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DICTIONNAIRE,
HISTORIQUE,
00 ^
HISTOIRE ABREGEE
DES HOMMES Ql'I SE SOVT FAIT Vîl NOM PAR LEL'R GEME , LEURS TALEKS ,
LEURS VERTUS, LEURS ERREURS OU LEURS CRIMES,
DEPmS LE C05IMENCKMEST DU MONDE JUSQU'a NOS JOURS;
ACGHCHTÉB de FLt'S DE 3000 AKTICXES IKTERCALÉs PAR ORDRE ALrUADÉTIQt'E.
TOME CINQUIÈME.
BESANÇON,
OUTHENIN CHALANDRE FILS, IMPRIMEUR- ÉDITEUR,
grand' RVE, s" 60.
PARIS,
CHEZ GAUME FRÈRES, LIBRAIRES.
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in 2009 witii funding from
University of Ottawa
Iittp://www.arcliive.org/details/dictionnairehis05felluoft
DICTIONIVAIRE
HISTORIQUE
DE FELLER.
£
lîi ADMER ou EdMeR) anglais de nais-
sance, d'abord moine du Bec, puis de
Cantorbéry , devint l'ami et le confident
de saint Anselme, qu'il accompagna dans
son exil. On lui offrit l'évêché de Saint-
André en Ecosse. Les uns disent qu'il le
refusa , les autres prétendent qu'il l'ac-
cepta. S'il est vrai qu'il ait été évêque ,
il faut qu'il ait abdiqué l'épiscopat , car
il mourut prieur de Cantorbéry en 1 137.
On a de lui 1" une Fie de saint An-
selme, divisée en 2 livres. On la trouve
dans les éditions des OEuvres de saint
Anselme, ainsi que dans Surius et Bol-
landus. 2° V Histoire des nouveautés ,
c'est-à-dire , de ce qui s'est passé de plus
considérable dans l'église britannique,
depuis l'an 1066 jusqu'à l'an 1122; elle
est divisée en 6 livres. Le Père Gerberon
a publié cette histoire avec les notes de
Jean Selden. 3° Le livre de l E xellence de
la sainte f^ierge. 4" Le traité des quatre
vertus ( la justice, la prudence, la force,
la tempérance ), qui ont été dans Marie,
6" Le traité de la Béatitude , composé
d'après ce qu'Eadmer avait entendu dire
à saint Anselme sur l'état des bienheu-
reux dans le ciel. 6° Le traité des Simi-
litudes. Le fonds en est aussi de saint An-
selme. Il fut rédigé par un de ses disci-
ples, qu'on croit être Eadmer. 1° Les
f^ies de plusieurs saints d'Angleterre.
Il y a encore d'autres ouvrages d'Eadmer
qui n'ont point été imprimés ( voyez
Wharton, prœf. in t. 2, Angl. sacr. ).
Les écrits d'Eadmer sont estimés pour l'or-
dre et l'exactitude ; le stile en est facile
et naturel {voyez Ceillier, tom. 21, pag.
349. ). — Une faut pas le confondre avec
V.
Eadmer ou Ealmeb , prieur de Saînt-Alban,
mort en 980, auquel on attribue desfe^-
tres, des homélies et 5 livres d'Exerci-
ces spirituels ( voyez Fabricius , Bibliot.
latin, tom. 2 , pag. 214).
* EAjNDI ( Joseph-Antoine-François^
Jérôme ) , savant prédicateur piémontais,
né à Saluées, en 1735, mort en 1799,
se forma à l'étude des sciences physiques
et mathématiques , sous le célèbre Bec-
caria qui l'associa ensuite à ses travaux.
Il professa la physique expérimentale à
Turin et devint membre de l'académie
des Sciences de cette ville, de la société
d'agriculture qui y était aussi établie , et
de plusieurs corps savans d'Italie et de
Piémont. Outre les Sermons qu'il pro-
nonça et qui lui firent la plus grande ré-
putation , il a fait plusieurs ouvrages
scientifiques et religieux parmi lesquels
on remarque 1° Physicœ experimentalis
lineamenta ad Subalpinos, qu'il composa
en société avec Vassali , Turin, 1793,
in-8 ; il en existe une contrefaçon faite
en 1800. 2° Raglone e religioni. 3" Des
Discussions de principes politiques. 4'»
Des Notices historiques sur les études du
Père Beccaria. 5° des Mémoires histori-
ques , adressés à M. Babbe , légataire des
manuscrits de ce célèbre restaurateur de
la physique en Piémont. Les Mémoires
de l'académie de Turin contiennent de
lui plusieurs Mérfloires intéressans. Vas-
sali, son neveu et son élève, a publié
dans le tome 6 de ses Mémoires , une
Notice sur sa vie et ses ouvrages , Tu'
rin, 1801 , in-4.
* EARLOM ( Richard ) , dessinateur
et graveur anglais , né dans le comté de
3 KBB
Somnierset , vers 1718 , mort à la fin du
18* siècle, gravait à la manière noire.
Son œuvre très considérable est recher-
ché des amateurs, surtout les épreuves
avant la lettre. Ses gravures sont remar-
quables par le moelleux, le fondu et le
velouté de ses tons. Les principales sont
L'académie de Londres , l'exposition
du salon , la sorcière , Agrippine abor-
dant à Blindes , Angélique et Médor ,
la forge , la F'ierge au lapin , le sacri-
fice d^ Abraham , la Madeleine chez le
pharisien , une sainte famille , Silène
■ivre et la femme de Rubens , les deux
avares, le roi d'Angleterre et sa famille ,
la Fierge dite la Zingarina. On lui a at-
tribué, mal à propos, un recueil de deux
cents paysages , d'après les dessins de
Claude Lorrain : ce recueil est de Ro-
bert Earlom.
' EBBESEN ( Niels ou Nicolas ) , sur-
nommé le Brutus danois , vivait au 14*
siècle , et était seigneur de Tœrreriis
dans le Jutland. A cette époque, le
royaume de Danemarck, presque tout
démembré , avait perdu son existence
politique. Plusieurs de ses provinces
étaient tombées au pouvoir des Suédois,
des seigneurs voisins et des vassaux am-
bitieux. Après la mort de l'infortuné
Christophe II , il ne restait à la famille
royale que quelques châteaux dans l'île
de Lotland, l'Esthonie, qui menaçait
aussi de secouer le joug. Il semblait que
l'excommunication , lancée par le pape
Jean XXII à l'occasion de l'emprisonne-
ment d'un évêque par le Roi , eut excité
contre ce royaume la colère divine.
Quelques-unes des provinces danoises
étaient hypothéquées : le comte Gérard
de Holstein avait en gage le Jutland et la
Fiouie, oii il régnait comme souverain ,
et tenait prisonnier le filsvîné de Chris-
tophe II, qui avait en vain essayé, de re-
prendre le pouvoir suprême. Aces petits
tyrans vinrent bientôt se réunir d'autres
fléaux non moins terribles, la disette
et la peste. Au milieu de cette complète
anarchie, il existait un homme, Nicls
Ebbescn, plein de sentimens généreux et
attaché à la dynastie de ses maîtres légi-
times. Le plus terrible, le plus cruel des
EBB
tyrans du Danemarck , -celui qui visait k
une plus grande domination , était le
comte Gérard ; ce fut contre lui qu'Eb-
besen dirigea ses attaques. Il se mit k la
tête des nobles et des paysans, qui souf-
fraient à regret les vexations d'un gou-
vernement insatiable et despotique. Les
insurgés , après avoir refusé de payer le
tribut , mirent le siège devant les châ-
teaux du comte Gérard. Celui-ci ayant
réuni une armée de dix mille combat-
tants , parcourt la province , répand par-
tout l'effroi , saccage , brûle les maisons,
les églises , les couvens , ne respecte ni
l'Age , ni le sexe , ni le caractère sacré
des prêtres ; il se repose de ces sanglans
explois à Rendey , ville centrale de la
province. Lecomte mande alors Ebbesen,
en lui accordant un sauf-conduit. 11 se
présente , et Gérard lui ordonne de lui
prêter foi et hommage ; Ebbcsea s'y re-
fuse, et déclare qu'il ne peut reconnaître
pour son souverain un usufruitier, un
tyran. << Jurez , lui dit Gérard, ou exilez-
)) vous, ou plutôt attendez-vous à être
» pendu. » — « Je ne vous crains pas ,
» lui répond Ebbesen ; je vous déclare la
)> guerre , et je vous jure que je vous
» combattrai personnellement partout oîi
» je vous trouverai. » Le comte, tout
étonné de ce courage , et craignant de
plus sinistres résultats, laissa partir libre
Ebbesen. 11 chercha ensuite à le gagner
par de séduisantes promesses; mais Eb-
besen fut inébranlable. Peu de temps
après son entrevue avec le comte Gérard,
il revient , pendant la nuit , à la tête de
soixante hommes , trompe la vigilance
des gardes , et s'introduit seul dans son
appartement. Le comte , éveillé en sur-
saut, reconnaît son ennemi, dont l'épée
menaçante brille devant ses yeux. Il ap-
pelle au secours , ses gardes accourent ;
au même instant Ebbesen lui plonge son
épée dans le cœur ; le tyran expire : ses
gardes se jettent sur le meurtrier ; il les
combat, les repousse : ses hommes d'ar-
mes , qui gardaient les avenues , volent
auprès d'Ebbesen ; assaillis par des cen-
taines d'hommes , ils se frayent un pas-
sage, et sortent du château. Le peuple
ayant appris la mort du comte Gérard ,
EBB
se range du côté d'Ebbesen , et immole
• tous les satellites de l'usurpateur. Ebbe-
■ scn ne perd pas de temps; il court as-
siéger Skanderborg , un des plus forts
châteaux de Gérard : les fils de celui-ci
viennent le défendre avec une puissante
armée. Ils sont vaincus , tués par Ebbe-
sen ; mais lui-même périt dans le com-
bat. Cependant il avait frayé à Waldemar,
fils de Christophe II , le chemin au pou-
voir suprême , et , en immolant Gérard
et ses fils , il l'avait délivré de ses enne-
mis les plus redoutables. Il ne fut donc
pas difl&cile à ce prince d'achever l'ex-
pulsion des autres tyrans. Il régna sous
le nom de W aldemar IV , dit le Restau-
rateur. Ebbesen diffère de Brutus, en.
ce que Gérard n'était pas son bienfaiteur,
et encore moins un maître élu par un sé-
nat ; néanmoins, nous croyons qu'il au-
rait fait une action plus louable et plus
héroïque s'il eût combattu son ennemi
corps à corps, dans un combat singulier,
plutôt que par surprise et par trahison.
Quoi qu'il en soit , le meurtre de Brutus
sur César fit ensuite répandre des fleuves
de sang, et introduisit l'anarchie dans
tout le monde alors connu ; celui commis
par Ebbesen fit cesser la guerre civile en
rendant à un prince légitime les domai-
nes de ses aïeux. Plusieurs poètes danois
ont célébré l'action d'Ebbesen; elle a
fourni le sujet d'une belle tragédie à M.
Sander, et M. Malte-Brun lui a consacre
une Ode , publiée eu 1812, et qui ne
rappelle nullement que l'auteur est un
étranger : M. Malte-Brun est encore da-
nois.
EBBON, 31® archevêque de Reims, né
d'une famille obscure , devint frère de
lait et condisciple de Louis le Débon-
naire, qui le fit son bibliothécaire, et le
plaça sur le siège de Reims. Ebbon con-
çut le dessein de travailler à la conver-
sion des peuples du Nord, et fit approu-
ver sa résolution du pape Pascal, qui le
nomma son légat. Sa mission ayant été
infructueuse, il revint en France, et se
mit à la tête des factieux qui déposèrent
Louis le Débonnaire. Il fut lui-même au
concile de Thionville en 835, et y con-
damna sa conduite envers l'empereur. 11
EBE 3
fut rétabli sur sou siège par le crédit de
Lothaire ; mais ayant été cité au concile
de Paris l'an 847 , et ayant refusé d'y
comparaître , il encourut l'indignation de
ce prince, et fut obligé de se retirer au-
près de Louis, roi de Bavière, qui lui
donna i'évêché de Hildesheira , oii il
mourut l'an 851 . C'était un prélat difficile
à définir par ses qualités opposées. Il fut
successivement courtisan assidu , mis-
sionnaire zélé, et enfin chef de parti.
( Voyez le spicilcge de don d'Achery , le
tom. VII diCi conciles de Labbe et le Re-
cueil des historiens de France de don
Bouquet. On a de lui une apologie qu'il
composa pour se justifier d'avoir repris
ses fonctions épiscopaies avant d'avoir
obtenu une nouvelle institution. On lui
attribue narratio clericoruni reniensium.
de depositione duplici Ebbonis ; Voyez
les scriptores histor. franc, de Du-
chesne. — Ebbon (S.), 29* évêque de
Sens, né en Bourgogne à la fin du 7*
siècle, succéda à son oncle saint Guer-^
rie et mourut le 27 août 7 50. Sa vie se
trouve dans les Acla sanctorum sancli
Bcnedicti tom 1 1 et dans la collection des
BoUandistes avec des notes de Jean
Stilting. — Ebbon, moine allemand mort
en 1139, a écrit la vie de saint Othon,
évêque de Bamberg et apôtre de la Po-
méranie, insérée dans les Acta sancto-
rum, mois de juillet , tome \".
EBED-JÉSU, auteur de plusieurs ou-
vrages en syriaque , est le même qu'Ab-
dissi. Voyez cet article.
* EBELING , littérateur allemand, né
à Carmissen en 17 41 , est auteur d'une
Histoire de la poésie allemande , d'une
Histoire et géographie de V Amérique ,
d'une Description du royaume de Ma-
jorque, de plusieurs Essais de poésies ,
insérés dans différens écrits périodiques,
et de plusieurs traductions de voyages.
Il est mort à Hambourg en 1817.
* EBERILVRD ( Jçan-Auguste ), théo-
logien et philosophe distingué, né le 31
août 17 39 à Halberstadt , fit ses études k
l'université de Halle et embrassa l'état
ecclésiastique. Son avancement dans
cette carrière fut retardé par la publica-
tion de quelques écrits Ihéologiqucs; il
4 EBE
ftt paraître son Apologie de Socrate ,
Amsterdam, 1773, in-8 , qui eut une in-
fluence aussi décisive »ur les destinées
de sou auteur que sur les études néolo-
giques en Allemagne , et qui le plaça au
premier rang des écrivains protestans de
son pays. Cette Défense de Socrate , qui
fut suivie d'une nouvelle Apologie de
Socrate ou Nouvel examen de la doctrine
touchant le salut des païens, en alle-
inand, Berlin, 1774, in-8 (traduit en
français par Dumas ) , n'est qu'un cadre
dans lequel l'auteur a fait entrer l'exa-
inen de la doctrine chrétienne sur la
(corruption de l'homme, sur la grâce,
sur la rédemption, sur les conditions du
salut : sur tous ces points il ébranle l'en^-
seignement de la religion . Lorsqu'il vit
l'extension qu'on donnait à sa doctrine ,
il essaya, par un nouvel ouvrage, intitulé
Amyntor, Berlin, 1782, in-8, de faire
aimer la morale évangétique ; mais Eber-
bard en méconnaissait le divin auteur ,
dans lequel il ne voit rien qu'un homme.
C'est ainsi qu'une première erreur con^
duit à une seconde , et que celui qui ne
veut suivre que son imagination , tombe
toujours dans de nouvelles erreurs. Il
donna ensuite l'Esprit du christianisme
primitif, 3 vol. in-8 , 1807 , ou il pré-
tend que cette religion est née du choc ,
du concours et d'une fusion de la culture
intellectuelle des Grecs avec la culture
morale dps peuples de l'Asie , paradoxe
que l'histoire , la réflexion et la critique
repoussent également. )1 fut un des ad-
versaires de Kant, et publia, de 1787
jusqu'en 1795, xin journal uniquement
destiné à combattre le kantisme. Cepen-
dant cette doctrine prévalut. Eberhard ,
soit lassitude , soit dépit de voir que ses
efforts étaient infructueux , chercha un
délassement utile dans d'autres travaux.
Il s'occupa d'un recueil de synonymes ,
qu'il publia sous ce titre : Essai d'un dià-
tionnaire universel des synonymes de la
langue allemande, Halle, 1795-1802, 6
vol. in-8 , où il montre un esprit au.ssi
pénétrant que juste : et lorsqu'il eut ter-
miné , avec le plus grand succès, ce
long travail, il entreprit de faire la revue
d9s richesses de la langue allmandc ,
EBE
dans un cours de rhétorique et de poé-
tique , joint à la théorie générale des
beaux arts. Cet ouvrage, devenu classique
en Allemagne, parut sous le titre A^ Ma-
nuel d'jEsthétiquepour les lecteurs d'un
esprit cultive dans toutes les classes de
la société, 1803-1805 , \ vol. On a en-
core de lui plusieurs autres ouvrages et
un grand nombre d'articles dans presque
tous les journaux littéraires d'Allemagne,
et surtout dans la Bibliothèque univer-
selle allemande de Nicolaï. Eberhard n'a-
vait obtenu qu'après 6 années de fonc-
tions pénibles dans deux petites cures
voisines de Berlin , la place de prédica-
teur à Charlottenbourg. 11 est mort le T
janvier 1809. Nicolaï a donné en alle-
mand une Notice sur la vie d' Eberhard.
EBERMANN ( Vite ) , jésuite , né à
Rentweisdorff" , dans l'évêché de Bam-
berg , en 1 597 , enseigna avec repu -
tation les belles-lettres, la philosophie et
la théologie à Mayence etk Wurtzbourg;
fut recteur du séminaire de Fulde, et
mourut à Mayence le 8 avril 1G75. Il a
publié Bellarmini controversiœ vindi-
c«fœ, Wurtzbourg, 1661 , in-4. Il y mon-
tre que la manière des hérétiques eu ré-
pondant à Bellarmin, est de tronquer les
preuves de ce célèbre controversiste , et
d'isoler des propositions pour pouvoir les
combattre avec une espèce d'avantage.
Ebermann a encore publié d'excellens
ouvrages de controverse contre Georges
Calixte, HermanCoringius, Jean Musxus,
professeur d'Iéna, etc.
• EBERT ( Jean-Arnoldt ) , professeur
à l'institut du Carolineum à Brun.swick,
né à Hambourg en 1723, est auteur de
plusieurs traductions allemandes qui
partagent avec les ouvrages de Gartner ,
Geller, Klopstock, etc. l'honneur d'avoir
restauré la littérature allemande. Il a
donné 1° une traduction des Nuits
d^Young, extrêmement estimée, avec
des notes , Leipsick, 1790, f793 , 5 vol.
in-8. 2° Une traduction de la tragédie
anglaise de Léonidas de Glover, Ham-
bourg, 17 78, in-8. 3" Quelques morceaux
de poésie lyrique et quelques épilres ,
parmi lesquelles on distingue celle à
Conrad Arnold Schmidt , imprimée scpa-
EBI
rément, Brunswick, 1772 , in 8. Ebeit
mourut le 19 mars 1795.
• EBERT ( Jean-Jacques ) , professeur
très distingué de philosophie et de ma-
thématiques à Witf emberg , né à Breslau
en 1737 , a publié les ouvrages suivans :
V Leçons de philosophie et de malhéma-
tiques pour les hautes classes, Franc-
fort, 17 73, Jn-8, 4» édition, 1790. 2"
Abre'gt des principes de logique , 5* édi-
tion, 17 90. 3" Abrégé des principes de
physique , 4* édition, 1803. 4° Leçons
de physique pour la jeunesse , Leipsick ,
1793, 2« édition, 3 vol. in-8. 5° jE7eWn^
des principales parties de la philosophie
pratique, Leipsick, 1784, in-8. 6° En-
tretiens sur les principales merveilles de
la nature, f"^ vol. , Leipsick, 1784, in-8.
7° Loisirs d'un père consacrés à V in-
struction de sa fille, Leipsick, 1795, in-8.
8" Journal pour l'instruction des jeunes
dames, 1794, à 1801. Ces deux ouvrages
ont eu le plus grand succès. Ebert est
mort le 18 mars 1805. Son enseignement
et ses ouvrages tous consacrés à la jeu-
nesse ont eu une grande influence en alle-
magne.
EBERTUS ouEbert ( Théodore ) , pro-
fesseur à Francfort sur l'Oder , dans le 1 7 •=
siècle, s'est fait un nom par ses ouvrages.
Les principaux sont : 1° Chronologia
sanctioris linguœ doctorum. 2° Elogia
jurisconsultorum et politicorum centum
illustrium , qui sanctam hebrœam lin-
guampropagarunt, Leipsick, 1628, in-8.
3° Poctica hcbraica, ibid. , 1628 , in-8.
Ces livres renferment beaucoup de choses
savantes et peu agréables , excepté pour
les hébraïsans.
EBEYS, Soudan d'Egypte, tua en 1 1 56
le calife son maître, qui se reposait sur ce
perfide du gouvernement de son royaume.
Le meurtrier se saisit de ses trésors , en
répandit une partie dans le palais, pour
amuser le peuple, pendant qu'il se sau-
vait l'épéc à la main. Les hospitaliers et
les templiers l'ayant arrêté sur le chemin
de Damas , et l'ayant mis à mort , parta-
gèrent entre eux ses trésors et les pri-
sonniers.
EBION , philosophe stoïcien , disciple
de Cérinthe, et auteur de la secte des
EBR 5
tbionites , commença à débiter ses rêve-
ries vers l'an 7 2 de J. C. Il soutenait que
le Sauveur était un pur homme, né par
le concours ordinaire des deux sexes. Il
ajoutait que Dieu avait donné l'empire
de ce monde au diable, et celui du monde
futur au Christ. Ses disciples mêlaient
les préceptes de la religion chrétienne
avec le judaïsme. Ils observaient éga-
lement le samedi et le dimanche. Ils cé-
lébraient tous les ans leurs mystères
avec du pain azyme. Ils se baignaient
tous les jours comme les juifs, et révé-
raient Jérusalem comme la maison de
Dieu. Ces hérétiques ne connaissaient
point d'autre Evangile que celui de saint
Matthieu , qu'ils avaient en hébreu, mais
corrompu et mutilé. Ils rejetaient le reste
du nouveau Testament , et surtout les
Epîtres de saint Paul, regardant cet
apôtre comme un apostat de la loi. Ils
honoraient les anciens patriarches, mais
ils méprisaient les prophètes. La vie des
premiers ébionites fut, dit on, assez sage,
celle des derniers fort déréglée. Ceux-ci
permettaient la dissolution du mariage
et la pluralité des femmes. Quoique juifs
opiniâtres , les ébionites reconnaissaient
Jésus-Christ pour le Messie; ils voyaient
donc en lui les principaux caractères ,
sous lesquels il avait été annoncé par les
prophètes. On ne les accuse point d'avoir
révoqué en doute les miracles de Jésus-
Christ, ni sa mort, ni sa résurrection.
Saint Epiphane atteste , au contraire ,
qu'ils admettaient tous ces faits essentiels,
lis étaient cependant nés dans la Judée ,
avant la destruction de Jérusalem : plu-
sieurs avaient été sur le lieu oîi ces faits
s'étaient passés ; ils avaient eu la facilité
de les vérifier. ( C'est contre Ebion et con-
tre Cérinthe que saint Jean composa son
évangile. )
EBROIN, maire du palais de Cîo-
laire III et de Thierri I, homme ambi-
tieux, fier, entreprenant, parvint à ce
poste par ses intrigues et par son hypo-
crisie. Les espérances que ses vertus ap-
parentes avaient données se démentirent
bientôt. Demeuré seul maître , par la re-
traite de la reine Balhildc, il ne contrai-
gnit plus son orgueil , son avarice , sa,
6 ECC
perAdie. Il ravissait les biens, il ôlail
les charges, il chassait les grands qui
étaient à la cour, et défendait aux au-
tres d'y venir sans sa permission. Après
la mort de Clotaire en 670, il mit Thierri
sur le trône ; mais la haine que les sei-
gneurs avaient pour le ministre , rejaillit
sur le roi. Us donnèrent la couronne à
Childéric II , firent tondre Thierri et
Ebroin, et les enfermèrent dans des mo-
nastères. On eût fait mourir Ebroin sans
la puissante médiation de saint Léger ,
qui ne se souvint plus de l'inimitié qu'il
ne s'était attirée de la part de ce méchant
homme qu'en blâmant ses injustices.
Childéric étant mort en 673, Thierri fut
replacé sur le trône, et prit Leudèse pour
maire du palais. Ebroin s'étant échappé
de son monastère, fit assassiner Leudèse,
supposa un Clovis , qu'il disait être fils
de Clotaire III , força les peuples de lui
prêter st-rment de fidélité, et ravagea les
terres de ceux qui lui résistèrent. La ville
d'Autun fut assiégée. L'évèque Léger eut
les yeux crevés par ordre d'Ebroin , à qui
il avait sauvé la vie, et fut mis dans un
monastère. Ebroin contraignit ensuite ,
les armes à la main , Thierri à le recevoir
de nouveau pour son maire du palais. Il
gagna les grands de Neustrie et de Bour-
gogne, et renvoya son faux Clovis, dont
il n'avait plus besoin. Sa tyrannie n'eut
plus de bornes ; tous les gens de bien en
furent les victimes. Enfin, un seigneur,
nommé Hermanfroi , qu'il menaçait de la
mort après l'avoir dépouillé de ses biens,
tua le tyran en 681 , les uns disent dans
son lit , les autres à la sortie de son pa-
lais. Ce fut sous ce ministre que com-
mença l'usage ou plutôt le monstrueux
abus de donner, à titre de précaire, les
biens ecclésiastiques à des seigneurs laï-
ques , sous l'obligation du service mili-
taire. (Le caractère d'Ebroin a fourni à
M. Ancelot le sujet d'une tragédie repré-
sentée sur le théâtre français en 1 822. )
ECCARD ou EcKHART (Jean Georges
1)'}, né en 167 4 à Duingeri, dans le
duché de Brunswick , fut ami de Leib-
nitz. Il devint, par le crédit de cet
homme célèbre, professeur en histoire à
Ilelmstadt. Après la mort de ce philoso-
ECC
phe, il eut une chaire à Hanovre; mais
les dettes qu'il contracta dans ce nouveau
séjour, l'obligèrent de le quitter en 1723.
L'année d'après , il embrassa la religion
catholique à Cologne, et se retira à Wurtz-
bourg. (Le pape Innocent XIII lui avait
offert une place dans cette ville, ou
bien à Passau ou à Vienne , Eccart pré-
féra Wurtzbourg) où il remplit avec dis-
tinction les charges de conseiller ?pi-
scopal, d'historiographe, d'archiviste et
de bibliothécaire. Il y mourut en 1750,
à 60 ans, après avoir été anobli par l'em-
pereur. On doit àEccard 1° Corpus his-
toricum medii œvi , a tcmporibus Caroli
Magni imperatoris adfinem seculi XV,
Leipsick, 1 7 1 9, 2 vol. in-fol. «Cette collec-
M tion qui vient, dit l'abbé Lenglet, d'un
» des plus habiles et des plus honnêtes
» hommes qu'il y ait dans l'empire, est
» très curieuse et bien dirigée ; chose
» rare dans les écrivains allemands ; et ce
« qui est encore plus rare, il ne répète
« point ce qui est dans les autres. » 2"
Leges F rancurum et Ripuarioriim, Lei-
psick , 1720, in-fol. : recueil non moins
estimé que le précédent. 3" De origine
Gcrmanoruru libri duo , publiés à Got-
tingen eu 1750 in-4. , parles soins de
Sheridius. 4" Historia studii elymolo-
gici linguce germanicœ , etc., in-8 , es-
timé, b" Origines Austriacœ , Leipsick,
1721 , in-fol. Ce savant a abandonné les
anciennes idées sur l'origine de la maison
d'Autriche ; il s'est attaché à prouver que
les maisons de Lorraine et d'Autriche
viennent de la même souche. 6° De rcbus
Franciœ orientalis et episcopatùs JVir-
ccburgensis, in quibus regutn et impera-
torum Franciœ , Germanixque gesla
exponuntur , Wurtzbourg , 1 729 , 2 vol.
in-fol. 7° Ànimadversiones historicœ et
criticœ in Schanati diœcesim et hierar-
chiam Fuldenscm, 1727, in-fol. 8" His-
toria gcnealogica principum Saxoniœ
superioris, Leipsick, 17 22, in-fol. etc.
ECCART. Voyez ëciiabd, Eckart, ou
ECKHART.
ECCHELLENSIS ( Abraham ) , savant
maronite, professcurdes langues syriaque
et arabe au collège royal à Paris, où le
célèbre Le Jay l'avait appelé. Cet homme
ECE
illustre lui donnait par an 600 ëcus d'or,
pour présider à l'impression de sa grande
Bible polyglotte. La congrégation de pro-
paganda fide l'agrégea, vers l'an 1G3G,
auï traducteurs de la Bible en arabe.
Eccheilensis passa de Paris à Rome, après
avoir obtenu en cette ville une chaire de
langues orientales. Il y mourut en \ 6G4.
Ce savant était profondément versé dans
la connaissance des livres écrits en syria-
que et en arabe ; et quoiqu'il ait eu des
supérieurs dans la connaissance de ces
deux langues, il faut avouer qu'il les pos-
sédait très bien. On a de lui 1° La traduc-
tion d'arabe en latin des b , ù et 1 li-
vres des Coniques d'Apollonius. Ce fut
par ordre du grand -duc Ferdinand II,
qu'il entreprit cet ouvrage , dans lequel
il fut aidé par Jean- Alphonse Rorelli,
mathématicien célèbre, qui l'orna de
commentaires. Cette version fut imprimée
à Florence avec le livre d'Archimède, De
assumptis, en 16G1, iu-fol. 2° Institutio
linguœsyriacœ, V>^ome,iG28, in-12. ^"Sy-
nopsis philosophiœ Orientalium, Paris,
1641, in-4. 4° Versio Durrhamani de
medicis virtutibus animalium, planta-
rum et goniniarum, Paris, 1G47, in-8.
5° Des ouvrages de controverse contre
les protestans, imprimés à Rome. G" Eu-
tichius vindicatus, contre Selden, et
contre Hottinger , auteur d'une Histoire
orientale, 1661, in-4. 7" Des remarques
sur le Catalogue des écrivains chalde'ens,
compose' par Ebed-Jesu, et publié à
Rome en 1663. Elles sont précieuses aux
amateursdelalittérature orientale. 8"Une
cdiiion des œuvres de saint Antoine,
abbé. 9" Concordia nationum christiana-
rum orientalium in fidei catholicœ dog-
matibus, Mayence, 1655. Il tâche de con-
cilier les sentimens des Orientaux avec
ceux de l'église romaine , et il y réussit
ordinairement très bien. Léon Allatius a
travaillé de concert avec Eccheilensis à
cet ouvrage.
ECEBOLE , sophiste de Constanti-
nople, maître de rhétorique de l'empe-
reur Julien, fut toujours de la religion du
souverain. Sous Constance, il se mit à la
mode, par ses invectives contre les dieux
des païens; il déclama depuis pour les
ECH 7
mêmes dieux, sous Julien son disciple. A
la première nouvelle de la mort de ce
prince, il joua le rôle de pénitent. Enfin
il mourut, sans reconnaître d'autre reli-
gion que l'intérêt présent : digne maître
du prince hypocrite et apostat, qui sous
les mêmes rapports fut son très digne dis-
ciple.
ECELIN. F oyez Ezzelin.
ECHARD (Jacques), dominicain, né à
Rouen en 1644, mourut à Paris en 1724.
Il contribua à illustrer son ordre, par la
Bibliothèque des écrivains qu'il a pro-
duits, 2 vol. in-fol., à Paris, le l®"^ en 1719,
le 2" en 1721. Le Père Quetif avait tra-
vaillé avant lui à cet ouvi'age ; mais il en
avait à peine fait un quart. Cette Biblio-
thèque est fort estimée par tous les bi-
bliographes. On y prend une idée juste
de la vie et des ouvrages des écrivains
dominicains, de leurs différentes éditions,
et des bibliothèques oii on les garde eu
manuscrit. Tout est appuyé sur de bonnes
preuves. L'auteur donne le titre de grands
hommes à des personnages très-médio-
cres ; mais l'exagération est le défaut de
tous les ouvrages de ce genre. Le Père
Echard avait toutes les qualités d'un sa-
vant vertueux. (A la suite de cet ouvrage,
il a placé Sacrum gyneceum Dominica-
narum , seu sorores ordinis prœdicato-
rum quœ scriptis claruerunt. )
ECHARD (Laurent), historien anglais,
né à Bassani dans le comté de Suffolk,
exerça successivement le pastorat dans
diverses églises. Sa santé était très faible.
Les eaux de Scarborough lui ayant été or-
données pour la rétablir, il résolut de s'y
transporter; mais il mourut en chemin à
Lincoln eu 1730. Il était membre de la
société des antiquaires de Londres. Ses
ouvrages, tous écrits en anglais, sont
1° Histoire d^ Angleterre jusqu'à la mort
de Jacques I, Londres, 1707, 1718, 3 vol.
in-fol., très estimée en Angleterre. 2° His-
toire romaine, depuis la fondation de
Home jusqu'à la translation de l'empire
par Constantin, traduite en français par
Daniel de La Roque, revue pour le stile,
corrigée et publiée par l'abbé des Fon-
taines, Paris, 1728 et 1729, 6 vol. in-12.
Cet abrégé n'est pas sans défaut ; mais la
8 ECI!
disette de bons ouvrages en ce genre lui
il donné beaucoup de cours en France et
en Angleterre. L'auteur y a transporté les
principaux traits de l'Histoire romaine.
Il y a fait entrer aussi de petites disgres-
sions sur les principaux écrivains de
Rome , qu'il peint avec plus de vérité que
de finesse. L'abbé Guyon a donné une con-
tinuation de cette Histoire en 10 vol.
in-1 2 . Les faits y sont arrangés avec ordre ;
la narration est simple et naturelle, lestile
assez pur. Cette Histoire a été réimprimée
en Hollande et à Avignon, en 1 2 vol. in-l 2.
L'ouvrage d'Echard fit connaître son au-
teur au ministère d'Angleterre, qui l'em-
ploya dans plusieurs affaires. 3° Histoire
générale de t Eglise avec des Tables
chronologiques , Londres, 1702, in-fol.,
en anglais. Les ecclésiastiques d'Angle-
terre font autant de cas de cet abrégé,
que les gens du monde en font de son
Histoire romaine. 4" Vlnterprète des
nouvellistes et des liseurs de gazettes ,
ouvrage superficiel , qui donna à l'abbé
Ladvocat l'idée de son Dictionnaire géo-
graphique portatif . Echard composa aussi
un Dictionnaire historique, qui n'est
qu'un squelette décharné. 6° Traduction-
anglaise des comédies de Plaute et de
Térence, etc.
ECHIUS ou EcKius ( Jean ) , né en
Souabe l'an 1486, professeur de théolo-
gie dans l'université d'Ingolstad , signala
son savoir et son zèle dans ces conférences
contre Luther, Carlostad, Mélanchthon,
etc. Il se trouva en 1 538 à la diète d'Augs-
bourg , et en 1 54 1 à la conférence de Ra-
tisbonne, et brilla dans l'une et dans l'au-
tre. Il joua le rôle principal dans toutes
les disputes publiques des catholiques
avec les luthériens. Il avait de l'érudition,
de la mémoire, de la facilité, de la péné-
tration, une logique précise et vigou-
reuse. Ce savant théologien mourut à In-
golstadt en 1543 , à 57 ans. On a de lui
deux Traités sur le sacrifice de la messe-,
un Commentaire sur le prophète Aggée,
1638, in-8; des homélies, 4 vol. in-8, et
des ouvrages de controverse ; entr'autres
son Manuel de controverse et son Traité
sur la prédestination. On conserve , avec
une sorte de respect, dans le Muséum du
ECK
collège d'ingolstadt, la chaire où il était :»<-
sisen donnant ses leçons. — Il ne faut point
le confondre avec Léonard Eckius, juris-
consulte célèbre, mort à Munich en 1 550 :
ce dernier jouissait d'une si grande ré-
putation, et était si aimé de Charles Quint,
que ce prince disait que « ce qui était
» conclu sans l'avis d'Eckius était conclu
» en vain. »
ECKARD. FoyezlxickVD.
* ECKHARD (Jean-Frédéric ) , savant
philologue saxon, né en 1723 à Qued-
linbourg, mort en 1794, devint recteur
du collège de Frankehausen en 17 48,
puis bibliothécaire de celui d'Eisenach
( 1758-1793 ). Sa vie tout entière fut
consacrée à l'étude et à l'enseignement.
Le Dictionnaire de Meusel cite de cet
auteur 92 ouvrages on programmes aca-
démiques , et Dissertations philologiques
et littéraires ; ils sont tous écrits en latiu
ou en allemand; les principaux sont :
1" De Elegantiorum litterarum studiis
inter chrislianos tempore Juliani , Ei.se-
nach, 1764 , in-4. 2° Exercitatio critica
de editione librorum apud veteres, 1777,
in-4. 3° Notices sur des Livres rares
du 15* siècle de la bibliothèque d^Eise-
nach, 1775, in-8. 4» Sur J. P. Erick,
savant littérateur d'Eisenach. 5° Des Bi-
bliothèques chez les Romains, 1790,
in-4. 6° De Edificatione et ornatione
sepulchrorum a scribis et pharisœis in-
stituta, Jena, 1746, in-4. 7" Notice d'un
livre rare intitulé Summa Magistrutia
ou Pisanella, ibid., 1771, in-4. 8" Notice
sur les Batteries flottantes employées
par César dans la guerre civile, 1783,
1784, avec un supplément. 9° Flavius
Josephus de Joanne Baptista testatus ,
1785, in-4. 10° La Fie de cet histo-
rien , traduite du grec en allemand , Leip-
sick, 1780, in-8. Eckharta fourni des ar-
ticles à quelques journaux littéraires de
l'Allemagne.
' ECKHEL ( Joseph-Hilaire ) , célèbre
numismate, né le 13 janvier 1737 à En-
zesfeld, dans l'Autriche supérieure. Il en-
tra chez les jésuites , enseigna le latin à
Vienne dans le collège Thèrésien, la rhé-
torique à Steyer , et fut ensuite nommé
professeur d'éloquence à l'uniTersité de
ECL
Vienne. Cédant à son goût pour l'étude
de l'antiquité, et particulièrement pour
celle de la numismatique, il obtint, en
1772, de ses supérieurs, la permission de
faire le voyage d'Italie, pour examiner
les nombreux cabinets qui s'y trouvent
épars. Le grand duc de Toscane le char-
gea de ranger le cabinet de Médicis.
Pendant son absence, l'impératrice Marie-
Thérèse l'avait nommé directeur du cabi-
net des médailles et professeur d'antiqui-
tés à Vienne (17 78). La suppression de
son ordre ayant eu lieu dans le même
temps, il se livra entièrement à ses études
favorites. Ses principaux ouvrages sont
ï° Nummi vetcres anecdoti. Vienne,
1775, 2 parties in-4, oîi il a fait connaître
plus de 400 médailles inédites, la plupart
autonomes. Elles sont rangées suivant
Une nouvelle méthode que sa simplicité
et sa clarté ont fait adopter dans la suite.
2° Une nouvelle édition du catalogue du
cabinet numismatique de Vienne, 1779,
2 vol. in-folio, en latin. 3° Choix des
pierres gravées du cabinet impérial des
antiques à Vienne^ 17 88, petit in-folio.
4" De doctrina nummorum, ou De la
science des médailles. Vienne , 1792-98,
8 vol. in-4. Ce bel ouvrage qui embrasse
la numismatique toute entière est remar-
quable par la précision des idées, la clarté
du stile et l'éloignement de tout esprit
de système, et surtout par une étude ap-
profondie de la science : elle lui assigne
dans ce genre le même rang qu'à Linnée
en botanique. Cet ouvrage mit le com-
ble à sa gloire ; mais il n'eut pas le temps
d'en jouir : il mouiut, peu de jours
après la publication du dernier vol., le
16 mai 1798.
ECKOUT. Voyez Van dkn Eckout
(Gerbrand).
ECLUSE ( Charles de l' ), Clusius, né
à Arras le 1 8 février 1 525, parcourut une
grande partie de l'Europe en herborisant.
Il s'était fait une loi de ne se fier qu'à ses
propres yeux pour les descriptions des
plantes : aussi l'exactitude la plus scru-
puleuse règne dans ses descriptions et
dans ses figures. Les empereurs Maximi-
lien II et Rodolphe II lui confièrent leur
jardin des simples. Les assiijétissemens
T.
EDE 9
de la vie de courtisan l'ayant dégoûté, il
se retira à Francfort-sur-le-Mein , ensuite
à Leyde, où il mourut en 1609, à 84 ans,
professeur de botanique. Ses ouvrages
ont été recueillis en 3 vol. in-fol. à An-
vers, 1601, 1605 et 1611, avec fig. Ils rou-
lent sur la science qu'il avait cultivée.
Voyez Belon.
* ECLUSE DES LOGES (Pierre-Ma-
thurin de l'), docteur de Sorbonne, né à
Falaise en 1715, et mort à Paris vers l'an
1783, est particulièrement connu par son
édition des Mémoires de Sully, Londres,
1745, 3 vol. in-4, ou 8 vol. in-I2, réim-
primé à Londres , 1778, 10 vol. in-12, et à
Paris 1814, 6 vol. in-8. On reprochait à ces
Mémoires de manquer d'ordre ; le stile
d'ailleurs en avait vieilli : il était en géné-
ral lent , surchargé de parenthèses ou de
phrases incidentes et quelquefois ob-*
scures. L'abbé de l'Ecluse les a mis en
meilleur français et en meilleur ordre, et
il redresse, toutes les fois que l'occasion
s'en présente , les erreurs dans lesquels
Sully a été entraîné par l'esprit départi.
* EDDY, célèbre géographe améri-
cain, né à New-Yorck en 1784, a publié
plusieurs cartes estimées , entre autres
celle de l'état de New-Yorck. Il s'occu-
pait d'un atlas complet de toute l'Amé-
rique , lorsqu'une mort prématurée l'en-
leva le 22 décembre 1817. Ou a encore
de lui un grand nombre à' Essais sur la
géographie , la botanique et sur d'autre^
branches d'histoire naturelle.
EDELIJNCK ( Gérard ) naquit à An-
vers en 1 64 1 . Il y apprit les premiers élé-
mens du dessin et de la gravure; mais ce
fut en France qu'il déploya tous ses ta-
lens. Louis XIV l'y attira par ses bien-
faits. Il fut choisi pour graver deux mor-
ceaux de la plus grande réputation , le
tableau de la sainte Famille de Raphaël^
et celui à' Alexandre visitant la famille.
de Darius, de Le Brun. Edelinck se
surpassa dans les estampes qu'il exécuta
d'après ces chefs-d'œuvre ; les copies fu-
rent aussi applaudies que les originaux.
On y admire , comme dans toutes ses au-
tres productions, une netteté de burin ,
une fonte et une couleur inimitables. Il
a réussi également dans les portraits
it) EDE
qu'il a faits de la plupart des hommes
illustres de son siècle. Cet excellent ar-
tiste mourut en 1 707 , dans l'hôlel royal
desGobelins, où il avait un logement,
avec le titre de graveur ordinaire duroi,
et de conseiller dans l'académie royale
de peinture.
* EDELCRANZ ( Abraham-lNicolas, le
baron ) , né à Abo en Suède, en 17.^4, fut
poète lyrique et dramatique. Après avoir
fait des odes et des pièces de théâtre ,
il devint en 1787 secrétaire et caissier
particulier du roi de Suède et directeur
des spectacles. En 1790 et 1791, il fit
un voyage en Angleterre dont son gou-
vernement l'avait cbargé ; il fut appelé
ensuite à la cbancelleric. Le roi lui fit
faire un nouveau voyage en Allemagne ,
en Hollande , en France et en Angleterre,
dans des vues d'utilité publique, no-
tamment pour examiner plusieurs procé-
dés mécaniques et industriels, il rapporta
un recueil ricbe d'observations , prati-
ques sur l'agriculture, les arts et le com-
merce; il parvint lui-même à perfection-
ner plusieurs machines. A son retour , il
fut appelé à l'intendance des musées
royaux , et aux comités pour les amélio-
rations des objets d'industrie et d'agri-
culture. La Suède lui est redevable de
plusieurs machines importantes parmi
lesquelles on cite les télégraphes qu'il
perfectionna et sur lesquels il publia
un traité en 1796 : il fit aussi une ma-
chine pneumatique dont la construction
la rend propre à divers usages. Outre
les places qu'il obtint en récompense
de ses services , le roi le nomma baron ,
et le combla de marques de faveurs. Edel-
cranz mourut à Stockholm le 15 mars
1821.
* EDELMANN (Jean-Frédéric), habile
compositeur de musique , naquit en
17 49 à Strasbourg. De bonne heure il se
fit connaître avec avantage comme pia-
niste , et publia un grand nombre de
sonates ^iAe concertos pour le clavecin.
En 1782 on joua à Topera l'acte à\i feu
dans le ballet des élémens , et Ariane
abandonnée dans l'isle de Naxos , qui
avaient été composés l'un et l'autre par
Edelmann et qui obtinrent un grand suc-
EDG
ces. On a de lui 1 4 œin'res pour le cla-
vecin. On assure qu'il a laissé en manu-
scrit l'Oratorio d'Esthcr, les Opéra d'Aï-
cione et de Méropc. Telle fut la \" par-
tie de la vie de ce musicien qui, à l'époque
de la révolution , en embrassa les prin-
cipes avec une chaleur furibonde : il
porta la démence politique non-seule-
ment jusqu'à abandonner la carrière qu'il
avait parcourue jusque là si honorable-
ment , il devint encore dénonciateur
public ; et dans ces nombreuses délations
qui envoyèrent à la mort une foule de
victimes, il n'oublia pas son bienfaiteur
le baron Dietricli ; lui-même périt sur
l'échafaud avec son frère , en 1 7 94 , après
la mort de Robespierre.
EDER ( George ) , né à Freisingen , se
fit un nom vers la fin du 16* siècle par
son habileté dans la jurisprudence. Il fut
honoré par les empereurs Ferdinand I ,
Maximilien II et Rodolphe II, delà charge
de leur conseiller, et laissa plusieurs
écrits sur le droit , dont le meilleur est
son OEconomio bibliorum , scu partitio-
num biblicarum libri quatuor , in-folio.
EDGAR , roi d'Angleterre , dit le Pa-
cifique, fils d'Edmond, succéda à sou
frère Eduin en 959. Il vainquit les Ecos-
sais , imposa à la province de Galles un
tribut annuel d'un certain nombre de
têtes de loups , pour dépeupler l'île de
ces animaux caniaciers.il subjugua une
partie de l'Irlande, poliça ses états, contri-
bua à la réforme des mœurs des ecclésias-
tiques , et mourut en 97 5, après un règne
de 16 ans. Quelques auteurs l'appellent
r amour et les délices des Anglais. Sa mo-
dération lui mérita le surnom de Pacifi-
que , et son courage égala son amour de
la paix. Sa vertu ne fut point exempte de
faiblesse ; mais la pénitence qu'il en fit
répara bien le scandale qu'il avait donné.
« Ce prince , dit Fleury , étant allé à un
» monastère de filles, situé à Vilton, fut
» épris de la beauté d'une personne noble
M qui y était élevée parmi les religieuses,
» sans avoir reçu le voile, et l'enleva...
j) L'archevêque de Cantorbéry , saint
» Dunstan, vint trouver le roi, quis'a-
» vanra à son ordinaire, lui tendant la
» main pour le faire asseoir sur le trône.
EDG
» L'archevêque retira sa main et lui dit :
» Fous osez toucher la main qui immole
w le F ils de la Vierge , avec votre main
V impure , après avoir enlevé à Dieu une
D vierge qui lui était destinée.... Je ne
» veux pas être ami d'un ennemi de Je-
■» sus-Christ. Le roi se jeta aux pieds du
» prélat, qui l'ayant disposé à toute sa-
M tisfaction , lui imposa une pénitence
» de sept ans, pendant lesquels il nepor-
)) terait point la couronne , il jeûnerait
» deux jours de la semaine, et ferait de
» grandes aumônes. Le roi accomplit
» exactement sa pénitence. Après les sept
M ans , il assembla les seigneurs , les évê-
» ques et les abbés de ses états, et, en
» leur présence , saint Dunslan lui remit
» la couronne sur la tête avec une allé-
j) gresse publique. C'était l'an 97 3. » On
trouve , dans la Collection des conciles ,
plusieurs lois qui font honneur à la sa-
gesse de son gouvernement. — Il ne faut
pas le confondre avec Edgar , roi d'E-
cosse , fils de sainte Marguerite et neveu
d'Edgar , dont il est parlé dans l'article
suivant.
EDGAR ATHELIIVG (c'est à dire vrai-
ment noble), légitime héritier du royaume
des Anglais, fut obligé, par Guillaume
le Conquérant, de chercher son salut
dans la fuite. 11 échoua en Irlande, avec
sa mère Agathe, et ses sœurs Marguerite
et Christine. Marguerite fut mariée au roi
Malcolm, dont elle eut six fils et deux
filles. Trois de .ses fils, Edgar , Alexandre
et David furent rois. Voyez Marguerite.
* EDGEWORTH (Richard Lovell ),
membre du parlement d'Irlande, né en
174.3 , et proche parent de l'abbé Edge-
worth, confesseur de Louis XVI, s'adonna
de bonne heure aux sciences exactes. Il
a publié plusieurs écrits estimés, parmi
lesquels on distingue celui qui a pour
titre : Essais sur Véducation relative-
ment au.r diverses professions. 11 s'était
occupé des moyens de détourner le cours
du Rhône, et avait publié à ce sujet quel-
ques ouvrages, qui lui méritèrent le titre
de citoyen delà ville de Lyon. Il est mort
le 13 juin 1817, universellement regretté
de sa famille et de ses amis.
* EDGEWORTH ( William ) , ingé-
EDM M
nieur, fils du célèbre Richard-Lowell Ed-
gcM'orth , et frère de Miss Edgeworth , si
connue dans la littérature, est mort en
1829 à Edgeworlh'S Town en Irlande ; il
avait rendu à son pays des services im-
portans dans la carrière oii l'avaient ap-
pelé ses talens et la confiance du gouver-
nement. On lui doit entr'autres les projets
d'une ligne de route de Belfast à Antrim,
qui sera l'une des plus belles voies de
communication de l'Irlande.
EDGEWORTH de Firmont , dernier
confesseur de Louis XVI. Voyez Firmoat.
EDISSA. Voyez Esther.
EDENE (Saint). Voyez Emond.
EDMER. Voyez. Eadmer.
EDMOND ou Edme ( Saint ) naquit
au bourg d'Abendon, d'un père qui entra
dans le cloître , et d'une mère qui vécut
saintement dans le monde. Il fit ses études
à Paris , et y enseigna ensuite les mathé-
matiques et les belles-lettres. Son nom
ayant pénétré jusqu'à Rome , le pape In-
nocent III lui donna ordre de prêcher la
croisade. Le pape Grégoire voulant ré-
compenser le zèle avec lequel il remplit
cette fonction , le désigna pour occuper
le siège de Cantorbéry , vaquant depuis
long-temps. Le chapitre l'élut d'une voix,
unanime , et l'élection fut confirmée par
le souverain pontife ; mais on eut beau-
coup de peine à faire consentir Edme à
accepter répiscopat. L'autorité del'évê-
que de Salisbury ayant vaincu sa résis-
tance, il fut sacré le 2 avril 1234.11 con-
tinua toujours son premier genre de vie,
sans craindre de s'exposer à la censure
de quelques évèques qui n'étaient pas
animés , comme lui, de l'esprit de Dieu,
«r Sa principale occupation , dit un his-
» torien , était de connaître les besoins
» spirituels et coi-porels de son troupeau,
» afin de pourvoir aux uns et aux autres.
5> Il avait un soin particulier des jeunes
» filles qui n'avaient point de ressource;
3> et pour les mettre plus sûrement à l'a-
3) bri du danger, il leur procurait un éta-
» blissement. Il faisait une guerre décla-
3> rée aux vices; il maintenait la disci-
)) pline avec une vigueur vraiment apo-
» stolique ; il veillait sur ses officiers de
» justice pour qu'ils remplissent avec in-
11 EDM
» tégritë les fonctions de leurs charges ,
» et qu'ils n'abusassent pas de leur au-
» torité pour opprimer les faibles. » Le
zèle qu'il employa à la reforme de son
clergé, lui attira des ennemis d/ins le
chapitre même de son église. Eprouvant
tous les jours des contradictions, il ne
voulut point paraître conniver à des abus
qu'il ne pouvait réprimer , il passa secrè*
tement en France, et mourut à Poissy,
le 16 novembre 1242, ayant été huit ans
archevêque de Cantorbéry. Le pape In-
nocent IV canonisa saint Edmond en
1247. Il nous reste de lui un ouvrage in-
titulé Spéculum Ecclesiœ dans la Biblio-
thèque des Pères, tom. 3, Cologne, 1618-
22 ; un livre des Constitutions diverses en
36 canons , dans la Collection des conci-
les d'Angleterre et d'Irlande deWilkins,
et des manuscrits contenant A.es prières ,
des dissertations sur les sept péchés ca-
pitaux, le décalogue et les sept sacre-
mens. On a une vie de saint Edme tirée
des manuscrits de l'abbaye de Pontigni,
Auxerre, 1763, in-12.
EDMOND ( Saint ) , roi des Anglais
orientaux , fut illustre par sa piété , qui
le fit mettre dans le catalogue des saints.
Ce prince, ayant en 870 voulu livrer
bataille aux Danois , fut vaincu et con-
traint de prendre la fuite. Il crut pouvoir
se cacher dans une église ; mais ayant été
découvert , il fut mené à Ivar , chef des
Danois, qui était à Hélisdon. Le vain-
queur lui offrit d'abord de lui laisser son
royaume , pourvu qu'il le reconnût pour
son souverain , et lui payât un tribut.
Edmond ayant refusé ce parti, Ivar le fit
attacher à un arbre , et percer d'une in-
finité de flèches , après quoi il lui fit cou-
per la tête. Le chef d'Edmond ayant été
trouvé quelque temps après , fut enterré
avec le corps à Saint-Edmonbourg, ville
qui a reçu son nom de ce roi. Les histo-
riens du temps en font l'éloge le plus
complet. Ils relèvent surtout sa piété, sa
douceur et son humilité. Les rois d'An-
gleterre l'honoraient comme leur princi-
pal patron, et le considéraient comme
un modèle accompli de toutes les vertus
loyales.
EDMOND I, roi d'Angleterre, ûl« d'E-
EDM
douard le Vieux , monta sur le trône Tan
940. Il soumit le Northumberland , mit
l'ordre dans son royaume, et donna de
grands privilèges aux églises. Il fut as-
sassiné l'an 94G, par un voleur qu'il avait
arrêté dans ses a]ipartemcns ; il emporta
avec lui les regrets de ses sujets.
EDaiOND II, dit Côte-de-Fer, roi
des Anglais après son père Ethelred,
commença de régner en 1016. Le royaume
était alors extrêmement divisé par les
conquêtes de Canut, roi de Danemarck.
Le nouveau roi prit les armes, se rendit
maître d'abord de Glocester et de Bristol,
et mit ses ennemis en déroute. Il chassa
ensuite Canut de devant Londres qu'il
assiégeait, et gagna deux sanglantes ba-
tailles. Mais ayant laissé à son ennemi le
temps de remettre de nouvelles troupes
sur pied, il perdit Londres et fut défait
en plusieurs rencontres. La mort de tant
de bons sujets le toucha. Pour les épar-
gner ou pour ne plus se commettre à leur
courage , il fit un défi à Canut , qui ac-
cepta ce parti. Ces rois se battirent avec
chaleur et à forces égales. Us terminè-
rent leur différend en partageant le
royaume. Quelque temps après , Edric ,
surnommé Stréon, corrompit deux valets-
de- chambre d'Edmond , qui lui passè-
rent un croc de fer au fondement , dans
le temps qu'il était pressé de quelque né-
cessité naturelle , et portèrent sa tête à
Canut qui fut maître du trône ( 1019 ).
Votjez Canut.
EDMOND PLANTAGENET, de
Woodstock , comte de Kent , était un fils
cadet du roi d'Angleterre Edouard I. Le
roi Edouard II, son frère aîné, l'envoya
l'an 1324 en France, pour y défendre
contre Charles IV les pays qui apparte-
naient à l'Angleterre ; mais il ne fut pas
heureux dans cette expédition. Il soutint
le parti de ceux qui déposèrent Edouard II
son frère, pour mettre son fils Edouard III
.sur le trône. Il se chargea du gouverne-
ment du royaume, avec onze autres sei-
gneurs , pendant la minorité de son ne-
veu; mais il s'aperçut bientôt que la
mère du jeune roi , de concert avec son
amant Roger Mortimer , ne lui en laissait
que le »cul titre. Il travailla dèa Ion à
EDO
faire remonter sur le troue son frère.
Cette tentative ne lui réussit pas : la reine
fit si bien que , dans un parlement tenu
à Winchester, il fut condamné à mort.
On le conduisit sur l'échafaud ; mais l'exé-
cuteur s'étant évadé , il y demeura de-
puis avant midi jusqu'au soir, sans qu'on
pût trouver un homme qui voulût faire
l'ofi&ce de bourreau. Enfin vers le soir ,
un garde de la maréchaussée se chargea
de celte triste exécution. Ainsi mourut ce
prince à l'âge de 28 ans.
EDMONDES ( Thomas ) , Anglais , né
en 1563 , joua un rôle dans les affaires
politiques sous les règnes d'Elisabeth, de
Jacques I et de Charles I. Il fut envoyé
en qualité d'ambassadeur en France et
dans les Pays-Bas, et mourut en 1G39.
On a publié i° ses JVcffociations , Lon-
dres, 1749,in-8. 2° Lettres sur les affai-
res d'e'tat , Londres, 1725, 3 vol. in-8.
EDOUARD LE VIEUX ou l'ancien ,
roi d'Angleterre 7^ de la dynastie saxone,
succéda à son père Alfred l'an 900. Il dé-
fit Constantin , roi d'Ecosse , vainquit les
Bretons du pays de Galles , et remporta
deux victoires sur les Danois. Il fit ensuite
ériger cinq évêchés, fonda l'université de
Cambridge, protégea les savans, et mou-
rut en 924.
EDOUARD LE JEUNE ou le martyre
( Saint), né en 962 d'Edgard, roi d'An-
gleterre , parvint à la couronne dès l'âge
de 13 ans en 97 5. La plupart des grands
du royaume le reconnurent pour leur roi.
Quelques-uns s'y opposèrent. Enfin Ei-
fride sa belle-mère , qui voulait faire ré-
gner son fils Ethelred , le fit assassiner en
978. Il était âgé de 15 ans. L'église ro-
maine l'honore comme martyr, et en cé-
lèbre la mémoire le jour de sa mort, le 18
mars.
EDOUARD (.Saint), dit le Confesseur
ou le Débonnaire, fils d'Ethelred II, fut
rappelé en Angleterre après la mort de
son frère Elfred , successeur de Canut II,
mais assassiné à son entrée dans le royau-
me. Il était alors en Normandie , où les
incursions des Danois l'avaient obligé de
se retirer. Il fut couronné l'an 1012. Le
comte Godwin, qui était allé le chercher
en Normandie, lui donna sa fille en ma-
ÊDO i3
riage, et gouverna sous son nom. Ce gé-
néral emporta d'assez grands avantages
sur les ennemis de l'état. Le roi laissa avi-
lir le sceptre par sa faiblesse ; il parut
d'abord n'avoir apporté sur le trône que
la piété et une douceur qui lui faisait dire
qu'il eût mieux aimé passer sesjoursdans
une condition obscure et privée, que d'a-
cheter une couronne par l'effusion du
sang humain; mais dès qu'il fut instruit
des vexations et des cruautés de Godwin,
il confisqua les biens de ce ministre in-
digne de sa confiance, le déclara ennemi
de l'état et gouverna par lui-même. Aucun
roi ne termina plus heureusement les
guerres qu'il eut à soutenir; dans les
temps de paix , il s'appliqua à rendre son
peuple heureux. Il fit un recueil des plus
belles lois portées par ses prédécesseurs,
et ordonna qu'elles fussent observées par
tous ses sujets sans exception : ce qui leur
fit donner le nom de lois communes-, elles
furent constamment respectées par les An-
glais, même dans les plus grandes révolu-
« tions. On vit alors, dit un auteur, ce que
» peut un roi qui est véritablement le
» père de ses sujets. Tous ceux qui appro-
» chaient de sa personne essayaient de
» régler leur conduite sur la sienne. On
» ne connaissait à sa cour, ni l'ambition,
» ni l'amour des richesses, ni aucune de
» ces passions qui malheureusement sont
■a si communes parmi les courtisans , et
» qui préparent peu à peu la ruine des
» états. Edouard paraissait uniquement
» occupé du soin de rendre ses peuples
» heureux ; il dinlinua le fardeau des im-
» pots, et chercha tous les moyens de ne
» laisser personne dans la souffrance.
» Comme il n'avait point de passions à
» satisfaire , tous ses revenus étaient em-
u ployés à récompenser ceux qui le ser-
» valent avec fidélité, à soulager les pau-
» vres , à doter les églises et les monas-
» tères. Il fit un grand nombre de fonda-
» tions, dont le but était de faire chanter
» à perpétuité les louanges de Dieu. Mais
» les divers établissemens qu'il fit , ne
» furent jamais à charge au peuple. Les
» revenus de son domaine lui suffisaient
» pour toutes les bonnes œuvres qu'il en-
» treprenait. On ne connaissait point alor»
k
ï4 EDO
» les taxes, ouf on n'y avait recours qu'en
>) temps de guerre, et dans des nécessités
» très pressantes.» Les grands du royaume
s'imaginant qu'il avait épuisé ses finan-
ces par ses aumônes, levèrent une somme
considérable sur leurs vasseaux, sans
l'en prévenir, et la lui apportèrent comme
un don que lui faisaient ses peuples pour
l'entretien des troupes, et pour les autres
frais occasionés par les dépenses publi-
ques. Edouard ayant appris ce qui s'é-
tait passé , remercia ses sujets de leur
bonne volonté, et voulut que l'on rendît
l'argent à tous ceux qui avaient contribué
à former la somme. Il laissa par testa-
ment sa couronne à Guillaume le Conqué-
rant, quoiqu'il ne fût pas son plus proche
parent : le prince Edgard, qui devait na-
turellement lui succéder , avait pris la
fuite et s'était sauvé en Ecosse , par la
crainte de ce terrible concurrent. Edouard
mourut le 6 janvier 1066, après un règne
de 23 ans. Il fut canonisé par le pape
Alexandre III.
EDOUARD I de ce nom , de la dy-
nastie normande ou des Plantagenet ,
(qu'on devrait nommer Edouakd IV parce
qu'il y avait déjà eu trois Edouard dans la
race saxonne], roi d'Angleterre, naquit à
Winchester eu 1240, du roi Henri III et
d'Eléonore de Provence. Il se croisa avec
le roi saint Louis contre les infidèles. Il
partageait les travaux ingrats de cette ex-
pédition malheureuse, lorsque la mort du
roi son père le rappela en Europe l'an
1272. Au relourde l'Asie, il débarqua en
Sicile, et vint en France , oîi il fit hom-
mage au roi Philippe III des terres que
les Anglais possédaient dans la Guicnne.
L'Angleterre changea de face sous • ce
prince. Ilsutcontenir l'humeur remuante
des Anglais , et animer leur industrie. Il
fit fleurir leur commerce, autant qu'on
le pouvait alors. Il s'empara du pays de
Galles sur Léolin, après l'avoir tué les ar-
mes à la main en 128.3. Il fit un traité ,
l'an 1286, avec le roi Philippe IV, dit le
Bel, successeur de Philippe III, par lequel
il régla les ditïérends qu'ils avaient pour
la Saintonge , le Limousin , le Qucrci et
lePérigord. L'année suivante il se rendit
à Amiens, où il fit au même prince hom-
EDO
mage de toutes les terres qu'il possédait
en France. La mort d'Alexandre III , roi
d'Ecosse , arrivée en 1 286 , ayant laissé
sa couronne en proie à l'ambition de
douze compétiteurs, Edouard eut la gloire
d'être choisi pour arbitre entre les pré-
tendans. Il exigea d'abord l'hommage de
cette couronne; ensuite il nomma pour
roi Jean Bailleul qu'il fil son vassal. Une
querelle peu considérable entre deux ma-
riniers, l'un français, l'autre anglais,
alluma la guerre en 1 293, entre les deux
nations. Edouard entra en France avec
deux armées, l'une destinée au siège de
La Rochelle, et l'autre contre la Norman-
die. Cette guerre fut terminée par une
double alliance en 1298, entre Edouard et
Marguerite de France , et entre son fils
Edouard et Isabelle , l'une sœur et l'au-
tre fille dé Philippe le Bel. Le souverain
anglais tourna ensuite ses armes contre
l'Ecosse. Bervick fut la première place
qu'il assiégea. Il la prit par ruse. Il fei-
gnit de lever le siège, et fit répandre par
ses émissaires qu'il s'y était déterminé par
la crainte des secours qu'attendaient les
assiégés. Quand il se fut assez éloigné
pour n'être pasaperçu,-il arbora le drapeau
d'Ecosse, et s'avança vers la place. La gar-
nison , séduite par ce stratagème , s'em-
pressa d'aller au devant de ceux qu'elle
croyait ses libérateurs. Elle était à peine
sortie, qu'elle fut coupée par les Anglais,
qui entrèrent précipitamment dans la
ville. Cesuccèsen amena d'autres. Le roi
d'Ecosse fut fait prisonnier, confiné dans
la tour de Londres et forcé à renoncer ,
en faveur du vainqueur , au droit qu'il
avait sur la couronne. Ce fut alors que
commença cette antipathie entre les An-
glais et les Ecossais, qui dure encore au-
jourd'hui , malgré la réunion des deux
peuples. Edouard mourut après avoir
perdu la conquête d'Ecosse , en 1307,
après trente-quatre ans de règne , et 68
ans de vie. Les historiens de diverses na-
tions ont parlé .si dilVércmment de ce
prince, dit l'auteur de V Histoire du Par-
lement d'Angleterre, qu'il est difficile
de s'en former une juste idée. Les satires
sont venues des Ecossais, et les élogesdes
Anglais. Parmi ces historiens, Vclly l'a
EDO
trop noirci ;le Père d'Orléans Ta trop flatté.
On ue peut lui refuser beaucoup de cou-
rage , des mœurs pures , une équité
exacte ; mais ces qualités furent ternies
par la cruauté et par la soif de la ven-
geance et de l'argent. Il s'empara de tous
les prieurés, n'assignant à chaque reli-
gieux que dix-huit deniers par semaine ,
et affectant le surplus à ses finances. Il
fit ensuite enlever tout l'argent des
monastères d'Angleterre , et saisir leurs
fonds et ceux des évèchés. De plus il mit
tous les ecclésiastiques hors de sa pro-
tection , tellement qu'on pouvait les in-
sulter impunément , n'étant plus sous la
sauve-garde des lois. C'est à cette con-
duite que Henri Spelman , protestant
anglais, dans son traité de la Fatalité des
sacrilt'ges, attribue la perle de l'Ecosse
et les malheurs arrivés à son fîls. Ce fut
sous ce prince que le parlement d'Angle-
terre prit une nouvelle forme , telle à
peu près que celle d'aujourd'hui. Le titre
de pair et de baron ne fut affecté qu'à
ceux qui entraient dans la chambre haute.
Il ordonna à tous les shérifs d'Angleterre,
que chaque comté ou province députât
au parlement 2 chevaliers, chaque cité 2
citoyens, chaque bourg 2 bourgeois. La
chambre des communes commença par-
là àentrer dans ce qui regardait les subsi-
des. Edouard lui donna du poids , pour
pouvoir balancer la puissance des barons.
Ce prince, assez ferme pour ne les point
craindre, et assez habile pour les ména-
ger, forma cette espèce de gouverne-
ment , qui rassemble les avantages de la
royauté , de l'aristocratie et de la démo-
cratie ; mais qui a aussi les divers incon-
véniens de tous les trois, et qui ne peut
subsister que sous un roi sage.
EDOUARD II , fils et successeur d'E>
douard I, couronné à l'âge de 23 ans, en
1307, abandonna les projets de son père
sur rEcosse,pourselivrerà ses maîtresses
et à ses flatteurs. Le principal d'entre eux
était un nommé Gaveston, Pierce gentil-
homme gascon, qui, à la fierté de sa nation,
joignait les caprices d'un favori et la dureté
d'un ministre. Il maltraita si cruellement
les grands du royaume, qu'ils prirent les
armes contre leur souverain , et ne les
EDO i5
quittèrent qu'après avoir fait couper la
tète à son indigne favori. Les Ecossais ,
profitant de ce trouble, secouèrent le jougj
des Anglais. Edouard, malheureux au de-
hors, ne fut pas plus heureux dans sa fa-
mille. Isabelle, sa femme, irritée contre
lui, se retira à la cour du roi de France
Charles le Bel , son frère. Ce prince en-
couragea sa sœur à lever l'étendard de
la révolte contre son mari. La reine , se-
courue par le comte de Hainaut, repassa
la mer avec environ 3,000 hommes en
1326. Edouard, livré à l'incertitude dans
laquelle il avait flotté toute sa vie , se ré-
fugia avec son favori Spencer dans le pays
de Galles, tandis que le vieux Spencer
s'enfermait dans Bristol pour couvrir sa
fuite. Cette ville ne tint point contre les
efforts des illustres aventuriers qui sui-
vaient la reine. Les deux Spencer mouru-
rent par la main du bourreau. Edouard,
fut condamné à une prison perpétuelle,
et son fils mis en sa place. Esclave sur le
trône, pusillanime dans les fers, il finit
comme il avait commencé, enlàche. Après
quelque temps de prison, on lui enfonça
un fer chaud dans le fondement par ua
tuyau de corne , de peur que la brûlure
ne parut. Ce fut par ce cruel supplice
qu'il perdit la vie l'an 1327, après un rè-
gne de 20 ans.
EDOUARD III, fils du précédent, vil
le jour en 1312 à Windsor. Mis sur le
trône à la place de son père, par les in-
trigues de sa mère, en 1327, il ne lui fut
pas pour cela plus favorable. Il fit enle-
ver son favori Mortimer jusque dans le lit
de cette princesse, et le fit périr igno-
minieusement. Isabelle fut elle-même
renfermée dans le château de Rising, et
y mourut après 28 ans de prison. Edouard»
maître , et bientôt maître absolu , com-
mença par conquérir le royaume d'Ecosse
disputé par Jean de Bailleul et David
de Bruce. Une nouvelle scène, et qui oc-
cupa davantage l'Europe , s'ouvrit alors.
Edouard III voulut retirer les places delà
Guienne , dont le roi Philippe de Valois
était en possession. Les Flamands , l'em-
pereur et plusieurs autres princes, entrè-
rent dans son parti, les premiers exigè-
rent seulement qu'Edouard prît le titre
\
i6 EDO
de roi de France , ea coiiscqueuce de ses
prétentions sur cette couronne , parce
qu'alors, suivant le sens littéral des traités
qu'ils avaient faits avec les Français , ils
ne faisaient que suivre le roi de France.
Edouard, suivant Rapin de Thoiras , ap-
prouva ce moyen de les faire entrer dans
la ligue. Voilà l'époque de la jonction des
fleurs de lys et des léopards. Edouard se
qualifia dans un manifeste roi de France,
d'Angleterre et d'Irlande. Il commença
la guerre par le siège de Cambray, qu'il
fut obligé de lever. La fortune lui fut en-
suite plus favorable. Il remporta une vic-
toire navale , connue sous le nom de ba-
taille de l'Ecluse. Cet avantage fut suivi
de la bataille de Créci en 1 346. Les Fran-
çais y perdirent 30,000 hommes de pied
1,200 cavaliers et 80 bannières. On attri-
bua en partie le succès de cette journée
à 6 pièces de canon dont les Anglais se
servaient pour la première fois , et dont
l'usage était inconnu en France. Le len-
demain de cette victoire, les troupes des
communes de France furent encore dé-
faites. Edouard, après deux victoires rem-
portées en deux jours , prit Calais , qui
resta aux Anglais 210 années. La mort de
Philippe de Valois, en 13à0, ralluma la
guerre. Edouard la continua contre le roi
Jean son ûls , et t^agna sur lui en 1 367
la bataille de Poitiers. Jean fut fait pri-
sonnier dans cette journée , et mené en
Angleterre , d'où il ne revint que quatre
ans après. Edouard, prince de Galles, fils
du roi d'Angleterre, qui commandait les
troupes dans cette bataille, donna des
marques d'un courage invincible. A sou
entrée dans Londres, il parut sur une pe-
tite haquenée noire, marchant à côté du
roi Jean , qui montait un beau cheval
blanc superbement harnaché. Dans un
siècle baïbare , cette modestie du vain-
queur est bien remarquable. Après la
mort de Jean, en 1364, Edouard fut
moins heureux. Charles V confisqua les
terres que les Anglais possédaient en
France , après s'être préparé à soutenir
l'arrôt de confiscation par les armes. Le
roi de France remporta de grands avan-
tages sur eux ; et le monarque Anglais
mourut en 1377, avec la douleur devoir
EDO
les victoires de sa jeunesse obscurcies
par les pertes de ses vieux jours. Sa vieil-
lesse fut encore ternie par le crédit de
ses favoris, et surtout par son amour
pour une certaine Alix , qui l'empècba
même de recevoir les sacremens de l'é-
glise dans sa dernière maladie. Son règne
aurait eu un éclat infini, sans ces taches.
L'Angleterre n'avait point eu encore de
souverain qui eût tenu dans le même
temps deux rois prisonniers , Jean , roi
de France , et David , roi d'Ecosse. Les
entreprises de ce monarque coûtèrent
beaucoup à l'Angleterre ; mais elle s'en
dédommagea par le commerce : elle ven-
dit ses laines , Bruges les mit en œuvre.
Ce fut Edouard qui institua l'ordre de la
Jarretière, vers l'an 1349. L'opinion
vulgaire est qu'il fit celle institution à
l'occasion de la jarretière que la comtesse
de Salisbury, sa maîtresse, laissa tomber
dans un bal , et que ce prince releva. Les
courtisans s'étant mis à rire , et la com-
tesse ayant rougi , le roi dit : Honni soit
qui mal y pense , pour montrer qu'il n'a-
vait point eu de mauvais dessein, et jura
que tel qui s'était moqué de cette jarre-
tière, s'estimerait heureux d'en porter
une semblable. Cette origine de l'ordre
de la Jarretière n'est rien moins que sûre.
Larrey dit que l'on tient pour une fable
que la divise , Honni soit qui mal y
pense, ait été prise des amours de ce
prince avec la comtesse de Salisbury.
« On prétend , ajoule-t-il , qu'elle ne fut
» employée par le fondateur, que pour
» marquer la bonne intention qu'il avait
V dans l'établissement d'un ordre qui
» obligeait ceux qui le recevaient, à se
t> tenir inséparablement unis , et qui de-
» mandait d'eux un attachement inviolable
j) à la vertu. « Le Père Papebrock, dans une
dissertation sur l'ordre de la Jarretière ,
dit que cet ordre n'est pas plus connu
sous le nom de la Jarretière que sous
celui de Saint-George ; que quoiqu'il
n'ait été institué que par Edouard III, il
avait pourtant été projeté avant lui par
Richard I , dans son expédition de la
Terre-Sainte, si l'on en croit un auteur
qui écrivait sous Henri VIII ; qu'au reste
il ne sait point sur quoi il se fonde ; que
EDO
quelques auteurs placent l't'poque de
cette institution par Edouard 111 , à l'an
1350; mais qu'il aime mieux suivre Frois-
sard, qui la met à l'an 1344, la 18^ du
replie d'Edouard ; que cette époque con-
vient mieux à l'histoire de ce prince qui
parle d'une grande assemblée de cheva-
liers , qu'il fit cette année là.
EDOUARD IV , fils de Richard , duc
d'Yorck, enleva en 14C1 la couronne
d'Angleterre à Henri VI. Il prétendait
qu'elle lui était due , parce que les filles
en Angleterre ont droit de succéder au
trône , et qu'il descendait de Lionel de
Clarence , second fils d'Edouard III , par
sa mère Anne de Mortimer, femme de Ri-
chard; au lieu qu'Henri descendait du
troisième fils d'Edouard III, qui était Jean
de Lancastre, son bisaïeul paternel. Deux
victoires remportées sur Henri , firent
plus pour Edouard que tous ses droits. Il
se fil couronner à Westminster, le 20 juin
de la même année 14G1. Ce fut la pre-
mière étincelle des guerres civiles entre
les maisons d'Yorck et de Lancastre, dont
la première portait la rose lilanche, et la
dernière la rouge. Ces deux partis firent
de toute l'Angleterre un théâtre de car-
nage et de cruautés ; les échafauds étaient
dressés sur les champs de bataille, et cha-
que victoire fournissait aux bourreaux
quelques victimes à immoler à la ven-
geance. Cependant Edouard IV s'affermit
sur le trône par les soins du célèbre comte
de Warwiék ; mais dès qu'il fut tranquille,
11 fut ingrat. Il écarta ce général de ses con-
seils , et s'en fit un ennemi irréconci-
liable. Dans le temps que Warwick négo-
ciait en France le mariage de ce prince
avec Bonne de Savoie, sœur de la femme
de Louis XI, Edouard voit Elisabeth Wo-
devill, fille du baron de Rivers, en devient
amoureux, et n'en peut jamais obtenir
que ces paroles accablantes : « Je n'ai pas
» assez de naissance pour espérer d'être
M reine, et j'ai trop d'honneur pour m'a-
» baisser à être maîtresse. » Xe pouvant
se guérir de sa passion , il couronne sa
maîtresse , sans en faire part à Warwick.
Le ministre outragé cherche à se venger.
Il arme l'Angleterre , il séduit le duc de
Clarence, frère du roi : enfin il lui ôta le
k
EDO 17
trône sur lequel il l'avait fait monter.
Edouard fait prisonnier en 1410, se sauva
de prison, et l'année d'après, 1471, se-
condé par le duc de Bourgogne, il gagna
deux batailles. Le comte de Warwick fut
tué dans la première. Edouard, fils de ce
Henri qui lui disputait encore le trône,
ayant été prii; dans la seconde, perdit la
vie ; ensuite Henri lui-même fut égorgé
en prison. La faction d'Edouard lui ouvrit
les portes de Londres. Ce prince, libre de
toute inquiétude, se livra entièrement
aux plaisirs, et ses plaisirs ne furent que
légèrement interrompus par la guerre
contre Louis XI , qui le renvoya en An-
gleterre à force d'argent , après avoir si-
gné une trêve de 9 ans. Ses dernières ar-
nées furent marquées par la mort de son
frère le duc de Clarence, sur lequel il
avait conçu des soupçons. Il lui permit
de choisir le genre de mort qui lui paraî-
trait le plus doux; et on le plongea dans
un tonneau de malvoisie, oîi il finit ses
jours comme il avait désiré. Edouard le
suivit de près; il mourut en 1483, à 41
ans, après 22 ans de règne. Ce monarque
avait commencé son règne en héros ; il le
fiit en débauché. Son affabilité lui gagna
tous les cœurs ; mais la volupté corrompit
le sien. Il aima trop le sexe, et eu fut trop
aimé. Il attaquait toutes les femmes par
esprit de débauche , et s'attachait pour-
tant à quelques-unes par des passions
suivies. Ses maîtresses les plus connues
furent Jeanne Shone , femme d'un bour-
geois de Londres; Elisabeth Lucy, à la-
quelle on prétend qu'il avait donné sa foi
avant son mariage , et Eléonore Talbot ,
veuve de lord Butler.
EDOUARD Y, roi d'Angleterre, fils
d'Edouard IV, ne survécut à son père que
deux mois. Il n'avait que onze ans lors- .
qu'il monta sur le trône. Son oncle Ri-
chard, duc de Glocester, tuteur d'Edouard
et de Richard son frère, jaloux de la cou-
ronne du premier et des droits du second,
résolut de les faire mourir tous deux pour
régner. Il les fit enfermer dans la tour de
Londres , et leur fit donner la mort l'an
1483. Après s'être défait de ses neveux,
il accusa leur mère de magie, et usurpa
la couronne. Sous le règne d'Elisabeth ,
2 ^
i8
EDO
la tour de Londres se trouvant extrême-
ment pleine, on fit ouvrir la porte d'une
chambre marée depuis long-temps. On y
trouva sur un lit deux petites carcasses
avec deux licols au cou : c'étaient les
squelettes d'Edouard V et de Richard son
frère. La reine, pour ne pas renouveler
la mémoire de ce forfait , fit remurer la
porte ; mais sous Charles II, en 1678, elle
fut rouverte, et les squelettes transportés
à Westminster, sépulture des l'ois.
EDOUARD VI, fils de Henri VIII et
de Jeanne Seymour, monta sur le trône
d'Angleterre à l'âge de 10 ans, en 1547,
et ne vécut que 16 ans. Le rôle qu'il joua
fut court et sanglant. Il laissa entrevoir
du goût pour la vertu et l'humanité; mais
ses ministres corrompirent cet heureux
naturel. L'archevêque de Cantorbéry,
Crammcr , lut un de ceux qui y contri-
buèrent le plus. Ce fut par ses insinua-
lions que la messe fut abolie, les images
brisées, la religion romaine proscrite, et
le sang des catholiques largement répan-
du. « On pilla et saccagea les églises, dit
» le protestant Heylin, sans que le roi en
)> profitât en aucune manière. Car quoi-
)< qu'il en eût tiré des richesses inexpri-
» mablcs, ainsi que de la vente des terres,
» non-seulement il fut accablé de dettes,
M mais encore les revenus de la couronne
» diminuèrent considérablement sous son
» règne. » On prit quelque chose de cha-
cune des différentes sectes de Zuingle, de
Luther et de Calvin , et l'on en composa
un symbole qui forma la religion angli-
cane : composition monstrueuse, édifice
du caprice et du scepticisme, digne fruit
et effet tout naturel de la séparation d'a-
vec la véritable Eglise. Le règne d'E-
douard fut flétri par une autre injustice,
que le goût de la réforme et les insinua-
tions de ses ministres lui arrachèrent : il
écarta du trône JMarie et Elisabeth ses
deux sœurs , et y appela Jeanne Gray sa
cousine. Il mourut en 1558.
EDOUARD, prince de Galles, plus
connu sous le nom de Prince noir, d'a-
près la couleur de son armure , fils d'E-
douard m, roi d'Angleterre, remporta la
victoire de Poitiers sur les Français {Voy.
EoouABD III) , et mourut avant son père
EDO
en 1376. « Le prince de Galles, dit Hume,
» a laissé une mémoire immortalisée par
» de grands exploits, par de grandes ver-
» tus, par une vie sans tache. Sa valeur
» et ses talens militaires furent les moin-
» dres de ses mérites : sa politesse, sa
» modération, sa générosité , son hu-
» manité lui gagnèrent tous les cœurs.
» Il était fait pour illustrer non-seulement
« le siècle grossier dans lequel il vivait,
M et dont les vices ne l'atteignirent point,
» mais encore le siècle le plus brillant
« de l'antiquité et des temps modernes. «
Une grande faute cependant fut la cause
de sa perte. Ayant entrepris de rétablir
sur le trône Pierre le Cruel, indigne d'ê-
tre associé à ses destinées , ce monarque
aussi perfide que barbare, refusa de payer
aux troupes anglaises les sommes conve-
nues et de leur fournir des vivres. Une
maladie contagieuse , suite de la disette,
se mit dans l'armée du prince de Galles,
qui régnait alors sur l'Aquitaine ; lui-
même fut atteint d'une maladie dont il
ne put se rétablir. Il fut forcé, pour ac-
quitter les dettes qu'il avait contractées
pour fournir aux préparatifs de la cam-
pagne, d'accabler d'impôts ses sujets qui
se révoltèrent. Cet incident ranima l'an-
tipathie naturelle des habitans contre les
Anglais, que toutes les belles qualités du
prince n'avaient fait qu'assoupir.
* EDOUARD, prince de Galles, fils
unique de Henri VI et de Marguerite d'An-
jou, né en 1 4 53, fut forcé de quitter l'An-
gleterre avec sa mère en 1463, à l'époque
où le parti d'York eut placé la couronne
sur la tête d'Edouard IV. Il y revint en
1 47 1 après avoir épousé la fille du comte
deWarwick, qui mécontent d'Edouard IV,
avait abandonné sa cause. Le parti de
Lancastre ayant été ruiné à la bataille de
Tewksbury, et le jeune prince étant
tombé avec sa mère dans les mains des
vainqueur, il fut massacré presque sous
les yeux du roi qui , dit-on , avait donné
le signal de sa mort. Cette catastrophe
est le sujet de la 3^ partie de la tragédie
de Henri F^Ide Shake.speare.
EDOUARD PLAMAGENET, le der-
nier de la race qui porte ce nom, comte
de Warwlck , eut pour père George, duc
EDO
de Clarence, frère d'Edouard rv et de Ri-
chard III, rois d'Angleterre. Henri VII
étant monté sur le trône et le regardant
comme un homme dangereux qui pouvait
lui disputer la couronne, le fit enfermer
très étroitement à la tour de Londres. Le
fameux Perkin Waërbeck qui s'était fait
passer pour Richard, le dernier des fils de
Richard III, était alors dans la même pri-
son. Il concerta avec Warwick en 1490
les moyens d'en sortir. Leur complot fut
découvert , et on crut que le roi le leur
avait fait insinuer, pour avoir un prétexte
de les sacrifier à sa sûreté. Ce qui confir-
ma ce soupçon , fut que dans le même
temps, le fils d'un corc^onnier, séduit par
un moine augustin , se donna pour le
comte de Warwich. Henri VII voulait
faire penser par cette ruse (sans doute
concertée avec ce religieux, puisqu'il eut
sa grâce), que le comte de Warwick don-
nait occasion à de nouveaux troubles. Ce
fut sous ce prétexte qu'on le fit décapiter
en 1 499. Il était le seul mâle de la maison
d'Yorck : voilà son véritable crime. Pen-
dant sa longue détention, uu certain Lam-
bert Simuel, différent du fils du cordon-
nier, se fit aussi passer pour comte de
Warwick sous le nom dJ Edouard Plaît-
tagcnet. Il fut couronné à Dublin par une
faction en 1487; mais ayant été battu
quelques jours après et fait prisonnier ,
le roi, tranquille sur son compte, lui
laissa la vie par pitié ; cependant, pour ne
par perdre toute sa vengeance, il lui don-
na l'office ridicule de marmiton dans sa
cuisine. *
EDOUARD (Charles), petit-fils de Jac-
ques II , roi d'Angleterre , né le 3 1 dé-
cembre 1720, en succédant aux droits de
la maison de Stuart , sur le trône d'An-
gleterre, se distingua par ses efforts pour
le recouvrer. Les tentatives qu'il fit en
1745 le rendront à jamais mémorable
dans les annales de la Grande-Bretagne.
II aborde en Ecosse, publie un manifeste
dans lequel il rappelle ses droits au trône
d'Angleterre, et promet un gouverne-
ment sage et modéré. Un morceau de
taffetas lié à un bâton, est le drapeau
sous lequel il rassemble 10,000 monta-
gnards écossais. Avec cette petite troupe
EDO 19
il s'empare d'Edimbourg, bat les Anglais
sous les murs de cette ville le 2 octobre,
entre en Angleterre , prend la ville de
Carlisle, et pénètre jusques dans le centre
dn royaume. Le duc de Cumberland mar-
che contre lui, le prétendant se retire, et
son arrière-garde est défaite à Clifton. La
bataille de Falkirk, qu'il gagne le 28 jan-
vier 1740, relève ses espérances; mais
celle de Culloden, qu'il perd le 27 avril,
le ruine absolument. Vaincu, poursuivi,
fugitif et errant de forêt en forêt, d'île eu
île, obligé quelquefois de se cacher dans
des antres, toujours prêt à tomber entre
les mains de ses ennemis, il se voit exposé
aux plus cruels revers de la fortune ; il
les supporta avec une égalité d'âme qui
intéressa toute l'Europe à son sort. Il s'é-
chappa enfin de l'Ecosse le 1 7 septembre
17 4G, et aborda en France sur un vaisseau
de Saint-Malo , après avoir traversé, sans
être aperçu, une escadre anglaise, à la
faveur d'un brouillard épais. Si dans la
suite, son âme, aigrie par de longs mal-
heurs, éprouvés chez des amis et des en-
nemis, a paru ressentir quelques situa-
tions violentes, c'est qu'abandonné à des
compagnies qu'il ne connaissait point as-
sez, trop long -temps éloigné des exem-
ples et des leçons de son vertueux père ,
il lui a été difficile d'assortir toujours sa
conduite à la dignité de sa naissance et
à l'étr.t de ses prétentions royales. Il
mourut à Rome, le 31 janvier 1788. Il
avait épousé, le 1 7 avril 17 72, la princesse
Louise-Maximilienne de Stolberg-Gedern ;
ils n'ont point eu d'enfans ; de sorte que
la ligne masculine de la famille royale de
Stuart, est réduite au seul cardinal, après
avoir donné des rois à l'Ecosse pendant
3 à 400 ans, et par les princesses de cette
maison, des souverains à la plus grande
partie de l'Europe. Il a laissé une fille née
hors de l'état de mariage, qu'il a pré-
tendu légitimer comme roi d'Angleterre;
mais cette légitimation n'a point été re-
connue.
* EDOUARD 1" , roi de Portugal ,
fils de Jean I'"' , succéda à son père en
1430. Son règne fut remarquable par le
rétablissement de la discipline, qui avait
été relâchée sous l'administration précé-
20 EDR
dente. Il mit de l'ordre dans les finances
de l'état, convoqua les Cortès ou Etats-
généraux , fit des lois |)our rdprimer le
luxe, encouragea le commerce, protégea
les sciences et les cultiva lui-même.. 11
mourut en 1438, à l'âge de 37 ans; il
avait chargé don Juan de Regras de rédi-
gea un Code sur l'administration de la
justice ; il travailla lui-même à cet ouvrage
précieux pour cette époque. Il a aussi
composé un Traité sur la fidcUle' que
l'on doit apporter dans le commerce de
l'amitié.
* EDRED , 10* roi d'Angleterre , de la
dynastie saxonne, fils d'Edouard l'Ancien,
monta sur le trône en 946 , après la mort
de son frère Edmond. Il se fit remarquer
})ar une extrême justice et gagna l'affec-
tion de ses sujets par sa bonté et la dou-
ceur de ses mœurs. Les Danois de Nort-
humberland s'étant révoltés, il les sou-
mit et força Malcolm , roi d'Ecosse, à lui
faire hommage des terres qu'il possédait
en Angleterre. Il laissa ensuite la direc-
tion des affaires à saint Dunstan , depuis
archevêque de Cantorbéry, et mourut en
955. Il eut pour successeur Edmond son
jieveu.
EDRIC , surnommé Stre'on ( c'est-à-
dire acquisiteur) , homme d'une nais-
sance fort obscure , sut par son éloquence
et par toutes sortes de ruses et d'intrigues,
s'insinuer fort avant dans les bonnes
grâces d'Ethelred II , roi d'Angleterre.
Ce prince le fit duc de Mercie , et lui
donna sa fille Edgithe en mariage. Par
cette alliance il mit dans sa maison un
perfide , vendu aux Danois , qui ne laissa
jamais passer aucune occasion de trahir
les intérêts du roi et du royaume. Jîd-
mond , son beau-frère , découvrit sa per-
fidie, et se sépara de lui. Edricse voyant
démasqué, quitta le parti d'Ethelred,
pour prendre celui de Canut. Quelque
temps après il rentra dans le parti d'Ed-
mond , qui avait succédé à Ethelred et
qui eut la générosité de lui pardonner.
Ce fourbe lui fit voir bientôt à la bataille
d'Asseldum, ce qu'il avait dans l'âme.
Pendant que les deux armées étaient aux
mains , il quitta tout à coup son poste ,
et alla se joindre aux Danois , qui rem-
EDW
portèrent la victoire. La paix s'étant faite
entre Edmond et Canut, Ëdric craignit
que l'union des deux rois ne lui fût fa-
talc. Il mit le comble à toutes ses perfi-
dies en faisant assassiner Edmond par
deux de ses propres domestiques, en
1017. Canut conserva à Edric le titre de
duc de Mercie ; mais ce ne fut pas pour
long-temps. Ce monstre eut un jour l'in-
solence de lui reprocher publiquement
« qu'il n'avait pas récompensé ses ser-
M vices, et particulièrement celui qu'il
» lui avait rendu , eu le délivrant d'un
« concurrent aussi redoutable que l'était
» Edmond. « Canut lui répondit tout en
colère que , « puisqu'il avait la hardiesse
M d'avouer publiquement un crime si
» noir, dont jusqu'alors il n'avait été
M que soupçonné , il devait en porter la
» peine. » En même temps , sans lui don-
ner le loisir de répliquer, il commanda
qu'on lui coupât la tête sur-le-champ , et
qu'on jetât son corps dans la Tamise. On
dit qu'il fit mettre cette tête sur le lieu
le plus élevé de la tour de Londres. On
prétend que c'est ce scélérat qui intro-
duisit le tribut que les Anglais furent
obligés de payer aux Danois sous le nom
de Danegelt.
EDWARDS ouEdwarts (Georges), né
à St'aford, dans le comté de Suffex, en
1C93 , a j/ublié une Histoire naturelle
des oiseaux, animaux et insectes , en
210 planches coloriées , en anglais, avec
la traduction française, Londres, 1751 ,
A vol. in-4 : ouvrage magnifique et inté-
ressant. On a encore de lui Glanures
d'histoire nuturelle , 1758 , 60 et G4 , 3
part. in-4. Ce sont des figures de quadru-
pèdes, d'oiseaux, d'insectes, de plantes,
avec des explications en anglais et en
français. Ces trois volumes doivent être
joints aux précédens. Edwards mourut le
23 juillet 1733.
' EDWARDS ( Bryan ou Brian ) , écri-
vain anglais, né en 1743, à Westburg,
dans le Wiltshire , habita de bonne heure
et long-temps la Jamaïque , où il était
possesseur d'une plantation de sucre.
Appelé en 1789 à faire partie de l'as-
semblée de cette île , on le vit combattre
vivement les propositions de Wilbeforcc
EFI
pour l'abolilion de la traite des Nègres.
On ignore à quelle époque il revint en
Angleterre ; mais il y devint membre du
parlement, et y plaida avec force la cause
des colons; mais comme il plaignait le
sort des esclaves tout en reconnaissant
les dangers de leur émancipation, il fit
adopter uue loi répressive des cruautés
que l'on exerçait contre eux. Il mourut le
1 6 juillet 1 800. On a de lui une Histoire
civile et commerciale des colonies an-
glaises dans les Indes occidentales ,
1793 , 2 vol. in-4 , ouvrage qui eut beau-
coup de succès ; dans lequel il se montre
naturaliste , politique, commerçant, mais
patriote un peu ardent. La 3* édition a
été publiée après sa mort, en 1801 , 3
vol. ; augmentée d'une Description his-
torique de la colonie française de l'île
de Saint-Domingue , qui avait été publiée
séparément en 1794 ; d'un Voyage dans
les îles des Barhades , Saint-Vincent ,
Tabago, etc., par William Young; et
des 3 premiers chapitres d'une Histoire
de la guerre dans les Indes occidentales,
depuis son origine en février 1793. Il a
été publié une nouvelle édition de cette
histoire, continuée jusqu'au temps ac-
tuel, Londres, 1819, 5 vol. in-8. La
Description de l'île de Saint-Domingue
comprenant le récit des calamités qui
ont désolé ce pays depuis l'année t 789 ,
a été traduite en français , Taris, 18l3,
in-8. — Il y eut en Angleterre plusieurs
savans et théologiens de ce nom.
EDZARDI ( Sébastien ) , professeur
en philosophie à Hambourg , où il était
lié, en 1G73, mort le 10 juin 173G , a
publié plusieurs ouvrages estimés, entre
autres, de Verbn substantiali, Ham-
bourg, ( 700 , contre les unitaires.
EEKHOUT (Gerbrant Vanden). Voy.
Van dex Eekiiout.
' EFIMIEF ( Dmitri-Vladimirovitsch) ,
colonel d'artillerie russe, mort en 1804,
s'est fait connaître par ses exploits, mais
plus encore par trois comédies qui ont
été représentées à St.-Pétersbourg avec
le plus grand succès : 1° le Joueur cri-
minel ou la Sœur vendue par son frère.
2" Suite de la Sœur vendue par son
frère. 3" Le Voyageur ou Véducation
EGB 21
sans succès. La l'« de ces pièces a seule
été imprimée, St.-Pétersbourg, 1788.
EFFIAT ( Antoine Coiffier Ruzh ,
dit le maréchal d' ), petit-fils d'un maître-
d'hôtel du roi , fut surintendant des
finances en 1626, général d'armée en
Piémont en 1630, enfin maréchal de
France le l*"" janvier 1631. Mécontent
d'avoir été oublié dans la promotion pré-
cédente , il s'était retiré à sa terre de
Chilli , à 4 lieues de Paris; mais le car-
dinal de Richelieu , de la maison duquel
il était comme intendant , le rappela et
lui donna le bâton. Ce maréchal mourut
le 27 juillet 1632, à Luzzel.stein , proche
de Trêves, en allant commander en Al-
lemagne. En moins de 5 à G ans il avait
acquis de la réputation dans les armes ,
par sa valeur ; au conseil , par son juge-
ment ; dans les ambassades , par sa dex-
térité ; et dans le maniement des finances,
par son exactitude et sa vigilance. Il était
père du marquis de Cinq-Mars ( voyez ce
mot ). Il mourut fort riche. Ses biens
ont passé dans la maison de Mazarin , par
La 3Ieilleraye son gendre. Ils lui venaient
en partie de son grand-oncle maternel ,
qui les lui laissa, à condition qu'il por-
terait le nom et les armes de Ruzé. Cet
oncle , nommé martin Ruzé , fils de Guil-
laume Ruzé , receveur des finances à
Tours , était un homme de mérite qui fut
secrétaire d'état sous Henri III et Henri IV.
(Le marquis d'Effiat a laissé plusieurs ou-
vrages sur le règne de Louis XIII : 1 ° Etat
des affaires des finances présenté en l'as-
semblée des notables par le marquis
d'Effiat, 1626, tome 12 du Mercure fran-
çais. 2° Discours sur son ambassade en
ylngleterre, ihid. 3" Lettres sur les fi-
nances (dans les factums du sieur Suagcz)
in-4. 4" Les heureu.r progrès des armées
de Louis XIII en Piémont dans le Recueil
des diverses révolutions. 6° Mémoires
concernant les dernières guerres d'Ita-
lie de 162r> à 1632 un vol. in-12. 6" Plu-
sieurs mémoires manuscrits et lettres
conservés dans diverses bibliothèques).
EGBERT , roi de Wcstrex et premier
roi d'Angleterre , se distingua par ses
vertus et son courage. Il était à Rome à
la cour de Charlemagne , quand les de-
aa , EGE
pûtes anglais vinrent lui apporter la cou-
ronne. Charlcmagne le voyant prêt à
partir, tira son épée , et la lui présentant ;
« Prince , dit-il , après que votre épée
» m'a si utilement servi , il est juste que
» je vous prête la mienne. « Egbcrt sou-
mit tous les petits rois de l'Angleterre ,
et régna paisiblement et glorieusement
jusqu'à sa mort, arrivée en 837. Ce fut
lui qui ordonna qu'on donnerait à l'a-
venir le nom d'Angleterre à cette partie
de la Grande-Bretagne qu'avaient occupée
Jes Saxons.
EGBERT , frère d'Eadbert , prince de
Northumberland , fut élevé dès son en-
fance dans un monastère , devint arche-
vêque d'Yorck en 732 , et mourut l'an
765. Nous avons de lui 1° Dialogus ec-
clesiasticœ institutionis , publié à Du-
blin en 1G64, in-8, par Jacques War-
raeus. 2° Tractatus de jure sacerdotali ,
et Excerpta Wk ex dictis et canonibus
patrum , dans les Conciles du Père
Labbe, tom. 6. 3° Pœnitentiale Ubris IF
distinctum , manuscrit que l'on conserve
dans quelques bibliothèques d'Angle-
terre,
*EGÈDE (Jean) , pasteur de l'Église
protestante , fondateur des missions da-
noises au Groenland, né en Danemarck
en 1686 , était ministre de Vogen , dans
l'évêché de Drontheim en Norwége , lors-
qu'il conçut le projet de travailler à l'in-
struction et à la conversion des Groen-
landais. Après des obstacles sans nombre,
il obtint la permission de se rendre dans
leur pays avec trois navires , pour y
former des établissemens. 11 parvint à con-
naître la langue du pays , et à gagner la
confiance des habitans par sa douceur :
il les instruisit des préceptes du christia-
nisme, et en baptisa un grand nombre.
Quand ses infirmités ne lui permirent
plus de vaquer à ses fonctions , il confia
son œuvres à son fils et se retira dans l'île
de Falster , oii il mourut le 6 novembre
1758. On lui doit 1° Nouvelle recherche
de l'ancien Groenland , o\x Histoire na-
turelle et description de la situation , de
tair, de Ut température et des produc-
tions de V ancien Groenland, Copen-
hague, 1729, in-4; nouvelle édition, 1741.
EGE
Ce livre a été traduit en allemand , en
anglais , en hollandais et en français.
Cette dernière traduction a été donnée
par Parthenay des Roches , sous ce litre :
Description et histoire naturelle du
Groenland, Copenhague et Genève,
1763, in-12. 2° Journal tenu pendant
la mission au Groenland , Copenhague,
1738 , in-8. Il a été traduit en allemand,
Hambourg, 1740, in-4 , sous le titre de
Relation délaille'e du commencement et
du progrès de la mission du Groenland,
etc. On trouve dans le tome xix de VHis-
toire des Voyages, un extrait de l'ou-
vrage de Crantz sur le Groenland , où
sont détailles les travaux d'Egède pour
la colonisation de ce pays. — Son fils ,
Paul Egèdk , mort en 1689, fut nommé
membre du collège des Missions , direc-
teur de l'hôpital des Orphelins , et
évêque du Groenland. Il partagea et con-
tinua les travaux de son père. Il a laissé
1° Relation du Groenland, ex traite d'un
journal tenu depuis 1721 jusqu^en 1788,
Copenhague, 1789 , in-12. 2" Dictiona-
riumgroenlanaicum, Copenhague, 1 754,
in-4. 3° Grammatica groenlandica ,
1760, in-12. 4° Traduction en groen-
landais de V Evangile , de l'Imitation de.
Jésus-Christ , etc.
"EGENTON (François), artiste an-
glais, naquit vers 1740. Il se livra par-
ticulièrement à la peinture sur verre , et
fut un de ceux qui contribuèrent au per-
fectionnement de cet art , qui était pres-
que oublié ; art toutefois dans lequel les
modernes n'ont jamais pu égaler les an-
ciens pour la vivacité et la beauté des
couleurSjComme on le voit dans les vitraux
des anciennes églises. Leur procédé, dif-
férent de celui des modernes, consistait
à rassembler de petits morceaux de verre
de différentes couleurs, qui formaient
ensemble comme une espèce de mosaïque.
Ensuite, et par une nouvelle méthode,
on a peint les verres par apprêt , savoir,
en y appliquant des couleurs métalliques
qu'on incorpore par l'action du feu gra-
duellement distribuée : invention que
l'on attribue à Claude de Marseille, et à
Cousin, peintres français. Egeuton a laissé
plus de cinquante ouvrages dans ce
EGE
genre , parmi lesquels on cite deux Ré-
surrections, sur les dessins de Joseph
Reynolds, et qui se trouvent à Linchfield
dans la cathédrale de Salisbury. Le ban-
quet donne' par Salomon à la reine de
Saba , d'après un tableau d'Hamilton
qu'on voit au château d'Arundel ; Saint
Paul converti et recouvrant la vue ,
dans l'église de Saint-Paul , à Birmin-
gham ; Le Christ portant sa croix , d'a-
près Morales , dans l'église de Wousled ,
au comté d'Essex ; L'âme d'un enfant en
présence de Dieu, d'après un tableau de
Peters, et que l'on voit dans une église
à Great-Barr, dans le comté de Stafford.
Egenton mourut le 26 mars 1805, âgé
de près de 65 ans,
EGERTON ( Thomas ) , garde-des-
sceaux d'Angleterre sous la reine Elisa-
beth , et chancelier sous Jacques I , fut
surnommé le défenseur incorriiptible des
droits de la couronne. Umourut en 1617,
à 70 ans, après avoir publié quelques
ouvrages àc jurisprudence.
"EGERTON (François), duc de Brid-
gewater, marquis de Brackley, baron d'El-
lesmire, fut le l*"" de sa famille qui prit le
nom de Bridgewater; il était fils de Scroop-
Egerton qui avait une fortune immense
dont il jouit de bonne heure par la mort de
ses parens ; il était né en 17 26 : bientôt il
s'occupa d'un projet que son père avait
formé , mais auquel des obstacles sans
nombre l'avaient forcé de renoncer. C'était
la construction du canal que l'on avait
songé d'entreprendre en Angleterre. Eger-
ton possédait dans ses terres de Worsley,
de riches mines de houille ; mais l'ex-
ploitation en devenait fort désavanta-
geuse à cause de la difficulté des trans-
ports. Un canal qui aurait servi à trans-
porter son charbon à Manchester dont
il était éloigné de 8 milles, eût été très
avantageux, peut-être même nécessaire
pour le succès de son entreprise. Mais ce
canal offrait des obstacles que l'on disait
insurmontables : néanmoins il s'adressa
à un artiste nommé Brindley, qui assura
que la confection du canal était prati-
cable. Egerton demanda donc au parle-
ment l'autorisation d'ouvrir un canal na-
vigable de Salford près de Manchester
EGE 23
jusqu'à Wofsey , et il l'obtint en 1768
après une opposition assez vive dans les
deux chambres. Après 5 ans de travaux et
des dépenses énormes, le canal fut terminé
et poussé même jusqu'à la rivière de
Mersey ; on ne peut voir sans étonnement
depuis les bords de la rivière d'Irwenel
couverte de voiles , des barques flotter
Sur un canal pratiqué à 40 pieds au
dessus. Le projet de construire un aqueduc
qui partant de Bartonbridge , serait pro-
longé jusqu'à l'Irwenel et s'élèverait à une
si grande hauteur au dessus du niveau
de cette rivière, fut généralement re-
gardé comme chimérique ; mais la réso-
lution d'Egerton était inébranlable, et il
fit construire ce canal en peu de temps :
il porte son nom. En général il fit beau-
coup de sacrifices pour la propagation
du système de navigation intérieure
dont il avait donné l'exemple et qui est
une des causes principales de la prospé -
rite actuelle de l'Angleterre et de l'Ecosse.
La fortune d'Egerton devint considérable :
pour en donner une idée il suffira de
dire qu'il payait à l'état pour sa taxe de
contributions annuelles 110,000 livres
sterling. Sa carrière politique n'offre rien
de remarquable ; il siégeait à la chambre
des pairs. En 1800, la S ocie'te' d'encou-
ragement des arts et du commerce de
Londres lui décerna une médaille d'or
en reconnaissance des services qu'il avait
rendus à son pays ; la même année il lui
fut volé des remercîmens pour un ou-
vrage intitulé Description du plan in-
cline des souterrains de Bridgewatter ,
dont il a paru une traduction française à
Parisen 1812, in-8, avec figures : on peut
reprocher à l'auteur de n'avoir pas rendu
dans cet ouvrage à Brindley toute la jus-
tice qu'il méritait. Egerton mourut le 8
mars 1803 ; il avait vécu célibataire.
* EGERTON (François -Henry, sir)
comte de Bridgewatter, membre de la
Société royale de Londres , prébendaire
de Durham, et recteur de Witchurch dans
le comté de Salop , était le dernier fils
de Jean Egerton évêque de Durham , et
d'Anne - Sophie, fille de Henri Grei duc de
Kent ; il était le frère et fut l'héritier du
riche duc de Bridgewatter. Amateur des
24 EGG
sciences , des lettres et des arts , il s'était
environné d'écrivains et d'artistes. Avec
les premiers il a publié dififérens ouvrages,
notamment une Description des travaux
souterrains exécutés a fValkdenmoor ,
dans le comté de Lancastre par le dernier
duc de Bridgewatler , inséré dans les
Transactions de la Société des arts. 2°
Une magnifique édition de VHippolyte
d^ Euripide , grec-latin , avec notes , Ox-
ford, 1176, in-4 : un exemplaire de cet ou-
vrage a été vendu 149 fr. Z° Fragjncns
et odes de Sapho , grec-latin , avec des
notes, Paris, 1815, in-8. 4° Cornus mas-
que de Milton , traduction littérale ,
française et italienne , Paris, 1812 , in-4.
5° Une édition de la Traduction du
même ouvrage pour Gaetano Palidori-da-
Bientina, Paris, 1812 , in-4. On lui doit
plusieurs autres écrits relatifs à l'illustra-
tion de sa famille. Egerton aimait à en-
courager les publications utiles; ainsi il
donna le montant de 20 souscriptions ,
en se faisant placer sur la liste des abon-
nés , à l'Hermès romanus du savant Bar-
bier - Vémars. Avec les artistes dont il
avait fait sa société , il s'occupa de faire
reproduire avec profusion son portrait et
celui des membres illustres de sa famille,
dont la lithographie a répandu à ses frais
une foule d'exemplaires. Il est mort à
Paris le 12 février 1829.
• EGG ( Jean-Gaspard ) , agronome
suisse, né en 17 38 , était greffier du dis-
trict d'Ellikon ( canton de Zurich ). Il est
connu par plusieurs institutions pré-
cieuses, pour l'avantage de sa commune
dont il fit dresser un plan géométrique, et
pour les progrès de l'agriculture et de
l'industrie, telles que la culture des biens
fonds communaux négligés jusqu'alors ,
l'assurance contre Vépizootie , et enfin ,
l'instruction pour la culture delà vigne,
à l'aquelle la société économique de Zu-
rich a décerné le premier prix. Egg mou-
rut en 1794. Sa vie a été écrite en alle-
mand par son filset publiée par la Société
de physique de Zurich, 1795, in-8.
EGGELING (Jean-Henri) , né à Brème
en 1639, parcourut la plupart des royau-
mes de l'Europe, dans la vue de perfec-
tionner son goût pour les antiquités
EGG
grecques et romaines. De retour dans sa
patrie , il fut nommé secrétaire de la ré-
publique ; emploi qu'il exerça avec dis-
tinction jusqu'à .sa mort, arrivée en 1 7 1 3,
à 74 ans. On a de lui des explications Ae
plusieurs médailles et de (juelques mo-
numens antiques ; Misteriu Cercris et
Bacchi, dans les Antiquités grecques de
Gronovius ; et Germaniœ antiquitates ,
Brème , 1 694 , in-4 , ouvrage plein de re-
cherches.
* EGGS ( Jean-Ignace ) , capucin sous
le nom dapère Ignace de Rheinfeld , né
dans cette ville en 1618, servit d'abord
comme aumônier à bord d'un des vaisseaux
delà flotte vénitienne , où il convertit et
baptisa plus de 600 mahométans prison-
niers. Il accompagna ensuite Octave,
comte de La Tour, dans son voyage à la
Terre-Sainte , séjourna trois mois à Jéru-
salem , et fut reçu avec lui chevalier du
Saint-Sépulcre. De retour dans sa patrie,
il consacra le reste de sa vie à l'élude et
aux missions dans les pays protestans. Il
mourut à Lauffenbourg le 1 *■■ février 1702.
Il a publié le résultat de son voyage sous
le titre de Relation du voyage de Jéru-
salem , et Description de toutes les mis-
sions apostoliques de l'ordre des Capu-
cins, in-4 : ouvrage intéressant, qui fut
réimprimé à Fribourgen Brisgaw eu 1 666,
et à Augsbourg en 1699.
* EGGS ( Léon ou Léonce ) , parent du
précédent , et jésuite comme lui , naquit
à Rhinfeld le 19 août 1666. Il cultiva
avec succès la poésie , et composa des
pièces de théâtre en allemand , en latin
et eu français, qui furent jouées dans
différentes villes d'Allemagne. Il était
très versé dans la langue grecque , et il
avait professé pendant quelque temps la
poésie et la rhétorique dans les collèges
delà société. Il accompagna au siège de
Belgrade, en qualité d'aumônier, les fils
de l'électeur de Bavière , et mourut , le
16 août 1717, au camp devant cette
ville. Il a laissé 1" Compositiones morales
et asceticœ ; ce sont des morceaux choi-
sis, tirés d'ouvrages français et latins. Il
en a été fait plusieurs éditions. 2° Opéra
moralia ; 3° OE strum ephemericum poe-
ticum, Munich , 1712. Cet ouvrage, pu-
blîé sous le nom de Genesius Gold, qui
est l'anagiamme du sien , est formé d'au-
tant d'élégies qu'il y a de jours dans l'an-
née , dont le sujet est pris des psaumes
de David. Z° Epigrammata , jElogia ,
Inscriptiones y Exercilationes scolas-
ticœ théâtrales. Ces opuscules sont restés
manuscrits. Il a aussi composé la Fie du
Père Richard Eggs.
* EGGS (George-Joseph ), de la même
famille, chanoine , doyen de l'église de
Saint-Martin de Rheinfeld, mort vers
1750. On lui doit Purpura docia , seu
Vitœ cardinalium scriptis illustrium ,
Munich, 1714-29, 4 vol. in-fol. , livre
estimable par les recherches et l'exacti-
tude ; et plusieuis autres ouvrages im-
primés la plupart en allemand et peu
connus en France.
EGINARDouEginhard, historien fran-
çais du 9« siècle, seigneur allemand, élevé
à la cour de Cbarlemagne, fit des progrès
si rapides dans les lettres , que ce prince
le fit son secrétaire. Il lui donna sa fille
Emma ou Imma en mariage A ces bien-
faits , il joignit encore la charge de sur-
intendant de ses bâtimens , et de chan-
celier. Après la mort de Cbarlemagne,
Eginard se consacra à la vie monastique.
11 se sépara de sa femme, et ne la regarda
plus que comme sa sœur. Louis le Dé-
bonnaire lui donna plusieurs abbayes ,
dont il se défit pour se fixer à Selingens-
tat, monastère qu'il avait fondé. Il en
fut le premier abbé. Eginard mourut sain-
tement dens sa retraite , l'an 839. Nous
avons de cet homme célèbre une P^ie de
Charlemagne, irès-de'taillee ; ( vila et
gesta Caroli magni, imprimée à Cologne,
1521, in-4, Francfort, Genève, Hanau,
Leipsick, Paris , Strasbourg , Helmstadt ;
l'édition la plus estimée est celle de Herm.
Schmiucke, Utreckt, 1711, in-4, avec
les notes de Bessel , de Bollandus , et
de Goldastj. Don Bouquet a inséré cet
ouvrage curieux dans sa grande Collec-
tion des Historiens de France, tom. 6.
Le président Cousin en a donné une
traduction française dans l'Histoire de
l'empire d'Occident , 2 vol. in-12. (lien
existe d'autres traductions d'un auteur
inconnu ; d'Elie Vinet, Poitiers, 1568,
Y.
in-8 ; de Léonard Pournas , Paris j 1 G 1 4 ,
in-1 2 ; de D. ( Denis ), Paris, 1812, in-1 2.
Il a été traduit en allemand par Jean-Au-
gustin Egenof, Leipsick, 1528, iu-12.
Eginard est aussi l'auteur des Annales
regum francorum Pipini, Caroli magni,
Ludovici PU, ab anno Christi 741 ad
annum 829, (imprimé dans la plupart
des éditions du précédent ouvrage). On
a encore de lui G2 lettres écrites en la-
tin, Francfort, 1714, in-fol. ; elles sont
importantes pour l'histoire de son siècle.
On les trouve dans le Recueil des Histo-
riens de France de Dnchesne , dans la
Collection de don Bouquet, etc. Eginard
était l'écrivain le plus poli de son temps.
"Nous avons composé cet article d'après
l'idée commune que le plus grand nom-
bre des historiens donne d'Eginard. Le
nouvel éditeur des OEuvres de Bossuet
dit dans une note sur la défense de la
déclaration du clergé de France , qu'il
est difficile de croire qu'Eginard ait vécu
du temps de Cbarlemagne. Eginard, dans
la Vie de ce prince , s'excuse de ce qu'il
ne parle point de sa naissance et de son
enfance, « parce qu'il n'y a plus, dit-il,
» d'homme vivant qui en ait connais-
» sance. » Cela veut dire tout au plus , à
cequ'ilparaît (et c'est le sentiment des au-
teurs de l'Histoire littéraire de France ),
qu'Eginard n'exécuta son dessein que
plusieurs années après la mortdeson hé-
ros. Les romanciers ont prétendu embellir
sa vie par des récits peu vraisemblables
et démentis par Eginard lui-même : quel-
ques-uns ont été mis sur la scène.
EGIMÈTE F. ^GiNETE ( Paul).
EGINHARD. F. Eginard.
EGLY (d'). Foyez Montenault.
EGMONT (Lamobai., comte d'), un
des principaux seigneurs des Pays-Bas,
né en 1522, d'une maison illustre de
Hollande , se distingua dans les armées
au service de l'empereur Charles V , qu'il
suivit en Afrique en 1544. Nommé géné-
ral de la cavalerie sous Philippe II , il se
signala à la bataille de Saint-Quentin en
1557, et à celle de Gravelines en 1558.
Mais après le départ de Philippe pour
l'Espagne , il favorisa les troubles qui
s'élevèrent dans les Pays-Bas , et se ligua
û6 EGN
avec les chefs de la rébellion, te duc
d'Albe qui y fut envoyé pour les pacifier ,
lui fit trancher la tête à Bruxelles , le 5
juin 15G8, aussi bien qu'à Philippe de
Montmorency , comte de Horn. Lorsque
le capitaine Salines demanda à d'Egmont
son épée , le comte répondit d'abord fiè-
rement : « Eh ! quoi ? capitaine Salines ,
» m'ôter cette épée qui a si bien servi le
M roi ! M Puis se radoucissant tout d'un
coup et la donnant : « Puisque telle est la
« volonté du roi , dit-il , prenez-la. » Ce
malheureux comte avait 46 ans: il mou-
rut avec résignation et dans la commu-
nion del'église catholique. L'ambassadeur
de France marqua à sa cour n qu'il avait
)» vu tomber cette tête qui avait deux fois
» fait trembler la France. »
EGNACE ou Egnazio ( Jean-Baptiste
CiPELLi dit ) , disciple d'Ange Politien ,
maître de Léon X, fut élevé avec ce pon-
tife sous les yeux de cet habile homme.
S'il y eut depuis une grande différence
dans la fortune de ces deux disciples , il
n'y en eut point dans leur goût pour les
belles-lettres. Egnace les professa à Ve-
nise sa patrie , avec le plus grand éclat.
La vieillesse l'ayant mis hors d'état de
continuer , la république lui accorda les
mêmes appointemens qu'il avait eus lors-
qu'il enseignait, et affranchit ses biens de
toutes sortes d'impositions. Egnace mou-
rut au milieu de ses livres, ses seuls plai-
sirs , en 1553, à 80 ans. Ses écrits sont
au dessous de la réputation qu'il s'était
acquise, par une heureuse facilité de par-
ler , et par une mémoire toujours fidèle.
Il était extrêmement sensible aux éloges
et aux critiques. Robortel ayant censuré
ses ouvrages , il répondit , dit-on , par
un coup de baïonnette dans le ventre,
qui pensa emporter le critique. Les prin-
cipaux ouvrages d'Egnace sont : 1» un
Abrégé de la vie des empereurs , depuis
César jusqu'à MaximiU.cn I, en latin,
Venise, 151G,in-8. Cet ouvrage, un des
meilleurs que nous ayons sur l'histoire
romaine, a été traduit pitoyablement par
le trop fécond abbé de Marollcs, dans son
Addition à l'histoire romaine, 1664, 2
vol. in-12. 2° Traité de l'origine des
Turcs , publié à la demande de Léon X ;
ij se trouve dans le l»' tome des Ôesia Dei
per Francos. 3" Un Panégyrique latin
de François I , en vers héroïques , Ve-
nise, 1540. Comme il y avait plusieurs
passages injurieux à Charles-Quint, l'em-
pereur s'en plaignit à Paul III , alors en-
nemi de la France ; ce pontife fit agir si
fortement contre le panégyriste, qu'il
pensa être accablé. 4" De savantes re-
marques sur Ovide. b° Des notes sur les
épîlres familières de Cicéron , et sur
Suétone. 6" De Exemplis illustrium vi-
rorum Venetœ civitatis et aliarum gen-
tium , lib. 9, Venise, 1554,in-4.
* EHLERS ( Martin ) , professeur de
philosophie à Kiel, où il est mort le 9
janvier 1 809, est né à Nortorf dans le Hols-
tein en 1732. L'Allemagne lui doit plu-
sieurs institutions utiles, des réformes très
sages dans les méthodes d'enseignement
usitées dans les universités d'Allemagne,
et quelques ouvrages estimables. 1° /?c-
cueilde petits traités sur l enseignement
des écoles publiques et l'éducation en gé-
néral, Flensbourg, 1776 , in- 8 , en al-
lemand. 2° Quelques portraits pour les
bons princes , et ceux qui se consacrent
à l'éducation des enfans des rois , Kiel
et Hambourg, 1786, 2 vol. in-8. 3" Con-
sidérations sur la moralité de nos jouis-
sances et de nos plaisirs , 1790 , 2 vol.
in-8.
* EHRARD ou Erhard (Dom Thoraas-
d'Aquin ) , savant bénédictin du 1 6* siè-
cle , appartenait à la congrégation des
Sts. -Anges ; il prit part à la dispute qui
eut lieu entre les bénédictins et les cha-
noines réguliers , au sujet de V Imitation
de Jésus-Christ ; à ce sujet il a publié
plusieurs ouvrages : 1° une édition latine
de y Imitation , accompagnée d'une pré-
face apologétique pour Gcrsen , Augs-
bourg, 1724. 2° Une défense de la même
opinion, intitulée Polychratcs gersen-
nensis , in qua quatuor libri de imita-
tionc Christi , Joannis Gersennensis ,
abbatis ordinis Sancti-Bcnedicti , vin-
dicantur ; c'est la réfutation du Scu-
tum kempense d'Amort , Augsbourg ,
1729. Z" Ars memoriœ sive claraetper-
spicua methodus excerpendi nucleum
rerum , ex omnibus scienliarum monu-
EHR
mentis, Augsbourg, 1715, 2 vol, in-8.
h° Gloria sanctissimi protoparenti Be-
nedicti , in terris adumbrata , seu vita,
virtutes, prodigia, gesta et cultus sancti
Benedicti , Augsbourg , 17 1 9, 6 vol. m-4 .
6° Isagoge et commentarius in univer-
sam sacrant Bibliam vulgatœ edifionis,
Sixti V et Clementis VIII pont, rom.,
auctoritate recognitam , Augsbourg ,
1729, 1735, 3 vol. in-8, et plusieurs au
très ouvrages sur la Bible. — Ehrard (Dom
Gaspard ) , bénédictin de la même con-
grégation en Bavière, a publié Diilcis
memoria in sancia evangelia , seu vila,
doctrina et mysteria Jesu-Christi, per
brevem commentarium in sancta evan-
gelia explicata, Augsbourg, 1719, 1 vol.
in-8. Il jouissait d'une grande réputation
de science et d'érudition. On ne connaît
ni le lieu ni la date de sa naissance , ni
l'époque de sa mort.
* EHRENHEIM ( N., baron d' ) ancien
président de la cbancellerie de Suède,
se retira des affaires après la chute de
Gustave - Adolphe. Pendant qu'il était
livré aux travaux de la diplomatie , il
s'occupait encore d'études scientifiques ;
mais lorsqu'il fut entièrement libre, il s'y
adonna exclusivement : on cite de lui un
ouvrage fort estimé , qui lui assigne un
rang très distingué parmi les savans de
la Suède ; il traite de la Physique géné-
rale et de la Météorologie. Mais ce qui
vaut encore mieux pour sa réputation,
c'est un trait de bienfaisance qui mérite
d'être connu. Un traité venait d'être
conclu entre l'Angleterre et la Suède ;
comme il avait coopéré à sa conclusion,
il devait recevoir, suivant l'usage, un
riche cadeau de l'Angleterre; il apprit
qu'une somme de mille livres sterling
allait être employée à l'achat de la boîte
qu'on lui destinait : Ehrenheim , quoique
absolument sans fortune, fit prier par le
ministre de Suède à Londres , M. Can-
ningdelui envoyer ceprésenten argent,
afin de l'employer au soulagement de la
province de Bohus dont les habitans
étaient en proie à une grande disette
de blé; le ministre anglais joignit au
montant du cadeau donné par le cabinet
de Londres , le prix de la tabatière que
EHR à'j
devait lui offrir à lui-même le gouverne-
ment suédois , afin de prendre aussi une
part à la bienfaisante action du baron
d'Ehrenheim. Ce diplomate généreux est
mort en 1828.
* EHRET ( George-Denis ), né dans le
margraviat de Bade vers 1710, mort eu
Angleterre vers 1770, s'est rendu célèbre
par son habileté à peindre les plantes. On
lui doit une suite de papillons et déplan-
tes mêlés ensemble, gravés par lui-même,
imprimés sous ce titre: Plantœ et papi-
lianes rariores depictœ , etc. , 17 48, in-
fol. Il a aussi peint les plantes les plus
rares de V Angleterre , que Trew fit gra-
ver et paraître par Décurie, grand in-folio,
1750 à 1773. C'était l'ouvrage le plus
magnifique qui eût encore paru , et le
plus soigné du côté des détails de la fruc-
tification. On doit encore à Ehret les fi-
gures de la Flore de la Jamaïque , de
VHortus cliffortianus , et de plusieurs
mémoires qui parurent dans les Transac-
tions de la société royale.
* EHRHART ( Balthasar ) , médecin
et botaniste allemand, n'est connu que
par le commerce A^ herbiers qu'il vendait
à un prix très bas et qu'il a répandus dans
toute l'Allemagne, et par différens ou-
vrages relatifs à la science qu'il cultivait.
Il a publié le catalogue de ses herbiers avec
l'indication des procédés qu'il employait
pour dessécher et conserver les plantes ;
ce qui a donné lieu à l'ouvrage intitulé :
Mautissa botanologiœ juvelis , Ulm ,
1 732 , in-8 ; augmenté et publié sous le
titre de Continuatio syllabi plantarum
quarum specimina sicca botanophilis of-
feruntur ., Memmengin , 1746, in-fol.
oii l'on trouve 36 plantes alpines assez
rares. Parmi les autres ouvrages qu'il a
publiés, on remarque sa thèse inaugurale
intitulée De Helimnitis suevicis, Leyde,
1724, in-4, et Augsbourg, 1727, avec
fig. 2" Un Mémoire inséré dans les Tra*^-^^
actions de la société royale de Londres
an 1739, contenant les plantes qu'il avait
rencontrées dans le Tyrol. 3° Vnelnstruc-
t,ion sur Vhistoire des plantes usuelles
1752, in-4, 4° Histoire économique des
plantes, classée suivant l'ordre des mois
de leur apparition , et leur lieu de nais-
:ï8 EHR
sauce. Cet ouvrage dont il a publié seu-
lement les 4 premiers -vol. , a été conti-
nué par Gmelin et forme 12 vol., 1G53 à
1761. 5° Un Mémoire sur la manière d'a-
gir du gui dans les Ephéméridcs des
curieux de la nature. ii° Un autre Mé-
moire dans VOEconomische Nachricht
contenant des éclaircissemens sur 78
plantes données par Ortliius comme nui-
sibles. 7° Une édition de VHortus sani-
tatis avec de nombreuses additions. Ce
savant botaniste est mort en 1756.
* EHRHARÏ ( Frédéric ) , botaniste ,
né en 1747 , à Holdarbane, { canton de
Berne ) , oîi son père était curé, mourut
en 1795. Il fut élève de Linnée. il a publié
différens herbiers recherchés pour leur
netteté et précision, 7 yo\. de fragmens
sur l'Histoire naturelle , etc. , in-8 , en
allemand , qui contiennent une grande
quantité d'excellentes notices eid^ obser-
vations, surtout pour la partie de la bo-
tanique, et des catalogues annuels des
plantes cultivées dans les jardins de Hcr-
renhauser dont la direction lui avait
été confiée par le gouvernement de Ha-
novre. On lui doit encore l'édition du
supplément du Système végétal de Lin-
né. Les Annales de botanique de M. Us-
leri tome 1 9 renferment des notices sur
sa vie. Thumberg a donné son nom à un
genre de la famille des graminées que
l'on connaît sous la dénomination d'Eli-
tarta.
* EHRMANN ( Frédéric-Louis ) , pro-
fesseur de physique , naquit en Alsace
vers 1 7 30 , et obtint une chaire dans l'u-
niversité de cette ville. Il inventa les
lampes à air inflammable , et a laissé les
ouvrages suivans : 1° La Description et
l^usage des lampes ( de son invention ),
rV82, in-8. Il a traduit cet ouvrage en
allemand. 2° Des Ballons et de l'art de
les faire , 1764, in-8; S" Mémoires de
Lavoisier ( traduits en allemand ), 17 97 ;
4° Essai d'un art de fusion à l'aide de
f^air et du feu , en allemand ( traduit en
^ j^^nçais par Dollard ) , 1787 , in-8 , fig.
L'auteur y décrit le procédé par lequel ,
çt" au moyen d'une lampe d'émailleur
çxc^téfi par le gaz oxygène, on fond les
iDé^V^x te» plus dors , ^ on br^e le di<v
EIC
mant. 5" Elémens de physique ; ce livre
est très utile , et contient une 7Vb/ic« sur
les principaux ouvrages relatifs à cette
science. Ehrmann est mort à Strasbourg,
en mai 1800, àl'àge d'environ 70 ans. —
Un autre Ehrmann ( Jean-Chrétien ) ,
médecin à Strasbourg , publia l'Histoire
des plantes dcl' yilsace,-p»rMa.Tp^i, 1742.
Cet ouvrage était resté inédit depuis 40
ans , n'ayant point été publié du vivant
de Mappi , mort en 1 702.
* EIGHNER ( Ernest ) , fameuï musi-
cien allemand, est connu comme composi-
teur et comme concertant : il fut l'un des
meilleurs bassons qui aient paru : il est
mort à Postdam en 1776. On a de lui un
grand nombre de symphonies, concerts ,
quatuor, trio et solo, goûtés pour leur
simplicité et la facilité qu'ils offrent aux
commençans ; ils sont pour divers instru-
mens : ses œuvres sont particulièrement
répandues en Allemagne, eu Hollande , et
en Angleterre.
* EICHHOF ( Cyprien) , est connu par
la publication d^ Itinéraires ou Guides des
voyageurs , qu'il fit paraître sous le titre
de Délites ; ses ouvrages sont accom-
pagnés de petites cartes dont la suite
forme un atlas complet ; les principaux
sont 1 ° Deliciœ Italiœ seu index viato-
rius ab urbe Borna ad omnes Italiœ civi-
tates, Ursel, 1604, iu-4. 2° Deliciarum
Germaniœ tam superioris quàm inferioris
index , indicans itinera ex Augustâ vin-'
delicorum ad omnes civitates, etc., in-4,
oblong. 3" Deliciœ Hispaniœ et index
viatorius , indicans itinera ab urbe To-
leto ad omnes in Hispaniâ civitates et
oppida, 1604, in-4, oblong. k° Liber in-
signium aliquot itincrum cum ex Au-
gustâ vindelicorum tum aliis Europœ ,
Asiœ et Africœ civitatibus , oppidiSque
maxime nonnuUis ad alias célèbres civi-
tates oppidaque , etc., 1606, in-4. Le
seul mérite de ces itinéraires est l'exacti-
tude. Eichhof vivait à la fin du 17* siècle
et au commencement du 18*.
* EICmiORN ( Jean-Conrad ) , en-
tonomologiste prussien , pasteur évangé-
lique à Dantzich, naquit en 1718. Toute
sa vie fut consacrée à l'étude des insectes
que l'on ne peut apeFcevoir à la simple
/
EIM
vue ; 11 fit un grand nombre d'obser\'a-
tions microscopiques dont la plupart ont
été consignées dans l'ouvrage allemand in-
titulé Des Animaux aquatiques de Dant-
iich et des environs , etc., 1775 et 1783,
Jd-4 , avec fig. et un supplément fait
pour répondre aux critiques de Fuessli.
Il est mort en 1790.
EICK ou Van-Eick (Hubert), peintre,
né en 1366 , à Maseick, dans la princi-
pauté de Liège , eut pour disciple son
frère Jean Eick, plus connu sous le nom
de Jean de Brurjes. Il fit divers tableaux
pour Philippe le Bon, duc de Bourgogne
qui lui donna des marques publiques de
son estime. H mourut en 1426. Voyez
Bruges.
* EIDOUS (Marc-Antoine), littérateur,
né à Marseille, a publié un grand nombre
de traductions ^ve^ne toutes au-dessous
du médiocre , à l'exception du Diction-
nuire universel de me'decine , de James,
qu'il a fait paraître avec Diderot et Tous-
saint, 1746, 6 vol. in-folio. Eidous se
donnait à peine le temps de transcrire
les ouvrages qu'il publiait : aussi ils por-
tent tous l'empreinte d'une rapidité tou-
jours funeste pour le bon goût. Il a tra-
duit en ouïT^V histoire naturelle de 10-
/•enor^uedeGremilla, 17 58, 3 vol. in-12;
la Théorie des sentimens moraux de
Smith, 17 74, 2 vol. in-12;rJ^gr/icaZ/«re
c<7m7>/è<e de Mortimer, 1765, 4 vol. in-12:
les Voyages en Asie de Bell d'Antermoni,
1766, 3 vol. in-12; l'histoire de la Cali-
fornie de Venegar, 1767, 3 vol. in-12.
M. Barbier qui a cité dans les anonymes
plusieurs des traductions d'Eidousdit que
V Histoire des principales découvertes
faites dans les arts, Lyon, 1767, in-12,
bien que désignée sur le titre comme tra-
duit de l'anglais est indiquée dans le pri-
vilège comme étant de la composition
d'Eidous. Il a aussi travaillé à l'Encyclo-
pédie.
EIMMART (George Christophe), pein-
tre, graveur, astronome, né à Ratisbonne
en 1658, s'établit à Nuremberg; ses ta-
lens lui firent donner la place de direc-
teur des peintres de cette ville , oii il
mourut en 1705. La peinture lui doit
des morceaux estimables, et l'astronomie
EIS ag
l'invention de quelques instrumens utiles.
Parmi ses œuvres on remarque une suite
de portraits de peintres, d'hommes c*élè*
bres, des tableaux d'histoire , des figures
de plantes , d'oiseaux et d'autres sujets
d'histoire naturelle. Il a consigné ses ob-
servations astronomiques et météorologi-
ques dans 50 vol. in-ïol. dont un seul a
été publié sous le titre de Iconographia
nova contemplationum de sole, in desola-
tis antiquorum philosophorum ruderibus
cortcej?/a, Nuremberg, 1071, in-fol. Eim-
mard a traduit en latin la description
d'une sphère armillaire, Altorf, 1695, in-4 .
EISEN (Charles), habile dessinateur,
mort k Bruxelles, le 4 juillet 17 78 , eût
pu mieux employer ses talens qu'à dessi-
ner des sujets de lubricité et de luxure ;
tels que les ^gr^re^ qui ornent, 1° les
Contes de la Fontaine, 1762, 2 vol. in-8;
2° les Métamorphoses d'Ovide,ilGl, 4 v.
in-4. Il a aussi fait les dessins des figures
de la Henriade, 2 vol. in-8.
EISENGREIN( Guillaume), chanoine
de Spire sa patrie , est auteur d'un ou-
vrage intitulé Catalogus testium verl-
tatis , publié en 1565, in-fol. C'est une
liste des écrivains ecclésiastiques qui ont
combattu les erreurs de leurs temps , et
par avance celles des siècles derniers.
Flaccus Illyricus a donné un catalogue
des défenseurs du calvinisme auquel il a
donné foit mal à propos le même litre.
(Cet écrivain est mort en 1570.)
EISENHART (Jean), jurisconsulte,
né à Erxleben, dans le Brandebourg, en
1643, fut professeur en droit et en morale
àHelmstad, dans le duché de Brunswick,
où il mourut en 1707, après avoir publié
\° Instit. juris naturalis et moralis. 2"
Commentatio de rcgali metalli fodina-
rumjure, etc. 3° De fide historicâ, Helm-
stad, 1702 : ouvrage qui prouve qu'il
avait plus de connaissance du droit que
des preuves de l'histoire.
EISENSCHMID (Jean-Gaspard), doc-
teur en médecine , naquit à Strasbourg
en 1 656. Dans un voyage qu'il fit à Paris,
il se lia avec.plusieurs savans, et parti-
culièrement avec Duvernay et Tourriefort.
Il fut associé à l'académie des Sciences au
rétablissement de cette société, et mourut
5o ELA
en ni2, à Strasbourg, où il s'était Axë
au retour de ses voyages. On a de lui
1" un Traité des poids, des mesures de
plusieurs nations , et de la valeur des
monnaies des anciens y Strasbourg, 1737.
2° Un Traite sur la figure de la terre ,
ellyptico-sphe'rdide. Il y soutient fort au
long l'opinion contraire à celle qui a pré-
valu depuis, sans êtrepeut-ôtre plus vraie.
Eisenschmid cultivait les mathématiques,
la géographie sans négliger la médecine.
On a encore de lui Carte de l'empire
d' Allemagne, en quatre grandes feuilles,
d'une grande exactitude.
* EKAMA ( Cornélius ) , professeur
d'astronomie mort le 24 février 1826 ,
a laissé quelques recherches historiques
sur les géomètres Frisons , et particuliè-
rement sur l'astronome Gemma Frisius.
ELA , roi d'Israël , fils de Baasa, suc-
céda à son père, l'an 930 avant J. C, et
la 2* année de son règne, il fut assassiné
dans un festin par Zamri, un de ses offi-
ciers. — Il y a eu du même nom un prince
Iduméen, successeur d'Olibama. — Un
autre, père de l'insolent Séméi, et quel-
ques autres moins connus.
ELAD, fils de Suahala , s'étant rendu
secrètement dans la ville de Geth avec
son frère pour la surprendre, fut décou-
vert par les habitans, qui les égorgèrent
tous deux.
' ELAGDINE (IVan-Perfilievilsch ) ,
conseiller privé , grand maître de la cour
de Catherine II et directeur de la musique
du théâtre de la cour, naquit en 1728.
Il acquit de son temps une assez grande
réputation par des Traductions qui sont
entièrement oubliées maintenant : parmi
les meilleures on cite V Impie , tragédie
allemande de Brave , St. - Pétersbourg ,
17 7 1 ; Aventures du Marquis de G ,
ibid , 1776, et le Misanthrope , Moscou ,
1 788 ; il avait aussi composé une Histoire
de Russie dont on disait beaucoup de
bien avant qu'elle ne parût ; elle ne fut
point publiée de son vivant ; ou en a im-
primé seulement le commencement après
sa mort, Moscou, 1803, et l'on n'a pas
été tenté d'en donner le reste. Il est mort
en 1796.
ELAM, fils de Sem, eut pour son par-
ELB
tage le pays qui était à l'orient du Tigre
et de l'Assyrie. Il fut père des peuples
connus sous le nom à'Èlamites ou Ela-
me'ens. Chodorlahomor, qui vainquit les
cinq petits rois de la Pentapole, et qui fut
défait par Abraham , était souverain de
ces peuples. La capitale du pays était
Elymaïde, oîi l'on voyait le fameux tem-
ple de Diane, qu'Antiochus voulut pil-
ler, et oîi il fut tué. L'Ecriture fait men-
tion de quelques autres personnages de
ce nom.
* ELBÉE (N... Gigot d' ) , général
vendéen, né à Dresde en 1752, d'une fa-
mille noble du Poitou. Son père, qui
avait épousé une Saxone, s'était fixé dans
ce pays et il y mourut. D'Elbée qui avait
passé une partie de sa jeunesse au service
de l'électeur de Saxe vint alors en France,
et entra dans un régiment de cavalerie
en qualité de lieutenant ; mais n'ayant
pu obtenir une compagnie , il quitta le
service et se retira dans sa terre de Beau-
préau dans le Poitou ( 1783). Au com-
mencement de la révolution , il suivit
l'exemple de beaucoup de gentilshommes,
quitta la France et se rendit à Coblentz;
mais il rentra dans son domicile peu de
temps après , pour ne pas éprouver les
peines portées par la loi contre les émi-
grés. Il ne prit d'abord aucune part aux
troubles de la Vendée ; mais les paysans
des environs de Beaupvéau ayant refusé
d'obéir aux lois sur le recrutement , et
s'étant soulevés , vinrent le prier de se
mettre à leur tête , et il ne crut pas de-
voir se refuser à cette marque de con-
fiance. Sa troupe fut bientôt jointe par
celles de MM. de Bonchamp, de Catheli-
neau , de Stofflet, de La Rochejaquclin.
Ces diflférens chefs eurent d'abord des
succès ; tout le pays se souleva en leur
faveur, et la guerre civile prit de ce mo-
ment un grand caractère. La troupe de
d'Elbée était nombreuse, et il exerçait sur
elle la plus grande influence. Il l'avait
formée à la manière de combattre qui
convenait le mieux à un pays coupé de
bois ; et quoiqu'il fût presque toujours
entouré de forces supérieures, il s'empara
des villes de Bressuire, Tissange , Chàtil-
lon et Angers. Il battit les troupes repu-
ËLS
bllcaines à Thôuars, à La Châtaigneraie,
à Vihers, à Saumur , à Châtenay, à Clis-
son et à Saint-Fulgent ; mais il avait été
repoussé de Nantes, et fut vaincu à Luçon
et au combat de Clioliet. Après avoir
échoué devant Nantes , il fut nommé
généralissime ; et cette nomination , ob-
tenue, dit-on, par de petites manœuvres,
avait indisposé diflcrens chefs, qui
croyaient y avoir plus de droit. Ployez
CiiARETTE. On reprocha aussi à d'Elbée
de n'avoir pas suivi les dispositions dont
on était convenu pour le plan d'attaque
générale; toutefois ce fut en qualité de
généralissime qu'il commanda à Luçon
et à Chollet; ces deux affaires furent mal-
heureuses pour les royalistes; dans la
dernière d'Elbée fut blessé grièvement.
Il fut transporté à Beaupréau , puis à
Noirmoutier : mais cette île ayant été
prise par les troupes républicaines , il
fut arrêté, traduit devant une commis-
sion militaire, condamné à mort, et exé-
cuté à l'âge de 42 ans. Il était si faible,
qu'on fut obligé de le porter au supplice
dans un fauteuil. Quelques écrivains lui
ont contesté les talens militaires : on
pourrait dire, tout au plus, qu'il n'avait
pas le talent de conduire une grande ar-
mée ; mais il avaittout ce qu'il faut pour
faire un excellent chef de parti. Il joi-
gnait, à une physionomie agréable et dis-
tinguée, une éloquence douce, persua-
sive, et il savait, suivant les circonstan-
ces, varier ses formes et ses tons. Il avait
par-dessus tout un courage à toute
épreuve, la confiance de ses soldats, mé-
ritée par une piété sincère; et l'on ne
peut disconvenir que, par ses nombreuses
victoires , il ne fut la véritable cause de
la grandeur momentanée du parti roya-
liste.
* EI.BÈNE, ou plutôt Delbene ( Al-
phonse d' ), évèque d'Alby, né à Lyon,
vers 1538, de Barlhélemi d'Elbène, pa-
trice de Florence, que les troubles qui
agitaient cette ville avaient forcé d'en
sortir , embrassa l'état ecclésiastique , et
s'y avança encore plus par son mérite que
par sa naissance. Il était docteur en droit,
et avait étudié sous Cujas. Aux connai.s-
sances qu'il avait acquises sous ce maître
ËLË ai
bablle, et a celles qui convenaient à son
état, il avait joint une profonde étude de
l'histoire. Le duc de Savoie le fit son his-
toriographe, et lui donna l'abbaye d'Hau-
te Combe, située dans ses états. Il attacha
même en sa faveur au titre d'abbé d'Haute-
Combe, celui de sénateur-né du sénat de
Savoie, et voulut que ce titre passât aux
abbés ses successeurs. Par la suite, d'El-
bène permuta avec Sylvestre de Saluées
l'abbaye d'Haute-Combe pour celle de
Mézières, diocèse de Châlons-sur-Saône.
Henri III le nomma à l'évêché d'.\lby.
D'Elbène aimait la poésie et l'avait culti-
vée dans sa jeunesse ; il était en corres-
pondance avec les beaux esprits de son
temps. Ronsard, alors le prince de la poé-
sie, lui avait dédié son Art poétique , et
Just-Lipse son Auctuarium veteriim in-
scriptioniim. Il était de l'académie flori-
montane d'Annecy. Il mourut le 8 février
1608, âgé de 70 ans. On a de lui : 1» Z?e
principntu Sabaudiœ et vera ducum
origine, aSnxoniœ priiicipibiis simulque
. rcgum Galliœ e stirpc Hiigonis Capeti
dcducta, liber primus , Haute-Combe,
1581, in-4, rare, et cité par Lenglet du
Fresnoy, t. 3, page 31 G de sa jMéthode
pour étudier l'histoire; 2" De gente et
fnmiliœ Hugonis Capeti origine, justoque
progressa ad dignitatem regiam, Lyon,
1595, et 1605, cité par le même auteur,
ibid., tom. 4, page 48 et 340; 3" De reg-
no Burgundiœ transjurnnœ et Arelatis
libri très, Lyon, 1602, in-4; 4" Tracta-
tus de gente et familin marchionum Go-
thiœ , qui postea comités sancti jEgidii
et Tolosates dicti sunt, L^on, 1592, 1607,
in-8. C'est la généalogie des comtes de
Toulouse. 5" De familiœ cistercianœ nec~
non Altœ-Combœ sancti Su/pitiiac Sta-
mediicœnobioriim origine; G° VAme'deïde,
poème historique. On trouve du même
quelques vers imprimés avec le Tombeau
d'Adrien Turnèbe, 1565, in-4. On lui at-
tribue des Lettres à d'Epernon; mais elles
ne sont pas de lui.
* EILBÈNE (Alphonse d'), neveu du pré-
cédent et son successeur sur le siège d'Al-
by, accusé d'avoir eu part aux troubles
de Languedoc en 1632, et d'être entré
dans la révolte du duc de Montmorency,
as
ÊLti
fut obligé «le sortir de France. Il revint
après la mort du cardinal de Richelieu ,
fut rétabli sur sou siège en 1645» et fait
conseiller d'état. Il mourut à Paris le
9 janvier 1651 à 71 ans, et fut enterré
dans l'églisfi du Temple,
* ELBÈNE (Alphonse d')^évêque d'Or-
léans et neveu de celui-ci, était le cin-
quième évèque de sa famille, y en ayant
eu un de Kîmes, deux d'Alby et un d'A-
gen. Alphonse d'Elbène fut nommé au
siège d'Orléans en 1646, sacré en 1647,
et At en 1648 son entrée solennelle dans
sa ville épiscopale. Il signala cette entrée
par la délivrance de 368 prisonniers. Elle
fut remarquable par un événement singu-
lier. Une i-ixe s'étant élevée pendant la
cérémonie , pour la préséance entre les
gens des seigneurs et barons obligés d'y
assister, le nouvel évêque descendit de sa
chaire épiscopale, puis, retroussant sa
chappe sur ses épaules, et tenant sa mi<-
tre d'une main, de l'autre il saisit au col-
let l'un des plus mutins, l'envoya en pri-
son, et rétablit ainsi le calme. En 16âl,
il assista à l'assemblée générale du clergé.
Dans un de ces synodes, il défendit la
lecture de V Apologie des casuistes ; et,
dans celui de 1664, il publia pour son
diocèse des Statuts synodaux , qui sont
regardés comme-un modèle en ce genre.
Il avait achevé à ses frais la construction
du palais épiscopal. Il mourut le 20 mai
1666.
ELBENE. Foyez Dblbenk (Benoit d').
ELBŒUF ou Elbeuf ( René de Lor-
raine, marquis d'), était le septième ûls
de Claude, duc de Guise, qui vint s'éta-
blir en France ; il fut la tige de la bran-
che desducsd'Elbœuf, et mourut eu 156G.
Charles II, son petit-fils, mort en 1667,
^vait épousé Catherine Henriette, fille de
Hmri IV et de Gabrielle d'Estrëes, qui
mourut en 1663. Ils eurent part l'un et
l'autre aux intrigues de cour sous le mi-
ttistère du cardinal de Richelieu. Leur
postérité masculine finit en leur petit-fils
Emmanuel-Maurice, duc d'Elbœuf, qui
aprè.s avoir servi l'empereur dans le
royaume de Naples, revint en France en
1719, et finit sa longue carrière en 176-3,
dans sa 86" année, sans postérité. Ou
lui doit la découverte de la ville à^HercU*
lanum. Le titre de duc d'Elbœuf est passé
à la branche d'Harcourt et d'Armagnac»
qui descendait d'un frèrç de Charles II.
ELÉAZAR, fils d'Aaron» et sou sucr
cesseur dans la dignité de grand-prêtre ,
l'an 1452 avant J. C, suivit Josué dans
la terre de Chanaan, et mourut après
12 ans de pontificat.
ELÉAZAR, fils d'Aod, frère d'Isaï, uu
des trois braves qui traversèrent avec im-
])étuosité le camp des ennemis du peuple
de Dieu , pour aller quérir au roi David
de l'eau de la citerne qui était proche la
porte de Bethléem. Une autrefois, les Is-
raélites saisis d'une frayeur subite, à la
vue de l'armée nombreuse des Philistins,
prirent lâchement la fuite , et abandon-
nèrent David. Eléazar seul arrêta la fu-
reur des ennemis , et en fit un si grand
carnage que son épée se trouva collée à
sa main, l'an 1047 avant J. C.
ELÉAZAR, fils d'Onias, et frère de Si-
mon le Juste, succéda à son frère dans la
souveraine sacrificature des Juifs. C'est
lui qui envoya 72 savans de la nation à
Ptolémée Philadelphe, roi d'Egypte, pour
traduire les livres ^aints d'hébreu en grec,
vers l'an 27 7 avant J. C. (zir»yes Abistée).
C'est la version qu'on nomme des Sep"
tante ^ et qui, suivant la lemarque des
Pères, a été pour les nations un moyen
précieux d'instruction et de préparation
à la doctrine de l'Evangile (quoiqu'il y
eût une version antérieure, mais moins
accréditée et moins répandue , dont Eu-
sèbe parle dans sa Préparation). Jésus-
Christ et les apôtres citent cette version
de préférence à l'hébreu, soit parcequ'elle
était d'un grand usage et plus générale-
ment connue, parmi les Juifs même, au
moins ceux qu'on appelait hellénistes ,
soit parce «fue le moment approchait ou
les nations qui ne savaient pas l'faébreii
allaient recueillir avec avidité l'instruc-
tion et les lumières de ces livres divins;
Un autre avantage inappréciable delà ver*
sion des Septante, c'est la détermination
des véritables leçons et du vrai sens, faite
dans un temps oii l'hébreu était une lan-
gue vivante et bien connue, où la tradi-
tion était dans toute sa force, oii le rcs-'
ELE
pect qu'on portait à ces divins oracles,
l'élude assidue qu'on en faisait , les in-
lerprélalions réfléchies et traditionnelles
des docteurs de la loi , mettaient ce dé-
pôt sacré à l'abri de la légèreté et de
la témérité des esprits. Encore aujour-
d'hui la version des Septante est la ter-
reur des hermeneutes hétérodoxes qui ,
par le moyen des points massorétiques ,
invention moderne et sans autorité ( roy.
Cappel et Masclef), et d'autres subti-
lités grammaticales, dénaturent les li-
vres saints, les dépouillent de tout ce
qu'ils ont de surnaturel et de divin, et
en font le jouet de l'imagination et du
caprice.
ELÉAZAR , vénérable vieillard de Jé-
rusalem , et un des principaux docteurs
de la loi, sous le règne d'Antiochus Epi-
phanes, roi de Syrie. Ce prince ayant
voulu lui faire manger de la chair de
porc, il aima mieux perdre la vie que de
transgresser la loi. Quelques gentils ou
juifs apostats de ses anciens amis, touchés
pour lui d'une fausse compassion, le sup-
plièrent de trouver bon qu'on lui appor-
tât des viandes dont il lui «tait permis de
manger, afin qu'on pût feindre qu'il avait
mangé des viandes du sacrifice , selon le
commandement du roi, et par ce moyen
le sauver de la mort ; mais Eléazar ne vou-
lut jamais y consentir. « Il est indigne de
» l'âge oii nous sommes, dit-il, d'user de
» cette fiction ; elle serait cause que plu-
u sieurs jeunes gens, s'imaginant qu'E-
» léazar, à l'âge de quatre-vingt-dix ans,
» aurait passé de la vie des juifs à celle
j» des païens, seraient eux-mêmes trom-
» pés par cette feinte , dont j'aurais usé
» pour conserver un petit reste de cette
» vie corruptible. Par là j'attirerais une
» tache honteuse sur moi, et l'exécration
» des hommes sur ma vieillesse. Car en-
» core que j'échappasse présentement aux
» supplices des hommes , je ne pourrais
» néanmoins fuir la main du Tout-Puis-
» sant , ni pendant ma vie , ni après ma
j) mort. En mourant courageusement, je
» paraîtrai digne de la vieillesse oîi je
» suis, et je laisserai aux jeunes gens un
» exemple de fermeté , en souffrant avec
» constance et avec joie une mort bouo-
V.
ELE
33
» rable pour le sacré culte de nos lois
M très saintes. »
ELÉAZAR, le dernier des cinq fils de
Mathathias , et frère des Machabées , les
seconda dans les combats livrés pour Ja
défense de leur religion. Dans la bataille
que Judas Machabée livra contre l'armée
d'Antiochus Eupator , il se fit jour à tra-
vers les ennemis pour tuer un éléphant ,
qu'il crut être celui du roi. Il se glissa
sous le ventre de l'animal , et le perça à
coups d'épée ; mais il fut accablé sous
son poids et reçut la mort en la lui don-
nant. •
ELÉAZAR, ma|j^ien célèbre sous
l'empire de Vespasien , qui , par le moyen
d'une herbe enfermée dans un anneau ,
délivrait les possédés , en leur mettant
cet anneau sous le nez. Il commandait
au démon de renverser une cruche plein
d'eau et le démon obéissait. C'est l'his-
torien Josèphe qui rapporte ces particu-
larités ; mais on sait quelle est la crédulité
de cet historien, à l'égard des faits ou
faux ou très incertains , tandis qu'il ré-
pand des doutes sur les prodiges les
mieux constatés des livres saints. Du
reste , si Eléazar était réellement un ma-
gicien , les jeux qu'il exerçait de concert
avec le démon n'ont rien d'incroyable.
Voyez Le Brun , Delrio, etc.
EI..ÉAZAR, capitaine juif, se jeta
dans le château de Macheron , et le dé-
fendit très vigoureusement après le siège
de Jérusalem. Cette place n'aurait pas
été prise si aisément , sans le malheur
qui arriva à Eléazar. Il s'était arrêté au
pied des murailles , comme pour braver
les Romains, quand un Egyptien l'enleva
adroitement et le porta au camp. Le gé-
néral , après l'avoir fait battre de verges,
fit élever une croix comme pour le cru-
cifier. Les assiégés avaient conçu pour
lui une si haute estime, qu'ils aimèrent
mieux rendre la place , que de voir périr
un homme si digne de vivre par son cou-
rage et son zèle patriotique. Flave Josè-
phe , Hist. liv. 7 , ch. 25.
ELÉAZAR , autre officier juif, voyant
la ville de Masséda , dans laquelle il s'é-
tait jeté , réduite aux abois , persuada à
ses compagnons de se taer eux-mêmes ,
3
34 ELE
plutôt que de tomber entre les maitts des
Romains. Ils le crurent, cl s'égorgèrent
les uns les autres. Flave Josèplie , Hist.
liv. 7 , chap. 35.
ELECTE, fut une des premières
femmes qui se convertirent à Jcsus-Christ.
C'est celle à qui l'apôtre saint Jean écri-
vit , pour la conjurer de s'éloigner de la
compagnie des hérétiques Basil idc et
Cerinlhe.
ELÉONORE DE CASTILLE, reine
de Navarre, fille de Henri II, dit le Ma-
gnifique , roi de Castille , fut mariée en
137 5 à Charles III, fit le JNoble , roi de
Navarre. S'élant brouillée avec son
époux , elle se retira en Caslille, oii elle
excita quelques séditions contre le roi
Henri 111 son neveu. Ce prince fut con-
traint de l'assiéger dans le château de
Roa , et la renvoya au roi Charles , son
mari, qui la reçut avec beaucoup de gé-
nérosité et en eut huit enfans. Eléonore
mourut hPampelune, en 141G, avec la
réputation d'une femme d'esprit, mais
d'un caractère inquiet.
ELÉONORE D'AUTRICHE, reine
de Portugal et de France , était fille de
Philippe I et de Jeanne de Castille, et
sœur des deux empereurs Charles-Quint
et Ferdinand I. Elle naquit à Louvaiu ,
en 1498 , et épousa en 1519 Emmanuel ,
roi de Portugal. Après la mort de ce
prince, elle épousa en 1530 François I,
qui avait perdu sa première femme en
1524. Sa bonté naturelle, .ses grâces lui
gagnèrent pendant quelque temps le
cœur de son époux , et elle ménagea une
entrevue entre lui efCharles-Quint pour
terminer leurs divisions. Mais les galan-
teries de François lui donnèrent bientôt
d'autres conseillères. Eléonore vivait
dans la retraite au milieu de la cour, ne
s'occupant que des exercices de piété.
Après la mort du roi, elle se retira d'a-
bord aux Pays-Bas, et ensuite en Espagne,
où elle mourut à Talavéra , en 1 558 ,
sans avoir donné d'enfans à François I.
( Hubert Thomas a donné de très grands
détails sur cette princesse dans les Annales
de vUn Frcdcrici II , Palalini. )
ELÉONORE, duchesse de G uienne,
succéda à son père Guillaume IX, en
ELE
1138 , à l'àgc de 15 ans, dans ce beau
duché qui comprenait alors la Gascogne ,
la Saintonge et le comté de Poitou. Elle
épousa la même année Louis VII, roi de
France. Ce monarque raccourcit ses che-
veux et se fit raser la barbe , sur les re-
présentations du célèbre Pierre Lom-
bard , qui lui dit , d'après saint Paul ,
qu'il n'était pas séant qu'un homme s'a-
musât à nourrir avec soin une longue
chevelure. Lombard ne faisait peut-être
pas attention que la réflexion de l'apôtre
était relative au costume de son temps
où les longues chevelures distinguaient
les femmes des hommes. Eléonore , vive,
légère et badine , railla le roi sur ses
cheveux courts et son menton rasé. Une
femme qui commence à trouver son mari
ridicule, ne tarde guère à le trouver
odieux , surtout si elle a quelque pen-
chant à la galanterie. Louis ayant mené
son épouse à la Terre-Sainte , elle se dé-
dommagea des ennuis que lui causait ce
long voyage a^vec le prince d'Antioche ,
et un jeune turc , nommé Saladiu. Le
roi aurait dû ignorer ces affronts , ou y
remédier tout* de suite. A son retour en
France, il lui en fit des reproches très
piquans. Eléonore y répondit avec beau-
coup de hauteur , et finit par lui proposer
le divorce. Leurs querelles s'aigrirent de
plus en plus; et enfin ils firent casser
leur mariage, sous prétexte de parenté,
en 1152. Eléonore , dégagée de ses pre-
miers liens , en contracta de seconds six
semaines après avec Henri H, duc de
Normandie, depuis roi d'Angleterre, à
qui elle porta en., dot le Poitou et la
Guienne. De là vinrent ces guerres qui
ravagèrent la France pendant 300 ans.
Eléonore eut 4 fils et une fille de son
nouveau mariage. Dès l'année llG2,ellc
céda la Guienne à Richard , son second
fils , qui en rendit hommage au roi de
France. Elle mourut en 1204 , avec une
réputation d'esprit et de coquetterie.
Larrey publia une Histoire romanesque de
celte princesse, à Rotterdam, en 1692,
in-12.
ELÉONORE DE GONZAGUE. Toy.
GONZACUK.
ELEONORE DE BAVIÈRE NEU-
ELE
BOURG. Voyez la fin de l'article LÉo-
POLn, empereîir.
ELEUTIiÈRE (Saint), natif de Nico-
polis, d'abord diacre du pape Anicet, fut
ordonné prêtre, et ensuite élu pape après
la mort de Soter, l'an 177. Il combattit
avec beaucoup de zèle les erreurs des va-
lentiniens, pendant son pontificat. Les
choses qui rendent célèbre ce pontificat ,
sont la mort glorieuse des martyrs de
Lyon , et l'ambassade qu'il reçut de Lu-
cius, roi de la Grande-Bretagne, pour de-
mander un missionnaire qui lui enseignât
la religion chrétienne. Saint Eleuthère
mourut en 193, après avoir gouverné l'E-
glise pendant plus de 16 ans.
ELEUTHÈRE (Saint), célèbre évêque
de Tournay, naquit en cette ville de pa-
ïens chrétiens. Sa famille avait été con-
vertie par saint Piat, 1 50 ans auparavant.
Depuis la mort de leur saint apôtre, les
chrétiens de Tournay avaient beaucoup
dégénéré et leur foi s'éteignait de jour
en jour par le commerce des païens , et
les désordres des rois de France , encore
idolâtres, qui y faisaient alors leur rési-
dence. Tel était l'état de l'église de cette
ville , lorsque saint Eleuthère en fut fait
évêque. Il fut sacré en 486, dix ans avant
le baptême de Clovis. Il arracha un grand
nombre de français aux superstitions du
paganisme, et défendit victorieusement
le mystère de l'incarnation, attaqué par
les hérétiques. Son zèle à maintenir le
dépôt de la foi, lui coûta la vie. Des scé-
lérats obstinés dans l'erreur lui portèrent
à la tête un coup dont il mourut le 1*="^
juillet 532. On trouve dans la Biblio-
thèque des Pères plusieurs sermons at-
tribués à ce saint évêque; mais il n'est
pas certain qu'ils soient de lui, si l'on en
excepte trois : l'un sur l'Incarnation,
l'autre sur la Naissance de Jésus-Christ ,
et le troisième sur l'Annonciation. Sa vie
a été écrite dans le 9*' siècle, par consé-
quent long-temps après la mort de saint
Eleuthère. L'auteur se trompe en le fai-
sant contemporain de saint Médard, et en
plaçant sa naissance sous le règne de Dio-
clétien. Un auteur postérieur de quelques
années donna plus d'étendue à cette vie
et y ajouta l'histoire de la translation des
ELI 35
reliques du saint, faite en 897. Enfin un
troisième auteur y a inséré depuis l'his-
toire de ses miracles et de la translation
de ses i-eliques , qui se fit à Tournay en
1164.
ELEUTHÈRE, exarque d'Italie pour
l'empereur Héraclius , ne fut pas plus tôt
arrivé à Ravenne, qu'il y fit le procès aux
meurtriers de Jean son prédécesseur. Il
se rendit ensuite à Naples , où ayant as-
siégé Jean Conopsin, qui lui avait fermé les
portes, il le contraignit de se rendre à dis-
crétion , et le fit mourir ; mais Eleuthère,
après avoir puni les révoltés, tomba lui-
même dans la rébellion. L'empire était
agité au dedans et au dehors. Il profita
de ces circonstances, pour se rendre maî-
tre de ce qui appartenait à l'empereur
dans l'Italie. Après la mort du pape Dieu-
donné en 617, il cïut que le saint Siège
serait vacant long-temps , et que tandis
que le peuple serait occupé à élire un
nouveau pontife , il lui serait aisé de se
saisir de la ville. Dans celte vue, il traita
son armée encore plus favorablement qu'il
n'avait fait , lui fit distribuer beaucoup
d'argent, et lui promit de grands avan-
tages ; mais les soldats et les officiers ,
détestant sa rébellion, se jetèrent sur
lui, l'assommèrent et lui coupèrent la
tête qu'ils envoyèrent à Héraclius vers la
fin de décembre 6 1 7 -
ELEUTHÈRE (Augustin), luthérien
allemand , dont on a un petit traité sin-
gulier et devenu rare : De arbore scien-
tice boni et mali, Mulhausen, 1560, in-8.
* ELGER (Ottomar), peintre, né à Got-
tembourg en 1632, excellait à peindre les
fleurs et les fruits. Appelé à la cour de
Berlin, il eut la qualité de premier pein-
tre de l'électeur Frédéric-Guillaume , et
fut comblé de ses bienfaits. Ses tableaux
sont très recherchés en Allemagne.
ELIAR, le troisième de ces vaillaiis
hommes qui se joignirent à David quand
il fuyait la persécution de Saiil. Il rendit
à ce prince afiligé des services très con-
sidérables dans toutes ses guerres.
ELIACIM, grand-prêtre des Juifs sous
le roi Manassès. Ce prince étant devenu
un modèle de pénitence depuis sa prison,
ne s'appliquait qu'à réparer les maux
36 ELI
qu'il avait faits à la religion et à l'état ; et
pour cela il avait rais toute sa confiance
dans Eliacim , et ne faisait rien sans son
conseil. Celui-ci se trouvait ainsi chef de
la religion, et ministre d'état. Il est quel-
quefois nommé Joakim -. plusieurs savans
croient qu'il est auteur du livre de Ju-
dith. — 11 y avait encore de ce nom un
sacrificateur qui revint de Babjione avec
Zorobabel ; un fils d'Abiud, parent de Jé-
sus-Christ selon la chair. <
ELIACIM, roi de Juda. Voyez Joa-
CHIM.
*ELIÇAGARAY (Dominique), ecclé-
siastique, membre du conseil royal de
l'instruction publique, naquit vers 17C0
dans le diocèse de Bayonne. Il embrassa
presque en nicrae temps la carrière de
l'enseignement et celle de l'église , et fut
de bonne heure professeur de philosophie
à Toulouse ; plus tard il devint officiai de la
Basse-Navarre. En 1790 il refusa le ser-
ment que la révolution avait imposée
aux ecclésiastiques, passa en Espagne et
revint en France sous le Directoire. Ce
fut à peu près à cette époque qu'il fit pa-
raître une brochure en faveur des droits
de l'Eglise. Cet écrit lui valut l'estime de
l'abbé Maury qui chercha à se l'attacher, et
lui envoya , lorsqu'il fut évêque de 3ion-
tefiascone , une nomination de grand-vi-
caire. Lorsque l'abbé Maury devint car-
dinal et fut nommé archevêque de Paris ,
il fit les mêmes offres à l'abbé Eliragaray,
qui les refusa. Successivement nommé
proviseur du lycée de Pau , professeur
de philosophie , doyen de la faculté des
lettres, recteur de l'académie, il se fit
remarquer par la bonté de son enseigne-
ment et par la sage administration des
établissemens qui lui étaient confiés. Pen-
dant les Cent-jours , il accompagna la
duchesse d'Angoulême à Londres en qua-
lité d'aumônier. En 1816, il fut appelé
au conseil royal de l'instruction publique,
place dans laquelle il a fait preuve de
son zèle accoutumé pour les intérêts de
l'Eglise. Chargé par M. de Corbière d'in-
specter les établissemens de l'université
dans le midi de la France , il était à Mar-
seille lorsque le journal de cette ville jeta
sur lui le ridicule le plus scandaleux en
ELI
publiant un discours qu'il aurait adressé
aux maîtres du collège. L'abbé Eliraga-
ray fut rappelé à Paris , oii dès lors sa
santé s'est altérée sensiblement. Il est
mort le 22 décembre 1822, emportant
dans la tombe la réputation d'un homme
de bien.
ELICHMAN (Jean), Danois, selon
quelques-uns, et, selon d'autres, Silésien,
pratiqua la médecine à Leyde, et mourut
en 1639. Il était savant dans les langues
orientales, et nous a laissé des remarques
sur la langue perse , qui ont servi à Louis
de Dieu pour composer sa grammaire
perse. Il prétend que la langue allemande
a une origine commune avec la langue
perse. On a encore île lui \° De usu lin-
guœ arable ce in medicina, Icnn , 1636.
2° De termine vitœ sccundum mentem
Orientdlium, Leyde, 1639, in-4. Foyez
Ramus, Paneg. Ling. Oriental, page 12.
EUE, prophète d'Israël, originaire de
Thesbé, vint à la cour du roi Achab, l'an
912 avant J. C. Il annonça a ce prince
impie les menaces du Seigneur, et lui
prédit le fléau de la sécheresse et de la
famine. Dieu lui ayant ordonné de se ca-
cher, il se retira dans un- désert, où des
corbeaux lui apportaient sa nourriture.
Il passa de cette solitude à Sarepta , ville
des Sidoniens, y multiplia l'huile de la
veuve qui le reçut. Achab rendait à l'i-
dole de Baal un culte sacrilège. Le pro-
phète vint en sa présence pour le lui re-
procher. Il assembla le peuple, donna le
défi aux prêtres de Baal ; et sa victime
ayant été seule consumée par le feu tom-
bé du ciel, il les fit mettre à mort. Me-
nacé par Jézabel, femme d'Achab, irritée
du châtiment des faux prophètes, il s'en-
fuit dans le désert : un ange l'y nourrit
miraculeusement. Il se retira ensuite à
Horeb, où Dieu lui apparut, et lui or-
donna d'aller sacrer Hazaël roi de Syrie ,
et Jéhu roi d'Israël. Les miracles d'Elie
n'avaient point changé Achab. Le pro-
phète vint encore le trouver pour lui re-
procher le meurtre de Naboth, qu'il avait
fait mourir après s'être emparé de sa vi-
gne. Il prédit peu de temps après à Ocho-
sias, qu'il mourrait de la chute qu'il avait
eue , et fit tomber le feu du ciel sur les
ÊLI
envoyés de ce prince. Le ciel l'enviait à
la terre ; il fut enlevé par un chariot de
feu vers l'an 895 avant J. C. Elisée son
disciple reçut son esprit et son manteau.
On fait Ja fête de l'enlèvement d'Elie ,
dans l'église grecque. On croit qu'il fut
transporté, non dans le séjour de la divi-
nité, mais dans quelque lieu au dessus de
la terre, ou sur la terre même, mais écar-
té et inconnu. ISous disons on croit ; car
dans des questions aussi délicates, il n'est
pas permis de décider , et de vouloir pé-
nétrer ce que Dieu s'est plu à nous ca-
cher ; mais comme l'Ecriture nous ap-
prend qu'Elie reparaîtra sur la terre avant
le dernier avènement du fils de Dieu , il
est naturel de croire qu'il n'est pas mort,
et que la mission qui lui reste à remplir,
est celle d'un homme voyageur, qui n'est
pas arrivé encore au ternie de la félicité.
— On sait que les carmes ont long-temps
regardé Elie comme leur fondateur. Foy.
Alrert(S.), patriarche de Jérusalem, et
Papebroch.
ELIE ou Elias I.evita , rabbin du IG*
siècle, natif d'Allemagne, passa la plus
grande partie de sa vie à Rome et à Ve-
nise , oii il enseigna la langue hébraïque
à plusieurs .savans de ces deux villes et
même à quelques cardinaux. C'est le cri-
tique le plus éclairé que les juils moder-
nes, presque tous superstitieux, aient eu.
Il a rejeté , comme des fables ridicules ,
la plupart de leurs traditions. On lui doit
t" Lcxicon chaldaicum , Isne , 1541,
in-fol. 2" TradUio doctrince , en hébreu,
Venise, 1538 , in-4 ; avec la version de
Munster, Bâle, 1539, in-8. 3° Collcctio
locorum, in quibus Chaldceus paraphras-
tes intcvjecit nomcn Messiœ Christi,
latine versa a Genebrando, Paris, 1752,
in-8. 4° Plusieurs Grammaires hébraï-
ques , in-8 , nécessaires à ceux qui veu-
lent approfondir les difficultés de cette
langue. 5° Nomenclatura hebraica, Tsnc,
1 542 , in-4. Idem, en hébreu et en latin,
par Drusius, Francker, 1681 , in-8.
ELIE DE BEAUMOJNT. Foyes Beau-
mont.
ELIEN , Claudiiis uElianus , rhéteur
et philosophe , vit le jour à Prenesle ,
aujourd'hui Palcstrine. Quoique né en
ELI
37
Italie, et n'en étant presque jamais sorti,
il fit de si grands progrès dans la langue
grecque , qu'il ne le cédait pas aux écri-
vains athéniens pour la pureté du lan-
gage. Il enseigna d'abord la rhétorique à
Rome ; mais dégoûté bientôt de cette
profession, il se mit à composer plusieurs
ouvrages. Ceux que nous avons de lui
sont, 1° quatorze livres intitulés: Ilisio-
riœ varice , qui ne sont pas venues en-
tières jusqu'à notre siècle. La meilleure
édition est celle qu'Abraham Gronovius
publia à Leydeen 17 31, 2 vol. in-4, avec
de savans commentaires. La varic'tc de
ces /u,yto/re^ est effectivement fort grande.
On y apprend des choses tout-à-fait iu-
cfcyables , quelquefois plaisantes , par
l'excès d'absurdité , comme lorsqu'on voit
les cochons devenir les fondateurs de l'a-
griculture ; car ce sont eux, suivant Elien,
qui nous ont appris le labourage. « Moïse,
» dit un auteur qui a sagement raisonné
)> là-dessus, nous en découvre une plus no-
» ble origine, lorsqu'il nous dit (Ge«. ///,
» 'f. 23) , que Dieu lui-même en imposa
3> la loi. Il faut convenir, ajoute-t-il, que
M les philosophes de tous les temps nous
i> ont appris cfl'ectivement d'étranges
w choses ; mais ce qui est particulière-
)) ment remarquable , c'est la prédilec-
» tion qu'ils ont toujours eue pour les
« cochons. Tandis qu'Elien nous les donne
» pour les fondateurs de l 'a gi-i culture ,
» Pyrrhon en fait le modèle des sages »
( voyez son article ). « Que dire de la
» plus nombreuse et de la plus fameuse
» secte philosophique, dont les mem-
3j bres s'efforçaient avec tant d'ardeur
■» et de succès d'être Èpicuri de greg c
» porcus. » 2° Une Histoire des ani-
maux, en 17 livres, Londres, 1744,
2 vol. in-4. L'auteur mêle à quelques
observations curieuses et vraies, plusieurs
autres triviales ou fausses. Il est aussi
menteur que Pline; mais Pline avait une
imagination qui embellissait les fables ,
et les lui fait pardonner. Ces deux ou-
vrages sont certainement d'Elien. On y
voit le même.génie dans l'un et dans l'au-
tre, et lamême varictéde lecture. Elien,
selon l'usage des philosophes , débitait
de très belles maximes ; il peignait la cour
38 ELI
tics pfinccs comme le s<?îour de la cor-
ruplion et l'écueil de là sagesse ; mais
peut-être eîit-il , comme tant d'autres ,
changé d'opinion , si on l'y avait invite
et accueilli. Ce qu'il y a de certain, c'est
qu'il n'était pas indiflcrcnt sur ce qui s'y
passait. Il publia un livre contre JIc'Uo-
gabalc, dans lequel il se déchaînait vive-
ment contre la conduite insensée de ce
prince, .sans le nommer. Elien florissait
vers l'an 222 de J. C. Il était, selon Sui-
das , grand-prètre d'une divinité dont
nous ignorons le nom. Il mourut âgé
d'environ GO ans , sans avoir été marié.
On a publié à Paris en 1772 , in-8 , une
bonne traduction française de ses His-
toires diverses, avec des notes utiles gpr
M. Dacier. On lui a attribué un Traité
sur la Tactique des Grecs, publié à Am-
sterdam, 1759, in-8; mais cet ouvrage
qui est effectivement ancien, parait ap-
partenir à un autre Elien.
ELIEZER, originaire de la ville de
Damas, était serviteur d'Abraham. Ce
patriarche le prit tellement en affection ,
qu'il lui donna l'intendance de toute sa
maison ; il le destinait même à être son
héritier , avant la naissance d'Isaac. Ce
fut lui qu'Abraham envoya en Mésopota-
mie chercher une femme pour son fils.
ELIEZER, rabbin, que les juifs croient
Être ancien, et font remonter jusqu'au
temps de J. C. ; mais qui selon le Père
Morin, n'est que du 7® ou 8" siècle. On a
de lui un livre intitulé Les Chapitres, ou
Histoire sacrée , que Vorslius a traduits
en latin, avec des notes iG44 , in-4. Il
est fameux parmi les hébraïsans. Cepen-
dant ses Chapitres sont remplis de fa-
bles grossières : il est dit , par exemple ,
au chap. 6, que le soleil et la lune
ont été créés dans la même forme et la
même splendeur ; mais que s'étant que-
rellés sur leur excellence , le soleil l'em-
porta , en devint plus grand et plus bril-
lant, etc.
ELIEZER , fils de Bariza , aga des ja-
nissaires , se battit en duel contre Bite-
zès, hongrois, dans le temps qu'Amurat,
empereur des Turcs, marcha contre Jean
Huniade en 1448. Ils sortirent tous deux
du combat sans se faire aucun mal, et
ELI
chacun Bc retira vers les siens. Elië^er
voulant faire connaître à l'empereur ce
qui l'avait excité à combattre si vaillam-
ment, lui rapporta l'exemple d'un lièvre
contre lequel il avait autrefois, tiré jus-
qu'à 40 flèches sans l'épouvanter, et qui
ne s'était enfui qu'au dernier coup. Il
ajouta que de là il avait conclu qu'il y
avait une destinée qui présidait à la vie ;
et que, fortifié par cette pensée, il n'a-
vait point fait difficulté de s'exposer au
combat contre un ennemi qui le surpas-
sait en âge et en force.
ELIjVAND ou Hklinand, moine cis-
tercien de l'abbaye de Froidmond, sous le
règne de Philippe-Auguste , est auteur
d'une plate chronique en 48 livres. Il n'est
pas vrai qu'il ne nous en reste que 4.
Cette chronique est en entier à l'abbaye
de Froidmond. Ainsi l'auteur du Diction^
naire critique , en 6 vol. , .s'est trompe.
Il aurait dû dire qu'on n'en a imprimé
que quatre, qui renferment les événe-
mens principaux depuisl'an 934 jusqu'en
i 200. Outre cette maussade compilation,
on a de lui de mauvais vers français, et
déplus mauvais sermons. Il était de Pron-
le-Roi en Beauvoisis. Il mourut vers l'an
1227.
*ÉLIO ( François-Xavier ), général
espagnol , naquit dans la Vieille-Castile
vers 1770, entra très jeune au sei"vice
militaire, fit ses premières campagnes
dans la guerre contre la république fran-
çaise ( 1 7 95 à 1 7 96 ), se distingua ensuite
dans la guerre contre Napoléon (de 1 809
à 1 8 1 3 ), et y obtint le grade de lieute-
nant-général. Il y avait déjà quelques
années que l'esprit de révolte s'était ma-
nifesté dans les deux Amériques, lorsque
Elio fut nommé capitaine- général des
provinces de Pdo de la Plata. A peine ar-
rivé dans sa résidence, en 1 810 , il eut à
combattre Linières, Artigas, et autres
chefs d'indépendans. Il fut assiégé dans
Monte-Vidéo par ce dernier , puis jiar le
général Bondo , qui avait récemment
servi dans la Péninsule en qualité de ca-
pitaine d'infanterie. Elio , n'étant pas eu
état de leur résister, demanda du secours
à la cour de Portugal, alors établie dans
le Brésil. Il obtint quatre mille hommes
EU
par la médiation «le la princesse Cliar-
iotle , sœur de Ferdinand VII , roi d'Es-
pagne , et femme du prince de Brésil ,
depuis Jean II. A l'approche des Portu-
gais , commandés par le général Souza ,
les indépendans acceptèrent les condi-
tions de paix que leur avait déjà offertes
le général Elio ; mais ce traité, conclu
en novembre 1811 , fut rompu onze mois
après par les insurgés , qui vinrent de
nouveau assiéger Monte- Vidéo. Sur ces
entrefaites, le général Vigodet remplaça
dans son commandement Elio , qui , re-
tourné en Espagne, continua de servir
contre les Français jusqu'à la restaura-
tion de Fertlinand VII. Le général Elio
fut un de ceux qui se déclarèrent contre
les Cortès, établies pendant la captivité de
Ferdinand à Valence. Elles furent abolies
pour faire place à l'ancien gouverne-
ment , et Elio fut nomme capitaine gé-
néral du royaume de Valence. Cepen-
dant les partisans des cortès tramaient
leurs complots dans le secret : il en éclata
un à Valence, dirigé parle colonel Vidal ,
et auquel prirent part quelques militai-
res. On se battit dans la ville, le sang
coula , et le général Elio fut contraint de
se retirer dans la citadelle jusqu'à ce qu'il
lui arrivât des renforts. Après avoir re-
pousse les indépendans , il fit mettre en
jugement le colonel Vidal , le fils d'un
banquier appelé Bertram de Lys, avec
onze de leurs complices , qui tous furent
mis à mort le même jour, 21 janvier
1813. Cette exécution avait été précédée
d'une proclamation du général Elio aux
habitans de Valence et aux soldats, pour
leur rappeler la fidélité qu'ils devaient
au roi , pour les prémunir contre les sug-
gestions des'amis des cortès , et les invi-
ter à le seconder dans les recherches
qu'il allait faire d'autres rebelles ou chefs
du parti constitutionnel. Il crut prudent
de faire arrêter plusieurs gens suspects ;
cette mesure , que les circonstances ren-
daient nécessaire, mécontenta plusieurs
familles du pays. Un an à peu près s'é-
tait écoulé , lorsque éclata la conjuration
de Quiroga ; elle entraîna un grand nom-
bre de militaires, et les Cortès furent de
nouveau proclamées à Cadix , au com-
ELI 39
mencement de mai 1 820. A l'imitation
de quelques autres provinces, celle de
Valence parut y adhérer , d'autant plus
que le roi, pour éviier une guerre civile ,
venait de prêter serment à la constitu-
tion. Le général Elio, par les mêmes
motifs , se porta à l'hôtel-de-ville , con-
voqua le corps municipal , et se dispo-
sait à donner son adhésion au nouvel or-
dre de choses, lorsque le peuple mutiné,
ne voulant point recevoir la constitution
par l'intermédiaire d'Elio , choisit pour
capitaine-général, jusqu'à nouvel ordre
du roi, le marquis d'Almodovar, qui
parvint à apaiser le tumulte , et sauva
la vie à Elio, menacé par la populace.
Il fut néanmoins conduit sous une es-
corte à la citadelle ; pour calmer le peu-
ple, on commença son procès, comme
accusé de la mort de Vidal et de Lys. Ce
procès traînait en longueur ; on avait
même oublié le prisonnier , dont on ne
se rappela que le 30 mai 1822 , à l'occa-
d%ie révolte parmi les artilleurs de la
citadelle, en faveur du gouvernement
absolu. Le général Elio fut alors accusé,
peut-être injustement, d'être l'auteur de
cette sédition. Les haines se réveillèrent,
on viola les formalités de son procès , et
un conseil de guerre devait le juger. Les
officiers généraux de l'armée active s'y
étant refusés, l'on choisit ce conseil parmi
la milice constitutionnelle, ou garde na-
tionale de Valence , qui le condamna , à
l'unanimité , au supplice du garrote
( strangulation ) ( 1 ). Le général Elio en-
treprit lui-même sa défense, entendit
son arrêt avec courage, et les trois jours
qu'on accorde en Espagne, aux con-
damnés pour se préparer à la mort , fu-
rent employés par Elio à remplir tous les
devoirs d'un chrétien. Il monta à l'écha-
faud avec le même courage et les mêmes
scntimens; il fut exécuté le 3 septembre
1822. Lors de la guerre des Français con-
tre les constitutionnels espagnols , une
régence ayant été formée dans la Pénin-
(1) Le garolte est une e«péce de carcan appujré sur deux
fers saillans et placés horizonlalement dans un pieu qui
s'élète sur lecbafaud. On y adapte le cou du palient , et
Vexécufcur des hautes œuvres , au moyen d'un tourniquet,
serre fortement le carcan , dont la prestiou TÏolenle Ole la
rie eu lUeiui d'uue stcoudc.
4o ELI
suie , on rendit tic grands honneurs à la
mémoire d'Elio. Quand Ferdinand VII fut
délivré par les armées françaises des mains
des cortès fugitives ( 1 ) , il confirma ces
honneurs par un décret solennel expédié
le 20 novembre 1823, dans lequel ce
monarque conférait au Als aîné d'Elio le
litre de marquis de la Fidélité. Il ajouta
en outre à sesarmesles initiales F. L. H.,
des mots Fidélité, Loyauté , Honneur ,
et conservait la solde de général à la
veuve d'Elio et à ses enfans. Non con-
tent de cet acte de justice, Ferdinand VII
excepta les juges du général Elio de l'acte
d'amnistie, qu'avait sollicité le généra-
lissime des armées françaises , S. A. R. le
duc d'Angoulême.
ELIOGABALE. F'. Héliogabalk.
ELIOT ( Jean ) , ministre de Boston
dans la Nouvelle-Angleterre , a fait pa-
raître une Bible en langue américaine ,
imprimée à Cambridge de la Nouvelle-
Angleterre; le Nouveau Testament en
16G1 , l'ancien en 1G63 , in-4 , et le t#kit
en 1G85 , aussi in-4.
* ELIOT ( George-Augusle ), lord
Heatfield , baron de Gibraltar , naquit eu
1718, dans le comté de Roxburh en
Ecosse : il était le plus jeune des sept
fils de Robert Eliot de Slobbs et des-
cendait d'une famille normande passée
en Angleterre à la suite de Guillaume le
Conquérant. Il fut mis de bonne heure à
l'université de Leyde , oîi il fit des pro-
grès rapides , surtout dans les langues
allemande et française. Son père, qui le
destinait à l'état militaire, l'envoya à
l'école royale du génie à La Fère , d'oîi il
revint , à 1 7 ans , pour entrer dans le 23*
régiment d'infanterie ou fusilier royal-
gallois. Il passa ensuite dans le corps des
ingénieurs à Wolvich où il resta jusqu'à
ce que le colonel Eliot , frère de son père ,
le fit entrer dans le 2* régiment des gre-
nadiers à cheval , oîi il obtint le grade
d'adjudant. Ce corps devint, par ses soins,
un des plus beaux de la grosse cavalerie
européenne. Il passa avec lui en Alle-
(i) Let corlé» ou lat eortit, mot du genre rémiuin. An-
cieiiuemeiit Untr tortit •igiiilUit U^ir rourt , c'est-à-dire ,
tenir (uciiibice , rcceToir, former une réunion de courti-
>ani , ft ensuite de dcputét : celle cxptestioii, (<■> (iirl'ci ,
*icnl de la curlt , b cour. ^ . ,» . . •, .
EU
magne, dans la guerre del740k 1748,
fut blessé \i la bataille de Dettingen,
pai-vint au grade de lieutenant-colonel,
et devint, peu de temps après, aide-
de-canip du roi George II , qui lui fit
quitter le 2* régiment de grenadiers à
cheval, pour lever et former le 1*' régi-
ment des chevau-légers , appelé de son
nom , régiment d'Eliot. Il fut aussitôt
désigné pour prendre part à l'expédition
tentée à Saint-Cast, contre les côtes de
France , servit de nouveau en Allemagne,
d'oîr on le retira pour l'envoyer à la Ha-
vanne , oîi son habileté contribua beau-
coup à faire prendre celte place , défen-
due vaillamment par le général espagnol
Louis de Velasco : le roi fut tellement con-
tent de sa conduite, qu'il donna le nom
de royal à son régiment. Enfin, Eliot
fut chargé du commandement de Gibral-
tar , où il s'est couvert de gloire par sa
longue défense contre les armées réunies
des Français et des Espagnols. Ce fut sur-
tout dans une attaque générale qui eut
lieu le 13 septembre 1782 , qu'il donna
les preuves les plus signalées de son sang-
froid et de son intrépidité. Son humanité
ne se fit pas moins remarquer après le
combat II fit retirer, delà mer et du
milieu des bàtimcns enflammés , les sol-
dats ennemis , dévoués à une mort cer-
taine. Le roi , pour reconnaître l'impor-
tance de ses services , le nomma cheva-
lier du Bain , le créa pair , et lui donna
un titre qui rappelait le rocher témoiu
de ses exploits ( baron de Gibraltar ). Il
mourut d'une attaque de paralysie à Aix-
la-Chapelle , où il était allé pour prendre
les eaux, le 6 juillet 1790.
ELIPAJND , archevêque de Tolède ,
ami de Félix d'Urgel , soutenait avec lui
que Jésus-Christ, en tant qu'homme , n'é-
tait que fils adoptif de Dieu. Il défendit
ce sentiment de vive voix et par écrit.
Cette erreur fut condamnée par plusieurs
conciles, et leur jugement fut confirmé
par le pape Adrien , qui fit rétracter Fé-
lix. Elipand, moins soumisque son maître,
écrivit contre lui en 799, et mourut peu
après.
ELTSA , premier fils de Javan , petit-
fils de Japhet , peupla l'EUide dans le Pc-
ELI
loponèse , ou , selon d'autres , celle par-
tie de l'Espagne proche de Cadix , qui, à
cause de ses agrcmens , fut appelée les
Champs Elyséens , ou Iles fortunées.
EIJSABETH ou Elizaheth ( Sainte ) ,
femme de Zacharie, mère de saint Jean-
Baptiste , qu'elle eut dans sa vieillesse,
reçut la visite de sa parente , la mère du
Sauveur, dans le temps de leur grossesse.
Saint Pierre d'Alexandrie dit que deux
ans après qu'elle eut rais au monde Jean-
Baptiste , elle fut obligée de fuir la per-
sécution d'Hérode. Elle alla se cacher
dans une caverne de la Judée, où elle
mourut , laissant son fils dans le désert ,
à la conduite de la Providence , jusqu'au
temps qu'il devait paraître devant le peu-
ple d'Israël.
ELISABETH ou Isabelle d'Aragon ,
reine de France, femme du roi Philippe III,
dit le Hardi., et fille de Jacques I, roi
d'Aragon, fut mariée en 12G2. Elle sui-
vit le prince son mari en Afrique , dans
l'expédition que le roi saint Louis entre-
prit contre les Barbares. Après la mort
de ce prince , Philippe vint prendre pos-
session de ses états. La reine , qui était
grosse , se blessa en tombant de cheval ,
et mourut kCozenceenCalabre, en 1271,
à 24 ans. Dans le même temps , Alfonse,
comte de Poitiers, frère de saint Louis,
fut emporté d'ujie fièvre pestilentielle à
Sienne, et sa femme, Jeanne de Toulouse,
mourut 12 jours après lui. De sorte que
le roi Philippe essuyant douleur- sur dou-
leur, après tant de dépenses et de tra-
vaux , ne remporta en France que des
coffres vides et des ossemens.
ELISABETH , reine de Hongrie. V.oy.
Gara.
ELISABETH (Sainte), fille d'André II,
roi de Hongrie , née en 1 207 , mariée à
Louis, landgrave de Hesse, perdit son
époux en 1227. Les seigneurs la privèrent
de la régence , que son rang et les der-
nières volontés du prince paraissaient lui
avoir assurée. Elisabeth , mère des pau-
vres, avait employé non-seulement sa
dot, mais encore sa vaisselle et ses pier-
reries, à les nourrir dans une famine. Elle
se vit réduite à mendier son pain de porte
en porte. Tirée ensuite de ce misérable
V.
ELÏ 4r
état, elle fut rétablie dans son palais;
mais proférant l'état d'humiliation auï
honneurs, elle prit l'habit du Tiers-Ordre,
et s'employa à servir les pauvres de l'hô-
pital de Marburg qu'elle avait fondé. Son
palais avait été une espèce de couvent.
Elle avait sur le trône toutes les vertus
du cloître ; et ses vertus n'eurent que plus
de force , lorsqu'elle se fut consacrée à
Dieu. Elle mourut à 3Iarburg eu 1231 , à
24 ans, et fut canonisée 4 ans après. On
garde une portion de ses reliques dans
l'église des carmélites à Bruxelles, et
une autre dans la belle chapelle de la Ro-
chc-Guyon sur Seine. Il y en a aussi une
portion considérable dans unechàsse pré-
cieuse qui fait partie du trésor électoral
d'Hanovre. Théodore de Thuringe a écrit
sa Fie.
ELISABETH ( Sainte ) , reine de Por-
tugal , fille de Pierre III , roi d'Aragon ,
épousa en 1281 Denys , roi de Portugal.
Après la mort de son mari , elle prit l'ha-
bit de Sainte-Claire , fit bâtir le monastère
de Coïmbre, et mourut saintement en
1336 , à G 6 ans. Elle fut canonisée par
Urbain VHI en 1C25.
ELISABETH ou Isabelle de Por-
tugal, impératrice et reine d'Espagne,
fille aînée d'Emmanuel , roi de Portugal,
et de Marie de Castille sa seconde femme,
naquit à Lisbonne en 1603. Elle fut mariée
àSévilleavec l'empereur Charles-Quint,
qui lui donna pour devise les trois grâces,
dont l'une portait des roses , l'autre une
branche de myrte, et la troisième \m
branche de chêne avec son fruit. Ce
groupe ingénieux était le symbole de sa
beauté , de l'amour qu'on avait pour
elle , et de sa fécondité. On les orna de
ces paroles : Hœc habet et sitperat... Eli-
sabet mourut en couches à Tolède en
1638. François Borgia , duc de Candie,
qui eut ordre d'accompagner son corps
de Tolède à Grenade , fut si touché de
voir son visage, autrefois plein d'allraits,
entièrement défiguré par la pâleur de Ja
mort et livré à la pourriture , qu'il prit
le parti de quitter le monde , pour se re-
tirer dans la Compagnie de Jésus , où il
mourut saintement. Voyez François de
Borgia ( S.).
3..
42 ELI
ELISABETH D'AUTRICHE, fiUc de
rcmpereur Maximilicn II, et femme de
Charles IX, roi de France, fut mariée à
Mézières le 2G novembre 1570. C'était
une des plus belles personnes de son
temps ; mais sa vertu surpassait encore
sa beauté. Tant qu'elle fut à la cour de
France , elle honora d'une tendre affec-
tion Marguerite , reine de Navarre , sa
belle-sœur , quoique d'une conduite bien
opposée à la sienne , espérant de la
mettre dans de meilleures voies ; et après
son retour en Allemagne , elle lui envoya
deux livres qu'elle avait composés; l'un,
sur la parole de Dieu ; l'autre , sur les
événemens les plus considérables qui ar-
rivèrent en France de son temps. Cette
vertueuse princesse , après la mort du roi
son époux, se retira à Vienne en Au-
triche, où elle mourut en 1592, âgée
seulement de 38 ans , dans un monas-
tère qu'elle avait fondé. ( Brantôme parle
de deux ouvrages de la composition de
cette princesse , l'un sur laparole de Dieu,
l'autre sur les événemens passés en France
de son temps ; mais il ne paraît pas que
ces écrits qu'elle envoya d'Allemagne k
sa belle-sœur Jlarguerite de Valois aient
été imprimés.)
ELISABETH, reine d'Angleterre,
fille de Henri VIII et d'Anne de Boulcn ,
naquit le 8 septembre 1533. Sa sœur
Marie , montée sur le trône , la retint
long-temps en prison. Elisabeth profita
de sa disgrâce. Elle cultiva son esprit et
apprit les langues ; mais de tous les arts,
celui de se ménager avec sa sœur , avec
les catholiques et avec les protestans , de
dissimuler et d'apprendre à régner, lui
tint le plus au cœur. Après la mort de
Marie, elle sortit de prison pour monter
sur le trône d'Angleterre. Elle se fit cou-
ronner avec beaucoup de pompe en 1 559,
par un évêque catholique, pour ne pas
effaroucher les esjirits ; mais elle était
protestante dans le cœur, et elle ne tarda
pas d'établir celte religion par le fer et
le feu , malgré le sermentsolennel qu'elle
avait fait à son t;acre de défendi-e la re-
ligion catholique romaine et d'en proté-
ger les ministres. Elisabeth convoqua un
parlement qui établit la religion angli-
ELI
cane telle qu'elle est aujourd'hui. Cest
un mélange de dogmes calvinistes, ayec
quelques restes de la discipline et des
cérémonies de l'église catholique. Les
évêques , les chanoines , les curés , les
ornemens de l'église , les orgues , la mu-
sique , furent conservés ; les décimes ,
les annales, les privilèges des églises
abolis ; la confession permise , et non or-
donnée ; la présence réelle admise , mais
sans transsubstantiation : système pure-
ment humain , sans sanction et sans au-
cun fondement religieux. Pour comble
d'inconséquence, elle se fit chef de la
religion , sous le nom de Souveraine
gouvernante de Ve'glise d' Angleterre
pour le spirituel et pour le temporel. Les
prélats qui s' opposèrent à ces nouveautés,
furent chassés de leurs églises ; mais la
plupart obéirent. Les hommes fermes,
les amis généreux de la vérité sont rares
dans tous les temps et dans tous les pays.
De 9,400 bénéficiers que contenait la
Grande-Bretagne, il n'y eut que 14
évêques , 50 chanoines et 80 curés qui ,
n'acceptant pas la réforme , perdirent
leurs bénéfices. Les uns finirent leur vie
dans des cachots , les autres dans les tour-
mens. Les jésuites qui accoururent au
secours de l'ancienne religion , périrent
par d'horribles supplices. Cependant le
trône d'Eli.sabeth n'était pas encore af-
fermi ; elle crut qu'il fallait s'assurer le
sceptre par des victimes plus distinguées.
Elle en eut bientôt l'occasion. Marie
Stuart , reine d'Ecosse , épouse de Fran-
çois II , roi de France, prenait le titre de
reine d'Angleterre , comme descendante
de Henri VIII. Elisabeth l'obligea à y re-
noncer après la mort de son mari. Le.s
Ecossais mécontens contraignirent Marie
à quitter l'Ecosse , et à se réfugier en An-
gleterre. Elisabeth lui promit un asile ,
et la fil aussitôt mettre en prison. Il se
forma dans Londres des partis en faveur
de la reine prisonnière. Le duc de Nor-
foick , catholique , voulut l'épouser ,
comptant sur le droit de Marie k la suc-
ces.sion d'Elisabeth ; il lui en coûta la
tète. Les pairs le condamnèrent , pour
avoir demandé au roi d'Espagne et au
pape des secours pour la malheureuse
ELI
princesse. Le supplice du duc n'apaisa
pas la colère d'Elisabeth ; elle continua
d'immoler des victimes de toutes les
classes de citoyens. En vain l'ambassa-
deur de France et celui d'Ecosse inter-
cëdèrentpour l'infortunée reine d'Ecosse;
Marie eut la tête tranchée , après 1 8 ans
de prison , le 1 8 février 1587 , à l'âge de
44 ans. Elisabeth , joignant la dissimula-
tion à la cruauté , aflecta de plaindre
celle qu'elle avait fait mourir , peut-être
autant par jalousie que par politique.
Elle prétendit qu'on avait passé ses or-
dres , et fit mettre en prison le secrétaire
d'état, qui avait, disait-elle, fait exé-
cuter trop tôt l'ordre signé par elle-
même. Cette mascarade, dans une scène
si tragique , ne la rendit que plus odieuse.
Philippe II avait préparé une invasion
en Angleterre du vivant de l'infortunée
écossaise. Il mit en mer, un an après sa
mort, en 1588, une puissante flotte
nommée V Invincible ; mais les vents et
les écueils combattirent pour Elisabeth ;
l'armée espagnole périt presque toute
par la tempête , ou fut la proie des An-
glais. Leur reine triompha dans la ville
de Londres , à la façon des anciens Ro-
mains. On frappa une médaille avec la
légende emphatique : Vcnit, vidit , vicit,
d'un côté ; et ces mots de l'autre : Diix
fœmina facti. Le chevalier Drack, et
quelques autres capitaines non moins
heureux que lui , avaient conquis à peu
près vers le même temps plusieurs pro-
vinces en Amérique. Les Irlandais , qui
lui avaient tenu tête en faveur de la re •
ligion catholique , grossirent le nombre
de ses conquêtes. Le comte d'Essex , son
favori , nommé vice-roi d'Irlande , fut
l'objet d'une des dernières tragédies qui
rendirent le règne d'Elisabeth fameux.
Ce comte voulait se venger , dit-on , d'un
soufflet que la reine lui avait donné dans
la chaleur d'une dispute, faire révolter
l'Irlande , se rendre maître de la tour de
Londres et s'emparer du gouvernement.
D'autres ont prétendu qu'il fut la victime
de la jalousie delà reine ( voyez Essex ).
Elisabeth le pleura en le faisant mourir.
Capable de toutes les atrocités , Elisabeth
ne l'était pas d'étouffer les remords et ces
ELI 43
reproches intimes que les crimes lais-
sent dans l'âme des tyrans. Dans sa der-
nière maladie , elle comprit fortement l'a-
bomination de sa vie. Elle dit aux méde-
cins qui s'empressèrent de lui offrir leurs
secours : Laissez-moi , je veux mourir ;
la vie m'est insupportable. Cécil et l'ar-
chevêque de Cantorbéry se jetèrent à ses
pieds, la supplièrent de prendre quelques
remèdes; ils ne purent rien obtenir, et
sa dernière réponse fut d'ordonner qu'on
la laissât mourir , qu'elle y était résolue;
Elle mourut en effet le 3 avril 1603, à
70 ans, après en avoir régné 45. Elle n'a-
vait jamais voulu se mai-ier. La nature
Tavait conformée de façon à la mettre
hors d'état de prendre un époux. Cepen-
dant sa figure qui n'avait rien de fort
extraordinaire, l'occupait autant que les
affaires d'état; elle.donna un jour l.GOO
écus à un Hollandais qui l'avait trouvée
belle ; dans un âge même oîi les femmes
coquettes négligent les agrémens, elle
ne cessa de les rechercher. Une anecdote
qui prouve la coquetterie d'Elisabeth ,
est l'ordonnance relative à son portrait.
Craignant d*être peinte moins belle
qu'elle ne croyait être , elle publia un
édit par lequel «. il fut défendu à tout
» peintre et graveur de continuer de
» peindre la reine ou la graver, jusqu'à
w ce que quelque artiste eut pu faire «n
M portrait fidèle , qui devait servir de
» modèle pour toutes les copies qu'on
M en ferait à l'avenir, après que ce mo-
« dèle aurait été examiné et reconnu
» aussi bon et aussi exact qu'il pourrait
» l'être. )) Il était dit <f que le désir na -
u turel à tous les sujets de posséder le
D portrait de S. M. , ayant engagé uu
» grand nombre de peintres , de graveurs
» et d'autres artistes , à en multiplier les
» cd^ies , il avait été reconnu qu'aucun
M jusqu'alors n'e'tnit parvenu à rendre ,
» dans leur exactitude , les beautés et
» les grâces de S. M. » La loi portait
enfin , « qu'il serait nommé des experts
» pour juger de la fidélité des copies, et
» il leur était enjoint de n'en toléi-er au-
» cune qui conservât quelques défauts
» ou difformités, dont, par la grâce de
» Dieu , S, M. était exempte. » Sons sou
44
î;li
rèfjne , l'Angleterre parut jouir d'une si-
tuation assez heureuse, si l'on considère
SCS rapports avec les autres états d'Eu-
rope. Son commerce étendit sesbranches
aux quatre coins du monde. Ses manu-
factures principales furent établies, sa
police perfectionnée. Elisabeth bannit le
luxe, le plus cruel ennemi d'un état,
proscrivit les carrosses , les larges fraises,
les longs manteaux, les longues épées ,
les longues pointes sur la bosse des bou-
cliers , et généralement tout ce qui pou-
vait être appelé superflu dans les armes
et les vêtcmens ; mais la plupart de ces
réformes tenaient à son aversion pour le
costume espagnol. La gloire qu'elle s'ac-
quit par sa dextérité , par son esprit , par
ses succès, fut obscurcie par les artifices
de comédienne , que tant d'historiens
lui ont reprochés , souillée par le sang
de Marie Stuart , et d'une multitude de
catholiques qu'elle immola à son fana-
tisme et à son ambition. « Si elle eut
3> quelques bonnes qualités , dit un his-
» torien , elle les a bien flétries par sa
3) manie sanguinaire pour l'établissement
» du schisme et de l'hérésie, dont elle se
w souciait peu ; par une cruauté barbare
j> qui a teint les échafauds du sang des
» têtes couronnées et de ses propres
» amans ; par une passion de dominer et
» unepolitique affreuse qui ne connaissait
M ni droit des gens, ni droit de nature,
» ni droit divin , quand ils gênaient sa
» marche ; par une duplicité jusque-là
» sans exemple , et sans laquelle l'Europe
M ignorerait peut-être encore l'art d'ac-
» quérir, par la fourberie, la réputation
» d'habileté. » Le zèle que montra tou-
jours Philippe II pour la foi de nos pères ,
est apparemment la cause de la haine
constante qu'Elisabeth lui voua. Cette
princesse fit publier , par forme d'édit ,
une satire, le 18 octobre 1591 , contre
ce prince qu'elle accusait de fomenter
continuellement des conjurations contre
elle en Angleterre. Thomas Stapléton ré-
futa cette imputation dans un livre in-
titulé : yipologia pro rege catholico ,
contra edictum.... in qua omnium tur-
barum et bcllnrum quibux his annix tri-
ffinta christinna respublica con/Iictatur,
ELI
fontes aperiuntur et remédia démons--
trantur ; imprimé d'abord aux Pays-Cas,
puis à Constance en 1 592. Elisabeth avait
une grande connaissance de la géographie
et de l'histoire. Elle parlait , ou du
moins entendait cinq ou six langues. Elle
traduisit divers traités^ du grec , du la-
tin et du français. Sa version d^ Horace
fut estimée en Angleterre aussi long-
temps qu'on eut quelque Intérêt à flatter
sa personne ou sa mémoire. Sa Vie par
Léti, traduite en français, 2 vol. in-12,
ne mérite guère d'être citée. M,''® Kéralio
a donné son Histoire , Paris, 1786-17 87 ,
5 vol. in-8 , ouvrage diffus et d'une
forme peu régulière, mais curieux et
intéressant : si dans quelques endroits
Elisabeth est trop flattée , il en est beau-
coup où elle est appréciée avec justesse.
ELISABETH FARNÈSE, héritière de
Parme, de Plaisance et de la Toscane,
née en 1692, épousa Philippe V en 17 H,
après la mort de Marie-Louise-Gabrielle
de Savoie. Ce fut l'abbé Albéroni qui
inspira ce mariage à la princesse des
Ursins, favorite du monarque espagnol.
H lui fit envisager la jeune princesse
comme étant d'un caractère souple , d'un
esprit simple, sans ambition et sans ta-
lent. Elisabeth était précisément le con-
traire de ce qu'elle avait été dépeinte.
Elle avait le génie élevé , l'âme grande
et l'esprit éclairé. Le roi , avec toute sa
cour, alla au-devant d'elle à Guadalaxara.
La princesse des Ursins s'avança pour la
recevoir jusqu'à Zadraque; mais à peine
fut-elle arrivée, qu'Elisabeth la fit con-
duire d'une manière aussi dure qu'im-
prévue hors du royaume. On a beaucoup
varié sur les raisons de celte disgrâce : le
duc de Saint-Simon croit qu'elle avait été
arrêtée par les deux rois de France et
d'E.spagne , et que la jeune reine ne fit
qu'exécuter leur résolution. Elisabeth
cultiva les sciences et les protégea : son
attachement à la religion catholique
était vif et éclairé , elle s'opposait avec
force à tout ce qui pouvait y donner at-
Icinle. L'Espagne la perdit en 1766. (On
peut consulter pour son histoire les Aie-
moires pour Elisabeth Farncze, Londres,
17 46, in-8; et les mémoires pouf servir à
ELI
l'histoire d'Espagne sous le règne de Phi-
lippe V, traduits en espagnol du marquis
de Saint-Philippe par Mandave , Amster-
dam (Paris), 17 6G, 4 vol. in-12. Le plus
ancien écrivain qui ait tracé l'histoire du
règne d'Elisaheth est Cambden. )
ELISABETH, princesse Palatine, fille
aînée de Frédéric V, électeur Palatin du
Rhin, élu roi de Bohême, naquit en 1618.
Dès son enfance, elle pensa à cultiver son
esprit : elle apprit les langues ; elle se
passionna pour la philosophie, et surtout
pour celle de Descartes. Ce célèbre phi-
losophe ne fit point difficulté d'avouer,
en lui dédiant ses Principes, qu'il n'avait
encore trouvé qu'elle qui fût parvenue à
comprendre si parfaitement ses ouvrages;
mais on sent assez la valeur de ces sortes
d'éloges mis dans des épîtres dédicatoires.
Elisabeth sacrifia tout au plaisir de phi-
losopher en paix. Elle refusa la main de
Ladislas .Vil, roi de Pologne. Ayant en-
couru la disgrâce de sa mère, qui la
soupçonnait d'avoir eu part à la mort de
d'Epinai, gentilhomme français, assassiné
A la Haye , elle se retira à Grossen , en-
suite à Heideiberg, et de là à Cassel. Sur
la fin de ses jours , elle accepta la riche
abbaye d'Hervorden , qui devint dès lors
une retraite pour tous les aspirans à la
philosophie de quelque nation , de quel-
que secte, de quelque religion qu'ils
fussent. Celte abbaye fut une des pre-
mières écoles cartésiennes ; mais cette
école ne subsista que jusqu'à la mort de
la princesse Palatine , arrivée en 1C80.
Quoiqu'elle eût du penchant pour la re-
ligion catholique, elle fit toujours pro-
fession du calvinisme , dans lequel elle
avait été élevée.
ELISABETH-PETROWNA , impé-
ratice de toutes les Russies, était fille du
czar Pierre I. Elle naquit le 29 décembre
1 7 1 0 , et monta sur le trône impariai le 7
décembre 17 41, par une révolution qui
en fit descendre le czar Iwaf^y^gardé
comme imbécile. Elle avait ét^pancée
en 1747 au duc de Holstein-Gottorp ;
inais ce prince étant mort onze jours
après , le mariage n'eut point lieu , et
Elisabeth passa le reste de ses jours dans
le célibat. Cette princesse prit part aux
ELI 45
deux dernières guerres de la France en
Allemagne , et montra toujours une con-
stante amitié pour ses alliés. La Russie la
perdit le 5 janvier 17G2, à 51 ans. Sa
mémoire est chère à ses sujets. Dans l'é-
tat le plus critique de sa maladie, elle
donna des ordres pour remettre en li-
berté 1 3 ou 1 4 mille malheureux, détenus
en prison pour contrebande. Elle voulut
en même temps qu'on rendît toutes les
confiscations laites pour raison de frau-
des, et que les droits sur le sel fussent
modérés , au point qu'il en résulta une
diminution annuelle de près d'un mil-
lion et demi de roubles dans l'étendue de
l'empire. Sa bonté éclata encore envers
les débiteurs qui étaient retenus en prison
pour une somme au dessous de 500 rou-
bles : elle en ordonna le payement de ses
propres deniers. On fait monter à plus
de 25 mille le nombre des infortunés qui
furent relâchés. Cette princesse avait fait
vœlPde ne faire mourir personne tant
qu'elle régnerait : « vœu qui ne peut être
» considéré, dit M. Coxe dans son ^oyagre
» de Russie, que comme une injure des
» plus graves envers la société; puisqu'en
M rompant cette barrière de la crainte de
u la mort, la plus forte sans doute qu'on
» puisse opposer au crime, on détruit la
« sauve-garde la plus sûre des vies et des
» propriétés des bons citoyens. » [Voyez
Calentids ). Du reste le même voyageur
observe que l'exécution de ce vœu ne fut
qu'apparente , que les coupables péris-
saient sous le knout, ou d'une manière
plus cruelle encore. (Elle avait fondé l'u-
niversité de Moscou et l'académie des
beaux-arts de Saint-Pétersbourg. On trou-
vera des détails très intéressans sur cette
impératrice dans l'Histoire de la Russie
moderne par Leclerc, dans le voyage en
Sibérie, par Chappe d'Auteroche et daiis
les Me'moires de Manstein.
* ELISABETH -CHRISTINE , reine
de Prusse, fille du duc de Brunswick-
Wolfenbuttel , naquit en 1715, et épousa
en 1733 le prince royal, qui devint en-
suite roi sous le nom de Frédébic II , sur-
nommé le Grand. Quoiqu'elle fut dépour-
vue de l'éclat de la beauté et qu'elle
n'eût pas reçu de la nature un esprit su-
46 ELI
pcrlcur , elle se fit néanmoins aimer de
tout ce qui l'entourait, par ses vertus et
la douceur de son caractère. Frédéric en
mourant déclara hautement que , pen-
dant toute sa vie , elle ne lui avait donné
aucun chagrin ; il la recommanda vive-
ment à son successeur. Elisabeth était ca-
tholique et il fallait qu'elle réunît toutes les
vertus de sa religion pour vivre, sans orage,
daiis cette cour protestante oii d'ailleurs
la philosophie du 1 8^ siècle exerçait son
intolérante influence encore plus que la
réforme. Pendant que les ouvrages si sou-
vent inquiets de nos modernes novateurs
étaient applaudis dans le cabinet de Fré-
déric, son épouse traduisait des ouvrages
pieux tels que le Chrétien dans la soli-
tude, par Crugot, Berlin, 1776: de la
Destination de l'homme , par Spelding ,
ibid., 177G ; Considérations sur les œu-
vres de Dieu, par Sturm, la Haye, 1777,
3 vol. ; Manuel de la relief ion , par Her-
mès, Berlin, 1789 ; Hymnes de GeMrt ,
ibid., 1790. On lui attribue aussi des ^Rc-
flexions sur Ve'tat des affaires politiques
en 1778, adressées aux personnes crain-
tives. Elisabeth-Christine survécut 1 1 ans
à son époux et mourut en 1797.
* ELISABETH - DE - FRANCE ( Phi-
lippine-Marie-Hélèue , 3Iadamk ) , sœur
de Louis XVI , né à Versailles le 3 mai
1764 , fut le dernier enfant du Dauphin,
fils de Louis XV. Elle perdit les auteurs
de ses jours avant de les connaître : con-
fiée aux soins de Mesdames de JN'ackau et
de Marsan , et à la direction de l'abbé de
Montégut , elle dut à leurs leçons et à
leurs conseils une éducation toute chré-
tienne. On remarqua de bonne heure en
elle les plus aimables vertus et on trou-
vait que son caractère avait quelque
ressemblance avec celui du duc de Bour-
gogne élève de Fénélon. Ces aimables
qualités ne tardèrent pas , malgré sa mo-
destie, à être connues de toute la France,
et elles retentirent même en Europe. Sa
main fut recherchée par plusieursprinces,
entr'aulrcs par un infant de Portugal ,
par le duc d'Aosle , fils du roi de Sar-
daigne , et par l'empereur Joseph II ; d'es
raisons politiques empêchèrent ces al-
liances d'avoir lieu ; mais la princesse
ELI
n'en manifesta aucun regret. Attachée
par la plus tendre amitié à son auguste
famille, elle y était considérée comme
un ange de paix, de bienfaisance et de
vertu. Au sein d'one cour bruyante , elle
aimait les plaisirs tranquilles ; elle s'oc-
cupait de quelques ouvrages manuels
dans lesquels elle excellait, de la lecture
de livres utiles , de la promenade et de
l'exercice du cheval. Elle se retirait quel-
quefois dans son agréable retraite de
Montreuil , dont Louis XVI lui avait fait
présent; elle faisait de nombreuses vi-
sites aux dames de St.-Cyr et à celles de
St. -Denis , oîi était Madame Louisb sa
tante : ainsi se passait la vie de cette prin-
cesse bienfaisante qui aimait mieux faire
quelques bonnes actions que s'acheter
quelques-uns de ces agréables riens qui
plaisent tant aux femmes. Que l'on ne
regarde pas comme déplacé l'éloge que
nous croyons faire de sa beauté , qui ,
sans être parfaite , était cependant chez
elle un vif reflet de son âme céleste ; une
blancheur éclatante , une bouche ornée
des plus belles dents , des yeux bleus ,
enfin un ensemble de physionomie vive
et attachante, commandaient le respect et
l'admiration. Etrangère aux affaires poli-
tiques , elle entrevoyait cependant les
malheurs qui menaçaient le trône; elle se
dévoua sans regret au sort de sa famille
qu'elle ne voulut jamais quitter, dévoue-
ment admirable dont elle fut l'innocente
victime. On la vil, lé jour qui précéda la
nuit affreuse du 5 au 6 octobre 1789,
courir à Versailles , se placer devant le
roi pour lui servir d'égide et pour mou-
rir avec lui, s'il le fallait. Alors, et ce fut la
première fois , elle donna des conseils au
roi ; elle voulait que l'on repoussât cette
foule d'assassins qui n'étaient point le
peuple français : peu s'en fallut que son
avis ne fut adopté ; mais d'autres conseils
prévalurent sur l'esprit trop confiant de
Lonis ïj^r On connaît les scènes sanglan-
tes do^^'ersailles fut témoin dans celte
circonstance. Elisabeth eut le bonheur
d'arracher au fer des meui-triers quel-
ques fidèles gardés-du-corps ; elle revint
même avec le roi à Paris, et sa présence
imposa plus d'une fois pendant ce pé-
ELI
nible voyage , aux factieux qui Insul-
taient la famille royale. Dès lors Madame
fut de tous les conseils secrets qui se
tinrent au palais dans l'intérêt du roi et
de|la France : sa voix n'y fut pas souvent
écoutée.; d'autres avis l'emportaient, et on
sait quels en furent les terribles résultats.
Cette princesse accompagna le roi dans
son voyage de IVIontmédy , elle en subit
toutes les fatigues et les humiliations.
Elle était aux côtés de Louis XVI lorsque
le 20 juin 17 92, un furieux la. prenant
pour la reine , dit qu'il fallait la massa-
crer ; et déjà il avait le fer levé sur sa
tête ; un de ses officiers s'étant hâté de
la faire connaître , elle lui dit: Pourquoi
ne pas lui laisser croire que je suis la
reine , vous lui auriez peut-être épar-
gne' un plus grand crime. Cette scène
se passait dans les Tuileries , en face
d'une foule de brigands que sa présence
servait à contenir. Dans la sanglante jour-
née du 10 août , malgré les instances
réitérées de Louis XVI , elle ne voulut
point quitter le château; elle partagea
tous les dangers du roi et suivait la fa-
mille royale à l'assemblée. Là, reléguée
dans la tribune des journalistes, elle en-
tendit cette triste discussion qui , après
avoir duré tout le jour , fut suivie du
décret qui prononçait la déchéance du
roi ; et pendant deux autres jours , elle
fut condamnée à entendre encore tout ce
que ces factieux débitaient avec leur,
éloquence révolutionnaire sur le choix
d'une prison. Elle fut ensuite conduite
frec le roi , la reine , le dauphin , Ma-
ame I" ( Marie -Thérèse, aujourd'hui
.duchesse d'Angoulême ) , à la tour du
Temple. Son courage ne l'abandonna
point ; résignée à tout ce que la Provi-
dence lui réservait de malheurs, elle con-
solait la famille royale et paraissait s'ou-
blier elle- même ; ses forces semblaient
même s'augmenter au milieu des mauvais
Irailemens auxquels ces illustres prison-
niers étaient exposés tous les jours. Tour-
à tour séparée de son frère , de la reine
et du dauphin , elle resta seule avec la
jeune fille de Louis XVI, dont elle re-
trempa l'àme par les leçons qu'elle savait
puiser dans ime religion qui donne aux
ELI 47
âmes vertiveuses tant de moyens d'es-
suyer les lamies des malheureux. Après
que le régicide eût été commis , on com-
mença l'odieux procès de la reine ; les
deux captives furent obligées de subir
le plus infâme interrogatoire ; la calomnie
avait répandu sur le compte de la reine
les accusations les plus scandaleuses ;
les inquisiteurs révolutionnaires envoyés
par la Convention , ne craignirent point
d'ofifenser leur pudeur , en venant dé
rouler devant la fille de Marie- Antoinette
et la sœur de Louis XVI l'exécrable li-
belle qui renfermait tous les crimes que
l'on reprochait à l'auguste accusée : ces
deux femmes angéliques furent forcées
d'entendre pendant six heures toutes les
calomnieuses imputations que la débau-
che faisait à la vertu. Les réponses ne
satisfirent point les factieux, et ces prin-
cesses furent dès lors traitées avec la plus
rigoureuse barbarie , avec un raffinement
de cruauté qui fut poussé jusqu'à les pri-
ver de leurs ouvrages , jusqu'à leur re-
fuser les alimens maigres qu'elles vou-
laient prendre pendant le temps prescrit
par l'Eglise ; ce qui ne les empêcha pas
de remplir en secret ces devoirs d'absti-
nence. Le 9 mai 1794 , on vint l'arracher
des bras de sa nièce pour la conduire à
la conciergerie ; ce fut à neuf heures du
soir que des satellites , payés sans doute
pour insulter à'son malheur, la jetèrent
dans cette prison où elle passa la nuit ;
le lendemain elle fut conduite au tri-
bunal révolutionnaire, jugée et condam-
née à mort sans que l'on ait pu motiver
son arrêt par l'apparence d'une accu-
sation : le seul crime qui lui fut repro
ché , ce fut d'avoir été en correspondance
avec les princes ses frères. C'en fut assez
pour l'envoyer au supplice. Le même jour
éclaira sa condamnation et sa mort. Après
21 mois de la plus cruelle captivité, elle
mourut avec la pieuse résignation d'un
chrétien et l'héroïque courage d'un mar-
tyr. En allant à l'échafaud sur la fatale
charrette , elle exhortait ceux dont elle
était environnée et qui allaient partager
son sort; elle priait, et sa bouche répé-
tait encore de saintes prières, lorsque la
hache révolutionnaire abattit cette tête
48 ELI
auguste. On eut la cruauté de la forcer
à voir le supplice de ceux qui devaient
être exécutés ce jour-là ; tous saluèrent
avec respect madame Elisabeth qui les
embrassa avec affection. Cette malheu-
reuse princesse avait alors 30 ans; ses
restes furent confondus avec ceux qu'on
entassait journellement au cimetière de
Monceaux. M. Ferrand, ancien magis-
trat, a écrit l'JB'Zog'e historique de madame
Elisabeth , Paris , 1814, in-8 , impri-
merie royale. Cet éloge d'abord pu-
blié en Allemagne avait été réimprimé à
Lyon en 1 795 , par les soins de M. l'abbé
Aimé Guillon. Les notes qui accompa-
gnent cet éloge fournissent des éclaircis-
semcnset des détails souvent très curieux;
mais ce qui donne un prix inestimable à
la dernière partie de ce volume , ce sont
environ 94 lettres de madame Elisabeth ,
où brillent la candeur de ses vertus, la
beauté de son caractère , l'aimable viva-
cité de son imagination, la fermeté de
sou âme, et l'excellence de son jugement.
On a encore une Oraison funèbre de ma-
dame Elisabeth , par l'abbé de Villefort,
Paris, 1 8 17 , in-8 ; et l'on trouve un abrégé
très intéressant de sa vie dans les Fies
des justes dans les plus hauts rangs
de la société , par l'abbé Carron , 4 vol.
in-12.
ELISABETH. Foyez sous le mot
Isabelle , les articles qui ne se trouvent
pas ici.
ELISAPHAT , fils deZéchri, qui aida
de ses conseils et de ses armes le souve-
rain pontife Soïada à déposer l'impie
Athalie , et à mettre Joas sur le trône. Il
commandait une compagnie de cent
hommes.
ELISÉE, disciple d'Elic et prophète
comme lui , était fils de Saphat. Il con-
duisait la charrue , lorsqu'Elie se l'asso-
cia par ordre de Dieu. Son maître ayant
été enlevé par un tourbillon de feu, Eli-
sée reçut ^on manteau et son double
esprit prophétique. Les prodiges qu'il
opéra , le firent reconnaître pour l'héri-
tier des vertus du saint prophète. Il di-
visa les eaux du Jourdain, et le passa à
pied sec ; il corrigea les mauvaises qua-
lités des eaux de la fontaine de Jéricho ;
EU
il fit dévorer par des ours desenfansqui
le tournaient en ridicule (c'étaient, ob-
servent les saints Pères , des enfans for-
més par des parens impics , à la dérision
des ministres de Dieu ) ; il soulagea l'ar-
mée de Josaphat et de Joram , qui man-
quait d'eau ; il leur prédit la victoire
qu'ils remportèrent sur les Moabites; il
multiplia l'huile d'une pauvre veuve ; il
ressuscita le fils d'une Sunamite ; il gué-
rit Naaman , général syrien , de la lèpre ;
et Giézi son disciple en fut frappé , pour
avoir reçu des présens contre son ordre ;
il prédit les maux qu'Hazaël ferait aux Is-
raélites; il annonça à Joas, roi d'Israël,
qu'il remporterait autant de victoires sur
les Syriens , qu'il frapperait de fois la
terre de son javelot. Elisée ne survécut ,
pas beaucoup à cette prophétie. Il mou-
rut à Samarie , vers l'an 830 avant J. C.
Un homme assassiné par des voleurs ayant
été jeté dans son tombeau , le cadavre
n'eut pas plutôt touché les os de l'homme
de Dieu, qu'il ressuscita. « C'était un
» de ces hommes rares, dit un historien
>> théologue, que la Piovidence suscite
» dans des temps de corruption et d'obs-
» curité , pour ranimer le foi par des œu-
» vres extraordinaires , et ramener à Dieu
■» par l'éclat des prodiges , des peuples
» séduits qui ne croient plus en sa puis-
)) sance. »
ELISÉE ( Jean François Copel , dit le
Père), fils de M. Copel, avocat au par-
lement de Besançon , naquit dans cette
ville en 1728, y fit ses premières études
au collège des jésuites , et s'y distingu|k
par les progrès les plus rapides. Ayani
fait une retraite aux Carmes de Besançon^
il entra dans cet ordre et se voua pour
toujours à Dieu , le 25 mars 1 745. Sa fer-
veur soutenue d'une piété sincère ne se
démentit point. Il remplit pendant six
ans, dans le couvent, les fonctions de
professeur, employant les intervalles de
liberté qu'elles lui laissaient à cultiver
l'étude des belles-lettres , et à former son
goût pour l'éloquence. H commença sa
carrière évangélique en 17 56 avec le plus
grand succès. L'année suivante, il partit
pour Paris, oîi pendant 2Gans il a exercé
le ministère de la parple, tant à la cour
Ëtl
qu'à la Tille, toujours avec la mêmeaf-
lluence d'auditeurs et les mêmes suffra-
ges. Enfin, excédé de travaux, et sa santé
succombant sous son zèle , après avoir
fait les plus grands efforts pour prêcher
le carême à Dijon , il mourut le 1 1 juin
1783 à Pontarlier, en allant en Suisse
pour prendre les eaux de la Brévine , que
les médecins lui avaient ordonnées. Ses
sermons ontété imprimés en 4 Vol. in-12,
tl8:). « c'est une chose bien remarqua-
» ble , dit Un auteur, que le succès
)) de ce prédicateur, les suffrages qu'il a
M recueillis , la vogue qu'il a eue parmi
» les petits et les grands. Tel est l'empire
» de la raison , des éternelles et impres-
j) criptibles règles du goût. Au milieu de
» le dégradation qui flétrit les lettres , de
» ces silllemens épigrammatiques et an-
n tithétîques , dé ces grosses phrases la-
» borieuses etboursoufflées, qui ont rem-
» placé le langage naturel, noble et éner-
» gique des Chrysoslôme et des Bossuet ;
» durant le triomphe même de la fausse
M éloquence ^ de cette petite coquette ,
» resplendissante de faux brillans, et ri-
» diculeraent afltibléc de colifichets, qui
» s'élève sur les débris de la dignité ora-
» toire ; un pauvre religieux, déjà par son
») état en contraste avec les applaudissc-
» mens de la multitude, fixe l'approba-
» tion de la cour et des peuples par des
>) discours sans fard , sans prétention ^
» simples et quelquefois négligés. S'il n'a
» pas la force et l'élévation de Bourda^
» loue, la douceur insinuante de Massil-
» Ion, l'abondance et la rapidité de Neu-
» ville, il a du moins tout ce qui distin-
M gue l'ancienne et véritable éloquence
» de l'affété verbiage du siècle. » Dans le
Journal historique et titie'rnirc, on avait
d'abord jugé tro]) sévèrement cet orateur,
sur le rapport des critiques qui l'avaient
entendu; mais après la lecture de ses dis-
cours, on lui a rendu la justice qu'il mé-
rite (voyez le journal du l'"' novembre
17 85, p. 323 ). On a remarque que , dans
son sermon sur la fausse piété , il avait
paru annoncer la révolution de France ,
en s'cxprimantde la sorte; <f O vous qui
» donnez des bornes à l'immensité delà
" mer, et qui domptez l'orgueil des flots!
ELI 49
» réprimez la licence de^ esprits , et ar-
n rêtez ce torrent de l'impiété qui me-
» nace de ravager la terre. Hélas ! peut-
» être touchons-nous à ces jours désas-
» treux , oii les yeux des élus, contraints
» de gémir sur les malheurs de la sainte
» Jérusalem , se changeront en des sour-
)> ces de larmes ! Les proférés rapides de
» l'incrédulité, le mépris des choses sain-
» tes , l'indifférence pour les dogmes , la
» prévention des esprits-forts contre le
» merveilleux , et leurs efforts pour dé-
» couvrir dans les forces de la nature la
« cause de tous les prodiges ; le Dieu du
j) ciel presqu'oublié dans lesarrangemens
» humains , comme s'il n'était pas lejDieu
» des armées et des empires;' les vœux
» que les Moïse lui adressent sur la mon-»
» tagne , regardés comme indifférens aux
» succès des combats ; les travaux du mi-
» nistère , les sacrifices des vierges, les
M larmes des pénitCns, méprisés comme
» des inutilités pieuses; enfin la facilité
» des esprits à recevoir ces funestes im-
» pressions, doivent nous faire craindre
« une révolution dans la foi. Eloignez ,
» grand Dieu, ce funeste présage; con-
« servez ce dépôt sacré dans ce royaume,
» que la piété de ses rois^ le zèle éclairé
» des pontifes , l'attachement du peuple
» au culte de ses pères , rendent encore
» une portion florissante de votre héri-
» tage. Augmentez dans tous les fidèles
» l'amour de la religion ; faites gémir l'im-
» pie sur ses excès, et que tous les cœurs,
» réunis par la foi dans le sein de votre
» Eglise , aspirent aux récompenses pro-
» mises aux vrais adorateurs. «
* ELISÉE (N.... TALAcnoiv, connu sous
le nom de Père), premier chirurgien de
Louis XVIII, naquit à Lagny en 1753. Il
entra de bonne heure dans l'hôpital de
la Charité oii il «cquit en peu de temps
des talens très distingués dans la pra-
tique. .\près avoir exercé tour à tour dans
différcns hôpitaux la chirurgie et la mé-
decine avec autant de zèle que de succès,
il fut nommé chirurgien en chef de ll^ô-
pital civil et. militaire de Gienoblc. Non
content de soigner les maladies, il ouvrit
une école d'où .sont sortis un grand nom-
bre de praticiens- distingtiés. ï^oi-sgu^ I«l
4
5o ELL
rt^Toliition <!clata en France, le Père Elisée
quitta son pays et se rendit à TarnKÎe des
princes à laquelle il fut dèslors attaché en
qualité de médecin. Il ne la quitta qu'au
moment du licenciement. On n'admira
pas seulement son zèle dans le traitement
des blessés ; il allait sur le champ de ba-
taille pour y panser tous les soldats qu'il
ï-encontrait, quelle que fut l'armée à la-
quelle ils appartinssent, et c'était souvent
avec ses propres vêtemens qu'il bandait
leurs plaies. Le Père Elisée porta le désin-
téressement jusqu'à refuser les honoraires
attachés à son emploi. Après que l'armée
de Condé eut été dissoute , il se rendit en
Angleterre oîi il exerça sa profession au-
près du Prince régent, du comte d'Artois et
de Louis XVIII. A l'époque de la restaura-
tion , le Père Elisée fut nommé premier
chirurgien du roi, médecin du Val-de-
Gràce et membre de la commission char-
gée de faire un rapport sur l'état de l'en-
seignement de la médecine en France. Il
accompagna le roi en Belgique pandant
les Cent-jours et revint avec lui à Paris.
Le père Elisée passa les dernières an-
nées de sa vie dans des occupations de
bienfaisance, procura à Louis XVIII plu-
sieurs occasions de faire de bonnes ac-
tions , et mourut à Paris le 27 septembre
1817.
ELIZABETH. Foycz Elisabeth.
ELLEBODIUS ou Ellebode ( Nicaise
Van), natif de Cassel en Flandre, fit ses
études à Padoue. Son habileté dans les
sciences lui mérita l'estime des grands
hommes de son temps. Radécius, évêque
d'Agria en Hongrie, l'attira chez lui, et
lui donna un canonicat dans sa cathé-
drale. Il mourut à Presbourg le 4 juin
1577. Nous avons de lui 1° xxi^eFevsion
du grec en latin de Nc'mésius , Anvers,
1566, Oxford, 1671 , et dans la Biblio-
thèque des Pères, édition de Lyon, tome 8.
Celte version d'un ouvrage savant et
utile , est faite de main de maître. Il est
le premier qui ait donné une bonne édi-
tion de Nemésius , et cela sur deux ma-
nuscrits corrompus , qu'il a corrigés avec
beaucoup d'art et de travail. George Valla
en avait donné une avant lui , oii l'au-
teur grec est ridiculement défiguré. 2° Des
ELL
poésies latines dans lc& Deliciœ poela-
riim Belgarum^Ae Gruterus.
ELLER DEBROOKUSEN (Jean Théo-
dore ), premier médecin du roi de Prusse,
naquit en 1 689 , à Pletzkau , dans la prin-
cipauté d'Anhalt-Bernbourg, et mourut
à Berlin en 1760. Au titre de premier
médecin que Frédéric-Guillaume lui avait
donné en 1735 , Frédéric son fils joignit,
en 1755, celui de conseiller privé , et de
directeur de l'académie royale de Prusse.
Nous avons de lui 1" Traita de la con-
naissance et du traitementdes maladieSy
principalement des aiguës , en latin, tra-
duit en français par .M. Le Roi, médecin,
1 7 7 4 , in- 1 2 . Le fonds de la doctrine ensei-
gnée dans cet ouvrage , est bon et établi
sur des observations importantes de prati-
que. ( 2° Cazophylacium, seu catalogus
rerum mineralium , et metallicarum ,
Bernbourg, 1723, in-8. 3° Observationes
médicales et chirurgicales, Berlin, 1730,
in-8, en allemand. \° Physiologia et pa-
ihologia medica , etc., publié par le doc-
teur Jean-Chrétien Zimmermann , en al-
lemand : c'est le recueil des leçons d'Eller ;
mais Ellcr a desavoué cet ouvrage. La
mort de l'auteur a privé le public de celles
qu'il avait faites sur les maladies chroni-
ques, et c'est une perte , car il joignait à
une longue pratique , la sagacité, la dex-
térité et la patience nécessaires à un ob-
servateur.)
* ELLEVOOD ( Thomas ) , né au vil-
lage de Crowelle, dansle comté d'Oxford
en 1639, est un des premiers quakers
qui aient écrit pour la propagation de
cette secte. Le premierouvrage oîi il pu-
blia ses opinions lui attira la surveillance
du gouvernement, et il fut mis en prison
plusieurs fois. Son père, de son côté,
irrité de voir professer à son fils des prin-
cipes différens des siens, lui infligea di-
verses punitions ; mais il resta ferme dans
l'opinion qu'il avait embrassée. L'éduca-
tion d'Ellevood avait été très négligée ;
pour remédier à ce défaut , et se mettre
en état de défendre la cause dont il s'é-
tait fait l'ardent prosélyte, il se plaça
pour lecteur auprès de Milton, alors aveu-
gle, et qui, tandis que Ellevood lui li-
sait les auteurs classiques , lui en expli-
ELL
quait les passages les jdus difficiles , et
lui donnait les premières notions des
sciences et des lettres. Il se sépara de ce
poète pour raison de santé , et fut ensuite
déshérité par son père , pour avoir con-
tracté un mariage selon le rit bizarre des
quakers. EUevood mourut en 1713. Il a
laissé plusieurs ouvrages : nous citerons
\° Alarme donnée aux prêtres^ ou Mes-
sage du Ciel pour les avertir, 1660 j
2° Histoire sacrée , Impartie, qui con-
tient l'ancien Testament, 1705; — His-
toire sacrée, 2* partie, qui contient le
nouveau Testament, 1709; Z" la Davi-
déide , poème en 5 livres ,1712.
ELLIGER. Voyez Elger.
* ELLIS ( Jean ) , négociant et natura-
liste anglais , mort à Londres , le 5 octo-
bre 1776 , s'est rendu célèbre par ses re-
cherches sur les coraliues et autres pro-
ductions marines , regardées jusqu'alors
comme plantes. Il constata la décou-
verte faite par Peyssonel que les coraux
n'étaient que des habitations de polypes
et posa les limites qui séparent la zoolo-
gie de la botanique. On trouve dans les
transactions philosophiques plusieurs
mémoires dans lesquels il consigna le ré-
sultat de ses expériences. Le musée bri-
tannique lui doit plusieurs curiosités
d'histoire naturelle. Il a laissé 1° Essay
loward a natural history of coralines ,
Londres, 17 54, in -4., avec 39 planches,
traduit en français par Allamand, la
Haye, 1750, in 4, et en allemand par
Schlosser et autres, Nuremberg, 17G7.
2° The natural History ofmany curious
and un commun zoophyies , Londres,
in-4, avec 63 planches, ouvrage estimé
et très bien exécuté. 3° Plusieurs mémoi-
res oîi il fait connaître des plantes très
curieuses , et où il donne les moyens de
transporter à de grandes distances les vé-
gétaux vivans. Ellis s'était aussi occupe
de conserver long-temps aux graines leur
faculté germinative, et lit à cette occasion
plusieurs mémoires. Il a écrit en outre
un traité sur le café. — Il ne faut pas le
confondre avec Henri Ellis , voyageur
anglais, mort au commencement du 19®
siècle , qui fit partie de l'expédition qui
alla, en 1746, chercher, par la baie
ELL Si
d'Hudson , un p&ssage au nord-ouest. Il
publia la relation de ce voyage, qui ne
produisit aucun résultat , sous ce litre ,
Voyage à la haie d'Hudson , etc. , Lon-
dres, 1748, in-8, trad. en français , par
Sellius, 2 vol. in-12 ; on en trouve des ex-
traits dans l'Hist. générale des voyages,
tom. 14 et 15, et dans plusieurs recueils.
* ELLIS ( Guillaume ) , agronome an-
glais, naquit vers la fin du 1 7* siècle , di-
rigea pendant près de 50 ans une ferme à
Little-Gaddesden, dans le comté de Hert-
ford, et confirma par sa propre expérience
un grand nombre d'observations utiles,
d'inventions, d'instrumens aratoires, et de
procédés inconnus relatifs à l'agriculture
et au gouvernement des troupeaux : le
résultat de ses propres observations et de
ses travaux est consigné dans les nom-
breux écrits qu'il a publiés et dont on a
fait un abrégé sous ce titre : Agriculture
abrégée et méthodique comprenant les
articles les plus utiles d'agriculture pra-
tique, 1772, 2 vol. in-8. Il est mort vers
l'année 1760.
* ELLYS (Antoine), évêque anglican,
naquit en 1693, et fit ses études à l'uni-
versité de Cambridge. Il posséda succes-
sivement différens bénéfices , et fut
nommé à l'évêché de Saint-David , dont
il prit possession en 1752. Il est connu
par les ouvrages suivans ; 1° Défense de
V Examen sacramentel, comme étant une
juste sécurité pour V Eglise établie, 1736,
in-4. Cet ouvrage , écrit en faveur de
l'église anglicane , était dirigé contre les
Dissenters. 2" Traité de la liberté spi-
rituelle et temporelle des protestons en
Angleterre. Cet ouvrage est divisé eu
deux parties. Dans la 1", l'auteur s'efforce
de prouver que les prolestans avaient eu
le droit de changer leur doctrine contre
ce qu'il appelle les prétentions de l'é-
glise romaine. Dans la seconde , il s'oc-
cupe de la liberté religieuse des sujets
dans leurs rapports avec le gouvernement.
Ce livre parut en 1763 après la mort de
l'auteur, arrivée en 1761. On a encore
d'Ellys, Remarques sur un Essai de Da-
vid Hume, concernant les miracles, 1 7 52,
in-4, et quelques Sermons imprimés sé-
parément.
52 ELO
EL^ACIN (George) , historien d'E-
gypte, mort en 1238 , fut secr<5taire des
califes, quoiqu'il fit profession du chris-
tianisme. On a de lui une Histoire 4es
Sarrasins, écrite en arabe, qui a été
traduite en latin parEperniuSj Leyde,
JG22,in-fol. On y trouve des choses
curieuses. Elle commence à Mahomet, et
finit à l'établissement d6 l'empire des
Turcs.
ELMENHORST fGeverhart) , de Ham-
bourg, mort en 1621 , s'appliqua à la
critique, et s'y rendit très habile. On a
de lui des notes sur Minutius Félix et sur
plusieurs autres auteurs anciens. Il
donna à Leyde , en 1 C 1 8 , le Tableau du
Cc'bès , avec la version latine et les notes
de JeanCasel.
ELMENHORST (Henri), auteur d'im
fraitc allemand sur les spectacles, im-
primé à Hambourg en 1G88, in-4. Il
tâche vainement d'y prouver que les
spectacles , tels qu'ils sont aujourd'imi,
loin d'être contraires aux bonnes mœurs,
sont capables de les former, On peut voir
cette matière discutée avec plus de raison
et de vérité, dans le Traite des specta-
cles de M. Bossuet , dans une lettre du
fameux citoyen de Genève à M. d'Alem-
bert, dans les Lettres sur les spectacles,
par M. Des Prés de Boissy , et dans le
Journal historique et littéraire, 1 5 avril
pt l*' mai 1781. f^oy. Molière.
ELOI (Saint), né à Cadillac, près de
Limoges, en 588, excella dès sa jeunesse
dans les ouvrages d'oi'févreric, particu-
lièrement dans ceux qui étaient destinés
^ orner les églises et les tombeaux des
saints. Clotaire II employa ses talens,
ainsi que Dagobert, qui le fit son tréso-
rier. On le tira de ce poste pour le met-
tre sur Ip siège deNoyon en G40. Il mou-
rut saintement en 6^0, après avoir prêché
le christianisme à des peuples idolâtres ,
fondé grand nombre d'églises et de mor^
|iastères,et paru avec éclat dans un concile
de Châlons, en 644,SaintOuen son ami a
écrit sa vie. Lévêque en a donné une tra-
duction, Paris, 1G93, in-8. Il l*a enrichie
4'une version de ÎG Jiome'lies, qui portent
le nom de saint Eloi. Elles sont très tou-
chantes , remplies de belles images , et
ELO
vraiment éloquentes, malgré la simplicité
du stile qui porte partout le caractère in-
téressant de la franchise antique. On a
aussi quelques lettres de ce saint.
ELOY ( JVicolas - François-Joseph ) ,
conseiller-médecin ordinaire de la prin-
cesse Charlotte de Lorraine , ensuite du
prince Charles- Alexandre de Lorraine son
frère, médecin-pensionnaire de la ville
de Mons , correspondant de la société
royale de médecine de Paris , né à Mons,
capitale du Hainaut, le 20 septembre
1714, exerça sa profession avec beaucoup
d'honneur et de désintéressement pen-
dant l'espace de 52 ans, et mourut le 10
mars 17 88, d'un asthme humide qui l'em-.
porta en moins de huit jours, regretté de
tous ses confrères et de ses concitoyens.
Continuellement appliqué à l'étude et à
la pratique de la médecine , il n'en fut
pas moins attaché aux devoirs de la re-
ligion, qu'il remplit avec la plus scrupu-»
leuse et la ydus édifiante exactitude. On
a de ce savant médecin : 1" lie'/lc.vions
sur l'usage du tlié , Mons, 17 50, in-12.
2" Reflexions sur une brochure intitulée
Apologie du thé, Mons, 1751, in-12.
3° Essai du Dictionnaire historique de
la médecine , Liège, 17 55, 2 vol. in-8.
4° Dictionnaire historique de la méde^
cine ancienne et moderne, Mons, 1778,
4 vol. in-4. L'auteur développe ici avec
plus d'étendue et d'intéiêt, les mêmes
choses dont les limites étroites de V Essai
ne lui avaient permis que de faire une
esquisse. La préface forme un discours
plein de choses et d'idées vraies qui, sans
avoir la boursoufflure de l'éloquence mo-
derne, plaît par un arrangement écono-
mique et bien gradué des notions assor^
ties à la matière que l'auteur traite. Il
présente d'une manière rapide, mais qui
occupe fortement l'esprit, l'histoire de la
médecine et des révolutions qu'elle a es-r
suyées. Dans le discours préliminaire , il
s'attache particulièrement à faire voir
les dangers de l'esprit de système et de
la manie de généraliser des choses mis-
ceptibles de modifications infinies et
différenciées, pour ainsi dire, individuel-
lement. Dans l'article médecine, plein
d'excellentes observations , l'auteur rç-r
ELO
ifient encore à cette leçon extrêmement
importante ; il fait toucher au doigt les
suites fatales de l'esprit systématique,
tel qu'il se montre dans toutes les scien-
ces , mais avec des suites plus graves
et plus déplorables dans l'art de la mé-
decine. La notice des médecins , où il
manque néanmoins quelques articles, l'a-
brégé de leur vie, le catalogue de leurs
ouvrages , est faite avec soin , avec une
modération et une impartialité qui prou-
vent dans l'auteur une grande droiture de
caractère. Quand il a occasion de parler
de ces médecins désintéresses qui regar-
dent comme un salaire précieux la satis-
faction de secourir des malades indigens,
de visiter des cabanes obscures et infec-
tées, où l'infirmité est unie à la misère ;
il le fait avec un langage de sentiment ,
qui honore infiniment sa philosophie.
Enfin la manière de penser de l'auteur ,
la fermeté de ses principes et sa religion,
paraissent encore mieux dans l'article où
il fait le catalogue des médecins qui se
sont sanctifiés par l'exercice de leur art.
Nous rapporterons le passage suivant ,
dans lequel on trouve une force d'esprit
qu'on peut regarder comme un phé^io-
mène dans le temps où nous sommes,
« Parmi les reproches qu'on a faits à la
)) médecine, le plus outrageant est celui
» d'accuser cette science de conduire à
» l'athéisme et à l'irréligion. Mais quand
» l'étude du mécanisme animal ne serait
j) pas celle des mei-veilles du Créateur ,
» dont on reconnaît le doigt et la toute-
3> puissance dans la structure de la plus
3) petite fibre ; quand cette étude ne por-
» terait pas au culte d'un Dieu, dont le
» médecin a tous les jours occasion d'ad-
3) mirer les ouvrages, il suffirait de faire l'é-
)> numération des personnages qui se sont
« sanctifiés dans l'exercice de la méde-
» cine, pour laver celte science des re-
j> prochrs qu'on lui fait encore aujour-
)> d'hui. Jusque dans le sein de l'église
» catholique il y a eu des athées ; mais
» c'est à la perversité de leurs cœurs , à
» raveugiement de leur esprit , et non
» point à l'art qu'ils professaient, qu'on
» doit attribuer leurs écarts {voyez Ga-
P lies). Les esprits forts de nos jours me
ELP
53
)) mettront sans doute au rang de ces
)> bonnes gens, que leur philosophie re-
» garde comme des dupes, parce qu*ils
)) croient ce que leurs pères ont cru. A
» cette condition, je consens d'être mis
» dans la même classe ; et pour mériter
)) davantage le mépris dont ils m'honore-
» ront , je mets ici sous leurs yeux les
» noms des saints mé^cins que l'Eglise
» révère. Elle leur a décerné un culte pu-
M blic , soit p'^n'^ avoir généreusement
» soutenu les intérêts de la foi qu'ils ont
» scellée de leur sang, soit pour avoir il-
» lustré leur profession par la pratique
» des vertus les plussublimes. » 5° Cours
élémentaire des accouchemens, clc. Mons,
1775, in-12. 6" Mémoire sur In mnrclie,
la nature, les causes et le traitement de
la dissenterie, Mons, 17 80, in-8. 7° Exa-
men de la question médico-politique :
« Si l'usage habituel du café est avanta-
» geux ou doif être mis au rang des cho-
» ses indifférentes à la conservation de
» la santé ; s'il peut se concilier avec le
» bien de l'état dans les provinces bel-
» giques, ou s'il est nuisible et conti-aire
» à tous égards? » ibid. 1781, in-8. Les
états du comté de Hainaut voulant témoi-
gner à l'auteur le cas qu'ils faisaient des
ouvrages qu'il avait mis au jour et des
services rendus à la patrie, lui firent re-
mettre, parleurs députés ordinaires, avec-
un compliment très flatteur, une taba-
tière d'or portant d'un côté les armes
des états , avec l'inscription : JEx dono
Patrice, et de l'autre un génie représen-
tant la renommée, avec ces paroles :
Minulatinnis incitamentum .
* ELPHINSTOIN (Jacques), grammai-
rien anglais né à Edimbourg en 1721, fit
d'excellentes éludes dans cette ville , et
devint à l'âge de 17 ans précepteur de'
Lord Blantyre. Après avoir parcouru la
Hollande et le Brabant, et s'être fixé pen-
dant quelque temps à Paris pour y ap-
prendre parfaitement la langue française,
il revint en Ecosse où il contribua au sué-
cès du Rambler, ouvrage périodique pu-
blié par le célèbre Johnson. 11 alla en-
suite en Angleterre où il reprit la carrière
de l'enseignement en établissant une école
à Kensington. De longues et laborieusçi^
54
ELS
recherches sur la langue anglaise lui fi-
rent connaître exaclenient cet idiome
dont il essaya de réformer le système
d'orthographe. Lui-même mit en pratique
cette orthographe nouvelle dans ses ou-
vrages; mais le système et les livres sont
tombés à la fois dans l'oubli. Cependant
on remarque i° une Traduction envers
du poème de la Religion de Louis Ra-
cine, qui obtint les suffrages d'Young et
de Richardson ; 2° PO0ÊÊ sur l'Educa-
tion, 1763, inS; 3" Accueil de poèmes
tires des meilleurs auteurs, 1764, in-8,
où il a inséré plusieurs pièces de sa com-
position ; 4° f^ers anglais , français et
latins, 1767, in-folio; b° une traduction
des Epigrammesàc Martial avec un Com-
mentaire, 1782, in 4 ; et en 17 83, une
Edition latine de ce poète, précédée
d'une Introduction à la lecture des poè-
tes. 6° Analyse des langues française et
anglaise, 17 55, 2 vol. in-12. V Principes
raisonnes de la langue an glaise, ou gram-
maire anglaise rc'duite à l'analogie ,
1764, 2 vol. in-12 ; il en a donné en 1765
un Abre'gé. 1° Nouveau système de pro-
nonciation, 1 vol. in-8. 8° Recueil de
lettres, contenant sa correspondance avec
des hommes distingués dans les sciences
et dansles lettres, Samuel Johnson, ledoc-
teur Jortin, Benjamin Franck) in, Macken-
sie , etc. Elphiston est mort à Hammers-
mith le 8 octobre 1809 à l'âge de 89 ans.
EL-ROI ( David ) , imposteur juif vers
l'an 933 , s'acquit une si grande autorité
parmi ceux de sa nation , qu'il leur per-
suada qu'il était le Messie, envoyé de
Dieu pour les rétablir dans la ville de
Jérusalem et pour les délivrer du joug
des infidèles. Le roi de Perse , Bazi-Bila ,
informé de la hardiesse de ce fourbe ,
donna ordre de l'enfermer ; mais il s'é-
chappa de prison. Il fallut, pour s'en dé-
livrer, que son beau-père, gagné par de
grandes sommes d'argent , le poignardât
pendant qu^il dormait.
ELSHAIMER ( Adam ) , peintre célè-
bre, naquit à Francfort , en 1574, d'un
tailleur d'habits. Après s'être fortifié dans
sa profession par les leçons d'Ussembac ,
et surtout par l'exercice, il passa à Rome.
U chercha dansles ruines de cette métro-
ELV
pôle de l'Europe , et dans les lieux écar-
tés oii son humeur sombre et sauvage le
conduisait souvent , de quoi exercer sou
pinceau. U dessinait tout d'après nature.
Sa mémoire était si fidèle , qu'il rendait
avec une précision et un détail merveil-
leux, ce qu'il avait perdu du vue depuis
quelques jours. Il a extrêmement fini ses
tableaux. Sa composition est ingénieuse,
sa touche gracieuse , ses figures rendues
avec beaucoup de goût et de vérité. Il
entendait parfaitement le clair-obscur; il
réussissait surtout à représenter des effets
de nuit et des clairs de lune. Ce peintre
mourut en 1620, dans l'indigence et
dans la plus sombre mélancolie, produite
par son caractère et par son état. Ses ta-
bleaux se vendaient très cher; il en fai-
sait peu , aussi sont-ils fort rares. Un de
ses disciples, nommé Jacques-Ernest Tho-
MANN, de Lindau , a fait des tableaux si
approchans de ceux de son maître, que
plusieurs connaisseurs s'y sont mépris.
ELSWARDUS. Voyez Ethelwardds.
ELSWICH (Jean Herman d' ) , luthé-
rien , naquit à Rensbourg dans le Hol-
stein, en 1684.11 devint ministre à Stade,
et y mourut en 1721. Il a publié, 1° le
livre de Simonius , de litteris pereunti-
bus, avec des notes; 2° Launoïus, de va-
ria Jristotelisfortuna, auquel il a ajouté:
Schediasma , de varia Aristotclis in
scholis protestantiuni fortuna ; et Joan-
nis Jota dissertatiodehistoriaperipate-
tica , etc. , etc.
ELVIR, l'un des califes ou successeurs
de Mahomet, était fils de Pisasire, der-
nier calife de Syrie ou deBabylone. S'é-
tant sauvé en Egypte, il fut reçu comme
souverain pontife. Les Egyptiens rassem-
blèrent toutes leurs forces pour détrôner
le maître du pays, qu'ils regardaient
comme un usurpateur. Ce prince s'avisa
d'un stratagème pour détourner l'orage
qui le menaçait; il envoya reconnaître
Elvir pour souverain dans ce qui concer-
nait la religion , s'offrant à prendre de
lui le cimeterre et les brodequins, qai
étaient les marques du pouvoir absolu en
ce qui regarde le temporel. La paix fut
faite à ces conditions , vers l'an 990, et
Elvir demeura calife.
j
ELY
ELXAI , juif qui vivait sous l'empire
de Trajan , fut chef d'une secte de fana-
tiques qui s'appelaient e/.rrtiYej. Ils étaient
moitié juifs et moitié chrétiens, lis n'a^
doraient qu'un seul Dieu; ils s'imagi-
naient l'honorer beaucoup en se baignant
plusieurs fois par jour. Ils reconnais-
saient un Christ , un Jlessie , qu'ils ap-
pelaient le Grand Roi. On ne sait s'ils
croyaient que Jésus fût le Messie, ou s'ils
en admettaient un autre , qui n'était pas
encore venu. Ils lui donnaient une forme
humaine , mais invisible , qui avait en-
viron 38 lieues de haut; ses membres
étaient proportionnés à sa taille. Ils
croyaient que le Saint-Esprit était une
femme, peut-être parce que le mot, qui
en hébreu exprime le Saint-Esprit , est
du genre féminin. Elxaï était considéré
par ses sectateurs comme une puissance
révélée et annoncée par les prophètes ,
parce que son nom signifie , selon l'hé-
breu, qui est révélée. Ils révéraient même
ceuï de sa race jusqu'à l'adoration, et se
faisaient un devoir de mourir pour eus.
Il y avait encore sous Yalens deux sœurs
de la famille d'Elxaï , ou de la race bé-
nite , comme ils l'appelaient. Elles se
nommaient Marthe et Marthène, et étaient
considérées comme des déesses par les
elxaïles.
ELYMAS, nommé aussi Bar-Jésu.,
filsde Jébas, de la* province de Cypre. Il
était avec le proconsul Sergius Paulus ,
lorsque saint Paul vint à Paphos, et il mit
en usage son art magique , pour empê-
cher que le procousul n'embrassât la foi
de Jésus-Christ. Mais Paul , le regardant
d'un œil menaçant, lui prédit que la main
de Dieu allait s'appesantir sur lui, et qu'il
serait privé de la lumière pour un certain
temps. Alors ses yeux s'obscurcirent, et
tournant de tous côtés, il cherchait quel-
qu'un qui lui donnât la main. Ce miracle
toucha le proconsul , qui se rendit à la
vérité et se déclara hautement pour Jésus-
Christ.
ELYOT, gentilhomme anglais, mort
en 1 646, fut aimé et estimé de Henri VIII,
qui le chargea de diverses négociations
importantes. On a de lui uu Traité de ïé-
ducation des en fans , en anglais, 1580,
ELZ 55
in-8; son Dictionnaire latin-anglais que
l'on croit être le premier qui ait paru en
Angleterre, et d'autres ouvrages.
ELZEVIR , dont le véritable nom est
Elzevier, imprimeurs d'Amsterdam et de
Lcyde, originaires de Eiége, de Louvain
ou d'Espagne, se sont fait un nom par les
belles éditions dont ils ont enrichi la ré-
publique des lettres. — Locis , dont les
presses travaillaient dès 1 595, et dont les
éditions offrent au frontispice un aigle
portant un faisceau de sept flèches avec
celte légende concordia res parvœ cres-
cunt, ou un homme debout avec la devise
non solus qu'adopta plus tard la famille
des Elzevirs pour la mettre en tête de
toutes ses éditions; — Matthieu ou Ma-
thys, fils aîné de Louis, qui exerça à Leyde-
de 1618 à 1640; — Gilles ( ^Egidius )
deuxième fils de Louis, libraire à la Haye
en 1 519 ; — Isaac, fils aîné de Matthieu
qui fut le premier typographe de la fa-
mille (16 17-1 628); — Boxavesture, Abra-
ham et Daniel, sont les plus célèbres. Il
n'y a plus de libraires de cette famille,
depuis la mort du dernier, arrivée à Ams-
terdam en 1680. Ce fut une perte pour
la littérature. Les Elzevirs ne valaient
point les Eliennes, ni pour l'érudition,
ni pour les éditions grecques et hébraï-
ques ; mais ils ne leur cédaient point dans
le chois des bons livres, ni dans l'intelli-
gence de la librairie. Ils ont même été
au dessus d'eus pour l'élégance et la dé-
licatesse des petits caractères. Leur Fir-
gile , leur Térence , leur Nouveau Tes-
tament ^rec, 16-33, in-l 2 ; \e Psautier ,
1653, V Imitation de Jésus-Christ sans
date, le Corps de droit, et quelques autres
livres ornés de caractères rouges , vrais
chefs-d'œuvre de typographie, satisfont
également l'esprit et les yeux, par l'agré-
ment et la correction. Les Elzevirs ont
publié plusieurs fois le catalogue de leurs
éditions. Le dernier, mis au jour par Da-
niel en 1 67 4, in-l 2, en 7 parties, est gTossi
de beaucoup d'impressions étrangères
qu'il voulait vendre à la faveur de la ré-
putation que les escellentes éditions de
sa famille lui avaient acquise dans l'Eu-
rope savante. (On trouve dans \e Magasin
encyclopédique {août et septembre 180C)
56 ÈME
une notice sur les imptimeurs de la fa-
mille dei Ehevirs par Adry, auteur d'un
catalogue raisonne de toutes les c'ditions
qu'ont données les Ehevirs ^ 3 vol. in-8,
uianusci'it qui se trouve dans la biblio-
thèque de M. Sensler, possesseur d'une
riche collection d'Elzevirs : le même sa-
vant a fait un catalogue manuscrit des El*
zevirs déguisés, petit vol. in-fol. : il se
trouve dans !a bibliothèque de M; Barbier.
Le Manuel du Libraire de Jean Charles
Brunet donne une notice de la collection
d'auteurs latins , français et italiens ,
petit in-1 2, publiés par les Elzevirs. M. Bc-
rard a fait paraître sous le voile de l'ano-
nyme : Essai bibliographique sur les e'di-
tions des Elzevirs les plus précieuses et
les plus recherchées, pre'ce'de' d'une notice
sur ces imprimeurs célèbres, 1822, 1 voL
in-8.
EMBER (Paul), ministre protestant,^
né à Débreczin dans la Haute-Hongrie, a
donné plusieurs ouvrages au commence-
ment du 18* siècle : 1° Des sermons en
hongrois, Clausenbourg, nOO, in-4. 2"
Historia ccclesiœ reformates in Hunga-
ria et Transilvania, Utrecht, 1728, in-4,
avec des additions par Frédéric-Adolphe
Lampe, professeur d'histoire ecclésia-
stique dans cette ville. Charles Péterffy
dit, dans sa Collection des conciles de
Hongrie , tome I , que cette Histoire n'est
farcie que de faits apocryphes, de calom-
nies et d'invectives contre l'église ro-
maine.
EÎVIBRY. ^oyes Thomas.
EMERICH ou Eymkrick. f^oyez Ni-
colas.
*EMÉRIGON (Balthazar-Marie), cé-
lèbre avocat du parlement d'Aix, mort
conseiller à l'amirauté de Marseille en
1785, âgé de GO ans, est auteur d'un
Traite' des assurances et des contrats à
la grosse, Marseille, 1784, 2 vol. in-4.
C'est le meilleur traité que nous ayons sur
cette matière ; on y trouve tout ce qui re-
garde les assurances anciennes et mo-
dernes. On a encore d'Eraérigon un petit
Commentaire de l'ordonnance de la ma-
rine du mois d'août 17 61, Marseille, 17 80,
2 vol. in-1 2, reimprimé à Paris 1803,
3 vol. in-1 2, et plusieurs mémoires csti-
ÊiVÎË
mes et recherchés sur des questions ma-
ritimes.
* EMERSON (Guillaume ou William)^
mathématicien anglais, né en 1701, à
Hurtworth, dans le comté de Durham^
s'était d'abord voué à l'enseignement }
mais les difficultés qu'il éprouvait à ren-*
dre verbalement ses pensées le lui firent
bientôt abandonner pour se livrer à la
composition. Il affectait de l'originalité
dans son vêlement, dans son maintien et
dans toutes ses habitudes. Il mourut dé
la pierre le 26 mai 1782, laissant un grand
nombre d'ouvrages, où l'on trouve bcau^
coup de clarté et de concision, mais peu
d'invention , et une sorte de rudesse dd
stile conforme à ses manières. Les prin^
cipanx ont été imprimés sous le titre de
Ci/clomathesis , ou Introduction facild
aux diverses branches de mathéma-'
tiques, 1770, 10 vol. in-8.
• EMERY (Jacques Condé), supérieuf
général de la congrégation de Saint-Sul-»
pice, naquit à Gex le 26 août 1732. Il
était fils du lieutenant-général criminel
au Bailliage de cette ville. Après avoir
commencé ses études chez les jésuites àd
Màcon, il les termina vers n.SO dans la
petite communauté de Saint-Sulpice k
Paris. Ordonné prêtre en 1 7.'j6, professeur'
de dogme au séminaire d'Orléans en 1 7 â9<
professeur de morale au .séminaire de
Lyon peu de temps après , il se fit rece-
voir docteur en théologie en 1 7G4 à l'uni-
versité de Valence; fut nommé en 17 70
supérieur du séminaire d'Angers et vi-
caire général de ce diocèse, et devint en
17 82 supérieur-général de la congréga-»
tion de Saint-Sulpice, après la démission
de l'abbé Legallic, 8* supérieur général.
En 1784 il reçut l'abbaye de Bois-Groland
dans le diocèse de Luçou, plus honorable
que lucrative. Dans ces diverses fonc-
tions, l'abbé Eniery fit preuve de toutes
les qualités qu'il fallait réunir pour les
remplir dignement ; on remarquait sur-
tout en lui un mélange de douceur et de
fermeté , une grande connaissance des
hommes et des choses, un coup d'œil
sûr et l'esprit d'ordre le plus exact ; il
y ajoutait encore un jugement sain et un
savoir ti-ès étendu. A l'approche de la rc-
EME
volution, il conçut de vives inquit'tudessur
le sort que les novateurs destinaient à la
religion; il n'en montra que plus de zclc
pour les intérêts qui lui étaient confiés.
Il fonda en 1789 un séminaire à Balti-
more , qui venait d'être érigé en évêché ,
et où il envoya plusieurs prêtres de Saint-
Sulpice. Bientôt il fut enlevé à ses reli-
gieuses occupations : son séminaire fut
fermé et lui-même jeté dans la prison de
Sainte-Pélagie d'où il sortit peu de temps
apVès , pour être bientôt arrêté de nou-
veau, et renfermé à la conciergerie qui
était le premier pas vers l'échafaud. Pen-
dant les 16 mois que dura sa captivité, il
s'occupait du soin de consoler les malheu-
reuses victimes de la révolution; il inspi-
rait à celles qui étaient destinées à la mort
le courage et la résignation qui rendent
moins pénibles pour un chrétien les ap-
prêts du supplice : son ministère évangé-
lique était connu des révolutionnaires ;
l'oa entendit Fouquier-Tinville , qui ce-
pendantîivait juré de le faire mourir et qui
différait de l'envoyer à l'échafaud, répéter
dans son langage trivial et sanguinaire :
Ce petit prêtre empêche les autres de
crier. Les évêques constitutionnels La-
mourette et Fauchct ayant été proscrits et
jetés dans la même prison que l'abbé
Emery, celui-ci eut le bonheur de les ra-
mener au repentir pour les fautes nom-
breuses qu'ils avaient commises. Après la
révolution du 9 thermidor au 2 (27 juillet
1794), il fut rendu à la liberté. M. de
Juigné, alors en exil, l'avaitnommé grand-
vicaire : l'abbé Emery administra dès lors
presque seul le diocèse de Paris; sa con-
duite modérée lui concilia tous les suf-
frages : sa prudence , nécessaire dans les
circonstances où il se trouvait , lui valut
la confiance du clergé et des fidèles : aussi
à peine pouvait-il suffire à ses nombreux
travaux et à la correspondance très éten-
due qu'il était obligé d'entretenir. Nous
ne répondrons point aux accusations qui
ont été faites contre lui : sa condescen-
dance ne fut jamais faiblesse , et le re-
proche d'ambition qu'on lui a adressé est
une calomnie. Forcé par la révolution du
18 fructidor an 5 (4 septembre 1797), de
se condamner encore quelque temps à la
V.
EME 57
retraite, il siit par quelques écrits ne
point la rendre stérile. ï.orsque Buona-
parte songea à rendre à la France le culte
catholique , les conseils de l'abbé Emery
ne furent point demandés; et, quoiqu'on
en ait dit, il fut entièrement étranger au
concordat qu'il accepta avec résignation,
comme tant d'autres, parce qu'il émanait
du saint Siégé. En 1802 le gouvernement
lui offrit l'évêché d'Arras qu'il refusa : il
ne fit qu'une demande ; ce fut de rétablir
le séminaire de Saint-Sulpice ; ce qui lui
fut accordé. Nommé vicaire-général de Pa-
ris , et conseiller de l'université , il fit par-
tie d'une commission composée de deux
cardinaux et de cinq évêques, qui était
chargée de s'occuper des intérêts de l'E-
glise. Tous les ecclésiastiques savent avec
quel courage il parla dans ces réunions
où furent prises des résolutions qu'il ne
voulut pas sanctionner par sa signature.
L'abbé Emery était très attaché au saint
Siège : personne plus que lui ne déplora
hautement les scandaleux débats que le
maître de la France avait soulevés contre
le pape. Son attachement au pontife per-
sécuté , son refus de signer les délibéra-
tions de la commission dont il était mem-
bre, lui attirèrent la disgrâce de Buona-
parte qui lui enjoignit en 1 8 1 0 de quitter
son séminaire, où il rentra cependant
quelque temps après. L'abbé Emery, tour-
menté par tant de secousses violentes, fa-
tigué par des travaux qui se renouvel-
laient tous les jours, mourut le 28 avril
1 8 1 1 à Paris, et fut enterré dans la maison
du séminaire à Issy. On lui doit quelques
ouvrages dont quelques-uns ont paru sous
le voile de l'anonyme : 1° L'Esprit de
Leibnitz., Lyon, 17 72, 2 vol. in-12, réim-
primé en 1803, sous le titre de Pensées
de Leibnitz sur la religion et la morale,
2 vol. in-8. L'auteur se proposa de réunir
dans cet ouvrage tout ce que Leibnitz
avait écrit sur la religion, afin de prouver
que l'incrédulité n'était pas, comme les
philosophes modernes s'en vantaient , le
partage de toute tête pensante, et qu'on
pouvait ici opposer philosophe à philo-
sophe. 2° L'esprit de sainte Thérèse^
Lyon, 1775 et 1779, iu 8, et 1820, 2 vol.
iu-1 2. C'est un recueil de ce que l'auteur
4-
58 EME
R jugé de meilleur pour la pratique dans
les (Écrits de la sainte. 3° Conduite de VE-
(flise dans la réception des ministres de
Li religion, qui reviennent de l'he'rc'sie et
du schisme, t797 et 1801, in-12. 4° Le
christianisme de François Bacon, ou
Pensc'cs et scntimens de ce grand homme
sur la religion, 1799, 2voK in-12. Le dis-
cours préliminaire , la vie de Bacon et
deux e'claircissemens qui soûl à la fin de
l'ouvrage, attestent la solidité, la sagesse
et la critique de l'auteur. L'auteur a eu
le même but que dans son Esprit de
Leibnitz. 5" Une édition de la Défense de
la Re'vélation d'Euler contre les objec-
tions des esprits forts , suivie des pen-
sées de cet auteur sur la religion , sup-
primées dans la dernière édition de ses
lettres à une princesse d'Allemagne ,
Paris, 1805, in-8. Cet ouvrage d'Euler,
écrit en allemand et traduit en français ,
était devenu extrêmement rare ; ainsi c'est
un nouveau service que l'ahbé Emery a
rendu à la religion, en ressuscitant, pour
ainsi dire, un monument si précieux. Ce
qui distingue particulièrement les ré-
flexions d'Euler , c'est la clarté réunie à
la précision; c'est une certaine simplicité
qui accompagne presque toujours les pen-
sées véritablement profondes. Celles sur-
tout où il fait tourner ses connaissances
astronomiques en preuves de la religion,
sont très remarquables. 6° Nouveaux
opuscules de Fleunj, Paris, 1807, in-12.
lis renfermentdeséclaircissemens sur l'as-
semblée du clergé de 1682, et de judi-
cieuses réflexions sur les quatre articles
qui y furent dressés. 7" Pensées de Des-
cartes sur la religion et la morale, Paris,
1811, in-8. M. Emery se proposait de
joindre Newton aux philosophes dont il
avait fait connaître les sentimens; mais
il n'eut pas le temps de terminer ce tra-
vail. Il a été l'éditeur de plusieurs ou-
vrages de M. de Luc, ainsi que des Lettres
à un évêque sur divers points de morale
et de discipline, par M. de Pompignan,
Ï802, in-8. Il a aussi inséré plusieurs ar-
ticles dans les Annales philosophiques.
* EMERY (Jean-Antoine-Xavier), né
à Baucaire en 1756, fut conseiller à la
cour des aides de Montpellier. Il sut ré-
EMI
sister au torrent de la révolution , et con-
server au milieu du délire de ces temps
malheureux les principes de fidèle sujet
et de chrétien. Son innocence et sa ver-
tu le trahirent bientôt; il fut arrêté
comme contre-révolutionnaire, et jeté
dans les prisons de Nîmes, où il mourut
le 30 juillet 1794. On a de lui un ouvrage
intitulé Traité des successions, obli-
gations et autres matières contenues
dans le 3* et le 4* livre des Institutes de
Justinien , enrichi cPun grand nombre
d'arrêts récens du parlement de Tou-
louse , 1787 , in-8. Cet ouvrage atteste
d'une manière avantageuse le savoir de
l'auteur en matière de jurisprudence.
EMILE ( Paul ) , général romain , fils
de Paul-Emile, tue à la bataille de Can-
nes , obtint deux fois les honneurs du
consulat. Dans le premier, il délit en-
tièrement les Liguriens , l'an 182 avant
J. C, avec une armée bien moins forte
que la leur. Dans le second , auquel il
parvint à l'âge de près de 60 ans, il
vainquit Persée, roi de Macédoine, ce
qui lui mérita le surnom de Macédoni-
que , réduisit son état en province ro-
maine, démolit 70 places qui jivaient
favorisé les ennemis, et retourna à Rome
comblé de gloire. Le triomphe qu'on lui
décerna, dura 3 jours ; Persée en était le
triste ornement. Paul Emile avait pleuré
sa défaite , et l'avait consolé par des rai-
sons et des caresses. Il remit aux ques-
teurs tous les trésors de Persée, et ne
conserva de tout le butin que la blilio-
thèque de ce roi malheureux. Ce grand
homme mourut l'an 168 avant J. C.
EMILE ( Paul ) , célèbre historien ,
était de Vérone. Le nom qu'il s'était fait
en Italie porta le cardinal de Bourbon à
l'attirer en France. Il y vint sous le règne
de Louis XII , et il obtint un canonicat
de la cathédrale de Paris. Il mourut dans
cette ville en 1529. C'était un homme
d'une piété exemplaire et d'un travail in-
fatigable. On a de lui une Histoire de
France en latin , 2 vol. in-8 , et in-folio,
1544, chez Vascosan, réimprimée en
1601 , in-fol., traduite en français par
Jean Renard, 1043, in-folio. Juste Lipse
en fait un grand éloge. Le stilc en est
EMI
pur, mais trop laconique, et souvent
obscur et embarrasse. Il y a trop de ha-
rangues pour un abrégé qui est d'ailleurs
assez décharné. S'il est court en quelques
endroits , il est trop diffus dans d'autres,
comme quand il parle de la première et
de la deuxième croisade. On lui reproche
aussi de donner dans les fables. Il montre
trop d'attachement aux Italiens ; aussi
Beaucaire disait-il qu'il était plutôt Ita-
loriim buccinnatorem , quant Gallicœ
historiée scriptorem. Cependant , malgré
ces défauts , il jouit de la gloire d'avoir
le premier débrouillé le chaos de notre
vieille histoire , et d'avoir défriché ses
champs incultes. Cette Histoire en dix
livres commence à Pharamond , et finit à
la 6* année de Charles VIII, en 1488.
Arnoul du Ferron en a donné une mau-
vaise continuation.
EMILIANI ( S. Jérôme ) , fondateur
des clercs-réguliers , dits somasques , né
à Venise d'une famille patricienne , porta
les armes pendant sa jeunesse ; ayant été
fait prisonnier de guerre et délivré d'une
manière toute extraordinaire , il prit la
résolution de quitter les armes pour se
dévouer entièrement au service du grand-
Maître des armées. De retour à Venise ,
touché de compassion à la vue des or-
phelins qui manquaient de tout , il en re-
tira un grand nombre dans une maison ,
oîi il leur prodigua tous les soins pour
les former à la vertu et pour les rendre
utiles à la société. Le bienheureux Caje-
tan , et Pierre Caraffa, depuis pape sous
le nom de Paul IV , louèrent beaucoup
son zèle , et l'engagèrent à faire dans
d'autres villes des établissemens sembla-
bles à celui qu'il venait de faire à Venise.
Après en avoir formé à Brixen , à Beigame
et ailleurs , il se retira dans un petit vil-
lage près de cette ville , nommé Somas-
que , où il institua sa congrégation qui
fut appelée de ce nom. La fin de cette
congrégation est l'éducation des orphe-
lins, et l'instruction delà jeunesse. Cet
institut fut approuvé par Pie V , Sixte V
et Clément VIII. Il passa le reste de ses
jours dans les exercices de la plus grande
charité envers le prochain , et mourut
l'an 1 531 , âgé de 56 ans. Benoît XIV le
EMI 5g
béatifia. Augustin Turtura et André
Stella , l'un prêtre , l'autre général des
somasques , ont écrit sa vie.
EMILIEN , ( Marcus Caïus JuUus
jEmilius, ^milianus), né l'an 207 ,
d'une famille très obscure de Mauritanie,
se distingua dans l'arm-ée romaine par
son courage , et s'avança de grade en
grade jusqu'à celui de général. Il com-
battit avec tant de valeur contre les
Perses, que les soldats le proclamèrent
empereur en 254 , après la mort de Dèce. ^
Gallus et Vaîérien étaient alors les légi-
times maîtres de l'empire ; il marcha
contre eux , les vainquit , et tandis qu'il
se préparait à les combattre de nouveau,
il apprit que leur armée les avait mas-
sacrés et l'avait reconnu empereur. Ce
titre lui fut confirmé par le sénat ; mais
il ne jouit pas long-temps de la puissance
souveraine. Volusien qui avait reçu de
ses soldats le sceptre impérial , vint at-
taquer son rival près de Spolette. L/es
troupes d'Emilien , fatiguées d'avoir tou-
jours les armes à la main , le massacrè-
rent sur un pont de cette dernière ville ,
appelé depuis lors le Pont sanglant. Il
régna très peu de temps. Ce n'étaitqu'un
soldat de fortune , plein à la vérité de
feu et de valeur, mais qui ignorait la po-
litique et les maximes du gouvernement.
EMILIEN (Alexandre), l'un des 29
tyrans qui s'élevèrent dans l'empire ro-
main vers le milieu du 3* siècle , était
lieutenant du préfet d'Egypte. H est connu
dans les martyrologes par le zèle barbare
avec lequel il persécuta les chrétiens
dans cette province. Une sédition qui
s'éleva dans Alexandrie en 203, lui four-
nit l'occasion de prendre le titre d'empe-
reur , que les .alexandrin , naturellement
inquiets et ennemis du gouvernement
de Gallien, lui confirmèrent. Emilien
parcourut la ïhébaïde et le reste de l'E-
gypte , où il affermit sa domination. Il
en chassa les brigands , à la grande satis-
faction du peuple , qui lui donna le nom
A' Alexandre. A l'exemple du héros Ma-
cédonien , il se préparait à porter les ar-
mes dans les Indes, lorsque Gallien en-
voya contre lui le général Thcodote» à
la tète d'une armée. Il fut vaincu dans
6o EMM
le premier combat , et contraint de se
retirer à Alexandrie en septembre 263.
Les hiibitaus de cette ville le livrèrent à
Théodote, qui l'envoya à Gallicn. Ce
prince le fit étrangler dans sa prison , à
la fin de la même année.
EMMA, fille de Richard II, duc de
Normandie , femme d'Ethelred , roi d'An-
gleterre, et mère de .saint Edouard, eut
beaucoup de part au gouvernement sous
le règne de son fils, vers l'an 1046. Le
comte de Kent, qui avait eu une grande
autorité sous plusieurs règnes, conçut
contre elle une si violente jalousie , qu'il
l'accusa de plusieurs crimes. Il gagna
quelques grands seigneurs qui confir-
mèrent ses accusations auprès du roi. Ce
prince crut trop facilement que sa mère
était criminelle, et alla la trouver inopi-
nément, pour lui ôtcr tout ce qu'elle
avait amassé. Emma eut recours dans cette
disgrâce à l'évêque de Winchester, son
parent ; mais ce fut une nouvelle matière
de calomnie pour ses ennemis. Le comte
de Kent lui fit un crime des visites trop
fréquentes qu'elle rendait à cet évêque,
et l'accusa d'avoir un mauvais commerce
aveclui. Leroi continua à être crédule : il
fallut que la princesse se justifiât parles
moyens en usage en ce temps-là, c'est à-
dire qu'elle marchât sur des fers ardens.
On ne sait comment elle soutint cette rude
épreuve : on sait seulement que le roi
ayant reconnu son innocence, se soumit
à la peine des pénitens.
EMMANUEL, dit Ze Grand, roi de
Portugal, monta sur le trône en 1495,
après Jean II , son cousin , mort sans en-
fans. Les prospérités de son règne , le
bonheur de ses entreprises, lui firent
donner le nom de Prince très fortuné.
Yasco de Gama , Améric Vespuce , Alva-
rès Cabrai et quelques autres , découvri-
rent sous ses auspices plusieurs pays in-
connus aux Européens. Son nom fut porté
par ces navigateurs dans l'Afrique , dans
l'Asie , et dans celte partie du monde
qu'on a depuis appelée Amérique. Le
Ilrésil fut découvert en 1500. Ce fut une
source de trésors pour les Portugais, aussi
appcllenl-ils le règne d'Emmanuel, le
siècle d'or du Portugal. C'ciit lui qui bà-
EMM
tit le superbe palais de Bélem, et fonda
le monastère attenant , où sont les tom-
beaux des rois de Portugal. Tous ses ou-
vrages portent l'empreinte de la magni-
ficence et du goût , de son génie vaste
et grand et de sa judicieuse administra-
tion. Ce prince mourut en 1521 , à 63
ans , regretté de ses sujets qu'il avait en-
richis , et béni d'une multitude de na-
tions infidèles, qu'il avait civilisées et
amenées au christianisme , mais détesté
des Maures, qu'il avait chassés, et des
Juifs qu'il avait obligés de se faire bapti-
ser. Emmanuel aimait les lettres et ceux
qui les cultivaient. Il laissa des Mémoi-
res sur les Indes. On voit à Bélem son
mausolée , avec cette inscription :
Littore al) orridiio qui priniùni ad liltora lolis
Extendit rullum nolitiamiiue l)ci ,
Tôt regeK doiniti cui stibiiiîsOre tiarofl
Conditur hoc tumulo inadnius Emmanuel.
La P^ie de ce prince a été écrite en por-
tugais par don de Goës, Lisbonne, 1566
et 15G7, 2 vol. in-fol., retouchée par
J.-B. Lavancha, Lisbonne, 1619, in-fol. ;
cette édition est tronquée et l'on préfère
la première. Mais on fait encore plus de
cas de l'ouvrage d'Osorio, intitulé : De
rébus Emmanuelis , Lusitaniœ régis ,
Lisbonne, 1571, in-fol. Simon Goulard
l'a traduit en français, Genève, 1581,
in-fol. , et Paris , 1 587 , in-8.
EMIVIAIVUEL - PHILIBERT , duc de
Savoie, né en 1528, de Charles III, fut
d'abord destiné à l'église ; mais après la
mort de ses deux frères , on lui laissa
suivre son inclination pour les armes.
Son courage lui mérita le commandement
de l'armée impériale au siège de Metz. Il
gagna en 1557 la fameuse bataille de
Saint-Quentin sur les Français; la vic-
toire fut si complète , qu'un général es-
pagnol opina, dans le conseil de guerre,
pour aller droit à Paris, et mourut de
chagrin de voir son avis rejeté. La paix
ayant été conclue à Catcau-Cambresis , il
épousa en 1559, Marguerite de France,
fille de François I, et sœur de Henri II.
Ce mariage lui fit recouvrer tout ce que
son père avait perdu de ses états. Il les
augmenta ensuite par sa dextérité et sa
valeur. 11 mourut en 1580, ne laissant
EMM
qu'un fils, Charles-Emmanuel ( voyez ce
mol).
* EMMERICH ( Frédéric-Charles-Thi-
motée ) , ministre et prédicateur protes-
tant, né à Strasbourg, le 15 février 17 86.
Après avoir terminé ses études, il fit, à
l'âge de vingt-un ans , une savante dis-
sertation, à la suite d'un vovage qu'il fit
dans l'intérieur de l'Allemagne ; il vint
en France , et demeura pendant six mois
à Paris , oii il lit la connaissance des sa-
vans les plus distingués. De retour à
Strasbourg , il fut nommé supérieur du
collège de Saint-Thomas. En 1 802 , il ob-
tint la chaire des langues latine, grecque
et hébraïque, au gymnase de cette vilie.
En 1812, il devint professeur agrégé du
séminaire protestant, où il donna un cours
d'histoire ecclésiastique. En 1819, il pro-
fessa la même science à la faculté de
théologie, qu'on venait d'établir en vertu
d'une ordonnance royale. Il prêcha sou-
vent dans le temple de Saint-Thomas, où
son éloquence attirait de nombreux au-
diteurs ; sa bibliolhèque était une des
plus riches de l'Alsace, il se proposait
de donner une histoire politique de tous
les temps et de tous les pays , qui était
le résultat de longues et pénibles recher-
ches, lorsqu'il fut surpris parla mort,
le l<"^ juin 1820, à l'âge de 34 ans. On a
de lui une dissertation, 1° De Evangc-
liis secundum Hebrœos , Egyptios , at-
qiie Jusiini martyris, Strasbourg, 1 807 ;
2° Quel est pour nous lebut du Jubilé de
la réformation ? { en allemand ) ibid. ,
1 8 1 G ; 3° Deux discours prononcés par
F. - Ch. - T. Emmcrich , ibid. , 1817,
Treultel et Wurtz ( en allemand ); 4"
Choix des sermons posthumes du doc-
teur F .-Ch.-T. Emmerich; ibid., 1821.
* EMMERY ( Jean -Louis -Claude ) ,
comte de Grozyeulx , pair de France , est
né à Metz le 26 avril 1752, d'un procu-
reur au parlement. Il exerçait dans la
même ville la profession d'avocat avec la
plus grande distinction, lorsqujen 17 80
il fut dépulé par le tiers-état de Metz aux
l'Hals-généraux. Il embrassa les principes
de la révolution, mais avec modération.
11 faisait partie du comité militaire dont
il fut souvent rapporteur \ trois l'ois il fut
EMM 6r
appelé à la présidence. En 1790 il de-
manda une loi sur la liberté de la presse;
et lorsque l'on eut fait prêter le serment
civique à Louis XVI , il demanda que
chaque député remplît dorénavant la
même formalité. Le 28 juillet , il accusa le
cardinal de Rohan, évêque de Strasbourg
et les princes allemands qui possédaient
des fiefs en Alsace, d'entretenir des
troubles dans cette province. A l'époque
de l'insurrection de la garnison de Nancy,
il provoqua, comme rapporteur de la com-
mission chargée d'examiner cette affaire,
le décret qui ordonnait la poursuite de
ceux qui y avaient pris part et surtout
des principaux moteurs. Ce fut lui qui
accusa M. de Bouille comme l'un des au-
teurs du voyage du roi à Varennes , de-
manda son arrestation , et fit ordonner
que trois commissaires seraient envoyés
à Varennes pour ramener la famille royale.
Il rédigea aussi le serment que l'armée
devait prêter pendant la suspension du
monarque. Peu de temps après il fit ven-
dre plusieurs décrets sur le régime mili-
taire, les tribunaux et les colonies. Il s'é-
tait aussi opposé à la destiuction de l'hô-
tel des Invalides. Après la fin de la session
il fut nommé juge au tribunal de cassa-
tion , et le 10 mai 1 792 il rendit compte
à l'Assemblée législative des travaux de
ce tribunal. Considéré comme suspect
sous le régime dp la terreur , il fut arrêté
et ne recouvra sa liberté qu'après la mort
de Robespierre ( 9 thermidor — 24 juillet
1794 ). Le département de la Seine le
nomma député au conseil des Cinq-cents
( 1797 ). Dans cette assemblée il professa
encore des principes modérés , parla con-
tre plusieurs loistyranniques desgouver-
nemensprécédens qu'il fit abroger, notam-
ment contre celle qui déppuillait de leurs
biens l€s parens des émigrés , et fit suspen-
dre la loi du divorce dont on faisait un
abus scandaleux. Au 18 fructidor il était
depuis quelque temps de la coniniissioii
des inspecteurs : il ne fut point compris
dans ceux qui furent proscrits ; srulement
son élection fut annulée. Eloigné des
affaires publiques, il resta dans la re-
traite jusqu'au 18 brumaire ( 9 octobre
17 90 ). Buonaparlc l'appela au conseil
6a EMM
d'clat ( section judiciare ). Emmery fut
lin des collaborateurs du code civil ; il se
vit charge l'année suivante de l'examen
des papiers saisis chez M. Hyde de Neu-
ville qui était l'un des a^ens des Bour-
bons : la police d'alors fit imprimer la
plupart des lettres que l'on trouva chez
ce royaliste , sous le titre de Correspon-
dance anglaise. Dans le mois d'août
1803 , les électeurs de la Moselle appelè-
rent Emmery au Sénat conservateur dont
il fit partie jusqu'à la 1'" restauration.
Il signa l'acte de déchéance deBuonaparte
( 5 avril 1814 ), et le 4 juin suivant son
nom fut placé sur la 1" liste des pairs.
Pendant les ccnt-jours il resta entière-
ment hors de la scène politique ; rentré
à la chambre des pairs , il se plaça au
côté gauche ; on se rappelle qu'à l'épo-
que de la proposition de M. Barthélémy
sur la loi des élections qu'il soutint , il
se fit porter malade et infirme à la cham-
bre pour donner son vote. Il est mort
dans sa terre de Crozyeulx près de Metz
le 16 juillet 1823, à l'âge de 71 ans. On
peut dire que ses opinions ne furent pas
ou ne parurent pas toujours entièrement
monarchiques; son caractère ne semble
pas avoir été très ferme, et les circon-
stances agissaient sur lui , mais jamais
avec assez de force pour lui faire suivre
le torrent de la révolution. On peut lire
les Mémoires de M. de Bouille dans les-
quels se trouve l'éloge d'Emmery, et les
Mémoires de Weber ( tom. 2 , p. 7 1), at-
tribués à M. de Fontanges archevêque de
Toulouse , où Emmery est cité comme un
des Reviseurs, c'est-à-dire, comme un
de ceux qui cherchèrent par tous les
moyens à faire revivre la popularité de
Louis XVI, et de l'investir d'une partie
de son ancien pouvoir.
* EMMET ( Thonias-Addis ), médecin,
ensuite avocat, naquit vers l'an 17G3 à
Dublin. Après avoir étudié la médecine,
il se livra à la jurisprudence et devint
avocat-général de l'état de New-York. Il
avait élé l'un des promoteurs de l'asso-
ciation des Irlandais unis , et avant d'ob-
tenir l'autorisation de passer aux Etats-
l'nis, il avait subi de longues persécu-
tions dont on trouve l'expose dans l'écrit
EMM
publié par M. Sam. L. Mitchill, .sous ce
titre : A Discourse on the life ond cha-
racter ofTIwmas-Addis Emmet, New-
York, 1828, in-8. Eramet est mort le
14 novembre 1827 à New-York. Il a
laissé Pièces of irish histor , illustrative
of the condition of the calholics of Ire-
land, etc., insérées par Mac-Neven dans
un Recueil qu'il publia en 1827 à New-
Y'ork. Il a fait paraître aussi quelques
Opuscules de médecine.
EMMIUS ( Ubbo ) , naquit à Gretha ,
village delà Frise orientale, en 1647.
Ses talens lui méritèrent le rectorat du
collège de Norden , et de celui de Léer ;
enfin la place de premier recteur de l'a-
cadémie de Groningue , et celle de pro-
fesseur en histoire et en langue grecque.
Quoique plusieurs princes et plusieurs
villes cherchassent à le posséder , il ne
voulut jamais quitter la chaire de Gronin-
gue , préférant une vie tranquille et une
condition médiocre , à la brillante folie
de l'ambition. Lorsque ses infirmités ne
luipremirentplusdetravailleren public,
il s'occupa dans son cabinet à plusieurs
ouvrages. Les plus estimables sont : 1"
Fétus Grœcia illustraia, en 3 vol. in-8,
Elzevir , 1 626 , très utile à ceux qui veu-
lent connaître l'ancienne Grèce. Cet ou-
vrage a reparu dans les Antiquités grec-
ques de Gronovius. 2" Décades rerum \
Frisicarum, in-folio, Elzevir, 1616. ■
Emraius, en bon critique, montre que
la plupart des choses qu'on a débitées sur
l'antiquité des Frisons , ne sont que des
fables. Cette histoire est estimée ; elle le
serait davantage, si son zèle pour le pro-
testantisme ne lui avait pas fait altérer
bien des faits, et s'il avait pris la peine
d'indiquer les sources où il a puisé ce
qu'il avance. 3" Opus chronologicum ,
Groningue, 1619, in-fol. C'est une chro-
nologie depuis la création du monde
ju-squ'au temps de l'auteur, avec des pro-
légomènes sur la chronologie romaine à
la tête de l'ouvrage. Ils sont écrits avec
autantdejustcssequedc précision. ii° Ap-
pendix gencalogica , Groningue , 1 620 ,
in-folio. Ce sont des tables généalogi-
ques qui font une suite de l'ouvrage pré-
cédent. Ce savant mourut à Groningue ,
EMP
en 1625, à 79 ans. Martin Hanckius a
donné sa Fie dans le Liber de scriptori-
bus romanis.
*EMON, enlalin £mo, premier abbé
de Weruni , monastère de l'ordre de Prc-
montré, près Groningue dans la Frise,
autrement nommé le Jardin fleuri, //or-
tus floridus , vivait à la fin du 1 2* siècle
et au commencement du 13''. Don Rivet
rapporte « qu'aidé de son frère, il copia
» tous les auteurs des arts libéraux, et les
» livres de théologie et de droit qu'ils
)) avaient vus à Paris , à Orléans et ail-
i> leurs dans le cours de leurs études. »
11 ajoute (' que dans la suite, le désir
» d'enrichir sa bibliothèque le porta à y
» employer des religieuses , ayant pour-
» tant l'attention de ne leur faire trans-
» crire que les livres de la Bible et les
» écrits des .saints Pères , comme étant
» plus à leur portée. » Emon , presuadé
qu'un monastère sans livres est comme
un arsenal sans armes , parvint par ce
moyen , non- seulement à fournir la bi-
bliothèque de son abbaye d'un grand
nombre d'ouvrages, mais encore à en
procurera d'autres maisons de son ordre.
L'abbé Emon mourut subitement en 1237.
Lui-même a écrit sur plusieurs sujets.
Nous ne citerons de lui que sa Chronique,
depuis 1203 jusqu'en 1237, continuée
par Menko, 5* ablié de Werum, et en-
suite par un anonyme, jusqu'en 1292;
inédite jusqu'en 1700, elle fut insérée
par Ântoiiie Matthieu dans ses Analectes,
tome 3 , et réimprimée par l'abbé Hugo ,
avec des notes dans le 1" tome des Sa-
crée antiquiiatis monumenta , pag. 129 ,
Etival, 1725, 2 vol. ii.-fol. Il ne faut
point confondre l'abbé Emon avec un au-
tre Emon, son cousin-germain, qui dota
de ses biens l'abbaye de Werum , où il
prit aussi l'habit de l'ordre dePrémontré,
et qui mourut en 1215.
* EMPECINADO ( Don Juan Martin ,
surnommé L'), fameux chef de guérillas
espagnols, naquit sur la fin du 18" siècle
d'un pauvre paysan de la Nouvelle-Cas-
tillc. En 1793, il servit dans la guerre
contre la France. La paix le ramena dans
ses foyers oii il reprit ses travaux cham-
pêtres. En 1808 , l'invasion de son pays
EMP 63
par les Français lui inspira le dc'sir de les
combattre , non plus comme soldat, mais
comme partisan. Il se je!a donc dans les
montagnes avec quelques-uns de ses com-
pagnons, harcela les ennemis , les surprit,
et les mit souvent en déroute, sans avoir
livré de combat. Bientôt il se vit à la tête
d'une troupe considérable , mais varia-
ble suivant les circonstances , à un poin
tel que souvent il était sans ses cama-
rades , et qu'à un signal donné plusieurs
milliers se trouvaient réunis sur le même
point ; sa valeur lui mérita le grade de
maréclial-de-camp. Ferdinand en mon-
tant sur le trône le confirma dans ce rang.
Bientôt l'Empecinado se mêla d'opinions
politiques : il présenta même au roi un
Mémoire pour lui rappeler les services
des corlès et le prier de gouverner d'a-
près les principes émis par cette assem-
blée libérale. Arrêté, puis exilé à Yalla-
dolid , il se trouvait dans cette ville sous
la surveillance de la police à l'époque de
l'insurrection de Riégo à laquelle il se
rallia sur-le-champ. Il fut nommé com-
mandant en second de l'armée des insur-
gés, puis chargé du gouvernement de
Zamora, et enfin envoyé contre le curé
Mérino qui avait pris les armes en faveur
des royalistes. Après avoir remporté quel-
ques succès qui donnèrent à la cause
révolutionnaire une durée de quelques
instans , il se battit contre les Français
dans le corps du comte de l'Abisbal en
Estramadure où il fut encore opposé au
curé Mérino qui servait dans l'armée du
général Eourmont. L'Empecinado tomba
entre les mains des vainqueurs : jeté dans
une prison , jugé et condamné à mort
par l'alcade de Tuédo , il fut pendu à
Ruéda le 19 août 1825, non sans s'être
long-temps débattu contre ses bourreaux.
Son nom de l'Empecinado n'est qu'un
sobriquet; il veut dire couleur de poix ,
crotte' ou enduit de poix ; il est commun
à tous les habitans de son village, parce
que beaucoup d'entr'eux sont cordon-
niers, ou parce que c'est un endroit cou-
vert de boue ; Ferdinand VII lui permit
de l'ajouter à son nom pour rappeler
l'époque où il n'était connu que par ce so-
briquet , et pendant laquelle il s'est illus-
64 EMP
Iré par sa fidélité et par ses exploits.
EMPEDOCLE d'Agrigenle en Sicile,
philosophe, poète, historien, était dis-
ciple de Télauges , qui l'avait été de Py-
thagorc. Il adopta l'opinion decc philoso-
phe sur la transmigration des âmes , et la
mit en vers dans un poème qui apparem-
ment se ressentait du désordre de la tête de
l'auteur. Empédocle y faisait l'histoire des
différeiis changemensdesonâme. Il avait
commencé par être fille, ensuite garçon,
puis arbrisseau, oiseau, poisson. Son
stile ressemblait beaucoup (si l'on en croit
Aristote , cité par Diogène Laërce ) à ce-
lui d'Homère. Il était plein de force , et
riche en métaphores et en figures poéti-
ques. Ses vers furent chantes aux jeux
olympiques , avec ceux d'Homère , d'Hé-
siode et des plus célèbres poètes. Il disait
quelquefois des choses fort raisonnables.
Il reprochait à ses concitoyens de courir
aux plaisirs , comme s'ils eussent dû
mourir le même jour ; et de se bdtir des
maisons comme s ils eussent cru toujours
vivre. La plus commune opinion est que
ce philosophe, dans un mouvement de
folie, voulant, comme dit Horace, pa-
raître un dieu , se jeta dans les flammes
de l'Etna , vers l'an 440 avant J.C.
Deus iinmortalis haberi
Dum cupit Eaipedoclea , ardeiitein frigidus £(nam
Iiisiluil.
Quelques écrivains distinguent Empédo-
cle le philosophe , d'un autre qui était
poète. Les fragmens des écris d'Empédo-
cle ont été réunis par M. Sturz, dans le
recueil intitnlé Empedoclis Agrigen-
tini de vita et pliilosophia ejus exposuit,
carminum reliquias colle g it M. Ferd.
Gu/i/. 5fMrz, Leipsick, 1805, 181 G, 1vol.
in-8 ; il faut y joindre Empedoclis et
Parmenidis fragmenta , ex codice bi-
bliothecœ taurinensis restituta ab Ame-
deo Peyron , Leipsick , 1810, in-8. Em-
pédocle joignit l'étude de la médecine à
celle de la philosophie ; ayant guéri une
femme d'Agrigente, nommée Vanlhea,
qui était tombée dans une profonde lé-
thargie, et que les autres médecins
avaient abandonnée comme morte , cette
cure passa pour miraculeuse , et dès lors
Empédocle fut considéré comme un Dieu.
EMP
Il feignit de le croire lui-même , et se
présenta en public avec un manteau de
pouqire, une ceinture d'or, les cheveux
flottans , la tête ornée d'une couronne ,
comme celle de la Pythie. Il renversa le
sénat d'Agrigente , composé de mille ci-
toyens , et y établit le gouvernement po-
pulaire.
EMPEREUR ( Constantin 1' ) , né vers
l'an 1680 à Oppyck, village du comté de
Hollande , savant consommé dans l'étude
des langues orientales , occupa avec hon-
neur une chaire d'hébreu et de théologie
à Harderwick et à Leyde. Il mourut en
1648 , dans un âge fort avancé. Tous les
ouvrages qu'il a donnés au public , of-
frent des remarques utiles , et respirent
une profonde érudition rabbiniqne et
hébraïque. Nous avons de lui 1° Tul-
mudis Babrjlonici codex Middôth cum
commentariis , etc. , Leyde, Elzevir ,
1630, in-4, en hébreu et en latin. Ce
commentaire , orné de figures très exac-
tes, explique avec beaucoup de netteté
toute la structure du temple de Jérusa-
lem, de ses autels, etc. 2" D. Isaaci
Abrabanielis et Mosis Alschechi com^
mentarius in Esdiœ prophetiam, Leyde,
Elzévir, 1631 , in-8, en hébreu et en
latin. L'Empereur, en publiant les com-
mentaires de ces rabbins sur la prophé-
tie d'Isaïe, qui regarde les souffrances
et la mort de l'Homme-Dicu , a eu soin
de réfuter leurs explications détournées,
et de repousser les traits qu'ils ont lancés
contre le christianisme. 3° Grammaire
chaldaïque , écrite en hébreu , avec la
traduction latine, Leyde, Elzévir, 1G31.
4° Itinerarium Benjaminis , en hébreu ,
avec la traduction en latin et des notes
de l'Empereur, Leyde, 1633. 6° Et plu-
sieurs autres traductions des livres ju-
daïques , enrichies d'observations sa-
vantes; elles sont les meilleures que l'on
ait , quoiqu'elles ne soient pas toujours
exactes.
EMPIRICUS. roy. Sextos Empiricus.
EMPORIUS, savant rhéteur, floris-
sait du temps de Cassiodore au 6* siècle.
Il reste de lui quelques écrits sur son
art, Paris, 1599, in-4. Le stile en est
vif et nerveux , suivant Gibert.
ENA
* EMSER ( Jérôme ) , fhëotogien ca-
tholique allcinaiïd, naquit àUlm en 1477.
Apres avoir commencé ses éludes à Tu*
binr^en , il alla les continuer à Bàle , où
il s'appliqua au droit , à la théologie et
à l'hébreu. H accompagna ensuite en Ai'
lemagne et en Italie, le cardinal Ray-
mond de Gurti , dont il avait été nommé
chapelain et secrétaire. Quelque temps „
après , il professa les humanités à Erl'urt,
qu'il quitta bientôt pour passer à l'uni-
versité de Leipsick, dont il l'ut reçu mem-
bre , et où il enseigna le droit canonique.
Vers le même temps, le duc George de
Saxe le prit pour son secrétaire et son
orateur dans la ville de Dresde , et l'en-
gagea à écrire contre le luthéranisme ,
qui commençait à s'étendre en Allemagne.
Emser avait été jusque-là l'ami de Lu-
ther; il eut avec ce réformateur quel-
ques conférences , espérant le ramener
du sentier de l'erreur, par des conseils
d'ami ; mais voyant qu'il ne gagnait rien
sur l'esprit de ce sectaire obstiné, il se
déclara son adversaire, et le combattit
vigoureusement. Les ouvrages qu'il pu-
blia sont 1° Motifs pour lesquels la
Traduction du nouveau Testament par
Luther doit être défendue au commun
des fidèles , Leipsick, 1G23, in-4 , réim-
primés avec augmentation , sous le titre
d'Annotations sur la Traduction du
nouveau Testament , etc., Dresde, 1624,
in-4. 2" Traduction allemande du nou-
veau Testament , pour être opposée à
celle de Luther, ])resde, 1527; Paris,
1G30. 3° Assertio missœ. 4° De canone
missce. Ces deux ouvrages sont une dé-
fense de la messe. 5° Histoire de la vie
et des miracles de saint Beunon, Leip-
sick, 1512, Dresde, 1594, in-4; et un
grand nombre d'autres écrits de contro-
verse.
• ENANBUC ( Vaudrosques Diel D' ),
fondateur des colonies fftinçaises aux An-
tilles, descendant d'une ancienne famille
de Normandie. Comme il n'était que le
cadet , il n'eut qu'une part fort peu
considérable dans la succession pater-
nelle; mais avec le peu qu'il recueillit, il
équippa un brigantin de quatre canons ,
monté par 40 marins bien disciplinés et
V.
EIXA 65
bien aguerris. Animé par Je désir d'a-
méliorer sa fortune , il partit ainsi de
Dieppe en 1625 et fit voile pour les mers
des Antilles , dans le dessein d'y faire
quelques prises sur le.s Espagnols ; la na-
ture n'avait pas été à son égard aussi in-
juste que la loi : rempli d'un coujage que
rien ne savait ébranler, il se défendit
contre une galère de 35 canons et par-
vint à la mettre en fuite ; ce combat eut
lieu près des Iles Caïman, Quinze jours
après il relàchj^ à St.-Qliristophe ; déjà
quelques Français s'y étaient établis, des
Anglais venaient récemment d'y débar-
quer; tout cependant l'invitait à se fixer
dans ce lieu agréable et fertile, où il
trouvait un port favorable et un terrein
excellent pour la culture du tabac ; il fit
donc un traité de partage qui lui assu-
rait la possession de la moitié de cette
île. Cependant les insulaires , excités par
un de leurs boye's ou médecins , résolu-
rent de massacrer tous les Européens ; Je
complot ne put réussir parce que les co-
lons fuient prévenus à temps par une
femme sauvage qui leur fit connaître tous
les détails de ce projet. Les naturels de
l'île furent punis sévèrement; mais quel-
que temps après , trois mille sauvages
appelés par eux d'une autre île , vinrent
attaquer la colonie française; ils furent
obligés de se rembarquer après avoir perdu
les deux tiers de leur troupe. Dès lors
la petite colonie fut en repos , et pendant
les huit mois que d'Enanbuc pa.ssa dans
celte île à cultiver du tabac , et à abattre
des arbres d'acajou , il ne fut plus atta-
qué par les insulaires. Il chargea son vais-
seau des productions de l'île et revint en
France où il arriva heureusement par le
port de Dieppe. Il se rendit aussitôt à
Paris où il demanda une entrevue au
cardinal de Richelieu qui applaudit à ses
projets et lui donna une commission spé-
ciale pour l'établissement d'une colonie
française à St. -Christophe, ou dans toute
autre île comprise entre le 1 1^ et 18^ de-
gré de latitude septentrionale; un autre
officier, nommé Durossey, lui fut adjoint.
Ces deux braves marins partirent du
Havre en 1627 avec deux vaisseaux; mais
leur traversée fut malheureuse : une
5
C6 END
glande partie de leur équipage atait
succombé. Les Anglaisprofitcrent de cette
circonstance qui leur donnait la supé-
riorilé du nombre pour étendre leurs
possessions au détriment de celles des
Français. D'Eiianbuc s'empressa de de-
mander eu France du renfort. Durossey
qu'il avait envoyé pour cet objet, ne tarda
pas à revenir avec six vaisseaux qui défi-
rent la flotte des Anglais et les forcèrent à
demander la paix. D'Enanbuc renvoya les
vaisseaux que Iç gouverneuient fiançais
lui avait fait parvenir; mais à leur tour
quelques espagnols vinrent attaquer les
colons français et les forcèrent de quitter
l'île. D'Enanbuc erra pendant trois se-
maines sur les mers des Antilles; il aborda
à St. -Martin; et pendant que Durossey
l'abandonnait lâchement pour retourner
en France , où le duc de Richelieu le lit
enfermer à la Bastille immédiatement
après son arrivée , d'Euanbuc ramena ses
compagnons à St.-Christophe que les Es-
pagnols avaient abandonné , et dès lors
il ne s'occupa plus que du soin de faire
prospérer cette colonie et de la mettre à
l'abri de nouvelles attaques. C'est dans
ce but qu'il chercha à former des établis-
scmens dans les îles voisines. Prévenu
dans son projet sur la Guadeloupe , il
fonda lui-même en 1635 celle de la Marti-
nique. Après avoir établi le fort de St.-
Pierre et organisé un gouvernement dans
cette île, il revint à St.-Christophe où il
mourut vers la fin de l'an 1C3G. On trouve
de plus amples détails sur d'Enanbuc
dans Y Histoire des Antilles , par le Père
du Tertre , qui fait l'éloge de son admi-
nistration et parle des regrets que sa
mort excita parmi les colons qui le re-
gardaient comme leur père et leur bien-
faiteur. Richelieu, en apprenant la fin de
d'Enanbuc , dit que le roi perdait en lui
un de ses plus fidèles serviteurs.
• ENDELCHIUS, ou Severus-Sanctus,
rhéteur et poète, naquit à Bordeaux dans
le 4" siècle. Quelques critiques le croient
lils de Flavius Sanctus, évèque d'Auxonnc,
d'après une épitaphe que celui-ci lui a
consacrée dans ses Pnrentalia. Ami de
saint Paulin , évèque de Nôle , il em-
bi'assa , à son exemple, le christianisme.
ENE
Vers la fin de sa vie , il se consacra à' Is
retraite , et l'on croit même qu'il avait
embrassé l'état ecclésiastique. L'abbé
Longchamp place sa mort à l'année 409.
Saint Paulin cite avec éloge les hymnes
d'Endclchius , composées sur la para-
bole des dix vierges de l'Evangile , mais
elles ont été perdues. Il ne nous reste de
ce poète qu'une églogue intitulée De
inortibus boum, faite à l'occasion d'une
maladie contagieuse , qui, vers 37 7, fit
de grands ravages dans la Turquie, l'Il-
lyrie et la Flandre. Les interlocuteurs sont
un païen qui se livre au désespoir, et un
chrétien qui lui offre pour le consoler la
pensée de la Providence. Cette pièce a
paru pour la première fois en 1590, dans
les Epigrammata et pocmata véterum,
tom. 2, pag. 448 et suivantes. Depuis elle
a été imprimée séparément à Francfort,
1612, in-8, avec des notes de Wcitz; à
Leyde , 1714, avec les mêmes notes et
celles de Seber. Elle a aussi été insé-
rée dans la Bibliotheca pntrum , et dans-
différens recueils de poésies chrétien-
nes.
ÉNÉE, Mneas Tacticus, Enée le Tac-
ticien, un des plus anciens, mais non
pas des meilleurs auteurs qui aient écrit
sur l'Art militaire , florissait du temps
d'Aristote. ( 4* siècle avant J. C. ). Ca—
saubon a publié un de ses traites en grec
De tnlcranda obsidione , avec une ver-
sion latine, dans le Poli/be, 1609, in-fol.
M. de Beausobre l'a donné en français ,
1 557 , in-4 , avec de savans commen-
taires.
ÉNÉE DE GAZE , philosophe pla-
tonicien , sous l'empire de Zenon , dans
le 5* siècle , embrassa le christianisme,
et y trouva une philosophie bien supé-
rieure à celle de Platon. On a de lui un
dialogue intitulé Théophraste , du nom
du principal interloculeur. Il traite de
l'immortalité de l'àrae et de la résurrec-
tion des corps. Jean Bo«er le mit au
jour à Leipsick en 1055, in-4 , avec la
traduction et les savantes notes de Gas-
pard Barthius. On le trouve aussi dans
la bibliothèque des Pères.
EINEÉ, évèque de Paris, homme d'es-
prit et consomme dans les affaires , pu-
ENG
Jiiia k la prière de Charles le Chauve un
tivre contre les erreurs des Grecs. Il
«ntreprend à Ja fois de répondre aux
écrits du patriarche Photius contre l'é-
glise latine , et de montrer la yérité de
la doctrine et la sainteté des dogmes de
cette église. Il mourut en 670.
* EJNFIELD (Guillaume) , ministre
anglican, non-conformiste, né à Sudbury
en 17 4 1 , et mort à Norwich, en 17 97 , fut
pasteur et professeur de belles-lettres à
Wanington dans le comté de Lancastre.
Il a publié 1° des Sermons à V usage des
familles, 1770, 2 vol. in-8. 2° Le prédica-
teur anglais , 4 vol. 3° Essai sur V his-
toire de Liverpool, 1774, in-fol. 4° His-'
toire de la philosophie, d'après Brucker,
1791,2 vol. in-4. 6° Sermons sur des
sujets pratiques , 17 98, 3 vol. in-8. Ses
sermons comme tous ses ouvrages sont
écrits d'un stilc clair, élégant ; la morale
y est présentée sans austérité : en gé-
néral ils paraissent plus propres à former
l'esprit et le goût, qu'à élever l'àme à la
piété.
* ENGAU (Jean-Rodolphe), savant
jurisconsulte allemand, né à Erfurt, en
1708, mortàléna en 1756, fut membre
de plusieurs académies, et conseiller de
la cour de Saxc-Weimar et d'Eisenach. Il
s'est fait par ses nombreux écrits une
haute réputation. Les ouvrages qui la lui
ont surtout méritée sont 1" Traite' des
prescriptions en matière criminelle , 4«
édition, 1772, in-8. 2° Elementajuris
germanici cii'ilis, 4* édition, 17 62, in-8.
3" Elementajuris criminalis germanico-
caroli ni, Inédit., 17 7 7, in-8. ^°Elementa
juris canonico - pontificio-ecclesiastici ,
5*édition, 1765, in-8. 5" Traite du droit
des chefs de V Eglise sur les docteurs qui
occupent des chaires, 3 vol. in-8. Cet ou-
vrage avait d'abord été écrit en allemand,
mais en 17 52 l'auteur l'augmenta consi-
dérablement et le fit paraître en latin.
* EÎNGEL (Jean-Jacques), littérateur al-
lemand, naquit en 1741 à Parchim, dans
le duché de Mecklenbourg, d'un pasteur
de la confession d'Augsbourg, etse destina
comme son père à la carrière ecclésias-
tique; mais il négliga bientôt l'étude de
la théologie pour se livrer entièrement
ENG 6n
à celle de la littérature ancienne et 4e
la philosophie. Ses progrès furent ra-
pides : en 1765 il se rendit à Leipsick :
les ouvrages qu'il y publia le firent con-
naître avantageusement et lui méritèrent
l'offre de la place de bibliothécaire à Go-
tha avec une chaire à l'université de Go-
tingue ; l'attachement qu'il portait à sa
mère dont il se serait vu éloigner, le dé-
termina à refuser. En 17 70 il accepta la
place de professeur de morale et de belles
lettres dans un des Gymnases de Berlin,
et conserva cette chaire jusqu'à 1787,
époque oîi le roi de Prusse Frédéric-Guil-
laume II le nomma directeur du théâtre
de Berlin, avec le célèbre poète Ramier.
Engel devait cette place à l'attachement
que lui témoignait le roi dont il avait
élevé les enfans,et à un ouvrage qu'il ve-
nait de publier sur l'art théâtral. Il avait
toutes les connaissances nécessaires pour
bien remplir ses fonctions : des intri-
gues de coulisses l'eurent bientùt dé-
goûté d'un emploi dans lequel il ne trou-
vait pas le repos si nécessaire à l'homme
qui se livre aux sciences ; il donna sa dé-
mission en 17 94. Mais son royal élève le
rappela bientôt à Berlin pour l'attacher à
l'académie des Sciences et lui donna une
pension dont il ne jouit pas long-temps.
Le désir de voir sa mère qui avait 80 ans
le détermina à retourner dans son lieu
natal , malgré l'état de maladie oii il
se trouvait alors; à peine eut-il ac-
compli ce devoir de la piété filiale qu'il
mourut dans le lieu qui l'avait vu naître
le 28 juin 1802, à 61 ans. Il a laissé plu-
sieurs ouvrages recommandables pour l'é-
légance du stile et une pureté de diction
très rares en Allemagne. Les principaux
sont 1° deux petites comédies : le Fils re-
connaissant et le Page, qui l'ont placé à
côté des meilleurs auteurs dramatiques
allemands. Elles ont été traduites en fran-
çais et se trouvent dans le théâtre de
Friedel : la deuxième a fourni le sujet de
notre comédie des deux pages rftrDezède.
2° Le philosophe du monde, 1775, 2 vol.
in-8 , recueil de morceaux sur diverses
questions de philosophie, de morale et de
iilléralure.Z'^ La théorie de l'art mimique,
1785, 2 vol. in-8, fig. 4° Le miroir des
68 ETfG
princes, 1796, suite de morceaaxtlc mo-
rale destiiu^s à l'instiiiction des princes,
et surtout de ceux qui doivent régner un
jour. 6° Lorenz Stark, roman, 1 80 1 , in-8 ;
cet ouvrage qui obtint un grand suc-
cès dans toute l'Allemagne fut le cbant du
cygne. La collection de ses œuvres re-
cueillies à Berlin, de 1801 à 1806, for-
me 12 vol. in-8.
* EINGEL (Arnold), jésuite, né à
Maëstricht en 1620, mort à Prague, vers
J676, professa pendant quelque temps la
rliétorique, puis se livra aux missions
dans lesquelles il se distingua autant par
6CS talens que par son zèle. On lui doit
plusieurs ouvrages de piété et de poésie
religieuse ; nous citerons !• Jndago mono-
cerotisab natura humana deitati.s saga-
cissima venatricc, per quinque sensuum
desideria amnnter adornatœ , Prague ,
1668, in-4. 2" Firtutis et honoris œdcs
in heroïbus et pœnatibus XX F grœco^la-
iinis illiistrntœ. Ibid, 1G71, in-8. 3° Les
panégyriques de la sainte Vierge, de
saint François-Xavier , l'Oraison funè-
bre de V empereur Ferdinand III , en la-
tin, etc. ; en général ses ouvrages sont peu
estimés.
EIN'GEL (Samuel), géographe et savant
suisse, naquit à Berne en 1702. Après
avoir voyagé en Allemagne et en Italie,
il rentra dans sa patrie où il remplit avec
distinction plusieurs places administra-
tives dans lesquelles il rendit d'importans
services à sa ville natale : dès l'an 1745.
il fit partie du conseil souverain et fut
pourvu successivement de différens bail-
liages. C'est à Inique Berne doit'en partie
ses greniers d'abondance , l'hôpital des
orphelins dans l'établissement duquel il
fut secondé par le célèbre Haller, la so-
ciété économique, etc. Il encouragea aussi
de tous ses efforts l'agriculture, chercha
dans toutes les occasions à propager les
bons procédés que l'on a découverts dans
ces derniers temps, et contribua à l'in-
troduction des pommes de terre qui fu-
rent utiles pendant la disette de 1772 :
services qui lui valurent une médaille de
la part de la ville de Noyon. Après une
vie si utilement consacrée à ses compa-
triotes, il mourut à Berne le li mars
ENG
1784. Il a publié plusieurs ouvrages esti-
més, parmi lesquels on remarque \° Mé-
moires et Observations géographiques
et critiques sur la situation des pays
septentrionaux d'Asie et d'Amérique,
Lausanne, 1765, in-4, avec cartes, tra-
duit en allemand par l'auteur, Leipsick,
17 72, in-4. Engel cherche, dans cet ou-
vrage, à prouver qu'il est possible de ga-
gner le grand Océan en naviguant par le
Nord; mais son hypothèse est fondée sur
une opinion dont la fausseté a depuis clé
reconnue par le capitaine Philipps. 2" Es-
sai sur cette question : Quand et com-
ment l'Amérique a-t-elle été peuplée
d^hommes et d^ animaux ? Amsterdam ,
1767, in-4, ou 5 vol. in-12. On trouve
aussi dans cet ouvrage plusieurs hypo-
thèses mal fondées et quelquefois oppo-
sées aux traditions de l'Ecriture , entre
autres celle-ci : que le déluge n'avait pas
été universel. Il entre aussi dans beaucoup
de discussions relatives à l'éclaircissement
de la Bible ; mais la question annoncée
comme devant faire le sujet principal ,
n'occupe que très peu de place. Z" Mé-
moire sur la navigation dans la mer du
Nord, 1779, in-4, où l'on trouve des rcn-
seignemens curieux sur les pays situés
dans ces parages glacés ; encore il y re-
vient à la possibilité de la navigation dans
l'Océan boréal, ^k" Remarques sur la par-
tie de la relation du Voyage du capi-
taine Cook, qui concerne le détroit entre
l'Asie et r Amérique, 1781, in-4, avec
une carte. 5° Bibliotheca selectissima,
sive Catalogus librbntm in omni gencre
seientiaruni rarissimarum, etc., Berne,
174-3, in-8, estimé à cause des anecdotes
et des notes qui s'y trouvent répandues.
6" Instructions sur la pomme de terre,
Berne, 1 772, 2 Tol. in-8, en allemand ; 7"
Mémoire sur la rouille du froment , Zu-
rich, 1778, et plusieurs aaUes ouvrages
sur l'économie rurale , imprimes sépnré-
ment ou insérés dans les Mémoires de la
société économique de Berne. On remar-
que beaucoup de germanismes dans ses ou-
vrages écrits en français.
EiN'GElLBERGE ou Ingelberge, femme
de l'empereur Louis II, fut accusée d'a-
dultère par le prince d'Anhuit et le comte
ENG
de Mansftcld, Jaloux de son dicvatfon.
L'impératrice se défendit autant qu'elle
put de cette imputation. 3Iais n'ayant
point de preuves décidément favorables,
elle se voyait dans le cas de se justifier
par l'épreuve du feu et de l'eau, en usa^je
dans ce temps-là. Engelberge se dispo-
sait à passer parées épreuves, lorsque
Boson, comte d'Arles, persuadé de son in-
nocence, donna un cartel de défi aux ca-
lomniateurs, les terrassa l'un et l'autre,
et leur fit rendre hommage, l'épée sur la
gorge , à la vertu de l'impératrice. Le
vainqueur eut pour prix de sa générosité
le titre de roi d'Arles , et pour femme
Ermengarde, fille unique de cette prin-
cesse. Engelberge, devenue veuve, se fit
bénédictine , et mourut saintement vers
l'an 890.
* E>.GELGRAVE ( Henri ), savant jé-
suite belge , né à Anvers en IGIO, mort
dans la même ville le 8 mars 1G70, a
laissé des ouvrages estimés, qui ont pour
titre : Lux evangelica sub vélum sacro-
runi emblematum recondiia in anni do-
minicas , 2tom. iu-4, 1()48. Il s'en est
fait depuis sept réimpressions de diffé-
rens formats. 2'^ Lucis evangclicœ sub
vélum sacrorum emblematum^ sivc cœ-
lum noi>um infesta et (jesta sanctorum ,
1G47, in-!ol., 1658, ln-4, et 1C59, iu-8.
3° Cœlumempyreumin (esta sanctoruni
apostolorum, niartyrum , confessorum,
virginum, etc., in-fol., in-4, et 2 vol. in-
12. 4° Cœluni empyreum, pars altéra,
in-fol., in-4 et in-8. On a encore de lui
des Me'ditatiom sur la passion de N. S.
en Flamand, Anvers , 1G7 0, iu-8. — Son
frère, Jcan-Captiste Engelgeave, aussi
jésuite, qui jouissait d'une grande consi-
dération dans son ordre, a publié Medi-
tationes per totum annum, in omncsdo-
minicas et festa, in-4, Anvers, 1G54.
'ENGELHCSEN ( Thierri d'), né dans
le duché de Hanovre, et mort en 1430,
est connu par une Chronique en latin qui
comprend depuis la création du monde ,
justju'à l'année 1420. Cette Chronique a.
clé continuée par Mathias Doriny, et pu-
bliée à Kelmstad, 1G71 , in-4, par Joa-
chim Jean Madeo. Engelhusen était su-
I>érieur d'un monastère à Wittembcrg.
ENG 69
' ENGELSCHALL (Joseph-Frédéric ),
dessinateur, professeur de belles-lettres et
poète, naquit à Marbourg, dans laHesse,
en 1739. Son père, et surintendant des
églises prolestantes, mal partagé du côté
de la fortune, ne put donner à son fils
une éducation assez soignée. A ce mal-
heur s'en joignit encore un autre ; Joseph-
Frédéric devint tout à coup sourd à l'âge de
1 3 ans; mais ses savantes dispositions poiir
l'étude surmontèrent ces obstacles, et il
apprit avec succès la philosophie, l'his-
toire, les belles-lettres et la peinture. En-
gelschall pourvut à son existence en don-
nant des leçons de dessin, dans lequel il
était très habile, jusqu'à ce qu'en 17 88 ,
il fut nommé professeur extraordinaire
de belles-lettres à l'université de 3Inr-
bourg; mais, comme ce titre n'était qu'ho-
norifique, on y ajouta celui de maître de
dessin, avec d'honnêtes appointemens.
Il avait beaucoup d'instruction , et pas-
sait pour èlre un des bons poètes de l'Al-
lemagne. Engelschall mouiutle 28 mars
17 97, âgé de 58 ans. On a de lui 1° Poc-
^te^ imprimées en 1788 et en 1805; cette
seconde édition a été publiée par les soins
de M. Justi, ami de l'auteur, et qui avait
déjà publié un autre ouvrage ( inédit )
d'Engelschall, intitulé : 2° F'ie du célèbre
peintre Jean-Henri Tischbien , Nurem-
berg , 1799.
EISGHIEN ou Enguies. Voyez Fran-
çois et Louis.
EAGLEBERT ( Corneille ) , peintre
très célèbre du 16" siècle, natif de Leyde.
H eut deux fils qui se distinguèrent aussi
dans le même art.
* ENGLEFIELD (Charles-Henri , sir) ,.
né d'une famille très ancienne de Berk-
shire, est mort à Londres le 21 mars 1 822,
après s'être distingué par son goût pour
les sciences et pour les beaux-arts , et
avoir publié les ouvrages suivans : 1"
Tables des lieux apparens de la comète
de 1661, dont le retour est attendu en
1789, avec une nouvelle méthode de se
servir du re'ticulc romboïdc, 1788, in-4;
2° Lettre à l'auteur de la revue sur les
protestans dissidcns, 17 90, in-8; 3" Re-
vue sur les motifs- de la séparation des
protestans de l'c'gHse romaine ; 4° Sur
70 ENG
la détermination de Vorhite des comètes
iCaprès la méthode du Père Boscovich
et celle de M. de la Place, 1793, in-4;
6° Promenade à Southampton avec des
gravures représentant ses antiquités ,
J801, in-8; G" Promenade dans Vile de
Wight, avec des gravures représentant
ses antiquités, li a aussi donné beau-
coup d'articles dans les Mémoires de la
société des antiquaires, et dans celle de
Linnée.
" ENGLISCH (Eslher), célèbre calligra-
plie anfïlaise , sous la reine Elisabeth et
sous Jacques I, est connue par la perfection
de son écriture. Il reste encore quelques-
uns de ses ouvrages qui sont fort recher-
chés. Un des plus curieux est intitulé Oc-
tavcs. Ce sont des stances de huit vers ,
sur la vanité et l'inconstance du monde,
écrites par Esther Englisch, le 1 " janvier
Ï600. Les vers sont en français et en an-
glais. Ce recueil est orné de guirlandes
de fleurs et de fruits, et de son portrait
en miniature, dessiné à la plume par elle-
même. On cite encore liist. memorabiles
Genesis per Estcrnm Inglis-gallam ,
JEdimburgi, anno 1600, conservé dans la
famille d'Harcourt et un autre que possède
M. Walkenaer qui contient le livre de l'Ec'
clésiaste de la main d' Esther Anglais-
français à Lislebourg en Ecosse, etc.,
avec le Cantique des cantiques.
* ENGRAMELLE (Marie-Dominique-
Joseph), religieux de l'ordre de Saint-
Augustin, né à JN'edonchal en Artois, le
24 mars 1727, se livra dès sa jeunesse à
l'étude des sciences, et particulièrement
de la musique et de la mécanique. Il
s'occupa particulièrement des inslrumens
» touches et de leur construction. On lui
doit la Tonotechnie, ou l'art de noter les
/cylindres et tout ce qui est susceptible
de notage dans les instrumens de ton •
ccrts, mécaniques , in-8, fig. Ce livre est
le premier qui ait révélé le secret d'un art
auquel les facteurs d'instrumens avaient
jusqu'alors refusé d'initier lepublic. C'est
aussi au Père Fngramelle qu'appartient
tout ce qui a rapport au notage dans l'art
du facteur d'orgue de D. Bçdos. On a en-
core de lui une Vescription des insectes
de V Europe peints diaprés nature par
Ernest, hi-4, première partie, contenant
les chenilles, chrysalides et papillons du
jour. Cet ouvrage , bien exécuté , a été
continué, et contient 29 cahiers, qui se. ]
relient ordinairement en 8 vol. Engra-* i
melle mourut en 17 80.
*ENGRAIVD (Henri), naquit à Saint-
Fiacre, près de Meaux, le 12 décembre
1753. Après avoir fait ses études, il entra
dans la congrégation de Saint-Maur, d'où
il se rendit à I.aon , pour y occuper la
place de professeur de rhétorique. Nommé
à la chaire de philosophie , et puis de
théologie à l'abbaye de Saint-Nicai.se de
Reims, il professa cette dernière science
ju.squ'en 1789, première époque de la ré-
volution française qui l'empêcha d'em-
brasser la carrière ecclésiastique , ;i la-
quelle il s'était destiné. Sans fortune, et ..
toujours étranger aux tumultcspoliliques,
il se livra à l'enseignement dans un pen-
sionnat de demoiselles à Reims; état qu'il
a exercé pendant trente années. Il fut
nommé conservateur de la bibliothèque
publi(pe de celte ville, emploi dans le-
quel il montra beaucoup de zèle et d'in-
telligence , quoiqu'il n'en retirât aucun
salaire : ce qui fait honneur à son désin-»
tércssement. Il est mort d'une maladie
aiguë, le 10 octobre 1823, à l'âge de 70
ans. lia laissé plusieurs ouvrages élémen-
taires, qui sont très estimés: 1° Principes
de la langue française, rappelés à leurs
plus simples élémens, 2* édit., 1809, in-
1.2 ; 3« édit., J 8 1 3, in-1 2 ; 2° Leçons élé-
mentaires sur l'histoire de France, de-
puis le commencement de la monarchie,
jusqu'au i fi brumaire an P^ III; 2" édit.,
1 809 ; 4" édition, arrivant jusqu'à la res-
tauration de 1814 inclusivement, 1821,
in-1 2; 5* édit., arrivant jusqu'en 1817,
pid)liéeen 1822; ^° Leçons élémentaires
sur la mythologie , suivies d'un traité
sommaire de l'apologue. Cet ouvrage a
en sept éditions, hi 4'estdc 1809, in-12; 4°
Leçons élémentairesiM Histoire romaine ;
elles ont eu huit éditions, la troisième est
de 1 809 ; 6" Leçons élémentaires sur
l'histoire ancienne et l'histoire grecque.
Cet ouvrage compte huit éditions; la 4*
est de 1813, in-12.
EJNJEDIM ( George ), un des plu» sub-
ETNN
lils unitaires qui aient fait des remarques
sur l'Ecriture sainte. On a de lui ExpU-
catio locorum scripturœ vetevLs et novi
Teslnmenti^ ex quitus dogma Trinilalis
stabiliri solct, in-4 : ouvrage pernicieux
et rempli de vains sophismes , qui a ëté
sévèrement défendu et brûlé dans diffé-
rens endroits. Il a été réfuté par Richard
Simon. Cet auteur, né en Transylvanie ,
ministre et surintendant dans sa patrie ,
mourut en 1597, âgé de 42 ans. Il a em-
prunté presque toutes ses remarques d'E-
tienne Basilius , unitaire de Coioswar.
EA^NIUS (Quintus), né à Rudes en
Calabre , l'an 239 avant J. C. , obtint par
ses talens le droit de bourgeoisie à Rome ;
honneur dont on faisait alors beaucoup
<le cas. U tira la poésie latine du fond
des forêts , pour la transplanter dans les
villes ; mais il lui laissa beaucoup de ru-
desse et de grossièreté. Le même siècle
vit naître et mourir .sa réputation ; ce
siècle n'était pas celui de la belle lati-
nité : on lèsent en lisant Ennius; mais
il compensa le défaut de pureté et d'é-
légance , par la force des expressions et
le feu delà poésie. L'élégant, le doux
Virgile avait beaucoup profité dans la
lecture du dur et du grossier Ennius. Il
en avait pris des vers entiers , qu'il d^-
i^elaM des perles tirées du fumier. Ennius
mourut delà goutte, l'an ÏG9 avant J. C.
Scipion , son ami , voulut avoir un tom-
beau commun avec ce poète, autant par
amitié que par considération pour son
mérite. Ennius avait mis en vers héroï-
ques les Annales de la république ro-
maine ; il avait aussi fait quelques sati-
res ; mais il ne nous reste que des
fragmens de ces ouvrages, Amsterdam,
1707, in-4 , et dans le Corpus poetarum
latinnrum deMaittaire, et dans le théâtre
des Latins , par Levée.
EMVODIUS , né en Italie vers 473 ,
et originaire des Gaules , embrassa Tétat
ecclésiastique du consentement de sa
femme , qui de son côté se fit religieuse.
Ses vertus et ses talens le firent élever
sur le siège de Pavie vers l'an 510. On le
choisit ensuite pour travailler à la réu-
nion de l'église grecque avec la latine.
11 fit deux voyages en Orient , qui ne ser-
ENO 71
virent qu'à faire connaître les ay^ifices
de l'empereur Anastase , et la prudence
d'Ennodius. Cet illustre prélat mourut
saintement en 521. Le père Sirmond
donna au public en ICI 2 une bonne
édition de &^s, œuvres , in-8. Elles renfer-
ment, 1" neuf \'\\ve?,à'épîtres , recueil
édifiant et utile pour l'histoire de son
temps ; 2" dix recueils à.'œuK>res dli>er-
fes ; i" la Défense du concile de Rome ,
qui avait absous le pape Symmaque ; 4"»
vingt-huit discours ou déclamations;
5" des poésies.
Ers'OCH, fils aîné de Caïn , bâtit avec
son père la première ville. Ce mot dans
l'origine ne signifie qu'une habitation
fixe, un terrain environné de clôture.
Caïn et Enoch en firent une pour eux et
pour leurs descendans ; elle fut appelée
Enochie.
ENOCH ou Henocii , fils de Jared et
père de Mathusalem , né l'an 3412 avant
J. C, fut enlevé du monde pour être
placé dans le Paradis terrestre, après avoir
vécu 3C5 ans avec les hommes. Il doit
venir un jour pour faire entrer les nations
dans la pénitence ( voyez Elie ). On lui
attribua, dans les premiers siècles de l'E-
glise, un. ouvrage plein de fables sur les
astres, sur la descente des anges sur la
terre, etc.; mais il y a apparence que
cette production avait été supposée par
les hérétiques , qui , non contens de fal-
sifier les saintes écritures , se jouaient,
par des ouvrages supposés et fabuleux ,
de la crédulité de leurs imbéciles secta-
teurs. Quelques critiques prétendent que
cet ouvrage, véritablement d'Enoch, a
été défiguré par des mains infidèles ; ils
se fondent sur ce que saint Jude, dan&
son épîlre canonique , paraît en citer
un passage. Mais saint Jude cite Enoch,
sans parler de son livre ; le passage en
question peut être le fruit d'une ancienne-
tradition , conservée dans d'autres li-
vres (1). Voyez Jude.
Ers OS , fils de Seth et père de Caïnan,
né l'an 37 99 avant J'- C, mort âgé de
905 ans, établit les principales cérémo-
(i)Tl p»aU rertain aujourd'hui qne le Pirrc ittribué
à t'iiocb existe : il faut donc en revenir au seiitinieul dtk.
critiques qui j)r«(eiideiit que cet ouvrage A 4lé défiguré. ■
72 ENS
nies da cnlte que les premiers hommes
rendirent à l'Etre-Suprême.
' ENS (Gaspard), historien allemand,
né vers 1570 à Lorch dans le Wurtem-
berg, fut uu des écrivains les plus labo-
rieux et les plus féconds de l'Allemagne ;
il renonça à l'étude du droit pour se li-
vrer à sa passion pour les voyages. En
ÏG03 il se fixa à Cologne et se mit aux
gages des libraires, pour lesquels il com-
posa dans l'espace de 15 ans un grand
nombre d'ouvrages dont on trouve la liste
dans la Bibliotheca realis de Lipenius. Us
sont tous en latin et roulent sur des su-
jets d'histoire, de politique, de critique,
de poésie, etc. Il composait jusqu'à 10 vo-
lumes dans une année. Les principaux
sont 1° Mercurius .fjallo-helUcus, Co-
logne, 1G04, et suiv. Ens en publia 6 vo-
lumes , depuis le 4^ jusqu'au 9''. 2° An-
nales, sive Commentaria de bello galln-
beîgico, ibid., 1G06, in-8-, 3° lielU civilis
in Belgio per xl annos gesti historia,
usque adannum ICOi), ex belgicis Mete-
rani commentnriis coiicinnata, ibid.,
ICIO; 4" MauiUiados libri vi, in qidbus
helgicœ describitur civilis belli causa,
illustris Mawitii natales et victorice
expUcantur, ibid., ICI 2, in-8; b° Berum
hungaricarum historia, libris ix com-
prehensa, ibid., 1604, in-8. Les biogra-
phes hongrois, tout en louant l'élégance
du stile d'Ens, lui reprochent plusieurs
inexactitudes. 6° Thésaurus politicus ex
italico latine versus , ibid., 1613-18-19,
3 vol. in-4; 7° Morosophia , sivc stuUce
sapientiœ et sapientis stultitiœ libri duo.
C'est une imitation de l'ouvrage de Spel-
to, publié avec le même titre en italien,
Pavie, 1606, in-4, ibid., 1620-21, in-8.
8° Heraclitus, de miseriis vitce humanœ,
ibid., 1622, in-12, etc. Ens a publié aussi
des poésies latines, dont une partie a été
insérée dans les Deliciœ poetarum ger-
manorum, tome 2, pages 1236 et suiv^
Et , pour prouver qu'il n'oubliait aucun
genre de littérature, il a donné une tra-
duction latine du roman de Gusman
d'Alfarache, sous le titre de Proscenium
vitœ, 1023, in-8. Ens est mort vers 1640.
* ENSENADA ( le marquis de la ) ,
l'un des ministres d'Espagne les plus ha-
ENT
biles , sous le règne de Ferdinand Vï , né
de parens obscurs , avait d'abord été te-
neur de livres chez un banquier de Ca-
dix : des talens supérieurs le firent bientôt
connaître. Il s'éleva par degrés , et du
poste d'intendant d'atmée,, il passa dans
le ministère , oîi il se montra avec l'éclat
d'un homme qui s'est créé lui-même.
Livré tout entier à l'administration pu-
blique , il supprima les dépenses super-
flues , encouragea les établissemens
utiles , protégea l'industrie , les sciences,
les arts , le commerce , et créa de nou-
veau , pour ainsi dire , la marine espa-
gnole. Il porta son système d'économie
jusque dans la maison de son souverain,
et sans rien retrancher de la pompe qui
convenait à un si puissant monarque , il
sut cependant y établir une sage réforme.
Sa modestie égalait ses talens. Le nom
qu'il prit en est une preuve : En se nada
signifie rien en soi. Il le prit après que
le roi Ferdinand VI eut voulu lui conférer
un titre de noblesse ; il s'appelait Zeno
SoMo. Les intrigues de cour du duc de
Huescar le firent disgracier ; mais il sou-
tint cette disgrâce avec la dignité d'un
grand-homme, et il ne se montra jamais
si supérieur à sa place que lorsqu'il l'eut
perdue. Le roi qui le regrettait sincère-
ment , le rappela ; mais les cabales de ses
ennemis surent le tenir éloigné du mi-
nistère. Il mourut en 1762.
ENT ( George ) , né à Sandwich dan*
le comté de Kent, en 1604, reçut le
bonnet de docteur en médecine à Padoue.
De retour en Angleterre , il se lia étroi-
tement d'amitié avec Harvée , devint
président du collège des médecins sous
Cromwel , et fut fait chevalier par Char-
les II qui avait tant déplaisir à l'entendre
qu'il assistait à ses leçons. Il mourut à
Londres en 1689. On a de lui \° De res-
pirationis usu priniario , 1679, in-8.
2° Apologia pro circulatione sanguinis,
1641 , in-8 , en faveur de Harvée. 3° Des
mémoires dans les Transactions philo-
sophiques.
EINTINOPE de Candie, fameux ar-
chitecte au commencement du 5"^ siècle,
a été l'un des principaux fondateurs de
la ville de Venise. Ridagaise, roi de»
ENT
Golhs, étant entre en Italie en 405, les
ravages dejjces barbares contraignirent
les 'peuples à se sauver en différens en-
droits. Entinope fut le premier qui se
retira dans des marais proche de la mer
Adriatique. La maison qu'il y bâtit était
encore la seule qu'on y vit , lorsque ,
quelques années après , les habitans de
Padoue se réfugièrent dans le même ma-
rais. Ils y élevèrent en 413 les 24 mai-
sons qui formèrent d'abord la cité. Celle
d'Entinope fut ensuite changée en église,
et dédiée à saint Jacques. Elle subsiste,
dit-on , encore, et est située dans le quar-
tier appelé Rialto , qui est le plus ancien
de la ville.
* EINTIUS , roi de Sardaigne, fils na-
turel de Frédéric II , était né de l'une
des nombreuses maîtresses que cet em-
pereur entretenait dans son palais. Son
véritable nom était Hanse ou Jean. Les
Italiens Je désignent sous celui de Enzio.
A peine âgé de 14 ans, il épousa, en
1238 , Adélaïde, marquise de Massa , hé-
ritière de Gallura et d'Oristagni , en Sar-
daigne , et veuve d'Ubaldo , vicomte de
Pise. Il était ainsi possesseur de toute la
Sardaignc , dont une partie lui était déjà
soumise. Entius était un des plusvaillans
fils de Frédéric ; son père l'employa dans
ses guerres injustes contre l'Eglise. Il
porta le fer et le feu dans la Jlarche
d'Ancône, ce qui lui attira l'excommuni-
cation de Grégoire IX. En 1241 , à la
tète de la flotte sicilienne et pisanne , il
battit, le 3 mai, les Génois, et fit pri-
sonniers les prélats appelés par le pape à
un concile , pour prononcer sur la con-
duite de l'empereur. Ayant porté , quel-
ques années après, ses armes dans la
Lombardie, il fut complètement battu
et fait prisonnier par les Bolonais à la
bataille de Possalto, le 2C mai 1247. Les
vainqueurs le conduisirent en triomphe
dans leur ville , et le condamnèrent à
une prison perpétuelle : il n'avait alors
que 26 ans. Frédéric essaya vainement
d'obtenir la liberté de son fils. Ses offres
et ses menaces furent également inutiles.
Les Bolonais firent bâtir au milieu de la
place dite de Saint-Pétrone , un palais
magnifique ; et c'est dans cette superbe
V.
ENT 7i
prison qu'Enlius languit pendant 25 ans,
c'est-à-dire jusqu'au moment de sa mort,
arrivée le 2G mai 1272. Pour aggraver sa
captivité , il eut la douleur d'apprendre
les malheurs et la mort de son père, de
ses frères et de l'infortuné Conradin , der-
nier descendant de son illustre famille.
Un poète ( le Tassoni ) lui a consacré quel-
ques chants dans son poème de la Sec-
ch'ia rapita ( le Seau enlevé'. ).
* ENTRAIGUES ou Antraigues [Em-
manuel- Louis -Henri de Launey, comte
d'}, député aux Etats-généraux en 1789,
né dans le Vivarais vers 1750, était ne-
veu du comte de St.-Priest , l'un des der-
niers ministres de Louis XVI. Il eut pour
précepteur le célèbre abbé Maury qui
lui donna du goût pour l'étude ; ce qui
le détourna de la carrière militaire à la-
quelle l'appelait sa position sociale. Mal-
gré l'éducation sage qu'il reçut de sou
Mentor, il ne put maîtriser son imagina-
tion, et ce fut avec enthousiasme qu'il
adopta les idées nouvelles de réforme et
de changement. Dès que le roi eut an-
noncé le projet de convoquer les Etats-
généraux ( 1788) , il publia un Mémoire
sur les Etats-généraux, leurs droits , et
la manière de les convoquer , 1788, in-8,
qui est rempli des principes les plus per-
nicieux et qui ne contribua pas peu à
exalter les têtes , et par conséquent à
préparer tous les maux de la révolution.
Il osa proclamer cette odieuse maxime :
que l insurrection est le plus saint de
tous les devoirs. Cependant lorsqu'il fut
arrivé aux Etats -généraux , il s'opposa
avec beaucoup de vigueur à la réunion
des trois ordres ; il fut néanmoins d'avis
que la constitution dont on allait s'oc-
cuper, fût précédée d'une déclaration
des droits de r/iomme; mais il défendit
la sanction royale et les prérogatives qui
y sont attachées , comme des principes
essentiels du gouvernement monarchi-
que. Il se fit d'ailleurs peu remarquer ,
quitta l'Assetûblée , sur la fin de 1789,
passa à l'étranger , et s'attacha d'abord à
la cour de Russie, qui lui confia plusieurs
missions diplomatiques. Il se rendit de là
à Vienne , oîi il recevait un traitement
de 36,000 livres, de différens princes.
5..
74 ENT
Aucan dmigré, peut-être, n'eut un sort
plus brillant dans l'ëlranger , et cepen-
dant il n'en est point dont les écrits
aient plus contribué à la révolution. Il
est vrai qu'il avait changé totalement de
manière de voir , qu'il demandait alors
une contre-révolution toute entière , et
qu'il faisait tous ses efforts pour se rendre
utile à la maison de Bourbon. Buona-
parte, qui le craignait beaucoup , le fit
arrêter à Milan, en «797, comme com-
promis dans une conspiration , qui fit
alors le plus grand bruit. Mais la dame
Saint-Huberti, avec laquelle il s'était ma-
rié , parvint à le faire évader. Il se rendit
en Allemagne ; et après avoir résidé quel-
que temps à Vienne , il retourna en Rus-
sie oîi il obtint en 1803 le titre de con-
seiller de l'empereur. A Dresde oîi il
avait été envoyé en mission , il publia
un écrit violent contre Buonaparte qui
exigea du roi de Saxe , qu'il fût renvoyé de
ses états. D'Entraigues retourna en Russie ;
puis , étant parvenu à se procurer les ar-
ticles secrets du traité de Tilsitt , il vint
en Angleterre et fit part au ministère
anglais de cette pièce importante ; ce
qui lui valut une pension considérable et
lui donna la plus grande influence dans
les délibérations du gouvernement an-
glais. Il vécut néanmoins éloigné d'Hart-
■wcl , où Louis XVIll tenait sa cour, et il
paraît que ce prince craignait de lui ac-
corder une entière confiance. Cependant
il est certain qu'il travaillait au rétablis-
sement de cette famille. Le comte d'En-
traigues fut assassiné au village de Barne,
près Londres, le 22 juillet 1812, lors-
qu'il allait monter en voiture , par ;un
italien à son service , nommé Laurenzo,
qui se tua lui-même d'un coup de pis-
tolet. On a de lui , outre le fameux mé-
moire dont il a été parlé plus haut , plu-
sieurs brochures politiques: 1° Discours
d'un membre de V Assemblée nationale.,
à ses co-députe's, 1789, in-8. 2° Ré-
flexions sur le divorce, in-8. 3° Quelle
est la situation de l'Assemblée nationale?
1790, in-8. 4° Exposé de notre antique
et seule règle de la constitution fran-
çaise , d'après nos lois fondamentales,
1792, in-8, 5' Dénonciation aux fran-
CNT
çais catholiques y des moyens employés
par r Assemblée nationale pour détruire
en France la religion catliolique , 1791,
in-8 ; 4« édit., 1792 , in-8. 6° Adresse à
la noblesse de France, 1792, in-8. 7°
Mémoire sur la constitution des états
de la province de Languedoc. 8° Sur la
régence de Louis -Stanislas- Xavier y
1793 , in-8. 9° Observations sur la con-
duite des princes coalisés, 1795, in-8.
1 0° Sur les effets d'une contre-révolution,
1796. 11° Lettre à M. de L. C, sur
l'état de la France, 1796, in-8. 12°
Des poésies fugitives , insérées dans di-
vers recueils.
* EINTRECASTAUX (Joseph-Antoine
Brdni d' ) , célèbre marin français, né à
Aix, en 17 39, d'un président du parle-
ment de Provence, entra dans la marine
comme enseigne de vaisseau, et fit ses
premières armes sous le bailli de Suffren.
Il fut élevé au commandement d'une fré-
gate, au commencement de la guerre de
17 78. Une action glorieuse le fit choisir
quelque temps après pour être capitaine
de pavillon sur le Majestueux , vaisseau
de 110 canons. Sa bravoure, son sang-
froid et ses talens le placèrent alors parmi
lesofi&ciers les plus distingués. Aussi utile
pendant la paix que pendant la guerre ,
il ne se fit pas moins remarquer dans
l'administration des ports et des arse-
naux du roi , par l'intégrité , la justesse
d'esprit, et l'étendue des vues dont il .
était particulièrement doué. Le comman-
dement des forces navales dans l'Inde lui
fut confié en 17 85. Les talens qu'il mon-
tra dans ce voyage , où il se fraya plu-
sieurs routes nouvelles , le firent dési-
gner pour aller à la recherche de La
Peyrouse , et il partit de Brest avec deux
frégates , pour cette glorieuse mission ,
au mois de septembre 1 791 ? Si ses efforts
n'ont pas eu le succès qu'on pouvait es-
pérer, les nombreuses découvertes qu'il
a faites , rendent sa campagne une des
plus brillantes qui aient été entreprises.
11 a reconnu en effet la côte occidentale
de la Nouvelle - Calédonie , celle de l'île
de Bougainville , la partie nord dé l'ar-
chipel de la Louisiade, plusieurs rades
et beaux ports au sud de la terre de Dié-
ENZ
men , près de 300 lieues de côte an sud-
ouest de la Nouvelle-Hollande ; enfin il
a constaté l'identité des îles Salomon de
Mendana , avec les terres vues par Sur-
ville et le lieutenant Sorthland , indi-
quées par Fieurieu dans son ouvrage
intitulé : Découverte des français au
sud-est de la Nouvelle-Guinée, Paris,
1793. Il se dirigeait vers l'île de Java ,
lorsqu'il fut attaqué du scorbut. Il y suc-
comba le 20 juillet 1793. Les talensqu'il
a développés dans cette campagne le pla-
cent au nombre de nos plus illustres na-
vigateurs. Son Voyage, rédigé par M.
Rossel , son capitaine de pavillon , a été
imprimé à Paris en 1808, 2 vol. in-4,
avec un atlas par M. Beautemps-Beaupré,
ingénieur-hydrographe de l'expédition ,
où les côtes qui ont été visitées pendant
cet intéressant voyage ont été tracées
avec une exactitude inconnue jusqu'a-
lors.
ENYDI. Voyez Enjedi.
* ENZINA ( Jean de la ), né vers l'an
1446 , d'une famille illustre de la Vieille-
Castille , fit ses études à Salaraanque , et
montra , dès sa plus tendre jeunesse , un
goût décidé pour la poésie. On peut dire
que la Enzina fut le véritable fondateur
du théâtre espagnol. La première comé-
die qu'il composa fut jouée lors du ma-
riage de Ferdinand le Catholique et d'I-
sabelle de Castille. Ses autres pièces
furent représentées à la cour et devant
les principaux seigneurs. Il augmenta
ensuite sa réputation par un Art poétique
( Arte de trovar ) , qu'il dédia au prince
don Jean. Il réunit dans cet ouvrage , le
second en ce genre qui paraissait en Es-
pagne , les principaux préceptes des
poètes grecs et latins, dans lesquels il
était très versé ; et quoique son art poé-
tique n'eût pas le mérite de ceux que
publièrent dans le siècle suivant Salas,
Espinel, etc. , il fut cependant regardé
comme une production aussi utile qu'a-
gréable. Mais il ne se distingua pas seu-
lement dans la carrière littéraire , il fut
chargé par Ferdinand de plusieurs mis-
sions auprès des cours de Rome et de
Naples , et il s'en acquitta avec distinc-
tion, la première édition de ses ouvrages
EOB 75
parut à Salamanque en 1 507 , du vivant
de l'auteur. Elle comprenait plusieurs
volumes qui contiennent des Poèmes ,
des Odes , des Chansons et douze Comé-
dies, parmi lesquelles on regarda alors
comme un chef-d'ceuvre de l'art drama-
tique celle qui a pour titre : Placida y
Victoriano. Ce poète mourut vers l'an
1 532 , comblé d'honneurs et de richesses.
Ses ouvrages sont remarquables par un
stile pur, des pensées brillantes et une
élégance inconnue jusqu'à l'époque où il
écrivit.
E^ZINAS ( François ), né à Burgos
en Espagne, vers 1515, est également
connu sous les noms de Dryander et de
Duchesne en français. Il fit ses études à
Wittemberg , sous Mélanchthon , qui lui
inspira du goût pour le luthéranisme.
Il embrassa ouvertement les nouvelles er-
reurs à Anvers. Il y entreprit , à la solli-
citation de Mélanchthon , une traduction
du nouveau Testament en espagnol, 1 742,
in-8 , qu'il eut l'audace de dédier à Char-
les-Quint , et de présenter à ce prince ,
en le priant de la prendre sous sa protec-
tion ; Charles le lui promit , pourvu qu'il
n'y eût rien contre la foi antique. La ver-
sion ayant été examinée , l'auteur fut mis
en prison, où il fut détenu pendant 15
mois. Il s'évada l'an 1545 , parcourut
l'Angleterre , l'Allemagne , et se rendit
à Genève, auprès de Calvin en 1552. On
ne sait rien de lui au-delà de celte époque.
Il a laissé une mauvaise Histoire de Télat
des Pays-Bas et de la religion d'Espa-
gne, Genève, in-8. Cette Histoire fait
partie du Martyrologe protestant , im-
primé en Allemagne. C'est l'histoire apo-
logétique des calvinistes et luthériens,
punis pour s'être arrogé le droit de dog-
matiser, d'insulter les prêtres, d'exciter
des troubles , etc.
EOBANUS Hessus ( Elius ) fut sur-
nommé Hessus, parce qu'il naquit en
1488, sur les confins de la Hesse , sous
un arbre au milieu des champs. Il profes-
sa les belles-lettres à Erfurt, à Nuremberg
et à Marpurg , où le landgrave de Hesse
l'avait appelé. Il mourut dans cette ville
en 1540, à 52 ans, avec la réputation
d'un bon poète, ennemi de la satire,
76 EON
quoique versiAcateur , du mensonge et
de la duplicité ; mais ami du vin et de
la crapule. Le cabaret était son Parnasse.
On raconte qu'il terrassa un des plus har-
dis buveurs de l'Allemafjne , qui lui avait
fait défi de boire un seau de bière. Eo-
banus fut vainqueur , et le vaincu ayant
fait de vains eflbrls pour épuiser le seau ,
tomba ivre-mort. Nous avons de ce poète
buveur un grand nombre de poésies ,
les vers tombaient de sa plume. Il avait
la facilite d'Ovide , avec moins d'esprit
et moins d'imagination. Les principaux
fruits de sa muse sont 1" des Traductions
en vers-latins de Théocrite, Bâle, 1631 ,
in-8, et de l'Iliade d'Homère, Bàle, 1 54 1 ,
in-8. 2° Des Ele'gies dignes des siècles
de la plus belle latinité. 3° Des Sylves ,
in-4, 4" Des Bucoliques estimées, Halle,
1539, in-8. 5° Ipsius et amicorum Epi-
slQlœ,'\Vi-io\. Ses poésies ont été publiées
sous le titre de Poematutn farragines
duce, à Halle en 1539, in-8 , et à Franc-
fort en 1564, dans le même format. Ca-
mérariusa écrit sa ^ie, imprimée à Leip-
sicken 1696, in-8.
EON DE L'ÉTOILE, gentilhomme bre-
ton, homme sans lettres, mais d'une ex-
travagance et d' une opiniâtreté tell e qu'on
en voit rarement. Ce fou se disait le fils
de Dieu , et le juge des vivans et des
morts, sur l'allusion grossière de son nom,
avec le mot eum dans cette conclusion
des exorcismes : Percumquijudicaturus
est vivos et mortuos. On ne doit pas s'é-
tonner qu'un insensé ait pu trouver une
telle absurdité dans son imagination. On
ne doit pas l'être non plus qu'il ait fait
un grand nombre de sectateurs , et que
quelques-uns aient mieux aimé se laisser
brûler , que de renoncer à leur délire. Il
n'y a , comme dit Cicéron , aucun genre
de folie , ou d'excès dont l'esprit humain
ne soit capable. Eon fut pris et conduit
au concile de Reims, assemblé par le pape
Eugène III en 1 15S. Le pontife demanda
à l'écervelé : « Qui es-tu? » Il lui répon-
dit : n Celuiquidoitvenir juger les vivans
>) elles morts. » Comme il se servait, pour
s'appuyer , d'un bâton fait en forme de
fourche, le pape lui demanda ce que
voulait dire ee bâton ? « C'est ici un grand
EO]N
j> mystère, répondit le fanatique. Tant
» que ce bâton est dans la situation où
M vous le voyez , les deux pointes tour-
» nées vers le ciel , Dieu est en possession
» des deux tiers du monde, et me laisse
M maître de l'autre tiers. Mais si je tourne
u les deux pointes vers la terre , alors
w j'entre en possession des deux tiers du
i> monde, et je n'en laisse qu'un tiers à
» Dieu. » Ce maître de l'univers fut en-
fermé dans une étroite prison , oîi il mou-
rut peu de temps après. Ceux d'entre les
sectateurs d'Eon, qui demandèrent à ren-
trer dans l'église, furent reçus avec bonté;
mais comme il paraissait que de telles
extravagances soutenues avec tant de fu-
reur , prouvaient quelque intervention de
l'esprit séducteur, on les exorcisa comme
des démoniaques.
* EON DE BEAUMONT (Charlotte-
Geneviève-Timothée, ou Charles -Ge-
neviève-Louis-Auguste-André-Timolhée
d'), l'un des personnages qui ont le plus
vivement excité la curiosité publique
vers la fin du 18* siècle, naquit à Ton-
nerre le G octobre 1 728, d'un avocat con-
seiller du roi à Paris, fit ses études au
collège Mazarin, fut reçu d'abord docteur
en droit civil et en droit canon, ensuite
avocat au parlement. Malgré ses succès
dans le barreau , il changea de carrière.
Le prince de Conti qui protégeait spécia-
lement sa famille lui fil obtenir une mis-
sion diplomatique et secrète à Saint-Pé-
tersbourg, oîi il prit les habits de femmes
qu'il quitta à son retour en France pour
reprendre les habits d'homme. Après
avoir aplani dans ce voyage les voies de
pacification , il fut envoyé une seconde
fois en Russie, mais avec un caractère
public. La prudence et l'activité de ses
démarches ne laissèrent rien à désirer.
Un traité définitif d'alliance entre la
•France et la Russie, et l'engagement de
celte puissance de faire marcher , en fa-
veur des cours de France et de Vienne ,
80,000 Russes destinés à suivre les dra-
peaux prussiens en filrent les heureux ré-
sultats, il parvint même à faire disgracier
et arrêter le grand chancelier Beslucheff,
cl à le faire remplacer par le comte Wo-
ronzow qui était dans les intérêts de I»
EON
France. A son retour, brûlant du désir
de se distinguer dans la carrière des ar-
mes, il obtint la permission d'aller re-
joindre l'armce française en Allemagne,
et il fit la campagne de 1761 avec le titre
de capitaine de dragons et comme aide-
de-camp du maréchal de Broglie ; il se
distingua à Hoxter, Ultrop, Eimbeck, et
surtout à Osterwick, où avec 80 dragons
il força un bataillon prussien de 800
hommes de mettre bas les armes. La paix
de 1762 le fit rentrer dans la carrière po-
litique. Il fut envoyé à Londres avec le
duc de Nivernois en qualité de secrétaire
d'ambassade, et nommé ensuite ministre
plénipotentiaire. Louis XV lui accorda la
croix de Saint Louis. Peu de temps après
de sourdes menées de la part de ses en-
nemis le firent rappeler ; mais pour le
consoler de sa disgrâce, le roi satisfait de
ses services lui accorda une pension de
12,000 francs. Le chevalier d'Eon resta en
Angleterre, et quoique sans caractère po-
litique, il s'occupa continuellement de
tout ce qui pouvait tourner à l'avantage de
sa patrie. Pendant ce temps des paris énor-
mes a valent lieu à Londres sur son sexe. Il y
eut même, à la demande d'un des joueurs,
un jugement rendu qui prononça d'après
la déposition de plusieurs témoins et du
chevalier lui-même qu'il était une véri-
table femme. Dans un voyage qu'il fit en
France, Louis XY lui enjoignit de pren-
dre les habits de son sexe, et il parut dans
dans le monde sous le titre de chevalière
d'Eon. Privé pendant la révolution de
sa pension, il tira quelques ressources de
son habileté dans l'escrime, en faisant
publiquement assaut avec le fameux
Saint-George ; mais l'âge et les infirmités
ayant exercé sur lui leurs ravages, des
amis généreux vinrent à son secours , et
rendirent ses derniers momens moins pé-
nibles. Il mourut le 21 mai 1810. Son
corps fut ouvert en présence de Père Eli-
sée, premier chirurgien de Louis XVIII,
et il fut déclaré qu'il appartenait au sexe
masculin. On a cherché inutilement à
connaître les raisons politiques qui ont
pu forcer un homme, un militaire, un
chevalier de Saint Louis à prendre des
habits de femme. Ses ouvrages ont été re-
EPA 77
cueillis en 1775 en 13 vol. in-8, sous le
titre de Loisirs du chevalier d'Eon. Ils
ont la plupart pour objet des matières
d'administration et de politique, et an-
noncent un observateur intelligent. Ses
observations et ses recherches sur les lois,
le commerce, le gouvernement de la Rus-
sie et de l'Angleterre sont d'autant plus
curieuses qu'elles ont été faites sur les
lieux , et qu'il ne s'est jamais permis de
trahir la vérité. Si son style manque quel-
quefois de noblesse et de correction, il est
du moins constamment simple , plein de
clarté, et quelquefois semé de traits vifs
et énergiques. Il a paru un catalogue des
livres rares et manuscrits précieux du
cabinet de la chevalière d'Eon, anglais
et français, Londres, 1791, in-8. On trouve
en tête un expose' historique assez cu-
rieux. M. de la Fortelle a publié à Paris
en 1779 in-8, la f^ie militaire , politique
^i privée de demoiselle Charles-Gène-
viève-Louise-Auguste-André-Timothée
Eon , ou d'Eon de Bcaumont c'cuyer ,
chevalier , ci-devant docteur en droit ,
avocat, censeur royal, envoyé' en Rus-
sie ; etc. Une seconde édition , donnée la
même année, est précédée d'une épître de
Dorât à l'héroïne.
EPAGATHE , of&cier de guerre sous
l'empire d'Alexandre Sévère, assassina le
célèbre jurisconsulte Ulpien, l'an de J. G.
226. L'empereur fut extrêmement irrité
de cet attentat ; mais il ne put faire pu-
nir le meurtrier à Rome, de peur que les
soldats ne se soulevassent. Il envoya Epa-
gathe en Egjpte, pour y être gouverneur;
et peu de temps après il lui commanda
d'aller en Gandie, où il le fit tuer par des
gens qui lui étaient afi&dés.
EPAMINOjVDAS, capitaine thébain ,
d'une famille distinguée, descendant des
anciens rois de Béotie , porta d'abord les
armes pour les Lacédémoniens, alliés des
Thébains , et lia une amitié étroite avec
Pélopidas, qu'il défendit courageusement
dans un combat. Pélopidas délivra, par
le conseil de son ami, Thèbes du joug de
Lacédémone. Ge fut le signal de la guerre
entre ces deux peuples. Epaminondas, élu
général des Thébains, gagna l'an 371
avant J. G. la célèbre bataille de Leuclres
78 EPA
dans la Béotîe. Les Lacédémoniens y per-
dirent leurs meilleures troupes et leur roi
Cléombrote. Pour conserver la supério-
rité que Thèbes venait d'acquérir par ses
succès sur Laccdémone, Epaminondas en-
tra dans la Laconie, à la tête de 50 mille
combattans , soumit la plupart des villes
du Péloponèse , les traita plutôt en al-
liées qu'en ennemies. 11 fit rétablir les
murs de Messène, et fut long-temps l'ob-
jet de la haine et de la colère de Lacédc-
mone. Celait encore un ennemi impla-
ble qu'il lui donnait. Par une de ces
humeurs bizarres qui font la seule règle
de la multitude et des cohues démocra-
tiques, Epaminondas, après avoir servi sa
patrie , fut traité en criminel d'état. Une
loi de Thèbes défendait de garder le com-
mandement des troupes plus d'un mois.
Le héros avait violé cette loi, mais c'était
pour donner la victoire à ses concitoyens.
Les juges allaient le condamner à mort,
lorsqu'il demanda qu'on mît sur son tom-
beau, « qu'il avait perdu la vie pour avoir
» sauvé la république. » Ce reproche fil
changer de résolution aux Thébains ; ils
lui rendirent l'autorité. Il en fit usage en
portant ses armes en Thessalie , et il y fut
vainqueur. La guerre s'étant allumée en-
tre les Eléens et ceux de Mantinée , les
Thébains volèrent au secours des pre-
miers ; il y eut une bataille dans les plai-
nes de Mantinée, à la vue même de cette
ville. Le général Ihébain s'étant jeté dans
la mêlée pour faire déclarer la victoire
en sa faveur, reçut un coup mortel dans
la poitrine, l'an 363 avant J. C. Ses amis
regrettant qu'il ne laissât pas d'enfans :
« Vous vous trompez, leur répondit-il, je
» laisse dans les batailles de Leuctres et
» de Mantinée , deux filles qui me feront
» vivre toujours. « Telle était la courte
philosophie des sages de l'antiquité!,Après
un peu de bruit pour des victoires d'un
efi'et momentané , et qui n'aboutissaient
qu'à changer une tyrannie contre une au-
tre, ils plaçaient dans une gloire passagère
toutes leurs espérances et toutes leurs
consolations. (Voyez sur Epaminondas les
vies de Pélopidas, d^Agésilas, OEuvres
morales de Plutarque qui avait aussi écrit
la vie d'Epaminondas ; mais elle est pen-
EPE
due : voyez aussi Cornélius Népos, Xëno-
phon, Diodore de Sicile, Justin, Polybe :
parmi les modernes, on peut consulter
l'abbé Gédoyn, tom. xm des Me'moires de .
V académie des Inscriptions , le Voyage
du jeune Anacharsis , F Histoire de la
Grèce de M. Mitford. tom. vi. chap. 28
et 28.)
EPAPHRODITE, apôtre ou évêque
de Philippesen Macédoine. Les fidèles de
cette ville ayant appris que saint Paul
était détenu prisonnier à Rome, envoyè-
rent Epaphrodite pour lui porter de l'ar-
gent, et l'aider de ses services. Ce député
exécuta sa commission avec beauc«up de
zèle, et tomba dangereusement malade à
Rome. Quand il fut guéri , saint Paul Je
renvoya avec une lettre pour les fidèles
de Philippes, remplie de témoignages d'a-
mitié pour eux et pour Epaphrodite, l'an
62 de Jésus-Christ.
EPAPHRODITE, maître d'Epictète.
Voyez ce mot.
EPAPHUS. Foyez Phaéton.
EPÉE (l'abbé de l') est né à Versailles
le 25 novembre 1712 d'un père archi-
tecte. Il s'est rendu célèbre par ses tra-
vaux en faveur des sourds et muets de
naissance. Son assiduité et sa patience,
autant que ses talens, ont donné à ses
peines un succès mérité , dont la gloire
eût été plus pure encore, s'il avait dédai-
gné les liaisons avec un parti qui a tou-
jours rais les bonnes œuvres en ostenta-
tion, quoique personnellement il fût sim-
ple et modeste. L'abbé de L'Epée donne
lui-même une idée juste, claire et pré-
cise de sa méthode dans son Institution
des sourds et des muets (voyez le Jour-
nal hist. et litt., du 15 septembre 1776,
page 81) : ouvrage écrit avec senti-
ment , et qui n'a pas le ton de sécheresse
et de didacticisme que le titre semble an-
noncer. Il y a à la fin une belle petite orai-
son latine, prononcée par un de ses élè-
ves et terminée par ce passage de la Sa-
gesse : Sapientia aperuit os mutorum ,
et linguas infantium fecit disertas (Sap.
10). Ce livre a été réimprimé en 1784
sous ce titre : la Ve'ritable manière d!in-
struirc-les sourds et muets, confirmée par
une longue expérience, Paris, 1 784, in-1 2.
EPE
On connaît le différend qui s'est élevé
entre l'abbé de L'Epée et l'abbé Des-
champs, qui dans son Cours élémentaire
iTéducation , regarde l'inspection des
mouvemens de la langue comme le moyen
principal de l'instruction des sourds et
muets ; tandis que le premier, et son dé-
fenseur M. Desloges, regardent l'usage
de signes naturels et méthodiques, comme
tenant la place la plus importante dans
cette instruction. Peut-être n'est-ce qu'une
dispute de mots ou une manière de rai-
sonner, qui tient plus à la spéculation
qu'à la pratique (voyez Je Journal hist.
et lut., 1" octobre 17 80, page 182j. Si
l'on considère les élèves comme sourds ,
le moyen direct et principal d'instruc-
tion, ce sont sans doute les signes ; mais
ce sera l'articulation et les mouvemens
de la langue , si on les considère comme
muets. Quoi qu'il en soit , l'art de faire
parler les sourds et muets, plus exercé
aujourd'hui et perfectionné, n'est cepen-
dant pas neuf; nous le tenons, comme
tous les autres, des hommes plus instruits
et moins bruyans que nous, qui nous ont
laissé le fruit de leurs observations. Il y
a bien des années que M. Péreire a fait à
Paris les plus heureux essais en faveur
des muets. En 1771 il présenta au roi de
Suède qui se trouvait dans cette capitale,
trois muets qui parlèrent devant ce prince.
Il reçut une pension du gouvernement, et
lorsque l'abbé de L'Epée commença à faire
du bruit, Péreire écrivit à l'abbé Fontenai
une lettre oîi il revendiquait sa décou-
verte. Nous avons une dissertation latine
de Jean Conrard Amman, sur la parole y
imprimée à Amsterdam en 1700, qui pré-
sente les détails les plus curieux, résultat
d'une longue et pénible expérience : on
en voit une traduction française à la au
de l'ouvrage de M. Deschamps. Le même
auteur nous a donné le Surdus loquens
(le sourd parlant), imprimé à Harlem en
1692. Long-temps avant le médecin Am-
man, Jean ^^■allis avait exercé avec beau-
coup de succès l'art de faire parler les
.sourds et muets, qti'un religieux, nommé
Ponce, avait déjà fait connaître en Espa-
gne. Le Père Gaspard Schott a écrit des
choses intéressantes sur le même objet ,
EPE 79
et M. Mercier dans la notice de ses ou-
vrages, lui fait honneur de la découverte.
L'abbé de L'Epée est mort à Paris , le 23
septembre 17 89. M. Papillon du Rivet,
dans sa belle épître au comte de Falkens-
tein, a célébré sentaient par les verssui-
vans :
A des «!gnes dont l'éloquenca
Supplée au langage des sons ,
Les muels, les sourds de naissance ,
Sont exercés par ses leçons;
Du destin réparant l'injure,
IL les console de ses torts ,
Et remplace en eux les ressorts
Que leur refusa la nature.
« Il ne rendait pas, dit tin auteur exact
'> dans son langage, les oreilles auxsourds,
» la parole aux muels ; mais il leur pro-
» curait la faculté de se parler sans le mi-
3> nistère de la langue , et de s'entendre
M sans le secours de l'oreille. Encore même
» est-il vrai de dire en quelque sens, qu'il
» leur donnait la parole ; car plusieurs
» prononçaient des mots et des phrases
» entières. Ils parlaient d'une manière
M désagréable ; on voyait bien que Dieu
« n'avait pas délié leur langue , mais ils
jj parlaient; ils vous répondaient même ,
n pourvu qu'ils eussent vu et distingué
» le mouvement de vos lèvres , car ils
» n'entendaient pas le son de vos paro-
» les. » L'abbé Fauchet a fait son Oraison
funèbre, et n'a point hésité à exalter son
opposition aux décrets de l'Eglise, comme
le premier titre de sa gloire et le fruit de
son courage; mais les écrivains catho-
liques en ont autrement jugé. « Que la
» patrie, dit l'un d'eux, paie à l'instilu-
» leur des sourds et muets, le tribut des
» éloges les plus mérités, notre voix s'u-
j) nira à la sienne ; mais qu'un panégy-
n riste imprudent , brouillant tout, con-
)> fondant toutes les idées, veuille nous
w faire voir un appelant, un réfractaire,
w comme un prêtre modeste et courageux ^
» l'intérêt de la foi l'emportera sur celui
» d'un particulier. Ce prêtre (on a la mal-
» adresse de nous l'apprendre ) résista
» jusqu'à la mort aux décrets dogmatiques
» du saint Siège. Il résista , tandis que
» toute l'Eglise était soumise ; il résista^
)) en défendant un livre et des erreurs
» que le pape, et avec lui l'Eglise disper-
8o EPH
M sée , frappaient de l'anathème. Si c'est
» là le courage de la liberté dans les idées
» religieuses , si c'est là le courage qui
» fait les grands aux yeux de la religion,
» qu'est-ce donc que la docilité et la sini-
V plicité dans la foi ? qu'est-ce donc que
M la soumission aux leçons des pasteurs
)> et des apôtres, si souvent recommandée
») dans nos livres saints? Si c'est -là le
» courage de la vérité , quel sera donc
» celui de la révolte, de l'opiniâtreté con-
»» tre cette Eglise et ses pasteurs , dont il
« nous est dit : Celui qui vous écoute
V m'écoute ; celui qui vous méprise , me
» méprise. » ( Il a eu pour successeur l'ab-
bé Sicard : cet établissement depuis la mort
de cet ecclésiastique était dans un état de
dépérissement qui aurait amené sa ruine,
lorsque l'administration de cet asile des
malheureux sourds-muets a nommé en
1831 pour le diriger, le vertueux et esti-
mable M. Désiré Ordinaire, ancien recteur
de l'académie de Strasbourg dont le ta-
lent s'était essayé avec succès , pour cet
enseignement, dans la maison des sourds-
muets de Besançon, et dont les vertus
chrétiennes et philanthropiques sont de-
puis long-temps de véritables passions.
On trouve une courte Notice sur l'abbé
de l'Epée dans le 57* volume de F^émi
de ïa religion et du roi, et dans lesiVbu-
vclles ecclésiastiques du 15 mai 1790.)
EPERNON. Voyez Valette.
EPHESTION , ami et confident d'A-
lexandre le Grand , mort à Ecbatane en
Médie , l'an 325 avant J. G. , fut pleuré
par ce héros. Ephestion, suivant l'ex-
pression de ce prince , « aimait Alexan-
» dre, au lieu que Gratérus aimait le roi. »
Le conquérant donna des marques de la
plus vive douleur, et même d'une dou-
leur cruelle et insensée. Il interrompit
les jeux , il fit mourir en croix le médecin
qui l'avait soigné dans sa dernière mala-
die. On a parlé diversement du genre d'a-
mour qu'il avait eu pour ce courtisan ;
mais l'atrocité des regrets fait assez voir
que c'était un amour absurde. En tout cas
il n'y aura pas de jugement téméraire de
croire que le conquérant ne mit pas plus
de sagesse dans cet attachement, que dans
celui qu'il eut pour l'eunuque Bagoas.
EPII
EPIIORE, orateur et historien de Cii-
Jnes en lonie, vers l'an 352 avant J. G. ,
fut disciple d'Isocrate. Il composa par
son conseil une Histoire , dont quelques
anciens ont fait l'éloge, et dont d'autres,
parmi lesquels Dion, Chrysostôme, Sui-
das, etc. , ont parlé d'une manière peu
avantageuse. Il paraît qu'il était imbu de
certains principes qui influaient beau-
coup sur sa narration. — Il ne faut pas i
le confondre avec un autre Ephore qui a ■
écrit une Histoire de V empereur Gallien ■
en- 27 livres.
EPHRAIM , 2« fils du patriarche Jo- '.
seph et d'Aseneth , fille de Putiphar , na-
quit en Egypte vers l'an 1710 avant J. G.
Jacob étant sur le point de mourir,
Joseph lui mena ses deux fils, Ephraïm et
Manassès ; le saint patriarche les adopta
et leur donna sa bénédiction , en disant
que « Manassès serait chef d'un peuple,
» mais que son frère serait plus grand
D que lui, et que sa postérité serait la
» plénitude desnations; » et mettant par
une action prophétique , la main droite
sur Ephraïm , le cadet , et la gauche sur
Manassès. Ephraïm eut plusieurs cnfans
en Egypte, qui se multiplièrent telle-
ment, qu'au sortir de ce pays, ils étaient
au nombre de 40,600 hommes capables
de porter les armes. Après qu'ils furent
entrés dans la Terre-Promise , Josué, qui
était de leur tribu , les plaça entre la Mé-
diterranée au couchant et le Jourdain à
l'orient. Gette tribu devint en effet, selon
la prophétie de Jacob, beaucoup plus
nombreuse que celle de Manassès.
EPHREM (Saint ), diacre d'Edesse,
fils d'un laboureur de Nicibe , s'adonna
dans sa jeunesse à tous les vices de cet
■ âge. Il reconnut ses égaremens et se re-
tira dans la solitude pour les pleurer. Il
Y pratiqua toutes les austérités, morti-
fiant son corps par les jeûnes et les veil-
les. Une prostituée vint tenter l'homme
de Dieu. Ephrem lui promit de faire tout
ce qu'elle voudrait, ^pourvu qu'elle le
suivît; mais cette malheureuse, voyant
que le saint la menait'dans une place pu-
blique, lui dit qu'elle rougirait de se
donner en spectacle. Le solitaire lui ré-
pondit avec un saint emportement : Tu
I
EPH
») as honte de pécher devant kshonimefi,
» et tu n'as pas honte de pécher devant
» Dieu, qui voit tout et qui connaît tout. »
Ces paroles touchèrent la prostituée , et
dès lors elle résolut de se sanctifier.
Ephrem ne resta pas toujours dans sa so-
litude. Il alla à Edesse, oii il fut élevé
au diaconat. La consécration de l'ordina-
tion anima son zèle , et ce zèle le rendit
orateur. Quoiqu'il eût négligé ses études,
il prêcha avec autant de facilité que d'é-
loquence. Comme les apôtres , il ensei-
gna ce que jusqu'alors il avait ignoré. Le
clergé, les monastères le choisirent pour
leur guide, et les pauvres pour leur père.
Il sortit de sa retraite , dans un temps de
famine , pour les faire soulager. Il re-
tourna enfin dans son désert, où il mou-
rut vers l'an 37 9. Saint Ephrem avait
composé plusieurs ouvrages en syriaque
pour l'instruction des infidèles , ou pour
la défense de la vérité contre les héréti-
ques. Ils furent presque tous traduits en
grec de son vivant. Il écrivit avec force
contre les erreurs de Sabellius, d'Arius,
d'Apollinaire et des Manichéens. On a
une très belle édition en latin , grec et
syriaque , de ceux qui sont parvenus jus-
qu'à nous, en G vol. in-folio, publiés à
Rome depuis 1732 jusqu'en 1746, sous
les auspices du cardinal~Quirini , par les
soins de M, Assémani, sous-bibliothécaire
du Vatic'an. L'illustre cardinal l'avait
chargé de cette entreprise , dont l'exécu-
tion a satisfait le public savant. Cette
édition est enrichie de prolégomènes,
de préfaces, de notes. Les ouvrages de
piété de saint Ephrem ont été traduits
en français, par M. l'abbé Le Merre,
Paris, 1744, 2 vol. in-12. Ses écrits ti-
rent leur principale force du génie et des
figures propres aux langues orientales. Ce
qu'il y a de plus admirable, c'est qu'il
n'y a rien d'étudié , et que toutes les pa-
roles ne sont que les effusions impé-
tueuses d'une âme qui s'épanche ; on y
remarque partout le langage d'un cœur
pénétré d'amour , de confiance, de com-
ponction, d'humilité, et de toutes les
autres vertus. L'auteur s'y est peint tel
qu'il était. Il y paraît uniquement occupé
des grandes vérités du salut. Sans cesse
V.
EPI
8i
il s'humilie sous la main toute-puissante
d'un Dieu infiniment saint et terrible
dans sa justice; la présence divine lui
inspire une frayeur respectueuse ; le sou-
venir du jugement dernier augmente sa
ferveur, le porte à pratiquer et à prêcher
les austérités delà pénitence, et l'anime
à travailler de toutes ses forces pour se
préparer un trésor de mérites. Ses paroles
impriment dans les âmes les sentimens
dont elles sont l'image : elles y portent
tout à la fois la lumière et la conviction.
Ce n'est point un feu qui produit une
chaleur passagère , c'est une flamme qui
dévore et détruit toutes les affections ter-
restres, qui transforme l'âme en elle-
même, et qui continue de brûler, sans
rien perdre de son activité. « Quel est
» l'orgueilleux, dit saint Grégoire de
» Nysse , qui ne deviendrait le plus hum-
u ble des hommes , en lisant ses discours
» sur l'humilité ? Qui ne serait enflammé
») d'un feu divin , en lisant son traité de
» la charité ? Qui ne désirerait d'être
» chaste de cœur et d'esprit, en lisant
» les éloges qu'il donne à la chasteté ? a
Saint Ephrem fut en relation avec les
personnages les plus illustres de son
temps, avec saint Grégoire de Nysse,
saint Basile , Théodoret. Le premier l'ap-
pelle le docteur de F univers ; le dernier ,
la lyre du Saint-Esprit.
EPHREM , patriarche d'Antioche ,
souscrivit à l'édit de Justinien contre
Origène , et à la condamnation des Trois
Chapitres, écrivit plusieurs ouvrages
pour la défense du concile de Chalcé-
doine , de Saint Cyrille et de saint Léo ,
dont Photius nous a conservé des extraits.
Il mourut vers l'an 546.
*EPICHARIS, affranchie et courtisane
romaine, accusée d'avoir conspiré avec
Pison contre îS'éron , avait ranimé plus
d'une fois le courage des conjurés. Livrée
par Volusius Proculus, tribun de la flotte
de Misène , elle souffrit les plus horri-
bles tourmens , et refusa constamment de
découvrir ses complices. Le lendemain ,
comme on la menait pour l'appliquer
une seconde fois à la torture , craignant
de ne pouvoir la supporter et de donner
quelques marques de faiblesse , elle s'é-
6
8a EPI
trangla avec sa ceinture : cette action
courageuse a fourni à M. le marquis
Ximenes le sujet d'une tragédie à'Epi-
charisqu'il a fait représenter en 1763 , et
à liCgouvé celle iFL'picharis et Nc'ron
qui a obtenu quelque succès ( 1800 ).
EPICHARME, poète et philosophe
pythagoricien, natif de Sicile, introduisit
la comédie à Syracuse. Il fit représenter
en cette ville un grand nombre àepièces^
que Plaute imita dans la suite. Il avait
aussi composé plusieurs traites de philo-
sophie et de médecine , dont Platon sut
profiter. Aristete et Pline lui attribuent
l'invention des deux lettres grecques 0
et X. 11 vivait vers l'an 440 avant J. C. ,
et mourut âgé de 90 ans. Il disait que les
dieux nous vendent tous les biens pour du
travail, ce qu'un poète a rendu d'une
manière plus simple :
Nil sine magno
Vita labore dédit mortalibiia.
EPICTÈTE , philosophe stoïcien
d'Hiérapolis en Phrygie, fut esclave d'E-
paphrodite , affranchi de Néron , que Do-
mitien fit mourir. Les philosophes ayant
été chassés de Rome par ce dernier empe-
reur, Epictète fut compris dans la pro-
scription j mais il revint ensuite, se fit un
nom distingué, et mourut sous Marc-Au-
rèle, dans un âge fort avancé. Arri€n, son
disciple, publia 4 livres de Discours, qu'il
avait entendu prononcer à son maître.
C'est ce que nous avons sous le nom à'JSn-
chyridion ou de Manuel. « Quelques au-
» teurs, dit M. Formey , par un zèle peu
» judicieux, ont voulu trouver dans ce li-
» vre la morale du christianisme. On est
}> surpris de voir combien le savant Dacier
» ( voyez ce mot ) s'est donné de peine
j> pour cela , et qu'il n'ait pas senti la
» différence extrême qui se trouve entre
» ces deux philosophies , quoique la pra-
)) tique en paraisse au premier coup
» d'œil la même. Aveuglé à ce point , il
p) n'a cherché qu'à donner un sens chré-
» tien à tout ce qu'il a traduit. » Il est
bien vrai qu'ayant vécu 94 ans après J. C. ,
et les Evangiles étant déjà répandus par
toute la terre , Epictète les a connus
et en a fait usage ; mais il n'en est pas
jooins certain que toute la base , l'âme
EPI
et le but de sa morale n'ont rien de com-
mun avec l'Evangile. « Dacier, continue
M M. Formey , n'est pas le premier qui
» soit tombé dans cette erreur. Nous
» avons une vieille paraphrase d'Epictète
» attribuée à un moine grec , dans la-
» quelle on trouve l'Evangile et Epictète
M également défigurés. Un jésuile (le Père
» Mourgues ) , homme de plus d'esprit, a
» mieux senti la différence des deux phi-
t> losophies. Le rapport qui se trouve en-
» tre les mœurs extérieures du stoïcien
» et du chrétien , a pu faire prendre le
» change à ceux qui n'ont pas considéré
» les choses avec assez d'attention ou
» avec la justesse nécessaire ; mais au
M fond , il n'y a rien qui admette si peu
1) de conciliation, et la morale d'Epicure
» n'est pas plus contraire à la morale de
» l'Evangile que celle de Zenon. Cela n'a
» pas besoin d'autres preuves que l'expo-
» sition du système stoïcien. La somme du
» premier se réduit à ceci : Ne pense qu^ à
» toi ; ne sacrifie tout qu'à ton repos. La
» morale du chrétien se réduit à ces deux
» préceptes: Aimei?ie« de tout ton cœur-,
« aime les hommes comme toi-même. «
Un auteur qui apprécie également bien la
morale de Zenon et d'Epictète , a eu soin
de nous prémunir contre les consolations
que nous serions tentés d'y chercher.
» Toutes les ressources , dit-il , (ju'ils nous
» offrent dans les événcmens qui ne dé-
j> pendent pas de nous , sont prises ou de
» la nécessité des choses, si peu conso-
« lantes en elle-même, ou de cette fierté
» stoïque , par laquelle le sage s'envc-
» loppe dans sa propre vertu , et se re-
» garde comme inaccessible aux coups
» du sort ; vertu et fierté de l'âme qui ne
» sait que concentrer les peines au de-
» dans , et ne les rend souvent que plus
V sensibles. » Malgré l'enthousiasme avec
lequel des gens superficiels ont parlé
d'Epictète, ce n'était dans la réalité qu'un
sage imaginaire et chimérique un phi-
losophe fier et orgueilleux , qui , dans la
disgrâce, affectait un air de constance
et d'intrépidité , sous lequel il cachait sa
sensibilité. Son maître Epaphrodite , lui
ayant donné , dans un moment de colère,
un grand coup de bâton sur la jambe ,
EPI
Epîctète lui répondit froidement : Si vous
frappez ainsi, vous la romprez. Cette
réponse, d'une philosophie déplacée, ir-
rita d'avantage Epapbrodite, qui le frap-
pant plus rudement , lui rompit en effet
la jambe; mais lui, sans s'émouvoir , lui
répliqua: Nevous l'avais-jepas dit que
vous me la rompriez ? L'épicurien Celse,
qui trouve dans cette disposition d'esprit
quelque chose de sublime (quoiqu'elle ne
soit qu'une grandeur d'âme fausse et ap-
parente , un dépit secret et malicieux ,
exprimé de façon à attiser la colère de
celui qu'on voulait morguer par cette
froideur factice), demande si le Dieu des
chrétiens a jamais dit des choses aussi
belles ? Origène répond à cela d'une ma-
nière non moins solide qu'ingénieuse:
Notre Dieu, dit-il, n'a prononcé aucune
parole ; ce qui est bien plus merveilleux
et bien plus estimable que ce qu'a dit
Epictète , qui par le silence aurait con-
servé sa jambe. Le suicide , suivant les
principes de cephilosophe, est une vertu;
aussi Caton est un de ses plus grands hé-
ros. Wolf a eu raison de condamner la
lecture de cet auteur, qui inspire un cer-
tain stoïcisme propre à rendre l'homme
insensible envers le prochain , et inflexi-
ble à ses prières . Le célèbre J. B. Rous-
seau n'en a pas parlé d'une manière plus
favorable :
En Tain , d'un ton de rhéteur,
Epictète à ton lecteur
Prêche le bonheur suprême;
J'y trouve un consolateur
Plus affligé que moi-même*
Dans son flegme simulé
Je découvre sa colère:
J'}' vois un homme arcabli
Sous le poids de sa misérr ;
Et dans tous ces beaux discouri,
Fabriqués durant le cours
De sa fortune maudite.
Vous recennaisseï toujours
L'Esclave d'Epaplirodile.
Hais je vois déjà d'ici
Frémir tout le xénonisme,
D'entendre traiter ainsi
Gn des saints du paganisme :
Pardon. Mais en vérité ,
Mon Apollon révolté
Lui devait ce témoignage .
Pour l'ennui que m'a coûté
SoD insupportable ouvrage.
Les meilleures éditions d'Epictèlc sont
celles de Leyde, 1670, in-24 et in-8, cum
EPI 83
notis variorum; d'Utrecht, 1711 , in-4 ;
de Londres, 1739, et 1741, en 2 vol.
in-4. Le Père Mourgues , l'abbé de Belle-
garde , Dacier , Lefebvre de Villebrune ,
Naigeon, Debure saint Fauxbin (1784,
2 vol in-18) et plusieurs autres écrivains,
en ont donné des traductions françaises.
Voyez Mourgues. "Le Manuel d^ Epictète
a aussi été trad. en allemand, en espagnol,
en portugais, en anglais , en italien , etc.
EPICURE naquit à Gargetium dans
l'Attique, l'an 342 avant J. C. , de parens
obscurs. La mère du philosophe était une
de ces femmes qui couraient les maisons
pour exorciser les lutins. Son fils, destiné
à être le chef d'une secte de philosophie,
la secondait dans ses fonctions supersti-
tieuses. Cependant , dès l'âge de 1 2 à 13
ans , il eut du goût pour le raisonnement.
Le grammairien qui l'instruisait, lui ayant
récité ce vers d'Hésiode : Le chaos fut
produit le premier de tous les êtres. —
Eh! qui le produisit , lui demanda Epi-
cure , puisqu'il était le premier ? — Je
n'en sais rien , dit le grammairien , il n'y
a que les philosophes qui le sachent. —
Je vais donc chez eux pour m' instruire ,
repartit l'enfant, et des lors il cultiva la
philosophie; mais il n'y trouva jamais
les éclaircissemens qu'il y cherchait ; il se
perdit au contraire dans toutes les absur-
dités du matérialisme, dans l'extravagant
système des atomes et du hasard imaginé
par Leucippe et Démocrite. Après avoir
parcouru différens pays , Epicure se fixa à
Athènes. Il érigea une école dans un beau
jardin , oîi il philosophait avec ses amis
et ses disciples. On venait à lui de toutes
les villes de l'Asie et de la Grèce. Sa doc-
trine était que, le bonheur de l'homme
est dans la volupté; et l'on conçoit assez
qu'une telle doctrine attire les auditeurs
et multiplie les disciples. Il est bien vrai
que quelques critiques , et la plupart des
beaux-esprits modernes, prétendent justi-
fier Epicure , et donner au mot volupté^
un sens qu'il n'eut jamais ; mais les vrais
sa vans ont toujours regardé cette justifi-
cation comme une chimère, et comme
un vain sophisme accrédité chez des hom-
mes intéressés à ne point avouer l'infamie
de leur maître. On convient qu'Epicure a
84 EPI
parlé beaucoup de vertu ; mais sa vertu,
c'est la volupté : et en cela il est très
raisonnable et très conséquent dans ses
principes. Tout ce qui fait la matière
d'une jouissance agréable , est matière de
vertu dans le système de l'athée ; la rai-
son en persuade et en autorise l'acquisi-
tion ; ce serait folie , indififérence stupide,
haine insensée de soi-même, de s'y refu-
ser. Le cardinal de Polignac en réfutant
Lucrèce , le plus élégant interprète de la
doctrine Epicurienne, a mis au grand jour
la nature de cette vertu prétendue ; il
est surprenant qu'on y revienne encore
sans répondre à ses raisons. Citera-t-on
toujours ce passage de Cicéron : Ne-
gat Epicurus jucundè posse vivi, nisi
cuTîi virtute vivatur , et n'njoutera-t-on
jamais le reste : nec cum virtute nisi ju-
cundè ? Cicéron donne à toute la terre le
défi de pouvoir ne pas entendre par vo-
lupté épicurienne la volupté des sens (Z>e
Finib. l. Z , n. 46 ). Ceux qui entendent
le plaisir de l'âme n'ont pas lu les pre-
miers vers de Lucrèce, disciple et inter-
prète d'Epicure :
^Dcaduni genitrix, divumque tiominumque Toluptaa.
Est-ce que Vénus présidait aux plaisirs de
l'esprit ? « Quoi , disait Cicéron , je ne
j) sais point ce que c'est que jjiÎoç en grec,
3j et voluptas en latin? Quiconque veut
» être épicurien, l'est en deux jours; et
)) je serai le seul qui ne pourrai y rien
j> comprendre ! Vous dites vous-même
» qu'il ne faut point de lettres pour de-
•» venir philosophe ( il parle à un épicu-
V rien ) ; en vérité quoique je sois natu-
ï) rellement assez modéré dans la dispute,
)) je l'avoue , j'ai peine à me contenir. »
En effet , pourquoi Cicéron n'aurait-il pas
compris ce que les épicuriens, la plu-
part fort bornés et incapables d'entrer
dans des discussions fines , comprenaient
dès le premier mot? Epicure parle d'une
volupté dont tout animal en naissant a
la connaissance par le sentiment seul.
« Pourquoi tergiverser, dit encore Cicé-
w ron en apostrophant ce philosophe ,
» sont-ce vos paroles ou non ? voici, voici
>) ce que vous dites dans le livre qui con-
» tient votre doctrine sur eelte matière :
EPI
» Je déclare, dites-vous, que je ne recon-
» nais aucun autre bien que celui que ton
n goûte par les saveurs et par les sons
» agréables, par la beauté des objets
» sur lesquels tombent nos regards, et par
M les impressions sensibles que îhomme
» reçoit dans toute sa personne ; et afin
i> qu'on ne dise pas que c'est la joie de
» rame qui constitue ce bonheur, je dé-
» clare que je ne conçois de joie dans
j) l'âme que quand elle voit arriver ces
» biens dont je viens de parler , etc. Est-
D ce que je mens? est-ce que j'invente ?
» Qu'on me réfute; je ne demande, je
M ne cherche en tout que la vérité. »
Après tout, si les épicuriens entendaient
par le mot de volupté, autre chose que
ce qu'on entend ordinairement , ils n'é-
taient guère habiles d'aller employer,
dans un pays où ils avaient tant de ri-
vaux et d'ennemis , une expression dont le
sens, au moins équivoque, pouvait don-
ner prise à la calomnie. « Qui les obli-
» geait , s'ils avaient des idées pures et
» exemptes de tout reproche, de présen-
» ter la vertusous l'habit d'une courtisane
w décriée ? » Quid enim necesse tanquam
merctricem in matronarum cœtuni, sic
voluptalem in virtutum concilium abdu-
cere ? invidiosum nomen est et infamiœ
subjectum... Les moeurs d'Epicure étaient
parfaitement conformes à sa doctrine ; il
a vécu en digne chef de celte classe
d'hommes qu'Horace appelle Epicuri de
grege porcos. Voltaire et les encyclopé-
distes veulent absolument qu'Epicure ait ;
été un homme de bien. Ceux-ci disent
» qu'il reçut dans ses jardins plusieurs
» femmes célèbres. Léontine, maîtresse •^
» de Métrodure ; Philénide , une des plus
» honnêtes femmes d'Athènes : Nécidie »
w Hérotie , Hédie , Marmarie , Boidie ,
» Phédrie. » Or, toutes ces femmes célè-
bres eï honnêtes étaient des femmes per-
dues de réputation , suivant Diogène
Laërce et les anciens écrivains. Il faut
compter extrêmement sur l'ignorance de
ses lecteurs , pour leur présenter Philé-
nide ou Philénis , pour une des plus hon-
nêtes femmes d' Athènes ; il ne reste plus
qu'à leur faire croire que Messaline était
une des plus honnêtes femmes de Rome.
I
EPI
rhiléiiis ëtait plus coupable que Messa-
line : non contente d'avoir corrompu la
jeunesse de son temps, elle voulut en-
core corrompre la jeunesse des siècles
futurs , par un livre abominable qu'elle
composa ( voy. les Adages de Junius sur
ces mots : Pliilaidinis commentarii, et
la remarque P de l'art. Hélène dans le
Dict. de Bayle); On ne peut lire saint
Clément d^Alexandrie, Lucien, Martial,
Athénée, Suidas, Giraldi , etc., sans
avoir le nom de Philénis en exécration.
Si MM. les encyclopédistes avaient seu-
lement ouvert les Dictionnaires de Gould-
man , d'Etienne , d'Hofïman , etc. , ils au-
raient trouvé le nom de Philénis suivi
d'une épithète infâme ; et Diogène Laërce
donne la même épithète à Nécidie, à Hé-
rotie , et aux autres compagnes de Phi-
lénis. Epicure était aussi débauché que
les femmes qu'il fréquentait. « Quand
» je le voudrais, dit Plutarque , il me se-
» rait impossible de passer par -dessus
« et l'impudence et l'impertinence de
» cet homme , dont les appétits volup-
» tueux requéraient des viandes ex-
» quises , des vins délicieux , des sen-
)) teurs délicates, et par -dessus tout
j> cela encore, de jeunes femmes , comme
» une Léontium , une Boidion , une
» Hédia, une Nicédion, qu'il entrete-
M nait et nourrissait. » On n'ose rap-
porter ce qu'ajoute Plutarque des affreux
débordemens d'Epicure avec son fami-
lier Poliénus et une courtisane native de
la ville de Cysique {voyez Plutarque dans
le traité , Qu'on ne peut vivre joyeuse-
ment selon Epicure , traduit par Amyot,
et l'article Léontium du Dictionnaire de
Bayle). Epicure mourut â l'âge de 72 ans,
l'an 270 avant J. C. , d'une rétention d'u-
rine , ou plutôt d'un accident occasioné
par de longues et d'effrénées débauches.
Gassendi a fait l'apologie de sa morale
spéculative et de sa morale pratique ,
dans un Recueil sur sa vie et ses écrits ,
la Haye, 1656 , in-8. M. l'abbé Batteux l'a
bien réfuté dans sa Morale (VEpicure
tirée de ses propres écrits^ in-4 , 17 58.
Comberland et Fabricius ont aussi rendu
k ce patriarche des impies et des libertins,
toute la justice qu'il mérite.
EPI 85
EPIMÉNIDES de Gnosse, dans la
Crète , passe pour le 7* sage de la Grèce
dans l'esprit de ceux qui ne mettent pas
Périandre de ce nombre. Il cultiva à la
fois la poésie et la philosophie. Il faisait
accroire au peuple qu'il était en com-
mère avec les dieux. On l'appela à Athè-
nes pour conjurer la peste , qu'il chassa
avec des eaux lustrales , selon les uns ;
et selon d'autres avec des eaux tirées de»
simples ; ou plutôt qu'il ne chassa d'au-
cune façon, à ce que pensent les gens
qui apprécient le mieux les merveilles de
l'antiquité. (On assure qu'il réunit un
troupeau de moutons auquel il donna la
liberté : mais des prêtres devaient les sui-
vre et les immoler dans le lieu oii chacun
de ces animaux s'arrêterait : là on élevait
un autel au Dieu de l'endroit , et comme
il arriva que l'on ne connaissait pas tou-
jours cette divinité, le sacrificateur fit
mettre sur la pierre Deo ignoto. On dit
que c'est une de ces pierres à laquelle fit
allusion S. Paul en passant à Athènes.) On
dit aussi qu'Epiménidcs s'endormit 27 ans
dans une caverne , et qu'après en être
sorti , il ne fut reconnu de personne et ne
reconnaissait plus lui-même personne.
De retour en Crète , il composa plusieurs
ouvrages en vers , et mourut dans un
âge fort avancé , vers l'an 598 avant
J. C. S. Paul , dans son épître à Tite ,
a cité le vers où ce poète fait des Cretois ,
ses compatriotes, ce portrait peu flat-
teur : Cretenses semper mendaces , ma-
Ice b^tiœ , ventres pigri. — Diogène
Laërce parle de trois autres Epiménides ,
dont l'un composa l'Histoire de Rhodes
en langue dorique.
*EPINAY (M"" Louise-Florence-Pé-
tronille de la Live d' ) , est plus connue
par ses liaisons avec J. J. Rousseau ,
Grimm, l'abbé Galiani , etc. que par ses
propres écrits. On lui doit cependant un
ouvrage estimable, qu'elle composa dans
les dernières années de sa vie , pour sa
pelite-fille , M"^ de Belzunce (depuis M""®
de Breuil). Ce livre, intitulé k-s Con-
versations d' Emilie , 2 volumes in-12, a
été très souvent réimprimé, et fut cou-
ronné par l'académie française en 17 83 ,
comme le meilleur ouvrage qui ait paru
86 EPI
dans celte année. En effet , il est écrit
dans un excellent esprit ; les principes y
sont présentés d'une manière nette et
simple , et il renferme tout ce qu'il est
utile d'enseigner en morale à un enfant
jusqu'à 12 ans. On y /roMfe, dit Laharpe,
des mots fins et naïfs , et des choses at-
tendrissantes. M"* d'Epinay était née à
Paris vers 1725; elle épousa vers 17501e
fermier général dont elle porte le nom.
Ce fut quelques années après ce mariage
qu'elle connut le philosophe de Genève
et fit bâtir pour lui près de Montmorency
la petite maison connue sous le nom de
l'Ermitage et qui est devenue depuis la
propriété de Grétry. Elle mourut au mois
d'avril 1783. On a publié, long-lemps
après sa mort. Mémoire et correspon-.
dance de madame d'Epinay, 3 vol. in-S,
Ces mémoires, destinés à détruire les fâ-
cheuses impressions données par Rousseau
dans la seconde partie de ses Confessions
contre cette dame, ne la justifient guère.
La correspondance adressée à Grimm ,
Duclos, J. J. Rousseau, Saint-Lambert,
Diderot, ne donne pas une meilleure
idée de ses principes. Mais l'ouvrage
qui lui fait le plus de tort, est la Cor-
respondance de l'abbé Galiani avec
madame d'Epinay , publiée en 1 8 1 8 en
2 vol in-8. Cette correspondance est
non-seulement répréhensible sous le rap-
port delà religion, mais elle révolte par
le cynisme de l'auteur. Il est poussé à
un point qui indigne en même temps
qu'il dégoûte. On a peine à concevoir
comment un ecclésiastique pouvait se
permettre im pareil ton, et comment
une femme pouvait le souffrir. Quelle
idée doit-on se former d'une société où
l'on n'observait pas même les règles de
la décence la plus commune, et où le
langage le plus grossier était devenu fa-
milier et habituel. Il est donc vrai qu'on
avait secoué toute sorte de frein dans ces
coteries philosophiques, et qu'on y af-
fichait le mépris de la pudeur comme de
la religion. Les mémoiresdeM™* d'Epinay
ont donné lieu à la publication des pièces
suivantes : Anecdotes ine'dites pour faire
suite aux mémoires de iVi™* d!Epinay,
précédées de V examen de ces mémoires ,
EPI
par M. Musset-Pathay, 1818 , in-8 : Co/t-
séquences immédiates des révélations
privées de M"^ Lalive Epinay , 1818,
in-8, etc. On doit encore à M""* d'Epinay
deux vol. assez rares, publiés à Genève sans
nom d'auteur sous le titre de Lettres à
mon fils, 1758, 1759, in-8 et in-12 et
de Mes Momens heureux, 1752 in-12.
EPINE. Foyez Spina (Jean).
EPIPHANE, fils de Carpocrate, héré-
tique comme son père, fut instruit dans
la philosophie platonicienne , et crut y
trouver des principes propres à appuyer
ses erreurs. Il supposait un principe éter-
nel, infini, et alliait avec ce principe fon-
damental, le système de Valentin. Selon
lui, comme selon nos régénérateurs mo-
dernes qui ont changé le plus beau royau-
me en des monceaux de ruine , ce sont
l'ignorance et la passion, qui, en rompant
l'égalité et la communauté des biens, ont
introduit le mal dans le monde ; les idée»
de propriété exclusive n'entrent point
dans le plan de l'intelligence suprême ;
elles sont l'ouvrage des hommes. Il con-
cluait de là qu'il fallait supprimer les lois
et rétablir l'état d'égalité ; il concluait
encore que la communauté des femmes
était le rétablissement de l'ordre, comme
la communauté des fruits de la terre. Il
est surprenant que nos preneurs de l'é-
galité des droits de ITiomme ne l'aient pas
encore étendue jusque-là. Par bonheur
pour ses contemporains, cet Epiphane
mourut à l'âge de 17 ans, vers le com-
mencement du 3« siècle. Sa doctrine avait
tellement plu au peuple, qu'il le révéra
comme un dieu. On lui consacra un tem-
ple à Samé, ville de Céphalonie ; et l'on
érigea une aca<îémie pour perpétuer sa
doctrine.
EPIPHANE (Saint ) , évêque de Sala-
mine et Père de l'Eglise, naquit dans le
village de Bessenduc en Palestine, vers
l'an 320. Dès sa plus tendre jeunesse il se
retira dans les déserts de sa province, et
fut le témoin et l'imitateur des vertus des
saints solitaires qui les habitaient. A 20
ans il fonda un monastère, et eut un grand
nombre de moines sous sa conduite. Il
s'appliqua dans sa solitude à l'étude des
écrivains sacrés et profanes. Elevé à la
EPI
prêtvise , il le fiit bientôt à l'ëpiscopat en
36G , par les vœux unanimes du clergé et
du peuple de Salamine ; métropole de
l'île de Chypre. Le schisme d'Antioche
rayant appelé à Rome , il logea chez l'il-
lustre veuve Paule. De retour dans son
diocèse , il instruisit son peuple par ses
sermons , et l'édifia par ses austérités. Il
le préserva de toutes les hérésies, et sur-
tout de celles d'Arius et d'Apollinaire.
Epiphane ne fut pas moins opposé à Ori-
gène qu'il croyait coupable des erreurs
qu'on rencontre dans ses écrits. Il les ana-
thématisa dans un concile en 401 , et se
joignit à Théodorel, pour engager saint
Jean-Chrysostôme à souscrire à cette con-
damnation. Le saint patriarche l'ayant
refusé, Epiphane vint en 403 à Constan-
tinople, à la persuasion de Théophile d'A-
lexandrie, pour y faire exécuter le décret
de son concile. Cette démarche était im-
prudente ; celle d'ordonner un prêtre à
Jérusalem sans le consentement de Jean,
patriarche de cette ville , ne l'est peut-
être pas moins. Le patriarche s'en plai-
gnit amèrement, et saint Epiphane s'en
excusa sur la nécessité des circonstances,
et sur le consentement présumé de Jean,
sur ce qu'il avait ignoré la défense que
Jean avait faite ; enfin sur ce que le mo-
nastère oii il avait fait l'ordination, n'é-
tait point de la juridiction de l'évêque de
Jérusalem {voyez le tom. 2 des OEuvres
de saint Epiphane, p. 312, édition de Pa-
ris 1622). Il ordonna aussi un diacre à
Constantinople sans le consentement de
saint Chrysostôme. Le pape Urbain II
l'excuse en ces termes en écrivant à Hu-
gues, archevêque de Lyon : Lcgimus
sanctum Epiphaniuni episcopum, ex
diœcesiS. Jo. Chrysostomi quosdam cle-
ricoi ordinasse, quod sanctusviromninb
non ftcissel, si ei detrimentum fore per-
penderet. Il l'excuse aussi sur sa bonne foi,
et sur l'utilité de cette ordination. Saint
Epiphane mourut en retournant de Con-
stantinople à l'île de Chypre, en 403, âgé
d'environ 80 ans, regardé comme un évê-
quc charitable, zélé, pieux; mais peu poli-
tique, et se laissant quelquefois emporter
trop loin par son zèle. De tous les ou-
vrages qui nous restent de ce Père , les
EPI 87
plus connus sont l^Son Panarium, c'est-
à-dire V Armoire aux remèdes. C'est une
exposition des vérités principales de la
religion, et une réfutation des erreurs
qu'on y a opposées. 2" Son Anchora ,
ainsi appelé, parce qu'il le compare à
l'ancre d'un vaisseau, et qu'il le composa
pour fixer la foi des fidèles cl les affermir
dans la saine doctrine. 3° Son Traité des
poids et des mesures, plein d'une pro-
fonde érudition. 4° Son livre des Douzes
pierres précieuses, qui étaient sur le l'a-
tional du grand-prêtre, ouvrage savant,
traduit en latin, Rome, 1743, in-4, par les
soins et avec les notes de François Fogini.
Tous ces écrits décèlent une vaste lec-
ture ; mais saint Epiphane ne la puisait
pas toujours dans les bonnes sources. Il
se trompe souvent sur des faits histori-
ques importans ; il adopte des fables et
des bruits incertains. Son stile, loin d'a-
voir l'élévation et la beauté de celui des
autres Pères grecs , des Chrysostôme ,
des Basile, est dur, négligé, obscur, sans
suite et sans liaison. Saint Epiphane était
un compilateur plutôt qu'un écrivain ;
mais la postérité ne lui doit pas moins de
reconnais.sance. Sans lui, nous n'aurions
aucune idée de plusieurs auteurs profanes
et ecclésiastiques, dont il nous a transmis
des fragmens. La meilleure édition des
œuvres àe ce Père est celle du Père Pétau,
en grec et en latin, 1622, avec de sa-
vantes notes, en 2 vol. in-folio. ( Ployez la
bibliothèque choisie des Pères de l'église
grecque et latine par M. l'abbé Guillon oi»
l'on trouve une excellente analyse de ses
ouvrages.)
EPIPHANE, patriarche de Constanti-
nople en 520 , prit avec zèle la défense
du concile de Chalcédoine et de la condam-
nation d'Eutichès. Le pape Hormidas lui
donna pouvoir de recevoir en son nom
tous les évêques qui voudraient se réunir
à l'église romaine, à condition qu'ils sous-
criraient à la /br/wMZe qu'il avait dressée.
Il mourut en 635, avec la réputation d'un
bon évêquc.
EPIPHANE le Scholastique, ami du
célèbre Cassiodore, traduisit, à sa prière,
les Histoires ecclésiastiques de Socrate,
de Sozomène, de Théodoret. C'est sur
88 EPI
cette version , plus fidèle qu'ëléffanle ,
que Cassiodore composa son Histoire tri-
partite. On attribue à Epiphaiic plusieurs
autres traductions de grec en latin. Il
florissait dans le G" siècle.
EPIPHANE, moine et prêtre de Jéru-
salem, qu'Anselme Banduri croit être le
même que Polveucte, patriarche de Con-
stantinople en 956,mortlel6 janvier 970,
nous alaissét" De Syriâ et UrbeSanctâ,
en grec et en latin, inséré dans 5/mou'cf«
d'Allatius, lib. 1 . 2° Fitœ B. Mariœ Vir-
ginis et sancti Andreœ apostoli , dont Al-
latius fait mention dans sa diatribe de
Simeonum scriptis, pag. lOG.
* EPIPHANE (Le Père), religieux ca-
pucin , né au commencement du 17*
siècle à Moirans, près de Saint-Claude ,
en Francbe-Comté, fut envoyé par ses su-
périeurs aux Indes, pour y travailler dans
les missions desservies par les Pères de
cet ordre. Plein de zèle et d'ardeur pour
la propagation de la foi , il y prêcha l'E-
vangile avec fruit. On sait qu'il existait
encore en 1685 ; mais on ignore l'époque
de sa mort. Il a laissé divers écrits sur la
théologie et les controverses. Ceux qu'on
connaît le plus sont 1° une Explication
littérale de V Apocalypse, et la Clef du
même livre ; 2° les Annales historiques
de la mission des pères capucins dans la
Nouvelle-Andalousie , 5" Ars memorice
admirabilis, omnium nescientium cxce-
dens captum, etc.
EPISCOPIUS (Simon) , dont le nom
de famille est Bischop , évêque , né à Am-
sterdam en 1583, professeur en théologie
à Leyde en IGl 3, se fit beaucoup d'enne-
mis , pour avoir pris le parti des armi-
niens contre les gomaristes. Ces deux
sectes, toutes deux enthousiastes et fac-
tieuses, divisaient alors la Hollande. Epi-
scopius plaida pour la première. Il fut in-
sulté en public et en particulier , et in-
sulta à son tour. Les états de Hollande
l'ayant invité de se trouver au synode
de Dordrecht, il rie put y être admis que
comme homme de parti cité à comparaî-
tre, et non pas comme juge appelé pour
donner des décisions. Le synode le chassa
de ses assemblées, le déposa du minis-
tère, et le bannit des terres de la repu-
EPP
blique : décision injuste et absurde de
la part de gens qui ne reconnaissaient
point de juges en matière de doctrine,
et qui s'arrogeaient en même temps une
infaillibilité qu'ils refusent à l'Eglise uni-
verselle {voyez Arminius, GoMAR, VoRS-
Tius). Il se retira à Anvers, oîi ne trou-
vant pas de gomaristes à combattre, il s'a-
musa à disputer avec les jésuites. Son exil
dura quelquetenrps; mais enfin, l'an 1G2C,
il revint en Hollande, pour être ministre
des remontrons à Roterdam . Huit ans après
il fut appelé à Amsterdam , pour veiller
sur le collège que ceux de sa secte venaient
d'y ériger.Il y mourut en 1643, d'une ré-
tention d'urine, après avoir professé pu-
bliquement la tolérance de toutes les sec-
tes qui reconnaissent l'autorité de l'Ecri-
ture sainte, de quelque manière qu'elles
l'expliquent. C'était ouvrir la porte à tou-
tes les erreurs. Cet opinion l'avait fait '
soupçonner de socinianisme, et il n'avait
pas détruit ces soupçons en publiant ses
Commentaires sur le nouveau Testa-
ment. L'on sent assez à travers ses équi-
voques , qu'il pensait que Jésus-Christ
n'était pas Dieu. « Du calvinisme au so-
» cinianisme, dit sagement un théologien,
» il n'y a qu'un pas ; » et rarement même
on s'arrête là ( voyez Lentulus. Ser-
VET, etc). Ses ouvrages de théologie ont
été publiés à la Haye en 1678, 2 vol. in-
fol. Episcopius étaitfort diffus, maisclair,
et très emporté, quoique apôtre du tolé-
ranisme. Il y a quelquefois plus de sul>-
tilités que de solidité dans ses raisonne-'
mens. La vie de ce sectaire est à la tête
de ses œuvres, publiées par Courcelles ;
Philippe de Limborch l'a aussi écrite en
1702, in-8.
EPONINE. Voyez Sabiisus.
■^EPPEINDORF (Henri d'), gentil-
homme allemand, né à Eppendorf, bourg
de Misnie, au commencement du 16*
siècle, fut un des hommes les plus éclai-
rés de son siècle. Il eut des démêlés avec
le célèbre Erasme au sujet d'une lettre
qui contenait des injures contr^lui. Ep-i
pendorf l'en accusa devant le duc de Saxe,
qui était son protecteur ; et, sous lesaus-
picçs de ce souverain, il publia un écrit ;
Ad D. Erasmi Roterodand libellum, cui\
EPR
titidus : Adversus mendnchtni cl nbtrec-
tationem utilis admonitio, justa querela,
Haguenau, 1531, in-8. Cet écrit fut réim-
primé à Leipsicken 1745. On a aussi d'Ep-
pendorf quelques traductions allemandes,
savoir : 1° les Apophtegmes de Plutar-
quc, Strasbourg, 1554 , in-fol.; 2" OEu-
vres de Pluiarque, 1551 ; 3° Abrège de
V histoire romaine , extrait des meilleurs
auteurs, 1 536, in-fol. ; 4" Histoire natu-
relle de Pline, 1543, in-fol. ; h° Chroni-
ques suédoise et danoise de Rrantz, 1545,
in-fol. Il mourut vers l'an 1553, dans un
âge peu avancé.
* EPRÉMÉNIL (Jean-Jacques Duval
d' ) était membre du conseil souverain de
cette colonie, et fut dejmis président de
celui de Madras, pendant le peu de temps
que cette place appartint aux Français.
11 était gendre du célèbre Dupleix , gou-
verneur de Pondichéry et commandeur
général des comptoirs français dans l'Inde.
Il se fit remarquer comme magistrat et
comme militaire, et défendit Madras avec
vaillance contre le Nabad d'Arcale. Voya-
geur intrépide, il pénétra sous l'habit de
Bramine dans les pagodes indiennes dont
il a décrit et défini les cérémonies ; enfin
cherchant dans les lettres la consolation
de la surdité dont il fut affligé pendant
ses dernières années, il a publié à son re-
tour en France un traité sur le commerce
du Nord et mourut en 1765.
* ÉPREMÉPslL ( Jean-Jacques-Duval
d'), fils du précédent, né à Pondichéry,
en 17 46, vint en France en 17 50. Il fit ses
études, s'adonna à la jurisprudence, et
devint d'abord avocat du roi au Chàtelet.
Il commença sa réputation eu défendant
avec énergie et succès devant le par-
lement de Rouen en 1781, contre M. de
Lally-ToUendal, la mémoire de son oncle,
Duval de Leyrit , gouverneur de Pondy-
chéry, lorsqu'il fut accusé d'avoir dénoncé
injustement le général Lally , et d'avoir
été le principal auteur de son jugement
et de sa mort. Il acheta bientôt après une
charge au parlement de Paris, où il montra
de grahds talens, une éloquence nerveuse
et fleurie en même temps, mais une tête
ardente et un goût extrême pour les chan-
gemens politiques. Il fut cependant un
EPR
8q
défenseur entliousiasle des privilèges des
parlemens, et il prétendait qu'ils pou-
vaient seuls être la sauve-garde et l'appui
de l'indépendance de la liberté publique,
dont il se montra le partisan comme les
autres réformateurs. Ainsi en 1781 il dé-
nonça'à l'indignation publique Linguet
qui, dans ses annales , avait attaqué les
parlemens •. deux ans après il se prononça
coniïe \^?> prisons prive'es ^ où le pouvoir
renfermait souvent des êtres dangereux
dont les procès eussent été scandaleux :
Mesmer commençait à se faire connaître,
il devintson disciple et établit chez lui un
baquet magnétique qui y attira un grand
nombre de croyans et de malades. Son
imagination vive et romanesque le porta
à écrire en faveur de ce système ; aussi
partagea - 1 - il< le ridicule de ceux qui y
avaient eu une confiance aveugle. On lui
attribue la provocation de l'arrêté parle-
mentaire qui demanda au roi la convoca-
tion des Etats-généraux. Son opposition
constante aux vues du ministère , sa dé-
nonciation au parlement des édits bur-
saux préparés par le garde des sceaux La-
moignon , et le ministre Brienne , le firent
enlever du palais et envoyer en exil aux
îles Ste. -Marguerite. Il devint alors le co-
ryphée de tous les ennemis dti gouverne-
ment , et l'idole du peuple, qui le regarda
comme son plus intrépide défenseur. Il
s'était toujours montré un des frondeurs
les plus déterminés de la cour, et sa criti-
que était d'autant plus dangereuse, qu'elle
paraissait dirigée par un grand fonds de
probité , et par l'amour du bien public.
La reine en devint surtout l'objet. Il cri-
tiquait ses goûts, sa dépense, à un tel
point, que cette princesse, instruite des
propos qu'il tenait à son égard , dit un
jour à sa marchande de mode , qui lui
présentait une coiffure nouvelle : « Je la
» prendrais volontiers , mais il faudrait
» auparavant obtenir de M. dEprémé-
» nil V agrément de la porter. » Cepen-
dant la bonté inépuisable du roi lui per-
mit de revenir à Paris : c'était lui ménager
un triomphe : aussi sur sa route il reçut
des fêtes et des couronnes , et il fut re-
gardé partout comme un défenseur et un
martyr de la cause populaire : ce qui reu-
6..
90 EPR
dail son succès plus complet , c'<5lait le
dtcrcl qui venait d'ordonner la convoca-
tion des Etats-généraux, qui était deve-
nue l'objet des vœux de sa compagnie. Il
y fut nommé député par la noblesse de
Paris , et s'y montra aussi ardent à défen-
•Ire les principes de l'ancienne monarchie,
qu'il avait manifesté d'énergie dans ses
attaques contre les ministres. Cette con-
tradiction dans sa conduite, sans le récon-
cilier avec ceux dont il avait humilié
l'orgueil, le rendit odieux à son parti.
Reconnu dans un groupe aux Tuileries ,
le 17 juillet 1792 , il en fut arraché avec
violence , et il aurait péri infailliblement,
si une patrouille de garde nationale, com-
mandée par l'acteur Micalefj ne l'eut enle-
vé à demi-mort des mains de ses assassins,
et ne l'eut conduit à la trésorerie, puis'
à l'abbaye, St. -Germain, oii le maire Pé-
tion le fit porter, et où il reçut de lui ces
jiaroles : « Comme vous , monsieur , je
X fus l'idole du peuple. » Après le 10
août, ses amis l'engagèrent à sortir d'un
pays oii ses jours étaient sans cesse en
danger, mais il s'y refusa en disant qu'il
devait partager les périls d'une révolu-
lion dont il avait été l'un des premiers
moteurs. Il se retira cependant dans une
terre qu'il avait à quelques lieues de Paris,
'aux environs du Havre , où il se flatta un
instant d'être oublié ; mais la proscription
l'atteignit bientôt. Il fut arrêté , traduit
au tribunal révolutionnaire, et condamné
à mort avec Chapelier, qui pendant la
session de l'Assemblée constituante avait
constamment été son antagoniste. Ils fu-
rent conduits à l'échafaud sur la même
charrette, et exécutés le 23 avril 1794.
En allant au supplice , Chapelier bii dit :
A qui de nous deux vont s'adresser les
injures du peuple ? a tous deux , répondit
d'Epréménil ; et en effet la multitude ac-
cueillit des mêmes succès ses deux anciens
idoles. D'Epréménil était, dit -on, bon
père , bon mari, excellent ami, mais trop
prévenu contre les abus, qu'il s'exagérait
et qu'il voulait réformer. Simple, crédule,
confiant , il se livra avec facilite aux char-
latans, aux imposteurs de toute espèce ,
et devint ensuite leur victime. On lui
attribue les fameuses remontrances du
EQU
mois de janvier 1788, qui produisirent
un si grand effet dans toute la France.
Ses autres ouvrages sont 1° des plai-
doyers; 2° un discours dans In cause des
magistrats qui composent la chambre des
vacations du parlement de Bretagne ,
1700 , in-8. 8° Nullité et despotisme de
l'assemble'e prétendue nationale , in-8.
4° Vétat actuel de la France, 1790,
in-8. La biographie des hommes vivans
attribue ces deux dernières brochures à
M. Ferrand, pair de France. — M™* d'E-
préménil ( Augustine - Françoise Sanc-
TCARi), partagea le sort de son mari ; elle
l'avait accompagné en exil , elle le suivit
sur l'échafaud.
' EQUEyiLLEY ( Jules-César-Suzanne
Lemercier baron d' ) , maréchal-de-camp,
né à Faverncy près de Vesoul, en novem-
bre i7G5, d'une famille de noblesse mi-
litaire j entra au service en qualité de
cadet gentilhomme dans un régiment
d'infanterie de marine. Il était lieute-
nant à l'époque de la révolution , lors-
qu'il se rendit à l'armée de Condé (1791),
entra dans les chasseurs-nobles , et passa
ensuite dans les chevaliers de la cou ■
ronne avec le grade d'officier. Licencié
en 1801 , d'Equevilley fut pendant 4 ans
dans un repos qui convenait peu à son
caractère. Fji 1805, il prit du service
dans l'armée française avec le grade de
capitaine au régiment étranger de la
Tour-d'Auvergne , en Calabre. Aide-de-
camp du comte de Ste.-Croix , il dut à sa
valeur le grade de chef d'escadron qu'il
avait encore en 1814. Alors Louis XVIII
le fit colonel de la légion de la Vendée.
En 1822 il fut nommé maréehal-de-camp
et commandant de la ville de Perpignan;
en 1 823, on le chargea du commandement
de la l'* subdivision de la 9^ division mi-
litaire , à Montpellier où il est mort le
\" novembre 1828. Dix blessures et de
nombreux faits d'armes attestent son cou-
rage. Vrai chi^étien , il appela lui-même
les secours dé la religion , qu'il reçut
avcc^es seiUimens qu'inspirent assez les
approches de la mort dans une âme que
n'a pas gâtée la philosophie moderne. Dans
une notice insérée au moniteur du 13
novembre 1828 , on lui a appliqué la
ERA
belle devise de Bajard ; Sans peur et
sans reproche.
ERARD (Claude), avocat au parlement
de Paris, mort en t700, à 54 ans, laissa
des plaidoyers imprimés en 1735, in-8.
Le plus célèbre est celui qu'il ht pour le
duc de Mazarin, contre Hortense Mancini,
sa femme , qui l'avait quitté pour passer
en Angleterre.
ERASISTRATE, fameux médecin, pe-
tit-fils d'Aristote, découvrit, dit-on, par
l'agitation du pouls d'Antiochus Soter,
la passion que ce jeune prince avait pour
sa belle-mère, et prétendit l'en avoir
guéri. Séleucus-Nicanor, son père, donna
cent talens à Erasistrate pour cette guéri-
son. Ce médecin désapprouvait l'usage de
la saignée, des purgations et des remèdes
violens. Il réduisait la médecine à des
cboses très simples , à la diète , aux tisa-
nes, aux purgatifs doux. Gallien nous a
conservé le titre de plusieurs de ses ou-
vrages, dont les injures du temps ont
privé la postérité. ( Ce médecin fut chef
d'une école dont les disciples portaient
son nom et qui subsista quatre siècles. )
ERASME (Didier), Desideriiis Eras-
miis, naquit à Roterdam en 1467, du com-
merce illégitime d'un bourgeois de Gou-
da, nommé Pierre Gheraeds, avec la fille
d'un médecin. Il fut enfant de chœur jus-
qu'à l'âge de 9 ans , dans la cathédrale
d'Utrecht. A 14, il perdit son père et sa
mère; à 17, il se fit chanoine régulier de
Saint-Augustin à Stein , près de Gouda ;
à 25, il fut élevé au sacerdoce, par l'évê-
que d'Utrecht. Sa pénétration était très
vive , et sa mémoire très heureuse.
Erasme voyagea pour perfectionner ses
talens, en France, en Angleterre, en Italie.
Il séjourna près d'un an à Bologne, et y
prit en IbOG le bonnet de docteur en
théologie. Ce fut dans cette ville qu'ayant
été pris pour chirurgien des pestiférés, à
cause de son scapulaire blanc, il fut pour-
suivi à coup de pierres, et courut risque
de la vie. Cet accident lui donna occa-
sion d'écrire à Lambert Brunius, secré-
taire de Jules II, pour demander la dis-
pense de ses vœux : il l'obtint. De Bolo-
gne, il pa.ssa à Venise, ensuite à Padoue,
enfin à Rome , oh ses ouvrages l'avaient
ERA çft
annoncé avantageusement. Le pape, les
cardinaux, en particulier celui de Médicis
(depuis Léon X), le recherchèrent et l'ap-
plaudirent. Erasme aurait pu se faire un
sort heureux et brillant dans cette ville;
mais les avantages que ses amis d'Angle-
terre lui faisaient espérer de la part de
Henri VIII, lui firent préférer le séjour dfe
Londres. Thomas Morus, grand-chancelier
du royaume, lui donna un appartement
chez lui. Erasme s'étant présenté à lui
sans se nommer, Morus fut si agréable-
ment surpris des charmes de la conversa-
tion de cet inconnu, qu'il lui dit. « Vous
» êtes Erasme ou un démon. » On lui of-
frit une cure pour le fixer en Angleterre ;
mais il la refusa. Il fit un second voyage
en France, l'an 1510, et peu de temps
après il retourna encore en Angleterre.
L'université d'Oxford lui donna une chaire
de professeur en langue gi-ecque. Soit
qu'Erasme fût naturellement inconstant,
soit que cette place lui parût au-dessous
de son mérite, il la quitta pour se retirer
à Bâle , d'où il allait assez souvent dans
les Pays-Bas, et même en Angleterre, sans
que ses fréquentes courses l'empêchassent
de donner au public un grand nombre
d'ouvrages. Léon X , ayant été élevé sur
le saint Siège, Erasme lui demanda la per-
mission de lui dédier son édition grecque
et latine du nouveau Testament, et reçut
la réponse la plus obligeante. Il ne fut
pas moins estimé par le successeur de
Léon , et par les autres souverains pon-
tifes. Paul III voulait l'honorer de la pour-
pre romaine ; Clément VII et Henri VIII
lui écrivirent de leur propre main , pour
se l'attacher. Le roi François I, Ferdinand,
roi de Hongrie , Sigismond , roi de Polo-
gne, et plusieurs autres princes , essayè-
rent en vain de l'attirer auprès d'eux.
Erasme, ami de la liberté, autant qu'en-
nemi de la contrainte des cours, n'accepta
que la charge de conseiller d'état , que
Charles d'Autriche (depuis empereur sous
le nom de Charles -Quint), lui donna.
Cette place lui acquit beaucoup de cré-
dit, sans lui -procurer beaucoup de gjêne.
L'hérésiarque Martin Luther tâcha de l'en-
gager dans son parti, mais inutilement.
Erasme , prévenu d'abord en faveur des
9?-
ERA
léfcrmateurs , se dégoûta d'eux quand il
les eut mieux connus. Il les regardait
comme une nouvelle espèce d'hommes
obstinés y médisans, hypocrites, men-
teurs , trompeurs, séditieux , forcenés ,
incommodes aux autres, divisés entre
eux... « On a beau vouloir, disait-il en
« plaisantant, que le luthéranisme soit
» une chose tragique ; pour moi , je suis
i> persuadé que rien n'est plus comique ,
» car le dénouement de la pièce est tou-
y> jours quelque mariage. >' Les réforma-
teurs devenant tous les jours plus bril-
lans à Bâle, il se retira à Fribourg, qu'il
quitta après un séjour de sept ans , pour
revenir à Bàle , où il mourut d'une dys-
senterie en 163C, à 69 ans. Il avait été du-
rant tout le cours de sa vie d'une ccm-
plexion délicate; il fut, sur la fin de ses
jours, tourmenté par la goutte et la gra-
velle. Sa mémoire est aussi chère à Bàle,
qu'il avait illustrée en y fixant sa demeure,
qu'à Rotterdam, qui jouit de la gloire de
lui avoir donné le jour. Ses compatriotes
lui ont fait élever une statue au milieu
de la grande place, sui- la base de laquelle
on lit ces paroles :
Dctiderio Erasmo
Map;iio srieiiliarum atque
Litleralurœ polilioris
Viodici et iiistauralori.
Pour faire cette statue, on fit fondre un
magnifique crucifix de bronze; ce qui
donna lieu à Yondel, poète hollandais, de
faire une épigramme saillante sur le pa-
triotisme des Rotterdamois {voyez Yon-
del). Il fut le plus bel esprit et le savant
le plus universel de son siècle. C'est à lui
principalement qu'on doit la renaissance
des belles-lettres , les premières éditions
de' plusieurs Pères de l'Eglise, la saine
critique. Il ranima les illustres morts de
l'antiquité, et inspira le goût de leurs
écrits à son siècle. Il avait formé son stile
sur eux. Le sien est pur, élégant, aisé; et
quoiqu'un peu bigarré, il ne le cède en
rien à celui des meilleurs écrivains de son
éiècle. On a reproché, non sans raison, à
Erasme , une trop grande liberté sur les
matières qui concernent la religion. Il
cxprce souvent une critique mal fondée
contre les saints Pères, Il se plaîtà gros-
ERA
sir les vices de son temps; jamais sa plu-
me n'est plus féconde en satires, que
quand il parle des religieux el des ecclé-
siastiques ; il se rend ju'^tice à lui-même,
lorsqu'il dit (lib. 1 , epist. 1 1 ; : Ut ingé-
nue, quod verum est, fatcar, sum natu-
ra propensinr ad jocos quam fartasse
deceat , et linfjuœ libérions quam non-
nunquam expédiât. On peut voir sur ce
point la Préface du Père Canisius sur les
Epîtres de saint Jérôme , et V Apparat
sacré du Père Possevin. Se fiant trop sur
ses propres lumières dans les matières de
religion, il s'est quelquefois écarté du
vrai chemin. C'est pour cela que plusieurs
de ses ouvrages ont été censurés par les
facultés de théologie de Paris et de Lou-
vain , et mis à Y Index du concile de
Trente. Damnatus in plerisque , dit un
auteur moderne, suspectus in multis,
caute legendus in omnibus. Il faut cepen-
dant avouer que quelques-uns ont poussé
la critique trop loin contre Erasme. Il est
certain qu'il a vécu et qu'il est mort dans
le^sein de l'église catholique, comme l'a
montré Jacques MarsoUier dans son Apo-
logie d'Erasme , Paris , 1713 : ouvrage
d'ailleurs trop favorable à Erasme, et con-
tre lequel le Père Tournemine s'éleva avec
force. Peu de jours avant sa mort, Erasme
écrivit à Conrard Goclenius sou intime
ami, qu'il voudrait finir ses jours ailleurs
qu'à Bàle, à raison des divisions que les
nouvelles sectes avaient produites dans
cette ville : Ob dogmatum dissensionem
malim alibi finire vitam. Cet homme cé-
lèbre essuya plusieurs orages qu'il ne sup-
porta pas avec trop de patience. Naturel-
lement sensible à l'éloge el à la critique,
il traitait ses adversaires avec dédain el
avec aigreur. Il eut toute sa vie une pas-
sion extrême pour l'étude ; il préféra ses
livres à tout, aux dignités et aux richesses.
Il était ennemi du luxe , sobre , sincère ,
ennemi de la flatterie, bon ami et con-
stant dans ses amitiés ; en un mot, il n'é-
tait pas moins aimable Irbmme, qu'homme
savant. Toutes ses OEuvres furent re-
cueillies à Bàle par le célèbre Froben son
ami, en 9 vol. in-fol. Les deux premiers et le
quatrième sont consacrés uniquement aux
ouvrages de grammaire, de rhétorique et
t
ERA
de philosophie. On y trouve VEloge de
la folie et les Colloques, les deux produc-
tions d'Erasme les plus répandues. La
première est une satire assez triviale con
tre les désordres et ridicules de son temps,
ou contre ce qui lui a paru tel. « Les dé-
» tails, dit un critique, en sont froids,
« prolixes, exagérés, quelquefois plats et
» dégoûtans. Il est inconcevable que ce
» livre ait pu jouir d'une si grande vo-
w gue; il n'y a que ic si-.e et le nom de
V l'auteur qui peuvent avoir produit cet
); enchantement. » On ne doit pas juger
plus favorablement ses Colloques, qu'on
lit plus pour la latinité que pour le fond
des choses. Il y a çà et là des endroits lu-
briques et obscurs, déplacés dans tout ou-
vrage ; mais surtout dans un prétendu
livre d'éducation, qu'Erasme écrivait pour
le fils de Froben : quand on réfléchit que
l'auteur avait alors GO ans, on ne sait plus
qu'en penser , ou bien on ne le sait que
trop. Le 3* volume renferme les c'pitres,
dont plusieurs ont rapport aux affaires de
l'Egli-^e ; le 6*, les livres de piété, écrits
avec une élégance qu'on ne trouve point
dans les autres mystiques de son temps ;
le 6*, la Version du nouveau Testament,
avec les notes; le "*, ses Paraphrases
sur le nouveau Testament; le 8*, ses
traductions des ouvrages de quelques
Pères grecs; le dernier, ses apologies.
Jean Le Clerc a donné une nouvelle édi-
tion de tous ces différens ouvrages, eu
11 vol. in-foiio, à Leyde, chez Vander-
Aa, 1703. L'Eloge de la Folie a été im-
primé séparément , cum notis variorum,
1676, in-8; et à Paris, Barbou, 1765, in-1 2.
On en a une assez mauvaise traduction
française, par Gueudeville, Amsterdam,
1728, in-8; Paris, 1761, in-8 et in-4, fi-
gures; et une autre de M. Barrett, Paris,
1789, in-1 2. Les Elzevirs ont donné une
édition de ses Adages, 1650, in-1 2; de
.ses Colloques, 1636, in-1 2. Il y en a une
édition, cum notis variorum, 1664 ou
1693, in-8. Ils ont été traduits en français
par Gueudeville, Leyde, 1 7 20, 6 vol. in-1 2,
fig. Barrett a donné en 1789 une nouvelle
traduction de VEloge de la folie. On a
imprimé séparément à Leyde, à la Haye
et a Amslerdam, ses meilleurs ouvrages
ERA 93
au nombre de 24, qui peuvent se relier
en 13 vol. petit in-l2. Ceux qui voudront
connaître Erasme plus en détail, peuvent
lire l'Histoire de sa vie et de ses ouvra-
ges, mise au jour en 1757, par M. de Bu-
rigny, ea 2 vol. in-1 2. Quoique assez mal
écrite, elle est intéressante dans plusieurs
endroits. On voit encore à Bâle, dans un
cabinet qui excite la curiosité des étran-
gers, son anneau, son cachet, son épée,
sou couteau, son poinçon, son testament
écrit de sa propre main, son portrait par
le célèbre Holbein, avec une épigramme
de Théodore de Bèze. On lui a fait cette
épitaphe :
Palliila mors magnum nobis accepit Erojmum ,
Sed Desiderium tollere non potuit.
Il existe à la bibliothèque de l'Arsenal une
vie d'Erasme par Claude Joly, ouvrage
qu'on croyait perdu, et que Burigny re-
grettait de n'avoir pu lire. Il a été re-
trouvé par M. Boulard dans le recueil
manuscrit , inscrit sous le n" 826.
ERASTE (Thomas) , médecin, né en
1524, à Bade en Suisse, enseigna avec
réputation à Heidelberg , puis à Bâle , où
il mourut en 1583. On a de lui : 1° di-
vers ouvrages de médecine , principale-
ment contre Paracelse, ainsi qu'une Vie
de ce philosophe, médecin et charlatan ;
on y voit qu'il se mêlait de magie, et
que le diable lui rendait des visites, Bâle,
1572, in-4. 2" Des thèses qui ont fait
beaucoup de bruit dans le temps, Zurich,
1595, in-4. 3° Opuscula , 1590, in-fol.
4° Consilia , Francfort, 1598, in-fol.
5" De aura potabili , in-8. 6° De putre-
dine, in-8. 1'^ De theriaca, Lyon, 1606,
in-4. 8° De lamiis seu strigibus , Bâle ,
1577, in-8. 9° Des thèses contre Vex-
communication, et l'autorité des consis-
toires, Amsterdam , 1649, in-8. Il paraît
que l'auteur était dans le cas de les crain-
dre. Le médecin était préférable chez lui
au controversiste ; mais ni l'un ni l'autre
ne méritaient le premier rang.
ERATOSTHEÎNE , Grec cyrénéen ,
bibliothécaire d'Alexandrie, mort 196
ans avant J. C. , cultiva à la fois la poé-
sie, la grammaire , la philosophie» les
mathématiques, et excella dans le pre-
mier et le dernier genre. On lui donna
ç)4 ERC
le nom de Cosmographe , H' Arpenteur
dcF univers, de second Platon. Il trouva,
dit-on , le premier la manière de mesurer
la grandeur de la circonférence de la
terre, qu'on n'a pu cependant encore
perfectionner jusqu'à s'assurer d'un cal-
cul précis ; et s'il est vrai que la terre n'a
point une figure parfaitement régulière ,
ri n'y en aura jamais (-voy^sCoiNDAMiîNE}.
11 forma le premier observatoire , et ob-
serva l'obliquité de l'écliptique. Il trouva
encore une méthode pour connaître les
nombres premiers , c'est-à-dire les nom-
bres qui n'ont point de mesure commune
- entre eux. Elle consiste à donner l'exclu-
sion aux nombres qui n'ont point cette
propriété. On la nomma le crible d'Era-
toslhène. Ce philosophe composa aussi
nn traité pour perfectionner l'analyse, et
il résolut le problème de la duplication
du cube, par le moyen d'un instrument
composé de plusieurs planchelles mobi-
les. Parvenu à l'âge de 80 ans et accablé
d'infirmités , il se laissa mourir de faim.
Le peu qui nous reste des ouvrages d'E-
ratosthène a été imprimé à Oxford , en
1672, 1 vol.in-8, età Gottingue en 1794.
On en a deux autres éditions dans l' Ura-
nologia du Père Pétau, 1C30 ; et à Am-
sterdam, dans le même format, 1703. (Les
savans modernes le regardent comme le
père de l'astronomie. )
ERATOSTRA.ÏE. Foyez Erosthate.
ERCHEMBERT, Lombard, vivait dans
le 9" siècle. Il porta les armes dès sa pre-
mière jeunesse, et fut prisonnier de
guerre. Il se retira au Mont-Cassin , oii il
embrassa la règle de Saint-Benoît à l'âge
d'environ 25 ans. On lui donna le gou-
vernement d'un monastère voisin ; mais
il y fut exposé à tant de traverses , qu'il
se vit encore contraint de se retirer. Ce
fut dans le lieu de sa retraite qu'il écrivit
un Supplément dejjuis l'an 7 74 jusqu'en
888, à V Histoire des Lombards, par
Paul Diacre. Il ajouta à ce Supplément
l'Histoire de la ruine et de la restaura-
tion du Mont-Cassin , et de V incursion
des Arabes jusqu'à l'an 884. On lui at-
tribue la Fie de Landulplie , e'vcque de
Capoue, en vers , et un Abrégé de F his-
toire des Lombards ; mais on doute qu'ils
ERC
soient de lui. Antoine Caraccioli, prêtre
de l'ordre des Clercs-réguliers , a publié
son supplément qui oft're quelques faits
curieux , avec d'autres pièces, à Naples,
en 1020, in-4. CamillcPérégrinl'a donné
de nouveau au public dans son Histoire
des princes Lombards , en 1C43, in-4.
(Il mourut l'an 889. )
ERCILLA-Y-CU?s'IGA ( don Alonzo
d' ) , fils d'un jurisconsulte célèbre , était
gentilhomme de la chambre de l'empe-
reur Maximilien. Il fut élevé dans le pa-
lais de Philippe II , et combattit sous ses
yeux à la célèbre bataille de Saint-Quen-
tin, en 1557. Le guerrier, entraîné par
le désir de connaître les pays et les hom-
mes, parcourut la France, l'Italie, l'Al-
lemagne , l'Angleterre. Ayant appris à
Londres que quelques provinces du Pérou
et du Chili s'étaient révoltées contre les
Espagnols, il brûla d'aller signaler son
courage sur ce nouveau théâtre. Il passa
sur les frontières du Chili dans une petite
contrée montagneuse , oii il soutint une
guerre aussi longue que pénible contre
les rebelles, qu'il défit à la fin. C'est cette
guerre qui fait le sujet de son poème de
VArnucana , ainsi appelé du nom de la
contrée. On y remarque des pensées neu-
ves et hardies. Le poète-conqxiérant a
mis beaucoup de chaleur dans ses ba-
tailles. Le feu de Ja plus belle poésie
éclate dans quelques endroits. Les des-
criptions sont riches , quoique peu va-
riées; mais nul plan, point d'unité dans
le dessein , point de vraisemblance dans
les épisodes, point de décence dans les
caractères. Ce poème , composé de plus
de trente-six chants, et trop long de la
moitié, fut imprimé pour la première
fois en 1597, in-12; mais la meilleure
édition est celle de Madrid, 1632 , 2 vol.
in-12. (Après son expédition contre les
peuples du Pérou et du Chili, il prit avec
lui 30 soldats et chercha de nouvelles
aventures ; il alla dans le pays qui est en-
ti'e le détroit de Magellan et l'île de Chiloé,
en prit possession et parcourut beaucoup
d'autres pays. Il rentra ensuite en Espa*
gne oii il mourut vers l'an 1 195. )
ERCKERN ( Lazare ) , surintendan^
des mines de Hongrie, d'Allemagne et di
ERII
Tyrol , sous trois empereurs , a écrit sur
la métallurgie a\ec beaucoup d'exacti-
tude. Son livre est en allemand ; maison
l'a traduit en latin avec des notes. 11 pa-
rut pour la première fois en 1 694, à Franc-
fort, in-fol. On y trouve presque tout ce
qui regarde l'art d'essayer les métaux.
* ERDT ( Paulin ) , religieux francis-
cain allemand , professeur de théologie
à l'université deFribourg en Brisgaw, né
à Wertoch en 1737, s'est distingué par
son zèle à combattre les incrédules , soit
dans les écrits dont il fut auteur , soit
dans ceux qu'il traduisit de l'anglais et du
français. Son principal ouvrage est une
Histoire littéraire de la théologie eulatin,
4 vol. in-8. Il a fait paraître aussi quel-
ques écrits sur la bibliographie.
ERECTHÉE, roi d'Athènes, succéda
à Pandion son père , vers l'an 1400 avant
J. C. Il partagea tous les habitans de son
royaume en quatre classes ( c'est-à-dire ,
en guerriers , artisans , laboureurs et pâ-
tres), pour éviter la confusion qui pour-
rait naître du mélange des conditions. Il
fut père de Cécrops , deuxième du nom ,
qui , après avoir été détrôné par ses ne-
veux, se retira chez Pylas son beau-
père , roi de Mégai'e. Ce prince régna 60
ans.
* ERÏIMANN ( Frédéric-Louis ) , phy-
sicien célèbre, né en 1741, faisait à Stras-
bourg depuis 1res long-temps un cours
de physique très suivi, lorsqu'il fut nom-
mé professeur de cette science à l'école
centrale duBas-Rhin. Il mourut dans cette
ville peu de temps après en 1 799, à l'âge
de 58 ans. Il s'est acquis une réputation
justement méritée de .savant, par des dé-
couvertes et des ouvrages précieux. Ainsi,
il est l'inventeur des lampes à air inflam-
mables , et à cette occasion il a public
Description et usage de quelques lampes
à air inflammables, avec une planche in-
diquant les pièces nécessaires à leur con-
fection. Il s'occupa beaucoup aussi de
l'invention des ballons, fit un grand nom-
bre d'expériences et publia des Observa-
tions sur les Mongolfières , ou ballons
aérostaliques, sur l'art de les faire, sur
les expériences qui ont déjà été faites ,
et l'histoire des deux premiers voyageurs
ERI 95
aériens, 1784, în-8. Les leçons, qu'il a
faites à l'école centrale , ont été recueil-
lies et publiées en français sous le titre
d'Elémcns de physique, ouvrage qui est
très estimé. Enfin Ei'bmann a traduit en
allemand les mémoires de Lavoisier sur
l'action du feu augmenté par le gaz oxi-
ghne avec des notes très intéressantes.
* ERIC, nom commun à plusieurs rois
de Suède et de Daneraarck. — Eric I , sur-
nommé le. Bon, roi de Danemarck , ré-
gna dans le 1 !<= siècle. Il fit la guerre aux
Vandales, et s'empara de leur capitale
dans l'île de Rugen , qui servait d'asile aux
pirates qui infectaient les mers et les cô-
tes du Danemarck. Un meurtre qu'il avait
commis l'engagea d'entreprendre un pè-
lerinage à Jérusalem ; mais il mourut en
route, dans l'île de Chypre, vers l'an
1106. Ce prince se fit chérir de la no-
blesse et du peuple , et respecter de tou-
tes les puissances voisines. Les anciennes
chroniques disent qu'il vivait avec ses
sujets comme un père avec ses enfans , et
qu'aucun malheureux ne le quittait sans
consolation.
ERIC IX ( Saint ) , fils de Jeswar , fut
élu par les Suédois pour être leur roi l'an
1 1 60 ; mais en même temps les Goths éle-
vèrent sur le trône Charles , fils de Suer-
cher. Cette double élection occasiona de
grands débats. Enfin, les deux partis con-
vinrent qu'Eric régnerait seul sur les
Goths et les Suédois, qui ne feraient plus
qu'une même nation , que Cbarlcs lui
succéderait après sa mort. Eric, attaqué
par les Finlandais en 1 1 64, gagna sur eux
une bataille qui le rendit maître de leur
pays. Ils étaient idolâtres. Eric leur en-
voya des missionnaires , à le tète desquels
il mit saint Henri , archevêque d'Upsal ,
dont le siège avait été érigé en métropole
l'an 1148, par le pape Eugène III. Ce
prélat gagna la couronne du martyre dans
sa mission l'an 1 167. Eric s'appliquait en
même temps à policer ses états par de
bonnes lois. On a de lui un code qui porte
son nom. Le zèle de ce prince pour le
bon ordre et sa piété lui firent des en-
nemis qui l'assassinèrent le jour de l'As-
cension, 17 mai 1162. Il est honoré
comme martyr. Israël Erland a donné sa
96 ERI
vie en latin, et Jean Scbcpffer l'a enrichie
de notes; Stockholm, 107 5, in-8.
ERICXIII, roi de Suède, de Dane-
marck et de Norwége , dut la première
couronne à la reine Marguerite, appelée
la Sêiniramis du Nord, et obtint la se-
condé après la mort de cette héroïne en
1 4 1 2 ; mais il ne sut conserver ni l'une ni
l'autre. Il déplut aux Suédois, parce qu'au
lieu de suivre les conventions qu'il avait
confirmées par serment , il les opprimait
par ses gouverneurs. Il mécontenta de
même les Danois par ses longues absen-
ces , et parce qu'il voulut rendre hérédi-
taire la couronne qui était élective. Les
peuples , secondés par la noblesse et le
clergé , le déposèrent. Eric voulut se sou-
tenir sur le trône par les armes; mais
n'ayant pu s'y maintenir, il se retira l'an
1438, en Poméranie , où il passa les res-
tes d'une vie obscure et languissante.
ERIC XIV, fils et successeur de Gus-
tave I dans le royaume de Suède , fut aussi
faible-et encore pjus cruel qu'Eric XIII. Il
aurait désiré de se marier avec Elisabeth,
reine d'Angleterre, qui ne voulait pas
d'époux; mais n'espérant pas d'obtenir sa
main, il partagea son trône et son lit avec
la fille d'un paysan. Celte alliance indi-
gne aliéna le cœur de ses sujets. Des soup-
çons très mal fondés, le portèrent à faire
arrêter Jean son frère , et à le tenir pen-
dant cinq ans dans une dure prison. Ce
prince infortuné, ayant obtenu sa liberté,
excita une révolte. Il assiégea Eric dans
Stockholm, le prit, et l'obligea de.renon-
cer à la couronne en 15G8. Le monarque
détrôné fut enfermé à son tour ; et traîné
de prison eu prison , il fut enfin confiné
dans le château d'Euriby dansl'Uplande.
En vain y invoqua-t-il en sa faveur les
lois qu'il avait fait taire quand il faisait
mourir des innocens, ou qu'il assassinait
ceux qui lui faisaient des remontrances ;
elles restèrent muettes pour lui , et il
mourut le 26 février 1 57 7 . Il n'avait régné
que huit ans. Olof Celsius a donné l'his-
toire de ce prince, qui a été traduite en
français pas Genêt , Paris , 1777.
ERIC ( Pierre ), navigateur hardi
mais cruel , obtint de la république vé-
uitienne le commandement d'une flolte
ERI
sur la mer Adriatique. En 1584 , il prit nn
vaisseau poussé par la tempête, où élait
la veuve de Ramadan, bâcha de Tripoli.
Cette femme emportait à Constantinople
pour 800 mille écus de bien. Lorsqu'Eric
se fut rendu maître de ce navire , et de
ceux qui étaient à sa suite, il fit tuer 250
hommes qu'il y trouva ; perça lui-même
de son épée le fils de la veuve entre les
Lras de sa mère ; et après avoir fait violer
40 femmes qu'il fit couper par morceaux ,
il ordonna qu'on les jetât dans la mer.
Cette barbarie atroce ne demeura pas
impunie. Le sénat de Venise lui fit trati-
cher la tête, et fit rendre à Amurat IV,
empereur des Turcs , tout le butin qu'E-
ric avait fait.
ERIGÈNE. royez Scot.
ERINNE, dame grecque, contempo-
raine de Sapho, composa des poésies,
dont on possède quelques fragmens dans
le Carmina novem paet. Feminaritm ,
Anvers, 1568, in-8. On en trouve des imi-
tations en vers français dans le Parnasse
des Dames , de M. Souvigny.
ERIOCA ou Arioch , roi des Eliciens
ou Elyméens, le même que le roi d'Elas-
sar qui accompagna Chodoriahoinor,
lorsque ce prince vint châtier les souve-
rains de Sodome et de Gomorrhe. Ses
états étaient entre le Tigre et l'Euphrate.
Ce fut sur ces terres que se donna cette
sanglante bataille entre Arphaxad, roi de
Médie, et Nabuchodonosor, roidesChal-
déens, où le premier fut tué.
ERITHRiEUS ( Janus-Nitius ). F oyez
Rossi.
ERIZZO (Paul ) , d'une des plus an-W
ciennes familles de Venise , se signala e»ll
1409 par la défense de Négrepont, dont
il était gouverneur. Après avoir fait une
vigoureuse résistance, il se rendit aui
Turcs sous promesse qu'on lui conserve-
rait la vie. Mahomet II , sans avoir aucun
égard à la capitulation , le fit scier en
deux, et trancha lui-même la tête à Anne,
fille de cet illustre malheureux, parc^
qu'elle n'avait pas voulu condescend!
à ses désirs.
ERIZZO en latin Erius ou Echini
(Sébastien), noble vénitien, mort
1585, se fit un nom par plusieurs ci
ERL
frages de litlérature. Il s'adonna aussi à
la science nuiuistnalisque, et a laissé un
Traité en italien sur les médailles : la
meilleure édition de cet ouvrage assez
estiuié , est celle de Venise , in-4 , dont
les exemplaires pour la plupart sont sans
date, mais dont quelques-uns portent
celle de 1571. On a encore de lui : 1 ° Des
Nouvelles en six journées, Venise, 156T,
in-4. 2° Tratto délia via inventrice e
deir instrumenta de gli aniichi, Venise ,
1564, in-4. Ce savant avait exercé quel-
ques emplois dans sa patrie : il fut du
conseil des dix.
ERKIVINS de Steinbach , architecte ,
mort en 1305 , a donné le plan de la ma-
gnifique cathédrale de Strasbourg, dont
il dirigea la construction pendant 28 ans,
€t qui fut achevée sur ses dessins. La tour
ne fut achevée qu'en 1449. Elle a 514
pieds d'élévation. La solidité en égale la
légèreté et la délicatesse.
ERLACH ( Jean-Louis ) , né à Berne ,
d'une maison de Suisse, très distinguée
par l'ancienneté de sa noblesse et parles
grands hommes qu'elle a produits, et la
première des six familles nobles de Berne.
Il porta les armes de bonne heure au ser-
vice de la France , et se signala en diver-
ses occasions. Sa valeur et ses explois
furent récompensés par les litres de lieu-
tenant-général des armées de France, de
gouverneur de Brisach, de colonel de
plusieurs régimens d'infanterie et de ca-
valerie allemand£. Louis XIII dut à sa
bravoure l'acquisition de Brisach en 1639;
et Louis XIV, en partie, la victoire de
Lens en 1648, et la conservation de son
armée en 1649. Ce prince lui confia cette
année le commandement général de ses
troupes , lors de la défection du vicomte
de Tureune. D'Erlach mourut à Brisach
l'année d'après , à 55 ans. Un de ses des-
ccndans publia en 1784 à&s, mémoires àe
sa vie , 4 vol. in-12. Il y a des *raits in-
téressans ; mais aussi beaucoup d'inutili-
tés et de petitesses , dont la suppression
eût prévenu l'ennui de plus d'un lec-
teur. — Il ne faut pas le confondre avec
Rodolphe-Louis d'Erlacii, membre du
conseil souverain de Berne , dont il a
paru en 1789 un prétendu Code du bon-
V.
ERN 97
heur , 6 vol. in-8 , fruit de l'impiété et
d'une verbiageuse déraison.
* ERLACH (Charles-Louis d') , naquit
à Berne en 1726. Il avait servi en France
avant la révolution , et il était maréchal
de camp lors de l'invasion du pays de
Vaud par les Français. Le gouvernement
de Berne lui conféra le commandement
de son armée , qu'il devait faire agir au
moment oîi finirait l'armistice conclu
avec le général Brune. Lorsqu'il allait
commencer les attaques , il reçut l'ordre
de suspendre les hostilités : le gouverne-
ment avait abdiqué ses pouvoirs. A la
nouvelle de la prise de Berne, d'Erlach
fut massacré par ses propres soldats , qui
le soupçonnèrent d'avoir des intelligen-
ces avec les Français.
* ERMAN (Jean-Pierre), pasteur de la
colonie française de Berlin, né dans cette
ville en^l 7 33 , y est mort en 1 8 1 4. Il était
principal du collège français , directeur
du séminaire, conseiller du consistoire
supérieur, membre de l'académie des
Sciences et Belles-Lettres : il se fit remar-
quer par son zèle à maintenir les métho-
des d'enseignement que les réfugiés
avaient apportées de France. La reine,
épouse de Frédéric H , l'admettait sou-
vent à sa cour. Il a rédigé , avec le pas-
teur Reclam , les Mémoires pour servir
à l'histoire des réfugiés Français dans
les états du roi de Prusse, Berlin, 1782-
94 , 8 vol. in-8 ; recueil trop prolixe et
d'un stile généralement trop négligé;
mais on y trouve des faits intéressans et
des anecdotes curieuses. Il a fait aussi l'é-
loge historique de la reine de Prusse ,
Sophie-Charlotte épouse de Frédéric I ,
des mémoires, des traductions , des ser-
mons, des discours académiques insérés
dans la bibliothèque germanique et dans
quelques autres recueils.
ERIVECOURT. For/ez. Blamont.
ERNEST, archiduc d'Autriche , 3* fils
de l'empereur Maximilien II, frère de
Rodolphe II , fut nommé par Philippe H,
gouverneur des Pays-Bas après la mort
d'Alexandre de Parme en 1592 ; il n'arriva
à Bruxelles qu'au commencement del 694,
et essaya d'abord les moyens de concilia-
lion et de paix ; mais les rebelles ne lui
I
98 ERN
répondirent que par des injures , et pré-
tendirent qu'il avait Toulu faire assassi-
ner le comte Maurice de Nassau par un
prêtre. Quand on considère la fausseté de
de tout ce qu'ils débitaient alors contre
les Espagnols et les catholiques, et sur-
tout la manière dont ils agissaient avec
les prêtres, qu'ils faisaient mourir par des
supplices inouïs, uniquement en haine
du sacerdoce catholique ( voyez Cor-
neille Musius et Ferdinand de Tolèuk ) ,
on ne peut considérer cette inculpation
que comme une calomnie dont ils ne pro-
duisirent aucune espèce de preuve, et
qui essuya les variations les plus propres
à la réfuter ; car plusieurs de leurs ga-
zettes font de ce prétendu assassin , un
soldat garde-du-corps , exécuté à Berg-
ob-Zoom , d'autres un prêtre de Kamur ,
exécuté à la Haye. Aussi Bentivoglio ,
dans son Histoire des guerres de Flandre,
oii il parle de Maurice de Nassau dans le
plus grand détail, ne dit pas un mot de
la prétendue conspiration. Les compila-
teuis du Moréri de Paris, 1759, qui rap-
portent cette fable , la réfutent en même
temps par le portrait qu'ils font d'Ernest.
« C'était, disent-ils, un prince paisible,
» doux, civil et de bon cœur. Si ses ver-
j> tus n'étaient point éclatantes, on peut
)> du moins dire qu'il n'avait point de
)) vices. « Il mourut le 20 février 1595 ,
ayant à peine gouverné les Pays-Bas l'es-
pace d'un an.
* ERIS ESTI ( Jean Auguste ) le Cicéron
de l'Allemagne, l'un des plus illustres cri-
tiques qu'ait produits ce pays de l'érudi-
tion, né en 1707 à Tœnnstadt en Thu-
ringe. Il fut docteur et professeur en
théologie à Leipsick. L'un des premiers ,
il sépara en Allemagne la théologie de la
religion ; distinction que l'on regarde
comme la source des innovations subsé-
quentes que sans doute il n'aurait pas
voulu approuver. Il mourut à Leipsick le
1 1 septembre 1 7 8 1 . On a de lui 1 " Opus-
cula philologico-critica , Amsterdam ,
1762, in-8. 2° Opuscula oratoria, ora-
tiones , proUisiones et elogia , Leyde ,
1762 et 17G7 ,.in-8. 3° Opuscula, oratio-
nes, nova coUectio, Leipsick, 1791,
ifk^^i^ir^ ArcIi6ologia UUeraria, iu-8,
ERN
1768 et 1790. Cette dernière édition, qui
est revue et augmentée par J. H. Martin,
est très-estimée. 5" Initia doctrinœ soli-
dioris, Leipsick, 173G, 7* édition, 1783,
in-8 . G" Institutio interpretis novi Testa-
menli, Leipsick, 1761 , in-8, 4* édition,
1 792. 7° Des sermons en allemand , Leip-
sick, 1768-82, 4 vol. in-8 , oii le savant
se montre plus que l'orateur chrétien.
8" Opuscula Ihcologica, 1773, et 1792,
in-8. d" Nouvelle bibliothèque the'ologique
en allemand, Leipsick, 1760 68, 10 vol.
in-8, Ebcrt et d'autres-savans ont eu part
à cet ouvrage. Ernesti a donné aussi des
éditions estimées et recherchées d'Ho-
mère, Leipsick, in-8, 1 7 59-64-65 ; de Cal-
limaque , Leyde, 2 vol. in-8, 1761 ; de
Polybe, Leipsick, 1763-64; de Xe'nophon,
à'Aristote , et de Cicéron, 7 vol.; Leip-
sick, 1776, 3^ édition; de Tacite, ibid.
1772, in-8 ; de Suétone , d' Aristophane ,
etc. Son Eloge par Auguste Guillaume Er-
nesti a paru à Leipsick , 1 7 8 1 , in-8 . — Er-
NESïi (Auguste-Guillaume), neveu du
précédent , savant professeur de philoso-
phie, et ensuite d'éloquence, né à Frohn-
dorf en Thuringe en 17 33, et mort en
1801, a laissé des éditions estimées de
Tite-Live, 5 vol. in-8; de Çuintilien ,
d'Ammien Marcelin et de Pomponius
Mêla.
* ERNEST (Simon-Pierre) , chanoine-
régulier et professeur en théologie , à
l'abbaye de Bolduc, devint curé d'Afden,
près d'Aix-la-Chapelle vers 1797 , et fut
nommé en 1814 membre de l'institut
royal des Pays-Bas. Il est mort en 1818 ,
et a laissé plusieurs ouvrages historiques
sur le Brabant , un Tableau historique
et chronologique des suffragans ou co-
e'vêques de Liège , avec des notices sur
l'origine des maisons religieuses , dans la
ville et sa banlieue; une Histoire des com-
tes de Limbourg , plusieurs chronolo-
gies historiques dans le tome 3 de l'Art
de vérifier les dates ; un grand nombre
de brochures sur le serment , et un écrit
apologétique au nouveau catéchisme pu*
blié par ordre de Buonaparte.
* EROLES ( Le baron d' ), né dans la
Catalogne en 1785, mort dans la pro-
vince de U Marche en septembre 1825,
I
ERO
fit ses premières armes dans la guerre
de l'indépendance en Espagne. Il se mon-
tra digne de ses ancêtres par la bravoure
dont il donna des preuves continuelles
pendant l'invasion de son pays par les
Français. Profitant de la connaissance
parfaite qu'il avait des localités , il s'était
mis à la tête des paysans de sa province
qu'il avait organisés en milices et qu'il
levait en masse , dans les momens oii les
générauxfrançaiss'y attendaient le moins.
Sa fidélité et son patriotisme furent té-
compensés dignement par Ferdinand Vil.
A l'époque de la révolution de 1820, il
se prononça pour le roi , se mit de nou-
veau à la tète de ses campagnards mal
équippés et mal armés , et soutint pen-
dant long-temps les efforts des constitu-
tionnels. Ce fut lui qui en Î822 organisa
Y Armée de la Foi ; il était aussi l'un des
trois membres de la régence d! Urgel. Il
seconda de tous ses efforts en 1823 les
Français qui entrèrent en Espagne pour
délivrer le roi des mains des révolution-
naires. Il était capitaine général des trou-
pes de S. M. C, officier delà Légion-d'lion-
neur, commandeur de l'ordre de Saint-
Louis; l'auteur anonyme d'une notice in-
titulée Nécrologie sur le baron d'£ rôles,
par un volontaire de l'armée de la Foi,
Paris, 1825, in-8, a dit avec raison de lui
qu'il avait été l'un des plus fermes ap-
puis de la religion catholique et de la lé-
gitimité. Cette notice a été insérée dans le
journal de V Etoile du 20 septembre 1 826,
et dans la Gazette de France du 29 du
même mois. On peut consulter le tome
28 des Victoires et cowyHe/ej, pour avoir
de plus amples détails sur ce général es-
pagnol.
EROPE , Mropus , fils de Philippe I ,
roi de 3Iacédoine , monta sur le trône
étant encore enfant. Les Illyriens, vou-
lant profiter de cette minorité , attaquè-
rent et défirent les Macédoniens ; mais
ceux-ci ayant porté le jeune roi à la tête
de l'armée, ce spectacle ranima tellement
les soldats, qu'ils vainquirent à leur tour,
vers l'an 598 avant J. C. , le prince ré-
gna environ 35 ans, avec assez de gloire.
EROS, affranchi de Marc-Antoine le
triumvir. Ployez cet article.
E1\R 99
EROSTRATE ou Eratostratk,
homme obscur d'Ephèse, voulant rendre
son nom célèbre à la postérité , brûla le
temple de Diane , l'une des sept merveil-
les du monde, l'an 35G avant J. C. le
jour même oîi Alexandre le Grand vint
au monde. Les Ephésiens firent une loi
qui défendait de prononcer son nom.
Cette loi singulière, loin de produire un
tel effet, servit l'intention du scélérat:
ce fut un moyen de répandre et de per-
pétuer sa mémoire; mais il n'y gagna
rien, car elle n'existe que pour être un
objet d'exécration.
ERPEjN'IDS ou d'Erpé ( Thomas ) , né
à Gorcum en Hollande l'an 1584, s'ap-
pliqua'à l'étude des langues orientales à
la persuasion de Scaliger ; parcourut une
grande partie de l'Europe , s'arrêta long-
temps à Venise, parce qu'il y trouva plu-
sieurs juifs et quelques niahométans qui
l'aidèrent dans l'étude qu'il y fit des lan-
gues arabe, perse, turque et éthiopienne.
De retour dans son pays en ICI 3, il fut
fait professeur des langues orientales à
Leyde , où il mourut en 1G24. Il laissa
plusieurs ouvrages sur l'arabe, sur l'hé-
breu, etc., dans lesquels on remarque
une profonde connaissance de ces lan-
gues. Les principaux sont : 1° Gram-
maire arabe, Leyde, 1636, 1G56, 1748
et 1T67, in-4 , estimée. 2" Grammaire
hébraïque, Leyde, 1659. 3° Grammaire
syriaque et chaldàique, Leyde, 1659.
h'^ Grammaire grecque , Leyde, 1662.
5" Psalterium Dalidicum Syriacum cum
versione latina. 6" Historia saraccnica
Georgii Elmacini cum versione latina ,
Leyde, 1622, in-folio, édition enrichie
de cartes géographiques et généalogi-
ques. 7° Lncmani fabulœ et Arabum
adagia cum interpretatione latina et no-
//j, Amsterdam, 1656, in-4. C'était un
homme laborieux, d'un esprit vif, d'une
mémoire étendue , attaché à ses livres et
à sa patrie, qui refusa toutes les offres
qu'on lui fit, pour l'attirer en Espagne
et en Angleterre. Voyez Nicéron, tome5.
Voyez aussi sur ce célèbre orientaliste,
G. J. Vossius, et le Père Scriverius. :,
* ERRA1NTE ( Joseph ) , peintre ita-
lien , né à Trapani , en Sicile , en 1 760,
loo ERR
étudia son art dans sa ville natale, puis
• à Falerme,à Naples, d'où il passa à Rome
où il se perfectionna. Errante avait le ta-
lent d'imiter les plus grands maîtres au
point que l'on confondaitsouvent ses co-
pies avec les modèJcs. On doit à cet ar-
tiste une importante découverte , c'est-
à-dire une manière sûre et facile de res-
taurer les vieux tableaux. Il avait gagné
la conAance du duc de Monte-Leonc dont
il avait fait le portrait : la reconnaissance
de ce seigneur alla jusqu'à lui faire une
pension de 60 ducats par mois ( environ
240 fr. ). La cour de Naples chargea cet
artiste de décorer le château de Caserte.
Lors de la révolution française, dont les
principes subversifs avaient pénétre jus-
que dans les états romains et le royatime
de Naples, Errante, qui les avait adoptés,
fut contraint de se réfugier à Milan , avec
son prolecteur le Duc de Monte-Leone.
Dans cette ville , il lutta avec succès con-
tre un habile adversaire , le peintre Ap-
piani , qui, de son côté , était émule de
Benvcnuti de Florence. L'artiste sicilien
peignait, en outre, le portrait avec un
talent remarquable , et excellait à faire
des armes, exercice auquel les Siciliens
se livrent avec plus d'ardeur que tous les
autrespeuplesde l'Europe. Errante croyait
que cet art n'était pas moins utile aux
peintres que l'avait été la gymnastique
aux anciens , et se proposait de publier
un traité sur le mouvement des muscles ;
projet que d'autres occupations l'empê-
chèrent de réaliser. Après la chute de
Napoléon et la nouvelle réorganisation
de l'Italie , il retourna à Rome , centre
de tous les arts ; il y mourut en juillet
1821 , âgé de 61 ans. On cite comme ses
meilleurs tableaux Artcmise pleurant
sur les cendres de Mausole ; la Mort du
comte Ugolin , au milieu de ses enfans ;
JEndymion ; le Concours de la beauté;
diffcrens tableaux de Psyché, et des
portraits. Il est auteur des ouvrages sui-
vans : 1 ° Traité sur les couleurs em-
ployées par les plus célèbres artistes ita-
liens et flamands : 2° Essai sur les cou-
leurs. Il y une Notice sur cet artiste ,
faite par le savant a)>bé Cancellieri ; et
on lui a élevé à Rome un beau mouu-
ERS
ment , exécuté par Léonard Jennio , ha-
bile sculpteur sicilien.
• ERSCH (Jean-Samuel), professeur à
Halle, né le 23 juin 1760 à Gross-Glogau
en Silésic, habita d'abord léna où il coo-
pérait à des ouvrages périodiques sur la
géographie et la statistique et où il tra-
vaillait à des traductions de relations de
voyagea publiées dans les pays étrangers.
Il fit paraître en 1788, un Catalogue des
ouvrages anonymes et pseudonymes de
V Allemagne pour servir de supplément à
l'Allemagne savante de Meusel. En 1790-
92, un Répertoire des journaux et au-
tres ouvrages périodiques allemands sur
la géographie et l'histoire, Lemgo, 3 vol.
Il mourut de fatigue et de chagrin le 16
janvier 1828.
' ERSKINE ( Jean ) , célèbre presby-
térien écossais, né en 1721 , fut ministre
à Edimbourg, et mourut le 19 janvier
1803. Il a laissé 1° des sermons, 1798,
in-8, estimés pour la liaison du discours
et la pureté du slile. 2° Esquisses de
l'histoire de l'Eglise, 1 790-97, 2 vol. in-8,
ouvrage rempli de documens intéressans
sur l'état delà religion dans l'Europe con-
tinentale, et où il dévoile la conjuration
formée par les incrédules contre la reli-
gion. On dit qu'il était vertueux et tolé-
rant pour les catholiques.
ERSKIIVE (Lord David Dun). Foyez
Dun ( David Erskine , lord ).
' ERSKINE ( Charles ) , cardinal, ori-
ginaire d'Irlande, né le 13 février 1753,
à Rome , où sa famille suivit celle des
Stuarts , lorsque cette dernière eut cessé
de régner. Destiné d'abord au barreau ,
il s'y distingua de bonne heure et fixa
l'attention de Pie VI qui l'engagea à chan-
ger de carrière. Le jeune Erskine, devenu
ecclésiastique, ne tarda pas à être évêque,
puis chanoine de Saint-Pierre. Envoyé
comme ministre plénipotentiaire à Lon-
dres, au moment où se formait la coali-
tion contre la France , il resta 8 années
en Angleterre. Pendant son séjour dans
cette île, on le vit à plusieurs reprises
parler en faveur de l'émancipation des
catholiques. A son retour qui eut lieu
après la paix d'Amiens , il reçut le cha-
peau de cardinal ; Pie Vil eut pour Ers-
ERS
tine la même bienveillance que son pré-
décesseur ; il l'envoya auprès du gouver-
nementconsulaire, et Buonaparte le reçut
avec distinction. Le cardinal Erskine re-
vint à Rome, où il mourut le 19 mars
1811. Il passait pour un des cardinaux
les plus instruits, parlait et écrivait cinq
langues , avec autant de pureté que de
_ facilité, et fut pendant long-temps un
M des plus beaux ornemens de la cour de
m Rome.
m ' ERSKIiVE ( Henri), avocat célèbre ,
*^ naquit en Ecosse , suivit la carrière de la
jurisprudence avec beaucoup de distinc-
tion , fut reçu au nombre des avocats de
la faculté écossaise dans un âge peu avan-
cé , fut relardé dans ses succès au bar-
reau par quelques écrits de jeunesse ,
et répara bientôt les pertes de temps et de
réputation qu'il avait faites. Enfin il ac-
quit une célébrité très grande dans sa pa-
trie. Il embrassa les opinions des Whigs
avec chaleur, devint le premier orateur
de l'assemblée qu'ils tenaient , fut recher-
jk'. cUé par les personnages les plus influens
de ce parti , notamment par Fox qui lui
donna la place de lord-avocat , qu'il
n'exerça que jusqu'à la mort de ce mi-
nistre. Henri Erskine est devenu le doyen
de la faculté des avocats d'Edimbourg. 11
est mort en 1817.
* ERSKIIVE (Thomas, lord), membre du
parlement d'Angleterre, célèbre juriscon-
sulte , né en Ecosse vers 17 50, perdit
de bonne heure son père, et dut les soins
de son éducation à son frère aîné , qui
lui fit suivre la carrière de la marine
( voyez l'article précédent). Il n'y resta
que peu de temps. Entré comme enseigne
dans le 1" régiment d'infanterie (1768 ),
et n'y trouvant pas un avancement assez
rapide, il quitta le service militaire (177 4)
et se livra à l'étude du droit. Après avoir
terminé ses cours aux universités de Cam-
bridge et de Lincols-Inn , il fut reçu avo-
cat en 1778. Bientôt son éloquence le fit
placer au rang des jurisconsultes les plus
distingués; Erskine prit même dans ses
plaidoyers une route différente de celle
qu'avaient suivie jusqu'alors les avocats ;
abandonnant la vieille et pédantesque
routine , il étonna l'auditoire par son
ERS loi
premier discours. Parmi le grand nombre
de causes qu'il défendit , on remarque
les plaidoyers qu'il prononça en faveur
du capitaine Baillie, du libraire Carnan,
^e Pamiral Keppel , de lord Gordon , de
Thomas Paine, de M. Hastings, du doyea
de St.-Asaph , et surtout dans le procès
des criminels d'état en 1814. Sa clientelle
était si nombreuse qu'il gagnait , dit-on ,
plus de 100,000 fr. par an. Nommé mem-
bre de la chambre des Communes en 1 7 8 3
par le bourg de Porstmouth , il fut con-
stamment réélu jusqu'en 180G, où il fut
appelé à la pairie. Il ne laissa échapper
aucune occasion de combattre le minis-
tère , surtout dans la guerre contre la
révolution française, et en 1800 lorsqu'il
parla avec tant de violence de la nécessité
de faire la paix avec la France , et de l'im-
possibilité de songer an rétablissement de
la famille des Bourbons. En général , on
peut dire qu'il ne soutint pas à la tribune
la réputation qu'il avait au barreau et
qu'il continuait toutefois à y justifier. Les
Anglais lui attribuent toutefois l'extension
et le développement des deux institutions
fondamental es de leur gouvernement, la li-
berté de la presse et le jugement par jury.
Après la mort de Pitt (1806), il fut nommé
membre du conseil privé , créé baron
avec le titre de lord, élevé à la dignité
de grand chancelier et d'orateur de la
chambre des pairs. Il perdit cette der-
nière place l'année suivante par la chute
du ministère de lord Grenville. Pendant
qu'il la remplit, il ne donna pas la preuve
de celte grande connaissance des lois
qu'elle suppose ; aucune de ses décisions
n'est citée comme autorité. Lord Erskine
avait une belle élocution, mais peu de
profondeur dans les idées et peu de con-
naissances en droit. Sa carrière politique
fut dès lors terminée. Il mourut le 1 7 oc-
tobre 1823. Il a publié Considérations
sur les causes et les conséquences de la
guerre actuelle avec la France, 1797,
pamphlet qui eut 43 éditions la même an-
née , traduit en Français sur la 23* édi-
tion, sous ce titre : Coup d' œil sur les cau-
ses et les. conséquences de la guerre
actuelle avec la France, Paris, 17 97 ,
in- 8 ; la Préface des Discours de Fox ,
loa ERX
et plusieurs brochures récentes en faveur
des Grecs. Ses meilleurs Discours ont
été recueillis et publiés par ses amis eu
6 vol. in-8, 2" édition, Londres, 1816. Les
plus remarquables ont été traduits eli
français dans le tome 2 de l'ouvrage in-
titulé barreau anglais, Paris, 1824; il
avait aussi composé des poésies qui ne
sont pas sans mérite, entr'autres un petit
poème intitulé Geranicum , qui fut attri-
bué à Shéridan , et un roman politique
en 2 vol. , intitulé Armata.
* ERTBORN ou Hertborn ( Joseph-
Charles-Emmanuel , baron van ) , littéra-
teur distingué, né à Anvers en 1778.
remplit dans son pays plusieurs emplois
administratifs à l'époque de la domination
française ; il était chargé de quelques
fonctions financières assez imporiantes
lors de la révolution opérée dans la Bel-
gique en 1814. Lorsque le royaume des
Pays-Bas fut définitivement organisé, il
fut nommé directeur des contributions
indirectes de la province de Liège. En
1819 , il fit partie du conseil-général des
monnaies à Utrecht, et en 1821, de la
chambre des comptes du royaume. Il s'oe-
cupait , dans les loisirs que lui laissaient
ses occupations administratives, de tra-
vaux scientifiques et littéraires; il s'était
adonné à l'élude des langues , et possé-
dait très bien le grec, le latin, le français,
le hollandais , l'italien et l'allemand. Il a
publié un volume de Recherches histo-
riques sur Vacade'mie d^ Anvers, et sur les
peintres , sculpteurs , graveurs et archi-
tectes qu'elle a produits ( en français } ,
1806.
"ERXLEBEN (Dorothée -Chrétienne
Léporin ) , naquit à Quediinbourg le 1 3
novembre 1715. Faible et valétudinaire,
elle assistait avec plaisir aux leçons de
médecine données à son frère par leur
père , le docteur Chrétien-Polycarpe Lé-
porin. Cette assiduité détermina en elle
son goût pour la médecine, qu'elle étu-
dia sous son père et dans les meilleurs
auteurs, tels que Stahl, HolTman, Boer-
haave , etc. , et oii elle fit de rapides
progrès. Elle fut mariée en 1743 à Jean
Chrétien Erxlcben, ministre du saint
Evangile à Quediinbourg; et l'on doit dire
ERX
à sa louange que son goût pour une étude
et un travail qui ne semblent pas être l'a-
panage de son sexe , ne l'empêcha pas de
remplir avec un .soin scrupuleux les de-
voirs d'épouse et de mère. Le 12 juin 1754,
elle obtint solennellement le doctorat à
l'université de Halle. Le candidat discuta
avec beaucoup de sagacité dans sa disser-
tation une question importante : Quod
nimis cito ac jucunde curare , sœpius
fiat causa minus tutce curationis. Parmi
les nombreuses félicitations qu'elle reçut
de tous côtés, on en remarque une en
stile lapidaire , du professeur Bochmer,
qui annonce que cette cérémonie, auto-
risée par le grand Frédéric, roi de Prusse,
n'avait jamais eu lieu en Allemagne,
Stupetc. nova, lit teraria. in.Italia non-
nunquam. in. Germnnia. Nunquam.
visa. vel. audita. etc. Au moment de
son mariage, elle publia un opuscule en
allemand, intitulé: Examen des causes
qui e'ioigncnt les femmes de l'e'tude ,
dans lequel on prouve qu'il leur est pos~
sible e^ utile de cultiver les sciences g
Berlin, 1742, in-8. La préface appar-
tient à son père. Madame Erxlcben mou-
rut le 13 juin 17G2, laissant quatre en-
fans, dont plusieurs se montrèrent di-
gnes d'elle.
* ERXLEBEN ( Jean - Chrétien- Poly-
carpe ) , naturaliste , fils de la précé-
dente, né à Quedlimbourg en Saxe le 22
juin 1744, fut reçu à 23 ans, docteur en
philosophie à l'université de Gottingue ,
le 5 mai 1767. Sa mère avait, par une
exception honorable et inouïe en Alle-
magne, obtenu le doctorat en médecine
à l'université de Halle ( Voyez l'article
précédent); lui-même étudia les diverses
branches de l'art de guérir ; mais il cul-
tiva avec prédilection l'histoire naturelle
et la physique. Il fut nommé professeur
ordinaire de philosophie en 17 75, et
jouissait déjà d'une réputation étendue,
lorsqu'il mourut à la fleur de l'âge , le 19
août 17 77. Il a laissé plusieurs ouvrages
en allemandrechcrchcs comme des modè-
les d'exactitude et de précision : 1° Elé~
mens d'histoire naturelle, Gottingue,
1768 et 1773 , in-8, réimprimé en 1782
et noi , avec des additions de J. Gcmc-
ERY
liu. i" Considérations sur les causes de
l'imperfection des systèmes mineralogi-
ques , 17G2, in-4. 3° Introduction à la
médecine vétérinaire , Gotliiigue, 1709,
in-8. 'i° Elémens de physique, 1772,
in-8 , réinii)rimés plusieurs fois avec des
augmentations importantes par G. C.
Lichtenberg. 5° Elémens de chimie, 1775,
in-8 , 17 84 et 1790, avec des notes sup-
plémentaires par J. C. Wiegleb. G° Sys-
tema regni animalis cum synomjmia et
historia animalium , classis 1 mamma-
lia, Leipsick, 17 77. Il n'existe point en
zoologie de traité plus exact et plus com-
plet que cette histoire des mammifères.
7° Mémoires physico-chimiques , 1777 ,
in-8. Erxlelien a encore rédigé une Bi-
bliothèque physique, dont il a paru 4 vol.
in-8 , et fourni plusieurs articles à divers
journaux.
ERYCEYRA. (Ferdinand de Mknesés,
comte d' ), naquit à Lisbonne en 1614.
Après avoir puisé dans les premières étu-
des le goût de la bonne littérature , il
alla prendre des leçons de l'art militaire
en Italie. De retour dans sa patrie , il fut
successivement gouverneur de Péniche ,
de Tanger , conseiller de guerre , gentil-
homme de la chambre de l'infant don
Pedro, et conseiller d'état. Au milieu des
occupations de ces diverses places, le
comte d'Eryccyra trouvait des momens à
donner à la lecture et à la composition.
On peut consulter le Journal étranger ,
de 17 57, sur ses nombreux ouvrages. Les
principaux sont : 1 ° L'Histoire de Tan-
ger, imprimée in-folio, en 1723. 2°
L'Histoire de Portugal, depuis 1640,
jusqu'en 1657 , en 2 vol. in-folio. Z° La
vie de Jean I , roi de Portugal. Ces dif-
férens livres sont utiles pour la connais-
sance de l'histoire de son pays.
ERYCEYRA ( François-Xavier de Me-
HEsÈs, comte d' ), arrière petitfils du
précédent et héritier de la fécondité de
son bisaïeul, naquità Lisbonne en 1672.
Il porta les armes avec distinction , ob-
tint, en 1735, le titre de mestre-de-camp
général et de conseiller de guerre, et
mourut en 1743, à 70 ans. Il n'était pas
grand seigneur avec les savans: il n'était
qu'homme de lettres , aisé , poli , com-
ESC io3
municatif. Le pape Benoît Xlll l'honora
d'un bref; le roi de France lui fit présent
du Catalogue de sa bibliothèque. L'aca-
démie de Pétersbourg lui adressait ses
mémoires ; une partie des écrivains de
France, d'Angleterre, d'Italie, etc. , lui
faisaient hommagede leurs écrits. Ses an-
cêtres lui avaient laissé une bibliothèque
choisie et nombreuse , qu'il augmenta de
15,000 volumes et de 1000 manuscrits.
Sa carrière littéraire a été remplie par
plus de cent ouvrages différens. Les plus
connus en France sont : 1° Mémoire sur
la valeur des monnaies de Portugal y
depuis le commencement de la monar-
chie , in-4 , 1 738. 2° Réflexions sur les
études académiques. 3° 58 parallèles
d'hommes et i2 de femmes illustres.
4° La Henriade , poème héroïque , avec
des observations sur les règles du poème
épique, in-4, 1741. 5° L' art poétique
de Boileau , traduit en portugais.
ERYTROPHILE ( Rupert ) , théolo-
gien du 17^ siècle, et ministre à Hano-
vre, est auteur d'un Commentaire métho-
dique sur l'histoire de la Passion. On a
encore de lui : Catence aureœ in harmo-
nium evangelicam. , in-4.
ESAU , fils d'isaac et de Fiébecca , né
l'an 1836 avant J. C, vendit à Jacob,
son frère jumeau , son droit d'aînesse, à
40 ans, et se maria à des chananéennes
contre la volonté de son père. Ce respec-
table vieillard lui ayant ordonné d'aller à
la chasse pour lui apporter de quoi man-
ger , lui promit sa bénédiction; mais Ja-
cob la reçut à sa place, par l'adresse de
sa mère ( voyez Rébecca ). Les deux frè-
res furent dès lors brouillés ; mais ils se
réconcilièrent ensuite. Jacob se retira
chez son oncle Laban. Esaù mourat à
Seïr en Idumée, l'an 1710 avant J. C. ,
âgé de 127 ans, laissant une postérité très
nombreuse.
ESCALE (Mastin del' ), d'une famille
que Villani fait descendre d'un faiseur
d'échelles nommé Jacques Fico , fut élu
en 1259 podestat de Vérone , où ses pa-
rens tenaient un rang distingué. On lui
donna ensuite le titre de capitaine per-
pétuel , et il fut dès lors comme souve-
rain. Mais quoiqu'il gouvernât ce petit
io4 ESC
état avec beaucoup de prudence, son
grand pouvoir souleva contre lui les plus
riches habitans. Il fut assassiné en 1273.
Ses descendans conservèrent et augmen-
tèrent même l'autorité qu'il avait acquise
dans Vérone. Mastin III de l'Escale, génie
remuant et ambitieux , ajouta non-seu-
lement Vicence et Bresce à son domaine
de Vérone ; il dépouilla encore les Car-
rare de Vadoue dont il fit Albert son
frère gouverneur. Celui-ci , livré à la
débauche , vexa ses sujets , et enleva la
femme d'un des Carare dépossédés, qui
sachant dissimuler à propos, flattèrent
l'orgueil des deux frères. Mastin , le plus
entreprenant des deux , ne tarda pas de
s'attirer la haine des Vénitiens en faisant
faire du sel dans les lagunes. Ces répu-
blicains , jaloux de ce droit qu'ils vou-
laint rendre exclusif, firent la guerre
aux l'Escale, rendirent Padoue aux Car-
rare, s'emparèrent de la Marche Tré-
visane, et enfermèrent Mastin en 1339
dans son petit état de Vérone et de Vi-
cence. Ce tyran subalterne avait commis,
dans le cours de la guerre , des cruautés
inouïes. Barthélemi de l'Escale , évêque
de Vérone , ayant été soupçonné de vou-
loir livrer cette ville aux Vénitiens,
Mastin son cousin le tua sur la porte de
son palais épiscopal le 28 août 1338. Le
pape ayant appris ce meurtre , soumit à
une pénitence publique Mastin, qui, après
l'avoir subie, jouit paisiblement du Vé-
ronais. Mais en 1387 il fut enlevé à sa
famille. Antoine de l'Escale, homme
courageux, mais cruel, souillé du meur-
tre de son frère Barthélemi , se ligua
avec les Vénitiens pour faire la guerre
aux Carrare. Son bonheur et ses succès
alarmèrent le duc de Milan , qui s'empa-
ra en 1387 de Vérone et de Vicence. An-
toine , réduit à l'état de simple particu-
lier, obtint une asile et le titre de noble
k Venise. Mastin III avait eu un fils ap-
pelé Caç le Grand , et ce fils , un bâtard
pommé Guillaume , héritier de sa valeur
et de son ambition. Celui-ci, secondé par
François Carrare, seigneur de Padoue,
ge remit en possession de Vérone et de
Vicence en 1403. Son pouvoir commen-
çait à être respecte , lorsque le même Car-
ESC
rare, qui l'avait aidé à reprendre l'auto-
rité de ses ancêtres , l'empoisonna pen-
dant le cours d'une visite qu'il lui avait
faite , sous prétexte d'aller lui faire com-
pliment. Cptte perfidie fut un crime
inutile. Les Vicentins et les Véronais,
ne voulant pas reconnaître ce scélérat ,
et las d'être disputes par de petits ty-
rans , se donnèrent à la république de
Venise en 1406. Bnuiorode l'Escale, der-
nier rejeton de cette famille ambitieuse,
tenta en vain en 1410 de rentrer dans
Vérone : il échoua contre les forces Véni-
tiennes. Les Scaliger qui portèrent dans
la république des lettres, le ton d'inso-
lence et de hauteur que les l'Escale
avaient à Vérone prétendaient être des-
cendus d'eux ; mais on leur prouva que
leur vanité se fondait sur des chimères.
ESCALIN. Foycz Garde ( Antoine Is-
calin , et non Escalin baron de la ).
*ESCARS (Jean-François de Pérusse,
duc d' ), naquit le 13 novembre 1747.
II avait un frère aîné qui était l'espoir de
ses parens et qui mourut jeune encore.
Avant cet événements! malheureux pour
sa famille, Jean-François d'Escars était
entré comme cadet dans l'ordre de Malte
cil il servit d'abord sur mer , et ensuite
sur terre. En 1774, il devint colonel des
dragons d'Artois. Après avoir épousé en
1783, la fille du fameux banquier La-
borde , il devint en 17 88, maître-d'hô-
tel du roi en survivance, et maréchal-
de-carap. En 1791 , il quitta la France
et se rendit auprès des princes qui étaient
réunis sur les bords du Rhin, et qui le
chargèrent d'une mission diplomatique
auprès de Gustave III , roi, de Suède.
Il resta plusieurs années à la cour de
Stockholm , oii il paraissait jouir d'un
grand crédit , et où il n'en eut cependant
pas assez pour empêcher que l'envoyé de
la république française ne fut accueilli
par la gouvernement suédois ( 1792 ). Le
baron d'Escars était encore en Suède lors-
que le roi Gustave tomba sous les coups
d'un assassin. Après ce fatal événement,
il reçut de nouvelles instructions des
princes, et se rendit, d'après leur ordre, à
Berlin , oii le gracieux accueil qu'il reçut
du roi l'engagea à reprendre du service
I
I
ESC
dans l'année prussienne. C'est à cette épo-
que qu'il contracta un nouveau mariage
avec M""* de Nadaillac, femme d'esprit ,
que quelques imprudences commises sous
le gouvernement impérial firent exiler aux
îles Ste. -Marguerite, d'où elle eut ensuite
la permission de se rendre dans la Tou-
raine. Le baron d'Escars fut nommé lieu-
tenant-général par Louis XVllI , qui lui
donna la charge de premier maître-d'hô-
tel. Il reçut aussi le litre de duc dans le
mois de mars 1816, et mourut le 9 sep-
tembre 1828. C'était un de ces hommes
de cour dont la fidélité à leur maître ne
fut jamais couverte d'aucun nuage.
* ESCARS ( François- Nicolas -René,
comte de Pérusse d' ) , cousin du précé-
dent , pair de France, né le 1 2 mars 1759,
fut élu député aux états-généraux par la
noblesse de Châteilerault. Dans cette as-
semblée signalée par tant de trahisons,
il resta fidèle aux principes de la monar-
chie ; il se prononça contre la révolution
et signa toutes les protestations que fit
la minorité monarchique contre les déci-
sions de la majorité constitutionnelle. U
quitta la France avec le comte d'Artois,
dont il était le gentilhomme d'honneur
et qui le fit son capitaine des gardes. Il
prit pari aux campagnes des émigrés ; ce
qui lui valut en 1794 le grade de maréchal-
de-camp. Lorsque les Bourbons revinrent
en France, le comte d'Escars fut nommé
lieutenant - général , reprit sa place de
capitaine des gardes de Monsieur, fut
élevé au rang de commandeur de St.-
Louis , et de pair de France. U fut aussi
gouverneur de la 4™® division militaire,
et mourut le 30 décembre 1822. Il appar-
tient, comme le précédent, à une famille
chez laquelle la fidélité au roi est une ha-
bitude, je dirais presque une nécessité.
* ESGHELS-KROON ( Adolphe ) ,
voyageur danois, né en 1736 à JN'ieblura
dans le duché de Sleswich , passa 18 ans
dans les Indes orientales , où il fut d'a-
bord résident de la compagnie hollan-
daise , ensuite agent du Danemarck ; en-
fin il se retira à kiel, où il mourut le 18
octobre 1793. On a de lui en allemand :
1° Description de l'île de Sumatra, con-
sidérée principalement sous le rapport
V.
ESC io5
du commerce, 1782, in-8, avec une
bonne carie. Celle relation est utile pour
rectifier beaucoup de notions fausses que
des ouvrages publiés antérieurement pou-
vaient faire prendre sur Sumatra. 2° Re-
lation authentique de Ve'tat actuel des
principales îles de VOcéan indien, sur-
tout de Bornéo. 3" Description de Ban-
da, d'Amboine, de Ceylan, etc. Cette
dernière description a été traduite en
français par Langlès, dans le recueil in-
titulé Description du Pcgu et de Vile de
Ceylan , Paris , 1793.
* * ESCHENBURG (Jean-Joachim), cri-
tique allemand, né à Hambourg le 7 dé-
cembre 1 7 48, et mortle 29 février 1 820, fut
gouverneur public des élèves du collège
Carolinà Brunswick. U consacra toute sa
vie à l'enseignement; et les bons prin-
cipes de morale qu'il répandit furent pro-
fessés par cet ami de la jeunesse , non-
seulement par ses paroles , mais encore
par ses actions. Il a publié les ouvrages
suivans ; 1° Muse'e britannique pour les
allemands, Leipsick, 1770, 1781, 7 vol.
in-8; 2° Commentaire de Hurd sur les
épitres d'Horace , traduit de l'anglais ,
Leipsick, 1772, 2 vol. in-8; Z° Théâtre
de Shakespeare, traduit de l'anglais, Zu-
rich, 1776-87, 14 vol. in-8; 2« édition,
1798-1806, 12 vol. in-8 ; celte traduction
est préférée à celle de Wielaud ; 4" Pré-
cis d'une théorie et d'un cours de belles-
lettres , Berlin, 1783, in-8; 6« édition,
1813, traduit en français par Storch, sous
le titre de Principes généraux de belles-
lettres , Saint-Pétersbourg, 1789, in-8;
b° Manuel de la littérature classique de
l'antiquité, et de la mythologie , Berlin,
1 7 83,in-8;6« édition, 1816, traduit en fran-
çais par Cramer, Paris, 1 802, 2 vol. in-8;
Q°Collection d'extraits tirés des meilleurs
auteurs anciens et modernes dans tous
les genres de poésie et d'éloquence, Ber-
lin, 1788-95, 9 vol. in-8; 7° Manuel de
l'étude des sciences, 1792 et 1800, in-8;
8° Monumens de la poésie et de la langue
allemande ancienne, Brème, 1799, in-8;
9° plusieurs traductions d'ouvrages fran-
çais et anglais, entre autres celle de VEs~
ther de Racine , en vers allemands. II a
coopéré à un grand nombre de journaux
1".
io6 ESC
et recueils përiodiques. 11 a donné en ou-
tre une édition des œuvres posthumes de
Lessing, avec des notes, Berlin, nUO.
* ESCHER, DE La Linth (Jean Conrad),
géologue suisse, né à Zurich le 24 août
nC7, mort dans la même ville le 9 mars
1823, était fils d'un conseiller d'état de
ce canton. Il At ses études à Genève d'où
il revint dans sa patrie pour s'occuper de
ses intérêts politiques. Après avoir con-
sacré quelque temps aux exercices mili-
taires imposés à tous les habitans de la
Suisse , il étudia les dififérens gouverne-
mens des cantons et chercha à connaître
ce qui pouvait contribuer le plus à leur
prospérité réelle et présente. Il fixa son
attention sur Véconomie industrielle et
rurale. Ce fut dans le but d'étudier celte
science qu'il fit un séjour de deux ans à
l'université de Gottingue où il s'occupa
aussi de la minéralogie, de la géologie,
et de la statistique II parcourut aussi l'An-
gleterre et l'Italie pour y visiter et con-
naître leursprincipales manufactures. Mal-
gré ces goûts qui semblent être l'apanage
exclusif des âmes tranquilles, il adopta
les principes de la révolution française,
fut élu membre du grand conseil helvé-
tique et coopérer à la rédaction du j ournal
démocratique qui paraissait alors sous le
titre de Républicain suisse. Lorsque Buo-
naparte eut imposé son joug sur l'helvé-
tie, Escher rentra dans la vie privée.
Quelques années après il devint conseil-
ler d'état ; mais il ne s'occupa guère que
du dessèchement des marais de la Linth
dont il fut chargé par la diète concur-
ramment avec une commission dont il fut
nommé président. Abandonné pendant
l'exécution de ce projet éminemment
utile, il n'en discontinua pas ses travaux :
il alla lui-même habiter ces marais pesti-
lentiels, et, de 1807 à 1816, il ne s'occupa
que de cet objet. Ses efforts furent cou-
ronnés par le plus heureux succès. La
Linth qui se perdait autrefois dans des
terres marécageuses, coule maintenant
par deux canaux dont l'un conduit une
partie de ses eaux dans le lac de Wesen
et l'autre dans celui de Zurich. Dès lors
le pays qui avait été jusqu'à cette époque
très malsain a vu disparaître les fièvres
ESC
qui désolaient ses habitans. Pour prix
d'un si grand bienfait , Escher ne voulut
recevoir que le surnom de la Linth ajouté
à son nom. On trouve sur les travaux qu'il
a fait exécuter des détails curieux dans
la Bibliothèque universelle de Genève ,
(sciences et arts, année 1819), et dans le
tome 27 de la Revue encyclopédique. On
remarque dans la même Bibliothèque
universelle et dans différens journaux al-
lemands, des Mémoires et Dissertations
d'Escher sur divers points de la géologie
de la Sui.sse. Des tnédailles d'or, d'argent
«t de bronze ont été gravées pour conser-
ver sa mémoire; et le professeur Vaucher
a publié une notice assez étendue sur sa
vie, insérée dans le tome 22 de la Biblio-
thèque de Genève.
* ESGHERNY (François -Louis n' ) ,
comte du St. -Empire, ancien chambellan
du roi de Wurtemberg, naquit à Neuchàtel
(Suisse) en 1734, et mourut à Paris en
1816. 11 est auteur des ouvrages suivans :
1 ° Lacunes de la philosophie, 1 7 8 3, in- 1 2 .
2° Correspondance d'un habitant de Pa-
ris avec ses amis de Suisse et d'Angle-
terre, sur les événemens de\1 90 jusqu'au
4 avril 1791, Paris, 1791 , in-8, réim-
primée en 1816, sous le litre de Tableau
historique de la révolution, 2 vol. in-8;
3° de V Egalité, ou Principes généraux
sur les institutions civiles , politiques et
religieuses, précédés de V éloge de J. J.
Rousseau, 1796, 2 vol. in-8; reproduits
sous ce titre : la Philosophie de la poli-
tique, ou Principes généraux sur les in-
stitutions sociales, Paris, 1798, in-8.
4" Mélanges delittérature, d'histoire, de
morale et de philosophie , 1809, 3 vol.
in-12 ; quelques volumes portent le titre
de la seconde édition avec la date de 1 8 1 5;
5" Fragmens sur la musique, etc., 1 809,
in-12., extrait du précédent.
ESCHINE, célèbre orateur grec, na-
quit à Athènes l'an 397 avant J. C. , 3 ans
après la mort de Socrate et 16 ans avant
la naissance de Démosthènes. Si l'on
ajoute foi à ce qu'il dit de lui-même , il
était d'une naissance distinguée, et il
avait porté les armes avec éclat ; et si
l'on adopte le récit de Démosthènes,
E.schine était le fils d'une courtisane.
ESC
Il aidait sa mère à initier les novices dans
les mystères de Bacchus , et courait les
rues avec eux. Il fut ensuite greffier d'un
petit juge de village; et depuis il joua
les troisièmes rôles dans une bande
de comédiens, qui le chassèrent de leur
troupe. Ces deux récits sont fort dif-
férens : si celui de Démosthènes est
faux, il sert à prouver que, dans tous les
temps , les gens de lettres ont été jaloux
les uns des autres; et que cette jalousie a
produit, dans les siècles passés comme
dans le siècle présent, des injures et des
personnalités révoltantes. Qjioi qu'il en
soit, Eschine ne fit éclater ses talens que
dans un âge assez avancé. Ses déclama-
tions contre Philippe , roi de Macédoine,
commencèrent à le faire connaître. On le
députa à ce prince ; et le déclamateur
emporté , gagné par l'argent du monar-
que , devint le plus doux des hommes. Dé-
mosthènes le poursuivit comme prévari-
cateur , et Eschine aurait succombé sans
le crédit d'Eubulus. Le peuple ayant vou-
lu quelque temps après décerner une
couronne d'or à son rival , Eschine s'y
opposa , et accusa dans les formes Ctési-
phon , qui avait le premier proposé de
la lui donner. Les deux orateurs pronon-
cèrent en cette occasion deux discours ,
qu'on aurait pu appeler deux chefs-d'œu-
vre , s'ils ne les avaient encore plus char-
gés d'injures que de traits d'éloquence.
Eschine succomba; il fut exilé. Dégoûté
du métier de rhéteur, il passa à Samos,
cil il mourut peu de temps après , à 7 5 ans.
Les Grecs avaient donné les noms des
Grâces à trois de ses harangues , et
ceux des Muses à neuf de ses épîtres.
Ces trois discours sont les seuls qui nous
restent. Eschine , plus abondant , plus
orné , plus fleuri , devait plutôt plaire à
ses auditeurs que les émouvoir ; Démos-
thènes , au contraire , précis , mâle, ner-
veux, plus occupé des choses que des
mots , les étonnait par un air de gran-
deur , et les terrassait par un ton de force
et de véhémence. Le premier avait plus
d'esprit , le second plus de génie. Les ha-
rangues d'Eschineont été recueillies avec
celles de Lysias , d'Andocides , d'isée , de
Dioarque, d'Antiphon, dcLycurgue, etc.,
ESC
lO-
par les Aides , 3 vol. in-fol., 1513. ( Us se
trouvent aussi dans les orateurs grecs
deReiske, Leipsick, 1770-7 5. L'abbé Au-
ger a donné une traduction d'Eschine avec
celle de Démosthènes, Paris, 177 7,5 vol.
in-8. Cette Traduction a été revue par
Planche avec le texte grec en regard, 1 820-
1822,10vol. in-8. J
ESCHINE, philosophe grec. On ignore
le temps auquel il vivait. Nous avons de lui
des dialogues avec les notes de Le Clerc,
Amsterdam, 1711, in-8, qui se joignent
aux auteurs cum notis variorum.
*ESCHroS (Nicolas) naquit en 1507
à Nordwik , près Bois-le-Duc. Ayant été
ordonné prêtre à Cologne, son savoir et
sa piété lui valurent l'offre honorable de
se charger de l'éducation du jeune duc de
Juliers. Mais la vie de la cour ne conve-
nait pas au caractère d'Eschius : il n'au-
rait pu être témoin des désordres qui y
régnent ordinairement. Il refusa cet em-
ploi honorable, préférant consacrer ses
tî-'p.ns à la direction d'une modeste école.
Il y forma des élèves aussi utiles à l'état
qu'à l'Eglise. On compte parmi ceux qui
profitèrent le plus de ses soins, Pierre Caui-
sius, jésuite, et Laurent Surius, chartreux.
S'étant lié avec ce dernier et plusieurs
autres religieux du même ordre , il réso-
lut d'embrasser leur institut ; mais la fai-
blesse de sa santé s'opposa à son pieux
dessein. Il voulut du moins imiter leur
vie solitaire , et obtint une cellule dans
la chartreuse , où il mena une vie édi-
fiante. Les supérieurs ecclésiastiques pen-
sant devoir employer ses talens et sa piété
à procurer le salut d'autrui , le nommè-
rent archiprêtre de Diest , et le chargè-
rent en même temps de la direction du
béguinage de cette ville. Eschius s'ac-
quitta avec zèle de ces deux emplois et
forma divers établissemens pieux. Il ter-
mina en 1578 une carrière qu'il avait
sanctifiée par la pénitence et les bonnes
œuvres. Sa vie a été écrite par Arnould
de Jean , son successeur dans la direc-
tion du béguinage de Diest. On a de ce
vénérable ecclésiastique 1° Exercices
de piété, en latin , Anvers , 1 563 , in-8,
15G9, in-16. Ils ont été traduits en fla-
mand et réimprimés en 1713. On trouve
io8 ESC
dans celle dernière édilion la yie d'Es-
chiiis, traduite aussi en flamand. 2° Isn-
goge ad vitam introversam capcssen-
dam , à Ja tête d'un livre intilulé : Tem~
plum animœ publié par Eschius, An-
vers, 15G3, in-8. Margarila cvnngeUca ,
Jivre de spiritualité, traduit du flamand
en latin. Cet ouvrage et le Tcmplum
animée apparliennent à une sainte fille
dont on ignore le nom. La Margarila
a été souvent réimprimée en latin , en
français, en flamand et en allemand.
ESCHYLE, né à Athènes d'une des
plus illustres familles de l'Allique , signa-
la son courage aux journées de Marathon,
de Salamine et de Platée; mais il est moins
célèbre par ses combats que par ses/>oe'«e,r
dramatiques. II perfectionna la tragédie
grecque, que Thespis avait inventée. Il
donna auxacteursun masque unhabitplus
décent, une chaussure plus haute, appe-
lée cothurne, et les fit paraître sur des plan-
ches rassemblées pour en former un théâ-
tre. Auparavant ilsjouaient sur un tom^'j-
reau ambulant, comme quelques-uns de
ïios comédiens de campagne. Eschyle ré-
gna sur le théâtre, jusqu'à ce que Sophocle
lui disputa le prix et l'emporta. Ce vieil-
lard ne put soutenir l'atfront d'avoir été
vaincu par un jeune homme. Il se retira
\i la cour d'Hiéron , roi de Syracuse , le
plus ardent protecteur qu'eussent alors
les lettres. On raconte qu'il perdit la vie
par un accident très singulier. Dn jour
qu'il dormait, dit-on, à la campagne, un
aigle laissa tomber une tortue sur sa tête
chauve, qu'il prenait pour la pointe d'un
rocher. Le poète mourut du coup vers
l'an 477 avant J. C. Il paraît que l'aigle
a la vue trop perçante , pour ne pas dis-
tinguer la tête d'un homme , de la pointe
d'un rocher. Cependant les historiens se
plaisent à répéter celte catastrophe sin-
gulière. On ajoute qu'un astrologue avait
prédit à Eschyle qu'il mourrait delà chute
d'une maison , et que pour cela il se tenait
presque toujours en rase campagne Ce
poète a de l'élévation et de l'énergie; mais
elle dégénère souvent en enflure et en
rudesse. Ses tableaux offrent de trop
grands traits, des images gigantesques
et épouvantables ; ses fictions sont hors
ESC .
de la nature, ses personnages mon-
strueux. Il écrivait en énergumène, et,
pour tout dire, en homme ivre. La repré-
sentation de ses Eumdnides était si ter-
rible, que l'effroi et le tumulte qu'elle
causa , fit écraser des enfans et blesser
des femmes enceintes. (Ses tragédies sont
au nombre de 60 , d'après l'auteur grec
de sa vie et de 90 selon Suidas. Sept
seulement ont été conservées. ) Les meil-
leures éditions de ces pièces sont celles
de Henri Etienne , 1 557 , in-4 ; et de Lon-
dres, in-fol., 1GG3, par Stanley, avec
des scholies grecques, une version latine
et des commentaires pleins d'érjudition.
Celle de Paw, la Haye', 1745, 2 vol,
in-4 , est moins estimée ; mais celle de
Glascow, 1746, 2 vol. in-8, est précieuse
pour la beauté de l'exécution. M. Schutz
en a donné une très bonne édition en
1 782, Halle, 3 vol. in-l 8. (Brunck et MM.
Hermann , Wolf et Bloomfidd ont isolé-
ment publié différentes pièces de ce grand
tragique dont la Trilogie éditée par le
professeur F. Th. Welker a paru en 1824,
Darmstadt, grand in-8.) On en a imprimé
une traduction française, élégante et fi-
dèle, Paris, 17 70, in-8, par M. Le Franc
de Pompignan. M. Laporte du Theil en a
publié une nouvelle traduction, Paris,
1794, 2 vol. in-8, accompagnée du
texte grec , d'après l'édition de Stanley.
(Cette dernière fait partie du théâtre des
grecs du P. Brumoy que vient de revoir
et de réimprimer M. Raoul-Rochette. )
ESCOBAR ( Barthélerai ) , pieux et
savant jésuite, né à Séville en 1558,
d'une famille noble et ancienne , avait
de grands biens , qu'il employa tous en
œuvres de charité. Son zèle le conduisit
aux Indes , où il prit l'habit de religieux.
Il mourut à Lima en 1624. On a de lui
1 ° Conciones quadragesimales et de Ad-
ventu, in-fol. 2° De fe.slis Domini. 3"
Scrmones de historiis sacrœ Scripturœ.
Ses ouvrages ne sont guère connUs qu'en
Espagne.
ESCOBAR ( Marine d' ) , née à Valla-
doliden (554, morte saintement en 1633,
est la fondatrice de la récollection de
Sainte-Brigitte en Espagne. Le P. Du-
pont, sou confesseur, laissa des mémoirei
I
ESC
sur sa vie, qu'on fit imprimer in fol. Ce
livre est devenu très rare.
ESCOBAR ( Antoine ) , de l'illustre
maison de Mendoza , jésuite , né à Valla-
dolid en 1689, mort en 16G9 , k 80 ans ,
est auteur de plusieurs ouvrages , dont
les plus connus sont ses Commentaires
sur l'Ecriture sainte, Lyon, 1667 , 9 vol.
in folio , et sa Théologie morale , (Lyon ,
1663 , 7 vol. in folio dans laquelle il élar-
git un peu trop le chemin du salut. Ses
principes de morale ont été tournés en
ridicule par Pascal : ils sont commodes ,
mais l'Evangile proscrit ce qui est com-
mode. Il ne faut cependant pas croire que
ces sortes d'ouvrages, quoique certaine-
ment répréhensibles , aient fait autant de
mal que quelques zélateurs l'ont pré-
tendu. Ce ne sont que les savans ou les
gens consciencieux qui les lisent; les
hommes dissipés ou libertins ne s'en oc-
cupent point. « Je n'ai connu ' aucun
3> homme de mauvaise vie , dit un auteur
w judicieux, qui eût beaucoup lu les ca-
» suistes; et je n'ai connu ni grand ca-
« suiste , ni grand liseur de casuistes qui
» ait été homme de mauvaise vie. » Un
jour qu'un certain réformateur décla-
mait contre les casuistes relâchés, en
présence d'un ecclésiastique respectable,
et lui demandait quel auteur il fallait lire
pour la morale ; Lisez , lui dit celui-ci ,
Caramuel et Escobar, ils sont encore
trop se'vères pour vous. « Vainement,
» disent les encyclopédistes, lesprédica-
w leurs de l'irréligion voudraient-ils s'au-
)) toriser de ces réflexions pour innocen-
» ter leurs propres égaremens , pour ren-
» dre odieux les théologiens qui les font
» remarquer et les réfutent. Leurs er-
>> reurs, qu'ils publient eux-mêmes, sont
» d'une toute autre conséquence que
-» celles des casuistes ; on ne peut excu-
» ser les premiers par aucun motif loua-
» ble; les ouvrages des incrédules ont
M fait plus de mal en dix ans, que tous
» les casuistes de l'univers n'en ont fait
» dans un siècle. » ( Encyclop. mé-
tliod. article casuistes). Voyez Busem-
BAUM, Pascal, Rangé. (Escobar avait com-
posé plus de 20 ouvrages formant 42 vol.
presque tous in-folio. )
ESC 109
* ESCOIQTJÏTZ (don Juan), ministre
d'état espagnol, naquit en 1762 dans la
province de Navarre et mourut en An-
dalousie le 18 novembre 1820. 11 fut d'a-
bord page de Charles III , puis chanoine
de Saragosse, et, parla faveur de Godoï,
gouverneur du prince des Asturies, depuis
Ferdinand VII. Il est difficile de dire si
l'ambition ou l'intérêt qu'il portait à son
jeune maître, le guida dans la conduite
qu'il tintjà l'égard de Godoï, dont l'Europe
entière a connu les intrigues ; ce qu'il
y a de certain, c'est qu'il se déclara con-
tre lui, et Godoï le fit exiler à Tolède où
il fut nommé archidiacre. 3Iais lorsque le
jeune Ferdinand fut monté sur le trône de
son père, il fut rappelé, et nommé conseil-
ler privé : il exerça même la plus grande
influence sur la destinée de la famille
royale d'Espagne. Ebloui par Buonaparte,
il rattacha le sort de la monarchie espa-
gnole aux promesses trompeuses de ce
prince ambitieux : ce fut sous sa dictée
que son élève écrivit cette fameuse lettre
à l'empereur des Français dans laquelle il
lui demandait à s'allier à la famille du
grand homme , et ce furent ses conseils
qui décidèrent Ferdinand à faire le voyage
de Baïonne. Escoiquitz reconnut, mais
trop tard, combien il avait été imprudent;
il chercha, mais en vain , à réparer sa
faute : ses taleq^, sa fermeté et même sa
souplesse ne purent parvenir à amener
un changement heureux dans la fortune
de ses princes : il n'eut pas même le triste
dédommagement de recevoir des récom-
penses de Buonaparte qui se contenta de
lui adresser quelques complimens et qu'il
appelait le petit Ximenès. Indigné des
insultes journalières que recevaient les
princes espagnols , il s'en plaignit amè-
rement ; et comme ses plaintes n'étaient
suivies d'aucune réponse favorable, il fit
entendre à M. de Champagny , alors mi-
nistre des relations extérieures, ces pa-
roles vraiment prophétiques -.V E spagne
vengera ses injures; elle rendra cent
fois les outrages qu'on lui prodigue. Il
suivit ses maîtres à Valenray. Dans un
voyage qu'il fit à Paris, il eut plusieurs
conférences avec les ambassadeurs d'Au-
triche , de Russie, de Prusse et de quel-
iio ESC
ques autres états de la confédt^ration
du Rhin, dans le but de déterminer une
coalition européenne contre Buonaparte :
ses démarches fixèrent l'attention du gou-
vernement français qui le contraignit
de se fixer à Bourges ; toutefois il prit
la plus grande part aux négociations qui
amenèrent le rétablissement des Bour-
bons sur le trône d'Espagne. De retour à
Madrid avec Ferdinand VU , il ne tar-
da pas à être en butte à des jalousies
de cour : à l'époque de la disgrâce de Ma-
canaz et des changemens qui survinrent
dans le ministère, il fut disgracié lui-
même : retiré à Saragosse , il fut renfer-
mé ensuite au château de Murcie. Après
avoir été rappelé pendant quelques in-
stans , il fut relégué à Ronda en Anda-
lousie où il mourut. Escoiquitz a laissé
plusieurs traductions d'ouvrages anglais
et français et quelques œuvres originales :
on cite de lui 1° les Nuits d'Voung, tra-
duites en vers espagnols, Madrid, 1797,
2 vol. in-8; 2° Mexico conquise, poème
épique, 1802, in-8 ; le Paradis perdu de
Milton , traduit en vers espagnols, Bour-
ges , 1812, 3 vol. in-8, fig.; k° Exposé
des motifs qui ont engagé, en 1 8 1 2, Fer-
dinand f^II à se rendre à Bàionne, pré-
senté à V Espagne et à l'Europe, ouvrage
traduit et réimprimé plusieurs fois dans
toutes les langues, notamment en français
par Aimé Joseph Bruand. Voyez pour
plus de détail les mémoires historiques
sur la révolution d^ Espagne, de M. de
Pradt, Paris, 1816. Ces deux auteurs ont
besoin d'être composés ensemble. La meil-
leure traduction française est celle de
Paris, 1816, in-8, avec portraits; 6° Jié-
futation d'un mémoire contre l'inquisi-
tion ; C° M. Botte , roman traduit de Pi-
gault Le Brun , avec des suppressions et
des corrections.
* ESCORBIAC (Jean d') , seigneur de
Bayonnete , né à Montauban , dans le 16"
siècle, était neveu du trop célèbre du
Bartas, qui lui inspira du goût pour la
poésie. On a de lui La Christiade , con-
tenant l'histoire sainte du prince de la
vie, Paris, 1613, in-8. Il remonte, dans
le 1'^' livre , à la création du monde et au
péché originel , et , ce qui est très plai-
£SD
sant , il comprend les mauvais vers dan»
rénumération des maux qu'a causés la
chute de l'homme. Il a à se reprocher
d'avoir, pour sa part, aggravé ce fléau.
ESCOUBLEAU (François d' } , cardi-
nal de Sourdis, archevêque de Bordeaux,
mérita la pourpre par les services que sa
famille avait rendus à Henri IV , et sur-
tout par ses vertus et sa piété. Léon XI ,
Paul V, Clément Vhl, Grégoire XV,
Urbain VIII , lui donnèrent des marques
distinguées de leur amitié et de leur es-
time , dans les dilTérens voyages qu'il fit
à Rome. Le cardinal de Sourdis convo-
qua , en 1 624 , un concile provincial. Les
ordonnances et les actes de ce synode
sont un témoignage du zèle dont il était
animé pour la discipline ecclésiastique.
Il mourut en 1628 , à 53 ans.
ESCOUBLEAU ( Henri d' ) , frère du
précédent, son successeur dans l'arche-
vêché fle Bordeaux , avait moins de goût
pour les vertus épiscopales , que pour la
vie de courtisan et de guerrier. Il suivit
Louis XIII au siège de La Rochelle, et le
comte d'Harcourt à celui des îles de Lé-
rins qu'il reprit sur les Espagnols. Ce pré-
lat était d'un caractère hautain et impé-
rieux. Le duc d'Epernon , gouverneur de
Guienne , homme aussi fier que l'arche-
vêque de Bordeaux, eut un différend très
vif avec lui. Le duc s'emporta jusqu'à le
frapper. Le cardinal de Richelieu , enne-
mi de d'Epernon , prit cette affaire fort à
cœur; mais Cospéan, évêque de Lisieux,
ramena l'esprit du cardinal, en lui disant:
« Monseigneur , si le diable était capable
» de faire à Dieu les satisfactions que le
« duc d'Epernon offre à l'archevêque de
» Bordeaux, Dieu lui ferait miséricorde. »
Ce différend fut terminé bientôt après,
mais d'une manière bien humiliante pour
l'orgueilleux d'Epernon , qui fut obligé
d'écrire la lettre la plus soumise à l'ar-
chevêque , et de se mettre à genoux de-
vant lui pour écouter avec respect la ré-
primande sévère qu'il lui fit avant de le-
ver l'excommunication. Sourdis mourut
en 164à, après avoir donné plusieurs
scènes odieuses ou ridicules.
ESCURE. F'oyezLv.scvKt.
ESDRAS, fils de Saraïas, souverain
ESD
pontife, que Nabuchodonosor fit mourir,
exerça la grande prêtrise pendant la cap-
tivité de Babylonne. Son crédit auprès
d'Artaxercès-Longueniain , fut utile à sa
nation. Ce prince l'envoya à Jérusalem
avec une colonie de Juifs. Il fut chargé
de riches présens pour le temple qu'on
avait commencé de rebâtir sous Zoroba-
bcl , et qu'il se proposait d'achever. Ar-
rivé à Jérusalem l'an 467 avant J. C. , il
y réforma plusieurs abus. Il proscrivit
surtout les mariages des Israélites avec
les femmes étrangères , et se prépara à
faire la dédicace de la ville. Cette céré-
monie ayant attiré les plus considérables
de la nation, Esdras leur lut la loi de
Moïse. Les juifs l'appellent le prince des
docteurs de la loi. C'est lui qui , suivant
les conjectures communes, recueillit tous
les livres canoniques , les purgea des fau-
tes qui s'y étaient glissées , et les distin-
gua en 22 livres , selon le nombre des
lettres hébraïques. On croit que dans
cette révision il changea l'ancienne écri-
ture hébraïque , pour lui substituer le ca-
ractère hébreu moderne, qui est le même
que le chaldéen. Les rabbins ajoutent
qu'il instilua une école à Jérusalem , et
qu'il établit des interprètes des Ecritu-
res , pour en expliquer les difficultés , et
pour empêcher qu'elles ne fussent alté-
rées. Ceux qui ont prétendu qu'il était
l'auteur du Pentateuque , n'ont pas réflé-
chi sur ce qu'il y avait dans cette opinion
d'absurde et d'impossible , de contraire
aux notion» chronologiques et histori-
ques, et à tout le contenu des livres de
Moïse. Nous avons quatre livres sous le
nom d'Esdras ; mais il n'y a que les deux
première qui soient reconnus pour cano-
niques dans l'église latine. Le premier
est constamment d'Esdras , qui y parle
souvent en première personne. Il contient
l'histoire de la délivrance des Juifs , sor-
tis de la captivité de Babylonne, depuis la
première année de la monarchie de Cy-
rus , jusqu'à la vingtième du règne d'Ar-
laxercès-Longuemain , durant l'espace
de 82 ans. Le second , dont Néhémie est
l'auteur, en contient une suite, l'espace
de 31 ans. Le troisième et le quatrième ,
sans être canoniques , ne laissent pas de
ESK î I t
jouir d'une grande considération: plu-
sieurs Pères s'en sont servis pour prouver
des vérités précieuses, par exemple, le
péché originel, clairement exprimé (Liv.
4, chap. 3 , 4 et 7 ). Sixte de Sienne ,
Driédo, Mariana et plu.sicurs rabbins,
attribuent à Esdras les deux livres desPa-
ralipomènes.
* ESKIL , ou EscHiL , célèbre archevê-
que de Lunden , en Scanie , et primat de
Dahemarck, naquit au commencement
du 12* siècle. On croit qu'il était fils de
Suénon , évêque de Wiborg. Envoyé à
Hildeshein pour y faire ses études, il y
fut attaqué d'une maladie dangereuse,
pendant laquelle il fit vœu d'établir cinq
monastères , s'il recouvrait la santé. De
retour en Danemarck, il fut d'abord nom-
mé chanoine , ensuite archidiacre de la
cathédrale de Lunden. En 1134, il ob-
tint l'évêché de Roschils , et quatre ans
après, il fut élevé sur le siège épiscopal
et primatial de Lunden. Parvenu à cette
dignité, il se souvint de son vœu, et
saint Bernard lui envoya , à sa prière , un
de ses religieux, Guillaume, qui présida
à la fondation du monastère d'Esrole. Ce-
pendant les soins qu'il donnait à son
église ne lui faisaient pas négliger les
affaires temporelles , et , né avec un pen-
chant à l'ambition, il cherchait assez
souvent à la satisfaire. Il prit part à tou-
tes les discussions politiques, et se dé-
clara tantôt pour, et tantôt contre son
souverain , à qui il fit même une guerre
ouverte. Cependant, au milieu de ces
agitations mondaines, il ne pouvait voir,
sans un sentiment d'admiration , les ver-
tus sublimes de saint Bernard , pour qui
il eut une vénération toute particulière.
Il fit même plusieurs voyages en France
pour lui parler. Flottant entre Dieu et le
monde, il était depuis long-temps pressé
de se consacrer entièrement à la retraite,
dans la solitude de Clairvaux ; mais de
trop forts liens l'attachaient encore au
monde. Il fit un voyage à Rome pour y
visiter Adrien, qu'il avait connu lors de
sa légation dans le Nord. Ce pape étant
mort , il en résulta un schisme ; l'arche-
vêque se déclara pour Alexandre III, tan-
dis que son roi Valdemar prit le parti de
11^2
ESM
Victor ni. De là une lutte violente entre
le roi ctEskil. Le prélat ayant succombé,
fut obligé de fuir , et fit un voyage à la
Terre-Sainte. A son retour, il resta quel-
que temps en France , et fut ensuite ré-
tabli dans sa dignité. Après quelques
nouveaux tracas , il connut enfin le néant
des grandeurs humaines; et quoique saint
Bernard ne fût déjà plus, il se retira dans
la solitude de Clairvaux , pour y termi-
ner, dans la paix et l'exercice des devoirs
de la religion , une carrière qui n'avait
été que trop agitée ; il mourut le 8 sep-
tembre 1187 , dans un âge très avancé.
En quittant son siège , il avait recom-
mandé Absalon pour son successeur. Il
se tint sous son pontificat un concile na-
tional à Lunden , auquel assistèrent les
évêques de Danemarck, de Suède, de
Norwége, et Theodignus, légat du saint
Siège. On connaît de ce prélat : Droit
ecclésiastique de Seanie , Copenhague ,
1 505 , avec le Code civil de la même pro-
vince. Cet ouvrage a depuis été inséré
en danois et en latin , dans le recueil des
Lois ecclésiastiques de Danemarck, que
G. J. Torkelin adonné, Copenhague,
1781.
"ESMENARD (Joseph- Alfonse), mem-
bre de l'Institut , né à Pélissane dans la
Provence en 17 70 , fit ses études chez les
Pères de l'Oratoire de Marseille, et partit
ensuite pour St.-Domingue. Il avait fait
deux voyages en Amérique lorsque la ré-
volution vint à éclater. Député à Paris
en 1790, il s'occupa de la rédaction
de plusieurs journaux politiques consa-
crés à la défense du roi. Obligé de fuir
après le 10 août 1792, il se retira en An-
gleterre, où il s'embarqua pour la Hol-
lande. Il passa de là en Allemagne, en
Italie, et se rendit peu de temps après à
Constanlinople , où il fut accueilli d'une
manière distinguée par M. de Choiseul-
Gouffier. En revenant à Venise , il offrit
ses services à 3Ionsieur ( Louis XVIII ). Il
rentra en France en 1797, fut un moment
attaché à l'ambassade de Hollande, et tra-
vailla quelques mois ù la Quotidienne.
Après la révolution de 18 fructidor, il fut
enfermé au Temple, et ne put en sortir
que pour ôtre de nouveau banni de la
ESM
France. La chute du Directoire lui permit
de revenir à Paris en 1799; il coopéra
à la rédaction du Mercure de France
avec Laharpe et Fontanes, publia des
fragmens de son poème de la Navigation
dont il s'occupait depuis long-temps, et
quitta ses occupations littéraires pour
suivre le général Lecierc à Saint-Domin-
gue. De retour en Trance avec les malheu-
reux restes de cette expédition, il fut
nommé chef du bureau des théâtres au
ministère de l'intérieur , place à laquelle
il renonça pour accompagner l'amiral
Joyeuse à la Martinique. A son retour en
1805, il fut nommé successivement cen-
seur des théâtres, censeur de la librairie,
chef de la troisième division de la police
générale et membre de l'institut. Une sa-
tire contre l'envoyé russe, imprimée dans
\e journal des Débats, l'obligea encore de
quitter la France et de se retirer en Ita-
lie. Il partait de Naples, après trois mois
d'exil , pour revenir dans sa patrie, lorsque,
sur le chemin de Fondi , il fut tout à coup
entraîné par des chevaux fougueux vers
un précipice , et se brisa la tête contre
un rocher. Il expira le 25 juin 1811, lais-
sant une femme et trois filles sans for-
tune. Ses principaux ouvrages sont 1° La
Navigation , poème en 8 chants , Paris ,
1805 , 2 vol. in-8 ; seconde édition en 6
chants seulement , 1806, 1 vol. in-8. U
travailla long-temps à ce poème , et il
entreprit plusieurs de ses voyages pour
être à portée d'étudier le sujet qu'il avait
choisi. Comme Vernet , il brava les ora-
ges de la mer pour les décrire , et ne fit
ses tableaux qu'en présence des objets
qu'il avait à peindre ; ce qui donne à ses
descriptions poétiques ce ton de vérité ,
ce mérite d'exactitude qu'on trouve pres-
que toujours chez les anciens , mais ra-
rement chez les modernes. La poésie
d'Esmenard est brillante , elle a de la ■
force , de la noblesse , quelquefois de la
chaleur et de l'harmonie ; mais cette har-
monie est plus sonore et retentissante >
que douce et gracieuse ; de sorte qu'à la
longue elle élourditplus qu'elle ne flatte, ,
ce qui tient peut-être au défautde variété '
et de flexibilité dans les tons. Ou peut
encore reprocher à l'auteur beaucoup
ESO
d'épitbètes oiseuses , des inversions for-
cées, des transitions qui ne le sont pas
moins , des hémistiches et même des vers
très dui's , d'autres très prosaïques , des
images fausses , des constructions vi-
cieuses , quelques larcins trop peu dis-
simulés. Le sujet ensuite en est beau-
coup trop vague et ne pouvait faire la
matière d'un poème. Malgré tous ces
défauts, il mérite de survivre à l'auteur,
parce qu'on y trouve de véritables beau-
tés qui le placent parmi les bons poètes
du 18" siècle. 2» Trajan , opéra en 3 ac-
tes, représenté en 1807 , qui obtint plus
de cent représentations, grâce à plusieurs
beaux morceaux de musique de Le Sueur,
aux brillantes décorations qui l'embellis-
sent, et à celles surtout de la scène du
triomphe de Trajan. 3° Fcrnnnd Cortez,
opéra en 3 actes , joué en 1 809 , et qui
n'eut aucun succès. Il l'avait fait en so-
ciété avec M. de Jouy, qui y fit deschan-
gemens considérables en 1807; alors il
eut plusieurs représentations, ainsi qu'en
1808. 4" des pièces de vers sur les cir-
constances, particulièrement en faveur
de Buonaparte, insérées dans la couronne
poétique de Napoléon dont il fut un des
chantres les plus féconds. 5° Des noies
historiques et littéraires , qui accompa-
gnent la première édition du poème de
Y Imagination , par Delille. G" Des arti-
cles fournis à la biographie universelle
de Michaud.
ESOPE, le plus ancien auteur des apo-
logues, après Hésiode qui en fut l'in-
venteur, naquit à Armorium, bourg de
Phrygie. Il fut d'abord esclave de deux
philosophes, de Xanthus et d'Idmon. Ce
dernier l'affranchit. Son esclave l'avait
charmé par une philosophie assaisonnée
de gaîlé, et par une âme libre dans la ser-
vitude. Les philosophes de la Grèce s'é-
taient fait un nom par de grandes sen-
tences enflées de grands mots; Esope prit
un ton plus simple, et ne fut pas moins
• célèbre qu'eux. Il prêta un langage aux
animaux et aux êtres inanimés, pour en-
seigner la vertu aux hommes , et les cor-
riger de leurs vices et de leurs ridicules.
H se mît à composer des apologues, qui ,
sous le masque de l'allégorie , et sous les
Y.
ESO ii3
agrémens de la fable , cachaient des mo-
ralités utiles et des leçons importantes.
Le bruit de sa sagesse se répandit dans la
Grèce et dans les pays circonvoisins.
Crœsus , roi de Lydie, l'appela à sa cour,
et se l'attacha par des bienfaits pour le
reste de sa vie. Esope s'y trouva avec So-
lon, n'y brilla pas moins que lui, et y
plut d'avantage. Mais tous ces faits sont
très incertains. L'existence même d'Esope
est révoquée en doute par des savansqui
pensent que c'est un personnage imagi-
naire, fabriqué par les Grecs sur celui de
Locman. Et c'est peut-être pour cela que
les Grecs le font voyager en Perse et en
Egypte , pour lui donner un air asiati-
que , et expliquer ce qui , sans cette pré-
caution , ne paraîtrait pas lui convenir. Il
est certain encore que Planudes , moine
grec, auquel on doit les fables d'Esope,
telles que nous les avons , a entassé , sous
le nom du fabuliste phrygien , beaucoup
d'apologues plus anciens ou plus moder-
nes que les siens. Enfin jusqu'aux dispu-
tes qui se sont élevées sur sa figure, sur sa
bosse, etc., tout contribue à répandre des
doutes sur son existence ( voyez Locman ,
Planudes, Salomon ). Les meilleures édi-
tions des Fables d'Esope , sont celles de
Plantin, 16C5,in-16; des Aides avec d'au-
tres fabulistes, 1505, in-foi. ; de Robert
Etienne , 1 546 ; d'Oxford , 1718, in-8 ;
de J. Chr. Gottl. Ernestiv, Leipsick, 1781,
in-8; de Fr. du Furia , Florence, 1709,
2 vol. in-8 ; de J.-G.Schneder, BresLau,
1811. La plus conrplèle est celle du Dr.
Coray, Paris, 1810, in-8, qui se distingue
par la beauté de l'impression , la correc-
tion du texte et les notes excellentes qui
l'accompagnent. Elles ont été traduites
enfrançais, etpresquedans toutes leslan-
gues. Lafontaine s'en est approprié une
grande partie qu'il embellit par le stile
et par la morale. Boursault a mis Esope
sur la scène, dans deux pièces, l'une
intitulée Esope à la cour, l'autre, Esope
à la ville.
ESOPUS ( Clodius } , comédien célè-
bre, vers l'an 84 avant J. G. Roscius et
lui ont été les meilleurs acteurs qu'on ait
vus à Rome. Esopus excellait dans le
tragique, et Ro.scius dans le comique.
8
ii4 ESP
Cicéron prit des leçons de d<5clanialion
de l'un et de l'autre. Esopus était d'une
prodigalité si excessive, qu'il fit ser-
vir dans un repas, au rapport de Pline ,
un plat de tejre qui coûtait dix mille
francs : il n'était rempli que d'oiseaux
qui avaient appiis à chanter et à parler ,
et qu'on avait payés chacun sur le pied
de GOO livres. Esopus, malgré ses gran-
des dépenses, laissa un héritage qui va-
lait près de deux millions. Son ftls, avec
moins de talcns, ne fut pas moins prodi-
gue. On. assure qu'il fit boire une fois à
ses convives des perles distillées. Ces ri-
chesses énormes des historiens prouvent
bien à quel point de fureur le mimisme,
cause et mesure de la corruption des peu-
ples, était parvenu chez celui de Rome
(voj/ezhARO^ , Garrick , Roscius). » Les
» Grecs , dit d'AleniLert, considéraient
}) Esopus , par la même raison qu'ils ad-
)) miraient Euripide et Sophocle. Les
» Grecs, ainsi que les Romains, mettaient
« entre les histrions et les hommes de
j> génie un espace immense ; mais ils
n payaient ceux-là comme tous les in-
» strumensde luxe et déplaisir. » On voit
ici en passant, que d'Alembert croyait
qu'Esopus était un comédien grec. L'éru-
dition de cet encyclopédiste et de ses col-
lègues est sujette à de plaisantes bévues,
voyez Panjsonius. On ignore l'époque de
sa mort.
ESPAGNAC ( Jean -Baptiste -Joseph
d'AMARZiT DE Sahugcet, barou d'), na-
quit d'un apothicaire, à Brive-la Gail-
larde, en 1714, A peine âgé de 19 ans,
il parut dans la carrière des armes , et s'y
lit remarquer. En n 34 , il se distingua en
Italie, et fut aide-dt-camp dès 1742,
dans les campagnes de Bavière. Ce fut
alors qu'il connut le comte Maurice de
Saxe, qu'il suivit dans les campagnes de
Flandre, y jouissant de son estime et de
l'avantage de le seconder , soit en qualité
d'aide-major -général d'infanterie, soit
comme colonel de l'un des régimens des
grenadiers créés en 17 46. Revêtu en 1754
du gouvernemcutde Bresse et du Bugey,
il reçut en J767, l'expectative du gou-
vernement de l'hôtel royal des Invalides,
qu'il n'eut en entier qu'en 17CG. L'ordre
ESP
qu'il n'a cessé d'y entretenir , le» réfor-
mes utiles qu'il y a faites , démontrent
que personne n'était plus digne que lui
de cette place importante. En 1780, il
reçut le grade de lieutenanl-général , et
mourut le 28 février 17 83. Toujours oc-
cupé de l'art pour lequel il était né, il
publia successivement les ouvrages sui-
vans : 1" Campagnes du roi en 1745, 4G,
47 eM8 , 4 vol. in-8. 2" Essai sur la
science delà guerre, 17 57 , 3 vol. in-8.
3" JEssai sur les grandes opérations de la
guerre, llhb, 4 vol. in-8. 4" Supple'-
ment aux Rêveries , ou Mémoires de la
guerre du maréchal de Saxe, 1757.
5" Histoire du maréclial de Saxe, Paris,
17 73, 2 vol. in-12, ou 3 vol. in-4. Tous
ces ouvrages annoncent des connaissan-
ces multipliées , des vues saines et diri-
gées par l'expérience.
* ESPAGPSAG (M, R. Sahuguet, abbé
d' ), fils du précédent, né à Paris, en
1754, devint chanoine de la cathédrale
de cette ville, et se fit d'abord distinguer
par ses talens littéraires , ensuite par son
goût pour les entreprises lucratives. Ayant
fait connaissance avec M. de Galonné
contrôleur général , il devint son agent
secret, et s'immisça dans plusieurs opé-
rations <le finances , qui lui valurent
beaucoup d'argent. Exilé lors de la dis-
grâce de son protecteur, il reparut en
17 89 , se fit recevoir au club des révolu-
tionnaires, et obtint, lorsque la guerre
fut déclarée, la fourniture de l'armée des
Alpes, ensuite celle des charrois militaires
del'arméedeDumouriez. Ce général ayant
été proscrit, il fut dénoncé parCambon
comme fournisseur infidèle : d'Espagnac
trouva moyen de se justifier tant qu'on eut
besoin de lui ; mais il succomba ensuite
et fut condamné à mort avec Bazire,
Chabot, Danton, etc., le 5 avril 1794.
On a de lui 1" Eloge de Catinat , in-8 ,
qui obtint un accessit à l'académie fran-
çaise en 1775. 2° Réflexions sur l'abbé
Suger, et sur son siècle, 1780, in-8,
ouvrage peu réfléchi , qui lui attira beau-
coup de critiques.
ESPAGNAÎNDEL (Matthieu l'), sculp-
teur célèbre, florissait à la fin du 17*
siècle. Quoique prolestant, il embellit
ESP
diverses églises de Paris, On cite entre
autres le rétable de l'autel des Prémon-
trés , et celui de la chapelle de la grande
salle du palais. Le parc de Versailles lui
doit quelques morceaux excellens , tels
sont Tigrane , roi d'Arménie ; un fleg-
matique ; deux termes représentant l'un
JDiogène , l'autre Socrate.
ESPAGiVE ( Charles d' ) , un des fa-
voris du roi Jean , eut l'épée de connéta-
ble en 1360. Ce n'était pas pour récom-
penser ses services ; il n'en avait rendu
aucun. Son mérite pour cette charge lut
sa naissance et la faveur. Il était si fier
de l'une et de l'autre, qu'il s'attira la
haine de Charles le Mauvais, comte d'E-
vreux et roi de Navarre. Ce monarque ,
indigné de ce que d'Espagne empêchait
qu'on ne lui fit justice au sujet de quel-
ques terres qu'il réclamait, résolut de le
faire tuer. 11 mena cent gendarmes l'inves-
tir dans le château de l'Aigle, petite ville
de Normandie. Les assassins escaladèrent
le château, et massacrèrent le connétable
dans son lit , entreonze heures et minuit,
k G janvier 1354. — Louis d'Espagne,
son frère aîné, servit sous Philippe VI,
dans la guerre contre les Anglais, et sous
Charles de Blois , à la conquête de la Bre-
tagne, il prit dans cette province sur
Jean de Montfort, concurrent deCharles
de Blois, Guérande d'assaut, et Dinan
par composition. Il fut amiral de France
en 1341.
ESPAGiNE ( le cardinal d' ), voyez
Mendoza ( Pierre-Gonzalez ).
ESPAG-NE ( Jean d' ) , natif du Dau-
phiné, ministre de l'église française de
Londres au 17* siècle, a compose divers
opuscules , publiés en 1G70 et 1G74, la
Haye, 2 vol. in-12. On y voit une criti-
que de la Bible de Genève et de la Ver-
sion anglicane. On cite principalement
celui qui a pour titre : Erreurs popu-
laires sur les points généraux qui con-
cernent V intelligence de la religion. Ce
ministre n'y a pas épargné le catéchisme
de Calvin.
"ESPAGNE (N....D'), général français,
fit pendant la révolution ses premières
campagnes d'une manière brillante : dans
plusieurs occasions, il développa ses ta-
ESP ii5
lens pour l'art militaire , et obtint en
1 804 le commandement de la 2 1 * division
militaire qui étaità Poitiers. Employé sous
Alasséna en Italie , ( 1805) , il commanda
la division des chasseurs à cheval , et se
distingua dans plusieurs combats, et, l'on
peut ajouter , dans toute la campagne de
180G. Il passa à Naples, oîi il obtint des
succès contre les insurgés calabrois, fut
pourvu du commandement de la province
de Labour et des deux principautés qui
en dépendent. Appelé à la grande armée
avec une division de cuirassiers pour
faire la campagne de Prusse, il arriva à
Berlin vers le milieu de décembre 180G ^
et se signala en beaucoup d'occasions ,
notamment au combat de Heilsberg, oîi
il fut blessé, le 10 juin 1807. Enfin il
donna de nouvelles preuves de valeur
dans la campagne d'Autriche, et fut tué
à la bataille de Wagram leG juillet 1809.
Il était officier de la Légion-d'honneur:
sa statue devait être élevée sur le pont
Louis Xyi.
ESPAGNET ( Jean d') , président au
parlement de Bordeaux , distingué par
ses lumières et ses vertus, est auteur
d'un Encliiridionphysicœ restituiez, im-
primé à Paris en 1G23, in-8, et traduit
en français sous ce titre : La Philosophie
des anciens, rétablie en sa pureté, 1 G5 1 ,
in-8. Le nom de l'auteur est désigné par
ces mots : Spes mea est in Âgno. On y
trouve un traité de la pierre philosopliale,
intitulé Arcanum hermeticœ philoso-
phiœ. Ce savant publia encore en 1 G 1 G un
vieux manuscrit in-8, \nW\.\\\(i Rozier des
<7«e/7'e,y,qu'il accompagna d'iinTraitésur
l'institution d'un jeune prince. Il croyait
que ce manuscrit n'avait pas encore vu
le jour; mais il y en avait une édition-
dès 1523 , in-fol. Le public fit un accueil
favorable à cesdiftërens ouvrages.
ESPAGNOLET (Joseph Ribela, dit l'),
peintre, naquit en 15S0 à Xativa , dans
le royaume de Valence en Espagne. Il étu-
dia la manière de Michel-Ange de Cara-
vage , qu'il surpassa dans la correction
du dessin ; mais son pinceau était moins
moelleux. Les sujets terribles et pleins
d'horreurs , étaient ceux qu'il rendait
avec le plus de vérité; mais peut-être
1 16 ESP
avec trop de férocité. Son goût n'était ni
noble , ni gracieux. Il mettait beaucoup
d'expression dans ses têtes. L'Espagnolet,
né dans la pauvreté, /'"vccut long-temps;
un cardinal l'en tira et le logea dans son
palais. Ce changement de fortune l'ayant
rendu paresseux , il rentra dans sa misère
pour reprendre le goût du travail. Na-
ples où il se fixa , le regardait comme
son premier peintre. Il obtint un appar-
tement dans le palaisdu vice-roi, et mou-
rut dans celte ville en J C56 , laissant de
grands biens et de beaux tableaux. Le
pape l'avait fait cbevalier du Christ. Ses
principaux ouvrages sont à Naples et à
l'Escurial en Espagne. (Ce sont le mar-
tyre de saint Janvier , saint Jérôme ,
la. Trinité., Démocrite, Heraclite, Ixion
sur la roue. Mater dolorosa, F Adora-
tion des bergers. Ce dernier tableau est
au Musée royal de Paris. Ce peintre a
gravé à l'eau-forte, et on a gravé d'a-
près lui.
ESPARRON ( Charles d'Arcussia, vi-
comte d' ) , s'occupa de la fauconnerie
\ers le milieu du IG* siècle. Il fit part au
public de sesamusemens, dans un traité
assez estimé, in-4 , Rouen , 1644.
ESPEISSES. Foyes Desfeissks, Bau-
VES.
* ESPEJO ( Antoine ) , voyageur espa-
gnol, qui découvrit le Nouveau-Mexique,
néàCordoue, vers 1550. Augustin Ruiz,
religieux franciscain, qui demeurait au
Vieux-Mexique, ayant appris de quelques
Indiens, appelés Cuchos, qu'ily avaitau
nord de grands et riches pays , résolut
de vérifier ce fait. Deux de ses confrères
s'étant réunis à lui , ils entreprirent ce
voyage , accompagnés d'un certain nom-
bre de soldats. Ils avaient parcouru deux
cent cinquante lieues vers le Nord, lors-
que attaqués par les Indiens Tignas, les
deux religieux, compagnons de Ruiz,
périrent dans la mêlée. La troupe revint
aux minesde Sainte-Barbe, dans la nou-
velle Biscaye , à cent'soixante lieues de la
ville de Mexico , d'où elle était partie ,
bien décidée à ne plus s'exposer à une en-
treprise aussi périlleuse. Il se trouvait
à ces mines , comme intéressé dans leur
exploitation , un bourgeois de Cordoue ,
ESP
nommé Espejo , jeune encore, et qu'au-
cun danger ne pouvait effrayer. Il se pro-
posa de pénétrer plus avant que ne l'a-
vait fait le Père Ruiz , se rendit au val
Saint-Barthélemi pour en obtenir la per-
mission de l'alcade-major ou gouverneur
de la province , qui lui accorda des sol-
dats et des provisions. Il partit le 10 no-
vembre 1582. Arrivé dans le pays des
Cuchos , et puis dans celui des Possa-
gnatcs , il y reçut un bon accueil et des
provisions abonda.ites. Ces peuplades
étaient d'un caractère doux, cultivaient
la terre , et demeuraient dans des caba-
nes aussi propres que commodes. Espejo
avec sa troupe, poursuivant sa marche,
rencontra de riches mines d'argent, au-
près desquelles se trouvaient les Indiens
Toboses , qui s'enfuirent en voyant des
soldats, parce que peu d'années aupara-
vant des militaires égarés les avaient
maltraités et pillés. Cependant des pré-
sens et des paroles de paix les firent re-
venir auprès des Espagnols; ils les gui-
dèrent pendant plusieurs lieues, jusqu'au
pays des Jumanes. Ce peuple était civi-
lisé , et très belliqueux : à l'approche des
Espagnols, ils se formèrent en bataille,
et lancèrent leurs flèches, qui tuèrent
six à huit chevaux. Les soldats , en sui-
vant le conseil d'Espejo, n'en tirèrent pas
vengeance ; ils se comportèrent de ma-
nière que la concorde fut bientôt établie
entre eux et les Indiens. Parmi les nom-
breuses rivières qui coulent dans ce pays,
il y en a une aussi grande que le Guadal-
quivir. Eu la côtoyant, les Espagnols
trouvèrent près de ses bords plusieurs
peuplades dont ils ignoraient la langue et
le nom. Parvenus jusqu'aux Tignas , ceux
qui avaient tué les deux religieux s'en-
fuirent, ainsi que tous les autres Indiens,
de crainte d'être punis pour ce meurtre.
Espejo , qui commençait à manquer de
provisions, et prévoyait qu'il pourrait
trouver encore des ennemis, fut sur le
point de retourner aux mines de Sainte-
Barbe ; mais s'étant avancé encore de
plusieurs lieues , quelques Indiens moins
prévenus contre les Espagnols, lui assu-
rèrent qu'il existait à l'orient un grand et
riche pays. Quelques-uns des soldats
ESP
avaient déjà abandonné Espejo; il ne lui
en restait que douze , avec lesquels il
continua son voyage. A mesure qu'il pé-
nétrait dans le pays, de belles plaines
s'otTraient à ses yeux, et il voyait sou-
vent des indices certains que ce pays était
fertile en mines. Les Indiens qui l'habi-
taient paraissaient être plus civilisés que
les autres. Leurs habitations itaient plus
élégantes, plus soignées; et pour se
garantir de l'ardeur du soleil , ils por-
taient des parasols assez semblables à
ceux des Chinois. Espejo se trouvait
alors à la hauteur de 37° 38, de lati-
tude boréale. Vers l'ouest comme vers
le nord, il rencontrait des peuplades
plus civilisées; dans le pays de Civola, il
remarque des croix qu'y avait plantées,
en 1542, le voyageur Coronado. D'au-
tres renseignemens vinrent le raffermir
dans son projet. Il apprit qu'à la distance
de soixante journées ( ou 450 lieues envi-
ron) se trouvait un lac spacieux , autour
duquel s'élevaient de grandes villes , oîi
l'argent et l'or abondaient. Ces nouvelles
ranimèrent le courage d'Espejo , mais il
n'en fut pas de même à l'égard de ses
compagnons , dont la plupart se séparè-
rent de lui. Eniin, après différentes cour-
ses , il arriva au pays des Tanins , d'où il
vit se développer un immense continent,
celui auquel on donna ensuite le nom de
Nouveau-Mexique. Espejo aurait voulu
pénétrer dans le pays, mais les Tarnas
lui ayant refusé des provisions , n'ayant
pas même voulu le recevoir, il fut con-
traint de retourner à la Nouvelle Bis-
caye. Il eut pour guide un Indien , qui
lui fit côtoyer la rivière des Vaches , et
il arriva avec sa petite troupe au val Saint-
Barthélemi,au commencement de juillet
' 583 , après un voyage d'environ huit
mois. Ayant écrit une Relation de sa dé-
couverte , il la fit parvenir au comte de
laCoruna, vice-roi du Mexique, qui l'en-
voya en Espagne au conseil des Indes.
Cette Relation se trouve au tome 1,13*
partie des Grands voyages^ dansHaklint
et dans V Histoire de la Chine , du Père
Mendoza. Les RR. PP. Garces etPonte vi-
sitèrent, de 1771 à 1776, les pays du
nord du Mexique ; et , dans la Relation
ESP tl^
qu'ils écrivirent de leur voyage , ils sont
parfaitement d'accord avec Espejo sur la
civilisation des Indiens de ces contrées.
Leur relation , insérée dans la Chroni-
que seraphique du collège depropaganda
fide(en espagnol) (Mexico, 17 92, in-
fol. ) , a 'été traduite en français par M.
Humboldt.
ESPEIN ( Zeger-Bernard Va?« ) , né Ji
Louvain en 164G, docteur en droit en
1675, remplit avec beaucoup de succès
une chaire du collège du pape Adrien YI.
Son association aui ennemis de l'églke,
ses sentimens sur le Formulaire et sur la
bulle Unigenitus, l'apologie qu'il fit du
sacre de Steenoven, archevêque schisraa-
tique d'Utrecht , remplirent ses derniers
jours de chagrins qu'il eût pu aisément
s'épargner. Il se retira à Maestricht, puis
à Amersfort, où il mourut en 1728. Van
Espen est sans contredit un des plus sa-
vans canonistes de son temps. Le meil-
leur et le plus recherché de ses ouvrages
est son Jus ecclesiasticum universum.
Les points les plus importans de la dis-
cipline ecclésiastique , y sont quelque-
fois discutés avec autant d'étendue que
de sagacité ; mais on reconnaît sans peîne
qu'il ne tire pas, à beaucoup près, tout
ce qu'il dit, de son érudition person-
nelle. « Ceux qui ont lu Thomassin et
» Van Espen, dit un critique, s'aperce-
» vront sans peine, que, quant à ce qui
u concerne la science ecclésiastique , le
» second ne fait que répéter le premier ;
« que c'est le riche fonds où il a puisé
» sans cesse, et dont il a fait un usage
» aussi commode que profitable à sa i"é-
» putation : peut-être cependant la doit-
« il particulièrement à la secte dont il
M épousa si vivement les intérêts. )> En-
tre diverses réflexions qu'il fait sur les
écrits des canonistes du siècle dernier
(Operum, part. F. p. 194 , edit. Colon.
17 48 ), il a soin d'avertir qu'il faut se dé-
fier de certaines opinions relâchées où le
torrent les a entraînés. La remarque est
en place ; et l'on peut y ajouter qu'il n'est
pas moins nécessaire d'être en garde con-
tre le rigorisme outré de quelques autres
canonistes, qui par un respect affecté
pour la discipline de l'église ancienne ,
n3 ESP
osent s'élever contre des pratiques géné-
ralement adoptées par l'église moderne
( a>oy. Fleury , Morin ( Jean ) , Tiiomas-
siN ). On a donné à Paris , sous le nom de
Louvain, en 1753 , un recueil de tous les
ouvrages de Van Espen , en 4 vol. iti-
fol. Cette édition, enrichie des observa-
tions de Gibert siir\e Jus ecclcsiasticum,
offre ce que la morale , le droit canoni-
que et même le civil ont de plus impor-
tant. On trouve divers détails curieux et
intéressans touchant cet auteur dans une
petite brochure assez rare, intitulée : De
Zegcro Bernai do Van Espen , etc. ,
authore IVilhclnio Bachusio. Ce Bachu-
sius avait été , comme Van Espen , lié
avec le parti deQuesnel, qu'il abandonna
ensuite; et les renseignemens qu'il en
donne , sont d'un homme qui est au fait
de la chose qu'il traite. Il en résulte de
fâcheuses impressions contre le caractère
et les qualités morales de Van Espen.
Voyez Bachusius ( Du Parc de Bellegarde
a écrit aussi la Vie de Van Espen ).
ESPENCE ( Claude d' ) , né à Châlons
sur Marne en 1611 , de parens nobles,
prit le bonnet de docteur de Sorbonne,
et fut recteur de l'université de Paris. Le
cardinal de Lorraine , qui connaissait son
mérite, se servit de lui dans plusieurs
affaires importantes. D'Espence le suivit
en Flandre l'an 1544, dans le voyage que
cette éminence y fit pour la ratification
de la paix entre Charles-Quint et Fran-
çois L Le cardinal de Lorraine le mena à
Rome en 1555. D'Espence s'y distingua
tellement , que Paul IV voulut l'honorer
de la pourpre afin de le retenir auprès de
lui. Le docteur français aimait mieux le
séjour de Paris. Jl revint dans cette ville,
et parut avec éclat aux étals d'Orléans en
1560, et au colloque de Poissy en 15G1.
Il mourut de la pierre en 1571. C'était un
des docteurs les plus judicieux et les
plus modérés de son temps. Ennemi des
voies violentes, il n'en était pas moins
fortement attaché aux moyens de main-
tenir et de répandre la foi catholique. Il
était très versé dans les sciences ecclésia-
stiques ctprofanes. Les ouvrages que nous
avons de lui, sont presque tous écrits en
latin , avec une dignité cl une noblesse
ESP
que les théologiens de son temps ne con-
naissaient presque pas. Il se sent pour-
tant de l'école, suivant Richard Simon,
qui rabaisse un peu le savoir de d'Espence.
On a de lui 1° un Traité des mariages
clandestins ; il y soutient que les fils da
famille ne peuvent valablement con-
tracter des mariages, sans le consente-
ment de leurs parens : question qui de-
mande que nous nous y arrêtions im mo-
ment. On ne peut douter qu'il n'y ait eu
autrefois une loi ecclésiastique qui an-
nule ces mariages. Un passage de saint
Basile ( Epist. ad Amphil ). ne laisse
aucun doute là-dessus. Les Pères du con-
cile de Cologne de l'an 1536, souhai-
taient qu'on renouvcKîl dans un concile
général, le canon Aliter, que Graliea
rapporte comme fait par le pape Evariste,
contre les mariages que les enfans (con-
tractent malgré leurs parens : Optamus
ut canon Evaristi pontificis concilio gê-
ner alirenovctur , tollanturque illa clan-
destina matrimonia , quœ , invitis pa~
rentibus et propinquis , veneris potius
quani Dei causa contrahuntur. Interea
vero donec ccclesîa de hoc prospiciat si
non irrita, prohibita saltem sint , et
excotnmunicationi contrahcntes , et qui
/lis ope et consilio adfuerint, subjaceant
( Conc. Colonicns. , anno 1536 ). On voit
par là que la loi a existé , et qu'elle est
tombée en désuétude. Il est cependant
des auteurs, tels que Juennin et d'Es-
pence ( dont il s'agit dans cet article ) ,
qui prétendent qu'elle existe encore en
France. Mais il est difficile d'accorder
celte opinion avec le concile de Trente,
avec la déclaration de Louis XIII , qui
assura au clergé que tous les réglemens ,
touchant celle matière , ne regardaient
que les effets civils, nullement la validité
du mariage. Les plus habiles juristes fran-
çais, Bochel, Blondeau, etc., sont dece
sehtiment , que Benoît XIV {de Sin. diœ-
ces. , lib. IX. ) établit d'une manière très
solide. Cependant pour les mariages des
princes du sang, contractés contre la vo-
lonté du roi , l'assemblée du clergé , en
1G55, a déclaré que la Coutume de France,
qui les regarde comme non valables ,
« est affermie par une légitime prescrip-
ËSP
» tton, et autorisée par l'Eglise » [voyez
Launoi , Gerbais , GiBERT ). 2° Des Com-
mentaires sur les e'pîtres de saint Paul
à Timothc'e et à Tite, pleins de longues
digressions sur la hiérarchie et la disci-
pline ecclésiastique. 3° Plusieurs iraite's
de controverse ; les uns en latin, les au-
tres en français. Tous ses ouvrages latins
ont été recueillis à Paris en ICI 9, in-fol.
*ESPERDUT, troubadour, vivait dans
le 13* siècle; il a laissé quelques Chan-
sons et une Sirvente contre les lâches et
mauvais seigneurs.
ESPER1EÎ\TE( Philippe Callimaque)^
né à San-Geminiano en Toscane , de l'il-
lustre famille de Buonacorti , alla à Rome
sous le pontificat de Pie II, et y forma avec
Pomponius Lœtus une académie, dont
tous les membres prirent des noms latins
ou grecs. Le savant dont nous parlons
changea son nom àc Buonacorti en celui
de Callimaco ; mais son génie pour les
affaires lui fit donner le surnom A'Espc-
riente. Paul II croyant que la nouvelle
académie cachait quelque mystère per-
nicieux , persuasion que le secret des as-
sociés justifiait, en poursuivit les mem-
bres avec rigueur. Esperiente se vit obligé
de se retirer en Pologne ; le i-oi Casimir
III lui confia l'éducation de ses enfans,
et le fit quelque temps après son secré-
taire. Ce prince l'envoya successivement
en ambassade à Constantinople, à Vienne,
à Venise et à Rome. De retour en Polo-
gne , le feu prit à sa maison , et consuma
ses meubles, sa bibliothèque et plusieurs
de ses écrits. H mourut peu de temps
après à Cracovie, en 1496. On a de lui
t" Commentarii rerum Persicarum,
Francfort, ICOl, in-folio. 2° Historia de
iisquœ à Fcnetis ientata sunt, Pcrsis
et Tarturis contra Turcas movdndis ,
etc. Il y a des recherches dans cet ou-
vrage, ainsi que dans le précèdent , avec
lequel il ne forme qu'un même volume.
3" Attila , in-4 , ou histoire de ce roi des
Huns. 4. Historia de rege Uladislao ,
seu clade Farnensi, in-4. Esperiente l'a
emporté dans cet ouvrage, suivant Paul
Jove, sur tous les historiens qui ont écrit
depuis Tacite : il la compare à la Vie d'A-
gricola. L'article sur Esperiente, qu'on
ESP trg
trouve dans le Dictionuaire de Bayle ,
est fort inexact.
ESPERNON (Jean-Louis de Nogabkt
de la Valette. Ployez Valette.
ESPINASSE ( Philibert de l' ) , sire de
La Clayetle, chevalier surnomme le grand
conseiller du roi Charles F" , servit sous
Eude, duc de Bourgogne, en qualité de
bachelier, avec deux écuyers. En 1340 le
roi le chargea d'aller faire rompre les
chaussées des étangs de Rue, pour la
conservation du Ponthieu. Il fut un des
plénipotentiaires envoyés à Bruges en
1375 , pour la trêve que l'on conclut avec
le roi d'Angleterre. Philibert assista,
comme conseiller du roi , aux procédures
qu'on instruisit au parlement et à la tour
du Temple contre les domestiques du roi
de Navarre , accusés d'avoir été les agens
de ce méchant prince pour empoisonner
le roi Charles V. Il fut encore attaché à
l'éducation du dauphin, en 1380. Enfin
il accompagna en Angleterre le sire de
La Trémouille, dans la descente qu'y
firent les Français. Il est la tige des bran-
ches de La Clayette , de Saint-André ,
de Sully , de La Faye et autres , qui tou-
tes ont porté son nom.
* ESP1]\ASSE( M"" Julie-Jeanne-Eléo-
nore de l' ) , célèbre par les relations
qu'elle eut avec d'Alembcrt, naquit à Lyon
en 1732 , d'une femme d'un rang élevé ,
qui vivait depuis long-temps séparée de
son mari. Cette dame, pour lui assurer
une existence indépendante , lui avait
laissé en mourant une cassette précieuse;
un abus de confiance lui enleva cette res-
source. Connaissant alors sa triste des-
tinée, elle se retira d'abord dans un cou-
vent , ensuite elle entra dans la famille
du mari de sa mère comme étrangère
et en qualité de gouvernante d'enfans.
Elle y était depuis 4 années , lorsque M"*
du Deffant l'y trouvant en 1752 , désira
se l'attacher, et, deux ans après, l'emmena
avec elle à Paris pour rendre sa maison
plus agréable. Ces deux dames allèrent
habiter la Rue St. -Dominique. M"« de
L'Espinasse qui avait un esprit cuflivé
i-éussit facilement et se fit d'illustres amis
qui obtinrent pour elle une pension du
roi. Après dix ans d'une amitié qui pa-
120 ESP
raissait sincère , elle quitta brusquement
sa protectrice qui, devenue aveugle,
avait, plus que jamais, besoin des secours
de l'amitié et de la reconnaissance, et
elle prit une maison , oii « elle rassembla ,
» dit Laharpe , la société la plus choisie
)) et la plus agréable en tout genre ; de-
» puis cinq heures du soir jusqu'à dix ,
w on était sûr d'y trouver l'élite de tous
)) les états, hommes de cours, hommes
V de lettres , ambassadeurs , femmes de
» qualité : c'était presque un titre de
» considération d'être reçu dans cette so-
» ciété. Elle en faisait le principal agré-
« ment. Je puis dire, ajoute ce littérateur
» distingué , que je n'ai pas connu de
» femme qui eût plus d'esprit naturel,
» moins d'envie d'en montrer, et plus de
» talens pour faire valoir celui des autres;
« elle mettait tout son monde à sa place,
}) et chacun était content de la sienne.
3) Avec un grand usage du monde, elle
» avait l'espèce de politesse la plus ai-
» mable, celle qui a le ton de l'intérêt.
3> Ce ton lui était facile : son âme siugu-
j) lièrement aimante , attirait tout ce qui
j) avait en ce genre des rapports avec elle.
)) Aussi personne n'a jamais eu autant
» d'amis, et chacun d'eux était aimé
w comme s'il eût été seul à l'être. On n'a
M jamais eu plus d'activité et plus deplai-
» sir à obliger. » M''*' de L'Espinasse n'é-
tait pas jolie ; car elle était défigurée par
la petite vérole. De tous ses admirateurs
les plus dévoués furent sans^ contredit le
philosophe d'Alembert , et le vieux pré-
sident Hainaut. Cependant avec tous les
avantages dont elle était environnée , M^^^
de L'Espinasse fut malheureuse, parce
qu'elle nourrissait dans son cœur des
passions désordonnées , et qu'elle perdit
les objets de ses affections. On a cru
long-temps que la mort prématurée du
comte de Mora , jeune espagnol qui lui
avait promis sa main, et qui mourut à
Bordeaux en venant la rejoindre , fut la
cause du chagrin qui la précipita au tom-
beau ; mais deux volumes d'une corres-
pondance inconnue ( Lettres de M"' de
L' Espincisse, écrites depuis Vannée 17 73
jusqu'àl année 17 76, Paris, 1809, et réim-
primées en 1811 ) , ont dévoilé à tous
ESP
les yeuj le secret d'un autre amour ( pour
M. Guibert qui y répondait faiblement ) ,
amour qu'elle était parvenue à cacher,
même à ceux de ses amis qui avaient le
plus sa confiance ; il paraît qu'elle est
mortevictime de cette passion. Ces lettres
ont pu ajouter à l'itlée qu'on avait de son
esprit ; mais elles ont nui à l'intérêt qu'a-
vait inspiré son caractère et ses malheurs
connus. Elle passa les derniers jours de sa
vie dans un affaissement total ; on la fai-
sait revenir avec des cordiaux. Peu de
temps avant sa mort , on la souleva :
« Est-ce que je vis encore , » dit-elle? Ce
furent ses dernières paroles ; elle expira
le 23 mai 1770. Avec moins de répu-
tation et une vie plus simple elle eût pu
être beaucoup plus heureuse. D'Alembert,
qui fut un de ses plus chauds partisans ,
et qui s'était fixé dans la même maison ,
fut nommé son exécuteur testamentaire.
Quoiqu'il eût beaucoup à se plaindre de
M"^ de L'Espinasse , et qu'il lui donnât
le nom de son injuste et cruelle amie ,
la douleur qu'il montra en celte occasion,
était si connue , qu'elle excita une sorte
d'intérêt public. Laharpe a prétendu que
le président Hainaut épousa M'^* de l'Espi-
nasse, quoiqu'il eût 70 ans; mais ce fait
est contesté : il paraît au moins que pour
sauver certaines convenances , cette
union ne fut pas rendue publique. M"«
de L'Espinasse ajouta deux chapitres au
Voyage sentimental de Sterne.
ESPINAY (Timoléon d'), seigneur de
Saii\t-Luc, servit sur terre et sur mer. Il
commandait la première escadre avec
rang de vice-amiral , à la défaite des Ro-
chelois en 1622. Ses services le firent es-
timer du cardinal de Richelieu ; cepen-
dant, comme ils n'étaient point assez
grands pour élever Saint-Luc jusqu'au
comble des honneurs, il n'y fût parvenu
qu'avec peine, s'il ne se fût démis du
gouvernement de Brouage, que ce minis-
tre voulait avoir. Saint-Luc eut pour ré-
compense le bâton de maréchal de France,
et la lieutenance de roi en Guienne,
l'an 1628. Il ne songea depuis qu'à vivre
dans le luxe et les plaisirs. Il mourut à
Bordeaux le 12 septembre 1C44.
* ESPINOSA ( Jean ), poète espagnol ,
ESP
né à Beilovado Tcrs 1Ô40, suivit lo^nr-
ricre des armes , et fut secrétaire de don
rédro Gonzalès de Mendoza , vice-roi de
Sicile. Il a écrit plusieurs ouvraf^es en
vers, qui eurent beaucoup de succès; et
oncifeentrcautresson Traité àlalouanrjc
des femmes, Miha, 1580, in-4. Il mourut
ver<; 159G.
* ESPIXOSA (Antoine) , poèlc espa-
^ol , né à Antcquera en Andaiousie vers
l'an 1 582, fut aumônier du duc de Médina
Sidonia, directeur du collège de Saint-
Alphonse àSan-LucardeBarraméda, où il
mourut en IGôO, après avoir publié I"une
bonne traduction en vers des Psaumes
pe'nitcntiaux , Malaxa, 162.0, h\-i. 2° Le
Panégyrique du duc de Médina Sidonia,
iG2^;Z"Bltesoroescondito, Madrid, 1 G44.
V Art de bien mourir, 1G51. 5" Tesoro
de poesias, 1C53. Ce recueil est fait avec
beaucoup de discernement et de goût.
L'auteur y inséra quelques-unes de ses
poésies, qui ne sont pas inférieures à cel-
les des auteurs les plus renommés.
*ESPI3iOSA (Hyacinthe-Jérôme), pein-
tre espagnol, naquit en 1 600 à Coeentena,
village du royaume de Valence, sedistin-
gua de bonne heure dans ses compositions
par le talent avec lequel il faisait le clair-
obscur, par la correction du dessin, lu
grâce et l'expression des ligures. Il s'était
perfectionné en Italie. On a un grand
nombre de ses tableaux, tous sur des su-
jets sacrés ; les plus remarquables sont
un Christ , une Madeleine , Y Apothéose
de S. Louis, Bertrand, S. Joachim ,
S. Pierre martyr , une Naissance du
Sauveur , la Nativité de S. Jean-Lap-
tiste, une Cène. Il mourut à Valence en
1680.
ESPINOY (Philippe d'), né en Flandre
en 1Ô52 d'une bonne famille, s'attacha à
rechercher les antiquités et les généalo-
gies des nobles de son pays. Le titre de
son ouvrage est : Recherche des antiqui-
tés et noblesse de Flandre, etc.. Douai,
1632, in-fol. avec fig. Il mourut vers
l'an 1633.
ESPRÉMÉNIL. Voyez F.pbkmknil.
ESPRlT(Jacques), né à Béziers enl Cl 1 ,
entra en 1C29 dans l'Oratoire, qu'il quitta
cinq ans après pour rentrer dausle monde.
▼.
T^V is'i
n avait toutes les qualités propres pour r
plaire, de l'esprit, de la ligure. Le du:;
de la Rochefoucault , le chancelier Sé-
guier et le prince de Conli , lui donnè-
rent des témoignages de leur estime et
de leur amilié.' Le premier le produisit
dans le monde ; le second lui obtint une
pension de 2,000 liv. et un brevet décon-
seiller d'état ; le troisième le combla de
bienfaits, et le consulta dans toutes ses
affaires, flsprit mourut en 1 GTS, à 67 ans,
dans sa patrie. Il était membre de l'acadé-
mie française, et fut un de ccux/jui brillè-
rent dans l'aurore de celle compagnie.
Les ouvrages d'Lsprit sont \° àcs Para-
phrases de quelques psaumes , qu'on ne
peut guère lire avec plaisir , quand on
connaît celles de Massillon. 2° La Faus-
seté des vertus humaines , Paris, 2 vol.
in-12, 1G78, et Amsterdam, in-8, 1716 :
livre médiocre, qui n'est, à quelques
égards , qu'un commentaire des pensées
du duc de La Piochefoucault ; mais qui ne
prête pas à la même critique, l'auteur
ayant moins généralisé son objet.
*ESQU1YEL ( Hyacinthe ) , religieux;
de l'ordre de Saint-Dominique, naquit
en Biscaye, en 1 501 , d'une famillenoble.
Il professa d'abord la philosophie dans
les couvens de son ordre. Ayant ensuite
conçu le dessein de se consacrer aux mis-
sions étrangères, et se proposant surtout
d'exercer son zèle dans le Japon , il par-
tit pour 3Ianille en 1625. A son arrivée
dans cette île, il y fut nommé professeur
de théologie, et il s'appliqua en même
temps à l'étude de la langue japonaise.
11 passa ensuite à l'île de Sormola , oîi il
fit de nombreuses conversions. Mais, tou-
jours occupé de l'idée de pénétrer au Ja-
pon , il s'embarqua avec un frère-mineur
sur un vaisseau de cette nation. Le ca-
pitaine avait promis de les conduire eu
sûreté à leur destination'; mais il les fit
périr pendant la traversée. Cet événe-
ment arriva en 1636. On connaît de ce
religieux : 1° Vocabulaire japonais et
espagnol , ^\avSS\e. , 1630; 2° Vocabu-
laire de la langue des Indiens de Tan-
ehuy , en Vile de Formose, et traduction
en cette langue de toute la doctrine chré~
tienne , ibid. , en 1691.
8..
122 ESP
* ESQtJIVEL DE ALAVA ( Diego
de ), prêtre espagnol et théologien dis-
tingué, florissait au iit" siècle vers l'an
1492. Il était né à Viltoiia, et y avait
fait ses études ; il entra dans l'état ecclé-
siastique. Versé dans les langues latine et
grecque , il s'appliqua à l'étude des Pères
et des conciles, remarquant, dans ses
uombreuses lectures , avec un soin par-
ticulier, ce qui concernait la discipline
ecclésiastique, et leschangemens qui s'y
étaient introduits. De ce travail et de ses
propres réflexions résulta un ouvrage au-
quel il donna pour titre : I)e Comitiis
universalibus ac de Us quœ ad rcligio-
nis et reipublicœ christianœ reformatio-
nem institucndam apta videntur , Gre-
nade, 1583, in-fol. Esquivel mourut à
Vittoria en 156?., et n'eut pas la satisfac-
tion de voir son livre imprimé. On y
trouve des vues utiles sur la réformation,
et il fut bien accueilli du public.
ESSÉ. Voyez. MONTALEMBERT.
* ESSEN (Jean-Henri , comte d'), feld-
marcclial suédois , issu d'une famille li-
vonienne, naquit en 17 55 à Kasioës dans
la Westro-Gothie. Après avoir fait ses
études aux universités d'Upsal et de Got-
tinguc , il entra de bonne heure au ser-
vice militaire et fut oilicier de dragons.
En 1771 il fut appelé à Stockholm, pour
prendre part à un tournois que Gustave III
donnait alors : l'adresse et la grâce que le
jeune d'Essen y déploya, l'intérêt qu'in-
spiraient sa belle figure et les agrémens
d'un esprit cultivé lui valurent à la cour
l'accueil le plus flatteur et bientôt après
les faveurs les plus grandes. Nommé otB-
cier supérieur et écuyer de la cour, il fut
décoré de plusieurs ordres et conserva ,
dès cette époque jusqu'à la fin de ce rè-
gne, les bonnes grâces du roi, sans jamais
en abuser, et sans en faire, comme les
autres courtisans, un trafic honteux. D'Es-
sen accompagna le roi dans ses nombreux
voyages en Italie, en France et en Alle-
magne (1783). En 1788 il le suivit dans
la campagne de Finlande qui fut si fatale
à la Suède, campagne au milieu de la-
quelle les armées suédoises échouèrent
devant les villes les plus faible."!, et où les
généraux refusèrent de continuer des hos-
ESP
tilil^ qu'ils disaient intempestives : pre-
mier signe du mécontentement dont les
effets devaiciU être si déplorables. Dans
sa retraite, le roi toujours accompagné de
son fidèle d'Es.sen, se rendit à Gothem-
bourg : cette ville était menacée par une
invasion de troupes norwégiennes entrées
dans les provinces du centre du royaume,
pour agir comme auxiliaires de la Russie :
le roi eût été infailliblement fait pri-
sonnier sans le dévouement et l'activité
d'Essen qui parcourut les provinces voi-
sines, fit des levées de paysans et en
forma une armée qui contribua à la déli-
vrance du roi. D'Essen fut instruit par des
voies indirectes du complot qui menaçait
les jours de Gustave : il fit d'inutiles ef-
forts pour empêcher le roi de se rendre
au bai oii on liU avait dit qu'il recevrait
la mort, et ce fut à sa prudence que l'on
dut l'arrestation de l'assassin. Voyez l'ar-
ticle Anckarstroem. Il fie quitta point son
maîîredontlesangrojaillitsurlui(lGmaFS
17C2J. Dans l'année qui avait précédé la
guerre de Finlande, le roi lui avait donné
en mariage l'une des plus riches et des
plus belles héritières de la Suède; celle
union qui avait été contrariée par l'oppo-
sition d'un jeune homme , fut la cause
d'un duel dans leqjicl d'Essen reçut an
coup d'épée ; celte affaire n'eut pas
d'autre suite. Sous le règne des princes
qui succédèrent à Gustave III , le comte
d'Essen jouit d'un grand crédit à la cour.
En 1795 il accompagna le duc de Suder-
Manie (Charles XIII) et le jeune roi Gus-
tave-Adolphe à Saint-Pétersbourg. A son
retour il fut nommé gouverneur de Sloc-
kholm. En 1 800 Gustave-.\dolphe lui con-
fia le gouvernement général de la Pomé-
ranie suédoise. En 1807, d'Essen com-
manda en chef l'armée réunie dans cette
province, et pendant deux mois et demi
il soutint alors le siège de Stralsand et
dut à sa valeur un honorable armistice.
Lorsque Gustave-Adolphe, mécontent de
ses généraux, prit l'héroïque mais inutile
résolution de commander lui-même ses
armées , le comte d'Essen se retira dans
ses terres d'Uplande. 3Iais après la révo-
lution de 1800 et l'abdication du roi, les
états-généraux de Suède le rappelèrent
ESS
an conseil d'état. Le roi Charles XIII lui
confia la même année l'ambassade de
Paris et le chargea, avec le conseiller d'é-
tat Lagerbielke, des négociations relatives
à la paix qui fut en efi'ct accordée le 17
septembre 1809 et qui rendit momenta-
nément lePoméranieàla Suède. En 1814,
d'Essen commanda les troupes destinées
à occuper la Norwtge; après s'être em-
paré de Kerby et de Prestbacka , il éta-
blit son quartier général à Hafslund , et
reçut par capitulation la ville de Fredrich-
stadt. Nommé gouverneur-général de la
Norwègc, pendant la minorité du prince
Oscar , il ne conserva celte place que
jusqu'en 1 8 1 G , époque où il donna sa dé-
mission et oîi il reçut le titre de grand
maréchal du royaume de Suède. Le comte
d'Essen a peu joui de sa prospérité; sa
première épouse, qu'il affectionnait ten-
drement , est morte jeune encore , lui
laissant un Als unique qui donnait les
plus belles espérances et qui est mort en
peu d'heures d'une maladie aiguë ; il
avait épousé en secondes noces une de ses
nièces. Il a terminé son honorable carrière
dans le mois de juillet 1 824 à Uddcvella,
où il était allé prendre les bains de mer.
ESSEX ( Robert d'Evreux ou Devereut,
comte d' ), fils d'un comte maréchal d'Ir-
lande , d'une famille originaire de Nor-
mandie , né le 10 novembre 1 5G7 à Nelhe-
vood, maison de campagne de son
père, dans le comté d'Héréford, est fa-
meux par ses aventures et par sa mort.
S'élant un jour présenté devant la reine
Elisabeth, lorsqu'elle allait se promener
dans un jardin , il se trouva un endroit
rempli de fange sur le passage. Essex dé-
tacha surle-champ un manteau broche
d'or qu'il portait, et l'étendit sous les
pieds de la princesse, qui fut touchée de
cette galanterie. La reine, âgée de 58
ans, prit bientôt pour lui un goût que son
âge paraissait mettre à l'abri des soup-
çons. Il était aussi brillant par son cou-
rage que par sa bonne mine. En 1585, il
accompagna Leycester en Hollande et ob-
tint à la suite de cette campagne le grade
de général de cavalerie. En 159) , Elisa-
beth lui confia le commandement des
troupes qu'elle envoyait au secours de
. ESS 123
Henri IV ; d'Essex ne resta pas long-temps
en France. Bientôt après il fut envoyé en
Espagne et s'empara de Cadix. Il avait
demandé la permission d'aller con-
quérir à ses dépens un canton de l'Irlande,
et se signala souvent comme volontaire.
Il fit revivre l'ancien esprit de la cheva-
lerie , portant toujours à son bonnet un
g-ant de la reine Elisabeth. Cette prin-
cesse le fit grand-maître de l'artillerie, lui
donna l'ordre de la Jarretière , le nom-
ma chancelier de l'unive rsilé de Cambrid-
ge et enfin le fit son conseil privé. H eut
quelque temps le premier crédit ; mais il
ne fit jamais rien de mémorable. En 1 599
il alla en Irlande contre les rebelles, à la
tète d'une armée de 20 mille hommes,
et il n'eut guère de succès. Peu après , la
reine lui ôta sa place au conseil , suspen-
dit l'exercice de ses autres dignités, et
lui défendit la cour. Eile avait alors 08
ans ; ce qui n'empêcha pas qu'on ne la
crût très attachée au comte. Nous ne dis-
cuterons pas les bruits qu'on a répandus
à ce sujet , nous dirons seulement que le
comte fut accusé de conspiration, et exé-
cuté le 25 février IGOl. Il n'avait que 34
ans. On prétend qu'Elisabeth hésita à si-
gner l'arrêt de moVt; ce qui est sûr, c'est
qu'elle le signa. — Son fils, que Jacques I.
rétablit dans tous les honneurs militaires,
dont il avait été privé par la sentence qui
avait condamné son père à mort , Jut gé--
néral du parlement contre Charles I. Il
donna sa démission en 1C45, et mourut
l'année suivante «Sa mort, dit Hume,
« fut un grand malheur pour l'Angleterre.
M Convaincu des fatales conséquences
» qu'on avait à redouter, il avait résolu
» d'amener les deux partis à faire la paix
» et de remédier autant qu'il serait en
)) son pouvoir à tous les maux auxquels
M il avait contribué, plutôt par erreur
» que par mauvaise intention. Sa mort
» affaiblit considérablement danslescom-
» munes le parti presbytérien ou modéré,
» et les faibles restes d'autorité , dont
» jouissait encore la cliambre des pairs ,
» furent totalement anéantis. »
* ESSEX ( Robert d'Evreux , ou Deve-
reux comte d' ) , né en 1 592 , était fils de
Robert comte d'Essex, fameux par la fa-
124 ESS.
vc'iir ù'Eiisabeth, sa souveraine, et par
la lin maliieurcuse que lui attirèrent la
jalousie de ses ennemis et son ambition
jiropre. Une année après la mort de son
père , !e jeune comte d'Essex fut rétabli
]»ar Jacques 1" dans tous les honneurs
liéréditaires dont on avait dépouillé sa
maison. Quoique fort jeune, il faisait
déjà paraître toute la fierté de son père,
et il en donna uue preuve frappante.
Jouant un jour à la paume avec Henri,
prince de Galles, une dispute s'éleva en-
tre eux , et le jeune prince l'appela traî-
tre. Robert , irrité , répondit par un coup
de raquette, et il ue fallut rien moins
que l'autorité du roi pour apaiser la
querelle. A peine âgé de 14 ans, il fut
marié à lady Charlotte Howard, quibien-
lùt commença contre son époux un pro-
cès qui la couvrit d'une honte person-
nelle , et qui se termina par le divorce ,
le roi était intervenu dans cet arrêt. Le
comte d'Essex se relira dans ses terres, et
se livra à toutes les diversions que lui of-
frait sa campagne. Mais, bientôt fatii^ué
de celte vie oisive , il passa en Hollande,
et y fit la guerre dans les armées de l'E-
lecteur palatin , gendre de Jacques F' ,
sous le prince Maurice. Revenu en Angle-
terre, il figura au parlement, dans le
pai'ti de l'opposition , ce qui lui aliéna la
cour. Il s'attacha alors davantage au ser-
vice étranger, et commanda, en 1624, un
régiment levé en Angleterre pour les Pro-
vinces-Unies. Lorsque Charles P' monta
^ur le trône , il fut employé comme vice-
amiral dans une expédition infructueuse
contre les Espagnols. Après une autre
campagne, en 1025, dans les Pays-Bas ,
il contracta un second mariage ; mais
cette union ne fut pas plus heureuse que
la première ; les procédés de sa femme
furent tels , qu'il fut obligé au bout de
deux ans de recourir au divorce. Ne pou-
vant goûter les douceurs de la vie domes-
tique, il saisit ardemment l'occasion qui
se présenta déjouer un rôle dans la car-
rière politique. Il chercha à captiver la
faveur du peuple, et à s'attacher les
principaux officiers de l'armée et les mi-
nistres puritains. Cependant Charles I*'
l'employa eneore dans plusieurs occa-
ESS
tions importantes , comme dans l'arme-
ment qui eut lieu en 103.^), et dans la
campa ofne contre les Ecossais , quatreau-
iiécs après. D'Essex donna partout des
preuves de bravoure et d'inteiligcnce, et
soutintl'honncur des armes du roi. H at-
tendait avec raison que ces services lui
mériteraient quelque reconnaissance de
la part de la cour ; mais lorsqu'elle n'eut
plus besoin de lui , cilc le remercia froi^
dément. Sa fierté fut vivement choquée
d'un pareil accueil; il resta cependant
fidèle au roi. En 1640, il fut un des douze
pairs qui signèrent une pétition dans la-
quelle ils priaientChatlesP' déterminer
les différends qui s'élevaient , et de con-
voquer un parlement. Peu de temps après^
d'Essex fut un des connnissaires chargea
de traiter avec les Ecossais, et quand, à
l'ouverture de ce long parlement qui de-
vait le conduire à l'échafaud , le roi vou-
lut se rendre populaire , il admit dans
son conseil le comte d'Essex , elle nomma
son chambellan. Il paraît même que l'ar-
mée lui serait restée fidèle, s'il avait cédé
aux instances de ses sujets les plus dé-
voués, qui lui conseillaient de mettre
d'Essex à la tête des troupes ; mais il ne
voulut jamais y consentir. Cependant,
forcé par la nécessité de recourir à ses
services , il le nomma , avant de partir
pour l'Ecosse , lieulenant-général de ses
forccsau sud delà Trcnt. Les pairs, de leur
côté, lui donnèrent uue marque de con-
fiance non moins honorable, en le nom-
mant président du comité permanent,
pendant tout le temps qu'ils resteraient
ajournés. Lor.sque le roi fut revenu d'E-
cosse, la chambre des communes, crai-
gnant les entreprises d'une populace tur-
bulente,.qui commençait à se rassembler,
demanda qu'il fût créé dans la cité,
pour la sûreté du roi et du parlement ,
une garde dont le commandement serait
donnéau comte d'Essex. Charles ne trouva
pas à propos d'accéderà celle mesure, et,
avant de quitter Londres, il ordonna à
d'Essex de le suivre. Le comte refusa, al-
léguant son devoir qui le retenait au par-
lement. Ce relus lui coûta toutes ses pla-
ces à la cour. Piqué contre le roi , et cir-
convenu par des hommes artiâeieux , il
ES3
consentit, en ir.42, à se chargep du
commandemenl de l'armée, levée, disait-
on, pour Ja sûreté du roi, taudis (ju'e!!e
était uniquement destinée à protéger les
deux chambres, qui remercièrent d'Essex
en jurant de vivre et de mourir pour lui.
Dès que le roi apprit la levée des troupes
parlementaires, il rassembla de son côté
une armée, et refusant d'écouter les pro-
positions de paix que lui fit faire d'Essex,
il le déclara traître à son roi et à soa
paj"S. Les deux armées en vinrent aux
mains à Edgc-Hill, le 23 août 1642. On
combattit de part et d'autre avec un égal
acharnement , et chaque parti s'attribua
la vicioire. Le comte n'en reçut pas
moins les remercîmens du parlement , et
tine gratification de 5,000 livres sterling,
11 prit l'année suivante Reading. Une ma-
ladie qui se mit dans son armée l'ayant
empêché de rien entreprendre d'impor-
tuut , les meneurs du parlement parlèrent
de le destituer ; mais ces démêlés n'eu-
rent aucun résultat fâcheux pour d'Essex,
qui , renforcé par de nouvelles troupes ,
lit lever le siège de Gloceslcr , s'empara
de Circenster , où étaient les magasins
de l'armée royale, et livra au roi une se-
conde bataille à iiewbery , le 23 septem-
bre 1G43; il y montra beaucoup de va-
leur ; l'avantage fut encore balancé; mais
d'Kssex réussit à couvrir Londres. S'étant
cîisuile dirigé vers la Cornouaiile , où on
l'avait assuré qu'il trouverait beaucoup
de partisans , il y fut suivi par le roi et
serré de si prèsqu'il n'avait plus la liberté
d'agir , et que les vivres commençaient à
lui manquer. Charles, le voyant dans
cette position , lui fit proposer un traité;
mais il répondit que n'étant pas le maî-
tre, il ne pouvait rien accepter. Se voyant
abandonné d'une partie de ses troupes,
il n'eut d'autre ressource que de s'embar-
quer à Plimoulh, et de gagner Londres
par mer. Il fut reçu avec beaucoup de
marques de respect et d'estime ; mais il
en éprouva peu de satisfaction ; et pres-
sentant déjà les vues ambitieuses de Crom-
>vel , qui après avoir renversé le trône ,
voulait s'établir sur ses ruines , il proposa
dans un conseil qui se tint chez lui , de
l'attaquer en plein parlement comme un
EST 125
incendiaire. Cette proposition n'eut d'au-
tre résultat que d'augmenter la haine que
Cromwel lui avait juré-e. Par l'ordonnance
de Self-Dcnyiiig, ou ùc renoncement à
soi-même, qui interdisait toutes les char-
ges aux membres du parlement, d'Essex
fut privé du commandement de l'armée,
et il parut s'en démettre avec plaisir. Ce-
pendant , le parlement , pour ne pas se
priver d'un homme aussi marquant, vota
qu'il serait élevé au rang de duc , et
qu'une pension de 10,000 liv. par an lui
serait accordée pour soutenir sa nouvelle
dignité; mais une mort soudaine l'empê-
cha de jouir de ces nouveaux honneurs.
Elle arriva le 14 septembre 1G4U. On
soupçonna que le poison avait terminé
ses jours, comme ceux de son aïeul. Le
parlement lui prodigua jusqu'à la fin les
plus grandes marques d'estimeet de con-
sidération. Il lui décerna des funérailles
publiques, qui eurent lieu avec la plus
grande pompe , à l'aljbaye de Westmin-»
ster, oli il fut enterré. Le comte d'Esset
avait reçu plusieurs affronts delà cour, et
avait vu ses services ma! récompensés, et
c'est ce qui l'excuserait, s'il pouvait l'ê-
tre, d'avoir pris les armes contre son sou-
verain. On doit cci»endant lui rendre cette
justice, qu'il chercha à entretenir la ba-
lance entre les deux partis, et que , par
conséquent, il n'avait d'autres vues que
celles de les amener à faire la paix. Mal-
gré ses fautes. Hume et d'autres histo-
riens anglais ont regardé la mort d'Esses
comme un grand malheur pour l'Angle-
terre, et l'ont accusé, dans les maux aux-
quels il contribua, plutôt d'erreur que
de mauvaise intention. Charles V" se vit
délivré par la mort du comte d'Essex d'un
redoutable ennemi ; mais ce n'était que
pour succomber sous un autre bien plus
cruel, le farouche Cromv,el.
EST. ^oj/e:; Alfoxse d'Est.
* EST ( Hercule HI , Renaud d' ) , der-
nier duc de Modène, né en 1727 , avait
succédé à son père en 1 780. Le duc d'Est
était alors dans un âge très avancé ; il ne
lut pas plutôt investi du pouvoir qu'il s'en
servit ])our amasser de l'argent; dans ce
but il établit dans l'armée et dans son pa-
lais une parcimonie telle , qu'il indisposa
176 EST
tous ses sujets ; aussi en 1796, lorsque les
armées françaises eutrèrent dans la Loni-
bardie , les Modéiiois furent les premiers
à se déclarer en leur faveur. Hercule ,
obligé de s'enfuir, se retira à Venise , où
il avait déjà mis en sûreté ses trésors. Le
traité de Gampo-Formio ( 9 juillet 1797 ),
priva la maison d'Est des duchés de Rcg-
gio et de Modène qui entrèrent dans la
confédération Cisal]iinc ; on promit au
duc Hercule de lui donner en indemnité
le Brisgaw ; mais il mourut en 1 802 à
Trieste avant que cette promesse fût réa-
lisée. Ce fut son gendre l'archiduc Fer-
dinand , frère des empereurs Joseph H
et Léopold H qui, à la paix de Lunéville,
obtint cette province. En 1814, àla chute"
de Buonaparlc, le petit -fils d'Hercule,
François - Joseph - Jean de Lorraine ,
archiduc d'Autriche, fils de l'archidnc Fer-
dinand qui avait reçu le Brisgaw et qui
était mort en 180G, et de Marie Béatrix
fille d'Hercule, rentra eu possession»! de
l'état de Modène, en vertu du congrès de
Vienne, 18f6.
* ESTAIjNG ou EsTEisG , nom d'une
ancienne famille du Rouergue nommée de
Stagna dans les actes du 10* siècle. Es-
TAiNG ( Charles Hector , comte d' ) né au
château de Ruvel, en Auvergne, en 1729,
commença à servir dans l'Inde sous les
ordres de Lally. Fait prisonnier par les
Anglais au siège de Madras, il fut relâché
sur parole. Mais ayant été repris les ar-
mes à la main avant son échange, il fut
traité avec sévérité et jeté dans un cachot
à Portsmoulh. Rentré en France, il voua
une haine éternelle aux Anglais. En 17G3,
il obtint le grade de lieutenant-général
des armées de France, et en 1778 il fut
envoyé en Amérique en qualité de vice-
amiral avec' 12 vaisseaux de ligne, pour
favoriser l'indépendance américaine. Les
vents contraires retardèrent tellement la
traversée, qu'il ne put arriver à l'embou-
chure de la Ware que huit jours après le
départ de l'amiral Howe : celui-ci ren-
forcé par l'escadre de lord Byron , crut
vaincre facilement l'amiral français : il
l'attaqua avec vigueur. D'Estaing eut
son vaisseau démâté et rasé comme un
ponton : dans cet état il fut environné par
EST
plusieurs vaisseaux ennemis et ne dut son
salut qu'à son courage à sa présence d'es-
prit. Après avoir rallié sa flotte à Boston
et s'être renforcé par le comte de Grasse
et Lamolhe, il entreprit de secourir les
colonies françaises menacées par les An-
glais : Sainte-Lucie était déjà tombée en-
tre leurs mains : il fit de vains cflbrls pour
la reprendre. Alors il se vengea d'un au-
tre côté du mauvais succès de celte entre-
prise. Il remporta une victoire navale
devant l'île de la Grenade, dont il s'em-
para avec intrépidité, et fit des prises
considérables. Il ramena ensuite sa flotlc
dans la nouvelle Angleterre et ïissiégea
Savanah : il échoua par sa faute et fut
découragé par deux blessures qu'il reçut
dans cette affaire. De retour en France
en 1780, il éut l'année suivante le com-
mandement d'une flotte qu'il ramena de
Cadix à Brest. Au commencement de la
révolution, quoique comblé des bien-
faits de la cour , il .se jeta dans le parti
populaire, et ne fui cependant pas nommé
aux Elats-gcnéraux. Il commandait la
garde nationale de Versailles, les 5 et 6
octobre , et il ne donna aucun ordre à la
garde nationale; il laissa commettre tou-
tes les horreurs dont ces deux journées
présentèrent le douloureux spectacle. Il
se rendit ensuite à Paris , oîi il servit
comme simple grenadier dans la garde
nationale; et, lors du voyage du roi à
Varennes, il protesta de son dévouement
à l'Assemblée qui ne lui demandait rien.
Sa conduite toute patriotique ne put le
sauvçr de la proscription. Il fut traduit
au tribunal révolutionnaire, et condamné
à mort le 28 avril 1 794. Il figura dans le
procès de la reine parmi les témoins à
charge ; il avait écrit à cetleprincesse en
1789 pour l'engager à user de l'influence
qu'elle exerçait sur l'esprit du roi pour le
détourner du projet qu'il avait formé de
quitter la France.
ESTAMPES ( Léonor d' ) , d'une illus-
tre maison de Berri , fut placé sur le siégé
de Chartres en 1620, et transféré à l'ar-
chevêché de Reims en 1 64 1. Il signala son
zèle pour la France dans l'assemblée dit
clergé de 1626, contre deux ouvrages oii
l'on soutenait des opinions alors très
EST
enmnu'.nes , mais qui n'en ëtaîenl pas
moins fausses louchant l'autorité des rois.
ESTAMPES -VALEI\ÇL\Y ( Achille
»' ) , connu soHS le nom de cardinal de
Falencay, naquit à Tours en 1593. Il se
* sit^nala au\ sièges de Montauban et de La
Rochelle. Après la réduction de celte
viile, il fut fait maréchal-dc-camp. Il passa
ensuite à Malte , où il avait été reçu che-
valier de minorité dès l'âge de 18 ans. La
religion lui confia la place de général des
galères. Son courage éclata dans toutes
les occasions, et surtout à la prise de l'île
de Ste. -Maure dans l'Archipel, Le pape
Urbain VI!I l'ayant appelé à Rome pour
se servir de son bras contre le duc de
Parme, il mérita par ses services d'être
créé cardinal en 1043. Ce fut vers le
même temps qu'il souliiit les intérêts de
la France contre l'ambassadeur d'Espagne
avec tant de vigueur , qu'il l'obligea de
rendre visite au cardinal protecteur de la
France. Le cardinal de Valenray mourut
en 1G4G , avec la réputation d'un homme
brave, fier, hardi, entreprenant. Les
choses les plus difficiles ne lui coulaient
guère plus à faire qu'à proposer.
ESTAMPES ( Jacques d' ) , de la fa-
mille du précédent, plus connu soua le
nom de maréchal de. la Fcrtc'-Imbaut ,
chevalier des ordres du roi , lieutenant-
général de l'Orléanais, etc., porta les
armes dès sa jeunesse, et se signala en di-
vers sièges et combats. Il fut envoyé am-
bassadeur en Angleterre l'an 1G41, et rap-
pelé quelque temps après, pour avoir ré-
vélé le secret du roi son maître. La reine
Anne d'Autriche lui procura le bâton de
maréchal de France en 1 051. C'était une
récompense due à son exactitude, à sa
vigilance et à sa bravoure. Il mourut dans
son château de Mauny , près de Rouen, le
20 mai ICG8, à 78 ans.
ESTAMPES ( la duchesse d' ). Foyez
PiSSELEU.
ESTERHAZI (Paul ), de Galantha,
prince du St.-Empire, Palatin et vice-roi
de Hongrie, chevalier de la Toison-d'Or,
fils de Nicolas Esterhazi , d'une des pre-
mières familles de Hongrie , naquit en
1635. La nature et l'éducation concouru-
rent à en faire un grand homme. Il fit des
EST 127
progrès rapides dans les belies-lettres, et
voyagea ensuite pour acquérir des lumiè-
res que l'élude seule ne peut donner. Fer-
dinand III, Léopold 1 , Joseph I et Char-
les IV lui donnèrent des marques de leur
estime, en l'élevant aux plus grands em-
plois dans le militaire et dans le gouver-
nement des provinces.il montra pendant
toute sa vie qu'il était digne de ces hon-
neurs. Il fut présent à presque tous les
combats qui se donnèrent en Hongrie, et
partout il donna des preuves de-son intel-
ligence et de sa bravoure. Il ne contribua
pas peu à la délivrance devienne en 1G85.
L'année d'après , il leva à ses propres frais
plusieurs régimens, et engagea les nobles
Hongrois, à son exemple, à fournir des
troupes pour former le siège de Bude.
Le commandement de ces troupes lui fut
confié ; et Leopold leur dut en grande
partie le succès de ses armes. Il mourut le
2G mars 1713, et fut enterré à Eysenstad,
oîi on lit sur son tombeau ces deux
vers latins :
Bi s deries quatuor rnmniisi prarlia , nunquam
Viilit U'rgu Lostis setl lanien bîo jaceo.
On voit en Hongrie beaucoup de monu-
mens de sa piété, de sa munificence et de
la protection qu'il donnait aux lettres.
L'étude et les exercices de pieté occu-
paient tout le temps qu'il ne consacrait
pas au service de l'état. La famille d'Es-
terhazi a produit plusieuis autres grands
hommes.
* ESTEVE (Pierre-Jacques) , médecin
espagnol, naquit à Tortose en 1512 , s'é-
tablit à Valence oii il exerça et enseigna
la médecine avec la plus grande distinc-
tion. Il a publié plusieurs ouvrages parmi
lesquels on cite une traduction latine des
Epidc'miques d'Ilippncrale avec des
commentaires tics e'tcndits , Valence ,
1553, 1 vol. in-folio. On a supposé que
cet ouvrage était de Gallien, tant on y
trouvait de science ; mais cette supposi-
tion est hors de toute vraisemblance.
* ESTEVE (Pierre) , membre de l'aca-.
demie de Montpellier, naquit dans cette
ville vers l'an 1 725 , a publié en 1 750 un
opuscule intitulé: Problème: si T expres-
sion que donne V harmonie est préférable
a celle quje fournit la mélodie. Presque
128 EST
tous ECS ouvraf^ës sont au dessous de la
nii^diocritc et ont été condamnés ù l'ou-
bli : toutefois on cile 1° Esprit des
beaux-arts, 1G53, 2 vol. in-12,qui a
eu un moment de vogue. 2" Nouvelle
découverte du principe de Vharmotiic ,
avec un examen de ce que M. Hameau
a publie', sous le titre de Démonstration
de ce principe, Paris, 1751 , in-8. 3"
lée.ttre à un ami sur l'exposition des ta-
bleaux au Louvre, 17 63, in-12; A" Mé-
moire contre M. de Causans sur la qua-
drature du cercle ; 5" Traité de la dic-
tion , 1755, in-12; C" Histoire générale
et particulière de l'astronomie , Paris ^
1755, 3 vol. in-12; V Dialogue sur les
arts , 1 7 56 , in-1 2. On lui attribue encore
Origine de r univers, 1758, ii)-12; la
Toilette du pfiilosophe , 1751 , in-12;.
Lettre à wi partisan du bon goût.
ESTHER ou Edissa , nom qui dans
Un dialecte de la langue hébraïque veut
dire Myrte , juive de la tribu de Ccnja-
min, tille d'AbihaïI , cousine-germaine
de Mardocbée. Le roi Assuérus l'épousa ,
après avoir répudié Vaslbi. Ce monarque
avait un favori nomme Aman , ennemi
déclaré de la naiion juive. Ce favori,
irrité de ce que Mardocbée lui refusait
les respects que les autres courtisans lui
rendaient, résolut de venger ce prétendu
affront sur tous les Juifs. 11 fit donner un
édit pour les faire tous exterminer dans
un temps marqué. Estber ayant imploré
la clémence du roi en faveur de sa nation,
obtint la révocation de l'édit, et la per-
mission de tirer vengeance de leur enne-
mi , le même jour qu'Aman avait destiné
à leur perte. Les historiens ne convien-
nent pas entre eux du temps auquel cet
événement est arrivé , ni du roi de Perse,
que l'Ecriture appelle Assuérus. Cepen-
dant les circonstances marquées dans le
livre à'Est/ier, paraissent convenir à
Darius, fi!s d'Hyslaspes. La vérité de
l'histoire d'Esther est attestée par un mo-
nument non suspect, par une fête que
les Juifs établirent en mémoire de leur
délivrance , et qu'ils nommèrent Purim,
les Sorts ou le jour des Sorts, parce
qu'Aman , leur ennemi , avait fait tirer
au sort , par ses devins, le jour auquel tous
rsT
tes Juifs devaient être massacrés. Il est
parlé de celte fête dans le 2" livre des
Macbabécs , cbap. 15, y. 37. Josèphe en
parle {ylntiq. Jud. liv. 1 1 , cb. G ). Elle
est marquée dans le calendrier des Juifs
au 4" jour du mois Adar. On ne sait pas
avec une entière certitude, qui est l'au-
teur de ce livre. Saint Augustin , saint
Epipbanc, saint Isidore, Tattribuent à
Esdras , Eusèbe le croit d'un écrivain plus
récent. Quelques-uns le donnent à Joa-
chim , grand-prêtre des Juifs , et pelit-fils
de Josedccb; d'autres à la synagogue,
qui le composa sur les lettres de Mardo-
cbée; mais la plupart des interprèles
l'attribuent à Mardocbée lui-mcrtie ; ils se
fondent sur le çhap. 9, y. 20 de ce livre,
oîi il est dit que Mardocbée écrit ces cho-
ses, et envoie des lettres à tous les Juifs
dispersés dans les provinces, etc. Le
texte grec dit qu'Eslhcr y ajouta quel-
ques pa.ssages; et ce sont sans doute ceux
qni semblent être détachés du corps de
l'ouvrage et ne présentent que des expli-
cations et des détails sur des choses dites
sommairement. Les Juifs l'ont mis dans
leur îjncien cano:i; cependant il ne se
trouve pas dans les premiers catalogues
des chrétiens, mais il est dans celui du
concile de Laodicée de l'an 3GC ou 3G7.
Il est cité comme Ecriture sainte par
saint Clément de Rome et par Clément
d'Alexandrie, qui out vécu long-temps
avant le concile de Laodicée. Saint Jé-
rôme a rejeté comme douteux les six der-
niers chapitres, parce qu'ils ne sont plus
dans le texte hébreu , et il a été suivi par
plusieurs auteurs catholiques jusqu'à
Sixte de Sienne,- mais le concile de Trente
a reconnu le livre entier comme canoni-
que. C'est un tableau admirable des res-
sources que la Providence .sait ménager
pour l'humiliation des superbes et la dé-
livrance de ses serviteurs : rien de plus
propre à nourrir l'espérance et le cou-
rage des fidèles dans les lemps de persé-
cution, du triomphe apparent et toujours
éphémère de l'impiété revêtue du pou-
voir. J. Barnès a donné une histoired'Es-
theren versgrecs, Londres, 1769, in-8.
On connaît ces beaux vers de Racine dans
sa tragédie d'jB'*//Krr :
EST
J'iî TO l'impie «^oré »iir ta lerre;
Pareil au i-èdre il portait cluus les cieux
Son front audarieux.
Il teiiibUit à «OD gré gouTeriier In toniierrff.
Foulait aux pieds ses ennemis vainctis :
Je n'ai fait que passer, il u'élait déjà plui^
ESTIEIV^'E ( François d' ) seigneur de
Saint-Jean de La Salle et de Monlfuron,
fut conseiller au parlement d'Aix sa pa-
trie , ensuite président aux enquêtes au
parlement de Paris, et enfin président à
mortier au parlement de Provence. Ce
magistrat, l'un des plus savaus juriscon-
^sultes du 16^ siècle, a laissé un livre
estimé , sous le titre de Decisiones Ste-
phani.
ESTIENNE, les imprimeurs. Foyez
Etiesne.
ESTIUS ( Guillaume ) ou William Hes-
SELs VAN Est, né l'an 1542, à Gorum
en Hollande, de l'ancienne famille d'Est,
prit le bonnet de docteur à Louvain en
1 580. Ses talcns le firent appeler à Douai,
cil il fut à la fois professeur en théologie,
supérieur du séminaire, prévôt de l'é-
glise de àaint-Pierre et chancelier de l'u-
niversité. Estius mourut dans cette ville
en 1G13, à 11 ans, avec la réputation
d'un savant laborieux et modeste, et d'un
prêtre vertueux. Benoît XIV le qualifie de
doctor fondatissimus. On doit à ses
veilles fun excellent Commentaire sur
le Maître des sentences , eu 2 vol. in-fol.,
Paris, 1696 ; Aaples, 1720 , avec des notes
de l'éditeur. Cet ouvrage , nourri des pas-
sages de l'Ecriture et des Pères , est fort
recommandé aux jeunes théologiens par
Dupin. 2° Un commentaire sur les e'pî-
tres de saint Paul, 2 vol. in-fol. , Rouen,
1709 , rempli d'une vaste et solide éru-
dition. On en a donné un abrégé , dont
la meilleure édition est celle de Louvain,
1776. Un auteur moderne avertit qu'en
lisant ce commentaire , il faut se souve-
nir qu'Estius , quoique bon catholique ,
a été discip'e de Hessels et de Baïus, et
qu'il a emprunté quelquefois leur façon
de parler. 3" Des notes sur les endroits
difficiles de V Ecriture sainte. Douai ,
1G28, in-folio, et Anvers , 1699, avec des
augmentations. Cet ouvrage est très infé-
rieur à l'autre, quoiqu'il y ait de la clarté
et de la solidité. 4" Orationes théologie es
V.
EST 129
XIX, Louvain. Il y eu a une ( la v^. ) ,
contre ceux qui sont économes de leur
savoir ,/et qui , renfermant leurs lumières
dans le cabinet , refusent de les commu-
niquer au dehors , soit au public en gé-
néral par de bons ouvrages, soit aux par-
ticuliers par des avis. On la trouve toute
entière à la suite du Tractatus triplex,
de ordine amoris , de François Van-Viane.
6° Hisloria Martyrium Gorcomiensium,
Douai, 1603, in-8. 6° Martyrium Ed-
mundi CampianiS. J. e gallico sermone
in latinuni translatum. Tous les écrits
d'Estius sont en latin.
ESÏOILE ( Pierre de l' ) , grand-au-
diencicr de la chancellerie de Paris , mort
en 1611 , s'est fait un nom par son Jour-
nal de Henri III, dont l'abbé Lengiet du
Fresnoi a donné une édition en 17 4 4 , en
5 vol. in-8. L'éditeur l'a augmenté de
plusieurs pièces sur la ligue , qui eussent
pu rester dans l'oubli. Ce journal com-
mence au mois de mai 1574, et finit au
mois d'aoiit 1589. Le Duchat en avait
donné une édition en 2 vol. in-8, que
celle de l'abbé Lengiet a effacée. On a
aussi de lui le Journal du règne de Henri
ir , avec des remarques historiques et
politiques du chev. C. B. A. (l'abbé Len-
giet du Fresnoi ), la Haye, 1741 , 4 vol.
in-8. U laut observer que les années 1 598
et les trois années suivantes manquent
dans le journal de L'Esloile. On a placé
dans cette édition le supplément concer-
nant ces années,^ par unauteuranonyme,
qui avait paru pour la première foi» eu
1636. Ces deux journaux avaient été pu-
bliés à Cologne (Bruxelles) par Godcfroi.
Le premier sous le titre de Journal de
Henri III, 4 vol. in-8; le second, sous
le titre de Mémoires pour servir à V his-
toire de France , depuis 1515 jusqulen
1611, 2 vol. in-8, 1719. Comme ces mé-
moires renferment plusieurs choses que
l'abbé Lengiet du Fresnoi a retranchées
dans son édition , il n'est pas surprenant
que les curieux les recherchent, d'autant
plus qu'ils sont devenus rares. L'Estoile
parait dans ses dsux journaux , un hom-
me véridique , qui dit également le bien
et le mal.
ESTOILE ( Claude de i.' ) , filp du pré
9
i3o EST
cèdent , mourut en 1G52, âgé d'environ
68 ans suivant les uns , et suivaut d'au-
tres en ICâl , à 54 ans. Peu accommodé
des biens de la fortune, il aimu mieux
quitter la capitale , que d'y mendier à
la table d'un financier , ou d'être incom-
mode k ses amis. Pélisson dit de lui qu'il
avait plus de génie que d'étude et de sa-
voir. On a de Jui deux pièces de théâtre
très médiocres, et des odes qui le sont
un peu moins : ces dernières se trouvent
dans \q Recueil des poètes français , 1692,
6vol.in-12.
*ESTOURMEL ( Louis-Marie, mar-
quis d' ) , lieutenant-général , naquit le
11 mars 1744 en Picardie, d'une noble
et riche famille. Ayant embrassé la car-
rière des armes , il entra d'abord dans les
mousquetaires , devint ensuite et succes-
sivement officier supérieur dans la gen-
darmerie, colonel en second au régiment
de Conti , brigadier , et colonel du régi-
ment de Pologne, cavalerie. Nommé
membre des notables en 17 87 , il fut dé-
puté par la noblesse du Cambrésis aux
Etats-généraux en 1789, et vota, non
dans le sens d'une licence aveugle et
anarcbique, mais pour une sage liberté
qui , sous une monarchie modérée , put
corriger quelques abus inévitables sous
toute espèce de gouvernement. Dans la
mémorable séance du 4 août, il renonça
pour lui et pour sa famille, aux privilè-
ges nobiliaires , et à tous les droits féo-
daux et en particulier à celui de Liège,
aux états de la province d'Artois ; mais il
défendit les privilèges et capitulations du
Cambrésis dont il pouvait croire que la
défense lui était confiée. Les états de sa
province ayant été accusés de s'opposer
secrètement à l'exécution des ordres de
l'assemblée , il les défendit énergique-
ment, et, le 18 mai 1790, il demanda
que Robespierre fût rappelé à l'ordre ,
pour avoir insulté !a personne du roi.
Les couvens venaient d'être .supprimés,
et l'on avait accordé aux différens reli-
gieux une modique pension qu'on ne
payait pas : d'Estourmel s'éleva contre
cet oubli impardonnable, et sollicita,
quoiqu'en vain, l'accomplissement des dé-
crets. Il demanda et o'bliut, en mars 1791,
KST
kl mise en liberté de MM. Hautefeuille ,
ari-èlés illégalement à Saint-Germain. Peu
de jours après , il combattit le projet de
loi qui fixait la résidence du roi, et dé-
nonça la correspondance qu'entretenaient
les sociéléspopulaires avec les divers corps
d'armée ; correspondance qui causait une
infinité de désordres. A la fin de la ses-
sion, d'Estourmel fut employé par le roi
comme inspecteui-- général des armées,
et servit ensuite dans celle du nord, sous
les ordres du général Custines. Bientôt la
mésintelligence s'établit entre lui et ce
chef, qui l'accusa des revers de l'armée.
D'Estourmel se justifia , et un décret du
26 mai décliara son innocence. Pendant le
régime de la terreur , il put échapper
aux persécutions ; il demeura ignoré sous
le consulat, et ne parut sur la scène po-
litique qu'au moment oîi Napoléon devint
empereur. Il obtint alors la croix d'hon-
neur, et fut nommé parle département
de la Somme ( en 1 804 ) , député au corps
législatif, oîi il fut réélu en 181 1 ; il en
faisait partie en 1814. Il fut un des pre-
miers à adhérer à la déchéance dcBuona-
parle , et au retour de ses princes légiti-
mes. A l'époque où Napoléon reparut ( le
20 mars 1815 ) sur le sol de la France,
accablé de chagrin et d'infirmités, il se
retirades afTaires ; et, heureux par les
souvenirs des services nombreux qu'il avait
rendus à sa patrie , il mourut le 1 3 dé-
cembre 1823, âgé de plus de soixante-
dix neuf ans. Il avait alors le grade de
lieutenant-général. D'Estourmel a publié:
Recueil des opinions émises à FAssem-
ble'e constituante , cl comptes rendus à
mes commet tans , Paris, 1811 , in-8.
ESTOUTEVILLE ( Guillaume d' ) ,
cardinal , archevêque de Rouen , était
fils de Jean d'Estouteville, d'une an-
cienne et illustre famille de Normandie.
Il fut chargé de commissions importan-
tes sous les règnes de Charles VU et de
Louis XI , reforma l'université de Paris ,
fut grand partisan de la pragmatique-
sanction , et protégea les savaus. Il mou-
rut à Rome , étant doyen des cardinaux,
le 22 décembre 1483, à 80 ans. Outre
l'archevèdié de Rouen, il possédait 6
évêchés tant en France qu'en Italie, 4
1
EST
aljbayes et 3 grands prieurés; mais il en
employait la meilleure partie à la déco-
ration des églises dont il é'ait chargé ,
et au soulagement des pauvres. Ce fut lui
qui commença le l)eaii château de Gail-
lon. Il a paru en 1 788 un prétendu éloge
de ce cardinal y. baibouillage philosophi-
que, sur lequel on aurait tort de le ju-
ger. La suflnsance du siècle croit honorer
les grands hommes des temps passés , en
leur donnant des traits qu'ils n'eurent
jamais et qu'ils eussent rougi d'avoir.
ESTRADES ( Godefroi, comte d' ) ,
maréchal de France , et vice-roi de l'A-
mérique , servit long-temps en Hollande
sous le prince Maurice, auprès duquel il
faisait les fonctions d'agent de France.
Il se montra à la fois bon capitaine et
grand négociateur. De retour à Paris, il
fut envoyé à Londres en ICCl , avec la
qualité d'ambassadeur extraordinaire. Il
y soutint avec une vigoureuse fermeté
les prérogatives de la couronne de France,
contre le baron de W'atteville, ambassa-
deur d'Espagne , qui avait voulu prendre
le pas sur lui. Le comte d'Estrades passa
l'année d'après en Hollande avec la même
qualité , et y conclut le traité de Bréda.
Il ne se distingua pas moins en 1G73,
lorsqu'il fut envoyé ambassadeur extraor-
dinaire aux conférences de Mmèguepour
la paix générale. Il mourut en 1C8C, à
79 ans, comme il venait d'être nommé
gouverneur du duc de Chartres. Les Né-
gociations du comte d'Estrades ont été
imprimées à la Haye en 17 42, 9 vol.
in-12. Ce n'est qu'un extrait des origi-
Daux , qui contiennent 22 vol. in-folio,
dont le moindre est de 900 pages. Jean
Aymond,. prêtre apostat, eu vola quel-
ques- uns dans la bibliothèque du roi , et
les publia à Amsterdam en 1709, in-12 ,
après les avoir tronqués.
ESTREES ( Jean u' ] , grand-maître de
l'artillerie de France , ué en 148G , d'une
famille distinguée et ancienne, mort en
1667 , à 81 ans, fut d'abord page de la
reine Anne de Bretagne. Il rendit de
grands services aux rois François I et
Henri II. C'est lui qui commença à mettre
l'artillerie de! France sur un meilleur
pied. Il se signala à la prise de Calais en
EST i3i
I &5S , et donna , dans plusieurs autres
occasions , des preuves d'intelligence et
de courage. On dit que c'est le premier
gentilhomme de la Picardie, qui ait em-
brassé la religion prétendue réformée. ( U
existe un discours rfe^ villes et châteaux,
forteresses battues , assaillies , prises
sous Jean cTEstrées , grand maîlre de
T artillerie par Fr. de la Treille , Paris ,
1563.)
ESTRÉES ( François- Annibal d' ),
duc , pair et maréchal de France , né eu
1573, embrassa d'abord l'état ecclésias-
tique, et le roi Henri IV le nomma à l'é-
vèché de Laon ; mais il quitta cet évè-
ché pour suivre le parti des armes. U
se signala £n diverses occasions , secou-
rut le duc de Mantoue en 1G2G , prit Trê-
ves, et se distingua par son esprit autant
que par sa valeur. ]\'ommé en 1G3G am-
bassadeur extraordinaire à Rome, il .sou-
tint avec honneur les intérêts de la cou-
ronne, mais non pas avec prudence. Ses
brusqueries et son humeur violente le
brouillèrent avec Urbain Vlll et avec se.s
neveux. On fut contraint de le rappeler.
II en eut un si grand dépit, qu'il refusa
de venir à la cour rendre compte de sa
conduite. Il mourut à Paris en 1G70»
à 98 ans. Le maréchal d'Estrées était
plus propre à servir le roi à la tète des
armées, que dans une négociation épi-
neuse. Non content de faire respecter
son caractère , il voulait faire craindre
sa personne. Il était frère de la belle Ga-
brielle d'Estrées, que Henri IV aurai!
épousée , si la mort ne l'eût enlevée.
Nous avons de lui 1° Des Mémoires^ de
la régence de Marie de Médicis. Ils sont
recherchés, de l'édition de Paris, 1GG6 ,
in-12, où il y a une lettre préliminaire
de Pierre Le Moine. 2° Une Relation du
siège de Mantoue , en 1 630 ; et une autre
du Conclave , dans lequel le pape Gré-
goire XV fut élu eu 1G21. H règne dans
ces difîérens ouvrages un air de vérité,
qui fait favorablement augurer de la fran-
chise de l'auteur : mais son stile incor-
rect prouve que le maréchal ne savait pas
aussi bien écrire que combattre,
ESTRÉES ( César d' ) , cardinal , abbé
de Saint-Germain-des-Prés , né en 1628,
i3a EST
fils du precédcnl', fut élevé sur le siège
de Laon eu 1G53, après avoir reçu le
bounet de docteur de Sorbonne. Le roi
le choisit peu de temps après pour mé-
diateur entre le nonce du pape et les amis
des quatre évêques d'Aleth , de Beauvais,
de Pamicrs et d'Angers. D'Estrées avait
Fart de ramener les esprits les plus oppo-
sés , de les persuader et de leur plaire.
Ses soins procurèrent un accommode-
ment , qui donna à l'église de France une
paix passagère, parce que les espritsqui
la recevaient , aimaient la guerre. Le car-
dinal désirées passa ensuite dans la Ba-
Tière , où Louis XIV l'envoya pour traiter
■Je mariage du daupbin avec la princesse,
électorale , et pour y ménager d'autres
afiàires importantes. Il se rendit quelque
temps après à Rome, y soutint les droits
de la France pendant les disputes de la
régale, et fut chargé de toutes les aflaires
après la mort du duc son frère en 1G89.
Il accommoda celles du clergé avec Rome,
et eut beaucoup de part aux élections
d'Alexandre VIII , d'Innocent XII et de
Clément XI. Lorsque Philippe V partit
pour le trône d'Espagne , le cardinal
d'Estrces eut ordre de le suivre pour tra-
vailler avec les premiers ministres de ce
prince. Il revint en France i'an 1703, et
mourut à son abbaye en 1714, à 87 ans.
Le cardinal d'Estrées était très versé dans
les affaires de l'Eglise et dans 'celles de
l'état. A un génie vaste , il joignait des
manières polies, une conversation aima-
ble , un caractère égal , l'amour des let-
tres et la charité envers les pauvres. S'il
ne fut pas toujours heureux dans ses né-
gociations, ce ne fut ni la faute de son
esprit , ni celle de sa prudence. ( On con-
serve à la bibliothèque du roi ses négo-
cia tions à Rome, 1671-1687.)
ESTRÉES ( Gabrielle d' ) , sœur de
Franrois-Annibal d'Estrées , reçut de la
nature tous les dons qui peuvent enchaî-
ner les cœurs. Henri IV, qui la vit pour
la première fois en 1591 au château de
Cœuvres , oii elle demeurait avec son
père , fut si touché de sa» figure sédui-
sante et des agrémens de son esprit,
qu'il résolut d'en faire sa maîtresse fa-
vorite. Il se déguisa un jour en paysan
EST
pour aller la trouver , passa à travers le»
gardes ennemies et courut risque de s»
vie. Pour la voir plus^librement, il lui
fit épouser Nicolas d'Amerval, seigneur
deLiancourt, avec lequel elle n'habita
point ; expédient qui ne peut honorer la
mémoire de ce monarque. La mort fu-
neste de Gabrielle. en 1599, finit cette
Ijaison scandaleuse. On prétend qu'elle
fut empoisonnée par le riche financier
Zamet. Ce qu'il y a de certain , c'est
qu'elle mourut dans des convulsions épou-
vantables. La tête de celte femme, une
des plus belles de sonsiècle, était toute
tournée le lendemain de sa mort , et le
visage si défiguré , qu'ellite n'éta plusre-
connaissable., « Spectacle bien propre,
» dit un auteur, à guérir des passions in-
» sensées, si l'homme qui en a une fois
V subi le joug, pouvait être ramené par
» de telles leçons à une raison qui n'existe
» plus chez lui, et dont il travaille a étein-
« dre ce qui lui reste peut-être encore de
j> son importune lumière. » De toutes les
maîtresses de Henri IV , c'est celle qu'il
aima le plus. Il la fit duchesse de Beau-
fort. Il eut d'elle trois enfans: César , duc
de Vendôme j Alexandre, et Henriette,
qui épousa le duc d*Elbœuf. Ce sont ces
anecdotes si multipliées dans la vie de ce
monarque, qui ont fait dire àBayle, qu'il
n'y eut jamais d'homme plus indigne d'a-
voir une épouse fidèle.
ESTRÉES ( Victor-Marie d' ), né en
16G0, succéda à Jean, comte d'Estrées,
son père , dans la charge de vice-amiral
de France , qu'il exerça avec beaucoup
de gloire dans les mers du Levant. Il bom-
barda Barcelonne et Alicante en 1C91, et
commanda, en 1G97, la flotte au siè-
ge de Barcelonne. Nommé en 1701 lieute-
nant général desarmées navales d'Espagne
par Philippe V, qualité qu'il joignit à
celle de vice-amiral de France , il réunit
le commandement des flottes espagnole et
française. Deux an| après il fut fait ma-
réchal-de-France , et prit le nom de ma-
réclialde Cœuvres. Cette dignité fut sui-
vie de celles de grand d'Espagne et de
chevalier de la Toison d'or. Il les mé-
ritait par une valeur héroïque , mais pru-
dente, et par les qualités du cœur pré-
i
EST
féi'iibles à tous les talens militaires. An
milieu des occupations bruyantes de la
guerre, il avait cultivé les lettres. Il mou-
rut à Paris en 1737 , à 77 ans. Il ne laissa
point d'enfant de sa femme Fucre-Félicité
de ÎSoailles. Sa mort éteignit le titre de
duché-pairie , attaché à la terre de Cœu-
vres, sous le nom d'Estrées, depuis 1G45.
Ses biens passèrent dans la maison de
Louvois par sa sœur qui avait épousé
]e marquis de Courtanvaus.
ESTRÉES ( Louis-César , duc d' ) ,
maréchal de France et ministre d'état ,
naquit à Paris en 1099, de François-Michel
Le Tellier de Courtanvaux , capitaine-
colonel des Cenl-Suisses , et de Marie-
Anne-Catherine d'Estrées , fille de Jean ,
comte d'Estrées, vice-amiral et maréchal
de France. Il fit ses premières armes dans
la guerre passagère que le duc d'Orléans
rcgent fit à l'Espagne , et sernt sous les
ordres du maréchal de Berwick. Parvenu
par ses services aux grades de maréchal
de camp et d'inspectcur-général de cava-
lerie , il se signala dans la guerre de 1 7 4 1 .
On se souviendra long-temps du blocus
d'Egra , du passa du Mein à Selingestadt,
de la journée de Fontenoy , du siège de
Mons, de celui deCharleroy, etc, etc.
11 eut la plus grande part à la victoire de
Lawfeldt ; et le maréchal de Saxe lui
confia , dans diverses occasions , les ma-
nœuvres les plus délicates. Une nouvelle
guerre ayant été allumée en 175G, Louis
XV , qui l'avait honoré du bâton de ma-
réchal le 24 février 17 57, lui donna le
commandement de l'armée d'Allemagne ,
forte de plus de cent mille hommes. Le
général montra au monarque le plan des
opérations , et ne craignit point de lui
dire : « Aux premiers jours de juillet,
» j'aurai conduit l'ennemi au-delà du
î> Wéser, et je serai prêt à pénétrer dans
M le pays d'Hanovre. » Kon content de
tenir parole , il livra bataille au duc de
Cumberland, et remporta la victoire le
2G juillet à Hastembeck. La perte fut ce-
pendant presque égale de part et d'autre ;
mais les Hanovriens découragés laissè-
rent prendre Ilamelen , et se disposaient
à abandonner l'électorat , lorsque M. de
AicUelicu vint relererM. d'Estrées , avant
ETC
i33^
qu'on sût à la cour des nouvelles de sa
victoire. Les courtisans l'accusaient de
lenteur. Après la bataille de Rosbach que
les Français perdirent, ils ne firent qu'es-
suyer successivement de nouveaux mal-
heurs. On avait les yeux tournes sur 3L
■ d'Estrées , comme seul capable de rendre
aux armées françaises la gloire qu'elles
avaient perdue. Mais son grand âge , ses
infirmités, ne lui permirent pas de rc-
, prendre le commandement. Cependant
après la défaite à Minden en 17G9, il se
rendit de nouveau à l'armée , pour y con-
certer avec M. de Contades le reste des
opérations de la campagne; et les Fran-
çais le virent partir avec regret au mois
de novembre , sans prendre le comman-
dement de l'armée. H obtint le brevet de
duc en 1763, et l'état le perdit le 2 jan-
vier 7771. (Voyez dans la galerie fran-
çaise l'abre'ge'de sa vie, 17 71, in-fol. )
' ETCHÈVERRI , ou Echeverri ( Jean
de ) , célèbre poète basque , né vers 1 650,
h Trafalla , dans la iVavarre , entra dans
l'état ecclésiastique , et devint docteur
en théologie. Il se livra particulièrement
à l'étude de sa lang-ue maternelle , inin-
telligible pour tous les autres Espagnols,
et pour ceux-là mêmes qui avoisinent les
provinces de Navarre , de la Biscaye , ou
de l'ancienne Cantabre. Plusieurs philo-
logues prétendent que le basque fut la
langue primitive des Espagnols ; d'autres
pensent qu'elle dérive du phénicien;
d'autres lui assignent une origine cartha-
ginoise ; et d'autres enfin croient que ce
n'est qu'un mélange de ces deux Lingues,
On a public plusieurs traites sur ce sujet,
et dift'érentes grammaires qui n'ont pas
encore déterminé ces doutes. Quoi qu'il
en soit, Etcheverri la choisit pour ses
vers, auxquels sa souplesse et sa douceur
la rendent très propre. La première pro-
duction d'Etcheverri fut une Ode oii il
célébrait la vertu et la beauté', réunies
ensemble. Ses autres poésies, dans la
même langue, sont : 1° Vie de Je'sus-
Christ ; 2" Les Mi, stères de la foi ; 3" Pi u-
sieurs f^ies de Saints • le tout, réuni dans
un volume,. fut public , pour la première
fois, à Bayonne, en 1640, in-8. Le slile
de l'auteur est pur, énergique , élégant ,
i34 ETE
et peut passer pour classique dans la lan-
gue basque.
* EÏEMARE ( Jean-Bapliste Le Sesnk
DE Menilles u' ) , prêtre appelant , né au
château de Méniilcs en ISormandie, en
1G82, etitraau séminaire Saint-Magloire,
où était alors l'abbé Duguct, et fut or-
donne prêtre en 1709. C'était l'année de
la desli notion de Port-Royal ; mais on
assure que d'Etcmarccnt encorele temps
d'y aller faife un pèlerinar^e avant celte
catastrophe, et qu'il promit de se consa-
crer à la défense des jansénistes. On ne
lui reprochera pas d'avoir manqué à sa
jiarole. Son premier écrit fut des lettres
Ihéologique.s contre une instruction pas-
torale du cardinal de Dissy. On y entre-
voyait déjà ses idées sur l'état de l'Eglise,
et ce système de fig^ures qu'il avait puisé
dans les leçons de Duguet , qu'il outra
depuis d'une manière bizarre et ridicule.
La bulle Unigenitus vint donner de l'a-
liment à son zèle. Il publia contre elle un
grand nombre de mémoires , et fut dès
lors de tous les conseils des appelans, et
eut part à toutes leurs démarches. Il alla
à Rome en 1725, dans l'espérance d'y ob-
tenir une bulle doctrinale qui lui fût fa-
vorable, et il n'y réussit point. Il en con-
çut, de nouvelles préventions contre la
cour de Rome, et suivit de plus en plus
son système favori, en publiant VEssai
de parallèle des temps de Jésus-Christ ,
avec les nôtres , Pcxplication de quel-
ques prophéties, la tradition de V Eglise
sur la future conversion des Juifs, etc.
Il voyait partout des figures de la défec-
tion de l'Eglise et de la conversion des
Juifs. Il les annonçait dans ses écrits,
dans ses conférences, dans ses conversa-
tions , et devint le chef d'un parti qui
s'abandonna aux plus folles illusions qui
préparèrent et fomentèrent les scènes
déplorables des convulsions. D'Etemare
eut le triste honneur d'être un des direc-
teurs de cettea?«i'/'c absurde et ridicule,
qui mit la division parmi les appelans.
Les plus modérés se dégoûtèrent de ses
rêveries et de ses turpitudes , et d'Ele-
mare essaya inutilement de les ramener
par son autorité et ses conseils. On se
moqua de ses décisions. Il chercha alors
ETH
à épurer le parti des convulsions, el H
finit par s'apercevoir lui-même que cette
œuvre n'était pas aussi divine (\u'ïi l'avait
imaginé, sans pourtant qu'il paraisse
avoir reconnu sincèrement le principe et
l'étendue de son illusion. Son crédit souf-
frit, en cette occasion, de rudes attein-
tes. La Taste d'un côté , et de l'autre ,
l'abbé Débonnaire et M'" Mol, dévoilè-
rent des traits peu honorables pour d'E-
temare , qui, un peu honteux, parut en-
1735, se condamner à la retraite , et il y
resta presque constamment pendant 10
ans. Il avait fait un voyage en Angleterre
en 1729 , avec Le Gros , pour tâcher d'y
former un parti ; mais il ne fut pas plus
heureux qu'à Rome. Ilalla souventdcpuis
en Hollande, où il avait connu Qiiesnel dès
1714, et il prit part à l'établissement
d'un episcopat dans ce pays. Sur la fin de
sa vie il s'y fixa, assista à l'espèce de con-
cile qu'on tint àUtrecht en 176-3 , et fut,
en quelque sorte, l'âme de toutes les dé-
marches de ce parti. Il mourut à Rhyn-
vick près d'Utrecht, dans un âge fort
avancé. Il avait joui parmi les siens d'une
haute réputation; il est à peine connu
aujourd'hui. C'est ce qui doit arriver à
tous ceux qui, au lieitde se rendre re-
commandables par des ouvrages utiles et
d'un intérêt général , ne se font que les
échos d'une faction. Leur nom passe avec
celui du parti qu'ils ont servi, et leurs
écrits meurent avec les petites passions
qui les ont fait naître. Ceux de l'abbé
d'Etemare , quoique très nombreux, sont
aujourd'hui complètement oubliés. On
en trouve la liste dans les Nouvelles
ecclésiastiques ,.27 février 1771.
ETHELBERT , roi de Kent en Angle-
terre l'an 5G0, épousa Berthe, fille de
Caribert , roi de France. Cette princesse |
travailla à la conversion du roi , qui fut f
suivie de celle de plusieurs seigneurs an-
glais, par le zèle de saint Augustin, que
le pape saint Grégoire envoya en Angle-
terre. Ethelbert régna heureusement , et
mourut en 1616, à 56 ans, après avoir
fondé les églises de Londres et de Ro-
chester. « Les vingt années qu'il vécut
«après son baptême , dit un historien,
» furent entièrement con.sacrées à la rc-
r
FfH
» ligion. La bienfaisance devint une de
» ses principales vertus , et ses peuples
» en éprouvèrent continuellement les
« heureux eft'ets. Il porta de sages lois ,
» que l'on observait encore en Angle-
« terre plusieurs siècles après sa mort.
3> Son attachement à la religion lui fai-
M sait saisir toutes les occasions^d'élen-
» d:c l'empire et la connaissance du nom
» de Jésus-Christ. Il abolit les supersti-
» tions païennes , renversa les temples
» des idoles , ou les consacra au vrai
» Dieu. » Ethelbert est nommé dans le
Martyrologe romain , et dans ceux d'An-
gleterre.
EÏHELRED ou Ethelbert II, roi
d'Angleterre, filsd'Edgard, succéda en
978 à son frère Edouard II. C'était un
prince barbare; il fit tuer tous les Danois
qui s'étaient établis en Angleterre. On
ajoute qu'il fit enterrer leurs femmes jus-
qu'à la moitié du corps, afin d'avoir le
plaisir de voir dévorer tout le reste par
des dogues affamés. L'avarice et la dé-
bauche le rendirent l'horreur de tousses
sujets. Ils se révoltèrent ; et Suéuon, roi
des Danois, s'étant rendu maître de ses
états, l'obligea de se retirer chez Richard
II, duc de Normandie, dans il avait épousé
la sœur. Après la mort de Suénon , Canut
son fils lui succéda : mais étant mort en
1015, Ethelred fut rappelé en Angleterre,
oîi il mourut bientôt après, l'an 1016. Il
laissa Alfred et saint Edouard.
ETHELWERDUS ou Elswardus , de
la famille d'Ethelred I, roi d'Angleterre,
florissait vers l'an 980. On a de lui une
Histoire depuis le commencement du
monde , jusqiCa la mort du roi Edgnrd
en 974 , insérée dans le Rerum anglicà-
rum s criptor es àe^àsWi j Londres, 169G,
in-fol.
ETllELWODE ( S. ) , élève de saint
Dunstan , abbé d'Abbendon , en 930 , et
évèque de Winchester en 961 , mourut
en 984, après avoir travaillé avec beau-
coup de zèle à la restauration de la dis-
cipline monastique. On conserve en ma-
nuscrit , dans quelques bibliothèques
d'.\nglcterre, la traduction Ac la règ'e
de saint Benoît en langue saxonne , et
quelques autres ouvrages dans la même
ETH i35
langue, touchant cette régule par saint
Ethelwode. Vincent de Ceauvais et saint
Antonin font mention d'un ouvrage con-
tre le mariage des prdlrcs , par le même
saint.
ETHODE, \" àc ce nom, roi d'Ecosse
dans le 2" siècle, monta sur le trône après
Conar. Il eut tant de reconnaissance pour
Argard , qui avait gouverné l'état sous le
règne de son prédécesseur , et que les
gi'ands du royaume avaient mis en pri-
son , qu'il le fit grand administrateur de
la justice. Argard fut tué dans l'exercice
de son emploi. Ethode irrité fit mourir
plus de 300 de ceux qui avaient eu par^
à ce meurtre. Il fut malheureusement
assassiné lui-même par un Hibernois,
joueur de flûte, qui couchait dans sa
chambre. On prétend que ce fut vers l'an
194. Tous ces faits sont assez mal appuyés,
et les commencemens de l'histoire d'E-
cosse sont un chaos , ainsi que ceux de
toutes les histoires.
ETHRYG ( George), né à Thames
dans le comté d'Oxfort, était savant dans
les mathématiques, la médecine et les lan-
gues hébraïque et grecque. Ferme dans
ses principes, malgré la perversion pres-
que générale , il demeura attaché à la re-
ligion de ses pères, et gagna la confiance
de plusieurs gentilshommes catholiques,
qui lui confièrent l'éducation de leurs
enfans. Il mourut en 1588. On a de lui
àes poc'sics latines , et Hypomnemata. in
aliquot libros Pauli jEginetœ, 1588, ir.-3.
ETHULPHE ou Etiiklavolph, fut le
second roi de la 3" dynastie d'Angle-
terre, et succéda l'an 836 à son père Eg-
bert. C'était un prince pacifique. Il ne se
réserva d'abord que le royaume de West-
sex, et céda à A!destan , son fils naturel ,
les royaumes (te Kent, d'Esscx et de
Sussex, que son père avait conquis. Il les
remit depuis en sa possession, par la mort
de ce fils. Il y avait peu d'années qu'il
régnait, quand les Danois firent des cour-
ses eu Angleterre , et prirent même Lon-
dres, mais il les défit entièrement. Elhul-
phe se voyant sans ennemis, offrit à Dieu
la dixième partie de ses états , et alla à
Rome sous le pontificat de Léon IV. Il
rendit loua ses royaumes tributaires en-
»36 ETI
vers le saint Siège, d'un sterling ou d'un
Bol pour chaque famille , au lieu qu'au-
paravant il n'y avait que ceux de Westsex
et de Sussex qui le payaient ; « ne croyant
» pouvoir mieux témoigner , dit un his-
» lorien , son attachement à la foi ca-
» tholique , qu'en contribuant à la splen-
» deur de la nouvelle Jérusalem et du
» siège de son pontife. » Ce tribut, éta-
bli, dit-on, dès l'an 7 26 , par Ina , roi des
Saxons, s'est payé jusqu'au temps de
Henri "VllI : et c'est proprement ce qu'on
appelle le romescot ou le denier de saint
Pierre. Quoi qu'il en soit, Ethulphe ,
de retour de son pèlerinage, épousa,
l'an 856 , en secondes noces , Judith de
France , fille du roi Charles le Chauve.
Son fils Ethelliald profita de son absence
pour se révolter contre lui ; mais il dis-
sipa les factions par son retour, et mourut
en 857 , après avoir partagé le royaume
entre les quatre fils qu'il avait eus d'Os-
burge sa première femme.
ÊïIEjNKE (S. ), premier martyr du
christianisme, l'un des sept diacres, fut
lapidé l'an 33 par les Juifs, qui l'accu-
saient d'avoir blasphémé contre Moïse et
contre Dieu. La sagesse et la constance
■avec laquelle il confondit ses barbares en-
nemis , pour lesquels il pria Dieu en mou-
rant , toutes les circonstances de son mar-
tyre, tel qu'il est rapporté dans les Actes
des apôtres, ont quelque chose de tou-
chant et de persuasif, qui pénètre le
chrétien d'un sentiment profond de piété,
en même temps que sa foi reçoit uti ac-
croissement de lumière et de force.
ETIENNE I ( S. } , monta sur la chaire
pontificale de Rome en 253 , après le mar-
tyre du pape Lucius. Son pontificat est
célèbre par la question sur la validité du
baptême donné par • les hérétiques.
Etienne décida « qu'il ne fallait rien in-
» nover. » La tradition de la plupart des
«glises prescrivait de recevoir tous les
hérétiques par la seule imposition des
mains , sans les rebaptiser , poui-vu qu'ils
eussent reçu le baptême avec de l'eau et
au nom des trois personnes de la Trinité.
Saint Cyprien et Firmilien assemblèrent
4les conciles, pour s'opposer à celte dé-
cision , contraire à la pratique de leurs
ETI
églises. Le pape réfuta le sentiment de
Cyprien ; il usa de commandemens et de
menaces pour lui faire quitter son sen-
timent, et refusa de communiquer avec
les évêques d'Afrique députés à Home, ce
qui était une marque publique d'impro-
bation et non pas un eHct certain de l'ex-
commmiication ( voyez S. Cypries ).
« Ce grand pape , dont la prudence éga-
» lait lu sainteté, savait , dit Vincent de
» Lérins , que la piété ne permettait ja-
») mais' de recevoir d'autre doctrine que
» celle qui nous est venue de la foi de
» nos prédécesseurs, et que nous étions
» obligés de la transmettre aux autres
»> avec la même fidélité que nous l'avions
» reçue ; qu'il ne fallait pas mener la re-
» ligion partout où nous voulions , mais
M la suivre partout oii elle nous menait j
w que le propre delà modestie chrétienne
« était de conserver fidèlement les saintes
« maximes que nous ont laissées nos
» pères, et non pas de faire passer nos
)) idées à la postérité. Quelle a donc été
» l'issue de cet événement ? Celle qu'ont
» coutume d'avoir de pareilles aftaires :
» on a retenu la foi ancienne, et l'on a
)) rejeté la nouveauté. » En efiet , la ques-
tion fut solennellement décidée au con-
cile de Nicée en faveur d'Etienne. Ce
saint pape mourut martyr le 2 août 257,
durant la persécution de Valérien.
ETIENNE II, romain, succéda en 752
à un autre Etienne, que plusieurs écri-
vains n'ont pas compté parmi les papes ,
parce que son pontificat ne fut que de
trois ou quatre jours. Astolphe , roi des
Lombards, menaçait la ville de Rome
après s'être emparé de l'exarcat de Ra-
venne. Etienne implora le secours de
Constantin Copronyme, empereur d'O-
rient , prince faible , indolent , subjugué
par le fanatisme des iconomaques, qui
renvoya le pontife au roi Pépin. Etienne
se détermina à aller en Lombardie trou-
ver Astolphe, malgré les pleurs et les ef-
forts que firent les Romains pour le re-
tenir. N'ayant rien pu gagner sur l'esprit
de ce roi , il passa en France pour deman-
der du secours. Pépin , par le. conseil du
pape , envoya jusqu'à trois fois des am-
bassadeurs à Astolphe. Ce prince persista
l
constamment dans son refus. Alors !*epirt
marcha contre lui. Quand ses troupes
furent à mi-chemin , il envoya de nou-
veau des ambassadeurs ', à la sollicitation
du pape qui voulait éviter l'effusion du
sang des chrétiens. Astolphe ne répon-
dant que par des menaces , Pépin franchit
les monts , assiégea le prince des Lom-
bards dans Pavie, et lui fit promettre
de restituer Ravenne ; mais à peine Pépin
eut repassé les monts , qu' Astolphe parut
devant Rome. Etienne eut recours à son
protecteur , et lui trouva les mêmes dis-
positions. Pépin passa de nouveau en Ita-
lie , dépouilla le roi des Lombards de son
exarcat, et lui enleva 22 villes, dont il
fit présent au pape. Cette donation est le
premier fondement de la seigneurie tem-
porelle de l'église romaine ; car, pour la
donation de Constantin , on sait qu'elle
n'a jamais existé. Le pape , pour hâter
l'arrivée du roi français en Italie, lui avait
écrit une lettre au nom de saint Pierre ,
où , par une prosopopée touchante et
persuasive, il faisait parler cet apôtre
comme s'il eût été encore vivant : et avec
saint Pierre , la sainte Vierge , les anges,
les martyrs, les saints et les saintes.
« Je vous conjure, disait saint Pierre,
» par le Dieu vivant , de ne pas permet-
» tre que ma ville de Rome soit plus
» long-temps assiégée par les Lombards. »
M. Fleury blâme ce pape d'avoir em-
ployé les motifs de la religion pour une
affaire d'état. Mais la délivrance du
pape, opprimé par Astolphe, celle de
l'église de Rome , oii les Lombards com-
mettaient tant de cruautés et tant de pro-
fanations, était-elle donc une affaire d' é-
tal ? Et voudrait-on que Pépin n'ait pas
mérité devant Dieu en la procurant?
Quant à la donation faite au saint Siège
par ce prince, M. Fleury convient qu'elle
est, aujourd'hui surtout, de la plus grande
importance pour le bien de l'Eglise. Tant
« que l'empire romain a subsisté, dit-
w il , il renfermait dans sa vaste étendue
» presque toute la chrétienté : mais de-
• » puis que l'Europe est divisée en plu-
» sieui-s princes indépendans les uns des
» autres ; si le pape eût été sujet de l'un
» d'eux , il eût été à craindre que les
V.
ETt
,37
» autres n'eussent eu de la peine à le re-
» connaître poui* père commun , et que
)) les schismes n'eussent été fréquens. On
)) peut donc croire que c'est par un effet
» de la Providence , que le pape s'est
» trouvé indépendant et maître d'un état
>' assez puissant, pour n'être pas aisément
» opprimé par les autres souverains ; afin
« qu'il fût plus libre dans l'exercice de
» sa puissance spirituelle , et qu'il pût
» contenir plus aisément les autres évi-
» ques dans le devoir. >> Le président
Hénault , l'abbé Terrasson , et le philo-
sophe Hume , ont fait sur cet objet des
réflexions du même genre (t'oy. la Chro-
nologie qui est au commencement du 1 «"^
tome, pag. 49 ). Etienne mourut en 757,
après 5 ans de pontificat. Ce pape as-
semblait souvent son clergé dans son pa-
lais , l'exhortait à l'étude de l'Ecriture
.sainte et des conciles , pour avoir tou-
jours de quoi répondre efficacement aux
ennemis de l'Eglise. Il nous reste de
ce pape cinq lettres et un recueil de quel-
ques constitutions canoniques.
ETIENNE III, romain, originaire
de Sicile, élu pape en 768. Un sei-
gneur, nommé Constantin, s'était em-
paré du pontificat ( c'est le premier exem-
ple d'une pareille usurpation du saint
Siège); on lui arracha les yeux, ainsi
qu'à quelques-uns de ses partisans , et on
intronisa Etienne , qui assembla un con-
cile l'année d'après , pour condamner
l'usurpateur. Dans la troisième session ,
on statua que les évoques ordonnés par
Constantin retourneraient chez eux pour
y être élus de nouveau , et reviendraient
ensuite à Rome pour être consacrés par
le pape. Etienne , paisible possesseur du
saint Siège , en jouit pendant 3 ans et
demi , et omirut en 7 7 2. Rome fut dans
l'anarchie avant et après son pontificat ;
mais on ne valait pas mieux ailleurs. Des
yeux et des langues arrachées , sont les
événemens les plus ordinaires de ces siè-
cles malheureux.
ETIENNE IV, romain , monta sur la
chaire de Saint-Pierre après le pape Léon
III , le 22 juin 816. Aussitôt qu'il fut or-
donné , il vint en France , et y sacra de
nouveau l'empereur Louis le Débonnaire.
9-
»38 ËTÏ
Il mourut le 25 jauvier 81 1 , à Rom6 ^
trois mois après son retour.
ETIENNE V, romain, pape après
Adrien III , fut intronisé à lu fin de sep-
tembre, en 885. Il écrivit avec force à
Basile le Macédonien , empereur d'Orient,
pour défendre les papes ses prédécesseurs
contre Pliotius. Il mourut en 891. « Ce
>» pape, dit un historien, était de race
)) noble et d'un détachement exemplaire.
)k II s'opposa de tout son pouvoir à son
» élévation ; pour le porter sur le trône
» pontifical , il fallut rompre les portes
» de sa maison oîi il s'était enfermé. La
3j charité et la piété éclataient surtout
» entre les vertus de ce pontife. Il nour-
3) rissait les orphelins comme ses enfans ,
» et les admettait souvent à sa table. A
w son avènement au pontifical , les biens
» de l'Eglise se trouvant presque tous
» dissipés , il distribua libéralement son
3) riche patrimoine. Il célébrait la messe
)> tous les jours, et donnait à l'oraison ou
» à la psalmodie , tout le temps que lui
» laissaient les fonctions de la charité et
j> de la sollicitude pastorale. 11 s'appli-
M qua sur toute chose à s'associer dans le
» gouvernement de l'Eglise, les hommes
3> les plus éclairés et les plus vertueux
» qu'il put découvrir. »
ETIENNE YI , mis sur le siège pon-
tifical en 896 , après l'antipape Boniface
VI. Ce pontife fit déterrer l'année d'après,
en 897 , le corps de Formose, son prédé-
cesseur et son ennemi , parce qu'il avait
quitté l'évêché de Porto pour celui de
Rome : translation inouïe alors , mais
qui ne méritait pourtant pas qu'Etienne
donnât à la chrétienté la farce, aussi
horrible que ridicule , de violer la .sépul-
ture d'un souverain pontife , et de faire
jeter son cadavre mutilé dans le Tibre. Le
pape Etienne se rendit si odieux par cette
vengeance , que les amis de Formose
ayant soulevé les citoyens, le chargèrent
de fers , et l'étranglèrent en prison quel-
ques mois après. Jean IX assembla un
concile qui condamna tout ce qui s'était
passé dans l'assemblée de quelques évè-
ques à Rome, en 897, contre la mémoire
et le corps de Formose. Les Pères du con-
cile remarquèrent que Formose avait été
ÈTi
transféré par nécessité dii siège de Porto
à celui de Rome : Neccssitatis causa de
Portuensi ecclesia Formosus, pro vit té
merito adapostolicam sedem provectus
est. Voyez Formose, Auxilius.
ETIENNE VII , successeur de Uon
VI , mourut en 931 , après 2 ans de pon-
tificat.
ETIENNE Vin, allemand, parent
de l'empereur Othon , fut élevé sur le
saint Siège après Léon VII, en 939. Les
Romains , alors aussi séditieux que bar-
bares, conçurent contre lui tant d'aver-
sion, qu'ils eurent, dit-on, la cruauté
de lui découper le visage. Il en fut si dé-
figuré , qu'il n'osait plus paraître en pu-
blic. Il mourut en 942.
ETIENNE IX , était frère de Gode-
froi le Barbu , duc de la Basse Lorraine.
Il se fit religieux au Mont-Cassin , en de-
vint abbé , et fut élu pape le 2 août
1057 , après la mort de Victor II. Il com-
mença son pontificat par tenir plusieurs
conciles , pour remédier principalement
à la vie déréglée des clercs. Il rechercha
tous ceux qui avaient transgressé les lois
de la continence. Ceux même qui ren-
voyèrent leurs concubines et embrassè-
rent la pénitence , furent exclus du san-
ctuaire pour un temps, et privés pour
toujours du pouvoir de célébrer les saints
mystères. Ce pontife mourut à Florence,
en odeur de sainteté , le 29 mars 1058.
ETIENNE DE MURET ( Saint >, fils
du comte de Thiers en Auvergne, suivit
son père en Italie, où des ermites cala-
brois lui inspirèrent du goût pour la vie
cénobitique. De retour en France, il se
retira sur la montagne de Muret dans le
Limousin, et vécut 50 ans dans cedésert,
entièrement consacré à la mortification ,
au jeûne et à la prière. En 1073 , il ob-
tint ime bulle de Grégoire VU, pour la
fondation d'un nouvel ordre monastique,
suivant la règle de St. -Benoît. La répu-
tation de sa vertu lui attira une foule de
disciples et des visites honorables. Sur la
fin de ses jours, deux cardinaux vinrent
le voir dans son ermitage. Ils demandè-
rent au saint homme, s'il était chanoine,
ou moine , ou ermite ? Etienne leur ré-
pondit : « Nous sommes des pécheurs ,
ETI
u conduits dans ce désert par la misëri-
» corde divine pour y faire pénitence. »
Ce n'était pas répondre trop nettement k
la question des cardinaux ; et on a été
assez embarrassé , long-temps après , à
déterminer à quel ordre sa famille appar-
tenait. Etienne l'édifia jusqu'à sa mort ,
arrivée en 1 124 , à 78 ans. Ses enfans in-
quiétés après la mort de leur père , par
les moines d'Ambazar , qui prétendaient
que Muret leur appartenait, emportèrent
le corps de leur fondateur qui était leur
seul bien , et le transportèrent à un lieu
nommé Grandniont, dont l'ordre a pris
le nom. Les annales de cet ordre furent
imprimées à Troyes, en 16G2. Il a été
supprimé en 1769; et les religieux ont
été pensionnés. On a de saint Etienne
du Muret • sa Règle, 164.5, in-12; et un
recueil de maximes, 17 04, in-12, eu
latin et en français.
ETIEINISE (Saint), né en Angleterre,
3^ abbé de Cîteaux , travailla beaucoup
pour l'accroissement de son ordre , fondé
depuis peu par Robert, abbé de Molesme.
Un grand nombre de disciples se mit
sous sa conduite , entre autres saint Ber-
nard, l'homme- le plus illustre que Cî-
teaux ait produit. Parmi le grand nom-
bre de monastères qu'Etienne bâtit, on
compte ceux de La Ferté , de Pontigny ,
de Clairvaux et de Morimond , qui sont
les quatre filles de Citeaux dont dépen-
dent toutes les autres maisons. Etienne
leur donna des statuts , approuvés en
1119 par Caiixte IL Ce saint abbé mou-
ret à cîteaux le 28 mars 1 134.
ETIENNE I ( Saint), roi de Hongrie ,
succéda en 997 à son père Geisa, pre-
mier roi chrétien de Hongrie , et mourut
à Bude en 1038. Il fut comme l'apôtre
de ses états , publia des lois très sages ,
vécut et mourut en saint. Lorsqu'il sentit
qu'il approchait de sa fin , il fit assem-
bler la noblesse pour lui recommander
le choix de son successeur, l'obéissance
au saint Sicge , et la pratique des vertus
chrétiennes. Quarante-cinq ans après sa
mort , son coqjs fut levé de terre , ren-
fermé dans une chasse , et déposé dans
une chapelle de l'église de Notre-Dame
à fiude. Benoit IX le canonisa. Ba valeur
ETI ^^
égalait sa piété ; il fut l'effroi des Barba-
res , et s'attira le respect et l'admiratiou
des nations chrétiennes. Ses vertus do-
mestiques ne brillaient pas d'un moindre
éclat que ses qualités royales. Son fils
Emeric puisa , dans une éducation chré-
tienne et les leçons de l'exemple , cette
innocence et cette pureté de mœurs qui
l'a fait mettre au nombre des saints. Ses
magnifiques fondations furent presque
toutes détruites sous le règne de Joseph II;
mais sa mémoire est toujours en grande
vénération chez les Hongrois , qui ne
prononcent son nom qu'avec attendrisse-
ment et enthousiasme. Ils se servent en-
core de sa couronne pour le sacre de
leurs rois. Quelques légendaires ont don-
né à cette couronne une origine fabu-
leuse, « Jlais elle n'a pas besoin de faux
» titres , dit un critique , pour être une
» pièce très respectable. Son antiquité ,
)j le grand pape qui la donna , le grand
» et saint roi qui la porta , la nation qui
» l'a si long-temps défendue contre les
M infidèles , et qui l'a toujours regardée
» comme la possession caractéristique du
» roi légitime, tout cela concourt à la ren-
» dre intéressante. Vainement Voltaire
» s'estmil moqué de l'importance que les
w Hongrois attachent à cette couronne ,
» jusqu'à n'avoir jamais voulu reconnai-
» trepour roi celui qui ne l'avait pas. Si
» quelque chose doit être bien constaté et
«sanctionné, c'est bien la royauté. »
Joseph II l'avait fait enlever et transpor-
ter à Vienne ; mais en 1 790 , elle fut ren-
due aux Hongrois , qui l'a reçurent avec
une pompe et des réjouissances extraor-
dinaires. C'est du roi saint Etienne que
vient le titre A^ apostolique, donné long-
temps par les papes aux rois de Hongrie,
et renouvelé en faveur de Marie-Thérèse ,
héritière de Charles VI.
ETIENNE D'ORLÉANS , d'abord
abbé de Sainte-Geneviève en 117 7, eu-
suite évèque de Tournay en 1191, eut
part aux affaires les plus considérables
de son temps. Il mourut en 1203. On a
de lui des sermons , des e'pilres curieu-
ses , 1682 , .in-8 , et d'autres ouvrages.
ETIENNE BATTORI. Foy. Battori.
ETIEJNJNE Dk Bïsa»cE) grammai-
i4o ETI
rien du 6« siècle , auteur d'un Diction-
naire géographique, dont nous n'avons
qu'un mauvais abrège', fait par Hermo-
laiis sous l'empereur Justinien , et publié
à Leyde en 1694 , in-fol., eu grec et en
latin , par Gronovius , avec les savans
commentaires de Berkelius. Il y en aune
autre édition de 1678 , qu'on jointà celle
de 1694 , à cause des changemens ; on y
joint encore les notes d'Holstenius ,
Leyde, 1684, in-fol. Vabrégé d'Hermo-
laiis nous a sans doute fait perdre l'ori-
ginal , qui eût été d'un prix inestimable
pour la connaissance des dérivés et des
noms des villes et provinces.
ETIENNE, vayvode de Moldavie, dans
le 16' siècle, se mit sur le trône par
les armes des Turcs, après en avoir
chassé le légitime possesseur, qu'il fit
mourir. 11 régna en tyran. Les Boïards
ne pouvant plus supporter le joug, le
massacrèrent dans sa tente , avec 2,000
hommes , partie Turcs , partie Tarlares ,
qui composaient sa garde.
ETIENNE ou EsTiENNE (Henri), pre-
mier du nom , imprimeur de Paris , mort
à Lyon en 1 620 , est la souche de tous les
autres savans de ce nom qui ont tant il-
lustré la presse et la littérature. Il est
connu par l'édition de quelques livres ;
et surtout par un Psautier à cinq colon-
nes, publié en 1609.
ETIENNE (Robert), second fils du
précédent , et parisien comme lui , sur-
passa son père parla beauté et l'exactitude
de ses éditions. Il travailla d'abord sous
Simon de Colines, qui avait épousé sa
mère ; mais depuis il travailla seul. Ro-
bert ennoblit son art par une connais-
sance parfaite des langues et des belles-
lettres. Il est le premier qui ait imprimé
les Bibles distinguées par versets. Les ser-
vices qu'il rendait aux lettres , lui au-
raient concilié une estime générale , sans
son penchant pour les nouvelles opinions.
Il avait publié une Bible , avec une ver-
sion par Léon de Juda , et des notes al-
térées par Calvin. Pour donner plus de
cours k cet ouvrage , il l'attribua à Va-
table, qui s'en défendit comme, d'iui
crime. Les docteurs deSorbonnc en ayant
censuré les notes , Robert se retira à Ge-
ETI
nève en 1651 , et y finit ses jours en
1 669 , à 66 ans. On dit que pour rendre
ses éditions plus correctes, il en faisait
exposer les feuilles dans les places pu-
bliques, et qu'il donnait des récom-
penses à ceux qui y trouvaient quelque
faute. Parmi ses belles éditions, on
distingue sa Bible hébraïque, 1644, 8
vol. in-16, l'in-4 est moins estimée; et
le Nouveau Testament grec, 1646, 2vol.
in-16. Outre les éditions dont il a enri-
chi la république des lettres , nous lai
devons son Thésaurus Unguœ lalinœ,
chef-d'œuvre en ce genre, publié en
1636 et en 1643, réimprimé plusieurs
fois à Lyon , à Leipsick , à Bâle et à Lon-
dres. L'édition de Londres, 1734 , 4 vol.
in-folio , est magnifique ; et celle de
Bâle, 1740, 4 vol. in-folio, 9 quelques
augmentations. Ce dictionnaire est véri-
tablement un trésor. On y trouve tout ce
qu'on peut désirer pour l'intelligence de
la langue latine.
ETIENNE ( Charles) , troisième fils de
Henri , imprimeur , joignit à l'art de son
père la science médicale. Il mourut en
1564, à 60 ans. On a de ce typographe
médecin 1" Z?e re rustica, in-8. 2" De
vascuUs , in-8. 3" Une Maison rustique,
in-4. 11° \]a Dictionnaire historique, géo-
graphique et poétique , Londres , 1686 ,
in-fol. 6° La traduction de la comédie
italienne, intitulée : le Sacrifice, parles
Acad. de Sienne //z/ro/îo/i, 1643, in-16;
et sous le titre des Abusés, 1660 , iu-16 ,
etc.
ETIENNE (Henri), fils de Robert,
né à Paris en 1628 , ouvrit les trésors de
la langue grecque , comme son père avait
fouillé ceux de la latine. Son ouvrage en
ce genre, est en 4 vol. in-fol., 1672. On
doit joindre à ce livre deux glossaires ,
imprimés en 1673, et un appendix -par
Daniel Scholt , Londres , 1746, 2 vol. in-
fol. On doit encore à Henri Etienne , plu-
sieurs auteurs qu'il mit en lumière et qu'il
corrigea avec beaucoup de soin : ces édi-
tions lui ont fait un grand nom parmi les
savans. Mais ce qui l'a fait le plus con-
naître à ceux qui ne se piquent que d'une
littérature légère , c'est sa version d^A-
nacréon en vers latins. Henri était calvi-
ETÏ
niste, et osait en faire profession à Paris,
dans un temps oii ceux de cette secte
étaient vivement poursuivis. Une satire
atroce qu'il publia contre le clergé régu-
lier , sous le titre de Préparation à l'A-
pologie pour Hérodote , l'obliga de s'en-
fuir de sa patrie. Il passa à Genève et de
là à Lyon , oii il mourut à l'hôpital en
l.')98 , à 70 ans, presque imbécille. Outre
les ouvrages dont nous avons parlé , ou
a de lui 1" des corrections sur Cicéron ,
en latin , la plupart très judicieuses. 2"
De origine mendorum. 3" Juris civilis
fontes et rivi, in-8. L'objet de cet ou-
vrage est de montrer que la plupart des
lois d'Egypte , ayant été tirées de celles
de Moïse , et ayant donné lieu à celles des
Grecs, c'était dans la même source qu'on
devait puiser les principes des lois ro-
maines. 4" V Apologie pour Hérodote^
publiée par Le Duchat, en 3 vol. in-8,
17 35 : rapsodie infâme d'invectives con-
tre la religion catholique , et de contes
sur les prêtres et sur les moines , recher-
chée par quelques savans d'un goût bi-
zarre , qui aiment mieux les décombres
de la littérature gauloise, que les bons
livres des beaux jours de Louis XIV. Henri
Etienne intitula son fatras : Apologie
pour Hérodote , parce que son but était
de justifier les fables de cet historien ,
par celles qu'il prétendait que les catho-
liques avaient débitées sur les saints ,
etc. 5° Poetœ greci principes , 1 566 ,
in-fol. 6° Medicce artis principes post
Hippocratem et Galenum ; collection
rare et chère , imprimée à Paris ,1677,2
vol. in-fol. La version qu'il fit de ces
auteurs, et qu'il joignit au texte ^ est es-
timée. 7° Traité de la prééminence des
rois de France. 8° La prémices , ou le
premier livre des Proverbes épigranima-
tisés , ou des Epigrammes provcrbiali-
sées, 1594 , iu-8 : recueil indigeste, oîi,
parmi quelques bonnes pointes, on en
trouve une foule de triviales. 9" Narra-
iiones cœdis Ludovici Borbonnii, in-S ,
1569. 10" Artis typographie œ qucrimo-
nia , poème dont M. Lottin , imprimeur,
a donné une traduction française, Paris,
1785. Henri Etienne y fait des plaintes
très vives contre les imprimeurs de sou
ETT »4ï
temps , regardé à si juste titre comme le
siècle d'or de la typographie. Que dirait-
il aujourd'hui , en voyant la plupart des
imprimeurs qtii savent à peine l'ortogra-
phe de leur langue maternelle ? Son zèl«
s'allumait , surtout quand il voyait des
imprimeurs qui ignoraient absolument le
latin. La famille des Etienne a produit
plusieurs autres imprimeurs célèbres. Le
dernier de tous fut Antoine , petit-fils du
précédent. Il mourut aveugle à l'Hôtel-
Dieu de Paris en 1674, à 80 ans. Les
Etienne sont placés à la tête des premiers
imprimeurs du monde , par la beauté et
la correction de leurs éditions. Les hom-
mes les plus savans et même les plus il-
lustres de leur temps , ne dédaignaient
pas de corriger leurs épreuves.
* ETIENNE ou EsTiE.NNE (Robert),
libraire de Paris, né en 1723 , prétendait
descendre des précédens. Il mourut en
1794. On lui doit les ouvrages suivans
qui ont paru la plupart sous le voile de
l'auonyme : 1 ° un Eloge de l'abbé Plu-
che , mis en tête d'un ouvrage intitulé
Concorde de la géographie des différens.
âges. 1° Causes amusantes et peu con-
nues, Paris, 1769 , 2 vol. in-12. 3" Ser-
mons pour les jeunes dames et les jeunes
demoiselles , traduit de l'anglais de For-
dyce, Paris, 1778. 4° Etrcnnes de la
vertu , contenant des actions de bienfai-
sance , de courage et d'humanité, Paris ,
1782-1794, 2 vol. in-8. Il a été l'éditeur
des Opuscules de Rollin , Paris, 1771 ,
2 vol. in-12, et il a ajouté des notes à
l'éloge de cet écrivain , par de Boze.
ETIENNE (François d'). Voyez Es-
TIENNE.
ETTMULLER ( Michel ) , né à Leip-
sick en 1646, mort dans cette ville en
1683 , y professa long-temps et avec un
succès distingué la botanique, la chimie
et l'anatomic. Dans ses nombreux voya-
ges, il parcourut presque toute l'Europe.
Il est auteur de plusieurs ouvrages de
médecine, recueillis à Naples en 5 vol.
in-folio, 1728. Sa chirurgie médicale a
été traduite en français à Lyon en 1698 ,
in-12. On a aussi des traductions de pres-
que tous SCS autres ouvrages , in-8 et
in-12. EttmuUcr, savant dans la théorie
!4a EUC
et heureux dans la pratique , oi&e dans
ses écrits des recherches curieuses et des
observatious utiles.
ETTMULLER (Michel-Ernest), fils du
précédent , aussi célèbre que lui , donna
au public la vie et les ouvrages de son
père. Il professa et exerça la médecine
avec réputation , et mourut à Leipsick en
1 732 , laissant plusieurs dissertations sur
différens objets de son art.
EUBULIDE. Foyez Euclide.
EUCHER ( Saint ), premier évêque de
Trêves , fonda ce siège au 3* siècle. Quel-
ques légendes le font mal à propos disci-
ple de saint Pierre. Son corps repose dans
l'église de Saint-Mathias , près de Trêves.
EUCHER ( S. ) , archevêque de Lyon,
d'une naissance illustre et d'une piété
éminente , se retira avec ses fils , Salonc
et Verau, dans la solitude de Lérins, après
avoir distribué une partie de ses biens aux
pauvres, et l'autre partie à ses filles, qui ne
le suivirent pas dans sa retraite. Il quitta
l'île de I,érins où ses vertus lui attiraient
trop d'applaudissemèns , et passa dans
celle de Léro , aujourd'hui Sainte-Mar-
guerite, Ce ne l'ut qu'à force d'instances
qu'on le tira de ce désert , pour le placer
sur le siège de Lyon vers 434. Il assista
en cette qualité au premier concile d'O-
range en 441 , et y signala sa science au-
tant que sa sagesse. « On vit en lui , dit
)) Claudien Mamert , un pasteur fidèle ,
» soupirant sans cesse après la céleste
» patrie , humble d'esprit , riche en bon-
» nés œuvres , puissant en paroles , ac-
» compli en tout genre de sciences , et de
« beaucoup supérieur aux plus grands
» évoques de son temps. » Il mourut vers
l'an 454. L'Eglise lui est redevable i° d'un
Eloge du désert , adressé à saint Hilairc.
Celui de Lérins y est peint avec des cou-
leurs bien propres à le faire aimer. Le
stile de cet ouvrage est aussi noble qu'é-
légant ; 2° d'un Traite du mépris du
monde. Saint Eucher montre dans le
monde un gouft're affreux , sous une su-
perficie brillante. « J'ai vu , dit-il , des
» hommes élevés au plus haut faîle des
j) honneurs et des richesses. La fortune ,
» prodigue eu leur faveur, avait accu-
» mule tous les biens sur leurs têtes, sans
Eue
u leur dontier même le temps de les dé-
» sirer ; leur prospérité , parvenue à sou
» comble , ne laissait plus d'activité à
» leurs passions. Mais ils ont disparu dans
» un moment ; leurs vastes possessions ont
» été dispersées , et eux-mêmes ne sont
» plus. » La latinité de cet ouvrage est
presque digne du siècle d'Auguste. On y
admire la douceur et la facilité du stile ,
la beauté des tours, la noblesse des pen-
sées, l'énergie de l'expression, la vivacité
et le naturel des images, la clarté de la
méthode. Ce traité a été traduit en fran-
çais par Arnaud d'Andilly ainsi que le pré-
cédent, 1672 , in-12. Tous les deux sont
en forme de lettres ; celui-ci est adressé
à Valérien, son parent. 3° D'un Traité des
formules spirituelles ; ce sont des expli-
cations de quelques endroits de l'Ecriture,
que saint Eucher écrivit pour l'usage de
Yeran , un des ses fils. On n'y trouve ni la
même élégance , ni la même beauté de
stile , que dans les deux ouvrages précé-
dens; mais le sujet ne le comportait pas, et
la simplicité est le caractère distinctif de
ce genre d'écrire. 4° De l'Histoire de saint
Maurice et des martyrs de la Légion
thébaine. Le témoignage seul de cet an-
cien et illustre auteur suffit pour anéantir
les doutes qu'un écrivain fameux a tâché
d'élever sur l'histoire de ces saints mar-
tyrs ( voyez Maurice ). Cette histoire a
été traduite en français par Dubourdieu ,
et imprimée à Amsterdam en 1705 avec
une dissertation critique très vantée par
Bayle , mais réfutée avec énergie par D.
Joseph Delisle , bénédictin. Les différens
écrits de saint Eucher sont dans la biblio-
thèque des Pères. Ses deux fils, Salone et
Veran, furent évêques, du vivant même de
leur père.
EUCLIDE , né à Mégare , et disciple
de Socrate , était passionné pour les le-
çons de son maître. Les Athéniens ayant
défendu, sous peine de mort, aux Méga-
riens d'entrer dans leur ville, Euclide s'y
glissait de nuit, en habit de femme, pour
entendre Socrate. 3Ialgré son attachement
pour ce philosophe , il s'éloigna de sa ma-
nière de penser. Le philosophe athénien
s'attachait principalement à spéculer sur
la morale > le mégarieu s'appliqua à e&er*'
fcer l'esprit de ses disciples par les vairiéé
subtilités de la logique. Sa secte fut ap-
pelée Disputante et Querelleuse. Le phi-
losophe Euclide ne méritait pas moins ces
ëpitiiètes ; il disputait en énerguniène.
Ses disciples héritèrent de son impétuo-
sité. La rage de la chicane les posséda tel-
lement, qu'Eubulide, l'un d'entre eux ,
réduisit en système , non pas l'art de rai-
sonner , mais l'art d'obscurcir la raison
par des subtilités aussi vaines que bar-
bares. Il fut l'inventeur de divers sophis-
mes si captieux et si embarrassans que
plusieurs de ses disciples moururent de
déplaisir de n'avoir pu les résoudre. Ces
travers passèrent , dans les siècles d'igno-
rance, des livres des philosophes païens,
dans quelques écoles chrétiennes. Le dia-
lecticien Abailard les y introduisit avec
éclat. Cette manière de raisonner a pro-
duit de mauvais effets ; la théologie, cette
science respectable , simple et divine, en
devint presque méconnaissable. Mais l'on
ne sauiait disconvenir qu'elle a servi à
maintenir les règles d'une sûre et rigou-
reuse logique , règles si essentielles dans
tous les genres de sciences , et négligées
aujourd'hui et violées par les hommes les
plus célèbres dans la république des let-
tres. Tant l'esprit humain est sujet aux
extrêmes! A peine est-il guéri de la ma-
nie de raisonner avec une exactitude af-
fectée et chicaneuse, qu'il donne dans
un défaut directement opposé. Foyez
DU.NS.
* EUCLIDE, le mathématicien, était d'A-
lexandrie, où il professait la géométrie
SOUS Ptolémée, fils de Lagus. Il a laissé
des élémens de cette science en 1 5 livres,
dont les deux derniers sont attribués à
Hypsicle , mathématicien d'Alexandrie.
C'est un enchaînement de plusieurs pro-
blêmes et théorèmes tirés les uns des au-
tres , et démontrés par les premiers prin-
cipes. L'antiquité ne nous a pas transmis
d'ouvrage plus important sur cette ma-
tière ; il a été loug-temps le seul livre
dans lequel les modernes ont puisé les
connai-ssances mathématiques. Les meil-
leures éditions des Elémens d'Euclide
sont celle qui a paru à Baie, 1550, in-fol.,
celle de Barrow,in-8, Londres, lG78j
tm
143
dé DàVld Grégory, in-folio , 1Î03, en
grec et en latin ; et celle de Robert Sim-
son , in-4 , en latin , puis en anglais, réim-
primée pour la sixième fois en 1781^ On
y trouve d'excellAites Notes critiques et
géométriques , oii l'éditeur redresse les
erreurs dont Théon et d'autres ont défi-
guré ces Elémens. Nous en avons plu-
sieurs traductions françaises ; la plus es-
timée est celle du père de Châles, iu-12.
( Les OEuvres d'Euclide en grec, latin et
français , d'après un manuscrit très an-
cien, qui était resté inconnu jusqu'à nos
jours, ont été publiées par F. Peyrard , à-
Paris, 1814, in-4. ) On a encore quelques
Fragmens d'Euclide , dans les anciens
auteurs qui ont traité de la musique , Am-
sterdam, 1652, 2 vol. in-4. M. Peyrard a
donné une édition des OEuvres d'Eu-
clide en grec , en latin et en français ,
d'après un manuscrit très ancien, qui
était J'este inconnu jusqu'à nos jours ,
Paris, 1814-18, 3 vol. in-4, fig. Il avait
déjà publié en 1804 les Elémens de géo-
métrie d'Euclide ; traduits littéralement y
1 vol. in-8 , avec un supplément, 1810,
in-8 , pour les parties qui étaient omises
ou incomplètes dans Euclide. Euclide était
doux, modeste. Il accueillit favorable-
, ment tous ceux qui cultivaient les sciences
exactes. Le roi Ptolémée voulut être son
disciple ; mais rebuté par les premières
difficultés , il demanda s'il n'y avait point
de voie plus aisée pour apprendre la géo-
métrie ? « Non , répondit Euclide , il n'y
en a point de particulière pour les rois. »
* EUCLIDE , premier archonte d'A-
thènes, 403 ans avant J. C, et dans la
2'' année de la 94*^ olympiade. Il se ren-
dit par son sage gouvernement aussi cé-
lèbi-e que les deux autres Euclides le fu-
rent, celui de Mégare par les subtilités
de sa dialectique, et celui d'Alexandrie
pour avoir donné ses premiers élémens
de géométrie. Euclide l'archonte fut élu
aussitôt après l'expulsion des trente ty-
rans, qu'il fit excepter de l'amnistie ac-
cordée à tous ceux qui avaient eu part
aux guerres civiles. Il fit faire une révision
générale des lois de la république , et l'on
en exclut les pernicieuses ou inutiles.
Dans les actes publics, il fit adopter l'ai
t44
ËtfD
phahet ionien ^ de 24 lettres , Comme
plus simple que celui dont les Athéniens
avaient fait usage jusqu'à ce jour. Eu-
clide parvint à réunir tous les esprits , et
son archontat est souveftt cité avec éloge
par les anciens auteurs.
* EUCLIDE , fameux sculpteur athé-
nien. Du temps de Pausanias , on admi-
rait ses ouvrages dans l'Achaïe, et surtout
dans la ville de Bure , où l'on voyait plu-
sieurs statues de cet artiste , toutes en
marbre pantélique , et chacune dans un
temple particulier , savoir , celles de Cé-
rts , habillée; de Vùius , de Bacchus et
de Lucine ; on voyait encore un Jupiter
assis , dans un temple de la ville d'Egire.
Euclide est un des plus anciens sculpteurs
grecs ; on croit qu'il vivait vers l'an 450
avant l'ère chrétienne.
EDCRITE. Voyez Evephknb.
EUD^MON-JEAN ( André ) , né dans
l'île de Candie, jésuite à Rome, mort
dans cette ville en 1G25, composa divers
ouvrages. Le plus connu a pour titre Ad-
monitio ad regem Ludovicum XIII,
1G26 , in-4 , et en français, 1C27 , in-4 ,
plein d'excellens avis , mais contenant
quelques propositions contraires aux ma-
ximes de l'état , que bien d'autres avaient
enseignées avant lui , et qui ne sont rien
en comparaison de celles qu'on a ensei-
gnées depuis. Voyez Santarel , Jou-
VENCY.
EUDES , duc d'Aquitaine , régnait en
souverain sur toute cette partie de la
France qui est entre la Loire, l'Océan,
les Pyrénées , la Septimanie et le Rhône.
î.e roi Chilpéric II l'ayant appelé à son
secours contre Charles Martel en 7 1 7 , le
reconnut pour souverain de toute l'Aqui-
taine. Eudes marcha avec lui contre Char-
les, qui ayant eu tout l'avantage, lui de-
manda de lui livrer Chilpéric avec ses
tré.sors. Le duc d'Aquitaine , soit par
crainte, soit par faiblesse, abandonna le
vaincu au vainqueur, et fit tui traité d'al-
liance avec lui. C'était en 719. Deux ans
après, en 721 , il défit Zama, général des
Sarrasins, qui avait mis le siège devant
Toulouse. Les infidèles, malgré cette dé-
faite , se rendirent de jour en jour plus
formidables. Eudes , pour arrêter leurs
ËtJfi
iirogrës , iît sa paix avec Manuza leur gé*
néral, et lui donna sa fille en mariage. La
guerre recommença en 732. Eudes ayant
favorisé le soulèvement d'une des provin-
ces d'Abdérauie, roi des Sarrasins, ce
prince passala Garonne pourlecombatlre.
Le duc d'Aquitaine pressé de tous côtés ,
après avoir perdu beaucoup de soldats et
de places, implora le secours de Charles-
Martel. Les deux princes réunis rempor-
tèrent une victoire signalée entre Tours
et Poitiers. Les Sarrasins y perdirent , à
ce qu'ont raconté quelques historiens
exagérateurs , plus de 300,000 hommes.
Eudes, débarrassé des Sarrasins , se battit
avec le prince qui l'avait aidé à les chas-
ser. La guerre se ralluma entre lui et
Charles-Martel , et ne finit que par la
mort d'Eudes en 736.
EUDES, comte de Paris, duc de France,
et l'un des plus vaillans princes de son
siècle , était fils de Robert le Fort. En 887
il contraignit les Normands de lever le
siège de Paris. L'année suivante, il fut
proclamé roi de la France occidentale, et
défit peu de temps après l'armée des Nor-
mands , qu'il poursuivit jusque sur la
frontière. Il obligea Charles le Simple de
se retirer dans la Neustrie, prit Laon , et
mourut à La Fère en Picardie , le 5 jan-
vier 898.
EUDES DE MONTREUIL, architecte
du 13^ siècle, fut fort estimé du roi saint
Louis, qui le conduisit avec lui dans
son expédition de la Terre-Sainte , oii il
lui fit fortifier la ville et le port de Jaffa.
De retour à Paris, il bâtit plusieurs
églises, celle de Sainte-Catherine du Val-
des Ecoliers , de l'Hôtel-Dieu , de Sainte-
Croix de La Bretonnerie, des Blancs-Man-
teaux , des Mathurins , des Cordeliers et
des Chartreux. Il mourut en 1289.
EUDES ( Jean ) , frère de l'historien
Mézerai , né à Rye dans le diocèse de
Seès, en 1601 , forma son esprit et régla
ses mœurs dans la congrégation de l'Ora-
toire , sous les yeux du cardinal de Bé-
ruUe. Après y avoir demeuré 18 ans, il en
sortit en 1043, pour fonder la congréga-
tion des Eudistcs. Ses anciens confrères
s'étant opposés à l'établissement de cette
société , Eudes cacha une partie de son
I
EUD
projet. Il se borna à demander une mai-
son à Caea pour y former des prêtres à
l'esprit ecclésiastique ; « mais sans aucun
j» dessein , dit-il , de former un nouvel
« institut. » Le sien se répandit néan-
moins avec beaucoup de fruits. Eudes
prêchait assez bien pour son temps, où
l'éloquence de la chaire n'avait pas été
portée si loin que dans le nôtre ; ce talent
le fit rechercher, et sa congrégation y
gagna. <f Le clergé de Normandie , dit
» l'abbé Berauit , où elle est particulière-
i) ment répandue, en fait encore aujour-
» d'hui l'éloge , par sa régularité et par
)j ses lumières. Aussi le nom du Père Eudes
» y est-il toujours dans la plus grande
«vénération; ce qui n'a point empêché
» l'historien fugitif du jansénisme , de le
M représenter , dans le vrai stile de la
)> Hollande hérétique, comme un fana-
n tique , ennemi déclaré de la grâce du
» Sauveur. C'est un témoignage de plus,
)) en faveur de ce saint prêtre relativement
» à la foi, c'est-à-dire à la vertu, sans
» laquelle toute sainteté n'en est que le
w simulacre. » Eudes mourut à Caen en
1C80 , à 79 ans, laissant des ouvrages qui
ont plus fait d'honneur à sa dévotion qu'à
son esprit. Celui qui a fait le plus de
bruit , est le traité De la dévotion et de
l'office du cœur de la F'ierge, in-12, IG50.
Eudes y adopte phusieurs pratiques nou-
velles, inspirées par une piété mal réglée
et par un zèle plus ardent qu'éclairé. On
a encore de lui une J^ie de Marie des
Vallées, manuscrite, en 3 vol. in-4.
EUDOXE de Guide , fils d'Eschine ,
fut à la fois astronome , géomètre , mé-
decin , législateur ; mais il est principale-
ment connucommeastronome.Hipparque
et lui donnèrent un nouveau jour au
système du monde d'Anaximandre. Eu-
doxe mourut l'an 350 avant J. C, après
avoir donné des lois à sa patrie. C'était
un géomètre laborieux. Il perfectionna ,
dit-on , la théorie des sections coniques.
EUDOXE, fils de saint Césaire martyr,
né à Ârabisse , ville d'Arménie , embrassa
l'arianisme , et fut un des principaux dé-
fenseurs de celte hérésie. Il fut fait évê-
que de Germanicie dans la Syrie , par
ceux de sa communion ; il assista au con-
EUD 145
cîle de Sardique et à plusieurs autres. En
358 , Eudoxe usurpa le siège d'Antioche.
Deux ans après, l'empereur de Constance
l'éleva au patriarchat de Constantinople.
Il persécuta les catholiques avec fureur ,
et mourut l'an 370 à Nicée , en sacrant
Eugène , arien comme lui , et évêque de
cette ville,
ECDOXIE ( ^lia ) , fille du comte
Bauton , célèbre général sous le grand
Théodose , était française ; elle joignait
les agrémens de l't sprit aux grâces de la
figure. L'eunuque Europe la fit épouser à
Arcade , et partagea d'abord avec elle la
confiance de ce faible empereur ; mais
ayant voulu ensuite s'opposer à ses des-
seins , elle chercha les moyens de perdre
ce rival, et elle les trouva. Maîtresse de
l'état et delà religion , cette femme régna
en roi despotique : son mari n'était em-
pereur que de nom. Pour avoir encore
plus de crédit que ne lui en donnait le
trône , elle amassa des richesses immenses
parles injustices les plus criantes. Saint
Jean-Chrysostôme fut le seul qui osa lui
résister. Eudoxie s'en vengea, en le faisant
chasser de son siège par un conciliabule ,
l'an 403. Une des causes de la haine de
l'impératrice contre le saint prélat , était
un sermon contre le luxe et la vanité des
femmes, que les courtisans envenimèrent.
Eudoxie rappela Chrysostôme après quel-
ques mois d'exil; mais le saint s'etant
élevé avec force contre les profanations
occasionées par les jeux et les festins ,
donnés au peuple à la dédicace d'une sta-
tue de l'impératrice , elle l'exila de nou-
veau en 404. Cette femme , implacable
dans ses vengeances et insatiable dans
son ambition , mourut d'une fausse cou-
che quelques mois après. Ses médailles
sont très rares.
EUDOXIE (^lia), fille de Léonce,
philosophe athénien, s'appelait AthénaUs
avant son baptême et son mariage avec
l'empereur Théodose le Jeune. Son père
l'instruisit dans les belles-lettres et dans
les sciences ; il en fit un philosophe, un
grammairen et un rhéteur. Le vieillard
crut qu'avec tant de talens joints à la
beauté , sa fille n'avait pas besoin de bien,
et la déshérita. Après sa mortelle voulut
]o
i46 EUD
rentrer dans ses droits; mais ses frères les
lui contestèrent. Heureuse ingratitude ,
puisqu'elle la fit impératrice ! Kudoxic se
voyant sans ressource, alla à Constanti-
nople porter sa plainte à Pulchérie , sœur
de Théodose II. Cette princesse étonnée
de son esprit, autant que charmée de sa
beauté , la fit épouser à son frère en 421 .
Les frères d'Athénaïs , instruits de sa
fortune , se cachèrent pour échapper à sa
vengeance. Eudoxie les fit chercher , et
les éleva aux premières dignités de l'em-
pire : générosité qui rend sa mémoire
plus chère aux âmes bien nées , que sa
fortune même. Son trône fut toujours en-
vironné de savans. Paulin , un d'entre
eux, plus aimable ou plus ingénieux que
les autres , fut le plus en faveur auprès
d'elle. L'empereur eu conçut de la ja-
lousie ; elle éclata au sujet d'un fruit
que l'impératrice donna à cet homme de
lettres. Ce fruit fut une pomme de dis-
corde. Théodose crut sa femme coupable,
fit tuer Paulin, congédia tous les officiers
d'Eudoxie, et la réduisit à l'état de simple
particulière. Cette princesse, aussi illustre
qu'infortunée, se retira dans la Palestine ,
et embrassa les erreurs d'Eutychès. Tou-
chée ensuite par les lettres de saint Si-
méon slylite , et par les raisons de l'abbé
Euthymius, elle retourna à la foi de l'E-
glise , et passa le reste de ses jours à
Jérusalem dans la piété et dans les lettres.
Elle mourut l'an 4G0, après avoir juré
qu'elle était innocente des crimes dont
son époux l'avait soupçonnée. Eudoxie
avait composé beaucoup d'ouvrages sur
le trône, et après qu'elle en fut des-
cendue. Photius cite avec éloge une tra-
duction en vers hexamètres des huit pre-
miers livres de V Ecriture. On attribue
encore à cette princesse un ouvrage ap-
pelé le Cenlon d'Homère qu'on trouve
dans la Bibliothèque des Pères. C'est la
vie de J. C. composée de vers pris de ce
père de la poésie grecque. Du Cange
pense que cet écrit est tout ce qui nous
reste de ses ouvrages ; mais la plupart de
ses critiques conviennent qu'il n'est ni
d'elle, ni digne d'elle. Yillefore a écrit sa
rie.
EUDOXIE LA Jeune (Licinia), ua-
EUD
quit à Constantinopleen 422. Elle était
fille de Théodose II et d'Eudoxie, et
femme de Valentinien III , que Maxime ,
usurpateur de l'empire, fit assassiner. Le
mcurlirer força la femme de l'empereuf
tué à accepter sa main. ( Eudoxie ignorait
que son nouvel époux fût souillé du sang
du premier). Lorsque Maxime osa le lui ré-
véler, outrée de colère , elle appela à son
secours Genséric , roi des Vandales. Ce
prince passa en Italie à la tête d'une nom-
breuse armée, mit tout à feu et à sang ,
saccagea Rome et emmena Eudoxie en
Afrique. Après 7 ans de captivité , elle
fut renvoyée à Constantinople en 462 ,
et y finit sa vie dans les exercices de la
piété. Ses médailles sont très rares , et les
vertus qui la signalèrent sont plus rares
encore. Elle ne fit usage de son pouvoir
que pour soulager les malheureux , qui
furent en grand nombre sous son règne.
Elle supporta les vices de Valentinien
avec un courage tranquille , et ne lui fut
pas moins attachée , que si cet époux
infidèle et livré à une vie infâme, eût été
un homme de bien.
EUDOXIE, veuve de Constantin
Ducas, se fit ])roclaraer impératrice, avec
ses trois fils , aussitôt après la mort de
son époux en 10G7. Romain Diogène, un
des plus grands de l'empire , avait voulu
lui enlever la couronne : Eudoxie le fit
condamner à mort ; mais l'ayant vu avant
l'exécution, elle fut si touchée de sa bonne
mine , qu'elle lui accorda sa grâce , et le
fit même général des troupes de l'Orient.
Romain Diogène répara par sa valeur ses
anciennes fautes. Eudoxie résolut de l'é-
pouser , afin qu'il l'aidât à réparer les
malheurs de l'empire , et à conserver le
sceptre à ses fils. Pour exécuter ce projet,
il fallait retirer des mains du patriarche
Xiphilin un écrit, par lequel elle avait
promis à Constantin Ducas de ne jamais
se remarier. Un eunuque de confiance ,
d'un esprit délié, va trouver le patriar-
che, lui déclare que l'impératrice veut
passera de secondes noces, mais que son
dessein est d'épouser le frère du patriar-
che. Xiphiliu ne trouva dès lors aucune
difficulté, rendit ce papier, et Eudoxie
épousa Romain en 10G8. Trois ans après,
EUG
Michel son fils , s'étaut fait proclamer
empereur, la renferma dans un monas-
tère. Elle avait eu sur le trône les qualités
d'un grand prince ; elle eut dans le cou-
vent les vertus d'une religieuse. Elle cul-
tiva la littérature avec succès. Nous avons
d'elle un manuscrit qui est dans la biblio-
thèque du roi de France : c'est un recueil
sur les généalogies des dieux , des héros
et des héroïnes et qui a pour titre lonia.
On trouve dans cet ouvrage tout ce qu'on
a dit de plus curieux sur les délires du
paganisme. Il décèle une vaste lecture.
Il a été imprimé à Venise par les sains
de M. de Villoison dans les yinecdota
grœcuy 1781 , 2 vol. in-4 ; le l^' volume
est occupé par ce manuscrit ; le 2® con-
tient des extraits de différens auteurs
grecs. Cette princesse composa plusieurs
autres ouvrages.
EUDOXIE Lapouccin , impératrice
de Russie , première femme de Pierre le
Grand et mère de l'infortuné Alexis, fut
répudiée et reléguée dans un couvent ,
près du lac Ladoga. On l'avait accusée
injustement , à ce qu'il paraît , d'avoir
eu un commerce illicite avec un seigneur,
nommé Rlébou , qui expira dans des tour-
mens horribles. Au milieu de l'exécution,
le jaloux et cruel Pierre le sollicita d'a-
vouer son crime; mais Klébou lui ré-
rondit d'une manière bien propre à jus-
tifier l'impératrice. « Il faut que tu sois
M aussi imbécile que tyran , pour croire,
» que n'ayant rien voulu avouer au
« milieu des tourmens inouïs que tu m'as
« fait souffrir , à présent que je n'ai plus
» d'espérance de vivre , j'irai flétrir l'in-
» nocence et l'honneur d'une femme ver-
» tueuse, en qui je n'ai jamais connu
» d'autre tache que de t'avoir aimé : va
» monstre, ajouta-t-il en lui crachant au
)' visage , retire-toi et laisse-moi mourir
» en paix. » Eudoxie fut rappelée par
Pierre II et mourut quelque temps après.
EUFÉMIî:. Fotjez Eupiiémie.
EUGÈNE I ( S. ) , Romain, fut vicaire-
général de l'église durant la captivité du
pape saint Martin, et son successeur dans
la chaire pontificale en 654. Il mourut le
1" juin 668.
EUGEJNE II , romain , pape après Pas-
EUG i47
chai I, l'an 82i , mort en 827, fut re-
commandable par son humilité. On ne
doit pas avoir une grande idée de son es-
prit, s'il est vrai , copime plusieurs au-
teurs l'assurent , qu'il établit l'épreuve
de l'eau froide. Il est vrai que dans ces
siècles, les moyens de connaître la vérité
étaient si peu lumineux et si peu sûrs,
qu'on est presque tenté d'approuver le
recours aux preuves surnaturelles : et au-
jourd'hui même que notre jurisprudence
est si fièrede ses lumières, le résultat de
beaucoup de procès civils et criminels
ne présente rien de plus avéré que l'é-
preuve de l'eau froide [voyez Charlkma-
gne). Noël Alexandre soutient qu'on a
attribué sans fondement à ce pape l'éta-
blissement de ce genre d'épreuve. Pape-
broch, dans le Pro/?y/euw, page 128,
est du même avis. Les épreuves de ce
genre furent procrites par le concile de
Worms en 821).
EUGÈNE III, religieux dé Cîleaux
sous saintBernard, ensuite abbé deSaint-
Anastase, fut élevé sur la chaire pontifi-
cale de Rome, en 1145. Il était de Pise
ets'appelait Bernard. Les Romains étaient
animés de l'esprit de révolte, lorsqu'il
monta sur le saint Siège. Us avaient ré-
tabli le sénat et élu nn patricc ; ils vou-
lurent qu'Eugène III appi'ouvàt tous ces
changemens. Le pape aima mieux sortir
de Rome. Il y rentra à la fin de l'année,
après avoir soumis les rebelles par les ar-
mes des Tiburtins , anciens ennemis des
Romains. Lé feu de la rébellion n'était
pas éteint : les séditieux le soufflaient de
tous côtés. Eugène , fatigué du séjour
orageux de Rome , se retira à Pise , et de
là à Paris en 1147. Il assembla un concile
à Reims l'année d'après , et un autre à
Trêves, oîi il permit à sainte Hildegarde, '
religieuse, d'écrire ses visions. De retour
en France, il vint à Clairvaux. Il y avait
été simple moine , il y parut en pape ;
mais en pape qui n'avait pas oublié son
ancien état : il portait sous les orneniens
pontificaux une tunique de laine. Sur la
fin de cette année il reprit le chemin d'I-
talie , et mourut à Tivoli en 1 153 , après
un pontificat de plus de huit ans, aussi
agité qu'il méritait peu de l'être. Les Ro-
i48 EUG
mains ne sentirent la grandeur de leur
perte, que quand on rapporta chez eux le
corps de ce magnanime et modéré pontife,
qu'ils arrosèrent de leurs larmes. C'est à
lui que saint Bernard adresse ses livres
de la Considération. Eugène le regarda
toujours comme son maître, et faisait le
plus grand cas de ses avis. De faux esprits
ont abusé de ces avis pour exagérer les
abus que Bernard reprenait, au lieu d'ad-
mirer et la sagesse personnelle du pon-
tife , et celle d'un gouvernement où les
conseils et les leçons, énoncés même quel-
quefois durement, sont reçus avec re-
connaissance et avec fruit. On a d'Eugène
des décrets , des épîtres , des constitu-
tions. On peut consulter, sur les actions
et les vertus de ce pape , V Histoire de
son pontificat , écrite avec beaucoup de
netteté par Don Jean de Lannes , biblio-
thécaire de l'abbaye de Qairvaux, Kancy,
1737, 1 vol. in-12.
EUGÈNE IV ( Gabriel Condolmhro ) ,
vénitien , d'une famille roturière, est une
preuve de ce que peut le talent , et sur-
tout celui des affaires. Il fui d'abord cha-
noine régulier de la congrégation de saint
Grégoire in alga, ensuite évêque de Sien-
ne , cardinal , enfin pape en 1431, après
Martin V , l'année même de l'ouverture
du concile de Bâle. Il y eut beaucoup de
mésintelligence entre le pontife et les
Pères de cette assemblée. Eugène lança
une bulle pour la dissoudre. Le concile
n'y répondit qu'en donnant un décret
pour établir son autorité , et en confir-
mant les deux décrets de lai* et de la 6*
session du concile de Constance, qui
soumettent le pape au concile : décret
donné en temps de schisme , où il exis-
tait des doutes sur le pape légitime, et où
l'unité n'a pu se rétablir que par la dépo-
sition de tous les coutendans. Le pontife
romain, après deux ans de délais , se ren-
dit enfin à Éàle. L'empereur Sigismond
avait été le lien de l'union d'Eugène avec
les Pères de Bâle ; cette union finit à la
mort de ce prince. Le pape assembla un
nouveau concile à Ferrare, après avoir
dissous une seconde fois celui de Bâle ,
qui ne laissa pas de se maintenir. La pre-
mière session se tint le 10 février 1438.
EUG
L'objet de cette assemblée était l'union
de l'église grecque avec la latine. Jean
Paléologue, empereur d'Orient , voulait
réconcilier les deux églises, parce qu'il
avait alors besoin des Occidentaux contre
les Turcs. Il arriva à Ferrare au mois de
mars , avec Joseph , patriarche de Con-
stantinople, 21 évêqueset une nombreuse
suite. La peste se mit dans cette ville ;
on transféra le concile à Florence. Après
avoir discuté avec les Grecs la procession
du Saint-Esprit, la primauté du pape, |
le purgatoire, la réuuion tant déairéefut i
terminée dans la 6* et dernière session ,
tenue le 6 juillet 1439. Le décret, dressé
en grec et en latin , fut souscrit de part
et d'autre. L'empereur et les prélats grecs
partirent fort contens de la générosité du
pape: Eugène leur donna beaucoup plus
qu'il n'avait promis par son traité. Il est
certain qu'il se prêta , avec autant de sa-
gesse que de zèle, à rétablir l'intelligence
entre l'église d'Orient et celle d'Occi-
dent ; mais malgré tous ces soins, l'union
ne fut pas durable. Les Grecs s'élevèrent
contre elle , dès que Paléologue leur en
eut montré le décret. Ils recommencè-
rent le schisme ; et depuis ce temps, il
n'a pas pu être éteint. Eugène fut mal
récompensé à Bâle des services qu'il ve-
nait de rendre à l'église latine. Le concile
qui était fort diminué , et où il ne se
trouvait plus guère de personnes distin-
guées , le déposa du pontificat , comme
« perturbateur de la paix , de l'union de
M l'Eglise ; simoniaque , parjure , incor-
» rigible, schismatique et hérétique. j>
Les rois de France et d'Angleterre, l'em-
pereur et les princes d'Allemagne, qui
jusque là avaient gardé une espèce de
neutralité, en furent indignés et s'en plai-
gnirent au concile. Le pape cassa ce dé-
cret, dans lequel il annule tous les actes
de l'assembléedeBâle. Le concile ou plu-
tôt l'assemblée qui continuait à s'appeler
ainsi , après avoir déposé Eugène, lui op-
posa Amédée VIII , duc de Savoie , qui
fut élu pape sous le 'nom de Félix V. L'E-
glise fut encore une fois déchirée par le
schisme. Eugène était|toujours à Florence,
renvoyant les foudres que le concile de
Bâle, devenu ua coucilabule, lançait
EUG
contre lui. En 1442, il transféra le con-
cile à Rome , et mourut 5 ans après en
1447 , lassé et détrompé de tout. Dans ses
derniers momens, il s'écria devant tout
le monde : « O Gabriel ! ( c'était son nom
M de baptême ) , ô Gabriel ! qu'il te serait
» bien plus avantageux de n'avoir jamais
« été ni pape , ni cardinal , ni évêque ;
M mais d'avoir fini tes jours comme tu les
M avais commencés, en suivant paisible-
» ment dans ton monastère les exercices
» de ta règle ! » « Ce fut toutefois , dit
» un célèbre historien, un des plus grands
u papes, quoiqu'un des moins heureux.
» Il eut toutes les qualités qui font révé-
» rer et chérir les grands ; l'élévation de
» l'esprit, la fermeté du courage, la no-
» blesse des goûts et des manières , la li-
» béralité et la bienfaisance , le don de
)) la parole, le talent des affaires , l'amour
« des lettres , sans être bien savant lui-
» même; et, ce qu'on ne peut trop ap-
» précier dans sa place et dans son siècle,
» la sagesse de ne point se mêler dans
» les différends temporels des princes. Sa
» vie fut édifiante et réglée ; il se montra
» extrêmement charitable envers lespau-
» vres, et très zélé pour la réduction des
u sectes qu'il eut le bonheur de réunir
» en grand nombre au centre de l'unité. »
Un historien ecclésiastique, plus abon-
dant que judicieux dans sa compilation ,
l'accuse d'une ambition odieuse, et d'a-
voir entretenu le schisme dans la seule
vue de maintenir son autorité. Mais ne
lui eût-on pas reproché avec plus de sens
et de justice, l'imprudence, la pusilla-
nimité, l'abandon du devoir, la trahison
même et la prostitution de l'épouse de
Jésus-Christ, si à l'ordre de huit évêques,
et d'un amas confus de clercs travestis
en successeurs des apôtres, il fût descendu
de la chaire apostolique, pour y élever
un intrus avéré ? Eugène IV était natu-
rellement si modeste, qu'en le voyant en
public , on l'eût pris , dit un écrivain du
temps, pour une vierge timide qui n'a
pas l'assurance de lever les yeux. Il eut
le chagrin de voir les progrès des Turcs,
et les suites funestes du conseil donné par
son légat àUladislas, de rompre son traité
avec Amurat II. Foy. ce mot, et Césarusi.
EUG 149-
EUGÈNE (S.), évêque de Carthage, fut
élevé sur ce siège, l'an 481 . H gouvernait
cette église en paix, lorsque le roi Hun-
neric ordonna que tous les évêques ca-
tholiques se trouvassent à Carthage, pour
y disputer avec les prélats ariens. La con-
férence se tint en 484 ; mais les ariens la
rompirent sous de mauvais prétextes;
Hunneric, leur partisan, persécuta leurs
adversaires sous des prétextes encore plus
mauvais. Il ordonna aux évêques de jurer
« que leur désir était qu'après sa mort ,
» son fils eût le trône. » La plupart des
évêques crurent qu'ils pouvaient faire ce
serment ; les autres le refusèrent. Hun-
neric les condamna tous également : les
premiers, comme réfractaires aux pré_
ceptes de l'Evangile qui défend de jurer
les autres, comme infidèles à leur prince.'
Il donna, peu de temps après, des ordres
pour rendre la persécution générale. Un
grand nombre de vierges consacrées à
Dieu, furent cruellement tourmentées ; il
y en eut plusieurs qui expirèrent sur le
chevalet. Les évêques, les prêtres, les
diacres, les laïques distingués qui furent
bannis, furent au nombre de 4,9G6. A
Carthage on fit souffrir le tourment des
coups de fouets et des coups de bâton à
tout le clergé , composé de plus de 500
personnes; après quoi on les bannit. Eu-
gène fut du nombre des exilés. Le peuple
suivit les évêques et les prêtres avec des
cierges à la main ; les mères portaient
leurs enfans dans leurs bras ; puis les dé-
posant aux pieds des confesseurs , elles
leur disaient, les yeux baignés de larmes :
« A qui nous laissez-vous, en courant au
» martyre ? Qui baptisera nos enfans? Qui
w nous donnera la pénitence ? Qui nous
» délivrera de nos péchés par le bienfait
» de la réconciliation ? Qui nous enterrera
» après la mort ? Qui offrira le divin sa-
» crifice avec les cérémonies ordinaires?
>» Que ne nous est-il permis d'aller avec
» vous ? w Qui nobis pœnilentiœ munus
collaturi sunt, et reconciliationis indul-
gentia obstrictos peccatorum vincuUs
soluturi ? A quibus divinis sacrificiis ri-
tus est exhibendus consuetus? Vobiscum.
et nos libeat pergere, si liceret ! (S. Vie.
Vit., 1. 2, p. 33). On voit qu'alors on ne
i5o EUG
songeait pas encore à faire des évcques
vonsUfulionnels, et que ni le peuple chré-
tien , ni même le tyran Hunncric ne re-
gardèrent une telle invention comme pos-
sible. Eugène fut rappelé sous le règne
de Gombaud, et exilé encore par Thrasa-
mond son successeur. On l'envoya dans
les Gaules. Eugène, retiré à Albi, cou-
ronna par une mort sainte , en 505, une
vie aussi glorieuse que traversée. On a de
lui une lettre dans Grégoire de Tours.
EUGEiNE, évêque de Tolède, gouverna
cette église pendant onze ans, et mourut
en 64a. Il possédait, assez bien pour son
temps, celle partie des mathématiques
qui sert aux calculs astronomiques. (Il
passait pour un savant astronome, il as-
sista aux 6% G«et 7« conciles de Tolède.)
EUGÈNE, évêque de Tolède, succes-
seur du précédent, est auteur de quelques
Traites de théologie, et de quelques o/>u.y-
ciiles en vers et en prose , publiés par le
Père Sirmoiid, en 161 U, in-8, avec les
poésies de Draconce. Le style d'Eugène
manque de politesse; mais les pensées
en sont justes , et les sentimens pieux. ( H
avait voulu fuir l'épiscopat : mais sa re-
traite fut découverte, et le roi Récésuinte
le força d'occuper le siège de Tolède. U
présida les 8% 9"= et 1 0« conciles de Tolède,
633-656. )
EUGENE, homme obscur, qui avait
commencé par enseigner la grammaire
et la rhétorique, fut salué empereur à
Vienne en Dauphiné, par le comte Arbo-
gaste , gaulois de naissance, après la mort
du jeune Valentinien, l'an 31)2. U se dé-
clara pour le paganisme, conduisit son
armée sur le Rhin, fit la paix avec les pe-
tits rois des Francs et des Allemands, et,
ayant passé les Alpes, s'empara de Milan.
Enfin ce ridicule usurpateur fut vaincu
et tué le 6 septembre 394 , par ordre de
l'empereur Théodose, qui le fit décapiter
sur le champ de bataille. Eugène avait
régné plutôt en esclave qu'en prince. Ar-
bogaste ne l'avait tiré de la place de maî-
tre du palais qu'il occupait, pour le pla-
cer sur le trône, que dans l'espérance de
régner sous son nom. En effet, Eugène lui
abandonna entièrement le soin du gou-
vernement et le commandement des tiou-
EUG
pesi, et ne fut qu'un fantôme d'empe-
reur.
EUGÈNE (François-Eugène de Savoie,
plus connu sous le nom de prince), gé-
néralissime des armées de l'empereur ,
naquit à Paris eu 1663 , d'Eugène-Mau-
rice, comte de Soissons, et d'Olympe
Mancini , nièce du cardinal Mazarin. 11
était arrière-petit-fils de Charles-Emma-
nuel , duc de Savoie. Il porta quelque
temps le petit collet sous le nom de Vab-
be'de Carignan, et le quitta ensuite pour
le service militaire. Cet homme, si dan-
gereux depuis à Louis XIV, ne parut pas
pouvoir l'être dans sa jeunesse. Le roi, le
jugeant peu propre aux fatigues de la
guerre, lui refusa un régiment. Le prince
fut piqué de ce refus; il protesta devant
plusieurs de ses amis, qu'il irait servir ail-
leurs, et qu'il ne reviendrait en France
que les armes à la main. En effet, Eugène
alla servir en Allemagne contre les Turcs
en qualité de volontaire, avec les princes
de Conti, en 1683. Les prodiges de valeur
qu'il fit dans cette campagne, lui méritè-
rent un régiment de dragons. L'empereur
se félicitait d'avoir acquis un tel homme.
Le prince Eugène avait toutes les qualités
propres à le faire devenir ce qu'il devint :
il joignait à une grande profondeur de
desseins, une vivacité prompte dans l'exé-
cution. Ses talens parurent avec beau-
coup plus d'éclat après la levée du siège
de Vienne. L'empereur l'employa en Hon-
grie sous les ordres de Charles V, duc de
Lorraine, et de Maximilien-Emmanuel ,
duc de Bavière. En 1691, il parut sur un
nouveau théâtre. Il délivra Coni, que le
marquis de Bulonde, subalterne du ma-
réchal de Catinat , tenait assiégé depuis
onze jours. U investit ensuite Carma-
gnole , et le prit après quinze jours de
tranchée. Sa valeur fut récompensée en
1697 par le commandement de l'armée
impériale. Le 1 1 septembre de cette an-
née, il remporta la victoire de Zcnta, fa-
meuse par la mort du grand-visir , de 17
bâchas, de plus de vingt mille Turcs, et
par la présence du grand-.seigneur. Celle
journée abaissa l'orgueil ottoman, et pro-
cura la paix de Carlowitz , oii les Turcs
reçurent la loi. Toute l'Europe applaudit
EUG
à celte victoire, eicepté les ennemis per-
sonnels d'Eugène. Il en avait plusieurs à
la cour de Vienne. Jaloux de la gloire qu'il
allait acquérir, ils lui avaient fait envoyer
nne défense formelle d'engager une ac-
tion générale. Ses succès augmentèrent
leur fureur; et il ne fut pas plus tôt arrivé
à Vienne qu'on le mit aux arrêts et qu'on
lui demanda son épée. « La voilà , dit ce
» héros, puisque l'empereur la demande ;
» elle est encore fumante du sang de ses
>) ennemis. Je consens de ne plus la re-
}> prendre, si je ne puis continuer à l'em-
» ployer pour son service. » Celte géné-
rosité touclia tellement Léopold, qu'il
donna à Eugène un écrit qui l'autorisait
à se conduire comme il le jugerait à pro-
pos, sans qu'il pût jamais être recherché.
La chrétienté fut tranquille et heureuse
après la paix de Carlowitz ; mais ce ne
fut que pour quelques années. La succes-
sion à la monarchie d'Espagne alluma
bientôt une nouvelle guerre. Eugène pé-
nétra en Italie par les gorges du Tirol ,
avec trente mille hommes , et la liberté
entière des'en servir comme ilvoudrait.il
amusa les généraux français par des fein-
tes, et força le 9 juillet 1701, le poste de
Carpi , après 5 heures d'un combat san-
glant. Ce succès rendit l'armée allemande
maîtresse du pays entre l'Âdige et l'Adda;
elle pénétra dans le Bressan, et le maré-
chal de Câlinât , qui commandait l'ar-
mée française, recula jusque derrière l'O-
glio. Le maréchal de Villeroi vint lui ôter
le bâton de commandement, et fut encore
moins heureux; il passa l'Oglio pour at-
taquer Chiari , dans le duché de Modène.
Le prince Eugène, retranché devant ce
poste rempli d'infanterie, battit le géné-
ral français , et le contraignit d'abandon-
ner presque tout le Mantouan. La cam-
pagne finit par la prise de La Mirandole,
le 22 décembre 1701. Au cœur de l'hiver
de l'année suivante , tandis que Villeroi
dormait tranquillement dans Crémone ,
Eugène pénètre dans cette ville par un
égoût , et le fait prisonnier. Son activité
et sa prudence, jointes à la négligence du
gouverneur, Uiiavaientdonné cette place;
le hasard cl la valeur des Français et des
Irlandais la lui olèrent. Il fut contraint de
fXG i5j
se retirer le soir du 1 *■■ février, après avoir
combattu tout le jour en héros. Le duc
de Vendôme , rais à la place de Villeroi,
se signala le 1 5 août à Luzzara. Cette ba-
taille, douteuse en elle-même, et pour
laquelle on chanta le Te Deitm à Vienne
et à Paris , parut se déclarer pour la
France, par la prise de Guastalla et de
quelques villes voisines. Le prince Eu-
gène quitta l'Italie pour passer en Alle-
magne ; il n'avait pas remporté de victoire
contre Vendôme; mais il laissait les trou-
pes en bon ordre. L'empereur se l'atta-
cha par de nouvelles grâces; il le nomma
président du conseil de guerre, et admi-
nistrateur de la caisse militaire. Le com-
mandement des armées d'Allemagne lui
fut confié. Eugène, Marlborough et Hcin-
sius, maîtres en quelque sorte de l'em-
pire , de l'Angleterre et de la Hollande ,
étroitement unis par l'esprit et par le
cœur, formèrent une espèce de triumvirat
fatal à la France et à l'Espagne. Les deux
premiers gagnèrent en 17 04 la bataille de
Hochstet , livrée assez mal à propos par
l'électeur de Bavière , secondé du maré-
chal de Tallard. Celle victoire fut décisive
et changea la face des affaires. Plus de la
moitié de l'armée française et bavaroise
fut détruite; le reste regagna avec peine
les bords du Rhin, abandonnant toutes les
villes de la Bavière et de la Souabe. De
retour en Italie, l'an 1705, Eugène com-
battit le duc de Vendôme à la journée de
Cassano, près de l'Adda : journée san-
glante, dont les deux partis s'attribuèrent
la gloire. L'armée française ayant assiégé
Turin l'année d'après, Eugène vola à son
secours. Il passe le Tanaro aux yeux du
duc d'Orléans, après avoir passé le Pô à la
vue de Vendôme. Il prend Correggio ,
Reggio ; il dérobe une marche aux Fran-
çais, les force dans leurs lignes , et leur
fait lever le siège. Après avoir délivré
Turin et battu les Français , il fit rentrer
le Milanais sous l'obéissance de l'empe-
reur , qui lui en donna le gouvernement.
La fortune continua de lui être favorable
en 1707. Les troupes françaises et espa-
gnoles évacuèrent la Lombardie ; le géné-
ral Daun s'empara du royaume de Naples.
Eugène pénétra peu de temps après en
1 5i EUG
Provence et en Dauphiné par le Col de
Tende. Cette invasion, heureuse au com-
mencement , finit comme toutes les inva-
sions faites dans ces provinces. On avait
mis le siège devant Toulon ; on fut oblii^é
de le lever. La Provence fut bientôt déli-
vrée, et le Dauphiné sans danger. La prise
de Suze fut tout le fruit de cette campa-
gne. Le prince Eugène, ayant passé en
17 08 des bords du Var aux bords de l'Es-
caut, mit en déroute les Français au san-
glant combat d'Oudenarde , le 1 1 juillet.
Ce n'était pas une grande bataille, dit un
auteur , mais ce fut pour les Français une
fatale retraite. Le vainqueur , maître du
terrain, mit le siège devant Lille , défen-
due par Bouflers. Celte ville , si bien for-
tifiée , se rendit après une défense de 4
mois. Il dut en partie son succès au dé-
couragement des généraux français : aus-
si , dans un âge plus avancé, il rejetait
les louanges qu'on lui donnait sur cette
entreprise, trop téméraire dans le projet,
pour être glorieuse dans l'exécution.
Cette conquête fut suivie de la batiiille
de Malplaquet , gagnée le 10 septembre
1709 , sur les maréchaux de Villars et de
Bouflers, qui lui disputèrent long-temps
Ja victoire. Marlborongh ayant été dis-
gracié , Eugène passa à Londres pour se-
conder sa faction ; mais ce voyage fut
inutile, il retourna seul achever la guerre.
C'était un nouvel aiguillon pour lui d'es-
pérer de nouvelles victoires , sans com-
pagnon qui en partageât l'honneur. Il
prit la ville du Quesnoy en 1712 , et
étendit dans le pays une armée d'environ
100,000 combattans. Quoique privé des
Anglais , il était supérieur de 20,000
hommes aux Français : il l'était surtout
par sa position , par l'abondance des ma-
gasins , et par 9 ans de victoire. La Fran-
ce et l'Espagne étaient dans l'alarme.
Une faute qu'il fit à Landrecie qu'il as-
siégait , les délivra de leurs inquiétudes.
Le dépôt des magasins , placés à Mar-
cbiennes , était trop éloigné ; le général
Albermale , posté à Denain , n'était pas
à portée d'être secouru assez tôt, s'il était
attaqué. Il le fut. Le maréchal deVillars,
après avoir donné le change au prince
Eugène , tomba sur Albermale , et rcm-
EUG
porta une victoire aussi aisée qae oom-
piète. Eugène arrivé trop tard ,. se relira,
après avoir fait d'inutiles efforts. Quel-
ques jours auparavant il avait voulu rap-
procher ses magasins; mais par une éco-
nomie mal entendue , les députés des
Hollandais s'y opposèrent. Cet événement
amena la paix. Eugène et Villars , héros
au champ de bataille , excellens négo-
ciateurs dans le cabinet, la conclurent
le 6 mai 1 7 1 4 , à Rastadt , et elle fut sui-
vie du traité de Baden en Argaw. La puis-
sance ottomane , qui aurait pu attaquer
l'Allemagne pendant la longue guerre de
1701 , attendit la conclusion totale de la
paix générale. Le grand-visir Ali parut
sur les frontières de l'empire avec 160,000
Turcs , Eugène le battit en 1716, à Pé-
terwaradin , et s'empara de Témeswar.
En 1717, il entreprit le siège de Belgra-
de ; les ennemis vinrent l'assiéger dans
son camp; et non contens de le bloquer,
ils avancèrent à lui par des approches et
des tranchées. Le prince Eugène , après
leur avoir laissé passer un ruisseau qui
les séparait de son camp , sortit de ses
retranchemens , les défit entièrement,
leur tua plus de 20,000 hommes , et s'em-
para de leurs canons et leurs bagages.
Belgrade n'ayant plus de secours à espé-
rer, se rendit au vainqueur. Une paix
avantageuse fut le fruit de ses victoires.
Couvert de gloire, il retourna à Vienne ,
où ses ennemis voulaient lui faire faire
son procès , pour avoir hasardé l'état
qu'il avait sauvé et dont il avait reculé
les frontières. La double élection faite en
Pologne ayant rallumé la guerre en 1733,
le prince Eugène eut le commandement
de l'armée sur le Rhin. Les Français pri-
rent Philisbourg à sa vue. Il n'y avait
plus dans l'armée impériale que l'ombre
du prince Eugène : il avait survécu à lui-
même, et il<;raignait d'exposer sa répu-
tation si solidement établie , au hasard
d'une dix-huitième bataille. Il mourut
subitement à Vienne en 17 36, regretté
de l'empereur et des soldats. Les mai
heurs de l'année suivante ne justifièrent
que trop ces regrets. L'empereur , qui
lui devait la gloire de son règne, disait
au milieu des pertes qui suivirent sa
EUG
mort : La fortune de l'état est-elle morte
avec ce héros ? Le prince Eugène fut le
plus beiireux général et le plus habile
ministre, que la maison d'xVutriche eût
eu depuis plusieurs siècles. Tl avait un
esprit plein de justesse et d'élévation,
les qualités et le courage nécessaires pour
triompher des capitaines les plus expé-
rimentés. S'il échoua quelquefois dans
ses entreprises , les circonstances qui les
lui firent manquer lui valurent de [nou-
veaux éloges. Il n'était pas toujours le
maître de faire ce qu'il voulait. Un de
ses amis lui demanda un jour , pendant
la longue guerre pour la succession
d'Espagne , la cause de la profonde rêve-
rie où il le voyait plongé. « Je fais ré-
w flexion , dit-il , que si Alexandre le
») Grand avait été obligé d'avoir l'appro-
» bation des députés de Hollande pour
•) exécuter ses projets , ses conquêtes
» n'auraient pas été à beaucoup près si
» rapides » Le courage n'était pas la
seule qualité du prince Eugène. Les trai-
tés de Rastadt et de Passarowitz ont au-
tant immortalisé son nom que ses victoi-
res. Il était le père des soldats et le mo-
dèle des ministres, philosophe, doux,
humain , bienfaisant , sans orgueil , sans
dédain , sans faste , et d'une générosité
peu commune. Son attachement à la re-
ligion était aussi solide que sincère. Il
portait avec lui , au milieu de ses opéra-
tions militaires, le petit, mais le précieux
livre de l Imitation de Je'sus-Christ , et
le lisait dans des momens de calme et de
réflexion. Quoique froid et réservé, il
était sensible aux charmes de l'amitié. Il
cultiva les lettres dans le cours de ses
victoires , et les protégea dans le cours
de son ministère. Tous les beaux arts
avaient des attraits pour lui. « De trois
» empereurs qu'il avait servi, le premier,
» Léopold, avait été , disait-il , son père,
» parce qu'il avait eu soin de sa fortune
» comme de celle de son propre fils ; le
» second, Joseph , son frère, parce qu'il
w l'avait aimé comme un frère ; le troisiè-
)> me Charles VI , son maître, parce qu'il
w l'avait récompensé en roi. « Ses Ba-
tailles ont été imprimées en deux vol.
in-fol. , auxquels on a joint un supplé-
V.
EUG
i53
ment. On peut aussi voir Yllistoire du
prince Eugène , imprimée à Vienne en
17 70, en 5 vol. in-12. Elle offre quelques
particularités curieuses, quoiqu'elle ne
soit très souvent qu'une compilation de
gazettes , et que l'auteur , calviniste ré-
fugié , donne quelquefois l'essor aux pré-
jugés de sa secte.
* EUGENE ou EuGKsios Bclcasis , sa-
vant prélat grec , né à Corfou en 1710,
professa la philosophie dans les collèges
les plus célèbres de sa nation , et visita
les universités d'Italie. En 1767, ayant
éprouvé quelques désagrémens à Con-
stantinople , il passa en Allemagne , et il
employa son séjour à Leipsick à se per-
fectionner dans les mathématiques sous
Segner, dont il traduisit les Elemens de
mathématiques en grec ancien. Il donna
aussi une édition des OEuvres de Joseph
de Brienne , et fit imprimer plusieurs de
ses ouvrages , particulièrement sa Logi-
que , dont il s'était répandu plusieurs co-
pies tronquées ou inexactes. Sa réputa-
tion étant parvenue jusqu'en Russie ,
l'impératrice Catherine II l'appela auprès
d'elle, et le nomma en 1776 à l'arche-
vêché de Slavinie et de Cherson, qui
venait d'être créé. Il résigna cette di-
gnité en 1779, en faveur de Nicéphore
Théotoki , et mourut à St.-Pétersbourg en
1 80G. ( Il possédait le latin, le grec , l'hé-
breu et presque toutes les langues de l'Eu-
rope. ) On a de lui , outre les ouvrages que
nous avons cités, 1° un Traité historique
de 1(1 dispute sur Vémanation du St.-Es-
prit , et un Examen de la logique de Ni-
céphore Blemmidès , insérés dans l'édi-
tion des OEuvres de Joseph de Bryenne.
2° Opinion des philosophes , ou Elemens
de philosophie naturelle , Vienne , 1 804 ,
in-4. 3" Une traduction des Questions
théologiques d' AdamZarnicevius contre
les sentimens de V église latine, avec des
notes , Moscou , 2 vol. in-fol. 4" Amuse-
mens théologiques , en grec moderne ,
Moscou, 2 vol. in-8. 5° Aperçu compa-
ratif des trois systèmes' d'astronomie ^
Venise, in-4, aussi en grec moderne. 6° Plu-
sieurs traductions d'ouvrages de mathé-
matiques , de géométrie , de métaphysi-
que , en grec moderne. 7° Une traduc-^
i54 EUL
tion en vers grecs héroïques de V Enéide
et des Ge'orgiques de p^irgile , St.-1'clers-
bourg, 4 vol. in-fol".
EUGIPPIUS , originaire de la Nori-
que , suivit sa nation lorsqu'Odoacre la
transféra en Italie l'an 488 ; il y fut abbé
de Lucullano , près de N'aples. Il est au-
teur 1° du Thésaurus ex S. Auguslino,
in-fo). , Bàle, 1642. 2° D'une Fie de S.
Augustin de Favinnes , insérée dans Bol-
landus. 3° D'une Fie de S. SeWrin, apô-
tre de la Norique , insérée dans les OEu-
vres de Marc Velser. La l'ègle qu'il avait
donnée à ses moines est perdue.
EULALIE ( Sainte ) naquit à Mérida ,
capitale de la Lusitanie en Espagne , fut
élevée dans la religion chrétienne , et fit
paraître dès son enfance une admirable
douceur de caractère, une modestie rare,
une tendre piété , et un grand amour
pour l'état de virginité. Elle n'avait que
douze ans , lorsque parurent les édits de
Dioclétien, par lesquels il était ordonné
à tous les chrétiens de sacrifier aux dieux.
Malgré sa jeunesse , elle regarda la publi-
cation de ces édits comme le signal du
combat , et se présenta d'abord au juge
pour lui reprocher l'impiété dont il se
rendait coupable, en voulant faire abju-
rer la seule vraie religion. Le juge nom-
mé Dacien la fit arrêter , et après avoir
employé inutilement tous les moyens de
séduction, il en vint aux menaces, fit
exposer à ses yeux les instrumcns destinés
à la tourmenter , et lui dit qu'elle ne su-
birait aucune torture , si elle vcAilait
■ prendre seulement du bout du doigt un
peu de sel et d'encens. Eulalie, pour
montrer qu'elle ne se laisserait pas sédui-
re , renversa l'idole et foula aux pieds le
gâteau destiné pour le sacrifice. Ce fut
alors que deux bourreaux, par ordre du
juge, lui déchirèrent les côtés avec des
crocs de fer , et lui découvrirent tous les
os. Elle appelait trophées de Jésus-Christ,
les plaies qu'on lui faisait. On lui appli-
qua ensuite des torches ardentes sur la
poitrine et sur les côtés. Elle souftVil cette
torture sans se plaindre, et elle n'ouvrit
la bouche que pour louer le Seigneur.
Le feu ayant pris à ses cheveux , elle fut
étouffée par la fumée et par la flamme.
EUL
Les chrétiens L'enterrèrent près du lieu
de son martyre , et on y bâtit depuis une
magnifique église. Prudence a célébré le
triomphe de cette sainte. — Il ne faut
pas la confondre avec une autre sainte
EiTi-ALiiî, viergeet martyre de Barcelonne,
sous l'empire de Dioclétien , dont le nom
est plus connu que le détail de ses ac-
tions et de ses souffrances.
EULALIUS , antipape, qu'une cabale
opposa au pape Boniface I en 4 1 8 , et que
l'empereur Ilonorius fit chasser comme
un intrus.
EULER. ( Léonard ) , professeur de
mathématiques, membre de^ plusieurs
académies , naquit en 1707 à Bâie , où il
s'appliqua avec succès à la philosophie
et à l'étude des langues orientales : ses
progrès dans les sciences lui acquirent
l'estime de Jean Bernouilli. Les fils de
cet habile géomètre l'invitèrent à se rendre
à St.-Pétersbourg, oîi ils avaient été ap-
pelés eux-mêmes en 1725. Euler y rem-
plit successivement les chaires de pro-
fesseur de physique et de mathématiques,
perfectionna le calcul intégral, inventa
le calcul des sinus, simplifia les opéra-
tions analytiques , et répandit un nou-
veau jour sur toutes les parties des scien-
ces mathématiques. En 1741 , il se rendit
à Berlin , contribua beaucoup à donner
du lustre à l'académie naissante , et re-
. tourna en 176G à St.-Pétersbourg, où il
perdit la vue, sans que cela l'empêchât
de travailler et d'enrichir le public de
ses productions. Il mourut le 7 septembre
1783. Peu de géomètres ont embrassé
tant d'objets à la fois, et les ont traités
avec plus de succès. On a de lui un grand
nombre d'ouvrages; 1° une Dissertation
sur la nature et la propagation du son,
en latin, Bâle , 1727 , in-4. 2° ....sur la
mâture des vaisseaux , que l'académie
de Paris honora de l'accessit en 1727.
3" Mechanica, sive motus scientia,
anahjtice exposita , St.-Pétersbourg,
1 736 , 2 vol. in-4. 4" Mémoire sur la na-
ture et les propriétés du feu , couronné
par l'académie de Paris en 1738. 6° Ten-
tamen novce Iheoriœ musicte , St.-Pé-i
tersbourg, 1739, in-4. Q'^ Mémoire sur le
flux et le reflux de la mer , couronne
EUL
parla même académie en 1740. Il y expli-
que l'action du soleil et de la lune sur la
mer , et appuie son explication de beau-
coup de géométrie et de calculs : ce qui
n'a point empêché plusieurs sa vans de la
regarder comme peu satisfaisante. C'est
une chose singulière que l'extrême va-
rrété et le peu de consistance des opi-
nions établies à ce sujet. Descartes qui
attribue ce phénomène à la pression de
l'air , Newton qui en fait honneur à l'at-
traction , sont au pied du mur quand on
objecte que les marées sont plus hautes
sous les zones tempéi'éesque sous la zone
lorridc ; et surtout quand on leur fait ob-
server que le baromètre ne monte ni ne
baisse lorsque la lune passe au méridien.
Aussi Galilée se moquait-il amèrement
de Kepler qui, avant Newton, avait rap-
porté ce phénomène à la lune ; mais par
un raisonnement plus étrange encore ,
il le fit dériver du mouvement de la terre.
Un physicien de ce siècle a eu recours à
la dilatation de l'air , produite par l'ac-
tion du soleil ; un autre à la fonte des
glaces polaires ; on a imaginé des gouf-
fres qui absorbaient et levomissaient les
eaux alternativement , etc. Le doute et
l'indécision d'un vieux poète sont peut-
être plus raisonnables que tout cela :
Quœrile , qups agitât mundi labor : at mihi sempcr
Tu , qusrcuinque nioves tara crebros , causa, mcatus ,
Ct tuperi Toluere , laie.
Lcr.is. Pam. , 1. i.
« Je ne sais , dit un philosophe , si l'on
j> saisit assez l'énergie de cet ut superi
» volucre. Quand on songe que depuis
» Lucain , on n'a rien dit de plus raison-
. » nable sur cet objet, que les physiciens
» de son temps ; quand on réfléchit d'un
j» autre côté que c'est un objet visible,
» palpable, immense, se renouvelant deux
» fois par jour, dans toute l'étendue des
>» deux hémisphères , observé de près par
" 500 raillions d'hommes , l'espace de 5
» à 6 mille ans ; on comprend ou du
» moins l'on peut comprendre alors toute
» la vérité de cet ut superi -voluere. »
3" Mcthodus invcniendi lineas curvas
jnnximi, minimive proprietnte gauden-
tes, Lausanne, 1744, in-4. %° Introdiictio
inanalysin. infinitorum, Lausanne, 1744,
EUL ï55
et Lyon , 1 796 , traduite en français avec
des notes, par Labey, 2 vol. in 4. 9'
Theoria motuum planetarum et come-
tarum, Berlin, 1744, in-4. 10" Opuscula
rmrii argumeniijUerVm, 174G, 3 vol. in-4.
1 \°Sciejitia navalis, seu tractât us de con-
struendis ne dirigendis navibus, Saint-
Pétersbourg ,1749,2 vol. in-4. 12° Theo-
ria motus lunœ , Berlin, 17'i3 , in-4. 13°
Disscrlatio de principio miiiimœ actio-
nis , una cum examine ohjcctionum Koe~
«/(//i, Berlin , 17 53, in-4. \¥> Institu-
tiones calcuU differentialis cum ejus usu
in analysi infinitorum ac docirinâ se-
rierum, 1755, in-4, 1787 et 1804, 2 vol.
in-4. 15° Constructio lenlium objecti-
varum , etc., Saint-Pétersbourg, 17G2,
in-4. 16° Meditationes de perturbatione
motus conietarum , ab attrnctionc pla-
netarum orta , St.-Pétersbourg, l'i62,
in-4. 17° Theoria motus corporum soli"
dorum seu rigidorum , 1765, in-4. 18°
Instilutiones calculi integralis , St.-Pé-
lersbourg, 1768, 3 vol. in-4, 1792, 4
vol. in-4. 19° Dioptrica, 1769, 3 vol.
in-i. 20" Opuscula analyiica, 1783, 2
vol. in-4. 21° Cinq Mémoires sur diffé-
rentes questions de mathématiques , dans
les Me'langes de Berlin ; c'est peut-être
ce qu'il y a de mieux dans cette collec-
tion. 22° Plusieurs Dissertations dans
les mémoires des académies de St.-Pé-
lersbourg et de Berlin. 23° Ele'mens rf'rtZ-
grè^re, en allemand. Cet ouvrage, qu'il
fit étant aveugle , a été traduit en français
et en russe ; il est écrit avec clarté et
méthode. La traduction française qui est
de M. Bernouilli , avec des notes par La-
grange et Garnier, a été réimprimée plu-
sieurs fois. La dernière édition est de
1 807 , 2 vol. in-8 , fig. 24° Lettres à une
princesse d' Allemagne , sur divers sujets
de physique et de philosophie , St.-Pé-
tersbourg, 1768-72, et Berne, 1778,3
vol. in-8. Il y attaque avec force le sys-
tème de Newton sur les couleurs, et d'au-
tres opinionsaccréditées. M. de Condorcet
en a donné une nouvelle édition en 1 787 ,
cil il s'est permis de faire plusieurs re-
tranchemens qui portent particulièrement
sur les endroits de ses lettres les plus
favorables à la religion , afin de laisser
i56
EUL
ignorer le cbristianiside d'Eulcr et sou-
iagcr les incrédules du poids de son au-
torilé qui les accable, parce que l'exemple
de cet illustre géomètre , joint à celui de
tant de savans du premier ordre , montre
avec évidence qu'on peut allier la con-
viction la plus profonde des vérités ré-
vélées, avec le génie le plus pénétrant
et les plus vastes connaissances. Quelle
honte pour des hommes si fiers de leurs
lumières, d'être ainsi réduits pour la dé-
fense de leur cause , à user de semblables
supercheries, aussi contraires à l'hon-
nêteté qu'à la bonne foi. Et combien ces
ruses indiquent , décèlent le peu de con-
fiance qu'ils ont dans leurs moyens ! Les
œuvres d'Euler ne sont pas les seules d'oii
ils aient essayé de faire disparaître toutes
les traces du christianisme ou de les af-
faiblir ; celles de Liunée , de Kewton et
de Bacon nouvellement travesti en incré-
dule , en offrent des exemples aussi scan-
daleux. Il n'y a pas même jusqu'à Pascal
que Condorcet n'ait eu l'audace de dé-
naturer en plus d'une manière , dans la
dernière édition qu'il a donnée de ses
Pensées (('oyez Condorcet). Les Lettres
à une princesse d'Allemagne ont été réim-
primées à Paris en 1812, 2 vol. iu-8, d'a-
près la première édition , avec des notes ,
parLabey. 25° Théorie complète de la con-
struction et de la manœuvre des vais-
seaux, St.-Pétersbourg, 17 73 , et Paris,
17 76, in-8 , fig. , retouchée pour le stile.
L'homme en lui était aussi estimable que
le savant. Bon époux , bon père , bon
ami , bon citoyen , il se montra constam-
ment fidèle à tous les rapports de la so-
ciété. Ennemi de l'injustice , s'il en voyait
commettre quelqu'une , il avait la fran-
chise de la censurer et le courage de l'at-
taquer sans avoir égard à la personne. 11
avait beaucoup de respect pour la religion
et remplissait avec soin les devoirs d'un
chrétien. Doux et honnête envers tout le
inonde, s'il a jamais senti de l'indignation,
ce n'a été qu'envers les ennemis du chris-
tianisme dont il a pris avec ardeur la
défense contre les objections des athées ,
dans un ouvrage qu'il publia à Berlin en
1747 , intitulé Essai d£ défense touchant
la révélation divine contre les esprits
EUM
forts. Cet essai , traduit en italien par
Nicolas Onérati , Naples, 17 88 , fait d'au-
tant plus d'honneur à ses principes, que
les prétendus esprits forts contre lesquels
il s'élève , dominaient alors , et donnaient
le ton dans la capitale de la Prusse, oii il
faisait sa résidence [voyez Embry). Euler
a laissé plusieurs fils qui marchent sur
les traces de leur père , entre autres J. H.
Euler l'aîné , mort à St.-Pétersbourg, le
6 septembre 1800, qui a remporté des
prix dans différentes académies , et pu-
blié un grand nombre de mémoires inté-
ressans sur l'astronomie , la physique, la
mécanique et l'optique, dans les collec-
tions académiques de Berlin , de Munich
et de Gotlingue. Voyez VEloge de Léo-
nard Euler, par Nicolas Fuss, son élève,
Berlin, 1784, in-4.
EU LOGE , pieux et savant patriarche
d'Alexandrie en 681 , mort en 607 , laissa
divers ouvrages contre les novatiens et
contre d'autres hérétiques de son temps.
Il fut uni d'une étroite amitié avec saint
Grégoire le Grand.
EULOGE DE CORDOUE (Saint),
prêtre, élu archevêque de Tolède, la même
année qu'il fut martyrisé par les Sarra-
sins en 869 , fortifia par ses écrits et par
ses discours ses frères dans la foi. Ceux
qui nous restent de lui sont 1° Memo-
riale sanctorum ; c'est une histoire de
quelques martyrs. 2° Libri très de mar-
tyribus Cordubcnsibus , et ^pologcticon
pro gestis eorumdem. 3° Exhortation
au martyre , et plusieurs lettres. Ces ou-
vrages se trouvent dans le 4* vol. de
VHispania illuslrata , et dans la Biblio-
thèque des Pères.
EU31E1\ES de Cardie, capitaine grec ,
l'un des plus dignes successeurs d'Alexan-
dre le Grand , était fils d'un voiturier. U
avait les qualités qui font le héros dans
la guerre , et l'homme estimable dans la
paix , et il dut son élévation à ces quali-
tés. Alexandre lui fit épouser la sœur de
Barsine , l'une de ses femmes. Après la
mort de ce conquérant , Eumènes acheva
la conquête de la Cappadoce et de la Pa-
phlagonie , et fut gouverneur de ces deux
provinces; mais Autigoue ne voulut point
l'y laisser établir. Se voyant sans res-
i
ELM
source, il se rendit auprès de Perdiccas,
qui le charjïea de porter la guerre sur les
bords de l'Hellcspont, contre les princes
ligués contre lui. Il défit Cratère et Néo-
ptolème, et tua celui-ci dans un combat
singulier. Cratère périt aussi dans le cours
de cette guerre , le vainqueur pleura le
vaincu, son ancien ami, lui rendit les
derniers devoirs , et fit porter ses cendres
en Macédoine à sa famille : action de gé-
nérosité , dont un historien chrétien se
charge avec plus de plaisir , que du dé-
tail fatigant de tant de meurtres inutiles.
Eumènes marcha ensuite contre Antipa-
ler , le vainquit et s'empara de plusieurs
provinces. Après la mort de l'ambitieux
Perdiccas, il eut à combattre Antigone.
On donna une bataille à Orcinium en
Cappadoce, l'an 320 avant J. C. Eumène
y fut vaincu par la trahison d'Appolo-
nide, commandant de la cavalerie. Le
traître fut pris et pendu sur-le-champ.
Eumènes, obligé d'errer et de fuir sans
cesse, congédia une partie de ses troupes,
et s'enferma dans le château de Nora sur
les frontières de la Cappadoce et de la
Lycaonie. Il y soutint un siège d'un an.
Après diflerens succès, mêlés de revers,
Antigone tailla en pièces l'arrière-garde
de son ennemi et prit le bagage de son
armée ; c'est ce qui décida la victoire en
fa faveur. Le vainqueur fit dire aux offi-
ciers et aux argyraspides , phalange de
Macédoniens , qu'il leur rendrait tout ce
qui leur appartenait , s'ils lui livraient
Eumènes. Ils eurent la lâcheté de recou-
vrer à ce prix leur bagage. L'illustre in-
fortuné fut mis à mort dans sa prison l'an
315 avant J. C. C'est l'ambition qui com-
mit ce meurtre. Antigone, autrefois le
meilleur amî d'Eumènes , l'estimait trop
pour ne pas le craindre. L'armée du vain-
cu étant sans chef fut bientôt dissipée.
Antigone se défiant des traîtres , les fit
exterminer.
EUMEÎNES I , roi de Pergame, succéda
à Philéthère son oncle l'an 2C4 avant
J. C. Il remporta une victoire sur Antio-
chus , fils de Séleucus , et augmenta ses
étals de plusieurs villes , qu'il prit sur les
rois de Syrie. Ce prince aimait les lettres
et encore plus le vin. Il périt d'un ex-
EUN iS-j
ces en ce genre , après 22 ans de règne.
EU3IENES II , neveu du précédent ,
monta sur le trône après Attale son père,
l'an 198 avant J. C. Les Romains, dont
il cultiva l'amitié, augmentèrent ses étals,
après leur victoire sur Antiochus le Grand.
( Eumène ayant appris l'alliance de Persée
et de Prusias, en avertit les Piomains.
Persée s'en vengea en payant des assas-
sins qui le laissèrent pour mort. Attale
son frère croyant qu'il avait cessé de vi-
vre, épousa sa femme et prit les rênes du
gouvernement. Eumènes se contenta de
lui dire quand il reparut dans son palais :
avant d'épouser la femme d'un autre ,
assurez-vous de sa mort. ) Il vainquit Pru-
sias et Antigone, et mourut l'an IfiO avant
J. C. Ce prince protégeait et cultivait les
lettres ; il augmenta considérablement la
fameuse bibliothèque de Pergame , qui
avait été fondée par ses prédécesseurs
sur le modèle de celle d'Alexandrie. Ses
frères Attale , Philéthère et Athénée lui
furent si attachés , qu'ils voulurent être
du nombre de ses gardes.
EUMÈNES, orateur, originaire d'Athè-
nes , professa la rhétorique avec beau-
coup d'éclat à Autun sa patrie. Il y ra-
mena le goût des arts et de l'éloquence.
Constance-Chlore et Constantin son fils
lui donnèrent des marques de leur es-
time. Il prononça l'an 309 \e panégyrique
de ces deux princes. Son discours le plus
célèbre est celui dans lequel il tâcha d'en-
gager Piiccius Varus , préfet de la Gaule
Lyonnaise , à rétablir les écoles publi-
ques, ruinées par les barbares qui avaient
inondé les Gaules. Eumènes ofl'rit de con-
tribuer à ce rétablissement; il cédait une
année des appoinleraens qu'il avait eu
qualité d'un des premiers secrétaires des
empereurs , ce qui faisait une somme
considérable. Ce rhéteur mourut vers le
milieu du 4* siècle. Le Père de La Baune,
jésuite, a recueilli ce qui nous reste de
ses harangues , dans ses Panegyrici ve-
ieres ad usum Delphini, 1G7G, in-4.
Son slile se sent un peu de la décadence
de la latinité , et il y a plus de lieux com-
muns que de pensées.
EUNAPE, natif de Sardes en Lydie,
sophiste , médecin et historien du 4*
i58 EUN
sièc'e (le l'ère chrétienne, sous les rè-
gnes de Valenlinien , de Valens et de
(iratifiii, écrivit V Histoire des Césars,
dont Suidas nous a conservé quelques
fragmens. l'.ous n'avons de lui que les
f^ies des philosophes de son temps,
écrites avec précision , et avec assez de
netteté et d'élégance. — A. Junius en a
donné une traduction latine avec le texte
grec, 159G, in-8.0n en trouve un extrait
dans les Ëxcerpla de le(/ationil}us,Tavis,
1648 , in-folio, qui font partie de la Bi-
zantine. Celte histoire des philosophes
est pleine d'injures, indignes de la saine
philosophie. Le but de l'auteur parait
être de relever l'idolâtrie et de rabaisser
le christianisme. Il exagère les vertus des
philosophes puïens , et atténue celles des
solitaires chrétiens (voyezZénoTn). Il in-
sulte même à leurs martyres ; et autant
qu'on peut en juger par cet ouvrage , Eu-
nape était un de ces hommes passionnés
qui couvrent leurs emportemcns du man-
teau de la sagesse , et qui ont sans cesse
le mot de philosophie dans la bouche ,
parce qu'ils sentent qu'ils ne l'ont point
dans le cœur.
EUJNOME, célèbre musicien de Lo-
cres en Italie. Comme il disputait le prix
de son art à un autre musicien , une ci-
gale vint , suivant la fable , se poser sur
son luth , pour suppléer à une corde qui
s'était rompue.
EUNOME , Eunomius , hérésiarque ,
natif de Cappadoce, d'abord maître d'é-
cole à Coustantinople, ensuite disciple
d'Aétius , parvint à l'évèché de Cysique
par la protection d'Eudoxe , patriarche
arien de Coustantinople. Ce prélat , en
l'ordonnant , lui conseilla de cacher les
erreurs qu'il avait sucées auprès d'Aétius.
Eunome ayant négligé cet avis, et s'étant
fait chef de parti, fut déposé parEudoxe
son ami , et exilé en divers endroits ; il
mourut dans sa patrie en 393. C'était un
arien outré. 11 soutenait que Jésus-Christ
n'était Dieu que de nom; qu'il ne s'était
pas uni substantiellement à l'humanité ,
mais seulement par sa vertu et par ses opé-
rations. Il rebaptisait ceux qui l'avaient
été dans la foi de la Trinité, et croyait
que la foi pouvait sauver sans les œuvres.
EUP
Ses impiétés étaient d'autant plus dan-
gereuses, qu'il réunissait à quelque talent
beaucoup d'artifice. Saint Grégoire de
Nice et saint Basile signalèrent leur élo-
quence et leur zèle contre ce sectaire
factieux. (Ses partisans s'appelaient EunO'
miens : ils furent proscrits par Gratien.)
EDNUS , esclave syrien , ne pouvant
supporter les malheurs de sa condition,
fit d'abord l'enthousiaste et l'inspiré de
la déesse de Syrie. Il se disait envoyé des
dieux , pour procurer la liberté aux es-
claves. Pour s'insinuer dans l'esprit des
peuples, il mettait dans sa bouche une
noix remplie de soufre eu poudre : il y
glissait adroitement le feu, et en souf-
flant il paraissait von\ir des flammes. Ce
prétendu prodige le fit regarder comme
un dieu. Deux mille esclaves, pressés
par leur misère, se joignirent à lui, et
il se vit à la tète de 50,000 hommes,
avec lesquels il défit les préteurs romains.
Perpenna , envoyé contre ces rebelles,
les réduisit par la faim, et fit mettre en
croix tous ceux qui tombèrent entre ses
mains.
EUPHÉMIE ( Sainte ) , vierge et mar-
tyre de Chalcédoine , au 4^ siècle , sous
Dioclétien , vers l'an 307 de Jésus-Christ.
Ses actes sont sans authenticité; mais
l'église grecque l'honore de la même
manière que les plus célèbres martyrs ,
et sa fête se célèbre dans presque tout
l'Orient. Il y avait anciennement à Cou-
stantinople quatre églises sous son invo-
cation. Celle qui portait son nom à Chal-
cédoine , était fort célèbre , et ce fut là
que se tint le quatrième concile général
qui proscrivit les erreurs d'Eutychès, en
451. On transporta depuis ses reliques
dans l'église de Sainte-Sophie à Constan-
tinople , où elles restèrent jusqu'au temps
de l'impie Constantin Copronyme , qui
voulut les jeter à la mer. On trouva le
moyen de les conserver, comme on l'ap-
prend de Constantin , évêque de Tio dans
la Paphlagonie , qui a fait un discours
sur ce sujet. Elles sont présentement à
Syllébrie, entre Coustantinople et An-
drinople. On en conserve une portion
dans l'église de la maison de Sorbonne
de Paris. Ou voyait à Rome du temps de
à
EUP
saint Grégoire ie Grand , une église qui
portait le nom de Sainte-Euphémie. Il
paraît que c'est la même que celle qui a
été réparée par le pape Urbain Mil , et
qui subsiste encore aujourd'hui. Une
ville de Caiabre qui portait son nom ,
fut engloutie par un tremblement de
terre, le 27 mars 1C38.
EUPHÉMJUS , patriarche de Constan-
tinople l'an 490 , illustre par sa science
et par ses vertus , efifaça des dyptiques
le nom de l'hérétique Monge, ouverte-
ment déclaré contre le concile de Chal-
cédoine. Il y rétablit celui du pape Félix
III , qui en avait été ôté. Ce pontife lui
refusa néanmoins sa communion , parce
qu'il conservait les noms de quelques
prélats hérétiques ou soupçonnés de
l'être. Euphémius s'obstina à y laisser
celui d'Acace , dont il ne voulait pas ou-
trager la mémoire. Le pape Gélase , suc-
cesseur de Félix, refusa aussi de commu-
niquer avec lui. L'empereur Anaslase
l'envoya en exil en 495. Ce patriarche
mourut à Ancyre en 515, victime de son
opiniâtreté.
* EUPHRAÎN'OR , célèbre sculpteur
et peintre de Corinthe, qui avait com-
posé plusieurs \o\umes sur la si/me'lrie et
sur les couleurs. Il florissait vers l'an 340
avant J. C. Quintilien le cite comme
ayant porté l'art de la peinture au der-
nier degré de perfection. Pline écrit qu'il
avait fait un grand nombre de belles
statues de bronze ou de marbre , parmi
lesquelles on distinguait un Paris que
les Grecs ne se lassaient pas d'admirer ;
une Minerve et une Lntone qui furent
transportées à Rome : on citait aussi un
t^ulcnin ; Alexandre et Philippe portés
sur des quadriges, etc. Pline le range
parmi les artistes athéniens.
EUPHRASIE ou Eupraxie (Sainte),
illustre solitaire et religieuse de la Tbé-
baïdc, fille d'Antigone , gouverneur de
Lycie, et parente de l'empereur Théodose
l'Ancien, naquit vers l'an 380, et mou-
rut à l'âge de 30 ans , dans l'un des mo-
nastères de la Thébaïde, où elle avait
donné des exemples admirables de vertu.
EL PHRATE , philosophe stoïcien sous
l'empereur Adrien , demanda à ce prince
EUP 1Ô9
la ridicule permission de s'ôtcr la vie,
qui n'était plus qu'un fardeau pour lui.
Adrien le lui permit, et le prétendu sage
se donna la mort l'an 1 1 S de Jésus-Christ.
EUPHROAE ( Saint ) , évoque de
Tours , petit-fils du B. Grégoire , évêque
de Langres, ne dut son élévation qu'à
ses vertus et à sa capacité. Sacré en 556,
il assista l'année suivante au concile de
Paris, oîi Ton arrêta de sages réglcmens
touchant les biens ecclésiastiques, les
ordinations des évêques, et les mariages
illégitimes. La ville de Tours ayant été
presque toute réduite en cendres par
une suite de la guerre civile qui s'était
allumée en France , ce saint évêque
donna des marques éclatantes de sa cha-
rité. Il pourvut à la subsistance des pau-
vres , trouva les moyens de procurer des
ressources aux habitans de la ville , et
s'opposa à l'établissement d'une taxe , à
laquelle le comte Gaison voulait assujétir
le peuple. En 5GC , Euphrone assembla
dans sa ville épiscopale un concile qui
est appelé le second de Tours , et dans
lequel on fit vingt-sept canons de disci-
pline. Ce prélat jouit de la plus haute
considération auprès des rois Clotaire I
et Charibert. On rapporte qu'étant en
route pour aller à la cour du dernier, il
revint sur ses pas , en disant que sott
voyage serait inutile , parce que le roi
était mort : ce qui se trouva vrai. Il fut
également estimé de Sigebert , roi d'Aus-
trasie. Ce fut lui que ce prince choisit
pour faire la translation de la vraie croix
dans le monastère de Sainte-Radegonde à
Poitiers. Ce saint évêque mourut le 4
août 57 3 , et eut pour successeur saint
Grégoire , son parent , qui est regardé
comme le père de l'histoire de France.
— Il ne faut pas le confondre avec saint
EuPHKOîiE , évoque d'Autun , qui eut beau-
coup de part à la lettre adressée à Tha-
lasse d'Angers , contenant divers régle-
mens sur les fêtes et le service divin , sur
les ecclésiastiques bigames , etc. , et sou-
scrivit au concile qui fut assemblé k Arles
en 475, à l'occasion du prêtre Lucide.
On ignore en quelle année il mourut. Ou
sait seulement qu'une sainteté éminente,
une prudence consomméç et un savoir
i6o EUR
profond le firent généralement respcctei".
EUl^OLIS , poète comique de l'an-
cienne comédie, sur Icqnel on a débité
beaucoup de fables, était d'Athènes, et
florissait vers l'an 440 avant J. C. Il
monta sur le théâtre dès l'âge de 1 7 ans,
et fut couronné plusieurs fois. On dit
qu'Alcibiade le fit mourir pour avoir fait
des vers contre lui ; d'autres prétendent
qu'il périt dans un naufrage. Il nous
reste de lui un ouvrage intitulé S ententiœ,
imprimé à Bâle en 1560, in-8.
EURIC. roijez EvARic.
EURIPIDE, poète tragique grec , né
à Salamine l'an 480 ou 486 avant J. C ,
fut disciple de Prodicus pour l'éloquence,
deSocrate pour la morale, et d'Anaxagore
pour la physique. Les chagrins que ce
dernier s'attira par ses rêveries philoso-
phiques, l'ayant dégoûté de la philoso-
phie , il s'adonna à la poésie dramatique.
Il s'enfermait dans une caverne pour
composer ses tragédies, qui firent l'ad-
miration de la Grèce et des pays étran-
gers. L'armée des Athéniens commandée
par Nicias, ayant été vaincue en Sicile,
la plupart des soldats rachetèrent leur
vie et leur liberté , en récitant des vers
du poète grec. Euripide florissait à
Athènes , dans le même temps que So-
phocle. L'émulation qui s'éleva entre lui
et ce redoutable concurrent, dégénéra en
inimitié. Aristophane l'immola à la risée
publique dans ses comédies. Euripide
médisait sans cesse des femmes et dans
la conversation et sur le théâtre : il se
maria pourtant deux fois , et deux fois il
répudia ses épouses. Cette conduite four-
nissait beaucoup à la plaisanterie du co-
mique grec. Euripide très sensible, et
ne pouvant soutenir plus long-temps les
railleries des auteurs et du public, quitta
Athènes, et se retira à la cour d'Arché-
laiis, roi de Macédoine. Ce prince, pro-
tecteur des gens de lettres, le fit son
premier ministre, si l'on en croit Solin.
Euripide fit, suivant quelques-uns, une
fin tragique. On prétend qu'il se prome-
nait dans un bois, et qu'il rêvait pro-
fondément suivant sa coutume , lorsqu'il
fut rencontré un peu à l'écart par les
çbiçns du prince, qui le mirent en
EUR
pièces. De quelque façon qu'il ait terminé
sa carrière, les chronologistes placent
sa mort l'an 407 avant J. C. Euripide
était un homme grave et sévère , malgré
la poésie. Il travaillait difficilement. Le
poète Alcestis, qui avait la facilité des
mauvais écrivains , se vantait qu'il avait
fait cent vers dans trois jours, taudis
qu'Euripide n'en avait fait que trois. « Il
w y a encore cette différence entre vos
» écrits et les miens , dit le poêle au ver-
» sificateur , que les vôtres dureront trois
« jours, et les miens perceront l'étendue
» des siècles. » De 84 tragédies qu'il
avait composées , il ne nous en reste
que 19 : He'cube, les Phéniciennes,
Médée, Alceste, Hyppolite , Iphigénie
en yiulidc , Andromaque , Electre , les
Suppliantes, les Bacchantes , Iphigénie
en Tauride, etc. « Son stile , dit Quin-
)) tilien , est plein de belles sentences,
» et soit qu'il fasse parler ou répliquer
» ses personnages , je le trouve compa-
)) rable à ce que nous avons de plus disert
» au barreau. » Mais à considérer ses
pièces, selon les règles du théâtre, il
n'y en a presque point qui soient à l'abri
des plus justes reproches. Duplicité d'ac-
tion , nœuds mal tissus, incidens sans
liaison ou mal préparés , dénoùmens
postiches , expositions froides et puériles;
enfin tous les défauts qui supposent l'i-
gnorance de l'art et qui détruisent l'imi-
tation de la nature , se trouvent fré-
quemment rassemblés dans ses tragédies. 1
Il semble quelquefois avoir jeté des scènes
au hasard , et n'avoir eu d'autre dessein
que d'assembler des dialogues philosophi-
ques ou politiques. Cependant son An-
dromaque fit une impression si vive sur
les Abdérites , qu'ils furent tous atteints
d'une espèce de folie, causée par le
trouble que la représentation de cette
pièce avait jeté dans leur imagination.
Les principales éditions d'Euripide sont
celle que l'on appelé l'édition Princeps,
publiée par Lascaris vers la fin du 1 5*
siècle et qui ne contient que 4 tragé-
dies : celles d'Aide , 1 503 , in-8 ; de Plan-
tin, en 1571 , in-16 ; de Commelin, en
1597, in-8 , sont remplies de fautes. Paul
Etienne en a donné une passable ca
1
EUR
1604 , in-4 ; on peut citer celle de Josué
Barnès, en 1694, in-folio; mais Wal-
kenaer et Reiske en ont montré l'insuf-
lisancc. Les meilleures sont celle de
Musgrave , en 17 78, 4 vol. in-4; et
celle de Leipsick, 1779-88 , 3 tomes
i»-4 , commencée par Morus , et achevée
par Beck. Voyez le Théâtrç des Grecs
du père Brumoy , qui a traduit les plus
lieaux morceaux d'Euripide. M. Prévôt
de Genève, de l'académie de Berlin , en
a donné en 1783 , une traduction fran-
çaise estimée , quoiqu'elle ne soit pas
toujours exacte, Paris, 4 vol. in-12.
Euripide a aussi été traduit en anglais
et en allemand. (Deux des pièces d'Euri-
pide, YHyppoUte et VIphige'nie en Au-
lide ont donné naissance à deux chefs-
d'œuvre, la Phèdre et ïlphigénie de
Racine.)
EURYCLES, fourbe de Lacédémone,
qui s'étant rendu à Jérusalem , et ayant
gagné les bonnes grâces du roi Hérode ,
et de ses enfans , découvrait aux uns les
secrets des autres , pour en avoir de l'ar-
gent. Il fut cause par ce moyen de la mort
d'Alexandre et d'Aristobule. Ce perfide
étant retourné dans son pqys , en fut
chassé par ses propres concitoyens.
EERYDICE, femme d'Amyntas, roi de
Macédoine , donna quatre enfans à son
époux : trois fils, Alexandre, Perdiccas et
Philippe, et une fille nommée Euryone.
La reine , amoureuse de son gendre, lui
promit l'empire et sa main ; mais ces dons
\'"unestes devaient être le prix de la mort
de son mari. Euryone préserva son père
de ce malheur en lui découvrant ces dé-
test'ables complots de sa mère. Amyntas
«utJa faiblesse de lui pardonner. Après sa
mort , Eurydice sacrifia à sa fureur ambi-
tieusft Alexandre, son fils aîné , qui avait
succéàéàson père. Perdiccas, son autre
fils , pincé sur le trône après Alexandre,
périt co mme lui. Les historiens ne nous
disent point si ce monstre fut puni de ses
exécrable.^ forfaits. Philippe , son 3* fils ,
père d'Ale.tandre leGrand,semiten garde
contre ses i^mbùches , et régna paisible-
ment.
EURYDICE , fille d' Amyntas , fut ma-
riée à son o\icle Aridce, ^Is naturel du
V.
EUS i6i
roi Philippe. Aridce monta sur le trône
de Macédoine après Alexandre le Con-
quérant ; mais la reine tint seule le scep-
tre. Cette femme ambitieuse, qui gou-
vernait despotiquement sous un roi titu-
laire , écrivit à Cassandre de se joindre à
elle contre Polyperchon , qui ramenait
Olympias de l'Epire avec son petit-fils
Alexandre, et Roxane, mère du jeune
roi. Cassandre vole à la tête de l'élite de
ses troupes en Macédoine ; mais lorsque
les deux armées furent en présence , les
Macédoniens abandonnèrent le parti d'Eu-
rydice, pour se ranger du côté du jeune
Alexandre qu'ils regardaient comme leur
prince légitime. Olympias fit percer de
flèches Aridée, et obligea sa femme
de s'ôter elle-même la vie, lui donnant
le choix du poison , du poignard ou du
cordeau. Elle s'étrangla , l'an 318 avant
J.C. ^
EUSEBE (Saint) , grec de naissance,
succéda au pape saint Marcel , le 20 mai
310; il sut maintenir la pieuse rigueur
de la pénitence canonique, surtout par
rapporta ceux qui étaient tombés pendant
la persécution. Son zèle lui attira plu-
sieurs ennemis, entre autres Héraclius,
homme turbulent, qui lui suscita toutes
sortes de contradictions, dont Eusèbe
triompha par sa patience. Ce saint pape
fut exilé en Sicile par le tyran Maxence,
et mourut le 26 septembre de l'année de
son élévation au pontificat.
EUSÈBE (Pamphile), évêque de Cé-
sarée en Palestine , naquit vers la fin de
l'empire de Gallien. On ne sait rien de
sa famille ; on ignore même le lieu de sa
naissance. Il s'unit de la plus étroite ami-
tié avec Pamphile , prêtre de Césarée.
Son ami ayant été martyrisé en 309, il
prit son nom pour éterniser sa mémoire
dans son cœur. Eusèbe s'était adonné de
bonne heure aux lettres sacrées et pro-
fanes. On disait de lui « qu'il savait tout
)) ce qui avait été écrit avant lui. » Il éta-
blit une école à Césarée , qui fut une pé-
pinière de savans. Son mérite le fit éle-
ver sur le siège de cette ville en 313.
L'arianisme infectait alors l'Eglise et l'em-
pire. Eusèbefutune des colonnes secrètes
de celte hérésie. Au concile de Nicéc , eu
1 (
i62 EUS
825 , 11 arait été placé à la droite de
Constantin. Il y anathématisa les erreurs
d'Arius , et proposa une formule de foi
orthodoxe ; mais il eut quelque peine à
souscrire au mol de consubstantiel que
les Pères ajoutèrent à sa formule. Il as-
sista en 331 avec les évêques ariens au
concile d'Antioche , où saint Eustathe fut
déposé. Les ariens le firent nommer à ce
siège ; mais il refusa , soit parce qu'il
condamnait ces sortes de changemens,
soit qu'il voulût augmenter son crédit
par celte preuve de désintéressement,
ce qui dans un évêque courtisan n'est
point sans vraisemblance. Quatre ans
après, il condamna saint Alhanase, de
concert avec les évêques des conciles de
Ccsarée et de Tyr. Le saint évèque refusa
de se trouver dans ces assemblées, parce
qu'il détestait les artifices d'Eusèbe et
qu'il redoutait son crédit. Les prélats as-
semblés à Jérusalem pour la dédicace de
l'église du St.-Sépulcre , le députèrent à
l'empereur Constantin , pour défendre le
jugement inique qu'ils avaient rendu con-
tre l'illustre défenseur de la divinité de
J. C. Cetévêquè courtisan surprit la re-
ligion du prince , et abusa de sa con-
fiance. Il noircit les innocens et blanchit
les coupables.il obtint le rappel de l'hé-
résiarque Arius et l'exil d'Alhanase. Il
connut le faible de Constantin, et fit
quelquefois , de ce fondateur du christia-
nisme dans l'empire , le persécuteur des
Trais chrétiens. Il prononça le panégy-
rique de ce prince , à l'occasion de la
réjouissance qu'il fit faire au commence-
ment de la 30* année de son empire, qui
fut la dernière de sa vie. On croit qu'il
survécut peu à ce prince ; il mourut vers
338. Eusèbe laissa beaucoup d'ouvrages
dignes de passer à la postérité qui en a
une partie. Les principaux sont 1° VHis-
ioire ecclésiastique, en 10 livres, depuis
l'avènement du Messie , jusqu'à la défaite
de Licinius. C'est le plus considérable de
tous ses écrits ; il lui a mérité le titre de
Père de l'histoire ecclésiastique. Il peut
tenir lieu des historiens originaux des
trois premiers siècles. Elle a été traduite
et continuée jusqu'à la mort du grand
Tbéodose, par Rufin d'Aquilée. Eusèbe
ECS
rejette les narrations fabuleuses avec plu*
de soin que n'ont fait saint Epiphane et
d'autres anciens. Son stile, sansagrémens
et sans beauté, est plutôt celui d'un com-
pilateur que d'un historien. Il avait plus
de finesse dans le caractère que dans l'es-
prit. Ce qu'on ne peut lui pardonner ,
c'est le coupable silence qu'il garde sur
l'arianisme dans son Histoire : nouvelle
preuve contre ceux qui forcent le sens de
ses mauvaises expressions , pour faire un
homme orthodoxe d'un intrigant, recon-
nu par toute l'antiquité pour arien d'es-
prit et de faction. De toutes les éditions
de l'Histoire ecclésiastique d'Eusèbe , la
plus correcte est celle de Henri de Va-
lois , dans la Collection des Historiens
ecclésiastiques grecs, 3 vol. in-fol., à
Paris en lGC9,puis en 1C77, avec une
version en latin qui a mérité l'estime du
public savant, ensuite augmentée et re-
vue à Cambridge, en 1720, 3 vol. in-
folio. Le président Cousin en a donné
une excellente traduction en français ,
4 vol. in-4 , ou 5 tomes en C vol. in-12.
2" La Fie de Constantin , en 4 livres.
C'est un panégyrique sous le titre d'his-
toire. Elle forme la 2* partie du tome
1"' de l'Histoire de l'Eglise , de Cousin ,
in-12, qui manque quelquefois ; et quand
elle y est, il y a 6 vol. 3° Une Chronique^
qui renfermait les événemens depuis le
commencement du monde, jusqu'à la
20« année du règne de Constantin. La
traduction qu'en fit saint Jérôme nous a
fait perdre une partie de l'original, d'au-
tant plus précieux, qu'Eusèbe entassait
dans tous ses ouvrages les passages des
auteurs les plus anciens. Joseph Scalig;er
a prétendu nous donner toute la Chroni-
que d'Eusèbe, dont il avait ramas.'.é les
fragmens épars dans différens écrivains.
On trouve en effet que son édition , im-
primée à Amsterdam , chez Janson , in-
folio , 1C58, est presque toute conforme
à la traduction de saint Jérôme. Cette
édition a perdu beaucoup de un valeur
par la découverte que l'on a faite récem-
ment d'une traduction complète, en ar-
ménien , de la Chronique d'Eusèbe, dont
on a donné deux éditions : la première
sous ce titre : Eusebii Pamphili chroni-
EUS
corum canonum libriduo. Milan, 1818,
grand in-4 ; production importante qui
a devancé celle du texte arménien ; la
deuxième , intitulée Eusehii Pampliili ,
Cœsariensis episcopi, chronicon bipnr-
iitum, etc., Venise, 1818, 2 xol. grand
in-4. 4° Les livres de la Préparation et
de la Démonstration évangéliquc. C'est
le traité le plus savant que l'antiquité
nous fournisse , pour démontrer la vérité
de la religion chrétienne et la fausseté
du paganisme. De 20 livres dont la Dé-
monstration évangélique était composée,
il ne nous en reste que 10. Le com-
mencement et la fin du 1*'' livre et du
lO*", manquent dans toutes les éditions;
mais Fabricius les publia eu 1725 dans
sa Bibliothèque des auteurs qui traitent
de la religion. La meilleure édition de la
Préparation et de la Démonstration , est
celle de Paris, 1628 , en 2 vol. in-folio,
avec une version nouvelle des 15 livres
de la Préparation , par le jésuite Vigier,
et celle de Donat , jointe aux livres de la
Démonstration. 5" Commentaires sur les
Psaumes et sur Isaie , publiés par don
de Montfaucon , dans les 2 premiers tom.
de la collection des Pères grecs, Paris,
170C , in-folio. Il n'y a, du Commentaire
sur les psaumes , que ce que le savant
éditeur en a pu trouver dans les îinciens
manuscrits, c'est-à-dire, ce qu'Eusèbe a
fait sur les 1 1 9 premiers psaumes. On
trouvera dans cet ouvrage des preuves
de son ajianisme. Le Père Montfaucon,
contre la coutume des éditeurs presque
tous enthousiastes de leur original , a
employé plusieurs autorités pour prouver
qu'il était arien, et ses autorités sont con-
vaincantes. G" Des opuscules qui portent
son nom, et que le Père Sirmond fit impri-
mer en latin, l'an 1643, Paris, in-8. On
peut voir les passages des anciens pour et
contre Eusèbe , recueillis fort exactement
par Valois, à la tète de l'édition de son
Histoire ecclésiastique. On a aussi d'Eu-
sèbe : Onomasticon urbium etlocorumsa-
crœ Scripturœ , imprimé avec les notes
de Bonfrérius et de Le Clerc à Amsterdam,
in-folio. (Voyez l'analyse des ouvrages
d'Eusèbe dans la Bibliothèque choisie des
Pères de l'Eglise par M. l'abbé Guillon ).
EUS i63
EUSÈBE (Saint), évêque de Verceil
au 4* siècle, mérita ce siège par sa scien-
ce, des mœurs douces et une piété tendre.
l\ signala sou zèle pour la foi au concile
de Milan en 355. Il proposa d'abord dé-
faire souscrire tous les évêques à celui de
Kicée , avant que de traiter aucune af-
faire; mais l'empereur Constance se ren-
dit maître de l'assemblée. 11 fit souscrire
]a plupart des évêques à la condamnation
d'Athanase , par menaces ou par surprise.
Ceux qui eurent la force de résister , fu-
rent bannis ; Eusèbe fut de ce nombre.
Après la mort de l'empereur , ce saint
homme retourna à son église. Il parcou-
rut la Grèce, l'illyrie, l'Italie; et par-
tout il opposa une digue aux ravages de
l'arianisme. Il finit saintement ses jours
en 373. Saint Ambroisc (ou l'auteur d'un
sermon qui lui est attribué) dit que c'est
le premier qui, eu Occident, joignit
la vie monastique à la vie cléricale, ren-
forçant ainsi les vertus sacerdotales par
le mépris des possessions terrestres : Pri-
mus in Occidentis partibus in eadem ec-
clesia eosdem monachos instHuit esse
quos clcricos , ut esset in ipsis viris et
contemptus rerum et accuratio levita-
rum. Voyez Jonadab, Norbert (S.). Jean-
André Irici , docteur du collège Ambro-
sicn, fit imprimer à Milan en 17 48, en 2
vol. in-4, le livre des Evangiles, écrit
de la propre main d'Eusèbe , qu'on avait
trouvé parmi les manuscrits de l'église
de Verceil. 11 a enrichi cette édition d'une
préface, de notes et d'une concordance
avec les autres manuscrits des Evangiles
et les versions des saints Pères. On trouve
deux de ses lettres dans la bibliothèque
des Pères. H avait traduit en latin le Com-
mentaire sur les psaumes d'Eusèbe de
Césarée ; mais cette traduction est perdue.
EUSÈBE ( Saint ), évcque de Samosate,
illustre par sa foi et par son amour pour
l'église. Il fut d'abord lié avec les ariens.
Le siège d'Antioche étant venu à vaquer,
ils convinrent avec les orthodoxes de
choisir Mélècepour le remplir. Ils confiè-
rent à Eusèbe le décret de cette élection ;
mais saint Mélèce s'étant aussitôt déclaré
pour la foi "catholique , les ariens , ap-
puyés par l'empereur Valens , résolurent
i64 EUS
de le déposer. Eusèbe , averti de leur per-
nicieux dessein , se retira dans son dio-
cèse avec l'acte qu'on lui avait confié.
On fit courir après lui, et l'envoyé de
l'empereur le menaça de lui faire couper
la main droite , s'il ne rendait l'acte d'é-
lection ; mais Eusèbe présentant ses deux
mains, dit avec fermeté : « qu'il se les
3> laisserait couper , plutôt que de se des-
■u saisir de cet acte , à moins que ce ne
» fût en présence de tous ceux qui le lui
« avaient mis en dépôt. » Ce digne évê-
que souscrivit à la foi de Nicée dans le
concile d'Antioche en 353, et se trouva
à Césarée en Cappadoce l'an 371 , pour
élire saint Basile, évêque de cette ville,
à la prière de saint Grégoire de Nazianze
le Père. La fermeté avec laquelle il s'op-
posa aux ariens , lui attira une foule de
traverses. Valens l'exila en 373. Durant
cet exil , il se déguisait en soldat pour
aller consoler les orthodoxes persécutés,
fortifiant les faibles, et animant les forts.
Après la mort de son persécuteur, Eu-
sèbe se trouva au concile d'Antioche en
378 , et y parla en digne défenseur de la
divinité de Jésus-Christ. 11 parcourut en-
suite diverses églises d'Orient. Ayant
voulu mettre Maris en possession de l'é-
vêché de Dolique en Syrie , une femme
arienne lui jeta sur la tête une tuile qui
le blessa à mort. Le digne prélat, avant
.i'expirer , fit promettre à ceux qui étaient
présens , de ne point poursuivre cette
femme en justice. On la poursuivit néan-
moins ; mais les catholiques, pour rem-
plir la dernière volonté de ce saint évê-
que , demandèrent et obtinrent sa grâce.
EUSÈBE , évêque de Béryte , puis de
Nicomédie , enfin de Constantinople , fa-
vorisa le parti d'Arius , dont il avait em-
brassé les erreurs. Il les abjura au concile
de Nicée ; mais cette abjuration forcée ne
l'empêcha pas de convoquer quelque
temps après un concile en Bithynie, où
Arius fut rétabli avec pompe. Les trou-
bles qu'il excitait dans l'église , forcèrent
Constantin à l'envoyer en exil. Il en fut
rappelé , et peignit Arius auprès de l'em-
pereur comme le plus orthodoxe des
hommes , et Athanase comme le plus re-
inu.-int. Il l'accusa d'avoir Itiis MQ tribut
EUS
«ur les Egyptiens, d'avoir favorisé la ré-
bellion d'un certain Philumène ; et pour
accabler plus sûrement le saint prélat , il
assembla des conciles, le fit déposer,
exiler, et fit recevoir Arius. Il se fit élire
par force évêque de Constantinople , l'an
338 , après l'injuste déposition de Paul ,
dont il ambitionnait la place. Eusèbe de
Césarée répandait sourdement l'arianis-
nie ; Eusèbe de Nicomédie en tirait vanité.
Il fut chef de parti , et voulut l'être. Ses
sectateurs furent nommés euse'biens. Quel-
ques mois avant sa mort, en 341 , il fit
admettre dans un concile d'Antioche les
impiétés ariennes comme des points de
foi. Eusèbe de Césarée a voulu le faire
passer pour un saint : il loue jusqu'à ses
défauts , mais ce sont les éloges d'un
homme de parti , qui veut canoniser son
chef.
EUSÈBE-EMISSENE , ainsi nommé ,
parce qu'il était évêque d'Emèse , fut
disciple d'Eusèbe de Césarée , et mourut
vers 359. Il était natif d'Edesse en Méso-
potamie. Saint Jérôme lui attribue plu-
sieurs ouvrages contre les juifs, les gen-
tils , les novatiens , et des homélies sur
les Evangiles ; mais il ne nous en reste
rien. On convient aujourd'hui que la plu-
part des homélies, publiées sous son
nom , ont été composées par des évêques
gaulois dans les premiers temps de Pé-
glise gallicane. On en attribue plusieurs
à saint Patient, évêque de Lyon. Eusèbe
était du parti d'Arius.
EUSEBE , avocat à Constantinople ,
s'éleva , n'étant que simple laïque, contre
l'hérésie de Nestorius , et fit une protes-
tation au nom des catholiques, en 429.
Devenu évêque de Dorylée , il se signala
avec le même zèle contre les erreurs d'Eu-
tychès. Cet hérétique était son ami ; il
tâcha de le ramener par la douceur ; mais
le trouvant plus obstiné , il se rendit son
accusateur dans un concile de Constan-
tinople de l'an 448. Ces sectaires s'en
vengèrent en le faisant déposer dans cette
assemblée, qui fut si bien nommée le
Brigandage d'Bphèse. Eusèbe se trouva
encore au concile général de Chalcédoine
en 451 , oîi il poursuivit la condamnation
de ce qui avait été fait à Ephèse ; il y re-
EUS
çut une pleine justification , et mourut
peu de temps après.
EUSÈBE de Strip,onie , riche seigneur
hongrois , qui après avoir distribué ses
biens aux pauvres, se retira dans les fo-
rêts. Plusieurs personnes s'étant jointes
à lui, il fonda le monastère de Pisilie
sous le titre de St. -Paul, premier ermite ,
mais sous la règle des chanoines réguliers
de St.-.\ugustin. Les ermites de St.-
Paul , qui ont subsisté en Hongrie jus-
qu'au règne de Joseph II , lui devaient
leur fondation. Eusèbe mourut dans le
monastère de Pisilie le 20 janvier 1270.
Sa piété et ses autres vertus lui ont acquis
le titre de bienheureux.
EUSEBIA (Aurélia) , femme de l'em-
pereur Constance dans le 4* siècle, était
née à Thessalonique d'un homme consu-
laire. Elle avait de la beauté, des grâces,
des vertus , de l'esprit et du goût pour
les arts. Ces qualités furent ternies par
son attachement à l'arianisme. Le dépit
qu'elle eut de n'avoir point d'enfans , la
porta à faire donner une potion à Hélène ,
sœur de Constance et femme de Julien ,
afin de la rendre stérile. On dit même
qu'elle corrompit la sage-femme de cette
princesse, et que, dès qu'elle fut accou-
chée, cette malheureuse fit périr le fruit.
Eusebia mourut vers 361. Ce fut elle qui
engagea Constance à donner à Julien le
titre de César. Ce prince fit son panégy-
rique, et nous l'avons parmi ses ouvra-
ges.
' EUSTACE ( John-Chetwôde) , prêtre
catholique romain, issu d'une ancienne
famille du comté de Lancastre, présida à
l'éducation de plusieurs jeunes anglais
qu'il accompagna dans leurs voyages : il
parcourut avec eux l'Italie , la Suisse et
la France. Il a publié quelques ouvrages
parmi lesquels on remarque : Voyage
classique en Italie, 1813, 2 vol. in-4 ,
plusieurs fois réimprimé.
EUSTACHE DE SAINT -PIERRE.
Voyez Saitjt-Pierbe.
EUSTACHE (Saint), martyr, qu'on
croit avoir souffert la mort avec sa femme
et ses enfans, sous l'empire de Trajan,
Les actes de son martyr , tels que nous
les avons , sont supposés ou considéra-
EUS i65
blement altérés. Le Père Rircher a fait de
vains efforts pour en établir l'authenti-
cité ; ce qui ne prouve rien du tout ,
contre le culte qu'on lui rend. Voyez
Catherine (sainte), vierge d'Alexandrie ;
RocH (saint) , etc.
EUSTACHE (Barlhélemi ) , professeur
d'anatomie et de médecine à Rome , vers
l'an lô-SO, laissa des planches anatomi-
ques, publiées à Rome en 1728 , in-fol.
Elles sont très propres à faire connaître
la structure du corps humain. On les
trouve aussi dans le Theatrum anatomi-
cum de Manget. Albin les a publiées de
nouveau à Leyde, 1744 , in-fol. avec des
explications latines. Nous avons encore
d'Eustache : 1° Opuscula ,\ie\i\. , 1726,
in-8. 2° Erotiani collectio vocum quœ
sunt apud Hippocratem , Venise , 1 566 ,
in-4.
EUSTATHE (Saint), né à Side en
Pamphylie , d'abord évêque de Bcrée ,
ensuite d'Antioche en 323. Il se distingua
au concile de Nicée par son zèle et par
son éloquence. Les ariens , excités par
Eusèbe de Nicomédie , prélat intrigant et
vindicatif, conspirèrent sa perte. On su-
borna une femme publique , qui soutint
avec serment au saint homme qti'elle
avait eu un enfant de lui. Sur celte fausse
accusation , il fiit déposé et exilé par
Constance , et selon quelques-uns par
Constantin. Il mourut dans son exil à Phi-
lippes en Macédoine , vers 337 , et fut en-
terré à Trajanopolis. Eustathe fut un des
premiers qui combattirent l'arianisme ; il
le fit avec autant de clarté que de force.
Les anciens vantent beaucoup ses ouvra-
ges ; nous ne les avons plus , et c'est une
véritable perte , s'il est vrai que le stile
en fut aussi pur , les pensées aussi nobles,
les expressions aussi élégantes que Sozo-
mène le dit. On lui attribue un Traité
sur la Pythonisse , mis au jour en 1629 ,
in-4, parle savant Allatius, avec un autre
Traité sur V ouvrage des six jours , ou
Hexameron, qu'il donne aussi h Eustathe.
Ce dernier écrit qu'on croit être d'un au-
teur plus récent, parut à Lyon en 1624 ,
in-4. On le trouve aussi dans la Biblio-
thèque des Pères.
EUSTATHE, évêqu e de Sébasle , joua
i66 EUS
un rôle singulier dans l'église au 4* siè-
cle. C'était un fourbe qui savait prendre
toutes sortes de formes selon ses intérêts.
Tantôt arien pur , tantôt semi-ai-ien ; or-
thodoxe un jour , le lendemain macédo-
nien , il faisait toutes les professions de
foi que les circonstances exigeaient. Au
concile d'Ancyre , il condamne la doc-
trine d'Actius son disciple , il est déposé
au concile de 3Iélitine , se trouve avec les
semi-ariens à Séleucie. Député par ceux-
cien Occident l'an 3G5, il en imposa au
pape Libère qui l'admit à sa communion :
il trompa de même les Pères du concile
de Thyane qui le rétablirent sur son siège ;
mais il n'y fut pas plutôt remonté , qu'il
tâcha de communiquer avec les ariens
qui ne voulurent point le recevoir ; il
tinit par se rendre avec Eunomius, chef
des ennemis de la divinité du Saint-Es-
prit, et mourut vers l'an 370. Quelques
auteurs ont cru qu'il était cet Eustathe
qui condamnait le mariage et la posses-
^iion des biens temporels, et dont les er-
reurs furent proscrites au concile de
Gangre ; mais Baronius et presque tous
les critiques modernes sont d'un avis
contraire , et croient avec plus de vrai-
semblance , que cet hérésiarque était un
moine d'Arménie.
EUSTATHE, évêque de Thessaloni-
que dans le 12* siècle, était un habile
grammairien. Il laissa des Commentaires
sur Homère et sur Denys le Géographe.
Son travail sur le poète grec est fort
étendu et très estimable ; il a saisi la force
et l'énergie de son original, et la fait
sentir à ses lecteurs. Outre les notes , on
trouve dans son ouvrage des disserta-
iions historiques et philosophiques écri-
tes avec beaucoup de sagacité. On lui
attribue aussi , mais sans aucun fonde-
ment , le roman (ÏTsmène et Ismc'nie ,
Paris, 1618 , in-8 , traduit en français,
Paris, 1743 , in-8 , fig. Colletet en avait
donné une en 1636, in-8. La meilleure
édition des commentaires d'Eustalhe sur
Homère, est celle de Rome, 1542 à 1550,
en grec, 4 vol. in-fol. Celle de Froben ,
1559 et 1560, 2 vol. in fol. , est moins
estimée. 11 en a paru à Florence ( en
1730, 32 et 35 ) 3 vol. d'une nouvelle
EUS
édition , avec les notes et les ttaduclions
d'Alex. Politi et d'Ant. Marie Salvini, qui
n'est pas achevée. A l'égard des commen-
taires sur Denys , ils ont été souvent
réimprimés depuis 1547, qu'ils furent
publiés par Robert Etienne avec le seul
texte.
EUSTOCHniM ou Eustoghik ( Sain-
te), de la famille des Scipion et des Emile,
illustre par sa piété et par la connais-
sance des langues , fut disciple de saint
Jérôme. Elle suivit son maître en Orient,
et se renferma ensuite avec Sle.-Paule ,
sa mère , dans un monastère de Bethléem,
dont elle fut supérieure. Elle savait l'hé-
breu, le grec, et employait la plus grande-
partie de son temps à méditer les saintes
Ecritures. Ellemourut en 419. Vainement
les novateurs ont voulu se servir de son
exemple , pour mettre la Bible entre les
mains de tout le monde pour eu faire la
lecture habituelle des femmes et des.
idiots. « Il est vrai , ditFénélon dans son
« excellent discours sur la lecture dcl'E-
» criture sainte en langue vulgaire, ({\ïq
» les livres de l'Ecriture sont les mêmes y
» mais tout le reste n'est plus au même
» état; les hommes qui portent le nom
» de chrétiens , n'ont plus la même sim-
» plicité , la même docilité , la même pré-
» paration d'esprit et de cœur. Il fautre-
» garder la plupart de nos fidèles comme
» des gens qui ne sont chrétiens que par
» leur baptême , reçu dans leur enfance,
« sans connaissance ni engagement vo-
» lontaire; ils n'osent en rétracter les
j) promesses , de peur que leur impiété
« ne leur attire l'horreur du public. Ils
» sont même trop inappliqués et trop in-
» différens sur la religion , pour vouloir
» se donner la peine de la contredire. Ils
« seraient néanmoins fort aises de trou*
» ver sans peine , sous leur main , dans
» les livres qu'on nomme divins , de quoi
») secouer le joug et flatter leurs passions ;
)) à peine peut-on regarder de tels
» hommes comme des catéchumènes. Les
« catéchumènes qui se préparaient au-
» trefois au martyre en même temps qu'au
» baptême , étaient infiniment supérieurs
j) à ces chrétiens qui n'en portent le nom
» que pour le profaner.... Eu notre temps
EUS
M chacun est son casuiste , chacun est
» son docteur , chacun décide , chacun
« prend parti pour les novateurs , sous
» de beaux prétextes, contre l'autorité de
Il l'Eglise; on chicane sur les paroles,
» sans lesquelles les sens ne sont plus que
» de vains t'untômes : les critiques sont
» au comble de la témérité ; ils dessèchent
n le cœur ; ils élèvent les esprits au-des-
« sus de leur portée ; ils apprennent à
») mépriser Ja piété simple et intérieure.
» Ils ne tendent qu'à faire des philoso-
» phes sur le christianisme et non pas
« des chrétiens. Leur piété est plutôt une
» étude sèche et présomptueuse , qu'une
» vie de recueillement et d'humilité. Je
t> croirais que ces hommes renverseraient
i> bientôt l'Eglise, si les promesses ne me
V rassuraient pas. Les voilà arrivés ces
M temps où les hommes ne pourront plus
« souffrir la saine doctrine , et où ils au-
V ront une démangeaison d'oreilles pour
" écouler les novateurs. J'en conclus
» qu'il serait très dangereux dans de telles
» circonstances , de livrer le texte sacré
» indifféremment à la téméraire critique
« de tous les peuples. Il faut songer à ré-
» tablir l'autorité douce et paternelle :
>> il faut instruire les chrétiens sur l'E-
» criture , avant que de la leur faire lire :
» il faut les y préparer peu à peu , en
y> sorte que quand ils la liront , ils soient
» déjà accoutumés à l'entendre, et soient
» remplis de son esprit avant que d'en
» voir la lettre -. il ne faut en permettre
» la lecture qu'aux âmes simples, doci-
« les , humbles , qui y chercheront non
»> à disputer , non à décider ou à critiquer,
n mais à se nourrir en silence. Enfin , il
» ne faut donner l'Ecriture qu'à ceux qui
>j ne la recevant que des mains de l'E-
« glise, ne veulent y chercher que les sens
» de l'Eglise même. » Voyez Algasie ,
Arodel ( Thomas ) , Harney , Prodicus.
EUSTRATE , archevêque de Nicée au
1 2* siècle , soutint avec force le senti-
ment des Grecs sur la procession du St.-
Esprit , dans un <r«j7e'qui se trouve ma-
nuscrit dans plusieurs bibliothèques.
Léon Allatius fait mention de cinq autres
traités du même auteur ; mais nous n'a-
▼ons rien d'imprimé de lui , que quelques
EUT 167
commentaires sur Aristote , In Analyti~
ca , grœce , Venise, 1 534 , in-Ibl. In Ethi-
ca, grœce, Venise, 153G, in-fol. et la-
tine, Paris, 1543, in-fol.
EUTHYCRATES , sculpteur de Sicyo-
ne, fils et disciple de Lysippe, vivait 300
ans avant J. C. ; Il s'appliqua principale-
ment à observer lesproportions. Les statues
d'Hercule et d'Alexandre lui acquirent
une grande réputation, aussi bien que sa
Médée , qui était traînée dans un char à
quatre chevaux. ( Il eut pour élèves son
fils qui fut ensuite un peintre distingué,
et Amocrate qui le surpassa dans la sculp-
ture. )
* EUTHYME ( Saint ), dit le Grand, ar-
chimandrite naquit à Métilène dans la pe-
tite Arménie en 377, fut d'abord supé-
rieur-général de tous les monastères de
sa province , devint abbé fl'une multi-
tude de solitaires en Palestine , et ne se
borna pas aux exercices de la vie monas-
tique : il prêcha avec succès l'Evangile
aux Sarrasins , combattit les nestoriens
et les eutychiens , fit abjurer leurs er-
reurs à beaucoup de manichéens , ramena
l'impératrice Eudoxie à la foi orthodoxe,
et devint l'oracle de l'église d'Orient. Il
mourut le 20 janvier 47 3, dans sa 96*
année. Son culte d'abord établi dans la
Palestine passa dans les autres églises
d'Orient.
EUTHYMIUS, ouEuTHYME, surnom-
mé Ze Syncelle, patriarche de Coustan-
tinople , natif d'Isaurie, fut mis l'an 906
à la place de Nicolas le Mystique , que
l'empereur Léon VI avait chassé de son
siège. Il avait été moine. Ses vertus et son
mérite lui acquirent l'estime de ce prince,
qui le choisit pour son confesseur ; mais
Alexandre II , successeur de Léon , bannit
Euthymius,et rétablit Nicolas. Il mourut
en exil l'an 920.
EUTHYMIUS ZIGABENUS, moine
basilien du 12® siècle, composa, par
ordre de l'empereur d'Orient , un traité
contre toutes les hérésies. Cet ouvrage,
intitulé Panoplie , est une exposition et
une réfutation de toutes les erreurs,
même de celles des mahométans. Il fut
traduit en latin par un chanoine de Vé-
rone en 1 586 , et depuis U a été inséré
1^8 EUT
dans la grande Bibliothèque des Pères.
Oiia encore de ce savant moine des Cnm-
nientaires sur les Psaumes , iur les Can-
tiques , sur les Evnncjiles , littéraux, mo-
raux et allégoriques ; mais ses allégories
sont moins déraisonnables que celles des
commentateurs de son temps.
EUTICHE , Eutichius , de la ville de
Fostat en Egypte , joignit aux études ec-
clésiastiques celle de la médecine, fut
fait patriarche d'Alexandrie le 8 février
933 , et mourut le 12 mai 940. Il a laissé
des aniuilcs en arabe , depuis le commen-
cement du monde jusqu'en 940, peu exac-
tes pour l'histoire et la chronologie , ainsi
que la plupart des autres histoires ara-
bes. Pocok les publia à Oxford en 1659 ,
avec une version latine , en 2 vol. in-4 ,
et des notes. Selden prétend prouver par
ces Annales •, que dans les premiers siè-
cles de l'Eglise, il n'y avait point de dif-
férence véritable entre les prêtres et les
évêques ; mais le savant Assémani lui a
démontré le contraire. On a encore en
manuscrit de ce patriarche 1° Histoire
des usurpations des Sarrasins en Si-
cile. 2° Dispute entre les hétérodoxes et
les catholiques contre les jacobites.
Z° Trois discours sur le jeûne et la par-
que , sur la fête des chrétiens et sur les
patriarches , etc. 4° QuCiques ouvrages
de médecine.
EUTOGIUS d'Ascalon, commentateur
^Apollonius et à'Archimède , sous l'em-
pire de Justinien , est un des mathémati-
ciens les plus intelligens qui aient fleuri
dans la décadence des sciences , chez les
Grecs. Ses deux commentaires sont très
bons , et on leur doit bien des traits sur
l'histoire des mathématiques. Le premier
se trouve dans l'édition d'Apollonius par
Halley ; le second a été publié à Bàle ,
grec et latin, en 1544 , in-fol.
EÙTROPE ( Flavius Eutropius ) , his-
torien latin. On ignore d'oîi il était , et
qui il était. On conjecture qu'il avait vu
le jour dans l'Aquitaine , et l'on sait qu'il
exerça de grandes charges. Il ditlui-même
qu'il porta les armes sous Julien , dans sa
malheureuse expédition contre les Perses ;
mais le rang qu'il obtint dans les armées
nous est inconnu. Plusieurs croieut qu'il
EUT
fut sénateur, parce qu'ils trouvent à la
tetc de son ouvrage le titre de clarissimey
qui ne se donnait qu'aux sénateurs. >'ous
avons de lui un Abrégé de l'histoire ro-
maine, Breviarum rerum romanarum, en
dix livres, depuis la fondation de Rome,
jusqu'à l'empire de Valens , auquel il le
dédia. Eutropeavait composé divers écrits
sur la médecine sans être médecin. Son
Histoire est le seul de ses ouvrages qui
nous reste. Cet abrégé , quoique court ,
est assez bien fait ; lesévénemens princi-
paux y sont exposés avec netteté , mais
sans élégance. Cette histoire a été tra-
duite en français par Faret , 1621, in-18 ;
par de Préfontaine, 1710, petitin-12; par
l'abbé Lezcau a vec des notes , en 17 1 7 ,
in-12. Cette dernière traduction a été
retouchée par de Vailly et réimprimée
en 1804, in-12, avec le texte; mais
on a supprimé la plupart des notes.
L'abbé Paul en a publié une nouvelle
traduction plus exacte en 1809. La
première édition de cet auteur est de
Rome, 1471, in-folio; celle ad usum
delphini, in-4, est de 1683. Il est impri-
mé avec une version grecque à Oxford , j
1703, in-8;à Leyde, 1729, in-12, et en 1
1762, in-8. M. de Line en a donné une
édition latine en 17 46 , à Paris chez Me-
rigot , et ensuite chez Barbou , avec un
nouveau frontispice sous la date de 1754,
avec les observations de Tunuegny. Le
Fèvre. M. Capperonnier en a publié en
1793 une nouvelle édition, in-12, en y
joignant Aurelius P^ictor et Sextus Ru-
fus. Voyez Paul , diacre d'Aquilée.
EUTROPE , fameux eunuque , sous
l'empire d'Arcadius , et son plus cher fa-
vori , parv int aux premières charges , et
fut même élevé au consulat. Cette digni-
té , autrefois si émiuente , avait à la vé-
rité été donnée à un cheval sous Caligula ;
mais elle n'avait pas encore été avilie au
point d'être occupée par un eunuque tel
qu'Eutrope. Son insolence , sa cruauté et
sa lubricité , soulevèrent tout le monde
contre lui. Gainas , goth , général ro-
main , fit révolter les troupes, et ne pro-
mit de les apaiser qu'à condition qu'on
lui livrerait la tête d'Eutrope. Arcadius ,
pressé d'un côté par la crainte , de l'autre
EUT
par les prières de sa femme Eiidoxie , que
J'eunuqiie avait menacée de faire répti-
tlier, le dépouilla de toutes ses dignités
et le chassa du palais. Eutrope , livré à
la vengeance du public , se sauva dans
une église. On voulut l'en arracher ; mais
saint Jean-Chrysostômc apaisa la popu-
lace par un sermon > qui passe pour un
■chef-d'œuvre d'éloquence. Au bout de
•quelques jours il en sortit; on lui fit son
procès , et il perdit la tête sur un écha-
/a«d en 309.
EUTYCHES , hérésiarque , se relira
<lès sa première jeunesse dans un monas-
tère près de Constantinople. Ses vertus
•et ses lumières charmèrent tous ses con-
frères, qui le choisirent d'une voix una-
nime pour leur abbé. Il passa toute sa vie
dans les CRercices de la pénitence la plus
austère. Il ne sortit de sa solitude que
pour aller combattre les erreurs de >'es-
toritts; mais il tomba lui-même dans une
hérésie contraire, et non moins funeste.
11 soutenait que la divinité de Jésus-Christ
et son humanité n'étaient qu'une nature,
depuis l'Incarnation ; qu'après l'union du
Verbe avec l'humanité , il n'était resté en
J. C. que sa nature divine , sous l'appa-
rence du corps humain. Eusèbe , évêque
de Dorjiée, son ami et son admirateur,
ayant tenté vainement de le ramener à la
vérité, se rendit son accusateur auprès
du concile de Constantinople, convoqué
en 448 par Flavien, évêque de cette ville.
L'hérésiarque ayant persisté dans ses sen-
timens , y fut condamné , dcpo.se du sa-
cerdoce et du gouvernement de son mo-
nastère, et excommunié. L'austérité de
ses mœurs lui avait fait des partisans ;
l'eunuque Chrysaphius, favori de l'em-
pereur Théodose le Jeune, était son ami.
Il obtint de ce prince, qu'on assemblerait
uni autre concile pour revoir les actes de
celui de Constantinople , et que Dioscore,
évêque d'Alexandrie, autre partisan d'Eu-
tychès , en aurait la présidence. C'est
cette assemblée qu'on a nommée le bri-
gandage d'Ephcse. Eutychès y fut absous
sansautre explication qu'une requcteéqui-
voque , dans laquelle il déclarait en géné-
ral quil analhématisaittoutes les héré.sies.
Flavien et Eiisèbe ses adversaires furent
EUT \Cyç)
non -seulement déposés, mais cruelle-
ment maltraités. Marcicn, successeur de
Thcodose , fut plus favorable à la doctrine
catholique. Il fit assembler en 461 le con-
cile de Chalcédoine, le 4^ général. Veu-
iychianisme Y fut proscrit, Dioscore dé-
posé , et la paix rendue à l'Eglise. Mais
la secte ne laissa pas de subsister et d'in-
triguer par différentes chicanes ; elle se
divisa en différentes branches , dont une
des principales était celle des acéphales,
ainsi nommés, parce qu'ils étaient d'a-
bord sans chef , également séparés de
l'église catholique, et de Pierre Jîoug,
faut patriarche d'Alexandrie , le boute-
feu de l'eutychianisme. Marcicn connais-
sant l'esprit querelleur et pointilleux de.s
Grecs, fit plusieurs lois pour défendre de
disputer publiquement sur la religion.
Ses édits ne purent arrêter la fureur dog^
matiquedeseutychiens. Il en fut de leurs
erreurs comme de celles des nesloriens.
Le mal se perpétua de génération en gé-
nération ; et cette secte, connue aujour^-
d'hui sous le nom de jncobitcx , domine
encore en Ethiopie, et est répandue en
Egypte et en Syrie. Les philosophes mo-
dernes, toujours lestes en raisonncmcns
lorsqu'il s'agit de religion, ont prétendu
que l'eutychianisme n'était qu'une affaire
de mots; il est aisé de voir qu'en niant
deux natures en Jésus-Christ, cette secte^
anéantissait le mystère de l'Incarnation.
« Tout ce mystère , dit un théologien , est
» fixé avec uneprécision si exacte, qu'oi»
)) ne peut rien dire de plus ou de moins»
» sans qu'on aperçoive l'écart ; ce qu'on
» remarque surtout d?.ns la doctrine lu-
« mineuse (jue la théologie appelle com-
M miinicaiinn d^idiômcs. Si l'hérétique
» veut se déguiser, s'il cherche à s'enve-
j) lopper, je le poursuis dans tous ses faux-
)> fuyons : je Je serre de près et je ne
» quitte pas prise qu'il ne se soit expli-
M que nettement pour ou contre la véritt;
î) révélée. » t^oycz Ar.ius , CsEtLius, Kes-
Tonius , SootN ( Lélie et Fauste ).
EUTYCHIEN , pape et martyr, suc-
céda à Félix, en janvier 27 5. Il ordonna
f[ue l'on ensevelirait les corps des mar-
tyrs dans dc& luniquc-î de pojM'pre. Il fui
martvrisé le 8 décembre 233.
i7« ET A
EUTYCHICS. frayez EoTTCHk».
EUTYQUE , Eutychius , patriarche
de Côtistanlinople , présida au concile
écuménique de cette ville en 553. Il avait
été d'abord moine d'Amasée dans le Pont;
il fut élevé sur le siège de Constantinople
par Justiiiien , à qui il avait plu. Cet em-
pereur étant tombé dans l'erreur des in-
corruptibles ( qui soutenaient que le corps
de Jésus-Christ , n'avait été susceptible
d'aucune altération , et n'avait jamais en-
duré la faim , la soif, ni aucun autre be-
soin naturel ), consacra celte rêverie dans
un édit. Eutyque refusa de le signer, et
fut disgracié et exilé l'an 565 , après avoir
été déposé dans un synode. A la mort de
Justinien , il fut rétabli sur son siège. Ce
fut alors qu'il composa un Traite de la
Résurrection , dans lequel il soutenait
que le corps des ressuscites serait si dé-
lié , qu'il ne pourrait plus être palpable.
La fureur des Grecs dans ce siècle et dans
les suivans , fut de disputer sans relâche
sur des questions que l'ignorance hu-
maine ne pouvait résoudre, et sur les-
quelles la Divinité n'a rien révélé. Saint
Grégoire, député du pape Pelage II, dé-
trompa Eutyque de son erreur. Ce pa-
triarche mourut peu de temps après en
582, à l'âge de 70 ans , après avoir fait
sa profession de foi en présence de l'em -
pereur, et dit en prenant sa peau avec sa
main : « Je confesse que nous ressusci-
w terons tous en cette même chair. »
EUZOIUS , diacre d'Alexandrie , fut
déposé en même temps qu'Arius par saint
Alexandre , évêque de cette ville , et con-
damné au concile de Nicée; mais ayant
présenté en 335 à l'empereur Constantin
une confession de foi , orthodoxe en ap-
parence, il fut nommé évêque d'Antioche,
l'an 361 ; ce qui fut cause que les catho-
liques commencèrent à tenir leurs assem-
blées à part ; c'est lui qui baptisa l'empe-
reur Constance. Il mourut en 376.
EVAGORAS I, roi de Chypre, reprit
la ville de Salamine qui avait été enlevée
à son père , et se prépara à se défendre
contre Artaxercès, roi de Perse, qui lui
avait déclaré la guerre. Il arma sur terre
et sur mer. Secouru par les Tyriens , les
Egyptiens et les Arabes, il fut d'abord
•ETA
vainqueur. Il se rendit maître des vais-
seaux qui apportaient des vivres à l'enne-
mi , et fit beaucoup de ravage parmi les
Perses. Le sort des armes changea. Gaos,
général persan, lit périr une partie de sa
flotte , mit le reste en fuite , pénétra dan»
l'île , et assiégea Salamine par mer et
par terre. Evagoras n'obtint la paix qu'à
condition qu'il se contenterait de la seule
ville de Salamine , que les autres places
de l'île appartiendraient au roi de Perse,
qu'il lui payerait un tribut , et qu'il ne
traiterait avec lui que comme un vassal
avec son seigneur. Evagoras fut assas-
siné peu de temps après , l'an 375 avant
J. C, par un eunuque. « C'était, dit un
» historien , un prince sage , modéré ,
» sobre, courageux. Il avait une gran-
u deur d'âme digne du trône. Mais ce
» qu'il y avait de plus royal en lui, et
» qui lui attirait pleinement la confiance
» de ses sujets , de ses voisins , et même
» de ses ennemis, était sa sincérité et la
» haine qu'il témoignait pour tout dégul-
» sèment et mensonge. » On lui reproche
néanmoins d'avoir employé , contre la
foi des sermens, la force et la politique^
pour rentrer dans tous les états que son
père avait possédés , et dont une partie
appartenait aux Perses par droit de con-
quête.
EVAGORAS II, petit-fîls du précé-
dent, et fils de Nicoclès, fut dépouillé du
royaume de Salamine par son oncle pa-
ternel Protagoras. Il eut recours au roL
Artaxercès Ochus, qui lui donna une
souveraineté en Asie , plus étendue que
celle qu'il avait perdue. Ce prince , ayant
été accusé auprès de son bienfaiteur, fut
obligé de s'enfuir dans l'île de Chypre ,
où il fut mis à mort.
EVAGRE (S.), patriarche de Con-
stantinople, élu en 370 par les orthodo-
xes, après la mort de l'arien Eudoxe, fut
chassé de son siège et exilé par l'empe-
reur Yalens. Son élection fut l'origine
d'une persécution contre les catholiques.
S. Grégoire de ^'azianze l'a décrite élo-
quemmcnt dans un de ses discours.
EVAGRE , patriarche d'Antioche , fut
mis à la place de Paulin , en 389. Flavien
avait succédé dès 38 1 à Mélèce; de façon
EVA
qu'Ëvagre ne fut reconnu évèque , quo
par ceux qui étaient restés du parti de
Paulin. Cette scission continua le schisme
dans l'église d'Antioche. Le pape Sirice
fit confirmer l'élection d'Evagre dans le
concile de Capoue en 390. Ce patriarche
mourut deux ans après. Saint Jérôme, son
ami , assure que c'était un esprit vif. Il
composa quelques ouvrages. On ne lui
donna point de successeur, et ceux de
son parti se réunirent , après quelques
difficultés, à ceux du parti de Flavien.
EVAGRE du Pont, dans l'Asie-Mi-
neure , vivait vers la fin du 4* siècle. On
lui attribue le deuxième livre de la Vie
des Pères, et plusieurs autres ouvrages
infectés des erreurs d'Origène, qui furent
traduits en latin par Rufin.
EVAGRE, né àEphiphanie en Syrie
vers l'an 536 , fut appelé le scolastique :
c'était le nom qu'on donnait alors aux
avocats plaidans. Evagre exerça cette pro-
fession. Après avoir brillé quelque temps
dans le barreau d'Antioche, il fut fait
questeur et garde des dépêches du préfet.
L'église lui doit une Histoire ecclésiasti-
que en 16 livres, qui commence oîi So-
crate et Théodoret finissent la leur, c'est
à-dire vers l'an 431 ; Evagre a poussé la
sienne jusqu'en 594 . Elle est fort étendue,
et appuyée ordinairement sur les actes
originaux et les historiens du temps. Son
stile , un peu diffus , n'est pas pourtant
désagréable : il a assez d'élégance et de
politesse. Evagre paraît plus verse dans
l'histoire profane , que dans l'ecclésicisti-
que. On croit s'apercevoir en lisant son
histoire, qu'il donnait dans les erreurs
d'Eutychès. Robert Etienne avait donné
l'original grec de cet historien , sur un
seul manuscrit de la bibliothèque du roi-
Son édition a été éclipsée par celle du
savant Henri Valois, qui avait eu sous les
yeux deux manuscrits. Celle-ci est enri-
chie d'une nouvelle version et de savantes
notes, Paris, 1673, in -fol. Elle a été
réimprimée à Cambridge en 1720.
• EVANGELI ( Antoine ) , poète et lit-
térateur italien, né à Cividale, dans le
Frioul , en 1742 , entra chez les religieux
somasques à Venise , où il avait fait ses
premières études , et où il fut employé à
EVA 171
renseignement. Il occupa la chaire de
belles-lettres à Padoue pendant plus de
30 ans, et se retira à Venise dans la mai-
son professe de son ordre , où il mourut
le 28 janvier 1 805. Ou a de lui : 1° Amor .
musico , poemelto in otlava rima , Pa-
doue , 1776. 2° Poesieliriche délia Bib-
bia esposte in vcrsi italiani , Padoue ,
1793. On y admire la vigueur et la fidé-
lité avec laquelle il a rendu les beautés
de l'Ecriture. 3° Scella cTorazioni italia-
ne de migliori scrillori , Venise, 1796 ,
2 vol. in-8. Ce choix, fait avec beaucoup
de soin , est bon pour former le goût dé
la jeunesse. On lui doit encore la publi-
cation des leçons latines de VElliica de
Steliini, dont il mit en ordre les manu-
scrits, et des opère varie, du même Stel-
iini , qu'il a enrichis de notes savantes.
Steliini avait été son guide dans ses étu-
des littéraires.
EVANS ( Corneille ) , imposteur, natif
de Jlarseille, voulut jouer un rôle pen-
dant les guerres civiles d'Angleterre. Il
était fils d'un anglais de la principauté'
de Galles, et d'une provençale. Sur quel-
que air de ressemblance qu'il avait avec
le fils aîné de Charles I , il fut assez hardi
pour se dire le prince de Galles. Ce fourbe
fit accroire au peuple qu'il s'était sauvé ds
France, parce que la reine sa mère avait eu
dessein de l'empoisonner. Il arriva le 1 3
mai 1648 dans une hôtellerie de Sand-
wick, d'où le maire le fit conduire dans
une des maisons les plus distinguées de
la ville , pour y être servi et nourri en
prince. Sa fourberie fut dévoilée. Le che-
valier Thomas Dishington , que la reine
et le véritable prince de Galles avaient
envoyé en Angleterre, voulut voir le pré-
tendu roi. Il l'interrogea , et ses réponses
découvrirent son imposture. Cet impu-
dent ne laissa pas de soutenir effronté-
ment son personnage ; comme les roya-
listes allaient le faire saisir, il prit la fuite.
On l'atteignit , et il fut conduit à Cantor-
béri , et enfin dans la prison de îN'ewgate
à Londres , d'où il trouva encore le
moyen de s'évader , et ne parut plus. Ou
ne sait pas ce qu'il devint.
• EVANSON ( Edouard ) , thëologictt
anglais, né k Warington en 1731 , obtint
ï7a EVE
plusieurs LëiiéAccs , ciitru autres la cure
de Tewkesbury, qu'il fut obligé de rési-
gner Gu 1778, pour avoir prêché uu ser-
mon en faveur d'une réforme à faire dans
la doctrine de l'éjjlise anglicane , relati-
vement à la Trinité et à l'Incarnalioii. 11
publia à ce sujet un ouvrage en 1772. On
encore de lui 1 "une Lettre xurles pvoplie'-
iies du nouveau Testament, 1777, in-8.
2° Argument pour et contre F observation
sabbatique du dimanche par la cessation
de tout travail, 1792, in-8. 3° Disso-
nance des quatre évangiles. II exclut du
eanon de l'Ecriture les évangiles de saint
îlattliicu, saint Marc et saint Jean, et
u'admet comme authentique que celui de
saint Luc , du moins dans sa plus grande
partie. Ce théologien était du nombre des
enquirers , et secondait Priestley dans
ses recherches sur ce que ces demi-incré-
dules appelaient les corruptions duchris-
tiànisme. Evanson est mort à Collbrd ,
uu comté de Gioccslcr, le 25 septembre
Ï805.
EVARIC ou EuRio, 7" roi des Goths
ca Espagne, fils de Théotloric I , et frère
de Théodoric II, auquel il succéda en
46C, ravagea la Lusitanie , la haute Es-
pagne et la Navarre , prit Arles et Mar-
seille ', mit le siège devant Clermont ; dé-
fit l'empereur Anthémius , secouru des
Bretons; pilla l'Auvergne, leBerry,la
Touraine et la Provence ', et mourut à Ar-
les en 48.5. ( Il fit un recueil des anciennes
lois et en ajouta de nouvelles: on lui re-
proche la mort de son frère Théodoric
et la persécution contre les catholiques ;
il était attaché à l'arianisme. }
EVARISTE , pape et successeur de
saint Clément l'an lOOdeJ. C, marcha sur
les traces de son prédécesseur, et mourut
saintement le2G ou 27 octobre 109. Sous
son pontificat, l'Eglise fut attaquée au
dehors par la persécution de Trajan , et
déchirée au dedans par divers hérétiques.
Quelques auteurs ecclésiastiques attri-
buent à ce pape l'établissement djEs pa-
roisses de Rome. Saint Alexandre lui suc-
céda.
EVE, la première des femmes, fut
ainsi nommée par Adam , -son mari , le
premier des hommes. Dieu la forma lui-
EVE
même d'une des côtes d'Adam , et la plaça
dans le jardin des délices, d'Dù elle fui
chassée pour avoir désobéi à Dieu qui
avait mis sa fidélité et son obéissance ii
l'épreuve {voyez Adam ). Il faut que ITiis-
toire d'Eve séduite par le démon , revêtu
de la figure du serpent, soit d'une con-
naissance et d'une croyance bien an-
ciennes parmi les nations païennes , puis-
que la fable d'Ophionée ( voyez ce mot )
est indubitablement greffée sur cetévéne-
nient et sur la chute des anges qu'il sup-
pose.... Les rabbins ont conté mille fables
sur !a mèi'C du g^enre humain ; quelques
commentateurs imbéciles ou fanatiques
les ont répétées; elles ne méritent que
le mépris. La manière dont la formation J
d'Eve est racontée dans ruisloire sainte, '
a donné lieu à quelques raillciùes froides,
et à des imaginations bizarres qui ne va-
lent pas la peine d'être réfutées ; mais
c'est une grande leçon donnée au genre
humain. Dieu a voulu par là faire con-
naître à la femme la supériorité de
l'homme de qui elle a été formée ; à
l'homme , combien sa compagne doit lui
être chère, puisqu'elle est une partie de
sa propre substance ; et à tous les deux ,
qu'ils doivent conserver entre eux l'union
la plus étroite, de laquelle dépend leur
bonheur et celui de leurs enfans. «Toutes
» les épigrammes de nos beaux esprits,
« dit un vrai philosophe , sur la création
« et sur l'état de nos premiers parens,
» sont un jeu bien puéril. Deux créatures
» innocentesplacéesparla main de Dieu,
w sur un sol riant et de facile culture :
» voilà l'homme dans son origine. Dé-
» généré depuis , il a appelé les arts à
»> son secours ; mais ces légers adoucis-
» semens ne compensent pas les dons de
» la nature et de la grâce , versés sur lui
M avec profusion. Que ces hommes qui ne
» veulent pas croire nos Ecritures , nous
«disent d'où vient l'homme ici -bas?
M De quelque manière qu'ils arrangent
» cette création , elle sera toujours aussi
» étonnante quelcrécitdeMoyse. y>[Foy.
MOYSE ).
EVEILLON (Jacques), savant et pieux
chanoine et grand-vicaire d'Afigers, sa
patrie , sous quatre évêquc différcns , né
en 1582, mourut en IGol , amèrement
pleuré des pauvres dont il était le père.
I! légua sa bibliollièque aux jésuites de La
Flèche : c'était toute sa richesse. Comme
on lui reprochait un jour qu'il n'avait
point de tapisseries : « Quand , en hiver,
» j'entre dans ma maison , répondit-ii ,
w les murs ne me disent pas qu'ils ont
» froid ; mais les pauvres qui se trou-
w vent à ma porte , tout tremblans , me
» disent qu'ils ont besoin de vêtemens. »
Malgré la multitude des affaires, et une
rigoureuse exactitude au chœur, il don-
nait beaucoup de momens à son cabinet.
Les principaux fruits de ses travaux sont :
i°J)e Proccssionibuseccle.siasticis, in-8,
Paris, lG'i5. L'auteur remonte, dans ce
savant traité, à l'origine des processions ;
il en examine ensuite le but, l'ordre
et les cérémonies. 2'' De recta psallendi
rnlionc, in-4, La Flèche, 1646. Ce devrait
être le manuel des chanoines. 3" Traite
des excommunications et des monitoires,
in-4, Angers, t751, et réimprimé à Paris
en 1672 , dans le même format. Le docte
écrivain y réfute l'opinion assez commu-
nément établie, que l'excommunicatiou
ne s'encourt qu'après la fulmination de
l'agrave. Son sujet y est traité à fond ;
mais il a trop négligé ce qui regarde
l'ancien droit et l'usage de l'Eglise des
premiers siècles. Il avait été fort jeune
professeur de rhétorique à Nantes , curé
à Soulerre pendant 13 ans, puis curé de
SI. -Michel à Angers, chanoine en 1620.
EVELIN ou EvELYiN ( Jean ) , né à
Wolton dans le comté de Surrey , l'an
1G20, partagea son temps entre les voya-
ges et l'étude. Il obtint pour l'université
d'Oxford les marbres d'Arundel ; et en-
suite pour la société royale, la biblio-
thèque môme de ce seigneur. Evelin avait
plus d'une connaissance : la peinture,
la gravure , Jes antiquités, le commerce,
etc. , lui étaient familiers. Les livres que
nous avons de lui en sont une preuve :
J" Sculptura, 1662, in-8. Cet ouvrage
concernant la gravure eu cuivre contient
les procédés et l'historique de cet art ; il
mériterait d'être traduit. 2" Sylva, 16TJ,
in-fol. Il y traite de la culture des arbres.
3" L'origine et les progi es de la naviga-
EVE 173
lion et du commerce , en anglais , in-8 ,
1674. 4" Nitmismata , in-folio, 1667.
C'est un discours sur les médailles des
anciens et des modernes. Sa nation lui
doit la traduction de quelques bons ou-
vrages français, tels que Le parfait Jar-
dinier de La Quintinie, et des Traités de
l'architecture de Cambray. Il mourut le
24 mars 1705.
EVENSSON (David), savant théolo-
gien suédois, né l'an 1699, fut pasteur
à Kiobing dans la Westmanie , et chape-
lain du roi de Suède. Il mourut en 1 7 50,
laissant plusieurs dissertations estimées
par ceux de sa communion, entre autres :
1° Deportione pauperibus relinquendâ.
2" Ve aquis supra cœlestibus. 3° De
prœdestinatione , etc.
EVEINUS III , roi d'Ecosse après Eder
son père, était si vicieux, que pour au-
toriser son libertinage, il ordonna par
une loi expresse, qu'un homme aurait
autant de femmes qu'il pourrait en nour-
rir ; que les rois auraient droit sur les
femmes des nobles , et que les genlils-
hommes seraient maîtres des femmes du
peuple. Ce prince cruel , avare et san-
guinaire, aliéna tous les cœurs. Les grands
du royaume s'étant soulevés contre lui,
le mirent dans une prison, où il fut étran-
glé quelque temps après. Son règne ne
fut que de 7 ans.
EVEPHENE, philosophe pythagori-
cien , condamné à mort par Denys, tyran
de Syracuse, pour avoir détourné les Mé-
tapontains de son alliance. Il demanda
permission, avant que de mourir, d'aller
dans son pays pour marier une sœur. Le
tyran lui demanda quelle caution il don-
nerait ? Il offrit Eucrite son ami , qui de-
meura à sa place. On admira l'action
d'Eucrite ; mais on fut beaucoup plus sur-
pris du retour d'Evéphène, qui se pré-
senta à Denys au bout de six mois, comme
on était convenu. Alors le tyran, charmé
de la vertu de ces deux amis, leur rendit
la liberté et les pria de les admettre pour
troisième dans leur amitié. On raconte la
même chose de Damou et de Pythias. Il
peut se faire que les mêmes sentimens
aient inspiré les mêmes vertus à des per-
sonnes dîffcrciî'es ; mais il est plusappa-
174 EVR
rent que la fabuleuse antiquité a fait deux
histoires d'un seule , ou qu'elles sont tou-
tes les deuxcontrouvées.
EVERARD. Foyez GRuniufe, Second.
EVILMÉRODAC, roi de Babylone,
succéda à son père Nabuchodonosor, vers
l'an 6G2 avant J. C. Ce jeune prince avait
gouverné despotiquement le royaume
pendant les sept années de la démence
de son père. Kabuchodonosor étant re-
monté sur le trône après avoir recouvré
la raison , arrêta toutes les entreprises de
son fils contre lui; il le tint enfermé. Ce-
lui-ci, dans sa prison', lia une étroite
amitié avec Jécbonias, roi de Juda, que
Nabuchodonosor tenait aussi dans les
fers. Ce prince étant mort , Evilmérodac
monta sur le trône , tira Jécbonias de
prison , et le combla de faveurs. On dit
qu'il eut la cruauté de priver de la sépul-
ture le corps de son père, et même qu'il
le fit hacher en morceaux. Il fut assas-
siné par son beau-frère Kéréglissor, après
un règne de deux ans.
EVRARD , Everhardus, célèbre er-
mite du pays de Trêves , passa sa jeunesse
à garder les troupeaux , et sanctifia cette
paisible et innocente occupation par la
prière et les vertus chrétiennes. Il se re-
tira ensuite dans la solitude d'une mon-
tagne voisine , pour ne plus songer qu'à
Dieu. Sa cellule est devenue l'origine
d'une grande abbaye de chanoines ré-
guliers de Saint-Augustin , fameuse par
le concours des pèlerins qui viennent y
invoquer la Sainte Vierge. « Lebon Ever-
» hardus, dit un voyageur, paraîtra sans
» doute n'avoir pas été bien philosophe.
» Cependant l'image de la Vierge qu'il a
» placée en ce lieu, entretient la piété
» et le précieux sentiment de la religion
» parmi des hommes assemblés là où il
» n'y avait que des haies et des bruyères,
n II en a résulté un monastère qui fait
» du bien à tous les environs , qui nourrit
» et loge les voyageurs; oii deS hommes
» ayant des mœurs , de la probité , de la
«bienfaisance, chantent avec édifica-
» tion les louanges de l'Eternel. Tous
» les écrits des philosophes n'ont pas
V encore produit tant de bien. Il s'en
V faut de beaucoup. » C'est près de cette
EXI
abbaye, nommée Everhardus Clauss
( Cellule d'Evrard ) , que les Français
furent défaits par M. de Seckendorflf, gé-
néral des impériaux, le 19 octobre 1735.
EVREMONT. roy. Saint-Evrkmont.
EVREUX ( Robert , comte d' ). rayez
Robert, second fils de Richard, dans
lequel vous trouverez les diiférentes mu-
tations du comté d'Evreux. 1
* EWALD ( Jean ) , poète danois , né 1
en 1 7 43 dans le duché de Slesvviek, mort 1
en 1781 , a laissé 1° des trage'dies, parmi j
lesquelles on cite la Mort de Ji aider ,
dont le sujet est tiré de la mythologie
Scandinave ; et qui est un des chefs-d'œu-
vre de la littérature danoise; Bolf ou
liollon , tirée de. l'histoire ancienne du
Danemarck ; Adam et Eve, ou la chute de
l'homme , drame oii l'on trouve de beaux
passages. 2"Deuxpastoralesles Pécheurs,
et Phile'mon et Baucis. 3° Des odes ou
chants lyriques. 4° Des élégies très esti-
mées. Celle intitulée V Espérance et le
souvenir, peut être comparée à ce que les
modernes ont de plus beau en ce genre. |
On a fait une belle édition de ses OEuvres '' j
complètes en 4 vol. in-8, Copenhague ,
17 81-91, avec des gravures de Chodo-
■wiecki.
* EWALD ( Le général ) , frère du pré-
cédent , né en 1726 , fut lieutenant-géné-
ral des armées danoises , et ofiicier de la
Légion d'honneur. Après avoir fait ses
premières armes en Amérique , au service
du landgrave de Hesse , et perdu un œil
dans cette campagne , il entra au service
du gouvernement danois. A la tète d'un
corps de troupes danoises et hollandaises,
il poursuivit le fameux major Schill , qui
faisait la guerre contre la France en son
propre nom , et qui avait déjà remporté
plusieurs avantages sur les troupes en-
voyées contre lui ; il le força de se renfer-
mer dans Stralsund ; Ewald emporta la
place d'assaut , et. le brave Chili , avec la
plupart de ses of&ciers , tous nobles prus-
siens, périrent dans ce combat. Le géné-
ral Ewald mourut à Riell, le 28 mai 1813.
On a de lui un ouvrage très estimé sur la
guerre des troupes légères.
* EXIMENO ( Don Antoine ) , savant
jésuite espagnol , né en 17 32 à Balbastro
J
EXP
dans l'Aragon, fut chargé d'enseigner les
mathématiques et l'artillerie aux jeunes
seigneurs élevés à l'école de Salamanque,
puis à celle de Ségovie. En commenrant
son cours en 17G2, il leur adressa un
discours sur la nécessite d'e'tudier Vart
de la guerre par principes; et publia pour
leur instruction plusieurs ouvrages esti-
més. A la suppression des jésuites il passa
en Italie, et se fixa à Rome, oii il conti-
nua de consacrer tous ses momens à l'é-
tude des sciences. Il s'y occupa surtout de
musique , et composa sur cet art un ou-
vrage qui fixa sur lui les regards de toute
l'Italie et le fit connaître du reste de l'Eu-
rope. Il est mort en 1798. Ses principaux
ouvrages sont 1° Historia militar de Es-
pana, Ségovie, 1769, in-4. C'est une his-
toire des grands capitaines espagnols. Elle
est aussi exacte que bien écrite. 2° Ma-
nual del artillero , 17 72, in-8 , estimé.
3° Dell' origine et délie regole délia mu-
sica , colla storia del suo progressa ,
decadenza e renovazione , 17 74, in-4. Il
établit dans cet ouvrage , que le but de
la musique étant de flatter l'oreille , on a
cherché mal à propos le principe de cet
art dans des combinaisons purement ma-
thématiques , et il relève à cet égard avec
autant de force que de goût les erreurs
dans lesquelles sont tombés Euler, Ra-
meau et d'Alembert. Son système , fondé
sur la prosodie , et applicable aux diffé-
rentes langues parlées de l'Europe , a
trouvé partout de nombreux partisans.
4° Dubbio diD. Antonio Eximeno sopra
il saggio fondamentale pratico di con-
irappunto , delR. padre maestro Giamb.
Martini, h^ome , 1776, in-4. S" Leftera
sopra l'opinione del signor Andres in-
torno la letteratura ecclesiastica de' se-
coli barbari , Manloue , 1783. C'est une
apologie de l'ouvrage d'Andrès, son ami ,
en réponse aux critiques qui en avaient
été faites.
EXPILLY ( Claude d' ) , président au
parlement de Grenoble , ami et disciple
des plus célèbres jurisconsultes de son
temps, naquit à Voiron en Dauphiné l'an
1661 , et mourut à Grenoble en IG-IG,
âgé de 75 ans. Henri IV et Louis XIII se
«ervirent utilement de lui dans le comtat
EXP 175
Venaissin , en Piémont et en Savoie. C'é-
tait un homme très estimable , l'ami et le
protecteur des gens de lettres. Qui méri-
tait son amitié ( dit Chorier, historien
du Dauphiné }, l'avait infailliblement ; et
c'était la mériter, que d'avoir du savoir
et de la vertu. Le président d'Expilli était
orateur, historien et poète; mais il ne
remplit bien aucun de ces titres , du
moins si l'on compare les ouvrages qui
nous restent de lui , à ceux de nos bons
écrivains. Ses Plaidoyers , imprimés à
Paris, in-4, en 1612, ne sont plus lus.
Ses poésies, publiées in-4 eu 1624, et la
Fie de Bayard, in-12, 1660, ne méri-
tent guère davantage de l'être. Son Traité
de l'orthographe française , a Lyon ,
in-fol., 1 61 8 , ne renferme qu'une théorie
peu judicieuse, et une pratique bizarre
et hors d'usage. Le magistrat valait mieux
en lui que l'écrivain. Foyez sa vie , Gre-
noble, 1660, in-8, parBonieldeChàtillon.
* EXPILLY (Jean-Joseph), littérateur
et diplomate , naquit à St.-Remy en Pro-
vence l'an 1719 , fut successivement se-
crétaire d'ambassade du roi de Sicile,
examinateur et auditeur général de l'évê-
ché de Sagona en Corse , chanoine tré-
sorier du chapitre de Ste. -Marthe de Ta-
rascon , membre de plusieurs académies ;
il parcourut une partie de l'Europe en
recueillant des observations intéressante»
sur les pays qu'il viskait : il a laissé deux
ouvrages géographiques qui sont encore
recherches et estimés à cause de l'exacti-
tude des détails sur le climat, les mœurs,
la population et les rapports politiques
des diverses contrées. Expilly était ecclé-
siastique : il mourut en 1793.
* EXPILLY (Louis-Alexandre) naquit
à Brest. Après avoir fait ses études théo-
logiques à Paris , il devint curé de St.-
Martin de Marlaix en Bretagne. En f 78&
le clergé de St.-Pol de Léon le députa aux
Etats-généraux, où il se rangea du côté des.
novateurs. Il fut membre du comité char-
gé d'examiner et de publier le livre-rouge,
fit à l'assemblée un rapport contre le droit
de propriété du clergé , prêta le serment
à la constitution civile dont il passe pour
avoir été l'un des rédacteurs, et fut élu
évêque constitutionnel du Finistère le 3t
176 EXU
octobre 1790. Avant de se faire sacrer,
il écrivit au pape pour lui demander son
agrément ; il ne s'en fit pas moins ordon-
ner sans l'avoir reçu, et , quoique le sou-
verain pontife cassât son élection ( bref
du 13 avril 1791 ), il n'en prit pas moins
possession de son évêché , dans lequel il
eut beaucoup de désagrémens et ne fut
soutenu que par les révolutionnaires.
Lorsque la révolution , conséquente avec
ses principes irréligieux, eut supprimé
l'exercice du culte , l'évêque Expilly de-
vint président du Directoire de son dé-
partement ; mais, ayant pris part à ce que
l'on appelait le fédéralisme. , il fut accusé
avec les autres membres du Directoire ,
condamné et exécuté avec eux le 21 juin
1794 à Brest. Il n'a laissé pour tout ou-
vrage que ses discours politiques et ses
lettres pastorales.
EXUPÉRANCE, préfet des Gaules, et
parent du poète Rutilius, était de Poi-
tiers. Son frère Quintilien , retiré à Beth-
léem , y menait une vie d'anachorète. Ce
fut, à ce qu'on croit, à la prière de ce-
lui-ci , que saint Jérôme écrivit à Exu-
pérance la lettre que nous avons encore,
pour l'exhorter à renoncer aux espérances
du siècle , et à se consacrer uniquement
au service de Dieu, Cette lettre resta sans
effet. Exupérance, occupé à rétablir les
lois dans l'Aquitaine , fut tué par ses sol-
dats, vers l'an 424 à Arles, dans une sé-
dition militaire.
EXUPÈRE ( Saint ) , évèque de Tou-
louse, illustre par sa charité durant une
grande famine. Après avoir distribué tous
ses biens , il vendit encore les vases sa-
crés d'or et d'argent, pour assister les
pauvres. Il fut réduit à porter le corps
de Jésus-Christ dans un panier d'osier, et
son sang dans un calice de verre. Saint
Jérôme le compare à la veuve de Sarepta,
et lui a dédié son Commentaire sur le
prophète Zacharie. Le pape Innocent lui
a adressé une dccrétale, célèbre dans
l'histoire ecclésiastique. Saint Eïupère
mourut vcrs4n, plein dejoui-s et de ver-
tus.— Il ne faut pas le confondre avec
saint ExopÈRE , évoque de Bayeux, au 4"
siècle. Celui-ci , honoré encore .sous le
nom de saint Spire, et un des premicrsévô-
EYM
qucs qui apportèrent le flambeau de ]'E>
vangile en Neustrie ( aujourd'hui Nor-
mandie).
* EYBEL ( Joseph-Valentin ) , profes-
seur de' droit canon à Vienne, mort en
1805, a composé les ouvrages suivans :
1° Ordre des principes de la jurispru-
dence ecclésiastique , 1775. 2" Corps de
droit pastoral moderne ; introduction au
droit ecclésiastique des catholiques ^
1777, 3 vol., mis à l'index par décret du
6 décembre 17 84. 3" Qu'est-ce que le
pape .'pamphlet destiné à affaiblir le res-
pect et l'attachement des peuples pour
le chef de l'Eglise. Le cardinal Gerdil ré-
futa cet écrit , qui fut condamné par uir
bref du 28 novembre 17 86. 4" Que con-
tiennent les monumens de l'antiquité'
chrétienne sur la confession auriculaire?
autre pamphlet qui fut proscrit le 1 1 no-
vembre 1784.
EY BEN ( Huldéric ) , savant juriscon-
sulte, né à Norden l'an 1629 , d'une fa-
mille noble, devint conseiller et anté-
cesseur à Helmstadl , puis juge dans la
chambre impériale de Spire, enfin con-
seiller au conseil aulique de l'empereur
Léopold. Il mourut en 1699, laissant des
ouvrages , imprimés à Strasbourg en
1708, in-fol. On ne les connaît guère en
France , quoiqu'estimés de leur temps.
EYCK. roijez Eick..
* EYMAR ( Etienne), prêtre de l'Ora-
toire, né vers 1097, et mort à Forcalquier
le 26 janvier 1767 , est connu par les ou-
vrages suivans : 1° Lettre à Vévêque de
Poitiers sur la théologie de ce diocèse ;
2" Lettres à l'évêque d'Angers sur les
Conférences de ce nom ; 3° Lettres à M.
Tjafiteau ( évèque de Sisteron ) sur ses
Entretiens d'Anselme et d'Isidore; 4"
Ijcttrc d'un Bordelais sur la vie de la
Sainte Vierge, par ce prélat, avectabbé
Barlhélemi de Lapnrtc. {F. Laporte.);
5° Réplique au mandement du même
évèque, du 8 septembre 1760. [Voyez
Lafiteau Pierre-François. )
■^ EYMAR (Ange-Marie comte d'),
député de la noblesse du bailliage de For-
calquier aux états-généraux de 1789, se
réunit au tiers-état, et suivit les idées de
la révolution. Admirateur enthousiaste
EZE
de J. J. Rousseau, il lui fit élever une
statue. Envoyé en ambassade en Piémont,
il prit part à la révolution qui força le
roi de Sardaigne à quitter ses états, et se
conduisait avec une sévérité qui lui fit
beaucoup d'ennemis. Rappelé par le Direc-
toire , il fut quelque temps après nommé
préfet du département du Léman, et
mourut à Genève le H janvier 1803. On
a de lui 1° Bc'/lcxioiis sur la nouvelle di~
vision du royaume, 1 7 90, in-8 . 2" Anec-
dote sur F'ioti, in-12. 3" Une Notice his-
torique sur Dolomieu, qu'il avait accom-
pagné dans son excursion sur les Alpes.
11 paraît que l'ouvrage intitulé : De l'in-
fluence de la se'vérite' des peines sur les
crimes qu'on lui a attribué , n'est pas de
lui. Il a traduit de l'espagnol , El delin-
quente honorado de Kp. me'ch. jovellor-
nos , Marseille , 1777, in-8 .
EYMERICK. F oyez Nicolas.
EZÉCHIAS , roi de Juda , successeur
d'Achaz , son père , l'an 727 avant J. C. ,
imita en tout la piété de David. Il détrui-
sit les autels élevés aux faux dieux, brisa
les idoles, et mit en pièces le serpent
d'airain que les Israélites adoraient. Il
fit ouvrir ensuite les portes du temple ,
et assembla les prêtres etleslévitespour
le purifier. Après cette cérémonie, le
saint roi y monta avec les principaux de
Jérusalem, y immola des victimes, et
rétablit le culte du Seigneur. Son zèle
fut récompensé; il reprit les villes dont
les Philistins s'étaient emparés sous le
règne d'Achaz , son père. Vainqueur des
Philistins , il voulut secouer le joug des
Assyriens, et leur refusa- le tribut ordi-
naire. Sennachérib, outré de ce refus,
porte la guerre dans le royaume de Juda;
il y était entré, lorsqu'Ezéchias fut at-
taqué d'une maladie pestilentielle. Le pro-
phète lasïe vint lui annoncer sa mort
prochaine. Dieu , toiiché par ses prières,
lui renvoya le prophète pour lui annon-
cer sa guérison miraculeuse. Isaïe con-
firma la certitude de sa promesse par un
prodige nouveau : il fit reculer de dix
degrés l'ombre du soleil sur le cadran
d'Achaz. Quelques interprètes ont cru
<iue le soleil rétrograda dans son cours ;
mais quoique les grandes révolutions ne
V,
EZE 177
coûtent pas plus à Dieu que les petites ,
il est plus simple et plus naturel de bor-
ner le prodige demandé par Achaz , au
lieu où il s'exécuta. Ezéchias exprima sa
reconnaissance par le beau cantique,
plein de sentiraens profonds et des plus
touchantes images, qu'on lit auchap. 38
d'Isaïe : Ego dixi in dimidio dierum meo-
rum , etc. Méredac Baladan , roi de Ba-
bylone , ayant su les différentes mer-
veilles opérées en faveur d'Ezéchias, lui
envoya des ambassadeurs pour l'en féli-
citer. Le monarque , sensible à cet hom-
mage, leur étala tous ses trésors. Isaïe
le reprend de ce mouvement de vanité,
et lui prédit que tout sera transporté à
Babylone. Ezéchias s'étant humilié sous
la main qui le menaçait, obtint qu'il
ne verrait point ce malheur. Cependant
Sennachérib s'était rendu maître des plus
fortes places , et menaçait Jérusalem. La
paix ne se fit qu'aux conditions les plus
dures. Le vainqueur exigea du vaincu ,
qu'on lui payerait une somme immense.
Ezéchias épuisa ses trésors et dépouilla le
temple pour satisfaire à ses engagemens ;
mais à peine avait-il compté l'argent, que
Sennachérib rompit le traité, et revint
ravager la Judée, blasphémant contre le
Dieu qui la protégeait. Il s'avançait vers Jé-
rusalem, mais l'ange du Seigneur ayant tué
dans une seule nuit 185,000 hommes de
son armée, il fut obligé de prendre la fuite.
Ezéchias , délivré de ce redoutable en-
nemi, chercha Dieu de tout son cœur,
le trouva , et mourut l'an 698 avant J. C.
à 63 ans. Génebrard assure, d'après les
hébreux , qu'il était savant dans les ma-
thématiques , et qu'il fit une réformation
de l'année des Juifs , par i'intercallation
du mois de Nisan au bout de chaque
troisième année.
EZÉCHIEL , l'un des quatre grands
prophètes, fils du sacrificateur Buzi , fut
emmené captif à Babylone avec Jécho-
nias. Il commença à prophétiser l'an 595
avant J. C. Il fut transporté en esprit
dans le temple de Jérusalem, où Dieu
lui montra les abominations qui s'y com-
mettaient. Il eut ensuite plusieurs visions
miraculeuses sur le rétablissement du
peuple juif et du temple, sur le règne du
12
178 EZE
Messie et la vocation des gentils. Il con"
tinua de prophétiser pendant 20 ans,
et fut tué à ce que l'on croit, par un
prince de sa nation , à qui il avait repro-
ché son idolâtrie. Dieu lui ordonna plu-
sieurs actions symboliques, qui ont
fourni des plaisanteries bien déplacées
aux incrédules modernes. On sait que
l'un d'eux, particulièrement fameux par la
légèreté et l'indécence de ses critiques,
parlait volontiers du pain d'Ezéchiel,
cuit avec des excrémens séchés au soleil
(comme il est d'usage dans plusieurs
plages d'Orient , oîi le bois est rare ) ,
mais que le dégoûtant commentateur re-
présentait sous un autre aspect. Il suffit
de remarquer, 1 ° que la plupart des choses
dont les incrédules ont tourné en ridi-
cule la représentation réelle et physique,
ne se passèrent qu'en vision. Il ne faut
qu'en lire le récit pour en être convaincu.
2° Le langage typique était alors usité
dans la plus grande partie de l'Asie ; plu-
sieurs peuples de l'Orient le conservent
encore ; on l'a retrouvé dans l'Amérique.
Si les actions symboliques des prophètes
étaient surprenantes par leur singula-
rité, quelquefois même par leur durée,
elles constataient par-là même, devant
le peuple nombreux qui les voyait, l'exi-
stence de la prophétie; elles ne lais-
saient aucun lieu de soupçonner apràs
l'événement, qu'elle eût été controuvée.
Les malheurs annoncés par les pro-
phètes faisaient plus d'impression sur
les coupables par l'appareil de l'avertis-
sement. Le langage typique est en gé-
néral le plus énergique et le plus pro-
pre à faire impression. « Trasibule et
» Tarquiu, dit l'auteur de l'Emile, cou-
» pant des têtes de pavots ; Alexandre
» appliquant son sceau sur la bouche de
»> son favori ; Diogène marchant devant
» Zenon , ne parlaient-ils pas mieux que
» s'ils avaient fait de longs discours ? Da-
» rius engagé dans la Scythie avec son
» armée , reçoit de la part du roi des
» Scythes un oiseau, une grenouille,
M une souris et cinq flèches. Cette haran-
» gue fut entendue, et Darius n'eut plus
}) grande hâte que celle de regagner son
» pays comme il put. » Ces observations
EZE
ont lieu à l'égard de plusieurs passages
de Jérémie et des autres prophètes. Des
philosophes hypocrites se sont récriés
sur quelques images et expressions de ce
prophète , et lui ont reproché d'avoir
peint l'idolâtrie de Jérusalem et de Sa-
marie sous l'image de deux prostituées,
dont la lubricité est représentée avec des
expressions que nos mœurs ne supportent
pas. Mais il ne faut pas juger des mœurs
anciennes par les nôtres. « Chez un peuple,
» dit un auteur, dont les mœurs sont
» simples et pures , le langage est moins
» châtié que chez les autres. Lorsqu'il y
» a peu de communication entre les deux
j> sexes, les hommes parlent entre eux
V plus librement qu'ailleurs. Les enfans
I) et les personnes innocentes parlent de
« tout sans rougir; elles ne pensent pas
» qu'on puisse en tirer de mauvaises con-
» séquences. C'est le désir coupable de
» faire entendre des obscénités , qui en-
» gage les impudiques à se servir d'ex-
M pressions détournées , afin de révolter
» moins ; ainsi , plus les mœurs sont dé-
j> pravées , plus le langage devient me-
» sure et chaste en apparence. Celui des
» Hébreux , qui est très naïf et très libre,
» loin de prouver la corruption de leurs
» mœurs, démontre précisément le con-
» traire, v C'est probablement à l'épo-
que où les mœurs commencèrent à se
dépraver par la suite des siècles , que les
Juifs comprirent que les tableaux tracés
parEzéchiel, pouvaient être dangereux,
et qu'ils ne permirent plus de lire ses
prophéties avant l'âge de 30 ans ( voyez
Salomon ). Les Prophe'ties d'Ezéchiel
sont fort obscures , surtout au commen-
cement et à la fin. Elles sont au nombre
de vingt-deux , et disposées suivant l'or-
dre des temps qu'il les a faites. Prado et
Villalpand , jésuites , ont fait de savans
commentaires pour les cclaircir. Son
stile , suivant saint Jérôme , tient un
milieu entre l'éloquent et le grossier.
Il est rempli de sentences , de comparai-
sons , de visions énigmatiques. Ce pro-
phète parait très versé dans les choses
profanes.
EZËCHIEL, juif, poète grec, floris-
sait après le milieu du 1*' siècle de l'ère
I
FAB
cbrëtîenne , ou selon Huet , un siècle , et
selon Sixte de Sienne, 40 ans avant J. C.
D'une tragédie qu^il avait faitesurla sortie
des Hébreux hors de l'Egypte , il ne reste
plus que des fragmens que FrédéricMorel
a traduits en prose et en vers latins. Ils
parurent à Paris en 1598, in-8. On les
trouve aussi dans Corpus Poetarum grce-
corum, Genève, 160G et 1614, 2 vol,
in-folio.
EZZELINO ou EcKLiso, tyran ori-
ginaire d'Allemagne , mais né à Onéra
dans la Marche Trévisane en Italie, se
montra si pervers dès son enfance, qu'on
disait de son temps qu'il avait été en-
gendré par le démon. Après avoir été
quelque temps à la tôle des Gibelins , il
quitta ce parti pour régner despotique-
ment sur Vérone , Padoue , et sur quel-
ques autres villes d'Italie dont il s'était
emparé. Les papes Grégoire IX, Inno-
cent IV et Alexandre IV , lancèrent
inutilement contre ce scélérat les foudres
du Vatican. Le seule Antoine de Padoue
mit pendant quelque temps un frein à ses
fureurs. « Ce saint et courageux reli-
» gieux, dit un historien du temps, alla le
» trouver à Vérone, et lui demanda une
» audience qui lui fut accordée. Lors-
» qu'on l'eut introduit dans l'apparte-
» ment d'Ezzelino , il le vit assis sur un
a trône, et environné d'une troupe de
» soldats, prêts à lui obéir au moindre
» signe. Ce spectacle ne l'effraya point ;
» il osa même dire au tyran , que ses
M massacres , ses pillages et ses sacrilèges
» criaient vengeance au ciel , et que tous
» ceux qu'il avait dépouillés de la vie ou
» de leurs biens, étaient devant Dieu
» comme autant de témoins qui deman-
» daient justice. Il dit encore d'autres
FAB 179
» choses qui ne supposaient pas moins
î) de hardiesse. Les gardes s'attendaient à
» tout moment qu'ils allaient recevoir
» l'ordre de tomber sur le saint. Mais
» ils ne purent revenir de leur étonne-
» ment , lorsqu'ils virent Ezzelino des-
» cendre de son trône , pâle et trem-
« blant, se mettre une corde au cou,
» se jeter , fondant en larmes , aux pieds
» d'Antoine, et le conjurer de lui obte-
» nir de Dieu le pardon de ses péchés.
» Le saint le releva , et lui donna des
» avis convenables à la situation oii il
a se trouvait. Quelque temps après Ez-
» zelino envoya un riche présent à An-
» toine ; mais celui-ci le refusa , en di-
» sant que le plus agréable présent que
» le prince pût lui faire, était de resti-
» tuef aux pauvres ce qu'il leur avait
» injustement enlevé. Ezzelino parut d'a-
» bord avoir changé de conduite. Mal-
» heureusement ces belles dispositions
» s'évanouirent , il retomba dans ses pre-
M miers excès. » On prêcha la croisade
contre lui. Toutes les villes de la Marche
Trévisane, et les princes de Lombardie,
se liguèrent pour en délivrer l'Italie. Il
fut pris devant Milan qu'il allait attaquer.
On le mena à Socino , oii il mourut dés-
espéré en 1259, après avoir exercé
pendant 40 ans la tyrannie la plus bar-
bare et la plus odieuse. La ville de Pa-
doue ayant tenté plusieurs fois de secouer
le joug, Ezzelino fit mourir plus de onze
raille citoyens de toute condition. Ce
monstre était aussi superstitieux que
cruel. Il n'entreprenait rien , sans avoir
consulté quatre astrologues, ployez sa
Vie écrite en italien par le Père Gérard ,
1560, in-8 , et traduite en français par
François Cortaud, Paris, 1644, in-l2.
F
FABBRONI. Voyez Fabroni.
FABER ( Gilles ) , carme , mort à Bru-
xelles en 1 506 , parut avec distinction
dans la chaire, en un temps où le minis-
tère de la parole était avili par le ridicule
et le burlesque que les prédicateurs mê-
laient aux vérités sacrées. Jean Trilhème
lui attribue une Chronique de son ordre ,.
une Histoire de Brahant , des Commçn-^
taires et d'autres ouvrages.
i8o FAB
FABER ( Jean ), jurisconsulte célèbre,
appelé ainsi qu'un de ses livres , le Mar-
teau des hérétiques , naquit à Leutkirch
eu Souabe vers l'an 1470, entra dans
l'ordre de Saint-Dominique, et brilla
dans les universités d'Allemagne L'évo-
que de Constance le fit son vicaire-gé-
néral en 1519; et Ferdinand, roi des
Romains , depuis empereur , le choisit
pour son confesseur en 152G. Ce prince
le nomma en 1531 à l'évèché de Vienne ,
que son zèle contre les hérétiques lui avait
mérité. Il mourut le 12 juin 1541 , âgé
de G3 ans , laissant plusieurs ouvrages
d'histoire , de controverse et de piété,
en 3 vol. in-fol. , Cologne , 1537 et 1541.
Celui de ses écrits qui lui fit le plus d'hon-
neur , est son Malleus hœreticorum ,
dans lequel les questions controversées
sont traitées avec beaucoup de solidité et
de chaleur. — Quelques auteurs distin-
guent ce Jean Faber d'avec un autre Jean
Faber , également dominicain, et né aussi
en Souabe , qui vivait dans le même
temps , écrivait dans le même genre et
de la même manière : ils font naître ce-
lui-ci à Heilbron en 1 500 et il mourut
selon leur opinion en 1570. Ils lui at-
tribuent 1° Enchiridion Biblioruni ,
Augsbourg, 1549 , in-4. 2° Fructus qui-
tus dignoscuntur heretici , ouvrage so-
lide et curieux , oii l'on trouve des par-
ticularités remarquables touchant Luther.
3° Libcllus quod fides esse possit sine
charitate. Augsbourg, 1548, in-4.
FABER ( Pierre ) , né en Savoie , fut
un des neuf premiers compagnons de saint
Ignace de Loyola , et seconda les travaux
du zélé fondateur , tant pour l'établisse-
ment de la compagnie, que pour le bien
général de l'Eglise. Il fit plusieurs courses
apostoliques en Italie , en Espagne et en
Allemagne, convertit un grand nombre
de libertins et d'hérétiques, et répandit
l'instruction chrétienne, particulièrement
dans les villages et parmi les pauvres. Il
mourut l'an 154G.
FABER ( Basile ) , né à Soraw en Si-
lésie l'an 1 520 , fut recteur du collège
d'humanités à Erfort, oii il mourut en
1576, et s'est fait connaître par son Thé-
saurus eruditiotùs scholastiae y qu'il pu-
FAB
blia en 1571. Auguste Buchmer, Cella-
rius, Greevius firent successivement des
augmentations à ce dictionnaire , dont les
citations sont fort exactes. La dernière
édition est de la Haye, 1735, 2 vol. in-fol.
Faber a donné aussi une traduction alle-
mande des remarques latines de Luther
sur la Genèse , et fut un des disciples les
plus ardens de cet hérésiarque.
* FABER ( Jean-Ernest ) , savant pro-
fesseur de langues orientales et de phi-
losophie, dans l'université de Kiel , en-
suite dans celle d'iéna , était né en 17 45
à Simmerhausen , dans le duché d'Hild-
burhauscn en Saxe, et mourut à léna le
15 mars 177 4. On lui doit i" Descriptio
commentarii in septuaginta interprètes^
Gottingue, 1768-69, 2 parties in-4. THis-
toria mannœ intcr Hebrœos, 1770-73
3° Programma novumdc Messia , exac-
tis 490 annis post exilium Judœorum
babijlonicum , nascituro ex Zacharia,
cap. 3 , 3^. S , 9 , 10. 4" Jésus ex nata-
liuni opportunitate Messins ^ léna, 1772,
in-8. 5" Archéologie des Hébreux , ea.
Allemand, première partie. Halle, 1773,
in-8. Faber a publié en outre les 2 pre-
miers numéros de la Nouvelle bibliothè-
que philosophique, en allemand, Leipsick,
177 4 , continuée par J. C. Hennings.
FABER. Foyez Fabbe, Favkk, Fevre,
Le Fèvre.
FABERT ( Abraham ) , maréchal de
France, naquit à Metz en 1599. Son père,
maître échevin de cette ville et fils d'un
riche libraire de Nancy , avait été anobli
par Henri IV. Il destina son fils au bar-
reau ou à l'Eglise ; mais le jeune Fabert,
né pour la guerre , voulut suivre son
penchant. Dès l'âge le plus tendre, il
s'occupait à différens exercices d'infan-
terie avec des figures de carton , qu'il fai-
sait mouvoir suivant le commandement.
Il servit sous le duc d'Epernon dans plu-
sieurs occasions importantes. Il se signala
surtout en 1635. On commença dès lors
à conter mille particularités fabuleuses
sur la cause de ses succès. On lesattribua
au diable , quoique l'on ne put mécon-
naître son courage et ses talens. Il sauva
l'armée du roi à la retraite de Mayence ,
cl ne se distingua pas avec moins d'éclat
I
FAB
>
en Italie qu'en Allemagne. Blessé à la
cuisse au siège de Turin, il ne voulut ja-
mais souffrir qu'on la lui coupât. « Il ne
» faut pas mourir par pièces , dil-il à Tu-
» renne et au cardinal de La Valette, qui
» l'exhortaient à cette opération : la mort
)) m'aura tout entier, ou elle n'aura rien. »
En 1G54, il prit Stenai. Ses services fu-
rent payés par le gouvernement de Se-
dan , et par le bâton de maréchal de
France en 1668. Le roi lui offrit depuis
le collier de ses ordres ; il le refusa , ne
se trouvant pas en état de produire les ti-
tres nécessaires pour recevoir cet hon-
neur. Louis XIV lui répondit , « que le
M refus qu'il faisait , lui inspirait plus
» d'estime pour lui , que ceux qu'il hono-
» rait du collier ne recueillaient de gloi-
» re dans le monde. » Fabert mourut en
1662 , à 63 ans. On fit des contes sur sa
mort , qui, tout étranges qu'ils étaient,
ne laissèrent pas de se répandre , et
trouveront encore quelques partisans
dans ce siècle philosophe. On avait ima-
giné qu'il était sorcier ; on prétendit que
le diable l'avait enlevé. Ce qui a pu ac-
créditer ces bruits , c'est que le maréchal
Fabert avait du goût pour l'astrologie ju-
diciaire, et d'autres curiosités vaines ou
dangereuses ( voyez Fausïus, Luxem-
bourg, Philippe u'Orléans, etc. ). Le Père
Barre , chanoine de Sle. -Geneviève , a
publié sa Fie en 1752 , en 2 vol. in-12.
Il y a des choses curieuses , mais trop de
minuties et de détails étrangers au ma-
réchal. Voici un trait qui fait l'éloge de
son caractère. Les troupes de Galas , gé-
néral de l'empereur, ayant pénétré en
Champagne , manquèrent de vivres. Les
généraux français les ayant obligés de se
retirer , elles tuèrent dans leur retraite
tous ceux qui leur en refusèrent. Fabert ,
qui les poursuivait, entra dans un champ
abandonné et couvert d'officiers et de
soldats autrichiens blessés et mourans.
Un français qui avait l'âme féroce , dit
tout haut : « Il faut achever ces malheu-
■» reux , qui ont massacré nos camarades
» dans la retraite de Mayence. — Voilà
» le conseil d'un barbare , reprit Fabert ,
» cherchons une vengeance plus noble. »
Aussitôlil fitdistribueràceux qui purent
FAB i8i
prendre une nourriture solide , le peu de
provisions que son détachement avait ap-
portées. Les malades furent ensuite trans-
portés àMézières, où, après quelques jours
de soin, la plupart recouvrèrent la santé.
Le père du maréchal Fabert est auteur
des Notes sur la Coutume de Lorraine ,
1667 , in-folio.
FABIEN ( Saint ) , romain ou italien,
monta sur la chaire de Saint-Pierre après
Anthère, en 236. Il bâtit plusieurs égli-
ses dans les cimetières où reposaient les
corps des martyrs. Il envoya des évêques
dans les Gaules pour y annoncer l'Evan-
gile ; mais plusieurs auteurs datent la
première mission des évèques envoyés en
France, du pontificat de saint Clément.
Saint Fabien mourut pour la défense de
la foi, au commencement de la persécu-
tion de Dèce, en 250, après un pontificat
de 14 ans, 1 mois et 10 jours. On lui at-
tribue des décrétales({\x\ sont visiblement
supposées.
FABIOLE ( Sainte ), dame romaine,
célèbre par ses vertus, surtout par sa cha-
rité et sa pénitence , dont saint Jérôme
fait le plus beau et le plus touchant éloge
dans son Epitaphium Fabiolœ. Sa vie
fournit une preuve décisive contre ceux
qui soutiennent la dissolubilité du ma-
riage en cas d'adultère. Cette femme il-
lustre, après s'être séparée d'un mari adul-
tère, en avait épousé un autre. Les lois
civiles, dont plusieurs émanées des em-
pereurs païens subsistaient encore dans
le code impérial , paraissaient autoriser
ce second mariage. Mais Fabiole ne tarda
pas à reconnaître son erreur et sa faute ;
elle en fit le jour même de Pâques une
pénitence éclatante , à la vue de tout le
peuple romain. Il ne se trouva , ni dans
cette capitale du monde , ni dans tout
l'empire, de théologien qui prétendît ou
justifier le mariage ou blâmer la péni-
tence. L'opinion de Launoy n'était donc
pas connue alors parmi les chrétiens. Et
qu'on ne dise pas que c'est pour être pré-
cisément contraire aux lois ecclésiasti-
ques que ce mariage fut réprouvé : car il
le fut, comme formellement contraire à
la doctrine de l'Evangile : Putabat , dit
saint Jérôme, à se virum Juste dimis-
iSa
FAB
tum, NEC EVANGELII RIGORESl ROVERAT ,
IN QDO NUBKNDI UNIVERSA EXCUSATIO, VI-
VENTIBUS VIRIS FOEMINIS AMPUTATUR
Aliœ sunt leges Cœsarum , aliœ Chris-
ti : aliud Papinianus , aliud Paulus
noster prœcipit ( Hier. Fpit. Fabiolœ ).
Qu'on juge après cela ou de rignorauce
ou de la mauvaise foi des écrivailleurs ,
qui , dans ces dernières années , ont osé
se servir de l'exemple de Fabiole pour
autoriser le divorce ! Celte sainte mourut
à Rome , \ers l'an 400. « Rome , dit saint
y Jérôme , était un champ trop étroit
» pour sa grande charité. Elle s'élançait
» dans les îles , et parcourait les rivages
» de la mer , tantôt en personne , tantôt
« par les ministres de ses bienfaits. » An-
gusta misericordia ejus Romafuit. Per-
agrabat insulas ; et reconditos curvo-
rum littoriim sinus, vel proprio corpore^
vel transmissa muuiflcentia circuibat.
FABIUS MAXIMUS ( Quinlus ) , dit
RuUianus , est le premier de la famille
des Fabiens qui fut honoré du titre de
Maximus , pour avoir ôté au petit peuple
la disposition des élections. Général de
la cavalerie, l'an 324 avant J. C. , il força
le camp des Saninites et remporta une
victoire complète. Le dictateur Papirius,
fâché qu'il eût donné la bataille contre
son ordre , voulut punir sa désobéissance;
mais le peuple romain et l'armée obtin-
rent sa grâce. Fabius fut cinq fois consul,
deux fois dictateur et une fois censeur.
Il refusa cette charge une seconde fois ,
disant que c'était contre la coutume de
la république. Il triompha des Âpuléiens
et des Lucériens , puis des Samniles , et
enfin des Gaulois , des Umbriens , des
Marses et des Toscans. Ce fut lui qui régla
que les chevaliers romains, montés sur
des chevaux blancs , iraient , le 15 juil-
let , depuis le temple de l'Honneur jus-
qu'au Capitolc.
FABIUS MAXIMUS ( Quintus ) , fils
' du précédent. Pendant son consulat, son
père vint à lui sans descendre de cheval ;
il lui fit ordonner de mettre pied à terre.
Alors cet illustre romain , embrassant son
fils , lui dit : n Je voulais voir si tu sa-
» vais ce que c'est que d'être consul . »
FABIUS (Quintus Maximus Verruco-
FAB
sus ) , surnommé Cunctator ou le Tem-
poriscur , un des plus grands capitaines
de l'ancienne Rome , fut élevé cinq fois
à la dignité de consul. Pendant son pre-
mier consulat, l'an 233 avant J. C. , il
défit les Liguriens. Sa patrie , réduite à
l'extrémité après la bataille de Trasimène,
eut recours à lui ; on le créa dîclaleur.
Il imagina une nouvelle façon de com- ^
battre Annibal. Il voulut le fatiguer par i
des marches et des contre-marches, sans
jamais en venir aux mains. Ces ruses lui
méritèrent le nom de Tcmporisr.ur. Les
Romains , raéconlens de ces remises, dont
ils ne pénétraient pas la finesse, le rap- i
pelèrent sous prétexte de le faire assister
à un sacrifice solennel , et donnèrent la
moitié de son autorité à son lieutenant
Minulius Rufus, homme aussi ardent que
Fabius était réservé. Ils revinrent bientôt
de leur erreur. Le téméraire lieutenant
s'étant engagé dans une embuscade , son
sage général le tira de ce péril. Slinutius,
pénétré de reconnaissance envers son li-
bérateur, lui remit ses troupes , content
d'apprendre sous lui à vaincre et à com-
mander. Fabius combattit avec sa pru-
dence ordinaire. On lui décerna le nom
de Bouclier de Rome. Après la bataille
de Cannes , il lassa tellement les trou-
pes d'Annibal , qu'elles ne furent plus en
état de se défendre contre les Romains.
11 reprit Tarente sur le général Carthagi-
nois. Ayant réglé avec lui le rachat des
captifs , et le sénat refusant de ratifier
son accord , il vendit tous ses biens pour
s'acquitter de sa parole. On rapporte
qu'Annibal ayant appris la ruse que Fa-
bius avait employée pour se rendre maî-
tre de Tarente , il s'écria plein d'étonne-
ment : «Quoi, les Romains ont donc aussi
» leur Annibal ! » .Ce dernier tenta vai -
nement d'attirer le romain au combat.
Il lui fit dire un jour : « Si Fabius est
» aussi grand capitaine qu'il veut qu'on
» le croie , il doit descendre dans la plaine
» et accepter la bataille. » Fabius répon-
dit froidement : « Si Annibal est aussi
» grand capitaine qu'il le pense , il doit
w me forcer à la donner. » Cet homme
illustre mourut quelques années après ,
âgé de près de cent ans . si l'on en croit
FAB
Valère-Maxime, l'an 204 avant J. C. C'est
de lui qu'Ennius a dit :
Chus honio nobi^ cuiirtando reslituït rem;
Non (ioiiebat eiiiui rumorea au te tatuleni.
FABIUS PICTOR, le premier des
Romains qui écrivit l'Histoire de sa pa-
trie, vivait vers l'an 21 G avant J. C. L'ou-
vrage que nous avons sous son nom , est
une pièee supposée, et du nombre de celles
qui ont été publiées par Aunius de Vi-
terbe. Ceux de cette famille prirent le
nom de Pictor , parce que celui dont ils
descendaient , avait fait peindre les murs
du temple de la Santé.
FABIUS DOSSENNUS ou Dorsenus,
composa des farces appelées par les Ro-
mains Atellanes , de la ville d'Attella
dans le pays des Osques, où elles prirent
naissance. Horace , Sénèque et Pline par-
lent de ce poète. On ne sait pas en quel
temps il a vécu.
FABIUS aiARCELLINUS , historien
du 3* siècie , est cilé par Lampride ,
comme auteur d'une Fie cC Alexandre
Mamme'c.
FABIUS RUSTICUS, historien du
temps de Claude et de Néron, fut ami de
Sénèque. Tacite loue son stile dans ses
Annales et dans la Fie d'Agricola ; et
cet éloge d'.un historien qui passait pour
satirique , est un préjugé en faveur des
écrits de Fabius.
FABRE (Jean-Claude) naquit à Paris
le 15 avril 1668 , d'un père chirurgien. H
entra chez les Pères de l'Oratoire et y
professa avec distinction. Une édition du
Dictionnaire de Rickelet , dans laquelle
il inséra plusieurs articles sur les matières
de théologie , et des satires odieuses dic-
tées par l'esprit de parti, l'obligea de
sovtir de sa congrégation. Il y rentra en
1715, et y mourut en 1753, dans la mai-
son de St. -Honoré à Paris, à 85 ans. Il
avait prêché avec quelque succès , et son
esprit se pliait facilement à tous les genres
d'étude. On a de lui 1° L'édition citée
du Dictionnaire de Riclielet , revue ,
corrigée et augmentée , en 2 vol. in-fol.,
Lyon, 1709, sous le titre d'Amsterdam.
2° Un petit Dictionnaire latin et fran-
çais , in-8 , dressé sur les meilleurs au-
teurs classiques , et dont ou a fait plu-
FAB i83
sîeurs éditions. 3° Une traduction des
OEuvres de Firgile , avec des disserta-
tions , des notes et le texte latin , en 3
vol., Lyon , 1721 , réimprimé en 1741,4
vol. in-12. Cette version, lâche et prolixe,
n'est guère au dessus de celle de Marti-
gnac. 4° Une Continuation de l'Histoire
ecclésiastique de Fleuri/, en 16 vol. in-4
et in-1 2 , depuis 1414, jusqu'à l'an 1 595.
On en a une nouvelle édition , 1777. Il
l'avait poussée beaucoup plus loin ; mais
les deux derniers tomes ayant été chan-
gés en quantité d'endroits par des mains
étrangères, et lui ayant d'ailleurs été dé-
fendu de donner de nouveaux volumes ,
la suite est restée manuscrite. Le conti-
nuateur est bien inférieur à l'auteur qu'il
continue , pour l'onction du stile et pour
le choix des matières , et surtout pour la
sagesse et l'éloignement de l'esprit de
parti. Il étend avec excès son travail, et
mêle à l'histoire ecclésiastique trop d'his-
toire civile. Ce n'est proprement qu'une
compilation écrite d'un stile facile, mais
sans correction et sans élégance. L'abbé
Rondet qui l'a continuée après lui , a en-
core plus mal réussi, et donné au fana-
tisme de la petite église un essor plus
libre. C'est cependant celte continuation
de Fleury, qui est continuellement citée
par les compilateurs du jour ; le fanatique
Fabre , le fanatique Rondet sont sans cesse
allégués comme des autorités légales, par
des gens même qui veulent avoir des ti-
tres à la philosophie. Tel est le sort de
l'histoire dans ces jours de subversion et
de mensonge. 5° Entretiens de Christine
et de Pélagie, sur la lecture de l'Ecri-
ture sainte, in-12. 6" Un Abrégé de
r Histoire ecclésiastique en manuscrit. 7*
La table de la traduction française de
l'Histoire du président de Thou , in-4. Il
avait aussi commencé la table du Journal
des savans , dont il se déchargea peu
après sur M. l'abbé de Claustre, à qui on
est redevable de cet ouvrage en 10 vol.
in-4. — Il ne faut pas le confondre avec
un abbé Fabde ou Fa vre , qui a donné des
Lettres sur la visite de M. des Achards , '
ouvrage dicté par l'esprit du même parti
et supprimé par un décret du saint-office
le 16 juin 1746.
ï84 FAB
• FABRE D'EGLANTINE (PUiHppe-
François-Nozaire ) , membre de la Con-
Tcntion et poète dramatique , né à Car-
cassonnc eu 1766, avait un caractère
changeant et d'une mobilité extraordi-
naire ; après avoir quitté la maison pater-
nelle, il fut successivement peintre, gra-
veur , musicien , comédien , poète et
législateur. Ayant remporté une eglantine
au concours des Jeux floraux , il ajouta
le nom de cette fleur à son nom. Après
avoir quitté le théâtre comme comédien,
il y reparut comme auteur. Sa carrière
poétique ne fut point commencée par
des chefs-d'œuvre ; ses premiers essais
furent F Amour et V intérêt^ et le Pré-
somptueux^ ouvrages dont il n'est plus
question nullepart. Bientôt, aprèsavoir lu
\ Optimiste ou Vlwmme content de tout ,
de Colin d'Harleville , il s'indigna que
dans ce moment de bouleversement gé-
néral, on pîit trouver quelqu'un dans
cette position ; il fit alors le Phylinte de
Molière ou la suite du Misanthrope ,
comédie en 5 actes et en vers , qui est
sans contredit le chef-d'œuvre de ce poète,
c'est la plus forte conception dramatique
que l'on ait faite depuis Molière ; mais
sous le rapport du stilc , elle présente
des imperfections qui ont éprouvé de
nombreuses critiques. En 1791 il fit re-
présenter r/«/n5'we épisiolaire , comédie
en 6 actes et en vers , qui maintint par
sa gaîté communicative la réputation de
l'auteur. En même temps que Fabre ac-
quérait des titres à une immortalité glo-
rieuse , il paraissait sur une autre scène ,
sur la scène politique où sa conduite et
ses principes lui donnaient des titres à
une célébrité d'un autre genre. Il avait
embrassé avec ardeur le parti de la révo-
lution. Membre de la société des Jacobins,
ami et secrétaire de Danton , membre de
la municipalité usurpatrice qui s'installa
«Ue-même dans la nuit du 9 au 10 août
1 792 , il partagea tous les excès de cette
époque. Député à la Convention par la
ville de Paris , il se prononça pour les
mesures les plus violentes , et dans le
procès du roi , il vota la mort sans sursis
et sans appel. Ce farouche républicain ne
tarda pas à être accusé de royalisme ; en
FAB
lui reprocha plus tard d'être le chef du
modérantisme. Son crime , aux yeux des
révolutionnaires, était d'avoir mis de l'in-
dépendance dans les mesures tyranniques
qu'il proposait , et de ne s'être point atta-
ché au char de Robespierre. D'abord on lui
reprocha des forfaits qu'il n'avait point
commis, et, lorsqu'il voulut se justifier, il
fut interrompu par les cris à la guil-
lotine. Arrêté comme falsificateur d'un
décret relatif à la compagnie des Indes, il
repoussa avec énergie dans son Mémoire
cette fausse inculpation. Sorti victorieux
de cette accusation , il retomba bientôt
sous le poids d'une autre , et lui , qui était
si fier de se dire français , fut arrêté com-
me complice d'une conspiration de l'é-
tranger. Condamné à mort avec Danton,
Camille Desmoulins , etc. , il mourut
avec eux le 6 avril 1794. Comme person-
nage politique, Fabre a laissé un nom
odieux : partisan des mesures révolu-
tionnaires , assassin de Louis XVI , il est
voué à l'exécration des siècles. Sa gloire
littéraire jettera peut-être un jour quel-
que voile sur ses infamies politiques. La
postérité a presque oublié le rôle que
joua dans la révolution d'Angleterre l'au-
teur du Paradis perdu -. nous désirons
que l'histoire fasse paix au conventionnel
Fabre, pour ne rappeler que les composi-
tions du poète. Outre les pièces que nous
avons citées, il fit d'autres comédies par-
mi lesquelles on remarque encore les
Précepteurs , en 6 actes et en vers, jouée
après la mort de l'auteur, imprimée en
1799, in-8, et traduit en allemand par
M™^ Kl)tzebue. 11 avait fait aussi une tra-
gédie, quelques pièces de vers et d'au-
tres écrits qui ont été réunis sous le titre
d'OEuvres mêlées et posthumes, Paris,
1802, 2 vol. in-8 et in-12. On a publié
en 1796 une Correspondance de Fabre
d'Eglantine, précédée d'une notice his-
torique sur son existence , morale, phy-
sique et dramatique, et d'un fragment
de sa vie écrite par lui-même , Paris , 3
vol. in-12.
• FABRE D'OLIVET (Antoine), litté-
rateur, naquit à Ganges (Héraut) le 8 dé-
cembre 1768. Il appartient à la même fa-
mille que le précédent, et il était comme
I
Paë
lui de la religion protestante. Deslîuéau
commerce, il vint à Paris à l'âge de 12
ans. S'étant lie avec quelques jeunes au-
teurs, il prit du goût pour les lettres et
pour la musique , auxquelles il se livra
bientôt entièrement, lldtbuta, en 1789,
par un opéra intitulé La Prise de Tou-
Ion , et donna ensuite quelques autres
pièces qui furent assez bien accueillies du
public , mais qui sont aujourd'hui entiè-
rement oubliées. Il ne parait pas qu'il ait
figuré dans nos troubles révolutionnaires,
ni occupé d'emploi , au moins un peu
important , ayant presque toujours vécu
à la solde des libraires. Il est mort, à
Paris , au commencement du mois de mai
1 825. On a de lui indépendamment de la
pièce déjà citée : 1" Ze Sage de l'Indos-
tari, 1 79C, ejiun acte et en vers ; 2" ^za-
laïs , ou le gentil Aimar , 1 800 , in-8. 3°
Lettres à Sophie sur l'histoire, 1801 ,
2 vol. in-8. C'est le meilleur ouvrage de
l'auteur; i°Gue'rison de Rodolphe Grivel,
sourd et muet de naissance, 1811, in-8.
Fabre d'Olivet avait cru trouver dans des
livres orientaux le moyen de faire parler
les muets, d'après une méthode pratiquée
par les prêtres de Memphis : il en fit l'es-
sai sur le jeune Grivel , qu'il assura avoir
guéri ; ce qui éleva une contestation en-
tre lui et MM. Sicard et Prony , qui pré-
sentèrent au ministère un rapport sur ce
fait. Le livre de Fabre d'Olivet a été réim-
primé en 1819 sous le titre de notions
sur le sens de Fouie ; 5" Les vers dorés
de Pythagore , expliqués et traduits ,
pour la première fois , en vers eumolpi-
ques français , 1813, in-8 ; G" La langue
hébraïque restituée , et le véritable sens
des mots hébreux , rétabli et prouvé par
leur analyse radicale, 181G, 3 parties
in-8. 7" De F état social ou vues philoso-
phiques sur t état du genrchumain, 1 822,
2 vol. in-8. 8° Le Troubadour , poésies
occitaniques au 12* siècle, 1804 , 2 vol.
in-8. 9^ Caïn, mystère dramatique de lord
Byron, traduit en français, Paris, 1823,
in-8 : le litre de cet ouvrage fut changé
en 1 824 : l'auteur l'intitula alors Histoire
philosophique du genre humain. Fabre
d'Olivet a eu part à la rédaction de la
Bibliothèque deslîomaps. Il ne manquait
V.
PAS
j85
pas d instruction ni d'imagination , mais
on trouve dans ses écrits des idées plus
que singulières, souvent extravagantes.
* FABRE (Pierre-Jean) , médecin , re-
çu à la faculté de Montpellier , exerça sa
profession à Castelnaudary avec un suc-
cès assez grand et en tirant ses ressources
moins de la science médicale que de la
chimie dont il avait fait une étude par-
ticulière. 11 a fait paraître un grand nom-
bre d'ouvrages que ses propres éloges
ont contribué à faire i-éussir : ils ont joui
parce moyen d'une vogue peu méritée;
ils ont même été traduits en allemand.
Les principaux sont : 1° Palladium spa-
giricum, Toulouse, 1G24, in-8; 2° In-
signes curationcs variorum morborum
medicamentts chymicis jucundissima
methodo curatorum, Toulouse, 1627,
in-8 ; 3° Myrothccium spagiricum sive
Pharmacopcea chymica , Toulouse ,
1G28 , in-8 ; 4" Alchymista christianus ,
Toulouse, 1632, in-8, le plus curieux
de ses ouvrages ; 5° Panchymici scu ana-
tomiœ tolius universi Opus, Toulouse,
164G, iu-8.
* FABRE (Pierre), chirurgien, na-
quit en 17 16 à Tarascon, fut professeur
royal au collège de chirurgie et conseil-
ler du comité de l'académie royale : il
s'est fait connaître avantageusement par
plusieurs ouvrages dont Prudhomme a
donné la liste dans son dictionnaire : il
est d'atitant plus fâcheux que ce biogra-
phe ait négligé d'indiquer à chacun des
ouvrages de ce chirurgien la date et le
lieu de publication , que loin de réparer
cette omission , on l'a confondu quelque-
fois avec son frère Antoine Fabre dans la
plus savante des collections biographi-
ques publiées postérieurement. Les prin-
cipaux sont Essai sur les maladies -vé-
nériennes , 1 7 58 , in-1 2 ; Traité des ma-
ladies vénériennes , 1765, 2 vol. in-1 2,
souvent réimprimé et traduit en alle-
mand en 1777 ; Essai sur différens
points de physiologie , 1778 , in-8 , tra-
duit en allemand par Plâtrier, 1778, in 8 ;
Recherches sur la nature de l'homme
considéré dans télat de santé et dans
Vélat de maladie, 17 76, in-8 ; Réflexions
sur la chaleur animale, 1 784, in-8 ; Es-
12..
i86 FAB
sai sur tés facultés de Vâme, Amsterdam ,
1786, in-12, réimprimé en 1787; He-
cherches sur les vrais principes de Vart
de guérir, 1790, in-8. Pierre Fabre a in-
séré aussi plusieurs Mémoires dans la
collection de l'acade'mie royale de chi-
rurgie.— Fabre (Antoine), son frère, né
à Tarascon en 1710, entra et fit profes-
sion dans l'ordre des grands carmes , où il
se fit connaître par son talent pour la
chaire , et fut chargé en 1743 par les au-
torités civiles et ecclésiastiques d'Arles
où il habitait alors , de faire le panc'gy-
rique de cette ancienne ville. Ce savant
opuscule a été imprimé à Aix ; mais le
recueil des sermons de l'auteur n'a ja-
mais vu le jour. Antoine Fabre est mort
à Aix en 1793.
* FABRE (Jean), né à Nîmes le 18
août 1727, mort à Cette en 1797, est
connu par un trait de piété filiale qui a
fourni à Fenouillot de Falbaire le sujet
d'un drame intitulé VHonnête criminel.
Ses parens étaient commerrans et pro-
testans -. Louis XIV, en révoquant Vc'dit
de Nantes , avait interdit aux piotcstans
l'exercice public de leur culte : il leur
était défendu , sous peine des galères, de
se réunir pour leurs cérémonies religieu-
ses. Le l*"^ janvier 17 56, Jean Fabre ac-
compagna son père dans le lieu où, mal-
gré les ordres du prince , on se livrait
aux exercices du protestantisme. La force
armée vint dissiper cette réunion et s'em-
para des coupables. Plusieurs s'enfuirent :
le jeune Fabre était du nombre ; mais à
la vue de son père saisi par les soldats ,
il s'élance auprès de l'oflicier qui les
commandait, et le supplie de le laisser
prendre la place du vieillard qui est en-
tre leurs mains et qui s'oppose vainement
à cet acte généreux. L'ofiicier consent à
cet échange , et le jeune Fabre accusé
d'avoir enfreint les ordres du roi , est
conduit à Montpellier où le tribunal le
condamne aux galères. Ce ne fut qu'au
bout de six ans que la cour , informée de
ce trait d'amour filial , le rendit à la
liberté. Rentré dans sa famille , il revit
son vieux père , épousa une de ses paren-
tes , s'adonna au commerce et passa une
vie heureuse que le souvenir de son dé-
i'Afl
vouement devait embellir tous les jôul'S.
* FABRE DE L'HÉRAULT ( N ) ,
avocat de Montpellier, fut député à la
Coipvention , vota dans le procès de Louis
XVI la peine de mort sans sursis ni ap-
pel, et joua du reste le rôle le, plus insig-
nifiant, jusqu'à l'époque où il fut en-
voyé à l'armée des Pyrénées orientales,
en qualité de commissaire. Sans aucune es-
pèce d'idéede stratégie, il voulut se mêler
de la conduite des troupes qu'il désorga-
nisa: on peut attribuer ainsi aux fautes que
l'ignorance de l'art militaire lui fit com-
mettre , la défaite de Dagobert à Truillas
le 22 septembre 1792, la retraite forcée
de Turreau et l'inaction de Doppet. Il
chercha du moins à réparer par son cou-
rage les désastres qu'il avait amenés par
son incapacité. Attaqué par le général
Lacuesta , il combattit avec valeur et fut
tué au moment où il ralliait les fuyards.
La Convention lui accorda les honneurs
du Panthéon , et à sa veuve une pension.
* FABRE (Marie-Jacques-Joseph-Vic-
torin ) , l'un des littérateurs du 1 9* siècle
les plus précoces et les plus célèbres , na-
quit à Jaujac (A,''dèche), le 19 juillet
17 85. H débuta dans les lettres à l'ngede
de 19 ans par un Eloge de Boileau et
quelques pièces de vers : ses essais furent
accueillis par les hommes de lettres les
plus recommandables comme l'annonce
du plus beau talent ; Parny et Ginguené
prédirent à l'auteur un avenir de gloire.
En 1805 , Fabre concourut pour le prix
de poésie que l'académie française avait
proposé sur \! Indépendance de ï homme
de lettres : Millevoie remporta la palme;
mais la pièce de Victorin Fabre moins
travaillée peut-être que celle du poète
lauréat , reçut un autre genre de récom-
pense presque aussi flatteur : l'académie
regretta de n'avoir pas deux couronnes
à offrir, et ses vers furent traduits en
plusieurs langues étrangères. Dans le
concours de l'année suivante , dont le
sujet était le Voyageur , les deux rivaux
furent couronnés à la fois. Yictorin Fa-
bre publiait en même temps d'autres ou-
vrages en vers : on remarqua surtout son
discours intitulé de Vlnfluence des lu-
mières sur ia destinée des empires. Ce
I
FAB
poète quittait quelquefois sa muse poé-
tique et adressait ses hommages à la
muse de l'éloquence : son talent ne bril-
lait pas moins dans cette nouvelle car-
rière, et ce fut à l'unanimité et avec
enthousiasme que l'académie couronna
son Eloge de Corneille. Le public ratifia
ce jugement, et il n'est presque aucun
écrivain de cette époque qui n'a>it eu sur ce
beau discours l'opinion la plus favorable.
Pendant plusieurs mois, et en France c'est
extraordinaire, il ne fut question que de
cet Eloge, soit dans les journaux, soit dans
les salons. (Voyez \e& Mémoires sur la lit-
térature par Palissot , article VIctorin
Fabre). Le cardinal Maury, Suart et Fran-
çois de Neuchàteau ont consigné dans
leurs écrits leur jugement sur cet ouvrage.
Un prix avait été proposé pour le meil-
leur Tableau littéraire du 18" siècle, et
ce sujet fut mis plusieurs années de suite
au concours. Des hommes du plus grand
mérite, notamment M. de Barante, M. Eu-
scbe Salverte, etc., sont entrés dans la
lice : quelques-uns ont même fait imprimer
leurs ouvrages ; Victorin Fabre et M. Jay
furent couronnés. Dans la même séance
du mois d'avril 1810, Fabre reçut une
autre palme pour son Eloge de La-
bruyère. L'année suivante , il fut cou-
ronné pour la sixième fois ; ce fut pour
une Ode sur les embcUisscmens de Paris.
Indépendamment de ses succès , d'autres
prix lui étaient décernes par plusieurs
académies de province : celle des Jeux
floraux lui en accorda un pour son Ode
sur le Tasse , et celle du Gard pour son
Poème sur la Mort de Henri IV. Dans
l'intervalle , Fabre avait fait paraître un
assez grand nombre de pièces de vers ,
des Epîtres , des Elégies , des Discours
philosophiques ei quelques petits poèmes
d'après les croyances attribuées aux Ca-
lédoniens. Plusieurs de ces pièces furent
traduites par des poètes étrangers ; tou-
tes eurent en France le plus grand suc-
cès. Un homme qxii jouissait d'une répu-
tation aussi brillante devait être applaudi
partout : Fabre le fut dans la chaire de
La Harpe et de Chénier , à l'Athénée de
Paris ; et, quoique ses leçons n'aient point
été imprimées, elles ont laissé de pro-
MB
187
fonds souvenirs chez tous ceux qui ont
eu le plaisir de l'entendre. En 1811 , Fa-
bre parut encore dans les concours de
l'académie, et donna son Eloge de Mon-
taigne : c'était , suivant le cardinal Mau-
ry , une grande création oratoire , sui-
vant Garât , un chef-d' œuvre , et selon
l'académie elle-même, cette production
était plus forte et mieux écrite que les
autres ouvrages du même auteur : cepen-
dant Fabre n'eut qu'une mention hono-
rable. Le public fut indigné, et les journa-
listes qui avaient montré le moins de bien-
veillance pour Fabre , désapprouvèrent
hautement ce singulier jugement. Voyez
surtout le Journal de V Empire du 7 mai
1813. On chercha les motifs qui avaient
dirigé les académiciens dans cette aifaire ;
on en trouva de politiques et de litté-
raires. Fabre n'avait pas chanté le héros
du jour : son nom était le seul , avec celui
de Delille, qui n'ait pas paru dans la Cou-
ronne poétique de Napoléon le Grand ; et
les jalousies littéraires , la vue ennuyeuse
de cette gloire acquise dans un âge où
tant d'académiciens ne sont encore que
des personnages obscurs , que sais-je ?
tout ce que l'amour-propre blessé peut
exciter dans l'âme si irritable de l'homme
de lettres, voilà ce que répétait le public
avec malice , et il faut le dire , avec véri-
té. Buonaparte avait mieux jugé le talen^t
de Fabre ; il ne vit personne qui pût
mieux célébrer la gloire militaire de la
France que le jeune écrivain qui avait
cueilli tant de palmes dans les concours
académiques : il le chargea de raconter
nos triomphes , devant le cercueil de
Bessières : Fabre accepta cet honneur, et
tous les cœurs palpitèrent en entendant
cette Oraison funèbre { cet éloge est res-
té inédit). Depuis celte époque, Fabre
fut en butte à des malheurs multipliés :
presque toute sa famille descendit dans
la tombe, et il consacra plusieurs années
aux soins les plus affectueux qu'il prodi-
gua à ses parens. Pendant quatre ans , il
resta au chevet du lit d'un frère chéri ; ce
frère qu'il arracha à la mort par sa tendre
affection j il l'avait déjà sauvé, à l'âge de
20 ans, en le retirant , au péril de sa vie,
des flots du Rhône où il était englouti.
iB8 FAB
En 1821, Fabre revint à Paris, et eu
ISSi et 1825, il contribua de sa plume
et de sa bourse aux succès du recueil qui
parut alors sous le titre de la Semaine.
Bientôt le chagrin , les fatigues , des en-
uuis de tous genres minèrent sa santé
et «br<?gèrent ses jours : il est mort au
commencement de l'année 1831 , laissant
en portefeuille un grand nombre d'ou-
vrages , parmi lesquels on ci le un vol. de
Fables politiques , un poème en quatre
chants et en vers de dix syllabes, intitu-
lé la Tour (V E glantine , dont deux frag-
mens ont été publiés au commencement
de 1824 ; un Songe du Floréal , in- 12 ,
et un grand Ouvrage de politique , dont
quelques fragmens ont été lus à l'Athé-
née en 1 822. On assure que son frère doit
faire paraître une édition de ses OEu-
vres complètes. Victorin Fabre appar-
tient, par ses écrits littéraires comme
par ses opinions politiques et religieuses,
à l'école philosophique.
* FABRE DE L'AUDE (Jean-Pierre ,
comte}, pair de France, né à Carcas-
sonne le 8 décembre 17.55, exerçait
avant la révolution, la profession d'avo-
cat au parlement de Toulouse, et aA^ait été
en 1783 député aux Etats du Languedoc.
Kommé en 1790 commissaire du roi pour
organiser le département de l'Aude , puis
procurcur-gcnéral-syndic , et enfin com-
missaire-royal près le tribunal criminel
de Carcassonne ; il remplit ses diverses
fonctions avec un zèle et un talent qui
pe furent pas les moindres causes de son
élévation. Pendant le régime de la ter-
reur, il fut proscrit; et lorsqu'un gou-
vernement un peu moins oppresseur eut
succédé aux comités et aux tribunaux ré-
volutionnaires, le département de l'Aude
le députa au conseil des Cinq-cents (24
vendémiaire an 4, IG octobre 1795),
oii il s'occupa presque exclusivement de
finances. Pendant 1 4 ans , il fut rappor-
teur des commissions de finances soit
dans ce conseil soit au tribunal. Ce fut
Fabre de l'Aude qui signala dans le mois
deseptembre 1 796, les abus qui régnaient
dans l'administration des postes, indiqua
de sages améliorations et s'opposa à ce
que le Directoire afTcrmàt cette branche
FAB
du revenu public. Ce fut encore lui qui ,
dans le mois de novembre de la même
année , demanda la régularisation de la
perception des droits pour l'entretien des
routes; qui fit décréter en 17 97 l'impôt
sur les billets de spectacle , au profit des
hospices dont la plupart avaient été rui-
nés par les dilapidations des révolution-
naires. Ce fut sans doute dans des vues
d'utilité publique , mal entendue il est
vrai, qu'il proposa de couvrir un déficit
de 125,000,000 sur les dépenses ordi-
naires de l'année , par le rétablissement
de la loterie et par l'impôt sur le sel :1a
morale et la religion repoussent l'un , et
l'autre est, de l'avis de tous les économis-
tes confirmé par Texpérience des labou-
reurs , opposé à la pro.spérité de l'agri-
culture (29 août 1797). Le 29 octobre
1797, Fabre fit un rapport sur le mode
d'imposition et de paiement des charges
départementales et communales. Le 4
juillet 1798, il demanda le rétablissement
des octrois de bienfaisance. En même
temps il donna un plan général de comp-
tabilité pour toute la France , s'opposa
plus tard à une coupe extraordinaire des
bois de l'Etat, et quelques jours après il
s'éleva contre les effets déplorables qu'a-
vaient produits l'emprunt force' et la loi
des otages : il mit dans cette dernière
discussion une chaleur qu'il n'avait pas
l'habitude d'apporter dans ses discours ,
et termina son opinion par ces mots qui
faillirent le faire envoyer à l'Abbaye :
P^oilà de quoi dessiller les yeux des
Quinze-vingts. Nous n'avons fait que
donner une faible partie des travaux fi-
nanciers de Fabre de l'Aude . pour bien
les connaître , il faudrait méditer les dis-
cussions auxquelles ont donué lieu ses
diverses propositions. Ce qu'il y a 3e
certain , c'est qu'il améliora le système
des impôts qui était alors bien incomplet
et qui a encore été perfectionné depuis ;
c'est qu'il fit prendre des mesures utiles
pour la vérification des recettes des pré-
posés aux finances , et que l'emploi des
contributions fut mieux assuré. Ou lui
doit en outre l'organisation des ponts
et chaussées , administration si dispen-
dieuse , et qui , malgré les soins que l'on
1
FAB
a apportt^s et que l'on apporte continuel-
lement pour utiliser, de la manière la
plus profitable; les millions qu'on lui
confie tous les ans, est encore bien loin
de répondre à l'attente ou aux justes exi-
gences du public. A l'époque oii fut éta-
bli le gouvernement consulaire, Fabre
de l'Aude fut envoyé dans le Midi en
qualité de commissaire, pour chercher à
concilier les partis. De retour à Paris ,
oii il fit dès lors partie du tribunal, il
continua à ne s'occuper que de finances.
Ce fut à peu près à cette époque qu'il fit
paraître un écrit intitulé : Recherches
sur Vimpôt du tabac et moyen de l'a-
mc'Uorer , ouvrage que MM. de Humboldt
et Bompland ont cité dans leur Essai
politique sur le Mexique , et dans lequel
on trouve V idée fondamentale qui a pré-
sidé à t établissement des droits réunis
(1" ventôse an 10, 20 février 1802.)
L'année suivante il développa cette opi-
nion et en fit l'objet d'une proposition for-
melle , par suite de laquelle fut établie
une administratioij^cciale embrassant la
régie de toutes les taxes indirectes : le bud-
get de 1 804 présente la création des
droits réunis. Peu auparavant (27 ventôse
an 1 1,1 8 mars 1803) Fabre avait proposé de
déclarer la contribution foncière fixe et im-
muable, et il regardait l'adoption de cette
proposition comme le seul moyen qui pût
faire disparaître l'inégalité de la reparti -
tion, etdonnerquelques capitaux à l'agri-
culture. Fabre , nommé président du tri-
bunal , félicita Buonaparte devenu empe-
reur , et dans les discours qu'il prononça,
soit alors, soit plus tard, devant la famille
impériale, il employa un langage indigne
delà haute position sociale qu'il occupait.
Toutefois nous ne sommes pas de ceux
qui croyons aux niaises calomnies pro-
pagées par le libelliste anglais , Golds-
mith, dans le Cabinet de St.-Cloud, et
nous ne pouvons supposer que l'impiété
et le mauvais goût de Fabre aient clé jus-
qu'à dire à la mère de Buonaparte : La
conception que vous avez eue en portant
dans votre sein le Grand Napoléon , n'a
Été SUREMENT QU'u.'HE INSPIRATION DIVINE.
11 fut chargé d'aller complimenter en Al-
lemagne le guerrier vainqueur de tant de
PAS 189
peuples ; maïs ni Fabre ni la députation
dont il était le chef, ne purent atteindre
le rapide conquérant. Arrivé à Lintz , il
reçut 170 drapeaux pris sur l'ennemi , et
il les apporta en France. Nommé com-
mandant de la Légion d'honneur à l'épo-
que de la création de cet ordre , il fit
partie du sénat conservateur le 14 août
1807 , après avoir été présenté deux fois
par son département. Il avait reçu en
même temps le litre de comte , et plus
lard (1810) il fui élu membre du grand
conseil d'administration du sénat : peu
de temps après, Buonaparte le nomma
procureur-général près le conseil du sceau
des titres. Quoiqu'il eût été comblé de
bienfaits par le gouvernement impérial,
Fabre ne tarda pas à voir en 1814 que
l'ordre public exigeait une grande répa-
ration , et que le trône de Louis XVI que
la révolution avait détruit le 10 août
1792 , devait être relevé pour le bonheur
de la France : il oublia ses affections pour
ne songer qu'à sa patrie , et dans la séance
du l*' avril 1814, il fut un des 67 pairs
qui votèrent la création d'un gouverne-
ment provisoire , et indiqua par une mo-
tion d'ordre les principales bases consti-
tutionnelles qui furent adoptées à St.-
Ouen. Chargé de faire un rapport sur le
projet de constitution présenté par le
gouvernement provisoire , il proposa le
principe et la rédaction de la proposition
qui tendait à abolir la confiscation ; et, en
énonçant cette proposition , il déclara
qu'il n'avait jamais voulu acquérir ni
biens d'émigrés ni biens du clergé. L'or-
donnance royale du 3 juin 1 8 1 4 , le com-
prit au nombre des pairs de Louis XVIII :
il vota continuellement dans le sens du
gouvernement, et fut de l'avis du minis-
tère qui demanda des mesures restrictives
contre la liberté de la presse. Fabre de
l'Aude fit aussi partie de la chambre des
pairs des cent jours , et , quoiqu'il se fût
opposé à la proclamation de Napoléon II,
et qu'il eût fait, après la bataille de Wa-
terloo, des démarches assez nombreuses ,
avec M. de Larochefoucault et d'autres
Pairs , pour supplier Louis XVIII de re-
venir à Paris, il fut regardé comme dé-
missionnaire , et ne rentra à la chambre
îQo FAB
des pairs qu'en 1819. Depuis cette épo-
que , Fabre est i-aremeut monte à la tri-
bune : cependant nous ne pouvons pas-
ser sous silence le discours remarquable
qu'il prononça , dans la séance du 23
mars 1822, sur le projet de résolution
relatif à la compétence et au mode de
procéder de la chambre des pairs en ma-
tière correctionnelle et criminelle : son
discours fut imprimé par ordre de la cham-
bre. Fabre \olait ordinairement avec le
ministère : cependant ses opinions avaient
une tendance libérale qui résultait, sans
doute, des anciennes habitudes qu'il avait
prises au conseil des Cinq-cents et au
tribunat dont il ne fut, dit-on, nommé
président, que parce que Buonaparte vou-
lait lui imposer silence. Ses connaissances
en matière financière étaient très éten-
dues , et on lui doit plusieurs améliora-
tions importantes dans la levée des con-
tributions et en général dans la compta-
bilité du trésor. Une violente attaque de
choléra-morbus l'a enlevé en peu de jours
dans le commencement de juillet 18-32.
Fabre de l'Aude a publié \° Lettre à mon
/ils sur maconduite politique, 181 G, in-8j
2° Traduction d^un ouvrage italien, in-
titule'. Réflexions politiques et morales ,
avec des notes du traducteur en italien
et en français, Paris, 1817, 4vol.in-12.
FABRETTI ( Raphaël ), né à Urbin
en Ombrie l'an ICI 9, mort à Rome en
1700, fut secrétaire du pape Alexandre
YIII , chanoine de la basilique du Vati-
can, et préfet des archives du château
Saint- Ange sous Innocent XII. 11 s'adonna
à l'étude de l'antiquité , et il ne lui man-
qua rien de ce qui doit faire un habile
homme en ce genre : connaissance de
l'histoire grecque et romaine, des lan-
gues , des critiques , des philosophes ;
correspondances avec les savans, etc. On
a de lui plusieurs ouvrages en latin , es-
times des antiquaires : 1" De aquis et
aquœ ductibus vetcris Romœ , Rome ,
1680, in-12, nouvelle édition, augmen-
tée de notes , Rome, 1788, in-4. 2" Z^e
columna Trajani, cum yïlp/wnsi Ciaco-
nii liistoria utriusque bclli Dacici a Tra-
Jano gesti , etc., Rome, 1683, in-fol.
3" Jœsithcei ad Gronoviuni apologcma
FAB
in ejusque Titilivitia , sive de TitO'Livio
somnia , animadversiones , 1686, in-4,
i° Inscriptionum antiquqrum explicatio,
Rome, 1699 , in-fol. Ce livre est regardé
comme un trésor pour les savans qui s'oc-
cupent de l'antiquité. Fabretti avait un
esprit vif, une conception facile et une
mémoire excellente. Il aimait l'étude avec
passion, et ce qu'il y a de singulier^ c'est
que loin d'affaiblir son tempérament ,
qui fut très faible jusqu'à l'âge de 30 ans,
elle le fortifia.
FABRI. Foycz Fèvre.
FABRI ( Honorât ou Honoré) , né dans
le diocèse de Belley en 1607 , jésuite en
Ï62G , professeur de philosophie à Lyon
dans sa société, mourut en 1688 à Rome,
où il fut long-temps pénitencier. C'était
un homme extrêmement laborieux. Il em-
brassa toutes sortes de connaissances ,
philosophie, mathématiques, théologie,
morale, et il laissa des écrits sur toutes
ces matières. On a de lui : 1° Notœ in
notas ÏFiUielnù ïVendrokii , sous le nom
àe Bernard Stubrock , insérées dans le
Recueil ou la grande Apologie de la
Doctrine morale de la Société de Jésus ,
Cologne, 1672, in-folio, et ensuite mises
à Vindex à Rome. 2°Suinmula theologiœ,
in-4. 3" Un Dialogue en faveur de lapro-
babilité, réfuté par l'abbé Gradi , biblio-
thécaire du Vatican, Rome, 1659, in-8.
Le Père Fabri était plus propre pour la
physique et les mathématiques, que pour
la théologie. Ses écrits dans le premier
genre sont : 1° une Physique, en latin,
Lyon, 1669, 4 vol. in-4. 2" Dialogiphy-
sici, Lyon, 1C69, in-8. 3" De plantis,
de gcneratione animalium, et de liomine,
Paris, 1666, in-4. C'est dans ce traité,
page 204 , qu'il prouve avoir enseigné la
circulation du sang avant que le livre de
Guillaume Harvée eût pu tomber entre
ses mains, k" Synopsis optica, Lyon, 1667,
in-4 . (5" Opusculum geometricum delinea
sinuum et Cycloïde. Il a laissé en outre
onze volumes in-4 de manuscrits : ce
sont des notes sur l'histoire naturelle de
Pline, des apologies, des aphorismes, des
parallèles, etc. )
FABRICE ou Le Fèvrk. Foy. Fabri-
cius( François).
^AËRICE ( André ), prol'esseUr dô
philosophie à Sainte-GertrudeàLouvain,
conseiller des ducs de Bavière et prévôt
d'Ottingen, natif de Hodeige, village du
pays de Liège , mourut en 1 68 1 . On a de
lui Harmonia confessionis Augustance,
Cologne , 1687 , in-folio ; des Notes sur
le Catéchisme romain, et des tragédies
sacrées.
FABRICE ( George ) , né à Kemnilz
dans la Misnie le 24 avril 151G, mort le
13 juillet 1571 , à 55 ans, a laissé des
poésies latines , imprimées à Bâle en 2
vol. in-8 , en 15G7. On y remarque beau-
coup de pureté et de naturel. Il a été prin-
cipalement fort attentif sur le choix des
mots. Il n'en emploie aucun dans ses poè-
mes sacrés, qui ressentent la fable et le pa-
ganisme. On a encore de lui 1° un Art
poétique, en 7 livers, en latin, 1589,
in-8 ; 2° une Collection des poètes chré-
tiens latins , in-8, Bàle, 1562. On lui a
reproché d'avoir altéré quelquefois les
auteurs qu'il publiait. .3" Une Descrip-
tion de Rome. 4° Origines Sa.ronicœ ,
Leipsick, IGOfi , en 2 vol. in-folio ; com-
pilation estiméepar les savans. On y trouve
les portraits des électeurs de Saxe, gravés
par Wolfg Killian. 5" Rerum Misnica-
rurn libri septcm. Ce sont des annales de
la ville de Meissen , réimprimées à Leip-
sick en 1G60 , in -4, et remplies de pro-
fondes recherches. 6° Rerum Germaniœ
et Saxoniœ volumina, duo, Leipsick , in-
folio, 1G09, etc. (Voyez, pour connaître
la liste des ouvrages de Fabrice , le tome
32 des mémoires de JN'iccron , et dans la
Centurin Fabriciorum.)
FABRICE ( Guillaume ) , surnommé
Uildanus, de Hilden, village de la Suisse,
où il naquit en loGO , savant chirurgien
dont les ouvrages ont été imprimés h
Francfort, 1CS2, in-folio, avec fig. Il
mourut à Berne en 1G34.
Fx\BRICIUS (Caïus), surnommé Lus-
cinus à cause de la petitesse de ses yeux,
fut consul romain l'an 282 avant .T. C. , et
mérita les honneurs du triomphe par'plu-
sieurs victoires sur les Samnites, les Bru-
tiens et les Lucaniens. Le butin qu'il rem-
porta dans ces victoires était si considé-
rable , qu'après avoir récompensé les sol-
FAB igi
ciats et restitué aux citoyens de Rome ce
qu'ils avaient fourni pour la guerre , il
lui resta 400 talens, qu'il fit porter à l'é-
pargne le jour de son triomphe. Député
deux ans après vers Pyrrhus, il refusa les
présens et les honneurs de ce 'prince ,
qui voulait corrompre sa fidélité. Ce roi
eut bientôt un nouveau sujet d'admira-
tion. Son médecin vint offrir à Fabricius,
pour lors consul, d'empoisonner son maî-
tre , pourvu qu'on lui payât ce parricide.
Le généreux romain renvoya le monstre
à Pyrrhus , pour être puni comme il le
méritait.... Les Samnites lui ayant offert
une somme considérable , il répondit à
leurs ambassadeurs, en portant la main
à ses oreilles , à ses yeux et à sa bouche :
« Tant que je pourrai commander à tou-
î) tes ces parties-la , vos offres me sont
» inutiles... » Fabricius fut censeur l'an
277 avant J. C, avec Erailius Papus ,
homme aussi austère que lui. Le premier
avait pour toute argenterie une petite sa-
lière , dont le pied n'était que de corne ;
l'autre un petit plat, pour présenter ses
offrandes aux dieux. Les deux censeurs
cassèrent de concert un sénateur nommé
Cornélius Rufinus , qui avait été deux
fois consul et dictateur, parce qu'il avait
chez lui dix livres d'argent en vaisselle
de table. « Admire qui voudra, dit Saint-
M Evremont , la pauvreté de Fabricius ;
» je loue sa prudence, et le trouve fort
» avisé de n'avoir eu qu'une salière d'ar-
T> gent , pour se donner le crédit de chas-
n ser du sénat un homme qui avait été
» nommé deux fois consul , qui avait
» triomphé , qui avait été dictateur, u
Quoi qu'il en soit de celte réflexion , et
des motifs de Fabricius, ce romain vécut
et mourut pauvre. Le sénat fut obligé de
marier ses filles aux dépens du public.
FABRICIUS- YÉIENTO, auteur la-
lin sous ?.éron , vers l'an -^9 de J. C. , fit
des libelles diffamatoires contre les séna-
teurs et les pontifes, et fut chassé d'Italie
pour ses crimes. Tacite remarque que
ce Fabricius étant préteur , attelait des
chiens aux chariots , au lieu de chevaux.
Ses livres furent brûlés par ordre de Né-
ron , comme des satires atroces.
* FABRICIUS (Théodore), l'un des
lç,i FAC
premiers artisans de la réforlne , né le2
février 1601 à Anholt-sur-rVssel , dans
le comté de Zutphcn , naquit de parens
pauvres , et n'eut pendant long-temps ,
aucun moyen de s'instruire ; il fut même
obligé de faire subsister sa mère des se-
cours qu'il obtenait de la charité publi-
que. Enfin, à 17 ans, il put commencer
ses études à Emmerick ; et son zèle et
son amour pour le travail lui firent bien-
tôt obtenir des succès rapides. Après avoir
terminé à Cologne son éducation , Fabri-
cius passa à Wittemberg , oîi il devint
élève de Luther et de Mélaucthon. Etant
revenu dans sa patrie au bout de 4 ans,
il ouvrit à Cologne une école d'hébreu ;
mais comme on ne tarda pas à s'aperce-
voir que , sous le prétexte d'enseigner
cette langue, il cherchait à répandre ses
nouvelles erreurs, il futchassé de la ville.
Retiré auprès du landgrave de Hesse
( Philippe le Magnanime), le patron des
réformés, il fut choisi pour être son aumô-
nier, et devint, en 153G , curé à Allen-
dorf sur laWerra ; mais l'aumônier, mau-
vais courtisan , s'élant avisé de prêcher
contre la polygamie, le landgrave, à qui
Luther avait permis de prendre deux fem-
mes , non content de lui retirer ses fa-
veurs , le fit mettre en prison et confisqua
ses biens. Fabricius recouvra cependant
sa liberté quelque temps après , et re-
tourna à Wittemberg en 1543 , où il pro-
fessa l'hébreu et la théologie. En 1544,
il fut nommé pasteur de l'église Saint-
Nicolas à Zerbst , oii son zèle un peu trop
tracassier lui attira encore des ennemis.
Accusé d'hétérodoxie dans sa secte , il fut
plusieurs fois obligé de se justifier. Enfin
il termina le 15 septembre 1550 son ora-
geuse carrière. Il a laissé 1" Insiilutiones
grammaticœ in linguam snnctam, Co-
logne,.1528, 1531 , in-4; 2° AiiicuU
pro evangelica doctrina, ibid.;^° Tabu-
Ice diiœ de nominibus et de verbis Hœ-
brœorum, Bàle, Henri Pierre, 1545;
4° des Honie'lies , des Sermons et des
Discours en allemand. On ne croit pas
qu'ils aient été imprimés ; 5° un Abrc'ge'
de sa Vie, que Théodore de Hase a in-
séré dans le premier fascicule de sa Bi-
blolheca Breniensis.
'FABRICIUS (Samuel), né vers la
fin du 1 6* siècle à Eislcben en Saxe , et
ministre de Zerbst, est connu par un ou-
vrage qui a pour titre : Cosmotheoria
sacra, Francfort-sur-le-Mcin , 1625,
in-8. Il en a été fait une seconde édition,
avec des Considérations sur les bienfaits
de Dieu, Bàle, 1675. Ce sont des ré-
flexions sur le psaume 104 , Confitemini
Domino , etc. J. Fabricius dit que ces
réflexions durent naissance aux Concioncs
du même auteur, sur ce psaume; elles
sont divisées en sept livres, qui traitent
du monde en général , du ciel , des nua-
ges, de l'air, des anges, delà terre, des
eaux , de la pluie, des fruits de la terre ,
etc. — Fabricius (Etienne), ministre à
Berne au 17' siècle, a laissé 1" Con-
ciones in prophetas minores, 1641, in-
fol. ; 2" Conciones sacrœ in Decnlogum,
1649 , in-4 ; 3" Conciones sncrœ infesti-
vitalibus annuis habitœ , 1656, in-4;
4" In CL Psnlmos Davidis et aliorum
prophetarum conciones sacrœ, 1664,
in-fol.
* FABRICIUS (Frédéric), premier
pasteur de l'église de Saint-ÎNicolas à
Stettin , et docteur en théologie de l'u-
niversité de Wittemberg, avait étudié
avec succès, à Leyde et à Utrecht, les
langues orientales. Il a laissé une Tra-
duction de l'hébreu du Commentaire du
rabbin David Kimchi , sur Malachie, et
plusieurs Sermons et Traités de théolo-
gie polémique, écrits en allemand. Il est
mort le 11 novembre 1703, âgédcOl
ans.
* FABRICIUS (Christophe-Gabriel ) ,
né à Schackdorf , ville de la basse Lusa-
ce, le 18 mai 1684 , fit ses cours de théo-
logie à l'université protestante de Wit-
temberg. En 1703, il fut chargé d'aller
prêcher l'Evangile en langue slave, dans
la basse Lusace, et en 1740 , dans la Lu-
sace supéricm-e. Il y mourut le 12 juin
1757- lia laissé 1" un Catéchisme en
langue slave ; 2" Hcrrcnhutfi démasqué,
Wittemberg, 1743; 3" Découverte de
l'esprit de secte des herrenhuthers ,
Wittemberg, 1749, in-8. Ces deux ou-
vrages sont écrits en allemand. Christo-
phe Fabricius y combat la secte des lier-
I
FAB
renhulbers ; il cherche à faire voir com-
bien sont dangereuses les vues que ces
sectaires cachent sous des dehors reli-
gieux , et quelles suites funestes ces er-
reurs peuvent avoir pour le christianis-
me. Voyez ZiNZKNDORF.
FABRICIUS nommé aussi Lefkvrk
(François), savant philosophe, né en 1 524
à Duren dans le duché de Juliers, vint à
Paris au collège de France suivre les le-
çons de Ramus et de Turnèbe , fut rec-
teur du collège de Dusseldorff en 1550 ,
et mourut en 1573 dans sa 78^ année. On
a de lui : 1° Pauli Orosii... Historiarum
îibri septem , Cologne , 1 582 , in-12. Fa-
bricius s'attache dans ses notes , à dé-
terminer la véritable manière de lire le
texte , à indiquer les endroits des histo-
riens profanes , qui ont rapport à ce que
dit Paul Orose , et enfin à fixer les points
de chronologie. Le Père André Schott en
a donné une édition à Mayence en 1115,
avec les notes de Fabricius et celles de
Lautius. 2° In Terentii comœdias annota-
tiones, Anvers, 1565. 3° Ciceronis histo-
ria , Cologne , 1 564 ; Gronovius y a ajouté
des notes , et elle a été insérée par l'abbé
d'Olivet à la fin de son édition de Cicéron.
FABRICIUS (Jérôme), né en 1537 ,
plus connu souslenom à' Aquapendente,
sa patrie , fut disciple et successeur de
Fallope dans la chaire d'anatomie de Pa-
doue. Il l'occupa pendant 40 ans avec
beaucoup de distinction. La république
de Venise lui donna une pension de cent
écus d'or , et l'honora d'une statue et
d'une chaîne d'or. Ce savant médecin
mourut en 1619, à Padoue, laissant plu-
sieurs ouvrages sur la chirurgie , l'ana-
tomie et la médecine , justement estimés
par ceux qui s'appliquent à ces arts uti-
les. Ses OEuvres anatomiques ont été
imprimées à Leyde en 1738, in-fol. Il re-
marqua le premier, en 1574, les valvules
des veines ; mais il ne connut ni leur
structure , ni leur usage. Fabricius tra-
vaillait plus pour la gloire que pour l'in-
térêt. Ses amis lui firent divers présens ,
pour récompenser son généreux désinté-
ressement. Il les mit dans un cabinet par-
ticulier , avec cette inscription : Lucri
neglecti lucntm.
FAB 193
FABRICIUS (Vincent), poète allemand,
né à Hambourg le 25 septembre 1613, fut
successivement conseiller de l'évêque de
Lubec , syndic de la ville de Dantzick ,
bourgmestre et député de cette ville à
Varsovie , où il mourut le 1 1 avril 1G67.
Ses charges ne l'avaient pas empêché de
se livrer à la poésie latine. Daniel Hein-
sius l'engagea à publier les fruUs de sa
muse en 163l2. On en a donne une édi-
tion plus complète à Leipsick, en 1667.
FABRICIUS ( François ) , né à Am-
sterdam, le 10 avril 1663, fut ministre et
professeur en théologie dans l'université
de Leyde , dont il a été quatre fois rec-
teur. On a de lui plusieurs dissertations
recueillies en 5 vol. in-4, Leyde, 1727.
Les principales sont 1° Christus eccle-
siœ fundamentum. 2° Sacerdoiium
Christi. 3° Christologia Noachica et
Abrahamica , seu disscrtatioiies ad se-
lectos textusveteris et novi Testamenti.
4° De fide christiana patriarcharum et
prophetarum , etc. Il a fait aussi impri-
mer 6 sermons en hollandais. Ce savant
mourut le 27 juillet 1738.
FABRiaUS ( Jean- Albert ), né à
Leipsick, en 1668, s'acquit de bonne
heure la réputation de littérateur poli et
de savant profond. Il avait un esprit fa-
cile , une mémoire heureuse et beaucoup
de pénétration. Après avoir fait ses étu-
des avec distinction dans sa patrie , il se
rendit à Hambourg, oîi Mayer lui confia
le soin de sa bibliothèque. La mort de
Vincent Placcius ayant fait vaquer la
chaire de professeur d'éloquence de cette
ville , Fabricius l'obtint. Cette place le
fixa à Hambourg, et il y passa le reste de
sa vie, chéri et honoré. En 1 7 1 9, le land-
grave de Hesse-Cassel lui offrit deux pos-
tes importans: la chaire de premier pro-
fesseur de théologie à Giessen, et la place
de surintendant des églises de la confes-
sion d'Augsbourg. Fabricius fut tenté de
les accepter ; mais les magistrats de Ham-
bourg , plus ardens à le retenir qu'il n'é-
tait à les quitter, augmentèrent en 1720
ses gages de 200 écus. Il y mourut en
1736 , à 68 ans. C'était un homme mo-
deste , sa douceur le faisait aimer, autant
que ses lumières inspiraient restime.
id
igi FAfi
Peu de savans ont été plus laborieux ; il
suflisait à tout, leçons publiques, corres-
pondances littéraires , composition d'ou-
vrages. Ceux qui l'ont fait connaître le
plus avantageusement dans la république
des lettres, sont : 1" Codex apocryphus
novi Testamenti coUectus , castigatus ,
Hambourg, 3 vol. in-8, 1719. C'est une
collection curieuse et exacte de beau-
coup de morceaux inconnus au commun
des lecteurs , et même au commun des
savans. On y trouve une notice de tous
les faux évangélistes , des faux actes des
apôtres et des apocalypses , dont l'Eglise
fut inondée dans sa naissance. Ce recueil
estimé est enricbi de plusieurs remarques
critiques, et ne peut que servir à consta-
ter pleinement l'authenticité des quatre
Evangiles et autres écrits canoniques,
constamment et généralement reconnus,
tandis que tout ce qui n'avait pas le ca-
ractère de l'inspiration , est allé au fond
de l'oubli. 2° Bibliotheca grœca, 1 4 vol.
in-4, publiés à Hambourg depuis 1705,
jusqu'en 1728. Cette notice des anciens
auteurs grecs , de leur vie, de leurs ou-
vrages , est précieuse aux bibliographes.
Il n'y a d'ailleurs presque aucun volume
qui ne contienne quelques écrits, entiers
ou en partie, des auteurs grecs anciens
et modernes. Il faut que le premier vo-
lume soit de 1718, ou au moins de 1708 :
éditions plus amples que celle de 1705.
Les volumes suivans sont semblables ,
quoique réimprimés. Il y a une 4« édition
augmentée, 1790-1811, 12 vol. in-4.
Elle n'est pas achevée , et ne peut avoir
moins de 16 à 17 vol. 3» Bibliotheca la-
tina ecclesiasHca , Hambourg , 1718,
in-folio. C'est le recueil des écrits latins
sur les matières ecclésiastiques. 4° Me-
morice Hamburgenses , 7 vol. in-8 , aug-
mentés d'un 8« en 1745, par Evers,
gendre de Fabricius. On y trouve la vie
et les éloges des illustres Ilambourgeois.
6° Codex pseudopygraphus veteris Tes-
tamenti, in-8, 2 volumes, 1722etl823.
L'auteur a exécuté à l'égard de l'ancien
Testament, ce qu'il avait pratiqué à l'é-
gard du nouveau , dans son Codex apo-
cryphus. G" Une savante édition àcSex^
tuS SmpiiicuSt grecque et latine, Lcip^
FAB
sick, 1718, in-fol. 1° Un Recueil en Uiiû
des auteurs qui ont prouve la ve'rile'du
christianisme, 1725, in-4. 8" Un excel-
lent ouvrage en allemand, traduit en
français sous ce titre, Théologie de l'eau,
1743 , Paris, in-8 ; avec de nouvelles re-
marques communiquées au traducteur.
9° Les écrivains de F histoire d^ Allema-
gne et du Nord, publiés par Lindenbro-
gius , auxquels il joignit les Origines de
Hambourg par I^mbeccius , ?t les In-
scriptions de cette même ville p r Anckel-
man : le tout orné de notes sa ^ntes et
d'appendices, in-fol. 10° Une éd. 'ion du
Theatrum anonymorum etpseudo. vmo-
rum de Placcius, in-fol. ; il y ajouta une
préface, et la vie de l'auteur. \\° Biblio-
theca latina , 1 707 , 1 708 et 1 721 , in-8 ,
3 vol., réimprimée à Venise en 1728,
2 vol. in-4, etàLeipsick, 1773-74, 3 vol.
in-8. Elle devait avoir un 4* vol. qui au-
rait contenu les auteurs chrétiens 1 2° Bi-
bliotheca mediœ et infimœ latinitatis,
17 34, in-8, 5 vol., réimpriméeà Padoue,
1754,6 vol. in-4. 13° Biblingraphiaan-
iiquaria, Hambourg, 1760, 2 vol. Cet
ouvrage est une notice des écrivains qui
ont travaillé sur les antiquités hébraï-
ques, grecques, romaines et ecclésiasti-
ques. 14° Centuriœ duœ Fnbriciorum
scriptis clarorum qui jam diem suiim
obicrunt, Hambourg, 1707, in-8. 15"
Une édition du Polyhistor , de Morhof,
Lubeck, 1747 , 2 vol. in-8. (Il existe une
notice sur la vie et les écrits de Fabricius
avec son portrait et sous ce titre : De vita
et scriptis Joannis Alberti Fabricii com-
mentarius, 1737, in-8. par H. S. Reimar
son gendre. )
*FABRICroS (Jean-Chrétien), cé-
lèbre entomologiste, élève de Linnée, né
en 1742, à Tundern dans le duché de
Sleswick , annonça dès ses premières
années beaucoup de goût pour l'histoire
naturelle , et suivit les cours de Linnée
à l'université d'Upsal. Forcé d'embrasser
un état, il étudia la médecine. Il futreçu
docteur à l'âge de 25 ans : mais bientôt,
nommé professeur d'histoire naturelle à
l'université de Riel , il se livra enlière-
"tnenlà ses études favorites pour lesquelles
il entreprit plusieurs voyag^es en diUï-:
fentes parties de l'Europe. Il devint coù-
seiller d'état du roi de Danemarck , et
professeur d'économie rurale et politi-
que. Il était en France aumomentoù son
pays était en guerre avec la Grande-Bre-
tagne. Péniblement afYecté du désartre
de sa patrie, il partit pour le Danemarck,
quand il apprit la nouvelle du siège de
Copenhague. Il offrit sesservices à son roi;
mais il mourut peu de temps après son
arrivée, en 1807. Ses principaux ouvrages
sont 1° Systema entomologiœ , Flens-
burg, 1775, in-8. Ce livre donna une
nouvelle face à la science. On y trouve
non-seulement l'exposition des carac-
tères essentiels des classes et des genres
du nouveau système que l'auteur voulait
établir, mais encore toutes les espèces
alors connues. 2° Gênera insectorum,
Kiel , in-8 , faisant suite à l'ouvrage pré-
cédent. 3" Phihsophia entomologica,
Hambourg, in-8, 1778. C'est le meilleur
ouvrage que nous ayons en ce genre. 4°
Entoniologia syslematica, Copenhague,
1792 à 1796 , 7 vol. in-8. 5° Supplcmen-
tum entomologiœ systcmaticœ , 1 798 ,
in-8. Il faut joindre à ce volume un Index
àlphaheiicus de 52 pages qui ne parut que
deux ans après. Fabricius a publié sépa-
rément un species pour chaque classe
d'insectes en particulier, sous ces titres :
Systemaeleutheratoruni, 1 80i ; Systema
rliyngotorum, 1803; Systema piezaio-
rwn, 1804, Systema antliatoriim, 1805 ,
avec vlvl index in-4 pour chacun. G" Con-
sidérations sur l'ordre général de la
nature, Hambourg , 1781 , in-8, en alle-
mand. 7° Résultat des leçons sur V his-
toire naturelle, Kiel, 1804, aussi en
allemand.
* FABRICIUS (Otto), prédicateur pro-
testant, naquit en 1744 -. les ouvrages
de Mans Hegedc sur le Groenland qu'il
lisait ù l'université, lui inspirèrent le dé-
sir d'aller prêcher l'Evangile dans les
pays septentrionaux. Il fut nommé mis-
sionnaire pour les colonies danoises de
Frédcriksaad , et partit pour ce pays du
Nord en 1768. Pendant son séjour qui
dura jusqu'en 1773 , il répandit la parole
sainte parmi les Groenlandais dont il vi-
sitait souvent les cabanes; il s'occupa
fAB 195
beaucoup de leur langue , et s'adonna à
la recherche des plantes du pays , sans
études préliminaires , sans autre livre
que le sytema naturœ , sans autres con-
seils que ceux du célèbre Otto-Frédéric
Muller avec lequel il était en relation. De
retour à Copenhague , il fut pourvu suc-
cessivement de plusieurs cures , et en
dernier lieu (1789) de celle de Christia-
nia où il mourut avec le titre et le rangd'é-
vêque le 1 2 avril 1 822 à l'âge de 72 ans. Il
s'était occupé de la rédaction de ses notes :
son principal ouvrage a pour titre : Fau-
na groenlandica , Copenhague, 17 80:
il l'a fait honorablement connaître du
monde savant. Des deux mariages que
contracta Fabricius , il eut 1 G enfans.
* FABRICY (le Père Gabriel) , domi-
nicain et célèbre bibliographe , né vers
1725 à St.-Maximin près d'Aix en Pro-
vence , entra fort jeune dans l'ordre de
Saint-Dominique dans lequel il devint
provincial , puis lecteur en théologie à
Rome. Ses vastes connaissances le firent
choisir pour l'un des docteurs théolo-
giens de la fameuse bibliothèque de Ca-
sanata, léguée en 1700 par le cardinal
de ce nom aux dominicains du couvent
de la Minerve. Il mourut à Rome en 1 800.
Fabricy était membre de l'académie des
Arcades. On lui doit 1° Recherches sur
l'époque de l'e'quitation et l'usage des
chars équestres chez les anciens , in-8 ,
1764. 2° Mémoires pour servir à l'his-
toire littéraire des Pères yînsaldi, Ma-
machi, Patuzzi , Richini et de Rubeis ,
imprimés dans le Dictionnaire universel
des Sciences ecclésiastiques du Père Ri-
chard . 3° Des titres primitifs de la ré-
vélation, ou Considérations critiques
sur la pureté et l intégrité du texte ori-
ginal des livres saints de V ancien Testa-
ment, 2 tom. in-8, Rome, 17 72 : c'est le
plus célèbre et le plus estime de ses ou-
vrages. 4" Censoris theologi diatribe ,
qua bibliogrnphiœ antiquariœ et sacrœ
criticcs capita aliquot illustrantur ,
Rome, 1782 , in-8. On le trouve à la suite
du Spécimen variarwn leclionum sacrl
textus de J.. B. de Rossi. Le Père Fabricy
a aussi travaillé avec le Père Audifredi au
magnifique Catalogue de la bibliothèque
196 FAB
de Casanata , dont il n'a été publié que 4
volumes.
FABR INI (Jean), grammairien flo-
rentin , \ivait dans le milieu du 16* siè-
cle. Nous avons de lui des notes et des
commentaires sur P^irgilc, Horace , Té-
rence, et sur quelques Epîtrcs de Cicé-
ron. Us sont assez bons pour leur temps.
Il est auteur de quelques autres ouvrages
sur sa langue.
* FABRONI (Ange) , célèbre biogra-
phe italien, naquit le 7 septembre 17 32, à
Marradi , village de Toscane , d'une fa-
mille distinguée, mais peu riche : il était
le dernier de onze enfans. Après avoir
fait ses premières études dans sa patrie ,
il obtint, en 17 50, une place à Rome
dans le collège Bandinelli qu'un boulan-
ger de ce nom avait fondé pour l'éducation
d'un certain nombre déjeunes toscans. Fa-
broni fit des progrès rapides, reçut le doc-
torat à Césène, et prit les ordres en 1 7 58.
Présenté au prélat Bottari , l'un des sou-
tiens du parti janséniste , qui le prit en
amitié, il fut chargé de remplir pour lui
les fonctions d'un canonicat de Sainte-
Marie Transtevère. Ce prélat l'engagea à
traduire, en italien , la Préparation à la
mort, duPèrcQuesnel, les Principes et rè-
gles de la vie chrétienne de Le Tourneur ,
et les Maximes de la. marquise de Sable'.
Fabroni publia ensuite, en latin, une f^ic
du pape Cle'ment XII, qui, quoique fort
médiocre , lui valut une récompense ma-
gnifique delà part du cardinal Néri Cor-
sini et l'avantage de prononcer , devant
le saint Père, un discours latin sur l'A-
scension. Quelque temps après, il fut
chargé de V oraison funèbre du préten-
dant Jacques Stuart , qu'il prononça de-
vant le cardinal d'York fils de ce prince,
et reçut encore un présent considérable.
Il entreprit ensuite une traduction ita
lienne des Entretiens de Plwcion, de
l'abbé de Mably ; mais cette publication
ne fut pas approuvée et nuisit même à
son avancement. Il conçut alors l'idée
d'écrire , en latin , les Fies des savons
italiens qui ont fleuri dans les 17 et 18"
siècles. C'est celui de ses ouvrages qui a
le plus contribué à sa réputation. Il en
publia le premier volume en 1766. L'an-
FAB
née suivante, il quitta Rome pour alléf se
fixer à Florence , et obtint , du grand-duc
Léopold, la place de prieur du chapitre
de la basilique de St. -Laurent. Il parta-
gea , dès ce moment , son temps entre les
fonctions religieuses de sa place et ses
travaux littéraires qui devinrent son seul
amusement. Fabroni ayant été alors dé-
signé pour précepteur des enfans du
grand-duc, craignit que cette faveur ne lui
attii'àt des ennemis : pour se soustraire à ce
danger, il voyagea en attendantle moment
d'entrer en fonction; il parcourut laFrance
et l'Angleterre ; mais à son retour en Tos-
cane , il n'obtint point la place pour la-
quelle il avait été choisi, et ne connut ja-
mais la cause du changement du grand-
duc à ce sujet. L'avènement au pontificat
de Ganganelli ( Clément XIV) , qu'il avait
compté autrefois parmi ses protecteurs ,
l'engagea néanmoins à retourner à Rome
quelques années après, et ce pape qui
estimait Fabroni , le nomma l'un des ]»ré-
lats de la chambre pontificale , et cher-
cha à le retenir auprès de lui. Cependant
la reconnaissance l'entraînant vers le
grand-duc qui venait de le créer prové-
diteur de l'université de Pise et prieur
de l'ordre de St.-Etienne , il résista aux
instances du saint Père , et après avoir
fait un voyagé à Naples, oîi il fut bien
accueilli de la reine et des personnages
les plus distingués , il retourna à Flo-
rence, oii il usa de son crédit auprès du
grand-duc , pour obtenir la permission
de tirer des archives de Médicis, des let-
tres de savans du 17" siècle, adressées
au cardinal Léopold de Médicis , qu'il pu-
blia en 2 volumes, et qui jettent beau-
coup de lumière sur l'histoire littéraire
de ce temps-là. Il voyagea ensuite en
Allemagne, en Saxe et en Prusse, et se lia
avec les principaux savans. De retour en
Toscane en 1773, il se fixa à Pise, oii il
entreprit, avec des gens de lettres, le
journal De' Icttcrati, dont il faisait pa-
raître quatre volumes par an et qu'il
poussa jusqu'au 105*; les trois derniers
contiennent une table générale. Il s'occu-
pait en même temps de son recueil bio-
graphique qui devint plus que jamais son
travail de prédilection , et il l'augmenta
II
FAfî
de plusieurs nouveaux volumes; le 18*
parut en 1799 , et les 1 9« et 20" après sa
mort à Lacques en 1804 et 1805. Cette
collection , qui a obtenu un grand suc-
cès , et qui le mérite sous plusieurs rap-
ports , renferme 1 54 vies , y compris la
sienne. Excepté vingt-une, elles sont tou-
tes de Fabroui. On lui reproche sa par-
tialité pour les jansénistes et contre les
jésuites. Vers les dernières années de sa
vie , il sembla se reprocher son peu de
ménagement pour cet ordre. Sentant sa
fin approcher, il se retira dans une soli-
tude auprès de Lucques , appelée Saint-
Cerbon, chez les franciscains réformés,
ovi il passa un mois uniquement occupé
de se préparer à la mort. De retour à Pise,
il vécut encore quelques mois et expira
le 22 septembre 1803 , après avoir rem-
pli tous les devoirs de la religion. On a
encore de lui 1° Laurentii Medicis ma-
gnifici vita, Pise , 1784 , 2 vol. in-4. 2°
Magni Cosmi Medieei vita, 1789, 2 vol.
in-4 . 3° Leonis Xpontificis maximi vita,
1797.4° Historia lycœi Pisani, Pise,
1791-95, 3 vol. in-4. S° Elogi d'illustri
Italiani, Pise, 178C-89, 2 vol. in-8. 6°
Elogi di Dante, di Poliziano, diAriosto
e di Torqualo Tasso, Parme, 180G, 7°
Abrège du voyage d'Anacharsis, en ita-
lien, qui lui mérita des éloges de l'au-
teur lui-même. « Rien n'est omis dans
» votre ouvrage , lui écrivit l'abbé Bar-
» thélemi ; j'admire le choix et la liaison
)» des faits, la propriété des termes et
» la rapidité du stile. »
*rABROM (Jean), chimiste et sa-
vant italien , naquit à Florence en 1 748 ,
fut envoyé à Paris en 1 798 , par son sou^
verain, le grand-duc de Toscane, pour as-
sister à une réunion de savans, char-
gés de trouver un système de poids et
mesures générales pour tous les peuples
civilisés. Il était employé au cabinet du
Muséum d'histoire naturelle de Florence
qu'il contribua , sous le grand-duc Lco-
pold, à enrichir et à rendre l'un des plus
beaux de l'Europe. Il s'occupa surtout
avec succès de la chimie agricole et in-
dustrielle, et il a fait à ce sujet plusieurs
ouvrages excellens. Estimé et respecté
sous tous les gouvernemeiis qui se succé-
FAB 197
dèrént éu Toscane après l'invasion des «
Français , il fut membre de la députation
des finances de la reine régente d'Etrurie
{Foyez Marie-Louise), veuve de Louis
I*' de Bourbon. Quand la Toscane fit
partie de l'empire français , Napoléon le
nomma maître des requêtes , conseiller
d'Elat,puis directeur-général des ponts
et chaussées pour les départemens au-
delà des Alpes. Appelé au Corps législa-
tif par le département de l'Arno , il obtint
la croix de la Légion d'honneur , et les n
titres de baron et de commandant de l'or-
dredelaRéunion. Fabroni était, en outre,
un des quarante de la Société italienne^
et de celle des Géorgophiles, correspon-
dant de l'Institut de France, professeur
honoraire des universités de Pise et de
Wilna, etc. La chute de Napoléon ayant
ramené en Toscane le grand-duc Ferdi-
nand III , ce prince appela auprès de lui
Fabroni , le nomma directeur de la mon-
naie de Florence , commissaire royal des
forges et des mines , et le décora de la
croix de l'ordre du Mérite. Il remplit
tous ces divers emplois , qu'il devait à
ses talens et à ses lumières , avec le zèle ,
et la probité qui distinguaient son carac-
tère. Fabroni est mort à Florence , d'un
coup d'apoplexie, le 17 décembre 1822.
Il a laissé les ouvrages suivans, tous,
excepté un seul , écrits en italien ; \° Ré-
flexions sur l'état actuelde l'agriculture,
ou Exposition du véritable plan pour
cultiver les terres avec le plus grand
avantage et pour se passer des engrais.
Traduit en français, Paris, Nyon l'aîné,
17 80 , in-1 2 ; Du ver à soie et du byssus
des anciens, Pérouse, 1782, in-8, fig.
L'auteur pense que la soie est le byssus
antique , mais M, Fleury a prouvé dans
une dissertation, insérée dans la Revue
encyclopédique (tome 1*' page 241),
que le byssus n'est autre chose que le
duvet des chèvres de Cachemire. 3° In-
structions élémentaires d'agriculture ,
Venise, 1787, in-12; Turin, «791 , in-
12, avec Ae% Notes du docteur J. Gio-
bert ; traduit en français par Alex. Vallée,
1805 , in-8. L'auteur écrivit cet ouvrage
par ordre du grand-duc de Toscane Léo-
pold I. 4° Dissertations sur la manière
198 PAS
de perfectionner les vins des états rô^
mains, Rome, 1793 , in-8 ; 5" Discours
sur une singulière espèce de briques,
Venise, 1791. Ce sont des briques fabri-
quées avec une substance appelle farine
fossile , découverte en France par M.
Faujas de Saint-Fonds , et qui rend les
briques flottantes. 6° Nouveau thermo-
mètre staiionnaire, en 1793;7°5u7-r«n-
tiquite'y les avantages et la me'thode de
la peinture encaustique, 2* édition , Ve-
nise, J800, in-8; 8° Synopsis planta-
rum horti botanici regii florentini , Flo-
rence, 1794 , in-4 ; 9° Les loisirs de la
campagne , ou Libre Discussion sur
quelques raisonnemens populaires, 1 800,
in-8 ; 10° De t économie rurale des Chi-
nois , Venise , 1 802 , in-8 ; 1 1 ° £a Biblio-
thèque, Modène , 1803. Cette bibliothè-
que est une lettre qu'on trouve insérée
dans les Mémoires de la société italienne
( tome 2 , p. 92 ) , dans le Magasin en-
cyclopédique de Stellini. Elle est adres-
sée au Père Pozzetlo des Ecoles pies , et
donne un excellent moyen de préserver
les livres des insectes. 1 2" Origine et ci-
vilisation des anciens habitant de l'Ita-
lie, Florence , 1803 , in-8 ; 13° Des ap-
provisionnemcns publics , Florence ,
1 804 , in-8 ; 1 4° De la pesanteur spéci-
fique des matières d'or et d'argent, Mo-
dène, 1806, in-4; 16" La Statère phi-
lippique, ou Essai sur la bonté et le ti-
tre de l'or natif, Florence, 1808. ht sta-
tère est une monnaie macédonienne. 16°
Du bronze et des autres métaux connus
de t antiquité , Livourne , 1810. Fabroni
publia ces trois derniers écrits lorsqu'il
était directeur des monnaies, lia donné
divers Mémoires dans plusieurs journaux
périodiques, notamment au Journal de
physique (de 1799 à 1800); et il fut un
des rédacteurs des Mémorie oa Mémoires
de la Société agraire de Florence. Les
principaux articlesqu'ila fournis au Jour-
nal de physique sont ceux relatifs à la
force réfrigérante des liquides, aux al-
carazas d'Espagne, à l'action chimique
des différens métaux entre eux.
FABROT ( Charles -Annibal) était
d'Ais en Provence , où il vit le jour l'an
1580. Sa profonde éruditiou et ses vastes
PAS
Connaissances dans la jurisprudence ci-<
vile et canonique, lui obtinrent l'amitié
du fameux Peiresc, protecteur de tous les
gens de mérite. Le président du Vair,
qui l'estimait aussi, devenu garde des
sceaxix en 1617 , attira Fabrot à Paris. Il
n'avait que 36 ans , et depuis 8 années
il occupait avec distinction une chaire de
droit dans l'université d'Aix. Il retourna
dans cette ville après la mort de son pro-
tecteur , et y reprit ses fonctions de pro-
fesseur. On le revit à Paris en 1637, pour
y faire imprimer des Notes sur les Ih-
stitutes de Justinien. Cet ouvrage, dédié
au chancelier Séguier, fut honorable et
utile à l'écrivain. Il fit à Fabrot un grand
nom dans la république des lettres , et
lui valut une pension de 2,(000 livres
qui lui fut accordée pour travailler à la
traduction du Basilicon : c'est la collec-
tion des lois romaines, dont l'usage s'é-
tait conservé dans l'Orient , et de celles
que les empereurs de Constantinople y
ont ajoutées. Cette collection avait été
faite par ordre de l'empereur Léon VI.
La traduction coûta à Fabrot dix années
d'application constante, et lui mérita
une charge de conseiller au parlement
de Provence , dont les circonstances du
temps ne lui permirent pas de jouir. Cet
ouvrage parut en 1657 à Paris, en 7 vol.
in fol., auquel il faut joindre le Supplé-
ment par Piuhnkenius, Leyde, 1766,
in-fol. En 1649, Fabrot publia une édi-
tion des OEuvres de Cédrène , de Ni-
cétas , d'Anastase le bibliothécaire , de
Constantin Manassès, et des Institutes
de Théophile Simocatte , qu'il enrichit
de notes et de dissertations. On a en-
core de lui des observations sur quelques
titres du Code Théodosien ; un Traité
sur l'usure contre Sanmaise; quelques
maximes de droit sur Théodore Balsa-
mon, sur l'histoire ecclésiastique, sur les
papes, et plusieurs traités particuliers
sur diverses matières de droit. En 1G62 ,
ce docte et infatigable écrivain com-
mença la révision des OEuvres de Cujas ,
qu'il corrigea sur plusieurs manuscrits,
et qu'il donna au public à Paris, l'an 1658,
en 10 vol. in-fol., avccd'excellentes«o/c.y
aussi curieuses qu'instructives. L'appli-
J
FAB
cation excessive qu'il mit à ce grand ou-
vrage, lui causa une maladie, dont il
mourut le 16 janvier 1659 , à Paris, âgé
de 79 ans. On trouva parmi les papiers
de ce savant homme , des Commentaires
sur les Institutes de Justinien, des notes
sur Aulugèle ; et le Recueil des ordon-
nances ou constitutions ecclésiastiques
qui n'avaient pas encore vu le jour en
grec. Ce dernier ouvrage a été inséré
dans la Bibliothèque du droit canon , pu-
bliéeenlGGl par Voël et Justel.
* FABRY ( Henri- Jean -Baptiste ) ,
comte d'Autrey, chevalier de Saint-Louis,
ué en 1723 et mort en 1777 , est auteur
de \' Antiquité justifiée , ou Réfutation
de r Antiquité dévoilée, 1766, in-12,
* FABRY ( Jean-Baptiste-Germain ) ,
avocat à la cour royale de Paris , né en
1780 à Cornus, dans le Rouergue, diocèse
de Vabres, se fit connaître avantageuse-
ment par son attachement aux saines
doctrines , et il consacra sa vie à les ré-
pandre par des écrits ou des recueils qui
font honneur à son esprit et à son cœur.
Envoyé à Paris pour y faire ses études
de droit, ses principes et sa conduite ne se
démentirent point au milieu des dangers
de la capitale. Reçu avocat en 1 804, il pa-
jutau barreau : mais il s'occupa plus spé-
cialement des événemens politiques et de
littérature religieuse. Il fut secrétaire du
ministre de la police générale de France,
Fouché, duc d'Otrante. Son empressement
à obliger fut la cause de sa mort : en
allant chercher le docteur Dubois à cinq
heures du matin pour une de ses parentes
dans le travail d'un accouchement diffi-
cile , il glissa sur le perron dans l'obscu-
rité , et tomba sur une pointe de fer qui
lui entra dans la cuisse et lui rompit une
artère. Il expira quelques minutes après ,
le 4 janvier 1821. On lui doit 1° le
Spectateur français au 19- siècle, ou
yariétés morales, politiques et litté-
raires, recueillies des meilleurs écrits
périodiques , collection précieuse par le
choix des matériaux qui la composent.
Elle forme 12 vol. in-8, Paris, 1805 à
1812. 2° Chefs-d'œuvre de V éloquence
chrétienne , ou Sermons de Bourdaloue,
£os5aeti Fénélon, Massillon^ sur la
FAB 199
vérité de la religion , formant un corps
d'ouvrage, Paris, 1810, 2 vol. in-12.
3" La régence à Blois , ou Les derniers
momens du gouvernement impérial,
1814, in-8, 6* édition, 1815. A° Itiné-
raire de Buonaparte depuis son départ
de Doulevent , le 28 mars , jusqu'à son
embarquement à Fréjusle28 avril 1814,
in-8 , 3* édition, 1815. 5° Itinéraire de
Buonaparte de tîle d'Elbe à V île de Sainte
Hélène, ou Mémoires pour servir à f his-
toire des événemens de 18\b, in-8, 1816,
réimprimé l'année suivante, avec des
augmentations considérables , en 2 vol.
in-8. 6° Mémoires pour servira F his-
toire de r instruction publique , depuis
1189 jusqu'à nos jours , ou Le génie de
la révolution considérée dans l'éduca-
tion , où l'on voit les efforts réunis de la
législation et de la philosophie rfu 18®
siècle pour anéantir le christianisme , 3
vol. in-8. On y trouve des pièces et des
faits très curieux sur les moyens pris ,
à différentes époques de la révolution ,
pour pervertir l'éducation. 7° Monumens
de la reconnaissance nationale votés en
France depuis 17 89, in-8, 1819. 7° Les
missionnaires de 1793, in-8, 1819 et
1 820. L'auteur y rappelle les prédications
anarchiques, impies et cruelles des révo-
lutionnaires de 1793 , et remarque l'af-
fection et l'intérêt que certains écrivains
portent à ces missionnaires si dignes
d'eux , tandis qu'ils ont en horreur ceux
qui prêchent l'ordre , la religion et la
charité. Le but de ces écrivains débontés
n'est pas équivoque ; et , comme c'est en
déclamant contre les nobles et les prêtres
qu'on est parvenu à opérer la révolution,
M. Fabry a pensé qu'il serait utile d'en
rappeler les pages sanglantes pour nous
préserver des mêmes malheurs; mais il
n'a rien exagéré : il cite toujours ses
sources et ses garans ; il s'est même im-
posé la loi de ne donner les faits que sur
les pièces officielles insérées dans le
Moniteur. Rien n'est donc plus authen-
tique que son histoire des Missions de
1793, comme rien n'est plus légitime
que sa généreuse indignation contre ces
sanglans missionnaires. Il avait com-
mencé des recherches pour faire une his>^
îoo FAC
toire de la lëgislation révolutionnaire sur
la religion et les prêtres ; il est à regret-
ter qu'il n'ait pas terminé ce travail :
personne n'était plus en état que lui de
traiter ce sujet; il connaissait parfaite-
ment la révolution et son esprit, et il la
jugeait très bien dans ses causes , ses
moyens et ses résultats. Tous ses ou-
vrages ont paru sous le voile de l'a-
nonyme : on peut en voir la liste dans la
Bibliographie de France, 1825 , p. 119
et 223. VAmi de la religion et du Roi
lui a consacré une notice intéressante
tom.26, pag. 285-288.
FACCIARDUS ou F.ïcciakdi (Chris-
tophe ) , né dans le territoire de Rimini,
passa de l'institut des mineurs conven-
tuels à celui des capucins dans la pro-
vince de Bologne , oii il se fit un grand
nom parmi les prédicateurs de son temps.
L'on rapporte qu'en prêchant un jour à
Bologne sur l'aumône, il fit tant d'im-
pression sur l'esprit des assistans , qu'a-
vant de sortir de l'église , ils se dépouil-
lèrent de leur argent et de leurs joyaui
les plus précieux , pour contribuer à l'é-
tablissement de l'hôpital des orphelins ,
que Facciardus venait de leur recom-
mander. L'on a de lui : 1° Exercilia
spiritualia ex sanctis patribus collecta,
3 vol. in-8, Londres, 1590; Venise, 1597
et 1C05. 2° Fitœet gesta sanctorum ec-
clesiœ Verruchinœ, in-8, Venise, IGOO.
2° Porta aurea et sanctuarium sanctœ
theologiœ , tum scJiolasticœ , tuni posi-
tivée , aperta. 4° Meditazioni dei prin-
cipali mysteri délia vita spirituale, in-4,
1599.
* FACCIOLATO (Jacques ) , savant
professeur de logique de l'université de
Padoue, né àToreglia près de celte ville
dans les Monts Euganées, mort en 1769,
a consacré toute sa vie à des recherches
sur des méthodes pour faciliter l'étude
approfondie des langues anciennes. Ses
principaux ouvrages sont : 1" Une nou-
velle édition du dictionnaire en sept
langues, connu sous le nom de Calepin,
Padoue, 1718, 2 vol. in-folio, depuis
plusieurs fois réimprimé. 2" Ortografia
moderna italiana con qualche cosa di
tinguaper uso del seminario de Padova,
FAC
1721, in-4. i° Orationes latinœ, Padoue,
1744 et 1767 , in-8. Ce sont les harangues
qu'il prononça chaque année à l'ouver-
ture des études. Elles ajoutèrent beau-
coup à sa réputation. 4° De gymnasio
patavino syntagmata duodecim ex ejus-
dem gymnasii fastis excerpta , Padoue,
1752, in-8. 5° Fasti gymnasU patavini
ab anno 1268 ad annum 1752, Padoue,
1757, in-4. 6° Epistolœ latince, Padoue,
1765, in-8. Il a beaucoup contribué au
grand dictionnaire latin, publié par For-
celiini.
FACIO ou Fazio ( Barthélemi) , né à
Specia ou Spezzia , dans l'état de Gènes ,
mort vers l'an 1465 , fut secrétaire d'Al-
phonse d'Aragon , roi de Naples. ^neas
Sylvius, pape sous le nom de Pie II , fut
très lié avec lui , ainsi que la plupart des
érudits de son siècle. On doit aux veilles
de ce profond littérateur : i° De bello
veneto-claudiano , seu inter Venetos et
Geniienses, Ljon, 1578, in-8, etc. 2<* Une
Histoire de son temps, jusqu'à l'année
1455, en latin. 3° De vit ce fclicitate,
Leyde, 1628 , in-24. 4° Un Traité des
hommes illustres de son temps , aussi en
latin , publié à Florence en 1745 , in-4 ,
par l'abbé Méhus. 5" Traduction latine
de V Histoire d'Alexandre le Grand en
grec , par Arien. 6° Quelques opuscules,
mis au jour par Treher, à Hanovre, 1611,
in-4. Ce savant était un ennemi irrécon-
ciliable. Il conserva jusqu'au tombeau sa
haine pour Laurent Valla.
FACUNDUS , évèque d'Hermiane en
Afrique, assista en 547 à la conférence
que le pape Vigile tint à Constantinople
sur la dispute des trois chapitres. Il s'a-
gissait dans cette affaire de l'orthodoxie
de Théodore de Mopsueste, des écrits de
Téodoret , et de la lettre d'Ibas. Facundus
les soutint avec une ardeur qui le fit
exiler. >'ous avons encore l'ouvrage qu'il
composa sur cette matière : il est écrit
d'un stile véhément, plein de feu et avec
beaucoup d'art ; mais l'auteur sort sou-
vent des bornes de la modération. Le ■
savant Père Sirmond publia cet écrit en ■
1629, in-8, avec des notes ;et il futinséré
depuis dans l'édition d'Optat, faite à
Paris. Facundus mourut vers l'an 653.
FADUS (Cuspius). f^oyez Ccspiirs
l'ADDS.
FAERNE ( Gabriel ) , de Crémone en
Italie, mit en vers latins , dans le 16»
siècle , cent fables d'Esope , distribuées
en o livres. Pie IV l'engagea à ce travail,
et n'eut pas à s'eù repentir. La morale y
est rendue d'une manière ingénieuse ; le
stile a cette précision, ce naturel, cette
variété , qui font le principal mérite de
ces sortes d'ouvrages. Faërnene vit point
mettre au jour le fruit de son travail : son
recueil de fables ne parut qu'en 1 oG4 , 3
ans après sa mort, avec une dédicace à
saint Charles Borromée, archevêque de
Milan. Ce recueil, imprimé à Rome en
1 664 , in-4 j et depuis à Padouc en 1718
et 1730, et à Londres, 1743, in-4, orné
de planches , fit connaître Faërne sur le
théâtre littéraire. Denyse en donna une
traduction française en 1699, petit in-12,
et Perrault, de l'académie française, les
traduisit en vers français, in-12, Ams-
terdam 1718. Trombeiîi en a donné une
bonne édition italienne, Venise, 1736.
Faërne était aussi bon critique qu'excel-
lent poète. On a encore de lui : I" Cen-
sura emendationum Livianarum Sigonii.
2° De mctris comicis. Z° Une édition de
Te'rcncc. 4° Des remarques sur Catulle
et sur plusieurs ouvrages de Cice'ron,
6" Dialotjie antiquitatum , etc. G" tti
luikeranos elegiœ. Il mourtlt à Rome en
16G1. Pie IV et le cardinal Charles Bor-
romée , neveu de ce pontife, l'honoraient
d'une estime particulière , ou plutôt
s'honoraient en rendant justice à son
mérite. Il faut remarquer que Faërne
écrivait dans le temps où les tables de
Phèdre n'étaient pas encore connues ,
de manière que le mérite en est tout-à-
fait original. Ce n'est que 20 ans après la
première édition des fables de Faërne,
que celles de Phèdre furent découvertes.
• FAESI ( Jean-Conrad ) , né à Zurich
en 1727, fut curé à Flaach près de Scbaf-
fouse, et mourut en 1790. Ce fut un écri-.
Tain' aussi laborieux qu'estimable : il fit
one étude particulière de l'histoire et de
la statistique de la Suisse. On lui doit
les ouvrages suivans qui sont écrits en
allemand : 1° Description géographique
FAQ ao<
et statistique de la Suisse, 17C5àl768,
4 vol. in-8. 2° Me'moire sur divers sujet»
de rhistnire ancienne et moderne , 1765,
2 vol. in-8. Z° Histoire de la paix d'U-
trecht , 1770. Il a traduit en allemand
y Histoire d'Afrique et d^ E spagne de
Cardone, et publié plusieurs mémoires
dans \es Journaux historiques de Mcusel.
FAGAjN ( Ch ristophe - Barthélemi )
naquit à Paris, en 1702, du premier
commis au grand bureau des consigna-
tions. Il y eut lui-même un emploi , qui
l'occupait peu , et qui lui laissa la li
berté de s'attacher aux belles-lettres.
Fagan, avec une partie de l'esprit de La
Fontaine, avait à peu près le même carac-
tère, la même indolenee, la même aver-
sion pour les affaii-es. Son extérieur né-
gligé, son air distrait et timide, n'an-
nonçaient point tout ce qu'il était. Il
avait beaucoup de talent pour le théâtre-.
Il travailla tour-à-tour pour le Français ,
l'Italien , et pour celui de la Foire. On
remarque , dans toutes ses pièces , un
enjouement naïf et fin. Les plus applau-
dies, soit pour le bon comique, soit pour
la conduite , sont le Rendez-vous et la
Pupille. Celle-ci mérite d'être mise à côté,
et si on ose le dire, au dessus de quel-
ques petites pièces de Molière. Pes-
seiier a rassemblé en J7C0, en 4 vol.
in-12, les différens ouvrages dramatiques
de Fagan. Les ornemeris dont il a ac-
compagné cette édition , sont un Eloge
historique de l'auteur, et une Analyse de
ses œuvres. Fagan mourut à Paris en
1755.
FAGE ou BiicHLiN ( Paul ) , Fagius ,
né à Ptheinsabern dans lePalatinat, d'un
maître d'école, se distingua par ses con-
naissances dans la langue hébraïque.
Appelé en Angleterre par Crammer , ar-
chevêque de Cantorbéry , il fut chargé
de faire des leçons publiques à Cam"
bridge, oii il mourut en 1 550 , âgé de 45
ans. Ce savant protestant a beaucoup
contribué à répandre la connaissance de
la langue hébaïque par ses ouvrages,
dont voici les principaux : 1* Apophm
thegmata patrum ; Scntentiœ mondes ,
1642, in-4. 2° Tobias hebraïcus , 1542,
in-4. 3° Expositio dictionum liebrajca-
i3..
20?. FAG
rum , ihAi , in-4. h' Notée in Pentateu-
chum, 1Ô46 , in-fol., etc.
FAGë (Raimond de la ) naquit en
1648 àLisleen Albigeois. 11 s'adonna au
dessin sanssecours, sans maître, maigre
ses pareus, et devint bientôt un dessina-
teur excellent. Il mettait dans ses produc-
tions, surtout dans les sujets libres, un
goût , un esprit qui surprenaient les ar-
tistes. Son atelier ordinaire était le
cabaret. Il s'était établi depuis plusieurs
jours chez un au'uergiste , et y faisait une
dépense qui paraissait au dessus de sa
fortune. Lorsqu'il fallutpajer, il crayonna
au dos du mémoire qu'on lui présenta ,
un dessin , que l'aubergiste porta à un
amateur. Le curieux en donna ce qu'on
lui demanda , et fit encore remettre de
l'argent à La Fage. Ce maître mourut en
1690. Il des.sinait à la plume et au lavis.
Ses dessins dans le premier genre sont
fort recherchés. Carie Maratte faisait
beaucoup de cas de ses ouvrages.
* FAGES ( Joseph ), chirurgien habile,
naquit à Toulouse le 1*'' août 1764, de'
parens qui étaient sans fortune , créa lui-
même son avenir et sentit de bonne heure
l'instinct de son art. A 1 4 ans il entra au
service de l'hôpital de St. -Joseph de la
Grâce , et s'y fit remarquer par des succès
surprenans, dûs à son travail et à ses dis-
positions précoces. Agé à peine de 18
ans , il faisait déjà un cours de chirurgie
et d'accouchement. Un concours ayant
été ouvert en 1785 à Montpellier pour
une place de premier chirurgien interne
de l'Hôtel-Dieu de celte ville , le jeune
Fages vint disputer cet emploi ; mais ,
quoique sa supériorité fût incontestable,
il ne l'obtint point alors , les usages vou-
lant que celle place fût donnée à celui
qui occupait la place inférieure; et ce
ue fut que quelque temps après et à la
suite d'un nouveau concours qu'il parvint
enfui à se voir dans le rang qu'il avait
déjà mérité depuis long-teuips. Il se livra
dès lors à plusieurs travaux scientifiques
e.t pratiques, relatifs à sa profession ; plu-
sieurs médailles lui furent décernées par
l'académie royale de chirurgie ; le célè-
bre Louis apprécia son talent et, à plu-
sieurs reprises , il l'iavita à se rendre au-
FAG
près de lui. En l'an 3 . Fages fut nommé
chirurgien en chef de l'armée des Pyré-
nées-Orientales, et peu de temps après
il eut le même titre à l'hôpital militaire
de Montpellier. Alors les écoles de méde-
cine et de chirurgie étaient supprimées :
Fages ne laissa pas périr cet enseigne-
ment, et parmi ses nombreux élèves, il
compta dessujets distinguésqui, plus tard,
illustrèrent la chirurgie militaire. Aux
leçons théoriques qui étaient les seules
que l'on donnât à l'ancienne université,
Fages ajouta un cours de chirurgie cli-
nique qu'il fonda lui-même. Malgré ses
talens, malgré les services qu'il avait
rendus , malgré la haute position sociale
dans laquelle l'avaient placé les uns et
les autres , des inimitiés particulières , si
fréquentes dans le corps des médecins
et des chirurgiens, empêchèrent qu'il ne
fût compris parmi les professeurs, lors de
la réorganisation de la faculté de méde-
cine de Montpellier , et ce ne fut qu'après
deux concours brillans qu'il obtint la
chaire de médecine opératoire. Depuis
celle époque jusqu'à sa mort arrivée le
4 juin 1824, il n'a cessé de donner ses
soins à ses malades et à ses élèves. Si d'un
côté l'on admirait son habileté dans l'art
de guérir , de l'autre on n'était pas moins
étonné de la facilité de son éloculion , de
l'heureux choix des expressions qu'il em-
ployait , de l'érudition dont il faisait
preuve sans pédanterie, de l'exactitude
de ses observations, en un mot de la pro-
fondeur de sa science ; aussi avait-il une
clientelle nombreuse , et la salle oii il
donnait ses cours était toujours remplie
d'une foule d'auditeurs. Sa perte a laissé
un vide à Montpellier.
* FAGET DE BAURE (Jean-Jacques),
ancien avocat au parlement de Pau , na-
quit à Orthez le 30 octobre Mhh, d'une
famille ancienne et distinguée dans la
magistrature. Après avoir terminé ses
études au collège de Juilly, il fit des
.progrès si rapides dans le droit qu'à 19
ans il était avocat-général au parlement
de Pau. Privé de celte place, dans laquelle
il avait débuté d'une manière si brillante,
il vécut dans la retraite jusqu'en 1809 :
alors Duonaparte le nomma rapporteur
FAG
Au conseil du contentieux de sa maison.
Eq 1810, Faget de Baure fut élu membre
du Corps législatif, et il siégeait encore
dans cette assemblée en 1814, époque
du retour des Bourbons, auquel il adhéra
le G avril, en signant l'acte de déchéance
de Buonaparte. En 1811 , il avait été ap-
pelé à la cour impériale de Paris , et en
éta i t deven u l'un des présidens; il avait été
conservé à la cour royale sous le gouyer-
iiement de Louis XVIH. Pendant la session
législative qui eut lieu en 1814, il parla
plusieurs fois à la tribune, et notamment
le 9 août, lorsqu'il s'agissait de la loi sur
la liberté de la presse pour laquelle il se
déclara , sans toutefois que l'on renonçât
alors à la censure, qu'il regardait comme
une mesure nécessaire dans les circon-
stances où l'on se trouvait. Son entier
dévouement à la famille royale éclata
surtout à l'époque où Buonaparte revint
de rî!e d'Elbe : il embrassa avec chaleur
la défense du roi. Après la seconde rentrée
des Bourbons , il fut compris au nombre
des membres du conseil royal de l'in-
struction publique. Président du collège
électoral des Landes , au mois de juillet
1815, il fut élu par le département des
Basses-Pyrénées, et devint vice-président
delà chambre. Il fit partie de diverses com-
missions, présenta un rapport relatif à
l'organisation de la cour des Comptes et
occupait le fauteuil pendant la discus-
sion de la loi sur les élections. Après la
dissolution de la chambre en 1816, il
présida le collège électoral des Basses-
Pyrénées qui le réélut député. Il eut en-
core l'honneur d'être nommé vice-prési-
dent : il siégeait au côté droit. Faget de
Baure mourut à Paris le 30 décembre
1817. C'était un homme plein de reli-
gion , et il avait une intégrité à toute
épreuve. On a de lui 1 ° divers morceaux
de littérature , notamment des vers sur
le Dante , insérés sans nom d'auteur dans
le Spectateur du Nord ; 2° Histoire du
canal du Languedoc , rédigée sur les
pièces authentiques, etc. .Paris, 1805,
in 8 ; 3" Essai historique sur le Béarn,
Paris , 1818 , in-8 , ouvrage posthume.
* TAGGI, ouDEFACGns(Ange), appelé
aussi cjuelquefojs Sangrino, du nom du
FAG lo5
château de Sangro , dans le royaume de
Naples, où il était né vers l'an 1 500, est
un de ceux qui ont le plus illustré l'ordre
de Saint-Benoît. Il était de la congréga-
tion du Mont-Cassin. Sa vie offrit le mo-
dèle de toutes les vertus : il partageait
son temps entre la pratique des devoirs
religienx et l'étude , à laquelle il se Irvra
avec une assiduité extraordinaire. Très
versé dans les langues grecque et latine,
il avait fait aussi une étude approfondie
de l'Ecriture sainte et des saints Pères.
Elu supérieur de diverses maisons, il se
lit remarquer par la sagesse de son admi-
nistration, qu'il porta au plus haut degré
dans le gouvernement du Mont-Cassin et
dans celui de la congrégation, dont la
présidence lui fut déférée à deux reprises
différentes. Le pape Pie V qui avait pour
lui la plus grande estime, l'avait nommé
inquisiteur de la foi. Parvenu à un âge
très avancé, dom Faggi se démit de toutes
ses places, pour consacrer à Dieu tous ses
momens , et mourut au Mont-Cassin le
17 mars 1593, âgé de 93 ans. Parmi les
nombreux ouvrages qu'il a laissés, on dis»
tingue particulièrement 1° In psalterium
Davidis régis et prophetœ clarissimi ^
paraphrasis vario metri génère exculla,
Venise, in-4, 1575; 2° Poesis christiana
in quatuor libros distincta, Padoue, in-4,
15G5; 3° Spéculum et exemplar christi-
colarum , seu Vita beati patris sancti
Benedicli , monachorum patriarchœ
*rt«c/w.H/ni,Florence, in-4,162G;4'' Trai-
té sur f oraison des 40 heures, Florence,
1583; 5° Vita sanctœ Virginis Mariœ,
carminé elegiaco, Vérone, 1G49; 6° Offi-
cium 40 horarum , varia metri génère ,
1 58 3 ; 1° Sentimens d^un pécheur en pré-
sence du très Saint-Sacrement , en vers
héroïques , Florence , 1583; S° Psautier
de la Sainte F'ierge, en prose et en vers
saphiques ; 9° Eloge en vers du Père
dom Paul Picco de Pavie, imprimé par-
mi ceux de Paul-Prosper Martinengo;
10" Dialogue sur les noms donnés à Dieu
dans les livres saints. Elnfin , des Hym-
nes, des Eloges, des P^ies des saints, des
Sermons, etc.
'FAGItlOLI (Jean-Baptiste), poète
comique et burlesque , né à Florenct en
ao4 FAa
1G60 , et mort en 1742 , fut reçu, malgré
sa jeunesse , dans Tacadémie des Apas-
listes, et commença dès lors à composer
des comédies dans lesquelles il jouait lui-
même les rôles les plus plaisans. Il occu-
pait ainsi les sociétés les plus distinguées
de sa patrie par ses vers, son humeur
bouffonne et ses bons mots. Ce qui ne
l'empêcha pas d'exercer plusieurs places
dans la magistrature floreolinc, )l a laissé
des poésies burlesques sous ce titre : liiine
piacevoli di Giam-Bnttista Fagiuoliy
Florence, 1729, 2 vol. iu-8; réimprimées
à Lucques, 1733-45, 7 vol. in-8. La dér
ceuce qui y règne les distingue de toutes
les autres du même genre. Elles eurent
du succès de son vivant, quoiqu'elles
n'aient ni l'originalité ni la verve de celles
de Berni. Ses comédies imprimées à Flo-
rence, 1734-3G, 7 vol. in-12, écrites aussi
dans le stile facétieux et burlesque , se
(ont remarquer par le bon ton qu'il y a
toujours conservé et qui est assez rare
dans les écrivains de cette nation. Le
censeur qui lésa approuvées dit qu'il les
regarde comme très utiles, étant une sa-
tire continuelle du vice.
•FAGNAN (Marie-Antoinette, dame),
née à Paris dans le 1 8* siècle, préféra une
douce obscurité à l'éclpt dont elle aurait
pu jouir dans la carrière littéraire. Elle
publia dejix ouvrages de féerie qui curent
(du succès. Le premier , intitulé Kanor ,
ponte traduit du sauvage, a pour but de
prouver quie le vérit^tbic amour fait des
prodiges; le second, qui a pou^ titre :
miroir des princesses orientales, est un
instrument qui révèle ce qui se passe au
fond des cœui's. Lesage en a pris les
i^ées qui font le fond de son opéra du
Miroir magique. On doit encore au même
^teur une bagatelle agréable, publiée
dans le Mercure ^e France, sous le tilre
de Minef bleu et Louvette , et réimpri-
mée depuis plusieup fois en 1814 dans
les Contes merveilleux . Le but de ce petit
ponte est de prouver qu'avec un bon cœur
on ne peut jamais être véritablement
laid. L'obscurité dans laquelle s'est en-
veloppée cette dame auteur fait qu'on
ignore l'époque précise de sa mort, qu'on
croit cepeadâqt être privée eu 1770.
FAG
FAGNANI ou Fagnan ( Prosper }, cé-
lèbre canoniste, consulté à Rome comme
l'oracle de la jurisprudence, fut pendant
lô ans secrétaire de la sacrée congréga-
tion. Cet habile homme perdit la vue à
l'âge de 44 ans, et ne travailla pas moins
jusqu'à sa mort, arrivée en 1G78, à l'âge
de 80 ans. On lui doit un long Commen-
taire sur les Dc'cre'lalcs , Rome, 1461,
3 vol. in-fol., réimprimé à Venise en
1697. Il fut entrepris par ordre du pape
Alexandre VII. La table de cet ouvrage,
vrai chef-d'œuvre en ce genre , vaut seule
autant que le Commentaire. Ce qu'il y a
de plus extraordinaire, c'estqu'un homme
aveugle ait pu la dresser , et la dresser
d'une manière si exacte.
FAGOIN (Gui Crescent), né à Paris au
jardin des Plantes, le 11 mai 1638, d'un
commissaire des guerres, fut destiné de
bonne heure à la médecine. II prit le
bonnet de docteur en 1664. Etant sur
les bancs, il soutint dans une thèse la cir-
culation du sang : action hardie alors, que
les vieux docteurs ne pardonnèrent au
jeune étudiant, qu'en faveur de l'esprit
avec lequel il avait défendu ce paradoxe,
aujourd'hui démontré. Vallot, premier
médecin du roi , ayant entrepris de re-
peupler le jardin royal, le livre commun
de tous les botanistes, Fagon lui offrit ses
soins. Il parcourut les Alpes, les Pyré-
nées, l'Auvergne, la Provence, le Lan-
guedoc, et n'en revint qu'avec une riche
pioisson. Son zèle fut récompensé par les
places de professeur en botanique et en
chimie au jardin du roi. Sa réputation le
fit choisir eu 16G0, pour être le premier
médecin de M"* la daupbine. Quelques
mois après il le fut de la reine , et après
la mort de cette princesse, il fut chargé
par le roi du soin de la santé des enfant
de France. Enfin Louis XIV, après l'avoir
approché de Iqi ppr degrés, le nomma son
premier médecin, en 1693. Dès qu'il fut
élevé à ce poste , il donna à la cour un
spectacle rare et singulier; il diminua
beaucoup les revenus de sa charge. Il se
retrancha ce que les autres médecins sub-
alternes de la cour payaient pour leur
serment ; il abolit des tributs qu'il trouva
établis sur les nominations aux chaires
FAH
royales de professeur en médecine dans
les diverses universités. Devenu surin-
tendant du jardin royal en 1698 , il in-
spira à Louis XIV d'envoyer ïournefort
dans le Levant , pour enrichir ce jardin
de nouvelles plantes. L'académie des
Sciences lui ouvrit son sein l'année d'a-
près. Fagon avait toujours eu une santé
très faible. Elle ne se soutenait que par
un régime presque superstitieux; et il
pouvait donner pour preuve de son habi-
leté, dit Fontenelle, qu'il vivait. L'art cé-
da enfin, et la France le perdit eu 1718,
âgé de près de 80 ans. Il avait épousé Ma-
rie Nozereau , dont il a laissé deux fils :
l'aîné, Antoine, évêque de Lombez , puis
de Vannes, njort le 1 G février 1 7 42 ; et le
second, Louis, consciller-d'état ordinaire
au conseil royal, et intendant des li-
uunces, mort à Paris le 8 mai 1744, sans
avoir été marié. Outre un profond savoir
dans sa profession, Fagon avait une éru-
dition très variée, fet embellie par l'heu-
reuse facilité de bien parler. Son cœur
était encore au dessus de son esprit. Il était
humain, généreux, désintéressé. Il eut
part au Catalogue du Jardin Royal, pu-
blié en 1GC5, sous le titre à'IIoitus Re-
gius. Il orna ce recueil d'un ■pelil poème
latin, inspiré par son goût pour la bota^
nique. On a encore de lui les Qualités du
quinquina,Vdris, 1703, in-12. (Son éloge
se trouve dans la notice des hommes tes
plus célèbres de la faculté de médecine ,
par J. A. Hazon. Son oncleGuy delà Drosse
fut le fondateur et devint l'intendant du
Jardin des Plantes. )
FAGUINDEZ (Etienne), jésuite de
Viane en Portugal, mourut en 1G46, à G8
jins, regardé comme un homme pieux et
savant. On a de lui 1° Traite' des contrats ,
Lyon, 1G41, in-fol. 2° Traite sur le De-
calogue, Lyon, 1G40, 2 vol. in-folio, et
d'autres ouvrages de the'ologie morflt/equi
ont eu de la réputation.
FAHRENHEIT (Gabriel-Daniel), né
fi Dantzick en 1G85, fut envoyé en Hol-
lande pour apprendre le commerce, mais
son goût le porta vers l'étude de la phy-
sique ; il s'appliqua particulièrement à la
construction des baromètres et des ther-
momètres. En 1720, il substitua à l'esprit
FAI 2o5
de vin, dont on s'était servi jusque-là
pour les thermomètres, le mercure, et
rend compte de celte opération dans sa
dissertation sur les thermomètres, 1 724.
Il adonne à cet instrument uneéchelle et
un terme fixe, différens de ceux de Réau-
mur. Au lieu de la glace, il a pris pour
terme l'eau bouillanlc, et son 32^ degré
répond au zéro de Réaumur. Mais on ne
saurait disconvenir que le thermomètre
de celui-ci est plus simple et plus sûr;
et que s'il est plus généralement adopté,
c'est qu'il mérite réellement de l'être.
Fahrenheit est mort en 1740. (Il avait pu-
blié eu outre cinq mémoires qu'on trouve
dans les Transactions philosophiques ,
1724).
FAIDEAU. ployez Feydeau.
FAIEL ou Fayel (Eudes de) , seigneur
renomme du Vermandois , se signala par
une action atroce, que l'histoire nous a
conservée. Il avait épousé Gabrielle de
Vergy, ou plutôt de Lévergies, issue d'une
des meilleures maisons du canton , mais
plus distinguée encore par sa beauté que
par .sa naissance. Cette dame, née avec
un cœur tendre, ne put résister aux ins-
tances et à la figure séduisante de Renault
ou Raoul, châtelain de Coucy, le plus ac-
compli de son temps, qui venait souvent
au château de Faïel. Il se forma entre elle,
et ce jeune seigneur, qui l'aimait au.ssi
éperdument, une funeste liaison. I^ ma-
ri, homme violent et emporté, en fut in-
struit ; mais comme ses soupçons n'étaient
pas pleinement confirmés, il n'osa en ve-
nir à un éclat. Sur ces entrefaites, Coucy
fut obligé de s'embarquer sur un des vais-
seaux de Richard Cœur-dc-Lion, roi d'An-
gleterre, pour la croisade dans laquelle
il s'était engagé. Son courage l'ayant em-
porté dans une affaire périlleuse contre
les Sarrasins, il reçut une blessure mor-
telle d'un javelot, qui le perça fort avant
entre les côtes. Se voyant à l'extrémité,
il chargea sonécuyer, dès qu'il serait re-
tourné en France, de remettre à la dame
de Faïel une lettre de sa main, un petit
coffre d'argent, avec les joyaux qu'il avait
reçus d'elle, à son départ : il l'enga-
gea aussi, sous le serment, à prendre sou
cœur après sa morî, et à porter ce funesla
2o6 FAI
présent à celle pour qui seule ce cœur
avait soupiré. Le messager était déjà dans
les avenues du château de Faïel, lorsqu'il
fut rencontré par le seigneur , qui le re-
connut, et l'obligea de lui déclarer le su-
jet de son arrivée. Faïel se saisit du fatal
dépôt avec une joie mêlée de rage ; il
rentra dans le château, et poussé par l'ex-
cès de sa jalousie, il fit servir à sa femme
dans un ragoût le cœur de Coucy, qu'elle
mangea sans se douter de rien. « Ce mets,
j) lui dit-il, a dû vous paraître excellent,
» car c'est le cœur de votre amant, » En
même temps pour la convaincre mieux de
la vérité de cet horrible repas, il jeta sur
la table le petit coffre et les bijoux. A ce
spectacle, la dame de Faïel, frappée
comme d'un coup de foudre, demeura
ttupide et sans voix, et passa de cette in-
sensibilité apparente à l'évanouissement ;
elle ne revint que pour jeter les cris du
désespoir, et jurer « qu'elle ne prendrait
» plus de nourriture « ; ce qui la condui-
sit en peu de jours au tombeau. Celte ef-
frayante catastrophe arriva vers l'an 1 191 :
elle a fourni le sujet d'une tragédie à
MM. de Belloy et d'Arnaud. Le seigneur
de Faïel, dévoré par le chagrin et les re-
mords, ne survécut pas long-temps à l'ac-
tion qui les lui avait causés. Il mourut
avec la douleur d'avoir sacrifié d'une ma-
nière si barbare une femme qu'il avait
toujours aimée ( voyez Mémoires histo-
riques sur la maison de Coucy et sur la
dame de Faïel, par M. de Belloy, citoyen
de Calais). On raconte le même trait de
vengeance d'une comtesse d'Astorgas
(voi/cz ce mot) ; mais il y a apparence
que ce n'est que l'histoire de Faïel tra-
vestie : à moins de supposer que les Mé-
moires de M. de Belloy ont été fabriqués
d'après l'anecdote de la comtesse d'Astor-
gas; ce qui dans ce siècle, où l'histoire
est devenue le jouet de l'imagination et
une spéculation de lucre, n'aurait rien
de bien étonnant : et que ne ferait pas un
bel -esprit, pour avoir à traiter quelque
sujet piquant, pour arranger un drame
larmoyant et bien terrible ! Ployez l'ar-
ticle Coucy.
FAIL (Noël du), seigneur de La Héris-
saye, gentilhomme breton , et conseiller
FAI
au parlement de Rennes, au 16* siècle y.
fut ami d'Eginard Baron et de Duaren.
On u de lui divers ouvrages qu'on ne liC
plus, et qu'on ne peut guère lire, si l'on
a le germe du bon goût. Les gens frivoles
recherchent cependant ses Contes ei Dis-
cours (VEulrapely Rennes, 1587, io-16,
réimprimés en 1732, 2 vol. in-12, et le*
Ruses de Rayot , l5IG, in- 16, réimpri-
mées aussi sous le titre de Propos rusti-
ques en 17 32. Ces livres ne sent reconi-
mandables que par leur naïveté.
FAILLE (Germain de la), né à Castel-
naudari en 1616, avocat du roi au prési-
dial de cette ville, devint syndic de Tou-
louse en 1G55, et secrétaire perpétuel des
Jeux Floraux en 1 694 . Il mourut en 1 7 1 1 ,
à 95 ans, doyen des anciens capilouls.
On a de lui i° Les Annales de Toulouse,
en 2 vol. in-fol., 1687 et 1701. L'auteur
de la dernière Histoire de Languedoc
(M. du Rozoi) a beaucoup profité de cet
ouvrage curieux et intéressant, surtout
pour les Toulousains. Le stile en est vif
et concis, mais peu correct. H s'est arrêté
à l'année 1 6 1 0 ; son amour pour la vérité
ne lui permit point de traiter l'histoire
des derniers temps, parce qu'il craignait
d'être obligé de la trahir. 2" Un Traité
de la noblesse des Capitouls , en 1707,
in-4 ; il est rempli de recherches cu-
rieuses. Indépendamment du mérite de
l'érudition , La Faille écrivait facilement
en vers et en prose. U était lié avec plu-
sieurs gens de lettres, dont il avait l'es-
time et l'amitié. (Ses poésies sont insérées
dans le Recueil des Jeux Floraux ).
* FAINI (M"°« Diamante), poète ita-
lienne , né à Savallo dans le Brescian au
commencement du 1 8» siècle, morte à Salo
le 13 juin 17 70, était fille d'un médecin
de Castrezato qui cultiva ses heureu.ses
dispositions. Elle fit des progrès signalés:
ses poésies sont charmantes. Sa prose
n'est pas moins facile et moins élégante
que ses vers. Elle écrivait aussi en latin
et même en français avec une rare pu-
reté. Elle possédait assez bien la science
astronomique, et même les matières théo-
logiques. Ses OEuvres , en prose et en
vers, ont été imprimées à Salo en 1762
et 1771, 1 vol. in-8. Ses vers roulent
\
I
FAI
presque tous sur des sujets sacrés ou mo-
raux.
•FAIPOULT ou Faypoult ( Guillau-
roe-Cliarles , chevalier de Maisoncelles )
adraiuistratcur et homme d'état sous le
régime républicain, naquit en 1752 d'une
famille noble de Champagne. Entré de
bonne heure au service militaire, il était
capitaine du génie à l'époque où le
gouvernement français envoya des se-
cours aux insurgés de l'Amérique du Nord.
Il sollicita la faveur de faire partie de
cette expédition : le refus qu'il essuya
du ministre de la guerre , le détermina
à donner sa démission. Dès cette épo-
que jusqu'à la révolution , il se livra
entièrement à la culture des sciences et
des arts. Les principes proclamés en
1789 trouvèrent en lui un chaud par-
tisan : il accepta des emplois , et devint
secrétaire-général du ministre de l'inté-
rieur sous Roland et Garât. Banni en
vertu du décret qui chassait les anciens
nobles, il revint à Paris sous le Directoire,
et publia un ouvrage assez médiocre in-
titulé : Essai sur les finances , an 3,
( 1795 ) in-8. Peu de temps après il fut
ministre des hnances, et ce fut sous son
ministère que les planches des assignats
furent brisées. Un an après, ce portefeuille
lui fut ôté. Nommé ministre plénipoten-
tiaire à Gènes, il parait qu'il se condui-
sit avec prudence : ce qu'il y a de cer-
tain, c'est que la ville de Gèues fit frap-
per une médaille sur laquelle se trouve
son buste à côté de celui de Cuonapartc
avec cette exergue : A Napoléon Buo-
haparle et à Guillaume Faypoult, la
Liguric reconnaissante. Le jeune vain-
queur de l'Italie avait engagé Faypoult à
le suivre en Egypte ; les aftaires de l'Ita-
lie l'empêchèrent de prendre part à cette
expédition : Faypoult fut envoyé de Gè-
nes à Milan , puis de Milan à Rome, et en-
fin à Naples, et présida à la création et à
l'organisation de presque toutes les répu-
bliques de l'Italie. Une querelle très vive
qu'il eut avec 'le général Champion net
et qui amena la destitution de celui-ci,
devint après le 1 8 fructidor le motif d'une
proscription contre Faypoult : il fut dé-
noneé en 1799 comme dilapidateur et
FAT 207
poursuivi par le tribunal criminel de 1»
Seine; ces poursuites s'arrêtèrent d'elles-
mêmes. Après le 18 brumaire, Euona-
parte, premier consul, le nomma préfet
de l'Escaut, qu'il administra jusqu'en
1 808, époque 011 il fut destitué. Une tem-
pête affreuse avait enlevé les digues des-
terrains bas de ce département, et la mer
en avait envahi une partie : la faute qui
devait être imputée aux seuls ingénieurs
des ponts et chaussées, retomba sur le
préfet qui encourut la disgrâce de Buo-
naparte. Lorsque Joseph fut élevé sur le
trône d'Espagne, il nomma Faypoult mi-
nistre des finances, et celui-ci occupa ce
poste jusqu'à la fin de 1813, époque où il
revint en France avec l'armée et la cour
du nouveau roi. Buonaparte lui confia
alors une mission importante en Italie :
malgré les nombreuses difficultés qu'il
rencontra, il parvint à Bologne auprès de-
Murât: il vit aussi tous les princes d&
cette presqu'île ; il s'agissait sans doute de
les faire prononcer tous en faveur du gou-
vernement chancelant de l'empereur. Les
événemens qui survinrent l'empêchèrent
de terminer ses négociations, ou ne nous
permettent pas d'en connaître le résultat.
En 1815, au retour de Buonaparte, Fay-
poult fut nommé préfet deSaône-et-Loire :
il contribua sans doute à exalter les habi-
tans de ce département qui se levèrent
presqu'en masse pour se réunir à l'armée
du général Lecourbe : il chercha aussi à
défendre la ville de Màcon qui, malgré
ses efforts multipliés, tomba au pouvoir
des Autrichiens. Faypoult arrêté et jeté
en prison, reçut ensuite du général au-
trichien Frimont, l'ordre de continuer à
administrer le département. Remplacé
bientôt après par le gouvernement royal,
il quitta Màcon, alla dans les Pays-Bas et
fut reçu presqu'en triomphe à Gand. Cette
cité a fait placer son portrait en pied dans
la grande salle de l'hôtel-dc-ville, où on
le voit encore. Il revint en 1816 à Paris,
où il mourut dans un état voisin de l'in-
digence, au mois d'octobre 1817.
FAIRFAX (Thomas), l'un des chefs
des parlementaires et général de leur ar-
mée, mit en déroute , le 24 juin 1645,
l'armée de Charles I à Nazerby. Ce prince
io8 FAR
y perdit toute son infanterie, sofi Canon
et son bagage. L'année suivante, Fairfax
se rendit maître d'Oxford; battit ensuite
le prince de Galles , força Eieter après
deux mois et demi de siège, et obtint en
1047 la place de gourverncur de la Tour
de Londres. En JG48 , il se démit de sa
charge et cessa de se mêler des affaires
d'état , quand il vit Charles I livré à la
chambre de justice ; ne se pardonnant
pas les avantages qu'il avait remportés
sur ce prince infortuné. Dès qu'il s'aper-
çut des intentions de Monck pour le réta-
blissement de Charles II, il fut un des
premiers à lui offrir ses sei^vices. Le par-
lement le choisit pour un des députés
vers ce prince, lorsqu'il l'invita à venir
reprendre la couronne. Il mourut en avril
1GC7. C'était un homme sombre, hypo-
condriaque, et au talent de la guerre
près, une espèce d'automate, qu'on fai-
sait agir comme on voulait : aussi Crom-
wel en sut-il tirer bon parti.
* FAISTENBERGER (Antoine), pein-
tre d'Inspruck, né en 1678, excellait dans
le paysage. Les siens sont d'une compo-
sition également grande et bien enten-
due. Il aimait à représenter des chutes
d'eau et des solitudes. Ce peintre mou-
rut à "Vienne, l'an 1720. Son frère Joseph,
dont il fut le maître, avait si bien imité
sa manière, que l'on confond souvent
leur stableaux.
' FAITHORIN'E (William) , peintre et
graveur anglais, né en ICI G, mort en
1691, fut banni de son pays pour n'avoir
pas voulu prêter serment d'obéi.ssance à
Cromwel. A son retour en Angleterre, il
se livra particulièrement à la gravure.
On cite de lui une Sainte Famille , d'a-
près Vouet, et le Christ au tombeau, d'a-
près Van-Dyck. Le genre oîi il s'est le
plus distingué est celui du portrait gravé.
Il en a donné un grand nombre qui sont
très estimés, et publié un traite' sur Fart
de la gravure, en 1662. 11 mourut en
1691.
• FAKim-EDDYN-RAZY , historien
arabe, un des plus célèbres docteurs mu-
sulmans, né, selonM. deSacy, vers la fin
du 7' siècle de l'hégire et au commence-
ment du 8" (vers l'an 1300 de J. G. ), et
rAL
selon d'autres h Rei en Perse , l'aù 543 oH
644 de l'hégire (1149 ou 1 1 50 de J. C. ),
mourut à Hérat Tan COC de l'hégire (1210
de J. C. ). Il avait étudié la théologie sco-
lastique et la philosophie sous le fameux
Algazaly , et professa avec un succès tel
que l'on se rendait à ses cours de toutes
les parties de la Perse et de la Mésopota-
mie. Il est connu par une Histoire chro-
nologique des dynasties , qui se trouve
parmi les manuscrits arabes que possède
la bibliothèque royale. Cette histoire est
divisée en deux parties , dont la première
traite des principes du gouvernement ,
des qualités nécessaires à un prince , et
des défauts qu'il doit éviter ; la seconde
présente succintement les différentes dy-
nasties qui ont gouverné l'empire fondé
par les Arabes, en commençant parles
premiers califes. Cette histoire , quoique
abrégée , mériterait, par l'importance des
faits qu'elle renferme et les réflexions de
l'auteur , de passer dans notre langue.
M. Sylvestre de Sacy , en a publié trois
extraits dans sa Chrestomathie arabe ,
savoir : 1" V Histoire du califat de Ha-
roun-Al-Aaschild ; 2° V Histoire du ca--
lifat de Moslassem, dernier prince abas-
side ; 3° le chapitre intitulé : Des droits
des souverains fur leurs sujets. Il ne
faut pas confondre cet historien avec le
docteur du même nom , né en 1 160.
* FAKHB-ENNISA (Chohd'ch), fille
célèbre , qui mérita le nom ci-dessus cité,
et qui signifie la gloire des femmes. Elle
naquit à Bagdad vers l'an 1088 de J. C,
professa la jurisprudence et la théologie,
compta parmi ses disciples les hommes
les plus distingués et les docteurs les plus
fameux de ce siècle. Elle passa sa vie
dans le célibat, uniquement occupée de
ses études, et mourut le 1" juillet 1179
de J. C, ou 574 de l'hégire.
' FALBAIRE (Charles-George FENODit-
toT de ) , poète dramatique , né à Salins
le 16 juillet 1727 , fil ses éludes au col-
lège de Louis le Grand à Paris , et dès sa
plus tendre jeunesse s'occupa de poésie
et de littérature. Il occupait dans les fi-
nances un emploi qui lui assurait une
existence honorable tout en lui permet-
tant de survre son goût pour les lettres.
â
FAL
Nommé en 1*82 inspecteur-général des
salines de l'est, il s'occupa avec succès
d'en accroître le revenu pour l'état. La
révolution le priva de ses emplois , et
détruisit sa fortune. Il mourut le 28 oc-
tobre 1800, à Ste.-iMenehouIt , où il s'é-
tait retiré avec sa famille. Ses œuvres
ont été réunies à Paris, en 2 vol. in-8 ,
1787 ; on y troiive : 1° L'Iwnnêle Crimi-
nel, drame en 5 actes et en vers , dont le
sujet était tiré , dit-on , d'an événement
réel ; mais on assure que Falbaire l'igno-
rait lorsqu'il composa cette pièce et que
la première idée lui en vint à la lecture
d'un passage de la Poétique de Marmou-
tel. Ce qu'il y a de plus certain, c'est que
cette pièce est l'imitation d'un drame es-
pagnol de Jovelianos , qui porte le même
titre. Pour s'en convaincre , il suffit de
rapprocher les deux drames. Celte pièce
par laquelle il débuta eut un grand suc-
cès. Il y a des situations attachantes;
mais le stile en est faible et négligé. On
en a fait plusieurs éditions; et elle a été
traduite en allemand, en hollandais et
en italien. 2° Le premier Navigateur ,
pastorale lyrique en 3 chants. 3" Les deux
avares , comédie en 2 actes et en prose ,
mêlée d'ariettes , dont quelques situa-
tions assez touchantes , et surtout la mu-
sique de Grétry, firent le succès. Grimm
en a fijit la critique dans sa correspon-
dance. 4° Le Fabricant de Londres,
drame en 5 actes et en prose , joué en
17 71 , et qui tomba dès la première re-
présentation. Une mauvaise plaisanterie
décida sa chute : au cinquième acte,
lorsqu'on vint annoncer la banqueroute
du fabricant, un homme du parterre s'é-
cria : J'y suis pour 20 sous (prix de son
billet). L'auteur retira sa pièce le lende-
main. Quoique cette pièce soit froide et
assez mal conduite, elle a été traduite en
allemand et en italien , et représentée
à plusieurs reprises sur les théâtres de
Vienne et de Vicence. 6° L'Ecole des
mœurs, ou les Suites du libertinage,
drame en 5 actes et en vers , joué sans
succès eu 1 7 7 6 et en 1 7 90 ; il a été traduit
en allemand et en hollandais. 6" Les Jam-
mabos, ou le$ moines japonais , tragédie
en 3 actes dirigée contre les jésuites : c'est
V.
FAL 2o<)
la plus mauvahe de ses productions, car
elle pèche par le plan , l'action cl le stile.
Le seul drame de V Honnête Criminel ob-
tint du succès, qu'il dut en grande partie
aux circonstances où il fut joué, et à l'in-
térêt qu'inspire le malheur qui n'est iws
mérité.
FALCANDUS ou Falcand (Hugues),
normand d'origine, trésorier de St. -Pierre
dePalerme, dansle 12* siècle, laissa une
Histoire de Sicile depuis 1 1 52 jusqu'en
1169, écrite avec simplicité et exacti-
tude. La meilleure édition de cet ouvrage
est celle de Gervais de Tournay, in-8 ,
Paris, 16.')0.
FALCIDIUS, tribun du peuple ro-
main, institua la loi Falcidie, l'an 40
avant J. C, ainsi appelée du nofn de son
auteur. Elle ordonnait que le quart des
biens de tout testateur demeurerait à ses
légitimes héritiers. C'est ce qu'on nomma
la Quarte Falcidique. On pouvait dispo-
ser du reste.
*FALCK ou Falk (Jean-Daniel), poète
satirique allemand , naquit à Dantzick
en 1770, de parens peu favorisés par
la fortune. Sa passion pour l'étude fut
mise à de rudes épreuves. Ayant embras-
sé d'abord la profession de son père qui
était perruquier , il consacrait ses épar-
gnes à acheter quelques livres qu'il dévo-
rait pendant ses momens de loisir ; mais
comme ses parens empêchaient ses lec-
tures, il les faisait souvent dans la rue
auprès d'une lanterne, même pendant la
saison la plus rigoureuse : les poètes al-
lemands étaient ses auteurs favoris. Il
obtint cependant d'apprendrela musique,
et il y fit des progrès étonnans. La langue
anglaise lui devint bientôt familière ,
sous la direction d'un maître qui lui
avait permis d'assister gratis à ses leçons.
Enfin ses succès dans toutes les parties
qu'il abordait, déterminèrent ses parens
à lui faire continuer ses études au Gym-
nase de sa ville natale ; il les termina à
l'université de Halle. Bientôt embrassant
exclusivement la profession d'homme de
lettres , il fit paraître plusieurs pièces de
vers dans le genre satirique et à l'imita-
tion de Boiieau. La considération qu'il
acquit par ses ouvrages lui méritèrent eu
>4
aïo Ï'AL
1778, de la part du grand-duc , la place
de conseiller de légation, avec appoiule-
mens : ce qui lui permit de se livrer euliè-
rementà son goût pour l'étude. En nOG,
il conçut J'idce d'un annuaire orné de gra-
vures et de caricatures, dans le but de pa-
rodier les classiques anciens et modernes,
et de faire voir , dans des observations
critiques, les préjugés de cbaque siècle :
cet annuaire, qui parut depuis 17 97
jusqu'en 1 803 , lui' attira beaucoup de
désagrémens. D'abord il avait, dans ses
satires, attaqué les vices et les folies
des hommes , comme dans les Tombeaux
de Kam et dans son poème des he'ros :
plus tard , il s'abaissa jusqu'à des per-
sonnalités , et tourna en ridicule des per-
sonnages estimables. Ses principaux ou-
vrages sont : 1° Satires, Leipsick et Al-
tona , 1800, 3 vol. in-12. Les Tombeaux
de Kam se trouvent dans le second vo-
lume. 2° Almanach des Amis des sail-
lies et de la satire, 1797-1803, 7 années,
in-12. 3" OEuvres choisies en prose de
Swifft et d'Arbuthnot , traduites en al-
lemand, Leipsick, 1798-1799, 6 vol.
in-8. 4° Dissertations sur la poésie et
les arts , Weimar, 1803, in-8. 5° Nou-
veau Recueil de contes et de satires, Ber-
lin , 1804 , in-8. Malgré son mérite litté-
raire, Faick a acquis d'autres droits mieux
fondés à la reconnaissance publique ; en
1 806 et en 1 8 1 3 , il rendit de grands ser-
vices à la ville de Weimar et à toute la
Saxe : la plupart des familles^ avaient été
ruinées ou détruites dans l'invasion des
Français : un grand nombre d'enfans se
trouvaient abandonnés : Falck eut pitié
de leur sort; et il était d'autant plus por-
té à ce sentiment de commisération qu'il
venait lui-même de perdre quatre enfans
qui avaient fait, pendant quelque temps,
son bonheur et son espérance : il vint au
secours de ces intéressantes victimes de
la guerre, et se voua dès lors à leur édu-
cation et à leur entretien : ce fut dans
ce but qu'il institua la Socic'tt des amis
dans le besoin. Après les avoir élevés,
il songea à leur donner des étals , fonda
en conséquence des écoles de filature, de
couture, de tricots, etc. Ce bienfaiteur de
l'humanité , qui d'abord en avait été' le
FAL
malin censeur, mourut à TV'eimar le 14
février 1826.
* FALCKENSTEIN (Jean-Henri de),
écrivain fécond et antiquaire allemand ,
mort eu 1760 , à Schwabach , fut cham- ,
bellan du prince évoque d'Eichstctt de
1718 à 17 30, conseiller aulique du Mar-
grave d'Anspach de 1730 à 1738 , et ré-
sident du Margrave d'Erfurt jusqu'en
1 740 : il était né en 1682 en Silésie. Il a
écrit en allemand un grand nombre d'ou-
vrages historiques et diplomatiques ; les
principaux sont \° Antiquitates et memo-
rabilia Nordgaviœ veteris , Schwabach,
1734-43-88, 4 vol. in-fol. 2" Chronique
de Thuringc, Erfurt , 1737-39, 3 vol.
in-4. 3" Description de Nuremberg , Er-
furt, 17 50, in-4. 4° Antiquitates et me-
morabilia marchiœ Brandcnburgicœ ,
Bayreuth, 1751 , 3 vol. in-4. 5° Histoire
du duché', ci- devant royaume de Ba-
vière, Munich, 17 93 , 3 vol. in-folio.
* FALCO^ER (Guillaume), poète
écossais, né à Edimbourg vers 17 30,
s'engagea fort jeune dans la marine, par-
tit pour les Indes orientales avec Je titre
de trésorier à bord de la frégate V Aurore,
et périt en 17C9 dans un naufrage sur les
rochers de Macao. On a de lui 1" un poè-
me en trois chants, intitulé Le naufrage,
Londres, 17 62 , écrit avec beaucoup de
chaleur et de poésie : il a obtenu plusieurs
éditions. Un premier naufrage quel'auleur
avait essuyé dans une traversée d'Alexan-
drie à Venise lui a fourni le sujet de cet
ouvrage qui n'est pas sans mérite. 2° Un
poème sur la mort de Frédéric, prince
de Galles. 3° Une Ode au duc d'York.
4" Un Dictionnaire de marine, in-4 ,
1760, estimé, réimprimé en 1809, avec
des additions considérables.
* FALCOJN'ER (Thomas) , savant et lit- ■
térateur anglais, naquit à Chesler en I
1736, fit partie du collège d'Oxford,
et a composé quelques ouvrages parmi
lesquels on remarque 1° Dévotions for
tlœ sacrament of tlie Lord! s supper, etc.
1786 , souvent réimprimé. 2° Des Obser-
vations sur le récit de Pline , touchant
le temple d'Ephèse , inséré dans le 1 1 "
vol. de l'Archéologie. 3° Des Tables
chronologiques depuis le règne de Solo-
â
FAL
mon , jusqu'à la mort d'Alexandre le
Grand j 179C, in-4 -. il a traduit aussi du
grec, du français et du latin les ouvrages
suivans : 1" Voyage d'Hannon, cclairci
par les relations des voyageurs moder-
nes , 1 797, in-8. 2° Le Tocsin , ou appel
au bon sens, 1798, in 8. 3° Foijage
d'Arricn autour de la mer Noire , 1806,
in-4. Trois Discours et une Dissertation
géographique font partie de cet ouvrage.
II avait préparé une nouvelle édition de
Strabon qui a paru en 1807 , latin-grec ,
par les soins de son neveu , 2 vol. in-fol.
*FALCOi>ER (William), médecin an-
glais , naquit à Londres eu 17 43, et
mourut à Bath en 1824. Il était aussi re-
marquable par son excellent caractère
que par l'étendue et la variété de ses
connaissances. Depuis 17CG jusqu'en
1805 , il a écrit en anglais sur divers su-
jets de médecine , qui tous ont obtenu
du succès et qui jouissent encore d'une
réputation méritée. On remarque surtout:
Essai sur V usage des eaux de Bath ,
1770, 1775, 1790; Observations sur le
régime et la diète recommandés généra-
lement aux personnes valétudinaires ,
1778, in-8; Remarque sur V influence
du climat, etc. , 1781, in-4 ; b" Influence
des passions sur la santé et les maladies,
17 78, in-8 ; &° Essai sur les moyens de con-
server la santé des agriculteurs , 1789,
in-8. Il a aussi traduit le Voyage d'A-
rianne sur le Pont Euxiuy auquel il a
joint une Dissertation géographique et
trois Discours préliminaires, 1 805, in-4.
FALCOINET ( Camille) , né à Lyon le
1" mars 1671 , d'une famille célèbre dans
la médecine , augmenta la gloire de ses
ancêtres par l'étendue et la variété de
son savoir. Le père Malebranche qui le
connut, lui donna son estime et son ami-
tié. L'académie des Belles-Lettres le mit
au nombre de ses membres en 1 7 1 G , et
le perdit le 8 février 1762. Il était alors
âgé de 91 ans, et il avait du sa longue
vie autant à son tempérament qu'à son
régime. Ce savant possédait une biblio-
thèque de 45,000 vol., de laquelle il avait
séparé, dès 1742, tous les ouvrages qui
manquaient à la bibliothèque du roi.
Nous avons de cet auteur ; t° une tra^
FAL 2 I I
duction du nouveau Système des pla-
nètes, composé en latin par Villeraot ,
publiée en 1707 , in-12. 2" Des éditions
de la pastorale de Daphnis et Chloéj
traduite par Amyot, 1731, in-8, avec
des notes. 3° Du Cymbalum mundi , par
Perier, avec des notes, 1732, in-12. La
nature de ces deux ouvrages ne donne
pas une grande idée du choix et du goût
de l'éditeur. 4° Plusieurs thèses de méde-
cine. Falconct avait l'humeur gaie , le
caractère prompt , l'esprit vif. Il aimait à
parler, et parlait fort bien. Quiconque
aimait les lettres , trouvait auprès de lui
l'accès le plus facile. Il prêtait ses livres
avec plaisir ; mais il en avait beaucoup
qui ne pouvaient être utiles à personne.
Quoiqu'il n'excellât pas dans la pratique
de la médecine, il connaissait très bien
la théorie , et brillait dans la consulta-
tion.
* FALCONET f Etienne -Maurice ) ,
sculpteur, né à Paris en 1 TIG , d'une fa-
mille peu riche et originaire d'Evilles ,
sur les frontières du Piémont , et alliée à
celle des médecins célèbres de ce nom.
Après avoir travaillé pendant quelque
temps chez un mauvais sculpteur , il fut
accueilli par Lemoine , et les progrès qu'il
fit sous sa direction furent très rapides.
Sa statue de Milon de Crotone, terrassé
par le lion, qu'il travailla longtemps et
qui le fit admettre îi l'académie en 1754 ,
est regardée comme une des meilleures
productions du ciseau moderne. Falconet
fut appelé en 1766 en Russie, par Cathe-
rine II , pour exécuter la statue équestre
de Pierre le Grand, qui le retint 12 ans à
St.-Pétersbourg, et qui suffirait seule
pour immortaliser son auteur. La concep-
tion de l'artiste est grande ; il représente
ce grand prince franchissant à cheval un
roc escarpé : un serpent écrasé sous ses
pieds indique les obstacles qu'il eut à
vaincre pour commencer la civilisation
de son peuple. Un rocher de granit qu'on
trouva dans un marais à quelques milles
de St.-Pétersbourg a servi de base à ce
monument : cette masse , longue de 37
pieds sur 22 de hauteur et 21 de lar-
geur, pesait près de 3 millions de livres.
Lorsque l'on fondit la figure et le cheval ,
ftia F AL
le métal manqua ; une deuxième foute eut
lieu , et Talconet sut empêcher tous les
inconvéniensque l'on pouvait craindre de
cette double opération. On ne sait à quoi
attribuer la conduite de Catherine, qui
n'accorda pas la moindre récompense à
cet artiste, lui donna seulement ce qui
était convenu , et le laissa partir sans lui
permettre de la voir : ce fut sans doute
une intrigue ; car le monument est admi-
rable. En se rendant en France, Falconet
séjourna quelque temps en Hollande : il
arriva à Paris où il est mort le 24 janvier
1791. Ses autres productions les plus re-
marquables sont Pygmalion , la Bai-
gneuse , un Amour menaçant , produc-
tions gracieuses , qui furent moulées dans
toute l'Europe. Il exécuta aussi des sujets
religieux : un Christ agonisant ; une An-
nonciation , pour l'église de St.-Rocli :
lin Saint-Ambroiss , refusant l'entrée de
la cathédrale de Milan à l'empereur Théo-
dose, pour l'église des Invalides. Toutes
ces figures, traitées dans l'expression et
le caractère quijeur conviennent, obtin-
rent tous les suffrages. Falconet a public
des Réflexions sur la sculpture, des obser-
vations sur la statue de Marc-Aurèle ;
la traduction des 34, 35 et 36' livres ds
Pline , etc. Ses œuvres , contenant plu-
sieurs écrits relatifs aux arts , ont été im-
primées à Lausanne, en 1 7 82, 6 vol. iu-8 ;
et ses œuvres diverses, concernant en-
core les arts, à Paris en 17 87 et 1808, 3
vol. in-8. On reproche à cet auteur un ton
beaucoup trop tranchant , et le défaut de
n'avoir pas rendu assez de justice aux an-
ciens. La pauvreté de sa famille était pour
Falconet un titre de gloire dont il tirait
vanité. Dans le voyage qu'il fit en Russie,
Catherine lui donna le titre de Visoko-
rodie , haute puissance , et à cette occa-
sion il disait : ce titre me convient à mer-
veille , car je suis ne dans un grenier.
FALCONETTO ( Jean - Marie ) , né à
Vérone en 14.S8 , fut d'abord peintre mé-
diocre ; mais son application assidue le
rendit excellent architecte. Le cardinal
Bembo et Louis Cornaro furent ses Mécè-
nes. Il fut le premier qui donna les des-
sins des théâtres et des amphithéâtres
des anciens, et introduisit le goût de la
FAL
bonne architecture à Venise. Il éleva plu-
sieurs édifices à Padoue , à Vopo dan» le
Frioul , et à Venise , qui sont la preuve
de ses talens. Il mourut à Padoue en
1Ô34, et fut enterré dans le caveau de
Cornaro.
FALCONIERI ( Sainte Julienne de) ,
morte à Florence sa patrie en odeur de
sainteté, l'an 1341 , donna en 1307 une
règle aux oblales ou converses des ser-
vîtes , dont elle fut la première supé-
rieure. Martin V l'approuva en 1424. La
pieuse fondatrice se signala par les plus
grandes austérités. Elle ne mangeait point
le mercredi et le vendredi. Benoît XIII la
canonisa en 1729.
FALCONIERI (Ocfavio ) , de la même
famille que la précédehle , est auteur
d'un savant discours en italien sur la
pyramide de Cn'ius Sestius , qu'on voit
près de la porte d'Oslic à Rome. Nardini
l'a inséré dans sa lîoma antica. Cet au-
teur était romain. Il mourut en 1C76 , à
l'âge de 30 ans.
FALDA ( Jean-Baptiste ) , graveur ita-
lien du 1 8'' siècle, dont on a des estampes
à l'cau-forte, d'un très bon goût. Les cu-
rieux recherchent ses livres des palais ,
des vignes et des fontaines de Rome.
FALETI (Jérôme) , comte de Trigna-
no , natif de Sa voue, s'appliqua avec un
succès égal à la poésie et aux affaires.
Les ducs de Ferrare lui confièrent des
commissions importantes. Les ouvrages
sortis de sa plume sont 1" un poème ita-
lien , en 4 chants, sur les guerres de
Flandre. 2° Douze livres de poésies. Z"
Les Causes de la guerre d^ Allemagne
sous Charles V , italien , 1562 , in-8. 4*
Le Traité d! Alhénagore sur la Résur-
rection , traduit en italien , 155G , in-4.
11 eut beaucoup de part à l'immense re-
cueil intitulé Polianlhea. Cet auteur flo-
rissait au 16* siècle.
FALIERI ( Ordclafo ), doge de Venise ,
alla vers l'an 1102 au secours de Bau>
douin, roi de Jérusalem, avec une puis-
sante flotte. Après l'avoir aidé à repren- fl
dre presque toute la Syrie, il conquit la ^
Dalmatie , la Croatie et plusieurs autres
provinces. Il rentra en triomphe dans sa
patrie , mais il ne jouit pas long-temps
I
FAL
de sa gloire. Zara en Dalmatîe s'étant
révoltée, il mil le siège devant cette ville,
et y périt.
FALIERI (Marin ou Marino ) , doge
de Venise en 1 3.!i4. Successeur d'André
Dandolo, il fut revêtu de cette dignité
à l'âge de 76 ans. 11 forma le projet de
s'emparer pour toujours du gouverne-
ment qui lui avait été confié pour quel-
ques mois. Il fallait se défaire des séna-
teurs, et le malheureux avait pris des
mesures pour les faire tous assa.ssiner. La
conspiration fut découverte par lui des
conjurés. Le sénat veilla si attentivement
sur les conspirateurs, que 16 d'entre eux
furent arrêtés avec Falieri leur chef. Il
eut la tète tranchée, le 17 avril 1355, à
l'âge de 80 ans ; les autres furent pendus ,
et 400 complices périrent par différens
genres de mort. Lord Byron a composé
«ne tragédie sur cette catastrophe.
FALKEMBERG ( Jean de ) , religieux
dominicain au commencement du 1 &«
siècle , se mêla des querelles des cheva-
liers leufoniques avec le roi de Pologne.
Il écrivit contre ce prince un mauvais
livre qui le fit mettre en prison à Con-
stance , où se tenait alors le concile gé-
néral. Ce libelle est adressé à tous les
rois , princes , prélats , et généralement
à tous les chrétiens. On a vu depuis un
livre fait par un évêque, qui avait une
dédicace toute semblable , et ne valait
pas mieux (la compilation donnée sous
le nom de Fabronius ). La simple et mo-
deste vérité ne s'annonce pas avec tant
d'emphase ; et selon la sage règle d'Ho-
race,
Kon fumum ex fulgore, scd ei fumo dare lucem
Cogitât
Falkemberg y promet la vie étemelle à
tous ceux qui se ligueront pour extermi-
ner les Polonais et Ladislas leur roi. La
condamnation du libelle fut résolue una-
nimement dans le concile. 3Iais elle ne
fut confirmée dans aucune session publi-
que, malgré les sollicitations des Fran-
çais , qui s'étaient joints aux Polonais ,
parce que les principes de Falkemberg
étaient les mêmes que ceux de Jean Petit,
autre prédicateur de l'homicide.
FALKLAND (Lucius Claby , vicomte
FAL 21 5
de ) , secrétaire d'état en Angleterre, du-
rant les convulsions des guerres civiles
du règne de Charles I, naquit vers l'an
1610 à Brokfort dans le comté d'Oxford.
Il se livra dans sa jeunesse à l'élude des
lettres. Citoyen éclairé, vertueux et ferme,,
il se montra d'abord un des plus ardens à
attaquer les usurpations de la cour; mais
lorsque la guerre civile éclata , il défen-
dit le pouvoir qui restait à Charles I , et
qu'il jugea nécessaire pour le soutien de
la liberté anglaise. On croit que ce fut
lui qui composa , avec le secours du roi,
presque tous les mémoires du parti mo-
narchique. Ce prince était si persuade de
sa supériorité dans cette lutte littéraire ,
qu'il fit distribuer les écrits du parlement
anglais avec les siens , pour mettre le
peuple au fait de la querelle. On assure
qu'il s'en servit même dans ses dernières
défenses contre les accusations des crom-
wellistes, plusieurs années après la mort
de Falkland, tué en 1643 à la bataille
de Newbury, à l'âge de 34 ans. (Falkland
a laissé diiFérens écrits sur les questions
politiques qui s'agitèrent de son temps, et
l'on croit qu'il a coopéré à l'histoire du
protestantisme de ClilHngworlh. )
* FALKNER (Thomas) , missionnaire
jésuite, fils d'un habile chirurgien de
ftSanchester en Angleterre, étudia la chi-
rurgie sous son père , et alla se perfec-
tionner à Londres. Il s'embarqua ensuite
pour la côte de Guinée , puis pour le Bré-
sil. Etant tombé malade à Buenos-Ayres ,
il reçut des soins si affectueux de la part
des jésuites fixés dans cette contrée, qu'il
s'attacha h eux , et entra dans leur société
pour partager leurs travaux apostoliques.
Son habileté dans la chirurgie et ses con-
naissances dans la mécanique furent très
utiles à la mission dans laquelle il fut
employé : 40 années de sa vie furent con-
sacrées à l'exercice du ministère évangé-
lique et à la pratique d» son art dans le
Chaco , le Paraguay , le Tucuman et les
Pampas. Après la suppression de son or-
dre , il revint dans sa patrie , et devint
chapelain d'un de ses compatriotes qui
était catholique. Il s'occupa alors d'écrire
une Description de la Patagonic et des
pays voisins dans V Amérique me'ridio-
2i4 FAL
nalcy lîerefort et Londres, 1774, in-4.
Elle fut traduite en allemand, et abrégée
en un vol. in-8, Gotha, 177 5. Il y en a
aussi une traduction française sous ce
titre : Description des terres Magellani-
ques et des pays adjacens , traduite de
l'anglais par M. D., Genève et Paris, 1788,
2 vol. in-lG. Ce livre ofFre des notions
précieuses sur les contrées que l'auteur a
décrites, sur les mœurs des peuples qui
les habitent, et sur les productions de la
nature que l'on y trouve; mais on recon-
naît qu'il n'était pas très versé dans l'his-
toire naturelle. Les Palagons qu'il a vus
sont grands et bien faits ; ils lui ont paru
avoir sept pieds et quelques pouces ;
mais il n'a point entendu parler de la race
gigantesque citée par plusieurs voya-
geurs. Le Père Falkner mourut en 1780.
* FALLET ( Nicolas ) , poète français,
ne à Langres en 1753 , mort à Paris le 22
décembre 1801 , a publié des pièces de
thc'âtre et autres poésies aujourd'hui ou-
bliées. Sa tragédie de Tibère et Sérénus,
quoique fort médiocre, obtint cependant
quelques représentations, et fut impri-
mée en 1702 et 1783. Il a travaillé à la
Gazette de France, au Journal de Paris ,
et coopéré au Dictionnaire historique et
critique des mœurs , lois , usages et cou-
tumes civiles , 17 72 , 4 vol. in-8.
'FALLETTI (Octave-Alexandre), mar-
quis de Bârolo, né à Turin en 17 53, mort
dans la même ville le 30 janvier 1828 ,
embrassa d'abord la carrière des armes ,
et se consacra ensuite à des études lit-
téraires qui ne furent interrompues qu'au
jnoment où son pays fut menacé de l'in-
vasion des Français , époque où il reprit
les armes. Sa vie fut dès lors entièrement
indépendante ; les devoirs d'homme de
cour lui enlevèrent toutefois quelques
momens précieux. L'éducation de son hls
l'occupa sérieusement, et ce fut avec lui
qu'il visita l'Allemagne, la Hollande, la
Suisse et la Russie. Ses principales pro-
ductions sont un Eloge de S t. -Real , des
Mémoires sur des sujets de critique lit-
téraire , de philosophie morale et de mé-
taphysique, présentés à l'académie de
Turin dont il était membre , des épîtres
(critiques) sur les OEuvres posthumes
FAL
d'Al/leri, et une espèce de roman des-
criptif sous le titre de Voyage de Théo
dore Callimncchi en Italie.
FALLOPE ou Fali-opio ( Gabriel ) ,
médecin italien, était profondément versé
dans la botanique, l'astronomie, la phi-
losophie , et surtout dans l'anatomie. Il
naquit à Modèue en 1 523 , et mourut à
Padoue en 15C2, à 39 ans, suivant le
Père Nicéron ; mais M. Eloy place sa nais-
sance en 1490 ,et le fait mourir à 7 3 ans :
CCS dernières dates paraissentmoinssûres.
Quoi qu'il en soit, cemédccin parcourut
une partie de l'Europe pour se perfec-
tionner dans son art. Il était méthodique
dans ses leçons, prompt dans ses dissec-
tions , et heureux dans ses cures. Quoi-
qu'il passe pour avoir découvert cette
partie de la matrice qu'on nomme la
trompe de Fallope , il faut avouer qu'elle
n'était pas entièrement inconnue aux an-,
ciens. Il s'est attribué quelques autres dé-
couvertes qu'on lui a contestées. Ses nom-
breux ouvrages out été recueillis en 4
vol. in-fol. , à Venise en 1584 et 1C06 :
c'est la meilleure édition. ( On peut voir
la liste de ses différentes productions dans
les Mémoires de Nicéron, tomes 4 et 1 0,
dans les éloges de Tamasini et surtout
dans la Bibliothèque des Ecrivains moder-
nes par Tiraboschi. )
FALLOURS ( Samuel ) , peintre hol-
landais , qui a peint les Curiosités natu-
relles , poissons , écrevisses , crabes qui
se trouvent sur les côtes des îles Molu-
ques , et les a fait imprimer à Amsterdam ,
1718, 2 tomes en 1 vol. in-folio, 43 plan-
ches dans le premier, 57 dans le second.
Ce livre est rare ; mais il ne faut se fier ,
ni à la vérité des enluminures , nia celle
des figures.
FALS ( Raimond ) , né à Stockholm en
1658 , passa à Paris en 1C83, et s'attacha
à Cliéron, médailleur du roi. Les mé-
dailles sorties de ses mains lui méritèrent
une pension de 1,200 livrés. Cet habile
artiste mourut à Berlin en 1703.
* FÂLSTER (Christian ), fameux cri-
tique danois j est connu dans le monde
savant par plusieurs ouvrages d'érudilionj
dont les principaux sont 1° Supplemen-
tum linguœ latinte ,¥lens,bomg , 1717;]
PAN
5" Animadverseris Epistolœ , ibid. ; 3°
Quœstinnes romance, ibid., 1718; 4°
Cogitationes philologie ce , Leipsick, 1719,
in -8 ; 6° Sermo Panegyricus de varia-
rum gentium bibliothccus , 1 720 , in-8 ;
6° f^igilia prima noclium ripensium ,
conlenant des observations sur Aulu-
gèle, Copenhague, 1721, in-8; '° Amœ-
nitates philohgiœ, Amsterdam, 1729 32,
3 vol. in-8; une traduction danoise de
la 14* Satire de Juve'iial, Copenhague,
1731 , in-4.
* FANGE ( Augustin ) , bénédictin de'
la congrégation de St. -Vannes, naquit à
Halton-Chàtcl près de Verdun ; après
avoir fait ses vœux à l'abbaye de Munster
en Alsace le 21 juin 1728, il professa
avec distinction les humanités , la philo-
sophie et la théologie dans sa congré-
gation. En 173G il fut nommé coadjuteur
du monastère de Senones en Lorraine ,
et il en devint abbé en 1765, après la
mort de dom Calmet son oncle , qui était
titulaire de cette abbaye. On ne connaît
pas l'époque précise de sa mort. Parmi
ses principaux ouvrages on remarque 1°
un Traité en latin des Sacremeiis en
général et en particulier , ouvrage pro-
fond et estimé ; 2° Iter helveticum ou
Relation d'un voyage qu'il avait fait en
Suisse en 1748 ; 3° le second volume de
la ISolice de Lorraine; 4° Fie de dom
Calmet, 1763 , in-8. On lui attribue:
Mémoires pour servir à Fhistoire de la
barbe de V homme , Liège, 1776, in-8.
Dom Fange a achevé V Histoire univer-
selle commencée par dom Calmet, mis
en ordre ses œuvres posthumes , et pu-
blié ses ouvrages en 1762.
FANNIUS ( Caïus ) , surnommé Stra-
bon , consul romain avec Valérius Mes-
sala , l'an 161 avant J. C. Ce lut sous son
consulat que fut publiée la loi Fannia
contre la somptuosité de la table. Cette
loi fixait les sommes qu'on pouvait dé-
penser pour le repas. On fut obligé de la
renouveler 20 ans après. Le luxé faisait
tous les jours de nouveaux ravages , et ce
luxe était une suite de la trop grande puis-
sance des Romains ; Scipion le reconnais-
sait lui-même et s'en plaignait. Fannius
réforma la formule de la prière qu'il était
FAN 2!5
d^usage de prononcer à la clôture du
lustre, par laquelle on dcfnandait aux
dieux qu'ils augmentassent la puis-
sance de la république : il en substitua
une autre , par laquelle on les priait de
vouloir bien la maintenir toujours dans
le même état.
FANNIUS (Caïus) , auteur latin sous
Trajan , composa une Histoire , en 3 li-
vres , des cruautés de Néron , et des der-
nières heures de ceux que ce monstre
faisait exécuter à mort , ou envoyait en
exil ( Exitus occisorum aut relegato-
rum a JVerone). Les savans, et surtout les
philosophes, ne sauraient trop regretter
la perle de cet ouvrage intéressant.
FANNIUS CÉPION , complice d'une
conjuration contre Auguste , qui fut dé-
couverte, se donna lui-même la mort.
Ilostem rum fuppret, se Fanniu» îp«e peremil;
Die, rogo, uoii furor est, ne nioriareniori?
MlSTItL. ,lib> ic.
Epigramme qui dans le fond n'est qu'un
jeu de mots , comme presque toutes celles
de Martial. Quelqueblàmable que fut Fan-
nius, il y avait certainement moins de
fureur dans son suicide que dans celui
de Caton d'Utique. Il cherchait à éviter
une mort ignominieuse et terrible.
FANNlÛS ( Quadratus ) , poète latin,
Ses ouvrages, quoique ridicules, furent
placés avecsonportraitdansla bibliothè-
que publique qu'Auguste avait fait con-
struire dans le temple d'Apollon. Horace,
son contemporain , lui donne le nom de
parasite , et le raille cruellement.
FANSHAW ( Richard ) , anglais, en-
voyé des rois Charles 1 et Charles II à la
cour d'Espagne et à celle de Portugal,
mourut à Madrid en 1666. Il se distingua
dans ses ambassades, ainsi que sur 1er
Parnasse. On a de lui quelques ouvrages
en vers et en prose, Londres, 1646 , in-4 ,
qu'on a lus autrefois; (la traduction en
vers anglais du Pastor fido , de la Lu-
siade et des comédies espagnoles^ Oïk,
a publié sur son ambassade des lettres:
originales précédées de sa vie, Londres ^
1702, in-8.)
♦ FANTIN-DÉSODOARTS ( An,
toine-Etienne-Nicolas ) , né à Poqt-rde-t
Beauvoisin dans le Dauphiné le 30 décent
2i6 FAN
bre 1738 , entra chez les jésuites qui fu-
rent supprimés avant qu'il eût pu pro-
noncer ses vœux. En 1789 il élait.prôtrc,
et avait le titre de vicaire-général d'Em-
brun ; mais il ne paraît pas qu'il en ait
jamais exercé les l'onctions , il est proba-
ble qu'il s'est livré cxclusivcmcntà ses tra-
vaux littéraires. Il s'était rendu à Paris
quelques années avant la révolution , et
lorsque ce grand événement fut accompli^
il y devint un des écrivains les- plus la-
borieux du parti révolutionnaire. Arrêté
après le 10 août comme prêtre, il se ma-
ria, entra dans les sections, et se lia par-
ticulièrement avec Robespierre , Collot-
d'Herbois, Marat et Chaumelle , qu'il ac-
compagnait quelquefois au club des Ja-
cobins. Non content de les fréquenter,
il proclama et répandit leurs princi-
pes dans les journaux du temps. Après
la révolution, il ne fit parler de lui que
par ses nombreux ouvrages : il était mem-
bre de l'Institut. Il mourut à Paris le
25 septembre 1820. Ses principales pro-
ductions sont : 1° Dictionnaire raison-
né du gouvernement , des lois , des usa-
ges et de la discipline de V Eglise , con-
ciliccs avec les liber te's et franchises de
l'e'glise gallicane , lois du royaume et ju-
risprudence des tribunaux de France ,
1788 , 6 vol. in-8. 2" Nouvel abrégé chro-
nologique de l'histoire de France, depuis
Clovis jusqu'à la mort de Louis XIF ,
par le président Ilénault, continué depuis
la mort de Louis XIV jusqu'à la paix
de 17 83, 17 88-89, 3vol. in-8; augmen-
tée en 1801 d'une 4« et d'une 5« parties,
oîi se, trouve V Histoire de la révolution ;
réimprimée en 1807 , en 2 vol. in-8 , et
en 1820 in-4, avec une nouvelle conti-
nuation jusqu'à la rentrée de Louis
XFIII en France. Cet ouvrage porte
quelquefois le titre à' Histoire de France
depuis la mort de Louis XIV. L'auteur
y affichait déjà l'admiration la plus dépla-
cée pour la philosophie moderne. 3° His-
toire, philosophique de la révolution ,
6* édition , 1807 , 10 vol. in-8. C'est celui
de ses ouvrages qui a obtenu le plus de
succès , et cependant il est rempli d'er-
reurs et de faux principes. On n'y remar-
que ni plan , ni ensemble , ni méthode :
FAN
ce sont des redites continuelles, det di-
gressions longues et sans objet , des ré-
flexions doiuiécs sans justesse comme sans
ordre. Ennemi de la noblesse et duclergé,
il parle de l'une avec mépris, de l'autre
avec haine : rien n'est plus mauvais que
son récit du procès de Louis XVI ; c'est
un tableau entièrement faux. M. Beaulieu,
auteur des Essais historiques sur les
causes et les effets de la révolulion de
France, a relevé entre autres ce para-
graphe étrange sur la démarche que fit
le roi le 16 juillet 1789 : <t Louis X.VI ( dit
« M. Fantin ) parut comme uu criminel
» devant ses juges ; il rejeta sur l'impos-
« ture de ses ministres les fausses dé-
» marches auxquelles il s'était livré. Il dc-
» clara que les ordres étaient expédiés
» pour l'éloignement des troupes de Paris
» et de \ersai!les ; qu'il rappelait Necker
« et les autres ministres disgraciés, et que
» désormais il ne prendrait d'autre con-
» seil que ceux des représentans de la na-
» tion. Le président assis (M. l'archevêque
» de Vienne ) lui répondit : Un roi est
» coupable , quand , sous les yeux de
M l'Assemblée, il écoute desconseils étran-
j) gers. Lally-Tolcndal , député de Paris,
» ajouta : Un roi qui avoue sa faiblesse
» et l'insuffisance de ses moyens , mérite
» la clémence d'une nation généreuse. Il
» est bon que les princes sachent , reprit
3) le président, en couvrant l?i voix de
)> Lally-Tolendal , qu'on ne règne pas
» long-temps avec sécurité , quand l'in-
» triguc, la cabale et l'astuce, devenues
)) ld»mobiles du gouvernement , sontéri-'
» géesen règle de la conduite dumonar-
» que. Cette proposition fut justifiée dans
« la suite. « On voit qinî dans tout ce
grossier galimathias , ajoute M. Beaulieu ,
il n'y a pas un seul mot, à l'exception de
l'annonce de l'ordre donné par le roi pour
l'éloignement des troupes, qui ne renfer-
me un iraperlinent mensonge. Le stile
est digne de l'esprit qui y règne : il est
tantôt plat et trivial, tantôt boursouflé
jusqu'au ridicule ; enfin cette compila-
tion, dénuée partout de vérité comme de
goût , est tombée dans l'oubli profond
qu'elle méritait. 4" lîévoluiions de t Ind^
pendant le 1 8" siècle , ou Mémoires dt
■
FAN
Tipoo-Saïb écrits par lui-même , et tra-
duits de la langue indostane , 1 7 9C , 2
vol. in-8 , 1797, 4 vol. iu-8. 6° Louis XF
et Louis Xrï, 1798 , 5 vol. in-8. 6° His-
toire d^ Italie depuis la chute de la répu-
blique romaine jusqu*aux premières an-
nées du 19e siècle, 1802 ; 9 vol. iu-8.
7° De r institution des sociétés politiques^
oû Théorie des gouvernemens , 1807,
in-8. 8" Les monumens inédits de l'anti-
quité, expliqués par IFinckelmann ,
1808-1809, 3 vol. iu-4. ^"Histoire de
France depuis la naissance de Henri IF
jusqu'à la moit de Louis XVI, 180G-
1810, 26 vol. in-12. Il s'est fait ainsi le
continuateur de Velly , Villaiet et Gai-
iiier. Cette histoire méritait un meilleur
écrivain. Il fut avec 31crcier*t Carra un
des premiers rédacteurs des Annales pa-
triotiques , et a laissé en oatr<î un grand
nombre de manuscrits.
* FANTONI ( Jean } , célèbre méde-
cin et anatomistc , né à Turin en 1675,
mort le 1 5 juin 1 758 , professa l'anatomie
à l'université de cette ville pendant une
longue suite d'années et avec un brillant
succès. Ses démonstrations étaient suivies
par un grand nombre d'auditeurs qui ne
pouvaient assez admirer sa profonde éru-
dition, l'importance des faits nouveaux
qu'il leur présentait continuellement, son
éloquence naturelle et cette latinité ex-
quise qu'on remarque dans tous ses ou-
vrages. Les principaux sont 1" Urevis
manuductio ad historiam anatoniicam ,
Turin, 1G99, petit in-4. 2° Diîsertatioiies
anatomicœ XI, ihid., 1701, in-12. Z"Âna-
tomia corporis humani, 1711, in-4.
4° Opuscula medica et physiologica ,
1738 , in-4. 5" Commentarius de quibus-
dani aquis medicatis , et historié a dis-
sertât io de fcbribus continuis, 1747, in-8.
• FANTUCCI ( le comte Marc) , litté-
rateur italien, né en 1 7 45 à Uavenne, d'une
famille très noble, entra d'abord dans la
magistrature dans l'intention de se rendre
utile à ses concitoyens; mais quelques dés-
agrémens qu'il éprouva l'engagèrent à
y renoncer. Il continua néanmoins à ser-
vir son pays , qui lui fut redevable , en
1784, d'une machine hydraulique très
avantageuse pour le territoire de Ravenne.
FAR
21'
tJne épidémie étant venue en 1780 rava-
ger cette province , il s'occupa des
moyens d'y remédier pour l'avenir, et pu-
blia à ce sujet un excellent mémoire dans
lequel il démontra combien il était urgent
de dessécher les marais des vallées méri-
dionales de cette contrée. En uh mot
toute la vie de Fantucci a été Consacrée
à de nobles efforts pour rendre à Ravenne
l'ancien éclat dont elle avait brillé. I.e
comte Fantucci est mort dans cette ville le
1 0 janvier 1 806. Pie VI avait pour lui une
prédilection toute particulière, et il eu
étaii digne par ses vertus , qu'il portait
jusqu'à l'austérité , et par son dévoue-
ment pour, l'utilité publique et pour l;i
gloire de sa patrie. On lui doit X" De' Mo-
numenti Ravennati, G tomes in-4. 2" De^
Gente Honcstia , in-fol. 3'' Memorie di
vario argomento del conte Fantucci,
in-4. On est redevable à ses soins de I;»
magnifique édition romaine des Papiri
diplomatici Raccolti ed illustrati dalU-
abate Gaetano Marini , dont plusieurs
appartiennent à Ravenne.
* FANTUZZI ( Jean ) , noble Bolo-
nais et dernier rejeton d'une famille illus-
tre de ce nom, qui a fourni un grand
nombre de personnages distingués dans
la carrière des lois et dans celle des let-
tres, naquit en 1742 , et mourut à Bolo-
gne en 1801 , avec le ^rade de colonel.
Il avait servi pendant plusieurs années
dans les gardes du corps du roi d'Espa-
gne. Il a laissé un ouvrage important in-
titulé Nolizie degli scrittori Bolognesi ,
Bologne, 1781-94, 9 vol. in-fol. Cet ou-
vrage est précieux par l'exactitude et la
bonne critique qui y régnent. Il est d'ail-
leurs écrit d'un stile élégant et correct.
On aurait désiré que l'auteur en eût sup-
primé des détails superflus ; mais ils sont
vrais et puisés dans des sources authen-
tiques. 11 était né en 1742 et mourut en
1801.
* FARCOT ( Joseph -Jean- Chryso-
slôme ), ancien dirqgteur de la statistique
de la Seine, naquit à Senlis le 8 avril
1744, et entra d'abord chez les oratoriens
oii il fut successivement professeur de
philosophie, de physique expérimentale
et de mathéraatiqTies. En 1 7 79 il fut forcé
14..
2i8 FAR
pour des affuires de fumillc de quitter
cette congrégation et se livra au com-
merce ; il transporta son établissement à
Paris, s'occupa avec zèle de ses intérêts
jusqu'en 17 93 , oii ses magasins furent
saisis et lui-même jeté en prison. Après
onze mois de captivité, il fut appelé par
le gouvernement aux discussions qui
avaient lieu à l'hôtel de Conti pour la
restauration du commerce et des arts.
Nommé membre du Directoire du dépar-
lement de la Seine , il fut chargé du ré-
tablissement des édifices destinés au culte
catholique, et il parvint à faire obtenir
1 5 églises. Après avoir fait partie de la
commission chargée de dresser le tableau
de dépréciation des assignats , il fut
.successivement depuis celte époque ,
membre du conseil des arts , de celui de
l'instruction publique , et directeur de
la statistique. Il a fait à ce sujet plusieurs
ouvrages 1° Questions constitutionnelles
sur le commerce et l'industrie , et projet
d'un impôt indirect , Paris , 17 90, in-8 ;
2° Discussions relatives à l'influence du
gouvernement sur les arts et le com-
merce , Paris , 1 808 , in-4 ; 3° Mémoires
sur les moyens d'encourager les décou-
vertes utiles , Paris, 1819 , ouvrage post-
hume publié par son fils M. J. Farcot.
On a encore de lui plusieurs Mémoires
et Rapports sur les arts , l'agriculture et
le commerce , qui n'ont pas été impri-
més. Il est mort le 23 août 1815, à l'âge
de 7 1 ans.
FARUELLA ( Michel-Ange ) , né à
Trapani en Sicile l'an 1 G50 , d'abord fran-
ciscain , ensuite prêtre séculier , devint
professeur d'astronomie et de physique
dans l'université de Padoue , et mourut
à Naples en 17 1 8 à 68 ans. On a de lui des
ouvrages peu connus en France , sur les
sciences auxquelles il s'était consacré.
C'était un homme d'un esprit vif et d'une
imagination féconde , mais très distrait.
Quoiqu'il eut des appointemens considé-
rables, sa générosit^nvers ses amis, et
son caractère indolent ne lui permirent
jamais d'être riche.
FARE ( Sainte), vierge, d'une famille
noble de Bric , sœur de saint Faron , évê-
que de Meaux , et de Changulsc , évêque
FAR ?
de Laon, bâtit le monastère de Faremous-
lier, eu fut abbesse, et mourut vers G 55,
après une vie de près de 60 ans, rem-
plie par la vertu et la mortification.
FARE. F'oyez La Fark.
FAREL ( Guillaume ) , né à Gap eu
14S9, vint de bonne heure à Paris, ré-
genta quelque tempâ au collège du car-
dinal Le Moine. Jacques Le Fêyre d'Eta-
ples, sou ami, lui inspira les nouvelles
erreurs que Luther répandait en Allema-
gne , et Zuingle en Suisse. Farci fut mi-
nistre à Genève avant Calvin , et y prê-
cha la réforme. Chassé de celte ville en
1 538 , il se retira à Bâle , puis à Neuchâ-
tel , où il mourut en 1565. Ce novateur
se maria à l'âge de 69 ans. Son savoir ,
qui était mcSiocre, fut terni par son opi-
niâtreté , et par son penchant pour toutes
sortes d'opinions. On a de lui : \° Le
Glaive de l'esprit, ouvrage qui, malgré
la singularité de son titre ( qui dans le
fond n'est que la traduction du Gladium
spiritus de saint Paul ) , offre de bonnes
choses contre les libertins. 2° De la sainte
Cène diuSeigneur. 3" Des thèses". Ce mi-
nistre fut accusé , par ceux de son parti,
de renouveler les erreurs de Paul de Sa-
mosate ; mais iin synode de Lausanne le
lava de cette imputation.
FARET ( Nicolas ) , né vers l'an 1600
à Bourg en Bresse, fut un des premiers
membres de l'académie française , et ré-
digea les statuts de cette compagnie nais-
sante. Il fut secrétaire du comte d'Har-
court , ami de Vaugeias , de Boisrobert,
de Coëffeteau , de Saint-Amand. Il mou»-
rut à Paris, en 16é6. On a de lui de mau-
vaise prose et déplus mauvais vers; l'His-
toire chronologique des Ottomans ; l'His-
toire d'Europe , traduite en français ;
l'Honnête Homme , tiré de l'italien de
Castiglione, in-12 ; des lettres qui n'ap-
prennent rien; àe% poésies plates, etc.
C'est aux vers suivans de Boileau , qu'il
doit sa célébrité :
Ain(.i tel aulrrfoii qu'on tU avec Farci ,
diarbnniierde «c( vers le» murs d'un cabaret
FARGIS ( Charles d'Angennes du ) ,
fut conseiller d'état sous Louis XIII , et
son ambassadeur en Espagne. Il fut dé-
jnculi sur le traité de Monçon, qu'il avait
FAR
conclu en 1626, pour n'avoir pas suivi
les instructions du Père Joseph , et il fut
obligé de faire réformer ce traité sur les
nouvelles instructions qu'il reçut. Sa
femme, Madeleine de Silly, comtesse de
la Rochepot, dame d'atours de la reine
Anne d'Autriche, entra dans quelques in-
trigues contre le cardinal de Richelieu ,
qui la contraignit de sortir de France.
Elle mourut à Louvain , au mois de sep-
tembre 1639. On trouve dans le Journal
du cardinal de Richelieu , et dans sa Yie
par Le Clerc ,17 53, 5 vol. in-1 2 , des let-
tres en chiffres de M"® du Fargis , qui
furent interceptées, et qui la firent con-
damner à être décapitée par arrêt de la
chambre de justice de l'Arsenal, en 1631 .
Elle eut un fils tué au siège d'Arras en
1640, sans avoir été mariée ; et une fille ,
religieuse à Port-Royal, morte en 1691.
* FARIA ( Manoel-Sévérin de ) , por-
tugais, écrivain, l'un des plus savans
numismates de son temps , naquit à Lis-
bonne en 1681, ou 82. Après avoir fait
ses cours de philosophie et de théologie,
et avoir été reçu docteur dans ces deux
facultés , il fut chantre et chanoine de la
cathédrale d'Evora , et mourut dans cette
ville le 16 décembre 1655. Il se livra avec
ardeur à l'étude des écritures, delà théo-
logie mystique, de l'histoire, de la politi-
que , de la géographie, et des antiquités
romaines et portugaises : il employa les
revenus de ses bénéfices à former des
collections précieuses de manuscrits an-
ciens, de médailles, de monnaies etd'an-
tiquitésde tout genre. Il est connu parles
ouvrages suivans : 1° Noticias do Por-
tugal , 2 vol. ; 2° F'arios diseur sos po-
liticos , Lisbonne, 1624, 1vol. Ces deux
ouvrages ont été réimprimés à Lisbonne
en 1624 et 1791. Dians le premier de ces
ouvrages , il traite de l'origine des litres
et des armoiries des l'amilles nobles du
Portugal , des monnaies anciennes , soit
portugaises, soit gothiques, arabes et ro-
maines , et il en donne des empreintes.
Après avoir parlé des différentes univer-
sités d'Espagne, de la navigation des Por-
tugais aux Indes orientales, il termine le
second volume par les vies de vingt car-
dinaux de sa nation. Le troisième volume
FAR a^g
est consacré à la vie de quelques Portu-
gais illustres , comme celles de l'histo-
rien Couto, du poète Camoëns, etc. Ces
deux ouvrages se font remarquer par une
élégance et une pureté de stile qui rap-
pellent le beau siècle de la littérature
espagnole.
FARIA DE SOUSA ( Manoel ) .
gentilhomme portugais , chevalier de
l'ordre du Christ, né à Catavella en 1 590,
mort à Madrid en 1649, dans un état qui
n'était guère au dessus de l'indigence.
Les lettres lui firent trop négliger la for-
tune. Après avoir été gentilhomme chez
domConzalès, évêque d'Oporto, et avoir
perfectionné ses connaissances sous la
direction de ce prélat, il avait fait un
voyage à Rome eu 1 7 3 1 , oîi il s'acquit la
considération des savans qui étaient au-
près du pape Urbain VIII. Faria était un
homme un peu singulier. Il s'habillait
plutôt comme un philosophe, que comme
un homme qui avait vécu à la cour. Son
humeur indépendante et son abord sévère
furent sans doute un obstacle à sa for-
tune. Il était cependant fort agréable et
fort enjoué avec ses amis. On a de lui
1° une Histoire de Portugal, conduite
jusqu'au règne du cardinal Henri , im-
primée plusieurs fois. La dernière et la
meilleure édition est de 1731, in-fol. ,
avec une continuation, et d'autres pièces
curieuses. 2" L'Europe, l'Asie et V A-
frique portugaises , ei\ a vol. in-folio,
2 pour l'Europe , 3 pour l'Asie , 1 pour
l'Afrique. VAsia portuguesa est l'his-
toire des Portugais aux Indes orientales,
depuis leur premier voyage en 1497,
jusqu'en 1640. Cet ouvrage exact et cu-
rieux a été traduit en italien , en français
et en anglais. Faria a encore laissé 7 vol.
depoe'sies ; des discours moraux et poli-
tiques; des commentaires sur la Lusiade.
Ses ouvrages sont écrits en espagnol.
FARINA. Ployez Charles Borromék
(S.) à l'article Borromée.
FARINACCI ( Prosper ) , célèbre ju-
risconsulte, naquit à Rome en 1554, et
y brilla dans le barreau. Il se plut à dé ■
fendre les causes les moins soutenables.
Cette manie funeste à bien des familles ,
i ointe à la rigueur et à la sévérité excessi vv
i
3.ao PAR
avec lesquelles il exerça la charge de pro-
cureur-fiscal , fit naître des murmures et
lui suscita des affaires. Cet homme , si
rigoureux pour les autres , était très in-
dulgent pour lui-même. Le pape Clé-
ment VIII disait de lui à ce sujet , en fai-
sans allusion au nom de Farinaccio : « La
» farine est excellente, mais le sac qui la
j) contient ne vaut rien. » Ce juriscou-
sulte mourut à Rome le même jour qu'il
lUaitné, le 30 octobre 1618, à 64 ans.
Ses ouvrages ont été recueillis en 13 vol,
in-fol. Anvers, 1 620 et années suivantes ;
ils sont recherchés par les jurisconsultes
iiltramontains. "Voici ce qu'ils renfer-
ment: Decisiones Rotœ , 2 vol. ; Jioiœ
novissimœ , 1 vol. ; Rotœrecentissimœ ,
1 vol.; Rcpcrtorium judiciale, 1 vol. ;
De Hceresi, 1 vol.; Consilia, 2 vol. ;
Praxis criminalis , 4 vol. ; Succus Pra-
xis criminalis , 1 vol. Malgré la critique
qu'on peut faire de quelques endroits, il
€st certain que ses ouvrages sont pleins de
savoir, et qu'il y a pour les jurisconsul-
tes bien des choses à recueillir.
FARINATO { Paul ) , peintre célèbre
et savant architecte , mourut à Vérone sa
patrie en 1 606 , à 8 4 ans.
* FARINELLI ( Charles Broschi , plus
connu sous le nom de), célèbre chanteur
italien, né à Naples le 24 janvier 1705,
fut élève de Porpora , et débuta d'une
manière brillante à l'âge de 17 ans sur le
théâtre d'Aliberti à Rome. En 1734, il
passa à Londres et y excita un enthou-
siasme universel. Après avoir obtenu tous
les suffrages en Italie et en Angleterre ,
il fut appelé à la cour de Madrid, et sa
voix produisit plus d'effet sur Philippe V,
chargé d'infirmités , et sur Ferdinand VI,
son successeur, tourmenté d'une pro-
fonde mélancolie, que tous les remèdes
de l'art. Ses manières aimables lui méri-
tèrent bientôt l'estime et la considéra-
tion de toute la cour. Sous le règne de
Ferdinand VI , il fut employé dans les
affaires du plus haut intérêt politique ,
tievint le canal de toutes les grâces , et
l'on peut dire, à sa louange, qu'il ne les
accorda qu'an mérite réel , et qu'il n'a-
busa jamais de son pouvoir. Loin d'écou-
ter un vain orgueil qui est ordinairement
PAR
l'apanage des parvenus , ce fut surtout s<
modestie qui désarma ceux qui auraient
pu être un obstacle à sa fortune. Sa dé-
férence et son respect pour les grands,
lui captivèrent l'amitié de la plupart d'en-
tre eux; à l'égard de ses ennemis, il' ne»
s'en vengea jamais qu'en répandant sur
eux les faveurs du roi. La mort de ce
prince et de la reine, arrivée la même
année (1 762 ), le jeta dans l'accablement
le plus profond. Il quitta l'Espagne et se
retira à Bologne, oîi il fit bâtir une su-
perbe maison. Il y passa le reste de ses
jours , uniquement occupé de sa harpe et
de son jardin , recevant avec affabilité
tous les étrangers qui désiraient le con-
naître, et répandant ses bienfaits sur tous
les malheureux qui l'environnaient. W
encouragea le Père Martini à écrire son
Histoire de la musique , l'aida de sa for-
tune , et lui fournit les documens néces-
saires. Farinelli mourut le 1 5 juillet 1782.
* FARMER. ( Hugues), ministre pres-
bytérien à Londres , né en 1 7 1 4 , fut un
des prédicateurs d'une congrégation de
Dissentcrs, et se fit une grande réputation
par son éloquence etpar ses ouvrages, qui
ont pour but d'établir que l'univers est
gouverné par Dieu seul. Les principaux
sont: 1° Un Essai sur la nature et le
dessein de la tentation de Jésus-Christ
dans le de'sert ^ oîiil soutient que c'était
une vision et non un fait réel , Londres,
1761 , et 1765 avec augmentation. 2° Une
Dissertation sur les miracles, qui a pour
objet de prouver qu'ils sont les argumens
d'une interposition divine et despreuves
absolues de la mission et de la doctrine
d'un prophète. Z° Un Essai sur les dé-
moniaques du nouveau Testament , oii
il prétendait que ces démoniaques n'é-
taient que des malades. Farmer est mort
le 6 février 1787.
"FARMER (Richard), célèbre critique
anglais, né à Lcicester en 17 35, fut suc-
cessivement prédicateur de la chapelle
royale de Whitehall, principal du collège
Emmanuel de l'université de Cambridge,
vice -chancelier et principal bibliothé-
caire de cette université , chancelier de
Lichtfield et de Covèntry , chanoine de
l'église de Cantorbéry , puis de celle de
FAR
Saint-Paul; il mourut eu 17 97. On a de
lui un Essai sur Verudition de Sha-
kespcar , l'un des meilleurs morceaux de
critique que possède la littérature an-
glaise ; plusieurs fois réimprimé : il se
trouve dans l'édition de Shakespear, don-
née par Stevens, J£ vol. in-8, 1793 , et
dans celle de Reed et Harris , 1803, 1812,
en 21 vol.
FARNABE ou Farnabî (Thomas ),
célèbre maître d'école anglais, né à Lon-
dres en 1 675 , d'un charpentier , fut d'a-
bord serviteur ; puis il fit ses premières
études à Oxford, et ensuite en Espagne,
dans un collège des jésuites. Il accompa-
gna François Drak et Jean Hawkins dans
leurs courses maritimes. De retour de ses
voyages, il se fit soldat dans les Pays-Bas,
déserta et retourna dans sa patrie. Il ou-
vrit une école de langue latine dans le
comté de Sommerset. Il alla continuer le
même travail à Londres , forma de bons
écoliers, et s'acquit la réputation d'un
maître habile. Son attachement à la fa-
mille royale lui attira des persécutions ;
mais elles ne furent pas capables d'ébran-
ler sa fidélité. 11 répondit toujours à ceux
qui le sollicitaient de se déclarer pour le
parti républicain : « J'aime mieux n'avoir
■» qu'un roi, que d'en avoir cinq cents, u
Il mourut exilé à Ely-House en 1547, à
7 2 ans. On avait proposé dans la chambre
des communes de l'exiler en Amérique.
Farnabe était aussi .savant humaniste, que
bon citoyen. Il nous reste de lui des édi-
tions de Juvénal , de Perse , de Se'nè-
que, de Martial, de Lucain, de Fir-
gile, de Te'rence , d'Ovide, avec des re-
marques qui ne sont que grammaticales;
elles seraient plus utiles si elles étaient
quelquefois historiques , géographiques
et mythologiques ; le latin en est un peu
dur et quelquefois incorrect.
FARAESE , nom d'une famille d'Italie
dont la généalogie remonte au IS'^ siècle
et qui avait dès celte époque de la célé-
brité. — Farnèse ( Pierre-Louis ) , pre-
mier duc de Parme et de Plaisance, était
fils aîné du pape Paul III ( Alexandre Far-
nèse }, qui l'avait eu d'un mariage secret,
contracté avant sa promotion au pon-
tificat. Ce pape lui conféra les duchés de
FAR 22 r
Parme et de Plaisance en 1547 , sous une
redevance de 8 mille écus au saint Siège ,
et donna en échange à l'état de l'Eglise ,
la principauté deCamérino et la seigneu-
rie de IVépi, qui lui appartenaient. Dès
que Farnèse eut été reconnu parle clergé
et par le peuple , il s'appliqua à fortifier
Plaisance, et la citadelle qu'il ^t con-
struire fut regardée comme une des meil-
leures forteresses de l'Italie. Comme il
chagrinait les nobles, croyant qu'ils op-
primaient le peuple , quatre gentilshom-
mes conspirèrent contre lui , et l'assassi-
nèrentà Plaisance, le IQ septembre 1547.
Un homme qui se mêlait de magie, lui
avait annoncé cette fin tragique ; on pou-
vait la lui prédire sans être sorcier ; mais
l'anecdote, si elle est vraie, ne laisse pas
d'être remarquable. Aussitôt après sa
mort, les milices impériales qui étaient
aux portes de la ville obligèrent les Plai-
santins à prêter serment à l'empereur
Charles-Quint , qui n'avait pas voulu re-
connaître la cession que le pape en avait
faite. Mais dans la suite, Octave Farnèse,
fils de Pierre-Louis, ayant épousé Mar-
guerite d'Autriche, fut reconnu, par cet
empereur , légitime possesseur du ducbé
de Parme ( voyez sa postérité dans les Ta-
bles chronologiques , à l'article Parme et
Plaisance). Sa postérité jouit de ces deux
duchésjusqu'aucardinal Antoine Farnèse,
mort en 1 7 3 1 . Sa nièce Elisabeth Farnèse,
épouse de Philippe V , roi d'Espagne, les
transmit au second de ses fils , qui les
céda en 17 35 à l'empereur Charles VI ,
contre le royaume des Deux-Siciles.
FARNESE, pape qui a pris le nom de
Paul III. Voyez Alexandre Farnèse.
FARNSWORT ou Farne-\\ert ( Ri-
chard ) , fut un des premiers disciples de
George Fox , auteur de la secte des qua-
kers. Il ajouta aux rêveries extravagantes
de son maître , le précepte observé scru-
puleusement dans le quakérisme, de ne
parler à personne , même aux rois dans
les suppliques, et même à Dieu dans la
prière, qu'en tutoyant. Il imposa un
livre pour démontrer cette impertinence.
Il prétend que l'usage contraire est une
flatterie indigne des enfans de lumière ;
c'était le titre que prenaient les quakers.
322 FAT
Kox approuva celte i(lc>e> et il fut le pre-
mier à s'y conformer.
FïVRON (Saint), évêriue de Meaui en
627, fonda l'abbaye qui porte son nom,
assista au 2* concile de Sens en 657, et
mourut le 28 octobre 672, à près de 80
ans.
*FARQTjHAR (George), poète comique
né en 1678, à Londonderry en Irlande,
mort en 1 707, fut d'abord comédien, puis
lieutenant au régiment du comte Orrery
en Irlande, se fit remarquer par la dou-
ceur de son caractère et de ses mœurs.
Ayant épousé une femme jeune et belle,
il ne put résister aux privations que lui
imposaient les besoins de sa maison : il
mourut de chaf^rin, à l'âge de 30 ans. 11
a laissé un nom dans le théâtre anglais ,
par l'amusante vivacité de ses intrigues ,
assez naturellcïnent conduites, quoique
fondées presque toutes sur des supposi-
tions invraisemblables et romanesques.
Ses œuvres ont été imprimées pour la
10* fois à Londres en 1772, en 2 v. in-12:
on regarde comme son chef-d'œuvre la
pièce qui a pour titre The beaux' Stra-
tagem, la Ruse du petit^maître.
* FATIO ou FAcao de Duilles (Nicolas),
géomètre célèbre, descendait d'une fa-
mille italienne, naquit à Bâle en Suisse
vers 1664. Il alla mourir dans le comté
de Worcester en Angleterre l'an 17 63.
Dès son bas âge , il se livra à l'étude des
sciences , et il n'avait encore que 17 ans
lorsqu'il se fit connaître par des recher-
ches savantes sur la distance du soleil à la
terre, et sur les apparences de l'anneau de
Saturne. Il s'occupa de la théorie de la
lumière et fit un mémoire sur la dilata-
tion et le resserrement de la prunelle.
On peut dire qu'il parcourut et étudia
avec succès toutes les sciences d'observa-
tion , non-seulement pour en concevoir
l'ensemble . mais encore pour en faire
d'heureuses et utiles applications. Ses
découvertes en ce genre furent très nom-
breuses; ainsi, il trouva une manière nou-
velle, facift et p!us exacte de travailler
les verres des télescopes , de percer les
rubis et de les faire concourir au perfec-
tionnement des montres , de mesurer la
vitesse d'un vaisseau , et de profiter du
FAU
mouvemeut des eaux , occasioné par le
scillage , pour moudre le blé , lever les
ancres et hisser les vergues. Il imagina
aussi une chambre d'observation suspen-
due , construite de manière à permettre
d'observer facilement les astres dans un
vaisseau. On a de lui un assez grand nom-
bre d'ouvrages intéressans sur la méca-
nique, l'astronomie et la clijmie, impri-
més séparément ou dans les numéros du
Gentlemens' magazine, de 1737 et 1738.
Il existe aussi de lui au musée britanni-
que plusieurs lettres et autres manuscrits
autographes d'une assez grande impor-
tance. Fatio avait honorablement parcou-
ru la moitié de sa carrière , lorsqu'il
abandonna tout-à coup les sciences exac-
tes pour les sciences occultes. Livré tout
entier à l'étude de l'alchimie , et de la ca-
bale , il se montra en même temps zélé
partisan des Camisards ou Pre'dicansdes
Cévennes qui s'étaient réfugiés à Londres
et fut en butte à la persécution que leur
fit la police anglaise. Fatio quitta l'An-
gleterre et partit pour la conversion de
l'univers. Après un voyage malheureux
qu'il fit dans ce but en Asie, il revint
mourir obscurément en Angleterre , sans
doute avec le regret d'avoir compromis
son nom jusqu'alors vénéré, par des sys-
tèmes repoussés par la raison autant que
par la religion.
FATTORE (le). Foi/ez Peîsis!.
' FAUCHART (Pierre), chirurgien-
dentiste, né en Bretagne , et mort à Paris
en 1761, est regardé comme le créateur
de l'art du dentiste, par son ouvrage in-
titulé le Chirurgien dentiste, 1728,2 vol.
in-12, réimprimé en 17 46 et 1786. Avant
lui, il n'existait aucun écrit qui enseignât
la manière de limer, tailler, plomber les
dents et d'en placer d'artificielles. Il a
décrit aussi, avec exactitude, les abcès
qui attaquent la substance intérieure des
dents, sans en altérer la substance corti-
cale.
* FAUCHE-BOREL ( Louis ) , l'un des
hommes les plus actifs et les plus fidèles
à la maison de Bourbon , naquit à Neu-
châtel en Suisse le 12 avril 1762, d'une
ancienne famille de Franche-Comté que
la révocation de l'édit de Nantes força de
I
FAU
s'expatrier. Il dirigeait dans sa \ille na-
tale un vaste établissement typographi-
que , lorsque la révolution française écla-
ta ; quoiqu'il fût né sous un gouverne-
ment rciiublicain , son âme toute monar-
chique ne put s'empêcher de voir avec
douleur cette foule d'émigrés français
qui cherchèrent alors un asile dans sa
patrie. Non-seulement il sympathisa aus-
sitôt avec eax , mais encore il mit ses
presses à leur disposition. Cette conduite
lui valut à lui-même une persécution assez
violente : il avait imprimé dans ses al-
manachs quelques pièces , et entr'autres
le testament de Louis XVI, qui déplurent
aux républicains deNeuchâtel. Il fut exi-
lé : il est vrai que son exil fut borné à
six mois ; mais il n'en conçut pas moins
dès lors la haine la plus violente pour les
démagogues , et sa vie toute entière fut
consacrée à la plus courageuse de toutes
les luttes. Fauche-Borel s'empressa donc
d'offrir ses services aux Bourbons qui les
acceptèrent avec reconnaissance. Depuis
1793 jusqu'en 1814 ce fut la même idée
qu'il poursuivit avec une constance et un
zèle qui l'associèrent à toutes les entre-
prises dont le but était la restauration du
trône des Bourbons. Il fut de tous les com-
plots, de toutes les intrigues, de toutes les
conspirations , de toutes les manœuvres ,
qui furent faites pendant cet intervalle en
faveur de cette auguste famille. Nous ne
pouvons le suivre dans toutes ses mar-
ches et contre-marches , sous les di-
verses dénominations et sous les déguise-
mens multipliés , qu'il fut obligé de
prendre : nous extrairons seulement
quelques détails des Mémoires de Fau-
che-Borel lui-même , des papiers publics
qui s'entretinrent souvent de lui , et
enfin de divers récits qui nous ont été
communiqués par quelques-uns de ses
amis et de ses compatriotes. Nous le
voyons en 1795 sous le nom de Louis
servir de médiateur entre le prince de
Coudé et le général Pichegru. Il s'agissait
d'engager Pichegru à quitter les drapeaux
de la république, et à venir se joindre
avec ses troupes à l'armée des royalistes.
Le prince de Condé , après avoir donné
ses instructions et de l'argent à Fauche-
FÂU
223
Borel et à son compatriote Courant, les
envoya l'un et l'autre à Strasbourg où
était l'armée de ce général qui lui-même
se tenait à lUkirck , à une lieue de Cette
ville. Fauche-Borel acheta une maison à
Strasbourg et y établit une imprimerie. H
ne fut point inactif pendant le séjour qu'il
fit dans la capitale de l'Alsace: entretenant
toujours une active correspondance avec
le prince de Condé , il avait lié connais-
sance avec quelques officiers de la garni-
son auxquels il lit adroitenient part* de
ses projets et qu'il préparait à en assurer
l'exécution : il était arrivé dans cette
ville le 29 juillet 1796. Les deux émis-
saires du prince de Condé avaient fait d'i-
nutiles tentatives pour aborder le général;
mais ils s'étaient liés surtout avec M.
Badouville, adjudant-général qui dès
lors leur fit connaître les démarches de
Pichegru; c'est par lui qu'ils apprirent
que ce général devait se rendre dans le
Haut-Rhin. Aussitôt Fauche-Borel prend
la route de Bàle , et rencontre le géné-
ral à Huningue : ce fut à Blodsheim que
Franche-Borel put l'aborder. Après lui
avoir demandé la permission de lui dé-
dier un ouvrage inédit de Jean-Jacques
Rousseau ( sa correspondance ) , ce qui
n'était que le prétexte de sa visite, il s'ou-
vrit bientôt entièrement, et lui dit avec le
plus grand courage quel était le motif
de la démarche qu'il faisait auprès de lui.
On sait que Pichegru n'hésita point à
promettre sa coopération en faveur de la
cause royaliste ; seulement il désirait être
certain que l'Autriche seconderait les ef-
forts des émigrés. Fauche-Borel ayant
aunoncé au prince de Condé l'heureux
commencement de cette négociation , re-
çut de nouvelles instructions pour en
amener le succès , et une correspondance
s'établit entre Pichegru et le prince de
Condé sur la manière" de faire triompher
le plan d'invasion de l'Alsace, et Fauche-
Borel était le porteur de ces lettres. Fau-
che ne tarda point à être dénoncé , et
le 24 décembre 1795, il fut arrêté par suite
de la dénonciation du journaliste Cotla, et
jeté dans la prison du Pont couvert : il
avait gagné le guichetier et était sûr de
s'évader , si l'affaire devenait sérieuse ;
224 ^Atj
mais six jours après, il fui mis en liberté,
faute de preuves. Cependant Pichegru per-
dit le commandement de l'armée; il se reti-
ra à Arbois , son lieu natal. ( Voyez l'arti-
cle PicHEGRuJ. Il était encore dans cette
retraite lorsque, dons le mois de juin
1790 , Fauche lui apporta , de la part de
Loiiis XVIII , une lettre importante. Le
général y répondit eu donnant au prince
qui lui avait écrit le plan qu'il fallait sui-
vre pour faire réussir ses projets. Fauche
remit cette réponse à Louis XVIII qui se
trouvait alors à Dilling-en ; pendant quel-
que temps nous ne savons ce qu'il devint
ni ce qu'il fit pour la cause qu'il servait
avec tant d'activité. Cette première partie
de la vie de Fauche-Iîorel , ou du moins
celte tentative pour prendre l'Alsace est
racontée en détail par lui-même dans
ses Mémoires ; on la trouve aussi dans
le Mémoire du comle de Mongaillard
concernant la conjuration de Pichegru:
en général, les faits sont racontés dans
ces deux ouvrages de la même manière ;
seulement dans ce dernier, les hommes y
sont mal jugés , les caractères y sont pré-
sentés sous des dehors trompeurs : à en-
tendre l'hislorien , il n'y eut dans celle
négociation, que cupidité, ambition et
incapacité : la passion seule a pu tenir ini
pareil langage. En 1707 , Pichegru, élu
membre du conseil des Cinq^cents, fut
nommé président de celte assemblée.
Fauche s'empressa , d'après l'ordre des
princes , d'aller à Paris. Un projet de
contre -révolution avait été formé par
ce général : tout semblait annoncer qu'il
réussirait; mais la révolution du 18 fruc-
tidor le renversa complètement. Nomi-
nativement poursuivi par suite de la
découverte de la correspondance de Pi-
chegru trouvée dans les équipages du
général autrichien Klinglin , Fauche fut
obligé de se cacher. Il avait trouvé un
asile chez un certain David Mounier qui
avait été autrefois son correspondant
d'affaires ;, il ne tarda pas à méditer de
nouveaux projets. Ce Mounier avait des
relations ivcc Boltot , secrétaire de Bar-
ras : Fauche songea à profiter de cet
homme dont il eut bientôt remarqué la
souplesse , pour arriver jusqu'au direc-
FAt
leur. Présenté à Barras , il lui dévoile \i
complot qu'il a concerté avec Piclvcgru :
et il consent à y entrer. Pichegru n'avait
pas paru content de ce que cette affaire
avait été remise ainsi entre les mains
de Barras ; cependaht il ne recula point ,
et dès lors cette intrigue fut l'pbjet de
l&utes les actions et de toutes les pensées
de Fauche. Ainsi à cette époque un gé-
néral français, l'un des directeurs les
plus influens, et des hommes les plus
recommandables par leur noblesse ou pat
leur nouvelle position sociale, travail-
laient en commun au retour des Bourbons
Ce n'est point dans un article biographi-
que que l'on peut faire connaître tous
les ressorts qui furent mis en jeu pour le
succès d'une pareille entreprise : Fauche
en était l'âme , il voyageait, il écrivait ,
il était toujours en mouvement. De Paris
il va à Mittau, de Millau en Russie : ayant
reçu l'ordre, pendant son voyage auprès
de Paul l", de venir s'établir à Wesel, il re-
tourna auparavant auprès de Louis XVIII
à Millau : il écrit à Barras à plusieurs re-
prises; celui-ci lui envoya son homme
de confiance, le chevalier Tropez de
Guerins. Tout allait au gré de ses désirs;
mais la révolution du 1 8 brumaire vint
encore détruire ses espérances : Fauche
était découragé. Il faut lire les détails de
cette seconde conspiration dans les Mé-
moires àe Fauche Borel qui ont pour titre:
Précis historique des différentes mis-
sions dans lesquelles M. Louis Fauche-
Borel a été employé pour la cause de '
la monarchie , suii^i de pièces justifica-
tives, ouvrage d'abord imprimé en 1815
à Paris, où il a été supprimé, et réimpri-
mé en 1816 à Bruvelles avec cette épi-
graphe ; pœnam pro munere. Fauche ,
abattu par ce dernier revers , avait quil*-
té la France pour s'établir à Londres ; il
venait d'y fonder une imprimerie et une
librairie française, et il semblait peu dis-
posé à s'occuper d'affaires politiques ,
lorsqu'un nouvel incident vint l'arracher
à son commerce. C'était l'époque oii l'on
négociait le traité d'Amiens. Quelques
royalislesqui n'avaient point encore dés
espéré de la cause des Bourbons, crurent
que dans l'intérêt de la monarchie , il fat
FAU
iait reconcilier Moi-eau et Pichegru. Fau-
che fut choisi pour être le médiateur en-
tre les deux généraux; il se chargea donc
de porter, de la part de Pichegru qui était
à Londres , des lettres aflcctueuscs à son
ancien compagnon d'armes. A peine lut-
il arrivé à Paris que reconnu par la police
à laquelle il était signalé , il fut arrêté et
conduit au Temple; il parvint à s'évader:
dix-huit heures après, il fut repris, et
passa dix-huit mois enprison. Son adresse
était si grande que , malgré toutes les
précautions que l'on prenait pour le te-
nir au secret , il entretint une correspon-
dance suivie avec Moreau par le moyen
d'un de ses neveux , nommé \itel. Enfin
sur la demande du roi de Prusse , dont il
s'était déclaré le sujet , et sur les instan-
ces de l'ambassadeur de ce monarque,
Fauche, qui à plusieurs reprises avait
été interrogé sur ses relations avec Mo-
reau et Pichegru , et qui avait persisté à
ne vouloir rien dire , fut reconduit par
la gendarmerie jusque sur le territoire de
Prusse. Il avait reçu l'ordre de ne point
retourner à Neuchâtel : il partit donc
pour Berlin où il fut accueilli par le roi
avec la plus grande distinction. Cette
troisième affaire n'ayant pas été plus
heureuse que les deux précédentes , il
chercha de nouveaux moyens d'arriver
au but honorable que jusqu'alors il s'était
toujours proposé. Ce fut lui que le comte
d'Avaray chargea d'imprimer à dix mille
exemplaires, la proclamation du 2 décem-
bre 1804 , adressée par Louis XVIII aux
Français. La distribution en fut faite par
ses soins. Buouaparle se plaignit auprès
du roi de Prusse, et des commissaires
furent chargés d'aller à Berlin pour cet
objet. Ce n'était pas là le seul crime que
Buonaparte lui reprochait ; Fauche était
parvenu à dévoiler ses projets sur laPrus-
se , et il en avait conféré plusieurs fois
avec le roi et ses ministres ; il avait même
remis des notes à ce sujet soit à l'am-
bassadeur de Russie , soit au gouverne-
ment prussien : Fauche avait en outre
conseillé en 1804 de rappeler des Etats-
unis le général Moreau dont la popularité
pouvait être opposée à celle de Buona-
parte. Aux yeux de celui qui avait pris le
V.
FAU ao5
tr«')nc des Bourbons, c'étaient des forfaits
qu'il devait poursuivre partout. Aussi ne
s'agit-il rien moins que d'en arrêter l'au-
teur dans Berlin même. Instruit que ses
jours n'étaient point en sûreté, même
dans ce pays étranger. Fauche se hâta
de partir pour l'Angleterre. Il revint
bientôt après en Suède , puis il retourna
à Londres oîi il forma de nouvelles cor-
respondances avec divers agens du parti
royaliste , notamment avecPerlet, ancien
journaliste. Nous ne pouvons entrer dans
les détails sur toutes ses lettres , dont les
unes sont dictées souvent par une inalté-
rable fidélité, et d'autres aussi par la plus
noire perfidie. En .1813, les royalistes ré-
fugiés en Angleterre crurent, sur la foi de
quelques-uns de ses témoignages trom-
peurs , qu'un débarquement dirigé par le
duc de Berry , pourrait être tenté sur les
côtes de France : Fauche-Borel fut envoyé
dans l'île de Jersey pour s'assurer de la vé-
rité de ces rapports : il revint bientôt, con-
vaincu que c'était un piège tendu par
les agens de Buonaparte à un prince loyal
qu'ils voulaient rendre victime de leur
perfidie. La sagesse de Fauche-Borel pré-
vint les malheurs que cette expédition
aurait entraînés. En 1814, il revint en
France avec les Bourbons : il fut au mi-
lieu des princes étrangers qui lui témoi-
gnèrent toutes sortes d'intérêt. Il se re-
tira ensuite dans sa patrie : son projet
était de s'établir en France. Le débarque-
ment de Buonaparte s'y opposa. Toujours
chargé de quelques missions particuliè-
res, il se rendit à Vienne , puis à Gand,
oii ses services furent mai accueillis par
quelques-uns des ministres de Louis XVIII.
Enfermé pendant huit jours dans un ca-
chot à Bruxelles, soupçonné injustement
de vouloir servir les projets de Buonaparte
comme s'il eût pu embrasser une autre
cause que celle du prince exilé, il dut
sa liberté à l'intervention de l'ambassa-
deur prussien. De là il se rendit à Vienne
oîi il se justifia pleinement : plus tard ,
sa justification fut plus complète et pas un
nuage ne vint ternir une vie toute en-
tière consacrée généreusement à la plus
sainte des caiises. Il vint ensuite à Neu-
châtel , entra en France avec les troupe»
i5
2a6 FAU
suisses qui envahirent une partie des
départemens du Doubs et du Jura , con-
tribua à faire placer le drapeau blanc sur
le fort de Joux (19 juillet 1816) : il aida
aussi les opérations du corps des volon-
taires royaux , commande par M. Gaëlan
de La Rochefoucault , qui p<5nétra en
Franche-Comté par la frontière suisse.
La cause que Fauche avait soutenue était
gagnée ; il fit part alors au public des
moyens qu'il avait employés pour la faire
réussir; il publia en 181 G son Précis his-
torique que nous avons déjà cité. Cet ou-
vrage fut lu avec avidité ; mais on y re-
marque que Perlet, qui avait été pendant
quelque temps son correspondant , y
était accusé de plusieurs abus de con-
fiance : Fauche lui reproche de l'avoir
trompé dans plusieurs occasions impor-
tantes ; mais l'accusation la plus forte
était celle d'avoir attiré à Paris , son
neveu Vitel , de l'avoir livré à la po-
lice , et d'avoir causé la mort de ce mal-
heureux jeune homme. Perlet répondit
par une brochure dans laquelle il pré-
tendait que Fauche avait trahi la cause
des Bourbons. Aussitôt celui-ci le tra-
duisit en police correctionnelle , et le fit
déclarer escroc et infâme calomniateur ,
et Fauche fut reconnu pour n'avoir man-
qué ni à l'honneur ni à la fidélité qu'il
devait aux Bourbons. Plusieurs Mémoires
araient été imprimés de part et d'autre
dans cette affaire. Peu de temps après ,
Fauche se retira en Angleterre d'où il est
revenu à Neuchâtel. Il avait obtenu du
roi de France une pension de 5,000 fr. :
ses affaires étaient cependant en mauvais
état ; pendant ses négociations il avait
contracté beaucoup de dettes ; il se plai-
gnit amèrement de n'avoir pas obtenu
tous les dédommagemens que lui méri-
taient ses sacrifices et son dévouement.
Cette pensée le tourmentait vivement;
sa tête s'en est échauffée , et depuis quel-
que temps il croyait être entouré d'enne-
mis et de pièges , lorsque dans le mois
de septembre 1829, il a mis fin à ses
jours en se précipitant du haut des fe-
nêtres de sa maison. Dans une lettre écrite
avant sa mort , il recommande son âme
à Dieu , lui demande pardon de ses pé-
FAU
cbés , et déclare pardonner à ses enne-
mis. Il venait, en 1 828, de publier de nou-
veaux Mémoires, 1828, 4 vol. in-8, avec
un portrait et une collection de gravures
de dix-sept portraits. Ces Mémoires sont
le récit fidèle, mais beaucoup trop éten-
du de toutes ses opérations. Ce n'est
point lui qui les a rédigés , mais bien
M. Alphonse de Beauchamp , d'après ses
notes. On doit aussi à Fauche-Borel des
Notices sur les généraux Fichegru el Mo-
rel , Londres, 180T, in-8.
FAUCHET ( Claude ) , président à la
cour des monnaies de Paris , sa patrie ,
naquit vers l'an 1629. Il rechercha avec
beaucoup de soin et de succès les anti-
quités de la France. Pendant le siège de
Sienne, en 1566, le cardinal de Tournon
l'envoya au roi pour prendre ses ordres.
Cette députation lui ouvrit la porte des
honneurs, mais non celle de la fortune.
Il mourut en IGOl, à 72 ans, laissant tant
de dettes, qu'il fallut, pour les acquitter,
vendre sa charge. Tous ses ouvrages fu-
rent imprimés à Paris en 1610, in-4. Les
plus curieux sont i" Antiquités gauloises
et françaises ; la première partie con-
tient les choses arrivées jusqu'à la venue
des Francs ; la deuxième contient les
choses avenues en France, depuis Phara-
mond jusqu'à Hugues -Capet. 2° Les
noms et sommaires des œuvres de six-
vingt et sept poètes français. 3° Un
Traité des libertés de l'église gallicane;
un autre de l'origine des chevaliers, Ar-
moiries, etc. 4° L'origine des dignités et
magistrats en France, 1600, in-8; 5° De
la ville de Paris. Il y a dans ces différens
traités mille choses curieuses et qu'on
chercherait vainement ailleurs ; mais il y
en a aussi beaucoup à ajouter, ou à cor-
riger. Le stile est dur, barbare et incor-
rect.
FAUCHET (Claude), né à Dorne, dio-
cèse de Nevers, le 22 septembre 1744,
embrassa l'état ecclésiastique, fut précep-
teur des enfans du marquis de Choiseul,
frère du ministre, et entra ensuite dans la
communauté des prêtres de la paroisse
de St.-Roch à Paris. Ayant été interdit
par l'archevêque, il fit différens person-
nages. Il parvint par ses intrigues, autant
FAU
que par ses talens, et un geure d'esprit
lout-à-fait singulier, plein de contrastes
et de disparates, à être prédicateur ordi-
naire du roi, vicaire-général et chanoine
honoraire de Bourges, abbé commenda-
taire de Montfort, etc. La révolution le
mit à même de donner l'essor à ses mau-
vaises qualités ; il y joua un rôle bruyant:
(le 14 juillet 1789, on le vit un sabre
à la main, s'avancer trois fois à la tête
des assaillans : il donnait des ordres, et fai-
sait des discours : ce fut un des héros de
cette journée). Il devint ensuite évêque
schismatique du Calvados ( ainsi nommé
d'un rocher de la Manche contre lequel
échoua le Calvados, vaisseau de la fameuse
flotte de Philippe II), et se signala par di-
vers écrits oîi se trouvent des vérités forte-
ment énoncées, à côté desplus monstrueu-
ses erreurs : tels sont le Discours sur la
religionnationale, Paris, 1 7 89, in 8 (voyez
DoMiNis), trois discours sur la liberté'
humaine, 1789; V Oraison funèbre de
l'abbé de VEpée, \1^0; Eloge civique
de Franck lin, 1790; Sermon sur l'ac-
cord de la religion et delà liberté, 1791,
etc. Le 6 avril 17 92, lorsqu'un décret
supprima le costume ecclésiastique, l'ab-
bé Fauchet déposa sur le bureau sa calotte
et sa croix, et ses confrères imitèrent son
exemple ; c'était le vendredi saint!... Ce-
pendant lorsqu'il vit la chute du trône ,
et qu'il lui fut impossible de se mépren-
dre sur le but du parti dominant, contre
la religion,, il prit une marche rétrograde,
se déclara contre le mariage des prêtres ,
et prononça, lors du procès de Louis XYI,
un discours courageux pour le temps, où.
il combattit ceux qui voulaient la mort
du roi, et leur dit des vérités assez har-
dies , entremêlées pourtant des phrases
alors en usage contre le tyran et la ty-
rannie. Dans les différens appels nomi-
naux, il vota toujours pour le parti le
plus favorijble. Depuis il s'attacha au parti
fédéraliste, et lutta avec courage contre
Marat et Robespierre. Ayant été accusé de
conspiration contre le parti jacobin , de-
venu dominantà la Convention nationale,
il fut condamné à mort, et périt sous la
guillotine, le 31 novembre 1793, après
avoir abjuré ses erreurs, et s'être con-
FAU 227
fessé à un prêtre vertueux, renfermé avec
lui à la Conciergerie, et qui avait eu le
bonheur de le faire rentrer en lui-iflême
(voyez les annales catholiques , tom. 4,
p. 169). Dans les temps antérieurs à la
révolution , il avait prononcé à l'acadé-
mie française un panégyrique de saint
Louis, et avait fait V Oraison funèbre du
duc d'Orléans , père d'Egalité , et de
Phéty peaux d'Herbaud, archevêque de
Bourges; un Discours sur les mœurs
rurales. On peut consulter \es Mémoires
pour servir à l'histoire de V église consti-
tutionnelle , ou Lettres à Claude Fau-
chet, oii Von trouve un précis de ses cri-
mes et de ses erreurs ; Liège, 1793, in-8.
Voyez le Journal hist. et litt., 15 décem-
bre 1793, p. 15.
FAUCHEUR (Michel le), ministre
protestant , fut appelé de Montpellier à
Charenton. Son éloquence ne fut pas
moins admirée à Paris qu'en province.
Le maréchal de La Force dit, au sortir
d'un de ses sermons sur le duel, « que si
» on lui envoyait un cartel , il le refuse-
» rait. M II mourut à Paris en 1607, esti-
mé des catholiques et des protestans. Sa
probité ne le cédait pas à son génie. On
doit à sa plume, aussi ingénieuse qu'élo-
quente 1° un Traité de V action de ï ora-
teur, Leyde, 1686, in-12, imprimé d'a-
bord sous le nom de Conrart : ouvrage
estimé. 1° Des sermons sur différens
textes de l'Ecriture, in-8. 3° Prières et
méditations chrétiennes. 4° Un Traité
de l'Eucharistie, contre le cardinal du
Perron, Genève, 1635, in-fol. imprimé
aux dépens des églises réformées, par or-
dre du synode national.
* FAUGERES (Marguerite Bleeckeb),
dame poète, née en 17 71, dans un village
des Etats-Unis , perdit sa mère de bonne
heure , et épousa un médecin de New-
York, qui dissipa sa fortune, et mourut
en 17 98 delà lièvre jaune. M"^ Faugères,
se consacra alors à l'éducation des jeunes
demoiselles, et mourut en 1 80 1 . On trouve
un grand nombre de ses poésies dans le
Muséum américain, et dans le Magasin
de New- York. En 1795, elle avait pu-
blié une tragédie de Bélisaire, qui a ob-
tenu quelques succès.
328 FAU
*FAUJAS de Saint-Fond (Barthëleuii),
.savant fjéolofîue , né à Montelimar le 17
mai 1741 , embrassa la carrière du bar-
reau , après avoir fait son droit avec dis-
tinction à Grenoble : c'était un des bons
avocats de cette ville ; mais son goût pour
la minéralogie lui fit abandonner>sa pro-
fcssioîi , et dès lors il ne s'occupa plus que
de faire des recherches relatives à la partie
de l'histoire naturelle dans laquelle il
s'est rendu célèbre : il s'est occupé sur-
tout des produits volcaniques , sur les-
quels on n'avait obtenu jusqu'alors que
des données inexactes ou incomplètes.
Après avoir parcouru et exploré les Alpes
en vrai naturaliste , il visita les Puy de
Dôme ou les montagnes de l'Auvergne.
En 17 76 il découvrit dans les monta-
gnes de Chenavary une riche mine de
Pouzzolane qu'il fit ouvrir à ses frais ,
sur laquelle il tenta des expériences de
tous genres et dont le gouvernement se
servit pour les constructions du port de
Toulon et dans quelques autres travaux
publics. Depuis 17 76 il entretenait une
correspondance suivie avec Buffon , qui
le fit nommer en 1779 adjoint au jardin
du roi, et en 1785 commissaire du roi
pour les mines. Toutes les années il par-
courait quelques parties de la France , ou
bien ii poussait ses voyages dans les dif-
férentes contrées de l'Europe et même jus-
que dans les états du nouveau monde :
ses courses étaient toujours dirigées dans
l'intérêt de la science. Ce fut pour le
récompenser de ses travaux importans et
de ses nombreuses découvertes, que Buf-
fon fit nommer Faujas son successeur. Ce
géologue enseigna sa science au jardin
des Hantes avec un talent que l'expé-
rience seule saurait donner : de conjec-
turale qu'elle était, il la rendit exacte , en
l'appuyant sur des bases scientifiques :
parmi les découvertes importantes qu'on
lui doit, nous ne saurions passer sous
silence celle de \di farine fossile , et de la
mine de fer de la voulte ( Ardèche ). En
octobre 1797 , le conseil des Cinq-cents
lui alloua une somme de 25,000 francs
pour le dédommager des dépenses qu'il
vivait faites pour ses travaux. Faujas est
niort le 18 juillet 1819. Il était adminis-
FAU
traleur du jardin du roi. Parmi ces nom-
breux ouvrages nous citerons \° Me'moires
sur des bois de cerf fossiles trouvc's dans
les environs de Montelimar ,Vav\s, 17 76,
petit in-4 ; 2" Recherches sur les volcans
éteints du Vivarais et du Velay , 1778,
in-folio ; c'est dans cet écrit qu'il déve-
loppe sa théorie sur la formation des
volcans , théorie qui reirase sur la na-
ture chimique de l'eau qui, suivant ce
géologue, doit être infailliblement en
communication avec le foyer des vol-
cans qu'elle entretient par sa décompo-
sition. 3° Histoire universelle de In pror
vince du Dauphiné, 1781, in-8, avec
fig. ; 4» Description des expériences de
la machine ae'rostatiquc de MM. Mon-
gol fier , Paris, 1783 et 1784, 2 vol. in-8.
Cet ouvrage est le plus complet sur celte
matière. 5° Minéralogie des volcans ,
1 7 84 , in-8 ; 6" Histoire naturelle des ro-
ches de Trapp, 1788, iu-12, 1813,
in-12; 7° Voyage en Angleterre^ en
Ecosse et aux îles Hébrides , où ton
trouve la description détaillée de la
grotte de Fingat, Paris, 1797, 2 vol.
in-8 , avec figures , traduit en anglais et
en allemand ; 8° Histoire naturelle de la
montagne de St.-Pierre de Maëstricht ,
Paris, 1798, grand in-4 avec 54 planches ;
9" Essai de géologie , ou Mémoire pour
servir à l'histoire naturelle du globe y
Paris, 1803 et 1809, in-8, avec figures.
Il a aussi laissé des manuscrits sur le pas-
sage du Rhône et dci Alpes par Annibal,
sur la fontaine de Vaucluse , et un grand
nombre de Mémoires relatifs à la géolo-
gie et à quelques autres questions d'his-
toire naturelle , insérés dans les Annales
du Muséum d'histoire naturelle. M. Frey-
cinet , ami de Faujas , a publié : Essai
sur la vie , les opinions et les ouvrages
de B. Faujas de Saint-Fond, admini-
strateur du jardin du rot, Valence, 1820,
iu-4.
FAULCONNIER (Pierre), grand-
bailli de la ville de Dunkerque sa patrie,
président de la chambre de commerce ,
s'acquitta avec beaucoup de zèle et de
désintéressement des fonctions de ces
charges pendant près de 60 ans , et mou-
rut en 1735. Nous avons d€ lui une Des-
FAtT
cription historique de Duiikerque , Bru-
ges, 1730, 2 vol. in-fol.,avec fig.; leslile
en est peu correct.
FAUR (Gui DU ), seigneur dePiBRAC,
naquit l'au 1528 à Toulouse, d'une fa-
mille illustre, et parut avec éclat dans le
barreau de celle ville. Il voyagea dans sa
jeunesse en Italie , pour se perfectionner
dans la connaissance du droit. De retour
dans sa patrie , il fut élu juge-mage. Dé-
puté aux états d'Orléans en 1 5G0 , au nom
de la ville de Toulouse , il présenta au roi
le cahier des doléances qu'il avait com-
posé lui-même. Quelque temps après,
Charles IX le choisit pour être un de ses
ambassadeurs au concile de Trente. Il y
soutint avec beaucoup d'éloquence les
intérêts de la couronne et les libertés de
de l'église gallicane. Le chancelier de
L'Hôpital , pénétré de son mérite, lui fit
donner la charge d'avocat-général au
parlement de Paris en 1565. Pibrac fit
renaître la raison et l'éloquence dans le
barreau, livré depuis long-temps à la bar-
barie et à l'indécence. En 1570, il fut
nommé conseiller d'état. Deux ans après,
il composa sa célèbre jjpologiede la Saint
Bartlidlemi ; mais on croit qu'il ne se
prêta k cet acte , si opposé à la douceur
de son caractère , qu'après y avoir été
contraint par des ordres supérieurs. Le
duc d'Anjou ayant eu la couronne de
Pologne, Pibrac accompagna ce prince,
et répondit pour lui aux harangues de
ses sujets. Le nouveau roi ayant appris
la mort de son frère, quitta secrètement
la Pologne, laissant à Cracovie Pibrac
exposé à la colère des Polonais, qui furent
près de se venger de la fuite du roi sur la
personne de son ministre. Il retourna
heureusement en France , d'où on le ren-
voya en Pologne , pour tâcher de con-
server la couronne à son maître : ce qui
ne réussit pas. Il fut plus heureux à son
retour en France, où il procura, entre
la cour et les protestans, un traité depaix,
dont il fut l'arbitre , comme il en avait
été l'auteur. Henri III lui donna , pour
prix de ses services, une charge de pré-
sident à mortier. La reine de Navarre et
le duc d'Alençon le choisirent pour leur
chancelier. Il mourut en 1584, à l'âge
FAU 2r»9
de 56 ans ; et la France perdit un grand
magistrat et uii bon écrivain. Il nous
reste de lui plusieurs ouvrages en vers
et en prose : 1" Des plaidoyers, des hn-
7-angues , in-4. 2" Un Discours de l'âme
et des sciences , adressé au roi. 3" Une
belle lettre latine sur le massacre de la
Saint -Barthclemi, 157 3, in-4. Outre
ces écrits peu connus aujourd'hui , on a
ses quatrains, que tout le monde con-
naît ; la première édition est de 1 57 4 , et
la dernière de 174G ,in-12. La matière
de ces petites productions est la morale ;
leur caractère, la simplicité et la gravité.
Pibrac a réuni dans les siens ces deux qua-
lités , l'utile et l'agréable y sont mêlés
avec goût. Ses quatrains furent d'abord
traduits en grec par Florent Chrétien , et
par Pierre Dumoulin ; d'autres écrivains
les mirent en vers latins ; enfin ils pas-
sèrent dans les langues turque, sfrabe et
persane. Les Français leur firent un aussi
bon accueil que les étrangers. On les
faisait apprendre par cœur aux enfans ;
et malgré leur vieillesse, on les lit encore
aujourd'hui avec quelque plaisir.
FAUR DE SAINT-JORRI ( Pierre
DU ), premier président au parlement de
Toulouse, mort d'apoplexie en pronon-
çant un arrêt en IGOO , âgé de 60 ans , a
laissé un grand ncyribre d'ouvrages , mo-
numens de son érudition. Ceux que les
savans lisent avec le plus de fruit sont : 1°
Dodecamcnon , sive de Dei nomine et
attribuiis , 1588, in-8 , écrit estimable,
qui renferme quantité de passages des
Pères greos et latins, éclaircis ou corri-
gés. 2" Trente-trois livres latins des 5e-
mesfres, en 2 vol. in-4 , 1598 et 1630,
plusieurs fois réimprimé. On y trouve
beaucoup de recherches et de questions
éclaircies. 3" Des jeux gymniques des
anciens, traité aussi savant que le pré-
cédent, in-folio, 1595. Il y a beaucoup
à apprendre dans ces différens ouvrages,
mais il faut y chercher l'instruction , et
non le plaisir. Il y règne quelquefois de
la confusion, et le stile n'est pas agréable.
FAURE ( Charles ) , abbé de Ste.-Ge-
neviève et prejnier supérieur-général des
chanoines réguliers de la congrégation
de France , vit le jour à Luciennes , pro-
23o FAU
che St.-Gerivain en Laye , d'une famille
noble. Il entra dans l'abbaye de Sainl-Vin-
cent de Senlis , et la réforma par ses con-
seils et par ses exemples. Celte réforme
fut suivie de celle de l'abbaye de Ste.-
Geneviève de Paris , et de près de 60 au-
tres maisons. Le réformateur fut nommé
général de celle nouvelle congrégation.
Il travailla avec des peines et des fati-
gues incroyables à rétablir l'ancienne
discipline. Il mourut saintement en 1644,
à 50 ans, laissant une Conduite pour tes
novices, et d'autres ouvrages. La Con-
duite a été réimprimée en 177 5. Le Père
Chartonnet a publié la Vie duPèreFaure,
en lG98,in-4. Elle renferme l'hisloire
des chanoines réguliers de la congréga-
tion de France , et l'esprit de leur fonda-
teur que le Père Faure avait commencé
lui-même. Elle est écrite d'une manière
édifiante.
FAURE ( François ) , cordelier né en
1612, d'une ancienne famille del'Angou-
raois, sous-précepteur de Louis XIV,
évêque de Glandèves , puis d'Amiens ,
mort d'apoplexie à Paris le 1 1 mars 1 687 ,
âgé de 76 ans, parvint à l'épiscopat par
son talent pour la chaire. C'est lui qui
fit cette application du vers de Virgile
à la reine , lorsque prêchant la passion à
Saint-Germain-l'Auxercois , il fut dans le
cas de recommencer son sermon à l'ar-
rivée de cette princesse :
Infuiiduin, regiiia , jubés reiioTare doloreni ;
application heureuse, mais déplacée
quant à la sainteté du sujet eti du lieu.
On a de lui plusieurs oraisons funèbres ,
entre autres celle d'Anne d'Autriche, qui
avait fait beaucoup de cas de ses lumières
et de ses vertus. C'était un homme de
bien et d'un grand zèle pour l'ortho-
doxie; les jansénistes ne lui ont pas par-
donné d'avoir censuré les Lettres Provin-
ciales, et la fameuse traduction du nou-
veau Testament, de Mons.
FAURE. Voyez VERSonis.
• FAUKE ( Jean-Baptiste ) , jésuite ,
naquit à Rome le 25 octobre 17 02, de
parens français d'origine. Il fit ses études
au collège romain , dirigé par le Pères jé-
suites , dont il prit l'habit le 30 mars
FAU
1738. Il remplit successivement les chai-
resdephilosophie,deconlroversc,de théo-
logie scolastique, et des saintes écritures.
Le Père Faure professa pendant trente
années, et fut, sans contredit, le pre-
mier théologien de sou siècle. Son ensei-
gnement était solide : nullement embar-
rassé parcelle foule de questions inu-
tiles et oiseuses qui font perdre de vue
d'autres plus importantes, son cours em-
barrassait plusque des discussions tliéolo-
giques ou une compilation de points spé-
culatifs ; c'était un corps complet de
doctrine théologiqtie. Les papes Benoît
XIV, et Clément XIII, ne dédaignaient
pas de le consulter dans les matières les
plus graves. Lors de la suppression des jé-
suites , il fut enfermé par les ordres de
Clément XIV dans le château Saint-Ange,
avec plusieurs chefs de son ordre ; et on
prit cette rigoureuse mesure envers le Père
Faure , parce que l'on craignait que sa
plume savante ne prît la défense de ce
même ordre qu'on venait de proscrire.
Pie VI , en rendant la liberté aux jésuites
captifs, permit au Père Faure de demeurer
dans sou couvent de Jésus ; mais les en-
nemis des jésuites l'en firent bientôt ex-
pulser. Il se retira à Viterbe, où les
habitans lui firent l'accueil le plus dis-
tingué, et où il rédigea en 2 vol. in-4 , une
Défense du fameux décret du roi Dési-
dère , décret si honorable pour cette
ville, et qui existe dans son palais mu-
nicipal. La vie de ce pieux ecclésiastique
était partagée entre ses devoirs religieux,
ses études et les soins qu'il donnait aux
pauvres et aux infirmes. Il mourut à Vi-
terbe, le 25 avril 1777, âgé de 75 ans.
On lui fit de magnifiques funérailles ; son
portrait fut placé dans la grande salle du
palais municipal, et son éloge fut pronon-
cé dans l'académie littéraire de cette ville.
Il a laissé 1" Thèses polemicœ, etc.
^ccedit difsertatio de capituUs S. Ce-
lest ino II olint tributis, etc. , Rome,
1754 ; 2° Dissertatio polemica de jure re-
galiœ et primarum pœnnrum contra
publicistas protestantes , Rome, 1753;
3" Dissertatio polcmica in recentiora
quœdam erronea systemata de morum
dngmatibus , Rome, 1753; 4' De praxi
FAU
guelphellnnià in dilatione sacramentalis
absolutionis; b° Diserlatio polcmicn ad-
vcrsus Edmundi Riclierii poUiiam eccle-
sinsticam; G°These.s tlieologicœ etpolemi-
Ciiedejurenaturœacgentium contra Gra-
lium.. . . Hobbe^um , Puff'cndorfium , etc.
Rome, 1757; 7° S. Jugiistini cnchiri-*
dion... noiis et assertionibus theologicis
illustratum, Rome, 17 55 ; 8' Conclusio-
nés univevsœ iheologiœ , Rome, 1766;
9° Brevis Apparatus ad thcologiam , et
jus canonicum, Rome, 1751. En italien :
10° Supplément, ou Supple'mens aux
premières animadveisions de M. Sam-
pieri , dans la cause du vénérable Jean
Palafox ; 11° A l'auteur des deux Let-
tres inlhiûées : Avis salutaires, Naples,
177 4 : 12" deux petits ouvrages très in-
léressans sur la dévotion du sacré cœur
de Jésus ; 1 3° Essais théologiques pour
former un errata corrigé, Lugano,
1 7 7 3; 1 4" Jugement impartial sur la con-
troverse entre les Pères conventuels et
les observnntins; ouvrage posthume, etc.
* FAURIS DE SAINT -VINCENT
( Alexandre-Jules-Antoiae), président à
la cour royale d'Aix, naquit dans cette
ville dans le mois de septembre 17 50,
d'une famille distinguée ; il était arrière-
petit fils de Pauline de Grignan, marquise
de Cimiane , et petit-fils de M""* de Sévi-
gné. Avant la révolution il était devenu
président à mortier au parlement de
Provence, et il occupa celte place jus-
qu'à la suppression des cours souveraines.
Pendant les premières années de nos
troubles politiques , il fut maire de sa
ville natale. Le département des Boucbes-
du-Rhône le nomma en 1809 député au
Corps législatif, d'où il passa en 1814 à
la chambre des députés. Il ne se passa
rien d'intéressant dans sa vie politique
et législative, et il ne parut guères à la
tribune que pour demander la franchise
du port de Marseille. Il avait été nommé
dans le mois de juin 1811, président à la
cour impériale d'Aix ; il fut continué dans
les mêmes fonctions à la cour royale ré-
formée par Louis XVIII. Les momens de
loisir que lui laissaient ses fonctions
n'étaient point perdus pour les lettres ;
Fauris les employait à l'élude des sciences
FAU a3t
et surtout de l'archéologie. 11 était par-
venu ainsi à acquérir une connaissance
approfondie des monumens de l'antiquité
et du moyen âge ; il a laLssé une riche
collection de médailles et publié plusieurs
écrits estimés , parmi lesquels on remar-
que : 1° Mémoire sur V ancienne position
de la cité d'Aix , Paris , 1 81 2 ; 2" Notice
sur les lieux où les Cimbres et les Teutons
ont été défaits par Marins , et sur le
séjour et la domination des Goths en
Provence, Paris, 1814 ; Z" Mémoire sur
tétat des lettres et des arts , et sur les
mœurs et usages suivis en Provence dans
le 1 5* siècle, Paris, 1 8 1 4 ; 4" Mémoire sur
les bas-reliefs^ des murs et portes exté-
rieures de JVotre-Dame de Paris , et sur
les bas-reliefs intérieurs du chœur de la
même église , Aix , 1815, etc. L'académie
des Inscriptions et belles-lettres avait ré-
compensé les efforts de ce savant en le
plaçant le 7 août 1816, sur la liste de ses
membres associés libres. Fauris est mort
à Aix le 15 novembre 1819 à l'âge de 70
ans.
FAUST. Voyez Fust.
FAUSTA ( Flavia Maximiana ) , fille de
Maximilien Hercule , et femme de l'empe-
reur Constantin. Dans les premiers temps
de son mariage, elle fut un modèle de
vertu ; mais la suite ne répondit pas à de
si heureux commencemens. Toutes les
pasîsions s'allumèrent tout à coup dans
son cœur. Elle s'abandonna aux personnes
les plus viles , jeta des regards incestueux
sur Crispe , fils de Constantin , et ne put
l'attendrir. Irritée de sa résistance , elle
joignit la calomnie à l'inceste , et l'accusa
auprès de l'empereur d'avoir voulu la.
violer. Elle fit mettre à mort , par cette
imposture , celui qui avait refusé de se
souiller d'un crime horrible. Constantin,
instruit trop tard de ses débauches et de
sa scélératesse , vengea la mort de son
fils , et son propre honneur si cruellement
outragé. Il la fit étouffer dans un bain
chaud, l'an 327 de Jésus-Christ.
FAUSTE , évêque de Riez , né vers l'an
390 , dans la Grande-Bretagne, quitta le
barreau où il brillait , pour s'ensevelir
dans le monastère , de Lérins. Il en fut
abbé vers l'an 433 , lorsque saint Maxime
232 F AU
quitta ce poste ^our gouverner IVglise
de niez. Il lui suecMa dans cet évéché
vers 455, fut exile en 481 , et mourut
\crs l'an 485. On a de lui un Traité du
libre arbitre et de la grâce , où il relève
trop les forces de la natiue,; et d'autres
ouvrages , dans la Bibliothèque des Pères.
Le nom de Fauste était autrefois dans le
(Catalogue des saints de Gcnnadius; mais
Molanus {De Martyrologiis , cap. 13) a
montré qu'il n'avait jamais été mis dans
le Catalogue des saints par l'église ro-
maine , et qu'il ne ge trouve ]»as dans le
Martyrologe d'Usuat-d. Simon Bartel , au-
teur d'une Histoire chronologique des
évêques de Riez , a mis à la fin de son
ouvrage une Apologie de Fauste , que les
curieux pourront consulter.
FAUSÏINE (An/lia Galcria Fausti-
na), née l'an 104, d'Annius Verus, préfet
de Rome, joignait à la splendeur d'une
origine très distinguée, une beauté par-
faite et un esprit fin, délié et insinuant.
Klle épousa Antonin, long-temps avant
qu'il parvînt à l'empire. L'envie de plaire
et le goût pour la volupté l'engagèrent
d'abord dans la galanterie, et ensuite dans
un libertinage effréné. Elle devint la fable
de Rome. Antonin , instruit de ses débau-
ches, se contenta d'en gémir. Elle mou-
rut comme elle avait vécu, dans le dérè-
glement, l'an 141. Antonin lui fit éiever
des autels et des temples. Faustine sa fille,
dont nous allons parler, se forma sur l'iu-
fame modèle de sa mère.
FAUSTINE {AnniaFaustina), dite
Faustine la Jeune, fille d'Antonin le Pieux
et de la précédente , épousa l'empereur
Marc-Aurèle. La nature lui avait accordé
la beauté, l'esprit et les grâces; elle abusa
de ses dons. Du plaisir elle passa à la dé-
bauche, et de la débauche aux derniers
excès de la lubricité. Le sénateur et le
chevalier romain étaient confondus chez
elle avec l'affranchi et le gladiateur. Pour
mettre le comble à ces horreurs, elle s'a-
bandonna à son gendre, et écouta sans
rougir les reproches que lui en fit sa fille.
Il ne lui resta aucune trace de pudeur. On
assure que son mari, instruit de ses dé-
réglemens, feignit de les ignorer; qu'il
alla même quelquefois jusqu'à récompen-
FAU
xer ses amans; et que lorsqu'on lui con-
seilla de la répudier, il répondit : « Il
» faudrait donc que je lui rendisse sa
» dot » , c'est à-dire l'empire. Réponse
peu assortie aux brillantes idées que les
auteurs, les modernes surtout, nous font
t concevoir de Marc-Aurèlc. On ajoute que
ce prince philosophe éleva aux grandes
charges de l'empire ceux qui souillaient
son lit , et que le peuple ne manquait pas
d'en rire. Faustine, malgré ses débordc-
mcns monstrueux, fut honorée dans les
temples comme une divinité. On institua '
en son honneur les fêtes faustinicnnes ;
et des prêtres mercenaires firent fumer
l'encens à l'autel de cette prostituée, avec
autant de profusion qu'à celui de Diane,
la déesse des vierges. ( Des mi'daillcs fu-
rent faites en son honneur : elle y porte
le titre de Diva , mater castrorum , pu-
dicitia, légende étrange pour une prosti-
tuf'e, ) Elle mourut l'an 17 5 au bourg de
Halale, situé au pied du mont Taurus.
Jacques Marchand a fait de vains efforts
pour la justifier, dans une dissertation ré-
futée d'avance par tous les témoignages
de l'ancienne histoire.
FAUSTINE (Maxima Faustina), fem-
me de l'empereur Constance, fils du grand
Constantin, futmariéeàceprince en 301,
après la mort d'Eusébie, et resta enceinte
d'une fille nommé Constantia, qui fut de-
puis mariée à l'empereur Gratien. C'est
cette princesse dont on voit le buste sur
le bel onyx conservé dans le trésor de St.-
Lambert à Liège , une des précieuses an-
tiques qu'on puisse voir en ce genre.
FAUSTUS( Jean), fameux nécroman-
cien dans le commencement du 1 6* siècle,
que quelques-uns disent natif de la .Soua<
be; d'autres d'Anhalt, et d'autres encore
de la Marche de Brandebourg, près de
Soltwedel. Son père était un paysan, qui
envoya ce fils à ses parens à Wittemberg,
où il fréquenta le collège et s'attira par
son esprit l'affection de tous ceux qui le
connaissaient. A l'âge de 16 ans, il alla à
Ingolstadt pour y étudier la théologie, cl
3 ans après il prit le degré de maître es»
arts. Il quitta ensuite la théologie, et
s'appliqua, avec une assiduité extraordi-
naire à la médecine, et à l'astrologie ju-
FAU
diclaire. Philippe Camerarius dit qu'il
t'tudia la magie à Cracovie, où il assure
qu'on eu donnait alors des leçons. Pen-
dant cet intervalle de temps, Faustus hé-
rita des biens considérables de son oncle
paternel qui mourut à Wittemberg. Il
employa cet héritage à la débauche, s'a-
donna entièrement à toutes sortes de sorti-
lèges et aux conjurations des esprits, et se
pourvut de tous les livres magiques. Jean
Wagner, fils d'un prêtre de Wasserbourg,
fut le domestique fidèle qu'il se choisit,
et à qui il communiqua tous ses secrets.
Faustus se servit aussi, pendant deux ans,
des instructions de Christophe Rayllin-
ger, fameux cristallomancien. Enfin, l'in-
fortuné Faustus conjura, dit-on, le dé-
mon, traita avec lui pour 24 ans, et en
reçut un esprit familier pour son service,
nommé Mcpidstophèles. On rapporte que
Faustus joua des tours surprenans à la cour
de l'empereur Maximilien; mais qu'à la
fin le démon l'étrangla et le déchira d'une
manière effroyable dans le village de Rim-
lich. Il avait alors 41 ans. George Rodol-
phe W'iedeman raconte tout cela dans
l'histoire de la Fie de Jean Faustus, qui
sans doute paraîtra fort singulière ; mais
que les auteurs contemporains , ceux
même qui ne passent ni pour crédules ni
superstitieux, rapportent comme indubi-
table. Le fameux Mélancbthon, qui vi-
vait dans ce temps-là, en parle comme
d'une affaire notoire. Et dans notre siè-
cle, où la philosophie a long-temps ri de
ces sortes d'histoires, on la voit courir
elle-même avec une criminelle curiosité
après tout ce qui peut les reproduire (1).
fiî M. d'Aiclienliolï , dans son Tabieau de C Angleterre ,
l'aii», 1788 , fiiit mention d'un docleur Falkon , qui peut
itre cousidéié comme le pendant de Fauslus. « Il y a, dit-
>• il, parmi celte nation un iiomme extraordinaire .qui,
• depuis trente ans est célèbre dans les annales cabalisti-
» ques. 11 se nomme Caïii Clientil Falk , et est connu gé-
■ néialement sous le nom de docteur Falkon. Un certain
» comte de Kanzow , mort depuis peu au service de
France comme maréchal de camp, assure dans ses mé-
» moires cabalistiques, nianiqnes , etc., avoir vu ce Falk
» dans le pays de Brunswick, sur une des terres de son
■ père , en présence de beaucoup de personnes connues ,
» qu'il nomme toutes et qu'il prend à témoin de la vérité
» de ce qu'il avance. Falk s'est-il servi dans celle opération
» de la méthode de Schropfer? Je n'en sais rien. Ce qu'il y
» a de certain , c'est que cet licmmc vit actuellement à
» Londres. Lorsqu'il sort, ce qui arrive très rarement, il
» est toujours revêtu d'un long lai ir , qui va très bien avec
■ sa longue barbe blanche et sa ligure noble et iutéres-
V.
FAV 233
F'oijezA.swoDKE, Bhon ( le), Brown (Tho-
mas ) , DEtRio , etc.
FAEVEAU ou. Fulvius (Pierre),
poète latin , natif du Poitou , ami de
Muret et de Joachim du Bellay , mourut k
Poitiers , à la fleur de .son âge , en 1 562.
Il ne nous reste de lui que des fraginens
insérés dans les Deliciœ poetarum gal-
lorurn de Gruter.
* FAVAllT (Charles-Simon) , auteur
dramatique, né à Paris le 13 novembre
1718, et mort le 12 mai 1792, était fils
d'un pâtissier qui s'attribuait l'inven-
tion des échaudés et qui faisait d'assez
bonnes chansons. Le jeune Favart fit de
bonnes études au lycée Louis le Grand.
Il débuta par une pièce de vers qui n'an-
> santé. Il est actuellement âgé de 70 ans à peu prés.
» Je ne me donnerai pas la peine de rapporter ici toutes
» les choses incroyables et extraordinaires qu'on raconto
» de ce vieillard,... Du prince voulut aller le voir, il y
> a quelques années; il se présenta à la porte de Falkon ,
» et ne fut point reçu. » Le comte de Mirabeau dans sa
Monarchie ijruisiemie , parle aussi en plusieurs endroits
du pofit des philosophes modernes, des princes et autres
brujans personnages , pour la magie, a Voyei, dit-il, en
» Allemagne tant de princes ivres de l'espoir et de l'attentu
» desmoyenssurnaturels de puissance, évoquer les esprits,
» explorer l'avenir et tous ses sejrets , tenter de découvrir
« la médeciue universelle , de faire le grand œuvre , et
» pour étanoher leur soif insatiable de domination et de
> trésors, ramper à la voix de leurs thaumaturges, qnu
» dirige un sceptre inconnu. » Ailleurs il parle d'un nom-
mé Schropfer, cafetier de Leipsick , auquel le duc Charles
de Courlande avait fait donner des cours de bâton , mai»
qui sut ensuite tellement fasciner ce prince, et une grande
partie des personnes les plus considéiahles de Dresde et de
Leipsiek, qu'il joua un assez grand rôle. « Dealers, dU-il,
» on vit reparaître en Europe les folles de l'Asie , de lit
I (Ihine , la médecine universelle, l'art de faire de l'or
» et des diamans, le breuvage du rimmortarité, etc., etc.
» Le genre particulier de Schropfer était surtout l'éïoca-
> tion des mânes : il commandait aux esprits ; il faisait ap-
» paraître à son gré les moris et les puissances invisibles.
» Onsait quel futle dénoûment de son drame. Aprèsa.oir
» consumé des sommes immenses à ses adhéreiis, après
» avoir aliéné le bon sens de plusieurs d'entre eux, dans
» l'inipossibililé de se soutenir plus long-temps , il se cassa
» la tête d'un coup de pistolet, dans un bosquet près de
» Ltipsick. A Schropfer succéda Saint-Germain , qu'un
» comte de Laïubert avait annoncé dans son Mémorial
» d'un mondain , etc. » Il est encore parlé plus amplement
de ces farces dans VEsaai sur la secte des illuminés, ou-
vrage d'ailleurs indigeste, où toutes les notions sont con-
fondues. Le cagliostrocisme et le mesmérisnie présentent
des scènes du même genre. « Qui eût cru , dit un auteur,
» qu'un siècle où l'existence de Dieu était un problème ,
II où presque tous les hommes doutaient de celle de leur
» âme , et ne répondaient que parmi souris moqueur &
11 lont ce qui supposait celle des anges et des démons; qui
> eût cru . ou qui eût dû le prévoir, qu'un tel siècle , ait
» lieu de finir par une entière incrédulité, finirait par
> courir avec autant d'avidité à du surnaturel de toute
Il espèce , qu'il avait couru si long-temps après des livres
> qui en détruisaieut jusqu'àla possibilité ?»
i5..
234 l'AV
nonçait pas un grand talent : Discours sur
la difficulté dp. réussir en poésie : elle fut
suivie d'un poèrac intitule : la France dé-
Itprée par Jeanne d'Arc. C'était au théâtre
qu'il devait obtenir des succès réels ;
et, de tous ceux qui ont travaillé pour
l'opéra comique, c'est lui qui a le mieux
saisi l'esprit de ce genre de spectacle. Il
a su y répandre de l'intérêt, du naturel,
de la gaîté, de la finesse et tous les
agrémens dont il est susceptible. Il a
donné à l'Opéra-comique et aux Italiens
plus de GO pièces, presque toutes rem-
plies d'esprit et de délicatesse. Celles qui
ont obtenu, et qui même obtiennent en-
core le plus de succès sont en grand
nombre , la Chercheuse d'esprit qui sera
toujours la plus ingénieuse comme la
plus agréable de ces sortes de produc-
tions , Nincttc à la cour, Acajou , yîn-
neite et Lubin, la Fcte du chùteau, la
Fée Urgèle , les Moissonneurs , la Ro-
sière de Salency , l Amitié à l'épreuve ,
la Belle Arsène, l'Astrologue de village,
etc. Sa comédie de Soliman II, ou les
Trois Sultanes, et l'Anglais à Bordeaux,
prouvent qu'il pouvait s'élever au-desstis
du genre de l'opéra comique. Ses pièces
de théâtre ont été réunies en 8 vol. in-8,
Paris, 1763, 10 vol. in-8. 1770, et son
Théâtre choisi en 1809, 3 vol. in-8, avec
la liste chronologique de tous ses ou-
vrages.
* FAVART D'HERBIGNY (Nicolas-
Remi), général de division dans le corps
royal du génie, né à Reims en 1736 et
mort à Paris en 1800, entra au service
dans l'arme du génie, se distingua parti-
culièrement à la défense de Belle-Ile
contre les Anglais, et eut la plus grande
part à l'exécution des ouvrages exté-
rieurs, qui arrêtèrent l'ennemi plus long-
temps que la place même. Il voulut être
de toutes les sorties , fut grièvement
blessé , et sortit par la brèche , ainsi
que toute la garnison, avec du canon et
tous les honneurs de la guerre. 11 ser-
vit ensuite plusieurs années à la Marti-
nique. De retour en France, il fut char-
gé de la construction du fort de Chà-
teauneuf, et de la petite expédition de
Genève en 1782. Commandant la place
FAV
de Neuf-Brisach en 1792, il eut le bon-
heur de calmer une insurrection afifreuse
qui éclata dans les troupes campées sur
les glacis, et sauva la vie à plusieurs per-
sonnes en exposant la sienne. Chargé en-
suite de mettre en défense toutes les
places de l'Alsace , il remplit cet ordre
avec autant de promptitude que d'intelli-
gence. Pendant la révolution, il se mon-
tra modéré dans ses priiicipes et ses ac-
tions. On lui doit des Mémoires précieux
sur la défense des côtes et sur les recon-
naissances militaires. C'est par erreur
qu'on lui a attribué un dictionnaire d'his-
toire naturelle qui contient les testacées,
Paris, 1755, 3 vol. petit in-8 : cet ouvrage
est de son frère, Christophe-Elisabeth
Favart d'Herbigny , chanoine de Reims,
mort en 1793.
* FAVART DE LANGLADE (Guil-
laume-Jean , baron ) , né à St. -Florent ,
département du Puy-de-Dôme , le 20
avril 17C2, fut reçu en 17 85 avocat au
parlement de Paris. En 1792, il fut en-
voyé près le tribunal d'Issoire , en qua-
lité de commissaire national , place qu'il
remplit avec beaucoup de sagesse pen-
dant nos troubles révolutionnaires. En
1795, il fut élu membre du conseil des
Cinq-cents: réélu en 1798, il devint
tribun après la révolution du 1 8 brumaire
et fut élevé à la dignité de président du
tribunat. Favart prit peu de part aux
discussions politiques de ces deux assem-
blées ; mais il s'occupa beaucoup des
travaux de législation , et fit différens
rapports très importans sur le notariat ,
sur les successions , sur le divorce , sur
les enfans naturels, etc. En 1804, il
vota pour la création de l'empire et tira
ses motifs de la nécessité d'une monar-
chie dans un pays comme la France.
Après la bataille d'Austerlitz , il fut de
la députation envoyée par le tribunat
pour complimenter Ruonaparte, et à son
retour il proposa de frapper une médaille
eu l'honneur du guerrier heureux que la
fortune poursuivait alors de ses faveurs.
Le tribunat ayant été supprimé , Favart
entra au Corps législatif , oii il fut pres-
que aussitôt président de la section de
l'intérieur, fut nommé en 1 809 conseiller
FAV
k la cour de cassation , et en 1813 reçut
le litre de maître des requêtes au conseil
d'état. Envoyé dans l'Arriège pour une
mission extraordinaire, il lit révoquer
une sentence de déportation prononcée
contre deux curés , accusés à la sollicita-
tion d'un prêtre marié. Sous la première
restauration, il conserva toutes ses pla-
ces. Au retour de Buonaparte , il resta
à la cour de cassation et ne fit plus par-
tie du conseil d'état. Le département du
Puy-de-Dôme le nomma membre de la
chambre des représentans; mais, comme
il ne prit aucune part aux discussions de
cette assemblée , le fjouvernement lui
rendit son emploi de maître des requêtes
après le second retour du roi. Nommé
président du collège électoral de la Co-
rèze , il fut député par le département
du Puy-de-Dôme à la chambre de 1815,
qui a été appelée chambre introuvable ,
par les uns ironiquement , et par les au-
tres pour s'en faire honneur : Favart y
fut de la minorité. Réélu en 1810, il
vota constamment avec le ministère. Il
fut nommé conseiller-d'état en service
ordinaire, par ordonnance du 25 janvier
1817 , et présida plus tard une des sec-
tions de la cour de cassation. Ce magis-
trat vertueux est mort le 14 novembre
1831, dans les sentimens les plus religieux,
et après avoir reçu les consolations et les
sacremens de l'Eglise. C'était un homme
rempli de qualités aimables et de grandes
connaissances en droit : l'un de ses plus
beaux titres de gloire est à^ avoir travaillé
à la rédaction des Codes. Parmi les ou-
vrage qu'il laisse , on remarque 1 ° Con-
férences du Code civil avec la discussion
particulière du conseil-d'état et du tri-
bunal, avant la rédaction définitive du
chaque projet de loi, 1805, 8 vol.
in-12 ; 2° Répertoire de la législation du
notariat, 1807, un vol. in-4 ; 3" Manuel
pour Vouverture et le partage des suc-
cessions, avec l'analyse des principes
sur les donations entre vifs , les tcsta-
mens et les contrats de mariage , 1811,
in-8 ; 4° Traité des privilèges et des
hypothèques , 1812 , in-8. Ces ouvrages
sont très estimés ; ils se trouvent dans
la bibliothèque de tous les gens de loi.
FAV
23^
et l'opinion de leur auteur fait autorité
en matière de jurisprudence.
*FAVIER (N...), célèbre publiciste ,
né à Toulouse, au commencement du
18*' siècle, d'une famille distinguée, suc-
céda à son père dans l'emploi de secré-
taire-général des Etats de Languedoc.
Après avoir dissipé sa fortune, il vendit
cette charge et devint secrétaire de M de
la Chétardie , ambassadeur à la cour de
Turin. Dès lors il s'adonna entièrement à
la politique, et surtout à la diplomatie.
M. d'Argenson , qui avait eu occasion de
connaître sestalens, l'employa à la ré-
daction de divers mémoires de la plus
haute importance. Favier rédigea , d'a-
près ses instructions, un mémoire intitulé
Ré flexions contre le traité de 1756, entre
la France et l'Autriche. Ce mémoire , un
des meilleurs qui aient paru sur la diplo-
matie de ce temps-là, lui attira beaucoup
d'ennemis. Il fut cependant chargé de
diftérentes missions secrètes en Espagne
et en Russie, sous le ministère de M. de
Choiseul; mais ayant composé pour le
comte de Broglie , chargé par Louis XV
de suivre une correspondance secrète
avec les ambassadeurs de France auprès
de différentes cours, plusieurs //lemotrey
dirigés contre le système et les instruc-
tions ostensibles du ministère, il fut obli-
gé de s'expatrier. Il se rendit en Angle-
terre et en Hollande, oîi il vécut dans la
société des hommes les plus distingués
par leur esprit et par leur rang. Poursuivi
par la haine des puissances contre les-
quelles il avait écrit, il fut enlevé à Ham-
bourg, conduit à Paris, comme impliqué
dans une conspiration fabuleuse, avec le
baron de Bon , Ségur et Dumouriez , et
renfermé à la Bastille, oîi il resta plusieurs
années, c'est-à-dire jusqu'à l'avénemcnt
de Louis X"VI. Le comte de Broglie était
parvenu à le faire mettre en liberté ; mais
il ne put lui obtenir la rentrée dans ses
emplois , dont son goût extrême pour la
dépense lui faisait un impérieux besoin.
Il se mit alors à composer des mémoires
sur les affaires du temps , et dissipait le
fruit de son travail aussitôt qu'il l'avait
reçu. Il vécut ainsi une partie de sa vie , •
dans une perpétuelle alternative de rai-
236 FAV
sère, d'aisance et de privations, d'études
et de dissipation. Le comte de Vergennes
qui avait apprécié son mérite, lui lit don-
ner une somme de 40,000 fr., pour payer
ses dettes, et une pension de 6,000 francs.
Sur la An de ses jours, il mena une vie
moins dissolue, ne conservant de ses an-
ciens goûts que celui de la table. Il mou-
rut à Paris le 2 avril 1784. M. de Ségur a
recueilli une partie de ses œuvres politi-
ques dans l'ouvrage intitulé Politique de
tous les cabinets de t Europe , pendant
les règnes de Louis XJ^et de Louis XV I^
1793, 2 vol. in-8, et 1802, 3 vol., avec
beaucoup de notes et observations de l'é-
diteur. Les autres ouvrages de Favicy, pu^
bliés la plupart sans nom d'auteur, sont
\° Le Spectateur littéraire sur quelques
ouvrages nouveaux, Paris, 1750, in-l2.
2° Essai historique et politique sur le
gouvernement présent de la Hollande,
Londres, 1748, 2 vol. in-12. Z'' Le poète
réformé, ou Apologie pour la S émiramis
de Voltaire, Amsterdam, 1748, in-8.
h° Mémoires secrets de Milord Boling-
broke , traduits de l'anglais, avec des
notes historiques , 1754, 3 vol. in-8.
5" Doutes et questions sur le traité de
Versailles, entre le roi de France et V im-
pératrice , reine de Hongrie , 1778 et
1791, in-8. 6° Ljcttres sur la Hollande y
1780, 2 vol. in-12. Il a travaillé avec
Fréron à la rédaction du Journal étran-
ger.
FAVIER DU BOULAY (Henri),
prieurde Sainte-Croix de Provins, mort en
1753, à 85 ans, avait du goût et de la
littérature. Nous lui devons la seule bonne
traduction que nous eussions de Justin
avant que l'abbé Paul eût publié la sienne.
Elles sont l'une et l'autre en 2 vol. in-12.
On a encore de lui d'autres ouvrages ,
mais moins connus que sa version. Il s'é-
tait adonné à la chaire , et avait prêché
avec quelque succès. Son oraison funèbre
de Louis XIV , parut à Metz en 1716 ,
in-fol.
FAVKES. Voyez Fawkes.
FAVORIN , sophiste célèbre sous
l'empereur Adrien, était d'Arles. Quel-
ques auteurs veulent qu'il ait été eiuiu-
que , et d'autres hermaphrodite. Il en-
FAV
seigna o-vec répntation à Athènes et en-
suite à Rome. Adrien lui parlait souvent
et lui témoignait de la confiance : mais
il s'en las.sa et le chassa de Rome avec les
autres philosophes ( voyez son article ),
On dit que Favorin s'étonnait de trois
choses : de ce qu'étant gaulois, il parlait
si bien grec ; de ce qu'étant eunuque , on
l'avait accusé d'adultère ; et de ce qu'il
vivait T étant ennemi de l'empereur.
FAVORIN (Varin, Varinus ou Gnarino),
né à Camérino , ville ducale dltalie , eu
1460, entra dans la congrégation de
Saint-Silvestre , ordre de Saint-Benoît , et
parvint par son mérite à rérêché de No-
céra. Ilestauteur d'un Zex/cony/'ec, qui
a été d'un grand usage autrefois. La meil-
leure édition de ce livre est celle de
Venise, 1712, chez Bartoli, in-folio. L'au-
teur mourut en 1537. On a encore de lui
des remarques sur la langue grecque ,
sous le titre de Thésaurus cornucopiœ ,
149G, Aide, in-folio.
* FAVRAS ( Thomas Mahi , marquis
de ), né à Blois en 1745, d'une famille
ancienne, dont les aïeux avaient rempli
les premières places de la magistrature
dans leur province , entra dans les mous-
quetaires en 1 755 , et fit avec distinction,
dans ce corps, la campagne de 1761. Il
passa ensuite dans le régiment de Bel-
sunce en qualité de capitaine, puis de-
vint premier lieutenant des Suisses de
Monsieur, grade qui lui donnait le rang
de colonel. En 1776, il se rendit à Vienne
pour faire reconnaître , devant le conseil
aulique , sa femme , seule fille unique et
légitime du prince d'Anhalt-Schawen-
bourg. Il commandait, en 1787, unelé-
gion en Hollande , lors de l'insurrection
contre le stathouder. De retour en France,
au commencement de la révolution, il
proposa plusieurs projets sur les finances
et sur la politique, qui le rendirent sus-
pect aux révolutionnaires. On sait que ,
dans l'état d'exaltation oîi se trouvaient
alors les esprits, il suffisait aux meneurs
de désigner une victime, pour que s»
perte fût certaine. Le marquis de Favras
l'ut accusé, dans le mois de décembre
1789, d'avoir proposé au gouvernement
de lever sur les frontières une armée pour
FAV
s'opposer à la nouvelle constitution, et
d'avoir voulu introduire la nuit dans Pa-
ris une troupe armée qui devait assassi-
ner Bailly et La Fayette, enlever le roi et
sa famille pour les conduire à Péronne.
Quoique cette accusation ne lût appuyée
d'aucune preuve , il fut arrêté par ordre
du comité des recherches de l'Assemblée
nationale , et traduit au Chàtelet , oii sa
condamnation fut demandée par le peu-
ple , avec des hurlemens cffrayans. Trois
témoins , Morel , Turcate et Marquié ap-
puyaient l'accusation de leurs témoigna-
ges : ils disaient avoir reçu de Favras la
communication de son projet: 12,000 sui-
ses et 12,000 autrichiens devaient se réu-
nir à Jlontargis et marcher sur Paris. On
refusa d'entendre les témoins à décharge.
Favras se défendit avec beaucoup de cou-
rage : il embarrassait ses juges par la
justesse de ses réponses. Le complot
dont on l'accusait était mal conçu , in-
cohérent dans les moyens de conduite,
impossible dans l'exécution ; il le prou-
va , détruisit victorieusement les preuves
qu'on lui opposait , et n'en fut pas moins
condamné à être pendu, le 18 janvier
17 90. « Votre vie, lui dit le lappor-
» leur en lui signifiant sa sentence ,
» est un sacrifice que vous devez à la
M tranquillité et à la liberté publiques. »
Il ne montra aucune crainte dans ce mo-
ment, dicta sans se troubler une décla-
ration très longue de son innocence ,
la revit et corrigea même les fautes d'or-
thographe faites par le greffier, avec un
soin scrupuleux. La place de Grève était
pleine d'un peuple frénétique qui de-
mandait sa mort à grands cris. Il la tra-
versa sans émotion , tout livré aux con-
solations de son confesseur. Arrivé au
lieu de l'exécution, il prononça d'une
voix ferme : Je meurs innocent, et il
donna lui-même le signal de l'exécution.
Cette protestation et sa fermeté frappè-
rent d'une espèce de stupeur ce peuple
tourmenté une minute auparavant de
convulsions fanatiques , et la multitude
se retira triste et pensive. On le regarda
comme une victime sacrifiée à la fureur
populaire, et l'on ne doute pas que son
unique crime fut d'avoir refusé de par-
FAV 237
tager le complot de ceux qui méditaient
la chute du trône. Prudhomme , un des
journalistes du temps, dont le témoi-
gnage ne peut être suspect, rendit compte
ainsi de sa défense : « Cet accusé parut
« devant ses juges avec tousles avantages
» que donne l'innocence, et qu'il sut
» faire valoir, parce qu'à un esprit or-
» né, il joignait la facilité de s'expiimer
» avec grâces : ses paroles avaient même
» un charme dont il serait difficile de
)) se défendre. Il avait de la douceur dans
» le caractère, de l'aménité dans le»
« manières, de la décence dans le main-
» tien ; il était d'une taille avantageuse,
» d'une physionomie noble et qui pré-
» venait en sa faveur.... Dans tout le
» cours de sa défense , il ne perdit ja-
» mais cette attitude qui convient à l'in-
» nocence , et il répondit à toutes les
» questions avec netteté et sans embar-
» ras. » L'avocat qui le défendit avec
chaleur, publia deux me'nioires dans le
cours de la procédure On a fait paraître,
peu de temps après sa mort, son testament
et sa correspondance avec son épouse,
qui produisirent une vive sensation ,
mais le crime était consommé. Favras a
laissé des me'moires relatifs aux troubles
de la Hollande , et un écrit sur les finan-
ces.
*FAVRAT (François-André de), gé-
néral au service de Prusse et gouverneur
de la place de Glotz , né vers 1730 et
mort en 1804 à l'âge de 74 ans, était
doué d'une force physique extraordinaire;
elle était si grande , dit-on , qu'un jour
il souleva un cheval avec son cavalier, et
que plus d'une fois on le vit prendre une
pièce de canon et la porter sur son épaule
avec autant de facilité qu'un fantassin
porte son fusil. Cette force étonnante ne
lui fut point donnée par la providence
au détriment de ses facultés intellec-
tuelles : il a laissé l'ouvrage suivant qui
est estimé et qui a pour titre : Me'moires
pour servir à l'histoire de la guerre de
la re'volution de Pologne depuis 1794
jusqu'en 1796, Berlin, 1709, in-8.
FAYRE , en latin Faber ( Antoine ) ,
né à Bourg en Bresse l'an 1 557 , fut suc-
cessivement juge-mage de Bresse, pré-
0.38 FAV
aident du Genevois poiu' M. le duc de
Nemours , premier président du sénat de
Chambéry, et gouverneur de Savoie et
de tous les pays eu deçà les monts ; il
mourut en 1G24. Ses ouvrages contien-
nent 10 vol in-fol. Jurisprudentia Pa-
pinianea, Lyon, 1658, 1 vol.; Decrro-
ribus interprctum juris , 2 vol.; Com-
ment, in Pandectas , seu de erroribus
pragmaticorum , 1659, 5 vol.; Codex
Fabrianiis , 1661, 1 vol.; Conjecturée
juris civilis , 1661 , 1 vol., regardé com-
me le meilleur de ses ouvrages, parce
que laissant là son imagination qui le
séduisait quelquefois , il s'appuie le plus
souvent de l'autorité de choses jugées.
Gn y joint H. Borgice investigationes
juris civilis in Conjecturas A F abri ,
Naples, 1678, 2 vol. in-fol. Dans les
quatrains de Pibrac , on en trouve de
Favre; il est aussi auteur d'une tragédie
intitulée les Gordians ou l'Ambition,
1596, in-8. Favre a éclairci plusieurs opi-
nions obscures ; mais il a poussé trop
loin les subtilités dans l'examen de cer-
taines questions de droit : il s'éloigne
quelquefois des principes. C'était un es-
prit vaste, propre aux affaires comme à
l'étude. Ce fut lui qui fut chargé de né-
gocier le mariage de M"* Christine de
France avec le prince de Piémont , "Vic-
tor Amédée. Le roi de France lui offrit
inutilement la première présidence du
parlement de Toulouse ; il voulut rester
au service du duc de Savoie. ( On trouve
l'éloge de Favre par Jacques Durandi
dans le tome 3 des Piemontesi illustri,
et un long article sur le même person-
nage dans les Vies des plus célèbres juris-
consultes par Taisand.)
FAVRE ( Claude ), seigneur de Vâu-
GELAs et baron de Péroges, naquit du
précédent, à Bourg en Bresse, et selon
quelques-uns, à Chambéry. Son père
était consommé dans l'étude de la juris-
prudence. Le fils ne fut point indigne
de lui : mais son esprit fut plus juste.
Le jeune Yaugeias vint à la cour de bonne
heure. Il fut gentilhomme ordinaire,
puis chambellan de Gaston , duc d'Or-
léans, qu'il suivit dans toutes ses re-
traites hors du royaume. Il mourut pau-
FAW
vre en 1650 , à 65 ans. On peut être sur-
pris que Vaugelas, estimé à la cour, réglé
dans sa dépense, et n'ayant rien négligé
pour sa fortune , soit presque mort dans
la misère ; mais les courses de Gaston ,
et d'autres accidens , avaient fort déran-
gé ses affaires. Louis XIII lui donna une
pension de 2,000 livres en 1619. Cette
pension qu'on ne lui payait plus, fut
rétablie par le cardinal de Richelieu,
afin de l'engager à travailler au diction-
naire de l'Académie. Lorsqu'il alla le re-
mercier de cette grâce , Richelieu lui dit
en riant : « Vous n'oublierez pas du moins
» dans le dictionnaire le mot àe pension.
» — Non, Monseigneur, répondit Vau-
» gelas ; et encore moins celui de recon-
3) naissance.... » Ce littérateur était un
des académiciens les plus aimables , com-
me des plus illustres ; il avait une figure
agréable , et l'esprit comme sa figure.
Vaugelas étudia toute sa vie la langue
française , et travailla à l'épurer. Sa tra-
duction de Quinte-Curce , imprimée en
1647 , in-4 , fut le fruit d'un travail de
30 années. Cette version, de laquelle
Balsac disait dans son stile emphatique:
« L'Alexandre de Quinte-Curce est invin-
)) cible, et celui de Vaugelas est inimi-
» table» passa pour le premier bon livre
écrit correctement en français. Malgré la
mobilité et l'inconsistance de la langue
française, il y a peu d'expressions qui
aient vieilli. Vaugelas ne rendit pas
moins de services par ses Remarques
sur la langue française, dont la pre-
mière édition est in-4 : ouvrage moins
nécessaire qu'autrefois, parc« que la plu-
part des doutes qu'il propose , ne sont
plus des doutes aujourd'hui ; mais ou-
vrage toujours utile, surtout si on le lit
avec les remarques dont Th. Corneille et
d'autres l'ont enrichi, en 3 vol. in-12.
FAWKES (François), poète anglais,
né dans le comté d'York en 1721 , bri-
gua les emplois de l'église anglicanspour
vivre , et s'adonna à la poésie par goût.
Il fut sous-ministre à Orpington en 1755,
ministre à Hayes en 17 74 , et mourut le
26 août 1777, après avoir publié dans
la langue de son pays 1° Traduction
d'Anacréony 1769, in-12. 2» de
I
FAY
Théocrite, 1767, in-S. 3" à! Apollo-
nius de Rhodes, 1780. 4° Le Recueil de
ses poésies a paru en 1761, in-8 .
FAY (CUarles-Jérônic de Cisternai
du) , capitaine aux gardes , né à Paris en
1 662 , eut une jambe emportée d'un coup
de canon au bombardement de Bruxelles
en 1095. Il n'était alors que lieutenant;
il obtint une compagnie ; mais il fut obli-
gé d'y renoncer , par l'impossibilité de
monter à cheval. Heureusement il aimait
les lettres, et elles furent sa consolation.
Il s'adonna à la recherche des livres rares
en tous genres , des belles éditions de
tous les pays , des manuscrits qui avaient
quelque mérite. Il se forma une biblio-
thèque bien assortie, de 25 mille écus.
Le catalogue en fut dressé en 1725, in-8,
par le libraire Martin. Le possesseur de
ce trésor littéraire était mort deux ans
auparavant, en 17 23.
FAY (Charles-François de Cisternai
du ) , fils du précédent , né à Paris en
1G98, servit quelque temps comme son
père ; mais ayant quitté l'état militaire ,
il se consacra entièrement à la chimie et
à la botanique. Reçu membre de l'aca-
démie des Sciences, il eut l'intendance
du jardin royal, entièrement négligé
avant lui , et qu'il rendit en très peu de
temps un des plus beaux de l'Europe. Il
était né à Paris en 1698 , et il mourut
en 17 39. Cet académicien avait des
mœurs douces, une gaîté fort égale , une
grande envie d'obliger, et ces qualités
n'étaient mêlées de rien qui déplut, d'au-
cun air de vanité, d'aucun étalage de sa-
voir, d'aucune malignité, ni déclarée,
ni enveloppée. Il fit des recherches nou-
velles sur le phosphore du baromètre,
sur le sel de la chaux, inconnu jusqu'à
lui aux chimistes, sur l'aimant, et enfin
sur l'électricité. Ses travaux en ce genre
sont consignés dans les Mémoires de l'a-
cadémie des Sciences, où l'on trouve
aussi son Eloge par Fontenelle.
FAY (Jean-Gaspard du), jésuite, mort
vers le milieu du siècle dernier, prêcha
avec un succès peu commun. Ses Sermons
sont en 9 vol. , qui parurent successive-
ment depuis 1738 jusqu'en 1743. Le
talent de l'action leur donnait une
FAY 239
beauté et une force , qu'ils perdirent
presque entièrement après l'impression.
FAYDIT ouFaidit ( Anselme ou Gan-
celme), poète provençal , mort vers l'an
1220, se mit à représenter des comédies,
qu'il composait lui-même. Elles furent
applaudies , et il devint riche en peu de
temps; mais son penchant à la vanité,
à la débauche et à la dépense, le rédui-
sit bientôt à la dernière misère. Richard
Cœur-de-Lion , roi d'Angleterre, l'en tira
par ses libéralités. Ce prince, marié à
Bérengère de Barcelone, avait du goût
pour la poésie provençale, dont la lan-
gue approchait beaucoup alors de la ca-
talane. Après la mort de son protecteur,
Faydit revint à Aix , et s'y maria avec
une fille pleine d'esprit et de beauté ,
qui se chagrina de la vie déréglée de son
époux , et mourut peu après. Le poète se
retira chez le seigneur d'Agoult, où il fi-
nit ses jours. Il avait écrit 1° un poème
sur la mort du roi Richard , son bienfai-
teur. 2° Le palais d'Amour, poème,
dont le titre annonce assez l'esprit.
3"Plusieurs comédies, entre autres une in-
titulée VHeregia dels prestres , c'est-;i^
dire V Hérésie des préires; il y prône les
Vaudois et les Albigeois , dont la doctrine
et les mœurs n'étaient que trop assorties
à sa conduite.
FAYDIT (Pierre Valentin), né àRiom
en Auvergne , d'abord prêtre de l'Ora-
toire, sortit de cette congrégation en
1671, pour avoir publié un ouvrage car-
tésien , contre la défense de ses supé-
rieurs. Le cartésianisme a été presque
une hérésie dans bien des corps pendant
long-temps. Faydit, né avec un esprit
singulier et ardent , se fit bientôt con-
naître dans le monde. Dans le temps que
les différends du pape Innocent XI avec
la France étaient dans la plus grande cha-
leur , il prêcha , à St.-Jean-en-Grève de
Paris , un sermon contre ce pontife. Il se
réfuta lui-même dans un autre sermon
publié à Liège , auquel il ne manqua pas
de répliquer en faisantimprimer l'extrait
de son premier sermon , avec les preu-
ves bonnes ou mauvaises des faits qui
y sont avancés. Un Traité surlaTrinité,
où il établissait le trithéisme , préteu-
24o FAY
dont que la doctrine de ce mystère avait
ëté« altéréeparlathéologiescolastique; »
cet ouvrage impie a pour titre : Altc-
ration du dogme theblogique par la phi-
losophie d'Avistote, grosin-8 , 1706. Uq
théologien connu en parle en ces termes :
« Un éci'ivain asservi à la faction des Ar-
» nauld et des Quesnel , prétend que la
» scolastiquea altéré le dogme de la Tri-
unité qui, selon lui, consistait ancien-
» nement à professer trois natures en
» Dieu. Raisonner de la sorte, c'est affi-
» cherl'ignorance la plus grossière, parce
H qu'il est connu que les théologiens ont
M constamment défendu contre les ariens
» et les sophistes , la foi de Nicée, et la
» consubstantialité des personnes di-
» vines. C'est afficher l'hérésie , d'abord
» celle ces trithéites , et de plus celle
n des erreurs modernes , qui affirment
i> que la vraie foi a péri contre la pro-
)) messe de Jésus-Christ, et qu'elle ne
» s'est retrouvée que dans quelques têtes
» privilégiées des derniers siècles. C'est
M afficher l'athéisme, puisqu'en détruisant
i> l'unité de Dieu, on en détruit l'essence. «
L'erreur de Faydit a été renouvelée de-
puis par le docteur OEhmbs ( voyez Jean
PiuLoroNos , et le Journ, hist. et litt. \"
février 1 79 l,pag. 1C7). Cet ouvrage extra-
vagant et impie mérita à Faydit, en 1696,
un appartement à St. -Lazare à Paris : châ-
timent qui ne changea ni son esprit ni
caractère ; il eut ordre du roi de se reti-
rer dans sa patrie, où il mourut en 1709.
Outre les ouvrages déjà cités, on a de lui
I ° Des remarques sur P^irgile, sur Homè-
re et sur le stile poe'tique de V Ecriture
sainte, en 2 vol. in-12 : mélange bizarre
de pensées différentes sur des sujets sa-
crés et profanes , dans lequel l'auteur se
donne trop de liberté à son ordinaire.
2° La Télémacomanie , in-12, critique
méprisable du chef-d'œuvre de Fénélon ,
pleine de notes singulières , aussi con-
traires à la vérité qu'au bon goût. 11 faut
en excepter ses réflexions contre les ro-
mans; encore tombent-elles à faux, vu
Ja nature de celui-ci. Faydit avait atta-
qué Bossuet , avant de censurer Fénélon.
II avait fait cette épigrammecontrele dis-
cours de i'évêque de Meaux à rassemblée
FAY
du clergé de 1 082. ( Il faut savoir que Bos-
suet avait cité Balaam dans ce discours) :
Un aiidlletir un ppn cynique
Dit mut liiiut en bàilbnt d'i'nnui:
Le proplii'tc Babani e>t obscur aujourd'hui;
<,)u il (assp parler ca bourrique,
EUes'ejpliqucra plus clairement que lui.
11 fallait que la démangeaison de médire
en vers et en prose fût bien forte dans
l'abbé Faydit , pour attaquer aussi indé-
cemment deux prélats illustres , l'éternel
honneur du clergé de France. 3° Des
mémoires contre ceux de Tillemont, bro-
chure in-4, plus comique que sérieuse,
supprimée dans sa naissance, et qui n'eut
point de §uite. On y voit Faydit tel qu'il
était : un fou qui a quelque esprit et du
savoir, et qui prend la plume dans les
accès de sa folie. 4° Le Tombeau de San-
teuil, iu-12, en vers latins d'un carac-
tère assez singulier , et en prose française.
La prose est une traduction libre des
pièces latines. On a attribué mal à pro-
pos les Moines empruntés, 2 vol. in-12,
à cet auteur. Ils ne sont pas de lui, mais
de Haitze.
FAYE (Jacques), seigneur d'Espeis-
ses , né à Paris en 1 542, conseiller au par-
lement en 1567, devint maître des re-
quêtes de l'hôtel du duc d'Anjou, depuis
Henri III. Il suivit ce prince en Pologne;
et après la mort de Charles IX, il revint
en France , pour porter de la part de
son maître des lettres de régente à la
reine. Il retourna ensuite en Pologne ,
oîi il rendit des services signalés à Henri.
Ce prince l'en récompensa par les char-
ges de maître des requêtes, d'avocat-
général, et enfin de président à mortier
au parlement de Paris. Il mourut à Seuils
en 1590, à 46 ans, laissant des liaran-
gues éloquentes pour son temps.
FAYE ( Jean-Elie Lériget de la ) na-
quit à Vienne en Dauphiné l'an 1071. Il
prit le parti des armes , fut d'abord mous-
quetaire , ensuite capitaine aux gardes,
se trouva à la bataille de Ramillies, à
celle d'Oudenarde et dans plusieurs jour-
nées, et y signala sa valeur. Il avait tou-
jours eu du goût et du talent pour les
mathématiques. La paix l'ayant rendu à
ses premiers penchans, il s'appliqua par-
I
FAY
liculjèremenl à la mécanique, h la phy-
sique expérimentale. L'académie des
Sciences lui ouvrit ses portes eu ITIG ,
et le perdit en 17 18, à 47 ans. On trouve
dans la collection de cette compagnie
deux mc'moires de La Paye.
FAYE (Jean-François Lériget de la ) ,
frère puîné du précédent, d'abord capi-
taine d'infanterie, ensuite gentilhomme
ordinaire du roi, eut plus de goût pour
ïa littérature agréa'oleque pour les scien-
ces sérieuses qui avaient été le partage de
son aîné. Il obtint une place à l'académie
franraiseen 1730, et mourut l'année d'a-
près à 57 ans. On a de lui quelques poé-
sies, oîi l'on remarque un esprit délicat et
une imagination agréable. Sa pièce la
plus célèbre est son Ode apologétique de
la poésie, contre le système de la Motte-
Houdard en faveur de la prose.
* FAYE ( George de la ) , démonstra-
teur à l'académie royale de chirurgie à
Paris , sa patrie , mourut dans cette ville
le 1 1 août 17 81. On a de lui 1 ° Cours d'o-
pérations de chirurgie par Dionis, avec
des notes, 1782, 2 vol. in-S. 2" Princi-
pes de chirurgie, Paris, 1739, in- 12, sou-
vent réimprimés. La dernière édition
est de 1811, in-8 . Il a été traduit en alle-
mand , en italien , en espagnol et en sué-
dois.
FAYEL. Foyez Faïel.
FAYETTE ( Gilbert Motier de La ) ,
maréchal de France , se distingua à la
bataille de Baugé en Anjou, l'an 1421 ,
fut fait prisonnier à la journée de Ver-
neuil ; et après sa délivrance , contribua
beaucoup à chasser les Anglais du
royaume. Il mourut le 23 février 14C4.
* FAYETTE ( Louise Motier de La ), de
la raêmefamilleque le précédent, naquit
en 1G18. Orpheline dès le berceau, elle
fut élevée par sa tante la comtesse de
Bregy , qui la retira du couvent à l'âge
de 15 ans, et la plaça , lorsqu'elle sentit
sa fin approcher , en qualité de dame
d'honneur dans la maison de la reine Anne
d'Autriche. M''« de LaFayelte avait 1 7 ans.
Sa beauté, sa modestie, sa discrétion et
sa douceur , attirèrent l'attention de
Louis XIII ; sa conduite fut un modèle de
vertu. Cette pieuse demoiselle, sen-
V.
FAY 24t
sihle aux épanchemens du cœur de ce
motiarque, qui venait chercher dans
sa société des consolations contre les
chagrins que lui causait un ministre im-
périeux, sous le jougduquel il s'étaitplacé,
s'attacha à sa personne, parce qu'elle
s'intéressait à sa gloire , et qu'elle au-
rait voulu qu'il fût heureux dans sa
famille et au-dehors; mais elle ne tarda
pas à s'apercevoir que Louis tout en sen-
tant sa chaîne, la croyait nécessaire, et
que pour conserver sa faveur il fallait se
résoudre à porter cette chaîne avec lui.
Trop fière pour dépendre d'autre que du
roi, M"^ de La Fayette se détermina à
rompre un engagement qui commençait
à alarmer sa sagesse. Louis , ordinaire-
ment si réservé , lui avait fait la proposi-
tion délicate de lui donner à Versailles ,
château de plaisir alors , un appartement
oîi il irait la voir librement. Cette pro-
position lui dessilla les yeux; dès lors elle
résolut de quitter le monde relie alla se
renfermer cheziesreligieusesde la Visita-
tion, où elle prit le voile en 1G37 , avec
le consentement du roi, qui, honteux
lui-même de son transport, jugea qu'il n'y
avait pas de meilleur moyen de se mettre
en garde contre sa faiblesse, et M"* de
La Fayette le détermina à relourner à son
épousé. Le fruit de cette réconciliation ,
après 22 ans de stérilité , fut un fils , et ce
fiis fut Louis XIV. Anne d'Autriche, re-
connaissante des bons offices de M"^ de
La Fayette , fit tous ses ciTorls pour l'en-
gager à revenir à la cour ; mais ils furent
inutiles. Elle resta dans le cloître,
montrant à l'univers l'exemple d'une fille
qui, dans l'âge des passions, s'immole
généreusement elle-même jiour ne pas
entraîner dans sa chute un prince qu'elle
aimait. Elle mourut en 16G5 danslecou-
vent de Chaillot qu'elle avait fondé. On
trouve des détails sur sa vie dans les
Me'moires de M""" de Motteville , 6 vol.
in 12. M™* de Genlis a publié un roman
historique intitulé : iW "* de La Fayette,
Paris, 1812,2 vol. Jn-12 ; mais ceroman,
qui est autant l'histoire d'autres per-
sonnes qui ont vécu sous Louis XIII que
celle de M"* de La Fayette , ne peut ,
comme tous les ouvrages de ce genre,
i6
a4a FAT
que donner une fausse idée de cette
vertueuse demoiselle. M""* de Genlis
avoue elle-même , que les mémoires du
temps ne lui ont g-uère fourni que des
caractères, et qu'il lui a fallu inventer pres-
que toutes les scènes et tous les détails.
FAYETTE (Marie-Madeleine Pioche nt:
lA Vergse, comtesse de La ) , était fille
d'Aymar de La Vergne, maréchal de camp,
gouverneur du Havre-de - Grâce. Elle
épousa , en 1 C55 , François , comte de La
Fayette. Elle se distingua encore plus par
son esprit que par sa naissance. Tous les
beaux esprits de son temps la recherchè-
rent. Parmi les gens de lettres , Ménage ,
La Fontaine, Ségrais, étaient ceux qu'elle
voyait le plus souvent. Elle mourut en
1693. Les principaux de ses écrits sont :
1* Zaïde, roman qui eut la plus grande
vogue. 2° Ln princesse de Clèvcs, 2 vol.
in-12 , autre roman , attaqué avec beau-
coup d'esprit par Valincourt, qui en fit
la critique, n'ayant pas encore 22 ans,
M™" de La Fayette avait mis sous le nom
de Se'grais ces deux productions. Ce bel
esprit avait contribué à la disposition de
l'édifice, et la dame l'avait orné. 3° Z«
Princesse de Monfpcnsiej\ in-1 2. 4" Des
Me'moires de la cour de France pour les
années 1688 et 1689, in-12. « On luire-
» proche d'avoir fait payer à M™* de
» Maintenon , dit un auteur, la gloire d'a-
i> voir été dans sa jeunesse plus aimable
» qu'elle. » 6° Histoire d'Henriette
d' Angleterre , in-1 2 : on y trouve peu
de particularités intéressantes. 6" Divers
portraits de quelques personnes de la
cour. Tous ces ouvrages sont encore assez
recherchés. M™* de Sévigné fait de ses
qualités le portrait le plus flatteur. Mais
La Beaumelle l'a peint moins avantageuse-
ment, tf Elle n'avait pas, dit-il , ce liant
» qui rend le commerce aimable et so-
» lide ; on trouvait autant d'agrémens
« dans ses écrits , qu'elle en avait peu
» dans ses propos. Elle était trop impa-
i> liente ;. tantôt caressante, tantôt impé-
i) rieuse , exigeant des égards infinis , et
» y répondant souvent par des hauteurs. »
Qualités qui n'ont rien d'étonnant dans
une femme qui, délivrée des occupations
domestiques et paisibles de son état , est
FEB
transportée dans les sociétés des beaux-
esprits , et tourmentée des prétentions
du savoir, à qui le nom de mère et d'é-
pouse , de femme vertueuse , douce et
modeste, est moins cher que celui d'au-
teur. « L'iiomnie-fcmme, dit l'auteur de
« V Influence de la philosophie sur l'es-
» prit et le cœur, est aussi ridicule que la
w femme-homme : ce sont de monstrueux
» assemblages que notre siècle, fertile
» en choses rares et curieuses , réalise à
» chaque instant. Depuis qu'il y a des
» petits-maîtres, il y a des femmes sa-
» vantes ; depuis que les hommes ont
» porté des colifichets , et ont affecté une
» toiletté féminine , les femmes en re-
"vanche, ont affecté la science des
» hommes , et se sont enfoncées dans
» les études abstraites. Lequel vous donne
» meilleure opinion d'une femme ,
» en entrant dans sa chambre, de la
« voir occupée à des travaux de son
» sexe , des soins de son ménage , envi'-
» ronnée des bardes de ses cnfans , ou
« de la trouver écrivant des vers sur sa
» toilette , entourée de brochures de
» toutes les sortes, et de petits billets de
» toutes les couleurs ? Toute fille lettrée
» restera fille toute sa vie , quand il n'y
» aura que des hommes sensés sur la
«terre. » Ployez GÉorniN , Grafigny ,
TeiNcin , SuzÊ. (Les oeuvres de M"'* de La
Fayette ont été recueillies avec celles de
M™" de Tencin et de Fontaines , Paris,
1804 , 5 vol. in-8 , avec une Notice par
M. Auger).
FAYPOULT. roijez Faipoult.
FEBRONITJS. Ployez Hontheim.
FEBVRE DE SAINT-MARC. Foyez
Saint-Marc (Charles Hugues de ).
FEBVRE ou Lefeburk ( Jacques , et
selon quelques-uns , Jean le ) , jésuite ,
né à Glajon , village du Hainaut, en-
seigna la philosophie à Douai , fut prési-
dent du séminaire archiépiscopal de Cam-
brai , établi à Beuvrage , près de Valen-
ciennes. Il s'y appliqua avec une ardeur
et une assiduité infatigable , à former les
élèves qui lui étaient confiés , à la sub-
limité des vertus qui illustrent le sacer-
doce , et font les pasteurs chrétiens.
Dans sa dernière maladie, il se fit trans-
FED
portera Valenciennes, où il mourut le 29
^vril 1755. II est connu par deux ouvrages
où il combat les incrédules avec beau-
coup de succès ; le l <"" est intitule : Bmjle
en petit , ou ^nntomie de ses ouvrages.
Douai, 17 37,in-12. Il reparut à Paris en
1747 avec une suite, sous ce titre :
Examen critique des ouvrages de Baijle.
H y démontre que les écrits de Bayle con-
tiennent de quoi former le plus mon-
strueux assemblage d'obscénités , d'hé-
résies et d'athéisme. Il met au grand jour
- les contradictions, les paralogismes , les
calomnies, les falsifications et les impos-
tures de ce fameux sceptique. Le second
■ est La seule religion véritable dcniontre'e
contre les athées , déistes , etc., Paris,
1744, in-8, ouvrage solide et métho-
dique.
*FEBVRE (Philippe le}, président
honoraire du bureau des finances et de
la généralité de Rouen , mort à Cliambéry
vers 17 80, a laissé plusieurs ouvrages
peu importans. Le seul qui mérite d'être
cité est son Abrégé de la vie d'Auguste,
in-1 2, où les faits principaux sont exposés
avec une clarté élégante.
• FEDELE (Cass'andra) , née en J4G5,
à Venise, d'une famille noble originaire
de Milan , fut l'admiration de son siècle
par l'étendue et la variété de ses con-
naissances. Elle cultiva , avec succès,
les lettres grecques et latines, la philo-
sophie , l'éloquence , l'histoire et la
théologie ; la poésie et la musique lui
servaient de délassement. Elle se lia avec
le père de la Mirandole, et correspondit
aussi avec plusieurs souverains , tels que
pape Léon X, le roi de France Louis
XII , le roi d'Aragon Ferdinand , et
Isabelle de Caslille. Cette princesse voulut
l'attirer à sa cour , et le poète latin Au-
gurello lui adressa une Ode , pour l'en-
gager à ce voyage ; mais la république
de Venise ne voulut pas se laisser ravir un
de ses plus beaux orncmens. Cassandra
avaitété mariée à un médecin de Vicence,
et elle le suivit à Candie , où la république
l'envoya exercer son art. Après la mort
de son époux Jean-Marie Mapelli. médecin
de Vicence , elle fut nommée, dans un
âge très avancé , supérieure des hospita-
FEI 245
Hères de Saint-Dominique , à Venise. Elle
gouverna cette maison pendant 12 ans, et
mourut le 25 mars 1 558 , âgée de 93 ans.
Thomassini a recueilli les Ze//7*e^ et dis-
cours de Cassandra , et a mis en tête la
Vie de cette femme célèbre, Paris, 1C3G ,
in-8.
FEDOR. P'oi/ez Foedor.
FEGELI (François-Xavier), né à Rote
dans le canton de Fribourg en 1C90, se
fit jésuite en 1710, enseigna la théologie
pendant 12 ans, et mourut à Fribourg
en 1 7 48. On a de lui : 1° De munere con-
fessarii. 2" De munere pœnilentis,
FEIJGO (Benoît-Jérôme) , bénédictin
espagnol, mort en 17 95, a contribué
autant par ses pièces critiques à éclairer
ses compatriotes sur leurs vices et leurs
défauts, que Michel Cervantes à corriger
ceux de son siècle par son roman de Don
Quichotte. On a de lui le Théâtre critique
en 17 vol in-4, y compris une table des
matières. Une partie de ce recueil a été
traduite en français par M. d'Hermilly ,
4 vol. in-1 2. Les ouvrages de Feijoo ont
été plusieurs fois réimprimés. La meil-
leure édition est celle publiée par les
soins de Campomanès, Madrid, 1780, 33
vol. in-8.
* FEITAMA. ( Sibrand ) , poète hol-
landais, né à Amsterdam en 1C84 , mou-
rut en 17 58. H débuta par la tragédie de
Fabricius, et par un drame allégorique
intitulé : Le triomphe de la poésie et de
la peinture. Il renonça à la composition,
pour se livrer uniquement à la traduction
des ouvrages français qu'il crut dignes
d'être connus en Hollande ; il traduisit
liomulus , les Machabées , Brut us ,
Ahire , Pyrrhus , etc. Ce que l'on
estime le plus de lui, c'est sa traduction
en vers hollandais du Télémaque de
Fénélon, et celle delà Henriade de Vol-
taire, aussi en vers. Son Théâtre a été
publié en 1735,2 vol. in-4.
FEITHIUS ou Feith (Everard),
d'Elboug dans la Gueldre,se rendit très-
habile au IG* siècle, dans les langues
grecque et hébraïque. Les troubles des
Pays-Bas l'obligèrent de se retirer en
France , où il s'acquit l'estime de Casau-
bon , de Du Puy , et du président de
2^4 FEI
Tlioti. Il y enseigna quelque temps la lan-
gue grecque. Mais se promenant un jour
à La Rochelle avec son valet, il fut prié
d'entrer dans ha maison d'un bourgeois ;
' et depuis ce moment on ne put savoir
ce qu'il «était devenu, quelque perquisi-
tion que les magistrats en fissent. On à
de lui deux ouvrages curieux et savans ,
in-1 2, intitulés: Antiquitntes Homericce,
et Antiquitates Atlienienses , en huit li-
vres, Strasbourg, 1743. Ils sont écrits en
bon latin ; il y traite de la religion des
Grecs, de leur marine et de leurs usages.
Tout cela est prouvé par des passages de
toutes sortes d'auteurs.
' FEITll (Rhynvis), célèbre poète
hollandais, membre de l'Institut des Pays-
Bas, de plusieurs sociétés savantes, del'or-
dre du Lion-Belgique, naquitàZwolledans
la province d'Over-Yssel, le 7 février 1 7 5.3.
Dès l'âge le plus tendre il montra d'heu-
reuses dispositions pour la poésie ; en
même temps qu'il commençait à cultiver
cet art , il s'adonnait à l'étude du droit ,
et fut reçu docteur dans celte faculté en
1770 à l'université de Leyde- De retour
à Zwolle, il en fut nommé bourguemestre;
peu de temps après il devint receveur du
cojlégc de l'Amirauté dans la même ville.
Pendant les momens de loisir que lui
laissaient ses fonctions, il s'occupait tou-
jours de la poésie. Il avait aussi du goût
pour toutes les parties de la littérature et
composa plusieurs ouvrages en prose; ses
diverses productions annoncent à la fois
un bon poète et un élégant prosateur;
comme elles sont très nombreuses , nous
nous bornerons à citer les suivantes :
1 ** Le Bonheur de la paix , 1779, poème
qui a remporté le premier prix d'un con-
cours ouvert par la société poétique de
Leyde; 2° Eloge de V amiral Ruytcr;
ce sujet était encore celui d'un prix pro-
posé par la même société. Cette pièce
obtint le premier prix , elle était en vers ;
l'auteur avait envoyé au concours un
tloge en prose qui obtitit le deuxième
prix. 3° Poème sur la Providence ; 4"»
Poème sur F humanité ; 5° Poème de
Charles V à son fils Philippe //, en lui
remettant te gouvernement des Pays-
Bas ; 6" Traité sur la foi'ce de la preuve
FEL
de la vérité, de la divinité de la doc-
trine de l'évangile, déduite des miracles
opérés par J. C. et par ses apôtre s ; 7" La
vertu et les mœurs peuvent-elles chez
des peuples oit la civilisation a fait de
grands progrès , trouver un appui suffi-
sant et une garantie durable dans les
meilleures constitutions humaines , de
législation , d'économie politique , et i.é-
ducation, sans avoir besoin de t influence
des idées religieuses? et qiC est-ce que
V expérience nous apprend a cet égard ?
L'auteur, après la discussion la plus lu-
mineuse , répond négativement à cette
question , et cet ouvrage ainsi que ceux
qui le précèdent , obtint le premier prix
comme tous les autres au concours où
ils furent envoyés; 8" Odes et poésies,
5 vol. ; elles ont mérité à leur auteur la ré-
putation de premier poète de la Hoiiande ;
U" Lettres sur différens sujets de litté-
rature , G vol . in-8 ; 1 0° Ferdinand et
Constantin , roman sentimental qui eut
un grand succès en Hollande, 1786, 2
vol. in-8 ; 1 1° Lettres en vers à Sophie,
1809. Feilh se propose de prouver dans
ces lettres que la philosophie de Kant
n'est pas compatible avec l'évangile.
Elles ont été sévèrement critiquées par le
professeur Kinker , grand partisan de
Kant, dans un écrit intitulé Lettres de
Sophie à Feilh ; 1 2° Odes et poésies di-
verses , 1809; 13" le Tombeau, poème
didactique, 1782. Ce poème a été traduit
en français par A. Çlavareau , Bruxelles ,
1827 , in-1 S. Quatre tragédies. Feith est
mort à la fin de 1814, à l'âge de 7 1 ans.
Il appartenait à une famille patricienne
qui comptait parmi ses membres des ma-
gistrats et des écrivains distingués.
FÉLIBIEN (André), sieur des .\ vaux
et de Javerci , né à Chartres en 1619,
suivit à Rome l'ambassadeur de France
en qualité de secrétaire. Il eut occasion
de .voir Le Poussin dans celte patrie des
beaux-arts. Il lia amitié avec lui , et per-
fectionna sous cet artiste son goût pour
la peinture, la sculpture eU'archilecture.
Foucquet , et Colbert après lui , em-
ployèrent ses talens. Il eut la place d'his-
toriographe des bâtimens du roi en 1 666,
et celle de garde des antiques en 1673.
\
I
FEL
Deux ans auparavant il avait été nommé
secrélaire de l'académie d'architecture.
Sa probité , aussi connue que son savoir,
le fit estimer et aimer de ce qu'il y avait
alors de plus habiles et de plus bonnêles
gens eu France. Les uns et les autres le
pleurèrent , lorsqu'il mourut en 1G95, à
"G ans. Celait un homme grave et sérieux.
Sa conversation ne laissait pas d'être fort
agréable , et même enjouée , suivant les
occasions. Il avait l'esprit juste et le
cœur droit , et était plutôt ami de la
vertu qu'esclave de la fortune. Il était
membre de l'académie des Belles-lettres.
Il lui a fait honneur par plusieurs ou-
vrages éh'gans, profonds, et qui res-
pirent le goût. Voltaire lui a reproché
avec raison de dire trop peu de chose en
trop de paroles , et de manquer de
méthode. Ces défauts se font sentir dans
tous ses livres. Les principaux sont :
i° Entretiens sur les vies et les ouvrages
des plus excellens peintres , 2 vol. in-4 ,
Paris, 1G85 , réimprimés à Amsterdam en
6 vol. in-12 ; à Trévoux en 6 , et tradiiits
en anglais. 2" Traite' de Forigine de la
peinture , in-4. 3" Les Principes de l'ar-
cliitecture , peinture et sculpture , Paris ,
lG90,in-4. On voit que Félibien avait
médité sur tous ces arts; cet ouvrage,
rempli de réflexions profondes et judi-
cieuses sur la théorie et la pratique, aida
les artistes et éclaira les savans. 4" Les
Cnnfc'renccs de Vacade'mie royale de
peinture, in-4. 6° Les quatre éléniens
n peints par Le Brun , et mis en tapis-
- séries, décrits par Fe'libien, in-4.
T Description de la Trappe, in-12.
6° Traduction du Château de Came, de
sainte Thérèse, de la Fie du pape Pic V,
de la Disgrâce du comte d'Olivarès,
1C58 , in-8. 8" Le Tableau de la famille
de Darius, décrit par le même, in-4.
9° liCS divertissemens de Versailles ,
donnés par le roi à toute sa cour, in- 1 2.
\Q° Description sommaire de Versailles,
avec un plan gravé par Sébastien Le
Clerc , in-12. (Il" Fie du père Louis de
Grenade ; 1 2° Paraphrase des lamenta-
tions de Jérémie , 1G46. Il fut l'un des
huit savans qui formèrent l'académie des
Inscriptions, fondée par Colberl en 16G3.
FEL 245
Ce fut encore lui qui composa toutes les
Inscriptions placées dans la cour del'Hôtel
de ville de Paris , depuis IGCO jusqu'en
1C8G. ) Il laissa trois fils : Nicolas-André;
mort doyen de l'église de Bourges en
1711 , et les deux suivans.
FÉLIBIEN ( Jean-François ) , fils du
précédent, mort le 23 juin 17 33 , à l'âge
de 7 6 ans, succéda à son père dans toutes
ses places, et eut comme lui le goût des
beaux-arts. On lui doit 1° Becueil histo-
rique de la vie et des ouvrages des plus
célèbres architectes ,¥av\s , 1G87 , in-4 :
ouvrage réimprimé plusieurs fois à Paris
et dans les pays étrangers, avec les jfe'/i-
tretiens de son père sur les peintres ^
dont il est le pendant. 2" La Descrip-
tion de Fersnilles ancienne et nouvelle ,
in-12 , avec la description et l'explication
des statues, tableaux , et autres ornemcns
de celle maison royale. 3" /,a Descrip-
tion de V église des Invalides, 170G , in-
folio , réimprirtiée en 17 56.
FÉLIBIEN ( Dom Michel ) , frère du
précédent, bénédictin de la congréga-
tion de St.-Maur, né à Chartres le 1 +
septembre 16G6, soutint avec honneur
la réputation que son père et son frère
s'étaient acquise. Les échevins de Paris ,
informés de son mérite, le choisirent
pour écrire l'histoire de celle ville ; il l'a-
vait beaucoup avancée , lorsqu'il mourut
en 1710. Elle fut continuée et publiée
par dom Lobineau, en 6 vol. in-fol. , à
Paris, 1 726. On a encore de dom Félibien,
V Histoire de Vabbaye de S t. -Denis, 1 vol.
in-foiio , ornée de figures , pleine d'é-
rudition , de recherches , et enrichie de
savantes dissertations. Elle parut à Paris
en 1700. LePère Félibien était un homme
d'un jugement sûr et d'un esprit facile;
mais sa faible santé fut un grand obsta-
cle à SCS études.
FÉLIBIEN (Jacques) , frère d'André»
chanoine et archidiacre de Chartres , oit
il était né en 1G3C, a composé 1° des
Instructions morales , en forme de caté-
chisme, sur les Commandemens de Dieu
et sur le Symbole , tirées de l'Ecriture
sainte. 2° Pcntateuchus historiens, Paris,
1704 , in-4. Ce livre a' été supprimé par
un anêt du conseil ; dans plusieurs exem-
246 FËL
plaires, les cartons retranchés se trouvent
à Ja fin du volume. Il mourut le 25 no-
vembre 17 IG, à 82 ans.
• FÉLICE ( Fortuné-Barlhélemi de ) ,
né à Rome le 24 août 1723, d'une fa-
mille orif^inairement napolitaine , fit de
bonnes éludes chez les jésuites, et pro-
fessa avec beaucoup de succès à Rome et
à Naples. Ayant enlevé dans un couvent
une femme de condition , il fut obliîjé de
fuir, et il se relira , après avoir parcouru
différens pays , à Berne , oîx il embrassa
la religion protestante, et se lia intime-
ment avec le célèbre Haller ctTscUarner.
Il vint ensuite établir une imprimerie à
Yverdun. Il publia avec ce dernier YEs-
trnto dclla letteratura curopea , journal
qu'il continua pendant 9 ans, et qui se
fait remarquer par une saine critique et
une érudition variée. Il a donné en outre
un très grand nombre d'ouvrages , les
principaux sont 1° De Newtoniana at-
iractione , unica cohœrenliœ nnturnlis
causa , advershs Clav. Hambergerum ,
Berne, 1757, in-4. 2° Discours sur la
manière de former l esprit et le cœur des
en fans 1 Yverdun, 17G3, in-8. 3" Prin-
cipes du droit de la nature et des gens ,
d'après Burlamaqui, Yverdun, 8 vol. in-8.
Voyez Burlamaqui. lien donna un abrégé
sous le titre de Leçons de droit de la nature
et des gens , 17G9 , 4 vol. in-8. 4^ h' En-
cyclopédie, ou Dictionnaire universel
raisonné des connaissances humaines ,
Yverdun, 17 70-80, 42 vol. in-4, 6 vol. de
supplément, et 4 vol. dephinches, d'après
l'édition de Paris, mais qu'il crut pou-
voir refondre, améliorer , enrichir. Tous
les articles signés D. F. , et toutes les addi-
tions placées entre deux astérisques, sont
de lui. Il eut pour collaborateurs Euler, De-
leuze, Tscharner, Lalande, Dupuis, Lieu-
taud, Haller, Formey,elc. 5" Code det hu-
manité,on la Législation universelle, na-
turelle, civile et politique, Yverdun, 17 78,
13 vol. in-4. Cet ouvrageesttiré en partie
de son Encyclopédie ; mais il y a joint
des développemens nombreux. C" Ta-
bleau philosophique de la religion chré-
tienne , 1779, 4 vol. in-12. 7" Tableau
raisonné de V histoire littéraire du 18*
siècle, Yverdun , 1779-83, in-8. %" Elé-
FEL
mens de la police d'un état, 1781, 2 voï.
in-12. Félice est mort le 7 février 1789»
à Yverdun.
* FÉLICI ( Le Père Louis ) , jésuite ,
naquit à Ischio vers 17 40, entra jeune
dans la compagnie de Jésus , y lit profes-
sion en 1773 , et se distingua par toutes
les vertus chrétiennes. Entre autres bon-
nes œuvres, on lui doit la fondation do
deux établissemens qui rendent encore
d'importans services à la religion et aui
fidèles. Le premier est la Congrégation
de vignerons et d'agriculteurs, dans l'é-
glise de Saint-Vital, attachée au noviciat
de Saint-André. Celte pieuse inslilution»
que le Père Féliei fonda lorsqu'il était en-
core novice , servit à inspirer à des gens
grossiers des sentimens religieux , des
mœurs plus pures ; mit fin aux rixes fré-
quentes que le moindre différend occa-
siouail, et les porta à s'aimer et à se se-
courir mutuellement. Se trouvant à Rome,
le Père Féliei fonda encore l'association
connue sous le nom A'Unio/tdes Prêtres
de Saint-Paul. Elle se forma, en 17 90,
dans l'hôpital de la Consolation , où
d'anciens jésuites et des prêtres séculiers
se réunissaient pour assister les malades.
Il fut secondé dans celte édifiante entre-
prise par M5Î. Vincent Henri , Joseph
Manrisi , Pierre Cavallo, François BuÛ'a,
l'abbé Sozzi , Gaétan Zucchi , et par les
PP. Bordoni, Paradisi et Salvalori , jé-
suites. Le prélat Médicis fut le bienfaiteur
de celte société , qui obtint la proleclioa
du vertueux cardinal Colonna. Le nom-
bre des associés augmentant de jour en
jour, ils .se rassemblaient dans l'église de
la Sapience, d'où ils se transportèrent à
l'Oratoire de Saint-Paul , dans l'église de
Saint-Stanislas des Polonais. Les person-
nes les plus distinguées du clergé régulier
et séculier, des prélats et des cardinaux^
assistent souvent à celte société et y tien-
nent tous les quinze jours leurs confé-
rences. On a divisé l'association en huit
branches , chacune soumise à un régula^
teur particulier , dont le charilabk but
est de distribuer des secours spirituels
aux malades des hôpitaux ; de faire le ca-
téchisme, de prêcher les samedis et le.*
dimanches aux matelots de toutes les n«-
FEL
lions ; de propager par tout le inonde là
dévotion aux cœurs de Jésus et de
Marie ; d'instruire les troupes, les déte-
nus, les forçats et leurs gardiens; de
réunir t^ous les jours de fêtes les jeunes ar-
tisans, les écoliers , les pères de famille,
les marchands et artistes; de visiter les
pauvres malades dans les maisons de
Rome , et leur porter des secours spiri-
tuels et temporels, d'instruire les conva-
lescens dans l'hospice du Père Ange ; de
visiter fréquemment les fous de l'hôpital
de la Longara. Enfin , deux autres bran-
ches se sont réunies aux huit premières,
dont l'une s'attache à l'instruction spiri-
tuelle des jeunes éludians de l'archi-
gymnase romain , et l'autre à celle des
élèves des beaux-arts. Le bien qu'a fait
cette association est incalculable ; ce bien
est dû au Père Félici, et à ses zélés protec-
teurs. « Cela prouve , dit l'auteur des
» Me'moires ecclésiastiques ( M. Pie ) ,
» combien ce clergé ( le romain) mérite
» le rang qu'il occupe dans les églises de
V la chrétienté. Il était digne de la capi-
» taie du monde catholique d'offrir, dans
» cette association , un modèle aux prê-
» très et aux fidèles des autres contrées. »
Lors du rétablissement de la compagnie
de Jésus, le Père Félici, quoique très
âgé et devenu aveugle , voulut se réunir
à ses confrères. C'est dans leurs bras qu'il
est mort, le 29 novembre 1819 , à 81 ans.
Ce pieux jésuite, avant même qu'il eût
fondé l'Union des prêtres de Saint-Paul,
était révéré à Rome , où il avait entrée
chez les principaux dignitaires de l'Eglise.
Il était le conciliateur, l'ange de paix
dans les familles , le bienfaiteur des pau-
vres ; il était enfin chéri de toutes les
classes, comme possédant toutes les
vertus.
FÉLICIAIVI ( Porphyre ) , évêque de
Foligno , mort en 1G32 , à 70 ans, avait
été secrétaire du pape Paul V. Il écrivait
avec beaucoup de netteté en latin et en
italien. Il n'eut point de supérieur eu son
temps pour la poésie italienne. On a de
lui (les lettres et des poe'sies.
FÉLICISSIME, diacre de Carthage,
se sépara de saint Cyprien avec les chré-
tiens tombés dans la persécution , vers
FEL î47
Tan 251. Il voulait qu'on les reçût à la
communion sur uue simple recomman-
dation des martyrs , et sans qu'ils eussent
fait pénitence. Il se joignit à Novat et h
quelques autres prêtres. Saint Cyprien
les excommunia.
FÉLICITÉ (Sainte) , dame romaine,
souffrit le martyre avec ses sept fils , sous
Marc-Aurèle , vers l'an 164. Les enfans ,
encouragés par leur illustre mère, sup-
portèrent les tourmens avec une con-
stance admirable. L'aîné fut flagellé
jusqu'à la mort, avec des fouets garnis
de plomb ; les deux suivans furent assom-
més à coups de bâton , et les autres dé-
collés avec leur mère , qui fut martyrisée
la dernière, frayez Perpétue.
* FÉLIN SKI (Aloïse), un des poètes
les plus distingués de la Pologne, naquit
en 1773. Il se trouvait à Varsovie à l'é-
poque de la diète constitutionnelle ; alors
il publia Senatus-consuUes sous le règne
de Jean Sobicski , suivis de plusieurs
questions de droit; à la même époque il
fit paraître diverses brochures politiques
dans le but de faire changer la forme du
gouvernement de la Pologne. Félinski
cdressa à plusieurs personnes distinguées
quelques-unes de ses poésies qui le firent
connaître avantageusement. Devenu en
1701 précepteur du neveu de Craski, il
fut ensuite nommé secrétaire des corres-
pondances de France auprès du généra-
lissime Rosciusko. Nommé professeur d'é-
loquence et de poésie au lycée de Krze-
mieniec et bientôt après directeur de cet
établissement , il s'attira l'admiration de
ses élèves et l'estime de tous ses conci-
toyens. Il avait entrepris de réformer
l'orthographe et même la langue polo-
naise; son système eut des partisans et
des ennemis; le savant Jean Suiadecki,
qui .se rangea parmi ses adversaires, fut
un de ceux qui contribuèrent le plus à
ce que ce projet de réforme ne fût point
adopté. Félinski est mort le 12 février
1822 à Rrzemieniec ; il était membre de
l'université de Vilna et de la société des
amis des Sciences de Varsovie. Il est au-
teur d'une excellente tragédie intitulée
Barbe Radziwill , qui a été traduite ea
prose française dans les chefs-d'œuvre
248 FEL
des théâtres étrangers -, il a traduit aussi
du français V Homme des champs de De-
lille, et quelques tragédies. Ses OEuvres
ont été publiées en 1825; une première
édition avait déjà paru de l81Gàl821,
Varsovie, 2 vol. in-12.
FELIPIQUE BARDANES. Foycz
Phiuppique.
FÉLIX, proconsul et gouverneur de
Judée, frère de Pallas affranchi de Claude,
passa en Judée vers l'an 63 de J. C. Dru-
sille, fille du vieil Agrippa, gagnée par
ses caresses , l'épousa quelque temps
après. Ce fut devant lui que saint Paul com-
parut. Néron le rappela delà Judée, qu'il
pillait et tyrannisait de la manière la plus
odieuse; ce qui n'empêcha pasTertullus
qui pérorait contre saint Paul, de le flatter
d'une manière lâche et indigne , pour
l'engager à condamner ce grand apôtre,
dont l'éloquence frappa tellement le gou-
verneur romain , qu'effrayé des grandes
vérités du christianisme , il rompit brus-
quement la conférence. Act. 24.
FÉLIX I (Saint), pape, successeur de
saint Denys en 2G9 , mourut martyr l'an
274. (Il vil la paix de l'Eglise troublée par
l'hérésie de PaulSamosale, et persécutée
par l'empereur Aurélien). Il nous reste de
ce pontife un fragment de la lettre qu'il
écrivit à Maxime d'Alexandrie, contre Sa-
bellius et Paul de Samosate. Elle fut lue
dans les conciles de Chalcédoine et d'E-
phèse et ce fragment est dans les actes du
concile de Chalcédoine. Ou lui en attribue
trois autres , visiblement supposés.
FÉLIX 11 , archidiacre de l'église ro-
maine , p'acé sur le siège pontifical en
355, par l'empereur Constance , pendant
l'exil du pape Libère , en fut chassé après
le retour du véritable pontife. Constance
aurait voulu que Libère et Félix gouver-
nassent tous deux l'église de Rome, et que
chacun fût à la tête de son parti ; mais le
peuple ayant entendu cet ordre de l'em-
pereur, qu'il fit lire dans le cirque, s'é-
cria tout d'une voix : « Il n'y a qu'un
» Dieu, qu'un Christ, qu'un évêque... »
Félix , obligé de se retirer , mourut dans
une de Ses terres le 22 novembre 365. Le
Martyrologe d'Usuard et celui de Rome
lai donnent le titre de martyr .- mais le
FEL
Père Papebroch prouve que c'est sans
preuve , dans une dissertation insérée
dans le Propylœum adyfcta sanclorum,
p. 5G. Il le dit cependant digne du culte
qu'on lui rend comme saint. Singularis
ipsius , dit-il , ad obilum usquepcr annos
plusquam octo modestia , qua sesc con-
ti/iuit in humili rcccssu , oblatis recupe-
randœ sedis occasionibus numquam
usas , postquam id sine fidei catholicœ
periculo fieri nonposse cognovit, omnem
a grata postcritate venerationem com-
mcruit. Plusieurs critiquesie placent dans
le catalogue des papes ; mais il paraît
qu'on doit le regarder plutôt comme évê-
que-vicaire du pape Libère , qui , selon
quelques-uns, avait consenti qu'on le
mît à sa place, et qu'il eût droit de lui
succéder, s'il venait à mourir pendant
son exil ; par-là on excuse le clergé de
Rome d'avoir adhéré à son ordination et
de l'avoir regardé pour pape, surtout après
qu'on eut annoncé à Rome , la chute ap-
parente dans la foi du pape Libère. Le
tombeau de Félix , trouvé sous le pontifi-
cat de Grégoire XllI l'an 1 582 , avec une
inscription honorable, confirme le senti-
ment des critiques favorables à sa mé-
moire.
FELIX UT , romain , bisaïeul de Gré-
goire le Grand, fut élu pape après Sim-
plicius en 483. Il commença par rejeter
l'édit d'union , publié par l'empereur Ze-
non , et anathémalisa ceux qui le rece-
vaient. Acace de Conslanlinople troublait
alors l'Eglise ; il tâcha de le ramener par
des lettres pleines de douceur ; mais ap-
prenant qu'il ne cessait de communiquer
avec Pierre Mongus , hérétique anathé-
matisé , il prononça contre lui une sen-
tence de déposition et d'excommunica-
tion. Cette sentence fut attachée au man-
teau d'Acace par des moines acémètes,
auxquels cette hardiesse coûta la vie. Fé-
lix assembla un concile à Rome en 487,
pour la réconciliation de ceux qui s'é-
taient laissé rebaptiser en Afrique pendant
la persécution. Il mourut saintement en
492. C'est le premier pape qui ait em-
ployé rindiction dans ses lettres. Athala-
ric , roi des Goths , quoique arien , res-
pecta ses vertus et son zèle pastoral. Fé-
fFÉL
lix en obtint plusieurs grâces et actes de
7 justice. Ce fut en sa considération que ce
prince donna un édit solennel en faveur
des libertés et privilèges de l'Eglise , et
prit des mesures pour faire respecter le
sacerdoce chrétien.
FÉLIX IV , natif de Bénévent , monta
sur la chaire de saint Pierre, après le pape
Jean I, le 24 juillet 526, par la faveur
de Théodoric. Il gouverna l'Eglise avec
beaucoup de zèle, de doctrine et de piété,
et mourut au commencement d'octobre
â30 , suivant Ânastase.
FELIX V. Voyez Amédée vin.
FÉLIX ( Saint ) , prêtre de Noleen
Carapanie , eut beaucoup à souffrir pour
la foi sousDèce et Valérien. La paix ayant
été rendue à l'Eglise , Félix reparut , et
continua à s'acquitter des fonctions du
saint ministère. Après la mort de Maxime,
ëvêque de Kole, on voulut le mettre à
la tète de cette église; mais son humilité
s'y opposa. Il passa le reste de ses jours
en paix , dans une terre qu'il labourait
lui-même. Il y mourut vers l'an 256. Les
miracles qui se sont opérés à son tombeau
sont attestés par saint Paulin , saint Au-
gustin, Sulpice-Sévère, etlepapeDamase.
<^uelques-uns de ces illustres et saints écri-
vains ont été témoins oculaires des faits
qu'ils rapportent. Saint Paulin atteste qu'il
a vu de ses yeux un énergumène , marcher
la tête en bas contre la voûte d'une église,
sans que ses habits fussent dérangés, le-
quel fut délivré par les reliques de saint
Félix de Noie. « Ces sortes de faits, dit
« un auteur moderne , sont traités de
» contes par les beaux esprits du jour :
» mais ils sont rapportés par des hommes
» de toute probité, et rejetéspar des gens
M qui n'en ont pas assez pour être crus ,
j> lors même qu'ils disent des choses très
>' ordinaires. » Félix a toujours été ho-
noré à Noie, comme un saint. Son culte
passa de l'Italie en Afrique.
FELIX (Saint), succéda à saint Briton
dans le gouvernement de l'église de Trêves
en 385. Son épiscopat fut agité de violens
orages. Les évêques assemblés à l'occasion
de son sacre , communiquaient tous les
jours avec Ithace et ses adhéreus, qui
sollicitaient la mort de l'hérétique Priscil-
V.
FEL 2^9
lien et de ceux de son parti. Saint Martin,
que des affaires avaient appelé vers le
même temps à Trêves , communiqua avec
les mêmes évêques en assistant à l'ordi-
nation de Félix; faiblesse qu'il se reprocha
toute sa vie. Saint Ambroise plus ferme
que lui , refusa constamment de commu-
niquer avec Félix et les autres évêques
qui avaient eu part à son ordination. Peu
de temps après les évêques des Gaules
s'assemblèrent en concile à Turin, où
après lecture faite des lettres écrites à ce
snjet^r saint Ambroise et le pape saint
Sirice, il fut résoluqu'on n'accorderait la
communion qu'à ceux qui se retireraient
de celle de Félix : celui-ci ne voulant
point être cause d'un schisme dans l'E-
glise , se démit de l'épiscopat , et se re-
tira auprès de l'église de la Sainte-Vierge
( aujourd'hui St. -Paulin ) à Trêves, qu'il
avait fait réparer ou construire ; il y
passa le reste de ses jours, éloigné de
tout commerce avec le monde , et dans
l'exercice des plus sublimes vertus.
FELIX, évêqued'Urgel, ami d'Elipand,
évêque de Tolède , soutenait comme lui
que Jésus-Christ est fils adoptif. Cette er-
reur fut condamnée au concile de Nar-
bonne l'an 791 , de Frioul la même an-
née, de Ratisbonne en 792. Il fut envoyé
ensuite à Rome, où il abjura son erreur ;
mais il continua à la répandre après son
retour à Urgel . Alcuin et Paulin d'Aquilée
la réfutèrent victorieusement. Il fut de
nouveau condamné à Francfort, en 794,
à Rome en 799 , et la même année à Aix-
la-Chapelle. C'est dans cette dernière as-
semblée qu'il fut dépossédé de l'épiscopat
à cause de ses rechutes , et ensuite relé-
gué à Lyon par Charlemagne, dont le
jugement en cette affaire ne fut que l'ex-
pression del'entière adhésion dece prince
aux décisions de l'Eglise, comme l'a
prouvéM. Bossuet(PoZi7. del Ecrit, liv. 7,
art. 4, prop. 11 ). Félix écrivit du lieu
de son exil à son peuple d'Urgel une let-
tre qui contenait l'abjuration de son er-
reur ; on doute qu'elle fût plus sin-
cère que les autres. « Félix d'Urgel pas-
» sa sa vie, dit l'abbé Bergier, dans une
« alternative continuelle d'abjurations
» et de rechutes , et la termina dans
i6..
a5o FEL
» l'hérésie. >» 11 mourut vers l'an 818.
' FÉLIX DE TASSY ( Charles-Fran-
çois ) , un des plus habiles et des plus
savans chirurgiens du 17* siècle, exerça
d'abord son art dans les hôpitaui civils
et militaires; puis il succéda en 1676 à
son père dans la charge de premier chi-
rurgien du roi .Vers cette époque Louis XIV
fut atteint d'une maladie qui porta long-
temps le nom de maladie du roi ( la fis-
tule à l'anus ) ; la France fut vivement
inquiète ; la chirurgie n'était point assez
avancée pour traiter ce mal , et l'on
ignorait généralement le procédé que,
16 siècles auparavant, Celse avait em-
ployé et décrit. Félix fit cette opération
avec le plus heureux succès, et il l'ut le
premier chirurgien moderne qui l'ait
tentée. La reconnaissance publique et
l'amitié de son souverain le payèrent
amplement du bienfait que son talent
avait produit ; mais une mort prématurée
l'enleva jeune encore le 25 mai 1703.
FELL. royez Fox ( George ).
FELL(Jean), évêque d'Oxford en 1675,
mort en 1686 , à 61 ans, fut sincèrement
attaché à la famille royale de Stuart.
Persécuté par les parlementaires, il se
renferma dans son cabinet , et y acquit
des connaissances très étendues. Dans le
temps de la révolution, en 1660, fil re-
parut , et il fut récompensé de son zèle
pour son roi , par des bénéfices et enfin
par l'évêché d'Oxford. On a de lui le
1" vol. des Rerum anglicavum S crip to-
res, Oxford, 1684, in-fol. : la mort l'ém-
is pécha de continuer cette savante et utile
collection. Il avait donné , avec Péarson,
une très belle édition de Saint-Cyprien ,
Oxford, 1682, in-fol. avec des remarques
savantes , et une édition des œuvres de
saint Théophile d'Antioche, Oxford, 1684.
Son nouveau Testament grec avec les
variantes , imprimé dans la même ville,
iD-12, 1675, est estimé. ( On lui doit en-
core Vie du docteur Henri Hammond ,
Londres, 1 66 l,in-8, en anglais, souvent
réimprimée en tête de la vie de cet auteur;
Alcinoi in platonicam philosophiam in-
troductio, Oxford, 1667, in-8 ; une traduc-
tion latine des Antiquités de l'université
tSOxford de Wood, 1674, 2 vol. in-folio.)
FEL
FELLER ( Joachim-Frédéric ) , né ii
Leipsick, en 1673, fut secrétaire du duc
de Veymar. Il passa la plus grande partie
de sa vie à voyager , pour visiter les sa-
Tans et les bibliothèques , se maria en
-1708 , et mourut en 1726. On a de lui :
1° Monumenta inedita, par forme de
journal, en 12 parties, léna, 1714 , in-4.
2° MiscelUinea Leibnitiana , Leipsick ,
1718 , in-8. 3" Généalogie de la maison
de Brunswick, en allemand, 1717,
in-8.
FELLER ( François ni). F, la Notice
sur sa vie et ses ouvrages au commen-
cement du premier volume.
FELLON ( Thomas-Bernard ), jésuite,
né à Avignon le 12 juillet 1672 , mort le
25 mars 1759, avait du talent pour la
poésie latine. On connaît ses poèmes in-
titulés : Faba Arabica ; Magnes. On a
encore de lui : 1 " Oraisons funèbres de
M. le duc de Bourgogne, et de Louis XIV.
2° Paraphrase des Psaumes, 1 7 3 1 , in- 1 2 .
3° On lui a attribué par erreur un
abrégé du Traitéde l'amour deDieu,Tpar
saint François de Sales ; cet ouvrage est
de l'abbé Tricallet.
FELTON ( Jean ) , gentilhomme an -
glais , très zélé pour la religion catholi-
que , afficha publiquement aux portes de
la maison épiscopale de Londres, la bulle
de Pie V , par laquelle ce pontife décla-
rait hérétique la reine Elisabeth, qui s'é-
tait déclarée chefde l'Eglise et avait aboli
le culte catholique. Felton fut condamne
à être pendu, et il le fut en 1570. On le
détacha de la potence, pendant qu'il
était encore en vie ; puis on lui coupa
les parties naturelles , qui furent jetées
dans le feu ; ensuite on lui fendit l'esto-
mac , pour lui arracher les entrailles et
le cœur , et après lui avoir coupé la tête,
on mit son corps en quatre quartiers.
Telle fut à l'égard de ce courageux défen-
seur de l'ancienne religion, la vengeance
d'une princesse, que la philosophie du
jour a tant exaltée. Son fils Thomas Fel-
ton , religieux de Saint-François de Paule,
périt également par le dernier supplice,
avec un autre prêtre, le 28 août 1588.
FELTRE. Voy. Claiike, duc de Feltre.
FÉNÉLON (Bertrand de Salis.'* ac mar-
FEN
qais de ), a donné la Relation du siège
de Metz^ 1553, in-4 ; le Voyage de
Henri II aux Pays-Bas , 1554, in-8. On
a ses Négociations en Angleterre , ma-
nuscrit, 2 vol. in-folio : elles étaient
dans la bibliothèque du chancelier Sé-
guier. Ce brave militaire se signala par
sa valeur et par ses services , et mourut
en 1599. Il était de l'illustre famille qui
a produit l'archevêque de Cambrai, dont
nous allons parler.
FÉNÉLOM ( François de Salignac de
lA Motte ) naquit au château de Féné-
lon en Querci, le 6 août 1G51 , d'une
maison ancienne et distinguée dans l'état
et dans l'Eglise. Des inclinations heureu-
ses, un naturel doux, joint à une grande
vivacité d'esprit , furent les présages de
ses vertus et de ses talens. Le marquis de
Fénélon son oncle , lieutenant- général
des armées du roi , homme d'une valeur
peu commune , d'un esprit orné et d'une
piété exemplaire, traita cet enfant comme
son propre fils, et le fit élever sous ses
yeux à Cahors. Le jeune Fénélon fit des
progrès rapides, les études les plusdiflBi-
ciles ne furent pour lui que des amuse-
mens. Dès l'âge de 19 ans, il prêcha et
enleva tous les suffrages. Le marquis ,
craignant que le bruit des applaudisse-
meus et les caresses du monde ne cor-
rompissent une âme aussi bien née , fit
prendre à son neveU la résolution d'aller
se fortifier dans la retraite et le silence.
Il le mit sous la conduite de l'abbé Tron-
çon, supérieur de Saint-Sulpice à Paris.
A 24 ans , il entra dans les ordres sacrés,
et exerça les fonctions les plus pénibles
du ministère dans la paroisse de Saint-
Sulpice. Harlay, archevêque de Paris,
lui confia, 3 ans après, la direction des
Nouvelles-Catholiques. Ce fut dans cette
place qu'il fit les premiers essais du ta-
lent de plaire , d'instruire et de persua-
der. Le roi ayant été informé de ses suc-
cès, le nomma chef d'une mission sur les
côtes de Saintonge et dans le pays d' Aunis.
Simple à la fois et profond , joignant à
des manières douces une éloquence forte,
il eut le bonheur d'opérer un grand nom-
bre de conversions. En 1689, Louis XIV
lui confia l'éducation de ses petits-fils,
FEN
aSi
les ducs de Bourgogne, d'Anjou et de
Berri. Ce choix fut tellement applaudi,
que l'académie d'Angers le proposa poiir
sujet du prix qu'elle adjuge chaque an-
née. Le duc de Bourgogne devint, sous
un tel maître , tout ce qu'il voulût. Fé-
nélon orna son esprit, forma son cœur,
et y jeta les semences du bonheur de
l'empire français. Ses services ne restè-
rent point sans récompense ; il fut nommé
en 1695 à l'archevêché de Cambrai. En
remerciant le roi , il lui représenta ( dit
M"* de Sévigné ) « qu'il ne pouvait re-
» garder comme une récompense , une
M grâce qui l'éloignait du duc de Bour-
» gogne. » Il ne l'accepta qu'à condition
qu'il donnerait seulement trois mois aux
princes, et le reste de l'année à ses dio-
césains. Il remit en même temps son
abbaye de Sain l- Valéry , et son petit
prieuré, persuadé qu'il ne pouvait possé-
der aucun bénéfice avec son archevêché.
Au milieu de la haute faveur dont il
jouissait, il se formait un orage contre
lui. INé avec un cœur tendre et une forte
envie d'aimer Dieu pour lui-même , il se
lia avec M"* Guyon , dans laquelle il ne
vit qu'une âme éprise du même goût que
lui. Les idées de spiritualité de cette
femme , excitèrent le zèle des théolo-
giens, et surtout celui de Bossuet. Ce
prélat voulut exiger que l'archevêque de
Cambrai , autre fois son disciple , alors
son rival, condamnât M"* Guyon avec
lui , et souscrivît à ses Instructions
Pastorales. Fénélon ne voulut sacrifier
ni ses sentimens , ni son amie. Il la met-
tait au nombre de ces mystiques qui ,
portant le mystère de la foi dans une con-
science pure, ont plus péché dans les ter-
mes que dans la chose , aussi savans dans
les voies intérieures , qu'incapables d'en
instruire les autres avec l'exactitude et
la précision que demande la théologie.
Il crut rectifier tout ce qu'on lui repro-
chait, en publiant son livre de l'Expli-
cation des Maximes des Saints , 1 C 97 ,
in-12. Le stile en était pur , vif, élégant
et affectueux ; les principes étaient pré-
sentés avec art , et les contradictions sau-
vées avec adresse. On y voyait , dit un
historien , un homme qui craignait éga-
:^5!i FEN
lement d'êlrc accusé de suivre Moliilos ,•
et d'abandonner sainte Thérèse ; tantôt
donnant trop à la charité , tantôt ne don-
nant pas assez à l'espérance. Bossuet, qui
vit dans le livre de Fénélon quelques rap-
ports avec des assertions déjà condamnées
par la proscription du Quiétisme , s'éleva
contre cet ouvrage avec véhémence. Les
noms de Montan et de Priscille , prodi-
gués à Fénélon et à son amie , parurent
indignes de la modération d'un évêque.-
« Bossuet, a dit un bel esprit de ce siècle,
M eut raison d'une manière révoltante j
M et Fénélon mit de la douceur , même
» dans ses torts. » D'habiles théologiens
ont cru que dans cette dispute , comme
dans beaucoup d'autres , il y avait des
suppositions qui n'existent pas dans la
réalité ; que dans l'amour de Dieu ou sup-
posait tantôt des abstractions , des consi-
dérations précisives ou négatives , aussi
inutiles que fatigantes ; tantôt des motifs
d'intérêt , des espérances explicites et
formelles, également inconnues au vérita-
ble amour , qui saisit et embrasse intime-
ment son objet, sans tant de raisonnement
et de calcul. Quoi qu'il en soit, un histo-
rien très instruit du fond de cette contro-
verse, rapporte une anecdote qui sert
beaucoup à faire connaître Fénélon. « On
» conseilla à Fénélon de faire diversion ,
V en attaquant à Rome les sentimens et
» les livres de Bossuet, et en les accusant
» de détruire la charité pour établir l'es-
j) pérance. Mais le pieux archevêque ne
» voulut pas user de récrimination contre
» un frère ; et comme on l'exhortait à se
» tenir en garde contre les artifices des
» hommes, que l'expérience lui avait si
y> bien appris à connaître, il fit cette belle
» réponse , Moriamiir in simplicitale
» nosticl ( mourons dans notre simpli-
cité }. » Cela ne l'empêcha iras de se dé-
fendre comme il le devait , et d'écrire
beaucoup pour s'expliquer lui-même.
Mais ses livres ne purent empêcher qu'il
ne fût renvoyé dans son diocèse au mois
d'août 1G97. Fénélon reçut ce coup sans
s'affliger et sans se plaindre. Son palaisde
Cambrai j ses meubles, ses papiers, ses
Jivres avaient été consumés i)ar le feu
dans le même temps, et il l'avait appris
FEN
avec la même tranquillité. Innocent XII
le condamna enfin en 1699, après 9 mois
d'examen : soit que le savant et pieux pré-
lat n'eût pas assez distingué les principes
des vrais mystiques d'avec ceux de Moli-
nos , soit que dans des matières abstrai-'
tes, cachées dans l'intimité de l'âme et
des voies secrètes de Dieu, et dès lors
difficiles à traiter sans obscurité et sans
équivoques , il n'ait point mis cette exac-
titude théologique , cette précision d'i-
dées et de langage, que demande la con-
servation de la foi et de la morale chré-
tienne ( voyez Saint-Jean de la Croix ,
RusBRocH , ÏAULEBE, clc. ). Le pape avait
moins été scandalisé du livre des Maxi-
mes , que de la chaleur emportée de ses-
adversaires. Il écrivit à quelques prélats:
Peccavit excessu amoris divini : sed vos
peccastis defeclu amoris proximi. Féné-
lon se soumit sans restriction et sans ré-
serve ; il ne recourut pas à la distinction
du fait et du droit ; il n'allégua pas que
les écrits publiés pour sa défense étaient,
malgré les efforts de ses adversaires, res-
tés hors d'atteinte. Il fit un Mandement
contre son livre, et annonça lui-même
en chaire sa condamnation. Pour donner
à son diocèse un monument de sou re-
pentir, il fit faire, pour l'exposition du
Saint-Sacrement, u?i Soleil porte' par deux
Anges, dont l'un foulait aux pieds di-
vers livres hérétiques , sur un desquels
était le titre du sien , quoique cette qua-
lification n'eût été donnée à aucune des
propositions condamnées. Après cette dé-
faite, qui fut pour lui une espèce de
triomphe , il vécut dans son diocèse eu
digne archevêque , en homme de lettres,
en philosophe chrétien. Il fut le père de
son peuple et le modèle de son clergé.
La douceur de ses mœurs, répandue dans
sa conversation comme dans .ses écrits,
le fit aimer et respecter , même des en-
nemis de la France. Le duc de Marlbo-
rough , dans la dernière guerre de Louis
XIV , prit soin qu'on épargnât "ses terres.
Il fut toujours cher au duc de Bourgogne ;
el lorsque ce prince vint en Flandre dans
le cours de la même guerre , il lui dit eu
le quittant : Je sais ce que je t>otfsdois ,
vous sa\'ez ce que je vous suis. On pré-
tend qu'il aurait eu part au gouverne-
lueatj si ce prince eût vécu. Le maître
ne survécut guère à son auguste élève ,
mort en n 12 ; il fut enlevé à l'Eglise,
aux lettres et à la patrie, le 7 janvier ,
en 1715) à G3 ans, et fut généralement
pleuré j surtout par Clément XI , qui
lui destinait un chapeau de cardinal.
Plusieurs écrits de philosophie , de théo-
logie , de belles-lettres , sortis de sa plu-
me, lui ont fait un nom immortel. On y
voit un homme nourri de la fleur de la
littérature ancienne et moderne, et ani-
mé par une imagination vive , douce et
riante. Son stile est coulant , gracieux ,
harmonieux ; les hommes d'un goût dé-
licat voudraient qu'il fût plus rapide, plus
serré, plus fort, plus fin, plus pensé,
plus travaillé ; mais il n'est pas donné à
l'homme d'être parfait. Ses principaux
ouvrages sont 1° he^ Aventures de Te'lc'-
maque , composés , selon les uns , à la
cour ; et fruit , selon d'autres , de sa re-
traite dans son diocèse. Un valet-de-
chambre, à qui Fénélon donnait à trans-
crire cet ouvrage singulier , qui tient à la
fois du roman et du poème épique, en
prit une copie pour lui-même. Il n'en fit
imprimer d'abord qu'une petite partie ,
et il n'y en avait encore que 208 pages
sorties de dessous presse , lorsque Louis
XIV, injustement prévenu contre l'au-
teur, et qui croyait voir dans le livre une
satire continuelle de son gouvernement ,
fit arrêter l'impression de ce chef-d'œu-
vre; et il n'a pas étépermis d'y travailler
en France , tant que ce prince a vécu.
Après la mort du duc de Bourgogne,
le monarque brûla tous les manuscrits
que son petit-fils avait conservés de son
précepteur. Fénélon passa toujours, à ses
yeux , pour un bei-esprit chimérique et
pour un sujet ingr^. Son Tcle'maque
acheva de le perdre à la cour de France;
mais ce livre n'en fut que plus répandu
dans l'Europe. Les malins cherchèrent
des allusions, et firent des applications.
Hs crurent voir M"»' de Montespan dans
Calipso, M"« de Fontanges dans Eucha-
ii.s, la duchesse de Bourgogne dans Aii-
liope, Louvois dans Protùilns, le roi Jac-
ques dans Idome'nee, houia XIV dans Se-
FËN 553
sostris. Les gens de goût , sans s'arrêter
à ces allusions, admirèrent dans ce ro-
man moral toute la pompe d'Homère ,
jointe à l'élégance de Virgile , tous les
agrémens de la fable réunis à; toute la
force de la vérité. Ils pensèrent que les
princes qui les méditeraient, appren-
draient à être hommes, à faire des heu-
reux et à l'être. « C'est la sagesse elle-
» même , dit un philosophe moderne ,
■o qui y donne des leçons aux rois et aux
» peuples , non avec cette morgue , cet
■o apprêt ridicule , ce verbe suffisant et
ï» orgueilleux , si fort en usage aujour-
» d'hui, mais avec un ton simple et
» modeste , accompagné du charme de
u la vérité : elle enseigne aux rois les
« moyens de faire fleurir leurs empires ,
M de soutenir l'éclat du trône, d'augmen-
» ter leur gloire , sans les tromper ni
■» les éblouir par des projets chimériques,
» par des systèmes destructeurs, par des
u économies imaginaires : elle leur mon-
w tre la source de l'abondance et du bon-
» heur public, dans l'encouragement de
» l'agriculture , dans la protection active
w et vigilante du commerce, dans l'abo-
■o lition du luxe , en renfermant chaque
y> individu dans son état par de sages lois.
» Loin de faire retentir sans cesse aux
» oreilles des peuples , ce cri turbulent
)) et inquiet d'e'galite', de liberté' , elle
» leur dit : Vous êtes nés sous l'empire
« des lois, vous avez des maîtres, la pa-
» trie vous porte dans son sein ; soyez
» soumis aux lois ; obéissez à vos maîtres;
» soyez sujets fidèles, aimez votre patrie,
» et songez que la Religion, l'honneur,
» votre intérêt personnel , sont des chaî-
» nés sacrées qui vous lient à l'état, et
» que les rompre est un crime, w Quelques
gens de lettres, tels que Faydit et Gueu-
deville , reprochèrent à l'auteur des ana-
chronismes , des phrases négligées, de&
répétitions fréquentes , des longueurs ,
des détails minutieux, des aventures peu
liées , des descriptions trop uniformes de
la vie champêtre ; mais leurs critiques ,
tombées dans l'oubli , u'ôtèreut rien de
son mérite q l'ouvrage critiqué. Elles
n'empêchèrent point qu'on n'en fît , et
qu'on n'en ait fait depuis un tiès grand
a54 FEN
nombre d'éditions. Les meilleures sont
crfles qui ont paru depnis nU , année
dans laquelle la famille de l'archcTêque
de Cambrai publia cette production , sur
le manuscrit de l'auteur, en 2 vol. in-12 ,
et la plus belle est celle d'Amsterdam en
1734, in-fol. , a\ec des figures magnifi-
ques. Il y en a aussi de très belles édit,
réimprimées récemment, en 2 vol. in-4 ,
2 vol. in-8, 4 vol. in-18 par Z?/rfo<aîné, Di-
dot']c\xne et Crapelet. On a fait des éditions
à Roterdam , à Liège et ailleurs , où l'on
explique , dans des notes, toutes les allu-
sions qui furent faites d'abord par le pu-
blic malin; plusieurs de ces notes ont de
plus un ton d'irréligion et de fanatisme
de secte. Cependant on voit mettre indif-
féremment ces éditions entre les mains des
jeunes gens. Il convient de leur donner
des éditions sans notes. Les Aventures
d". Téle'maque ont été trad. en prose dans
toutes les langues de l'Europe, et même en
grec et en latin. Elles ont été mises en vers
français , mais sans succès , Paris , Didot ,
n 92 , 6 vol. in-1 2 , et trad. en vers alle-
mands, en vers hollandais ( voyez Feita-
ma), en vers italiens et en vers latins.
2° Dialogue des Morts, en 2 vol. in-12,
réimp. plusieurs fois en 1 vol. in-12. Le
Téle'maque , OM , pour mieux dire, les
principales réflexions du Téltmaque
avaient été données pour thème au duc
de Bourgogne ; ces Dialogues lui furent
donnés pour lui inspirer quelque vertu,
ou pour le corriger de quelque dé-
faut. Fénélon les écrivait tout de suite,
sans préparation ; à mesure qu'il les
croyait nécessaires au prince ; ainsi on
ne doit pas être surpris s'ils sont quelque-
fois vides de pensées , si on y trouve des
assertionspeu réfléchies, des imputations
mal fondées et pleines de préjugés natio-
naux. 3° Dialogues sur V Eloquence en
général et sur celle de la Chaire enparti-
culier, avec une Lettre sur la Rhétori"
que et la Poésie, I7I8, in-12, plusieurs
éditions. Cette Lettre, adressée à l'aca-
démie Française, est un excellent mor-
ceau qui ne dépare point les Dialogues.
L'auteur du Télémaque avait été reçu
dans cette compagnie en 1693, à la
)»lace de PelHsson. Il lai fut utile plus
FEN
d'une fois , par son goût pour [les belles-
lettres, et par sa grande connaissance de
la langue. 4" Direction pour laconscience
d^ un Roi, composée pourle duc de Bour-
gogne , brochure in-12, estimée. On l'a
publiée en 1648, et elle a été réimpri-
mée à Paris en 1 7 74 , in-8. 5° Abrégé des
f^ies des anciens Philosophes, autre
fruit de l'éducation du duc de Bourgo-
gne, in-12. Cet ouvrage n'est pas ache-
vé. 6° Un excellent Traité de l' Education
des Filles, in-12. 7° OEuvres philoso-
phiques, ou Démonstration de Vexis-
tence de Dieu par les preuves de la na-
ture , dont la meilleure édition est de
1726 , à Paris, in-12. Le duc d'Orléans,
depuis régent du royaume , avait con-
sulté, dit l'auteur du Siècle de Louir
XIF, l'archevêque de Cambrai sur de&
points qui intéressent tous les hommes.
Il demandait si on peut démontrer l'exi-
stence de Dieu ; si ce Dieu veut un culte ?
11 faisait beaucoup de questions, de cette"
nature, en philosophe; et l'archevêque
répondait en philosophe et en théologien.
Le Père Tournemine y a fait des addi-
tions. 8° Des OEuvres spirituelles , Am-
sterdam, 1731, 5 vol. in-1 2, réimprimées
plusieurs fois en 4 vol. in-12. On y voit
un homme consommé dans les voies in-
térieures , dans la connaissance du cœur
et de l'esprit humain ; plus on a réfléchi
en chrétien , plus on prend plaisir à les
lire , plus on en sent la vérité et la pro-
fondeur. 9" De^ Sermons, 1744, in-12,
faits dans la jeunesse de l'auteur, et gui
sont au rang des productions médiocres
en ce genre. 10" Plusieurs Ouvrages en
faveur de la constitution Unigenitus et
du Formulaire. Les ennemis de l'arche-
vêque deCambray ont prétendu qu'il n'a-
vait pris parti contre ie Jansénisme, que
parce que le cardiqpl de Koailles s'était
déclaré contre le Quiétisme; imagination
aussi frivole que calomnieuse , directe-
ment opposée avec la vie et le caractère
de cet homme célèbre , incapable de son
naturel et par le genre de sa philosophie,
et plus encore par sa religion , d'une si
Kche et si odieuse hypocrisie. Pour se
convaincre de la sincérité et de l'immu-
tabilité de ses sentimens, touchant cette
1
FKN
secte , il n'y a qu'à lire la lettre qu'il
écrivit la veille de sa mort, et qui se
trouve dans ses OEuvres spirit., tom. 4,
p. 368. « Je viens de recevoir l'extrême-
w onction. C'est dans cet état , oii je me
» prépare à aller paraître devant Dieu ,
M que je vous prie instamment de repré-
» senter au roi mes véritables sentimens.
» Je n'ai jamais eu que docilité pour l'E-
» glise , et qu'horreur des nouveautés
» qu'on m'a imputées. J'ai reçu la con-
u damnation de mon livre avec la sim-
» plicité la plus absolue Je prends la
» liberté de demander à sa majesté deux
» grâces , qui ne regardent ni ma per-
j> sonne ni aucun des miens. La première
» est qu'elle ait la bonté de me donner
*> un successeur pieux , régulier , bon ,
M et ferme contre le Jansénisme, lequel
» est prodigieusement accrédité sur cette
>» frontière, etc. L'autre grâce est , etc. »
1 1 •» Quelques autres écrits, et un grand
nombre de Lettres qu'on a prorais au pu-
blic. Fénélon avait fait, pour les princes
ses élèves , une excellente Traduction et
FEnéide de Virgile : mais on ne sait ce
qu'est devenu le manuscrit. Quelle perte,
si celte version était dans le stile du Té-
lémaque ! Ramsay , disciple de l'arche-
vêque de Cambrai , a publié la F^ie de
son illustre maître, in-12,ia Haye, 1*24.
AL de Bausset a publié une Histoire de
Fénelon très estimée, 3* édition, 1817,
4 vol. in-8. Les curieux qui la consulte-
ront , ne pourront s'empêcher d'aimer ce
prélat , et de le pleurer. Il recevait les
étrangers aussi bien que les Français, et
ne leur cherchait pas des ridicules. La
politesse est de toutes les nations, disait-
il, les manières de V expliquer sont diffé-
rentes, mais indifférentes leur nature.
Quoiqu'il eût beaucoup à se plaindre de
Bossuet, il prit un jour le parti de ce pré-
lat contre Ramsay , qui ne rendait pas
assez de justice à son érudition. M. l'abbé
de Querbœuf a donné en 1787 , et années
suivantes , une édition con;plète de ses
OEuvres, Paris, Didot, 9 vol. in-4. Elles
ont été réimprimées à Paris, en 1 8 1 0, en
10 vol. in-8 et in-12, et à Toulouse en
19 vol. in-12 et en 1821-24, par MM.
Cosselin «t Caron , 22 vol. ln-8. L'abbé
FEN 255
Jauffret a publié les OEuvres choisies
de Fénélon en 6 vol. in-12 : deux édi-
tions en ont paru.
FÉNÉLON (Gabriel -Jacques), neveu
du précédent, eut les vertus de son oncle
réunies à tous les talens militaires : che-
valier des ordres du roi , lieutenant-gé-
néral, ambassadeur ea Hollande, minis-
tre plénipotentiaire au congrès de Sois-
sons, il signa le traité de neutralité fait
avec les états en 1733. Il fut blessé mor-
tellement à la bataille de Rocoux , étant
lieutenant-général , et mourut trois jours
après à Lantin , le 1 1 octobre 1746. On y
voit son épitaphe dans l'église de ce villa-
ge , faite par le P. Baudory . On l'y nomme
Gallice et hostium desideria. Voltaire,
en parlant de ce héros, fait un aveu bien
honorable au Christianisme. « Son ex-
« trême dévotion, dit -il, augmentait
» encore son intrépidité. Il pensait
» que l'action la plus agréable à Dieu
» était de mourir pour son roi ( quand la
» raison et le devoir Fexigent ). Il faut
» avouer qu'une armée composée d'hom-
» mes qui penseraient ainsi serait invin-
)> cible. V Histoire de Louis X F, tom. 1 ,
page 209. Voyez Gustave-Adolphe. Le
marquis de Fénélon publia la première
édition régulière de Télémaque, con-
forme au manuscrit de Fénélon lui-même.
• FÉNÉLON (J. B. A. Saliguac de),
delà famille des précédens, né en 1714 ,
à St.-Jean-d'Estissac en Périgord, em-
brassa l'état ecclésiastique , et fut aumô-
nier de la reineMarie Lecksinska, épouse
de Louis XV. Après la mort de cette prin-
cesse , il se retira dans le diocèse d'Au-
tun , au prieuré de St.-Sernin-du Bois,
dont il avait été pourvu en 1 7 4 5 , et il s'y
fit bientôt remarquer par ses vertus bien-
faisantes. Le pays ne contenait que des
roain-mortables; il les affranchit tous; il
encouragea la culture des terres, éta-
blit des forges pour faciliter le débit du
charbon abondant dans la contrée , et
abandonna, pour les faire prospérer, le
produit d'un étang qui formait la meil-
leure partie de son revenu. Dans une an-
née de disette , il fit ouvrir à ses frais
une grande route de St.-Sernin à Con-
ches , oîi se tenait un gros marché ; il
256 FEN
procura ainsi k ses vassaux le moyen de
pouvoir transporter facilement leurs den-
rées , et aux femmes , aux enfant, aux
"vieillards employés dans ces travaux, une
existence assurée dans ces temps de mi-
sère. Des circonstances imprévues l'appe-
lèrent à Paris; il n'y voulut loger que
dans un séminaire , celui des Missions
étrangères ; bientôt il eut connaissance
<le l'établissement formé par l'abbé de
Pont-Briant en faveur des petits Sa-
voyards. Chargé de la direction de cette
bienfaisante institution, il entreprit de
faire connaître à ces jeunes infortunés
les utiles vérités de la religion ; et il ai-
dait en même temps de sa bourse ceux
que des maladies ou le défaut d'ouvrage
laissait sans ressource. Pour les encou-
rager au bien, il donnait de petites mé-
dailles de cuivre à ceux qui étaient con-
stamment appliqués à leur devoir ; et ces
médailles , bientôt connues de la police,
devinrent , pour ceux qui en étaient dé-
corés , la plus puissante des recomman-
dations. On le voyait souvent s'arrêter
près d'eux, dans les carrefours, pour
s'informer de leurs gains, les consoler
quand ils n'en avaient pas obtenu, et leur
demander quels étaient leurs besoins les
plus urgens. Quand ses moyens étaient
épuisés , il savait intéresser les riches en
leur faveur. Des vertus aussi modestes
auraient dû le préserver, il semble, de
la rage des révolutionnaires ; cependant
il fut arrêté comme suspect en 1793 , et
renfermé au Luxembourg. Les Savoyards
réclamèrent en vain leur père et leur uni-
que appui ; il fut traduit au tribunal ré-
volutionnaire, et condamné amortie 7
juillet 1794 , à l'âge de 80 ans. Placé sur
la charrette qui devait le conduire à l'é-
chafaud , il ne cessa d'exhorter , de con-
soler ses compagnons d'infortune jusqu'au
lieu du supplice , où il prononça sur eux
les paroles de l'absolution; et l'on re-
marqua que le bourreau lui-même , pé-
nétré tout à coup d'un respect involon-
taire, s'inclina devant ce saint prêtre ,
comme s'il désirait d'être absous du crime
dont il allait être l'instrument. L'éloge de
ce respectable ecclésiastique est consigné
dans les Annales pliilosophiques, morales
FER
et littéraires faisant suite aux annales ca-
tholiques, tome 8 , Paris, 1800, in-8.
FENOUILLOT. Foyez Falbaire.
* FEINZI (François-Marie) , patriarche
• de Jérusalem , est mort à Rome le 9 jan-
vier 1829, à l'âge de 91 ans; il était le
doyen des évêquesdu monde catholique.
Il naquit à Zara d'une famille noble le
24 mars 1738. Nommé archevêque de
Corfou , du rit latin , le 20 septembre
1779, il donna sa démission en 181G,
et fut créé patriarche de Jérusalem dans
le consistoire de la même année.
* FÉRAUD ( Jean-François ), jésuite et
grammairien , né à Marseille le 1 7 avril
1725, fut envoyé après son noviciat, à
Besançon , où il professa avec beaucoup
de succès, les élémens de la langue latine,
et plus tard la réthorique et la philoso-
phie. Lorsque son ordre fut supprimé, il se
retira dans le comtat Venaissin , d'où il
obtint la permission de revenir dans sa
patrie. Il y vécut presque ignoré , parta-
geant son temps entre l'exercice des de-
voirs de la religion , et les occupations
littéraires qu'il s'était créées, il émigra
au commencement de la révolution , et
rentra en France en 1798. Malgré son
grand âge, il se consacra tout entier au
service des autels qui se trouvaient alors
presque abandonnés faute de ministres ; il
fit avec beaucoup de distinction des con-
férences religieuses à l'église de St.-Lau-
rent de Marseille , et mourut dans cette
ville le 8 février 1 807 . On lui doit 1" Dic-
tionnaire grammatical de la langue
française ., Avignon, 17C1 ; et 4* édition
considérablement augmentée , Paris ,
1786 , 2 vol. in-8. Il a entrepris de figu-
rer la prononciation; mais n'ayant pres-
que pas habité Paris , ses remarques n'ont
pas toutes la même justesse. 2° Diction-
naire critique de la langue française ,
Marseille, 1787-88, 3 vol. in-4 ; ouvrage
important , dans lequel on trouve , sur
lîii grand nombre de difficultés , des so-
lutions qu'on chercherait vainement dans
le Dictionnaire de l'Académie, et qui a
été d'une grande utilité à tous ceux qui
ont voulu écrire sur la langue française.
L'uuteur y avait fait de nombreuses ad-
ditions et corrections qiîi sont restées
FER
manuscrites , la première édition n'étant
pas épuisée ; si elle n'a pas eu en France
tout le succès qu'elle méritait , on peut
l'attribuer aux Dictionnaires abrégés qui
ont paru dans un format plus portatif, et
qui en ont emprunté les remarques les
plus essentielles.
FÉRAUD. Voyez Ferraud , député.
FERATJLT (Jean), et non Ferranù,
né à Angers , fut procureur du roi au
Mans vers 1510. On a de lui , entre autres,
un traité latin Des Droits et Privilèges
du Royaume de France , dédié au roi
Louis XII, Paris, 1545, in-8.
EMPEREURS d'aLLEMAGSE.
FERDINAND I , empereur d'Allema-
gne , second fils de l'archiduc Philippe
et frère de Charles-Quint , naquit à Mé-
dine en Castille l'an 1 503. Il épousa Anne,
fille de Ladislas VI , roi de Hongrie et de
Bohème , et sœur de Louis-le-Jeune , tué
\k la bataille de Mobacs en 1526. Après la
mort de ce prince , Ferdinand se crut en
droit de lui succéder, et se fit couronner
roi de Hongrie et de Bohème en 1527
{voy. Zapol). 11 fut élu roi des Romains
en 1531. Charles-Quint ayant abdiqué
l'empire en 1556, il lui succéda en 1558,
l'abdication n'ayant été acceptée par les
princes d'empire que cette année là. Le
pape Paul IV refusa de le reconnaître pour
empereur légitime , parce que , disait ce
pontife , l'abdication de Charles-Quint ,
faite sans la permission du saint-Siége ,
était nulle ; mais Pie IV , son successeur,
ne crut pas devoir faire ces diflicultés.
Ferdinand pressa ce pape de permettre
à ses sujets d'Autriche la communion sous
les deux espèces : le pape s'occupait de
cette affaire , lorsque l'empereur mourut
à Vienne en 1564, à 61 ans. Ce prince
sage et modéré voulait donner la paix à
l'Eglise ; mais il ne connaissait pas assez
l'esprit des sectaires, toujours plus tu-
multueux et plus exigeans, lorsqu'on pa-
raît incliné à composer avec eux. Il fit
une trêve de 8 ans avec les Turcs , récon-
cilia plusieurs princes ennemis, et termi-
na les querelles des rois de Daneraarck
et de Suède. Un testament, qu'il avait
fait 20 ans avant sa mort , en 1543 , et
V.
FER 3^7
auquel il ne dérogea point par ses der-
nières volontés, jeta de loin la semence
de la guerre qui a troublé l'Europe 200
ans après. Ce testament appelait ses filles
à la succession des royaumes de Bohême
et de Hongrie , au défait des héritiers de
ses fils. Cette disposition a donné lieu ,
en 1740, à la prétention que la maison
électorale de Bavière a formée sur ces
royaumes, l'archiduchesse Anne, fille de
Frédéric I , ayant été mariée à Albert V,
duc de Bavière. Mais le vrai sens du tes-
tament ne regardait que ses filles propre-
ment dites , alors vivantes , non pas les
eufans qui en naîtraient , et qui , après
des siècles, s'imagineraient pouvoir dis-
puter la succession aux descendans de la
ligne directe. Cela était bien clair aux
yeux de tout homme qui ne raisonne pas
d'après la logique des cours , et qui ne
connaît pas les sophismes de l'ambitieuse
et tortueuse politique. (On a de cet empe-
reur des lettres en latin adressées au pape
Pie IV, Paris, 1563, in-8. Sa vie a été
écrite en espagnol par UUoa , et en italien
par Dolce : son éloge se trouve dans le
recueil intitulé : Orationes clarorum vi-
r or uni , etc. , ad principes habit œ , Co-
logne, 1559.)
FERDINAND H, archiduc d'Aotrir
che, fils de Charles, duc de Styrie , et
petit-fils de Ferdinand I, né en 1578,
roi de Bohème en 1 6 1 7 , de Hongrie en
1618, fut empereur en 1019, à 41 ans.
Les Bohémiens révoltés venaient de se
donner à Frédéric V , électeur Palatin ,
surnommé roi d'hiver (parce qu'il n'a
régné que l'espace d'un hiver). L'empe-
reur attaqua le nouveau roi et dans sou
royaume de Bohême et dans son électo-
rat. La bataille de Prague , gagnée en
1620 , décida de son sort. Son électoral
fut donné à son vainqueur , Maximilien ,
duc de Bavière. Christiern IV , roi de Da-
nemarck , s'unit , avec d'autres princes ,
pour secourir le Palatin. Tilli, un des
plus grands généraux de l'empereur , le
défit en 1626 , ôta toutes les ressources
au Palatin , et força son défenseur le roi
Christiern à signer la paix en 1629. Les
victoires de Ferdinand donnèrent de la
jalousie aux princes protestans d'Allemar
17
258 FER
gne; ils s'uairent contre lui avec Loui«
XIII , roi de France , et Gustave-Adolphe ,
roi de Suède. Gustave , le héros du Kord,
remporta une victoire signalée à Leipsick
sur Tilli en 1631 , soumit les deux tiers
de l'Allemagne , et perdit la vie , l'année
d'après , au milieu de ses triomphes, à la
bataille de Lutzen. Bannier , général du
roi mort , continua ses conquêtes , et
soutint la réputation des armes suédoises.
L'empereur rompit le cours de ces vic-
toires , par le gain de la bataille de Nort-
lingueen 1634. L'année suivante, il con-
clut à Prague une paix particulière avec
le duc de Saxe et d'autres princes pro-
testans , et fut assez heureux , deux ans
après , pour faire déclarer son fils roi des
Romains. Enfin, après 18 ans d'un règne
toujours troublé par des guerres intes-
tines et étrangères , Ferdinand mourut
en 1637. Les plus grands ennemis de cet
empereur n'ont pu refuser des éloges à sa
grandeur d'âme , à sa prudence , à sa fer-
meté, à ses autres vertus. Il semblait être
au-dessus des événemens , dit un histo-
rien , et trouvait , jusque dans ses pertes,
les moyens de parvenir à ses fins. Il eût
été le restaurateur de la religion catho-
lique eu Allemagne , sans les puissans
secours que la France et la Suède donnè-
rent aux protestans. Quelques sectaires
et les philosophistes des derniers temps
ont déchiré le nom de ce prince d'une
manière indigne , et traité de fanatisme
les efforts qu'il fit pour réprimer les nou-
velles erreurs. Un écrivain judicieux et
équitable remarque , à cette occasion ,
que (f le nom de fanatique n'est donné
» par nos prétendus sages qu'aux catho-
« liques qui ont combattu pour la foi de
» leurs pères , pour la défense de leurs
j> temples, de leurs sacrifices, de leurs
» usages. Charles V , Philippe II , le duc
» d'Albe , Ferdinand II , etc. , sont des
M fanatiques ; Elisabeth , qui fait nager
» l'Angleterre dans le sang pour y établir
j) l'hérésie, est une héroïne. Gustave-
» Adolphe , qui a pillé et dégradé toutes
» les églises d'Allemagne , et ravagé en
jj l'honneur de Luther dix grandes pro-
» vinces ; Guillaume , qui détrône son
» beau-père en faveur de la religion an-
FER
» glicane, etc., sont des héros. Qualitë
)' distinctive de la vérité , elle seule attire
» la haine et les malédictions de l'er-
» reur. » (voyez Jacques II, Philippe II ,
Louis XIV, Maintenon.) Le Père Guil-
laume I^mormaini a donné un tableau
des vertus de ce religieux empereur, sous
le litre de Idea principis christiatii, Co-
logne, 1638, in-24 de 298 pages. Gus-
tave-Adolphe disait au milieu de ses bril-
lans succès , qu'// ne craignait que les
vertus de Ferdinand. Betlem Gabor, un
autre de ses ennemis , disait que la guerre
était difficile et dangereuse contre un
prince que la prospérité rH élevait pas ,
et qui ne se laissait point abattre par
l'adversité.
FERDINAND in , surnommé Er-
nest , fils aîné de Ferdinand II , naquit
en 1608 , fut roi de Hongrie en 1625 , de
Bohême en 1627 , des Romains en 1636 ,
et empereur en 1637. La mort du père
ne changea rien à la face des affaires , et
la guerre continua partout avec une égale
vivacité sous son fils. Il eut d'abord quel-
ques avantages sur les Suédois ; mais Ber-
nard de Saxe, duc de Veimar, devint un
ennemi aussi dangereux pour Ferdinand
III , que Gustave-Adolphe l'avait été
pour Ferdinand II. Ce général remporta
4 victoires en moins de 4 mois. Bannier
ne fut pas moins heureux sous ce règne,
qu'il l'avait été sous le précédent. Il osa
assiéger Ratisbonne , où l'empereur te-
nait sa diète ; il la foudroya de son canon ,
et , sans un dégel , il s'en rendait maître.
Les Français s'étaient joints aux Suédois.
Le maréchal de Guébriant enleva Lamboi
et ses troupes à la bataille d'Ordingen ,
en 1643. Le duc d'Enghien, appelé de-
puis le grand Condé , força l'année sui-
vante les retranchemens de Fribourg, et
gagna en 1645 une bataille à Nortlingue ,
dans cette même plaine oii les Suédois
avaient été vaincus onze ans auparavant ;
mais cette victoire n'eut ni l'importance
ni les effets de la première. Torstenson ,
autre général suédois , pressait l'Autriche
d'un côté , Condé et Turenne de l'autre.
Ferdinand , fatigué de tant de revers ,
conclut enfin la paix de Westphalie en
1648. Les traités signés, l'un à Osnabruck,
I
I
FER
l'autre à Munster , sont aujourd'hui le
code politique et la principale des lois
fondamentales de l'empire germanique.
Par cette paix, les rois de Suède devin-
rent princes de l'empire , en se faisant
céder la plus belle partie de la Poméranie :
le roi de France devint landgrave l'Alsace,
sans être prince de l'empire : la religion
luthérienne et la calviniste furent auto-
risées , et l'église catholique frappée du
plus grand coup qu'elle eût encore essuyé
en Allemagne. Le saint-Siége et le roi
d'Espagne furent mécontens de ce traité ;
l'empereur lui-même en versa des larmes;
mais il subit la loi de la nécessité , et
mourut environ dix ans après, en 1667.
( L'histoire particulière de Ferdinand
III & été publiée en italien par le comte
Galeazzo Gualdo Priorato, Vienne, 1672,
in-fol. avec plusieurs portraits et des
pians de différentes places fortes. )
ROIS DE CASTILLE, DE tÉO.N ET d'ESPAGSE.
FERDINAND I, roi de Castille et
de Léon , dit le Grand , second fils de
Sanche 111 , roi de Navarre , donna ba-
taille à Alfonse , roi de Léon , et le tua
en 1037. Maître de ce royaume et par le
droit de conquête et par celui de son
épouse, il se fit couronner roi de Léon
et des Asturies en 1038. Il tourna ensuite
ses armes contre les Maures , leur prit
beaucoup de villes , et poussa ses cou-
quêtes jusqu'au milieu du Portugal , ou
il fixa la rivière de Mondego pour servir
de bornes aux deux états. Quelque temps
après, il déclara la guerre à son frère
Garcias IV , roi de Navarre. On en vint
aux mains, et Garcias perdit son royaume
et la vie. Ferdinand mourut eu 1066,
après avoir régné 30 ans eu Castille , et
28 dans le royaume de Léon. Prince sage ,
grand capitaine , on ne lui reproche que
la faute , trop souvent répétée dans ces
temps barbares en Espagne et en France ,
d'avoir partagé ses états entre ses trois
fils , qui tous devinrent rois : faute qui
fut toujours la source des guerres civiles.
FERDINAND II, fils puîné d' Alfonse
YIII , roi de Léon et de Castille , rem-
porta de grands avantages sur les Portu-
gais, fit Alfonse Henriquez 1 eur roi pri-
FER a59
sonnier , et usa avec modération de sa
victoire. Il mourut en 11 87, après un
règne de 30 ans.
FERDINAND III ( Saint ) , fils d'A!- .
phonse IX, né l'an 1200 , parvint à la
couronne de CastHle par l'abdication
volontaire de sa mère , la reine Béren-
gère, en 1217 , et à celle de Léon par la
mort de son père en 1230. Dès l'an 1226,
il avait commencé à faire la guerre aux
Maures, et leur avait pris Baeza et Useda.
Ce fut en 1 236 que Cordo'ue tomba en
son pouvoir. Elle contenait 300,000
âmes; et l'on vit un roi chrétien occuper
le palais d'Abdérame , dit le Grand , trois
siècles après l'époque oii il fut construit.
Il convertit eu église sa superbe mosquée,
chef-d'œuvre d'architecture moresque ,
oîi l'on compte 12,000 colonnes , et qui
est encore aujourd'hui la cathédrale de
Cordoue. Al-Mansour y avait fait apporter
les cloches de Compostelle sur les épaules
des chrétiens , et Ferdinand les fit repor-
ter en Galice sur celles des Maures. Après
la prise de Cordoue , les rois maures de
Murcie et de Grenade se déclarèrent tri-
butaires de Ferdinand. Ce prince tourna
ses armes contre Séville : deux ans se
passèrent dans les préparatifs et à la con-
struction d'une flotte qui, placée à l'em-
bouchure du Guadalquivir , bloquait le
port de Séville , et interceptait tous les
convois envoyés d'Afrique. Après une
opiniâtre défense , Séville capitula faute
de vivres. Peu de temps après , Ferdi-
nand prit Xérès, oii avait péri , cinq
siècles et demi auparavant , dora Rodri-
gue , dernier roi goth en Espagne , qui
tomba au pouvoir des Musulmans. Il mou-
rut en 1262, occupé du projet de con-
quérir le royaume de Maroc. Son succes-
seur fut Alphonse X , qu'il avait eu de
Béatrix de Sonabe. Il avait épousé en
secondes noces Jeanne de Ponthieu , fille
du comte Simon et de Marie , petite-fille
de France. Blanche de Castille , mère de
saint Louis, était sœur d'Alphonse IX,
père de Ferdinand. Ce prince , cousin -
germain de saint Louis , fut aussi saint ,
et peut-être plus grand homme que lui.
Il fit des lois sages comme ce roi de
France : il humilia les grands qui tyran-
26c
FER
nisaient les petits , purgea ses états des
brigands et des voleurs , établit le conseil
souverain de Caslille , fit rassembler les
lois de ses prédécesseurs en un Code , et
donna une nouvelle face à l'Espagne. Son
zèle pour la foi fut sans bornes ; sa piété,
sa vie austère et exemplaire, sa magnifi-
cence dans tout ce qui concerne le culte
de Dieu , furent constamment regardées
par les peuples chrétiens comme les vraies
causes qui tenaient la victoire attachée à
sa personne et à ses armées. Les philoso-
phes ne lui pardonneront pas d'avoir
poursuivi les hérétiques, et fait punir les
dogmatisans ," mais c'est une nouvelle
preuve que leur suffrage n'est pas fait
pour honorer la véritable grandeur. Clé-
ment X le mit au nombre des saints. Le
cardinal dom Rodrigue Ximenès , arche-
vêque de Tolède et ministre de Ferdinand
III , a écrit son histoire sous le nom de
Chronique , ^és'iWe , 1616; Médina del
Campo, 1G67 , in-fol. L'abbé Ligny a
écrit , en français , la Vie de ce prince ,
Paris, 1759, in-12.
FERDINAND IV , est surnommé
V Ajourné , parce que dans un accès de
colère il fit jeter du haut d'un rocher ,
deux seigneurs qui , avant que d'être pré-
cipités, l'ajournèrent à comparaître de-
vant Dieu dans 30 jours, et qu'il mourut
au bout de ce terme. Ce qu'il y a de cer-
tain c'est que Ferdinand mourut subite-
ment et fort jeune , à 24 et selon quel-
ques-unsà27 ans. Ilétaitparvenuautrône
de Castille en 1295 , à l'âge de dix ans.
Les premières années de son règne furent
très orageuses ; mais la reine Marie , sa
mère , se conduisit avec tant de sagesse
et de fermeté, qu'elle assura la couronne
sur la tète de son fils. Il se signala par ses
conquêtes sur le roi de Grenade et sur les
Maures , aiuquels il enleva Gibraltar ,
moins fort alors qu'aujourd'hui. C'était
un prince violent , emporté et despotique.
Voici comme un auteur contemporain
rapporte l'histoire de son ajournement.
« Deux frères , accusés de meurtre et con-
» damnés à être précipités du haut d'un
» rocher , quoiqu'on n'eût pas de quoi
7) les convaincre , et qu'ils persistassent
» à nier le fait, en appjelèrent à l'équité
FER
» des lois ; mais voyant que leurs repré-
» sentations au roi étaient inutiles, et
» qu'ils avaient affaire à un juge impla-
» cable et féroce , ils prirent Dieu à té-
» moin de leur innocence, et citèrent le
» prince à comparaître dans 30 jours k
» son tribunal. On méprisa ce discours,
» qu*on regarda plutôt comme un désir
» (,de vengeance que comme une prédic-
» tion (1). Ferdinand marchait en Anda-
'r> lousie , et était arrivé à Martos , lors-
» qu'au trenlièmejour, justement depuis
» l'exécution des deux frères , le monar-
» que s'étant retiré après son dîner pour
» dormir , fut trouvé mort dans son lit •
( voyez MoLAY ).
FERDINAND V, difle CathoUque, fils
de Jean H, roi d'Arragon, vit le jour à Soz
sur les frontières de la Navarre le 1 0 mars
H52.il épousa en 1469, Isabelle deCastil-
Ic, sœur de Henri IV, dit V impuissant. Ce
mariage joignit les états de Castille avec
ceux d'.\rragon. Ferdinand et Isabelle
vécurent ensemble , dit un historien , non
comme deux époux dont les biens sont
communs sous les ordres du mari , mais
comme deux monarques étroitement unis
pour leurs communs intérêts. Us formè-
rent une puissance , telle que l'Espagne
n'en avait pas encore vue. Ferdinand dé-
clara la guerre à Alfonse , roi de Portugal ,
{•; Ces ajournemensfail» par desinnac«nii, peuTPnt êtr«
iff espères de prophéties, ou bien un recours lif et ron-
fiaiil Ters la justice diiine . gaiis cotère et «ans esprit d*
Tenjreance. En pénéral . la proTOCiitinn ou appel au juge-
ment de Dieu n'est pas criminelle, lorsnu'ellese fait sans
passion . par amour de la justice , dans les circoustances
conrenablrs et urgentes. C'est ainsi que Patid disait i
Saiil : JiuHnl Dominas inter te et tn« , et uUiualur me Do-
mina!. Et Zacbarie condamné à la mort par Joas ; Fideat
Dominât et requirat. Et les Uachabées qui annonçaient si
fortemeni et si efficacement la prompte et terrible puni-
tion d'Anliochus. Et saint Paul qui ne Toulail paa que la
conduite d'Alexaudrele Trésorier restât impunie : Rediet
itii Dominut juxta opéra tua. Et les saints martvr* qui daii)
I'ipocal,vpse appellent le jour qui doit rengcr leur taiif :
Xhijuequo, Domine , non vindieae tanguinem not/rum, etc. J
Du reste , il est certain que Dieu exauce les voeut mèma
criminels des misérables; soit pour arcrlir les riches etlei
puissansdenepoint mépriser, moins encore opprimer lei
faibles : soit pour rendre redoutable 1 inroration de soo
saint nom , et nous arertir de ne pas l'employer légère-
ment, — L'efiîCBoe de ces ajournemcns a un rapport sei>-
slble arec celle des malédictions et imprécations, attestée
par une multitude d'histoires aTérées , et par l'autorité de»
LiTre* saints. Jb inope ne avertat oculie propler iram , «I
iii'n retinqunt qnarentibut tibi rein maledieere. Ualedietn-
lit tibi in amaritudine anima exaudietur depreeatio itfiut ;
txtudlcl autemeim^iii fetit illam. Ecrii. i. fNotideFrllcr )
FER
le ballil à Toro en HîC , et teiinîna la
guerre par uncpaixavanlageuse. Leroyau-
me de Grenade gémissait sous le joug
des .Maures ; il le conquit, après une
guerre de 8 ans. Rlaître de la Castille par
sa femme , de Grenade par ses armes , et
de l'Arragon par sa naissance, il ne lui
manquait que la Navarre qu'il conquit
dans la suite. Dans le même lems que
Ferdinand faisait des conquêtes en Eu-
rope , Christophe Colomb découvrait
l'Amérique et le faisait souverain d'un
nouveau Monde. Ce n'était pas assez pour
Ferdinand : il envoie en Italie Gonsalve
de Cordoue , dit le grand Capitaine, qui
s'empare d'une partie du royaume de
Naples , tandis que les Français se ren-
daient maîtres de l'autre. Ceux-ci furent
ensuite entièrement chassés par les Es-
pagnols , avec lesquels ils ne pouvaient
s'accorder sur les limites. Cette conquête
fut suivie de celle de la NavaiTC. Henri
VIII, roi d'Angleterre, était son gendre;
il lui proposa la conquête de la Guieune.
Le jeune roi envoie une armée , et son
beau-père s'en sert pour conquérir la
Navarre : fondant , dit-on , ses droits sur
une bulle prétendue , qui excommuniait
le roi de Kavarre , et qui donnait son
royaume au premier occupant ; mais puis-
que Ferdinand étant en guerre avec la
France , avait autant de droit de leur
prendre la Navarre que toute autre pro-
vince , il est inutile, de lui supposer des
motifs imaginaires pour faire cette con-
quête. Ferdinand, appelé le sage et le
prudent en Espagne , en Italie le pieux ,
' n'eut pas en France de surnom si honora-
ble : on sait que les Français ne disent
guère de bien de leurs vainqueurs. Ce-
pendant les gens équitables et impartialux
lui ont rendu justice. « On ne peut lui
« refuser , dit un auteur français , d'avoir
» été le plus grand roi de son siècle :
» fin , souple , adroit , laborieux , éclairé,
» connaissant les hommes et les affaires ,
» fécond en ressources , prévoyant les
» événemens , faisant la guerre non en
» baladin , mais en roi. » Ce monarque
mourut en 15)6 , au village de Madriga-
let , d'une hydropisie , causée par un
breuvage que Germaine de Foix, sa se-
FER 2(rr
condc femme , lai avait douné pour le^
rendre capable d'avoir des enfans. Les
juifs furent chassés d'Espagne sous so»
règne ; ce bannissement eut quelques
mauvaises suites', mais la conduite de
ces Israélites en avait fait appréhender
de plus grandes , si' on ne prenait pas le
parti de les éloigner. Il humilia la haute
noblesse ; il rendit la force aux lois ; il
ramena la décence et la régularité diï
clergé ; il diminua les impôts ; il donna
les plus sages ordonnances , il punit les
magistrats prévaricateurs : et ce qui est
beaucoup moins que tout cela aux yeux
des sages , il découvrit un nouveau Mon-
de ; il conquit Grenade, Napies, la Na-
varre, Oran, les côtes d'Afrique. Ce n'était
pas sans raison que Philippe II disait ;
Ccst à lui que nous devons tout. Sa vie
écrite par l'abbé Mignot , 2 vol. in-12 ,
manque d'exactitude et d'impartialité ; on
y remarque plus d'asservissement aux
préjugés nationaux, que d'attachement
à la vérité de l'histoire. (L'histoire de son
règne a été faite aussi par Kerriand de
Pulgar , et puliliée sous le titre de Cro-
nica de los Rcyes Ferdinando y Dona
Isabel, Sarragosse, 1567, in-fol. Valence,
1 7 80, in-fol. ; on l'a encore sous le titre de
Rerum a Ferdinando et Isabella hispa-
niarum regibus gcstarum décades duce ,
Grenade, 1545, in-fol.)
FERDINAND VI, surnommé le Sage,
fils de Philippe V , et de Marie de Savoie
sa première femme, né à Madrid le 6 avril
1712, monta sur le trône après la mort de
son père , arrivée en 1746. Ce prince prit
part à la guerre de 1 7 4 1 , et surtout h la
paix signée en 1748 , qui procura à ua
de ses frères les duchés de Parme et de
Plaisance. Il profita de ce calme pa.ssa-
ger, pour réformer les abus introduits
dans les finances; il rétablit la marine, et
protégea le commerce, les arts et l'agri-
culture. L'Espagne, fécondée par ses bien-
faits, vit sortir de son sein des manu-
factures en tout genre. Par ses soins les
Espagnols, auparavant tributaires de l'in-
dustrie des autres nations, virent abon-
der chez eux les matières premières et les
productions des arts. Des canaux prati-
qués en différentes parties de l'état par-
26a FER
tèrent l'uboiulunce dans les campagnes ;
avec tout cela l'Espagne n'augmenta ni
en force ni en considération publique.
Sa faiblesse resta toujours la môme , et ])a-
vut même s'annoncer par des symptômes
plus sensibles. « Il en est des royaumes
» arrivés une fois à l'époque de leur dé-
» cadence , dit un politique, comme d'un
)i corps grave , dont la chute s'accélère
» de moment à autre, et qui ne peut être
M arrêté sans quelque cause majeure ,
» moins encore prendre une direction ré-
» trograde. » Ferdinand YI mourut sans
postérité à Madrid le 10 août 1769 , à 46
ans. Son frère Charles lui succéda. Il fut
toujours d'une santé faible , qui ne lui
permit pas de faire tout ce qu'il aurait
voulu. Il avait épousé, en 1129, Marie-Ma-
deleine-Tbérèse, infante de Portugal.
ROIS DE NAPLES.
FERDINAND I , fils naturel d'Alfonse
d'Arragon , dit le Magnanime , prit pos-
session du royaume de Naples en 1458 ,
qui lui fut confirmée par le pape Pie II
( il avait alors 34 ans. ) Il eut d'abord à
soutenir une guerre contre plusieurs prin-
ces qui lui contestaient ce royaume ; il
fut battu près de Sarno ; mais ayant été
ensuite secouru par Scanderberg, ses ar-
mes eurent du succès ; il battit le duc de
Calabre. Tranquille possesseur du royau-
me, il ne tarda pas de tourner ses armes
contre le saint Siège qui lui avait rendu
des services signalés. Innocent VIII réus-
sit à faire la paix avec lui ; mais ce fut
pour un moment. Ce prince renouvela
d'abord les hostilités ; ce qui força le pape
à l'excommunier; mais ayant montré du
regret de ses déprédations , le pontife si-
gna derechef un traité de paix. Charles
VIII, roi de France, ayant formé des pré-
tentions sur ce royaume, Ferdinand vou-
lut détourner l'orage en faisant des pro-
positions avantageuses à ce prince; elles
furent rejetées, et ce refus affligea Ferdi-
nand si vivement, qu'il en mourut en
1 493. Il fut peu regretté de ses sujets qu'il
n'avait cessé de vexer ainsi que ses voi-
sins. Alfonse son fils aîné lui succéda.
FERDINAND II, fils d'Alfonse, fut
coui'onDé roi de Naples en 1495; il eut
FER
d'abord une guerre sangliinte à soutenir
contre Charles VIII, roi de France, et ses
propres sujets qui l'obligèrent de se reti-
rer dans l'ile d'Ischia. Les Vénitiens et les
Espagnols travaillèrent à le rétablir dans
Naples occupé par les Français. Ferdinand
paraît devant cette ville avec une flotte
nombreuse en 1495, assiège Montpensier
retiré dans un des châteaux de Naples,
l'oblige à l'abandonner, l'investit ensuite
dans Attelle etie fait prisonnier. Il ne jouit
point du fruit de ses victoires. Il mourut
immédiatement après que les Français eu-
rent évacué le royaume de Naples l'an
149C. Frédéric son oncle lui succéda.
' FERDINAND III ( Joseph-Jean-
Baptîste ) , archiduc d'Autriche , grand-
du; de Toscane , fils de Léopold II et de
Marie-Louise , infante d'Espagne, et frère
de l'empereur François II , naquit à Flo-
rence le 8 mai 1769. Son père ayant été
appelé au trône d'Autriche par la mort
de Joseph II, son frère, Ferdinand, fut
proclamé grand duc le 7 mai 1791. Il prit
les rênes du gouvernement dans les cir-
conslances les plus dilficiles et au mo-
ment que la révolution française mena-
çait tous les trônes de l'Europe. Ferdi-
nand crut conserver le sien à force de
condescendance , n'ayant pas de forces
suffisantes pour s'opposer à un ennemi
puissant. Il fut un des premiers souve-
rains qui reconnurent la république fran-
çaise. Laflotte, ministre du roi de France
en Toscane, ayantélé confirmé dans cette
qualité par la Convention, le grand-duc
n'hésita pas à le recevoir , et , par un
acte du 1 6 janvier 1793, dit entre autres
choses : « Nous nous ferons un vrai plai-
» sir de l'accueillir..., et de lui porter
» pleine et entière foi en tout ce qu'il
M aura à nous exposer au nom de la ré-
» publique française, à laquelle nous
» sommes enchantés de pouvoir donner
» des preuves continuelles de notre scru-
w puleuse exactitude à observer la plus
ï> parfaite neutralité, etde notre désir con-
» staut de cultiver la bonne intelligence, i
M au maintien de laquelle nous avons tou-1
» jours attachéuu grand prix. » Ferdinand |
n'avait pas voulu entrer dans la première j
coalition contre la France. Les secoure j
FER
immenses qui sortaient de ses états pour
subvenir aux besoins des révolutionnai-
res, sa bonne harmonie avec la républi-
que française, ne pouvaient que déplaire
aux autres souverains: aussi lord Hervey,
ministre britannique à Florence, exprima,
dans les journaux , le mécontentement de
sa cour ; ce mécontentement était d'au-
tant plus juste que celle de Florence ne
prit point le deuil à la mort funeste de
Louis XVI. La Russie fit les mêmes plain-
tes, et lui reprocha ses liaisons avec les
régicides de son parent Louis XVL Les
plaintes de François II, frère du grand-
duc , et de son oncle le roi d'Espagne ,
furent encore plus vives, mais ne purent
ébranler la résolution de Ferdinand, qui,
parfois, montrait même pour l'ennemi
commun une partialité imprudente. Le
8 octobre , le ministre anglais vint inti-
mer au grand-duc de renvoyer le ministre
républicain , faute de quoi l'escadre an-
glaise, qui était devant Livourne , bom-
barderait ce port , et des troupes anglai-
ses occuperaient la Toscane. Le grand-
duc fut contraint d'obéir : La flotte par-
tit ; mais le grand-duc ne tarda pas à
montrer encore ses véritables sentimens.
Les Anglais ayant enlevé à Livourne une
grande quantité de grains appartenant à
la république française , Ferdinand III,
par un motu proprio, du 4 novembre
1794, fit restituer à ses frais ces grains
dans les ports de Provence. Les succès
des armées républicaines portèrent Fer-
dinand à dépêcher en France , comme
ambassadeur extraordinaire, le comte
Carletti , qui, parmi les révolutionnaires,
passait pour un excellent patriote. Car-
letti arriva à Paris le 31 janvier 1795 : il
avait ordre de traiter directement avec
le comité de salut public, et de rétablir
la neutralité avec la France. Le 3 janvier,
î! conclut , avec ce comité , le traité qui
commence ainsi : « Le grand-duc de Tos-
B cane révoquetoutacte d'adhésion, con
» sentement ou accession à la coalition
i> armée contre la république française ,
» etc., etc. )> SonA. R. Madame (aujour-
d'hui dauphine) était à cette époque dé-
tenue encore au Temple , et sur le point
d'être renvoyée en Autriche. Le comte
FER a63
Carlétli demanda la permission de pré-
senter ses devoirs à la princesse ; mais ,
pour toute réponse , le Directoire lui in-
tima l'ordre de quitter Paris sur-le-champ.
Cela n'interrompit pas la bonne harmo-
nie de la France avec le grand-duc , qui
disgracia son ambassadeur, et envoya à sa
place don Neri Corsini, frère du prince de
ce nom. Malgré les sacrifices que le grand-
duc avait faits pour la république fran-
çaise , les troupes entrèrent dans ses états
en juillet 1796. Elles n'étaient encore
qu'au pied des Alpes que Ferdinand or-
donna à tous les émigrés français de sor-
tir de la Toscane. Outre cela , les Anglais
ayant insulté à Livourne le pavillon ré-
publicain , et le grand-duc ne pouvant
donner au Directoire la satisfaction qu'il
lui demandait, une division de Buona-
parte vint prendre possession de ce port.
Le général français, sa femme .loséphine,
et son oncle , depuis cardinal Fesch, vin-
rent visiter le grand-duc , qui leur fit
l'accueil le plus distingué et les admit à
sa table ; moyennant deux millions, que
ce prince paya , Buonaparte promit que
ses troupes n'entreraient pas à Florence.
Mais le jacobinisme avait pénétré dans la
Toscane , et comptait un grand nombre
de partisans. En même temps que le grand-
duc reconnaissait les républiques Ligu-
rienne et Cisalpine, et permettait que
ceux qui en dépendaient portassent la
cocarde tricolore , il fut obligé d'établir
un tribunal pour punir les factieux ,
dont le chef était un certain Aletis. Mais
cette mesure ne les découragea pas , et
ils aJËchèrent aux portes mêmes du pa-
lais ducal , des pamphlets , dont l'un di-
sait : Le peuple seul est souverain. Le
complot éclata peu de jours après ; il
avait pour but d'assassiner le grand-duc,
d'incendier Florence , et de s'emparer du
gouvernement. Tels étaient les fruits que
Ferdinand allait recueillir de sa trop offi-
cieuse neutralité , lorsqu'il forma une ar-
mée de 16,000 hommes pour contenir
les factieux. Cependant la guerre contre
la république continuait toujours ; les
Napolitains entrèrent (en décembre 1 798)
dans Livourne, le Directoire accusa le
grand-duc d'avoir rompu la neutralité »
^4 FEÏV
et envoya dans la Toscane le général Ser-
. rurier. Mais Ferdinand, au prix de quinze
cent mille francs ayant obtenu des Na-
politains l'évacuation de Livourne, le gé-
néral Serrurier sortit de la Toscane , et
la paix fut rétablie jusqu'au mois de mars
1799. A cette époque la Toscane fut com-
prise dans la déclaration de guerre faite
par la France à l'empereur d'Allemagne.
Des troupes françaises , commandées par
Schérer, MioUis et Gautier, entrèrent
dans la Toscane sans que Ferdinand fit
la moindre tentative pour arrêter leur
marche. Le 25 , Florence était au pouvoir
des républicains, et le 27 le grand-duc
quitta sa capitale et se dirigea vers Vienne.
Lors de l'entrée de BuonaparleàFlorence,
la Toscane avait été dépouillée d'une
grande partie de ses richesses en ta-
bleaux, sculptures, entre autres de la
Vénus de Médicis , et de plusieurs manus-
crits précieux de la bibliothèque Lauren-
tiana -. à cette seconde entrée des Fran-
çais , le pillage fut encore plus considé-
rable. Nous n'avons point parlé du cou-
rageux zèle des Arétins , qui s'armèrent
pour chasser les ennemis de leur religion
et de leur patrie : mais comme ils étaient
en trop petit nombre , et qu'ils ne furent
point secondés pas les autres Toscans ,
il payèrent cher les pi-emiers succès qu'ils
obtinrent : un grand nombre fut égorgé
par les républicains, qui mirent leur ville
au pillage. On accorda à Ferdinand , par
le traité de Lunéville ( 1802 ) , le duché
de Saltzbourg ; et ensuite on lui donna
(en 1805 ) en échange le pays de Wurtz-
bourg. Le grand-duc vécut en bonne in-
telligence avec Buonaparte , qui lui fit
espérer , dit-on , de le faire roi de Polo-
gne , et assista (en 1810) au mariage de
Napoléon avec sa nièce l'archiduchesse
Marie-Louise. La coalition de 1813 ayant
rendu les trônes à leurs souverains légi-
times , Ferdinand revint à Florence , s'y
montra bon prince , et protecteur des
lettres et des arts. Il est mort d'apoplexie
eu janvier 1825. Son fils Léopold II
(né en 1797 ) lui a succédé; Ferdinand
avait eu ce fils et deux filles de son épouse
Louise-Marie, princesse de Naples, morte
en 1804.
FER
* FERDINAND IV, roi de Naples et
des Deux-îSiciles, troisième fils de Char-
les III, qui fut depuis roi d'Espagne , et
d'Amélie de Saxe,, naquit à Naples !e 12
janvier 1751. Le prince de Santo-Nicau-
dro fut chargé de le diriger , ainsi que son
frère aîné Charles IV, qui devint roi d'Es-
pagne. Ce seigneur rempli de probité et de
zèle, manquait toutefois des connaissan-
ces nécessaires pour remplir des fonctions
si difficiles : aussi ses élèves ne furent-
ils pas soignés comme ils le méritaient,
et c'est à ce défaut d'une bonne éduca-
tion qu'il faut attribuer sans doute plu-
sieurs des fautes de leur règne. Dès son
enfance, Ferdinand manifesta pour le peu-
ple un attachement qui le rendit cher à la
nation : il s'amusait avec les enfans deson
âge , quelle que fût leur condition , et il
les appelait ses camarades .- sous ce rap-
port c'était comme notre Henri IV. La mort
de Ferdinand VI appela en 17 59 sur le
trône d'Espagne le frère puîné de ce roi ,
Charles III , père de Ferdinand dont nous
retraçons la vie. Ce jeune prince, alors
âgé de 8 ans, devint par-là même roi de
Naples : son avènement au trône fut ac-
cueilli avec enthousiasme par le peuple
auquel il fut présenté par son père. Avant
le départ de Charles III , un conseil de
régence fut présidé par le marquis de
Tanucci, ancien professeur de droit à
Pise, et alors premier ministre du royau-
me de Naples. Ce gouvernement fut des-
potique : le président de la régence, gui-
dé par l'ambition , chercha à détourner
le roi des afiaires , et ce fut dans ce hut
qu'il l'environna des plaisirs les plus
capables d'égarer son esprit et son cœur,
sans songer aux conséquences qu'une pa-
reille conduite devait amener. En même
temps , il abusait du pouvoir et faisait
murmurer les grands et le peuple. Sur
ces entrefaites , le jeune prince fut marié
le 7 avril 1768 , à Marie-Caroline-Louise
de Lorraine, archiduchesse d'Autriche ,
sœur de Marie- Antoinette, reine de Fran-
ce ; cette princesse, remplie d'érainentes
qualités, parvint en peu de temps à s'em-
parer de l'esprit du roi , son époux , et
sut dès lors le gouverner à son gré. Elle
songea bientôt à tirer parti des mécon-
1
FER
t<>ntemens qu'avaient provoqués les réfor-
mes plus ou moins liaidies | qu'avaient
tentées le conseil de régence ; elle lit re-
marquer au roi la haine que portait au
chef de l'Eglise, son ministre Tanucci ;
elle s'efforça de le renverser ; elle y réus-
sit (1777). Celui-ci ayant été remplacé
par le marquis de la Sambuca , elle cher-
cha à le dominer ; mais n'y étant pas par-
venue , elle finit par le faire sortir du
ministère (1784). Elle mit à sa place y/c-
ton pour lequel elle avait une confiance
sans borne , qu'il sut conserver pendant
long-temps. Voyez Acton. Ce ministre
fut successivement appelé à la marine ,
à la guerre et aux finances , et , quel-
ques fonctions qu'il ait remplies , il fut
toujours le chef et le maître des autres
ministres; il dirigeait l'état, et était le véri-
table roi. Cependant il associait à sa puis-
sance la reine 3Iarie-Caroline : un con-
seil qu'elle présidait , avait été établi par
les soins de son favori , et tout se réglait
d'après ses avis. Ferdinand n'était roi que
de nom ; il n'avait aucune autorité ; le
seul droit qui lui ait été conservé était
celui de s'amuser à son gré , et il en usait
amplement : ce qu'il y a de remarquable,
c'est que lui-même connaissait la nullité
du rôle qu'on lui faisait jouer , et, quand
on s'adressait à lui pour quelque affaire ,
il répondait : allez parler à la maîtresse
(c'est ainsi qu'il désignait la reine). Ac-
ton était entièrement dévoué à l'Angle-
terre et à l'Autriche : il mettait de côté
Rome , la France et presque l'Espagne.
Le saint-Siége avait à se plaindre des
empiètemens que l'autorité civile faisait
tous les jours sur l'autorité ecclésiasti-
que ; plusieurs églises et monastères fu-
rent .supprimés, sans l'avis du souverain
pontife. La France , qui cependant avait
donné la famille royale à Naples, n'était
nullement écoutée , et une frégate fran-
çaise ne put même entrer dans les ports
de ce royaume. Enfin la voix de Char-
les III était sans influence sur son fils : il
fallut pour le rappeler à ses devoirs qu'il
lui écrivît la lettre la plus pressante: en-
core quel fut le résultat de celte démar-
che ? une entrevue devait avoir lieu en-
tre le père et le fils ; celui-ci avait reçu
V.
FER 265
d'Espagne un vaisseau magnifique (le
Joachim) \ioyir faire le voyage : lîi reine,
le roi et leur ministre Acton s'embarquè-
rent dans le mois de mai 17 8G pour aller
auprès de Charles IH; arrivés à Libourne;
Marie-Caroline et Acton parvinrent à faire
renoncer Ferdinand à ce voyage; au lieu
de continuer leur route , ils allèrent à
Florence et revinrent à Naples , au mois
de novembre de la même année. Celte
conduite semblait devoir amener une
rupture avec l'Espagne; mais Acton était
si adroit; il avait tant d'influence sur la
reine et sur le roi qu'il détourna l'orage
qui commençait à gronder sur sa têle.
Dès qu'il crut remarquer que Marie-Ca-
roline commençait à s'attacher à une
autre créature, et que son crédit pouvait
être menacé , il s'empressa de faire dis-
paraître de la cour celui qui lui portait
ombrage, et le comte de Cavamanica,
capitaine des gardes, qui avait été appe-
lé au conseil de la reine, fut envoyé en
Sicile en qualité de vice-roi ; encore ne
jouit-il pas long-temps de sa dignité, car
il mourut bientôt après, du poison qui
lui fut donné, dit-on , par son secrétaire.
La puissance d'Acton prit à cette époque
un nouvel accroissement. Charles III vint
à mourir en 17 88, et dès lors l'Espagne
fut sans influence sur le royaume de Na-
ples. Tel était l'état de ce pays , lorsque
la révolution française éclata , et alarma
les puissances de l'Europe. Acton , fran-
çais de naissance (voyez ce mot), avait
pour son pays une aversion qu'il ne
pouvait dissimuler ; et il travaillait moins
à venir au secours des augustes parens
du roi et de la reine , qu'à contracter
une alliance avec l'Autriche et avec l'An-
gleterre. Le gouvernement français , mé-
content des relalionsactivcs qui existaient
entre le cabinet de Naples et celui de Sl.-
Janies , envoya l'amiral Latouche avec
une escadre devant Naples, afin de faire
rompre cette alliance avec l'Angleterre.
Dans le cas oii il n'y parviendrait pas ,
il était chargé de bombarder la ville. Ac-
ton consentit à tout. 11 n'en continua
pas moinsensecretsesrelations, et il était
d'ailleurs bien résolu de se soustraire
aux conditions qui lui avaient été impo-
1-7..
266 FER
sées, 4ès que les circonstances le lui
permettraient. Cette affaire avec la France
étant terminée, du moins en apparence ,
Ferdinand songea à se réconcilier avec
le souverain pontife , et ce fut dans ce
but que cette même année, 1702, il
se rendit à Rome , convint avec Pie VI
que les rois de Naples, à leur avènement
au trône, paieraient au saint-Siége cinq
cent mille ducats , et qu'à celte condi-
tion tous les anciens droits que récla-
mait cette cour seraient abolis. Tout
semblait annoncer que les germes de
dissolution , qui fermentaient depuis
long-temps dans le royaume de Napies ,
allaient enfin être étouffés : il n'en fut
point ainsi ; une cendre légère recou-
vrait l'étincelle qui devait produire un
Taste embrasement. Alors Louis XVI suc-
combait sous la liache révolutionnaire :
à la nouvelle de ce crime, une coalition
se forma , et le roi de Napies , qui s'em-
pressa d'y entrer, réunit son escadre à
celle d'Espagne et d'Angleterre pour ve-
nir faire le siège de Toulon. Pendant ce
temps-là , Je mécontentement s'était en-
core accru à Napies ; on murmurait hau-
tement et on demandait ouvertement le
renvoi d'Aclon et de lady Hamilton ,
épouse de l'ambassadeur de l'Angleterre,
femme licencieuse qui avait, par sa con-
duite à la cour, et les danses obscènes
qu'elle avait introduites à Napies, cho-
qué , jusqu'au scandale , la juste suscep-
tibilité des Napolitains. Des vociférations
tumultueuses se firent entendre ; un com-
plot eut lieu; mais il fut découvert au
moment où il allait être mis à exécution:
une junte suprême d'e'tat fut établie; les
conspirateurs furent punis de la manière
la plus sévère. La tentative sur Toulon
n'ayant pas réussi comme la coalition l'at-
tendait, les troupes napolitaines se réu-
nirent en Italie aux troupes autrichiennes
et se battirent pour la même cause , c'est-
à-dire , contre la révolution française
qui n'avait pas été étrangère au dernier
complot découvert à Napies. Les mécon-
tens ne tardèrent point à former une au-
tre conspiration beaucoup plus sérieuse
à laquelle prirent part des personnes
de la plus haute distinction. Plus de 700
FER
arrestations eurent lieu ; personne ne fit
d'aveux, et l'on ne connut point d'une ma-
nière positive quels étaient les projets des
conjurés. On ignore si la haine contre Ac-
ton, ou l'amour de la liberté, ou bien les
idées révolutionnaires , propagées par la
France, les avaient dirigés dans cette péril-
leuse entreprise. Quoi qu'il en soit, Acton
donna sa démission ; mais , quoiqu'il ne
fût plus ]»remier ministre , il exerçait tou-
jours la plus grande influence sur la mar-
che du gouvernement. Toutefois , Napies
fut tranquille pendant quelques mois :
Ferdinand, vivement sollicité parla cour
de Madrid, consentit à faire avec la France
un traité qui ne fut suivi exactement ni
par les Français ni par les Napolitains ;
car, d'un côté Acton n'avait point cessé
d'être en relation avec l'Angleterre, et
la France continua d'avoir avec les mé-
contensde Napies, des intelligences dans
le but d'exciter un soulèvement. Ferdi-
nand lui-même qui n'avait fait cette con-
vention qu'à regret , avec les révolution-
naires français , cherchait une occasion
de guerre. L'entrée du général Berthier
dans les Etats romains , vint la lui four-
nir : bientôt en effet, ayant réuni ses
troupes au nombre de GO, 000 hommes,
à celles de la Sardaigne , de la Toscane
et de l'Autriche, il s'avance en personne
contré les Français , entre dans Rome ,
et force ses ennemis à se retirer dans le
Château St. -Ange. Mais le général Cham-
pionnet ayant battu peu après le général
Mlcheroux , près d'Ancône , et ensuite le
général Mack à Civita-Castellana , il fut
obligé d'évacuer promptement la ville
de Rome et de s'en retourner à Napies.
Dans la position malheureuse oîi il se
trouvait , poursuivi par les armées fran-
çaises , sentant qu'il lui était impossible
de résister , il prit le parti de se retirer
en Sicile : dans la nuit du 24 septembre
1 7 08, il s'embarqua avec ses trésors, après
avoir laissé à Napies don François Pigna-
lelli-TrongoUi en qualité de vice -roi.
Bientôt tout est en dissolution dans
cette partie de l'Italie. Mack passe du
côté des Français : les républicains de
Napies appelaient les armées ennemies;
enfin le vice-roi, après avoir cherché à
FER
se mettre à la tête de l'armée , abandon-
1)6 son gouvernement , et se rend à
Palerme , où sa barbarie le fait jeter en
prison. Les LazaronL furent, pendant
quelque moment , les maîtres de Naples :
le peuple se donna un cbef : le sang
coula de toutes parts ; enfin, pendant trois
jours, l'anarcliie régna sur ce malheureux
pays. Le général Cbampionnet arriva sous
les murs de Kaples, et, comme le peuple
avait changé d'avis , et qu'il voulait faire
\' résistance , ses troupes attaquèrent cette
Tille le 21 janvier, et s'en emparèrent le
23. Parvenu à empêcher le pillage, Cbam-
pionnet leva une contribution de guerre
de 6,000,000 de ducats , et établit un
gouvernement provisoire. Naples fut tran-
quille ; mais les environs étaient agités.
Les Calabrois surtout levèrent l'étendard
de l'indépendance : à leur tète sont des
prêtres et surtout le cardinal Ruffo , la
poitrine couverte d'une croix blanche :
sous leurs drapeaux se rangent les trou-
pes de Sciarpa , de Panganera et du fa-
meux Fra Diavolo. Ruffo reçoit le titre de
vice-roi , commande l'armée , défait les
Français et les chasse de Kaples le 21
juin 1799. Une république éphémère avait
remplacé dans celte ville le gouverne-
ment de Ferdinand : le délire démago-
gique avait tourné une foule de tètes : là
comme à Paris , on avait établi des clubs
politiques ; on imprimait des Journaux
populaires , on avait inscrit sur les édifi-
ces publics la devise au nom de laquelle
tant d'innocens avaient été condamnés
en France : Liberté', égalité' , fraternité'
ou la mort; et pour comble de scandale,
des prêtres oubliant la dignité de leur
mission , prêchaient les idées révolution-
naires. Ruffo , entré à IVapIes , appelle
bientôt Ferdinand eu Italie ; ce prince
blâma la sévérité de sa conduite , car
Ruffo avait excepté de toutes les capitu-
lations les malheureux Napolitains ; il fut
destitué. Une junte d'e'tat , composée en
grande partie de Siciliens , fut chargée
d'examiner la conduite des accusés : pen-
dant qu'elle se livrait à ces investigations,
le roi retourna à Palerme. Il y eut alors
une réaction terrible : le pillage , le mas-
sacre sur les places publiques et dans les
FER 'à67
prisons ne furent point ëpai^nés : les
personnages les p us illustres, compro-
mis, il est vrai, sons le gouvernement
républicain, périrent ou dans le feu Ou
à une potence. Enfin , depuis le mois de
juin jusqu'en décembre 1799, le sang ne
cessa pas de couler. Au mois de janvier
1800, Ferdinand revint à Naples avec la
reine et la cour dont faisait partie lady
Hamilton : mais bientôt Marie-Caroline
se rendit à Vienne avec les trois prin-
cesses ses filles, et elle ne revint à Na-
ples que lorsque le souvenir des derniè-
res exécutions eût été un peu effacé.
Alors le cabinet de 3Iadrid acquit une
grande influence sur celui de Naples, en
concluant avec Buonaparte , alors l'""
consul, un traité qui assurait l'intégrité
du royaume de Naples. Acton fut défini-
tivement éloigné , et l'alliance entre les
deux cours fut cimentée par le mariage
d'une princesse de Naples avec le prince
des Asturies (maintenant Ferdinand VII) ,
et par celui d'une infante d'Espagne avec
le prince héréditaire des deux Siciles
(depuis Ferdinand V). Les deux mariages
furent célébrés à Barcelonne le 6 mai
1802. (Les deux princesses moururent
quelques années après. ) Le traité de Lu-
néville plaçait le royaume de Naples dans
une position difficile, puisque l'Autriche
faisait la paix avec la France, et aban-
donnait Naples son ancienne alliée. Par
le traité de Florence (28 mars 1802),
Ferdinand fut forcé de céder les Prési-
des , Piombino et d'autres parties de ses
états , et de recevoir des troupes françai-
ses sur différens points de son royaume ,
jusqu'à ce que les Anglais eussent éva-
cué l'Egypte. Lors du renouvellement
de la guerre avec l'Angleterre en 1803 ,
Buonaparte augmenta sous un autre pré-
texte , le nombre des troupes qu'il avait
déjà dans le royaume de Naples. En 1806,
Ferdinand s'engagea , par un traité avec
la France, à garder la neutralité avec
l'Angleterre et avec les autres puissances
belligérantes : le roi de Naples ne fut
point fidèle à sa promesse ; il reçut dans
ses Etats 12,000 russes et anglais. Mais
Buonaparte gagna la bataille d'Auslerlitz :
les Russes abandonnent Naples : l'empc-
a(;8 FER
icur des Français proclame la tléchéaûce
de Ferdinand IV et l'élévalion de Joseph
au trône de ce' prince (ISOO). Ferdinand
délaissé de l'Aulricbe et de tous ses alliés,
retourna en Sicile. Joseph s'établit dans
sa capitale; maisbienlôt(l808), il échan-
ge celte couronne contre celle d'Espa-
{jne, et Joachim Murât devient roi de
Naples. A Palerme, la division régnait
entre la reine et les Anglais. Ceux-ci
voulaient dominer ; ils étaient appuyés
])ar Acton qui , sans être ministre , avait
repris son ancienne influence. Deux par-
tis se formaient : le peuple fut pour la
reine , et de nouvelles Vêpres sicilien-
nes se préparaient : peut-être auraient-
elles eu lieu, si les Anglais, avertis du
danger qu'ils couraient , n'eussent aug-
menté leurs forces. Ce fut vers cette
l'poqne que mourut Acton (1808). Dans
le même temps , le duc d'Orléans , ac-
tuellement Louis-Philippe , épousa la
princesse Marie-Amélie, fille du roi de
Sicile (26 novembre 1809). Enfin ce fut
encore alors que Ferdinand , fatigué des
divisions qui agitaient sa cour, abandon-
}idi le gouvernement à son fils, et lui don-
na le titre de vicaire-général. Tous ces
divers événemens n'avaient pas distrait
la reine de ses projets de domination :
elle voulait à toute force chasser les An-
glais dont elle portait péniblement le
joiig. Ceux-ci informés de ses desseins,
voulurent en empêcher l'exécution , et
le plus sûr moyen qu'ils trouvèrent, fut
d'éloigner la reine de la Sicile , et ils la
forcèrent de quitter cette île dans la sai-
son la plus rigoureuse. Dès lors Ferdi-
nand , se trouva placé sous la tutelle du
général ang!ais Eenlinck qui l'obligea à
donner uke constitution à ce qui lui res-
tait de sujets : le prince fut abreuvé de
tant d'amertumes qu'il prit le parti de se
retirer dans une dç ses maisons de plai-
sance. La chute de Buonaparle en 1814
ne priva pas encore Murât d'un trône
usurpé : l'Autriche le lui avait garanti
pour le détacher de son beau-frère : mais
en 1815, s'étant déclaré pour lui, il fut
)>attu , chassé du royaume , et comme il y
reparut , il fut peu de temps après fusillé
i\<>yez Mubat). Alors Ferdinand revint à
FEU
Naples après dix ans d'absence (15 mal
1815) : sa rentrée dans son royaume fut
signalée par quelques exécutions, surtout
à l'occasion d'une conjuration tramée
contre le roi par d'anciens jacobins unis
à des partisans de Murât : Louis de Médi-
cis était alors premier ministre. Ferdi-
nand , veuf de Marie-Caroline depuis le
8 septembre 1814, épousa en 1 8 1 G M»* de
Migliaccio, duchesse de Floridia; il donna
sa petite-fille, la princesse Caroline-Fer-
dinande-Louise , an duc de Bcrry(1816).
Le royaume de Naples était tranquille ,
lorsqu'en juillet 1820 , éclata une révo-
lution dont la cau.se , selon les uns , était
l'augmentation de l'impôt, suivant les
autres, l'esprit libéral conservé par les
Carbonari. Louis Menichini, prêtre de
Noia, et un lieutenant au régiment de
Bourbon (cavalerie) , se mettent à la tête
d'un escadron qui crie vive la Constitu-
tion, et se dirigent sur Avellino : les ha-
bitans du pays , la milice organisée et
les soldats du général Pépé envoyé» pour
les arrêter, se réunissent à eux et deman-
dent la constitution des Cortès. Le roi
promet de l'accorder huit jours après r
les insurgés trouvant le terme trop long
la veulent sur-le-champ : alors Ferdinand
remet les rênes du gouvernement entre
les mains de son fils avec le titre de vi-
caire-général et tous les droits de Valter
ego. Alors Pépé entra à Naples le 9 ; et
le 12 le roi et la famille royale jurèrent
la Constitution. Ce gouvernement nou-
veau fut signalé à Naples par des scènes
sanglantes (14 juillet), et au dehors par
une agitation qui , dans certaines locali-
tés, devint une véritable anarchie. Le con^
grès de Laybach fut réuni pour arranger
les afi"aires d'Italie ; invité à y venir , le
roi de Naples partit (le IG décembre)
pour cette assemblée des souverains qui
désapprouvèrent les innovations introdui-
tes dans son royaume. L'occupation mi-
litaire du midi de l'Italie fut décidée, et
bientôt une armée autrichienne, mise
sous les ordres de Ferdinand lui-même,
attaqua les troupes des constitutionnels,
les battit dans une première rencontre ,
et les mit en déroute dans la deuxième.
Lg roi rentra dans sa capitale le 2i mars
<9
FER
1821 : les troupes auxiliaires sëjournô-
tent quelques mois dans ce royaume ,
qui recommençait à jouir de la tran-
quillité, lorsque le 4 janvier 1826 Ferdi-
nand fut frappé d'apoplexie, et mourut à
l'âge de 74 ans. Que dirons-nous du ca-
ractère faible de ce prince : il fut gou-
verné toute sa \ie ; jamais il ne fut roi.
Mais il était bon, bienfaisant, charitable;
il aimait son peuple : toujours il fut mal
entouré , depuis son précepteur jusqu'à
son épouse et ses ministres. Jorani , écri-
vain italien, qui a traité avec peu de
ménagement les souverains de l'Italie,
parle avec admiration des vertus de Fer-
dinand. Parmi les actes remarquables
de ce prince , on doit citer l'organisation
qu'il donna à un petit village qu'il avait
fondé près du château de Caserla , pour
y établir une manufacture de soierie : à
cet effet, il fit un recueil de lois qui est
intitulé : Origine délia popolazione di
S.-Leucio , colle leggi correspondcnii :
Naples, 1780, in-8 , ouvrage traduit
dans toutes les langues. De nombreux
écrits ont été faits à la louange de
Ferdinand : nous citerons JDelle lodi
di Ferdinando, etc. P. F. M. Avelino,
Naples 1825, in-4 ; Per le solejvii Esse-
quie di Ferdinando, etc., par Emm.-
Taddei, etc., 2« édit. ibid., 1825.
FERDINAND-ALVAREZ , duc d'Al-
be. Voyez Tolède.
GRANDS-DUCS DE TOSCANE.
FERDINAND I, grand-duc de Tos-
cane, succéda à son frère François , mort
en 1587. Il gouverna son petit état avec
une sagesse qui le fit aimer de ses sujets
et estimer de tous les princes dé l'Eu-
rope. Il prêta généreusement à Henri IV
de l'argent pour se soutenir contre la Li-
gue. Ferdinand mourut en 1G09 , regardé
comme un bon politique. Il avait renvoyé
le chapeau de cardinal pour être grand -
duc.
FERDINAND II, grand duc de Tos-
cane , successeur de Cosme II, ne se fit
pas moins estimer par sa prudence que
Ferdinand I. Il sut garder une exacte neu-
tralité dans les guerres survenues entre
la France et l'Espagne. Comme la paix
FER 269
dont il faisait jouir ses sujets augmentait
ses revenus, il en fit un noble usage en
défendant l'Italie, et en secourant les Vé-
nitiens dans la guerre de Candie. Il mou-
rut en 1G98 , et gouvernait l'état de Tos-
cane depuis 1 G20. En examinant l'histoire
de ce prince et des autres Médicis , on voit
que ce n'est pas la guerre qui soutient
et fait prospérer les états. Ils ont presque
tout obtenu d'une sage politique : qua-
lité plus estimable que tous les talens mi-
litaires
* FERDINAND (grand-duc de Parme),
infant d'Espagne , frère de Charles IV ,
naquit le 21 juin 1751 , et fut élevé par
Condillac. Devenu en 1765 maître des
duchés de Parme , Plaisance et Guastalla ,
il épousa le 27 juin 17G9 Marie-Amélie-
Anloinetle d'Autriche , sœur de l'empe-
reur régnant. Pendant la révolution fran-
çaise , il voulut s'opposer à la marche des
soldats républicains, obtint d'abord sur
eux quelques avantages et fut fait ensuite
prisonnier. Privé de ses états , il les re-
couvra par suite des conventions qu'il
conclut avec le général Buonaparte. Mais
à sa mort arrivée en 1 802 , ses duchés
furent réunis à l'empire français. A la
chute de Buonaparte ils devinrent l'apa-
nage de son épouse Marie-Louise , an-
cienne impératrice.
FERDINAND de Cordoue, célèbre es-
pagnol du 1 5" siècle, passait pour un pro-
dige de scieuceen son temps, et n'en se-
rait pas un dans le nôtre, comme les sa-
vans du nôtre n'en seraient pas un dans
le sien. ( A dix ans il avait terminé ses
cours de latinité et de rhétorique : à 25,
il était docteur dans toutes les facultés ;
il possédait à fond plusieurs langues, le
latin, le grec, l'hébreu, l'arabe; il con-
naissait les mathématiques, la médecine,
la théologie , etc.) Il po.ssédaitlesscolas-
tiques, Scot, Alexandre de Halès, Aristote;
ce ne serait pas un sujet d'éioge à pré-
sent ; comme on eût été alors très peu de
chose avec nos encyclopédies et nos pe-
tits romans. ( Sa mémoire était si grande
qu'il répétait quatre i>ages de Cicéron
après les avoir lues une fois). Ce qu'il y
eut de singulie» dans Ferdinand , c'est
qu'outre ses vastes connaissances, il pei-
ano FER
giiait, chantait, dansait, jouait des instru-
inens aussi bien qu'aucun homme de son
temps. La réunion de tant de talens le fit
regarder par quelques-uns de ses contem-
porains, comme sorcier. On prétend qu'il
annonça la mort de Charles le Téméraire,
duc de Bourgogne. On ajoute que les sa-
vans de Paris l'admirèrent beaucoup en
14^5. On lui attribue un traité : Dearti-
ficio omnis scibilis, et des Commentaires
sur l Almageste de Ptole'me'e , et sur une
grande partie de la Bible. (Il servit avec
distinction dans les guerres contre les
Maures , sous Jean il de Castille , et fut en-
voyé à Rome en 1469 auprès du pape
Alexandre VI, qui l'accaeillit avec les plus
grands honneurs. Il obtint une pension
de la reine Isabelle de Castille, et mourut
vers l'an 1480.)
FERDINAND LOPEZ de Castaneda,
portugais, accompagna son père dans les
Indes, où il allait en qualité déjuge royal.
A son retour, il publia VHistoire de son
voyage. Elle a été traduite en français par
Nicolas de Grouchi, Paris, 1554, in-4, en
italien et en anglais. Nous ignorons les
années de sa naissance et de sa mort. Il
florissait au 1 6® siècle.
FERDINAND (Charles), natif de Bru-
ges, poète, musicien, philosophe et ora-
teur, quoique aveugle dès l'enfance, pro-
fessa les belles-lettres à Paris. Le pape
Innocent VIII , informé de la sainteté de
sa vie et de son savoir , lui permit de
prendre l'ordre de diacre, en vertu du-
quel il exerça le ministère de la prédica-
tion avec beaucoup de zèle et d'éloquence.
Il mourut l'an 1496, bénédictin dans le
monastère de Chézal-Benoît , à 12 lieues
de Bourges. Il a laissé quelques ouvrages,
entre autres 1° De tranquillitate animi,
Paris, 1512, qualité bien nécessaire à un
aveugle, et qui ne l'est guère moins à
ceux qui voient clair. 2" Monasticorum
confabulaiioniim libri quatuor, Paris,
Ï515. On lui attribue assez généralement
Spéculum monasticœ disciplinée , Pai'is ,
1515, in-folio.
FERDINAND ( Jean ), jésuite de To-
Jcde, mort à Palencia en 1595, à 59 ans,
est auteur d'un ouvrage intitulé Divina-
fum Scripturarum Thésaurus, in- fol.,
FER
1594. C'est une explication des passager
difficiles de l'Ecriture-Sainte par ordre
alphabétique. Il devait en donner dcui
autres vol. — Il ne faut pas le confondre
avec Jean Ferdinand, dominicain arrago-
nais, qui a donné 3 ans avant sa mort, arri-
vée en 1625, un Commentaire surVEcclc-
siaste,k Rome, in-fol. Il y prouve la con-
formité de la Vulgate avec le texte hébreu.
FERDINANDI (Epiphane), médecin
célèbre, né à Messagna dans la terre d'O-
trante le 2 novembre 1569, professa la
poétique , la géométrie et la philosophie
dans sa patrie. Il mourut en 1638, après
avoir publié quelques ouvrages. Le meil-
leur est celui qui a pour titre, Observa-
tiones et Casus Medici, à Venise, in-foK,
1621. Ce livre a été réimprimé plusieurs
fois en Allemagne et en Hollande. On a
encore de lui 1° Theoremata Medica^
Venise, 1611, in-fol. 2° De vita propor-
ganda, Naples, 1612, in-4. 3° De Peste ^
Naples, 1631, in-4. Ferdinandi était un
vrai philosophe : il savait élever son âme
au dessus des disgrâces. Un jour, pendant
qu'il expliquait Hippocrate , on vint lui
annoncer la mort d'un de ses fils , jeune
homme de 20 ans, qui donnait des espé-
rances : il se contenta de répondre comme
Job : Dieu me l'avait donné. Dieu me
l'a ôté. Un de ses amis tâchait de le con-
soler sur la mort de sa femme qu'il aimait
tendrement : Je serais, lui répondit-il,
indigne du nom de philosophe , si dans
de tels malheurs je ne savais pas me
consoler moi-même. Le premier trait
peint mieux le sage et le chrétien ; le se-
cond parut se ressentir un peu de l'é-
goïsme qui fait le caractère des philoso-
phes profanes ; mais sans doute qu'il
parlait de cette philosophie qui suppose
et comprend les motifs religieux qui seuls
donnent une consolation solide. ( On
trouve dans les f^ite de' letteratiSalen-
tini de Dominique de Angelis une notice
biographique sur Ferdinandi , que Ni-
céron a bien analysée , tom. 21 de ses
mémoires. )
FERDOUCY (Aboul Cacen Manssour),
le plus célèbre des poètes persans , né à
Rizvàn dans le Khoraçân l'an de l'hégire
304 (de J. C. 916), répara l'obscurité de
FER
sn naissance par la beauté de son génie.
Disciple d'Assedi, il surpassa de beaucoup
son maître , et se fit admirer de tout le
Levant. On a de lui V Histoire des Rois,
ou ChâhNamch en 120,000 vers : il
célèbre dans cet ouvrage les anciens sou-
verains de Perse. Ce poème fut, dit-on,
si goûté du prince sous lequel vivait Fer-
dousi , qu'il donna à l'auteur une pièce
d'or pour chaque distique , et l'ouvrage
<5tait composé de soixante mille distiques.
Il mourut l'an 1020 de J. C. ou 411 de
l'hégire.
FERG (François de Paule), célèbre
peintre de paj sages , né à Yienne en Au-
triche, en 1C89. Son goût pour les voya-
ges, et un mariage imprudent qu'il fit, le
réduisirent à la misère. On dit, qu'il fut
trouvé sur sa porte , mort de froid et de
besoin, n'étant âgé que de 51 ans.
FERGESON (Jacques), né dans le
comté de Bamf , province de Bucban en
Ecosse, en 1 7 1 0, inventa la roue astrono-
mique, espèce d'astrolabe utile pour ob-
.server les éclipses de lune. Il se rendit
ensuite à Londres, et il y décrivit la ligne
du mouvement de la lune, que la société
royale avait proposée : la solution de ce
problème lui valut l'entrée dans cette so-
ciété et une pension de 60 liv. sterlings.
Il mourut le IG novembre 17 76. Ses ou-
vrages sont 1° Traite' de Mécanique ,
1770. 2° Introduction à l'Electricité',
1772. 3° Introduction à l'Astronomie.
4° L' Astronomie expliquée selon les prin-
cipes de Newton, 17 70. 7« édit. 1785.
6° Leçons sur des sujets choisis de Mé-
canique, Hydrostatique, Hydraulique,
Pneumatique et Optique, 5* édit., 1776,
réimprimées à Edimbourg, en 1805,
2 volumes in-8, avec des corrections et
des additions considérables. 6° Traité de
perspective , 1775. Ces ouvrages ont un
grand cours en Angleterre : il y a cepen-
dant des idées hypothétiques mêlées avec
les démonstrations et les faits, ce qui
éloigne souvent la certitude et la solidité
du résultat.
*FERGUSON (William), peintreécos-
sais, mort vers 1690, excellait à peindre
les oiseaux morts ou vivans.
•FERGtJSO.N(Adam), célèbre écrivain
FER 27 ï
écossais, naquit en 1724 à Logierait, près
de Perth. (Doué des plus heureuses dispo-
sitions, il fut reçu en 1 7 39 à l'université de
Saint-André, et passa ensuite à celle d'E-
dimbourg par une faveur qui ne fut ac-
cordée qu'à son mérite). Il devint d'abord
chapelain d'un régiment de montagnards
écossais jusqu'à la paix d'Aix-la-Chapelle
en 1748, ensuite professeur de philoso-
phie naturelle et de philosophie morale
à Edimbourg. Vers 17 7 3, il accompagna,
en qualité de gouverneur le jeune comte
de Chesterfield dans ses voyages sur le
continent; et, en 1778, il fut nommé se-
crétaire de la commission chargée d'aller
proposer des arrangemens pacifiques aux
Américains. Il est mort le 22 février 1816.
On a de lui, 1 " Essai sur la société ci-
vile, 1767, in-4. et in-8.; ouvrage pro-
fond , qui commença sa réputation et fut
traduit en allemand, en français et en
suédois. 2° Institutions de philosophie
morale, 1769, in-8; c'est la substance de
ses leçons à l'Université; elles ont été
réimprimées en 1 800 à Mayence, à Franc-
fort, à Bdle, et traduites en allemand par
Gave, et en français par Reverdit. 3° His •
toire des progrès et de la chute de la ré-
publique romaine, 1782, 3 vol. in-4,
réimprimée à Edimbourg en 1799, avec
des corrections importantes, et à Londres
en 1805, 5 vol. in-8. Cet ouvrage, un des
plus profonds qui ait paru en Angleterre
sur cette matière, a été traduit en ita-
lien , en allemand et en français. Cette
dernière traduction a été donnée par
M. Desmeunier, 7 vol. in-8 etin-12. Fer-
guson s'était proposé de faire, pour la
république, ce que Gibbon avait fait pour
l'empire romain. Considérant son sujet
en philosophe, il néglige les petits détails
pour traiter à fond les grands événemens,
et développe l'influence qu'ils ont pu
avoir .sur la constitution de l'état. Son
stile est noble et élégant, quoique un peu
diffus , et quelquefois même obscur, par
la longueur de ses périodes. 4° Principes
des sciences morales et politiques, 17 99
2 vol. in-4. C'est une analyse de ses le-
çons, qui avaient eu beaucoup de succès
par leur mérite propre, et par la grâce
que leur prêtait son éloculion. Piclet eu
«a donné d'amples extraits dans la Biblio-
thèque britannique.
* FERINO (Pierre-Marié-Barthélemi),
major d'un régiment autrichien, né en
Piémont, en 17 47, lit ses premières armes
en Autriche dans un régiment d'infante-
rie, et prit ensuite du service en France au
commencement de la révolution. Nommé
général de brigade, il se distingua à l'ar-
mée du Rhin , dans les campagnes de
1794 et 1795. Bientôt il mérita par sa
bravoure, le grade de général de division.
La reprise des lignes de Weissembourg et
le déblocus de Landau furent une preuve
de ses connaissances dans l'art de la
guerre. En 1796, il effectua, avec Desaix,
le passage du Rhin à Kehl, et prit part à
toutes les opérations de cette campagne.
Il faisait partie de l'armée de Moreau qui
s'illustra par sa belle retraite, défendit le
pont d'Huningue en 1797 de la manière
la plus brillante, et continua à se couvrir
de gloire dans toutes les occasions où il
combattit. En 1805, il fut nommé mem-
bre Sénat du conservateur; il obtint en-
suite la Sénatorerie de Florence , et fut
pourvu en 1807 du gouvernement de la
ville et des ports d'Anvers ; enfin il revint
siéger au Sénat, et vota le l^"" avril 1814 la
déchéance de Buonaparte. Le roi lui ac-
corda la croix de Saint Louis, et des lettres
de naturalisation : il est mort le 28 juin
1816.
FERTOL. Foyez Pont-de-Vesle.
* FERLET (L'abbé Edme), naquit à
Kancy , et étudia dans cette université ,
cil il devint professeur de belles-lettres.
S'étant rendu à Paris, il obtint un cano-
nicat dans l'église de Saint-Louis du Lou-
vre, et devint dans la suite secrétaire en
' second de l'archevêché de Paris. La révo-
lution lui fit perdre cette place, et il res-
ta ignoré jusqu'à l'époque du concordat,
en 1801, qu'il fut réinstallé comme secré-
taire. H est mort à Paris le 24 novembre
1821, âgé d'environ 70 ans. On a de lui
1 ° Sur le bien et le mal que le commerce
des femmes a fait à la littérature. Cet ou-
vrage, couronné par l'académie de Nancy
en 1772, a été imprimé à la suite d'un
discours que prononça M. de Solignac
«u nom de l'acadéniie. 2° De l'abus de
FER
la philosophie par rapport a la litte'rO'
<ure, 1773, in-8 ; 3" Éloge de M. le chc
valier de Solignac secrétaire du cabi-
net du feu roi de Pologne, Londres et Pa-
ris, 1774, in-8; 4° Oraison funèbre de
AI. de Beaumont, archevêque de Paris ^
1784, in-8 ; 4" Observations lilte'raires ,
critiques, politiques, geographiques,etc.,
sur les histoires de Tacite , avec le texte
latin, 1801, 2 vol. in-8; Q" Be'ponse à un
écrit anonyme intitulé : Avis aux lec"
leurs sans partialité, 1801, in-8. Cet
Avis était une critique de ses Observa-
tions, à laquelle Ferlet répondit victo-
rieusement.
FER JEUX. Voyez Ferréol.
* FERLONI (Séverin-Antoine), savant
ecclésiastique, né dans l'état de l'Eglise,
en 1740, fut regardé comme un des plus
célèbres prédicateurs de son siècle. Ses
succès dans la chaire lui méritèrent la
dignité de grand prince de l'ordre Con-
stantinicn. Il s'occupa alors de V Histoire
des variations de la discipline de l'E-
glise, qui pouvait former, dit<on, 30 vol.,
et qu'il était sur le point de terminer lors-
que l'irruption des armées françaises
dans Rome en 17 98, y donna naissance
au gouvernement républicain. Ses papiers
furent brûlés ou enlevés, et il perdit en
un instant le fruit de 30 années de tra-
vail. Réduit presque à la misère par la
perte de sesdignilés, et manquant de cette
fermeté de caractère qui tient l'homme
vertueux au dessus des plus extrêmes dis-
grâces, il vendit sa plume à ceux même
qui avaient causé sa ruine. Il composa suc-
cessivement plusieurs Homélies en faveur
de Buonaparte : son discours sur la con-
scription militaire fut très utile au gouver-
nement français. De tels services lui valu-
rent la place de théologien du Conseil par-
ticulier du Vice- Roi à Milan. Cefulluiqul
composa par ordre de la cour ces adresses
véhémentes que l'on fit souscrire par quel-
ques évcques et quelques chapitres d'Ita-
lie, et qui furent publiées avec ostenta-
tion à Milan et à Paris. Le complaisant^
Ferloni composa aussi un Traité de Vau-
torité de l' Eglise, en 3 vol. oii il soute-
nait les principes que le gouvernement
français voulait faire prévaloir ; mais le
FER
censeurs ayant courageusement refusé
leur approbation, le livre ne parut point,
et les évcnemens de 1 8 1 4 l'ont condamne
à un éternel oiiLli. Ferloni mourut à Mi-
lan , le 23 octobre 1813, sans avoir joui
du fruit d'une conduite si méprisable ; le
peu de secours pécuniaires qu'il recevait
du gouvernement, suffisait à peine pour
le faire subsister.
FERMAT (Pierre), conseiller au par-
lement de Toulouse, naquit en 1595, et
mourut en 1665. Il cultiva la jurispru-
dence, la poésie, les mathématiques. Des-
cartes, Pascal, Roberval, Huygens etCar-
cavi furent liés avec lui. On a de Fermât
des Observations sur Diophante, et plu-
sieurs Lettres dans le recueil de celles de
Descartés. Ses ouvrages furent publiés à
Toulouse en 1679, sous le titre à' Opéra
Mathemalica , en 2 vol. in-fol. La géo-
métrie lui a presque autant d'obligations
qu'à Descartes , quoiqu'il soit beaucoup
moins célèbre. Sa sagesse a nui à sa ré--
putation ; il apprécia si bien la frivolité
d'un grand nom, qu'il évita de s'en faire
un. Il fut non-seulement le restaurateur
de la géométrie ancienne, mais le pré-
curseur de la moderne. C'était d'ailleurs
un magistrat aussi intègre que éclairé.
* EERMIN (Philippe), médecin et
voyageur, né au commencement du 18*
siècle à Maestricht , où il devint membre
de la magistrature municipale de cette
ville, passa en 1774 à Surinam où il ré-
sida près de 10 ans, recueillit un grand
nombre d'observations sur les objets les
plus curieux de cette colonie. A son re-
tour, il publia 1" Histoire naturelle delà
Hollande équinoxiale ou de Surinam ,
Amsterdam, 1765, in-8,ouvragequifut vi-
vement critiqué et qu'il fit réimprimer ,
en 1769, sous ce titre : Description géné-
rale , historique , ge'ographiquc et phy-
sique de la Colonie de Surinam. 2 vol.
in-8. Les additions considérables qu'il a
faites à cette édition ont rendu ce livre
l'un des meilleurs que nous ayons sur les
colonies. 2° Tableau historique et poli-
tique de Vétat ancien et actuel de la co-
lonie de Surinam , et des causes de sa
décadence, Maestricht, 1778, in-8. Ce
Tab'.eau a été traduit en allemand , avec
V.
quelques augmentations, et péW servir
de suite ou de supplément à sa descrip-
tion qu'il rectifie en plusieurs endroits.
3° Traite' des maladies les plus fréquentes
a Surinam, avec une dissertation sur le
fameux crapaud de Surinam nommé
Pipa, Maestricht, 1764, in-8, et Amster-
dam, 1765.
* FERNAN-NUPJÈS (le duc de),
grand d'Espagne , naquit à Madrid en
1 7 7 8, et entra de bonne heure à la cour où
il se distingua par ses lumières et par sa
franchise. Dévoué à la cause royale, il fut
un de ceux qui en 1807 se prononcèrent
le plus fortement contre l'emprisonne-
Inent de Ferdinand ; et lorsque ce prince
eut recouvré la liberté, il prit hautement
son parti. Il fit tous ses efforts pour l'en-
gager à ne point faire le voyage de Bayon-
ne, et, quand il le vit décidé à l'entrepren-
dre , il voulut du moins l'accompagner.
Le parti de don Manuel Godoï prince de
la Paix . ayant prévalu sur celui du prince
des Asturies , Fernan-Nunès était sur le
point de se retirer , lorsque Buonaparle ,
qui voulait se l'attirer, le nomma grand-
veneur. Fernan accepta malgré lui cet,
emploi ; car , secrètement attaché à ses
anciens maîtres , il arma ses vassaux et
soudoya un grand nombre d'insurgés dans
la Castille. Proscrit par les ordres de Buo-
naparle , il se retira dans ses terres, où il
travailla d'Une manière plus efficace en-
core en faveur des ennemis de la France.
Pour prendre une part plus active à la
défense commune , il servit dans les trou-
pes des Cortès. Lorsque Ferdinand fut de
retour dans sa capitale, il fut un des
premiers à se présenter devant son roi ;
il fut aussi l'un des premiers qui mon-
trèrent à ce monarque à quel danger il
exposait son pouvoir royal en adoptant
la constitution des Cortès. Pour récom-
penser sa fidélité , Ferdinand lui donna
en 1815 l'ambassade de Londres d'où il
passa en 1817 à celle de France, avec le
titre de duc de Casa - Fernan- Nunès.
Pendant la révolution de 1820, il sus-
pendit ses fonctions d'ambassadeur. Il
mourut à Paris en 1821. Ce duc était fils
du comte Fernan -Nunès qui avait été
aussi ambassadeur en France, et qnrfut
274 FER
recoin ranndablc à la fois par ses talenset
par ses vertus.
FERiVAIND. r. Ferdinand (Charles).
' FERNANDÈS ( Jean ) , navigatear
portugais, le premier européen qui ait
pénétré clans l'intérieur de l'Afrique ,
l'an H-iG, resta plusieurs mois prison-
nier des Maures Assanhadji dans le voi-
sinage du Rio-do-Ouro en 1447 et 1448 ,
et recueillit sur ces peuples nomades des
renseigiicmens qui offrent beaucoup d'a-
nalogie avec ceux de Mungo-Park. Fer-
nandès fit un second voyage avec Diego
Gilhomen envoyé pour conclure un traité
d'alliance avec les Maures de Meça. Dès
qu'on eut jeté l'ancre, il descendit à terre
pour examiner le pays au nord du cap
Nam ; mais une bourasque ayant poussé
presque aussitôt le bàtimen^ en mer , il
fut laissé sur cette côte élrang"ère : on
ignore ce que devint ce hardi navigateur.
*FERNAjyDÈS (Denis), voyageur por-
tugais, équipa en 1440, un bâtiment pour
faire de nouvelles découvertes sur la côte
d'Afrique. Il y reconnut l'embouchure du
Sénégal, et pénétra jusqu'au promontoire
le plus occidental d'Afrique , auquel il
donna le nom de Cnp Fat , à cause dli
grand nombre d'arbres verdoyans dont
cette pointe de terre était couverte. Les
brlsans qui entourent ce cap i'alarmërent ;
il n'osa pas aller au delà.
* FERNANDÈS (Juan), pilote espa-
gnol du 16® siècle, navigua d'abord le
long de la côte de l'Amérique méridio-
nale, arriva près du Chili, et découvrit en
1 572 les îles qui portent son nom ; et deux
ans après , dans une autre traversée , il
trouva les îles de St. -Félix et de St.-Am-
broise , situées au nord des précédentes.
Parti du Chili en 1676, il rencontra une
côte qui avait toute l'apparence du con-
tinent. Comme son navire était très petit
et assez mal équippé , il ne poussa point
ses recherches, et parut dans l'intention
ue revenir avec une expédition plus con-
sidérable ; mais la mort l'empêcha d'exé-
cuter son projet. On croit que c'est la
Nouvelle Zélande. Quelques détails sur
l'expédition de Fernandès se trouvent
dans un ouvrage espagnol de Louis Arias,
intitulé Mémoire pour recommaniier au
FER
roi la conversion des naturels des tics
nouvellement découvertes , 1 609 , publié
aussi en anglais par Dalrymple (Edim-
bourg 1773), qui en inséra un extrait
dans sa Collection historique ; Vonyiage
intitulé Foyage dans la mer du Sud par
les Espagnols et les Hollandais , traduit
par Tréville , n'en est que l'abrégé.
FERNANDEZ de Cordoue. Foyez
GONSALVE.
FERNANDEZ (Antoine), raquit à
Coïmbre en 1 662 , se fit jésuite , fut pro-
fesseur de l'Ecriture sainte à Evora , et
se consacra ensuite aux missions dans les
Indes Orientales. De retour à Lisbonne ,
il y prêcha avec beaucoup de fruit, et
mourut , consumé de travaux , à Coïmbre
le 14 mai 1628. On a de lui un Commen'
taire sur les visions de V Ancien Testa-
ment, imprimé à Lyon.
* FERNANDEZ ( Antoine ) , jésuite
portugais j naquit à Lisbonne en 1666.
Envoyé à Goa en 1002 , il pénétra deux
ans après en Abyssinie , déguisé en ar-
ménien. Il résida trente ans dans ce pays,
et sut acquérir l'estime et la protection
de Socinios ou Melec-Segned , qui était
monté sur le trône en 1 607 , et avait em-
brassé la religion catholique. Ce prince
chargea Fernandez d'une mission auprès
du roi d'Espagne Philippe IV et du pape
Paul III. Le courageux jésuite demanda
pour l'accompagner Féciur-Egzy, homme
considéré en Ethiopie , et rempli de zèle
pour la religion catholique. Pour éviter
de traverser les provinces révoltées, oîi
ils auraient été arrêtés et leurs dépêches
saisies, ils furent obligés de prendre la
route de Naréa , qui est la plus longue ,
et d'arriver par cette voie à Melinde sur
l'Océan des Indes. Fernandez et sa com-
pagnie partirent de Goïam au mois de
mars 1613. Arrivés dans l'Alaba , ils fu-
rent arrêtés et rais en prison par ordre
du souverain de ce pays , prince maho-
métan. Il les aurait fait mourir sans les
lettres et les présens du monarque des
Abyssins. Enfin il voulut bien les mettre
en liberté , mais à condition qu'ils re-
brousseraient chemin. Ils furent donc
obligés de revenir à Goïam , .après dix-
huit mois d'un voyage pénible , et dans
FER
lequel iJs avaient plusieurs fois risqué de
perdre la vie. Après Ja mort du Père Paèz,
chef de la mission , il en remplit quelque
temps les fonctions; mais Fadillas, qui
succéda à Socinios, mort en 1632 , ayant
expulsé de ses états tons les prêtres ca-
tholiques , le Père Fernandez revint à
Goa, où il mourut le 12 novembre 1642.
On connaît de ce Père, 1" en éthiopien ,
un Traité des erreurs des Ethiopiens ,
Goa, 1642, in-4 , imprimé avec des ca-
ractères éthiopiens , envoyés par Urbain
VIII. 2° Dans la même langue , une Tra-
duction du Rituel romain, 1626 ; 3" en
dialectique amharique, une Instruction
pour les confesseurs , avec d'autres ou-
vrages ascétiques ; 4° Voyage a Gingiro ,
fait avec F éciur - E gzy , ambassadeur
envoijé par Vempereur d' Etliiopic en
1613 , contenant la roule ^e'nible et dan-
gereuse du voyageur , sa captivité, sa
délivrance ainsi que la description des
royaumes de Naréa , de Gingiro et de
Cambate , avec des particularités cu-
rieuses. Ce voyage a été inséré dans le
tome 2 d'un recueil publié en hollandais
par Vander-Aa, 1707 , 2 vol. in-12, avec
une carte bien gravée , mais peu exacte.
Cette relation y est renfermée en 22 pa-
ges; elle est curieuse, mais laisse bien
des choses à désirer. Moréri attribue à
Fernandez un autre ouvrage en éthio-
pien , intitulé Trésor de la foi , dans le-
quel il réfute un écrit dans la même lan-
gue , d'un éthiopien schismatique, appelé
Ras-Athanate.
* FERNANDEZ (Jean-Patrice), jésuite
et missionnaire au Paraguay , était aussi
espagnol. Il a publié la Relation histori-
que de la mission chez la nation appelée
Chiquitos, Madrid, 17 26, 1 vol. in-8 ;
elle a été traduite en allemand, Vienne ,
1729, 1 vol. in-8, et en latin, ibid. ,
1733, 1 vol. in-4; elle contient l'histoire
des Chiquitos et celle de quelques nations
voisines. On n'y trouve guère d'autres
détails que ceux qui ont rapport à la mis-
sion. Le Père Jean-Patrice se disposait à
en aller fonder une à Chaco , lorsqu'il
mourut en 17 72.
* FERNANDEZ NAVARRETE
(Jean ) , surnommé el mudo (le muet) ,
FER S75
célèbre peintre espagnol, né à Logrono
en 1 526 , perdit l'usage de la parole à la
suite d'une maladie aiguë , dès l'âge de
2 ans. Cette infirmité ne l'empêcha pas
de manifester un goût décidé pour la
peinture. Il fut plusieurs années à l'école
du célèbre Titien et devint peintre de
Philippe II, qui lui fit faire plusieurs
grands tableaux pour le monastère de l'é-
glise de l'Escurial. Ses plus beaux ouvra-
ges sont une Assomption , le Martyre de
St. -Jacques, un St. -Jérôme dans le
désert , une Nativité de J. C. , la Récep-
tion des trois Anges , par Abraham. Ce
dernier est son chef-d'œuvre. Fernandez
mourut à Ségovie en 157 9. Il était très
instruit dans l'histoire , la mythologie ,
et se distingua dans son art par la com-
position , la correction du dessin , l'ex-
pression des figures, et surtout par le co-
loris , ce qui le fit appeler le Titien es-
pagnol. On trouve ses tableaux au palais
de l'Escurial. Il y a eu plusieurs autres
peintres et sculpteurs du même nom. ■ ■
* FERNANDEZ-THOMAS (Manoël)
naquit à Lisbonne vers 1760; il fut un
des agens les plus actifs et le principal
auteur de la révolution de Portugal , du
26 août 1820. Il fut choisi pour être
membre de la junte provisoire du gou-
vernement qui s'installa à Oporto, et alla
se réunir à celle de Lisbonne. Don Manoël
était juge de Porto , lorsqu'en récom-
pense de ses travaux révolutionnaires , il
fut nommé, par le congrès constituant ,
débuté aux Cortès , dont il devint bien-
tôt vice-président. Quand la constitution
fut publiée , il vota pour une amnistie
générale. Après avoir opiné que le con-
grès ne devait pas aller au devant du roi ,
il fut de la députation qui se rendit à
bord du vaisseau qui avait transporté
S. M. de Rio-Janeiro au port de Lisbonne.
Il s'opposa ensuite au veto absolu , et de-
manda que le veto royal suspensif ne
s'appliquât pas aux articles de la consti-
tution que le roi devait accepter ou re-
fuser. Il fit affecter les revenus des éta-
blissemens ecclésiastiques supprimés aus
créanciers de l'état, et provoqua la loi
sur la liberté de la presse, pour les délits
de laquelle il vota, au maximum y nne
27<5 FER
forte amenda et dix années de piison.
Lors de l'extinction du saint-office , il
demanda qu'on donnât pour seuls motifs
les lumières du siècle , et son incompa-
tibilité avec un pays d'hommes libres. Le
patriarche de Lisbonne n'ayant pas voulu
prêter serment à la constitution , il vota
pour qu'il fût entendu, jugé , et fit en-
suite supprimer le patriarcat. Il appuya
le projet tendant à écarter des emplois
les ennemis de la constitution. 11 parla
en faveur de l'établissement du jury ,
dont les membres devaient , selon lui ,
être élus par le peuple, et les déclara
juges compétens dans les matières reli-
gieuses. Nous passerons sous silence d'au-
tres motions de ce député, qui portait
dans la tribune tout le délire d'un déma-
gogue , et qui se montra un des plus ar-
dens adversaires du roi et de son auguste
famille. Pendant toute la session il eierça
la plus grande influence sur ses collè-
gues. Il mourut à Lisbonne, le 20 no-
vembre 1 822 , sans se douter que le mon-
strueux colosse , qu'il avait contribué sL
puissamment à élever, allait tomber eu
ruines.
FERNANVILLE ( Pierre-Simon Cha-
PEROU DE St. -André de), prêtre du dio-
cèse de Meaux, mort le 20 octobre 1757,
âgé de 68 ans , joua un rôle dans le parti
des anti-constitutionnaires. On a de lui
1 ° La préface de la seconde colonne des
Exaples. 2° Explication de T Apoca-
lypse. V Lettres a iJf'"« Mol, in-4.
FERNEL (Jean -François), natif de
Mont-Didier en Picardie , vint au monde
en 1606. Après avoir consacré plusieurs
années à la philosophie et aux mathéma-
tiques , il s'appliqua à la médecine qu'il
exerça avec beaucoup de succès. On pré-
tend qu'il s'avança à la cour de Henri II,
dont il devint le px-emier médecin, pour
avoir trouvé le secret de rendre féconde
Catherine de Médicis. Cette princesse
lui fit des présens considérables. Cet ha-
bile homme mourut en 1568. Nul d'entre
les modernes , depuis Galien , n'avait
mieux écrit avant lui sur la nature et la
cause des maladies. Sa Pathologie en fait
foi ; Fernel la vit lire de son vivant dans
)es écoles publiques. On a de lui plusieurs
FER
autres ouvrages non moitis estimé.<i ; les
principaux sont 1° Medicina universa,
Utrecht, 1666, in-4. 2" Medici antiqui
Grœci qui de febribus scripscrunt , Ve-
nise, 1694, in-fol. Les Médecins latins
8ur la même matière ont été imprimés en
1647, in-fol. 3" Consilia medicinalia ,
Francfort, 1586, in-8., etc. A° Monacos-
pherium sive astrolabii genus , generalis
horarii structura, Paris, 1626, in-fol. ;
6° De proportionibus libri duo, 1628 ,
in-fol. 6" Cosmotheoria libros duos com~
plexa, 1628, in-fol. ; 1^ De naturali parte
mcdicinœ libri septem , 1642, in-fol.;
8° De abditis rcrum cousis , libri duo ,
1548-52, in-fol. ; réimprimé plus de 30
fois. 9" Medicina, Paris, 1554, etc. 10»
Therapeutices unii>ersalis libri seplem ,
Lyon , 1571, traduit en français par Teil ,
Paris, 1648, in-8. Cet illustre restaura-
teur de la médecine n'était point pour le
fréquent usage de la saignée ; et on le
lotie avec raison de s'être écarté de la
méthode d'Hexelius trop prodigue du
sang. On trouve dans ses ouvrages, outre
une savante théorie, des faits curieux,
tel que celui d'un énergumène , qui par-
lait grec et latin sans avoir jamais appris
ces deux langues : « ce qui prouve, dit
j) un auteur , que Fernel n'avait pas cet
» entêtement philosophique, déterminé
» plutôt à nier des choses constatées,
« qu'à convenir de l'impossibilité de les
» expliquer sans recourir à des sévérités
•o religieuses, u Au mérite d'excellent
médecin , Fernel réunissait celui de bon
écrivain. Il parlait et il écrivait la langue
latine avec tant de pureté, qu'on l'op-
posa souvent aux savansultramon tains qui
nous reprochaient le latin barbare de nos
écoles, ff Ce grand médecin , dit un au-
» teur moderne, considérait cette langue
V comme la seule assortie à sa profession,
» et eut regardé comme un blasphème en
» matière de science comme en matière
1) de morale, le projet de traiter la mé-
»j decine en langue vulgaire. Une telle
i> innovation , fruit de l'ignorance et de
» la corruption de ce siècle, ne s'était 1
» point offerte à l'esprit des grands hom-
» mes qui nous ont devancés dans la car-^ j
1) rière des connaissances humaines. In-
FER
» dépendamment des vues de décence et
» de moralité, qu'une langue antique et
M chaste peut seule réaliser , la nature
)» même de la médecine, ses opérations
» et son but s'opposent à cette inversion.
» Les langues modernes changent conli-
« nueilement, le résultat des mots et des
j> constructions n'est point irrévocable-
» ment fixé. Il en naîtrait des équivoques
i> terribles, des termes inconnus et mal
M interprétés , qui , dans une science de
jj celte nature , seraient d'une consé-
« quence affreuse. Un médecin , quelque
M habile qu'il fût, ne pourrait soigner
» que les paysans ou les bourgeois de son
» canton. Il serait nul pour les malades
» dont il ne comprendrait pas la langue ;
« au lieu que la langue universelle le
» met à même de les servir tous, au moins
» ceux qui la savent également , ou qui
» trouvent un interprète de la leur; ce
j) qui ne manque nulle part , où il y a
» un ecclésiastique ou un homme tant
j> soit peu lettré. » L'élude était la prin-
cipale, ou, pour mieux dire, la seule
passion de Fernel. Quand il avait des
convives chez lui , il ne faisait pas difl'i-
culté de les quitter à la fin du repas, pour
se retirer dans son cabinet : excellente
leçon pour ceux qui sacrifient à une po-
litesse parasite et mal entendue un temps
précieux ; et plus encore pour ceux qui ,
par cette frivole considération, dérogent
aux devoirs de leur état et aux fonctions
les plus respectables.
* FERNIG ( Louis-Joseph de ) , né le
3 octobre 17 35 d'une famille noble d'Al-
sace, embrassa la carrière des armes , fit
avec distinction les campagnes du Ha-
novre (1765-17G2), quitta le service et
se livra à la culture des lettres. Il fut
l'ami de Voltaire qui le retint pendant un
an à Ferney. Après la mort du patriarche
delà philosophie moderne, il vint dans le
Hainaut français où il fit un mariage ho-
norable, se fixa à Morlagne où il était
administrateur cl greffier général des
terres etchatellenies de ce lieu ; en même
temps il s'occupait encore de littérature
et de science. Nommé en 1789 comman-
dant de la garde nationale , il empêcha
Jes désordres (jui eurent lieu dans tant
FER 277
d'autres endroits. Ce fut à Mortagne que
BC tirèrent les premiers coups de fusil
entre la France et l'Europe ; la garde
nationale de ce lieu s'opposa à l'entrée
des Autrichiens, et fit le service le plus
pénible pendant plusieurs mois. Bientôt
la guerre fut portée en Champagne; pen-
dant que les gardes nationales du Nord
allèrent seconder les efforts des troupes
de ligne, le pays de Mortagne fut sac-
cagé : la propriété de Fcrnig ne fut point
épargnée. Dumouriez donna à sa famille
un asile dans son camp , et à lui , la place
de capitaine commandant les guides. Fcr-
nig combattit en cette qualité à Valmy, à
Jemmapes , à jVerwinde, eut une grande
part aux succès des campagnes de 1792
et 1793 , et quitta l'armée avec Dumou-
riez. Rentré en France en 1802, il vécut
dans la retraite, cl mourut en 1816 d'une
attaque d'apoplexie. Il était le père de
l'officier général du même nom et des
j)lics Fernig qui ont joué un si grand rôle
pendant la révolution. Foyez l'article
suivant.
' FERNIG ( les D"« Félicité et Théo-
phile de), connues par le courage dont
elles ont fait preuve pendant la révolution,
étaient âgées l'une de 16 ans, l'autre de
13, lorsqu'en 1792 elles prirent les ar-
mes et allèrent se placer dans les rangs
de la garde nationale de Morlagne , qui
tous les jours se mesurait avec les Autri-
chiens. Le général Beurnonville instruit
deleursexploils, en informa la Convention
qui leur envoya deux chevaux richement
caparaçonnés. Lorsque les troupes fran-
çaises se portèrent sur la Champagne qu'a-
vait déjà envahie le duc de Brunswick ,
les Autrichiens se jetèrent sur le village
de Morlagne et pillèrent la propriété de
Fernig. Dumouriez fit nommer les deux
sœurs Fernig ofiiciers d'état-major; elles
rendirent à l'armée, combattirent avec se
vigueur à Valmy, à Jemmapes, à Auder-
lecht, à Nerwinde, dans toutes les jour-
nées des campagnes de 1792 et 1793.
L'histoire de ces deux campagnes rap-
porte plusieurs actions glorieuses dont'
les D^'*''' Fernig furent les auteurs. Entraî-
nées dans la fuite de Dumouriez , elles re-
prirent en pays étranger le costume et les
278 FER
habitudes de leur sexe. Cependant pour-
suivies en Hollande, en Westphalie , en
Danemarck , elles furent euiprisonuées
dans le i)reniier de ces pays : i-enducs à la
liberté, elles viennent à Paris solliciter la
radiation de leur nom sur la liste des
émigrés : on ne veut ni de leur vie , ni
de leur présence en France : elles sont
obligées de quitter le sol natal, et ne peu-
vent y rentrer qu'en 1 802. M'^"* Théophile
est morte en 1 8 1 0 à Bruxelles où sa sœur
s'est mariée. Les D^'" de Fernig avaient
deux autres sœurs , Louise et Aimée qui
étaient trop jeunes pour suivre leur exem •
pie, et un frère qui parvint au grade de
général de brigade.
FERON ( Jean le ) , né à Compiègne ,
avocat au parlement de Paris, publia en
155à, le Catalogue des Connétables,
Chanceliers , Amiraux , Maréchaux de
France , in-fol. Cet ouvrage , entière-
ment refondu par Denis ■Godefroi , au
Louvre, 1G58 , a fait oublier l'édition de
Feron , qui mourut âgé de GO ans , sous
le règne de Charles IX. On a encore de
lui quelques autres écrits , tant imprimés
que manuscrits.
FERRACTNO ( Barthélemi ) , né en
1692 dans le Bassan j montra , dès sa plus
tendre jeunesse , ce que peut la nature
toute seule. Réduit au métier de scieur
de bois , il inventa , au sortir de l'en-
fance , une scie, qui, par le moyen du
vent , faisait très promplemcnt un travail
exact et considérable. Il imagina ensuite
de faire des tonneaux à vin sans cerceaux ;
et il en fit qui étaient plus solides que
ceux qui en ont. Ces succès agrandirent
bientôt la sphère de ses inventions, il
travailla sur le fer , et il fit des horloges
de cette matière, qui , quoique très sim-
ples, produisaient beaucoup d'efletsdif-
férens. 11 inventa même une machine
hydraulique aussi peu compliquée, par
le moyen de laquelle il faisait de grandes
roues dentelées. Ce qui étonna surtout
les mécaniciens, c'est la machine hydrau-
lique faite pour le procurateur Belegno.
Cette machine élève l'eau à 35 pieds,
mesure du pays: c'est la vis d'Archimède.
Enfin , c'est à ce célèbre ingénieur que
la ville de Bassan doit le fameux pont de
PER
la Brenta, aussi admirable par la hardiesse
que par la solidité de sa constructiou.i
Cet habile homme est mort à Solagnii en
1777. M. François Memmo a publié la
J^ie et les inventions de ce mécanicien ,
à Venise, 1764, in-4.
'FERRAJDOLI (Nunzio, dit Degm
Affiti ) , peintre napolitain, né à Nocera
près de Salerneen 16G1, mort à Bologne^
excellait dans le paysage. Ses composi-
tions se font particulièrement remarquer
par la variété des plans , la beauté des
sites , et par l'art avec lequel étaient
rendus la dégradation dans les objets de
la nature , les lointains , l'air, les feuil-
lages battus des vents, les eaux dans un
mouvement continuel : quelques-uns de
ses ouvrages ont mérité d'être comparés
à ceux de l'Albane, Salvator Rosa et de
Cl. Lorrain.
FERR AND {Fulgentius Ferrandus),
diacre de l'église de Carthage au 6* siècle^
disciple de saint Fulgence , fut un des
premiers qui se déclarèrent contre la
condamnation des Trois Chapitres , et
particulièrement contre celle delà Lettre
d'il/as. On a de lui une Collection abrégée
des Canons, nae. Exhortation au comte
Reginus sur les devoirs d'un capitaine
chrétien , et quelques autres morceaux
que le jésuite Chifllet fit imprimer à
Dijon en 1C49 , in-4.
FERRAND(Jean de). Foyes Ferault.
FERRAND ( Jacques ) , natif d'Agen ,
docteur en médecine vers le commen-
cement du dernier siècle, a laissé un
Traité sur la maladie d'Amour , in-8 ,
Paris, 1G23.
FERRAJND ( Louis ) , né à Toulon le
3 octobre 1645 , était avocat au par-
lement de Paris, oii il mourut en 1699 ; fl
mais il est moins connu sous cette qua- V
lité , que sous celle d'érudit. Il avait une
connaissance assez étendue des langues
et de l'antiquité ; mais cette connais-
sance était un peu confuse. Il accable
sou lecteur de citations entassées sans
choix, il. écrit en savant qui n'est que
savant , et qui raisonne de même. On a
de lui 1° un gros Commentaire latin
sur les Psaumes, in-i, 1683. 2° Bé-
flexions sur la Religion chrétienne, 1679,
FER
2 vol. iii-12, qui offrent plusieurs ques-
tions curieuses de chronologie et d'his-
toire , et une explication des prophéties
de Jacob et de Daniel sur le Messie.
3° Le Psautier latin-français, 1G86,
in-1 2. 4° Quelques écrits de controverse,
parmi lesquels on distingua dans le temps
son Traite de l'Eglise contre les He're-
iiqiies , et principalement contre les
Calvinistes, Paris, 1G05, in-1 2. Le
clergé deFrancefut si content de cet ou-
vrage, qu'il augmenta de deux cents
livres la pension de 800 , qu'il lui avait
accordée en 1G80. 5° Traité de la con-
naissance de Dieu , publié avec des
notes par un moine bénédictin de Saint-
Bertin eu Artois; Paris, 1706,in-12.
6° Une Lettre et un Discoure pour prouver
le monachisme de saint Augustin : opi-
nion qui n'est pas adoptée par les bons
critiques.
FERRAIND ( Antoine ) , conseiller à
la cour-des-aides de Paris sa patrie, mort
en 17 < 9, à 42 ans, faisait de petites
chan-sons galantes. Il jouta avec Rousseau
dans l'épigramme et le madrigal. L'un et
l'autre eussent dû mépriser un genre où
il y avait peu de gloire à acquérir, et où
le succès est presque toujours la mesure
de la honte. La plupart des chansons
de Ferrand , recueillies in-8 , ont été
mises sur les airs de clavecin de la com-
position de Couperin.
FERRAA'D ( Jacques-Philippe) , pein-
tre français, fils d'un médecin de Louis
XIII , naquit à Joigny en Bourgogne , l'an
1653. Il fut valet-de-chambre de Louis
XIV , membre de l'académie de peinture.
Il voyagea dans une partie de l'Europe ,
et mourut à Paris en 1732, à 79 ans. Il
excellait dans la peinture en émail. On a
de lui un Traité curieux sur cette matière ,
imprimé à Paris en 1723, in-1 2. On y
trouve aussi un petit Traité de minia-
ture.
* FERRAIND (N...), médecin et voya-
geur français, né vers 1670 , devint mé-
decin du kan des Tartares de Crimée , et
accompagna le fils de ce prince dans une
expédition en Circassie. Le mauvais état
des chrétiens de ce pays le toucha vive-
ment , et dans un voyage qu'il fit en 1 706
FER 279
h Constantinople , il engagea les jésuites,
qui étaient dans cette capitale, à établir
une mission dans la Crimée. Le père Dubon
consentit à le suivre, et fonda une mission
qui eut les plus grands succès. Ferrand
resta toujours à la cour des kans , où il
jouit d'un grand crédit jusqu'à sa mort ,
arrivéevers 1720. Il a laissé : 1° Jîépnnsc
à quelques questions faites au sujet des"
Tartares Circasscs ; 2" Voyage de
Crimée en Circassie par le pays des
Tartares JVogaïs , fait en Van 1702.
Ces deux morceaux ont été insérés dans
le tome 10 du Recueil des voyages au
nord, et dans le tome 3 des Lettres édi-
fiantes , nouvelle édition. Ferrand se
montre dans ces deux ouvrages judicieux
et bon observateur.
"FERRAIND (Marie-Louis), général
de division, naquit à Besancon le 12
octobre 17 63. Après avoir fait de bonnes
éludes , il embrassa le parti des armes , et
fit toutes les campagnes d'Amérique dans
. lecorpsdeRochambeau, avec son frère qui
était pharmacien en chef. A son retour
en France, il s'engagea dans un régiment
de dragons , et devint secrétaire de son
colonel. En 17 92 il était chef d'escadron.
Arrêté sous le régime de la terreur, il
fut jeté en prison , et n'en sortit qu'après
le 9 thermidor. Il eut alors un avancement
rapide. Il servit en qualité de général de
brigade dans les armées de l'Ouest, des
Ardennes et de Sambre-et-Meuse. Après
la paix d'Amiens , il fut nommé gouver-
ncui- de Valencienne; , et quelque temps
après commandant du département du
Pas-de-Calais. Lorsque le gouvernement
voulut se mettre en possession de Saint-
Domingue, dont la partie espagnole
venait d'être cédée à la France par le
traité des Pyrénées , Ferrand fut désigné
pour faire partie de l'expédition. Après la
mort du général Leclerc,qui avait soumis
l'île ent'ère ea quatre mois, une insur-
rection des Nègres ayant éclaté sur tous
les poinls,le général Ferrand songea à
mettre la partie française à l'abri des ré-
voltés ; mais l'occupation du Cap par
Dessalines le força de se replier sur Santo-
Domingo : le gourvernement lui en fut
déféré. Et lorsqu'en 1805 Dessaiines s'a-
a8o FER
vanoa àla tête de vingt-deux mille nègres,
il iit avec le secours des habilans une
vigoureuse défense. Sur ces entrefaites ,
les secours qu'il avait demandés à l'amiral
Missiessi étant arrivés, Dessalines fut
battu sur tous les points , et forcé de lever
le siège. Dès ce moment la partie orien-
tale jouit d'une tranquillité parfaite jus-
qu'au moment oii l'on reçut en Amérique
la nouvelle de l'invasion de l'Espagne par
les Français (1808). Le gouverneur de
Porto-Rico en instruisit Ferrand par une
déclaration de guerre , tandis que la plus
grande partie des colons commençait à
regarder les Français de mauvais œil,
malgré les bienfaits dont Ferrand les avait
comblés. Une révolte éclata h Baraboude
dans lespremicrs jours d'octobre. Ferrand
sortit de Santo-Domingo pour aller étouf-
fer l'insurrection : il joignit les rebelles
le 7 novembre à Palo-Himado. Quoiqu'il
n'eût que cinq cents hommes, et que les
ennemis fussent quatre fois aussi nom-
breux, il les attaqua avec vigueur. Le
combat fut long et opiniâtre ; mais enfin
les Français succombèrent sous le nom-
bre , et Ferrand , après des prodiges de
valeur , s'ôta la vie d'un coup de pis-
tolet , pour ne pas tomber au pouvoir
des -vainqueurs ( 7 novembre 1808 ). On
trouve des détails sur ce général et ses
opérations administratives dans un ou-
vrage intitulé : Précis historique des
e've'nemens de la partie de VUe Saint-
Domingue, \i:xT M. Gilbert Guillemin ,
Paris, 1811 , in-8.
FERRAND DE MONTHELON , an-
cien professeur de l'académie de St.-Luc
à Paris , ensuite professeur de dessin à
Reims , né h Paris, et mort dans cette ville
en 1754 , eut beaucoup de mérite en son
genre. On a de lui un Mémoire sur l'é-
tablissement de V Ecole des Arts.
*FERRA]\D DE LA GAUSSADE
( Jean-Henri Becays ) , général français ,
né le 16 septembre 17 36, à Mont-Flan-
quin en Agenois, d'une famille noble,
obtint en 1746 une lieutenance au régi-
ment de Normandie infanterie , et fit les
campagnes de 1 7 4 7 et 1 7 4 8 . Blessé griève-
ment au combat deOlostercamp pendant
la guerre de 7 ans , il fut élevé au grade
FÈR
de capitaine en 1756, décoré de la croit
de Saint-Louis en 1767 , et fait major de
Valencienneseul763. Lorsque la révolu-
tion éclata, il en adopta les principes, et
fut nommé commandant de la garde na-»
tionale de celle ville, où il eut le bonheur
de maintenir le bon ordre. ÎSommé maré-
chal-de-camp en 1792, il partit pour
l'armée du Nord, et contribua beaucoup
au gain de la bataille de Jemmapes. En
1793, il fut fait général de brigade, et,
quelques joui-s après, général de division.
Il se distingua encore à Valenciennes^
qu'il défendit , pendant près de trois
mois , contre l'armée coalisée , forte de
150,000 hommes, quoiqu'il n'eût avec
lui que 9,500 hommes de toutes armes ,
et ne capitula qu'après avoir repoussé
assauts, et ayant trois brèches praticables
depuis 8 jours au corps de la place. Cette
défense, qui passe pour un des beaux
faits d'armes de la révolulioû , ne l'em-
pêcha pas d'être incarcéré pendant 9
mois, et il ne recouvra sa liberté qu'à la
chute de Robespierre. Le délabrement de
sa santé l'obligea de demander sa retraite.
En 1802, il fut nommé préfet de la
Meuse-Inférieure , et fut rappelé en 1 80*
pour remplir d'autres fonctions. Il est
mort à la Planchette , près Paris, le 28
novembre 1805. Quelque temps avant sa
mort , il publia un précis de la défense
deValenciennes, Paris, 1805, in-8.
♦ FERRAND ( le comte , Antoine
François-Claude ) , pair de France , minis-
tre d'état , commandeur de l'ordre du
Saint-Esprit, etc., naquit en 1751, d'une
ancienne famille qui s'était distinguée
avant la révolution dans la carrière des
armes et dans celle du barreau. Parmi
ses nobles ancêtres, on distingue le chan-
celier Matthieu Ferrand, sous Philippe de
Valois eu 1328, et plus tard, Jean-Claude
Ferrand conseiller au parlement de Paris,
fils de Michel , doyen du parlement , mas-
sacré sur les marches de l'Hôtel-de-Ville le
4 juillet 1652, victime de son dévouement,
puisqu'alors il venait défendre la cause
du roi pendant la guerre de la fronde :
ce fut cet illustre aïeul que le comte
Ferrand prit pour modèle et auquel il
adressa celte belle apostrophe dans son
PEB
W excellent ouvrage de V Accord des prin-
cipes et des lois, le premier qui soit
sorti de sa plume : « Otoi qui m'as laissé
i> un nom que la mort doit rendre plus
w respectable , toi qui péris par les mains
» des séditieux , en défendant la cause
» de Louis XIV encore jeune ; guide »u-
i> jourd'hui les travaux d'un de tes des-
» cendaus ! sans doute il te fallut du
» courage pour t'exposer à la fureur d'une
M populace révoltée; peut-être aujour-
I) d'hui n'eu faut-il pas moins pour rap-
») peler de grandes véritésàun siècle qui
» les ridiculise ou les persécute.- « Le
comte Ferrand était avant la révolution
conseiller aux enquêtes dans le parlement
de Paris, place qu'il avait obtenue à
18 ans, avec dispense d'âge. De bonne
heure il se fit remarquer par un jugement
sain et par une mâle éloquence. Dans
plusieurs occasions il fit preuve d'une
noble indépendance , et son dévouement
aux intérêts du trône comme à ceux de
]a nation, se manifesta surtout lorsque ,
avec plusieurs autres conseillers du par-
lement, il représenta en 1787 , à Louis
XVI le danger de créer pour 5 ans des em-
prunts graduels et successifs : on remarqua
le discours qu'il prononça devant le roi :
il rappelait ce qui s'était passé dans des
circonstances financières à peu près sem-
blables , sous Louis XV qui , après avoir
formé le même projet que celui contre
lequel il se prononçait, adopta l'avis de
la majorité et renonça à une mesure dont
on lui avait montré les funestes consé-
quences. La voix de Ferrand ne fut point
écoutée. Peu de temps auparavant , ce
jeune magistrat , âgé seulement de 34
ans, avait publié l'ouvrage important qui
a pour titre : Accord des principes et des
lois. Son libraire avait mis en même
temps en vente, mais sans nom d'auteur,
un poème erotique d'un vieux président.
En arrivant au parlement , celui - ci
aperçut M. Ferrand ; Monsieur, lui dit-il ,
Je viens de lire votre ouvrage chez notre
libraire : il m^a fait rougir. Le public
et mes confrères penseront qu'il est
Fœuvre du magistrat à chcK^eux blancs ,
et que celui que je viens de publier est
•celui d'un jeune conseiller, et que le li-
V.
FER
, 281
braire lef a tronipe's ; mais je m'em-
presse de proclamer la vérité' , et de
prier ces Messieurs de m'aider à faire
connaître le véritable auteur de l'excel"
lent ouvrage que rnent de nous doiiner
le jeune magistrat qui est déjà une des
lumières du Parlement et l'un des plus
fermes appuis du trône. Ferrand s'oc-
cupait aussi de poésie : ses compositions
sont d'un stile facile et coiTect. Il fit
quelques tragédies qui furent remar-
quées ■ il jouait lui-même dans les salons
les rôles de quelques-uns de ses héros.
Ces délassemens passagers ne le fixèrent
pas long-temps : il était appelé à traiter
des matières plus sérieuses. Ferrand s'é-
tait'marié en 17 80, avec la fille du pré-
sident Rolland qui périt en 1793 , sous
la hache révolutionnaire. Après avoir
montré la plus vigoureuse opposition aux
principes politiques et religieux de 1789,
il quitta la France dès le mois de septem-
bre de la même année , s'attacha au prince
de Condé , dont il gagna la confiance, et
qui , dès la première campagne , l'admit
dans son conseil. Après la mort de Louis
XVI , il fit partie du conseil de régence.
Pendant l'émigration il publia plusieurs
ouvrages pour défendre les droits de son
souverain. Ce fut encore à la même épo-
que qu'il écrivit V éloge de Madame Eli-
sabeth, d'après les notes que lui fournit
Madame de Borabelles qu'il rencontra en
1795 à Ratisbonne. Ferrand revint en
France en 1800 , ne remplit aucune fonc-
tion ni sous le gouvernement consulaire
ni sous le gouvernement impérial , et
s'occupa exclusivement d'études littérai-
res ou historiques. Peu de temps après
son retour, il fit paraître le bel ouvrage
<Je V Esprit de l'histoire ou Lettres politi-
ques et morales d'un père à son fils. Il
y établit ce principe éminemment con-
servateur que nul n'a le droit de vouloir
une révolution : ce ne fut point celte
maxime qui déplut à Buonaparte; car il de-
vait tenir au maintien de l'état de choses
qui existait alors ; mais ce fut le discours
deViomandierdans lequel il est question
d'un général qui replace Chiideric, roi
légitime sûr un trône usurpé. La police
défendit la pxiblication de cet ouvrage,
18..
282 FER
qui n'en fut que plus recherché, et dont
quelques exemplaires se vendirent jusqu'à
deux Jouis chacun. Le libraire Dcsenne
qui avait une haute opinion du talent de
Ferrand, et qui possédait les manuscrits de
l'histoire de Pologne par Rulhières , vint
lui proposer de la continuer; ce qu'il
n'accepta qu'avec peine : il y travailla
pendant trois ans, et, lorsque cet ouvrage
fut terminé, il éprouva toutes sortes de
désagrémens. Il en avait prévu quelques-
uns , surtout ceux qui lui vinrent de la
police, mais dont d'autres durent le sur-
prendre; car on le traita de barbare, par-
ce qu'il n'avait pas voulu conserver cette
qualification que Rulhières donnait ha-
bituellement aux Russes, et parce qu'il ne
croyait pas que l'on devait accuser une na-
tion toute entière qui marche à la civilisa-
tion plus rapidement qu'on ne le croit
d'ordinaire. On lui proposa aussi de lui
accorder la permissiou d'imprimer celte
histoire, à la condition sordide qu'il aban-
donnerait la moitié des bénéfices de l'é-
dition. En 1 8 1 2 le bruit courut que Ferrand
avait fait partie de la conspiration Mallet :
le fait était faux. Jamais Ferrand n'eut la
pensée d'une conspiration : il attendait
en silence , comme tant d'autres fidèles
royalistes , que les temps fussent accom-
plis. A cette occasion nous rappellerons ce
qu'il dit en 1800, au ministre Bénézéqui
lui témoignait quelque inquiétude sur sa
présence en France : Je vais, lui répondit-
il , me mettre bien à découvert vis-à-vis
de vous. Toutes les fois que l'on vous
dira que je suis entre' dans une conspi-
ration , armiez que cela est faux ,
et vous aurez raison. Mais quand
vous saurez qu'un prince français a mis
le pied en France, soyez sûr que je ferai
V impossible pour aller le joindre. Après
la déchéance de Buonaparte, quelques
royalistes se réunirent ( 31 mars 1814 ),
chez M. Lepellctier de Morfontaine ,
ancien magistrat , pour aviser aux moyens
d'assurer le retour des Bourbons : il n'est
pas vrai , comme l'ont dit tous les bio-
graphes , qu'il proposa d'avoir recours
au Sénat : un tel avis était totalement
contraire à ses opinions et à ses princi-
pes : une députation fut envoyée auprès
FER
de l'empereur Alexandre d'après le con-
seil de Ferrand , qui cependant n'en fit
point partie. Louis XYIII voulant récom-
penser son zèle et sa fidélité le nomma mi-
nistre d'état , et directeur-général des
postes. Plus tard ( août 1814 ) il l'éleva
à la dignité de comte. Plein de con-
fiance dans ses lumières il l'appela dans
le conseil qui rédigea la Charte, et Ferrand
eut une grande part à cet acte important
du règne de ce prince. Le 14 novembre
1814, sur la demande que le prince de
Condé fit lui-même au roi , Ferrand reçut
la croix de St.-Louis avec les lettres les
plus aimables du prince qui la lui en-
voyait. Nommé membre de la commission
chargée de l'examen des demandes en
restitution des biens non vendus des émi-
grés , il en présenta le projet le 1 3 sep-
tembre à la chambre des Députés , et en
développa les motifs dans un discours
remarquable , où il rappela les services
et les malheurs des émigrés , et dit
qu'en déclarant irrévocable la vente des
biens nationaux , le roi avait agi dans
l'intérêt de la pais intérieure , mais
que n'ayant pu rendre légitime ce qui
était injuste , il convenait que la nation
accordât, quand les circonstances le per-
mettraient, de justes dédommageraens
à ceux qui avaient été privés de leurs
biens : ce fut lui qui prononça le premier
le mot d'indemnité. Ce discours violem-
ment combattu par M. Bédoch , député ,
fut défendu d'une manière victorieuse
par M. Mutin dans un article publié dans
le Journal des Débats. Ferrand eut par
intérim le portefeuille de la marine pen-
dant la maladie et après la mort de M.
Malouet : au mois de septembre il pré-
senta au roi un projet relatif à la traite
des Nègres qu'il voulait interdire entre
le Cap blanc et le Cap de Palmes sur les
côtes d'Afrique. Il présenta aussi le 20
octobre à la chambre des Députés un
projet de loi sur les dettes des colons de
St.-Domingue : il proposait de prolonger
jusqu'à la fin de la session de 1815, le
sursis que leur avait accordé le gouver-
nement précédent. Il céda le ministère
de la marine à M. Beugnot. Au 20 mars
il fut obligé de remettre sa direction à
FER
M. Lavalelte : le refus de chevaux que lui
fit son successeur l'empêcha d'accompa-
gner le roi. Muni toutefois d'un sauf-
conduit , il se rendit dans la Vendée, où
les émissaires de Buonaparte avaient déjà
divisé les royalistes, et où par conséquent
il ne put faire le bien qu'il espérait pour
la cause de ses maîtres. Retiré secrète-
ment à Orléans, il fut découvert par la
police de Fouché qui connaissait son
voyage dans la Vendée : il reçut l'ordre
de sortir de France , mais ses infirmités
le firent révoquer. La seconde restaura-
tion lui rendit ses titres et ses dig-nités ;
seulement il ne rentra point à la direc-
tion-générale des postes; mais en revan-
che il fut créé pair de France le 17
août 1816. Le 20 novembre de la même
année , il parut comme ténioin dans le
procès de Lavalette : personne mieux
que lui ne pouvait faire connaître les
circonstances dans lesquelles sa place de
directeur lui avait été enlevée. Forcé de
dire la vérité , il exhiba le sauf-conduit
que lui avait donné Lavallette. Ferrand
fut chargé de faire à la chambre des
Pairs le rapport sur l'établissement des
cours prévotales ; et ce fut sur sa propo-
sition , motivée par le tableau des tenta-
tives criminelles du parti buonapartiste
ou républicain , que la chambre adopta
cette mesure à une grande majorité. Louis
XVIIF n'avait jusqu'alors récompensé que
le dévouement politique de Ferrand : ap-
préciateur éclairé du talent , il ne pou-
vait oublier le mérite de ses productions
littéraires; aussi le 21 mars 1816 il le
nomma membre de l'académie française,
et Je 16 décembre suivant, grand-ofiicier-
secrétaire des ordres de St. -Michel et
du St. -Esprit. Déjà la santé de Ferrand
s'affaiblissait ; et quoiqu'il eût déjà perdu
la vue, il alla prêter serment dans le
cabinet du Roi. Malgré ses souffrances ,
il a continuellement assisté aux séances
de la chambre des Pairs oii il vota tou-
jours avec le côté droit. Il est mort le 1 7
janvier 1825, à l'âge de 7 3 ans. Voici la
liste exacte de ses ouvrages ; 1° Accord
des principes et des lois sur les évoca-
tions, commissions et cassations illéga-
les, Paris, 1786, in-8 ; 2° Essai d'un
FER 9.83
ciloijen , Paris, 1789, in-8; 8° Nullité
et Despotisme de V Assemblée prétendue
nationale, décembre 17 90 , in-8; 4'»
Etat actuel de la France , janvier 1 7 90 ;
5° Adresse d'un citoyen très actif, fé-
vrier 1790; 6° Douze lettres d'un com-
merçant à un cultivateur , mars , avril ,
mai 1790; 1° Le dernier coup de la
ligue , octobre 1 7 90 ; 8° Lettre d'an
ministre d'une cour étrangère à M. le
comte de Montmorin , 1791 ; 9" Réponse
au post-scriptum d'une lettre du comte
de Lally-Tolendal à M. Burk ; 10° Le
rétablissement de la monarchie , juillet
1793; 11" Considérations sur les révo-
lutions sociales, août 17 94 ; 12° V Es-
prit de l'histoire , ou Lettres politi-
ques et morales d'un père à son fils, sur
la manière d'étudier l'histoire en géné-
ral , et particulièrement de Vhistoire de
France , Paris, 1802-1809, 5« édition ,
4 vol. in-8, 1816. Ce livre est remar-
quable par la sagesse du pian , l'ordre
des matières , les pensées justes et pro-
fondes : il devait enfin , par les bons
principes qu'il contient , attirer néces-
sairement sur son auteur les persécutions
d'un gouvernement despotique et illégi-
titne. C'est à l'occasion de cet ouvrage ,
que l'empereur de Russie envoya à l'au-
teur une bague d'un grand prix, accom-
pagné d'une lettre très flatteuse. 13°
Eloge historique de M""" Elisabeth de
France, suivi de plusieurs lettres de cette
princesse , Ratisbonne , 1795, refait par
l'auteur en 1814 , et publié à Paris peu
de jours après la restauration. Les autres
ouvrages du comte Ferrand , qui sont non
moins remarquables que les précédens ,
ont pour titres : 14° Théorie des révo-
lutions, Paris, 1817, 4 vol. in-8 ; 15°
Histoire des trois démembremens de la
Pologne, 1820, 3 vol. in-8 ; 16" Testa-
ment politique , 1830, 1 vol. in-8, œuvre
posthume. Il avait aussi fait plusieurs
brochures : Vues d'un pair de France sur
la session de 1821 , lïefiexions sur la
question du renouvellement intégral de
la chambre des députés , 1823 , etc.
Plusieurs de, ses opinions et rapports ont
été imprimés par ordre de la chambre
des Pairs. On a de lui quatre tragédies ^
5.84 TER
1" Zoaré, 1779; 2" Philoctèle, 1780; 3°
ÎAi sié{je de Rhodes, 1784 ; 4° Alfred le
Grand , 17 85. Le eomte Fcrrand ne varia
jamais dans ses principes politiques. On
avait proposé à Buouaparte de chercher
à l'atlirçr dans son parti : Oh ! celui-là —
répondit-il , il n'j/ faut pas compter ;
nous ne l'aurons jamais : il aime trop
les Bourbons.
FERRARE. Ployez Rkmée de France ,
et Alfosse d'Est.
FERRARI (Barthélemi), Ferrarius,
gentilhomme milauois, né en 1497 , in-
stitua en 1 533, de concert avec Antoine-
Marie-Zacharie et Jacques-Antoine Mo-
rizia , l'ordre desBarnabites , si utiles de-
puis à l'Italie et à l'Allemagne. Il mourut
supérieur de cette congrégation en 1544,
avec une grande réputation de vertu.
* FERRARI ( André,) , peintre génois,
mort en 1559. Il était également habile
pour le paysage , les fruits , les fleurs ,
les animaux , et pour les sujets histori-
ques. Il y a eu plusieurs autres peintres
de ce nom.
FERRARI ( François - Bernardin ) ,
prêtre de la congrégation des Oblats,
docteur de Milan sa patrie, naquit en
1577 , et mourut en 1C69 , à 92 ans. Il
parcourut, par ordre du cardinal Frédéric
Borromée , archevêque de cette ville ,
l'Espagne et l'Italie , pour recueillir des
livres et des manuscrits. Il fit une riche
moisson , et dès lors la Bibliothèque
Ambroisienne eut un nom dans l'Europe
littéraire. On lui doit plusieurs ouvrages,
pleins d'érudition et de recherches cu-
rieuses. Il écrit nettement et méthodique-
ment. Les principaux sont : \" De ritu
sacrarum concionum. Milan , 1 620 , in-4 .
Jean-Georges Grœvius a redonné au pu-
blic ce savant ouvrage sur les anciennes
coutumes de l'Eglise à l'égard des prédi-
cations ; Utrecht , 1692, in-4. Quelques
bibliographes ont dit que le succès de ce
livre excita la. jalousie du cardinal, et qu'il
fit tout ce qu'il put pour le faire sup-
primer, parce qu'il vit que son traite De
concionante Episcopo , qu'il mit au jour
dans le même temps , était éclipsé par
celui de Ferrari ; mais cette anecdote ,
déjà réfutée par le caractère du sage et
FER
vertueux prélat, l'est encore par les faits
et les dates. Le livre de l'archevêque ne
vit le jour qu'en 1 632, après sa mort, et 1 2
ans aprèsla publication de celui de Fer-'
rari, imprimé en 1620, in-4. Cet ouvrage
était un des pJus rares arabroisicns, avant
qu'on le réimprimât. L'édition originale
de 1620 est la plus recherchée. 2" Des
applaudissemens et des acclamations
des Anciens; ouvrage divisé en sept
livres , et imprimé à Milan en 1627, in-4.
3" Un Traité des funérailles des chré-
tiens.
FERRARI ( Jean-Baptiste ), jésuite
de Sienne, né en 1584 , mort en 1655,
donna au public, en 1622, un Diction-
naire syriaque , in-4 , sous le titre de
Nomenclator Syrianus, très utile à ceux
qui s'appliquent aux langues orientales.
L'auteur s'est principalement attaché à
expliquer les mots syriaques de la Bible :
travail dans lequel il fut aidé par de sa-
vans Maronites. On a encore de lui : De
malorum aureorum cultura ; Rome,
164G, in-fol. ; et De florum cultura,
Rome, 1633 , in-4 ; et en italien, Rome,
1638, in-4.
FERRARI ( Octavien ) mi'.anois, né
en 1 51 8, professa laphilosophie à Padoue,
et mourut dans sa patrie en 1 586 , estimé
pour sa vertu et sa vaste littérature. On
lui doit : 1 " Clavis philosophiœ Aristo-
telicœ , 1606, in-8. 2° Un savant traité
de l'Origine des Romains , en latin :
Milan, 1607, in-8. Grœvius l'a inséré
dans le l*"" vol. de ses Antiquités Ro-
maines , et y a ajouté les corrections né-
cessaires. Le stile de Ferrari est pur et
assez élégant.
FERRARI ( Octave ) naquit à Milan
comme le précédent , en 1607 , et ne fut
pas moins estimé. ( Il fut professeur d'élo-
quence au collège Ambrosien, et histo-
riographe de la ville de Milan.) Louis XIV,
la reine Christine , la ville de Milan , lui
firent des présens et des pensions. Il les
méritait par son savoir ; il possédait l'an-
tiquité. On a de lui plusieurs ouvrage»
savans et curieux, f Sur les Fêtcmens
des Anciens, et les Lampes sépulcrales ,
en latin , in-4 , Padou€ , 1 68 5 ( voyez Lt-
CETi ). 2" De Mimis et Pantomimis, 1714,
FER
in-8. 3° Origines linfjuœ ilalicce,in-iol. ,
1676 ; livre plein d'érudition, mais dans
lequel il exalte trop la langue italienne.
4° Opuscula, Hermstadt, 1710, in-8. Ce
savant mourut en 1682, à 74 ans. C'é-
tait un homme d'une humeur douce,
sincère , affable, ami de la paix : aussi
l'appelait-on le Pacificateur et le Con-
ciliateur. Son stile est élégant et châtié ,
mais sans affectation ; il sait prendre le
ton de son sujet, à quelques endroits
près , où il imite un peu trop le ton des
poètes.
FERRARI ( Philippe ) , religieux ser-
vite , mort eu 1626 , est connu par une
Typographie du Bréviaire romain , et
par un Dictionnaire géographique , que
l'abbé Baudrand fit réimprimer en 1682,
augmenté de moitié. Il ne corrigea point
les inexactitudes de Ferrari, et il en ajouta
de nouvelles , suivant l'usage de ces
compilateurs iguorans, qui joignent leurs
rapsodies aux ouvrages des autres.
FERRARI (Gui), élégant et éloquent
écrivain du 18" siècle, né en Italie, et
mort en 1791 , s'est fait un nom distin-
gué par plusieurs ouvrages latins, dignes
(Ju siècle d'Auguste. Il se fit d'abord con-
naître par son abrégé d'histoire De Fita
quinque imperatorum, ou Mémoire de la
vie de cinq généraux autrichiens qui se
sont distingués dans la dernière guerre
avec la Prusse, Vienne, 177 5, in-8.
Ceux que la frivolité du siècle n'a pas
conduits jusqu'au mépris des langues an-
, ciennes , ne peuvent que lire avec plai-
* sir cet ouvrage. On y trouve , outre le
mérite historique, un genre de narration
qui unit la précision avec la majesté et
la richesse du langage romain. Les cinq
généraux , dont l'auteur rapporte les ex-
ploits , sont MM. Brown , Daun , Nadasti,
Serbelloni et Laudon. On a donné le Re-
cueil de ses Œuvres à Lugano , 1777. Il
y traite en détail les actions des cinq gé-
néraux , qu'il n'avait qu'effleurées dans
l'ouvrage précédent. Son stile en général
ressemble beaucoup à Cornélius Nepos ;
mais lorsqu'il entre dans quelques détails
sur les opérations militaires et les révo-
lutions de la guerre , il est moins alors
celui de Cornélius Nepos, que celui de
FER 285
Jules-César ; eî c'est effectivement là te
modèle des historiens de la guerre. L'a-
brégé de la Vie des héros guerriers est
suivie de celle de trois hommes célèbres
dans la littérature d'Italie : Jules-César
Crusato , Thomas Ceva , et Antoine Lec-
chi. Viennent ensuite sept Oraisons lati-
nes, entre lesquelles on distingue celle
de optimo pâtre- familias ; il y a des ob-
servations qui renferment plus de sagesse
et d'utilité sur l'éducation des enfans,
qu'on n'en voit dans dix traités sur cette
matière , laquelle a été tant agitée dan&
ces dernières années, et dont on ne cesse
encore d'occuper le public. Le stile de
Ferrari s'élève avec les choses , et prend
un nouvel essor quand il est employé à
célébrer de grands événemens. Alors sa'
prose devient nombreuse , ses périodes
s'enchaînent, si» marche est plus grave et
plus imposante. C'est ce qu'on remarque
dans le début de l'oraison , oii il célèbre
la fameuse victoire de Kolin. Il y a en-
core dans ce Recueil, des plaidoyers sur
différens sujets plus ou moins intéres-
sans; et c'est dans ceux qui le sont moins,
et qui semblent ne pas se prêter à la ri-
chesse et aux oniemens de l'éloquence,
que l'art et les ressources de l'auteur pa-
raissent plus à découvert. L'on ne peut
cependant disconvenir que quelques-unes
de ces pièces ont peu de développement,
peu de force , et quelquefois un peu de
sécheresse. H y a aussi des faits qui ne
sont pas rapportés avec assez d'exacti-
tude , et des narrations où l'on croit en-
trevoir des anachronismes. Ployez le
Journ. hist. et littér. 1«»" février 1778,
p. 168.
* FERRARI (Jean-Baptiste , l'abbé),
naquit à Tresto , près d'Esté, le 21 juin
1 732, et mourut à Padoue en 1 806, après
avoir été préfet des études du séminaire
de cette ville. Il montra de bonne heure
du goût pour les choses saintes. Il est
auteur de différens ouvrages écrits en
latin et qui traitent pour la plupart des
matières religieuses. On lui doit aussi
quelques Opuscules poétiques f\m ont du
mérite , mais qui sont restés manuscrits :
ce sont des Dialogues, des Odes, des Elé-
gies et des Epigrammes. Ses meillcurea
a86 FER
productions sont -. 1" Laudatio in funere
Clementis XIH , in-4 , l'adoue, 1769;
2" rUa Egid'd ForcelUni, ibid., 1792,
iu-4 ; 4° f^itœ illustrium virorum scmi-
narii Palavinensis,'\\i\à., 1799, in-8 ; 4"
Vita Jacobi Facciolati, ibid. 17 99,
in-8 ; Fita PU Fil , cum appendice ,
ibid., 1802, in-4.
* FERRARI (Pierre), architecte de la
chambre apostolique, né à Spolète en
1763, se distingua de bonne heure par
une profonde connaissance de son art.
L'administration française mit à profit
son talent pour le bien de l'Italie, en le
chargeant de plusieurs travaux impor-
tans, en qualité d'ingénieur en chef dans
le département du Trasimène. De con-
cert avec le chevalier Fontana , il s'oc-
cupa du projet de canal de jonction de
la mer Adriatique à la mer Méditerranée.
Ce ne fut qu'en ^1825 qu'il fit part au pu-
blic de ses méditations sur cette utile con-
ception : son livre est intitulé : de l'Ou-
verture d'un canal navigable qui, de la
vier Adriatique en traversant V Italie ,
déboucherait par deux endroits dans la
mer Méditerranée. Ferrari a donné aussi
des plans pour le dessèchement des lacs
de Trasimène et de Fucino. Il est mort à
Naples à l'âge de 7 3 ans, le 7 décembre
1825.
FERRARI. Voyez Giolito de Ferrari
(Gabriel).
FERRARI. Voyez Galateo.
FERRARIENSIS. Voyez Silvestre
(François ).
FERRARIS ( Jean-Pierre de ) , célè-
bre docteur en droit, natif de Pavie au
14* siècle, composa, dans un âge très
avancé, une Pratique de Droit, 1544,
in-8 , peu connue aujourd'hui.
* FERRARIS ( Joseph, comte de ),
né à Lunéville le 20 avril 172G, d'une
famille noble du Piémont établie en Lor-
raine depuis plus d'un siècle, entra en
qualité de ^page à Vienne, eir 1735, chez
l'impératrice Amélie, veuve de l'empe-
reur Joseph I. Lors de la guerre qui eut
lieu après la mort de l'empereur Charles
VI , le comte de Ferraris , qui sortait à
peine de l'enfance, sollicita l'honneur
de débuter dans la carrière militaire, et
FER
il obtint un drapeau dans le régiment de
Grune ( 1741). Blessé à la bataille de
Czallau ( 17 mai 1744 ), après avoir fait
des prodiges de valeur , il eut une lieute-
nance, et, avant la fin de la campagne ,
une compagnie d'infanterie» La paix
dont jouit l'Autriche pendant quelques
années, retarda son avancement; mais
la guerre de 7 ans lui fournit de nouveau
l'occasion de signaler son courage. Le 1 4
octobre 17 58 , à la bataille de Hochkir-
chen, il s'empara d'une batterie de 36
pièces de canon , à la tète du régiment
de Charles-Lorraine dont il était colonel ;
ce qui lui valut la décoration de l'ordre
de Marie-Thérèse. Il fut élevé au grade
de général-major en 17G1 , et à celui de
lieutenant-général en 17 73. En 17 77 , il
fut nommé directeur-général de l'artille-
rie des Pays-Bas. Il s'occupa à celte épo-
que de la carte des provinces belgiques.
Lorsque la guerre eut éclaté avec la Prusse
en 1778 , Marie-Thérèse lui donna un té-
moignage bien flatteur de sa confiance ,
en plaçant sous sa direction le jeune ar-
chiduc Maximilien, depuis électeur de Co-
logne. Son crédit se soutint également
sous le règne de l'empereur Joseph II.
Quoiqu'âgé de 67 ans, il prit une part
active à la campagne de 17 93 contre les
Français , et il se distingua particulière-
ment au combat de Famarsetausiége de
Valenciennes. Il obtint alors le cordon
de commandeur, et, peu de temps après,
la grand'croix de Marie-Thérèse, la place
de vice-président du conseil aulique de
guerre, et enfin le titre de feld-maré-
chal. Il est mort à Vienne le 1*"^ avril 1814,
universellement regretté. Il joignait à
des talens peu communs, des mœurs
douces, une politesse exquise , et une
loyautéTsans égale. On lui doit une carte
des provinces belgiques en 25 feuilles,
qui peut soutenir la comparaison avec la
grande carte de France de Cassini.
* FERRAUD ou Féraud (N...), député
à la Convention nationale par le départe-
ment des Hautes-Pyrénées, naquit dans la
vallée d'Aure, au pied des Pyrénées, vers
l'an 17 64. lise montra dès l'ouverture
de la session l'ennemi acharné de la cour,
fut chargé de faire un rapport sur les
FER
pétitions des sections de Paris qui deman-
daient la mise en jugement de Louis XVIj
et dans le procès de ce malheureux mo-
narque , il fut de la majorité qui le con-
damna sans sursis ni appel. D'un autre
côté , il poursuivit de la même haine les
émigrés : il fit ordonner qu'un nommé
\iard , envoyé du ministre Lebrun à
Londres, accusé d'être leur agent et
l'espion de l'étranger, fut traduit à la barre
de l'Assemblée. Ce fut encore lui qui de-
manda que le ministre Pache ne pût sortir
de la capitale avant d'avoir rendu compte
de sa gestion. Dans plusieurs occasions,
Fcrraud s'était fait remarquer par ses con-
naissances en économie politique , et ses
premiers travaux consacrés aux subsistan-
ces, furent pour lui l'occasion de présen-
ter des vues très judicieuses sur cette
partie du service public. Ferraud s'était
attaché au parti de la Gironde , qui vou-
lait une république sans terreur : aussi le
vit-on combattre de tous ses eftbrts la fac-
tion des Montagnards qui voulaient arriver
au même but que la Gironde , mais par la
guillotine et les échafauds, comme ils
en ont donné l'épreuve épouvantable
pendant qu'ils ont été au pouvoir. INul
doute que Ferraud n'eût été compromis
dans la proscription du 31 mai 17 93, si
alors il n'eût été en mission. Ses amis ,
pour le mettre à l'abri de l'orage qui me-
naçait les Girondins, le firent envoyer
successivement à l'armée du Nord et à
celle des Pyrénées-Orientales. Ferraud
avait du courage ; il ne put être le té-
moin inactif des efforts et des succès de
nos soldats : il voulut partager les uns
et les autres, et à plusieurs reprises,
on le vit se mêler avec les combattans :
un jour il chargea avec intrépidité à la
tête d'une colonne , et , quoiqu'il fût
blessé, il termina lui-même cet enga-
gement et parvint à repousser les en-
nemis. Rappelé à la Convention après le
9 thermidor an 2 ( 2 juillet 1794), il
fut adjoint à Barras pour réprimer les re-
belles suscités par la commune de Paris ;
il continua à poursuivre avec un zèle
digne d'éloge les démagogues de la Mon-
tagne, et contribua à l'arrestation de Ro-
bespierre. Renvoyé à l'armée du Nord ,
FER 287
il continua à donner des preuves de son
intrépidité , et on peut placer son nom
parmi ceux des guerriers qui se distinguè-
rent alors à la prise de Frankendal et à
celle du fort du Rhin. De retour de Celte
mission , il rentra à l'assemblée. La con-
duite qu'il avait tenue à l'égard de Ro-
bespierre et des Montagnards avait indis-
posé contre lui la commune et ses fougueux
satellites : la Gironde s'efforçait d'inspi-
rer des idées d'ordre, et de faire sortir la
France du chaos sanglant dans lequel
elle se trouvait plongée : d'un autre côté,
la faction des Jacobins renouvelait ses
efforts ; elle fait arriver l'abjecte popu-
lace des faubourgs de Paris, au son du
tocsin sonné dès le milieu de la nuit du
20 mai 17 96. Les rebelles furieux pénè-
trent à la Convention ; ils demandent à
grands cris du pain , la liberté des pa-
triotes et la Constitution de 1793. Fer-
raud accoutumé à braver les dangers, s'é-
lance pour empêcher cette violation de
la représentation nationale. Boissy d'An-
glas est au fauteuil ; mais vingt armes à
feu sont dirigées sur le président; Fer-
raud le couvre de sdn corps , et dit aux
factieux : j'ai e'tc atteint plus d'une fois
du fer ennemi: voilà mon sein couvert
de cicatrices ; je vous abandonne ma
vie, mais respectez le sanctuaire des
lois. Ces paroles furent les dernières qu'il
prononça : atteint dans la poitrine par
un coup de pistolet , il tomba , mais il
respirait encore ; une femme insulte à
cette victime de la fureur populaire , eu
lui frappant le visage avec ses galoches ;
un homme traîne son cadavre dans le
couloir et lui coupe la tête, la place au
bout d'une pique, el la présente à Boissy
d'Anglas qui , à sa vue , se lève , se dé-
couvre et salue avec majesté ces restes
d'un homme courageux {voyez Boissy
d'ANGLAs ). Cet assassin était un serrurier
qui le lendemain fut condamné à mort ;
mais la populace l'arracha violemment à
l'échafaud : peu de temps après , il fut
repris, condamné de nouveau par une
commission militaire et exécuté. La Con-
vention décréta que des honneurs funè-
bres seraient rendus à Ferraud : cette
cérémonie eut lieu le 1 4 prairial , et Lou-
•>88 FER
vel y prononça son oraison funèbre qui
a été imprimée en nU5.
FERRE ( Vincent ) , dominicain , na-
tif de Valence en Espagne , cnseigiia la
théologie avec réputation à Burgos et à
Rome , puis à Salamanque , oii il mourut
vers 1G83. On a de lui des Commentaires
estimés en Espagne sur la Somme de
saint Thomas, en 8 vol. in-fol. Il résout
toutes les difficultés avec beaucoup de
netteté et de précision.
FERREIN ( Antoine ) , ne à Frespech
en Agénois , l'an 1693 , était médecin de
Montpellier. Il a été de l'académie des
Sciences , et professeur en médecine au
coUége-royal. Ses Leçons sur la Méde-
cine, et celles sur la Matière médicale,
publiées depuis sa mort, chacune en 3
vol. in-12, par M. Arnault de Nobleville,
prouvent qu'il avait bien médité sur l'art
de guérir. Il l'exerça avec succès jusqu'à
sa mort, arrivée à Paris le 28 février
1709.
* FERREIRA ( Antoine ), célèbre
poète portugais, né à Lisbonne en 1528 ,
mort le 28 avril 1569 , à peine âgé de 41
ans, a publié les ouvrages suivans, qui
sont des poésies lyriques ou dramatiques,
et qui l'ont placé au rang des auteurs
classiques de sa patrie : 1° Inès de Cas-
tro , la seconde tragédie régulière qui
ait paru en Europe , et que les Portugais
regardent comme un des beaux monu-
mens de leur littérature. La Motte en a
emprunté les plus belles scènes. 2°/'oc-
' mas Lusitanos, Lisbonne , 1598. 3° Des
Comédies imprimées en 1622 et 1771 ,
avec celles de Sa de Miranda.
FERREIRA ( Antoine) , né à Lisbon-
ne, publia dans cette ville en 1670 , un
Cours de Chirurgie estimé, et plusieurs
fois réimprimé in-fol. L'auteur était chi-
rurgien de la chambre du roi de Portu-
gal. Il mourut en 1677.
* FERREOL ( S. ), premier évêque de
Besançon , accompagna saint Irénée dans
les Gaules , et fut envoyé par lui dans la
Séquanie avec saint Ferjeux son frère :
les deux apôtres furent arrêtés par les
ordres de Claude, préfet romain. Malgré
les tourmens qui leur furent infligés, ils
restèrent inébranlables dans la foi ; ils
FER
eurent la tôte tranchée l'an 21 1. Leurs
tombeaux existent encore dans un souter-
rain près de Besançon , dans le village
de Saint-Ferjeux.
FERREOL ou Forgeot ( S. ) , martyr
de Vienne dans les Gaules, fut mis à mort
à ce que l'on croit , sous le règne de Dio-
clétien et de Maximien. — Il faut le dis-
tinguer de saint Ferreol , évêque de Li-
moges en 591 , sous le règne de Cliilpé-
ric ; et de saint Ferreol , évêque d'Ussez
en 533. On a de celui-ci une Jièffle mo-
nastique , insérée par Holstenius dans
son Codex Regularum.
FERRERA ( Jean ) , espagnpl , entre-
prit , par ordre du cardinal Ximenès , un ,
Traité complet d^ Agriculture. Il ra-
massa, dan.î son ouvrage, tout ce que
les anciens et les modernes avaient écrit
d'important sur ce premier art du genre
humain. Uy joignit ses observations par-
ticulières, fruits d'une longue expérience.
Ce livre a été très utile dans son temps ,
et il a servi beaucoup à ceux qui ont de-
puis traité la même matière.
FERRERAS ( Don Jean de ) naquit
le 7 juin 1652 , à Labaneza en Espagne.
Après avoir fait ses études avec beaucoup
de succès dans l'université de Salaman-
que , il obtint au concours la cure de
Saint- Jacques de Talavera , dans le dio-
cèse de Tolède. Il fut transféré ensuite à
celle de Saint-Pierre de Madrid par son
confesseur. (Le nonce du pape le fit théo-
logien et examinateur de son tribunal ,
et l'Inquisition le nomma son qualifica-
teur et son proviseur. Le roi d'Espagne
voulut qu'il assistât aux juntes d'état et
à son conseil privé.) Ferreras refusa,
quelque temps après, deux évêchés con-
sidérables , malgré les instances que lui
fit la cour pour les lui faire accepter.
L'académie de Madrid le choisit , l'an-
née même de sa fondation , en 1713,
pour un de ses membres. Le roi , en
confirmant un choix applaudi par tous
les gens de lettres , l'honora de la charge
de garde de sa bibliothèque. Ferreras
fut très utile à l'académie naissante , par
ses lumières. Il lui servit surtout beau-
coup pour la composition du Diction-
naire espagnol, entrepris et publié par
FER
cette illustre compagnie en 1739, en
6 vol. in-fol. Ferreras était mort 4 ans
auparavant en 1735. On a de ce savant
espagnol plusieurs ouvrages de théologie,
de philosophie , de belles-lettres et d'his-
toire. Le plus considérable et le plus connu
est son Histoire d^ Espagne , écrite en
sa langue, la meilleure , la plus complète
que nous ayons sur cette nation : M. d'Her-
milly en a donné une bonne traduction
française en 10vol. in-4, Paris, 1731.
* FERRÈRE ( Philippe), célèbre avo-
cat au parlement de Bordeaux , né à Tar-
bes en 1767, se plaça dès ses premiers
débuts au rang des orateurs les plus dis-
tingués du barreau de sa province. Il n'a-
dopta pas les principes de la révolution ;
aussi fut-il obligé de quitter sa ville na-
tale dans laquelle il ne put rentrer qu'a-
près la terreur ( 1795 ). Il reprit ses fonc-
tions d'avocat et y obtint des succès écla-
tans. En 1804 il refusa de faire partie du
tribunat , et sous la restauration il ne sol-
licita aucune récompense de sa fidélité.
Il est mort le 14 janvier 1815 à l'âge de
48 ans , d'une maladie de poitrine que les
fatigues de la plaidoirie lui avaient oc-
casionée. Ses principaux discours ont
été imprimés pour la première fois dans
le Barreau français de MM. Clair et Cla-
pier, Paris, 1 820 et années suivantes , 12
volumes in-8 . Ses plaidoyers sont remar-
quables par l'élévation des pensées, l'é-
légance et l'énergie du stile, et par les
mouvemens oi'atoires dont ils sont ani-
més.
* FERRERI (Zachaîl-), né à Vienne
en 1479, étudia le droit canonique à
Padoue , et entra fort jeune dans l'ordre
de Saint-Benoît de la congrégation du
Mont-Cassin. Passionné pour l'étude, et
surtout pour la poésie , il s'était formé
dans sa cellule une bibliothèque considé-
rable ; mais soit que les livres ne fussent
pas conformes aux études de son état ,
soit que cette espèce de propriété fût
contraire à la règle , le président de la
congrégation fit enlever la bibliothèque.
Après avoir prié inutilement qu'on lui
rendît ses livres chéris , Ferreri résolut ,
dans son chagrin , de passer dans l'ordre
des Chartreux. Ses supérieurs s'y oppo-
V.
FER 289
sèrent ; cependant , sans tenir compte de
ce refus, il s'y réfugia. Mais, réclamé
par ses supéiùeurs , il fut forcé de revenir
dans son monastère , d'oîi on l'envoya ,
en 1 606 , continuer ses études à Rome.
Après y avoir été fait docteur en droit
civil et canonique , il y reçut la couronne
poétique. Son dessein de se faire char-
treux l'occupait continuellement. Etant
à Venise en 1 508 , il entra au noviciat
de cet ordre , prit le nom de frère Zacha-
rie-Benoît ; mais de nouveaux obstacles
l'empêchèrent encore de faire sa profes-
sion. Son mérite et ses talens l'ayant fait
nommer abbé de Subbachio , il assista eu
cette qualité au concile de Pise , convo-
qué en 1511 , contre le pape Jules II; et
eu fut nommé secrétaire. S'é tant pronon-
cé fortement contre le pape , il n'avança
pas sous le pontificat de Jules 11, mais
Léon X , son successeur , le nomma , en
1519, à l'évèclié de Guardia, et l'em-
ploya dans plusieurs missions impor-
tantes en Allemagne. A son retour en Ita-
lie , après la mort de Léon X , il fut nom-
mé gouverneur de Faenza. Il mourut à
Rome , vers 1526 ou 1527. Il a laissé 1*
Sancli carthusiensis ordinis origo , Man-
toue, 1509. C'est une vie de saint Bruno,
suivie de diverses poésies et de l'apologie
de l'auteur ; elle est insérée dans la Col-
lection des œuvres de saint Bruno, Paris,
1624. 2° Promotiones et progressas sa-
cro-sancti Pisani concilii, inchoati anno
1511 , necnon acta et décréta sacro-
sanctœ gcneralis Pisanœ synodi, in-fol.
3" Apologia sacri Pisani concilii nioder-
ni , Pise , 1 5 1 1 ; 4" Acta scitu dignissima
Consiantiensis concilii. Milan, 1511,
in-fol. ; 5° Décréta et acta concilii B asi-
liensis , 1511, in-fol. , rare , 1512, in-8 ;
6° Lugdunense somniuni de divi Leonis
X pontificis maximi , ad summum pon^
tificatum divina promotione , carmen ,
Lyon, 1513, in-4, inséré dans le tome
4 des Carmina illustrium poetarum ita-
lorum , Florence, 1721. On prétend que
ce poème , composé de plus de mille
vers , fut achevé en trois jours. 7° Vita
sancti Casimiri , Cracovie, 1520, et in-
sérée dans les Acta sanctorum. de Bol-
landus; 8° Oratio de eliminandis de regno
»9
290 FER
PoUmiœ erroneis traditionibus Liitheri ,
Cracovie, 1521; 9" De rcformatione
Ecclesiœ, suasoria orntio ad bcatum
p^trcm Iladvianum Vlpontif. max. Ve-
nise, 1622, in-8 ; 10" Hymni novi ce-
clesiastici , juxta vcram metri et lati-
Tiitalis normnni , Rome, 1525, in-4>
ibid., 1549 , in-8 : ces hymnes sont esti-
m(!es. Il y a de Ferreri plusieurs autres
ouvrages qui n'ont point été publiés.
* FERRERI (Matthias ) , capucin pié-
iTiontais, naquit à Cavalco-Maggiore,
dans le 17* siècle. Après avoir professé
la théologie dans divers couvens de son
ordre , il fut nommé définiteur des mai-
sons de son ordre. Ses talens pour la
chaire le firent choisir pour aller prêcher
dans la vallée des Alpes où il y avait
beaucoup de protestans, dont il eut le
bonheur de ramener un assez grand nom-
bre dans le sein de l'Eglise. On a de lui une
histoire des missions en général et en par-
ticulier de celles faites par les religieux
de son ordre dans les vallées des Alpes :
elle a pour titre : Jus regnandi aposto-
licuni per miîsiones apostolicas religio-
sorum iotius ordinis hierarchici ab iiiitio
Ecclesiœ , sive Ralioiiarium chronogra-
phicwn missionum cv an g clic arum ab
apostolicis operariis , prœsertim capu-
cinis , in quatuor mundi paitibus , si-
gnanter in Gallia cisalpina , exercita-
runi, Turin, 1C59, 2 vol. in-fol. On y
trouve des détails qui peuvent servir à
l'histoire et à la topographie de ces con-
trées peu connues.
* FERRERO - DELLA - MARMOR A
( Thérèse-Marie-Charles-Yictoire ) , car-
dinal, né le 5 octobre 17 57 à Turin , fut
évêque de Casai en 1 790 , puis de Saluzzo
en 1805 ; Léon XII lui accorda la pourpre
le 27 septembre 1824 ; mais ce prélat ne
parut point au dernier conclave. Il est
mort la nuit du 30 décembre 1831 , dans
son palais abbatial de St.-Benigne. Les
journaux du Piémont ont fait l'éloge de
ses vertus ; nous n'avons pu nous procu-
rer d'autres renseignemens sur ce car-
dinal : ils sont puisés dans le tome 70 de
VAmi de la religion et du, roi , page 616.
FERRET , ou Ferrktti ( Emile ) , né
à Caslel-Franco dans le Bolonais, en 1489,
FER
secrétaire du pape Léon X , fut appelé à
Palis par François l*' , qui le lit membre
du parlement, et le chargea de trois lé-
gations , l'une vers les Vénitiens , l'autre
vers les Florentins , la troisième vers
l'empereur . dont il s'acquitta avec hon-
neur. Il mourut à Avignon le 15 juillet
1552. Il cultiva les muscs dans le tumulte
de la cour. C'était un homme modeste ,
modéré, libéral, dont tout le plaisir était
de jouer du luth et de se promener. Il fit
mettre au dessus de la chaire de juris-
prudence d'Avignon , qu'il fit faire à ses
dépens, cette inscription : Peritum orno^
imperitum dedccoro. On a de lui : 1° Opé-
ra juridica , 1598, i\x-k° ; 2° Ciceronis
orationes ad veterum codicum fidem
castigatœ. On trouve sa Vie dans les
Vitœ clarissimorum jurisconsultorum
de Buder, léna, 1722 , in-8.
FERRETTI , poète et historien de
Vicence , dans le 14® siècle, fut un de
ceux qui chassèrent la barbarie répandue
en Europe , et qui firent renaître le bon
goût dans les belles-lettres. Parmi les pro-
ductions de ce savant en prose et en vers ,
il y a une Histoire de son temps en 7 li-
vres, depuis 1250 jusqu'en 1318: elle
est curieuse. Muratori l'a publiée dans le
9' tome des écrivains de l'Histoire d'Italie.
On a encore de lui un Poème latin sur les
beaux faits de Can de l'Escale.
FERRI ( Paul ) , ministre protestant à
Metz sa patrie , naquit en 1591 , et mou-
rut de la pierre en IGGO. On lui en trouva
plus de 80 dans la vessie. Ferri était
connu de son temps par ses écrits et par
ses sermons ; à présent il ne l'est plus
que par la réfutation que fit Bossuet de
son Catéchisme , publié en 1654 , inrl2.
C'est par cette réponse que ce prélat fit
son entrée dans la république des lettres.
FERRI (Ciro }. royez Ciro-Ferri....
F'oyez aussi Ferry.
' FERRIER ( Boniface ) , général de
l'ordre des chartreux , naquit en 1355 à
Valence en Espagne. Après avoir étudié
le droit et reçu le bonnet à l'université
de Lérida , il exerça la magistrature dans
sa ville natale , et s'étant marié , il de-
vint père de onze enfans ; mais ayant
perdu son épouse et neuf de ses enfans ,
FER
il résolut de se vouer à l'état monastique.
Son frère Vincent Ferrier , religieux de
l'ordre de Saint-Dominique , le confirma
dans ce pieux dessein. Après avoir vendu
ses biens et distribué aux pauvres ce qui
n'était pas nécessaire à l'établissement
des deux fils qui lui restaient , il entra ,
en 1396 , chez les chartreux de la Porte-
du-Ciel , prit les ordres , et se livra tout
entier aux éludes de sou nouvel état. Elu
général de l'ordre en 1402, après la mort
de Guillaume Raynaud, il gouverna avec
sagesse. Urbain VI et Benoit XIII se dis-
putaient alors le pontificat. Ce schisme
divisa aussi les chartreux , partages entre
les deux obédiences. Ferrier était pour
Benoit XIII , avec ceux qui l'avaient élu ;
le reste était pour Urbain VI. Etienne de
Sienne avait été élu général de cette par-
tie. Pour faire finir une scission qui ne
pouvait qu'avoir des résultats funestes ,
les deux généraux eurent la sagesse de se
démettre , afin qu'on en élût un troisième
qui réunît tous les monastères sous son
autorité. Ferrier, malgré sa résolution,
fut forcé par Benoît XIII ( Pierre de Lune )
de reprendre ce gouvernement. Il lui
resta encore attaché , mais lorsqu'il vit
son obstination à vouloir rester sur le
trône pontifical malgré les maux de l'E-
glise et les décrets du concile de Con-
stance, il abandonna son parti, et mourut
quelque temps après. Sainte-Marthe fixe
sa mort au 27 avril 1417 ; d'autres ne la
placent que deux ans après. On connaît
de lui : 1° un Traite dans lequel il exa-
mine pourquoi il y a eu peu de chartreux
canonisés, et pourquoi on cite peu de
miracles de cet ordre ; 2° une Traduc-
tion de la Bible en espagnol ; 3" un Traita
adressé à Boniface , religieux du même
ordre ; 4° Dô approbatione ordinis liber
unus; 6° des Sermons et des Lettres. Il
se montra toujours fidèle observateur de
la discipline régulière.
FERRIER ( Armand du ) , professeur
en droit à Toulouse sa patrie , ensuite
président aux enquêtes à Paris , et maî-
tre des-requêtes, fut choisi pour se trouver
en qualité d'ambassadeur au concile de
Trente. Il y soutint les intérêts de la France
avec une vivacité et une aigreur qui dé-
FER 291
plurent à plusieurs prélats. Par égard à
leurs plaintes , on envoya Ferrier ambas-
sadeur à Venise. Il s'y lia avec Fra-Paolo,
et lui fournit des mémoires pour son
Histoire du Concile de Trente , pleins
de l'esprit de secte dont il était imbu.
Ferrier mourut garde-des-sceaux du roi
de Navarre , depuis Henri IV , en 1 585 ,
âgé de 79 ans, laissant quelques ouvra-
ges. Il fit profession publique du calvi-
nisme dans ses dernières années.
FERRIER ( Jean ) , né à Rhodez en
1619 , entra chez les jésuites , y professa,
et fut ensuite confesseur de Louis XIV.
Il mourut en 1674, laissant un Traite'
sur la Science moijenne , et des écrits
contre les disciples de Jansénius.
FERRIER ( Jérémie ) , ministre pro-
testant, et professeur en théologie à Nîmes,
embrassa la religion catholique , et de-
vint conseiller d'état. Il mourut l'an 1 626.
On lui attribue le Catholique d'Etat,
1625, in-8 : c'est une réponse aux repro-
ches que les partisans de l'Espagne fai-
saient à la France. Il est encore auteur
d'un Traité de VÂntechrist et de ses
marques, in-fol. , Paris, 1615. Sa fille
fut mariée au fameux lieutenant-criminel
Tardieu , qui fut assassiné avec elle par
des voleurs, en 1664. Son gendre et sa
fille étaient connus par l'avarice la plus
sordide.
FERRIER ( Louis ) , natif d'Avignon ,
poète français , fut mis à l'inquisition de
cette ville , pour certaine maxime d'Epi-
cure :
L'amour pour les mortels est le toureraln bien.
Mauvaise traduction du premier vers de
Lucrèce :
£aeadum genitrix, dÎTumqae hominumque TolupUs.
Ce vers se trouve dans ses Préceptes ga-
lans, poème qui courut manuscrit avant
qu'il le publiât à Paris en 1678, in-12.
Ferrier ayant été absous par le saint-of-
fice , à la prière 'le ses amis , se retira à
Paris, et devint précepteur de?. fi^ du
duc de Saint-Aignan. Il mourut en i721,
à 69 ans , en Normandie , oîi il avait
acheté la terre de la Martinière. Outre ses
Préceptes galans , dont le titre marque
assez que ce n'est point un code de mœurs.
29a FER
on a de lui quelques tragédies plus que
môdiocres , et une traduction de Justin,
1693, 2 vol. in-12, qui a été éclipsée
par celle de l'abbé Paul.
FERRIER. Voyez Viîicewt- Fermer
(S.). ,
FERRIERE ( Claude de) , docteur en
droit de l'université de Paris sa patrie ,
naquit en 16-39. Il professa la jurispru-
dence à Paris , puis à Reims , oii il mou-
rut en 1 7 1 5 , à 7 7 ans. Ses ouvrages sont
estimés , quoiqu'il ait composé la plu-
part pour subvenir aix besoins pressans
d'une famille nombreuse. Il enrichit les
libraires ; mais ils ne l'enrichirent point.
Les honoraires de ses livres suffisaient à
grand'peine pour le dédommager du
temps qu'il sacrifiait à leur composition ,
quoiqu'on ne puisse pas l'accuser d'avoir
poussé ce sacrifice trop loin. Les princi-
paux sont 1° La Jurisprudence du Code,
1684 , en 2 vol. in-4. 2" — du Digeste ,
1688, 2 vol. in-4. 3° — des Novelles ,
1688 , 2 vol. in-4. 4" La Science des No-
taires , in-4 , portée par son fils à 2 vol.
et réimprimée sous ce titre : Le nouveau
parfait Notaire , ou la Science des No-
taires de feu C. J. de Perrière , mise en
harmonie avec les dispositions du code
civil, etc., par M. Massé, notaire à Paris,
1805, 2 vol. in-4 ; 4« édit. 1813 , 3 vol.
in-4. 5° Le Droit de Patronage, 1686 ,
in-4. 6° Institution coutumière , 3 vol.
m-12. 7° Introduction à la Pratique,
1758, in-12. 8° Des Commentaires sur
la Coutume de Paris, 2 vol. in-12. 9° Un
Traité des Fiefs , 1680, in-4. 1 0" Le Re-
cueil des Commentateurs de la Coutume
de Paris , 1714 , en 4 vol. in-fol. Il faut
avouer que la plupart des écrits de Claude
de Perrière ne sont que des compilations,
qui quelquefois manquent d'exactitude :
mais elles peuvent être regardées comme
des répertoires utiles. Le Dictionn. de
Droit, 1771 ,2 vol. in-4 , est de Claude-
Joseph son fils , qui a été doyen des pro-
fesseurs en droit dansl'uuiversité de Paris,
dont nous avons encore la. Traduction
nouvelle des Institutes de Tcmpereur
Juslinien, avec des observations pour
FintelUgcnce du texte , VappUcalion du
droit français au droit romain, etc.
FER
Cet ouvrage , qui est une augmentation
de celui que son père avait donné sur la
môme matière , peut être de quelque se-
cours pour les jeunes gens qui étudient le
droit. Si le père ne parvint pas à la for-
tune , ce n'est pas qu'il n'eût reçu de la
nature les dons de la figure et de l'esprit;
mais ils étaient déparés par une hauteur
incommode , par une prévention outrée
pour ses sentimens , et par la manie de
critiquer ceux des autres.
* FERRIÈIIES ( Charles-Elie , mar-
quis de), né à Poitiers le 27 janvier 1741,
d'une famille noble et distinguée , entra
dans les chevau-légers de la garde du
roi. Mais préférant l'étude des belles-let-
{res à la vie militaire , il se retira au châ-
teau de Marsay près de Mirebeau. Au
commencement de la révolution , il fut
nommé député de la noblesse de la séné-
chaussée de Saumur aux Etats-généraux,
et il y présenta un plan de finance pour
V établissement d'une caisse territoriale.
Il vécut depuis dans la retraite , et mou-
rut dans son château de Marsay, le 30 juil-
let 1 804. On a de lui : 1° Le Théisme , ou
Recherches sur la nature de Vhomme et
sur ses rapports avec les autres hommes
dans l'ordre moral et dans V ordre poli-
tique, 2 vol. in-12, 2'' édition 1791.
l'auteur y développe la doctrine de Des-
cartes, de Malebranche et de Locke , et
cherche à faire connaître le sort réservé
aux nations dont les mœurs et lesgouver-
nemens ne sont pas en rapport avec la
religion établie : c'est un bon ouvrage.
2° De la constitution qui convient aux
Français ,1789, in-8. 3° Plan de finan-
ces pour V établissement d^ une caisse ter-
ritoriale. 4° Opinion contre F arrestation
du roi à Farennes, 1791, in-8 . 5° Compte
rendu à mes commettans , 1791, in-8. -
6° De Tétat des lettres dans le Poitou 1
depuis l'an Zdd jusqu'à l'année 1789. '
1° Mémoires pour servir à l'histoire de
V Assemblée constituante et de la révolu-
tion rfe 1789, 3 vol. in-8, 17.98. C'est
son meilleur ouvrage. Ferrières a écrit
avec la plus grande impartialité; ses livres
sont devenus très rares. Le tome 4 qui
finit à la mort du roi , est resté manu-
scrit. Il a paru dans la Collection des mc~
FER
moires relatifs à la révolution finnçaisè
publiée par MM. Berville et Barrière avec
une notice sur la \ie de l'auteur, des
noies et des c'claircissemens, Paris, 1821.
FERRON ( Arnaud du ) , conseiller
au parlement de Bordeaux , sa patrie, est
auteur d'une continuation en latin de
l'Histoire de Paul-Emile ; de savantes ob-
servations sur les lois , et d'autres ou-
vrages qui lui ont assuré le surnom d'At-
ticus , que lui donna Scaliger. Il fut em-
ployé dans les grandes affaires, et mourut
en 1563 , à 48 ans. Sa Continuation de
Paul-Emile , imprimée à Paris , chez Vas-
cosan , 1 555 , in-8 , est ample , sans être
trop longue. Elle s'étend depuis le ma-
riage de Charles VIII jusqu'au règne de
François I. Les anecdotes qu'il rapporte
sont curieuses , et ses détails fort exacts.
Son père était aussi conseiller au parle-
ment.
* FERUCCI (François), sculpteur,
né à Fiésolé, mort en 1585, s'est fait
connaître par ses ouvrages qui sont tous
en porphyre. On prétend que c'est lui qui
trouva le secret de tremper l'acier, afin
de pouvoir travailler cette matière si
dure. Il réussit par cette invention à faire
le bassin de la magnifique fontaine du
palais Pitti à Florence, la statue du grand-
duc Cômc, et celle de la Justice, qui est
surla colonne de la Ste.-Tr inité. Il y a eu
plusieurs autres sculpteurs de ce nom.
FERRY ( Jean-Baptiste ) , prêtre , de
la société littéraire-militaire, né à Besan-
çon , mort au mois d'avril 1 7 56 , âgé de
plus de 60 ans, était chanoine prében-
dier de l'église de Sainte-Madeleine en
cette ville. On a de lui plusieurs livres
(Vèqlise , à l'usage du diocèse de Besan-
çon. ^OjrezFERRI. <.
FERTÉ (Henri deSenecterre, maréchal
de La), donna des preuves de son courage
au siège de La Rochelle (1628), àl'altaque
du pas de Suze , au secours de Casai , à la
prise de Moyenvic , à celle de Trêves , et
à la bataille d'Avènes. Il n'était alors que
colonel ; il fut fait maréchal de camp sur
la brèche d'Hesdin , pour avoir défait les
troupes que les ennemis voulaient y je-
ter. Il se signala à la bataille de Rocroy,
et surtout à celle de Lens. Il défit le duc
FER 293
de Lorraine, et lui tua près de 2,000
hommes au combat de Saint-Nicolas en
1650. Devenu maréchal de France, le 5
janvier 1661 , il sauva Nancy peu après ,
et prit la même année , Chaste, Mirecourt
et Vaudrevange. Sa valeur et son expé-
rience éclatèrent encore en 1653, 1655.
Il assista aux sièges de Landrecies et de
Saint-Guilain , fut fait prisonnier à celui
de Valenciennes, et racheté par Louis XIV
pour 100,000 livres. En 1657 et 1658 , il
prit Montmédi et Gravelines. Il mourut
en 1681 , à 82 ans, chevalier des ordres
du roi. Sa femme, Madeleine d'àngenses,
morte en 1714 , à 85 ans, a donné lieu à
un petit roman qui porte son nom, et
qui se trouve avec ceux de Bussy. Son
fils, Henri-François, duc de La Ferté,
mort en 1703, n'a pas laissé de postérité
masculine. Le maréchal de La Ferté était
un homme vain et présomptueux. Il ne
pouvait souffrir les succès de Turenne ,
qu'il était incapable d'égaler, quoiqu'il eût
d'ailleurs du mérite. Malgré la violence
de son humeur, il était fort empressé à
faire sa cour , et ce fut en partie ce qui
contribua à l'élever aux dignités.
FERTÉ-IMBAUT (Le maréchal de La),
Voyez Estampes ( Jacques ).
FERTEL ( Martin-Dominique ) , im-
primeur, né vers l'an 1670. Après avoir
parcouru la France et l'Italie, il s'établit
à Saint-Omer. Il a donné au public : La
Science pratique de l'Imprimerie, Saint-
Omer, 1723, in-4, avec fig. : ouvrage cu-
rieux , renfermant tout ce qui tst relatif à
cet art. Il est mort l'an 1752.
FERVAQUES. Voyez Hautemkr.
FERUS. Voyez Sauvage.
*FERUSSAC (Jean-Baptiste, d'Au-
debard, baron de), naquit le 30 juin
1745, à Clérac , d'une ancienne famille
distinguée dans l'armée : son père , lieu-
tenant-colonel du régiment de cavalerie
de Clermont-Prince , voulut qu'il suivit
la carrière de ses aïeux ; il le fit en con-
séquence entrer en 1754 à l'école royale
militaire, d'où il sortit en 1762 avec le
grade de sous-lieutenant de grenadiers
au régiment de Béarn-infanterie. Le jeu-
ne chevalier de Férussac s'occupa d'étu-
des sérieuses , surtout de celles qui sont
294 FER
nécessaires pour entrer dans l'arlillerie :
bientôt en effet il passa dans le régiment
de Besançon qui appartenait à cette arme:
il était capitaine en 178G. Employé dans
les principaux établissemciis de l'artille-
rie , il soigna surtout les outils des pion-
niers auxquels il apporta des modifica-
tions avantageuses. Il était sur le point
d'être nommé major, lorsque la révolu-
tion éclata. Alors il quitta le service ,
et en 1791 , il alla rejoindre les princes.
Ce fut sans contredit l'un des meilleurs
officiers de cette armée : nommé chef de
brigade , puis lieutenant-colonel, il com-
manda constamment l'artilleriede l'avant-
garde sous les ordres du duc d'Enghien.
Il assista à toutes les affaires et se distin-
gua surtout à celle de Schusseuried , où
il sauva l'armée de Condé d'un désastre
inévitable. Il resta constamment avec les
princes jusqu'au départ de son corps
pour la Volhynie. De retour en France
(1801) , il se consacra dès lors à l'éduca-
tion de ses eufans, refusant les offres
que Buonaparte lui fit faire, et ne voulant
exercer d'autres fonctions que celle de
maire de sa commune. A la rentrée du
roi , il accepta le litre honorifique de
colonel avec une pension de 1 ,800 francs.
Ce brave officier est mort au château de
Lagardç , près de Lauzerte en 1816. De •
puis qu'il avait été rendu à sa patrie ,
Férussac avait continué ses études et ses
observations scientifiques : il a laissé
quelques ouvrages parmi lesquels nous
citerons 1° Observations sur l'Encyclo-
pédie , brochure in-8 , 1 782, où il signale
les vices du plan adopté pour cet ou-
vrage ; 2° Essai sur la défense des îles
et des provinces maritimes , imprimé
dans le Dictionnaire de tactique de l'En-
cyclopédie, qui a été traduit en plusieurs
langues ; 3° Essai sur la forme et la
construction la plus avantageuse à don-
ner aux aérostats pour parvenir à les
diriger , 1784 ; 4° Examen de l'effet de
l'attraction , Mémoire inséré dans le
Journal de physique; 6" Essai d'une
nouvelle méthode conchyologique , insé -
ré dans le 4* vol. "des Mémoires de la
société médicale d'émulation, et plusieurs
autres observations dans les journaux
, FEU
des sciences. Il à laissé en manuscrit des
Mélanges et des mémoires pour servir à
l'Histoire de la révolution. On lui doit
aussi l'Histoire naturelle , générale et
particulière des Mollusques terrestres
et ffuviatilles , tant des espèces que Ion
trouve aujourd'hui vivantes que des dé-
pouilles fossiles de celles qui n'existent
plus : ouvrage que son fils, le baron de
Férussac, officier supérieur au corps royal
d'état-niajor , a publié par livraisons : le
même baron de Férussac est le rédacteur
en chef du Bulletin universel des scien-
ces, dont les embarras de notre situation
politique ont suspendu la publication.
FESTUS ( Pompéius Sextus ) , célèbre
grammairien , abrégea le traité de Ver-
rius Flaccus : De verborum significa-
tione. Cet abrégé, très utile, suivant Sca-
liger , a été donné au public par Dacier,
ad usum Delphini, Paris, 1G81 , in-4 ,
et Amsterdam, 1699, in-4. Cette der-
nière édition ne vaut pas celle de Paris.
FESTUS ( Porcins ), proconsul et
gouverneur de Judée, vers l'an 61 de
J. C. , fit citer saint Paul à son tribunal,
lorsqu'il était à Césarée. Cet apôtre, ayant
appelé à César, Festus le lui renvoya ,
n'osant pas le condamner , quoiqu'il eût
déjà reçu une somme d'argent pour n'ê-
tre pasfavorable àsaint Paul. Act. 26.
FETI (Dominique ) , peintre romain ,
disciple de Civoli , forma son goût sur les
ouvrages de Jules Romain. Il allia une
grande manière et un coloris vigoureux,
à une pensée fine, à une expression vive,
et à une touche spirituelle et piquante.
Le cardinal Ferdinand Gonzague , depuis
duc de Mantoue , l'employa à orner son
palais , et lui aurait fait un sort heureux ,
si la débauche ne l'eût enlevé en 1624 ,
à 35 ans. Les dessins de ce peintre sont
d'un grand goût, et très rares. On en voit
quelques-uns au Musée de Paris , notam-
ment le mariage de sainte Catherine ,
la méditation sur le néant des vanités hu-
maines. Il laissa une sœur qui se fit reli-
gieuse. Elle peignait fort bien. Le cou-
vent où elle entra fut orné de ses tableaux;
elle eu fit aussi pour les autres maisons
religieuses de Mantoue.
FEU (François) , docteur de Sorbqnne ,
J
FEU
naquit à Massiac en Auvergne l'an 1633.
11 fut grand-vicaire de Rouen, sous Col-
bert , puis curé de Saint-GerVais à Paris ,
en 1686 : dans ces deux places il se fit gé-
néralement estimer des grands et des pe-
tits. Il mourut le 26 décembre 1G99 , à 66
ans. Onadeluilesdeuxpremiersvol.(in-4,
1G92 et 1695 ) d'un cours de tbéologie,
qu'il n'eut p^s le temps d'achever.
Ft:U-ARl>E]\T ( François ) , corde-
lier, né à Coutance en 1541 , docteur de
Sorbonne en 1576 , était un zélé ligueur.
Il disserta en chaire contre Henri III et
Henri IV. Il mourut en 1610 à Bayeux,
et non à Paris , comme dit Bayle , lais-
sant : 1" Des Traités de controverse , où
il y a de bonnes choses ; mais qui , pour
la manière, tiennent au goût de son siè-
cle. 2° Des commentaires sur plusieurs
livres de la Bible. 3° Des éditions dequel-
ques ouvrages des Pères et des scolasti-
ques. L'ardeur qu'il avait témoignée pour
la ligue , parut s'éteindre dès qu'il vit la
religion hors de danger.
FEUILLADE. Toye-AuBUssois (Fran-
çois de la ).
FEUILLÉE (Louis ), minime, associé
de l'académie des Sciences , botaniste du
roi, naquit à Mane en Provence l'an 1 660,
11 entreprit, par ordre de Louis, XIV,
plusieurs voyages dans les différentes
parties du monde. Il fit honneur au choix
du monarque. Ce prince le gratifia d'une
pension, et lui fit construire un observa-
toire à Marseille. Le Père Feuillée, usé
par les fatigues de ses courses savantes ,
mourut dans cette ville en 1732. Un air
modeste et simple relevait beaucoup le
mérite de ses connaissances. On a de lui
un Journal des observations physiques y
mathématiques et botaniques , faites sur
les côtes de l'Amérique méridionale et à
la Nouvelle-Espagne, Paris, 1714-1725,
3 vol. in-4. Le tome 3 contient une His-
toire des plantes médicinales en usage
au Pérou et au Chili. Ce Journal , écrit
durement , mais aussi exact que curieux,
peut servir de modèle aux voyageurs , et
de flambeau à ceux qui naviguent en Amé-
rique. Au retour de la mer du Sud , le
Père Feuillée présenta au roi un grand
volume in-folio , oii il avait dessiné d'a-
FEU 295
près nature tout ce que ce vaste pays con-
tient de plus curieux. Cet ouvrage inté-
ressant est en original dans la bibliothè-
que du roi , de même que le Journal de
son -voyage aux Canaries , pour la fixa-
tion du premier méridien; à la fin, il a
ajouté l'Histoire abrégée de ces îles.
FEUILLET ( Nicolas ) , chanoine de
Saint-Cloud , près de Paris , prédicateur
apostolique et d'une morale qui a paru
sévère, mourut à Paris le 7 septembre
1693, âgé de 7 1 ans. On a de lui (in-1 2,
1702) l'Histoire de la conversion de
Chanteau, cousin-germain de Caumartin,
conseiller d'état. Feuillet en avait été le
principal instrument. Cette Histoire édi-
fiante, réimprimée plusieurs fois, est
très répandue. On a encore de lui des
lettres, qui peignent les sentimens de
religion dont il était pénétré ; et une
Oraison funèbre de Henriette d'Angle-
terre, duclics se d'Orléans. Son portrait
a été gravé par Edelinck.
FEUQUIERES. Foyez Pas.
* FEUTRIER ( J.F.-Hyacinthe), né
à Paris le 2 avril 1785 , acheva ses études
ecclésiastiques au séminaire de St.-Sul-
pice , sous le respectable M. Emery. Dès
son entrée dans le sacerdoce , il montra
un talent distingué pour la prédication,
et le cardinal Fesch l'appela bientôt à la
grande aumônerie , en qualité de secré-
taire-général. 11 en remplissait les fonc-
tions pendant l'époque la plus critique
du règne de Buonaparte , lors de ses ini-
ques persécutions contre le pape et l'é-
glise catholique ; et l'on doit dire à son
honneur qu'il fut également fidèle aux
principes et au malheur. Il contribua
puissamment à la résistance que le con-
cile national de 1811 opposa aux volon-
tés tyranniques de l'empereur , et fut le
principal agent des secours pécuniaii*es
qu'on fit secrètement passer au souverain
pontife et aux cardinaux exilés. Au pre-
mier retour de Louis XVHï , l'archevêque,
de Reims , depuis cardinal et archevê-
que de Paris , lui confia les mêmes fonc-
tions de secrétaire-général de la grande
aumônerie, qu'il quitta pendant les cent
jours, ayant résisté courageusement à
toutes les offres de Buonaparte , çt à tou-
âge FEt5
tes les instances de son oncle , le cardi-
Dal Fescli. Il refusa même de prêter au-
cun serment au nouveau gouvernement ,
et fit beaucoup d'efiforts pour persuader
au cardinal de retourner à Rome et de
rester étranger aux affaires politiques de
la France. Après la seconde restauration,
il fut fait successivement chanoine hono-
raire de St.-Denis , puis curé de la Mag-
deleine, paroisse un peu négligée sous
l'administration d'un prédécesseur valé-
tudinaire : il y déploya un zèle et une
activité extraordinaires, et ranima puis-
samment la piété des fidèles et leur ar-
deur pour les bonnes œuvres. Les com-
inencemens de son épiscopat à Beauvais
furent également marqués par une vie
fort active. Il visita son diocèse , fit des
missions , prêchant et confessant lui-
même; car il aimait toutes les fonctions
de son état , et à Paris , il dirigeait beau-
coup de personnes , prêchait souvent ,
menait , en un mot , la vie du pasteur le
plus occupé. Appelé en 1827 au minis-
tère des affaires ecclésiastiques, il eut
part aux fameuses ordonnances du 16
juin 1828 , qui excitèrent de si vives ré-
clamations de la part des évêques et du
clergé français , et qui , s'il faut en croire
des bruits assez répandus , lui causèrent
plus tard de justes et amers regrets. Il
mourut subitement d'un anévrisme dont
il était atteint depuis plusieurs mois , le
27 juin 1830. Il avait été fait comte et
pair de France, avec une pension de
1 2,000 fr. , peu de jours avant de quitter
le ministère. L'auteur de cet article a
recueilli de la bouche d'un vénérable
prélat des détails assez singuliers sur
les circonstances qui accompagnèrent
la nomination de Feutrier au siège de
Beauvais , et la translation de son respec-
table prédécesseur au siège de Rennes.
Il s'ensuivrait que les protecteurs de Feu-
trier, tenaient beaucoup à le placer dans
ce que l'on appelait jadis un évêché de
cour, et que la démission de M. de L**.
fut acceptée à Rome , sur l'attestation de
l'ambassadeur d'alors et du ministre des
affaires ecclésiastiques, avant d'avoir été
donnée par lui selon les formes voulues
par l'Eglise. On assure qu'un autre évê-
FEU
que, aujourd'hui sans siège, fut dépos-
sédé de la même manière à peu près, sous
le même ministre. Voilà ce qui arrive
quand la nomination des évêques devient
une affaire administrative, au lieu de res-
ter une affaire de conscience, comme elle
aurait dû toujours être. Le ministère de
Feutrier fut une preuve nouvelle de celte
grande vérité que les talens sont répar-
tis à l'homme avec mesure ,'et que , pour
avoir rempli d'une manière brillante et
même avec succès des fonctions élevées,
on n'est point assuré pour cela de réussir
également dans un poste supérieur ,
qui impose d'à utres devoirs et demande
d'autres qualités. Feutrier possédait les
vertus ecclésiastiques et épiscopales dans
un haut degré ; mais on peut croire qu'il
manqua du courage et de la franchise
qui font les hommes politiques , dans les
temps de troubles et de dissensions. L'é-
piscopat français n'oubliera jamais tout
ce que ce ministre employa de petites
ressources et de moyens équivoques pour
assurer ses collègues que le pape désirait
qu'ils se soumissent aux ordonnances , et
pour leur persuader, par des dépêches
télégraphiques fort peu exactes quant
au fond, qu'on obéissait partout à la voix
du souverain pontife. Le fait était que
Léon XII , de glorieuse mémoire , avait
blâmé fortement les ordonnances du 16
juin , et n'avait engagé les évêques fran-
çais à s'y soumettre , que sur la parole
donnée par le ministre , qu'on ne les exé-
cuterait pas à la rigueur. Le fait est en-
core que la lettre du cardinal Bernetti,
écrite au nom du pape , ne fût commu-
niquée qu'avec beaucoup de mystère à
deux ou trois prélats , et que le cardinal
de Latil fut chargé d'en donner une con-
naissance telle quelle aux autres évêques,
par une lettre rendue publique dans
le temps. Il est encore vrai que la plu-
part des évêques ne voulurent y adhérer
qu'avec une infinité de restrictions : ce
qui n'empêchait pas le ttle'graplie d'an-
noncer avec hâte à toute la France qu'un
tel évêque avait adhéré ! On doit à Feu-
trier un Eloge historique et religieux de
Jeanne d'Arc pour V anniversaire de la
délivrance d'Orléans le 8 mai 1429, pro-
1
FEV
nonce dans la cathédrale de celte ville le
8 mai 1821 et le 8 mai 1823; Orléans,
1823, in-8. Oraison funèbre de S . A. 11.
Mgr. le duc de Berri, qu'il devait pro-
noncer dans l'église Ste.-Madeleine pour
un service qui n'eut point lieu, 1820,
in-8. Oraison funèbre de S. A. R. M'""
la duchesse douairière d'Orléans, 2* édit.
Paris, 1821 , in-8.
FEUTRY ( Amé-Ambroisè-Joseph ) ,
avocat au parlement de Douai , né à Lille
Je 9 octobre 1720 , et mort à Douai le 28
mars 1789 , est auteur de quelques petits
poèmes , où il pourrait y avoir un peu
plus de chaleur et d'action , mais où il y
a de l'élégance et une versitication en
général noble et forte. Le Temple de la
Mort , les Tombeaux , les Ruihes, por-
tent l'empreinte d'une mélancolie douce ,
€t de cette philosophie sagementsombre,
qui donne dans le silence des leçons
utiles. Le choix du sujet contraste avan-
tageusement avec tant de bruyantes des-
criptions de fêtes , de farces , de folies
d'amour, et de creuses spéculations phi-
losophiques , qui exercent lès talens ou
occupent l'oisiveté des écrivains du
jour, et donnent de l'esprit de l'auteur
une idée avantageuse. Dans le Temple
de la Mort on A admiré ce vers caracté-
ristique :
Le temps qui détruit tout, en atTcrinit les niuis.
On a aussi de lui: Choix d'histoires; les
jeux denfans , poème en prose ; Dieu,
ode; cuix Nations , ode ; Mémoires du
siècle d^ Auguste et une édition de Robin-
son Crusoé. Voyez Foé.
FEVERSHAM ( Louis de Duras,
comte de ) , chevalier de l'ordre de la
Jarretière , commandait l'armée de Jac-
ques II, lorsque le prince d'Orange fit sa
descente en Angleterre, l'an 1688. Le
comte abandonné de son armée, licencia
le peu de soldats qui lui étaient restés
attachés. Ce fut le motif dont se servit le
prince d'Orange , pour faire mettre en
prison ce fidèle serviteur , prétendant
qu'il n'avait pu licencier une armée royale,
sans sa permission. Il obtint pourtant sa
liberté dans la suite , et mourut à Lon-
dres, à l'âge de 71 ans , en 1709», avec
une grande réputation de bravoure.
FEV 297
FEVRE (Jean Le) , avocat au parle-
ment, et rapporteur-référendaire en chan-
cellerie, sous Charles V , roi de France,
est auteur d'un poème moral , intitulé
Le respit de la mort , 1 533 , in-8 , gothi-
que. Il y en a encore une édition de Paris,
150fi,in-4.
FÈVRE ( Raoul Le ) , chapelain de
Philippe, duc de Bourgogne en 1364, est
auteur du Recueil des Histoires troyen-
nes, assez rare, des éditions du 1 5* siècle,
in-fol. Celles du 1 6", quoiqu'aussi bonnes,
ne sont pas recherchées.
FEVRE ( Jacques F abri ou Faber, ou
Le) surnommé dE tapies [Stapulensis],
du lieu de sa naissance , au diocèse d'.A-
miens, vint au monde vers l'an 1455. Il
fit ses études dans l'université de Paris,
€t y professa ensuite les belles-lettres et
la philosophie. C'était encore le règne de
la plus barbare scolastique. Le Fèvre sut
s'élever au dessus des chicanes de l'école.
Il fut un des premiers qui inspirèrent le
goût des études solides , et en particu-
lier de celle des langues- mères. Guillau-
me Briçonnet , évêque de Meaux , le choi-
sit pour son grand-vicaire en 1523; ce
prélat ayant été accusé de favoriser les
novateurs. Le Fèvre, soupçonné de l'a-
voir séduit , fut obligé de le quitter. Il se
retira à Strasbourg , et de là à Paris , où
il fut nommé précepteur du troisième fils
de François I. La reine Marguerite , sœur
de ce prince , infectée des nouvelles er-
reurs , mena Le Fèvre à Nérac en 1 530 ;
c'est là que cet habile homme , après
avoir rouvert les yeux à la vérité, finit
ses jours, sincèrement converti, en 1537.
Ses principaux ouvrages sont : 1° Un
Traité des trois Madeleines , solidement
réfuté par les bollandistes et par d'autres
savans [voyez Fischer Beda). 2" Un Psau-
tier en 5 colonnes , Paris, in-folio , 1 509,
avec des notes peu estimées. 3° Des com-
mentaires sur les Psaumes, sur l'Ecclé-
siaste, sur les Evangiles , sur Saint-Paul, \
etc., savans, mais mal digérés et mal
écrits. i° Agones martyrum mensis ja-
nuarii , in folio ( sans date ni lieu, mais
du commencement du 16* siècle. )5''Une
version française de toute la Bible , im-
primée à Anvers en 1530, 1534 et 1541,
19 •
2<)8 FEV
iii-folio, et en 1728 , en 4 vol. in-8. L'é-
dilion de 1534, revue par des docteurs
de Louvaiu , est la plus correcte, la plus
exacte et la plus rare , parce qu'elle fut
supprimée. Cette traduction , son senti-
ment sur la monogamie de sainte Anne ,
et sa distinction des trois Maries , soule-
vèrent beaucoup de docteurs contre Le
Fèvre ; ce qui l'obligea de se contredire
dans le traité De dupUci et unica Mcuj-
dalcna , in-4 , pour prouver qu'on pou-
vait soutenir qu'il y en avait deux ou une
seule. A force de varier et de tourner
celte question, iU'asibien embrouillée,
qu'on ne sait point ce qu'il en pensait.
FÈVKE. ( Louis Le). Voyez Cjiante-
REAU_,
FÈVRE ( Gui Le ) , sieur de La Code-
RiE , en Ba.sse-Normandie , où il naquit
l'an 1541. Savant dans les langues orien-
tales, il eut beaucoup de part à la fameuse
Polyglotte d'Anvers , confiée aux soins
d'Arias Montanus. Si on le croit, celui-ci
n'y contribua pas autant qu'on le pense
communément. Le Fèvre passa avec son
frère Nicolas à Anvers , pour l'exécution
de ce grand ouvrage. Il y travailla long-
temps , et y inséra le nouveau Testament
en syriaque , avec une version en latin ,
une Grammaire syriaque et une chaldaï-
que, et un Dictionnaire de ces deux lan-
gues. Il retourna ensuite en France, ap-
portant pour tout fruit de ses travaux ,
beaucoup de fatigues et quelque peu de
réputation. A son retour, il fut secrétaire
du duc d'Alençon, frère du roi Henri III ;
fut mal payé comme à Anvers, et alla
mourir à La Boderie en 1598. On a de
lui plusieurs ouvrages en vers et en prose,
des traductions, etc. Il mêlait aux épines
de l'étude des langues , les fleurs de la
poésie française. Il eut de son temps une
assez grande réputation dans ce dernier,
" genre ; mais à l'exception de quelques
pièces, où l'on trouve une certaine naï-
veté , qui plaît malgré la barbarie du lan-
gage , tout ce qui nous reste de lui est du
plus mauvais goût : stile ampoulé , phra-
ses inintelligibles, comparaisons forcées,
expressions basses, allusions puériles,
jeux de mots ridicules, plaisanteries froi-
des. On peut consulter le Père Kicéroa
FEV
{Mémoires, tome 38*} , qui donne la ca-
talogue de ses ennuyeuses productions.
FÈVRE DE LA BODERIE ( Antoine
Le ) , frère du précédent , fut employé
par Henri IV et par Ivouis XIII dans des
affaires importantes. Il eut la qualité
d'ambassadeur à Rome, dans les Pays-Bas
et en Angleterre. Jacques I lui fitpréscnt
d'un bassin de vermeil, enrichi de pierre-
ries, avec ces mots : « Jacques, roi delà
» Grande-Bretagne , à Antoine de La Bo-
» dciie. "Le prince de Galles lui donna un
diamant d'un grand prix ; elles seigneurs
d'Angleterre ajoutèrent à tous ces pré-
sens , 1 50 haquenées, que La Boderie dis-
tribua à son retour à ses amis. Il n'en ré-
serva qu'une seule, que Henri IV lui de-
manda. « Il n'est pas juste , lui dit ce
)) prince , que je sois le seul de vos amis,
i> qui n'ait point de part à vos libéra-
■» lités. » La Boderie fut très utile à ce
monarque, surtout dans l'affaire du
maréchal de Biron dont il découvrit les
intelligences à Bruxelles. 11 mourut en
1615, à GO ans. Il avait épousé la sœur du
marquis de Feuquières , gouverneur de
Verdun, dont il eut deux filles; l'une mou-
rut fort jeune , et l'autre épousa M. Ar-
naud d'Andilli en 1613 , auquel elle aj)-
porta la terre de Pomponne. On a de lui
un Traité de la noblesse, traduit de l'i-
talien de Jean-Baptiste Nenna , imprimé
en 1583, in-8. On a publié, en 1749,
ses lettres et ses négociations , 5 vol.
in-12. Il passe aussi pour l'un des auteurs
du Catholicon , satire que l'esprit de
parti a fait valoir dans le temps, mais
qui, dans lefond, n'est qu'une platitude
dont la haine contre l'Espagne et les in-
vectives contre la ligue font tout le mé-
rite: « Comme si l'association des calvi-
» nistes, dit un auteur impartial, n'avait
)) pas été une ligue , et une ligue compo-
» sée de sujets rebelles , armée contre le
») trône et l'autel. »
FÈVRE (Nicolas Le), né à Paris en
1544, se creva un œil en taillant une
plume. Cet accident n'interrompit point
ses études. Il commença celle du droit à
Toulouse. Nicolas avait dès lors le goût
de l'atitiquité ; il entreprit le voyage de
Aomç pour se perfectionner. De retour
FEV
en France , il se livra aux douceurs de
l'étude, tandis que la plupart des gens
de lettres de Paris s'occupaient des
affaires de la ligue. Henri IV, étant
enfin paisible possesseur de sa couronne,
choisit Le Fèvre pour précepteur du
prince de Condé ; et après la mort de ce
roi, la reine lui confia l'éducation de
Louis XIU. Il mourut 16 mois après, en
ICI 2, à C9 ans. Quoique Le Fèvre eût
travaillé toute sa vie, il n'ambitionnait
pointle titre d'auteur, ou peut-être crai-
gnait-il les écueils de cette profession.
Ses opuscules furent publiés à Paris en
1G14 , in-4 , par Le Bègue. On y aperçoit
un critique exact , sans être trop hardi ,
judicieux dans ses conjectures, et juste
dans ses raisonnemens. Son stile est pur,
net et concis. Si ses talens le firent esti-
mer , son caractère ne le fit pas moins
aimer : il était humain , doux , commu-
nicatif. Il vécut dans la retraite avec la
politesse d'un courtisan , et à la cour
avec la simplicité d'un solitaire.
FEVRE (Ta^negui Le) , né à Caen en
1615, se fit de bonne heure un nom par
ses succès dans l'étude du grec et du la-
tin. Le cardinal de Richelieu le gratifia
d'une pension de 2,000 livres, pour avoir
l'inspection sur les ouvrages imprimés
au Louvre. Cet illustre rémunérateur des
gens de lettres se proposait de le faire
principal d'un collège, qu'il devait ériger
sous le nom de Richelieu. Sa mort ravit
ce nouveau bienfait aux savans , et à Le
Fèvre un protecteur. Le Fèvre, qui avait
plus de cupidité que de religion , se fit
protestant, et eut une classe d'humanités
à Saumur, qui assura sa vie dans ce
inonde, mais non pas son salut dans l'au-
tre. Il méprisa, dit l'auteur du Siècle de
Louis XIV , ceux de sa secte , et vécut
parmi eux. On lui envoya des jeunes
gens de celte secte de toutes les pro-
vinces du royaume et des pays étrangers.
Les professeurs mêmes assistaient à ses le-
çons. En 1G72, il se préparait à quitter
Saumur pour passer à Heidelberg , lors-
qu'une fièvre continue l'emporta à 57
ans. Le Fèvre était un vrai épicurien ,
et n'épargnait rien pour satisfaire ses
goûts. Il se parfumait comme un pelil-
FEV a<)Ç)
maître. Il lui manquait , à la vérité , cet
air aisé du grand monde , mais il y sup-
pléait par un verbiage étudié. Les fruits
de sa plume sont 1° Des Notes, sur
J/iacrcon, Lucrèce , Virgile , Horace ,
Te'rence, Phèdre, Longin, Aristophane,
Elien, ApoUodore, Eutrope, Aurelius-
Fictor, Denys d'Alexandrie, etc. Le
Fèvre commente ces auteurs , en homme
qui connaissait assez bien les délicatesses
des langues, et qui en possédait l'esprit.
2° Deux volumes de lettres 1659 et 1665,
in-4. 3° Les Vies des poètes grecs, en
français, iri-1 2, dont la meilleure édi-
tion est celle qu'en a donnée P>o!and, à
laquelle il a ajouté ses remarques. 6° Des
poésies grecques et latines. Le latin de
Le Fèvre est pur , poli , délicat , mais
pas tout-à-fait exempt de gallicismes ;
son siècle fournit de meilleurs modè'.Cs
en ce genre. 5" Des morceaux de Platon
et de Plutarque, qu'il a traduits et ac-
compagnés de notes. Son français n'a pas
les grâces de son latin; on voit un hom-
me de collège, qui fait des efforts pour
prendre le ton d'un homme du monde.
Il veut mêler le sérieux de Balzac avec
l'enjouement de Voiture , et les gâte tous
les deux. Il avait un attachement inviola-
ble à ses amis. Dans le temps que Pellis-'
son était prisonnier d'état, il eut le cou-
rage de lui dédier son Lucrèce. Outre
jjrae Dacier sa fille , il eut un fils, auteur
d'un petit traité paradoxal, sous ce titre :
De futilitate poetices , 1697, in-12.
FÈVRE (Nicolas Le), célèbre chi-
miste du 17® siècle, démonstrateur de
chimie au jardin royal des plantes de
Paris, fut appelé en Angleterre pour di-
riger un laboratoire de chimie , que
Charles II avait formé à Saint-James ,
l'une de ses maisons royales. Ce prince
l'accueillit avec distinction. On a de lui
une Chimie théorique et pratique , en
2 vol. in-8 , dont la 3" édition parut en
1674. On croit que l'auteur mourut peu
de temps après. Son livre est un des pre-
miers où l'on ait établi des principes et
rassemblé les découvertes faites sur la
chimie.
FÈVRE (Claude Le), peintre, né à
Fontainebleau eu 163-3 , mort à Londres
3oo FEV
en 1675 , fil les premières cludes do sou
sirldaiis les {galeries et les salles de Fon-
taliicbleau. Il se mit ensuite sous la dis-
cipline de Le Sueur et de Le Brun. Ce
dernier, ajant vu quelques portraits de
sa main , lui conseilla de s'appliquer à ce
genre de peinture. Le Fèvre acquit en
effet un talent supérieur pour saisir la
ressemblance, et le caractère, en quel-
que sorte, delà personne qu'il représen-
tait. Sa louche est vraie et spirituelle ,
son coloris frais et piquant. Le roi et la
reine voulurent être peints par cet excel-
lent artiste, qui depuis fut très employé
à la cour. Le Fèvre passa en Angleterre,
et fit dans ce royaume plusie;irs tableaux,
qui lui acquirent beaucoup de réputalioa
et de richesses. Il a traité avec succès
quelques sujets d'histoire. Ona gravé d'a-
près ce maître, et il a lui-même gravé plu-
sieurs portra^itsà l'eau-forle. François de
Tfoy a été son élève.
FÈVRE ( Roland Le } , autre peintre ,
natif d'Anjou, mort en Angleterre en
1677 , excella à faire des charges.
FEVRE (Jacques Le), docteur de Sor-
bonne , grand-vicaire de Bourges , né à
Coulauces au milieu du 17* siècle, et
mort à Paris en 1716, s'est fait un nom
par les ouvrages qu'il a publiés pour la
défense de l'Eglise. Les principaux sont
1" Motifs invincibles pour convaincre
ceux de la religion prétendue-re'forme'e,
Paris, 1682, in-12. 2° Nouvelle Confé-
rence avec un ministre , touchant les
causes de la séparation des protes-
ians, 1685, in-12 : ce livre eut un grand
succès. 3" Instructions pour confirmer
les nouveaux Convertis dans la foi de
V Eglise. On a encore de lui : Entretiens
fFEudoxe et d'Euchariste, sur l'His~
ioire de l'arianisme et des iconoclastes
du Père Maimbourg, 1674, in-12;
Anti-journal des assemblées de S or-
bonne : critique, ou plutôt satire, con-
duite par l'esprit de parti.
FÈVRE. ^oyezFEBVRE (Jacques Le).
FÈVRE (André Le), avocat, né à
Troyes , était neveu de Houdard de La
Molle. Son oncle ayant perdu la vue,
l'appela auprès de lui, et il fut son lec-
teur et son secrétaire. Il s'acquitta de
FEV
ces deux emplois avec une assiduité et
un zèle , qui lui méritèrent les éloges de
toutes les âmes honnêtes. 11 mourut à
Paris en 1768 , après avoir passé ces der-
nières années dans des infirmités conti-
nuelles. Nous avons de lui les Mémoires
de l'académie des Sciences de Troyes ,
1744 , in-8 , réimprimés en 1 756 , en 2
part, in-12. Cet ouvrage, auquel M. Gros-
ley a eu part, est dans le goût des Mathn-
nnsius , mais plus sagement écrit. Il y a
des choses agréables et des recherches
curieuses.
FEVRET ( Charles ) , né à Semur en
1583, fut avocat au parlement de Dijon
dès l'âge de 19 ans, et mourut dans celle
ville en 1661. On a de lui un Traite' de
l'Abus, composé à la prière de Louis II ,
prince de Condé, et dont la meilleure édi-
tion est de Lyon, 1 7 36 , en 2 vol. in-folio,
avec des notes du célèbre Gilbert et de
Brunet, avocat, Févret a approfondi
cette matièi-e, et son ouvrage est le fruit
des p!us longues recherches ; il y a ce-
pendant des canonisles qui trouvent de
l'inconvcnienl dans la trop grande exten-
sion de ses principes. Hauteserre, l'a ré-
futé par ordre du clergé, qui a cru y
voir compromis les droits de l'Eglise. On
a encore de lui l'Histoire de la sédition
arrivée à Dijon en 1 630, in-8, et d'aulres-
Guvrages en prose et en vers latins.
FEVRET DE FO^TÈÏE (Charles-
Marie), arrière-petit-fils du précédent,
né à Dijon en 1710 , fut reçu conseiller
aupariementde celteville en 1736. Après
s'être attaché pendant une longue suite
d'années à rassembler une nombreuse
collection d'ouvrages, et de morceaux,
tant imprimés que manuscrits, sur l'his-
toire de France, il conçut le projet de
donner au public une nouvelle édition
de la Bibliothèque historique de la
France du Père Le Long. C'eslparlesaug-
mentations considérables qu'ont produi-
tes les recherches et les travaux de M.
Fontète , que cet ouvrage vraiment im-
portant , et dont l'utilité peut s'étendre
à tant d'objets, après être sorti des mains
de son premier auteur en un seul vol.
in-folio , en 1 7 1 9 , est devenu un réper-
toire immense qui forme aujourd'hui 4
FIA
vol. in-fol. , non compris les tables qui
en composent un a'". Ce magistrat , aussi
recommandable par ses qualités sociales,
que par ses lumières dans la jurispru-
dence, son zèle pour sa patrie, et son
amour pour les lettres, est mort direc-
teur de l'académie de Dijon en 1172,
sans avoir vu la lin d'une entreprise qui
lui fait tant d'honneur. M. Barbeau des
Bruyères, auquel il avait remis tout son
travail dès 1 7C4 , a présidé à l'édition de
cet ouvrage.
FEYDEAU (Matthieu), né à Paris en
1616, docteur de Sorbonne, théologal
d'Alet, ensuite de Beauvais, mourut en
exil , à Amionay dans le Vivarais , en
1694, à 78 ans. Son attachement au
parti de M. Arnauld lui avait occasioné
beaucoup de chagrins. On a de lui ;
1° Des Méditations sur la providence et
la miséricorde de Dieu , sous le nom du
sieur de Pressigni, in-12. 2° Le Caté-
chisme de la Grâce, iu-12, et d'autres
ouvrages.
FEYDEAU DE BROU f Henri ) , évo-
que d'Amiens , delà même famille que le
précédent, mort en 1706, âgé de 53 ans,
a donné au public : 1° Une lettre latine
à Innocent XII , contre le JVodus prœdcs-
tinationis du cardinal Sfondrate. 2" Une
Ordonnance pour la juridiction des évè-
ques et des curés, contre le Père des Ira-
brieux , jésuite. 3° Lettre au sujet de la
lettre à un Curieux sur d'anciens tom-
beaux découverts en 1697, dans l'abbaye
de Saint-Acheul.
FEYJJOO. Voyez Feijoo.
FIACRE (Saint), étant venu d'Irlande
ou d'Ecosse en France , saint Faron , évo-
que de Meaux , lui donna un lieu solitaire'
oii il bâtit un hôpital , dans lequel il re-
cevait les passans et les étrangers. Il
mourut vers l'an 670. Les légendes lui
donnent la qualité de prince. Sa Vie
qui n'est guère authentique , a été pu-
bliée dans le Recueil de Surius , dans
celui des Bollandistes ( tom. 6« d'août ,
pag. 698 et suiv. ) , dans les Acta SS.
ord. S. Benedicti de Msib'ûlon, lom. 2,
et dans les autres hagiographes ; enfin
nous en avons des Vies imprimées à part,
entre autres celle écrite eu vers et impri-
FIÂ 3of
niée iu-4 , sans date , ni nom de ville ni
d'imprimeur, et celle de dom Pirou,
bénédictin de Saint-3Iaur, imprimée à
Paris en 1 636, in-1 2. L'ermitage de Saint-
Fiacre est devenu un bourg de la Brie ,
fameux par ses pèlerinages ; l'église ou
chapelle est desservie par les bénédic-
tins, les femmes n'entrent point dans le
sanctuaire ; et l'on remarque que la reine
Anne d'Autriche, y venant en pèlerinage
en lG4i, se conforma à cet usage , et
qu'elle fit même , à pied , le chemin
depuis Monceau jusqu'à Saint-Fiacre. Dou
du Plessis , qui donne un article curieux
sur ce saint solitaire ( Hist. de Meaux.,
tom. 1 , p. 61 et suiv.) observe que dans
sa chapelle il y a une pierre, sur la-
quelle vont s'asseoir pieusement les pè-
lerins, pour guérir des héniorrhoïdes, ou,
selon d'autres , du fie ou mal de Saint-
Fiacre ( Vistus , cancri gcnus, carnosis
partibus ndhœrere soUtus , primo qui-
dem calli instar durcscit;postea callus in
pus conversus , proximas partes dcpas-
citur. C'est ainsi que Mabillon désigne
cette maladie-dans les annales de sou or-
dre, t. 1 , p. 344 ). On a prétendu que
le nom de fiacres avait été donné aux
carrosses de place, parce qu'ils furent
d'abord destinés à voilurer jusqu'à Saint-
Fiacre ( en Brie) les parisiens qui y al-
laient en pèlerinage ; mais Ménage , dans
son Dictionnaire étymologique, atteste
comme témoin oculaire, que ces carrosses
furent ainsi appelés du nom de l'image
de saint Fiacre, qui servait d'enseigne à
un logis de la rue Saint-Antoine , où l'on
a premièrement loué ces sortes de voi-
tures. On peut concilier ces deux senti-
mens; en supposant que le maître de
l'auberge n'avait pris saint Fiacre pour
enseigne , qu'à cause de la première des-
tination de ces voitures pour ce pèle-
rinage-, la rue Saint-Antoine où était l'au-
berge , est précisément sur le chemin de
Paris à Saint Fiacre. Par la suite il étendit
l'usage de ses voitures pour le service
des rues de Paris.
FIACRE , frère lai de l'ordre de Saint-
Augustin , né à 3Iarly en 1609 , et mort à
Paris en 1684, se fit connaître par sa
piété cl di verses prédiclionsqui parurent
3oa FIA
siirnalurcllcs. Louis XIII , la reine Anne
d'Autriche , Louis XIV, Marie-Thérèse,
son épouse , et d'autres grands person-
nages, avaient grande confiance en ses
prières, et s'y recommandaient souvent.
Il était fort lié avec Claude Bernard, sur-
nommé le pauvre prêtre { voyez cet ar-
ticle ). Sa vie imprimée à Paris en 1722 ,
est écrite avec une simplicité qui attache.
Dans son discours préliminaire, l'auteur
anonyme ( que l'on sait être un augustin,
nommé Gabriel de Sainte-Claire) montre
qn'il connaissait les règles de la critique
et qu'il s'y est conformé. On y trouve
cette réflexion : « La disposition de nos
« pèi-es était de croire tout à l'aveugle;
>» ils se faisaient conscience de douter du
>» moindre prodige; ils croyaient trop.
» La disposition d'esprit de nos jours (en
3> 1722) est de ne croire rien; s'il me fallait
» opter entre ces deux extrémités , j'ai-
» merais mieux la puérile crédulité de
5' ceux qui croient tout, etc. » Du reste,
le livre est imprimé fort incorrectement,
et le lecteur est arrêté , à chaque pas par
des fautes grossières qui ne sont pas
relevées dans Yerrata. L'abbé d'Artigny
en a donné, d'après un journaliste, le
Précis de ce qui concerne la naissance de
Louis XIV ( que la reine Anne attribua
aux prières du frère Fiacre ), dans le tome
6* de ses Mémoires ; mais on voit, par ce
précis, que l'abbé n'avait pas vu le livre
même.
* FIARD ( Jean-Baptiste, l'abbé ) ,
naquit à Dijon , d'une honnête famille,
le 23 novembre I 736. Entré d'abord chez
les jésuites, il était professeur de rhéto-
rique à Aiençon , lorsque cette société
fut supprimée. Il se rendit à Paris, et fut
admis dans le séminaire de Saint-Nicolas-
du Chardonnet. Appelé dans sa ville
natale par M. d'Apchon, qui administrait
ce diocèse , il y remplit les fonctions de
vicaire dans les paroisses de Saint-Phi-
libert, puis de Saint-Pierre. Il était pourvu
d'un mdpart à Sainl-Michel lorsque la
révolution .survint. L'abbé Fiard ayant
refusé de prêter le serment dit civique ,
il fut déporté en 175)3 avec d'autres prê-
tres malheureux. Il échappa aux maladies
qui firent périr, à Rochcfort, un grand
FIA
nombre de ses compagnons d'infortune,
et revint dans son diocèse en 1795.
D'autres disent qu'étant sexagéraire il ne
fut point déporté ; mais qu'ayant voulu
continuer ses fonctions ecclésiastiques
avec son zèle habituel , il fut enfermé
pendant 2 ans( 17 93-1 7 95).Dès lors il vécut
retiré et mourut le 30 septembre 1818:
L'abbé Fiard était pieux, charitable;
mais , dès son enfance, à ce qu'ont assuré
des personnes qui l'ont connu intime-
ment , il avait montré une imagination
exaltéequ'il avaitencore enflammée par la
lecture de livres exlravagans. L'abbé
Fiard avait la faiblesse de croire à la ma-
gie, et donnait à celle-ci un si grand
empire, qu'il ne voyait partout que des
sorciers et des magiciens. Dans ses écrits,
il cite comme de'monolâtres les ventrilo-
ques, Mesmer, Cagliostro et autres jon-
gleurs de la même espèce ; il prend aussi
pour des sorciers les faiseurs de tours,
une poupée automate et autres objets ,
qui ne sont, en général, qu'un résultat
de procédés physiques ou de pur charla-
tanisme. Avant la révolution , il avait an-
noncé dans le Journal de Verdun , dans
le Journal eccle'siastique , et dans le
Spectateur de Toulouse, l'existence d'un
grand nombre de de'monolâtres. Le 2?.
octobre 1775, il écrivit une longue lettre
à l'assemblée du clergé , dans laquelle il
lui dénonçait également les projets d'une
foule de magiciens et de sorciers , qui
minaient sourdement le trône et l'autel.
Les persécutions qu'il avait éprouvées ne
firent qu'exalter de plus en plus son ima-
gination. Selon lui , la révolution n'était
que l'effet d'un ensorcellement , et huit
cent mille Parisiens étaient ensorcelés ,
ainsi que Louis XVI lui-même. Tous les
ouvrages qu'il a publiés roulent sur ce
sujet : en voici les titres : \° Lettres phi-
losophiques sur la maffie , 1801 , in-8 ;
2° La France trompée par les magiciens
et les de'monolâtres du 1 8« siècle , 1 803 ,
in-8 ; 3" Le Secret d'e'tat , brochure in-8,
1815. On attribue aussi à l'abbé Fiard
Le Mystère des magne'tiseurs et des
somnambules dévoilé , par un homme
du monde, 1815, in-8. M. Deleuze a
cru devoir réfuter cet ouvrage dans ses
1
i
Fie
Annales du magnétisme animal. { on
peut également voir les Annales politi-
ques , morales et littéraires , du 17 dé-
cembre 1815). En 1797 , l'abbé Fiard
soumit à La Harpe une partie de son tra-
vail , par lequel il voulait prouver Vo-
riffine diabolique et magique de la révo-
lution. La Harpe se borna à lui répondre
« que les révolutionnaires ne pouvaient
» être d'aussi grands sorciers, parce qu'ils
» ne croyaient ni en Dieu ni au diable.»
Sur la fin de sa vie l'abbé Fiatd se pro-
menait toujours seul dans les lieux les
plus solitaires, ayant constamment avec
lui quelques-uns de ses ouvrages sur la
magie et les magiciens. Cependant , lors-
que , par intervalles , il oubliait sou sujet
favori , il raisonnait fort juste, et parais-
sait avoir de l'érudition. On plaignait
sincèrement un homme estimable dupe
d'un rêve que son imagination lui repro-
duisait sans cesse, et auquel il croyait
de bonne foi. he Journal de Dijon An
6 août 1825 contient une notice très
détaillée sur l'abbé Fiard , par M. C.-M.
Âmanton.
FICHARD ( Jean ) , jurisconsulte de
Francfort sur le Mein , sa patrie , syndic
de cette ville , y mourut en I.'jSI , à 70
ans. n savait les langues et l'histoire du
droit. Il fut disciple du célèbre Zalins
qui professait à Fribourg en Rrisgau. Il
voyagea en Halie et s'arrêta dans toutes les
universités. On a de lui : 1° Onomasticon
pliilosophico-medico-sytionymum , 1674,
in-8; c'est un dictionnaire d'alchimie;
2° Concilium matrimoniale, 1580,
in-fol. ; 3" De Cautelis, 1577, in-fol.; 4»
f^itœ virorum qui eruditione claruerunt,
in-4, très rare ; 5° f^itœjurisconsultorum,
1 565 , in-4 , etc. ; ii fait suite à celui de
hem. ?i\il\[ms.Q°LesCoutumes de Franc-
fort ; 7° Concilia, etc., Francfort, 1590,
2 vol. in-fol. ; Darmstadt, 1G7 7 , 3 vol.
in-fol., y compris la vie de l'auteur, par
II. P. Herdesianus. On trouve une notice
sur Fichard avec son portrait dans le
Mercure allemand. Deutsche Mercur. ,
de 1776, 2« partie.
FICHET. rayez Fischet.
* FICHET (Alexandre) , savant jésuite,
naquit en 1588 au Petit Bornand, dans
Fie 3o3
le diocèse de Genève. Ses supéi'ieurs
l'employèrent à enseigner à Lyon les
humanités pendant sept ans, et la phi-
losophie avec les mathématiques pendant
quatre. Il se consacra ensuite au minis-
tère de la chaire , et obtint un tel succès,
que l'église n'était jamais assez vaste pour
contenir l'auditoire qui se pressait pour
l'entendre. 11 fut recteur du collège de
Kîmes , et envoyé à Rome en qualité de
député de la province de Lyon , pour y
assister à la huitième congrégation de soû
ordre. Le père Fichet avait un talent par-
ticulier pour développer dans ses écoliers
la vocation à l'état jnonastique. On en
compte un grand nombre qui , par ses
conseils , entrèrent dans divers instituts.
Ses ouvrages sont: 1° Chorus poctarum
lustratus cum musœo rhetorico etpoe-
tico ; c'est une édition purgée du Corpus
poetarum. \£ nombre des poètes latins
compris dans ce recueil est de 58. Il en
manque quelques-uns, qu'il se proposait
d'ajouter dans une autre édition. Cet
ouvrage a été imprimé à Lyon , 16l6 ,
in-4. 2" Favus mellis ex variis sanctis
collectus , Lyon, 1615-1617 , in-24. Ces
deux ouvrages sont sans nom d'auteur.
3° La Vie de la bienheureuse mère de
Chantai, fondatrice de la Visitation
Lyon, 1642, in-4; 4° la Vie de saint
Bernard de Menthon ; 5° Arcana stu-
diorum omnium methodus, et hibliotheca
scientiarum , Lyon, 1649 , in-8 , réim-
primé à la suite du Prodromus historiœ
litterariœ de Lambecius, Hambourç
1710 , in-fol. Cet ouvrage est écrit avec
élégance, et donne des moyens faciles de
faire des progrès dans les sciences. 6" Le
Triomphe du saint-Siége contre un con-
seiller hérétique de Grenoble , Grenoble,
1640. Il mourut à Chambéry le 30 mars
1659.
* FICHTÉ (Jean-Théophile), célèbre
philosophe et métaphysicien allemand
de l'école moderne, naquit à Rammenau
en Lusacc le 19 mai 1762, de parenspeu
fortunés. Son père y avait une fabrique
de rubans et faisait un petit commerce
de mercerie. L'éducation de Fichté eut
été probablerrient très négligée si un
protecteur de sa famille ne s'en fût pas
3o4 Fie
chargé et n'en eût pas pris le plus grand
soin. Fichlé repondit médiocrement aux
bonnes intentions de son bienfaiteur. Né
avec un caractère vif et indépendant il
ne put supporter le régime des écoles, et
plusieurs fois il s'échappa de celles où il
avait été placé. Un jour il fut trouvé assis
au bord d'une rivière, les jeux fixés sur
une carte ; interrogé sur ce qui l'occupait
alors , il répondit qu'il cherchait la roule
d'Amérique. Cependant la réflexion vint
détruire son indocilité : il suivit ses études
avec exactitude , et se fit surtout distin-
guer en philosophie et en théologie. Après
avoir passé ainsi quelque temps à Wit-
temberg et à Lcipsick où il s'acquit une
réputation brillante parmi ses condisci-
ples , il se trouva dans la nécessité de
pourvoir Jui-raème à ses moyens d'exis-
tence ; et , malgré l'aversion qu'il avait
pour toute espèce de dépendance , il
accepta , chez un seigneur prussien qui
habitait Roenisberg, une, place de pré-
cepteur. Ce fut dans cette ville qu'il eut
l'occasion de connaître le fameux Kant ,
dont les systèmes étaient alors en grand
crédit. Le résultat des entreliens qu'il
cul avec ce nébuleux professeur, fut la
publication d'un ouvrage que Fichlé fit
paraître sous ce titre : Essai critique de
toutes les révolutions, 17 92. Comme il
n'y avait pas mis son nom et que l'on y
rencontrait toutes les idées de Kant , ce
fut à ce dernier qu'on l'attribua ; mais le
-véritable auteur se fit connaître; et, sans
juger les opinions qu'il y émit , nous di-
rons qu'il annonçait un penseur. Après
avoir passé de maison en maisott , sous le
titre d'instituteur, un temps très précieux,
«t s'être ennuyé mille fois dans un emploi
que l'on regarde souvent presque comme
domestique et purement mercenaire, il
se décida à voyager. Il venait de recevoir
60 ducats d'un magistrat de Varsovie
chez lequel il avait commencé à exercer
cette charge et avec lequel il n'avait pu
s'arranger , c'est avec celte modique som-
me qu'il se mit en route. Il parcourut une
partie de l'Allemagne , vint en Suisse ,
et se maria à Zurich avec la nièce du
poète Klopstock, auteur de la Messiade.
Cette même année ( 1793 ) , il publia ses
Fie
Matériaux pour rectifier les jugement
du public sur la révolution française ,
première partie. La deuxième n'a point
paru , parce que l'auteur rencontra un
grand nombre de critiques , et ces criti-
ques justement méritées annoncent que
l'ouvrage avait été lu. La hardiesse des
principes émis par l'auteur avait produit
des sensations profondes et diverses. Pour
légitimer la révolution, il prétendit qu'en- ;
tre le roi de France et ses sujets , il y avait
un traité synallagmatique , et que dans
tout contrat pareil il peut y avoir lieu à
résiliement par la seule volonté de l'une
des parties. Dans cette argumentation
tout était faux, et le principe et l'applica-
tion , en fait et en droit : la majeure, la
mineure et la conséquence tout était vi-
cieux. Peu de temps après Fichte fut ap-
pelé à la chaire de philosophie d'Iéna , à
Ja place de Reinhold , premier disciple
de Kant, et professeur un peu moins
obscur que son maître. Déjà la doctrine
du philosophe de Koenisberg avait subi
quelques modifications en passant par la
pensée de son élève : Fichté mélangea le
système primitif et le système modifié ,
et de ce mélange sortit son système par-
ticulier sur V idéalisme transcendental ,
auquel il donna le nom de Doctrine de la
science. Il en publia le programme dès
son arrivée à léna. Kant partait d'une ana-
lyse de l'entendement , de la raison pra-
tique et du jugement : Reinhold prit
pour base le fait primitif de la conscience :
Fichté à son tour appuya toute sa doc-
trine sur l'action de la pensée qui se re-
plie sur elle-même , et oflVe ainsi l'idée
d'une pensée qui réagit aussi sur elle-
même et surH'idée du/woi, et équivalent
de l'un et de l'autre. Le moi alors se pose
lui-même , et ici commence l'existence ■
du moi intelligent et du moi existant, m
Ce moi absolu , libre ou sujet , forme la ^
conscience , et suf)pose un objet ou un
non moi. Fichté fait ainsi de l'activité de
l'âme l'univers entier, et (selon lui),
tout ce qui peut être conçu ou imaginé
vient d'elle. Il regarde , en outre , le
premier moi comme durable , et le second
comme passager. Le premier a la puis-
sance de créer ou de rayonner en lui-
i
m
inèmc l'image de l'uniTers, et i\ ne con-
sidère le monde extérieur que comme
uue borne de notre existence ; borne sur
laquelle notre pensée travaille. Cette
borne est créée parl'àme, dont l'activité
constante s'exerce sur son œuvre propre.
L'obscurité de cette exposition prouverait
aul)Csoin l'obscurité du système, si d'ail-
leurs sa réputation à ce sujet n'était point
faite. On peut du reste trouver une juste
appréciation de cette doctrine dans l'/i'.s.mt
sur le premier problème de la philoso-
phie , l essai sur l'existence et sur les
derniers systèmes de méthaphysique qui
ont paru en Allemarjne , insérés l'un et
l'autre dans les Mélanges de littérature
et lie philosophie , par 31. Ancillon , Taris,
1809, in-8, et dans l'Histoire comparée
des philosophies. L'année suivante (1794)
ce professeur cbangca la matière de ses
leçons : il traita de la destination de
V homme de lettres. En 1 7 96 il publia les
hases du droit de la nature, et en 17 98
son système de morale ; en même temps
il rédif^eait de concert avec îN'ieHiannner
un Journal philosophique dans lequel il
traitait les mêmes questions. Ces diverses
publications faisaient fermenter les es-
prits. Tout en ^-oulant établir les bases de
la religion , il prétendait que Bien lui-
même n'était que l'ordre moral de l'uni-
vers ; il ajoutait ensuite : « Le moi, en
» cbercbant à remplir ses devoirs, aspire
j> à un ordre moral de l'univers ;: par là
» il se rapproche de Dieu , et il a la vie
)) qui vient de Dieu. Remercier Dieu
M comme substance qui ne peut se repré-
» senter que dans le temps et dans l'es-
» pace, serait idolâtrie. » Cette question
fut, non sans fondement , jugée héréti-
que, et les autorités firent confisquer
l'ouvrage dans toute la Saxe. L'auteur
écrivit un Appel au public ])our se di.s-
culper (le l'accusation d'athéisme, et
toutes les plumes savantes de l'Allemagne
furent alors en mouvement; mais heu-
reu.semenl les défenseurs elles apologistes
de l'ouvrage de Fichté furent en petit
nombre. Ficlité ne put résister à tor.fes
les attaques dont son système fut i'-objet :
le plus puissant de ses adversaires était
Schelling. Ce philosophe avait été da-
V.
bord un des panégyristes dé 4a Doctrinii
de la science ; mais s'étant créé une autrC
espèce àUdéologie , il voyait les choses
dans un sens contraire à celui qu'adop-
taient Kaiit , Reinhold , et surtout Fichté.
Schelling , en établissant son système de
V identité absolue, s'élève à l'absolu pri-
mitif -. il a vu le moi primitif , source de
toute réalité et de toute science ; et si ,
par ce moi primitif infini, Schelling a
vu ou a cru voir l'Etre suprême à qui ces
attributs appartiennent uniquement, cer-
tes il s'est rapproché d'une idée plus
claire , plus juste et plus distincte. Fichté,
au contraire , dans sa philosophie tran-
scendcntalc, avait adopté que le moi sub-
jectif produit le non moi objectif, et
qu'ainsi le contraire n'a pas lieu. Ne pou-
vant triompher d'ini si grand antagoniste,
Fichté se défendait de son mieux; mais
Schelling le terrassa par son ouvrage de
Bruno , où il détruisit victorieusement le
système de l'identité absolue de Fichté.
Ensuite , et dans son Exposition du vrai i
rapport de la philosophie naturelle à la
dQctrine de Fichté (180G), il lui re-
proche, avec justice, qu'il donne tout,
en physi({uc comme en philosophie, à la
seule action mécanique , et qu'il n'a pas
la moindre idée de l'énergie de la vie
dynamique. Il se vit contraint d'aban-
donner sa place et de quitter léna : il se
rendit à Berlin où il donna des leçons
particulières et oii il publia plusieurs
écrits relatifs à la politique. Toute l'Alle-
magne se déchaîna contre lui, et l'on ne
sait comment Fichté put résister à ce
torrent de critiques qui furent laucé»es
contre lui. Cependant ayant été nommé
en I80C professeur de philosophie tran-
scendante à l'université d'Eriang , il y fit
plusieurs discours qui rétablirent sa ré-
putation. H publia les leçons qu'il fit
alors ; ces discours étaient intitulés : J)c
l'état de l'homme de lettres et de ses
travaux dons l'empire de la liberté; son
cours parut sous le tilre de Guide de la
vie bicnhcui'citse . Dans ces derniers ou-
vrages on voit s'éciaircir enfin sa téné-
breuse doctrine, ou, pour mieux dire, il la
purifia. Il cÀ difficile de trouver un livre
philosophique écrit avec plus d'onction ;
20
ao6 me
on voit qu'il a été tliclé sous l'influence
des pensées religieuses : on ne peut lire
sans admiration ce qu'il dit de l'évangile
de saint Jean. Du reste on n'y rencontre
plus aucune de ces propositions qui, buit
ans auparavant, l'avaient fait accuser
d'hérésie, et même, à droit ou à tort , d'a-
théisme. La révolution qui ébranla lu mo-
narchie prussienne,. força Fichté à quitter
Berlin. Après avoir fui à Koenisberg,
puis à Riga , il Tcviut dans la première
de ces villes, oîi bientôt il apprit que la
protection du savant ilumboldt l'avait
fait nommer recteur de rnniversitc de
Berlin. Fichlc dans ses nouvelles fonc-
tions mérita l'estime publique. Sa femme,
remplie de toutes les vertus qui font et
honorent le chrétien , s'était dévouée au
service des malades abandonnés. Atteinte
d'une fièvre putride , elle parviut à se
guérir ; mais elle communiqua son mal à
Fichté dont la santé était altérée depuis
plusieurs années , et qui mourut le 29
janvier 181 i. Malgré les paradoxes que
l'oq rencontre dans les ouvrages dcFichté,
ce philosophe n'en fut pas moins un
homme extraordinaire , et, quoique son
système n'anra jamais , si modiiié qu'il
.soit, l'honneur d'être universellement ré-
pandu , c'est encore l'œuvre du génie ;
car il y a quelquefois du génie même
dans des erreurs. Il était doué d'une élo-
quence pleine de chaleur et de force ;
quel que fût l'objet de son enseignement,
il y avait toujours foule à ses leçons.
Quoiqu'il fut extrêmement vif, il mit
toujours dans ses discussions la plus
grande modération ; il voulait convaincre
et non pas blesser. Bon époux , ami obli •
géant, il avait les moeurs pures, et si on
peut lui contester le titre d'homme de
génie que nous lui avons décerné, du
moins chacun .s'accorde^ it lui donner
celui d'homme estimable. Les principaux
ouvrafjes de ce philosophe sont : 1 " Essai
/le critique de toutes les rcveUations ,
Koenisberg, 1792, ibid., 1793, in-8;
2" Matériaux pour rectifier lesjugcmens
du public sur la révolution française ,
175)3 , in-8 ; 3"^ Sur la notion de la doc-
trine de la science appelée communément
philosophie, Wcimar, V,H, 17 98, 1T99,
m
\ vol. in-8 ; 4° La liberté de penser ré-
clamée des souverains de l'Europe ,
1794, in-8 ; 5" Discours sur la destina-
tion de l'homme de lettres, léna , 1794 ,
in-8; G** Bases de la xloctriiui 'de la
science , ibid. , 17 94 , 1 vol. in-8 , 1801 ,
1802, 2 vol. ; 7" Précis de ce qui carac-
lérise la. doctrine de la science relative-
ment à la faculté théorétique , ibid. ,
1774 , et 1802 , in-8 ; 8° Bases du droit
naturel d'après les principes de la doc-
trine de la science , ibid. , 179G et 1797,
2 vol. in-8 ; 9" Système de morale d'après
les principes de Id doctrine de la science,
ibid., 1798, in-8; 10° Nouvel essai pour
servir à l'histoire de t athéisme , Mar-
bourg , in-8 ; 11° Appel au public sur
l'imputation d'athéisme fuite a l'auteur ,
léna, 1709, in-8, 2" édition; 12° /!« j
destination de Vhomme, Berlin, 1800, \
in-8; 13° Discours sur la condition de
Vhomme de lettres eÀ sur ses travaux
dans V empire de la liberté , ibid. , 1 806 ,
in-8 ; 1 4" Discours adressés à la nation
allemande , ihïd. , 180C, in-8; 15° La
doctrine de la science exposée dans toute
son étendue, Straubing, 1807, in-8;
1G° Principes fondamentaux de toute la
doctrine de la science , etc., et esquisse
du caractère distinctif de cette science
relativement à la faculté théorétique ,
1810, in-8; et divers opuscules 'm%éré%
dans les jour?iaux philosophiques et dans
d'autres écrits périodiques ou publiés
séparément.
"^ FICHTEL ( Jean Eiibenreich } , na-
turaliste hongrois, ué en 1732 à Pres-
bourg, s'adonna à la jurisprudence, qu'il
abandonna pour une place d'actuaire dans
le directoire de la nation Saxonne. Ce
directoire ayant été supprimé, Fichtel
se rendit à Vienne, oii il fut d'abord
employé dans la chambre des comptes. On
l'envoya ensuite en Transylvanie pour
occuper une place de chef de bureau à la
trésorerie. En 178.5, il devint directeur
de la régie du domaine et des douanes ,
et en 17 87 conseiller du gouvernement
de la même province. Il mourût presque
subitement le 4 février 179.5. Lesdiflférens
voyages qu'il fut oblige de faire pour
remplir ses fonctions Je mirent à même
PIC
de Satisfaire ses goûts pour l'hisloire na-
turelle. Son cabinet de minéralotïie pas-
sait pour le plus riche qui fût dans les
étals autrichiens. On lui doit : \" Mé-
moires sur la minérnloc/ic de la Transyl-
vanie , >'ureinberg , 1 780, 2 parties in-4.
2° Observations minéralogiqites sur les
monts Carpaths , Vienne, 179!, 2 part.
in-8. 3" Mémoires minéralogiques ,
Vienne, 1794, in-8. i" Notice d'unvolcan
brillant en Hongrie, Berlin, 17 99.
FIC1]\ ou FiciNO (Marsile ou Marsilio },
chanoine de Florence sa patrie , savant
dans les lanf^ucs grecque et latine , naquit
le 19 octobre 14 33. Il professa la philo-
sophie dans l'université de Florence. Il
eut une foule de disciples : car quoiqu'il
adoptât les rêveries de l'astrologie judi-
ciaire , erreur qui lui était comihune
avec les philosophes de son temps, il
avait d'ailleurs beaucoup de mérite. Il
dut à la libéralité des îlédicis, des re-
traites agréables auprès de l^lorcnce. Il y
passait le plus de temps qu'il pouvait,
avec des amis choisis qui philosophaient ,
et qui partageaient avec lui les charmes
de la raison et de la solitude. Ficin avait
besoin de l'air de la campagne. Son tem-
pérament était mélancolique, sa santé
délicate , et il ne la conservait que par
des attentions presque superstitieuses. Il
changeait jusqu'à six ou sept fois de
calotte par heure. La nature était trop
faible chez lui, pour qu'elle ne succombât
point, malgré toutes les attentions de
l'art. Il mourut en 1499, à CG ans. Ses
ouvrages ont été recueillis à liàle en
1561 , en 2 vol. in-folio. Ils ont été im-
primésplu-sieurs fois On y voitdes traduc-
tions d'auteurs grecs , de Platon , de
Plotin , dont il essaie de faire des chré-
tiens , parce qu'effectivement il se trouve
dans leurs ouvrages des endroits très favo-
rables à la religion chrétienne, fruits
sans doute de la lecture des livres saints,
ou de la traduction primitive, ou des
notions que les Juifs avaient communi-
quées aux autres nations. On y trouve
aussi des écrits de physique, de meta -
phyfiiquc , de morale, de religion ; des
lettres en 12 livres, imprimées séparé-
ment, Venise, 1 49a , in-fol., rares , ainsi
ne 3o7
que son L^dilion de la Philosophie pla-
tonicienne, imprimée à Florence in-folio ,
1482. (On peut consulter sur Ficino ,
Tiraboschi dans son Histoire desécrivains
italiens : J. G. Scheiliorn , Aniœnit. litt. ,
tome 1 ^"^ ; et sa Fie écrite par Jean Corsi,
de Florence, imprimée à Pise en 1771,
in-8. Ficino eut pour élèves lessavansles
plus illustres , comme .Vccolti, Calverino,
Cavalcanti , Ange Politieu; ce dernier,
ainsi que d'autres poètes , le célébra dans
ses vers. ]
*FICOROM (François }, antiquaire
italien , né dans les environs de Rome ,
en 16G4, mourut dans cette ville en 1747,
âgé de 83 ans. Il fut membre associé de
l'académie des Inscriptions , delà société
royale de Londres et de plusieurs autres
sociétés savantes. Il fonda la société
degt Inculti à home. On lui doit un
grand nombre d'ouvrages en italien qui
prouvent son érudition. Les principaux
sont : 1 " Osservazioni snpra Vanticldla di
Roma dcscritlc nel diario italico publi-
cato dal P. Bernard MonI faucon,
1709, in-4 , ouvrage curieux et estimé.
2° Itali ed altri instrumcnti lusorii degli
anticfU romani , Rome, 1 734 , in-4 , fig.,
curieux etpeu commun. 3° Le maschere
sceniche e le figure corniche d'antichi
romani, Rome, 1736 et 1748, in-4, fig.^
traduit en latin , sous ce titre : De larvis
scenicis , en 17 50 ou 1754, in-4 , ftg.
i° Ipiombi antichi, 1 7 40 , in-4 , fig. , rare
et estimé. Il a été traduit en latin.
5° / vestigi e racita diRoma nntica , ri-
cercate e spiegate, 1744, grand in-4.
6° Gemmœ antiquœ littéral œ, aliœque
rariores, 17 57 , in-4 , fig. , publié après
la mort de l'auteur, avec de savantes notes
de Galleoli. • ■
* FICQUET ( Etienne ) , graveur , né
à Paris en 1731 , mort en 1794 , excellait
à peindre les portraits en petit. On lui
doit ceux des personnages les plus cé-
lèbres de France, qui forment une suite
connue sous la dénomination de Collec-
tion Ficquet. Elle se compose des por-
traits suivaiis : il/"^ de Maintcnon,
Molière, Foliaire, Montaigne, Regnard,
J. B. Rousseau , Fénélon , Descaries ,
/. /. Rousseau, Lamùthe-LeFayer ^
5o8 FID
Crebillon ,. Corneille , Fisen, Fade,
Chcunevwre , el deux dift'ërcns portraits
de La Fontaine. Il a laissé imparfait
celui de Bossuet , qui devait Caire partie
de celle collection; on eu rencontre
quelques épreuves. Ou a encore de lui
plusieurs autres très petits portraits ,
tels que ceux de Cice'ron , Ne wton ,
Louis Xr , etc. Celui de M™» de Mainte-
non est rc.çardé comme un chef-d'œuvre.
Il était d'un caractère original , travail-
lait peu lorsqu'il n'était pas pressé par le
besoin , et mourut dans un élat voisin
de l'indigence, en 17 94.
FIDDLS (Uicliard), écrivain poli et
savant théologien aiygjais, né à Huu-
mamby dans le comté d'York , en 167 1 ,
fut ministre à Halsham , lieu malsain ,
qu'il fut obligé de quitter. I! se retira à
Pulney, oii il mourut en 1724. Il est au-
teur 1 o D'un Corps de théologie ,1718-
1720, 2 vol. in-fol. ; 2° de cinquante-deux
discours pratiques sur différens sujets ,
1720, in-fol. ; 3" de la Fie du cardinal
Wolsey, Londres, 1724, in-folio ; h° d'un
Traité de morale, 1724 , in-8 , où il ré-
fute la fable des Abeilles de Mandeville ,
et les Recherches sur la vertu de Sha-
flesbury. Il était plus fécond que solide.
FIDELE ( Saint), né à Sigmaringen,
^^etile ville de la Sooabe , étudia la phi-
losopu'C et la juris^vudence dans l'uui-
■versité de Fribowrg. Quelques gentils-
hommes' curieux de voyager, ayant désiré
de l'âP^oir pour compagnon , il parcourut
avec eus , depuis 1604 jusqu'en 1 C 1 0, l'Al-
lemagne, l'Italie, la France et plusieurs
provinces d*Espagnc. De retour dans sa
patrie, il embrassa la .profession d'a-
vocat , et devint célèbre d«ns le barreau;
mais •redoutant les écucils dont cette
carrière est semée, il la, quitta bientôt
pour se faire capucin. Le pape Grégoire
W , qui venait d'établir la congrégation
de la Propagande, instruit du mérite de
Fidèle , le préposa aux missions qui de-
vaient se faire chez les Grisons; il s'ac-
quitta de son emploi avec un succès
digne de son zèle , et tel qu'on espérait
de ramener dans le sein de l'Kglise tout
ce qui restait d'hérétiques chez celte na-
tion ; mais quelques-uns d'entre eus ,
FIE
plus allachés à l'erreur, et par-là mém(!
jaloux de ses succès , tésolurent de te
perdre de la manière la plus lâche et la
plus cruelle. D'après une invitation si-
mulée , le Père Fidèle s'étant présenté
pour les instruire , [ils se jetèrent tumul-
tueusement sur lui et le massacrèrent le
24 avril 1622. Clément XIII l'a mis au
nombre des saints.
FIDERI , empereur du Japon , fils et
successeur de Taïkosama en l.'jOS. On-
goschio son tuteur lui enleva sa cou-
ronne, après l'avoir obligé d'épouser sa
fille. Fideri leva une puissante armée
contre l'usurpateur; mais celui-ci plus
heureux le rétluisit à s'enfermer avec sa
femme cl les seigneurs de son parti dans
un palais , où il fit mettre le feu.
FIDIUS. Fnyez Da's-FiDius.
FIELDIPs'G (Henri), célèbre romancier
anglais, filsd'un lieutenant-général, vil le
jour à Sharpham-Park , dans le comté de
Sommerset, le 28 avril 1707. Né avec une
imagination vive et même libertine, il s'a-
bandonna,avant l'âge de 20 ans, tellement
à la débauche , qu'il altéra sa santé et sa
médiocre fortune. A 30 ans il épousa miss
Cradock , beauté célèbre du comté de
Salisbury. Sa dot fut bientôt consumée
dans les plaisirs. Fielding voulut suivre
le barreau ; mais la goutte, qui l'assaillit
tout à coup , l'obligea d'abandonner
cette carrière à laquelle il était d'ailleurs
peu propre. La composition de plusieurs
comédies ou farces , et de plusieurs ro-
mans, et la place de juge de paix dans
le comté de Midlesex , furent ses res-
sources contre l'indigence. Une maladie
de langueur, qui l'ailligeait depuis quel-
que temps, l'engagea d'aller, en 1753,
en Portugal. Il mourut à Lisbonne eu
octobre 1764. Ses romans sont traduits en ■.
français : Tom-Jones , en 4 vol. ; Amélie, m
en a ; les Aventures d'Andrews, 2 vol.;
Roder ic Randon, 3 vol. in-i2 ; Foyage
danK Vautre monde, in-12. Les comédies ^
de Fielding ne sont pas du premier mé-
rite; elles oftVent pourtant des scènes
agréables , et quelques ridicules nou-
veaux, peints avec vérité, avec énergie
et d'une manière originale. Il en a imité
deux de Molière, Y Avare et le Médecin
FtE
maUjrc lui. Quant à ses romans , on y
trouve de belles siluations, des scnli-
niens toucliaiis, d'cxcellens caractères,
dont quelques-uus sont neufs; mais l'au-
teur prodifjileirop les réflexions, les di-
{;ressious, les portraits bas et les menus
détails. i}\\ a corritjé une partie de ces
défauts dans les traductions françaises, du
moins dans celle d'Âmclie. Tom-Jones ,
le chef-d'œuvre de l'auleur, a été réduit
de C vol. i» 4 ; encore il y en a deux de
trop. Chéron Cn a donné depuis une tra-
duction complète en G vol. iu-12. Ficï-
ding donna pendant quelques mois une
espèce de Journal de morale, qui avait
les mêmes imperfections que ses romans.
C'était un tas d'observations faites à la
bâte et dans les rues , mal adroitement
cousues à des lieux communs , satiriques
el moraux , dont l'eft'et ne sera certaine-
ment pas de rendre les hommesnicilleurs.
FiENîVE ( Robert de ) , vieux guer-
rier, qui fut honoré de l'épéede conné-
table en 135G ; mais le roi Charles V vou-
lant fjratifier Dugucsclin de cette charge,
de Fiennc donna sa démission en 1370.
Sa famille a subsisté jusqu'à nos jours.
FIE^US ( Thomas } , d'Anvers , né en
1 507 , fut appelé à !.ouvain en 1 o93 ,
pour remplir une chaire de médecine. Il
la quitta au bout de sept ans, pour se
rendre à la cour de Maximilien , électeur
de Bavière, en qualité de son médecin ;
iL n'y resta qu'un an, et il vint repren-
dre sa chair<î à Louvain , oii il mourut
en 1631. Il est regardé comme un mé-
decin très savant. Il en est peu de son
temps qui l'aient égalé dans la connais-
sance, de l'histoire naturelle et la chi-
rurgie. On a de lui : 1" De viribus ima-
ginât innis , in-8. 2" De formaiinnc cl de
animationc fœtus, in-8. 3° ylpolorjia
pro Ubroprœccd. in-8 , 1G29. \° De cau-
teriii, in-8., dont la mciricurc édition
est de Londres, 1733, in- 4. b" Libri
chirurgici, 1G49, in-i ; et d'autres livres
bien reçus dans leur temps. — Son père
Jean Fienus, médecin à Anvers, mort à
Dordrecht en 1 j85, donna un traité De
statibus humanum corpus nioleslanli-
bus, 1G82, in-8, curieux.
FJESQUE( Jean-Louis de) , comte de
FIE 3o9
Lavagne , d'une des plus grandes famille-s
de Gènes , naquit avec des qualités qui
auraient pu lui procurer une vie heu-
reuse; mais son ambition ]ç perdit. Xa
haute fortune d'André Doria excitait sa
jalousie; il se ligua d'abord avec les
Franr.Tis,' qni voulaient recouvrer Gènes.
YjW des conjurés lui ayant fait corapren-
*lre que c'était l'entreprise d'une âme
lâche , d'aimer mieux assurer sU patrie à
des étrangers, que de la conquérir pour
lui-même, il travailla à s'en rendre mai
Ire. A l'entrée de ia nuit du l" janvier
1547, les conjurés commencèrent d'exé-
cuter leur projet. Us s'étaient déjà rendus
maîtres de la Darsènc , lieu où sont les
galères, lorsque la planche sur laquelle
le comte passait pour entrer dans une
galère s'étant renversée, il tomba dans
la mer et .se noya, à l'âge de 22 ans. La
mort du chef rallcntit l'ardeur des cou-
jurés^ et !a république fut sauvée. On
punit le crime de Fiesqiie sur sa famille,-
elle fut bannie de Gènes jusqu'à la cin-
quiènse génération , et sou palais fut
rasé. Le cardinal de Retz a donné l'His-
toire de cette conjuration, in-8, 1G66.
Cet ouvrage n'est qu'une espèce d'abré-
gé de l'Histoire de la même conspira-
lion , publiée en italien par 31ascardi,
et traduiteen français par Fontenai-Sainte-
Geneviève, 1G39, in-8. (Schiller a donné
sur ce sujet une bonne tragédie qui a
été imitée p.ir .M. Ancelot, 1825.)
FIEUBET ( Gaspard de ) , seigneur de
Ligny, conseiller au parlement de Tou-
louse sa patrie , ensuite chancelier de la
1 eine Marie-Thérèse d'.\utriche , et con-
seiller d'état , mourut aux Camaldules de
Grosboisen lC:)i, à G7 ans. Il a laisséquel-
ques petites /;iV;c^5 de poésie , répandues
dansdivers recueils. On les lit avec plaisir,
pour la délicatesse, la légèreté et le na-
turel qui y régnent.. Sa fable surtout,
intitulée Ulysse et les Syrèncs, est très
estimée.
FIEUX ( Jacques de ), entra de bonne
heure dans l'état ecclésiastique, et fut doc-
teur de la maison de Navarre. Son talent
ponrla prédication le rendit célèbre, et lui
mérita l'cvêché de Touî , auquel il fut
nommé eu I.C7G. Il y publia l'année sui-
3id FIG
vante (les Statuts synodaux , qui depuis
ont servi de règle en celle église , el fit
de fréquculcs visiles dans sou diocèse,
toujours avec graud fruit. Son zèle , sa
douceur, sou ëloqueuce 4ui gagnèrent
tous les èœurs. Ce digne pasteur l'ut reçu
partout comme il méritait, avec des té-
moignages unanimes d'eslimjc cl de con-
fiance, surtout dansla Vosge, oîi l'on
n'avail point vu d'évèque de mémoire
d'iiomme. M. de Fieux avait une sagacité
singulière pour la décision des. <^s de
conscieiice, et il publia en 1G79, un
écrit sur l'usure, très estimé, qui l'ut
principalement utile dans son diocèse,
où ce vice avait jeté de profondes ra-
cines. Il mourut à Paris dans les senti-
niens de la plus tendre piété, qui avait
présidé à tous ses travaux.
* FlGUlilREDO (Antonio Pébeira
de), savant portugais, pé à Macao le H
février 17*5, fit ses premières éludes chez
les jésuites , et entra ensuite dans la
congrégation des Pères de l'Oratoire de
la maison du SaintE<<pril à Lisbonne, oiiil
enseigna successivement lu grammaire ,
la rhétorique el la théologie. Quelques
diôërends s'étant élevés en^re la cour de
Rome et celle de Portugal , il se pro-
nonça d'abord en faveur du sainl-Siége ;
mais il changea bientôt d'opinion , et
soutint publiquement les famenses thèses
du pouvoir des rois sur les personnes et
les biens ecclésiastiques. Il publia peu
de temps après son Essai thénlogiquc ,
oîi il défend la même cause. Cet ouvrage
lui valut l'einploi de député ordinaire
dans le tribunal royal de la censure , et
de premier interprète dans les bureaux
des affaires étrangères et de la guerre.
Obligé de vivre dans le monde , il se
crut autorisé à quitter ses habits reli-
gieux , démarche qui augmenta l'animad-
version de ses ennemis, et le fit regarder
comme un homme vendu à la cour et à
l'ambition du marquis dé Pombal. Ce
ministre ne pouvait en efi'el trouver un
homme qui fût mieux eu état de secon-
der ses plans hardis de réforme, figuei-
redo joignait à la plus grande activité ,
la pénétration et l'étendue du savoir. En
1772, il fut élu un des trois premiers
FIL
députés de la junte du subside liitt'-
faire et de l' instruction publique. Il
devint peu après membre de l'académie
royale des Sciences dans la classe de la
littérature portugaise. Sa grande assi-
duité aux alïaires et à l'élude altérèrent
sa santé. Sur lu fin de sa vie, il sembla
se repentir des erreurs où ^Qn ambition
l'avait entruiné , et mourut d'une attaque
d'apoplexie le 1 4 août 1 71)7 , avec l'habit de
son ordrequ'il availdemundé lui-même. Il
a composé plusieurs livres sur les langues
latine el portugaise, qui éprouvèrent de
nombreuses critiques de In part des jé-
suites , contre lesquels il s'était ouverte-
ment déclaré. Celui desesouvragesqui lui
fait le plus d'honneur ,est la sainte Bible ,
traduite euparturjuis , avec des préfaces ,
notes et variantes, 1778-90, 23 vol. in-8.
Il a laissé un grand nombre de manuscrits.
* FILA-MOJNDO (Raphaël-Marie), évê-
que de Suessa , né à tapies , dans la 2*=
moitié du K** siècle, embrassa l'ordre de
Saint-Dominique dans le couvent de
Sainte-.Marie dcUa Sanilà. D'excellentes
études , et son application k la théologie,
le rendirent capable de professer de
bonne heure cette science avec succès; il
cultiva en même temps la littérature , et
se fil connaître avantageusement par
([uelqucs pièces de vers qu'il adressa a
ses amis. Ses talens le firent appeler à
Rome par le supérieur de l'ordre, et il y
fut nommé eu 1706 l'uu des conserva-
teurs de la fameuse bibliotlièque de la Ca-
sanala. Le pape Clément XI lui donna
l'évêché de Suessa dans la terre de La-
bour , qu'il administra avec sagesse jus-
qu'à sa mort arrivée en 1 7 1 6. On connaît
de ce prélat ; l" Ilgenio bellicoso di Na-
poti; Mcmoric istnriche (Talcuni capi-
tani celebri napolitani, Naples, 1694,
2 part, in-fol. Il y en a des exemplaires
qui portent la date de 17» i. C'est l'his-
toire des célèbres capitaines du royaume
de IS'aples. Elle est ornée de ôG portraits.
2" Raggunglin del viaggio fatlo dapadri
delV ordinede Predicatori nella Tartaria
minore, neW nnno 16G2 , con la nuova
spedizione del padrc Francesco , epis-
copo , in Arinriiia Persia , Kaplcs,
IGOà, in-8 ; .3'' TheorhetoncK idca , ex
ni
dtvinis scriptinis etpoUlioris iitterâturœ
mtjstagngis dcducta, Naples, i:Ot), 2
Tol. in-4. C'est UD cours dVloqucnce sa-
crée à l'usage de ceux qui se destinent au
ministère de la chaire, le Père Echatd
l'a dlé avec éloge dans sa Bibl. ord.
prtedicat.
FILANGIERI ( Gaétan ), publicisJe
ccièbre. rentilhorame de la chambre du
roi des Deux-Siciles , et conseiller au dé-
partement des finances , ne à Naples le 1 8
août l'hi, et mort dans la même ville en
1788 à la fleur de son âge, était fils du
prince d'Aragnello et petit-fils par sa
mère du duc de Fraynito : ( il descendait
de ces aventuriers normands qui dans le
1 1 * siècle fondèrent des royaumes en Ita-
lie. Filangieri avait 1 4 ans lorsqu il entra
dans un des régimens destinés à la garde
du roi ; mais il quitta bientôt la profes-
sion des armes pour se livrer à l'élude de
la morale , de la philosophie et des lois.
Il obtint de grands succès au barreau. ) Il
est auteur de la Science de In Lc'gisla-
tioit, en italien, qui fut condamnée par
un décret de la cour de Rome, en date du
C décembre 1784. 11 en a paru plusieurs
éditions à Napics , Venise , Florence et
Milan. Elle a été traduite en allemand ,
en espagnol etc. I.a traduction française
i si de Gallois, Paris, 1786-91, 7 vol. in-8.
ot avec des notes de Benjamin-Con-
stant , 1821, 6 vol. in-8. Les maximes phi-
losophiques qu'il a répandues dans cet
ouvrage, lui ont fait une prompte répu-
tation dans un certain monde. Si l'on
tvceple quelques passages sur le despo-
tisme des rois et les abus du gouverne-
ment militaire, on peut dire que ce n'est
i|a'une répétition de ce qu'on voit ail-
leurs, à quelques paradoxes près qui sont
propres à l'auteur. Et dans le fait , que
pcnt-on dire de nouveau sur une matière
toile que la législation , sans se perdre
dans des spéculations hasardées et dan-
creuses? « Ne comprendra-l-on jamais,
dit un VTai politique, combien il est
dangereux dans un état de souô'rir que
des hommes sans mission , souvent sans
talent^ et sans lumières j déclament à
lort et à travers contre les usages reçus,
contre les anciens élabiisseitiens, frou-
m 3ii
>i dent ce qu'il y a de plus reêpeclab'.e ,
a foulent aux pieds tous les principes ,
» sous le spécieux prétexte de s'élever
» contre les abus, et de détruire les pré-
u jugés. Le public toujours avide de ndu-
» veautés , toujours disposé à confondre
u la témérité et l'audace avec le génie ,
« toujours dupe de l'emphase et des pro-
)> messes des charlatans, se persuade ai-
» sèment que des hommes qui jugent et
n qui condamneutavedtant de hardiesse,
•) ont des vues supérieures , et que nos
w ancêtres n'avaient pas le sens commun ;
« il se pénètre des idées et des maximes
u de ces réformateurs , d'autant plus flat-
« teuses , qu'elles paraissent neuves ; et
)' quel mal n'en résulte-t-il pas pour la na-
» tion ? » En 17 88 , il parut à Paris 3 au- '
très vol. de la Science de la Lc'gislation.
Ces trois volumes posthumes ressemblent
parfaitement aux autres , à cela près que
l'auteur, devenu plus constant, plus
hardi, déguise moins certaines opinions,
que le crédit toujours croissant du phi-
losophisme lui a paru rendre plus aisé-
ment admissibles. Il y a de bonnes cho-
- ses , il y en a beaucoup de mauvaises. Le
nombre de celles-ci est encore allé en
croissant dans les 7 et 8" vol. publiés à
Paris en 1701. Il y règne de plus un ton
de morgue et de vrai fanatisme , une lé-
gèreté et une inconséquence d'idées , et
tant de spéculations creu.ses, dangereu-
ses, tyranniques et impraticables, qu'on
est fondé dedouler que ce soit réellement
une suite et une traduction de l'ouvrage
italien, et de présumer. que c'est plutôt
la production de quelque déaiocrale pa-
risien, dont la tcle n'aura pu conserver
une organisation saine aa milieu des mou-
vemens de la révolution. (Le premier li-
vre de Fiiangieri traite des règles géné-
rales de la législation ; le deuxième des
lois politiques et économiques ; le troi-
sième des lois criminelles; le quatrième
de l'éducation, des mœurs, et de l'instruc-
tion publique; le cinquième des lois re-
latives à la religion. Ce livre est resté in-
complet, l'auteur étant mort avant de
l'avoir achevé. Le professeur Joseph
Grippa a réfuté cet ouvrage eh 1782. D'un
autre côté l'avocat Tommasi a fait l'éloçe
3tA m
de FilaDglcri kvec Une analyse de sa tc-
(fislation universelle,, frilangieri avait ob-
tenu en 1777 les litres de f^cntilhonimc
de la cbamlirc du roi ; de jtinjordoinc de
semaine , et d'officier du corps royal de
Ja marine II habita la Cour, et ce fut
alors qu'il ûl paraître son ouvrage. En
1783 il épousa la comtesse Caroline do
Frendel, noble hongroise, se démit de
toutes ses charges, et se retira à Cava pour
se livrer aux plaisirs de l'amitié et de l'é-
tude. Ferdinand IV l'arracha à sa retraite
en 1787 , à l'époque où il monta sur le
trône, et le fit membre du conseil suprême
des finances. Un maladie grave le força
à aller avec sa famille à Vico-F.qucnsis
oîi il est mort à 36 ans. )
* FILASSIER ( Jean-Jacques ) , agro-
nome , né à VVarwick-sud , dans la Flan-
dre , vers 1 73G , d'un père riche , se voua
d'abord à l'état ecclésiastique auquel la
lecture des philosophes le fit renoncer,
La simplicité de ses goûts semblait devoir
l'éloigner de la capitale: cependant il
saisit avec plaisir l'occasion de s'en rap-
procher , en se chargeant de la direction
de la pépinière de Clamart, où il vivait
paisibîemcnt lorsque la ^évolution éclata.
Le vœu des habitaus l'appela bientôt à
la place de procureur-syndic du district
de Bourg-la-I\einc; il fut ensuite nommé
à l'Assemblée législative , oii il parla eu
faveur de la liberté de conscience. Après
le 10 août, il fut dénoncé comme roya-
liste ; mais s'étant justifié de l'accusation
portée contre lui , il retourna dans sa
commune, dont il fut élu juge de pai.x.
Suspendu de ses fonctions après le 9
thermidor, il reprit ses anciennes etdou-
ces habitudes, ej^mourut à Clamart en
1806. On lui doit quelques ouvrages es-
timés, en faveur de l'éducation. \° Dic-
tionnaire historique de l éducation , Pa-
ris, 1771 , 2 vol. in-12, 1784, 2 vol.
in-8, 1808, 3 vol. in-8. C'est un recueil
d'anecdotes choisies , instructives et in-
téressantes,, qu'on peut mettre sans dan-
ger entre les mains des cnfans. 2" Erns-
te , ou VAmi de la jeunesse, Paris, 1773 ,
petit in-S , très souvent réimprimé. La
dernière édition est en 2 vol. in-g. On y
trouve un abrégé d'histoire et de géogra-
tIL
pbîe avec d'autres notions élémèntaiiurSi
le tout en forme d'entretiens familiers
d'Eraste avec son élèye. 3° Eloge du Dau-
phin, père de Louis XVI, Paris, 1777,
in-8. 4" Culture de la grosse asptrgc ,
dite de Hollande, Paris, 1783, in-12.
5" Dictionnaire du jardinier français ,
Ppris, 1790, 2'VoL in-8, ouvrage' très
utile.
FILASSIER. Voyez FaïAssiER.
PILASTRE ( Guillaume ), évêquc de
Tournai dans le 16^ siècle, dont nous
avons une espèce de chronique que les
curieux de tout ce qui concerne l'histoire
de France recherchent encore, quoique
surannée. Elle fut imprimée l'an 1517 ,
en 2 vol. in-fol. On a encore de lui La
Toison d'or, Paris, 1530, 2 vol. in-folio.
FILCHIUS ou FiLcin.\ ( Benoît), né
d'une famille noble de la Grande-Breta-
gne, fut élevé dans les principes du cal-
vinisme , et attaché à la secte puritaine.
Rendu à Paris dès l'âge de 21 ans, il y
abjura celte secte , qui ne faisait que de
naître , pour rentrer dans la religion de
ses pères, que ses compatriotes n'au-
raient jamais abandonnée , si , comme
lui , ils avaient eu le courage de se déter-
miner en faveur de la. vérité , contre l'in-
térêt de leurs propres passions. Son grand
amour pour la vertu lui fit embrasser,
dans celte même ville, l'ordre austère
des capucins ; après quoi iJ repassa dans
Sci patrie en 1559, dans le dessein d'y
rétablir la vraie religion : mais les liérc-
tiques ayant découvert son état et ses
vues, le déférèrent à la reine Elisabeth,
qui le retint dans une étroite prison, pen-
dant l'espace de trois ans , après lesquels
Henri III , roi de France, obtint son élar-
gissement , le fit revenir à Paris, ef l'ho-
nora de sa bicnveillnncc particnlièrc. De
là, jusqu'à sa mort, le Père Benoît com-
posa plusieurs ouvrages analogues à son
zèle, à sa piélé et à .ses lumières, tels
que r* Régula pcrfcctionis , cantine ns
brève ne, lucidum compendiuni totius
viUe spiritualis , etc. Cet ouvrage, écrit
d'abord en anglais , puis traduit en fla-
mand et en français , fut mis aussi en
lalin par l'auteur lui-même, quelques
années avant sa mort. Il s'en fitsuccessi-
FIL
vement plusieurs éditions à Rome, Paris,
Lyon , Viterbe et ailleurs. 2° SoUloquium
piuni et grave, Gic. , dans lequel il expli-
que les motifs de sa conversion. 3° Liber
variorum exercitiorum spiritualium ,
etc., Viterbe, 1608. A" Eques christia-
nus, etc., 2 vol. in-12, Paris, 1609.
M. Thajer, ministre protestant, nouvelle-
ment converti à la religion catholique,
fait le plus bel éloge de cette production,
qui n'a pas peu contribue à le ramener
dans le sein de l'Eglise. Voyez Zrt Relation
de la conversion de M. Jean Thayer ,
4« édition , Liège, 1780, page 18 , et le
Journal historique et littéraire , 1 " fé-
vrier 1789, page 174.
FILESAC ( Jean ) , docteur de Sor-
bonne et curé de St.-Jean-en-Grève ,
mourut à Paris , sa patrie , doyen de la
faculté de théologie, en 1638. Il a com-
posé plusieurs ouvrages sur des matières
ecclésiastiques et profanes, remplis d'une
érudition assommante. Ce n'est qu'un
tissu de passages , qu'il joint les uns aux
auti-es par quelques réflexions, sans beau-
coup d'ordre ni de méthode. Il passe du
sacré au profane, fait de longues digres-
sions , écrites très durement , et lasse
son lecteur en l'instruisant. Ses princi-
paux ouvrages sont 1° lui Traite de V au-
torité des évêques , Paris , 1 606 , in-8 ;
2° un autre du Carême. 3" De fOrigine
des paroisses. i° Des Traite's delà con-
fession auriculaire , de F idolâtrie , et de
rOrigine des anciens statuts de la Fa-
culté de Paris , eic. Ils sont réunis sous
le titre d'Opéra pleraque , Paris, 1621 ,
in-S.
FILTCAIA ou FiLicAJA ( Vincent de },
poète lyrique italien , sénateur de Flo-
rence, sa patrie, né en 16 42 et mort eu
1707, fut membre de l'académie de la
Crusca et de celle des Arcades. Ses
poésies , publiées en 1 707 , in-fol. , par
son fils, réimprimées à Venise, 1747 , 3
vol. in-12, sont délicates, et respirent
le ton d'un homme qui vit dans le grand
monde ; les meilleures sont les 6 odes ou
canzoni qu'il composa sur la délivrance
de Vienne par les Turcs. Il n'était pas
riche : Christine, reine de Suède , sachant
qu'il avait de la peine à faire subsister sa
V.
FIL 3i3
iamille , lui fit du bien , et Sa générosité
fut d'autant plus louable , qu'elle voulut
qu'on l'ignorât entièrement. Ses poésies
lui valurent la dignité de sénateur , le
gouvernement de la ville de Volterrc,
puis celui de Pise , et enfin la charge de
secrétaire du tirage des magistrats, qui
était alors très importante. Ployez l'élogfe
de ce poète dans les f^ies des Aicndi
de Crescimbeni.
FILLASSIER (Marin], prêtre parisien,
mort en 1733, à 56 ans, fut curé de
campagne, et ensuite chapelain des dames
de Miramion. Il est auteur d'un ouvrage
plein d'onction , intitulé ; Sentiment
chrétiens , propres aux personnes inflr
mes, in-12; ouvrage qui n'est composé
que de passages de l'Ecriture et des Pères .
Le Père Bouhours en avait donné un sem
blable , tiré exclusivement de l'Ecriture
sainte.
FILLIv(\.lj (Jean), professeur en droit
et avocat du roi à Poitiers , né eu 1600 ,
mort en 1682 à l'âge de 82 ans, est
principalement connu par sa Relation
juridique de ce qui s'est passé à Poitiers
touchant la nouvelle doctrine des jansé-
nistes , imprimée par le commandement
rfe /a ret«e , Poitiers , 1654, in-8. C'est
dans le second chapitre que l'on trouve
l'anecdote connue sous le nom de Projet
de Bourg fontaine. Filleau raconte que
six personnes qu'il n'ose désigner que
par les lettres initiales de leurs noms,
s'étaient assemblées en 1621 , pour déli-
bérer sur les moyens de renverser la reli-
gion et d'élever le déisme sur ses ruines.
On a imprimé en 1 7 56 : La Réalite du
projet de B our g fontaine , 2 vol. in-12 :
ouvrage auquel on a opposé I^a Vérité et
l'innocence victorieuses de la calomnie,
ou Huit lettres sur le projet de Bourg-
fontaine, 1758, en 2 vol. in-12. Le plus
fort argument employé dans celte réfuta-
tion , est que la Réalité a été brûlée par
arrêt du parlement de Paris , du 2) avril
17 58; mais l'auteur ( D. Clémencet ) ne
songeait pas que les Provinciales avaient
été brûlées par arrêt du parlement de
Provence, du 9 février 1667. Quoi qu'il
en soit , la Réalité, mal à propos allri-
buée au Père Patouillet ( voyez ce mot },
20..
3i4 FIL
a été réimprimée plusieurs fois , traduite
en latin sous le titre de Feritas consilii
Burgofonte initi, en allemand, en fla-
mand, et autres langues. Dans les der-
nières éditions, on trouve une longue
réponse aux huit lettres. La meilleure
édition est celle de Liège , 1787 , 2 vol.
in-8. « La postérité ayant sous les yeux
TT les événemens qui lui sont réservés ,
» jugera peut être mieux que nous, si ce
» projet a existé ou non. » Voilà ce que
nous disions en 1783. Ces événemens
n'étaient pas bien loin. Peu d'années
après on vit le jansénisme intimement
uni nu pbilosopUisme , transmettre à ce-
lui ci ses erreurs propres , et ce fanatis-
me de secte qui porta la dévastation dans
l'église de France. Un auteur moderne a
porté delà Réalité, le jugement suivant :
« Je suis loin de garantir toutes les con-
» jectures, combinaisons et rapprocbe-
» mens de l'auteur. Quoique l'ensemble
w présente un tableau frappant, et que les
» événemens ne soient que trop propres à
w lui concilier Ja confiance des lecteurs, je
» croisnéanmoinsquel'auteuratroplégè-
)) i-ement désigné quelques coopérateurs
H de cette œuvre, d'abord si mystérieuse,
» et aujourd'hui si manifeste dans ses
» effets. Des liaisons d'amitié , ainsi que
» des démarches , ou écrits inconsidérés ,
» ne suffisent pas pour accuser ces inten-
u tions , surtout dans un temps oii le vé-
» ritable esprit de la secte était peu con-
1) nu , et oîi les gens de bien ont pu être
» les dupes des apparences. Voyez Ar-
M NAULD (Henri ). Quant aux six princi-
» paux auteurs , dont il est question dans
» le projet, nous en abandonnons le juge-
)i ment à ceux qui auront combiné sans
» prévention leurs ouvrages et leur con-
» duite , avec la tcîcbe respective que la
» Relation de Filleau leur attribue »
[voyez Jansémus, Montgero:s , Paris,
etc. ) On a encore de Filleau : \° Les Ar-
rêts notables du parlement de Paris,
1631 , 2 vol. in-fol, 2" Les Preuves his-
toriques de la vie de sainte Radegonde.
3" Traité de F Université de Poitiers.
FILLEAU DE LA CHAISE. Foyez
Chaise ( Jean de la ).
•FILLEAU DE SAINT-MARTIN,
FIN
frère de Filleau de la Chaise, mort vers
1695 , a publié une traduction du chef-
d'œuvre de Cervantes, sous ce titre
Histoire de V admirable Don Quichotte
de la Manche , 1677 , 4 vol. in-12 , très
souvent réimprimée en 6 vol. , qui se lit
encore , malgré l'abrégé de Florian , et
malgré la traduction complète de M, Bou-
chon-Dubournial. Voyez Cervantes ,
Florian.
FILLIUCIUS (Vincent), jésuite, né
à Sienne en 1556, enseigna la philo.so-
phie , les mathématiques , la théologie ,
fut pénitencier à Rome , et casuisle en
chef du saint-Office. Il mourut en 1622.
On a de lui des Questions morales, Lyon,
1633 , où il paraît quelquefois enseigner
une morale trop indulgente.
* FILMER ( Sir Robert ) , écrivain po-
litique anglais, né dans le comté de
Kent, en 1604, a publié : 1° L'J-
narchie d'une monarchie limitée et
mixte, 1 646, réimprimé en 1 652 et 1 679 :
il le donna en réponse au traité de la
monarchie de Huulon. V Le palriarchf,
écrit oîi il prouve que tout gouvernement
a commencé par être monarchique , et
que tous les titres légaux pour régner sont
originairement dérivés des chefs de fa-
mille , ou de ceux à qui leurs droits ont
été transférés. C'est pour combattre les
principes exposés dans cet ouvrage que
Sidney a écrit son Discours sur le gou-
vernement. Filmer mourut en 1647.
' FINCH ( Robert ) , littérateur , né
à Londres en 1783, mort à Rome le 16
septembre 1 830 , fut l'un des collabora-
teurs de la Revue encyclopédique. Après
ses premières études, il servit quelque
temps dans l'armée qu'il quitta bientôt
pour entrer à l'université d'Oxford. Mi-
nistre plein de zèle et prédicateur distin-
gué , il fut ensuite le secrétaire intime
de Pitt. Employé dans plusieurs missions
diplomatiques, il s'en acquitta avec suc-
cès ; mais à la carrière des affaires poli-
tiques , il préfera celle de la science , fit
de nombreux voyages, vint en France,
explora toutes les parties de l'Italie , la
Grèce, la Turquie d'Europe, plusieurs
contrées de l'Asie, la Palestine, la Syrie
et la Perse. Il se fixa ensuite à Rome oii
il resta presque conlinuellemenl jusqu'à
sa mort. Il avait fait plusieurs traductions
d'ouvrages italiens qu'il ne jugea point
assez parfaites pour les publier , et avait
entrepris la Bibliographie universelle
de l Italie , qu'il n'eut pas le temps de
terminer.
FINE ( Oronce ) , mathématicien , né à
Briançon en Dauphiné, l'an 1494, fut
choisi par François I pour professer les
mathématiques au collège royal. Il avait
beaucoup de génie pour la mécanique ;
il fit une horloge d'une singulière inven-
tion. On a de lui plusieurs ouvrages de
géométrie , à^ optique , de géographie et
A'astrologic, réunis en 3 vol. in-fol.,
1532, 42 et 5G. Il était fort attaché à
l'astrologie, et plus qu'un géomètre
ti'aurait dû l'être ; mais on l'a déjà dit ,
la géométrie laisse l'esprit comme elle le
trouve. Fine mourut très pauvre en 1555.
Les beaux esprits chargèrent son tom-
beau de vers et d'épitaphes. Il avait pris
pour devise : Virescit vulnere virtus.
(Voyez sur Oronce les Mémoires deNicé-
ron, tome 38 , celui de l'abbé Gautet sur
le Collège royal, et la Bibliothèque du
Dauphiné, par Gui Allard.)
* FINESTRÈS Y MONSALVO ( Jo-
seph ) , célèbre jurisconsulte catalan , né
à Karcelonne , le 11 avril 1C88, se dis-
tingua par l'étendue de ses connaissances,
enseigna le droit pendant plusieurs
années à l'université de Cervera , et s'oc-
cupa de rétablir l'éducation publique,
qui avait été négligée pendant la guerre
de la succession. Il donna plusieurs sages
réglemens qui furent adoptés. Il fit venir
des caractères grecs qui manquaient dans
cette province , pour l'impression des
ouvrages nécessaires à l'élude de celte
langue , justement considérée comme in-
dispensable pour tous ceux qui se con-
sacrent aux lettres. On lui doit plusieurs
ouvrages remarquables par la précision,
l'énergie et la clarté du stile : \"Exerci-
tationes academicœ XII, H 45, in-4.
2" Hermogcniani jurisconsulti juris ,
epitomnrum libros scx commentarius ,
1757 , 2 vol. in-4. Cet ouvrage contient
UQ abrégé historique des meilleurs ju-
risconsultes catalans. 3" Sylloge inscrip-
Plt 3i5
tionunt romdhài'um quœ in prtncipatu
Catalauniœ vel extant , vel aliquando
extiterunt , notis et observationibus il-
lustratarum , 1760, in-4, ouvrage pré-
cieux pour l'histoire de l'Espagne sous
la domination des Romains. Finestrès
mourut le 17 novembre 1770.
FINIGUERRA. Voyez Maso.
FIORI ( -Mario di ) , peintre. Voyez
Mario.
FIQUET. Voyez Ficquet.
FIRENZUOLA (Ange), poète flo-
rentin , et religieux de la congrégation
de Vallombreuse , né le 28 septembre
1493, avait auparavant exercé la fonction
d'avocat à Home , sous le nom de Nanini,
qui était celui de sa famille. Il fut connu
et estimé du pape Clément VII , qui pre-
nait plaisir à la lecture de ses ouvrages.
Il mourut à Rome peu après en 1545. Il
a beaucoup écrit en vers et en prose.
L'édition de ses œuvres en ce dernier
genre, à Florence, 1548, in-8 , et celle
de ses poésies , 1549, in-8, sont recher-
chées. Sa traduction de i'Ane d'or, Ve-
nise, 15G7 , in-8, est rare. On trouve
quelques Capitoli de lui avec ceux de
Berni. Il a aus.si fait plusieurs comédies :
// Lucidi, Florence, 1549 , in-8. La Tri-
nuzia, 1551 , in-8, reimprimée à Paris en
1818 avec des notes de M. Biagioli. Ses
OEuvres ont été recueillies à Florence
en 17G3 , 3 vol. in-8. Son Discours des
animaux A été traduit en français, Lyon,
155C, in-lG; et par La Rivey, 1579,
in-lG. Son Discours de la beauté des
dames l'a été par J. Pallet, Paris, 1578,
in-8.
* FIRMIAN (LéopoldMaximiliende).
archevêque de Vienne , né à Trente le
1 1 octobre 1 76G, d'une famille distinguée
dont presque tous les membres ont oc-
cupé de grandes places sous le gouver-
nement autrichien , eut pour père le
comte de Firmian, ministre à Milan , et
l'un des grands protecteurs de l'uni-
versité de Pavie. Ce comte de Firmian
avait pris l'habitude de se rendre juge de
l'orthodoxie des thèses de théologie , et
de gourmander à cet égard les docteur."» ;
il publia aussi des réglemens pour les
ëvêques^ et il en adressa un en 1709, qui
3i6 PlR
excita (ië vives réclamations j voyez les
Nouvelles eccle'siastiques du 1 1 décem-
hre 1762 et du 30 décembre 17 Gi). Son
fils fut .d'abord évèque de Lavant en 1 800;
puis il succéda en 1802 à M. de Hohen-
wart sur le siège de Vienne. Après une
longue maladie , il est mort à Vienne le
28 novembre 1831. Les journaux ont an-
noncé que ce prélat emportait les regrets
de tout son diocèse. A la lin du dernier
siècle , il y eut deux prélats du nom de
Firmiau. Léopold-Ernest , évi^que de Sec-
eau , puis de Passau , qui fut cardinal en
1772 , et qui mourut dans son diocèse le
13 mars 1783 ; et Virgile-Marie-Augustin,
évèque de Lavant en Corintliie , puis
prélat du chapitre de Saltzbourg , et se-
nteur de celui de Passau, qui mourut sur
la fin de 1788. Ces deux évêques ont été
accusés d'avoir été ennemis des jésuites,
et par conséquent d'avoir adopte les idées
opposées ; il faut peut-être se délier des
Nouvelles ecclésiastiques qmoniréçdLïyàu.
ce bruit. Us étaient frères du ministre du
même nom , et par conséquent oncles de
l'archevêque de Vienne. Celte Notice est
extraite de l'Ami de la religion et durai,
tome 70, page 361.
FIRMICUS MATERIVUS (Julius),
fit paraître, sous les enfans de Constan-
tin, un excellent traité d cla Fausseté
des Religions profanes. L'auteur, en
montrant la vanité de l'idolâtrie , établit
divers points de la religion chrétienne.
On a publié cet ouvrage avec le Minutius
Félix à Leyde , en 1G72, in-8 , et en
1G99, avec les notes de Jean Wouwer.
On lui attribue encore 8 livres d'astro-
nomie, imprimés par Aide Manuce, en
1 490 , in-fol". Mais cette dernière produc-
tion paraît être d'un autre Julius Firmicus,
qui vivait dans le même temps. Elle est
jdeine de rêveries.
FIRMILIEN , évèque de Césarée en
Cappadoce, ami d'Origèue, prit parti
pour saint Cyprien, dans la dispute sur
la rebaptisation de ceux qui avaient été
baptisés par les hérétiques. Il écrivit,
dit-on , .sur cette question , une lettre à
saint Cyprien , dans laquelle toutes les
raisons, qui pouvaient autoriser la pra-
tique des églises d'Afrique, sont exposées
avec force. Voyet Cyprien ( saint ). Ce-
pendant, dans une dissertation du père
Marcellin Molkenbubr , récollet , im-
primée à Munster en Westphalie, 1790,
in-^ , on prétend que cette lettre est
faussement attribuée à Firmilien, et
qu'elle est de quelque dona liste d'A-
frique, après le 4" siècle, qui l'a attri-
buée à Firmilien pour lui donner plus
de poids ; les raisons détaillées dans cette
dissertation sont très plausibles. Firmi-
lien présida , en 2G4 , au premier concile
d'Antioche , contre Paul de Samosate. Il
était près de se rendre à un second sy-
node, oii cet hérétique opiniâtre devait
être anathématisé ; mais il mourut en
chemin , l'an 2G9 , selon le Père Pagi et
M. Fleury. Baronius place sa mort à l'an
272. L'auteur de la dissertation citée ci-
dessus prouve que le second concile
d'Antioche n'a pas été célébré avant l'an
272 , et que couséqucramcnt Firmilien a
vécu jusqu'à cette année.
FIRMIN , nom de quatre évêques : le
premier , évèque d'Amiens «t martyrisé
au 3" siècle ; le second , évèque de la
même ville, au 4" siècle; le troisième ,
évèque d'Uzès; et le quatrième, dcMende.
FIRMIUS ( Marcus ) , homme puissant
de Séleucie eu Syrie , se fit proclamer
empereur en Egypte pour venger la reine
Zéuobie, dont il était ami. Aurélien mar-
cha contre lui , le fit prisonnier , et, après
lui avoir fait souffrir toutes sortes de
lourmens , il s'en délivra tout-à-fait l'an
273. C'était un homme d'une taille gi-
gantesque , et d'une force surprenante.
On l'appelait /c Cyclopc. On frappait,
dit-on, sur sa poitrine , comme sur une
enclume , sans qu'il eu ressentît aucune
douleur. Le commerce immense qu'il
faisait avec les Sarrasins et les Indiens
lui avait acquis une grande considération
dans l'Orient.
* FIRMOIVT ( Henri-EssEx-EDGE-
woRTH de ) , dernier confesseur de Louis
XVI, naquit en 17 4.') à Edgeworth-Town ,
en Irlande, d'un père qui était ministre
protestant, et qui vint en France en 1051,
avec sa famille, après avoir embrassé la
religion catholique. Le jeune Firmont fit
ses premières études chez les jésuites de
1
îoulouse, se rendit ensuite à Paris au col-
lège de Navarre pour y suivre le cours de
pLilosophie , et ce fut en Sorbonne qu'il
étudia la théologie. Après avoir reçu les
ordres sacrés , l'abbé de Firraont se i-etira
aux missions étrangères , où il s'occupa
exclusivement des devoirs de son état, et
surtout de la direction des consciences ,
de l'instruction des pauvres et du soula-
gement des malheureux. Il avait pris le
nom de Firmont qui était celui d'une an-
cienne terre de sa famille , non par un
vain«orgueil , mais parce qu'en France on
avait quelque difticulté à prononcer son
nom d'Edgeworth. Son zèle était si actif
qu'il songea pendant quelque temps à
aller prêcher la foi dans les contrées
lointaines ; mais il ne voulut point pren-
dre de parti , avant d'avoir consulté sou
directeur qui connaissait ses vertus, et
qui pensait avec raison qu'avec les qua-
lités aimables dont il était doué , il ferait
plus de bien en France que chez les Sau-
vages. Les évêqucs d'Irlande offrirent im
siège épiscopal à cet ecclésiastique zélé
qui n'avait pu encore oublier sa patrie :
mais il le refusa. En 1 7 7 7 il devint confes-
seur de M™* Elisabeth : ce qui le mit en
relation avec la cour, et lui procura plus
tard le pénible et dangereux devoir d'as-
sister dans ses derniers momens le mal-
heureux monarque que la révolution avait
choisi pour victime. Instruit du désir
qu'avait manifesté Louis XVI de recevoir
par son ministère les consolations de la
religion, l'abbé de Firmont s'empressa
de se rendre au Temple pour remplir ce
douloureux devoir : malgré les périls dont
il était environné , il trouva dans le sen-
timent religieux dont il était pénétré , le
courage de les braver; il s'attendait à
mourir de la même main qui tuait son
maître : mais ce martyre n'effraya point
le pieux ecclésiastique qui entendit la
confession du roi , lui donna les derniers
sacremens et put célébrer les saints mys-
tères devant l'auguste prisonnier. Malgré
la fermeté que Louis XVI avait montrée
pendant tous les débats de son procès, il
sentit lui-même qu'aux approches de la
mort , il avait besoin d'une main amie
pour diriger ses derniers pas dans la vie.
L'abtc de Firmont l'accompagna jusque
sur l'échafaud. Lorsque le bourreau se
présenta au roi pour lui lier les mains
derrière le dos , celui-ci manifesta un
sentiment d'indignation : ce fut en ré-
pendant un torrent de larmes que l'abbé
de Firmont raffermit la constance de
Louis par ces paroles que la religion
seule a pu lui inspirer : Sire , dans ce
nouvel outrage , je ne vois qu'un trait
de ressemblance entre votre Majesté et
le Dieu qui va être sa récompense -. et
cette pensée rendit à ce malheureux roi
la résignation chrétienne dont il avait
encore besoin pour terminer le sacrifice ;
et lorsque les apprêts du supplice furent
terminés , lorsque la hache révolution-
naire allait consommer le plus grand de
tous les crimes , le Samuel de la France
dit alors à cette noble victime : allez ,
Fils de saint Locis, montez au ciel. Ces
paroles simples et sublimes ont retenti
dans tout l'uuivers chrétien, et c'est en
vain que la modestie de ce pieux ecclé-
siastique a déclaré que dans la stupeur où
il se trouva, quand la tête de Louis XVI fut
tombée , il ne se rappelait point si réel-
lement il les avait prononcées : la France
les a entendues, elles ont été dites; elles
sont maintenant historiques. L'abbé de
Firmont fit montrer la tête de l'illustre
victime au peuple français , et le sang
ruissela sur ses habits. Le rôle que venait
déjouer d'une manière si magnanime le
vertueux abbé de Firmont, fut aux yeux de
quelques forcenés un motif de proscrip-
tion : parmi les témoins de ce spectacle
affreux , on en vit qui désiraient que
le couteau sanglant se relevât encore une
fois pour retomber sur sa tète : des cris
affreux furent proférés contre lui ; mais
les troupes lui ouvrirent leurs rangs ;
la multitude même lui permit de s'éloi-
gner, et il s'en revint après cette doulou-
reuse mission répandre de nouvelles lar
mes chez M. de Malcsherbes. Malgré les
périls de sa position, l'abbé de Firmont
resta en France tant qu'il put Croire être
utile à M^^Elisabeth. A plusieurs reprises
il fut obligé de se cr.cher, et il mena une
vie errante et vagabonde jusqu'au mo-
ment où celte princesse alla comme ses
3i^
flft
parens terminer ses jours sur un ^ciia»
faud. Il avait été continuellement en
correspondance avec elle, et jusqu'au
dernier jour il l'avait soutenue de ses
pieux conseils. L'abbé de Firmout se ren-
dit alors en Angleterre , et alla trouver
à Edimbourg Monsieur, frère du roi, pour
s'acquitter d'un message dont l'avait
chargé M""» Elisabeth. De là il se rendit
en Allemagne auprès de Louis XVIII, dont
il devint en quelque sorte le confident ,
et qu'il accompagna à Mittau en 1798.
Pendant toute sa vie, l'abbé de Firmont
fut en quelque sorte l'objet de la curio-
sité publique : chacun voulait voir le
prêtre courageux qui avait assisté Louis
XVI dans ses derniers momens : chacun
voulait entendre de sa bouche quelques
détails d'une mort si religieusement hé-
roïque. L'empereur Paul l" , ayant dé-
siré de le voir , Louis XVIII le chargea de
porter à ce prince l'ordre du St.-Esprit :
à sa vue le czar s'inclina , demanda .sa
bénédiction, et montra la plus grande ad-
miration pour ses vertus ; il lui fit don
de son portrait enrichi <le diamans, d'une
pension de deux mille roubles que le
charitable abbé de Firmont consacra
au soulagement des malheureux. De re-
tour à Mittau il reprit ses exercices de
charité ; il mourut bientôt victime de son
dévouement; chargé par Louis XVIII de soi-
gner des blessés français qui se trouvaient
dans les hôpitaux de celte ville , il fut
atteint par une fièvre épidémique qui
l'enleva en trois jours le 22 mai 1807.
Toute la famille royale manifesta les plus
vifs regrets pour la perte qu'elle venait
de faire : M"" d'Angouléme lui avait pro-
digué ses soins, malgré le péril auquel
elle s'exposait en restant dans la chambre
d'un homme qui mourait d'une maladie
contagieuse : elle accompagna à pied ,
ainsi que les princes , sa dépouille mor-
telle jusqu'au cimetière. Le roi annonça
lui-même au frère de l'abbé de Firmont
la perle douloureuse qu'il venait de faire,
et il se chargea de composer soivépilaphe
qui véritablement est une oraison funèbre.
I). o. XI.
Hic j»cel '
revemidiuiiiiui »ir ^.
IlEMticis Essix EDGEWORTH de FiiitiOBT,
fîft
•abcta t)ei Ecclesia saccrdoi ,
ticaHtis gcnerilit Ecclcsie parisientii, elr.i
qui
rcdemprorit nostri TOliKia tcnent.
oculus raco ,
pe« claudo,
pater pauperum ,
iiisrentium ronsolator
fuit.
LlDOÏICPU XVI
ab impiit reliellibutque inbdili»
morli dedituni,
ad ulllinum rertaiiien
robnra»it ,
>trenuoque niartyrii cwloi apertoi
o»(eiidil.
E manibut rrglcidarum
mira Dei prolection*
ereptui ,
LVDOTICO XVIII
eum ad te vocaiiti
ullro occureiifl.
ej per di^cem aniios,
regiip ejiis fainiliie
^lrc non f l fidolibus sodalibiK
eifunplar lirtutum ,
lerairwn malorum,
•eie prsebuil.
Per mullas et Tarias regionri
temporiini calainilale
actus,
illi qucm soliiin rolebat
icmper i>iniilis,
periransiit beocracleiido.
Plenui tandem bouis operibu<
obiit
dli'XXII niaii mentit,
tim. Domini M. D CC.C. VII.
selalis lero siiar LXII.
I{cquie$cat in pare.
L'abbé de Bouvens prononça à Londres
le 29 juillet 1807, dans la chapelle ca-
tholique française Voraisnn funèbre de
l'abbé de Firmont qui a été imprimée à
Paris en 1814, in-8. On a publié les mé-
moires de M. rabbé Edgeworth de Fir-
mont , dernier confesseur de Louis Xf^I,
recueillis par E. Sncyd-Edgeworth ,
et traduit de V anglais par le traducteur
d'Edmond-Uurke (M. Dupont), Paris,
1 8 1 G, in-8 : ces mémoires sont suivis d'une
relation des derniers momens de Louis
XVI par l'abbé de Firmont lui même
et de quelques-unes de ses lettres sur
les révolutions , adressées au docteur
Moyland : ces deux pièces sont extrême-
ment curieuses. On a aussi les lettres de
l'abbé Edgeworth, confesseur de Louis
XVI à ses parens, à ses amis , etc. , re-
cueillies par le révérend Thomas R...
traduites de l'anglais par M"" Elisabeth
Lebon, Paris, 1818, in-8 : ces lettres
sont précédées de mémoires sur la vie
FIS
de tabbe de Firmont , en les lisant on
entre en quelque sorte dans l'àme de
ce vertueux ecclésiastique , dont le dé-
vouement a excité l'admiration, mais que
ses belles qualités forcent d'aimer.
FIRMUS, général des Maures en
Afrique , se révolta contre Valentinien I ,
l'an 37 5 de J. C. Après avoir commis de
grands ravages , il fut contraint de s'é-
trangler lui-même , pour ne pas tomber
vif entre les mains des Romains.
FISCHER ou FISHER ( Jean ) , né
^ au diocèse d'York vers 14.55, docteur
et chancelier de l'université de Cam-
bridge, évêque de Rochester, confes-
seur de la reine Marguerite , précepteur
de Henri VIII , ne voulut pas reconnaître
son élève pour chef de l'église anglicane,
lorsque ce prince se sépara de Rome
pour une maîtresse. Henri le fit mettre
en prison , et ayant appris que le pape
Paul IH lui destinait un chapeau de car-
dinal , il dit en se moquant du pape :
n Qu'il envoie son chapeau de cardinal
» quand il voudra ; je ferai en sorte que,
» quand il arrivera , la tète pour laquelle
» il est destiné , ne subsiste plus. » En
effet , Henri fit aussitôt faire le procès à
ce vénérable vieillard, qui eut la tète
tranchée le 21 juin 1535. Son âge de 80
ans , et les services qu'il avait rendus k
ce monarque, auraient dû lui épargner
une mort si cruelle , quand même ses
vertus et son innocence n'eussent point
fait son éloge. Fischer avait un grand
sens et un jugement très solide. C'est un
des meilleurs controvensistes de son
temps. Toutes ses œuvres ont été pu-
bliées en un volume in-fol. à Wurtzbourg,
en 1597. On y voit plusieurs traités
contre les erreurs de Luther , un De
unica Maydalena contre Jacques Le
Fèvre d'Etaples et Josse Clicthoue ( vorjez
Madelaine ). On y a ajouté l'ouvrage
qui porte le nom de Henri VIII contre
Luther, que quelques-uns croient a voir été
fait par Fischer.
FISCHER (Jean-Bernard), architecte
allemand, a construit les plus beaux édi-
fices modernes de Vienne; entre autres
l'église deSaint-Charles-Borroméc, dans
UJi des faubourgs de Vienne , qui pass«
P^S
Sig
pour son chef-d'œuvre; les écuries de
l'empereur, la chancellerie de Bohème, le
Belvédère , ou palais du prince Eugène ,
celui de Schonbrun. Il est mort en 1724.
Si ces édifices ne sont pas sans défauts,
ils sont dans leur ensemble d'une compo-
sition grande et noble ; le dernier surtout,
quoique les décorations extérieures soient
peut-être trop chargées, a de grandes
beautés. S'il était plus vaste, on en eût
fait depuis long-temps la résidence im-
périale. Comme il fut bâti des dépouilles
des Turcs, un littérateur a proposé d'y
mettre pour inscription , ce vers de Vir-
gile :
Barbarico po&lcs auro spoliisquc superbi.
( On doit à Fischer Essai d'une architec-
ture historique , ou recueil de bâtimens
antiques, avec des explications en alle-
mand et en français, Leipsick, 1725, in-
folio, ouvrage curieux et utile, mais mal
exécuté. Il est composé de 93 planches et
divisé en 5 livres.
* FISCHER ( Jean-Eberhard ) , savant
professeur d'histoire et d'antiquités à
Saint-Pétersbourg, naquit à Essling, eu
Souabe, en 1C97. Il fut membre de l'aca-
démie impériale de Russie, et un des sa-
vans envoyés, en 1739, par la cour pour
faire des observations en Sibérie et au
Kamtschatka. De retour de son voyage ,
qui dura près de huit ans, il s'occupa de
la publication de ses observations , et
mourut le 24 septembre 1771, âgé de 74
ans. Il a laissé en allemand 1° Histoire
de Sibe'rie , depuis la découverte de ce
pays jusqu'à sa conquête par les Bussei,
Pétersbourg, 17G8, 2 vol. in-8. G.-F. Mul-
1er publia depuis une Histoire ^lus com-
plète de ce pays, mais qui n'a point nui
au succès de celle de Fischer. 2" Sur l'o-
rigine , la langue , la mœurs des Mol-
daves ; cet écrit se trouve dans le Calen-
drier historique de Pétersbourg, année
1770 ; 3° Sur l'origine des Américains ,
ibid., 1 7 7 1 ; 4° Questions Pe'tropolitanes,
Gbttingue,. 1770, in-8, 119 pages : cet
ouvrage contient quatre dissertations ;
on parle dans la première de l'origine des
Hongrois, que l'auteuv place, non chez
les Huns, sortis du nord de In Chine, mais
chez les Yon grès, peuplé habitant prcsdc
%2Ù PIS
Tourfau. Selon Fischer, leâ Yongres pas-
sèrent dans la Bythinie, d'où, ayant été
chassés par les Patz inaces, ils s'établirent
dans la Pannonic. Leur langue est com-
posée du tartare, du scythe et de l'idiome
des Vogouls. La deuxième dissertation est
intitulée : De gente et nomine Tartaro-
rum, item de priscis MogoUs eorumque
lingua; la troisième a pour titre De va-
riis nominibus S inarum titulisque impe-
ratorum; la quatrième, en allemand,
traite des peuples hyperboréens. Fischer
a laissé en manuscrit un Vocabulaire si-
bérien, qu'il envoya à la bibliothèque de
Gottingue, oii il est conservé.
"FISCHER (Chrétien-Gabriel), natura-
liste prussien, né à Rœnigsbergvers la fin
du 17* siècle, y enseigna la philosophie
en 1715^ mais son zèle à soutenir la doc-
trine de Wolf lui attira Jes persécutions
que cette philosophie essuyait dans les
états de la Prusse. Il voyagea en Italie,
en France et en Angleterre, rentra à Kœ-
nigsberg en 1736, et y mourut le 15 dé-
cembre 17 61. Il a laissé Premiers fonde-
mens d'une histoire naturelle de la Prusse
souterraine, Kœnigsberg, 1714 et 1715,
in-4, en allemand; et autres ouvrages
moins importans. Il a été éditeur et com-
mentateur du bel ouvrage de Job-Henri
\Anck, &t stellis marinis, Leipsick, 1733,
in-fol. avec 32 planches. — Il ne faut
pas le confondre avec Jacques-Benjamin
Fischer, naturaliste livonien, élève de
Linnée, né à Riga en 1730, mort en 1793,
auteur d'un Essai d'histoire naturelle de
la Livoiiic, Leipsick, 1778, in-8, 2*^ édi-
tion, 1791; d'une Addition à l'Essai
d'histoire naturelle, Riga, 1784, in-8; et
des additions et corrections à la Biblio-
thèque livonienne deGadebusch, insérées
dans les Mélanges du Nord de Hupel. Ce
savant l'ut directeur de la maison des or-
phelins de Riga.
* FISCHER (Jean-Chrétien), savant
philologue allemand, né en 1712 à Schle-
ben , fut d'abord professeur adjoint de
philosophie à léna, ensuite libraire et con-
seiller de commerce du duc de Saxe-Wei-
mar. Il mourut le 21 mars 1793. Sçs prin-
cipaux ouvrages sont 1° De insignibus
honarum Ulterarum secuU Xlf^ usque
FIS
ad initium sècuU XVI in Italia instau-
ratoribus dissertatio, léna, 1744, in-4.
2° Dissertatio de Hubertino Crescenti-
nate, elegantiorum litlerarum sec. XV
in Italia instauratore, léna, 1739, in-4.
3° Bibliothèque de jurisprudence mo-
derne, en allemand, 1774-75, 2 cahiers
in-8. Il a traduit aussi en allemand du
français les lettres de Julie Catesby par
M""" Riccoboni; de l'anglais, les lettres de.
Bolingbroke, et a donné une édition des
epistolœ ad Thyrenum et ad diversos ,
autore Jac.-Nic. Erytreo. ( Vittorio de
Rossi), Cologne (léna), 1 7 39, ou 1 7 40, in-8,
avec une préface et une vie de l'auteur, et
une autre des ouvrages du savant jésuite
Sarasa, de Arte semper gaudendi, traduit
en italien 1741, et en allemand 1748.
* FISCHER (Frédéric-Christophe-Jo-
nathan), savant jurisconsulte et publi-
ciste allemand, né àStutgardcn 1750, fut
employé à Vienne, en 1776, comme se-
crétaire d'ambassade du prince de Bade,
et à Munich, en 17 78, comme secrétaire
de légation du duc de Deux-Ponts. En
1779 il fut nommé professeur du droit
des gens à l'université de Halle , dont il
devint assesseur ordinaire l'année sui-
vante, et mourut le 20 septembre 1797.
Il a laissé un grand nombre d'ouvrages
dont Meusel donne la liste : les princi-
paux sont 1° De prima expedilione Atti-
lœin Gallias ac de rébus gestis fValtheri
Aquitanorum principis, carmcn epicum
sec. VI nunc primum ex codice MS.
membranaceo produetum, etc., Leipsick,
1780 et 1792, 2 part. in-4. 2" Novissima
scriptorum ac monumentorum rerum
Germanicarum tam ineditorum quam
rarissimorum, collectio, Halle, 1781-82,
2 part. in-4. 3° Littérature du droit ger-
manique, Leipsick, ) 782, in-8. A" Histoire
du commerce, de la navigation , des arts
et manufactures, agriculture, police,
monnaies, etc., et du luxe de l'Allema-
gne, Havovrc, 1785-92, 4 vol. in-8. On
trouve dans cet ouvrage de l'érudition ;
mais on y désirerait plus d'ordre et de
critique. 5° Histoire de Frédéric II, roi
de Prusse, Halle, 1787, 2 vol. in-8, com-
pilation assez médiocre. Ces trois derniers
ouvrages sont en allemand.
FIS
' FISCHER (Jean-Frédéric), savant
professeur de belles-lettres, né à Cobourg
le 10 octobre 1726, enseigna avec beau-
coup de réputation à Leipsick, devint
recteur de l'école de Saint-Thomas, et
mourut le 11 octobre 1799. Ou lui doit
plusieurs ouvrages qui ne sont pas sans
mérite, malgré le défaut d'ordre et l'exces-
sive sécheresse qu'on pourrait leur repro-
cher. On en trouvera la liste complète
avec une exacte indication des titres, des
dates et des formats , dans la notice de
M. Kuinol , imprimée à la suite des re-
marques de Fischer sur la grammaire
grecque de Weller, 1798-1801. Les princi-
paux sont 1 ° des Remarques sur la gram-
maire grecque de Weller, Leipsick, 17 81,
in-8, 2" édition, 1798-1801, imprimée
sous ce titre Animadversionum ad J.
Weller grammaticam grœcam. specimina
très, 4 vol. in-8. On trouve à la tète du
3* volume une excellente notice sur Fis-
cher. 2" Des Commentaires sur la Cyro-
pe'die'de Xénophon, Leipsick, 1803, in-8.
Il a aussi donné des éditions estimées
A'Anacréon (17 93), à'Eschine le Socra-
tique (17 88), de Théophraste (17G3), de
Platon (17 83), etc. M. Kindervater a
donné en allemand un Essai sur Fischer
considéré comme professeur , Leipsick ,
1801 , in-8.
* FISCHER (H.-N.) , mathématicien
et astronome habile , né à Kicsbach en
Bavière, était entré fort jeune dans l'or-
dre des jésuites. Lorsque cet ordre fut
supprimé , il obtint une chaire de pro-
fesseur de mathématiques à Ingolstadt,
et devint ensuite directeur de l'obser-
vatoire deManheim. Après avoirfait, dans
l'intérêt de la science, plusieurs voyages
en Angleterre, il fut appelé en 1803 à
la chaire d'astronomie de l'université de
Wûrtzbourg. Quelques ennuis , et même
une espèce de persécution dont il fut
l'objet, l'avaient forcé auparavant à se re-
tirer en Angleterre où il fit un séjour de
plusieurs années. Il est mort h Wiirtz-
bourg le 21 février 1805. On trouve dans
les Ephémérides géographiques de M. de
Zach plusieurs mémoires de Fischer sur
l'astronomie , ainsi que des observations
et des notices très importantes dans le
V.
FIS 32 1
Journal de Physique de Ilubner. Fis-
cher a publié aussi un ouvrage sur la
lumière qui a remporté le prix en 1779
à l'université de Goettingue.
* FISCHER (E. Gotthelf) , docteur et
savant chimiste allemand, connu sur-
tout en France par un excellent Traité
de physique, professa long-temps les
mathématiques et la chimie à Berlin. Par-
mi les nombreux ouvrages scientifiques
^u'il a publiés, nous citerons 1" P^ermium
intestinalium brevis expositio, 1786 ,
1788 ; 2° sur les formes de VOs'interma
xillaire, Leipsick, 1 800, in-8; 3° Mémoire
pour servir d'introduction à un ouvrage
sur la respiration des animaux , 17 98 ,
in-8 ; 4" Observations anatomiqucs sur
une Poule dont la tête présentait le
profild' une figure humaine, insérées dans
la Gazette de Santé, octobre 1816, et
dans les Annales encyclopédiques de
Millin, janvier 1817, avec une gravure
représentant cet animal extraordinaire ;
5° Physique mécanique , traduite par
M"»* Biot , avec d'excellentes notes de M
Biot, 1806, in-8, 4« édition, 1829.
Fischer est mort en 1831. M. Millin adon-
né une Notice détaillée des nombreux
ouvrages de ce savant.
FISCHET ou FiCHET (Guillaume), doc-
teur de Sorbonne, recteur de l'université
de Paris en 1467, appela deux ans après
( de concert avec Jean de La Pierre son
ami) Martin Cranlz, Ulric Gering, et Mi-
cliel Friburger, imprimeurs allemands,
qui mirent sous presse les premiers livres
qui aient été imprimés en France. Fischet
s'opposa au dessein de Louis XI, qui vou-
lait faire prendre les armes aux écoliers.
Il alla à Rome avec le cardinal Bessarion,
en 1470. Le pape Sixte IV le combla d'hon-
neurs et le fit son camérier. On a de Fis-
chet une Rhéthorique et des épures, dont
le stile est au dessus de son siècle; elles
furent imprimées en Sorbonne in-4, 1471.
— Il ne faut pas le confondre avec
Alexandre Fichet, jésuite, mort à Cbam-
béri en 1649, qui se distingua par son ta-
lent pour la prédication et par son zèle
infatigable pour l'instruction de la jeu-
nesse. On lui àoïi Arcana studiorum om-
nium melhoduset bibliolheca scientiarum
31
3îa FIT
librorumque earuiïi ordine tributorum
universalis , 1649, in-8 : ouvrage écrit
avec élégance, et où, parmi beaucoup de
lieux communs, on trouve d'exccllcns
procédés pour faciliter l'étude, pour faire
des extraits, etc.
FISEN ( Barthélemi ) , ne à Liège en
1591, entra chez les jésuites en IGIO,
se rendit habile dans l'éloquence latine,
dans l'histoire , et les antiquités de son
pays. Il mourut le 26 juin 1649. Ses ou-
vrages sont : 1 " Origo prima festi Coi'"
poris Chrisli, Liège, 1628. Cette histoire
est écrite avec soin et a coûté beaucoup
de recherches. 2" Historia ecclesiœ Léo-
diensis , Liège, 1696, iu-fol. C'est une
histoire qui commence 600 ans avant
J. C. et va jusqu'en 1612. On sent qu'elle
remonte trop pour que les premiers siè-
cles ne soient farcis de faits plus qu'in-
certains. Toute cette histoire est parta-
gée en trente et un livres , suivis chacun
de notes , où l'auteur éclaircit les diffi-
cultés qu'il rencontre en son chemin , et
produit de temps en temps des pièces
justificatives. Le slile est beau et peut-
être trop oratoire et trop fleuri pour une
histoire. 3° Flores ecclesiœ Leodiensis ,
Lille , 1647 , in-fol. Ce sont les vies des
saints du diocèse de Liège , rangées selon
Tordre du calendrier. Fisen y a fait en-
trer des listes exactes des abbés et des
abbesses de tous les monastères du
diocèse de Liège. Cet ouvrage est utile
et curieux.
FiSHEa. Toyez Fischer.
FITE ( Jean de la ) , ministre de la
religion prétendue-réformée, né dans le
Béarn d'une famille noble, sortit de
France pour cause de reli gion . Après avoir
achevé ses études en Hollande, il devint
ministre de l'église française de Holtzap-
pel , puis de celle de Hanau, où il mou-
rut en nS?. Son ouvrage le plus connu
est intitulé Eclaircissement sur la ma-
tière de la grâce et sur les devoirs de
l'homme, 2 vol. in-8. — U ne faut pas le
confondre avec son aïeul Jean de la Fite.
ministre de l'église de Pau, dont on a
des sermons et des traites de contro-
verse.
FITZHERBERT ( Antoine ) , célèbre
FIT
jurisconsulte anglais du 16* siècle, s'il-'
lustra par son érudition, et plus encor»
par sa probité et son attachement à la
religion de ses pères. U prédit les mal-
heurs qui devaient naturellement suivre
le schisme, et défendit à ses enfans d'a^-
cheler des biens enlevés aux monastères,
et même d'accepter ceux qu'on pourrait
leur offrir. Sous le règne de Marie , oit
reconnut la vérité de sa prédiction et lit,
sagesse de cette défense. Il mourut le 2|
mai 1!»38. On a de lui 1" JSpitomejuris.
2° De ï office et de Vautorité des juges
de paix.
FITZHERBERT ( Thomas ) , petit-
fils du précédent, né en 1532, jésuite
en 1614, mort en 1640, est connu par un
Traité de politique et de religion contre
Machiavel , Douai , 1615, in-4 ; et par
une disquisition pleine de sagesse et de
saine morale, intitulée An sit utilitas in
scclere , VxomG , 1610, in-8.
FITZHERBERT f Mcolas ) , autre
petit-fils d'Antoine et cousin du précé-
dent, ué en 1550, s'attacha au cardinal
d'Alain , et mourut en 1612. On lui doit
1° Fita cardinalis Aluni, 1608. C'est
un tribut de reconnaisance qu'il paie à
son bienfaiteur. 2" De continualione reli-
gionis christinnce in anglia 1 608. 3" Oxo-
nensii academiœ descriptio, 1602.
FIT Z- JAMES ( Jacques de ) , duc de
Berwick , fils naturel de Jacques II et
d'Arabelle Churchill, sœur du duc de
Marlborough, naquit en 1671 , à Moulins,
oii sa mère le mit au monde en revenant
des eaux de Bourbon. U porta les armes
dès sa plus tendre jeunesse. Il se trouva
en 1686) au siège deBude où il fut bles-
sé, et à la bataille de Mohacs en 1687,
que les impériaux gagnèrent sur les Turcs.
Le jeune Berwick signala sa valeur dans
cette journée. Jacques II ayant été chassé
de son trône par son gendre , Berwick le
suivit en France , lieu de son asile. Il re-
passa ensuite en Angleterre , pour com-
mander en Irlande, pendant l'absence de
milord Tirconnel , qui en était vice-roi.
Il se distingua l'an 1690, au siège de
Londonderry , et à la bataille de la Boine,
où il eut un cheval tué sous lui. Berwick
ne montra pas moins de bravoure dans
FIT
le cours de cette guerre , et pendant les
premières campagnes de la suivante. Louis
XIV lui donna , en 1703 , le commande-
ment général des troupes qu'il envoya à
Philippe V. En une seule campagne , il
se rendit maître d'une foule de places
et de forteresses. Rappelé en France, il
se mit à la tète des troupes destinée»
contre les fanatiques des Cévennes. Après
avoir réduit ces rebelles, il alla meltre
le siège devant ^'ice , s'en rendit maître
le 14 novembre 1105, et soumit tout le
comté. Celte campagne lui mérita le
bâton de maréchal de France : dignité à
laquelle il fut élevé le 15 février 1706.
Le roi l'ayant nommé la même année pour
commander les troupes en Espagne , il
arrêta les progrès des ennemis victorieux.
Il gagna, en 1707, la bataille impor-
tante d'Almanza sur milord Galiowai et
le comte de Las Minas. Philippe V ré-
compensa le vainqueur comme le méri-
faieut de si grands services. Il le créa
duc de Leria et de Xerica au royaume
de Valence ; le fit chevalier de la Toison-
d'Or, et attacha à son duché une gran-
desse de la première classe. Eervvick sou-
tint la gloire qu'il s'était acquise à Al-
manza, par la prisedeBarcelonne, le 12
septembre 17 H ; il était alors généralis-
sime des armées d'Espagne. La mort du
roi de Pologne , Auguste H , ayant rallu-
mé la guerre en 17 33 entre l'empire et
la France , le maréchal de Berwick ,
nommé général des troupes de France en
Allemagne, alla mettre le siège devant
Philisbourg. Un coup de canon termina
sa glorieuse carrière le 12 juin 17 34, la
place ne fut prise que le 12 juillet sui-
vant. Le maréchal de Berwick était aussi
estimable par ses vertus chrétiennes et
civiles que par ses talens militaires. Le
président Montesquieu , qui avait connu
particulièrement cet illustre capitaine ,
nous en parle en ces termes : « J'ai vu
« de loin dans les livres de Plutarque,
» ce qu'étaient les grands hommes ; j'ai
» vu en lui de plus près ce qu'ils sont,
» je ne connais que sa vie privée : je n'ai
» point vu le héros, mais l'homme d'où
» le héros est parti.... Il aimait ses amis;
M sa manière était de rendre des services,
FIX 323
» sans vous rien dire : c'était une main
» invisible qui vous servait.... Il avait un
» grand fonds de religion. Jamais homme
« n'a mieux suivi ces lois de l'Evangile ,
» qui coûtent le plus aux gens du monde;
» enfin , jamais homme n'a tant pratiqué
» la religion, et n'en a si peu parlé.... Il
j) ne disait jamais de mal de personne ;
» aussi ne louait-il jamais les gens qu'il
» ne croyait pas dignes d'être loués. »
Ses Mémoires ont été publiés en 1778,
2 vol. in-12. Ils sont pleins de cet in-
térêt que donne la vérité énoncée d'un
ton simple, et affanchie des petits arti-
fices de l'égoïsme. Ils sont d'un usage
admirable pour réfuter les petits contes
romanesques et calomnieux, par lesquels
on ne cesse de défigurer l'histoire du
siècle de Louis XIV. Ceux que l'abbé
Maigon avait publiés en 1737 , ne sont
plus lus que des personnes qui aiment
mieux les romans et les satires que les
histoires.
FJTZ-JAMES (François, duc de], fils
du précédent, renonça aux dignités de
son père, dont il avait la survivance,
pour emhra.sser l'état ecclésiastique en
1727. Il fut abbé de Saint-Victor, cvêque
de Soissons en 1739, etmourut en 1704,
dans sa 55" année. Ses Instruclions pas-
torales et son Rituel, dont les Inslruc-
lions sont imprimées en 2 et en 3 vol.
in-12 , ont fait beaucoup de bruit ; quel-
ques-uns de ces écrits ont été condamnés
à Rome et censurés par plusieurs évêques
de France ; les jansénistes le regardaient
comme un des principaux appuis du par-
ti ; cependant l'on ne connaît dalui au-
cune démarche d'opposition formelle aux
décisions de l'Eglise. (Sa vie se trouve
à la tête de ses œuvres posthumes, 1709,
2 vol. in-12, avec un troisième sous le
litre de supplément. )
* FIXLMILLNER (Placide), astro-
nome allemand , l'un des premiers qui
calculèrent l'orbite de la planète Ura-
nus, né en J 7 2 1 , au vil.'age d'Aehleulhen ,
dans la haute Autriche, entra dans l'ordre
des bénédictins en 1737, étudia succes-
sivement la théologie, le droit , les lan-
gues orientales, l'histoire, les antiquités
et- la musique, et devint professeur de
3^4 FLA
droit canonique et directeur du coIlé{>'e
de Crernsmunter établi dans l'abbaye
pour la jeune noblesse. Il fut aussi revêtu
de la diguité de notaire apostolique en la
cour de Rome, et mourut le 27 août
ï 7 91 . On a de lui \° Meridianus spcculœ
astronomicœ Cremifanensis ^ Steyer ,
1765, in-4 , ouvrage dans lequel il dé-
termina la longitude et la latitude de son
observatoire, qu'il a rendu célèbre car
les observations qu'il n*a cessé d'y faire.
2° Decennium astronomicum , Steyer ,
1776, in-4. C'est un recueil d'observa-
tions faites et calculées avec soin , dont
les astronomes font encore usage pour
leurs reichercbes. 3° Acta asironomica
Çremifanensia , Steyer, 1791 , in-4 , ou-
vrage posthume , où l'on trouve les ob-
servations de 1776 à 1791 ; des mémoires
sur la parallaxe du soleil , l'occultation
de Saturne en 17 75 ; l'observation et la
mutation dans le calcul des planètes , etc.
Il a fait aussi un grand nombre d'obser-
-yàtions sur Mercure , dont Lalande s'est
servi pour construire des tables de cette
planète. On trouve une notice sur Fix-
millner dans les Ephcniérides géogra-
phiques du B. de Zach, novembre 1799.
FIZES ( Antoine ) , célèbre médecin
de Montpellier sa patrie , mourut dans
cette ville le l4 août 1765 , à 75 ans. La
faculté de médecine le compte parmi les
professeurs qui ont le plus servi à la faire
fleurir. Il éclaira la pratique de son art
par une théorie lumineuse. Nous avons
de lui plusieurs ouvrages qui lui ont fait
un nom en Europe. Les principaux sont
1" Opéra medica, 17 42, in-4. 2° Leçons
de chimie de l'université' de Montpellier,
1750, in-12. 3° Tractât us de febrihus ^
1749 , in-12. Cet excellent ouvrage a été
traduit en français , 17 57 , in-12. 4° Trac-
iatus de physiologia, 1750, in-12. 5°
Plusieurs dissertations sur différentes
matières de médecine, science que l'au-
teur possédait à un degré supérieur. C'é-
tait i'Hippocrate de Montpellier. II joi-
gnait une grande .«implicite de mœurs à
des connaissances très étendues et très
variées. F oyez sa vie par M. Estève ,
1765, in-8.
FLAGCILLE {MUaFlacciUay, appe-
FLA
léc quelquefois par les Gvecs PlaceUa ou
Placidia , fille d'Antoine , préfet des
Gaules et ensuite consul ropiain , naquit
en Espagne , et fut mariée à Théodosc y
lorsqu'il n'était encore que particulier.
Elle reçut le titre d'Auguste quand elle
monta avec lui sur le trône de Constan-
tinoplp. Elle contribua beaucoup par son
zèle à la destruction de l'idolâtrie et à la
propagation du christianisme. Elle avait
toutes les vertus que cette religion in-
spire ; bienfaisante avec discernement ,
simple dans ses manières, et modeste
avec un extérieur plein de dignité. Elle
portait Théodose à l'indulgence , à la clé-
mence et au soulagement de ses sujets.
Ses incommodités l'ayant obligée d'aller
prendre les eaux dans un village de la
Thrace, ell€ y mourut en 388. Elle fut
mère d'Arcadius et d'Honorins. L'église
giecque l'a élevée au rang des bienheu-
reux. Saint Grégoire de IN'ysse prononça
son oraison funèbre.
FLACCOURT ou Flacodrt ( Etienne
de), né à Orléans en 1007, directeur-
général de la compagnie française de l'O-
rient, avait commandé, en l648, une
expédition dans l'île de Madagascar : ex-
pédition malheureuse, ainsi que toutes
celles qui l'avaient précédée ; mais qui
nous a procin-c une Histoire de cette île,
qu'il avait bien étudiée pendant dix ans
de séjour sur les lieux. Il la fit imprimer
à Paris, en un vol. in-4, 1G58, réimpri-
mée en 1601 et 1664 , avec figures dessi-
nées et gravées par lui-même ; et la dédia
au surintendant Foucquet. On y trouve
des choses curieuses et intéressantes.,
telle que cette prière des Mndagascariens,
qui prouve l'idée juste et vraie que ces
barbares ont de la Divinité. « O Eternel !
)> ayez pitié de moi , parce que je suis
M passager ; ô Infini ! parce que je ne suis
» qu'un point ; ô Fort ! parce que je suis
w faible ; ô Source de la vie ! parce que
M je touche à la mort ; ô Intelligent !
» parce que je suis dans l'erreur ; ô Bien-
» faisant! parce que je suis pauvre; ô
» Tout-Puissant ! parce que je ne puis
» rien, u ( Il a publié aussi un Petit caté-
chisme madecasse et français avec les
prières du matin et du soir , Paris , 1 657,
FLA
in-8 ; et un Dictionnaire de la langue de
Madagascar. Flaccourt se noya en reve-
nant en France pour la seconde fois , le
10 juin IGCO. C'est lui quia donné à l'île
Bourbon le nom qu'elle porte).
FLACCUS ILLYRICUS. Foyez Fban-
COWITZ.
FLACÉ ( René ) , curé de l'église de
la Couture , dans un faubourg du Mans ,
né à logent sur la Sarthe, à 6 lieues du
Mans, en 1630, mourut le 16 septembre
ICOO. On a de lui, outre plusieurs pièces
de théâtre, divers autres ouvrages en
prose et en vers et surtout un Poème la-
tin sur l'origine des Manceaux , qu'on
peut voir dans la Cosmographie deBellc-
forest. La Croix du Maine dit qu'il était
poète, théologien, philosophe, historien,
qu'il savait bien la musique , et qu'il prê-
chait avec succès.
* FLACHAT ( Jean-Claude } , négo-
ciant et voyageur, né à Lyon vers 1720,
parcourulla Hollande , l'Italie, l'Allema-
gne, la Hongrie et la Turquie : il séjourna
pendant 16 ans à Constantinople , où il
devint bascrguian hachi ou marchand
du grand-seigneur. Il profita de son titre
pour dessiner un grand nombre de mé-
tiers et de machines, et s'instruire de la
manière de fabriquer différentes espèces
d'étoffes, de choisir les matières que l'on
doit y employer , de teindre solidement
le coton en rouge , etc. ; enfin ayant ob-
servé que les Grecs avaient conservé ,
dans la pratique des arts, des procédés
qui nous sont inconnus , et qu'il regar-
dait comme intéressant d'introduire par- ,
minons, ilse renditàSmyrne, et amena
en France plusieurs ouvriers grecs, qu'il
établit dans la manufacture de Saint-Cha-
mond eu Lyonnais , qui appartenait à son
frère, et dont il avait la direction. Le
roi , pour le récompenser des services im-
portans qu'il avait rendus à l'industrie
française , accorda à son établissement ,
par arrêt du 21 décembre 17 66 , le titre
de manufacture royale , et divers privi-
lèges et exemptions. Flachat a publié le
résultat de ses voyages sous le titre :
Observations sur le commerce et sur
les arts d'une partie de V Europe , de
Fjésie^ de T Afrique et même des Iri-
FLA 3a5
des orientales , Lyon , 1 766 , 2 vol. in-1 2-
Il a inséré dans son livre , des mémoires
sur la culture de la garance , sur la teinir
ture du coton filé en bleu, et sur la ma-
nière de le blanchir. Flachat est mort
vers 1780.
FLAMEL (Nicolas) , natif de Pontoise,
exerça la profession d'écrivain libraire-
juré à Paris. Il était né sans biens : on le
vit tout à coup riche pour un homme de
son état ; mais ses richesses étaient seu-
lement pour les malheureux. Il soulagea
la veuve et l'orphelin , fonda des hôpi-
taux, répara des églises. (Le peuple igno-
rant crut que Flamel avait trouvé le se-
cret de faire de l'or ; et cette fable a été
accréditée par Jean Gohori, 140 ans après
sa mort. ) Naudé attribue sa fortune ( qui
n'était pas aussi considérable qu'on l'a
dit ) à la connaissance qu'il avait des af-
faires (^-es juifs. Il ajoute que, lorsqu'ils
furent chassés de France en 1394 , et que
leurs biens furent acquis au roi , Flamel
traita avec leurs débiteurs pour la moitié
de ce qu'ils devaient , et leur promit de
ne pas les dénoncer. Ce conte a été ré^
futé par M. deSainle-Foix, danslepremier
vol. de ses Essais sur Paris; et il est
bien plus vraisemblable que Fiamel dut
sa fortune à la connaissance qu'il avait
des principes du commerce, dans un
temps où tout le monde les ignorait. Il
mourut en 1418. Foyez sur cet homme
singulier , V Histoire critique de Nicolas
Flamel et de Pernelle sa femme, recueil-
lie d'actes anciens , qui purifient l'ori-
gine et la médiocrité de leur fortune , à
Paris, chezDesprez, 1761, in-1 2. Cet
ouvrage est dcM. l'abbé Villain. On a faus-
sement attribué à Flamel un sommaire
philosophique en vers , 1 6G1 , in-8 , et un
traite de la Transformation des métaux,
1G28, in-8. On joint à ces deux livres
\ Explication des figures hiéroglyphi-
ques , que Flamel mit au cimetière des
Innocens , Paris , 1G82, in-4.
FLAMINIO ( Marc-Antoine ) naquit
à Imola, de Jean-Antoine Flamimo, dont
nous avons divers ouvrages en vers et en
prose. Le fils eut les goûts de son père,
et le surpassa. Le cardinal Farnèse, dont
il était le bel-esprit , Iç fit nommer se-
326 FLA
crétaire du concile de Trente ; mais sa
santé délicate l'empêcha de remplir celte
commission. Il mourut à Rome en 1550,
à 52 ans. On a de lui des lettres et des
épigrammes , 15(51, rn-8 , traduites en
vers fiançais par Anne deMarquets, Paris,
1569, in-8. Sa Paraphrase de trente
Psaumes, entreprise à la sollicitation du
cardinal Pôlus, et imprimée à Florence
en 1558 , in-12 , offre d'assez beaux vers
et une latinité pure. Ses autres écrits ne
méritent pas moins d'être lus.
FLAMIÏNIUS (Caïus), consul romain,
d'un caractère turbulent et emporté , at-
tiré au combat par les ruses d'Annibal ,
perdit la fameuse bataille deTrasymène,
où il resta sur la place avec un grand
nombre de sénateurs, l'an 217, avant
Jésus-Christ.
FLAMINIUS ( Titus-Qumtus ) , élevé
au consulat par son mérite, l'^jn 198
avant J. C , n'avait pas encore 30 ans.
Il se proposa Scipion pour modèle. Il ne
lui manqua , pour égaler la gloire de ce
héros, que d'avoir à combattre des rivant
aussi redoutables. Comme lui , il avait
toutes les vertus civiles et militaires.
Nommé général des troupes romaines
contre Philippe V, roi de Macédoine, il
força l'armée de ce prince dans lesdéfilés
de l'Epire ; il soumit presque entièrement
cette province, réduisit la Thessalie, la
Phocide, la Locride. Il joua dans la Grèce
le rôle le plus brillant. Il lit publier aux
Jeux Néméens par un crieur public , que
les Grecs étaient remis en liberté. Il fut
en effet leur libérateur et leur père. La
république l'envoya dans la suite vers
Prusias pour demander la tête d'Annibal,
sous le vain prétexte qu'il tramait quel-
que chose contre Rome. U agit si adroite-
ment auprès de ce prince , que les Ro-
mains se virent délivrés de cet ennemi.
FLAMINIUS NOBILIUS , théologien
et critique de Imcques, mort en 1590,
à 58 ans, publia en 1588 àRon\e, in-fol.,
des Notes sur ta Bible di^s Septante ,
pleines d'érudition ; et un traité: Deprœ-
destinatione j ibid. , 1581 , in-4.
FLAMSTEED ( Jean } , a.slronçme , né
à Derby en Angleterre le 19 août 1C46 ,
prit du goût pour l'astronomie en voyant
FLA
une sphère de Sucrobosco. U cultiva cette
science avec beaucoup de succès , fut
membre delà société royale de Londres,
en IC70, et la môme année nommé astro-
nome du roi , avec une pension de cent
livres sterlings, ensuite directeur de l'ob-
servatoire de Gréenwick. U mourut en
1720, à 70 ans. Cet astronome avait par-
tagé son temps d'une façon singulière :
il donnait le jour aux cafés, et la nuii
aux astres. C'était un petit homme mai-
gre , qui n'avait aucun goût pour les
femmes: aussi mourut-il dansle célibat.
On a de lui : 1 ° Histnria cœlestis britan-
nica, Londres, 1725, en 3 vol. in-fol.
2" Ephémérides. 3° La ^Doctrine de la
sphère , imprimée en 1681 , avecleA^oM-
veau système de mathématiques de Jo-
nas Morus, le plus zélé protecteur de
Flamstécd. Newton ayant trouvé plu-
sieurs de ses obsei-vations peu justes,
Flamstéed écrivit contre lui : l'académie
des Sciences de Paris jugea, en faveur de
son adversaire ; mais Flamstéed ne lai.ssa
pas d'avoir raison dans l'esprit de plu-
sieurs savans. Flamstéed s'est surtout dis-
tingué par ses observations sur le nombre
des étoiles visibles, et de longues études
pour le déterminer avec précision. On sait
qu'il a rendu beaucoup plus nombreux le
catalogue qu'en avait dressé Bayer , et
qu'il les a portées au nombre de 3,000 ;
mais- ce qu'un observateur philosophe
ne doit pas négliger, c'est qu'il n'y a pas
deux astronomes qui, dans aucun temps,
aient pu s'accorder dans ce calcul. Sans
.parler des tables des anciens, depuis l'u-
sage du télescope, Kepler a compté 1393
étoiles bien visibles et distinctes dansles
deux hémisphères célestes ; Riccioli en a
trouvé 1437 ; le Père Pardies 1491 ; de la
Hire, 1576; Bayer, 1716; Royer, 1805;
Hevelius, 1 888,. Flamstéed , comme nous
venons de le dire , 3000. Rheita , fameux
astronome de Cologne, assure en avoir
vu plus de 2000 dans une seule constel-
lation : Galilée prétend en avoir décou-
vert 500 dans une petite partie d'Orion ;
M. de La Caille 9800 dans une partie du
ciel austral , le Père Maycr proteste en
avoir vu, en 1 777 , plusde 200 <lont per-
sonne u'a jamais entendu parier. En 178Ô,
FLA
Merschel en découvrit 1300 nouvelles»
précisément dans la classe des nébuleu-
ses , et en 1787 , il «n compta 50,000
dans une zone de 1 5 degrés sur 2 degrés
de largeur, etc. , ce que d'autres astro-
nomes ont traité de vision. Et ces mêmes
gens ne se sont pas toujours tenus au
même compte. D'où il s'ensuit que non-
seulement les étoiles en général, mais les
"étoiles même visibles , et exposées depuis
six mille ans aux deux yeux de cinq cent
millions d'hommes , sont réellement in-
nombrables ; que Dieu seul en connaît la
multitude déterminée, comme dit David,
et les appelle toutes par leurs noms : Qui
numéral multitudincni stcllnrum et om-
nibus eis nomina vocal. Ps. 146.
* FLANDRiN ( Pierre ), vétérinaire
et anatomiste, né à Lyon le 12 septembre
1752, entra dès l'âge de 14 ans à l'école
vétérinaire de cette ville , et s'y distin-
gua par son application et son intelli-
gence. Il fut choisi quelque temps après
pour enseigner l'anatomic à ses camara-
des, et ensuite appelé à l'école d'Alfort ,
près Paris , pour y être professeur d'ana-
lomie , et adjoint à son oncle Chabert ,
qui en était directeur. C'est dans l'exer-
cice de cette chaire qu'il fit exécuter la
belle suite de préparations anatomiques ,
qui enrichit le cabinet de l'école d'Al-
fort. Il s'acquit une réputation méritée
par ses travaux sur l'anatomic comparée.
Le gouvernement l'envoya successive-
ment en Angleterre et en Espagne, pour
y observer la manière de conduire et di-
riger l'éducation des moulons à laine fine.
Il fut nommé, en 1791, correspondant
de l'académie des Sciences , et il venait
d'être admis à l'Institut comme associé,
lorsque la mort l'enleva au commence-
ment de juin 179G. On a de lui : 1° Un
Précis sur Vanalomiedu cheval, 17 87,
in-8 , qu'il avait rédigé pour ses élèves ,
et oîi l'on trouve quelques remarques
neuves et justes. 2° Mémoire sur lapos-
sibililé d'améliorer les chevaux en
France, Taris, 1790, in-8. Z" De lapra-
tique de r éducation des moutons, cl des
moyens de perfectionner les laines, in-8,
plusieurs fois réimprimé. 4° .Absorption
des vaisseaux lymplmliques sur la rê-
FLA âa7
tÎTie ; b°Sur la nature et les attributs de»
sarigues, animal très singulier par sa
conformation. G° Sur la rage ; 1° Instruc-
tions et observations sur les maladies
des animaux domestiques, avec l'analyse
des ouvrages vétérinaires anciens et mo-
dernes, 1782, 1795, -3'' édition, 6 vol.
in-8. Diverses observations ou disserta-
tions dans le Dictionnaire anatomique de
l'Encyclopédie , dans le Journal de mé-
decine et autres feuilles périodiques, ou
l'on trouve des vues ingénieuses.
FLASSAINS ( ÏARAUDET de ), poète
provençal, natif de Flassans , petit village
de Provence dans le diocèse de Fréjus,
obtint de Foulques de Ponlevès une por-
tion de cette terre pour un poème inti-
tulé : Enseignemens pour éviter les tra-
hisons de V Amour. Le Moine, dit le
Monge des Iles-d'Or , assure que cet ou-
vrage valait beaucoup plus ; mais qu'il
fut inutile au vendeur et à l'acheteur,
trompés l'un et l'autre par leurs maîtres-
ses. Taraudet vivait en 1354. La reine
Jeanne se servit de lui pour faire des re-
montrances à l'empereur Charles IV qui
passait en Pi-ovence, et il s'en acquitta
très bien.
FLAUST ( Jean-Baptiste ) , avocat au
parlement de Rouen, né à Yire en 1709 ,
mort à sa terre de Saint Sévère , près de
cette ville, le 21 mai 17 83, s'est fait
connaître par son Explication de la ju-
risprudence et de la coutume de Nor-
mandie, dans un ordre simple et facile ,
2 vol. in-fol. L^ne table des matières ajou-
tée à cet ouvrage en rendrait l'usage
plus facile.
FLAVE JOSEPHE. P^oyi;z Josephe.
FLAVIEN ( Saint') ,.palriarche d'An-
tioche , d'une naissance illustre et d'une
vertu supérieure à sa naissance, fut placé
sur le trône patriarcal ,, du vivant de
Paulin. Cette élection confirmée par le
concile de Constantinople en 382 , fut
l'origine d'un schisme éteint sous le pape
Innocent I. Flavien chassa de son dio-
cèse les hérétiques Messa liens, qui l'a-
vaient infecté de leurs erreurs. Il demanda
grâce à l'empereur Théodose pour son
peuple, etl'obtint. Leshabitansd'Antio-
che avaient renversé et outragé dans une
3-28 FLA
sédition la statue de l'impératrice Pris^
cille ; Flavien parla pour eux avec l'élo-
quence que Cicéron déploya autrefois
pour Ligarius. Saint Chrysostôme , qu'il
avait ordonné prêtre, avait, dit-on, com-
posé sa harangue. Ce grand prélat mou-
rut en 4 04, après avoir gouverné son église
pendant 23 ans. — Il ne faut pas le con-
fondre avec un autre saint Flavikn , pa-
triarche d'Antioche en 496 , que l'empe-
reur Anastase voulut obliger de souscrire
VHénotique de Zenon , et approuver la
déposition de Macédonius de Constanti-
nople. Il eut le courage de lui résister et
de souffrir l'exil que son refus lui attira.
Il y mourut Tan 518.
FLAVIEN ou Flavunus ( Saint), suc-
céda à Proclus dans le patriarcat de
Constantiiiople , en 447. Cbrysaphius,
favori de l'empereur Théodose le Jeune,
Toulut le faire chasser de son siège, le
saint prélat brava ses menaces. Il ne se
montra pas moins ferme contre Eutychès ,
qui commença à semer ses erreurs vers
le même temps. Il l'anathématisa dans
«n concile ; mais les partisans de l'héré-
siarque condamnèrent Flavien et le dé-
posèrent en 449, dans le fameux synode
connu sous le nom de brigandage (VE-
phèse. Dioscore , évtique d'Alexandrie ,
accompagné d'une foule de soldats et de
moines, présidait à cette séditieuse as-
semblée. Flavien appela de cette con-
damnation à Rome ; mais Dioscore ne ré-
pondit à ses raisonnemens , que par des
coups de pieds et des coups de poings;
enfin , ce furieux le maltraita si cruelle-
ment, que le saint en mourut trois jours
après en 449.
FLAVIGNI ( Valérien de ) , docteur
de Sorbonhe en 1 628, chanoine de Reims,
et professeur en hébreu au collège royal
en 1630, naquit dans le diocèse de Laon,
et mourut à Paris le 29 avril 1674 , dans
un âge assez avancé. C'était un homme
plein de feu dans sa conduite et dans ses
écrits. Il déféra à la faculté de théologie
une thèse soutenue chez les jésuites du
collège de Clermont , appelé depuis le
collège de Louis le Grand. On préten-
dait dans cette thèse , que le sy.stème de
Copernic , étant contraire à l'Ecriture ,
FLÀ
et condamné par les inquisiteurs de
Rome, on tic pouvait le soutenir en
France. Flavigni voulut démontrer qu'une
pareille assertion violait les droits du
royaume et du parlement , ce qui n'était
pas trop clair. Ce docteur savait de l'hé*
breu , de la théologie , des belles-lettres ;
mais il cherchait trop à déprimep ceux
qui en savaient autant et plus que lui. Il
écrivait d'ailleurs , plutôt avec l'impé-
tuosité d'un jeune Hibernois qui argu-
mente sur les bancs , qu'avec la gravité
d'un vieux théologien. On a de lui la
Défense d'une thèse qu'il avait signée
en qualité de grand-maître d'études. Il y
était dit que Ve'piscopat n'est pas un sa-
crement distinct de la prêtrise : senti-
ment qu'il ne faut pas confondre avec
l'erreur , qui n'attribue aux évèques rien
au dessus des simples prêtres. Flavigni
prétendait que c'était le même sacre-
ment avec des effets plus étendus, et
l'impression d'un caractère plus grand ,
parce que sans cela il y aurait plus de
sept sacremens : conséquence que d'au-
tres théologiens admettent , en disant que
le sacrement de l'Ordre étant considéré
dans sa généralité , et comme la consé-
cration sacerdotale dans toutes ses divi-
sions, est mis comme une unité généri-
que dans le nombre de sept. Celte apo-
logie a été imprimée à Tournay , en 1668,
in-4. (Il avait travaillé h [a Polyglotte de
Le J»y , qu'il critiqua plus tard. )
* FLAYIGNY ( César-François, comte
de ) , né vers 1740 à Craonne dans le
Laonnais, embrassa la profession des ar-
mes, et parvint au grade de lieutenant-co-
lonel d'un régiment de dragons. Il obtint
ensuite une compagnie dans les gardes
françaises , et devint maréchal de camp
en 1788. Après le licenciement de la
maison du roi , il se retira dans sa terre
de Charmes près de Lafère , où il mourut
le 1 1 décembre 1 803. Il a publié : 1° Prin-
cipes fondamentaux de la construction
des places , avec un nouveau système
de fortifications, traduit de l'italien
d'Antoni, 1775 , in-8. 2° Introduction à
l'histoire naturelle et à la géographie de
r Espagne, traduite de l'anglais de Bow-
Ics, 1776, in-8. 3" Correspondance de
^eniand Cortez avec tempereur Char-
les'Çuint , sur la^onquêie du Mexique ,
1878 , in-12. 4° Rc flexions sur la déser-
tion et sur la peine des déserteurs en
France, Paris, 1768, in-8.
* FLAVIGNY ( A. L. J ) , fils unique
du précédent , né en 1764, ayant obtenu
une lieulenance dans les gardes-franoaises,
fut un des gentilsbommes qui se mon-
trèrent le plus dévoués au service du
malheureux Louis XVI. Il se rendit con-
stamment auprès de sa personne, à cha-
que crise politique qui menaçait ses jours,
et fut arrêté après le 10 août 1792. il
resta près de 18 mois détenu dans la
maison de Saint-Lazare, et fut condamné
à mort par le tribunal révolutionnaire le
24 juillet 1794 , comme complice de la
conspiration des prisons, au moment où
la chute de Robespierre allait le rendre
à son père et à son pays.
• FLAVITAS ou Fravitas , patriarche
de Constantiitople après Acace , en 489 ,
employa la ruse pour se faire élire. L'em-
pereur Zenon avait fait mettre sur l'autel
de la grande église de Constantinople ,
un papier blanc et cacheté , comptant
que Dieu ferait écrire par un ange le nom
du prêtre qu'il destinait à la chaire pa-
triarcale ; Flavitas corrompit l'eunuque
qui avait la garde de l'église , et écrivit
son nom sur le papier. Ouelques histo-
riens ont révoqué en doute ce trait d'im-
posture. On peut voir ce qu'en dit M. de
Tillemont dans ses Mémoires pour servir
à l'Histoire ecclésiastique , où ce fait est
amplement discuté. Cette supercherie le
fit ])atriarche. C'était le plus fourbe et le
plus artificieux des hommes. Dans le
même temps qu'il jurait aux hérétiques
qu'il ne voulait avoir aucune communi-
cation avec le pontife de Rome , il écri-
vait sourdement au pape Félix. Sa mort ,
arrivée en 490, lui épargna un châti-
ment exemplaire. Il n'occupa ce siège
(pie quatre mois.
* FLAXMAN ( John ) , sculpteur an-
glais , né en 1754, passa la plus grande
partie de sa jeunesse en Italie, où il a
laissé les souvenirs les plus honorables.
On admire même encore à Rome plusieurs
de ses statues et bas-reliefs. De retour en
V.
fLÊ
âag
Angleterte il a enrichi sa patrie dé tnonu-
mens remarquables par leur goût et par
leur correction ; peut-être une critique
sévère désirerait-elle dans ces composi-
tions plus d'expression, plus de moelleux,
de grâce et de fini. Ses principaux ou-
K'ragcs comme sculpteur sont le beau
mausolée du poète Collins dans la cathé-
drale de Chichester, celui du lord Mans-
field dans l'abbaye de Westminster , ceux
de lordHowe et du général Abercromby;
la statue de sir Reynolds et de Washing-
ton. Il a publié Série de gravures pour
expliquer l^ poème d'Homère , Londres ,
1793, 2 vol. in-4, 2* édition, 1805. Il
a aussi donné en 1805 Acs Séries de gra-
vures pour V Eschyle , 2 vol. in-fol. , et
pour le Dante , 2 vol . in-fol. ; et en 1 8 1 7,
Deuxième série de dessins pour illustrer
et expliquer les travaux , les jours et la
théogonie d'Hésiode, 1 vol. in-fol. Flax-
man était professeur à l'académie royale
de peinture de Londres , et avait reçu le
brevet de peintre du roi. Lord Eigiri
ayant enlevé , comme chacun le sait , des
monumens d'Athènes , des frises , des bas-,
reliefs et d'autres débris de sculpture
antique , une commission fut nommée
par le parlement pour juger le mérite de
ces acquisitions. Ce fut d'après l'avis de
Flaxman que ces différens objets ont été
achetés par le gouvernement et sont de-
venus propriété nationale.
FLECHELLES. Foyez Guerin (Hu-
gues ).
* FLECHEUX , astronome et mécani-
cien, mort à Paris le 4 novembre 1793 à
l'âge de 55 ans , a donné un Planétaire
ou Planisphère, propre à mettre sous
les yeux de la jeunesse le mouvement des
astres. On lui doit cacoï&V Oxocosme ou
Démonstration du mouvement annuel
de la terre autour du soleil, 1 784, in-8.
FLÉCHIER ( Esprit ) , évêque et ora-
teur .sacré , né le 10 juin 1G32 à Pernes,
petite ville du diocèse de Carpentras , fut
élevé dans le sein des lettres et de la vertu,
auprès d'Hercule Audififret , son oncle ,
général des Pères de la doctrine chré-
tienne , où il était entré à l'âge de 16 ans.
(Obligé suivant la règle de la maison , de
se livrer à l'euseigneinent , il professa la
33o
Plifl
rhétorique à Narbosoe }. Fléchitii' y ayant
quitté cette congrégation , après la mort
de son oncle, parut à Paris oîi ii remplit
dans l'une des paroisses l'emploi aussi
modeste qu'utile de catéchiste des petits
enfans , fut ensuite précepteur des fils de
Louis Caumartiu intendant des finances
et conseiller d'état. Une pièce de vers la-
tins sur le Carrousel ( Circulas regius },
donné par le roi en 1G62 , commença sa
réputation : ses sermons y ajo!itèrent
beaucoup. Il fut nommé lecteur du dau-
phin par le crédit du duc de Montansier
qui l'honorait de sou amitié. Il eut part
aux bienfaits que Louis XIV répandit sur
les gens de lettres. Fléchier , encouragé
par ces récompenses, fit de nouveaux ef-
forts , et balança bientôt la réputation de
Bossuct dans l'oraisou funèbre. C«lle de
Turenne, son chef-d'œuvre, fit pleurer
ie monarque, et mit le comble à la gloire
de l'orateur. On admira surtout le beau
parallèle du maréchal de France avec Ju-
das Machabée. U est vrai qu'il n'était pas
le premier qui eût transporté auv géné-
raux modernes les éloges donnés à cet
ancien capitaine. Lingendes , évèque de
]^àcon , et Fromentïères , évèque d'Aire,
s'en étaient déjà servis : l'un , dans l'o-
raison funèbre de Charles-Emmanuel, duc
de Savoie ; l'autre , dans celle du duc de
Beaufort. Mais Fléchier se rendit propre
ce lieu commun , par les orneinens dont
il l'embellit dans son exorde , qui est un
chef-d'œuvre par l'harmonie et le carac-
tère majestueux et sombre qui y régnent.
La cour récompensa .ses talens, en 1685,
par l'évêché de Lavaur, et en 1687, par
celui de Nîmes. Louis XIV lui dit en le
nommant au premier évêché : « Ne soyez
» pas surpris si j'ai récompensé si tard
» votremérite; j'appréhendaisd'ètre privé
M du plaisir de vous entendre. » Le dio-
cèse de Nîmes était plein d'hérétiques ;
il se conduisit avec eux en bon pasteur.
Il les instrui.sit tous par la solidité de .ses
discDui-s, et plus encore par la régularité
de ses mœurs. Il mourut à Montpellier le
16 février 1710, à 78 ans, regretté de
ses diocésains catholiques et huguenots,
et laissant plus de 25,000 écus aux pau-
vnss. L'académie française s'était associé
FLË
Fléchier, après là mort de Godeau en
1 C7 3. Il y entra le mèm^our que Racine.
C'est sur le modèle de cette compagnie
qu'il forma celle de Nîmes , dont il fut le
mentor et le père. On a de lui 1" Des
œuvres mêlées , in-1 2, en vers et en prose.
On a loué avec raison ses vers français et
latins. Les pensées en sont délicates, les
expressions heureuses, les termes bien
choisis , la cadence harmonieuse. 2° L'é-
dition d'un ouvrage fort curieux d'An-
toine Marie Gratiani : De casibus iltus-
triuni virorum , in-i , avec une préface
en latijn. Le stile en est aussi pur qu'élé-
gant. 3" Des Panégyriques des saints,
mis au rang des meilleurs ouvrages de ce
genre, Paris, 1690, en 4 vol. in-4 ; 1697,
2 vol. in-12; 1739, 3 vol. in-1 2. 4° Re-
cueil d'oraisons funèbres , en un vol.
in-4 et in-12. Il y a moins d'élégance et
de pureté de langage dans celle de Bos-
suet ; mais on y trouve une éloquence
plus forte, plus niàle, plus nerveuse. Le
stile de Fléchier est plus coulant, plus
arrondi , plus uniforme. Celui defiossuet,
moins égal , moins soutenu , est plus
rempli de ces traits hardis, deces Agures
vives et frappantes qui caractérisent le
génie. Fléchier est plus heureux que lui
dans le choix et dans l'arrangement des
mots; mais son penchant pour l'antithèse
répand une sorte de monotonie sur son
stile. 11 devait autant à l'art qu'à la na-
ture ; Bossuet devait plus à la nature qu'à
l'art. 5° Des Sermons en 3 vol. in-12,
qui ne sont pas de la même force que
ses oraisons funèbres et ses panégyri-
ques. On y trouve de belles périodes , et
très peu de raisonnemens. Il avait cher-
ché de bonne heure dans nos vieux pré-
dicateurs des traits d'éloquence et des
pensées ingénieuses , dont il faisait un
usage plus ingénieux encore ; aussi lui
trouve-t-on quelquefois , quant au fonds
des choses , un air antique, l'air du com-
mencement de son siècle. 11 prêchait avec
un vieux goût et un stile moderne. 6° His-
toire de tempereur Théodose le Grand ,
Paris, 1679 , in-4, réimprimée très sou-
vent in-12; elle est estimée pour l'élé-
gance du stile , autant que pour l'intérêt
de la narration. Ceux qui ont cru qu'il
FLE
flattait son héros , «'ont pas rendu justice
à cet empereur qui , dans le vrai , <?tait
grand homme et grand prince à tous
égards. 7° La P^ie du cardinal Ximenès ,
eu 2 vol. in-12, et un in-4. Il peint ce
cardinal comme un saint; l'abbé Marsol-
lier . dans une histoire de Ximenès, pu-
bliée vers le même temps que celle de
Fléchier , en tit un politique ; ce grand
ministre avait été l'un et l'autre ; mais
Marsollier était un esprit trop mobile pour
peindre dignement un homme d'un ca-
ractère si ferme. 8° Des lettres , 2 vol.
iu-12. On y trouve des détails affligeans
sur les excès des calvinistes , qui dès-lors
répandaient l'efifroi partout et préludaient
aux scènes affreuses qui ont désolé JN'îmes
en nyO et 1791. 9° La Fie du cardinal
Commendnn , traduite du latin d'Antoine-
Marie Graliani in-4. , et 2 vol. in-12,
plusieurs fois réimprimée. 10° Des OEu-
vres posthumes , en 2 vol. in-12; elles
contiennent ses mnndemens et ses lettres
pastorales , oii la philosophie chrétienne
et la tendresse épiscopale se font sentir
avec tous leurs charmes. On y a ramassé
différens discours, complimcns et haran-
gues. L'auteur du Dictionnaire critique,
en ti vol. , lui attribue un recueil manus-
crit, formant 6 vol. in- fol. , sur les anti-
quités du Languedoc ; mais il est certain
qu'il n'est pas de lui : c'est l'ouvrage d'un
citoyen de >'imes, appelé Aulne Rul-
man. L'abbé Ducreux, chanoine d'Au-
xerre , a donné une éditiou complète des
OEuvres de Fléchier , à Xîmes, en 17 82 ,
5 tomes en 10 vol. in-8. Ses poésies la-
tines ont paru dans un recueil séparé , à
Bâle, 1782, 1 vol. in-12. En 1791, le
siège de ce grand homme fut souillé par
un nommé Dumouchel , d'abord garçon
perruquier , puis prêtre apostat , que l'As-
semblée nationale subrogea à l'évèque lé-
gitime, foyez Dumouchel.
FLEETW OOD ( Guillaume ) , évoque
anglican . né dans la Tour de Londres en
1GÔ6 , d'une famille noble, originaire de
la province de Lancastre, se ht connaî-
tre , sous le règne de Guillaume III , par
ses ouvrages. La reine Anne, instruite
de son mérite , lui donna un canonicat
de Windsor en 1702, puis l'évèçhé de
FLE 33 1
Saint Asaphen 1 708. Fleetvcood fut trans-
féré de cetévêché à edui d'Ely en 1714,
et mourut en 1*23 , à 67 ans. Ses princi-
paux ouvrages sont : 1 " Inscriptionum
antiqunrum sijlloge , Londres, 1691 ,
in-8. 2" Des sermons. 3° Essai sur les
miracles , 1701 , in-8. k" Chronicon pre-
tiosum. 5° Explication du 13" chnp. de
Cépître aux Romains. Sa vie est à la tète
de ses sermons. — Il ne faut pas le con-
fondre avec un autre Guillaume Fleet-
wooD , avocat de la reine Elisabeth , qui
fut député pour aller visiter de sa part
plusieurs diocèses. Il mourut en 1592.
On a de lui 1° Elenchus annaliuni Ed-
vardi V , Ricliardi III , Hcnrici Fil et
Henrici FUI, Londres, 1597 , in 8. On
sent combien il a dû les défigurer, pour
qu'on ne trouvât pas à chaque page la
condamnation de la réforme anglicane.
•2° \] Office déjuge de paix , 1658.
FLEIX. Foyez Foix ( Raymond ).
FLEMALE. Fnyez Bertholet.
' FLEMING, ou Flemminge (Richard; ,
prélat anglais , naquit à Croston , dans
le comté d'Oxford , vers la fin du 1 4'= siè-
cle. Il fit ses études à Oxford , et embras-
sa, avec chaleur, l'hérésie de Wiclef ;
mais il devint bientôt son ennemi. Il ap-
porta à renverser l'édifice la même ar-
deur qu'il avait mise à le construire. En
1420, Henri V le nomma à l'évêché de
Lincoln , auquel le pape Martin V l'avait
lui-même désigné. Cependant . lorsque
ce même pape voulut le transférera l'ar-
chevêché d'York, Henri s'y opposa, et
Fleming demeura évêque de Lincoln. Ce
prélatmourut en 1430, après avoir fondé,
à Oxford le collège de Lincoln pour de
jeunes théologiens , destinés à combattre
les erreurs de Wiclef.
* FLEMING ( Patrice ), religieux obser^
vantin , né en 1599 d'une famille noble,
dans le comté de Louth , en Irlande , fut
envoyé à Douai , à l'âge de 1 3 ans , pour
y faire ses études sous la direction de son
oncle maternel , Christophe Cusack , su-
périeur des collèges irlandais , en Flan-
dre. Après avoir fait ses humanités , il se
rendit à Louvain , oii il embrassa la règle
de saint François, dans le collège de
Saint-Antoine de Padouç, oui apnarte^
332 FLE
nait à des franciscains de sa nation. Lors-
que ses cours de théologie et de philoso-
phie furent terminés , il se rendil à Rome
avec le Père Hugues Mac-Caghwel , défi-
niteur général de l'ordre. En passant à
Paris, il s'yJia d'amitié avec le Père Hu-
gues Ward , et ils formèrent le dessein de
recueillir les matériaux , pour composer
les vies des saints d'Irlande. Ils fouillè-
rent tous les deux dans toutes les biblio-
thèques qui furent à leur portée. Fleming
fit de nombreuses recherches dans toutes
les villes de France, d'où il passa en Italie
et en Allemagne. Une partie de ces vies
fut publiée, quelques années après , par
le Père Colgan , qui reconnaît avoir tiré
un grand secours des recherches de Fle-
ming et du Père Ward. Le Père Fleming
fut chargé d'enseigner la philosophie dans
le couvent de Saint-Isidore de Rome. Il
reçut , quelque temps après , le même
emploi à Louvain. Il fut ensuite envoyé
à Prague , pour y gouverner le couvent
de l'Immaculée Conception. L'Allemagne
était alors en feu; et le luthéranisme, ap-
puyé par les armes victorieuses des Sué-
dois, se répandait de tous côtés. Les
armées suédoises et saxonnes faisaient
souffrir une cruelle persécution aux catho-
liques , et surtout aux religieux. Prague
étant menacée d'être investie après la ba-
taille de Leipsick, le Père Fleming, pour
ne pas tomber entre les mains d'un en-
nemi barbare , quitta cette ville avec le
Père Malhias Hoav , son confrère. Mais
ils eurent le malheur de tomber entre les
mains d'une troupe de paysans luthériens ,
qui les massacrèrent impitoyablement:
Moréri place cet assassinat au 7 novembre
1631. Wading, historien des frères mi-
neurs , le recule de deux années ; mais la
prise de Prague , qui eut lieu en 1631 ,
doit faire préférer la première date. On
a de ce religieux 1° Collectanea sacra,
Louvain, 1667; 2" Fita R. P. Hugonis
Cavdli ( Macaghwel. ) ; 3" un Jbrégc du
Chronicon consecrali Pelri Ratisbonœ.
* FLEMIING (Robert), théologien écos-
sais , naquit à Bathens , en 1030. Il adop-
ta les principes du calvinisme , et fut
expulsé comme non-conformiste de la
pure do C^u^Iang ; h laquelle il AViiit
FLË
été nommé fort jeune , en exécution de
l'acte publié à Glascow. Peu après la
restauration , il fut même arrêté ; mais
ayant obtenu son élargissement, il passa
à Rotterdam , oii il fut élu ministre de la
congrégation écossaise. Il mourut le 25
juillet 1694. Il a laissé 1° le Miroir dt
V amour divin dévoile, 1691 , in-8. C'est
un recueil de poésies religieuses. 2"L'^c-
complissemeiit des Ecritures ; ouvrage
très estimé , surtout des dissidens et des
calvinistes.
* FLESSELLES ( Jacques de ) , né en
1721, d'une famille de robe , devint d'a-
bord conseiller d'état , ou maître hono-
raire des requêtes, et figura, lors des
troubles de la Bretagne , dans le parti du
duc d'Aiguillon contre le fameux procu-
reur-général La Chalotais. Envoyé en-
suite en qualité d'intendant à Lyon, il
s'y fit chérir par sa douceur , sa bienfai-
sance et son zèle pour les intérêts de cette
grande cité , dont le commerce lui est re-
devable d'établissemens importans. Il y
fonda un prix en 1 77 7 , pour le perfection
nement de la teinture des soies en noir.
Au commencement de la révolution il fut
nommé prévôt des marchands de la ville
de Paris; mais il n'avait ni la fermeté ni
les talens qui convenaient à cette place
dans un moment aussi difficile. Accusé
de trahison par le parti populaire le 1 4
juillet 1789, jour de la prise de la Bas-
tille, il hésita, balbutia et chercha à
s'excuser, à prouver son innocence. Les
factieux enhardis par sa faiblesse , lui si-
gnifièrent qu'il fallait aller au Palais-Royal,
lieu de réunion de tous les agitateurs ,
et que là il serait entendu. Le malheureux
Flesselles crut devoir consentir à cette dé-
marche ; mais à peine fut-il arrivé au bas
de l'escalier qui descend sur la place de
Grève , qu'un jeune homme lui cassa la
tête d'un coup de pistolet. La populace
se précipita aussitôt sur son cadavre ; on
en sépara la tête qui «fut placée au haut
d'une pique , et portée au Palais-Royal.
Le corps fut traîné dans la fange. Ce
meurtre commis sous les yeux de l'auto-
rité , sans qu'elle osât prendre des mesu-
res pour en punir les auteurs, fut le signal
de l'insurrectioiî , et d« tous les «tten-
FLE
tats qui le suivirent. Flcsselles était âgé
de 68 ans.
FLETCHER (Gilles), poète anglais
et bon politique , qualités qui se ren-
contrent rarement ensemble , fut charge
de quelques commissions en Ecosse et
en Allemagne par la reine Elisabeth , qui
l'envoya ensuite en qualité d'ambassadeur
eu Moscovie. Il était secrétaire de la cité
de Londres et trésorier de Saint-l*aul ,
quand il mourut en 1610. On a de lui
1" une Relation de son ambassade en
Moscovie, 1590, in-8. L'auteur s'y
montre peu favorable aux Russes qui
étaient alors encore demi-barbares. 2° De
Utteratis antiquœ Britanniœ , 1633,
in-12.
FLETCHER (Jean), neveu du pré-
cédent, poète tragique anglais, mort à
Londres en 1625, à 49 ans, marcha sur
les traces de Shakespear dans la carrière
dramatique , et obtint une des premières
places après son modèle. Le cabaret était
son Parnasse. Un jour qu'il y récitait une
trage'dic, dans laquelle il y avait une
conjuration contre la vie d'un roi , des
gens qui passaient dans la rue le dénon-
cèrent comme un scélérat. On le mit en
prison ; mais on reconnut bientôt que le
conjurateur ne tuait les rois que sur le
théâtre. Voyez Beaumost ( François).
FLEURANGES. Votjez Marck '( Ro-
bert de La ), troisième du nom.
* FLEURET , ancien professeur d'ar-
chitecture de l'écoie royale militaire de
Paris, mort le l*' janvier 1817, est au-
teur de V Art de composer des pierres
factices aussi dures que le caillou , et de
Becherches sur la manière de bâtir des
anciens, 1808, in-'4 , avec un vol. de
planches.
• FLEURET ( Elisabeth , Madame ) ,
née à Paris le 10 juin 1725 , est connue
des âmes pieuses par le Guide des supé-
rieures, 1 vol. in-12, 178G , ouvrage que
M. Emery , supérieur du séminaire de
St.-Sulpice de Paris, se plaisait à citer
dans ses conférences , et que l'abbé de
Montis a revêtu d'une approbation très
favorable Elle a laissé aussi une suite à
ce livre : ce sont des avis aux supérieures
sur la direction spirituelle des religieusça
FLE 333
et des novices , et des entretiens spiri-
tuels et familiers , qui formeraient peut-
être trois volumes , et dont la publica-
tion ne serait pas utile seulement aux
personnes qui vivent en communauté ,
mais encore à toutes celles qui ont à
cœur le salut de leiu-s âmes. Cette pieuse
dame, sur la mort de laquelle nous n'avons
aucun détail , était fille d'un contrôleur
au service du duc d'Orléans. Entrée chez
les religieuses de la congrégation de No-
tre-Dame , elle était devenue maîtresse
des novices : c'est le fruit de son expé-
rience qu'elle avait déposé dans sou livre.
*FLEURL\U (Louis-Gaston), doc-
teur en théologie et évêque d'Orléans ,
naquit à Paris en 1C62. Il avait d'abord
été évêque d'Aix en 1698. Il passa à l'é-
vêché d'Orléans en 1 705 , et eut en même
temps l'abbaye de Saint-Jean d'Amiens,
ordre de Prémontré. A son avènement
au siège d'Orléans , il racheta et fit déli-
vrer 854 prisonniers détenus pour dettes.
Ce prélat était doué d'une charité ad-
mirable, et possédait, à un degré émi-
uent, toutes les vertus épiscopales. Il
assista à l'assemblée du clergé de 1715 ,
et tint plusieurs synodes dans sou
diocèse , veillant avec soin au maintien
de la discipline ecclésiastique. Il fonda
à Orléans plusieurs établissemens utiles,
entre autres une maison pour les nou-
velles converties. Ce prélat mourut le 1 1
janvier 1733. Il a laissé des Re'glemens
et avis synodaux , extraits des synodes
qu'il avait tenus.
*FLEURIAU (Thomas-Charles), jé-
suite, qui vivait vers la fin du 17® siècle,
fut chargé par ses supérieurs de corres-
pondre avec les missionnaires de la com-
pagnie dans le Levant , et de rédiger les
mémoires qu'ils envoyaient. On en trouve
plusieurs dans le Recueil des lettres
édifiantes, écrites des missions étran-
gères, 26 vol. in-12 ou 14 vol. in-8. H
a publié en outre , 1 " Etat présent de
l'Arménie , Paris ,.1694, in-1 2 . 2° Etat
des missions de la Grèce, Paris, 1695,
in-12. 3" Avec le père Monier : Nou-
veaux mémoires des missions de la com-
pagnie de Jésus dans le Levant , Paris ,
Ï71Î, et années suivantes, — Uy utm
334
FLE
plusieurs autres jésuites du même nom .
entre autres Bertrand-Gabriel Fleuriau ,
né en 1G93, auteur des Principes de la
langue latine, mis dans un ordre plus
clair et plus exact , très souvent réim-
primes. Les dernières éditions ont été
retouchées par M. de Wailly. (On a encore
de lui : Relation des conquêtes faîtes
dans les Indes, par D-F.-M. d'Almeida ,
traduite de l'italien, Paris, 1769, in-12;
f^ie du père Claver, ibid. , 17,61 in-12.)
FLECRIAU. Foyez Langlk.
* IXEURIE€ ( Charles-Pierre Claret,
coqote de ) , ministre de la marine sous
Louis XVI, né à Lyon eu 1738, entra dans
la marine à l'âge de treize- ans , et fut
toujours un modèle d'application et de
bonne conduite. Il profita, pour se livrer
à l'étude avec une ardeur nouvelle , de
la paix conclue en 1763. Le premier fruit
de ses méditations fut des horloges ma-
rines , qu'il exécuta avec Ferdinand Ber-
thoud, célèbre horloger, qui s'occupait
alors du même objet. Elles furent es-
sayées en 17G8, sur la frégate FIsis,
qu'il commandait eu qualité de lieutenant
de vaisseau, et le succès sui-passa les
espérances qu'on avait conçues. Il obtint
en 1776 la place de directeur-général
des ports et arsenaux de la marine , et il
prouva , dans ce nouvel emploi , oîi il
rendit à l'état les services les plus écla-
tans , qu'il était aussi bon administrateur
que savant marin. C'est lui qui rédigea
tous les plans des opérations navales de
la guerre de 1778 , et ceux de toutes les
campagnes de découvertes, telles que
celles de La Peyrouse et de d'Elntrecas-
teaux. On lui doit aussi la réduction de
V Ordonnance du roi sur la régie et l' ad-
ministration des ports et arsenaux,
Paris, 1776, in-4. Le 27 octobre 1790,
il fut appelé au ministère de la marine
et des colonies , et il eu remplit les fonc-
tions avec l'intégrité qui l'avait toujours
fait remarquer, jusqu'au 17 mai 1791,
qu'il fut obligé de donner sa démission ,
le parti jacobin voulant le remplacer par
une de ses créatures. Louis XVI lui confia
alors l'éducation du Dauphin , avec le
titre de gouverneur} mais les orages de
n 9? Ip forcèrent 4e se retirer des affaires
FLE
publiques, et de chercher des consola-
tions dans l'étude. Il vécut dans l'oubli
jusqu'en 1793 , oii il fut arrêté : mais il
recouvra bientôt sa liberté. En 1797 il
vint siéger dans le conseil tles Anciens , et
lut exclu de cette assemblée lors des évé-
nemens du 1 8 fructidor. Après le 1 2 bru-
maire il devint sénateur, et termina sa car-
rièrele 1 8 août 1 8 1 0.Ona de lui 1 ° Foyage
fait par ordre du roi, c/il768en769, pour
éprouver les horloges marittes , Paris,
177 4,2 vol. in-4 , fig. 2° Découvertes des
FrançaU dans le sud-est de la Nouvelle-
Guinée , Paris, 1790, in-4. 3" Voyage
autour du monde , fait pendant les an-
nées 1790, 1791 et 1792 par Etienne
Marc/iand, Paris, 1798, 4 vol. in-4.
Ce voyage , précédé d' une introduc-
tion savante sur l'histoire de toutes
les navigations à la côte nord-ouest de
l'Amérique, contient des remarques
très intéressantes sur la navigation du
grand Océan. Le quatrième vol. contient
un grand nombre de cartes hydrogra-
phiques.
• FLEURIOT-LESCOT ( J. A. C. ),
né à Bruxelles en 1761 , fut obligé de
quitter son pays , lors des troubles du
Brabant , et vint se réfugier à Paris , où
il exerçait la profession d'architecte ,
mais avec peu de succès. Au commence-
ment de la révolution française il se jeta
avec fureur dans le parti des démago-
gues , comme presque tous les étrangers
qui se trouvaient alors à Paris , et devint
successivement substitut de l'accusateur
public , près le tribunal révolutionnaire,
commissaire aux travaux publics , et
enfin maire de Paris. Il s'était lait re-
marquer au club des Jacobins , et devait
son avancement et ses honneurs à Ro-
bespierre. Lorsque son protecteur fut
arrêté , il montra une fermeté de ca-
ractère qu'on ne lui snpposait pas , et
fut le principal moteur de l'insurrection
dirigée à cette époque contre la Conven-
tion. Après avoir fait sonner le tocsin ,
rassemblé le corps municipal , garni de
troupes la place de l'Hôtel de ville , il
voulut exciter le peuple à prendre la dé-
fense de Robespierre qu'il proclamait le
sauveur dç h patriç, )or;$qu'ii fut mii
hors de la loi , et arrêté par Bourdon de
l'Oise. Jugé bientôt et condamné , il.;fut
conduit à l'échafaud , le 28 juillet 17 94
avec ses complices, étant Agé d'environ
33 ans.
FLEURY ( Claude ) , originaire de
Normandie né à Paris , le 6 décembre
1C40 , d'un avocat au conseil , suivit le
barreau pendant 9 ans avec succès. L'a-
mour de la retraite et de l'étude lui
donnèrent du goût pour l'état ecclésia-
stique. Il rembra.ssa , et il en eut les
vertus. PrécepteuV du prince de Conti ,
en 1672, il le fut ensuite du comte de
Vermandoisen 1680. Ses soins auprès de
sou élève lui valurent l'abbaye du Loc-
Dieu en 1084 , et la place de sous-pré-
cepteur des ducs de Bourgogne, d'Anjou
et de Derry en 1689. Associé de Fénélon
dans ce noble emploi , il eut comme lui
l'art de faire aimer la vertu à ses élèves
par des leçons pleines de douceur et d'a-
grémens, et par ses exemples plus per-
suasifs que ses leçons. Louis XIV avait
mis en œuvre ses talens; il sut les ré-
compenser. Il lui donna en 1706 le riche
prieuré d'Argenteuil. L'abbé Fleury , en
l'acceptant , remit son abbaye du Lor-
Dieu. S'il avait ambitionné de plus
grandsbiens etdes dignités plus relevées,
il les aurait eus ; mais son désintéresse-
ment égalait ses autres vertus. 11 vécut
solitaire à la cour. Un cœiir plein de
droiture , des mœurs pures , une vie
simple , laborieuse , édifiante , une mo
destie sincère , une candeur admirable ,
lui gagnèrent les suffrages des courtisans
même les plus corrompus. Le duc d'Or-
léans jeta les yeux sur lui en 1716 , pour
la place de confesseur de Louis XV. Ce
choix fut approuvé de tout le#ionde. On
n'y trouva , dit l'abbé Dorsannc que le
défaut de 7a ans. Fleury , après avoir
formé le cœur du père , forma celui du
fils. Sa vieillesse l'obligea de se démettre
de cette place en 1722. 11 mourut d'apo-
plexie l'année d'après , dans sa 83* année.
Il était de l'académie française. Les ou-
vrages sortis de sa plume sont , 1 " Mœurs
des Israélites .- livre qui est entre les
mains de tous les fidèles , et que l'on
peat regarder comme le tableau le plus
FLË 335.
vrai de la vie des saints de l'ancien
Testament. 2° Mœurs des chrétiens , ou-
vrage réuni avec le précédent , dans un
seul vol. in-12. L'un peut servir d'intro-
duction à l'histoire sacrée , et l'autre à
l'histoire ecclésiastique. L'onction y règne
avec un esprit de candeur et de vérité
qui gagne le lecteur chrétien ; et avec
un discernement, des lumières et des
vues qni ravissent le savant et le phi-
losophe. 3" Histoire, eccle'siastique, en
20 vol. in-12, et in-4 . Le premier, pu-
blié en 1 691 , commence à l'établissement
de l'Eglise ; et le dernier , imprimé en
1722, finit à l'an 1414. Elle a été con-
tinuée par le Père Fabre, de l'Oratoire,
jusqu'à l'année 1595, 16 vol.; en tout
36 vol. in-4 et in-12. Elle a été réim-
primée à Bruxelles et à Caen. C'est ce
que irous avons de plus complet en notre
langue sur l'histoire ecclésiastique. Xéan-
moins, dit l'abbé Lenglet du Fresnoy,
ce sont plutôt des extraits cousus l'un
avec l'autre, qu'une histoire exacte et
bien suivie. Cet écrivain , si l'on en croit
l'abbé dcLonguerue , travaillait son livre
à mesure qu'il étudiait l'histoire de la
religion. On sent qu'il n'est pas maître
de sa matière , il ne marche qu'en trem-
blant, et presque toujours sur les traces
de Labbc et de Baronius. Il en était au
dernier volume de cet annaliste célèbre,
qu'il ne connaissait encore que le premier
vol. de l'excellente Critique AuVhte Pagi,
en 4lom. in-fol. Aussi plusieurs écrivains
ont écrit contre son Histoire. Le Père Ho-
noré de Sainte-Marie , carme déchaussé ,
publia à Malines , en 1 727 , des Observa-
tions sur l'Histoire eccle'siastique de
Vabbé Flewy , adressées à N. S. P. le
pape Benoit XIII , et nosseigneurs les
e'vêqucs , in-12, réimprimées à Malines
en 1729, et depuis (en 1740) sous lé
titre de Dénonciation de t Histoire ecclé-
siastique de Fleury , à nosseigneurs les
évcques ; en 1733, le Père Baudoin de
Housta , religieux augustin des Pays-Bas^M
fit paraître à Malines : La mauvaise foi
de M. F leury , prouvée par plusieurs pas-
sages des saints Pères, des conciles , et
d^ auteurs ecclésiastiques , qu'il a omis ,
tronqués , ou infidèlement traduits dans
336 t*LË
son Histoife. En 1736 , 6ii îiiipninà a
Avignon des Observations theologiques,
historiques, critiques , etc. , sur l'Histoire
ecclésiastique de feu M. Vabbéde Fleuri/,
avec des dissertations , analyses des
Pères, et autres pièces détachées, 2 vol.
m-4. L'ouvrage devait avoir 8 vol. , mais
la suite n'a pas vu le jour ; en 1 802 il
parut des Réflexions sur l'Histoire ec-
clésiastique de Fleury , attribuées à
l'abbé Rossignol ; et , à peu près dans le
même temps M. Marchetti, archevêque
d'Ancyre , donna une Critique de l'His-
toire ecclésiastique de Fleury , qui fut
traduite en français , et imprimée dans la
Belgique en 1803 ; elle a été réimprimée
à Besançon en 1819, en 2 vol. in-12.
Quoiqu'on reproche à l'auteur de n'avoir
pas assez ménagé sou adversaire , et d'a-
voir qualifié quelquefois .ses méprises
avec une sévérité un peu rigoureuse , elle
doit trouver place dans les bibliothèques,
à côté de l'histoire de Fleury ; enfin , en
1807 , Muzzarelli publia à Rome des Re-
marques sur l'Histoire ecclésiastique ,
et spécialement sur les discours de
Fleury , in-8 , traduites en français sur
la A' édition. Dom Cellier , et les auteurs
de l'Histoire de P Eglise gallicane , ont
relevé plusieurs erreurs de faits et de
dates dans Fleury. Les Actes des Martyrs ,
qu'il a soin de rapporter avec trop de
détail , devraient avoir plus de précision,
et ne montrer que l'héroïsme de leurs
souffrances , sans nous présenter un pro-
cès-verbal. Son stile est d'une simplicité
touchante et d'une onction qui édifie ;
mais il esttrès sQuvent négligé , languis-
sant , monotone , plein d'héllénismes et
de latinismes. he& Discours préliminaires
répandus dans cet ouvrage , et imprimés
séparément en 1 vol. in-12 , sont écrits
avec beaucoup plus d'élégance , de pu-
reté, de précision et de force» on y
trouve d'excellentes choses , mais il y en
a aussi qui ont été critiquées avec raison
{voyez Honoré de Sainte-Marie', Housta).
On remarque dans l'auteur une telle pré-
dilection pour la discipline de la primi-
tive église , qu'il semble improuver tout
ce qui n'a pas l'empreinte des premiers
siècles. Comme si la discipline de l'Eglise
n^ctaît pas essentiellement variable , ou
que l'église primitive dût en tout servir
de modèle dans les siècles postérieurs.
« On ne peut trop respecter la primitive
» église , dit un auteur modéré et équi-
» table ; mais la haute idée qu'on en a ,
« ne doit pas servir à nous faire mépriser
>' l'église des derniers siècles. Dans la
» primitive église , parmi beaucoup de
» sainteté , il ne laissait pas de se glisser
» des relàchemens , et dans l'église des
» derniers siècles, parmi des relâche-
» mens qui s'y sont glissés , il ne laisse
)' pas d'y avoir encore beaucoup de sain-
» teté. » Il y a aujourd'hui plusieurs abus
réformés qui avaient subsiste durant des
siècles. En comparant sans prévention
l'état de l'Eglise de nos jours dans toutes
ses parties , avec son état dans les pre-
miers siècles , on trouvera que les avan-
tages qu'elle n'a plus sont remplacés
par d'autres. Erasme , qu'on peut citer
hardiment en cette matière , après avoir
développé ce parallèle dans toute son
étendue, conclut que si saint Paul reve-
nait sur la terre, V état actuel de l'Eglise
ne lui déplairait pas. « Croyez-vous , dit
» un homme d'une exacte logique , que
» l'Eglise a le droit de régler sa disci-
» pline, et sur la pénitence, et sur les
i) appels , et sur les élections, et sur les
)> institutions canoniques , et sur les ex-
» emptions , et sur tout autre sujet reli-
» gicux? Répondez oui ou non. Si vous
» dites oui, eh' bien ! attendez donc
» qu'elle ait substitué la règle ancienne
)> à la règle plus récente. Si vous dites
» non , il est d'un imbécile de nous pro-
» poser comme un retour aux règles de
)) l'Eglise , ce que l'Eglise n'a pas le droit
» de régler* « [voyez Morin , Thomassin).
L'on ne doit pas ignorer que ces Discours
ont été altérés par des mains étrangères.
On en a pour garant la première édition
du 9" discours sur les libertés de l'église
gallicane, qui se trouve le 12'' dans la
nouvelle édition. On y a ajouté, dans les
éditions postérieures des notes, sous pré-
texte de corriger le texte , et ensuite on
y a changé ou supprimé tout ce qui ne
s'accordait pas avec la doctrine de ces
écrivains téméraires , qui ont cru pou-
rLË
voir mettre leur faux dans une tnoîsson
qui ne leur appartenait pas. On a donne
une table des matières pour VHistoire
ecclésiastique de Fleury , et la continua-
tion du Père Fabre , ouvrage fanatique ,
et fruit de l'esprit de secte {voyez Fabre),
en 1 vol. in 4, et 4 vol. in-12. La der-
nière édition de cette Histoire est celle
de Nîmes, en 25 vol. in-8 , 1779-1780.
En général , la lecture de Fleury ne fait
pas aimer les pontifes, et elle a fourni
des armes à leurs ennemis. Aussi voit-on
des personnes pieuses et éclairées craindre
de recommander sou Histoire aux jeunes
gens ou aux femmes qui prendraient
trop au pied de la lettre des réflexions pré-
sentées souvent un peu crûment. Plu-
sieurs communautés ne lisent pas publi-
quement son ouvrage, et des théologiens
qui n'ont pas moins de sagesse que de
lumière , et qui sont pleins d'ailleurs d'es-
time pour Fleury^, ont souvent regretté
qu'il eût affaibli l'utilité de son travail
par son penchant au blâme , et par uu
manque de réserve qui les affligeait et les
étonnait de sa part. L'Histoire de Fleury a
été traduite en latin, et continuée par le
Père Alexandre de Saint-Jean de la Croix,
carme déchaussé. Celte continuation est
un répertoire de tout ce qu'on a dit
d'horreurs contre la société des jésuites.
Les contes les plus absurdes , ceux même
que les protestans et les philosophes du
jour ont réfelés , y sont reproduits comme
des matières dignes d'une histoire ecclé-
siastique. Cet ouvrage a été vivement
attaqué par M. Mangold, dans une cri-
tique publiée à Augsbourg, 1783-1786,
3 vol. in-8. i° Institution au droit ecclé-
siastique , en 2 Aol. in-12 ; ouvrage fort
abrégé, mais plein de bonnes choses,
quoiqu'il y en ait aussi quelques-unes
qui ont paru repréhensibles. M. Boucher
d'Argis en donna une nouvelle édition
en 1764, enrichie de notes, b" Catéchisme
historique, in-12. Ouvrage qui a eu le
plus grand cours; cependant tout n'y
est pas rigoureusement exact : M. Paquot
en a donné une édition avec des notes et
quelques changemens. Le ton en est sec,
sans onction et sans intérêt. 6° Traité du
choix et de la méthode des études , in-12.
V.
tm
55^
Ces deux derniers ouvrages ont été tra-
duits en espagnol, de même que les
Mœurs des Israélites. 7" Devoirs des
maîtres et des domestiques , in-1 2 ,
estimé. 8° La f^iede la mère d^ Arbouse ,
réformatrice du Val-de-Grace, in-12.
9° VHistoire du droit français , in-1 2 .
On la trouve aussi à la tête de Y Institu-
tion de M. d^Argou. 10° Le Traité du
droit public , 2 vol. in-12, 17C9 : ou-
vrage posthume , et auquel il ne mit pas
la dernière main. On a recueilli les Opus-
cules de Fleury à Nîmes en 1 7 80, en 5 vol.
in-8. ( Ils contiennent tous les ouvra-
ges de Fleury, à l'exception deVIlistoire
ecclésiastique. M. Emery , supérieur-
général de la congrégation de Saint-Sul-
pice, a publié en 18^7 , sous le titre de
Nouveaux opuscules, in-12 , quelques
pièces inédites de Fleury , et surtout le
manuscrit autographe du Discours sur
les libertés de Féglise gallicane , qui
avait été imprimé après la mort de l'au-
teur , avec des notes violentes et er-
ronées, attribuées à Débonnaire, qui
provoquèrent un arrêt du conseil , du 9
septembre 1723 , pour supprimer l'écrit,
et qui firent mettre le discours à l'index,
par décret du 13 février 1729. C'est donc
un service important que M. Emery a
rendu à Fleury, en publiant cette édition,
qui fait connaître la véritable opinion de
ce .savant ecclésiastique sur un point
d'un si grand intérêt. Le volume com-
mence par une préface rédigée avec
beaucoup d'exactitude et de sagacité , où
M. Emery traite plusieurs questions,
discute quelques assertions de Fleury ,
et porte uu jugement aussi solide que
modéré sur cet auteur , que les jansé-
nistes affectaient de compter au nombre
des partisans de leur doctrine , ou au
moins de leur opposition à la cour de
Rome, tandis qu'il est prouvé par plu-
sieurs affaires , et notamment par celle
de l'évêquede Saint-Pons, que ce célèbre-
historien , loin d'approuver les entre-
prises des parlemens contre la cour de
Kome , regrettait au contraire l'espèce
de guerre que l'on faisait au pape , et
souhaitait que l'on gardât plus de mesure
à son égard , et surtout qu'on pesât les
m FLÈ
conséquences de ces plaintes , A,t ces
tléAances , de ces protestations et de ces
condamnations si fréquentes dans l'his-
toire de la Biag^istrature. }
FLEURY (Apdré-Hercule de) naquit
à Lodève le 22 juin 1 G63 , et fut mené à
Paris, à l'âge de 6 ans. Il fit ses huma-
nités au collège des jésuites, et sa phi-
losophie au collège d'Harcourt. Il brilla
dans l'un et dans l'autre. Destine à l'étal
ecclésiastique , il fut chanoine de Mont-
pellier et docteur de .Sorbonne. Introduit
à la cour, il fut aumônier de la reine et
ensuite du roi. Une figure agréable , un
esprit délicat, une conversation assai-
sonnée d'anecdotes, une plaisanterie
fine , lui gagnèrent généralement les
cœurs. Ou sollicita vivement pour lui.
Louis XIV le nomma en 1698 à l'évé-
ché de Fréjus. « Je vous ai fait atten-
» dre long-temps , lui dit ce prince, mais
» vous avez tant d'amis, que j'ai voulu
)) avoir seul ce mérite auprès de vous. »
L'évèque de Fréjus était dans son diocèse
lorsque l'armée des alliés se répandit eu
Provence. Il plut aux généraux ennemis;
le duc de Savoie et le prince Eugène lui
accordèrent ce qu'il voulut. La contri-
bution fut modique. La ville de Fréjus
n'éprouva aucun désordre , et la campa-
gne des environs fut épargnée. Louis
XIV , près de mourir , le nomma précep-
teur de Louis XV. Successeur des Bossuet
et des Fénélon, dans l'emploi important
de former les rois, il s'attacha comme
eux à cultiver l'esprit et lecœur du jeune
monarque, et en fit de bonne heure le
bicn-aime de la France. En 1726, il
fut fait cardinal, et bientôt après son
élève le plaça à la tète du ministère : il
avait alors plus de 70 ans. Le fardeau
du gouvernement nel'eftraya point, et il
montra jusqu'à près de 90 ans une tête
saine, libre et capable d'affaires. Depuis
1726 jusqu'à 1740, tout prospéra. Il
commença et termina glorieusement la
guerre contre Charles VI. Il obtint la
Lorraine pour la France. Cette guerre de
1733 fut finie en 173G, par une paix qui
ne donna le calme à l'Europe que pour
quelques années. Une nouvelle guerre,
en 1 740 , vint troubler les derniers mo-
mens du cardinal de Fleury. Il mourut
en 1 743 , dans sa 90* année, avec la dou-
leur de n'avoir vu en cette dernière
guerre que des malheurs, et des malheurs
que le public lui reprochait , peut-être
mal à propos, car il est certain que cette
guerre avait été entreprise contre son
avis. Comptant sur la paix, il avait né-
gligé la marine; le peu qui restait à la
France de forces maritimes fut détruit
parles Anglais. L'économie qu'il mettait
dans sa maison , il voulut , autant qu'il
était possible , l'introduire dans l'admi-
nistration publique. C'est pour cette rai-
son qu'il ne fit pas construire des vais-
.seaux. Son caractère tranquille lui fil peu
estimer et même craindre les esprits ac-
tifs et profonds ; il les écarta trop des
grandes places. Il se défiait plus des hom-
mes , qu'il ne cherchait à les connaître.
L'élévation , dit un homme qui l'avait
beaucoup connu, manquait à son ca-
ractère. Ce défaut tenait à ses vertus, à
la douceur, à l'égalité, à l'amour de
l'ordre et de la paix. Il laissa tranquille-
ment la France réparer ses perles et s'en-
richir par un commerce immense , sans
faire aucune innovation. S'il s'opposa vi-
vement aux jansénistes , c'est qu'il était
persuadé qu'en matière de religion toute
nouveauté était à redouter : et que de
toutes les sectes qui ont déchiré lEglise,
celle-ci était peut-être la plus dange-
reuse. « Un ministre , dit l'éloquent au-
» leur de son Oraison funèbre , guidé
)> par ces grandes vues de politique sage
» et vertueuse , n'aurait-il pas démenti
M tous ses principes s'il avait négligé les
M intérêts de la religion , affligée parmi
» nous par tantde divisions fatales? Jours
■ de présomption et d'indocilité, où,
» par un rafanement de souplesse et de
« dissimulation profonde , l'erreur vaste
u et hardie dans ses projets, timide et
» mesurée dans ses démarches, condamne
» l'Eglise, et ne la quitte pas; reconnaît
» l'autorité , et ne plie pas ; dédaigne le
» joug de la subordination , et ne le se-
» coue pas; respecte les pasteurs, et ne les
» suit pas; dénoue imperceptiblement
» les liens de l'unité , et ne les rompt
» pas; sans paix et sans guerre, sans ré-
ta
« volte et sans obéissance. » Le cardinal
de Fleury n'était pas porté à faire de la
peine ; il n'aimait ni à troubler la tran-
quillité des autres ni qu'on troublât la
sienne. Il fut heureux autant qu'un mi-
nistre peut l'être. Il conserva dans l'âge
le plus avancé, et dans les embarras des
affaires , la sérénité et la gaieté de ses
premières années. Il faut bien se garder
de le juger d'après ce que Voltaire et les
philosophes en ont dit. Le blâme et les
éloges de tels personnages doivent tou-
jours se prendre en raison inverse.
* FLEURY ( Marie-Maximilien-Hector
DK RossKT de ), de la même famille que le
précédent, né en 1770, fut arrêté en
1793 comme suspect, et renfermé dans
la prison du Luxembourg, où il conserva
sa gaieté naturelle , et passait la journée
à jouer à la balle ou aux barres ; mais
ayant vu périr ou proscrire sa famille ,
le désespoir s'empara de lui , et il écrivit
à Dumas , président du tribunal révolu-
tioniiaire , une lettre conçue en ces ter-
mes : « Homme de sang ! égorgeur ! can-
» nibale ! monstre ! scélérat ! tu as fait
» périr ma famille ; tu vas envoyer à l'é-
» chafaudceux qui paraissent aujourd'hui
» devant ton tribunal ; tu peux me faire
» subir le même sort, car jeté déclare que
» je partage leurs sentimens. « Voilà le
billet doux qu'on m'écrit , dit Dumas à
Fouquier-Tinville , dis-moi ce qu'il faut
y répondre. « Ce Monsieur paraît pressé,
» répond Fouquier , il faut le satisfaire. »
Aussitôt deux gendarmes vont prendre
le jeune comte , le placent sur le banc
des accusés , et il est condamné à mort
avec cinquante autres personnes qu'il
n'avait jamais vues , le 18 juin 1794,
comme complice de rassassinat de Col-
lot d'Herbois. Vêtu d'une chemise rouge,
comme ses compagnons , il fut conduit à
l'échafaudle même jour.
FLINCK (Godefroij, peintre, né à
Clèves eu 1616, eut dès sa plus tendre
jeunesse une forte inclination pour le
dessin. Ses parens l'ayant mis chez un
peintre , il fit dans cet art des progrès
rapides. Lorsqu'il se vit en état de tra-
vailler seul, il alla à Amsterdam. Le goîlt
générai était alors pour la maniçi-e de
FLI 33g
Rembrant; Flinck se mit pendant un au
sous la direction de ce fameux peintre.
On assure qu'il ne lui fallut pas plus de
temps pour imiter parfaitement son maî-
tre. Il abandonna ensuite sa manière ,
pour prendre celle des Italiens, qu'il
saisit parfaitement. Les ouvrages qu'il fit
depuis lui acquirent une si grande estime,
que les bourguemestres d'Amsterdam le
choisirent preférablement à tout autre
pour faire 8 grands tableaux historiques,
et de 4 demoindregrandeur. Ilmourutau
milieu de ce travail, le 2 décembre 1660,
âgé seulement de 44 ans.
* FLIIVDERS (Matthieu) , navigateur
anglais , né à Donington dans le Lincoln-
shire , fit successivement plusieurs voya-
ges pour la reconnaissance des côtes de
la Nouvelle-Hollande ou Notasie , et il en
écrivit la relation en anglais sous ce titre :
Voyage aux terres australes , entre-
pris pour compléter la découverte de ce
grand pays et exécute' pendant les an-
nées 1801, 1802 et 1803, Londres, 1814,
2 vol. in-4, avec un atlas. Flinders mou-
rut le 19 juillet de la même année, peu
de jours après avoir corrigé la dernière
feuille de son ouvrage et avant sa publi-
cation. Ce voyage ne renferme presque
que des détails nautiques, et place ce na-
vigateur au nombre des meilleurs marins
de .son temps et des hydrographes les plus
distingués.
* FLINS DES OLIVIERS ( Claude-
Marie-Louis-Emmanuel Carbon de), litté-
rateur français , né à Reims en 1757, était
conseiller en la cour des monnaies au
commencement de la révolution , qui le
priva de sa charge. Il se livra alors tout
entier à la littérature , et il prostitua sa
plume à propager les opinions anarchi-
ques. Malgré ses efforts, il resta long-
temps oublié , et il n'obtint qu'en 1 802 ,
par la protection de M. de Fontanes , la
place de commissaire impérial près le tri-
bunal de Vervius , qu'il occupa jusqu'à
sa mort , arrivée en 180G. On a de lui
1° Voltaire, poème lu à la fête acadé-
mique de la loge des Neuf Sœurs , Paris ^
1779, in-8. 2° Fragmens d'un poème
sur r affranchissement dés serfs , 1781,
in'8 . 3° Poèmes et discours en vers , lus
34o FLO
et mentionnés aux séances publiques de
l'académie française , 1782, in-8. k° Le
réveild' E piménide à Paris, ou Les étren-
nes de la liberté', comédie en 1 acte et en
vers, 1700, in-8. b" Le mari directeur, ou
Le déménagement du couvent, comédie
en 1 acte en vers , 1 792 ; B° La jeune hôtes-
se, comédie en trois^acteseten vers, imitée
de \aLocondiera deGoldoni, 1792, in-8.
7° La papesse Jeanne, comédie en 1 acte
représentée de 1790 à 1793, etc. Les
Voyages de V opinion, Paris, 17 89 : c'est
une espèce de journal dont il n'a paru que
cinq numéros. On voit au titre de la plu-
part des ouvrages de Flins quelle cause il
a servi par ses écrits. Il a été l'éditeur des
oeuvres du chevalier Berlin, 1785, 2 vol.
i.i -8 , et l'un des collaborateurs du jour-
nal le Modérateur , à la relation duquel
présidait Fontanes, son ami.
* FLIPART (Jean-Jacques), graveur,
né à Paris en 1 723 , fut élève de Laurent
Cars, et devint membre de l'académie
royale de peinture. Cet artiste, qui avait
une très grande connaissance du dessin,
a beaucoup gravé. Ses principales estam-
pes sont une sainte famille , d'après Ju-
les Romain -,10 paralytique servi par ses
enfans ; V accordée de village ; le gâteau
des rois , tous trois d'après Creuse ; une
tempête d'après Vernet ; deux sacrifices,
d'après Vien ; Adam et Eve ; NotreSei-
gneur à la piscine d'après Dietrich , etc.
11 est mort le 9 juillet 1782.
FLODOART ou Frodoard, historien,
né à Epernayen 893 , mort dans un mo-
nastère en 9G6 , disciple de Rémi d'Au-
xerre , chanoine de Reims , et ensuite
curé de Cormicy et de Coroy , a laissé
une Chronique des derniers rois Carlo-
vitigens , et une Histoire de Ic'glise de
Reims. Sa Chronique , généralement esti-
mée des savans, commence à l'année
919, et finit en 966. Pithouet Duchesne
l'ont publiée , elle ne contient exactement
que ce qu'il a pu voir et discuter par lui-
même dans l'espace de sa vie , oii il jouis-
sait de toute la force de sa raison. Aussi
y trouve-t-on un choix si judicieux des
événemenis intéressans et mémorables ,
soit de France, soit des pays voisins,
çru'on ne peut guère puiser à une meiU
FLO
leure source. Son histoire comprend toute
la suite historique de l'église de Reims ,
depuis sa fondation jusqu'en 949. La meil-
leure édition de cet ouvrage curieux et
intéressant pour les Rémois , est celle de
George Covener, in-8. Douai, 1617. (Ni-
colas Chesneau en a donné une traduction
française en 1580, in-4; maiselle était
fautive et incomplète. M. Guizot en a pu-
blié une nouvelle dans sa Collection des
mémoires relatifs à l'histoire de France
tome 5 et 6 ). On a encore de lui les Vies
des saints de la Palestine , d'Antioche
et d'Italie , en vers ; l'Histoire des pa -
triarches , des apôtres et des souverains
pontifes jusqu'à Léon Vil. On conserve
cet ouvrage en manuscrit chez les Pères
carmes déchaussés à Lille , avec des dis-
sertations et des notes du Père tlonoré de
Sainte-Marie. Le stile de Flodoardse res-
sent du siècle où il a écrit.
* FLOGEL ( Charles-Frédéric ) , écri-
vain allemand, né à Jauer en Silésie,
en 1729 et mort en 1788, fut professeur
de philosophie à l'académie des jeunes
nobles de Leignitz ; il s'est attaché d'une
manière toute particulière à l'histoire de la
littérature et se proposait de la suivre dans
toutes ses parties; il est auteur 1° d'une
Introduction àVart d^ inventer , Breslau ,
1760, in-8. 2° Histoire de l'esprit hu-
main , 1765 , in-8. Elle a été traduite en
italien et publiée à Pavie en 1 788. 3° His-
toire de la littérature comique, 1784,
4 vol. in-8. Les 3 premiers volumes trai-
tent du comique en général et de la satire
chez tous les peuples anciens et moder-
nes ; le 4* est destiné à la comédie, i" His-
toire du comique grotesque , 1 788 , in-8,
qui fut suivie de V Histoire des fous en
titre d'office , et de l'Histoire du burles-
que. Ces trois ouvrages ne furent publiés
qu'après sa mort. Toutes ces productions,
écrites en allemand, jouissent d'une ré-
putation méritée.
FLONCEL ( Albert-François ), né à
Luxembourg en 1697 , avocat au parle-
ment , censeur royal, de plusieurs aca-
démies d'Italie , s'est fait un nom par son
amour pour la langue italienne. Nommé
secrétaire d'état de la principauté de Mo-
p^CQ en nsi f il joignit à cette chargée
FLO
celle (le secrétaire des affaires étrangères
en 1735, sous MM. Amelotet d'Argenson.
Il fut enlev é aux lettres en 1773. Sa bi-
bliothèque , composée de 8,000 articles
de livres italiens , a été vendue après sa
mort. Elle a donné lieu d'en faire un ca-
talogue curieux j 17 74,2 vol. in-8. — M"'®
Floncel ( Jeannfi Françoise de Lavau ) ,
morte en 1764, à 49 ans, avait traduit les
2 premiers actes de l'Avocat vénitien
de Goldoni, 1760, ia-12.
' FLOOD ( Henri ), membre du parle-
ment d'Angleterre, né en 1732, et mort
le 2 décembre 1791, était fils du chef de
justice du tribunal du banc du roi en Ir-
lande : après avoir fait ses études d'une
manière peu brillante au collège de la
Trinité de Dublin, puis à l'université
d'Oxford, il crut que ses richesses lui
donnaient assez d'esprit, et végéta quelque
temps dans un état d'insouciance assez
fréquent chez les fils de grands seigneurs.
Son gouverneur , le docteur Markham ,
pour le détromper, lui fit faire la con-
naissance de jeunes gens fort instrqits.
Flood rougit alors de son ignorance, tra-
vailla et répara le temps perdu. Elu en
1759, membre de la chambre des com-
munes en Irlande, il se distijigua par une
éloquence brillante , et par Je zèle et la
persévérance qu'il mit à soutenir toutes
les mesures qu'il regardait comme utiles
à son pays , et qu'il parvint presque tou-
jours à faire adopter. Son adhésion et son
opposition alternatives aux mesures mi-
nistérielles lui attirèrent fréquemment
le reproche de versatilité. En 1783, il fut
élu membre du parlement anglais pour
la ville de Winchester, et il représenta le
bourg de Seaford dans la session suivante.
Le dernier discours qu'il prononça dans
le parlement anglais en 1790 avait pour
objet une réforme dans la représenta-
tion parlementaire; et le plan qu'il pro-
posa obtint l'approbation de Fox et des
hommes les plus éclairés. Son influence
était pourtant affaiblie dans les dernières
années de sa vie. Il mourut d'une pleu-
résie qu'il contracta en travaillant à étein-
dre un incendie qui s'était manifesté dans
un de ses bureaux. Son éloquence était
remarquable par la force du raisonnement
FLO 34 I
et par la pureté et la richesse de son sti-
le , plein d'images et d'allusions classi-
ques. Il excellait surtout dans la réplique,
et malheur à l'adversaire qui provoquait
ses sarcarmes. On a imprimé plusieurs de
ses discours prononcés dans le parlement,
parmi lesquels on distingue celui sur le
traite de commerce avec la France ,
1787 , in-8. Dans ses momens de loisir il
s'occupait aussi de poésie. On a de lui
des vers sur la mort de F réde'ric, prince
de Galles , publiés dans la collection
d'Oxford en 1751 ; une orfe sur la Renom-
mée, 1785, in-8; la traduction de \dL pre-
mière ode pythique de Pindare, 1785.
* FLOR (Roger), né à Tarragone, le
14 juillet 1262, prit l'habit des templiers,
et fit sa profession à Barcelonne , dans la
maison de cet ordre. Etant passé en Pa-
lestine , l'époque des dernières croisades
avec plusieurs chevaliers catalans , il s'é-
tablit à Saint-Jean-d'Acre ; mais les infi-
dèles ayant assiégé cette place, elle fut
prise d'assaut en 1291. Roger, ramassant
alors tous las chevaliers et les chrétiens
dispersés, en forma une petite armée na-
vale, avec laquelle il porta des secours et
des vivres aux armées chrétiennes, infesta
les côtes et battit souvent les flottes de
l'ennemi. Il se rendit ensuite en Sicile ,
au secours de Frédéric d'Aragon, qui dis-
putait la couronne de cette île aux rois
de Naples de la maison d'Anjou, et il con-
tribua beaucoup, par son intelligence et
sa valeur, à le faire triompher. De là il
alla offrir ses services à l'empereur Andro-
nic , attaqué par les Turcs. Roger , à la
tête de deux mille Catalans qui l'avaient
suivi , et aidé des troupes de l'empereur,
remporta sur les Turcs une victoire signa-
lée, qui rappela la tranquillité dans l'em-
pire. Andronic, pour récompenser ce ser-
vice, lur accorda sa nièce en mariage ( il
n'avait fait que des vœux simples ), avec
le titre de César. Il combla également
d'honneurs et de richesses les principaux
officiers de Roger , et notamment le comte
d'Entenca, qu'il éleva à la dignité de
Magneduc (généralissime des armées de
terre et de mer ). Mais ayant ensuite
soupçonné que Roger tramait avec ses
Catalans un complot pour s'emparer 4q
342 FLO
son trône, il le fit assassiner une nuit ( le
23 avril 1 306 ) , pendant que celui-ci pas-
sait à l'appartement de sa femme. Le
comte d'Eutenca , arrêté en même temps,
fut condamné à mort. Les Catalans , in-
dignés , se renfermèrent dans Gailipoli ,
d'oii , par de fréquentes sorties , ils ven-
gèrent cruellement la mort de leur géné-
ral , et c'est à celte époque qu'on doit
rapporter les dégâts qu'ils firent dans
l'empire, et non au temps de la guerre
contre les Turcs, comme le prétendent
• quelques historiens.
FLORE , ou Floris , ou Frakcflore
( François ), naquit à Anvers en 1520.
Ce peintre , le Raphaël de la Flandre ,
était fils d'un tailleur de pierres, et apprit
la sculpture sous son oncle Claude Flore
jusqu'à l'âge de 20 ans , que la réputation
de Lambert Lombard , habile peintre ,
l'attira à Liège , oii il devint un des prin-
cipaux élèves de ce maître. De là il alla
à Rome , oii il étudia l'antique et les ou-
vrages de Michel-Auge. De retour dans sa
patrie, il la décora de ses tableaux. Il di-
visait la journée en deux parties égales,
l'une consacrée à peindre, et l'autre à
boire. Il aimait moins le jeu que le vin ,
et le vin moins que le travail. Il disait
ordinairement : « Le travail est ma vie
» et le jeu est ma mort. » Il mourut en
1570, à 50 ans.
FLOREJNT ou Florentius est le nom
de cinq comtes de Hollande qui ont régné
de l'an 1062 à l'an 1296. — Florent V,
comte de Hollande, fils de Guillaume,
roi des Romains , perdit son père dès sou
jeune âge. Livré à divers tuteurs , il y
eut beaucoup de divisions dans son état.
Dès qu'il put gouverner par lui-même,
il fit la guerre aux Frisons rebelles. Ayant
enlevé à un gentilhomme , nommé Ge«
rard de Velsen , son épouse , il fut tué et
percé de 32 coups d'épce par ce mari ir-
rité. Le meurtrier ayant été pris fut con-
duit à Loyde , oîi on le mit dans un ton-
neau plein de clous. On le roula ainsi dans
toute la ville , et il finit sa vie par ce cruel
supplice. Florent mourut en 1296, après
avoir régné 40 ans. Il laissa sept fils
et quatre filles de Beatrix, fille de Gui
4e D^mpierre, cwtç de Flandre, qu'il
FLO
avait ëpousëe après la mort de Hugues de
Châtillon.
FLORENT ( François ) , d'Amai-le-
Duc , professeur en droit à Paris et à Or-
léans, mort dans cette dernière ville en
1650, a laissé des ouvrages de droit,
que Doujat publia in-4, en 2 parties, 1679.
La vie de ce jurisconsulte , également re-
commandablc par sa probité et ses lumiè-
res, est à la tête de ses œuvres.
FLOREINT-CHRÉTIEJV. f^oyezCaRÉ-
TIEN.
FLORENTIN ( S. ) , martyr de Cha-
rollois , qu'on croit avoir souffert la mort
pour la foi vers 406.
FLORENTIN ( S. ) , premier abbé du
monastère que fonda à Arles en 548,
saint Aurélien , évêque de cette ville, se-
condé par les libéralités du roi Childe-
bert. 11 mourut le 12 avril 553, à l'âge
de 70 ans, après avoir gouverné ses reli-
gieux avec autant de douceur que d'édi-
fication pendant cinq ans et demi. Ses
reliques renfermées dans une châsse d'ar-
gent sont aujourd'hui dans l'église pa-
roissialede Sainte-Croix de la même ville.
On lit sur le tombeau de marbre où elles
étaient autrefois, l'épitaphe du saint en
vers acrostiches. C'est le premier exemple
que fournisse l'antiquité ecclésiastique
de ce genre de poésie , dont tout le mérite
consiste en une combinaison , qui ne peut
que donner des entraves au génie , sou-
vent aux dépens de la vérité et de la
raison.
* FLOREZ ( Henri ) , savant espagnol,
né à Valladolid le 14 février 1701. Il prit
l'habit religieux dans l'ordre de Saint-
Augustin en 1715, et se fit bientôt dis-
tinguer par sa piété et ses talens. Après
avoir professé pendant quelques années
la théologie , il se livra exclusivement à
l'étude de l'histoire sacrée et profane, et
devint très fort dans l'histoire des anti-.
quités. Ce savant religieux mourut à Ma-
drid le 2 août selon les uns, et le 5 mai sui-
vantlesautresderannéel773, après avoir
publié les ouvrages suivans : 1° un Cours
de théologie, en 5 vol. in-4. 2° Clavc
historical, 1743, in-4, ouvrage dans le
genre de l'art de vérifier les dates, etre-
Biarijuable par l'e-xactitude , l'ordre et 1»
précision qui y régnent. Ce livre fut réim-
primé pour la 8« fois en 1794. 3°Za Es-
pana sagrada , o Theatro geographico-
historico de la iglesia de Espana , 3Ia-
drid, 1747-79, 29 vol. in-4. Elle a été
continuée par le Père Risco , qui publia
le 30* vol., et le Père Fernandès, qui
donna les tomes 31 à 34. Cette histoire
de l'église d'Espagne se fait remarquer
par le choix et la certitude des faits, et
par la marche sûre et rapide du discours.
4* Espatia carpetana. 5° Mcdallas de
las colonias , municipios y pucblos an-
tiguos de Espana, Madrid, 1757-1773,
3 vol. grand in-4 , recueil qui eut un
grand succès , et fit recevoir l'auteur as-
socié correspondant de l'académie royale
des Inscriptions et belles-lettres de Ma-
drid. 6° Dissertation de la Cantabria ,
Madrid, 1768, in-4. 7° Mcmorias de las
reynas cathoUcas , 1770, 2 vol. in-4.
8" Un Traité sur la botanique , et les
sciences naturelles , etc.
* FLORIAN ( Jean -Pierre -Claris ,
chevalier de ) , littérateur français , né le
C mars 17 55, dans le château de Florian
près de Sauve dans les Basses-Cévennes ,
d'une famille noble et distinguée dans
les armes , fut d'abord envoyé dans une
pension à St.-Hippolyte où il fit peu de
progrès : mais ce que le travail ne donna
point, l'esprit naturel et d'heureuses dis-
positions vinrent l'apporter , et le jeuuc
Florian se fit bientôt remarquer par ses
saillies fines et délicates. Le frère aîné
du père de Florian , le marquis de Flo-
rian, avait épousé une nièce de Voltaire :
celte alliance valut au jeune Florian
l'honneur d'être présenté de bonne heure
au philosophe de Ferncy, qui l'accueilit
avec amitié, lui donna des conseils, et
l'engagea fortement à étudier , comme
l'y engageait déjà sa mère Guillette de
Saigne, castillane d'origine, la langue et
la littérature espagnoles, trop négligées
en France depuis Louis XIV. Florian ter-
mina ses études littéraires à Ferney, et à
l'âge de 1 5 ans il entra dans les pages du
duc de Pentiuèvre qui eut toujours pour
lui la plus grande bienveillance. Après
avoir fait son éducation mililaire , sui-
vant les usages du temps , il alla à l'é-
fLÔ
â4S
eole (l'artillerie de Bapaunie i Mais en-
nuyé des études sérieuses auxquelles il
était astreint , il passa comme sous-lieu-
tenant dans le régiment de dragons-Pen:
thièvre, où il ne tarda pas à devenir ca-
pitaine. Bientôt après , il quitta le service
militaire et accepta la place de gentil-
homme ordinaire auprès du duc de Pen-
thièvre, qui le traita presque en ami, et
le chargea de la douce mission de distri-
buer ses bienfaits , c'est-à-dire , comme
le disait le prince lui-même, de partager
%e^ bonnes fortunes. Fidèleàses maîtres,
il ne prit aucune part à la révolution
dont il déplorait les honteux excès. Forcé
comme noble, en 1793 , de quitter Paris ,
il se retira à Sceaux où il fut arrêté par or-
dre du comité de sûreté générale, et trans-
féré à la prison de la Bourbe, dite alors le
port-libre .- il ne recouvra sa liberté
qu'après le 9 thermidor ; il retourna dans
son asile de Sceaux ; mais sa captivité avait
tellement dérangé sa santé, la révolution
lui avait fait éprouver tant d'émotions
violentes, qu'il en conserva un sentiment
profond de tristesse et de mélancolie qui
abrégea ses jours et le conduisit au tom-
beau, à l'âge de 38 ans, le 13 septembre
1 794. La réputation de Florian n'est point
fondée sur les événemens de sa vie que
nous venons de raconter : militaire et
courtisan, il ne fit rien dans ces deux po-
sitions qui mérite d'être raconté avec
détail; mais ce fut un écrivain distingué,
qui eut un genre à part, et qui a fait des
ouvrages originaux que tout le monde
a lus. Dans les garnisons où il s'était
trouvé , lorsqu'il était sous les drapeaux ,
il n'avait pas consacré ses loisirs , comme
la plupart de ses camarades , à des plai-
sirs sans utilité, ou à ces sortes d'amuse-
mens qui cessent d'être frivoles pour de-
venir coupables. Ses momens de repos
avaient été employés à l'étude , et ils
tournèrent au profit de son talent qui ne
tarda pas à se révéler. Son premier essai
fut un éloge de Louis XII qui ne fut
pas généralement goûté : il réussit mieux
dans une épître à Voltaire qui: venait
d'obtenir la liberté de quelques paysans :
cette pièce , qui a pour titre Foliaire ou
le Serf du Mont Jura, fut couronnée en
344 fLO
1782 , par l'académie française ', son cgh-
gue de Ruth dictée par la reconnaissance,
€t dédiée au duc de Penthièvre, obtint
l'année suivante le même honneur. Flo-
riau fit aussi plusieurs pièces de théâtre
qui lui valurent l'honneur d'être reçu en
1788 membre de l'académie française. Il
continua dès lors à donner au public une
foule de petits ouvrages qui furent lus
avec avidité. Les principaux sont, ou-
• tre ceux que nous avons déjà indiqués ,
1° àe& fables qu'il faut placer au des-
sous de celles de La Fontaine , mais qui
l'emportent de beaucoup sur celles de
plusieurs autres fabulistes : c'est son prin-
cipal titre de gloire, et l'on peut dire que
Florian occupe en France le second rang
parmi ceux qui se sont occupés de ce
genre. Ses fables seraient excellentes , si
elles étaient plus originales , plus natu-
relles , plus simples : elles sentent un
peu trop l'art ; elles n'ont pas le sans^
façons le laissez - aller , l'abandon de
celles du bon La Fontaine. Il y a quelque-
fois trop d'esprit et pas assez de profon-
deur. Du reste, la versification en est
élégante et facile, le stile pur et correct,
le but toujours moral , et l'invention
heureuse et piquante. Il donna à l'apolo-
gue une empreinte de sensibilité qui se
décèle facilement , surtout dans ce vers
de la fable qui a pour titre : la Mère ,
l'enfant et les sarigues ■
L'asile le plus sûr esl le sein d'une nièiL'.
2" Son théâtre qui est composé de petites
pièces, telles que les deux billets, le bon
ménage, le bonpère, la bonne mère, etc. ,
qui toutes eurent beaucoup de succès ef
dans lesquelles l'auteur fit preuve d'une
sensibilité à la fois douce et attrayante.
On remarque aussi celles dans lesquelles
Arlequin joue le principal rôle : ce
sont les meilleures et les plus morales.
Florian a rendu le plus grand service à
ce personnage si fameux de la comédie
italienne, que nous ne connaissions que
par ses lazzis et ses balourdises. Il l'a placé
dans trois situations différentes : amant
dans l'une, époux dans l'autre, et père
dans la d""* ; et dans chaque situation ,
il le rend intéressant par sa naïveté,
sa bonté et sa franchise : on dirait que
FLO
l'auteur l'a doué de ses qualités pérsoti'»
nelles. Florian jouait quelquefois ce rôle
dans les sociétés, et on assure qu'il était
aussi fort que Carlin lui-même. « Laharpe
" dit que la délicatesse et la finesse , qui
» n'excluent pas le naturel, distinguent et
» feront toujours aimer les petites comé-
» dies de Florian , et que tout l'esprit
» qu'on y remarque n'est qu'un coidposé
» fort heureux de bon cœur , de bon sens
« et de bonne humeur. » 3" Estelle ,
1T88 ; Galatéc , 17 83 : ce sont deux ro-
mans dont le dernier a été puisé dans
Cervantes, et dont le premier est entière-
ment de sa création. On peut dire que
Florian a créé le genre pastoral parmi
nolis. Dans Estelle , il retrace les beau-
tés pastorales et les beaux sites du pays
où il est né. En général ses tableaux sont
frais et agréables. 4° Ses Nouvelles qui
sont au nombre de six, et qui sont suivies
de ses Nouvelles Nouvelles -. c'est une suite
de récits charmans,dans le genre des Con-
tes de Marmontel, qui a loué lui-même ces
productions de Florian. Voici comment il
en parlait : lu nature lui a dit , conte •
ce qui prouve que cet écrivain voyait
dans son rival un auteur vraiment doué
d'un talent original. Mais ses contes sont
peu variés, tout y porte l'empreinte de la
douceur et la tranquillité des champs :
aussi un critique disait-il assez plaisam-
ment à ce sujet -.faime beaucoup les ber-
geries de M. de Florian : mais j'y vou-
drais un loup. Du reste ces Nouvelles
sont écrites avec soin et élégance, et on
les lit avec plaisir. b° Gonzalve de Cor-
doue f 1791 , 3 vol. in-16 ). Florian fut
moins heureux dans le développement de
ce caractère : il a fait de son héros castil-
lan un chevalier français. On rencontre
dans ce poème un mélange assez heureux
des actions guerrières et des mœurs pas-
torales : mais ce genre est trop indé-
terminé , et l'auteur ne pouvait pro-
duire un chef-d'œuvre. Cependant cet
ouvrage est précédé d'un précis histori-
que sur les Maures qui est un excellent
morceau d'histoire. G" Numa Pompilius
( 1786, 2 vol. in-16 ) est une froide
imitation de Télémaque , et a tous les
défauts de Gonzalve. 1" GuiUaumc'TeU ;
JFLd
8° EUe'zer et Nephthali, poèmes assez
mëdiocres , dont le premier fut composé
en prison, et lui a donné occasion de dire
que c'était en prison qu'il chantait les
héros de la liberté , et dont le second
fut écrit après son retour à Sceaux. On
peut expliquer par ces circonstances Ja
faiblesse de ces deux ouvrages. 9° Tra-
duction de Don Quichotte , oeuvre post-
hume de Florian qui fut plutôt un abrégé
qu'une véritable traduction , et qui tra-
vestit en pastorale française un ouvrage
de mœui's chevaleresques : cette critique
des ridiculesde la chevalerie est faible dans
Florian, et il est diflicile de bien compren-
dre le but de Cervantes : sous plusieurs
autres rapports, cette traduction est pré-
férable à celle de Filleau de St. Martin.
Les ouvrages de Florian ont été souvent
réimprimés : la meilleure édition de ses
œuvres complètes , &m\\es de ses œu-
vres posthumes, a été publiée en 13 vol.
in-8, par M. Briand, 1 823, 1 824 : en géné-
ral Florian échoua dans le plan de ses
ouvrages : avec de la sensibilité et de la
grâce , il manquait essentiellement de
force et de génie ; mais l'élégance et la
facilité de son slile, et surtout cette dou-
ceur répandue dans tous ses écrits, feront
toujours lire cet auteur avec le plus
grand plaisir. Get écrivain est du petit
nombre de ceux qui, ne se laissant point
séduire aux illusions de l'amour-propre ,
surent se renfermer dans les limites de
leurs talens : et si les siens n'obtinrent
pas des succès brillans , du moins n' en-
courut-il jamais une chute ridicule. Flo-
rian était l'ami de Ducis , qui fit hom-
mage à sa mémoire de la Famille arabe.
Enfin , pour terminer , nous dirons que
le produit des ouvrages de Florian fut
consacré à payer les dettes de son aïeul :
ces derniers traits le font connaître tout
entier.
* FLORIDA - BLANCA. ( François-
Antoine MoxiNo , comte de), premier
ministre de Charles III , roi d'Espagne ,
naquit eu 11 30, dans la province de
Murcie, oii son père exerçait l'état de
notaire. Après avoir reçu une éduca-
tion soignée et fait d'excellentes études
à Salamanque, il embrassa la carrière du
V.
FLO 34^
barreau. Son habileté lui mérita bientôt
les places les plus distinguées de la ma-
gistrature, et enfin celle de ministre d'Es-
pagne à la cour de Rome. Diplomate aussi
distingué que bon jurisconsulte, il déploya
dans cette place des talens supérieurs
qui furent la cause de son élévation. Il
devint premier ministre après la disgrâce
du marquis d'Esquilache. Son admini-
stration fait époque dans l'histoire d'Es-
pagne. Ce ministre établit dans la capi-
tale une police exacte , fit respecter le
pavillon espagnol sur toutes les mers ,
maintint la paix avec la France , vint à
bout de terminer les dissensions politi-
ques de l'Espagne et du Portugal par un
double mariage , et rendit en quelque
sorte à son gouvernement son antique
splendeur. Ce fut alors qu'il reçut de son
souverain le titre de Florida-B lança.
Ami des sciences et des arts , il institua
des écoles gratuites de toutes les sciences,
en même temps qu'il embellit Madrid
par les plus belles promenades et par
des édifices publics. Il fut moins heu-
reux dans les guerres qu'il fit entre-
prendre à son souverain. Celle d'Alger
en 1777 et celle de Gibraltar en 17 82
coûtèrent à l'Espagne près de 80,000
hommes. Renonçant enfin au projet de
punir les déprédations des corsaires algé-
riens , et de chasser les Anglais de la pé-
ninsule , il tourna toutes ses vues vers le
commerce et l'industrie, et parvint ainsi
a réparer les maux causés par la guerre.
Son opposition aux principes de la révo-
lution française lui fit perdre sa place ,
après la mort de Charles III , au com-
mencement de 1792. Il fut remplacé par
le comte d'Aranda. Un chirurgien fran-
çais nommé Perret avait tenté de l'as-
sassiner auparavant , et lui fit plusieurs
blessures qui ne se trouvèrent pas mor-
telles. Florida-Blanca fut d'abord sim-
plement relégué dans laprovincede Mur-
cie ; mais ses ennemis qui étaient nom-
breux , surtout parmi la noblesse qu'il
avait dépouillée d'une grande partie de
ses privilèges pendant son élévation, par-
vinrent à le faire enfermer dans le châ-
teau de Pampelune, d'où il sortit après
plusieurs mois de détention , et se retira
22..
346 FLO
dans séâ terres situées près de la ville de
Loria. 'Lors de l'invasion des Français en
Esparpe en 1808 , il fut appelé par le
vœi i de la nation à présider les Corlès ;
iP.ais il ne jouit pas long-temps de cet
honneur : il mourut la même année , le
20 novembre, à Séville, âgé de 78 ans.
Ses mœurs furent toujours pures , son ca-
ractère égal , son cœur humain. Il était
affable envers les malheureux , infatiga-
ble dans le travail, mais trop jaloux de
son autorité; et les grands qu'il chercha
souvent à humilier peuvent lui repro-
cher quelques injustices. Il faut aussi
avouer qu'il s'attacha trop à enrichir et
à élever ses parens. Un seul refusa tous
ses dons , et ce fut son père qui, devenu
veuf, s'était consacré à l'étal ecclésiasti-
que. Son hls essaya inutilement de lui
faire accepter un évêché et de riches
prébendes ; il se contenta de vivre des
revenus d'un modique bénéfice. Florida
a composé plusieurs traités sur la juris-
prudence.
* FLORIDIA (Lucie-iMigliaccio, du-
chesse de ) , née à Syracuse en 1772,
perdit son premier mari le prince de
Partanna, en 1812. Bientôt elle fixa les re-
gards de Ferdinand I*"" , roi de tapies ,
et, lorsque ce monarque perdit la reine
Caroline d'Autriche , son épouse , il se
maria en secret et de la main gauche
avec celte dame sicilienne,qui était alors
âgée de 43 ans , et qui , malgré cet âge ,
avait conservé tous les charmes de la
première jeunesse. Ce mariage , célébré
le 27 novembre 1814 , resta caché jus-
qu'au moment oii le roi , recouvrant en
1816 1e trône d'Italie, revint à Naples ,
son ancienne capitale. Alors il fut permis
à la nouvelle épouse de Ferdinand de
faire porter à ses gens la livrée du roi , et
de loger cHe-mcme au château. Le mo-
narque voulut qu'à l'ancien titre de prin-
cesse de Partanna , elle subsiatuàt celui
de duchesse de Floridia , l'un des fiefs de
la maison Migliaccio. Il n'eut point été
question dans cette biographie de celte
épouse de Ferdinand qui ne joua aucun
rôle politique, si elle n'avait présenté
l'exemple rare d'un désintéressement et
d'une vertu digne d'éloge. Douée des
FLO
qualités les plus aimables , elle dut à sa
beauté son élévation extraordinaire. Pla-
cée à côté du trône , elle eut toujours le
sentiment de sa position , et jamais on
ne la vit se mêler à une intrigue , ni cher-
cher à gouverner l'état : ce ne fut point
une Du Barry, et c'est là ce qui la recom-
mande le plus à nos yeux. On assure
même qu'il lui arrivait souvent de plai-
santer sur son ancien état , et de se rap-
peler avec ses plus intimes amis les pri-
vations auxquelles elle s'était vue exposée
souvent dans la maison ruinée de sou pre-
mier mari. Cependant si, comme femme,
elle était exemple de vanité , elle avait ,
comme mère, de l'ambition pour ses en-
fans ; elle parvint à les faire placer avan-
tageusement dans les postes les plus éle-
vés de l'état. Comblée des bienfaits du
roi , la duchesse de Floridia n'a pas sur-
vécu long-temps à Ferdinand. Atteinte
d'une maladie inflammatoire , elle est
morte à Naples le 29 avril 1826.
FLORIDUS (François), de Donadeo
dans la terre de Sabine , mort en 1547,
est auteur d'un ouvrage inlilulé Lectiones
subcisii'ce, Franciorl , 1602, in-8, qui
lui fit un nom.
FLORIEN, Marcus-Antonius-Flo-
rianus, frère utérin de l'empereur Tacite,
se fit, après .sa mort en 276, proclamer
empereur par l'armée de Cilicie , mais
celle d'Orient ayant forcé Probus d'ac-
cepter l'empire, il se prépara à marcher
contre lui. Probus vint à sa rencontre,
et refusa de composer avec Florien , qui
fut tué par ses soldats, 2 mois après qu'il
eut pris la pourpre. Ce prince avait de
l'ambition, mais point de valeur.
FLORIMOND DE RÉMOIND, né à
Agen, fut conseiller au parlement de Bor-
deaux en 1570 , et mourut en 1602. Il se
distingua moins comme magistrat , que
comme auteur. 11 avait eu d'abord du
penchant pour les erreurs de Calvin; mais
il les réfuta ensuite avec zèle. Les nova-
teurs, qui ne l'aimaient point, disaient
que c'était « un homme qui rend des ar*
M rets sans conscience , fait des livres
» sans science , et bâtit sans argent : »
turlupinade qui ne prouve autre chose
que la faiblesse et le mauvais goût de
FLO
ceux qui se battaient avec de telles armes.
On a de lui 1° plusieurs traités, parmi
lesquels on distingue celui de l'Ante
christ : ouvrage d'un but plus étendu que
le titre ne semble annoncer, et qui traite
de divers objets qui combattent la sain-
teté du cbristianisme. Il y a des faits cu-
rieux et instructifs. 2° De Forigine des
he're'sies, 2 vol. in-4 : livre qui manque
quelquefois de critique , mais k qui , dit
» l'abbé Langlet, n'est pas à mépriser,
» et oîi il y a bien des recbercbes. » Le
même Langlet l'attribue au P. Richeome.
FLORIN , prêtre de l'église romaine
au 2° siècle, fut déposé du sacerdoce pour
avoir enseigné des erreurs , entre autres
que Dieu est l'auteur du mal. Quelques
écrivains l'accusent encore d'avoir sou-
tenu qire les cboses défendues par la loi
de Dieu ne sont point mauvaises en elles-
mêmes ; mais seulement à cause de la dé-
fense : ce qui ne peut être vrai qu'à l'é-
gard de quelques défenses particulières
et des lois purement positives. Il avait
été disciple de saint Polycarpe avec saint
Irenée , mais il ne fut pas fidèle à garder
la doctrine de son maître. Saint Irenée
lui écrivit pour le faire revenir de ses
erreurs ; Eusèbe nous a conservé un frag-
ment de cette lettre dans son Hist. ceci.,
liv. 5, chap. 20. Saint Irenée composa
enfin contre lui ses livres : Ve la monar-
chie et de l'ogdoadc que nous n'avons
plus.
* FLORIO (Daniel , comte de) , poêle
italien, né à Udine en 1710, d'une fa-
mille ancienne et distinguée, s'appliqua à
l'étude des letttes avec tant de succès, que
son nom fut bientôt répandu dans toute
l'Italie. Ses parens l'avaient envoyé à 1 8
ans à l'université de Padoue. Ses premiers
essais dans la poésie lyrique lui valurent
plus d'une fois les éloges du célèbre Mé-
tastase : ce sont des c«n^rt/e5. Mais il réus-
sissait particulièrement dans la compo-
sition de sespetites pièces de circonstance
Il avait recueilli lui-même ses différentes
productions sous ce titre ; Poésie varie,
Udine, 1777, 2 vol. in-4, ornés de vi-
gnettes. On y trouve des images agréa-
bles et des pensées délicates, exprimées
pvçc autant de naturel que de facilité. Oa
FLO 347
peut dire qu'il mérita presque tous les
éloges que ses compatriotes lui ont pro-
digués. Il avait commencé un poème in-
titulé la Jérusalem détruite, qui ne pa-
raît pas avoir été achevé. Le comte de
Florio est mort en 1789.
FLORIOT (Pierre), prêtre du diocèse
de Langres, confesseur des religieuses
de Port-Royal , mort en 1691 , à 87 ans ,
s'est fait un nom par la Morale du Pa-
ter, gros in-4 , 1709 , dans lequel il pa-
raphrase cette belle prière d'une manière
qui lui a causé du désagrément. On a en-
core de lui des Homélies , in-4 , et uu
Traité de la messe de paroisse , in-8 ,
qu'on peut regarder comme un bon ou-
vrage de morale, et un médiocre traité
de liturgie.
*FLORIS, prêtre: aucune biographie
ne donne des détails sur son compte ;
cependant son ouvrage intitulé : Les
droits de la vraie religion , soutenus
contre les maximes de la nouvelle
philosophie, 1774 , 2 vol. in-12 , lui mé-
rite une place distinguée parmi les dé-
fenseurs de la religion.
FLORIS (François). Voyez. Flore,
peintre.
FLORUS (L. Annaeus Julius), histo-
rien latin , de la famille des Annéens ,
qui avait produit Sénèque et Lucain ,
composa , environ 200 ans après Au-
guste , un Abrégé de ï Histoireromaine,
en 4 livres, dont il y a plusieurs éditions.
Les meilleures sont celles d'Elzévir ,
1638, in-12; de Grœvius, Amsterdam,
1702, in-8 : c'est dommage que dans
cette édition les médailles y soient gra-
vées à contre-sens , ce qui gâte souvent
l'explication qu'on en a mise au bas ; de
jjrae Dacier , adusum dclphini , 1 67 4 ou
1726, in-i ; de Uuker, 1744, in-8. Il y
a plusieurs traductions françaises deFlo-
rus ; la meilleure est celle de l'abbé Paul,
Paris, 1774, in-12. On trouve dans cet
ouvrage d*; l'élégance et de la noblesse;
mais elles dégénèrent en enflure. Dans
un abrégé qui doit être extrêmement sim-
ple , Florus prendle ton de déclaraateur ,
«comme s'il voulait, dit M. Crevier,
» compenser par le faste des manières
■>} et du dehors j l'appauvrissement d'un
348 FLO
1) sujet réduit en squelette. C'est lui qui
» paraît le premier avoir donné cours
M aux abrégés, si commodes pour la pa-
» resse, et si propres à faire des demi-sa-
» vans. » L'on ne peut cependant discon-
venir qu'il n'y ait de belles sentences,
des expressions pleines de dignité et d'é-
nergie. Florus était poète. Spartien rap-
porte que l'empereur Adrien entra en lice
avec lui, et qu'ils firent des vers l'un
contre l'autre. L'empereur reprochait au
poète d'aimer le cabaret ; et le poète n'eut
gardede risposter tout ce qu'il savait sur
le compte de son rival.
FLORUS (Drepanius) , fameux diacre
de l'église de Lyon, au 9* siècle, dont
on a un écrit sur la prédestination. Il
laissa d'autres ouvrages, parmi lesquels
on remarque une explication du canon
de la messe , où il donne trop dans le
sens mystique , et ne s'attache pas assez
au sens littéral ; et un Commentaire sur
saint Paul. On trouve ses dififérens ou-
vrages dans quelques éditions du véné-
rable Bède , et dans la Bibliothèque des
Pères.
FLOUR ( Saint ) , premier évêque de
Lodève , martyrisé en Auvergne l'an
389 , donna son nom à la ville de Saint-
Flour.
• FLOYER ( Sir John ) , célèbre méde-
cin anglais, né vers l'an 1649, mort en
1734, à Litchfield oii il exerçait son art
avec la plus grande distinction. Il était
grand partisan des bains froids, et les or-
donnait particulièrement dans les rhuma-
tismes chroniques et autres maladies ner-
veuses. Ses principaux ouvrages sont,
1° La pierre de touche de la me'decine ,
Londres, 1687, in-8. 2" Recherche sur
l'usage raisonnable des bains , Londres,
1697 , in-8, qu'il a reproduit en grande
partie dans, son Essai pour rétablir le
baptême des enfans par immersion ,
1724 , in-4. Cet ouvrage, qui a été traduit
eu allemand , fixa particulièrement l'at-
tention des anabaptistes. 3° Traité sur
Pasthme, Londres, 1G98 et 1717 , in-8.
Il a été traduit en français par Jault ,
1761 et 1785, in-12, et en allemand par
Scherf, Lcipsick, 1782, in-8. 4" L'hor-
loge du pouls des médecins , Londres ,
FOE
1707 et 1710, 2 vol. în-8 , traduit en
italien, Venise, 1715, in-4. 5° Medicina
geronomica ou VArt de conserver la
santé des vieillards, avec un supplément
à l'usage de Phuile et des onctions, et une
lettre sur le régime à suivre dans la jeu- .
nesse, Londres, 1724.
FLUDD ou De Fluctibus (Robert),
dominicain écossais , naquit à Milgale ,
dans la province de Kent, en 1574 , re-
çut le bonnet de docteur en médecine à
Oxford , et exerça cette profession à Lon-
dres , où il mourut le 8 septembre 1637.
Il fut surnommé le Chercheur, parce
qu'il fit beaucoup de recherches dans les
mathématiques et dans la philosophie.
Il a laissé des ouvrages de médecine , de
philosophie, d'alchimie, dont 1» collec-
tion fut imprimée à Oppenheim et à
Goude en 1617 et années suivantes, 5 vol.
in-fol. Les principaux sont : Apologie des
frères de la Rose-Croix, Leyde, 1616,
in-8 , latin ; Tractatus theologico-phi-
losophicus de vita, morte et resurrec-
tione , 1617, in-8 ; Utriusque Cosmi
metaphysica physica et technica hitto-
rica; f^eritatis proscenium; Sophiœ
cum moria certamen ; Summum bono-
rum , quod est verum magiœ , cabales ,
alchymiœ , fratrum Roseœ Crucis ve-
rorum verœ subjectum-, Philosophia mo-
saica ; A mphitheatrum anatomiœ ;■ Phi-
losophia sacra , etc. Il n'civt guère possi-
ble de reconnaître dans tous ces ouvrages,
une tête constamment saine ; il y a des
choses profondément méditées, il y en a
de chimériques et de ridicules. Son lan-
gage entortillé et mystérieux l'a fait ac-
cuser de magie par ceux qui lui suppo-
saient plus de malice qu'il n'en avait en
effet.
FLURANCE. Foyez Rivaux.
FOÉ. royez FÉ.
* FOÉ (Daniel), poète anglais, naquit à
Londres en 1663 d'un simple artisan. Il
fut d'abord destiné par ses parens à une
profession mécanique , qu'il abandonna
bientôt pour se livrer à son penchant
pour la poésie. Il épousa avec vivacité
les intérêts du roi Guillaume, prince
d'Orange, essuya divers chagrins qu'il
s'attira par sa plume satirique : eu môme
FOE
temps il continuait son état de bonnetier,
faisait des pamphlets , des romans et des
vers. Condamné à 2 ans de prison, au pi-
lori et à une forte amende , il écrivit un
hymne au pilori. C'est pendant sa cap-
tivité qu'il commença la Revue (1704),
gui donna naissance au Spectateur d'Ad-
disson. Employé ensuite par Ja reine
Anne à plusieurs missions secrètes, il vou-
lut faire encore des brochures politiques
qui lui attirèrent de nouveaux désagré-
inens. Il résolut de ne se livrer qu'à la lit-
térature. Il tint parole , eut plus de re-
pos et acquit une réputation durable; il
mourut en 1731. On a de lui 1° Les
Aventures de Bobinson Crusnt en an-
glais , 1 7 1 9 ; il a été traduit dès 1 720 par
St. -Hyacinthe et par Van-Eften qui a été
faussement attribué à Richard Steele,
l'un des écrivains du Spectateur -. ce ro-
man est écrit d'une manière si naturelle,
que long-temps il a passé pour une re-
lation exacte d'un voyageur véridique
[voyez^KS Effen). M. Feutry, avocat
au parlement de Douai , a donné une
édition de cet ouvrage en 1766 , 2 vol.
in-12 ; il l'a abrégé sans en altérer le ca-
t ractère. Il avait promis d'en retrancher
quelques déclamations indécentes que
l'auteur anglican s'était permises contre
la religion catholique et ses ministres ;
mais il n'a que faiblement rempli sa pro-
messe. L'édition de Liège , 1G85, 4 vol.
in-1 2 , est plus exacte , quant à ce point,
et remplit mieux les intentions des lec-
teurs catholiques. Cette édition est en-
core remarquable par l'Histoire curieuse
et intéressante d'Alexandre Seikirk, qu'on
voit à la fin du quatrième tome. 2" Le
vrai Anglais de naissance , poème fait
à l'occasion de la révolution qui plaça
Guillaume sur le trône de son beau-père,
en réponse à l'ouvrage intitulé : Les
étrangers. 3" La réforme des moeurs ,
oii il attaque ouvertement les personnes
du plus haut rang qui employaient leur
aulorilé à soulenir l'impiété et la disso-
lution. 4" Essai sur le pouvoir du corps
collectif du peuple anglais. Cet ouvrage
est en faveur de la chambre des commu-
nes. 5° Le court moyen contre les non-
conformistes, qui lui attira une punition
FOE 349
publique plus ignominieuse que cruelle.
(i° De jure divino , poème latin. 7" Un
Plan de commerce. 8° Le commerçant
anglais. 9° L'instructeur de famille,
2 vol. 18° Plusieurs ec/iïy politiques qui
n'ont guère syi-vécu aux événemens qui
les avaient fait naître ; et quelques au-
tres oii il développe des idées qui , pour
être aujourd'hui accueillies, n'en sont
pas plus solides ni plus conformes aux
saines notions.
FŒDOR ou FÉDOR , fils aîné du czar
Alexis , monta sur le trône de Russie en
1676. Il avait été élevé pour la guerre et
pour le cabinet. Dès qu'il eut soumis l'U-
kraine révoltée, et qu'il eut fait la paix
avec les Turcs, il s'occupa du soin de
policer ses états. Il encouragea plusieurs
citoyens de Moscou à bâtir des maisons
de pierres à la place des chaumières
qu'ils habitaient. Il agrandit cette capi-
tale. Il fit des réglemens de police géné-
rale ; mais en voulant réformer les
boyards , il les indisposa contre lui. Il
méditait de plus grands chaiigemens ,
lorsqu'il mourut sans enfans en 1682, à
la fleur de son âge. Son second frère,
Pierre , qui n'était âgé que de dix ans , et
qui faisait déjà concevoir de grandes
espérances, régna après lui, et acheva
ce que Fœdor avait commencé.
FOES ou FoEsius (Anutius), médecin
de Metz, mort en 1595, à 68 ans, était
très versé dans la langue grecque. Son
amour pour l'étude l'empêcha de s'atta-
cher à des princes qui auraient pu faire
sa fortune. Il est auteur d'une traduction
très fidèle des OEuvres d' Hippocrate
en latin , accompagnées de corrections
dans le texte, et ornées de scholies, Ge-
nève, 1657 , 2 vol. in-fol. On a encore
de lui une espèce de Dictionnaire sur
Hippocrate, à Francfort, 1588,in-foI.
* FOGGllNI (Pierre-François), prélat
romain , préfet de la bibliothèque du Va-
tican, né à Florence en 1713. fut reçu
docteur en théologie à Pise. Son père, cé-
lèbre architecte lui donna le goût des
arts : mais le jeune Fog'gini avait préféré
de bonne heure l'état ecclésiastique. Le
prélat Bottari , son concitoyen , l'ayant
invité à venir se fixer à Rome, il s'y ren-
35o
FOG
dit, et Benoît XIV lui donna une place
dans l'académie d'histoire pontificale
qu'il avait établie. Le cardinal Chéri-
Marie Corsini le nomma ensuite à un
bénéfice dans l'église de St.-Jean-de-La-
tran, et le fit son théologien. Sous Clé-
ment XIV, il fut employé dans les affaires
qui concernaient les jésuites, et il paraît
qu'il neleurfut pas favorable. Pie Vile fit
depuis son camérier secret à la mort d'E-
tienne Evode Assemanie, archevêque d'A-
pamée, et préfet de la bibliothèque vati-
cane. Il mourut d'apoplexie le 2 juin 1 7 8 3 .
D a laissé un grand nombre d'ouvrages,
les principaux sont 1 " des Thèses histori-
ques et polémiques contre les quatre ar-
ticles du clergé de France de 1682. On
dit qu'il changea depuis de sentiment
sur ce point. 2° P. Virgilii Maronis
codex antiquissimus à fiufio Turcio
Aproniano distinctus et emendatus , Flo-
rence, 1741 , in-4. Cette édition est exé-
cutée en lettres onciales à l'instar du
manuscrit. 3'V Accord admirable des
Pères de l'Eglise , sur le petit nombre
des adultes qui doivent être sauvés, en
latin, 1762. Lequeux en donna une tra-
duction française en 1760. 4" Une collec-
tion d'écrits des Pères sur les matières
delà grâce, 1754-71 , 8 vol.
FOGLIETA ( Uberto ), savant génois,
eut part aux troubles qui s'élevèrent à
Gènes, et fut envoyé en exil. Pour se
consoler des tribulations qu'il avait es-
suyées dans le monde , il ne voulut avoir
de commerce qu'avec les lettres Le car-
dinal d'Est le reçut dans sa maison à
Rome. Il y mourut en 1581 , âgé de 63
ans. Parmi les ouvrages sortis de sa plu-
me , on distingue 1° son traité i?e r«-
tione scribcndœ historiée, aussi judicieux
que bien écrit. 2° Historia Genuensium ,
1585, in-fol. , fidèle, élégante et peu
commune. François Serdonati en a fait
nue traduction en italien: elle est estimée.
3" Tumultus Neapolitani, 1571, in-4.
4° Elogia clarorum Ligurum, in-4.
It" De sacro fœdere in Sclimum , in-4 .
6" De Unguœ usu et prœstantiâ, 1723 ,
in-8. T" De causis magnitudinis Tur-
carum imperii, in-8. 8" De similitudine
normcp PoK&fVwfpe, daps ses Opuscules,
FOH
Rome, 1579, in-4. 9° Délia republica
di Genoa, in-8 ; ouvrage intéressant pour
ceux qui veulent connaître cette répu-
blique, du moins telle qu'elle était dans
le 16* siècle.
FOHÉ. roycz FÉ.
FOHI, premier roi delà Chine, régla,
dit-on, les mœurs desChinois, alors bar-
bares , et leur donna des lois. On pré-
tend qu'il fit plus, qu'il dressa des tables
astronomiques : mais vu l'ignorance des
Chinois modernes en fait d'astiouomie,
il est peu vraisemblable que leurs fon-
dateurs aient été fort versés dans cette
science. De mauvais chronologistes ont
dit que Fohi régnait du temps des pa-
triarches Héber et Phaleg ; mais il n'y a
nulle apparence que les Chinois aient
quelques renseignemens antérieurs au dé-
luge. Si le dieu chinois, Fohé, est le
même que Noé ( voyez FÉ ) , il est évident
que Fohi est très postérieur à Fohé ,
puisque la mythologie a dû naturellement
précéder l'histoire de la Chine. Quoi qu'il
en soit, ce que l'on raconte de Fohi
doit nécessairement se ressentir du ton
fabuleux qui règne dans l'histoire chi-
noise, surtout dans celle des premiers
teriips. Il ne sera pas inutile d'en donner
ici un échantillon, qui pourra servir de
règle aux lecteurs. Nous le tirons d'une
lettre du Père Amiot , insérée dans le 1 1*
tome des Mémoires de la Chine. Le Père
Amiot, pour prouver que les aérostats
ont été connus à la Chine, rapporte trois
passages tirés des plus fameux historiens
de l'empire. Il est dit dans l'un que
Chennoung voulant mesurer la terre,
ne sachant comment s'y prendre, fut
aidé dans .son opération par un « homme-
» esprit, dont la couleur était d'un vert
» tirant sur le bleu; ses sourcils étaient
j) épais ; il portait sur sa tête une pierre
» de yu , et était porté lui-même par six
>) dragons volans. Cet homme-esprit mc-
» sura la terre , détermina sa figure en-
» Ire les quatre mers , et trouva que son
« étendue d'orient en occident était de
» 90 ouan de lys , et de 81 ouan du nord
» au sud (1) ». Le second passage porte
(i] Ouan ett le nombre qui désigne dix DiiUe; le //< eit
DU dixième de lieue. Qu'pp calcule qiainleiiaDl , il iju'op
fût
que l'empereur Hoangty sentant sa fin
s'approcher , quitta la terre et s'envola
au ciel, monte sur un dragon. On lit
dans un troisième passage que « plus an-
« ciennement encore , sous l'erapire des
» cinq Loung ( des cinq dragons ) qui
« régnaient sur le ?,tco\ïà Ae?, dix peuples
» perdus, avant la fondation de l'empire
» Chinois par Fohi, les hommes logeaient
» dans des antres et des cavernes, comme
» les quadrupèdes , ou se perchaient sur
>> les arbres comme les oiseaux ; tandis
» que leurs souverains montés sur des
« dragons , planaient dans les airs comme
» nuages , et gouvernaient ainsi leurs
)> sujets de haut en bas. » Tout cela est
dit au reste fort sérieusement par le Père
Âmiot, qui soupçonne que ces dragons
étaient remplis de gaz. Voyez Comte
(i,e), Coisrucius, Halde (du), Yao.
FOIGjNI ou CoGîN Y ( Gabriel ) , corde-
lier défroqué , se relira en Suisse vers
16G7 , et fut chantre de l'église deMorge.
En ayant été chassé pour quelques indé-
cences qu'il y commit à la suite d'une
débauche , il alla se marier à Genève, où
il enseigna la grammaire et le français.
Il y fit paraître , en 1676, V Australie,
ou les Aventures de Jacques Sadeur ,
in-12 , qui faillirent l'en faire chasser,
parce qu'on y trouve des impiétés et des
obscénités révoltantes. On l'y toléra ce-
pendant ; maisaubout dequelque temps,
il fut obligé d'en sortir, laissant à sa ser-
vante des marques scandaleuses de leur
commerce. Il se retira en Savoie, et mou-
rut dans un couvent en 1692.
FOILLAN ( Saint ) , fils de Fyltan ,
roi de iMomonie en Irlande , renonça au
monde , ainsi que ses deux frères Fursy
et Ultau , et embrassa l'état monastique.
Fursy , qui en avait donné l'exemple et
le conseil , passa en Angleterre , et bâtit
le monastère de Knôbbersburg , dans le
royaume des Est-Angles , dont il donna
la conduite à Foillan, qu'il avait fait venir
d'Irlande. Après la mort de Fursy, arri-
vée à Péronne ( selon d'autres à Mazerœl-
les, près de Dourlens ) , le 16 janvier
6&0,Ultan et Foillan passèrent en France.
en applique le résultat ^ ces qualre mtrs et la («rr« qui est
(nire tllti, et l'on aura une idée de la géographie chinoise.
FOI 35 1
On lit dans quelques auteurs que Foillan
fit un voyage à Rome , et qu'il y fut sacré
évêque régionnaire. Quoi qu'il eq soit
de cette ordination , il est au moins cer-
tain qu'il ne tarda pas à rejoindre Ulfan
son frère. Ils se rendirent l'un et l'autre
à Nivelle dans le Brabant , où sainte Ger-
trude était abbesse. Le monastère qu'elle
gouvernait , avait été fondé par le B.
Pépin de Landeu , son père, et par la
B. Ite, sa mère. Il y avait aussi dans
le voisinage un monastère pour des hom-
mes. Les deux frères y restèrent quelque
temps. En 652 , sainte Gertrude donna à
Ultan un terrain pour bâtir un hôpital et
un monastère , entre la Meuse et la Sam-
bre , alors dans le diocèse de Maëstricht ,
et aujourd'hui dans celui de Liège. C'était
l'abbaye de Fosse , aujourd'hui église
collégiale. Sainte-Gertrude retint Foillan
à Nivelle , pour instruire les religieuses.
Le saint homme se chargea aussi de l'in-
struction du peuple dans les villages voi-
sins. S'étant mis en route avec trois com-
pagnons en 665 , pour aller voir son frère
à Fosse , il fut massacré par des voleurs
ou des infidèles, dans la forêt de Sogne,
qui faisait partie de la forêt Charbonière
en Hainaut. Ses reliques se gardent avec
beaucoup de vénération dans l'église de
Fosse.
FOINARD ( Frédéric-Maurice ) , curé
de Calais , mort à Paris en 1743 , âgé de
60 ans , était de Conches en Normandie.
On a de lui quelques ouvrages dont les
plus connus sont : 1" Projet pour un
nouveau Bréviaire ecclésiastique , avec
la critique de tous les nouveaux Bréviai-
res qui ont paru jusqu'à présent, in-12,
1720. 2" Breviarium ecclesiasticum ,
exécuté suivant le projet précédent, 2
vol. in-12. Les auteurs des nouveaux
Bréviaires ont profité de celui-ci. 3° Les
psaumes dans l'ordre historique , in-1 2,
1742. 4" Deux vol. in-12 sur la Genèse.
Des idées singulières que l'auteur hasarda
sur le sens spirituel les firent supprimer.
FOIX ( Raimond Roger , comte de },
accompagna le roi Philippe-Auguste à la
guerre de la Terre-Sainte en 1190. Il
prit depuis le parti des Albigeois avec
feu j mais son ardeur ne le mena qu'à
352 I^ÔI
des humiliations. Il fut obligé de de-
mander la paix , et de reconnaître pour
comte de Toulouse Simon de Monfort.
Puylaurens rapporte qu'en une conférence
tenue au château de Foix entre les catho-
liques et les Albigeois , la sœur du comte ,
non moins ardente que son frère, voulut
parler en faveur des derniers : « Allez ,
}) Madame , lui dit Etienne de Minea ,
3) filez votre quenouille; il ne vous ap-
» partient pas de parler dans une dispute
}) de religion. » Raimond Roger mourut en
1222. L'illustre maison de Foix, dont
était Raimond , descendait de Bernard ,
second fils de Roger II , comte de Car-
cassonne. Bernard eut le comté de Foix
en 10G2, et le posséda pendant 34 ans.
Sa postérité subsista avec honneur jusqu'à
Gaston III , qui vit mourir son fils avant
lui ( voyez Gaston III. ) Il mourut lui-
même en 1391 , ayant cédé le comté de
Foix à Charles VI; mais le roi , par géné-
rosité , le rendit à son cousin Matthieu ,
qui mourut en 1 398 , sans enfans ; et dont
la sœur Isabelle épousa Archambaud de
Grailly , qui prit le nom de Foix. Son
petit-fils, Gaston IV , se maria avec Eléo-
nore , reine de Navari-e. Sa postérité
masculine fut terminée par Gaston de
Foix , duc de Nemours, tué à la bataille
de Ravenne en 1512 , à 24 ans ( voyez
Gaston de Foix, duc de Nemours ). Mais
Catherine de Foix , reine de Navarre ,
pelite-fiUe de Gaston IV , avait épousé
Jean d'Albret , dont la pelite-fiUe fut
mère de Henri IV... Archambaud de
Grailly avait eu un second fils nommé
Gaston, captai de Buch, et dontles descen-
dans furent comtes de Caudale et ducs
de Rendan. Cette branche avait été ho-
norée de la pairie sous le titre de Rendan,
par considération pour Marie-Claire de
Beaufremond, marquise de Senecey, dame
d'honneur d'Anne d'Autriche, qui avait
épousé Jean-Bapliste Gaston de Foix ,
comte de Fleix, tué au siège de Mardick
en Jfi46. Elle mourut elle-même en 1680.
Ses trois fils n'ont point laissé de posté-
rité- Le dernier, Henri-Charles, qui por-
tait le nom de duc de Foix , est mort en
1714. Il faut consulter sur cette famille
l'histoire du comté de Foix.
FOI
FOIX ( Pierre de ) , cardinal, né eu
i 38G , était fils d'Archambaud , captai de
Buch, et d'Isabelle, comtesse de Foix,
fut d'abord franciscain , et cultiva avec
succès les lettres sacrées et profanes.
L'antipape Benoit XIII l'honora de la
pourpre en 1408, soit pour récompenser
son mérite, soit pour attirer dans son
parti les comtes de Foix. Pierre n'avait
alors que 22 ans; il abandonna le pontife
au concile de Constance, préférant les
intérêts de l'Egli.se à ceux de l'amitié. Le
concile lui confirma la qualité de cardi-
nal, Martin V l'envoya légat en Arragon,
pour dissiper les restes du schisme. Il y
réussit, et mourut en 14G4 , dans sa 78"
année , à Avignon , dont il avait la vice-
légation. Il était aussi archevêque d'Arles.
C'est lui qui a fondé à Toulouse le col-
lège de Foix. — Il faut le distinguer du
cardinal Pierre de Foix , son petit-neveu,
non moins habile négociateur , qui mou-
rut évêque de Vannes , à la fleur de son
âge, en 1490.
FOIX (Odet de), seigneur de Lautrkc,
maréchal de France et gouverneur de
la Guienne , était petit-fils d'un frère de
Gaston IV , duc de Foix ; il porta les ar-
mes dès l'enfance. Ayant suivi Louis XII
en Italie , il fût dangereusement blessé
à la bataille de Ravenne eu 1512. Après
sa guérison , il contribua beaucoup au
recouvrement du duché de Milan. Fran-
çois I lui en donna le gouvernement.
Lautrec savait combattre, mais il ne sa-
vait pas comrnander. Il fut chassé de
Milan, de Pavie, de Lodi , de Parme et
de Plaisance , par Prosper Colonne. Il
tâcha de rentrer dans le Milanais par une
bataille ; mais ayant perdu celle de la
Bicoque en 1522, il fut obligé de se
retirer en Guienne dans une de ses terres.
Sa disgrâce rie fut pas longue. En 1528,
il fut fait lieutenant-général de l'armée
de la ligue en Italie, contre l'empereur
Charles Quint. Il emporta d'abord Pavie ,
qu'il mit au pillage; puis s'avança vers
Naplcs , et mourut devant cette place le
1 5 août de la même année , après avoir
lutté quelque temps contre l'ennemi , la
peste , la misère et la famine, — Son
frère , Thomas de Foix , dit le maréchal
foi
de Lescun , passait pour un homme
cruel et extrêmement avare. Ses exactions
firent soulever le Milanais en 1 521 . Après
la perte de la bataille de la Bicoque , les
ennemis l'assiégèrent dans Crémone. Il
n'y tint pas aussi long-temps qu'il le pou-
vait ; et en rendant la place , il promit
de faire évacuer toutes celles du Mila-
nais , oii il y avait garnison française.
Il reçut , à la journée de Pavie en. 1 525 ,
un coup de feu dans le bas-ventre, dont
il mourut sept jours après , prisonnier
de guerre à Milan.
FOIX ( Paul de ) , archevêque de Tou-
louse , de la même famille que Lautrec ,
né en 1528, se distingua dans ses am-
bassades en Ecosse , à Venise , en Angle-
terre , et surtout dans celle de Rome ,
auprès du pape Grégoire XIII. Il mourut
dans celte dernière ville en 1584 , à 56
ans. Muret, dout il avait été le bienfai-
teur , prononça son oraison funèbre. Ce
prélat était homme de lettres , et aimait
ceux qui les cultivaient , surtout ceux qui
brillaient par leur éloquence, ou qui pos-
sédaient les écrits d'Aristote , dont il était
admirateur passionné. On a de lui des
Lettres , in-4 , Paris , 1628 , écrites avec
précision. Elles prouvent qu'il était un
assez bon écrivain et un grand homme
d'état. C'est sans preuve qu'on les a attri-
buées à d'Ossat son secrétaire , depuis
cardinal.
FOIX ( François de ) , duc de Candalc ,
commandeur des ordres du roi , et évêque
d'Aire , mort à Bordeaux en 1694, à 90
ans , traduisit le Pimandre dé Mercure
Trismégiste , et les Elémens d'Euclide ,
qu'il accompagna d'un commentaire. Il
avait une chaire de géométrie à Bordeaux.
FOIX ( Louis de ) , architecte parisien ,
florissait sur la fin du 16* siècle. Il fut
préféré à tous les architectes de l'Europe
par Philippe II , qui le choisit pour élever
le monastère et le palais de l'Escurial.
De retour d'Espagne , il Jïoucha l'ancien
canal de l'Adour , et en creusa un nou-
veau en 157 9. Ce fut encore lui qui bâtit
en 1 595 le fanal à l'embouchure de la
Garonne , qu'on appelle communément
la Tour de Cordouan. Cette tour à 160
pieds de hauteur.
V.
FOIX ( Marc-Antoine de ) , jésuite ,
né en 1627 au château de Fabas, dans le
diocèse de Conserans , mort à Billom en
Auvergne en 1687 , fut homme de let-
tres , théologien , prédicateur , profes-
seur , recteur , provincial , et tout ce que
l'étendue de ces titres exigeait. On a de
lui : 1° L'art de prêcher la parole de
Dieu, 'm-12. C'est l'ouvrage d'un homme
instruit delà littérature sacrée et profane.
2° L'art d'élever un prince , in-12 , at-
tribué d'abord au marquis de Vardes ;
bon ouvrage , dont le succès fut rapide ;
on y trouve dés choses communes que
l'auteur n'a pas cru devoir négliger, pour
y substituer des vues rares et extraordi-
naires; son livre n'en est que plus estima-
ble et plus sûrement utile.
FOIX ( Gaston de }. Voyez Gaston.
FOIX. Voyez Saint-Foix ( Germain
POULLAIN BE ).
FOLARD ( Le chevalier, Charles de},
surnommé le Ve'gèce français , né à Avi-
gnon le 13 février lG69,avec des inclina-
tions militaires, sentit augmenter son pen-
chant à la lecture des Commentaires de
César. Il s'engagea dès l'âge de 1 6 ans ; on
le dégagea : il se rengagea encore, et ses
parens le laissèrent suivre l'impulsion de
la nature. De cadet dans le régiment de
Berri , devenu sous-lieutenant , il fit le
métier de partisan pendant tout le cours
de la guerre de 1688 ; et ce métier, qui
n'est pour tant d'autres qu'une espèce de
brigandage , fut pour lui une école ; il
exécuta en petit tout ce qu'il avait vu
faire en grand ; il leva des cartes , il
dressa des plans ; il parut dès lors un
homme rare. La guerre de 1701 lui four-
nit de nouvelles occasions de signaler
son habileté et ses connaissances. Le duc
de Vendôme le fit aide-de-camp , et ne
le céda qu'avec regret à son frère le grand-
prieur , qui commandait alors l'armée de
Lombardie. Le chevalier de Folard répon-
dit à l'idée qu'on ajvait de lui ; il contri-
bua beaucoup, à la prise d'Hostiglia et à
celle de la Cassine de la Bouline, qui lui
mérita la croix de St. -Louis et une pen-
sion de 400 livres. Blessé dangereusement
à la bataille de Cassanoen 1705, il réflé-
chit, au milieu des douleurs cuisantes
23
354 ^01
que lui causaient trois coups de feu , stir
rarrangement de celte bataille , et forma
dès lors son système des colonnes. Après
s'être distingué dans plusieurs sièges en
Italie , et surtout à celui de Modène , il
passa en Flandre, fut blessé à Malplaguet ,
et fait prisonnier quelque temps après.
Le prince Eugène ne put le gagner par
les offres les plus avantageuses. De retour
en France, il eut le commandement de
Bourbourg , qu'il conserva jusqu'à sa
mort. En n 1 4 il se rendit à Malte , assié-
gée par les Turcs, et s'y montra ce qu'il
avait paru partout ailleurs. Le désir de ser-
vir sous Charles XII, plutôt que l'intérêt ,
l'attira en Suède. Il vit ce roi soldat , et
lui fit goûter ses nouvelles idées sur la
guerre. Charles destinait le chevalier
Folard à être un des instruniens dont il
voulait se servir dans une descente pro-
jetée en Ecosse ; mais la mort du héros ,
tué au siège de Fridérichshall , dérangea
tous ses projets , et obligea Folard à re-
venir en France. Il servit en 1719 sous
le duc de Berwick , en qualité de mestre-
de-camp , et ce fut sa dernière campagne.
Il avait étudié toute sa vie l'art militaire
en philosophe ; il l'approfondit encore
plus, lorsqu'il fut rendu à lui-même. Il
donna des leçons au comte de Saxe , et
prédit dès lors ses succès. Le chevalier
de Folard exposa ses nouvelles décou-
vertes dans ses Commentaires sur Poly-
be , en G volumes in-'4 , Paris , 1727 ,
réimprimé à Amsterdam en 176-3, 7. vol.
in-4, avec un supplément qui ne se trouve
pas dans l'édition de Paris. Ils ont été
abrégés en 3 vol. in-4 , Paris, 1 7 67 . L'au-
teur peut être appelé ajuste titre le f^e'gè-
ce moderne. En homme de lettres , il a
su puiser dans les sources les plus cachées
tout ce qu'il a cru propre à nous instrui-
re ; et en homme de guerre, il l'a exposé
avec beaucoup d'intelligence. Le fonds en
est excellent , mais la forme n'en est pas
si agréable. L'abondance des idées de
l'auteur entraîne une profusion de paro-
les. Son slile est négligé , ses réflexions
sont détachées les unes des autres , ses
digressions ou inutiles ou trop longues.
On a encore de cet habile homme : 1° Un
livre de Nouvelles découvertes sur la
tôt
guerre, in-12. Les idées y sont attssi pro-
fondes et plus méthodiques que dans son
commentaire ; 2" un Traité de la défense
des places ; 3° un Traité du métier de
partisan, manuscrit, que le maréchal de
Belle-Ile possédait. Le chevalier de Folard
aurait pu faire une fortune assez considé-
rable ; mais ses liaisons avec les défen-
seurs des miracles qu'on attribuait à M.
Paris ,^le firent regarder de mauvais œil
par le cardinal de Fleury. On voyait à
regret ce vieux militaire au milieu d'une
troupe de convuisionnaires , marmotter
des hymnes à l'honneur du diacre Paris
( voyez. V histoire d'un voyage littéraire
fait en 17 33 en France, etc , la Haie,
1736 ). Il revint de cette folie avant sa
mort , arrivée à Avignon en 1761 , et se
soumit de la manière la plus expresse à
toutes les décisions de l'Eglise. Ceux qui
voudront connaître plus particulièrement
le chevalier de Folard, peuvent consulter
les mémoires pour servir à son histoire ,
imprimés à Paris , sous le titre de Ratis-
bonne, en 1763 , in-12.
FOLARD (François Melchior de ) , jé-
suite , frère du précédent, membre de
l'académie de Lyon, naquit à Avignon
en 1683, et mourut en 1739. Onade lui
OEdipeel Thémistocle, tragédies faibles,
et VOraison funèbre du maréchal de
Fillars, non moins médiocre.
FOLENGO (Jean-Baptiste), béné-
dictin n\antouan , mort en 16.b9, à 60
ans, laissa un Commentaire sur les
psaumes , imprimé à Bàle en 1667 , in-
fol. , et sur les épîtres catlioliques , in-8,
écrit noblement et purement. H com-
mente en critique et presque toujours
avec intelligence.
FOLENGO (Jérôme, dit Théophile),
plus connu sous le nom de Merlin Coc-
caye , naquit le 8 novembre 1491 , dans
un lieu appelé autrefois Cépada près du
lac inférieur dans le Mantouan. Il entra
comme le précédent dans l'oi'dre des
bénédictins. Lîf tournure de leur esprit
fut bien différente ; l'un se consacra à
l'érudition et à la piété , l'autre à la
bouffonnerie et à la turlupinade , et se
fit des ennemis. Ses supérieurs voulurent
le mettre en règle , mais il échappa à
I
1
FOL
leurs poursuites, par la protection de
plusieurs seigneurs. II mourut en 1544 ,
à 51 ans, dans son prieuré de Sainte-
Croix de Campége, près de Bassano,
après avoir erré pendant plusieurs années
avec une jeune femme pour laquelle il
avait quitté son couvent , après être rentré
dans son monastère , avoir dirige un
couvent de religieuses et s'être fait chas-
ser. De tous ses ouvrages , le plus connu
est sa Macarone'e, ou Histoire macaroni-
quc. Ce nom de macnroniqiie , qu'on a
donné à toutes les productions du même
genre , vient du mot macaroni, qui est
le nom d'un gâteau qu'on fait en Italie
avec de la farine , des œufs et du fro-
mage. Le poème de Folengo fut reçu
avec transport, dans un siècle où les
bouffonneries pédantesques tenaient lieu
de saillies , les anagrammes de bons
mots, et les logogriphes de pensées. Il
est difficile de faire un abus plus étrange
de son esprit. Il s'abandonne entièrement
à son imagination aussi vive que bizarre,
sans respect ni pour la langue latine ,
dont il fait un mélange monstrueux avec
l'italienne, ni pour le bon sens qu'il
choque à chaque page. Avec tout cela ,
l'auteur, qui a l'air d'un bouffon, fait
d'excellentes réflexions sur les vices des
hommes : il attaque fortement les pas-
sions, surtout l'orgueil, la paresse, l'en-
vie," la volupté , la frivolité. Le poème ma-
ronique fut traduit en français en 1G06.
Cette version barbare a été publiée de
nouveau , sans aucun changement , en
1734 , 2 vol. in-12; elle n'était ni assez
importante ni assez estimée , pour mé-
riter une nouvelle édition. L'original de
la Macaronée , imprimé sous le nom de
Merlin Coccaye, en 1521 , à Frescati,
in-12, est rare; l'édition de Venise en
1554 , in-12, lest moins. Il y a encore
I de lui trois poèmes assez recherchés :
1° Orlandino da Limerno Pitocco ,
Venise, 1526 ou 1539 ou 1550, in-8,
réimprimé à Londres en 1773, in-8 et
in-12. 2° Caos del tri per uno, Venise,
1527 , in-8. C'est un poème sur les trois
âges de sa vie , en slile en partie maca-
ronique. 3° La Humanita del Figlio di
Dco, in oitava rima. Venise, 1533 , in-4,
FOL 355
FOLIETA. Voyez Foglieta.
FOLKES ( Martin ), antiquaire , phy-
sicien et mathématicien anglais, né à
Westminster le 29 octobre 1G90 , mort à
Londres, le 28 juin 175i, se distingua
dans les académies des Sciences déFrance
et d'Angleterre où il fut admis. Celle-ci
l'avait reçu dans sou sein à l'âge de 24
ans ; deux ans après elle le mit dans son
conseil. Newton le nomma ensuite son
vice-président, et enfin il succéda à Sloane
dans la présidence même. Ses connais-
sances et ses succès dans les sciences qui
sont l'objet des travaux de cette com-
pagnie , furent les titres qui le placèrent
à sa tète. Les nombreux mémoires qu'il
lui présenta , et qu'on trouve dans les
Transactions philosophiques , justifient
son choix. Cet auteur tira un grand
profit , pour la science des antiquités ,
d'un voyage qu'il fit en Italie ; et celui
qu'il fit en France le lia avec les savans
de ce royaume. Ses mémoires roulent
sur le poids et la valeur des monnaies
romaines ; sur les mesures des colonnes
Trajane et Antonine ; sur les monnaies
d'or d'Angleterre , depuis le règne d'E-
douard III ; sur les polypes d'eau douce ;
sur les bouteilles dites de Florence, et sur
divers sujets de physique. Lorsqu'il eut
été admis k l'académie des Sciences de
Paris , il présenta un mémoire sur la
comparaison des mesures et des poids de
France et d'Angleterre. Il finit sa carrière
littéraire par un ouvrage estimé de sa
nation , sur les monnaies d'argent d'An-
gleterre , depuis la conquête de cette île
par les Normands, jusqu'à son temps.
Les lettres remplirent sa vie; ni les soins
du mariage , ni les distractions des
voyages, ne purent rallentir son ardeur
pour l'élude. Il avait amassé une ample
bibliothèque , et un cabinet enrichi d'une
collection de monnaies , supérieure à
tout ce qu'on connaissait en ce genre.
Folkes a été enterré à l'abbaye de West-
minster où on lui a élevé un beau
monument.
* FOLLEVILLE (Gabriel Guyot bu
Guillot de) , ecclésiastique, plus connu
sous le nom d'évêque d'Agra , naquit en
IBrelagne d'une famille aisée qiii le des-
356 FOL
tina de bonne heure à l'état ecclésiasti-
que. Il était vicaire ou curé à Uol, lors-
que la révolution éclata. Après avoir
prêté serment à la constitution du clergé,
il se rétracta. Il vint à Paris , d'où il se
réfugia à Poitiers chez une de ses paren-
tes : son extérieur pieux disposa en sa
fiaveur tous ceux qui dans ce^e villç ai-
maient encore la religion , et l'on vit ac-
courir à lui une foule de personnes qui
lui demandaient des conseils , ou qui dé-
siraient de se servir de son ministère. On
assure que , lorsque la ville de Thouars
tomba au pouvoir des Vendéens , il fut
pris par les royalistes ; qu'alors , et l'on
ne sait pourquoi , il était habillé en sol-
dat ; qu'il dit pour sa justification qu'il
avait été forcé par les républicains de se
mettre dans leurs rangs ; qu'ayant de-
mandé à être conduit auprès de M. de
Villeneuve qui avait été son camarade
d'études, il se fit reconnaître de ce com-
mandant, et que ce fut probablement
alors qu'il imagina la fable d'une mission
dont il aurait été chargé par le pape. Il
déclara donc avec une assurance extraor-
dinaire qu'il avait été choisi pour appor-
ter la parole sainte dans l'Ouest ; que
quelques prélats fidèles s'étaient réunis
eu secret pour lui donner l'ordination
épiscopale ; que le pape avait non-seule-
ment confirmé leur choix en lui confé-
rant le titre d'évêque d'Agra , mais en-
core qu'il l'avait chargé de venir dans
les provinces insurgées pour réchauffer
le zèle des amis de la royauté et la piété
des fidèles. Ce mensonge, dicté par la
vanité, ou peut-être par le désir d'être
utile, fut accueilli avec empressement :
le prétendu évêque d'Agra fut présenté
en grande pompe à l'armée , et tous les
Vendéens virent en lui l'envoyé du ciel :
rien ne pouvait produire un effet plus
grand que l'apparition au milieu d'eux
d'un évêque que la Providence semblait
leur offrir , pour leur montrer qu'elle ne
les avait point abandonnés. L'abbé de
FoUeville pontifiait devant les troupes
réunies, et on le voyait encourager les
soldats sur le champ de bataille , relever
les blessés , leur prodiguer tous les soins
»Y66 m C9ur8|e Yr9><peRt meneiUçux ,
FON
et donner aux mourons les derniers se-
cours de la religion. Il avait été installé
en qualité de président du conseil char-
gé de l'administration des pays insurgés.
Dans cette position difficile, l'évêque
d'Agra ne montra point les taicns qu'on
lui supposait ; il ne répondit pas à l'i-
dée que les ^Vendéens avaient conçue de
lui : son imposture même avait été dé-
couverte. Le pape fit savoir aux chefs
Vendéens par un bref du 31 juillet 1793,
qu'il n'avait point envoyé d'évêque dans
les pays insurgés de la France ; mais les
circonstances malheureuses oii se trou-
vait l'armée catholique et royale, em-
pêchèrent qu'on ne dévoilât son scanda-
leux artifice. Après la déroute du Mans ,
l'abbé de FoUeville tomba entre les mains
des républicains , reconnu par les trou-
pes victorieuses , il fut condamné à mort
et exécuté à Angers le 5 janvier 1794. Il
subit son supplice avec courage ; sa ré-
signation était toute chrétienne. Ou l'a
représenté comme un fanatique , comme
un homme de sang : le fait est qu'il avait
un caractère doux et pacifique ; il était
réellement très pieux. La fraude dont il
se servit eut pu être très utile à l'armée
royaliste ; mais nous ne pouvons ni l'ex-
cuser ni le justifier. L'abus des choses
saintes fut toujours un crime , et c'est en
vérité pour nous une énigme de concilier
les vertus de l'abbé FoUeville avec sa
prétention à l'épiscopat , et l'usurpation
d'un titre que l'Eglise ne permit jamais
de prendre à ceux qui n'en ont pas le
droit.
FONCEMAGNE ( EUenne Ladrbault
de ) , né à Orléans le 8 mai 1694, mort à
Paris le 26 septembre 1779, membre de
l'académie française, fut sous-gouverneur
du duc de Chartres. Il est connu dans le
monde littéraire par des Lettres au sujet
du Testament politique du cardinal de
Ptichclieu , où il prouve avec autant de
politesse que de jugement et de raisons
solides , que ce Testament est réellement
du ministre de Louis Xill ; par plusieurs
mémoires qui sont insérés dans les
recueils de l'académie des Inscriptions ,
et qui roulent tous sur des points de
l'tustoirç de France, excepté celui sur 1»
FON
déesse Laverne , et par la brillante réu-
nion qu'il avait chaque semaine chez lui,
et qui s'appelait la conversation. Fone-
magne était très religieux.
\ FOJNSECA ( Antoine da ) , dominicain,
né à Lisboaue , vint faire ses études à
Paris , et publia dans cette ville , en 1 539,
des Remarques sur les Commentaires de
la Bible , par le cardinal Cajetan , in-fol.
Il reçut , 3 ans après , le bonnet de doc-
teur de Sorbonne. De retour dans sa pa-
trie , il fut prédicateur du roi , et obtint
une chaire de théologie en l'université
de Coimbre. Il mourut eu 1588.
FONSECA ( Pierre da ) , jésuite , né à
Corticada en Portugal , docteur d'Evora ,
mourut à Lisbonne , le 4 novembre 1 599,
à 7 1 ans , après avoir publié une Meta-
physique en 4 tomes in-fol. Cette méta-
physique a eu un grand cours , et a été
long-temps citée dans les écoles. Il y a
des choses inutiles par leur objet direct,
mais excellemment propres à exercer
l'esprit, à lui donner des idées justes,
nettes , précises , et à le former à une
exacte logique. Ployez Chapklais , Duns,
OCCAM.
FOJNSECA ( Roderic ) , médecin , natif
de Lisbonne , professa la médecine avec
distinction au commencement du 11^
siècle, à Pise et à Padoue, et composa
divers ouvrages sur celle science , entre
autres : De tuendavaletudinc, et De cal-
culorum remediis.
* FONSECA (Eléonore , marquise de) ,
dame d'honneur de la reine de Naples ,
née en 1768, d'une famille illustre de
cette ville, passa sa première jeunesse dans
l'étude des sciences et des lettres , et s'a-
donna particulièrement à celle de l'his-
toire naturelle et même de l'anatomie.
Elle correspondit dans la suite pour cette
science avec le célèbre Spallanzani, à
qui elle communiquait ses observations.
On croit qu'il en profita pour sa fameuse
découverte des vaisseaux lymphatiques.
Eléonore épousa en 1784 le marquis de
Fonseca , d'une ancienne famille espa-
gnole depuis long-temps établie à Naples,
et fut reçue à la cour en qualité de dame
d'honneur de la reine Marie-Caroline ,
(]ui lui accorda ^a bienvçillaQce } mai$
FON 35^7
la marquise de Fonseca qui aimait à faire
de l'esprit , ne sut pas la conserver.
Des propos un peu mordans qu'elle s'était
permis contre cette princesse et le mi-
nistre Acton , et qui furent rapportés à
sa majesté par des personnes jalouses de
la faveur de la marquise, lui firent donner
l'ordre de ne plus reparaître à la cour.
C'est de cette époque que date l'inimitié
de M"^ de Fonseca pour la famille royale.
Lorsque la révolution éclata en France,
elle en adopta les principes, et se servit
pour nuire à la cour de l'influence que
sa beauté , son esprit et son amabilité lui
donnaient sur les personnes les plus re-
marquables delà capitale qu'elle rassem-
blait chez elle. On l'a même accusée d'a-
voir eu une correspondance secrète avec
les Français qui approchaient de Naples,
et d'avoir eu ainsi une grande part aux
troubles de ce royaume en février 1799.
Le roi ayant été obligé d'abandonner
son palais, les lazzaronis, qui alors lui
étaient dévoués, commirent les plus
grands excès contre les Français qui se
trouvaient à Naples et contre leurs par-
tisans. Us se proposaient de se porter à
l'hôtel de la marquise de Fonseca pour
exercer sur elle leur vengeance; mais
elle avait été prévenue. Elle parvint,
avec un grand nombre de dames, en-
nemies comme elle de la cour , qu'elle
avait réunies, à se retirer au château
Saint-Elme, qui était déjà au pouvoir
des Français. Lorsqu'ils firent leur entrée
dans la ville , elle entreprit la rédaction
d'un journal intitulé Moniteur napoli-
tain , dans lequel elle attaqua sans mé-
nagement la reine et ses ministres. Les
succès du cardinal RufiTo ayant obligé les
Français d'évacuer Naples, la marquise
de Fonseca s'obstina à y rester, contre
l'avis de ses amis , afin , disait-elle, d'être
toujours à portée d'encourager son parti;
mais elle fut arrêtée et condamnée à
être pendue. L'arrêt fut exécuté le 20
juillet 17 99, malgré les prières de sa
famille et des principaux seigneurs , qui
demandaient au moins la commutation
de la peine. Elle n'avait alors que 3 1 ans.
FONT (Joseph de La ) , poète français,
çs\ m\9wç ds çm^ C9t»é4i«8 , dont ka
358
FON
meilleures sont l'Epreuve réciproque et
les Frères rivaux. On a encore de lui
plusieurs opéras et l'opéra-comique inti-
tulé le Monde renverse. La Font était né
à Paris en 1686 , et il mourut à Passy près
de cette capitale, en 1726, à 39 ans. Il
était encore plus passionné pour Je jeu
que pour la poésie.
FONT ( Pierre de La ), né à Avignon ,
devint prieur de Valabrègue et officiai de
l'église d'Uzès. C'était un homme de Dieu,
plein de zèle et de charité. Il se démit
du prieuré dont il était pouryu , pour en
fonder un séminaire dans la ville épisco-
pale. Il en fut lui-même le premier supé-
rieur , et une des fonctions de cet emploi
pénible nous a procuré cinq volumes
d'Entretiens ecclésiastiques , imprimés
à Paris, in-12. On en fait cas, ainsi que
de 4 vol. de prônes, in-12. Toutes les
preuves que fournissent l'Ecriture, les
Pères, les conciles, sur les devoirs des
ecclésiastiques et des autres fidèles, sont
répandues dans ces deux ouvrages avec
beaucoup d'intelligence. Le pieux auteur
termina sa carrière au commencement du
18* siècle.
" FONT DE SAVINES( Charles La),
évêque de Viviers, né à Embrun en 17 42,
fut sacré évêque en 17 78, et ne se fit
connaître qu'au moment de la révolution
par les écarts les plus malheureux. En
1791, il donna la démission de souévêché
entre les mains des électeurs de son dé-
partement , comme pour réparer les vices
de son institution. Confirmé par eux , il
prêta le serment voulu par la constitu-
tion civile du clergé, et la défendit par
ses écrits. Il prit en même temps le titre
d'évêque de I'.\rdèche, et donna la con-
sécration épiscopale à deux curés le 24
juin 1792. Le 1" décembre 1793 il re-
nonça publiquement à ses fonctions, en
se dépouillant de ses habits pontificaux
devant l'administration départementale ,
et en lui livrant sa crosse, ses mitres, sa
croix, son calice et tous les ornemensde
l'église. Il prononça en cette occasion un
discours scandaleux et impie, et écrivit
depuis contre la célébration des fêtes , le
célibat ecclésiastique , le jeûne et les rè-
gles les plus saintes et les plus iayariables
FON
de la discipline. Pendant la terreur, il
fut néanmoins arrêté et envoyé à la Con-
ciergerie à Paris. Il sembla un moment
que ce châtiment l'avait fait rentrer en
lui-même. Instruit que l'archevêque de
Vienne gouvernait son diocèse avec des
pouveii's du saint-Siége, il conseillait à
ceux qui croyaient à la juridiction , de
s'adresser à ce prélat , reconnaissant que
lui-même n'en avait réellement pas. Cet
heureux changement ne fut pas de longue
durée. En 1797 il s'éleva de nouveau
contre le pape et contre le métropolitain,
et il parut vouloir reprendre la conduite
de son diocèse ; mais il fut repoussé par
l'opinion de ses diocésains. Il se relira
alors à Paris , et revint cn.suite dans sa
ville natale , où il eut le bonheur de re-
connaître et d'avouer ses erreurs. Il ne
cessa de les pleurer et d'en faire péni-
tence jusqu'à sa mort, arrivée au com-
mencement de janvier 1815.
FONTAINE (Charles), né à Paris le
13 juillet 1616 d'un commerçant , passa
sa vie à faire des vers , passables pour le
temps. Il se fixa à Lyon , oii il contracta
successivement deux mariages, et mourut
dans un âge avancé , postérieurement à
1 68G. Ses principales poésies sont recueil-
lies en 1 vol. in-8 , imprimé à Lyon en
1 666, sous le titre de Ruisseaux de Fon-
taine. On a encore de lui le Jardin d*a-
mour , avec la Fontaine d'amour, Lyon,
1688 , in-16 : cette édition avait été pré-
cédée de deux autres. Victoire d! Argent
contre Cupido , Lyon, 1637, in-16, etc.
Il a mis aussi le nouveau Testament en
sixains, Lyon, 1660, in-12, avec des fi-
gures en bois.
FONTAINE ( Jean de La ) , le Fabu-
liste par excellence , naquit à Château-
Thierry , le 8 juillet 1621 , un an après
Molière. A 19 ans , il entra chez les Pères
de l'Oratoire, qu'il quitta 18 mois après.
La Fontaine ignorait encore à 2^2 ans ses
talens singuliers pour la poésie. On lut
devant lui la belle ode de Malherbes sur
l'assassinat de Henri IV, et dès ce mo-.
ment il se reconnut poète. Un de ses pa-
rens ayant vu ses premiers essais, l'en-
couragea et lui fit lire les meilleurs au-
teurs unçieps et roodevues, français et
i
J-ÔN
étrangers. On lui fit épouser Msrîe Héri-
card , fille d'une figure et d'un caractère
qui lui gagnaient les cœurs. La Fontaine,
soit insensibilité , soit vanité , la quitta
pour vivre dans la capitale , et ce n'est
pas ce qui prévient !e plus en faveur de
son caractère. La duchesse de Bouillon ,
exilée à Cbàteau-Tbierry , avait connu La
Fontaine, et lui avait même, dit-on, fait
faire ses premiers contes. Rappelée à Pa-|
ris , elle y mena le poète. La Fontaine
avait un de ses parens auprès de Fouc-
quet. La maison du surintendant lui fut
ouverte, et il en obtint une pension,
pour laquelle il faisait à chaque quartier
une quittance poétique. Après la disgrâce
de son bienfaiteur, La Fontaine entra en
qualité de gentilhomme chez la célèbre
Henriette d'Angleterre, première femipe
de Monsieur. La mort lui ayant enlevé
cette princesse, il trouva de généreux
protecteurs dans M. le prince , dans le
prince de Conti , le duc de Vendôme et
le duc de Bourgogne , et des protectrices
dans les duchesses de Bouillon , de Maza-
rin , et dans l'ingénieuse La Sablière ;
celle-ci le retira chez elle, et prit soin de
sa fortune. Atladié à Paris par les agré-
mens de ia société , et par ses liaisons
avec les plus beaux esprits de son siècle,
La Fontaine allait néanmoins tous les ans
au mois de septembre rendre visite à sa
femme. A chaque voyage il vendait une
portion de son bien , sans s'embarrasser
de veiller sur ce qui testait. Il ne passa
jamais de bail de maison, et il ne renou-
vela jamais celui d'une ferme. Cette apa-
thie qui coûtait tant d'ciforts aux anciens
philosophes , il l'avait sans effort. Elle
influait sur toute sa conduite et le rendait
quelquefois insensible même aux injures
de l'air. M""* de Bouillon , aliant un malin
à Versailles, le vit rêvant sous un arbre
du Cours; le soir en revenant, elle le
trouva dans le même endroit et dans la '
même attitude , quoiqu'il fit assez froid
et qu'il eut plu toute la journée. Il avait
quelquefois des distractions qui lui ô talent
la mémoire ; il en avait d'autres qui lui
ôtaient le jugement. Il loua beaucoup un
jeune homme qu'il trouva dans une as-
semblée. « Eh ! c'est votre fils, lui dit-
FON
359
on ; » il répondit froidement 1 « Ah ! j'en
» suis bien aise. » Il avait fait un conte ,
dans lequel , conduit par sa matière , il
mettait dans la bouche d'un moine une
allusion fort indécente à ces paroles de
l'Evangile : Domine , quinque talenta
tradidisti mihi, etc. ; et par un tour d'i-
magination dont La Fontaine seul pouvait
être capable, il l'avait dédié au docteur
Arnauld. Il fallut que Racine et Boileau
lui fissent sentir combien la dédicace
d'un conte licencieux à un homme grave
choquait le bon sens. Racine le mena un
jour à Ténèbres , et s'apercevant que
l'oiiice lui paraissait long , il lui donna
pour l'occuper un volume de la Bible,
qui contenait les petits prophètes. Il tom-
ba sur la prière des juifs dans Baruch , et
ne pouvant se lasser de l'admirer , il di-
sait à Racine : « C'était un beau génie
» que ce Baruch ; qui était-il ? » Le len-
demain et plusieurs jours suivans, lors-
qu'il rencontrait dans la rue quelques
personnes de sa connaissance , après les
complimens ordinaires , il élevait la voix
pour dire «. Avez-vous lu Baruch ? c'était
» un beau génie ! » L'espèce de stupidité
que ce célèbre fabuliste avait dans son
air, dans son maintien et dans sa con-
versation , fit dire à M"^ de La Sablière ,
un jour qu'elle avait congédié tous ses
domestiques; « Je n'ai gardé avec moi
« que mes trois bêtes , mon chien , mon
)) chat et La Fontaine. » Cependant cet
homme, si insensible en apparence et si
apathique , était quelquefois colère et
rancunier. Ayant eu une dispute avec M.
Choart, curé de St.-Germain-le-Vieil , à
Paris, il s'en vengea par la fable rfa curé
et du mort ( liv. 7 , fab. 1 1 ). C'est la plus
mauvaise de toutes ses fables , elle se res-
sent de l'humeur du poète ; le nom du
curé y est défiguré ( voyez le Journal de
Paris , 1787 , n" 107 ). La FQntaine avait
toujours vécu dans une grande indolence
sur !a religion , comme sur tout le reste.
Une maladie qu'il eut sur la fin de 1G92
le fit rentrer en lui-même. Le Père Poujeit
de l'Oratoire , alors vicaire de St.-Roch ,
lui fit faire une confession générale. Prêt
à recevoir le viatique, il délesta ses contes
et en demanda pardon à Dieu , en pré-
36o fài^
sence de quelques membres de l'académie
qu'il prit pour témoins de son repentir.
Si ce repentir fut sincère , il ne fut pas
constant. La Fontaine laissa échapper
après sa conversion encore quelques con-
tes ; celui de la Clochette en est un. C'est
à quoi fait allusion son prologue cité dans
Moréri :
O combien l'homme ett inconstant, dîrert,
Faible , léger, tenant mal sa parole 1
J'afaiijuri, même en assez beaux tera.
De renoncer à tout conte friTole,
Kl quand juré ? c'est ce qui me confond ,
Puis , Piex-Tous à rimeur qui répond
D'un seul moment......
La Fontaine réprima ces saillies d'une
imagination long-temps fixée à ce genre
d'écrire, qui n'est ni le plus noble, ni le
plus sage. Il entreprit de traduire les
hymnes de l'Eglise ; mais sa verve émous-
sée par l'âge, et peut-être son génie que
la nature n'avait pas fait pour le sérieux ,
ne lui permirent pas de fournir long-
temps cette carrière. Il mourut à Paris
en 1695, à 74 ans, dans les plus vifs sen-
timens de religion. Lorsqu'on le désha-
billa , on le trouva couvert d'un cilice.
Il s'était fait lui-même celte épitaphe ,
qui le peint parfaitement :
Jeanj'en alla comme il était venu.
Mangeant ton fonds après son revenu.
Croyant le bien chose peu nécessaire.
Quant à son temps, bien le sut dispenser!
Deux parts en fit dont il soûlait passer
L'une à dormir, et l'autre à ne rien faire.
Parmi les ouvrages qui noiw restent de
La Fontaine , il faut placer au premier
rang ses contes et ses fables. Les pre-
miers sont un modèle parfait du stile
historique dans le genre familier , mais
en même temps un recueil de tableaux
destructifs des mœurs, qu'une jeunesse
TCrlueuse ne saurait trop redouter. Ses
fables sont sa véritable gloire. On y re-
connaît le poète de la nature ; une molle
négligence y décèle le grand maître et
l'écrivain original. « On dirait, suivant
» l'expression d'un critique judicieux ,
» qu'elles sont tombées de sa plume. U a
» surpassé l'ingénieux inveuteur de l'a-
» pologue , et son admirable copiste.
» Aussi élégant , aussi naturel , moins
» pur à la vérité , mais aussi moins froid
y et moins nu que Phèdre, il a attrapé
» le point de perfection dans ce genre. »
Si ceux qui sont venus après lui , comme
La Motte, Richer , d'Ardenne , Aubert,
Desbillons , l'ont sui-passé quelquefois
pour l'invention des sujets , ils sont fort
au-dessous pour tout le reste , pour l'har-
monie variée et légère des vers , pour la
grâce , le tour , l'élégance , les charmes
naïfs des expressions et du badinage. Il
jélève, dit La Bruyère, ses petits sujets
^jusqu'au sublime. Sous l'air le plus sim-
ple , il a du génie , et même plus de ce
qu'on appelle esprit , qu'on n'en trouve
dans le monde le mieux cultivé. On doit
à M. de Montenault une magnifique édi-
tion des fables de La Fontaine , en 4 vol.
in-fol., dont le premier a vu le jour en
1 7 55 , et le dernier en 1 7 59 ; chaque fable
est accompagnée d'une et quelquefois de
plusieurs estampes ; l'ouvrage est précé-
dé d'une vie du fabuliste. On a une autre
édition des fables de La Fontaine par
Coste, 1744 , 2 vol. in-t2 , avec figures
et de courtes notes, et 1 vol. iu-12,sans
figures. Elles ont depuis été réimprimées
très souvent, in-8 , in- 12 et in-18, avec
et sans figures , et traduites en vers latins
par Giraud, 1 7 7 5, 2 vol . in-8 ou in- 1 2 . (Les
plus belles éditions des fables sont celles
de Paris, Didol aîné, 1802, 2 vol. grand
in-fol. , ou 1818, 2 vol. in-8, de Parme
(veuve Bodoni), 1814, 2 vol. grand
in-fol.) L'on a imprimé à Paris en
1758, en 4 jolis petits vol. in-12, les
OEiivres diverses de La Fontaine , c'est-
à-dire tout ce qu'on a pu rassembler de
ses ouvrages tant en vers qu'en prose, à
l'exception de ses fables et de ses contes.
On y trouve quelques comc'dies, un poème I
sur le quinquina, que\(pies pièces ana- •
crêontiques , des lettres et d'autres mor-
ceaux , la plupart très faibles et qu'on
n'aurait jamais imprimés , si les éditeurs
(consultaient la gloire des morts plutôt
que l'intérêt des vivans. Tous les ouvrages
de La Fontaine furent recueillis en 1726,
3 vol. in-4 , belle édition encadrée , 1803,
8 tomes en 5 vol. in-12, et 1814 , 6 vol.
in-8 , fig. ( Il en a paru plusieurs éditions
en 1826 : le libraire Dupont en a fait une
en 6 vol. in-8 , avec les commentaires et
les notes de M. Walkenaer. ) La Fontaine
FOiS
avait essayé de beaucoup de genres , de
quelques-uns même opposés à son génie.
Voici comme il peint son inconstance :
Papillon du Parnasse, et semblable aux abeiUei.
1 qui le bou Platon compare nos merTeil^I
Je suis cbose légère , el To!e à tout sujet;*
Je tais de fleur en fleur, et d'objet eu objet "
A beaucoup de plaisir je mêle un peu de (gloire.
J'irais plus haut peut être au temple de mémoire
Hais quoi li« suis volageen Ters comme eu amours, ete.
( Outre la traduction latine du Père Gi-
raud que nous avons déjà citée, on a des
imitations ou des traductions de ces petits
chefs-d'œuvre dans presque toutes les lan-
gues : il n'est pas jusqu'à la littérature russe
qui ne s'honore d'avoir son La Fontaine :
dans ce dernier temps M. Krilof l'a imité
avec plus de succès qu'aucun autre poète
étranger et même français. L'un des plus
xécens biographes de notre immortel fa-
buliste , M. W alkenaer , est celui qui le
premier l'a bien fait connaître ; son livre
a pour titre Histoire de la vie et des ou-
vrages de Jean de La Fontaine^ 1.820 ,
3« édition, 1824, in-8. Le travail qu'a
également donné M. A. A. Barbier sur
l'histoire bibliographique de ce grand
poète, est 'm\.i\.\}\é Notice des principales
éditions des fables et des œuvres de La
Fontaine. Il se trouve dans le tome 2 des
fables inédites publiées par M. Robert ,
Paris, 1825,2 vol. in-8. Chamfort a fait
V Eloge de La Fontaine , couronné par
l'académie de Marseille. )
FOINTAirs'E (Mcolas), parisien, fils
d'un maître écrivain, fut confié à l'âge
de 20 ans aux solitaires de Port-Royal.
11 se chargea d'abord d'éveiller les au-
tres ; mais dans la suite il eut le soin plus
noble des études de quelques jeunes gens
qu'on y élevait. Les heures de loisir qui
lui restaient, il les employait à trans-
crire les écrits des savans qui habitaient
celle solitude. Il suivit Arnauld et Nicole
dans leurs diverses retraites. Il fut en-
fermé à la Bastille avec Sacy, le 13 mai
166G , et en sortit avec lui en 1668. Ces
deux amis ne se quittèrent plus. Après la
mort de Sacy en 1684 , Fontaine changea
plusieurs fois de retraite. Il se fixa enfin
à Melun , oîi il mourut en 1709, à 84
ans. On a de lui 1° Vies des saints de
ï ancien Testament , en 4 vol. in-8 : ou-
V.
FON 36i
vrage composé sous les yeux de Sacy ,
qui peut être de quelque utilité pour
l'histoire sacrée. 2° Les Fies des saints,
in-fol. et 4 vol. in-8. C'étaient les plus
exactes avant celles de Baillet ; mais les
unes et les autres sont oubliées depuis
celles que M. l'abbé Godescard a tradui-
tes de l'anglais , 12 vol. gr. in-8. 3° Mé-
moires sur les Solitaires de Port-Roy al y
en 2 vol. in-12 , très détaillés , et même
jusqu'à la minutie : tout parait précieux
dans les saints d'un parti auquel on est
dévoué. 4° Traduction des Homélies de
saint Chrysostôme sur les Epures de
saint Paul, en 7 vol. in-8. On accusa
l'auteur d'être tombé dans le nestoria-
nisme ; l'archevêque de Paris , Harlay ,
condamna Fontaine , qui se rétracta ,
puis s'expliqua, et prétendit , à l'exemple
de tous les dogmatisans, avoir raison.
6° Abrégé de l'Histoire de la Bible , pu-
blié sous le nom de Royaumont , in-8 ,
avec figures , communément attribué , et
peut-être avec raison , à Sacy. Voye%
MaISTRE ( LE }.
FONTAINE ( Jacques de La ) , jé-
suite de Berg-Sainl-Vinox , travailla avec
beaucoup de zèle à la défense de la con-
stitution Unigenitus , et publia sur ce
sujet un ouvrage en 4 vol. in-fol. Il
mourut à Rome le 18 février 1728, à
l'âge de 78 ans.
FONTAINE ( Alexis ), né à Clavai-
8on en Dauphiné , s'occupa principale-
ment du calcul intégral , fut reçu de l'a-
cadémie des Sciences, et mourut en 1771
à Cuiseaux en Franche-Comté. Ses mé-
moires , qui sont dans le recueil de l'a-
cadémie , ont été imprimés séparément
en 1 vol. in-4.
* FONTAINE ( Jean Claude ) , pro-
fesseur de philosophie au collège d'An-
necy , et chanoine de la collégiale de la
même ville, né à Talloires en 1715, et
mort dans la même ville en 1807, a
donné quelques ouvrages peu connus.
Les principaux sont : 1" Réfutation de la
nécessité et du fatalisme , Annecy ,1783,
2 vol. in-8. 2° Le véritable système sur le
mécanisme de V univers, ou Démonstra-
tion de V existence du premier moteur ,
Annecy, 1785, 2 voL iji-8. Il a laissé
23..
362
FOl^
plusieurs manuscrits sur des objets d'as-
tronomie, de physique, etc.
FONTAIJVE DE LA Roche. Foyez Ro-
che.
FONTAINES ( Pierre Des ) , né dans
le Vermandois en Picardie , maître des
requêtes de Saint-Louis , a réuni les usa-
ges du Vermandois sous le titre de Con-
seils à son ami. Du Cangc les a publiés
avec l'Histoire de Saint-Louis, de Join-
ville , 1668 , in-fol. C'est le premier au-
teur que l'on connaisse qui ait écrit sur
la jurisprudence française. U a aussi écrit
une histoire sous le titre de Livres de la
Reigne. Joinville dit que saint Louis
s'en servait « pour ouïr les plaids de la
M porte , pour recevoir les requêtes et
i> faire droit aux parties. »
FONTAINES ( Marie -Louise -Char-
lotte DE Pelakd de GivRV , épousc du
comte de ), fille du marquis de Givry,
commandant de Metz, morte en 1730,
cultiva les lettres à l'ombre du silence ,
et cueillit quelques fleurs dans le champ
romanesque. On lui doit entre autres pro-
ductions, écrites sans prétention et pour
le seul plaisir d'écrire : La comtesse de
Savoie, roman dans le goût de Zaïde ,
imprimé en 1722. {Ame'nophis, prince de
Libye. Ils ont été imprimés dans les œu-
vres complètes àe. Mesdames de Lafajette
et deTencin , Paris, 1804, in-8, et réim-
primés sous le titre d'œuvres de Mesda-
mes de Fontaines, etc. , avec une notice
littéraire, Paris, 1812, 1 vol. in-18.)
FONTAINES ( Pierre-François Gtjyot
des ) naquit à Rouen le 22 juin ICSâ,
d'un conseiller au parlement. Les jésui-
tes , chez lesquels il fit ses humanités avec
éclat, lui donnèrent leur habit en 1700.
Après avoir professé 1 5 ans dans diffe-
rens collèges de la société , il sollicita sa
sortie et l'obtint sans peine. Son humeur
difficile et son génie indépendant avaient
un peu indisposé ses supérieurs , qui lui
avaient conseillé eux-mêmes de rentrer
dans le siècle , et de quitter le cloître
pour lequel il ne paraissait pas fait. L'abbé
des Fontaines était prêtre alors ; on lui
donna la cure de Torigny en Normandie,
mais il ne tarda pas de s'en démettre. 11
fieki quelque temps auprès du cardinal
FOIS
d'Auvergne , comme bel-esprit et homme
de lettres. Quelques brochures critique»
lui firent un nom à Paris. L'abbé Biguon
lui confia en 1 7 24 le Journal des savans,
mort dq|la peste, comme on disait alors,
parceique les prédécesseurs de l'abbé des
Fontaines dans ce travail ne le remplis-
saient que d'extraits de livres surla peste
de Marseille. Le nouveau journaliste ra-
nima ce cadavre, et se distingua égale-
ment par d'autres ouvrages périodiques.
Le premier vit le jour en 1731 , sous le
titre de Nouvelliste du Parnasse , ou
Réflexions sur les ouvrages nouveaux.
Il n'en publia que 2 vol. L'ouvrage fut
arrêté par le ministère en 1 7 32 , et ce fut
au grand regret de quelques littérateurs
qui y trouvaient l'instruction, et des
gens du monde qui y cherchaient l'amu-
sement. Environ trois ans après, en 1 736,
l'abbé des Fontaines obtint un nouveau
privilège pour des feuilles périodiques.
Ce sont celles qu'il intitula : Observa-
tions sur les écrits modernes, in-12;
commencées comme les précédentes avec
l'abbé Granet , et continuées jusqu'au
33* vol. inclusivement. On les supprima
encore en 1743. Cependant l'année sui-
vante il publia une autre feuille hebdo-
madaire, intitulée : Jugemens sur les
ouvrages nouveau.v , en 11 vol. in-i2,
dontIes2 derniers sont de Mairault. L'abbé
Granet n'eut point part aux jugemens,
comme le dit l'abbé Ladvocatou son conti-
nuateur ; il y avait 2 ans qu'il était mort.
L'abbé des Fontaines mourut en 1745, à
60 ans. Ses critiques ont été taxées de
trop de sévérité ; mais celte sévérité , dit
un auteur judicieux , n'était-elle pas né-
cessaire , si l'on fait attention à la rapi-
dité avec laquelle le goût se pervertit
aujourd'hui ? Il était naturel que l'abbé
des Fontaines fût sensible à la dégrada-
tion des lettres : personne ne connaissait
mieux que lui les règles et les raisons des
règles -, personne ne les développait avec
plus de finesse , d'agrément et de clarté ;
personne ne saisissait avec autant de pré-
cision les différens degrés du beau et les
moindres nuances du ridicule ; l'œil sans
cesse ouvert sur les moindres défauts, il
les sentait vivement et ne faisait grâce à
I
FON
rien. Est-il étonnant après cela , qu'il
ait eu pour ennemis les médiocres écri-
vains de son temps, et naènie des écri-
vains célèbres qui ne voulaient être mé-
diocres en rien ? Delà ce déchaînement
presque universel contre lui. On s'efforça
de décrier ses talens , on attaqua sa ré-
putation, on calomnia ses mœurs, on
enfanta un délu!j;e de libelles, auxquels
il eut la faiblesse d'être sensible , et qui
le rendirent injuste à l'égard de ceux
qui l'avaient offensé ; mais si le ressenti-
ment a aigri quelquefois son slile , on dé-
couvre toujours dans ses jugemens les
lumières d'un homme fait pour régenter
le Parnasse. Toutes les fois qu'il n'écoute
que la raison et le bon goût, on ne peut
s'empêcher de le regarder comme le mo-
dèle des bons critiques. « L'abbé des
» Fontaines ( dit Fréron } , philosophe
» dans sa conduite comme dans ses prin-
i> cipes , était exempt d'ambition ; il avait
>j dans l'esprit une noble fierté, qui ne
» lui permettait pas de s'abaisser à solli-
" citer des bienfaits et des titres. Le plus
» grand tort que lui aient fait les injures
«•dont on l'a accablé, est qu'elles ont
» quelquefois corrompu son jugement.
w L'exacte impartialité, je l'avoue, n'a
M pas toujours conduit sa plume , et le
» ressentiment de son cœur se fait remar-
» quer dans quelques-unes de ses criti-
» ques... Sil'abbédesFontainesétaitquel-
« quefois dur et piquant dans ses écrits ,
» dans la société , il était doux , affable ,
>' poli , sans affectation de langage et de
» manières. On doit cependant le mettre
» au rang de ceux dont on n'est curieux
M quedelire les ouvrages. Il paraissaitdans
» la conversation un homme ordinaire,
» à moins qu'on n'y agitât quelque ma-
)) tière de littérature et de bel-esprit. Il
X soutenait avec chaleur ses sentimens ;
» mais la même vivacité d'imagination ,
» qui l'égarait quelquefois, le remettait
)' sur la route, pour peu qu'on la lui fît
» apercevoir. « J. .1. Rousseau,^ iM. Rollin,
et tous ceux qui s'intéressaient aux pro-
grès de la bonne littérature, ont rendu
par leurs éloges, justice à ses talens et à
ses lumières. L'auteur delà Mc'tromnnie
( le célèbre Piron ) fut long-temps de ce
FON 3(5î
nombre. Ami faible et inconstant, comme-
ne le sont que trop ordinairement les.
gens de lettres, il ne se brouilla avec
l'abbé des Fontaines que pour une baga-
telle. Voltaire lui fut également attaché,
mais quelques plaisanteries sur la-tragé-
die de la Mort de César, irritèrent ce
poète , et furent le signal d'une guerre
qui a duré jusqu'à la mort du critique.
Outre ses feuilles , on a encore de l'abbé
des Fontaines : 1° une Traduction de.
Virgile, en 4 vol. in-8^, Paris, 1743,
avec des figures de Cochin , des discours,
bien écVits , des dissertations utiles , des
remarquçs propres à diriger les jeunes
gen^dans la lecture de /^l'rg'iVe et des au-
teurs qui l'ont imité. Il y en a aussi une
édition en 2 vol. in-12. Cette version ,
fort supérieure aux traductions de Fabre,
de Catrou et des autres , est la meilleure ;.
mais elle n'est pas encore parfaite. Quel-
ques morceaux sont écrits du stile de Tc-
lémaquc : c'était tout ce qu'on pouvait
attendre d'un traducteur en prose; mais
dans plusieurs autres fragmens , l'auteur
de V Enéide n'a que la moitié de ses grâ-
ces. On trouve des endroits rendus avec
chaleur, mais avec trop peu de fidélité;
d'autres très élégans, mais froids, gla-
cés : ceux-ci sont le plus grand nombre.
2° Poésies sacrées , traduites ou imitéea
des Psaumes, ouvrage de sa jeunesse , et
qui n'en est pas moins froid. 3° Lettres
sur le Livre de la Religion chrétienne
prouvée par les faits, par t abbé Houtte-
ville, in-12. Elles sont au nombre de 18,
et la plupart très judicieuses. 4" Parado-
xes littéraires sur l'Inès de Castro de La
Motte, in-8. Cette critique fut très re-
cherchée. 5° Entretiens sur les Voyages
de Cyrus de Ranisay , autre critique
fort sensée. 6° i?rtci«e vengé, ou Exa-
men des remarques grammaticales de
M. Vabbé d'OIivet sur les OEuvres de
Racine, in-12. Celte brochure prouve
que l'abbé des Fontaines connaissait le
génie de .sa langue. 1° Les Voyages de
Gulliver , traduits de l'anglais de Swift ,
in-12. 8° Le Tiouveau Gulliver, 2 vol.
in-12. Il ne vaut pas l'ancien; mais si
l'on n'est pas sati.sfait de l'invention, on
y reconnaît du moins le même goût d«.
364 FON
stilc et de critique morale , qui avait fait
la réputation de celui de Swift. 9° Les
Aventures de Joseph Andrews , tradui-
tes de l'anglais, 2 vol. in-12. 10° L'His-
toire de don Juan de Portugal, in-12 ,
roman historique , dont le fond est dans
Mariana. 11° L'abbé des Fontaines a eu
part à la traduction de l'Histoire du pré-
sident de TLou : à l'Histoire des révolu-
tions de Pologne ; à celle des ducs de
Bretagne ; à la traduction de l'Histoire
romaine d'Ecbard ; à l'Histoire abrégée
de la ville de Paris , par d'Auvigni : au
Dictionnaire neologique , ouvrage esti-
mable fait pour guérir quelques auteurs
qui écrivaientcommeparlaient les laquais
des Pre'cieuses , mais qu'il infecta de sa-
tires personnelles. M. l'abbé de La Porte
a publié en 17 57 l'Esprit de V abbé des
Fontaines^ en 4 vol. in-12. On trouve à
la tête du premier volume la vie de l'au-
teur , un catalogue de ses ouvrages, et
un autre des écrits publiés contre lui.
FONTANA (Publie), prêtre, né en
1548 àPalIuccio, près de Bergame, eut
le talent de la poésie latine et les vertus
de son état. Le cardinal Aldobrandini ne
put jamais lui faire quitter sa solitude.
Il mourut en 1G09 , à 62 ans. Le principal
de ses ouvrages , imprimé à Bergame en
1 594 , in-folio , est son poème de la Del-
phinide. Il y a de la grandeur , de la no-
blesse , de l'élévation , et peut-être un
peu d'enflure dans le stile.
FONTANA (Dominique) , né à Mili ,
village sur le bord occidental du lac de
Lugano , en 1643, vint à Rome à l'âge de
20 ans pour y étudier l'architecture. Sixte
V, qui s'était servi de lui n'étant que car-
dinal , le choisit pour son architecte lors-
qu'il eut obtenu la tiare. Ce pontife avait
conçu le projet de mettre sur pied l'obé-
lisque de granit d'Egypte , qu'on voit
actuellement sur la place de St.-Pierre à
Rome , et qui alors était couché par terre,
près le mur de la sacristie de cette église.
Il proposa un concours aux artistes ingé-
nieurs et mathématiciens, pour imaginer
les moyens de redresser ce précieux reste
de la magnificence romaine , haut de 1 07
palmes, d'une seule pièce, et du poids
d'environ un million de livres. Les pro-
FON
cédés dont les Egyptiens et les Romains
s'étaient servis , soit pour transporter ,
soit pour élever en l'air ces masses énor-
mes, étaient ensevelis dans l'oubli; la
tradition ne fournissait rien à ce sujet ,
et il fallait nécessairement imaginer. Fon-
tana présenta au pape le modèle d'une
machine propre à cette opération , avec
laquelle il exécutait en petit, ce qui de-
vait se pratiquer en grand. L'exécution
répondit à l'attente : l'obélisque fut d'a-
bord transporté sur la place où il devait
être élevé , distante de 1 1 5 cannes du
lieu où il était couché ; et le 1 0 septembre
1 58G il fut dressé sur son piédestal , au
bruit des acclamations réitérées d'une
multitude innombrable de spectateurs. Il
fut magnifiquement récompensé. Le pape
le créa chevalier de l'Eperon d'or et noble
romain , et fit frapper des médailles h son
honneur. A ces distinctions fut ajoutée
une pension de 2,000 écus d'or, réver-
sible à ses héritiers ; outre 5,000 écus de
gratification, et le don de tous les maté-
riaux qui avaient servi à son entreprise ,
estimés à plus de 20,000 écus. C'est cette
érection de l'obélisque de la place de St*.-
Pierre qui a fait la plus grande réputation
de Fontana. ( 11 transporta et éleva trois
autres anciens obélisques, l'un sur la place
de Ste. -Marie-Majeure , l'autre sur celle
de St. -Jean de Latran, et le troisième sur
la place du peuple. Il répara les colonnes
Trajane et Antonine , continua le palais
papal , sur le mont Quirinal nommé de-
puis Monte Cavallo à cause des deux
groupes représentant des coursiers domp-
tés par deux héros , que Fontana fit
transporter dans ce lieu depuis les Ther-
mes de Dioclélien. (Il avait beaucoup de
génie pour la mécanique ; mais il a fait
de grandes fautes en architecture. Les
mauvais offices qu'on lui rendit auprès
du pape Clément VIII , et peut-être des
torts réels, le firent destituer de sa place
de premier architecte de sa Sainteté. Il
fut appelé à Naples en 1 592 , par le comte
de Mirande , vice-roi , qui le créa archi-
tecte du roi , et ingénieur en chef du
royaume. Il construisit plusieurs édifices
dans cette ville , et entre autres le palais-
royal. Il y mourut riche et fort considéré,
I
FON
en 1607. On a de cet architecte 1 vol.
in fol. imprimé à Rome en 1690 , où sont
décrits les moyens qu'il employa pour le
transport et l'érection de l'obélisque dont
nous avons parlé.
FONT Aïs A (Charles) , architecte cé-
lèbre , né à Brundolo dans le territoire
de Côme en 16.34 , fut un des meilleurs
élèves du cavalier Bernin ; mais il n'eut
point sa correction , et donna dans le
singulier. Innocent XII et Clément XI
employèrent souvent ses talens. Il a con-
struit un grand nombre de monumens
publics à Rome , entre autres le Mausolée
de la reine Christine à St. -Pierre , les pa-
lais Grimani et Bolognetti , la fontaine de
Ste. -Marie in Transtevcre , une des fon-
taines de la place St.-Pierre , le théâtre
de Tordionne, la bibliothèque de la Mi-
nerve, le palais de Visconti à Frescati ,
etc., etc. Innocent XI le chargea de faire
la description de l'église de St.-Pierre.
Suivant le calcul de cet architecte, les
dépenses qui ont été faites pour cette
église depuis sa fondation jusqu'au mo-
ment oîi il écrit ( en 1694 ) , montent à
46 millions huit cent mille et cinquante-
deux écus romains , sans y comprendre
la dépense des modèles , la démolition de
l'ancienne église et du clocher du cavalier
Bernin , les peintures, les échafauds, etc.
(Suivant Fontana , la hauteur intérieure ,
depuis le pavé jusqu'au dessous de la
voûte, est de 6 3 toises 5 pouces, et la voûte
a 6 pieds 2 poucesde diamètre.) Il mourut
à Rome le 6 février 1714. On a de lui :
1° La description dont nous venons de
parler , sous le titre de Templum Vali-
canum et ejiis origo, 1694 , in-fol. Il ren-
ferme d'excellens principes pour les jeu-
nes architectes. 2" Anfiteatro Flavio
descritto e delineato , config. , la Haie,
1725, in-fol.
FONTANA (François) , habile ma-
thématicien et physicien , publia en
1 646 , un traité intitulé Novœ cœlestium
et terrcstrium rerum observationes. Il
préparait d'autres ouvrages , lorsqu'il
mourut de la peste à Naples, en 1636.
* FONTANA (Le Père Grégoire), cé-
lèbre mathématicien italien , né à Villa
de Nogarola dans le Tyrol, le 7 décembre
FON 365
1735, s'engagea fort jeune dans l'ordre
des écoles Pies à Rome , et s'y fit bientôt
distinguer par ses talens. On l'envoya
professer à Sinigaglia, à Milan, ensuite
à Pavie , oii il remplaça le fameux Bosco-
M'ich, et où il enseigna avec distinction
pendant près de 30 ans les hautes mathé-
matiques. Il était en même temps direc-
teur de la bibliothèque de l'université
créée par le comte de Firmian, et elle
acquit sous lui son existence et une grande
partie de ses richesses. Lorsque Buona-
parte vint en Italie en 1796 , comme gé-
néral en chef de l'armée française, il le
fit nommer membre du Corps législatif de
la naissante république cisalpine , et il
eut la faiblesse d'accepter cette place ;
mais il s'en démit bientôt. Il se retira à
Milan après la bataille de 3Iarengo , et
devint membre du collège électoral de*
Doiti. Une fièvre ardente l'emporta le 24
août 1803. Il a laissé 1° plusieurs disser^
tations ou opuscules académiques. 2° Un
grand nombre de mémoires insérés dans
la collection des académies de Sienne , de
Turin et autres sociétés savantes. 3° Plu-
sieurs traductions d'ouvrages français ,
anglais, ou allemands, tels que Vllydro-
namique de l'abbé Bossut; une disser-
tation de Laurent Mosheim sur rou-
vrage d'Origine contre Cehus ; un ser-
mon sur le martyre de Charles I, pro-
noncé à Dublin ; VEscmpio délia Fran-
cia , ou V E xemple de la France , avis
et miroir pour V Angleterre , d'Artur
Young. Ces deux ouvrages furent faits et
publiés à l'occasion de l'attentat atroce
commis contre la personne de Louis XVI.
* FONTANA (Le chevalier Félix de),
savant physicien et naturaliste italien ,
frère du précédent , naquit en 1730 à Po-
marolo , petit bourg du Tyrol. L'empe-
reur François I , alors grand duc de Tos-
cane , le nomma professeur de philoso-
phie à Pise , où il resta jusqu'à ce que
le grand duc Pierre Léopold , depuis em-
pereur sous le nom de Léopold II , le fit
venir à Florence, et le chargea de former
le beau cabinet de physique et d'histoire
naturelle qui fait encore aujourd'hui l'an
des plus beaux ornemens de celte ville.
L'empereur Joseph II , à son passage à
366
FON
Florence , lui accorda le titre de cheva-
lier en signe d'admiration de ses travaux.
Quoique Fontana n'eût pris aucune part
directe aux aifaires à l'époque de la pre-
mière occupation de la Toscane par les
Français, les déférences que les généraux
français lui témoignèrent alors lui firent
courir quelques risques au retour des
Autrichiens ; et les insurgés d'Arezzo qui
les précédèrent à Florence , le jetèrent
même en prison ; mais il fut promptement
mis en liberté. Il mourut le 10 mars 1805
des suites d'une chute qu'il avait faite
quelques mois auparavant dans une rue.
On lui doit plusieurs écrits marquans sur
la chimie, la physique et la physiologie.
1° Des Lettres sur les phénomènes de.
T irritabilité' , insérées dans le troisième
volume des mémoires de Hallcr sur les
parties sensibles et irritables. 2" De'
moti deW irride, Lucca , 1765, in-8. Il
prouve par des expériences très ingé-
nieuses sur les raouvemens de l'iris, que
l'irritabilité de cette partie de l'œil est
dans certain cas soumise à la volonté.
3° Ricerche filoso/iche sopra la fisica
animale , Florence , 17 75, in-4 ; ouvrage
qui vient à l'appui du précédent , et oîi
il cherche à prouver que l'influence du
nerf sur la fibre ne doit être considérée
que comme un irritant extérieur. 4° Ri-
cerche snpra'l veleno délia vipera , Luc-
ca , 1767 , in-8. Il prétend dans ce re-
cueil , où l'on trouve un très grand nom-
bre d'expériences , que la morsure d'une
vipère d'Europe est insuffisante pour tuer
un homme. 5" Traite' sur le venin de la
vipère , sur les poisons américains , sur
le laurier cerise , et sur quelques autres
poisons végétaux y etc., Florence, 17 81,
2 vol. in-4 , fig. , traduit en allemand en
1787 , 2 vol. in-4 , fig. C° Plusieurs opus-
cules et mémoires de chimie insérés dans
les recueils du temps. Gébelin en a traduit
quelques-uns sous ce titre : Observations
physiques et chimiques, Paris, 17 85,
in-8. Fontana prit surtout beaucoup de
part aux recherches sur les gaz auxquels
Cavendish, Priestley et LavOisier avaient
donné une si grande impulsion. On lui
doit l'emploi du gaz nitreux pour mesu-
rer la salubrité de l'air; et plusieurs phy-
FON
sicîens se servent encore de son eudin-
mètre , qu'il avait conçu d'après la dé-
couverte de Priestley sur la propriété
qu'a ce gaz d'absorber l'oxigène. Il a par-
ticulièrement observé la faculté du char-
bon d'absorber les différentes espèces
d'air. Quoique Fontana soit ingénieux
dans tous ses écrits, il n'est pas toujours
exact, et plusieurs de ses expériences ont
besoin d'être revues avant qu'on puisse
les employer comme bases de doctrine.
En 1796, Buonaparte , alors général en
chef de l'armée d'Italie , lui commanda
une collection de toutes les parties du
corps humain en cire coloriée , à l'instar
de celle que ce savant avait fait exécuter
sous ses propres yeux pour le musée de
Florence ; mais les pièces envoyées à Paris
s'étant trouvées inférieures à celles de
M. Laumonier , la collection fut donnée à
la faculté de médecine de Montpellier.
* FONTANA (Mariano le Père), célèbre
professeur de mathématiques, né à Casal-
Maggiore le 18 février 17 40, entra dès
l'âge de IG ans dans la congrégation des
barnabitcs ou clercs réguliers de St. -Paul.
Il se fit bientôt distinguer par ses talens
et professa la philosophie et les mathé-
matiques d'abord à Milan , ensuite à l'u-
niversité de Pavie, où il enseigna jus-
qu'en 1802. 11 se retira alors à Milan avec
la pension d'éraérite ; il y mourut dans
le couvent de St. -Barnabe le 18 novem-
bre 1808. Son principal ouvrage est son
Corso di dinamica, 3 vol. ou part, in-4,
Pavie, 1790, 92 et 95. On trouve dans
les atti ou actes de l'Institut d'Italie ,
dont il était membre, un mémoire où il
essaie de réfuter le Traité anahjtique de
la résistance des solides d^égale résis-
tance, publié à Paris en 1798 par Gi-
rard.
* FONTANA ( François-Louis ) , car-
dinal , naquit à Casal-Maggiore , dans le
Milanais le 28 août 1 7 50, de parens riches
dont les quatre enfans se consacrèrent à
l'Eglise : trois dans l'ordre des barnabitcs,
et le quatrième dans l'état ecclésiastique.
François-Louis entra dans la congréga-
tion des barnabitcs, où il avait reçu la pre-
mière éducation dans le collège de Ste.-
Croix de sa ville natale, dirigé par des
1
FON
religieux de cet ordre ; il prononça ses
■vœux le 21 octobre 1766 a Monza. La
première jeunesse de Fonlana avait été
un peu agitée : cet illustre personnage ,
qui dut à la religion ses plus belles in-
spirations, faillit donner dans des erreurs
très grandes ; mais il dut à un jugement
sain et à un cœur droit de s'éloigner de
l'abîme dans lequel il était sur le point
de se précipiter. En 1772, au moment
où il venait de terminer sa théologie, il
accompagna le Père Erménégilde Fini ,
naturaliste distingué, appelé à Vienne
par l'impéjatrice Marie-Thérèse pour vi-
siter les mines de Hongrie. Ce fut dans
ce voya^re qu'il se lia avec Métastase que
plusieurs productions poétiques avaient
déjà rendu célèbre. Il revint en Italie un
an après, et se rendit auprès de son frè-
re , Marino Fontana qu'il aida dans la
direction du collège de St.-Louis de Bo-
logne : il y professa les belles-lettres.
Nommé ensuite professeur d'éloquence
dans les écoles Arcimboldes de Milan , il
fut ensuite professeur de belles-lettres
grecques , latines et italiennes dans le
collège des nobles de cette ville. Son en-
seignement lui fit la plus grande réputa-
tion ; ses leçons avaient fait apprécier en
lui un mérite littéraire du premier ordre.
Ce fut à peu près à la même époque
qu'il fit paraître un petit poème en vers
italien dont le sujet est V Eloge d'Homère
(1780). Son Essai des meilleurs poètes
grecs dans les quatre dialectes; ses belles
Elégies sur la mort du mathématicien
Frisi; les Fies de plusieurs sav ans ita-
liens dont Fabroni avait parlé dans l'ou-
vrage qui a pour titre Fitœ italorum
doclrina prœsiantium. En général il
s'occupa beaucoup de biographie ; il
fournit des matériaux précieux à son
compatriote Jean Romain , auteur de
plusieurs éluges historiques estimés. Ces
travaux ne restèrent pas sans récompen-
.se : nommé successivement procureur-
général et provincial de son ordre à Mi-
lan , il se fit remarquer dans les diifé-
rens postes qui lui furent confiés alors
et plus tard, par la noblesse de son ca-
ractère , par son zèle pour la gloire de
ta patrie et la splendeur de son ordre ,
FON 367
et surtout par l'attachement à la religion.
Il a joué un rôle remarquable dans toutes
les négociations ouvertes entre la France
et Rome depuis le commencement de no-
tre révolution. Pendant les troubles qui
eurent lieu de bonne heure en Italie , et
dont Milan était le foyer, la prudence du
Père Fontana sauva de la destruction les
collèges qui étaient soumis à sa direc-
tion. Après l'élection de Pie VII, il fut
appelé à Rome auprès du souverain pon-
tife par les conseils du cardinal Gerdil ,
juste appréciateur du mérite. Ce protec-
teur généreux mourut en 1802 : le Père
Fontana fit son éloge funèbre qu'il pro-
nonça aux obsèques de cet illustre écri-
vain le 1 9 août dans l'église de St.-Charles
des Catinari. Le 7 janvier suivant il lut
dans une séance solennelle de l'académie
des Arcades un éloge littéraire de ce pré-
lat : ces deux discours ont été publiés ,
et le premier a été traduit en français
avec des notes par l'abbé d'Auribeau. Le
Père Fontana avait entrepris la publica-
tion des œuvres du cardinal Gerdil , de
concert avec le Père Léopold Scati : cette
édition, commencée en 1806, devait
avoir 20 vol. in-4 ; elle a été interrom-
pue au ] 5* vol. par les événemens po-
litiques survenus alors à Rome. A l'épo-
que du premier voyage du St. -Père à
Paris , le Père Fontana fut désigné pour
en faire partie. Arrivé à Lyon , il reçut
les derniers soupirs du cardinal Borgia ,
qui était tombé malade en route , et qui
mourut le 3 novembre 1804. Pendant
sou séjour dans la capitale de France , le
Père Fontana vécut dans la retraite , ne
paraissant jamais en public , n'assistant
à aucune cérémonie ; il disait pour excu-
se qu'il se livrait à l'étude : son véritable
motif était la répugnance qu'il éprouvait
pour l'ordre de choses qui régnait alors.
En 1807 il fut nommé général de son or-
dre. En 1809 , Buonaparte voulant faire
prononcer son divorce , fit venir à Paris
tous les chefs des congrégations religieu-
ses pour obtenir d'eux des concessions
qu'il n'avait pu arracher au saint-Siège.
Le Père Fontana resta fidèle à ses doctrines
et à ses sentimens : il avait déjà été en-
gagé plusieurs fois vainement par le gé-
368
FON
néral Miollis , à usée de son influence au-
près de Pie VU, ai'in que le saint pontife
souscrivit aux demandes de son persécu^
leur. Pie VII fut, comme on le sait, arrêté
dans son palais le 6 juillet 1808, et ame-
né en France. Le Père Fontana eut sa
part de cette persécution. Le 12 août de
la même année , à une heure après mi-
nuit , il reçut l'ordre de quitter Rome
dans les 24 heures, et la nuit suivante
il fut forcé de partir avec les chefs des
autres congrégations religieuses ; arrivé
à Paris , on l'obligea de quitter son cos-
tume religieux , de prendre l'habit sécu-
lier et de se rendre à Arcis-sur-Aube , oii ,
après avoir reçu l'accueil le plus grossier
d'un aubergiste , il put enfin trouver un
logement honnête , grâces aux soins d'un
ecclésiastique vertueux , M. Bétel , curé
de cette ville. Un mois après , l'ordre lui
fut donné de revenir à Paris, où le ministre
des cultes le conduisit aussitôt chez Buo-
naparte qui eut avec lui un entretien
long et animé. Dans celte conférence en-
tre un empereur et un religieux , l'un
commanda, l'autre refusa de rien faire
qui fût contraire aux intérêts de l'Eglise,
et , avant de répondre sur les questions
qui lui étaient adressées , il demandait
qu'elles fussent écrites pour pouvoir les
méditer et en voir toute la portée. Ce-
pendant les conférences sur les affaires
de l'Eglise s'ouvrireut. Le Père Fontana
assista , malgré lui , aux premières séan-
ces ; mais une maladie assez grave le for-
ça de garder le lit , et l'empêcha de pren-
dre part aux délibérations de cette réu-
nion. L'abbé Emeiy, qui en faisait aus.si
partie, montra un courage bien grand
qu'il puisa dans ses propres sentimens
et dans les conseils du Père Fontana.
Voyez Emery. Dès que le Père Fontana
fut guéri , il reçut l'ordre d'aller à Sa-
vone remplir la mission dont l'objet lui
avait été communiqué par Buonaparte
lui-même : le Père Fontana fil au cardi-
nal Fesch qui le lui communiqua la même
réponse qu'à l'empereur. Sur ces entre-
faites , le cardinal Maury reçut le fameux
bref du 5 novembre 1810, relatif à son
exaltation à l'archevêché de Paris. Op
accusa , peut-être justement, si toutefois
JFON
c'était un sujet de reproche , le Père
Fontana d'avoir été chargé de le lui en-
voyer : des visites minutieuses furent
faites vainement chez lui pour s'assurer
s'il ne le possédait pas : le frère Charles
du même ordre que le Père Fontana affir-
me dans ses mémoires qu'il en avait alors
plusieurs copies qui furent soustraites
aux agens de la police impériale. Mais
on trouva un papier sans signature , dans
lequel on blâmait vivement la conduite
de Buonaparte à l'égard du saint-Siége
et de ses compagnons d'exil. Le Père
Fontana arrêté et détenu pendant trois
jours à la police , ne voulut pas dire quel
en était l'auteur (le chanoine Muzzarelli) ;
il fut conduit à Vincennes. On ne lui
permit pas d'emmener avec lui , malgré
son âge et ses infirmités, le frère Charles
qui l'avait toujours accompagné , et que
l'on jeta dans une prison humide et mal
saine , oîi il fut saisi par la fièvre et par
une fluxion douloureuse , et d'où on ne
le tira qu'au bout de huit mois, après
avoir été pendant tout ce temps presque
sans aucun secours. Plusieurs cardinaux
partageaient dans le même donjon la
captivité du Père Fontana : quelques uns
d'entr'eux recouvrèrent leur liberté à
l'époque du concordat de Fontainebleau
(1813). Mais M. de Gregorio et lui restè-
rent dans cette prison d'état jusqu'à la
chute du gouvernement impérial. Le Père
Fontana avait subi une nouvelle attaque
de la part d'un ministre de Buonaparte ,
et il y avait résisté. Savary, alors ministre
de la police , vint auprès de lui, et em-
ploya tous les genres de séductions pour
amener cet homme inébranlable à don-
ner son assentiment aux projets de l'em-
pereur : la réponse du Père Fontana fut a
toujours la même ; il voulait étudier ce *
qu'on lui demandait , et s'en rapportait
avant tout aux décisions du saint-Siége.
Ce fut pendant sa captivité qu'il compo-
sa, pour différentes fêtes, cinq iVofcne*
ou Tridui que M. de Gregorio a publiés
depuis. Transportés en 1814 à la Force
où ils trouvèrent M. de Boulogne , le frè-
re Charles et plusieurs ecclésiastiques .
ces deux captifs attendirent encore quel-
que temps l'heureuse catastrophe qui
1
devait leur ouvrir les portés de leur
prison ; ce moment arriva pour le Père
Fontana le 2 avril. Le ô mai il partit
pour l'Italie. Son intention était de se fi-
xer à Monza, dans l'ancien collège de son
ordre ; mais Pie VII l'appela à Rome , et
le nomma secrétaire de la congrégation
des affaires ecclésiastiques. Dans le mois
de mars 1815, pendant l'invasion passa-
gère de Murât, le Père Fontana accompa-
gna le pape à Gènes , avec l'ambassadeur
de Louis XVIII, tous les cardinaux et un
grand nombre de personnages distingués.
De retour à Rome, Pie VII créa dans le con-
sistoire du 1*"^ mars 181 G plusieurs cardi-
naux, parmi lesquels on remarqua le Père
Fontana, sous le titre de Sle. -Marie de la
Miner\e, et M. de Gregorio son compagnon
de captivité. Le Père Fontana ne cessa
pas d'être le général de son ordre, au-
quel il continua de porter le plus vif
intérêt , rétablissant d'anciens collèges ,
en créant de nouveaux, et surveillant
l'éducation do la jeunesse confiée aux
soins des barnabiles. Il fut nommé à la
même époque préfet de la congrégation
de Yindex. Le souverain poutit'e avait
pour lui le plus grand attachement ; se-
crétaire de la société des livres orien-
taux , consulteur du saint Office et des
Rites, censeur de l'académie de la Reli-
gion catholique , président de la propa-
gande , il fut en même temps membre
des premières académies de l'Italie , de
l'académie Oorentine , de celle des Arca-
des de Rome, de celle des Immobiles de
Padoue , etc. Comme religieux , la con-
fiance en ses lumières était si grande que
son avis faisait autorité dans les ques-
tions théologiques les plus difficiles , et
qu'il fut souvent consulté , soit par des
corporations , soit par la cour de Rome
elle-même , dans les circonstances diffi-
ciles qu'amenèrent les révolutions de
France et d'Italie. Comme savant, le Père
Fontana réuni! un grand nombre de con-
naissances : non-seulement il était versé
dans toules les sciences ecclésiastiques,
mais il savait les mathématiques , la phi-
losophie , les sciences naturelles ; il était
fort dans les antiquités et connaissait le
stile lapidaire-, il parlait et écrivait les
V.
PON
369
langues anciennes et plusieurs langues
de l'Europe : l'idiome toscan lui était fa-
milier, et il faisait de jolis vers grecs.
Enfin il n'était étranger à aucune des
parties de la littérature ancienne et mo-
derne. Outre les ouvrages que nous
avons cités, il a encore laissé quelques
inscriptions et quelques /70C.ytei grecques
dans le genre de celles de saint Grégoire
de Nazianze. Le Père Fontana est mort .î
Rome le 19 mars 1822, à l'âge de 71 ans
et 6 mois; son vieux compagnon , le frè-
re Charles , a reçu ses derniers adieux.
Son éloge a été prononcé par le Père
Placide Zurla , abbé camaldule , le 26 du
même mois dans le collège de la Propa-
gande. Le Père Grandi, barnal)ile,aécrit
la f^iedu cardinal F ontana, Rome, 1 823,
in-8.
* FONTANELLE ( Jean-Gaspard Du-
bois ), professeur de belles- lettres aux
écoles centrales du département de l'I-
sère , ensuite professeur d'histoire et
doyen de la faculté des lettres de l'aca-
démie de Grenoble, naquit dans cette
ville le 29 octobre 17 37 , et mourut le 15
février 1812. Il cultiva avec des succès
divers, la littérature, la poésie et la phi-
losophie. Son principal ouvrage est une
traduction nouvelle des Métamorphoses
d'Ovide, 17G6, 2 vol. in-8; 1778 et
1780, 2 vol. in-12; et avec des notes,
1802, 4 vol. in-8; 1806, 2 vol. in-12.
Elle est moins élégante que celle de l'ab-
bé Banier, mais plus exacte. Ses autres
productions sont 1" deux comédies qui
n'eurent aucun succès : le Connaisseur ,
en 2 actes et en vers , et le Bon mari , en
un acte et en vers. 2' Pierre le Grand,
1766, in-8, tragédie non repré.sentée.
3° Ericie , ou la f^estale , drame en 3
actes, 1768, in-8, pièce dirigée contre
les vœux monastiques , et qui occasiona
dans le temps un grand scandale. Le cen-
seur royal y refusa son approbation , et
défense fut faite à l'auleur de la faire im-
primer ; néanmoins il la mit au jour, et
elle fut recherchée avidement. Eu 1789
elle a été représentée sur le théâtre Fran-
çais. 4° Naufrage et aventures de Pierre
Fiaud, \1Q% , in-12, .souvent réimpri-
mé. 5" Effets des passions, ou Mémoi-
.4
3^0
mn
res de Ptoricdnrt, 1768, 3 toi. in-12.
6° Anecdotes africaines, 1775, in-8'.
7° Lore'dan , tragédie en 4 actes , jouée
sans succès, 1776, in-8. 8° Nouveaux
mélanges sur diffèrens sujets , contenant
des essais dramatiques , philosophiques
et litte'raires, 1781,3 vol. in-8. 9" Anna,
ou l'Héritière galloise , traduit de l'an-
glais , 1788, 4 vol. in-12. 10" Clara et
'.Emmeline , aussi traduit de l'anglais ,
1788 , 2 vol. in-12. 11° Etat actuel de
l'empire ottoman , traduit de l'anglais ,
1791 , 2 vol. in-8. 12° Cours de belles-
lettres, Paris, 1813 , 4 vol. in-8, publié
par M. Renauldon , petit-fils de l'auteur.
Ce cours , écrit dans le sens philosophi-
que , n'a pas eu de succès et ne peut
convenir à la jeunesse , qu'il ne peut qu'é-
garer en lui donnant de fausses idées sur
nos meilleurs écrivains, et même sur la
littérature , l'opinion de l'auteur n'étant
pas toujours conforme à celle de nos
meilleurs critiques. On a encore de Fon-
tanelle des Contes philosophiques , et
autres ouvrages immoraux qui n'ont pas
eu plus de succès que ses autres produc-
tions. Il a travaillé à la Gazette univer-
selle de politique et de littérature , de
Deux-Ponts, depuis son établissement
en 1770 jusqu'en 17 76; à la partie poli-
tique du Journal de politique et de litté-
rature, dont Laharpe rédigeait la partie
littéraire ; et à la partie politique du
Mercure de France. En 17 84 il était ré-
dacteur de la Gazette de France.
* FONTANES ( Louis , marquis de) ,
fils de Jean-Pierre Marcellin de Fontanes,
inspecteur des maniifactures dans le Bas-
I^nguedoc et dans le Poitou , naquit à
Niort le 10 mars 1757 : sa famille origi-
naire deGenève et précédemment d'Espa-
gne, était noble et protestante. Après
avoir quitté l'Espagne, ses parens étaient
venus on France et y avaient embrassé
le protestantisme ; mais, par .suite de la
révocation de l'édit de Nantes ils avaient
été obligés de s'expatrier dans les der-
nières années du règne de Louis XJV.
Son père, né à Genève, vint en France
pour chercher à y recueillir quelques
débris de son patrimoine ; il fut obligé
d'accepter la place d'inspecteur des ma-
fÔN
ùufacturcs, et le Poitou lui doit eh grande
partie le défrichement des terrains stéri-
les appelés lais-de-mer , l'amélioration
de la culture et la propagation des pépi-
nières de garance. Ce n'était pas non
plus un homme sans talcns littéraires, et
l'on trouve du même écrivain des mé-
moires intéressans dans les Epliéméri-
des du citoyen, et dans les Recueils de
diverses sociétés d'agriculture. Il laissa
deux fils , l'aîné qui se fit connaître de
bonne heure par des essais poétiques ,
mourut à 2 1 ans : le cadet est celui dont il
est question dans cet article. Celui-ci fut
élevé par sa mère dans la religion catho-
lique, et fil ses études chez les oratoriens
dans sa ville natale. Après avoir terminé
ses clases, il vint à Paris oîi il ne tarda
pas à se faire une brillante réputation.
Dans les premiers morceaux de poésie
qu'il publia , on s'accordait à trouver la
réunion bien rare d'une imagination bril-
lante , d'un goût épuré et d'une har-
monie douce et suave. Ce jeune poète
n'avait alors que 20 ans. L'année sui-
vante, il publia la traduction en vers
de l'Essai sur l'homme de Pope , traduc-
tion qu'il revit avec le plus grand soin ,
et dont la dernière publication eut lieu
trois jours avant sa mort. Le caractère
principal de cet ouvrage est la précision ;
peut-être dégénère-t-elle quelquefois en
sécheresse ; mais , si quelques vers furent
l'objet d'une juste critique, du moins
chacun loua sans restriction ni réserve
le discours qui sert d'introduction. De-
puis 17 83 à 1789, Fontanes publia quel-
ques petits poèmes qui augmentèrent
encore sa réputation ; nous citerons sur-
tout le Jour des morts dans une cam-
pagne, qui est une heureuse imitation du
Cimetière de Gray ; quelques f.agmens
du Poème de I^ucrèce qui font regretter
que celte traduction n'ait pas été termi-
née ; le Ferger qui passe pour son meil-
leur ouvrage, et enfin VE pitre à Louis
XVI sur l'édit en faveur dcsnnn-calho
ligues, qui remporta le prix à l'académie
française. Dans les première^ années de
la révolution, Fontanes rédigea le jour-
nal intitulé le Modérateur , dont le titre
indique assez dans quel esprit de pa-
FON
cification il ëtait rédigé. Il s'était mon^
tré dès le commencement de nos troubles
civils opposé au bouleversement que
méditaient les révolutionnaires ; et , s'il
publia son Poème séculaire pour la fête
du 14 juillet 1 7 90 , célébrée au champ
de Mars sous le nom de fédération, il
osa rappeler des souvenirs glorieux de
la monarchie ; et les noms immortels de
Turenne et de Condé furent , au grand
scandale des fédérés , prononcés dans ce
chant national. Au moment oii la terreur
commençait à faire couler le sang de tant
de bons citoyens , Fontanes eut le cou-
rage de rédiger et de faire présenter à la
Convention une pétition en faveur des
malheureux habitans de Lyon (17 94). Ce-
pendant il ne fut point alors persécuté ,
et , après le 9 thermidor , oii tomba Ro-
bespierre , il fut nommé membre de l'In-
stitut (classe delittératiue), et peu après
professeur de belles-lettres à l'école cen-
trale des Quatre-Nations. La révolution
du 1 8 fructidor qui proscrivit les royalis-
tes , comprit Fontanes dans ses proscrip-
tions. Exilé, il chercha d'abord à ne
point quitter la France , et se cacha pen-
dant quelque temps dans les environs de
Paris ; puis découvert et poursuivi , il
«rra d'asile en asile , se retira enfin à
Hambourg et passa en Angleterre. Ac-
cueilli avec distinction par les princes
français, il retrouva à Londres M. de
Chateaubriand qu'il avait déjà connu à
Paris : leur amitié devint plus intime ; et
dèslors jusqu'à la mort deFonianes, aucun
nuage n'est venu la troubler. Le 18 bru-
maire rouvrit les portes de la patrie aux
malheureux français que nos troubles
avaient disséminés à l'étranger : Fontanes
s'empressa de revenir à Paris, où il fut l'un
des rédacteurs àa Mercure (avec Laharpe,
Esmenard et M. de Chateaubriand ). On
assure que ce fut Lucien Buonaparte qui
le lança dans le monde, ilenavait fait son
secrétaire. Lorsque l'on apprit la mort
de Wasinghton, le gouvernement prépara
une fètc en l'honneur de ce fondateur
de la liberté américaine ; Fontanes fut
charge de faire l'éloge de ce général ,
et cette oraiion funèbre fut prononcég
tl8»)S (e ffmplc de Mars , çQmip§ i'o|»
FOÎ^ 371
disait alors , c'est-à-dire dans la chapelle
des Invalides qui n'était point encore
rendue au culte. On remarqua que cet
écrivain royaliste trouva moyen de pla-
cer l'éloge de la reine Marie-Antoinette,
que l'on avait impitoyablement immolée
quelques années auparavant, et dont les
révolutionnaires ne purent jamais souf-
frir ni les vertus ni la mémoire. Cette
princesse informée qu'un jeune Argill ,
prisonnier de guerre , était en Amérique
sous le poids d'une condamnation à mort ,
avait intercédé pour lui auprès de Wasing-
thon qui lui avait accordé sa grâce. C'est
à ce trait d'humanité que Fontanes fit
allusion , et chacun admira l'audace ver-
tueuse de l'orateur qui rappelait ainsi ,
au moment oii la révolution n'était point
encore terminée , le souvenir des vertus
d'une des plus illustres victimes de cette
époque sanglante. Fontanes rentra à l'a-
cadémie dont il avait été exclus pendant
son exil : nommé peu de temps après
membre du Corps législatif, il en devint
président. C'était l'époque des grandes
victoires de Buonaparte : c'était aussi celle
des actes les plus sages de son admini-
.stration : Fontanes loua les uns et les au-
tres. On lui en a fait un crime , et les
mots de courtisan et d'adulateur lui ont
été prodigués : un écrivain surtout , M.
de Mongaillard , â déversé sur lui tout le
fiel de la plus virulente satire ( Histoire
de France , tome 9, pages 84, 181 , 287;
tome 10, pages 174, 179, 207, 260, 267,
tome 1 1 , pages 47 , tCl , 282 , etc. ) Ce-
pendant Fontanes dans plusieurs occa-
sions fit preuve de courage et de liberté :
on peut consulter ce qu'il dit , comme
président, le 29 février 1800, aux com-
missaires du gouvernement qui vinrent
proposer au Corps législatif un décret
qui condamnerait aux peines les plus
graves et «nème à la mort , ceux qui recè-
leraient Pichegm et Georges Cadoudal.
Lorsque les Codes eurent été promul-
gués, on éleva dans la salle des séances
du Corps législatif, une statue en mar-
bre en l'honneur de Buonaparte : l'inau-
guration en fut faite avec apparat , et
Fontanes prononça ces paroles coura-»
geuses, qui frappaient de réprobatiqn h
37Î FON
révolution lout entière : La première
place e'tnit vacante ; le plus digne devait
la remplir : en y montant , il rHa détrôné
que Vanarchie qui régnait seule dans
V absence de tous les pouvoirs légitimes.
C'est dans le même sens qu'il parla au
souverain Pontife Pie VII , qui venait
pour couronner Buonaparte : il lui disait
que la France abjurait de trop longues
erreurs, et qu'elle commençait enlin à
reconnaître que toutes les pensées irré-
ligieuses sont des pensées impolitiques,
et que tout attentat contre le christia-
nisme est un attentat contre la société.
Dans d'autres occasions il osa donner des
leçons à un homme qui n'aimait pas les
conseils. Ainsi, lorsqu'après la conquête
du royaume de Naples, on remit à Buona-
parte les drapeaux que les armées fran-
çaises avaient enlevés aux Italiens pen-
dant'cette guerre, Fontanes, en présence
de tout le corps diplomatique et d'une
assemblée nombreuse , dit au héros de
cette époque : Malheur à moi si je fou-
lais aux pieds la grandeur abattue ! Je
respecte la majesté royale jusque dans
ses humiliations , et même , quand elle
n'est plus, il reste je ne sais quoi de
vénérable dans ses débris. Dans toutes
les circonstances oîi il lui était possible
d'adresser sans inconvenance quelques
vérités utiles au pouvoir , il le fit avec
une noble audace. Mais , malgré toutes
les précautions oratoires qu'il avait le ta-
lent de prendre, il choqua le maître ,
qui ne permit point d'abord d'imprimer
ses discours , en disant qu'il suffisait d'en
avoir entendu un , et qui plus tard lui
enleva la présidence du Corps législatif.
Quelque grands que fussent les éloges de
Fontanes , jamais ils ne furent adressés
qu'officieusement comme président , et au
nom du Corps législatif : comme simple
citoyen, il n'écrivit pas une seule ligne ,
pas un seul vers en l'honneur de Buona-
parte , et cette remarque n'échappa point
à de lâches courtisans qur s'irritaient
encore plus de ce silence, qui n'était
rompu que par des louanges officielles.
Fontanes avait reçu , pendant sa prési-
dence le titre de comte; en 1808 , à la
préptioft de l'université ,'il pbtinî la cli-
FON
gnilé de grand-maître , et la jeunesse
française sait assez comment il sut faire
revivre les études si long-temps aban-
données , avec quel zèle il travailla à la
résurrection des établissemens d'instruc-
tion , et quel succès il obtint sous le
rapport scientifiqueetlittéraire. On l'avait
vu placer des ecclésiastiques à la tête des
collèges , rechercher les jésuites ou les
oratoriens pour leur confier la direction
deces établissemens, accueillir tous les ta-
lens pour les faire profiter à l'amélioration
des éludes. Si de grands vices s'atta-
chèrent à l'organisation de l'université ,
Fontanes en pallia un bon nombre ; si
le despotisme dirigea l'éducation , c'est
que le despotisme du trône imposait
toutes ces petites tyrannies subalternes ;
si le régime militaire fut celui de nos
écoles , c'est que l'empereur était un
guerrier : si la religion ne présida pas
entièrement aux premières années de
notre jeunesse , c'est que la religion
n'avait pas repris tout son empire , et
qu'elle était peu encouragée par les hom-
mes plus avancés en Age. >'ous ne parle-
rons pas des autres défauts de l'adminis-
tration universitaire , que Fontanes ne
put faire disparaître; de cette distinction
presque avilissante entre les administra-
teurs qui avaient l'habitude de se réserver
tous les avantages et tous les honneurs ,
et les professeurs qui avaient toutes les
charges de l'enseignement sans pouvoir
participer à des réconipenses justement
méritées ; de ces sinécures connues sous
le nom de conseil royal , d'inspection
générale, d'inspection d'académie; etc.
La colère de Buonaparte s'étant un peu
apaisée , Fontanes fut admis au Sénat
le 5 février 1810. En avril 181 i , il fut
un des premiers à parler en faveur des
Bourbons , et comme sénateur il vota la
déchéance de Buonaparte. Maintenu dans
son titre de grand-maître, puis créé pair
de France , il prit part à la rédaction de
la charte de Louis XVIII , fit appeler au
conseil royal l'abbé Emery et M. de Bo-
nald. Dans le mois de février 1815, il fut
décidé que l'université serait régie par
un conseil : Fontanes perdit sa place de
Çrand-roaître ; mais, pour lui prouver ^ue
FON
ce n'était point une disgrâce , le roi lui
donna Je grand cordon de la Légion d'hon-
neur. Pendant les cent jours , Fontanes
resta éloigné des affaires et devint à la
seconde restauration membre du conseil
privé ; on l'entendit rarement à la cham-
bre des pairs; mais à l'académie fran-
çaise , il lit plusieurs discours où l'on
admira de nouveau son érudition et ses
talens oratoires, notamment lorsqu'il reçut
M. de Sèze dans cette compagnie (25 avril
1SJ6 ). Depuis long-temps Fontanes,
devenu marquis et élevé aux dignités
les plus émiuentes, semblait avoir ou-
blié ses talens poétiques. En 1817, il
lut à l'académie française une Ode sur la
violation des tombeaux de St. -Denis ,
qui eut le plus grand succès, et il la dé-
clama lui-même avec autant de grâce que
de noblesse. A l'époque oii parurent les
Martyrs de son ami M. de Chateaubriand,
il composa aussi quelques stances en son
honneur, et elles sont dignes de la répu-
tation du poète et de la gloire de l'écri-
vain. Après avoir souffert quelque temps
d'une maladie violente que lui avait
causée la fin tragique du jeune St. -Marcel-
lin mort dix-huit mois auparavant, il mou-
rut à Paris le 17 mars 1821 , à l'âge de
G 4 ans. Les sentimens chrétiens qui l'a-
nimèrent pendant ses derniers momens,
avaient présidé à toute sa vie , et Fonta-
nes peut être placé parmi les écrivains
religieux ^ comme parmi les écrivains
royalistes. Il laissa en portefeuille un
poème sur ladelivrancc de la Grècc(\m n'é-
tait pas entièrement terminé. Nous avons ,
dans le cours de cette notice , fait con-
naître les principaux ouvrages de Fon-
tanes. Ce personnage célèbre peut être
envisagé comme écrivain et comme légis-
lateur. Les mêmes opinions ])oIitique9t,
littéraires et religieuses se font remarquer
dans tous ses actes et dans tous ses écrits :
c'est un homme fidèlement attaché à ces
principes d'ordre et de religion qui font
la sécurité des empires. Partisan de la
légitimité , il eut des regrets pour la
chute du trône des Bourbons ; il eut le
bonheur de le voir relevé et peut-être
contribua-t-il à sa restauration. Il vit
dans Buonaparte le destructem* dç Tîmaf-
FON 3:3
chic , et à ce titre , il lui devait de la
reconnaissance : tous les bons Français
ont éprouvé le même sentiment pour cet
illustre guerrier. Dans le Corps législatif,
comme au Sénat il se montra toujours
non l'homme du pouvoir, mais l'homme
de la France , et sa voix courageuse fit
entendre plus d'une sévère leçon, prépa-
rée par des éloges d'autant plus grands
qu'ils devaient déguiser toute l'âpreté du
conseil ou même de la réprimande. Comme
écrivain, il composa des ouvrages en vers
et en prose : ceux-ci sont des discours
faits avec le plus grand talent , avec une
pureté et une élégance rare : mais di-
sons-le , on y voit souvent le rhéteur
encore plus que l'orateur : ses poe'sies
portent le même caractère : elles sont en
outre suaves et harmonieuses : mais le
poète n'imagina jamais le plan d'un
grand ouvrage , et ce défaut de con-
ception l'a fait placer parmi les poètes
du second ordre. Quelques biographes
prétendent que son véritable nom était
Fontagnes.
FOINTAÎS'GES (Marie-Angélique de
ScoRAiLLE DE RousiLtE, duchcsse dc).
née en lG61 , d'une ancienne famille de
Rouergue, était fille d'honneur de Ma-
dame. « Belle comme un ange, dit
» l'abbé de Choisi, mais sotte comme un
)i panier, » elle n'en subjugua pas moins
le cœur de Louis XIV. A une partie de
chasse, le vent ayant dérangé sa coiffure,
elle la fit attacher avec un ruban dont
les nœuds lui tombaient sur le front ; et
celle mode passa avec son nom dans
toute l'Europe. Le roi la fit duchesse;
mais elle ne jouit pas long-temps de sa
faveur. Elle mourut, le 28 juin 1681 , à
20 ans, à l'abbaye de Port-Royal de
Paris, oîi elle s'était retirée, après avoir
été abandonnée par Louis XIV à la suite
de ses couches, pendant lesquelles sa ma-
ladie l'avait entièrement défigurée. Elle
voulut voir Je roi dans sa dernière ma-
ladie. Louis XIV s'attendrit , et elle lui
dit : n Je meurs contente , puisque mes
» derniers rqgards ont vu pleurer mon
» roi. » Faible consolation et bien peu
assortie à la nature du moment.
3:4 FOK
FONTANINI ( Juste ) , savant arche-
vêque d'Ancyre , et chanoine de l'église
de Ste. -Marie-Majeure , camérier d'hon-
neur de Clément XI, naquit en 1 666 dans
le duché de Frioul , et mourut à Rome
en 1736. Il n'y avait presque aucun
homme distingué dans le monde savant,
avec lequel il ne fût en commerce de
lettres. On a de lui un grand nombre
d'ouvrages dont les plus connus sont
1 ° sa Bibliothcca délia Eloquenza ita-
liana. C'est un catalogue raisonné des
bons livres de la langue italienne dans
les dififérentes classes. Il en fut fait plu-
sieurs éditions du vivant de l'auteur ;
mais la meilleure et la plus ample est
celle qui a été donnée à Venise en n.î..,
2 vol. in-4, avec les notes d'Apostolo-
Zéno , dans lesquelles ce savant et judi-
cieux bibliographe a relevé une multitude
d'erreurs et d'rnexactitudesdc Fontanini.
2° Une Collection des bulles de canoni-
sation, depuis Jean XV jusqu'à Be-
noît XIII, 1729, in-fol.en latin. 3» Une
Histoire Utte'raire d^ A quile'e , en latin,
in-4, Rome, 17 42 : ouvi-age posthume,
plein d'érudition sacrée et profane , et
d'une bonne critique. 4° Dissertatio de
corona ferrea Longobardorutn, 1717. Il
prétend que la couronne de fer que l'on
conserve à Monzal , petite ville de Lom-
bardie, est faite de l'un des clous de
N. S. , et qu'on s'en est servi ancienne-
ment pour couronner les rois de Lombar-
die, et ensuite les empereurs d'Allema-
gne. Muratori lui opposa le traité : De
coronafcrrea, où il soutient qtie la cou-
ronne de fer était inconnue du temps
des rois Lombards.
FOjNTANON (Antoine), avocat au
parlement de Paris, natif d'Auvergne,
est le premier qui ait rédigé avec ordre
les ordonnances des rois de France. On
a de lui une Collection des e'dits de nos
rois depuis 1210 jusqu'à la fin du 16"=
siècle , temps auquel cet auteur floris-
sait,en 4 vol. in-fol., Paris, 1611.
FONTE-MODEftATA, dame véni-
tienne, née en 1 555 , morte le 5 novem-
bre 1592, à 37 an», avait, dit-on, une
mémoire si heureuse , qu'elle répétait ,
pmr »lo»i 4irç , »9t powr mot m m"
FON
mon , après l'avoir entendu une fois. On
a d'elle divers ouvrages en vers et en
prose. Les plus connus sont un éloge de
son sexe en vers, intitulé : Ilmerito délie
donne, imprimée à Venise, 1600, in-4,
et le Floridoro , poème en 13 chants,
imprimé dans la même ville en 1581 ,
in-4. Fonte-Moderata est un surnom
qu'elle s'était donné. Elle s'appelait Mo-
desta Pozzo, et était mariée à un gentil-
hommevénitien, nommé PhilippeGeorgi.
Sar/e a été écrite par Nie. Doglioni.
' FONTENAILLES ( André Perret
de ) , ecclésiastique vénérable , né à Ma-
çon vers 1754, mort à Paris le 13 juin
1831 , avait fait ses études au lycée
Louis le Grand , où il fut envoyé foçt
jeune , et où il fit la connaissance intime
du jeune Decalogne, dont l'abbé Proyart a
publié la vie. Dirigé par M. l'abbé Cardin
principal de cet établissement , il resta
long-temps avec lui , etfitmêmesa théo-
logie dans cette maison. Il embrassa l'état
ecclésiastique et fut reçu docteur en
théologie k la fin de 1783. Nommé vicaire
de la petite paroisse de Ste. -Croix dans
la Cité , il devint peu après chanoine de
la cathédrale deMàcon. Mais la révolution
lui réservait ses rigueurs ; il lut du nom-
bre des prêtres que la barbarie révolu-
tionnaire jeta sur les pontons de Roche-
fort. Après avoir survécu comme par
miracle à celte persécution dans laquelle
périrent presque tous ses coj^ipagnous
d'infortune, il reprit son ministère tantôt
comme missionnaire , tantôt comme curé
dans le diocèse de Lyon. Il revint à
Paris où il prêcha dans presque toutes
les églises, et donna des retraites qui pro-
duisirent les plus heureux effets. Obligé
de s'abstenir du tribunal de la pénitence
^arsuite d'une grave surdité qui l'affligea,
il ne resta pas oisif ; il chercha à se con-
soler de l'inaction où le tenaient ses in-
firmités par la publication de plusieurs
écrits, dont l'Jmide la religion a rendu
un compte avantageux. C'est d'après la
même feuille où nous aimons à prendre
tous les renseignemens que nous y trou-
vons , parce qu'ils sont dictés par l'amour
dp l'Eglise et de la vérité ; c'est , disons-
oous , d'acres la wèiue fçiiiUe qjue nom»
I
FÔN
doûneroùs la liste des écrits principaus
de ce vertueux ecclésiastique : 1° Manuel
religieux à l'usage des maisons d'édu-
cation, 1824, iu-l8; 2° Manuel des
domestiques et des ouvriers, 1826;
3° Instruction sur le jubile', même an-
née ; 4° le Guide de la jeunesse et suite
du manuel religieux , 1826, 2 vol. in-1 8 ;
ce sont des lectures spirituelles pour
tous les jours de l'année ; 5° le Guide de
la jeunesse chrétienne ou manuel reli-
gieux, 1826, 2 vol. in-18; c'est une
nouvelle édition du Manuel de 1824; la
seconde partie se vend séparément et est
destinée aux jeunes gens qui ont terminé
leur éducation ; 6° Observations sur l'é-
ducation des jeunes gens , in-8 ; 1° Ob-
servations sur Féducation des jeunes
ecclésiastiques , in-8 ; ces deux écrits
furent réunis dans une 2^ édition qui
parut en 1829 , in-8 de 126 pag. ; 8" Dis-
cours de morale à l'usage des missions
et des retraites spirituelles, 1829, in-12.
Enfin le mal empirant de jour en jour ,
Fonteuailles se munit de tous les secours
de la religion , édifia tous les fidèles par
sa piété , par sa résignation dans les souf-
frances et par sa charité chrétienne. L'ah-
bé de Fonteuailles avait été quelque temps
grand-vicaire de Màcon , sur la fin de
l'administration de M. Moreau, dernier
évêque de ce siège ; il avait le titre de
chanoine honoraire des chapitres de Bor-
deaux et de Montauban. Il mourut dans
un état voisin de l'indigence.
FOIVTENAY ( Jean-Baptiste , Blain
de), peintre, né à Caen, l'an 1654, con-
seiller à l'académie de peinture , mérita
un logement aux galeries du Louvre, et
une pension par ses talens. Il avait, dans
un degré supérieur , celui dépeindre les
fleurs et les fruits. Sa touche est vraie,
son coloris brillant , ses compositions
variées. Les insectes paraissent vivre
dans ses ouvrages ; les fleurs n'y per-
dent rien de leur beauté , et les fruits de
leur fraîcheur. Ce peintre mourut à Paris
en 1715.
•FONTENAY (Pierre-Claude), jé-
suite, né à Paris en 1683, mort à La
Flèche en 1742 , continua ['Histoire de
l'Eglise gallicane, après la mort du
fm
S75
Père Longueval, et donna les tomes 9
et 10 de cetouvrage.il avait composé
une partie du 1 1^ vol. , que le Père Bru-
moy acheva. Son stile est moins coulant
et moins historique que celui de son con-
frère ; mais ou y voit un homme qui est
maître de son sujet. « Il joignait, dit le
« Père Berthier , à des manières faciles et
i> complaisantes toutes les vertus de son
w état. » Il avait travaillé au Journal de
Trévoux. Il s'était occupé d'une Histoire
des papes ; mais il n'a pas été possible
de tirer parti des manuscrits qu'il a
laissés sur ce sujet.
* FOINTENAY (Louis-Abel de Boknk-
FONS, plus connu sous Icnom d'abbé de),
né en 1 7 37 à Castelnau de Brassac près de
Castres, entra chez les jésuites, etpiofessa
les humanités à Tournon. Après la dissolu-
tion de cette société, il vint se fixer tî Paris
oii il se fit connaître sous le nom d'abbe
de Fontenay par plusieurs ouvrages d'un
mérite assez médiocre : il rédigea succes-
sivement les ^/fiches de province et le
Journal général de France , jusqu'au
10 août 17 92, qu'il fut proscrit pour
avoir défendu dans sa feuille les intérêts
de la monarchie. Il passa dans l'étranger,
et ne revint en France qu'après la ter-
reur. Il se remit à ses travaux littéraires ,
et mourut le 28 mars 1806. On a de lui
1 ° Dictionnaire des artistes, 1777, 2 vol .
petit in-8. 2" Table de l'Histoire univer-
selle, traduite' de l'anglais, formant le
46^ vol. in-4. 3" La plus grande partie du
texte de la Galerie du Palais Royal,
17 86-1808, 59 livraisons in-fol. 4° La
suite du Voyageur français. 5° L'illus-
tre destinée des Bourbons, 17 90, 4 vol.
iu-12. G" Dictionnaire de l'élocution
française, par Demandre, édition revue,
corrigée et augmentée, 1802, 2 vol.
in-8. 7° Une nouvelle édition delaGeb-
graphie de Lacroix, 1805, 2 vol. in-12,
etc.
FOIVTENAY. Foyez Brumoï Lokguk-
VAL.
FONTENÈLLE (Bernard le Bovie4
ou le BocYER de ), un des savans les plus
aimables du 18^ siècle, naquit le 11 fé-
vrier 1C57 , à Bouen, d'un père avocat,
et d'une mère qui était la sœur du grand
3^6
POfT
Corneille. Cet enfant destine 4» vivre
près d'un siècle, dit l'abbé Trublct, pensa
mourir de faiblesse le jour même de sa
naissance. Le jeune Fonlenelle fit ses
études à Rouen cbcz les jésuites qu'il a
toujours aimés. En rhétorique à 13 ans,
il composa pour le prix des palinods une
pièce en vers latins , qui fut jugée digne
d'être imprimée , mais non d'être cou-
ronnée. Après sa physique, il fit son droit,
fut reçu avocat , plaida une cause , la
perdit, et promit de ne plus plaider. 11
renonça au barreau pour la littérature et
la philosophie , entre lesquelles il parta-
gea sa vie. En 1674 , à 17 ans, il vint à
Paris; à 20 ans fl fit une partie des opéras
de Psyché et de Bellérophon , qui pa-
rurent en 1678 et 1679, sous le nom
de Thomas Conreille son oncle. En
1681, il fit jouer sa tragédie A'Aspar.
Elle ne réussit point; il en jugea com-
me le public , et jeta son manuscrit au
feu. Ses Dialogues des morts , publiés
en 1683 , reçurent un accueil plus 'favo-
rable. Ils offrent de la littérature et de la
philosophie; la morale y est agréable,
peut-être même trop , et le philosophe
n'a pas assez écarté le bel-esprit. Voici
ses autres ouvrages suivant l'ordre chro-
nologique : 1 "Lettres du chevalier d'Er. .
1685. Elles sont pleines d'esprit ^ mais
non pas de celui qu'il faudrait dans des
lettres. On sent trop qu'on a voulu y en
mettre, et qu'elles sont le fruit d'une
imagination froide et compassée. 2° En-
tretiens sur la pluralité' des mondes ,
1686. n Ce livre, dit l'auteur du Siècle
» de Louis XIV, fut le premier exemple
■» de l'art délicat de répandre des grâces
M jusques sur la philosophie. » Mais ce
fut un exemple dangereux, parce que la
véritable parure de la philosophie est
l'ordre, la clarté, et surtout la vérité ;
et que, depuis cet ouvrage ingénieux , on
n'a que trop souvent cherché à y substi-
tuer les pointes, les saillies, les faux orne-
mens. Ces mondes, déjà très douteux en
eux-mêmes , sont fondés en partie .sur
les chimériques tourbillons de Descartes.
Ils ont été souvent réimprimes : la meil-
leure édition est celle de 1800 , enrichie
tks notes de Lalande. Us ont été tra-
duits en allemand par Gottsched , VÀp*
sick , 1730, in-8 , et par l'astronome
Bode, Berlin, 1798, in-12, avec des
notes estimées ; en italien , par Vestri-
ni, Arezzo , 1751; en anglais 1760;
en grec moderne , par Toussaint Ko-
drika , athénien , Vienne, 1794, in-8.
3° Histoire des oracles , tirée de l'en-
nuyeuse composition de Van Dale sur le
même sujet. Cet ouvrage écrit d'un stile
léger et superficiel en lui-même, fut ré-
futé en 1707 par le Père Baltus. L'ou-
vrage de ce jésuite, publié sous le titre
de Re'ponse à V Histoire des oracles , pa-
rut si décisif à Fontenelle , qu'il n'y
répondit point, disant que le diable avait
gagné sa cause. Il faut convenir néan-
moins que son opinion sur les oracles ,
quoique historiquement fausse, n'aurait
peut-être rien eu de répréhensible , s'il
n'y avait point inséré des maximes qui
pouvaient se tourner contre les plus
grandes vérités , et conduire à un triste
scepticisme. L'esprit d'irréligion se ma-
nifeste plus clairement dans la Relation
de Vile de Bornéo ( faussement attribuée
à Catherine Bernard ) , dans le Traité
sur la liberté, ûnnsVE pitre sur Basnage
à Rome et Genève , et dans quelques au-
tres écrits. 4° Poésies pastorales , avec
un discours surVËgloguc, et unedigres^
sion sur les anciens et les modernes,
1C88. Les gens de goût ne veulent pas
que ces pastorales .soient mises, pour la
naïveté et le naturel , à côté de celles de
Théocrite et de Virgile. Les bergers de
Fontenelle , disent-ils, sont des courti-
sans ou des petits-maîtres. C'est un nou-
veau genre pastoral qui tient un peu du
roman, et AoniVAstréeAe d'Urfé , et les
comédies de VAmynte et du Pastov Fido,
ont fourni le modèle ( t'oyez Théocrite ,
Virgile). 5° Plusieurs volumes des Mé-
moires de l'académie des Sciences. Fon-
tenelle, nommé membre de cette Acadé-
mie en 1691, et il en devint secrétaire en
1699. Il continua de l'être pendant 42
ans, et donna chaque année un vol. de
l'histoire de celte compagnie. La préface
générale est estimée. Dans l'histoire , il
jette souvent de la clarté sur des matières
obscures. Les Eloges des académiciens ,
fÔN
répandus dans cette histoire , ont été im-
primés séparément en 2 vol. C'est sur-
tout dans ses éloges qu'il déploie toute
la coquetterie du bel-esprit. « Ses por-
» traits, dit un critique, sont tracés
M avec art , et quoique flattés, ils conser-
» vent néanmoins un certain air de res-
u semblance qui les fait reconnaître. Il
» n'approfondit rien , effleure tout , pa-
» raît se jouer de son sujet , ne donne
» point à penser au lecteur , cherche
» seulement à amuser, le surprend
» même quelquefois par des traits ingé-
» nieux et fins ; partout on aperçoit le
■» manège d'une coquette, dont le fard
)) fait tous les charmes. » 6" L'Histoire
du théâtre français jusqu'à Corneille,
avec la vie de ce célèbre dramatique.
Cette histoire très abrégée , mais avec
choix, est pleine d'enjouement. 7° Bé-
flexions sur la poétique du théâtre tra-
gique : c'est un des ouvrages les plus
pensés de Fontenelle, et celui peut-être
oîi , en paraissant moins bel-esprit , il
parait plus homme d'esprit. 8° Elémens
de Géométrie de V infini, in-4, 1 727 : livre
dans lequel les géomètres n'ont guère
connu que le mérite de la forme. 9° Une
tragédie en prose et six comédies ; les
unes et les autres peu théâtrales, et dé-
nuées de chaleur et de force comique.
10° Théorie des tourbillons cartésiens-,
ouvrage qui , s'il n'est pas de sa vieil-
lesse , méritait d'en être. Fontenelle était
grand admirateur de Descartes , et dé-
fendit jusqu'à la mort les erreurs dont il
s'était laissé prévenir dans l'enfance.
1 1 ° Des Discours moraux et philosophi-
ques ; des pièces fugitives, dont la poé-
sieest faible ; des lettres, parmi lesquelles
on en trouve quelques-unes de jolies, etc.
Tous ces dififérens ouvrages ont été re-
cueillis en 11 vol. in-12, Paris, 1758,
et 8 vol. in-8 , Paris , 1790 (à l'exception
des écrits de géométrie et de physique ) ,
sous le titre A'OEuvres diverses. L'édi-
tion la plus récente est celle de Paris,
1824-1825. On en avait fait deux édi-
tions en Hollande , l'une en .3 vol. in- fol.
1829, l'autre in-4, 3 vol. 1829, ornées
toutes deux de figures gravées par B. Pi-
cart. Les curieux les recherchent ; mais
V.
fm
hî
elles sont beaucoup moins complètes
que l'édit. en 11 vol. in-12. Ce fut aussi
Fontenelle qui donna en 1732 la nou-
velle édition du Dictionnaire des sciences
et des arts , par Thomas Corneille.
Malgré un tempérament peu robuste en
apparence , Fontenelle n'eut jamais de
maladie considérable , pas même la pe-
tite vérole. Il n'eut'de la vieillesse que
la surdité et l'affaiblissement de la vue ;
encore cet affaiblissement ne se fit sentir
qu'à l'âge de plus de 90 ans. Il mourut le
9 janvier 1757. Un caractère doux et so-
ciable ne le garantit pas de la misan-
thropie et d'un triste égoïsme. « Les
» hommes sont sots et méchans, disait-
» il; mais tels qu'ils sont, j'ai à vivre
» avec eux, et je me le suis dit de bonne
» heure. » Ses amis lui reprochèrent
plusieurs fois de manquer de sentiment:
il est vrai qu'il n'était pas bon pour ceux
qui demandent de la chaleur dans l'a-
mitié. H voyait très souvent M""* de Ten-
cin ; quand il apprit sa mort : a Eh bien !
)) dit-il, j'irai dîner chez la Geoffrin. »
( Foyez ce mot). Il vivait beaucoup avec
l'abbé Dubois , qu'il appelait son ami.
Un jour qu'on avait fait à celui ci présent
d'une botte d'asperges dans la primeui- ,
ils convinrent de la faire assaisonner,
partie à l'huile, partie à la sauce, pour
satisfaire leurs goûts respectifs; avant
l'entremets , l'abbé Dubois est frappé
d'une apoplexie , et tombe sans connais-
sance , Fontenelle court sur l'escalier et
crie à la cuisinière : « Toutes les asperges
» à la sauce , toutes les asperges à la
» sauce. » Quoiqu'il fût né sans biens ,
il laissa de grandes richesses; sa philoso-
phie n'ayant pu l'affranchir d'amasser et
d'ajouter à la qualité de bel-esprit celle
de financier. Ou trouvera de plus amples
détails sur Fontenelle, dans les mémoires
pour servir à l'histoire de sa vie et de
.ies ouvrages , par M. l'abbé Trublet ,
Amsterdam , 1761 , in-12 ; mais il faut se
souvenir que c'est un admirateur, un
panégyriste qui déploie en faveur de
son héros toutes les ressources de l'en-
thousiasme. Un écrivain aussi zélé pour
les bons principes que pour le bon goût
et la belle littérature , l'a appelé « un
24..
378 fON
)> homme sans caractère et sans talent
3) prononcé, moitié philosophe, moitié
» bel-esprit ; grimacier , dont tous les
3) ouvrages sont défigurés par une conti-
» nuel le afféterie d'expressions et d'idées,
» par des tons précieux et maniérés, par
;) des pointes ; qui dans les sciences n'a
» rien inventé, et n'avait que le talent
» d'exposer avec méthode et clarté les
» inventions d'autrui. » * Fonlenelle
étant jugé ici un peu sévèrement , nous
croyons devoir ajouter au jugement de
Felier celui de l'abbé Sabathier : « En
» envisageant, dit-il, M. de Fontenelle
» comme poète, il faut oublier , pour sa
» gloire, qu'il a fait des tragédies, des
» comédies , et ne se ressouvenir que de
» l'opéra de Thétis et Pelée (Laharpe
» même dit qu'il ne dut son succès qu'à
3J la musique et aux accessoires du
» théâtre ) ; ses autres poésies paraîtront
» également médiocres à ceux qui préfè-
» rent le naturel à l'affectation du bel-
» esprit. Ses e'glogues surtout sont des
» entretiens de petits-maîtres raffinés ,
» et non des pastorales dont la candeur
3> et la simplicité doivent faire le premier
» agrément. Comme prosateur il serait
» dangereux de prendre en tout sa ma-
» nière d'écrire pour modèle : la finesse
» et l'agrément trop recherché, qui rè-
» gnent dans sa prose , sont des amorces
» séduisantes, propres à égarer les jeunes
3> esprits he^ Dialogues des morts ne
» sont que des assauts de pensées bril-
» lantes , oîi l'auteur cherche plusàcton-
» ner par les interlocuteurs disparates ,
» qu'à instruire , en développant le vrai
» caractère : ce n'est pas ainsi qu'on écrit
» la morale ; l'élégance de l'esprit ne
» peut que l'afifaiblir. Si l'écrivain dont
» nous parlons était réduit à la seule
» gloire d'avoir mis au jour de pareilles
}> productions, sa célébrité aurait fini
}> avec sa vie , et même avant. Mais en re-
3> connaissant les défauts du bel-esprit ,
» on ne peut s'empêcher de rendre justice
» au philosophe. Le talent particulier
» qu'il a eu de mettre à la portée de tout
» le monde les matières les plus abstrai-
» tes ; de revêtir de la clarté et desagré-
» mens du stile les sujets les plus ingrats^
fON
de répandre dans ses ouvrages les con-
naissances les plus étendues , sans af-
fectation , avec ordre et dans la plus
grande précision ; de dominer, par l'ai-
sance de son esprit , tout c c qui se pré-
sentait sous sa plume , dans les genres
les plus opposés et les plus difficiles, lui
assure la gloire d'une intelligence fine,
prompte, profonde, et celle du mérite
rare d'avoir su communiquer aux autres,
sans effort , ce qui paraissait avant lui
au dessusde la pénétration du commun
des lecteurs. C'est ce qu'il est facile de
remarquer dans son livre sur la Plura-
lité des Mondes, dans son Histoire de l'A-
cadémie des Sciences, et dans les éloges
qu'il a faits de plusieurs académiciens.
Le premier ouvrage fait admirer un
esprit lumineux qui se joue de l'embar-
ras des systèmes , procède avec dexté-
rité à travers les contradictions , déve-
loppe sans gêne les principes qu'il a
établis, et fait adopter ses idées , non
en faisant sentir la touche intime de la
persuasion , encore moins la force
delà conviction, mais par le talent
de plaire et d'amuser , etc. S'il s'é-
gara dans ses idées , il n'eut pas la té-
mérité de les réduire en systèmes ; s'il
avança quelques propositions un peu
hardies , il ne les défendit pas avec opi-
niâtreté ; s'il eut quelques démêlés lit-
téraires, il les soutint constamment
avec honnêteté , ou termina par un si-
lence , toujours sage quand on n'offre
aux autres que des découvertes oppo-
sées aux idées reçues. Ces qualités ren-
dirent au moins sa philosophie respec-
table dans ses sentimens , quoiqu'elle
ne fût pas toujours sûre dans ses maxi-
mes. » Pour justifier Fontenelle sur sa
manière de penser, nous ajouterons ici le
jugement que l'auteur des Mémoires pour
servir à l'Histoire ecclésiastique a porté
sur cet écrivain : « Il donna en 1G87 YHis-
» toire des oracles, tirée en partie de
j> l'ouvrage de Van Dale sur le même su-
» jet. Elle a été réfutée par le Père Bal-
» tus. Cet ouvrage ne donne , ni en soi ,
» ni par la manière dont il est traité ,
» aucun motif suffisant pour suspecter la
M religion de Fontenelle. On lui attribue
FON
y>\& Relation de l'île de Bornéo, citée
» par Bayle, et qui renferme une histoire
» allégorique et critique de l'église de
» Rome et de celle de Genève. Ce mor-
j> ceau si court ne pourrait être regardé
» que comme une plaisanterie , et ne sau-
» rait convaincre Fontenelle d'incrédu-
» lité. Fontenelle ne parla jamais de la
» religion qu'avec respect dans ses écrits
» avoués. S'il lui eût été contraire, il au-
» rait pu glisser de temps en temps quel-
» ques traits contre elle. Il ne l'a point
)' fait , qu'oiqu'il fût assez porté , par
j) la trempe de son esprit , aux allusions
» fines et aux épigrammes plus ou moins
» voilées , et qu'il les ait prodiguées sur
» d'autres sujets. Dans ses Eloges des
3) académiciens , il ne manque jamais de
M faire mention de leur attachement et de
)> leur respect pour la religion , sans que
)) sans doute rien ne l'ohligeât à en parler.
» Voltaire , dans sa Correspondance , lui
1) reproche d'avoir été un lâche , ce qui
j> veut dire apparemment, qu'il n'avait
n pas de zèle pour la philosophie . Laharpe
» dit qu'il pratiquait tous ses devoirs pu-
» blics de la religion ; et , suivant Moréri,
» il demanda lui-même les sacremens de
» l'Eglise , qu'il reçut avec une parfaite
n connaissance. Il dit au curé de l'église
» de St.-Roch qu'il avait vécu et voulait
» mourir dans le sein de l'église cathoLi-
» que. »
FONTÈTE. Foyez Fevret.
FOINTIUS ou FoNTi ( Barthélemi ) ,
natif de Florence, se fit estimer de Pic
de La Mirandole , de Marsille Ficin , de
Jérôme Donato, et des autres habiles
écrivains de son siècle. Mathias Corvin ,
roi de Hongrie , l'honora de son amitié ,
et lui donna la direction de la fameuse
bibliothèque de Bude. Les écrits de Fon-
tius sont : un Commentaire sur Perse ;
des Harangues ; le tout recueilli et im-
primé à Francfort, in-8 , 1621. Fonti
mourut en 1513.
FONÏRAILLES ( Louis d'AsTAHAC ,
marquis de ) , fut choisi par Monsieur
pour aller négocier en Espagne un traité,
qui lui fournit les moyens de chasser le
pardinal de Richelieu; mais il eut le
|ïOp)ieur de n'être pas arrêté comme
FOP 379
M. de Cinq-Mars. Il revint en France
après la mort du cardinal, et ne mourut
qu'en 1677. ( Il a écrit une relation des
choses particulières de la cour , pendant
Ui faveur de Cinq-Mars , imprimée au
tome 1*"' des mémoires de Montrésor. )
* FOOTE ( Samuel ) , comédien et au-
teur comique anglais, né en 172-3 , d'une
bonne famille dans le comté de Cor-
nouailles , fut destiné au barreau ; mais
sa mauvaise conduite lui ayant fait dis
siper sa fortune patrimoniale , il devint
membre du parlement, contracta des
dettes nouvelles qu'il ne put payer , et
devint comédien par nécessité. Il débuta
sur le théâtre de Hay-Market à Londres en
1744, par le rôle d'Othello et quelques
autres rôles tragiques dans lesquels il
n'eut aucun succès. Après s'être plongé
pendant deux ans dans de nouvelles in-
trigues pour échapper à la poursuite de
ses créanciers, il éleva pour son compte
un petit théâtre à Hay-Market où il fut à
la fois directeur, auteur et acteur. Il eut la
hardiesse d'y mettre en scène des per-
sonnages du temps : ce qui lui attirait la
foule , mais lui causa des chagrins. Par
suite des procès qu'on lui intenta et dans
lesquels il fut obligé de payer des
amendes considérables, son théâtre fut
fermé. Plus tard, après un accident qui
avait forcé de lui couper une jambe , il
eut la permission d'ouvrir son théâtre
pendant la clôture des deux théâtres
principaux de Londres. Le public se porta
en foule à ses représentations ; et il eût
acquis une fortune considérable , si le
jeu n'eût dévoré ses profits. Au milieu
des ennuis qu'il se procura , les médecins
lui ordonnèrent de voyager. Il mourut
presque subitement à Douvres en allant
en France pour sa santé. On l'a appelé
V Aristophane anglais. Ses œuvres ont
été imprimées à Londres en 1 778 , 4 vol.
in-8.
FOPPENS ( Jean-François ), né à
Bruxelles , fut successivement professeur
en philosophie à Louvain , chanoine de
l'église de Bruges , chanoine de Malines
et archidiacre. Il mourut le 16 juillet
1761, âgé de 72 ans. Ses talens, ses
Ycrtus, et surtout son zèle pom- la re|i«
58o FOR
gion , le firent regretter universellement.
On a de lui 1° Bibliotheca Belgica ,
Bruxelles , chez son frère Pierre Foppens,
1728, 2 vol. in-4 , où il a fait entrer les
ouvrages d'Aubert Le Mire , de François
Swertius et de Valère André , sur les au-
teurs belgiques. Il a fait de grandes ad-
ditions à ces auteurs , et continué la bi-
bliothèque belgique depuis vers 640 où
finit celle de Valère André , jusqu'à l'an
1680. Cet ouvrage est estimé et mérite
de l'être à bien des égards ; on y désire-
rait un peu plus de critique et d'exacti-
tude. 2° Une édition du recueil diploma-
tique d'Aubert Le Mire , Bruxelles , 1723,
2 vol. in-fol , enrichie de nouvelles notes
cl de tables, augmentée d'un grand
nombre de diplômes inconnus à Aubert
Le Mire. Il ajouta ensuite deux volumes
in-folio à cette collection, l'un en 1 734 ,
l'autre en 1748. 3° Historia episcopatus
Jntverpiensis, Bruxelles, 1717, in-4.
4° Historia episcopatus Sylvœducensis,
Bruxelles, 1721, in-4. 6° Chronologia
sacra episcoporum Belgii ab anno 1561
ad annum 1761 , in-12; ouvrage en vers
avec des notes historiques en prose.
6° Un grand nombre de poèmes latins ,
dénués la plupart d'énergie , et de cet
enthousiasme qui constitue la vraie
poésie, mais toujours sages dans leur
objet et les vues de l'auteur.
FORBES ( Jean ) , écossais , professeur
de théologie et d'histoire ecclésiastique
dans l'université d'Aberdeen , mort en
1648 , à 65 ans, laissa des Institutions
historiques et ihe'ologiques qu'on trouve
dans la collection de ses œuvres , 1703 ,
2 vol. in-fol. C'est un vaste recueil , où
l'auteur , en traitant de la doctrine chré-
tienne , prétend contre la vérité notoire
des faits, que diverses circonstances y
ont apporté des changemens. On a fait
un abrégé de cet ouvrage propre à nourrir
les préjugés des protestans. Son père
(Patrice), évèque d'Aberdeen, mort en
1635 , donna un Commentaire sur l'A-
pocalypse, in-4, 1646.
FORBES (Guillaume) , premier évêque
d'Edimbourg , s'est fait un nom par ses
Considérations sur les controverses , en
Jfttin, imprimées à Fruncfçrt, jn-8,
FOR
1707. Il mourut dans sa 49' année en
1G34 , laissant un fils qui embrassa la re-
ligion romaine.
FORBES ( Duncan ) , lord , président
des assises d'Edimbourg , mort au milieu
du 18* siècle, est connu en France par
les traductions qu'a publiées le Père
Houbigant , de ses Pensées sur la reli-
gion , de sa lettre à un e'vêque , etc. ,
Lyon, 1769 , in-8. Ces écrits ont eu un
succès médiocre.
FORBIN ( Toussaint de ) , plus connu
sous le nom de cardinal de Janson,
d'une famille illustre de Provence, fut
successivement évèque de Digne, de
Marseille et de Beauvais. Louis XIV,
connaissant le talent singulier qu'il avait
de manier les affaires , le nomma son
ambassadeur en Pologne. Jean Sobieski,
qui dut en partie à son crédit le trône de
cette république , lui en marqua sa re-
connaissance, en le nommant au cardi-
nalat. Envoyé à Rome sous Innocent XII
et sous Clément XI , il traita avec tant de
sagesse les affaires de France , qu'il fut
honoré en 1706 de la charge de grand-
aumônier. Il mourut à Paris en 1713, à
83 ans. C'était un homme spirituel et
preste aux reparties vives. Il fut un des
plus ardens adv«rsaires de V Apologie des
casuistes. Nous avons une censure qu'il
publia contre elle , étant évêque de Digne.
FORBIN ( François-Toussaint de ),
neveu du précédent , plus connu sous le
nom de comte de Rosemberg , quitta la
France pour avoir tué en duel un de ses
ennemis. Il y rentra ensuite ; mais ayant
été blessé à la bataille de la Marsaille en
1693, il fit vœu de se faire religieux de
la Trappe. Il l'accomplit environ dix ans
après , prit le nom de frère Arsène , et
fut envoyé à Buon-Solazzo en Toscane ,
pour y établir l'esprit primitif de Cîteaux.
Il y mourut saintement eu 1710. On a
publié la relation édifiante de sa vie et
de sa mort, traduite de l'italien en fran-
çais , in-12, par l'abbé Maupertuis.
FORBIN ( Claude, chevalier de ,^) né
en 1656 à Gardane près d'Aix en Proven-
ce , commença dès sa première jeunesse
à servir sur mer , et il continua avec
l^eaucoup d'inleUiççnçe , 4ç çpwF^ge et
FOR
d'activité. Après avoir été grand-amiral
du roi de Siam , à qui il fut laissé en 1686
par le chevalier de Chaumont , il se si-
gnala sur la mer Adriatique. Il attai^ua
en 1706 , près du Texel, avec cinq petits
vaisseaux , une escorte ennemie , forte de
six vaisseaux de guerre de 50 à 00 canons.
Il en enleva un , brûla un autre , coula
bas un troisième , et dispersa le reste.
Devenu chef d'escadre , il dissipa dans
les mers du IVord trois différentes flottes
anglaises destinées pour la Moscovie. A
son retour il battit, avec Duguay-Trouin ,
une autre flotte anglaise. Ses infirmités ,
ou plutôt le mécontentement qu'il avait
des ministres, l'ayant obligé de quitter
le service , il se retira vers 1710 auprès
de Marseille. Il y mourut en 1733 , à 77
ans. Forbin mérita la confiance de Louis
XIV et l'estime de sa nation , par sa bra-
voure et par son application à remplir
ses devoirs. Il s'attachait à ceux qui ser-
vaient sous lui , et ne laissait point échap-
per l'occasion de les faire connaître à la
cour. Forbin avait la tête d'un général et
la main d'un soldat. On trouvera plusieurs
traits d'une bravoure singulière dans ses
mémoires, publiés en 17 49, en 2 vol.
in-12, par Reboulet, et réimprimés en
1781.
FORBISHER ou Frobisher (Sir Mar-
tin ) , pilote anglais , né à Devonsbire ,
se signala de bonne heure par ses courses
maritimes. La reine Elisabeth l'envoya ,
avec trois navires en 1 576, pour chercher
le détroit que l'on croyait être au nord
de la Sibérie , qui devait servir à passer
de l'occident en orient par le nord. Mais
ce voyage , ainsi que celui qu'il entreprit
deux ans après , et tous ceux qu'on a faits
depuis relativement à cet objet , n'ont
rien produit, parce que ce passage n'existe
réellement pas : car , supposé que les
deux continens ne se touchent nulle part ,
les monts de glaces rendraient encore tout
passage impraticable ( Voyez Cook ).
Forbisher , qui ne connaissait rien en
histoire naturelle, apporta de ses voyages
une grande quantité de pierres qu'il avait
fait tirer des montagnes de ce pays-là. Il
s'imaginait qu'elles renfermeraient de l'or
fit de l'argent ; roais après les avoir l)ien
FOR
m
examinées, il n'y trouva rien , et l'on s'en
servit pour paver les chemins. Peu de
temps après ce second voyage, l'amiral
ïlaward le créa chevalier , pour récom-
penser les marques de bravoure qu'il avait
données en 1588 dans un combat entre
la flotte anglaise et la flotte espagnole.
Après s'être signalé sur mer , il se signala
sur terre. Il débarqua en Bretagne pour as-
siéger le fort de Gradon. Cette place se
rendit après une vigoureuse résistance ;
mais Forbisher y fut blessé, et mourut de
sa blessure àPlimouthen 1594.
* FORBONNAIS ( François Veron ou
Veroni de } , inspecteur-général des mon-
naies de France , de l'Institut national , né
au Mans , le 2 octobre 1722 , d'une fa-
mille illustrée dans le commerce, termina
ses études à Paris , et voyagea en Italie «t
en Espagne pour les affaires de son père.
Ayant été appelé en 1743, auprès d'un
oncle , riche armateur à Nantes , il s'a-
donna entièrement à l'étude de l'écono-
mie politique , et recueillit un grand nom-
bre d'observations importantes sur les
manufactures , le commerce , la marine ,
les colonies , la valeur des monnaies.
En 17 52, il vint se fixer à Paris, oii il
soumit au gouvernement divers mémoires
sur les finances , qui ne furent point ac-
cueillis par les ministres. Il publia de
1753 à 1758 plusieurs autres Mémoires
sur les mêmes matières ; ils furent mieux
reçus du public : eu 1756 , il fut nommé
inspecteur-général des monnaies. Sous
le ministère de M. de Silhouette , il pro-
posa divers plans de finances et des vues
utiles ; la plus importante de ses opéra-
tions fut de créer 72,000 actions, chacune
de 1000 fr., dans les fermes générales du
royaume ; il attribua à chacune de ces
actions la moitié des bénéfices dont jouis-
saient les fermiers-généraux : cette afl'aire
produisit en 24 heures, sans grever l'état,
72 millions. Il proposa d'autres réformes ;
mais il fut contrarié dans ses projets , et
exilé dans ses terres. Du fond de sa re-
traite , il continua de correspondre avec
les intendans des finances, et surtout avec
le fameux abbé Terray , qui lui demanda
des mémoires , et fit des effors jputiles
poqf jp ramener »h îinion dçs gffairçs, Il
382
FÔR
se rendit à Paris en 1790, sur l'invitation
du comité des finances , et il eut part à
un travail relatif aux monnaies. U mourut
le 20 septembre 1800. Il a laissé un grand
nombre d'ouvrages sur les finances et le
commerce , où l'on trouve d'excellentes
vues; ils sont écrits d'une manière noble ,
facile et souvent élégante. Les principaux
sont : 1° Extrait de l'esprit des lois,
avec des observations, 1753 , in-12; 2°
Théorie et Pratique du commerce et de
la marine, traduit de l'espagnol , 1753 ,
in-4 ; 3° Considérations sur les finances
tT Espagne , relativement à celles de
France, 1753, in-12; k" Le négociant
anglais, 1753 , 2 vol. in-12; 5° Elémens
ducommerce, Paris, 1754, 2 vol. in-12,
plusieurs fois réimprimés. L'édition de
1796 a été corrigée et enrichie d'addi-
tions importantes; 6" Questions sur le
commerce des Français au Levant, 1 755,
in-12; 7° Recherches et considérations
sur les finances de France , depuis 1 595
jusqu'en 1721 , Bâle, 1758 , 2 vol. in-4 ,
réimprimés la même année à Liège , en
6 vol. in-12; 8° Principes et observations
économiques , 1767 , 2 vol. in-12; 9°
Analyse des principes sur la circulation
des denrées et Finfluence du numéraire
sur cette circulation , 1800 , in-12 ; 10°
divers articles dans l'Encyclopédie , sur
le commerce , les changes , la population.
Il a laissé en outre un grand nombre de
manuscrits. Sa vie littéraire a été écrite
par Dclisle de Sales, Paris, 1801, in-8.
FORCADEL ( Etienne ) , Forcatulus ,
professeur en droit à Toulouse , était de
Béziers,et mourut en 1578. Ses écrits
consislent en poésies latines et fran-
çaises, 1579 , in-8 , les unes et les autres
très médiocres ; en livres de droit , un
peu moins mauvais , et en histoires. Les
litres de ces ouvrages pourront donner
une idée de son stile précieux et affecté,
1 ° Necromantiœ , sive occultœ jurispru-
dentice tractatus , in ccntum viginti
quinque dialogos distinctus. 2° Spherœ
legalis dialogus unus, 3° Cupido juris
peritus , in viginti duo capita divisas.
4° Penus juris civilis, sive de alimentis
capita triginta continens. 5° Aviarium
juris civilis , in mvem capita partifurrii
FOR
G° Commentarius in tituXum de justitia
etjure,lib. 1 Digestorum. 1° Tractatio
dilucida rei criminalis , in quatuor di-
gesta partes. 8° Commentarius nobilis
in jura feudorum. — Il avait pour frère
Pierre Forcadki, , professeur royal de ma-
thématiques , mort en 1577 , dont on a
une traduction française d'Euclide et de
la géométrie d'Oronce Fine , et une
arithmétique en 4 livres.
FORCÉ ( Jacques-Nompar de Cau-
MONT , duc de La ) , fils de François , sei-
gneur de La Force , qui fut tué dans son
lit, avec Armand son fils aîné, pendant
le massacre de la St.-Barthélerai. Jac-
ques, qui n'avait que neuf ans , et qui était
couché avec eux , se cacha si adroitement
entre le corps de son père et celui de son
frère , qu'il échappa au glaive des assas-
sins. C'est lui-même qui a écrit cet événe-
ment dans des mémoires conservés dans
sa maison, et cités dans la Henriade. U
porta les armes sous Henri IV , et servit
ensuite les réformés contre Louis XIII ,
surtout au siège de Montauban en 1621.
L'année d'après, La Force s'étant détaché
des erreurs et des séditieuses intrigues des
huguenots , prit Pignerol , et défit les
Espagnols à Carignan en 1G30. Quatre
ans après il passa en Allemagne , fit lever
le siège de Philisbourg , secourut Heidel-
berg, et prit Spire en 1635. Sa terre de
La Force , en Périgord , fut érigée en
duché-pairie l'an 1637. H s'y retira après
avoir rendu des services importans à
l'état , et mourut plein de jours et de
gloire en 1652, à 97 ans. Ce n'était pas,
suivant l'abbé Le Gendre , le général le
plus renommé de son siècle ; mais ce
n'était pas aussi le moins habile.
FORCE ( Armand IN'ompar de Cau-
BioNï , duc de La ) , fils du précédent, et
maréchal de France comme lui , obtint le
bâton en 1652 , pour avoir servi avec
distinction contre les huguenots. Le com-
bat de Ravon , où il défit 2,000 impé-
riaux , et prit prisonnier Colloredo leur
général , lui fit beaucoup d'honneur. U
mourut en 1675, à 95 ans. Une longue J
vie était , ce semble , le partage de cette
famille illustre.
FORCE ( Cbarlottp'Rosç de Caumoht '
de La ), de l'académie des Aicovrati de
Padoue , était petite-fille de Jacques de
La Force , et mourut en 1724 , à 70 ans.
Elle a illustré le Parnasse français par ses
vers , et la république des lettres par sa
prose. On a d'elle, dans le premier genre,
une épître à M""* de Maintenon , et un
poème dédié à la princesse de Conti , sous
le titre de Cliâteau en Espagne , qui ne
manquent ni d'imagination ni de génie.
On connaît d'elle , dans le second genre :
1 " L'Histoire secrète de Bourgogne , en
2 vol. in-12, roman assez bien écrit,
Paris, 1G91. 2° CeWe de Marguerite de
Falois, 4 vol. in-12 , Paris, 1719. 3° La
Vie de Catherine de Bourbon. 4° Les
Fées, contes des contes , sans nom d'au-
teur, in-12. 5° Mémoires historiques de
la duchesse de Bar, sœur de Henri IV ,
etc., in-12. 6° Gustave IFasa, in-12,
qu'on ne lit guère. Le fond de presque
tous les ouvrages de M'^* de La Force est
historique ; mais la broderie en est ro-
manesque. Elle avait épousé en 1687
Cbarles de Brion ; mais le mariage fut
déclaré nul au bout de dix jours.
* FORCELLIIVI ( Egidio ) , savant
ecclésiastique italien , né dans un village
du diocèse de Padoue en 1688 , fit ses
études dans le séminaire de cette ville ,
et fut ensuite appelé à la direction du
séminaire de Cénéda , et à la chaire de
rhétorique pour les jeunes séminaristes,
qu'il fut obligé d'y remplir. Il mourut le
4 avril 1768. On lui doit un grand dic-
tionnaire latin , le meilleur que nous
avons , qu'il fit de concert avec Faccio-
lato , et qui absorba , pour ainsi dire , sa
vie entière. 11 a été publié après sa mort
sous ce titre : Totius latinitatis Lexicon ,
concilio et cura Jac. Facciolati , opéra
et studio œgidii Forcellini, Patavini,
1771 , 4 vol. in-folio , réimprimé en
1805. 11 faut y joindre un supplément,
publié en 1816. Chaque mot latin de ce
dictionnaire est rendu en italien , et ac-
compagné du mot grec correspondant.
La première édition est la meilleure. La
seconde ne renferme point d'augmenta-
tions, quoiqu'elles soient annoncées sur le
frontispice. La vie deForcellini a été écrite
par l'abbé J. B. Ferrari, Padoue, 1792, in-4.
Î'OA 383
* FORDYCE ( Jacques ), célèbre pré-
dicateur écossais, né en 17 20 à Aderdeen ,
occupa long-temps à Londres la place de
pasteur d'une congrégation de dissenters
ou non-conformistes , et mourut à Bath
le 1*" octobre 1796. Ses prédications
eurent beaucoup de vogue : il avait le
secret de parler au cœur , et joignait au
mérite d'une composition élégante et
fleurie , celui d'une élocution claire et
animée. On lui doit : 1° Essai sur l'ac-
tion convenable à la chaire , in-1 2 , im-
primé à la suite de Théodore ^ dialogue
concernant l'art de prêcher , par David
FoRDYCE , son frère , 3* édition in-12,
1 7 55. 2" Le temple de la vertu , songe ,
in-12, 1755 et 1777. 3° Sermons aux
jeunes femmes , 2 \ol. in-i 2, 1796. Ce
recueil, généralement goûté des femmes,
a été traduit en français. 4° Le caractère
et la conduite du sexe féminin , et les
avantages que les jeunes gens peuvent
recueillir de la société des femmes ver-
tueuses, 17 79, in-8. Il recommande aux
jeunes gens un commerce spirituel avec
le sexe, qui ressemble à l'amour platoni-
que. 5" Adresses aux jeunes gens , 1777
et 1796, 2 vol, in-12. 6" Adresses à la
Divinité, 17 85 et 1787, in-12. 7° Un vol.
de poésies , 1786 , in-12. Il y a de la
correction , de la facilité , mais peu de
poésie.
* FORDYCE ( George ), célèbre mé-
decin , né en 1736, près d'Aberdeen ,
ouvrit des cours particuliers de méde-
cine , et s'attira un grand nombre d'au-
diteurs par la précision , la clarté , l'exac-
titude avec lesquelles il s'exprimait ; ce
qui vaut bien l'éloquence qui séduit tou-
jours , mais qui est souvent stérile pour
la science. Il a répandu de nouvelles
lumières sur le mécanisme des fluxions ,
et sur la nature du liquide qu'elles châ-
tient ; mais ce qui contribua davantage
à sa réputation , fut la belle série d'expé-
riences qu'il entreprit en 1774, avec au-
tant de zèle que de talent , sur la tempé-
rature des animaux en général, et du
corps de l'homme en particulier. II mou-
rut le 25 juin 1802, laissant plusieurs,
ouvrages en anglais, dépourvus du char>
me du slile , mais remarquables par des
384 PÔft
vues neuves et des expériences curieuses :
\'' Principes d'agriculture et préceptes
sur la ve'ge'tation y Edimbourg , 1765 et
1771 , in-8. Ils ont été traduits en alle-
mand avec des notes et des additions ,
"Vienne, 1777 , in-8. 2° Eltmens de mé-
decine-pratique, Londres , 1768 , in-8 ,
souvent réimprimés et traduits en alle-
mand. C'est le manuel qui servait de texte
à ses leçons. 3° Traite' de la digestion
des alimcns , Londres, 1791 , traduit en
allemand en 1793. 4° Cinq dissertations
sur la fièvre simple, Londres, 1794-1802,
in-8,
FOREIRO { François ) , en latin Fo-
reriuSy dominicain de Lisbonne, mort
en 1581 , fut un des trois théologiens
choisis pour travailler au Cate'chisme du
concile de Trente , où il avait fait admi-
rer son talent pour la chaire. On a de lui
un savant Commentaire surisaïe, in-fol.,
qu'on a inséré dans le Recueil des grands
critiques.
FOREST ( Pierre ) , savant médecin ,
plus connu sous le nom de Forestus , né
à Âlcmaër en 1 522 , d'une famille noble,
étudia et pratiqua la médecine en Italie ,
en France et dans les Pays-Bas , oîi il
mourut en 1597. On a de lui des Obser-
vations sur la médecine, 6 vol. iu-fol.,
Francfort, 1623.
FOREST ( Jean ) , peintre du roi , né
à Paris en 1636 , mort dans la même ville
en 1712, était un excellent paysagiste,
et joignait à ce talent beaucoup d'esprit
et un caractère plaisant. Il fit le voyage
d'Italie oùPierre-FrançoisMola lui donna
des préceptes dont il sut bien profiter ;
et il étudia le coloris dans les ouvrages
du Titien , du Giorgion et des Bassan. On
remarque dans ses tableaux des touches
hardies', de grands coups de lumière', de
savantes oppositions de clair et d'ombre,
un stile élevé, de beaux sites et des
ligures bien dessinées.
FORESTI ou FoRESTA ( Jacques-
Philippe de ) , est plus connu sous le nom
de Philippe de Bergame , sa patrie. Il
entra dans l'ordre des Augustins, et s'y
fit un nom. Il mourut le 15 juin 1520,
Agé de 86 ans , après avoir publié une
Chronique depuis Adam jusqu'en 1 503 ,
foft
et continuée depuis jusqu'en 1535, Paris,
1535, in-folio. Elle eut beaucoup de
cours dans le siècle de l'auteur ; elle ne
le méritait guère. Si l'on excepte les
événemens dont il a pu être témoin ,
tout le reste n'est qu'une informe com-
pilation des historiens les plus crédules.
On a encore de Foresti : Confessionale ,
ou Interrogatorium , Venise, 14^7,
in-folio ; et un Traité des femmes illus-
tres, Ferrare, 1497 , in-fol. , en latin.
FORESTIER (Pierre), savant cha-
noine d'Avalon, mort dans cette ville eu
1 723 , à 69 ans , est auteur de 2 volumes
ai Homélies, et de quelques autres ou-
vrages, dont le meilleur est V Histoire des
indulgences et des jubilés , in-12.
* FORESTIERI ( François-Benedict ),
littérateur italien , né à Sinigaglia eu
1797, fut élevé à l'école de Frugoni et de
Césarotti. Il s'occupa beaucoup et de
bonne heure des classiques latins et de la
poésie italienne. On a de lui des traduc-
tions de quelques-unes des élégies de Ti-
bulle et des poésies latines de Pétrarque :
il publia lui-même plusieurs morceaux
de poésie parmi lesquels on distingue ce-
lui qu'il fit sur la mort de Perticari son
ami. Ce jeune poète est mort en 1828.
* FORFAIT ( Pierre Alexandre-Lau-
rent ) , ingénieur-constructeur de la ma-
rine , né à Rouen eu 1752, exerça d'a-
bord les fonctions d'ingénieur à Brest ,
puis à Cadix sous les ordres du comte
d'Estaing. Il se recommanda particulière-
ment à l'attention du gouvernement en
1787 par la construction de paquebots
propres à recevoir des marchandises,
ainsi qu'un grand nombre de passagers ,
et destinés à entretenir avec les Etats-
Unis une navigation régulière. Chargé
ensuite d'une mission de la plus haute
importance auprès de l'Angleterre , il fut
nommé à son retour, membre de l'Assem-
blée législative en 1791, et il eut le cou-
rage de s'opposer à toutes les proposi-
tions révolutionnaires faites par des têtes
exaltées. Il alla ensuite reprendre ses
fonctions au Havre , et devint successi-
vement ministre de la marine , conseiller
d'état , inspecteur-général de la flotiiie
destinée contre l'Angleterre, comman-
FOR
danl de la Légion - d'honneur , préfel
maritime au Havre , puis à Gènes. Des-
servi par des envieux qui pai-vinrent à
lui faire perdre la confiance du gouver-
nement, il se retira au scinde sa famille,
et mourut des suites d'une attaque d'a-
poplexie le 9 novembre 1807. Il a laissé
1" un Mémoire en latin, sur les canaux
navigables, couronné par l'académie
de Mantoue en 17 73. 2° Un Traité élé-
mentaire de la mâture des vaisseaux ,
Paris, 1788, 1 Yol. in-4 , ouvrage entre-
pris par ordre du ministre de la marine,
pour l'instruction des élèves , et qui an-
nonce que l'auteur avait bien approfondi
son sujet.
FORGEAT! ( Saint ). Foyez Ferréol.
* FORGEOT ( Nicolas-Julien ) , auteur
dramatique , avocat et inspecteur de l'ad-
ministration des postes, né à Paris au
mois de juillet 1758, étudia le droit ,
se fit recevoir avocat , et mourut à Paris
le 4 avril 1798. Il a donné plusieurs
pièces qui eurent du succès , et dont
quelques-unes sont restées au répertoire :
à l'Opéra , les Pommiers et le moulin ;
ôux Français , les Epreuves , la Ressem-
blance ; au théâtre Italien , les Deux
Oncles., les Dettes, la Caverne, etc.;
au théâtre Feydeau , le Double Divorce ,
la Rupture inutile. Son chef-d'œuvre est
l'Opéra-comique des Dettes, en 2 actes
et en prose, mêlé d'ariettes, musique
de M. Champin, joué le 8 janvier 1787.
FORGES. Foy. Desforges-Mailla'rd.
FORGET DE Frksxe (Pierre), ha-
bile secrétaire d'état, employé dans toutes
les affaires importantes de son temps,
mourut en 1610. C'est lui qui dressa le
fameux édit de Nantes. — Une faut pas
le confondre avec Germain Forget ,
avocat au bailliage d'Evreux , dont on a
un Traité des personnes et des choses
ecclésiastiques et décimales , Rouen ,
162.'i, petit in-8.
* FORKEL (Jean -Nicolas), célèbre
musicien allemand et docteur en philoso-
phie, naquit le 22 février 17 49 à Méeder
près de Cobourg , de parens très pauvres.
Néanmoins il apprit dès son bas âge la
musique, seul, uniquement avec le se-
cours de l'ouvrage de Matthesons, intitulé
V.
FOR 385
le Parfait maître de chapelle. Ses di.spo-
sitions étaient si heureuses et ses succès
furent si rapides , qu'à 1 7 ans il fut nom-
mé préfet du chœur de l'église de Schwe-
rin. Le duc de Mecklcmbourg, ayant trou-
vé en lui de l'aptitude pour les sciences
et les lettres, lui fournit les moyens de se
rendre à l'université de Gottingue , où
il s'occupa du droit : fatigué d'une étude
qui n'avait pour lui aucun agrément, il
profitait de tous ses momens de loisir
pour apprendre l'art dont il sentait qu'il
avait le génie : il mit à contribution les
nombreuses ressources que lui fournissait
la riche bibliothèque de cette ville , et
étudia la théorie de la musique dans les
meilleurs ouvrages qui avaient paru jus-
qu'alors. Chargé bientôt de diriger le
concert académique , il fut en relation
avec tous les musiciens célèbres de l'Al-
lemagne. L'université le reçut docteur
en philosophie, et la ville lui accorda
le droit de bourgeoisie. Ce savant pro-
fesseur a composé des symphonies , des
oratorio , des cantates , des concerto ,
des sonates. Il a aussi beaucoup écrit
sur la partie théorique de son art. Ses
ouvrages , tous composes en allemand ,
sont : 1" De la Théorie de la musique,
Gottingue, 1774, in-4; 2» Bibliothè-
que musicale et critique , Gotha , 17 78,
3 vol. in-8 ; ouvrage qui produisit une
grande sensation , parce que la princesse
Amélie de Prusse venait de faire une cri-
tique amère àcV Iphigénic de Gluck, mu-
sicien qu'il attaquait lui-même. 3" Sur la
meilleure organisation des concerts pu-
blics , 1779, in-4 ; 4" Développement de
quelques idées sur la musique ; 6" Alma-
nach musical pour V Allemagne , 1782
et années suivantes ; 6° Histoire générale
de la musique, 1788-1801 , 2 vol. in-4,
ouvrage que 3Iarpurg considérait commte
une production dont l'Allemagne devait
s'enorgueillir, et qui est resté incomplet.
7° Sur la littérature universelle de la
musique , Lév^?,\ck , 1790, livre destine
à faire connaître tous les écrits qui ont
été publiés sur cette matière. Il avait an-
noncé un Prospectus pour un magnifique
ouvrage , sous le titre de Monument de
Vart musical depuis la découverte de la
386 FOR
cantrepointe jusqu^aux temps actuels ,
qui devait avoir cinquante cahiers , et
contenir les chefs-d'œuvre de toutes les
sortes de musique ; mais les éditeurs
.-lyant renoncé au traité qu'ils avaient si-
gné, l'ouvrage n'eut pas de suite. Il çst
mort le 20 mars 1818. Les académies de
Stockholm et de Livourne l'avaient admis
dans leur sein.
* FORMAGE (Jacques Charles-César) ,
littéraleui", né à Coupe-Sartre près de
Lisieus , en 1749, fut professeur de 3*
à Rouen en 1779, occupa la chaire des
langues anciennes à l'école centrale , et
fut attaché ensuite au lycée de cette
ville. Il cultiva les poésies latine et fran-
çaise. On a de lui 1° Iii liccntiam
nostrce poeseos carmen ; 2° Ignis ; 3" In
pestem quœ Rothomago incubiiit;
4" Stances sur la guerre d^ Amérique :
ces trois poèmes et les stances ont été
couronnes par l'académie de l'Immaculée-
Conception de Rouen en 1778, 1779 et
1780, insérés dans le recueil des pièces de
celte académie ; 6° Discours sur la réu-
nion de la Normandie à la couronne de
France sous Philippe- Auguste , cou-
ronné en 1781 par la même académie,
et inséré par extraits dans son, recueil ;
C" des fables mises en vers , qui n'ont
rien de remarquable , quoiqu'elles lui
aient fait quelque réputation. Il est mort
à Rouen le 11 septembre 1808.
* FORMEY ( Jean-Henri-Samuel ) ,
ministre protestant , ne à Berlin en 17 1 1 ,
d'une famille de réfugiés français , fut
nommé pasteur à Brandebourg à 20 ans,
puis a" Berlin, où il obtint en 1737 la
chaire d'éloquence au collège français
de cette ville, et en 1739 celle de phi-
losophie , vacante par la mort de Lacroze.
Son mérite lui valut la place de secré-
taire correspondant de la princesse Hen-
riette-Marie de Prusse , retirée au châ-
teau deCoepenick, celle de conseiller
privé au Directoire français, et de secré-
taire perpétuel de l'académie de Berlin.
H mourut le 8 mars 1797. On dit qu'il
était attaché à la révolution, et c'est peut-
être pour cela que Voltaire l'a tourné en
ridicule. Il a publié un très grand
nombre d'ouvrages ; les principaux sont :
FOR
1° Mémoires pour servir à l'histoire tt
au droit public de la Pologne , la Haie
1741, et Franclort 1754, in-8. 2° La
belle Wolfienne , ou abrégé de la philo-
sophie wolfienne , la Haie ,1741,6 vol .
in 8, et 1774 , 6 vol , in-12. 3" Conseils
pour former une bibliothèque peu nom-
breuse, mais choisie, 1746, in-12,
souvent réimprimés. 4° Pensées raison-
nables opposées aux pensées philoso-
phiques , 1 7 49 et 1 756 , in-8^ 5° Le phi-,
losophe chrétien, Leyde, 1750-56, 4 vol.
in-8 : c'est le recueil d'une partie des
sermons de l'auteur. 6° Discours moraux
pour servir de suite au Philosophe chré-
tien, 1715, 2 vol. in-12. 7° Mélanges
philosophiques, 1754, 2 vol. in-8.
8° Eloges des académiciens de Berlin et
de divers autres sav ans , 1757, 2 vol.
in-12. 9" Le philosophe païen , ou Pen-
sées de Pline , avec un commentant
littéraire et moral, 17 59, 3 vol. in-12.
10° Principes élémentaires des belles-
lettres , 17 58 et 63, in-12. \i° Abrégé
de F histoire de la philosophie , 1760,
in-8. i 2° Abrégé de V histoire ecclésia>-
stique , 1762, 2 vol. in-12. tZ" Anti-
Emile , 1702 et 1764, in-8. 14° Emile
chrétien , consacré à V utilité publique.
Berlin, 1764, 2 vol. in-8. i S" Sermons
sur divers textes de V Ecriture-sainte ,
17 76, 2 vol. in-8. Il a travaillé à la Bi-
bliothèque germanique avec Beausobre ,
et commencé une autre collection sous
le titre de Nouvelle bibliothèque ger-
manique, 25 vol. in-8. Ha aussi coopéré
au Journal de Berlin, à la Bibliothèque
centrale , à la Bibliothèque des sciences
et des beaux-arts , aux Nouvelles litté-
raires , au Journal encyclopédique , etc.
FORMOSE , évêque de Porto , suc-
céda au pape Etienne V le 1 9 septembre
891. C'est le premier évêque transféré
d'un autre siège à celui de Rome. Formo-
se , déjà évêque , ne reçut point de nou-
velle imposition des mains .- il fut seule-
ment intronisé. Il mourut en 896 , aprèâ
avoir couronné Arnoul empereur. Etienne
VI , successeur de Formose , après le
court pontificat de Bonifacc VI, fit dé-
terrer son corps , après avoir condamné
sa mémoire ( voyez Etienne VI }. Jeau
FOR
IX assembla un coucDe en 898 , qui cassa
les articles du synode convoqué par
Etienne VI, et rétablit la mémoire de
Formose. Voyez Auxilips.
FORNARI ( Marie-Victoire ) , née à
Gènes en 1562 , fut mariée à Ange Strate,
de qui elle eut trois garçons et deux filles,
qui tous embrassèrent la vie religieuse.
Après la mort de son mari , elle institua
l'ordre des Annonciades Célestes, et mou-
rut en odeur de sainteté le 1 5 décembre
1617. Sa Vie a été imprimée à Paris , en
1770, in-12. Son ordre a une centaine
de maisons, en Italie, en Allemagne, et en
France. Les religieuses sont habillées de
blanc , avec un scapulaire bleu-de-ciel,
et le manteau Je même ; c'est de là
qu'elles ont tiré leur nom de Ce'lestes.
* FORNICI ( Jean) , né vers l'an 1762
et mort le 11 avril 1828 à Rome , où il
était chanoine de la collégiale de St.-
Eustache , maître des cérémonies ponti-
ficales , secrétaire de la congrég-ation des
cérémonies, archiviste de la Pénitencerie
et consulteur de la congrégation des in-
dulgences , avait de grandes connais-
sances en liturgie : il a laissé 1° des In-
stitutions liturgiques pour le sénat ro-
main ; 2° deux collections de questions
et les réponses sur des doutes liturgi-
ques ; 3° des notes imprimées par ordre
de la congrégation des Rites ; 4° un recueil
de panégyriques , plusieurs fois réim-
primé.
* FORSKAL ( Pierre ) , naturaliste et
voyageur suédois, né en 1736, fit pa-
raître de bonne heure une dissertation
intitulée : Dubia de principiis philoso-
phiœ recentioris. Son ami Linnéc le re-
commanda à Frédéric l" , roi de Dane-
luarck. D'après les ordres de ce prince,
il accompagna Niebuhr dans un voyage
en Asie; il alla ensuite à Malte , et par-
vint en Egypte, où il fut pris en re-
montant le Nil, et dépouillépar les Arabes.
Ayant été attaqué de la peste, il mourut
à Djerim en Arabie le 11 juillet 1763.
Niebuhr rassembla ses papiers , et publia
les ouvrages suivans : 1° Descriptiones
aninmlium , avium , ampliibiorum , quœ
in itinere orientali obscrvavit Pet rus
Forskal illAunix, 1775 , in-4. 2" Flora
FOR • 387
œgyptiaco-arabica , sivc Descriptiones
plantarum , etc., 1775, in-4. 3° Icônes
rerum naturaliuni quas in itinere orien-
tali depingi curavit Forskal, 17 76,
in-4.
FORSTER ( Jean ) , théologien pro-
testant, né à Augsbourg en 1495, ami
de Reuchlin , de Mélanchthon et de Lu-
ther , enseigna l'hébreu avec réputation
à Witteraberg, et y mourut en 1556. On
a de lui un excellent Dictionnaire hé-
braïque, Bàle, 1564 , iu-fol. — Il est dif-
férent d'un autre Jean Forster, mort en
1613, (jui a laissé des Commentaires sur
VExode, Isaïe et Jérémie , 3 vol. in-4;
et De intcrpretatione Scripturarum ,
Wittemberg , 1608, in-4 .
* FORSTER ( Froben , en latin Fro-
bcnius), né le 30 août 1 709, à Konisgsfeld
en Bavière , entra dans l'ordre de Saint-
Benoît à l'âge de 19 ans, et fit profession
à Ratisbonne dans l'abbaye de Saint-Em-
meran , oîi il professa la philosophie de-
puis 1735 jusqu'à 1744, époque àlaquelle
il fut appelé à l'université de Saltzbourg
pour y remplir les mêmes fonctions. Il
revint trois ans après à Saint-Emmeran
pour y professer l'interprétation de l'E-
criture sainte; il fut élu prieur de ce
monastère en 17 50, et prince-abbé en
1 762. Après s'être distingué par la sagesse
de son administration, il mourut le 12
octobre 1791. Cet illustre prélat avait utie
érudition profonde; il aimait les sciences ,
et il s'efforça de les faire fleurir dans son
abbaye. Il a laissé 1° six Dissertations
latines sur divers sujets de philosophie et
de théologie; 2° une Dissertation en
allemand sur le concile tenu en 1763 à
Aschein , dans la Haute-Bavière. Elle a été
insérée dans le tome 1*"^ des Mémoires de
l'académie des Sciences de Bavière.
3° Une Edition d'Alcuin, sous ce titre ;
Beati Flacci Albini seu Âlcuini. . opéra. .
de nova collata , multis locis emcndala ,
et opusculis prinium repertis plurimunt
aucta , 2 parties, 1777 , 4 vol. in-fol.
Dom Catelinot, bénédictin de la con-
grégation deSaint- Vannes, avait aussi tra-
vaillé à une édition d'.\lcuin , de laquelle
dom Forster tira beaucoup de sermons
pour la sienne. ( Voyez Cateliïoï. ) Il y
388 FOR
joignit en outre soixante-onze lettres
inédites, venues d'Angleterre, beaucoup
de variantes et de corrections , fruits
d'immenses recherches laites dans les
bibliothèques d'Allemagne , un traité De
cursu et snltu lunœ bis-sexto ; un autre
De orthographia , et enfin un écrit inti-
tulé : Libellas adversus hœresin Fclicis
( urgcllensis ) ad abbates et monachos
Gothiœ , orné d'une préface du père Fog-
gini. [Voyez Félix, évêque d'Urgel ,
et FoGiNi , qui avait envoyé ce traité à
l'abbé d'Emmeran , d'après un manuscrit
du Vatican. )
FORSTER ( Valentin ) est auteur
d'une Histoire du droit , en latin , avec
les Vies des plus célèbres jurisconsul-
tes y jusqu'en 1680, temps oti il écri-
vait. — Nous avons eu dans le siècle der^
nier un autre Forster ( Nathanaël ) , qui
a donné une Bible hébraïque , sans points.
Oxfort, 1750, 2 vol. in-4 : édition es-
timée.
* FORSTER ( Jeau-Rheinold ) , célè-
bre naturaliste et voyageur prussien ,
issu d'une famille anglaise qui avait quitté
sa patrie, à cause des troubles politiques
du règne de Charles I , naquit à Dirs-
chaw , dans la Prusse Polonaise le 22 sep-
tembre 1729. Après avoir fait ses études
au Gymnase de Berlin et à l'université
de Halle , où il s'était surtout appliqué
à la connaissance des langues anciennes
et modernes, des langues orientales etde
la théologie , il exerça d'abord les fonc-
tions de prédicateur à Nassenhuben près
de Dantzick ; mais son revenu ne suffisant
pas à l'entretien d'une famille qui prenait
de l'accroissement , il accepta la proposi-
tion qu'on lui fit d'aller en Russie diriger
les nouvelles colonies de Saratoff. Le peu
d'avantages qu'il tirait de ce poste lui fit
prendre la résolution de se rendre à Lon-
dres en 1766, et il fut choisi en 1772 pour
accompagner comme naturaliste le capi-
taine Cook dans son second voyage au-
tour du monde. La dureté de son carac-
tère lui fit beaucoup d'ennemis , et lui
attira même des châtimens : car Cook fut
obligé de le mettre trois fois aux arrêts.
A son retour, il porta plainte contre lui, et
celui-ci fut «iicore puni par l'amiraulé
FOR
qui le priva d'une partie des avantages
qu'il pouvait espérer, et lui défendit
de faire la relation de son voyage. Tous
ces ennemis le décidèrent à quitter un
pays dont le séjour lui était devenu in-
supportable. Frédéric il, dont il avait fixé
l'attention, lui fournit les moyens de re-
venir ( 1780), le nomma professeur d'his-
toire naturelle, et inspecteur du jardin
botanique à Halle. Malgré le zèle qu'il
apportait à tout ce qui pouvait faire fleu-
rir cette université, il ne put gagner l'a-
mitié de ses confrères les professeurs,
que son caractère vif , irritable et suscep-
tible éloignait de lui. Un goût désor-
donné pour le jeu ajoutait encore à ses.
malheurs en épuisant toutes ses ressour-
ces. La mort de ses deux fils vint les ag-
graver encore. Il succomba à une longue
maladie le 9 décembre 1798. Peu de sa-
vans ont possédé des connaissances aussi
étendues que Forster ; il savait dix-sept
langues mortes et vivantes, entre autres,
le cophte et le samaritain ; et il joignait à
une lecture immense le talent de bien
observer. On a de lui 1° Introduction à
la minéralogie, Londres, 1768, in-8 , en
anglais , ainsi que les deux ouvrages sui-
vans. 2" Catalogue d'insectes anglais,
Warington , 17"0, in-8. 3° Catalogue
des animaux de l'Amérique anglaise ,
avec des instructions succinctes pour
rassembler , conserver et transporter
toutes sortes de curiosités naturelles ,
17 70, in-8. 4° Flora jémericœ septen-
trionalis ( or a Catalogue of tlie plants
of north Jmerica ), 1771 , in-8. b° Cha-
racteres generuni plaiitarum , quas in
itinerc ab insulas maris australis colle-
gerunt, descripserunt, delinearunt , an-
nis 1772-1775, J. R. Forster et G. Fors-
ter, Gottingue , 1776 , in-4. 6° Observa-
tions faites dans un voyage autour du
monde , sur la géographie physique ,
l'histoire naturelle et la philosophie mo^
raie, Londres, 17 78, in-4, en anglais,
trad. en allemand, en hollandais, en sué-
dois , et en français, par Pingeron , for-
mant le 5^ vol. de l'édit. française in-4
du 2* voyage de Cook. C'est un résumé
aussi instructif qu'intéressant de ce fa-
meux voyag". 7" Zoologice Indicé ra-
I
FOR
rioris spicilcgium , avec une traduction
en allemand ; Halle, 1781 et 1793, in-fol.
8" Tableau de V Angleterre poup l annce
17 80, continué jusqu'à l'année 1783,
iu-8 , en anglais : l'auteur le traduisit en
allemand. 9" Histoire des découvertes et
des voyages faits dans le Nord ( en alle-
mand) , Francfort-sur-l'Oder , 1784, in-8,
traduit en anglais : Londres, 1786 , et en
français , d'après la version anglaise , par
Broussonnet, Paris, 1788, in-8. \(i°En-
chiridion historiœ naturali inserviens,
1 788 , in-8. 1 i" Magasin des voyages les
plus récens , trad. de diverses langues ,
et enrichis de remarques , Halle , 1790-
98, 16 vol. in-8. 12" Observations et
vérités jointes à quelques principes qui
ont acquis un haut degré de vraisem.'
blance , ou Matériaux pour un nouvel
essai sur la théorie de la terre australe,
Leipsick, 1798 , in-8.
" FORSTER ( Jcan-George-Adara ) ,
fils du précédent, né à Nassenhuben ,
près de Dantzick, suivit son père en
Bussie , à Londres et dans son voyage au-
tour du monde avec Cook. Il vint à Paris
en 17 77 , et passa ensuite en Hollande et
en Allemagne , oii le landgrave de Hesse
lui offrit une chaire d'histoire naturelle à
Cassel, qu'il occupa jusqu'au moment où
le roi de Pologne lui en lit accepter une
à l'université de Wilna , où il reçut le
grade de docteur en médecine. Catherine
II , jalouse de toute espèce de gloire ,
avait voulu aussi, en 1787, faire exécu-
ter un nouveau voyage autour du monde ,
et avait nommé Forster historiographe
de cette expédition ; mais cette entre-
prise n'eut pas lieu, à cause de la guerre
contre les Turcs. Se trouvant sans em-
ploi , il se rendit en Allemagne , où il se
fit une brillante réputation par la publi-
cation de plusieurs mémoires sur l'his-
toire naturelle et la littérature. L'élec-
teur de Mayence le choisit pour son pre-
mier bibliothécaire, et il remplissait cet
emploi avec distinction , lorsque l'armée
française s'empara de cette ville en 1792.
Ami chaud des nouveautés , il embrassa
avec ardeur les principes de la révolu-
tion , et fut député à Paris , par les Ma-
jençois , pour solliciter leur réunion à la
FOR 38g
France. Pendant cette mission , qu'il avait
acceptée avec trop de légèreté, les Prus-
siens reprirent Mayence : ses manuscrits
et tout ce qu'il possédait tombèrent au
pouvoir du prince de Prusse : sa femme
même qu'il chérissait , séduite par un
Français , l'abandonna. Puni ainsi de son
ingratitude envers son bienfaiteur, et dé-
goûté de la révolution et des biens chi-
mériques qu'elle promettait , il se livra
à l'étude des langues orientales , dans le
but d'entreprendre un voyage à l'Indos-
tan et au Thibet ; mais sa santé altérée
par les secousses qu'il avait éprouvées,,
et un vice scorbutique dont il était at-
teint , le conduisirent au tombeau dans
le mois de mars 1794, à l'âge de 39 ans.
lia laissé 1° Foyage autour du monda
sur le vaisseau la Résolution , comman-
dé par le capitaine Cook dans les années
1772-1775, Londres, 1777 , 2vol. in-4 ,
en anglais. Il le traduisit en allemand avec
son père , et y fit diverses additions, Ber-
lin, 1779-80, 2 vol. in-4, et 17 84, 3vol.
in-8. Cette relation ne diffère pas pour
le fond d'avec celle de Cook; mais elle
est écrite avec plus de soin , et contient
quelques observations qui ne se trouvent
point dans la narration de ce célèbre na-
vigateur ; elles ne consistent la plupart
qu'en allusions amères dirigées contre
les vices des Européens, et même des
compagnons de voyage de l'auteur. Ces
sorties souvent répétées lui suscitèrent
des critiques , et , quoique très jeune , il
y répondit avec modération dans un écrit
intitulé : Réplique aux remarques de
M. fraie, sur la relation du dernier
voyage de Cook , publiée par M. Forster,
Londres , 1778 , in-8. 2° F lorulœ insula-
rum australium prodromus, Goltingen ,
17 86 , in-8. 3° Mélanges ou Essais sur
la géographie morale et naturelle , l'his-
toire naturelle et la philosophie usuelle.
Leipsick et Berlin, 1789-97, 6 vol. in 8,
en allemand. Les deux derniers vol. ont
été publiés après sa mort. 4° Tableau de
la partie inférieure du Rhin , du Rra-
ba/it , de la Flandre , de la Hollande ,
de l Angleterre, de la France en 1790,
Berlin, 1791-94 , 3 vol. in-8, Huber fit
paraître le dernier volume, auquel il
Sgo FOR
ajouta une notice sur l'auteur. U a été
trad. en hollandais, grand in-8, et en
français sous ce titre : Voyage philoso-
phique et pittoresque sur les rives du
Mhin , à Liège , dans la Flandre , le
£rabant, la Hollande, Paris, 1795, 2
vol. in-8, et Voyage philosophique et
pittoresque en Angleterre , suivi d'un
Essai sur thist. des arts dans la Grande-
Bretagne , 1796, in-8. Ce livre annonce
beaucoup d'instruction ; mais on regrette
que l'auteur se soit trop abandonné à sa
manie du sentiment , et , dans la partie
qui concerne l'Angleterre , à sa mauvaise
humeur contre les habitans de cette île.
5° Souvenirs de Vannée 1 790 , tableaux
historiques avec figures du célèbre Cho-
dowiecki; Berlin, 1793, Jn-8. 6° Ma-
gasin de Gottingen , concernant les
arts et la littérature , journal publié en
allemand en société avec Lichtenberg,
Gottingen , 1780-82. 7° Plusieurs traduc-
tions en allemand et divers mémoires ,
programmes , lettres et pamphlets poli-
tiques , relatifs à Mayence. 11 a aussi tra-
vaillé à la collection des voyages publiés
par Sprengel.
* FORSTER ( George ) , voyageur an-
glais, né vers 1750, était employé civil
au service de la compagnie des Indes-
Orientales, lorsqu'il conçut, sans doute
à la sollicitation de quelques-uns des
chefs de la compagnie , l'audacieux pro-
jet de revenir en Europe par le nord de
l'Inde et de la Perse ; il partit de Calcutta
le 23 mai 1782, après avoir pris toutes les
précautions dictées par la prudence : il
avait appris les langues des pays qu'il de^
vait parcourir, connaissait leurs mœurs,
et s'était vêtu du costume oriental. Il vint
par les pays de Cachemir et de Candahar ,
et au bout d'un an il était au midi de la
mer Caspienne. Il avait fait 900 lieues ,
environ 2 lieues et demie par jour. Il
continua sa route et au premier port, il
s'embarqua pour l'Angleterre et termina
heureusement ce voyage, malgré les dan-
gers sans nombre qu'il eut à courir. De
retour dans l'Inde , les directeurs de la
compagnie lui conférèrent le titre et les
fonctions d'ambassadeur à la cour des Ma-
rattcs orientaux àPiagpour dans le Bérar.
FOR
Il y mourut peu de temps après son ar-
rivée, en 1792. On a de lui 1" Jb'siai sur
la mythologie et les coutumes des In-
dous, brochure in-8 , qu'il publia à Lon-
dres en 1785, et qui eut beaucoup de
succès. 2° A Journey from Bengal to
england, Calcutta , 1790 , 2 vol. in-4. Le
second ne fut publié qu'après sa mort,
d'après les matériaux trouvés dans ses pa-
piers ; c'est la relation de son voyage. Elle
est curieuse et instructive , et a été tra-
duite en allemand , et en français , sous
le titre de Voyage du Bengale à Saint-
Pétersbourg , a travers l'es provinces
septentrionales de Vlnde, le Cachemire,
la Perse, la mer Caspienne, etc., suivi
de V Histoire des Rohyllahs et de celle
desSeiks, par feu George Forster, tra-
duit de Vanglais avec des additions,
etc. Paris, 1802, 3 vol. in-8, avec 2
cartes.
* FORSTER (Jean-Chrétien ) , naquit
le U décembre 1735 à Halle, et fut
professeur de philosophie dans l'univer-
sité de celte ville. Il y exerça ensuite dif-
férens emplois administratifs, et fut char-
gé , en 1791 , de l'inspection du jardin
botanique et économique. Il est auteur
des ouvrages suivans : 1° Disputatio de
dcliriis. Halle, 1759, in-4; 2° Compa-
ratio demonstrationis Cortesii pro exis-
tentia Dei , cum illa qua Ansclinus can-
tuariensis usus est , Berlin , 1770 , in-4.
Ses autres ouvrages sont en allemand :
3° Caractère des trois philosophes Leib-
nitz , lyolf et Baumgartev , 2' édition ,
Halle, 1765, in-8. Cet ouvrage est bien
écrit et conçu dans de bons principes ;
4° Introduction à la politique , d'après
les principes de Montesquieu , ibid. ,
1765, iu-8 ; 5° Essai d^ introduction à
V économie politique , Berlin , 1771 , in-8 ;
0° Aperçu de V histoire de ï université du
Halle , pendant le premier siècle de sa
fondation , ibid. , 1794 , in-8 , etc. , etc.
Foi-fiter est mort le 19 marà 1798. — Il y
a un autre Jean-Chrétien Forster , théo-
logien protestant , né en Thuringe vers
17 54 , mort en 1800 , qui a donné en al-
lemand quelques ouvrages ascétiques et
des sermons.
FORSTWER ( Christophe ) , né en
]Ft)R
) 598 , mourut en 1 667 , et publia , dès
l'âge de 19 ans , un ouvrage sur la poli-
tique. Après avoir étudié en Allemagne ,
il alla en Italie , où Jean Cornaro , doge
de Venise , le goûta tellement qu'il l'ho-
nora de l'ordre de St. -Marc. Forstner vint
ensuite en France , et retourna en Alle-
magne. Employé dans les négociations
de la paix de Munster , il fit paraître tant
de prudence et de capacité , que le comte
de Trautmansdorf, plénipotentiaire de
l'empereur, lui procura la qualité de
conseiller-aulique. Outre ses Hypomne-
mata politica, 1623, in-8 , on a de lui
1° De principatu Tiberii, 2° Notœ poli-
ticœ ad Taciium. Z° Un recueil de ses
Lettres sur la paix de Munster, etc., etc.
• FORSYTH (Guillaume), jardinier
distingué , né dans le comté d'Aberdeen
en Ecosse en 1737, se livra de bonne
heure à la pratique du jardinage et s'y
distingua bientôt. Il vint à Londres en
1763, et, peu après, travailla sous le
célèbre Miller^ jardinier du jardin des
apothicaires à Chelsea , et lui succéda en
1771. Le roi le nomma en 1784 surinten-
dant de ses jardins royaux de Kensington
et de St. -James. C'est alors que le talent
de Forsyth encouragé par une telle dis-
tinction, prit un nouvel essor. Il s'adonna
particulièrement à l'étude des arbres frui-
tiers et forestiers, et s' occupa spécialement
des remèdes à apporter aux maladies aux-
quelles les végétaux peuvent être sujets.
Son travail fut couronné par le plus grand
succès et lui fit découvrir une composi-
tion qui répondait à ses vues. L'utilité de
celte découverte fut reconnue générale-
ment et le roi en récompensa généreuse-
ment l'auteur. Forsyth est mort le 25
juillet 1804. 11 était membre de la société
des antiquaires et d'autres corps savans.
On lui doit 1° Observations sur les ma-
ladies , les défauts et les accidens aux-
quels les arbres à fruit et les arbres fo-
restiers sont sujets, Londres , 1 791, in-8.
'2° Traite' de la culture des arbres frui-
tiers. Londres, 1802, in-4. traduit en
français , avec des notes par Pictet-Mallet.
Genève et Paris, 1803, in-8. Ce livre,
qui contient le résultat de tous ses tra-
vaux , a eu trois édilioas en peu de temps .
FOR 3gt
FORT (François Lk), d'une famille
patricienne de Genève , naquit en cette
ville en 1656. Une forte inclination pour
les armes le fit quitter la maison pater-
nelle dès l'âge de 14 ans. Après avoir
servi en Hollande comme volontaire , il
eut une lieutenance dans le régiment
d'un colonel allemand au service du czar.
Le Fort était hardi et entreprenant ; il
parlait assez bien 4 ou 5 langues. Il n'é-
tait point savant ; mais il avait beaucoup
lu, sans avoir dans un degré égal le ta-
lent de digérer ses lectures. Pierre le
Grand , qui avait conçu le dessein de ré-
former sa nation, le vit et lui donna sa
confiance. En 1696 , le Fort eut la con-
duite du siège d'Azof. Il y montra tant
d'habileté dans l'art de la guerre, que
le czar le mit à la tète de ses troupes de
terre et de mer, et le fit son premier mi-
nistre d'état , avec la qualité d'ambassa-
deur et de plénipotentiaire dans toutes
les cours étrangères. Le Fort eut part à
tous les changemens que Pierre I fit dans
son empire. Il mourut à Moscou en 1699.
Le czar , pénétré de sa perte , lui fit des
obsèques magnifiques , et y assista.
FORT ( Le ). Voyez Morisière.
* FORTE ou FoRTio (Ange), méde-
cin vénitien du 16* siècle, est connu
par plusieurs ouvrages sur l'astrologie
judiciaire , dont il s'est montré pendant
toute sa vie le partisan le plus chaud.
Parmi ses ouvrages , nous citerons ; De
mirabilibus humanœ vitœ naturalia
Fundamenta , Venise , 1 543, 1 556, in-8;
et Veritatis redivivœ militia , ibid. y
1541 , in-8.
* FORTEBRACCIO ( Nicolas), par-
tisan ou condottiere italien du 1 5* siècle,
successeur du fameux Braecio de Mon-
tone , son oncle , combattit tantôt sou&
une bannière, tantôt sous une autre;
ainsi , il servit les Florentins contre Vol^
terre et contre Lucques en 1429 , prit du
service sous le pape Eugène IV , déclara
ensuite la guerre à ce souverain pontife,^
et avait déjà eonquis la plus grande par-
tie de ses états , lorsqu'il mourut en 1 43.5.
des suites d'une blessure qu'il avait re-
çue peu de temps auparavant à Capo-di-
Monte.
393 FOR
FORTESCUE ( Jean }, lord , chef de
justice et grand chancelier d'Angleterre,
80US le règne de Henri VI, naquit dans
le 15® siècle à Wear-Giflord dans le De-
vonshire. Son nom est très connu en
Angleterre; sa réputation de juriscon-
sulte repose sur plusieurs ouvrages esti-
més qui ont pour objet la Loi Natufelle ,
et les Lois de l'Angleterre. Le plus re-
marquable de ses écrits est celui qui a
pour titre : De laudibus legiim Angliœ ,
traduit du latin en anglais en 17 37 , avec
des notes de Selden et de nombreuses
remarques sur les Antiquités , l'Histoire
et les Lois tT Angleterre.
FORTIGUERRA (Nicolas), cardinal,
natif de Pistoie , rendit de grands services
aux papes Eugène IV , Nicolas V , Pie II
et Paul II. Il commanda l'armée du saint-
Siége avec succès , et mourut à Viterbe
en 1473 , à 55 ans.
FORTIGUERRA (Nicolas), savant
prélat de la même famille que le précé-
dent, mourut en 1735, à 61 ans. On a
de lui une version de Te'retice en vers
italiens , Urbin, 1736 , fig., avec le texte
latin. Sa maison était le rendez-vous de
tout ce que Rome possédait alors de plus
excellens littérateurs , et leurs conversa-
tions ne roulaient que sur la littérature.
Un jour on disputait sur la prééminence
entre le Tasse et l'Arioste : l'un et l'autre
trouvèrent des partisans dans cette as-
semblée. Fortiguerra était pour le Tasse ;
et voulant prouver combien il était facile,
avec de l'imagination , de réussir , au
moins jusqu'à un certain degré , dans le
genre de l'Arioste , il composa un poème
en 30 chants, qui fut commencé et fini
en très peu de temps. C'est le Ricciar-
detto publié en 1738, in-4 : ouvrage
héroïco-burlesque , oîi l'auteur , à l'exem-
ple de l'Arioste , s'est livré à tout ce que
son imagination lui présentait. Il y règne
un désordre et une bizarrerie qui jettent
le lecteur dans une contention d'esprit
continuelle , et qui en rendraient la lec-
ture insoutenable , sans les plaisanteries
et la versification aisée qu'il respire : la
pudeur, la bienséance et la religion y
sont blessées tour à tour , de l'aveu même
du traducteur. On l'a imité en vers fran-
FOR
Çais en 1766, 2 vol. in-8 : l'auteur (M.
du Mourrier), chevalier de St.-Louis ,
mourut de consomption en 1769, soit
que son travail eût occasioné sa maladie,
soit que sa maladie eût déterminé son
travail. Cet ouvrage empêcha Fortiguerra
d'avoir la pourpre que lui destinait Clé-
ment XII.
* FORTIS (Jean -Baptiste Albert,
l'abbé ) , littérateur italien , né à Vicence
en 1740 , entra fort jeune dans l'ordre de
St. - Augustin ; mais , ennemi de toute
espèce de joug , il en sortit bientôt , et fit
plusieurs voyages , où il prit une manière
hardie de penser qui le fit nommer par
plusieurs de ses compatriotes le voyageur
philosophe. Pendant sa carrière , Fortis
fut tour à tour physicien, naturaliste,
poète], journaliste , bibliographe et même
érudil ; mais son caractère ardent et son
imagination bizarre ne lui permirent ja-
mais de se fixer. En 1801 , il fut nommé
préfet de la riche bibliothèque de Bolo-
gne, où il mourut le 21 octobre 1803.
On a de lui 1° Saggio d'osser^azioni so-
pra l'isola di Cherso ed Osero, Venise,
1771, in-4 . 2" Fiaggio in Dalmazia,
Venise, 1774, 2 vol. in-4, fig. et cart.
Il a été traduit en anglais, Londres, 1778,
in-4; et en français, Berne, 1778, 2
vol. in-18. On convient en général que
l'imagination de l'auteur l'a entraîné un
peu loin , et qu'il a accordé trop de con-
fiance à des autorités suspectes. On peut
consulter l'excellente dissertation intitu-
lée Osservazioni sopra divcrsi pezzi del
viaggio in Dalmazia , Venise , 1776,
in-4. 3° Voyage mine'ralogique dans la
Calabre et la Fouille, ou Lettres au
comte Thomas de Basscgli , patricien
de Raguse , 1788, in-8. 4" Mémoires
pour servir à Vhistoire naturelle , et
principalement à Voryctographie de FI-
ialie, Paris, 1802, 2 vol. in-8. 5° Beau-
coup de dissertations disséminées dans
les mémoires de diverses académies dont
il était membre , ou publiées séparément.
Il a travaillé long-temps au journal de
Grisellini , qui traitait principalement
d'agriculture, d'arts et de commerce, et à
VEuropa letteraria , ouvrage périodique ,
publié à Venijie par M™® Caminer Tura.
FOR
• FORTIS ( Aloys ) , 20« général des
jésuites , naquit à Vérone le 26 février
1748 , et fut reçu dans la compagnie de
Jésus dès l'âge de 14 ans. Ses premiers
progrès dans la vertu et les brillans suc-
cès qui couronnèrent ses études de litté-
rature et de philosophie annoncèrent ce
qu'il serait un jour. Il enseignait la rhé-
torique au collège de Ferrare quand Clé-
ment XIV supprima la compagnie ; résolu
cependant de consacrer sa vie entière au
service de l'Eglise , il rentra dans sa pa-
trie pour y faire ses études théologiques.
Malgré le grand nombre de savans qui se
trouvaient alors à Vérone , on lui donna
la chaire de philosophie au lycée de cette
ville; il justifia l'attente publique, s'y fit
même une grande réputation par le Pvo-
dromiis ad universam metaphysicam
qu'il y publia. Ce fut dans la même ville
et vers la même époque, qu'il entreprit et
acheva conjointement avec le chanoine
Séraphin Volta, l'ouvrage connu sous le
titre de : Illtistrazione de Pesci impietriti
dcl monte Bolca in Ferona. Comme la
compagnie subsistait toujours en Russie ,
le Père Fortis se fit inscrire de nouveau
au nombre de ses membres , et , sans quit-
ter l'Italie, alla rejoindre à Parme ceux
de ses frères qui sous la protection du
duc Ferdinand venaient d'y rouvrir le pen-
sionnat des nobles : il y fut plusieurs an-
nées professeur de littérature. Les applau-
dissemens avec lesquels furent accueillies
dans plusieurs réunions de savans ses poé-
sies italiennes, grecques et latines ont fait
regretter que par humilité, sur la fin de
ses jours, il ait livré aux flammes tout ce
qui lui restait d'écrits. Dès que la com-
pagnie de Jésus fut rétablie dans le royau-
me de Naples ( 1 804 ) , il s'y rendit avec
empressement, mais à peine avait-il pu
organiser les classes publiques du collège
de cette ville , que les circonstances po-
litiques le forcèrent de se retirer à Or-
viète et puis à Vérone, d'où il se rendit à
Rome à l'époque où Pie VII rétablit la
compagnie par tout l'univers catholique.
Sa Sainteté le nomma examinateur des
évêques, et le général Brzozowski, ré-
sidant toujours en Russie, le fit son vi-
caire-général en Italie. Elu général de
V.
FOR 393
son ordre (1820), il se fit estimer au
dehors et chérir de ses inférieurs , retra-
çant en lui-même toutes les vertus qu'il
désirait voir reluire dans les autres. Ni les
travaux de sa charge , ni ses dernières in-
firmités ne diminuèrent jamais en lui l'es-
prit de recueillement et de prière , ni ne
l'empêchèrent d'observer la vie commu-
ne. Il mourut à Rome , le 27 janvier 1 829.
FORTIUS , ou plutôt Sterk ( Joa-
chim ) , philosophe et mathématicien ,
plus connu sous le nom de Fortius Rin-
gelbergius , né à Anvers vers l'an 1499 ,
se fit aimer d'Erasme , d'Oporin , d'Hy -
périus et de plusieurs autres savans de
son temps. On le mit assez jeune à la cour
de l'empereur Maximilien I , où il resta
jusqu'à l'âge de 1 7 ans ; de retour dans
son pays , il fit des progrès étonnans dans
l'étude des belles-lettres et de la philoso-
phie. Il employa ses heures de récréation
à apprendre à dessiner et à graver. Vers
l'an 1529 , il se mit à parcourir les prin-
cipales villes de la France. Arrivé dans
une ville , il se mettait aussitôt à ensei-
gner quelque science , dont le cours n'é-
tait ordinairement que d'un mois. Il ne
fut pas possible de le retenir plus long-
temps dans aucune ville. Fortins était
passionné pour les langues anciennes. On
l'entendait souvent dire qu'iZ préférait
un mot de la pure laùnitéà un écu d'or.
Aucune science n'eut pour lui tant d'at-
trait que l'astronomie ; mais , comme
presque tous les astronomes de son siècle,
il donna dans les chimères de l'astrologie
judiciaire. Il mourut vers 1536. Ses ou-
vrages ont été rassemblés sous le titre de
Joachimi Fortii Ringelbergii lucubra-
tiones. Lyon , 1556 , iu-8. On y dislingue
un traité De Rationc studii , Anvers ,
1 529 , dont Thomas Erpénius a donné
une édition estimée , Leyde ,. 1C22. Cet
ouvrage renferme des avis très judicieux,
tant pour les maîtres que pour les éco-
liers : mais ils sont balancés par des con-
seils qui sentent le pédantisme. Comme
astrologue , il a soin d'y dresser l'horos-
cope de son livre.
FORTUNAT. Foyez Venance For-
TUNAT.
FORTUNATIANUS. Foyez Curius.
25..
394 FOS .
* FORTUNIO (AugusUn) , religieux
de l'ordre des camaldules , naquit dans
le 1 G" siècle à Fiesole dar^s la Toscane, de
parens originaires de Florence, qu'il per-
dit de bonne heure. Placé dans le collège
de Pise aux frais du grand-duc , il fit de
très grands progrès dans les langues et la
littérature ancienne. Après avoir fait ses
vœux dans le couvent des Saints-Anges à
Florence, il se livra à l'exercice de ses
devoirs, à l'enseignement des langues et
à la recherche des nionumens qui pou-
vaient intéresser son ordre. Il mourut
dans un âge peu avancé à Florence vers
1 595. On a de ce savant religieux les ou-
vrages suivans : i° Historia camalclulen-
sium, Florence, première partie 1575,
deuxième partie, 1579, in -4 : cette
histoire dont Gui Grandi fait l'éloge sous
le rapport de l'érudition , mais non sous
celui de l'exactitude chronologique, est
inférieure à celle des PP. Mittarelli et Cos-
ladoni ; 2" Apologia Augustini Floren-
tini pro libris suis hisloriarum camal-
dulensium, ibid., 1 592 , in-12 ; c'est une
réponse au Père Luc ermite, qui avait at-
taqué plusieurs récits de faits miriàçuleux
racontés dans V Histoire de Fortunio ;
3" Cronichelta del monte san Savino di
Toscana, ibid., 1583, in-4, etc.; 4° Li-
ber carminum , ibid., 1591, in-8 ; ce
sont des poésies pieuses et sur des sujets
de dévotion. On a encore de Fortunio des
opuscules moins intéressans.
FOSCARAUI ( Gilles ) , dominicain
bolonais , mort évêque de Modène en
1564 , à 53 ans, fut un des théologiens
choisis pour travailler au Catéchisme du
concile de Trente. C'était un prélat sa-
vant, pieux et charitable. Il trouva dans
sa frugalité et sa modestie un fonds suffi-
sant pour subvenir aux nécessités des
pauvres , pour fonder une maison des
Filles-Repenties, et pour embellir son
église et le palais épiscopal. Dans un
temps de calamité , il vendit jusqu'à sa
crosse et son anneau. ( On lui attribue un
livre intitulé: Ordo judiciarius in fora
erclesiastico. )
FOSCARI (François), d'une illustre
famille de Veni.se , dont il augmenta en-
core lelu.stre. Il fut en 1415 procurateur
FOS
de St.-Marc , et élu doge en 1423^, après
avoir gagné ou acheté les suffrages. Vou-
lant se rendre redoutable à ses voisins ,
il fit la guerre , et soumit à la république
le Bressan , le Rergamasque , Crémone ,
Ravenneet d'autres places. Ces conquêtes
coûtèrent beaucoup aux Vénitiens , qui
murmuraient hautement contre lui ; il
les apaisa en offrant sa démission , qui ne
fut pas acceptée. Ses ennemis suscitèrent
diverses affaires à son fils, qui fut relégué
d'abord à Trévise , et ensuite deux fois à
la Canée. Le dernier exil accabla de dou-
leur le malheureux doge , et il fut hors
d'état de gouverner les affaires de la ré-
publique. Il fut déposé à l'Age de 84 ans ,
en 1457, et Pascal Maripert mis à sa
place. Il mourut deux jours après. Son
fils était mort lui-même dahs sa prison ;
on l'avait accusé d'avoir assa.ssiné un sé-
nateur ; mais le véritable meurtrier dé-
clara , au lit de la mort , que Foscari était
innocent. Il n'était plus temps : l'infor-
tuné Foscari avait péri , victime de la ca-
lomnie.
' FOSCARI ( François ) , sénateur vé-
nitien , célèbre par ses missions diploma-
tiques , ses connaissances et ses travaux ,
mort le 7 décembre 1790, a publié Thé-
saurus antiquitatum sacrarum , com-
plcctens selcctissima clarissimorum vi-
rorum opuscula , in quibus veterum ffe-
brœorum, mores, leges, instituta, ritus
sacri et civiles illustraniur, Venise ,
1744-1769,34 vol. in-fol. Il fut aidé dans
cette immense collection par Ugolini. Il
a publié aussi Bibliotheca veterum pa-
trum , antiquorum, scriptorum ecclesias-
ticorum gr œco-latina, Yenise , 14 vol.
in-fol.; et les OEuvres de Théophylacte ,
archevêque de Bulgarie, Venise, 1763,
4 vol. in-fol.
FOSCARINI ( Michel ) , sénateur vé-
nitien , remplit différens postes dans sa
république, et mourut en 1G92, à 64
ans. Il a continué l'Histoire de Fenise ,
par Nani , 169G, in-4, qui fait le tome
1 0* de la Collection des historiens de
Venise , 1718, in-4 : collection a.ssez mal'
imprimée, mais dans laquelle on n'a fait
entrer que de bons auteurs. Foscarini
avait écrit par ordre de la république,
FOS
et il est regardé comme un historien qui
9 eu de bons documens. On trouve deux
de ses Nouvelles dans celles de Gli Aca-
demici incogniti , 1651 , in-4.
• FOSCARTNI (Marc), de la même
famille que le précédent , fut encore plus
illustre et comme politique et comme
littérateur. Né en 1G95 , il se distingua
dès sa jeunesse par ses succès , ses con-
naissances et ses mœurs. Il entra de bonne
heure dans les charges publiques , et fut
bientôt chevalier et procurateur de St.-
Marc. Envoyé en ambassade dans plu-
sieurs cours de l'Europe, il revint à Venise
où il fut chargé de la direction des mo-
numens publics , puis de la bibliothèque
deSt.-Marc. En 1762 les suffrages de ses
compatriotes l'appelèrent à la suprême
dignité de doge. Il mourut l'année sui-
vante, 10 mois après son élection. On a
de lui le premier volume d'une Histoire
littéraire de Venise, Padoue, 1752,
grand in-fol. ; un Traité de V éloquence
et des mémoires secrets pour servir à
l'histoire de V empereur Charles FI. Tous
ces ouvrages sont écrits en italien.
FOSCO (Placide), italien, médecin
de Pie V , se distingua par sa science et
par sa vertu. Il mourut à Rome en 1574 ,
âgé de 64 ans. On a de lui un traité : De
usu et ahusu Astrologiœ in arte medica.
L'astrologie et l'astronomie étaient alors
synonymes , et il est très vraisemblable
que cette dernière science n'est point
inutile aux médecins. « Je voudrais , dit
M M. de la Lande, que les médecins con-
» sultassent au moins l'expérience à cet
M égard , et qu'ils examinassent si les
» crises et les paroxismes des maladies
» n'ont pas quelques correspondances
» avec les situations de la lune par rap-
» port à l'équateur , aux sisigées et aux
» apsides. Plusieurs médecins m'en ont
« paru persuadés. »
* FOSCOLO ( Ugo ) , l'un des grands
poètes et littt'rateurs de l'Italie , naquit
dans l'île de Zante en 1777. Il quitta de
bonne heure les îles Ioniennes , se rendit
à Venise , erra pendant quelque temps
sans dessein et sans but sur les bords de
r.\.driatique et dans quelques villes de
l'Italie , et s'arrêta eu&n î^ Padouë oii il
FOS 395
suivit le cours de littérature deCésarotti.
A l'école de ce professeur célèbre , il
puisa cette profonde admiration qu'il
conserva toujours pour les classiques
grecs , latins et italiens. Il écrivit lui-
même , fit des vers tendres où régnait
une douce harmonie, puis il chanta la
liberté, enfin il rechercha la gloire. Il la
rechercha de toutes les manières, dans
tous les états ; tour k tour poète, orateur ,
professeur, il fut aussi tantôt philosophe,
tantôt homme à la mode ; quelquefois il
affectait le stoïcisme le plus sévère , d'au-
tres fois il sacrifiait aux plaisirs. Foscolo
embrassa la carrière dramatique; il débuta
à Venise par sa tragédie de Thyesle qu'il
jugea plus sévèrement et beaucoup mieux
que ses panégyristes. Son imagination
mobile se porta ensuite sur un autre objet.
Après avoir lu Werther , il voulut se faire
connaître lui-même , se peindre dans la
position d'un amant désespéré. Ce roman
qu'il intitula: Dernières lettres de Jacopo
Ortis, est une imitation un peu servile
de Goethe : mais il est plein de feu ; ses
allusions aux événemens dont sa patrie a
été le théâtre , et les souvenirs relatifs k
quelques-uns de ses contemporains le
font lire avec entraînement. Disons, pour
l'honneur de la morale, qu'il n'est pas
bien de voir un beau talent se consacrer
k la peinture d'une passion qui conduit
au suicide , et que c'est enflammer les
lecteurs d'un sentiment qui peut deve-
nir criminel , quand bien même il n'a pas
pour résultat une mort violente. Dans un
discours prononcé au congrès de Lyon
en 1801 , Foscolo fit l'éloge des républi-
ques italiennes, et ce discours fut un
morceau d'éloquence. Déjk connu comme
poète , comme romancier , comme ora-
teur, il voulut avoir la réputation d'é-
rudit : c'est dans ce but qu'il traduisit en
italien le petit poème de Callimaque sur la
chevelure de Bérénice , que déjk Catulle
avait mis en latin ; il y ajouta un long com-
mentaire hérissé de notes et de citations
d'auteurs qu^il n'avait pas lus. Cette fois-
ci , il échoua dans sa tentative , et lui-
même plaisantait de sa science d'emprunt.
Nommé k l'université de Pavie professeur
de belles-lettres » il succéda k Monti , dé-»
396 FOS
buta par un discours sur V origine et les
règles fondamentales de la littérature ,
et 'développa les théories philosophiques
de Locke et de Condillac. Ses fonctions
ne l'empêchaient pas de se livrer à de
nouveaux travaux poétiques : il entreprit
la traduction d'Homère en vers sciolti;
Monti avait entrepris la même tâche ; les
deux poètes firent en même temps le pre-
mier chant ; le public applaudit égale-
ment à leurs efforts ; il admira la noblesse
et l'harmonie de l'un, la force et la con-
cision de l'autre. Foscolo interrompit sa
carrière littéraire pour embrasser celle
des armes , s'attacha au général Thuillier
( 1805) , se rendit à Calais pour prendre
part à l'expédition que Buonaparte mé-
ditait contre l'Angleterre. De retour en
Italie (1808) , il publia une belle édition
des ouvrages classiques du prince Rai-
mond MontecucuUi avec des notes et des
additions importantes : il en a paru une
édition plus complète en 1821 à Turin,
par les soins de M. Grassi. A Milan Foscolo
donna la tragédie à'Ajax qui fut vive-
ment attaquée sous le rapport politique
et sous le l'apport littéraire : il n'était
plus alors l'ami de Monti , et il essuyait
les vengeances des écrivains qu'il avait
maltraités lui-même. Dénoncé par ses en-
nemis , il chercha un asile dans la patrie
du Dante et de Machiavel , à Florence, où
il donna sa Ricciarda , jouée sur plu-
sieurs théâtres d'Italie , imprimée à Lon-
dres et traduite en français -. cette pièce
est la seule de Foscolo qui se trouve dans
la collection des chefs-d'œuvre des théâ-
tres étrangers. Redevenu militaire après
la chute de Buonaparte , il fut aide-de-
camp du général Pino. Mais ses opinions
n'étaient pas d'accord avec le nouvel or-
dre de choses : il fut obligé de quitter sa
patrie ; il passa ses dernières années à
Londres. En Angleterre , il publia la tra-
duction du voyage sentimental de Sterne
sous le nom de Didimo Chinexico, fit
quelques articles dans les journaux , ou-
vrit à plusieurs reprises un cours de lit-
térature italienne. Il est mort à Londres
le 11 septembre 1827. Parmi les écrits
qu'il a publiés à Londres, on compte les
JSssais sur Pe'trarque , une savante In-
FOS
troduction aux Nouvelles de Boccace ,
un travail important sur la divine comé-
die du Dante dont le premier volume
seul a paru. VAlcée, les Gracej, quelques
odes, plusieurs sonnets, sa pièce intitu-
lée Sepolcri sont des morceaux poétiques
estimés. Foscolo avait un beau talent,
mais des passions et des mœurs qui firent
son malheur; et il dut se reprocher amè-
rement les désordres de sa vie privée.
Les lettres de Jacobo Ortis ont été tra-
duites par M. de S. (Senonnes), 1814, 2
vol. in-12 : cette traduction a paru en
1814 sous le titre du Proscrit ou lettres
de Jacobo Ortis, et en 1830 sous celui
d'Amour et suicide ou le Werther de
P^enise. Les mêmes lettres ont été tra-
duites par M. Truchon, Paris, 1819, et
par un anonyme, Lyon, 1823.
* FOSSATI (Jean-François) , bénédic-
tin de la congrégation du Mont Olivet ,
né à Milan vers la fin du 16^ siècle, fut
un excellent prédicateur et devint évê-
que du diocèse de Tortone qu'il adminis-
tra avec sagesse jusqu'en 1653, époque
où il mourut. On a de ce prélat : 1° Oru-
zione funèbre délia morte del ser. Cosi-
mo II Medici , gran-duca di Toscana ,
Sienne, 1620, in-4; 2° Mewionc istori-
che délie guerre d'Italia dcl secoh pré-
sente dall anno 1600, Milan , 1640, in-4,
Bologne, 1641 et 1645, in-8.
* FOSSATI (George), architecte ,
graveur et imprimeur , né à Morco près
de Lugano, au commencement du 18«
siècle , s'est fait une réputation très éten-
due par le grand nombre d'ouvrage* sor- ,
tis de son burin. On a de lui 1° un Re-
cueil de diverses fables dessinées et gra-
vées par lui , en italien et en français, a
"Venise, 1744, 6 parties en 3 vol. petit I
in-fol. fig. en couleur. Les gravures font
le principal mérite de ce recueil très re-
cherché des curieux. 2° P^ita dcgli archi-
tetti del signor Felibien , tradotta dcl
francese , 1755, in-8. fig. On a encore
de lui, comme graveur, un recueil des
édifices de Palladio , les plans de Ve-
nise , Bergame , Genève , et une carte
du lac de Lugano.
FOSSE ( Charles de La ) , fils d'un or-
fèvre, naquit à Paris en 1640. Il entra
1
FOS
dans l'école de Le Brun, premier peintre
du roi , et l'imita si bien , que le maître
ne dédaigna pas d'employer son élève
dans ses grands ouvrages. Le voyage d'I-
talie le perfectionna , et à son retour il
peignit le dôme de l'hôtel royal des Inva -
lides. Il fut regardé comme un des pre-
miers coloristes. Il excellait dans la fres-
que, dans le paysage, et surtout dans
l'histoire. Louis XIV lui accorda une pen-
sion de mille écus. Il fut reçu de l'acadé-
mie de peinture , et en devint recteur et
professeur. Il mourut à Paris en 17 IG. Sa
réputation l'avait fait appeler en Angle-
terre, où milord Montaigu l'occupa à
décorer sa maison de Londres. Les pein-
tures de ce grand artiste furent admirées
de tous les connaisseurs. Le roi Guillau-
me III étant venu les voir , proposa à La
Fosse un établissement très avantageux ;
mais, vers ce même temps, le célèbre
Mansard lui écrivit de revenir en France ,
oîi il était désiré. — H y a un graveur cé-
lèbre du même nom ( Jean-Baptiste-Jo-
seph ) , né à Paris en 1721 , auquel on
doit les gravures du Voyage de Naples
et de Sicile , par l'abbé de St. -Non, qui
excellait surtout à saisir le maintien et la
physionomie de ses modèles.
FOSSE ( Antoine de La ), sieur d'Au-
bigny,'neveu du précédent, naqtiit à Pa-
ris en 1653 d'un orfèvre, comme son
oncle. Il fut successivement secrétaii-e du
marquis de Créqui et du duc d'Aumont.
Lorsque le marquis de Créqui fut tué à
la bataille de Luzara , il fut chargé de
porter à Paris le cœur du jeune héros,
et il chanta sa mort dans une pièce de
vers que nous avons encore. La Fosse
parlait et écrivaitpurement l'italien. Une
ode qu'il fit en cette langue lui mérita une
place dans l'académie des Apatistes de
Florence. H y prononça pour remercîraent
un discours en prose sur ce sujet singu-
lier : Q^uels yeux sont les plus beaux ,
des yeux bleus ou des noirs ? Il avait
encore plus detaleut pour la poésie fran-
çaise. Ses vers sont extrêmement travail-
lés : il avouait lui-même que l'expression
lui coûtait plus que la pensée. On a de
lui plusieurs tragédiens, dont Manlius
est la meilleure; et une Traduction ^ ou
FOS 397
plutôt une Paraphrase en vers français ,
des Odes d'Auacréon. On trouve après
cette version plusieurs autres pièces de
poésie. 11 mourut en 1708 , à 65 ans. Son
Théâtre est en2vol. in-12, Paris, 1747.
Il en a paru une autre édition en 1755 ,
qu'on a grossie , par je ne sais quel motif,
de la Gabinie de Bruéys , et du Distrait
de Regnard.
FOSSÉ ( du ). Voyez Thomas.
* POSTER (Samuel) , mathématicien
anglais, né à la fin du 16* ou au com-
mencement du 17' siècle, étudia à l'uni-
versité de Cambridge , les mathématiques
avec une ardeur extraordinaire : aussi
obtint-il de grands succès : il fut nommé
en 1636 professeur d'astronomie à Gres-
ham. Après avoir quitté cette place au
bout de dix mois , il la reprit en 1641 et
mourut en 1652, laissant les ouvrages
suivans : 1" Traité de gnomonique, 1638,
in-8 , c'est un ouvrage estimé. 2° OEu-
ures posthumes , 1652, in-4 ; Z° Mélan-
ges, ou Veillées mathématiques ( en
latin et en anglais) , 1659, in-fol. Il in-
venta et perfectionna plusieurs instru-
mens de mathématiques et d'optique : il
il avait fait des observations d'éclipsés.
Foster était de l'association savante qui
précéda la société royale de Londres.
* FOSTER (Jean ) , savant philologue
anglais, né à Windsor en 1731 , fit ses
premières études à Eton et à l'univer-
sité de Cambridge. Adjoint au docteur
Edouard Barnard , célèbre maître de l'é-
cole d'Eton , il lui succéda en 1765 et
devint chanoine de Windsor en 1772. Sa
santé altérée par ses travaux le força d'al-
ler aux eaux de Spa , où il mourut en
1773. Foster n'a laissé qu'un ouvrage;
mais il prouve sa vaste érudition. Il a
pour titre : Essai sur la nature diffé-
rente de Vaccent et de la quantité, avec
leur usage et leur application dans la
prononciation des langues anglaise , la-
tine et grecque ; contenant un précis et
une explication des tons anciens, et une
défense de V accentuation moderne , con-
tre les objections d'Isaac Vossius , Hen-
ninius , Sarpedonius , le docteur Gally
et autres auteurs, Cambridge, 1763,
in-8 (en anglais). On a consei-vé avec
398
FOT
soin les manuscrits de plusieurs de ses
exercices de collège.
POSTER ( Jacques ) , minisire an-
glais , non-conformiste , né à Excester en
1697 , mourut le 5 novembre 1753 , après
avoir publié, 1" Y Excellence de la Ré-
vélation chrétienne contre Tiddal ,1731.
2" Discours sur la Religion naturelle et
les vertus sociales^ 2 vol. in-4. 3° Des
Sermons. 4° Des Traités de controverse.
* FO-THOU-TCHHIING, célèbre Sa-
manéen, qui contribua puissamment à
rétablissement de la religion de Bouddah
à la Chine , naquit dans la contrée que
les Chinois nomment Thian-Tchou ( Hin-
doustau ) , d'une famille qui se nommait
Fe : après s'être livré sérieusement à l'é-
tude des sciences occultes , il vint s'éta-
blir l'an 310àLo-Yang, maintenant Ho-
nan , qui était la résidence des rois Tchao,
princes Tartares qui gouvernèrent le nord
et l'occident de la Chine de l'an 308 à l'an
329. C'est à la cour de ces rois qu'il fit
usage de sa science mystérieuse : il par-
vint à faire croire aux esprits crédules de
cette province qu'il exerçait un grand
pouvoir sur la nature: qu'il entretenaitun
commerce avec les esprits : qu'il avait à
sa disposition les bons et les mauvais gé-
nies : qu'il avait déjà vécu plus de cent
ans, qu'il se nourrissait d'air, etc ; qu'il
avait au côté une ouverture d'où jaillis-
sait pendant la nuit des torrens de flam-
mes, et d'oii il faisait souvent sortir son
cœur et ses entrailles qu'il lavait parfois
à la rivière : le son des cloches était pour
lui un pronostic d'où il tirait l'indication
de l'avenir ; les Saducéens disent qu'il ne
se trompa jamais. Après avoir cherché
dans le désert un refuge contre les Chinois
qui reprirent Lo-Yang , il revint cepen-
dant auprès du généralissime auquel il fut
très utile : présenté à l'empereur Chi-Le ,
il fit devant lui des prodiges , disent
les partisans 'de Bouddah, et c'est ainsi
que s'établit en Chine le Bouddisme. On
croit qu'il mourut en 349, après avoir fait
un grand nombre de disciples et fondé
plusieurs monastères.
' FOÏHERGÏLL (Jean), célèbre mé-
decin anglais, né le 8 mars 1712 à Car-
lend près de Richemont dans le comté
FOU
d'York, et mort le 26 décembre 1780, culti-
va l'histoire naturelle et la botanique avec
succès , mais il se rendit surtout recom-
mandable par sa bienfaisance. On grava
sur son tombeau : « Ci-gît le Docteur Fo-
« thergill, qui dépensa 200 mille guinées
» pour le soulagement des malheureux. »
Son cabinet zoologique et minéralogique
était un des plus complets de l'Angle-
terre. Il a enrichi les Transactions phi-
losop/Uques, et les Mémoires de la socié-
té médicale de Londres de plusieurs ob-
servations curieuses. Tous ses écrits ont
été rassemblés après sa mort , et publiés
à Londres, en 1781, in-8, en 1783, 3 vol.
in-8, et en 1804, in-4. Ils ont été traduits
en allemand, Altenbourg, 1785, 2 vol.
in-8.
* FOUCAULT , nom d'une ancienne
famille du Périgord , qui a produit plu-
sieurs personnages distingués. — Jean
Foucault , chambellan de Charles VII , et
l'un des plus vaillans capitaines de ce
prince , tomba au pouvoir de Talbot au
siège de Laval ( 1 425 ) , et se racheta de
ses deniers. En 1429 il assista au sacre de
Charles VU , et l'année suivante il défen-
dit avec bravoure et avec houneur la ville
de Lagny contre les Anglais. Il mouruten
1466 dans un âge très avancé.
* FOUCAULT (Jean), seigneur de
l'Ardimalie, baron d'Auberoche, né dans
le Périgord en 1542 , servit 4e tous ses
moyens la cause de Henri de Navarre ,
( Henri IV ) , qui le nomma, lorsqu'il fut
sur le trône , son chambellan , puis gou-
verneur du Périgord et vicomte de Li-
moges. Foucault mourut d'un coup de ca-
non à un assaut dans la guerre que Hen-
ri IV soutenait contre les Espagnols. La
famille Foucault conserve religieusement
les lettres que ce prince lui écrivit.
FOUCAULT (Louis) , comte de Dau-
gnon , avait été page du cardinal de Ri-
chelieu. Il s'attacha au duc de Fronsac
qui commandait les flottes de France. Il
servit sous lui avec le rang de vice-ami-
ral , au combat donné devant Cadix en
1640, et se saisit après sa mort de la forte
place de Brouage , dont le duc était gou-
verneur. Cette place fit la fortune de Fou-
cault : car en la remettant , on luidonaK
FOU
pour récompense le bâton de maréchal
de France le 20 mars 1653. Il mourut en
octobre 1659 , âgé d'environ 43 ans, avec
la réputation d'un homme avide de gloire
et d'argent.
FOUCAULT ( Nicolas-Joseph ) , pari-
sien , honoraire de l'académie des belles-
lettres , fut successivement intendant de
Montauban , de Pau et de Caen , et tra-
vailla partout pour le bien de l'état et
des lettres. Il découvrit en 1704 l'an-
cienne ville des Viducassiens à deux lieues
de Caen , et il en envoya une relation
exacte à l'académie des Belles-lettres. Il
avait fait la découverte , quelque temps
auparavant , du précieux ouvrage de Lac-
tancc , De mortibus persecutorum , et
qu'on ne connaissait que par une citation
de Saint-Jérôme. Ce fut sur ce manlis-
crit , trouvé à l'abbaye de Moissac en
Querci , que le savant Baluze le publia
( voyez Lactance ). Foucault mourut en
1721 , âgé de plus de 80 ans. Il joignait
des mœurs douces à une vertu austère,
et des agrémens à un savoir profond.
' FOUCAULT de l'Ardimalie ( Louis
marquis de ) , capitaine de chasseurs à
cheval , fut élu député de la noblesse du
Périgordaux Etats-généraux de 178D , et
s'y fit remarquer par son courage à dé-
fendre les droits du trône et de la no-
blesse. Il avait peu d'éloquence, mais il
était doué d'une voix très forte qui se
faisait entendre au milieu des cris des
tribunes et du côté gauche. Mirabeau lui
rendait la justice de dire , « qu'il redou-
» tait plus son gros bon sens que l'esprit
» et l'éloquence de beaucoup d'autres
» membres du côté droit. » Lors de la
première discussion sur les émigrés, il
justifia leur fuite par les dangers que
leur offraient les lanternes et les baïon-
nettes. Accusé d'avoir favorisé M. de
Brune Saordin , il avoua à la tribune l'a-
voir caché plusieurs jours chez lui , et il
ajouta : « Que sa conscience l'assurait
j) qu'il n'avait fait en cela que ce qu'or-
» donnafent l'humanité et la justice. »
On le vit quelque temps après , dans une
séance orageuse oii il était menacé d'être
envoyé à l'Abbaye , défier hardiment le
côté gauche f et déclarer que le côté droit
FOU 399
était décidé à réisister à l'oppression. Il
parla plusieurs fois contre les clubs , fut
un des signataires des protestations du 1 2
et du 1 5 septembre , émigra après fa ses-
sion et servit à l'avant-garde de l'armée
des princes , ensuite à celle de Condé , où
il fut employé comme officier dans les
corps nobles. Il profila de l'amnistie du
26 avril pour rentrer en France , et se re-
tira dans les terres qui lui restaient. Il
fut tué en 1 804, dans son château de l'Ar-
dimalie par la chute d'un mur qu'il fai-
sait réparer.
* FOUCAULT ( Jules, marquis de )
cousin -germain du précédent, colonel
du génie, membre de la chambre des dé-
putés en 1815, né en 1782 au château
de Lubersac en Limousin , fut élève de
l'école polytechnique en 1801, et of-
ficier du génie en 1803. Envoyé au siège
de Stralsund , il fit partie de l'armée d'Al-
lemagne , il passa ensuite en Espagne et
servit avec distinction aux sièges de Sar-
ragosse, de Mequinenza , deLéridaetde
Tortose. Après avoir reçu plusieurs bles-
sures, il devint chef de bataillon dans
son arme, alla en Hollande ( 1811 ), et fut
chargé de défendre le Helder où il était
encore en 1814. Louis XVIII le nomma
secrétaire de la commission des anciens
officiers, et le département de la Corrèze,
son député à la chambre de 1 8 1 5. En 1 8 1 6,
il obtint le commandement d'un régiment
du génie. Il mourut à Metz en 1821. Son
régiment lui a fait élever un monument
funèbre.
* FOUCHÉ (Joseph) , duc d'Otrante,
naquit à Nantes le 29 mai 1763, d'un
capitaine de vaisseau marchand qui le
destina d'abord à suivre la même profes-
sion. Ses études , chez les oratoriens où
il fut élevé, furent peu brillantes; ses
faibles progrès n'étaient dûs qu'à une
laborieuse application. La délicatesse de sa
constitution ne lui permit pas d'embras-
ser l'état de son père ; il entra dans la
congrégation de l'Oratoire, fut reçu'dans
la maison de l'Institution de Paris, et y
continua ses études , avec quelques suc-
cès. Successivement professeur à Juilly,
à Arras , à Vendôme , la révolution fran-
çaise le trouva préfet des classes au col-
4oo FOU
légede Nantes; il avait alors 25 ans. Dé-
jà connu pour avoir osé monter dans un
aérostat à l'époque oii se faisaient les
premières expériences de cette nouvelle
découverte , il ajouta bientôt une triste
illustration à cette innocente célébrité ,
et le club de Nantes retentit de ses mo-
tions furieuses. Peu après (septembre 92),
il fut député de son département à la Con-
vention : retenu pendant long-temps dans
un silence presqu'absolu par la médiocri-
té de ses talens oratoires, il le rompit
d'une manière horrible à l'époque du
procès de Louis XVI : on reconnut alors
l'ami de Robespierre et de Danton. « Il
3> semble , disait-il , que nous sommes
» effrayés du courage avec lequel nous
7) avons aboli la royauté ; nous chance-
V Ions devant l'ombre d'un roi. Sachons
3) prendre enfin une attitude républi-
■» caine ; nous sommes assez forts pour
» soumettre toutes les puissances et tous
w les événemens ; le temps est pour nous
)) et contre tous les rois de la terre. » La
mort sans appel ni sursis fut la conclu-
.sion de ces diatribes sanguinaires. L'ambi-
tion et l'avidité de Fouché le rapprochè-
rent de Danton plutôt que de Robespierre,
dont l'incorruptibilité, si populaire à cette
époque, ne permettaitni le luxe ni les exac-
tions. Poursuivant la même ligne de fureur
républicaine, Fouché fit rendre deux
décrets, l'un déclarant nationaux les
biens dépendant des établisseraens d'in-
struction publique autres que les collè-
ges ; l'autre ordonnant la recherche des
biens d'émigrés (J4 mars 1793). Tou-
jours médiocre à la tribune, il brigua des .
missions : l'Aube et la Nièvre furent tour-
à-tour le théâtre de ses horribles exploits.
La mort est un sommeil e'ternel , telle
fut la folie philosophique dont il faisait
emphatiquement orner les portes des
cimetières. Quatre-vingt-trois prêtres
furent envoyés par lui aux noyades de
Nantes. Célèbre par ce qu'on appelait
alors de Vénergie , il fut adjoint à Collot-
d'Herbois dans son expédition contre
Lyon. On frémit en Usant ses proclama-
tions et sa correspondance officielle :
« Nous le jurons, s'écria il-i 1 , le peuple
» sera vengé ; ce sol qui fut rougi du sang
FOU
» des patriotes, sera bouleversé, et sur
3) les débris de cette ville superbe et re-
» belle , s'élèveront des chaumières épar-
« ses que les amis de la liberté et de l'é-
» galité s'empresseront de venir habiter.»
Les condamnés devaient être conduits
en plein jour en face du lieu même où
les patriotes «ivaient été exécutés, pour
y « expier sous le feu de la foudre une
» vie trop long-temps criminelle. Le peu-
» pie , écrivait-il encore , a mis entre les
» mains de ses représentans , le tonnerre
» de sa vengeance : ils ne le quitteront
» que lorsque tous ses ennemis seront
» foudroyés. « « Les démolitions sont trop
» lentes , écrit-il à la Convention : il faut
» des moyens plus rapides à l'impatience
M républicaine ; l'explosion de la mine ,
» l'activité dévorante de la flamme peu-
» vent seules exprimer la toute-puissance
» du peuple. » Toute sa correspondance
de cette époque que les courtisans de sa
grandeur ont voulu en vain attribuer à
CoUot-d'Herbois , est pleine de traits
pareils. De retour à Paris le 8 avril , il
fut nommé le G juin président du club
des Jacobins ; mais Robespierre l'accusa
à'avoir déshonoré la révolution par ses
excès, le fit chasser des Jacobins comme
uri conspirateur chargé de rapines ; et
sans le 9 thermidor , il aurait infaillible-
ment partagé le sort de Chaumette que
V incorruptible dictateur avait envoyé à
l'échafaud. Après le 9 thermidor , il s'ef-
forçait de revendiquer nue partie de la ^
gloire de cette journée; « elle est trop
» belle pour avoir été déshonorée par sou
» secours , » s'écria Boissy - d'Anglas.
Chassé de l'Assemblée et décrété d'arres-
tation , il fut compris dans l'amnistie gé-
nérale du 26 octobre 1795 , et envoyé en
mission par le Directoire sur les frontîtrcs
d'Espagne , puis exilé comme terroriste
dans la vallée de Montmorency. Ses rap-
ports avec Gracchus-Babœuf, qui le firent
condamner alors , lui servirent bientôt à ^
obtenir , par d'importantes révélations ,
la confiance des directeurs : par le crédif
de Barras , il fut nommé ambassadeur]
près la république Cisalpine, y essaya
contre les réactions anti-révolutionnaires
un 1 8 fructidor en miniature , fut rap-.
'A ■
es
J
fOtJ
pelé pat lé Directoire , et aurait été ra-
mené captif à Paris, sans ses liaisons avec
le jjénéral Joubert qui s'y opposa. Tou-
jours soutenu par Barras , nommé ambas-
sadeur près la république Batave , il re-
vint bientôt se saisir du portefeuille de
la police. Ici se termine sa carrière de
démagogue , et commence sa vie d'hom-
me d'état. Il paralyse l'exécution de
l'horrible loi des otages , attaque vive-
ment les clubs, résiste aux fureurs du
manège , présente un rapport contre les
royalistes du Morbihan, supprime onze
journaux , et prépare de loin le 1 8 bru-
maire en frappant à droite et k gauche
tout ce qui s'opposait au pouvoir. Avec
le produit des jeux , il se fait des créatu-
res, s'attache Joséphine, se lie intime-
ment avec tous les Buonaparte , arrange
avec le jeune conquérant qui arrivait
d'Egypte , la journée qui lit succéder le
consulat à la Constitution de l'an 3. Les
démocrates comme les royalistes furent
combattus ; le complot d'Aréna , Cerac-
chi et Topino-Lebrun échoua ; les auteurs
de la machine infernale furent décou-
verts , et 300 démagogues déportés sous
ce prétexte ; la justice distributive des
emprisonnemens et des exils , et , il faut
l'avouer, quelquefois de la clémence et du
pardon , fut habilement balancée entre
tous les partis : mille noms seulement
furent maintenus sur la liste des émigrés:
peu après les royalistes étaient amorcés ,
les démagogues adoucis , et Buonaparte
lui-même sentait ses caprices asservis à
l'influence de son ministre. Fatigué de
cette contrainte, et plus confiant en ses
propres forces , il s'en défit après la paix
d'Amiens (septembre 1802). La sénato-
rerie d'Aix fut donnée à Fouché comme
fiche de consolation ; il se vengea par des
bons mots du ministre de la justice , Ré-
gnier , sous la direction de qui la police
fut réunie ; et le sobriquet de gros-juge
lui restera. Dans l'automne de l802, Fou-
ché fit encore partie d'une commission
chargée de conférer avec les députés des
cantons suisses, dont les rapports fédé-
raux furent changés par le fameux acte
de me'dintUm. La conspiration de Georges
et de Pichegru , la transition du consulat
V.
POU 4oï
à l'empire l'appelèrent Fouché à la police
le 10 juillet 1804. Ici fut l'époque de sa
plus grande puissance. Il ressuscita l'an-
cienne maxime que trois personnes ne
pouvaient se réunir et parler indiscrète-
ment des affaires publiques sans que le
lendemain la police n'en fût informée. De-
venu le modérateur de l'état , tous les
partis le prônèrent : son action fut si
forte sur l'opinion qu'on attribua à lui
seul l'avènement et le maintien au pou-
voir de Napoléon. Pendant les guerres
de l'empire, réunissant entre ses mauis
le ministère de la police et celui de l'in-
térieur , il dirigeait presque en maître
absolu la politique générale ; et lors du
débarquement des Anglais dans l'île de
Walcheren , il osa écrire : « prouvons à
« l'Europe que si le génie de Napoléon
» peut donner de l'éclat à la France par
w ses victoires , sa présence n'est pas né-
» cessaire pour repousser nos ennemis, u
Les Anglais furent chassés , mais l'empe-
reur se souvint de l'audacieuse circulaire.
A peu près dans le même temps, l'empe-
reur découvrit une négociation diploma-
tique entamée à son insu , avec le marquis
de Wellesley, par l'entremise de l'officier
irlandais Fagan. Napoléon, qui en suivait
une autre parallèlement, vit les deux en-
voyés, dontlcspropositionsétaient contra-
dictoires sur plusieurspoints, pris pour des
espions et chassés. Indigné contre son
audacieux ministre , il donna la police à
Savary , réclama de Fouché sa correspon-
dance, et ne pouvant obtenir, malgré une
sorte de visite domiciliaire dans laquelle
Berthier et Real furent mystifiés par
l'homme le plus ru.sé de France, que quel-
ques papiers iusignifians , il l'exila dans
sa sénatorerie d'Aix. Déjà duc d'Otrante
par le décret impérial du 30 niai-s sur les
grands fiefs de l'empire , il avait été nom-
mé gouverneur de Rome en même temps
que renvoyé du ministère. Ne s'abusant
pas sur sa position , et craignant un dé-
noûraent tragique à tout ce drame d'in-
trigues , il s'embarqua à Livourne pour
les Etats-Unis : mais ne pouvant suppor-
ter la mer, il prit son parti , revint dans
sa sénatorerie , d'oîi il fut appelé au quar-
tier-général de Dresde aprè.s la campagne
26
4oà P6V
de Russie, et envoyé en lUyrîe comme
gouverneur -général. Arrivé à Leybach
en juillet 1813, sans forces contre l'inva-
sion autrichienne, il se retire, intrigue
avec Murât qui, poussé par son penchant
naturel et par les insinuations de Fouché,
se joint à la coalition des puissances ;
muni des pouvoirs de l'empereur, il traite
pour l'évacuation de la Toscane et des
états romains , revient à Lyon , est forcé
par la position politique qu'il avait ré-
cemment prise , à gagner Valence où. il
apprend l'arrivée de Monsieur comte d'Ar-
tois, à Vesoul. Il fut trop tard à Paris
pour faire partie du gouvernement pro-
visoire , et ne put , malgré les menées
de ses partisans , réussir à se faire nom-
mer alors ministre de la police. Cette
première restauration de la monarchie le
confina dans son château de Ferrières,
d'où, il conserva des relations avec tous
les personnages politiques. Il prétend
avoir répondu à des intrigans dont le but
était le renversement des Bourbons , et
dont les avances le prévenaient : « Je ne
5> travaille point en serres chaudes ; je
)) ne veux rien faire qui ne puisse paraître
)) au grand air. » Son plan était alors de
profiter de l'abdication pour établir une
régence dont la consolidation d'une lé-
gitimité illégitime eut été la conséquence.
Cependant ses communications avec les
royalistes continuaient d'abord, par l'in-
termédiaire de M. de Blacas, et ensuite
par celui de M. le duc d'Havre. Dans une
entrevue avec Monsieur ( depuis Charles
X ) chez la princesse de Vaudemont , il
s'écria, en parlant de la possibilité de
sauver la couronne : « 11 est trop tard ;
» sauvez le roi ; je me charge de sauver
» la monarchie, » mot plus connu qu'il
n'est facile à bien comprendre. On voulut
alors s'assurer de sa personne ; mais il
escalada le mur de l'hôtel d'Hortense
Beauharnais , voisin du sien , et échappa
à toutes les recherches. Après le 20 mars,
Napoléon lui rendit la police , et triom-
pha de ses efforts qui tendaient à substi-
tuer à la force militaire une force révo-
lutionnaire , dont la terreur ressuscitée
eut été le principal moyen. Fouché par-
vint , par ses intrigues à neutraliser la
Pot]
Vénààe : mais peu confiant dans lé flOti^
vel ordre de choses il communiquait arec
Gand. Maître de la chambre des représen-
tans , il força Buonaparte à abdiquer après
Waterloo , et se trouva pendant un instant
arbitre des destinées de la France comme
président du gouvernement provisoire :
c'est en cette qualité qu'il traita de la
reddition de Paris. Il eut bien voulu faire
adopter son plan de régence , et envoya
au quartier général des alliés cinq pléni-
potentiaires à la tête desquels était M. de
La Fayette , avec mission de traiter de la
paix et d'adhérer à toute espèce de gou-
vernement excepté à celui des Bourbons.
Mais la France réclamait ses anciens rois,
et elle les obtint. Tous les efforts de Fouché
se concentrèrent alors pour arracher des
concessions à ceux qu'il ne pouvait évi-
ter : le 6 juin , il eut une conférence à
Neuilly avec le duc de Wellington , et le
lendemain il fut présenté au roi, à Ar-
nouville près St. -Denis. Il essaya de
persuader à Louis XVIII qu'il devait con-
solider à jamais la révolution en sa per-
sonne, en abandonnant la cocarde blanche
et les émigrés de Gand. Ce prince , qui
plus tard ne s'abandonna que trop à des
conseils de ce genre , refusa de suivre
ceux-là , et se contenta de conserver au
conseiller le ministère de la police. Car-
not , furieux de voir son ancien collègue
adoucir si heureusement pour lui les plus
rapides transitions , et craignant d'ail-
leurs sa surveillance, lui écrivit ces mots
pleins d'une emphase toute lacédémo-
nienne , et d'un arrière-goût de républi-
que : « Traître, où veux-tu que j'aille? »
— « Imbécille, où tu voudras » répondit
Fouché. Il contribua tant par son habileté
non contestée que par ses anciennes re-
lations à aplanir bien des difficultés.
L'ordonnance du 26 juillet, l'arrestation
de Ney et de Labédoyère, la soumission
de l'armée de la Loire , le désarmement
des factieux furent en partie son ouvrage. M i
Mais bientôt de nouvelles intrigues révo-^ |
lutionnaires , des rapports confidentiels
divulgués , l'approche de la chambre in-
trouvable, et la force réagissante de l'opi-
nion royaliste le contraignirent de donner
sa démission, ^'ommé ministre à Dresde,
FOU
il y fut surpris par la loi du 12 janvier
1816 contre les régicides. Ici finit sa car-
rière politique si longue et si bien l'cm-
plie. Doué d'un jugement profond , d'une
prévoyance rare, d'un tact exquis des
hommes et des clioses, Fouché prit tou-
jours conseil des circonstances ; sa vie
est partagée en deux époques , dont l'une
offre le beau idéal de la frénésie déma-
gogique , et l'autre le type parfait du
despotisme : il a reflété son siècle : il n'a
point été plus inconséquent que le temps
oîi il a vécu. Au milieu de tant de con-
tradictions, il a constamment été dévoué
à dcu,x intérêts : au sien d'abord , et avant
tout ; ensuite à celui de la révolution :
assez semblable en cela à Buonaparte , ce
grand révolutionnaire - soldat , dont il
était la contre-épreuve dans l'ordre civil ,
et dont il a toujours partagé la puissance.
Une femme de génie a surnommé Napo-
léon la révolution à cheval -. Fouché fut
la révolution homme d'affaires , la révo-
lution homme de cabinet : il la servit
contre Robespierre , contre le Directoire,
tontre l'empereur , contre la restaura-
tion , dévoué pourtant avant tout à sa
propre fortune , à sa propre ambition , à
ses 14,000,000 avec lesquels il quittâtes
affaires. Du reste, sans fanatisme d'aucun
genre : la révolution l'a fait bourreau ,
l'empire l'a fait despote , un siècle hon-
nête l'eut peut-être trouvé honnête hom-
me. Fouché a épousé eu août 1815 M'^^
de Castellane. Après son bannissement il
\oyagea quelque temps en Allemagne, et
se fixa à Trieste oîi il mourut en 1820.
L'Allemagne a été inondée par lui d'é-
^crits apologétiques. Après la première
restauration a paru : Copie d'une lettre
adressée à S. A. R. Mgr. le comte d'Ar-
tois , par M. le duc D*''* le 25 avril
181 4, Paris, juin 1814, in-8. On a de M.
de St.-Victor Quelques observations sur
la lettre de Fouché au duc de IFelUng-
ton , suivies du texte de cette lettre et de
quelques notes explicatives , Paris , Ni-
coUe, 1817, in-8. De M. Liebaut (du
Jura) Quelques mots sur deux ex-minis-
tres { MM. de Talleyrand et Fouché). Des
anonymes ont donné ; Fouché de Nan-
/e^ , sa vie privée , politique et mQffçlç
FOU 4o3
depuis son entrée à la Convention jus~
qu'à ce jour , 1816 , in-32 , et Sept mois
de la vie de Fouché de Nantes ( 1793-
94 ) , Paris , Audin , 1 8 1 6 , in-1 2. Un an-
glais a publié un Mémoire historique sur
Fouché de Nantes , maintenant duc
d'Oli-ante , Paris , Egron , 1815, in-8 . Le
meilleur ouvrage écrit sur sa vie a paru
sous le titre de Mémoires de J. Fouché,
Paris, 1824, 2 vol. in-8; suivant M.
Barbier [n° 22 , 937 des Anonymes) il a
été rédigé par M. de Beauchamp , sur des
notes fournies par M. de Julian , ancien
agent de Fouché. L'éditeur ( M. Lerouge)
a eu à soutenir un procès pour cet ou-
vrage contre les fils du duc d'Otrante.
FOUCHER (Simon), surnommé le
Restaurateur de la philosophie acadé-
micienne , parce qu'il travailla à ressu-
sciter la philosophie des anciens académi-
ciens, né à Dijon en 1644, mourut k
Paris en 1696, après avoir publié: !<>
Histoire de la Philosophie académi-
cienne. 2° Dissertation sur la recherche
de la vérité, suivie d'un examen des sen-
timens de Descartes, et plusieurs autres
ouvrages aujourd'hui oubliés.
FOUCHÈR (L'abbé Paul) , de l'aca-
démie des Inscriptions et belles-lettres ,
né à Tours en 1704, mortà Paris en 1778,
était un savant studieux , et un homme
doux et honnête. Il cultiva d'abord les
sciences exactes, et nous avons de lui
une Géométrie métaphysique, 1758,
in-8. Il se tourna ensuite du côté de l'é-
rudition , et eut des succès en ce genre.
Son traité hastorique De la Religion des
anciens Perses, divisé en plusieurs Mé-
moires imprimés dans différens volumes
du Recueil de l'Académie des Belles-
Lettres , prouve son savoir et sa sagacité.
Ce sont des recherches curieuses et neu-
ves sur un sujet traité jusqu'alors très-
imparfaitement.
* FOUCHER D'OPSONVILLE (N*"'*),
écrivain français, né en 1734 , entra au
service en 1752. Deux fois il fit par terre
le voyage de France aux Indes, chargé,
dit-on , de missions importantes près des
souverains de ces contrées : il profita du
long séjour qu'il y fit pour bien étudier
les mœurs des |i§|}ita}is ç,\ î§s |)f odiiction^
4o4 FOI?
du pays. Les ouvrages qu'il publia sur ce
sujet contiennent des particularités in-
connues jusqu'alors : il s'occupa surtout
des animaux dont les Arabes et les Juifs
font leur nourriture, notamment des sau-
terelles ; il traita des crocodiles, des ca-
méléons et des serpens ; fit connaître les
causes de la vénération que les liabitans
de l'Inde ont pour le cheval , l'âne et le
bœuf; enfin il raconta les fréquens com-
bats que dans ces contrées les hommes
livrent aux tigres en les attaquant corps
à corps. Atteint de la peste en Arabie, il
fut abandonné dans le désert par la ca-
ravanne dont il faisait partie, et ne dut sa
guérison qu'à une espèce de prodige.
Pour revenir en France , il eut à essuyer
des maux incroyables. Il mourut en 1802,
après avoir publié les ouvrages suivans :
i " JEssais philosophiques sur les mœurs
de divers animaux étrangers , Paris ,
1783 , in-8 ; ouvrage curieux, extrait du
Journal des voyages de l'auteur , qui em-
brasse aussi l'histoire naturelle, les mœurs
et les usages des peuples que d'Opson-
ville a visités. Il avait annoncé un autre
ouvrage beaucoup plus étendu sur l'Inde,
mais il n'a publié que le Bagavadam
qui en faisait partie, et qui, comme on
le sait , contient la doctrine des Indiens
sur l'Etre suprême , les dieux , les géans
et les hommes, 1788, in-8; traduit sur
une version Tamoule par Méridas Poule ,
interprète de la compagnie des Indes. 2°
Supplément au voyage de Sonnerai ,
Amsterdam (Paris), 1785, in-8, conte-
nant des observations critiques; 3" Lettre
d'un voyageur au baron de L. sur la
guerre des Turcs, Paris, 1788, in-8.
Il a publié aussi quelques brochures en
faveur de la révolution.
*FOUCHY (Jean-Paul Grand-Jean de),
astronome et secrétaire perpétuel de l'a-
cadémie des Sciences, né à Paris en
1707, y mourut le 15 avril 1788. Il
eut tous les goûts des âmes douces. Né
avec un caractère paisible , il cultivait
la poésie , mais dans le secret de l'amitié,
ne faisant que des vers de société. Il ai-
mait aussi la musique, et touchait l'or-
gue presque tous les dimanches dans qùcl-
flues églises dç soq voisinage ; par là jl
FOU
satisfaisait à la fois son goût pour la musi-
que , sa piété et son zèle pour obliger. On
trouve un grand nombre de ses me'/no/rcj
dans le'recueil de l'académie des Sciences,
et la description de quelques instrumens
de son invention dans le recueil des ma-
chines de l'académie , tom. 5 , G , 7. Oa
a encore de lui des éloges de plusieurs
académiciens, Paris, 1761 , in-12.
FOUCQUET (Nicolas), marquis de
Belle-Ile , fils d'un conseiller d'état , na-
quit en 1615. Sa mère, Marie de Mau-
peou , damcd'uncpiété éminenteet d'une
charité extrême, morte en 1681 , à 91
ans, fut regardée commela mère des pau-
vres, auxquels elle faisait distribuer de
l'argent et des remèdes. Elle est auteur
d'un recueil très répandu sous le titre de
Remèdes faciles et domestiques , 2 vol.
in-12. Nicolas Foucquct, son fils, donna
dès son enfance des marques non équivo-
ques de son esprit. Il fut reçu maître des
requêtes à 20 ans , et 'procureur-général
du parlement de Paris à 43 ans. La place
de surintendant des finances lui fut don-
née en 1053, dans un temps oîi elles
avaient été épuisées parles dépenses des
guerres civiles et étrangères. Foucquet
aurait dû les ménager ; il les dissipa et
eu usa comme des siennes propres. Il dé-
pensa près de 36 millions d'aujourd'hui
à faire bâtir sa maison de Vaux. Ses dé-
prédations , les alarmes que donnaient
les fortifications de Belle-Ile,' les tentati-
ves qu'il avait faites sur le cœur de mada-
me de la Vallière : tout servit à irriter
Louis XIV contre son ministre. On l'at-
tira avec adresse à Nantes , et on l'arrêta
le 7 septembre 1661. Foucquet s'était dé-
fait fort imprudemment , quelque temps
auparavant , de sa charge de procureur-
général. Son procès lui fut fait par des
commissaires, qui le condamnèrent en
1 664 à un bannissement perpétuel , com
mué en une prison perpétuelle. Ce fui
dans la citadelle de Pignerol qu'il fut e
fermé ; il y mourut , suivant le bruit co
mun, en 1680, dans de grands senlimenS'
de piété. De tous les amis que sa fortune
lui avait faits , il ne lui resta que Gour-
ville , Pellisson, mademoiselle de Scudé-
ri, ceux (|ui furent enveloppé^ dans S?i djst
m-^
FOU
grâce , et quelques gens de lettres qu'il
pensionnait. Le premier assure dans ses
Mémoires, que Foucquet sortit de sa pri-
son quelque temps avant sa mort. Le se-
cond prit sa défense dans plusieurs Mé-
moires recueillis en 1 5 volumes, qui sont
des modèles d'éloquence. La Fontaine
plaifpiit ses malheurs dans une élégie
touchante. Il chercha à adoucir lassévé-
rité du roi ; il osa môme lui adresser une
ode pour émouvoir sa pitié en faveur du
ministre disgracié. En 1789 , il parut une
dissertation , pour prouver que cet in-
tendant était le célèbre Masque-de-fer ;
opinion peu accréditée , et qui , comme
le remarque un critique , ne s'accorde
pas avec l'extrême respect qu'on porta
toujours à ce prisonnier , et les mesures
extraordinaires prises pour laisser son
nom sous leplus grand secret. Il faut con-
venir néanmoins qu'elle acquiert quelque
vraisemblance quand on considère qu'ef-
fectivement Foucquet fut d'abord enfermé
à Pignerol, et qu'on ne sait pas positive-
ment ce qu'il devint depuis. Le bruit a
couru qu'il y était mort ; d'autres disent
qu'il mourut dans le sein de sa famille
( f^. Masque-de-fer.) Sa mère, dont la cha-
rité extrême a déjà été citée , et qui fit
pendant sa longue carrière sa plus douce
jouissancedu soulagement despauvres, est
auteur du recueil qui a pour titre : Re-
mèdes faciles et domestiques, 2 vol. in-
12. Lorsqu'elle apprit que son fils était
arrêté à >'antes , elle se prosterna aussi-
tôt , et dit : « Je vous remercie , mon
0) Dieu ; je vous ai toujours demandé
j» son sîilut , et voilà le chemin ! » Fouc-
quet mourut en effet dans de grands sen-
timens de piété. D'Âuvigny a donné sa
vie dans le tome 6 des Vies des hommes
illustres de France. Il assure qu'il com-
posa dans sa prison divers ouvrages de
piété, dont quelques-uns ont été livrés
au public, tels que les Conseils de la sa-
gesse, ou Recueil des maximes de Salo-
mon, Paris, 1683, 2 vol. in-12. Cet ou-
vrage n'est pas de Foucquet, mais du
Père Boutauld , jésuite. On peut consul-
ter le Recueil des Défenses de M. Fouc-
. quel (en Hollande) , 1665-1668, 15 vol,
"Jfr-1 2, et les notices sur la mort du surin-
FOTJ 4o5
tendant Fouquet , recueillies à Pignerol
parM. Modeste Paroletti, Turin, 1812, in-4.
FOUCQUET ( Charles-Armand ) , fils
du surintendant des finances , né à Paris
en 1657 , entra dans l'Oratoire en 1682.
11 devint supérieur de St.-Magloire en
1699 , et fut quelque temps grand-vicaire
auprès de Foucquet son oncle , évêque
d'Agde. Les abbés Bignon , Dnguet, Boi-
leau et Couct , furent très liés avec lui.
Il eut l'amitié et la confiance du cardinal
de Noailles, et mourut à Paris dans la
maison de Ste.-Magloire, en 1734. Après
la mort du Père de la Tour, général de
l'Oratoire , le Père Foucquet lui aurait
infailliblement succédé, si son nom,
inscrit sur la liste des appelons , et des
Réappelans , ne l'avait fait exclure.
FOUCQUET (Charles-Louis-Auguste),
comte de Belle-Ile, petit-fils du surin-
tendant des finances, naquit à Villefran-
che en Rouergue , l'an 1684, de Louis
Foucquet, et de Catherine-Agnès de Le-
vis. Les livres qui traitent de la guerre,
de la politique et de l'histoire, furentdès
son enfance ses lectures favorites ; il ne
les quittait que pour se livrer aux mathé-
matiques, dans lesquelles il fit des pro-
grès sensibles. A peine fut-il sorti de l'a-
cadémie , que Louis XIV lui donna un
l'égiment de dragons. Il se signala au
siège de Lille , y reçut une blessure , et
devint brigadier des armées du roi en
1 708 , et mestre-de-camp-général des dra-
gons en 1709. Dès que la paix fut signée,
le comte de Belle Ile se rendit à la cour,
fut très bien accueilli de Louis XIV ; et
les services du pelit-fils firent oublier les
fautes du grand-père. La mort de ce mo-
narque ayant changé le système des af-
faires, la guerre fut déclarée en Espagne;
le comte de Belle Ile mérita alors d'être
créé maréchal-de-camp et gouverneur
de Huningue. Il eut la première place en
1718, et la seconde en 171 9. Le duc de
Bourbon ayant succédé dans la place de
premier ministre au duc d'Orléans, le
comte de Belle-Ile , lié avec M. Leblanc ,
fut entraîné dans la disgrâce de ce mi-
nistre, et enfermé à la Bastille. Il n'en
sortit que pour être exilé pendant quel-.
(|ue tentipg dan? ses tprres, qe fntdsnMf
4o6 POU
calme de la solitude qu'il travailla à son
entière justification. Il fut fait lieutenant-
général en 1731 , et gouverneur de la
ville de Metz et du pays Messin en 1733.
La guerre venait d'éclater ; il obtint le
commandement du corps d'armée qui
devait agir sur la Moselle, et s'empara de
la ville de Trêves. Après avoir joué un
des principaux rôles devant Philisbourg,
il eut , le reste de la campagne , le com-
mandement des troupes en Allemagne. Il
se rendit l'année suivante , 1735 , à Ver-
sailles, moins pour y être décoré del'ordre
du Saint-Esprit auquel le roi l'avait nom-
mé, que pour y être consulté par le car-
dinal de Fleury. Les puissances belligé-
rantes avaient beaucoup négocié pour la
paix dès le commencement de 1735. Ce
l'ut Belle-Ile qui engagea le cardinal à ne
point se désister de ses prétentions sur
la Lorraine. Rendu à lui-même , il em-
ploya le loisir de la paix à écrire des
Mémoires sur les pays qu'il avait par-
courus , et sur les différentes parties du
gouvernement; ouvrage jugé un peu sé-
vèrement parle marquis d'Argenson dans
ses Loisirs. « La preuve , dit-il , que ses
» idées ne sont ni bien lumineuses , ni
M réellement grandes , c'est que son stile
» est faible et même plat , qu'il n'écrit
» ni purement ni fortement. » C'est à lui
qu'on dut presque toutes les ordonnan-
ces militaires qui parurent en 1737. En
1741 , il reçut le bâton de maréchal de
France ; et la mort de l'empereur Char-
les "VI ayant rallumé la guerre , il fut
nommé ambassadeur plénipotentiaire à
la diète de Francfort pour l'élection de
l'empereur Charles VII. ^La magnificence
qu'il étala dans cette occasion , sera long-
temps célèbre; il semblait être plutôt im
des premiers électeurs, qu'un ambassa-
deur. Il avait ménagé toutes les voix et
dirigé toutes les négociations. Le roi de
Prusse , informé de tout ce qu'il avait fait ,
ne put s'empêcher de s'écrier avec admi-
ration : Il faut convenir que le maréchal
de Belle-Ile est le législateur de l Alle-
magne. Si Charles VU fut élu et couron-
né, ce fut en partie par ses soins. Ce
prince eut quelques succès, suivis de
grands ni^lUçursj Ips Fr«»P^ai5 furent l»bf»il''
FOU
donnes des Prussiens, ensuite des Saxons.
Le maréchal de Belle-Ile se trouva enfer-
mé dans Prague. Il fallut évacuer cette
place , et cette opération n'était pas fa-
cile. Il surmonta tous les obstacles , et la
retraite se fit à la fin de 17 42. A la troi-
sième marche , il fut atteint par le prince
de Lobkowitz, qui parut à la tête d'un
corps de cavalerie , au delà d'une plaine
oii l'on pouvait donner bataille. Le prince
tint un conseil de guerre, dans lequel il
fut résolu de lui couper la retraite , et
d'aller rompre les ponts sur la rivière
d'Egra , par où les Français devaient pas-
ser. Le maréchal de Belle-Ile choisit un
chemin qui eût été impraticable en toute
autre saison : il fit passer son armée sur
les marais glacés. Le froid fut l'ennemi le
plus redoutable; grand nombre de sol-
dats en périrent ; un des otages , que le
maréchal de Belle-Ile avait amenés de
Prague avec lui , mourut dans son car-
rosse. Enfin on arriva le 26 décembre à
Egra par une route de 38 lieues. Cette
retraite hardie ne laissa pas d'être blâmée
par quelques vieux militaires , parce que
le maréchal eut sans peine obtenu une
capitulation honorable , qui eut sauvé
tant de braves soldats. C'est le parti que
prit M. de Chevert , resté à Prague avec
trois mille hommes ( frayez Cm e vert ).
Cependant le maréchal de Belle-Ile se
rendit à Francfort , oii l'empereur Char-
les VII , qui l'avait déjà déclaré prince
du Saint-Empire , le décora de l'ordre de
la Toison d'or. De retour eu France, il
partagea ses momens entre les aiTaires et
les soins qu'il devait à sa santé. Il passa
de nouveau en Allemagne , et il fut fait
prisonnier le 20 décembre 1743 , en al-
lant prendre des relais à la poste d'Elbin-
gerode , petit bourg enclavé dans le ter-
ritoire d'Hanovre , et conduit en Angle-
terre, oii il resta jusqu'au 17 août de
l'année suivante. Revenu en France, il
lut envoyé en Provence pour repousser
les Autrichiens qui l'inondaient. Il les
chassa peu à peu de cette province , et
leur fit repasser le Var en février 1747.
Après quelques succès, le vainqueur partit
pour concerter à Versailles les opérations
de U campagnç de 1748» î-e foi qui l'a-r
I
I
Vait fait duc de Gisors en 1742, lé créa
pair de France. Il était sur le point d'exé-
cuter un plan qui devait le rendre maître
de Turin , lorsqu'il apprit la malheureuse
affaire d'Exilés , où son frère fut tué. La
paix de 1748 ayant mis fin aux hostilités,
il continua à jouir de la confiance de
Louis XV , et devint ministre principal
en 1757- L'assiduité au travail, les mal-
heurs de la France, les soins qu'il prit
pour les réparer, le consumèrent peu à
peu, et il mourut le 26 janvier 1761 , en
chrétien et en sage. Le Père de Neuville
prononça son oraison funèbre , chef-d'œu-
vre d'éloquence et de sentiment, qui
sans flatterie et sans exagération , donne
de cet homme illustre la plus grande idée ;
en même temps que l'orateur s'arrête sur
des vérités sombres et salutaires fortement
prononcées. On a reproché au maréchal
de Belle-Ile d'avoir engagé le roi, malgré
toutes les remontrances du cardinal de
Fleury, à la guerre de 1741, qui ruina
la France sans aucun avantage , et lui fit
perdre sa considération morale et sociale
au dehors par la violation de la Pragma-
tique-Sanction solennellement jurée.
Dans les fonctions de son ministère on
l'a blâmé de s'attacher trop aux petits dé-
tails , et d'entrer dans tous les projets.
Son esprit systématique l'engagea à rece-
voir tous les plans qu'on lui présentait ,
et à protéger trop d'aventuriers ; mais il
retirait ses bontés dès qu'il s'apercevait
qu'on l'avait surpris. J'ai fait des fautes ,
disait-il quelquefois , mais je n'ai jamais
eu l'orgueil ridicule de ne pas en conve~
nir. Haut avec les grands , il portait dans
les cours étrangères toute la dignité
qu'exigeait la grandeur du maître qu'il
représentait; mais affable et prévenant
avec ceux qui étaient au dessous de lui,
il ne leur faisait point sentir le poids de
son autorité. Il aima les talens en homme
éclairé , mais non pas en ministre qui ne
protège les arts que par air. Le maréchal
de Belle-Ile était naturellement froid; ses
conversations n'étaient pas gaies , mais
ellesétaientinstructives, et il savait parler
avec netteté et bien raconter un fait. IN'é
sobre, il n'aima jamais ni le jeu , ni la
table ; mais ou ne peut dissimuler qu'il
FÔtl 407
èul beaucoup de penchant pour le beau-'
sexe. Par son testament il donna au roi
tous les biens qu'il avait reçus en échange
de Belle-Ile , à la charge de payer ses
dettes qui étaient considérables. Le ma-
réchal de Belle-Ile avait été marié deux
fois. Il eut de son second mariage avec
Marie-Casimire-Thérèse-Geneviève-Em-
manuelle de Bethune , un fils unique ,
Louis-Marie, né le 27 mars 1732, ap-
pelé le comte de Gisors, tué en 1758 à
l'armée du Rhin , dans la malheureuse
journée de Crevelt. Le Testament politi-
que , publié sous le nom du maréchal de
Belle-Ile, est une pièce fabriquée par
Chévrier et Maubert.
FOUCQUET ( Henri- Auguste , baron
LA Motte ) , fils de Charles de la Motte
Foucquet , gentilhomme normand , qui
s'était retiré en Hollande , après la révo-
cation de l'édit de Nantes , fut admis fort
jeune en qualité de page à la cour d'An-
halt-Dessau ; mais l'ardeur qu'il avait de
se distinguer dans le métier des armes ,
lui fit quitter secrètement la cour , et il
s'enrôla en qualité de simple soldat au
service de Prusse. Sa valeur l'éleva suc-
cessivement jusqu'au grade de général
d'infanterie. Il se distingua surtout pen-
dantla guerre de sept ans. Schwerin ayant
perdu la vie dans la sanglante bataille de
Prague , Foucquet remplaça ce héros :
une balle brisa dans sa main la garde de
son épée , et le blessa grièvement ; mais
il ne perdit point contenance , il se fit
lier l'épée à la main blessée , et continua
de commander l'aile gauche de l'armée,
qui , soutenue par un renfort de cavale-
rie , acheva la victoire. A la bataille de
Landshut , le 23 juin 1760, après 7 heures
de combat, il fut battu par Landon , et
fait prisonnier. Après la paix , il se rendit
à Brandebourg ; il y finit ses joui's le 2
mai 1773.
* FOUGERÊT ( Anne-Françoise Dou-
tremont ) , fondatrice de la Charité ma-
ternelle, était fille et petite -fille de ju-
risconsultes célèbres; elle fut mariée
fort jeune à M. Fougeret receveui'-général
des finances. Douée d'un cœur excellent
et d'une disposition à la bienfaisance,
que la religion augmentait encore che^
4o8 FOU
elle, l'abandon des enfans avait toujours
été pour son cœur maternel une des plus
honteuses plaies de l'hunianité. Les asiles
ouverts par saint Vincent de Paule étaient
encombrés , parce que la misère y pré-
cipitait les enfans légitimes avec ceux
qui n'ont point de famille à réclamer ;
beaucoup d'entre eux manquaient de
nourrices , et tous les soins des dignes
filles de saint Vincent ne pouvaient em-
pêcher qu'une sorte de contagion n'at-
teignît la plupart des enfans qui séjour-
naient à l'hospice. Pour remédier à ces
inconvéniens , madame Fougeret con-
çut l'idée d'une association qui aurait
pour but de secourir à domicile les mères
pauvres, afin qu'elles pussent nourrir et
élever elles-mêmes leurs enfans. Faisant
un appel aux mères de famille , elle eut
bientôt réuni un grand nombre de dames
les plus riches et les plus considérées de
la capitale. Le gouvernement et la fa-
mille royale encouragèrent de leurs bien-
faits cette philanthropique institution,
et dès la première année , le nombre des
enfans légitimes portés à l'hospice fut
considérablement diminué. Les régle-
mensquidirigentaujourd'hui les diverses
sociétés de charité maternelle, sont en-
core ceux que madame Fougeret avait
médités et établis en 1788. Sa prudente
prévoyance avait dès lors mis cette in-
stitution à l'abri des difficultés et des
dangers qui eussent résulté de la cessation
des secours , à l'époque oîi la révolution
frappa dans leur fortune ou dans leur per-
sonne presque toutes les dames associées à
cette œuvre. La Cliarilé înaternelle, dont
le nom même , si l'on considère l'époque
oîi il fut choisi , témoigne en faveur de
l'esprit religieux et sage de sa fondatrice ,
fut protégée par tous les gouvernemens
qui se sont succédé ; elle survécut à la ré-
publique, fut pompeusement adoptée
par l'empire, et sous nos rois elle a re-
trouvé près du trône la protection que
lui avait autrefois accordée Marie-Antoi-
nette. Cette reine avait accepté le titre
de fondatrice delà Charité maternelle , à
une époque bien rapprochée de celle de
ses malheurs. Moïse, sauvé des eaux par
une priiicessç. çt rendu à sa mère pour
FOU
qu*elle V allaitât, avait été le sujet ingé-
nieux du premier timbre adopté par la
société. Rien n'avait été négligé pour
faire reconnaître au peuple trompé tout
ce qu'il devait à la charité de la souve-
raine contre laquelle on l'animait sans
cesse. Les soins que prenait madame
Fougeret à cet égard lui procurèrent plu-
sieurs fois l'honneur d'être admise chez
la reine ; elle entendit ses plaintes, elle
vit couler ses larmes , et baigna des
siennes les mains de celte princesse in-
fortunée, sans avoir d'autre secours à lui
ofifrir que son dévouement et ses impuis-
sans efforts. Traînée à son tour dans les
prisons avec ses enfans, madame Fouge-
ret eut , après trente années de la plus
parfaite union , la douleur de voir périr
surl'échafaud un époux qui s'était associé
à toutes ses bonnes œuvres. Unique sou-
tien de sa famille , elle lutta constamment
pour elle contre la spoliation; et l'énergie
de ses plaintes étonna quelquefois ceux
qui en étaient les auteurs. Retirée à la
campagne au milieu de sa famille , ma-
dame Fougeret ne cessa point de faire le
bien ou d'en donner l'exemple ; elle
mourut le 13 novembre 1813. Combien
dans une biographie rencontre-t-on de
personnages qui ne doivent leur illustra-
tion qu'à la bienfaisance chrétienne ?
" FOUGEROUX ( Augusle-Denis ),
membre de l'académie des Sciences, né à
Paris le JO octobre 17 32 , et mort le 28
décembre 1789, était neveu du célèbre
Duhamel , et n'eut d'autre ambition que
de l'imiter. Comme lui, il parcourut
toutes les sciences , pour chercher dans
chacune ce qu'elle pouvait offrir à l'éco-
nomie rurale et aux arts, et ce qui pou-
vait contribuer à les perfectionner, il
parcourut l'Anjou et la Bretagne , pour
y examiner les carrières d'ardoise et les
'travaux qui s'y exécutent. Il voyagea en-
suite en Italie. On lui doit 1° Mémoire
sur la formation des as, 1760, in-8.
2° L'Art de tirer des carrières V ardoise,
de la fendre ci de la tailler, 17C2,
in-fol. 3" L'Art de travailler les cuirs
dorés, 1762, in-fol. 4° L'Art du tonne-
lier, in-fol. b" Recherches sur les ruines
d'Jferculanum, etc . , avec un traité sur la
1
fabrication des mosaïques , tîC9 , in-8.
G° L'Art du coutelier, 1772, 3 vol.
in-fol. 7° Observations faites sur les
côtes de Normandie , avec M. Tillet ,
1773, in-4. 8° Beaucoup de Mémoires
dans le recueil del'académie des Sciences.
FOUILLOUX ( Jacques du j , gentil-
homme poitevin , mort sous Charles IX ,
auquel il dédia son ouvrage sur la chasse,
Rouen, 1650 ou 1C56, Paris, 1063 , et
Poitiers, iGGl, in-i. Cet ouvrage , re-
marquable par sa naïveté et le ton de vé-
rité qui y l'ègne, est souvent cité par
BuiTon et Daubenton. Il a été traduit en
italien par César Parona. ( A la suite de
la Vénerie ou la Chasse , on trouve un
petit poème intitulé V Adolescence de
Jacques de Fouilloux, et qui n'est re-
marquable que par la belle simplicité du
stiie.)
FOUILLOUX ( Jacques ) , licencié de
Sorbonne , né à La Rochelle , et mort à
Paris en 1736, à 06 ans , se donna beau-
coup de mouvemens en faveur du jansé-
nisme. Il eut grande part à la première
édition de VAction de Dieu sur les
créatures , in-4 , ou G vol. in-1 2 ( Voyez
Boursier ) ; aux Quatre Gémissemens
sur Port-Royal , in-1 2 , aux grands
Hexaples , 1721 , 7 vol . in-4 ; à V Histoire
du Cas de conscience , 1705 , en 8 vol.
in-1 2 , et à plusieurs autres productions
polémiques , qu'il est inutile de faire
connaître, pai'ce qu'elles sont oubliées
ou qu'elles doivent l'être.
* FOULCOIE, en latin Fulcoius,
poète français du 11® siècle , naquit à
Beauvais vers l'an 1020. Il embrassa l'é-
tat ecclésiastique , mais il ne reçut que
le sous-diaconat II n'était pas seulement
un poète distingué pour le siècle où il
vivait , mais il était encore habile gram-
mairien et savant iurisconsulte : cepen-
dant il ne dut sa réputation qu'à son ta-
lent poétique. Il adressait ses vers aux
personnages les plus remarquables ; à
Manassé , "^vchevêque de Reims , aux
papes Alexandre II , Grégoire VU , et aux
principaux prélats de la cour de Rome.
Mais de toutes les personnes qu'il loua,
Manassé fut celui qui se montra le plus
reconnaissant ; FouJcoie trouva toujours
V.
FÔtî
409
en lui Un protecteur. Ce poète mourut
à Meaux, en 1083. Ses poésies, conser-
vées à la bibliothèque du roi , sont di-
visées en trois tomes, dont le premier
est intitulé: Z/fri/zn ; le second, Neu-
trum ; et le troisième, Utrumque. L'au-
teur anonyme d'une préface qu'on trouve
dans l'exemplaire de la bibliothèque ex-
plique ainsi ces titres singuliers : le pre
mier est intitulé Utrum , parce qu'il ne
contient que des pièces de peu d'étendue;
le second , Neulrum , parce que l'auteur
y a rassemblé des ouvrages plus impor-
tans que ceux du premier, mais infé-
rieurs à ceux du troisième. Ce sont des
vies des saintsdu diocèse de Meaux, mises
en vers. Le troisième enfin est intitulé
Utrumque , parce que Foulcoie y traite
de l'un et l'autre Testamensdnns un long-
poème. On sent que la versification de
Foulcoie , à cause du temps où il écrivait,
doit être très négligée. On ne trouve
dans ses poésies aucune trace de goût ni
de règle ; et s'il a été regardé de son
temps comme un poète célèbre, on ne
doit l'attribuer sans doute qu'à l'igno-
rance de son siècle.
FOULLON ( Jean-Erard ), jésuite , né
à Liège eu 1008 d'une famille noble,
prêcha avec applaudissement pendant
30 ans , et mourut recteur du collège de
Tournay le 25 octobre 1668.11 fut la
victime de sa charité, en servant les
pestiférés. L'Ecriture sainte , la morale
chrétienne et l'histoire de son pays fu-
rent les principaux objets de ses études.
Nous avons de lui : 1" Commcntarii liis-
toriciet morales inlibros Machahœorum,
Liège, 1659-1665, 2 vol. in-fol., es-
timés. 2° Ver a Ecclesia , omnium infide
errorum commune remedium , Liège ,
1662. 3" Historiée Leodiensis compen-
dium , Liège, 1655, très exact. 4" His-
toria Leodiensis, Liège, 1735, 3 vol.
in-fol. Les deux premiers volumes sont
du Père Foullon ; le troisième a pour
auteurs MM. de Crassier et de Louvrex,
éditeurs de cet ouvrage. Le Père Foul-
lon l'a poussée jusqu'en 1612 , et les con-
tinuateurs jusqu'au prince de Berghes.
C'est la meilleure Histoire que nous
ayons de la principauté de Liège.
26..
4io f'ôtf
FOULON ou Gnaphkk (Pierre Je),
né à Cormette , chassé de son monastère
pour son penchant à l'eutychianisme,
gagna les bonnes grâces de Zenon , gendre
de l'empereur Léon, et obtint par son
crédit le siège d'Antioche. Il répandit
toutes sortes d'erreurs , se maintint sur
son siège malgré plusieurs sentences de
déposition , et mourut en 488.
FOULON (Guillaume), Gnaphœus
( c'est son nom en grec ) , poète latin , né
à la Haie, mourut en 1568 , à ^'orden
en Frise, âgé de 7 5 ans. Il fit d'assez
plates comédies ; mais comme elles ne
sont pas communes, quelques curieux
les recherchent. On a de lui : Vita Joan-
nis Pistorii a Wocrden, Leyde, 1649,
in-8 ; Hypocrisis , tragi-comédie , 1544,
in-8; Misobarbarus, comédie. Acolastus
de Filio Prodigo , comédie , 1 554 , in-8,
etc. Il était protestant.
* FOULON ( N. . .), l'une dès premières
victimes de la révolution , naquit d'une
famille bourgeoise , vers 1730, sous le
ministère de M. de Choiseul. Il entra
dans l'administration , et fut successive-
ment commissaire des guerres , intendant
de l'armée pendant les campagnes de
1 7 56 , et conseiller d'état. Il était parvenu
à ce haut rang , lorsque IVecker se retira
le 12 juillet 1789 ; alors il fut nommé à
sa place contrôleur-général des finances ;
mais il ne put pas être installé dans ses
fonctions , la révolution du 1 4 juillet
l'ayant empêché d'en prendre possession.
Plusieurs fois la cour avait déjà pensé à
lui donner cet emploi important , car elle
était sûre de sa fidélité : mais il avait en
finances des idées si singulières qu'on
craignait de lui confier le trésor public.
Il avait émis ce principe que nous ne sau-
rions caractériser : c'est qu'alors pour
rttablir le crédit public il fallait faire
banqueroute. Cette opinion avait été di-
vulguée : elle avait indisposé contre lui
tous les créanciers de l'état ; et ceux qui
attendaient leur fortune d'un bouleverse-
ment , tous les agitateurs , tous les révo-
lutionnaires ( le nombre en était donsi-
dérab!e),augmentaientencore les craintes
en commentant ce système, et déversaient
sur son auteur toutes les haines publi-
t'ÔtJ
^ues : on lui prêta même d'autres prôpôâ
qui devaient encore aigrir davantage les
esprits. Ainsi on disait qu'un jour quel-
qu'un lui parlant de la misère du peuple,
dans ce temps où la disette se faisait sen-
tir et oîi le blé était devenu très cher , il
s'écria avec dédain ; hé bien! si cette
canaille rHa pas de pain, elle mangera du
foin. Foulon s'aperçut bientôt qu'il était
l'objet de l'animadversion des novateurs,
et que , s'il n'y prenait garde , il tombe-
rait sous leurs coups : en conséquence
il fit répandre le bruit de sa mort
pour échapper aux recherches de leur
haine ; il se retira au château de Viry
à quelques lieues de Paris. Mais les
paysans de cet endroit le trahirent, l'ar-
rêtèrent, l'insultèrent de mille façons:
en guise de bouquet que l'on portait à la
campagne les jours de fêtes, ils attachèrent
une poignée d'orties à sa boutonnière, et
derrière son dos ils placèrent une botte
de foin , pour lui rappeler de la manière
la plus injurieuse le motqu'on lui prêtait :
et c'est dans cet état qu'ils le livrèrent
aux émissaires de Paris qui le conduisirent
à l'Hôtél-de-Ville , après lui avoir fait
subir tontes sortes de tourmcns pendant
la route. Pour lui éviter de nouvelles in-
sultes ou même la mort dont le menaçait
la populace, M. de Lafayette ordonna
qu'on le conduisît en prison , et promit
qu'ensuite on ferait son procès. La mul-
titude fut d'abord satisfaite ; mais reve-
nant ensuite à des idées de cruauté que
la pensée de la justice lui avait fait un
instant abandonner , elle s'écria : qu'on
nous le livre , et nous en ferons justice
nous-mêmes. A peine Foulon arrivait-il
sur l'escalier de l'Hôtel-de- Ville que l'on
se jette sur lui , et qu'on l'entraîne sous
une lanterne à laquelle on Vaccroche
aussitôt. C'était le 22 juillet 1789. Cette
première victime de la révolution expira
bientôt. Sa tête fut séparée du tronc , et
tandis que les uns , la portant au bout
d'une pique, après lui avoir mis un bâillon
et lui avoir rempli la i)ouche de foin , si
rendirent ainsi au Palais-Royal , lesautre;i
traînaient dans la boue des rues le ca-
davre du malheureux Foulon. Il avait 75^
ans. Le même jour on arrêta son gendre
POtl
M. Berlhier de Sauvigny à Compîègne ;
la voiture qui le conduisait fut rencon-
trée par ces cannibales dans la rue Saint-
Denis : depuis ce moment jusqu'à son
arrivée sur la place de Grève , on lui fit
subir toute sorte d'injures; on lui présenta
même à plusieurs reprises la tête de Fou-
lon. Quelques circonstances louchant l'ar-
restation et les souffrances de Foulon et
de Berthier ne permettent pas de douter
que ces meurtres n'aient été préparés d'a-
vance. 11 faut lire dans les écrits du temps
l'histoire de ces horribles journées.
•FOULOûi (Nicolas), bénédictin de
la congrégation de St.-Maur , naquit à
Maxilly-sur-Saône le 4 mars 1742. Parti-
san du jansénisme , il ne s'arrêta point
dans ses erreurs ; il adopta encore celles
des convulsionnaires. Il était parent de
don Clément , savant bénédictin , né à
Bèze, près de Maxilly. Il est probable
que c'est cette parenté qui l'attira dans la
maison des Blancs-Manteaux à Paris où le
jansénisme continuait à dominer. Foulon
se lia aussi avec le Père Lambert , domi-
nicain livre aux mêmes erreurs , avec
Bonjour curé de Fareins, si connu par ses
scènes scandaleuses de crucifiement , et
avec tous les chefs de ce parti. On s'oc-
cupait beaucoup alors parmi eux de la
venue d^Elie , de la prochaine conver-
sion des juifs et du renouvellement dont
T Eglise avait besoin. Jeune et ardent,
Foulon adopta toutes ces rêveries , et ne
tarda pas à faire paraître une vie de St.-
Jtobert , abbe' de Malesme , avec un of-
fice propre , Troyes, 17 76, in-8 , et, peu
de temps après, un autre livre dans le
même genre avec ce titre : Prières par-
ticulières en forme d^ office eccle'siastique
^ pour demander à Dieu la conversion des
Juifs et le renouvellement de l'Eglise ,
Orléans, 1778, in-12 : dans ces deux
ouvrages et surtout dans le dernier , on
rencontre les idées favorites des appelans,
et l'ofiSce est fait dans le même sens ; car
il reproduit sous mille formes différentes
la vieillesse de V église , Ui défection des
pasteurs, V apostasie générale. Chargé
de rédiger le nouveau bréviaire de sa
congrégation , il prépara , de concert
fLyec quelques-uns de ses confrères , l'é-
FOU 4ii
dltîon qui fut publiée en 1787 en 4 vo-
lumes ; elle ne reçut pas l'approbation
du général des Bénédictins, et ne fut
point adoptée. L'éditeur n'avait pas jugé
convenable d'y placer les saints sortis
de l'ordre des jésuites. On y trouvait
de nouvelles litanies de N. S. et de la
sainte Vierge ; l'éloge de quelques jan-
sénistes et en particulier de Rondet y
avait été placé , ainsi qu'un tableau de
la religion dans lequel il était facile de
saisir les idées et le langage de la secte.
Foulon eut dans le principe une grande
rigidité de conduite ; il blâmait amère-
ment le moindre relâchement dans les
habitudes monacales : on dut être fort
surpris lorsqu'on le vit oublier lui-même
par une conduite légère qu'il apparte-
nait à un ordre religieux. Ses sorties fré-
quentes al laient déterminer ses supérieurs
à le faire passer dans une autre maison ,
lorsqu'il s'évada. Il s'était retiré à Mont-
morenci chez son ami le Père Cotte , an-
cien oratorien et curé intrus de ce lieu.
Peu de temps après il connut M""* Ma-
rotte du Coudray , fille d'un ancien
conseiller au Châtelet , et l'une des sec-
taires les plus rigides ; elle avait porté
l'austérité du jansénisme jusqu'à prendre
la détermination de ne jamais se marier.
Dom Foulon la fit changer d'avis ; le Père
Cotte avait épousé aussi sa sœur. On
ignore ce que devint Foulon pendant la
révolution. Il obtint une place d'huissier
au conseil des Cinq-cents, puis au Tribu-
nat et enfin au Sénat. Il conserva cette
dernière place jusqu'à sa mort survenue
le 13 juillet 1813. Il a publié les ouvra-
ges suivans : 1° Prières particulières en
forme d'once ecclésiastique pour de-
mander à Dieu la conversion des Juifs ,
et le renouvellement de l'Eglise en Fran-
ce , 1778, in-12; 2° Histoire élémen-
taire , philosophique et politique de l'an-
cienne Grèce , depuis l'établissement des
colonies jusqu'à la réduction de la Grèce
en provinces romaines, 1801, 2 vol.
in-8. Il avait annoncé des Histoires ro-
maines et de France sur le même plan ;
M. Grégoire dit qu'il a laisse en manu-
scrit un Traité fort étendu en faveur du ,
mariage des prêtres. VAmi de In. reli-
4i2 FOU
gion et du roi lui a consacra une notice
élendue et très intéressante dans le tome
55, page 305, 19 avril 1828.
* FOULONS (N.... de), ancien pro-
cureur du roi au présidial de Langres ,
avait rempli à la satisfaction publique
les fonctions de subdélégué de l'inten-
dance de Champagne et de président du
conseil général du département de la
Haute-Marne. Après avoir, à l'exemple
de sa famille , honoré la magistrature et
l'administi'ation pendant plus de trente
années , il s'était livré à la médecine pour
consacrer son temps aux habitans de la
campagne qui trouvaient gratuitement
chez lui non-seulement les remèdes et
tous les secours nécessaires à leur santé,
mais encore les conseils les plus utiles
pour leurs affaires d'intérêt. Sa vie a été
pleine de bonnes œuvres , et tout le pays
le regardait comme une seconde provi-
dence. Il est mort dans le mois de juin
1827 , dans sa terre de Barges, près de
Bourbonne-les-Bains.
FOULQUES I, comte d'Anjou , dit le
Roux , mort en 938 , réunit et gouverna
avec prudence toutes les terces de son
comté.
FOULQUES II, dit le Bon , fils du
précédent, mort à Tours en 958, fit dé-
fricher et cultiver avec soin les terres du
comté d'Anjou. Il s'appliqua à faire
fleurir la piété et les sciences dans ses
états. On dit que le roi Louis d'Outre-
mer , s'étant moqué de ce que Foulques
le Bon s'appliquait à l'étude et allait sou-
vent chanter au chœur , Foulques lui
écrivit ces mots : Sachez , Sire , qu'un
prince sans lettres est un âne couronne'.
( Foulques a laissé plusieurs Hymnes en
l'honneur de saint Martin. )
FOULQUES III , comte d'Anjou, dit
Nerra ou le Jérosolymitain , à cause de
deux voyages qu'il fit à la Terre-Sainte ,
succéda, l'an 987 , à Geoffroi son père.
Ce prince belliqueux , prudent et rusé ,
remporta divers avantages sur ses voi-
sins, et mourut à Metz le 23 juin 1040.
FOULQUES IV , dit le Rèchin , fils
du seigneur de Châteaulandon , et d'une
fille de Foulques III ( article précédent) ,
succéda l'an lOGO à son oncle maternel
FOU
Geoilfroi Martel. Il s'empara du Gàtinois
et de la Tourraine , qui étaient le partage
de son frère aîné , et s'abandonna au vin
et aux femmes. Il en épousa trois consé-
cutivement , en les répudiant l'une après
l'autre. Mais enfin la dernière, Bertrade
de Montford, le quitta pour Philippe I,
roi de France. Ses discussions violentes
avec Raoul archevêque de Tours le firent
excommunier : mais plus lard il rentra
en grâce avec l'Eglise. Il mourut en 1 109.
Il avait composé une Histoire des comtes
d'Anjou , dont il se trouve dans le Spi-
cile'ge de d'Achery un fragment , que
l'abbé de Marolles a traduit dans son
Histoire d'Anjou, 1C81 , in- 4.
FOULQUES , archevêque de Reims ,
succéda à Hincmar en 883 , tint un con-
cile en 892, où il fit reconnaître roi
Charles le Simple, âgé de quatorze ans.
On y menaça d'excommunication Bau-
douin , comte de Flandre , pour les usur-
pations des biens d'église , et pour avoir
maltraité des ministres de l'autel. Le roi
Charles ayant voulu dans la suite faire
alliance avec les Normands encore ido-
lâtres , Foulques lui fit des remontrances ,
qui paraissent n'être pas assez modérées.
Quelques critiques l'excusent, en disant
qu'il avait sauvé son prince encore en-
fant , des mains de ses ennemis ; qu'il
l'avait élevé et lui avait conservé la cou-
ronne, et que quoique ces services ne le
dispensassent ni de la fidélité , ni du res-
pect qu'il lui devait , ils pouvaient ce-
pendant faire tolérer de sa part certaines
expressions trop libres, dictées par le
zèle. Il fut assassiné par des vassaux de
Baudouin en 900. Ce prélat était recom-
mandable par ses connaissances et par
ses vertus.
FOULQUES, FoUQUKs, ou Foulquet,
évêque de Toulouse, natif de Marseille ,
s'acquit une grande réputation , et se fit
aimer des princes par ses poésies ingé-
nieuses en langue provençale. Il parut
avec éclat au 4* concile de Latran en,
1215, et s'y intéressa pour saint Do-
minique, son intime ami. Il mourut en,
1231.
FOUTAINE (Sir Andrew) , savant an-
tiquaire, dont nous avons un Traite' eu.-
I
FOtl
rieiu sur leé médailles de Saxe. On l'a
placé dans le Trc'sor des antiquités du
Nord, imprimé en latin à Londres en 3
vol. in-fol. (Il mourut le 4 septembre
1753, après avoir été vice-chambellan de
la reine d'Anfjleterre , gouverneur du
prince Guillaume, chevalier du bain et
conservateur de la monnaie.)
* FOUQUART ( Gabrielle ) , née à
Abbevillc en 15C8, est la fondatrice en
France des religieuses de Saint-François-
de-Paide. Elle avait eu depuis sa plus
tendre jeunesse un goût décide pour la
vie religieuse ; mais son père étant mort,
elle se trouva soiis la dépendance d'un
oncle qui la força de se marier à l'âge de
26 ans. Restée veuve après deux ans de
mariage , et maîtresse de son sort , elle
revint à sou premier dessein. Après avoir
donné quelques années à la réflexion,
elle prit l'habit de Saint-François-de-
Paule et prononça ses vœux à l'âge de 33
ans. Ayant alors réuni quelques dames
séculières , qui voulaient suivre son
exemple, elle fonda à Abbeville un mo-
nastère , sous le titre de Jésus-Maria ,
et ce fut la première maison de cet ordre
en France. Le pape Grégoire XV autorisa
cette fondation par une bulle du 10 juin
1623 , et la mère Fouquart en fut la pre-
mière supérieure ou correctrice. Celte
vertueuse fondatrice mourut en 1639.
* FOUQUERET , ou Foqueré ( Dom
Antoine-Michel) , né en 1640 à Château-
roux en Berri , embrassa l'ordre de Saint-
Benoit à l'âge de 1 7 ans , et prononça ses
vœux Je 3 octobre 1658, dans l'abbaye
de Saint-Augustin de Limoges. Après
avoir enseigne la rhétorique et le grec
dans le monastère de Mauriac en Au-
vergne , il fut employé en qualité de su-
périeur dans différentes maisons de son
ordre , et s'acquitta de ses fonctions avec
autant de zèle que de sagesse. Ayant ob-
tenu sa retraite eu 1693, il choisit pour
demeure l'abbaye de Saint-Faron dans la
ville de Meaux , et y mourut le 3 novem-
bre 1709, âgé de 69 ans. Il était de la
congrégation de Saint-Maur. On connaît
de lui : 1" Synodus bethlecmetica pro
reali prœsentia anno 1672 celebrata ,
grœce et latine , Paris, 1676 , in- 8. Cette
FOU 4i3
_ traduction n'ayant pas paru assez exacte,
Fouqueret en donna une seconde édition ,
et fit disparaître ce qu'il y avait de dé-
fectueux dans la première. Il se servit
pour ce travail des lumières du docteur
Arnault et du Père Combefis. Cette se-
conde édition parut sous le titre de
Synodus hierosolymitana. A la fin de
cet ouvrage , Fouqueret a fait imprimer
en grec et en latin , un écrit intitulé :
Dyonisii patriarchœ constantinopoli-
tani super calvinistarum erroribus ,
ac reali imprimis prœsentia , responsio ,
anno 1672 édita. Ces actes , dont l'au-
thenticité est attestée par'M. de Nointel,
ambassadeur de France à la Porte
ottomane , sont très importans , en ce
qu'ils prouvent la conformité de la
croyance de l'église grecque avec celle
de l'église romaine sur le dogme de la
présence réelle. 2" Celebris historia mo-
nothelitarum , Paris, 1678, in-8. Cet
ouvrage , dédié à l'évêque de Lavano , et
qui passe pour savant et profond, parut
sous le nom emprunté de Jean-Baptiste
Tagnamini.
* FOUQUET (Jean-François ) , jésuite
français et missionnaire à la Chine , arriva
dans ce pays le 25 juillet 1699 , et y de-
meura jusqu'en 1720. Les succès qu'il
obtint dans sa mission , lui valurent à
son retour le titre d'évêque d'Eleuthéro-
polis. Pendant son séjour en Chine, il
étudia long-temps le chou-king, et il fut,
de tousses confrères , celui qui se laissa
le plus éblouir par l'idée de retrouver
les mystères du christianisme renfermés
dans les caractères symboliques des
Chinois. Il prétend que leurs livres sacrés
offrent une perpétuelle allégorie avec les
objets de notre foi. Malgré cet esprit sys-
tématique , on ne peut lui refuser beau7
coup de mérite et de savoir. Ou lui doit
Tabula chronologica historiœ sinicœ.
C'est un tableau en trois feuilles où sont
placés , suivant l'ordre chronologique,
les noms des princes chinois et les événe-
mcns les plus remarquables de leur
règne. Ce tableau a été réimprimé à Augs-
bourg, en 1746 , en deux feuilles in-fol.
Ce qui en fait le principal mérite , c'est
l'explication des nianhao , ou noms d'an-
^^
4i4 Pov
nées, si nécessaires pour la lecture des
historiens chinois. On a encore de Fou-
quet une lettre au duc de La Force , in-
sérée dans les lettres édifiantes , oii il rend
compte des difficultés que les jésuites
éprouvèrent quand ils voulurent s'établir
dans la province de Kiamsi , et de la
manière dont les Chinois forment leurs
guerriers. Il s'étend particulièrement sur
les Bonzes, principaux adversaires des
missionnaires. (On a aussi de lui une
lettre au duc de la Force , datée de Naht-
chang-fou , dans la province de Kiamsi
le 26 novembre 1702 ; elle se trouve dans
le Recueil des lettres édifiantes , tome 5
de la 1 " édition , page 1 2 9 et tome 1 7 de
l'édition de 1781, page 95. )
*FOUQUET (Henri), célèbre pro-
fesseur de médecine , né en 1727 i> Jlont-
pellier , fut le premier qui enseigna dans
cette ville la médecine clinique : il eut
aussi la gloire de perfectionner un mode
d'enseignement déjà adopté dans les
plus célèbres universités étrangères. Il
est mort le 10 octobre 1806. On lui doit
plusieurs dissertations savantes ; la plus
remarquable est une Dissertation sur le
tissu muqueux. On a encore de lui un
Essai sur le pouls considère' par rapport
aux affections des principaux organes ,
1767, in-8 ; un Discours sur la clinique,
1803 , in-4 , et plusieurs articles impor-
tans dans l'Encyclopédie.
TOUQUIER-TAINVILLE ou Thin-
VILLE OU de Tain VILLE (Antoine-Quen-
tin), l'un des révolutionnaires les plus
odieux, naquit en 1747 , d'un riche cul-
tivateur d'Hérouelles , village près de
St.-Quentin. Lorsqu'il eut terminé ses
études dans cette dernière ville, il se
rendit à Paris , suivit quelque temps le
barreau comme avocat , et acheta ensuite
une charge de procureur au Châtelet.
Fouquier ne put vivre du produit de cet
emploi lucratif : il avait des habitudes
vicieuses qui le forçaient à des dépenses
exorbitantes. Poursuivi par ses nombreux
créanciers , il vendit sa place ; et quand
on lui en eut payé la valeur , il consacra
la somme , non à l'acquittement de ses
dettes , mais à ses débauches ordinaires.
Cette banqueroute frauduleuse ne fut que
POt
le moindre de ces crimes : la révolution
vint bientôt lui offrir la perspective d'un
heureux avenir , et comme le boulever-
sement des fortunes ne pouvait que lui
présenter des chances favorables , il fut
l'un des partisans les plus fougueux des
idées nouvelles proclamées alors. En at ■
tendant ce grand événement, il avait
cherché à tirer parti de quelques talens
acquis dans ses éludes ; il fit des vers
pour vivre ; il en composa même en l'hon-
neur de Louis XVL... Lorsqu'en 1789 les
esprits se préparèrent à la grande catastro-
phe dont lesouvenir glace encore d'effroi,
Fouquier ne joua d'abord qu'un rôle su-
balterne ; mais sa voix se fit peu à peu
entendre dans les clubs, et la haine qu'il
ne déguisait point pour la famille royale,
la cour, les ministres , les honnêtes gens
et surtout les riches, le fit remarquer
des chefs du parti qui virent en lui un
homme dont la coopération leur serait
utile. Après la journée du 10 août 1792
qui renversa le trône , Fouquier cria plus
fort qu'auparavant ; car jusqu'alors il -
avait été quelque peu retenu par la crain-
te de voir le gouvernement royal vaincre \
les projets des factieux. Il ne tarda pas ;
à être employé au service des Monta-
gnards qui cherchaient partout des bour-
reaux pour hâter leur horrible projet d'e-
puration ; car l'on sait que leur but était
d'abattre les têtes de tous ceux qui ne
partageaient point leurs sanguinaires opi-
nions. Fouquier fut nommé juré au tri-
bunal révolutionnaire : il avait parfaite-
ment entendu le mot d'ordre ; et docile
à l'injonction de ses supérieurs, il votait
dans toutes les causes pour la peine de
mort. Ses maîtres et Robespierre en par-
ticulier, ayant vu quel parti avantageux
ils pouvaient tirer d'un tel homme, le ^
nommèrent accusateur public près le
même tribunal. Le rôle de biographe de-
vient ici d'une difficulté insurmontable ;
c'est avec du sang qu'est écrite l'histoire m
d'un pareil monstre. Aucun accusé ne ■
sortit de son tribunal que pour aller à la
mort. On vit des individus amenés pour
d'autres ; l'erreur était manifeste : n'im-
porte, ils furent envoyés au supplice.
La chose ne serait pas croyable , s'il n'é-
fotl
tait facile d'en citer plusieurs exemples :
un nommé Gamache fut amené devant
le tribunal : l'huissier fit remarquer qu'il
y avait deux détenus de ce nom , et que
l'atïaire qu'on allait juger, concernait
celui qui était alors en prison , et non
celui que l'on avait sous les yeux : c'est
égal, ditFouquier , celui-ci vaut autant
que l'autre ; il l'envoya à l'cchafaud. Une
veuve Maillet, ayant été conduite devant
le tribunal pour M""" la duchesse de Mail-
lé , Fouquier lui-même s'aperçut de l'er-
reur dans l'interrogatoire : n'importe ,
dit-il , ce n'est pas toi que l'on voulait
juger, mais autant vaut aujourd'hui
que demain , et ce fut une victime de
plus. Tous les matins on voyait an-iver
devant le palais une grande quantité de
charretles pour conduire les condamnés
à l'échafaud. Comme on imputait à tous
les accusés le même crime , Fouquier fit
imprimer , pour avoir plus tôt fait , les
actes d'accusation dans lesquels on se
bornait à ajouter les noms. Ce n'était
plus le jury qui prononçait , c'était Fou-
quier dont il n'était que l'écho. Et quand
on songe qu'à un tel excès de barbarie se
joignait encore la plus atroce dérision ,
on ne peut s'empêcher de crier à l'abo-
mination. Ainsi un malheureux vieillard,
qui avait eu la langue paralysée , ne pou-
vant répondre aux questions que lui adres-
sait Fouquier, un de ses collègues fit re-
marquer le défaut qui empêchait cet
accusé de parler : ce n'est pas sa langue
qu'il me faut, répondit Fouquier, c'est
sa tête. On raconte encore qu'un jour
Fouquier envoya demander un officier
Corse déjà très âgé, enfermé dans la prison
du Luxembourg : comme il ne vint point,
un jeune étourdi qui portait un nom
à peu près semblable , se présenta à sa
place ; conduit au tribunal , ce jeune
homme n'en sortit que pour aller à l'é-
chafaud. Mesdames de Ste. -Amarante ,
traînées devant Fouquier, osèrent faire
preuve d'une noble contenance et d'un
courage héroïque ; Fouquier en avait été
étonné lui-même ; mais il avait dit :
quelle effronterie', il faut que j'aille les
i'oir monter sur l'e'chafaud, afin derrC as-
surer si rcellement elles conserveront
leur caractère jusqu'à ta fin ; j'irai,
dussé-je me passer de dîner. Quelquefois
Fouquier affectait un certain respect pour
les formes de la justice , et il faisait en-
tendre des témoins ; mais ces témoins
n'étaient autres que des hommes gagés ,
connus dans les prisons sous le nom de
moutons , et leurs dépositions mensongè-
res venaient servir de bases à ses sanglan-
tes condamnations. On rapporte qu'un
jour un de ces témoins que Fouquier n'a-
vait point encore vu , et dont par consé-
quent il n'était point sûr, demanda à
déposer : l'accusateur public le regarda
d'un air inquiet et osa lui dire : si tu as
à déposer contre T accusé, tu peux parler-,
si ce que tu veux dire est en sa faveur ,
tu n'as pas la parole -. au reste, ajouta-
t-il , à demi-voix , regarde-moi et tu
sauras ce que tu dois faire. Dans les
prétendues conspirations de prisons qui
ont fait périr tant d'innocentes victimes,
deux de ces faux témoins comparaissaient
comme complices : Fouquier oublia de
donner aux juges le mot qui devait les
avertir du rôle que jouaient ces deux
moutons; ils furent condamnés à mort
avec les autres accusés : ces deux té-
moins réclamèrent aussitôt auprès de
Fouquier qui dit en jurant : c'est un ou-
bli , mais c'est égal : pour cette fois cela
passera comme ça ; et les deux mou-
tons allèrent à l'échafaud. Les membres
qui composaient cet atroce tribunal se
réunissaient toutes les semaines chez
Lecointre , l'un des députés les plus
fougueux de la Convention, et c'était,
au milieu d'un repas .splendide, qu'ils
discutaient leurs listes de proscription.
Tous les matins, ils se réunissaient dans
un café voisin de la conciergerie ; et tout
en déjeunant ils plaisantaient sur les
victimes de la veille et sur celles du jour.
Fouquier était surtout jaloux de la gloire
qu'acquéraient ses collègues par leurs
sanglans exploits : j'ai fait gagner cette
semaine , disait-il , tant de millions à la
république : la semaine prochaine , je
lui en ferai gagner davantage -. je dé-
culotterai encore un' bien plus grand
nombre de riches. Mais l'une des pre-
mières victimes de Fouquier, la plus
4i6 T6V
auguste avec M""" Elisabeth, fut l'infor-
tunée Marie- Antoinette : jamais accusé
ne fut l'objet d'un acharnement plus
odieux : jamais monstre ne fit paraître
autant d'atrocité : il fallait un sang-
royal pour abreuver ce tigre. Ce fut lui
qui rédigea l'acte d'accusation de cette
princesse : donnant carrière à ses idées
extravagantes , et voulant sans doute
chercher dans un horrible scandale une
immortalité qui ne pouvait que le cou-
vrir de honte , il accumula sur le compte
de la reine toutes les infamies , toutes
les horreurs , toutes les absurdités , enfin
tout ce que l'on peut imaginer de plus
révoltant en politique et en morale ; il
en fit une Je'sabel , une Messaline , une
Fvédcgonde. La reine pleine de courage
chercha d'abord à se justifier; elle re-
poussa avec Une noble indignation les
attaques de son lâche accusateur ; mais
lorsqu'elle en vint à celte partie de l'ac-
cusation dans laquelle on lui reprochait
d'avoir outrage la nature en corrompant
le prince royal, elle se tourna du côté
de l'auditoire , et , d'un ton pénétré, elle
fit entendre ces simples et sublimes pa-
roles : Teii appelle à toutes les mères'....
( Voyez Marie-Antoinette. ) On sait que
Fouquier parvint à obtenir sa tête. A
peine cette œuvre de scélératesse était-
elle consommée , qu'il fut chargé de
suivre le procès des 22 Girondins que
la Convention , subjuguée par les Mon-
tagnards, envoyait au tribunal révolu-
tionnaire. Jamais il ne fit preuve d'aussi
peu de talens oratoires ; il représenta les
accusés comme royalistes , quoique par-
mi eux il y en eût f(ui eussent voté la
mort du roi ; et , par une contradiction
encore plus choquante , il leur reprocha
d'être fédéralistes , c'est-à-dire , de ten-
dre à établir une république semblable
à celle des Etats-Unis d'Amérique. Parmi
ces Girondins , il y en avait quelques-
uns qui étaient doués de beaucoup d'élo-
quence , et qui repoussèrent avec succès
l'accusation intentée contre eux , et ils
produisirent un effet si grand que , pour
la première fois , les juges du tribunal
révolutionnaire hésitèrent, incerlainss'ils
condamneraient ou absoudraient ; Fou-
fôû
quiér consulta la Convention qui , silr k
motion de Billaud-Varennes , décida que
le tribunal devait juger les Girondins
révolutionnairement ; ils furent jugés re-
volutiontiairement , c'est-à-dire qu'ils al-
lèrent à l'échafaud. C'est de cette époque
que date le f/ouveriicment révolution-
naire qui répandit tant de sang , et dont
Fouquier fut l'un des agens les plus ac-
tifs. Toutes les opinions purent compter
leurs victimes: royalistes, constitution-
nels de 1791 , fédératifs, modérés, Gi-
rondins, Montagnards, etc., ont été re-
présentés successivement sur l'échafaud
comme ils l'avaient été dans les assemblées
législatives : ces jugemens , ou ces bou-
cheries, durèrent jusqu'à la chute de Ro-
bespierre ( 9 thermidor, 27 juillet 1794).
En apprenant la ruine de son bienfaiteur,
Fouquier dit : nul changement pour
nous , car il faut que la justice ait son
cours ; et en même temps il envoya au
supplice 42 personnes dont plusieurs
étaient des habitans recommandables de
Paris. Il fut chargé après l'arrestation de
Robespierre de constater en jtersonne
l'identité et de requérir la condamnation
de son protecteur, ainsi quecelle des juges
du tribunal révolutionnaire qui étaient ses
créatures , de ses amis et de ses complices.
Il eut l'inexplicable audace de conduire le
chefdesMonlagnardsau supplice, et même
de venir à 4a barre de la Convention pour
la féliciter de ce grand acte de justice.
Dans ce moment Barrère monta à la tri-
bune, et proposa de former un nouveau
tribunal révolutionnaire et de continuer
le même système de terreur : en même
temps il désigna pour accusateur public
Fouquier ; à ce nom mille voix s'élevèrent
pour s'opposer à un tel choix. Frérou,
qui avait aussi une triste célébrité , mais
à qui il restait encore assez de pudeur
pour ne pas consentir à ce que l'on accor-
dât cet emploi à un tel monstre, prit aus-
sitôt la parole, énuméra les crimes de
Fouquier et conclut ainsi : je demande
que Fouquier aille cuver dans les enfers
tout le sang dont il s'est enivre'. Peu de
jours après Fouquier fut destitué et dé ■
crété d'accusation pour avoir envoyé à
la mort sans arrêt 42 prisonniers du
FOU
Luxembourg. Cependant il ne fut mis éii
jugement que le mois d'avril suivant.
L'acte d'accusation formé contre lui fait
dresser d'horreur les cheveux sur la tête.
'Voyez V Histoire de France de Mongail-
lard, tome " , page 100 jusqu'à 105 de
l'édition in-1 2. Fouquier montra dans les
débats toute l'audace d'un scélérat con-
sommé. « La Convention , dit-il , a mis
» la terreur à l'ordre du jour; elle a pro-
» clamé l'extermination des rebelles ; les
)) comités me les envoyaient pour que
» je remplisse les formalités du jugement ;
» je n'ai fait qu'obéir à vos ordres , ci-
» toyens représentans , et vous m'accu-
» sez ! Lequel de vous m'a fait entendre
M une parole de réprimandes ? Le sang
» découlait de la bouche de tous vos ora-
» teurs , et vos décrets surpassaient en-
» core votre tribune. Si je snis coupable,
» vous l'êtes tous , et j'accuse l'Assemblée
» entière. Je n'ai été que la hache de la
j) Convention , et punit-on une hache ? »
Son procès dura 41 jours : 400 témoins
furent entendus à charge et à décharge ;
1 5 de ses complices furent condamnés à
mort et conduits avec lui à l'échafaud ;
il fut exécuté le dernier. Dans le trajet
de la conciergerie à la place de Grève ,
la charrette ayant été forcée de s'arrêter
deux fois, il répondit aux huées de la
multitude par d'ignobles grimaces , et
lorsqu'on criait : tu n'as pas la parole ,
mot dont il se servait quand il voulait
empêcher les accusés de se justifier , il
crachait sur les spectateurs , proférait
d'horribles juremens et ajoutait .- Canail-
le , vas donc chercher à la section tes
trois onces de pain ; moi, je m'en vas le
ventre plein. Pendant son procès il avait
publié un Mémoire pourD . Fouquier Tin-
ville , tx~accusateur public ,prcs le tri-
bunal révolutionnaire établi à Paris , et
tendu volontairement à la conciergerie
le jour du décret qui ordonne son arres-
tation , in-4 de 20 pages : en lisant ce
titre , on voit en frémissant que , s'il eût
voulu, ce monstre eût échappé à la jus-
• tice humaine. « Profondément artificieux,
» dit Mercier , habile à supposer le cri-
» me, à controuver des faits, il montra
j» dans son interrogatoire une présence
V.
vm 4i7
)) d'esprit imperturbable. Wacé devant
» le tribunal oîi il avait accusé tant de
» victimes, il écrivait sans cesse; mais,
•» comme un Argus , il était tout yeux et
» tout oreilles ; et , en écrivant , pas un
» mot du président , d'un accusé , d'un
» témoin , d'un juge , de l'accusateur
M public , ne lui échappait. Il affecta
» de dormir pendant le résumé de l'ac-
» cusateur public , comme pour avoir
» l'air calme , tandis que l'enfer était
» dans son cœur. Son regard fixe faisait
» malgré soi baisser les yeux ; lorsqu'il
» s'apprêtait à parler , il fronçait le sour-
w cil et plissait le front ; sa voix était
» haute , rude et menaçante. Il niait
)) d'une voix ferme sa signature , et ne
» tremblait pas devant le témoin accu-
)> sateur. Quand ou le conduisit au sup-
» plice, son front dur comme le marbre,
)) défia tous les regards de la multitude ;
)) on le vit même sourire et proférer des
» paroles menaçantes Au pied de l'écha-
» faud , il sembla pour la première fois
w éprouver des remords , et il trembla en
M y montant. » Fouquier avait la tête
ronde , les cheveux noirs et unis, le front
étroit et blême , les yeux petits et ronds,
le visage plein et grêlé , le regard tantôt
fixe, tantôt oblique.
FOUQUIÈRES (Jacques), peintre,
né à Anvers vers l'an 1 680, élève de Breu-
ghel le paysagiste, et deRubens qui l'em-
ployait quelquefois à ses tableaux , tra-
vailla au Louvre sous Louis XllI. Ce mo-
narque l'anoblit. Les airs de qualité qu'il
prit depuis, le firent appeler par dérision
le baron deFouquières. Il ne peignit pres-
que plus, crainte de déroger à sa noblesse;
et dès qu'il prenait le pinceau, il ne man-
quait pas de ceindre sou épée. Il mourut
pauvre en 1621. Ce peintre a également
réussi dans les grands morceaux et dans
les petits. Il était excellent paysagiste.
Son coloris est d'une fraîcheur admira-
ble.
FOUR (Don Thomas du ) , bénédictin
de St.-Maur , a laissé une Grammaire
hébraïque, in-8 , fort méthodique, Paris,
164i. Il mourut à Jumiége en 1G47, par-
venu à peine à sa 34* année. Sa science
et sa piété étaient dans un degré égal.
25
^
4t8 JPÔtî
Nous avons encore de lui un Testament
spirituel pour servir de préparation à la
mort, in-1 i ; et quelques autres ouvrages
de piété.
FOUR (Philijppe-Sylvestre du ), habile
antiquaire, et marchand droguiste à Lyon,
était de Mauosque. Il entretenait com-
merce de lettres avec tous les savans anti-
quaires de son temps et principalement
avec Jacques Spon , qui lui communi-
quait ses lumières, et auquel il ouvrait
généreusement sa bourse. Du Four était
riche, et il faisait surtout de grandes li-
béralités à ceux de sa secte. Après la ré-
vocation de ledit de Nantes , il se retira
dans les pays étrangers. Il mourut à Ve-
vey en Suisse, en 1685, à 63 ans. On a
de lui 1° Instruction morale d'un père à
son fils qui part pour un long voyage ,
in-1 2. 2" Traités nouveaux et curieux du
Cafe\ du Thé et du C/iocolat, in-1 2. Il
approuve l'usage de ces boissons , mais
avec quelques restrictions. Son stile est
assez mauvais , et ses raisounemcns ne
sont pas toujours concluans.
FOUR (Charles du), curé deSt.-Ma-
clou à Rouen , et ensuite abbé d'Aulnay ,
mort en 1679 , s'est fait connaître par ses
disputes avec le Père Brisacier , et par
son zèle contre la morale relâchée. Il est
auteur de divers écrits ecclésiastiques ou
polémiques. On ne les lit plus.
* FOURCROY ( Antoine-François de },
chimiste célèbre , naquit à Paris le 1 5
juin 1755, d'un père qui appartenait à
une famille noble mais pauvre, et qui,
après avoir été pharmacien de la maison
du duc d'Orléans , perdit sa charge et le
droit d'exercer sa profession dans la ca-
pitale , par suite de la demande qu'en
fit , en vertu de certains arrangcmens ,
la corporation des apothicaires. Ce mal-
heur mit dans une gène très grande toute
la famille de Fourcroy qui continua néan-
moins ses études et les termina d'une
manière brillante. Il entra dans un bu-
reau, et peut-être y aurait-il végété d'une
manière obscure pendant toute sa vie,
si les conseils et même les secours de
Wicq-d'Azir , l'ami de sa famille , ne
l'eu-ssent déterminé à embrasser une autre
carrière. Fourcroy suivit l'école de mé-
decine , et le grand anatomiste qui était
son bienfaiteur dirigea ses premiers pas
dans cette nouvelle route : en peu de
temps Fourcroy fut dans le cas d'être
médecin. Peu s'en fallut qu'il ne fût ar-
rêté par le besoin d'argent. Le docteur
Diest avait légué à la faculté de médecine
des fonds pour qu'elle accordât tous les
deux ansdcs licences gratuites à l'étudiant
pauvre qui le mériterait le mieux : Four-
croy concourut en 1 7 80, mais une injustice
criante, fruit de l'esprit de parti qui divi-
sait la faculté et la société royale de mé-
decine, lui enleva celte ressource , et ce
fut avec le produit d'une collecte faite
dans le sein de cette dernière compagnie
qu'il paya ses frais d'examen et de diplô-
me. Tout en pratiquant la médecine ,
Fourcroy s'adonnait à la chimie. Elève de
Bucquet , il fut chargé plusieurs fois de
remplacer ce professeur qui lui procura
même un amphitéâtre pour faire des cours
particuliers. Fourcroy était déjà savant
dans cette partie des sciences exactes ; il
était en outre habile démonstrateur :
le timbre agréable de sa voix , la pureté
et l'élégance de son langage , la facilité ,
la clarté et la chaleur de son élocution
charmaient son nombreux auditoire , et
souvent on voyait une foule de person-
nes étrangères aux connaissances chi-
miques assister à ses leçons , unique-
ment pour avoir le plaisir de l'entendre.
Bientôt la réputation de Fourcroy s'éten-
dit au loin, et, en 1784, après la mort de
Macquer, Buffon le nomma à la chaire de
cliimie du jardin du roi, et cet habile pro-
fesseur enseigna cette science avec la plus
grande distinction pendant 25 ans. Admis
en 1 7 8 5 à l'académie des Sciences ( section
d'analomie } , il passa bientôt à la section
de chimie où il lui convenait plus de se
trouver. Il fut aussi de la société de
Lavoisier, et travailla avec lui aux grandes
expériences qui lui valurent une si bril
lante renommée. Jusqu'à l'époque oùj
éclata la révolution, Fourcroy, vécut tran-
quille et loin des affaires. Alors mécon-
tent de la cour dont il croyait avoir été
négligé , il se montra dans les assemblées
populaires, et fut nommé en 1792 député
de Paris à la Convention nationale où il
1
I
FOU
ne siégea toutefois qu'après le 21 janvier ,
*n remplacement du trop fameux Marat.
11 ne monta à la tribune que pour des
questions d'administration intérieure et
d'instruction publique. Tant que dura la
dictature de Robespierre , il fut membre
du comité d'enseignement national et
de celui des armes , et il ne s'occupa qu'à
rétablir l'instruction publique et à créer
de nouveaux moyens de défense. Il pro-
posa de rappeler plusieurs savans qui
étaient expatriés ou qui gémissaient dans
les fers ; dans la liste qu'il présenta on ne
vit point le nom du célèbre Lavoisier, et
lorsque ce savant fut condamné à périr
sur un cchafaud , on lui reprocha de n'a-
voir pas sauvé un homme qui lui inspi-
rait sans doute de la jalousie , parce qu'en
efifet le talent de Lavoisier était plus
beau que le sien. Mais cette accusation
nous paraît trop grave , pour l'admettre
inconsidérément et sans preuve : l'àrae de
Fourcroy était trop élevée pour avoir la
pensée d'une pareille infamie, et nous som-
mes disposés à croire que cette inculpa-
tion est une calomnie. Quoi qu'il en soit,
Fourcroy fut douloureusement affecté de
ce reproche qui , dans plus d'une occa-
sion, fut répété avec amertume. Après la
dissolution de la Convention, il entra
dans le conseil des Anciens et, à la suite
du 18 brumaire , il iit partie du conseil
d'état. En 1801 il fut chargé de la direc-
tion générale de l'instruction publique :
ce fut lui qui substitua au pi an d'instruc-
tion organisé en l'an 3 le système qui a
présidé à l'établissement de l'université :
il rédigea tous les réglemens et tous les
projets relatifs à l'enseignement , établit
les écoles de médecine de Paris, de Mont-
pellier et de Strasbourg, créa 12 écoles
de droit , organisa plus de trente lycées,
aujourd'hui collèges royaux , et plus de
300 collèges communaux. Chargé de pré-
parer les décrets sur l'établissement de
l'université, il recommença 23 fois ce pé-
nible travail sans pouvoir obtenir l'ap-
probation du ministère. Ce désagrément
joint à d'autres ennuis excitèrent son mé-
contentement : il osa s'en plaindre, et on
le disgracia. Ce fut Fontanes qui obtint la
^tectioQ de l'université en 1808. Four-,
FOU 4tg
croy fut sensible à cette exclusion, iltomba
dans une mélancolie que ses amis essayè-
rent en vain de combattre. L'un d'eux,
Corvisart , crut qu'un remède moral vau-
drait mieux que tous les médicamens , et
un jour qu'il avait occasion de parler à
Buonaparte du chagrin qui souvent était
une maladie mortelle, celui-ci parut dou-
ter de cette vérité dont cependant il put se
procurer la preuve à plusieurs reprises.
Oui, sire, dit Corvisart, on meurt de cha-
grin , et je connais quelqu'un qui dans
ce moment meurt de cette maladie : et qui
donc reprit vivement Buonaparte ? C'est
Fourcroy, sire. — Vous croyez;... Mais ras-
surez-vous , je me suis occupé de sa gué-
rison. Allez levoir etvousme rapporterez
de ses nouvelles. — Il avait en effet signé
plusieurs jours auparavant une dotation
de 20,000 fr. , en faveur de Fourcroy. Il
était trop tard; Fourcroy mourut pendant
cette conversation : c'était le 16 décembre
1809. Son titre de comte et sa dotation
passèrent à son fils qui avait embrassé la
carrière des armes , et qui mourut hono-
rablement sur le champ de bataille de
Lutzen. Fourcroy était membre de l'Ins-
titut, et faisait partie de toutes les sociétés
savantes de la capitale , et de plusieurs
académies de province et de l'étranger.
Outre la chaire de chimie qu'il avait au
jardin des plantes, il occupait encore celle
de l'Ecole polythecnique , et plusieurs
fois il donna un cours à l'Athénée. Il
s'honorait de son titre de professeur , et
il le préferait à tous ceux que les circons-
tances lui donnèrent. Il fut un-des inven-
teurs de cette nouvelle nomenclature qui
est elle-même une analyse de la science,
et a le mérite de définir les substances
qu'elle désigne. Il a laissé plusieurs ou-
vrages très ■ estimés parmi lesquels on
remarque son Cours de chimie ou Leçons
d'histoire naturelle et de chimie, qui est
l'abrégé de son enseignement, 1780,
2 vol. in-8. Six éditions publiées en 20
ans prouvent assez le talent avec lequel
la matière y est traitée : elles constatent
aussi les progrès que cette science a faits
pendant cette espace de temps ; car Fourr
croy augmenta son ouvrage à mesure que
les autres savans faisaient de nouvellçs
420 POU
découvertes. La dernière édition a G vol.
in-4 ou 1 1 vol. in-8 , et a. pour titre Sys-
tème des connaissances chimiques et de
leur application aux phe'nomènes de la
nature et de Part. 2° Philosoph. clmni-
que, 1792, 1795 et 180G, trad. presque
en toutes les langues et même en grec
moderne ; 3° Armlyse de l'eau sulfureuse
d'Enghien, 1738, 1 vol. in-8. i° Essai
sur les maladies des artisans , trad. du
latin de Romazzini, avec notes et addi-
tions, 1777 , in-12. 5° L'Art de connaî-
tre et d'employer les me'dicamens dans
les maladies qui attaquent le corps hu-
main, 1785, 2 vol. in-8. 6° Essai sur
le phlogistique et les acides, 1788, in-8.
7" Ze Médecin éclairé par les sciences
physiques, 1792, 4 vol. in-8. 8" Pro-
cédé pour extraire la soude du sel ma-
rin, 1795, in-4. 9° Tableaux synopti-
ques de chimie, 1800-1805, in-fol. Il a
fourni en outre aux Annales de chimie et
a d'autres journaux, ainsi qu'aux revues
de diverses sociétés savantes , plus de 1 50
mémoires roulant tous sur des expériences
' qu'il avait faites. On regarde comme les
plus importantes celles qui ont rapport à
la découverte de plusieurs composés qui
détonnent par la simple percussion ; aux
procédés propres à perfectionner l'ana-
lyse des eaux sulfureuses , à la séparation
du cuivre , de l'étain et aux perfectionne-
mens des analyses végétales. Son éloge a
été fait par BI. Palissot de Beauvais ,1810,
in-4, et par M. Cuvier dans les Mém. de
l'Institut.
"FOURCROY DE RAMECOURT
(Charles-René), ingénieur, naquit à
Paris le 19 janvier 1715, eteut pour père
un avocat célèbre : destiné lui-même au
barreau dès son enfance, il étudia le droit
pour plaire à sa famille ; mais entraîné
par un penchant irrésistible vers les scien-
ces , il s'y livra en secret avec une telle
application, qu'il acquit en peu de temps
les connaissances exigéesalors pour entrer
dans le génie. Admis dans ce corps en 17 35,
à l'âge de 20 ans, après un examen très
brillant, il fit plusieurs campagnes pen-
dant la guerre de 1740 sous les ordres
du maréchal d'Asfeld. Vingt ans après,
çp J16< , pendant l?i guerre de sept ans,
FOU
il commanda le corps des ingénieurs des
côtes de Bretagne, il fit ensuite la cam-
pagne de Portugal et se trouva en 1764
au siège d'Almeida. Lorsque la paix lui eut
permis de reprendre les études du cabi-
net , il s'appliqua avec une nouvelle ar-
deur à perfectionner ses connaissances ,
et fut employé successivement à Calais,
dans le Roussillon , en Corse et devint
maréchal-de-camp ; enfin le comte de
St.-Germainvoulantattacher au ministère
de la guerre un officier supérieur , l'ap-
pela comme le plus digne de remplir la
place de directeur de la division du corps
du génie. En 1776 il fut nommé in.spec-
teur-général de son armée , et mourut à
Paris le 12 janvier 1791. On a de lui
1° L'Art du tuilier-briquetier et celui
du chaufournier, dans le recueil des des-
criptions publiées par l'académie des
sciences dont il était membre. 2° Mé-
moire sur la fortification perpendicu-
laire, Paris , 1786. 3" Plan de communi-
cation entre V Escaut, laSambre, l'Oise,
la Meuse , la Moselle et le Rliin , pour
réunir toutes les parties intérieures de
la France ; 4" plusieurs Mémoires, dans
le recueil de l'académie des Sciences. Il
a enrichi de remarques et de descriptions
les ouvrages des savans avec lesquels il
était lié, el notamment le Traité des pê-
ches et le Traité des forêts. L'académie
des Sciences lui donna le titre d'associé
libre.
* FOURCROY DEGUILLERVILLE
( Jean-Louis de ) , frère du précédent , né
à Paris en 1717 , entra dans la compa-
gnie des cadets gentils-hommes à Roche-
fort, et partit avec le grade d'officier d'ar-
tillerie pour St.-Domingue où il demeura
vingt ans. De retour en France, il acheta
une charge de conseiller au bailliage de
Clermont-sur-Oisc ; il fut ensuite juge au
tribunal qui remplaça le bailliage au mo-
ment de la révolution, el mourut à Cler-
mont en 1799. On a de lui 1" Lettre sur
l'éducation physique des enfans du pre-
mier âge, Paris , 1770, in-1 2. 2° Les en-
fans élevés dans l'ordre de la nature, ou
Abrégé de l'histoire naturelle des enfans <
du premier âge , à V usage des pères etj^
ntères de famille, Pww, 178? , W'|?,,
FOU
Cet excellent ouvrage a été traduit en
allemand par Cramer Lubeck, 1781, 2
vol. in-8.
* FOURIER (Jean-Baptisle-Joseph,
baron), secrétaire perpétuel de l'acadé-
mie des Sciences, membre de l'académie
française, naquit à Auxerre le 21 mars
1768, d'une famille originaire de Lor-
raine , qui s'honorait de compter parmi
ses membres Pierre Fourier , réformateur
et général de l'ordre des chanoines régu-
liers. Placé fort jeune à l'école militaire
établie à Auxerre , il fit en peu de temps
et avec succès ses premières études. Dès
l'âge de 13 ans, époque oîi il les eut
terminées , il s'adonna sérieusement aux
mathématiques, sans toutefois négliger
la littérature : à 1 8 ans il avait publié
un mémoire oii sont consignées les
découvertes mathématiques qu'il avait
déjà faites. Les savans y trouvèrent le
génie précoce de Pascal , et le jeune ma-
thématicien fut récompensé de ses pre-
miers travaux par une chaire dans l'école
oîi il avait été élevé. A l'époque de la
formation de l'école normale , il fut en-
voyé par son département pour y perfec-
tionner ses connaissances sous les maîtres
habiles qui devaient y donner leurs le-
çons : mais à peine y eut-il paru qu'on
le nomma maître de conférences, place
qui Je mettait dans la nécessité de s'en-
tretenir avec les élèves sur ce qui avait
été l'objet de l'enseignement des cours.
Plus tard , Vc'cole centrale des travaux
publics , depuis l'école polytechnique fut
organisée sur des bases fixes , et Fourier
fut un des professeurs de cette institution :
son enseignement profond et lucide fut
goûté ; son urbanité le fit chérir des élè-
ves. Bientôt Buonaparte voulut associer
à sa campagne d'Egypte des savans dont
la gloire devait encore augmenter la
sienne. Fourier fit partie de cette com-
mission , et fut chargé même par le gou-
Ycrnement de désigner ceux des élèves
de l'école polytechnique qu'il élait con-
venable d'y associer. Après la soumission
du Caire, Buonaparte créa l'Institut
égyptien-, Fourier en fut membre, et
bientôt après il en devint , par le sufltrage
linanime de ses confrères , le secrétaire
FOU 42 1
perpétuel ; appelé ensuite à faire les fonc-
tions de commissaire de l'armée française
près du conseil ou divan formé des
principaux ulémas du Caire et des pro-
vinces , il fut aussi administrateur de la
justice pendant l'expédition des Français
en Syrie. Dans tous ces emplois Fourier
apporta les qualités convenables, et le
savant fut un bon administrateur. L'Ins-
titut d'Egypte ayanfr été divisé en deux
parties , Fourier fut à la tète de l'une, et
dès lors les recherches dans la haute
Egypte furent nombreuses et les décou-
vertes immenses. En même temps Fourier
faisait des traités , et contribuait à la pa-
cification de l'Egypte, que des circons-
tances indépendantes de sa volonté , ren-
dirent trop peu durables. Ce fut lui encore
qui exprima les regrets de l'armée à la
mort de Kléber, ainsi qu'à la nouvelle de
celle de Desaix , et dans ces deux circon-
stances, Fourier fut l'éloquent interprète
de la douleur de ses compatriotes. Bientôt
il revit la France : l'Institut d'Egypte rap-
portait un grand nombre de documens
sur ce pays ; il était à craindre que cha-
cun des savans ne publiât isolément le
résultai, de ses recherches ; mais il fut
décidé que toutes ces richesses seraient
déposées dans un grand ouvrage , impri-
mé aux frais de l'état. Fourier fut choisi
pour en rédiger la Préface historique ,
qui a été accueillie en France, en An-
gleterre et en Allemagne comme un chef-
d'œuvre d'élocution , et comme un des
plus beaux monumens de la langue fran-
çaise. Ce discours préliminaire écrit, se-
lon M. de Fontanes , avec les grâces d'A-
thènes et la sagesse de V Egypte , con-
tient , mais à grands traits, les événemens
de l'histoire , les observations de la
science, et les vues de la politique. Il fut
composé pendant que l'auteur était préfet
à Grenoble , place qui lui fut offerte en
récompense de ses services. 11 l'occupa
depuis 1801 jusqu'en 1815, et pendant
cette époque il ne se borna point , dans
son administration , aux devoirs ordinai-
res de son emploi : le plus remarquable
de ses travaux administratifs est le Des-
sèchement des marais de Bourgoin près
de Lyon , çatreprise iminense, tentée m-
w^
422 FOU
fructueusement à plusieurs reprises, etqui
fut terminée par les soins de Fourier , qui
assainit ainsi le territoire de 40 commu-
nes. Fourier n'avait point perdu de vue la
science : en 1 807 , il obtint le prix proposé
par rinstitu t sur une question difficile qu'il
résolut d'après des méthodes entièrement
nouvelles , et qu'il vérifia par des expé-
riences curieuses : il s'agissait de déter-
miner les lois de la propagation de la
chaleur dans les corps solides : en 1811
il remit à l'Institut un me'moire sur le
même sujet ; ces deux écrits formeùt le
corps du grand ouvrage qu'il a publié
plus tard sous le titre de Théorie analy-
tique de la cJialèur. Les Bourbons avaient
conservé à Fourier sa préfecture de l'I-
sère : lorsque Buonaparte revint en 1 81 5,
Fourier quitta Grenoble > son approche;
mais ii fut ramené devant l'empereur qui
le nomma préfet du Rhône : il n'occupa
cette place que pendant quelques semai-
nes ; ayant refusé d'exécuter des mesures
qu'un ministre exigeait de lui , il fut
remplacé par M.- Pons-de-Cette. Dès lors
il vint se fixer à Paris et ne s'occupa plus
que des sciences et des lettres. En 1815
l'académie des Sciences le choisit pour
un de ses membres ; cette élection ne fut
pas confirmée par le roi : l'année sui-
vante , l'académie le nomma une seconde
fois ; alors cette élection fut approuvée.
Il n'entre pas dans notre cadre de faire
l'analyse de tousMes travaux de ce savant
mathématicien. Le grand ouvrage d'a-
nalyse mathématique que Fourier a pu-
blié , et qui a pour objet de soumettre au
calcul les lois du mouvement de la cha-
leur, intéresse à la fois l'utilité publique
elles principaux phénomènes delà na-
ture. Ses résultats ont été vérifiés à l'aide
d'un thermomètre ingénieux et d'une
sensibilité remarquable, appelé par lui
thermomètre de contact , instrument
dont on peut se servir dans un grand
nombre d'occasions , et qui pourrait être
utile à l'hygiène. Fourier avait été nommé
secrétaire-perpétuel de l'académie des
Sciences conjointement avec son illustre
confrère M. Cuvier, dont le monde savant
déplore la perte récente : ses fonctions
H mettaient dans le cas de faire l'éloge
FOU
des membres que perdait l'académie. Les
discours qu'il a prononcés dans ces occa-
sions l'ont placé à côté de Fontenelle , de
Condorcet , et de Vicq-d' Azyr , et lui ont
ouvert les portes de l'académie française
en 1827. 11 était membre d'un très grand
nombre de sociétés littéraires et savantes,
notamment de la société royale de Lon-
dres. Il est mort presque subitement le
16 mai 1830. Plusieurs discours ont été
prononcés sur sa tombe par MM. Sylves-
tre, de Sacy , Cuvier, Féletz , Girard et
Jomard, son collaborateur dans le grand
ouvrage d'Egypte. Ce livre contient un
grand nombre de mémoires de Fourier :
on en trouve aussi plusieurs dans di-
verses collections académiques, entre
autres dans le Recueil de Vacadémie des
Sciences. Outre les ouvrages que nous
avons déjà cités , on doit à Fourier 1" Mé-
moire sur la Statistique ( tome 2 du
journal de l'école polytechnique 1778).
2° Mémoire sur la résolution générale
des équations algébriques, présenté à
l'Institut d'Egypte. 3" Rapport sur les
établissemens appelés Tontines , Paris ,
1821 , in-4 ; 4" Plusieurs rapports sur
les sciences mathématiques , Paris, 1822-
1829. 5" Plusieurs mémoires sur la théo-
rie du mouvement de la chaleur, insérés
dans les Mémoires de T Institut , tomes
4 , 6, 7 et 8. 6" Recherches statistiques
sur la ville de Paris , publiées d'après
les ordres du préfet de la Seine. 7" Les j
éloges de Sir JFilliam-Herschel , de De-
lambre , de Bréguet et de M. Charles,
Fourier a aussi fait plusieurs articles des
géomètres dans la Biographie univer-
selle , où ils étaient signés d'un Z.
FOURIER ( Pierre ). Foyez Foorrier.
FOURMONT (Etienne), né en 1683
à Herbelay , village près de Paris , d'un
père chirurgien , montra dès sa jeunesse
des dispositions surprenantes pour les
langues. Il avait la mémoire si heureuse,
qu'après avoir appris par cœur toutes les
racines grecques de Port-Royal , il les ré-
citait souvent en rétrogradant. Il n'étai(fl
encore qu'écolier, lorsqu'il donna ses Ra<^^
cines de la langue latine mises en vers
français, ouvrage qui eût fait honneur à
un maître. Après avoir étudié au collège
1
FOU
des Trente-Trois et à celui de Montaigii
il fut chargé de l'éducation des fils du duc
d'Antin. Il succéda à M. Galland en 1 7 1 3,
dans la chaire d'arabe au collège rojal;
l'académie des Inscriptions se l'associa la
même année , la société royale de Lon-
dres en 1738, et celle de Berlin en 1741.
Il mourut le 18 septembre 1745, à 62
ans. Il avait joui pendant sa vie de la con-
sidération due à son savoir , à la droiture,
à la modestie et à la candeur qui l'ac-
compagnaient. Le comte de Tolède mi-
nistre d'Espagne lui obtint une pension
de la cour, qui fut arrêtée lors de la
rupture entre la France et l'Espagne. Le
duc d'Orléans le mit au nombre de ses
secrétaires. Les savans français et étran-
gers le consultaient dans tout ce qui con-
cerne le grec, le persan, le syriaque, l'a-
rabe , l'hébreu et le chinois. On a de lui
une foule d'ouvrages imprimés et manu-
scrits , témoignages de son érudition et
de son amour pour le travail \° Réflexions
critiques sur les Histoires des anciens
peuples, jusqu'au temps de Cyrus, 1735,
1 vol. in-4, chargées de citations. 2° Une
Grammaire chinoise , en latin, in-fol.
1742, sur laquelle on peut consulter le
Journal des savans, de mars et avril 17 43.
3" Meditationcs sinicœ , 17 57 , in-fol. :
ouvrage qui renferme les préliminaires
de la grammaire chinoise, et l'explication
de tout le technisme de cette langue.
4° Plusieurs Dissertations dans les Mé-
moires de l'académie des belles-lettres ,
semées d'érudition. Sa vie a été écrite
par de Guignes et Deshauterayes ses
élèves ; on la trouve à la tête des Réfle-
xions sur Vorigine des anciens peuples ,
Paris, 1747 , 2 vol in-4; et à la suite de
cette notice on trouve la liste de ses ou-
vrages , mémoires, dissertations, etc.
Fourmont avait un frère, membre de
cette compagnie comme lui , et profes-
seur en langue syriaque au collège royal.
Ce dernier, appelé Michel Foubmont,
mourut en 174G. Il était né en 1690 à
Herbelay , avait été envoyé en 1 728 dans
l'Orient par ordre de Louis XV pour re-
cueillir des manuscrits et des inscrip-
tions. On trouve dans les archives de la
Bibliothèque du roi le catalogue des ma-
FOU 4aS
nuscrits qu'il a rapportés ; quelques-uns
ont sejvi à éclairer différens points de
l'histoire grecque. Fourmont s'occupait
de la publication d'un recueil de 1200
inscriptions qu'il avait réunies dans ses
voyages , lorsque la mort le surprit au
milieu de ce travail.
*FOURNEL (Jean-François), célèbre
avocat-consultant de Paris, fut bâtonnier
de son ordre, et il était le doyen des avo-
cats lorsqu'il est mort le 21 juillet 1820.
Il était encore très jeune quand il publia
un Mémoire qui sauva du bûcher la fille
Salmon condamnée à être brûlée vive . Ses
principaux ouvragessont fTraite' des in-
jures considérées dans Tordre judiciaire,
parDareau, avec des obseri>atiohs,,qm
font presque les deux tiers de l'ouvrage,
1785, 2 vol. in-12. 2° Dictionnaire rai-
sonné, ou Exposition par ordre alpha-
bétique des lois concernant les transac-
tions entre particuliers , 1798, in-S.
3" Traité de la contrainte par corps ,
1798, in-12. 4" Traité du voisinage,
1799, in-12; 3« édit., 1812, 2 vol. in-8.
ouvrage estimé. 5° Code de commerce,
accompagné de notes et observations ,
1807 , in-8. 6° Histoire des avocats au
parlement et du barreau de Paris,
1790-1813, 2vol. in-8. \° Hist. du barreau
de Paris dans le cours de la révolution ,
1816, in-8. C'est la suite de l'ouvrage
qui précède. 8° Les Lois rurales de la
France rangées dans leur ordre naturel,
1819, 2vol. in-8. 9° Recueil des lois,
ordonnances , règlemens , arrêts et dé-
cisions cités dans les Lois rurales, 1820.
Ce volume forme le troisième volume des
Lois rurales , dont il est le complément
nécessaire. '
FOURNI. Fojjez Fourny.
FOURNIER ( Guillaume ) , excellent
critique de Paris , professeur en droit à
Orléans, mit au jour en 1584, in-folio :
De verborum significationibus .
FOURNIER ( George) , né à Caen , se
fit jésuite, et mourut à la Flèche en 1652,
à 57 ans. Ses principales productions sont
1 " une Hydrographie, 1 7 6 7 , in fol . 2°Asiœ
descriptio, curante L. M. S., 1656, in-
fol. : ouvrages bons pour leur temps, et
qui ont servi à en l'aire de meilleurs.
424 FOU
FOURJNIER (Pierre-Simon), graveur
et fondeur de caractères , naquit à, Paris
le 1 5 septembre 1712. Il excella dans son
art. Ses caractères ont embelli la typo-
graphie , ses lumières l'ont éclairée. Il
publia en 1737 la Table des proportions
qu'il faut observer entre les caractères,
pour déterminer leurs hauteurs et fixer
leurs rapports. Cette table est une décou-
verte, non-seulement honorable pour son
auteur , mais très essentielle aux progrès
de l'art. Cet habile artiste remonta jusqu'à
la naissance de l'imprimerie, pour la con-
naître à fond. Il donna en différens temps
divers traites historiques et critiques sur
l'origine et les progrès de la typogra-
phie;, dans lesquels on voit un savant
consommé dans la matière qu'il traite.
Ces différentes dissertations ont été
recueillies en un vol. in-8 , divisé en
trois parties. La dernière renferme une
histoire curieuse des graveurs en bois.
Mais l'owvrage le plus important de Four-
nier, est son Ma/mcl typographique utile
aux gens de lettres , et à ceux qui exer-
cent les différentes parties de l'art de
r imprimerie, en 2 vol. in-8. L'auleur de-
vait y en joindre deux autres ; mais il
fut prévenu par la mort en 17G8. L'hom-
me n'était pas moins recommandable en
lui que l'artiste. Le calme de son âme,
l'esprit de religion dont il était animé,
répandait autour de lui une joie douce
et toujours égale. Il aimait la retraite et
le travail , et même avec excès ; car ce
fut sa constante application qui causa
sa mort. On a des épreuves des différens
caractères qu'il avait gravés, dans son
Manuel typographique. On y en trouve
même pour la musique : il était l'inven-
teur de ces sortes de caractères; et ils
le disputent , pour la beauté , à la musi-
que gravée en taille-douce. C'est lui qui
a péremptoirement réfuté M. Schœpflin
qui avait attribué l'invention de l'impri-
merie à Guttemberg ( voyez ce mot) , en
montrant que Guttemberg ne s'était point
sei-vi de caractères mobiles, mais de
planches gravées. Ce qu'il y a de remar-
quable , c'est que le passage même dont
M. Schœpflin étayait son opinion, laren-
Tcrse de fond en comble. Foyez le Jour-
FOU
nal historique et litte'rairc , P' juillet
1791 , page 327.
* FOURNIER (Pierre-Nicolas), ingé-
nieur et architecte de Nantes , naquit à
Paris en 1747 d'un financier. Il commen-
ça ses études au collège Duplessis ; mais
les désordres de sa jeunesse forcèrent ses
parens à le placer dans un couvent , où
il parait qu'il porta l'habit religieux pen-
dant quelques mois. Il embrassa ensuite
la carrière des armes, et, après avoir servi
quel(f ue temps dans le régiment de colo-
nel-général , et dans celui de La Roche-
foucault, il entra dans l'artillerie royale,
où il resta de 1770 jusqu'en 1783. Il se
retira à Nantes , où il se chargea de l'ad-
ministration du grand théâtre. Dès les
premiers symptômes de la révolution , il
se joignit aux Nantais qui se rendirent à
Rennes pour favoriser , disaient-ils , la
liberté nationale. Après le 14 juillet, lors
de la formation des compagnies armées ,
il servit comme chef de bataillon dans
celle de Nantes. Il fut ensuite nommé
commissaire-civil de la force départemen-
tale, envoyée à Paris par le département
de la Loire-Inférieure, pour prêter un
appui aux représentans du peuple et
veiller au maintien de la liberté. Fournier
et son détachement furent ensuite requis
pour aller combattre les Vendéens. Re-
venu à Nantes avec les débris de sa petite
troupe, il s'y trouva le 30 juin 1793.
Lorsque cette ville fut assiégée par les
armées combinées d'Anjou et de Poitou ,
il défendit son poste avec obstination.
Peu de temps après, le gouvernement
révolutionnaire ayant été organisé, Four-
nier fut compris dans les cent trente-
deux Nantais que Carrier envoyait à Paris,
disait-il, mais qui devaient être assassi-
nés sur la route. Il dut la vie, comme ses
compagnons d'infortune , à l'humanité
de Broussard , et ensuite à celle du géné-
ral Danican , qui se refusèrent à cet ordre
barbare. A leur arrivée à Paris , les Nan- m
lais furent jetés en prison, où ils de-fl
meurèrent pendant plus d'un an. Pendant' .
sa détention, Fournier publia des Mé-
moires où il retraçait les services qu'il
avait rendus à la cause révolutionnaire.
Il fut défendu avec autant de zèle que de
i
FOU
talent par l'acteur Beauiieu , et acquitte
avec les autres Nantais, deux mois après
la mort de Robespierre. Il revint alors à
Nantes , où il ne s'occupa plus que des
fonctions d'ingénieur. Ayant trouvé quel-
ques médailles romaines en faisant creu-
ser un aqueduc , il prit du goût pour les
antiquités , fit faire des fouilles , et dé-
couvrit plusieurs monumens antiques,
sur lesquels il a écrit dififérens Mémoires
conservés à la bibliothèque publique de
Nantes. Il avait aussi tracé le plan de cette
ville telle qu'elle était sous Henri III, et
y avait joint une savante dissertation. Il
mourut dans cette ville le 20 septembre
1810. Fournier était arcbitecte-voyer de
Nantes, membre de la société des scien-
ces , lettres et arts de la même ville , et
correspondant de l'académie celtique.
* FOURNIER (Charles ou Claude),
né à Saint-Domingue vers 17C0, ou en
Auvergne en 1745 , et surnommé l'Amé-
ricain , à cause du long séjour qu'il fit
en Amérique , fut un de ces brigands qui
désolèrent la France pendant la révolu-
tion . Quelle que soit sa patrie, il était à St.-
Domingue vers 1772, servit dans les dra-
gons blaucs pendant 13 ans : ce qui ne
l'empêcha pas de se livrer à l'agriculture,
et surtout au commerce : il perfectionna
aussi la fabrication du tafia , dont il fit
un nouveau genre d'industrie pour l'îie ,
et oîi il gagna des sommes immenses
qui le mirent en état d'établir des fabri-
ques considérables; mais sa fortune de-
venue colossale excita l'envie des autres
fabricans qui lui suscitèrent des pei-sécu-
tions , et le retinrent en prison pendant
plus de 27 ans. Forcé de quitter St.-Do-
mingue après avoir vu incendier ses pro-
priétés , il revint en France où , après
plusieurs démarches, on lui offrit une in-
demnité provisoire : il voulait une répa-
ration complète contre les autorités lo-
cales; mais la révolution qui survint lui
ôta les moyens de la poursuivre. Arrivé
en France avant ces temps désastreux, il
se trouvait en prison au commencement
des troubles, pour les crimes qu'il avait
commis. Mais les portes des prisons s'ou-
vrirent aux cris de vive la liberté, et les
malfaiteurs eu sortirent. Fournver fut
V.
FOU fyi5
bientôt remarqué par les chefs de la ré-
volution , qui en firent un aboyeiir de
place , et l'admirent ensuite dans le club
des Cordeliers. Le 13 juin 1789, il avait
été nommé commandant des volontaires ;
mais il perdit cette place à l'époque de
l'organisation de la garde nationale. Quel-
ques biographes prétendent que , lors de
l'insurrection du champ de Mars , le 1 7
juillet 1791 , M. de La Fayette étant arri-
vé avec un faible détachement de la garde
nationale , pour faire cesser le désordre ,
ce fut Fournier qui lui lâcha à bout por-
tant le coup de pistolet dont il faillit
être atteint. Mais ce qu'il y a de certain ,
c'est qu'au 10 août, il commandait la
horde des brigands dits Marseillais^ et
qu'il fut un de ceux qui contribuèrent le
plus aux attentats commis dans cette
affreuse journée. Le palais des rois de
France fut inondé de sang. Mais par une
contradiction qu'on ne saurait expliquer ,
Fournier sauva la vie à plusieurs person-
nes ; tant il est vrai que l'humanité ne
perd jamais entièrement ses droits, m^me
chez les plus grands scélérats : ce n'était
qu'une modération passagère. On l'a ac-
cusé aussi d'avoir pris part aux massacres
des prisons de Paris des 2 et 3 septembre :
c'est un fait trop grave pour l'avancer
sans des preuves certaines. Chargé de
conduire les prisonniers d'Orléans à Ver-
sailles , il les fit tous massacrer dans cette
dernière ville le 9 septembre 17 92. Dans
ces derniers temps d'horreurs et d'anar-
chie, les bourreaux avaient aussi leur
tour, et finissaient par diriger leur rage
les uns contre les autres. Fournier fut
accusé, le 12 mars 1793 , par Bourdon de
l'Oise et Marat, d'avoir tiré un coup de
pistolet sur M. de La Fayette , et d'avoir
présidé aux massacres de septembre. Cette
accusation n'eut pas de suite. Après le
1 8 brumaire , il fut arrêté et condamné à
la déportation ; mais on se contenta de
le mettre en surveillance. Enfin il se
trouva impliqué dans l'affaire du 3 nivôse
(24 décembre 1800) , et fut déporté aux
îles deséchelles, d'où il parvint à s'éva-
der à l'aide d'une créole , après avoir
perdu tous ses compagnons d'infortune.
Il gagna la Guadeloupe , et fut employé
27..
426 FOU
par Victor Hugues , son ami , qui y com-
mandait , sur les corsaires qui étaient à
SCS ordres , et s'y distingua lorsque la
colonie passa sous la domination anglaise.
En 1808 , il revint en France, fut arrêté
de nouveau , et se trouvait encore à La
Force en 1 8 1 6 ; mais ayant demande des
Juges , il filt relâché et traîna sa pénible
existence jusqu'en 1823, qu'il mourut
dans un état voisin de l'indigence. Il a
publié un Mémoire pour se justi&er des
massacres des prisonniers d'Orléans, et
quelques autres brochures.
♦ FOURNIER SARLOVÈSE ( Fran-
çois, le comte), lieutenant-général, né en
17 75 dans le Périgord. Sespareus le des-
tinèrent d'abord au barreau ; mais en 1 7 92
il quitta ses études de droit pour embrasser
Il carrière des armes. Entré comme sous-
lieutenant dans un régiment de dragons, il
obtint la plupart de ses grades sur le champ
de bataille, et en 17 98 à 23 ans, il était
déjà colonel du 1 2^ régiment de hussards.
Fournier était franchement républicain;
mais il ne l'était pas à la manière des
Robespierre ou des Marat ; il tolérait les
opinions des autres , et au besoin il les
défendait : c'est ce qu'il fit cette même an-
née 1 798 , oîi il poursuivit une bande d'as-
sassins qui avaient fait une irruption noc-
turne dans le café de Garchi , rue de Ri-
chelieu, et qui étaient venus attaquer plu-
sieurs personnes fort tranquilies , qu'ils
accusaient d'être chouans et royalistes.
Le colonel Fournier repoussa les agres-
seurs, et dans celte lutte il reçut plusieurs
coups de sabres. Personne n'a jamais con-
testé à Buonaparte le talent de connaître
les hommes, il sut estimer la valeur et la
bravoure de Fournier ; il voulut qu'il fit
partie de son corps d'armée d'Italie : les
champs de Mareugo , la vallée d'Aoste ,
les rives de la Chiuvella, Montébello,
furent successivement le théâtre de sa
valeur , et les bulletins de l'armée répé-
tèrent souvent le nom du 12* régiment
de hussards et de son chef. Les éloges de
Buonaparte n'apportèrent aucun change-
ment à ses opinions politiques, et ce fut
à haute voix qu'il blâma les projets ambi-
tieux du premier consul. Comme il exer-
çait la plus grande influence sur ses sol-
FOU
dats , on craignit de la part de son régi-
ment une opposition qui pouvait se com-
muniquer au reste de l'armée. Par ordre de
Buonaparte, Fournier.fut arrêté à l'opéra :
le lendemain il fut conduit dans son ap-
partement, où l'on devait faire devant lui
l'inventaire de ses papiers ; mais à peine
y fut-il entré qu'il enferma ses gardiens
dans sa chambre et se sauva. Cinq cents
hommes de la garde consulaire, et la gen-
darmerie d'élite furent mis en mouve-
ment pour le trouver : ils le saisirent en
effet quelques jours après , et il fut jeté
dans la prison du Temple oii se trouvait
alors le chef d'escadron Donadieu que
l'on accusait d'avoir, de concert avec
lui , voulu assassiner Buonaparte , et que
néanmoins il ne connaissait nullement.
Aucune preuve ne fut trouvée contre lui ;
on ne l'exila pas moins dans le Périgord.
L'amiral Villeneuve fut peu après chargé
d'une expédition en Amérique : Fournier
reçut l'ordre de l'accompagner. Au re-
tour de cette malheureuse expédition, il
fut confiné de nouveau dans le Périgord
où , s'ennuyant d'un repos ignominieux ,
il demanda du service. Appelé à partager
les succès de l'armée d'Allemagne , il re-
trouva son ancienne bravoure, et mérita
les éloges d'un homme qui n'aimait de lui
que sou courage. Chacuu sait qu'avant la
bataille d'Eylau, Buonaparte lui dit : Co-
lonel , dans votre affaire, il faut un bap-
tême de sang. Fouruier obéit, se distin-
gua dans cette journée, ainsi qu'à Fried-
land où il fut nommé membre de la Lé-
gion d'honneur et général de brigade.
Envoyé en Espagne sous les ordres du
maréchal Ney, il fit les campagnes de
1808 et de 1809 , se distingua particuliè-
rement à Lugo, où il se défendit avec trois fli
bataillons et deux escadrons contre unéa 1
armée entière; ce qui lui valut la croix
d'officier de la Légion d'honneur avec le
titre de comte. En 1812 il fit la campa-
gne de Russie, et se signala surtout pen»
dant la retraite, particulièrement au pas
sage de la Bérézina où il fit une charge
brillante de cavalerie : le grade de gé-
néral de division et la croix de commaoi
dant de la Légion d'honneur furent la|
récompense de sa valeur. Quelques te-
FOU
proches adresses à Buonaparte après les
revers de cette campagne, furent con-
sidérés comme séditieux ; Fournier Tut
arrêté et envoyé à Mayence. Avant d'ar-
river dans cette ville, l'escorte qui le con-
duisait fut attaquée par des cosaques ; il
profita de cette circonstance pour se sau-
ver. Comme le bruit se répandit bientôt
après qu'il avait passé à l'ennemi, il se
présenta à Mayence et demanda des juges.
Cette conduite , que Buonaparte admira
lui-même en disant qu'elle était digne
d'un chevalier, n'empêcha point sa desti-
tution qui fut prononcée par un décret.
Fournier se retira en Périgord où il fut
sous la surveillance de la police jusqu'à
la rentrée des Bourbons. Ces princes ne
tardèrent point à lui rendre son grade et
à lui donner la croix de St. -Louis. Four-
nierne servit point pendant les cent-jours:
après la seconde restauration, il fit partie
de l'état-major de l'armée , et fut à plu-
sieurs reprises employé comme inspec-
teur-général de la cavalerie. Il fit impri-
mer en 1814 des Considérations sur ta
législation militaire , dans lesquelles il
prédisait d'une manière positive que Buo-
naparte reviendrait de l'iie d'Elbe, et in-
diquait les moyens qui devaient contri-
buer au succès de cette entreprise : cet
ouvrage n'a pas été publié. Le général
Fournier est mort dans le mois de jan-
vier 1827. C'était un brave militaire : la
loyauté de son caractère l'honore encore
plus que sa bravoure.
* FOURNIER (Joseph-Augustin, mar-
quis d'Aultane), lieutenant-général, mem-
bre de plusieurs ordres français et étran-
gers, naquit à Valréas le 18 août 1769 et
mourut le 7 janvier 1828. Issu d'une fa-
mille ancienne illustrée dans la carrière
des aimes, il était entré au service à l'âge
de 16 ans, et lorsque la révolution éclata,
il avait le grade de capitaine de grena-
diers. Il fut du petit nombre des anciens
nobles qui restèrent dans l'armée, et on le
•yit combattre aux affaires de Menin , de
Courtray , de Valmy. Appelé à l'état-ma-
jor de l'armée , il fut nommé général de
brigade. L'amitié qui le liait à Morcau fut
la cause de sa disgrâce : pendant un an il
resta sans emploi. Devenu ensuite chef
FOU 47.7
d'état-major au 3" corps de l'arinée d'Al-
lemagne, il se distingua à Austerlitz et à
léna, fit la campagne de Pologne, se
couvrit de gloire dans les champs de Pnl-
tusk, et fut promu le 31 décembre 1806
au grade de général de division. Après
avoir été gouverneur de Varsovie, il passa
en Espagne oii il resta jusqu'à la retraite
de 1814 : il termina ses glorieuses cam-
pagnes de l'empire à la bataille de Tou-
louse. Sous la première restauration, il
fut inspecteur-général , et dans le mois de
mars 1815 il était chef d'état-major de
l'armée royaliste , sous les ordres du duc
d'Angoulême. Cette expédition n'ayant
pas été heureuse, ce fut d'Aultane qui
négocia avec les généraux de Buonaparte
la capitulation conclue au Pont-St.-Es-
prit, et qui après avoir été convenue, fut
deux fois suspendue. Lorsque le prince
se fut embarqué , le général d'Aultane se
rendit à Paris où il fut destitué et mis en
surveillance. Après le deuxième retour
des Bourbons , il fut nommé commandant
de la 7* division militaire : mais il n'ac-
cepta point cette place , et mourut le 7
juin 1828. Ce brave militaire avait une
probité et un désintéressement dont plu-
sieurs villes, entr'autres Ratisbonne, ont
conservé les souvenirs dans leurs archi-
ves.
FOURNIVAL (Simon), commis au
secrétariat des tr é.«oriers de Fr:.nce,a
fait un Recueil des titres qui les concer-
nent, Paris, 1655, in-fol. ; qui est rare.
Il a été continué par M. Jean-Léon du
Bourgneuf, trésorier de France à Orléans,
et imprimé en cette ville in-4, 1745,
2 parties. Ces collections ont une place
dans les grandes bibliothèques.
FOURNY (Honoré Caille Du), audi-
teur de la chambre des comptes à Paris,
acquit une connaissance de l'histoire de
France , et des anciens titres et archives
qu'on garde à Paris, qui lui fit un nom :
mais sa modestie et son zèle à obliger ses
amis le rendirent encore plus recomman-
dable. Un de ceux avec qui il lia amitié, fut
le Père Anselme de la Vierge-Marie, augus-
tin-déchaussé , qui avait publié en 1674
Y Histoire ge'ne'alogique et chronologique
de la maison de France, et des grands-
4^8 FOU
officiers de la couronne. Du Fourny lui
prodigua ses avis pour une nouvelle édi-
tion, luiAt corriger un très grand nom-
bre de fautes, et lorsque ce religieux fut
mort en 1694 , il continua de travailler
à perfectionner ce grand ouvrage. Cepen-
dant, dans la nouvelle édition qui vit le
jour en 1712, il voulut que les correc-
tions parussent être toutes du premier
auteur , et il ne s'attribua que l'honneur
d'avoir continué la suite des grands-of-
ficiersjusqu'à cette année. L'abbé de Lon-
guerue l'a certainement jugé avec trop
de sévérité, quand il a dit : « M. du Four-
» ny était un bonhomme , incapable de
» vouloir tromper. Il savait sa chambre
» des comptes ; mais il ne savait que
» cela. Son livre fourmille de fautes. On
» lui fournissait des mémoires ; mais il
» ne savait pas assez reconnaître ce qu'ils
■» avaient de défectueux. » Il est bien vrai
que Du Fourny n'a pas corrigé toutes les
fautes qui se trouvaient dans l'ouvrage
du Père Anselme. Mais quel est le criti-
que , même érudit et judicieux , qui , en
fait de recherches et de nionumens plus
ou moins authentiques , puisse se flatter
de se déterminer toujours avec certitude ?
Du Fourny mourut en 1731. Gette 77/^-
toire est à présent en 9 vol. in-fol. , pu-
bliés depuis 1726 jusqu'en 17-33, par les
Pères Ange et Simplicicn , augustius-dé-
chaussés, continuateurs de celte utile
compilation ; ils ont mis le plus grand
soin à distinguer les pièces authentiques
de celles qui ne l'étaient pas. Du Fourny
mourut en 1731.
FOURQUEVAUX ( Raimond de Bec-
cari de Pavie, baron de), était d'une
branche de l'ancienne famille noble de
Beccari de Pavie , retirée en France au
temps des guerres entre les Guelphes et
les Gibelins, né à Toulouse en 1 509 ^ il
commença à servir au siège de Naplës sous
Lautrec, en 1 528. Il commandait un corps
considérable d'infanterie grisonne et ita-
lienne à la bataille de Marciano en Tos-
cane, l'an 1554 ; il y futblessé et prison-
nier , et gardé 1 5 mois dans le fort de
San-Miniato à Florence. De retour en
France, il obtint le gouvernement de
Narbonne. On raconte qu'il se servit d'un
FOX
stratagème assez singulier pour en chas-
ser plusieurs habitans mal-intentionnés.
Il fit publier que deux chevaliers espa-
gnols devaient se battre en champ-clos
hors de la ville. Il fit poser des barrières
pour les combattaus, et dresser des écha-
fauds pour les juges. Tout le peuple étant
sorti de la ville pour assister à ce spec-
tacle, il en fit fermer les portes, et ne
laissa rentrer que les sujets fidèles au roi.
Il contribua beaucoup en 1562 à la déli-
vrance de Toulouse , dont les huguenots
s'étaient presque rendus maîtres ; et mou-
rut chevalier de l'ordre du roi , à Nar-
bonne, en 1574, à 66 ans, après avoir
rendu des services importans aux monar-
ques qui l'employèrent dans la province
du Languedoc. Fourquevaux est auteur
d'un livre intitulé ; J^ies de plusieurs
grands Capitaines français , imprimé à
Paris en 1643, in-4. Ces vies sont au
nombre de 14. Elles sont compilées fort
exactement d'après les historiens du
temps : c'est dommage que l'auteur n'en
ait pas rassemblé un plus grand nombre.
FOURRIER (Pierre), de Mathincourt,
bourg de Lorraine dont il était curé ,
était d'un autre bourg nommé Mirecourt,
oiiilnaquitea 1565. Il entra jeune parmi
les chanoines-réguliers , chez lesquels il
se distingua par sou savoir et sa piété. Il
établit deux nouvelles congrégations ,
l'une de chanoines-réguliers réformés
qui enseignent, et l'autre de religieuses
pour l'instruction des filles. Le pape Paul
V approuva ces établissemens en 1615 et
1616. Il est difficile de dire tout le bien
qu'elles ont opéré et qu'elles opèrent en-
core dans le monde chrétien. Les reli- .M
gieuses , nommées communément de la \
Congrégation de Notre-Dame, ont par-
ticulièrement estimées dans toutes les
villes oii elles sont établies : elles y jouis-
sent de la confiance bien méritée des pa-
rens pour l'éducation de leurs enfans , et
répandent l'instruction avec l'amour de
la vertus. Le Père Fourrier mourut sain-
tement en 1640. Il a été béatifié en 1730.. •
FOURS Y. FoyezYvv^i. M
FOX ( Jean ), né à Boston en 1517 , "
quitta l'Angleterre sous le règne de
Henri VIII pour professeï' le calvinisme
FOX
en libelle. Il fit quelques voyages dans
sa patrie , et s'y fixa entièrement sous la
reine Elizabelh. Il mourut dans un âge
avancé. L'ouvrage par lequel il est prin-
cipalement connu, est intitulé : Acta et
monumenta Ecclesiœ , en 3 vol. in-fol.,
réimprimé en 1684. Péarson lui reproche
des erreurs, de fausses citations, de mau-
vais raisonnemens, etc. ; dans une tète
échaidïée comme la sienne par les nou-
veaux dogmes, cela ne pouvait être au-
trement. Dans sa jeunesse il avait cultivé
la poésie, pour laquelle il avait quelque
talent. On a de lui plusieurs pièces de
théâtre. Jacques Bienvenu a traduit le
Triomphe de Jésus-Christ, Genève, 1562,
in-4 , rare. Son fils Samuel Fox a écrit sa
vie qui a été imprimée en tête des actes
et monumens de t église.
FOX ( Georges ), fondateur de la secte
des Quakers ou Trembleurs , né au
village de Breton dans le comté de Lei-
cester, en 1624, n'avait que 19 ans,
lorsque sa tète s'étant singulièrement
exaltée , soit par quelque accident parti-
culier , soit par un effet de son tempé-
rament, il se crut tout d'un coup in-
spiré de Dieu , et se mit à prêcher. Velu
de cuir , depuis les pieds jusqu'à la tête,
il allait de village en village, criant
contre la guerre et contre le clergé. Son
ignorance dans les lettres humaines ne
l'embarrassa point. Quoique fils d'un ou-
vrier eu soie , et quoiqu'on ne lui eût
appris d'autre métier que celui de cor-
donnier, il s'était appliqué de bonne
heure à parler le langage de l'Ecriture et
de la controverse. Il avait de la mémoire
et de l'enthousiasme. Les provinces de
Leicester , de Nottingham et de Darbi ,
furent les premiers théâtres de ce sombre
charlatan. Il donna aux aveugles enthou-
siastes qui le suivaient , le nom à' en-
fans de la lumière. Ayant comparu à
Darbi devant les juges , il les prêcha si
fort sur la nécessité de trembler devant
le Seigneur, que le commissaire qui l'in-
terrogeait , s'écria qu'il avait affaire à un
quaker, c'est-à-dire trembleur en an-
glais , nom qu'on a donné depuis à cette
secte. Fox s'associa des femmes; ayant
counu dans la prison de Lancastre la dame
FOX 42g
Fell, veuve d'un illustre magistrat de
cette province , il lui inspira ses erreurs
et l'épousa. Le patriarche duquakérisme
emmena avec lui sa prosélyte en Améri-
que, l'an 1662. Elle partagea les fonc-
tions de son ministère , et fit valoir ses
extravagances. Il y eut , chez les sots et
les dupes , les mêmes succès qu'il avait
eus dans une partie de l'ancien monde.
Ce succès lui persuada que si l'Europe,
l'Asie et l'Afrique ne s'étaient pas encore
rangées sous ses étendards, c'est qu'elles
l'ignoraient. Il écrivit donc à tous les sou-
verains des lettres insensées , qu'on paya
du plus profond mépris. Fox, revenu en
Angleterre , continua de répandre ses rê-
veries, et mourut en 1681. Peu de temps
avant sa mort , il composa un gros volu-
me sur sa Fie et ses Missions -. pour le
Rendre plus mystérieux , il défendit par
son testament de l'imprimer. On peut
voir ce qu'en dit le Père Catrou dans
son Histoire des Trembleurs , publiée
en 1733 ( l'oyei Barclay Robert). Dans
une réponse faite aux quakers qui, en
1791, étaient venus dans l'assemblée na-
tionale de France , Mirabeau réfuta leurs
principes en ces termes : « Vous ne prêtez
» point, dites-vous, de sermens : mais vous
» vous trompez ; un serment n'est qu'une
» pronjesse faite à Dieu ; la conscience
a d'une âme pure est un temple de la Di-
» vinité , et , en promettant sur votre
» conscience, vous faites intervenir Dieu
» dansvosparoles...Le sang humain n'est
« jamais versé par vous sur la terre : tou-
» chante philosophie! maisprenez garde;
u ne seriez-vous pas dans une erreur que
M la vertu vous cache ? Auriez-vous per-
■» mis que ces hordes de sauvages, qui
n errent dans les déserts de l'Amérique ,
» eussent porté le massacre dans la paci-
w fique Pensylvanie, qu'ils eussent égorgé
» vos femmes, vos enfans, vos vieillards,
« plutôt que de sauver ces vies si chères
» en donnant la mort à des meurtriers ? »
On sait qu'un écrivain trop fameux a
comparé le christianisme naissant à la
secte des quakers. Un si étrange paral-
lèle pourrait faire soupçonner qu'il avait
lui-même" de fortes dispositions au qua-
kérisme. Quand la secte des quakers aura
43o FOX
subjugiifi les philosophes et les rois; quand
elle aura détruit toutes les autres religions,
et cela dans un siècle aussi éclairé que
celui d'Auguste; quand durant 18 siècles
elle aura eu le suffrage de tous les bons
esprits , elle aura pour elle un grand ar-
gument. C'est à ceux qui savent apprécier
les possibilités et pressentir l'avenir, à
prononcer si le fanatisme des trembleurs
aura jamais ces succès. Les écrits de Fox
ont été réunis en 3 vol. in fol. : le pre-
mier contient son Journal, le second sa
Correspondance , le troisième ce qu'il a
écrit sur sa doctrine. Quelques person-
nes ont prétendu qu'il n'était pas réelle-
ment l'auteur de ces différens ouvrages;
mais ses sectateurs soutiennent que tout
ce que ce recueil renferme de plus admi-
rable est réellement de leur patriarche.
* FOX (Charles- James), le plus grand
orateur politique de l'Angleterre, trois
fois ministre , long-temps chef de l'oppo-
sition anglaise, fut un de ces hommes dont
le génie opéra sur leurs contemporains la
plus puissante influence, en sorte qu'à leur
nom se rattache l'histoire de toute une épo-
que. D'un autre côté Fox fut livré à toutes
les passions et à tous les vices : les irrégu-
larités, les écarts, les fautes de sa vie pri-
vée seront sans doute un jour effacés par
la gloire de ses grands talens : mais nous
sommes encore trop rapprochés de lui
pour ne pas nous rappeler ses liaisons avec
les hommes les plus vicieux de l'Angle-
terre et des pays qu'il visita , ses débau-
ches , son amour effréné pour le jeu , les
moyens peu honorables auxquels il eut
souvent recours pour subvenir à ses pre-
miers besoins. Les anciens auraient dit de
lui qu'il réunissait les vices d'Alcibiade à
l'éloquence de Démosthène , et nous ,
nous disons qu'il fut sous bien des rap-
ports , , le Mirabeau de l'Angleterre.
Tous les biographes ont reconnu deux
hommes dans Fox , le libertin et l'ora-
teur ; ils les ont séparés avec soin ;
nous, nous les réunissons, parce que
cette réunion servira à expliquer plus
d'un fait, et qu'elle fera comprendre beau-
coup mieux le caractère extraordinaire de
cet homme d'état , qui sut ainsi de son
vaste génie toucher les deux extrêmes de
FOX
la dégradation et de la noblesse , et met-
tre son âme sous l'empire tyrannîque de
tant de passions opposées. Né à Londres,
le 24 janvier 17 48, il était le S^fils deHenri
Fox, premier lord Hoiland, qui obtint le
ministère de la guerre sous Georges 11 et
fut presque toute sa vie le rival de Wil-
liam Pitt, lord Chatam : le fils de cet il-
lustre personnage devait plus tard con-
tinuer cette lutte. Le jeune Fox avait
des dispositions heureuses : malgré son
goût pour la dissipation , les progrès qu'il
fit au collège d'Eton et à l'université d'Ox-,
ford dans différens genres d'instruction ,
furent grands et rapides. Ses succès con-
firmèrent les espérances que son père
avait conçues de lui : mais lord Hoiland
avait adopté le plus singulier et le plus
faux de tous les systèmes d'éducation r
loin de mettre un frein aux passions de
son fils , il sembla les favoriser , cro^'ant
les éteindre par la satiété. Il connaissait
peu le cœur humain : car, s'il Teût étu-
dié d'une manière sérieuse , il eût trouvé
qu'il est en nous des appétits qui , sem-
blables à la flamme, s'accroissent lors-
qu'on les alimente. Il laissa le jeune Fox
abandonné entièrement à lui-même ; cet
élève de la nature n'éprouva ni résistance
à ses volontés ni obstacles à ses désirs.
Dès l'âge de 14 ans, c'était un joueur
consommé : tous les jours il recevait alors
cinq guinées pour les risquer au jeu : plus
tard il risqua sur le fatal tapis sa fortune ,
son repos, l'estime de ses amis , sa repu- ,
talion : il perdit tout , excepté sa gloire ;
encore ne put-il pas la conserver intacte :
la tache de sa vie privée y est encore em-
preinte. Son éducation classique, quoi-
que interrompue par des absences et des
voyages, quoique distraite par le déran-
gement de ses passions , fut terminée
d'une manière brillante : il étonnait ses
maîtres par son savoir , et toute sa vie les
classiques grecs et latins amusèrent ses]
loisirs. A 20 ans Fox vint en France : ilj
s'y distingua par son gofit pour la toi-^
lette ; c'était un bel esprit , un fashiona-
ble , dont les bons mots circulaient dat
les salons. Elégant et bien fait, il pouvait
sans peine devenir un homme à la mode,|
et il le fut dans tous les pays du continent j
FOX
qu'il parcourut alors. Son dësir était de
se faire remarquer : il y parvint , et ,
comme sur les routes , il ne pouvait fixer
ratlention qu'à l'aide de son argent, il
eut alors la fureur de la dépense ; mais sa
prodigalité altéra sa fortune : les femmes
et le jeu en dissipèrent les restes. Son
père, Impatient de le voir figurer sur la
scène politique, le fit nommer en 1768
membre de la chambre des communes par
le bourg de Midburst dans le comté de
Sussex. Fox n'avait point encore l'âge
voulu par les lois ; et , ce qu'il y a de re-
marquable , sa nomination ne fut pas con-
testée. Il ne recula pas devant l'austérité
des travaux législatifs, et son premier
di-scours annonça l'homme d'état et l'o-
rateur. Les antécédens de lord Holland
plaçaient naturellement son fils dans les
rangs ministériels : aussi , quand Fox dé-
buta dans la carrière politique, ce fut
sous la bannière du pouvoir qu'il se plaça :
il parla contre la pétitioo de Wilkes , dé-
puté nommé du comté de Middiessex, et
alors détenu dans la prison du Banc du
Roi : le pétitionnaire réclamait contre sa
captivité qu'il taxait d'arbitraire et qui le
privait de siéger à la chambre , et deman-
dait à prouver la légalité de sa nomina-
tion. L'opinion publique, cette bizarre
et capricieuse reine du monde , avait pris
la défense de Wilkes : il n'y eut que le
ministère qui applaudit à la polémique
de Fox ; mais chacun applaudit à son ta-
lent, à sa naissante éloquence, et le cen-
seur anonyme qui publiait alors les Let-
tres de Junius, lui donna même des en-
courageraens. Lord JVolh, chancelier de
l'échiquier, voulant récompenser les ef-
iprts du jeune député et croyant que son
opinion n'avait été qu'un calcul d'am-
bition , le nomma d'abord payeur de la
caisse des veuves et des orphelins , puis
l'un des lords de l'amirauté, et enfin mem-
bre de la trésorerie. Il se trompait , et, si
Fox vota avec le ministère jusqu'en 1772,
souvent on le vit manifester des opinions
contraires. Vers ce temps-là, il commença
à se lier avec les membres de l'opposition,
et notamment avec Burcke : cette liaison
lui fit perdre sa place ; mais auparavant
le ministère lui fit des remontrances qui
FOX 43 1
furent mal accueillies : dans la discussion
du bill sur le serment du Test , ou sur
l'adhésion aux articles de religion dont
quelques citoyens avaient demandé à être
exemptés , il professa des opinions indé-
pendantes et un système de tolérance peu
convenable aux ministres (1772). Lord
Noth lui fit passer pendant la séance un
billet signé de sa main : c'était sa desti-
tution. Fox s'en consola en reprenant plus
que jamais sa vie dissipée. Les femmes, le
jeu, les paris, la table, tous les moyens
de dépenses furent employés par ce jeune
étourdi , pour se donner du plaisir ; on
eût dit qu'il cherchait à se ruiner : en
peu de temps, il dépensa les sommes con-
sidérables que lui avait procurées la vente
d'une terre qu'il avait dans l'île de Tha-
net, et bientôt il ne posséda plus rien. Il
ignorait peut-être auparavant que l'état
de gêne perpétuelle est une espèce d'es-
clavage, et que tout esclavage dégrade
l'âme la plus noble : il put s'en convain-
cre lui-même lorsqu'il se vil contraint de
recourir à des moyens vils et honteux
pour subvenir aux premières nécessités
de la vie. Disons cependant à son hon-
neur qu'il préféra les persécutions de ses
créanciers aux exigeances du pouvoir, et
qu'il sut conserver son indépendance po-
litique. Mais ses débauches affaiblirent
sa santé ; sa constitution robuste ne put
lutter contre son goût efixéné pour les.
plaisirs , et contre la nécessité d'un tra-
vail soutenu pour les débats parlementai-
res. Dans le but de réparer ses forces usées,
il se condamnait à un sommeil de com-
mande : mais l'abus du laudanum ne fit que
verser dans son corps fatigué la maladie
à laquelle il devait succomber. Malgré ses
distractions ruineuses, Fox n'avait point
abandonné la carrière politique. Sou père
étai t mort en 1 7 7 4 , lui laissant une fortune
considérable ( 1,500,000 livres sterlings
environ) qui fut bientôt dissipée. Ce fut
à l'époque oii l'on examina la conduite du
ministère relativement aux colonies an-
glaises, que Fox montra l'opposition la
plus forte : devenu chef des Wighs , il
se mit en avant dans toutes les discus-
sions oîi U s'agit de l'Amérique : il défen-
dit la cause des peuples du nouveau cou-
43i FOX
tinent, prétendit qu'on n'avait pas le
droit de s'opposer à la demande qu'ils
faisaient de s'imposer eux-mêmes , et ,
quand il \it l'opposition du ministère, il
sembla prédire tous les malheurs qui al-
laient résulter de cette faute pour la do-
mination anglaise , et dit que lord Noth
aurait le talent de perdre dans une seule
campagne plus de provinces qu^ Alexan-
dre le Grand n^ était parvenu à en con-
quérir. Il y avait sans doute de l'exagé-
ration dans cette réflexion, dictée un peu
par la mauvaise humeur ; mais la vérité
est qu'il annonça par là la prochaine sé-
paration des colonies et de la métropole.
Après cette session que bien des circon-
stances contribuèrent à rendre célèbre
(1776), Fox fit un voyage en France,
pressentit les dispositions du cabinet de
Versailles, se confirma dans son opinion,
et , pendant toute la guerre d'Amérique ,
il ne cessa d'en attaquer les auteurs. Dans
le mois de décembre 1779, il éleva une
vive discussion sur les affaires maritimes,
reprocha à l'amiral sa négligence, deman-
da sa destitution , accusa l'amirauté en
masse , fit un grand nombre de motions
toutes dirigées contre le ministère. A la
suite d'une de ses chaleureuses improvi-
sations , rapportées infidèlement dans un
journal , Fox fut appelé en duel par
M. Adam qui crut avoir été insulté , et qui
le blessa légèrement (29 mars 1779). Fox
était devenu l'homme du peuple après
avoir été l'homme du ministère : le peu-
ple se porta en masse devant sa maison
pour s'informer de sa santé , et une foule
nombreuse se fit inscrire chez lui. Ce-
pendant des élections générales avaient
été ordonnées pour 1780: Fox, malgré
l'opposition du ministère , fut élu député
par Westminster. Dans le parlement qui
fut convoqué alors, l'opposition devint
encore plus vive qu'elle n'avait été jus-
que là. On vit Fox blâmer avec violence
et hardiesse la marche du ministère ; il
demanda des enquêtes sur sa conduite,
sur la guerre d'Amérique , sur la mau-
vaise administration de la marine ; enfin,
nous le dirons, il accabla lord North et le
força de se retirer ( février 1 782 ). Le nou-
veau ministère composé sous le nom du
FOX
marquis Rockingham, compta Fox parmi
les secrétaires d'état : il devint ministre
des affaires étrangères : cet orateur n'a-
vait encore que 25 ans. Pendant la courte
durée de cette administration qui n'eut
le pouvoir que pendant quelques mois ,
quelques mesures favorables à la paix gé-
nérale furent prises par le gouvernement:
les chambres cherchèrent à restreindre
l'influence de la couronne. Ainsi les con-
tractans ou les fournisseurs du gouver-
nement furent privés du droit d'entrer à
la chambre des communes ; les préposés
des douanes ou de Vaccise , perdirent la
faculté de voter dans les élections. On
chercha à pacifier l'Irlande, une poli-
tique généreuse fut adoptée à son égard.
Mais tout à coup la mort du marquis de
Rockingham , arrivée dans le mois de
juillet de la même année, amena un chan-
gement dans le ministère : Fox n'en fit
plus partie. Redevenu simple député,
on eût cru qu'il allait recommencer cette
opposition qui avait été la cause de sa
popularité; il n'en fut point ainsi. On le
vit , au grand étonuement de toute l'An-
gleterre , entrer en quelque sorte en né-
gociation avec l'ancien ministère, au-
quel il devait sa première destitution :
il était encore , il est vrai , opposé au mi-
nistère, car il ne pouvait y avoir rien de
commun entre lord Noth et lui : c'étaient
deux systèmes entièrement opposés que
l'ambition et le mécontentement réu-
nissaient pour un instant : c'était une coa-
lition entre deux partis extrêmes pour
faire tomber un ennemi commun. Cette
ligue parvint à son but : le ministère
dont Pitt faisait partie tomba , et Fox
pour la seconde fois reprit un portefeuille
( 2 avril 1783 ). Ce fut sous ce ministère
qu'eut lieu le traité de paix définitif
avec toutes les puissances que l'Angle-
terre avait eues à combattre , et Noth
auteur opiniâtre de la guerre, qui faisait
aussi partie du ministère, se vit obli-
gé d'y concourir. Ce ministre , ainsi qu
Fox , avait auparavant combattu viv
ment les préliminaires de la paix ; mais
chose bien singulière , et cependant fré-
quente dans les gouvernemeiis constitu-
tionnels, c'est qu'il ne fût rien changé aux
I
1
FOX
conditions proposées d'abord. La neutrali-
té des puissances du Nord auxquelles l'An-
gleterre défendait de fournir à la France
des bois de construction fut un léger ob-
stacle à la paix : néanmoins elle fut signée
avec lesEtats-Unis dont l'indépendance fut
alors légitimement reconnue ; avec la Hol-
lande qui rendit ses anciennes conquêtes;
avec l'Espagne qui recouvra Minorque et
les Florides, mais redemanda en vain Gi-
braltar; avec la France dont l'Angleterre
redoutait la puissance (3 septembre 1783).
L'Angleterre recouvrait dans l'Inde au
delà de ce qu'elle perdait en Amérique :
l'attention de Fox qui était ministre des
affaires étrangères, se porta sur ce pays oii
d'horribles abus faisaient maudire le nom
anglais , et pouvaient amener de sanglan-
tes représailles : il porta un bill en vertu
duquel les pouvoirs de la compagnie des
Indes devaient être déférés à sept direc-
teurs qui ne pourraient être renvoyés sans
l'aveu du parlement. Le discours qu'il pro-
nonça dans cette occasion passe pour être
le chef-d'œuvre de cet orateur. Malgré
l'opposition de Pitt, la loi passa à une
«forte majorité : mais ce succès, qui devait
le maintenir au pouvoir , fut la cause de
sa chute ; Georges ÏII ne put voir avec
indifférence la conduite d'un ministre qui
diminuait tous les jours ses prérogatives
royales, et on assure qu'il agit en secret
pour faire rejeter le bill à la chambre des
Lords ; il réussit en effet ; mais comme les
députés des communes persistèrent dans
leur première résolution , il ne vit d'autre
moyen de salut pour son autorité que de
renvoyer un ministère, sous lequel il était
dans une espèce de tutelle , et dont le sys-
tème ne pouvait convenir à son plan par-
ticulier de gouvernement. Ce ministère
avait duré peu de temps et trop cepen-
dant pour que Fox qui, en y entrant,
avait promis de ne plus se livrer à la dis-
sipation, au jeu et à la débauche, ait pu
montrer qu'au moins, lorsqu'il était au
pouvoir, la politique absorbait ses pas-
sions. Cet homme d'état dut s'apercevoir
combien ses tergiversations avaient indis-
posé contre lui la multitude , puisqu'aux
élections qui eurent lieu à Westminster,
il eut beaucoup de difficultés à se faire
T.
r'Ox
433
élire; les élections durèrent 4 5 jours, et
il ne l'emporta sur son rival que d'un pe-
tit nombre de vois, et quand bien même
il avait pour lui la plus grande quantité
des suffrages , on contesta la légalité de
l'élection : une enquête fut ordonnée :
Pitt et Fox en faisaient souvent la ma-
tière de leurs violens débats , mais enfin
après huit mois de recherches, le parle-
ment déclara l'élection valide. Pitt de-
venu secrétaire d'état à l'âge de 24 ans,
resta au ministère pendant iong-temps.
Fox de son côté fit de son rival le point de
mire de toutes ses attaques. L'opposition
s'était renforcée d'un grand nombre de ta-
lens : cependant elle n'obtint aucun triom-
phe sur l'habileté du ministre qui dirigeait
alors les affaires de l'Angleterre. Mais
dans le mois d'octobre 1788, Fox voya-
geait en Italie lorsqu'il apprit la maladie
de Georges III, qui plus tard devait se dé-
velopper d'iuie manière plus terrible :
aussitôt il quitte Bologne oii il se trou-
vait alors, et il vient à Londres auprès du
prince de Galles dont plusieurs fois il
avait servi les intérêts, et qu'il ne voulait
point abandonner dans cette circonstance
difficile. Il appuya ses prétentions à la
régence vivement disputées par le minis-
tère. Pendant que l'on discutait encore,
le chancelier annonça que sa Majesté d'a-
près le rapport des médecins , était en
convalescence et que tout concourait à
donner l'espoir d'un prompt rétablisse-
ment ; qu'il fallait ajourner la délibération
( février 1789 J. Bientôt en effet la santé
du roi se raffermit et il ne fut plus ques-
tion de régence. Sur ces entrefaites la ré-
volution française vint à éclater : Fox
s'en montra le partisan fougueux, et, sui-
vant M. de Montgaillard ( Discours pré-
liminaire de r histoire de France ) , ce
grand bouleversement était aux yeux de
l'orateur anglais le plus yrand pas fait
pour l'affranchissement total du genre
humain. Burke , qui avait combattu avec
lui dans les rangs de l'opposition, déclara
qu'il renonçait à l'amitié d'un homme
qui prêtait à de pareils désordres l'auto-
rité de son talent. Fox versa des larmes ,
conjura Burke d'abjurer une résolutioa
qu'il regardait comme un grand malheur
2{5
434 ^0%
pour lui ; jnais leur liaison ne &e re-
noua jamais. En 1790 le cabinet de Lon-
dres parut disposé à faire la guerre à la
Russie et à l'Espagne : Fox combattit le
projet avec son éloquente énergie, et le
discours qu'il prononça dans cette cir-
constance lui valut l'honneur de voir son
buste placé par Catherine II , entre ceux
de Cicéron et de Démosthènes. Cepen-
dant la révolution française faisait de jour
en jour plus de progrès. De grands cri-
mes se commettaient , et l'enthousiasme
de Fox ne diminuait point. Lorsque le pro-
cès de Louis XVI fixa tous les regards ,
Fox, qui bien certainement n'avait point
prévu ce fait , proposa au parlement d'An-
gleterre d'intervenir auprès de la Conven-
tion nationale en faveur du monarque qui
allait être jugé par ses sujets. Il est beau
de voir un étranger d'un talent aussi dis-
tingué que Fox , entraîné par des idées
de philanthropie et d'humanité, reculer
devant les conséquences du système ré-
volutionnaire proclamé en France, et , de
concert avec d'autres hommes d'état re-
commandables de son pays, sommevle mi-
nistère anglais de concourir au salut de
Louis XVI. Sur la motion de Shéridan ,
Fox, Grey, etc., la chambre des commu-
nes vota (20 décembre) une adresse au roi
dans laquelle elle exprimait l'indignation
et l'horreur de toute la nation sur l'in-
justice et la barbarie de la catastrophe qui
menaçait le roi de France. Lorsque la
guerre entre la France et l'Angleterre fut
proposée, Fox, malgré son mépris pour
notreancien gouvernement, s'écriait plein
d'indignation : Le meilleur moyen de pu-
nir les Français de ce meurtre exécra-
ble est de les abandonner à eux-mêmes ,
puisqu'une nation capable de commettre
et de souffrir une injustice , une atro-
cité' aussi manifeste , ne peut manquer
d^en recueillir bientôt les fruits les plus
amers. Trois ans après il haranguait dans
le forum de Westminster les électeurs dont
il sollicitait les suffrages ; faisant allusion
au même événement , il disait encore : Il
n'est pas un européen hors de France
qui ne considère ce déplorable événe-
ment comme l'acte le plus révoltant de
la cruauté et de T injustice. Le môme Fox
fox
s^exprime ainsi dans son ouvragé sur les
derniers Stuarts : « Si l'on cifbsidère les
» motifs qui déterminèrent l'arrêt de mort
>» sous des rapports étendus , si l'on exa-
■» mine l'effet général qu'il devait pro-
» duire et qu'il produisit dans l'opinion ;
)> il faut convenir que la courageuse pa-
» tience et la piété que Louis XVI eut
» occasion de déployer, ont inspiré pour
» sa mémoire une vénération qu'autre-
)) ment il n'aurait obtenue qu'à un bien
» moindre degré. Du respect compatis-
« sant qu'on ressent pour celui qui souf-
M fre et de la haine qu'on porte à ses en-
» nemis, naissent bientôt faveur pour la
» cause de l'un , aversion pour celle des
»> autres : ainsi , même en admettant ( ce
» qui est douteux ) qu'un exemple aussi
» terrible pour les princes eût été de quel-
j) que utilité pour la cause des peuples ,
M cet avantage fut bien plus que contré-
» balancé par la faveur que donnent à la
» cause des rois les passions les plus no-
» blés du cœur humain, l'admiration pour
» la vertu et la pitié pour le malheur. »
N'oublions pas que c'est Fox , le partisan
de la révolution française qui s'exprime
ainsi. Cet attachement aux principes ré-
volutionnaires lui avait entièrement alié-
né les esprits ; la débauche avait usé son
tempérament vigoureux, et sa fortune
était délabrée entièrement. Sans influen-
ce et sans ressource , il s'éloigna des af-
faires publiques. Cependant ses amis po-
litiques déplorèrent cet éloignement et
l'engagèrent à rentrer au parlement. Ce
fut alors qu'il s'adressa aux citoyens de
Westminster, pour leur faire part de la
triste position dans laquelle il se trouvait;
cette explication fut bien accueillie , et
ses partisans se cotisèrent pour subvenir à
ses besoins. De retour au parlement , il
combattit l'opinion du ministère qui
avait déclaré qu'il était impossible d'en-
tamer aucune négociation avec la Fran-
ce, tant que le système de gouvernement «
adopté par ce pays n'éprouverait pas deH
grands changcmens. La multitude lui
était alors dévouée : le jour anniversaire
de sa naissance , Fox fut entouré d'une
foule innombrable qui s'était rendue d
toutes les parties de la ville à la tavern»
I
FOX
où il dînait ; des discours v^hëmens fu'
rent prononcés , et lui-même but à la
santé du PEurLE-souvERAiw. Le roi, infor-
mé de la conduite de Fox, le raya lui-
même de la liste des conseillers de la
couronne, titre qui lui avait été conservé.
Fox fut très sensible à cette disgrâce , et
pendant quelque temps il ne parut pas
à la tribune ; cependant il triompha, lors-
qu'il vit que le gouvernement anglais
était disposé dès l'année 1795 à recevoir
des propositions de paix de la part du
Directoire. Ce ne fut qu'en 1801 que le
traité d'Amiens fut signé. Alors Fox se
rendit en France ; accueilli avec distinc-
tion par Buonaparte , il profita de son
séjour à Paris et de la permission qui lui
en fut donnée, pour puiser dans les archi-
ves du gouvernement , les renseigne-
mens dont il avait besoin pour l'Histoire
des derniers Stiiarts dont il s'occupait.
A peine fut-il de retour en Angleterre
•que son pays déclara de nouveau la
guerre à la France. Pitt s'était retiré du
ministère avant que le traité d'Amiens ne
fût signé , mais Fox n'y était point ren-
tré ; son rival devait reprendre le timon
des affaires le 12 mai 1804 , et il le con-
serva jusqu'à sa mort arrivée en 1806.
Après 22 ans de retraite, Fox ambition-
nait de se retrouver sur le théâtre des af-
faires publiques ; il fut encore une fois
ministre des affaires étrangères. Aupara-
vant il avait montré d'abord quelque
conformité entre ses vues et celle de
Pitt, et l'on assure même qu'entre ce
ministre et Fox il y avait eu un rappro-
chement, d'après lequel ce dernier devait
rentrer au ministère, sous les auspices
de lord Grenville ; mais le roi ne voulut
point alors entendre parler de Fox , pour
lequel il avait une haine prononcée.
Lorsqu'il s'était vu ainsi éloigné du gou-
vernement , Fox avait repris son rôle de
chef de l'opposition ; et à la mort de Pitt,
celte opposition étant plus violente que
jamais , ce fut à la nécessité du moment
que Georges III céda , en permettant que
le nom de Fox figurât sur la liste des mi-
nistres. Fox avait rendu l'hommage le plus
grand aux talens de Pitt , ainsi qu'à ses
mœurs et à ses vertus privées ; mais ei?
FOX
435
rappelant les fautes et les erreurs qu'il
reprochait à sou rival , il s'était opposé
aux honneurs que l'on voulait décerner
à ce ministre. Pendant la courte admi-
nistration de Fox , on le vit avec éton-
nement proposer de faire la guerre au
roi de Prusse : on dit qu'il ne le fit que
dans l'intention de plaire au roi qui dé-
sirait reprendre l'électorat d'Hanovre qui
formait une partie de son patrimoine.
Ce ne fut pas la seule circonstance dans
laquelle on trouva dans cet homme d'état
des idées de courtisan et l'oubli de son
ancien amour pour l'indépendance. Dé-
jà plusieurs fois il avait été q,uestion au
parlement de la traite des Nègres ; la
proposition d'abolir ce commerce hon-
teux avait été faite par Pitt ; elle fut re-
nouvelée par Fox qui partageait entière-
ment cette opinion , et qui précédem-
ment avait dit : Depuis 40 ans que je
siège nu parlement y si j'eusse remporté
cette victoire sur la cupidité , je me se-
rais retiré de la carrière avec la con-
science d'avoir senti mon devoir et de
ravoir rempli. Il fit alors adopter une
adresse au roi pour le supplier d'obtenir,
par des négociations , le concours des
puissances étrangères à l'abolition du
commerce des Noirs; et il mérita ainsi
que la sculpture plaçât sur son mausolée
l'image de l'Afrique reconnaissante. Fox
mourut le 13 septembre 1806, à l'âge de
58 ans, et sa dépouille mortelle alla re-
joindre celle de son rival Pitt sous les
caveaux de Westminster. On rendit les
plus grands honneurs à sa cendre ; et ses
funérailles firent éclater des regrets pres-
que universels ; car ses partisans per-
daient leur chef, ses adversaires un
homme de génie : sa mort laissait un
grand vide à la tribune , oii sa voix avait
tant de fois fait entendre des paroles si
éloquentes. Il n'avait que 58 ans , et, de-
puis l'âge de 20 ans , il avait toujours été
membre de la chambre des communes. Ce
qui contribua le plus à sa renommée , ce
fut d'abord son système de paix géné-
rale, et sa lutte contre le ministère, à
deux époques différentes, lors de la guerre
d'Amérique , et de celle que l'Angleterre
déclara à la république française \ il fut
436
FOX
le partisan , le protecteur , l'orateur des
deux révolutions qui , à la fin du dernier
siècle, ont ébranlé le inonde entier, et
dont toutes les conséquences sont encore
loin d'être prévues. Si nous sommes loin
d'approuver sa conduite dans ces deux
affaires , nous applaudirons aux pensées
pleines d'humanité qui le dirigèrent,
lorsqu'il demanda l'abolition de la traite
des Nègres. Son talent oratoire n'attei-
gnait la haute élévation à laquelle il est
si souvent parvenu , que lorsqu'il était
animé : quand rien ne l'agtiait , il y
avait peu de méthode dans ses discours ;
il n'était pas toujours très clair , et son
débit était quelque peu difficile. Mais ,
lorsqu'il était ému, sa dialectique était
pressante et vigoureuse •. c'étaient , dit
Baërt, cité par Montgaillard , dans le to-
me 1 0 de l'histoire de France, des rayons
dun soleil brûlant ; et, si en Angleterre
comme en France , il y a quelque dissen-
timent sur la bonté de la cause qu'il défen-
dit , il n'en existe aucun sur le mérite de
son éloquence : ainsi lorsqu'on dit que
celle de Pitt fut Cice'ronienne , on ajoute
que celle de Fox est De'mosthe'nique.
En effet, il y a chez lui plus de force
que d'ornemens; il n'est jamais rhéteur,
il est toujours orateur. Nous voudrions
ne point revenir sur sa vie privée : en
1796 , il avait, comme nous l'avons dit,
fait un appel à ses amis qui lui firent une
pension de 3,000 livres sterlings. Il avait
été pendant quelque temps sans autre
ressource, que celle que lui fournissaient
les chances du jeu ; et on le voyait pas-
ser dans la même nuit du parlement à un
tripot, ou d'un tripot au parlement. Ja-
mais les pertes qu'il fit, quelque gran-
des qu'elles fussent , ne troublèrent son
âme. On raconte qu'un jour qu'il avait
été plus malheureux que de coutume ,
l'un de ses amis craignit qu'il ne prît
quelque résolution funeste : plein d'in-
quiétude , ii se rendit à sa maison ;
mais , au lieu de le voir accablé des coups
du sort, il le trouva occupé d'examiner
une nouvelle édition ô'He'rodote. On ra-
conte encore de lui qu'étant avec un
compagnon de débauche que des huis-
siers poursuivaient ainsi que lui, leur
FOX
retraite fut découverte , et que les gens
du roi vinrent pour se saisir de leurs
personnes ; mais , au bruit que firent les
huissiers , Fox, qui n'en connaissait point
la cause , regarda aussitôt à la fenêtre ; et
commeil eut bientôt reconnuleshuissiers,
il leur demanda gravement si ce jour-là
ils chassaient au lièvre ou au renard ?
( Son compagnon s'appelait Hare , mot
qui veut dire lièvre , et le nom de Fox
veut dire renard. ) Les huissiers ne pu-
rent s'empêcher de sourire , et l'un d'eux
l'engagea sinon à payer , du moins à in-
diquer un terme, quand ce terme devrait
être le jugement dernier :A^o/î, lui dit Fox;
ce jour-là il se traitera des choses plus
se'rieuses ; remettons, si vous le voulez,
l'affaire au lendemain -. ces paroles an-
noncent l'esprit de Fox ; mais elles ne
prouvent pas en faveur de sa probité ni
de sa délicatesse. En général , il négligea
trop la réputation des mœurs qui sont si
nécessaires à l'orateur, lors même que
la religion n'en ferait pas un devoir ; et
en vérité l'on est honteux pour lui de
l'entendre dire dans une de ses lettres
qu'un seul genre d'excès ne lui suffisait
pas ( Histoire d'Angleterre de Hume ,
continuée jusqu'en 1820, tome 20, page
300). Sa passion pour le jeu était si forte
que, lorsqu'il occupaitquelque place dans
l'administration, ses commis étaient obli-
gés d'aller le chercher dans les maisons
publiques , et, tandis qu'il signait d'une
main , il tenait les cartes de l'autre. Il
avait été pendant sa jeunesse d'une re-
cherche étonnante dans ses vêtemens ;
sur la fin de sa vie il était d'une saleté
dégoûtante. Il était d'une taille moyenne. ,
en avançant en âge, il grossit beaucoup. Â
Un visage large , uu nez aquilin , des f
yeux vifs, recouverts de sourcils noirs,
une barbe épaisse et souvent très longue,
tels étaient les caractères principaux de
son portrait , dont il était facile de faire
une caricature, satisfaction que se don-
nèrent plus d'une fois ses ennemis. Fox
avait un esprit très cultivé ; il a laissé
quelques vers latins dont l'élégance at-
teste la profonde connaissance qu'il avait
de la langue des Romains. Il savait tout
aussi bien le grec , et ses auteurs favoris
I
1
FOX
ëtaieut Homère , Longin , Thucydide et
Démosthènes. Fox n'a fait imprimer de
SOD T^ivant que son Appel aux citoyens
de fFeslniinster . Son Histqire des deux
derniers rois de la maison des Stuarts ,
suivie de pièces originales et justifica-
tives , Londres, 1808, ia-4 , ne parut
qu'après sa mort : c'est une apologie
de la révolution de 1668, qui paraît
avoir été faite plutôt par un avocat qui
défend sa cause que par un narrateur
qui raconte les faits. Cet ouvFage impar-
fait a été publié par son neveu, lord
HoUaud; il a été attaqué par M. Rose et
défendu par Samuel Heyvood. M. l'abbé
d'Andrezel en a fait paraître une traduc-
tion française en 1800 , 2 vol. in-8, avec
une notice sur l'auteur ; mais elle n'a vu lé
jour qu'après avoir été horriblement mu-
tilée par la police de Buonaparte. Les Dis-
coursde Fox ont été recueillis en 1 8 1 4, 6
volumes in-8 , et traduits en français par
MM. H. de Lanvry et de Jussieu, 1819-
20, 12 vol. in-8. On a publié diverses
biographies de Fox ; mais outre ces dif-
férens ouvrages historiques qui ont paru
en France et en Angleterre, sur ce person-
nage célèbre , on peut consulter 1 ° His-
toire de la vie politique et des services
publics comme orateur et homme d'e'tat
de C. J. Fox, Londres, 1783, in-8;
2° Recollections of tlie life, etc.. Souve-
nirs de la vie de Ch. J. Fox, par B. C.
Walpole, ibid. 1806, in-12 ; ^"Mémoire
surlavie publique de Fox , 1808, 1 vol.
in-4 ; 4° Caractères de feu Ch. J. Fox,
choisis et en partie e'crits par Philopa-
tris Varvicensis (on croit que c'est le
docteur Parr qui s'est caché sous cette
indication pseudonyme), 1809, 2 vol.
in-8 ; 5° Mémoire sur les dernières an-
nées de Ch. J. Fox , par Jean Bernard
Frotter son secrétaire, 1811, in-8;
6° Correspondance de Ch. Jame Fox
avec feu Gilbert Fakefield , de Vannée
1796 à iSOi , principalement sur des su-
jets de littérature classique, 1816, 1
vol. in-8; 7° Fie politique, littéraire et
privée de Fox , traduite en français ,
Paris, 1808 , in-8. En général il faut se
défier de ces différens ouvrages dans les-
quels les auteurs ont été plutôt exclusi-
FOY 43^
vement des panégyristes quô dé vérita-
bles biographes.
FOX-MORZILLO , Foxus MorziUus
( Sébastien ) , né à Séville en 1 528 , fit
ses études eu Espagne et dans les Pays-
Bas, et s'acquit de la réputation par ses
ouvrages. Philippe II , roi d'Espagne ,
l'ayant nommé pour être précepteur de
l'infant don Carlos , il quitta Louvain, et
alla s'embarquer pour être plutôt auprès
du prince ; mais il fit malheureusement
naufrage , et périt à la fleur de son âge.
On a de lui des Commentaires sur le
Timée et sur le Phédon de Platon, in-fol . ,
et plusieurs autres ouvrages remplis d'é-
rudition.
* FOY (Maximilien-Sébastien), l'un
des lieutenans-généraux les plus distin-
gués de l'armée , et l'un des orateurs les
plus éloquens de la chambre des députés,
naquit à Ham (Somme) le 3 février 1775.
Il se destina de bonne heure à la carrière
militaire , et , après avoir fait ses études
préparatoires , il fut admis , à l'âge de 1 5
ans, à la suite d'un brillant examen, à
l'école d'artillerie de Lafère. Deux ans
après, ayant terminé ses cours militaires
et ayant obtenu les suffrages de ses maî-
tres et de ses chefs , il fut nommé sous-
lieutenant d'artillerie ( l*"" mars 1792),
puis lieutenant au 3""® régiment de la
même arme (septembre 1792 ) ; ce fut en
cette qualité qu'il fit la campagne du
Nord soi's le général Dumouriez. Les
premiè; es armes de Foy annoncèrent un
guerrier distingué , et ce fut en peu de
temps qu'il dut à sa belle conduite les
grades de capitaine , de chef d'escadron
et d'adjudant-général ; ce dernier grade
lui fut donné sur le champ de bataille de
Diessenoffen ( 1800). Mais reprenons la
vie militaire de Foy dont la réputation
mérite un récit plus circonstancié. Après
avoir fait les campagnes de Belgique
( 1792 ) , Foy revint à Paris; désigné pour
faire partie des armées , commandées
successivement par les généraux Dam-
pierre , Custines , Houchard , Jourdau
et Pichegru, il prit part à toutes les
affaires qui eurent lieu pendant ces deux
années ( 1793-1794). Quelque temps
après, il fit à la tête de la 6® com-
438 FOY
pagnîe du i' régiment d'artillerie à
cheval, les campagnes de 1796, 1796
et 1797 à l'armée du Khin et Moselle ; il
faudrait citer toutes les actions de Foy ,
si l'on voulait faire connaître les faits
d'armes qui lui ont acquis la réputation
brillante dont il jouissait parmi ses ca-
marades : disons seulement qu'il se dis-
tingua de la manière la plus éclatante
au passage du Lech , à l'assaut de la tête
du pont de Huuingue, au passage du Rhin
à Diesheim. Après avoir fait partie de
l'armée expéditionnaire que l'on voulait
envoyer dans la Grande-Bretagne (1798,
an 6 ) , il vint à l'armée de Suisse où il
servit sous les ordres du général Schauen-
bourg. A l'armée du Danube (1799), il
mérita les éloges du général Masséna,
et l'année suivante le passage de la Lim-
math ne fut effectué que, grâce à ses con-
seils éclairés et à sa bravoure consommée.
En 1800, il était adjudant-général à
l'armée du Rhin d'où il passa peu de
temps après , avec le corps du général
Moncey en Italie , pour se joindre à
l'armée qui venait de s'illustrer à Maren-
go. Chargé du commandement d'une
brigade d'élite qui formait l'avant-gar-
de , il vainquit les troupes autrichiennes
à Perri , à l'entrée du Tyrol : ce qui lui
valut le grade de colonel du 5™" régi-
ment d'artillerie à cheval , auprès du-
quel il ne se rendit que lorsque la paix
d'Amiens eut été signée. Après la rupture
de ce traité en 1803, il commanda les
batteries flottantes destinées a la défense
des côtes de la 16* division militaire. En
1804 , il fut employé comme chef d'état-
major d'artillerie au camp d'Utrecht. En
1805 , il fit la campagne d'Autriche dans
le 2® corps de la grande armée , et en
1806, il commanda l'artillerie du corps
stationné dans le Frioul. Lorsqu'en 1807
le gouvernement français, en vertu d'une
convention particulière, envoya 1,200
canoniers auxiliaires au sultan Selim, ce
fut le colonel Foy qui les commanda ; ces
canoniers furent obligés de revenir en
France , par suite de la révolution qui
éclata vers cette époque à Constantino-
ple. Foy resta en Turquie et se chargea
de la défense des Dardanelles contre les
FOY
Anglais. De retour en France vers la fin
de 1807, il fut envoyé en Portugal ou
il fit la campagne de 1808. Ce fut seule-
ment alors , le 3 septembre de cette an-
née, qu'il fut Bommé général de brigade.
Il commanda dès lors une brigade de
l'armée de Portugal jusqu'au 29 octobre
1810, époque où il fut promu au grade
de général de division. Foy avait été
choisi par le maréchal Masséna pour dé-
fendre auprès de Buonaparte la cause de
l'armée de Portugal arrêtée sur les bords
du Tage par des obstacles qu'il ne dépen-
dait pas de sa valeur et de son dévoue-
ment de surmonter. Il remplit cette mis-
sion d'une manière noble et honorable, et
l'on croit qu'il fut dans cette circonstance
mieux apprécié par l'empereurqui le nom-
ma seulement alors général de division.
Foy a prouvé par les savantes manœuvres
qu'il fit faire aux troupes qu'il avait sous
ses ordres, que depuis long-temps il mé-
ritait cette marque de confiance, ou pour
mieux dire cette récompense due à tant
de services. Ainsi après avoir dirigé des
corps isolés composés de plusieurs divi-
sions , il prit à la bataille des Acapiles ou
de Salamanque (22 juillet 1812) le com-
mandement en chef de l'armée, qu'il con-
serva pendant toute la retraite dont il
assura les mouvemens, et pendant tous
les engagemens que ses troupes eurent
avec l'armée anglo-espagnole , jusqu'à
son arrivée sur le Duero. Alors on le vit,
à la tête de la droite de l'armée de Por-
tugal , s'emparer , pendant la retraite des
Anglais , de la ville de Palentia le 25 oc-
tobre 1812 , et opérer avec le plus grand
bonheur le passage du Duero à Fordesil-
las le 29 du même mois. L'année, sui-
vante , il commanda deux divisions dans
la Biscaye, fit le siège de Castro Urdiaies,
et dispersa les bandes de guérillas qui
infestaient cette province. Après la ba-
taille de Vittoria (21 juin 1813), Foy
réunit les débris de l'armée française
avec lesquels il forma un corps de vingt
mille hommes. Il battit , avec quelques-
unes de ses troupes, l'aile gauche d6^
l'armée ennemie. C'est ici l'époque la
plus belle de la vie militaire de Foy :
attaqué par le général Graham , il se
I
1
défendit pied à pied contre les Anglais ;
et la BATAILLE DB ToLosA , dans laquelle
les ennemis firent tant de perte , est sans
contredit le plus brillant fait d'armes de
cette campagne, et toute la gloire en
appartient au général Foy. Après avoir
renforcé la garnison de Saint-Sébastien
et repassé la Bidassoa , sans avoir laissé
derrière lui un homme , un canon , ou
même un fusil , il commanda la gauche
de l'armée à la bataille de Pampelune ,
et à celle de St.-Jean-Pied-de-Port. Il eut
la part la plus active à tous les combats
qui furent livrés pendant plus de six
mois pour la défense du passage des Py-
rénées. Blessé grièvement d'un coup de
feu à la bataille d'Orthez , il se retira le
27 février 1814 : on croyait que cette
blessure était mortelle. Sous la première
restauration, Louis XVIII sut le distinguer
d'entre cette foule de généraux que la
révolution et l'empire avaient légués à la
royauté ; il le nomma inspecteur-général
et lui donna le titre de comte avec la
croix de St. -Louis. Lorsque Buonapartc
essaya pendant les cent-jours son gou-
vernement militaire , Foy oublia sans
doute avec quelle lenteur il était arrivé
au grade qu'il avait enfin obtenu : peut-
être, comme tant d'autres Français qui,
(l'on ne sait en vérité pour quel motif),
n'avaient pu être attachés , même par la
reconnaissance , à la cause de la légiti-
mité, et rêvaient une république impos-
sible au milieu de mœurs corrompues ,
il ne prit alors les armes que par haine
pour l'étranger, et non par attachement
pour un prince qui avait si long-temps
refusé de lui donner un avancement
justement mérité. Quoi qu'il en soit ,
le général Foy assista à la bataille de
Waterloo où il reçut une balle qui lui
perça l'épaule : c'était la 16* blessure
qu'il recevait sur le champ de bataille.
Cependant il combattit encore jusqu'à
la fin de l'action , et ne se retira que
lorsqu'il se fut assuré que le désastre
de l'armée était certain. Après le se-
cond retour des Bourbons , le général
Foy se tint pendant quelque temps à
l'écart. Dans sa solitude il se livrait à de
hautes méditations. Le général Foy avait
des opinions politiques arrêtées , et nous
ne croyons faire aucune accusation in-
juste envers cet illustre personnage en
disant qu'elles tendaient au républica-
nisme ; ce n'était certainement pas le
républicanisme de 1793; il avait même
en horreur les monstres qui tourmenté ■
rent alors la France pendant trop long-
temps. Ainsi en 1 7 94 , à l'époque de
la terreur, sa grande âme s'indigna
de la sanglante tyrannie dont la Fran-
ce était alors la victime : il osa même
s'exprimer avec une noble hardiesse au
sujet des massacres qui tous les jours se
renouvelaieat à Paris et dans plusieurs
autres villes , en présence de Joseph Le-
bonqui le fit aussitôt incarcérer : l'ordre
avait été donné de le traduire devant le
tribunal révolutionnaire , dont les arrêts
de mort tombaient sur presque tous les
accusés , lorsque le 9 thermidor, jour oii
le monstre le plus féroce tomba à son
tour sous la hache révolutionnaire , le
rendit à la liberté et à la gloire. Lors-
qu'en 1 803 éclata l'affaire de Georges et de
Pichegru à laquelle on rattacha le nom
de Moreau , il refusa de faire signer à
son corps une adresse au premier con-
sul ; comme on y désignait les accusés
comme coupables , il prononça ces paro-
les vraiment historiques : « Je féliciterai
» autant qu'on le voudra le premier con-
» sul d'avoir échappé à une conspiration
M contre sa vie ; mais je ne signerai ja-
» mais , je ne ferai jamais signer à mes
» officiers une adresse qui 'désigne tels
» ou tels individus comme auteurs ou
w chefs de cette conspiration , parce que
» JK suis MILITAIRE ET QDK JE NE SUIS PAS
» JUGE. » Lorsque le guerrier devenu
consul à vie ne se contenta plus de cette
haute dignité, et s'aliéna à jamais les
républicains dont il détruisait les espé-
rances , et les vrais royalistes qui avaient
quelques raisons de croire que son œil
clairvoyant ne trouverait d'autre parti
à prendre pour sa gloire et pour le repo»
de l'Europe que celui de rappeler les
Bourbons , Foy refusa d'inscrire son nom
sur les registres où la bassesse et la flat-
terie allèrent déposer leurs suffrages :
indigné même de voir un grand homme
44o FOY
se déshonorer par cette usurpation , qui
n'était, il est vrai, à ses yeux que la
destruction de la république , et échan-
ger la couronne de lauriers si légère
pour la tête d'un héros, contre la cou-
ronne d'or de l'empire si lourde même
pour les grands hommes. Foy refusa
même dans un repas très nombreux de
porter uu toast au héros qui briguait le
titre d'empereur ; il se contenta de boire
au premier consul. C'est à ces actes d'in-
dépendance qu'il faut attribuer surtout
le refus que Buonapartc faisait continuel-
lement de donner de l'avancement au
colonel Foy qu'il laissa pendant 9 ans
avec ce grade, sans lui avoir même con-
servé celui d'adjudant-général qu'il avait
gagné sur le champ de bataille. Le gé-
néral Foy aimait l'étude : pendant quel-
que temps on le vit suivre à Strasbourg ,
oîi il se trouvait pour soigner la blessure
qu'il avait reçue à Diershem , lors du
passage du Rhin , les cours de droit pu-
blic des nations donnés par le professeur
Koch. Pendant sa retraite del81dàl819,
ce fut avec ardeur qu'il s'occupa de re-
cherches historiques ; il rédigea et mit
en ordre ses Souvenirs sur la guerre
d'Espagne. Nommé inspecteur-général
d'infanterie dans les 2* et 16* divisions
militaires, il reparut dès lors dans les
affaires publiques. La même année (1819)
il fut élu à la chambre des députés par
le département de l'Aisne. Sur ce nou-
veau théâtre , le général Foy brilla peut-
être encore plus que sur les champs de
bataille. Sans contredit , il fut l'un des
orateurs les plus éloquens, je dirai pres-
que le premier orateur de la restauration.
Il siégeait au côté gauche , mais il ne
partageait point l'exagération de ceux
de ses collègues qui occupaient la même
partie de la chambre : calme dans la dis-
cussion la plus vive , modéré au milieu
des passions , il parlait avec sang froid ,
avec aisance , avec grâce : il y avait du
mouvement dans son stile ; on remar-
quait des formes vives et figurées qui le
rendaient pittoresque : son éloquence
semblait être d'inspiration : c'était son
âme qu'il paraissait mettre à découvert,
lorsqu'il exprimait ses sentimeus patrio*
r^OY
tiques qui ne sont pas le privilège exclu-
sif d'un parti , mais qui font palpiter le
coeur d'un royaliste au moins autant que
celui d'un républicain. Il avait une argu-
mentation puissante; ses raisonnemens
étaient fondés sur la charte de Louis XVIII,
dont nous aimons à croire qu'il était le
partisan sincère. Foy était aussi l'adver-
saire le plus acharné des ministres , dont
il combattait le système et les actions
toutes les fois qu'il les jugeait contraires
à ses doctrines qu'il croyait être celles
de la France entière. Il fut l'ami de Ca-
simir Perrier, et nous croyons ne pas
nous tromper en disant qu'il mérita l'élo-
ge que M. Royer-Collard a fait au prési-
dent du conseil le jour de ses funérailes;
c'est qu'il ne conspira point. Foy est un
caractère à part : au milieu de l'opposi-!
tion libérale dont tous les actes furent
loin d'être dirigés dans l'intérêt public,
il sut toujours faire preuve de cette
loyauté, de cette grandeur d'âme dont
les camps lui avaient donné l'habitude ,
et que l'étude avait encore agrandie. On
pouvait n'être point le partisan de ses
opinions , mais on était forcé d'être l'ad-
mirateur de son talent. L'abbé de Mont •
gaillard place son nom à côté de ceux de
Mirabeau et de Cazalès. Nous ne pouvons
point passer en revue tous ses discours ;
nous dirons seulement qu'il parla sur
tous les projets importans qui furent dis-
cutés depuis 1819 jusqu'en 1825. Il prit
à tâche surtout de défendre ses anciens
compagnons d'armes dont il redisait sou-
vent les exploits , et en faveur desquel
il réclamait l'attention du gouvernement.1
On peut dire qu'il ne laissa échapper au:-|
cune occasion de parler, et qu'il trait
toutes les que.stions d'administration tani
civile que militaire, comme toutes celle
d'économie politique et même de diploma-
tie qui se présentèrent ou qu'on fit naître
dans les sessions auxquelles il prit part,
venait d'être réélu par le département
qui l'avait déjà nommé une fois , lors
qu'il se sentit affaibli par les fatigues d(
discussions continuelles qu'il soutenait
journellement , et de plus en plus , avec
une ardeur à laquelle ses forces physi-
ques ne pouvaient pas répondre. Le tra".
FOY
vail lui fut interdit, et il entreprit, d'après
l'avis des médecins , un voyage dans les
Pyrénées qui ne fit qu'aggraver son mal.
De retour à Paris , il reçut les soins em-
pressés de ses parens et de ses amis ; mais
ils furent inutiles. Foy mourut le 28 no-
vembre 1825. Ses funérailles furent sem-
blables à celles de tous les hommes po-
litiques qui sont les chefs ou les repré-
sentans d'un parti. Le convoi fut composé
d'une foule immense , et des discours
furent prononcés sur sa tombe , par Ca-
simir Perrier , Méchin , Ternaux , et le
général MioUis : mais grâce à l'active
surveillance du gouvernement , aucun
scandale ne vint troubler celte pompe fu-
nèbre. Il laissait une fortune de 8,000
livres de rente : un appel fut bientôt fait
h tous les libéraux de France pour doter
cette famille que l'on disait malheureuse,
et la souscription produisit près d'un
million. Plusieurs de ses Discours avaient
déjà été imprimés ; mais ils ont encore
été recueillis après sa mort , sous le titre
de Discours du gênerai Foy , précédés
dune notice biographique par M. P. F.
Tissot, d!un éloge par M. Etienne et
dun essai sur l'éloquence politique en
France, par M. Jay, Paris, 182G, 2 vol.
in-8, avec portrait et fac-similé, 2* édition,
1827. On avait déjà recueilli les Pensées
du général Foy , tirées de ses discours
prononcés à la tribune législative pen-
dant les sessions de 1819 et de 1820,
précédées d'une notice sur la vie de ce
général, Paris, 1821 , 1 vol. in-l8. On
a aussi imprimé : Journée du 30 novem-
bre 1825 , ou Récit des derniers inomens
et des funérailles du général Foy, Paris ,*
1825, in-8, et Couronne poétique du gé-
néral Foy, publiée par Magallon, Paris ,
1826; c'est un recueil des pièces de
•vers publiées en son honneur. Sa veuve
a fait paraître après sa mort : Histoire
de la guerre de la péninsule sous Napo-
léon , précédée d'un Tableau politique
et militaire des puissances belligérantes,
par le général Foy, Paris, 1827 , 4 vol.
in-8, avec atlas. Cet ouvrage, dit un jour-
naliste , laisse beaucoup à désirer , les
vues n'ont rien de large et les critiques
sont souvent dictées par des préjugés na-
V.
FRA 44 1
tionaux. Cependant, comme cette pro-
duction est d'une certaine importance ,
nous entrerons dans plus de détails. Nous
parlerons d'abord des tableaux militaires
qui , précédant celui de la France , man-
quent de méthode et de suite ; l'auteur
intervertit souvent l'ordre des faits ; mais
on y remarque des traits brillans, et
même sous le rapport littéraire, c'est
un ouvrage remarquable. Les mêmes
qualités se rencontrent dans le Tableau
de r/iiitoire d'Angleterre , avec plus
d'exactitude dans les faits. On y voit les
améliorations successives introduites par
le duc d'York dans l'organisation de l'ar-
mée anglaise , et les progrès que nos éter-
nels rivaux ont encore à faire surtout
dans les armes savantes. LesTableaux de
l'Espagne et du Portugal, quoique
moins importans , présentent aussi des
beautés et des défauts ; quant à l'histoire
dont les tableaux ne sont que l'introduc-
tion , la narration est restée incomplète ,
l'auteur s'étant arrêté à la convention du
30 août 1808 : ainsi sur 6 ans de guerre
il n'a tracé que la première : peut-être
les éditeurs auraient-ils dû donner à l'ou-
vrage le titre de fragment d'une histoire
de la guerre d'Espagne. Ce fragment
serait encore assez recherché , puisqu'il
contient les détails de Kette insurrection
soudaine qui en un instant fit de l'Espa-
gne toute entière un champ de bataille.
Les récits en sont pleins de vie et de
mouvement ; les descriptions de batailles
surtout sont des modèles de netteté , et
l'on doit regretter que l'auteur n'ait pas
terminé son ouvrage et qu'il n'ait pu y
mettre la dernière main ; sans doute il
aurait fait disparaître en partie les défauts
qu'on lui reproche. On a publié plusieurs
P'ies du général Foy.
FRÀ-BASTIEN. Voyez Sébastien.
FRACASTOR ( Jérôme ) naquit] à
Vérone vers l'an 1483 , avec des lèvres si
fort attachées l'une à l'autre, qu'il fallut
qu'un chirurgien les séparât avec un ra-
soir. On dit que , dans son enfance , sa
mère fut écrasée de la foudre , tandis
qu'elle le tenait dans ses bras, sans qu'il
en fût atteint. Ses progrès dans les scien-
ces et les beaux-arts furent rapides, il
28..
((4^ FRA
cultiva surtout avec heaucotip de succès
la poésie et la médecine. Le pape Paul
m, voulant transférer d'Allemagne en
Italie le concile de Trente , se servit de
lui pour y engager les Pères ; et ce fut
alors qu'on le transféra à Bologne, et
mourut d'apoplexie à Casi , près de Vé-
rone , en 1 553 , à 7 1 ans. Sa patrie lui fit
élever une statue G ans après. Fracastor
était en relation avec les meilleurs litté-
rateurs de son temps , et en particulier
avec l'illustre cardinal Bembo. 11 était
digne de ce commerce par les qualités de
son coeur. Exempt d'ambition , content
de peu , il mena une vie saine et joyeuse.
Il parlait peu ; mais lorsqu'il était en so-
ciété avec ses amis , sa conversation était
aussi gaie qu'animée. Dans la médecine ,
il s'attachait à la guérison des maladies
extraordinaires. Fracastor est principale-
ment connu par l'élégance avec laquelle
il écrivait en latin. Son poème intitulé :
Syphilis , sive de morbo gaïlico , ou-
vrage dans le goût des Géorgiques de Vir-
gile , n'est point indigne de l'auteur qu'il
a imité. Il a obtenu plus de 20 éditions.
La versification en est riche et nombreu-
se , les images vives , les pensées no-
bles. On en a donné en 1753 , in-12, une
traduction en français avec des notes :
elle est attribuée à Macquer et à Lacombc.
Il a aussi été traduit en italien. Il nous
reste plusieurs autres ouvrages de ce
poète médecin, 1° De stellis liber unus ,
1535-1538, in-Sj 2° De sympathia et
antipathia rcrum , 1546 , a eu plusieurs
éditions , 3° Fiacastorius sive de anima
Dialogus. On les a recueillis à Padoue en
17 35, en 2 vol. in-i. Les/>oeAie^ avaient
été imprimées séparément dans la même
ville en 1718, in-8.
FRACHEÏÏA ( Jérôme ) , de Rovigo
en Italie, se fit un nom par ses ouvrages
de politique. Le plus considérable est :
// seminario de Governi , di Stato c di
Guerra, 1648 , in-4. Il mourut à Na pies,
au commencement du dix-septième siè-
cle. Il demeura quelque temps à Rome ,
où il fut chargé par la cour d'Espagne de
diversesafl'aires ; mais son esprit satirique
l'obligea de quitter cette capitale. Nous
avoas encore de lui une traduction ila-
FRA
liennedu poème de Lucrèce, avec d'excel-
lentes remarques sur l'Epicuréisme.
•FRA-DIAVOLO, ou Frère Diable,
dont le véritable nom est Michel Pozza ,
naquit à Itri , vers 1 7G0. S'étant mis à la
tête d'une troupe de brigands , il désola
pendant long-temps la Calabre. Lorsque
les Français envahirent le royaume de
Naples, Fra-Diavolo prit le parti du roi ,
et leur fit la guerre. Le cardinal RufFo ,
après avoir forcé, en 1799 , les Français
à évacuer le royaume de Naples , lui ob-
tint le pardon du passé et le brevet de
colonel ou de chef de masse insurgée. De-
venu tout à coup un autre homme, il ne
s'occupa que de bien former sa troupe, fit
la campagne de Rome, s'y distingua par
son intrépidité, et obtint plusieurs récom-
penses. Lorsque les Français, sous la con-
duite de Buonapartc , eurent occupé Na-
ples une deuxième fois , il fut chargé de
réunirses camarades, et il se retira à Gaëte.
Le souvenir de son ancien métier lui fit
commettre quelques désordres dans cette
ville, d'où il fut chassé par ordre du prince
de Hessc-Philippsthal , qui en était gou-
verneur. Après avoir erré quelque temps
dans la Calabre , il se rendit à Palerme ,
oii il prit part à l'insurrection organisée
par le commodore Sydney Smith. Ayant
débarqué à Sperlonga , il délivra sur son
passage tous les malfaiteurs détenus dans
les prisons , pour en grossir sa troupe ,
et marqua sa route par le meurtre , le
vol et l'incendie. Atteint par les Français,
il se défendit avec courage , et parvint à
s'échapper; mais il fut trahi par un
paysan , arrêté à Saint-Severino, et con-
duit à Naples, où il fut exécuté le 6 no-
vembre 1806, sur la place du marché,
en présence d'une foule immense. Sa
mort est devenue le sujet d'un opéra.
FRAGUIER (Claude-François), de
l'académie française et de celle des bel-
les-lettres , naquit à Paris le 28 août 1 666.
Les Pères la Baune, Rapin, Jouvencl, lî^l
Rue et Commire lui inspirèrent le goût]
des belles-lettres, et surtoutdela poésie.
Il prit l'habit de jésuite en 1683, et I^
quitta en 1694, soit qu'il fût convainc!)
que ce n'était pas sa vocation , soit que]
ses supérieurs ne crussent pas qu'il eû|
FRA
l'esprit de l'état religieux. L'abbé Bi[ïnon,
chargé de présider au Journal des Sa-
vans , eilgagea l'abbé Fraguier k parta-
ger ce travail , auquel il paraissait propre
par ses connaissances , et surtout parce
qu'il possédait diflërentes langues. Ren-
lermc chez lui , dans un âge peu avancé,
par des infirmités continuelles , il s'oc-
cupa d'une traduction de Platon , que sa
santé l'obligea d'abandonner; mais il pu-
blia un poème sur la pbilosopbie de ce
Grec , intitulé : Ecole de Platon. Il y
montre ua grand respect pour ces vieux
pédagogues , qui ont donné des leçons
qu'ils ne pratiquaient guère ; leçons qui
elles-mêmes n'étaient pas toujours sages,
et respiraient ou la vanité ou la corrup-
tion des auteurs , et qui dans tous les cas
étaient sans ressort et sans sanction [voyez
Platon , Lucien , Socrate , Zenon , etc.).
Ce poème et les autres poésies de l'abbé
Fraguier se trouvent dans le Recueil de
celles de Huet, publié en 1729, in-12,
par les soins de l'abbé d'Olivet. On a en-
core de l'abbé Fraguier plusieurs Visser-
tations , insérées dans les Mémoires de
l'académie des belles-lettres. Il mourut
d'apoplexie en 1728 , âgé de 62 ans. Le
célèbre Huet et d'autres savans illustres
avaient été ses amis, mais ses liaisons
avec !\inon de Lenclos et son enthousias-
me philosophique qui allait jusqu'à faire
l'éloge du pédéraste Socrate , éloignèrent
de lui les hommes vertueux.
FRAIN ( Jean ) , seigneur du Trem-
blai, né à Angers en 1641 , membre de
l'académie de cette ville, mourut en
1724. Sa conversation était celle d'un
homme qui avait beaucoup lu, mais trop
entêté de ses idées. Sur la fin de ses jours
il devint presque misanthrope. On a de
lui plusieurs Traités de morale solidement
écrits : 1" Nouveaux Essais de morale,
in-12. 2° Traite' de la vocation chré-
tienne des enfans. 3° Conversations mo-
rales sur les jeux et les divertissemcns.
40 Traité de la confiance en Dieu.
* FRAMERY (Nicolas-Etienne ) , poète
et musicien , né à Rouen 1 e 2 6 mars 1745,
mort à Paris le 26 novembre 1810 , cul-
tiva tout à la fois la poésie , l'art drama-
tique et la musique, et il s'est fait connaître
FRA 443
dans ces différens genres par plusieurs
ouvrages qui ont du mérite. Il connaissait
surtout la musique, non-seulement dans
sa théorie , mais encore dans ses différeus
systèmes. Il a composé 1° Mémoire sur
le Conservatoire de musique, 177 5.2° Le
musicien pratique , traduit de l'italien
de D'Azopardi, 2 vol. in-8 , 17 86 ; c'est
un traité de contre-point que l'on dit fort
médiocre, et dont cependant M. Choron
a donné une nouvelle édition en 1823,
1 vol. in-4. ^° Lettre à l'auteur du Mer-
cure (dans le Mercure de septembre
17 76 ) où. il se déclare contre la musique
de Gluck. \°Avis aux poètes lyriques, ou
de la nécessité du rhythme et de la césure
dans les hymnes, 1786, in-8; 5° Dis-
cours couronné par l'Institut sur cette
question : analyser les rapports qui e.vis.-
tent entre la musique et la déclamation,
et déterminer les moyens d'appliquer la
déclamation à la musique sans nuire à
la mélodie, 1802, in-8 ; G" Notice sur
Joseph Haydn , Paris , 1 8 1 0 , in-8 ; 7 ° i9c
rorganisation des spectacles de Paris ,
1791 , in-8; 8° La première partie du
Dictionnaire de musique de l'Encyclo-
pédie méthodique , avec Ginguené. 9° Il
rédigea le Journal de musique en 1770
et 1771 , iu-8. Framery fut le premier
qui parodia en français quelques opéras
italiens : les pièces qu'il a parodiées sont
la Colonie , l'Olympiade , l'Infante de
Zamora et les deu.x Comtesses. Il réussit
assez bien dans ce genre de travail qui
demande beaucoup d'esprit et surtout
l'esprit de critique. Il avait à peine 18
ans , lorsqu'il donna aux Italiens sa Nou-
velle Eve, dont la représentation fut dé-
fendue par ordre de la police. Il fit pa-
raître ensuite Nanette et Lucas, musique
du chevalier d'Herbain ; il retoucha et
fit remettre en scène le Nicaise de Vadé ;
il donna en 1 7 83 la Sorcière par hasard,
opéra-comique dont il avait fait la mu-
sique et les paroles. Enfin , un concours
ayant été ouvert pour les drames lyri-
ques , Framéry obtint le prix pour son
opéra de Médée , dont la musique devait
être faite par Sacchini qui mourut avant
d'avoir commencé son travail : ce fut
Framery qui se chargea de ce soin; la
444 FRA
pièce n'a jamais été représentée. Parmi
les autres productions littéraires de Fra-
mery on compte 1 ° La pureté de l'âme ,
ode couronnée à Rouen , 1770. 2' Quel-
ques romans. 3" Une traduction littérale
en prose de la Jérusalem délivrée , Paris,
1785, 5 vol. in-18, et un autre du Ro-
land furieux , Paris , 1787, 10 ■vol. in-12 :
ces deux traductions ont été faites en so-
ciété avec Panckouke.
FRANC (Martin Le) , prévôt et cha-
noine de Lausanne, puis secrétaire de
l'antipape Félix V et du pape Nicolas V,
était d'Auraale en Normandie , selon Fau-
chet. Il publia un mauvais livre ( contre
le roman de la Rose) intitulé : Le Cham-
pion des Dames. Il plaide assez mal leur
cause ; cependant l'édition de Paris, 1 530,
in-8 , est recherchée des personnes fri-
voles , ainsi que son Estrifde la Fortu-
ne et de la Vertu, Paris, 1519, in-4.
FRANC (Jean- Jacques, le marquis de
Pompignan ) , premier président de la
cour des aides de Montauban, membre de
l'académie française, etc. , né en 1709,
à Montauban , où il exerça d'abord la
charge d'avocat général à la cour des Aides,
et succéda ensuite à son père et à son
oncle dans la première présidence de ce
tribunal. (Il fut revêtu aussi d'une place de
conseiller d'honneur au parlement de Tou-
louse, distinction extraordinaire et même
unique. Son goût pour les lettres lui fit
quitter bientôt toute espèce de fonctions
publiques , et il vint à Paris jouir des
succès que lui avaient déjà mérités quel-
ques-uns de ses ouvrages. Il avait débuté
sur la scène tragique en 1 734 par sa pièce
imitée de Métastase , de Didon , qui s'est
long-temps maintenue au théâtre : il avait
alors 22 ans. Dès lors tous les momens
de loisir que ses emplois lui avaient
permis de prendre avaient été consacrés
à l'étude. ) Il s'est fait un nom très distin-
gué dans divers genres de littérature. Bien
différent de nos écrivains modernes , il
s'était nourri de tous les sucs de la saine
antiquité , et avait puisé dans les mêmes
sources où s'étaient abreuvés, si l'on
peut hasarder cette expression , les Ra-
cine , les Despréaux , les J. B. Rousseau.
Le latin , le grec , l'hébreu , ces trois lan-
FRA
gués qu'on peut regarder comme les trois
fleuves de l'ancienne érudition , étaient
familières à M. de Pompignan :' il y joi-
gnait l'italien et l'anglais. On peut dire ,
sans crainte d'être démenti par tout con-
naisseur impartial , que M. de Pompignan
est le poète français qui approche le plus
de J. B. Rousseau , pour le talent d'expri-
mer en vers les beautés des prophètes.
Quoiqu'un grand poète , descendu de sa
sphère pour sacrifier à sa passion , et se
montrer le plus petit des hommes , ait
dit : Sacrés ils sont , car personne n'y
touche; cette plaisanterie n'empêchera
point que les Poésies sacrées de M. de
Pompignan ne reçoivent à jamais un juste
tribut d'admiration. On sera toujours
frappé de l'ode où Isaïe nous peint les
ombres hautaines des Souverains de VE-
gypte renversées dans les enfers , sous
la main de Dieu ; et de plusieurs autres
remplies d'expressions nobles , d'idées
vastes et sublimes. Partout on y retrouve
le poète instruit, l'homme qui possède
toutes les richesses de sa langue , point
de faux éclat, le terme propre, la rime
conservée dans son exactitude. Voilà ce
qui distinguera toujours M. de Pompi-
gnan de tous ces rimailleurs qui se sont
avisés de vouloir imiter J. B. Rousseau.
Ses Poésies diverses n'étincellent pas de
beautés aussi frappantes. Mais sa tragédie
de Didon est sans contredit une des meil-
leures qui ait paru sur le théâtre français.
Son Voyage de Languedoc plein d'agré-
ment , de variété et d'intérêt , inférieur
à celui de Bachaumont et de Chapelle du
côté de la naïveté et de l'aisance , mais
supérieur par la correction , la noblesse
et la poésie , a paru moins occuper l'at-
tention du public que sa traduction des
Géorgiques , ouvrage généralement ap-
plaudi, devenu plus célèbre encore par
l'espèce de lutte qu'il a essuyée contre
celui de M. l'abbé Delille, et les parallèles
multipliés qu'on a faits des deux traduc-
tions. «. La manière de M. Delille , dit un
» critique juste et éclairé , doit paraître
» plus brillante , et cela par un défaut
» qui a généralement réussi aux poètes
» de ce siècle : c'est la méthode de tra-
M vailler en marqueterie , par de petites
FRA
» phrases morcelées , et en isolant leurs
» vers. Cette méthode, qui détruit, à la
» vérité , l'harmonie générale d'un ou-
« vrage , qui empêche d'en sentir les liai-
» sons, d'en saisir l'ensemble, et d'en
» suivre la marche , a de grands avanta-
» ges pour briller aux yeux des lecteurs
» superficiels , dont l'attention décousue
» et le goût de détail ne peut voir et
» juger qu'un petit objet à la fois. La ma-
» nière de M. de Pompignan , plus sira-
« pie , plus naturelle , plus conforme en
M général à la marche des idées et aux
» phrases périodiques du poète latin ,
M plaira peut-être davantage aux connais-
» seurs qui sentiront un peu mieux dans
» ses vers le goût pur et vrai de l'anti-
» quité ; d'autant plus qu'on n'aura point
» à lui reprocher ce clinquant antithéti-
» que, ces bluettes du bel-esprit, ces
» tours maniérés, ces petits agrémens
» sans grâce , et ce vermillon éblouissant
» dont M. l'abbé Delille a souvent cnlu-
» miné la muse de Virgile. » Sa tra-
duction d'Eschyle et de quelques dialo-
gues de Lucien est d'une perfection qu'il
semble difficile de surpasser; peu d'é-
crivains ont mieux gardé les règles de la
traduction, et mieux conservé l'esprit
des auteurs traduits. Il a donné en 1784
ses OEuvres complètes, Paris, 6 vol.
in-8 , très belle édition. On souhaiterait
qu'il eût fait un choix, et qu'il n'eût
point associé aux titres d'une gloire soli-
de,.des bagatelles qui ne peuvent en
rien y contribuer. On est surtout fâché
d'y trouver la Prière universelle , pièce
remplie de maximes fausses , que l'auteur,
par une complaisance mal entendue , a
traduite de Pope , à la sollicitation de
quelques Anglais , faux amis qui l'impri-
mèrent à son insu , et que lui-même , par
une tendresse mal placée envers cet en-
fant illégitime, n'a pas eu le courage de
supprimer. Il n'avait jamais eu dans l'es-
prit les principes qu'elle renferme , et en
général il est difficile d'allier d'une ma-
nière plus étroite le génie avec la religion,
avec le respect des mœurs , et les égards
dus à l'honnêteté et à la décence. On
chercherait en vain dans ses epîtres et
dans ses Discours philosophiques , ce ton
FRA 445
d'aigreur et de cynisme, qu'un coloris
séduisant n'est pas capable d'adoucir ;
ces maximes hardies qui défigurent toutes
les notions ; cet appareil de sentiment qui
n'échauffe que l'imagination et laisse le
cœur froid. On y trouve en revanche des
traits de force et de lumière , des leçons
de morale, des règles de goût qu'on peut
adopter sans craindre de s'égarer. Tout
ce que le poète y débite est toujoursd'ac-
cord avec les vrais principes. Qu'on lise
avec attention son Epitre sur la déca-
dence de la littérature française, on y
reconnaîtra sans peine le danger des tra-
vers qu'il condamne, la nécessité des
préservatifs qu'il leur oppose , la sagesse
des réflexions qu'il présente ; on y admi-
rera surtout un athlète vigoureux , lut-
tant avec avantage contre les champions
de la nouveauté et du mauvais goût. C'est
un spectacle bien noble que celui d'un
académicien, qui , au milieu de sa com-
pagnie , ose rappeler les lettres à leur
première dignité, élever la voix en faveur
de la patrie et des mœurs , et défendre la
foi de ses pères , sans que , ni les murmu-
res d'une partie de l'assemblée, ni la sur-
prise et l'indignation qui éclatent sur le
visage de certains auditeurs, ni les re-
gards sévères qu'on lui lance , puissent
déconcerter l'intrépide avocat d'une cause
si belle. Opposez à ce tableau celui d'un
malheureux vieillard quia fondé sa répu-
tation sur la ruine de la religion et des
mœurs, égayant ses dernières années par
de coupables facéties , et rappelant tou-
tes ses forces pour jeter de la boue au
visage de son respectable confrère, parce
qu'il a eu l'audace d'exposer en pleine
académie les sentimens d'un honnête
homme et d'un bon citoyen. Un homme
d'esprit l'a appelé le dernier des Romains.
Il mourut le l**^ novembre 1784, dans son
château de Pompignan, oii il était retourné
pour se soustraire à la tourbe philosophi-
que qui le persécutait. M. de Sancy a
consacré ces vers à sa mémoire :
Prés de Rousseau Le Franc est au sacré Talion ,
Favori de Minerve ainsi que d'Apollon,
Bien ne peut ternir sa mémoire,
£t son triomphe est alîernii :
Voltaire fut sou ennemi ,
C'est uu uouTeau titre à sa gloire.
446
FRA
Outre les ouvrages dont nous avons parlé,
ses Lettres qui sont en très grand nom-
bre, et dont on se propose de faire la
collection , ne seront pas le moindre titre
de sa gloire. « Cet écrivain, dit l'abbé
î) Maury , dans un Discours où d'ailleurs
» il ne lui a pas rendu assez de justice ,
« semble amollir son stile et s'attendrir
j> au nom de l'amitié , dont il a la cor-
» dialitc, l'abandon, les aimables inquié-
« tudes. Ce qui dans l'art d'écrire lui a
» le moins coûté , sera peut-être ce qui
» honorera le plus sa mémoire ; et il aura
» ce trait de ressemblance avec le chan-
» celier d'Aguesseau , dont il fut chéri et
5) estimé , que ses lettres seront un des
» plus beaux monumeas de ses travaux
5) et de son génie. »
FRANC (Jean George Le ), marquis de
Pompignan , frère du précédent , né à
Montauban le 22 février 1715, évêquedu
Tuy en Velay en 1743, arjchevêque de
Vienne en 1774, est mort à Paris le 30
décembre 1790, après avoir long-temps
servi l'Eglise par son zèle, édifié la France
par ses vertus , et éclairé par ses savans
écrits, dont les principaux sont 1° Ques-
tions diverses sur l incrt'dulité , in- 12 ;
ouvrage très bien écrit , quoique d'une
manière un peu prolixe, et plusieurs fois
i-éimprimé. Il y examine, l"s'il y a beau-
coup de véritables incrédules. 2° Quelle
est l'origine de l'incrédulité. 3°Siïes in-
crédules sont des esprits-forts. 4° Si l'in-
crédulité est compatible avec la probité.
5° Si elle est pernicieuse à l'état. Toutes
ces questions sont traitées avec autant
de profondeur que de sagesse. 2° V Incré-
dulité convaincue par les Prophéties ,
Paris, 1759, 3 vol. in-l 2. L'accomplisse-
ment des prophéties, dans l'exposition
claire et précise qu'en fait le savant pré-
lat , en fixe le sens , et met la vérité de
la religion dans le plus grand jour.
3° La Religion vengée de Fincrédulité
par l incrédulité elle-même, Paris, 1772,
in-l 2. Il a l'avantage d'y combattre des
ennemis qui se détruisent eux-mêmes par
les contradictions et les absurdités que
renferment leurs systèmes comparés
les uns avec les autres ; il n'a besoin ,
pour les terrasser , que des propres traits
FRA
qu'ils se lancent eux-mêmes, et il en fait
ré.suller le triomphe le plus complet et
le plus glorieux pour la cause qu'il dé-
fend. \° La dévotion réconciliée avec
l'esprit, 17 55, in-l 2. Il y prouve, contre
les détracteurs de la dévotion , qu'elle
s'allie très bien avec l'esprit des belles-
lettres, des sciences , de gouvernement ,
des affaires et de société. 5° Le véritable
usage de l'autorité séculière dans les ma-
tières qui concernent la Religion , Avi-
gnon , 1782 , in-l 2. 4« édit. On y trouve
la même solidité qui caractérise les ou-
vrages du savant évêque du Puy ; car tous
ces ouvrages ont été publiés avant qu'il
ait été élevé sur le siège de Vienne -. il
trace avec précision la ligne de démarca-
tion qui sépare les deux pouvoirs. Il a
paru oublier les principes qu'il y établit,
lorsqu'il a voulu jouer un rôle dans ce
qu'on appelait mal-à-propos Y Assemblée
nationale de France; mais il est à croire
qu'il ne prévoyait pas jusqu'où les choses
seraient portées. « Trop bon , dit l'abbé
» Barruel , pour soupçonner à quoi ten-
« daient ceux qui ont abusé de sa fai-
» blesse , il se laissa entraîner par ce
«parti, qui le fit, pour quinze jours,
» président de l'assemblée , qui lui valut
» ensuite le ministère de la feuille. Il fut
» à la cour ce qu'est un honnête homme
» qui dit son avis , mais qui , sans nerf et
» sans vigueur, se contente de gémir, de'
» pleurer, quand il voit prévaloir des
», desseins pernicieux à l'Eglise. Il fut un
» de ces hommes qui, par crainte du
M bruit , n'osent pas même souffler quand
j) l'ennemi est aux portes , qui se rangent
» même sous ses bannières, sous prétexte i
» de l'engager à faire moins de mal: ilj
» lui en a coûté, je ne dirai pas des re-
» mords , mais des larmes amères , qu'il '
» ne répandait même qu'en secret et en
» présence de ses amis. Il avait peur qu'oaJ
» ne sut aux Jacobins qu'il avait pleuré
«sur les maux de l'Eglise. Il est mor
» pour avoir étouffé sa douleur. Bossue
» l'eût exhalée ; et la cour et la ville
» nos législateurs auraient suquelapeul
M n'étouffe pas la voix des Chrysostôme
» devant les précurseurs du schisme
» de l'hérésie. Bossuet n'eût pas tenu soi
FRA
>• le boisseau ce trait de lumière échappé
» depuis long-temps à Rome sur la con-
» stitntioii prétendue civile du clergé. Je
» lesaisde ceuxmêmesqui ontvuetlu la
» lettre du pape à M. de Pompignan (1).
)) Elle en disait assez pour décider notre
» opinionsur cette malheureuse constitu-
» tion du clergé. La politique l'a tenue se-
» crèle ; je reproche à cette politique les
» sermensde tous ceux que la manifesta-
» tion du bref adressé à M. de Pompignan
)» en aurait détournés. Nous souhaitons
» que Dieu ne fasse pas au prélat mort le
« même reproche. La peur excuse tout ,
» mais c'est la peur même qui a besoin
» d'excuse, et Dieu seul connaît celles qui
» peuvent la rendre pardonnable dans
» un prêtre. »
FRANCESCHINI ( Marc-Antoine ) ,
peintre bolonais, naquit eri 1648. 11 fut
l'élève de Cignani. Il saisit tellement le
goût de son maître, que celui ci lui con-
fia l'exécution de ses principaux ouvrages.
Ce peintre mourut en 1729, après s'être
faite un réputation étendue.
FRANC-FLORE. Toyes Flore (Fran-
çois ).
FRANCHI ( Nicolas ) , on plutôt Ni-
coLO Franco, poète satirique, natif de
Bénévent vers 1 609 , l'ami , ensuite le ri-
val del'Arélin , attaqua comme lui les vi-
vans et les morts , et en fut récompensé
comme lui , si ce que nous avons dit à
l'article Arétin, est vrai. Pie V l'ayant
fait arrêter, ilfutpendu à Rome en 15G9.
Si l'on eu croit le Ghilini , il écrivait
avec beaucoup de délicatesse en vers et
en prose ; mais il est vrai seulement que
Franco écrivait des infamies et des or-
dures avec beaucoup de facilité. Son ima-
gination était féconde en horreurs. Il se
déchaîna avec fureur contre le pape Paul
III , contre tous les Farnèse , contre les
Pères du concile de Trente, contre Char-
les-Quint, etc. On a de lui 1° Plusieurs
,'l) Celle lettre ne fut trouvée dan» les papier» de M. de
Pompipiian qu'après sa mort. Cependant il n'est lien de
plu» »rai f|ue eelte excuse di» prêtres assermentés , fondée
•urle silence prétendu du souver-iin pontife snrla consti-
tution rini/edn clergé. L'auteur de cette note atlesleaToir
entendu dire à beaucoup de prêtres qu'ils n'aiaient prêté
icrmeni que parce que le saint Pcie avait refusé de ré-
pondre. Si ce» mêmes ecclésiastiques ont persisté depuis
dan» leur scrnicut , c'est qu'un abîme eu appelle un autre.
FRA 447
Sonnets sur V Arétin , qui furent impri-
més avec la Priapeia, 1548 , in-8 , de
225 pages. 1° Dinlogi piacevoli, Venise ,
1542, in-8. 3° // Tcmpio (Tamore,
4° Dialogo Suella Belloezza. On a im-
primé en* 1 777 la Fie de Nicolo Franco,
ou les Dangers de la satire, Vàris, in-12.
FRANCHI (Vincent), président du
conseil royal de Naples , sa patrie , et cé-
lèbre jurisconsulte , mort en 1601 , à 70
ans , a publié : Dccisiones sacrircgiicon-
silii neapolitani , in-fol.
FRANCHI NI (François), né à Co-
sença en 1495, suivit Charles-Quint à
l'expédition d'Alger, et allia Mars avec
les Muses. Il fut ensuite évêque de Messa,
puis de Populania , et mourut en 1554.
On lui doit quelques Dialogues , et d'au-
tres petits ouvrages écrits avec assez d'a-
grément. ( Les meilleures pièces de Fran-
chini se trouvent dans les Carmina illus"
trium poetarum de Toscano , et dans les
Deliciœ poctarum italorumdeJ. Gruter.)
FRANCIA ( François Raibouni , dit
Le), peintre bolonais, mort le 7 avril
1518, à 68 ans, excellait dans le dessin,
et fut un des premiers artistes de son
temps dans l'art de graver des coins pour
les médailles. On prétend que Raphël lui
ayant adressé un tableau de Ste.-Ce'cile,
pour le corriger et le placer dans une
église de Florence , Francia fut si frappé
de sa beauté , que la jalousie dégénérée
en désespoir, occasiona sa dernière ma-
ladie et sa mort. ( Le Musée de Paris pos-
sède de Francia Joseph d'Arimathie ,
St.-Jean et les trois Maries. )
FRANCISQUE, peintre. Foy. Mile.
FRANCHIS (Pierre Franz, plus con-
nu sous le nom de ) , professeur d'élo-
quence , d'histoire et de grec à Amster-
dam , sa patrie , né en 1645 , voyagea en
Angleterre, en France et en Italie. Il
jouissait d'une réputation assez étendue
lorsqu'il mourut en 1704 , à 59 ans. On a
de lui \" Recueil de poésies , 1697, in-12.
Ce Piccueil contient des poésies héroïques
oîi il y a trop peu d'élévation , des églo-
gucs, des élégies et des épigrammes;
c'est dans ces deux derniers genres que
Francius a réussi , surtout dans les épi-
grammes. 2" Des Harangues, 1705, in-8.
448 FRA
3° Des OEuvrcs posihumes, 1706, in-8.
FRANCK ou Frank de Frankknkau
(Georges), médecin, naquit à Naum-
bourg en 1643. A l'âge de 18 ans, il fut
créé poète couronné k léna : il mérita
cet honneur par sa grande facilité à faire
des vers allemands, latins, grecs et hé-
breux. Dans la suite , il devint successi-
vement professeur en médecine à Heidel-
berg et à Wittemberg , d'où le roi de Da-
nemark ^ Christiern V, le fit venir à sa
cour : il fut honoré , à son arrivée , des
titres de médecin du roi et de conseiller-
aulique. L'empereur Léopold ajouta ce-
lui de comte Palatin en 1G92. Ses ouvra-
ges imprimés sont 1° Flora Francien ,
in-12 ; 2° Satyrœ medicœ, 3° Plusieurs
Lettres. Il a aussi laissé un grand nom-
bre de manuscrits qui méritaient de voir
le jour. L'académie Ze'o/;oZrfme, celle des
Ricovrati de Padoue , et la société royale
de Londres, se l'étaient associé. Il mou-
rut en 1704 , à 61 ans.
FRANCK (Auguste-Herman ), théolo-
gien allemand , né à Lubeck en 1663, fit
une partie de ses études à Leipsick. Il y
fonda , avec quelques-uns de ses amis ,
une espèce de conférence sur l'Ecriture-
Sainte , qui subsiste encore sous le titre
de Collegium Philobiblicum. Devenu mi-
nistre à Erfurt , il fut obligé de sortir de
cette ville en 1691 . Le fanatisme que res-
piraient ses sermons lui attira cette ex-
clusion. L'électeur de Brandebourg l'ap-
pela dans ses états : il s'y rendit , et il fut
professeur de grec et des langues orien-
tales à Halle, puis de théologie en 1698.
C'est dans celte ville qu'il fit la fondation
de la Maison des orphelins. Cette maison
prospéra tellement, qu'il y avait, en 1 7 27 ,
2196 jeunes gens, et plus de 130 précep-
teurs. On y donnait à manger à près de
600 pauvres , soit étudians , soit orphe-
lins. L'empirisme et les charlatanerics
d'un certain Basedow contribuèrent de-
puis à lui faire perdre sa réputation.
Franck mourut en 1727 , à 64 ans. On a
de lui : 1° des Sermons et des livres de
dévotion , en allemand. 2° Mcthodus stu-
dii theologici. 2° Jntroduclio ad lectio-
nem Prophelarum. 4° Commcntatio de
scnpo Ubrorum Fetcris et Novi Tes-
FRA
lamcnti. 5° Manuductio ad lectionem \
Scripturce sacrœ. 6" Observationes M-
blicœ. Les préjugés de secte, qui réglaient
les jugemcns de l'auteur, ont empêché
que ses ouvrages ne fussent répandus
hors des pays du Nord. j
FRANCK ( Simon ), né à Jemmappes , 1
près de Liège , en 1741 , se distingua dès
le premier âge dans les belles-lettres, par-
ticulièrement dans l'éloquence et dans
la poésie latine, comme on le voit par
les pièces diverses insérées dans les Musce
Leodienses ^ 1761 et 1762 , 2 vol. in-8.
Dans le premier de ces recueils, on dis-
tingue un poème épique sur l'établisse-
ment du christianisme au Japon , plein
d'épisodes , d'images et de comparaisons
heureuses , et de très beaux vers , qui a «
été réimprimé à la suite de la F'ie de l'A-
pôtre des Indes, Liège, 1788. Parmi les
pièces du second volume , on remarque
l'ode : In impios seculi nostri scriptores.
Ayant embrassé l'état ecclésiastique, et
s'étant livré avec une ardeur extraordi-
naire aux fonctions du saint ministère ,
il mourut dans sa patrie en 17 72 , d'une
maladie contagieuse, qu'il arSît contrac-
tée en visitant les malades , avec un zèle
égal à ses autres vertus... Qu'il soit per-
mis à l'auteur de cet article de dire :
Manibus dale lilia plenis.
Ilis «altetn accumulem douis, et fungar iiiani
Munere. £\£id. VI.
FRANCKENBERG( Abraham de ), sei-
gneur de Ludwigsdorff et de Schwirse dans
la principauté d'Oels, se livra au fanatisme
d'une secte obscure etméprisable. Ilpassa
la plus grande partie de sa vie à Ludwigs- '
dorff, où il était né en 1593 , et où il
mourut en 1652. On a de lui un grand
nombre de livres extravagans , en latin
et en allemand, remplis de rêveries des
Boehmistes. l"Une Fie de Jacques Bochm,
fondateur de celte secte. 2° Fita veterum
Sapientum; 3" Nosce te ipsuni, etc. Il y
a dans ces derniers ouvrages quelques
vérités triviales, noyées dans le verbiage,
et mêlées à diverses erreurs.
* FRANCKENBERG ( Jean-Henrii
Ferdinand de ), cardinal , archevêque de
Matines, naquit le 18 septembre 1726 àl|
Gross-Glogaw en Silésie , d'une famille
PRA
distinguée. Il fit chez les jésuites ses pre-
mières études, se voua bientôt à l'état
ecclésiastique, et , après avoir terminé ses
cours de théologie et de droit canon au
collège Germanique de Rome , il fut or-
donné prêtre le 10 août 1749. La veille
de la Toussaint de la même année, il prê-
cha devant Benoît XIV : son éloquence, sa
piété et son zèle pour le service de la re-
ligion le firent remarquer de bonne heure,
et, lorsqu'il eut été reçu docteur en droit
canon , il ne tarda pas à être élevé aux
dignités ecclésiastiques. Successivement
nommé chanoine de Breslau , grand-vi-
caire de Goritz, doyen de la collégiale
de Toussaint à Prague , puis de celle de
Buntslau en Silésie , il dut le 27 janvier
17.59, à Marie-Thérèse dont il était le su-
jet , l'archevêché de Malines vacant par la
mort du cardinal d'Alsace. Sa présence
dans son diocèse fut pour lui une occasion
de déployer son zèle, et pour ses diocésains
un sujet d'édification journalière. Ses ver-
tus le firent porter au cardinalat le l*' juin
1778. Marie -Thérèse lui avait accordé
précédemment le titre de conseiller d'é-
tat avec la grand-croix de l'ordre de St.-
Etienne. Le diocèse de Malines fut sage-
ment administré, et l'on peut dire que ce
prélat remplissait avec exactitude et avec
succès les nombreux et pénibles devoirs
de l'épiscopat : la célébration des saints
mystères , de longues et profondes médi-
tations , des études sérieuses et suivies ,
des prédications pleines d'onction et de
foi'ce, tels étaient les travaux de tous
les jours de ce respectable pontife. Cette
administration fut calme et heureuse pen-
dant toute la durée du règne de Marie-
Thérèse ; la mort de cette vertueuse prin-
cesse changea entièrement la face des af-
faires : Joseph II qui succéda à sa mère
voulut faire des réformes en matières ec-
clésiastiques, et à cette occasion il publia
plusieurs édits contraires à la doctrine de
l'Eglise ou tout au moins au vc8u de la
religion : nous ne citerons d'abord que
la suppression des communautés religieu-
ses, qui ont jeté un si grand lustre sur l'E-
glise et qui furent une pépinière de saints.
Ces édits devinrent l'objet des réclama-
tions du cardinal : mandé à Vienne en
V,
MA
449
1 78t pour rendre compte de sa conduite,
il le fit avec respect , mais avec coxirage
et avec liberté. Toutefois l'empereur le
renvoya à Malines. Malgré l'opposition
du clergé des Pays-Bas , Joseph continua
la publication de ses édits de réforme ,
et ordonna entr'autres l'ouverture d'un
séminaire général. Soit que les profes-
seurs eussent un enseignement réprében-
sible sur plusieurs points , comme le dé-
clara publiquement l'archevêque de Ma-
lines, qui ne voulut jamais y envoyer ses
théologiens , soit que la nomination des
chefs qui devaient diriger cet établisse-
ment eût été faite par l'empereur au lieu
de l'être par les évêques à qui ce droit ne
peut être enlevé, puisqu'ils sont les con-
servateurs et les gardiens naturels des
doctrines religieuses. On peut affirmer
que le plus grand mécontentement régna
dès lors dans les Pays-Bas, et ce mé-
contentement ne tarda pas à être suivi de
troubles sérieux au milieu desquels les
Autrichiens furent chassés de ces provin-
ces. Joseph était disposé à retirer ses édits,
lorsqu'il mourut, sans avoir pu rétablir la
tranquillité dans un pays que ses ordres
tyranniques avaient soulevé contre lui.
Son successeur Léopold rétablit l'ancien
ordre de choses , et dès lors chacun s'ef-
força de réparer les maux causés par les
derniers événemens. Mais la révolution
française venait d'éclater : de nouveaux
orages menacèrent aussitôt la Belgique.
Les Français y pénétrèrent à la fin de 1 7 92,
et quoiqu'ils eussent invité les professeurs
de l'université de Louvain à continuer
leurs travaux, et qu'ils eussent promis de
ne toucher ni à l'enseignement, ni au
culte , des désordres de tous genres eu-
rent lieu : les séminaires furent abandon-
nés , les églises pillées et un peuple re-
ligieux, poursuivi dans ses croyances. Les
Français , chassés de la Belgique dans le
mois de mars 1793, y rentrèrent l'an-
née suivante avec des forces imposantes.
Pendant la première invasion, Francken-
berg avait été obligé de se cacher. La
confiscation de ses biens, la spoliation des
églises , les insultes aux prêtres n'avaient
pas dû le rassurer sur la conduite que les
vainqueurs devaient tenir à son égard,
29
45(1 FRA
Pend&iit la seconde occupation des f*ays-
Bas : il fut encore obligé de se retirer en
Hollande ; mais le besoin de revoir son
troupeau, de partager ses malheurs pen-
dant ce temps de calamités publiques , le
déterminèrent, malgré les dangers qu'il
pouvait courir , à revenir à Malines oii son
palais était occupé, et où il fut obligé d'al-
ler se loger au séminaire. En échange de
ses biens qui étaient saisis , on lui avait
promis une pension qu'il ne toucha ja-
mais. Malgré tous les sacrifices qu'il dut
faire alors pour la tranquillité publique ,
il fut en proie à une horrible persécution,
par suite du serment de haine à la royauté
et de fidélité à la constitution civile du
clergéqu'on exigea de lui, et qu'il refusa
avec le même courage que la plupart des
prêtres français. Un décret de déporta-
tion fut lancé contre lui par le Directoire :
transféré à Emmerick au delà du Rhin ,
il habita le monastère des religieux trini-
taires. Chassé en vertu d'un ordre que ses
ennemis avaient obtenu du roi de Prusse ,
de ce lieu d'où il pouvait facilement cor-
respondre avec son diocèse , il se retira à
Berkem qui appartenait encore à l'archi-
duc-électeur de Cologne et évêque de
Munster. Peu de temps après , sur la de-
mande du pape , il envoya sa démission
de son siège , puis il alla s'établir à Bréda
sur le territoire hollandais, où après avoir
été invité par le cardinal Consalvi, au nom
du souverain Pontife , à venir se fixer à
Rome, il mourut d'une attaque d'apo-
plexie le 11 juin 1804. Son grand âge ne
lui avait pas permis de faire le voyage
d'Italie : il s'était contenté d'accepter de
la cour de Rome une pension de 3,000
florins dont il ne toucha qu'un quartier.
Ce pieux et courageux prélat exerça ses
fonctions épiscopales dans l'exil comme
dans le siège même de son évêché : pen-
dant torute sa vie, il fut un modèle de
piété, et mérita d'être compté parmi les
plus illustres prélats du IS** siècle. On
trouve des détails fort intéressans sur sa
vie et sur son administration dans une
Notice curieuse qui fat publiée après sa
mort , et dans l'ouvrage du docteur Yan-
de-Velde , intitulé : Synopsis monumen-
torum,Giaid^ 1822, 3 vol. in-8.
MA
FRANCKENSTEIN (Christian Gode-
froi) , né à Leipsick en 1661, mort le 26
août 1717, après avoir voyagé en France,
en Angleterre et en Suisse , exerça avec
applaudissement la profession d'avocat à
Leipsick. Il avait une mémoire prodi-
gieuse. Ses principaux ouvrages sont :
1° une Continuation de l'introduction à
l'Histoire de Puffendorff. 2° Vie de la
reine Christine. 3° Histoire du 1 6* et du
1 7'' siècles, qui ne sont que de mauvaises
compilations.
FRANCKENSTEIN ( Jacques -Au-
guste ) , fils du précédent , mort à Leip-
sick en 1733, après avoir été professeur
de la chaire du droit de la nature et des
gens, est auteur d'un grand nombre d'ou-
vrages et de dissertations latines , dontla
plupart ne sont que des compilations ,
entre autres : \° De collatione bonorum.
2° Dejuribus Judœorum singularibus in
Ger mania. d° De Thesauris, etc. etc.
FRANCKLIN ou Fbanklin (Benjamin ),
né à Boston dans la Nouvelle-Angleterre
le 17 janvier 1706, mort à Philadelphie en
Amérique le 17 avril 1790, dans la 85«
année de son âge. De simple prote d'im-
primerie, il parvint à se faire un nom dis-
tingué parmi les savans et parmi les poli-
tiques. ( Son père natif d'Angleterre, fa-
bricant de savon et de chandelles à Bos-
ton , l'envoya à l'âge de 8 ans dans une
école ; mais il l'en retira deux ans après ,
pour lui faire embrasser sa profession. A
12 ans le jeune Francklin fut mis en ap-
prentissage chez son frère James qui était
imprimeur. Il y fit de grands progrès ;
car il travaillait avec assiduité , lisait
beaucoup et méditait encore plus. Des
1721 , son frère fit paraître le Journal
de la Nouvelle-Angleterre : c'était la
3® feuille périodique qui paraissait en
Amérique : Francklin y mit quelques ar-
ticles qui furent accueillis favorablement,
et qui l'engagèrent à continuer ses tra-
vaux littéraires. Il se proposa d'imiter le
Spectateur d'Adisson , et fit pour y arri-
ver des épreuves de tout genre. En même
temps il lisait les poètes , les philosophes,
les théologiens : cependant il quitta Bos-
ton et alla à New- York , puis à Philadel-
phie, où il entra dans l'imprimerie de M.
FRA
Keimer. Encouragé par le gouverneur ,
WUliam Keit, à établir une imprimerie, lui
promettant l'appui du ministère , il vint
en Angleterre pour acheter le matériel né-
cessaire à cette entreprise , ne trouva pas
le gouvernement favorable à son projet, et
fut quelque temps sans ressource ( 1724 ).
Devenu ouvrier imprimeur , il économisa
sur sa nourriture de quoi faire paraître sa
Dissertation sur la liberté et sur la né-
cessite'., où il prétendit que la vertu et
le vice ne sont que de vaines distinc-
tions. De retour à Philadelphie, il fut
prote chez itf . Keimer, artiste industrieux
et habile ; il se rendit utile à cet établis-
sement. Cherchant ensuite à sortir de
la gêne qu'il éprouvait par quelques
essais de commerce , et par la publica-
tion d'un journal qui eut quelque vogue,
il fonda une société philosophique et
une bibliothèque : il commença aussi
son Almanach du bon-homme Richard
qu'il continua pendant 25 ans et qu'il
remplit de maximes de frugalité et de
j leçons d'industrie : il en vendait jus-
qu'à 10,000 par an. Nommé en 1736 se-
crétaire de l'assemblée générale de Pen-
sjivanic, et en 1737 maître de poste, il
créa une compagnie d'assurance contre
l'incendie , une troupe de pompiers , une
société pour la défense de la province :
membre de l'assemblée de Pensylvanie , il
prit part à toutes les querelles entre le gou-
vernement et les habitans. ) En même
temps il s'appliqua beaucoup à varier les
phénomènes de l'électricité, et à les faire
servir à une théorie qui donnât une idée
juste de ce fluide si subtil et si merveil-
leux. Quoique toutes ses idées n'aient pas
joui de l'approbation des savans , on ne
peut nier qu'il n'ait répandu des lumières
sur cet objet , et que plusieurs de ses con-
jectures ne soient appuyées de l'expé-
rience. Son projet d'apaiser les tempêtes
de la mer avec de l'huile et des matières
graisseuses est aujourd'hui reconnu pour
une illusion complète ( voyez le Journ.
histor. et littér., 1" juillet 1782 , p. 337,
et autres cités , ibid. ). On sait qu'il a
beaucoup travaillé à l'indépendance des
colonies anglaises en Amérique , et c'est
à ce titre que l'Assemblée nationale de
FRA 45i
France a décerné un deuil de trois jours
pour honorer sa mémoire. Cependant la
guerre danslaquelle il entraîna la France,
a fait un mal infini à ce beau royaume ,
et l'on peut dire qu'elle a mis le comble
au désordre de ses finances. « On nous
» fit entreprendre, dit un écrivain de cette
« nation , contre toutes les règles de la
» vraie politique autant que de la jus-
» tice, une guerre effroyablement dispen-
M dieuse ; guerre aussi follement conduite
« que légèrement engagée ; guerre où la
» nation fut réduite à se regarder comme
» triomphante quand elle n'avait pas été
» battue , et elle n'eut pas toujours cette
)> étrange gloire; guerre qui, en ôtant à
)> nos rivaux des domaines immenses en
» étendue, où leurs forces et leur com-
» merce s'extravasaient avec plus de faste
» que d'utilité réelle pour eux , leur en
» a rendu bien plus que l'équivalent, puis-
» qu'une paix plus humiliante qu'avan-
» tageuse pour nous a été suivie d'un
» traité de commerce désastreux , extra-
» vagant dans plusieurs de ses disposi-
» tions, ruineux dans toutes, et dont on-
» croirait que l'objet a été d'indemniser
» l'Angleterre des pertes qu'elle avait
» faites en Amérique , de lui assurer en
» Europe, sur la France, les tributs qu'elle
» ne pouvait plus retirer dans l'autre con-
» tinent. » Du reste , c'est peut-être ce
point de vue là même , qui a rendu cher
le nom de Francklin à l'Assemblée natio-
nale, puisque, sous ce rapport, elle lui
doit son existence. Cet homme célèbre,
étant encore imprimeur , s'était fait une
épitaphe singulière, où l'on voitqu'à cette
date il croyait à la résurrection un peu
plus fermement que lorsqu'il demanda
la bénédiction de Voltaire pour son fils
( Foy. le Journ. hist. et litt. , 25 mars
1778 , page 465 ). Mais il paraît qu'à la
fin il était revenu à cette croyance , pui.s-
qu'il voulut que l'épitaphe fût mise sur
son tombeau. La voici , traduite littérale-
ment par M. Bertin :
Le corpi
de Beniamîo Francklin, imprimeur,
( comme la cou»erture d'un TÏeux litre
dont la dedans est arraché ,
et qui n'a plus ni reliure ni dorure )
l«n ici de ptture «vx ren ;
isl
FRA
naùl'eaTrige en lui-même ne ut» pu perdu ,
e«r il reparaîtra un jour,
fainsi qu'il l'a toujours peoié |
daos une oouTelle et plus belle éditioo ,
reTue et corrigée
par l'auteur.
Les œuvres de Francklin ont été réunies
en 3 vol. in-8. Londres , 1 806 , en anglais.
Barbeu du Bourg a publié une trad. fran-
çaise de la partie physique, Paris, 1773,
2 vol. in-4. En 1 792 , on a publié en 2 vol.
in-8 une traduction française des Mé-
moires de sa vie écrits par lui-même, sui-
vie de ses œuvres morales , politiques et
littéraires. Son éloge a été écrit par Con-
dorcet. (Il faut consulter sur sa vie les
Mémoires qu'il a rédigés lui-même et
adressés à son fils : ils ont été traduits en
français par M. Ginguené, Paris, 1791,
in-8. ) Sa Correspondance choisie a été
publiée et traduite en français par M. de
la Mardelle , Paris, 1 8 1 8, 2 vol. in-8. Cha-
cun connaît le vers de Turgot sur Franc-
klin :
Eripuitcœlo fulmeo (ceptrumque tyrannit.
FRANCO (Battista), peintre véni-
tien , mort en 1561 , égalait les plus ha-
biles artistes de son temps dans le dessin ;
mais il était faible dans le coloris, et
peigtiait d'une manière fort sèche.
* FRANCO ( Antonio ) , portugais , né
en 1662 à Montalvas (province de l'A-
lentejo ) , entra dans la société des jé-
suites à l'âge de 1 S ans , où il mérita
bientôt , par sa piété et ses talens , l'es-
time de ses supérieurs. Il remplit le&
charges les plus importantes de son or-
dre , et , se consacrant en même temps à
des recherches historiques , il contribua
à la gloire de la société , en faisant con-
naître les jésuites portugais les plus re-
commandables par leur piété , leur talent
et leur zèle. Le père Franco mourut à
Evorale 3 mars 1 7 32. Parmi les ouvrages,
soit en latin , soit en portugais , qu'on a
de ce religieux, on distingue : \° Annus
gloriosus societatis Jesu in Lusitania ,
complectens sacras memorias illustrium
virorum qui virtutibus, sudoribus , san-
guine , fidem , Lusitaniam et societatem
Jesu in Asia , A fric a , America et
Europa feUcissim^exornàrunt , "Vienne,
n20, iii-4 ; V Synopsis annalium sq^
FRA
cietatis Jesu in Lusitania f ab anno
1540, usque ad annum 1725, Augs-
bourg, 1726, in-fol. ; 3° Imagem do
primeiro seculo da compànhia de Jesu
em Portugal, 2 vol. in-fol. ; 4° Imagem
do segundo seculo, un vol. Dans ce der-
nier ouvrage , resté inédit, sont rangés
par ordre chronologique les événemens
les plus mémorables des premiers 150
ans de la société de Jésus , dans la pro-
vince du Portugal. 5° une Syntaxe
abrégée en langue portugaise; 6° une
Traduction en la même langue de Vln-
diculus universalis du Père de Pomey.
( Voyez PoMKY. )
FRANCO. Foyez Franchi.
FRANÇOIS d'Assise ( Saint ) naquit
à Assise en Ombrie l'an 1182. On le
nomma Jean au baptême ; mais depuis
on y ajouta le surnom de François , à
cause de sa facilité à parler la langue
française , nécessaire alors aux Italiens
pour le commerce , auquel son père le
destinait. La piété seule avait de l'attrait
pour Jean. Il quitta la maison paternelle,
vendit le peu qu'il avait , se revêtit d'une
tunique et se ceignit d'une ceinture de
corde. Son exemple trouva des imitateurs,
et il avait déjà un grand nombre de dis-
ciples , lorsque le pape Innocent III ap-
prouva sa règle en 1210. Ce pape n'avait
pas , dit-on , voulu écouter un homme
que son extérieur annonçait peu avan-
tageusement ; mais ayant vu en songe le
même pauvre qu'il avait rebuté, dans
l'attitude de soutenir l'église de Saint-
Jean-de-Latran qui paraissait s'écrouler,
il le fit rappeler et lui accorda sa de-
mande. L'année d'après , le saint fonda- I
teur obtint des Bénédictins l'église de *
Notre-Dame de la Portioncule, près
d'Assise. Ce fut le berceau de l'ordre des
Frères-Mineurs , répandu bientôt en Italie,
en Espagne et en France. L'enthousiasme
qu'inspiraient les vertus de François était
si vif, que lorsqu'il entrait dans quelque
ville, on sonnait les cloches; le clergé et le
peuple venaient au devant de lui, chantant
des cantiques et jetant des'rameauxsurle
passage. Sa nouvelle famille se multiplia
tellement, qu'au premier chapitre gé-
néral qu'il tint proche d'Assise en 1219,
il se trouva près de 6000 frères-mineurs.
Peu après ce chapitre , il obtint du pape
Honorius III une bulle en faveur de son
ordre. Plusieurs de ses disciples voulaient
qu'il demandât le pouvoir de prêcher
partout oîi il leur plairait , même sans la
permission des évêques. Le sage fonda-
teur se contenta de leur répondre : « Tâ-
M chons de gagner les grands par l'hu-
» milité et par le respect, et les petits
» par la parole et le bon exemple. Notre
» privilège singulier doit être de n'avoir
» point de privilège. » Réponse digne de
l'humble fondateur , mais qui n'empêche
pas que les exemptions et privilèges des
religieux n'aient été souvent utiles à
l'Eglise, et même nécessaires dans les
diocèses dont les évêques étaient ou fa-
vorables à l'erreur , ou insoucians sur le
salut de leurs ouailles. Ce fut vers le
même temps que François passa dans la
Terre-Sainte ; il se rendit auprès du sultan
Hélédin pour le convertir. Il offrit de se
jeter dans un bûcher pour prouver la
religion chrétienne ; le sultan n'ayant
pas voulu le mettre à une telle épreuve ,
renvoya François avec honneur. Revenu
en Italie, il institua le tiers-ordre. Il
voulut , par cette institution , procurer
»ux laïques le moyen de mener une vie
semblable à celle de ses religieux , 'sans
en pratiquer cependant toute l'austérité,
et sans quitter leurs maisons. Après avoir
réglé ce qu'il croyait convenir le plus à
SCS diflfèrens enfâns , et s'être démis du
gënéralat, il se retira sur une des plus
hautes montagnes de l'Apennin. C'est là
qu'il vit , à ce que rapporte saint Bona-
Tenture , un Séraphin crucifié qui perça
ses pieds, ses mains et son côté droit;
c'est l'origine du nom de Seraphique
qui a passé à tout son ordre : événement
étonnant , mais bien prouvé , que le pape
Alexandre rv a vérifié par lui-même , et
que le judicieux Fleury ( liv. 79 , n° 5 )
a montré être hors des atteintes d'une
critique équitable. Le Père Chalippe,
pécollet, dans la Fie de saint François.
Paris, 1734 et 1736, réfute très bien ce
que Baillet a étourdiment disserté sur ce
sujet. Le saint patriarche mourut 2 ans
•près à Assise en 1226 , âgé de 45 ans.
tKk
^^
Son amour pour la pauvreté , son déta-
chement de tous les biens de la terre , et
sa profonde humilité , l'ont fait regarder
comme un des plus parfaits modèles de
l'abnégation chrétienne, de l'indifférence
et du dépouillement évangélique. Sa
maxime , ou plutôt l'élan habituel de sa
piété, était les mots : Deus meus et
omnia. « Paroles d'un sens sublime et
» profond (dit un philosophe chrétien) :■
» Dieu est tout ; quitter tout pour lui ,
» c'est ne rien quitter , puisque tout se
» retrouve en lui éminemment. » Le Ciel
ne tarda pas à faire éclater sa sainteté
par plusieurs miracles : ce n'en était pas
un petit, que la merveilleuse propa-
gation de son ordre. Quoiqu'il eût dé-
fendu de toucher à sa règle, à peine
fut-il mort, qu'on l'interpréta de cent
manières. Ce partage produisit dans la
suite les difierentes branches des Rt-
collets , des Picpuces, des Capucins,
des Observantins. Ces enfans du même
père diffèrent beaucoup entre eux par
l'habit et par la façon de vivre. Les chro-
niques de l'ordre marquent expressément
que le premier qui voulut se singulariser
dans l'habit, quoiqu'il fût un des huit
anciens compagnons du saint fondateur,
fut frappé de lèpre et se pendit de déses-
poir. L'ordre de St. -François , malgré ses
différentes scissions , a produit des hom-
mes illustres par leur science et leur ver-
tu, et a donné à l'Eglise cinq papes , et
un grand nombre de cardinaux et d' évê-
ques. Les services qu'il a rendus à l'E-
glise et qu'il continue de rendre , sont
inappréciables, et ont amplement vérifié
la vision du pape Innocent. La haine que
les sectaires lui portent, est seule une
preuve décisive du bien qu'il a opéré , et
des combats qu'il n'a cessé de livrer aux
erreurs. De prétendus réformateurs ont
voulu ramener ces religieux , ainsi que
tous ceux qui embarrassent les enne-
mis de l'Eglise, au travail des mains, en
usage chez les anciens solitaires. Wiclef
aurait bien voulu ériger cette prétention
en dogme ; et quoique l'Eglise l'ait con-
damnée , quelques écrivains , parmi les-
quels on est fâché de compter M. Fleury,
ne se sont pas assç? écartés de ses erreur;.
454 FRA
« Quels qu'aient été la vertu'dcs solitaires
» d'Egypte , dit un hagiographe , et le
M zèle pour leur sanctiâcation person-
» nelle, il serait déraisonnable de vouloir
V en faire une règle complète et adéquate
» pour des religieux qui , sans professer
» la même austérité , se dévouent à l'in-
» struction des âdèles , à la défense de
» la foi , aux combats contre les héréti-
» ques. Si leur vie est moins éclatante en
» mortification , elle est parfois plus édi-
» Aante en fait de docilité , d'humilité et
» d'orthodoxie : car l'on n'ignore pas
)» avec quelle facilité plusieurs de ces
M solitaires se sont laissé entraîner dans
» diverses hérésies, et avec quelle obsti-
3> nation ils y ont persévéré ; et de nom-
» breux monastères y persévèrent encore
j) aujourd'hui. » On lit dans les ouvrages
de saint Jérôme , un passage exactement
applicable à cette matière , où. l'on trouve
toute l'éloquence et la sévère logique de
ce Père : Siaut fiscellamjuncotexerem,
aut palmarum folia complicarem , aut
in sudore vultûs mei comcder^em pancm,
et veniris opus sollicita mente pertrac-
tarem ; nuUus morderet , nuUus repre-
henderct. Nunc autem quia juxta sen-
tentiam Salvatoris , volo operari cibum
qui nonperit, error mihi geminus infli-
gitur.... 0 fratres dilectissimi, pro fla-
bello, calat/iis, sportellisque, munuscu-
lis jnonachorum spiritualiahœc et man-
sura bona suscipite. 2" praefat. in lib.
Job. ( P^oy. saint Claude , Saint-Amour ,
BoNAYENTURK, Norbert.) Lameilleure édi-
tion des deux Règles du saint patriarche
et de ses Opuscules est celle du Père Jean
delà Haie, en 1641, in-fol. Elles ont été
réimprimées en Allemagne en 1739,
in-fol. LePèreChalippe, récollet, a donné
sa Fie, Paris, 1728 , in-4, et 1736, 2 vol.
in-12.
FRANÇOIS DE PAULE ( Saint ) ,
fondateur de l'ordre des Minimes , naquit
à Paule en Calabre l'an 1416. Un attrait
singulier pour la solitude et pour la piété
le conduisit dans un désert au bord de la
mer , oii il se creusa une cetlule dans le
roc. La réputation de sa sainteté attira
auprès de lui lue foule de disciples , qui
bâtirent {tuteur de son ermitage un
FRA
Inonastère , le premier de son ordre. On
nomma d'abord ses religieux les er-
mites de saint François ; mais François
voulut qu'ils portassent le nom modeste
de minimes. Il leur prescrivit un carême
perpétuel , et leur donna une règle , ap-
prouvée par le pape Alexandre VI, et
confirmée par Jules II. Le nom du saint
fondateur se répandit en Europe avec le
bruit de ses vertus. Louis XI , dangereuse-
ment malade , l'appela eu France du fond
de la Calabre, espérant d'obtenir sa gué-
rison par ses prières. Ce prince ,très ja-
loux de tenir son rang, alla au devant de
lui et se prosterna devant l'humble reli-
gieux. « Vous étiez alors , ô mon Dieu !
» connu dans le monde ( s'écrie à ce sujet
» un orateur célèbre ) , et les cours des
» princes n'étaient pas des lieux inacces-
M sibles à votre grâce ni à la piété chré-
> tienne, puisque vos serviteurs y étaient
» si honorablement traités. » Quoique le
saint annonçât au roi une fin prochaine ,
au lieu de la guérison qu'il espérait, il
continua à jouir de toute sa confiance, et
l'aida à finir par une mort chrétienne une m
vie qui , à bien des égards , ne l'avait 1
pas été. François établit quelques maisons
en France , et mourut dans celle du Ples-
sis-du-Parc en 1 507 ; il fut canonisé en
1519, par Léon X. Les Minimes furent
appelés en France Bons-Hommes, du
nom de Bon Homme que les courtisans
de Louis XI donnaient à leur père. Les
hommes du siècle ne manquent jamais de
confondre la piété et la précieuse sim-
plicité de l'Evangile, avec ce qu'ils ap-
pellent Bonhomie. Le Père Hilarionde
Coste a donné sa P^ie , in-4.
FRANÇOIS XAVIER ( Saint ) , sur-
nommé V Apôtre des Indes , né au châ-
teau de Xavier au pied des Pyrénées le 7
avril 1 506 , était neveu du célèbre doc-
teur Navarre. Il enseignait la philosophie
au collège de Beauvais à Paris , lorsqu'il
connut Ignace de Loyola , fondateur des
jésuites. Il s'unit étroitement avec lui ,
et fut un des sept compagnons du saint
espagnol , qui firent vœu dans l'cglia^M
de Mont-Martre , en 1534, d'aller tranS
vailler à la conversion des infidèles. Jean
ni, roi de Portugal, ayant demandé
1
FftA
des missionnaires pour les Indes orien-
tales , Xavier s'embarqua à Lisbonne en
1541. De Goa oii il se fixa d'abord, il
répandit la lumière de l'Evangile sur
la côte de Comorin , à Malaca , dans
les Moluques, dans le Japon. Un nom-
bre infini de barbares reçurent le bap-
tême. Xavier leur inspira le goût pour
le christianisme , autant par ses vertus
que par son éloquence ; et la Providet e
renouvela plus d'une fois, en faveur de
ces nouvelles églises , les merveilles des
premiers temps du christianisme. Il mou-
rut en 1552, dans l'île de Sancian, à la
vue de l'empire de la Chine, oii il brû-
lait de porter la foi. Il était âgé de 46
ans , et en avait employé dix et demi à
la conversion des Indes. « Terme bien
j> court, dit l'abbé Bérault, quand il
» n'eût soumis qu'une nation au joug de
» l'Evangile ! Mais s'il a établi la foi dans
» 52 royaumes plus ou moins étendus ;
» s'il a arboré l'étendard de la croix dans
» 3,000 lieues de pays; s'il a baptisé de
» sa main près d'un million tant de Sar-
» rasius que d'idolâtres ; s'il a procuré à
» l'Eglise plus de nouveaux sujets que les
M fameux hérésiarques de son siècle n'ont
» fait de déserteurs et d'apostats , ne
» peut-on pas dire que la rapidité des
» conquérans les plus mémorables n'égala
» pas la sienne ; et que s'il eût rempli la
» mesure commune de la vie humaine,
» le monde entier , pour son zèle , plutôt
« que pour leur valeur, eût été un champ
» trop étroit ? « Son corps, plusieurs fois
relevé de terre , d'abord à l'ile de San-
cian, puis à Malaca, ensuite à différentes
fois à Goa , fut trouvé sans aucune cor-
ruption. En 1782, il fut derechef dé-
couvert et exposé durant trois jours aux
yeux du public. {Foyez la Relation de
M. Cicala , et sa Vie imprimée à Liège ,
p. 22.) Grégoire XV le mit au nombre
des saints en 1G22. Les protestans mêmes
lui ont donné ce nom. Tavernier dit qu^on
peut V appeler ajuste titre le saint Paul
et le véritable apôtre des Indes. Richard
Haklvit , au second tome des Navigations
de la nation anglaise ^ en parlant de l'île
de Sancian, remarque qu'elle est fameuse
Car la mort de François Xavier , dont il
fait un grand éloge, auquel il ajoute que
les histoires modernes des Indes sont
remplies des excellentes vertus et des
œuvres de ce saint homme. Baldeus,
dans son Histoire des Indes, après avoir
parlé de Xavier comme d'un autre saint
Paul, dit que les dons qu'il avait reçus
pour exercer la charge de ministre et
d' ambassadeur de Je'sus-Christ, étaient
si e'minens , qu'il ne lui est pas possible
de les exprimer. Et quelques lignes après,
adressant la parole au saint même : Plût
à Dieu, s'écrie-t-il , qu'ayant été si cé-
lèbre par votre ministère, notre Reli-
gion nous permît de vous adopter , ou
que la vôtre ne vous obligeât pas de
nous renoncer '. Effectivement , la vie
et les immenses travaux de ce grand
homme sont le fruit visible de cette con-
viction intime, de cette foi vive, de
cette charité active et brûlante, que les
systèmes et les opinions des hommes ne
sauraient produire : aussi , le zèle pour
la conversion des infidèles a-t-il toujours
été et sera toujours propre à l'Eglise ca-
tholique ; ceux des sectaires qui ont voulu
l'imiter n'ont pu en soutenir long-temps
les apparences , moins encore en renou-
veler les effets : et pour dire un mot des
apôtres de la nouvelle philosophie , con-
tens d'enseigner commodément dans des
brochures la prétendue vérité, ils n'ont
garde de quitter leurs foyers pour l'an-
noncer à des peuples ignorans et sauva-
ges. On a de saint François Xavier : 1°
cinq livres A'Epîtres, Paris, 1631 , in-8.
2° Un Catéchisme. i° Des Opuscules. Ces
ouvrages respirent le zèle le plus animé,
la piété la plus tendre, un jugement sûr
et solide. Les Pères Tursel in etBouhours,
jésuites , ont élégamment écrit sa Vie y
l'un en latin , l'autre en français. Celle-
ci a été très souvent réimprimée. On a
de M. Dulard une épopée intitulée la
Xavériade , ou l'apostolat de saint
François Xavier, un peu froide , mais
pleine de grandes idées : il y en a une
autre en latin ( voy. Franck ).
FRANÇOIS DEBORGIA (Saint),
vice-duc de Gandie où il naquit en 1510, et
roi de Catalogne, jouissai t de la plus grande
considération à la cour de Charles-Quint.
456 fRA
chargé de coDdaire à Grenade le corps de
l'impcratrice Isabelle , pour y être déposé
dans le tombeau royal , et obligé d'at-
tester que c'était réellement le corps de
cette princesse qui avait été un prodige
de beauté , il fut si frappé à l'ouverture
du cercueil , de ne pouvoir plu^ la recon-
naître , que ce tableau de la mort devint
pour lui uue leçon subitement efficace.
Il vécut en saint au milieu de la cour, et ,
après la mort de son épouse , il entra
chez les jésuites , dont il fut le troisième
général. Tous les honneurs le poursuivi-
rent dans sa retraite ; de riches évêchés ,
le cardinalat, et d'autres dignités lui
furent offerts à plusieurs reprises, et,
après la mort de Pie V , une partie des
cardinaux voulurent l'élever sur la chaire
de saint Pierre. Il échappa à tout cela,
et mourut à Rome quelques mois après
ce pape, le 30 septembre 1572, à l'âge
de 62 ans, après avoir établi sa compagnie
dans un grand nombre de provinces et ren-
du de grands services à l'Eglise. Le voyage
qu'il fit par ordre de Pic V avec le cardinal
Alexandrin, pour réunir les princes chré-
tiens contre les infidèles , avança sa mort,
ses forces et l'état de sa santé ne répondant
pas aux fatigues de cette commission. C'é-
tait un homme d'une mortification extraor-
dinaire. Sainte Thérèse qui l'appelait un
saint recherchait et suivait ses conseils
dans les affaires difficiles. Charles-Quint
voulut le voir dans sa retraite de St.-Juste,
et lui répéta ce qu'il lui avait confié
long-temps auparavant , que son exem-
ple avait beaucoup servi à le déterminer
à quitter le trône et le monde, et que
dès lors il en avait conçu la résolution ;
anecdote qui détruit les contes imaginés
sur l'abdication de ce prince ( voyez Ve-
SAL ). Clément X le mit au nombre des
saints en 1671. Il laissa plusieurs ouvra-
ges, traduits de l'espagnol en latin par
le Père Alfonse Deza , jésuite, Bruxelles ,
J675, in-fol. F oyez sa Fie , publiée en
français , in-4 , par le Père Verjus , d'a-
près Ribadeneira et Eusèbe Niéremberg.
FRANÇOIS DE SALES (Saint ) , né
au château de Sales, diocèse de Genève ,
en 1567 , fit ses premières études à Paris,
et son cours de droit à Padoue. Il édifia
FRA
ces deux villes par sa piété aussi douce
que tendre. Il fut d'abord avocat à Cham-
béri , puis prévôt d'Anneci ; ensuite évê-
que de Genève, après la mort de Claude
Garnier son oncle en 1602. Son zèle pour
la conversion des zuingliens et des cal-
vinistes avait éclaté avant son épisco-
pat ; il ne fut que plus ardent après. Ses
succès répondirent à ses travaux. Il avait
gagné à l'Eglise plus de 70,000 héréti-
ques, depuis 1592 jusqu'en 1602 qu'il
fut évêque. Il serait difficilede faire un dé-
tail exact de ceux qu'il ramena au bercail,
depuis 1 602 jusqu'à sa mort. Le cardinal
du Perron disait qu'tZ n'y avait point
d'hérétique qu'il ne pût convaincre; mais
qu'il fallait s'adreser à F évêque de Genève
pour les convertir. Un jour nouveau lui-
sit sur le diocèse de Genève , dès qu'il en
eut pris possession. Il fit fleurir la science
et la piété dans le clergé séculier et ré-
gulier. Il institua l'an 1610 l'ordre de la
Visitation , dont la baronne de Chantai ,
qu'il avait détrompée des faux charmes
du monde, fut la première supérieure. Il
voulut qu'on y admit les filles d'un tem-
pérament délicat, et même les infirmes,
qui ne peuvent se placer dans le monde ,
ni dans les cloîtres austères. Cette con-
grégation fut érigée en titre d'ordre et
de religion, l'an 1618, par le pape Paul V.
Sur la fin de cette même année , François
fut obligé de se rendre à Paris avec le
cardinal de Savoie, pour conclure le ma-
riage du prince de Piémont avec Chris-
tine de France. Cette princesse le choisit
pour son aumônier; le saint évoque, qui
avait déjà refusé un évêché en France ,
et qui refusa vers le même temps la coad-
jutoreriede l'évêché de Paris, ne voulut
accepter cette place qu'à condition
qu'elle ne l'empêcherait point de résider
dans son diocèse pour lequel il soupirait.
Il y retourna le plus tôt qu'il put , et
continua d'y vivre en pasteur des pre-
miers siècles ;de l'Eglise, en Irénée, eu
Augustin. L'an 1622 , ayant eu ordre de
se rendre à Lyon , où le duc de Savoie
devait voir Louis XIII , il y fut frappé
d'apoplexie le 27 décembre, et mourii
le lendemain , à 56 ans. Saint François^
Sales était une de ces âmes tendres et i
FRA
bltmes , nées pour la vertu et pour la
piété, et destinées pour le Ciel à inspirer
l'une et l'autre. On remarque ce caractère
dans tous ses écrits : la candeur, l'onction
qu'ils respirent , les rend délicieux même
k ceux que les lectures de piété ennuient
le plus. Les principaux sont : t" Intro-
duction à la vie dévote. Le but de ce
livre était de montrer que la dévotion n'é-
tait pas seulement faite pour les cloîtres,
mais qu'elle pouvait être dans le monde,
et s'y accorder avec les obligations de
la vie civile et séculière. Il fit des fruits
merveilleux à la cour de France et à celle
de Piémont. 2° Un Traité de F amour de
VieUy mis dans un nouvel ordre par le
Père Fellon, jésuite, en 3 vol. 11 a été
depuis imprimé en 2 vol. , et abrégé eu
un seul par l'abbé Tricalet. Z"Bes Lettres
spirituelles , et d'autres ouvrages de
piété , recueillis en 2 vol. in-fol. Elles
ont été réimprimées en 1817, en 3 vol.
in-8, avec un beau portrait et un modèle
de son écriture. Saint François de Sales
y paraît un des mystiques les plus judi-
cieux de ces derniers temps. Les lecteurs
qui voudront connaître plus en détail ses
ouvrages et ses vertus , peuvent lire sa
f^ie élégamment écrite par l'abbé Marsol-
lier, en 2 vol. , et son Esprit, par le Ca-
mus , évêque de Belley , son intime ami.
Ce dernier livre , insipidement prolixe,
a été réduit par M. Collot , docteur de
Sorbonne , à un gros vol. in-8, plusieurs
fois réimprimé. On a publié à Paris en
1823 une belle édition complète de ses
œuvres, 16vol. in-8.
FRANÇOIS, ^oye; RÉGIS.
FRANÇOIS DELORRAINE(Etienne),
empereur d'Allemagne , naquit en 1708 ,
de Léopold , duc de Lorraine , et d'Eliza-
beth-Charlotte d'Orléans , et fut marié en
1 73G avec Marie-Thérèse , fille de l'empe-
reur Charles VI (voyez ce mot). Après
la mort de ce prince , il disputa la cou-
ronne impériale à Charles VII , mort à
Munich en janvier 1746. Il fut élu empe-
reur le 1 3 septembre de la même année.
Le fléau de la guerre désolait alors toute
l'Europe. On peut voir à l'article Brown
un précis des expéditions militaires de ce
temps-là. La paix conclue en 1748 à Aix-
V.
FRA 457
la-Chapclle rendit la tranquillité à l'em-
pire d'Allemagne. Une nouvelle guerre
s'étant allumée en 17 56, fut terminée
par le traité d'Hubertsbourg en Saxe , le
1 5 février 1763. L'empereur François pro-
fita de l'heureux loisir de la paix pour
faire fleurir le commerce , les sciences et
les arts dans ses états , qui le perdirent
le 18 août 1765. Il mourut subitement à
Inspruck , oîi il s'était rendu pour les
noces de son fils Léopold avec l'infante
Mai'ie-Louise d'Espagne. Comme il mou-
rut au sortir de la comédie, on ne man-
qua pas d'en accuser l'air du spectacle ,
qu'on sait être plus méphitique que dans
les salles d'hôpitaux et d'anatomie. C'é-
tait un de ces hommes vertueux par reli-
gion et par sentiment , qui font le bien
pour lui-même , et savent se mettre à
l'abri de cette célébrité bruyante, qui
flatte la faiblesse et la vanité jusque sur
le trône. Sa vie n'a été qu'une suite nou
inierrompue d'actions de sagesse, de
justice, de bienfaisance; et cependant il
y a peu d'empereurs qui aient fait moins
de bruit dans le monde que François I.
Serait-ce une propriété de la véritable
grandeur , de n'être pas compromise par
la fausse science ?
ROIS ET PRINCES DE FRANCE.
FRANÇOIS I, roi de France, parvint
à la couronne le l*"^ janvier 1515, à 21
ans, après la mort de Louis XII son beau-
père. Il était né à Cognac en 1494, de
Charles d'Orléans , comte d'Angoulème ,
et de Louise de Savoie. Petit-fils de Va-
lentine de 31ilan , il prit avec le titre de
roi de France , celui de duc de Milan , et
se mit à la tête d'une puissante armée
pour aller se rendre maître de ce duché.
Il n'ignorait pas que les Suisses s'étaient
emparés du Mont-Genèvre et du Mont-Ce-
nis , les deux portes de l'Italie ; mais il
espérait tout de son courage et de celui
de ses troupes. On tenta de passer les
Alpes par les cols de l'Argentière et de
Guillestre, jusqu'alors impraticables; on
en vint à bout, et les Français se virent
bientôt aux plaines de Marignan , où ils
furent attaqués par les Suisses. La ba-
taille dura deux jours , les 13 et 14 sep<
29.
458 FRA
teinbre 15t5. François I ne perdit point
]e sang froid dans cette action, aussi lon-
gue que meurtrière ; il passa une partie
de la nuit à ranger ses troupes , et une
autre partie sur l'afifùt d'un canon, en
attendant le jour. Le vieux maréchal de
Trivulce disait, des 18 batailles oîi il s'é-
tait trouve, «que c'étaient des jeux d'en-
» fans ; mais que celle de Marignan était
'• une bataille de géans. « Bayard avait
ce jour armé chevalier son roi. Les Suis-
,v ses fuirent enfin, laissant sur le champ
de bataille plus de dix mille de leurs
compagnons, et abandonnant le Milanais
aux vainqueurs. Plus tard ils devinrent
les fidèles alliés de la France. Maximilien
Sforce lui en fit la cession , et se retira
en France , oii il mourut. Les Génois se
déclarèrent pour les Français. Le pape
Léon X , effrayé de leurs succès , vit le
roi à Bologne , et fit sa paix avec lui. Ce
fut dans cette conférence , qu'après avoir
obtenu l'abolition de la pragmatique-
sanction , il conclut le 14 décembre
1515 , le concordat pour la collation des
bénéfices, confirmé l'année suivante au
concile de Latran. François obtint la no-
mination des bénéfices , et Léon les an-
nales, en renonçant aux mandats, résci
ves , expectatives , et autres droits dont
jouissait le siège de Rome. Les universités
et les parlemens ne reçurent le concordat
qu'après de longues résistances. Cèpe;
dant les universités n'avaient pas tac'
s'en plaindre , puisque la troisième part i
des bénéfices leur est réservée par '
moyen de l'impétration ; «t les parlemci?-
ne faisaient pas attention que François I ,
en accordant les annales, se procurait
d'ailleurs des avantages considérables •
et ils oubliaient sans doute la maxiuK
très raisonnable comme très catholique ,
que tous les chrétiens doivent concou.ir
à l'entretien du premier pontife, et à : •
splendeur de son siège. « Maxime si pe..
» contestée , di^ un jurisconsulte de c.'
» siècle, que le concile de Baie, en pro
M posant l'abolition des annales , deman
M liait en même temps un moyen de les
i> suppléer , et de donner au souverain
» pontife, et à l'administrateur de l'Eglise
' M ooiverselle, les secours nécessaires à
FRA
u Un gouvernement si vaste et si compo-
» se. Fébronius lui-même , cet ardent ad-
» versaire des pontifes romains, convient
» que les annales sont une rétribution
» légitime , et fondée sur des vues et des
u fins très sages. Et quand on sait que
» tout le produit des annales et autres
» droits quelconques, attachés aux expédi-
» lions romaines, ne vont annuellement
» pour toute la France qu'à 500,000 1.,
» on ne peut comprendre les clameurs
» que produit ce mince objet, sans ea
» chercher la source dans la haine de
» Dieu et de son culte. » L'année d'après
la conquête de Milan en 1516 , Charles-
Quint et François I signèrent le traité de
Noyon , oii ils se donnèrent mutuelle-
ment, l'un, l'ordre <le la Toison-d'or, et
l'autre , celui de St.-Michel , après s'être
juré une paix éternelle. Celte paix fut de
deux jours. Après la mort de l'empereur
Maximilien , François fit briguer la cou-
ronne impériale. Charles, plus jeune, et
moins craint par les électeurs , l'emporta
sur lui, malgré les 400,000 francs qu'il
dépensa pour avoir des suffrages. La
guerre fut allumée dès lors , et le fut
pour long- temps. Le ressentiment de
François éclata d'abord sur la Navarre. Il
la conquit et la perdit presque au même
temps. Il fut plus heureux en Picardie :
il en chassa Charles qui y était entré ,
pénétra dans la Flandre , lui prit Landre-
cies, Bouchain , Hesdin et plusieurs au-
tres places; mais il perdit le Milanais par
les violences de Lautrec , et le connétable
de Bourbon par les injustices de Louise
de Savoie sa mère. Ce général se jeta dans
le parti de l'empereur. Les Français,
commandés par Lautrec, furent défaits
le 27 avril 1522, à la Bicoque. Cette fu-
neste journée fut suivie de la perte de
Crémone et de Gênes. Bourbon , secondé
par Antoine de Lève, battit en J 524 l'ar-
rière-garde de l'amiral Bonnivet à la re-
traite de Rebec , oii Bayard fut tué ; il
marcha vers la Provence , prit Toulon ,
et assiégea Marseille. François 1 courut
au secours de la Provence , et, après l'a-
voir délivrée , il s'enfonça encore dans le
Milanais et assiégea Pavie. On était dant
le cœur de l'hiver. C'était une faute con-
I
FRA
sidérable , d'avoir formé un siège dans
une saison si rigoureuse. François en lit
une autre non moins importante , en dé-
tachant mal à propos dii mille hommes
de sou armée pour les envoyer conquérir
Kaples. Trop faible pour résister aux im-
périaux, il fut battu le 24 février 1526,
après avoir eu deux chevaux tués sous
lui , et fait prisonnier avec les principaux
seigneurs de France {voyez Lannoy). Son
malheur voulut encore qu'il fut pris par
le seul officier français qui avait suivi le
duc de Bourbon, et que ce duc fût pré-
sent pour jouir de son humiliation. L'ab-
bé Gervaise , dans la Vie de ^aint Martin
de Tours , semble attribuer ce malheur à
la violation du tombeau de ce saint, d'où
François I venait de faire enlever une
grille d'argent pour la convertir en mon-
naie. Comme il paraît que le roi lui-même,
ainsi que la reine , était dans cette per-
suasion , il ne sera pas inutile de rap-
porter ici le passage de cet historien ,
homme raisonnable et instruit. « Quoique
» François 1 eût fait serment comme les
j) rois ses prédécesseurs, lorsqu'il se fit
» recevoir abbé et chanoine de l'église
» de St. -Martin , d'en être le protecteur,
» quelques officiers de ses finances abu-
» saut de sa facilité , lui firent croire que
« dans les besoins pressans de l'état , il
î) pouvait légitimement se servir du treil-
» lis d'argent qui fermait le tombeau de
■» saint 3Iarlin. Us vinrent à Tours au
» mois de juillet de l'année 1522, signi-
» fier aux chanoines l'ordre qu'ils avaient
» de l'enlever. On trouve dans les regis-
» très de cette église la réponse que le
» chapitre leur fit. Elle est conçue en ces
» termes : Les chanoines disent qu'ils
» sont très humbles et très obe'issans
» cliapelains et orateurs dudit seigneur
» roi, et qui a vux n'est de querelles,
» arguer et contester avec sa majesté';
« mais que craignant d'offenser Dieu , le
M créateur , et monsieur saint Martin, et
» pour les causes par eux déjà alléguées,
« et autres légitimes , ils n'osent et ne
» doivent consentir ledit treillis Jtrepris
» ou enlevé. Les officiers ne laissèrent pas
» de passer outre ; le treillis fut mis en
» pièces le 8 du mois suivant , et chargé
FRA 459
» à la porte de l'église dans des chariots,
» escortés de plusieurs compagnies de
)) soldats , qui le conduisirent à la mon-
» naie. On en fit des testons, où d'un
» côté la figure de saint Martin est em^-
» preinte. Il s'en trouve encore quelqucs-
« uns dans les cabinets des curieux. Celle
» action si peu attendue d'un prince ca-
» tholique, jeta tous les gens de bien
« dans la consternation. Ceux même qui
» s'étaient chargés de cette entreprise ,
» la trouvèrent si bonteuse, qu'ils ne
M voulurent jamais permettre qu'on en
» dressât un procès-verbal. Le fabricier
» de l'église et quelques chanoines des
» plus zélés, s'étant opiniâtres à le vou-
» loir faire , en furent chassés avec les
» notaires. La chose fut si loin, qu'ayant
» paru à l'une des fenêtres de l'église ,
M pour voir ce qui s'y passait , l'on tira
» dessus plusieurs coups d'arquebuse ,
» dont heureusement personne ne fut
» blessé. Quelques historiens ont cru que
» les malheurs qui arrivèrent depuis à
» François I , furent de justes châtimens
» de la profanation du tombeau de saint
» Martin. En effet, on remarque que co
» prince ayant peu de temps après porté
» ses armes dans le Milanais , et mis le
» siège devant Pavie, il y fut abandonné
» des siens , son cheval tué sous lui dans
» la retraite, lui-même dangereusement
» blessé, et arrêté sur les terres que Char-
» lemagne avait données à l'église de
» St. -Martin. Il reconnut alors, mais trop
» tard , que ce n'était pas sans raison que
» Clovis avait dit autrefois qu'il n'y avait
« pas lieu de se promettre la victoire de
» ses ennemis, après qu'on avait offensé ce
» grand saint. Louise de Savoie, sa mère,
» à qui il avait laissé la régence pendant
» son absence, sitôt qu'elle eût reçu la
» nouvelle de la prise du roi , vint avec
» les princesses, enfans de France, aa
» tombeau du saint , implorer son se-
» cours , et tâcha de réparer , par les
» présens qu'elle y laissa , l'injure qui
» lui avait été faite. Le roi lui-même
M n'eut pas plutôt recouvré sa liberté,
» qu'il y vint , avant d'aller à Paris , pour
j> lui en faire une espfte de satisfaction.
w La colère de Dieu éclata d'une manière
46o FRA
j> bien plus sensible contre la personne
» de Jacques Fournier ( d'autres le nom-
i) ment Beaune , voyez ce mol) , seigneur
i) de Semblançai , qui avait été l'auteur
M d'une si méchante action ; car cinq ans
j) après , le même jour que le treillis
» avait été enlevé , sur une fausse accu-
5) sation il fut condamné à être pendu ,
j) et le fut en effet quelques jours après
}) à Moutfaucon , dans le fief du prieuré
» dé Saint-Martin-des-Cbamps. » Quoi
qu'il en soit de ces observations, Fran-
çois I" fut conduit à Madrid , où Cbarles
le traita avec tous les égards possibles,
et lui rendit la liberté par un traité^
qu'il savait bien que son prisonnier n'ol>
serverait pas. Par ce traité , signé à Ma-
drid , le 1 4 janvier 1 526 , François re-
nonçait à ses prétentions sur Naples , le
Milanais , Gènes et Ast , h la souveraine-
té sur la Flandre et l'Artois. Il devait cé-
der le duché de Bourgogne; mais lorsque
Lannoy vint le demander au nom de l'em-
pereur, François I*', pour toute réponse ,
le fit assister à une audience des députés
de Bourgogne, qui déclarèrent au roi
« qu'il n'avait pas le pouvoir de démem-
» brer aucune province de sa monar-
V chie ; » et comme l'empereur se plaignit
de ce manquement de paroles , François
lui fit dire en propres termes : « Vous
}) avez menti par la gorge , et autant de
» fois que vous le direz , vous mentirez. «
fit plus, il se ligua contre Charles avec
les Vénitiens et presque toute l'Italie,
l.autrec se rendit maître d'une partie de
la Lombardie , et aurait pris Naples , si
les maladies contagieuses , favorables aux
Espagnols , n'eussent enlevé une partie
de l'armée française avec leur général ,
eu 1528. Ces pertes avancèrent la paix:
elle fut conclue à Cambray en 1529. Le
roi de France épousa Eléonore , veuve
du roi du Portugal et sœur de l'empe-
reur. Ses deux fils étaient restés en otage
lorsqu'il sortit de prison ; en .violant le
traité de Madrid, « il les exposa, dit
» Voltaire , au courroux de l'empereur ;
» il y a des temps où cette infraction eût
» coûté la vie à ces deux princes : »
mais le caractè^ de Charles ignorait
ce genre de vengeance. François racheta
FRA
ses enfans moyennant deux militons d'or.
Mais cette rançon devint fatale à la Fran-
ce , parce que le roi prit la résolution in-
digne d'un grand prince , d'altérer la
monnaie , et fit frapper des espèces de
moindre aloi que celles qui avaient
cours , pour payer cette somme. Cette
supercherie , jointe à la faiblesse qu'avait
eue François \" d'abandonner ses alliés
à sou rival, lui fit perdre la confiance
de l'Europer A peine la paix était con-
clue, qu'il travailla sourdement à faire
des ennemis à l'empereur. En 1 534 , il en-
voya en Amérique Jacques Cartier habile
navigateur de St.-Malo , pour faire des
découvertes ; et en effet ce marin décou-
vrit le Canada (voy-ez Cartiek). Il fonda .
le collège royal , il forma la bibliothèque ■*
royale ; il aurait plus fait encore , sans la
passion malheureuse de vouloir toujours
être duc de Milan et vassal de l'empire
Tialgré l'empereur. Il passa encore en
Italie , et s'empara de la Savoie en 1585.
L*empereur de son côté se jeta sur la Pro-
vence , assiégea Marseille , et fut repous- ^
se, François 1*' s'unit avec Soliman II;
mais cette alliance avec un empereur
lahométan , excita les murmures de
l'Europe chrétienne, sans lui procurer
< jcun avantage. Las de la guerre , il con- ■«»
;'t enfin une trêve de dix ans avec
arles , dans une entrevue que le pape
. ul III leur ménagea à Nice en 153(V-
> empereur , ayant passé quelque temps
près par la France pour aller châtier
'is Gantois révoltés, lui promit l'investi-
î lire du Milanais , si l'on en croit la plu-
|i..it des historiens français, mais lesEs-
^i;).jnols l'ont constamment nié , « Quelle
!> apparence , disent-ils , qu'un prince
< sensé aura consenti à céder une grande
V et magnif.que province , pour avoir pu
» abréger son chemin, et arriver quel-
j/ ques jours plus tôt aux portes d'une ville
a révoltée. » Voltaire lui-même assure
que Charles ne donna qu'une parole va-
gue ; et l'on ne peut disconvenir que la
demande qu'en fit François dans ces cir-|
constances ne fût très déplacée. Si da
l'alternative d'être arrêté ou de promettre
le Milanais , Charles eût pris ce dernier
parti ; la promesse eût été nulle seloa
j
FRA
toutes les règles du droit. Quoi qu'il en
soit, la guerre se rallume bientôt après.
François envoie des troupes en Italie ,
dans le Roussillon et dans le Luxembourg-
Le comte d'Engbien bat les impériaux à
Cérisoles en 1544 , et se rend maître du
Montferrat. La France, unie avec Bar-
bero"usse et Gustave Wasa, se promet-
tait de plus grands^ avantages , lorsque
Charles-Quint et Henri VIII , ligues contre
François l" , détruisirent toutes ses es-
pérances , en pénétrant dans la Picardie
et la Champagne. L'empereur était déjà
à Soissons , et le roi d'Angleterre prenait
Boulogne. Le luthéranisme fit le salut de
la France. Les princes luthériens d'Al-
lemagne s'unissent contre l'empereur.
Charles, pressant la France et pressé
dans l'empire, fit la paix à Crespi en
Valois le 18 septembre 1644. François I",
délivré de « l'empereur , s'accommoda
bientôt avec le roi d'Angleterre Henri
VIII. Ce fut le 7 septembre lâ4G. Il mou-
rut l'année d'après à Rambouillet , le 31
mars 1547 , de celte maladie alors pres-
que incurable, que la découverte du Nou-
veau Monde , avait , dit-on , transplan-
tée en Europe , mais que plusieurs savans
croient être d'une date très antérieure
(vot/cz AsTRUC ). Un long portrait de
François l" serait superflu : il est assez
peint dans le cours de cet article. Il fut
plus brave chevalier que grand prince.
Il eut plutôt l'envie que le pouvoir d'a-
baisser Charles-Quint, son rival de gloire,
mais plus puissant, plus heureux et plus
circonspect. « Charles-Quint , dit l'abbé
» Raynal , n'agissait que par des intérêts
» d'état , et François I*' , qui n'avait en
» vue que des passions particulières, y
- » portait ce motif petit et bas qui en-
» traînetoujours à l'humiliation «(J^rtecrf.
hisL , tome 1 , page 181). Comme il ré-
fléchissait peu, il entreprenait les guerres
avec une légèreté extrême , et s'exposait
imprudemment aux plus grands revers.
Quoiqu'il s'occupât beaucoup du soin
^ d'étendre son royaume, il ne le gouver-
- na jamais lui-même. L'état fut succes-
sivement abandonné aux caprices de la
duchesse d'Angoulème , aux passions
des ministres, à l'avidité des favoris. Son
FRA 46«
zèle pour la religion fut singulièrement
inconséquent : tarnlis qu'il faisait brûler
les hérétiques en France, il les soutenait
en Allemagne; et c'est à lui que le lu-
théranisme est redevable de n'avoir pas
succombé à la puissance de Charles-
Quint. La protection qu'il accorda aux
beaux-arts , semble avoir couvert aux
yeux des savans une partie de ses défauts.
Il se trouva précisément dans le temps
de la renaissance des lettres ; il en re-
cueillit les débris échappés aux ravages
de la Grèce, et il les transplanta en Fran-
ce. Son règne est l'époque de plusieurs
révolutions dans l'esprit et dans les
mœurs des Français. Il appela à sa cour
les dames , les cardinaux et les prélats
les plus distingués de son royaume. La
justice , depuis la fondation de la monar-
chie , avait été rendue en latin ; elle
commença l'an 1536 à l'être en français.
François l" fut déterminé à ce change-
nient par une expression barbare , em-
ployée dans un arrêt rendu au parlement
de Paris. Motif bien léger et plein d'in-
conséquence , puisqu'il eût été plus fa-
cile et plus simple de corriger un solé-
cisme, que de changer de langue. « Celte
1. iunovafion , dit un observateur moder-
-'-ne, a eu plus d'un mauvais effet. D'a-
» bord la langue romaine , ce grand
w organe de l'érudition et des sciences ,
)> cet idiome des grands modèles , a été
)' négligée. La jurisprudence est deve-
ti nue un champ ouvert à tout le monde ;
' les ignorans, toujours plus présomp-
)> tueux et plus prompts que les gens in-
3) struits, s'en sont emparés. La science
i) de Injustice et des lois a dégénéré en
» verbiage et en chicane. Le nom d'avo-
j) cat est devenu l'étiquette des petits-
j» maîtres , et un litre pour ceux qui n'en
» ont pas d'autre. La magistrature a été
» considérée comme un groupe de gens
i) ignares ou] intéressés , et quelquefois
» comme un corps de factieux. De là les
» termes de robinerie , de robinaille , de
» robinauderie , etc. , affectés aujour-
I» d'hui à une profession qui mérita long
M temps le respect et la confiance des
» peuples. Tant il est dangereux de tou-
» cher aux usages établis , ne fût-ce
46a FRA
» qu'en matière de langue ! » Ce fut en-
core François l" qui introduisit la mode
de porter les cheveux courts et la bar-
be longue , pour cacher une blessure
qu'il reçut dans un jeu en 1521. Tous
les courtisans eurent la plus longue bar-
be qu'ils purent; c'était alors un orne-
ment de petit-maître. Les gens graves
et les magistrats n'en portaient point j
ils ne laissèrent croître la leur, que lors-
que les courtisans se furent dégoûtés de
celte mode. François P"" accabla son peu-
ple d'impôts , et il recommanda à son
fils en mourant de diminuer les tailles.
Il laissa dans ses coffres environ .six mil-
lions d'à-présent. Son histoire, écrite
par M. Gaillard, 8 vol. in-12 , est le fruit
de la prévention et de l'esprit national ;
tous les faits et tous les caiactères y sont
défigurés. Ce prince est mieux apprécié
dans la Galerie p/Ulosophique du 16®
siècle, par M. de Mayer, 2 vol. in-8. On
y trouve , après divers détails intéres-
sans , ce portrait en petit : « François I*"" ,
, >» bon , sincère , généreux , populaire ,
» mais inconséquent et indiscret , jamais
» méchant ni cruel , n'eut point de
» mœurs , énerva et ruina la nation sans
» le vouloir. » ( Sa vie a été aussi écrite
par Varillas , Paris, 1G85, 2 vol. in-4. On
a publié à Paris , 1707 , in-12 : Histoire
et parallèle de Charles - Quint et de
François I" , tires d'un manuscrit du
f^atican ; M''^ de Lussan a donné les
Anecdotes de la cour de François I" ,
Londres (Paris), 1748, 3 vol. in-12;
M. Rœderer a publié Louis XII et Fran-
çois 1*', ou Mémoires pour servir à une
nouvelle histoire de leur règne. Enfin la
bibliothèque du roi possède plusieurs
recueils manuscrits de poésies et de let-
f.res de François P' : l'abbé Langlet en
a tiré une Epître ( en vers) , traitant de
son parlement de France et de sa prise
devant Pavie , et l'a publiée à la fin de
V Histoire justifiée contre les romans ,
Amsterdam , Rouen , 1735, in-1 2. )
Î'RAIN'ÇOIS II , roi de France , né à
Fontainebleau en 1544 , de Henri II et de
Catherine de Médicis , monta sur le trône
après la mort de son père en 1559- Il
' avait épousé l'année d'auparavant Marie
FRA
Stuart , fille uniqiie de Jacques V , roi
d'Ecosse. Quoique son règne ne fût que
de 1 7 mois , il vit éclore tous les maux
qui depuis désolèrent la France. François,
duc de Guise , et te cardinal de Lorraine,
oncles de ce roi enfant, par sa femme,
furent mis à la tête du gouvernement ,
pour réprimer les calvinistes qui mena-
çaient le royaume d'une entière subver-
sion." Antoine de Bourbon , roi de Na-
varre , et Louis , son frère , prince de
Condé, fâchés de n'avoir point de part
à l'administration , résolurent de secouer
le joug. Ils se joignirent aux calvinistes
pour détruire les Guises , protecteurs
des catholiques. L'ambition fut la cause
de cette guerre , la religion , le prétexte,
et la conspiration d'Amboise le premier
signal. Cette conspiration éclata au mois
de mars 1560. Le prince de Condé en
était l'âme invisible, et La Renaudie le
conducteur. Celui-ci s'étant ouvert à
Avenelles , avocat de Paris , la plus gran-
de partie des conjurés est arrêtée , et ili
sont exécutés. La Renaudie fut tué en
combattant , et plusieurs autres périrent
comme lui les armes à la main. La con-
spiration découverte et punie, le pouvoir
des Guises n'en fut que plus grand. Ils
firent donner un édit à Romorantin , par
lequel la connaissance du crime d'hérésie
était renvoyée aux évêques et interdite
aux parlemens. Ce fut le chancelier de
l'hôpital lui-même, quoique très favo-
rable aux protestans qui dressa cet édit ;
édit raisonnable et assorti à la nature des
délits , puisque les évêques sont les vrais
juges de la doctrine. On défendit aux
calvinistes de tenir des assemblées. On
créa dans chaque parlement une chambre j
qui ne connaissait que de ces cas-là , et
qu'on appelait la Chambre ardente.
prince de Condé , chef du parti calvi-
niste, fut arrêté , condamné à perdre la
tête , et allait finir par la main du bour-
reau, lorsque François H, malade depui&|
long-temps et infirme dès son enfance,
mourut à 1 7 ans , le 5 décembre 1 560
d'un abcès qu'il avait à la tête, et doi
l'humeur ne put entièrement couler pal
son oreille. Quelques auteurs rapportent)
que cet accident devint mortel par U
FRA
poison que le chirurgien , qui était hu-
guenot, mtMa parmi les remèdes, pour
délivrer son parti de la crainte que lui
inspirait la sévérité indispensable des
lois de François II ( voyez les Mémoires
de Castelnau, avec les notes de Jean le
Laboureur).
FRA^ÇOIS DE France, duc d'Alen-
çon, d'Anjou et de Brabant, et frère de
François H, Charles IX et Henri III, né
en 1 554 , se mit à la tête des mécontens
lorsque son frère Henri HI monta sur le
trône. Catherine de Médicis , sa mère , le
fil arrêter ; mais le roi le remit en liberté.
Il en profita pour exciter de nouveaux
troubles. En 1 575 , il se mit à la tête des
Reistres, parce qu'on lui avait refusé la
lieutcnance générale du royaume. On
l'apaisa ; mais quelque temps après
ayant été appelé par les confédérés des
Pays-Bas , il alla les commander malgré
son frère , et se rendit maître de quel-
ques places. Il revint en France, et re-
passa ensuite dans les Pays-Bas, dont il
fut reconnu prince. Il signala son cou-
rage contre le duc de Parme qui assiégeait
Cambray , et se rendit maître de Cateau-
Cambresis en 1581. Il passa la même an-
née en Angleterre pourconclure son ma-
riage avec Elizabelh, qui le joua , et qui
ne voulut pas s'unir avec lui , malgré
l'anneau qu'elle lui avait donné pour
gage de sa foi. De retour dans les Pays-
Bas , il fut couronné duc de Brabant à
Anvers , et comte de Flandre à Gand , en
1582 ; mais l'année suivante ayant voulu
asservir le pays dont il n'était que le dé-
fenseur , et se rendre maître d'Anvers , il
y fut entièrement défait et obligé de re-
tourner en France. Il y mourut de phtisie
en 1584, à 29 ans, sans avoir été marié,
regardé comme un prince léger, bizarre,
qui mêlait les plus grands défauts à quel-
ques bonnes qualités.
FRANÇOIS DE Bourbon, comte de
Saint-Pol et de Chaumont , né en 1491 ,
de François , comte de Vendôme , signala
son courage à la bataille de Marignan en
1515. Le brave Bayard, ayant fait cheva-
lier François I après cette journée, ac-
corda le même honneur à François de
Bourbon. Ce général secourut Mézières as-
FRA 463
siégé parles troupes impériales en 1521 ,
prit Mouzon et Bapaume, et battit les
Anglais au combat de Pas. A la bataille
de Pavie en 1525 , il fut du nombre des
généraux prisonniers. Il se sauva, et fut
repris en 1528 par Antoine de Lève, qui
le surprit à Landriano , à 5 lieues de Mi-
lan. Les Lansquenets et les Italiens l'a-
vaient abandonné dans ce péril , et sa ca-
valerie s'était sauvée à Pavie avec l'avant-
garde. Il mourut à Cotignan , près de
Reims, en 1545,
FRANÇOIS DE BoDKBON , duc de
Montpensier, de Châtelleraut , prince de
Dombes, dauphin d'Auvergne, fils de
Louis de Bourbon H du nom , donna des
preuves de sa valeur au siège de Rouen
en 15C2, aux batailles de Jarnac et de
Montcontour en 1569, et au massacre
d'Anvers en 1572. Henri III le fit cheva-
lier de ses ordres , et l'envoya en Angle-
terre. Après la mort de ce monarque , il
fut un des plus fidèles sujets de Henri IV,
et un de ses plus braves généraux. Il se
distingua à Arques et à Ivri en 1 590. Il
mourut à Lisieux en 1 592 , à 50 ans ,
après avoir soumis Avranche au roi et
lui avoir rendu d'autres services non
moins importans.
FRANÇOIS DE Bourbon , comte d'En-
ghien , gouverneur de Hainaut , de Pié-
mont et de Languedoc , naquit au châ-
teau de La Fère , de Charles de Bourbon,
duc de Vendôme. Son courage se déve-
loppa de bonne heure. François I lui con-
fia en 1-543 la conduite d'une armée,
avec laquelle il se rendit maître de JN'ice,
s'avança dans le Piémont , prit Crescen-
tin , Dezance , et remporta la victoire de
Cérisoles , le lundi de la fête de Pâques
de 1544. Il s'empara ensuite du Jlontfer-
rat, à l'exception de Casai. L'année d'a-
près, ce prince, jouant avec de jeunes
seigneurs à défendre un fort de neige, y
fut tué, en 1545, à 27 ans.
FRANÇOIS DE Lorraine, duc de Guise
et d'Aumale , fils aîné de Claude de Lor-
raine , duc dé Guise , né au château de
Bar en 1519, reçut au siège de Boulogne
en 1545, une blessure qui , suivant quel-
ques auteurs , le fit appeler le Balafré ^
quoique ce surnom semble n'appartenir
464 FRA
qu'à Henri de Guise. Son courage se
montra d'une manière plus éclatante en
1553 à Metz , qu'il défendit vaillamment
contre Charles-Quint. Les troupes de
l'empereur, engourdies par le froid,
laissèrent plusieurs soldats après elles.
Le duc de Guise , loin de les faire assom-
mer, comme faisaient quelques généraux
de ces temps malheureux , les reçut avec
humanité. Autant sa valeur avait paru
durant le siège, autant sa générosité
éclata-t-elle après. Plusieurs autres avan-
tages en Flandre et en Italie firent pro-
poser à quelques-uns de le faire vice-roi
de la France ; mais ce titre paraissant
trop dangereux dans un sujet puissant et
belliqueux , on se contenta de lui donner
celui de lieutenant-général des armées
du roi au dedans et au dehors. Les mal-
heurs de la France cessèrent dès qu'il
fut à la tête des troupes. En huit jours il
prit Calais et tout son territoire , au mi-
lieu de l'hiver. Il chassa pour toujours
de celte ville les Anglais, qui l'avaient
possédée 210 ans. Celte conquête, suivie
de celle de Thionville, prise sur les Es-
pagnols , mit le duc de Guise au dessus
de tous les capitaines de son temps. Il
prouva que le bonheur ou le malheur des
états dépend souvent d'un seul homme.
Maître de la France sous Henri II , il le
fut encore sous François IL La conspira-
tion d'Amboisc , tramée par les protes-
tans pour le perdre , ne fit qu'augmenter
son crédit. Le parlement lui donna le
titre de Conservateur de la patrie. Son
autorité était telle , qu'il recevait assis et
couvert , Antoine , roi de Kavarre , qui
se tenait debout et tête nue. Après la
mort de François H , cette autorité baissa,
mais sans être entièrement abattue. Des
lors se formèrent les partis des Condé et
des Guise. Du côté de ceux-ci étaient le
connétable de Montmorenci et le maré-
chal de Saint-André , de l'autre étaient
les protestans et les Coligni. Le duc de
Guise, zélé catholique , ctl'àme du parti
opposé aux protestans, avait résolu de
maintenir l'ancienne religion dans son
éclat. Passant auprès de Vassi , sur les
frontières de la Champagne , il trouva des
calvinistes qui chantaient les psaumes de
FRA
Marot dans une grange. Ses domestiques
prirent querelle avec eux. On en vint
aux mains; et il y eut près de soixante
de ces malheureux tués et deux cents de
blessés. Cet événement imprévu , que
les protestans appellent le massacre de
Fassi , alluma la guerre civile dans tout
le royaume. Le duc de Guise prit Ilouen,
Bourges , et gagna la bataille de Dreux
en 1562. Il fut alors au comble de sa
gloire. Vainqueur partout oii il s'était
trouvé , il était chéri des catholiques et
le maître de la cour , affable, généreux ,
et en tout sens le premier homme de
l'état. Il se préparait à assiéger Orléans,
le centre de la faction protestante et leur
place d'armes , lorsqu'il fut tué d'uu
coup de pistolet en 1503 par Poltrot de
Méré, gentilhomme huguenot. Les calvi-
nistes qui, sous François II et Henri II,
n'avaient su que prier , et souffrir ce
qu'ils appelaient le martyre , étaient de-
venus , dit un historien , des enthousias-
tes furieux. Ils ne lisaient plus l'Ecriture,
que pour y chercher des exemples d'as-
sassinats. Poltrot se crut un Aod, envoyé
de Dieu pour tuer un chef philistin. Le
parti , aussi fanatique que lui , fit des
vers en son honneur j et il reste encore
des estampes avec des inscriptions qui
élèvent son meurtre jusqu'au ciel, quoi-
que ce ne fût que le crime d'un furieux
aussi lâche qu'imbécile. Yalincour a écrit
]sivie de François de Guise, in-12. Il
parut, en 1576, une satire sanglante
contre lui , le cardinal son frère et les
autres Guise , sous le titre de Légende de
Charles, cardinal de Lorraine, etc.^
par François de l'Ile , in-8. On la trouve
dans le tome 6 des Mémoires de Condé ,
in-4. Le nom de l'auteur est supposé ; on
la croit de Régnier de La Planche. Aiu
traits flétrissans que renferme cette sa-
tire , nous substituerons ceux-ci ; ils font
trop d'honneur à ce héros , pour les
laisser dans l'oubli. Un jour qu'il visi-
tait son camp , le baron de Lunebourg,
un des principaux chefs des Reistres,
trouva mauvais qu'il voulût examiner sa
troupe, et s'emporta jusqu'à lui présenter
le bout de son pistolet. Le duc de Guise
tira froidement l'épée , éloigna le pisto-
PRA
Ict et le fit tomber. Montpezal , lielile-
nant des gardes de ce prince , choqué de
l'insolence de i'of&cier allemand , allait
lui ôter la vie , lorsque Guise lui crie :
» Arrêtez , Moutpezat , vous ne savez pas
» mieux, tuer un homme que moi. » Et se
tournant vers l'emporté Lunebourg :
» Je te pardonne, lui dit-il , l'injure que
î) tu m'as faite ; il n'a tenu qu'à moi de
» m'en venger. Mais pour celle que tu as
>) faite au roi , dont je représente ici la
» personne , c'est à lui d'en faire la jus-
» tice qu'il lui plaira. » Aussitôt il l'en-
voya en prison , et acheva de visiter le
camp, sans que les Reistres osassent mur-
murer, quoiqu'ils fussent naturellement
séditieux On avait averti le duc de
Guise qu'un gentilhomme huguenot était
venu dans son camp à dessein de le tuer ;
il le fit arrêter. Ce protestant lui avoua
sa résolution. Alors le duc lui demanda :
« Est-ce à cause de quelque déplaisir que
>' tu aies reçu de moi ? — Non, lui ré-
» pondit le protestant, c'estparce que vous
j» êtes le plus grand ennemi de ma reli-
» gion. — Eh bien ! répliqua Guise , si ta
» religion te porte à m'assassiner , la
)) mienne veut que je te pardonne , » et
il le renvoya. Le duc de Guise avait une
intrépidité que les héros les plus fameux
traiteraient d'imprudence. On lui montra
un jour un homme qui s'était vanté de
le tuer ; il le fit venir , le regarda entre
deux yeux, et lui trouvant un air embar-
rassé et timide : « Cet homme-là , dit-il
» en levant les épaules, ne me tuera ja-
» mais ; ce n'est pas la peine de l'arrê-
» ter. »
'FRANÇOIS (Dom Claude et dom Phi-
lippe ) , qu'on réunit dans le même arti-
cle pour éviter les redites , appartenaient
tous deux à la congrégation de Saint-
Vannes. Dom Claude, né à Paris en 1559,
fut envoyé , après avoir fait sa profes-
sion , au Mont-Cassin, pour y étudier les
réglemens sur lesquels la congrégation
de Saint A'annes , encore au berceau ,
voulait se modeler. Dom Claude revint
avec une constitution qu'il avait rédi-
gée , et fut nommé président de la con-
grégation. Il trouva , après quelques
années d'expérience, que l'article des con-
V.
FRA 465
stitutions qui statue la vacance de la
supériorité après le terme de cinq ans ,
sans que le supérieur pût être continué,
offrait des inconvéniens. Les autres su-
périeurs , et particulièrement dom Phi-
lippe , ne partagèrent pas son opinion ;
on écrivit de part et d'autre , mais sans
se convaincre mutuellement. Eu 1630,
le pape mit fin à la dispute en permettant
de continuer le supérieur au-delà de cinq
ans , lorsque le bien de la congrégation
le demanderait. L'union entre les deux
confrères ne souffrit pas de cette dissen-
sion , et dom Claude , après avoir rendu
de grands services à la congrégation , et
en avoir été douze fois président , mou-
rut à l'abbaye de Saint-Michel , le 1 0 août
ï G32. — François ( Dom Philippe ) , dont
le véritable nom était Philippe Colard,
naquit à Lunéviile en 1579. Il était à
peine âgé de 10 ans lorsque son parent
Lignarius, abbé de Sénones, le prit dans
son monastère dans l'intention d'en faire
son coadjuteur. Il prit l'habit de Sainl-
Benoît, et lorsqu'il eut fait profession,
il alla faire ses cours de philosophie et
de théologie à l'université de Ponl-à-
Mousson. Il y étudia aussi la langue
grecque, et avec tant de succès, que dès
ce moment il s'en servit habituellement
pour correspondre avec son père , qui
était très versé dans cette langue. Dési-
rant entrer dans un monastère où. la ré-
forme fût en vigueur , il quitta secrète-
ment, en 1603, Sénones, malgré les avan-
tages qui devaient l'y retenir, et se
rendit à Saint- Vannes , oîi il fit profes-
sion l'année suivante , après avoir ensei-;
gué la philosophie et la théologie à Saint-
Michel , où le cardinal de Lorraine avait
introduit la réforme. Rappelé à Saint-
Vannes , il y fut mis à la tête du novi-
ciat. En 1609, ii fut nommé visiteur,
et, trois ans après, prieur de l'abbaye
de Saint-Airy de Verdun , dont il devint
abbé. En 1622 , il fut élu président de la
congrégation. Il mourut à Saint-Airy, le
27 mars 1637 , après avoir fait rebâtir l'é-
glise de cette abbaye , et l'avoir enrichie
de beaucoup de choses précieuses. C'é-
tait un religieux plein de zèle et de piété,
et très attaché à la discipline. Marie-Jac-
3o
466 FRA
queline Bouelte tic Blemure , religieuse
bénédictine, a écrit sa Fie , insérée dans
le 2^ volume des Hommes illustres de
l'ordre de Saint-Benoît. Dom Philippe
écrivit plusieurs ouvrages au sujet de
son diflerend avec dom Claude. On a en
outre de lui : 1" Trésor de perfection
tire' des épitres et c'vangiles qui se li-
sent à la messe pendant Vannée , Paris ,
IG 15, 4 vol. in- 12 ; 2° Le Guide spiri-
tuel pour les novices , Paris , 1 G 1 6 , in-1 2 ;
3° Le Noviciat des bénédictins , avec un
traité de la mort précieuse des bénédic-
tins, in-12; 4° Renouvellement spiri-
tuel nécessaire aux bénédictins ; 5° La
Règle de Saint-Benoit , traduite avec
des considérations , Paris, 1613et 1G20;
6° Occupation journalière des religieux;
7" Enseignement tiré de la règle ; %"
Courte explication de ce qui se dit dans
ï office divin , contenant le sens littéral
et mystique de chaque psaume , avec
des affections; 9" Les Exercices des
novices. Ils ont été traduits en latin , et
étaient en usage dans presque toutes les
congrégations de bénédictins.
FRANÇOIS ou Franciscus de Victo-
ria , ainsi nommé du lieu de sa naissan-
ce , dominicain , professeur de théologie
à Salamanque, mort en 1549 , est auteur
de plusieurs petits traités de théologie ,
recueillis en un vol. in-8, sous le titre
de Theologicœ prœlcctiones.
FRANÇOIS DE JÉSUS Marie , carme
réformé , natif de Burgos , fut professeur
de théologie à Salamanque et définileur
général de son ordre. Il mourut en 1G77 ,
après avoir publié un Cours de théologie
morale, imprimé à Salamanque, et réim-
primé depuis à Madrid et à Lyon , en 6
vol. in-fol.
FRANÇOIS ROMAIN , dit leYrère
Romain , de l'ordre de Saint-Dominique ,
naquit à Gand en 1G46. Il travailla en
1G84 à la construction d'une arche du
pont de Maëstricht , par ordre des états
4e Hollande. Louis XIV l'appela quelques
années après en France pour achever le
pont-Royal, commencé par 51. Gabriel,
et qu'on désespérait de pouvoir finir. Le
succès de cet ouvrage lui valut les titres
d'inspecteur des ponts et chaussées et
.FRA
d'architecte du roi dans la généralité de
Paris. Il mourut dans cette ville en 173â>
à 89 ans. Il était aussi bon religieux que
grand architecte. Il donnait aux devoirs
de son état tous les momeus qu'il pou-
vait dérober à l'architecture.
FRANÇOIS ( Laurent Le ) , né à Arin-
thod, dans le diocèse de Besançon, le 2
novembre 1G98, passa quelques années
dans la congrégation de la mission , et s'y
distingua par ses talens , qu'il continua
d'employer utilement contre les erreurs
du temps , après en être sorti. Il mourut
à Paris le 24 février 1782 , et lais.sa ses
légataires universels , les pauvres de la
paroisse dans laquelle il était né. Ses
vertus répondaient à son zèle pour la Re-
ligion , dont il pratiquait les devoirs
comme il en défendait les dogmes. Nous
avons de lui : 1° Lettre sur le pouvoir
des démons, in-4. 2° Les Preuves de la
Religion de J. C, 1751, 8 vol. in-12.
3° VExamen du Catéchisme de l'hon-
nête homme , 17G4, 1 vol. in-12. 4" Ré-
ponses aux difficultés proposées contre
la Religion Chrétienne par J. J. Rous-
seau, 1765, in-12. b" Observations sur
la Philosophie de l'Histoire , et le Dic-
tionnaire philosophique , 2 vol. in-8, avec
gravure. Voltaire , dans une épître à d'A-
lembert, traite l'auteur àe pauvre im-
bécille , qui a fait un livre en deux vo-
lumes contre les philosophes , que per-
sonne ne connaît et ne connaîtra. H faut
cependant bien que le livre ait été connu,
puisqu'il a donné tant d'humeur à l'iras-
cible philosophe dont rhonnét« critique
ne trouvait ni esprit , ni jugement chez les
gens qui réfutaient ses erreurs. 6° Exw-
men des faits qui servent de findement
à la religion chrétienne, 1767, 3 vol.
in-12. Les ouvrages non imprimés de cet
auteur, sont la Réfutation du système de
la nature , 4 vol, et Réfutation des trois
imposteurs. Ces ouvrages , sans avoir le
mérite de l'élégance et de la précision ,
ont celui de la clarté, de la simplicité»
de la facilité et de l'onction. Les excel-
lens raisonnemens opposés aux erreurs dit
temps, semblent quelquefois s'aSaiblir
par la prolixité de l'exposition et la mar-
che grave et modeste de l'auteur ; mais
I
1
FRA
pour peu qu'on réfléchisse et qu'on res-
serre l'ensemble , on en saisit toute la
force. Ce savant, comme la plupart des
modernes, s'était laissé enf^ouer de l'im-
portance et de la beauté des maximes des
anciens philosophes grecs et perses; mais
ayant examiné leurs livres de plus près ,
il revint de son erreur. Il s'aperçut que
c'est une ruse de nos philosophes de nous
donnerdes extraits de Zoroastre, de Con-
fucius, et d'autres prétendus saoes de
l'antiquité, pour faire croire que nous
n'avions pas besoin de la religion chré-
tienne , pour avoir une bonne morale :
s'ils donnaient en entier les ouvrages de
ces anciens, ils ne feraient point tant de
dupes : car à côté d'une phrase raisonna-
ble dictée par le bon sens, ils en met-
traient une autre, qui semblerait naître
d'une extravagance consommée. « C'est
» raisonner pauvrement , dit un savant
j) théologien , de dire : telle maxime de
» la loi chrétienne se trouve dans les phi-
)) losophes , telle autre dans les législa-
» teurs : l'une est prêchée à la Chine,
» l'autre en Egypte ou au Japon : celle-ci
w a été connue du temps de Pythagore ,
» celle-là cinq ou six cents ans après,
j) Donc les hommes n'ont pas été mieux
» instruits par Jésus-Christ que par les
» païens. » F^oy. Collius , Confucios ,
EpictÈte, Zenon, etc.
FRANÇOIS ( Jean-Charles ), graveur
des dessins du cabinet du roi , naquit à
Nancy en 1717 d'une famille honnête. Il
commença par graver la vaisselle ; mais
il était né pour un travail bien supérieur
à celui-là. Après avoir perfectionné son
talent pour la taille-douce à Lyon, il
vint à Paris et y trouva des protcclcurs.
C'est dans cette ville qu'il inventa , dit-
on , la gravure en dessin , que d'autres
attribuent à Demarteau ( Voxjez ce nom).
C'est une gravure qui imite le dessin au
crayon, au point de faire illusion. Quoi-
qu'elle n'ait rien de flatteur à l'œil , elle
peut servir pour mettre sous les yeux
des élèves d'excellens modèles à étudier
et à copier. Cette découverte , qu'on lui
a disputée, lui valut une pension de GOO
liv. et le titre de graveur des dessins du
cabinet du roi. Les persécutions que l'en-
FRA 467
vie lui suscita hâtèrent sa mort , arrivée
en 1769. C'était un homme simple, plus
occupé de son travail que de ses succès.
Ses principaux ouvrages sont : 1° un
livre à dessiner. 2° Le recueil des châ-
teaux que le roi de Pologne occupait en
Lorraine , graves par ordre de ce monar-
que. 3° Le corps de garde , d'après Van-
loo. \° La Ficrgc, d'après Vien. 5" Les
portraits qui accompagnent l'Histoire
Mes philosophes modernes de Saverien,
Une marche de cavalerie , d'après Parro-
cel, supérieurement gravée. 1° Le por-
trait de M. Quesnajj , estampe unique ,
dans laquelle la taille-douce , le burin ,
la manière noire du crayon , toutes les
façons de graver sont réunies.
* FRANÇOIS ( Dom Jean ) , savant
bénédictin de la congrégation de St.-
Vannes, né le 26 janvier 1722 , à Acre-
mont , village près de Bouillon , y mourut
le 22 avril 1791. Il avait pris l'habit de
son ordre à l'abbaye de Beaulieu en Ar-
gone , et y prononça ses vœux à l'âge de
1 7 ans. Après avoir enseigné la théologie
et occupé plusieurs emplois supérieurs
de sa congrégation il devint successive-
ment prieur de l'abbaye de St.-Arnould;
et de St.-Clément, dans la ville de Metz.
A l'époque de la révolution, il se retira
dans le hameau qui l'avait vu naître. On
lui doit 1° une Histoire de Metz, 17 79
et années suivantes , 4 vol. in-4. 2" Dic-
tionnaire roman , wallon , celtique et
tudesque, pour servir à l'intelligence
des anciennes lois et contrats , Bouillon,
1777, in-4. 3" Bibliothèque ge'ne'rnle des
e'crivains de l'ordre de St. -Benoît , pa-
triarche des moines d^Occident, conte-
nant une notice exacte des ouvrages de
tout genre , composés par les religieux,
des diverses branches , filiations et re-
formes, Bouillon , 1777 , 4 vol. in-4. — ■
Il y a eu plusieurs autres bénédictins cé-
lèbres, du même nom et de la même
congrégation, entre autres dom Claude
Fraïsçois , né à Paris vers 1 559 , et mort
dans l'abbaye de St. -Michel , le 1 0 août
1632 , qui fut un des premiers religieux
de la réforme, et un de ceux qui contri-
buèrent le plus à son établissement , et
qui fut douze fois président de la congre-
468 FRA
gation ; — Dom Philippe François , ne k
Lunéville en 1579, auteur de plusieurs
ouvrages ascétiques fort en usage dans
presque toutes les maisons de son ordre :
le Guide spirituel pour les novices ;
les Exercices des novices ; le Noviciat
des be'nédictins ; la Règle de S t. -Benoît ;
V Occupation journalière des religieux ;
Enseignement tire' de la règle , etc.
* FRANÇOIS ( Louis-Jean) , supérieur
prêtre de la congrégation de St. -Lazare,
massacré le 3 septembre 1*92 , dans son
séminaire qui avait été converti en prison.
11 a publié plusieurs écrits , où il manifes-
tait son opposition aux principes des no-
vateurs , savoir : Opinion sur les biens
eccle'siastiques ; Point de de'mission ;
Jie'ponse à M. Camus, oii il vengeait
l'orthodoxie et la régularité des brefs de
Pie YI , relatifs à la constitution civile du
cierge'; trois lettres sur la juridiction épi-
scopalc, en réfutation des écrits schisma-
tiques de Gratien, usurpateur du siège
métropolitain de Rouen ; Mon apologie ;
excellent ouvrage , où il démontrait qu'on
ne pouvait prêter le serment, sans embras-
ser l'hérésie et créer un schisme ; Apologie
du veto, apposé par le roi au décret
concernant la déportation des prêtres,
FRANÇOIS, sculpteur. Foyez Ques-
Kov ( François du).
FRANÇOIS SONNIUS. Voyez So:«-
MIUS.
• FRANÇOIS DE Nkufchatkau (Nico-
las-Louis, le comte), littérateur et homme
d'état, né à Neufchâtcau en Lorraine le
17 avril 1750, d'un père qui était maître
d'école et recteur des traites foraines , se
distingua dans les premières études qu'il
ât chez les jésuites de son lieu natal. Ses
progrès furent même si rapides et si
brillans qu'à l'âge de 1 3 ans , il publia
un recueil de poésies qui lui ouvrit deux
ans après, en 1765, les portes de l'acadé-
mie de Dijon, et en 1767 celles de Lyon
et de Marseille. En 1766 il avait ajouté à
son nom de François, qui est très commun
dans son pays, celui de Neufchâteau qu'il
fut autorisé à conserver par un arrêt du
parlement de Nancy de l'an 1777. En
17 76 il acheta la charge de lieutenant-
général au bailliage de Mirecourt. On dit ,
FRA
mais rien n'est moins prouvé , qu'après
avoir terminé ses études de droit , il avait
obtenu des dispenses d'âge pour être
admis en qualité d'avocat au parlement
de Reims , mais qu'il fut rayé bientôt
après de la liste des avocats, parce qu'il
avait reconnu l'enfant naturel d'un homme
de la plus haute naissance, ou selon d'au-
tres, parce qu'il avait épousé la nièce de
l'acteur Prévîlle , le Roscius de ce temps
et que ce ne fut qu'ensuite qu'il acheta
sa charge de lieutenant-général. Cequ'ily
a de bien certain et ce que nous pouvons
affirmer, c'est qu'il épousa réellement M"*
Dubus, nièce de Préville, que cette union
fut de comte durée, et qu'il s'unit plus
tard avec une dame de Mirecoutt. François
de Neufchâteau toujours adonné à la
poésie qu'il cultivait avec passion , fut
nommé subdélégué de l'intendant de
Lorraine eu 1781 , et l'année suivante
procureur-général du roi au conseil sou-
verain du cap français dans l'île de St.-
Domingue ; nous ne pensons point qu'il
eut obtenu cette place, s'il eût encourru,
comme on le dit, la dégradation que
quelques biographes lui reprochent. De
retour en France après la suppression de
son emploi , il perdit dans la traversée
ses précieux manuscrits, parmi lesquels
se trouvait une traduction de Roland
le furieux qu'il regretta toujours. Le roi
lui conféra en 17 88 le titre de conseiller
honoraire au conseil supérieur de St.-Do-
mingue. Dèslorë François de Neufchâteau
se livra exclusivement à son goût pour les
lettres. Cependant il fut détourné de ses
occupations par les événemens de la révo-
lution dont il embrassa tes principes avec
ardeur. Ce fut lui qui provoqua à Toul
en 1 7 90 un rassemblement qui fut regardé
comme séditieux : arrêté par ordre du
lieutenant du roi , il ne tarda pas à être
remis en liberté. Peu de temps après ,
il fut nommé successivement juge de
paix du canton de Vicherey , administra-
teur du dépaitement des Vosges, et enfîa
député à l'Assemblée législative. Elu
secrétaire de cette assemblée, le 3 octobre^
1791 , puis président le 26 décembre, il,
se montra pendant toute la session par-
tisau des idées révolutionnaires , parla
I
FRA
contre les prêtres non assermentés , pro-
posa contre eux des mesures violentes ,
et vota la vente des biens nationaux par
petits lots, afin que l'intérêt attachât le
peuple à la cause de la révolution. Elu
membre de Ja Convention , il n'accepta
point celte dcputation : mais la Conven-
tion le nomma ministre de la justice ,
place qu'il refusa pour cause de santé.
Toutefois il se chargea des fonctions depré-
sidcnt de l'administration départementale
des Vosges. Il avait fait représenter en
1703 sur le Théâtre Français la pièce inti-
tulée Paméla ou la vertu récampcnsce :
quoique cette imitation de Goldoni soit
assez froide , elle eut quelque succès :
mais le parti révolutionnaire crut y voir
des principes contraires à ses opinions :
l'auteur mis en prison comme suspect de
royalisme ne recouvra sa liberté qu'après
le 9 thermidor. Alors il fut nommé juge
au tribunal de cassation , puis commis-
saire du Directoire de l'administration
centrale du département des Vosges. Le
16 juillet 1797, il remplaça Benezech
au ministère de l'intérieur, et, après le
18 fructidor, il arriva au Directoire oîi il
succéda à Carnot. Après avoir participé
au pouvoir suprême seulement jusqu'au
9 mai 1798 , il reprit le portefeuille de
l'intérieur qu'il conserva jusqu'en 1799 ,
époque où il eut Quinette pour succes-
seur. Pendant son second ministère ,
Neufchâleau fut en butte à bien des ac-
cusations : d'abord , à la suite d'une in-
struction dans laquelle il recommandait
de poursuivre les royalistes et les terro-
ristes , on lui reprocha au conseil des
Anciens et à celui des Cinq cents d'avoir
porté atteinte à la souveraineté du peuple.
Quelque temps après on lui reprocha
encore de corrompre l'esprit public en
faisant représenter des pièces anti civi-
ques, et d'employer même à cet eifet les
fonds de son département. Il ne remplis-
sait aucune fonction , lorsque la journée
du 18 brumaire vint créer des consuls
à la place des directeurs. Nommé ensuite
sénateur , grand officier de la Légion
d'honneur ( 1804 ) , grand cordon du
même ordre , comte de l'empire , secré-
taire du Sénat, président annuel du même
FRA 469
corps , il fut chargé dans plusieurs cir-
constances de complimenter Buonaparte.
Lorsque celui-ci prit la couronne, Ncufchâ-
teau lui adressa un discours dans lequel
on remarqua ces paroles qui le terminè-
rent : que Dieu protégeait la France ,
puisqu'il^ avait cvéé Buonaparte pour
elle. « Soyez long-temps vous-même , lui
» dit-il, vous n'aurez point eu de modèle ,
» et vous en servirez toujours. » Sans
être les admirateurs passionnés du grand
homme qui tint en main pendant quelque
temps les rênes de la France , nous di-
rons qu'il y avait quelque chose de vrai
dans les phrases emphatiques de Neufchâ-
teau : la forme exagérée dont il se servit
prêta seule au ridicule , et d'ailleurs les
esprits n'avaient point encore mesuré
toute la portée du génie qui présidait aux
destinées de notre pays; et c'est nous,
pour qui ce règne est déjà de l'histoire,
qui pouvons mieux qu'on ne le faisait il
y a 15 ou 20 ans, juger ce grand per-
sonnage dont la vie ne fut pas exempte
de fautes ni même de crimes , mais qui
connaissait nu suprême degré l'art du pou-
voir et le talent de rétablir l'ordre. Foyez
l'article Buonaparte. Xe reprochons donc
point avec trop d'amertume les louanges
que Neufchâteau accorda , non au vain-
queur de tant de peuples qu'il poursui-
vait de sa haine ou de son ambition , mais
au grand homme qui écrasa la révolu-
tion , fit succéder l'ordre à l'anarchie, et
permit enfin que les hommes religieux
pussent adresser au ciel leurs communes
prières. Désigné dans le mois de novem-
bre 1806 pour féliciter Buonaparte sur
ses nouvelles vicfoires en Prusse , il fut
de la députation qui rapporta à Paris 340
drapeaux enlevés aux Prussiens , avec
l'épée, l'écharpe, le hausse-col et le cor-
don du grand Frédéric , trophées qui fu-
rent long-temps suspendus à la voûte de
l'église des Invalides. Depuis cette époque
jusqu'en 1814, François de Neuchâteau
s'occupa d'agriculture et de poésie. Entiè-
rement oublié par les Bourbons, et même
par Buonaparte pendant les cent jours, il
ne fit partie depuis 1814 d'aucune assem-
blée publique. Pour résumer sa vie publi-
qjie, nous dirons qu'après avoir eu des dis-
470 FIIA
positions précoces et obtenu des places
importantes avant la révolution, il fut par-
tisan des idées révolutionnaires, mais non
un terroriste :quependant son administra-
tion, il protégea les sciences et les arts,
donna l'idée de faire exposer en public les
produits de l'industrie française, et envoya
dans les départemens une foule de livres
qui pouvaient contribuer à1a propagation
de l'instruction. Il fut l'admirateur exa-
géré de Buonaparte, et ses coraplimens
étaient trop souvent fades , à force d'èlre
trop mielleusement préparcs. Comme
littérateur et comme poète il publia in-
dépendamment du recueil de poésies ei
de la pièce de Pamc'la dont nous avons
parlé , une hymne à la liberté qv^W com-
posa en prison , ainsi qu'une /jr/ère à VE-
/re,ÇH/?re/neoiisontexpnmcsd'honorabIes
sentimens. Après la victoire d'Austerlitz,
il fit paraître une Ode a CUo qu'il intitula
les Quatre dynasties ou l'histoire de
France. Membre de la société d'agricul-
ture de Paris , il offrit au roi Louis XVIH
en 1 8 1 4 les Mémoires que cette compa-
gnie avait composés depuis 19 ans. Il
était aussi membre de l'académie fran-
çaise depuis la création de l'institut, et
à plusieurs reprises il a fait des lectu-
res intéressantes dans le sein de ce corps
savant. Après avoir consacré toute sa vie
à l'étude et à l'administration , il mourut
le 8 janvier 1828. Le catalogue de ses
productions se compose des ouvrages
suivans que nous donnons dans l'ordre
chronologique de leurs publications :
i" Poésies diverses, 17C5, in-12 ; 2"
Pièces fugitives de François de Neuf-
château , 176G, in-12-, 3'' Ode sur les
parlemens , 1771 , in-8 ; 4" le Mois
il' Auguste , épître à Foliaire , 1 7 7 4 ;
S° Discours sur la manière de lire les
vers, 1775, in-12; 6" Anthologie mo-
rale, 1784, in-16; V Recueilauthentigue
des anciennes ordonnances de Lorraine ,
J 784 , 2 vol. in-8 ; 8° les Etudes du ma-
gistrat au Cap-Français , 178C ; 9° l'Ori-
gine ancienne des principes modernes
ou les décrets constitutionnels conférés
avec les maximes des sages de l'anti-
quité, 1791 , in-8 ; 10" les Lectures du
citoyen, 1792 ; 11° Paméla, comédie en
FRA
i actes et en vers , 1793 , in-8 ; 12"» des
Améliorations dont la paix d^it être
l'époque, 1797 , in-8 ; 13" /<?^ Vosges ,
poème, 1796, in '8 , édition 1797; 14»
l'Institution des en fans ou Conseils d'fin
père à son fils , imités des vers latins de
Muret , 1798 , in-8 ; 15° Méthode pra-
tique de lecture, 1 799 , in-8 ; 16° le Con-
servateur ou Recueil de morceaux choisis
d'histoire , de politique , de littérature
et de philosophie , 1800, 2 vol. in-8 j
1 7° Lettres si.r le Robinier, 1 803 , in- 1 2 ;
1 8° Tableau des mces que se propose la
politique anglaise dans toutes les parties
du monde, 1804, in-8 ; 19° Histoire de
l'occupation de ta Bavière par les Autri-
chiens , en 1778 et 1779, etc., 1806,
in-8 ; 20" Foyage agronomique dans la
sénatorerie de Dijon, 1806, in-4 ; 21**
VArt de multiplier les grains , 1810,
in-8 ; 22° Fables et Contes en vers ,
suivis des poèmes de la Lupiade et de la
Fulpéide, 181 4 , 2 vol. in-12 ; 23" Let-
tre à M. Suard sitr sa nouvelle édition
de la traduction de l'histoire de Charles-
Quint et sur quelques oublis de Robert-
son , 1817, in-8; 24° Supplément au
mémoire de M. Parmentier sur le maïs ,
1817, in-8 ; 25° les Tropes ou les figures
de mots , poème en 4 chants ; 26° les
Trois nuits d'un Goutteux , poème en
trois chants , 1819, in-8 ; 27" Esprit du
grand Corneille ou Extrait raisonné de
ceux des ouvrages de P. Corneille qui
ne font pas partie du recueil de ses
chefs-d'œuvre, 1819, in-S , formant le
tom. 45 de la Collection des meilleurs
ouvrages de la langue française ; 28"
fine nouvelle édition des Lettres pro-
vinciales, augmentée, 1822 , 2 vol. in 8 ;
29° Examen de la question de savoir si
T^esage est l'auteur de Gilblas ou s'il la
pris de l'espagnol, imprimé dans une
nouvelle édition de Gilblas , 1 820 , 3 vol.
in-8 ; 30^ Introduction aux Pensées de
Biaise Pascal , en tète d'une édition de
cet ouvrage, 1821 , in-8; 31° l'Lisfitu-
iion des cnfans , nouvelle édition , 1824-
1828 , in-8 et in-12 ; 32" Mémoires sur
la manière d'enseigner et d'étudier l'agri-
culture , etc. ( en 1801 , à la sociélé
d'agriculture delà Seine ), 1828 ,broch.
FRA
in-8. Il coopéra au Dictionnaire d'agri-
■culture pratique, 1828, 2 vol. in-8;
l'introduction est de François de Neuf-
château. Il a composé en outre plusieurs
Rapports , Lettres , Mémoires et autres
pièces insérées dans divers journaux. Un
anonyme a publié : Essai historique sur
la vifi et les c'crits de François de Ncuf-
château, entremêle' de quelques conseils
qiion lui adressa sur son ministère ,
1799, in-8.
FRANÇOISE (Sainte) , dame romaine,
née en 1384 , également respectable par
sa piété et sa charité, mariée dès l'âge
de 1 2 ans à Laurent Ponziani , morte en
1440, à 5G ans, fonda en 1425 le monas-
tère des Oblales , appelées aussi Colla-
Unes, à cause du quartier de Rome, où
elles furent transférées en 1463. «A toutes
» les vertus de la femme forte , dit un
i> hagiographe, à la prévoyance, à l'ac-
« tivité , au courage, elle joignait dans
» un degré rare toutes celles que le
» christianisme a portées si haut , la dou-
» ceur, la charité, la patience, l'humi-
» lité. On voyait cette dame illustre por-
» ter sur ses épaules ce qui était néces-
« saire à l'entielien des pauvres et de sa
» communauté , ou conduire à travers la
>i ville l'animal qui porlait ces provi-
« sions. On en raconte des choses fort ex-
» traordinaires, que tant de sainteté rend
» très croyables , indépendamment des
» témoignages sur lesquels elles sont ap-
» puyées. » Paul Y la canonisa ; on fait
sa fêle le 9 mars.
FRANÇOISE, femme de Pierre II,
duc de Bretagne, fille de Louis d'Am-
boise , vicomte de Thouars , naquit en
1 427 . Elle eut beaucoup à souffrir de l'hu-
meur sombre et chagrine de son mari ,
qui en vint jusqu'à la frapper : outrage ,
dont elle fut si affligée qu'elle en tomba
malade. Le duc la voyant à l'extrémité
lui demanda pardon , et vécut depuis avec
elle dans une grande union. Elle fut sa
principale garde dans tout le temps de
sa maladie ; mais ni ses prières , ni ses
soins n'empêchèrent point qu'il ne mou-
rût. Il dit avant d'expirer « qu'il laissait
j» son épouse aussi pure, qu'il l'avait re-
» çue. » Les parcQs de cette princesse ,
FRÀ
47 É
et le roi Louis XI , employèrent inutile-
ment les prières , la ruse et la force pour
l'obliger à épouser le duc de Savoie , qui
la désirait ardemment à cause de sa vertu.
Elle se fit carmélite eu 1467 , et mourut
le 26 février 1486 , victime de sa charité.
Elle gagna sa dernière maladie auprès
d'une religieuse, qu'elle secourut jusqu'à
la mort. L'abbé Barrin a écrit sa P^ie ,
Bruxelles, 1704 , in-12.
Î^RANCOLINI (Balthasar) naquit à
Fermo , dans la Marche d'Aucône , ea
1650, se fit jésuite en 1666, enseigna
avec distinction la philosophie et la théo-
logie à Rome, et mourut au collège ro-
main le 10 février 1709, avec la répu-
tation d'un religieux vertueux et savant-
Son livre intitulé Clericus romanus con-
tra nimium rigorem munitus , imprimé
à Rome avec les approbations ordinaires
en 1705 , et ensuite à Munich en 1707 ,
a pour objet de réfuter les reproches des
jansénistes , et surtout du docteur Ar-
nauld , contre la manière dont on admi-
nistre dans l'Eglise le sacrement de péni-
tence.
FRANCOWITZ ( Mathias ) , né à AI-
bona en Illyrie, le 3 mars 1521 , est con-
nu parmi les théologiens protestans sous
le nom de Flaccus Illyricus. Luther eut
en lui un disciple ardent : ce fanatique
s'éleva avec force contre l'intérim de
Charles-Quint , et contre les projets de
pacification. Il eut beaucoup de part à la
composition des centuries de Magde~
bourg [Voyez Judex). Nous avons de
lui \° Le Catalogue des témoinsde la vé-
rité', Francfort, 1672, in-4. ( VoycTi
Eiseingren). 2" Missa latina antiqua^
in-8, Strasbourg, 1557. La rareté de ce
livre l'a rendu très cher. Cette liturgie
contient la foi et les usages anciens de
l'église romaine. Les protestans croyaient
qu'elle serait un témoignage contre les
catholiques ; mais s'étant aperçus qu'elle
fournissait des armes à leurs adversaires ,
ils n'oublièrent rien pour en supprimer
tous les exemplaires; et c'est la cause de
leur rareté. On la trouve cependant en
entier dans les Annales du Père Le Cointe,
et dans les Liturgies du cardinal Bona.
Francowitz a donné un Jj>pendix à sa
t^2 FRA
Missa latina dans son (^dilion de Sulpi-
ce-Sévèrc , Bâle , 1 65C , in-8. On a encore
de lui une foule de Traites violens con-
tre l'église romaine. Il veut y prouver
« que la papauté est une invention du
M diable, et que le pape est un diable
)> lui'-même. » Tous les ouvrages de cet
enthousiaste furieux sont peu communs.
Ceux qui sont curieux de sottises et de
pauvretés peuvent en voir le catalogue
dans le tome 24 des Mémoires de Niccron.
Il mourut à Francfort -sur- le -Mein en
167 5, à 55 ans. (Ritter a publié une no-
tice sur la vie et les ouvrages de Flaccùs
Illyricus, Francfort, 1723 et 1725, in-4.)
FRAKCUS ( Sébastien ) , fameux ana-
baptiste du 16" siècle, publia plusieurs
écrits remplis d'erreurs et de fanatisme.
Les théologiens de la confession d'Augs-
bourg , assemblés à Smalcalde en 1540 ,
chargèrent Mélanchthon de le réfuter.
Francus publia encore un livre très sati-
rique contre les femmes ; il fut réfuté par
Jean Freherus et par Luther , qui se char-
gea volontiers de la cause du sexe.
FRANGIPANI ( François-Christophe,
comte de ) , beau-frère du comte de Serin,
conspira avec lui contre l'empereur Léo-
pold , et fut un des principaux chefs de
la révolte des Hongrois, qui commença
en 1G65. Les points capitaux de l'accusa-
tion formée contre Frangipani , n'étant
que trop prouvés , il fut condamné à avoir
le poing droit coupé et la tête tranchée.
Tous ses biens furent confisqués au profit
de l'empereur, et sa famille dégradée de
noblesse ; l'exécution se fit publiquement
dans la ville de Neustadt , oii il était pri-
sonnier, le 30 avril 1C71. Frangipani
mourut avec beaucoup de résignation et
de constance.
* FRANK ( Jean-Pierre ) , célèbre mé-
decin allemand , né d'une famille origi-
naire de France , à Rodalben , dans le
grand-duché de Bade, le 17 mars 1745.
Il fit ses éludes à Heidelbcrg oii il apprit
l'anatomie et la médecine , puis à Pont-
à-Mousson , oii il reçut le grade de doc-
leur. Après avoir exercé avec distinction
sa profession, en Lorraine, à Bilche, où
il demeura quelque temps, et dans plu-
sieurs autres endroits de l'Europe, le
MA
prince évèque de Spire le nomma son
médecin , et , en 1 7 84 , il obtint la chaire
de médecine à l'université de Goltingue ,
avec le titre de conseiller de cour du roi
d'Angleterre. Etant allé, en 1785, à
Vienne, il y fit de si belles cures que
l'empereur le créa conseiller impérial et
royal du gouvernement , et le nomma
professeur de médecine clinique à l'uni-
versité de Pavie , oîi il succéda au célèbre
Tissot. Ses succès nombreux ayant étendu
au loin sa réputation , l'empereur le rap-
pela à Vienne , et lui confia la direction
du grand hôpital de cette ville , dans l'u-
niversité de laquelle il occupa le même
emploi qu'il avait à Pavie. Sur l'invita-
tion de l'empereur de Russie ( Paul I*'' ) ,
et à la suite de quelques chagrins, il se
rendit à Pétcrsbourg , en 1794. D'abord
professeur de clinique à l'université de
Wilna, il le fut ensuite à celle de Pétcrs-
bourg ; peu de temps après, il reçut le
titre de médecin de l'empereur, ou ar-
chiâtre impérial, avec le grade de géné-
ral-major. Il resta 1 4 ans en Russie. Des
raisons de santé le décidèrent à revenir à
Vienne : avant son départ l'empereur
Alexandre lui donna le brevet d'une pen-
sion de 3,000 roubles par an. Le docteur
Frank est mort dans cette ville , en dé-
cembre 1821 , âgé de 80 ans. Les grains
de santé du docteur Frank ont eu beau-
coup de succès et l'ont fait connaître par-
tout. Il est auteur de plusieurs ouvrages ,
dont les plus importans sont 1" Epistola
invitatoria ad eruditos de communican-
dis qiice ad poUliam medicam spectant ,
principum et legislatorum decretis ,
Manheim, 177G, in-8; 2° Système sur j
la police me'dicale ( en allemand ), ibid. , |
4 vol. in-8 , 1 777 , 1785 ; 3° Plan d'école
clinique , ou Méthode d' enseigner la pra-
tique de la médecine dans un hôpital
académique ( en français ) , Vienne, 1 7 90,
in-8. Le stile de cet ouvrage est peitt
correct : Frank maniait avec plus de su^H
ces les langues allemande et latine, dans
lesquelles son stile peut passer pour clas-
sique. 4** De curandis hominum morbis ,
Manheim , 17 92, 1 807 , G vol, in-8. Il a
laissé aussi un opuscule sur sa vie, et
qui a pour titre : 5" Biograpliie du D
MA
Scan ' Pierre Frank , écrite par lui-
même , etc. Sou fils (Joseph) suit avec
honneur la profession de son père, et est
auteur de plusieurs ouvrages très estimés
sur la médecine.
* FRANKLIN (Eléonore-Anne, plus
connue sous le nom de miss Porden), na-
quit en 1795, et eut pour père William
Porden , architecte. De bonne heure elle
montra du goût pour la littérature et
surtout pour la poésie qu'elle cultiva avec
passion. Dès l'âge de 17 ans elle fit pa-
raître un poème badin intitulé les Voiles,
qu'elle augmenta dans la suite et publia
eu 1815, en six chants. Trois ans après
elle donna un autre petit poème qu'elle
intitula V E xpddition arctique , et qui lui
valut la connaissance du capitaine Trank-
lin , célèbre par les voyages de décou-
verte qu'il a faits dans le nord de l'Amé-
rique. L'admiration que ce marin éprouva
pour le talent de miss Porden et peut-être
aussi la reconnaissance qu'il éprouvait
pour elle , le déterminèrent à demander
sa main, et il l'épousa dans le mois
d'août 1823. Cette union ne fut pas de
longue durée ; M™^ Franklin mourut le
22 février 1825, au moment où son mari
venait de partir pbur son second voyage.
Un an avant son mariage elle avait pu-
blié encore un poème épique sous ce
titre : Cœur-de-Lion ou la troisième
croisade.
FRANKLIN (Benjamin). F.Franck-
un.
FRANTZIUS ou Frantz (Wolfrang),
théologien luthérien , né en 1564 à Pla-
wen dans le Voigtland, devint professeur
en histoire , puis en théologie à Wittem-
berg, où il mourut en 1020. On a de lui
1° Animaliim hisioria sacra, 1G65,
in-12, Dresde, 1687, 2 vol. in-8, ou-
vrage recherché et curieux. 2° Traclaius
de intcrprctatione sacrarum scriptura-
rum, 1634, in-4 , et d'autres ouvrages,
où, si l'on excepte quelques préjugés de
secte, il y a des choses utiles à recueillir.
Le célèbre Schcuchzer a consulté l'His-
toria animalium pour sa Physica sacra.
FRANZ (Joseph), jésuite, naquit à
Linlz en 1703, et fut professeur de phy-
sique expérimentale à l'académie de
V.
PRA 4-73
Vienne , et puis directeur de celle des
langues orientales, fondée en 1754, dans
la même ville , par Marie-Thérèse. Le Père
Franz était généralement estimé , et pour
ses talens , et pour la pureté de ses mœurs.
On a de lui 1° Dissertatio de natura elcc-
iri, Vienne ,1751, in-4 ; 2° Jeu de cartes
géographiques , ibid., 1759. On lui attri-
bue un petit drame intitulé Godefroi de.
Bouillon , représenté par les élèves des
académies des langues orientales, devant
leurs augustes fondateurs, le 1 8 décembre
1757 , Vienne, 1761 , in-8. Les interlo-
cuteurs s'expriment dans les langues tur-
que et française ; cette dernière est écrite
avec une grande pureté. Le Père Franz
est mort le 13 avril 1 776 , trois ans après
la suppression de son ordre.
FRA-PAOLO. Foyez Sarpi (Paul).
FRASSEN ( Claude ) , né près de .Pé-
ronne en Picardie en 1620, définiteur-
général de l'observance de St. -François ,
docteur de Sorbonne et gardien de Paris,
mourut en 1 7 1 1 , dans la 9 1 * année de son
âge. Ce savant religieux avait paru avec
distinction dans le chapitre général de
son ordre, tenu à Tolède en 1682, et
dans celui de Rome en 1688. A l'excep-
tion de ces deux voyages , il vécut tou-
jours dans une exacte retraite. Les prin-
cipaux fruits de ses veilles sont 1° une
Philosophie imprimée plusieurs fois en 2
vol. in-4. 2° Une Théologie, en 4 vol.
iu-folio , Paris, 1672. Elle vaut mieux
que sa Philosophie , qui était bonne ce-
pendant pour son temps : la logique , la
métaphysique et la morale y sont très
bien traités; il y a , comme c'était alors
l'usage , plusieurs questions plus subtiles
qu'importantes , mais qui servent à ren-
dre l'esprit juste ( voyez Duns , Occam ).
3° Disquisitiones biblicœ , Paris ,J682 ,
en 2 vol. in-4 , le premier sur la Bible en
général , le deuxième sur le Pentateuque,
réimprimés avec des augmentations, a.
Lucques, 1764, en 2 vol. in- fol. L'éru- .
dition brille dans cet ouvrage ; mais on
y désirerait plus de méthode et de préci-
sion. On lui reproche d'avoir pillé dans
la Démonstration évangélique de M.
Huet , et d'avoir masqué son larcin d'une
ruse assez commune aux plagiaires. 11
3o..
4^4
VM
critiqua d'une façon peu décente l'illustre
prëlat, à l'instigation de Louis Ferrand ;
mais dans la suite il en demanda pardon
à l'oftensé.
FRATTA ( Jean ) , poète italien d'une
famille noble de Vérone , vivait dans le
16^ siècle : il laissa des c'glogucs , et un
poème héroïque intitulé la Maltéide ,
dont Le Tasse faisait cas. Ce poème fut
imprimé à Venise en 1 596 , in-4 , du
vivant de son auteur.
* FRAUNHOFER ( Joseph) , opticien
célèbre, né à Straubing en 1787 , mort
à Munich en 1 826 , fut obligé pour ac-
quérir l'instruction à laquelle il doit sa
réputation , de vaincre les plus grands ob-
stacles que puisse rencontrer un homme
dans la carrière des sciences. Orphelin à
1 1 ans , attaché dès l'enfance à un travail
manuel , mis en apprentissage chez un
maître très exigeant, il manqua de tous
les secours , même pour apprendre à lire
et à écrire , et pourtant il apprit. Retiré
comme par miracle de dessous les ruines
de la maison qu'il habitait et qui s'était
écroulée subitement, il devint l'objet
d'abord de la curiosité puis de l'intérêt
de plusieurs personnages de mérite ,
parmi lesquels on aime à citer Maximi-
lien-Joseph, roi de Bavière. Ce ne fut
qu'avec discrétion que le jeune Fraun-
hofer usa des secours qu'on lui accorda ,
et on le vit encore le jour dans un atelier
.ses outils à la main , la nuit dans un ca-
binet sans fenêtre où il lui était interdit
d'avoir de la lumière : il vint à bout d'ap-
prendre les mathématiques. A l'âge de
20 ans il fut reçu dans le bel établisse-
ment créé par MM. Reichenbach et Utz-
schneider pour la confection des instru-
mens de mathématiques et d'optique :
dès lors il commença la carrière qu'il a
parcourue avec tant de succès. En 1823
il fut nommé conservateur du cabinet de
physique de l'académie de Munich dont
il était déjà membre. Associé à plusieurs
académies , notamment à VInstitution
astronomique cC Edimbourg et à l' Univcr-
sitt d'Erlnngen , il reçut du roi de Ba-
vière la décoration de l'ordre du mérite
civil , et du roi de Danemark , celle de
l'ordre de Danebrog. Nous terminons en
PRË
disant pour la gloire de Fraunhofer que
le célèbre télescope de l'université de
Dorpat est son ouvrage.
FRAVITA. Voyez Flavita.
FREARD DU CASTEL ( Raoul-
Adrien ) , né à Bayeux , réunissait aux
vertus sociales les qualités d'un homme
de bien. Ses momens de loisir étaient
partagés entre l'étude de la géométrie et
la culture des fleuré. Il mourut en 1766 ,
après avoir donné : 1° EUmens de la
géométrie dEuclide , Paris, 1 7 40, in-1 2 ;
2° V Ecole du jardinier fleuriste , ibid. ,
1T64, in-12. Ces ouvrages sont faible-
ment écrits.
FRÉDEGAIRE, le plus ancien histo-
rien français depuis Grégoire de Tours ,
est appelé le scolastique, parce qu'autre-
fois on honorait de ce nom les hommes
qui se distinguaient par leurs écrits. Il
composa, par ordre de Childebrand frère
de Charles Martel , une chronique , qu'on
trouve dans le recueil des historiens de
France de Duchesne et de Don Bouquet.
Elle va jusqu'en 641. Son stile est bar-
bare ; il manque de construction et d'ar-
rangement. Il coule d'ailleurs trop rapi-
dement sur des événemens intéressans.
Cependant , tout abrégé qu'il est , il faut
absolument recourir à lui pour cette
partie de l'histoire de France. ( Sa Chro-
nique est divisée en 6 livres dont les trois
premiers ne sont qu'une compilation des
chroniques précédemment écrites par Ju-
les-Africain, Eusèbe,saint Jérôme et Idace;
le i" est un abrégé de saint Grégoire de
Tours , et le 5« renferme la continuation
de cette histoire. ) Cet ouvrage a eu des
continuateurs anonymes , qui l'ont con-
duit jusqu'en 768. (Il a été imprimé en
forme d'appendice aux OEuvres de Saint
Grégoire de Tours, Bâle,.1568 et 1610,
in-8 , sous ce titre : Fredegarii Scholas-
tici chronicon quod illc, jubentc Chil-
debrando comité , Pipini régis patruo
scripsit; il a été traduit en français par
l'abbé de Marollcs et M. Guizot ( Col-
lection des historiens de France ). On
peut consulter sur cet ouvrage la disser-
tation d'Adrien de Valois , de Fredegario
ejusque opcribus , la préface de D. Rui"
nart en tête des œuvres de Grégoire
FRE
Tours , r/ùstoire littéraire de France de
D. Rivet, tom. 3 , et ï Apologie de l'his-
toire de Fre'degairc par l'abbé de Vertot ,
insérée au tome 1*"" des Mémoires de
Vacadémie des Inscriptions. )
FRÉDÉGO]NDE,femme de ChilpéricI,
roi de France, née en 543 à Avancourt
en Picardie, d'une famille obscure, entra
d'abord au service d'Audouaire ou Audo-
vère , première femme de ce prince. Elle
employa tout son esprit et toute sa beauté
pour la lui faire répudier. Chilpéric prit
une seconde femme ; Frédégonde la fit as-
sassiner, et obtint le lit et le trône qu'elle
occupait. Ce monstre d'ambition et de
cruauté inspira sou mari , et lui fit com-
mettre une foule de crimes. Il accabla
d'impôts SCS sujets , et fit la guerre à ses
frères. Frédégonde seconda ses armes par
le fer et le poison. Elle fit assassiner
Sigebert, Mérovée, Clovis, Prétextât, etc.
Après la mort de Chilpéric , elle arma
contre Childebert, défit ses troupes en
591 , ravagea la Champagne , et reprit
Paris avec les villes voisines qu'on lui
avait enlevées. Elle mourut en 597 , cou-
verte de gloire par ses succès , et d'op-
probre par ses crimes. Nous parlons , dans
cet article, d'après le plus grand nombre
des historiens. Il y a cependant apparence
que la haine publique exagéra beaucoup
les vices et les maux attribués à Frédé-
gonde. Dreux Duradier a entrepris de la
justifier dans son Histoire anecdotique
des reines et régentes de France, 6 vol.
in-12; mais il a été victorieusement réfuté
par Gaillard, dans le Journal des savans
de janvier nG3 , pag. 13 et suivantes.
Voyez Brunehaut.
FRÉDÉRIC ( Saint ) , évoque d'U-
Irecht, et fils d'un grand seigneur de
Frise , gouverna son diocèse avec zèle ,
et fut martyrisé en 838 pour la défense
de la foi.
EMPEREURS D'ALLEMAGNE.
FRÉDÉRIC I , dit Barberousse , fils
de Frédéric , duc de Souabe , et duc de
Souabe lui-même en 1 1 47 , après la mort
de son père , était né en 1 121 , et obtint
la couronne impériale en 1152, à 31 ans,
^rès Conrad III son oncle. |l avait déjà
FRÉ 475
été avec ce prince en Asie, et avait com-
battu dans les rangs des croisés ( 1147 )•
Il passa en Italie l'an 1155, pour la rece-
voir des mains du pape. Adrien IV le
sacra le 1 1 juin après bien des difficultés
sur le cérémonial. On savait si peu à
Rome ce que c'était que l'empire romain ,
et toutes les prétentions étaient si con-
ti'adictoires , que d'un côté le peuple se
souleva , parce que le pape avait cou-
ronné l'empereur sans l'ordre du sénat
et du peuple ; et de l'autre côté , le pape
Adrien écrivait dans toutes ses lettres ,
qu'il avait conféré à Frédéric le bénéfice
de l'empire romain. Frédéric imposa si-
lence aux députés du peuple : « Rome ,
» leur dit-il , n'est plus ce qu'elle a été ;
» Charlemagne et Othon l'ont conquise ,
» et je suis votre maître. » Non moins
choqué des lettres du pape, il dit « qu'il
» tenait son empire de Dieu et de l'élec-
M tion des princes , et non de la libéra-
» lité des pontifes romains. » Un légat ,
devant qui il prononça ces paroles, vou-
lut le lui contester 5 Frédéric le renvoya,
Adrien lui envoya en 1157 à Besancon
où il était alors , un autre légat auquel
l'empereur fit protester que par le mot
de bénéfice , le pape n'avait entendu que
la bénédiction ou le sacre, et non une
investiture. L'année précédente (1156)
Frédéric avait répudié Adélaïde , pour
épouser Béatrix , fille de Renaud , comte
de Bourgogne , et réunit par-là le comté
de Bourgogne à ses états ; mais ce pré-
tendu mariage, contracté contre les règles
de l'évangile , le mit mal dans l'esprit
des peuples, et ne contribua pas peu à la
conduite des Milanais envers la nouvelle
impératrice ( voyez Béatrix ). Après la
mort d'Adrien, en 1160, Frédéric, qui
voulait dominer à Rome , opposa au légi-
time pontife Alexandre III , l'antipape
Victor , et successivement deux autres.
Les Milanais , indignés de ces violences ,
secouèrent le joug en 1 161 , et tâchèrent
de former une république. Mais leur capi-
tale fut prise en 11C2 et rasée jusque
dans ses fondemens. On passa la charrue
et on sema du sel sur son terrain. Bresse ,
Plaisance furent démantelées, et les autres
villes j qui avaient voulu être libres , per-
4:6 FRÉ
dirent non-seulement cet avantage , mais
leurs privilèges. Le vainqueur fit faire la
recherche de tous les droits et de tous
les fiefs usurpés. Quatre docteurs de
l'université de Bologne qu'il consulta,
lui attribuèrent tous ces droits , et même
l'empire du monde entier , tels que les
empereurs des premiers siècles l'avaie^
possédé. Le fameux Barthole ne balafiça
pas même à déclarer hérétiques , tous
ceux qui oseraient douter de la monar-
chie universelle des empereurs romains.
On voit par cette plaisante décision , que
la jurisprudence des empereurs n'était
pas mieux en ordre que celle des papes ;
et que ceux qui déclament tant contre la
seconde, affectent à l'égard de la première
un silence qui tient de l'injustice et de la
mauvaise foi. Le pape Alexandre III , qui
avait été obligé de se retirer en France ,
excommunia Frédéric en 1168. Les villes
de Lombardie se liguèrent ensemble la
même année pour le maintien de leur
liberté. Les Milanais rebâtirent leur ville
malgré l'empereur. Ils remportèrent sur
lui une victoire signalée, près de Côme,
en 1176 : et cette victoire produisit la
paix entre Alexandre et Frédéric. Venise
fut le lieu de la réconciliation. Il fallut
que le superbe Frédéric pliât. Il reconnut
le pape, baisa ses pieds, lui servit d'huis-
sier dans l'église , et conduisit sa mule
dans la place St. -Marc. La paix fut jurée
le 1" août 1177 , par 12 princes de l'em-
pire. Tout fut à l'avantage de l'Eglise ,
Frédéric promit de restituer ce qui appar-
tenait au saint-Siége. Les terres de la
comtesse Mathilde ne furent point spéci-
fiées , et ce fut un nouveau sujet de que-
relle entre l'empereur et le pape Urbain
III. Les progrès des Sarrasins réunirent
les esprits. Saladin , le héros de son pays
et de son siècle , avait repris Jérusalem
sur les chrétiens. Le pape engagea Fré-
déric à reconquérir la Terre-Sainte. Ce
prince se croisa en 1189. Isaac Lange ,
empereur de Constantinople , était l'allié
de Saladin et du sultan d'Icône. Frédéric
fut donc obligé de combattre les Grecs.
11 força les passages , remporta deux vic-
toires sur les Turcs, prit Icône, pénétra
en^Syrie , et alla mourir l'année suivante
PRE
1 190, après un règne de 38 ans, près de
Tarse en Cilicie , pour s'être baigné dans
le Cidnus ou le Senef , de la maladie
qu'Alexandre le Grand contracta autrefois
dans le même fleuve suivant quelques
critiques : mais la chose n'est pjs certaine,
l laissa en mourant une réputation célè-
bre d'inégalité et de grandeur. Il couvrit
son orgueil , son caractère violent et em-
porté , par le courage , la franchise , la
libéralité et la constance dans la bonne
et la mauvaise fortune. Il avait une mé-
moire surprenante, et même beaucoup
de savoir, pour un siècle oîi la rouille de
l'ignorance était si épaisse , que presque
aucun prince allemand ne savait ni lire
ni signer son nom. Jamais les revenus
des empereurs n'avaient été plus consi-
dérables que sous Frédéric ; il tirait an-
nuellement de l'Italie et de l'Allemagne
60 talens d'or , ce qui revient à 0 millions
d'écus d'Allemagne : somme prodigieuse
pour ce temps-là , oîi le domaine des em-
pereurs avait déjà souffert des perles im-
menses. C'est sous Frédéric I que les
archevêques de Mayence commencèrent
à prendre le titre d'archi-c/iancelicrs de
l'empire. La f^ie de Frédéric Barbe-
rousse a été écrite en latin , Leipsick ,
1773, in-4. On peut consulter sur ce
prince l'un des plus remarquables qu'ait
eus l'Allemagne , plusieurs ouvrages , en-
tr'autres la Chronique d'Othon de Frei-
singen: l'ouvrage de Gunther, Ligurinus,
.vtVe de rébus gestis Frederici /, libri X,
Hildelberg , 1 8 1 2 , in-8 .
FRÉDÉRIC II , petit-fils de Frédéric
I , et fils de l'empereur Henri VI , né en
1 1 94 , à lési , élu roi des Romains eu
1 1 96 , du vivant de son père , empereur
en 1210, à 19 ans, ne fut paisible pos-
sesseur de l'empire qu'après la mort d'O-
thon en 121 8. Son règne commença par
la diète d'Egra en 1 21 9. Ce fut dans celte
diète qu'il fit jurer aux grands seigneurs
de l'empire, de ne plus rançonner les,
voyageurs qui passeraient dans leur ter-j
ritoire , et de ne pas faire de fausse mon»
naie : usages barbares , que les petitsj
princes prenaient pour des droits sacrés
dans ces temps de brigandage. Après]
avoir mis prdre à tout en AUemag^ne ,
FRE
passa en Italie. Milan lui ferma ses portes,
comme à un petit-fils de Barberousse : et
il alla se faire couronner à Rome par le
pape Honoré 111, le 22 novembre 1220.
Il signala son couronnement par des édits
violens contre les hérétiques, et par le
serment d'aller se battre dans la Terre-
Sainte. Frédéric né en Italie, et s'y plai-
sant beaucoup , ne se pressa pas de se
rendre à Jérusalem. Grégoire IX , succes-
seur d'Honoré III, l'avertit en vain d'exé-
cuter son serment, et l'excommunia en
1 227 et 1228. Frédéric part pour la Terre-
Sainte, et y arrive en septembre 1228.
Mélédin , sultan de Babylone , effrayé de
l'orage qui allait fondre sur lui , conclut
l'année d'après une trêve de dix ans avec
l'empereur. Grégoire IX, irrité de ce que
Frédéric avait abandonné si légèrement
la cause des chrétiens d'Orient , et exé-
cuté son serment d'une manière illusoire,
l'anathématisa. Il assembla une armée ,
et s'empara d'une grande partie de la
Fouille , dont il investit le beau-père de
Frédéric II , Jean de Brienne. Le jeune
Henri son fils, roi des Romains, se dé-
clara aussi contre son père , et fit répan-
dre le bruit de sa mort. Cette nouvelle ,
quoique fausse , occasiona la révolte gé-
nérale de la Sicile et de l'Italie. Frédéric,
instruit de ces événemens, repasse en
Europe. Ayant ramassé une armée à la
hâte, il se rend maître de la Romagne,
de la Marche d'Ancône , des duchés de
Spolette et de Bénévent. Les soldats de
la croisade papale, appelés Guelfes , -por-
taient le signe des deux clés sur l'épaule.
Les croisés de l'empereur s'appelaient
Gibelins , et portaient la croix ; ils furent
souvent vainqueurs. Le pape se réconcilie
avec l'empereur en 1230, moyennant la
somme de 130,000 marcs d'argent et la
restitution des villes qu'il lui avait prises.
Frédéric ne fut si facile , que parce que
son fils s'était révolté en Allemagne. Il
va assembler une diète à Mayence ; con-
damne en 1235 le rebelle à une prison
perpétuelle , et fait élire peu après son
second fils , Conrad IV , roi des Romains.
L'Allemagne pacifiée, il repasse en Lom-
bardie en 1240, bat les Milanais et en
fait un gfrand carnage. Il prend plusieurs
ME 4:7
autres villes , soumet la Sardaigne, triom-
phe des forces de Venise et de Gènes , se
rend maître du duché d'Urbin et de la
Toscane, et assiège Rome. Ce fut alors
que ce prince emporté et cruel lit fendre
la tête en quatre , ou marquer d'un fer
chaud fait en croix , les prisonniers qu'il
faisait. Il alla ensuite saccager Bénévent ,
le Mont-Cassin , et les terres des Tem-
pliers. Rien n'arrêtait ses dégâts , et c'é-
tait surtout à l'égard des nrinistres de
l'Eglise qu'il se montrait implacable. « Les
» temples , disent les historiens , furent
» saccagés ; les vases sacrés servirent dans
)) sa cuisine ; les cendres des saints, trou-
» blées dans leur tombe , furent jetées
» aux vents , leurs ossemens dispersés ;
» des ecclésiastiques languirent dans les
« fers ; à d'autres on creva les yeux ; d'au-
3) très furent chassés de l'empire , ou
» égorgés ou livrés aux flammes. L'on fit
j> expirer sur les bûchers des comtes et
» des barons du parti guelfe ; d'autres
V périrent de faim et de vermine dans les
}> prisons souterrraines d'antiques don-
» jons. Des villes de cette faction furent
n ruinées de fond en comble. Ezzelino ,
» gibelin furieux et sanguinaire , fit périr
1) par la faim , le fer et le l'eu , douze
» mille citoyens de Padoue , enfermés
» dans l'amphithéâtre de Vérone » ( voyez
EzzELi>io). Frédéric avait été de nouveau
excommunié par Grégoire IX en 1236.
Le pape donnait pour motif de cette ex-
communication , que les armées de ce
prince avaient pillé des églises; qu'il
avait fait juger par des cours laïques les
affaires ecclésiastiques ; et qu'il avait
blasphémé Jésus-Christ dans la diète de
Francfort , et l'avait mis au nombre des
imposteurs qui avaient trompé l'univers.
Dans sa lettre, adressée aux princes et
prélats contre cet empereur, le 12 des
calendes de juin de la 1 3^ année de son
pontificat, 1239, Grégoire l'accuse for-
mellement d'avoir rangé le Sauveur du
monde , Moïse et Mahomet sur une même
ligne , et rapporte les paroles mêmes de
l'empereur : A tribus Baratatoribus , ut
ejus verbis utamur , scilicet Christo
Jesu , Moïse et Mahometo , totum mun-
dum fuisse deceptum, etc. ^oye? Vignes
PRÈ
(Pierre de). Celte dernière accusation,
la plus grave de toutes , fut niée par
l'empereur , dans un manifeste envoyé à
toutes les cours. Le pape , qui n'ajoutait
aucune fpi à cette protestation , et qui
avait , comme il l'assure dans sa lettre ,
des preuves démonstratives du fait , vou-
lut faire assembler un concile ; mais les
prélats français, anglais et espagnols, s'é-
tant embarqués à Gênes , furent faits pri-
sonniers par Henri , roi de Sardaignc ,
fils naturel de l'empereur. Le pontife en
mourut de douleur. Célestin IV , son suc-
cesseur, n'occupa le trône pontifical que
18 jours. Le siège vaqua pendant 19 mois.
Enfin Innocent IV ayant été élu , ce pape,
l'ami de Frédéric , quand il était cardinal,
s'efforça en vain de le réconcilier avec le
saint-Siége. Après bien des négociations
inutiles , il le déposa dans le concile de
Lyon , en 1245; mais la sentence ne fut
prononcée qu'au nom du pape , et en
jjrésence du concile , prœscntc conciUo ,
non avec l'approbation du concile , ap-
probante coiicilio , comme portent les
décrets oii le concile concourait avec le
pape. Il n'a point été question dans ce
concile du droit du pontife sur la cou-
ronne du prince ; ce point n'y fut nulle-
ment agité, ni défini. Tout paraît avoir
été supposé comme un article de juris-
prudence reconnu ( voyez Martin IV ,
Grégoike vu ). Tout se réduisait à savoir
si l'empereur était véritablement coupa-
ble des crimes dont on l'accusait j c'est là-
dessus qu'intervint le jugement. Des his-
toriens et des jurisconsultes ont écrit que
le point dont il s'agit ici , formait une
question purement civile , très différente
de celle qui regardait le prétendu do-
maine temporel des papes , et que c'était
une prétention de suzeraineté. Sous le
règne des Othon , disent-ils , non-seule-
ment le pape, comme souverain de Rome,
conférait l'empire ; mais il donnait en-
core aux empereurs le pouvoir de dési-
gner leurs successeurs. Après les Othon ,
il donna à certains princes d'Allemagne
le droit d'élire les rois des Teutons , qui
étaient ensuite élevés à la dignité impé-
riale, et les empereurs élus lui prêtaient
serment de fidélité ( Suppl Baron. , /. ?,
FRE
c. 40, tom. 10, ann. 964 , p. 783, 784
et 909 ). Les papes prétendirent en con-
séquence que les empereurs tenaient leur
couronne du saint-Siége, comme les
électeurs le droit d'élection. Delà ils iur
feraient , par une conséquence quelcon-
que , le droit de les juger et de les dépo-
ser. On voit par une lettre de Frédéric II,
que c'était là une des raisons sur les-
quelles Innocent IV appuyait ses préten-
tions ; elle est rapportée dans l'Histoire
de France , par Daniel , tome 4 , p. 573,
édit. 1755. Quoi qu'il en soit, les écri-
A assiers qui se sont épuisés en sarcasmes
contre la conduite des pontifes dans ces
temps pénibles et difficiles , n'ont pas eu
l'équité d'observer qu'ils avaient les
mœurs de leur temps , qu'ils en avaient
adopté la jurisprudence et les maximes ;
que c'est sur cet état de choses qu'il faut
les juger , ainsi que les empereurs qui
n'étaient pas plus au dessus de leur siècle
que les papes, et dont la jurisprudence,
comme nous venons de l'observer à l'ar-
ticle de Fre'déric I , était plus défec-
tueuse encore et plus révoltante. Les pa-
pes d'aujourd'hui sont très éloignés de
ces prétentions , et n'en ont pas qui leur
soit plus chère que celle de donner aux
souverains de la terre des exemples de
modération , de douceur , de sagesse et
de justice. « C'est une chose singulière ,
» dit un écrivain moderne , et elle serait
3> inconcevable si on ne connaissait l'hy-
» pocrisie du siècie , d'entendre nos phi-
» losophes déclamer avec fureur contre
î) le droit que s'attribuaient les papes sur
M des rois chrétiens , précisément en fa-
» veur de l'Eglise qu'ils troublaient , et
» que leur devoir était de protéger : tan-
« dis que ces mêmes philosophes font
» une profession ouverte de renverser les
» trônes, de traiter en esclaves les rois
» les plus sages , et d'établir l'anarchie
» la plus affreuse sur les débris de toute
)) autorité. » Les peuples ligués de Lom-
bardie Iwittircnt Frédéric : les princes ne
le regardèrent plus que comme un impie ;
pour comble de malheur, les Allemands
élurent contre lui, en 1246, Henri de
Thuringe , puis Guillaume , comte de
Hollande, en 1247, On dit qu'étant dans
1
PRE
la Pôuille , il découvrit que son médecin
voulait l'empoisonner, et qu'il fut obligé
de prendre des mahométans pour sa garde.
Us ne le garantirent pas des fureurs de
Mainlroy, l'un de ses bâtards, qui, à ce
qu'on prétend , l'empoisonna à Fioren-
zuela en 1250, à 57 ans, et l'étouffa sous
une pile de carreaux , parce que le poison
n'agissait pas assez promptement. D'au-
tres le font mourir d'une manière diffé-
rente. Quoique d'un naturel violent et
emporté, cet empereur avait quelques
qualités estimables. Actif, vigilant, cou-
rageux, il eût pu réprimer, s'il avait
voulu sérieusement , la puissance maho-
niétane dans sa naissance. Il fonda des
universités, notamment celle de Padoue;
il cultiva des beaux-arts et les fit culti-
ver. On a de ce prince des vers en langue
romane , des lettres en latin , et un traite
de la chasse au faucon ( De artc venandi
ciim avibus ) , imprimé avec Albertiis
magnus , De falconibus , Augsbourg ,
1596 , in-8. Il fit traduire de grec en la-
tin divers livres, ert particulier ceux A'A-
ristote, VAlmagestc de Ptolémée et plu-
sieurs traités de Gallien. Ce fut un des
meilleurs troubadours de son époque. Il
paraît que dans les dernières années de
sa vie il était revenu à des sentimens plus
religieux , puisque dans son testament il
charge son fils Conrad de restituer tout
ce qui pouvait appartenir à l'Eglise, et
légua 100,000 onces d'or pour le secours
de la Terre-Sainte. Quelques auteurs pré-
tendent qu'il mourut dans de grands sen-
timens de piété et de repentir. (Les re-
cueils de Frecher , de Goldast et de Mu-
ratori renferment un grand nombre de
morceaux précieux pour l'histoire de ce
prince ; d'autres ouvrages parlent encore
de cet empereur ; mais il faut une critique
habile pour distinguer ce que l'esprit de
parti a débité pour ou contre lui. )
^TRÉDÉRIC m, dit le Beau, fils
d'Albert I d'Autriche , fut élu par quel-
ques électeurs en 1 3 1 4 ; mais le plus grand
nombre avait déjà donné la couronne im-
périale à Louis de Bavière , qui le vain-
quit et le fit prisonnier dans une bataille
décisive en 1322. Il mourut en 1333, après
quelques années de prison , empoisonné
ME 4^^
par un philtre amoureux , seloti les uns ;
rongé des vers, selon les autres. Duchat
lui attribue cette devise : A. E. I. O. V.
que Matthieu Tympius prétend signifier,
Aquila Elccta Liste Omnia Vincit. L'é-
vénement fait voir qu'elle convenait mieux
à son rival. D'autres l'ont expliquée par
Austria Erit In Orbe ritimo ; d'autres
par Austria Erit Imperans Orbi Fni-
verso ; d'autres enfin par Audax Et Iin-
probus Omnia Fcrtit. (On peut consulter
pour plus de détails l'ouvrage de Beumann
intitulé : Voluntarium imperii consor-
tium inter Fredericum Austriacum et
Ludovicum Barbarum, Francfort, 1735,
in-fol. avec figure.)
FRÉDÉRIC lY , empereur ( ou III ,
selon quelques-uns , qui ne mettent pas
Frédéric III , au nombre des empereurs ),
dit Ze Pacifique , né le 25 décembre 1415
d'Ernest , duc d'Autriche , monta sur le
trône impérial en 1440 , à 25 ans , et fut
couronné à Rome en 1452, de la main
du pape Nicolas V. Par le serment qu'il
prêta à ce pontife , il promit de n'exercer
dans Rome aucun acte de souverain, sans
son consentement. Le couronnement de
Frédéric est le dernier qui ait été fait à
Pkome , et fut un des moins éclatans. Eléo-
noi'e de Portugal , qu'il avait demandée
en mariage, se rendit à Rome , et y fut
couronnée impératrice en même temps
que son époux. Frédéric ne voulait pas
d'abord consommer le mariage en Italie,
de peur que l'enfant qui en naîtrait n'eut
les mœurs italiennes. Il fallut qu'Alfonse,
aïeul de sa femme, roi d'Aragon et de
Naples , l'y engageât. L'empereur de re-
tour en Allemagne s'abandonna à son hu-
meur trop pacifique, et pour mieux dire,
insouciante ; il en résulta des guerres ci-
viles. Les électeurs, assemblés à Franc-
fort , le sommèrent de s'appliquer aux
affaires de l'état , de rétablir la paix pu-
blique ,*de faire administrer la justice et
de punir le crime. On le menaça d'élire
un roi des Romains , qui aurait le gouver-
nement de l'empire. Ces menaces furent
inutiles. La Hongrie se donna en 1458 à
Mathias , fils d'Huniade son défenseur.
Frédéric se contenta de lui refuser lacou-
ronne de saint Etienne, qu'il avait entre
48ô ME
les mains : refus qui produisit une guerre
sanglante. Mathias envahit l'Autricbe ,
prend Vienne, en chasse l'empereur,
qui , avec une suite de 80 personnes , se
met à se promener de couvent en cou-
vent, en attendant que son vainqueur
lût mort. Il répétait sans cesse ces paro-
les, qui doivent être dans le cœur d'un
philosophe, mais non dans celui d'un
monarque : « L'oubli des biens qu'on ne
» peut recouvrer, est la félicité suprême. »
Il se conduisit suivant ces principes , et
finit la guerre par un traité de paix hon-
teux en 1487. Il mourut en 1493, à 78
ans , après un règne peu glorieux. C'est
au commencement du règne de cet em-
pereur en 1440, qu'on place l'invention
de l'imprimerie. FoyezYvst. (On trouve
quelques bons mots , Provcrbia de ce
prince , dans un recueil intitulé Marga-
rita facetiarum, Strasbourg, 1509, in-4.}
ROIS DE DANEMARK.
FRÉDÉRIC I , roi de Danemark en
1 523 , après l'expulsion du barbare Chri*-
tiern , se maintint sur le trône par les
armes. Il fit alliance avec Gustave I, qui
s'était fait reconnaître roi de Suède , et
se IJgTia avec les villes anséatiques. Après
il introduisit le luthéranisme dans ses
états, l'an 1526. Il mourut en 1533, à
l'âge de 62 ans.
FRÉDÉRIC II, roi de Danemark,
fils et successeur de Christiern III , aug-
menta ses états , favorisa l'académie de
Copenhague , fit fleurir les lettres , aima
les savans, et protégea Ticho-Brahé au-
quel il donna l'île de Herven pour y con-
struire le fameux observatoire d'Ura-
niembourg. Son règne ne fut troublé que
par une guerre passagère avec la Suède;
elle fut heureusement terminée en 1570.
11 mourut en 1588 , à 54 ans. Il eut pour
ministre Pierre Oxe dont les talens amé-
liorèrent sensiblement ses. états.
FRÉDÉRIC III, né en 1609, d'abord
archevêque de Brème, ensuite roi de Da-
nemark en 1648 , après la mort de Chris-
tiern rV' son père, perdit plusieurs places,
que Charles-Gustave , roi de Suède , lui
enleva. Il mourut en 1670, à 01 ans,
pprès avoir obtenu que la couronne, au-
ME
pàraVànt élective, serait héréditaire dauâ
sa maison. La noblesse, qui traitait les
autres ordres avec dureté, perdit en même
temps une partie de ses privilèges.
FRÉDÉRIC IV , roi de Danemark ,
fils de Christiern V, né en 1621 , monta
sur le trône de son père en 1699. Il se
ligua , avec le czar Pierre et le roi de Po-
logne , contre Charles XII , qui le con-
traignit à faire la. paix. Après une guerre
fort désavantageuse , le roi de Suède ayant
été réduit à se retirer en Turquie par le
czar, Frédéric se dédommagea de ses
pertes et lui enleva plusieurs placés. 11
mourut en 1730 , à 59 ans, après avoir
fondé les missions du Groenland et de la
Laponie, la maison des Orphelins de Co-
penhague et 240 écoles pour l'instruction
des enfans pauvres.
* FRÉDÉRIC V , roi de Danemark
et de Norwége , fils de Christian VI , né
en 1 723, succéda à son père le 6 août 1746,
et mourut en 1 766. Pierre III étant monté
sur le trône de Russie e» 1762, leva
une armée considérable pour reprendre
sur le Danemark le duché de Flesseig dont
son père avait été dépouillé. Déjà le géné-
ralRomanzow,àlatêtede40,000hommes,
jetait la terreur dans le Mecklenbourg,
et Frédéric préparait une résistance for-
midable , lorsque Pierre fut assassiné et
que Catherine s'empressa de retenir ses
troupes et de signer la paix. Son règne
fut remarquable par plusieurs institutions
et entreprises propres à faire fleurir l'in-
dustrie , le commerce , les sciences et les
arts. Il accorda de grands avantages à la
compagnie asiatique , et parvint à rendre
le commerce d'Amérique entièrement
libre. Copenhague lui doit une académie
de peinture et une maison d'accouche-
men« gratuits : cet hôpital est devenu
l'un desplus remarquables de l'Europepar
sa bonne organisation.
ROIS DE POLOGNE.
FRÉDÉRIC- AUGUSTE I, roi de Po-
logne , naquit à Dresde en 1670, de Jean-
George III , électeur de Saxe. Il eut cet
électoral après la mort de Jean-George IV,
son frère , en 1694. Il fit ses premières
campagnes contre les Français en 1689
i
fKE
sur les bords du Rhiu , et y donna des
marques de valeur. Choisi en 1G95 pour
commander l'armée chrétienne contre les
Turcs , il soutint sa réputation de bra-
voure, et eut sur eux de jvrauds avantages.
Ayant embrassé la religion catholique
l'année suivante , il fut élu roi de Pologne
le 27 juin , et coui-onné à Cracovie le 15
septembre. Il avait acheté la moitié des
suffrages de la noblesse polonaise, et
forcé l'autre par l'approche d'une armée
saxonne , qu'il ne tarda pas d'employer
contre Charles XII. Il se jeta d'abord .sur
la Liyonie ; il y eut quelques succès contre
les Suédois, mais ils furent suivis de plu-
sieurs échecs. Il fut obligé de lever le
siège de Riga , perdit la bataille de Clis-
sow et celle de Frawstadt ; et après une
guerre où il avait été aussi malheureux
que brave , il signa la paix en 1706. Par
ce traité il fut dépouillé de la couronne
de Pologne , que Charles XIl avait fait
donner à Stanislas Leczinski, en 1704.
.\près la bataille de Pultavva, Frédéric-Au-
guste remonta sur le trône , et s'y sou-
tint avec honneur jusqu'à sa mort , arri-
vée en 17 33. Ce monarque avait une force
de corps incroyable ; mais il était plus
connu encore par sa bravoure et surtout
par sa grandeur d'âme dans la bonne et
la mauvaise fortune. Sa cour était la plus
brillante de l'Europe, après celle de
Louis XIV. Il signala son règne par un
nouveau code , par l'érection de diffé-
rentes chaires académiques , par la fon-
dation d'un gymnase pour la noblesse â
Dresde, et par d'autres établissemeus
qui l'ont immortalisé dans le cœur de
ses sujets.
FRÉDÉRIC- AUGUSTE II, roi de Po-
logne ; fils du précédent , naquit en 1 696,
et parvint au trône en 17 34. Les dernières
années de son règne furent très malheu-
reuses. En 1 7 50 , le roi de Prusse s'em-
para de la Saxe, qu'il garda jusqu'à la
paix conclue à Hubertsbourg , le 1 5 fé-
vrier 1763, Frédéric-.\uguste mourut le
5 octobre de la même année. C'était un
prince plein de bonté et de générosité ;
mais qui ayant des voisins puissaus né-
gligea trop le soin de préparer de bonne
heure les moyens de leur résister.
V.
fRE
4Bi
ROI DE SUEDE.
FRÉDÉRIC, prince de Hesse-Cassel ,
épousa, le I avril 1715, Ulrique Eléo-
nore , sœur de Charles XII , roi de Suède.
Cette princesse, après la mort funeste
du conquérant sou frère , succéda à la
couronne le 3 février 1 7 1 'J L'année sui-
vante elle associa son époux au trône
avec l'agrément des états, et Frédéric fut
proclamé roi de Suède le 4 avril i720. Il
fit la guerre aux Russes , qui battire'ut ses
troupes en plusieurs rencontres, et m ou-
rut eu 1751 , à 75 ans, sans postérité.
ÉLECTEURS DE BRAXDEBOUBG.
FRÉDÉRIC GUILLAU3ÏE DE BRAN-
DEBOURG, surnommé le Grand-Elec-
teiir , né à lîerlin en 1620 , fit la guerre
aux Polonais avec avantage. Elle finit par
le traité de Braunsberg en 1657. Dans
la guerre de 167 4 contre Louis XIV, il
s'unit avec le roi d'Espagne elles Hollan-
dais! Il marcha dans l'Alsace avec sou
armée ; mais il fut bientôt contraint de
la retirer , pour s'opposer aux Suédois
qui s'étaient emparés des meilleures places
du Brandebourg. Frédéric les mit en fuite,
fit une descente dans l'île JeRugen,prit
Fehrschantz, Stralsund , Gripswalde, et
fit une paix avantageuse , fruit de ses
victoires. Il mourut en 1688. L'auteur
des Mémoires de Brandebourg en fait
ce portrait , ou , pour mieux dire , ce pa-
négyrique : « Frédéric-Guillaume avait
)> toutes les qualités qui font les grands
» hommes : magnanime , débonnaire, gé-
n néreux, humain.... Il devint le restaura-
•» teur et le défenseur de sa patrie, le
» fondateur de la puissance du Brande-
» bourg, l'arbitre de ses égaux.... Avec
» peu de moyens il fit de grandes choses,
» se tint lui seul lieu de ministre et de
» général , et rendit florissant un état
» qu'il avait trouvé enseveli sous ses
» ruines. » Lorsque Frédéric II fit trans-
porter les corps de ses ancêtres dans la
nouvelle cathédrale de Berlin , il voulut
voir celui de Frédéric-Guillaume , son
bisaïeul. Après l'avoir considéré long-
temps en silence et les larmes aux yeux ,
il le prit par la main et dit aux assistans :
« Messieurs, celui-ci a fait beaucoup. »
3i
48a FRË
FRÉDÉRie I , électeur de Brande-
bourg, fils du précédent , naquit à Kœ-
nigsbergen 1G5?. Le titre de roi tentait
son ambition : il fit négocier en 1 700 au-
près de Léopold, pour l'érection du du-
ché de Prusse en royaume. L'empereur
avait refusé , en 1695, de reconnaître la
Prusse pour un duché séculier ; mais en
1 700 , Frédéric lui ayant promis du se-
cours contre la France , il ne fit aucune
difficulté de la reconnaître pour un royau-
me. L'Angleterre et la Hollande furent
gagnées parle même motif. Les différends
entre la Suède et le roi de Pologne assu-
rèrent le consentement de ces deux cou-
ronnes , qui avaient un intérêt égal à
ménager Frédéric ; enfin , à la paix d'U-
trecht , il fut généralement reconnu
comme roi. On lui confirma en même
temps la possession de la ville de Guel-
dres , et de quelques autres de ce duché
dont il s'était emparé en 1703. Il aug-
menta encore ses étals , du comté de Tek-
lenbourg , de la principauté de Neuchâlcl
et de Valangin. ( Il mourut d'une frayeur :
sa troisième femme Louise de Meclden-
bourg était tombée en démence ; on cher-
chait à le cacher au roi ; mais un jour
elle enfonça une porte , et se présenta
vêtue de blanc et tout ensanglantée de-
vant Frédéric qui dormait : à sa vue , il
pensa voir le Fantôme blanc , être ima-
ginaire que l'on croyait , dans les idées su-
perstitieusesdecette époque, présider aux
destinées de la famille de Brandebourg ,
et annoncer la mort des princes de cette
maison. Trois semaines après il était
mort : ) c'était en 1713. Ce prince était
magnifique et généreux , mais c'était aux
dépens de ses sujets .- il foulait les pauvres
pour engraisser les riches. Sa cour était
;superbe , ses ambassades magnifiques, ses
bâtimens somptueux , ses fêtes brillantes.
Il fonda l'université de Halle , la société
royale de Berlin , et l'académie des No-
bles. Il dépensait ordinairement sans
choix l'argent de ses peuples. Il donna un
fief de 40 mille écusà un chasseur, qui
lui fit tirer un cerf de haute ramure;
enfin , pour nous servir de l'expression de
son petit-fils , « il était grand dans les pe-
V tites choses, et petit dans les grandes » ,
FRE
KOIS DE PBUSSE.
FRÉDÉRIC-GUILLAUME I (') , roi
de Prusse , né à Berlin , le 1 5 abfit 1088,
était fils du précédent : il commença à
régner en 1713, sous les auspices favora-
bles de la paix. Toute son attention se
tourna d'abord sur l'intérieur du gou-
vernement. Il rétablit l'ordre dans les
finances , la police , la justice , le mili-
taire. De cent chambellans qu'avait eus
son père , il n'en retint que douze. Il ré-
duisit sa propre dépense à une somme
modique , disant « qu'un prince doit
» être économe du sang et du bien de
» âes sujets. » La bonne administration
de ses finances fit que, dès la pre-
mière année de son règne , il entre-
tint 50 mille hommes sous les armes ,
sans qu'aucune puissance lui payât de
subsides. La France et l'Espagne avaient
enfin reconnu sa royauté, et la souverai-
neté de la principauté de Neuchâtel. On
lui avait garanti le pays de Gueidres et
de Kessel, en forme de dédommagement
de la principauté d'Orange , à laquelle
il renonça pour lui et pour ses descen-
dans. Le Nord était en feu par les que-
relles de Charles XII. Frédéric ne voulut
pas s'en mêler , et tandis que ce héros
soldat perdait ses plus riches provinces ,
Frédéric acquérait la baronie de Lim-
bourg dans la Souabe. Il fut enfin obligé
de prendre part à cette guerre , et de se
déclarer contre le roi de Suède , dont les
procédés et les hostilités l'avaient d'au-
tant plus irrité , qu'il ne voulait pas les
réparer. Frédéric , forcé de se défendre ,
ne put s'empêcher de s'écrier : « Ah !
» faut-il qu'un roi que j'estime, me con-
» traigne à devenir son ennemi ? » Ses
armes eurent un heureux succès, il chassa
les Suédois de Stralsund en 1 7 1 5 , et re-
vint vainqueur à Berlin , mais sans vou-
loir permettre qu'on lui élevât un arc de
triomphe. Eu méprisant les dehors de la
(i! Ce Mrait Fiinétic-Giii-Litii» II, »i l'on comptait
FrédrricGuillaume le (rrand électeur; maif l'on date de-
puis l'érection de la Prus»c en royaume. — D'un autre
côté , il Taut observer que c'est l'usage de cette cour de
cotisidùrcr l'ensemble de deux noms comme un nom dif-
férent : c'est pourquoi le grand Frèdirio n'est que Frédé-
ric II.
FRE
royauté , il en outrait cependant quelque-
fois les droits, et se rendait maître des
propriétés. C'est ainsi qu'il abolit en
1717 tous les fiefs dans ses états , et les
rendit allodiaus. L'année suivante, il
borna la durée des procès criminels à
trois mois. Il repeupla la Prusse et la Po-
méranie , que la peste avait dévastées.
Il fit venir des colonies de la Suisse , de
la Souabe et du Palatinat, et les y établit
à grands Irais. Beaucoup d'étrangers fu-
rent appelés dans ses états. Ceux qui
établissaient des manufactures dans les
villes, et ceux qui y faisaient connaître
des arts nouveaux , étaient excités par
des bénéfices , des privilèges et des ré-
compenses. 11 parcourait annuellement
toutes ses provinces , et partout il en-
courageait l'industrie et faisait naître
l'abondance. Dès l'an 1718, son armée
montait à près de 60 mille hommes, nom-
bre excessif pour l'étendue de ses états ;
mais de ce mal il résulta quelque bien ;
l'argent que les provinces payaient à l'é-
tat leur revenait sans cesse par le moyen
des troupes. Les laines qu'on vendait aux
étrangers et qu'on rachetait après qu'ils
les avaient travaillées, ne sortirent plus
du pays. Toute l'armée fut habillée de
neuf, régulièrement tous les ans. La paix
de 1720 lui assura la ville et la princi-
pauté de Stétin. Frédéric avait établi sa
résidence à Potzdam, maison de plaisance,
dont il fit une belle ville, oîi fleurirent
les arts. Il y fonda un grand hôpital où
sont entretenus annuellement 2,500 en-
fans de soldats , qui peuvent apprendre
les professions auxquelles leur génie les
détermine. Il établit de même un hôpital
de filles , qui sont élevées aux ouvrages
propres à leur sexe. Il augmenta , la
même année, en 17 22, le coi-ps des ca-
dets , oîi 300 jeunes gentilshommes ap-
prenaient l'art de la guerre. Tandis que
Frédéric faisait fleurir ses états au-
dedans , il les soutenait au dehors. Il
signa en 1727 le traité de Wusterhausen
avec l'empereur; il consistait dans des
garanties réciproques. A peine ce traité
fut-il conclu , qu'il pensa s'allumer
une guerre en Allemagne entre les rois
de Prusse et d'Angleterre. Il s'agis-
FRE 483
sait de deux petits prés , situés aux con-
fins de la vieille Marche et du duché de
Zell , et de quelques paysans hanovricns
que des officiers prussiens avaient enrô-
lés. Cette querelle fut pacifiée dans le
congrès de Brunswick. L'année 1730 est
remarquable par les brouilleries de Fré-
déric avec son fils , qui , lié de bonne
heure avecles philosophes, et lisant leurs
livres, n'avait pas pris les maximes qui
assurent la paix des familles. Le roi de
Prusse, père tendre mais sévère , l'envoya
prisonnier à Custrin sur l'Oder, et ne le
relâcha qu'après les prières réitérées de
l'empereur et du roi d'Angleterre. 11
mourut le 3 1 mai 1 740, avec tous les sen-
limensde religion qu'on peut avoir hors
de la véritable Eglise. « La politique de
M Frédéric , dit son illustre fils , fut tou-
u jours inséparable de sa justice. Moins
» occupé à étendre ses états qu'à les bien
» gouverner, circonspect dans ses enga-
» gemens , vrai dans ses promesses , aus-
» tère dans ses mœurs , rigoureux sur
» celles des autres , scruptileux observa -
» leur de la discipline militaire, il présu-
» mait si bien de l'humanité , qu'il au-
» rait voulu que ses sujets fussent aussi
» stoïques que lui. » Il n'aimait pas les
savans ni les poètes. La connaissance de
l'histoire, peut-être celle de la nature
humaine , lui avait persuadé que les let-
tres cultivées au-delà d'un certain degré,
et devenues d'un usage trop général, dé-
truisaient l'énergie des nations et prépa-
raient la chute des empires ; et c'est peut-
être à la conduite qu'il tint à cet égard,
qu'il faut en partie attribuer la gloire du
règne suivant. Ployez Giraldi (Lilio) ,
Rousseau [Jean-Jacques). «Il retarda
» par là , dit l'abbé Denina , les progrès
» d'une philosophie destructive et de cet
» esprit léger qui commençait à se répan-
» dre de son temps. C'était à l'époque dé
w la régence du duc d'Orléans , que Fré-
» déric-Guillaume montrait tant d'aver-
» sion pour les modes et les muses fran-
» raises. C'était dans ce temps que les
» Français les plus sensés se plaignaient
» de la futilité qui régnait dans la litlé-
» rature , et de la corruption du goût
» qui gagnait amplement. » Les anecdo-
484
PRÈ
tes suivantes achèveront de donner une
juste idée de son caractère. Le roi et le
prince royal (depuis Frédéric II), pas-
sant quelques jours k Bonn , l'électeur
Clément-Auguste, de la maison de Ba-
vière, les traita avec toute la magnificence
possible. On leur donna entre autres , un
hal. Frédéric-Guillaume était toujours
tort mal Iiiibillé , car il portait un uni-
forme aussi long-temps qu'il le pouvait ;
et quand il se faisait faire un habit neuf,
on y mettait les boutons du vieux. Le
prince royal n'était guère plus élégant;
d'ailleurs il était fort triste , et ne trou-
vait aucun plaisir à tous les divertisse-
mens. Le roi s'en étant aperçu lui de-
manda la raison de sa tristesse , et pour-
quoi il ne dansait pas. Frédéric baissa les
yeux et regarda son habit tout usé. Mais
le vigoureux monarque répondit en lui
appliquant un ample souflletdevant toute
la compagnie ; et le poussa au milieu de
la salle, en lui disant « Allons, allons,
« marche ! » Des larmes coulèrent des
yeux du prince : mais il fallut prier une
dame , et danser avec elle. Quand Fré-
déric-Guillaume avait fait sa revue , il
allait se promener à pied par la ville.
Alors tout le monde s'enfuyait au plus
vite. Il ne pouvait pas souffrir sur-
tout uue femme dans les rues. Quant
il en rencontrait quelqu'une , il la ren-
voyait chez elle , avec une paire de
soufflets, ou quelques coups de canne
ou de pied , en disant : « Que fait ici
« cette gueuse ? Les honnêtes femmes
M restent dans leur ménage. » Un beau
jour d'été , il surprit plusieurs femmes
qui se promenaient derrière le château
dans une place publique , nommée yar-
din du Roi, mais qui n'est qu'une grande
place d'exercice. A cette vue , il appela
des soldats , envoya chercher des balais,
et obligea les belles dames à balayer la
place pendant une demi-heure. Il ne pou-
vait soulYrir que les ministres de la pa-
role de Dieu vinssent voir la parade;
et quand il en apercevait quelques-uns ,
il les envoyait , à coups de c^nne , lire la
bible et faire des sermons. ( En général
Frédéric était dur : sa mère chercha vai-
nement pendant son enfance à vaincre
FRE
son caractère. Il était prodigue de coups
de bâton, et c'est de cette manière qu'il
avait l'habitude de terminer les querelles
de famille. Il aimait ses troupes et tout
ce qui les concernait: lui-même exerçait
ses soldats et il les désirait de la plus
haute taille : le régiment de ses gardes
était une véritable légion de géans. ) On
a public la Fie de Frédéric-Guillaume ,
en 2 vol. in-12, 1*41. C'est un ouvrage
très médiocre, fait en partie sur les ga-
zettes , mais plus véridique que la plu-
part des histoires modernes, écrites avec
l'emphase du faux esprit philosophique.
FRÉDÉRIC II, roi de Prusse , fils du
précédent, né le 24 janvier 1 7 1 2, succéda
à son père, Frédéric-Guillaume, le 31
mai 17-40. (A l'âge de 18 ans, il fut telle-
ment indigné des vexations tyranniqucs
dont il était l'objet, qu'il voulut prendre
la fuite : un goût naturel pour les let-
tres et les arts , développé encore par
l'éducation toute française qu'il reçut, lui
avait d'ailleurs rendu insupportable la
cour de son père. Aussi en 1730 il allait
partir ; mais son projet échoua par l'in-
prudence d'un officier nommé Katt , qui
devait être le compagnon de sa fuite.
Frédéric eut la douleur de voir exécuter
ce malheureux jeune homme qu'il ai-
mait tendrement , et fut lui-même con-
damné à mort : il passa plus d'une année
dans un emprisonnement rigoureux ,
resta éloigné de la cour, étudia dans la
retraite, et ne se montra guère qu'en
1 740 pour monter sur le trône. ) Il entra
la même année en Silcsie à la tèle d'une
armée , pour enlever cette province à
l'héritière de Charles VI , et , par une de
ces révolutions dont la politique humaine
offre tant d'exemples , on vit le succes-
seur du plus fidèle allié de l'Autriche,
tourner sa puissance contre une maison
long-temps défendue et secourue par ses
ancêtres. Il ne trouva qu'une faible ré-
.sistance, et fut bientôt maître des places
les plus considérables. L'année suivante,
le 9 avril, il surprit à Molvitz, le comte
de Neipperg, commandant 25 mille au-
trichiens, cl le défit entièrement, quoi-
que le général Borner, à la tète de la ca-
valerie, eût d'abord culbuté l'armée prus-
FRE
sienne. Cette victoire fut suivie de celle
de Czaslau, le 17 mai 1742 ; mais la ca-
valerie prussienne y ayant été presque
détruite, la paix fut signée le 11 juin à
Breslaw ; le comté de Glatz en Bohème
et la basse Silésie furent cédés au roi.
1,'extrémilé oii les succès de Marie-Thé-
rèse avaient réduit l'empereur Charles VII
et ses alliés, engagea le roi de Prus.se à
reprendre les armes. Il s'empara de Pra-
gue le 16 septembre 17 44 ; mais les Hon-
grois la reprirent le 17 novembre de la
même année. La victoire remportée à
Friedberg, le 24 juin 1745, sur les Au-
trichiens et les Saxons , fut suivie d'un
nouveau traité de paix , conclu le 25 dé-
cembre, oîi les cessions précédentes fu-
rent confirmées. Depuis cette époque,
Frédéric s'appliqua entièrement au gou-
vernement intérieur de ses états, à pro-
léger le commerce, à établir des manu-
factures , embellir les villes et surtout sa
capitale, élever des forteresses, etc.,
jusqu'à ce qu'en 1756, sur le soupçon
d'une alliance conclue entre le roi de
Pologne et l'impératrice-reine , il entra
brusquement en ^axe , combattit le gé-
néral Brown à Lovvositz en Bohème , le
1*^' octobre 17 56, et quoique la victoire
parût indécise, s'empara peu de jours
après de toute l'armée saxonne , compo-
sée de 14,000 hommes, renfermée dans
le camp de Pyrna. L'année suivante, il
s'avança jusqu'à Prague,, donna le G mai
une bataille sanglante, dans laquelle
ayant rapidement occupé un vide que les
Autrichiens, par trop d'ardeur, avaient
laissé dans leur centre, il obligea une
partie de leur armée de se retirer, et
l'autre d'entrer dans Prague. U assiégeait
cette ville, lorsque le comte de Daim lui
présenta la bataille à Kolin , le 18 juin.
Il y perdit ses meilleures troupes. Ses gre-
nadiers furent repoussés à six reprises dif-
férentes ; les voyant hésiter à obéir à l'or-
dre d'une nouvelle attaque, il accourut
en personne en leur criant : ÏVollet ikr
daim ewig lebcn ? (Voulez-vous donc
vivre éternellement? ) Cette exhortation
singulière les fit marcher à une septième
attaque, aussi inutile que les précéden-
tes. Après cette défaite , il leva le siège
FRE
48â
et évacua la Bohème. Le 30 août de la
même année , ses troupes , commandées
parle général Lehvald, furent défaites
par les Russes à Gros-Jœgerndorff dans
la Prusse Brandebourgeoise, et le 7 sep-
tembre, par les Autrichiens sur la Neiss,
dans la Lusace; mais le 5 novembre il
remporta sur les Français la fameuse ba-
taille de Piosbach. Il perdit Schweidnitz,
le 1 2 novembre ; et son ai-mée comman-
dée par le prince de Beveren , fut défaite
à Bre.slaw le 22 du même mois, ce qui
rendit les Autrichiens maîtres de cette ca-
pitale de la Silésie ; mais ils la perdirent
le 10 décembre, après avoir été totale-
ment défaits à Lissa , 5 jours auparavant.
Lacàmpagaesuivantcs'ouvritpar le siège
d'Olmutz , que le roi commandait en per-
sonne , tandis que le comte de Daun s'oc-
cupait ù former une armée (car la dé-
faite de Lissa avait presque anéanti celle
qui triompha à kolin et à Breslaw). Ce
général avança avec ces nouvelles trou-
pes, intercepta un grand convoi ; et cette
armée , composée pour ainsi dire de re-
crues, que le danger de la patrie avait
fait accourir de toutes parts , força le roi
à lever le siège de cette place importante
(*). L'année 17 58 fut remarquable par
la bataille donnée à Zorndorff le 25 août ;
les Russes commandés par le général Fer-,
mer, et les Prussiens par leur roi, s'at-
tribuèrent également la victoire. La ba-
taille de Hoch-Rirchen fut plus décisive,
le camp des Prussiens, leurs tentes, leurs
bagages, tombèrent au pouvoir du comte
de Daun ; mais , ce qui est plus étonnant
qu'une victoire , c'est que le roi complè-
\\) Cetlp observation el d'aulro? du même genre produi-
ront peut-être un jour de grandes réformes dans l'clat
militaire: nii pensera ((u'unu armée de 3>o à 5o,flOoiioni-
mes de vieilles troupes peut en peu de mo'S, former et
s'incorporer 100,000 recrues , et qu'une telle armée com-
posée de soldats sains, robustes et de, bonne Tolonlé ,
viiut plus de 400,000 Loniines énerri*s dans l'oisif ité, dans
la corruption morale et physique; bétail huinatn , comme
dit un homme d'esprit, qui péril trois fois avant qu'on en
ait besoin. Le génie de l'humanité ouvrira peut-être un
jour les jeux des rois sur cet important objet; mais la
politique d'aujourd'hui est toute d'appareil , et elle n'a
point de calculs pour les moyens qui rendent Tétai for-
midable sans parade et sans bruit. Et d'ailleurs , quand
les gouvernemcns cesseront-ils de consacrer dans leur»
relations cette ih'imorale et odieuse miixime du dioit du
plus fort, et quand , pénétrés du senl>n^<'ut de la dignité
humaine , rcsseront-îls de verser avec si peg de ipénajre.
ment le sang dvs pei4p!cs?,.,,
486 FRE
tement battu , partit comme un foudre
pour la Silésie , et fit lever le sicge de
^feiss , qui était sur le point de se rendre.
L'année 1 759 , l'armée prussienne fut dé-
faite à Zulliehau le 23 juillet par le géné-
ral russe Soltikow , et à Kunnersdorff le
1 2 août par le même général et un corps
d'autrichiens , commandé par Laudou .
Dresde se rendit aux Autrichiens le 4
septembre , et les Prussiens tâchèrent inu-
tilement de le reprendre en 1760. Ils
eurent plus de succès au combat de Peilz ,
le 30 octobre 1750; mais le général Finck,
s'étant placé avec 20,000 hommes près de
Maxen sur lui plateau commandé de tou-
tes parts, fut environné parles Autrichiens
et obligé de se rendre sans tirer un coup
de fusil , le 20 novembre 1759. Le géné-
ral Fouquet ne fut pas plus heureux le
23 juin 1760, ayant été l>attu et fait pri-
sonnier à Landshut , par Laudon, cet
habile et actif militaire , que Frédéric
appelait sa sentinelle , parce qu'il en était
partout observé et le rencontrait partout.
Le 3 novembre, les Prussiens eureut leur
revanche à Torgau , oii le comte de Daun
avait d'abord été victorieux ; mais les
Autrichiens ayant abandonné une mon-
tagne que le général Ziethen s'empressa
d'occuper , l'honneur de cette journée
resta à Frédéric. Laudon ayant pris
Schweidnitz d'emblée en 1761 , les Prus-
siens le reprirent en 1762 après un siège
de deux mois. Mais Colberg étant tombé
au pouvoir des P»usses , et l'état menacé
de toutes parts , Frédéric avait besoin de
tout son courage pour ne pas céder aux
revers , lorsque la mort de la czarine
Elizabeth, arrivée en 17 62, changea l'état
des affaires , et amena la paix signée à
Hubertsbourgle 15 février 1763. Lerésul-
lat de ce traité, fruit de tant de sang inu-
tilement répandu , fut que tout resterait
sur le pied où il était avant la guerre.
Les divisions de la Pologne ayant inspiré
en 1772 aux puissances voisines le projet
de la démembrer, Frédéric eut pour sa
part la Prusse polonai.se et quelques autres
districts. Les prétentions que l'impéra-
trice forma sur la Bavière , après la mort
de l'électeur Maximiiien-Joseph en 1 77 7 ,
rallumèrent la guerre, qui dura deux ans
FRE
sans qu'il y ait eu de part et d'autre au-
cune action d'éclat. Par le traité conclu
à Teschen le 13 mai 1779, on ajouta à
l'Autriche quelques districts de la Baviè-
re , et la succession de Bareuth et d'Ans-
pach fut assurée à Frédéric. Ce monarque
était occupé à former une ligue qu'il
croyait nécessaire à la sûreté et à l'équi-
libre de l'Allemagne , lorsque la diminu-
tion sensible de ses forces l'avertit que
la fin de son règne n'était pas éloignée ;
une hydropisie, qui se joignit à cet épui-
sement , avança sa mort et l'enleva à
Sans-Souci , près de Polzdam , le 1 7 août
1786 , dans sa 7 5^ année. Il avait épousé
Elizabeth-Christine de Brunswick , nièce
de l'impératrice , épouse de Charles VI ,
dont il n'eut point d'enfans, ( Voyez
Marie-Thérèse , Louis XV, Bbown, Dadn ,
Charles-Alexandre, etc. ) Un génie vaste,
vif et rapide , une étendue de vues qui
embrassait tout, une promptitude qui
réunissait presqu'au même instant le pro-
jet et l'exécution : la science de la guerre
portée à son comble ; une vie dure , agis-
sante , infatigable ; tm fonds inépuisable
de ressources personnelles et politiques
dans les circonstances les plus pénibles ;
une administration ferme , égale , con-
séquente, seront toujours des idées atta-
chées au nom de Frédéric II. Il aima les
sciences et les arts , il les cultiva lui-
même, l'utl'ami et le Mécène des savans.
S'il se trompa quelquefois sur l'objet de
ses bienfaits, si de l'encouragement géné-
ral il est né quelquefois un excès de con-
fiance, si la licence et l'audace ont usurpé
le nom de liberté, c'est qu'il est bieu
difficile à la prudence humaine de faire
le bien sans mélange , et d'atteindre
exclusivement le but qu'elle se propose.
Ceux qu'on appelle aujourd'hui philoso-
phes l'ont regardé comme leur appui ;
mais on sait avec quelle sévérité il les
châtiait quand leur vanité et leur égoïs-
me osaient compromettre sa protection ,
et à quel point leur chef éprouva son
ressentiment. iSon zèle pour la justice a
pu s'égarer dans sa roule , par la céléril
et l'ardeur avec lesquelles il l'a quelque-
fois poursuivie ; mais si dans le flegme
de la réflexion .et la lenteur des forme;
PRE
judiciaires le magistrat peut s'abuser , ne
jugeons pas trop sévèrement le monarque
dont la puissance ne prescrit pas contre
l'erreur. Un état militaire égal à celui
des plus grandes monarchies , l'obligea à
tirer de ses provinces des subsides pro-
portionnés à une si vaste dépense , à éta-
blir un ordre de finances qui semblait
pressurer le peuple : mais dans toutes les
occasions il venait à son secours : le'S
villes et les provinces ne réclamaient
jamais en vain le trésor public; il respecta
la propriété , les possessions civiles et
religieuses , comme un dépôt sacré con-
lié à sa défense. Trop judicieux pour s'en
tenir en fait de religion à l'inconséquence
des principes protestans , il fut , comme
tous les savans destitués de la lumière de
la vraie foi , dans un état d'indécision et
de perplexité ; mais la nécessité et l'im-
portance de la religion en général lui
étaient connues. Il aima , il protégea les
catholiques, conserva leurs églises, leurs
prêtres, et ne permit point qu'on donnât
la moindre atteinte à leurs usages, à
l'ordre et à la pompe de leur culte. Tous
les étrangers admirent le beau temple
qu'ils ont élevé à Berlin sous ses aupices.
Il était vivement touché de la majesté de
leurs cérémonies , et surtout de la pompe
imposante du sacrifice. Un jour qu'il avait
assisté à la grand'messe chantée dans la
cathédrale de Breslaw par le cardinal de
Zinzendorfif, il dit à ce prélat : « Les
M calvinistes traitent Dieu comme un ser-
» viteur , les luthériens , comme leur
» égal , mais les catholiques le traitent
» en Dieu. » Vers la fin de son règne ,
ayant appris qu'une secte , auparavant
peu connue en AUepiagne , et qui partout
se fait passer pour un fantôme , faisait
des ravages à Brinn et à Olmutz , il prit
toutes les précautions convenables pour
en préserver le clergé de ses états. On
lui a reproché d'avoir profité de la fai-
blesse de l'Autriche pour conquérir une
de ses provinces , d'avoir ravagé et épuisé
la Saxe , d'avoir réglé sur l'esprit de con-
quêtes et la gloire des combats , des dé-
marches que la morale chrétienne et la
rigueur du droit font dépendre d'autres
principes \ mais « quel est le prince, dit
» le maréchal de Berwick dans s6s excel'
» lens mémoires , quelle est la nation
u qui puisse se vanter d'avoir toujours
M préféré la bonne foi et la justice à ses
-) intérêts ? Il n'est question que d'un
» peu plus ou d'un peu moins : car l'on
" peut avancer hardiment, qu'il semble
» que la religion , l'équité et la parenté
» ne sont plus présentement des motifs
» qui fassent impression ; et que pour
)) satisfaire son ambition et se procurer
» quelques avantages , l'on se croit tout
» permis. » Tout cela peut être , et n'est
effectivement que trop vrai ; mais dans
les jugemens moraux, ce n'est pas sur
ce qui est généralement pratiqué , que
le sage se règle, mais sur ce qui doit être
pratiqué. L'équité n'eùt-elle plus qu'un
seul partisan , n'en eût-elle aucun , c'est
sur elle , sur elle seule, sur ses droits inva-
riables et imprescriptibles , que l'homme
de probité , que l'homme chrétien se
décide pour distribuer la louange et le
blâme. Nous ne rassemblerons pas ici
tous les traits de ce monarque célèbre. "
Les portraits des rois guerriers surtout
ne peuvent acquérir qu'avec le temps le
mérite d'une ressemblance parfaite. Il est
des traits qui doivent être aperçus de
loin pour faire leur véritable eÉfet dans
l'ensemble ; il est des couleurs trop vives
ou trop foncées, que le temps doit réduire
à des nuances convenables. Si l'admira-
tion a ses excès , la censure a les siens.
Si la personne des monarques s'illustre
par des faits éclatans , la gloire des ac-
tions publiques est quelquefois obscurcie
par des bruits sourds que l'indiscrétion
répand sur la conduite personnelle. Quel-
ques anecdotes suppléeront à l'ensemble
d'un portrait complet. Frédéric aimait
les reparties libres , et s'en o£Pensait
rarement, surtout quand elles étaient
promptes et vives , et qu'il y avait donné
lieu. Dans une revue , ayant aperçu un
officier qui avait une balafre , il lui dit :
« A quel cabaret avez-vous attrapé cela ?
» A Kolin , répondit celui-ci , oîi Votre
» Majesté a payé l'écot. » ( Le roi avait
été complètement battu à kolin. ) — Par
le partage de la Pologne et la prise de
possession du roi , i'évêque de Warmie
488 f*RE
perdit une grande partie de se? revenus.
Ce prélat que Frédéric aimait beaucoup ,
étant venu, eu 1770 , lui rendre ses de-
voirs à Potzdam , le monarque lui dit :
« Il est impossible qiie vous m'aimiez. »
L'évêqueréponditqu'iln'oublieraitjamais
les devoirs d'un sujet envers sou souve-
rain. « Pour moi , dit le roi , je suis vvai-
» ment votre ami, et j'ai beaucoup compté
» sur votre amitié. Si saint Pierre me refu-
» sait un jour l'entrée du Paradis, j'espère
» que vous auriez la bonté de m'y porter
» sous votre manteau , sans que personne
» s'en aperçoive. » « Cela sera difficile ,
)) reprit l'évêquc , car votre majesté me
« l'a tellement rogné, que je ne pourrai
» jamais y cacher de la contrebande. »
Le roi se mit à rire et prit fort bien la
plaisanterie. — Souj)aut un jour avec
l'abbé Bastiani , un des italiens qu'il avait
souvent auprès de lui , Frédéric lui dit :
« Quand vous aurez obtenu la tiare ( car
» je ne doute pas que vos vertus ne vous
X la procurent un jour ) , comment me
« recevrez-vous , lorsque j'irai à Rome
» pour vous rendre mes hommages ? Je
» dirai , répondit l'abbé , qu'on laisse
)) entrer l'aigle noir , aiin qu'il me cou-
9 vre de ses ailes , mais eu même temps
)> je me garderai de son bec. >> — Un
anglais causait un jour avec le roi de
Prusse sur les débats du parlement d'An-
gleterre , Frédéric, se plaignant du peu
de ressort de l'autorité royale dans le
royaume britannique , dit : « Oh ! si
» j'étais roi d'Angleterre... f> « Site, dit
>; l'anglais , en l'interrompant , si vous
3) étiez roi d'Angleterre, vous ne le seriez
)) pas vingt-quatre heures. » — On sait
que le roi faisait battreiine grande quan-
tité de petite monnaie de mauvais aloi ,
que l'on nommait^iV'ce.yrfc six pfcnnings.
On payait avec ces pièces les soldats , les
ouvriers , et une partie des pensions des
officiers civils et militaires ; mais à aucune
caisse royale on ne recevait ces sixpfeii-
nings , de sorte que le roi attirait le bon
argent dans ses coffres pour n'en ressortir
jamais , et distribuait parmi le peuple
cette mauvaise monnaie qui ne rentrait
plus dans ses coffres. Un jour Frédéric ,
passant à Polzdam devant la porte d'un.
HÛ
boulanger , le voit disputer avec titi
paysan ; il demande ce que c'est, on lui
dit que le boulanger veut payer en six
pfcnnings du blé qu'il a acheté du paysan,
et que ce dernier refuse de prendre cette
monnaie. Frédéric s'avance et dit au
paysan : « Pourquoi ne veux-tu pas pren-
» dre cette monnaie ? » Le paysan regar-
de le roi , et lui répond avec htiraeur :
(( La prends-tu toi ? » Le roi ne répondit
pas un mot , et passa son chemin. — Un
jeune officier quittait quelquefois son
uniforme , quoique cela fût défendu sévè-
rement , et mettait un habit vert , pour
aller à quelques parties de plaisir. Un
jour qu'il croyait le roi absent , il va ,
ainsi vêtu , se promener avec sa maîtresse
dans les jardins de Sans-Souci. Au détour
d'une allée, il aperçoit le roi, qui le recon-
naît à son épée qu'il avait eu l'impru-
dence de garder. Qui êtes-vous ? lui dit
Frédéric. « Sire , répond le jeuite homme,
» en se remettant de sa frayeur , je suis
» un officier , mais je me promène ici
» incognito. » Le roi se mit à rire et lui
dit : « Eh bien ! prenez garde que le roi
» ne vous voie , » et il passa son che-
min.— Cependant cette indulgence de
Frédéric à l'égard de la liberté des repar-
ties , avait des exceptions ; quelquefois il
en prenait de l'humeur , et ne pouvait
s'empêcher de la témoigner, et il reste
toujours vrai en général qu'il n'est pas
bon de rire avec les rois. « Frédéric , dit
» l'auteur de sa vie , aimait à railler les
» autres, et la plaisanterie lui était désa- ■
» gréable , lorsqu'il en était l'objet. ■
» Quand il voyait un médecin , la prc-
» mière chose qu'il lui demandait, c'était
» le nombre de personnes qu'il avait en-
» voyées dans l'autre monde. L'un d'eux
» lui répondit : Pas tant que vous ,
» Sire. Il lui tourna le dos et ne lui re-
» parla de sa vie. » — Ce qui avait irrité
Frédéric contre Voltaire , c'est que Mau-
pertuis lui avait raconté l'anecdote sui-
vante. Ue jour que le général Maùstein
était dans la chambre de Voltaire , oii
celui-ci corrigeait le stiledcs Mémoires
sur la Russie, composés par cet officier,
le roi lui envoja une pièce de vers de sa
facou à examiner. Voltaire renvoya Mans-
FRE
tein, en lui disant : » Mon ami, à une autre
i) fois ; voilà le roi qui m'envoie sou linge
» sale à blanchir, je blanchirai le vôtre
« après. M — La Métrie ayant dit au roi
qu'on était bien jaloux de la faveur et de
la fortune de Voltaire , il répondit : « Lais-
» sez faire : on presse l'orange , et on la
» jette quand on en a avalé le jus. » « Fré-
» déric, ajoute sou biographe, n'eut ja-
» mais d'autre dessein que de faire corri-
» ger et publier ses ouvrages, par cet
» auteur à la mode. » — Lorsque l'abbé
Baynal vint à Berlin , Frédéric demanda
à le voir , et se vengea par une petite
méchanceté du passage de Yllistoirc
des deux Indes , oii il n'était pas ménagé.
Le roi lui parla de son Histoire du Sla-
thouderat et de ses Mémoires histori-
ques, et aiFecta de ne lui pas dire un mot
de V Histoire des deux Indes. L'abbé lui
dit : « Sire , j'ai fait encore quelques au-
» très ouvrages. — Je ne les connais pas,
» lui répondit Frédéric; » et il parla
d'autre chose. On prétend que l'abbé
n'aurait pas refusé la place de président
de l'académie si on la lui eût offerte ; on
en toucha quelque chose à Frédéric, qui
rejeta la proposition bien loin. Il écrivit
en même temps une lettre à d'Alembert,
oîi il disait les plus belles choses de l'ab-
bé Raynal , mais dans les petits soupers
on le traitait de fanatique et de dc'clama-
teur. — Frédéric se moquait de son aca-
démie , qu'il avait appris à connaître par
toutes ses guerres intestines , aussi bien
que par la bizarrerie et la contradiction
de ses jugemens. « Un jour , dit l'auteur
« de sa f^ie , il voulut s'assurer si les
M louanges que les académiciens prodi-
« guaient à ses Mémoires étaient bien
» sincères. Pour cet effet , il fit passer au
» secrétaire perpétuel un manuscrit de
» sa façon , en cachant soigneusement
» d'où il venait. Soit oubli ou négligence,
» il n'en fut fait aucune mention. Au
» bout de quelque temps , le nom de
y> l'auteur transpira , et les louanges re-
» commencèrent, mais on prétend que
V Frédéric répondit : f^ous m^avez ap-
y> pris ce que je dois penser de vos suf-
» frages. » — Ce qui pouvait un peu
consoler l'académie, c'est que les juge-
V.
FRE 48ç)
mens de Frédéric n'étaient quelquefois
pas mieux motivés. « Avant que Voltaire
» eût avoué au roi qu'il avait fait la Pu-
n celle d'Orléans, Frédéric prétendait
» que c'était faire injure au plus bel
» esprit de la France , que de lui attribuer
» ce qu'il appelait une infâme rapsodie,
» Quand on sut que Voltaire en était l'au-
» teur, il se la fit lire par d'Algarotti,
» et dit : Ce n'est pas cela que j'avais
» lu; ceci est charmant, il n'y a que
» f^oltaire capable de faire un si bel ou-
» vrage. C'était le même ouvrage , mais
» les noms en imposent. » Le roi répara
en quelque sorte cette inconséquence par
les vers suivans , oîi la Pucelle sert de
pendant à Candide -.
Candide est un petit Tanricn ,
Qui n'a ni pudeur ni cervelle;
A ces trails on le connaît bien
Frère cadet de la Purelle.
Leur xieux papa, pour rajeunir,
Doiuierait une belle somme: ^
Sa jeunesse Ta rcTenir,
Il fait des œuvres de jeune homme.
Tcut n'est pas bien: lisez l'écrit ,
La preuTe en esl à chaque page-.
Vous le Terrez en cet ouvrage ,
Où (ou (esl nid/, comme il le dit.
Quand Frédéric eut bien apprécié ses
académiciens, non-seulement il en fit son
jouet , mais « il encouragea , dit l'auteur
» de sa P^ie, les plaisanteries que l'on fit
» contre eus , et donna même le plan
» d'un ouvrage critique sur leurs Mé-
» moires. Quand il les faisait venir , c'é-
» tait souvent pour se moquer d'eux. Il
3) appelait l'un son Montesquieu , un au-
)) treson d'Alembert, un troisième son
)) Fontenelle. Les bons académiciens fai-
» salent de profondes révérences , et al-
» laient raconter ces beaux complimens
» à leur retour à Berlin , pendant que
» Frédéric riait de leur crédulité et s'ap-
w plaudissait de son persifllage. Il y a
» dans une ville de Suisse un homme em-
)) ployé' à la poste aux lettres , qui a été
» académicien de Berlin. Il ne manque
» pas pour se donner du relief, de faire
j> parade de ce titre. Un plaisant lui di-
w sait un jour : f^ous n'avez guère chan-
)) gé d'état ; vous étiez homme de lettres ;
» maintenant vous êtes l'homme aux
» lettres. Un autre suisse , aussi membre
3i..
490 FRE
M de l'acadëmie de Berlin , a postulé dans
» sa patrie une place d'espèce de mas-
>j sier , qui porte la livrée de l'état. Il
» n'a pas réussi , et a été obligé de rester
M à Berlin (*j. » — Après le départ de
Voltaire , Frédéric défendit les plaisan-
teries irréligieuses; et causant un jour
avec la comtesse die Camas , il lui dit qu'il
estimait fort heureuses les personnes qui
pouvaient croire les vérités de la re-
ligion ; mais que pour lui, ayant une
fois pris son parti , il ne pouvait plus
changer; « car, ajouta'-t-il , si mes sujets
» me voyaient maintenant aller à l'église,
w ils se moqueraient de moi , et m'accu-
j) seraient de faiblesse. — Non , Sire, lui
» répondit M™* de Camas, on les verrait
M verser des larmes de joie. » — ^ Nous
finirons tous ces détails par le jugement
qu'un écrivain connu vient de faire de
l'administration de Frédéric, à l'occasion
du panégyrique de ce prince', publié par
l'auteur de V Essai gênerai de lactique.
« Depuis cette guerre de sept ans , les
» forces de Frédéric n'ont guère servi
» qu'à maintenir la paix en Europe , en
« épouvantant ceux qui seraient tentés
» de la troubler. Dans ce long repos , il
« restait au roi de Prusse à acquérir une
w autre gloire qui eût expié cette gloire
)) du guerrier qui, comme le dit Montes-
w quieu , laisse toujours une grande
« dette à payer à V humanité'. Je parle
» de la gloire de grand administrateur et
») de grand législateur. Le panégyriste de
j) Frédéric , attaché à la mémoire de ce
1» grand homme par quelque rapport se-
j> cret de goût et de génie , voudrait bien ,
» après en avoir fait le premier des rois
» guerriers , lui assigner encore une des
V places les plus honorables parmi les
» monarques administrateurs et législa-
» leurs. Il paraît que les esprits les plus
(l) On ne peut s'empêcher de faire ici une rédexinn
au»i Trappatile par «i lérilé, que Iiuniiliaiite pour le> pe-
lit! mprit» , qui >c croient «avaiis , p^rre qu'iU «ont mem-
bres d'un norpn répulé scienlill>|ue. Si sous les }'eus d'un
roi qui se connaissait en lioinmes, et surtout en hnmnies
de lettres, qui foulait s'illustrer par les sciences, par les
secours et l'éclat qu'il leur doiniait;si. dis-je , sous les
ypux et à la nomination immédiate d'un tel prince, de
wmblables personnages ont obtenu des fauUuili, que pen-
ser des académiciens des autres pays, que penser de c«
f[rnre d'honneur en général , que penser de ceux qui l'am ■
bitiuuucot? Fi'jrei Pitox, HtsiTOii, Plessis ( Armaud ;.
FRfe
» éclairés de l'Europe résisteront beau^
u coup à ce jugement : ce n^est pas qu6
le panégyriste dissimule les reproches
qui ont été faits à son héros ; mais il
en atténue trop quelques-uns , et ii
voudrait trop balancer les autres pat
quelques biens particuliers , ouvrage
de l'ordre et de l'économie du roi de
Prusse. Si on le considère comme légis-
lateur , ce Code Fre'de'ric , auquel il a
permis qu'on donnât son nom , ne mé-
ritait pas de le porter. Ce n'est guère
qu'un extrait dû droit romain , qui
n'est pas au dessus du livre de notre
Domat. Tous les défauts des lois romai-
nes y sont , au nombre près , parce
qu'on a tout abrégé ; et il est douteux
qu'on y ait ajouté une seule grande
vue de législation ; car ce n'en est pas
une que cet amour de simplicité et de
rapide exécution , qui lient bien plus
à l'esprit militaire qu'à l'esprit législa-
teur. Si on le considère comme admi-^
nistraleur , l'inflexible équité ordonne
de porter sur sa mémoire un jugement
plus sévère encore. On cite les terres
qu'il a fait défricher, les sables qu'il a
rendus fertiles, les nombreux villages
qu'il a élevés ou peuplés; des manu-
factures par lui créées ou encouragées ;
la population enfin augmentée dans
son royaume, tandis que partout ail-
leurs elle a beaucoup de peine à se
soutenir à son niveau. Tous ces faits
peuvent n'être pas assez bien établis ;
ils peuvent avoir été exagérés ; et quand
ils seraient tous vrais et tous exacts,
l'administration du roi de Prusse pour-
rait encore avoir été très vicieuse.
N'ayant aucune cour, aucun faste , avec
beaucoup d'économie , il a dû avoir
beaucoup d'argent , et avec de l'argent
il a pu faire des établisscniens utiles :
il en a fait. Mais ce qu'un roi , tel puis-
sant qu'il soit , peut faire par lui-même,
est toujours peu de chose en comparai-
son de ce que ferait sa nation , s'il la
laissait libre de toute gêne et de toute
entrave , en protégeant seulement son
industrie. Cent mille esprits qui médi-
tent constamment sur leurs propres in-
térêts, voient toujours beaucoup plus
FRE
» de choses et les voient mieux qu'un
» seul homme de génie qui médite quel-
« quefois sur les intérêts des autres. Fré-
)> déric avait une manie bien indigne d'un
» esprit supérieur. H voulait tout voir et
» tout administrer par lui-même; au lieu
» que les grands administrateurs, éclairés
» par un petit nombre de principes dont
" ils répandent la lumière sur leur na-
» tion , sont des spectateurs tranquilles ;
w et non des créateurs inquiets d'un ordre
» qui n'est jamais si beau ni si heureux
« que lorsqu'il s'établit par lui-même sur
M les lois éternelles de la nature des cho-
i> ses et des hommes. Le bien que Frédé-
» rie a fait, est celui d'un particulier
jj très puissant, plutôt que l'œuvre d'un
» souverain qui avait du génie : et si vous
» voulez prendre une juste idée du nié-
« chant système d'administration qu'il
» avait embrassé , voyez à quelles misé-
» râbles et honteuses pratiques ce système
w avait conduit un grand homme : voyez
» en quelle estime il avait pris cet art de
» nos finances , dont notre désespoir est
u de ne pouvoir nous délivrer; voyez-îe
» travailler de concert avec des faux-mon-
» nayeurs qu'il devrait punir du dernier
u supplice , et faire servir son efi&gie à
« attester un mensonge et à couvrir une
» fraude , multiplier des impôts à toutes
» les entrées , sur tous les objets de con-
» sommation , et se persuader encore ,
« comme les plus bornés de nos polili-
» ques, que ce qui est pris sur la denrée
» n'est pas pris sur la terre , que ce qui
» est pris sur les marchandises étrangères
» n'est pas pris sur les nationaux qui les
» achètent : voyèz-le porter l'inspection
» d'un inquisiteur, sur des actions aban-
M données à la liberté dans les empires
» les plus despotiques ; défendre à ses
M sujets riches de marier leurs filles sans
» sa permission ; leur interdire les longs
)) voyages ; ne pas leur permettre de
» transporter hors de la Prusse leur for-
» tune : le royaume d'un roi philosophe
» semble être converti en un cloître.
» Frédéric oublie , ou il ignore que la
» liberté est la chaîne la plus forte qui
» attache les hommes dans un pays , et
» il croit rendre son empire florissant en
FRE 491
X dépouillant ses sujets des droits les plus
M sacrés de la nature. Je ne croirai donc
» pas à tout ce qu'on a dit des prospérités
» de son peuple , parce que je ne crois
1) pas aux prospérités des esclaves ; et
» quand même ce qu'on en a dit serait
i> incontestable , je croirai qu'avec un
« système opposé , Frédéric eût fait cent
« fois plus de bien encore. Et qu'on ne
» dise pas que j'oppose un principe gé-
» néral à un fait ; ce principe général est
)) fondé sur des faits universels ; au reste,
a et je dois le répéter , le panégyriste du
u roi de Prusse énonce lui-même presque
« tous ces reproches, et s'il tâche de les
» adoucir en faveur d'un monarque qui a
)> d« si grands droits à l'admiration uni-
« verselle, on voit sans incertitude qu'il
j) ne partage aucune de ses erreurs , et
« qu'il est loin , comme tant d'autres, de
» se servir des fautes d'un grand homme,
» pour attaquer des vérités auxquelles on
" doit plus de respect encore. « Outre
la vie dont nous avons cité quelques pas-
sages, et qui a paru à Strasbourg en 17 88 ,
4 volumes in-1 2 , l'abbé Denina en a dop-
né une autre en 17 89, beaucoup plus
courte, mais écrite avec plus de discer-
nement et de sagesse , 1 volume in-8. Le
meilleur ouvrage anglais sur Frédéric II
est intitulé Tableau du règne de Fré-
déric II , avec un parallèle entre ce
prince et Philippe II de Macédoine , par
Gillies , Londres, 1 809. ( Le général Jomi-
ni , dans son Traité des grandes opéra-
tions militaires , a donné l'Histoire cri~
tique des campagnes de Frédéric , corn,'
parées à celles de V empereur Napoléon.
On trouve dans les œuvres de Guibert YE-
loge historique de Frédéric II .• on peut
consulter encore P^ie de Frédéric II
(par Lavaux ) , Strasbourg , 1 788 , 4 vol.
in-8 ; Lettres sur Frédéric II { par le
mêroe ) , ibid. , 3 vol. in-S ; l'ouvrage de
Busching , Caractère de Frédéric II ^
traduit de l'allemand, et les souvenirs de
Thiébaud, Taris, 1810, 5 vol. in-8.) On
a publié ses OEuvres primitives , c'est-
à-dire , la collection des ouvrages qui
avaient paru de son vivant, en 4 vol.
in-8 , Amsterdam , 1 790, et ses OEuvres
posthumes , en 20 vol. in-8 , avec Sivie,
493 FRÈ
Amsterdam, 1789. Nous n'entrerons pas
dans le détail de tout ce qu'ils présentent
de matières propres à l'éloge ou à la cen-
sure. I! en est peu qu'on puisse regarder
comme lui appartenant en entier. Mais si
quelques philosophes lui ont attribué les
leurs , un d'eux fut accusé de s'être attri-
bué les siens ; et l'on sait ce qu'il lui en
coûta. Il n'y a pas d'apparence qu'un
prince qui avait un grand sens ait écrit
tout ce qu'on lit dans quelques-uns de
ces ouvrages , moins encore qu'il l'ait
pensé. ( Parmi ses ouvrages on remarque
VAnti- Machiavel; les Mémoires pour
servir a l'histoire de la maison de Bran~
dehourg ; les Poésies du philosophe de
Sans- Souci; V Histoire de mon temps
(1740-45), V Histoire de la guerre de
sept ans , etc. On peut résumer ainsi le
règne de ce prince) : il montra de bonne
heure du goût pour l'étude et les lettres ,
et ce fut même un sujet de brouillerie
avec son père , qui connaissait le danger
de ses études philosophiques ( voyez Fré-
déric-Guillaume). Le jeune Frédéric ne
persista pas moins dans ses idées ; il étu-
dia la philosophie de Wolff, se lia avec
"Voltaire , et se permit avec lui les plai-
santeries les plus indécentes contre le
christianisme et contre les prêtres. En
montant sur le trône , il ne craignit pas
de renoncer à tout acte de religion , et il
accueillit successivement tous les écri-
vains à qui leurs ouvrages irréligieux at-
tiraient quelques traverses , c'est-à-dire ,
tous les hommes dont les idées d'innova-
tion menaçaient leur pays d'une révolu-
tion prochaine. Il est vrai que lorsqu'il
connut mieux leurs principes , il les éloi-
gna de sa cour ; mais devait-il leur en
permettre l'entrée? N'était-ce pas une
injure faite aux autres puissances, que
de donner un asile à des hommes pros-
crits dans leur patrie pour leurs principes
dangereux ? Berlin éprouvera long-temps
l'influence funeste de ses exemples, de
ses écrits et de ceux des philosophes qu'il
admettait dans ses états et même dans
son intimité. On a dit néanmoins qu'il
aima , qu'il protégea les catholiques ; ce-
pendant, on lit dans l'histoire , qu'à son
entrée dans la Silésie , il favorisa les lu-
FRB
thériens , et qu'il étendit leurs privilèges
au point qu'ils eurent des églises de toute
part ; qu'au contraire , il prit des mesures
fâcheuses contre les catholiques , qu'il
défendit les pèlerinages , supprima de»
fêles , et conféra , de sa propre autorité ,
des bénéfices à des ecclésiastiques réfu-
giés dans ses états , et suspects sur la re-
ligion , tels que l'abbé de Prades et l'abbé
Bastiani. Son mépris pour la religion était
tel, qu'il fit construire, sur la place des
Gendarmes à Berlin , une salle de spec-
tacle entre une église catholique et un
temple luthérien , « de manière , dit un
» historien de sa vie , que les murs de
» ces édifices se touchaient , et que sou-
» vent l'office divin était interrompu par
» le bruit de l'orchestre et le chant des
» acteurs. » Il est triste de voir qu'un
souverain qui devrait protéger la religion
«n fasse ainsi un sujet de dérision et de
caprice. Il n'avait guère plus de respect
pour la justice , que par dessus tout un
monarque devrait respecter , puisque
c'est le lien de toute société ; « comme
» il aimait , dit un de ses historiens , à
» être le maître en tout , et qu'il ne pou-
» vait soidfrir qu'on lui résistât ; afin
» d'entretenir la crainte dans tous les
D tribunaux et les collèges , il cassait de
» temps en temps des gens en place sans
w examen , sans donner raison de sa con-
» duite , sans qu'il y eût aucune appa-
)) rence de faute. » Nous ne lui reproche-
rons pas Dresde livrée au pillage , la gar-
nison de Nciss passée au fil de l'épce, les
forteresses de Custrin et de Spandaw
pleines de prisonniers d'état. Ce sont là
de ces traits propres à tous les conque-
rans , et l'on ne peut en attendre davan-
tage d'un guerrier incrédule. Si nous
passons à l'administration intérieure et
aux détails domestiques, il était d'une
sévérité implacable, et oubliait aisément
les plus importans services. On lui re-
proche aussi son goût pour la raillerie ,
si peu séant pour un roi. Il n'est pas un
seul de ses amis, de ses courtisans, de
SCS savans , de ses philosophes, qu'il
n'ait cherché à humilier. On l'accuse en-
core d'une avarice excessive , et ses his-
toriens en citent des exemples peu hono-
FRE
râbles. L'auteur du Voyage en Prusse ,
in-8 , 1807 , prétend qu'il n'aimait per-
sonne , et cite de lui des traits étranges
d'égoïsme et de dureté ; il lui reproche
des actes iniques, une profonde indiffé-
rence pour l'opinion publique, son mé-
pris pour ses sujets , sa défiance de ceux
qui l'entouraient. Il faut tirer le voile sur
ses mœurs, Voltaire en a dévoilé la tur-
pitude. Quant à ses écrits , on est fâché
d'y voir Frédéric descendre au rôle cho-
quant d'un conjuré , et parler de la reli-
gion avec une licence révoltante et le ton
d'un homme de mauvaise compagnie. Il
est vrai que dans quelques-uns de ses ou-
vrages il a changé de langage, et qu'a-
près avoir approuvé les projets des phi-
losophes , tant qu'il a cru qu'ils n'en vou-
laient qu'à la religion , il a cherché à
les réfuter ; mais c'est lorsqu'il les a vus
attaquer aussi les rois. « Que voulez-vous,
» écrivait-il à d'Alembert, que le public
« pense , lorsqu'il voit des écrits du même
» auteur se contredire , qu'on voit des
» libelles infâmes paraître contre le gou-
» vernement , et des cyniques effrontés
» qui mordent indifféremment tout ce
» qu'ils rencontrent. » Il écrivait , dans
un autre endroit, toujours en parlant
des philosophes : « Mon avis serait de
•» loger ces messieurs aux Petites-Maisons ,
» pour qu'ils fussent les législateurs des
M fous leurs semblables, ou de leur don-
» ner à gouverner une province qui mé-
» ritât d'être châtiée. Ils apprendraient ,
» par leur expérience, après qu'ils y au-
» raient tout mis sens dessus dessous,
M qu'ils sont des ignorans , et surtout
» qu'on s'expose à dire force sottises
» quand on se mêle de parler de ce qu'on
» n'entend pas. » Il est malheureux qu'il
» n'ait pas toujours pensé de même. « Fré-
» déric fut , dit un écrivain judicieux ,
)> un grand capitaine ; mais le litre de
» grand roi embrasse de plus hautes qua-
» lités. Les vertus guerrières étendent
» les empires : ce sont les vertus civiles
M qui les affermissent Frédéric a créé
» l'armée prussienne qui déjà n'existe
» plus ; il n'a point créé de nation. Il a
w fondé une tactique nouvelle ; il n'a
>' point formé cet esprit public et social
FRE 4g3
» qui naît de l'amour de l'ordre. Il a
M montré en cela moins de prévoyance
» qu'il n'appartient à un prince d'en
» avoir Il fallait donc fonder son trône
» sur une base plus solide qu'une épée;
» il fallait rendre sa nation forte ea
» mœurs et en principes , y répandre cet
» esprit d'ordre et de vertu qui résiste
» aux chances des combats et aux se-
» cousses des révolutions ; et , par un
» insigne aveuglement , ce prince ras-
» sembla autour de lui tous les esprits
» forts de l'Europe , comme pour multi-
» plier dans son pays les exemples de
M licence, d'impiété et de dépravation. «
Pour terminer cet article , nous y ajou-
terons ce portrait de Frédéric tracé en
peu de mots. Sa vie ne fut qu'un enchaî-
nement d'artifices : en violant toutes les
lois de l'humanité , il avait l'audace d'en
proclamer les droits. Dominé par deux
passions cruelles , l'ambition et l'avarice,
il se montra plus jaloux de l'affermisse-
ment de son pouvoir que du bonheur de
ses sujets.
* FRÉDÉRIC-GUILLAUME II, roi
de Prusse, né le 25 septembre 1744 , était
neveu du grand Frédéric , qui lui té-
moigna toujours beaucoup d'affection ,
mais ne voulut pas qu'il fût ménagé sous
aucun rapport. Ainsi on l'exposait aux
hasards de la guerre comme un simple
hussai'd. De bonne heure il donna les plus
grandesespérances. Chargé, dans la guerre
de la succession de Bavière , de conduire
un corps d'armée en Silésie, il le ramena
sans se laisser entamer , quoiqu'il fût
suivi par des forces beaucoup supérieures
aux siennes. Il parvint au trône à l'âge
de 42 ans, le IG août 17 86, et montra
d'abord des intentions de bienfaisance. Il
répara plusieurs injustices de son prédé-
cesseur, diminua quelques impôts, abolit
des monopoles vexatoires , et voulut que
ses sujets jouissent d'une plus grande li-
berté ; mais d'un autre côté , il se montra
fort jaloux de son autorité , et il écarta
successivement du ministère les hommes
les plus distingués par leurs talens et
leur expérience. En même temps il s'a-
bandonnait à son goût excessif pour la
débauche , et il se laissait dominer par
494 FRE
ses maîtresses et des favoris obscurs. Un
autre travers de Frédéric fut sa crédulité
pour les illumines , alors très nombreux
en Allemagne, qu'il accueillit dans son
palais, et qui parvinrentà égarer son ima-
gination et à tromper son esprit. Dès
lors, les emplois ne furent plus accordés
qu'aux plus misérables intrigues; les tré-
sors que Frédéric avait amassés pour des
circonstances importantes, furent dissi-
pés d'une manière bonteuse, et l'armée
qui cessa d'être encouragée par la pré-
sence de son chef, perdit tout à fait sa
supériorité ; mais ce qu'il y eut de plus
malUeureux encore, ce fut sa faiblesse et
sa versalililé dans les occasions les plus
importantes. On le vit successivement
abandonner les Turcs , les Polonais elles
Belges , après les avoir excités à des at-
taques imprudentes. En 1792, il serait
à la tète de la coalition qui devait réta-
blir Louis XVI sur le trône , et après être
parvenu à 30 lieues de Paris avec une
armée de 80,000 hommes , il négocia avec
Je parti révolutionnaire, au moment où
il fallait agir avec le plus de vigueur ,
pour ne pas lui laisser le temps de se re-
connaître. Son ai-mée revint sur le Rhin,
où elle combattit encore deux ans sans
résultat. Il s'occupait en même temps ,
de concert avec la Fiussie, d'un nouveau
partage de la Pologne , et ce fut lui qui
triompha en 1794 deKosciusko, et s'em-
para de Cracovie. En 1795, il se retira
tout à fait de la coalition , abandonnant à
la république française ses états de la rive
gauche du Rhin, et laissant l'Autriche
presque seule aux prises avec cette puis-
sance , dans le moment où son agression
et ses menaces avaient porté le parti ré-
volutionnaire de France à mettre sous les
armes une immense population. C'est à
une telle défection et dans de pareilles
circonstances, qu'il faut sans doute attri-
buer tous les malheurs qui accablèrent
depuis l'Europe. Frédéric-Guillaume ne
jouit pas lui-même long-temps de la paix
qu'il venait de procurer à ses sujets. Il
mourut le IG novembre 1797 , laissant la
couronne à son fils Frédéric-Guillaume III .
M. le comte de Ségur aîné a publié en
1 800 , V Histoire des principaux événe-
FRE
mens du règne de Fre'déric-Guillaumc Ily
roi de Prusse, et tableau politique de
l'Europe depuis 178G jusqu'en 1796,
contenant un précis des révolutions de
Brabant, de Hollande , de Pologne et
de France, 3 vol. in-8. Cette histoire est
écrite en général avec élégance. On y
trouve des portraits bien frappés ; mais
on y désirerait de temps en temps quel-
que chose de plus précis, de plus mâle,
de plus sévère.
* FRÉDÉRIC-GUILLAUME, premier
roi de Wurtemberg, naquit le 6 septem-
bre 1 7 64 , de Charles-Eugène duc de Wur-
temberg. Il était entré très jeune au ser-
vice de Prusse en qualité de colonel , et
s'élait distingué dans la guerre de la suc-
cession pendant laquelle il avait obtenu
le grade de major-général. L'impératrice
Catherine II , au service de laquelle il s'é-
tait placé ensuite, le fit lieutenant-général
et lui confia le gouvernement de la Finlan-
de. Marié d'abord à la princesse Auguste-
Caroline de Brunswick-Wolfcnbuttel, puis
en secondes noces ( 1 8 mai 17 97) à Char-
lotte-Àuguste-Mathilde d'Angleterre, il
fut appelé sur le trône ducal de Wurtem-
berg , par la mort de son père qui eut lieu
le 23 décembre 17 97. Son administration
est remplie d'un grand nombre d'événe-
mens. Une constitution souscrite à Tu-
bingue en 1 514 par le prodigue Ulric, et
garantie depuis par l'Autriche, la Prusse
et le Hanovre, assurait aux Etats de Wur-
temberg le droit de surveiller l'assiette
de l'impôt et l'emploi de son produit : le
duc chercha à s'affranchir de cette gêne ,
et comme il trouva de la résistance , de
violens démêlés eurent lieu entre lui et
les Etats : il ne vit même dans cette op-
position que le résultat des idées déma-
gogiques dont ses sujets commençaient à
être infectés, et fit arrêter les principaux
membres de cette assemblée, comme ac-
cusés d'entretenir des relations politique»
avec les républicains français. Un traité
de subsides conclu le 20 avril 1800 avec
l'Angleterre, l'intéressant aux négocia'
tions de la paix d'Amiens , il obtint après
leur conclusion , des indemnités assej
considérables pour lui et pour sa famille
Dans le récès de la députation de l'empire
i
FRE
( 25 février J 80Sj , il reçut, ainsi que cinq
autres princes proteslans la dignité élec-
torale. Lorsque la guerre fut déclarée par
la France à l'Autriche, l'électeur de Wur-
temberg oublia ce qu'il devait à la confé-
dération germanique pour ne plus songer
qu'à ses idées ambitieuses : il reçut Buo-
naparle à Ludwigsbourg, et conclut avec
lui le 4 octobre 1805 un traité par lequel
l'intégralité de son électorat était garan-
tie , et en revanche il devait fournir à son
prolecteur un corps de huit à dix mille
hommes. C'était une époquedeconfusion :
chaque prince usui-pait les titres ambitieux
que son orgueil lui faisait imaginer : ainsi
l'archiduc d'Autriche, François II, avait
déjà en 1804 pris de sa propre autorité
le titre impérial : les électeurs de Wur-
temberg et de Bavière suivirent son
exemple ; ils prirent le titre de roi sous
lequel ils furent désignés comme alliés
de Buonaparte dans le traité de Pres-
bourg : ils se firent proclamer dans leurs
états le l*"" janvier 1806. Le nouveau
roi de Wurtemberg avait reçu en outre
par ie même traité les cinq villes dites
du Danube, les deux comtés de Hohen-
berg, le Landgraviat de Nellenbourg
et la préfecture d'Altorf. Tout souriait
à ce nouveau monarque. Frédéric I avait
pris Buonaparte pour modèle, et il ten-
dait comme lui au pouvoir absolu : ce
qui était contraire à l'ancienne organi-
sation de cette principauté. En vertu
de la convention signée le 1 2 octobre
1805, Buonaparte avait délégué à Fré-
déric toute la puissance souveraine :
voulant en conséquence user pleinement
du droit que lui accordait son maître, il
cassa les Etats le 3 du même mois : alors
disparut l'ancienne constitution du pays :
de là de sourds mécontentemens , puis
des soulèvemens qu'il fallut réprimer par
des moyens extrêmes , enfin cette fer-
mentation des esprits qu'une mesure in-
considérée excita et entretint jusqu'en
1814 , époque où le roi se vit contraint
de faire desconcessions exorbitantes et de
donner une constitution qui lui attira de
la part de la noblesse médiatisée de si
amères et de si j ustes censures. Il avait été
un des premiers à signer l'acte de confé-
FRE 495
déralisme des états du Rhin proposé par
Buonaparte ( 12 juillet 1806 ). Après avoir
assisté à la conférence d'Erfurt qui eut
lieu en 1808 entre Buonaparte et l'empe-
reur Alexandre, il prit l'année suivante
ainsi que cinq autres princes de la con-
fédération , la part la plus active à la
guerre des Français contre l'Autriche. La
paix de Schœnbrunn lui permit de s'oc-
cuper un peu de son royaume , et on le
vit faire des échanges de territoire avec
le roi de Bavière. Après avoir assisté en
1809 à l'anniversaire du couronnement
de Buonaparte , il réunit encore ses trou-
pes aux troupes françaises pour faire la
campagne de Russie. Après le désastre de
cette folle expédition , il resta encore
quelque temps fidèle à son allié ; mais
cédant à la nécessité des circonstances ,
il fit comme le roi de Bavière : il se ran-
gea du côté des Russes et des Prussiens.
Sa mémoire n'est pas dans cette circon-
stance entachée de trahison , et ce n'est
pas sur un champ de bataille que se fit ce
grand revirement. Dès le 22 octobre 1813,
un de ses ministres entama des négocia-
tions à ce sujet, et le 8 du mois suivant le
comte de Zeppelin signait à Fulde, en
son nom , un traité par lequel il promet-
tait de donner 12,000 hommes aux puis-
sances alliées. On a remarqué le mani-
feste qu'il publia dans cette circonstance r
il se borne à reprocher à Buonaparte d'a-
voir laissé dégarnies de troupes et expo-
sées à l'invasion des ennemis, les fron-
tières du royaume que l'acte de con-
fédération lui imposait de protéger. Lors-
que les événemens qui amenèrent la chute
de Buonaparte eurent été accomplis, il
se rendit à Vienne et assista au congrès
qu'il quitta brusquement pour revenir à
Stuttgard< son titre de roi avait été main-
tenu par les hautes puissances. Il convo-
qua les Etats pour le 15 mars 1815, et,
lorsqu'ils furent réunis , il leur présenta
l'acte constitutionnel qu'il donnait à son
peuple. Cet événement produisit une sen-
sation très forte dans toute l'Allemagne,
et l'on assure que cette concession blâ-
mée partons les souverains , empoisonna
le reste de sa vie. Il mourut le 30 septem-
bre 181 G :son fils Guillaume 1% né le 2 T
496 FRÉ
septembre 1807 lui a succédé. Le carac-
tère de Frédéric présente de singulières
variations : pendant presque toute sa vie,
il fut l'ennemi des idées libérales et ten-
dit au pouvoir absolu : c'était cet amour
de l'autorité qui avait excité celte lutte
qu'il avait eu à soutenir avec les Etats 5
c'était la même passion qui l'avait en-
gagé dans l'alliance qu'il contracta avec
Buonaparle, et voilà qu'à la fin de sa vie,
il renonça à un système auquel il avait
dû sa puissance, avec ses titres d'élec-
teur et de roi. Yit-il dans la chute de son
protecteur une grande leçon, et redouta-
t-il une même catastrophe due , comme
la sienne , à l'abus du pouvoir ? ou bien
céda-t-il à cette puissance secrète qui
agit sur tant d'esprits en 1814, et qui ,
en préconisant les idées modifiées de la
révolution française , opéra l'état de crise
politique où se trouvent maintenant tous
les états de l'Europe. Frédéric avait du
goût pour les arts , mais il les encoura-
gea avec trop peu de discernement. Il
avait donné l'une de ses filles en mariage
à l'un des frères de Buonaparte , Jérôme ,
alors roi de Westphalie.
* FRÉDÉRIC -AUGUSTE, premier
roi de Saxe, né le 23 décembre 1750,
était fils de l'électeur Frédéric-Christian ,
auquel il succéda en 1763 : le jeune prince
n'avait alors que 13 ans. Jusqu'en 1768
la régence fut entre les mains du prince
Xavier, l'aîné de ses oncles. Alors la Saxe
eut beaucoup à soufi'rir de la mauvaise
administration de ce prince , ensorte qu'à
l'époque oii le jeune électeur prit les rê-
nes de l'administration , il avait bien des
maux à réparer. Cependant la sagesse de
sa conduite, l'économie sévère qu'il ap-
porta dans les finances , et le soin qu'il
mit à faire oublier le dernier gouverne-
ment, contribuèrent en peu de temps à
changer la face de ses étals. Il était di-
rigé par les habiles conseils de son mi-
nistre Gutschmid, et ce fut grâce à son
zèle et aux bonnes intentions de l'élec-
teur que l'on vit bientôt renaître l'indus-
trie, et le papier monnaie qui était discré-
dité reprit sa valeur, en même temps que
les esprits commençaient à avoir quelque
confiance danslegouverneraent. En 1 769,
FRÉ >
Frédéric épousa la princesse Marie-Amélie-
Auguste, sœur de l'électeur de Bavière.
Frédéric s'occupa continuellement de la
égislation criminelle de ses états; il y
apporta des modifications dictées pat
l'humanité : ainsi en 17 70 il fit abolir la
question et la torture. Malgré ses inten-
tions paternelles hautement manifestées,
il se forma contre lui en 1776 un com-
plot, auquel on a prétendu qu'avait parti-
cipé sa mère rélectrice douairière, mécon-
tente de ce qu'on l'avait éloignée des af-
faires. Ce fut le cabinet de Berlin qui en
eut connaissance et qui en instruisit l'E-
lecteur. Le colonel Aydolo , saxon d'ori-
gine , était le chef de la conspiration : il
fut arrêté et renfermé. Au reste dans cette
circonstance malheureuse, Frédéric eut
des preuves éclalantes de dévouement et de
zèle de la part d'un de ses chambellans ^
nommé xMariolini. Lorsque le roi de Prusse*
Frédéric II, prévoyant les ambitieux pro-
jets de l'Autriche, voulut former une ligue
pour tenir cette puissance en échec , il
y entraîna facilement le jeune électeur
de Saxe, qui ne cherchait qu'à défendre
les droits échus à sa mère par la mort de
l'électeur de Bavière, Maximilien-Joseph,
dernier enfant mâle de sa maison. Le
traité de Teschen signé le 16 mai 1779 ,
mit fin à la guerre , et en mênie temps il
fut convenu que l'Autriche renoncerait
à toutes ses prétentions sur la Bavière , et
que Frédéric serait substitué à tous les
droits de sa mère. Ce prince donna plus
tard une grande preuve de sagesse , lors-
qu'en 1791 il refusa la couronne de Po-
logne rendue héréditaire : elle lui était
proposée par la diète polonaise. Il savait
que le but de cette nation était <le se sous-
traire à l'influence , toujours malheureuse
pour elle , de la Russie , et qu'il était im-
possible de se maintenir sur ce trône nou-
veau, sans l'agrément de cette puissance
toujours rivale. Au reste il était dirigé
alors par les cabinets de Berlin et de
Vienne, qui le dirigèrent encore dans les
conférences de Pilnitz, faites à la suite
des progrès de la révolution française. Il
prit part à la coalition qui fut organi-
sée contre la France, et fournit son con-
tingent dans les armées qui combattirent
FRE
les troupes françaises jusqu'en 1796,
époque où fut conclu le traité de Berlin
( 6 août 1 796 ) , entre la république fran-
çaise et le roi de Prusse , relativement à
la neutralité du nord de l'Allemagne :
alors Frédéric se rangea à ce système
de neutralité , et ses troupes ne fui-ent
plus employées que pour la garde de ses
états : elles couvrirent ses provinces mé-
ridionales. D'ailleurs il avait conclu avec
Je général Jourdan un armistice dans le
même but. En 1806 il était toujours sous
l'influence de laPrusse et comme la guerre
était déclarée à ce royaume par la France,
non-seulement il permit aux troupes prus-
siennes de passer sur ses états , il fournit
encore 22,000 hommes destinés à agir de
concert avec elles. Après les victoires
d'Iéna et de Auerstaedt, la Saxe fut occu-
pée militairement par les Français, et il
ne fut permis à Frédéric de rester neutre
qu'à la condition de payer une contribu-
tion de guerre de 26 millions : les fortifi-
cations de Dresde furent même démolies.
Cependant Buonaparte aggrandit bientôt
la Saxe , et donna à l'Electeur le litre de
roi. C'est en cette qualité que ce prince
signa le 11 octobre 1 806, l'acte par lequel
il s'associait à la confédération du Khin.
Bientôt en échange du bailliage de Gom-
mern, du comté de Barby et d'une partie
du comté de Monsfeld , il reçut le cercle
de Cotbus, et, après le traité de Tilsitt, les
provinces méridionales enlevées au ter-
ritoire prussien , la nouvelle Prusse orien-
tale et occidentale et la nouvelle Silésie.
Ce royaume était considérable ; le prince
qui le gouvernait dut témoigner sa re-
connaissance à son bienfaiteur; il le tit
de la manière qui convenait à Buonaparte ;
car il tint continuellement à sa disposition
une armée de 20,000 hommes. Ces troupes
combattirent avec valeur dans la guerre
de 1809 contre l'Autriche. Les ennemis
envahirent ses états : sa capitale fut oc-
cupée, et lui-même, réduit par la chance
des combats, à fuir devant les vainqueurs,
se retira à Francfort. Buonaparte le ra-
mena dans sa capitale, après avoir vaincu
l'archiduc Charles , et le traité de Vienne
qui fut conclu le li octobre 1809, le dé-
dommagea des ennuis de cette campa-
Y.
fRE
497
gne; il obtint en effetle duché de Varsovie
et les districts de l'ancienne et de la nou-
velle Gallicie , qui avaient été acquis par
l'Autriche en 1772 et 1796. Le roi de
Saxe assista la même année à l'anniver-
saire du couronnement de Buonaparte ,
célébré avec la plus grande pompe à Pa-
ris. Jusqu'en 1812 Frédéric ne s'occupa
que de l'administration de son royaume.
Alors Buonaparte réunit à Dresde tous
les princes de l'Allemagne avec le roi de
Prusse et l'empereur d'Autriche. Il les
trouva tous dévoués à ses intérêts ; tousl'a-
bandonnèrent après le désastre de la cam-
pagne de Russie. Le seul Frédéric lui resta
fidèle , et quand l'empereur vaincu tra-
versa la Saxe, il trouva delà part du roi
son vassal les mêmes marques d'attache-
ment. Bientôt les armées alliées s'appro-
chèrent de son royaume : avant de le quit-
ter, il déclara à ses sujets par une pro-
clamation, qu'il restait fidèle aux enga-
geraens qu'il avait contractés depuis six
ans , et en même temps il remettait entre
les mains des Français ses places les plus
importantes. Cependant les victoires de
Lutzen et de Bautzen l'avaient rauiené
dans sa capitale ; il vit les dispositions de
ses sujets qu'avait électrisés la proclama-
tion de l'empereur Alexandre ; il lutta en
vain contre l'opinion hautement mani-
festée. On sait que les Saxons pendant la
bataille de Leipsick abandonnèrent les
Français , et d'amis qu'ils étaient le matin
ils furent ennemis dès le milieu de la
journée. Cette trahison, quelle qu'en soit
la cause, a été justement blâmée, et est une
grande tache dans l'histoire de la Saxe :
les soldats de Frédéric pouvaient quitter
la cause de l'homme qui les avait tyran-
nisés ; mais ce n'était point au milieu d'une
bataille déjà engagée qu'ils devaient faire
cette déclaration. Ce crime ne doit point
être imputé à Frédéric qui le vit com-
mettre avec douleur : lui-même fut
conduit et retenu à Berlin , lorsque la
puerre fut terminée. Quand les puis-
sances alliées réglèrent le sort des peu-
ples au congrès de Vienne , peu s'en fal-
lut que la Saxe ne fût rayée de la liste des
nations. Cependant la France et l'Autri-
che se déclarèrent en faveur de Frédéric :
32
498 FRE
lui-même protesta contre toute cession ,
mais le 9 février 1815, il fut obligé de si-
gner à Presbourg un traité qui , en le ren-
dant à ses sujets , détacha de sa souverai-
neté plusieurs provinces qui furent don-
nées a la Prusse, à rAulrichc et à la Russie,
et qui réduisirent son royaume à une su-
perficie de 938 lieues carrées. A l'épo-
que de la seconde invasion des alliés en
France , il fournit son contingent : il ac-
céda à la sainte-alliance le 1*' mai 1817.
Dès lors il ne s'est plus occupé que du
soin de faire oublier à ses sujets les maux
dont la guerre les a long-temps accablés.
Il était ami des arts et les protégea avec
discernement. Le 5 mai 1827 , la mort a
enlevé ce prince à ses sujets qui l'ont vi-
vement regretté. Il a eu pour successeur
son frère Antoine.
FRÉDÉRIC DE HOLSTEIN. Voyez
Adolvhk-Frédéric.
FRÉDÉRIC V, électeur Palatin, sur-
nommé roi cV hiver, Voy. Ferdinand II ,
empereur.
FREDOLI (Berenger), né à Benne,
en Languedoc , d'une famille noble, mort
à Avignon en 1323 ," était habile dans le
droit. Il fut choisi en 1298 par Boniface
"VIII, pour faire la compilation du Sexte ,
c'est-à-dire, du 6* livre des De'cre'taks ,
avec Guillaume de Mandagot et Richard
de Sienne. Clément V l'honora du cha-
peau de cai'dinal en 1325.
* FRÉE (Jean), ecclésiastique an-
glican , né à Oxford en 1711, consacra
sa vie à la prédication , à l'instruction de
la jeunesse et à la culture des lettres. Il fut
directeur de l'école de grammaire de
Saint-Sauveur , et occupa successivement
plusieurs cures. Il mourut dans un état
voisin de l'indigence, le 9 septembre
1791 . Son principal ouvrage est une His-
toire de la langue anglaise , en 4 parties ,
qui a eu plusieurs éditions. La 4« est de
1788. On a encore de lui des sermons et
plusieurs écrits de controverse, dirigés
la plupart contre les méthodistes , et des
poésies diverses.
FRÉGOSE, FuLGosE, ou Campo-Fré-
cosE , nom d'une illustre famille génoise
d'origine plébéienne, qui s'éleva dans le
H« siècle au dessus de la noblesse et
FRE
fournit plusieurs doges à la république.
Les membres les plus remarquables de
cette famille sont Frégosk ( Paul), cardinal,
archevêque de Gènes, sa patrie, doge en
1462 : il perdit cette placre quelque temps
après, la recouvra en 1463, et l'occupa
encore deux fois. Il mourut à Rome en
1498.
FRÉGOSE ( Baptiste ) , neveu du pré-
cédent , né à Gènes vers l'an 1 440, fut élu
doge en 1478. Il ne conversa que très
peu de temps cette dignité. La hauteur
de son caractère et la sévérité de son gou-
vernement le firent déposer la même an-
née. Il fut exilé à Trégui ; mais nous igno-
rons quand il mourut. Il égaya sa re-
traite par la lecture et le travail. On doit
à sa plume : 1° un ouvrage italien en 9
livres , mais qui n'a paru qu'en latin ,
Milan , 1 509 , in-folio , de la traduction
de Camille Ghilini ,' sur les actions mé-
morables, danslegoûtde Valère Maxime.
Les meilleures éditions de ce traité , sou-
vent réimprimé , sont celles de Juste Gail-
lard, avocat au parlement de Paris, qui
y a fait des additions, des corrections,
et l'a orné d'une préface. 2" La Vie du
pape Martin V. 3° Un Traité latin sur
les femmes savantes. 4° Un autre en ita-
lien contre l'amour, Milan, 1496, in-4,
traduit en français , 1581, in-4 ; l'origi-
nal et la version sont également rares.
FRÉGOSE ( Frédéric ) , né à Gènes en
1480, archevêque de Salerne et cardinal,
de la même famille que les précédens ,
défendit la côte de Gènes contre Corto-
gli , corsaire de Barbarie , qui la rava-
geait. Il surprit ce pirate dans le port de ,
Biserte , passa à Tunis, et à l'île de Gerbes,
et revint à Gènes chargé de gloire et de
butin. Les Espagnols ayant surpris Gènes
en 1622, Frédéric chercha un asile en
France. François I le reçut avec distinc-
tion , et lui donna l'abbaye de Saint-Be-
nigne de Dijon. De retour en Itïilie , il
fut fait cardinal et évêque d'Engubio , où
il mourut en 1541. La langue grecque et
l'hébraïque lui étaient familières. Son sa-
voir était soutenu par les vertus épisco-
pales. On a de lui un Traite' de VoraisoKi
en italien , Venise , 1542 , in-8.
FRÉGOSE (Antonio Phileremo), poèt
FRE
italien , du commencement du 16" siècle,
dont la Cerva Bianca , et autres poésies
ont été réunies à Milan en 2 vol. in-8 ;
le i" en 1615, le 2'= eu 1525, assez
rares.
FRÉGOSE. Foyez Fulgose.
FREHER. Foyez Marquart-Fkehkr.
' FREISLEBEN ( Christophe-Henri ) ,
jurisconsulte allemand, conseiller camé-
ral du duché de Saxe-Gotha et des mines
d'Altembourg , mort vers l'an 17 33, a
laissé plusieurs ouvi'ages fort utiles pour
celle du droit : 1" Corpus juris civilisaca-
dernicum, Altembourg, 1721 , in-4, très
souvent réimprimé. La dernière édition
est de 1789. 2° Corpus juris canonici
academicum, 177 8, in-4. La dernière
édition est de Bâle, 1773.3" Schutzius il-
lustratus sive compendium juris Schut-
zio Lauterbachianum ex complurium
ccleberrimorumjurisconsultorum, scrip-
lis ac notis illustratum , Altembourg ,
1734 , 2 vol. in-4 , compilation fort bien
faite , destinée à expliquer l'abrégé fait
par Schutz du CoUegium juris, de Lau-
terbach. 4° Une traduction allemande de
VHomme de cour , de Balt. Gracian , et
quelques opuscules moins importans-
FREIG ( Jean-Thomas ) , Freigius ,
natif de Fribourg en Brisgaw , enseigna
le droit avec réputation à Fribourg, à
Bâle et à Altorf, et mourut de la peste
vers 1583. On a de lui des Paralitles sur
le digeste , in-8 , et d'autres ouvrages.
FREIIND (Jean) naquit en 1675, à
Croton , dans le comté de Nort-Hampton,
d'un père ministre. Westminster fut sa
première école. Dès l'âge de 21 ans, il
mit au jour deux discours grecs, l'un
d'Eschine , l'autre de Démosthènes , avec
une traduction et des remarques. Il se
consacra ensuite à la médecine. Lecomte
de Péteiboroug l'emmena avec lui en
1705 en Espagne, alors le théâtre de la
guerre. Après y avoir exercé sa profes-
sion pendant deux ans , il passa à Rome
et s'y lia avec tous les savans qui culti-
vaient son art. Freind , de retour en An-
' gleterre , fut renfermé à la tour de Lon-
dres , soupçonné d'être d'intelligence
avec les ennemis de l'état : malheureuse-'
pient les philosophes et les lettres ne sont
FRE 499<
que trop souvent dans ce cas- là ( voyez
VïsPASiEji ). On sollicita en vain son élar-
gissement pendant six mois; mais au bout
de ce temps, le ministre étant tombé ma-
lade , Méad ( voyez ce mot } , confrère '
du prisonnier, ne voulut lui ordonner,
aucun remède , que Freind ne fût sorti de
la tour : conduite très blâmable et qui ne
prouve pas que Méad fût convaincu de
l'innocence de son ami. Cependant Freind
fut élargi , et obtint la place de premier
médecin de la princesse de Galles , depuis
reine d'Angleterre. Il mourut à Londres
à 52 ans , en 1728, membre de la société
royale. Freind était aussi heureux dans
la pratique , qu'éclairé dans la théorie.
Ses opinions étaient reçues en Angleterre,
comme celles d'Hippocrate dans la Grèce.
Des ouvrages qu'il a laissés les princi-
paux sont : 1° Histoire de la médecine^
depuis GaUien jusqu'au ii^ siècle .- li- .
vre savant traduit de l'anglais en fran-
çais, par M. Noguez,en2 vol. in-4, 1728.
2" V Emmetioloyie , ou Traité de V éva-
cuation ordinaire des femmes, traduit
en français par Devaux , 1730, in-12.
3" Lectiones chymicœ, Amsterdam, 1710,
in-8. 4° J'razïe'rfe/a^èt're. Tous les écrits
""de Freind ont été recueillis à Londres ,
in-fol. , 1733, et à Paris, 1735, in-4; sa
Fie est à la tête de cette collection.
FREINSHEMIUS (Jean) naquit en
1608 à Ulm en Souabe. Mathias Berneg-
ger , savant de Strasbourg , lui confia sa
bibliothèque et lui donna sa fille. L'uni-
versité d'Upsa luiayantproposé des avan-
tages considérables , il y alla professer
l'éloquence pendant 5 ans. La reine Chris-
tine , qui l'enviaità l'université, le choisit
pour son bibliothécaire et son historio-
graphe , avec sa table et 2,000 écus d'ap-
pointemens. Il fut bientôt obligé d'aban-
donner ces honneurs et de revenir dans
sa patrie , pour rétablir sa santé , que le
climat de Suède avait dérangée. L'élec-
teur Palatin lui donna un an après son
départ d'Upsal, en 1656 , une place de
professeur honoraire de l'université de
Heidelberg, et une charge de conseiller
électoral. Freinshemius n'en jouit pas
long-temps, étant mort en 1660, à 52
aps, Ce savant possiklait les langues n)Qrtei|
5oo PRE
et presque toutes les langues vivantes. Il
joignait à une littérature choisie, de
l'esprit et du goût. Il s'occupa toute sa
vie avec autant de zèle que de succès à
réparer les brèches que le temps avait
faites à quelques auteurs. (Il entreprit de
faire des Supplémens à Qulhte-Curce ,
et il y réussit , dans l'édition qu'il donna
avec un index et des commentaires ,
Strasbourg, 1640, 2 vol. in-8. Il fit avec
le même succès un semblable travail sur
Tite-Live dont il publia ( Lib. XI ad XX ) ,
Strasbourg, 1649, in-12, et donna en-
suite une édition qui contient 60 livres,
Strasbourg, 1654, in-4 ; enfin Doujat réu-
nit les 95 livres dans son édition de Tite-
Live ad usum Delphini. Les supplémens
de Tite-Live, moins estimés que ceux de
Quinte-Curce ont été cependant insérés
dans les éditions latines de Jean Leclerc
et de Crevier , de Lemaire , et traduits
en français par Durier, Guérin, Bureau
de la Malte. ) Il fut moins heureux dans ses
supplémens de Tacite , parce que , pour
faire revivre cet historien inimitable , il
fallait un génie aussi fort , aussi vigou-
reux, aussi profond que le sien, et il
s'en trouve à peine un dans vingt siècles.
Le Père Brotier y a depuis complètement
réussi. On a encore de Freinshemius des
Commentaires sur Florus , et quelques
autres auteurs latins , qu'il a ornés de sa-
vantes tables.
FREIRE DE ANDRADA ( Hyacin-
the ) , abbé de Ste. -Marie de Chans , né à
Bëja en Portugal , l'an 1 597 , parut d'a-
bord avec distinction à la cour d'Espa-
gne ; mais son attachement à la maison
de Bragance indisposa le ministère con-
tre lui. Il s'éclipsa jusqu'au temps que
Jean IV fut proclamé roi de Portugal, en
1640. Il se rendit auprès de lui, et en
fut très bien reçu. Ce monarque lui offrit
l'évèché de \isen qu'il refusa , prévoyant
que le pape, qui ne reconnaissait pas d'au-
tre roi de Portugal que celui d'Espagne,
ne lui accorderait point ses bulles. Il
mourut à Lisbonne , en 1657 , à 60 ans.
Freire avait l'esprit léger , mais le cœur
généreux et plein de franchise. Il défen-
dait ses amis en secret , et les reprenait
çn face. Il cultiva avèb succès la poésie
PRE
et l'histoire. On a de lui : 1° la Fie de
don Juan de Castro , in-fol. , traduite en
latin par Rotto, jésuite italien. C'est un
des livres les mieux écrits en portugais.
2° Des Poésies portugaises , en petit
nombre , mais élégantes.
FREITAG (Jean) , né à Nieder-We-
sel, dans le duché de Clèves, en 1581 ,
fut professeur en médecine à Helmstadt,
médecin en différentes cours d'Allema-
gne , et enfin professeur à Groningue ,
oii il mourut en 1641. Il ne cessa de cri-
tiquer les ouvrages du célèbre Daniel
Sennert , auquel il ne semble pas avoir
rendu assez de justice, quoique plusieurs
de ses critiques soient fondées. Les prin-
cipaux ouvrages de Freitag sont 1 " Noc-
tes medicœ , Francfort, 1616, in-4. 2"
Aurora medicorum, 1630, in-4 [voyez
Manget , Bibliotheca script, medicor.
1. 1 1 , p. 346 ). — Il ne faut pas le confon-
dre avec Jean Freitag , né à Perleberg
en 1 587 , qui pratiqua la médecine avec
réputation à Ratisbonne, où il mourut
en 1654, après avoir publié De melan-
cholia hypochondriaca ; ni avec Jean-
Henri Freitag , qui publia un ouvrage
sur la chimie en 1635 , à Quedlimbourg ;
ni avec le major Freitag, devenu célèbre
pour avoir donné à Francfort des coups
de bâton à M. Arouet de Voltaire , par
ordre de Frédéric II , roi de Prusse.
* FREMIN (René) , sculpteur, né en
1673 à Paris, où il prit les premières le-
çons de son art, alla à Rome pour se per-
fectionner , et se distingua à son retour
par divers ouvrages , tels que la Samari-
taine ; le Maître-autel de St.-Louis ; la
Statue de sainte Sylvie. Appelé en Espa-
gne par Philippe V , qui faisait alors con-
struire la Granja, à St.-Ildefonse, il con
tribua beaucoup à orner les jardins de ce
palais , il fit un grand nombre de statues
et de groupes ; mais l'ouvrage qui lui fit
le plus d'honneur fut la fontaine dile
des Grenouilles. On loue, dans cet ar-
tiste, l'élégance et la facilité avec la-
quelle il exécutait ses ouvrages ; mais on
critique l'attitude de ses statues et le ca-
ractère qu'il imprimait à ses dieux et à
ses nymphes , qui manquent de cette
simplicité grecque dont il aurait dû sç
FRE
pënëtrer à Rome. Il est mort à Paris ,
comblé d'honneurs et de richesses, en
1746.
FREMINET (Martin) , peintre, ne à
Paris en 1567 , fit le voyage de Rome
dans un temps que les peintres étaient par-
tagés entre Michel-Ange de Caravage, et
Joseph d'Arpino dit le Giospin. Il s'atta-
cha à prendre ce que ces deux peintres
avaient de meilleur, et y réussit. Fremi-
net était très instruit dans les sciences
relatives à son art : il savait l'anatomie ,
la perspective et l'architecture. Il fut un
grand dessinateur, et l'on remarque
beaucoup d'invention dans ses tableaux ;
mais sa manière fière , les expressions
fortes de ses figures , des muscles et des
nerfs durement prononcés , et les actions
de ses personnages trop recherchées , ne
sont point du goût de tout le monde. Ses
dessins sont terminés. Henri IV le fit son
premier peintre , et Louis XIII l'honora
du cordon de St. -Michel. Il peignit le
plafond de la chapelle de Fontainebleau ,
et mourut à Paris en 1619.
FREMI N VILLE (Edme de la Poix
de ), né en 1 680 à Verdun en Bourgogne ,
du lieutenant-général de cette ville , de-
vint lui-même bailli de La Palisse. Les
matières féodales sont les principales qui
se présentent à traiter devant un juge de
grandes seigneuries ; il en fit une étude
particulière. Le fruit de ses travaux fut le
Traité des dîmes , 1 vol. in-12; la Pra-
tique des terriers , en 5 vol. in-4 , qui
est un excellent traité des fiefs. Il fit un
6* volume, pour les droits des habitaus.
Il a extrait , par ordre alphabétique , le
Traité de la police du commissaire La
Marre , sous le titre de Dictionnaire de
la police, en 1 vol. in-4 ; ouvrage esti-
mé, et réimprimé en province, in-8.
Freminville mourut à Lyon, le 14 no-
vembre 1773. C'était un homme savant
et laborieux.
FREMIOT. Voyez Chantal.
FREMIOT (André), archevêque de
Bourges, né à Dijon "en 1573, d'une fa-
mille noble et féconde en personnes de
mérite , fut chargé d'a£faires importantes
sous Henri IV et Louis XIII , et s'en ac-
quitta en homme intelligent. On a de lui
FRE Soi
un discours des marques de V Eglise con-
tre les hérésies, 1610, in-8 , et d'autres
ouvrages. Ce prélat estimable mourut à
Paris le 13 mai 1641.
* FREMOPsT (Dom Charles), religieux
et réformateur de l'abbaye de Grammont ,
naquit à Tours en 1610. Dès qu'il eut
pris l'habit, à l'âge de 18 ans, il ne tarda
pas à s'apercevoir du relâchement qui
régnait dans la discipline de l'abbaye ;
il n'en fit pas moins son noviciat avec
une exactitude exemplaire , et redoubla
de ferveur et de zèle pour ses devoirs.
Lorsqu'il eut fait sa profession , son abbé
le nomma prieur de l'abbaye. Dora Fré-
mont s'eftorça , par son exemple et ses
discours, d'établir parmi ses confrères
plus de régularité ; ne pouvant y parve-
nir , il demanda et obtint la permission
d'aller à Paris terminer ses études dans le
collège que l'ordre y avait près de l'uni-
versité. Ayant été présenté au cardinal de
Richelieu, il lui fit agréer un plan de
réforme qu'il avait dressé. Nommé par le
ministre , prieur d'Epoisse , près de Di-
jon , dom Frémont aidé de son confrère
dom Joseph Baboul , y jeta les premiers
fondemens de sa réforme. Pour ne pas
paraître affecter la singularité , il se con-
tenta de remettre en vigueur dans sa
communauté la règle telle que le pape
Innocent IV l'avait mitigée. Le prieuré
de Thiers en Auvergne , lieu de Ja nais-
sance de saint Etienne , instituteur de
l'ordre, prit aussi la réforme, ainsi que
six ou sept autres monastères, mais sans
se soustraire à la juridiction de l'abbé de
Grammont. Dom Frémont gouverna pen-
dant 30 ans le prieuré de Thiers, et y
mourut saintement en 1689, âgé de 79
ans. On connaît de ce religieux : La Vie,
la Mort et les Miracles de saint Etien-
ne , confesseur , et fondateur de P ordre
de Grammont , dit vulgairement des
Bons-Hommes, Dijon, 1647, in-8. On
trouve à la suite de cet ouvrage La Vie
du bienheureux Hugues de Lacerta ,
disciple de saint Etienne. Il a composé
en outre plusieurs OEuvres de piété 'a
l'usage de ses confrères.
* FRÉMONT - D'ABLANCOURT
( Nicolas ) , diplomate et littérateur fran*
5oa FRE
çais , né à Paris en 1625 , mort à la Haie
en 1693, était neveu du fameux Perrot
d'Ablancourt qui fut son maître. Il acquit
sous son oncle une grande réputation
d'esprit et de savoir , et plusieurs princes
d'Allemagne , en ayant entendu parler ,
s'empressèrent de l'attirer auprès d'eux.
Malgré les offres les plus brillantes , il ne
voulut point quitter le service de sa pa-
trie , où d'ailleurs Turenne , qui l'avait
pris sons sa protection, le fît nommer
ambassadeur de France près la cour de
Portugal , et quelque temps après résident
à Strasbourg. De retour à Paris , après la
mort de Turenne , il partageait son temps
entre la société des beaux esprits de l'é-
poque et la culture des lettres, lorsque la
révocation de l'édit de Nantes le força de
s'expatrier dans un âge encore peu avancé .
Il se retira en Hollande où le prince d'O-
range le nomma son historiographe et
lui accorda une pension. Frémont a com-
posé les ouvrages suivans : 1 ° Dialogues
de la santé, Amsterdam, 1784, in-l2;
2° Perrot d^ Ablancourt venge ou Ame-
lot de la Houssaye convaincu de ne pas
parler français et de mal expliquer le
latin, Amsterdam, 17 86, in-12 ; 3° Mé-
moires concernant V histoire de Portugal,
depuis le traité des Pyrénées (1059)
jusqu'en 1668, avec les révolutions ar-
rivées dans ce temps-là à la cour de
Lisbonne, Paris, 1701, in-12, réimprimes
la même année en Hollande. Frémont a
ajouté à la traduction des OEuvrcs deLu-
cien, par Perrot d'Ablancourt le Dialogue
des lettres de Valphabet et le Supplément
à Vhisloire véritable. Il a aussi revu la
traduction de V Afrique par Marmol , et
a travaillé au Dictionnaire des rimes de
Richelet.
FRENICLE (Nicolas ) , poète français,
né à Paris en 1600, fut conseiller-général
eu la cour des monnaies, et mourut doyen
de la même cour après l'an 1661. On a
de lui plusieurs pièces de théâtre : V Pa-
lémon et Niobé, in-8 , deux pastorales.
2° V Entretien des bergers , autre pasto-
rale. 3° Un poème intitulé Jésus crucifié.
4° Une Paraphrase des psaumes , en
vers, etc. Tous ces ouvrages sont très
médiocres.
FRE
FRENICLE DE BESSY (Bernaxd),
frère du précédent, mort en 1675, fut
grand arithméticien et ami de Descartes.
Ce philosophe faisait grand cas de son
arithmétique , qui le conduisait à des dé-
tails où «l'analyse a bien de la peine à
parvenir ; mais il s'étonnait que sans le
secours de l'algèbre , dont en effet il ne
faisait aucun usage , Bessy fût devenu si
profond dans cette science. On trouve
plusieurs de ses écrits dans le 5' tome
des anciens mémoires de F académie des
Sciences , dont il était membre : entre
autres , une méthode pour trouver la so-
lution des problèmes par les exclusions.
Condorcet a écrit son éloge.
* FRÈRE ( George ) , comte , lieute-
nant-général, naquit le 2 octobre 1764
à Montréal. A l'âge de 17 ans ( 1791 ) , il
entra dans le 2* bataillon de l'Aude, et ,
y ayant déployé du courage et de l'intel-
ligence , il fut nommé capitaine en 1 792.
Devenu chef de bataillon l'année sui-
vante , à l'armée des Pyrénées-Occiden-
tales, il se distingua bientôt après à celle
des Pyrénées-Orientales, d'où iljpassa en
Italie, y fit les campagnes de 1794 et
1795, et fut blessé aux redoutes de Séza.
Lorsque les Français entrèrent dans le
Piémont , il reçut à la journée de la Bren-
ta une nouvelle blessure , qui lui valut
le grade de chef de brigade. De retour
en France, après le traité Ae. Campo-For-
mio, il servit dans les armées de l'Ouest,
de la Hollande et du Rhin , fut nommé
ensuite commandant de la garde du pre-
mier consul , devint général de brigade
en septembre 1802 , et fut employé dans
l'armée de Hanovre et à la grande armée,
pendant les campagnes de 1 805 , 1 806
et 1807 . Le général Frère fut souvent cité J
avec éloge dans les bulletins du temps ; r
et notamment (en 1806) à la prise de
Lubeck , où il entra un des premiers. Un
de ses plus beaux faits d'armes fut la dé-
fense (le la tête du pont de Spandau sur
la Vassarge. Avec un seul régiment et
quatre pièces de canon , il soutint l'atta-
que de 10,000 Russes, qui revinrent six
fois à la charge pour s'emparer de ce pont,
et furent forcés de se retirer, après avoir
éprouY^ wie perte considérable. \\ fut
FRE
nommé successivement comte, comman-
dant de la Légion d'honneur et général
de division. Le 6 mai 1808 , il se rendit
en Espagne , et le 7 juin , il s'empara de
la ville de Ségovie. Il alla ensuite appuyer
l'armée du maréchal Moncey , qui assié-
geait Valence ; et, après la prise de cette
ville , il coopéra au siège mémorable de
Saragosse, en qualité de chef d'état-major
du maréchal Lannes. Appelé à la grande
armée , le général Frère se trouva à la
bataille de Wagram, où il se distingua
de nouveau et reçut des blessures graves.
A peine guéri , il retourna en Espagne
et assista aux sièges d'Ostalric, de Tor-
tose et de Tarragone. H revint en France
en 1813, et passa au commandement de
la 1 3* division militaire à Rennes , puis
à la 16" à Lille. Lors de la première res-
tauration , Louis X\IIl le créa chevalier
de Saint-Louis. Après le débarquement
de Buonaparte à Cannes , le 20 mars 1815,
et pendant les cent jours , le général
Frère se conduisit avec une réserve ex-
trême. Cependant , s'il ne s'empressa pas
de se ranger sous les drapeaux de son
ancien général , il ne se montra pas non
plus fort zélé pour la cause des Bourbons ;
conduite équivoque qui rendit justement
suspecte sa véritable opinion. Aussi, au
retour du roi , et dès le commencement
de 1 81 G , il fut mis en non activité, et y
resta jusqu'à sa mort, arrivée le 1 7 février
1^20.
FRERET (Nicolas) , secrétaire perpé-
tuel de l'académie des Belles-lettres , né
à Paris le 15 février 1G88, d'un procu-
reur au parlement , se fit recevoir avo-
cat par complaisance pour sa famille. La
nature ne lui avait donné aucun goût
pour le barreau , et par conséquent pres-
que point de talent ; il le quitta pour se
livrer à l'histoire et à la chronologie, ses
premières passions. L'académie des In-
scriptions lui ouvrit ses portes dès l'âge
de 25 an5. Il signala son entrée par un
Discours sur l'origine des Français,
rempli de propos indiscrets sur l'affaire
des princes avec le régent , qui le fit
renfermer à la Bastille. Bayle fut presque
le seul auteur qu'on lui donna pour égayer
sa prison ; il le lut tant de fois , qu'il le
FRE 6o3
savait presque par cœur. Les erreurs de
ce fameux sceptique s'inculquèrent dès
lors dans son esprit. On ne s'en aperçoit
que trop , lorsqu'on jette les yeux sur
ses Lettres de Tlirasibule à Leucippe ,
où l'on trouve le triste athéisme réduit
en principes , quoique adroitement enve-
loppé ; et sur V Examen des apologistes
du christianisme, 1767, in-8 : ouvrage
posthume, non moins rcpréhensible que
le précédent , mais qui n'est pas de lui.
L'abbé Bergier l'a réfuté victorieusement
par son ouvrage intitulé Certitude des
preuves du christianisme. Fréret ayant
obtenu sa liberté , s'adonna entièrement
à ses anciennes études. On lui doit 1"
plusieurs me'moires , pleins d'érudition
et de discussions épineuses. Ils sont ré-
pandus dans les différens volumes de la
collection académique des Belles-lettres.
Ceux dans lesquels il essaie d'éclaircir la
chronologie lydienne et la chinoise , ont
été d'abord recherchés ; mais l'on s'est
convaincu depuis , que ces fabuleuses
histoires n'avaient rien gagné aux travaux
de ce savant , beaucoup plus crédule en
matière de vieilles annales, qu'en matière
de religion. 2° La pre'face , les notes, et
une partie de la traduction du roman
espagnol , intitulé Tyran le Blanc , 2
vol. in-12. 3° Défense de la chronologie
contre le système de Newton , Paris ,
1758 , in-4 ; 4° Quelques ouvrages frivo-
les , qui n'amuseront jamais les lecteurs
sages. Fréret avait une vaste littérature.
Il connaissait l'intrigue de presque toutes
les pièces des différens théâtres de l'Eu-,
rope. Sa mémoire était immense. Il écri-
vait avec netteté et avec ordre , mais il
avait du penchant pour les opinions sin-
gulières ; ses Lettres de Thrasihule an-
noncent au jugement d'un critique judi-
cieux, « un esprit dur et un cœur cor-
» rompu. » L'auteur du Dictionnaire
philosophique s'est souvent paré de l'éru-
dition de Fréret , et n'en a pas fait un
meilleur usage. Il mourut en 1749. (La
plus grande partie des ouvrages de Fréret
se trouve dans les Mémoires de V acadé-
mie. On a imprimé à Paris, en 1796, 20
vol. in-8 de prétendues OEuvres com-
plètes de Fréret, qui sont loin de justifier
5o4 fRË
leur titre : les premiers volumes de celte
édition incomplète ont été publiés par
Leclerc de St. -Chênes. En 1792 , il a paru
4 volumes diOEuvres philosophiques de
Fréret dont la plus grande partie n'est
pas de lui {voyez le n" IS,!".") du Dic-
tionnaire des anonymes ) ; celte collec-
tion contient l'ouvrage publié dans le
siècle dernier sous le nom de Fréret et
intitulé: Examencritique des apologistes
de la religion chrétienne; il est aujour-
d'hui certain qu'il a été composé par Bu-
rigny : on trouve à ce sujet de très longs
et très curieux détails dans le Diction-
naire des anonymes , n" 6129. De tous
les ouvrages philosophiques attribués à
Fréret, le seul dont il soit véritablement
l'auteur est le suivant : Lettre de Thra-
sibiile à Lcucippe , Londres, sans date,
( 17G8) , in-12 ; celte lettre revue , cor-
rigée et refaite en plusieurs endroits par
Naigeon , est insérée dans le Dictionnaire
de Philosophie de ï Encyclopédie, article
Fréret. La meilleure édition des OEuvres
de Fréret est celle de ChampoUion-Fi-
geac, Paris, 182i , 8 vol. in-8 , précédée
d'une notice sur Fréret par l'éditeur.
FRÉRON ( Elic - Catherine ) , né à
Quimper en 1 7 1 9 , montra de bonne heure
des talens. Il entra chez les jésuites , pour
les y perfectionner. Il professa pendant
quelque temps avec succès au collège de
Louis le Grand. Les Pères Brumoi et Bou-
geant le dirigèrent dans ses éludes, et
lui inspirèrent le goût de la belle littéra-
ture. Quelques mécontcntemcus l'ayant
obligé de sortir des jésuites en 1739, il
aida d'abord l'abbé des Fontaines dans
la composition de ses feuilles , et donna
ensuite un petit journal , sous le litre de
Lettres de M™" la comtesse, in-12,
1746. Celte comtesse était l'interprète de
la raison et du bon goût, et elle s'expri-
mait avec autant d'esprit que de sel.
Comme la réputation de plusieurs beaux
esprits n'était pas ménagée dans ces
feuilles , ils eurent le crédit de les faire
supprimer. Elles reparurent en 1749,
sous un autre titre. C'est au commence-
ment de celle année que Fréron publia
ses Lettres sur quelques écrits de ce
temps , qui , renfermant une critique
aussi vive que piquante , ne plurent pas
plus à un grand nombre d'écrivains,
que celles de la comtesse. Elles furent
quelquefois interrompues , et ce fut
presque toujours au regret du public,
qui aime à s'amuser des critiques et de
ceux qui en sont l'objet. Après avoir pu-
blié 13 vol. de ce journal, l'auteur le fit
paraître en 1754, sous le titre à! Année
littéraire , et il en a publié régulièrement
8 vol. par année, à l'exception de 1754,
qu'il n'en donna que 7 , jusqu'à sa mort
arrivée en mars 17 "6. Beaucoup d'esprit
naturel , de la gaité , un goût sûr , un
tact fin , le talent de présenter les défauts
d'un ouvrage avec agrément : telles fu-
rent les qualités de ce redoutable jour-
naliste. De la partialité, une malignité
quelquefois trop marquée , de la préci-
pitation dans les jugemens : tels furent
ses défauts. Il avait des mœurs douces,
et. sa société était facile et enjouée ; mais
le ressentiment des injustices le rendit
quelquefois injuste. Ses autres ouvrages
sont \° un recueil d'opuscules , en 3 vol.
in-12 , parmi lesquels on trouve des poé-
sies qui ne sont pas sans mérite. L'Ode
sur la bataille de Fontenoi est une des
meilleures qui aient paru depuis Bous-
seau. 2° Les, Amours de Vénus et d'A-
donis, in-12, 1748 : brochure traduite
de l'italien du cavalier Marini. Fréron
était très peu conséquent dans rattache-
ment qu'il alBchail pour les bonnes
mœurs. Diverses analyses qu'on voit dans
\ Année littéraire , en sont une autre
preuve. 3° Il travailla pendant quelque
temps au Journal étranger. Il l'aban-
donna pour s'occuper entièrement de son
Année littéraire, dont le privilège a été
continué à sa veuve.
* FRÉRON (Louis-Stanislas), fils du
précédent, l'un des plus fougueux mem-
bres de la Convention , né à Paris en
1755, eut pour parrain Stanislas, roi dej
Pologne, et pour protectrice M*^»* Adélaïde!
tante de Louis XVI. Il fut élevé gratuite-
ment au collège de Louis le Grand, et,}
à la mort de son père (1776) , il lui suc-J
céda dans le privilège de V Année litté-
raire ; mais il ne fut que le prèle-noi
de l'abbé Royou et de Geoffroy qui furent]
FRE
les rédacteurs de cette feuille. Il avait
été le condisciple de Robespierre ; il en
devint l'ami, et, lorsque la révolution
éclata , il fut , malgré les antccédens de
sa famille, malgré les liens qui l'atta-
chaient à des maisons royales , l'un des
plus violeus partisans des innovations
de cette époque. Au lieu de travailler au
journal dont son père lui avait transmis
la propriété, à laquelle il renonça d'ail-
leurs en 1790, il rédigea l'Orateur du
peuple où il montra moins de talent que
d'exagération ; et , pour nous servir des
expressions d'un biographe peu suspect ,
il parut avoir moins le dc'sir d'éclairer ,
que celui de faire croître et de propager
l incendie. [Ployez la Biographie des con-
temporains, article Fréron.) Celte feuille
circula avec profusion dans les halles ,
les cabarets et tous les lieux où se rend
d'ordinaire la multitude ; mais bientôt
elle pâlit devant Y Ami du peuple de
Marat, que celui-ci avait créé à la même
époque. Cependant Fréron avait donné
à la révolution des gages suffisans de
dévouement : son zèle lui valut une
place de député à la Convention natio-
nale. Ne devait-il pas être uu de.ï mem-
bres les plus furieux de cette fougueuse
assemblée , le journaliste qui s'était fait
gloire d'avoir déclaré, après le retour de
Varennes , qu'il n'y avait plus de roi en
France ; d'avoir demandé l'accusation et
la mise en jugement de Louis XVI ; d'avoir
appelé à grand cris l'établissement de
la république ; le démagogue impie et
cruel qui , au club des Cordeliers, avait
si souvent parlé contre la religion , les
riches et les nobles ; qui , dans les ter-
ribles journées des 3 et d'octobre, avait
figuré dans la horde des brigands de cette
époque sanglante ; l'Orateur du peuple
qui haranguait dans les rues et sur les
places publiques; qui avait eu la plus
graiule part à la conspiration du Champ
de Mars , et qui , après avoir été obligé
de quitter la capitale' avec Danton ," Ca-
mille Desmoulins, Marat , et d'autres per-
sonnages du même bord , était rentré à
Paris avec les intentions les plus hostiles
à la royauté ; un homme enfin qui , après
avoir repris son journal , y avait propagé
V.
les maximes révolutionnaires dont il se
faisait honneur? Fréron vota la mort de
Louis XVI , et l'exécution dans les 2 i heu-
res , en se vantant en même temps Hl avoir
deux ans auparavant déjà demandé le
supplice du tyran; et d'être allé mcmeV at-
taquer dans son palais. On ne pouvait
mieux attendre d'un membre delà muni-
cipalité ou de la commune du lO août.
Envoyé quelque temps après Iç procès de
l'infortuné monarque, en mission dans
les départémens du Midi , il se rendit à
Marseille avec Barras, Salicettï, et îe frère
de Robespierre : ces députés lurent char-
gés de punir cette ville d'avoir montré
quelque pitié en faveur des malheureux
députés proscrits par suite de la révolu-
tion du 31 mai 1793; Fréron l'emporta
sur ses collègues en férocité : par ses
ordres les échafauds furent dressés ; de
nombreuses exécutions curent lieu ; des
maisons] furent détruites , et la réunion
de celles qu'il lui plut de conserver
fut appelée ville sans nom. Pendant ce
temps-là, Toulon était tombé au pouvoir
des Anglais et des Espagnols, qui défen-
daient la cause de la royauté. Ce que l'on
concevra difficilement , c'est que Fréron
et ses collègues proposèrent de laisser
aux ennemis le terrain situé depuis les
bords de la mer jusqu'à la Durance ; cette
proposition faillit être taxée de trahison ,
et peu s'cii fallut que les commissaires ne
fussent arrêtés ; mais ils appartenaient
d'une manière si intime au parti de la
Montagne qui dominait alors, qu'il leur
fut envoyé seulement des instruction.^
sur la conduite qu'ils avaient à tenir ;
et ces instructions furent .si précises
qu'il ne leur fut plus permis d'hésiter :
Toulon fut pris. [F oyez l'article Blosa-
PARTE.) Cette ville changea son nom con-
tre celui de Port-la-Montngnc. Nous ne
savons comment raconter ce qui se passa
ensuite dans cette malheureuse cité ; et
quand nousdirious que les commissaires
de la Convention ordonnèrent à 800 des
principaux citoyens de la ville de se
rendre au champ de aiars sous prétexte
d'y recevoir des communications impor-
tantes; que lorsqu'ils y furent arrives et
placés dans le lieu qui leur fut indiqué ,
3?... ■
566 FRÊ
une batterie qui avait été masquée , tira
sur eux à mitraille , on ne pourrait pas
ajouter foi à un pareil récit ; c'est cepen-
dant ce qui arriva : mais ce qui dépasse
toute croyance, c'est que le canon ayant
épargné quelques-unes des victimes des
commissaires, et celles-ci restant étendues
sur le terrain pour faire croire qu'elles
avaient été tuées, Fréron et ses collègues ,
qui s'étaient aperçus que la mitraille
n'avait pas atteint tout le monde , par-
coururent ce champ de carnage , en s'é-
criant : que ceux qui ne sont pas morts
se lèvent , la Re'publique leur fait grâce:
et aussitôt une foule de Toulonnais, trom-
pés par cette promesse , se lèvent ; mais
c'est pour tomber sous le feu de la mous-
queterie : les blessés furent achevés par
le sabre , la baïonnette ou les crosses de
fusils. En vérité , on ne pourrait croire
à de pareilles horreurs, si ceux qui en ont
été les auteurs ne s'en étaient pas van-
tés. On rapporte que Fréron écrivait à
son collègue Moïse Bayle : « Nous avons
3) requis 12,000 maçons pour raser la
j) ville : tous les jotirs depuis notre arri-
» vée, nous faisons tomber 200 têtes. Il
» y a déjà 800 Toulonnais de fusillés.
» Toutes les grandes mesures ont été
» manquées à Marseille, par Albitte et
» Carteaux; si l'on eut fait fusiller com-
» me ici 800 des conspirateurs dès l'en-
3> trée des troupes , et qu'on eût créé une
» commission militaire pour condamner
» le reste des scélérats, nous n'en serions
M pas oii nous sommes : » Une autre de ses
lettres renferme ce passage : « Les fusil-
w iades sont ici à l'ordre du jour ; et ,
» sans la crainte de faire périr d'innocen-
i> tes victimes, telles que les patriotes
» détenus , tout était passé au fil de l'é-
M pée : comme , sans la crainte d'incen-
}> dier l'arsenal et les magasins, la ville
» eût été livrée aux flammes ; mais elle
» n'en disparaîtra pas moins du sol de
» la liberté. Demain et jours suivans ,
« nous allons procéder au rasement
» Fusillade jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de
» traîtres. » De retour à Marseille , Fréron
et ses collègues recommencèrent leurs
proscriptions , et déjà 400 personnes
étaient tombées sous les coups de ces fé-
FRÊ
toces proconsuls , lorsque le comité de
salut public rappela ses agens : Fréron
fut à peine arrivé à Paris qu'il se présen-
ta à la société des Jacobins oîi il fut pro-
clamé le Sauveur du Midi. Cette espèce
d'ovation déi)lut à Robespierre qui jura
sa perte. Pour l'éviter , Fréron s'associa
avec énergie à ceux qui conspirèrent
celle de ce dictateur sanguinaire. Il crai-
gnait pour ses jours : Hébert,Clootz,Chau-
mette, Danton, venaient de périr sur
l'échafaud ; les autres clubistes de la
même faction redoutant le même sort ,
se réunirent pour renverser ce tyran , et
ils amenèrent la révolution du 9 ther-
midor an 2 (28 juillet 1794). Adjoint
à Barras , Fréron avait été chargé d'atta-
quer riiôtel-de-ville où Robespierre s'é-
tait retiré avec ses complices ; et , lors-
que ce monstre eût été arrêté , ilproposa
de démolir la maison commune ; mais sa
proposition fut rejetée. Devenu riche au
milieu du bouleversement de toutes les
fortunes , Fréron réclama l'ordre comme
condition essentielle de la conservation
des propriétés. Il reprit la direction de
son Journal; mais V Orateur du peuple
fut rédigé sur un autre plan, et cette
feuille fut consacrée dès lors à poursuivre
les restes du parti teiToriste dont naguè-
res il était l'un des agens les plus terri-
bles. Lorsque Barrère proposa de recom-
poser le tribunal révolutionnaire , et
qu'en même temps il indiqua Fouquier-
Thinville comme accusateur public ; non,
s'écria Fréron , tout Paris réclame son
supplice ; je demande contre lui un dé-
cret d'accusation, et que ce monstre aille
cuver dans les enfers tout le sang dont il
s'est enivre'. (Voyez Fouquier Thinville.)
Quelle différence pouvait-on établir en-
tre l'accusateur et l'accusé ? Tous deux
avaient répandu en abondance le plus
beau sang de leur pays. Mais Fréron plus
adroit que son collègue , avait habile-
ment viré de bord : sou Journal, ré-
digé de concert avec Dussault , qui lui
prêta .sa plume en conservant l'anonyme,
parut être une œuvre courageuse ; les
jeunes gens les plus distingués de la ca-
pitale , que l'on appela dans cette cir-
constance la Jeunesse dorée de Fréron ,
FRE
devinrent ses partisans; ils traînèrent
dans la boue le buste de Marat. Le 20
mai 1795 (1" prairial, an 3), Fréron
fut envoyé , avec Barras et Laporte ,
contre le faubourg St.-Antoine, qui s'é-
tait soulevé ; fidèle à sas anciennes habi-
tudes de démolition , il donna l'ordre de
l'incendier ; mais le général Menou , qui
fut cliargé de l'exécution , refusa coura-
geusement d'obéir. Ce rôle de contre-
révolutionnaire ne pouvait pas convenir
long'^temps à Fréron ; il ne tarda pas à se
rattacher à ses anciens amis : il avait
cessé d'être populaire , et il ne fut pas
réélu à l'assemblée qui remplaça la Con-
vention. Il accepta donc une mission
dans le 3Iidi , retourna à Marseille où il
déploya plus de luxe dans ses habitudes
que l'on n'aurait pensé de la part d'un dé-
magogue de 1793 : il fit preuve de fer-
meté , employa un appareil de force ar-
mée presque inutile dans la circonstance,
et répara du moins jusqu'à un certain
point les malheurs de ses premières mis-
sions : néanmoins il fut accusé, se défen-
dit avec arrogance et obtint encore l'im-
punité. Il revint à Paris : n'ayant point
encore cette fois été réélu dans l'un des
deux conseils , il vécut dans l'obscurité
jusqu'au 18 brumaire an 8 (9 novembre
1799). Buonaparte qu'il avait connu au
siège de Toulon, était alors premier con-
sul : on assure que Fréron devait en
épouser la sœur, qui fut depuis mariée
au général Leclerc et ensuite au prince
Camille Borghèse , mort en 1832. Voyez
BoRGHÈsE ; mais une première épouse
délaissée vint se plaindre à Buonaparte ,
et le mariage fut rompu. Le consul lui
donna une place peu importante dans
l'administration des hospices ; et , lors
de l'expédition de Saint-Domingue, il
lui confia la place de sous -préfet de
l'un des arrondissemens de cette île
(partie Sud). Au bout de deux mois ,
Fréron succomba à l'influence du climat
et peut-être à la conviction que les fonc-
tions lointaines qu'on lui avait confiées
étaient un véritable exil ( 1802 ). Fréron
n'avait pas plus de 35 ans. Il a publié en
1 7 96 un Mémoire historique sur la ré-
çLction royale et sur les massacres 4u
FRE 5<>7
Midi, avec des notes et des pièces jusU-^
ficatives , première partie an 4 , in-8 ( il
n'en a pas été publié d'autres parties ) ;
il fut répondu à cette brochure par une
autre, intitulée .hnardà Fréron, oiil'on
réfute cette prétendue justification. On
peut remarquer deux hommes dans le
personnage dont nous traçons la vie : le
fils de Fréron qui sut se mesurer avec
Voltaire , l'homme de lettres et le légis-
lateui- ; son humeur insouciante semblait
peu disposée à concevoir et encore moins
à exécuter les horreurs révolutionnaires.
Jusqu'en 1789, Fréron avait partagé sou
temps entre les Muses et les plaisirs ; il
aimait Pétrarque, et personne n'aurait
jamais songé que l'aimable traducteur de
quelques-unes des pages de ce galant
écrivain , eût pu jamais tracer les lignes
sanglantes de V Orateur du peuple. Les
circonstances changèrent Fréron , et une
tache ineffaçable est empreinte sur le nom
du révolutionnaire dont la mémoire est
encore eu horreur à Toulon et à Marseille.
On assure qu'un jour le lieutenant de
police le manda auprès de lui à l'occa-
sion d'une critique uniquement relative
au talent d'un comédien, et lui prescrivit,
sous peine d'être envoyé à Bicêtre , une
rétractation humiliante. Alors Fréron
était jeune ; il obéit en frémissant : ce
fut dans cet état de fermentation que le
trouva la révolution. Moins disposé au
pardon que ne l'avait été son père , il
combattit eu énergumène la monarchie
et toutes les institutions qui se ratta-
chaient à l'ancien ordre de choses ; il
triompha , mais l'histoire qui redit son
triomphe, lui a consacré une page de
sang.
*FRESIA d'Oglianto (iMaurice-Ignace),
lieutenant-général des armées françaises,
né à Saluées en 1746 d'une ancienne fa-
mille du Piémont , entra à 20 ans au ser-
vice de Sardaigne , après avoir reçu à
Turin une éducation distinguée. Cornette
dans le régiment du roi ( dragons ), il par-
vint de gradé en grade jusqu'à celui de
colonel qu'il obtint en 1793, d'abord
dans le régiment de Chablais, puis dans
celui des chevau-légers du roi. Il avait
fait jusqu'alors toutes ses campagnes çqi^-
5o8 FRE
trela France : nommé général en 1796 ,'
il passa l'année suivante sous les dra-
peaux français et consen^a son grade. Le
général Frésiase distingua dans plusieurs
occasions : il commandait unebrif)ade de
dragons avec laquelle il se battit dans les
deux affaires qui eurent lieu successive-
ment sous les murs de Vérone. Sans en-
trer dans le détail de tous les faits d'ar-
mes par lesquels il signala sa valeur, nous
dirons que ce fut h sa brillante réputa-
tion qu'il dut le commandement général
des troupes piéraontaises au service de
France, qui, sous les ordres d'un tel cbef ,
se couvrirent de gloire en rivalisant de
couTage avec les soldats français. Frésia
fut fait prisonnier axi bord de l'Adda; mais
bientôt échangé, il repanit à la tête de
ses troupes, et continua à se faire remar-^
quer par ses talens militaires. Lorsque le
Piémont fut réuni à la France, le géné-
ral Frésia fut chargé du commandement
du département de la Haute-Loire et en-
.suite de celui de l'Hérault. Il organisa en
1803 à Montpellier le corps piémontais
que l'on appela la Ze'grtow rff^m«V/t. Il fit les
campagnes de 1805 et de 180G en Italie,
et celle de 1807 en Prusse , il obtint alors
le grade de général de division, com-
manda la cavalerie piéniontaise à la ba-
taille de Friedland et conduisit ensuite
un corps de cavalerie en Espagne d'oii il
revint par suite de la capitulation de
Baylen que fit le général Dupont. Après
avoir commandé pendant quelque temps
la 18* division militaire, il fut envoyé à
la cour de Toscane oîi il remplit, à la sa-
tisfaction du gouvernement, l'importante
mission dont il était chargé. Employé de
nouveau, à son retour, à la grande armée,
il commanda ensuite la 4" division mili-
taire du royaume d'Italie, fut chargé pro-
visoirement du gouvernement de Venise,
et fit en 1813 la campagne de Saxe. Nom-
mé commandant militaire des provinces
lllyriennes , il pourvut à la défense de Lay-
bach et de Trîeste. Lorsque les événe-
mens le forcèrent de quitter ces provin-
ces, il revint en France oii il reçut le com-
mandement de la division de réserve que
l'on organisait dans le Piémont. Au com-
mencement de 1 8 1 4 il fut chargé de l^ dé^
PRE
fense de Gènes qu'il ne rendit au général
Bentink qu'après avoir obtenu une ho-
norable capitulation. Les événemens de
1814 ne ramenèrent point le général
Frésia dans sa pairie ; il continua de res-
ter eu France oii il obtint sa retraite en
1816, et ob. il est mort dans le mois d'oc-
tobre 1826^
FRESNAYEf Jean Vaiquelai.n dk la ),
ne en 1534 a La Fresnaye en Normandie ,
fut d'abord avocat du roi au bailliage de
Caen , ensuite lieutenant-général, et pré-
sident au présidial de cette ville; il y
mourut en 1606, à 72 ans. C'est le pre-
mier poète français qui ait fait des fafire.y.
Celles de La Fresnaye, plus sensées que
plaisantes , n'ont ni l'énergie, ni le pi-
quant de Régnier ; et par conséquent sont
moins lues par les Français , naturelle-
ment amis du sel et del'épigramme. On a
encore de La Fresnaye ; 1° un Art poéti-
que qu'on ne lit plus et qu'on ne doit
plus lire, parce que ce qu'il y a de bon
se trouve ailleurs , et que le reste n'est
qu'un recueil de préceptes triviaux , ver-
sifiés faiblement. 2° Un poème intitulé -.
Pour la Monarchie de ce royaume contre
In division , ouvrage d'un y.élé patriote.
3" Deux livres à'Tdylles , et trois autres
à' Epig ranimes , à^Epitriphes et de Son-
nets. Toutes ces poésies ont été recueil-
lies par lui-même, in-8 , 1605 , à Caen.
Il était père de Des Ivetaux. Voyez ce
mot.
FRESNE ( Abraham-Alexis Quinaolt
Du ) naquit d'une famille attachée au
théâtre depuis long-temps. Il était d'un
caractère extrêmement hautain , comme
Baron. Il disait modestement , en parlant
de lui : « On me croit heureux : erreur
M populaire! Je préférerais à mon état
» celui d'un gentilhomme qui mangerait
» tranquillement douze mille livres de
» rente dans son vieux château. » Du
Fresne était si glorieux, qu'il parlait à
peine à ses domestiques ; et lorsqu'il était
question de payer un fiacre ou un porteur
de chaise , il se contentait de faire un
signe, ou de dire d'un air dédaigneux :
Qu'on paie ce malheureux, n Ce n'est du
» reste pas à ces mimes qu'il faut s'en
» prendre, dit un auteur, s'ils sont pleins
I
FRE
)) d'insolence et d'orgueil , mais à l'en-
» gouement dupublicquileurfaitperdre
» La tète par des applaudisseinens exagé-
))1ls, et par des richesses qui tes mettent
» de niveau avec les plus grands sei-
» gneurs. » ( Voyez Baro.n , Esopus, Gar-
RicK, Roscius). Cet histrion est mort en
1767.
FRESNE. Voyez Cange (or).
FRESINE. Voyez Forget.
* FRESINEL ( Augustin-Jean ) , physi-
cien célèbre, membre de l'Institut ( aca-
démie des Sciences) et delà société phi-
lomatique, ingénieur en chef au corps
royal des ponts et chaussées, naquit à
Broglie (Eure) le 10 mai 1788; il avait
trois frères : l'aîné , officier d'artillerie ,
mourut en 1807 en Espagne ; le troisiè-
me est ingénieur des ponts et chaussées ,
et le quatrième suit avec succès la car-
rière des lettres. Son père qui était archi-
tecte et entrepreneur de travaux publics ,
n'ayant point adopté les principes de la
révolution , se vit forcé , par l'anarchique
volonté des tyrans de cette époque, de
renoncer aux entreprises de son art, et
vint en 179 4 chercher un asile dans une
petite campagne qu'il possédait dans les
environs de Caen oîi il s'occupa unique-
ment de l'éducation de ses enfans. Les
progrès d'Augustin furent retardés par sa
mauvaise santé ; pendant quelque temps
il ne montra aucune disposition bien mar-
quée ; l'infidélité de sa mémoire et la len-
teur de sa pensée firent craindre qu'il ne
fût bon à rien : mais bientôt il .montra à
ses parens qui ne le perdaient pas de vue,
un esprit d'observation , de recherche et
même d'invention , qui leur fit espérer
qu'un jour il pourrait se distinguer. A 13
ans le jeune Fresnel fut envoyé à Caen
pour y terminer ses études. Entré à l'âge
de 16 ans à l'école polytechnique, il
choisit la partie des ponts et chaussées :
le rang "élevé qu'il occupait dans l'école
lui permettait de désigner la carrière
qu'il voulait parcourir. Il fut envoyé suc-
cessivement dans les départemens de la
Vendée, de Ja Drôme et d'Ile-et-Vilaine.
Pendant plusieurs années il se trouva
presque absorbé parles travaux de routes
qui lui étaient^ confiés : cependant il sa-
PRE 5o<5
vait trouver quelques momens de loisir
qu'il consacrait à la science. En 1814 et
1 8 f 6 il se montra attaché à ses devoirs de
français, il alla dans le midi se réunir à
l'armée royaliste , pendant l'époque oii
pour la seconde fois la France eut à su-
bir le joug de Buonaparte. Jamais il ne se
prévalut de cet acte de dévouement que
le délabrement de sa santé rendait dou-
blement méritoire. Ce fut à ÎN'iort que Fres-
nel fit ses premières observations sur les
phénomènes nouveaux que lui présenta
la diffraction de la lumière. Il en rendit
compte dans un mémoire imprimé en
1815 à l'académie des Sciences. Peu de
temps après , cette société savante pro-
posa pour sujet de prix V Examen géné-
ral de tous les phénomènes de la diffrac-
tion : Fresnel obtint le prix. Il était de
retour à Paris depuis 1815, oîi son admi-
nistration l'avait fixé. Notre but ne peut
être de faire connaître la doctrine scien-
tifique de Fresnel : il nous suffira de dire
qu'avec la théorie des ondulations , il a
expliqué entièrement la diffraction. Vin-
flexion , la réflexion , la polarisation ,
la réfraction , la double réfraction , etc. ,
de telle manière que tous ces phénomènes
qui jusqu'alors avaient été considérés in-
dépendamment les uns des autres, forment
dans la théorie de Fresnel, un système en-
tier. Ces découvertes ont été présentées
dans plusieurs mémoires ob. les ressources
de la géométrie et de l'analyse sont ap-
pliquées aux expériences les plus délica-
tes et les plus ingénieuses. Les recher-
ches auxquelles il se livrait sur la fin de
sa vie ont eu pour objet la différence du
pouvoir dispersif des divers milieux com-
parée à leur pouvoir réfringent. Ces di-
vers travaux valurent à Fresnel, en 1819,
son admission à la société philomathique,
en 1823 sa réception à l'académie des
Sciences ( à l'unanimité des suffrages ,
honneur que peu de savans ont obte-
nu avant lui). Il fut en 1824 décoré de
la Légion-d'honneur; et en 1825 admis
à la société royale de Londres. En 1827 il
obtint le prix fondé dans cette société par
M. de Piumford pour la plus belle décou-
verte sur la chaleur et la lumière. En
même temps que Fresnel se liyrait à des
Bià
FRE
recherches aussi savantes y il était con-
duit à appliquer ses principes à l'éclai-
rage des phares. Appelé en 1819 à faire
partie de la commission chargée des pha-
res , il trouva le moyen de corriger pres-
qu'enlièrementraberration de sphéricité,
et cette invention parut tellement avan-
tageuse qu'elle a été considérée comme
un service des plus utiles rendu à l'hu-
manité pendant ce siècle. De concert avec
M, Arago, il a construit des phares dont
l'effet est beaucoup plus considérable que
celui que l'on avait obtenu par les plus
grands réflecteurs employés jusqu'à pré-
sent. Des phares de ce genre sont placés
depuis 1825 à l'entrée de la Gironde sur
la tour de Cordouau , à Dunkerque et à
la pointe de Grave. L'administration met
aussi en usage pour l'éclairage des côtes
de France ce système , qui a été bientôt
apprécié en Angleterre , en Hollande , en
Danemark, en Russie, en Toscane, etc.
Cette invention valut à son auteur la mé-
daille d'or donnée par la société d'encou-
ragement, et le jury d'examen de l'exposi-
tion de 1823 demanda pour lui la croix de
St. -Michel. La manière dont Fresnel par-
vin ta cette découverte est digne de remar-
que. Le gouvernenjent informé des succès
qu'il obtenait dans ses recherches sur la lu-
mière, l'engagea à faire des essais sur les
phares. Fresnel travailla et obtint l'heu-
reux résultat que nous avons indiqué :
aussi a-t-on dit que c'est la première fois
qu'une découverte a été faite par ordre.
Fresnel était chargé en même temps par
ses fonctions du cadastre du pavé de Paris.
En 1821, il fut nommé examinateur de
physique et de géométrie descriptive à l'é-
cole polytechnique. En 1824, à la suite
d'un examen qu'il avait fait à cette école ,
il éprouva des symptômes alarmans qui
annonçaient un épuisement presque total :
depuis cette époque , il la toujours été lan-
guissant; il est mort à Ville-d'Avray, le
14 juillet 1827. On trouve plusieurs Mé-
moires et Notes de lui dans les Annales
de physique et de chimie , années 1 81 6 à
1825, dans le Bulletin de la société phi-
lomatique, 1822, 23 et 24, et dans les
tomes 5 et 7 des Mémoires de tacadémie
des Sciences, Son mémoire sur Véclai"
FRE
rage des phares a été imprimé séparément
en 1822. Fresnel a laissé plusieurs tra-
vaux inédits , dont on fait espérer la pu-
blication. M. Duleau, ingénieur despdBts
et chaussées , a publié sur lui une excel-
lente Notice y où l'on trouve d'amples
détails sur ses découvertes. Voyez la
Revue encyclopédique àe 1828 tome l".
FRESNOY ( Charles-Alfonse Du ) , né
à Paris en 1611, d'un apothicaire, fut
destiné à la médecine par ses parens , à
la poésie et à la peinture par la nature.
Les beaux arts l'emportèrent sur la phar-
macie , malgré les mauvais traitemens
que sa famille lui fit esSuyer. 11 prit d'a-
bord des leçons de dessin chez Perrier et
chez Vouet. De cette école il passa dans
celle d'Italie, sans autre secours poiu'
vivre que son pinceau. Du Fresnoy fut
obligé , pour subsister , de peindre des
ruines et des morceaux d'architecture.
Pierre Mignard , avec lequel il lia une
amitié qui durti jusqu'à la mort , {vint
le trouver à Rome, et l'aida à sortir de
l'indigence. Chaque jour étendait la
sphère de ses connaissances; il étudiait
Raphaël et l'antique , et à mesure qu'il
avançait dans la théorie de son art , il
écrivait ses remarques en vers latins pour
s'aider dans la pratique. De ces observa-
tions rassemblées naquit son poème ;
De arte graphica, de l'art de la pein-
ture : production admirable pour les pré-
ceptes , mais dénuée d'ornemens et de
grâces , et très inférieure, pour la pureté
et l'élégance du stile , au poème latin de
l'abbé de Marsy, sur le même sujet. Du
Fresnoy prenait tour à tour la plume et
le pinceau. Il approche du Titien pour
le coloris et de Carrache pour le des-
sin. Ses tableaux et ses dessins ne sont
pas communs. Le musée de Paris pos-
sède deux tableaux de cet artiste : une
S te. -Marguerite eluneNymple avec des
Ndiades. Il mourut en 1 665 , chez un de
ses frères , dans le village de Villiers-le-
Bcl, à 4 lieues de Paris. Son poème sur
la peinture a été traduit en français par
Roger de Piles. La meilleure édition de
ce poème est celle de Paris, 1673 , qu'on J
a ornée des ligures de Le Clerc , in-12.|
Renou eu a donné en 1789 une tr«duQ<|
tîon libre et en vers, avec des remarques ;
enfin M. Rabany-Beaurefïard en a publié
une nouvelle traduction à Clermont-Fer-
rand, 1810, in-8.
FRESNOY. Foycz Lknglet du Fres-
NOY ( Nicolas ).
FRESNY ( Charles Rivière Dn ) , ne à
Paris en 1648, passait pour petit-fils de
Henri IV , et lui ressemblait. 11 joignait
à un goût général pour les arts , des ta-
lens particuliers pour la musique et le
dessin. Sans crayon , sans pinceau , sans
plume , il faisait des tableaux cliarnians.
Il excellait surtout dans l'art de distri-
buer les jardins. Ce talent lui valut le
brevet de contrôleur des jardins du roi ,
et le privilège d'une manufacture de
glaces. Du Fresny, extrêmement prodi-
gue , le céda pour une somme médiocre.
Il se fit rembourser en même temps nue
rente viagère de 3,000 livres, que Louis
XIV avait ordonné aux entrepreneurs de
lui faire. Ce prince disait : « Il y a deux
" hommes que je n'enrichirai jamais, »
du Fresny et Bontems. C'étaient ses deux
valets-de-chambre , et presque aussi dis-
sipateurs l'un que l'autre. Du Fresny
quitta la cour , après avoir vendu toutes
ses charges. Ses ouvrages ont été recueil-
lis en 1731 , en 6 vol. in-12. Ils renfer-
ment : 1° Ses Pièces de théâtre. 2° Des
Cantates , qu'il a mises lui-même en mu-
sique. 3° Plusieurs chansons. 4° Les Amii-
semens sérieux et comiques, petit ou-
vrage souvent réimprimé , et plein de
peintures vives et plaisantes de la plu-
part des états de la vie. 5° Des Nouvel-
les historiques , etc. On remarque dnns
toutes ces productions tine imagination
enjouée et singulière.
* FRESSINET (Philibert , le baron ),
lieutenant-général, né le 21 juillet 1707,
à Marcigny ( Saône et Loire ) , entra à
1 G ans comme volontaire dans un régi-
ment de dragons , et dut à sa valeur la
rapidité de son avancement ; car il était
déjà adjudant-général en 17 07. Il avait
été fait sous-lieutenant en 1 7 92, en récom-
pense de l'intrépidité qu'il avait déployée
à St.-Domingue lors de la première in-
surrection des Noirs, et ce fut en se battant
continuellement avec la plus grande va-
FRE 6m
leur contre ces peuples révoltés qu'il
parcourut d'une manière aussi brillante
les premiers degTés de l'échelle militaire.
A son retour en France , il fut confirmé
dans son^ grade d'adjudant-général, et fit
en cette qualité les campagnes d'Allema-
gne, de Suisse et d'Italie, depuis 1797
jusqu'en 1802. Pendant ces diverses expé-
ditions , il continua d'acquérir de la
gloire et d'obtenir de l'avancement : il
fut fait général de brigade , après avoir
contribué puissamment à la conquête de
la Valteline, et avoir coopéré à la victoire
remportée à TaufFers , sur le général au-
trichien Laudon. Il servit aussi de la ma-
nière la plus glorieuse sous les ordres du
général Championnet en Piémont et par-
ticulièrement à Castelleto et Montauera
près de Coni , et ensuite sous le général
Joubert, avec lequel il se battit contre les
Autrichiens à Novi où il fut grièvement
blessé. On cite encore parmi ses faits
d'armes le combat opiniâtre qu'il soutint
pendant sept heures sur les hauteurs d'Al-
bizola près de Savonne, contre le général
Mêlas qui marchait sur Gênes où Masséna
était bloqué. Le lendemain de cette vic-
toire fut encore pour lui un jour de triom-
phe : il dégagea le corps du général Soult
qui était environné près de Sacello par
les ennemis beaucoup plus nombreux ,
et qui était privé de munitions et de
vivres : ces huit mille français durent leur
salut à la rapidité avec laquelle Fressinet
franchit les montagnes escarpées qui le
séparaient du corps de Soult, et à la vi-
gueur avec laquelle il attaqua inopiné-
ment les Autrichiens. Ce général continua
à servir en Italie .sous le général Brune :
à la tête de sa brigade , il fut de toutes
les affaires qui curent lieu à cette époque,
et qui ont immortalisé la valeur française.
Il se distingua surtout au passage du Min-
cio qu'il effectua le premier ainsi que
celui du Tagliamento. Après avoir ainsi
acquis iine réputation de valeur justement
méritée , il fut appelé :i faire partie de
l'expédition de St.-Domingue commandée
par le général Leclerc : il s'embarqua sur
l'escadre hollandaise à Flessingue, et ne
fut pas plutôt arrivé dans cette colonie
qu'il eut gagné la confiance des princi-
Si2 fRÈ
paux chefs des insurgés. Clirisloplie et
Toussaint - Louverture qui, l'avaient déjà
connu , lorsqu'il était venu quelques
années auparavant dans leur île , ne firent
aucune difficulté pour entrer en négo-
ciation avec lui, et ce fut à sa persuasion
qu'ils consentirent à poser les armes.
C'était un service immense que Fiessiuet
avait rendu à l'expédition. 11 crut que
les Kègres seraient traités comme il en
était convenu avec eux ; mais il n'en fut
point ainsi; le général Leclerc, qui sans
doute avait reçu des ordres de Buoua-
parte , crut ou feignit de croire que ,
parmi les anciens insurgés , il y en avait
qui fomentaient l'esprit de rébellion, et
ce fut sous ce prétexte que , sans songer
qu'il violait le droit des gens, que l'on
doit tout aussi bien observer envers les
Noirs qu'envers les Blancs , sans voir que
c'était une tache dont il chargeait la mé-
moire de son maître comme aussi la sienne
propre , il fit arrêter Toussaiiit-Louver-
ture et l'envoya en France. Ce malheureux
Nègre transporté dans un pays lointain
fut , comme on le sait , jeté dans une
prison d'état , et ce fut dans un cachot
glacé du fort de Joux , dans les monta-
gnes du Jura , près de Pontarlier , qu'il
mourut de douleur, d'ennui et de froid.
Fressinet ne dissimula pas son indigna-
tion : la désapprobation qu'ilfit de cetacte
despotique fut punie par uue disgrâce de 5
ans. Arrêté lui-même , il fut renvoyé en
France. Dans la traversée il tomba au
pouvoir des Anglais qui le retinrent pen-
dant 1 4 mois en captivité. De retour tlaus
sa patrie il ne désavoua point devant le
ministre de la guerre le blâme qu'il avait
jeté sur la conduite des Français dans
la colonie de St.-Domingue, et la censure
était d'autant plus juste, qu'on pouvait
à cette époque, par les revers que nos
troupes avaient subis dans cette île , s'as-
surer que ces prévisions n'étaient point
exagérées. Fressinet n'en fut pas moins
envoyé en exil successivement à Bor-
deaux , en Italie et à Tours. Ce ne fut
qu'en 1812 que Icgouvernement lui ren-
dit du service, et l'envoya dans la Calabre.
La même année il alla à Vérone avec les
troupes qui se trouvaient dans le royaume
Pré
de Naples et fit partie du ti""" corjis de
la grande armée que le général Gérard y
organisait. Après avoir traversé le Tyrol
et l'Allemagne, il rejoignit le prince
Eugène sur les frontières de la Pologne ,
et, pendant cette campagne de 1813,
il signala son intrépidité dans de fré-
quentes occasions. Les bulletins de l'ar-
mée citèrent ses faits d'armes : ainsi lors
de la défection des Prussiens , qui fu-
rent les premiers îi abandonner les Fran-
çais , il contribua efficacement à sauver
l'armée du prince Eugène que cette dé-
fection plaçait dans une position difficile.
Nommé commandant de la Gl""" division
militaire, il battit les Prussiens le 5 avril
à la droite de l'Elbe , en avant de .Magde-
bourg , et le 30 du même mois , il par-
vint après plusieurs combats à opérer à
jN'ewbourg la jonction des troupes com-
mandées par le prince Eugène avec l'ar-
mée de Buonaparte , et dès le surlende-
main, 2 mai , il se fit remarquer par son
intrépide sang froid à la mémorable et
meurtrière bataille de Lutzcn oii furent
vaincus les Prussiens et les Russes réunis.
Ce fat lui qui dans cette journée glorieuse
s'empara avec une poignée d'hommes, du
village d'Esdorf occupé par un grand
nombre de grenadiers russes qui inquié-
taient les troupes françaises, et après s'en
être emparé non .sans peine, il le garda
pendant tonte l'action, et ne ces.sa de com
battre que lorsque le succès de cette af-
faire eut été entièrement décidé. Buona- i
parle avait remarqué la bravoure de Fres- 1
sinet : le prince Eugène lui témoigna
devant toute l'armée combien sa conduite
était digne d'éloges. Fressinet reçut le
titre de général de division , avec la di-
gnité de baron et les croix de comman-
dant de la Légion d'honneur et de com-
mandeur de l'ordre de Saint-Joseph de
Wurtzbourg. Ces récompenses, quoique
tardives , furent pour Fressinet de puis-
sans encouràgemcns. li fit encore preuve
dé talent et de valeur au pas.sage de
l'Elbe près de Dresde ; il réussit à s'em-
parer des bateaux que l'ennemi n'avait
point. pu détruire, et à reconstruire le
pont au milieu d'une grêle de balles. et
de boulets. A la bataille de Bautzcn , il
FRE
ooininandait one division de réserve
( 22 mai 1813 ). Déjà un des corps d'ar-
mée avait été repoussé par les ennemis
qui commençaient à seporter sur la droite
pour envelopper les Français , lorsque
Fressinet s'élance avec impéttiosité contre
les alliés, et leur enlève, malgré une rési-
stance vigoureuse, les positions avanta-
geuses dont ils s'étaient emparés. Destiné
ensuite à aller en Italie pour renforcer
l'année du prince Eugène , il ne put s'y
rendre, parce que les chemins étaient in-
terceptés ; il assista par conséquent à la
bataille de Leipsick ( 1 8 et 1 9 octobre ) ;
il s'y couvrit de gloire et servit d'aide-de-
camp à Buonaparte : dans le mois de dé-
cembre suivant il alla commander la 3™*
division d'Italie. Après la défection de
Murât , le prince Eugène se décida à fran-
chir le Mincio pour aller chercher l'en-
nemi et lui livrer bataille : mais il avait
laissé Fressinet à Monzanbanopour garder
le haut Mincio. Ce fut Fressinet qui fut
attaqué : 18,000 ennemis se jetèrent
sur 6,000 français : le combat dura sept
heures : il fut si acharné que les soldats
de Fressinet, manquant de munitions, se
servirent de l'arme blanche. La mêlée
durait encore lorsque le prince vint atta-
quer les Autrichiens et délivrer cette
troupe de héros. Cette affaire prépara la
Tictoire que le prince remporta sur le
3Iincio le même jour ( 8 février 1814 }.
Après la chute de Buonaparte , le général
Fressinet rentra en France où il reçut la
crois de Saint-Louis et fut mis en non-acti-
vité. L'amitié qui le liait au général Ex-
celmans le détermina à aller prendre sa
défense devant le conseil de guerre de
Lille qui devait le juger : il eut la satis-
faction de le voir absous à l'unanimité :
il dut attribuer ce succès à la logique
pressante qu'il avait su employer , et à
l'éloquence toute militaire dont il avait
fait preuve. Pendant les cent jours , Fres-
sinet fut chargé de plusieurs missions
particulières , notamment k Rouen et à
Toulouse , où il fit des proclamations
analogues aux circonstances. Chargé pro-
visoirement du commandement de la 1 G'"»
division militaire , il organisa la 26'"«
cohorte active , doùt le commandement
V.
PRE 5i3
hit donné au général Decaen. Il revint
ensuite à Paris, où il apprit aussitôt le
désastre de Waterloo. Il fit partie de
l'état-major du maréchal Davoust, et fut
l'un de ceux qui signèrent une adresse de
dévouement à la chambre des représen-
tans : on assure même qu'il en fut le
rédacteur. Il fut aussi l'un des généraux
qui se prononcèrent le plus fortement
pour la défense de la capitale, et fit tous
ses efforts pour faire adopter cette réso-
lution. L'ordonnance royale du 24 juillet
1815 comprit Fressinet parmi ceux qui
furent exilés. Réfugié en Belgique , il fut
arrêté à Flessingue au moment où il
allait mettre à la voile pour l'Amérique ,
cependant il parvint à s'échaper , et il '
regagna le navire où sa femme l'attendait
( 1 7 février 1818 ). On trouve dans la Bi-
bliothèque historique les adieux de Fres-
sinet à sa patrie. Débarqué à Buénos-
Ayres dans le Paraguai, il quitta cette ville
après un séjour d'un an , alla ensuite à
Montevideo , puis à Rio-Janeiro où il se
proposait d'aller combattre sous les ordres
du général St.-Martin , lorsqu'il reçut
l'ordonnance royale qui le rappelait eu
France. Parti le 7 février 1820, il arriva
au Havre dans le mois de mai suivant
après 5 ans d'exil. Bientôt après il fut
arrêté et détenu pendant G semaines à la ,
Conciergerie. L'année suivante, après une
audience qu'il obtint du roi, il fut replacé
sur le cadre de disponibilité : mais il ne
jouit pas long-temps du bonheur d'avoir
retrouvé sa patrie : il mourut à Paris le 9
août 1821. Fressinet est auteur de la bro-
chure qui a pour titre : Appel aux généra-
lions présentes et futures sur la conven-
tion de Paris faite le Z juillet 1815, par un
ofhcier-général , témoin des événemens.
Genève ( Paris, 1 81 T ) , in-1 2 , réimprimé
clandestinement à Paris en 1820 , in-8.
" FRETEAU DE SAINT-JUST ( Em- ,
manuel-Marie-Michel-Philippe ) , conseil-
ler de grand'chambre au parlement de
Paris, beau-frère du président Dupaty, né
vers 1745, se voua au commencement de
la révolution au parti d'Orléans, et se
déclara contre les mesures proposées au
parlement par les ministres , et relatives
à l'impôt graduel. Arrêté par suite de
33
5i4 FRE
ces diffi^rcnds , il fut relâché après la
disgrâce du cardinal de Rriennc , et nom-
mé , par le bailliage de Melun , députe de
la noblesse aux Etats-généraux, Il fut un
des premiers membres de la minorité
qui passa à la chambre du tiers-état ,
et fut eulicrement dévouée au parti dé-
mocratique. Sou empressement à parler
sur toutes les matières , et à vouloir se
mêler de tout , le fit surnommer par Mira-
beau , la commère Frétcau. Il proposa
de donner à Louis XVI le titre de roi des
Français , et d'ajouter à ces mots : Louis
roi par la grâce de Dieu, ceux-ci : et
par la loi constitutionnelle de Vétat , ap-
puya toutes les mesures coptre la cour ,
dénonça les bastilles secrètes, demanda
l'abolition des ordres religieux et la vente
des biens du clergé. Il vota ensuite pour
que le droit de guerre et de paix appar-
tînt à la nation, adhéra à l'abolition de la
noblesse, et fit une violente sortie contre
les ennemis de la constitution. Il voulut
s'opposer au nouveau serment du clergé,
mais il ne fut pas écoulé. Son rapport
alarmant sur la situation de la France en
1791 lui attira une foule de sarcasmes.
Cependant , à la suite de ce rapport , on
ordonna au prince de Condé de rentrer
en France , et il fit rendre le 28 juin un
décret qui défendait à tous les Français
de sortir du royaume. Après la session , il
fut nommé juge du tribunal du 2* arron-
dissement de Paris. Les jacobins le firent
arrêter comme suspect en 1 793 , et il fut
condamné seulement à la détention par
mesure de sûreté générale ; mais pour-
suivi par la haine de Robespierre, on l'en-
veloppa dans une prétendue conspira-
tion des prisons, et il fut mis amortie 14
juin 1794.
* FRETEAD ( Jean-Marie-Nicolas ) ,
médecin et chirurgien , né à Meslai, ci-
devant diocèse de Rennes, en 1765,
d'un avocat au parlement de cette ville ,
vint, en 1788 , terminer ses éludes mé-
dicales à Paris , fut successivement nom-
mé chirurgien-major à l'armée des côtes
de Brest , et obtint le même titre aux hô-
pitaux des volontaires de la Loire-Infé-
rieure. Il exécuta avec succès presque
tout£s les opérations de la haute chirur-
FRE
gie,ctfutun des premiers qui imaginèrent
des moyens mécaniques propres à corriger
les difformités corporelles. Il était de la
société académique de Nante». Il acquit ,
en outre , beaucoup de réputation comme
accoucheur. Freteau mourut , le 9 avril
1823, âgé de cinquante-huit ans. On a
de lui 1" Mémoire sur les moyens de
guérir facilement et sans danger les
vieux ulcères des jambes , même chez
les vieillards , Paris , 1 803 ; 2° Essai sur
Fasphyxie de l'enfant nouveau-né , Pa-
ris, F. Louis, 1803; 3" Considérations
pratiques sur le traitement de la go-
norrhée virulente , etc. , Paris , Le for-
mant, 1 S 1 3, in-S" de 300 pages ; 4° Traité
élémentaire sur Uemploi légitime et mé-
thodique des émissions sanguines dans
Fart de guérir, avec application des
principes à chaque maladie , Paris , Ga-
bon, 181G, in-8. Cet ouvrage avait été
couronné par la société de médecine de
Paris , le 5 juillet 1814. 5° Considérations
sur l'asphyxie de fenfant nouveau-né,
18 10. C'est la réponse à une critique de
son ouvrage sur le même sujet , qu'il dé-
veloppe plus amplement, et d'une ma-
nière victorieuse. Il a donné, ^ outre,
un grand nombre de mémoires dans
plusieurs your«a«ar savons et de méde-
cine , comme sur Y Heureux effet de l'al-
laitement artificiel. — Sur la ligature
d'un polype utérin. — Sur une hémorr-
hagie très sérieuse dont la cause a étélong-
temps inconnue. — Sur la doctrine des né-
croses, et la nécrose du tibia. — Sur une
intumescence de la langue, «t'ecprolon-
gement hors de la bouche. — Divers articles
sur V agriculture , le magnétisme, etc
♦ FREUNDWEILER (Henri) , pein-
tre suisse, né à Zurich en 17 55, fit plu-
sieurs voyages en Allemagne , et séjourna
quelque temps à Dresde et à Berlin. Le
prince de Dessau chercha à se l'attacher ;
mais cet artiste préféra son indépendance,
et revint en Suisse , où il cultiva surtout
le genre historique. La plupart de ses ta-
bleaux sont tirés de V histoire de sa na-
tion. On loue la vérité de leurs détails
cl la beauté de leur coloris. •
' FREVIER ( Charles-Joseph ) , né à
Rouen le 11 novembre 1689 , entra fort
I
FRE
jeune dans la société des jésuites, où il
fut destiué à l'enseignement. On n'est
pas sûr de l'époque de sa mort ; mais il
vivait encore en 17 70 , après la suppres-
sion de son ordre : il paraît qu'il survé-
cut peu à cette époque. Il est connu par
le différend littéraire qu'il eut avec ses
confrères les journalistes de Trévoux. Le
Père Widenhoffer, jésuite allemand, pas-
sant par Malines , remarqua dans la bi-
bliothèque des jésuites de cette ville un
manuscrit de Bellarmin , qui contenait
une dissertation sur la Yulgate ; il en fit
un précis; mais trouvant ensuite plus à
propos de faire imprimer le manuscrit
lui-même, il en obtint une copie colla-
tionnée du Père Holvoët, bibliothécaire
du collège de Malines , et le publia sous
ce litre : jdpographus ex manuscripto
autographe venerabilis Dei servi Ro-
berti Bellarmini e societate Jesu , S. R.
E . cardinalis , de editione J^ulgata ,
quo sensu a concilio tridetitino defmitum
sit, ut en pro authcntica haberetur. Le
Père Berthier , en rendant compte de cet
écrit dans son Journal de Trévoux , éta-
blit que le sentiment de Bellarmin et
même du cardinal Pallavicin était que le
concile de Trente , en déclarant la Yul-
gate authentique, avait voulu direqu'el'e
était exemple de toute erreur en matière
de foi et de mœurs , et qu'elle seule de-
vait être en usage dans les églises et les
écoles, mais qu'il n'avait pas prétendu
qu'il ne s'y trouvait pas de fautes. Le
Père Frévier s'éleva contre cette opinion ,
qu'il trouvait dangereuse , dans un livre
qu'il publia sous ce titre : La Fulgate
authentique , authentique dans tout son
texte , plus authentique que le texte hé-
breu , que le texte grec , qui nous res-
tent; théologie de Bellarmin , son apo-
logie contre récrit annoncé dans le
Journal de Trévoux, article 85 , juillet
1750, Rome, 1753, in-12. Il y soutient
que la Vulgate est le seul texte pur , et
que ni le texte hébreu ni le texte grec
n'ont pas cet avantage , et que c'est ainsi
qu'a voulu l'établir le concile de Trente.
Quant à l'opinion de Bellarmin et du car-
dinal Pallavicin , il prouve, d'après des
passages tires de leurs écrits , que leur
FRE 5i5
sentiment était le même que le sien , et
que le manuscrit trouvé à Malines ne
peut prouver le contraire, étant une
pièce sans conséquence , un mémorial
oii Bellarmin , jeune encore , aurait re-
cueilli le résultat de ses lectures, et qu'il
aurait ensuite jeté* comme un écrit indi-
gne de lui. Mais c'était moins pour com-
battre le Père Berthier que Frévier avait
composé ce livre , que pour ne pas laisser
croire que les Ecritures saintes pouvaient
être exposées à un soupçon de corrup-
tion.
FREY ( Jean-Cécile ) , né à Keisers-
tul en 1580, professa la philosophie au
collège de Montaigu à Paris , et y mourut
de la peste l'an 1631 . Ses ouvrages latins
de philosophie furent imprimés en cette
ville , in-8 , 2 vol. ; le 1 " en 1 655 , le 2=
en 1646. On trouve dans celui-ci quel-
ques écrits de médecine , science en la-
quelle il avait été passé docteur. La liste
des autres ouvrages que renferme cette
collection se trouve dans le Dictionnaire
de Moréri et dans le tome 39 des Mé-
moires du Père Nicéron.
FREY. Voyez Neuville.
FREY ( Jean-Jacques ) , né à Lucerne,
le 17 février 1681 , fut l'un des plus célè-
bres graveurs de son temps , vécut long-
temps à Rome , et y mourut le 12 janvier
1751. Il a gravé d'après les plus grands
maîtres, tels que Raphaël, le Guide, le
Dominiquin , Annibal Carrache , Carlo
Maratti , le Poussin. Son burin est vif et
expressif. Le recueil de ses gravures forme
2 gros vol. in-folio et s'élève à plus de
cent planches, outre l'estampe, qui passe
pour être son chef-d'œuvre et qui est
appelée : In conspectu angelorum psal-
lam tibi.
FREZIER ( Amédée-François ) , in-
génieur et voyageur , né à Chambéry en
1682, d'une famille distinguée dans la
robe , originaire d'Ecosse , vint à Paris
pour étudier la jurisprudence ; mais les
mathématiques ayant plus d'attrait pour
lui , il s'y livra entièrement , et entra
dans le corps du génie en 1707. La cour
le chargea d'aller examiner les colonies
espagnoles , au Pérou et au Chili en
1711 , et employa sou talent pour les
5r6 FRI
fortifications à Saint-Malo, à Saiiit-Domin-
gne en 1719, h Landau en 1728. Ce fut
aussi cette même année qu'il reçut la
croix de St. -Louis , et qu'il se maria. Il
parvint ensuite au grade de lieutenant-
colonel , et enfin de directeur de toutes
les fortifications de la Bretagne. Il mourut
en 1772 , à l'âge de 92 ans. Nous avons
de lui divers ouvrages : 1° Traité des
feux (V artifice, 1747 , in-8 ; 2° Voyage
de la mer du Sud , 1716, in-4 , et 2 vol.
in- 12 , 1717 ; 3° Théorie et pratique de
la coupe des pierres et des bois , Stras-
bourg, 1769, 3 vol. in-4. Il donna l'abrégé
de ce livre sous le titre â!Elémens de
sicréotomie , Paris, 1769, 2 vol. in-8.
FREZZI DE FoiiGNo ( Frédéric ), évê-
que de Foligno sa patrie , avait été domi-
nicain , il fut décoré de la mitre par Bo-
niface IX en 1 403 , assista au concile de
Pise en 1409 , et mourut en 1410 à Con-
stance , pendant la tenue du concile. Il
est auteur d'un poème fort estimé des
Italiens , intitulé : Il quadriregio , ou
Les quatre règnes de la vie de l homme ;
le 1*' règne est celui de Cupidon, le 2*
celui de Satan , le 3* celui des Vices ,
et le 4" celui de Minerve ou de la Vertu.
Il fut imprime pour la première fois à
Foligno en 1481 , in-fol. , et cette édition
est rare et recherchée. La derrière et la
meilleure est celle de Foligno, 1725,2
vol. in-4. Quelques critiques ont voulu
enlever cet ouvrage à Frezzi , pour le
donner à Nicolas Malpigli, Bolonais; mais
les meilleurs bibliographes d'Italie sou-
tiennent qu'il est certainement de Frezzi.
FRIART ou FRÉAR. Voyea Cham-
BRAY ( Roland ).
FRIBURGER. Voyez Gerwg.
* FRIEDEL ( Adrien-Chrétien ) na-
quit à Berlin le 13 mars 1753. Il vint à
Paris dès sa première jeunesse , et fut
professeur en survivance des pages du
roi. Il publia plusieurs comédies tradui-
tes de l'allemand , comme La Piété
filiale, d'Engel , 1781; Le Page, du
même, 1781 , etc. Il donna en outre le
Nouveau théâtre allemand , ou Recueil
des pièces qui ont paru avec succès sur
les théâtres des capitales de l'Allema-
gne, 1782-1785, 12 vol. iu-8. M. Bou-
FRI
ncvillc a en part à cette traduction. Le
Nouveau théâtre contient vingt-huit
pièces des meilleurs auteurs allemands.
A la tête du premier volume , on trouve
une histoire de leur théâtre. Friedel est
mort en 1786.
* FRIEDEL ( Louise-Béate-Augustine,
Utecht dame), née en 1768àColnow
en Poméranie , morte à Carcassonne en
1818, a publié deux ouvrages qui ont
sauvé son nom de l'oubli : 1" VArt du
confiseur, Paris, 1802, souvent réim-
primé ; 2° Mémoire d'une mère infor-
tunée à ses filles ; la 14« édition faite ea
1819, 1 vol. in-12, est précédée d'une
Notice sur l'auteur.
* FRISCH ( Joseph-Léopold ) , minis-
tre protestant , fut très instruit dans les
sciences naturelles et dans la philologie ,
et naquit à Berlin , le 29 octobre 1714.
On a de lui : 1 ° Musei hoffmaniani pé-
tri ficata et lapides , Halle , 1741 , in-4 ;
Tableau systématique des quadrupèdes ,
distribués en ordres , genres et espèces,
Glogaw, 17 75 , in-4 ; 3° Des avantages
et des inconvéniens que présentent les
quadrupèdes , Bulaunz, 1776, in-8. Ces
deux ouvrages sont écrits en allemand.
Frisch mourut en 1787.
* FRISCH ( Jean-Léonard ) , ministre
protestant et philologue allemand, né à
Sulzbach le 1 9 mars 1 6G6 , passa la moitié
de sa vie à voyager en Allemagne , en
France, en Suisse, en Italie, en Hollande,
en Turquie , etc. S'étant fixé à Berlin en
1700, il y enseigna la langue russe à
Leibnilz. Il exerça tour à tour, auprès
de divers gentilshommes, l'emploi d'éco-
nome , d'intendant et de précepteur , et
devint recteur de la société prussienne
en 1726. Il fut chargé en 17 31 de diriger
la classe historico-philologico-germani-
que, et mourut à Berlin le 21 mars 1743.
On a de lui un grand nomhrc d'ouvrages
qui attestent la variété de ses connais-
sances : 1° Spécimen lexici germanici ,
Berlin, 1723 , iu-8 ; 2'^ Dictionnaire alle-
mand-latin, 1741, in-4; 3° Nouveau
dictionnaire des passagers , français-
allemand et allemand-français, Leipsick,
1712, très souvent réimprimé en 1 et 2
vol. îu 8 ; 4" Programma de origine cha-
\
FRÏ
racteris slavonici , vulgb dicH cinitici ,
Berlin, 1727 , in-4 ; 5" Continuationes
historiœ linguœ slavonicœ, 1727 , 1729
et 1734 , in 4 ; G° Description de tous
les insectes de l'Allemagne, Berlin, 1720-
1738 , 13 cahiers in-4 , ouvrage estimé ;
7° Description ci figure des oiseaux de
l'Allemagne , in-folio , figures coloriées ,
très bel ouvrage , qui a été continué par
son fils Josse-Léopold , mort en 1787 ,
auquel on doit Musei Hoffmannianipe-
trefactaet lapides, Uaile , 1741 ; 8** Jte-
cherches d'histoire naturelle , Berlin ,
17 42, et autres ouvrages qui ont pour
objet la minéralogie et la zoologie.
FRISCHE ( Dom Jacques du), bénédic-
tin de la congrégation de St,-Maur , né à
Séez en 1640, donna, en 1686 et 1690,
avec D. Nicolas Le Nourri , une nouvelle
édition de St.-Ambroise , accompagnée
de savantes notes, en 2 vol. in-fol. Ou
lui doit aussi la Vie de saint Augustin ,
qui se trouve à la tête des œuvres de ce
saint docteur ; il y travailla avec D.
Vaillant sur les mémoires de l'abbé de
Tillemont. D. Frische travaillait à une
nouvelle édition de saint Grégoire de
Nazianze , lorsqu'il mourut à Paris en
1693, avec la réputation d'un savant
vertueux. Pinsson, avocat au parlement, a
fait l'éloge de Don Frische dans une lettre
imprimée en 1694.
FRISCIILIN ( Nicodème ) , philologue
allemand , né à Balingen , dans le duché
de Wittemberg le 22 septembre 1547,
se tua en 1590 , à 43 ans , en voulant se
sauver d'une tour ou ses vers l'avaient
fait enfermer. Il avait beaucoup de talent
pour la poésie. On a de lui seize livres
iH élégies, sept comédies, deux tragédies ,
etc. Sa comédie de Rébecca lui valut une
couronne de laurier d'or, que l'empereur
Kodolphe voulut lui donner solennelle-
ment à la diète de Ratisbonne. Il était
partisan de Piamus : ses écrits en matière
grammaticale eu font foi. Il a travaillé
aussi sur Callimaque, Aristophane , Vir-
gile , Perse , etc. , qu'il a ou traduits ou
éclaircis par des notes. Ses OEuvres
poétiques parurent en 4 vol. in-8 , 1598
à 1607. (On a encore de lui des ouvrages
sur Y astronomie y sur les Hébreux , cl un
FRI 5i7
dictionnaire grec-latin-allemand. Lange
a publié à Brunswick en 1 727 : Frischll-
ni Vita,fama, scriptis et vitœ exitu
memorabilis. Voyez la liste de ses ouvra-
ges dans le tome 19 des Mémoires de
Nicéron. )
FRISCHMUTH ( Jean ), né en 1019 à
W.ertheim , dans la Franconie , iut rec-
teur , puis professeur des langues à léna ,
où il mourut en 1687. On a de lui : 1°
des explication^ Ae plusieurs endroits
difficiles de l'Ecriture sainte , dont quel-
ques-unes sont assez heureuses; 2° plus
de 60 dissertations in-4 , philologiques
et théologiques , sur des sujets curieux ,
pleines d'érudition.
* FRISI ( L'abbé Paul ) , célèbre ma-
thématicien et physicien , né à Milan le
13 avril 1728, entra à l'âge de 15 ans
chez les clercs de Saint-Paul de l'ordre
des Barnabites , et composa à 22 ans sa
fameuse Dissertation sur la figure de la
terre. Il professa la philosophie à Milan ,
ensuite à Pise. En 1764 , il fut rappelé
dans sa patrie pour occuper la chaire de
mathématiques dans les écoles palatines.
Il était membre de presque toutes les
académies de l'Europe , et fut honoré de
la protection du pape Clément XIII , de
l'empereur Joseph II , de Catherine II ,
et des rois de Prusse et de Danemark.
Pise lui avait donné la permission de se
séculariser. Il parcourut alors à plusieurs
reprises l'Italie, l'Allemagne, la "France
et l'Angleterre, partout consulté, partout
donnant d'excellens avis sur tous les su-
jets de mathématiques pures , d'astrono-
mie , de physique et particulièrement
d'hydraulique. Il apprit aux Milanais à se
servir des paratonnerres. Il mourut à
Milan en 1784. Ses principaux ouvrages
sont : 1 ° Disquisitio mathematica in cau-
sant physicam figurœ et magnitudinis
telluris /zo^frœ, Milan , 1751 ; 2° Nova
electricitatis theoria, e/c. Milan, 1755;
3° De motu diurno terrce disscrtatio ,
Pise, 1 7 58 ; 4" Del modo di regolare i
fiumi c torrenti principalmente delBolo-
gnese e délia Romagna , libri tre , Luc-
ques, 1762 et 1768, 3^ édition augmen-
tée , Florence, 1770. On en a publié une
traduction française à Paris en 177 i ;
5i8 FRI
5" Saggio sopra VarclUtectura gotica ,
Livourne, 1766 ; 6° Z?e giavilalc univer-
sali , libri très , Mifan , 1768. Bernouilli
dit que cet ouvrage est un des plus pro-
fonds et des plus utiles qu'il y ait sur
l'astronomie; 7° Cosmographiœ physicœ
et mathematicœ , etc. Milan , 17 74, 2
vol. in-4. Ce livre est regardé comme le
chef-d'œuvre de Frisi ; 8° Paoli Frisa
opéra. Milan, 1782-1783, 3 vol. in-8.
Il a écrit en outre plus^urs éloges, parmi
lesquels il n'a pas oublié celui de d'Alem-
bert , sou ami. Ce savant laborieux a pu-
blié de f751 à 1784, 29 ouvrages, la plu-
part en italien et quelques-uns en fran-
çais et en latin. Le comte Verri a dédié
àCondorcet l'éloge de Frisi intitulé : Me-
tnorie appartcnenti alla vita ed agli
. studj del signor don Paolo Frisi, Milan,
1787 , in-4.
FRIZON ( Pierre ), du diocèse de
Reims, d'abord jésuite, ensuite grand-
maîlre du collège de Navarre, et docteur
de Sorbonne, mort en 1051 , laissa : 1°
une histoire des cardinaux français, sous
le titre de GaUia puipurata, 1638, in-fol.
ouvrage très estimé d'abord , mais qui
perdit quelque chose de son crédit , lors-
que Baluze en eut dévoilé les bévues dans
son Anti-Frizonius ; 2" une édition de la
Bible de Louvain, avec les moyens de dis-
cerner les Bibles françaises catholiques
d'avec les hérétiques, 1621, in-fol. — Il ne
faut pas le confondre avec Nicolas Frizon,
jésuite lorrain, mort au commencement du
18* siècle, après avoir publié: 1 ° La vie du
cardinal Bellarmin, Nancy, 1708 , in-4 ;
2" La vie du vénérable Jean Berchmans,
in-8 ; 3" Abrégé des méditations du Père
Louis du- Pont, Châlons, 1 7 1 2. Cet abrégé
est très bien fait ; on en a donné une
nouvelle édition en 1786 , à Paris , chez
Nyon , 4 vol. in-12.
• FRIZIERI ou Fbiedzkri (N... ), cé-
lèbre compositeur , né à Vérone le 6 jan-
vier 1741 , mort à Anvers dans le mois
d'octobre 1825, à 85 ans , était devenu
aveugle à l'âge d'un an. Une intelligence
précoce qui se développa presque d'elle-
même le dédommagea , s'il est possible ,
de la perte de la vue : sou adresse était
si grande qu'à l'âge de 1 1 ans il fit une
FRO
mandoline , et apprit seul à jouer de cet
instrument. Il était parvenu aussi à jouer
très bien de la flûte , du cor , de l'orgue,
du violon , etc. Bientôt il songea à quit-
ter la maison paternelle pour profiler de
ses talens, et, dès l'âge de 24 ans , il alla
chercher des applaudissemens dans plu-
sieurs villes d'Italie. Il s'arrêta d'abord à
Novarre, où il produisit leplus grand effet
à l'aide de sa mandoline et de son violon.
Il séjourna long-temps à Strasbourg et à
Paris. Ce que l'on distinguait en lui , c'é-
tait la précision de son exécution et sur-
tout la facilité avec laquelle il improvisait
des accompagnemens de sonates. Un de
ses grands mérites était aussi de retenir
les plus longs morceaux de musique dès
qu'il les avait entendus une fois. Il a donné
à Paris plusieurs opéras-comiques qui ont
eu du succès, entr'autres les Deux mili-
ciens , les Souliers mordorés ou la Cor-
donnière allemande, ]e Billet de mariage .-
on lui attribue aussi Lucette ; mais quel-
ques biographes pensent que cet opéra
n'est pas de lui. Il avait établi aussi à Paris
une société philharmonique où l'on en-
tendit ses deux filles exécuter de la ma-
nière la plus brillante les concerto de
Viotti sur le violon. L'explosion de la
machine infernale ayant détruit son éta-
blissement , il alla à Anvers où il est mort.
Il avait aussi publié à Paris un OEuvrc
de duo de violons, une symplwnie con-
certante pour deux violons, deux recueils
de six romances, avec accompagnement
de piano ; une scène tirée de son opéra
des Thermopyles et un livre de quatuor.
FROBEN ( Jean ) , célèbre imprimeur
d'Hammelburg dans la Franconie , alla
exercer sa profession à Bâle. Il fut le pre-
mier en Allemagne qui eut de la délica-
tesse dans l'art d'imprimer , et du discer-
nement dans le choix des auteurs. Il pu-
blia les ouvrages de saint Jérôme , de
saint Augustin , d'Erasme , qui vint lui-
même à Bâle , attiré par sa réputation.
Ces trois impressions sont les plus cor-
rectes de toutes celles de Froben. Il se
proposait de mettre au jour les Pères
<]frec.T, lorstju'il mourut en 1527 d'une
chute. Son fils et son gendre soulinrcut
son nom avec honneur.
FRO
FROBISHER. Foyez Forbisher.
* FROCHOT (Nicoias-Thérèsc Benoît,
comte j, ancien préfet du département de
la Seiuc, était notaire royal et prévôt avant
la révolution. Il s'était engagé auparavant
dans le service militaire et avait été pen-
dant quelque temps simple soldat ; mais
sesparens obtinreutson congé, et dès lors
le jeune Frochot avait travaillé sérieuse-
ment pour se donner un établissement
honorable. Il y était parvenu , lorsqu'en
17 89 il fut choisi par le tiers-état de Chà-
tillon-sur-Scine pour député aux états-
généraux. Frochot, qui avait adopté les
principes politiques les plus favorables à
la liberté, s'attacha bientôt à îilirabeau
dont il admirait, encore plus que tout le
monde, les talens oratoires, et dont il
partageait toutes les opinions. Placé à
côté de lui dans l'Assemblée, il recueil-
lait pour cet orateur des notes qui lui fu-
rent souvent d'une grande utilité. Bien-
tôt il devint son secrétaire à titre officieux
et plus tard il fut son exécuteur testamen-
taire. Frochot ne parla qu'une fois pen-
dant cette session ; ce fut pour la sup-
pression des fours banaux. Après la mort
de Mirabeau, il parut plus souvent à la
tribune. Lorsqu'il eut pris connaissance
de la succession de son ami , il vint dire
à l'Assemblée que Mirabeau était mort
comme quelques-uns des grands hommes
de la Grèce , et demanda que le trésor
public se chargea des frais de ses funé-
railles. Un grand débat eut lieu entre
M"^ Du Saillant sœur de Mirabeau et Fro-
chot, sur cette déclaration d'insolvabilité ;
il n'en résulta qu'une chose, c'est que l'on
sut pluspositivement encore que ses créan-
ciers perdraient au moins 50 pour 100.
Frochot se mêla ensuite à plusieurs discus-
sions importantes, et, dans celle qui fut
élevée sur la réforme des constitutions et
sur les conventions nationales, il fit un
discours où les principes de la liberté fon-
dée sur la souveraineté du peuple, étaient
posés sans détour : les idées révolution-
naires coramenraient à être à l'ordre du
jour : ce discours fut par conséquent
goûté par l'Assemblée devant laquelle il
fut prononcé et qui en ordonna l'impres-
sion. Ses admirateurs dirent même qu'il
FRO Sig
était digne de l'ami de Mirabeau (. 3t
août 17 9 1 ). En 17 92, Frochot accepta une
place de juge de paix à Paris ; éloigné
dès lors des affaires politiques , il resta
uniquement occupé de ses utiles et mo-
destes fonctions jusqu'au mois de novem-
bre 1799 oîi il fut élu membre du Corps
législatif. Nommé peu de temps après
préfet de la Seine , il donna sa démission
de sa qualité de représentant , pour se li-
vrer entièrement aux devoirs de sa place
qu'il occupa 12 ans. Son administration
fut sage et prudente ; il fit preuve de zèle
et de talens administratifs : son autorité
protégeait tous les intérêts. C'est à lui que
Paris est redevable de l'ordre élabli dans
toutes les parties de son administration
municipale , et de tant de monumens où
la magnificence est unie à l'utilité. Le
canal de l'Ourcq , un grand nombre de
fontaines publiques, etc. , sont des bien-
faits de sa sollicitude. C'est sur sa propo-
sition et par ses soins que l'on doit la
création de plusieurs établisscmens; le
nouveau mode d'inhumation , la réorga-
nisation de l'instruction primaire, etc.
Tout Paris prit part à la disgrâce qu'il
encourut en 1 8 1 2 et qui lui enleva sa place.
En voici la cause. Un chef de bataillon
nommé Souiller, commandant la 18" co-
horte, alors en garnison à Paris , s'él<iit
présenté le 23 octobre 1812 à 7 heures du
matin à l'hôtel-de ville , et il avait déclaré
qu'en vertu des ordres qu'il avait reçus
du général Mallet , il venait en prendre la
garde et s'entendre avec lepréfet pour évi-
ter toute espèce de désordre. Frochot re-
venait alors de sa campagne près de Nogen t
et à 8 heures du matin du même jour,
au moment où il traversait le faubourg
St.-Martin , un billet lui avait été donné
de la part d'un de ses chefs de division ;
il était conçu ainsi : on attend M. lepré-
fet , FUIT iMPEKATOE. Tout étouné d'unc
communication aussi peu attendue , Fro-
chot arrive sur la place de Grève qui
alors était couverte de soldats : le com-
mandant Souiller vint lui confirmer la
nouvelle de la mort de Buonapartc arri-
vée , disait-il , le 7 octobre à Moscou. En
même temps il lui présenta une lettre du
général Mallet, qui prenait le titre de com-
Ô20 FRO
mandant de Paris : elle contenait les in-
struclioDS qu'il avait données àcccbef de
bataillon : il ne s'agissait rien moins que
d'abolir le gouvernement impérial > d'é-
tablir une commission provisoire à l'hô-
tel-de-ville et de faire sonner le tocsin
pour appeler le peuple. Frochot ne dou-
tait point de la mort de Buonaparte ; mais
il voulait s'entendre avec les grands fonc -
tionnaircs de l'état pour aviser à ce qu'il
fallait faire dans des circonstances aussi
difficiles. Il songeait donc à s'évader, lors-
que Souiller le requiert de prendre les
dispositions nécessaires pour recevoir la
commission provisoire et l'état-major.
Frocbot donne des ordres en conséquence :
il allait se retirer, lorsqu'on vient lui an-
noncer que le général Mallet a été arrêté
et qu'il était à la tète d'une grande con-
spiration que l'on vient de faire écbouer.
Il était évident que Frochot n'était point
de la conspiration, et que la manière
dont elle avait été ourdie n'avait pas per-
mis ni de la prévoir ni de la prévenir :
Buonaparte en jugea autrement. Dès qu'il
fut de retour à Taris, il fit assembler
les sections du conseil d'Etat : celle de la
guerre demanda la mise en jugement de
Frochot : toutes les autres pensèrent que,
sans être coupable de trahison , le préfet
avait montré dans cette circonstance une
coupable pusillanimité. Exclu du conseil
d'état , Frochot fut en même temps desti-
tué de la préfecture qui fut confiée à
M. de Chabrol. Louis XVIU donna à Fro-
chot le titre de conseiller d'état honoraire,
et sur la demande du conseil-général de
la Seine, il lui fut alloué une pension de
15,000 francs sur les revenus de Paris.
Pendant les cent jours il accepta la pré-
fecture des Bouches-du-Rhône ; ce qui
lui fit perdre à la seconde restauration le
titre de conseiller d'état honoraire. Re-
tiré dès loi-s dans sa campagne près de
Chaumont , il y vécut dans l'obscurité. Il
est mort à l'âge de G8 ans, le 30 juillet
1828 avec la réputation d'un bon admi-
nistrateur.
FRODOARD. Foycz Flodoabt.
FRCELICH ( GuUlaume ), né en 1 492
à Soleurc en Suisse, servit avec beaucoup
de zèle et de gloire les rois François I ,
PRO
Henri II et Charles rx. ; il commanda en
qualité de colonel , plusieurs régimens
suisses au service de ces princes , et
mourut à Paris en 1 5C2 , après 40 ans de
service. On lui éleva un mausolée dans
l'église des grands Cordeliers. Frœlich
était zélé pour la religion catholique ,
autant que pour le service militaire. Il
quitta sa patrie, lorsqu'elle embrassâtes
nouvelles erreurs. Brantôme et de Thou
font un grand éloge de ce brave officier.
FR(BLICH ( Erasme ) , né à Gratz en
Styrie en 1700, entra chez les jésuites
en 1716. Il professa les belles-lettres et
les mathématiques à Vienne , oîi il eut
occasion de suivre son inclination pour
la connaissance des médailles. Il était
bibliothécaire du collège Thérésien de
cette ville, lorsqu'il y mourut le 7 juillet
1758. De 1733 à 1757 il a publié outre
un grand nombre d'opuscules , 1 G ou-
vrages importans sur les médailles et les
monnaies des rois et des villes grecques ,
romaines et asiatiques : nous citerons seu-
lement les suivans : 1 " Utilitas rei num-
maricB vetcris , compendio proposita ,
etc. , Vienne, 1733, in-8 ; 2" Annales
compendlarii regum et reriim Syriœ , 1
nummis veteribus illuslrati , deducti aJf
obitu Alexandri , etc. , Vienne, 1744, in-
folio ; 2® édition augmentée ibid., 1754 ,
in-fol. ; 3° Regum veterum numismata
anecdota , aut perrara , nolis illustrnta ,
etc. , ibid., 1752, in-4 ; 4° Quatuor ten-
tamina in re nummariâ , Vienne, 1 737 ,
in-4 , réimprimés en 1750 ; 5° De figura
telluris, V&ssau, 1757, ih-4 ; 6° Annales
rerum et regum Syriœ , 1751 , in-folio ;
7° Des dissertations sur des médailles
particulières, parmi lesquelles on distin-
gue Familia F'abaUathi nummis iUus-
trata, 1762, in-4, etc.
FROIDMONT ou Fromont ( Libert } ,
Fromondus , né à Hacourt , village du
pays de Liège , en 1587 , docteur, inter-
prète royal de l'Ecriture sainte à Lou-
vain , mourut doyen de la collégiale de
St.-Pierre de cette ville en 1653. Dcs-
cartcs et Jansénius étaient ses amis ; il
publia VAugustinus du dernier avec
Henri Calénus , chanoine et ensuite ar-
chidiacre de Malincs , et évêquc de Rare-
FRO
monde : service dont on doit leur savoir
peu de gré , quand on rëflécbit aux trou-
bles que ce livre a fait naître ( voye:i
CALEiHUS et Jassenius ). On a de Froid-
mont : 1° un Commentaire latin sur les
Epîlres de saint Paul, 2 tom. in-folio ,
1670. C'est proprement un abrégé de
celui d'Estius; 2° Des Commentaires sur
les Cantiques des Cantiques et sur l'Apo-
calypse , peu utiles , et qui se ressentent
des erreurs qu'il avait adoptées ; 3° Fin-
centii lenis tlieriaca contre les Pères
Petau et Deschainps , jésuites. Ce dernier
ouvrage est polémique. On a encore de
lui , dans le même genre , avec des titres
bizarres et ridicules : la Lampe de saint
Aug ustin ; les Mouchettes de la Lampe;
Colloques en rimes entre saint Augustin
et saint Ambroise ; ces écrits sont en
latin.
FROILA , P' de ce nom , roi d'Espa-
gne , à Oviédo , à Léon et dans les Astu-
ries , était fils d'AlXonsc I , et commença
de régner l'an 757. Il fit d'abord de belles
ordonnances pour la police du royaume
et s'opposa aux courses des Maures. De-
puis il remporta , l'an 760 , une célèbre
victoire sur Omar , prince des Sarrasins
eu Galice , et tua 54 mille de ces barba-
res. Froila souilla sa gloire par le meurtre
de son frère Vimazan ; meurtre vengé
bientôt après par Aurèle son autre frère ,
qui lui ôta le trône et la vie en 768.
FROILA II. royezFRUELA.
FROILA III, frère d'Ordogno, roi de
Léon en Espagne , lui succéda l'an 923 ,
parce que les enfans de son frère n'étaient
pas en état de régner. Il ne sut imiter
son prédécesseur que dans ce qu'il avait
fait de mal. A son exemple , il fit mourir
les enfans d'un grand seigneur de Cas-
tille , nommé don Osmond. Celte action
acheva de révolter les Castillans. Ils pri-
rent les armes ouvertement , s'érigèrent
en espèce de république , et firent choix
de deux magistrats souverains pour les
gouverner. Froila mourut de la lèpre en
935 , après avoir régné un peu plus d'un
an.
FROISSARD ou Froissart ( Jean ) ,
naquit à Valenciennes, en 1333. Un esprit
vif et inquiet ne lui permit pas de se fixer
V.
FRO
521
long-temps aux mêmes occupations et aux
mêmes lieux. Il aimait la chasse, la mu-
sique , les fêtes , la parure , la bonne
chère , le vin , les femmes. Ces goûts ,
fortifiés par l'habitude , ne moururent
qu'avec lui. ( Tourmenté du désir d'ap-
prendre et de faire des récits , Froissard
passa la plus grande partie de sa vie dans
les diverses cours de France et d'Angle-
terre , lisant ses vers aux dames, deman-
dant aux chevaliers et aux vieux écuyers
le détail des faits d'armes dont ils avaient
été les acteurs et les témoins. Il compta
parmi ses protecteurs Madame Philippa
deHainaut, femme d'Edouard III, Gastou-
Phébus comte de Foix , et Venceslas duc
de Brabant, en la société duquel il com-
posa son recueil de poésies. (On croit
qu'il finit ses jours à Chimay , où il était
chanoine et trésorier vers 1402. Froissard
était poète et historien ; mais il est plus
connu sous cette dernière qualité que
sous la première. Sa Chronique de France,
d'Angleterre, d'Ecosse, d'Espagne, de Bre-
tagne, etc., a été imprimée plusieurs fois.
La meilleure édition et une des moins
communes était celle de Lyon, in-fol. eu
4 vol. 1569, réimprimée à Paris en 1574.
( On estime beaucoup celle qui vient
d'être publiée d'après les manuscrits
avec des notes par M. Buchon , dans
sa Collection des chroniques nationales
françaises , écrites en langue vulgaire
du 13^ au 16^ siècle, Paris, Verdière ,
1824, et suivans. M. Dacier a travaillé
à cette publication. On prétend qu'il y
a un manuscrit de sa chronique à Bres-
law , plus fidèle que tous les imprimés.)
Cette chronique s'étend depuis 1326 jus-
qu'en 1400. Jean Sleidan l'a abrégée.
Monstrelet l'a continuée jusqu'en 1467.
On y trouve, dans un détail très ci rconstan-
cié, même quelquefois jusqu'à la minutie,
les événemens les plus considérables ar-
rivés de son temps en Europe. Elle a été
traduite en anglais par Bourchier , Lon-
dres, 1723-1725 , 2 vol. in-folio; 3« édi-
tion, Londres, 1812, 2 vol. in-4,avec de
nombreuses cori'ections, etc., etc. Johnes
en a donné une nouvelle traduction an-
glaise imprimée avec le plus grand luxe ,
1803-1807 , 4 vol. in-4 , avec un supplé-
33..
522 PRO
ment publié en 1810. (La cbrotaique de
Froissard a été abrégée en français par
Belleforest sous le titre de Recueil diligent
et profitable , Paris 1572, in-16 ; en latin
par Sleidan , ibid. 1637, in-8 ; en anglais
par P. Godling , Londres, 1608 , in-4.)
On a encore de Froissard plusieurs jjjcce*
depoe'sies , parmi lesquelles on distingue
ses pastourelles , un peu trop libres pour
les productions d'un chanoine. Froissard
fut un des premiers qui mit en vogue la
ballade.
FROLAND ( Louis ) , avocat au par-
lement de Rouen , mort en 1436 , exerça
sa profession à Paris, et y fut singuliè-
rement consulté sur la coutume de Nor-
mandie qu'il possédait très bien. On a de
lui quelques ouvrages de droit, relatifs à
la Coutume de son pays. 1° Mémoires
concernant la prohibition d'évoquer les
décrets d'immeubles situés en Norman-
die , 1722 , in-4. 2° Mémoires concernant
les statuts, 1729, 2 vol. in-4. 3° Mé-
- moires sur le sénatus-consulte velléien ,
1722, in-4. 4° sur la comté-pairie
d'Eu, in-A.
* FROMAGE DES FEUGRÈS ( Char-
les-Micbel-François), né en 1770 à Viette
près Lisieux , professa la philosophie au
collège de cette ville , fut ensuite nommé
élève à l'école normale, puis à celle d'Al-
fort , oîi il fut professeur de médecine et
de chirurgie , devint vétérinaire en chef
de la gendarmerie de la garde impériale,
et périt malheureusement pendant la dé-
sastreuse retraite de Moscou , à la fin de
1812. On lui doit : 1° Correspondance
sur la conservation et l'amélioration
des animaux domestiques , 1811 , 4 vol.
in- 1 2 . 2° De la garantie dans le commerce
des animaux, Paris, 1 805, in-8. 3" Traité
de r engraissement des animaux domes-
tiques, 1805 et 1806 , in-12. 4° Impor-
tance de V amélioration et de la multi-
plication des chevaux en France , 1805,
in-8. 5° Moyens de rendre Vart vétéri-
naire plus utile, 1805, in-8. Il a publié
ces quatre derniers articles avec Chabert.
6° Plusieurs articles dans la continuation
du Cours complet d'agriculture de Ro-
ziev, et dans V Abrégé, en 6 volumes
in-8 , publié sous le titre de Cours com-
PRO
put d^ agriculture pratique, Paris, 1809.
FROMAGEAU (Germain) , parisien ,
docteur de Sorbonne, succéda à Dela-
met dans la décision des cas de conscien-
ce. Son désintéressement le porta à re-
fuser tous les bénéfices , et sa charité à
accepter l'emploi héroïque d'assister ceux
qui sont condamnés au dernier supplice.
Il l'exerça long-temps avec beaucoup de
zèle. Il mourut en Sorbonne l'an 1705,
]^aissant grand nombre de décisions de
cas de conscience, recueillies avec celles
de son prédécesseur en 2 vol. in-folio ,
à Paris, 1733.
* FROMAGEOT ( Jean-Baptiste ),
avocat au parlement de Dijon , et pro-
fesseur en droit à l'université de cette
ville, y naquit le 10 septembre 1724 , et
mourut k Besançon le 14 août 1753, Il
eut plusieurs querelles avec le président
Bouhier. On lui doit les Lois ecclésiasti-
ques tirées des seuls livres saints, 1753 ,
in-1 2, etplusieursrft^*er/afton.ï anonymes
sur différens sujets de jurisprudence.
FROMAGET (N.), mort à Paris en
1759, poète médiocre, donna quelques
romans et quelques opéra-comiques déjà
presque oubliés.
* FROMENT (François-Marie) , roya-
liste fidèle, naquit le 9 juillet 1756 à Nî-
mes, où il était avocat. Dès le commence-
ment de la révolution, il se fit remarquer,
ainsi que son père et ses frères , par son
opposition aux nouveaux principes. Ce fut
lui qui donna dans le midi de la France
le signal de l'insurrection royaliste. Ce fut
encore lui qui organisa avec d'autres Fran-
çais de la même opinion que lui , le ras-
semblement connu sous le nom de camp
de Jalès. Il avait été auparavant le prin-
cipal moteur de la pétition présentée à
l'Assemblée nationale par les catholiques
de Nîmes, qui demandaient que leur re-
ligion fût toujours la religion de l'état :
ce qui l'exposa aux plus grands dangers,
à l'époque oîi éclatèrent les troubles de
Nîmes. Froment a donné la Relation de
ces massacres dans une brochure publiée
à cette époque ( 1790 ). Celte même an-
née il avait été k Turin, où il fut accueilli
avec distinction par le comte d'Artois qui
l'encouragea dans ses projets de résis-
FRO
tance avec l'armée royaliste de France.
En 1814 il fut annobli; mais il ne put
obtenir les indemnités qu'il réclamait
pour des voyages périlleux que les prin-
ces lui avaient fait entreprendre dans leurs
intérêts, en Espagne, en Angleterre et
même en France , comme il a cherché à
le prouver dans la brochure s Recueil de
divers écrits relatifs à la révolution ,
Paris, 1816, in-8. Froment est mort le
22 septembre 1825.
FROMENTHAL (Gabriel Bkrthon de),
juge-mage du Puy en Velay , mort vers
1762 , fut l'oracle de son pays par son
savoir , et ne fut pas moins estimé pour
son intégrité. Ses Décisions de droit ci-
vil, canonique et français, 1740, in-
folio , sont consultées de tous les juris-
consultes.
FROMENTIÈRES ( Jean-Louis de) ,
évêque d'Aire , naquit en 1632 à Saint-
Denis de Gastines , dans le Bas-Maine. Il
prêcha l' Avent devant Louis XI V en 1 6 7 2 ,
et le Carême en 1680 , et toujours avec
succès. Elève du Père Sénaut , de l'Ora-
toire, il mit comme lui, dans ses ser-
mons , de l'élévation et de la solidité.
Quoiqu'il eût défendu en mourant de les
imprimer, on les publia en 1684 , 6 vol.
in-12. Cet orateur, plus attentif au fond
des choses qu'à la forme , néglige quel-
quefois l'harmonie , l'élégance et la pu-
reté dulaagage. Il mourut en 1684, extrê-
mement regretté de'son diocèse , malgré
les réformes qu'il y avait introduites.
FROMOND. Voyez Froidmoxt.
FRONSAC. ^oye; Maillé- Brezé.
FRONSPERG ( George , comte de ) ,
d'une maison illustre du Tyrol , naquit
en Souabe à Mindla , près de Memming-
hen. C'était un homme d'une valeur et
d'une force extraordinaires. Il servit deux
fois l'empereur Charles V en Italie, avec
beaucoup de gloire , particulièrement à la
bataille de Pavie ; mais ses emportemens
allèrent jusqu'à la fureur contre l'église
romaine. Fronsperg était luthérien , et au
fanatisme d'un hérétique , il joignit la fé-
rocité d'un soldat. Ayant levé des troupes
pour l'empereur contre le pape Clément
VII , il fit publier qu'il enrichirait ceux
qui le suivraient des dépouilles de Rome.
FRO ÔaS
Les luthériens accoururent en foule.pour
s'enrôler sous ses enseignes ; et sur l'espé-
rance du sac de Rome, ils se contentèrent
d'un écu par tète. Fronsperg ayant for-
mé une armée d'environ 1 8,000 hommes,
se mit en marche au mois d'octobre pour
entrer en Italie. Ce fut alors qu'il fit faire
un cordeau tissu d'or et de soie , qu'il
portait en écharpe à la vue de tout le
monde. Il disait à ceux qui lui en deman-
daient la raison , « que c'était pour traiter
» le pape comme les Ottomans traitaient
» leurs frères. » Ce barbare joignit l'ar-
mée du duc de Bourbon sur la fin du
mois de janvier 1627 ; mais il n'alla pas
jusqu'à Rome ; car pendant que les trou-
pes étaient dans le Bolonais , il fut frappé
d'une apoplexie dont il mourut à Fer-
rare , sur la fin du mois de mars.
FRONTEAU ( Jean ) , chanoine-ré-
gulier génovefain , et chancelier de l'u-
niversité de Paris , naquit à Angers en
1614 , enseigna la philosophie et la théo-
logie, s'attacha pendant quelque temps
au parti des anti-constitutionnaires , et
fut exilé dans un prieuré de l'Anjou. Ayant
quitté l'esprit de parti , il revint à Paris
et fut fait curé de la paroisse de Ste.-Ma-
deleine à Montargîs , où il mourut dix
jours après sa prise de possession en 1 662.
On a de lui divers ouvrages : X" De diebus
festivis , in-fol. , dans le Kalendarium
romanum, 1652, in-8. 2" Antithèses
Augustini et Calvini , 1651, in-16.
3° Epistolœ de origine parochiarum , de
jure episcoporum , de priscorum chris-
tianorum moribus , de signo crucis. An-
notata in romanum Kalendarium, etc.
La meilleure édition est celle de Vérone,
1733, in-8. 4° Des Dissertations pour
prouver que l'Imitation de Jésus-Christ
est de Thomas à Kempis , et de non pas
de Gerson ni de Gersen ( voyez Amort ).
5° Une édition des œuvres doives de
Chartres , Faxis , 1647, in-fol, accom-
pagnée de remarques savantes et judi-
cieuses , et d'une vie de ce pieux docteur.
Le PèreFrohteau possédait neuf langues;
ce fut lui qui dressa la belle bibliothèque
de Ste.-Geneviève. Sa piété était aussi so-
lide qu'affectueuse , et ne lui permit pas
de rester long-temps dans un parti qui
524 FI^O
n'en avait que les dehors , et qui dans le
dedans nourrissait l'orgueil delà rébellion
contre l'Eglise. ( Véloge du Père Fron-
teau a été fait en latin par le Père Lalle-
mand chancelier de Ste.-Geneviève, Paris,
1633, in-4.)
FRONTIN ( Sextus Julius Fronti-
nus ) , brave guerrier et savant juriscon-
sulte romain , fut préteur l'an 70 de J. C.
et ensuite 3 fois consul. Vespasien l'en-
voya en 78 contre les Anglais, et il les
battit plusieurs fois. La lecture des au-
teurs militaires , grecs et romains , per-
fectionna beaucoup ses connaissances sur
l'art de la guerre. Il a laissé quatreli-
vres de stratagèmes de guerre , écrits , à
ce que l'on croit, sous Domitien, et impri-
més avec les autres auteurs qui ont traité
de l'art militaire dans les f^eteres de rc
militari scrip tores, Wesel, 1670 , 2 vol.
in-8 ; et plusieurs fois séparément, Leyde ,
1731 , in-8 , et Paris, sans notes, 1763,
in-12. Ils sont traduits en français avec
Polyen, 1770, 3 vol. in-12. C'est l'ou-
vrage d'un capitaine autant que d'un-sa-
vant. L'expédition d'Angleterre l'avait
encore plus instruit que ses lectures. Ner va
lui donna l'intendance des eaux et des
aqueducs de Rome , sur lesquels il com-
posa un ouvrage en deux livres , imprimé
à Bâle et à Florence, et intitulé : (De aquœ-
duclibus urbis Romœ. M. Rondelet a pu-
blié une traduction de cet ouvrage sous
ce titre : Commentaire de Frontin sur
les aqueducs de Rome , traduit avec le
texte en regard, précédé d'une notice
sur Frontin, Paris, 1820, un vol in-4.
avec un atlas. ) Son traité De qualitate
agrorum vit le jour à Paris par les soins
de Turnèbe, avec les autres auteurs qui
ont écrit sur les limites. On a encore de
lui un petit livre : De coloniis. Ses li-
vres : De scientiâ militari , qu'il avait
dédiés à Trajan , sont perdus. ( Frontin
mourut l'an 106 de J. C. ( 859 de Rome ).
L'édition princeps des œuvres de Fron-
tin a paru à Bologne , 1494, in-fol. et est
devenue fort rare. )
FRONTO ou FoNTOîf ( Marchus-Cor-
nélius ) , rhéteur latin , eut pour disci-
ples L. Vérus et Marc-Aurèle , qui fit éri-
ger une statue à son maître , et qui le
FRO
nomma consul. Son éloquence n'était pas
fleurie , mais elle était noble et majes-
tueuse , et respirait une certaine gravité
austère : quelques-uns disent que, pour
cette partie, il était l'émule de Gicéron.
( Nous n'avons guère de Fronto que quel-
ques fragmens cités par les grammai-
riens. )
FRONTO ( Marchus Julius ), consul
l'an 96 de J. C. , osa s'écrier en plein sé-
nat, en parlant des abus qui se glissaient
dans la punition des délateurs : «c II est
» dangereux d'être gouverné par un prince
» sous qui tout est défendu ( il voulait
» parler de Néron ) ; et encore plus dan-
» gereux de l'être par un prince sous qui
» tout est permis. » Ces dernières pa-
roles tombaient sur la facilité de Nerva ,
qui remédia bientôt aux désordres dont
elle avait été la source.
FONTO DUC^US. Voyez Duc.
* FRORIEP ( Just-Frédéric ), ministre
prolestant et savant orientaliste d'Alle-
magne , naquit en 1 745 à Lubeck, oîi il fit
d'excellentes études qu'il perfectionna
ensuite k Leipsick. Il était à peine âgé dfe
22 ans lorsqu'en 1767,, il se fit graduer
en philosophie dans l'université de cette
ville. Reçu bachelier en théologie l'an-
née suivante, il fut nommé prédicateur du
temple dans la même université , et se fit
dans cette carrière évangélique une répu-
tation très brillante. Bientôt il obtint,
encore dans la même université, la place
de professeur extraordinaire de théolo-
gie ; mais il occupa très peu de temps
cette chaire qu'il échangea contre celle
de théologie à Augsbourgen 1 7 7 1 , et plus
lard contre celle des langues orientales
à l'université d'Erfurth. En 1792, Froriep
fut destitué : alors il se retira à Wctziar
où il vécut dans la retraite, et où il fut
quelque temps prédicateur. Après avoir
publié un grand nombre d'ouvrages sur la
philosophie sacrée et la littérature orien-
tale , dont on trouve la liste dans le Dic-
tionnaire de Meusel , il mourut dans cette
ville en 1800. Ses productions les plus im-
portantes sont 1 " De utilitate linguœ ara-
bicœ in defcndcndis nonnuUis lacis S.
Scriplurœ spécimen primum , Leipsick ,
1767 , i»-4. 2° Corani caput primum et
FRO
secundi priores versus arahice et latine ,
cum animadversionibus historicis et phi-
lologicis, 1768, in-8. Z"* Arabische bi-
bliotek, Leipsick, in-8. A° Dissertalco
inauguralis de nova ratione conjungendi
theologiam dogmnticam cum theologia
morali, Helmstadt, 1772, in-i. 5" Bi-
bliothèque des connaissances theologi-
ques , en allemand , premier vol. Lemgo ,
1771-1773, deuxième vol. ibid. 1774-
1778. — Froriep ( Amélie-Henrielle-So-
phie ) , femme du précédent , née à Ros-
tock en 1762, morte à Gotha en 1784, a
traduit en allemand les deux ouvrages
suivans : la Nouvelle Clémentine, ou Let-
tres de Henriette de Bervllle de Léonard
Weimar, 1782, in-8. Correspondance de
jRollin avec le roi de Prusse, Gotha,
1 783, in-8. Elle avait aussi composé Ame-
lie de Nordheim ou la Mort prématu-
rée, 1783 , 2 vol. in-8. Elle était fort in-
struite et très vertueuse.
* FROSSARD (N...) professeur de
théologie protestante à Montauban, est
mort dans cette ville le 3 janvier 1830 à
l'âge de 78 ans. Né à Nyon dans le can-
ton de \"aud , il exerça d'abord le mini-
stère de pasteur à Lyon ; mais la réro-
lution le jeta hors de ses fonctions ecclé-
siastiques qu'il ne reprit qu'en 1802 à
Montauban. Lorsqu'on forma une faculté
de théologie dans cette ville, il en fut
nommé doyen, et fut en même temps pro-
fesseur de morale et d'éloquence de la
chaire. On a de lui une Traduction des
sermons de Bloii et d'un livre de Wil-
berforce , intitulé : le Christianisme des
gens du monde mis en opposition avec
le véritable christianisme , Paris , 1821 ,
2 vol.in-S.Frossard fut un des grands pro-
moteurs de l'affranchissement des Nègres.
* FROTTÉ ( Le comte Louis de ) ,
chef des royalistes de Normandie, gen-
tilhomme de cette province , servit dans
l'infanterie avant la révolution française,
et se montra de bonne heure l'adversaire
de toutes les innovations politiques de
cette époque. Il prit le parti de l'émigra-
tion en 1792 ; mais la guerre extérieure
ne remplissant point ^on attente, il quitta
l'Angleterre deux ans après, et passa en
France pour faire insurger la Normandie,
FKO
§25
oùil avait des intelligences. En débarquant
sur la côte de Saint-Malo avec plusieurs
autres gentilshommes, il eut à soutenir
un combat avec les troupes républicaines ;
mais il leur échappa , et parvint dans la
basse Normandie , où il commença à figu-
rer parmi les chpuans royalistes en qua-
lité de général. Il avait tout ce qu'il faut
pour réussir , un grand courage , une pa-
tience à toute épreuve , des talens mili-
taires naturels et le désir de se faire un
nom. Il se rendit , le l*' avril 1795 , aux
conférences de La Mabilais en Bretagne ,
et refusa de signer le traité négocié par
Cormatin , en déclarant qu'il n'y avait
pour les royalistes de sécurité que dans
les armes. Il regagna alors la Normandie,
et organisa l'insurrection dans les can-
tons limitrophes du Calvados et de la Man-
che. Il n'eut d'abord sous ses ordres,
que 300 hommes peu aguerris ; mais
sa persévérance et son infatigable acti-
vité lui valurent des succès partiels et
répétés contre des détachemens de ré-
publicains. En 179.5 il fit une incursion
dans le Maine, s'empara momentanément
de la petite ville de Mayenne, et s'efforça
de coordonner ses opérations avec celles
des autres chefs de l'Anjou , du Maine et
de la Bretagne. La malheureuse issue de
l'expédition de Quiberon vint arrêter l'es
sor de ses vastes projets. Il ne perdit ce-
pendant pas courage, et remporta quel-
ques avantages sur plusieurs bataillons
républicains ; mais il fut battu à son tour.
Ayant reçu des subsides du ministère an-
glais, il redoubla de zèle, forma une
compagnie organisée sous le nom de gen-
tilshommes de la couronne , et devint
redoutable aux troupes qui lui furent op-
posées ; il essaya même de s'emparer de
la petite ville de Tinchcbray , qui avait
quelques fortifications ; mais il fut re-
poussé avec perte. Poursuivi par le géné-
ral Hoche , qui avait soumis la Vendée ,
il se vit contraint , après une résistance
opiniâtre, de se rembarquer pour l'Angle-
terre. Il y resta jusqu'à l'époque de la
rupture des conférences de Rasladt , en
1799, oiiles royalistes purent reprendre
les armes. Alors il débarqua en Normandie,
et se trouVa bientôt à la tête de forces consi-
526 FRU
dërables cpie l'on peut porter jusqu'à i 0
mille hommes. Il prit plusieurs bourgs ,
et délivra sa mère et un grand nombre de
royalistes qui venaient d'être emprison-
nés , en exécution de la loi des otages. Il
fit ensuite une expédition assez heureuse
dans le midi du département de la Man-
che, puis il éprouva quelques revers. Mais
après le 1 8 brumaire qui promettait plus
de stabilité au nouvel état de choses,
presque tous les autres chefs royalistes
capitulèrent, et il résistait encore , reje-
tant toute espèce de pacification. Enfin
accablé par des forces toujours croissan-
tes , il se détermina à écrire , le 28 jan-
vier 1800, au général Guidai pour lui
déclarer qu'il se soumettait aux lois de la
république. Il se rendait à Alenron pour
négocier son accommodement, lorsqu'au
mépris de la foi jurée il fut arrêté avec
six de ses officiers, et traduit devant une
commission militaire formée à Verneuil.
Il parut devant ses juges avec l'audace
qui l'avait toujours caractérisé, et fut con-
damné à être fusillé. Il ne voulut pas se
laisser bander les yeux , et attendit de-
bout et avec calme le coup qui devait lui
ôter la vie. Il avait environ 45 ans. Son
supplice fut un des premiers crimes po-
litiques de Buonaparte. On assure qu'il
avait donné des ordres secrets pour son
arrestation et pour sa condamnation.
FROUMEINTEAU ( Nicolas ) , nom
sous lequel s'est caché un écrivain pro-
testant du 16* siècle, qu'on n'a pas en-
core découvert selon les uns , et qui réel-
lement s'appelait Barnaud. Ses ouvrages
sur le rétablissement des finances sous
le malheureux règne de Henri III , sont
encore recherchés malgré leur stile sur-
anné , par la candeur , la bonhomie et
les vues utiles qui y régnent. Le pre-
mier est intitulé : Secret des finances de
France , in-8 , 1 581 ; le second : Cabinet
du roi de France^ 1582, in-8. Ce der-
nier ouvrage contient des infamies qui
font presque oublier les bonnes observa-
tions qui y sont mêlées.
FRUCTUEUX (Saint), évêquc de
Tarragone , souffrit le martyre en 259 ,
par ordre d'Emilieu , gouverneur de cette
ville.
FRU
FRUCTUEUX (Saint), archevêque
de Drague au 7* siècle, se retira dans
une solitude et y bâtit un monastère qu'il
nomma Complutum , parce qu'il le con-
sacra à Dieu , sous l'invocation des saints
Justin et Pasteur , martyrs de Complute ,
aujourd'hui Alcala de Hénarez, dans la
Castille. Malgré l'amour qu'il avait pour
la retraite , ses vertus l'élevèrent à l'épis-
copat. On l'ordonna d'abord évêque de
Dume, et en 656, le 10* concile de To-
lède le plaça sur le siège archiépiscopal
de Brague. Il mourut en 665 , après avoir
édifié le monde et comme évêque et
comme religieux. Ses reliques sont à
Compostelle. On a encore deux règles ,
dont il est l'auteur. La première est dite
de Complute , parce qu'elle était parti-
culière à l'abbaye de ce nom. La seconde,
appelée Règle commune, s'observait dans
les autres communautés d'hommes et de
femmes , dont il était fondateur. Sa vie ,
écrite par un auteur contemporain , se
trouve dans Bollandus, Mabillou et Bul-
teau.
FRUELA ou Froila , usurpateur du
royaume de Léon , vers le milieu du 9"
siècle, était fils du roi Véremond, et
comte de Galice. L'ambition le perdit. Il
ne put voir sans envie la couronne sur
la tête d'Alfonse III , son neveu qui avait
succédé à Ordogno , et qui par ses belles
qualités était digne de régner : il se fit
proclamer roi dans cette province. Al-
fonse, dont la prudence ne s'étendait
pas jusqu'à soupçonner de trahison ceux
qui lui étaient unis par le sang, n'apprit
cette révolte que par la marche de Frue-
la , qui venait se présenter devant Oviédo
avec une armée assez forte ; mais bientôt
après il trouva le moyen de faire poi-
gnarder l'usurpateur et de se rétablir sur
le trône vers l'an 866.
FRUGONI ( Charles-Innocent ) , poète
italien, né à Gênes le 21 novembre 1G92,
entra dans l'ordre des clercs réguliers
Somasqucs, et enseigna les belles-lettres
pendant plusieurs années. Il se dégoûta
ensuite de son état , sollicita et obtint du
pape la permission de quitter son ordre.
Il était prêtre , et vécut le reste de sa vie
à Parme , où l'infant dom Philippe l'ho-
FUA
Qorait de son estime. Il y mourut en
1768. La collection de ses poésies, fort
estimées des Italiens , a paru à Parme ,
en 1779 , en 9 vol. in-8. On a réimprimé
à Brescia en 1782 un Choix des poésies
de Frugoni, en 2 yoI. in-8.
FRUMENCE (Saint) , apôtre de l'E-
thiopie , était tyrien. Etant allé dans
l'Ethiopie avec Edresse son frère, et Mé-
Tope, marchand et philosophe de Tyr,
les deux frères plurent tellement par leur
sagesse et leur science au roi , qu'il en
fit ses favoris ; il fit Edresse son échan-
son, et Frumence son trésorier. Fru-
mence se servit de son crédit pour établir
la religion chrétienne dans l'Ethiopie ,
dont il fut ordonné évêque l'an 331 , par
saint Athanase. Le christianisme fit de
grands progrès par son moyen dans ce
vaste empire. Ces peuples reconnaissent
qu'ils sont principalement redevables à
saint Frumence de leur conversion au
christianisme. Ils tombèrent depuis dans
l'hérésie d'Eutychès, et encore aujour-
d'hui ils ne reconnaissent qu'une nature
en Jésus-Christ. Dans le 10* siècle leur
roi envoya une ambassade au pape Clé-
ment VII. Il se forma des missions dans
leur pays. Grégoire XIII leur envoya des
jésuites ; les succès répondirent d'abord à
leurs travaux , mais ne se soutinrent pas :
ces missionnaires furent martyrisés en
1670.
FRUTER ou plutôt Fruitiers (Luc) ,
Fruterius, critique, né en 1541 à Bru-
ges , vint à Paris en 1 566 , et y mourut
ayant à peine 25 ans. Il était ami de
Muret et de plusieurs autres savans. On
a de lui quelques ouvrages, 158i, ln-8,
bien écrits en latin , et qui promettaient
beaucoup à la république des lettres.
Quoique très jeune , il avait le jugement
aussi sain que les vieillards les plus ex-
périmentés.
' FUALDES ( N.... ) ancien procureur
du roi à Rhodez , dont l'assassinat a re-
tenti dans toute l'Europe, et a été l'occa-
sion d'un procès célèbre, naquit vers
1 761 au Mur-de-Barrey , et fut reçu quel-
ques années avant la révolution avocat au
parlement de Toulouse. Il resta ignoré
pendant nos troubles politiques. Il était
PUC
Ô27
procureur du roi à Rhodez , lorsqu'il fut
assassiné le 1 9 mars 1817, de la manière
la plus affreuse dans la maison d'un cer-
tain Bancal , manouvrier de cette ville.
La police ayant découvert, après d'activés
recherches , les auteurs du meurtre atroce
de ce magistrat , le procès fut instruit de-
vant la cour d'assises de l'Aveyron. Les
débats de cette cause très compliqués ont
fixé pendant assez long-temps l'attention
générale :les dépositions d'une dame nom-
mée Manson , ont servi d'épisode dans ce
drame épouvantable , et n'ont contribué
qu'à jeter dans cette affaire plus d'intérêt
que de lumière. Nous ne chercherons
point a en reproduire les détails qui se
trouvent d'ailleurs amplement exposés
dans l'ouvrage intitulé : Histoire et pro-
cès complet des assassins de M. Fualdès
par le Sténographe français ( M. Latou-
che), Paris, 1818, 2 vol. in-8, 3« édition,
et dans tons les journaux du temps. Il y
en a qui ont prétendu que ce meurtre
était le résultat d'une vengeance politi-
que ; mais ce fait ne résulte pas des dé-
bats.
* FUCHS (Théophile), poète alle-
mand, né en 1720 à Leppersdorff dans la
Haute-Saxe , était fils d'un pauvre paysan
qu'il assista dans ses travaux agrestes
jusqu'à l'âge de 18 ans. Il n'avait reçu
d'autre instruction que celle que lui
donna le maître d'école du lieu ; mais par-
venu à cet âge , il sentit le besoin d'étu-
dier : ce fut pour lui une passion irrésis-
tible. Ayant obtenu de ses parens la per-
mission de se rendre à l'université de
Leipsick , il reçut en partant de son frère,
la somme de 7 florins et demi qui était le
montant de sa part dans la succession à
venir de sa famille. Avec cette modique
somme , il se met en route ; il n'a aucune
autre ressource , aucune protection , plus
d'asile ; mais il est plein d'espoir, il brûle
d'ardeur, et chemin faisant, il compose
le long de la route un poème en vers
alexandrins, dans lequel il opposait d'une
manière originale et neuve sa misère ac-
tuelle et ses brillantes espérances de for-
tune. Ce poème , qui était un essai encore
bien informe , fut lu avec plaisir par plu-
sieurs personnes, et notamment par le
528 FUC
poète Hagedorn qui fit en sa faveur une col-
lecte de 700 écus : ce qui lui permit de
suivre les cours pendant 5 ans. Le célèbre
professeur Gottsched l'avait recommandé
dans sa NonvelleBibliothèque des sciences
et des arts, comme un jeune bomme plein
de mérite , mais sans moyen d'existence.
Les ressources que lui fournirent ses pro-
tecteurs lui permirent de terminer ses étu-
des : il s'était attacbé surtout à la théolo-
gie , sans toutefois négliger la poésie à
laquelle il était redevable de sa position
actuelle, et qui devait être à ses yeux la
source de son bonheur à venir. En 1751
Fuchs vint à Dresde, fut nommé diacre
dans un bourg près de Meissen où il se
maria en 1752. Pendant la guerre de sept
ans son domicile fut pillé , et il faillit re-
tomber dans la misère; mais la poésie lui
donna du courage, et il lui dut ses plus
beaux momens comme ses plus douces
consolations. Nommé en 17G'J prédica-
teur à Taubenheim près de Friedberg , il
occupa cette place jusqu'en 1787 où il
prit sa retraite. Il vint se fixer à Meissen
où il mourut vers 1810. Les poésies de
Fucbs sont presque toutes dans le genre
lyrique; elles n'ont pas le goût, l'élé-
gance , la grâce qu'on pourrait désirer :
ce qui tient à ce que Fuchs habita tou-
jours la campagne. Il avait cherché à
marcher sur les traces de Hagedorn son
bienfaiteur , et le restaurateur du bon
goût en Allemagne. Fuchs est placé au
nombre des poètes allemands du troi-
sième ordre. Ses poésies ont été pour la
plupart insérées dans le Recueil de Chris-
tophe-Henri Schmid, et dans les Anlho-
logies lyriques de Ramier et Mathisson :
il publia lui-même les Poésies d'un fils
de paysan, Dresde, 1752, in-8 ; nouvelle
édition augmentée, ibid. 1771 , in-8, et
Ma vie jusqu'à Vàge de 11 ans , briève-
ment racontée pour la gloire de Dieu
et la consolation des pauvres, 1796,
in-8-
'FUCHS (Jean-Christophe), physi-
cien et littérateur allemand, né le 1*''
mars 1 7 2G à Gross-Germersleben dans le
duché de Magdebourg , était à l'âge de
28 ans gouverneur des pages du roi et de
la reine de Prusse, et conserva cet emploi
FUE
jusqu'à sa mort arrivée en septembre 1 795.
H s'est distingué comme amateur éclairé
des sciences physiques et naturelles. Dans
les loisirs que lui laissait sa place , il com-
posa quelques mémoires intéressans qui
ont été insérés dans les recueils de \A-
cadémie des Scrutateurs de la nature, de
Berlin , dont il était membre : nous cite-
rons 1" Mémoires sur l'histoire des fos-
siles et des pétrifications. 2° Mémoire
sur un os maxillaire et une défense d^é~
léphant trouvés près de Postdam r « 1 7 68 .
3° Mémoires sur les paratonnerres. D'au-
tres dis.sertations du même savant ont été
insérées dans d'autres recueils académi-
ques. Il a laissé aussi quelques opuscules
inédits. Tous ses ouvrages sont écrits en
allemand.
FUCHSIUS. Foyez Fosch.
FUENTE. Foyez Po?iCK de la Fue.nte.
' FUENTÈS (Le comte de) , général
espagnol, né à Yalladodid le 18 septem-
bre 1 5G0 , servit avec distinction sous le
règne de Philippe III et sous celui de Phi-
lippe IV. En 16 43 il commandait, quoi-
que octogénaire, cette célèbre infanterie
espagnole regardée comme invincible
jusqu'au moment où le grand Condé en
triompha à la bataille de P»ocroi. Fuentès,
alors tourmenté de la goutte , se fit por-
ter sur le champ de bataille , où il mou-
rut percé de coups le 19 mars 1643.
Condé , en apprenant sa mort , s'écria
qu'il aurait voulu mourir comme lui , s'il
n'avait pas vaincu.
FUESI (Pie), dominicain, né en 1703
à Comaron en Hongrie, de parens pro-
testans , embrassa la religion catholique
et entra dans l'ordre des Dominicains.il
mourut à Yaitzen en 1769. On a de lui
1° Otia poetica. Vienne, 1744; 2° Tri-
bunale confessariorum et ordinandorum
Martini Wigardt in brève compcniliuni
collectum , 1 745 ; 3° Fasciculus biblicus,
Bude, 1746; 4° Fie de saint Fincent
Ferrier , en hongrois , OEdenbourg ,
1749 ; 5° Catonis moralia disticlui, ad
hungaricos versus magna elêgantia re-
dacta , plusieurs fois réimprimés , der-
nière édition, Bude, 1772.
* FUESSLI ( Jean-Melcbior ), graveur
et écrivain, naquit à Zurich en 1677- H
I
i
FtJË
a exécuté plusieurs plancbes , panni les-
quelles on cite la Cérémonie des sermens,
qui représente l'alliance jadis stipulée
entre la république de Venise et les can-
tons de Zurich et de Berne. Fuessli a
aussi laissé un ouvrage estimé , qui a
pour titre Histoire des meilleurs pein-
tres de la Suisse, de 1755 à 1780, 4
vol. , avec un Supplément et portraits.
Fuessli , après avoir long-temps voyagé
en Allemagne , oîi il s'attira l'amitié des
artistes et des gens de cour, revint en
Suisse , s'y maria , occupa quelque temps
la place de chancelier, et y mourut en
17 36. — Son fils aîné , Jean Rodolphe,
mort à Vienne en 1 806 , avait entrepris
le Catalogue raisonné des meilleures es-
tampes gravées d'après les artistes les
plus célèbres de chaque école, dont il n'a
publié que les 4 premiers volumes, 1798
à 1806. Ils comprennent les écoles fla-
mandes et italiennes. Il a gravé les por-
traits et les vignettes dej l'Histoire des
peintres de la Suisse , de son père.
"FUESSLI (Jean-Conrad), né en 1 704 à
Wetzlan, oîi son père originaire de Zurich
était pasteur, fut ministre à Veltheim en
1744, et mourut en 1775. On a de lui 1"
Tliesaurus historiée helveticœ , Zurich,
1735 , jn-fol. ; c'est un recueil des histo-
riens latins de la Suisse. 2° Un Abrégé
de V histoire de la Suisse à la suite de
Helvetiorumrepublica de Simler, Zurich,
1734. Son fanatisme contre la religion
catholique perce partout oii il a trouvé
occasion de le montrer.
* FUESSLI (Matthieu) , peintre , né à
Zurich en 1 598 , se distingua dans la re-
présentation des scènes effrayantes ; telles
que batailles, combat naval, incendies
et pillages. Il mourut en 1604.
* FUESSLI ou FusELi (Henri), peintre et
professeur de dessin à l'académie de Lon-
dres, naquit à Zurich en 1 7 4 2 d'une famille
qui avait déjà fourni plusieurs hommes cé-
lèbres dans la carrière des beaux arts ( V.
les articles précédens). Henri fit ses étu-
des dans sa patrie, et se rendit ensuite à
Berlin , ou il suivit les leçons des grands
maîtres de l'école allemande. Après s'y
être pénétré de la lecture des poètes les
plus distingués de ce pays , surtout de
V.
Kleist , de Wieland , de Klopstock , il s'at-
tacha au fameux Lavater avec lequel il
voyagea en 1761 dans une partie de l'Alle-
magne, avec l'intention d'y étudier les ou-
vrages des plus fameux peintres. Il se ren-
dit ensuite en Angleterre oîi il se lia avec
le fondateur de l'école de peinture de ce
pays , Reinolds , qu'on appelle le Corrége
de la Grande-Bretagne. De là il passa en
Italie pour y étudier les chefs-d'œuvre de
Michel-Ange et des autres grands-maîtres
de cette terre classique des beaux arts. Il
vint enfin se fixer en Angleterre en 1 778 ,
et ses tableaux ont été accueillis avec tant
de faveur qu'on l'a placé après le fameux
West. Il est mort le 26 avril 1825 à Pult-
ney-Hill dans un état voisin de l'indi-
gence. Son œuvrie précédé d'une îiotice
historique a paru à Zurich en 1 806, 4 vol.
in-fol. Parmi ses principaux tableaux on
remarque lady Macbeth; quelques scè-
nes de l'Espiègle , le Spectre de Dion ,
d'après Plutarque, une suite de sujets
tirés de Milton; Hercule combattant les
chevaux de Diomède. Fuessli ne se borna
point à peindre , il fit encore des ouvrages
sur la peinture.
FUET ( Louis ) , célèbre avocat au par-
lement de Paris, mort en 1739, âgé
d'environ 50 ans, est auteur d'un Traité
estimé sur les matières bénéficiales ,
1723 , in-4. Rousseau de Lacombel'a re-
donné sous le titre de Jurisprudence ca-
nonique, in-folio, 1771 , après l'avoir
rectifié et augmenté.
FUGGER ( Ulric ) , né en 1 528 à Augs-
bourg , d'une famille riche , fut d'abord
camérjer du pape Paul III , et se fit en-
suite protestant. Il faisait des dépenses si
considérables jiour acquérir les manus-
crits des auteurs anciens , que sa famille
lui fit ôter l'administration de son bien.
H se retira à Heidelberg , où il mourut en
1584 , à 58 ans. Il légua sa bibliothèque,
qui était très belle, à l'électeur Palatin.
C'est le seul individu de cette famille
célèbre qui ait abandonné la religion ca-
tholique. Il arriva même contre son in-
tention qu'il rendit grand service à cette
religion en destinant 1000 florins pour
une œuvre pieuse , et engageant ses pa-
rens à en faire autant ; car cette somme,
34
53o FUL
beaucoup acct-ue , servit ensuite à la fon-
dation du magnifique collège de St.-Sau-
veur à Augsbourg, un de ceux qui furent
les plus utiles à l'église catholique en
Allemagne. Les jésuites l'occupaient en-
core après leur suppression, en 1791 , et
il en sortit une multitude d'ouvrages
contre les erreurs et les faux docteurs
du temps. On peut voir sur ce sujet ,
Origo collegii S. J. ad sanctum Salva-
torem, A. V . Fuggeriane pietatis mn-
numentum , Augsbourg, 1786, 1 vol.
iii-8.
FUHRMANN ( Mathias ), savant moine
autrichien , de l'ordre de St. -Paul , pre-
mier ermite, était définiteur-général de
la province d'Autriche , et mourut en
1773. Il a publié plusieurs ouvrages eu
allemand : 1° L'Autriche ancienne et
moderne. Vienne, 1734, 4 part. in-8.
2° Païenne ancienne et moderne, 1738 ,
2 part. in-8. 3° P^ie et miracles de St.-
Se'verin , apôtre du Nordgau ou de l'Au-
triche , 1746, in-8. 4° Description his-
torique de la ville et des faubourgs de
Vienne, 1766-67 , 2 vol. in-8. 5" Histoire
générale , ecclésiastique et civile des
états héréditaires de la maison d^ Autri-
che, depuis Auguste jusqu'à Van ZZl de
J. C. , 1769, in-4, fig. 6" Historia sacra
de baptismo Constantini Max. Aug.
colloquiis familiaribus digesta , Rome ,
17 43-47 , 2 part, in-4 , fig., ouvrage plein
d'érudition , mais dont la seconde partie
est défigurée par de nombreuses fautes
d'impression. 7° Dux vice angelicus ad
urbem Romam , 1749 , in-8. Il a été tra-
duit en allemand, la même année.
FULBERT, 54« évêque de Chartres en
1007, chancelier de France, suivant
quelques-uns , avait été disciple de Ger-
bert, depuis pape sous le nom de Syl-
vestre II. 11 passa d'Italie en France , et
fit des leçons de théologie dans les écoles
de l'église de Chartres. Il mourut le 10
avril 1028 , regardé comme le prélat de
son temps qui connaissait le mieux l'an-
cienne discipline, et qui la faisait obser-
ver avec le plus d'exactitude. Ses œuvrer
ont été publiées en 1G08 , in-8. On peut
voir dans ses épîtres combien il était con-
sidéré de tous les princes de son temps.
PUL
Elles sont d'ailleurs bien écrites, et sur-
tout fort utiles pour l'histoire , la disci-
pline et les usages de son siècle. Ses au-
tres ouvrages sont des sermons, des
hymnes , Ae& proses ; mais ce ne sont pas
les plus précieuses parties de ses Œuvres.
FULGENCE (Saint), Fabius Claudlus
Gordianus Fulgentius , né à Lepté dans
la Bizacène , province d'Afrique , en 467,
ou bien en 463 , de parens nobles, quitta
le monde , oii il aurait pu briller par ses
talens, pour se renfermer dans un mo-
nastère. Il devint le père d'une grande
communauté en 494 , fut ordonné prêtre
à Rome en 500. On le tira de sa soli-
tude , pour l'élever sur le siège de Ruspe
en Afrique, en 508. Son zèle contre l'a-
rianisme déplut à Trasimond , roi des
Vandales , qui l'exila en Sardaigne. Hil-
déric , successeur de ce prince barbare ,
le rappela en 523. Son peuple le reçut
comme en triomphe. Pendant son exil il
avait composé plusieurs ouvrages. r.,e
Père Sirraond en a publié quelques-uns ,
Paris, 1684, in-4 : car nous n'avons pas
tous ceux qui sont sortis de sa plume. Le
principal de ceux qui nous restent est
son Traité de la prédestination et de la
grâce , en 3 livres. Il y défend avec zèle
la doctrine de saint Augustin. Il mourut
en 533 , après avoir fait un bien infini en
Afrique par une science profonde , unie
à une rare vertu.
FULGENTIUS - PLANCIADES ( Fa-
bius) est auteur de trois Livres de my-
thologie, publiés à Amsterdam en 1681 ,
2 vol. in-8 , avec Julius-Hyginius , Lac-
tancius-Placidus et Albricius , par Munc-
ker , sous le titre de Mythographi latini.
11 était , dit-on, évêque de Carthage dans
le 6* siècle. Nous avons encore de lui un
traité curieux : De priscis vocabulis la-
tinis , Paris, 1586, in-4.
FULGOSE ou Fregose (Raphaël ) , en-
seigna , vers l'an 1438 , le droit avec ré-
putation à Pavie et à Plaisance , puis à
Padoue , où il mourut , laissant divers
ouvrages peu lus , même par les juris-
consultes. — Il y a un autre Fulgosk ou
Fregose (Baptiste) , qui fut doge de Gè-
nes, sa patrie, en 1478. Voyez Frkgosk
(Baptiste).
FUL
* FULLEBORN ( George-Guslave), sa-
vant professeur allemand , naquit à Glo-
gau le 2 mars 1769. Après avoir com-
mencé ses études sous son père , homme
profond et distingué par ses connaissan-
ces littéraires , et qui était conseiller du
bailliage de Glogau, il alla les terminer k
l'université de Halle , oii il publia bientôt
une Dissertation latine sur le livre de
Xe'nophon : Ze'non à Gorgias , ordinai-
rement attribue' à Aristote. De retour k
Glogau en 1*89, il prêcha dans l'église
luthérienne de celte ville , et fut nommé
troisième diacre. Appelé à Breslau pour
y enseigner les langues hébraïque , grec-
que et latine, en remplacement du célèbre
professeur Gedicke, dans l'établissement
appelé E lisahethanum , il ne remplit
pas long-temps ces fonctions dans les-
quelles il avait acquis une grande répu-
tation. Atteint d'une maladie de cœur,
il mourut k la fleur de l'âge le 1 6 février
1803. Quoiqu'enlevé bien jeune encore ,
il a laissé un grand nombre d'ouvrages
dont les principaux sont : 1 " une édition
des satires de Perse , avec ime traduc-
tion et des notes en allemand , Zullichau ,
1794 ; 2° Théorie abrégée du stile latin ,
en allemand, Breslau, 1783, in-8 ; 3°
Quelques contes populaires dans la même
langue, 1791-93. i" Des mélanges inti-
tulés Feuilles diverses, d'EdelwaldeJus-
tus , 1795 ; 5° Fragmens de Parménide
avec luie traduction et des notes en alle-
mand, Zullichau, 1795, in-8. 6" Georgi
Gemistlii S. Plethonis et Mich. apostoliy
orationes funèbres duce , in quibus de
immortalitate animi exponitur , nunc
primum e M SS. editi, Leipsick , 1793,
in-8. 7" Encyclopedia phihlogica ,
Breslau, 2« édit. 1803, 1 vol. iu-8. 8"
Une édition des œuvres posthumes du
célèbre Lessing , Berlin, 1795, in-8.
9° Un morceau sur le dialecte silésien, in-
séré dans le Journal de Silésie. 10" Des
fragmens pour servir à l'histoire de la
Philosophie , en 1 2 parties , Zullichau et
Freystadt, 1791 , 3 vol. in-8. 11° Notes
et dissertations jointes à la traduction
de la politique d' Aristote , publiées par
Garve , Breslau , 1799-1800, in-8. 12° Un
ouvrage périodique eu allemand sous le
FUL
53 1
titre de Conteur de Glogau, depuis le
4* cahier, 1800 , jusqu'à sa mort : il
a dicté les derniers numéros depuis son
lit.
FULLER ( Nicolas ) , de Southampton,
fut successivement secrétaire de Robert
Horn , évêque de Winchester , pasteur de
l'église d'Aldington , chanoine de Salis-
bury , et recteur de Waltham. Il mourut à
Aldington en 1623. On a de lui : 1° Mis-
cellanea theologica et sacra , Londres ,
1617 , in-4 ; 2° un Appendix k cet ou-
vrage, Leyde, l622 , in-8. On y trouve
beaucoup d'érudition. L'auteur possédait
très bien les langues orientales.
FULLER ( Thomas ) , historien an-
glais, né en 1608 , fut ministre en diffé-
rens endroits , chanoine de Salisbury ,
prédicateur k Londres. Le zèle qu'il mon-
tra pour Charles I l'exposa k des tracas-
series de la part de l'usurpateur , qui le
dépouilla de ses emplois ; il fut ensuite
réintégré dans son canonicat de Salis-
bury, où il mourut le 16 août 1661. On
lui doit : 1° Description de la Palestine
et des régions adjacentes , et des choses
mémorables y arrivées sous Tancien et
le nouveau Testament , Londres, 1662,
in-folio , en anglais. 11 s'y montre habile
critique ; 2° Histoire de V Eglise depuis
Jésus-Christ jusqu'en 1648, Londres,
1655 , in-fol. On comprend qu'elle n'est
pas exempte de préjugés , surtout quant
aux derniers temps ; 3° Histoire des croi-
sades , Cambridge, 1651 , in-folio; 4"
F'ies des hommes illustres de F Angle-
terre, 1662, in-folio, réimpriméeen 1810,
en 2 vol. in-4 , avec des notes explicati-
ves ; 5° De la vie des théologiens mo-
dernes , 1651 , in-4 ; 6" Des sermons et
des livres de controverse. Tout ce qu'il
a écrit est en anglais.
FULRADE, abbé de St. -Denis en
France , archichapelain du roi Pépin ,
mort en 784, se distingua par sa piété,
par ses talens et sa capacité dans les af-
faires et les négociations importantes dont
il fut chargé. Il sut mériter la conhance
des princes et des papes. Etienne II lui
accorda divers privilèges pour son ab-
baye de St. -Denis, où il logea lorsqu'il
vint en France solliciter du secours au-
532 FUL
près de Pépin , contre Astolfe. Voyez
Etienne II.
* FDLTON ( Robert ), célèbre méca-
nicien américain , né vers 1767 , dans le
comté de Lancastre , état de Pensylvanie ,
fut d'abord destiné à la profession de
joaillier, qu'il abandonna pour se livrer
à la peinture , suivit à Londres les leçons
de West originaire d'Amérique , et, après
avoir passé plusieurs années sous ce grand
peintre d'histoire, il exerçait son art dans
le comté de Devon lorsqu'il fit la connais-
sance du mécanicien Rumsey son com-
patriote. Par suite de cette liaison ,
l'élève de West résolut de quitter une
carrière dans laquelle il ne pouvait espé-
rer une grande célébrité; il se livra à
l'étude de la mécanique dont il attendait
avec raison des résultats plus avantageux.
Il suivait cette direction nouvelle , lors-
qu'un américain, Joël Barlow, l'attira en
France pour travailler à un panorama.
Cette entreprise lui attira gloire et profit,
et il continua ses études de mécanique.
Il retourna aux Etats-Unis, oîi il publia
successivement la découverte d'un mou-
lin pour scier et polir le marbre ; un
sj'stème de canaux de navigation ; une
machine à faire des cordes ; l'invention
d'un bateau pour naviguer sous l'eau , le
torpédo , ou moyen de faire sauter en
mer les vaisseaux ennemis ; et enfin le
sleamboat , ou bateau à vapeur , décou-
verte qui suffirait seule pour l'immorta-
liser. Il conçut depuis , pour la défense
des ports en temps de guerre , une espèce
de frégate qu'on peut manœuvrer au
moyen de cette machine , et il eut la
satisfaction de voir ses expériences réus-
sir au-delà de ses espérances. Il fut nom-
mé immédiatement membre de la société
philosophique de Philadelphie et de la
société militaire des Etats-Unis. Le con-
grès^ venait de lui accorder 5000 dollars ,
pour le mettre à même de continuer ses
expériences du torpédo , lorsqu'une mort
prématurée l'enleva aux sciences, le 24
février 1815. Plusieurs de ses découver-
tes ont été décrites en français dans les
Annales 'des arts et manufactures , et
dans le Bulletin de la société d'encoura-
gement. Sou système des canaux a été
FUL
traduit par M. de Recicourt , sous ce
titre : Kecherches sur les moyens de
perfectionner les canaux de navigation ,
etc. , Paris, 1799 , in-8 , fig. La vie de
Fulton a été écrite par son ami Cadwaller
D. Colden , New-York , 1819 , in-8.
FUL VIE, dame romaine, de la famille
Fulvia qui donna tant de grands capitai-
nes à la république , mariée d'abord au
séditieux Clodius , ensuite à Curion ,
enfin à Marc-Ântoine , eut part à toutes
les exécutions barbares du triumvirat.
Elle était aussi vindicative que son mari.
Lorsqu'oYi lui apporta la tète de Cicéron ,
elle perça sa langue avec un poinçon
d'or, et joignit à cet outrage toutes les
indignités qu'une femme eu fureur peut
imaginer. Antoine l'avait quittée pour
Cléopâtre, dont il était éperdûment amou-
reux : elle voulut qu'Auguste vengeât cet
affront ; mais n'ayant pu l'obtenir , elle
prit les armes contre lui , et les fit pren-
dre à Lucius-Antoine, frère de son mari.
Auguste ayant été vainqueur , elle se re-
tira en Orient , fut très mal reçue par
Antoine , et eu mourut de douleur à Sy-
cionc , l'an 40 avant J. C.
FULVIUS NOBILIOR ( Servius ) ,
de l'illustre famille Fulvia , dont nous
venons de parler , fut élevé au consulat ,
l'an 255 avant J. C. , avec Emilius Pau-
lus. Ils signalèrent leur administration
par des victoires et des malheurs. Ayant
appris l'infortune de Régulus , fait pri-
sonnier en Afrique , ils y allèrent pour
soutenir la réputation des armes romai-
nes. Ils chassèrent les Carthaginois qui
assiégeaient Clupéa ; et après avoir fait
un grand butin , ils périrent dans un
naufrage , avec près de 200 navires. —
Marcus Folvius Nobilior , petit-fils du
consul, fut envoyé l'an 189 avant.!. C.
en Espagne , et y rendit de grands ser-
vices à la république. Il fut aussi hoiuiré
du consulat l'an 193. Il se distingua par
la prise d'Ambracie, près du golfe de
Larta , et obligea les Etoliens de deman-
der la paix. — Il y eut du temps d'Au-
guste un sénateur nommé Fulvius , qui
ayant eu la faiblesse de dire à sa femme
un secret important, que l'empereur lui
avait confié et qui fut divulgué sur-le-
I
FUL
champ , se donna la mort de regret. Sa
femme suivit cet exemple funeste.
FULVIUS— URSINDS ou Fluvio-
Orsini , romain , bâtard , dit-on , de la
maison des Ursins. Un chanoine de La-
tran l'éleva et lui donna son canonicat;
il en employa les revenus à ramasser des
livres. Il mourut à Rome en 1000 , à 70
ans , laissant des notes sur Cicéron , Var-
ron , Columelle , Festus-Pompéius, etc. ,
et plusieurs ouvrages sur l'antiquité. Ou
distingue ses traités ■.\° De familiis Ro-
jnanorum, 1663, in-folio; 2° De Tri-
clinio Romanorum, 1689, in-12, oii il
a mis à profit tout ce que la belle littéra-
ture , dirigée par le goût , peut fournir
pour éclaircir cette matière.
* FULYY ( Philippe-Louis Orry , mar-
quis de) naquit en 1 7 30 à l'île de France,
suivant les uns, et suivant les autres à Ver-
sailles, ou bien ailleurs, d'un conseiller
d'état, Jean-Henri-Louis Orry qui fut in-
tendant des finances et qui établit à ses
frais à Vincennes la belle manufacture de
porcelaine qui, à sa mort, fut transférée à
Sèvres , et qui est maintenant une manu-
facture royale. Le jeune de Fulvy se retira
en Angleterre au commencement de la ré-
volution, et il y resta jusqu'à sa mort arri-
véele 18 janvier 1823. Il cullivales lettres
pendant toute sa vie : avant 1789 il avait
inséré un grand nombre de morceaux de
poésies dans les Journaux et dans les
Recueils périodiques. On en trouve dans
le Mercure, dans V Alrnanach des Muses
et dans les Etrennes d' Apollon. Il a laissé
un Recueil de 133 fables , Madrid, 1798.
Il en existe à la bibliothèque royale un
exemplaire , peut-être le seul qui soit en
France. Le Journal des Débats du If)
juin 1823 lui a consacré une petite No-
tice dans laquelle il représente le mar-
quis de Fulvy copime un homme d'esprit
et comme le modèle des chevaliers fran-
çais. Voyez le tome premier des Souve-
nirs et mélanges de M. A. de Labouisse
qui s'est caché sous le pseudonyme de
M. de Rochefort. On a dit que le nom de
Fulvy n'était qu'un faux nom dont s'était
servi Louis XVIII pour publier ses divers
ouvrages de poésie ; mais c'est une er-
reur.
FUM
533
* FUMAGALLI ( Le Père Ange ) , sa-
vant historien de la Lombardie et abbé
de l'ordre de Cîteaux , entra à l'âge de 15
ans dans cette congrégation, et il y étudia
les langues orientales et la théologie.
Lors de la création de l'Institut des scien-
ces , lettres et arts du royaume d'Italie ,
il fut choisi des premiers pour donner de
l'illustration à cette compagnie naissante;
mais la suppression de son ordre devint
pour lui la cause d'un chagrin mortel :
il. n'y survécut que peu de temps , et
mourut à Milan le 12 mars 1804. Il a
laissé des mémoires intéressans et utiles
sur l'irrigation des prairies et sur d'au-
tres objets d'économie rurale, et plusieurs
Dissertations savantes sur Vorigine de
V idolâtrie, sur un manuscrit grec de la
liturgie ambroisicnne , etc. ; mais l'ou-
vrage qui lui fait le plus d'honneur est
son Institution diplomatique, ^lïaxi, 1 802,
2 vol. in-4 , sujet qui n'avait pas encore
été traité en Italie avec un aussi grand
détail , et qu'il a exposé d'une manière
tellement supérieure , que cet ouvrage
est regardé comme classique. Son stile
est élégant , pur et correct.
* FUMARS ( Etienne ) , littérateur et
poète, né le 22 octobre 1743, dans un
bourg des environs de Marseille. Il fut
chargé de l'éducation des enfans du
comte de Grave , et ensuite de celle des
enfans du comte de Vérac , qu'il accom-
pagna dans son ambassade en Danemark.
Il s'y maria , et devint professeur de lit-
térature française à l'université de Kiel,
et ensuite à celle de Copenhague. Il
mourut subitement dans cette ville le 30
novembre 1800. On a publié, après sa
mort , à Paris , le recueil de ses fables ,
en 1 vol. in-8 et iu-12 , 1807 : quelques-
unes joignent à la facilité du stile l'ori-
j;[inalité des idées ; mais le plus grand
nombre sont faibles d'invention et de
couleur.
FUMÉE ( Adam ) , premier médecin
de Charles VII , de Louis XI , et de Charles
VIII , eut lès sceaux par commission en
1492 , comme doyen des maîtres des re-
quêtes , et les eut jusqu'à sa mort , qui
arriva au mois de novembre l494. Il
était mathématicien , médecin , poète ,
534 FUN
historien. Louis XI, qui l'estimait beau-
coup , l'avait souvent employé dans des
négociations.
FU3IÉE. Voyez Beucblin.
FUMEX. ( Jean-Fclix-Henri de ) , né à
Toulouse en ITH , fit ses études à St.-
Sulpice et l'ut sacré évèque de Lodève en
1 750 : il illustra son épiscopat par les ver-
tus et les œuvres que la religion inspire
aux vrais ministres de Jésus-Christ. Il fut
pendant trente ans le père et le consola-
teur de son peuple. Indépendamment des
travaux propres de son ministère , aux-
quels il se livrait avec une activité in-
croyable , payer les dettes des pauvres ,
secourir des familles honteuses , étaient
ses actes de bienfaisance de chaque jour.
Les curés du diocèse trouvaient toujours
chez lui des ressources pour leurs parois-
ses. L'église de la cathédrale , l'Hôtel-
Dieu , l'hôpital , ont été les objets de sa
générosité. Il aimait surtout l'hôpital
qu'il s'est appliqué à rendre utile et com-
mode à force de dépenses^ et qu'il a in-
stitué son héritier. Par le spectacle de ses
vertus autant que par ses instructions ,
il a ramené à la religion catholique un
grand nombre de calvinistes , et leur a
assuré un état honnête , surtout aux en-
fans persécutés ou abandonnés de leurs
parens ( voyez-en un exemple touchant
dans le Journal historique et littéraire ,
15 juillet 1784, page 411 ). Il mourut le
2 janvier 1790 , au milieu des ruines de
l'église de France , et dans le pressenti-
ment douloureux des scènes plus affreu-
ses encore qui allaient s'ouvrir. Il n'a eu
d'autre oraison funèbre que les sanglots
des pauvres et les larmes de tous les ca-
tholiques de son diocèse. On a de lui deux
Instructions pastorales, o\\ il s'élève par-
ticulièrement contre les incrédules; et
le Culte de V amour divin , ou De'votion
au sacré cœur.
FUNCH, FUNECCIUS ou Funccius
( Jean ) , ministre luthérien , né à Wer-
den, près de Nuremberg , en 1 518 , s'at-
tacha à la doctrine d'Osiander, dont il
épousa la fille, et exerça le ministère
dans la Prusse. Il ne put se défendre de
l'esprit de trouble qui agitait tous les ré-
formateurs de son siècle. Ayant été con-
FUR
vaincu de donner à Albert, duc de Prusse,
dont il était chapelain , des conseils dés-
avantageux à l'état de Pologne, il fut
condamné avec quelques autres , comme
perturbateur du repos public. Il eut la
tète tranchée à Kœnisberg en 1 566. On a
de lui ime Chronique depuis Adam jus-
qu'à 1560, Wittemberg, 1570, in-fol, ,
et quelques autres ouvrages auxquels son
supplice donna de la célébrité autrefois ,
mais qui n'en ont plus aucune aujour-
d'hui.
FURETIÈRE (Antoine), parisien,
abbé de Chalivoi , de l'académie fran -
çaise, fut exclu de cette compagnie en
1685. L'académie l'accusait d'avoir pro-
fité de sou travail pour composer le dic-
tionnaire français qui porte son nom. Il
se justifia dans des factums ; mais il ajou-
ta aux raisons des injures contre plu-
sieurs académiciens , à la vérité écrites
avec esprit , mais qui n'en étaient pas
moins des injures. On prétend qu'il cher-
cha à se raccommoder avec eux avant sa
mort, arrivée en 1688, à 68 ans. Son
Dictionnaire ne vit le jour que deux ans
après, en 1690 , 2 vol. in-fol., ou 3 vol.
in-4. Basnage de Beauval le retoucha ,
l'augmenta, et en publia une édition
))eaucoup meilleure que la première, en
1701 , 3 vol. in-folio, réimprimée à Ams-
terdam , 1725, 4 vol. in-folio. On a dit
que ce dictionnaire avait donné naissance
à celui de Trévoux , dont la dernière édi-
tion est de 1771, 8 vol. in-fol. Si cela
est, il faut convenir que les imitateurs
ont tellement perfectionné l'ouvrage ,
qu'on n'y reconnaît plus le premier ar-
chitecte. Furetière s'était fait connaître
par d'autres ouvrages: 1° V&t cin({ satires
en vers, in-12, et Ac?, paraboles évan-
(je'Uques , aussi en vers , 1672, in- 1 2 ; les
unes et les autres sont écrites faiblement.
2" Par son Roman bourgeois, satire mo-
rale et un peu trop personnelle , qui eut
beaucoup de cours dans .son temps. 3" Par
une Relation des troubles arrivés au
royaume d^ Eloquence , in-1 2 , allégorie
forcée. 4" Un Recueil de poésies . 5° Voya^
(je de Mercure. On publia , après sa mort,
un Furetcriana , recueil où il y a bien des
choses qui lui sontabsolument étrangères.
I
FUR
* FURGAULT ( Nicolas ) , professeur
à l'université de Paris , né en 170G à St.-
Urbain près de Joinville , diocèse de
Châlons- sur -Marne, fit ses éludes avec
distinction au collège de Troyes, s'adonna
particulièrement aux langues latine et
grecque dans lesquelles il vint se perfec-
tionner à Paris, et fut appelé ensuite
dans l'université où il professa d'abord
la sixième , puis la septième au collège
Mazarin. Personne n'eut plus que lui le
talent de l'enseignement de la grammaire
et des humanités ; il se fit remarquer sur-
tout par la patience et l'aménité de son
caractère : aussi fut-il toujours chéri par
tous ses élèves , qui voyaient plutôt en lui
un ami qu'un maître. Son zèle pour la
jeunesse le porta à composer un grand
nombre d'ouvrages qui sont tous destinés
à son instruction. Il a publié 1° un Nou-
vel abrégé de la Grammaire grecque ,
Paris, 1746, in-8 , ouvrage élémentaire
qui fut tellement goûté par l'ancienne
université qu'elle en fit un usage constant
jusqu'au moment de sa suppression ; on
en a fait depuis plusieurs réimpressions
parmi lesquelles nous remarquons les
éditions de »I. Jeannet , Paris, 1813 et
1816, in-8. 2" Abrégé de la quantité ou
mesure des syllabes latines, Paris, 17 40,
in-8 ; cet ouvrage était à sa neuvième
édition en 1 8 1 3 ; 3° Dictionnaire d^ anti-
quités gi'ecqucs et romaines, Paris, 1768
et 1786, petit in-8; Z" édition, 1809;
in-8. 4° Dictionnaire géographique his-
torique et mythologique portatif, Paris ,
1776, petit in-8; 5" Les principaux
idiotisme s grecs avec les ellipse t qu'ils
renferment, Paris, 1780 , 1784 et 1789,
in-8 ; cet ouvrage fait suite à la gram-
maire grecque. 6° Les ellipses de la lan-
gue latine , précédés d'une courte ana-
lyse des différens mots appelés parties
d'oraison, Paris, 1780, in-l2. Tous ces
ouvrages annoncent les grandes connais-
sances élémentaires de Furgault , et ,
quand bien même d'autres ouvrages du
même genre ont été publiés depuis , on
peut assurer qu'ils n'ont point détruit la
réputation que mérite à tout égard le sa-
vant grammairien dont nous retraçons
brièvement la vie, et dont le souvenir sera
PUR 535
long-temps gardé par tous les amis des
bonnes études. Furgault avait été nommé
professeur émérite de l'université ; il
jouissait en paix de ce titre modeste , lors-
que la révolution le força de quitter Paris.
11 se retira dans son lieu natal où il mou-
rut le 21 décembre 1795. Il avait pris
l'habitude de se faire lire quelques mor-
ceaux de Sénèque après son dîner , par
une de ses nièces qui habitait avec lui ;
et , c'est pendant luie de ces lectures sur
la brièveté de la vie , qu'un jour celle-ci
le croyant endormi, s'aperçut bientôt
après qu'il avait cesse de vivre.
FDRGOLE (Jean-Baptiste), avocat
au parlement de Toulouse , né en 1690 à
Castel-Ferrus , dans le bas Armagnac, joi-
gnit à la science la plus profonde des lois
de la jurisprudence française, des usa-
ges , des coutumes , la connaissance de
cette partie de l'histoire , qui est relative
à la législation de tous les temps et de
tous les pays. Le chancelier d'Aguesseau,
qui l'estimait beaucoup , l'encouragea à
entreprendre un Commentaire sur Vor-
donnance concernant les donations , du
mois de février 1731,. Cet ouvrage , im-
primé d'abord à Toulouse en un seul vol.
in-4 , a été réimprimé en 2 , en 1761.
Après avoir publié cet ouvrage, il com-
mença son Traité des curés primitifs,
etc ; un vol. in-4, 1736, dont l'édition
est épuisée depuis long-temps. Il se rendit
à Paris pour présenter lui-même son
Traité des Testamens et autres dispo-
sitions de dernière volonté. Le chance-
lier parcourut cet ouvrage , et donna de
justes éloges à l'auteur. Il parut en 4 vol.
in-4 , 1745-48 , et tous les exemplaires se
trouvèrent enlevés à mesure que chaque
volume vit le jour. La nouvelle édition ,
imprimée à Paris en 1779, quoiqu'en 3
vol. , est beaucoup plus complète. Il se
préparait à faire imprimer son Commen-
taire sur V ordonnance des substitutions ,
lorsque le roi lenomniacapitoulen 1745.
Les occupations de cette charge l'empê-
chèrent de finir l'édition de cet ouvrage,
qui n'a été publié qu'en 17G7 , par les
soins de Poucet de la Grave , en 1 vol.
in-4. Il travailla, en attendant, à son
Traité de la seigneurie féodale univer-
536 PUR
seUe , et du Franc-Aleu naturel , qui a
paru à la même époque, in-12. On a réim-
primé ses OEuvves complètes, Paris,
1776 et 1776 , 8 vol. in-8. Cette édition
est moins estimée que rin-4. Ce savant
jurisconsulte est mort en mai 1761.
FURIUS-BIBACULUS (Marcus), de
Crémone, poète latin vers l'an 103 avant
J. C. , écrivit des Annales en vers , dont
Macrobe rapporte quelques fragmens , et
qui ne donnent pas une grande idée de
ses talens. C'est de \và que parle Horace
dans ce vers :
Furiuni hibernas cana nÏTe conspuit Alpes.
FURST ( Walter ) , Fursius , suisse
du canton d'Uri , fut un des fondateurs
de la liberté helvétique. Il se joignit en
1307 à plusieurs de ses compatriotes ani-
més du désir de secouer le joug d'Albert
d'Autriche. Furst travailla , de concert
avec ses compagnons , à s'emparer de
toutes les citadelles bâties pour les con-
tenir. On les démolit, et ce fut le pre-
mier signal de la liberté. Voyez Tell et
Melchtal.
FURSTEMBERG (Guillaume de),
issu d'une des plus illustres maisons d'Al-
lemagne , grand-maître de l'ordre de Li-
vonie , ou des Porte-Glaives, défendit
cette province contre les armes des Mos-
covites; moins heureux en 1560, il fut
fait prisonnier, et on l'emmena en
Moscovie , où il mourut.
FURSTEMBERG (Ferdinand de),
évêque dePaderborn, puis de Munster, né
àBilstein, en 1626 , fut lepère de son peu-
ple et le Mécène des hommes de lettres.
On lui est redevable de plusieurs monu-
mens de l'antiquité , qui étaient dans son
diocèse de Paderborn. Il les fit renouveler
à grands frais, les embellit de plusieurs
in.scriptions , et eu publia de savantes
descriptions dans ses Moniime.nta Pa-
derbornensia , Amsterdam, 1G72, et
Francfort, 1713, in-4 : collection utile et
curieuse. On lui doit encore des poésies
latines, imprimées au Louvre en 1684,
in-folio , et dignes de cet honneur , par
la pureté du stile et la noblesse des pen-
sées. L'auteur ne vit point cette magnifi-
que édition , étant mort le 6 juin de l'an-
née précédente.
FUR
FURSTEMBERG (François Egon,
prince de ) , fils d'Egon , comte de Furs-
temberg, naquit en 1626. Il fut grand-
doyen et grand-prévôt de Cologne , et
l'un des principaux ministres de l'élec-
teur de cette ville. Ayant été élu évêque
de Strasbourg en 1^65 , il conçut le des-
sein d'y voir rétablir la religion catholi-
que, et s'attacha à la France, qui s'em-
para de cette ville en 1681. Il mourut
à Cologne, le 1" avril de l'année sui-
vante.
FURSTEMBERG ( Guillaume Egon ,
prince de ) , frère du précédent , lui suc-
céda dans son évêché. Il s'attacha aussi
à la France , devint cardinal et abbé de
Saint-Germain-des-Prés à Paris, où il
mourut le 10 avril 1704,danssa75^année.
Il avait été postulé de 1 i voix pour l'évè-
ché de Cologne en 1088 ; mais le prince
Clément de Bavière l'emporta sur lui ,
après un procès vivement poussé de part
et d'autre , et décidé par Innocent XI.
Louis XIV en conçut un chagrin très vif,
et ce ne fut pas la moindre cause qui
décida la guerre de 1688, terminée par
la paix de Ryswick en 1697. Ce cardinal
était un homme instruit , et doué de qua-
lités très estimables.
FURSY. Voyez Foillan.
FUSCHIUS ou FuscH (Léonard), ap-
pelé VEginète d'Allemagne , naquit à
>Yembdingen, en Bavière, l'an 1501. Il
professa et exerça la médecine avec beau-
coup de réputation à Munich , à Ingols-
tadt , etc. L'empereur Charles-Quint l'a-
noblit, et Cosme, duc de Toscane, lui
offrit 600 écus d'appointemens pour l'at-
tirer dans ses états. Il s'attacha surtout à
la partie la plus essentielle de la méde-
cine, à la botanique. Son exemple et ses
leçons la firent renaître en Allemagne ,
et excitèrent l'émulation en France et en
Italie. Parmi le grand nombre d'ouvrages
qu'on a de lui, on ne citera que son Bis-
tnria Stirpium, le meilleur de tous,
Bâie, 1542, in-fol. Il mourut en 1566 à
Tubingcn, âgé de 65 ans. — Il ne faut
pas le confondre avecRemacle Fuscnius,
de la ville de Limbourg, médecin, mort
chanoine de Saint-Paul à Liège en 1587 ,
et qui a aussi donné une Histoire des
FUS
plantes y Anyers, 1544 , et Vies des mé-
decins, Paris, 1542.
* FUSELIER. Voyez Fuzelier.
FUSI (Antoine) , docteur de Sorbon-
ne , et curé de Saint-Barthélemi et de
Saint-Leu son annexe , fut privé de ses
bénéfices par seûtence de l'officialité,
rendue sur des accusations de magie. La
sentence ayant été confirmée par la pri-
matie, il se retira à Genève en 1619 , s'y
maria , et y mourut. 11 a publié sous le
nom de Juvain Solonicque, une satire
contre Vivian , maître des comptes, mar-
guillier de Saint-Leu , intitulée Le Mas-
tigophore , 1609, in-8 ; et depuis sa re-
traite à Genève , il a donné Le franc-ar-
cher de la véritable Eglise , 1619 , in-8.
Il eût un fils digne de lui , qui se fit ma-
hométan à Constantinople, pour décliner
la juridiction de l'ambassadeur de France,
qui devait le juger pour un crime qu'il
avait commis.
* FUSS (Nicolas) naquit en 1754 à
Bâle d'où il partit à l'âge de 1 8 ans pour
St.-Pétersbourg , après avoir reçu une
éducation très distinguée. Ce fut son maî-
tre Daniel Bernouilli qui lui fit faire ce
voyage dans le but d'aller servir d'adjoint
au célèbre Euler qui était aveugle. Fuss
séjourna long-temps dans la maison de ce
savant. Associé de bonne heure à l'aca-
démie des Sciences de St.-Pétersbourg
( 1776 ) , il en devint membre en 1783 ,
puis secrétaire en 1 800 : son zèle et sa
science furent très utiles à celte société
qu'il dirigea pendant long-temps. L'em-
pereur Alexandre le nomma en 1 802 mem-
bre d'une commission chargée de faire
des statuts pour l'académie , les univer-
sités et les écoles de l'empire. Il le choi-
sit aussi plus tard pour la direction gé-
nérale des écoles que l'on venait d'orga-
niser. On peut dire que Fuss rendit de
très grands services à l'instruction publi-
que en Russie. Il avait été nommé con-
seiller d'état et chevalier des ordres
de St.-Wladimir. Il faisait partie d'un
grand nombre de sociétés savantes. Il est
mortle23 décembre 1825.0nluidoitplu-
ivRvxs, Mémoires importans sur les mathé-
matiques pures ou appliquées : quelques-
uns ont été traduits en plusieurs langues.
V.
- FUS ^^
FUST ou Faust (Jean), orfèvre de
Mayence , fut un des trois artistes qu'on
associe ordinairement pour l'invention
de l'imprimerie; les deux autres sont
Guttemberg et Schœffer. 11 paraît qu'on
lui doit particulièrement les caractères
sculptés mobiles ; car il est vraisemblable
que Guttemberg a imprimé avant lui , ou
vers le même temps que lui , sur des
planches gravées. A l'égard de Schœffer,
qui était écrivain de profession , et devint
depuis gendre de Faust, on ne peut lui dis-
puter la gloire d'avoir imaginé les poin-
çons et les matrices , à l'aide desquels
cet art admirable fut porté à sa perfec-
tion. Le premier fruit de ce nouveau pro-
cédé, qui constitue l'origine du vérita-
ble art typographique, fut le Durandt
rationaledivinorum officiorum, que Faust
et Schœffer publièrent en 1459, et qui
fut suivi l'année d'après fdu Catholicon
Joannis Januensis. Parut ensuite la Bible.
de 1462, si recherchée des amateurs de
raretés typographiques. Ces trois ouvra-
ges avaient été précédés de deux éditions
du Psautier parles mêmes artistes, la pre-
mière en 1457 , et la 2* en 1459; mais
exécutées, au jugement de quelques sa-
vans , l'une et l'autre avec des caractères
en bois sculptés, quoique d'autres pré-
tendent qu'elles sont imprimées avec des
caractères en fonte , excepté les capitales.
Ces deux éditions du Psautier , excessive-
ment rares, sont des chefs-d'œuvre de ty-
pographie, qui étonnent les gens de l'art,
tant par la hardiesse, la propreté et la pré-
cision avec laquelle l'industrieux Schœf-
fer en a taillé les caractères , qui imitent
la plus belle écriture du temps , que par
la beauté et l'élégance des lettres initia-
les , imprimées par rentrées de trois cou-
leurs , bleu , rouge et pourpre , à la ma-
nière des camaïeux, et par la justesse et
la netteté de l|jpipression. On connaît
cependant des livres que l'on juge plus an-
ciens que ceux que nous avons cités, quoi-
que la date , ni le nom du lieu et de l'im-
primeur n'y soient pas marqués. Tels sont :
1" une Bible de la bibliothèque maza-
rJne , imprimée avec des caractères en
bois mobiles, en 2 vol. in-fol. 2°Le Spécu-
lum vilcehumancef en 58 planches. 3° Une
34..
538 FUS
Histoire de l'ancien et du nouveau Testa-
ment, représentée en 40 figures, gravées
en bois , avec des sentences et des expli-
cations latines sculptées sur les mêmes
planches. 4° L'Histoire de saint Jean
l'e'vangc'liste , de même en 48 planches.
ô° j4rs moriendi , en 24 pages , impri-
mées seulement d'un côté. Chaque page
est composée d'une estampe en bois, qui
représente un exemple des misères de la
vie humaine avec quelques explications
gravées sur la même planche. Ce livre a
été vendu 1 000 liv. à la vente du cabinet
de M. Mariette, en 177 5. Ces trois der-
niers livrets , qui sont in-folio précèdent
sûrement l'impression en caractères mo-
biles, et peuvent remonter jusqu'en 1440.
La Bible doit avoir été imprimée entre
1450 et 1455. L'abbé Ghesquière, long-
^mps associé aux bollandistes , prétend
qu'on a un petit livret d'une date pour
le moins aussi ancienne, imprimé par un
Jean Brito de Bruges ; mais il paraît cer-
tain que cet ouvrage n'est point un fruit de
la typographie , mais un manuscrit exé-
cuté avec de nouveavx soins et une mé-
thode particulière, quoique l'inscription,
prise dans un sens absolument littéral ,
semble dire autre chose (voyez le Journ.
histor. du l'^^août 1780, pag. 514). On a
écrit et répété bien des fois , que Fust ,
étant venu à Paris pour y vendre une par-
tie de son édition de la Bible de 1 462 , et
en ayant vendu les exemplaires à vil prix,
en comparaison de ce qu'on payait alors
les Bibles manuscrites, mais à des prix
fort différens, avait été poursuivi en jus-
tice par quelques acheteurs qui se plai-
gnaient de les avoir surpayés ; qu'ayant
même été accusé de magie à cause de la
parfaite ressemblance qu'on avait remar-
quée entre les caractères, il avait été obli-
gé de s'enfuir. Mais s'il est vrai que Faust
ait vendu à Paris des exemplaires d'une
FUZ
bible, ce ne peut être de celle de 1462 ,
puisque le Psautier imprimé cinq ans au-
paravant , absquc calami exaratione , ]ui
ôtait le moyen de faire des dupes. Quant
à l'accusation de magie , c'est un vieux
conte qui doit son origine à l'histoire du
docteur Faustus ouFaust (voyez Faustus).
L'on ne peut douter néanmoins que Faust
n'ait fait plusieurs voyages à Paris. Il y
était en 1 46G, et la preuve en résulte d'un
exemplaire des Offl.ces de Cice'ron , pu-
bliés cette année par le même Faust et
Schœfifer, son gendre, existant dans la
bibliothèque publique de Genève , à la fin
duquel le premier possesseur de ce livre a
noté de sa main , « qu'il lui a été donné
» par Jean Faust , à Paris, au mois de juil-
» let l466.»OnpeutcroirequeFaustmou-
rut de la peste , qui , cette même année ,
enleva 40,000 habitans à la capitale, pen-
dant les mois d'août et de septembre , et
d'autant mieux qu'on ne trouve plus que
le nom de Schœfifer seul dans les souscrip-
tions des livres imprimés postérieurement
à Mayence. Voyez Guttembkrg.
* FUZELIER ( Louis) , parisien, cul-
tiva les lettres dès son enfance. Il fut ré-
dacteur du Mercure , conjointement avec
La Bruyère , depuis le mois de novembre
1744 , jusqu'à sa mort arrivée le 19 sep-
tembre 1752, dans la 80« année de son
âge. Cet auteur travailla seul ou en société
pour tous les théâtres de Paris. Parmi ses
pièces on en compte 36 dont une seule est
passable, c'est Momus fabuliste : l'auteur
a voulu faire une critique de La Fontaine.
Laharpe, dans son Cours de Littérature, dit
« qu'il affichait des prétentions fort mal
» placées ; et qu'il était bien le plus froid
» et le plus plat rimeur, le bel esprit le
» plus glaçant et le plus glacé , qui ail
» fait chanter à l'opéra des fariboles
» dialoguées. »
FIN DG TOME CINQUIEME.
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