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Full text of "Dictionnaire historique : ou histoire abrégée des hommes qui se sont fait nom par leur génie, leurs talens, leurs vertus, leurs erreurs ou leurs crimes, depuis le commencement du monde jusqu'a nos jours"

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DICTIONNAIRE, 

HISTORIQUE, 

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HISTOIRE  ABREGEE 

DES  HOMMES  Ql'I  SE  SOVT  FAIT  Vîl  NOM  PAR  LEL'R  GEME  ,  LEURS  TALEKS  , 
LEURS  VERTUS,  LEURS  ERREURS  OU  LEURS  CRIMES, 

DEPmS    LE    C05IMENCKMEST    DU    MONDE   JUSQU'a    NOS    JOURS; 
ACGHCHTÉB   de    FLt'S    DE    3000    AKTICXES    IKTERCALÉs    PAR   ORDRE    ALrUADÉTIQt'E. 

TOME  CINQUIÈME. 


BESANÇON, 

OUTHENIN  CHALANDRE  FILS,  IMPRIMEUR- ÉDITEUR, 

grand' RVE,  s"  60. 

PARIS, 

CHEZ  GAUME  FRÈRES,  LIBRAIRES. 


Digitized  by  the  Internet  Archive 

in  2009  witii  funding  from 

University  of  Ottawa 


Iittp://www.arcliive.org/details/dictionnairehis05felluoft 


DICTIONIVAIRE 

HISTORIQUE 

DE  FELLER. 


£ 


lîi  ADMER  ou  EdMeR)  anglais  de  nais- 
sance, d'abord  moine  du  Bec,  puis  de 
Cantorbéry  ,  devint  l'ami  et  le  confident 
de  saint  Anselme,  qu'il  accompagna  dans 
son  exil.  On  lui  offrit  l'évêché  de  Saint- 
André  en  Ecosse.  Les  uns  disent  qu'il  le 
refusa  ,  les  autres  prétendent  qu'il  l'ac- 
cepta. S'il  est  vrai  qu'il  ait  été  évêque  , 
il  faut  qu'il  ait  abdiqué  l'épiscopat ,  car 
il  mourut  prieur  de  Cantorbéry  en  1 137. 
On  a  de  lui  1"  une  Fie  de  saint  An- 
selme, divisée  en  2  livres.  On  la  trouve 
dans  les  éditions  des  OEuvres  de  saint 
Anselme,  ainsi  que  dans  Surius  et  Bol- 
landus.  2°  V Histoire  des  nouveautés , 
c'est-à-dire ,  de  ce  qui  s'est  passé  de  plus 
considérable  dans  l'église  britannique, 
depuis  l'an  1066  jusqu'à  l'an  1122;  elle 
est  divisée  en  6  livres.  Le  Père  Gerberon 
a  publié  cette  histoire  avec  les  notes  de 
Jean  Selden.  3°  Le  livre  de  l E xellence  de 
la  sainte  f^ierge.  4"  Le  traité  des  quatre 
vertus  (  la  justice,  la  prudence,  la  force, 
la  tempérance  ),  qui  ont  été  dans  Marie, 
6"  Le  traité  de  la  Béatitude ,  composé 
d'après  ce  qu'Eadmer  avait  entendu  dire 
à  saint  Anselme  sur  l'état  des  bienheu- 
reux dans  le  ciel.  6°  Le  traité  des  Simi- 
litudes. Le  fonds  en  est  aussi  de  saint  An- 
selme. Il  fut  rédigé  par  un  de  ses  disci- 
ples, qu'on  croit  être  Eadmer.  1°  Les 
f^ies  de  plusieurs  saints  d'Angleterre. 
Il  y  a  encore  d'autres  ouvrages  d'Eadmer 
qui  n'ont  point  été  imprimés  (  voyez 
Wharton,  prœf.  in  t.  2,  Angl.  sacr.  ). 
Les  écrits  d'Eadmer  sont  estimés  pour  l'or- 
dre et  l'exactitude  ;  le  stile  en  est  facile 
et  naturel  {voyez  Ceillier,  tom.  21,  pag. 
349.  ).  — Une  faut  pas  le  confondre  avec 

V. 


Eadmer  ou  Ealmeb  , prieur  de  Saînt-Alban, 
mort  en  980,  auquel  on  attribue  desfe^- 
tres,  des  homélies  et  5  livres  d'Exerci- 
ces spirituels  (  voyez  Fabricius  ,  Bibliot. 
latin,  tom.  2  ,  pag.  214). 

*  EAjNDI  (  Joseph-Antoine-François^ 
Jérôme  ) ,  savant  prédicateur  piémontais, 
né  à  Saluées,  en  1735,  mort  en  1799, 
se  forma  à  l'étude  des  sciences  physiques 
et  mathématiques ,  sous  le  célèbre  Bec- 
caria  qui  l'associa  ensuite  à  ses  travaux. 
Il  professa  la  physique  expérimentale  à 
Turin  et  devint  membre  de  l'académie 
des  Sciences  de  cette  ville,  de  la  société 
d'agriculture  qui  y  était  aussi  établie ,  et 
de  plusieurs  corps  savans  d'Italie  et  de 
Piémont.  Outre  les  Sermons  qu'il  pro- 
nonça et  qui  lui  firent  la  plus  grande  ré- 
putation ,  il  a  fait  plusieurs  ouvrages 
scientifiques  et  religieux  parmi  lesquels 
on  remarque  1°  Physicœ  experimentalis 
lineamenta  ad Subalpinos,  qu'il  composa 
en  société  avec  Vassali ,  Turin,  1793, 
in-8  ;  il  en  existe  une  contrefaçon  faite 
en  1800.  2°  Raglone  e  religioni.  3"  Des 
Discussions  de  principes  politiques.  4'» 
Des  Notices  historiques  sur  les  études  du 
Père  Beccaria.  5°  des  Mémoires  histori- 
ques ,  adressés  à  M.  Babbe ,  légataire  des 
manuscrits  de  ce  célèbre  restaurateur  de 
la  physique  en  Piémont.  Les  Mémoires 
de  l'académie  de  Turin  contiennent  de 
lui  plusieurs  Mérfloires  intéressans.  Vas- 
sali, son  neveu  et  son  élève,  a  publié 
dans  le  tome  6  de  ses  Mémoires ,  une 
Notice  sur  sa  vie  et  ses  ouvrages ,  Tu' 
rin,  1801 ,  in-4. 

*  EARLOM  (  Richard  ) ,  dessinateur 
et  graveur  anglais ,  né  dans  le  comté  de 


3  KBB 

Somnierset ,  vers  1718  ,  mort  à  la  fin  du 
18*  siècle,  gravait  à  la  manière  noire. 
Son  œuvre  très  considérable  est  recher- 
ché des  amateurs,  surtout  les  épreuves 
avant  la  lettre.  Ses  gravures  sont  remar- 
quables par  le  moelleux,  le  fondu  et  le 
velouté  de  ses  tons.  Les  principales  sont 
L'académie  de  Londres ,  l'exposition 
du  salon ,  la  sorcière ,  Agrippine  abor- 
dant à  Blindes ,  Angélique  et  Médor  , 
la  forge  ,  la  F'ierge  au  lapin ,  le  sacri- 
fice d^ Abraham  ,  la  Madeleine  chez  le 
pharisien  ,  une  sainte  famille ,  Silène 
■ivre  et  la  femme  de  Rubens  ,  les  deux 
avares,  le  roi  d'Angleterre  et  sa  famille , 
la  Fierge  dite  la  Zingarina.  On  lui  a  at- 
tribué, mal  à  propos,  un  recueil  de  deux 
cents  paysages ,  d'après  les  dessins  de 
Claude  Lorrain  :  ce  recueil  est  de  Ro- 
bert Earlom. 

'  EBBESEN  (  Niels  ou  Nicolas  ) ,  sur- 
nommé le  Brutus  danois  ,  vivait  au  14* 
siècle ,  et  était  seigneur  de  Tœrreriis 
dans  le  Jutland.  A  cette  époque,  le 
royaume  de  Danemarck,  presque  tout 
démembré ,  avait  perdu  son  existence 
politique.  Plusieurs  de  ses  provinces 
étaient  tombées  au  pouvoir  des  Suédois, 
des  seigneurs  voisins  et  des  vassaux  am- 
bitieux. Après  la  mort  de  l'infortuné 
Christophe  II ,  il  ne  restait  à  la  famille 
royale  que  quelques  châteaux  dans  l'île 
de  Lotland,  l'Esthonie,  qui  menaçait 
aussi  de  secouer  le  joug.  Il  semblait  que 
l'excommunication  ,  lancée  par  le  pape 
Jean  XXII  à  l'occasion  de  l'emprisonne- 
ment d'un  évêque  par  le  Roi ,  eut  excité 
contre  ce  royaume  la  colère  divine. 
Quelques-unes  des  provinces  danoises 
étaient  hypothéquées  :  le  comte  Gérard 
de  Holstein  avait  en  gage  le  Jutland  et  la 
Fiouie,  oii  il  régnait  comme  souverain  , 
et  tenait  prisonnier  le  filsvîné  de  Chris- 
tophe II,  qui  avait  en  vain  essayé,  de  re- 
prendre le  pouvoir  suprême.  Aces  petits 
tyrans  vinrent  bientôt  se  réunir  d'autres 
fléaux  non  moins  terribles,  la  disette 
et  la  peste.  Au  milieu  de  cette  complète 
anarchie,  il  existait  un  homme,  Nicls 
Ebbescn,  plein  de  sentimens  généreux  et 
attaché  à  la  dynastie  de  ses  maîtres  légi- 
times. Le  plus  terrible,  le  plus  cruel  des 


EBB 

tyrans  du  Danemarck , -celui  qui  visait  k 
une  plus  grande  domination ,  était  le 
comte  Gérard  ;  ce  fut  contre  lui  qu'Eb- 
besen  dirigea  ses  attaques.  Il  se  mit  k  la 
tête  des  nobles  et  des  paysans,  qui  souf- 
fraient à  regret  les  vexations  d'un  gou- 
vernement insatiable  et  despotique.  Les 
insurgés  ,  après  avoir  refusé  de  payer  le 
tribut ,  mirent  le  siège  devant  les  châ- 
teaux du  comte  Gérard.  Celui-ci  ayant 
réuni  une  armée  de  dix  mille  combat- 
tants ,  parcourt  la  province ,  répand  par- 
tout l'effroi ,  saccage ,  brûle  les  maisons, 
les  églises ,  les  couvens ,  ne  respecte  ni 
l'Age ,  ni  le  sexe ,  ni  le  caractère  sacré 
des  prêtres  ;  il  se  repose  de  ces  sanglans 
explois  à  Rendey ,  ville  centrale  de  la 
province.  Lecomte  mande  alors  Ebbesen, 
en  lui  accordant  un  sauf-conduit.  11  se 
présente ,  et  Gérard  lui  ordonne  de  lui 
prêter  foi  et  hommage  ;  Ebbcsea  s'y  re- 
fuse, et  déclare  qu'il  ne  peut  reconnaître 
pour  son  souverain  un  usufruitier,  un 
tyran.  <<  Jurez  ,  lui  dit  Gérard,  ou  exilez- 
))  vous,  ou  plutôt  attendez-vous  à  être 
»  pendu.  »  —  «  Je  ne  vous  crains  pas  , 
»  lui  répond  Ebbesen  ;  je  vous  déclare  la 
)>  guerre ,  et  je  vous  jure  que  je  vous 
»  combattrai  personnellement  partout  oîi 
»  je  vous  trouverai.  »  Le  comte,  tout 
étonné  de  ce  courage ,  et  craignant  de 
plus  sinistres  résultats,  laissa  partir  libre 
Ebbesen.  11  chercha  ensuite  à  le  gagner 
par  de  séduisantes  promesses;  mais  Eb- 
besen fut  inébranlable.  Peu  de  temps 
après  son  entrevue  avec  le  comte  Gérard, 
il  revient ,  pendant  la  nuit ,  à  la  tête  de 
soixante  hommes ,  trompe  la  vigilance 
des  gardes ,  et  s'introduit  seul  dans  son 
appartement.  Le  comte ,  éveillé  en  sur- 
saut, reconnaît  son  ennemi,  dont  l'épée 
menaçante  brille  devant  ses  yeux.  Il  ap- 
pelle au  secours ,  ses  gardes  accourent  ; 
au  même  instant  Ebbesen  lui  plonge  son 
épée  dans  le  cœur  ;  le  tyran  expire  :  ses 
gardes  se  jettent  sur  le  meurtrier  ;  il  les 
combat,  les  repousse  :  ses  hommes  d'ar- 
mes ,  qui  gardaient  les  avenues  ,  volent 
auprès  d'Ebbesen  ;  assaillis  par  des  cen- 
taines d'hommes ,  ils  se  frayent  un  pas- 
sage, et  sortent  du  château.  Le  peuple 
ayant  appris  la  mort  du  comte  Gérard  , 


EBB 

se  range  du  côté  d'Ebbesen  ,  et  immole 
•  tous  les  satellites  de  l'usurpateur.  Ebbe- 

■  scn  ne  perd  pas  de  temps;  il  court  as- 
siéger Skanderborg ,  un  des  plus  forts 
châteaux  de  Gérard  :  les  fils  de  celui-ci 
viennent  le  défendre  avec  une  puissante 
armée.  Ils  sont  vaincus  ,  tués  par  Ebbe- 
sen  ;  mais  lui-même  périt  dans  le  com- 
bat. Cependant  il  avait  frayé  à  Waldemar, 
fils  de  Christophe  II ,  le  chemin  au  pou- 
voir suprême  ,  et ,  en  immolant  Gérard 
et  ses  fils ,  il  l'avait  délivré  de  ses  enne- 
mis les  plus  redoutables.  Il  ne  fut  donc 
pas  difl&cile  à  ce  prince  d'achever  l'ex- 
pulsion des  autres  tyrans.  Il  régna  sous 
le  nom  de  W  aldemar  IV  ,  dit  le  Restau- 
rateur. Ebbesen  diffère  de  Brutus,  en. 
ce  que  Gérard  n'était  pas  son  bienfaiteur, 
et  encore  moins  un  maître  élu  par  un  sé- 
nat ;  néanmoins,  nous  croyons  qu'il  au- 
rait fait  une  action  plus  louable  et  plus 
héroïque  s'il  eût  combattu  son  ennemi 
corps  à  corps,  dans  un  combat  singulier, 
plutôt  que  par  surprise  et  par  trahison. 
Quoi  qu'il  en  soit ,  le  meurtre  de  Brutus 
sur  César  fit  ensuite  répandre  des  fleuves 
de  sang,  et  introduisit  l'anarchie  dans 
tout  le  monde  alors  connu  ;  celui  commis 
par  Ebbesen  fit  cesser  la  guerre  civile  en 
rendant  à  un  prince  légitime  les  domai- 
nes de  ses  aïeux.  Plusieurs  poètes  danois 
ont  célébré  l'action  d'Ebbesen;  elle  a 
fourni  le  sujet  d'une  belle  tragédie  à  M. 
Sander,  et  M.  Malte-Brun  lui  a  consacre 
une  Ode ,  publiée  eu  1812,  et  qui  ne 
rappelle  nullement  que  l'auteur  est  un 
étranger  :  M.  Malte-Brun  est  encore  da- 
nois. 

EBBON,  31®  archevêque  de  Reims,  né 
d'une  famille  obscure ,  devint  frère  de 
lait  et  condisciple  de  Louis  le  Débon- 
naire, qui  le  fit  son  bibliothécaire,  et  le 
plaça  sur  le  siège  de  Reims.  Ebbon  con- 
çut le  dessein  de  travailler  à  la  conver- 
sion des  peuples  du  Nord,  et  fit  approu- 
ver sa  résolution  du  pape  Pascal,  qui  le 
nomma  son  légat.  Sa  mission  ayant  été 
infructueuse,  il  revint  en  France,  et  se 
mit  à  la  tête  des  factieux  qui  déposèrent 
Louis  le  Débonnaire.  Il  fut  lui-même  au 
concile  de  Thionville  en  835,  et  y  con- 
damna sa  conduite  envers  l'empereur.  11 


EBE  3 

fut  rétabli  sur  sou  siège  par  le  crédit  de 
Lothaire  ;  mais  ayant  été  cité  au  concile 
de  Paris  l'an  847  ,  et  ayant  refusé  d'y 
comparaître ,  il  encourut  l'indignation  de 
ce  prince,  et  fut  obligé  de  se  retirer  au- 
près de  Louis,  roi  de  Bavière,  qui  lui 
donna  i'évêché  de  Hildesheira ,  oii  il 
mourut  l'an  851 .  C'était  un  prélat  difficile 
à  définir  par  ses  qualités  opposées.  Il  fut 
successivement  courtisan  assidu ,  mis- 
sionnaire zélé,  et  enfin  chef  de  parti. 
(  Voyez  le  spicilcge  de  don  d'Achery  ,  le 
tom.  VII  diCi  conciles  de  Labbe  et  le  Re- 
cueil des  historiens  de  France  de  don 
Bouquet.  On  a  de  lui  une  apologie  qu'il 
composa  pour  se  justifier  d'avoir  repris 
ses  fonctions  épiscopaies  avant  d'avoir 
obtenu  une  nouvelle  institution.  On  lui 
attribue  narratio  clericoruni  reniensium. 
de  depositione  duplici  Ebbonis  ;  Voyez 
les  scriptores  histor.  franc,  de  Du- 
chesne.  — Ebbon  (S.),  29*  évêque  de 
Sens,  né  en  Bourgogne  à  la  fin  du  7* 
siècle,  succéda  à  son  oncle  saint  Guer-^ 
rie  et  mourut  le  27  août  7  50.  Sa  vie  se 
trouve  dans  les  Acla  sanctorum  sancli 
Bcnedicti  tom  1 1  et  dans  la  collection  des 
BoUandistes  avec  des  notes  de  Jean 
Stilting.  — Ebbon,  moine  allemand  mort 
en  1139,  a  écrit  la  vie  de  saint  Othon, 
évêque  de  Bamberg  et  apôtre  de  la  Po- 
méranie,  insérée  dans  les  Acta  sancto- 
rum, mois  de  juillet ,  tome  \". 

EBED-JÉSU,  auteur  de  plusieurs  ou- 
vrages en  syriaque ,  est  le  même  qu'Ab- 
dissi.  Voyez  cet  article. 

*  EBELING ,  littérateur  allemand,  né 
à  Carmissen  en  17  41  ,  est  auteur  d'une 
Histoire  de  la  poésie  allemande ,  d'une 
Histoire  et  géographie  de  V Amérique  , 
d'une  Description  du  royaume  de  Ma- 
jorque, de  plusieurs  Essais  de  poésies , 
insérés  dans  différens  écrits  périodiques, 
et  de  plusieurs  traductions  de  voyages. 
Il  est  mort  à  Hambourg  en  1817. 

*  EBERILVRD  (  Jçan-Auguste  ),  théo- 
logien et  philosophe  distingué,  né  le  31 
août  17  39  à  Halberstadt ,  fit  ses  études  k 
l'université  de  Halle  et  embrassa  l'état 
ecclésiastique.  Son  avancement  dans 
cette  carrière  fut  retardé  par  la  publica- 
tion de  quelques  écrits  Ihéologiqucs;  il 


4  EBE 

ftt  paraître  son  Apologie  de  Socrate , 
Amsterdam,  1773,  in-8  ,  qui  eut  une  in- 
fluence aussi  décisive  »ur  les  destinées 
de  sou  auteur  que  sur  les  études  néolo- 
giques en  Allemagne  ,  et  qui  le  plaça  au 
premier  rang  des  écrivains  protestans  de 
son  pays.  Cette  Défense  de  Socrate ,  qui 
fut  suivie  d'une  nouvelle  Apologie  de 
Socrate  ou  Nouvel  examen  de  la  doctrine 
touchant  le  salut  des  païens,  en  alle- 
inand,  Berlin,  1774,  in-8  (traduit  en 
français  par  Dumas  ) ,  n'est  qu'un  cadre 
dans  lequel  l'auteur  a  fait  entrer  l'exa- 
inen  de  la  doctrine  chrétienne  sur  la 
(corruption  de  l'homme,  sur  la  grâce, 
sur  la  rédemption,  sur  les  conditions  du 
salut  :  sur  tous  ces  points  il  ébranle  l'en^- 
seignement  de  la  religion .  Lorsqu'il  vit 
l'extension  qu'on  donnait  à  sa  doctrine , 
il  essaya,  par  un  nouvel  ouvrage,  intitulé 
Amyntor,  Berlin,  1782,  in-8,  de  faire 
aimer  la  morale  évangétique  ;  mais  Eber- 
bard  en  méconnaissait  le  divin  auteur , 
dans  lequel  il  ne  voit  rien  qu'un  homme. 
C'est  ainsi  qu'une  première  erreur  con^ 
duit  à  une  seconde ,  et  que  celui  qui  ne 
veut  suivre  que  son  imagination  ,  tombe 
toujours  dans  de  nouvelles  erreurs.  Il 
donna  ensuite  l'Esprit  du  christianisme 
primitif,  3  vol.  in-8 ,  1807  ,  ou  il  pré- 
tend que  cette  religion  est  née  du  choc , 
du  concours  et  d'une  fusion  de  la  culture 
intellectuelle  des  Grecs  avec  la  culture 
morale  dps  peuples  de  l'Asie ,  paradoxe 
que  l'histoire ,  la  réflexion  et  la  critique 
repoussent  également.  )1  fut  un  des  ad- 
versaires de  Kant,  et  publia,  de  1787 
jusqu'en  1795,  xin  journal  uniquement 
destiné  à  combattre  le  kantisme.  Cepen- 
dant cette  doctrine  prévalut.  Eberhard  , 
soit  lassitude ,  soit  dépit  de  voir  que  ses 
efforts  étaient  infructueux ,  chercha  un 
délassement  utile  dans  d'autres  travaux. 
Il  s'occupa  d'un  recueil  de  synonymes  , 
qu'il  publia  sous  ce  titre  :  Essai  d'un  dià- 
tionnaire  universel  des  synonymes  de  la 
langue  allemande,  Halle,  1795-1802,  6 
vol.  in-8  ,  où  il  montre  un  esprit  au.ssi 
pénétrant  que  juste  :  et  lorsqu'il  eut  ter- 
miné ,  avec  le  plus  grand  succès,  ce 
long  travail,  il  entreprit  de  faire  la  revue 
d9s   richesses  de  la  langue  allmandc , 


EBE 

dans  un  cours  de  rhétorique  et  de  poé- 
tique ,  joint  à  la  théorie  générale  des 
beaux  arts.  Cet  ouvrage,  devenu  classique 
en  Allemagne,  parut  sous  le  titre  A^  Ma- 
nuel d'jEsthétiquepour  les  lecteurs  d'un 
esprit  cultive  dans  toutes  les  classes  de 
la  société,  1803-1805  ,  \  vol.  On  a  en- 
core de  lui  plusieurs  autres  ouvrages  et 
un  grand  nombre  d'articles  dans  presque 
tous  les  journaux  littéraires  d'Allemagne, 
et  surtout  dans  la  Bibliothèque  univer- 
selle allemande  de  Nicolaï.  Eberhard  n'a- 
vait obtenu  qu'après  6  années  de  fonc- 
tions pénibles  dans  deux  petites  cures 
voisines  de  Berlin ,  la  place  de  prédica- 
teur à  Charlottenbourg.  11  est  mort  le  T 
janvier  1809.  Nicolaï  a  donné  en  alle- 
mand une  Notice  sur  la  vie  d' Eberhard. 

EBERMANN  (  Vite  ) ,  jésuite ,  né  à 
Rentweisdorff" ,  dans  l'évêché  de  Bam- 
berg ,  en  1 597  ,  enseigna  avec  repu  - 
tation  les  belles-lettres,  la  philosophie  et 
la  théologie  à  Mayence  etk  Wurtzbourg; 
fut  recteur  du  séminaire  de  Fulde,  et 
mourut  à  Mayence  le  8  avril  1G75.  Il  a 
publié  Bellarmini  controversiœ  vindi- 
c«fœ,  Wurtzbourg,  1661  ,  in-4.  Il  y  mon- 
tre que  la  manière  des  hérétiques  eu  ré- 
pondant à  Bellarmin,  est  de  tronquer  les 
preuves  de  ce  célèbre  controversiste ,  et 
d'isoler  des  propositions  pour  pouvoir  les 
combattre  avec  une  espèce  d'avantage. 
Ebermann  a  encore  publié  d'excellens 
ouvrages  de  controverse  contre  Georges 
Calixte,  HermanCoringius,  Jean  Musxus, 
professeur  d'Iéna,  etc. 

•  EBERT  (  Jean-Arnoldt  ) ,  professeur 
à  l'institut  du  Carolineum  à  Brun.swick, 
né  à  Hambourg  en  1723,  est  auteur  de 
plusieurs  traductions  allemandes  qui 
partagent  avec  les  ouvrages  de  Gartner , 
Geller,  Klopstock,  etc.  l'honneur  d'avoir 
restauré  la  littérature  allemande.  Il  a 
donné  1°  une  traduction  des  Nuits 
d^Young,  extrêmement  estimée,  avec 
des  notes  ,  Leipsick,  1790,  f793  ,  5  vol. 
in-8.  2°  Une  traduction  de  la  tragédie 
anglaise  de  Léonidas  de  Glover,  Ham- 
bourg, 17  78,  in-8.  3"  Quelques  morceaux 
de  poésie  lyrique  et  quelques  épilres  , 
parmi  lesquelles  on  distingue  celle  à 
Conrad  Arnold  Schmidt ,  imprimée  scpa- 


EBI 
rément,  Brunswick,  1772  ,  in  8.    Ebeit 
mourut  le  19  mars  1795. 

•  EBERT  (  Jean-Jacques  ) ,  professeur 
très  distingué  de  philosophie  et  de  ma- 
thématiques à  Witf  emberg ,  né  à  Breslau 
en  1737  ,  a  publié  les  ouvrages  suivans  : 
V  Leçons  de  philosophie  et  de  malhéma- 
tiques  pour  les  hautes  classes,  Franc- 
fort, 17  73,  Jn-8,  4»  édition,  1790.  2" 
Abre'gt  des  principes  de  logique ,  5*  édi- 
tion, 17  90.  3"  Abrégé  des  principes  de 
physique  ,  4*  édition,  1803.  4°  Leçons 
de  physique  pour  la  jeunesse ,  Leipsick  , 
1793,  2«  édition,  3  vol.  in-8.  5°  jE7eWn^ 
des  principales  parties  de  la  philosophie 
pratique,  Leipsick,  1784,  in-8.  6°  En- 
tretiens sur  les  principales  merveilles  de 
la  nature,  f"^  vol. ,  Leipsick,  1784, in-8. 
7°  Loisirs  d'un  père  consacrés  à  V in- 
struction de  sa  fille,  Leipsick,  1795,  in-8. 
8"  Journal  pour  l'instruction  des  jeunes 
dames,  1794,  à  1801.  Ces  deux  ouvrages 
ont  eu  le  plus  grand  succès.  Ebert  est 
mort  le  18  mars  1805.  Son  enseignement 
et  ses  ouvrages  tous  consacrés  à  la  jeu- 
nesse ont  eu  une  grande  influence  en  alle- 
magne. 

EBERTUS  ouEbert  (  Théodore  ) ,  pro- 
fesseur à  Francfort  sur  l'Oder ,  dans  le  1 7  •= 
siècle,  s'est  fait  un  nom  par  ses  ouvrages. 
Les  principaux  sont  :  1°  Chronologia 
sanctioris  linguœ  doctorum.  2°  Elogia 
jurisconsultorum  et politicorum  centum 
illustrium ,  qui  sanctam  hebrœam  lin- 
guampropagarunt,  Leipsick,  1628,  in-8. 
3°  Poctica  hcbraica,  ibid. ,  1628  ,  in-8. 
Ces  livres  renferment  beaucoup  de  choses 
savantes  et  peu  agréables  ,  excepté  pour 
les  hébraïsans. 

EBEYS,  Soudan  d'Egypte,  tua  en  1 1 56 
le  calife  son  maître,  qui  se  reposait  sur  ce 
perfide  du  gouvernement  de  son  royaume. 
Le  meurtrier  se  saisit  de  ses  trésors ,  en 
répandit  une  partie  dans  le  palais,  pour 
amuser  le  peuple,  pendant  qu'il  se  sau- 
vait l'épéc  à  la  main.  Les  hospitaliers  et 
les  templiers  l'ayant  arrêté  sur  le  chemin 
de  Damas ,  et  l'ayant  mis  à  mort ,  parta- 
gèrent entre  eux  ses  trésors  et  les  pri- 
sonniers. 

EBION ,  philosophe  stoïcien ,  disciple 
de  Cérinthe,  et  auteur  de  la  secte  des 


EBR  5 

tbionites ,  commença  à  débiter  ses  rêve- 
ries vers  l'an  7  2  de  J.  C.  Il  soutenait  que 
le  Sauveur  était  un  pur  homme,  né  par 
le  concours  ordinaire  des  deux  sexes.  Il 
ajoutait  que  Dieu  avait  donné  l'empire 
de  ce  monde  au  diable,  et  celui  du  monde 
futur  au  Christ.  Ses  disciples  mêlaient 
les  préceptes  de  la  religion  chrétienne 
avec  le  judaïsme.  Ils  observaient  éga- 
lement le  samedi  et  le  dimanche.  Ils  cé- 
lébraient tous  les  ans  leurs  mystères 
avec  du  pain  azyme.  Ils  se  baignaient 
tous  les  jours  comme  les  juifs,  et  révé- 
raient Jérusalem  comme  la  maison  de 
Dieu.  Ces  hérétiques  ne  connaissaient 
point  d'autre  Evangile  que  celui  de  saint 
Matthieu  ,  qu'ils  avaient  en  hébreu,  mais 
corrompu  et  mutilé.  Ils  rejetaient  le  reste 
du  nouveau  Testament ,  et  surtout  les 
Epîtres  de  saint  Paul,  regardant  cet 
apôtre  comme  un  apostat  de  la  loi.  Ils 
honoraient  les  anciens  patriarches,  mais 
ils  méprisaient  les  prophètes.  La  vie  des 
premiers  ébionites  fut,  dit  on,  assez  sage, 
celle  des  derniers  fort  déréglée.  Ceux-ci 
permettaient  la  dissolution  du  mariage 
et  la  pluralité  des  femmes.  Quoique  juifs 
opiniâtres ,  les  ébionites  reconnaissaient 
Jésus-Christ  pour  le  Messie;  ils  voyaient 
donc  en  lui  les  principaux  caractères  , 
sous  lesquels  il  avait  été  annoncé  par  les 
prophètes.  On  ne  les  accuse  point  d'avoir 
révoqué  en  doute  les  miracles  de  Jésus- 
Christ,  ni  sa  mort,  ni  sa  résurrection. 
Saint  Epiphane  atteste  ,  au  contraire , 
qu'ils  admettaient  tous  ces  faits  essentiels, 
lis  étaient  cependant  nés  dans  la  Judée , 
avant  la  destruction  de  Jérusalem  :  plu- 
sieurs avaient  été  sur  le  lieu  oîi  ces  faits 
s'étaient  passés  ;  ils  avaient  eu  la  facilité 
de  les  vérifier.  (  C'est  contre  Ebion  et  con- 
tre Cérinthe  que  saint  Jean  composa  son 
évangile.  ) 

EBROIN,  maire  du  palais  de  Cîo- 
laire  III  et  de  Thierri  I,  homme  ambi- 
tieux, fier,  entreprenant,  parvint  à  ce 
poste  par  ses  intrigues  et  par  son  hypo- 
crisie. Les  espérances  que  ses  vertus  ap- 
parentes avaient  données  se  démentirent 
bientôt.  Demeuré  seul  maître  ,  par  la  re- 
traite de  la  reine  Balhildc,  il  ne  contrai- 
gnit plus  son  orgueil ,  son  avarice ,  sa, 


6  ECC 

perAdie.  Il  ravissait  les  biens,  il  ôlail 
les  charges,  il  chassait  les  grands  qui 
étaient  à  la  cour,  et  défendait  aux  au- 
tres d'y  venir  sans  sa  permission.  Après 
la  mort  de  Clotaire  en  670,  il  mit  Thierri 
sur  le  trône  ;  mais  la  haine  que  les  sei- 
gneurs avaient  pour  le  ministre ,  rejaillit 
sur  le  roi.  Us  donnèrent  la  couronne  à 
Childéric  II ,  firent  tondre  Thierri  et 
Ebroin,  et  les  enfermèrent  dans  des  mo- 
nastères. On  eût  fait  mourir  Ebroin  sans 
la  puissante  médiation  de  saint  Léger , 
qui  ne  se  souvint  plus  de  l'inimitié  qu'il 
ne  s'était  attirée  de  la  part  de  ce  méchant 
homme  qu'en  blâmant  ses  injustices. 
Childéric  étant  mort  en  673,  Thierri  fut 
replacé  sur  le  trône,  et  prit  Leudèse  pour 
maire  du  palais.  Ebroin  s'étant  échappé 
de  son  monastère,  fit  assassiner  Leudèse, 
supposa  un  Clovis ,  qu'il  disait  être  fils 
de  Clotaire  III ,  força  les  peuples  de  lui 
prêter  st-rment  de  fidélité,  et  ravagea  les 
terres  de  ceux  qui  lui  résistèrent.  La  ville 
d'Autun  fut  assiégée.  L'évèque  Léger  eut 
les  yeux  crevés  par  ordre  d'Ebroin ,  à  qui 
il  avait  sauvé  la  vie,  et  fut  mis  dans  un 
monastère.  Ebroin  contraignit  ensuite  , 
les  armes  à  la  main ,  Thierri  à  le  recevoir 
de  nouveau  pour  son  maire  du  palais.  Il 
gagna  les  grands  de  Neustrie  et  de  Bour- 
gogne, et  renvoya  son  faux  Clovis,  dont 
il  n'avait  plus  besoin.  Sa  tyrannie  n'eut 
plus  de  bornes  ;  tous  les  gens  de  bien  en 
furent  les  victimes.  Enfin,  un  seigneur, 
nommé  Hermanfroi ,  qu'il  menaçait  de  la 
mort  après  l'avoir  dépouillé  de  ses  biens, 
tua  le  tyran  en  681  ,  les  uns  disent  dans 
son  lit ,  les  autres  à  la  sortie  de  son  pa- 
lais. Ce  fut  sous  ce  ministre  que  com- 
mença l'usage  ou  plutôt  le  monstrueux 
abus  de  donner,  à  titre  de  précaire,  les 
biens  ecclésiastiques  à  des  seigneurs  laï- 
ques ,  sous  l'obligation  du  service  mili- 
taire. (Le  caractère  d'Ebroin  a  fourni  à 
M.  Ancelot  le  sujet  d'une  tragédie  repré- 
sentée sur  le  théâtre  français  en  1 822.  ) 

ECCARD  ou  EcKHART  (Jean  Georges 
1)'},  né  en  167  4  à  Duingeri,  dans  le 
duché  de  Brunswick ,  fut  ami  de  Leib- 
nitz.  Il  devint,  par  le  crédit  de  cet 
homme  célèbre,  professeur  en  histoire  à 
Ilelmstadt.  Après  la  mort  de  ce  philoso- 


ECC 

phe,  il  eut  une  chaire  à  Hanovre;  mais 
les  dettes  qu'il  contracta  dans  ce  nouveau 
séjour,  l'obligèrent  de  le  quitter  en  1723. 
L'année  d'après ,  il  embrassa  la  religion 
catholique  à  Cologne,  et  se  retira  à  Wurtz- 
bourg.  (Le  pape  Innocent  XIII  lui  avait 
offert  une  place  dans  cette  ville,  ou 
bien  à  Passau  ou  à  Vienne ,  Eccart  pré- 
féra Wurtzbourg)  où  il  remplit  avec  dis- 
tinction les  charges  de  conseiller  ?pi- 
scopal,  d'historiographe,  d'archiviste  et 
de  bibliothécaire.  Il  y  mourut  en  1750, 
à  60  ans,  après  avoir  été  anobli  par  l'em- 
pereur. On  doit  àEccard  1°  Corpus  his- 
toricum  medii  œvi ,  a  tcmporibus  Caroli 
Magni  imperatoris  adfinem  seculi  XV, 
Leipsick,  1 7 1 9, 2  vol.  in-fol.  «Cette  collec- 
M  tion  qui  vient,  dit  l'abbé  Lenglet,  d'un 
»  des  plus  habiles  et  des  plus  honnêtes 
»  hommes  qu'il  y  ait  dans  l'empire,  est 
»  très  curieuse  et  bien  dirigée  ;  chose 
»  rare  dans  les  écrivains  allemands  ;  et  ce 
«  qui  est  encore  plus  rare,  il  ne  répète 
«  point  ce  qui  est  dans  les  autres.  »  2" 
Leges  F rancurum  et  Ripuarioriim,  Lei- 
psick ,  1720,  in-fol.  :  recueil  non  moins 
estimé  que  le  précédent.  3"  De  origine 
Gcrmanoruru  libri  duo  ,  publiés  à  Got- 
tingen  eu  1750  in-4.  ,  parles  soins  de 
Sheridius.  4"  Historia  studii  elymolo- 
gici  linguce  germanicœ  ,  etc.,  in-8  ,  es- 
timé, b"  Origines  Austriacœ  ,  Leipsick, 
1721  ,  in-fol.  Ce  savant  a  abandonné  les 
anciennes  idées  sur  l'origine  de  la  maison 
d'Autriche  ;  il  s'est  attaché  à  prouver  que 
les  maisons  de  Lorraine  et  d'Autriche 
viennent  de  la  même  souche.  6°  De  rcbus 
Franciœ  orientalis  et  episcopatùs  JVir- 
ccburgensis,  in  quibus  regutn  et  impera- 
torum  Franciœ  ,  Germanixque  gesla 
exponuntur  ,  Wurtzbourg  ,  1 729  ,  2  vol. 
in-fol.  7°  Ànimadversiones  historicœ  et 
criticœ  in  Schanati  diœcesim  et  hierar- 
chiam  Fuldenscm,  1727,  in-fol.  8"  His- 
toria gcnealogica  principum  Saxoniœ 
superioris,  Leipsick,  17  22,  in-fol.  etc. 
ECCART.  Voyez  ëciiabd,  Eckart,  ou 

ECKHART. 

ECCHELLENSIS  (  Abraham  ) ,  savant 
maronite,  professcurdes  langues  syriaque 
et  arabe  au  collège  royal  à  Paris,  où  le 
célèbre  Le  Jay  l'avait  appelé.  Cet  homme 


ECE 

illustre  lui  donnait  par  an  600  ëcus  d'or, 
pour  présider  à  l'impression  de  sa  grande 
Bible  polyglotte.  La  congrégation  de pro- 
paganda  fide  l'agrégea,  vers  l'an  1G3G, 
auï  traducteurs  de  la  Bible  en  arabe. 
Eccheilensis  passa  de  Paris  à  Rome,  après 
avoir  obtenu  en  cette  ville  une  chaire  de 
langues  orientales.  Il  y  mourut  en  \  6G4. 
Ce  savant  était  profondément  versé  dans 
la  connaissance  des  livres  écrits  en  syria- 
que et  en  arabe  ;  et  quoiqu'il  ait  eu  des 
supérieurs  dans  la  connaissance  de  ces 
deux  langues,  il  faut  avouer  qu'il  les  pos- 
sédait très  bien.  On  a  de  lui  1°  La  traduc- 
tion d'arabe  en  latin  des  b ,  ù  et  1  li- 
vres des  Coniques  d'Apollonius.  Ce  fut 
par  ordre  du  grand -duc  Ferdinand  II, 
qu'il  entreprit  cet  ouvrage ,  dans  lequel 
il  fut  aidé  par  Jean- Alphonse  Rorelli, 
mathématicien  célèbre,  qui  l'orna  de 
commentaires.  Cette  version  fut  imprimée 
à  Florence  avec  le  livre  d'Archimède,  De 
assumptis,  en  16G1,  iu-fol.  2°  Institutio 
linguœsyriacœ,  V>^ome,iG28,  in-12.  ^"Sy- 
nopsis philosophiœ  Orientalium,  Paris, 
1641,  in-4.  4°  Versio  Durrhamani  de 
medicis  virtutibus  animalium,  planta- 
rum  et  goniniarum,  Paris,  1G47,  in-8. 
5°  Des  ouvrages  de  controverse  contre 
les  protestans,  imprimés  à  Rome.  G"  Eu- 
tichius  vindicatus,  contre  Selden,  et 
contre  Hottinger  ,  auteur  d'une  Histoire 
orientale,  1661,  in-4.  7"  Des  remarques 
sur  le  Catalogue  des  écrivains  chalde'ens, 
compose'  par  Ebed-Jesu,  et  publié  à 
Rome  en  1663.  Elles  sont  précieuses  aux 
amateursdelalittérature  orientale.  8"Une 
cdiiion  des  œuvres  de  saint  Antoine, 
abbé.  9"  Concordia  nationum  christiana- 
rum  orientalium  in  fidei  catholicœ  dog- 
matibus,  Mayence,  1655.  Il  tâche  de  con- 
cilier les  sentimens  des  Orientaux  avec 
ceux  de  l'église  romaine ,  et  il  y  réussit 
ordinairement  très  bien.  Léon  Allatius  a 
travaillé  de  concert  avec  Eccheilensis  à 
cet  ouvrage. 

ECEBOLE ,  sophiste  de  Constanti- 
nople,  maître  de  rhétorique  de  l'empe- 
reur Julien,  fut  toujours  de  la  religion  du 
souverain.  Sous  Constance,  il  se  mit  à  la 
mode,  par  ses  invectives  contre  les  dieux 
des  païens;  il  déclama  depuis  pour  les 


ECH  7 

mêmes  dieux,  sous  Julien  son  disciple.  A 
la  première  nouvelle  de  la  mort  de  ce 
prince,  il  joua  le  rôle  de  pénitent.  Enfin 
il  mourut,  sans  reconnaître  d'autre  reli- 
gion que  l'intérêt  présent  :  digne  maître 
du  prince  hypocrite  et  apostat,  qui  sous 
les  mêmes  rapports  fut  son  très  digne  dis- 
ciple. 

ECELIN.  F  oyez  Ezzelin. 

ECHARD  (Jacques),  dominicain,  né  à 
Rouen  en  1644,  mourut  à  Paris  en  1724. 
Il  contribua  à  illustrer  son  ordre,  par  la 
Bibliothèque  des  écrivains  qu'il  a  pro- 
duits, 2  vol.  in-fol.,  à  Paris,  le  l®"^  en  1719, 
le  2"  en  1721.  Le  Père  Quetif  avait  tra- 
vaillé avant  lui  à  cet  ouvi'age  ;  mais  il  en 
avait  à  peine  fait  un  quart.  Cette  Biblio- 
thèque est  fort  estimée  par  tous  les  bi- 
bliographes. On  y  prend  une  idée  juste 
de  la  vie  et  des  ouvrages  des  écrivains 
dominicains,  de  leurs  différentes  éditions, 
et  des  bibliothèques  oii  on  les  garde  eu 
manuscrit.  Tout  est  appuyé  sur  de  bonnes 
preuves.  L'auteur  donne  le  titre  de  grands 
hommes  à  des  personnages  très-médio- 
cres ;  mais  l'exagération  est  le  défaut  de 
tous  les  ouvrages  de  ce  genre.  Le  Père 
Echard  avait  toutes  les  qualités  d'un  sa- 
vant vertueux.  (A  la  suite  de  cet  ouvrage, 
il  a  placé  Sacrum  gyneceum  Dominica- 
narum ,  seu  sorores  ordinis  prœdicato- 
rum  quœ  scriptis  claruerunt.  ) 

ECHARD  (Laurent),  historien  anglais, 
né  à  Bassani  dans  le  comté  de  Suffolk, 
exerça  successivement  le  pastorat  dans 
diverses  églises.  Sa  santé  était  très  faible. 
Les  eaux  de  Scarborough  lui  ayant  été  or- 
données pour  la  rétablir,  il  résolut  de  s'y 
transporter;  mais  il  mourut  en  chemin  à 
Lincoln  eu  1730.  Il  était  membre  de  la 
société  des  antiquaires  de  Londres.  Ses 
ouvrages,  tous  écrits  en  anglais,  sont 
1°  Histoire  d^  Angleterre  jusqu'à  la  mort 
de  Jacques  I,  Londres,  1707,  1718,  3  vol. 
in-fol.,  très  estimée  en  Angleterre.  2°  His- 
toire romaine,  depuis  la  fondation  de 
Home  jusqu'à  la  translation  de  l'empire 
par  Constantin,  traduite  en  français  par 
Daniel  de  La  Roque,  revue  pour  le  stile, 
corrigée  et  publiée  par  l'abbé  des  Fon- 
taines, Paris,  1728  et  1729,  6  vol.  in-12. 
Cet  abrégé  n'est  pas  sans  défaut  ;  mais  la 


8  ECI! 

disette  de  bons  ouvrages  en  ce  genre  lui 
il  donné  beaucoup  de  cours  en  France  et 
en  Angleterre.  L'auteur  y  a  transporté  les 
principaux  traits  de  l'Histoire  romaine. 
Il  y  a  fait  entrer  aussi  de  petites  disgres- 
sions  sur  les  principaux  écrivains  de 
Rome ,  qu'il  peint  avec  plus  de  vérité  que 
de  finesse.  L'abbé  Guyon  a  donné  une  con- 
tinuation de  cette  Histoire  en  10  vol. 
in-1 2 .  Les  faits  y  sont  arrangés  avec  ordre  ; 
la  narration  est  simple  et  naturelle,  lestile 
assez  pur.  Cette  Histoire  a  été  réimprimée 
en  Hollande  et  à  Avignon,  en  1 2  vol.  in-l  2. 
L'ouvrage  d'Echard  fit  connaître  son  au- 
teur au  ministère  d'Angleterre,  qui  l'em- 
ploya dans  plusieurs  affaires.  3°  Histoire 
générale  de  t Eglise  avec  des  Tables 
chronologiques ,  Londres,  1702,  in-fol., 
en  anglais.  Les  ecclésiastiques  d'Angle- 
terre font  autant  de  cas  de  cet  abrégé, 
que  les  gens  du  monde  en  font  de  son 
Histoire  romaine.  4"  Vlnterprète  des 
nouvellistes  et  des  liseurs  de  gazettes , 
ouvrage  superficiel ,  qui  donna  à  l'abbé 
Ladvocat  l'idée  de  son  Dictionnaire  géo- 
graphique portatif  .  Echard  composa  aussi 
un  Dictionnaire  historique,  qui  n'est 
qu'un  squelette  décharné.  6°  Traduction- 
anglaise  des  comédies  de  Plaute  et  de 
Térence,  etc. 

ECHIUS  ou  EcKius  (  Jean  ) ,  né  en 
Souabe  l'an  1486,  professeur  de  théolo- 
gie dans  l'université  d'Ingolstad  ,  signala 
son  savoir  et  son  zèle  dans  ces  conférences 
contre  Luther,  Carlostad,  Mélanchthon, 
etc.  Il  se  trouva  en  1 538  à  la  diète  d'Augs- 
bourg ,  et  en  1 54 1  à  la  conférence  de  Ra- 
tisbonne,  et  brilla  dans  l'une  et  dans  l'au- 
tre. Il  joua  le  rôle  principal  dans  toutes 
les  disputes  publiques  des  catholiques 
avec  les  luthériens.  Il  avait  de  l'érudition, 
de  la  mémoire,  de  la  facilité,  de  la  péné- 
tration, une  logique  précise  et  vigou- 
reuse. Ce  savant  théologien  mourut  à  In- 
golstadt  en  1543 ,  à  57  ans.  On  a  de  lui 
deux  Traités  sur  le  sacrifice  de  la  messe-, 
un  Commentaire  sur  le  prophète  Aggée, 
1638,  in-8;  des  homélies,  4  vol.  in-8,  et 
des  ouvrages  de  controverse  ;  entr'autres 
son  Manuel  de  controverse  et  son  Traité 
sur  la  prédestination.  On  conserve ,  avec 
une  sorte  de  respect,  dans  le  Muséum  du 


ECK 

collège  d'ingolstadt,  la  chaire  où  il  était  :»<- 
sisen  donnant  ses  leçons.  — Il  ne  faut  point 
le  confondre  avec  Léonard  Eckius,  juris- 
consulte célèbre,  mort  à  Munich  en  1 550  : 
ce  dernier  jouissait  d'une  si  grande  ré- 
putation, et  était  si  aimé  de  Charles  Quint, 
que  ce  prince  disait  que  «  ce  qui  était 
»  conclu  sans  l'avis  d'Eckius  était  conclu 
»  en  vain.  » 

ECKARD.  FoyezlxickVD. 

*  ECKHARD  (Jean-Frédéric  ) ,  savant 
philologue  saxon,  né  en  1723  à  Qued- 
linbourg,  mort  en  1794,  devint  recteur 
du  collège  de  Frankehausen  en  17  48, 
puis  bibliothécaire  de  celui  d'Eisenach 
(  1758-1793  ).  Sa  vie  tout  entière  fut 
consacrée  à  l'étude  et  à  l'enseignement. 
Le  Dictionnaire  de  Meusel  cite  de  cet 
auteur  92  ouvrages  on  programmes  aca- 
démiques ,  et  Dissertations  philologiques 
et  littéraires  ;  ils  sont  tous  écrits  en  latiu 
ou  en  allemand;  les  principaux  sont  : 
1"  De  Elegantiorum  litterarum  studiis 
inter  chrislianos  tempore  Juliani  ,  Ei.se- 
nach,  1764  ,  in-4.  2°  Exercitatio  critica 
de  editione  librorum  apud  veteres,  1777, 
in-4.  3°  Notices  sur  des  Livres  rares 
du  15*  siècle  de  la  bibliothèque  d^Eise- 
nach,  1775,  in-8.  4»  Sur  J.  P.  Erick, 
savant  littérateur  d'Eisenach.  5°  Des  Bi- 
bliothèques chez  les  Romains,  1790, 
in-4.  6°  De  Edificatione  et  ornatione 
sepulchrorum  a  scribis  et  pharisœis  in- 
stituta,  Jena,  1746,  in-4.  7"  Notice  d'un 
livre  rare  intitulé  Summa  Magistrutia 
ou  Pisanella,  ibid.,  1771,  in-4.  8"  Notice 
sur  les  Batteries  flottantes  employées 
par  César  dans  la  guerre  civile,  1783, 

1784,  avec  un  supplément.  9°  Flavius 
Josephus  de  Joanne  Baptista  testatus , 

1785,  in-4.  10°  La  Fie  de  cet  histo- 
rien ,  traduite  du  grec  en  allemand ,  Leip- 
sick,  1780,  in-8.  Eckharta  fourni  des  ar- 
ticles à  quelques  journaux  littéraires  de 
l'Allemagne. 

'  ECKHEL  (  Joseph-Hilaire  ) ,  célèbre 
numismate,  né  le  13  janvier  1737  à  En- 
zesfeld,  dans  l'Autriche  supérieure.  Il  en- 
tra chez  les  jésuites ,  enseigna  le  latin  à 
Vienne  dans  le  collège  Thèrésien,  la  rhé- 
torique à  Steyer ,  et  fut  ensuite  nommé 
professeur  d'éloquence  à  l'uniTersité  de 


ECL 

Vienne.  Cédant  à  son  goût  pour  l'étude 
de  l'antiquité,  et  particulièrement  pour 
celle  de  la  numismatique,  il  obtint,  en 
1772,  de  ses  supérieurs,  la  permission  de 
faire  le  voyage  d'Italie,  pour  examiner 
les  nombreux  cabinets  qui  s'y  trouvent 
épars.  Le  grand  duc  de  Toscane  le  char- 
gea de  ranger  le  cabinet  de  Médicis. 
Pendant  son  absence,  l'impératrice  Marie- 
Thérèse  l'avait  nommé  directeur  du  cabi- 
net des  médailles  et  professeur  d'antiqui- 
tés à  Vienne  (17  78).  La  suppression  de 
son  ordre  ayant  eu  lieu  dans  le  même 
temps,  il  se  livra  entièrement  à  ses  études 
favorites.  Ses  principaux  ouvrages  sont 
ï°  Nummi  vetcres  anecdoti.  Vienne, 
1775,  2  parties  in-4,  oîi  il  a  fait  connaître 
plus  de  400  médailles  inédites,  la  plupart 
autonomes.  Elles  sont  rangées  suivant 
Une  nouvelle  méthode  que  sa  simplicité 
et  sa  clarté  ont  fait  adopter  dans  la  suite. 
2°  Une  nouvelle  édition  du  catalogue  du 
cabinet  numismatique  de  Vienne,  1779, 
2  vol.  in-folio,  en  latin.  3°  Choix  des 
pierres  gravées  du  cabinet  impérial  des 
antiques  à  Vienne^  17  88,  petit  in-folio. 
4"  De  doctrina  nummorum,  ou  De  la 
science  des  médailles.  Vienne  ,  1792-98, 
8  vol.  in-4.  Ce  bel  ouvrage  qui  embrasse 
la  numismatique  toute  entière  est  remar- 
quable par  la  précision  des  idées,  la  clarté 
du  stile  et  l'éloignement  de  tout  esprit 
de  système,  et  surtout  par  une  étude  ap- 
profondie de  la  science  :  elle  lui  assigne 
dans  ce  genre  le  même  rang  qu'à  Linnée 
en  botanique.  Cet  ouvrage  mit  le  com- 
ble à  sa  gloire  ;  mais  il  n'eut  pas  le  temps 
d'en  jouir  :  il  mouiut,  peu  de  jours 
après  la  publication  du  dernier  vol.,  le 
16  mai  1798. 

ECKOUT.  Voyez  Van  dkn  Eckout 
(Gerbrand). 

ECLUSE  (  Charles  de  l'  ),  Clusius,  né 
à  Arras  le  1 8  février  1 525,  parcourut  une 
grande  partie  de  l'Europe  en  herborisant. 
Il  s'était  fait  une  loi  de  ne  se  fier  qu'à  ses 
propres  yeux  pour  les  descriptions  des 
plantes  :  aussi  l'exactitude  la  plus  scru- 
puleuse règne  dans  ses  descriptions  et 
dans  ses  figures.  Les  empereurs  Maximi- 
lien  II  et  Rodolphe  II  lui  confièrent  leur 
jardin  des  simples.  Les  assiijétissemens 

T. 


EDE  9 

de  la  vie  de  courtisan  l'ayant  dégoûté,  il 
se  retira  à  Francfort-sur-le-Mein ,  ensuite 
à  Leyde,  où  il  mourut  en  1609,  à  84  ans, 
professeur  de  botanique.  Ses  ouvrages 
ont  été  recueillis  en  3  vol.  in-fol.  à  An- 
vers, 1601, 1605  et  1611,  avec  fig.  Ils  rou- 
lent sur  la  science  qu'il  avait  cultivée. 
Voyez  Belon. 

*  ECLUSE  DES  LOGES  (Pierre-Ma- 
thurin  de  l'),  docteur  de  Sorbonne,  né  à 
Falaise  en  1715,  et  mort  à  Paris  vers  l'an 
1783,  est  particulièrement  connu  par  son 
édition  des  Mémoires  de  Sully,  Londres, 
1745,  3  vol.  in-4,  ou  8  vol.  in-I2,  réim- 
primé à  Londres  ,  1778,  10  vol.  in-12,  et  à 
Paris  1814,  6  vol.  in-8.  On  reprochait  à  ces 
Mémoires  de  manquer  d'ordre  ;  le  stile 
d'ailleurs  en  avait  vieilli  :  il  était  en  géné- 
ral lent ,  surchargé  de  parenthèses  ou  de 
phrases  incidentes  et  quelquefois  ob-* 
scures.  L'abbé  de  l'Ecluse  les  a  mis  en 
meilleur  français  et  en  meilleur  ordre,  et 
il  redresse,  toutes  les  fois  que  l'occasion 
s'en  présente ,  les  erreurs  dans  lesquels 
Sully  a  été  entraîné  par  l'esprit  départi. 

*  EDDY,  célèbre  géographe  améri- 
cain, né  à  New-Yorck  en  1784,  a  publié 
plusieurs  cartes  estimées ,  entre  autres 
celle  de  l'état  de  New-Yorck.  Il  s'occu- 
pait d'un  atlas  complet  de  toute  l'Amé- 
rique ,  lorsqu'une  mort  prématurée  l'en- 
leva le  22  décembre  1817.  Ou  a  encore 
de  lui  un  grand  nombre  à' Essais  sur  la 
géographie ,  la  botanique  et  sur  d'autre^ 
branches  d'histoire  naturelle. 

EDELIJNCK  (  Gérard  )  naquit  à  An- 
vers en  1 64 1 .  Il  y  apprit  les  premiers  élé- 
mens  du  dessin  et  de  la  gravure;  mais  ce 
fut  en  France  qu'il  déploya  tous  ses  ta- 
lens.  Louis  XIV  l'y  attira  par  ses  bien- 
faits. Il  fut  choisi  pour  graver  deux  mor- 
ceaux de  la  plus  grande  réputation  ,  le 
tableau  de  la  sainte  Famille  de  Raphaël^ 
et  celui  à' Alexandre  visitant  la  famille. 
de  Darius,  de  Le  Brun.  Edelinck  se 
surpassa  dans  les  estampes  qu'il  exécuta 
d'après  ces  chefs-d'œuvre  ;  les  copies  fu- 
rent aussi  applaudies  que  les  originaux. 
On  y  admire ,  comme  dans  toutes  ses  au- 
tres productions,  une  netteté  de  burin  , 
une  fonte  et  une  couleur  inimitables.  Il 
a  réussi  également  dans  les  portraits 


it)  EDE 

qu'il  a  faits  de  la  plupart  des  hommes 
illustres  de  son  siècle.  Cet  excellent  ar- 
tiste mourut  en  1 707  ,  dans  l'hôlel  royal 
desGobelins,  où  il  avait  un  logement, 
avec  le  titre  de  graveur  ordinaire  duroi, 
et  de  conseiller  dans  l'académie  royale 
de  peinture. 

*  EDELCRANZ  (  Abraham-lNicolas,  le 
baron  ) ,  né  à  Abo  en  Suède,  en  17.^4,  fut 
poète  lyrique  et  dramatique.  Après  avoir 
fait  des  odes  et  des  pièces  de  théâtre , 
il  devint  en  1787  secrétaire  et  caissier 
particulier  du  roi  de  Suède  et  directeur 
des  spectacles.  En  1790  et  1791,  il  fit 
un  voyage  en  Angleterre  dont  son  gou- 
vernement l'avait  cbargé  ;  il  fut  appelé 
ensuite  à  la  cbancelleric.  Le  roi  lui  fit 
faire  un  nouveau  voyage  en  Allemagne  , 
en  Hollande ,  en  France  et  en  Angleterre, 
dans  des  vues  d'utilité  publique,  no- 
tamment pour  examiner  plusieurs  procé- 
dés mécaniques  et  industriels,  il  rapporta 
un  recueil  ricbe  d'observations ,  prati- 
ques sur  l'agriculture,  les  arts  et  le  com- 
merce; il  parvint  lui-même  à  perfection- 
ner plusieurs  machines.  A  son  retour ,  il 
fut  appelé  à  l'intendance  des  musées 
royaux ,  et  aux  comités  pour  les  amélio- 
rations des  objets  d'industrie  et  d'agri- 
culture. La  Suède  lui  est  redevable  de 
plusieurs  machines  importantes  parmi 
lesquelles  on  cite  les  télégraphes  qu'il 
perfectionna  et  sur  lesquels  il  publia 
un  traité  en  1796  :  il  fit  aussi  une  ma- 
chine pneumatique  dont  la  construction 
la  rend  propre  à  divers  usages.  Outre 
les  places  qu'il  obtint  en  récompense 
de  ses  services ,  le  roi  le  nomma  baron , 
et  le  combla  de  marques  de  faveurs.  Edel- 
cranz  mourut  à  Stockholm  le  15  mars 
1821. 

*  EDELMANN  (Jean-Frédéric),  habile 
compositeur  de  musique  ,  naquit  en 
17  49  à  Strasbourg.  De  bonne  heure  il  se 
fit  connaître  avec  avantage  comme  pia- 
niste ,  et  publia  un  grand  nombre  de 
sonates  ^iAe  concertos  pour  le  clavecin. 
En  1782  on  joua  à  Topera  l'acte  à\i  feu 
dans  le  ballet  des  élémens  ,  et  Ariane 
abandonnée  dans  l'isle  de  Naxos ,  qui 
avaient  été  composés  l'un  et  l'autre  par 
Edelmann  et  qui  obtinrent  un  grand  suc- 


EDG 

ces.  On  a  de  lui  1 4  œin'res  pour  le  cla- 
vecin. On  assure  qu'il  a  laissé  en  manu- 
scrit l'Oratorio  d'Esthcr,  les  Opéra  d'Aï- 
cione  et  de  Méropc.  Telle  fut  la  \"  par- 
tie de  la  vie  de  ce  musicien  qui,  à  l'époque 
de  la  révolution ,  en  embrassa  les  prin- 
cipes avec  une  chaleur  furibonde  :  il 
porta  la  démence  politique  non-seule- 
ment jusqu'à  abandonner  la  carrière  qu'il 
avait  parcourue  jusque  là  si  honorable- 
ment ,  il  devint  encore  dénonciateur 
public  ;  et  dans  ces  nombreuses  délations 
qui  envoyèrent  à  la  mort  une  foule  de 
victimes,  il  n'oublia  pas  son  bienfaiteur 
le  baron  Dietricli  ;  lui-même  périt  sur 
l'échafaud  avec  son  frère ,  en  1 7 94  ,  après 
la  mort  de  Robespierre. 

EDER  (  George  ) ,  né  à  Freisingen  ,  se 
fit  un  nom  vers  la  fin  du  16*  siècle  par 
son  habileté  dans  la  jurisprudence.  Il  fut 
honoré  par  les  empereurs  Ferdinand  I , 
Maximilien  II  et  Rodolphe  II,  delà  charge 
de  leur  conseiller,  et  laissa  plusieurs 
écrits  sur  le  droit ,  dont  le  meilleur  est 
son  OEconomio  bibliorum ,  scu  partitio- 
num  biblicarum  libri  quatuor ,  in-folio. 

EDGAR ,  roi  d'Angleterre  ,  dit  le  Pa- 
cifique, fils  d'Edmond,  succéda  à  sou 
frère  Eduin  en  959.  Il  vainquit  les  Ecos- 
sais ,  imposa  à  la  province  de  Galles  un 
tribut  annuel  d'un  certain  nombre  de 
têtes  de  loups ,  pour  dépeupler  l'île  de 
ces  animaux  caniaciers.il  subjugua  une 
partie  de  l'Irlande,  poliça  ses  états,  contri- 
bua à  la  réforme  des  mœurs  des  ecclésias- 
tiques ,  et  mourut  en  97  5,  après  un  règne 
de  16  ans.  Quelques  auteurs  l'appellent 
r amour  et  les  délices  des  Anglais.  Sa  mo- 
dération lui  mérita  le  surnom  de  Pacifi- 
que ,  et  son  courage  égala  son  amour  de 
la  paix.  Sa  vertu  ne  fut  point  exempte  de 
faiblesse  ;  mais  la  pénitence  qu'il  en  fit 
répara  bien  le  scandale  qu'il  avait  donné. 
«  Ce  prince ,  dit  Fleury ,  étant  allé  à  un 
»  monastère  de  filles,  situé  à  Vilton,  fut 
»  épris  de  la  beauté  d'une  personne  noble 
M  qui  y  était  élevée  parmi  les  religieuses, 
»  sans  avoir  reçu  le  voile,  et  l'enleva... 
j)  L'archevêque  de  Cantorbéry ,  saint 
»  Dunstan,  vint  trouver  le  roi,  quis'a- 
»  vanra  à  son  ordinaire,  lui  tendant  la 
»  main  pour  le  faire  asseoir  sur  le  trône. 


EDG 

»  L'archevêque  retira  sa  main  et  lui  dit  : 
»  Fous  osez  toucher  la  main  qui  immole 
w  le  F  ils  de  la  Vierge  ,  avec  votre  main 
V  impure ,  après  avoir  enlevé  à  Dieu  une 
D  vierge  qui  lui  était  destinée....  Je  ne 
»  veux  pas  être  ami  d'un  ennemi  de  Je- 
■»  sus-Christ.  Le  roi  se  jeta  aux  pieds  du 
»  prélat,  qui  l'ayant  disposé  à  toute  sa- 
M  tisfaction ,  lui  imposa  une  pénitence 
»  de  sept  ans,  pendant  lesquels  il  nepor- 
))  terait  point  la  couronne ,  il  jeûnerait 
»  deux  jours  de  la  semaine,  et  ferait  de 
»  grandes  aumônes.  Le  roi  accomplit 
»  exactement  sa  pénitence.  Après  les  sept 
M  ans ,  il  assembla  les  seigneurs ,  les  évê- 
»  ques  et  les  abbés  de  ses  états,  et,  en 
»  leur  présence ,  saint  Dunslan  lui  remit 
»  la  couronne  sur  la  tête  avec  une  allé- 
j)  gresse  publique.  C'était  l'an  97  3.  »  On 
trouve  ,  dans  la  Collection  des  conciles , 
plusieurs  lois  qui  font  honneur  à  la  sa- 
gesse de  son  gouvernement.  —  Il  ne  faut 
pas  le  confondre  avec  Edgar  ,  roi  d'E- 
cosse ,  fils  de  sainte  Marguerite  et  neveu 
d'Edgar ,  dont  il  est  parlé  dans  l'article 
suivant. 

EDGAR  ATHELIIVG  (c'est  à  dire  vrai- 
ment noble),  légitime  héritier  du  royaume 
des  Anglais,  fut  obligé,  par  Guillaume 
le  Conquérant,  de  chercher  son  salut 
dans  la  fuite.  11  échoua  en  Irlande,  avec 
sa  mère  Agathe,  et  ses  sœurs  Marguerite 
et  Christine.  Marguerite  fut  mariée  au  roi 
Malcolm,  dont  elle  eut  six  fils  et  deux 
filles.  Trois  de  .ses  fils,  Edgar ,  Alexandre 
et  David  furent  rois.  Voyez  Marguerite. 

*  EDGEWORTH  (Richard  Lovell  ), 
membre  du  parlement  d'Irlande,  né  en 
174.3  ,  et  proche  parent  de  l'abbé  Edge- 
worth,  confesseur  de  Louis  XVI,  s'adonna 
de  bonne  heure  aux  sciences  exactes.  Il 
a  publié  plusieurs  écrits  estimés,  parmi 
lesquels  on  distingue  celui  qui  a  pour 
titre  :  Essais  sur  Véducation  relative- 
ment au.r  diverses  professions.  11  s'était 
occupé  des  moyens  de  détourner  le  cours 
du  Rhône,  et  avait  publié  à  ce  sujet  quel- 
ques ouvrages,  qui  lui  méritèrent  le  titre 
de  citoyen  delà  ville  de  Lyon.  Il  est  mort 
le  13  juin  1817,  universellement  regretté 
de  sa  famille  et  de  ses  amis. 

*  EDGEWORTH  (  William  ) ,  ingé- 


EDM  M 

nieur,  fils  du  célèbre  Richard-Lowell  Ed- 
gcM'orth ,  et  frère  de  Miss  Edgeworth  ,  si 
connue  dans  la  littérature,  est  mort  en 
1829  à  Edgeworlh'S  Town  en  Irlande  ;  il 
avait  rendu  à  son  pays  des  services  im- 
portans  dans  la  carrière  oii  l'avaient  ap- 
pelé ses  talens  et  la  confiance  du  gouver- 
nement. On  lui  doit  entr'autres  les  projets 
d'une  ligne  de  route  de  Belfast  à  Antrim, 
qui  sera  l'une  des  plus  belles  voies  de 
communication  de  l'Irlande. 

EDGEWORTH  de  Firmont ,  dernier 
confesseur  de  Louis XVI.  Voyez  Firmoat. 

EDISSA.  Voyez  Esther. 

EDENE  (Saint).  Voyez  Emond. 

EDMER.  Voyez.  Eadmer. 

EDMOND  ou  Edme  (  Saint  )  naquit 
au  bourg  d'Abendon,  d'un  père  qui  entra 
dans  le  cloître ,  et  d'une  mère  qui  vécut 
saintement  dans  le  monde.  Il  fit  ses  études 
à  Paris  ,  et  y  enseigna  ensuite  les  mathé- 
matiques et  les  belles-lettres.  Son  nom 
ayant  pénétré  jusqu'à  Rome ,  le  pape  In- 
nocent III  lui  donna  ordre  de  prêcher  la 
croisade.  Le  pape  Grégoire  voulant  ré- 
compenser le  zèle  avec  lequel  il  remplit 
cette  fonction  ,  le  désigna  pour  occuper 
le  siège  de  Cantorbéry  ,  vaquant  depuis 
long-temps.  Le  chapitre  l'élut  d'une  voix, 
unanime ,  et  l'élection  fut  confirmée  par 
le  souverain  pontife  ;  mais  on  eut  beau- 
coup de  peine  à  faire  consentir  Edme  à 
accepter  répiscopat.  L'autorité  del'évê- 
que  de  Salisbury  ayant  vaincu  sa  résis- 
tance, il  fut  sacré  le  2  avril  1234.11  con- 
tinua toujours  son  premier  genre  de  vie, 
sans  craindre  de  s'exposer  à  la  censure 
de  quelques  évèques  qui  n'étaient  pas 
animés  ,  comme  lui,  de  l'esprit  de  Dieu, 
«r  Sa  principale  occupation ,  dit  un  his- 
»  torien ,  était  de  connaître  les  besoins 
»  spirituels  et  coi-porels  de  son  troupeau, 
»  afin  de  pourvoir  aux  uns  et  aux  autres. 
5>  Il  avait  un  soin  particulier  des  jeunes 
»  filles  qui  n'avaient  point  de  ressource; 
3>  et  pour  les  mettre  plus  sûrement  à  l'a- 
3)  bri  du  danger,  il  leur  procurait  un  éta- 
»  blissement.  Il  faisait  une  guerre  décla- 
3>  rée  aux  vices;  il  maintenait  la  disci- 
))  pline  avec  une  vigueur  vraiment  apo- 
»  stolique  ;  il  veillait  sur  ses  officiers  de 
»  justice  pour  qu'ils  remplissent  avec  in- 


11  EDM 

»  tégritë  les  fonctions  de  leurs  charges , 
»  et  qu'ils  n'abusassent  pas  de  leur  au- 
»  torité  pour  opprimer  les  faibles.  »  Le 
zèle  qu'il  employa  à  la  reforme  de  son 
clergé,  lui  attira  des  ennemis  d/ins  le 
chapitre  même  de  son  église.  Eprouvant 
tous  les  jours  des  contradictions,  il  ne 
voulut  point  paraître  conniver  à  des  abus 
qu'il  ne  pouvait  réprimer ,  il  passa  secrè* 
tement  en  France,  et  mourut  à  Poissy, 
le  16  novembre  1242,  ayant  été  huit  ans 
archevêque  de  Cantorbéry.  Le  pape  In- 
nocent IV  canonisa  saint  Edmond  en 
1247.  Il  nous  reste  de  lui  un  ouvrage  in- 
titulé Spéculum  Ecclesiœ  dans  la  Biblio- 
thèque des  Pères,  tom.  3,  Cologne,  1618- 
22  ;  un  livre  des  Constitutions  diverses  en 
36  canons ,  dans  la  Collection  des  conci- 
les d'Angleterre  et  d'Irlande  deWilkins, 
et  des  manuscrits  contenant  A.es prières , 
des  dissertations  sur  les  sept  péchés  ca- 
pitaux, le  décalogue  et  les  sept  sacre- 
mens.  On  a  une  vie  de  saint  Edme  tirée 
des  manuscrits  de  l'abbaye  de  Pontigni, 
Auxerre,  1763,  in-12. 

EDMOND  (  Saint  ) ,  roi  des  Anglais 
orientaux ,  fut  illustre  par  sa  piété  ,  qui 
le  fit  mettre  dans  le  catalogue  des  saints. 
Ce  prince,  ayant  en  870  voulu  livrer 
bataille  aux  Danois ,  fut  vaincu  et  con- 
traint de  prendre  la  fuite.  Il  crut  pouvoir 
se  cacher  dans  une  église  ;  mais  ayant  été 
découvert ,  il  fut  mené  à  Ivar ,  chef  des 
Danois,  qui  était  à  Hélisdon.  Le  vain- 
queur lui  offrit  d'abord  de  lui  laisser  son 
royaume ,  pourvu  qu'il  le  reconnût  pour 
son  souverain ,  et  lui  payât  un  tribut. 
Edmond  ayant  refusé  ce  parti,  Ivar  le  fit 
attacher  à  un  arbre ,  et  percer  d'une  in- 
finité de  flèches  ,  après  quoi  il  lui  fit  cou- 
per la  tête.  Le  chef  d'Edmond  ayant  été 
trouvé  quelque  temps  après ,  fut  enterré 
avec  le  corps  à  Saint-Edmonbourg,  ville 
qui  a  reçu  son  nom  de  ce  roi.  Les  histo- 
riens du  temps  en  font  l'éloge  le  plus 
complet.  Ils  relèvent  surtout  sa  piété,  sa 
douceur  et  son  humilité.  Les  rois  d'An- 
gleterre l'honoraient  comme  leur  princi- 
pal patron,  et  le  considéraient  comme 
un  modèle  accompli  de  toutes  les  vertus 
loyales. 

EDMOND  I,  roi  d'Angleterre,  ûl«  d'E- 


EDM 

douard  le  Vieux ,  monta  sur  le  trône  Tan 
940.  Il  soumit  le  Northumberland ,  mit 
l'ordre  dans  son  royaume,  et  donna  de 
grands  privilèges  aux  églises.  Il  fut  as- 
sassiné l'an  94G,  par  un  voleur  qu'il  avait 
arrêté  dans  ses  a]ipartemcns  ;  il  emporta 
avec  lui  les  regrets  de  ses  sujets. 

EDaiOND  II,  dit  Côte-de-Fer,  roi 
des  Anglais  après  son  père  Ethelred, 
commença  de  régner  en  1016.  Le  royaume 
était  alors  extrêmement  divisé  par  les 
conquêtes  de  Canut,  roi  de  Danemarck. 
Le  nouveau  roi  prit  les  armes,  se  rendit 
maître  d'abord  de  Glocester  et  de  Bristol, 
et  mit  ses  ennemis  en  déroute.  Il  chassa 
ensuite  Canut  de  devant  Londres  qu'il 
assiégeait,  et  gagna  deux  sanglantes  ba- 
tailles. Mais  ayant  laissé  à  son  ennemi  le 
temps  de  remettre  de  nouvelles  troupes 
sur  pied,  il  perdit  Londres  et  fut  défait 
en  plusieurs  rencontres.  La  mort  de  tant 
de  bons  sujets  le  toucha.  Pour  les  épar- 
gner ou  pour  ne  plus  se  commettre  à  leur 
courage  ,  il  fit  un  défi  à  Canut ,  qui  ac- 
cepta ce  parti.  Ces  rois  se  battirent  avec 
chaleur  et  à  forces  égales.  Us  terminè- 
rent leur  différend  en  partageant  le 
royaume.  Quelque  temps  après ,  Edric  , 
surnommé  Stréon,  corrompit  deux  valets- 
de-  chambre  d'Edmond ,  qui  lui  passè- 
rent un  croc  de  fer  au  fondement ,  dans 
le  temps  qu'il  était  pressé  de  quelque  né- 
cessité naturelle  ,  et  portèrent  sa  tête  à 
Canut  qui  fut  maître  du  trône  (  1019  ). 
Votjez  Canut. 

EDMOND  PLANTAGENET,  de 
Woodstock ,  comte  de  Kent ,  était  un  fils 
cadet  du  roi  d'Angleterre  Edouard  I.  Le 
roi  Edouard  II,  son  frère  aîné,  l'envoya 
l'an  1324  en  France,  pour  y  défendre 
contre  Charles  IV  les  pays  qui  apparte- 
naient à  l'Angleterre  ;  mais  il  ne  fut  pas 
heureux  dans  cette  expédition.  Il  soutint 
le  parti  de  ceux  qui  déposèrent  Edouard  II 
son  frère,  pour  mettre  son  fils  Edouard  III 
.sur  le  trône.  Il  se  chargea  du  gouverne- 
ment du  royaume,  avec  onze  autres  sei- 
gneurs ,  pendant  la  minorité  de  son  ne- 
veu; mais  il  s'aperçut  bientôt  que  la 
mère  du  jeune  roi ,  de  concert  avec  son 
amant  Roger  Mortimer ,  ne  lui  en  laissait 
que  le  »cul  titre.  Il  travailla  dèa  Ion  à 


EDO 

faire  remonter  sur  le  troue  son  frère. 
Cette  tentative  ne  lui  réussit  pas  :  la  reine 
fit  si  bien  que ,  dans  un  parlement  tenu 
à  Winchester,  il  fut  condamné  à  mort. 
On  le  conduisit  sur  l'échafaud  ;  mais  l'exé- 
cuteur s'étant  évadé ,  il  y  demeura  de- 
puis avant  midi  jusqu'au  soir,  sans  qu'on 
pût  trouver  un  homme  qui  voulût  faire 
l'ofi&ce  de  bourreau.  Enfin  vers  le  soir , 
un  garde  de  la  maréchaussée  se  chargea 
de  celte  triste  exécution.  Ainsi  mourut  ce 
prince  à  l'âge  de  28  ans. 

EDMONDES  (  Thomas  ) ,  Anglais ,  né 
en  1563  ,  joua  un  rôle  dans  les  affaires 
politiques  sous  les  règnes  d'Elisabeth,  de 
Jacques  I  et  de  Charles  I.  Il  fut  envoyé 
en  qualité  d'ambassadeur  en  France  et 
dans  les  Pays-Bas,  et  mourut  en  1G39. 
On  a  publié  i°  ses  JVcffociations  ,  Lon- 
dres, 1749,in-8.  2°  Lettres  sur  les  affai- 
res d'e'tat ,  Londres,  1725,  3  vol.  in-8. 

EDOUARD  LE  VIEUX  ou  l'ancien  , 
roi  d'Angleterre  7^  de  la  dynastie  saxone, 
succéda  à  son  père  Alfred  l'an  900.  Il  dé- 
fit Constantin ,  roi  d'Ecosse  ,  vainquit  les 
Bretons  du  pays  de  Galles ,  et  remporta 
deux  victoires  sur  les  Danois.  Il  fit  ensuite 
ériger  cinq  évêchés,  fonda  l'université  de 
Cambridge,  protégea  les  savans,  et  mou- 
rut en  924. 

EDOUARD  LE  JEUNE  ou  le  martyre 
(  Saint),  né  en  962  d'Edgard,  roi  d'An- 
gleterre ,  parvint  à  la  couronne  dès  l'âge 
de  13  ans  en  97  5.  La  plupart  des  grands 
du  royaume  le  reconnurent  pour  leur  roi. 
Quelques-uns  s'y  opposèrent.  Enfin  Ei- 
fride  sa  belle-mère ,  qui  voulait  faire  ré- 
gner son  fils  Ethelred ,  le  fit  assassiner  en 
978.  Il  était  âgé  de  15  ans.  L'église  ro- 
maine l'honore  comme  martyr,  et  en  cé- 
lèbre la  mémoire  le  jour  de  sa  mort,  le  18 
mars. 

EDOUARD  (.Saint),  dit  le  Confesseur 
ou  le  Débonnaire,  fils  d'Ethelred  II,  fut 
rappelé  en  Angleterre  après  la  mort  de 
son  frère  Elfred ,  successeur  de  Canut  II, 
mais  assassiné  à  son  entrée  dans  le  royau- 
me. Il  était  alors  en  Normandie  ,  où  les 
incursions  des  Danois  l'avaient  obligé  de 
se  retirer.  Il  fut  couronné  l'an  1012.  Le 
comte  Godwin,  qui  était  allé  le  chercher 
en  Normandie,  lui  donna  sa  fille  en  ma- 


ÊDO  i3 

riage,  et  gouverna  sous  son  nom.  Ce  gé- 
néral emporta  d'assez  grands  avantages 
sur  les  ennemis  de  l'état.  Le  roi  laissa  avi- 
lir le  sceptre  par  sa  faiblesse  ;  il  parut 
d'abord  n'avoir  apporté  sur  le  trône  que 
la  piété  et  une  douceur  qui  lui  faisait  dire 
qu'il  eût  mieux  aimé  passer  sesjoursdans 
une  condition  obscure  et  privée,  que  d'a- 
cheter une  couronne  par  l'effusion  du 
sang  humain;  mais  dès  qu'il  fut  instruit 
des  vexations  et  des  cruautés  de  Godwin, 
il  confisqua  les  biens  de  ce  ministre  in- 
digne de  sa  confiance,  le  déclara  ennemi 
de  l'état  et  gouverna  par  lui-même.  Aucun 
roi  ne  termina  plus  heureusement  les 
guerres  qu'il  eut  à  soutenir;  dans  les 
temps  de  paix  ,  il  s'appliqua  à  rendre  son 
peuple  heureux.  Il  fit  un  recueil  des  plus 
belles  lois  portées  par  ses  prédécesseurs, 
et  ordonna  qu'elles  fussent  observées  par 
tous  ses  sujets  sans  exception  :  ce  qui  leur 
fit  donner  le  nom  de  lois  communes-,  elles 
furent  constamment  respectées  par  les  An- 
glais, même  dans  les  plus  grandes  révolu- 
«  tions.  On  vit  alors,  dit  un  auteur,  ce  que 
»  peut  un  roi  qui  est  véritablement  le 
»  père  de  ses  sujets.  Tous  ceux  qui  appro- 
»  chaient  de  sa  personne  essayaient  de 
»  régler  leur  conduite  sur  la  sienne.  On 
»  ne  connaissait  à  sa  cour,  ni  l'ambition, 
»  ni  l'amour  des  richesses,  ni  aucune  de 
»  ces  passions  qui  malheureusement  sont 
■a  si  communes  parmi  les  courtisans ,  et 
»  qui  préparent  peu  à  peu  la  ruine  des 
»  états.  Edouard  paraissait  uniquement 
»  occupé  du  soin  de  rendre  ses  peuples 
»  heureux  ;  il  dinlinua  le  fardeau  des  im- 
»  pots,  et  chercha  tous  les  moyens  de  ne 
»  laisser  personne  dans  la  souffrance. 
»  Comme  il  n'avait  point  de  passions  à 
»  satisfaire ,  tous  ses  revenus  étaient  em- 
u  ployés  à  récompenser  ceux  qui  le  ser- 
»  valent  avec  fidélité,  à  soulager  les  pau- 
»  vres ,  à  doter  les  églises  et  les  monas- 
»  tères.  Il  fit  un  grand  nombre  de  fonda- 
»  tions,  dont  le  but  était  de  faire  chanter 
»  à  perpétuité  les  louanges  de  Dieu.  Mais 
»  les  divers  établissemens  qu'il  fit ,  ne 
»  furent  jamais  à  charge  au  peuple.  Les 
»  revenus  de  son  domaine  lui  suffisaient 
»  pour  toutes  les  bonnes  œuvres  qu'il  en- 
»  treprenait.  On  ne  connaissait  point  alor» 


k 


ï4  EDO 

»  les  taxes,  ouf  on  n'y  avait  recours  qu'en 
>)  temps  de  guerre,  et  dans  des  nécessités 
»  très  pressantes.»  Les  grands  du  royaume 
s'imaginant  qu'il  avait  épuisé  ses  finan- 
ces par  ses  aumônes,  levèrent  une  somme 
considérable  sur  leurs  vasseaux,  sans 
l'en  prévenir,  et  la  lui  apportèrent  comme 
un  don  que  lui  faisaient  ses  peuples  pour 
l'entretien  des  troupes,  et  pour  les  autres 
frais  occasionés  par  les  dépenses  publi- 
ques. Edouard  ayant  appris  ce  qui  s'é- 
tait passé ,  remercia  ses  sujets  de  leur 
bonne  volonté,  et  voulut  que  l'on  rendît 
l'argent  à  tous  ceux  qui  avaient  contribué 
à  former  la  somme.  Il  laissa  par  testa- 
ment sa  couronne  à  Guillaume  le  Conqué- 
rant, quoiqu'il  ne  fût  pas  son  plus  proche 
parent  :  le  prince  Edgard,  qui  devait  na- 
turellement lui  succéder ,  avait  pris  la 
fuite  et  s'était  sauvé  en  Ecosse ,  par  la 
crainte  de  ce  terrible  concurrent.  Edouard 
mourut  le  6  janvier  1066,  après  un  règne 
de  23  ans.  Il  fut  canonisé  par  le  pape 
Alexandre  III. 

EDOUARD  I  de  ce  nom ,  de  la  dy- 
nastie normande  ou  des  Plantagenet , 
(qu'on  devrait  nommer  Edouakd  IV  parce 
qu'il  y  avait  déjà  eu  trois  Edouard  dans  la 
race  saxonne],  roi  d'Angleterre,  naquit  à 
Winchester  eu  1240,  du  roi  Henri  III  et 
d'Eléonore  de  Provence.  Il  se  croisa  avec 
le  roi  saint  Louis  contre  les  infidèles.  Il 
partageait  les  travaux  ingrats  de  cette  ex- 
pédition malheureuse,  lorsque  la  mort  du 
roi  son  père  le  rappela  en  Europe  l'an 
1272.  Au  relourde  l'Asie,  il  débarqua  en 
Sicile,  et  vint  en  France ,  oîi  il  fit  hom- 
mage au  roi  Philippe  III  des  terres  que 
les  Anglais  possédaient  dans  la  Guicnne. 
L'Angleterre  changea  de  face  sous  •  ce 
prince.  Ilsutcontenir  l'humeur  remuante 
des  Anglais ,  et  animer  leur  industrie.  Il 
fit  fleurir  leur  commerce,  autant  qu'on 
le  pouvait  alors.  Il  s'empara  du  pays  de 
Galles  sur  Léolin,  après  l'avoir  tué  les  ar- 
mes à  la  main  en  128.3.  Il  fit  un  traité  , 
l'an  1286,  avec  le  roi  Philippe  IV,  dit  le 
Bel,  successeur  de  Philippe  III,  par  lequel 
il  régla  les  ditïérends  qu'ils  avaient  pour 
la  Saintonge ,  le  Limousin  ,  le  Qucrci  et 
lePérigord.  L'année  suivante  il  se  rendit 
à  Amiens,  où  il  fit  au  même  prince  hom- 


EDO 

mage  de  toutes  les  terres  qu'il  possédait 
en  France.  La  mort  d'Alexandre  III ,  roi 
d'Ecosse  ,  arrivée  en  1 286  ,  ayant  laissé 
sa  couronne  en  proie  à  l'ambition  de 
douze  compétiteurs,  Edouard  eut  la  gloire 
d'être  choisi  pour  arbitre  entre  les  pré- 
tendans.  Il  exigea  d'abord  l'hommage  de 
cette  couronne;  ensuite  il  nomma  pour 
roi  Jean  Bailleul  qu'il  fil  son  vassal.  Une 
querelle  peu  considérable  entre  deux  ma- 
riniers, l'un  français,  l'autre  anglais, 
alluma  la  guerre  en  1 293,  entre  les  deux 
nations.  Edouard  entra  en  France  avec 
deux  armées,  l'une  destinée  au  siège  de 
La  Rochelle,  et  l'autre  contre  la  Norman- 
die. Cette  guerre  fut  terminée  par  une 
double  alliance  en  1298,  entre  Edouard  et 
Marguerite  de  France ,  et  entre  son  fils 
Edouard  et  Isabelle  ,  l'une  sœur  et  l'au- 
tre fille  dé  Philippe  le  Bel.  Le  souverain 
anglais  tourna  ensuite  ses  armes  contre 
l'Ecosse.  Bervick  fut  la  première  place 
qu'il  assiégea.  Il  la  prit  par  ruse.  Il  fei- 
gnit de  lever  le  siège,  et  fit  répandre  par 
ses  émissaires  qu'il  s'y  était  déterminé  par 
la  crainte  des  secours  qu'attendaient  les 
assiégés.  Quand  il  se  fut  assez  éloigné 
pour  n'être  pasaperçu,-il  arbora  le  drapeau 
d'Ecosse,  et  s'avança  vers  la  place.  La  gar- 
nison ,  séduite  par  ce  stratagème ,  s'em- 
pressa d'aller  au  devant  de  ceux  qu'elle 
croyait  ses  libérateurs.  Elle  était  à  peine 
sortie,  qu'elle  fut  coupée  par  les  Anglais, 
qui  entrèrent  précipitamment  dans  la 
ville.  Cesuccèsen  amena  d'autres.  Le  roi 
d'Ecosse  fut  fait  prisonnier, confiné  dans 
la  tour  de  Londres  et  forcé  à  renoncer , 
en  faveur  du  vainqueur  ,  au  droit  qu'il 
avait  sur  la  couronne.  Ce  fut  alors  que 
commença  cette  antipathie  entre  les  An- 
glais et  les  Ecossais,  qui  dure  encore  au- 
jourd'hui ,  malgré  la  réunion  des  deux 
peuples.  Edouard  mourut  après  avoir 
perdu  la  conquête  d'Ecosse ,  en  1307, 
après  trente-quatre  ans  de  règne ,  et  68 
ans  de  vie.  Les  historiens  de  diverses  na- 
tions ont  parlé  .si  dilVércmment  de  ce 
prince,  dit  l'auteur  de  V  Histoire  du  Par- 
lement d'Angleterre,  qu'il  est  difficile 
de  s'en  former  une  juste  idée.  Les  satires 
sont  venues  des  Ecossais,  et  les  élogesdes 
Anglais.  Parmi  ces  historiens,  Vclly  l'a 


EDO 

trop  noirci ;le Père  d'Orléans  Ta  trop  flatté. 
On  ue  peut  lui  refuser  beaucoup  de  cou- 
rage ,  des  mœurs  pures ,  une  équité 
exacte  ;  mais  ces  qualités  furent  ternies 
par  la  cruauté  et  par  la  soif  de  la  ven- 
geance et  de  l'argent.  Il  s'empara  de  tous 
les  prieurés,  n'assignant  à  chaque  reli- 
gieux que  dix-huit  deniers  par  semaine  , 
et  affectant  le  surplus  à  ses  finances.  Il 
fit  ensuite  enlever  tout  l'argent  des 
monastères  d'Angleterre  ,  et  saisir  leurs 
fonds  et  ceux  des  évèchés.  De  plus  il  mit 
tous  les  ecclésiastiques  hors  de  sa  pro- 
tection ,  tellement  qu'on  pouvait  les  in- 
sulter impunément ,  n'étant  plus  sous  la 
sauve-garde  des  lois.  C'est  à  cette  con- 
duite que  Henri  Spelman ,  protestant 
anglais,  dans  son  traité  de  la  Fatalité  des 
sacrilt'ges,  attribue  la  perle  de  l'Ecosse 
et  les  malheurs  arrivés  à  son  fîls.  Ce  fut 
sous  ce  prince  que  le  parlement  d'Angle- 
terre prit  une  nouvelle  forme ,  telle  à 
peu  près  que  celle  d'aujourd'hui.  Le  titre 
de  pair  et  de  baron  ne  fut  affecté  qu'à 
ceux  qui  entraient  dans  la  chambre  haute. 
Il  ordonna  à  tous  les  shérifs  d'Angleterre, 
que  chaque  comté  ou  province  députât 
au  parlement  2  chevaliers,  chaque  cité  2 
citoyens,  chaque  bourg  2  bourgeois.  La 
chambre  des  communes  commença  par- 
là  àentrer  dans  ce  qui  regardait  les  subsi- 
des. Edouard  lui  donna  du  poids  ,  pour 
pouvoir  balancer  la  puissance  des  barons. 
Ce  prince,  assez  ferme  pour  ne  les  point 
craindre,  et  assez  habile  pour  les  ména- 
ger, forma  cette  espèce  de  gouverne- 
ment ,  qui  rassemble  les  avantages  de  la 
royauté ,  de  l'aristocratie  et  de  la  démo- 
cratie ;  mais  qui  a  aussi  les  divers  incon- 
véniens  de  tous  les  trois,  et  qui  ne  peut 
subsister  que  sous  un  roi  sage. 

EDOUARD  II ,  fils  et  successeur  d'E> 
douard  I,  couronné  à  l'âge  de  23  ans,  en 
1307,  abandonna  les  projets  de  son  père 
sur  rEcosse,pourselivrerà  ses  maîtresses 
et  à  ses  flatteurs.  Le  principal  d'entre  eux 
était  un  nommé  Gaveston,  Pierce  gentil- 
homme gascon, qui, à  la  fierté  de  sa  nation, 
joignait  les  caprices  d'un  favori  et  la  dureté 
d'un  ministre.  Il  maltraita  si  cruellement 
les  grands  du  royaume,  qu'ils  prirent  les 
armes  contre  leur  souverain ,  et  ne  les 


EDO  i5 

quittèrent  qu'après  avoir  fait  couper  la 
tète  à  son  indigne  favori.  Les  Ecossais , 
profitant  de  ce  trouble,  secouèrent  le  jougj 
des  Anglais.  Edouard,  malheureux  au  de- 
hors, ne  fut  pas  plus  heureux  dans  sa  fa- 
mille. Isabelle,  sa  femme,  irritée  contre 
lui,  se  retira  à  la  cour  du  roi  de  France 
Charles  le  Bel ,  son  frère.  Ce  prince  en- 
couragea sa  sœur  à  lever  l'étendard  de 
la  révolte  contre  son  mari.  La  reine ,  se- 
courue par  le  comte  de  Hainaut,  repassa 
la  mer  avec  environ  3,000  hommes  en 
1326.  Edouard,  livré  à  l'incertitude  dans 
laquelle  il  avait  flotté  toute  sa  vie ,  se  ré- 
fugia avec  son  favori  Spencer  dans  le  pays 
de  Galles,  tandis  que  le  vieux  Spencer 
s'enfermait  dans  Bristol  pour  couvrir  sa 
fuite.  Cette  ville  ne  tint  point  contre  les 
efforts  des  illustres  aventuriers  qui  sui- 
vaient la  reine.  Les  deux  Spencer  mouru- 
rent par  la  main  du  bourreau.  Edouard, 
fut  condamné  à  une  prison  perpétuelle, 
et  son  fils  mis  en  sa  place.  Esclave  sur  le 
trône,  pusillanime  dans  les  fers,  il  finit 
comme  il  avait  commencé,  enlàche.  Après 
quelque  temps  de  prison,  on  lui  enfonça 
un  fer  chaud  dans  le  fondement  par  ua 
tuyau  de  corne  ,  de  peur  que  la  brûlure 
ne  parut.  Ce  fut  par  ce  cruel  supplice 
qu'il  perdit  la  vie  l'an  1327,  après  un  rè- 
gne de  20  ans. 

EDOUARD  III,  fils  du  précédent,  vil 
le  jour  en  1312  à  Windsor.  Mis  sur  le 
trône  à  la  place  de  son  père,  par  les  in- 
trigues de  sa  mère,  en  1327,  il  ne  lui  fut 
pas  pour  cela  plus  favorable.  Il  fit  enle- 
ver son  favori  Mortimer  jusque  dans  le  lit 
de  cette  princesse,  et  le  fit  périr  igno- 
minieusement. Isabelle  fut  elle-même 
renfermée  dans  le  château  de  Rising,  et 
y  mourut  après  28  ans  de  prison.  Edouard» 
maître  ,  et  bientôt  maître  absolu ,  com- 
mença par  conquérir  le  royaume  d'Ecosse 
disputé  par  Jean  de  Bailleul  et  David 
de  Bruce.  Une  nouvelle  scène,  et  qui  oc- 
cupa davantage  l'Europe  ,  s'ouvrit  alors. 
Edouard  III  voulut  retirer  les  places  delà 
Guienne ,  dont  le  roi  Philippe  de  Valois 
était  en  possession.  Les  Flamands ,  l'em- 
pereur et  plusieurs  autres  princes,  entrè- 
rent dans  son  parti,  les  premiers  exigè- 
rent seulement  qu'Edouard  prît  le  titre 


\ 


i6  EDO 

de  roi  de  France ,  ea  coiiscqueuce  de  ses 
prétentions  sur  cette  couronne ,  parce 
qu'alors,  suivant  le  sens  littéral  des  traités 
qu'ils  avaient  faits  avec  les  Français  ,  ils 
ne  faisaient  que  suivre  le  roi  de  France. 
Edouard,  suivant  Rapin  de  Thoiras  ,  ap- 
prouva ce  moyen  de  les  faire  entrer  dans 
la  ligue.  Voilà  l'époque  de  la  jonction  des 
fleurs  de  lys  et  des  léopards.  Edouard  se 
qualifia  dans  un  manifeste  roi  de  France, 
d'Angleterre  et  d'Irlande.  Il  commença 
la  guerre  par  le  siège  de  Cambray,  qu'il 
fut  obligé  de  lever.  La  fortune  lui  fut  en- 
suite plus  favorable.  Il  remporta  une  vic- 
toire navale  ,  connue  sous  le  nom  de  ba- 
taille de  l'Ecluse.  Cet  avantage  fut  suivi 
de  la  bataille  de  Créci  en  1 346.  Les  Fran- 
çais y  perdirent  30,000  hommes  de  pied 
1,200  cavaliers  et  80  bannières.  On  attri- 
bua en  partie  le  succès  de  cette  journée 
à  6  pièces  de  canon  dont  les  Anglais  se 
servaient  pour  la  première  fois ,  et  dont 
l'usage  était  inconnu  en  France.  Le  len- 
demain de  cette  victoire,  les  troupes  des 
communes  de  France  furent  encore  dé- 
faites. Edouard,  après  deux  victoires  rem- 
portées en  deux  jours  ,  prit  Calais ,  qui 
resta  aux  Anglais  210  années.  La  mort  de 
Philippe  de  Valois,  en  13à0,  ralluma  la 
guerre.  Edouard  la  continua  contre  le  roi 
Jean  son  ûls ,  et  t^agna  sur  lui  en  1 367 
la  bataille  de  Poitiers.  Jean  fut  fait  pri- 
sonnier dans  cette  journée  ,  et  mené  en 
Angleterre ,  d'où  il  ne  revint  que  quatre 
ans  après.  Edouard,  prince  de  Galles,  fils 
du  roi  d'Angleterre,  qui  commandait  les 
troupes  dans  cette  bataille,  donna  des 
marques  d'un  courage  invincible.  A  sou 
entrée  dans  Londres,  il  parut  sur  une  pe- 
tite haquenée  noire,  marchant  à  côté  du 
roi  Jean ,  qui  montait  un  beau  cheval 
blanc  superbement  harnaché.  Dans  un 
siècle  baïbare ,  cette  modestie  du  vain- 
queur est  bien  remarquable.  Après  la 
mort  de  Jean,  en  1364,  Edouard  fut 
moins  heureux.  Charles  V  confisqua  les 
terres  que  les  Anglais  possédaient  en 
France ,  après  s'être  préparé  à  soutenir 
l'arrôt  de  confiscation  par  les  armes.  Le 
roi  de  France  remporta  de  grands  avan- 
tages sur  eux  ;  et  le  monarque  Anglais 
mourut  en  1377,  avec  la  douleur  devoir 


EDO 

les  victoires  de  sa  jeunesse  obscurcies 
par  les  pertes  de  ses  vieux  jours.  Sa  vieil- 
lesse fut  encore  ternie  par  le  crédit  de 
ses  favoris,  et  surtout  par  son  amour 
pour  une  certaine  Alix ,  qui  l'empècba 
même  de  recevoir  les  sacremens  de  l'é- 
glise dans  sa  dernière  maladie.  Son  règne 
aurait  eu  un  éclat  infini,  sans  ces  taches. 
L'Angleterre  n'avait  point  eu  encore  de 
souverain  qui  eût  tenu  dans  le  même 
temps  deux  rois  prisonniers ,  Jean  ,  roi 
de  France ,  et  David ,  roi  d'Ecosse.  Les 
entreprises  de  ce  monarque  coûtèrent 
beaucoup  à  l'Angleterre  ;  mais  elle  s'en 
dédommagea  par  le  commerce  :  elle  ven- 
dit ses  laines ,  Bruges  les  mit  en  œuvre. 
Ce  fut  Edouard  qui  institua  l'ordre  de  la 
Jarretière,  vers  l'an  1349.  L'opinion 
vulgaire  est  qu'il  fit  celle  institution  à 
l'occasion  de  la  jarretière  que  la  comtesse 
de  Salisbury,  sa  maîtresse,  laissa  tomber 
dans  un  bal ,  et  que  ce  prince  releva.  Les 
courtisans  s'étant  mis  à  rire  ,  et  la  com- 
tesse ayant  rougi ,  le  roi  dit  :  Honni  soit 
qui  mal  y  pense  ,  pour  montrer  qu'il  n'a- 
vait point  eu  de  mauvais  dessein,  et  jura 
que  tel  qui  s'était  moqué  de  cette  jarre- 
tière, s'estimerait  heureux  d'en  porter 
une  semblable.  Cette  origine  de  l'ordre 
de  la  Jarretière  n'est  rien  moins  que  sûre. 
Larrey  dit  que  l'on  tient  pour  une  fable 
que  la  divise ,  Honni  soit  qui  mal  y 
pense,  ait  été  prise  des  amours  de  ce 
prince  avec  la  comtesse  de  Salisbury. 
«  On  prétend  ,  ajoule-t-il ,  qu'elle  ne  fut 
»  employée  par  le  fondateur,  que  pour 
»  marquer  la  bonne  intention  qu'il  avait 
V  dans  l'établissement  d'un  ordre  qui 
»  obligeait  ceux  qui  le  recevaient,  à  se 
t>  tenir  inséparablement  unis ,  et  qui  de- 
»  mandait  d'eux  un  attachement  inviolable 
j)  à  la  vertu.  «  Le  Père  Papebrock,  dans  une 
dissertation  sur  l'ordre  de  la  Jarretière , 
dit  que  cet  ordre  n'est  pas  plus  connu 
sous  le  nom  de  la  Jarretière  que  sous 
celui  de  Saint-George  ;  que  quoiqu'il 
n'ait  été  institué  que  par  Edouard  III,  il 
avait  pourtant  été  projeté  avant  lui  par 
Richard  I ,  dans  son  expédition  de  la 
Terre-Sainte,  si  l'on  en  croit  un  auteur 
qui  écrivait  sous  Henri  VIII  ;  qu'au  reste 
il  ne  sait  point  sur  quoi  il  se  fonde  ;  que 


EDO 

quelques  auteurs  placent  l't'poque  de 
cette  institution  par  Edouard  111 ,  à  l'an 
1350;  mais  qu'il  aime  mieux  suivre  Frois- 
sard,  qui  la  met  à  l'an  1344,  la  18^  du 
replie  d'Edouard  ;  que  cette  époque  con- 
vient mieux  à  l'histoire  de  ce  prince  qui 
parle  d'une  grande  assemblée  de  cheva- 
liers ,  qu'il  fit  cette  année  là. 

EDOUARD  IV ,  fils  de  Richard ,  duc 
d'Yorck,  enleva  en  14C1  la  couronne 
d'Angleterre  à  Henri  VI.  Il  prétendait 
qu'elle  lui  était  due ,  parce  que  les  filles 
en  Angleterre  ont  droit  de  succéder  au 
trône ,  et  qu'il  descendait  de  Lionel  de 
Clarence  ,  second  fils  d'Edouard  III ,  par 
sa  mère  Anne  de  Mortimer,  femme  de  Ri- 
chard; au  lieu  qu'Henri  descendait  du 
troisième  fils  d'Edouard  III,  qui  était  Jean 
de  Lancastre,  son  bisaïeul  paternel.  Deux 
victoires  remportées  sur  Henri ,  firent 
plus  pour  Edouard  que  tous  ses  droits.  Il 
se  fil  couronner  à  Westminster,  le  20  juin 
de  la  même  année  14G1.  Ce  fut  la  pre- 
mière étincelle  des  guerres  civiles  entre 
les  maisons  d'Yorck  et  de  Lancastre,  dont 
la  première  portait  la  rose  lilanche,  et  la 
dernière  la  rouge.  Ces  deux  partis  firent 
de  toute  l'Angleterre  un  théâtre  de  car- 
nage et  de  cruautés  ;  les  échafauds  étaient 
dressés  sur  les  champs  de  bataille,  et  cha- 
que victoire  fournissait  aux  bourreaux 
quelques  victimes  à  immoler  à  la  ven- 
geance. Cependant  Edouard  IV  s'affermit 
sur  le  trône  par  les  soins  du  célèbre  comte 
de  Warwiék  ;  mais  dès  qu'il  fut  tranquille, 
11  fut  ingrat.  Il  écarta  ce  général  de  ses  con- 
seils ,  et  s'en  fit  un  ennemi  irréconci- 
liable. Dans  le  temps  que  Warwick  négo- 
ciait en  France  le  mariage  de  ce  prince 
avec  Bonne  de  Savoie,  sœur  de  la  femme 
de  Louis  XI,  Edouard  voit  Elisabeth  Wo- 
devill,  fille  du  baron  de  Rivers,  en  devient 
amoureux,  et  n'en  peut  jamais  obtenir 
que  ces  paroles  accablantes  :  «  Je  n'ai  pas 
»  assez  de  naissance  pour  espérer  d'être 
M  reine,  et  j'ai  trop  d'honneur  pour  m'a- 
»  baisser  à  être  maîtresse.  »  Xe  pouvant 
se  guérir  de  sa  passion ,  il  couronne  sa 
maîtresse  ,  sans  en  faire  part  à  Warwick. 
Le  ministre  outragé  cherche  à  se  venger. 
Il  arme  l'Angleterre  ,  il  séduit  le  duc  de 
Clarence,  frère  du  roi  :  enfin  il  lui  ôta  le 


k 


EDO  17 

trône  sur  lequel  il  l'avait  fait  monter. 
Edouard  fait  prisonnier  en  1410,  se  sauva 
de  prison,  et  l'année  d'après,  1471,  se- 
condé par  le  duc  de  Bourgogne,  il  gagna 
deux  batailles.  Le  comte  de  Warwick  fut 
tué  dans  la  première.  Edouard,  fils  de  ce 
Henri  qui  lui  disputait  encore  le  trône, 
ayant  été  prii;  dans  la  seconde,  perdit  la 
vie  ;  ensuite  Henri  lui-même  fut  égorgé 
en  prison.  La  faction  d'Edouard  lui  ouvrit 
les  portes  de  Londres.  Ce  prince,  libre  de 
toute  inquiétude,  se  livra  entièrement 
aux  plaisirs,  et  ses  plaisirs  ne  furent  que 
légèrement  interrompus  par  la  guerre 
contre  Louis  XI ,  qui  le  renvoya  en  An- 
gleterre à  force  d'argent ,  après  avoir  si- 
gné une  trêve  de  9  ans.  Ses  dernières  ar- 
nées  furent  marquées  par  la  mort  de  son 
frère  le  duc  de  Clarence,  sur  lequel  il 
avait  conçu  des  soupçons.  Il  lui  permit 
de  choisir  le  genre  de  mort  qui  lui  paraî- 
trait le  plus  doux;  et  on  le  plongea  dans 
un  tonneau  de  malvoisie,  oîi  il  finit  ses 
jours  comme  il  avait  désiré.  Edouard  le 
suivit  de  près;  il  mourut  en  1483,  à  41 
ans,  après  22  ans  de  règne.  Ce  monarque 
avait  commencé  son  règne  en  héros  ;  il  le 
fiit  en  débauché.  Son  affabilité  lui  gagna 
tous  les  cœurs  ;  mais  la  volupté  corrompit 
le  sien.  Il  aima  trop  le  sexe,  et  eu  fut  trop 
aimé.  Il  attaquait  toutes  les  femmes  par 
esprit  de  débauche  ,  et  s'attachait  pour- 
tant à  quelques-unes  par  des  passions 
suivies.  Ses  maîtresses  les  plus  connues 
furent  Jeanne  Shone ,  femme  d'un  bour- 
geois de  Londres;  Elisabeth  Lucy,  à  la- 
quelle on  prétend  qu'il  avait  donné  sa  foi 
avant  son  mariage  ,  et  Eléonore  Talbot , 
veuve  de  lord  Butler. 

EDOUARD  Y,  roi  d'Angleterre,  fils 
d'Edouard  IV,  ne  survécut  à  son  père  que 
deux  mois.  Il  n'avait  que  onze  ans  lors-  . 
qu'il  monta  sur  le  trône.  Son  oncle  Ri- 
chard, duc  de  Glocester,  tuteur  d'Edouard 
et  de  Richard  son  frère,  jaloux  de  la  cou- 
ronne du  premier  et  des  droits  du  second, 
résolut  de  les  faire  mourir  tous  deux  pour 
régner.  Il  les  fit  enfermer  dans  la  tour  de 
Londres ,  et  leur  fit  donner  la  mort  l'an 
1483.  Après  s'être  défait  de  ses  neveux, 
il  accusa  leur  mère  de  magie,  et  usurpa 
la  couronne.  Sous  le  règne  d'Elisabeth , 

2      ^ 


i8 


EDO 


la  tour  de  Londres  se  trouvant  extrême- 
ment pleine,  on  fit  ouvrir  la  porte  d'une 
chambre  marée  depuis  long-temps.  On  y 
trouva  sur  un  lit  deux  petites  carcasses 
avec  deux  licols  au  cou  :  c'étaient  les 
squelettes  d'Edouard  V  et  de  Richard  son 
frère.  La  reine,  pour  ne  pas  renouveler 
la  mémoire  de  ce  forfait ,  fit  remurer  la 
porte  ;  mais  sous  Charles  II,  en  1678,  elle 
fut  rouverte,  et  les  squelettes  transportés 
à  Westminster,  sépulture  des  l'ois. 

EDOUARD  VI,  fils  de  Henri  VIII  et 
de  Jeanne  Seymour,  monta  sur  le  trône 
d'Angleterre  à  l'âge  de  10  ans,  en  1547, 
et  ne  vécut  que  16  ans.  Le  rôle  qu'il  joua 
fut  court  et  sanglant.  Il  laissa  entrevoir 
du  goût  pour  la  vertu  et  l'humanité;  mais 
ses  ministres  corrompirent  cet  heureux 
naturel.  L'archevêque  de  Cantorbéry, 
Crammcr ,  lut  un  de  ceux  qui  y  contri- 
buèrent le  plus.  Ce  fut  par  ses  insinua- 
lions  que  la  messe  fut  abolie,  les  images 
brisées,  la  religion  romaine  proscrite,  et 
le  sang  des  catholiques  largement  répan- 
du. «  On  pilla  et  saccagea  les  églises,  dit 
»  le  protestant  Heylin,  sans  que  le  roi  en 
)>  profitât  en  aucune  manière.  Car  quoi- 
)<  qu'il  en  eût  tiré  des  richesses  inexpri- 
»  mablcs,  ainsi  que  de  la  vente  des  terres, 
»  non-seulement  il  fut  accablé  de  dettes, 
M  mais  encore  les  revenus  de  la  couronne 
»  diminuèrent  considérablement  sous  son 
»  règne.  »  On  prit  quelque  chose  de  cha- 
cune des  différentes  sectes  de  Zuingle,  de 
Luther  et  de  Calvin ,  et  l'on  en  composa 
un  symbole  qui  forma  la  religion  angli- 
cane :  composition  monstrueuse,  édifice 
du  caprice  et  du  scepticisme,  digne  fruit 
et  effet  tout  naturel  de  la  séparation  d'a- 
vec la  véritable  Eglise.  Le  règne  d'E- 
douard fut  flétri  par  une  autre  injustice, 
que  le  goût  de  la  réforme  et  les  insinua- 
tions de  ses  ministres  lui  arrachèrent  :  il 
écarta  du  trône  JMarie  et  Elisabeth  ses 
deux  sœurs ,  et  y  appela  Jeanne  Gray  sa 
cousine.  Il  mourut  en  1558. 

EDOUARD,  prince  de  Galles,  plus 
connu  sous  le  nom  de  Prince  noir,  d'a- 
près la  couleur  de  son  armure ,  fils  d'E- 
douard m,  roi  d'Angleterre,  remporta  la 
victoire  de  Poitiers  sur  les  Français  {Voy. 
EoouABD  III) ,  et  mourut  avant  son  père 


EDO 

en  1376.  «  Le  prince  de  Galles,  dit  Hume, 
»  a  laissé  une  mémoire  immortalisée  par 
»  de  grands  exploits,  par  de  grandes  ver- 
»  tus,  par  une  vie  sans  tache.  Sa  valeur 
»  et  ses  talens  militaires  furent  les  moin- 
»  dres  de  ses  mérites  :  sa  politesse,  sa 
»  modération,  sa  générosité ,  son  hu- 
»  manité  lui  gagnèrent  tous  les  cœurs. 
»  Il  était  fait  pour  illustrer  non-seulement 
«  le  siècle  grossier  dans  lequel  il  vivait, 
M  et  dont  les  vices  ne  l'atteignirent  point, 
»  mais  encore  le  siècle  le  plus  brillant 
«  de  l'antiquité  et  des  temps  modernes.  « 
Une  grande  faute  cependant  fut  la  cause 
de  sa  perte.  Ayant  entrepris  de  rétablir 
sur  le  trône  Pierre  le  Cruel,  indigne  d'ê- 
tre associé  à  ses  destinées ,  ce  monarque 
aussi  perfide  que  barbare,  refusa  de  payer 
aux  troupes  anglaises  les  sommes  conve- 
nues et  de  leur  fournir  des  vivres.  Une 
maladie  contagieuse ,  suite  de  la  disette, 
se  mit  dans  l'armée  du  prince  de  Galles, 
qui  régnait  alors  sur  l'Aquitaine  ;  lui- 
même  fut  atteint  d'une  maladie  dont  il 
ne  put  se  rétablir.  Il  fut  forcé,  pour  ac- 
quitter les  dettes  qu'il  avait  contractées 
pour  fournir  aux  préparatifs  de  la  cam- 
pagne, d'accabler  d'impôts  ses  sujets  qui 
se  révoltèrent.  Cet  incident  ranima  l'an- 
tipathie naturelle  des  habitans  contre  les 
Anglais,  que  toutes  les  belles  qualités  du 
prince  n'avaient  fait  qu'assoupir. 

*  EDOUARD,  prince  de  Galles,  fils 
unique  de  Henri  VI  et  de  Marguerite  d'An- 
jou, né  en  1 4  53,  fut  forcé  de  quitter  l'An- 
gleterre avec  sa  mère  en  1463,  à  l'époque 
où  le  parti  d'York  eut  placé  la  couronne 
sur  la  tête  d'Edouard  IV.  Il  y  revint  en 
1 47 1  après  avoir  épousé  la  fille  du  comte 
deWarwick,  qui  mécontent  d'Edouard  IV, 
avait  abandonné  sa  cause.  Le  parti  de 
Lancastre  ayant  été  ruiné  à  la  bataille  de 
Tewksbury,  et  le  jeune  prince  étant 
tombé  avec  sa  mère  dans  les  mains  des 
vainqueur,  il  fut  massacré  presque  sous 
les  yeux  du  roi  qui ,  dit-on ,  avait  donné 
le  signal  de  sa  mort.  Cette  catastrophe 
est  le  sujet  de  la  3^  partie  de  la  tragédie 
de  Henri  F^Ide  Shake.speare. 

EDOUARD  PLAMAGENET,  le  der- 
nier de  la  race  qui  porte  ce  nom,  comte 
de  Warwlck ,  eut  pour  père  George,  duc 


EDO 

de  Clarence,  frère  d'Edouard  rv  et  de  Ri- 
chard III,  rois  d'Angleterre.  Henri  VII 
étant  monté  sur  le  trône  et  le  regardant 
comme  un  homme  dangereux  qui  pouvait 
lui  disputer  la  couronne,  le  fit  enfermer 
très  étroitement  à  la  tour  de  Londres.  Le 
fameux  Perkin  Waërbeck  qui  s'était  fait 
passer  pour  Richard,  le  dernier  des  fils  de 
Richard  III,  était  alors  dans  la  même  pri- 
son. Il  concerta  avec  Warwick  en  1490 
les  moyens  d'en  sortir.  Leur  complot  fut 
découvert ,  et  on  crut  que  le  roi  le  leur 
avait  fait  insinuer,  pour  avoir  un  prétexte 
de  les  sacrifier  à  sa  sûreté.  Ce  qui  confir- 
ma ce  soupçon ,  fut  que  dans  le  même 
temps,  le  fils  d'un  corc^onnier,  séduit  par 
un  moine  augustin ,  se  donna  pour  le 
comte  de  Warwich.  Henri  VII  voulait 
faire  penser  par  cette  ruse  (sans  doute 
concertée  avec  ce  religieux,  puisqu'il  eut 
sa  grâce),  que  le  comte  de  Warwick  don- 
nait occasion  à  de  nouveaux  troubles.  Ce 
fut  sous  ce  prétexte  qu'on  le  fit  décapiter 
en  1 499.  Il  était  le  seul  mâle  de  la  maison 
d'Yorck  :  voilà  son  véritable  crime.  Pen- 
dant sa  longue  détention,  uu  certain  Lam- 
bert Simuel,  différent  du  fils  du  cordon- 
nier, se  fit  aussi  passer  pour  comte  de 
Warwick  sous  le  nom  dJ Edouard  Plaît- 
tagcnet.  Il  fut  couronné  à  Dublin  par  une 
faction  en  1487;  mais  ayant  été  battu 
quelques  jours  après  et  fait  prisonnier , 
le  roi,  tranquille  sur  son  compte,  lui 
laissa  la  vie  par  pitié  ;  cependant,  pour  ne 
par  perdre  toute  sa  vengeance,  il  lui  don- 
na l'office  ridicule  de  marmiton  dans  sa 
cuisine.  * 

EDOUARD  (Charles),  petit-fils  de  Jac- 
ques II ,  roi  d'Angleterre ,  né  le  3 1  dé- 
cembre 1720,  en  succédant  aux  droits  de 
la  maison  de  Stuart ,  sur  le  trône  d'An- 
gleterre, se  distingua  par  ses  efforts  pour 
le  recouvrer.  Les  tentatives  qu'il  fit  en 
1745  le  rendront  à  jamais  mémorable 
dans  les  annales  de  la  Grande-Bretagne. 
II  aborde  en  Ecosse,  publie  un  manifeste 
dans  lequel  il  rappelle  ses  droits  au  trône 
d'Angleterre,  et  promet  un  gouverne- 
ment sage  et  modéré.  Un  morceau  de 
taffetas  lié  à  un  bâton,  est  le  drapeau 
sous  lequel  il  rassemble  10,000  monta- 
gnards écossais.  Avec  cette  petite  troupe 


EDO  19 

il  s'empare  d'Edimbourg,  bat  les  Anglais 
sous  les  murs  de  cette  ville  le  2  octobre, 
entre  en  Angleterre ,  prend  la  ville  de 
Carlisle,  et  pénètre  jusques  dans  le  centre 
dn  royaume.  Le  duc  de  Cumberland  mar- 
che contre  lui,  le  prétendant  se  retire,  et 
son  arrière-garde  est  défaite  à  Clifton.  La 
bataille  de  Falkirk,  qu'il  gagne  le  28  jan- 
vier 1740,  relève  ses  espérances;  mais 
celle  de  Culloden,  qu'il  perd  le  27  avril, 
le  ruine  absolument.  Vaincu,  poursuivi, 
fugitif  et  errant  de  forêt  en  forêt,  d'île  eu 
île,  obligé  quelquefois  de  se  cacher  dans 
des  antres,  toujours  prêt  à  tomber  entre 
les  mains  de  ses  ennemis,  il  se  voit  exposé 
aux  plus  cruels  revers  de  la  fortune  ;  il 
les  supporta  avec  une  égalité  d'âme  qui 
intéressa  toute  l'Europe  à  son  sort.  Il  s'é- 
chappa enfin  de  l'Ecosse  le  1 7  septembre 
17  4G,  et  aborda  en  France  sur  un  vaisseau 
de  Saint-Malo ,  après  avoir  traversé,  sans 
être  aperçu,  une  escadre  anglaise,  à  la 
faveur  d'un  brouillard  épais.  Si  dans  la 
suite,  son  âme,  aigrie  par  de  longs  mal- 
heurs, éprouvés  chez  des  amis  et  des  en- 
nemis, a  paru  ressentir  quelques  situa- 
tions violentes,  c'est  qu'abandonné  à  des 
compagnies  qu'il  ne  connaissait  point  as- 
sez, trop  long -temps  éloigné  des  exem- 
ples et  des  leçons  de  son  vertueux  père , 
il  lui  a  été  difficile  d'assortir  toujours  sa 
conduite  à  la  dignité  de  sa  naissance  et 
à  l'étr.t  de  ses  prétentions  royales.  Il 
mourut  à  Rome,  le  31  janvier  1788.  Il 
avait  épousé,  le  1 7  avril  17  72,  la  princesse 
Louise-Maximilienne  de  Stolberg-Gedern  ; 
ils  n'ont  point  eu  d'enfans  ;  de  sorte  que 
la  ligne  masculine  de  la  famille  royale  de 
Stuart,  est  réduite  au  seul  cardinal,  après 
avoir  donné  des  rois  à  l'Ecosse  pendant 
3  à  400  ans,  et  par  les  princesses  de  cette 
maison,  des  souverains  à  la  plus  grande 
partie  de  l'Europe.  Il  a  laissé  une  fille  née 
hors  de  l'état  de  mariage,  qu'il  a  pré- 
tendu légitimer  comme  roi  d'Angleterre; 
mais  cette  légitimation  n'a  point  été  re- 
connue. 

*  EDOUARD  1"  ,  roi  de  Portugal  , 
fils  de  Jean  I'"' ,  succéda  à  son  père  en 
1430.  Son  règne  fut  remarquable  par  le 
rétablissement  de  la  discipline,  qui  avait 
été  relâchée  sous  l'administration  précé- 


20  EDR 

dente.  Il  mit  de  l'ordre  dans  les  finances 
de  l'état,  convoqua  les  Cortès  ou  Etats- 
généraux  ,  fit  des  lois  |)our  rdprimer  le 
luxe,  encouragea  le  commerce,  protégea 
les  sciences  et  les  cultiva  lui-même..  11 
mourut  en  1438,  à  l'âge  de  37  ans;  il 
avait  chargé  don  Juan  de  Regras  de  rédi- 
gea un  Code  sur  l'administration  de  la 
justice  ;  il  travailla  lui-même  à  cet  ouvrage 
précieux  pour  cette  époque.  Il  a  aussi 
composé  un  Traité  sur  la  fidcUle'  que 
l'on  doit  apporter  dans  le  commerce  de 
l'amitié. 

*  EDRED ,  10*  roi  d'Angleterre ,  de  la 
dynastie  saxonne,  fils  d'Edouard  l'Ancien, 
monta  sur  le  trône  en  946  ,  après  la  mort 
de  son  frère  Edmond.  Il  se  fit  remarquer 
})ar  une  extrême  justice  et  gagna  l'affec- 
tion de  ses  sujets  par  sa  bonté  et  la  dou- 
ceur de  ses  mœurs.  Les  Danois  de  Nort- 
humberland  s'étant  révoltés,  il  les  sou- 
mit et  força  Malcolm  ,  roi  d'Ecosse,  à  lui 
faire  hommage  des  terres  qu'il  possédait 
en  Angleterre.  Il  laissa  ensuite  la  direc- 
tion des  affaires  à  saint  Dunstan  ,  depuis 
archevêque  de  Cantorbéry,  et  mourut  en 
955.  Il  eut  pour  successeur  Edmond  son 
jieveu. 

EDRIC ,  surnommé  Stre'on  (  c'est-à- 
dire  acquisiteur) ,  homme  d'une  nais- 
sance fort  obscure ,  sut  par  son  éloquence 
et  par  toutes  sortes  de  ruses  et  d'intrigues, 
s'insinuer  fort  avant  dans  les  bonnes 
grâces  d'Ethelred  II ,  roi  d'Angleterre. 
Ce  prince  le  fit  duc  de  Mercie ,  et  lui 
donna  sa  fille  Edgithe  en  mariage.  Par 
cette  alliance  il  mit  dans  sa  maison  un 
perfide ,  vendu  aux  Danois ,  qui  ne  laissa 
jamais  passer  aucune  occasion  de  trahir 
les  intérêts  du  roi  et  du  royaume.  Jîd- 
mond ,  son  beau-frère ,  découvrit  sa  per- 
fidie, et  se  sépara  de  lui.  Edricse  voyant 
démasqué,  quitta  le  parti  d'Ethelred, 
pour  prendre  celui  de  Canut.  Quelque 
temps  après  il  rentra  dans  le  parti  d'Ed- 
mond ,  qui  avait  succédé  à  Ethelred  et 
qui  eut  la  générosité  de  lui  pardonner. 
Ce  fourbe  lui  fit  voir  bientôt  à  la  bataille 
d'Asseldum,  ce  qu'il  avait  dans  l'âme. 
Pendant  que  les  deux  armées  étaient  aux 
mains  ,  il  quitta  tout  à  coup  son  poste , 
et  alla  se  joindre  aux  Danois ,  qui  rem- 


EDW 

portèrent  la  victoire.  La  paix  s'étant  faite 
entre  Edmond  et  Canut,  Ëdric  craignit 
que  l'union  des  deux  rois  ne  lui  fût  fa- 
talc.  Il  mit  le  comble  à  toutes  ses  perfi- 
dies en  faisant  assassiner  Edmond  par 
deux  de  ses  propres  domestiques,  en 
1017.  Canut  conserva  à  Edric  le  titre  de 
duc  de  Mercie  ;  mais  ce  ne  fut  pas  pour 
long-temps.  Ce  monstre  eut  un  jour  l'in- 
solence de  lui  reprocher  publiquement 
«  qu'il  n'avait  pas  récompensé  ses  ser- 
M  vices,  et  particulièrement  celui  qu'il 
»  lui  avait  rendu ,  eu  le  délivrant  d'un 
«  concurrent  aussi  redoutable  que  l'était 
»  Edmond.  «  Canut  lui  répondit  tout  en 
colère  que ,  «  puisqu'il  avait  la  hardiesse 
M  d'avouer  publiquement  un  crime  si 
»  noir,  dont  jusqu'alors  il  n'avait  été 
M  que  soupçonné ,  il  devait  en  porter  la 
»  peine.  »  En  même  temps  ,  sans  lui  don- 
ner le  loisir  de  répliquer,  il  commanda 
qu'on  lui  coupât  la  tête  sur-le-champ  ,  et 
qu'on  jetât  son  corps  dans  la  Tamise.  On 
dit  qu'il  fit  mettre  cette  tête  sur  le  lieu 
le  plus  élevé  de  la  tour  de  Londres.  On 
prétend  que  c'est  ce  scélérat  qui  intro- 
duisit le  tribut  que  les  Anglais  furent 
obligés  de  payer  aux  Danois  sous  le  nom 
de  Danegelt. 

EDWARDS  ouEdwarts  (Georges),  né 
à  St'aford,  dans  le  comté  de  Suffex,  en 
1C93  ,  a  j/ublié  une  Histoire  naturelle 
des  oiseaux,  animaux  et  insectes ,  en 
210  planches  coloriées ,  en  anglais,  avec 
la  traduction  française,  Londres,  1751  , 
A  vol.  in-4  :  ouvrage  magnifique  et  inté- 
ressant. On  a  encore  de  lui  Glanures 
d'histoire  nuturelle  ,  1758  ,  60  et  G4  ,  3 
part.  in-4.  Ce  sont  des  figures  de  quadru- 
pèdes, d'oiseaux,  d'insectes,  de  plantes, 
avec  des  explications  en  anglais  et  en 
français.  Ces  trois  volumes  doivent  être 
joints  aux  précédens.  Edwards  mourut  le 
23  juillet  1733. 

'  EDWARDS  (  Bryan  ou  Brian  ) ,  écri- 
vain anglais,  né  en  1743,  à  Westburg, 
dans  le  Wiltshire ,  habita  de  bonne  heure 
et  long-temps  la  Jamaïque ,  où  il  était 
possesseur  d'une  plantation  de  sucre. 
Appelé  en  1789  à  faire  partie  de  l'as- 
semblée de  cette  île ,  on  le  vit  combattre 
vivement  les  propositions  de  Wilbeforcc 


EFI 

pour  l'abolilion  de  la  traite  des  Nègres. 
On  ignore  à  quelle  époque  il  revint  en 
Angleterre  ;  mais  il  y  devint  membre  du 
parlement,  et  y  plaida  avec  force  la  cause 
des  colons;  mais  comme  il  plaignait  le 
sort  des  esclaves  tout  en  reconnaissant 
les  dangers  de  leur  émancipation,  il  fit 
adopter  uue  loi  répressive  des  cruautés 
que  l'on  exerçait  contre  eux.  Il  mourut  le 
1 6  juillet  1 800.  On  a  de  lui  une  Histoire 
civile  et  commerciale  des  colonies  an- 
glaises dans  les  Indes  occidentales , 
1793  ,  2  vol.  in-4  ,  ouvrage  qui  eut  beau- 
coup de  succès  ;  dans  lequel  il  se  montre 
naturaliste  ,  politique,  commerçant,  mais 
patriote  un  peu  ardent.  La  3*  édition  a 
été  publiée  après  sa  mort,  en  1801  ,  3 
vol.  ;  augmentée  d'une  Description  his- 
torique de  la  colonie  française  de  l'île 
de  Saint-Domingue ,  qui  avait  été  publiée 
séparément  en  1794  ;  d'un  Voyage  dans 
les  îles  des  Barhades ,  Saint-Vincent , 
Tabago,  etc.,  par  William  Young;  et 
des  3  premiers  chapitres  d'une  Histoire 
de  la  guerre  dans  les  Indes  occidentales, 
depuis  son  origine  en  février  1793.  Il  a 
été  publié  une  nouvelle  édition  de  cette 
histoire,  continuée  jusqu'au  temps  ac- 
tuel, Londres,  1819,  5  vol.  in-8.  La 
Description  de  l'île  de  Saint-Domingue 
comprenant  le  récit  des  calamités  qui 
ont  désolé  ce  pays  depuis  l'année  t  789  , 
a  été  traduite  en  français  ,  Taris,  18l3, 
in-8.  — Il  y  eut  en  Angleterre  plusieurs 
savans  et  théologiens  de  ce  nom. 

EDZARDI  (  Sébastien  ) ,  professeur 
en  philosophie  à  Hambourg ,  où  il  était 
lié,  en  1G73,  mort  le  10  juin  173G  ,  a 
publié  plusieurs  ouvrages  estimés,  entre 
autres,  de  Verbn  substantiali,  Ham- 
bourg, (  700  ,  contre  les  unitaires. 

EEKHOUT  (Gerbrant  Vanden).  Voy. 
Van  dex  Eekiiout. 

'  EFIMIEF  (  Dmitri-Vladimirovitsch) , 
colonel  d'artillerie  russe,  mort  en  1804, 
s'est  fait  connaître  par  ses  exploits,  mais 
plus  encore  par  trois  comédies  qui  ont 
été  représentées  à  St.-Pétersbourg  avec 
le  plus  grand  succès  :  1°  le  Joueur  cri- 
minel ou  la  Sœur  vendue  par  son  frère. 
2"  Suite  de  la  Sœur  vendue  par  son 
frère.  3"  Le  Voyageur  ou  Véducation 


EGB  21 

sans  succès.  La  l'«  de  ces  pièces  a  seule 
été  imprimée,  St.-Pétersbourg,  1788. 

EFFIAT  (  Antoine  Coiffier  Ruzh  , 
dit  le  maréchal  d'  ),  petit-fils  d'un  maître- 
d'hôtel  du  roi ,  fut  surintendant  des 
finances  en  1626,  général  d'armée  en 
Piémont  en  1630,  enfin  maréchal  de 
France  le  l*""  janvier  1631.  Mécontent 
d'avoir  été  oublié  dans  la  promotion  pré- 
cédente ,  il  s'était  retiré  à  sa  terre  de 
Chilli ,  à  4  lieues  de  Paris;  mais  le  car- 
dinal de  Richelieu ,  de  la  maison  duquel 
il  était  comme  intendant ,  le  rappela  et 
lui  donna  le  bâton.  Ce  maréchal  mourut 
le  27  juillet  1632,  à  Luzzel.stein  ,  proche 
de  Trêves,  en  allant  commander  en  Al- 
lemagne. En  moins  de  5  à  G  ans  il  avait 
acquis  de  la  réputation  dans  les  armes , 
par  sa  valeur  ;  au  conseil ,  par  son  juge- 
ment ;  dans  les  ambassades  ,  par  sa  dex- 
térité ;  et  dans  le  maniement  des  finances, 
par  son  exactitude  et  sa  vigilance.  Il  était 
père  du  marquis  de  Cinq-Mars  (  voyez  ce 
mot  ).  Il  mourut  fort  riche.  Ses  biens 
ont  passé  dans  la  maison  de  Mazarin ,  par 
La  3Ieilleraye  son  gendre.  Ils  lui  venaient 
en  partie  de  son  grand-oncle  maternel , 
qui  les  lui  laissa,  à  condition  qu'il  por- 
terait le  nom  et  les  armes  de  Ruzé.  Cet 
oncle  ,  nommé  martin  Ruzé  ,  fils  de  Guil- 
laume Ruzé ,  receveur  des  finances  à 
Tours  ,  était  un  homme  de  mérite  qui  fut 
secrétaire  d'état  sous  Henri  III  et  Henri  IV. 
(Le  marquis  d'Effiat  a  laissé  plusieurs  ou- 
vrages sur  le  règne  de  Louis  XIII  :  1  °  Etat 
des  affaires  des  finances  présenté  en  l'as- 
semblée des  notables  par  le  marquis 
d'Effiat,  1626,  tome  12  du  Mercure  fran- 
çais. 2°  Discours  sur  son  ambassade  en 
ylngleterre,  ihid.  3"  Lettres  sur  les  fi- 
nances (dans les  factums  du  sieur  Suagcz) 
in-4.  4"  Les  heureu.r  progrès  des  armées 
de  Louis  XIII en  Piémont  dans  le  Recueil 
des  diverses  révolutions.  6°  Mémoires 
concernant  les  dernières  guerres  d'Ita- 
lie de  162r>  à  1632  un  vol.  in-12.  6"  Plu- 
sieurs mémoires  manuscrits  et  lettres 
conservés  dans  diverses  bibliothèques). 

EGBERT ,  roi  de  Wcstrex  et  premier 
roi  d'Angleterre ,  se  distingua  par  ses 
vertus  et  son  courage.  Il  était  à  Rome  à 
la  cour  de  Charlemagne  ,  quand  les  de- 


aa  ,     EGE 

pûtes  anglais  vinrent  lui  apporter  la  cou- 
ronne. Charlcmagne  le  voyant  prêt  à 
partir,  tira  son  épée ,  et  la  lui  présentant  ; 
«  Prince ,  dit-il ,  après  que  votre  épée 
»  m'a  si  utilement  servi ,  il  est  juste  que 
»  je  vous  prête  la  mienne.  «  Egbcrt  sou- 
mit tous  les  petits  rois  de  l'Angleterre , 
et  régna  paisiblement  et  glorieusement 
jusqu'à  sa  mort,  arrivée  en  837.  Ce  fut 
lui  qui  ordonna  qu'on  donnerait  à  l'a- 
venir le  nom  d'Angleterre  à  cette  partie 
de  la  Grande-Bretagne  qu'avaient  occupée 
Jes  Saxons. 

EGBERT ,  frère  d'Eadbert ,  prince  de 
Northumberland ,  fut  élevé  dès  son  en- 
fance dans  un  monastère  ,  devint  arche- 
vêque d'Yorck  en  732  ,  et  mourut  l'an 
765.  Nous  avons  de  lui  1°  Dialogus  ec- 
clesiasticœ  institutionis ,  publié  à  Du- 
blin en  1G64,  in-8,  par  Jacques  War- 
raeus.  2°  Tractatus  de  jure  sacerdotali , 
et  Excerpta  Wk  ex  dictis  et  canonibus 
patrum ,  dans  les  Conciles  du  Père 
Labbe,  tom.  6.  3°  Pœnitentiale  Ubris  IF 
distinctum  ,  manuscrit  que  l'on  conserve 
dans  quelques  bibliothèques  d'Angle- 
terre, 

*EGÈDE  (Jean) ,  pasteur  de  l'Église 
protestante ,  fondateur  des  missions  da- 
noises au  Groenland,  né  en  Danemarck 
en  1686  ,  était  ministre  de  Vogen  ,  dans 
l'évêché  de  Drontheim  en  Norwége ,  lors- 
qu'il conçut  le  projet  de  travailler  à  l'in- 
struction et  à  la  conversion  des  Groen- 
landais.  Après  des  obstacles  sans  nombre, 
il  obtint  la  permission  de  se  rendre  dans 
leur  pays  avec  trois  navires ,  pour  y 
former  des  établissemens.  11  parvint  à  con- 
naître la  langue  du  pays ,  et  à  gagner  la 
confiance  des  habitans  par  sa  douceur  : 
il  les  instruisit  des  préceptes  du  christia- 
nisme, et  en  baptisa  un  grand  nombre. 
Quand  ses  infirmités  ne  lui  permirent 
plus  de  vaquer  à  ses  fonctions  ,  il  confia 
son  œuvres  à  son  fils  et  se  retira  dans  l'île 
de  Falster ,  oii  il  mourut  le  6  novembre 
1758.  On  lui  doit  1°  Nouvelle  recherche 
de  l'ancien  Groenland ,  o\x  Histoire  na- 
turelle et  description  de  la  situation ,  de 
tair,  de  Ut  température  et  des  produc- 
tions de  V ancien  Groenland,  Copen- 
hague, 1729,  in-4;  nouvelle  édition,  1741. 


EGE 

Ce  livre  a  été  traduit  en  allemand ,  en 
anglais ,  en  hollandais  et  en  français. 
Cette  dernière  traduction  a  été  donnée 
par  Parthenay  des  Roches ,  sous  ce  litre  : 
Description  et  histoire  naturelle  du 
Groenland,  Copenhague  et  Genève, 
1763,  in-12.  2°  Journal  tenu  pendant 
la  mission  au  Groenland ,  Copenhague, 
1738  ,  in-8.  Il  a  été  traduit  en  allemand, 
Hambourg,  1740,  in-4 ,  sous  le  titre  de 
Relation  délaille'e  du  commencement  et 
du  progrès  de  la  mission  du  Groenland, 
etc.  On  trouve  dans  le  tome  xix  de  VHis- 
toire  des  Voyages,  un  extrait  de  l'ou- 
vrage de  Crantz  sur  le  Groenland ,  où 
sont  détailles  les  travaux  d'Egède  pour 
la  colonisation  de  ce  pays.  — Son  fils  , 
Paul  Egèdk  ,  mort  en  1689,  fut  nommé 
membre  du  collège  des  Missions ,  direc- 
teur de  l'hôpital  des  Orphelins ,  et 
évêque  du  Groenland.  Il  partagea  et  con- 
tinua les  travaux  de  son  père.  Il  a  laissé 
1°  Relation  du  Groenland,  ex  traite  d'un 
journal  tenu  depuis  1721  jusqu^en  1788, 
Copenhague,  1789  ,  in-12.  2"  Dictiona- 
riumgroenlanaicum,  Copenhague,  1 754, 
in-4.  3°  Grammatica  groenlandica , 
1760,  in-12.  4°  Traduction  en  groen- 
landais  de  V Evangile ,  de  l'Imitation  de. 
Jésus-Christ ,  etc. 

"EGENTON  (François),  artiste  an- 
glais, naquit  vers  1740.  Il  se  livra  par- 
ticulièrement à  la  peinture  sur  verre ,  et 
fut  un  de  ceux  qui  contribuèrent  au  per- 
fectionnement de  cet  art ,  qui  était  pres- 
que oublié  ;  art  toutefois  dans  lequel  les 
modernes  n'ont  jamais  pu  égaler  les  an- 
ciens pour  la  vivacité  et  la  beauté  des 
couleurSjComme  on  le  voit  dans  les  vitraux 
des  anciennes  églises.  Leur  procédé,  dif- 
férent de  celui  des  modernes,  consistait 
à  rassembler  de  petits  morceaux  de  verre 
de  différentes  couleurs,  qui  formaient 
ensemble  comme  une  espèce  de  mosaïque. 
Ensuite,  et  par  une  nouvelle  méthode, 
on  a  peint  les  verres  par  apprêt ,  savoir, 
en  y  appliquant  des  couleurs  métalliques 
qu'on  incorpore  par  l'action  du  feu  gra- 
duellement distribuée  :  invention  que 
l'on  attribue  à  Claude  de  Marseille,  et  à 
Cousin,  peintres  français.  Egeuton  a  laissé 
plus  de    cinquante  ouvrages   dans    ce 


EGE 

genre ,  parmi  lesquels  on  cite  deux  Ré- 
surrections, sur  les  dessins  de  Joseph 
Reynolds,  et  qui  se  trouvent  à  Linchfield 
dans  la  cathédrale  de  Salisbury.  Le  ban- 
quet donne'  par  Salomon  à  la  reine  de 
Saba ,  d'après  un  tableau  d'Hamilton 
qu'on  voit  au  château  d'Arundel  ;  Saint 
Paul  converti  et  recouvrant  la  vue , 
dans  l'église  de  Saint-Paul ,  à  Birmin- 
gham ;  Le  Christ  portant  sa  croix  ,  d'a- 
près Morales  ,  dans  l'église  de  Wousled , 
au  comté  d'Essex  ;  L'âme  d'un  enfant  en 
présence  de  Dieu,  d'après  un  tableau  de 
Peters,  et  que  l'on  voit  dans  une  église 
à  Great-Barr,  dans  le  comté  de  Stafford. 
Egenton  mourut  le  26  mars  1805,  âgé 
de  près  de  65  ans, 

EGERTON  (  Thomas  ) ,  garde-des- 
sceaux  d'Angleterre  sous  la  reine  Elisa- 
beth ,  et  chancelier  sous  Jacques  I ,  fut 
surnommé  le  défenseur  incorriiptible  des 
droits  de  la  couronne.  Umourut  en  1617, 
à  70  ans,  après  avoir  publié  quelques 
ouvrages  àc  jurisprudence. 

"EGERTON  (François),  duc  de  Brid- 
gewater,  marquis  de  Brackley,  baron  d'El- 
lesmire,  fut  le  l*""  de  sa  famille  qui  prit  le 
nom  de  Bridgewater;  il  était  fils  de  Scroop- 
Egerton  qui  avait  une  fortune  immense 
dont  il  jouit  de  bonne  heure  par  la  mort  de 
ses  parens  ;  il  était  né  en  17  26  :  bientôt  il 
s'occupa  d'un  projet  que  son  père  avait 
formé ,  mais  auquel  des  obstacles  sans 
nombre  l'avaient  forcé  de  renoncer. C'était 
la  construction  du  canal  que  l'on  avait 
songé  d'entreprendre  en  Angleterre.  Eger- 
ton  possédait  dans  ses  terres  de  Worsley, 
de  riches  mines  de  houille  ;  mais  l'ex- 
ploitation en  devenait  fort  désavanta- 
geuse à  cause  de  la  difficulté  des  trans- 
ports. Un  canal  qui  aurait  servi  à  trans- 
porter son  charbon  à  Manchester  dont 
il  était  éloigné  de  8  milles,  eût  été  très 
avantageux,  peut-être  même  nécessaire 
pour  le  succès  de  son  entreprise.  Mais  ce 
canal  offrait  des  obstacles  que  l'on  disait 
insurmontables  :  néanmoins  il  s'adressa 
à  un  artiste  nommé  Brindley,  qui  assura 
que  la  confection  du  canal  était  prati- 
cable. Egerton  demanda  donc  au  parle- 
ment l'autorisation  d'ouvrir  un  canal  na- 
vigable de  Salford  près  de  Manchester 


EGE  23 

jusqu'à  Wofsey  ,  et  il  l'obtint  en  1768 
après  une  opposition  assez  vive  dans  les 
deux  chambres.  Après  5  ans  de  travaux  et 
des  dépenses  énormes,  le  canal  fut  terminé 
et  poussé  même  jusqu'à  la  rivière  de 
Mersey  ;  on  ne  peut  voir  sans  étonnement 
depuis  les  bords  de  la  rivière  d'Irwenel 
couverte  de  voiles ,  des  barques  flotter 
Sur  un  canal  pratiqué  à  40  pieds  au 
dessus.  Le  projet  de  construire  un  aqueduc 
qui  partant  de  Bartonbridge  ,  serait  pro- 
longé jusqu'à  l'Irwenel  et  s'élèverait  à  une 
si  grande  hauteur  au  dessus  du  niveau 
de  cette  rivière,  fut  généralement  re- 
gardé comme  chimérique  ;  mais  la  réso- 
lution d'Egerton  était  inébranlable,  et  il 
fit  construire  ce  canal  en  peu  de  temps  : 
il  porte  son  nom.  En  général  il  fit  beau- 
coup de  sacrifices  pour  la  propagation 
du  système  de  navigation  intérieure 
dont  il  avait  donné  l'exemple  et  qui  est 
une  des  causes  principales  de  la  prospé  - 
rite  actuelle  de  l'Angleterre  et  de  l'Ecosse. 
La  fortune  d'Egerton  devint  considérable  : 
pour  en  donner  une  idée  il  suffira  de 
dire  qu'il  payait  à  l'état  pour  sa  taxe  de 
contributions  annuelles  110,000  livres 
sterling.  Sa  carrière  politique  n'offre  rien 
de  remarquable  ;  il  siégeait  à  la  chambre 
des  pairs.  En  1800,  la  S ocie'te'  d'encou- 
ragement des  arts  et  du  commerce  de 
Londres  lui  décerna  une  médaille  d'or 
en  reconnaissance  des  services  qu'il  avait 
rendus  à  son  pays  ;  la  même  année  il  lui 
fut  volé  des  remercîmens  pour  un  ou- 
vrage intitulé  Description  du  plan  in- 
cline des  souterrains  de  Bridgewatter  , 
dont  il  a  paru  une  traduction  française  à 
Parisen  1812,  in-8,  avec  figures  :  on  peut 
reprocher  à  l'auteur  de  n'avoir  pas  rendu 
dans  cet  ouvrage  à  Brindley  toute  la  jus- 
tice qu'il  méritait.  Egerton  mourut  le  8 
mars  1803  ;  il  avait  vécu  célibataire. 

*  EGERTON  (François -Henry,  sir) 
comte  de  Bridgewatter,  membre  de  la 
Société  royale  de  Londres  ,  prébendaire 
de  Durham,  et  recteur  de  Witchurch  dans 
le  comté  de  Salop ,  était  le  dernier  fils 
de  Jean  Egerton  évêque  de  Durham  ,  et 
d'Anne  -  Sophie,  fille  de  Henri  Grei  duc  de 
Kent  ;  il  était  le  frère  et  fut  l'héritier  du 
riche  duc  de  Bridgewatter.  Amateur  des 


24  EGG 

sciences ,  des  lettres  et  des  arts ,  il  s'était 
environné  d'écrivains  et  d'artistes.  Avec 
les  premiers  il  a  publié  dififérens  ouvrages, 
notamment  une  Description  des  travaux 
souterrains  exécutés  a  fValkdenmoor , 
dans  le  comté  de  Lancastre  par  le  dernier 
duc  de  Bridgewatler ,  inséré  dans  les 
Transactions  de  la  Société  des  arts.  2° 
Une  magnifique  édition  de  VHippolyte 
d^ Euripide ,  grec-latin  ,  avec  notes ,  Ox- 
ford, 1176,  in-4  :  un  exemplaire  de  cet  ou- 
vrage a  été  vendu  149  fr.  Z°  Fragjncns 
et  odes  de  Sapho ,  grec-latin  ,  avec  des 
notes,  Paris,  1815,  in-8.  4°  Cornus  mas- 
que de  Milton  ,  traduction  littérale  , 
française  et  italienne ,  Paris,  1812  ,  in-4. 
5°  Une  édition  de  la  Traduction  du 
même  ouvrage  pour  Gaetano  Palidori-da- 
Bientina,  Paris,  1812  ,  in-4.  On  lui  doit 
plusieurs  autres  écrits  relatifs  à  l'illustra- 
tion de  sa  famille.  Egerton  aimait  à  en- 
courager les  publications  utiles;  ainsi  il 
donna  le  montant  de  20  souscriptions  , 
en  se  faisant  placer  sur  la  liste  des  abon- 
nés ,  à  l'Hermès  romanus  du  savant  Bar- 
bier -  Vémars.  Avec  les  artistes  dont  il 
avait  fait  sa  société  ,  il  s'occupa  de  faire 
reproduire  avec  profusion  son  portrait  et 
celui  des  membres  illustres  de  sa  famille, 
dont  la  lithographie  a  répandu  à  ses  frais 
une  foule  d'exemplaires.  Il  est  mort  à 
Paris  le  12  février  1829. 

•  EGG  (  Jean-Gaspard  ) ,  agronome 
suisse,  né  en  17  38  ,  était  greffier  du  dis- 
trict d'Ellikon  (  canton  de  Zurich  ).  Il  est 
connu  par  plusieurs  institutions  pré- 
cieuses, pour  l'avantage  de  sa  commune 
dont  il  fit  dresser  un  plan  géométrique,  et 
pour  les  progrès  de  l'agriculture  et  de 
l'industrie,  telles  que  la  culture  des  biens 
fonds  communaux  négligés  jusqu'alors , 
l'assurance  contre  Vépizootie  ,  et  enfin  , 
l'instruction  pour  la  culture  delà  vigne, 
à  l'aquelle  la  société  économique  de  Zu- 
rich a  décerné  le  premier  prix.  Egg  mou- 
rut en  1794.  Sa  vie  a  été  écrite  en  alle- 
mand par  son  filset  publiée  par  la  Société 
de  physique  de  Zurich,  1795,  in-8. 

EGGELING  (Jean-Henri) ,  né  à  Brème 
en  1639,  parcourut  la  plupart  des  royau- 
mes de  l'Europe,  dans  la  vue  de  perfec- 
tionner son   goût  pour   les   antiquités 


EGG 

grecques  et  romaines.  De  retour  dans  sa 
patrie  ,  il  fut  nommé  secrétaire  de  la  ré- 
publique ;  emploi  qu'il  exerça  avec  dis- 
tinction jusqu'à  .sa  mort,  arrivée  en  1 7 1 3, 
à  74  ans.  On  a  de  lui  des  explications Ae 
plusieurs  médailles  et  de  (juelques  mo- 
numens  antiques  ;  Misteriu  Cercris  et 
Bacchi,  dans  les  Antiquités  grecques  de 
Gronovius  ;  et  Germaniœ  antiquitates , 
Brème ,  1 694  ,  in-4 ,  ouvrage  plein  de  re- 
cherches. 

*  EGGS  (  Jean-Ignace  ) ,  capucin  sous 
le  nom  dapère  Ignace  de  Rheinfeld ,  né 
dans  cette  ville  en  1618,  servit  d'abord 
comme  aumônier  à  bord  d'un  des  vaisseaux 
delà  flotte  vénitienne ,  où  il  convertit  et 
baptisa  plus  de  600  mahométans  prison- 
niers. Il  accompagna  ensuite  Octave, 
comte  de  La  Tour,  dans  son  voyage  à  la 
Terre-Sainte ,  séjourna  trois  mois  à  Jéru- 
salem ,  et  fut  reçu  avec  lui  chevalier  du 
Saint-Sépulcre.  De  retour  dans  sa  patrie, 
il  consacra  le  reste  de  sa  vie  à  l'élude  et 
aux  missions  dans  les  pays  protestans.  Il 
mourut  à  Lauffenbourg  le  1  *■■  février  1702. 
Il  a  publié  le  résultat  de  son  voyage  sous 
le  titre  de  Relation  du  voyage  de  Jéru- 
salem ,  et  Description  de  toutes  les  mis- 
sions apostoliques  de  l'ordre  des  Capu- 
cins,  in-4  :  ouvrage  intéressant,  qui  fut 
réimprimé  à  Fribourgen  Brisgaw  eu  1 666, 
et  à  Augsbourg  en  1699. 

*  EGGS  (  Léon  ou  Léonce  ) ,  parent  du 
précédent ,  et  jésuite  comme  lui ,  naquit 
à  Rhinfeld  le  19  août  1666.  Il  cultiva 
avec  succès  la  poésie ,  et  composa  des 
pièces  de  théâtre  en  allemand ,  en  latin 
et  eu  français,  qui  furent  jouées  dans 
différentes  villes  d'Allemagne.  Il  était 
très  versé  dans  la  langue  grecque  ,  et  il 
avait  professé  pendant  quelque  temps  la 
poésie  et  la  rhétorique  dans  les  collèges 
delà  société.  Il  accompagna  au  siège  de 
Belgrade,  en  qualité  d'aumônier,  les  fils 
de  l'électeur  de  Bavière ,  et  mourut ,  le 
16  août  1717,  au  camp  devant  cette 
ville.  Il  a  laissé  1"  Compositiones  morales 
et  asceticœ  ;  ce  sont  des  morceaux  choi- 
sis, tirés  d'ouvrages  français  et  latins.  Il 
en  a  été  fait  plusieurs  éditions.  2°  Opéra 
moralia  ;  3°  OE strum  ephemericum  poe- 
ticum,  Munich  ,  1712.  Cet  ouvrage,  pu- 


blîé  sous  le  nom  de  Genesius  Gold,  qui 
est  l'anagiamme  du  sien ,  est  formé  d'au- 
tant d'élégies  qu'il  y  a  de  jours  dans  l'an- 
née ,  dont  le  sujet  est  pris  des  psaumes 
de  David.  Z°  Epigrammata ,  jElogia , 
Inscriptiones  y  Exercilationes  scolas- 
ticœ  théâtrales.  Ces  opuscules  sont  restés 
manuscrits.  Il  a  aussi  composé  la  Fie  du 
Père  Richard  Eggs. 

*  EGGS  (George-Joseph  ),  de  la  même 
famille,  chanoine ,  doyen  de  l'église  de 
Saint-Martin  de  Rheinfeld,  mort  vers 
1750.  On  lui  doit  Purpura  docia ,  seu 
Vitœ  cardinalium  scriptis  illustrium  , 
Munich,  1714-29,  4  vol.  in-fol.  ,  livre 
estimable  par  les  recherches  et  l'exacti- 
tude ;  et  plusieuis  autres  ouvrages  im- 
primés la  plupart  en  allemand  et  peu 
connus  en  France. 

EGINARDouEginhard, historien  fran- 
çais du  9«  siècle,  seigneur  allemand,  élevé 
à  la  cour  de  Cbarlemagne,  fit  des  progrès 
si  rapides  dans  les  lettres ,  que  ce  prince 
le  fit  son  secrétaire.  Il  lui  donna  sa  fille 
Emma  ou  Imma  en  mariage  A  ces  bien- 
faits ,  il  joignit  encore  la  charge  de  sur- 
intendant de  ses  bâtimens  ,  et  de  chan- 
celier. Après  la  mort  de  Cbarlemagne, 
Eginard  se  consacra  à  la  vie  monastique. 
11  se  sépara  de  sa  femme,  et  ne  la  regarda 
plus  que  comme  sa  sœur.  Louis  le  Dé- 
bonnaire lui  donna  plusieurs  abbayes , 
dont  il  se  défit  pour  se  fixer  à  Selingens- 
tat,  monastère  qu'il  avait  fondé.  Il  en 
fut  le  premier  abbé.  Eginard  mourut  sain- 
tement dens  sa  retraite  ,  l'an  839.  Nous 
avons  de  cet  homme  célèbre  une  P^ie  de 
Charlemagne,  irès-de'taillee  ;  (  vila  et 
gesta  Caroli  magni,  imprimée  à  Cologne, 
1521,  in-4,  Francfort,  Genève,  Hanau, 
Leipsick,  Paris  ,  Strasbourg ,  Helmstadt  ; 
l'édition  la  plus  estimée  est  celle  de  Herm. 
Schmiucke,  Utreckt,  1711,  in-4,  avec 
les  notes  de  Bessel ,  de  Bollandus ,  et 
de  Goldastj.  Don  Bouquet  a  inséré  cet 
ouvrage  curieux  dans  sa  grande  Collec- 
tion des  Historiens  de  France,  tom.  6. 
Le  président  Cousin  en  a  donné  une 
traduction  française  dans  l'Histoire  de 
l'empire  d'Occident ,  2  vol.  in-12.  (lien 
existe  d'autres  traductions  d'un  auteur 
inconnu  ;  d'Elie  Vinet,  Poitiers,  1568, 
Y. 


in-8  ;  de  Léonard  Pournas ,  Paris  j  1 G 1 4  , 
in-1 2  ;  de  D.  (  Denis  ),  Paris,  1812,  in-1 2. 
Il  a  été  traduit  en  allemand  par  Jean-Au- 
gustin Egenof,  Leipsick,  1528,  iu-12. 
Eginard  est  aussi  l'auteur  des  Annales 
regum  francorum  Pipini,  Caroli  magni, 
Ludovici  PU,  ab  anno  Christi  741  ad 
annum  829,  (imprimé  dans  la  plupart 
des  éditions  du  précédent  ouvrage).  On 
a  encore  de  lui  G2  lettres  écrites  en  la- 
tin, Francfort,  1714,  in-fol.  ;  elles  sont 
importantes  pour  l'histoire  de  son  siècle. 
On  les  trouve  dans  le  Recueil  des  Histo- 
riens de  France  de  Dnchesne ,  dans  la 
Collection  de  don  Bouquet,  etc.  Eginard 
était  l'écrivain  le  plus  poli  de  son  temps. 
"Nous  avons  composé  cet  article  d'après 
l'idée  commune  que  le  plus  grand  nom- 
bre des  historiens  donne  d'Eginard.  Le 
nouvel  éditeur  des  OEuvres  de  Bossuet 
dit  dans  une  note  sur  la  défense  de  la 
déclaration  du  clergé  de  France ,  qu'il 
est  difficile  de  croire  qu'Eginard  ait  vécu 
du  temps  de  Cbarlemagne.  Eginard,  dans 
la  Vie  de  ce  prince  ,  s'excuse  de  ce  qu'il 
ne  parle  point  de  sa  naissance  et  de  son 
enfance,  «  parce  qu'il  n'y  a  plus,  dit-il, 
»  d'homme  vivant  qui  en  ait  connais- 
»  sance.  »  Cela  veut  dire  tout  au  plus ,  à 
cequ'ilparaît  (et  c'est  le  sentiment  des  au- 
teurs de  l'Histoire  littéraire  de  France  ), 
qu'Eginard  n'exécuta  son  dessein  que 
plusieurs  années  après  la  mortdeson  hé- 
ros. Les  romanciers  ont  prétendu  embellir 
sa  vie  par  des  récits  peu  vraisemblables 
et  démentis  par  Eginard  lui-même  :  quel- 
ques-uns ont  été  mis  sur  la  scène. 

EGIMÈTE  F.  ^GiNETE  (  Paul). 

EGINHARD.  F.  Eginard. 

EGLY  (d').  Foyez  Montenault. 

EGMONT  (Lamobai.,  comte  d'),  un 
des  principaux  seigneurs  des  Pays-Bas, 
né  en  1522,  d'une  maison  illustre  de 
Hollande ,  se  distingua  dans  les  armées 
au  service  de  l'empereur  Charles  V ,  qu'il 
suivit  en  Afrique  en  1544.  Nommé  géné- 
ral de  la  cavalerie  sous  Philippe  II ,  il  se 
signala  à  la  bataille  de  Saint-Quentin  en 
1557,  et  à  celle  de  Gravelines  en  1558. 
Mais  après  le  départ  de  Philippe  pour 
l'Espagne ,  il  favorisa  les  troubles  qui 
s'élevèrent  dans  les  Pays-Bas ,  et  se  ligua 


û6  EGN 

avec  les  chefs  de  la  rébellion,  te  duc 
d'Albe  qui  y  fut  envoyé  pour  les  pacifier , 
lui  fit  trancher  la  tête  à  Bruxelles ,  le  5 
juin  15G8,  aussi  bien  qu'à  Philippe  de 
Montmorency ,  comte  de  Horn.  Lorsque 
le  capitaine  Salines  demanda  à  d'Egmont 
son  épée ,  le  comte  répondit  d'abord  fiè- 
rement :  «  Eh  !  quoi  ?  capitaine  Salines , 
»  m'ôter  cette  épée  qui  a  si  bien  servi  le 
M  roi  !  M  Puis  se  radoucissant  tout  d'un 
coup  et  la  donnant  :  «  Puisque  telle  est  la 
«  volonté  du  roi ,  dit-il ,  prenez-la.  »  Ce 
malheureux  comte  avait  46  ans:  il  mou- 
rut avec  résignation  et  dans  la  commu- 
nion del'église  catholique.  L'ambassadeur 
de  France  marqua  à  sa  cour  n  qu'il  avait 
)»  vu  tomber  cette  tête  qui  avait  deux  fois 
»  fait  trembler  la  France.  » 

EGNACE  ou  Egnazio  (  Jean-Baptiste 
CiPELLi  dit  ) ,  disciple  d'Ange  Politien , 
maître  de  Léon  X,  fut  élevé  avec  ce  pon- 
tife sous  les  yeux  de  cet  habile  homme. 
S'il  y  eut  depuis  une  grande  différence 
dans  la  fortune  de  ces  deux  disciples ,  il 
n'y  en  eut  point  dans  leur  goût  pour  les 
belles-lettres.  Egnace  les  professa  à  Ve- 
nise sa  patrie  ,  avec  le  plus  grand  éclat. 
La  vieillesse  l'ayant  mis  hors  d'état  de 
continuer ,  la  république  lui  accorda  les 
mêmes  appointemens  qu'il  avait  eus  lors- 
qu'il enseignait,  et  affranchit  ses  biens  de 
toutes  sortes  d'impositions.  Egnace  mou- 
rut au  milieu  de  ses  livres,  ses  seuls  plai- 
sirs ,  en  1553,  à  80  ans.  Ses  écrits  sont 
au  dessous  de  la  réputation  qu'il  s'était 
acquise,  par  une  heureuse  facilité  de  par- 
ler ,  et  par  une  mémoire  toujours  fidèle. 
Il  était  extrêmement  sensible  aux  éloges 
et  aux  critiques.  Robortel  ayant  censuré 
ses  ouvrages ,  il  répondit ,  dit-on ,  par 
un  coup  de  baïonnette  dans  le  ventre, 
qui  pensa  emporter  le  critique.  Les  prin- 
cipaux ouvrages  d'Egnace  sont  :  1»  un 
Abrégé  de  la  vie  des  empereurs ,  depuis 
César  jusqu'à  MaximiU.cn  I,  en  latin, 
Venise,  151G,in-8.  Cet  ouvrage,  un  des 
meilleurs  que  nous  ayons  sur  l'histoire 
romaine,  a  été  traduit  pitoyablement  par 
le  trop  fécond  abbé  de  Marollcs,  dans  son 
Addition  à  l'histoire  romaine,  1664,  2 
vol.  in-12.  2°  Traité  de  l'origine  des 
Turcs ,  publié  à  la  demande  de  Léon  X  ; 


ij  se  trouve  dans  le  l»'  tome  des  Ôesia  Dei 
per  Francos.  3"  Un  Panégyrique  latin 
de  François  I ,  en  vers  héroïques ,  Ve- 
nise,  1540.  Comme  il  y  avait  plusieurs 
passages  injurieux  à  Charles-Quint,  l'em- 
pereur s'en  plaignit  à  Paul  III ,  alors  en- 
nemi de  la  France  ;  ce  pontife  fit  agir  si 
fortement  contre  le  panégyriste,  qu'il 
pensa  être  accablé.  4"  De  savantes  re- 
marques sur  Ovide.  b°  Des  notes  sur  les 
épîlres  familières  de  Cicéron ,  et  sur 
Suétone.  6"  De  Exemplis  illustrium  vi- 
rorum  Venetœ  civitatis  et  aliarum  gen- 
tium ,  lib.  9,  Venise,  1554,in-4. 

*  EHLERS  (  Martin  ) ,  professeur  de 
philosophie  à  Kiel,  où  il  est  mort  le  9 
janvier  1 809,  est  né  à  Nortorf  dans  le  Hols- 
tein  en  1732.  L'Allemagne  lui  doit  plu- 
sieurs institutions  utiles,  des  réformes  très 
sages  dans  les  méthodes  d'enseignement 
usitées  dans  les  universités  d'Allemagne, 
et  quelques  ouvrages  estimables.  1° /?c- 
cueilde  petits  traités  sur  l enseignement 
des  écoles  publiques  et  l'éducation  en  gé- 
néral, Flensbourg,  1776  ,  in- 8  ,  en  al- 
lemand. 2°  Quelques  portraits  pour  les 
bons  princes ,  et  ceux  qui  se  consacrent 
à  l'éducation  des  enfans  des  rois  ,  Kiel 
et  Hambourg,  1786,  2  vol.  in-8.  3"  Con- 
sidérations sur  la  moralité  de  nos  jouis- 
sances et  de  nos  plaisirs  ,  1790  ,  2  vol. 
in-8. 

*  EHRARD  ou  Erhard  (Dom  Thoraas- 
d'Aquin  ) ,  savant  bénédictin  du  1 6*  siè- 
cle ,  appartenait  à  la  congrégation  des 
Sts. -Anges  ;  il  prit  part  à  la  dispute  qui 
eut  lieu  entre  les  bénédictins  et  les  cha- 
noines réguliers ,  au  sujet  de  V Imitation 
de  Jésus-Christ  ;  à  ce  sujet  il  a  publié 
plusieurs  ouvrages  :  1°  une  édition  latine 
de  y  Imitation  ,  accompagnée  d'une  pré- 
face apologétique  pour  Gcrsen  ,  Augs- 
bourg,  1724.  2°  Une  défense  de  la  même 
opinion,  intitulée  Polychratcs  gersen- 
nensis ,  in  qua  quatuor  libri  de  imita- 
tionc  Christi ,  Joannis  Gersennensis  , 
abbatis  ordinis  Sancti-Bcnedicti ,  vin- 
dicantur  ;  c'est  la  réfutation  du  Scu- 
tum  kempense  d'Amort  ,  Augsbourg  , 
1729.  Z"  Ars  memoriœ  sive  claraetper- 
spicua  methodus  excerpendi  nucleum 
rerum  ,  ex  omnibus  scienliarum  monu- 


EHR 

mentis,  Augsbourg,  1715,  2  vol,  in-8. 
h°  Gloria  sanctissimi  protoparenti  Be- 
nedicti ,  in  terris  adumbrata ,  seu  vita, 
virtutes,  prodigia,  gesta  et  cultus  sancti 
Benedicti ,  Augsbourg ,  17 1 9,  6  vol.  m-4 . 
6°  Isagoge  et  commentarius  in  univer- 
sam  sacrant  Bibliam  vulgatœ  edifionis, 
Sixti  V  et  Clementis  VIII  pont,  rom., 
auctoritate  recognitam  ,  Augsbourg  , 
1729,  1735,  3  vol.  in-8,  et  plusieurs  au 
très  ouvrages  sur  la  Bible.  — Ehrard  (Dom 
Gaspard  )  ,  bénédictin  de  la  même  con- 
grégation en  Bavière,  a  publié  Diilcis 
memoria  in  sancia  evangelia ,  seu  vila, 
doctrina  et  mysteria  Jesu-Christi,  per 
brevem  commentarium  in  sancta  evan- 
gelia explicata,  Augsbourg,  1719,  1  vol. 
in-8.  Il  jouissait  d'une  grande  réputation 
de  science  et  d'érudition.  On  ne  connaît 
ni  le  lieu  ni  la  date  de  sa  naissance  ,  ni 
l'époque  de  sa  mort. 

*  EHRENHEIM  (  N.,  baron  d'  )  ancien 
président  de  la  cbancellerie  de  Suède, 
se  retira  des  affaires  après  la  chute  de 
Gustave  -  Adolphe.  Pendant  qu'il  était 
livré  aux  travaux  de  la  diplomatie ,  il 
s'occupait  encore  d'études  scientifiques  ; 
mais  lorsqu'il  fut  entièrement  libre,  il  s'y 
adonna  exclusivement  :  on  cite  de  lui  un 
ouvrage  fort  estimé ,  qui  lui  assigne  un 
rang  très  distingué  parmi  les  savans  de 
la  Suède  ;  il  traite  de  la  Physique  géné- 
rale et  de  la  Météorologie.  Mais  ce  qui 
vaut  encore  mieux  pour  sa  réputation, 
c'est  un  trait  de  bienfaisance  qui  mérite 
d'être  connu.  Un  traité  venait  d'être 
conclu  entre  l'Angleterre  et  la  Suède  ; 
comme  il  avait  coopéré  à  sa  conclusion, 
il  devait  recevoir,  suivant  l'usage,  un 
riche  cadeau  de  l'Angleterre;  il  apprit 
qu'une  somme  de  mille  livres  sterling 
allait  être  employée  à  l'achat  de  la  boîte 
qu'on  lui  destinait  :  Ehrenheim ,  quoique 
absolument  sans  fortune,  fit  prier  par  le 
ministre  de  Suède  à  Londres ,  M.  Can- 
ningdelui  envoyer  ceprésenten  argent, 
afin  de  l'employer  au  soulagement  de  la 
province  de  Bohus  dont  les  habitans 
étaient  en  proie  à  une  grande  disette 
de  blé;  le  ministre  anglais  joignit  au 
montant  du  cadeau  donné  par  le  cabinet 
de  Londres ,  le  prix  de  la  tabatière  que 


EHR  à'j 

devait  lui  offrir  à  lui-même  le  gouverne- 
ment suédois ,  afin  de  prendre  aussi  une 
part  à  la  bienfaisante  action  du  baron 
d'Ehrenheim.  Ce  diplomate  généreux  est 
mort  en  1828. 

*  EHRET  (  George-Denis  ),  né  dans  le 
margraviat  de  Bade  vers  1710,  mort  eu 
Angleterre  vers  1770,  s'est  rendu  célèbre 
par  son  habileté  à  peindre  les  plantes.  On 
lui  doit  une  suite  de  papillons  et  déplan- 
tes mêlés  ensemble,  gravés  par  lui-même, 
imprimés  sous  ce  titre:  Plantœ  et papi- 
lianes  rariores  depictœ  ,  etc. ,  17  48,  in- 
fol.  Il  a  aussi  peint  les  plantes  les  plus 
rares  de  V Angleterre ,  que  Trew  fit  gra- 
ver et  paraître  par  Décurie,  grand  in-folio, 
1750  à  1773.  C'était  l'ouvrage  le  plus 
magnifique  qui  eût  encore  paru ,  et  le 
plus  soigné  du  côté  des  détails  de  la  fruc- 
tification. On  doit  encore  à  Ehret  les  fi- 
gures de  la  Flore  de  la  Jamaïque  ,  de 
VHortus  cliffortianus ,  et  de  plusieurs 
mémoires  qui  parurent  dans  les  Transac- 
tions de  la  société  royale. 

*  EHRHART  (  Balthasar  ) ,  médecin 
et  botaniste  allemand,  n'est  connu  que 
par  le  commerce  A^ herbiers  qu'il  vendait 
à  un  prix  très  bas  et  qu'il  a  répandus  dans 
toute  l'Allemagne,  et  par  différens  ou- 
vrages relatifs  à  la  science  qu'il  cultivait. 
Il  a  publié  le  catalogue  de  ses  herbiers  avec 
l'indication  des  procédés  qu'il  employait 
pour  dessécher  et  conserver  les  plantes  ; 
ce  qui  a  donné  lieu  à  l'ouvrage  intitulé  : 
Mautissa  botanologiœ  juvelis  ,  Ulm , 
1 732  ,  in-8  ;  augmenté  et  publié  sous  le 
titre  de  Continuatio  syllabi  plantarum 
quarum  specimina  sicca  botanophilis  of- 
feruntur .,  Memmengin ,  1746,  in-fol. 
oii  l'on  trouve  36  plantes  alpines  assez 
rares.  Parmi  les  autres  ouvrages  qu'il  a 
publiés,  on  remarque  sa  thèse  inaugurale 
intitulée  De  Helimnitis  suevicis,  Leyde, 
1724,  in-4,  et  Augsbourg,  1727,  avec 
fig.  2"  Un  Mémoire  inséré  dans  les  Tra*^-^^ 
actions  de  la  société  royale  de  Londres 
an  1739,  contenant  les  plantes  qu'il  avait 
rencontrées  dans  le  Tyrol.  3°  Vnelnstruc- 
t,ion  sur  Vhistoire  des  plantes  usuelles 
1752,  in-4,  4°  Histoire  économique  des 
plantes,  classée  suivant  l'ordre  des  mois 
de  leur  apparition ,  et  leur  lieu  de  nais- 


:ï8  EHR 

sauce.  Cet  ouvrage  dont  il  a  publié  seu- 
lement les  4  premiers  -vol. ,  a  été  conti- 
nué par  Gmelin  et  forme  12  vol.,  1G53  à 
1761.  5°  Un  Mémoire  sur  la  manière  d'a- 
gir du  gui  dans  les  Ephéméridcs  des 
curieux  de  la  nature.  ii°  Un  autre  Mé- 
moire dans  VOEconomische  Nachricht 
contenant  des  éclaircissemens  sur  78 
plantes  données  par  Ortliius  comme  nui- 
sibles. 7°  Une  édition  de  VHortus  sani- 
tatis  avec  de  nombreuses  additions.  Ce 
savant  botaniste  est  mort  en  1756. 

*  EHRHARÏ  (  Frédéric  ) ,  botaniste , 
né  en  1747  ,  à  Holdarbane,  {  canton  de 
Berne  ) ,  oîi  son  père  était  curé,  mourut 
en  1795.  Il  fut  élève  de  Linnée.  il  a  publié 
différens  herbiers  recherchés  pour  leur 
netteté  et  précision,  7  yo\.  de  fragmens 
sur  l'Histoire  naturelle  ,  etc. ,  in-8 ,  en 
allemand ,  qui  contiennent  une  grande 
quantité  d'excellentes  notices  eid^ obser- 
vations, surtout  pour  la  partie  de  la  bo- 
tanique, et  des  catalogues  annuels  des 
plantes  cultivées  dans  les  jardins  de  Hcr- 
renhauser  dont  la  direction  lui  avait 
été  confiée  par  le  gouvernement  de  Ha- 
novre. On  lui  doit  encore  l'édition  du 
supplément  du  Système  végétal  de  Lin- 
né. Les  Annales  de  botanique  de  M.  Us- 
leri  tome  1 9  renferment  des  notices  sur 
sa  vie.  Thumberg  a  donné  son  nom  à  un 
genre  de  la  famille  des  graminées  que 
l'on  connaît  sous  la  dénomination  d'Eli- 
tarta. 

*  EHRMANN  (  Frédéric-Louis  ) ,  pro- 
fesseur de  physique ,  naquit  en  Alsace 
vers  1 7  30 ,  et  obtint  une  chaire  dans  l'u- 
niversité de  cette  ville.  Il  inventa  les 
lampes  à  air  inflammable ,  et  a  laissé  les 
ouvrages  suivans  :  1°  La  Description  et 
l^usage  des  lampes  (  de  son  invention  ), 
rV82,  in-8.  Il  a  traduit  cet  ouvrage  en 
allemand.  2°  Des  Ballons  et  de  l'art  de 
les  faire  ,  1764,  in-8;  S"  Mémoires  de 
Lavoisier  (  traduits  en  allemand  ),  17  97  ; 
4°  Essai  d'un  art  de  fusion  à  l'aide  de 
f^air  et  du  feu ,  en  allemand  (  traduit  en 

^  j^^nçais  par  Dollard  ) ,  1787  ,  in-8  ,  fig. 
L'auteur  y  décrit  le  procédé  par  lequel , 
çt"  au  moyen  d'une  lampe  d'émailleur 
çxc^téfi  par  le  gaz  oxygène,  on  fond  les 
iDé^V^x  te»  plus  dors ,  ^  on  br^e  le  di<v 


EIC 

mant.  5"  Elémens  de  physique  ;  ce  livre 
est  très  utile ,  et  contient  une  7Vb/ic«  sur 
les  principaux  ouvrages  relatifs  à  cette 
science.  Ehrmann  est  mort  à  Strasbourg, 
en  mai  1800,  àl'àge  d'environ  70  ans. — 
Un  autre  Ehrmann  (  Jean-Chrétien  ) , 
médecin  à  Strasbourg ,  publia  l'Histoire 
des  plantes  dcl'  yilsace,-p»rMa.Tp^i,  1742. 
Cet  ouvrage  était  resté  inédit  depuis  40 
ans ,  n'ayant  point  été  publié  du  vivant 
de  Mappi ,  mort  en  1 702. 

*  EIGHNER  (  Ernest  ) ,  fameuï  musi- 
cien allemand,  est  connu  comme  composi- 
teur et  comme  concertant  :  il  fut  l'un  des 
meilleurs  bassons  qui  aient  paru  :  il  est 
mort  à  Postdam  en  1776.  On  a  de  lui  un 
grand  nombre  de  symphonies,  concerts , 
quatuor,  trio  et  solo,  goûtés  pour  leur 
simplicité  et  la  facilité  qu'ils  offrent  aux 
commençans  ;  ils  sont  pour  divers  instru- 
mens  :  ses  œuvres  sont  particulièrement 
répandues  en  Allemagne,  eu  Hollande ,  et 
en  Angleterre. 

*  EICHHOF  (  Cyprien) ,  est  connu  par 
la  publication  d^ Itinéraires  ou  Guides  des 
voyageurs ,  qu'il  fit  paraître  sous  le  titre 
de  Délites  ;  ses  ouvrages  sont  accom- 
pagnés de  petites  cartes  dont  la  suite 
forme  un  atlas  complet  ;  les  principaux 
sont  1  °  Deliciœ  Italiœ  seu  index  viato- 
rius  ab  urbe  Borna  ad  omnes  Italiœ  civi- 
tates,  Ursel,  1604,  iu-4.  2°  Deliciarum 
Germaniœ  tam  superioris  quàm  inferioris 
index ,  indicans  itinera  ex  Augustâ  vin-' 
delicorum  ad  omnes  civitates,  etc.,  in-4, 
oblong.  3"  Deliciœ  Hispaniœ  et  index 
viatorius ,  indicans  itinera  ab  urbe  To- 
leto  ad  omnes  in  Hispaniâ  civitates  et 
oppida,  1604,  in-4,  oblong.  k°  Liber  in- 
signium  aliquot  itincrum  cum  ex  Au- 
gustâ vindelicorum  tum  aliis  Europœ  , 
Asiœ  et  Africœ  civitatibus ,  oppidiSque 
maxime  nonnuUis  ad  alias  célèbres  civi- 
tates oppidaque ,  etc.,  1606,  in-4.  Le 
seul  mérite  de  ces  itinéraires  est  l'exacti- 
tude. Eichhof  vivait  à  la  fin  du  17*  siècle 
et  au  commencement  du  18*. 

*  EICmiORN  (  Jean-Conrad  )  ,  en- 
tonomologiste  prussien ,  pasteur  évangé- 
lique  à  Dantzich,  naquit  en  1718.  Toute 
sa  vie  fut  consacrée  à  l'étude  des  insectes 
que  l'on  ne  peut  apeFcevoir  à  la  simple 


/ 


EIM 

vue  ;  11  fit  un  grand  nombre  d'obser\'a- 
tions  microscopiques  dont  la  plupart  ont 
été  consignées  dans  l'ouvrage  allemand  in- 
titulé Des  Animaux  aquatiques  de  Dant- 
iich et  des  environs ,  etc.,  1775  et  1783, 
Jd-4  ,  avec  fig.  et  un  supplément  fait 
pour  répondre  aux  critiques  de  Fuessli. 
Il  est  mort  en  1790. 

EICK  ou  Van-Eick  (Hubert),  peintre, 
né  en  1366  ,  à  Maseick,  dans  la  princi- 
pauté de  Liège ,  eut  pour  disciple  son 
frère  Jean  Eick,  plus  connu  sous  le  nom 
de  Jean  de  Brurjes.  Il  fit  divers  tableaux 
pour  Philippe  le  Bon,  duc  de  Bourgogne 
qui  lui  donna  des  marques  publiques  de 
son  estime.  H  mourut  en  1426.  Voyez 
Bruges. 

*  EIDOUS  (Marc-Antoine),  littérateur, 
né  à  Marseille,  a  publié  un  grand  nombre 
de  traductions  ^ve^ne  toutes  au-dessous 
du  médiocre ,  à  l'exception  du  Diction- 
nuire  universel  de  me'decine ,  de  James, 
qu'il  a  fait  paraître  avec  Diderot  et  Tous- 
saint, 1746,  6  vol.  in-folio.  Eidous  se 
donnait  à  peine  le  temps  de  transcrire 
les  ouvrages  qu'il  publiait  :  aussi  ils  por- 
tent tous  l'empreinte  d'une  rapidité  tou- 
jours funeste  pour  le  bon  goût.  Il  a  tra- 
duit en  ouïT^V histoire  naturelle  de  10- 
/•enor^uedeGremilla,  17  58,  3  vol.  in-12; 
la  Théorie  des  sentimens  moraux  de 
Smith,  17  74,  2  vol.  in-12;rJ^gr/icaZ/«re 
c<7m7>/è<e de  Mortimer,  1765,  4  vol.  in-12: 
les  Voyages  en  Asie  de  Bell  d'Antermoni, 
1766,  3  vol.  in-12;  l'histoire  de  la  Cali- 
fornie de  Venegar,  1767,  3  vol.  in-12. 
M.  Barbier  qui  a  cité  dans  les  anonymes 
plusieurs  des  traductions  d'Eidousdit  que 
V Histoire  des  principales  découvertes 
faites  dans  les  arts,  Lyon,  1767,  in-12, 
bien  que  désignée  sur  le  titre  comme  tra- 
duit de  l'anglais  est  indiquée  dans  le  pri- 
vilège comme  étant  de  la  composition 
d'Eidous.  Il  a  aussi  travaillé  à  l'Encyclo- 
pédie. 

EIMMART  (George  Christophe),  pein- 
tre, graveur,  astronome,  né  à  Ratisbonne 
en  1658,  s'établit  à  Nuremberg;  ses  ta- 
lens  lui  firent  donner  la  place  de  direc- 
teur des  peintres  de  cette  ville  ,  oii  il 
mourut  en  1705.  La  peinture  lui  doit 
des  morceaux  estimables,  et  l'astronomie 


EIS  ag 

l'invention  de  quelques  instrumens  utiles. 
Parmi  ses  œuvres  on  remarque  une  suite 
de  portraits  de  peintres,  d'hommes  c*élè* 
bres,  des  tableaux  d'histoire ,  des  figures 
de  plantes ,  d'oiseaux  et  d'autres  sujets 
d'histoire  naturelle.  Il  a  consigné  ses  ob- 
servations astronomiques  et  météorologi- 
ques dans  50  vol.  in-ïol.  dont  un  seul  a 
été  publié  sous  le  titre  de  Iconographia 
nova  contemplationum  de  sole,  in  desola- 
tis  antiquorum philosophorum  ruderibus 
cortcej?/a,  Nuremberg,  1071,  in-fol.  Eim- 
mard  a  traduit  en  latin  la  description 
d'une  sphère  armillaire,  Altorf,  1695,  in-4 . 

EISEN  (Charles),  habile  dessinateur, 
mort  k  Bruxelles,  le  4  juillet  17  78  ,  eût 
pu  mieux  employer  ses  talens  qu'à  dessi- 
ner des  sujets  de  lubricité  et  de  luxure  ; 
tels  que  les  ^gr^re^  qui  ornent,  1°  les 
Contes  de  la  Fontaine,  1762,  2  vol.  in-8; 
2°  les  Métamorphoses d'Ovide,ilGl,  4  v. 
in-4.  Il  a  aussi  fait  les  dessins  des  figures 
de  la  Henriade,  2  vol.  in-8. 

EISENGREIN(  Guillaume),  chanoine 
de  Spire  sa  patrie ,  est  auteur  d'un  ou- 
vrage intitulé  Catalogus  testium  verl- 
tatis ,  publié  en  1565,  in-fol.  C'est  une 
liste  des  écrivains  ecclésiastiques  qui  ont 
combattu  les  erreurs  de  leurs  temps ,  et 
par  avance  celles  des  siècles  derniers. 
Flaccus  Illyricus  a  donné  un  catalogue 
des  défenseurs  du  calvinisme  auquel  il  a 
donné  foit  mal  à  propos  le  même  litre. 
(Cet  écrivain  est  mort  en  1570.) 

EISENHART  (Jean),  jurisconsulte, 
né  à  Erxleben,  dans  le  Brandebourg,  en 
1643,  fut  professeur  en  droit  et  en  morale 
àHelmstad,  dans  le  duché  de  Brunswick, 
où  il  mourut  en  1707,  après  avoir  publié 
\°  Instit.  juris  naturalis  et  moralis.  2" 
Commentatio  de  rcgali  metalli  fodina- 
rumjure,  etc.  3°  De  fide  historicâ,  Helm- 
stad,  1702  :  ouvrage  qui  prouve  qu'il 
avait  plus  de  connaissance  du  droit  que 
des  preuves  de  l'histoire. 

EISENSCHMID  (Jean-Gaspard),  doc- 
teur en  médecine ,  naquit  à  Strasbourg 
en  1 656.  Dans  un  voyage  qu'il  fit  à  Paris, 
il  se  lia  avec.plusieurs  savans,  et  parti- 
culièrement avec  Duvernay  et  Tourriefort. 
Il  fut  associé  à  l'académie  des  Sciences  au 
rétablissement  de  cette  société,  et  mourut 


5o  ELA 

en  ni2,  à  Strasbourg,  où  il  s'était  Axë 
au  retour  de  ses  voyages.  On  a  de  lui 
1"  un  Traité  des  poids,  des  mesures  de 
plusieurs  nations ,  et  de  la  valeur  des 
monnaies  des  anciens  y  Strasbourg,  1737. 
2°  Un  Traite  sur  la  figure  de  la  terre , 
ellyptico-sphe'rdide.  Il  y  soutient  fort  au 
long  l'opinion  contraire  à  celle  qui  a  pré- 
valu depuis,  sans  êtrepeut-ôtre  plus  vraie. 
Eisenschmid  cultivait  les  mathématiques, 
la  géographie  sans  négliger  la  médecine. 
On  a  encore  de  lui  Carte  de  l'empire 
d' Allemagne,  en  quatre  grandes  feuilles, 
d'une  grande  exactitude. 

*  EKAMA  (  Cornélius  ) ,  professeur 
d'astronomie  mort  le  24  février  1826  , 
a  laissé  quelques  recherches  historiques 
sur  les  géomètres  Frisons  ,  et  particuliè- 
rement sur  l'astronome  Gemma  Frisius. 

ELA  ,  roi  d'Israël ,  fils  de  Baasa,  suc- 
céda à  son  père,  l'an  930  avant  J.  C,  et 
la  2*  année  de  son  règne,  il  fut  assassiné 
dans  un  festin  par  Zamri,  un  de  ses  offi- 
ciers. —  Il  y  a  eu  du  même  nom  un  prince 
Iduméen,  successeur  d'Olibama.  — Un 
autre,  père  de  l'insolent  Séméi,  et  quel- 
ques autres  moins  connus. 

ELAD,  fils  de  Suahala ,  s'étant  rendu 
secrètement  dans  la  ville  de  Geth  avec 
son  frère  pour  la  surprendre,  fut  décou- 
vert par  les  habitans,  qui  les  égorgèrent 
tous  deux. 

'  ELAGDINE  (IVan-Perfilievilsch  ) , 
conseiller  privé  ,  grand  maître  de  la  cour 
de  Catherine  II  et  directeur  de  la  musique 
du  théâtre  de  la  cour,  naquit  en  1728. 
Il  acquit  de  son  temps  une  assez  grande 
réputation  par  des  Traductions  qui  sont 
entièrement  oubliées  maintenant  :  parmi 
les  meilleures  on  cite  V Impie ,  tragédie 
allemande  de  Brave ,  St.  -  Pétersbourg , 

17  7 1  ;  Aventures  du  Marquis  de  G , 

ibid ,  1776,  et  le  Misanthrope ,  Moscou , 
1 788  ;  il  avait  aussi  composé  une  Histoire 
de  Russie  dont  on  disait  beaucoup  de 
bien  avant  qu'elle  ne  parût  ;  elle  ne  fut 
point  publiée  de  son  vivant  ;  ou  en  a  im- 
primé seulement  le  commencement  après 
sa  mort,  Moscou,  1803,  et  l'on  n'a  pas 
été  tenté  d'en  donner  le  reste.  Il  est  mort 
en  1796. 

ELAM,  fils  de  Sem,  eut  pour  son  par- 


ELB 

tage  le  pays  qui  était  à  l'orient  du  Tigre 
et  de  l'Assyrie.  Il  fut  père  des  peuples 
connus  sous  le  nom  à'Èlamites  ou  Ela- 
me'ens.  Chodorlahomor,  qui  vainquit  les 
cinq  petits  rois  de  la  Pentapole,  et  qui  fut 
défait  par  Abraham  ,  était  souverain  de 
ces  peuples.  La  capitale  du  pays  était 
Elymaïde,  oîi  l'on  voyait  le  fameux  tem- 
ple de  Diane,  qu'Antiochus  voulut  pil- 
ler, et  oîi  il  fut  tué.  L'Ecriture  fait  men- 
tion de  quelques  autres  personnages  de 
ce  nom. 

*  ELBÉE  (N...  Gigot  d' ) ,  général 
vendéen,  né  à  Dresde  en  1752,  d'une  fa- 
mille noble  du  Poitou.  Son  père,  qui 
avait  épousé  une  Saxone,  s'était  fixé  dans 
ce  pays  et  il  y  mourut.  D'Elbée  qui  avait 
passé  une  partie  de  sa  jeunesse  au  service 
de  l'électeur  de  Saxe  vint  alors  en  France, 
et  entra  dans  un  régiment  de  cavalerie 
en  qualité  de  lieutenant  ;  mais  n'ayant 
pu  obtenir  une  compagnie ,  il  quitta  le 
service  et  se  retira  dans  sa  terre  de  Beau- 
préau  dans  le  Poitou  (  1783).  Au  com- 
mencement de  la  révolution  ,  il  suivit 
l'exemple  de  beaucoup  de  gentilshommes, 
quitta  la  France  et  se  rendit  à  Coblentz; 
mais  il  rentra  dans  son  domicile  peu  de 
temps  après ,  pour  ne  pas  éprouver  les 
peines  portées  par  la  loi  contre  les  émi- 
grés. Il  ne  prit  d'abord  aucune  part  aux 
troubles  de  la  Vendée  ;  mais  les  paysans 
des  environs  de  Beaupvéau  ayant  refusé 
d'obéir  aux  lois  sur  le  recrutement ,  et 
s'étant  soulevés  ,  vinrent  le  prier  de  se 
mettre  à  leur  tête ,  et  il  ne  crut  pas  de- 
voir se  refuser  à  cette  marque  de  con- 
fiance. Sa  troupe  fut  bientôt  jointe  par 
celles  de  MM.  de  Bonchamp,  de  Catheli- 
neau  ,  de  Stofflet,  de  La  Rochejaquclin. 
Ces  diflférens  chefs  eurent  d'abord  des 
succès  ;  tout  le  pays  se  souleva  en  leur 
faveur,  et  la  guerre  civile  prit  de  ce  mo- 
ment un  grand  caractère.  La  troupe  de 
d'Elbée  était  nombreuse,  et  il  exerçait  sur 
elle  la  plus  grande  influence.  Il  l'avait 
formée  à  la  manière  de  combattre  qui 
convenait  le  mieux  à  un  pays  coupé  de 
bois  ;  et  quoiqu'il  fût  presque  toujours 
entouré  de  forces  supérieures,  il  s'empara 
des  villes  de  Bressuire,  Tissange ,  Chàtil- 
lon  et  Angers.  Il  battit  les  troupes  repu- 


ËLS 

bllcaines  à  Thôuars,  à  La  Châtaigneraie, 
à  Vihers,  à  Saumur ,  à  Châtenay,  à  Clis- 
son  et  à  Saint-Fulgent  ;  mais  il  avait  été 
repoussé  de  Nantes,  et  fut  vaincu  à  Luçon 
et  au  combat  de  Clioliet.  Après  avoir 
échoué  devant  Nantes ,  il  fut  nommé 
généralissime  ;  et  cette  nomination  ,  ob- 
tenue, dit-on,  par  de  petites  manœuvres, 
avait  indisposé  diflcrens  chefs,  qui 
croyaient  y  avoir  plus  de  droit.  Ployez 
CiiARETTE.  On  reprocha  aussi  à  d'Elbée 
de  n'avoir  pas  suivi  les  dispositions  dont 
on  était  convenu  pour  le  plan  d'attaque 
générale;  toutefois  ce  fut  en  qualité  de 
généralissime  qu'il  commanda  à  Luçon 
et  à  Chollet;  ces  deux  affaires  furent  mal- 
heureuses pour  les  royalistes;  dans  la 
dernière  d'Elbée  fut  blessé  grièvement. 
Il  fut  transporté  à  Beaupréau ,  puis  à 
Noirmoutier  :  mais  cette  île  ayant  été 
prise  par  les  troupes  républicaines ,  il 
fut  arrêté,  traduit  devant  une  commis- 
sion militaire,  condamné  à  mort,  et  exé- 
cuté à  l'âge  de  42  ans.  Il  était  si  faible, 
qu'on  fut  obligé  de  le  porter  au  supplice 
dans  un  fauteuil.  Quelques  écrivains  lui 
ont  contesté  les  talens  militaires  :  on 
pourrait  dire,  tout  au  plus,  qu'il  n'avait 
pas  le  talent  de  conduire  une  grande  ar- 
mée ;  mais  il  avaittout  ce  qu'il  faut  pour 
faire  un  excellent  chef  de  parti.  Il  joi- 
gnait, à  une  physionomie  agréable  et  dis- 
tinguée, une  éloquence  douce,  persua- 
sive, et  il  savait,  suivant  les  circonstan- 
ces, varier  ses  formes  et  ses  tons.  Il  avait 
par-dessus  tout  un  courage  à  toute 
épreuve,  la  confiance  de  ses  soldats,  mé- 
ritée par  une  piété  sincère;  et  l'on  ne 
peut  disconvenir  que,  par  ses  nombreuses 
victoires ,  il  ne  fut  la  véritable  cause  de 
la  grandeur  momentanée  du  parti  roya- 
liste. 

*  EI.BÈNE,  ou  plutôt  Delbene  (  Al- 
phonse d'  ),  évèque  d'Alby,  né  à  Lyon, 
vers  1538,  de  Barlhélemi  d'Elbène,  pa- 
trice  de  Florence,  que  les  troubles  qui 
agitaient  cette  ville  avaient  forcé  d'en 
sortir ,  embrassa  l'état  ecclésiastique  ,  et 
s'y  avança  encore  plus  par  son  mérite  que 
par  sa  naissance.  Il  était  docteur  en  droit, 
et  avait  étudié  sous  Cujas.  Aux  connai.s- 
sances  qu'il  avait  acquises  sous  ce  maître 


ËLË  ai 

bablle,  et  a  celles  qui  convenaient  à  son 
état,  il  avait  joint  une  profonde  étude  de 
l'histoire.  Le  duc  de  Savoie  le  fit  son  his- 
toriographe, et  lui  donna  l'abbaye  d'Hau- 
te Combe,  située  dans  ses  états.  Il  attacha 
même  en  sa  faveur  au  titre  d'abbé  d'Haute- 
Combe,  celui  de  sénateur-né  du  sénat  de 
Savoie,  et  voulut  que  ce  titre  passât  aux 
abbés  ses  successeurs.  Par  la  suite,  d'El- 
bène permuta  avec  Sylvestre  de  Saluées 
l'abbaye  d'Haute-Combe  pour  celle  de 
Mézières,  diocèse  de  Châlons-sur-Saône. 
Henri  III  le  nomma  à  l'évêché  d'.\lby. 
D'Elbène  aimait  la  poésie  et  l'avait  culti- 
vée dans  sa  jeunesse  ;  il  était  en  corres- 
pondance avec  les  beaux  esprits  de  son 
temps.  Ronsard,  alors  le  prince  de  la  poé- 
sie, lui  avait  dédié  son  Art  poétique ,  et 
Just-Lipse  son  Auctuarium  veteriim  in- 
scriptioniim.  Il  était  de  l'académie  flori- 
montane  d'Annecy.  Il  mourut  le  8  février 
1608,  âgé  de  70  ans.  On  a  de  lui  :  1»  Z?e 
principntu  Sabaudiœ  et  vera  ducum 
origine,  aSnxoniœ priiicipibiis  simulque 
.  rcgum  Galliœ  e  stirpc  Hiigonis  Capeti 
dcducta,  liber  primus ,  Haute-Combe, 
1581,  in-4,  rare,  et  cité  par  Lenglet  du 
Fresnoy,  t.  3,  page  31 G  de  sa  jMéthode 
pour  étudier  l'histoire;  2"  De  gente  et 
fnmiliœ  Hugonis  Capeti  origine,  justoque 
progressa  ad  dignitatem  regiam,  Lyon, 
1595,  et  1605,  cité  par  le  même  auteur, 
ibid.,  tom.  4,  page  48  et  340;  3"  De  reg- 
no  Burgundiœ  transjurnnœ  et  Arelatis 
libri  très,  Lyon,  1602,  in-4;  4"  Tracta- 
tus  de  gente  et  familin  marchionum  Go- 
thiœ ,  qui  postea  comités  sancti  jEgidii 
et  Tolosates dicti sunt,  L^on,  1592,  1607, 
in-8.  C'est  la  généalogie  des  comtes  de 
Toulouse.  5"  De  familiœ  cistercianœ  nec~ 
non  Altœ-Combœ  sancti  Su/pitiiac  Sta- 
mediicœnobioriim  origine;  G°  VAme'deïde, 
poème  historique.  On  trouve  du  même 
quelques  vers  imprimés  avec  le  Tombeau 
d'Adrien  Turnèbe,  1565,  in-4.  On  lui  at- 
tribue des  Lettres  à  d'Epernon;  mais  elles 
ne  sont  pas  de  lui. 

*  EILBÈNE  (Alphonse  d'),  neveu  du  pré- 
cédent et  son  successeur  sur  le  siège  d'Al- 
by, accusé  d'avoir  eu  part  aux  troubles 
de  Languedoc  en  1632,  et  d'être  entré 
dans  la  révolte  du  duc  de  Montmorency, 


as 


ÊLti 


fut  obligé  «le  sortir  de  France.  Il  revint 
après  la  mort  du  cardinal  de  Richelieu  , 
fut  rétabli  sur  sou  siège  en  1645»  et  fait 
conseiller  d'état.  Il  mourut  à  Paris  le 
9  janvier  1651  à  71  ans,  et  fut  enterré 
dans  l'églisfi  du  Temple, 

*  ELBÈNE  (Alphonse  d')^évêque  d'Or- 
léans et  neveu  de  celui-ci,  était  le  cin- 
quième évèque  de  sa  famille,  y  en  ayant 
eu  un  de  Kîmes,  deux  d'Alby  et  un  d'A- 
gen.  Alphonse  d'Elbène  fut  nommé  au 
siège  d'Orléans  en  1646,  sacré  en  1647, 
et  At  en  1648  son  entrée  solennelle  dans 
sa  ville  épiscopale.  Il  signala  cette  entrée 
par  la  délivrance  de  368  prisonniers.  Elle 
fut  remarquable  par  un  événement  singu- 
lier. Une  i-ixe  s'étant  élevée  pendant  la 
cérémonie ,  pour  la  préséance  entre  les 
gens  des  seigneurs  et  barons  obligés  d'y 
assister,  le  nouvel  évêque  descendit  de  sa 
chaire  épiscopale,  puis,  retroussant  sa 
chappe  sur  ses  épaules,  et  tenant  sa  mi<- 
tre  d'une  main,  de  l'autre  il  saisit  au  col- 
let l'un  des  plus  mutins,  l'envoya  en  pri- 
son,  et  rétablit  ainsi  le  calme.  En  16âl, 
il  assista  à  l'assemblée  générale  du  clergé. 
Dans  un  de  ces  synodes,  il  défendit  la 
lecture  de  V Apologie  des  casuistes ;  et, 
dans  celui  de  1664,  il  publia  pour  son 
diocèse  des  Statuts  synodaux ,  qui  sont 
regardés  comme-un  modèle  en  ce  genre. 
Il  avait  achevé  à  ses  frais  la  construction 
du  palais  épiscopal.  Il  mourut  le  20  mai 
1666. 

ELBENE.  Foyez  Dblbenk  (Benoit  d'). 

ELBŒUF  ou  Elbeuf  (  René  de  Lor- 
raine, marquis  d'),  était  le  septième  ûls 
de  Claude,  duc  de  Guise,  qui  vint  s'éta- 
blir en  France  ;  il  fut  la  tige  de  la  bran- 
che desducsd'Elbœuf,  et  mourut  eu  156G. 
Charles  II,  son  petit-fils,  mort  en  1667, 
^vait  épousé  Catherine  Henriette,  fille  de 
Hmri  IV  et  de  Gabrielle  d'Estrëes,  qui 
mourut  en  1663.  Ils  eurent  part  l'un  et 
l'autre  aux  intrigues  de  cour  sous  le  mi- 
ttistère  du  cardinal  de  Richelieu.  Leur 
postérité  masculine  finit  en  leur  petit-fils 
Emmanuel-Maurice,  duc  d'Elbœuf,  qui 
aprè.s  avoir  servi  l'empereur  dans  le 
royaume  de  Naples,  revint  en  France  en 
1719,  et  finit  sa  longue  carrière  en  176-3, 
dans  sa  86"  année,  sans  postérité.  Ou 


lui  doit  la  découverte  de  la  ville  à^HercU* 
lanum.  Le  titre  de  duc  d'Elbœuf  est  passé 
à  la  branche  d'Harcourt  et  d'Armagnac» 
qui  descendait  d'un  frèrç  de  Charles  II. 

ELÉAZAR,  fils  d'Aaron»  et  sou  sucr 
cesseur  dans  la  dignité  de  grand-prêtre , 
l'an  1452  avant  J.  C,  suivit  Josué  dans 
la  terre  de  Chanaan,  et  mourut  après 
12  ans  de  pontificat. 

ELÉAZAR,  fils  d'Aod,  frère  d'Isaï,  uu 
des  trois  braves  qui  traversèrent  avec  im- 
])étuosité  le  camp  des  ennemis  du  peuple 
de  Dieu ,  pour  aller  quérir  au  roi  David 
de  l'eau  de  la  citerne  qui  était  proche  la 
porte  de  Bethléem.  Une  autrefois,  les  Is- 
raélites saisis  d'une  frayeur  subite,  à  la 
vue  de  l'armée  nombreuse  des  Philistins, 
prirent  lâchement  la  fuite ,  et  abandon- 
nèrent David.  Eléazar  seul  arrêta  la  fu- 
reur des  ennemis ,  et  en  fit  un  si  grand 
carnage  que  son  épée  se  trouva  collée  à 
sa  main,  l'an  1047  avant  J.  C. 

ELÉAZAR,  fils  d'Onias,  et  frère  de  Si- 
mon le  Juste,  succéda  à  son  frère  dans  la 
souveraine  sacrificature  des  Juifs.  C'est 
lui  qui  envoya  72  savans  de  la  nation  à 
Ptolémée  Philadelphe,  roi  d'Egypte,  pour 
traduire  les  livres  ^aints  d'hébreu  en  grec, 
vers  l'an  27  7  avant  J.  C.  (zir»yes  Abistée). 
C'est  la  version  qu'on  nomme  des  Sep" 
tante ^  et  qui,  suivant  la  lemarque  des 
Pères,  a  été  pour  les  nations  un  moyen 
précieux  d'instruction  et  de  préparation 
à  la  doctrine  de  l'Evangile  (quoiqu'il  y 
eût  une  version  antérieure,  mais  moins 
accréditée  et  moins  répandue  ,  dont  Eu- 
sèbe  parle  dans  sa  Préparation).  Jésus- 
Christ  et  les  apôtres  citent  cette  version 
de  préférence  à  l'hébreu,  soit  parcequ'elle 
était  d'un  grand  usage  et  plus  générale- 
ment connue,  parmi  les  Juifs  même,  au 
moins  ceux  qu'on  appelait  hellénistes , 
soit  parce  «fue  le  moment  approchait  ou 
les  nations  qui  ne  savaient  pas  l'faébreii 
allaient  recueillir  avec  avidité  l'instruc- 
tion et  les  lumières  de  ces  livres  divins; 
Un  autre  avantage  inappréciable  delà  ver* 
sion  des  Septante,  c'est  la  détermination 
des  véritables  leçons  et  du  vrai  sens,  faite 
dans  un  temps  oii  l'hébreu  était  une  lan- 
gue vivante  et  bien  connue,  où  la  tradi- 
tion était  dans  toute  sa  force,  oii  le  rcs-' 


ELE 

pect  qu'on  portait  à  ces  divins  oracles, 
l'élude  assidue  qu'on  en  faisait ,  les  in- 
lerprélalions  réfléchies  et  traditionnelles 
des  docteurs  de  la  loi ,  mettaient  ce  dé- 
pôt sacré  à  l'abri  de  la  légèreté  et  de 
la  témérité  des  esprits.  Encore  aujour- 
d'hui la  version  des  Septante  est  la  ter- 
reur des  hermeneutes  hétérodoxes  qui , 
par  le  moyen  des  points  massorétiques , 
invention  moderne  et  sans  autorité  (  roy. 
Cappel  et  Masclef),  et  d'autres  subti- 
lités grammaticales,  dénaturent  les  li- 
vres saints,  les  dépouillent  de  tout  ce 
qu'ils  ont  de  surnaturel  et  de  divin,  et 
en  font  le  jouet  de  l'imagination  et  du 
caprice. 

ELÉAZAR ,  vénérable  vieillard  de  Jé- 
rusalem ,  et  un  des  principaux  docteurs 
de  la  loi,  sous  le  règne  d'Antiochus  Epi- 
phanes,  roi  de  Syrie.  Ce  prince  ayant 
voulu  lui  faire  manger  de  la  chair  de 
porc,  il  aima  mieux  perdre  la  vie  que  de 
transgresser  la  loi.  Quelques  gentils  ou 
juifs  apostats  de  ses  anciens  amis,  touchés 
pour  lui  d'une  fausse  compassion,  le  sup- 
plièrent de  trouver  bon  qu'on  lui  appor- 
tât des  viandes  dont  il  lui  «tait  permis  de 
manger,  afin  qu'on  pût  feindre  qu'il  avait 
mangé  des  viandes  du  sacrifice ,  selon  le 
commandement  du  roi,  et  par  ce  moyen 
le  sauver  de  la  mort  ;  mais  Eléazar  ne  vou- 
lut jamais  y  consentir.  «  Il  est  indigne  de 
»  l'âge  oii  nous  sommes,  dit-il,  d'user  de 
»  cette  fiction  ;  elle  serait  cause  que  plu- 
u  sieurs  jeunes  gens,  s'imaginant  qu'E- 
»  léazar,  à  l'âge  de  quatre-vingt-dix  ans, 
»  aurait  passé  de  la  vie  des  juifs  à  celle 
j»  des  païens,  seraient  eux-mêmes  trom- 
»  pés  par  cette  feinte ,  dont  j'aurais  usé 
»  pour  conserver  un  petit  reste  de  cette 
»  vie  corruptible.  Par  là  j'attirerais  une 
»  tache  honteuse  sur  moi,  et  l'exécration 
»  des  hommes  sur  ma  vieillesse.  Car  en- 
»  core  que  j'échappasse  présentement  aux 
»  supplices  des  hommes ,  je  ne  pourrais 
»  néanmoins  fuir  la  main  du  Tout-Puis- 
»  sant ,  ni  pendant  ma  vie ,  ni  après  ma 
j)  mort.  En  mourant  courageusement,  je 
»  paraîtrai  digne  de  la  vieillesse  oîi  je 
»  suis,  et  je  laisserai  aux  jeunes  gens  un 
»  exemple  de  fermeté ,  en  souffrant  avec 
»  constance  et  avec  joie  une  mort  bouo- 

V. 


ELE 


33 


»  rable  pour  le  sacré  culte  de  nos  lois 
M  très  saintes.  » 

ELÉAZAR,  le  dernier  des  cinq  fils  de 
Mathathias ,  et  frère  des  Machabées ,  les 
seconda  dans  les  combats  livrés  pour  Ja 
défense  de  leur  religion.  Dans  la  bataille 
que  Judas  Machabée  livra  contre  l'armée 
d'Antiochus  Eupator ,  il  se  fit  jour  à  tra- 
vers les  ennemis  pour  tuer  un  éléphant , 
qu'il  crut  être  celui  du  roi.  Il  se  glissa 
sous  le  ventre  de  l'animal ,  et  le  perça  à 
coups  d'épée  ;  mais  il  fut  accablé  sous 
son  poids  et  reçut  la  mort  en  la  lui  don- 
nant. • 

ELÉAZAR,  ma|j^ien  célèbre  sous 
l'empire  de  Vespasien ,  qui ,  par  le  moyen 
d'une  herbe  enfermée  dans  un  anneau  , 
délivrait  les  possédés ,  en  leur  mettant 
cet  anneau  sous  le  nez.  Il  commandait 
au  démon  de  renverser  une  cruche  plein 
d'eau  et  le  démon  obéissait.  C'est  l'his- 
torien Josèphe  qui  rapporte  ces  particu- 
larités ;  mais  on  sait  quelle  est  la  crédulité 
de  cet  historien,  à  l'égard  des  faits  ou 
faux  ou  très  incertains ,  tandis  qu'il  ré- 
pand des  doutes  sur  les  prodiges  les 
mieux  constatés  des  livres  saints.  Du 
reste  ,  si  Eléazar  était  réellement  un  ma- 
gicien ,  les  jeux  qu'il  exerçait  de  concert 
avec  le  démon  n'ont  rien  d'incroyable. 
Voyez  Le  Brun  ,  Delrio,  etc. 

EI..ÉAZAR,  capitaine  juif,  se  jeta 
dans  le  château  de  Macheron ,  et  le  dé- 
fendit très  vigoureusement  après  le  siège 
de  Jérusalem.  Cette  place  n'aurait  pas 
été  prise  si  aisément ,  sans  le  malheur 
qui  arriva  à  Eléazar.  Il  s'était  arrêté  au 
pied  des  murailles ,  comme  pour  braver 
les  Romains,  quand  un  Egyptien  l'enleva 
adroitement  et  le  porta  au  camp.  Le  gé- 
néral ,  après  l'avoir  fait  battre  de  verges, 
fit  élever  une  croix  comme  pour  le  cru- 
cifier. Les  assiégés  avaient  conçu  pour 
lui  une  si  haute  estime,  qu'ils  aimèrent 
mieux  rendre  la  place  ,  que  de  voir  périr 
un  homme  si  digne  de  vivre  par  son  cou- 
rage et  son  zèle  patriotique.  Flave  Josè- 
phe ,  Hist.  liv.  7  ,  ch.  25. 

ELÉAZAR ,  autre  officier  juif,  voyant 
la  ville  de  Masséda  ,  dans  laquelle  il  s'é- 
tait jeté ,  réduite  aux  abois ,  persuada  à 
ses  compagnons  de  se  taer  eux-mêmes , 

3 


34  ELE 

plutôt  que  de  tomber  entre  les  maitts  des 
Romains.  Ils  le  crurent,  cl  s'égorgèrent 
les  uns  les  autres.  Flave  Josèplie ,  Hist. 
liv.  7  ,  chap.  35. 

ELECTE,  fut  une  des  premières 
femmes  qui  se  convertirent  à  Jcsus-Christ. 
C'est  celle  à  qui  l'apôtre  saint  Jean  écri- 
vit ,  pour  la  conjurer  de  s'éloigner  de  la 
compagnie  des  hérétiques  Basil idc  et 
Cerinlhe. 

ELÉONORE  DE  CASTILLE,  reine 
de  Navarre,  fille  de  Henri  II,  dit  le  Ma- 
gnifique ,  roi  de  Castille ,  fut  mariée  en 
137  5  à  Charles  III,  fit  le  JNoble  ,  roi  de 
Navarre.  S'élant  brouillée  avec  son 
époux ,  elle  se  retira  en  Caslille,  oii  elle 
excita  quelques  séditions  contre  le  roi 
Henri  111  son  neveu.  Ce  prince  fut  con- 
traint de  l'assiéger  dans  le  château  de 
Roa  ,  et  la  renvoya  au  roi  Charles ,  son 
mari,  qui  la  reçut  avec  beaucoup  de  gé- 
nérosité et  en  eut  huit  enfans.  Eléonore 
mourut  hPampelune,  en  141G,  avec  la 
réputation  d'une  femme  d'esprit,  mais 
d'un  caractère  inquiet. 

ELÉONORE  D'AUTRICHE,  reine 
de  Portugal  et  de  France ,  était  fille  de 
Philippe  I  et  de  Jeanne  de  Castille,  et 
sœur  des  deux  empereurs  Charles-Quint 
et  Ferdinand  I.  Elle  naquit  à  Louvaiu  , 
en  1498  ,  et  épousa  en  1519  Emmanuel , 
roi  de  Portugal.  Après  la  mort  de  ce 
prince,  elle  épousa  en  1530  François I, 
qui  avait  perdu  sa  première  femme  en 
1524.  Sa  bonté  naturelle,  .ses  grâces  lui 
gagnèrent  pendant  quelque  temps  le 
cœur  de  son  époux ,  et  elle  ménagea  une 
entrevue  entre  lui  efCharles-Quint  pour 
terminer  leurs  divisions.  Mais  les  galan- 
teries de  François  lui  donnèrent  bientôt 
d'autres  conseillères.  Eléonore  vivait 
dans  la  retraite  au  milieu  de  la  cour,  ne 
s'occupant  que  des  exercices  de  piété. 
Après  la  mort  du  roi,  elle  se  retira  d'a- 
bord aux  Pays-Bas,  et  ensuite  en  Espagne, 
où  elle  mourut  à  Talavéra  ,  en  1 558 , 
sans  avoir  donné  d'enfans  à  François  I. 
(  Hubert  Thomas  a  donné  de  très  grands 
détails  sur  cette  princesse  dans  les  Annales 
de  vUn  Frcdcrici  II ,  Palalini.  ) 

ELÉONORE,  duchesse  de  G uienne, 
succéda  à  son  père  Guillaume  IX,  en 


ELE 

1138  ,  à  l'àgc  de  15  ans,  dans  ce  beau 
duché  qui  comprenait  alors  la  Gascogne , 
la  Saintonge  et  le  comté  de  Poitou.  Elle 
épousa  la  même  année  Louis  VII,  roi  de 
France.  Ce  monarque  raccourcit  ses  che- 
veux et  se  fit  raser  la  barbe ,  sur  les  re- 
présentations du  célèbre  Pierre  Lom- 
bard ,  qui  lui  dit ,  d'après  saint  Paul , 
qu'il  n'était  pas  séant  qu'un  homme  s'a- 
musât à  nourrir  avec  soin  une  longue 
chevelure.  Lombard  ne  faisait  peut-être 
pas  attention  que  la  réflexion  de  l'apôtre 
était  relative  au  costume  de  son  temps 
où  les  longues  chevelures  distinguaient 
les  femmes  des  hommes.  Eléonore  ,  vive, 
légère  et  badine ,  railla  le  roi  sur  ses 
cheveux  courts  et  son  menton  rasé.  Une 
femme  qui  commence  à  trouver  son  mari 
ridicule,  ne  tarde  guère  à  le  trouver 
odieux ,  surtout  si  elle  a  quelque  pen- 
chant à  la  galanterie.  Louis  ayant  mené 
son  épouse  à  la  Terre-Sainte ,  elle  se  dé- 
dommagea des  ennuis  que  lui  causait  ce 
long  voyage  a^vec  le  prince  d'Antioche , 
et  un  jeune  turc ,  nommé  Saladiu.  Le 
roi  aurait  dû  ignorer  ces  affronts ,  ou  y 
remédier  tout* de  suite.  A  son  retour  en 
France,  il  lui  en  fit  des  reproches  très 
piquans.  Eléonore  y  répondit  avec  beau- 
coup de  hauteur ,  et  finit  par  lui  proposer 
le  divorce.  Leurs  querelles  s'aigrirent  de 
plus  en  plus;  et  enfin  ils  firent  casser 
leur  mariage,  sous  prétexte  de  parenté, 
en  1152.  Eléonore  ,  dégagée  de  ses  pre- 
miers liens  ,  en  contracta  de  seconds  six 
semaines  après  avec  Henri  H,  duc  de 
Normandie,  depuis  roi  d'Angleterre,  à 
qui  elle  porta  en.,  dot  le  Poitou  et  la 
Guienne.  De  là  vinrent  ces  guerres  qui 
ravagèrent  la  France  pendant  300  ans. 
Eléonore  eut  4  fils  et  une  fille  de  son 
nouveau  mariage.  Dès  l'année  llG2,ellc 
céda  la  Guienne  à  Richard ,  son  second 
fils ,  qui  en  rendit  hommage  au  roi  de 
France.  Elle  mourut  en  1204  ,  avec  une 
réputation  d'esprit  et  de  coquetterie. 
Larrey  publia  une  Histoire  romanesque  de 
celte  princesse,  à  Rotterdam,  en  1692, 
in-12. 
ELÉONORE  DE  GONZAGUE.  Toy. 

GONZACUK. 

ELEONORE  DE  BAVIÈRE  NEU- 


ELE 

BOURG.  Voyez  la  fin  de  l'article  LÉo- 
POLn,  empereîir. 

ELEUTIiÈRE  (Saint),  natif  de  Nico- 
polis,  d'abord  diacre  du  pape  Anicet,  fut 
ordonné  prêtre,  et  ensuite  élu  pape  après 
la  mort  de  Soter,  l'an  177.  Il  combattit 
avec  beaucoup  de  zèle  les  erreurs  des  va- 
lentiniens,  pendant  son  pontificat.  Les 
choses  qui  rendent  célèbre  ce  pontificat , 
sont  la  mort  glorieuse  des  martyrs  de 
Lyon ,  et  l'ambassade  qu'il  reçut  de  Lu- 
cius,  roi  de  la  Grande-Bretagne,  pour  de- 
mander un  missionnaire  qui  lui  enseignât 
la  religion  chrétienne.  Saint  Eleuthère 
mourut  en  193,  après  avoir  gouverné  l'E- 
glise pendant  plus  de  16  ans. 

ELEUTHÈRE  (Saint),  célèbre  évêque 
de  Tournay,  naquit  en  cette  ville  de  pa- 
ïens chrétiens.  Sa  famille  avait  été  con- 
vertie par  saint  Piat,  1 50  ans  auparavant. 
Depuis  la  mort  de  leur  saint  apôtre,  les 
chrétiens  de  Tournay  avaient  beaucoup 
dégénéré  et  leur  foi  s'éteignait  de  jour 
en  jour  par  le  commerce  des  païens ,  et 
les  désordres  des  rois  de  France ,  encore 
idolâtres,  qui  y  faisaient  alors  leur  rési- 
dence. Tel  était  l'état  de  l'église  de  cette 
ville ,  lorsque  saint  Eleuthère  en  fut  fait 
évêque.  Il  fut  sacré  en  486,  dix  ans  avant 
le  baptême  de  Clovis.  Il  arracha  un  grand 
nombre  de  français  aux  superstitions  du 
paganisme,  et  défendit  victorieusement 
le  mystère  de  l'incarnation,  attaqué  par 
les  hérétiques.  Son  zèle  à  maintenir  le 
dépôt  de  la  foi,  lui  coûta  la  vie.  Des  scé- 
lérats obstinés  dans  l'erreur  lui  portèrent 
à  la  tête  un  coup  dont  il  mourut  le  1*="^ 
juillet  532.  On  trouve  dans  la  Biblio- 
thèque des  Pères  plusieurs  sermons  at- 
tribués à  ce  saint  évêque;  mais  il  n'est 
pas  certain  qu'ils  soient  de  lui,  si  l'on  en 
excepte  trois  :  l'un  sur  l'Incarnation, 
l'autre  sur  la  Naissance  de  Jésus-Christ , 
et  le  troisième  sur  l'Annonciation.  Sa  vie 
a  été  écrite  dans  le  9*'  siècle,  par  consé- 
quent long-temps  après  la  mort  de  saint 
Eleuthère.  L'auteur  se  trompe  en  le  fai- 
sant contemporain  de  saint  Médard,  et  en 
plaçant  sa  naissance  sous  le  règne  de  Dio- 
clétien.  Un  auteur  postérieur  de  quelques 
années  donna  plus  d'étendue  à  cette  vie 
et  y  ajouta  l'histoire  de  la  translation  des 


ELI  35 

reliques  du  saint,  faite  en  897.  Enfin  un 
troisième  auteur  y  a  inséré  depuis  l'his- 
toire de  ses  miracles  et  de  la  translation 
de  ses  i-eliques ,  qui  se  fit  à  Tournay  en 
1164. 

ELEUTHÈRE,  exarque  d'Italie  pour 
l'empereur  Héraclius ,  ne  fut  pas  plus  tôt 
arrivé  à  Ravenne,  qu'il  y  fit  le  procès  aux 
meurtriers  de  Jean  son  prédécesseur.  Il 
se  rendit  ensuite  à  Naples ,  où  ayant  as- 
siégé Jean  Conopsin,  qui  lui  avait  fermé  les 
portes,  il  le  contraignit  de  se  rendre  à  dis- 
crétion ,  et  le  fit  mourir  ;  mais  Eleuthère, 
après  avoir  puni  les  révoltés,  tomba  lui- 
même  dans  la  rébellion.  L'empire  était 
agité  au  dedans  et  au  dehors.  Il  profita 
de  ces  circonstances,  pour  se  rendre  maî- 
tre de  ce  qui  appartenait  à  l'empereur 
dans  l'Italie.  Après  la  mort  du  pape  Dieu- 
donné  en  617,  il  cïut  que  le  saint  Siège 
serait  vacant  long-temps ,  et  que  tandis 
que  le  peuple  serait  occupé  à  élire  un 
nouveau  pontife ,  il  lui  serait  aisé  de  se 
saisir  de  la  ville.  Dans  celte  vue,  il  traita 
son  armée  encore  plus  favorablement  qu'il 
n'avait  fait ,  lui  fit  distribuer  beaucoup 
d'argent,  et  lui  promit  de  grands  avan- 
tages ;  mais  les  soldats  et  les  officiers , 
détestant  sa  rébellion,  se  jetèrent  sur 
lui,  l'assommèrent  et  lui  coupèrent  la 
tête  qu'ils  envoyèrent  à  Héraclius  vers  la 
fin  de  décembre  6 1 7  - 

ELEUTHÈRE  (Augustin),  luthérien 
allemand ,  dont  on  a  un  petit  traité  sin- 
gulier et  devenu  rare  :  De  arbore  scien- 
tice  boni  et  mali,  Mulhausen,  1560,  in-8. 

*  ELGER  (Ottomar),  peintre,  né  à  Got- 
tembourg  en  1632,  excellait  à  peindre  les 
fleurs  et  les  fruits.  Appelé  à  la  cour  de 
Berlin,  il  eut  la  qualité  de  premier  pein- 
tre de  l'électeur  Frédéric-Guillaume ,  et 
fut  comblé  de  ses  bienfaits.  Ses  tableaux 
sont  très  recherchés  en  Allemagne. 

ELIAR,  le  troisième  de  ces  vaillaiis 
hommes  qui  se  joignirent  à  David  quand 
il  fuyait  la  persécution  de  Saiil.  Il  rendit 
à  ce  prince  afiligé  des  services  très  con- 
sidérables dans  toutes  ses  guerres. 

ELIACIM,  grand-prêtre  des  Juifs  sous 
le  roi  Manassès.  Ce  prince  étant  devenu 
un  modèle  de  pénitence  depuis  sa  prison, 
ne  s'appliquait  qu'à  réparer  les  maux 


36  ELI 

qu'il  avait  faits  à  la  religion  et  à  l'état  ;  et 
pour  cela  il  avait  rais  toute  sa  confiance 
dans  Eliacim ,  et  ne  faisait  rien  sans  son 
conseil.  Celui-ci  se  trouvait  ainsi  chef  de 
la  religion,  et  ministre  d'état.  Il  est  quel- 
quefois nommé  Joakim  -.  plusieurs  savans 
croient  qu'il  est  auteur  du  livre  de  Ju- 
dith. —  11  y  avait  encore  de  ce  nom  un 
sacrificateur  qui  revint  de  Babjione  avec 
Zorobabel  ;  un  fils  d'Abiud,  parent  de  Jé- 
sus-Christ selon  la  chair.  < 
ELIACIM,  roi  de  Juda.  Voyez  Joa- 

CHIM. 

*ELIÇAGARAY  (Dominique),  ecclé- 
siastique, membre  du  conseil  royal  de 
l'instruction  publique,  naquit  vers  17C0 
dans  le  diocèse  de  Bayonne.  Il  embrassa 
presque  en  nicrae  temps  la  carrière  de 
l'enseignement  et  celle  de  l'église ,  et  fut 
de  bonne  heure  professeur  de  philosophie 
à  Toulouse  ;  plus  tard  il  devint  officiai  de  la 
Basse-Navarre.  En  1790  il  refusa  le  ser- 
ment que  la  révolution  avait  imposée 
aux  ecclésiastiques,  passa  en  Espagne  et 
revint  en  France  sous  le  Directoire.  Ce 
fut  à  peu  près  à  cette  époque  qu'il  fit  pa- 
raître une  brochure  en  faveur  des  droits 
de  l'Eglise.  Cet  écrit  lui  valut  l'estime  de 
l'abbé  Maury  qui  chercha  à  se  l'attacher,  et 
lui  envoya  ,  lorsqu'il  fut  évêque  de  3ion- 
tefiascone ,  une  nomination  de  grand-vi- 
caire. Lorsque  l'abbé  Maury  devint  car- 
dinal et  fut  nommé  archevêque  de  Paris , 
il  fit  les  mêmes  offres  à  l'abbé  Eliragaray, 
qui  les  refusa.  Successivement  nommé 
proviseur  du  lycée  de  Pau  ,  professeur 
de  philosophie  ,  doyen  de  la  faculté  des 
lettres,  recteur  de  l'académie,  il  se  fit 
remarquer  par  la  bonté  de  son  enseigne- 
ment et  par  la  sage  administration  des 
établissemens  qui  lui  étaient  confiés.  Pen- 
dant les  Cent-jours  ,  il  accompagna  la 
duchesse  d'Angoulême  à  Londres  en  qua- 
lité d'aumônier.  En  1816,  il  fut  appelé 
au  conseil  royal  de  l'instruction  publique, 
place  dans  laquelle  il  a  fait  preuve  de 
son  zèle  accoutumé  pour  les  intérêts  de 
l'Eglise.  Chargé  par  M.  de  Corbière  d'in- 
specter les  établissemens  de  l'université 
dans  le  midi  de  la  France ,  il  était  à  Mar- 
seille lorsque  le  journal  de  cette  ville  jeta 
sur  lui  le  ridicule  le  plus  scandaleux  en 


ELI 

publiant  un  discours  qu'il  aurait  adressé 
aux  maîtres  du  collège.  L'abbé  Eliraga- 
ray fut  rappelé  à  Paris ,  oii  dès  lors  sa 
santé  s'est  altérée  sensiblement.  Il  est 
mort  le  22  décembre  1822,  emportant 
dans  la  tombe  la  réputation  d'un  homme 
de  bien. 

ELICHMAN  (Jean),  Danois,  selon 
quelques-uns,  et,  selon  d'autres,  Silésien, 
pratiqua  la  médecine  à  Leyde,  et  mourut 
en  1639.  Il  était  savant  dans  les  langues 
orientales,  et  nous  a  laissé  des  remarques 
sur  la  langue  perse ,  qui  ont  servi  à  Louis 
de  Dieu  pour  composer  sa  grammaire 
perse.  Il  prétend  que  la  langue  allemande 
a  une  origine  commune  avec  la  langue 
perse.  On  a  encore  île  lui  \°  De  usu  lin- 
guœ  arable  ce  in  medicina,  Icnn ,  1636. 
2°  De  termine  vitœ  sccundum  mentem 
Orientdlium,  Leyde,  1639,  in-4.  Foyez 
Ramus,  Paneg.  Ling.  Oriental,  page  12. 

EUE,  prophète  d'Israël,  originaire  de 
Thesbé,  vint  à  la  cour  du  roi  Achab,  l'an 
912  avant  J.  C.  Il  annonça  a  ce  prince 
impie  les  menaces  du  Seigneur,  et  lui 
prédit  le  fléau  de  la  sécheresse  et  de  la 
famine.  Dieu  lui  ayant  ordonné  de  se  ca- 
cher, il  se  retira  dans  un- désert,  où  des 
corbeaux  lui  apportaient  sa  nourriture. 
Il  passa  de  cette  solitude  à  Sarepta ,  ville 
des  Sidoniens,  y  multiplia  l'huile  de  la 
veuve  qui  le  reçut.  Achab  rendait  à  l'i- 
dole de  Baal  un  culte  sacrilège.  Le  pro- 
phète vint  en  sa  présence  pour  le  lui  re- 
procher. Il  assembla  le  peuple,  donna  le 
défi  aux  prêtres  de  Baal  ;  et  sa  victime 
ayant  été  seule  consumée  par  le  feu  tom- 
bé du  ciel,  il  les  fit  mettre  à  mort.  Me- 
nacé par  Jézabel,  femme  d'Achab,  irritée 
du  châtiment  des  faux  prophètes,  il  s'en- 
fuit dans  le  désert  :  un  ange  l'y  nourrit 
miraculeusement.  Il  se  retira  ensuite  à 
Horeb,  où  Dieu  lui  apparut,  et  lui  or- 
donna d'aller  sacrer  Hazaël  roi  de  Syrie , 
et  Jéhu  roi  d'Israël.  Les  miracles  d'Elie 
n'avaient  point  changé  Achab.  Le  pro- 
phète vint  encore  le  trouver  pour  lui  re- 
procher le  meurtre  de  Naboth,  qu'il  avait 
fait  mourir  après  s'être  emparé  de  sa  vi- 
gne. Il  prédit  peu  de  temps  après  à  Ocho- 
sias,  qu'il  mourrait  de  la  chute  qu'il  avait 
eue ,  et  fit  tomber  le  feu  du  ciel  sur  les 


ÊLI 

envoyés  de  ce  prince.  Le  ciel  l'enviait  à 
la  terre  ;  il  fut  enlevé  par  un  chariot  de 
feu  vers  l'an  895  avant  J.  C.  Elisée  son 
disciple  reçut  son  esprit  et  son  manteau. 
On  fait  Ja  fête  de  l'enlèvement  d'Elie , 
dans  l'église  grecque.  On  croit  qu'il  fut 
transporté,  non  dans  le  séjour  de  la  divi- 
nité, mais  dans  quelque  lieu  au  dessus  de 
la  terre,  ou  sur  la  terre  même,  mais  écar- 
té et  inconnu.  ISous  disons  on  croit  ;  car 
dans  des  questions  aussi  délicates,  il  n'est 
pas  permis  de  décider ,  et  de  vouloir  pé- 
nétrer ce  que  Dieu  s'est  plu  à  nous  ca- 
cher ;  mais  comme  l'Ecriture  nous  ap- 
prend qu'Elie  reparaîtra  sur  la  terre  avant 
le  dernier  avènement  du  fils  de  Dieu ,  il 
est  naturel  de  croire  qu'il  n'est  pas  mort, 
et  que  la  mission  qui  lui  reste  à  remplir, 
est  celle  d'un  homme  voyageur,  qui  n'est 
pas  arrivé  encore  au  ternie  de  la  félicité. 
—  On  sait  que  les  carmes  ont  long-temps 
regardé  Elie  comme  leur  fondateur.  Foy. 
Alrert(S.),  patriarche  de  Jérusalem,  et 
Papebroch. 

ELIE  ou  Elias  I.evita  ,  rabbin  du  IG* 
siècle,  natif  d'Allemagne,  passa  la  plus 
grande  partie  de  sa  vie  à  Rome  et  à  Ve- 
nise ,  oii  il  enseigna  la  langue  hébraïque 
à  plusieurs  .savans  de  ces  deux  villes  et 
même  à  quelques  cardinaux.  C'est  le  cri- 
tique le  plus  éclairé  que  les  juils  moder- 
nes, presque  tous  superstitieux,  aient  eu. 
Il  a  rejeté  ,  comme  des  fables  ridicules , 
la  plupart  de  leurs  traditions.  On  lui  doit 
t"  Lcxicon  chaldaicum  ,  Isne ,  1541, 
in-fol.  2"  TradUio  doctrince ,  en  hébreu, 
Venise,  1538  ,  in-4  ;  avec  la  version  de 
Munster,  Bâle,  1539,  in-8.  3°  Collcctio 
locorum,  in  quibus  Chaldceus paraphras- 
tes  intcvjecit  nomcn  Messiœ  Christi, 
latine  versa  a  Genebrando,  Paris,  1752, 
in-8.  4°  Plusieurs  Grammaires  hébraï- 
ques ,  in-8  ,  nécessaires  à  ceux  qui  veu- 
lent approfondir  les  difficultés  de  cette 
langue.  5°  Nomenclatura  hebraica,  Tsnc, 
1 542  ,  in-4.  Idem,  en  hébreu  et  en  latin, 
par  Drusius,  Francker,  1681  ,  in-8. 

ELIE  DE  BEAUMOJNT.  Foyes  Beau- 
mont. 

ELIEN  ,  Claudiiis  uElianus ,  rhéteur 
et  philosophe  ,  vit  le  jour  à  Prenesle , 
aujourd'hui  Palcstrine.   Quoique  né  en 


ELI 


37 


Italie,  et  n'en  étant  presque  jamais  sorti, 
il  fit  de  si  grands  progrès  dans  la  langue 
grecque ,  qu'il  ne  le  cédait  pas  aux  écri- 
vains athéniens  pour  la  pureté  du  lan- 
gage. Il  enseigna  d'abord  la  rhétorique  à 
Rome  ;  mais  dégoûté  bientôt  de  cette 
profession,  il  se  mit  à  composer  plusieurs 
ouvrages.  Ceux  que  nous  avons  de  lui 
sont,  1°  quatorze  livres  intitulés:  Ilisio- 
riœ  varice  ,  qui  ne  sont  pas  venues  en- 
tières jusqu'à  notre  siècle.  La  meilleure 
édition  est  celle  qu'Abraham  Gronovius 
publia  à  Leydeen  17  31,  2  vol.  in-4,  avec 
de  savans  commentaires.  La  varic'tc  de 
ces /u,yto/re^  est  effectivement  fort  grande. 
On  y  apprend  des  choses  tout-à-fait  iu- 
cfcyables  ,  quelquefois  plaisantes ,  par 
l'excès  d'absurdité  ,  comme  lorsqu'on  voit 
les  cochons  devenir  les  fondateurs  de  l'a- 
griculture ;  car  ce  sont  eux,  suivant  Elien, 
qui  nous  ont  appris  le  labourage.  «  Moïse, 
»  dit  un  auteur  qui  a  sagement  raisonné 
)>  là-dessus,  nous  en  découvre  une  plus  no- 
»  ble  origine,  lorsqu'il  nous  dit  (Ge«.  ///, 
»  'f.  23) ,  que  Dieu  lui-même  en  imposa 
3>  la  loi.  Il  faut  convenir,  ajoute-t-il,  que 
M  les  philosophes  de  tous  les  temps  nous 
i>  ont  appris  cfl'ectivement  d'étranges 
w  choses  ;  mais  ce  qui  est  particulière- 
))  ment  remarquable ,  c'est  la  prédilec- 
»  tion  qu'ils  ont  toujours  eue  pour  les 
«  cochons.  Tandis  qu'Elien  nous  les  donne 
»  pour  les  fondateurs  de  l 'a gi-i culture , 
»  Pyrrhon  en  fait  le  modèle  des  sages  » 
(  voyez  son  article  ).  «  Que  dire  de  la 
»  plus  nombreuse  et  de  la  plus  fameuse 
»  secte  philosophique,  dont  les  mem- 
3j  bres  s'efforçaient  avec  tant  d'ardeur 
■»  et  de  succès  d'être  Èpicuri  de  greg  c 
»  porcus.  »  2°  Une  Histoire  des  ani- 
maux,  en  17  livres,  Londres,  1744, 
2  vol.  in-4.  L'auteur  mêle  à  quelques 
observations  curieuses  et  vraies,  plusieurs 
autres  triviales  ou  fausses.  Il  est  aussi 
menteur  que  Pline;  mais  Pline  avait  une 
imagination  qui  embellissait  les  fables , 
et  les  lui  fait  pardonner.  Ces  deux  ou- 
vrages sont  certainement  d'Elien.  On  y 
voit  le  même.génie  dans  l'un  et  dans  l'au- 
tre, et  lamême  varictéde  lecture.  Elien, 
selon  l'usage  des  philosophes ,  débitait 
de  très  belles  maximes  ;  il  peignait  la  cour 


38  ELI 

tics  pfinccs  comme  le  s<?îour  de  la  cor- 
ruplion  et  l'écueil  de  là  sagesse  ;  mais 
peut-être  eîit-il ,  comme  tant  d'autres , 
changé  d'opinion  ,  si  on  l'y  avait  invite 
et  accueilli.  Ce  qu'il  y  a  de  certain,  c'est 
qu'il  n'était  pas  indiflcrcnt  sur  ce  qui  s'y 
passait.  Il  publia  un  livre  contre  JIc'Uo- 
gabalc,  dans  lequel  il  se  déchaînait  vive- 
ment contre  la  conduite  insensée  de  ce 
prince,  .sans  le  nommer.  Elien  florissait 
vers  l'an  222  de  J.  C.  Il  était,  selon  Sui- 
das ,  grand-prètre  d'une  divinité  dont 
nous  ignorons  le  nom.  Il  mourut  âgé 
d'environ  GO  ans ,  sans  avoir  été  marié. 
On  a  publié  à  Paris  en  1772  ,  in-8  ,  une 
bonne  traduction  française  de  ses  His- 
toires diverses,  avec  des  notes  utiles  gpr 
M.  Dacier.  On  lui  a  attribué  un  Traité 
sur  la  Tactique  des  Grecs,  publié  à  Am- 
sterdam, 1759,  in-8;  mais  cet  ouvrage 
qui  est  effectivement  ancien,  parait  ap- 
partenir à  un  autre  Elien. 

ELIEZER,  originaire  de  la  ville  de 
Damas,  était  serviteur  d'Abraham.  Ce 
patriarche  le  prit  tellement  en  affection , 
qu'il  lui  donna  l'intendance  de  toute  sa 
maison  ;  il  le  destinait  même  à  être  son 
héritier ,  avant  la  naissance  d'Isaac.  Ce 
fut  lui  qu'Abraham  envoya  en  Mésopota- 
mie chercher  une  femme  pour  son  fils. 

ELIEZER,  rabbin,  que  les  juifs  croient 
Être  ancien,  et  font  remonter  jusqu'au 
temps  de  J.  C.  ;  mais  qui  selon  le  Père 
Morin,  n'est  que  du  7®  ou  8"  siècle.  On  a 
de  lui  un  livre  intitulé  Les  Chapitres,  ou 
Histoire  sacrée  ,  que  Vorslius  a  traduits 
en  latin,  avec  des  notes  iG44  ,  in-4.  Il 
est  fameux  parmi  les  hébraïsans.  Cepen- 
dant ses  Chapitres  sont  remplis  de  fa- 
bles grossières  :  il  est  dit ,  par  exemple , 
au  chap.  6,  que  le  soleil  et  la  lune 
ont  été  créés  dans  la  même  forme  et  la 
même  splendeur  ;  mais  que  s'étant  que- 
rellés sur  leur  excellence ,  le  soleil  l'em- 
porta ,  en  devint  plus  grand  et  plus  bril- 
lant, etc. 

ELIEZER ,  fils  de  Bariza  ,  aga  des  ja- 
nissaires ,  se  battit  en  duel  contre  Bite- 
zès,  hongrois,  dans  le  temps  qu'Amurat, 
empereur  des  Turcs,  marcha  contre  Jean 
Huniade  en  1448.  Ils  sortirent  tous  deux 
du  combat  sans  se  faire  aucun  mal,  et 


ELI 

chacun  Bc  retira  vers  les  siens.  Elië^er 
voulant  faire  connaître  à  l'empereur  ce 
qui  l'avait  excité  à  combattre  si  vaillam- 
ment, lui  rapporta  l'exemple  d'un  lièvre 
contre  lequel  il  avait  autrefois, tiré  jus- 
qu'à 40  flèches  sans  l'épouvanter,  et  qui 
ne  s'était  enfui  qu'au  dernier  coup.  Il 
ajouta  que  de  là  il  avait  conclu  qu'il  y 
avait  une  destinée  qui  présidait  à  la  vie  ; 
et  que,  fortifié  par  cette  pensée,  il  n'a- 
vait point  fait  difficulté  de  s'exposer  au 
combat  contre  un  ennemi  qui  le  surpas- 
sait en  âge  et  en  force. 

ELIjVAND  ou  Hklinand,  moine  cis- 
tercien de  l'abbaye  de  Froidmond,  sous  le 
règne  de  Philippe-Auguste  ,  est  auteur 
d'une  plate  chronique  en  48  livres.  Il  n'est 
pas  vrai  qu'il  ne  nous  en  reste  que  4. 
Cette  chronique  est  en  entier  à  l'abbaye 
de  Froidmond.  Ainsi  l'auteur  du  Diction^ 
naire  critique ,  en  6  vol.  ,  .s'est  trompe. 
Il  aurait  dû  dire  qu'on  n'en  a  imprimé 
que  quatre,  qui  renferment  les  événe- 
mens  principaux  depuisl'an  934  jusqu'en 
i  200.  Outre  cette  maussade  compilation, 
on  a  de  lui  de  mauvais  vers  français,  et 
déplus  mauvais  sermons.  Il  était  de  Pron- 
le-Roi  en  Beauvoisis.  Il  mourut  vers  l'an 
1227. 

*ÉLIO  (  François-Xavier  ),  général 
espagnol ,  naquit  dans  la  Vieille-Castile 
vers  1770,  entra  très  jeune  au  sei"vice 
militaire,  fit  ses  premières  campagnes 
dans  la  guerre  contre  la  république  fran- 
çaise (  1 7  95  à  1 7  96  ),  se  distingua  ensuite 
dans  la  guerre  contre  Napoléon  (de  1 809 
à  1 8 1 3  ),  et  y  obtint  le  grade  de  lieute- 
nant-général. Il  y  avait  déjà  quelques 
années  que  l'esprit  de  révolte  s'était  ma- 
nifesté dans  les  deux  Amériques,  lorsque 
Elio  fut  nommé  capitaine- général  des 
provinces  de  Pdo  de  la  Plata.  A  peine  ar- 
rivé dans  sa  résidence,  en  1 810 ,  il  eut  à 
combattre  Linières,  Artigas,  et  autres 
chefs  d'indépendans.  Il  fut  assiégé  dans 
Monte-Vidéo  par  ce  dernier  ,  puis  jiar  le 
général  Bondo ,  qui  avait  récemment 
servi  dans  la  Péninsule  en  qualité  de  ca- 
pitaine d'infanterie.  Elio  ,  n'étant  pas  eu 
état  de  leur  résister,  demanda  du  secours 
à  la  cour  de  Portugal,  alors  établie  dans 
le  Brésil.  Il  obtint  quatre  mille  hommes 


EU 

par  la  médiation  «le  la  princesse  Cliar- 
iotle ,  sœur  de  Ferdinand  VII ,  roi  d'Es- 
pagne ,  et  femme  du  prince  de  Brésil , 
depuis  Jean  II.  A  l'approche  des  Portu- 
gais ,  commandés  par  le  général  Souza , 
les  indépendans  acceptèrent  les  condi- 
tions de  paix  que  leur  avait  déjà  offertes 
le  général  Elio  ;  mais  ce  traité,  conclu 
en  novembre  1811  ,  fut  rompu  onze  mois 
après  par  les  insurgés ,  qui  vinrent  de 
nouveau  assiéger  Monte- Vidéo.  Sur  ces 
entrefaites,  le  général  Vigodet  remplaça 
dans  son  commandement  Elio ,  qui ,  re- 
tourné en  Espagne,  continua  de  servir 
contre  les  Français  jusqu'à  la  restaura- 
tion de  Fertlinand  VII.  Le  général  Elio 
fut  un  de  ceux  qui  se  déclarèrent  contre 
les  Cortès,  établies  pendant  la  captivité  de 
Ferdinand  à  Valence.  Elles  furent  abolies 
pour  faire  place  à  l'ancien  gouverne- 
ment ,  et  Elio  fut  nomme  capitaine  gé- 
néral du  royaume  de  Valence.  Cepen- 
dant les  partisans  des  cortès  tramaient 
leurs  complots  dans  le  secret  :  il  en  éclata 
un  à  Valence,  dirigé  parle  colonel  Vidal , 
et  auquel  prirent  part  quelques  militai- 
res. On  se  battit  dans  la  ville,  le  sang 
coula  ,  et  le  général  Elio  fut  contraint  de 
se  retirer  dans  la  citadelle  jusqu'à  ce  qu'il 
lui  arrivât  des  renforts.  Après  avoir  re- 
pousse les  indépendans ,  il  fit  mettre  en 
jugement  le  colonel  Vidal ,  le  fils  d'un 
banquier  appelé  Bertram  de  Lys,  avec 
onze  de  leurs  complices  ,  qui  tous  furent 
mis  à  mort  le  même  jour,  21  janvier 
1813.  Cette  exécution  avait  été  précédée 
d'une  proclamation  du  général  Elio  aux 
habitans  de  Valence  et  aux  soldats,  pour 
leur  rappeler  la  fidélité  qu'ils  devaient 
au  roi ,  pour  les  prémunir  contre  les  sug- 
gestions des'amis  des  cortès ,  et  les  invi- 
ter à  le  seconder  dans  les  recherches 
qu'il  allait  faire  d'autres  rebelles  ou  chefs 
du  parti  constitutionnel.  Il  crut  prudent 
de  faire  arrêter  plusieurs  gens  suspects  ; 
cette  mesure  ,  que  les  circonstances  ren- 
daient nécessaire,  mécontenta  plusieurs 
familles  du  pays.  Un  an  à  peu  près  s'é- 
tait écoulé  ,  lorsque  éclata  la  conjuration 
de  Quiroga  ;  elle  entraîna  un  grand  nom- 
bre de  militaires,  et  les  Cortès  furent  de 
nouveau  proclamées  à  Cadix ,  au  com- 


ELI  39 

mencement  de  mai  1 820.  A  l'imitation 
de  quelques  autres  provinces,  celle  de 
Valence  parut  y  adhérer  ,  d'autant  plus 
que  le  roi,  pour  éviier  une  guerre  civile , 
venait  de  prêter  serment  à  la  constitu- 
tion. Le  général  Elio,  par  les  mêmes 
motifs ,  se  porta  à  l'hôtel-de-ville  ,  con- 
voqua le  corps  municipal ,  et  se  dispo- 
sait à  donner  son  adhésion  au  nouvel  or- 
dre de  choses,  lorsque  le  peuple  mutiné, 
ne  voulant  point  recevoir  la  constitution 
par  l'intermédiaire  d'Elio  ,  choisit  pour 
capitaine-général,  jusqu'à  nouvel  ordre 
du  roi,  le  marquis  d'Almodovar,  qui 
parvint  à  apaiser  le  tumulte  ,  et  sauva 
la  vie  à  Elio,  menacé  par  la  populace. 
Il  fut  néanmoins  conduit  sous  une  es- 
corte à  la  citadelle  ;  pour  calmer  le  peu- 
ple, on  commença  son  procès,  comme 
accusé  de  la  mort  de  Vidal  et  de  Lys.  Ce 
procès  traînait  en  longueur  ;  on  avait 
même  oublié  le  prisonnier ,  dont  on  ne 
se  rappela  que  le  30  mai  1822 ,  à  l'occa- 
d%ie  révolte  parmi  les  artilleurs  de  la 
citadelle,  en  faveur  du  gouvernement 
absolu.  Le  général  Elio  fut  alors  accusé, 
peut-être  injustement,  d'être  l'auteur  de 
cette  sédition.  Les  haines  se  réveillèrent, 
on  viola  les  formalités  de  son  procès ,  et 
un  conseil  de  guerre  devait  le  juger.  Les 
officiers  généraux  de  l'armée  active  s'y 
étant  refusés,  l'on  choisit  ce  conseil  parmi 
la  milice  constitutionnelle,  ou  garde  na- 
tionale de  Valence  ,  qui  le  condamna ,  à 
l'unanimité  ,  au  supplice  du  garrote 
(  strangulation  )  (  1  ).  Le  général  Elio  en- 
treprit lui-même  sa  défense,  entendit 
son  arrêt  avec  courage,  et  les  trois  jours 
qu'on  accorde  en  Espagne,  aux  con- 
damnés pour  se  préparer  à  la  mort ,  fu- 
rent employés  par  Elio  à  remplir  tous  les 
devoirs  d'un  chrétien.  Il  monta  à  l'écha- 
faud  avec  le  même  courage  et  les  mêmes 
scntimens;  il  fut  exécuté  le  3  septembre 
1822.  Lors  de  la  guerre  des  Français  con- 
tre les  constitutionnels  espagnols ,  une 
régence  ayant  été  formée  dans  la  Pénin- 

(1)  Le  garolte  est  une  e«péce  de  carcan  appujré  sur  deux 
fers  saillans  et  placés  horizonlalement  dans  un  pieu  qui 
s'élète  sur  lecbafaud.  On  y  adapte  le  cou  du  palient ,  et 
Vexécufcur  des  hautes  œuvres  ,  au  moyen  d'un  tourniquet, 
serre  fortement  le  carcan ,  dont  la  prestiou  TÏolenle  Ole  la 
rie  eu  lUeiui  d'uue  stcoudc. 


4o  ELI 

suie ,  on  rendit  tic  grands  honneurs  à  la 
mémoire  d'Elio.  Quand  Ferdinand  VII  fut 
délivré  par  les  armées  françaises  des  mains 
des  cortès  fugitives  (  1  ) ,  il  confirma  ces 
honneurs  par  un  décret  solennel  expédié 
le  20  novembre  1823,  dans  lequel  ce 
monarque  conférait  au  Als  aîné  d'Elio  le 
litre  de  marquis  de  la  Fidélité.  Il  ajouta 
en  outre  à  sesarmesles  initiales  F.  L.  H., 
des  mots  Fidélité,  Loyauté ,  Honneur  , 
et  conservait  la  solde  de  général  à  la 
veuve  d'Elio  et  à  ses  enfans.  Non  con- 
tent de  cet  acte  de  justice,  Ferdinand  VII 
excepta  les  juges  du  général  Elio  de  l'acte 
d'amnistie,  qu'avait  sollicité  le  généra- 
lissime des  armées  françaises ,  S.  A.  R.  le 
duc  d'Angoulême. 

ELIOGABALE.  F'.  Héliogabalk. 

ELIOT  (  Jean  ) ,  ministre  de  Boston 
dans  la  Nouvelle-Angleterre  ,  a  fait  pa- 
raître une  Bible  en  langue  américaine  , 
imprimée  à  Cambridge  de  la  Nouvelle- 
Angleterre;  le  Nouveau  Testament  en 
16G1  ,  l'ancien  en  1G63  ,  in-4  ,  et  le  t#kit 
en  1G85  ,  aussi  in-4. 

*  ELIOT  (  George-Augusle  ),  lord 
Heatfield ,  baron  de  Gibraltar ,  naquit  eu 
1718,  dans  le  comté  de  Roxburh  en 
Ecosse  :  il  était  le  plus  jeune  des  sept 
fils  de  Robert  Eliot  de  Slobbs  et  des- 
cendait d'une  famille  normande  passée 
en  Angleterre  à  la  suite  de  Guillaume  le 
Conquérant.  Il  fut  mis  de  bonne  heure  à 
l'université  de  Leyde ,  oîi  il  fit  des  pro- 
grès rapides  ,  surtout  dans  les  langues 
allemande  et  française.  Son  père,  qui  le 
destinait  à  l'état  militaire,  l'envoya  à 
l'école  royale  du  génie  à  La  Fère ,  d'oîi  il 
revint ,  à  1 7  ans ,  pour  entrer  dans  le  23* 
régiment  d'infanterie  ou  fusilier  royal- 
gallois.  Il  passa  ensuite  dans  le  corps  des 
ingénieurs  à  Wolvich  où  il  resta  jusqu'à 
ce  que  le  colonel  Eliot ,  frère  de  son  père , 
le  fit  entrer  dans  le  2*  régiment  des  gre- 
nadiers à  cheval ,  oîi  il  obtint  le  grade 
d'adjudant.  Ce  corps  devint,  par  ses  soins, 
un  des  plus  beaux  de  la  grosse  cavalerie 
européenne.   Il  passa  avec   lui  en  Alle- 

(i)  Let  corlé»  ou  lat  eortit,  mot  du  genre  rémiuin.  An- 
cieiiuemeiit  Untr  tortit  •igiiilUit  U^ir  rourt ,  c'est-à-dire  , 
tenir  (uciiibice  ,  rcceToir,  former  une  réunion  de  courti- 
>ani ,  ft  ensuite  de  dcputét  :  celle  cxptestioii,  (<■>  (iirl'ci , 
*icnl  de  la  curlt ,  b  cour.  ^ .    ,» .    .  •, . 


EU 

magne,  dans  la  guerre  del740k  1748, 
fut  blessé  \i  la  bataille  de  Dettingen, 
pai-vint  au  grade  de  lieutenant-colonel, 
et  devint,  peu  de  temps  après,  aide- 
de-canip  du  roi  George  II ,  qui  lui  fit 
quitter  le  2*  régiment  de  grenadiers  à 
cheval,  pour  lever  et  former  le  1*'  régi- 
ment des  chevau-légers ,  appelé  de  son 
nom ,  régiment  d'Eliot.  Il  fut  aussitôt 
désigné  pour  prendre  part  à  l'expédition 
tentée  à  Saint-Cast,  contre  les  côtes  de 
France ,  servit  de  nouveau  en  Allemagne, 
d'oîr  on  le  retira  pour  l'envoyer  à  la  Ha- 
vanne ,  oîi  son  habileté  contribua  beau- 
coup à  faire  prendre  celte  place ,  défen- 
due vaillamment  par  le  général  espagnol 
Louis  de  Velasco  :  le  roi  fut  tellement  con- 
tent de  sa  conduite,  qu'il  donna  le  nom 
de  royal  à  son  régiment.  Enfin,  Eliot 
fut  chargé  du  commandement  de  Gibral- 
tar ,  où  il  s'est  couvert  de  gloire  par  sa 
longue  défense  contre  les  armées  réunies 
des  Français  et  des  Espagnols.  Ce  fut  sur- 
tout dans  une  attaque  générale  qui  eut 
lieu  le  13  septembre  1782  ,  qu'il  donna 
les  preuves  les  plus  signalées  de  son  sang- 
froid  et  de  son  intrépidité.  Son  humanité 
ne  se  fit  pas  moins  remarquer  après  le 
combat  II  fit  retirer,  delà  mer  et  du 
milieu  des  bàtimcns  enflammés ,  les  sol- 
dats ennemis ,  dévoués  à  une  mort  cer- 
taine. Le  roi ,  pour  reconnaître  l'impor- 
tance de  ses  services ,  le  nomma  cheva- 
lier du  Bain ,  le  créa  pair  ,  et  lui  donna 
un  titre  qui  rappelait  le  rocher  témoiu 
de  ses  exploits  (  baron  de  Gibraltar  ).  Il 
mourut  d'une  attaque  de  paralysie  à  Aix- 
la-Chapelle  ,  où  il  était  allé  pour  prendre 
les  eaux,  le  6  juillet  1790. 

ELIPAJND  ,  archevêque  de  Tolède  , 
ami  de  Félix  d'Urgel ,  soutenait  avec  lui 
que  Jésus-Christ,  en  tant  qu'homme ,  n'é- 
tait que  fils  adoptif  de  Dieu.  Il  défendit 
ce  sentiment  de  vive  voix  et  par  écrit. 
Cette  erreur  fut  condamnée  par  plusieurs 
conciles,  et  leur  jugement  fut  confirmé 
par  le  pape  Adrien ,  qui  fit  rétracter  Fé- 
lix. Elipand,  moins  soumisque  son  maître, 
écrivit  contre  lui  en  799,  et  mourut  peu 
après. 

ELTSA ,  premier  fils  de  Javan  ,  petit- 
fils  de  Japhet ,  peupla  l'EUide  dans  le  Pc- 


ELI 

loponèse ,  ou  ,  selon  d'autres ,  celle  par- 
tie de  l'Espagne  proche  de  Cadix ,  qui,  à 
cause  de  ses  agrcmens ,  fut  appelée  les 
Champs  Elyséens  ,  ou  Iles  fortunées. 

EIJSABETH  ou  Elizaheth  (  Sainte  ) , 
femme  de  Zacharie,  mère  de  saint  Jean- 
Baptiste  ,  qu'elle  eut  dans  sa  vieillesse, 
reçut  la  visite  de  sa  parente  ,  la  mère  du 
Sauveur,  dans  le  temps  de  leur  grossesse. 
Saint  Pierre  d'Alexandrie  dit  que  deux 
ans  après  qu'elle  eut  rais  au  monde  Jean- 
Baptiste  ,  elle  fut  obligée  de  fuir  la  per- 
sécution d'Hérode.  Elle  alla  se  cacher 
dans  une  caverne  de  la  Judée,  où  elle 
mourut  ,  laissant  son  fils  dans  le  désert , 
à  la  conduite  de  la  Providence  ,  jusqu'au 
temps  qu'il  devait  paraître  devant  le  peu- 
ple d'Israël. 

ELISABETH  ou  Isabelle  d'Aragon  , 
reine  de  France,  femme  du  roi  Philippe  III, 
dit  le  Hardi.,  et  fille  de  Jacques  I,  roi 
d'Aragon,  fut  mariée  en  12G2.  Elle  sui- 
vit le  prince  son  mari  en  Afrique ,  dans 
l'expédition  que  le  roi  saint  Louis  entre- 
prit contre  les  Barbares.  Après  la  mort 
de  ce  prince ,  Philippe  vint  prendre  pos- 
session de  ses  états.  La  reine ,  qui  était 
grosse ,  se  blessa  en  tombant  de  cheval , 
et  mourut  kCozenceenCalabre,  en  1271, 
à  24  ans.  Dans  le  même  temps  ,  Alfonse, 
comte  de  Poitiers,  frère  de  saint  Louis, 
fut  emporté  d'ujie  fièvre  pestilentielle  à 
Sienne,  et  sa  femme,  Jeanne  de  Toulouse, 
mourut  12  jours  après  lui.  De  sorte  que 
le  roi  Philippe  essuyant  douleur- sur  dou- 
leur, après  tant  de  dépenses  et  de  tra- 
vaux ,  ne  remporta  en  France  que  des 
coffres  vides  et  des  ossemens. 

ELISABETH ,  reine  de  Hongrie.  V.oy. 
Gara. 

ELISABETH  (Sainte),  fille  d'André  II, 
roi  de  Hongrie ,  née  en  1 207  ,  mariée  à 
Louis,  landgrave  de  Hesse,  perdit  son 
époux  en  1227.  Les  seigneurs  la  privèrent 
de  la  régence ,  que  son  rang  et  les  der- 
nières volontés  du  prince  paraissaient  lui 
avoir  assurée.  Elisabeth  ,  mère  des  pau- 
vres, avait  employé  non-seulement  sa 
dot,  mais  encore  sa  vaisselle  et  ses  pier- 
reries, à  les  nourrir  dans  une  famine.  Elle 
se  vit  réduite  à  mendier  son  pain  de  porte 
en  porte.  Tirée  ensuite  de  ce  misérable 

V. 


ELÏ  4r 

état,  elle  fut  rétablie  dans  son  palais; 
mais  proférant  l'état  d'humiliation  auï 
honneurs,  elle  prit  l'habit  du  Tiers-Ordre, 
et  s'employa  à  servir  les  pauvres  de  l'hô- 
pital de  Marburg  qu'elle  avait  fondé.  Son 
palais  avait  été  une  espèce  de  couvent. 
Elle  avait  sur  le  trône  toutes  les  vertus 
du  cloître  ;  et  ses  vertus  n'eurent  que  plus 
de  force ,  lorsqu'elle  se  fut  consacrée  à 
Dieu.  Elle  mourut  à  3Iarburg  eu  1231 ,  à 
24  ans,  et  fut  canonisée  4  ans  après.  On 
garde  une  portion  de  ses  reliques  dans 
l'église  des  carmélites  à  Bruxelles,  et 
une  autre  dans  la  belle  chapelle  de  la  Ro- 
chc-Guyon  sur  Seine.  Il  y  en  a  aussi  une 
portion  considérable  dans  unechàsse  pré- 
cieuse qui  fait  partie  du  trésor  électoral 
d'Hanovre.  Théodore  de  Thuringe  a  écrit 
sa  Fie. 

ELISABETH  (  Sainte  ) ,  reine  de  Por- 
tugal ,  fille  de  Pierre  III ,  roi  d'Aragon  , 
épousa  en  1281  Denys ,  roi  de  Portugal. 
Après  la  mort  de  son  mari ,  elle  prit  l'ha- 
bit de  Sainte-Claire  ,  fit  bâtir  le  monastère 
de  Coïmbre,  et  mourut  saintement  en 
1336 ,  à  G 6  ans.  Elle  fut  canonisée  par 
Urbain  VHI  en  1C25. 

ELISABETH  ou  Isabelle  de  Por- 
tugal, impératrice  et  reine  d'Espagne, 
fille  aînée  d'Emmanuel ,  roi  de  Portugal, 
et  de  Marie  de  Castille  sa  seconde  femme, 
naquit  à  Lisbonne  en  1603.  Elle  fut  mariée 
àSévilleavec  l'empereur  Charles-Quint, 
qui  lui  donna  pour  devise  les  trois  grâces, 
dont  l'une  portait  des  roses ,  l'autre  une 
branche  de  myrte,  et  la  troisième  \m 
branche  de  chêne  avec  son  fruit.  Ce 
groupe  ingénieux  était  le  symbole  de  sa 
beauté ,  de  l'amour  qu'on  avait  pour 
elle ,  et  de  sa  fécondité.  On  les  orna  de 
ces  paroles  :  Hœc habet  et  sitperat...  Eli- 
sabet  mourut  en  couches  à  Tolède  en 
1638.  François  Borgia ,  duc  de  Candie, 
qui  eut  ordre  d'accompagner  son  corps 
de  Tolède  à  Grenade ,  fut  si  touché  de 
voir  son  visage,  autrefois  plein  d'allraits, 
entièrement  défiguré  par  la  pâleur  de  Ja 
mort  et  livré  à  la  pourriture ,  qu'il  prit 
le  parti  de  quitter  le  monde ,  pour  se  re- 
tirer dans  la  Compagnie  de  Jésus ,  où  il 
mourut  saintement.  Voyez  François  de 
Borgia (  S.). 

3.. 


42  ELI 

ELISABETH  D'AUTRICHE,  fiUc  de 
rcmpereur  Maximilicn  II,  et  femme  de 
Charles  IX,  roi  de  France,  fut  mariée  à 
Mézières  le  2G  novembre  1570.  C'était 
une  des  plus  belles  personnes  de  son 
temps  ;  mais  sa  vertu  surpassait  encore 
sa  beauté.  Tant  qu'elle  fut  à  la  cour  de 
France  ,  elle  honora  d'une  tendre  affec- 
tion Marguerite ,  reine  de  Navarre ,  sa 
belle-sœur  ,  quoique  d'une  conduite  bien 
opposée  à  la  sienne ,  espérant  de  la 
mettre  dans  de  meilleures  voies  ;  et  après 
son  retour  en  Allemagne ,  elle  lui  envoya 
deux  livres  qu'elle  avait  composés;  l'un, 
sur  la  parole  de  Dieu  ;  l'autre ,  sur  les 
événemens  les  plus  considérables  qui  ar- 
rivèrent en  France  de  son  temps.  Cette 
vertueuse  princesse ,  après  la  mort  du  roi 
son  époux,  se  retira  à  Vienne  en  Au- 
triche, où  elle  mourut  en  1592,  âgée 
seulement  de  38  ans ,  dans  un  monas- 
tère qu'elle  avait  fondé.  (  Brantôme  parle 
de  deux  ouvrages  de  la  composition  de 
cette  princesse ,  l'un  sur  laparole  de  Dieu, 
l'autre  sur  les  événemens  passés  en  France 
de  son  temps  ;  mais  il  ne  paraît  pas  que 
ces  écrits  qu'elle  envoya  d'Allemagne  k 
sa  belle-sœur  Jlarguerite  de  Valois  aient 
été  imprimés.) 

ELISABETH,  reine  d'Angleterre, 
fille  de  Henri  VIII  et  d'Anne  de  Boulcn , 
naquit  le  8  septembre  1533.  Sa  sœur 
Marie ,  montée  sur  le  trône ,  la  retint 
long-temps  en  prison.  Elisabeth  profita 
de  sa  disgrâce.  Elle  cultiva  son  esprit  et 
apprit  les  langues  ;  mais  de  tous  les  arts, 
celui  de  se  ménager  avec  sa  sœur ,  avec 
les  catholiques  et  avec  les  protestans ,  de 
dissimuler  et  d'apprendre  à  régner,  lui 
tint  le  plus  au  cœur.  Après  la  mort  de 
Marie,  elle  sortit  de  prison  pour  monter 
sur  le  trône  d'Angleterre.  Elle  se  fit  cou- 
ronner avec  beaucoup  de  pompe  en  1 559, 
par  un  évêque  catholique,  pour  ne  pas 
effaroucher  les  esjirits  ;  mais  elle  était 
protestante  dans  le  cœur,  et  elle  ne  tarda 
pas  d'établir  celte  religion  par  le  fer  et 
le  feu ,  malgré  le  sermentsolennel  qu'elle 
avait  fait  à  son  t;acre  de  défendi-e  la  re- 
ligion catholique  romaine  et  d'en  proté- 
ger les  ministres.  Elisabeth  convoqua  un 
parlement  qui  établit  la  religion  angli- 


ELI 

cane  telle  qu'elle  est  aujourd'hui.  Cest 
un  mélange  de  dogmes  calvinistes,  ayec 
quelques  restes  de  la  discipline  et  des 
cérémonies  de  l'église  catholique.  Les 
évêques  ,  les  chanoines ,  les  curés  ,  les 
ornemens  de  l'église ,  les  orgues ,  la  mu- 
sique ,  furent  conservés  ;  les  décimes , 
les  annales,  les  privilèges  des  églises 
abolis  ;  la  confession  permise ,  et  non  or- 
donnée ;  la  présence  réelle  admise  ,  mais 
sans  transsubstantiation  :  système  pure- 
ment humain ,  sans  sanction  et  sans  au- 
cun fondement  religieux.  Pour  comble 
d'inconséquence,  elle  se  fit  chef  de  la 
religion ,  sous  le  nom  de  Souveraine 
gouvernante  de  Ve'glise  d' Angleterre 
pour  le  spirituel  et  pour  le  temporel.  Les 
prélats  qui  s' opposèrent  à  ces  nouveautés, 
furent  chassés  de  leurs  églises  ;  mais  la 
plupart  obéirent.  Les  hommes  fermes, 
les  amis  généreux  de  la  vérité  sont  rares 
dans  tous  les  temps  et  dans  tous  les  pays. 
De  9,400  bénéficiers  que  contenait  la 
Grande-Bretagne,  il  n'y  eut  que  14 
évêques ,  50  chanoines  et  80  curés  qui , 
n'acceptant  pas  la  réforme ,  perdirent 
leurs  bénéfices.  Les  uns  finirent  leur  vie 
dans  des  cachots ,  les  autres  dans  les  tour- 
mens.  Les  jésuites  qui  accoururent  au 
secours  de  l'ancienne  religion ,  périrent 
par  d'horribles  supplices.  Cependant  le 
trône  d'Eli.sabeth  n'était  pas  encore  af- 
fermi ;  elle  crut  qu'il  fallait  s'assurer  le 
sceptre  par  des  victimes  plus  distinguées. 
Elle  en  eut  bientôt  l'occasion.  Marie 
Stuart ,  reine  d'Ecosse  ,  épouse  de  Fran- 
çois II ,  roi  de  France,  prenait  le  titre  de 
reine  d'Angleterre ,  comme  descendante 
de  Henri  VIII.  Elisabeth  l'obligea  à  y  re- 
noncer après  la  mort  de  son  mari.  Le.s 
Ecossais  mécontens  contraignirent  Marie 
à  quitter  l'Ecosse ,  et  à  se  réfugier  en  An- 
gleterre. Elisabeth  lui  promit  un  asile  , 
et  la  fil  aussitôt  mettre  en  prison.  Il  se 
forma  dans  Londres  des  partis  en  faveur 
de  la  reine  prisonnière.  Le  duc  de  Nor- 
foick ,  catholique  ,  voulut  l'épouser , 
comptant  sur  le  droit  de  Marie  k  la  suc- 
ces.sion  d'Elisabeth  ;  il  lui  en  coûta  la 
tète.  Les  pairs  le  condamnèrent ,  pour 
avoir  demandé  au  roi  d'Espagne  et  au 
pape  des  secours  pour  la  malheureuse 


ELI 

princesse.  Le  supplice  du  duc  n'apaisa 
pas  la  colère  d'Elisabeth  ;  elle  continua 
d'immoler  des  victimes  de  toutes  les 
classes  de  citoyens.  En  vain  l'ambassa- 
deur de  France  et  celui  d'Ecosse  inter- 
cëdèrentpour  l'infortunée  reine  d'Ecosse; 
Marie  eut  la  tête  tranchée ,  après  1 8  ans 
de  prison  ,  le  1 8  février  1587  ,  à  l'âge  de 
44  ans.  Elisabeth  ,  joignant  la  dissimula- 
tion à  la  cruauté ,  aflecta  de  plaindre 
celle  qu'elle  avait  fait  mourir ,  peut-être 
autant  par  jalousie  que  par  politique. 
Elle  prétendit  qu'on  avait  passé  ses  or- 
dres ,  et  fit  mettre  en  prison  le  secrétaire 
d'état,  qui  avait,  disait-elle,  fait  exé- 
cuter trop  tôt  l'ordre  signé  par  elle- 
même.  Cette  mascarade,  dans  une  scène 
si  tragique ,  ne  la  rendit  que  plus  odieuse. 
Philippe  II  avait  préparé  une  invasion 
en  Angleterre  du  vivant  de  l'infortunée 
écossaise.  Il  mit  en  mer,  un  an  après  sa 
mort,  en  1588,  une  puissante  flotte 
nommée  V Invincible  ;  mais  les  vents  et 
les  écueils  combattirent  pour  Elisabeth  ; 
l'armée  espagnole  périt  presque  toute 
par  la  tempête ,  ou  fut  la  proie  des  An- 
glais. Leur  reine  triompha  dans  la  ville 
de  Londres  ,  à  la  façon  des  anciens  Ro- 
mains. On  frappa  une  médaille  avec  la 
légende  emphatique  :  Vcnit,  vidit ,  vicit, 
d'un  côté  ;  et  ces  mots  de  l'autre  :  Diix 
fœmina  facti.  Le  chevalier  Drack,  et 
quelques  autres  capitaines  non  moins 
heureux  que  lui ,  avaient  conquis  à  peu 
près  vers  le  même  temps  plusieurs  pro- 
vinces en  Amérique.  Les  Irlandais  ,  qui 
lui  avaient  tenu  tête  en  faveur  de  la  re  • 
ligion  catholique  ,  grossirent  le  nombre 
de  ses  conquêtes.  Le  comte  d'Essex ,  son 
favori ,  nommé  vice-roi  d'Irlande ,  fut 
l'objet  d'une  des  dernières  tragédies  qui 
rendirent  le  règne  d'Elisabeth  fameux. 
Ce  comte  voulait  se  venger ,  dit-on ,  d'un 
soufflet  que  la  reine  lui  avait  donné  dans 
la  chaleur  d'une  dispute,  faire  révolter 
l'Irlande ,  se  rendre  maître  de  la  tour  de 
Londres  et  s'emparer  du  gouvernement. 
D'autres  ont  prétendu  qu'il  fut  la  victime 
de  la  jalousie  delà  reine  (  voyez  Essex  ). 
Elisabeth  le  pleura  en  le  faisant  mourir. 
Capable  de  toutes  les  atrocités  ,  Elisabeth 
ne  l'était  pas  d'étouffer  les  remords  et  ces 


ELI  43 

reproches  intimes  que  les  crimes  lais- 
sent dans  l'âme  des  tyrans.  Dans  sa  der- 
nière maladie ,  elle  comprit  fortement  l'a- 
bomination de  sa  vie.  Elle  dit  aux  méde- 
cins qui  s'empressèrent  de  lui  offrir  leurs 
secours  :  Laissez-moi ,  je  veux  mourir  ; 
la  vie  m'est  insupportable.  Cécil  et  l'ar- 
chevêque de  Cantorbéry  se  jetèrent  à  ses 
pieds,  la  supplièrent  de  prendre  quelques 
remèdes;  ils  ne  purent  rien  obtenir,  et 
sa  dernière  réponse  fut  d'ordonner  qu'on 
la  laissât  mourir ,  qu'elle  y  était  résolue; 
Elle  mourut  en  effet  le  3  avril  1603,  à 
70  ans,  après  en  avoir  régné  45.  Elle  n'a- 
vait jamais  voulu  se  mai-ier.  La  nature 
Tavait  conformée  de  façon  à  la  mettre 
hors  d'état  de  prendre  un  époux.  Cepen- 
dant sa  figure  qui  n'avait  rien  de  fort 
extraordinaire,  l'occupait  autant  que  les 
affaires  d'état;  elle.donna  un  jour  l.GOO 
écus  à  un  Hollandais  qui  l'avait  trouvée 
belle  ;  dans  un  âge  même  oîi  les  femmes 
coquettes  négligent  les  agrémens,  elle 
ne  cessa  de  les  rechercher.  Une  anecdote 
qui  prouve  la  coquetterie  d'Elisabeth , 
est  l'ordonnance  relative  à  son  portrait. 
Craignant  d*être  peinte  moins  belle 
qu'elle  ne  croyait  être ,  elle  publia  un 
édit  par  lequel  «.  il  fut  défendu  à  tout 
»  peintre  et  graveur  de  continuer  de 
»  peindre  la  reine  ou  la  graver,  jusqu'à 
w  ce  que  quelque  artiste  eut  pu  faire  «n 
M  portrait  fidèle ,  qui  devait  servir  de 
»  modèle  pour  toutes  les  copies  qu'on 
M  en  ferait  à  l'avenir,  après  que  ce  mo- 
«  dèle  aurait  été  examiné  et  reconnu 
»  aussi  bon  et  aussi  exact  qu'il  pourrait 
»  l'être.  ))  Il  était  dit  <f  que  le  désir  na  - 
u  turel  à  tous  les  sujets  de  posséder  le 
D  portrait  de  S.  M.  ,  ayant  engagé  uu 
»  grand  nombre  de  peintres  ,  de  graveurs 
»  et  d'autres  artistes ,  à  en  multiplier  les 
»  cd^ies  ,  il  avait  été  reconnu  qu'aucun 
M  jusqu'alors  n'e'tnit  parvenu  à  rendre  , 
»  dans  leur  exactitude ,  les  beautés  et 
»  les  grâces  de  S.  M.  »  La  loi  portait 
enfin  ,  «  qu'il  serait  nommé  des  experts 
»  pour  juger  de  la  fidélité  des  copies,  et 
»  il  leur  était  enjoint  de  n'en  toléi-er  au- 
»  cune  qui  conservât  quelques  défauts 
»  ou  difformités,  dont,  par  la  grâce  de 
»  Dieu ,  S,  M.  était  exempte.  »  Sons  sou 


44 


î;li 


rèfjne ,  l'Angleterre  parut  jouir  d'une  si- 
tuation assez  heureuse,  si  l'on  considère 
SCS  rapports  avec  les  autres  états  d'Eu- 
rope. Son  commerce  étendit  sesbranches 
aux  quatre  coins  du  monde.  Ses  manu- 
factures principales  furent  établies,  sa 
police  perfectionnée.  Elisabeth  bannit  le 
luxe,  le  plus  cruel  ennemi  d'un  état, 
proscrivit  les  carrosses ,  les  larges  fraises, 
les  longs  manteaux,  les  longues  épées , 
les  longues  pointes  sur  la  bosse  des  bou- 
cliers ,  et  généralement  tout  ce  qui  pou- 
vait être  appelé  superflu  dans  les  armes 
et  les  vêtcmens  ;  mais  la  plupart  de  ces 
réformes  tenaient  à  son  aversion  pour  le 
costume  espagnol.  La  gloire  qu'elle  s'ac- 
quit par  sa  dextérité  ,  par  son  esprit ,  par 
ses  succès,  fut  obscurcie  par  les  artifices 
de  comédienne ,  que  tant  d'historiens 
lui  ont  reprochés ,  souillée  par  le  sang 
de  Marie  Stuart ,  et  d'une  multitude  de 
catholiques  qu'elle  immola  à  son  fana- 
tisme et  à  son  ambition.  «  Si  elle  eut 
3>  quelques  bonnes  qualités ,  dit  un  his- 
»  torien ,  elle  les  a  bien  flétries  par  sa 
3)  manie  sanguinaire  pour  l'établissement 
»  du  schisme  et  de  l'hérésie,  dont  elle  se 
w  souciait  peu  ;  par  une  cruauté  barbare 
j>  qui  a  teint  les  échafauds  du  sang  des 
»  têtes  couronnées  et  de  ses  propres 
»  amans  ;  par  une  passion  de  dominer  et 
»  unepolitique  affreuse  qui  ne  connaissait 
M  ni  droit  des  gens,  ni  droit  de  nature, 
»  ni  droit  divin ,  quand  ils  gênaient  sa 
»  marche  ;  par  une  duplicité  jusque-là 
»  sans  exemple ,  et  sans  laquelle  l'Europe 
M  ignorerait  peut-être  encore  l'art  d'ac- 
»  quérir,  par  la  fourberie,  la  réputation 
»  d'habileté.  »  Le  zèle  que  montra  tou- 
jours Philippe  II  pour  la  foi  de  nos  pères , 
est  apparemment  la  cause  de  la  haine 
constante  qu'Elisabeth  lui  voua.  Cette 
princesse  fit  publier ,  par  forme  d'édit , 
une  satire,  le  18  octobre  1591  ,  contre 
ce  prince  qu'elle  accusait  de  fomenter 
continuellement  des  conjurations  contre 
elle  en  Angleterre.  Thomas  Stapléton  ré- 
futa cette  imputation  dans  un  livre  in- 
titulé :  yipologia  pro  rege  catholico , 
contra  edictum....  in  qua  omnium  tur- 
barum  et  bcllnrum  quibux  his  annix  tri- 
ffinta  christinna  respublica  con/Iictatur, 


ELI 

fontes  aperiuntur  et  remédia  démons-- 
trantur ;  imprimé  d'abord  aux  Pays-Cas, 
puis  à  Constance  en  1 592.  Elisabeth  avait 
une  grande  connaissance  de  la  géographie 
et  de  l'histoire.  Elle  parlait ,  ou  du 
moins  entendait  cinq  ou  six  langues.  Elle 
traduisit  divers  traités^  du  grec ,  du  la- 
tin et  du  français.  Sa  version  d^ Horace 
fut  estimée  en  Angleterre  aussi  long- 
temps qu'on  eut  quelque  Intérêt  à  flatter 
sa  personne  ou  sa  mémoire.  Sa  Vie  par 
Léti,  traduite  en  français,  2  vol.  in-12, 
ne  mérite  guère  d'être  citée.  M,''®  Kéralio 
a  donné  son  Histoire  ,  Paris,  1786-17  87  , 
5  vol.  in-8 ,  ouvrage  diffus  et  d'une 
forme  peu  régulière,  mais  curieux  et 
intéressant  :  si  dans  quelques  endroits 
Elisabeth  est  trop  flattée  ,  il  en  est  beau- 
coup où  elle  est  appréciée  avec  justesse. 
ELISABETH  FARNÈSE,  héritière  de 
Parme,  de  Plaisance  et  de  la  Toscane, 
née  en  1692,  épousa  Philippe  V  en  17  H, 
après  la  mort  de  Marie-Louise-Gabrielle 
de  Savoie.  Ce  fut  l'abbé  Albéroni  qui 
inspira  ce  mariage  à  la  princesse  des 
Ursins,  favorite  du  monarque  espagnol. 
H  lui  fit  envisager  la  jeune  princesse 
comme  étant  d'un  caractère  souple ,  d'un 
esprit  simple,  sans  ambition  et  sans  ta- 
lent. Elisabeth  était  précisément  le  con- 
traire de  ce  qu'elle  avait  été  dépeinte. 
Elle  avait  le  génie  élevé  ,  l'âme  grande 
et  l'esprit  éclairé.  Le  roi ,  avec  toute  sa 
cour,  alla  au-devant  d'elle  à  Guadalaxara. 
La  princesse  des  Ursins  s'avança  pour  la 
recevoir  jusqu'à  Zadraque;  mais  à  peine 
fut-elle  arrivée,  qu'Elisabeth  la  fit  con- 
duire d'une  manière  aussi  dure  qu'im- 
prévue hors  du  royaume.  On  a  beaucoup 
varié  sur  les  raisons  de  celte  disgrâce  :  le 
duc  de  Saint-Simon  croit  qu'elle  avait  été 
arrêtée  par  les  deux  rois  de  France  et 
d'E.spagne  ,  et  que  la  jeune  reine  ne  fit 
qu'exécuter  leur  résolution.  Elisabeth 
cultiva  les  sciences  et  les  protégea  :  son 
attachement  à  la  religion  catholique 
était  vif  et  éclairé  ,  elle  s'opposait  avec 
force  à  tout  ce  qui  pouvait  y  donner  at- 
Icinle.  L'Espagne  la  perdit  en  1766.  (On 
peut  consulter  pour  son  histoire  les  Aie- 
moires  pour  Elisabeth  Farncze,  Londres, 
17  46,  in-8;  et  les  mémoires  pouf  servir  à 


ELI 

l'histoire  d'Espagne  sous  le  règne  de  Phi- 
lippe V,  traduits  en  espagnol  du  marquis 
de  Saint-Philippe  par  Mandave ,  Amster- 
dam (Paris),  17  6G,  4  vol.  in-12.  Le  plus 
ancien  écrivain  qui  ait  tracé  l'histoire  du 
règne  d'Elisaheth  est  Cambden.  ) 

ELISABETH,  princesse  Palatine,  fille 
aînée  de  Frédéric  V,  électeur  Palatin  du 
Rhin,  élu  roi  de  Bohême,  naquit  en  1618. 
Dès  son  enfance,  elle  pensa  à  cultiver  son 
esprit  :  elle  apprit  les  langues  ;  elle  se 
passionna  pour  la  philosophie,  et  surtout 
pour  celle  de  Descartes.  Ce  célèbre  phi- 
losophe ne  fit  point  difficulté  d'avouer, 
en  lui  dédiant  ses  Principes,  qu'il  n'avait 
encore  trouvé  qu'elle  qui  fût  parvenue  à 
comprendre  si  parfaitement  ses  ouvrages; 
mais  on  sent  assez  la  valeur  de  ces  sortes 
d'éloges  mis  dans  des  épîtres  dédicatoires. 
Elisabeth  sacrifia  tout  au  plaisir  de  phi- 
losopher en  paix.  Elle  refusa  la  main  de 
Ladislas  .Vil,  roi  de  Pologne.  Ayant  en- 
couru la  disgrâce  de  sa  mère,  qui  la 
soupçonnait  d'avoir  eu  part  à  la  mort  de 
d'Epinai,  gentilhomme  français,  assassiné 
A  la  Haye ,  elle  se  retira  à  Grossen  ,  en- 
suite à  Heideiberg,  et  de  là  à  Cassel.  Sur 
la  fin  de  ses  jours ,  elle  accepta  la  riche 
abbaye  d'Hervorden ,  qui  devint  dès  lors 
une  retraite  pour  tous  les  aspirans  à  la 
philosophie  de  quelque  nation  ,  de  quel- 
que secte,  de  quelque  religion  qu'ils 
fussent.  Celte  abbaye  fut  une  des  pre- 
mières écoles  cartésiennes  ;  mais  cette 
école  ne  subsista  que  jusqu'à  la  mort  de 
la  princesse  Palatine ,  arrivée  en  1C80. 
Quoiqu'elle  eût  du  penchant  pour  la  re- 
ligion catholique,  elle  fit  toujours  pro- 
fession du  calvinisme ,  dans  lequel  elle 
avait  été  élevée. 

ELISABETH-PETROWNA ,  impé- 
ratice  de  toutes  les  Russies,  était  fille  du 
czar  Pierre  I.  Elle  naquit  le  29  décembre 
1 7 1 0  ,  et  monta  sur  le  trône  impariai  le  7 
décembre  17  41,  par  une  révolution  qui 
en  fit  descendre  le  czar  Iwaf^y^gardé 
comme  imbécile.  Elle  avait  ét^pancée 
en  1747  au  duc  de  Holstein-Gottorp  ; 
inais  ce  prince  étant  mort  onze  jours 
après ,  le  mariage  n'eut  point  lieu ,  et 
Elisabeth  passa  le  reste  de  ses  jours  dans 
le  célibat.  Cette  princesse  prit  part  aux 


ELI  45 

deux  dernières  guerres  de  la  France  en 
Allemagne ,  et  montra  toujours  une  con- 
stante amitié  pour  ses  alliés.  La  Russie  la 
perdit  le  5  janvier  17G2,  à  51  ans.  Sa 
mémoire  est  chère  à  ses  sujets.  Dans  l'é- 
tat le  plus  critique  de  sa  maladie,  elle 
donna  des  ordres  pour  remettre  en  li- 
berté 1 3  ou  1 4  mille  malheureux,  détenus 
en  prison  pour  contrebande.  Elle  voulut 
en  même  temps  qu'on  rendît  toutes  les 
confiscations  laites  pour  raison  de  frau- 
des, et  que  les  droits  sur  le  sel  fussent 
modérés ,  au  point  qu'il  en  résulta  une 
diminution  annuelle  de  près  d'un  mil- 
lion et  demi  de  roubles  dans  l'étendue  de 
l'empire.  Sa  bonté  éclata  encore  envers 
les  débiteurs  qui  étaient  retenus  en  prison 
pour  une  somme  au  dessous  de  500  rou- 
bles :  elle  en  ordonna  le  payement  de  ses 
propres  deniers.  On  fait  monter  à  plus 
de  25  mille  le  nombre  des  infortunés  qui 
furent  relâchés.  Cette  princesse  avait  fait 
vœlPde  ne  faire  mourir  personne  tant 
qu'elle  régnerait  :  «  vœu  qui  ne  peut  être 
»  considéré,  dit  M.  Coxe  dans  son  ^oyagre 
»  de  Russie,  que  comme  une  injure  des 
»  plus  graves  envers  la  société;  puisqu'en 
M  rompant  cette  barrière  de  la  crainte  de 
u  la  mort,  la  plus  forte  sans  doute  qu'on 
»  puisse  opposer  au  crime,  on  détruit  la 
«  sauve-garde  la  plus  sûre  des  vies  et  des 
»  propriétés  des  bons  citoyens.  »  [Voyez 
Calentids  ).  Du  reste  le  même  voyageur 
observe  que  l'exécution  de  ce  vœu  ne  fut 
qu'apparente ,  que  les  coupables  péris- 
saient sous  le  knout,  ou  d'une  manière 
plus  cruelle  encore.  (Elle  avait  fondé  l'u- 
niversité de  Moscou  et  l'académie  des 
beaux-arts  de  Saint-Pétersbourg.  On  trou- 
vera des  détails  très  intéressans  sur  cette 
impératrice  dans  l'Histoire  de  la  Russie 
moderne  par  Leclerc,  dans  le  voyage  en 
Sibérie,  par  Chappe  d'Auteroche  et  daiis 
les  Me'moires  de  Manstein. 

*  ELISABETH -CHRISTINE  ,  reine 
de  Prusse,  fille  du  duc  de  Brunswick- 
Wolfenbuttel ,  naquit  en  1715,  et  épousa 
en  1733  le  prince  royal,  qui  devint  en- 
suite roi  sous  le  nom  de  Frédébic  II ,  sur- 
nommé le  Grand.  Quoiqu'elle  fut  dépour- 
vue de  l'éclat  de  la  beauté  et  qu'elle 
n'eût  pas  reçu  de  la  nature  un  esprit  su- 


46  ELI 

pcrlcur ,  elle  se  fit  néanmoins  aimer  de 
tout  ce  qui  l'entourait,  par  ses  vertus  et 
la  douceur  de  son  caractère.  Frédéric  en 
mourant  déclara  hautement  que  ,  pen- 
dant toute  sa  vie ,  elle  ne  lui  avait  donné 
aucun  chagrin  ;  il  la  recommanda  vive- 
ment à  son  successeur.  Elisabeth  était  ca- 
tholique et  il  fallait  qu'elle  réunît  toutes  les 
vertus  de  sa  religion  pour  vivre,  sans  orage, 
daiis  cette  cour  protestante  oii  d'ailleurs 
la  philosophie  du  1 8^  siècle  exerçait  son 
intolérante  influence  encore  plus  que  la 
réforme.  Pendant  que  les  ouvrages  si  sou- 
vent inquiets  de  nos  modernes  novateurs 
étaient  applaudis  dans  le  cabinet  de  Fré- 
déric, son  épouse  traduisait  des  ouvrages 
pieux  tels  que  le  Chrétien  dans  la  soli- 
tude,  par  Crugot,  Berlin,  1776:  de  la 
Destination  de  l'homme ,  par  Spelding  , 
ibid.,  177G  ;  Considérations  sur  les  œu- 
vres de  Dieu,  par  Sturm,  la  Haye,  1777, 
3  vol.  ;  Manuel  de  la  relief  ion  ,  par  Her- 
mès, Berlin,  1789  ;  Hymnes  de  GeMrt , 
ibid.,  1790.  On  lui  attribue  aussi  des  ^Rc- 
flexions  sur  Ve'tat  des  affaires  politiques 
en  1778,  adressées  aux  personnes  crain- 
tives. Elisabeth-Christine  survécut  1 1  ans 
à  son  époux  et  mourut  en  1797. 

*  ELISABETH  -  DE  -  FRANCE  (  Phi- 
lippine-Marie-Hélèue  ,  3Iadamk  ) ,  sœur 
de  Louis  XVI ,  né  à  Versailles  le  3  mai 
1764  ,  fut  le  dernier  enfant  du  Dauphin, 
fils  de  Louis  XV.  Elle  perdit  les  auteurs 
de  ses  jours  avant  de  les  connaître  :  con- 
fiée aux  soins  de  Mesdames  de  JN'ackau  et 
de  Marsan  ,  et  à  la  direction  de  l'abbé  de 
Montégut ,  elle  dut  à  leurs  leçons  et  à 
leurs  conseils  une  éducation  toute  chré- 
tienne. On  remarqua  de  bonne  heure  en 
elle  les  plus  aimables  vertus  et  on  trou- 
vait que  son  caractère  avait  quelque 
ressemblance  avec  celui  du  duc  de  Bour- 
gogne élève  de  Fénélon.  Ces  aimables 
qualités  ne  tardèrent  pas ,  malgré  sa  mo- 
destie, à  être  connues  de  toute  la  France, 
et  elles  retentirent  même  en  Europe.  Sa 
main  fut  recherchée  par  plusieursprinces, 
entr'aulrcs  par  un  infant  de  Portugal , 
par  le  duc  d'Aosle ,  fils  du  roi  de  Sar- 
daigne  ,  et  par  l'empereur  Joseph  II  ;  d'es 
raisons  politiques  empêchèrent  ces  al- 
liances d'avoir  lieu  ;  mais  la  princesse 


ELI 

n'en  manifesta  aucun  regret.  Attachée 
par  la  plus  tendre  amitié  à  son  auguste 
famille,  elle  y  était  considérée  comme 
un  ange  de  paix,  de  bienfaisance  et  de 
vertu.  Au  sein  d'one  cour  bruyante ,  elle 
aimait  les  plaisirs  tranquilles  ;  elle  s'oc- 
cupait de  quelques  ouvrages  manuels 
dans  lesquels  elle  excellait,  de  la  lecture 
de  livres  utiles ,  de  la  promenade  et  de 
l'exercice  du  cheval.  Elle  se  retirait  quel- 
quefois dans  son  agréable  retraite  de 
Montreuil ,  dont  Louis  XVI  lui  avait  fait 
présent;  elle  faisait  de  nombreuses  vi- 
sites aux  dames  de  St.-Cyr  et  à  celles  de 
St. -Denis  ,  oîi  était  Madame  Louisb  sa 
tante  :  ainsi  se  passait  la  vie  de  cette  prin- 
cesse bienfaisante  qui  aimait  mieux  faire 
quelques  bonnes  actions  que  s'acheter 
quelques-uns  de  ces  agréables  riens  qui 
plaisent  tant  aux  femmes.  Que  l'on  ne 
regarde  pas  comme  déplacé  l'éloge  que 
nous  croyons  faire  de  sa  beauté ,  qui , 
sans  être  parfaite ,  était  cependant  chez 
elle  un  vif  reflet  de  son  âme  céleste  ;  une 
blancheur  éclatante  ,  une  bouche  ornée 
des  plus  belles  dents ,  des  yeux  bleus , 
enfin  un  ensemble  de  physionomie  vive 
et  attachante,  commandaient  le  respect  et 
l'admiration.  Etrangère  aux  affaires  poli- 
tiques ,  elle  entrevoyait  cependant  les 
malheurs  qui  menaçaient  le  trône;  elle  se 
dévoua  sans  regret  au  sort  de  sa  famille 
qu'elle  ne  voulut  jamais  quitter,  dévoue- 
ment admirable  dont  elle  fut  l'innocente 
victime.  On  la  vil,  lé  jour  qui  précéda  la 
nuit  affreuse  du  5  au  6  octobre  1789, 
courir  à  Versailles ,  se  placer  devant  le 
roi  pour  lui  servir  d'égide  et  pour  mou- 
rir avec  lui,  s'il  le  fallait.  Alors,  et  ce  fut  la 
première  fois ,  elle  donna  des  conseils  au 
roi  ;  elle  voulait  que  l'on  repoussât  cette 
foule  d'assassins  qui  n'étaient  point  le 
peuple  français  :  peu  s'en  fallut  que  son 
avis  ne  fut  adopté  ;  mais  d'autres  conseils 
prévalurent  sur  l'esprit  trop  confiant  de 
Lonis  ïj^r  On  connaît  les  scènes  sanglan- 
tes do^^'ersailles  fut  témoin  dans  celte 
circonstance.  Elisabeth  eut  le  bonheur 
d'arracher  au  fer  des  meui-triers  quel- 
ques fidèles  gardés-du-corps  ;  elle  revint 
même  avec  le  roi  à  Paris,  et  sa  présence 
imposa  plus  d'une  fois  pendant  ce  pé- 


ELI 

nible   voyage ,  aux  factieux   qui   Insul- 
taient la  famille  royale.  Dès  lors  Madame 
fut  de  tous  les   conseils  secrets  qui  se 
tinrent  au  palais  dans  l'intérêt  du  roi  et 
de|la  France  :  sa  voix  n'y  fut  pas  souvent 
écoutée.;  d'autres  avis  l'emportaient,  et  on 
sait  quels  en  furent  les  terribles  résultats. 
Cette  princesse  accompagna  le  roi  dans 
son  voyage  de  IVIontmédy ,  elle  en  subit 
toutes  les  fatigues   et  les  humiliations. 
Elle  était  aux  côtés  de  Louis  XVI  lorsque 
le  20  juin  17  92,   un  furieux  la.  prenant 
pour  la  reine ,  dit  qu'il  fallait  la  massa- 
crer ;  et  déjà  il  avait  le  fer  levé  sur  sa 
tête  ;  un  de  ses  officiers  s'étant  hâté  de 
la  faire  connaître  ,  elle  lui  dit:  Pourquoi 
ne  pas  lui  laisser  croire  que  je  suis  la 
reine ,  vous  lui  auriez  peut-être  épar- 
gne' un  plus  grand  crime.  Cette  scène 
se  passait  dans  les  Tuileries  ,  en  face 
d'une  foule  de  brigands  que  sa  présence 
servait  à  contenir.  Dans  la  sanglante  jour- 
née du   10  août  ,  malgré  les  instances 
réitérées  de  Louis  XVI ,  elle  ne  voulut 
point  quitter  le  château;  elle  partagea 
tous  les  dangers  du  roi  et  suivait  la  fa- 
mille royale  à  l'assemblée.  Là,  reléguée 
dans  la  tribune  des  journalistes,  elle  en- 
tendit cette  triste  discussion  qui ,  après 
avoir  duré  tout  le  jour  ,   fut  suivie  du 
décret  qui  prononçait  la  déchéance  du 
roi  ;  et  pendant  deux  autres  jours  ,  elle 
fut  condamnée  à  entendre  encore  tout  ce 
que  ces  factieux    débitaient    avec  leur, 
éloquence  révolutionnaire  sur  le  choix 
d'une  prison.  Elle  fut  ensuite  conduite 

frec  le  roi ,  la  reine ,  le  dauphin  ,  Ma- 
ame  I"  (  Marie -Thérèse,  aujourd'hui 
.duchesse  d'Angoulême  )  ,  à  la  tour  du 
Temple.  Son  courage  ne  l'abandonna 
point  ;  résignée  à  tout  ce  que  la  Provi- 
dence lui  réservait  de  malheurs,  elle  con- 
solait la  famille  royale  et  paraissait  s'ou- 
blier elle- même  ;  ses  forces  semblaient 
même  s'augmenter  au  milieu  des  mauvais 
Irailemens  auxquels  ces  illustres  prison- 
niers étaient  exposés  tous  les  jours.  Tour- 
à  tour  séparée  de  son  frère ,  de  la  reine 
et  du  dauphin  ,  elle  resta  seule  avec  la 
jeune  fille  de  Louis  XVI,  dont  elle  re- 
trempa l'àme  par  les  leçons  qu'elle  savait 
puiser  dans  ime  religion  qui  donne  aux 


ELI  47 

âmes  vertiveuses  tant  de  moyens  d'es- 
suyer les  lamies  des  malheureux.  Après 
que  le  régicide  eût  été  commis ,  on  com- 
mença l'odieux  procès  de  la  reine  ;  les 
deux  captives  furent  obligées   de  subir 
le  plus  infâme  interrogatoire  ;  la  calomnie 
avait  répandu  sur  le  compte  de  la  reine 
les   accusations  les    plus  scandaleuses  ; 
les  inquisiteurs  révolutionnaires  envoyés 
par  la  Convention  ,  ne  craignirent  point 
d'ofifenser  leur  pudeur  ,  en  venant  dé 
rouler  devant  la  fille  de  Marie- Antoinette 
et  la  sœur  de  Louis  XVI  l'exécrable  li- 
belle qui  renfermait  tous  les  crimes  que 
l'on  reprochait  à  l'auguste  accusée  :  ces 
deux  femmes  angéliques  furent  forcées 
d'entendre  pendant  six  heures  toutes  les 
calomnieuses  imputations  que  la  débau- 
che faisait  à  la  vertu.  Les  réponses  ne 
satisfirent  point  les  factieux,  et  ces  prin- 
cesses furent  dès  lors  traitées  avec  la  plus 
rigoureuse  barbarie  ,  avec  un  raffinement 
de  cruauté  qui  fut  poussé  jusqu'à  les  pri- 
ver de  leurs  ouvrages  ,  jusqu'à  leur  re- 
fuser les  alimens  maigres  qu'elles  vou- 
laient prendre  pendant  le  temps  prescrit 
par  l'Eglise  ;  ce  qui  ne  les  empêcha  pas 
de  remplir  en  secret  ces  devoirs  d'absti- 
nence. Le  9  mai  1794  ,  on  vint  l'arracher 
des  bras  de  sa  nièce  pour  la  conduire  à 
la  conciergerie  ;  ce  fut  à  neuf  heures  du 
soir  que  des  satellites ,  payés  sans  doute 
pour  insulter  à'son  malheur,  la  jetèrent 
dans  cette  prison  où  elle  passa  la  nuit  ; 
le  lendemain  elle  fut  conduite  au  tri- 
bunal révolutionnaire,  jugée  et  condam- 
née à  mort  sans  que  l'on  ait  pu  motiver 
son  arrêt  par  l'apparence   d'une  accu- 
sation :  le  seul  crime  qui  lui  fut  repro 
ché ,  ce  fut  d'avoir  été  en  correspondance 
avec  les  princes  ses  frères.  C'en  fut  assez 
pour  l'envoyer  au  supplice.  Le  même  jour 
éclaira  sa  condamnation  et  sa  mort.  Après 
21  mois  de  la  plus  cruelle  captivité,  elle 
mourut  avec  la  pieuse  résignation  d'un 
chrétien  et  l'héroïque  courage  d'un  mar- 
tyr. En  allant  à  l'échafaud  sur  la  fatale 
charrette ,  elle  exhortait  ceux  dont  elle 
était  environnée  et  qui  allaient  partager 
son  sort;  elle  priait,  et  sa  bouche  répé- 
tait encore  de  saintes  prières,  lorsque  la 
hache  révolutionnaire  abattit  cette  tête 


48  ELI 

auguste.  On  eut  la  cruauté  de  la  forcer 
à  voir  le  supplice  de  ceux  qui  devaient 
être  exécutés  ce  jour-là  ;  tous  saluèrent 
avec  respect  madame  Elisabeth  qui  les 
embrassa  avec  affection.  Cette  malheu- 
reuse princesse  avait  alors  30  ans;  ses 
restes  furent  confondus  avec  ceux  qu'on 
entassait  journellement  au  cimetière  de 
Monceaux.  M.  Ferrand,  ancien  magis- 
trat, a  écrit  l'JB'Zog'e  historique  de  madame 
Elisabeth ,  Paris ,  1814,  in-8  ,  impri- 
merie royale.  Cet  éloge  d'abord  pu- 
blié en  Allemagne  avait  été  réimprimé  à 
Lyon  en  1 795  ,  par  les  soins  de  M.  l'abbé 
Aimé  Guillon.  Les  notes  qui  accompa- 
gnent cet  éloge  fournissent  des  éclaircis- 
semcnset  des  détails  souvent  très  curieux; 
mais  ce  qui  donne  un  prix  inestimable  à 
la  dernière  partie  de  ce  volume  ,  ce  sont 
environ  94  lettres  de  madame  Elisabeth  , 
où  brillent  la  candeur  de  ses  vertus,  la 
beauté  de  son  caractère ,  l'aimable  viva- 
cité de  son  imagination,  la  fermeté  de 
sou  âme,  et  l'excellence  de  son  jugement. 
On  a  encore  une  Oraison  funèbre  de  ma- 
dame Elisabeth ,  par  l'abbé  de  Villefort, 
Paris,  1 8 17 ,  in-8  ;  et  l'on  trouve  un  abrégé 
très  intéressant  de  sa  vie  dans  les  Fies 
des  justes  dans  les  plus  hauts  rangs 
de  la  société ,  par  l'abbé  Carron ,  4  vol. 
in-12. 

ELISABETH.  Foyez  sous  le  mot 
Isabelle  ,  les  articles  qui  ne  se  trouvent 
pas  ici. 

ELISAPHAT ,  fils  deZéchri,  qui  aida 
de  ses  conseils  et  de  ses  armes  le  souve- 
rain pontife  Soïada  à  déposer  l'impie 
Athalie  ,  et  à  mettre  Joas  sur  le  trône.  Il 
commandait  une  compagnie  de  cent 
hommes. 

ELISÉE,  disciple  d'Elic  et  prophète 
comme  lui ,  était  fils  de  Saphat.  Il  con- 
duisait la  charrue ,  lorsqu'Elie  se  l'asso- 
cia par  ordre  de  Dieu.  Son  maître  ayant 
été  enlevé  par  un  tourbillon  de  feu,  Eli- 
sée reçut  ^on  manteau  et  son  double 
esprit  prophétique.  Les  prodiges  qu'il 
opéra ,  le  firent  reconnaître  pour  l'héri- 
tier des  vertus  du  saint  prophète.  Il  di- 
visa les  eaux  du  Jourdain,  et  le  passa  à 
pied  sec  ;  il  corrigea  les  mauvaises  qua- 
lités des  eaux  de  la  fontaine  de  Jéricho  ; 


EU 

il  fit  dévorer  par  des  ours  desenfansqui 
le  tournaient  en  ridicule  (c'étaient,  ob- 
servent les  saints  Pères ,  des  enfans  for- 
més par  des  parens  impics ,  à  la  dérision 
des  ministres  de  Dieu  )  ;  il  soulagea  l'ar- 
mée de  Josaphat  et  de  Joram  ,  qui  man- 
quait d'eau  ;  il  leur  prédit  la  victoire 
qu'ils  remportèrent  sur  les  Moabites;  il 
multiplia  l'huile  d'une  pauvre  veuve  ;  il 
ressuscita  le  fils  d'une  Sunamite  ;  il  gué- 
rit Naaman  ,  général  syrien  ,  de  la  lèpre  ; 
et  Giézi  son  disciple  en  fut  frappé ,  pour 
avoir  reçu  des  présens  contre  son  ordre  ; 
il  prédit  les  maux  qu'Hazaël  ferait  aux  Is- 
raélites; il  annonça  à  Joas,  roi  d'Israël, 
qu'il  remporterait  autant  de  victoires  sur 
les  Syriens ,  qu'il  frapperait  de  fois  la 
terre  de  son  javelot.  Elisée  ne  survécut  , 
pas  beaucoup  à  cette  prophétie.  Il  mou- 
rut à  Samarie ,  vers  l'an  830  avant  J.  C. 
Un  homme  assassiné  par  des  voleurs  ayant 
été  jeté  dans  son  tombeau ,  le  cadavre 
n'eut  pas  plutôt  touché  les  os  de  l'homme 
de  Dieu,  qu'il  ressuscita.  «  C'était  un 
»  de  ces  hommes  rares,  dit  un  historien 
>>  théologue,  que  la  Piovidence  suscite 
»  dans  des  temps  de  corruption  et  d'obs- 
»  curité ,  pour  ranimer  le  foi  par  des  œu- 
»  vres  extraordinaires ,  et  ramener  à  Dieu 
■»  par  l'éclat  des  prodiges  ,  des  peuples 
»  séduits  qui  ne  croient  plus  en  sa  puis- 
))  sance.  » 

ELISÉE  (  Jean  François  Copel  ,  dit  le 
Père),  fils  de  M.  Copel,  avocat  au  par- 
lement de  Besançon ,  naquit  dans  cette 
ville  en  1728,  y  fit  ses  premières  études 
au  collège  des  jésuites ,  et  s'y  distingu|k 
par  les  progrès  les  plus  rapides.  Ayani 
fait  une  retraite  aux  Carmes  de  Besançon^ 
il  entra  dans  cet  ordre  et  se  voua  pour 
toujours  à  Dieu ,  le  25  mars  1 745.  Sa  fer- 
veur soutenue  d'une  piété  sincère  ne  se 
démentit  point.  Il  remplit  pendant  six 
ans,  dans  le  couvent,  les  fonctions  de 
professeur,  employant  les  intervalles  de 
liberté  qu'elles  lui  laissaient  à  cultiver 
l'étude  des  belles-lettres ,  et  à  former  son 
goût  pour  l'éloquence.  H  commença  sa 
carrière  évangélique  en  17  56  avec  le  plus 
grand  succès.  L'année  suivante,  il  partit 
pour  Paris,  oîi  pendant  2Gans  il  a  exercé 
le  ministère  de  la  parple,  tant  à  la  cour 


Ëtl 

qu'à  la  Tille,  toujours  avec  la  mêmeaf- 
lluence  d'auditeurs  et  les  mêmes  suffra- 
ges. Enfin,  excédé  de  travaux,  et  sa  santé 
succombant  sous  son  zèle ,  après  avoir 
fait  les  plus  grands  efforts  pour  prêcher 
le  carême  à  Dijon ,  il  mourut  le  1 1  juin 
1783  à  Pontarlier,  en  allant  en  Suisse 
pour  prendre  les  eaux  de  la  Brévine ,  que 
les  médecins  lui  avaient  ordonnées.  Ses 
sermons  ontété  imprimés  en  4  Vol.  in-12, 
tl8:).  «  c'est  une  chose  bien  remarqua- 
»  ble  ,  dit  Un  auteur,  que  le  succès 
))  de  ce  prédicateur,  les  suffrages  qu'il  a 
M  recueillis ,  la  vogue  qu'il  a  eue  parmi 
»  les  petits  et  les  grands.  Tel  est  l'empire 
»  de  la  raison  ,  des  éternelles  et  impres- 
j)  criptibles  règles  du  goût.  Au  milieu  de 
»  le  dégradation  qui  flétrit  les  lettres ,  de 
»  ces  silllemens  épigrammatiques  et  an- 
n  tithétîques ,  dé  ces  grosses  phrases  la- 
»  borieuses  etboursoufflées,  qui  ont  rem- 
»  placé  le  langage  naturel,  noble  et  éner- 
»  gique  des  Chrysoslôme  et  des  Bossuet  ; 
»  durant  le  triomphe  même  de  la  fausse 
M  éloquence  ^  de  cette  petite  coquette , 
»  resplendissante  de  faux  brillans,  et  ri- 
»  diculeraent  afltibléc  de  colifichets,  qui 
»  s'élève  sur  les  débris  de  la  dignité  ora- 
»  toire  ;  un  pauvre  religieux,  déjà  par  son 
»)  état  en  contraste  avec  les  applaudissc- 
»  mens  de  la  multitude,  fixe  l'approba- 
»  tion  de  la  cour  et  des  peuples  par  des 
>)  discours  sans  fard  ,  sans  prétention  ^ 
»  simples  et  quelquefois  négligés.  S'il  n'a 
»  pas  la  force  et  l'élévation  de  Bourda^ 
»  loue,  la  douceur  insinuante  de  Massil- 
»  Ion,  l'abondance  et  la  rapidité  de  Neu- 
»  ville,  il  a  du  moins  tout  ce  qui  distin- 
M  gue  l'ancienne  et  véritable  éloquence 
»  de  l'affété  verbiage  du  siècle.  »  Dans  le 
Journal  historique  et  titie'rnirc,  on  avait 
d'abord  jugé  tro])  sévèrement  cet  orateur, 
sur  le  rapport  des  critiques  qui  l'avaient 
entendu;  mais  après  la  lecture  de  ses  dis- 
cours, on  lui  a  rendu  la  justice  qu'il  mé- 
rite (voyez  le  journal  du  l'"'  novembre 
17  85,  p.  323  ).  On  a  remarque  que ,  dans 
son  sermon  sur  la  fausse  piété ,  il  avait 
paru  annoncer  la  révolution  de  France , 
en  s'cxprimantde  la  sorte;  <f  O  vous  qui 
»  donnez  des  bornes  à  l'immensité  delà 
"  mer,  et  qui  domptez  l'orgueil  des  flots! 


ELI  49 

»  réprimez  la  licence  de^  esprits ,  et  ar- 
n  rêtez  ce  torrent  de  l'impiété  qui  me- 
»  nace  de  ravager  la  terre.  Hélas  !  peut- 
»  être  touchons-nous  à  ces  jours  désas- 
»  treux  ,  oii  les  yeux  des  élus,  contraints 
»  de  gémir  sur  les  malheurs  de  la  sainte 
»  Jérusalem ,  se  changeront  en  des  sour- 
)>  ces  de  larmes  !  Les  proférés  rapides  de 
»  l'incrédulité,  le  mépris  des  choses  sain- 
»  tes  ,  l'indifférence  pour  les  dogmes ,  la 
»  prévention  des  esprits-forts  contre  le 
»  merveilleux  ,  et  leurs  efforts  pour  dé- 
»  couvrir  dans  les  forces  de  la  nature  la 
«  cause  de  tous  les  prodiges  ;  le  Dieu  du 
j)  ciel  presqu'oublié dans  lesarrangemens 
»  humains ,  comme  s'il  n'était  pas  lejDieu 
»  des  armées  et  des  empires;'  les  vœux 
»  que  les  Moïse  lui  adressent  sur  la  mon-» 
»  tagne ,  regardés  comme  indifférens  aux 
»  succès  des  combats  ;  les  travaux  du  mi- 
»  nistère ,  les  sacrifices  des  vierges,  les 
M  larmes  des  pénitCns,  méprisés  comme 
»  des  inutilités  pieuses;  enfin  la  facilité 
»  des  esprits  à  recevoir  ces  funestes  im- 
»  pressions,  doivent  nous  faire  craindre 
«  une  révolution  dans  la  foi.  Eloignez  , 
»  grand  Dieu,  ce  funeste  présage;  con- 
«  servez  ce  dépôt  sacré  dans  ce  royaume, 
»  que  la  piété  de  ses  rois^  le  zèle  éclairé 
»  des  pontifes ,  l'attachement  du  peuple 
»  au  culte  de  ses  pères  ,  rendent  encore 
»  une  portion  florissante  de  votre  héri- 
»  tage.  Augmentez  dans  tous  les  fidèles 
»  l'amour  de  la  religion  ;  faites  gémir  l'im- 
»  pie  sur  ses  excès,  et  que  tous  les  cœurs, 
»  réunis  par  la  foi  dans  le  sein  de  votre 
»  Eglise  ,  aspirent  aux  récompenses  pro- 
»  mises  aux  vrais  adorateurs.  « 

*  ELISÉE  (N....  TALAcnoiv,  connu  sous 
le  nom  de  Père),  premier  chirurgien  de 
Louis  XVIII,  naquit  à  Lagny  en  1753.  Il 
entra  de  bonne  heure  dans  l'hôpital  de 
la  Charité  oii  il  «cquit  en  peu  de  temps 
des  talens  très  distingués  dans  la  pra- 
tique. .\près  avoir  exercé  tour  à  tour  dans 
différcns  hôpitaux  la  chirurgie  et  la  mé- 
decine avec  autant  de  zèle  que  de  succès, 
il  fut  nommé  chirurgien  en  chef  de  ll^ô- 
pital  civil  et.  militaire  de  Gienoblc.  Non 
content  de  soigner  les  maladies,  il  ouvrit 
une  école  d'où  .sont  sortis  un  grand  nom- 
bre de  praticiens-  distingtiés.  ï^oi-sgu^  I«l 

4 


5o  ELL 

rt^Toliition  <!clata  en  France,  le  Père  Elisée 
quitta  son  pays  et  se  rendit  à  TarnKÎe  des 
princes  à  laquelle  il  fut  dèslors  attaché  en 
qualité  de  médecin.  Il  ne  la  quitta  qu'au 
moment  du  licenciement.  On  n'admira 
pas  seulement  son  zèle  dans  le  traitement 
des  blessés  ;  il  allait  sur  le  champ  de  ba- 
taille pour  y  panser  tous  les  soldats  qu'il 
ï-encontrait,  quelle  que  fut  l'armée  à  la- 
quelle ils  appartinssent,  et  c'était  souvent 
avec  ses  propres  vêtemens  qu'il  bandait 
leurs  plaies.  Le  Père  Elisée  porta  le  désin- 
téressement jusqu'à  refuser  les  honoraires 
attachés  à  son  emploi.  Après  que  l'armée 
de  Condé  eut  été  dissoute ,  il  se  rendit  en 
Angleterre  oîi  il  exerça  sa  profession  au- 
près du  Prince  régent,  du  comte  d'Artois  et 
de  Louis  XVIII.  A  l'époque  de  la  restaura- 
tion ,  le  Père  Elisée  fut  nommé  premier 
chirurgien  du  roi,  médecin  du  Val-de- 
Gràce  et  membre  de  la  commission  char- 
gée de  faire  un  rapport  sur  l'état  de  l'en- 
seignement de  la  médecine  en  France.  Il 
accompagna  le  roi  en  Belgique  pandant 
les  Cent-jours  et  revint  avec  lui  à  Paris. 
Le  père  Elisée  passa  les  dernières  an- 
nées de  sa  vie  dans  des  occupations  de 
bienfaisance,  procura  à  Louis  XVIII  plu- 
sieurs occasions  de  faire  de  bonnes  ac- 
tions ,  et  mourut  à  Paris  le  27  septembre 
1817. 

ELIZABETH.  Foycz  Elisabeth. 

ELLEBODIUS  ou  Ellebode  (  Nicaise 
Van),  natif  de  Cassel  en  Flandre,  fit  ses 
études  à  Padoue.  Son  habileté  dans  les 
sciences  lui  mérita  l'estime  des  grands 
hommes  de  son  temps.  Radécius,  évêque 
d'Agria  en  Hongrie,  l'attira  chez  lui,  et 
lui  donna  un  canonicat  dans  sa  cathé- 
drale. Il  mourut  à  Presbourg  le  4  juin 
1577.  Nous  avons  de  lui  1°  xxi^eFevsion 
du  grec  en  latin  de  Nc'mésius ,  Anvers, 
1566,  Oxford,  1671  ,  et  dans  la  Biblio- 
thèque des  Pères,  édition  de  Lyon,  tome  8. 
Celte  version  d'un  ouvrage  savant  et 
utile ,  est  faite  de  main  de  maître.  Il  est 
le  premier  qui  ait  donné  une  bonne  édi- 
tion de  Nemésius ,  et  cela  sur  deux  ma- 
nuscrits corrompus ,  qu'il  a  corrigés  avec 
beaucoup  d'art  et  de  travail.  George  Valla 
en  avait  donné  une  avant  lui ,  oii  l'au- 
teur grec  est  ridiculement  défiguré.  2°  Des 


ELL 

poésies  latines  dans  lc&  Deliciœ  poela- 
riim  Belgarum^Ae  Gruterus. 

ELLER  DEBROOKUSEN  (Jean  Théo- 
dore ),  premier  médecin  du  roi  de  Prusse, 
naquit  en  1 689 ,  à  Pletzkau ,  dans  la  prin- 
cipauté d'Anhalt-Bernbourg,  et  mourut 
à  Berlin  en  1760.  Au  titre  de  premier 
médecin  que  Frédéric-Guillaume  lui  avait 
donné  en  1735  ,  Frédéric  son  fils  joignit, 
en  1755,  celui  de  conseiller  privé ,  et  de 
directeur  de  l'académie  royale  de  Prusse. 
Nous  avons  de  lui  1"  Traita  de  la  con- 
naissance et  du  traitementdes maladieSy 
principalement  des  aiguës  ,  en  latin,  tra- 
duit en  français  par  .M.  Le  Roi,  médecin, 
1 7  7  4 ,  in- 1 2 .  Le  fonds  de  la  doctrine  ensei- 
gnée dans  cet  ouvrage ,  est  bon  et  établi 
sur  des  observations  importantes  de  prati- 
que. (  2°  Cazophylacium,  seu  catalogus 
rerum  mineralium ,  et  metallicarum  , 
Bernbourg,  1723,  in-8.  3°  Observationes 
médicales  et  chirurgicales,  Berlin,  1730, 
in-8,  en  allemand.  \°  Physiologia  et  pa- 
ihologia  medica ,  etc.,  publié  par  le  doc- 
teur Jean-Chrétien  Zimmermann ,  en  al- 
lemand :  c'est  le  recueil  des  leçons  d'Eller  ; 
mais  Ellcr  a  desavoué  cet  ouvrage.  La 
mort  de  l'auteur  a  privé  le  public  de  celles 
qu'il  avait  faites  sur  les  maladies  chroni- 
ques, et  c'est  une  perte ,  car  il  joignait  à 
une  longue  pratique ,  la  sagacité,  la  dex- 
térité et  la  patience  nécessaires  à  un  ob- 
servateur.) 

*  ELLEVOOD  (  Thomas  ) ,  né  au  vil- 
lage de  Crowelle,  dansle  comté  d'Oxford 
en  1639,  est  un  des  premiers  quakers 
qui  aient  écrit  pour  la  propagation  de 
cette  secte.  Le  premierouvrage  oîi  il  pu- 
blia ses  opinions  lui  attira  la  surveillance 
du  gouvernement,  et  il  fut  mis  en  prison 
plusieurs  fois.  Son  père,  de  son  côté, 
irrité  de  voir  professer  à  son  fils  des  prin- 
cipes différens  des  siens,  lui  infligea  di- 
verses punitions  ;  mais  il  resta  ferme  dans 
l'opinion  qu'il  avait  embrassée.  L'éduca- 
tion d'Ellevood  avait  été  très  négligée  ; 
pour  remédier  à  ce  défaut ,  et  se  mettre 
en  état  de  défendre  la  cause  dont  il  s'é- 
tait fait  l'ardent  prosélyte,  il  se  plaça 
pour  lecteur  auprès  de  Milton,  alors  aveu- 
gle, et  qui,  tandis  que  Ellevood  lui  li- 
sait les  auteurs  classiques ,  lui  en  expli- 


ELL 

quait  les  passages  les  jdus  difficiles ,  et 
lui  donnait  les  premières  notions  des 
sciences  et  des  lettres.  Il  se  sépara  de  ce 
poète  pour  raison  de  santé ,  et  fut  ensuite 
déshérité  par  son  père ,  pour  avoir  con- 
tracté un  mariage  selon  le  rit  bizarre  des 
quakers.  EUevood  mourut  en  1713.  Il  a 
laissé  plusieurs  ouvrages  :  nous  citerons 
\° Alarme  donnée  aux  prêtres^  ou  Mes- 
sage du  Ciel  pour  les  avertir,  1660  j 
2°  Histoire  sacrée  ,  Impartie,  qui  con- 
tient l'ancien  Testament,  1705;  —  His- 
toire sacrée,  2*  partie,  qui  contient  le 
nouveau  Testament,  1709;  Z"  la  Davi- 
déide  ,  poème  en  5  livres  ,1712. 
ELLIGER.  Voyez  Elger. 
*  ELLIS  (  Jean  ) ,  négociant  et  natura- 
liste anglais ,  mort  à  Londres ,  le  5  octo- 
bre 1776  ,  s'est  rendu  célèbre  par  ses  re- 
cherches sur  les  coraliues  et  autres  pro- 
ductions marines ,  regardées  jusqu'alors 
comme  plantes.  Il  constata  la  décou- 
verte faite  par  Peyssonel  que  les  coraux 
n'étaient  que  des  habitations  de  polypes 
et  posa  les  limites  qui  séparent  la  zoolo- 
gie de  la  botanique.  On  trouve  dans  les 
transactions  philosophiques  plusieurs 
mémoires  dans  lesquels  il  consigna  le  ré- 
sultat de  ses  expériences.  Le  musée  bri- 
tannique lui  doit  plusieurs  curiosités 
d'histoire  naturelle.  Il  a  laissé  1°  Essay 
loward  a  natural  history  of  coralines , 
Londres,  17  54,  in -4.,  avec  39  planches, 
traduit  en  français  par  Allamand,  la 
Haye,  1750,  in  4,  et  en  allemand  par 
Schlosser  et  autres,  Nuremberg,  17G7. 
2°  The  natural  History  ofmany  curious 
and  un  commun  zoophyies ,  Londres, 
in-4,  avec  63  planches,  ouvrage  estimé 
et  très  bien  exécuté.  3°  Plusieurs  mémoi- 
res oîi  il  fait  connaître  des  plantes  très 
curieuses ,  et  où  il  donne  les  moyens  de 
transporter  à  de  grandes  distances  les  vé- 
gétaux vivans.  Ellis  s'était  aussi  occupe 
de  conserver  long-temps  aux  graines  leur 
faculté  germinative,  et  lit  à  cette  occasion 
plusieurs  mémoires.  Il  a  écrit  en  outre 
un  traité  sur  le  café.  —  Il  ne  faut  pas  le 
confondre  avec  Henri  Ellis  ,  voyageur 
anglais,  mort  au  commencement  du  19® 
siècle ,  qui  fit  partie  de  l'expédition  qui 
alla,  en  1746,   chercher,  par  la  baie 


ELL  Si 

d'Hudson ,  un  p&ssage  au  nord-ouest.  Il 
publia  la  relation  de  ce  voyage,  qui  ne 
produisit  aucun  résultat ,  sous  ce  litre , 
Voyage  à  la  haie  d'Hudson ,  etc. ,  Lon- 
dres, 1748,  in-8,  trad.  en  français  ,  par 
Sellius,  2  vol.  in-12  ;  on  en  trouve  des  ex- 
traits dans  l'Hist.  générale  des  voyages, 
tom.  14  et  15,  et  dans  plusieurs  recueils. 

*  ELLIS  (  Guillaume  ) ,  agronome  an- 
glais, naquit  vers  la  fin  du  1 7*  siècle  ,  di- 
rigea pendant  près  de  50  ans  une  ferme  à 
Little-Gaddesden,  dans  le  comté  de  Hert- 
ford,  et  confirma  par  sa  propre  expérience 
un  grand  nombre  d'observations  utiles, 
d'inventions,  d'instrumens  aratoires,  et  de 
procédés  inconnus  relatifs  à  l'agriculture 
et  au  gouvernement  des  troupeaux  :  le 
résultat  de  ses  propres  observations  et  de 
ses  travaux  est  consigné  dans  les  nom- 
breux écrits  qu'il  a  publiés  et  dont  on  a 
fait  un  abrégé  sous  ce  titre  :  Agriculture 
abrégée  et  méthodique  comprenant  les 
articles  les  plus  utiles  d'agriculture  pra- 
tique, 1772,  2  vol.  in-8.  Il  est  mort  vers 
l'année  1760. 

*  ELLYS  (Antoine),  évêque  anglican, 
naquit  en  1693,  et  fit  ses  études  à  l'uni- 
versité de  Cambridge.  Il  posséda  succes- 
sivement différens  bénéfices ,  et  fut 
nommé  à  l'évêché  de  Saint-David ,  dont 
il  prit  possession  en  1752.  Il  est  connu 
par  les  ouvrages  suivans  ;  1°  Défense  de 
V Examen  sacramentel,  comme  étant  une 
juste  sécurité  pour  V  Eglise  établie,  1736, 
in-4.  Cet  ouvrage ,  écrit  en  faveur  de 
l'église  anglicane  ,  était  dirigé  contre  les 
Dissenters.  2"  Traité  de  la  liberté  spi- 
rituelle et  temporelle  des  protestons  en 
Angleterre.  Cet  ouvrage  est  divisé  eu 
deux  parties.  Dans  la  1",  l'auteur  s'efforce 
de  prouver  que  les  prolestans  avaient  eu 
le  droit  de  changer  leur  doctrine  contre 
ce  qu'il  appelle  les  prétentions  de  l'é- 
glise romaine.  Dans  la  seconde  ,  il  s'oc- 
cupe de  la  liberté  religieuse  des  sujets 
dans  leurs  rapports  avec  le  gouvernement. 
Ce  livre  parut  en  1763  après  la  mort  de 
l'auteur,  arrivée  en  1761.  On  a  encore 
d'Ellys,  Remarques  sur  un  Essai  de  Da- 
vid Hume, concernant  les  miracles,  1 7  52, 
in-4,  et  quelques  Sermons  imprimés  sé- 
parément. 


52  ELO 

EL^ACIN  (George) ,  historien  d'E- 
gypte, mort  en  1238  ,  fut  secr<5taire  des 
califes,  quoiqu'il  fit  profession  du  chris- 
tianisme. On  a  de  lui  une  Histoire  4es 
Sarrasins,  écrite  en  arabe,  qui  a  été 
traduite  en  latin  parEperniuSj  Leyde, 
JG22,in-fol.  On  y  trouve  des  choses 
curieuses.  Elle  commence  à  Mahomet,  et 
finit  à  l'établissement  d6  l'empire  des 
Turcs. 

ELMENHORST  fGeverhart) ,  de  Ham- 
bourg, mort  en  1621  ,  s'appliqua  à  la 
critique,  et  s'y  rendit  très  habile.  On  a 
de  lui  des  notes  sur  Minutius Félix  et  sur 
plusieurs  autres  auteurs  anciens.  Il 
donna  à  Leyde ,  en  1 C 1 8 ,  le  Tableau  du 
Cc'bès  ,  avec  la  version  latine  et  les  notes 
de  JeanCasel. 

ELMENHORST  (Henri),  auteur  d'im 
fraitc  allemand  sur  les  spectacles,  im- 
primé à  Hambourg  en  1G88,  in-4.  Il 
tâche  vainement  d'y  prouver  que  les 
spectacles  ,  tels  qu'ils  sont  aujourd'imi, 
loin  d'être  contraires  aux  bonnes  mœurs, 
sont  capables  de  les  former,  On  peut  voir 
cette  matière  discutée  avec  plus  de  raison 
et  de  vérité,  dans  le  Traite  des  specta- 
cles de  M.  Bossuet ,  dans  une  lettre  du 
fameux  citoyen  de  Genève  à  M.  d'Alem- 
bert,  dans  les  Lettres  sur  les  spectacles, 
par  M.  Des  Prés  de  Boissy ,  et  dans  le 
Journal  historique  et  littéraire,  1 5  avril 
pt  l*'  mai  1781.  f^oy.  Molière. 

ELOI  (Saint),  né  à  Cadillac,  près  de 
Limoges,  en  588,  excella  dès  sa  jeunesse 
dans  les  ouvrages  d'oi'févreric,  particu- 
lièrement dans  ceux  qui  étaient  destinés 
^  orner  les  églises  et  les  tombeaux  des 
saints.  Clotaire  II  employa  ses  talens, 
ainsi  que  Dagobert,  qui  le  fit  son  tréso- 
rier. On  le  tira  de  ce  poste  pour  le  met- 
tre sur  Ip  siège  deNoyon  en  G40.  Il  mou- 
rut saintement  en  6^0,  après  avoir  prêché 
le  christianisme  à  des  peuples  idolâtres , 
fondé  grand  nombre  d'églises  et  de  mor^ 
|iastères,et  paru  avec  éclat  dans  un  concile 
de  Châlons,  en  644,SaintOuen  son  ami  a 
écrit  sa  vie.  Lévêque  en  a  donné  une  tra- 
duction, Paris,  1G93,  in-8.  Il  l*a  enrichie 
4'une  version  de  ÎG  Jiome'lies,  qui  portent 
le  nom  de  saint  Eloi.  Elles  sont  très  tou- 
chantes ,  remplies  de  belles  images ,  et 


ELO 

vraiment  éloquentes,  malgré  la  simplicité 
du  stile  qui  porte  partout  le  caractère  in- 
téressant de  la  franchise  antique.  On  a 
aussi  quelques  lettres  de  ce  saint. 

ELOY  (  JVicolas  -  François-Joseph  ) , 
conseiller-médecin  ordinaire  de  la  prin- 
cesse Charlotte  de  Lorraine ,  ensuite  du 
prince  Charles- Alexandre  de  Lorraine  son 
frère,  médecin-pensionnaire  de  la  ville 
de  Mons ,  correspondant  de  la  société 
royale  de  médecine  de  Paris ,  né  à  Mons, 
capitale  du  Hainaut,  le  20  septembre 
1714,  exerça  sa  profession  avec  beaucoup 
d'honneur  et  de  désintéressement  pen- 
dant l'espace  de  52  ans,  et  mourut  le  10 
mars  17 88, d'un  asthme  humide  qui  l'em-. 
porta  en  moins  de  huit  jours,  regretté  de 
tous  ses  confrères  et  de  ses  concitoyens. 
Continuellement  appliqué  à  l'étude  et  à 
la  pratique  de  la  médecine ,  il  n'en  fut 
pas  moins  attaché  aux  devoirs  de  la  re- 
ligion, qu'il  remplit  avec  la  plus  scrupu-» 
leuse  et  la  ydus  édifiante  exactitude.  On 
a  de  ce  savant  médecin  :  1"  lie'/lc.vions 
sur  l'usage  du  tlié ,  Mons,  17  50,  in-12. 
2"  Reflexions  sur  une  brochure  intitulée 
Apologie  du  thé,  Mons,  1751,  in-12. 
3°  Essai  du  Dictionnaire  historique  de 
la  médecine  ,  Liège,  17  55,  2  vol.  in-8. 
4°  Dictionnaire  historique  de  la  méde^ 
cine  ancienne  et  moderne,  Mons,  1778, 
4  vol.  in-4.  L'auteur  développe  ici  avec 
plus  d'étendue  et  d'intéiêt,  les  mêmes 
choses  dont  les  limites  étroites  de  V Essai 
ne  lui  avaient  permis  que  de  faire  une 
esquisse.  La  préface  forme  un  discours 
plein  de  choses  et  d'idées  vraies  qui,  sans 
avoir  la  boursoufflure  de  l'éloquence  mo- 
derne, plaît  par  un  arrangement  écono- 
mique et  bien  gradué  des  notions  assor^ 
ties  à  la  matière  que  l'auteur  traite.  Il 
présente  d'une  manière  rapide,  mais  qui 
occupe  fortement  l'esprit,  l'histoire  de  la 
médecine  et  des  révolutions  qu'elle  a  es-r 
suyées.  Dans  le  discours  préliminaire  ,  il 
s'attache  particulièrement  à  faire  voir 
les  dangers  de  l'esprit  de  système  et  de 
la  manie  de  généraliser  des  choses  mis- 
ceptibles  de  modifications  infinies  et 
différenciées,  pour  ainsi  dire,  individuel- 
lement. Dans  l'article  médecine,  plein 
d'excellentes  observations ,  l'auteur  rç-r 


ELO 
ifient  encore  à  cette  leçon  extrêmement 
importante  ;  il  fait  toucher  au  doigt  les 
suites  fatales  de  l'esprit  systématique, 
tel  qu'il  se  montre  dans  toutes  les  scien- 
ces ,  mais  avec  des  suites  plus  graves 
et  plus  déplorables  dans  l'art  de  la  mé- 
decine. La  notice  des  médecins ,  où  il 
manque  néanmoins  quelques  articles,  l'a- 
brégé de  leur  vie,  le  catalogue  de  leurs 
ouvrages ,  est  faite  avec  soin ,  avec  une 
modération  et  une  impartialité  qui  prou- 
vent dans  l'auteur  une  grande  droiture  de 
caractère.  Quand  il  a  occasion  de  parler 
de  ces  médecins  désintéresses  qui  regar- 
dent comme  un  salaire  précieux  la  satis- 
faction de  secourir  des  malades  indigens, 
de  visiter  des  cabanes  obscures  et  infec- 
tées, où  l'infirmité  est  unie  à  la  misère  ; 
il  le  fait  avec  un  langage  de  sentiment , 
qui  honore  infiniment  sa  philosophie. 
Enfin  la  manière  de  penser  de  l'auteur , 
la  fermeté  de  ses  principes  et  sa  religion, 
paraissent  encore  mieux  dans  l'article  où 
il  fait  le  catalogue  des  médecins  qui  se 
sont  sanctifiés  par  l'exercice  de  leur  art. 
Nous  rapporterons  le  passage  suivant , 
dans  lequel  on  trouve  une  force  d'esprit 
qu'on  peut  regarder  comme  un  phé^io- 
mène  dans  le  temps  où  nous  sommes, 
«  Parmi  les  reproches  qu'on  a  faits  à  la 
))  médecine,  le  plus  outrageant  est  celui 
»  d'accuser  cette  science  de  conduire  à 
»  l'athéisme  et  à  l'irréligion.  Mais  quand 
»  l'étude  du  mécanisme  animal  ne  serait 
j)  pas  celle  des  mei-veilles  du  Créateur , 
»  dont  on  reconnaît  le  doigt  et  la  toute- 
3>  puissance  dans  la  structure  de  la  plus 
3)  petite  fibre  ;  quand  cette  étude  ne  por- 
»  terait  pas  au  culte  d'un  Dieu,  dont  le 
»  médecin  a  tous  les  jours  occasion  d'ad- 
3)  mirer  les  ouvrages, il  suffirait  de  faire  l'é- 
)>  numération  des  personnages  qui  se  sont 
«  sanctifiés  dans  l'exercice  de  la  méde- 
»  cine,  pour  laver  celte  science  des  re- 
j>  prochrs  qu'on  lui  fait  encore  aujour- 
)>  d'hui.  Jusque  dans  le  sein  de  l'église 
»  catholique  il  y  a  eu  des  athées  ;  mais 
»  c'est  à  la  perversité  de  leurs  cœurs ,  à 
»  raveugiement  de  leur  esprit ,  et  non 
»  point  à  l'art  qu'ils  professaient,  qu'on 
»  doit  attribuer  leurs  écarts  {voyez  Ga- 
P  lies).  Les  esprits  forts  de  nos  jours  me 


ELP 


53 


))  mettront  sans  doute  au  rang  de  ces 
)>  bonnes  gens,  que  leur  philosophie  re- 
»  garde  comme  des  dupes,  parce  qu*ils 
))  croient  ce  que  leurs  pères  ont  cru.  A 
»  cette  condition,  je  consens  d'être  mis 
»  dans  la  même  classe  ;  et  pour  mériter 
))  davantage  le  mépris  dont  ils  m'honore- 
»  ront ,  je  mets  ici  sous  leurs  yeux  les 
»  noms  des  saints  mé^cins  que  l'Eglise 
»  révère.  Elle  leur  a  décerné  un  culte  pu- 
M  blic  ,  soit  p'^n'^  avoir  généreusement 
»  soutenu  les  intérêts  de  la  foi  qu'ils  ont 
»  scellée  de  leur  sang,  soit  pour  avoir  il- 
»  lustré  leur  profession  par  la  pratique 
»  des  vertus  les  plussublimes.  »  5°  Cours 
élémentaire  des  accouchemens, clc.  Mons, 
1775,  in-12.  6"  Mémoire  sur  In  mnrclie, 
la  nature,  les  causes  et  le  traitement  de 
la  dissenterie,  Mons,  17  80,  in-8.  7°  Exa- 
men de  la  question  médico-politique  : 
«  Si  l'usage  habituel  du  café  est  avanta- 
»  geux  ou  doif  être  mis  au  rang  des  cho- 
»  ses  indifférentes  à  la  conservation  de 
»  la  santé  ;  s'il  peut  se  concilier  avec  le 
»  bien  de  l'état  dans  les  provinces  bel- 
»  giques,  ou  s'il  est  nuisible  et  conti-aire 
»  à  tous  égards?  »  ibid.  1781,  in-8.  Les 
états  du  comté  de  Hainaut  voulant  témoi- 
gner à  l'auteur  le  cas  qu'ils  faisaient  des 
ouvrages  qu'il  avait  mis  au  jour  et  des 
services  rendus  à  la  patrie,  lui  firent  re- 
mettre, parleurs  députés  ordinaires,  avec- 
un  compliment  très  flatteur,  une  taba- 
tière d'or  portant  d'un  côté  les  armes 
des  états ,  avec  l'inscription  :  JEx  dono 
Patrice,  et  de  l'autre  un  génie  représen- 
tant la  renommée,  avec  ces  paroles  : 
Minulatinnis  incitamentum . 

*  ELPHINSTOIN  (Jacques),  grammai- 
rien anglais  né  à  Edimbourg  en  1721,  fit 
d'excellentes  éludes  dans  cette  ville ,  et 
devint  à  l'âge  de  17  ans  précepteur  de' 
Lord  Blantyre.  Après  avoir  parcouru  la 
Hollande  et  le  Brabant,  et  s'être  fixé  pen- 
dant quelque  temps  à  Paris  pour  y  ap- 
prendre parfaitement  la  langue  française, 
il  revint  en  Ecosse  où  il  contribua  au  sué- 
cès  du  Rambler,  ouvrage  périodique  pu- 
blié par  le  célèbre  Johnson.  11  alla  en- 
suite en  Angleterre  où  il  reprit  la  carrière 
de  l'enseignement  en  établissant  une  école 
à  Kensington.  De  longues  et  laborieusçi^ 


54 


ELS 


recherches  sur  la  langue  anglaise  lui  fi- 
rent connaître  exaclenient  cet  idiome 
dont  il  essaya  de  réformer  le  système 
d'orthographe.  Lui-même  mit  en  pratique 
cette  orthographe  nouvelle  dans  ses  ou- 
vrages; mais  le  système  et  les  livres  sont 
tombés  à  la  fois  dans  l'oubli.  Cependant 
on  remarque  i°  une  Traduction  envers 
du  poème  de  la  Religion  de  Louis  Ra- 
cine, qui  obtint  les  suffrages  d'Young  et 
de  Richardson  ;  2°  PO0ÊÊ  sur  l'Educa- 
tion, 1763,  inS;  3"  Accueil  de  poèmes 
tires  des  meilleurs  auteurs,  1764,  in-8, 
où  il  a  inséré  plusieurs  pièces  de  sa  com- 
position ;  4°  f^ers  anglais  ,  français  et 
latins,  1767,  in-folio;  b°  une  traduction 
des  Epigrammesàc  Martial  avec  un  Com- 
mentaire, 1782,  in  4  ;  et  en  17  83,  une 
Edition  latine  de  ce  poète,  précédée 
d'une  Introduction  à  la  lecture  des  poè- 
tes. 6°  Analyse  des  langues  française  et 
anglaise,  17  55,  2  vol.  in-12.  V  Principes 
raisonnes  de  la  langue  an  glaise,  ou  gram- 
maire anglaise  rc'duite  à  l'analogie  , 
1764,  2  vol.  in-12  ;  il  en  a  donné  en  1765 
un  Abre'gé.  1°  Nouveau  système  de  pro- 
nonciation, 1  vol.  in-8.  8°  Recueil  de 
lettres,  contenant  sa  correspondance  avec 
des  hommes  distingués  dans  les  sciences 
et  dansles  lettres,  Samuel  Johnson,  ledoc- 
teur  Jortin,  Benjamin  Franck)  in,  Macken- 
sie  ,  etc.  Elphiston  est  mort  à  Hammers- 
mith  le  8  octobre  1809  à  l'âge  de  89  ans. 

EL-ROI  (  David  ) ,  imposteur  juif  vers 
l'an  933 ,  s'acquit  une  si  grande  autorité 
parmi  ceux  de  sa  nation  ,  qu'il  leur  per- 
suada qu'il  était  le  Messie,  envoyé  de 
Dieu  pour  les  rétablir  dans  la  ville  de 
Jérusalem  et  pour  les  délivrer  du  joug 
des  infidèles.  Le  roi  de  Perse ,  Bazi-Bila  , 
informé  de  la  hardiesse  de  ce  fourbe , 
donna  ordre  de  l'enfermer  ;  mais  il  s'é- 
chappa de  prison.  Il  fallut,  pour  s'en  dé- 
livrer,  que  son  beau-père,  gagné  par  de 
grandes  sommes  d'argent ,  le  poignardât 
pendant  qu^il  dormait. 

ELSHAIMER  (  Adam  ) ,  peintre  célè- 
bre, naquit  à  Francfort ,  en  1574,  d'un 
tailleur  d'habits.  Après  s'être  fortifié  dans 
sa  profession  par  les  leçons  d'Ussembac  , 
et  surtout  par  l'exercice,  il  passa  à  Rome. 
U  chercha  dansles  ruines  de  cette  métro- 


ELV 

pôle  de  l'Europe ,  et  dans  les  lieux  écar- 
tés oii  son  humeur  sombre  et  sauvage  le 
conduisait  souvent ,  de  quoi  exercer  sou 
pinceau.  U  dessinait  tout  d'après  nature. 
Sa  mémoire  était  si  fidèle ,  qu'il  rendait 
avec  une  précision  et  un  détail  merveil- 
leux, ce  qu'il  avait  perdu  du  vue  depuis 
quelques  jours.  Il  a  extrêmement  fini  ses 
tableaux.  Sa  composition  est  ingénieuse, 
sa  touche  gracieuse ,  ses  figures  rendues 
avec  beaucoup  de  goût  et  de  vérité.  Il 
entendait  parfaitement  le  clair-obscur;  il 
réussissait  surtout  à  représenter  des  effets 
de  nuit  et  des  clairs  de  lune.  Ce  peintre 
mourut  en  1620,  dans  l'indigence  et 
dans  la  plus  sombre  mélancolie,  produite 
par  son  caractère  et  par  son  état.  Ses  ta- 
bleaux se  vendaient  très  cher;  il  en  fai- 
sait peu ,  aussi  sont-ils  fort  rares.  Un  de 
ses  disciples,  nommé  Jacques-Ernest  Tho- 
MANN,  de  Lindau  ,  a  fait  des  tableaux  si 
approchans  de  ceux  de  son  maître,  que 
plusieurs  connaisseurs  s'y  sont  mépris. 

ELSWARDUS.  Voyez  Ethelwardds. 

ELSWICH  (Jean  Herman  d'  ) ,  luthé- 
rien ,  naquit  à  Rensbourg  dans  le  Hol- 
stein,  en  1684.11  devint  ministre  à  Stade, 
et  y  mourut  en  1721.  Il  a  publié,  1°  le 
livre  de  Simonius ,  de  litteris  pereunti- 
bus,  avec  des  notes;  2°  Launoïus,  de  va- 
ria Jristotelisfortuna,  auquel  il  a  ajouté: 
Schediasma  ,  de  varia  Aristotclis  in 
scholis  protestantiuni  fortuna  ;  et  Joan- 
nis  Jota  dissertatiodehistoriaperipate- 
tica ,  etc.  ,  etc. 

ELVIR,  l'un  des  califes  ou  successeurs 
de  Mahomet,  était  fils  de  Pisasire,  der- 
nier calife  de  Syrie  ou  deBabylone.  S'é- 
tant  sauvé  en  Egypte,  il  fut  reçu  comme 
souverain  pontife.  Les  Egyptiens  rassem- 
blèrent toutes  leurs  forces  pour  détrôner 
le  maître  du  pays,  qu'ils  regardaient 
comme  un  usurpateur.  Ce  prince  s'avisa 
d'un  stratagème  pour  détourner  l'orage 
qui  le  menaçait;  il  envoya  reconnaître 
Elvir  pour  souverain  dans  ce  qui  concer- 
nait la  religion ,  s'offrant  à  prendre  de 
lui  le  cimeterre  et  les  brodequins,  qai 
étaient  les  marques  du  pouvoir  absolu  en 
ce  qui  regarde  le  temporel.  La  paix  fut 
faite  à  ces  conditions  ,  vers  l'an  990,  et 
Elvir  demeura  calife. 


j 


ELY 

ELXAI ,  juif  qui  vivait  sous  l'empire 
de  Trajan ,  fut  chef  d'une  secte  de  fana- 
tiques qui  s'appelaient  e/.rrtiYej.  Ils  étaient 
moitié  juifs  et  moitié  chrétiens,  lis  n'a^ 
doraient  qu'un  seul  Dieu;  ils  s'imagi- 
naient l'honorer  beaucoup  en  se  baignant 
plusieurs  fois  par  jour.  Ils  reconnais- 
saient un  Christ ,  un  Jlessie ,  qu'ils  ap- 
pelaient le  Grand  Roi.  On  ne  sait  s'ils 
croyaient  que  Jésus  fût  le  Messie,  ou  s'ils 
en  admettaient  un  autre ,  qui  n'était  pas 
encore  venu.  Ils  lui  donnaient  une  forme 
humaine ,  mais  invisible  ,  qui  avait  en- 
viron 38  lieues  de  haut;  ses  membres 
étaient  proportionnés  à  sa  taille.  Ils 
croyaient  que  le  Saint-Esprit  était  une 
femme,  peut-être  parce  que  le  mot,  qui 
en  hébreu  exprime  le  Saint-Esprit ,  est 
du  genre  féminin.  Elxaï  était  considéré 
par  ses  sectateurs  comme  une  puissance 
révélée  et  annoncée  par  les  prophètes , 
parce  que  son  nom  signifie ,  selon  l'hé- 
breu, qui  est  révélée.  Ils  révéraient  même 
ceuï  de  sa  race  jusqu'à  l'adoration,  et  se 
faisaient  un  devoir  de  mourir  pour  eus. 
Il  y  avait  encore  sous  Yalens  deux  sœurs 
de  la  famille  d'Elxaï ,  ou  de  la  race  bé- 
nite ,  comme  ils  l'appelaient.  Elles  se 
nommaient  Marthe  et  Marthène,  et  étaient 
considérées  comme  des  déesses  par  les 
elxaïles. 

ELYMAS,  nommé  aussi  Bar-Jésu., 
filsde  Jébas,  de  la*  province  de  Cypre.  Il 
était  avec  le  proconsul  Sergius  Paulus  , 
lorsque  saint  Paul  vint  à  Paphos,  et  il  mit 
en  usage  son  art  magique ,  pour  empê- 
cher que  le  procousul  n'embrassât  la  foi 
de  Jésus-Christ.  Mais  Paul  ,  le  regardant 
d'un  œil  menaçant,  lui  prédit  que  la  main 
de  Dieu  allait  s'appesantir  sur  lui,  et  qu'il 
serait  privé  de  la  lumière  pour  un  certain 
temps.  Alors  ses  yeux  s'obscurcirent,  et 
tournant  de  tous  côtés,  il  cherchait  quel- 
qu'un qui  lui  donnât  la  main.  Ce  miracle 
toucha  le  proconsul ,  qui  se  rendit  à  la 
vérité  et  se  déclara  hautement  pour  Jésus- 
Christ. 

ELYOT,  gentilhomme  anglais,  mort 
en  1 646,  fut  aimé  et  estimé  de  Henri  VIII, 
qui  le  chargea  de  diverses  négociations 
importantes.  On  a  de  lui  uu  Traité  de  ïé- 
ducation  des  en  fans ,  en  anglais,  1580, 


ELZ  55 

in-8;  son  Dictionnaire  latin-anglais  que 
l'on  croit  être  le  premier  qui  ait  paru  en 
Angleterre,  et  d'autres  ouvrages. 

ELZEVIR ,  dont  le  véritable  nom  est 
Elzevier,  imprimeurs  d'Amsterdam  et  de 
Lcyde,  originaires  de  Eiége,  de  Louvain 
ou  d'Espagne,  se  sont  fait  un  nom  par  les 
belles  éditions  dont  ils  ont  enrichi  la  ré- 
publique des  lettres.  —  Locis ,  dont  les 
presses  travaillaient  dès  1 595,  et  dont  les 
éditions  offrent  au  frontispice  un  aigle 
portant  un  faisceau  de  sept  flèches  avec 
celte  légende  concordia  res  parvœ  cres- 
cunt,  ou  un  homme  debout  avec  la  devise 
non  solus  qu'adopta  plus  tard  la  famille 
des  Elzevirs  pour  la  mettre  en  tête  de 
toutes  ses  éditions;  — Matthieu  ou  Ma- 
thys,  fils  aîné  de  Louis,  qui  exerça  à  Leyde- 
de  1618  à  1640;  — Gilles  (  ^Egidius  ) 
deuxième  fils  de  Louis,  libraire  à  la  Haye 
en  1  519  ;  —  Isaac,  fils  aîné  de  Matthieu 
qui  fut  le  premier  typographe  de  la  fa- 
mille (16 17-1 628); — Boxavesture,  Abra- 
ham et  Daniel,  sont  les  plus  célèbres.  Il 
n'y  a  plus  de  libraires  de  cette  famille, 
depuis  la  mort  du  dernier,  arrivée  à  Ams- 
terdam en  1680.  Ce  fut  une  perte  pour 
la  littérature.  Les  Elzevirs  ne  valaient 
point  les  Eliennes,  ni  pour  l'érudition, 
ni  pour  les  éditions  grecques  et  hébraï- 
ques ;  mais  ils  ne  leur  cédaient  point  dans 
le  chois  des  bons  livres,  ni  dans  l'intelli- 
gence de  la  librairie.  Ils  ont  même  été 
au  dessus  d'eus  pour  l'élégance  et  la  dé- 
licatesse des  petits  caractères.  Leur  Fir- 
gile ,  leur  Térence  ,  leur  Nouveau  Tes- 
tament ^rec,  16-33,  in-l  2  ;  \e  Psautier , 
1653,  V Imitation  de  Jésus-Christ  sans 
date,  le  Corps  de  droit,  et  quelques  autres 
livres  ornés  de  caractères  rouges ,  vrais 
chefs-d'œuvre  de  typographie,  satisfont 
également  l'esprit  et  les  yeux,  par  l'agré- 
ment et  la  correction.  Les  Elzevirs  ont 
publié  plusieurs  fois  le  catalogue  de  leurs 
éditions.  Le  dernier,  mis  au  jour  par  Da- 
niel en  1 67  4,  in-l  2,  en  7  parties,  est  gTossi 
de  beaucoup  d'impressions  étrangères 
qu'il  voulait  vendre  à  la  faveur  de  la  ré- 
putation que  les  escellentes  éditions  de 
sa  famille  lui  avaient  acquise  dans  l'Eu- 
rope savante.  (On  trouve  dans  \e Magasin 
encyclopédique  {août  et  septembre  180C) 


56  ÈME 

une  notice  sur  les  imptimeurs  de  la  fa- 
mille dei  Ehevirs  par  Adry,  auteur  d'un 
catalogue  raisonne  de  toutes  les  c'ditions 
qu'ont  données  les  Ehevirs ^  3  vol.  in-8, 
uianusci'it  qui  se  trouve  dans  la  biblio- 
thèque de  M.  Sensler,  possesseur  d'une 
riche  collection  d'Elzevirs  :  le  même  sa- 
vant a  fait  un  catalogue  manuscrit  des  El* 
zevirs  déguisés,  petit  vol.  in-fol.  :  il  se 
trouve  dans  !a  bibliothèque  de  M;  Barbier. 
Le  Manuel  du  Libraire  de  Jean  Charles 
Brunet  donne  une  notice  de  la  collection 
d'auteurs  latins ,  français  et  italiens , 
petit  in-1 2,  publiés  par  les  Elzevirs.  M.  Bc- 
rard  a  fait  paraître  sous  le  voile  de  l'ano- 
nyme :  Essai  bibliographique  sur  les  e'di- 
tions  des  Elzevirs  les  plus  précieuses  et 
les  plus  recherchées,  pre'ce'de' d'une  notice 
sur  ces  imprimeurs  célèbres,  1822,  1  voL 
in-8. 

EMBER  (Paul),  ministre  protestant,^ 
né  à  Débreczin  dans  la  Haute-Hongrie,  a 
donné  plusieurs  ouvrages  au  commence- 
ment du  18*  siècle  :  1°  Des  sermons  en 
hongrois,  Clausenbourg,  nOO,  in-4.  2" 
Historia  ccclesiœ  reformates  in  Hunga- 
ria  et  Transilvania,  Utrecht,  1728,  in-4, 
avec  des  additions  par  Frédéric-Adolphe 
Lampe,  professeur  d'histoire  ecclésia- 
stique dans  cette  ville.  Charles  Péterffy 
dit,  dans  sa  Collection  des  conciles  de 
Hongrie ,  tome  I ,  que  cette  Histoire  n'est 
farcie  que  de  faits  apocryphes,  de  calom- 
nies et  d'invectives  contre  l'église  ro- 
maine. 

EÎVIBRY.  ^oyes  Thomas. 

EMERICH  ou  Eymkrick.  f^oyez  Ni- 
colas. 

*EMÉRIGON  (Balthazar-Marie),  cé- 
lèbre avocat  du  parlement  d'Aix,  mort 
conseiller  à  l'amirauté  de  Marseille  en 
1785,  âgé  de  GO  ans,  est  auteur  d'un 
Traite'  des  assurances  et  des  contrats  à 
la  grosse,  Marseille,  1784,  2  vol.  in-4. 
C'est  le  meilleur  traité  que  nous  ayons  sur 
cette  matière  ;  on  y  trouve  tout  ce  qui  re- 
garde les  assurances  anciennes  et  mo- 
dernes. On  a  encore  d'Eraérigon  un  petit 
Commentaire  de  l'ordonnance  de  la  ma- 
rine du  mois  d'août  17  61,  Marseille,  17  80, 

2  vol.   in-1 2,   reimprimé  à  Paris   1803, 

3  vol.  in-1 2,  et  plusieurs  mémoires  csti- 


ÊiVÎË 

mes  et  recherchés  sur  des  questions  ma- 
ritimes. 

*  EMERSON  (Guillaume  ou  William)^ 
mathématicien  anglais,  né  en  1701,  à 
Hurtworth,  dans  le  comté  de  Durham^ 
s'était  d'abord  voué  à  l'enseignement } 
mais  les  difficultés  qu'il  éprouvait  à  ren-* 
dre  verbalement  ses  pensées  le  lui  firent 
bientôt  abandonner  pour  se  livrer  à  la 
composition.  Il  affectait  de  l'originalité 
dans  son  vêlement,  dans  son  maintien  et 
dans  toutes  ses  habitudes.  Il  mourut  dé 
la  pierre  le  26  mai  1782,  laissant  un  grand 
nombre  d'ouvrages,  où  l'on  trouve  bcau^ 
coup  de  clarté  et  de  concision,  mais  peu 
d'invention ,  et  une  sorte  de  rudesse  dd 
stile  conforme  à  ses  manières.  Les  prin^ 
cipanx  ont  été  imprimés  sous  le  titre  de 
Ci/clomathesis ,  ou  Introduction  facild 
aux  diverses  branches  de  mathéma-' 
tiques,  1770,  10  vol.  in-8. 

•  EMERY  (Jacques  Condé),  supérieuf 
général  de  la  congrégation  de  Saint-Sul-» 
pice,  naquit  à  Gex  le  26  août  1732.  Il 
était  fils  du  lieutenant-général  criminel 
au  Bailliage  de  cette  ville.  Après  avoir 
commencé  ses  études  chez  les  jésuites  àd 
Màcon,  il  les  termina  vers  n.SO  dans  la 
petite  communauté  de  Saint-Sulpice  k 
Paris.  Ordonné  prêtre  en  1 7.'j6,  professeur' 
de  dogme  au  séminaire  d'Orléans  en  1 7  â9< 
professeur  de  morale  au  .séminaire  de 
Lyon  peu  de  temps  après ,  il  se  fit  rece- 
voir docteur  en  théologie  en  1 7G4  à  l'uni- 
versité de  Valence;  fut  nommé  en  17  70 
supérieur  du  séminaire  d'Angers  et  vi- 
caire général  de  ce  diocèse,  et  devint  en 
17  82  supérieur-général  de  la  congréga-» 
tion  de  Saint-Sulpice,  après  la  démission 
de  l'abbé  Legallic,  8*  supérieur  général. 
En  1784  il  reçut  l'abbaye  de  Bois-Groland 
dans  le  diocèse  de  Luçou,  plus  honorable 
que  lucrative.  Dans  ces  diverses  fonc- 
tions, l'abbé  Eniery  fit  preuve  de  toutes 
les  qualités  qu'il  fallait  réunir  pour  les 
remplir  dignement  ;  on  remarquait  sur- 
tout en  lui  un  mélange  de  douceur  et  de 
fermeté ,  une  grande  connaissance  des 
hommes  et  des  choses,  un  coup  d'œil 
sûr  et  l'esprit  d'ordre  le  plus  exact  ;  il 
y  ajoutait  encore  un  jugement  sain  et  un 
savoir  ti-ès  étendu.  A  l'approche  de  la  rc- 


EME 

volution,  il  conçut  de  vives  inquit'tudessur 
le  sort  que  les  novateurs  destinaient  à  la 
religion;  il  n'en  montra  que  plus  de  zclc 
pour  les  intérêts  qui  lui  étaient  confiés. 
Il  fonda  en  1789  un  séminaire  à  Balti- 
more ,  qui  venait  d'être  érigé  en  évêché , 
et  où  il  envoya  plusieurs  prêtres  de  Saint- 
Sulpice.  Bientôt  il  fut  enlevé  à  ses  reli- 
gieuses occupations  :  son  séminaire  fut 
fermé  et  lui-même  jeté  dans  la  prison  de 
Sainte-Pélagie  d'où  il  sortit  peu  de  temps 
apVès ,  pour  être  bientôt  arrêté  de  nou- 
veau, et  renfermé  à  la  conciergerie  qui 
était  le  premier  pas  vers  l'échafaud.  Pen- 
dant les  16  mois  que  dura  sa  captivité,  il 
s'occupait  du  soin  de  consoler  les  malheu- 
reuses victimes  de  la  révolution;  il  inspi- 
rait à  celles  qui  étaient  destinées  à  la  mort 
le  courage  et  la  résignation  qui  rendent 
moins  pénibles  pour  un  chrétien  les  ap- 
prêts du  supplice  :  son  ministère  évangé- 
lique  était  connu  des  révolutionnaires  ; 
l'oa  entendit  Fouquier-Tinville ,  qui  ce- 
pendantîivait  juré  de  le  faire  mourir  et  qui 
différait  de  l'envoyer  à  l'échafaud,  répéter 
dans  son  langage  trivial  et  sanguinaire  : 
Ce  petit  prêtre  empêche  les  autres  de 
crier.  Les  évêques  constitutionnels  La- 
mourette  et  Fauchct  ayant  été  proscrits  et 
jetés  dans  la  même  prison  que  l'abbé 
Emery,  celui-ci  eut  le  bonheur  de  les  ra- 
mener au  repentir  pour  les  fautes  nom- 
breuses qu'ils  avaient  commises.  Après  la 
révolution  du  9  thermidor  au  2  (27  juillet 
1794),  il  fut  rendu  à  la  liberté.  M.  de 
Juigné,  alors  en  exil,  l'avaitnommé  grand- 
vicaire  :  l'abbé  Emery  administra  dès  lors 
presque  seul  le  diocèse  de  Paris;  sa  con- 
duite modérée  lui  concilia  tous  les  suf- 
frages :  sa  prudence ,  nécessaire  dans  les 
circonstances  où  il  se  trouvait ,  lui  valut 
la  confiance  du  clergé  et  des  fidèles  :  aussi 
à  peine  pouvait-il  suffire  à  ses  nombreux 
travaux  et  à  la  correspondance  très  éten- 
due qu'il  était  obligé  d'entretenir.  Nous 
ne  répondrons  point  aux  accusations  qui 
ont  été  faites  contre  lui  :  sa  condescen- 
dance ne  fut  jamais  faiblesse ,  et  le  re- 
proche d'ambition  qu'on  lui  a  adressé  est 
une  calomnie.  Forcé  par  la  révolution  du 
18  fructidor  an  5  (4  septembre  1797),  de 
se  condamner  encore  quelque  temps  à  la 

V. 


EME  57 

retraite,  il  siit  par  quelques  écrits  ne 
point  la  rendre  stérile.  ï.orsque  Buona- 
parte  songea  à  rendre  à  la  France  le  culte 
catholique ,  les  conseils  de  l'abbé  Emery 
ne  furent  point  demandés;  et,  quoiqu'on 
en  ait  dit,  il  fut  entièrement  étranger  au 
concordat  qu'il  accepta  avec  résignation, 
comme  tant  d'autres,  parce  qu'il  émanait 
du  saint  Siégé.  En  1802  le  gouvernement 
lui  offrit  l'évêché  d'Arras  qu'il  refusa  :  il 
ne  fit  qu'une  demande  ;  ce  fut  de  rétablir 
le  séminaire  de  Saint-Sulpice  ;  ce  qui  lui 
fut  accordé.  Nommé  vicaire-général  de  Pa- 
ris ,  et  conseiller  de  l'université ,  il  fit  par- 
tie d'une  commission  composée  de  deux 
cardinaux  et  de  cinq  évêques,  qui  était 
chargée  de  s'occuper  des  intérêts  de  l'E- 
glise. Tous  les  ecclésiastiques  savent  avec 
quel  courage  il  parla  dans  ces  réunions 
où  furent  prises  des  résolutions  qu'il  ne 
voulut  pas  sanctionner  par  sa  signature. 
L'abbé  Emery  était  très  attaché  au  saint 
Siège  :  personne  plus  que  lui  ne  déplora 
hautement  les  scandaleux  débats  que  le 
maître  de  la  France  avait  soulevés  contre 
le  pape.  Son  attachement  au  pontife  per- 
sécuté ,  son  refus  de  signer  les  délibéra- 
tions de  la  commission  dont  il  était  mem- 
bre, lui  attirèrent  la  disgrâce  de  Buona- 
parte  qui  lui  enjoignit  en  1 8 1 0  de  quitter 
son  séminaire,  où  il  rentra  cependant 
quelque  temps  après.  L'abbé  Emery,  tour- 
menté par  tant  de  secousses  violentes,  fa- 
tigué par  des  travaux  qui  se  renouvel- 
laient  tous  les  jours,  mourut  le  28  avril 
1 8 1 1  à  Paris,  et  fut  enterré  dans  la  maison 
du  séminaire  à  Issy.  On  lui  doit  quelques 
ouvrages  dont  quelques-uns  ont  paru  sous 
le  voile  de  l'anonyme  :  1°  L'Esprit  de 
Leibnitz.,  Lyon,  17  72,  2  vol.  in-12,  réim- 
primé en  1803,  sous  le  titre  de  Pensées 
de  Leibnitz  sur  la  religion  et  la  morale, 
2  vol.  in-8.  L'auteur  se  proposa  de  réunir 
dans  cet  ouvrage  tout  ce  que  Leibnitz 
avait  écrit  sur  la  religion,  afin  de  prouver 
que  l'incrédulité  n'était  pas,  comme  les 
philosophes  modernes  s'en  vantaient ,  le 
partage  de  toute  tête  pensante,  et  qu'on 
pouvait  ici  opposer  philosophe  à  philo- 
sophe. 2°  L'esprit  de  sainte  Thérèse^ 
Lyon,  1775  et  1779,  iu  8,  et  1820,  2  vol. 
iu-1 2.  C'est  un  recueil  de  ce  que  l'auteur 

4- 


58  EME 

R  jugé  de  meilleur  pour  la  pratique  dans 
les  (Écrits  de  la  sainte.  3°  Conduite  de  VE- 
(flise  dans  la  réception  des  ministres  de 
Li  religion,  qui  reviennent  de  l'he'rc'sie  et 
du  schisme,  t797  et  1801,  in-12.  4°  Le 
christianisme  de  François  Bacon,  ou 
Pensc'cs  et  scntimens  de  ce  grand  homme 
sur  la  religion,  1799,  2voK  in-12.  Le  dis- 
cours préliminaire  ,  la  vie  de  Bacon  et 
deux  e'claircissemens  qui  soûl  à  la  fin  de 
l'ouvrage,  attestent  la  solidité,  la  sagesse 
et  la  critique  de  l'auteur.  L'auteur  a  eu 
le  même  but  que  dans  son  Esprit  de 
Leibnitz.  5"  Une  édition  de  la  Défense  de 
la  Re'vélation  d'Euler  contre  les  objec- 
tions des  esprits  forts ,  suivie  des  pen- 
sées de  cet  auteur  sur  la  religion ,  sup- 
primées dans  la  dernière  édition  de  ses 
lettres  à  une  princesse  d'Allemagne  , 
Paris,  1805,  in-8.  Cet  ouvrage  d'Euler, 
écrit  en  allemand  et  traduit  en  français , 
était  devenu  extrêmement  rare  ;  ainsi  c'est 
un  nouveau  service  que  l'ahbé  Emery  a 
rendu  à  la  religion,  en  ressuscitant,  pour 
ainsi  dire,  un  monument  si  précieux.  Ce 
qui  distingue  particulièrement  les  ré- 
flexions d'Euler ,  c'est  la  clarté  réunie  à 
la  précision;  c'est  une  certaine  simplicité 
qui  accompagne  presque  toujours  les  pen- 
sées véritablement  profondes.  Celles  sur- 
tout où  il  fait  tourner  ses  connaissances 
astronomiques  en  preuves  de  la  religion, 
sont  très  remarquables.  6°  Nouveaux 
opuscules  de  Fleunj,  Paris,  1807,  in-12. 
lis  renfermentdeséclaircissemens  sur  l'as- 
semblée du  clergé  de  1682,  et  de  judi- 
cieuses réflexions  sur  les  quatre  articles 
qui  y  furent  dressés.  7"  Pensées  de  Des- 
cartes sur  la  religion  et  la  morale,  Paris, 
1811,  in-8.  M.  Emery  se  proposait  de 
joindre  Newton  aux  philosophes  dont  il 
avait  fait  connaître  les  sentimens;  mais 
il  n'eut  pas  le  temps  de  terminer  ce  tra- 
vail. Il  a  été  l'éditeur  de  plusieurs  ou- 
vrages de  M.  de  Luc,  ainsi  que  des  Lettres 
à  un  évêque  sur  divers  points  de  morale 
et  de  discipline,  par  M.  de  Pompignan, 
Ï802,  in-8.  Il  a  aussi  inséré  plusieurs  ar- 
ticles dans  les  Annales  philosophiques. 

*  EMERY  (Jean-Antoine-Xavier),  né 
à  Baucaire  en  1756,  fut  conseiller  à  la 
cour  des  aides  de  Montpellier.  Il  sut  ré- 


EMI 

sister  au  torrent  de  la  révolution  ,  et  con- 
server au  milieu  du  délire  de  ces  temps 
malheureux  les  principes  de  fidèle  sujet 
et  de  chrétien.  Son  innocence  et  sa  ver- 
tu le  trahirent  bientôt;  il  fut  arrêté 
comme  contre-révolutionnaire,  et  jeté 
dans  les  prisons  de  Nîmes,  où  il  mourut 
le  30  juillet  1794.  On  a  de  lui  un  ouvrage 
intitulé  Traité  des  successions,  obli- 
gations et  autres  matières  contenues 
dans  le  3*  et  le  4*  livre  des  Institutes  de 
Justinien ,  enrichi  cPun  grand  nombre 
d'arrêts  récens  du  parlement  de  Tou- 
louse ,  1787  ,  in-8.  Cet  ouvrage  atteste 
d'une  manière  avantageuse  le  savoir  de 
l'auteur  en  matière  de  jurisprudence. 

EMILE  (  Paul  ) ,  général  romain ,  fils 
de  Paul-Emile,  tue  à  la  bataille  de  Can- 
nes ,  obtint  deux  fois  les  honneurs  du 
consulat.  Dans  le  premier,  il  délit  en- 
tièrement les  Liguriens  ,  l'an  182  avant 
J.  C,  avec  une  armée  bien  moins  forte 
que  la  leur.  Dans  le  second ,  auquel  il 
parvint  à  l'âge  de  près  de  60  ans,  il 
vainquit  Persée,  roi  de  Macédoine,  ce 
qui  lui  mérita  le  surnom  de  Macédoni- 
que ,  réduisit  son  état  en  province  ro- 
maine,  démolit  70  places  qui  jivaient 
favorisé  les  ennemis,  et  retourna  à  Rome 
comblé  de  gloire.  Le  triomphe  qu'on  lui 
décerna,  dura  3  jours  ;  Persée  en  était  le 
triste  ornement.  Paul  Emile  avait  pleuré 
sa  défaite  ,  et  l'avait  consolé  par  des  rai- 
sons et  des  caresses.  Il  remit  aux  ques- 
teurs tous  les  trésors  de  Persée,  et  ne 
conserva  de  tout  le  butin  que  la  blilio- 
thèque  de  ce  roi  malheureux.  Ce  grand 
homme  mourut  l'an  168  avant  J.  C. 

EMILE  (  Paul  ) ,  célèbre  historien , 
était  de  Vérone.  Le  nom  qu'il  s'était  fait 
en  Italie  porta  le  cardinal  de  Bourbon  à 
l'attirer  en  France.  Il  y  vint  sous  le  règne 
de  Louis  XII ,  et  il  obtint  un  canonicat 
de  la  cathédrale  de  Paris.  Il  mourut  dans 
cette  ville  en  1529.  C'était  un  homme 
d'une  piété  exemplaire  et  d'un  travail  in- 
fatigable. On  a  de  lui  une  Histoire  de 
France  en  latin  ,  2  vol.  in-8  ,  et  in-folio, 
1544,  chez  Vascosan,  réimprimée  en 
1601  ,  in-fol.,  traduite  en  français  par 
Jean  Renard,  1043,  in-folio.  Juste Lipse 
en  fait  un  grand  éloge.  Le  stilc  en  est 


EMI 

pur,  mais  trop  laconique,  et  souvent 
obscur  et  embarrasse.  Il  y  a  trop  de  ha- 
rangues pour  un  abrégé  qui  est  d'ailleurs 
assez  décharné.  S'il  est  court  en  quelques 
endroits  ,  il  est  trop  diffus  dans  d'autres, 
comme  quand  il  parle  de  la  première  et 
de  la  deuxième  croisade.  On  lui  reproche 
aussi  de  donner  dans  les  fables.  Il  montre 
trop  d'attachement  aux  Italiens  ;  aussi 
Beaucaire  disait-il  qu'il  était  plutôt  Ita- 
loriim  buccinnatorem ,  quant  Gallicœ 
historiée  scriptorem.  Cependant ,  malgré 
ces  défauts  ,  il  jouit  de  la  gloire  d'avoir 
le  premier  débrouillé  le  chaos  de  notre 
vieille  histoire ,  et  d'avoir  défriché  ses 
champs  incultes.  Cette  Histoire  en  dix 
livres  commence  à  Pharamond  ,  et  finit  à 
la  6*  année  de  Charles  VIII,  en  1488. 
Arnoul  du  Ferron  en  a  donné  une  mau- 
vaise continuation. 

EMILIANI    (  S.  Jérôme  ) ,    fondateur 
des  clercs-réguliers  ,  dits  somasques ,  né 
à  Venise  d'une  famille  patricienne ,  porta 
les  armes  pendant  sa  jeunesse  ;  ayant  été 
fait  prisonnier  de  guerre  et  délivré  d'une 
manière  toute  extraordinaire ,  il  prit  la 
résolution  de  quitter  les  armes  pour  se 
dévouer  entièrement  au  service  du  grand- 
Maître  des  armées.  De  retour  à  Venise , 
touché   de  compassion  à  la  vue  des  or- 
phelins qui  manquaient  de  tout ,  il  en  re- 
tira un  grand  nombre  dans  une  maison  , 
oîi  il  leur  prodigua  tous  les  soins  pour 
les  former  à  la  vertu  et  pour  les  rendre 
utiles  à  la  société.  Le  bienheureux  Caje- 
tan  ,  et  Pierre  Caraffa,  depuis  pape  sous 
le  nom  de  Paul  IV  ,  louèrent  beaucoup 
son   zèle ,    et  l'engagèrent  à  faire  dans 
d'autres  villes  des  établissemens  sembla- 
bles à  celui  qu'il  venait  de  faire  à  Venise. 
Après  en  avoir  formé  à  Brixen  ,  à  Beigame 
et  ailleurs ,  il  se  retira  dans  un  petit  vil- 
lage près  de  cette  ville  ,  nommé  Somas- 
que  ,  où  il  institua  sa   congrégation  qui 
fut  appelée  de  ce  nom.  La  fin  de  cette 
congrégation  est  l'éducation  des  orphe- 
lins, et  l'instruction  delà  jeunesse.  Cet 
institut  fut  approuvé  par  Pie  V  ,  Sixte  V 
et  Clément  VIII.  Il  passa  le  reste  de  ses 
jours  dans  les  exercices  de  la  plus  grande 
charité  envers  le  prochain ,  et  mourut 
l'an  1 531  ,  âgé  de  56  ans.  Benoît  XIV  le 


EMI  5g 

béatifia.  Augustin  Turtura  et  André 
Stella  ,  l'un  prêtre ,  l'autre  général  des 
somasques  ,  ont  écrit  sa  vie. 

EMILIEN ,   (  Marcus   Caïus    JuUus 
jEmilius,    ^milianus),   né    l'an    207  , 
d'une  famille  très  obscure  de  Mauritanie, 
se  distingua  dans  l'arm-ée  romaine  par 
son  courage ,   et  s'avança   de  grade  en 
grade  jusqu'à  celui  de  général.  Il  com- 
battit avec  tant   de  valeur  contre    les 
Perses,  que  les  soldats  le  proclamèrent 
empereur  en  254  ,  après  la  mort  de  Dèce.  ^ 
Gallus  et  Vaîérien  étaient  alors  les  légi- 
times maîtres   de   l'empire  ;    il  marcha 
contre  eux  ,  les  vainquit ,  et  tandis  qu'il 
se  préparait  à  les  combattre  de  nouveau, 
il  apprit  que  leur  armée  les  avait  mas- 
sacrés et  l'avait  reconnu  empereur.  Ce 
titre  lui   fut  confirmé  par  le  sénat  ;  mais 
il  ne  jouit  pas  long-temps  de  la  puissance 
souveraine.   Volusien  qui  avait  reçu  de 
ses  soldats  le  sceptre  impérial ,  vint  at- 
taquer son  rival  près  de  Spolette.   L/es 
troupes  d'Emilien ,  fatiguées  d'avoir  tou- 
jours les  armes  à  la  main  ,  le  massacrè- 
rent sur  un  pont  de  cette  dernière  ville  , 
appelé  depuis  lors  le  Pont  sanglant.  Il 
régna  très  peu  de  temps.  Ce  n'étaitqu'un 
soldat   de  fortune  ,   plein  à  la  vérité  de 
feu  et  de  valeur,  mais  qui  ignorait  la  po- 
litique et  les  maximes  du  gouvernement. 
EMILIEN  (Alexandre),  l'un  des  29 
tyrans  qui  s'élevèrent  dans  l'empire  ro- 
main vers  le  milieu  du  3*  siècle ,  était 
lieutenant  du  préfet  d'Egypte.  H  est  connu 
dans  les  martyrologes  par  le  zèle  barbare 
avec  lequel   il  persécuta   les   chrétiens 
dans  cette  province.   Une  sédition  qui 
s'éleva  dans  Alexandrie  en  203,  lui  four- 
nit l'occasion  de  prendre  le  titre  d'empe- 
reur ,  que  les  .alexandrin ,  naturellement 
inquiets  et  ennemis   du  gouvernement 
de  Gallien,    lui    confirmèrent.  Emilien 
parcourut  la  ïhébaïde  et  le  reste  de  l'E- 
gypte ,   où  il  affermit  sa  domination.  Il 
en  chassa  les  brigands ,  à  la  grande  satis- 
faction du  peuple ,  qui  lui  donna  le  nom 
A' Alexandre.  A  l'exemple  du  héros  Ma- 
cédonien ,  il  se  préparait  à  porter  les  ar- 
mes dans  les  Indes,  lorsque  Gallien  en- 
voya contre  lui  le  général  Thcodote»  à 
la  tète  d'une  armée.  Il  fut  vaincu  dans 


6o  EMM 

le  premier  combat ,  et  contraint  de  se 
retirer  à  Alexandrie  en  septembre  263. 
Les  hiibitaus  de  cette  ville  le  livrèrent  à 
Théodote,  qui  l'envoya  à  Gallicn.  Ce 
prince  le  fit  étrangler  dans  sa  prison ,  à 
la  fin  de  la  même  année. 

EMMA,  fille  de  Richard  II,  duc  de 
Normandie ,  femme  d'Ethelred ,  roi  d'An- 
gleterre, et  mère  de  .saint  Edouard,  eut 
beaucoup  de  part  au  gouvernement  sous 
le  règne  de  son  fils,  vers  l'an  1046.  Le 
comte  de  Kent,  qui  avait  eu  une  grande 
autorité  sous  plusieurs  règnes,  conçut 
contre  elle  une  si  violente  jalousie ,  qu'il 
l'accusa  de  plusieurs  crimes.  Il  gagna 
quelques  grands  seigneurs  qui  confir- 
mèrent ses  accusations  auprès  du  roi.  Ce 
prince  crut  trop  facilement  que  sa  mère 
était  criminelle,  et  alla  la  trouver  inopi- 
nément, pour  lui  ôtcr  tout  ce  qu'elle 
avait  amassé.  Emma  eut  recours  dans  cette 
disgrâce  à  l'évêque  de  Winchester,  son 
parent  ;  mais  ce  fut  une  nouvelle  matière 
de  calomnie  pour  ses  ennemis.  Le  comte 
de  Kent  lui  fit  un  crime  des  visites  trop 
fréquentes  qu'elle  rendait  à  cet  évêque, 
et  l'accusa  d'avoir  un  mauvais  commerce 
aveclui.  Leroi  continua  à  être  crédule  :  il 
fallut  que  la  princesse  se  justifiât  parles 
moyens  en  usage  en  ce  temps-là,  c'est  à- 
dire  qu'elle  marchât  sur  des  fers  ardens. 
On  ne  sait  comment  elle  soutint  cette  rude 
épreuve  :  on  sait  seulement  que  le  roi 
ayant  reconnu  son  innocence,  se  soumit 
à  la  peine  des  pénitens. 

EMMANUEL,  dit  Ze  Grand,  roi  de 
Portugal,  monta  sur  le  trône  en  1495, 
après  Jean  II ,  son  cousin ,  mort  sans  en- 
fans.  Les  prospérités  de  son  règne ,  le 
bonheur  de  ses  entreprises,  lui  firent 
donner  le  nom  de  Prince  très  fortuné. 
Yasco  de  Gama  ,  Améric  Vespuce ,  Alva- 
rès  Cabrai  et  quelques  autres ,  découvri- 
rent sous  ses  auspices  plusieurs  pays  in- 
connus aux  Européens.  Son  nom  fut  porté 
par  ces  navigateurs  dans  l'Afrique ,  dans 
l'Asie  ,  et  dans  celte  partie  du  monde 
qu'on  a  depuis  appelée  Amérique.  Le 
Ilrésil  fut  découvert  en  1500.  Ce  fut  une 
source  de  trésors  pour  les  Portugais,  aussi 
appcllenl-ils  le  règne  d'Emmanuel,  le 
siècle  d'or  du  Portugal.  C'ciit  lui  qui  bà- 


EMM 

tit  le  superbe  palais  de  Bélem,  et  fonda 
le  monastère  attenant ,  où  sont  les  tom- 
beaux des  rois  de  Portugal.  Tous  ses  ou- 
vrages portent  l'empreinte  de  la  magni- 
ficence et  du  goût ,  de  son  génie  vaste 
et  grand  et  de  sa  judicieuse  administra- 
tion. Ce  prince  mourut  en  1521  ,  à  63 
ans ,  regretté  de  ses  sujets  qu'il  avait  en- 
richis ,  et  béni  d'une  multitude  de  na- 
tions infidèles,  qu'il  avait  civilisées  et 
amenées  au  christianisme ,  mais  détesté 
des  Maures,  qu'il  avait  chassés,  et  des 
Juifs  qu'il  avait  obligés  de  se  faire  bapti- 
ser. Emmanuel  aimait  les  lettres  et  ceux 
qui  les  cultivaient.  Il  laissa  des  Mémoi- 
res sur  les  Indes.  On  voit  à  Bélem  son 
mausolée ,  avec  cette  inscription  : 

Littore  al)  orridiio  qui  priniùni  ad  liltora  lolis 

Extendit  rullum  nolitiamiiue  l)ci , 
Tôt  regeK  doiniti  cui  stibiiiîsOre  tiarofl 
Conditur  hoc  tumulo  inadnius  Emmanuel. 

La  P^ie  de  ce  prince  a  été  écrite  en  por- 
tugais par  don  de  Goës,  Lisbonne,  1566 
et  15G7,  2  vol.  in-fol.,  retouchée  par 
J.-B.  Lavancha,  Lisbonne,  1619,  in-fol.  ; 
cette  édition  est  tronquée  et  l'on  préfère 
la  première.  Mais  on  fait  encore  plus  de 
cas  de  l'ouvrage  d'Osorio,  intitulé  :  De 
rébus  Emmanuelis  ,  Lusitaniœ  régis , 
Lisbonne,  1571,  in-fol.  Simon  Goulard 
l'a  traduit  en  français,  Genève,  1581, 
in-fol. ,  et  Paris ,  1 587  ,  in-8. 

EMIVIAIVUEL  -  PHILIBERT  ,  duc  de 
Savoie,  né  en  1528,  de  Charles  III,  fut 
d'abord  destiné  à  l'église  ;  mais  après  la 
mort  de  ses  deux  frères ,  on  lui  laissa 
suivre  son  inclination  pour  les  armes. 
Son  courage  lui  mérita  le  commandement 
de  l'armée  impériale  au  siège  de  Metz.  Il 
gagna  en  1557  la  fameuse  bataille  de 
Saint-Quentin  sur  les  Français;  la  vic- 
toire fut  si  complète ,  qu'un  général  es- 
pagnol opina,  dans  le  conseil  de  guerre, 
pour  aller  droit  à  Paris,  et  mourut  de 
chagrin  de  voir  son  avis  rejeté.  La  paix 
ayant  été  conclue  à  Catcau-Cambresis ,  il 
épousa  en  1559,  Marguerite  de  France, 
fille  de  François  I,  et  sœur  de  Henri  II. 
Ce  mariage  lui  fit  recouvrer  tout  ce  que 
son  père  avait  perdu  de  ses  états.  Il  les 
augmenta  ensuite  par  sa  dextérité  et  sa 
valeur.  11  mourut  en  1580,  ne  laissant 


EMM 

qu'un  fils,  Charles-Emmanuel  (  voyez  ce 
mol). 

*  EMMERICH  (  Frédéric-Charles-Thi- 
motée  ) ,  ministre  et  prédicateur  protes- 
tant, né  à  Strasbourg,  le  15  février  17  86. 
Après  avoir  terminé  ses  études,  il  fit,  à 
l'âge  de  vingt-un  ans ,  une  savante  dis- 
sertation, à  la  suite  d'un  vovage  qu'il  fit 
dans  l'intérieur  de  l'Allemagne  ;  il  vint 
en  France ,  et  demeura  pendant  six  mois 
à  Paris ,  oii  il  lit  la  connaissance  des  sa- 
vans  les  plus  distingués.  De  retour  à 
Strasbourg ,  il  fut  nommé  supérieur  du 
collège  de  Saint-Thomas.  En  1 802  ,  il  ob- 
tint la  chaire  des  langues  latine,  grecque 
et  hébraïque,  au  gymnase  de  cette  vilie. 
En  1812,  il  devint  professeur  agrégé  du 
séminaire  protestant,  où  il  donna  un  cours 
d'histoire  ecclésiastique.  En  1819,  il  pro- 
fessa la  même  science  à  la  faculté  de 
théologie,  qu'on  venait  d'établir  en  vertu 
d'une  ordonnance  royale.  Il  prêcha  sou- 
vent dans  le  temple  de  Saint-Thomas,  où 
son  éloquence  attirait  de  nombreux  au- 
diteurs ;  sa  bibliolhèque  était  une  des 
plus  riches  de  l'Alsace,  il  se  proposait 
de  donner  une  histoire  politique  de  tous 
les  temps  et  de  tous  les  pays ,  qui  était 
le  résultat  de  longues  et  pénibles  recher- 
ches, lorsqu'il  fut  surpris  parla  mort, 
le  l<"^  juin  1820,  à  l'âge  de  34  ans.  On  a 
de  lui  une  dissertation,  1°  De  Evangc- 
liis  secundum  Hebrœos ,  Egyptios ,  at- 
qiie  Jusiini  martyris,  Strasbourg,  1 807  ; 
2°  Quel  est  pour  nous  lebut  du  Jubilé  de 
la  réformation  ?  {  en  allemand  )  ibid. , 
1 8 1 G  ;  3°  Deux  discours  prononcés  par 
F.  -  Ch.  -  T.  Emmcrich  ,  ibid. ,  1817, 
Treultel  et  Wurtz  (  en  allemand  );  4" 
Choix  des  sermons  posthumes  du  doc- 
teur F  .-Ch.-T.  Emmerich;  ibid.,  1821. 

*  EMMERY  (  Jean -Louis -Claude  )  , 
comte  de  Grozyeulx  ,  pair  de  France ,  est 
né  à  Metz  le  26  avril  1752,  d'un  procu- 
reur au  parlement.  Il  exerçait  dans  la 
même  ville  la  profession  d'avocat  avec  la 
plus  grande  distinction,  lorsqujen  17  80 
il  fut  dépulé  par  le  tiers-état  de  Metz  aux 
l'Hals-généraux.  Il  embrassa  les  principes 
de  la  révolution,  mais  avec  modération. 
11  faisait  partie  du  comité  militaire  dont 
il  fut  souvent  rapporteur  \  trois  l'ois  il  fut 


EMM  6r 

appelé  à  la  présidence.   En  1790  il  de- 
manda une  loi  sur  la  liberté  de  la  presse; 
et  lorsque  l'on  eut  fait  prêter  le  serment 
civique  à  Louis  XVI  ,  il  demanda  que 
chaque    député    remplît    dorénavant   la 
même  formalité.  Le  28  juillet ,  il  accusa  le 
cardinal  de  Rohan,  évêque  de  Strasbourg 
et  les  princes  allemands  qui  possédaient 
des   fiefs   en     Alsace,    d'entretenir  des 
troubles  dans  cette  province.  A  l'époque 
de  l'insurrection  de  la  garnison  de  Nancy, 
il  provoqua,  comme  rapporteur  de  la  com- 
mission chargée  d'examiner  cette  affaire, 
le  décret  qui  ordonnait  la  poursuite  de 
ceux  qui  y  avaient  pris  part  et  surtout 
des  principaux  moteurs.  Ce  fut  lui  qui 
accusa  M.  de  Bouille  comme  l'un  des  au- 
teurs du  voyage  du  roi  à  Varennes  ,  de- 
manda son  arrestation ,  et  fit  ordonner 
que  trois  commissaires  seraient  envoyés 
à  Varennes  pour  ramener  la  famille  royale. 
Il  rédigea  aussi  le  serment  que  l'armée 
devait  prêter  pendant  la  suspension  du 
monarque.  Peu  de  temps  après  il  fit  ven- 
dre plusieurs  décrets  sur  le  régime  mili- 
taire, les  tribunaux  et  les  colonies.  Il  s'é- 
tait aussi  opposé  à  la  destiuction  de  l'hô- 
tel des  Invalides.  Après  la  fin  de  la  session 
il  fut  nommé  juge  au  tribunal  de  cassa- 
tion ,  et  le  10  mai  1  792  il  rendit  compte 
à  l'Assemblée  législative  des  travaux  de 
ce  tribunal.   Considéré  comme    suspect 
sous  le  régime  dp  la  terreur  ,  il  fut  arrêté 
et  ne  recouvra  sa  liberté  qu'après  la  mort 
de  Robespierre  (  9  thermidor  —  24  juillet 
1794  ).  Le  département  de  la  Seine  le 
nomma  député  au  conseil  des  Cinq-cents 
(  1797  ).  Dans  cette  assemblée  il  professa 
encore  des  principes  modérés ,  parla  con- 
tre plusieurs  loistyranniques  desgouver- 
nemensprécédens  qu'il  fit  abroger,  notam- 
ment contre  celle  qui  déppuillait  de  leurs 
biens  l€s  parens  des  émigrés ,  et  fit  suspen- 
dre la  loi  du  divorce  dont  on  faisait  un 
abus  scandaleux.  Au  18  fructidor  il  était 
depuis  quelque  temps  de  la  coniniissioii 
des  inspecteurs  :  il  ne  fut  point  compris 
dans  ceux  qui  furent  proscrits  ;  srulement 
son   élection    fut  annulée.   Eloigné  des 
affaires  publiques,  il   resta  dans  la  re- 
traite jusqu'au   18  brumaire  (  9  octobre 
17  90  ).  Buonaparlc  l'appela  au  conseil 


6a  EMM 

d'clat  (  section  judiciare  ).  Emmery  fut 
lin  des  collaborateurs  du  code  civil  ;  il  se 
vit  charge  l'année  suivante  de  l'examen 
des  papiers  saisis  chez  M.  Hyde  de  Neu- 
ville qui  était  l'un  des  a^ens  des  Bour- 
bons :  la  police  d'alors  fit  imprimer  la 
plupart  des  lettres  que  l'on  trouva  chez 
ce  royaliste  ,  sous  le  titre  de  Correspon- 
dance anglaise.  Dans  le  mois  d'août 
1803  ,  les  électeurs  de  la  Moselle  appelè- 
rent Emmery  au  Sénat  conservateur  dont 
il  fit  partie  jusqu'à  la  1'"  restauration. 
Il  signa  l'acte  de  déchéance  deBuonaparte 
(  5  avril  1814  ),  et  le  4  juin  suivant  son 
nom  fut  placé  sur  la  1"  liste  des  pairs. 
Pendant  les  ccnt-jours  il  resta  entière- 
ment hors  de  la  scène  politique  ;  rentré 
à  la  chambre  des  pairs ,  il  se  plaça  au 
côté  gauche  ;  on  se  rappelle  qu'à  l'épo- 
que de  la  proposition  de  M.  Barthélémy 
sur  la  loi  des  élections  qu'il  soutint ,  il 
se  fit  porter  malade  et  infirme  à  la  cham- 
bre pour  donner  son  vote.  Il  est  mort 
dans  sa  terre  de  Crozyeulx  près  de  Metz 
le  16  juillet  1823,  à  l'âge  de  71  ans.  On 
peut  dire  que  ses  opinions  ne  furent  pas 
ou  ne  parurent  pas  toujours  entièrement 
monarchiques;  son  caractère  ne  semble 
pas  avoir  été  très  ferme,  et  les  circon- 
stances agissaient  sur  lui ,  mais  jamais 
avec  assez  de  force  pour  lui  faire  suivre 
le  torrent  de  la  révolution.  On  peut  lire 
les  Mémoires  de  M.  de  Bouille  dans  les- 
quels se  trouve  l'éloge  d'Emmery,  et  les 
Mémoires  de  Weber  (  tom.  2  ,  p.  7 1),  at- 
tribués à  M.  de  Fontanges  archevêque  de 
Toulouse ,  où  Emmery  est  cité  comme  un 
des  Reviseurs,  c'est-à-dire,  comme  un 
de  ceux  qui  cherchèrent  par  tous  les 
moyens  à  faire  revivre  la  popularité  de 
Louis  XVI,  et  de  l'investir  d'une  partie 
de  son  ancien  pouvoir. 

*  EMMET  (  Thonias-Addis  ),  médecin, 
ensuite  avocat,  naquit  vers  l'an  17G3  à 
Dublin.  Après  avoir  étudié  la  médecine, 
il  se  livra  à  la  jurisprudence  et  devint 
avocat-général  de  l'état  de  New-York.  Il 
avait  élé  l'un  des  promoteurs  de  l'asso- 
ciation des  Irlandais  unis ,  et  avant  d'ob- 
tenir l'autorisation  de  passer  aux  Etats- 
l'nis,  il  avait  subi  de  longues  persécu- 
tions dont  on  trouve  l'expose  dans  l'écrit 


EMM 

publié  par  M.  Sam.  L.  Mitchill,  .sous  ce 
titre  :  A  Discourse  on  the  life  ond  cha- 
racter  ofTIwmas-Addis  Emmet,  New- 
York,  1828,  in-8.  Eramet  est  mort  le 
14  novembre  1827  à  New-York.  Il  a 
laissé  Pièces  of  irish  histor  ,  illustrative 
of  the  condition  of  the  calholics  of  Ire- 
land,  etc.,  insérées  par  Mac-Neven  dans 
un  Recueil  qu'il  publia  en  1827  à  New- 
Y'ork.  Il  a  fait  paraître  aussi  quelques 
Opuscules  de  médecine. 

EMMIUS  (  Ubbo  ) ,  naquit  à  Gretha  , 
village  delà  Frise  orientale,  en  1647. 
Ses  talens  lui  méritèrent  le  rectorat  du 
collège  de  Norden  ,  et  de  celui  de  Léer  ; 
enfin  la  place  de  premier  recteur  de  l'a- 
cadémie de  Groningue ,  et  celle  de  pro- 
fesseur en  histoire  et  en  langue  grecque. 
Quoique  plusieurs  princes  et  plusieurs 
villes  cherchassent  à  le  posséder ,  il  ne 
voulut  jamais  quitter  la  chaire  de  Gronin- 
gue ,  préférant  une  vie  tranquille  et  une 
condition  médiocre ,  à  la  brillante  folie 
de  l'ambition.  Lorsque  ses  infirmités  ne 
luipremirentplusdetravailleren  public, 
il  s'occupa  dans  son  cabinet  à  plusieurs 
ouvrages.  Les  plus  estimables  sont  :  1" 
Fétus  Grœcia  illustraia,  en  3  vol.  in-8, 
Elzevir ,  1 626  ,  très  utile  à  ceux  qui  veu- 
lent connaître  l'ancienne  Grèce.  Cet  ou- 
vrage a  reparu  dans  les  Antiquités  grec- 
ques de  Gronovius.  2"  Décades  rerum  \ 
Frisicarum,  in-folio,  Elzevir,  1616.  ■ 
Emraius,  en  bon  critique,  montre  que 
la  plupart  des  choses  qu'on  a  débitées  sur 
l'antiquité  des  Frisons ,  ne  sont  que  des 
fables.  Cette  histoire  est  estimée  ;  elle  le 
serait  davantage,  si  son  zèle  pour  le  pro- 
testantisme ne  lui  avait  pas  fait  altérer 
bien  des  faits,  et  s'il  avait  pris  la  peine 
d'indiquer  les  sources  où  il  a  puisé  ce 
qu'il  avance.  3"  Opus  chronologicum , 
Groningue,  1619,  in-fol.  C'est  une  chro- 
nologie depuis  la  création  du  monde 
ju-squ'au  temps  de  l'auteur,  avec  des  pro- 
légomènes sur  la  chronologie  romaine  à 
la  tête  de  l'ouvrage.  Ils  sont  écrits  avec 
autantdejustcssequedc précision.  ii° Ap- 
pendix  gencalogica ,  Groningue ,  1 620  , 
in-folio.  Ce  sont  des  tables  généalogi- 
ques qui  font  une  suite  de  l'ouvrage  pré- 
cédent. Ce  savant  mourut  à  Groningue  , 


EMP 

en  1625,  à  79  ans.  Martin  Hanckius  a 
donné  sa  Fie  dans  le  Liber  de  scriptori- 
bus  romanis. 

*EMON,  enlalin  £mo,  premier  abbé 
de  Weruni ,  monastère  de  l'ordre  de  Prc- 
montré,  près  Groningue  dans  la  Frise, 
autrement  nommé  le  Jardin  fleuri,  //or- 
tus  floridus  ,  vivait  à  la  fin  du  1 2*  siècle 
et  au  commencement  du  13''.  Don  Rivet 
rapporte  «  qu'aidé  de  son  frère,  il  copia 
»  tous  les  auteurs  des  arts  libéraux,  et  les 
»  livres  de  théologie  et  de  droit  qu'ils 
))  avaient  vus  à  Paris ,  à  Orléans  et  ail- 
i>  leurs  dans  le  cours  de  leurs  études.  » 
11  ajoute  ('  que  dans  la  suite,    le  désir 
»  d'enrichir  sa  bibliothèque  le  porta  à  y 
»  employer  des  religieuses  ,  ayant  pour- 
»  tant  l'attention  de  ne  leur  faire  trans- 
»  crire  que  les  livres  de  la  Bible  et  les 
»  écrits  des  .saints  Pères ,  comme  étant 
»  plus  à  leur  portée.  »  Emon  ,  presuadé 
qu'un  monastère  sans  livres  est  comme 
un  arsenal  sans  armes ,  parvint  par  ce 
moyen ,  non-  seulement  à  fournir  la  bi- 
bliothèque de  son  abbaye   d'un  grand 
nombre  d'ouvrages,   mais   encore  à  en 
procurera  d'autres  maisons  de  son  ordre. 
L'abbé  Emon  mourut  subitement  en  1237. 
Lui-même  a  écrit  sur  plusieurs  sujets. 
Nous  ne  citerons  de  lui  que  sa  Chronique, 
depuis   1203  jusqu'en   1237,  continuée 
par  Menko,  5*  ablié  de  Werum,  et  en- 
suite par  un  anonyme,  jusqu'en   1292; 
inédite  jusqu'en  1700,  elle  fut  insérée 
par  Ântoiiie  Matthieu  dans  ses  Analectes, 
tome  3 ,  et  réimprimée  par  l'abbé  Hugo  , 
avec  des  notes  dans  le  1"  tome  des  Sa- 
crée antiquiiatis  monumenta  ,  pag.  129  , 
Etival,    1725,   2   vol.  ii.-fol.  Il  ne  faut 
point  confondre  l'abbé  Emon  avec  un  au- 
tre Emon,  son  cousin-germain,  qui  dota 
de  ses  biens  l'abbaye  de  Werum ,  où  il 
prit  aussi  l'habit  de  l'ordre  dePrémontré, 
et  qui  mourut  en  1215. 

*  EMPECINADO  (  Don  Juan  Martin  , 
surnommé  L'),  fameux  chef  de  guérillas 
espagnols,  naquit  sur  la  fin  du  18"  siècle 
d'un  pauvre  paysan  de  la  Nouvelle-Cas- 
tillc.  En  1793,  il  servit  dans  la  guerre 
contre  la  France.  La  paix  le  ramena  dans 
ses  foyers  oii  il  reprit  ses  travaux  cham- 
pêtres. En  1808  ,  l'invasion  de  son  pays 


EMP  63 

par  les  Français  lui  inspira  le  dc'sir  de  les 
combattre  ,  non  plus  comme  soldat,  mais 
comme  partisan.  Il  se  je!a  donc  dans  les 
montagnes  avec  quelques-uns  de  ses  com- 
pagnons, harcela  les  ennemis ,  les  surprit, 
et  les  mit  souvent  en  déroute,  sans  avoir 
livré  de  combat.  Bientôt  il  se  vit  à  la  tête 
d'une  troupe  considérable  ,  mais  varia- 
ble suivant  les  circonstances ,  à  un  poin 
tel  que  souvent  il  était  sans  ses  cama- 
rades ,  et  qu'à  un  signal  donné  plusieurs 
milliers  se  trouvaient  réunis  sur  le  même 
point  ;  sa  valeur  lui  mérita  le  grade  de 
maréclial-de-camp.    Ferdinand  en  mon- 
tant sur  le  trône  le  confirma  dans  ce  rang. 
Bientôt  l'Empecinado  se  mêla  d'opinions 
politiques  :  il  présenta  même  au  roi  un 
Mémoire  pour  lui  rappeler  les  services 
des  corlès  et  le  prier  de  gouverner  d'a- 
près les  principes  émis  par  cette  assem- 
blée libérale.  Arrêté,  puis  exilé  à  Yalla- 
dolid ,  il  se  trouvait  dans  cette  ville  sous 
la  surveillance  de  la  police  à  l'époque  de 
l'insurrection  de  Riégo  à  laquelle  il  se 
rallia  sur-le-champ.  Il  fut  nommé  com- 
mandant en  second  de  l'armée  des  insur- 
gés, puis  chargé  du  gouvernement   de 
Zamora,  et  enfin  envoyé  contre  le  curé 
Mérino  qui  avait  pris  les  armes  en  faveur 
des  royalistes.  Après  avoir  remporté  quel- 
ques  succès  qui  donnèrent   à  la  cause 
révolutionnaire  une   durée  de  quelques 
instans ,  il  se  battit  contre  les  Français 
dans  le  corps  du  comte  de  l'Abisbal  en 
Estramadure  où  il  fut  encore  opposé  au 
curé  Mérino  qui  servait  dans  l'armée  du 
général  Eourmont.  L'Empecinado  tomba 
entre  les  mains  des  vainqueurs  :  jeté  dans 
une  prison  ,  jugé  et  condamné  à  mort 
par  l'alcade  de   Tuédo ,  il  fut  pendu  à 
Ruéda  le  19  août  1825,  non  sans  s'être 
long-temps  débattu  contre  ses  bourreaux. 
Son  nom  de  l'Empecinado  n'est  qu'un 
sobriquet;  il  veut  dire  couleur  de  poix , 
crotte'  ou  enduit  de  poix  ;  il  est  commun 
à  tous  les  habitans  de  son  village,  parce 
que  beaucoup  d'entr'eux  sont  cordon- 
niers, ou  parce  que  c'est  un  endroit  cou- 
vert de  boue  ;  Ferdinand  VII  lui  permit 
de  l'ajouter  à  son  nom  pour  rappeler 
l'époque  où  il  n'était  connu  que  par  ce  so- 
briquet ,  et  pendant  laquelle  il  s'est  illus- 


64  EMP 

Iré  par  sa  fidélité  et  par  ses  exploits. 
EMPEDOCLE  d'Agrigenle  en  Sicile, 
philosophe,  poète,  historien,  était  dis- 
ciple de  Télauges ,  qui  l'avait  été  de  Py- 
thagorc.  Il  adopta  l'opinion  decc  philoso- 
phe sur  la  transmigration  des  âmes  ,  et  la 
mit  en  vers  dans  un  poème  qui  apparem- 
ment se  ressentait  du  désordre  de  la  tête  de 
l'auteur.  Empédocle  y  faisait  l'histoire  des 
différeiis  changemensdesonâme.  Il  avait 
commencé  par  être  fille,  ensuite  garçon, 
puis  arbrisseau,  oiseau,  poisson.  Son 
stile  ressemblait  beaucoup  (si  l'on  en  croit 
Aristote ,  cité  par  Diogène  Laërce  )  à  ce- 
lui d'Homère.  Il  était  plein  de  force  ,  et 
riche  en  métaphores  et  en  figures  poéti- 
ques. Ses  vers  furent  chantes  aux  jeux 
olympiques ,  avec  ceux  d'Homère ,  d'Hé- 
siode et  des  plus  célèbres  poètes.  Il  disait 
quelquefois  des  choses  fort  raisonnables. 
Il  reprochait  à  ses  concitoyens  de  courir 
aux  plaisirs ,  comme  s'ils  eussent  dû 
mourir  le  même  jour  ;  et  de  se  bdtir  des 
maisons  comme  s  ils  eussent  cru  toujours 
vivre.  La  plus  commune  opinion  est  que 
ce  philosophe,  dans  un  mouvement  de 
folie,  voulant,  comme  dit  Horace,  pa- 
raître un  dieu ,  se  jeta  dans  les  flammes 
de  l'Etna ,  vers  l'an  440  avant  J.C. 

Deus  iinmortalis  haberi 

Dum  cupit  Eaipedoclea ,  ardeiitein  frigidus  £(nam 
Iiisiluil. 

Quelques  écrivains  distinguent  Empédo- 
cle le  philosophe ,  d'un  autre  qui  était 
poète.  Les  fragmens  des  écris  d'Empédo- 
cle  ont  été  réunis  par  M.  Sturz,  dans  le 
recueil  intitnlé  Empedoclis  Agrigen- 
tini  de  vita  et pliilosophia  ejus  exposuit, 
carminum  reliquias  colle  g  it  M.  Ferd. 
Gu/i/.  5fMrz,  Leipsick,  1805,  181  G,  1vol. 
in-8  ;  il  faut  y  joindre  Empedoclis  et 
Parmenidis  fragmenta  ,  ex  codice  bi- 
bliothecœ  taurinensis  restituta  ab  Ame- 
deo  Peyron  ,  Leipsick  ,  1810,  in-8.  Em- 
pédocle joignit  l'étude  de  la  médecine  à 
celle  de  la  philosophie  ;  ayant  guéri  une 
femme  d'Agrigente,  nommée  Vanlhea, 
qui  était  tombée  dans  une  profonde  lé- 
thargie, et  que  les  autres  médecins 
avaient  abandonnée  comme  morte ,  cette 
cure  passa  pour  miraculeuse ,  et  dès  lors 
Empédocle  fut  considéré  comme  un  Dieu. 


EMP 

Il  feignit  de  le  croire  lui-même ,  et  se 
présenta  en  public  avec  un  manteau  de 
pouqire,  une  ceinture  d'or,  les  cheveux 
flottans  ,  la  tête  ornée  d'une  couronne  , 
comme  celle  de  la  Pythie.  Il  renversa  le 
sénat  d'Agrigente  ,  composé  de  mille  ci- 
toyens ,  et  y  établit  le  gouvernement  po- 
pulaire. 

EMPEREUR  (  Constantin  1'  ) ,  né  vers 
l'an  1680  à  Oppyck,  village  du  comté  de 
Hollande ,  savant  consommé  dans  l'étude 
des  langues  orientales  ,  occupa  avec  hon- 
neur une  chaire  d'hébreu  et  de  théologie 
à  Harderwick  et  à  Leyde.  Il  mourut  en 
1648 ,  dans  un  âge  fort  avancé.  Tous  les 
ouvrages  qu'il  a  donnés  au  public ,  of- 
frent des  remarques  utiles ,  et  respirent 
une  profonde  érudition  rabbiniqne  et 
hébraïque.  Nous  avons  de  lui  1°  Tul- 
mudis  Babrjlonici  codex  Middôth  cum 
commentariis  ,  etc.  ,  Leyde,  Elzevir  , 
1630,  in-4,  en  hébreu  et  en  latin.  Ce 
commentaire ,  orné  de  figures  très  exac- 
tes, explique  avec  beaucoup  de  netteté 
toute  la  structure  du  temple  de  Jérusa- 
lem,  de  ses  autels,  etc.  2"  D.  Isaaci 
Abrabanielis  et  Mosis  Alschechi  com^ 
mentarius  in  Esdiœ  prophetiam,  Leyde, 
Elzévir,  1631  ,  in-8,  en  hébreu  et  en 
latin.  L'Empereur,  en  publiant  les  com- 
mentaires de  ces  rabbins  sur  la  prophé- 
tie d'Isaïe,  qui  regarde  les  souffrances 
et  la  mort  de  l'Homme-Dicu ,  a  eu  soin 
de  réfuter  leurs  explications  détournées, 
et  de  repousser  les  traits  qu'ils  ont  lancés 
contre  le  christianisme.  3°  Grammaire 
chaldaïque  ,  écrite  en  hébreu  ,  avec  la 
traduction  latine,  Leyde,  Elzévir,  1G31. 
4°  Itinerarium  Benjaminis ,  en  hébreu , 
avec  la  traduction  en  latin  et  des  notes 
de  l'Empereur,  Leyde,  1633.  6°  Et  plu- 
sieurs autres  traductions  des  livres  ju- 
daïques ,  enrichies  d'observations  sa- 
vantes; elles  sont  les  meilleures  que  l'on 
ait ,  quoiqu'elles  ne  soient  pas  toujours 
exactes. 

EMPIRICUS.  roy.  Sextos  Empiricus. 

EMPORIUS,  savant  rhéteur,  floris- 
sait  du  temps  de  Cassiodore  au  6*  siècle. 
Il  reste  de  lui  quelques  écrits  sur  son 
art,  Paris,  1599,  in-4.  Le  stile  en  est 
vif  et  nerveux ,  suivant  Gibert. 


ENA 

*  EMSER  (  Jérôme  ) ,  fhëotogien  ca- 
tholique allcinaiïd,  naquit  àUlm  en  1477. 
Apres  avoir  commencé  ses  éludes  à  Tu* 
binr^en  ,  il  alla  les  continuer  à  Bàle  ,  où 
il  s'appliqua  au  droit ,  à  la  théologie  et 
à  l'hébreu.  H  accompagna  ensuite  en  Ai' 
lemagne  et  en  Italie,  le  cardinal  Ray- 
mond de  Gurti  ,  dont  il  avait  été  nommé 
chapelain  et  secrétaire.  Quelque  temps  „ 
après ,  il  professa  les  humanités  à  Erl'urt, 
qu'il  quitta  bientôt  pour  passer  à  l'uni- 
versité de  Leipsick,  dont  il  l'ut  reçu  mem- 
bre ,  et  où  il  enseigna  le  droit  canonique. 
Vers  le  même  temps,  le  duc  George  de 
Saxe  le  prit  pour  son  secrétaire  et  son 
orateur  dans  la  ville  de  Dresde ,  et  l'en- 
gagea à  écrire  contre  le  luthéranisme  , 
qui  commençait  à  s'étendre  en  Allemagne. 
Emser  avait  été  jusque-là  l'ami  de  Lu- 
ther; il  eut  avec  ce  réformateur  quel- 
ques conférences ,  espérant  le  ramener 
du  sentier  de  l'erreur,  par  des  conseils 
d'ami  ;  mais  voyant  qu'il  ne  gagnait  rien 
sur  l'esprit  de  ce  sectaire  obstiné,  il  se 
déclara  son  adversaire,  et  le  combattit 
vigoureusement.  Les  ouvrages  qu'il  pu- 
blia  sont    1°   Motifs  pour  lesquels   la 
Traduction  du  nouveau  Testament  par 
Luther  doit  être  défendue  au  commun 
des  fidèles ,  Leipsick,  1G23,  in-4  ,  réim- 
primés avec  augmentation ,  sous  le  titre 
d'Annotations  sur    la    Traduction  du 
nouveau  Testament ,  etc.,  Dresde,  1624, 
in-4.   2"  Traduction  allemande  du  nou- 
veau Testament ,  pour  être  opposée  à 
celle  de  Luther,  ])resde,    1527;  Paris, 
1G30.  3°  Assertio  missœ.  4°  De  canone 
missce.  Ces  deux  ouvrages  sont  une  dé- 
fense de  la  messe.  5°  Histoire  de  la  vie 
et  des  miracles  de  saint  Beunon,  Leip- 
sick, 1512,   Dresde,   1594,  in-4;  et  un 
grand  nombre  d'autres  écrits  de  contro- 
verse. 

•  ENANBUC  (  Vaudrosques  Diel  D'  ), 
fondateur  des  colonies  fftinçaises  aux  An- 
tilles, descendant  d'une  ancienne  famille 
de  Normandie.  Comme  il  n'était  que  le 
cadet ,  il  n'eut  qu'une  part  fort  peu 
considérable  dans  la  succession  pater- 
nelle; mais  avec  le  peu  qu'il  recueillit,  il 
équippa  un  brigantin  de  quatre  canons  , 

monté  par  40  marins  bien  disciplinés  et 

V. 


EIXA  65 

bien  aguerris.  Animé  par  Je  désir  d'a- 
méliorer sa  fortune  ,   il  partit  ainsi  de 
Dieppe  en  1625  et  fit  voile  pour  les  mers 
des  Antilles ,  dans  le  dessein  d'y  faire 
quelques  prises  sur  le.s  Espagnols  ;  la  na- 
ture n'avait  pas  été  à  son  égard  aussi  in- 
juste que  la  loi  :  rempli  d'un  coujage  que 
rien  ne   savait  ébranler,   il  se  défendit 
contre  une  galère  de  35  canons  et  par- 
vint à  la  mettre  en  fuite  ;  ce  combat  eut 
lieu  près  des  Iles  Caïman,  Quinze  jours 
après  il  relàchj^  à  St.-Qliristophe  ;  déjà 
quelques  Français  s'y  étaient  établis,  des 
Anglais  venaient  récemment  d'y  débar- 
quer; tout  cependant  l'invitait  à  se  fixer 
dans  ce  lieu  agréable  et  fertile,  où  il 
trouvait  un  port  favorable  et  un  terrein 
excellent  pour  la  culture  du  tabac  ;  il  fit 
donc  un  traité  de  partage  qui  lui  assu- 
rait la  possession  de  la  moitié  de  cette 
île.  Cependant  les  insulaires ,  excités  par 
un  de  leurs  boye's  ou  médecins ,  résolu- 
rent de  massacrer  tous  les  Européens  ;  Je 
complot  ne  put  réussir  parce  que  les  co- 
lons fuient  prévenus  à  temps  par   une 
femme  sauvage  qui  leur  fit  connaître  tous 
les  détails  de  ce  projet.  Les  naturels  de 
l'île  furent  punis  sévèrement;  mais  quel- 
que temps  après  ,  trois  mille  sauvages 
appelés  par  eux  d'une  autre  île ,  vinrent 
attaquer  la  colonie  française;  ils  furent 
obligés  de  se  rembarquer  après  avoir  perdu 
les  deux  tiers  de  leur  troupe.  Dès  lors 
la  petite  colonie  fut  en  repos ,  et  pendant 
les  huit  mois  que  d'Enanbuc  pa.ssa  dans 
celte  île  à  cultiver  du  tabac  ,  et  à  abattre 
des  arbres  d'acajou ,  il  ne  fut  plus  atta- 
qué par  les  insulaires.  Il  chargea  son  vais- 
seau des  productions  de  l'île  et  revint  en 
France  où  il  arriva  heureusement  par  le 
port  de  Dieppe.  Il  se  rendit  aussitôt  à 
Paris  où  il  demanda   une    entrevue  au 
cardinal  de  Richelieu  qui  applaudit  à  ses 
projets  et  lui  donna  une  commission  spé- 
ciale pour  l'établissement  d'une  colonie 
française  à  St. -Christophe,  ou  dans  toute 
autre  île  comprise  entre  le  1 1^  et  18^  de- 
gré de  latitude  septentrionale;  un  autre 
officier,  nommé  Durossey,  lui  fut  adjoint. 
Ces   deux  braves    marins  partirent    du 
Havre  en  1627  avec  deux  vaisseaux;  mais 
leur    traversée   fut    malheureuse  :   une 
5 


C6  END 

glande  partie  de  leur  équipage  atait 
succombé.  Les  Anglaisprofitcrent  de  cette 
circonstance  qui  leur  donnait  la  supé- 
riorilé  du  nombre  pour  étendre  leurs 
possessions  au  détriment  de  celles  des 
Français.  D'Eiianbuc  s'empressa  de  de- 
mander eu  France  du  renfort.  Durossey 
qu'il  avait  envoyé  pour  cet  objet,  ne  tarda 
pas  à  revenir  avec  six  vaisseaux  qui  défi- 
rent la  flotte  des  Anglais  et  les  forcèrent  à 
demander  la  paix.  D'Enanbuc  renvoya  les 
vaisseaux  que  Iç  gouverneuient  fiançais 
lui  avait  fait  parvenir;  mais  à  leur  tour 
quelques  espagnols  vinrent  attaquer  les 
colons  français  et  les  forcèrent  de  quitter 
l'île.  D'Enanbuc  erra  pendant  trois  se- 
maines sur  les  mers  des  Antilles;  il  aborda 
à  St. -Martin;  et  pendant  que  Durossey 
l'abandonnait  lâchement  pour  retourner 
en  France ,  où  le  duc  de  Richelieu  le  lit 
enfermer  à  la  Bastille  immédiatement 
après  son  arrivée ,  d'Euanbuc  ramena  ses 
compagnons  à  St.-Christophe  que  les  Es- 
pagnols avaient  abandonné ,  et  dès  lors 
il  ne  s'occupa  plus  que  du  soin  de  faire 
prospérer  cette  colonie  et  de  la  mettre  à 
l'abri  de  nouvelles  attaques.  C'est  dans 
ce  but  qu'il  chercha  à  former  des  établis- 
scmens  dans  les  îles  voisines.  Prévenu 
dans  son  projet  sur  la  Guadeloupe  ,  il 
fonda  lui-même  en  1635  celle  de  la  Marti- 
nique. Après  avoir  établi  le  fort  de  St.- 
Pierre  et  organisé  un  gouvernement  dans 
cette  île,  il  revint  à  St.-Christophe  où  il 
mourut  vers  la  fin  de  l'an  1C3G.  On  trouve 
de  plus  amples  détails  sur  d'Enanbuc 
dans  Y  Histoire  des  Antilles ,  par  le  Père 
du  Tertre ,  qui  fait  l'éloge  de  son  admi- 
nistration et  parle  des  regrets  que  sa 
mort  excita  parmi  les  colons  qui  le  re- 
gardaient comme  leur  père  et  leur  bien- 
faiteur. Richelieu,  en  apprenant  la  fin  de 
d'Enanbuc  ,  dit  que  le  roi  perdait  en  lui 
un  de  ses  plus  fidèles  serviteurs. 

•  ENDELCHIUS,  ou  Severus-Sanctus, 
rhéteur  et  poète,  naquit  à  Bordeaux  dans 
le  4"  siècle.  Quelques  critiques  le  croient 
lils  de  Flavius  Sanctus,  évèque  d'Auxonnc, 
d'après  une  épitaphe  que  celui-ci  lui  a 
consacrée  dans  ses  Pnrentalia.  Ami  de 
saint  Paulin ,  évèque  de  Nôle ,  il  em- 
bi'assa  ,  à  son  exemple,  le  christianisme. 


ENE 

Vers  la  fin  de  sa  vie  ,  il  se  consacra  à'  Is 
retraite ,  et  l'on  croit  même  qu'il  avait 
embrassé  l'état  ecclésiastique.  L'abbé 
Longchamp  place  sa  mort  à  l'année  409. 
Saint  Paulin  cite  avec  éloge  les  hymnes 
d'Endclchius  ,  composées  sur  la  para- 
bole des  dix  vierges  de  l'Evangile ,  mais 
elles  ont  été  perdues.  Il  ne  nous  reste  de 
ce  poète  qu'une  églogue  intitulée  De 
inortibus  boum,  faite  à  l'occasion  d'une 
maladie  contagieuse ,  qui,  vers  37  7,  fit 
de  grands  ravages  dans  la  Turquie,  l'Il- 
lyrie  et  la  Flandre.  Les  interlocuteurs  sont 
un  païen  qui  se  livre  au  désespoir,  et  un 
chrétien  qui  lui  offre  pour  le  consoler  la 
pensée  de  la  Providence.  Cette  pièce  a 
paru  pour  la  première  fois  en  1590,  dans 
les  Epigrammata  et  pocmata  véterum, 
tom.  2,  pag.  448  et  suivantes.  Depuis  elle 
a  été  imprimée  séparément  à  Francfort, 
1612,  in-8,  avec  des  notes  de  Wcitz;  à 
Leyde ,  1714,  avec  les  mêmes  notes  et 
celles  de  Seber.  Elle  a  aussi  été  insé- 
rée dans  la  Bibliotheca  pntrum ,  et  dans- 
différens  recueils  de  poésies  chrétien- 
nes. 

ÉNÉE,  Mneas  Tacticus,  Enée  le  Tac- 
ticien, un  des  plus  anciens,  mais  non 
pas  des  meilleurs  auteurs  qui  aient  écrit 
sur  l'Art  militaire ,  florissait  du  temps 
d'Aristote.  (  4*  siècle  avant  J.  C.  ).  Ca— 
saubon  a  publié  un  de  ses  traites  en  grec 
De  tnlcranda  obsidione  ,  avec  une  ver- 
sion latine,  dans  le  Poli/be,  1609,  in-fol. 
M.  de  Beausobre  l'a  donné  en  français  , 
1 557 ,  in-4  ,  avec  de  savans  commen- 
taires. 

ÉNÉE  DE  GAZE  ,  philosophe  pla- 
tonicien ,  sous  l'empire  de  Zenon ,  dans 
le  5*  siècle ,  embrassa  le  christianisme, 
et  y  trouva  une  philosophie  bien  supé- 
rieure à  celle  de  Platon.  On  a  de  lui  un 
dialogue  intitulé  Théophraste ,  du  nom 
du  principal  interloculeur.  Il  traite  de 
l'immortalité  de  l'àrae  et  de  la  résurrec- 
tion des  corps.  Jean  Bo«er  le  mit  au 
jour  à  Leipsick  en  1055,  in-4  ,  avec  la 
traduction  et  les  savantes  notes  de  Gas- 
pard Barthius.  On  le  trouve  aussi  dans 
la  bibliothèque  des  Pères. 

EINEÉ,  évèque  de  Paris,  homme  d'es- 
prit et  consomme  dans  les  affaires  ,  pu- 


ENG 

Jiiia  k  la  prière  de  Charles  le  Chauve  un 
tivre  contre  les  erreurs  des  Grecs.  Il 
«ntreprend  à  Ja  fois  de  répondre  aux 
écrits  du  patriarche  Photius  contre  l'é- 
glise latine  ,  et  de  montrer  la  yérité  de 
la  doctrine  et  la  sainteté  des  dogmes  de 
cette  église.  Il  mourut  en  670. 

*  EJNFIELD  (Guillaume)  ,  ministre 
anglican,  non-conformiste,  né  à  Sudbury 
en  17  4 1 ,  et  mort  à  Norwich,  en  17  97 ,  fut 
pasteur  et  professeur  de  belles-lettres  à 
Wanington  dans  le  comté  de  Lancastre. 
Il  a  publié  1°  des  Sermons  à  V usage  des 
familles,  1770,  2  vol.  in-8.  2° Le  prédica- 
teur anglais  ,  4  vol.  3°  Essai  sur  V his- 
toire de  Liverpool,  1774,  in-fol.  4°  His-' 
toire  de  la  philosophie,  d'après  Brucker, 
1791,2  vol.  in-4.  6°  Sermons  sur  des 
sujets  pratiques ,  17  98,  3  vol.  in-8.  Ses 
sermons  comme  tous  ses  ouvrages  sont 
écrits  d'un  stilc  clair,  élégant  ;  la  morale 
y  est  présentée  sans  austérité  :  en  gé- 
néral ils  paraissent  plus  propres  à  former 
l'esprit  et  le  goût,  qu'à  élever  l'àme  à  la 
piété. 

*  ENGAU  (Jean-Rodolphe),  savant 
jurisconsulte  allemand,  né  à  Erfurt,  en 
1708,  mortàléna  en  1756,  fut  membre 
de  plusieurs  académies,  et  conseiller  de 
la  cour  de  Saxc-Weimar  et  d'Eisenach.  Il 
s'est  fait  par  ses  nombreux  écrits  une 
haute  réputation.  Les  ouvrages  qui  la  lui 
ont  surtout  méritée  sont  1"  Traite' des 
prescriptions  en  matière  criminelle  ,  4« 
édition,  1772,  in-8.  2°  Elementajuris 
germanici  cii'ilis,  4*  édition,  17  62,  in-8. 
3"  Elementajuris  criminalis  germanico- 
caroli ni, Inédit.,  17  7  7,  in-8.  ^°Elementa 
juris  canonico  - pontificio-ecclesiastici , 
5*édition,  1765,  in-8.  5"  Traite  du  droit 
des  chefs  de  V Eglise  sur  les  docteurs  qui 
occupent  des  chaires,  3  vol.  in-8.  Cet  ou- 
vrage avait  d'abord  été  écrit  en  allemand, 
mais  en  17  52  l'auteur  l'augmenta  consi- 
dérablement et  le  fit  paraître  en  latin. 

*  EÎNGEL  (Jean-Jacques),  littérateur  al- 
lemand, naquit  en  1741  à  Parchim,  dans 
le  duché  de  Mecklenbourg,  d'un  pasteur 
de  la  confession  d'Augsbourg,  etse  destina 
comme  son  père  à  la  carrière  ecclésias- 
tique; mais  il  négliga  bientôt  l'étude  de 
la  théologie  pour  se  livrer  entièrement 


ENG  6n 

à  celle  de  la  littérature  ancienne  et  4e 
la  philosophie.  Ses  progrès  furent  ra- 
pides :  en  1765  il  se  rendit  à  Leipsick  : 
les  ouvrages  qu'il  y  publia  le  firent  con- 
naître avantageusement  et  lui  méritèrent 
l'offre  de  la  place  de  bibliothécaire  à  Go- 
tha avec  une  chaire  à  l'université  de  Go- 
tingue  ;  l'attachement  qu'il  portait  à  sa 
mère  dont  il  se  serait  vu  éloigner,  le  dé- 
termina à  refuser.  En  17  70  il  accepta  la 
place  de  professeur  de  morale  et  de  belles 
lettres  dans  un  des  Gymnases  de  Berlin, 
et  conserva  cette  chaire  jusqu'à  1787, 
époque  oîi  le  roi  de  Prusse  Frédéric-Guil- 
laume II  le  nomma  directeur  du  théâtre 
de  Berlin,  avec  le  célèbre  poète  Ramier. 
Engel  devait  cette  place  à  l'attachement 
que  lui  témoignait  le  roi  dont  il  avait 
élevé  les  enfans,et  à  un  ouvrage  qu'il  ve- 
nait de  publier  sur  l'art  théâtral.  Il  avait 
toutes  les  connaissances  nécessaires  pour 
bien  remplir  ses  fonctions  :  des  intri- 
gues de  coulisses  l'eurent  bientùt  dé- 
goûté d'un  emploi  dans  lequel  il  ne  trou- 
vait pas  le  repos  si  nécessaire  à  l'homme 
qui  se  livre  aux  sciences  ;  il  donna  sa  dé- 
mission en  17  94.  Mais  son  royal  élève  le 
rappela  bientôt  à  Berlin  pour  l'attacher  à 
l'académie  des  Sciences  et  lui  donna  une 
pension  dont  il  ne  jouit  pas  long-temps. 
Le  désir  de  voir  sa  mère  qui  avait  80  ans 
le  détermina  à  retourner  dans  son  lieu 
natal ,  malgré  l'état  de  maladie  oii  il 
se  trouvait  alors;  à  peine  eut-il  ac- 
compli ce  devoir  de  la  piété  filiale  qu'il 
mourut  dans  le  lieu  qui  l'avait  vu  naître 
le  28  juin  1802,  à  61  ans.  Il  a  laissé  plu- 
sieurs ouvrages  recommandables  pour  l'é- 
légance du  stile  et  une  pureté  de  diction 
très  rares  en  Allemagne.  Les  principaux 
sont  1°  deux  petites  comédies  :  le  Fils  re- 
connaissant et  le  Page,  qui  l'ont  placé  à 
côté  des  meilleurs  auteurs  dramatiques 
allemands.  Elles  ont  été  traduites  en  fran- 
çais et  se  trouvent  dans  le  théâtre  de 
Friedel  :  la  deuxième  a  fourni  le  sujet  de 
notre  comédie  des  deux  pages  rftrDezède. 
2°  Le  philosophe  du  monde,  1775,  2  vol. 
in-8 ,  recueil  de  morceaux  sur  diverses 
questions  de  philosophie,  de  morale  et  de 
iilléralure.Z'^  La  théorie  de  l'art  mimique, 
1785,  2  vol.  in-8,  fig.  4°  Le  miroir  des 


68  ETfG 

princes,  1796,  suite  de  morceaaxtlc  mo- 
rale destiiu^s  à  l'instiiiction  des  princes, 
et  surtout  de  ceux  qui  doivent  régner  un 
jour.  6°  Lorenz  Stark,  roman,  1 80 1 ,  in-8  ; 
cet  ouvrage  qui  obtint  un  grand  suc- 
cès dans  toute  l'Allemagne  fut  le  cbant  du 
cygne.  La  collection  de  ses  œuvres  re- 
cueillies à  Berlin,  de  1801  à  1806,  for- 
me 12  vol.  in-8. 

*  EINGEL  (Arnold),  jésuite,  né  à 
Maëstricht  en  1620,  mort  à  Prague,  vers 
J676,  professa  pendant  quelque  temps  la 
rliétorique,  puis  se  livra  aux  missions 
dans  lesquelles  il  se  distingua  autant  par 
6CS  talens  que  par  son  zèle.  On  lui  doit 
plusieurs  ouvrages  de  piété  et  de  poésie 
religieuse  ;  nous  citerons  !•  Jndago  mono- 
cerotisab  natura  humana  deitati.s  saga- 
cissima  venatricc,  per  quinque  sensuum 
desideria  amnnter  adornatœ ,  Prague , 
1668,  in-4.  2"  Firtutis  et  honoris  œdcs 
in  heroïbus  et  pœnatibus  XX  F  grœco^la- 
iinis  illiistrntœ.  Ibid,  1G71,  in-8.  3°  Les 
panégyriques  de  la  sainte  Vierge,  de 
saint  François-Xavier ,  l'Oraison  funè- 
bre de  V empereur  Ferdinand  III ,  en  la- 
tin, etc.  ;  en  général  ses  ouvrages  sont  peu 
estimés. 

EIN'GEL  (Samuel),  géographe  et  savant 
suisse,  naquit  à  Berne  en  1702.  Après 
avoir  voyagé  en  Allemagne  et  en  Italie, 
il  rentra  dans  sa  patrie  où  il  remplit  avec 
distinction  plusieurs  places  administra- 
tives dans  lesquelles  il  rendit  d'importans 
services  à  sa  ville  natale  :  dès  l'an  1745. 
il  fit  partie  du  conseil  souverain  et  fut 
pourvu  successivement  de  différens  bail- 
liages. C'est  à  Inique  Berne  doit'en  partie 
ses  greniers  d'abondance ,  l'hôpital  des 
orphelins  dans  l'établissement  duquel  il 
fut  secondé  par  le  célèbre  Haller,  la  so- 
ciété économique,  etc.  Il  encouragea  aussi 
de  tous  ses  efforts  l'agriculture,  chercha 
dans  toutes  les  occasions  à  propager  les 
bons  procédés  que  l'on  a  découverts  dans 
ces  derniers  temps,  et  contribua  à  l'in- 
troduction des  pommes  de  terre  qui  fu- 
rent utiles  pendant  la  disette  de  1772  : 
services  qui  lui  valurent  une  médaille  de 
la  part  de  la  ville  de  Noyon.  Après  une 
vie  si  utilement  consacrée  à  ses  compa- 
triotes, il  mourut  à  Berne  le  li  mars 


ENG 

1784.  Il  a  publié  plusieurs  ouvrages  esti- 
més, parmi  lesquels  on  remarque  \°  Mé- 
moires et  Observations  géographiques 
et  critiques  sur  la  situation  des  pays 
septentrionaux  d'Asie  et  d'Amérique, 
Lausanne,  1765,  in-4,  avec  cartes,  tra- 
duit en  allemand  par  l'auteur,  Leipsick, 
17  72,  in-4.  Engel  cherche,  dans  cet  ou- 
vrage, à  prouver  qu'il  est  possible  de  ga- 
gner le  grand  Océan  en  naviguant  par  le 
Nord;  mais  son  hypothèse  est  fondée  sur 
une  opinion  dont  la  fausseté  a  depuis  clé 
reconnue  par  le  capitaine  Philipps.  2"  Es- 
sai sur  cette  question  :  Quand  et  com- 
ment l'Amérique  a-t-elle  été  peuplée 
d^hommes  et  d^ animaux  ?  Amsterdam  , 
1767,  in-4,  ou  5  vol.  in-12.  On  trouve 
aussi  dans  cet  ouvrage  plusieurs  hypo- 
thèses mal  fondées  et  quelquefois  oppo- 
sées aux  traditions  de  l'Ecriture ,  entre 
autres  celle-ci  :  que  le  déluge  n'avait  pas 
été  universel.  Il  entre  aussi  dans  beaucoup 
de  discussions  relatives  à  l'éclaircissement 
de  la  Bible  ;  mais  la  question  annoncée 
comme  devant  faire  le  sujet  principal , 
n'occupe  que  très  peu  de  place.  Z"  Mé- 
moire sur  la  navigation  dans  la  mer  du 
Nord,  1779,  in-4,  où  l'on  trouve  des  rcn- 
seignemens  curieux  sur  les  pays  situés 
dans  ces  parages  glacés  ;  encore  il  y  re- 
vient à  la  possibilité  de  la  navigation  dans 
l'Océan  boréal,  ^k"  Remarques  sur  la  par- 
tie de  la  relation  du  Voyage  du  capi- 
taine Cook,  qui  concerne  le  détroit  entre 
l'Asie  et  r Amérique,  1781,  in-4,  avec 
une  carte.  5°  Bibliotheca  selectissima, 
sive  Catalogus  librbntm  in  omni  gencre 
seientiaruni  rarissimarum,  etc.,  Berne, 
174-3,  in-8,  estimé  à  cause  des  anecdotes 
et  des  notes  qui  s'y  trouvent  répandues. 
6"  Instructions  sur  la  pomme  de  terre, 
Berne,  1  772,  2  Tol.  in-8,  en  allemand  ;  7" 
Mémoire  sur  la  rouille  du  froment ,  Zu- 
rich, 1778,  et  plusieurs  aaUes  ouvrages 
sur  l'économie  rurale ,  imprimes  sépnré- 
ment  ou  insérés  dans  les  Mémoires  de  la 
société  économique  de  Berne.  On  remar- 
que beaucoup  de  germanismes  dans  ses  ou- 
vrages écrits  en  français. 

EiN'GElLBERGE  ou  Ingelberge,  femme 
de  l'empereur  Louis  II,  fut  accusée  d'a- 
dultère par  le  prince  d'Anhuit  et  le  comte 


ENG 

de  Mansftcld,  Jaloux  de  son  dicvatfon. 
L'impératrice  se  défendit  autant  qu'elle 
put  de  cette  imputation.  3Iais  n'ayant 
point  de  preuves  décidément  favorables, 
elle  se  voyait  dans  le  cas  de  se  justifier 
par  l'épreuve  du  feu  et  de  l'eau,  en  usa^je 
dans  ce  temps-là.  Engelberge  se  dispo- 
sait à  passer  parées  épreuves,  lorsque 
Boson,  comte  d'Arles,  persuadé  de  son  in- 
nocence, donna  un  cartel  de  défi  aux  ca- 
lomniateurs, les  terrassa  l'un  et  l'autre, 
et  leur  fit  rendre  hommage,  l'épée  sur  la 
gorge  ,  à  la  vertu  de  l'impératrice.  Le 
vainqueur  eut  pour  prix  de  sa  générosité 
le  titre  de  roi  d'Arles ,  et  pour  femme 
Ermengarde,  fille  unique  de  cette  prin- 
cesse. Engelberge,  devenue  veuve,  se  fit 
bénédictine ,  et  mourut  saintement  vers 
l'an  890. 

*  E>.GELGRAVE  (  Henri  ),  savant  jé- 
suite belge  ,  né  à  Anvers  en  IGIO,  mort 
dans  la  même  ville  le  8  mars  1G70,  a 
laissé  des  ouvrages  estimés,  qui  ont  pour 
titre  :  Lux  evangelica  sub  vélum  sacro- 
runi  emblematum  recondiia  in  anni  do- 
minicas ,  2tom.  iu-4,  1()48.  Il  s'en  est 
fait  depuis  sept  réimpressions  de  diffé- 
rens  formats.  2'^  Lucis  evangclicœ  sub 
vélum  sacrorum  emblematum^  sivc  cœ- 
lum  noi>um  infesta  et  (jesta  sanctorum , 
1G47,  in-!ol.,  1658,  ln-4,  et  1C59,  iu-8. 
3°  Cœlumempyreumin  (esta  sanctoruni 
apostolorum,  niartyrum ,  confessorum, 
virginum,  etc.,  in-fol.,  in-4,  et  2  vol.  in- 
12.  4°  Cœluni  empyreum,  pars  altéra, 
in-fol.,  in-4  et  in-8.  On  a  encore  de  lui 
des  Me'ditatiom  sur  la  passion  de  N.  S. 
en  Flamand,  Anvers  ,  1G7  0,  iu-8.  —  Son 
frère,  Jcan-Captiste  Engelgeave,  aussi 
jésuite,  qui  jouissait  d'une  grande  consi- 
dération dans  son  ordre,  a  publié  Medi- 
tationes  per  totum  annum,  in  omncsdo- 
minicas  et  festa,  in-4,  Anvers,  1G54. 

'ENGELHCSEN  (  Thierri  d'),  né  dans 
le  duché  de  Hanovre,  et  mort  en  1430, 
est  connu  par  une  Chronique  en  latin  qui 
comprend  depuis  la  création  du  monde  , 
justju'à  l'année  1420.  Cette  Chronique  a. 
clé  continuée  par  Mathias  Doriny,  et  pu- 
bliée à  Kelmstad,  1G71  ,  in-4,  par  Joa- 
chim  Jean  Madeo.  Engelhusen  était  su- 
I>érieur  d'un  monastère  à  Wittembcrg. 


ENG  69 

'  ENGELSCHALL  (Joseph-Frédéric  ), 
dessinateur,  professeur  de  belles-lettres  et 
poète,  naquit  à  Marbourg,  dans  laHesse, 
en  1739.  Son  père,  et  surintendant  des 
églises  prolestantes,  mal  partagé  du  côté 
de  la  fortune,  ne  put  donner  à  son  fils 
une  éducation  assez  soignée.  A  ce  mal- 
heur s'en  joignit  encore  un  autre  ;  Joseph- 
Frédéric  devint  tout  à  coup  sourd  à  l'âge  de 
1 3  ans;  mais  ses  savantes  dispositions  poiir 
l'étude  surmontèrent  ces  obstacles,  et  il 
apprit  avec  succès  la  philosophie,  l'his- 
toire, les  belles-lettres  et  la  peinture.  En- 
gelschall  pourvut  à  son  existence  en  don- 
nant des  leçons  de  dessin,  dans  lequel  il 
était  très  habile,  jusqu'à  ce  qu'en  17  88  , 
il  fut  nommé  professeur  extraordinaire 
de  belles-lettres  à  l'université  de  3Inr- 
bourg;  mais,  comme  ce  titre  n'était  qu'ho- 
norifique, on  y  ajouta  celui  de  maître  de 
dessin,  avec  d'honnêtes  appointemens. 
Il  avait  beaucoup  d'instruction  ,  et  pas- 
sait pour  èlre  un  des  bons  poètes  de  l'Al- 
lemagne. Engelschall  mouiutle  28  mars 
17  97,  âgé  de  58  ans.  On  a  de  lui  1°  Poc- 
^te^  imprimées  en  1788  et  en  1805;  cette 
seconde  édition  a  été  publiée  par  les  soins 
de  M.  Justi,  ami  de  l'auteur,  et  qui  avait 
déjà  publié  un  autre  ouvrage  (  inédit  ) 
d'Engelschall,  intitulé  :  2°  F'ie  du  célèbre 
peintre  Jean-Henri  Tischbien ,  Nurem- 
berg ,  1799. 

EISGHIEN  ou  Enguies.  Voyez  Fran- 
çois et  Louis. 

EAGLEBERT  (  Corneille  )  ,  peintre 
très  célèbre  du  16"  siècle,  natif  de  Leyde. 
H  eut  deux  fils  qui  se  distinguèrent  aussi 
dans  le  même  art. 

*  ENGLEFIELD  (Charles-Henri  ,  sir) ,. 
né  d'une  famille  très  ancienne  de  Berk- 
shire, est  mort  à  Londres  le  21  mars  1 822, 
après  s'être  distingué  par  son  goût  pour 
les  sciences  et  pour  les  beaux-arts ,  et 
avoir  publié  les  ouvrages  suivans  :  1" 
Tables  des  lieux  apparens  de  la  comète 
de  1661,  dont  le  retour  est  attendu  en 
1789,  avec  une  nouvelle  méthode  de  se 
servir  du  re'ticulc  romboïdc,  1788,  in-4; 
2°  Lettre  à  l'auteur  de  la  revue  sur  les 
protestans  dissidcns,  17  90,  in-8;  3"  Re- 
vue sur  les  motifs-  de  la  séparation  des 
protestans  de  l'c'gHse  romaine  ;  4°  Sur 


70  ENG 

la  détermination  de  Vorhite  des  comètes 
iCaprès  la  méthode  du  Père  Boscovich 
et  celle  de  M.  de  la  Place,  1793,  in-4; 
6°  Promenade  à  Southampton  avec  des 
gravures  représentant  ses  antiquités , 
J801,  in-8;  G"  Promenade  dans  Vile  de 
Wight,  avec  des  gravures  représentant 
ses  antiquités,  li  a  aussi  donné  beau- 
coup d'articles  dans  les  Mémoires  de  la 
société  des  antiquaires,  et  dans  celle  de 
Linnée. 

"  ENGLISCH  (Eslher),  célèbre  calligra- 
plie  anfïlaise ,  sous  la  reine  Elisabeth  et 
sous  Jacques  I,  est  connue  par  la  perfection 
de  son  écriture.  Il  reste  encore  quelques- 
uns  de  ses  ouvrages  qui  sont  fort  recher- 
chés. Un  des  plus  curieux  est  intitulé  Oc- 
tavcs.  Ce  sont  des  stances  de  huit  vers , 
sur  la  vanité  et  l'inconstance  du  monde, 
écrites  par  Esther  Englisch,  le  1  "  janvier 
Ï600.  Les  vers  sont  en  français  et  en  an- 
glais. Ce  recueil  est  orné  de  guirlandes 
de  fleurs  et  de  fruits,  et  de  son  portrait 
en  miniature,  dessiné  à  la  plume  par  elle- 
même.  On  cite  encore  liist.  memorabiles 
Genesis  per  Estcrnm  Inglis-gallam , 
JEdimburgi,  anno  1600,  conservé  dans  la 
famille  d'Harcourt  et  un  autre  que  possède 
M.  Walkenaer  qui  contient  le  livre  de  l'Ec' 
clésiaste  de  la  main  d' Esther  Anglais- 
français  à  Lislebourg  en  Ecosse,  etc., 
avec  le  Cantique  des  cantiques. 

* ENGRAMELLE  (Marie-Dominique- 
Joseph),  religieux  de  l'ordre  de  Saint- 
Augustin,  né  à  JN'edonchal  en  Artois,  le 
24  mars  1727,  se  livra  dès  sa  jeunesse  à 
l'étude  des  sciences,  et  particulièrement 
de  la  musique  et  de  la  mécanique.  Il 
s'occupa  particulièrement  des  inslrumens 
»  touches  et  de  leur  construction.  On  lui 
doit  la  Tonotechnie,  ou  l'art  de  noter  les 
/cylindres  et  tout  ce  qui  est  susceptible 
de  notage  dans  les  instrumens  de  ton  • 
ccrts,  mécaniques ,  in-8,  fig.  Ce  livre  est 
le  premier  qui  ait  révélé  le  secret  d'un  art 
auquel  les  facteurs  d'instrumens  avaient 
jusqu'alors  refusé  d'initier  lepublic.  C'est 
aussi  au  Père  Fngramelle  qu'appartient 
tout  ce  qui  a  rapport  au  notage  dans  l'art 
du  facteur  d'orgue  de  D.  Bçdos.  On  a  en- 
core de  lui  une  Vescription  des  insectes 
de  V Europe  peints  diaprés  nature  par 


Ernest,  hi-4,  première  partie,  contenant 
les  chenilles,  chrysalides  et  papillons  du 
jour.  Cet  ouvrage ,  bien  exécuté  ,  a  été 
continué,  et  contient  29  cahiers,  qui  se.  ] 
relient  ordinairement  en  8  vol.  Engra-*     i 
melle  mourut  en  17  80. 

*ENGRAIVD  (Henri),  naquit  à  Saint- 
Fiacre,  près  de  Meaux,  le  12  décembre 
1753.  Après  avoir  fait  ses  études,  il  entra 
dans  la  congrégation  de  Saint-Maur,  d'où 
il  se  rendit  à  I.aon ,  pour  y  occuper  la 
place  de  professeur  de  rhétorique.  Nommé 
à  la  chaire  de  philosophie ,  et  puis  de 
théologie  à  l'abbaye  de  Saint-Nicai.se  de 
Reims,  il  professa  cette  dernière  science 
ju.squ'en  1789,  première  époque  de  la  ré- 
volution française  qui  l'empêcha  d'em- 
brasser la  carrière  ecclésiastique ,  ;i  la- 
quelle il  s'était  destiné.  Sans  fortune,  et  .. 
toujours  étranger  aux  tumultcspoliliques, 
il  se  livra  à  l'enseignement  dans  un  pen- 
sionnat de  demoiselles  à  Reims;  état  qu'il 
a  exercé  pendant  trente  années.  Il  fut 
nommé  conservateur  de  la  bibliothèque 
publi(pe  de  celte  ville,  emploi  dans  le- 
quel il  montra  beaucoup  de  zèle  et  d'in- 
telligence ,  quoiqu'il  n'en  retirât  aucun 
salaire  :  ce  qui  fait  honneur  à  son  désin-» 
tércssement.  Il  est  mort  d'une  maladie 
aiguë,  le  10  octobre  1823,  à  l'âge  de  70 
ans.  lia  laissé  plusieurs  ouvrages  élémen- 
taires, qui  sont  très  estimés:  1°  Principes 
de  la  langue  française,  rappelés  à  leurs 
plus  simples  élémens,  2*  édit.,  1809,  in- 
1.2  ;  3«  édit.,  J  8 1 3,  in-1 2  ;  2°  Leçons  élé- 
mentaires sur  l'histoire  de  France,  de- 
puis le  commencement  de  la  monarchie, 
jusqu'au  i  fi  brumaire  an  P^ III;  2"  édit., 
1 809  ;  4"  édition,  arrivant  jusqu'à  la  res- 
tauration de  1814  inclusivement,  1821, 
in-1 2;  5*  édit.,  arrivant  jusqu'en  1817, 
pid)liéeen  1822;  ^°  Leçons  élémentaires 
sur  la  mythologie ,  suivies  d'un  traité 
sommaire  de  l'apologue.  Cet  ouvrage  a 
en  sept  éditions, hi  4'estdc  1809,  in-12;  4° 
Leçons  élémentairesiM Histoire  romaine  ; 
elles  ont  eu  huit  éditions,  la  troisième  est 
de  1 809  ;  6"  Leçons  élémentaires  sur 
l'histoire  ancienne  et  l'histoire  grecque. 
Cet  ouvrage  compte  huit  éditions;  la  4* 
est  de  1813, in-12. 

EJNJEDIM  (  George  ),  un  des  plu»  sub- 


ETNN 

lils  unitaires  qui  aient  fait  des  remarques 
sur  l'Ecriture  sainte.  On  a  de  lui  ExpU- 
catio  locorum  scripturœ  vetevLs  et  novi 
Teslnmenti^  ex  quitus  dogma  Trinilalis 
stabiliri  solct,  in-4  :  ouvrage  pernicieux 
et  rempli  de  vains  sophismes  ,  qui  a  ëté 
sévèrement  défendu  et  brûlé  dans  diffé- 
rens  endroits.  Il  a  été  réfuté  par  Richard 
Simon.  Cet  auteur,  né  en  Transylvanie , 
ministre  et  surintendant  dans  sa  patrie  , 
mourut  en  1597,  âgé  de  42  ans.  Il  a  em- 
prunté presque  toutes  ses  remarques  d'E- 
tienne Basilius  ,  unitaire  de  Coioswar. 

EA^NIUS  (Quintus),  né  à  Rudes  en 
Calabre  ,  l'an  239  avant  J.  C. ,  obtint  par 
ses  talens  le  droit  de  bourgeoisie  à  Rome  ; 
honneur  dont  on  faisait  alors  beaucoup 
<le  cas.  U  tira  la  poésie  latine  du  fond 
des  forêts  ,  pour  la  transplanter  dans  les 
villes  ;  mais  il  lui  laissa  beaucoup  de  ru- 
desse et  de  grossièreté.  Le  même  siècle 
vit  naître  et  mourir  .sa  réputation  ;  ce 
siècle  n'était  pas  celui  de  la  belle  lati- 
nité :  on  lèsent  en  lisant  Ennius;  mais 
il  compensa  le  défaut  de  pureté  et  d'é- 
légance ,  par  la  force  des  expressions  et 
le  feu  delà  poésie.  L'élégant,  le  doux 
Virgile  avait  beaucoup  profité  dans  la 
lecture  du  dur  et  du  grossier  Ennius.  Il 
en  avait  pris  des  vers  entiers ,  qu'il  d^- 
i^elaM  des  perles  tirées  du  fumier.  Ennius 
mourut  delà  goutte,  l'an  ÏG9  avant  J.  C. 
Scipion  ,  son  ami ,  voulut  avoir  un  tom- 
beau commun  avec  ce  poète,  autant  par 
amitié  que  par  considération  pour  son 
mérite.  Ennius  avait  mis  en  vers  héroï- 
ques les  Annales  de  la  république  ro- 
maine ;  il  avait  aussi  fait  quelques  sati- 
res ;  mais  il  ne  nous  reste  que  des 
fragmens  de  ces  ouvrages,  Amsterdam, 
1707,  in-4  ,  et  dans  le  Corpus  poetarum 
latinnrum  deMaittaire,  et  dans  le  théâtre 
des  Latins ,  par  Levée. 

EMVODIUS ,  né  en  Italie  vers  473  , 
et  originaire  des  Gaules  ,  embrassa  Tétat 
ecclésiastique  du  consentement  de  sa 
femme ,  qui  de  son  côté  se  fit  religieuse. 
Ses  vertus  et  ses  talens  le  firent  élever 
sur  le  siège  de  Pavie  vers  l'an  510.  On  le 
choisit  ensuite  pour  travailler  à  la  réu- 
nion de  l'église  grecque  avec  la  latine. 
11  fit  deux  voyages  en  Orient ,  qui  ne  ser- 


ENO  71 

virent  qu'à  faire  connaître  les  ay^ifices 
de  l'empereur  Anastase ,  et  la  prudence 
d'Ennodius.  Cet  illustre  prélat  mourut 
saintement  en  521.  Le  père  Sirmond 
donna  au  public  en  ICI 2  une  bonne 
édition  de  &^s,  œuvres  ,  in-8.  Elles  renfer- 
ment, 1"  neuf  \'\\ve?,à'épîtres ,  recueil 
édifiant  et  utile  pour  l'histoire  de  son 
temps  ;  2"  dix  recueils  à.'œuK>res  dli>er- 
fes  ;  i"  la  Défense  du  concile  de  Rome  , 
qui  avait  absous  le  pape  Symmaque  ;  4"» 
vingt-huit  discours  ou  déclamations; 
5"  des  poésies. 

Ers'OCH,  fils  aîné  de  Caïn  ,  bâtit  avec 
son  père  la  première  ville.  Ce  mot  dans 
l'origine  ne  signifie  qu'une  habitation 
fixe,  un  terrain  environné  de  clôture. 
Caïn  et  Enoch  en  firent  une  pour  eux  et 
pour  leurs  descendans  ;  elle  fut  appelée 
Enochie. 

ENOCH  ou  Henocii  ,  fils  de  Jared  et 
père  de  Mathusalem  ,  né  l'an  3412  avant 
J.  C,  fut  enlevé  du  monde  pour  être 
placé  dans  le  Paradis  terrestre,  après  avoir 
vécu  3C5  ans  avec  les  hommes.  Il  doit 
venir  un  jour  pour  faire  entrer  les  nations 
dans  la  pénitence  (  voyez  Elie  ).  On  lui 
attribua,  dans  les  premiers  siècles  de  l'E- 
glise, un.  ouvrage  plein  de  fables  sur  les 
astres,  sur  la  descente  des  anges  sur  la 
terre,  etc.;  mais  il  y  a  apparence  que 
cette  production  avait  été  supposée  par 
les  hérétiques  ,  qui ,  non  contens  de  fal- 
sifier les  saintes  écritures  ,  se  jouaient, 
par  des  ouvrages  supposés  et  fabuleux  , 
de  la  crédulité  de  leurs  imbéciles  secta- 
teurs. Quelques  critiques  prétendent  que 
cet  ouvrage,  véritablement  d'Enoch,  a 
été  défiguré  par  des  mains  infidèles  ;  ils 
se  fondent  sur  ce  que  saint  Jude,  dan& 
son  épîlre  canonique ,  paraît  en  citer 
un  passage.  Mais  saint  Jude  cite  Enoch, 
sans  parler  de  son  livre  ;  le  passage  en 
question  peut  être  le  fruit  d'une  ancienne- 
tradition  ,  conservée  dans  d'autres  li- 
vres (1).  Voyez  Jude. 

Ers  OS  ,  fils  de  Seth  et  père  de  Caïnan, 
né  l'an  37  99  avant  J'-  C,  mort  âgé  de 
905  ans,  établit  les  principales  cérémo- 

(i)Tl  p»aU  rertain  aujourd'hui  qne  le  Pirrc  ittribué 
à  t'iiocb  existe  :  il  faut  donc  en  revenir  au  seiitinieul  dtk. 
critiques  qui  j)r«(eiideiit  que  cet  ouvrage  A  4lé  défiguré.  ■ 


72  ENS 

nies  da  cnlte  que  les  premiers  hommes 

rendirent  à  l'Etre-Suprême. 

'  ENS  (Gaspard),  historien  allemand, 
né  vers  1570  à  Lorch  dans  le  Wurtem- 
berg, fut  uu  des  écrivains  les  plus  labo- 
rieux et  les  plus  féconds  de  l'Allemagne  ; 
il  renonça  à  l'étude  du  droit  pour  se  li- 
vrer à  sa  passion  pour  les  voyages.  En 
ÏG03  il  se  fixa  à  Cologne  et  se  mit  aux 
gages  des  libraires,  pour  lesquels  il  com- 
posa dans  l'espace  de   15  ans  un  grand 
nombre  d'ouvrages  dont  on  trouve  la  liste 
dans  la  Bibliotheca  realis  de  Lipenius.  Us 
sont  tous  en  latin  et  roulent  sur  des  su- 
jets d'histoire,  de  politique,  de  critique, 
de  poésie,  etc.  Il  composait  jusqu'à  10  vo- 
lumes dans  une  année.  Les  principaux 
sont   1°  Mercurius .fjallo-helUcus,  Co- 
logne, 1G04,  et  suiv.  Ens  en  publia  6  vo- 
lumes ,  depuis  le  4^  jusqu'au  9''.  2°  An- 
nales, sive  Commentaria  de  bello  galln- 
beîgico,  ibid.,  1G06,  in-8-,  3°  lielU  civilis 
in  Belgio  per  xl  annos  gesti  historia, 
usque  adannum  ICOi),  ex  belgicis  Mete- 
rani   commentnriis   coiicinnata,    ibid., 
ICIO;  4"  MauiUiados  libri  vi,  in  qidbus 
helgicœ  describitur  civilis  belli  causa, 
illustris  Mawitii    natales    et  victorice 
expUcantur,  ibid.,  ICI 2,  in-8;  b° Berum 
hungaricarum  historia,  libris  ix   com- 
prehensa,  ibid.,  1604,  in-8.  Les  biogra- 
phes hongrois,  tout  en  louant  l'élégance 
du  stile  d'Ens,  lui  reprochent  plusieurs 
inexactitudes.  6°  Thésaurus  politicus  ex 
italico  latine  versus ,  ibid.,  1613-18-19, 
3  vol.  in-4;  7°  Morosophia ,  sivc  stuUce 
sapientiœ  et  sapientis  stultitiœ  libri  duo. 
C'est  une  imitation  de  l'ouvrage  de  Spel- 
to,  publié  avec  le  même  titre  en  italien, 
Pavie,  1606,  in-4,  ibid.,  1620-21,  in-8. 
8°  Heraclitus,  de  miseriis  vitce  humanœ, 
ibid.,  1622,  in-12,  etc.  Ens  a  publié  aussi 
des  poésies  latines,  dont  une  partie  a  été 
insérée  dans  les  Deliciœ  poetarum  ger- 
manorum,  tome  2,  pages  1236  et  suiv^ 
Et ,  pour  prouver  qu'il  n'oubliait  aucun 
genre  de  littérature,  il  a  donné  une  tra- 
duction latine   du   roman    de  Gusman 
d'Alfarache,  sous  le  titre  de  Proscenium 
vitœ,  1023,  in-8.  Ens  est  mort  vers  1640. 
*  ENSENADA    (  le  marquis  de  la  ) , 
l'un  des  ministres  d'Espagne  les  plus  ha- 


ENT 

biles ,  sous  le  règne  de  Ferdinand  Vï ,  né 
de  parens  obscurs ,  avait  d'abord  été  te- 
neur de  livres  chez  un  banquier  de  Ca- 
dix :  des  talens  supérieurs  le  firent  bientôt 
connaître.  Il  s'éleva  par  degrés ,  et  du 
poste  d'intendant  d'atmée,,  il  passa  dans 
le  ministère  ,  oîi  il  se  montra  avec  l'éclat 
d'un  homme  qui  s'est  créé  lui-même. 
Livré  tout  entier  à  l'administration  pu- 
blique ,  il  supprima  les  dépenses  super- 
flues ,  encouragea  les  établissemens 
utiles ,  protégea  l'industrie ,  les  sciences, 
les  arts ,  le  commerce  ,  et  créa  de  nou- 
veau ,  pour  ainsi  dire ,  la  marine  espa- 
gnole.  Il  porta  son  système  d'économie 
jusque  dans  la  maison  de  son  souverain, 
et  sans  rien  retrancher  de  la  pompe  qui 
convenait  à  un  si  puissant  monarque ,  il 
sut  cependant  y  établir  une  sage  réforme. 
Sa  modestie  égalait  ses  talens.  Le  nom 
qu'il  prit  en  est  une  preuve  :  En  se  nada 
signifie  rien  en  soi.  Il  le  prit  après  que 
le  roi  Ferdinand  VI  eut  voulu  lui  conférer 
un  titre  de  noblesse  ;  il  s'appelait  Zeno 
SoMo.  Les  intrigues  de  cour  du  duc  de 
Huescar  le  firent  disgracier  ;  mais  il  sou- 
tint cette  disgrâce  avec  la  dignité  d'un 
grand-homme,  et  il  ne  se  montra  jamais 
si  supérieur  à  sa  place  que  lorsqu'il  l'eut 
perdue.  Le  roi  qui  le  regrettait  sincère- 
ment ,  le  rappela  ;  mais  les  cabales  de  ses 
ennemis  surent  le  tenir  éloigné  du  mi- 
nistère. Il  mourut  en  1762. 

ENT  (  George  ) ,  né  à  Sandwich  dan* 
le  comté  de  Kent,  en  1604,  reçut  le 
bonnet  de  docteur  en  médecine  à  Padoue. 
De  retour  en  Angleterre  ,  il  se  lia  étroi- 
tement d'amitié  avec  Harvée ,  devint 
président  du  collège  des  médecins  sous 
Cromwel ,  et  fut  fait  chevalier  par  Char- 
les II  qui  avait  tant  déplaisir  à  l'entendre 
qu'il  assistait  à  ses  leçons.  Il  mourut  à 
Londres  en  1689.  On  a  de  lui  \°  De  res- 
pirationis  usu  priniario ,  1679,  in-8. 
2°  Apologia  pro  circulatione  sanguinis, 
1641  ,  in-8 ,  en  faveur  de  Harvée.  3°  Des 
mémoires  dans  les  Transactions  philo- 
sophiques. 

EINTINOPE  de  Candie,  fameux  ar- 
chitecte au  commencement  du  5"^  siècle, 
a  été  l'un  des  principaux  fondateurs  de 
la  ville  de  Venise.  Ridagaise,  roi  de» 


ENT 

Golhs,  étant  entre  en  Italie  en  405,  les 
ravages  dejjces  barbares  contraignirent 
les  'peuples  à  se  sauver  en  différens  en- 
droits. Entinope  fut  le  premier  qui  se 
retira  dans  des  marais  proche  de  la  mer 
Adriatique.  La  maison  qu'il  y  bâtit  était 
encore  la  seule  qu'on  y  vit ,  lorsque , 
quelques  années  après ,  les  habitans  de 
Padoue  se  réfugièrent  dans  le  même  ma- 
rais. Ils  y  élevèrent  en  413  les  24  mai- 
sons qui  formèrent  d'abord  la  cité.  Celle 
d'Entinope  fut  ensuite  changée  en  église, 
et  dédiée  à  saint  Jacques.  Elle  subsiste, 
dit-on ,  encore,  et  est  située  dans  le  quar- 
tier appelé  Rialto  ,  qui  est  le  plus  ancien 
de  la  ville. 

*  EINTIUS  ,  roi  de  Sardaigne,  fils  na- 
turel de  Frédéric  II ,  était  né  de  l'une 
des  nombreuses  maîtresses  que  cet  em- 
pereur entretenait  dans  son  palais.  Son 
véritable  nom  était  Hanse  ou  Jean.  Les 
Italiens  Je  désignent  sous  celui  de  Enzio. 
A  peine  âgé  de  14  ans,  il  épousa,  en 
1238  ,  Adélaïde,  marquise  de  Massa ,  hé- 
ritière de  Gallura  et  d'Oristagni ,  en  Sar- 
daigne  ,  et  veuve  d'Ubaldo  ,  vicomte  de 
Pise.  Il  était  ainsi  possesseur  de  toute  la 
Sardaignc  ,  dont  une  partie  lui  était  déjà 
soumise.  Entius  était  un  des  plusvaillans 
fils  de  Frédéric  ;  son  père  l'employa  dans 
ses  guerres  injustes  contre  l'Eglise.  Il 
porta  le  fer  et  le  feu  dans  la  Jlarche 
d'Ancône,  ce  qui  lui  attira  l'excommuni- 
cation de  Grégoire  IX.  En  1241  ,  à  la 
tète  de  la  flotte  sicilienne  et  pisanne  ,  il 
battit,  le  3  mai,  les  Génois,  et  fit  pri- 
sonniers les  prélats  appelés  par  le  pape  à 
un  concile  ,  pour  prononcer  sur  la  con- 
duite de  l'empereur.  Ayant  porté ,  quel- 
ques années  après,  ses  armes  dans  la 
Lombardie,  il  fut  complètement  battu 
et  fait  prisonnier  par  les  Bolonais  à  la 
bataille  de  Possalto,  le  2C  mai  1247.  Les 
vainqueurs  le  conduisirent  en  triomphe 
dans  leur  ville  ,  et  le  condamnèrent  à 
une  prison  perpétuelle  :  il  n'avait  alors 
que  26  ans.  Frédéric  essaya  vainement 
d'obtenir  la  liberté  de  son  fils.  Ses  offres 
et  ses  menaces  furent  également  inutiles. 
Les  Bolonais  firent  bâtir  au  milieu  de  la 
place  dite  de  Saint-Pétrone ,  un  palais 
magnifique  ;  et  c'est  dans  cette  superbe 

V. 


ENT  7i 

prison  qu'Enlius  languit  pendant  25  ans, 
c'est-à-dire  jusqu'au  moment  de  sa  mort, 
arrivée  le  2G  mai  1272.  Pour  aggraver  sa 
captivité ,  il  eut  la  douleur  d'apprendre 
les  malheurs  et  la  mort  de  son  père,  de 
ses  frères  et  de  l'infortuné  Conradin ,  der- 
nier descendant  de  son  illustre  famille. 
Un  poète  (  le  Tassoni  )  lui  a  consacré  quel- 
ques chants  dans  son  poème  de  la  Sec- 
ch'ia  rapita  (  le  Seau  enlevé'.  ). 

*  ENTRAIGUES  ou  Antraigues  [Em- 
manuel- Louis -Henri  de  Launey,  comte 
d'},  député  aux  Etats-généraux  en  1789, 
né  dans  le  Vivarais  vers  1750,  était  ne- 
veu du  comte  de  St.-Priest ,  l'un  des  der- 
niers ministres  de  Louis  XVI.  Il  eut  pour 
précepteur  le  célèbre  abbé  Maury  qui 
lui  donna  du  goût  pour  l'étude  ;  ce  qui 
le  détourna  de  la  carrière  militaire  à  la- 
quelle l'appelait  sa  position  sociale.  Mal- 
gré l'éducation  sage  qu'il  reçut  de  sou 
Mentor,  il  ne  put  maîtriser  son  imagina- 
tion, et  ce  fut  avec  enthousiasme  qu'il 
adopta  les  idées  nouvelles  de  réforme  et 
de  changement.  Dès  que  le  roi  eut  an- 
noncé le  projet  de  convoquer  les  Etats- 
généraux  (  1788) ,  il  publia  un  Mémoire 
sur  les  Etats-généraux,  leurs  droits  ,  et 
la  manière  de  les  convoquer ,  1788,  in-8, 
qui  est  rempli  des  principes  les  plus  per- 
nicieux et  qui  ne  contribua  pas  peu  à 
exalter  les  têtes  ,  et  par  conséquent  à 
préparer  tous  les  maux  de  la  révolution. 
Il  osa  proclamer  cette  odieuse  maxime  : 
que  l insurrection  est  le  plus  saint  de 
tous  les  devoirs.  Cependant  lorsqu'il  fut 
arrivé  aux  Etats -généraux ,  il  s'opposa 
avec  beaucoup  de  vigueur  à  la  réunion 
des  trois  ordres  ;  il  fut  néanmoins  d'avis 
que  la  constitution  dont  on  allait  s'oc- 
cuper, fût  précédée  d'une  déclaration 
des  droits  de  r/iomme;  mais  il  défendit 
la  sanction  royale  et  les  prérogatives  qui 
y  sont  attachées ,  comme  des  principes 
essentiels  du  gouvernement  monarchi- 
que. Il  se  fit  d'ailleurs  peu  remarquer , 
quitta  l'Assetûblée ,  sur  la  fin  de  1789, 
passa  à  l'étranger  ,  et  s'attacha  d'abord  à 
la  cour  de  Russie,  qui  lui  confia  plusieurs 
missions  diplomatiques.  Il  se  rendit  de  là 
à  Vienne ,  oîi  il  recevait  un  traitement 
de  36,000  livres,  de  différens  princes. 
5.. 


74  ENT 

Aucan  dmigré,  peut-être,  n'eut  un  sort 
plus  brillant  dans  l'ëlranger  ,  et  cepen- 
dant il  n'en  est  point  dont  les  écrits 
aient  plus  contribué  à  la  révolution.  Il 
est  vrai  qu'il  avait  changé  totalement  de 
manière  de  voir ,  qu'il  demandait  alors 
une  contre-révolution  toute  entière ,  et 
qu'il  faisait  tous  ses  efforts  pour  se  rendre 
utile  à  la  maison  de  Bourbon.    Buona- 
parte,  qui  le  craignait  beaucoup  ,  le  fit 
arrêter  à  Milan,  en  «797,  comme  com- 
promis dans  une  conspiration  ,  qui  fit 
alors  le  plus  grand  bruit.  Mais  la  dame 
Saint-Huberti,  avec  laquelle  il  s'était  ma- 
rié ,  parvint  à  le  faire  évader.  Il  se  rendit 
en  Allemagne  ;  et  après  avoir  résidé  quel- 
que temps  à  Vienne ,  il  retourna  en  Rus- 
sie oîi  il  obtint  en   1803  le  titre  de  con- 
seiller de  l'empereur.    A  Dresde  oîi  il 
avait  été  envoyé  en  mission ,  il  publia 
un  écrit  violent  contre  Buonaparte  qui 
exigea  du  roi  de  Saxe ,  qu'il  fût  renvoyé  de 
ses  états.  D'Entraigues  retourna  en  Russie  ; 
puis ,  étant  parvenu  à  se  procurer  les  ar- 
ticles secrets  du  traité  de  Tilsitt ,  il  vint 
en  Angleterre  et  fit  part  au  ministère 
anglais  de  cette  pièce   importante  ;   ce 
qui  lui  valut  une  pension  considérable  et 
lui  donna  la  plus  grande  influence  dans 
les  délibérations  du  gouvernement  an- 
glais. Il  vécut  néanmoins  éloigné  d'Hart- 
■wcl ,  où  Louis  XVIll  tenait  sa  cour,  et  il 
paraît  que  ce  prince  craignait  de  lui  ac- 
corder une  entière  confiance.  Cependant 
il  est  certain  qu'il  travaillait  au  rétablis- 
sement de  cette  famille.  Le  comte  d'En- 
traigues  fut  assassiné  au  village  de  Barne, 
près  Londres,  le  22  juillet   1812,  lors- 
qu'il allait  monter  en  voiture ,  par  ;un 
italien  à  son  service ,  nommé  Laurenzo, 
qui  se  tua  lui-même  d'un  coup  de  pis- 
tolet. On  a  de  lui ,  outre  le  fameux  mé- 
moire dont  il  a  été  parlé  plus  haut ,  plu- 
sieurs brochures  politiques:  1°  Discours 
d'un  membre  de  V Assemblée  nationale., 
à  ses  co-députe's,   1789,  in-8.   2°  Ré- 
flexions sur  le  divorce,  in-8.  3°  Quelle 
est  la  situation  de  l'Assemblée  nationale? 
1790,  in-8.  4°  Exposé  de  notre  antique 
et  seule  règle  de  la  constitution  fran- 
çaise ,  d'après  nos  lois  fondamentales, 
1792,  in-8,  5'  Dénonciation  aux  fran- 


CNT 

çais  catholiques  y  des  moyens  employés 
par  r Assemblée  nationale  pour  détruire 
en  France  la  religion  catliolique  ,  1791, 
in-8  ;  4«  édit.,  1792  ,  in-8.  6°  Adresse  à 
la  noblesse  de  France,  1792,  in-8.  7° 
Mémoire  sur  la  constitution  des  états 
de  la  province  de  Languedoc.  8°  Sur  la 
régence  de  Louis -Stanislas- Xavier  y 
1793  ,  in-8.  9°  Observations  sur  la  con- 
duite des  princes  coalisés,  1795,  in-8. 
1 0°  Sur  les  effets  d'une  contre-révolution, 
1796.  11°  Lettre  à  M.  de  L.  C,  sur 
l'état  de  la  France,  1796,  in-8.  12° 
Des  poésies  fugitives ,  insérées  dans  di- 
vers recueils. 

*  EINTRECASTAUX  (Joseph-Antoine 
Brdni  d'  ) ,  célèbre  marin  français,  né  à 
Aix,  en  17  39,  d'un  président  du  parle- 
ment de  Provence,  entra  dans  la  marine 
comme  enseigne  de  vaisseau,  et  fit  ses 
premières  armes  sous  le  bailli  de  Suffren. 
Il  fut  élevé  au  commandement  d'une  fré- 
gate, au  commencement  de  la  guerre  de 
17  78.  Une  action  glorieuse  le  fit  choisir 
quelque  temps  après  pour  être  capitaine 
de  pavillon  sur  le  Majestueux ,  vaisseau 
de  110  canons.  Sa  bravoure,   son  sang- 
froid  et  ses  talens  le  placèrent  alors  parmi 
lesofi&ciers  les  plus  distingués.  Aussi  utile 
pendant  la  paix  que  pendant  la  guerre , 
il  ne  se  fit  pas  moins  remarquer  dans 
l'administration  des  ports  et  des  arse- 
naux du  roi ,  par  l'intégrité ,  la  justesse 
d'esprit,  et  l'étendue  des  vues  dont  il  . 
était  particulièrement  doué.  Le  comman- 
dement des  forces  navales  dans  l'Inde  lui 
fut  confié  en  17  85.  Les  talens  qu'il  mon- 
tra dans  ce  voyage ,  où  il  se  fraya  plu- 
sieurs  routes  nouvelles ,  le  firent  dési- 
gner pour  aller  à  la  recherche   de  La 
Peyrouse ,  et  il  partit  de  Brest  avec  deux 
frégates ,  pour  cette  glorieuse  mission , 
au  mois  de  septembre  1 791  ?  Si  ses  efforts 
n'ont  pas  eu  le  succès  qu'on  pouvait  es- 
pérer, les  nombreuses  découvertes  qu'il 
a  faites ,  rendent  sa  campagne  une  des 
plus  brillantes  qui  aient  été  entreprises. 
11  a  reconnu  en  effet  la  côte  occidentale 
de  la  Nouvelle  -  Calédonie ,  celle  de  l'île 
de  Bougainville ,  la  partie  nord  dé  l'ar- 
chipel de  la  Louisiade,  plusieurs  rades 
et  beaux  ports  au  sud  de  la  terre  de  Dié- 


ENZ 
men ,  près  de  300  lieues  de  côte  an  sud- 
ouest  de  la  Nouvelle-Hollande  ;  enfin  il 
a  constaté  l'identité  des  îles  Salomon  de 
Mendana ,  avec  les  terres  vues  par  Sur- 
ville et  le  lieutenant  Sorthland ,  indi- 
quées par  Fieurieu  dans  son  ouvrage 
intitulé  :  Découverte  des  français  au 
sud-est  de  la  Nouvelle-Guinée,  Paris, 
1793.  Il  se  dirigeait  vers  l'île  de  Java  , 
lorsqu'il  fut  attaqué  du  scorbut.  Il  y  suc- 
comba le  20  juillet  1793.  Les  talensqu'il 
a  développés  dans  cette  campagne  le  pla- 
cent au  nombre  de  nos  plus  illustres  na- 
vigateurs. Son  Voyage,  rédigé  par  M. 
Rossel ,  son  capitaine  de  pavillon  ,  a  été 
imprimé  à  Paris  en  1808,  2  vol.  in-4, 
avec  un  atlas  par  M.  Beautemps-Beaupré, 
ingénieur-hydrographe  de  l'expédition , 
où  les  côtes  qui  ont  été  visitées  pendant 
cet  intéressant  voyage  ont  été  tracées 
avec  une  exactitude  inconnue  jusqu'a- 
lors. 

ENYDI.  Voyez  Enjedi. 

*  ENZINA  (  Jean  de  la  ),  né  vers  l'an 
1446  ,  d'une  famille  illustre  de  la  Vieille- 
Castille ,  fit  ses  études  à  Salaraanque  ,  et 
montra  ,  dès  sa  plus  tendre  jeunesse  ,  un 
goût  décidé  pour  la  poésie.  On  peut  dire 
que  la  Enzina  fut  le  véritable  fondateur 
du  théâtre  espagnol.  La  première  comé- 
die qu'il  composa  fut  jouée  lors  du  ma- 
riage de  Ferdinand  le  Catholique  et  d'I- 
sabelle de  Castille.  Ses  autres  pièces 
furent  représentées  à  la  cour  et  devant 
les  principaux  seigneurs.  Il  augmenta 
ensuite  sa  réputation  par  un  Art  poétique 
(  Arte  de  trovar  ) ,  qu'il  dédia  au  prince 
don  Jean.  Il  réunit  dans  cet  ouvrage ,  le 
second  en  ce  genre  qui  paraissait  en  Es- 
pagne ,  les  principaux  préceptes  des 
poètes  grecs  et  latins,  dans  lesquels  il 
était  très  versé  ;  et  quoique  son  art  poé- 
tique n'eût  pas  le  mérite  de  ceux  que 
publièrent  dans  le  siècle  suivant  Salas, 
Espinel,  etc.  ,  il  fut  cependant  regardé 
comme  une  production  aussi  utile  qu'a- 
gréable. Mais  il  ne  se  distingua  pas  seu- 
lement dans  la  carrière  littéraire  ,  il  fut 
chargé  par  Ferdinand  de  plusieurs  mis- 
sions auprès  des  cours  de  Rome  et  de 
Naples ,  et  il  s'en  acquitta  avec  distinc- 
tion, la  première  édition  de  ses  ouvrages 


EOB  75 

parut  à  Salamanque  en  1 507  ,  du  vivant 
de  l'auteur.  Elle  comprenait  plusieurs 
volumes  qui  contiennent  des  Poèmes  , 
des  Odes ,  des  Chansons  et  douze  Comé- 
dies, parmi  lesquelles  on  regarda  alors 
comme  un  chef-d'ceuvre  de  l'art  drama- 
tique celle  qui  a  pour  titre  :  Placida  y 
Victoriano.  Ce  poète  mourut  vers  l'an 
1 532 ,  comblé  d'honneurs  et  de  richesses. 
Ses  ouvrages  sont  remarquables  par  un 
stile  pur,  des  pensées  brillantes  et  une 
élégance  inconnue  jusqu'à  l'époque  où  il 
écrivit. 

E^ZINAS  (  François  ),  né  à  Burgos 
en  Espagne,  vers  1515,  est  également 
connu  sous  les  noms  de  Dryander  et  de 
Duchesne  en  français.  Il  fit  ses  études  à 
Wittemberg ,  sous  Mélanchthon  ,  qui  lui 
inspira  du  goût  pour  le  luthéranisme. 
Il  embrassa  ouvertement  les  nouvelles  er- 
reurs à  Anvers.  Il  y  entreprit ,  à  la  solli- 
citation de  Mélanchthon  ,  une  traduction 
du  nouveau  Testament  en  espagnol,  1 742, 
in-8  ,  qu'il  eut  l'audace  de  dédier  à  Char- 
les-Quint ,  et  de  présenter  à  ce  prince  , 
en  le  priant  de  la  prendre  sous  sa  protec- 
tion ;  Charles  le  lui  promit ,  pourvu  qu'il 
n'y  eût  rien  contre  la  foi  antique.  La  ver- 
sion ayant  été  examinée ,  l'auteur  fut  mis 
en  prison,  où  il  fut  détenu  pendant  15 
mois.  Il  s'évada  l'an  1545  ,  parcourut 
l'Angleterre ,  l'Allemagne ,  et  se  rendit 
à  Genève,  auprès  de  Calvin  en  1552.  On 
ne  sait  rien  de  lui  au-delà  de  celte  époque. 
Il  a  laissé  une  mauvaise  Histoire  de  Télat 
des  Pays-Bas  et  de  la  religion  d'Espa- 
gne,  Genève,  in-8.  Cette  Histoire  fait 
partie  du  Martyrologe  protestant ,  im- 
primé en  Allemagne.  C'est  l'histoire  apo- 
logétique des  calvinistes  et  luthériens, 
punis  pour  s'être  arrogé  le  droit  de  dog- 
matiser, d'insulter  les  prêtres,  d'exciter 
des  troubles ,  etc. 

EOBANUS  Hessus  (  Elius  )  fut  sur- 
nommé Hessus,  parce  qu'il  naquit  en 
1488,  sur  les  confins  de  la  Hesse ,  sous 
un  arbre  au  milieu  des  champs.  Il  profes- 
sa les  belles-lettres  à  Erfurt,  à  Nuremberg 
et  à  Marpurg ,  où  le  landgrave  de  Hesse 
l'avait  appelé.  Il  mourut  dans  cette  ville 
en  1540,  à  52  ans,  avec  la  réputation 
d'un  bon  poète,  ennemi  de  la  satire, 


76  EON 

quoique  versiAcateur ,  du  mensonge  et 
de  la  duplicité  ;  mais  ami  du  vin  et  de 
la  crapule.  Le  cabaret  était  son  Parnasse. 
On  raconte  qu'il  terrassa  un  des  plus  har- 
dis buveurs  de  l'Allemafjne ,  qui  lui  avait 
fait  défi  de  boire  un  seau  de  bière.  Eo- 
banus  fut  vainqueur ,  et  le  vaincu  ayant 
fait  de  vains  eflbrls  pour  épuiser  le  seau , 
tomba  ivre-mort.  Nous  avons  de  ce  poète 
buveur  un  grand  nombre  de  poésies , 
les  vers  tombaient  de  sa  plume.  Il  avait 
la  facilite  d'Ovide  ,  avec  moins  d'esprit 
et  moins  d'imagination.  Les  principaux 
fruits  de  sa  muse  sont  1"  des  Traductions 
en  vers-latins  de  Théocrite,  Bâle,  1631 , 
in-8,  et  de  l'Iliade  d'Homère,  Bàle,  1 54 1 , 
in-8.  2°  Des  Ele'gies  dignes  des  siècles 
de  la  plus  belle  latinité.  3°  Des  Sylves , 
in-4,  4"  Des  Bucoliques  estimées,  Halle, 
1539,  in-8.  5°  Ipsius  et  amicorum  Epi- 
slQlœ,'\Vi-io\.  Ses  poésies  ont  été  publiées 
sous  le  titre  de  Poematutn  farragines 
duce,  à  Halle  en  1539,  in-8  ,  et  à  Franc- 
fort en  1564,  dans  le  même  format.  Ca- 
mérariusa  écrit  sa  ^ie,  imprimée  à  Leip- 
sicken  1696,  in-8. 

EON  DE  L'ÉTOILE,  gentilhomme  bre- 
ton, homme  sans  lettres,  mais  d'une  ex- 
travagance et  d' une  opiniâtreté  tell  e  qu'on 
en  voit  rarement.  Ce  fou  se  disait  le  fils 
de  Dieu ,  et  le  juge  des  vivans  et  des 
morts,  sur  l'allusion  grossière  de  son  nom, 
avec  le  mot  eum  dans  cette  conclusion 
des  exorcismes  :  Percumquijudicaturus 
est  vivos  et  mortuos.  On  ne  doit  pas  s'é- 
tonner qu'un  insensé  ait  pu  trouver  une 
telle  absurdité  dans  son  imagination.  On 
ne  doit  pas  l'être  non  plus  qu'il  ait  fait 
un  grand  nombre  de  sectateurs  ,  et  que 
quelques-uns  aient  mieux  aimé  se  laisser 
brûler ,  que  de  renoncer  à  leur  délire.  Il 
n'y  a ,  comme  dit  Cicéron ,  aucun  genre 
de  folie ,  ou  d'excès  dont  l'esprit  humain 
ne  soit  capable.  Eon  fut  pris  et  conduit 
au  concile  de  Reims,  assemblé  par  le  pape 
Eugène  III  en  1 15S.  Le  pontife  demanda 
à  l'écervelé  :  «  Qui  es-tu?  »  Il  lui  répon- 
dit :  n  Celuiquidoitvenir  juger  les  vivans 
>)  elles  morts.  »  Comme  il  se  servait,  pour 
s'appuyer  ,  d'un  bâton  fait  en  forme  de 
fourche,  le  pape  lui  demanda  ce  que 
voulait  dire  ee  bâton  ?  «  C'est  ici  un  grand 


EO]N 

j>  mystère,  répondit  le  fanatique.  Tant 
»  que  ce  bâton  est  dans  la  situation  où 
M  vous  le  voyez ,  les  deux  pointes  tour- 
»  nées  vers  le  ciel ,  Dieu  est  en  possession 
»  des  deux  tiers  du  monde,  et  me  laisse 
M  maître  de  l'autre  tiers.  Mais  si  je  tourne 
u  les  deux  pointes  vers  la  terre  ,  alors 
w  j'entre  en  possession  des  deux  tiers  du 
i>  monde,  et  je  n'en  laisse  qu'un  tiers  à 
»  Dieu.  »  Ce  maître  de  l'univers  fut  en- 
fermé dans  une  étroite  prison ,  oîi  il  mou- 
rut peu  de  temps  après.  Ceux  d'entre  les 
sectateurs  d'Eon,  qui  demandèrent  à  ren- 
trer dans  l'église,  furent  reçus  avec  bonté; 
mais  comme  il  paraissait  que  de  telles 
extravagances  soutenues  avec  tant  de  fu- 
reur ,  prouvaient  quelque  intervention  de 
l'esprit  séducteur,  on  les  exorcisa  comme 
des  démoniaques. 

*  EON  DE  BEAUMONT  (Charlotte- 
Geneviève-Timothée,  ou  Charles -Ge- 
neviève-Louis-Auguste-André-Timolhée 
d'),  l'un  des  personnages  qui  ont  le  plus 
vivement  excité  la  curiosité  publique 
vers  la  fin  du  18*  siècle,  naquit  à  Ton- 
nerre le  G  octobre  1 728,  d'un  avocat  con- 
seiller du  roi  à  Paris,  fit  ses  études  au 
collège  Mazarin,  fut  reçu  d'abord  docteur 
en  droit  civil  et  en  droit  canon,  ensuite 
avocat  au  parlement.  Malgré  ses  succès 
dans  le  barreau  ,  il  changea  de  carrière. 
Le  prince  de  Conti  qui  protégeait  spécia- 
lement sa  famille  lui  fil  obtenir  une  mis- 
sion diplomatique  et  secrète  à  Saint-Pé- 
tersbourg, oîi  il  prit  les  habits  de  femmes 
qu'il  quitta  à  son  retour  en  France  pour 
reprendre  les  habits  d'homme.  Après 
avoir  aplani  dans  ce  voyage  les  voies  de 
pacification ,  il  fut  envoyé  une  seconde 
fois  en  Russie,  mais  avec  un  caractère 
public.  La  prudence  et  l'activité  de  ses 
démarches  ne  laissèrent  rien  à  désirer. 
Un  traité  définitif  d'alliance  entre  la 
•France  et  la  Russie,  et  l'engagement  de 
celte  puissance  de  faire  marcher ,  en  fa- 
veur des  cours  de  France  et  de  Vienne , 
80,000  Russes  destinés  à  suivre  les  dra- 
peaux prussiens  en  filrent  les  heureux  ré- 
sultats, il  parvint  même  à  faire  disgracier 
et  arrêter  le  grand  chancelier  Beslucheff, 
cl  à  le  faire  remplacer  par  le  comte  Wo- 
ronzow  qui  était  dans  les  intérêts  de  I» 


EON 

France.  A  son  retour,  brûlant  du  désir 
de  se  distinguer  dans  la  carrière  des  ar- 
mes, il  obtint  la  permission  d'aller  re- 
joindre l'armce  française  en  Allemagne, 
et  il  fit  la  campagne  de  1761  avec  le  titre 
de  capitaine  de  dragons  et  comme  aide- 
de-camp  du  maréchal  de  Broglie  ;  il  se 
distingua  à  Hoxter,  Ultrop,  Eimbeck,  et 
surtout  à  Osterwick,  où  avec  80  dragons 
il  força  un  bataillon  prussien  de  800 
hommes  de  mettre  bas  les  armes.  La  paix 
de  1762  le  fit  rentrer  dans  la  carrière  po- 
litique. Il  fut  envoyé  à  Londres  avec  le 
duc  de  Nivernois  en  qualité  de  secrétaire 
d'ambassade,  et  nommé  ensuite  ministre 
plénipotentiaire.  Louis  XV  lui  accorda  la 
croix  de  Saint  Louis.  Peu  de  temps  après 
de  sourdes  menées  de  la  part  de  ses  en- 
nemis le  firent  rappeler  ;  mais  pour  le 
consoler  de  sa  disgrâce,  le  roi  satisfait  de 
ses  services  lui  accorda  une  pension  de 
12,000  francs.  Le  chevalier  d'Eon  resta  en 
Angleterre,  et  quoique  sans  caractère  po- 
litique, il  s'occupa  continuellement  de 
tout  ce  qui  pouvait  tourner  à  l'avantage  de 
sa  patrie.  Pendant  ce  temps  des  paris  énor- 
mes a  valent  lieu  à  Londres  sur  son  sexe.  Il  y 
eut  même,  à  la  demande  d'un  des  joueurs, 
un  jugement  rendu  qui  prononça  d'après 
la  déposition  de  plusieurs  témoins  et  du 
chevalier  lui-même  qu'il  était  une  véri- 
table femme.  Dans  un  voyage  qu'il  fit  en 
France,  Louis  XY  lui  enjoignit  de  pren- 
dre les  habits  de  son  sexe,  et  il  parut  dans 
dans  le  monde  sous  le  titre  de  chevalière 
d'Eon.  Privé  pendant  la  révolution  de 
sa  pension,  il  tira  quelques  ressources  de 
son  habileté  dans  l'escrime,  en  faisant 
publiquement  assaut  avec  le  fameux 
Saint-George  ;  mais  l'âge  et  les  infirmités 
ayant  exercé  sur  lui  leurs  ravages,  des 
amis  généreux  vinrent  à  son  secours ,  et 
rendirent  ses  derniers  momens  moins  pé- 
nibles. Il  mourut  le  21  mai  1810.  Son 
corps  fut  ouvert  en  présence  de  Père  Eli- 
sée, premier  chirurgien  de  Louis  XVIII, 
et  il  fut  déclaré  qu'il  appartenait  au  sexe 
masculin.  On  a  cherché  inutilement  à 
connaître  les  raisons  politiques  qui  ont 
pu  forcer  un  homme,  un  militaire,  un 
chevalier  de  Saint  Louis  à  prendre  des 
habits  de  femme.  Ses  ouvrages  ont  été  re- 


EPA  77 

cueillis  en  1775  en  13  vol.  in-8,  sous  le 
titre  de  Loisirs  du  chevalier  d'Eon.  Ils 
ont  la  plupart  pour  objet  des  matières 
d'administration  et  de  politique,  et  an- 
noncent un  observateur  intelligent.  Ses 
observations  et  ses  recherches  sur  les  lois, 
le  commerce,  le  gouvernement  de  la  Rus- 
sie et  de  l'Angleterre  sont  d'autant  plus 
curieuses  qu'elles  ont  été  faites  sur  les 
lieux ,  et  qu'il  ne  s'est  jamais  permis  de 
trahir  la  vérité.  Si  son  style  manque  quel- 
quefois de  noblesse  et  de  correction,  il  est 
du  moins  constamment  simple ,  plein  de 
clarté,  et  quelquefois  semé  de  traits  vifs 
et  énergiques.  Il  a  paru  un  catalogue  des 
livres  rares  et  manuscrits  précieux  du 
cabinet  de  la  chevalière  d'Eon,  anglais 
et  français,  Londres,  1791,  in-8.  On  trouve 
en  tête  un  expose'  historique  assez  cu- 
rieux. M.  de  la  Fortelle  a  publié  à  Paris 
en  1779  in-8,  la  f^ie  militaire ,  politique 
^i  privée  de  demoiselle  Charles-Gène- 
viève-Louise-Auguste-André-Timothée 
Eon ,  ou  d'Eon  de  Bcaumont  c'cuyer , 
chevalier ,  ci-devant  docteur  en  droit , 
avocat,  censeur  royal,  envoyé' en  Rus- 
sie ;  etc.  Une  seconde  édition ,  donnée  la 
même  année,  est  précédée  d'une  épître  de 
Dorât  à  l'héroïne. 

EPAGATHE ,  of&cier  de  guerre  sous 
l'empire  d'Alexandre  Sévère,  assassina  le 
célèbre  jurisconsulte  Ulpien,  l'an  de  J.  G. 
226.  L'empereur  fut  extrêmement  irrité 
de  cet  attentat  ;  mais  il  ne  put  faire  pu- 
nir le  meurtrier  à  Rome,  de  peur  que  les 
soldats  ne  se  soulevassent.  Il  envoya  Epa- 
gathe  en  Egjpte,  pour  y  être  gouverneur; 
et  peu  de  temps  après  il  lui  commanda 
d'aller  en  Gandie,  où  il  le  fit  tuer  par  des 
gens  qui  lui  étaient  afi&dés. 

EPAMINOjVDAS,  capitaine  thébain , 
d'une  famille  distinguée,  descendant  des 
anciens  rois  de  Béotie ,  porta  d'abord  les 
armes  pour  les  Lacédémoniens,  alliés  des 
Thébains ,  et  lia  une  amitié  étroite  avec 
Pélopidas,  qu'il  défendit  courageusement 
dans  un  combat.  Pélopidas  délivra,  par 
le  conseil  de  son  ami,  Thèbes  du  joug  de 
Lacédémone.  Ge  fut  le  signal  de  la  guerre 
entre  ces  deux  peuples.  Epaminondas,  élu 
général  des  Thébains,  gagna  l'an  371 
avant  J.  G.  la  célèbre  bataille  de  Leuclres 


78  EPA 

dans  la  Béotîe.  Les  Lacédémoniens  y  per- 
dirent leurs  meilleures  troupes  et  leur  roi 
Cléombrote.  Pour  conserver  la  supério- 
rité que  Thèbes  venait  d'acquérir  par  ses 
succès  sur  Laccdémone,  Epaminondas  en- 
tra dans  la  Laconie,  à  la  tête  de  50  mille 
combattans ,  soumit  la  plupart  des  villes 
du  Péloponèse ,  les  traita  plutôt  en  al- 
liées qu'en  ennemies.  11  fit  rétablir  les 
murs  de  Messène,  et  fut  long-temps  l'ob- 
jet de  la  haine  et  de  la  colère  de  Lacédc- 
mone.  Celait  encore  un  ennemi  impla- 
ble  qu'il  lui  donnait.  Par  une  de  ces 
humeurs  bizarres  qui  font  la  seule  règle 
de  la  multitude  et  des  cohues  démocra- 
tiques, Epaminondas,  après  avoir  servi  sa 
patrie ,  fut  traité  en  criminel  d'état.  Une 
loi  de  Thèbes  défendait  de  garder  le  com- 
mandement des  troupes  plus  d'un  mois. 
Le  héros  avait  violé  cette  loi,  mais  c'était 
pour  donner  la  victoire  à  ses  concitoyens. 
Les  juges  allaient  le  condamner  à  mort, 
lorsqu'il  demanda  qu'on  mît  sur  son  tom- 
beau, «  qu'il  avait  perdu  la  vie  pour  avoir 
»  sauvé  la  république.  »  Ce  reproche  fil 
changer  de  résolution  aux  Thébains  ;  ils 
lui  rendirent  l'autorité.  Il  en  fit  usage  en 
portant  ses  armes  en  Thessalie ,  et  il  y  fut 
vainqueur.  La  guerre  s'étant  allumée  en- 
tre les  Eléens  et  ceux  de  Mantinée ,  les 
Thébains  volèrent  au  secours  des  pre- 
miers ;  il  y  eut  une  bataille  dans  les  plai- 
nes de  Mantinée,  à  la  vue  même  de  cette 
ville.  Le  général  Ihébain  s'étant  jeté  dans 
la  mêlée  pour  faire  déclarer  la  victoire 
en  sa  faveur,  reçut  un  coup  mortel  dans 
la  poitrine,  l'an  363  avant  J.  C.  Ses  amis 
regrettant  qu'il  ne  laissât  pas  d'enfans  : 
«  Vous  vous  trompez,  leur  répondit-il,  je 
»  laisse  dans  les  batailles  de  Leuctres  et 
»  de  Mantinée ,  deux  filles  qui  me  feront 
»  vivre  toujours.  «  Telle  était  la  courte 
philosophie  des  sages  de  l'antiquité!,Après 
un  peu  de  bruit  pour  des  victoires  d'un 
efi'et  momentané ,  et  qui  n'aboutissaient 
qu'à  changer  une  tyrannie  contre  une  au- 
tre, ils  plaçaient  dans  une  gloire  passagère 
toutes  leurs  espérances  et  toutes  leurs 
consolations.  (Voyez  sur  Epaminondas  les 
vies  de  Pélopidas,  d^Agésilas,  OEuvres 
morales  de  Plutarque  qui  avait  aussi  écrit 
la  vie  d'Epaminondas  ;  mais  elle  est  pen- 


EPE 

due  :  voyez  aussi  Cornélius  Népos,  Xëno- 
phon,  Diodore  de  Sicile,  Justin,  Polybe  : 
parmi  les  modernes,  on  peut  consulter 
l'abbé  Gédoyn,  tom.  xm  des  Me'moires  de  . 
V académie  des  Inscriptions ,  le  Voyage 
du  jeune  Anacharsis ,  F  Histoire  de  la 
Grèce  de  M.  Mitford.  tom.  vi.  chap.  28 
et  28.) 

EPAPHRODITE,  apôtre  ou  évêque 
de  Philippesen  Macédoine.  Les  fidèles  de 
cette  ville  ayant  appris  que  saint  Paul 
était  détenu  prisonnier  à  Rome,  envoyè- 
rent Epaphrodite  pour  lui  porter  de  l'ar- 
gent, et  l'aider  de  ses  services.  Ce  député 
exécuta  sa  commission  avec  beauc«up  de 
zèle,  et  tomba  dangereusement  malade  à 
Rome.  Quand  il  fut  guéri ,  saint  Paul  Je 
renvoya  avec  une  lettre  pour  les  fidèles 
de  Philippes,  remplie  de  témoignages  d'a- 
mitié pour  eux  et  pour  Epaphrodite,  l'an 
62  de  Jésus-Christ. 

EPAPHRODITE,  maître  d'Epictète. 
Voyez  ce  mot. 

EPAPHUS.  Foyez  Phaéton. 

EPÉE  (l'abbé  de  l')  est  né  à  Versailles 
le  25  novembre  1712  d'un  père  archi- 
tecte. Il  s'est  rendu  célèbre  par  ses  tra- 
vaux en  faveur  des  sourds  et  muets  de 
naissance.  Son  assiduité  et  sa  patience, 
autant  que  ses  talens,  ont  donné  à  ses 
peines  un  succès  mérité ,  dont  la  gloire 
eût  été  plus  pure  encore,  s'il  avait  dédai- 
gné les  liaisons  avec  un  parti  qui  a  tou- 
jours rais  les  bonnes  œuvres  en  ostenta- 
tion, quoique  personnellement  il  fût  sim- 
ple et  modeste.  L'abbé  de  L'Epée  donne 
lui-même  une  idée  juste,  claire  et  pré- 
cise de  sa  méthode  dans  son  Institution 
des  sourds  et  des  muets  (voyez  le  Jour- 
nal hist.  et  litt.,  du  15  septembre  1776, 
page  81)  :  ouvrage  écrit  avec  senti- 
ment ,  et  qui  n'a  pas  le  ton  de  sécheresse 
et  de  didacticisme  que  le  titre  semble  an- 
noncer. Il  y  a  à  la  fin  une  belle  petite  orai- 
son latine,  prononcée  par  un  de  ses  élè- 
ves et  terminée  par  ce  passage  de  la  Sa- 
gesse :  Sapientia  aperuit  os  mutorum  , 
et  linguas  infantium  fecit  disertas  (Sap. 
10).  Ce  livre  a  été  réimprimé  en  1784 
sous  ce  titre  :  la  Ve'ritable  manière  d!in- 
struirc-les  sourds  et  muets,  confirmée  par 
une  longue  expérience,  Paris,  1 784,  in-1 2. 


EPE 

On  connaît  le  différend  qui  s'est  élevé 
entre  l'abbé  de  L'Epée  et  l'abbé  Des- 
champs, qui  dans  son  Cours  élémentaire 
iTéducation  ,  regarde  l'inspection  des 
mouvemens  de  la  langue  comme  le  moyen 
principal  de  l'instruction  des  sourds  et 
muets  ;  tandis  que  le  premier,  et  son  dé- 
fenseur M.  Desloges,  regardent  l'usage 
de  signes  naturels  et  méthodiques,  comme 
tenant  la  place  la  plus  importante  dans 
cette  instruction.  Peut-être  n'est-ce  qu'une 
dispute  de  mots  ou  une  manière  de  rai- 
sonner, qui  tient  plus  à  la  spéculation 
qu'à  la  pratique  (voyez  Je  Journal  hist. 
et  lut.,  1"  octobre  17  80,  page  182j.  Si 
l'on  considère  les  élèves  comme  sourds , 
le  moyen  direct  et  principal  d'instruc- 
tion, ce  sont  sans  doute  les  signes  ;  mais 
ce  sera  l'articulation  et  les  mouvemens 
de  la  langue ,  si  on  les  considère  comme 
muets.  Quoi  qu'il  en  soit ,  l'art  de  faire 
parler  les  sourds  et  muets,  plus  exercé 
aujourd'hui  et  perfectionné,  n'est  cepen- 
dant pas  neuf;  nous  le  tenons,  comme 
tous  les  autres,  des  hommes  plus  instruits 
et  moins  bruyans  que  nous,  qui  nous  ont 
laissé  le  fruit  de  leurs  observations.  Il  y 
a  bien  des  années  que  M.  Péreire  a  fait  à 
Paris  les  plus  heureux  essais  en  faveur 
des  muets.  En  1771  il  présenta  au  roi  de 
Suède  qui  se  trouvait  dans  cette  capitale, 
trois  muets  qui  parlèrent  devant  ce  prince. 
Il  reçut  une  pension  du  gouvernement,  et 
lorsque  l'abbé  de  L'Epée  commença  à  faire 
du  bruit,  Péreire  écrivit  à  l'abbé  Fontenai 
une  lettre  oîi  il  revendiquait  sa  décou- 
verte. Nous  avons  une  dissertation  latine 
de  Jean  Conrard  Amman,  sur  la  parole  y 
imprimée  à  Amsterdam  en  1700,  qui  pré- 
sente les  détails  les  plus  curieux,  résultat 
d'une  longue  et  pénible  expérience  :  on 
en  voit  une  traduction  française  à  la  au 
de  l'ouvrage  de  M.  Deschamps.  Le  même 
auteur  nous  a  donné  le  Surdus  loquens 
(le  sourd  parlant),  imprimé  à  Harlem  en 
1692.  Long-temps  avant  le  médecin  Am- 
man, Jean  ^^■allis  avait  exercé  avec  beau- 
coup de  succès  l'art  de  faire  parler  les 
.sourds  et  muets,  qti'un  religieux,  nommé 
Ponce,  avait  déjà  fait  connaître  en  Espa- 
gne. Le  Père  Gaspard  Schott  a  écrit  des 
choses  intéressantes  sur  le  même  objet , 


EPE  79 

et  M.  Mercier  dans  la  notice  de  ses  ou- 
vrages, lui  fait  honneur  de  la  découverte. 
L'abbé  de  L'Epée  est  mort  à  Paris ,  le  23 
septembre  17  89.  M.  Papillon  du  Rivet, 
dans  sa  belle  épître  au  comte  de  Falkens- 
tein,  a  célébré  sentaient  par  les  verssui- 
vans  : 

A  des  «!gnes  dont  l'éloquenca 

Supplée  au  langage  des  sons  , 

Les  muels,  les  sourds  de  naissance  , 

Sont  exercés  par  ses  leçons; 

Du  destin  réparant  l'injure, 

IL  les  console  de  ses  torts  , 

Et  remplace  en  eux  les  ressorts 

Que  leur  refusa  la  nature. 

«  Il  ne  rendait  pas,  dit  tin  auteur  exact 
'>  dans  son  langage,  les  oreilles  auxsourds, 
»  la  parole  aux  muels  ;  mais  il  leur  pro- 
»  curait  la  faculté  de  se  parler  sans  le  mi- 
3>  nistère  de  la  langue ,  et  de  s'entendre 
M  sans  le  secours  de  l'oreille.  Encore  même 
»  est-il  vrai  de  dire  en  quelque  sens,  qu'il 
»  leur  donnait  la  parole  ;  car  plusieurs 
»  prononçaient  des  mots  et  des  phrases 
»  entières.  Ils  parlaient  d'une  manière 
M  désagréable  ;  on  voyait  bien  que  Dieu 
«  n'avait  pas  délié  leur  langue ,  mais  ils 
jj  parlaient;  ils  vous  répondaient  même , 
n  pourvu  qu'ils  eussent  vu  et  distingué 
»  le  mouvement  de  vos  lèvres ,  car  ils 
»  n'entendaient  pas  le  son  de  vos  paro- 
»  les.  »  L'abbé  Fauchet  a  fait  son  Oraison 
funèbre,  et  n'a  point  hésité  à  exalter  son 
opposition  aux  décrets  de  l'Eglise,  comme 
le  premier  titre  de  sa  gloire  et  le  fruit  de 
son  courage;  mais  les  écrivains  catho- 
liques en  ont  autrement  jugé.  «  Que  la 
»  patrie,  dit  l'un  d'eux,  paie  à  l'instilu- 
»  leur  des  sourds  et  muets,  le  tribut  des 
»  éloges  les  plus  mérités,  notre  voix  s'u- 
j)  nira  à  la  sienne  ;  mais  qu'un  panégy- 
n  riste  imprudent ,  brouillant  tout,  con- 
)>  fondant  toutes  les  idées,  veuille  nous 
w  faire  voir  un  appelant,  un  réfractaire, 
w  comme  un  prêtre  modeste  et  courageux  ^ 
»  l'intérêt  de  la  foi  l'emportera  sur  celui 
»  d'un  particulier.  Ce  prêtre  (on  a  la  mal- 
»  adresse  de  nous  l'apprendre  )  résista 
»  jusqu'à  la  mort  aux  décrets  dogmatiques 
»  du  saint  Siège.  Il  résista  ,  tandis  que 
»  toute  l'Eglise  était  soumise  ;  il  résista^ 
))  en  défendant  un  livre  et  des  erreurs 
»  que  le  pape,  et  avec  lui  l'Eglise  disper- 


8o  EPH 

M  sée ,  frappaient  de  l'anathème.  Si  c'est 
»  là  le  courage  de  la  liberté  dans  les  idées 
»  religieuses ,  si  c'est  là  le  courage  qui 
»  fait  les  grands  aux  yeux  de  la  religion, 
»  qu'est-ce  donc  que  la  docilité  et  la  sini- 

V  plicité  dans  la  foi  ?  qu'est-ce  donc  que 
M  la  soumission  aux  leçons  des  pasteurs 
)>  et  des  apôtres,  si  souvent  recommandée 
»)  dans  nos  livres  saints?  Si  c'est -là  le 
»  courage  de  la  vérité ,  quel  sera  donc 
»  celui  de  la  révolte,  de  l'opiniâtreté  con- 
»»  tre  cette  Eglise  et  ses  pasteurs ,  dont  il 
«  nous  est  dit  :  Celui  qui  vous  écoute 

V  m'écoute  ;  celui  qui  vous  méprise ,  me 
»  méprise.  »  (  Il  a  eu  pour  successeur  l'ab- 
bé Sicard  :  cet  établissement  depuis  la  mort 
de  cet  ecclésiastique  était  dans  un  état  de 
dépérissement  qui  aurait  amené  sa  ruine, 
lorsque  l'administration  de  cet  asile  des 
malheureux  sourds-muets  a  nommé  en 
1831  pour  le  diriger,  le  vertueux  et  esti- 
mable M.  Désiré  Ordinaire,  ancien  recteur 
de  l'académie  de  Strasbourg  dont  le  ta- 
lent s'était  essayé  avec  succès ,  pour  cet 
enseignement,  dans  la  maison  des  sourds- 
muets  de  Besançon,  et  dont  les  vertus 
chrétiennes  et  philanthropiques  sont  de- 
puis long-temps  de  véritables  passions. 
On  trouve  une  courte  Notice  sur  l'abbé 
de  l'Epée  dans  le  57*  volume  de  F^émi 
de  ïa  religion  et  du  roi,  et  dans  lesiVbu- 
vclles  ecclésiastiques  du  15  mai  1790.) 

EPERNON.  Voyez  Valette. 

EPHESTION ,  ami  et  confident  d'A- 
lexandre le  Grand  ,  mort  à  Ecbatane  en 
Médie  ,  l'an  325  avant  J.  G. ,  fut  pleuré 
par  ce  héros.  Ephestion,  suivant  l'ex- 
pression de  ce  prince ,  «  aimait  Alexan- 
»  dre,  au  lieu  que  Gratérus  aimait  le  roi.  » 
Le  conquérant  donna  des  marques  de  la 
plus  vive  douleur,  et  même  d'une  dou- 
leur cruelle  et  insensée.  Il  interrompit 
les  jeux  ,  il  fit  mourir  en  croix  le  médecin 
qui  l'avait  soigné  dans  sa  dernière  mala- 
die. On  a  parlé  diversement  du  genre  d'a- 
mour qu'il  avait  eu  pour  ce  courtisan  ; 
mais  l'atrocité  des  regrets  fait  assez  voir 
que  c'était  un  amour  absurde.  En  tout  cas 
il  n'y  aura  pas  de  jugement  téméraire  de 
croire  que  le  conquérant  ne  mit  pas  plus 
de  sagesse  dans  cet  attachement,  que  dans 
celui  qu'il  eut  pour  l'eunuque  Bagoas. 


EPII 

EPIIORE,  orateur  et  historien  de  Cii- 
Jnes  en  lonie,  vers  l'an  352  avant  J.  G. , 
fut  disciple  d'Isocrate.  Il  composa  par 
son  conseil  une  Histoire  ,  dont  quelques 
anciens  ont  fait  l'éloge,  et  dont  d'autres, 
parmi  lesquels  Dion,  Chrysostôme,  Sui- 
das, etc. ,  ont  parlé  d'une  manière  peu 
avantageuse.  Il  paraît  qu'il  était  imbu  de 
certains  principes  qui  influaient  beau- 
coup sur  sa  narration.  —  Il  ne  faut  pas  i 
le  confondre  avec  un  autre  Ephore  qui  a  ■ 
écrit  une  Histoire  de  V empereur  Gallien  ■ 
en- 27  livres. 

EPHRAIM ,  2«  fils  du  patriarche  Jo-  '. 
seph  et  d'Aseneth  ,  fille  de  Putiphar ,  na- 
quit en  Egypte  vers  l'an  1710  avant  J.  G. 
Jacob  étant  sur  le  point  de  mourir, 
Joseph  lui  mena  ses  deux  fils,  Ephraïm  et 
Manassès  ;  le  saint  patriarche  les  adopta 
et  leur  donna  sa  bénédiction ,  en  disant 
que  «  Manassès  serait  chef  d'un  peuple, 
»  mais  que  son  frère  serait  plus  grand 
D  que  lui,  et  que  sa  postérité  serait  la 
»  plénitude  desnations;  »  et  mettant  par 
une  action  prophétique ,  la  main  droite 
sur  Ephraïm ,  le  cadet ,  et  la  gauche  sur 
Manassès.  Ephraïm  eut  plusieurs  cnfans 
en  Egypte,  qui  se  multiplièrent  telle- 
ment, qu'au  sortir  de  ce  pays,  ils  étaient 
au  nombre  de  40,600  hommes  capables 
de  porter  les  armes.  Après  qu'ils  furent 
entrés  dans  la  Terre-Promise ,  Josué,  qui 
était  de  leur  tribu ,  les  plaça  entre  la  Mé- 
diterranée au  couchant  et  le  Jourdain  à 
l'orient.  Gette  tribu  devint  en  effet,  selon 
la  prophétie  de  Jacob,  beaucoup  plus 
nombreuse  que  celle  de  Manassès. 

EPHREM  (Saint  ),  diacre  d'Edesse, 
fils  d'un  laboureur  de  Nicibe ,  s'adonna 
dans  sa  jeunesse  à  tous  les  vices  de  cet 
■  âge.  Il  reconnut  ses  égaremens  et  se  re- 
tira dans  la  solitude  pour  les  pleurer.  Il 
Y  pratiqua  toutes  les  austérités,  morti- 
fiant son  corps  par  les  jeûnes  et  les  veil- 
les. Une  prostituée  vint  tenter  l'homme 
de  Dieu.  Ephrem  lui  promit  de  faire  tout 
ce  qu'elle  voudrait,  ^pourvu  qu'elle  le 
suivît;  mais  cette  malheureuse,  voyant 
que  le  saint  la  menait'dans  une  place  pu- 
blique, lui  dit  qu'elle  rougirait  de  se 
donner  en  spectacle.  Le  solitaire  lui  ré- 
pondit avec  un  saint  emportement  :  Tu 


I 


EPH 

»)  as  honte  de  pécher  devant  kshonimefi, 
»  et  tu  n'as  pas  honte  de  pécher  devant 
»  Dieu,  qui  voit  tout  et  qui  connaît  tout.  » 
Ces  paroles  touchèrent  la  prostituée  ,  et 
dès  lors  elle  résolut  de  se  sanctifier. 
Ephrem  ne  resta  pas  toujours  dans  sa  so- 
litude. Il  alla  à  Edesse,  oii  il  fut  élevé 
au  diaconat.  La  consécration  de  l'ordina- 
tion anima  son  zèle ,  et  ce  zèle  le  rendit 
orateur.  Quoiqu'il  eût  négligé  ses  études, 
il  prêcha  avec  autant  de  facilité  que  d'é- 
loquence. Comme  les  apôtres ,  il  ensei- 
gna ce  que  jusqu'alors  il  avait  ignoré.  Le 
clergé,  les  monastères  le  choisirent  pour 
leur  guide,  et  les  pauvres  pour  leur  père. 
Il  sortit  de  sa  retraite  ,  dans  un  temps  de 
famine ,  pour  les  faire  soulager.  Il  re- 
tourna enfin  dans  son  désert,  où  il  mou- 
rut vers  l'an  37  9.  Saint  Ephrem  avait 
composé  plusieurs  ouvrages  en  syriaque 
pour  l'instruction  des  infidèles ,  ou  pour 
la  défense  de  la  vérité  contre  les  héréti- 
ques. Ils  furent  presque  tous  traduits  en 
grec  de  son  vivant.  Il  écrivit  avec  force 
contre  les  erreurs  de  Sabellius,  d'Arius, 
d'Apollinaire  et  des  Manichéens.  On  a 
une  très  belle  édition  en  latin ,  grec  et 
syriaque ,  de  ceux  qui  sont  parvenus  jus- 
qu'à nous,  en  G  vol.  in-folio,  publiés  à 
Rome  depuis  1732  jusqu'en  1746,  sous 
les  auspices  du  cardinal~Quirini ,  par  les 
soins  de  M,  Assémani,  sous-bibliothécaire 
du  Vatic'an.  L'illustre  cardinal  l'avait 
chargé  de  cette  entreprise ,  dont  l'exécu- 
tion a  satisfait  le  public  savant.  Cette 
édition  est  enrichie  de  prolégomènes, 
de  préfaces,  de  notes.  Les  ouvrages  de 
piété  de  saint  Ephrem  ont  été  traduits 
en  français,  par  M.  l'abbé  Le  Merre, 
Paris,  1744,  2  vol.  in-12.  Ses  écrits  ti- 
rent leur  principale  force  du  génie  et  des 
figures  propres  aux  langues  orientales.  Ce 
qu'il  y  a  de  plus  admirable,  c'est  qu'il 
n'y  a  rien  d'étudié ,  et  que  toutes  les  pa- 
roles ne  sont  que  les  effusions  impé- 
tueuses d'une  âme  qui  s'épanche  ;  on  y 
remarque  partout  le  langage  d'un  cœur 
pénétré  d'amour ,  de  confiance,  de  com- 
ponction, d'humilité,  et  de  toutes  les 
autres  vertus.  L'auteur  s'y  est  peint  tel 
qu'il  était.  Il  y  paraît  uniquement  occupé 
des  grandes  vérités  du  salut.  Sans  cesse 

V. 


EPI 


8i 


il  s'humilie  sous  la  main  toute-puissante 
d'un  Dieu  infiniment  saint  et  terrible 
dans  sa  justice;  la  présence  divine  lui 
inspire  une  frayeur  respectueuse  ;  le  sou- 
venir du  jugement  dernier  augmente  sa 
ferveur,  le  porte  à  pratiquer  et  à  prêcher 
les  austérités  delà  pénitence,  et  l'anime 
à  travailler  de  toutes  ses  forces  pour  se 
préparer  un  trésor  de  mérites.  Ses  paroles 
impriment  dans  les  âmes  les  sentimens 
dont  elles  sont  l'image  :  elles  y  portent 
tout  à  la  fois  la  lumière  et  la  conviction. 
Ce  n'est  point  un  feu  qui  produit  une 
chaleur  passagère ,  c'est  une  flamme  qui 
dévore  et  détruit  toutes  les  affections  ter- 
restres, qui  transforme  l'âme  en  elle- 
même,  et  qui  continue  de  brûler,  sans 
rien  perdre  de  son  activité.  «  Quel  est 
»  l'orgueilleux,  dit  saint  Grégoire  de 
»  Nysse ,  qui  ne  deviendrait  le  plus  hum- 
u  ble  des  hommes  ,  en  lisant  ses  discours 
»  sur  l'humilité  ?  Qui  ne  serait  enflammé 
»)  d'un  feu  divin ,  en  lisant  son  traité  de 
»  la  charité  ?  Qui  ne  désirerait  d'être 
»  chaste  de  cœur  et  d'esprit,  en  lisant 
»  les  éloges  qu'il  donne  à  la  chasteté  ?  a 
Saint  Ephrem  fut  en  relation  avec  les 
personnages  les  plus  illustres  de  son 
temps,  avec  saint  Grégoire  de  Nysse, 
saint  Basile ,  Théodoret.  Le  premier  l'ap- 
pelle le  docteur  de  F  univers  ;  le  dernier , 
la  lyre  du  Saint-Esprit. 

EPHREM ,  patriarche  d'Antioche , 
souscrivit  à  l'édit  de  Justinien  contre 
Origène ,  et  à  la  condamnation  des  Trois 
Chapitres,  écrivit  plusieurs  ouvrages 
pour  la  défense  du  concile  de  Chalcé- 
doine ,  de  Saint  Cyrille  et  de  saint  Léo , 
dont  Photius  nous  a  conservé  des  extraits. 
Il  mourut  vers  l'an  546. 

*EPICHARIS,  affranchie  et  courtisane 
romaine,  accusée  d'avoir  conspiré  avec 
Pison  contre  îS'éron ,  avait  ranimé  plus 
d'une  fois  le  courage  des  conjurés.  Livrée 
par  Volusius  Proculus,  tribun  de  la  flotte 
de  Misène ,  elle  souffrit  les  plus  horri- 
bles tourmens ,  et  refusa  constamment  de 
découvrir  ses  complices.  Le  lendemain , 
comme  on  la  menait  pour  l'appliquer 
une  seconde  fois  à  la  torture ,  craignant 
de  ne  pouvoir  la  supporter  et  de  donner 
quelques  marques  de  faiblesse ,  elle  s'é- 

6 


8a  EPI 

trangla  avec  sa  ceinture  :  cette  action 
courageuse  a  fourni  à  M.  le  marquis 
Ximenes  le  sujet  d'une  tragédie  à'Epi- 
charisqu'il  a  fait  représenter  en  1763  ,  et 
à  liCgouvé  celle  iFL'picharis  et  Nc'ron 
qui  a  obtenu  quelque  succès  (  1800  ). 

EPICHARME,  poète  et  philosophe 
pythagoricien,  natif  de  Sicile,  introduisit 
la  comédie  à  Syracuse.  Il  fit  représenter 
en  cette  ville  un  grand  nombre  àepièces^ 
que  Plaute  imita  dans  la  suite.  Il  avait 
aussi  composé  plusieurs  traites  de  philo- 
sophie et  de  médecine ,  dont  Platon  sut 
profiter.  Aristete  et  Pline  lui  attribuent 
l'invention  des  deux  lettres  grecques  0 
et  X.  11  vivait  vers  l'an  440  avant  J.  C. , 
et  mourut  âgé  de  90  ans.  Il  disait  que  les 
dieux  nous  vendent  tous  les  biens  pour  du 
travail,  ce  qu'un  poète  a  rendu  d'une 
manière  plus  simple  : 

Nil  sine  magno 

Vita  labore  dédit  mortalibiia. 

EPICTÈTE  ,  philosophe  stoïcien 
d'Hiérapolis  en  Phrygie,  fut  esclave  d'E- 
paphrodite ,  affranchi  de  Néron ,  que  Do- 
mitien  fit  mourir.  Les  philosophes  ayant 
été  chassés  de  Rome  par  ce  dernier  empe- 
reur, Epictète  fut  compris  dans  la  pro- 
scription j  mais  il  revint  ensuite,  se  fit  un 
nom  distingué,  et  mourut  sous  Marc-Au- 
rèle,  dans  un  âge  fort  avancé.  Arri€n,  son 
disciple,  publia  4  livres  de  Discours,  qu'il 
avait  entendu  prononcer  à  son  maître. 
C'est  ce  que  nous  avons  sous  le  nom  à'JSn- 
chyridion  ou  de  Manuel.  «  Quelques  au- 
»  teurs,  dit  M.  Formey ,  par  un  zèle  peu 
»  judicieux,  ont  voulu  trouver  dans  ce  li- 
»  vre  la  morale  du  christianisme.  On  est 
}>  surpris  de  voir  combien  le  savant  Dacier 
»  (  voyez  ce  mot  )  s'est  donné  de  peine 
j>  pour  cela ,  et  qu'il  n'ait  pas  senti  la 
»  différence  extrême  qui  se  trouve  entre 
»  ces  deux  philosophies ,  quoique  la  pra- 
))  tique  en  paraisse  au  premier  coup 
»  d'œil  la  même.  Aveuglé  à  ce  point ,  il 
p)  n'a  cherché  qu'à  donner  un  sens  chré- 
»  tien  à  tout  ce  qu'il  a  traduit.  »  Il  est 
bien  vrai  qu'ayant  vécu  94  ans  après  J.  C. , 
et  les  Evangiles  étant  déjà  répandus  par 
toute  la  terre ,  Epictète  les  a  connus 
et  en  a  fait  usage  ;  mais  il  n'en  est  pas 
jooins  certain  que  toute  la  base ,  l'âme 


EPI 

et  le  but  de  sa  morale  n'ont  rien  de  com- 
mun avec  l'Evangile.  «  Dacier,  continue 
M  M.  Formey ,  n'est  pas  le  premier  qui 
»  soit  tombé  dans  cette  erreur.  Nous 
»  avons  une  vieille  paraphrase  d'Epictète 
»  attribuée  à  un  moine  grec ,  dans  la- 
»  quelle  on  trouve  l'Evangile  et  Epictète 
M  également  défigurés.  Un  jésuile  (le  Père 
»  Mourgues  ) ,  homme  de  plus  d'esprit,  a 
»  mieux  senti  la  différence  des  deux  phi- 
t>  losophies.  Le  rapport  qui  se  trouve  en- 
»  tre  les  mœurs  extérieures  du  stoïcien 
»  et  du  chrétien ,  a  pu  faire  prendre  le 
»  change  à  ceux  qui  n'ont  pas  considéré 
»  les  choses  avec  assez  d'attention  ou 
»  avec  la  justesse  nécessaire  ;  mais  au 
M  fond ,  il  n'y  a  rien  qui  admette  si  peu 
1)  de  conciliation,  et  la  morale  d'Epicure 
»  n'est  pas  plus  contraire  à  la  morale  de 
»  l'Evangile  que  celle  de  Zenon.  Cela  n'a 
»  pas  besoin  d'autres  preuves  que  l'expo- 
»  sition  du  système  stoïcien.  La  somme  du 
»  premier  se  réduit  à  ceci  :  Ne  pense  qu^ à 
»  toi  ;  ne  sacrifie  tout  qu'à  ton  repos.  La 
»  morale  du  chrétien  se  réduit  à  ces  deux 
»  préceptes:  Aimei?ie«  de  tout  ton  cœur-, 
«  aime  les  hommes  comme  toi-même.  « 
Un  auteur  qui  apprécie  également  bien  la 
morale  de  Zenon  et  d'Epictète ,  a  eu  soin 
de  nous  prémunir  contre  les  consolations 
que  nous  serions  tentés  d'y  chercher. 
»  Toutes  les  ressources ,  dit-il ,  (ju'ils  nous 
»  offrent  dans  les  événcmens  qui  ne  dé- 
j>  pendent  pas  de  nous ,  sont  prises  ou  de 
»  la  nécessité  des  choses,  si  peu  conso- 
«  lantes  en  elle-même,  ou  de  cette  fierté 
»  stoïque ,  par  laquelle  le  sage  s'envc- 
»  loppe  dans  sa  propre  vertu ,  et  se  re- 
»  garde  comme  inaccessible  aux  coups 
»  du  sort  ;  vertu  et  fierté  de  l'âme  qui  ne 
»  sait  que  concentrer  les  peines  au  de- 
»  dans  ,  et  ne  les  rend  souvent  que  plus 
V  sensibles.  »  Malgré  l'enthousiasme  avec 
lequel  des  gens  superficiels  ont  parlé 
d'Epictète,  ce  n'était  dans  la  réalité  qu'un 
sage  imaginaire  et  chimérique  un  phi- 
losophe fier  et  orgueilleux ,  qui ,  dans  la 
disgrâce,  affectait  un  air  de  constance 
et  d'intrépidité ,  sous  lequel  il  cachait  sa 
sensibilité.  Son  maître  Epaphrodite  ,  lui 
ayant  donné ,  dans  un  moment  de  colère, 
un  grand  coup  de  bâton  sur  la  jambe , 


EPI 

Epîctète  lui  répondit  froidement  :  Si  vous 
frappez  ainsi,  vous  la  romprez.  Cette 
réponse,  d'une  philosophie  déplacée,  ir- 
rita d'avantage  Epapbrodite,  qui  le  frap- 
pant plus  rudement ,  lui  rompit  en  effet 
la  jambe;  mais  lui,  sans  s'émouvoir ,  lui 
répliqua:  Nevous  l'avais-jepas  dit  que 
vous  me  la  rompriez  ?  L'épicurien  Celse, 
qui  trouve  dans  cette  disposition  d'esprit 
quelque  chose  de  sublime  (quoiqu'elle  ne 
soit  qu'une  grandeur  d'âme  fausse  et  ap- 
parente ,  un  dépit  secret  et  malicieux , 
exprimé  de  façon  à  attiser  la  colère  de 
celui  qu'on  voulait  morguer  par  cette 
froideur  factice),  demande  si  le  Dieu  des 
chrétiens  a  jamais  dit  des  choses  aussi 
belles  ?  Origène  répond  à  cela  d'une  ma- 
nière non  moins  solide  qu'ingénieuse: 
Notre  Dieu,  dit-il,  n'a  prononcé  aucune 
parole  ;  ce  qui  est  bien  plus  merveilleux 
et  bien  plus  estimable  que  ce  qu'a  dit 
Epictète ,  qui  par  le  silence  aurait  con- 
servé sa  jambe.  Le  suicide  ,  suivant  les 
principes  de  cephilosophe,  est  une  vertu; 
aussi  Caton  est  un  de  ses  plus  grands  hé- 
ros. Wolf  a  eu  raison  de  condamner  la 
lecture  de  cet  auteur,  qui  inspire  un  cer- 
tain stoïcisme  propre  à  rendre  l'homme 
insensible  envers  le  prochain ,  et  inflexi- 
ble à  ses  prières  .  Le  célèbre  J.  B.  Rous- 
seau n'en  a  pas  parlé  d'une  manière  plus 
favorable  : 

En  Tain  ,  d'un  ton  de  rhéteur, 

Epictète  à  ton  lecteur 

Prêche  le  bonheur  suprême; 

J'y  trouve  un  consolateur 

Plus  affligé  que  moi-même* 

Dans  son  flegme  simulé 

Je  découvre  sa  colère: 

J'}'  vois  un  homme  arcabli 

Sous  le  poids  de  sa  misérr  ; 

Et  dans  tous  ces  beaux  discouri, 

Fabriqués  durant  le  cours 

De  sa  fortune  maudite. 

Vous  recennaisseï  toujours 

L'Esclave  d'Epaplirodile. 

Hais  je  vois  déjà  d'ici 

Frémir  tout  le  xénonisme, 

D'entendre  traiter  ainsi 

Gn  des  saints  du  paganisme  : 

Pardon.  Mais  en  vérité , 

Mon  Apollon  révolté 

Lui  devait  ce  témoignage . 

Pour  l'ennui  que  m'a  coûté 

SoD  insupportable  ouvrage. 

Les  meilleures  éditions  d'Epictèlc  sont 
celles  de  Leyde,  1670,  in-24  et  in-8,  cum 


EPI  83 

notis  variorum;  d'Utrecht,  1711  ,  in-4  ; 
de  Londres,  1739,  et  1741,  en  2  vol. 
in-4.  Le  Père  Mourgues  ,  l'abbé  de  Belle- 
garde  ,  Dacier ,  Lefebvre  de  Villebrune  , 
Naigeon,  Debure  saint  Fauxbin  (1784, 
2  vol  in-18)  et  plusieurs  autres  écrivains, 
en  ont  donné  des  traductions  françaises. 
Voyez  Mourgues.  "Le  Manuel  d^ Epictète 
a  aussi  été  trad.  en  allemand,  en  espagnol, 
en  portugais,  en  anglais ,  en  italien ,  etc. 
EPICURE  naquit  à  Gargetium  dans 
l'Attique,  l'an  342  avant  J.  C. ,  de  parens 
obscurs.  La  mère  du  philosophe  était  une 
de  ces  femmes  qui  couraient  les  maisons 
pour  exorciser  les  lutins.  Son  fils,  destiné 
à  être  le  chef  d'une  secte  de  philosophie, 
la  secondait  dans  ses  fonctions  supersti- 
tieuses. Cependant ,  dès  l'âge  de  1 2  à  13 
ans ,  il  eut  du  goût  pour  le  raisonnement. 
Le  grammairien  qui  l'instruisait,  lui  ayant 
récité  ce  vers  d'Hésiode  :  Le  chaos  fut 
produit  le  premier  de  tous  les  êtres.  — 
Eh!  qui  le  produisit ,  lui  demanda  Epi- 
cure  ,  puisqu'il  était  le  premier  ?  —  Je 
n'en  sais  rien ,  dit  le  grammairien  ,  il  n'y 
a  que  les  philosophes  qui  le  sachent.  — 
Je  vais  donc  chez  eux  pour  m' instruire , 
repartit  l'enfant,  et  des  lors  il  cultiva  la 
philosophie;  mais  il  n'y  trouva  jamais 
les  éclaircissemens  qu'il  y  cherchait  ;  il  se 
perdit  au  contraire  dans  toutes  les  absur- 
dités du  matérialisme,  dans  l'extravagant 
système  des  atomes  et  du  hasard  imaginé 
par  Leucippe  et  Démocrite.  Après  avoir 
parcouru  différens  pays ,  Epicure  se  fixa  à 
Athènes.  Il  érigea  une  école  dans  un  beau 
jardin ,  oîi  il  philosophait  avec  ses  amis 
et  ses  disciples.  On  venait  à  lui  de  toutes 
les  villes  de  l'Asie  et  de  la  Grèce.  Sa  doc- 
trine était  que,  le  bonheur  de  l'homme 
est  dans  la  volupté;  et  l'on  conçoit  assez 
qu'une  telle  doctrine  attire  les  auditeurs 
et  multiplie  les  disciples.  Il  est  bien  vrai 
que  quelques  critiques ,  et  la  plupart  des 
beaux-esprits  modernes,  prétendent  justi- 
fier Epicure  ,  et  donner  au  mot  volupté^ 
un  sens  qu'il  n'eut  jamais  ;  mais  les  vrais 
sa  vans  ont  toujours  regardé  cette  justifi- 
cation comme  une  chimère,  et  comme 
un  vain  sophisme  accrédité  chez  des  hom- 
mes intéressés  à  ne  point  avouer  l'infamie 
de  leur  maître.  On  convient  qu'Epicure  a 


84  EPI 

parlé  beaucoup  de  vertu  ;  mais  sa  vertu, 
c'est  la  volupté  :  et  en  cela  il  est  très 
raisonnable  et  très  conséquent  dans  ses 
principes.  Tout  ce  qui  fait  la  matière 
d'une  jouissance  agréable ,  est  matière  de 
vertu  dans  le  système  de  l'athée  ;  la  rai- 
son en  persuade  et  en  autorise  l'acquisi- 
tion ;  ce  serait  folie ,  indififérence  stupide, 
haine  insensée  de  soi-même,  de  s'y  refu- 
ser. Le  cardinal  de  Polignac  en  réfutant 
Lucrèce  ,  le  plus  élégant  interprète  de  la 
doctrine  Epicurienne,  a  mis  au  grand  jour 
la  nature  de  cette  vertu  prétendue  ;  il 
est  surprenant  qu'on  y  revienne  encore 
sans  répondre  à  ses  raisons.  Citera-t-on 
toujours  ce  passage  de  Cicéron  :  Ne- 
gat  Epicurus  jucundè  posse  vivi,  nisi 
cuTîi  virtute  vivatur ,  et  n'njoutera-t-on 
jamais  le  reste  :  nec  cum  virtute  nisi  ju- 
cundè ?  Cicéron  donne  à  toute  la  terre  le 
défi  de  pouvoir  ne  pas  entendre  par  vo- 
lupté épicurienne  la  volupté  des  sens  (Z>e 
Finib.  l.  Z  ,  n.  46  ).  Ceux  qui  entendent 
le  plaisir  de  l'âme  n'ont  pas  lu  les  pre- 
miers vers  de  Lucrèce,  disciple  et  inter- 
prète d'Epicure  : 

^Dcaduni  genitrix,  divumque  tiominumque  Toluptaa. 

Est-ce  que  Vénus  présidait  aux  plaisirs  de 
l'esprit  ?  «  Quoi ,  disait  Cicéron ,  je  ne 
j)  sais  point  ce  que  c'est  que  jjiÎoç  en  grec, 
3j  et  voluptas  en  latin?  Quiconque  veut 
»  être  épicurien,  l'est  en  deux  jours;  et 
))  je  serai  le  seul  qui  ne  pourrai  y  rien 
j>  comprendre  !  Vous  dites  vous-même 
»  qu'il  ne  faut  point  de  lettres  pour  de- 
•»  venir  philosophe  (  il  parle  à  un  épicu- 
V  rien  )  ;  en  vérité  quoique  je  sois  natu- 
ï)  rellement  assez  modéré  dans  la  dispute, 
))  je  l'avoue ,  j'ai  peine  à  me  contenir.  » 
En  effet ,  pourquoi  Cicéron  n'aurait-il  pas 
compris  ce  que  les  épicuriens,  la  plu- 
part fort  bornés  et  incapables  d'entrer 
dans  des  discussions  fines ,  comprenaient 
dès  le  premier  mot? Epicure  parle  d'une 
volupté  dont  tout  animal  en  naissant  a 
la  connaissance  par  le  sentiment  seul. 
«  Pourquoi  tergiverser,  dit  encore  Cicé- 
w  ron  en  apostrophant  ce  philosophe , 
»  sont-ce  vos  paroles  ou  non  ?  voici,  voici 
>)  ce  que  vous  dites  dans  le  livre  qui  con- 
»  tient  votre  doctrine  sur  eelte  matière  : 


EPI 

»  Je  déclare,  dites-vous,  que  je  ne  recon- 
»  nais  aucun  autre  bien  que  celui  que  ton 
n  goûte  par  les  saveurs  et  par  les  sons 
»  agréables,  par  la  beauté  des  objets 
»  sur  lesquels  tombent  nos  regards,  et  par 
M  les  impressions  sensibles  que  îhomme 
»  reçoit  dans  toute  sa  personne  ;  et  afin 
i>  qu'on  ne  dise  pas  que  c'est  la  joie  de 
»  rame  qui  constitue  ce  bonheur,  je  dé- 
»  clare  que  je  ne  conçois  de  joie  dans 
j)  l'âme  que  quand  elle  voit  arriver  ces 
»  biens  dont  je  viens  de  parler ,  etc.  Est- 
D  ce  que  je  mens?  est-ce  que  j'invente  ? 
»  Qu'on  me  réfute;  je  ne  demande,  je 
M  ne  cherche  en  tout  que  la  vérité.  » 
Après  tout,  si  les  épicuriens  entendaient 
par  le  mot  de  volupté,  autre  chose  que 
ce  qu'on  entend  ordinairement ,  ils  n'é- 
taient guère  habiles  d'aller  employer, 
dans  un  pays  où  ils  avaient  tant  de  ri- 
vaux et  d'ennemis ,  une  expression  dont  le 
sens,  au  moins  équivoque,  pouvait  don- 
ner prise  à  la  calomnie.  «  Qui  les  obli- 
»  geait ,  s'ils  avaient  des  idées  pures  et 
»  exemptes  de  tout  reproche,  de  présen- 
»  ter  la  vertusous  l'habit  d'une  courtisane 
w  décriée  ?  »  Quid  enim  necesse  tanquam 
merctricem  in  matronarum  cœtuni,  sic 
voluptalem  in  virtutum  concilium  abdu- 
cere  ?  invidiosum  nomen  est  et  infamiœ 
subjectum...  Les  moeurs  d'Epicure  étaient 
parfaitement  conformes  à  sa  doctrine  ;  il 
a  vécu  en  digne  chef  de  celte  classe 
d'hommes  qu'Horace  appelle  Epicuri  de 
grege  porcos.  Voltaire  et  les  encyclopé- 
distes veulent  absolument  qu'Epicure  ait  ; 
été  un  homme  de  bien.  Ceux-ci  disent 
»  qu'il  reçut  dans  ses  jardins  plusieurs 
»  femmes  célèbres.  Léontine,  maîtresse  •^ 
»  de  Métrodure  ;  Philénide ,  une  des  plus 
»  honnêtes  femmes  d'Athènes  :  Nécidie  » 
w  Hérotie ,  Hédie ,  Marmarie ,  Boidie , 
»  Phédrie.  »  Or,  toutes  ces  femmes  célè- 
bres eï  honnêtes  étaient  des  femmes  per- 
dues de  réputation ,  suivant  Diogène 
Laërce  et  les  anciens  écrivains.  Il  faut 
compter  extrêmement  sur  l'ignorance  de 
ses  lecteurs ,  pour  leur  présenter  Philé- 
nide ou  Philénis  ,  pour  une  des  plus  hon- 
nêtes femmes  d' Athènes  ;  il  ne  reste  plus 
qu'à  leur  faire  croire  que  Messaline  était 
une  des  plus  honnêtes  femmes  de  Rome. 


I 


EPI 

rhiléiiis  ëtait  plus  coupable  que  Messa- 
line  :  non  contente  d'avoir  corrompu  la 
jeunesse  de  son  temps,  elle  voulut  en- 
core corrompre  la  jeunesse  des  siècles 
futurs ,  par  un  livre  abominable  qu'elle 
composa  (  voy.  les  Adages  de  Junius  sur 
ces  mots  :  Pliilaidinis  commentarii,  et 
la  remarque  P  de  l'art.  Hélène  dans  le 
Dict.  de  Bayle);  On  ne  peut  lire  saint 
Clément  d^Alexandrie,  Lucien,  Martial, 
Athénée,  Suidas,  Giraldi ,  etc.,  sans 
avoir  le  nom  de  Philénis  en  exécration. 
Si  MM.  les  encyclopédistes  avaient  seu- 
lement ouvert  les  Dictionnaires  de  Gould- 
man  ,  d'Etienne ,  d'Hofïman ,  etc. ,  ils  au- 
raient trouvé  le  nom  de  Philénis  suivi 
d'une  épithète  infâme  ;  et  Diogène  Laërce 
donne  la  même  épithète  à  Nécidie,  à  Hé- 
rotie  ,  et  aux  autres  compagnes  de  Phi- 
lénis. Epicure  était  aussi  débauché  que 
les  femmes  qu'il  fréquentait.  «  Quand 
»  je  le  voudrais,  dit  Plutarque ,  il  me  se- 
»  rait  impossible  de  passer  par -dessus 
«  et  l'impudence  et  l'impertinence  de 
»  cet  homme  ,  dont  les  appétits  volup- 
»  tueux  requéraient  des  viandes  ex- 
»  quises ,  des  vins  délicieux ,  des  sen- 
))  teurs  délicates,  et  par -dessus  tout 
j>  cela  encore,  de  jeunes  femmes  ,  comme 
»  une  Léontium ,  une  Boidion  ,  une 
»  Hédia,  une  Nicédion,  qu'il  entrete- 
M  nait  et  nourrissait.  »  On  n'ose  rap- 
porter ce  qu'ajoute  Plutarque  des  affreux 
débordemens  d'Epicure  avec  son  fami- 
lier Poliénus  et  une  courtisane  native  de 
la  ville  de  Cysique  {voyez  Plutarque  dans 
le  traité  ,  Qu'on  ne  peut  vivre  joyeuse- 
ment selon  Epicure ,  traduit  par  Amyot, 
et  l'article  Léontium  du  Dictionnaire  de 
Bayle).  Epicure  mourut  â  l'âge  de  72  ans, 
l'an  270  avant  J.  C. ,  d'une  rétention  d'u- 
rine ,  ou  plutôt  d'un  accident  occasioné 
par  de  longues  et  d'effrénées  débauches. 
Gassendi  a  fait  l'apologie  de  sa  morale 
spéculative  et  de  sa  morale  pratique , 
dans  un  Recueil  sur  sa  vie  et  ses  écrits , 
la  Haye,  1656  ,  in-8.  M.  l'abbé  Batteux  l'a 
bien  réfuté  dans  sa  Morale  (VEpicure 
tirée  de  ses  propres  écrits^  in-4  ,  17 58. 
Comberland  et  Fabricius  ont  aussi  rendu 
k  ce  patriarche  des  impies  et  des  libertins, 
toute  la  justice  qu'il  mérite. 


EPI  85 

EPIMÉNIDES  de  Gnosse,  dans  la 
Crète ,  passe  pour  le  7*  sage  de  la  Grèce 
dans  l'esprit  de  ceux  qui  ne  mettent  pas 
Périandre  de  ce  nombre.  Il  cultiva  à  la 
fois  la  poésie  et  la  philosophie.  Il  faisait 
accroire  au  peuple  qu'il  était  en  com- 
mère avec  les  dieux.  On  l'appela  à  Athè- 
nes pour  conjurer  la  peste ,  qu'il  chassa 
avec  des  eaux  lustrales ,  selon  les  uns  ; 
et  selon  d'autres  avec  des  eaux  tirées  de» 
simples  ;  ou  plutôt  qu'il  ne  chassa  d'au- 
cune façon,  à  ce  que  pensent  les  gens 
qui  apprécient  le  mieux  les  merveilles  de 
l'antiquité.  (On  assure  qu'il  réunit  un 
troupeau  de  moutons  auquel  il  donna  la 
liberté  :  mais  des  prêtres  devaient  les  sui- 
vre et  les  immoler  dans  le  lieu  oii  chacun 
de  ces  animaux  s'arrêterait  :  là  on  élevait 
un  autel  au  Dieu  de  l'endroit ,  et  comme 
il  arriva  que  l'on  ne  connaissait  pas  tou- 
jours cette  divinité,  le  sacrificateur  fit 
mettre  sur  la  pierre  Deo  ignoto.  On  dit 
que  c'est  une  de  ces  pierres  à  laquelle  fit 
allusion  S.  Paul  en  passant  à  Athènes.)  On 
dit  aussi  qu'Epiménidcs  s'endormit  27  ans 
dans  une  caverne ,  et  qu'après  en  être 
sorti ,  il  ne  fut  reconnu  de  personne  et  ne 
reconnaissait  plus  lui-même  personne. 
De  retour  en  Crète ,  il  composa  plusieurs 
ouvrages  en  vers ,  et  mourut  dans  un 
âge  fort  avancé ,  vers  l'an  598  avant 
J.  C.  S.  Paul ,  dans  son  épître  à  Tite , 
a  cité  le  vers  où  ce  poète  fait  des  Cretois , 
ses  compatriotes,  ce  portrait  peu  flat- 
teur :  Cretenses  semper  mendaces ,  ma- 
Ice  b^tiœ ,  ventres  pigri.  —  Diogène 
Laërce  parle  de  trois  autres  Epiménides  , 
dont  l'un  composa  l'Histoire  de  Rhodes 
en  langue  dorique. 

*EPINAY  (M""  Louise-Florence-Pé- 
tronille  de  la  Live  d'  )  ,  est  plus  connue 
par  ses  liaisons  avec  J.  J.  Rousseau , 
Grimm,  l'abbé  Galiani ,  etc.  que  par  ses 
propres  écrits.  On  lui  doit  cependant  un 
ouvrage  estimable,  qu'elle  composa  dans 
les  dernières  années  de  sa  vie ,  pour  sa 
pelite-fille ,  M"^  de  Belzunce  (depuis  M""® 
de  Breuil).  Ce  livre,  intitulé  k-s  Con- 
versations d' Emilie  ,  2  volumes  in-12,  a 
été  très  souvent  réimprimé,  et  fut  cou- 
ronné par  l'académie  française  en  17  83  , 
comme  le  meilleur  ouvrage  qui  ait  paru 


86  EPI 

dans  celte  année.  En  effet ,  il  est  écrit 
dans  un  excellent  esprit  ;  les  principes  y 
sont  présentés  d'une  manière  nette  et 
simple ,  et  il  renferme  tout  ce  qu'il  est 
utile  d'enseigner  en  morale  à  un  enfant 
jusqu'à  12  ans.  On  y /roMfe,  dit  Laharpe, 
des  mots  fins  et  naïfs ,  et  des  choses  at- 
tendrissantes. M"*  d'Epinay  était  née  à 
Paris  vers  1725;  elle  épousa  vers  17501e 
fermier  général  dont  elle  porte  le  nom. 
Ce  fut  quelques  années  après  ce  mariage 
qu'elle  connut  le  philosophe  de  Genève 
et  fit  bâtir  pour  lui  près  de  Montmorency 
la  petite  maison  connue  sous  le  nom  de 
l'Ermitage  et  qui  est  devenue  depuis  la 
propriété  de  Grétry.  Elle  mourut  au  mois 
d'avril  1783.  On  a  publié,  long-lemps 
après  sa  mort.  Mémoire  et  correspon-. 
dance  de  madame  d'Epinay,  3  vol.  in-S, 
Ces  mémoires,  destinés  à  détruire  les  fâ- 
cheuses impressions  données  par  Rousseau 
dans  la  seconde  partie  de  ses  Confessions 
contre  cette  dame,  ne  la  justifient  guère. 
La  correspondance  adressée  à  Grimm , 
Duclos,  J.  J.  Rousseau,  Saint-Lambert, 
Diderot,  ne  donne  pas  une  meilleure 
idée  de  ses  principes.  Mais  l'ouvrage 
qui  lui  fait  le  plus  de  tort,  est  la  Cor- 
respondance de  l'abbé  Galiani  avec 
madame  d'Epinay ,  publiée  en  1 8 1 8  en 
2  vol  in-8.  Cette  correspondance  est 
non-seulement  répréhensible  sous  le  rap- 
port delà  religion,  mais  elle  révolte  par 
le  cynisme  de  l'auteur.  Il  est  poussé  à 
un  point  qui  indigne  en  même  temps 
qu'il  dégoûte.  On  a  peine  à  concevoir 
comment  un  ecclésiastique  pouvait  se 
permettre  im  pareil  ton,  et  comment 
une  femme  pouvait  le  souffrir.  Quelle 
idée  doit-on  se  former  d'une  société  où 
l'on  n'observait  pas  même  les  règles  de 
la  décence  la  plus  commune,  et  où  le 
langage  le  plus  grossier  était  devenu  fa- 
milier et  habituel.  Il  est  donc  vrai  qu'on 
avait  secoué  toute  sorte  de  frein  dans  ces 
coteries  philosophiques,  et  qu'on  y  af- 
fichait le  mépris  de  la  pudeur  comme  de 
la  religion.  Les  mémoiresdeM™*  d'Epinay 
ont  donné  lieu  à  la  publication  des  pièces 
suivantes  :  Anecdotes  ine'dites pour  faire 
suite  aux  mémoires  de  iVi™*  d!Epinay, 
précédées  de  V examen  de  ces  mémoires  , 


EPI 

par  M.  Musset-Pathay,  1818  ,  in-8  :  Co/t- 
séquences  immédiates  des  révélations 
privées  de  M"^  Lalive  Epinay ,  1818, 
in-8,  etc.  On  doit  encore  à  M""*  d'Epinay 
deux  vol.  assez  rares,  publiés  à  Genève  sans 
nom  d'auteur  sous  le  titre  de  Lettres  à 
mon  fils,  1758,  1759,  in-8  et  in-12  et 
de  Mes  Momens  heureux,  1752  in-12. 

EPINE.  Foyez  Spina  (Jean). 

EPIPHANE,  fils  de  Carpocrate,  héré- 
tique comme  son  père,  fut  instruit  dans 
la  philosophie  platonicienne  ,  et  crut  y 
trouver  des  principes  propres  à  appuyer 
ses  erreurs.  Il  supposait  un  principe  éter- 
nel, infini,  et  alliait  avec  ce  principe  fon- 
damental, le  système  de  Valentin.  Selon 
lui,  comme  selon  nos  régénérateurs  mo- 
dernes qui  ont  changé  le  plus  beau  royau- 
me en  des  monceaux  de  ruine ,  ce  sont 
l'ignorance  et  la  passion,  qui,  en  rompant 
l'égalité  et  la  communauté  des  biens,  ont 
introduit  le  mal  dans  le  monde  ;  les  idée» 
de  propriété  exclusive  n'entrent  point 
dans  le  plan  de  l'intelligence  suprême  ; 
elles  sont  l'ouvrage  des  hommes.  Il  con- 
cluait de  là  qu'il  fallait  supprimer  les  lois 
et  rétablir  l'état  d'égalité  ;  il  concluait 
encore  que  la  communauté  des  femmes 
était  le  rétablissement  de  l'ordre,  comme 
la  communauté  des  fruits  de  la  terre.  Il 
est  surprenant  que  nos  preneurs  de  l'é- 
galité des  droits  de  ITiomme  ne  l'aient  pas 
encore  étendue  jusque-là.  Par  bonheur 
pour  ses  contemporains,  cet  Epiphane 
mourut  à  l'âge  de  17  ans,  vers  le  com- 
mencement du  3«  siècle.  Sa  doctrine  avait 
tellement  plu  au  peuple,  qu'il  le  révéra 
comme  un  dieu.  On  lui  consacra  un  tem- 
ple à  Samé,  ville  de  Céphalonie  ;  et  l'on 
érigea  une  aca<îémie  pour  perpétuer  sa 
doctrine. 

EPIPHANE  (Saint  ) ,  évêque  de  Sala- 
mine  et  Père  de  l'Eglise,  naquit  dans  le 
village  de  Bessenduc  en  Palestine,  vers 
l'an  320.  Dès  sa  plus  tendre  jeunesse  il  se 
retira  dans  les  déserts  de  sa  province,  et 
fut  le  témoin  et  l'imitateur  des  vertus  des 
saints  solitaires  qui  les  habitaient.  A  20 
ans  il  fonda  un  monastère,  et  eut  un  grand 
nombre  de  moines  sous  sa  conduite.  Il 
s'appliqua  dans  sa  solitude  à  l'étude  des 
écrivains  sacrés  et  profanes.  Elevé  à  la 


EPI 

prêtvise ,  il  le  fiit  bientôt  à  l'ëpiscopat  en 
36G  ,  par  les  vœux  unanimes  du  clergé  et 
du  peuple  de  Salamine  ;  métropole  de 
l'île  de  Chypre.  Le  schisme  d'Antioche 
rayant  appelé  à  Rome ,  il  logea  chez  l'il- 
lustre veuve  Paule.  De  retour  dans  son 
diocèse  ,  il  instruisit  son  peuple  par  ses 
sermons ,  et  l'édifia  par  ses  austérités.  Il 
le  préserva  de  toutes  les  hérésies,  et  sur- 
tout de  celles  d'Arius  et  d'Apollinaire. 
Epiphane  ne  fut  pas  moins  opposé  à  Ori- 
gène  qu'il  croyait  coupable  des  erreurs 
qu'on  rencontre  dans  ses  écrits.  Il  les  ana- 
thématisa  dans  un  concile  en  401 ,  et  se 
joignit  à  Théodorel,  pour  engager  saint 
Jean-Chrysostôme  à  souscrire  à  cette  con- 
damnation. Le  saint  patriarche  l'ayant 
refusé,  Epiphane  vint  en  403  à  Constan- 
tinople,  à  la  persuasion  de  Théophile  d'A- 
lexandrie, pour  y  faire  exécuter  le  décret 
de  son  concile.  Cette  démarche  était  im- 
prudente ;  celle  d'ordonner  un  prêtre  à 
Jérusalem  sans  le  consentement  de  Jean, 
patriarche  de  cette  ville  ,  ne  l'est  peut- 
être  pas  moins.  Le  patriarche  s'en  plai- 
gnit amèrement,  et  saint  Epiphane  s'en 
excusa  sur  la  nécessité  des  circonstances, 
et  sur  le  consentement  présumé  de  Jean, 
sur  ce  qu'il  avait  ignoré  la  défense  que 
Jean  avait  faite  ;  enfin  sur  ce  que  le  mo- 
nastère oii  il  avait  fait  l'ordination,  n'é- 
tait point  de  la  juridiction  de  l'évêque  de 
Jérusalem  {voyez  le  tom.  2  des  OEuvres 
de  saint  Epiphane,  p.  312,  édition  de  Pa- 
ris 1622).  Il  ordonna  aussi  un  diacre  à 
Constantinople  sans  le  consentement  de 
saint  Chrysostôme.  Le  pape  Urbain  II 
l'excuse  en  ces  termes  en  écrivant  à  Hu- 
gues, archevêque  de  Lyon  :  Lcgimus 
sanctum  Epiphaniuni  episcopum,  ex 
diœcesiS.  Jo.  Chrysostomi  quosdam  cle- 
ricoi  ordinasse,  quod  sanctusviromninb 
non  ftcissel,  si  ei  detrimentum  fore  per- 
penderet.  Il  l'excuse  aussi  sur  sa  bonne  foi, 
et  sur  l'utilité  de  cette  ordination.  Saint 
Epiphane  mourut  en  retournant  de  Con- 
stantinople à  l'île  de  Chypre,  en  403,  âgé 
d'environ  80  ans,  regardé  comme  un  évê- 
quc  charitable,  zélé,  pieux;  mais  peu  poli- 
tique, et  se  laissant  quelquefois  emporter 
trop  loin  par  son  zèle.  De  tous  les  ou- 
vrages qui  nous  restent  de  ce  Père ,  les 


EPI  87 

plus  connus  sont  l^Son  Panarium,  c'est- 
à-dire  V  Armoire  aux  remèdes.  C'est  une 
exposition  des  vérités  principales  de  la 
religion,  et  une  réfutation  des  erreurs 
qu'on  y  a  opposées.  2"  Son  Anchora , 
ainsi  appelé,  parce  qu'il  le  compare  à 
l'ancre  d'un  vaisseau,  et  qu'il  le  composa 
pour  fixer  la  foi  des  fidèles  cl  les  affermir 
dans  la  saine  doctrine.  3°  Son  Traité  des 
poids  et  des  mesures,  plein  d'une  pro- 
fonde érudition.  4°  Son  livre  des  Douzes 
pierres  précieuses,  qui  étaient  sur  le  l'a- 
tional  du  grand-prêtre,  ouvrage  savant, 
traduit  en  latin,  Rome,  1743,  in-4,  par  les 
soins  et  avec  les  notes  de  François Fogini. 
Tous  ces  écrits  décèlent  une  vaste  lec- 
ture ;  mais  saint  Epiphane  ne  la  puisait 
pas  toujours  dans  les  bonnes  sources.  Il 
se  trompe  souvent  sur  des  faits  histori- 
ques importans  ;  il  adopte  des  fables  et 
des  bruits  incertains.  Son  stile,  loin  d'a- 
voir l'élévation  et  la  beauté  de  celui  des 
autres  Pères  grecs  ,  des  Chrysostôme  , 
des  Basile,  est  dur,  négligé,  obscur,  sans 
suite  et  sans  liaison.  Saint  Epiphane  était 
un  compilateur  plutôt  qu'un  écrivain  ; 
mais  la  postérité  ne  lui  doit  pas  moins  de 
reconnais.sance.  Sans  lui,  nous  n'aurions 
aucune  idée  de  plusieurs  auteurs  profanes 
et  ecclésiastiques,  dont  il  nous  a  transmis 
des  fragmens.  La  meilleure  édition  des 
œuvres  àe  ce  Père  est  celle  du  Père  Pétau, 
en  grec  et  en  latin,  1622,  avec  de  sa- 
vantes notes,  en  2  vol.  in-folio.  (  Ployez  la 
bibliothèque  choisie  des  Pères  de  l'église 
grecque  et  latine  par  M.  l'abbé  Guillon  oi» 
l'on  trouve  une  excellente  analyse  de  ses 
ouvrages.) 

EPIPHANE,  patriarche  de  Constanti- 
nople en  520 ,  prit  avec  zèle  la  défense 
du  concile  de  Chalcédoine  et  de  la  condam- 
nation d'Eutichès.  Le  pape  Hormidas  lui 
donna  pouvoir  de  recevoir  en  son  nom 
tous  les  évêques  qui  voudraient  se  réunir 
à  l'église  romaine,  à  condition  qu'ils  sous- 
criraient à  la /br/wMZe  qu'il  avait  dressée. 
Il  mourut  en  635,  avec  la  réputation  d'un 
bon  évêquc. 

EPIPHANE  le  Scholastique,  ami  du 
célèbre  Cassiodore,  traduisit,  à  sa  prière, 
les  Histoires  ecclésiastiques  de  Socrate, 
de  Sozomène,  de  Théodoret.  C'est  sur 


88  EPI 

cette  version ,  plus  fidèle  qu'ëléffanle , 
que  Cassiodore  composa  son  Histoire  tri- 
partite.  On  attribue  à  Epiphaiic  plusieurs 
autres  traductions  de  grec  en  latin.  Il 
florissait  dans  le  G"  siècle. 

EPIPHANE,  moine  et  prêtre  de  Jéru- 
salem, qu'Anselme  Banduri  croit  être  le 
même  que  Polveucte,  patriarche  de  Con- 
stantinople  en  956,mortlel6  janvier  970, 
nous  alaissét" De Syriâ  et  UrbeSanctâ, 
en  grec  et  en  latin,  inséré  dans  5/mou'cf« 
d'Allatius,  lib.  1 .  2°  Fitœ  B.  Mariœ  Vir- 
ginis  et  sancti  Andreœ  apostoli ,  dont  Al- 
latius  fait  mention  dans  sa  diatribe  de 
Simeonum  scriptis,  pag.  lOG. 

*  EPIPHANE  (Le  Père),  religieux  ca- 
pucin ,  né  au  commencement  du  17* 
siècle  à  Moirans,  près  de  Saint-Claude , 
en  Francbe-Comté,  fut  envoyé  par  ses  su- 
périeurs aux  Indes,  pour  y  travailler  dans 
les  missions  desservies  par  les  Pères  de 
cet  ordre.  Plein  de  zèle  et  d'ardeur  pour 
la  propagation  de  la  foi ,  il  y  prêcha  l'E- 
vangile avec  fruit.  On  sait  qu'il  existait 
encore  en  1685  ;  mais  on  ignore  l'époque 
de  sa  mort.  Il  a  laissé  divers  écrits  sur  la 
théologie  et  les  controverses.  Ceux  qu'on 
connaît  le  plus  sont  1°  une  Explication 
littérale  de  V Apocalypse,  et  la  Clef  du 
même  livre  ;  2°  les  Annales  historiques 
de  la  mission  des  pères  capucins  dans  la 
Nouvelle-Andalousie  ,  5"  Ars  memorice 
admirabilis,  omnium  nescientium  cxce- 
dens  captum,  etc. 

EPISCOPIUS  (Simon) ,  dont  le  nom 
de  famille  est  Bischop ,  évêque  ,  né  à  Am- 
sterdam en  1583,  professeur  en  théologie 
à  Leyde  en  IGl 3,  se  fit  beaucoup  d'enne- 
mis ,  pour  avoir  pris  le  parti  des  armi- 
niens contre  les  gomaristes.  Ces  deux 
sectes,  toutes  deux  enthousiastes  et  fac- 
tieuses, divisaient  alors  la  Hollande.  Epi- 
scopius plaida  pour  la  première.  Il  fut  in- 
sulté en  public  et  en  particulier  ,  et  in- 
sulta à  son  tour.  Les  états  de  Hollande 
l'ayant  invité  de  se  trouver  au  synode 
de  Dordrecht,  il  rie  put  y  être  admis  que 
comme  homme  de  parti  cité  à  comparaî- 
tre, et  non  pas  comme  juge  appelé  pour 
donner  des  décisions.  Le  synode  le  chassa 
de  ses  assemblées,  le  déposa  du  minis- 
tère, et  le  bannit  des  terres  de  la  repu- 


EPP 

blique  :  décision  injuste  et  absurde  de 
la  part  de  gens  qui  ne  reconnaissaient 
point  de  juges  en  matière  de  doctrine, 
et  qui  s'arrogeaient  en  même  temps  une 
infaillibilité  qu'ils  refusent  à  l'Eglise  uni- 
verselle {voyez  Arminius,  GoMAR,  VoRS- 
Tius).  Il  se  retira  à  Anvers,  oîi  ne  trou- 
vant pas  de  gomaristes  à  combattre,  il  s'a- 
musa à  disputer  avec  les  jésuites.  Son  exil 
dura  quelquetenrps;  mais  enfin,  l'an  1G2C, 
il  revint  en  Hollande,  pour  être  ministre 
des  remontrons  à  Roterdam .  Huit  ans  après 
il  fut  appelé  à  Amsterdam  ,  pour  veiller 
sur  le  collège  que  ceux  de  sa  secte  venaient 
d'y  ériger.Il  y  mourut  en  1643,  d'une  ré- 
tention d'urine,  après  avoir  professé  pu- 
bliquement la  tolérance  de  toutes  les  sec- 
tes qui  reconnaissent  l'autorité  de  l'Ecri- 
ture sainte,  de  quelque  manière  qu'elles 
l'expliquent.  C'était  ouvrir  la  porte  à  tou- 
tes les  erreurs.  Cet  opinion  l'avait  fait  ' 
soupçonner  de  socinianisme,  et  il  n'avait 
pas  détruit  ces  soupçons  en  publiant  ses 
Commentaires  sur  le  nouveau  Testa- 
ment.  L'on  sent  assez  à  travers  ses  équi- 
voques ,  qu'il  pensait  que  Jésus-Christ 
n'était  pas  Dieu.  «  Du  calvinisme  au  so- 
»  cinianisme,  dit  sagement  un  théologien, 
»  il  n'y  a  qu'un  pas  ;  »  et  rarement  même 
on  s'arrête  là  (  voyez  Lentulus.  Ser- 
VET,  etc).  Ses  ouvrages  de  théologie  ont 
été  publiés  à  la  Haye  en  1678,  2  vol.  in- 
fol.  Episcopius  étaitfort  diffus,  maisclair, 
et  très  emporté,  quoique  apôtre  du  tolé- 
ranisme.  Il  y  a  quelquefois  plus  de  sul>- 
tilités  que  de  solidité  dans  ses  raisonne-' 
mens.  La  vie  de  ce  sectaire  est  à  la  tête 
de  ses  œuvres,  publiées  par  Courcelles  ; 
Philippe  de  Limborch  l'a  aussi  écrite  en 
1702,  in-8. 

EPONINE.  Voyez  Sabiisus. 

■^EPPEINDORF  (Henri  d'),  gentil- 
homme allemand,  né  à  Eppendorf,  bourg 
de  Misnie,  au  commencement  du  16* 
siècle,  fut  un  des  hommes  les  plus  éclai- 
rés de  son  siècle.  Il  eut  des  démêlés  avec 
le  célèbre  Erasme  au  sujet  d'une  lettre 
qui  contenait  des  injures  contr^lui.  Ep-i 
pendorf  l'en  accusa  devant  le  duc  de  Saxe, 
qui  était  son  protecteur  ;  et,  sous  lesaus- 
picçs  de  ce  souverain,  il  publia  un  écrit  ; 
Ad  D.  Erasmi  Roterodand  libellum,  cui\ 


EPR 

titidus  :  Adversus  mendnchtni  cl  nbtrec- 
tationem  utilis  admonitio,  justa  querela, 
Haguenau,  1531,  in-8.  Cet  écrit  fut  réim- 
primé à  Leipsicken  1745.  On  a  aussi  d'Ep- 
pendorf  quelques  traductions  allemandes, 
savoir  :  1°  les  Apophtegmes  de  Plutar- 
quc,  Strasbourg,  1554  ,  in-fol.;  2"  OEu- 
vres  de  Pluiarque,  1551  ;  3°  Abrège  de 
V histoire  romaine  ,  extrait  des  meilleurs 
auteurs,  1 536,  in-fol.  ;  4"  Histoire  natu- 
relle de  Pline,  1543,  in-fol.  ;  h°  Chroni- 
ques suédoise  et  danoise  de  Rrantz,  1545, 
in-fol.  Il  mourut  vers  l'an  1553,  dans  un 
âge  peu  avancé. 

*  EPRÉMÉNIL  (Jean-Jacques  Duval 
d'  )  était  membre  du  conseil  souverain  de 
cette  colonie,  et  fut  dejmis  président  de 
celui  de  Madras,  pendant  le  peu  de  temps 
que  cette  place  appartint  aux  Français. 
11  était  gendre  du  célèbre  Dupleix ,  gou- 
verneur de  Pondichéry  et  commandeur 
général  des  comptoirs  français  dans  l'Inde. 
Il  se  fit  remarquer  comme  magistrat  et 
comme  militaire,  et  défendit  Madras  avec 
vaillance  contre  le  Nabad  d'Arcale.  Voya- 
geur intrépide,  il  pénétra  sous  l'habit  de 
Bramine  dans  les  pagodes  indiennes  dont 
il  a  décrit  et  défini  les  cérémonies  ;  enfin 
cherchant  dans  les  lettres  la  consolation 
de  la  surdité  dont  il  fut  affligé  pendant 
ses  dernières  années,  il  a  publié  à  son  re- 
tour en  France  un  traité  sur  le  commerce 
du  Nord  et  mourut  en  1765. 

*  ÉPREMÉPslL  (  Jean-Jacques-Duval 
d'),  fils  du  précédent,  né  à  Pondichéry, 
en  17  46,  vint  en  France  en  17  50.  Il  fit  ses 
études,  s'adonna  à  la  jurisprudence,  et 
devint  d'abord  avocat  du  roi  au  Chàtelet. 
Il  commença  sa  réputation  eu  défendant 
avec  énergie  et  succès  devant  le  par- 
lement de  Rouen  en  1781,  contre  M.  de 
Lally-ToUendal,  la  mémoire  de  son  oncle, 
Duval  de  Leyrit ,  gouverneur  de  Pondy- 
chéry,  lorsqu'il  fut  accusé  d'avoir  dénoncé 
injustement  le  général  Lally ,  et  d'avoir 
été  le  principal  auteur  de  son  jugement 
et  de  sa  mort.  Il  acheta  bientôt  après  une 
charge  au  parlement  de  Paris,  où  il  montra 
de  grahds  talens,  une  éloquence  nerveuse 
et  fleurie  en  même  temps,  mais  une  tête 
ardente  et  un  goût  extrême  pour  les  chan- 
gemens  politiques.  Il  fut  cependant  un 


EPR 


8q 


défenseur  entliousiasle  des  privilèges  des 
parlemens,  et  il  prétendait  qu'ils  pou- 
vaient seuls  être  la  sauve-garde  et  l'appui 
de  l'indépendance  de  la  liberté  publique, 
dont  il  se  montra  le  partisan  comme  les 
autres  réformateurs.  Ainsi  en  1781  il  dé- 
nonça'à  l'indignation  publique  Linguet 
qui,  dans  ses  annales ,  avait  attaqué  les 
parlemens  •.  deux  ans  après  il  se  prononça 
coniïe  \^?>  prisons prive'es  ^  où  le  pouvoir 
renfermait  souvent  des  êtres  dangereux 
dont  les  procès  eussent  été  scandaleux  : 
Mesmer  commençait  à  se  faire  connaître, 
il  devintson  disciple  et  établit  chez  lui  un 
baquet  magnétique  qui  y  attira  un  grand 
nombre  de  croyans  et  de  malades.  Son 
imagination  vive  et  romanesque  le  porta 
à  écrire  en  faveur  de  ce  système  ;  aussi 
partagea  - 1  -  il<  le  ridicule  de  ceux  qui  y 
avaient  eu  une  confiance  aveugle.  On  lui 
attribue  la  provocation  de  l'arrêté  parle- 
mentaire qui  demanda  au  roi  la  convoca- 
tion des  Etats-généraux.  Son  opposition 
constante  aux  vues  du  ministère  ,  sa  dé- 
nonciation au  parlement  des  édits  bur- 
saux  préparés  par  le  garde  des  sceaux  La- 
moignon  ,  et  le  ministre  Brienne ,  le  firent 
enlever  du  palais  et  envoyer  en  exil  aux 
îles  Ste. -Marguerite.  Il  devint  alors  le  co- 
ryphée de  tous  les  ennemis  dti  gouverne- 
ment ,  et  l'idole  du  peuple,  qui  le  regarda 
comme  son  plus  intrépide  défenseur.  Il 
s'était  toujours  montré  un  des  frondeurs 
les  plus  déterminés  de  la  cour,  et  sa  criti- 
que était  d'autant  plus  dangereuse,  qu'elle 
paraissait  dirigée  par  un  grand  fonds  de 
probité  ,  et  par  l'amour  du  bien  public. 
La  reine  en  devint  surtout  l'objet.  Il  cri- 
tiquait ses  goûts,  sa  dépense,  à  un  tel 
point,  que  cette  princesse,  instruite  des 
propos  qu'il  tenait  à  son  égard ,  dit  un 
jour  à  sa  marchande  de  mode ,  qui  lui 
présentait  une  coiffure  nouvelle  :  «  Je  la 
»  prendrais  volontiers ,  mais  il  faudrait 
»  auparavant  obtenir  de  M.  dEprémé- 
»  nil  V agrément  de  la  porter.  »  Cepen- 
dant la  bonté  inépuisable  du  roi  lui  per- 
mit de  revenir  à  Paris  :  c'était  lui  ménager 
un  triomphe  :  aussi  sur  sa  route  il  reçut 
des  fêtes  et  des  couronnes ,  et  il  fut  re- 
gardé partout  comme  un  défenseur  et  un 
martyr  de  la  cause  populaire  :  ce  qui  reu- 

6.. 


90  EPR 

dail  son  succès  plus  complet ,  c'<5lait  le 
dtcrcl  qui  venait  d'ordonner  la  convoca- 
tion des  Etats-généraux,  qui  était  deve- 
nue l'objet  des  vœux  de  sa  compagnie.  Il 
y  fut  nommé  député  par  la  noblesse  de 
Paris ,  et  s'y  montra  aussi  ardent  à  défen- 
•Ire  les  principes  de  l'ancienne  monarchie, 
qu'il  avait  manifesté  d'énergie  dans  ses 
attaques  contre  les  ministres.  Cette  con- 
tradiction dans  sa  conduite,  sans  le  récon- 
cilier  avec  ceux  dont  il  avait   humilié 
l'orgueil,  le  rendit  odieux  à  son  parti. 
Reconnu  dans  un  groupe  aux  Tuileries  , 
le  17  juillet  1792  ,  il  en  fut  arraché  avec 
violence ,  et  il  aurait  péri  infailliblement, 
si  une  patrouille  de  garde  nationale,  com- 
mandée par  l'acteur  Micalefj  ne  l'eut  enle- 
vé à  demi-mort  des  mains  de  ses  assassins, 
et  ne  l'eut  conduit  à  la  trésorerie,  puis' 
à  l'abbaye, St. -Germain,  oii  le  maire  Pé- 
tion  le  fit  porter,  et  où  il  reçut  de  lui  ces 
jiaroles  :  «  Comme  vous ,  monsieur ,  je 
X  fus  l'idole  du  peuple.  »  Après  le   10 
août,  ses  amis  l'engagèrent  à  sortir  d'un 
pays  oii  ses  jours  étaient  sans  cesse  en 
danger,  mais  il  s'y  refusa  en  disant  qu'il 
devait  partager  les  périls  d'une  révolu- 
lion  dont  il  avait  été  l'un  des  premiers 
moteurs.  Il  se  retira  cependant  dans  une 
terre  qu'il  avait  à  quelques  lieues  de  Paris, 
'aux  environs  du  Havre ,  où  il  se  flatta  un 
instant  d'être  oublié  ;  mais  la  proscription 
l'atteignit  bientôt.  Il  fut  arrêté ,  traduit 
au  tribunal  révolutionnaire,  et  condamné 
à  mort  avec  Chapelier,  qui  pendant  la 
session  de  l'Assemblée  constituante  avait 
constamment  été  son  antagoniste.  Ils  fu- 
rent conduits  à  l'échafaud  sur  la  même 
charrette,  et  exécutés  le  23  avril  1794. 
En  allant  au  supplice ,  Chapelier  bii  dit  : 
A  qui  de  nous  deux  vont  s'adresser  les 
injures  du  peuple  ?  a  tous  deux ,  répondit 
d'Epréménil  ;  et  en  effet  la  multitude  ac- 
cueillit des  mêmes  succès  ses  deux  anciens 
idoles.  D'Epréménil  était,  dit -on,  bon 
père ,  bon  mari,  excellent  ami,  mais  trop 
prévenu  contre  les  abus,  qu'il  s'exagérait 
et  qu'il  voulait  réformer.  Simple,  crédule, 
confiant ,  il  se  livra  avec  facilite  aux  char- 
latans, aux  imposteurs  de  toute  espèce  , 
et  devint  ensuite  leur  victime.  On  lui 
attribue  les  fameuses  remontrances  du 


EQU 

mois  de  janvier  1788,  qui  produisirent 
un  si  grand  effet  dans  toute  la  France. 
Ses  autres  ouvrages  sont  1°  des  plai- 
doyers; 2°  un  discours  dans  In  cause  des 
magistrats  qui  composent  la  chambre  des 
vacations  du  parlement  de  Bretagne  , 
1700  ,  in-8.  8°  Nullité  et  despotisme  de 
l'assemble'e  prétendue  nationale  ,  in-8. 
4°  Vétat  actuel  de  la  France,  1790, 
in-8.  La  biographie  des  hommes  vivans 
attribue  ces  deux  dernières  brochures  à 
M.  Ferrand,  pair  de  France.  — M™*  d'E- 
préménil (  Augustine  -  Françoise  Sanc- 
TCARi),  partagea  le  sort  de  son  mari  ;  elle 
l'avait  accompagné  en  exil ,  elle  le  suivit 
sur  l'échafaud. 

'  EQUEyiLLEY  (  Jules-César-Suzanne 
Lemercier  baron  d'  ) ,  maréchal-de-camp, 
né  à  Faverncy  près  de  Vesoul,  en  novem- 
bre i7G5,  d'une  famille  de  noblesse  mi- 
litaire j  entra  au  service  en  qualité  de 
cadet    gentilhomme    dans  un   régiment 
d'infanterie    de  marine.  Il  était  lieute- 
nant à  l'époque  de  la  révolution ,  lors- 
qu'il se  rendit  à  l'armée  de  Condé  (1791), 
entra  dans  les  chasseurs-nobles ,  et  passa 
ensuite  dans  les  chevaliers  de  la  cou  ■ 
ronne  avec  le  grade  d'officier.  Licencié 
en  1801 ,  d'Equevilley  fut  pendant  4  ans 
dans  un  repos  qui  convenait  peu  à  son 
caractère.  Fji  1805,  il  prit  du   service 
dans  l'armée  française  avec  le  grade  de 
capitaine   au  régiment   étranger  de  la 
Tour-d'Auvergne ,  en  Calabre.  Aide-de- 
camp  du  comte  de  Ste.-Croix ,  il  dut  à  sa 
valeur  le  grade  de  chef  d'escadron  qu'il 
avait  encore  en  1814.  Alors  Louis  XVIII 
le  fit  colonel  de  la  légion  de  la  Vendée. 
En  1822  il  fut  nommé  maréehal-de-camp 
et  commandant  de  la  ville  de  Perpignan; 
en  1 823,  on  le  chargea  du  commandement 
de  la  l'*  subdivision  de  la  9^  division  mi- 
litaire ,  à  Montpellier  où  il  est  mort  le 
\"  novembre  1828.  Dix  blessures  et  de 
nombreux  faits  d'armes  attestent  son  cou- 
rage. Vrai  chi^étien ,  il  appela  lui-même 
les  secours  dé  la  religion  ,  qu'il  reçut 
avcc^es  seiUimens  qu'inspirent  assez  les 
approches  de  la  mort  dans  une  âme  que 
n'a  pas  gâtée  la  philosophie  moderne.  Dans 
une  notice  insérée  au  moniteur  du  13 
novembre  1828  ,  on  lui  a  appliqué  la 


ERA 

belle  devise  de  Bajard  ;  Sans  peur  et 
sans  reproche. 

ERARD  (Claude),  avocat  au  parlement 
de  Paris,  mort  en  t700,  à  54  ans,  laissa 
des  plaidoyers  imprimés  en  1735,  in-8. 
Le  plus  célèbre  est  celui  qu'il  ht  pour  le 
duc  de  Mazarin,  contre  Hortense  Mancini, 
sa  femme ,  qui  l'avait  quitté  pour  passer 
en  Angleterre. 

ERASISTRATE,  fameux  médecin,  pe- 
tit-fils d'Aristote,  découvrit,  dit-on,  par 
l'agitation  du  pouls  d'Antiochus  Soter, 
la  passion  que  ce  jeune  prince  avait  pour 
sa  belle-mère,  et  prétendit  l'en  avoir 
guéri.  Séleucus-Nicanor,  son  père,  donna 
cent  talens  à  Erasistrate  pour  cette  guéri- 
son.  Ce  médecin  désapprouvait  l'usage  de 
la  saignée,  des  purgations  et  des  remèdes 
violens.  Il  réduisait  la  médecine  à  des 
cboses  très  simples ,  à  la  diète ,  aux  tisa- 
nes, aux  purgatifs  doux.  Gallien  nous  a 
conservé  le  titre  de  plusieurs  de  ses  ou- 
vrages,  dont  les  injures  du  temps  ont 
privé  la  postérité.  (  Ce  médecin  fut  chef 
d'une  école  dont  les  disciples  portaient 
son  nom  et  qui  subsista  quatre  siècles.  ) 

ERASME  (Didier),  Desideriiis  Eras- 
miis,  naquit  à  Roterdam  en  1467,  du  com- 
merce illégitime  d'un  bourgeois  de  Gou- 
da, nommé  Pierre  Gheraeds,  avec  la  fille 
d'un  médecin.  Il  fut  enfant  de  chœur  jus- 
qu'à l'âge  de  9  ans ,  dans  la  cathédrale 
d'Utrecht.  A  14,  il  perdit  son  père  et  sa 
mère;  à  17,  il  se  fit  chanoine  régulier  de 
Saint-Augustin  à  Stein  ,  près  de  Gouda  ; 
à  25,  il  fut  élevé  au  sacerdoce,  par  l'évê- 
que  d'Utrecht.  Sa  pénétration  était  très 
vive ,  et  sa  mémoire  très  heureuse. 
Erasme  voyagea  pour  perfectionner  ses 
talens,  en  France,  en  Angleterre,  en  Italie. 
Il  séjourna  près  d'un  an  à  Bologne,  et  y 
prit  en  IbOG  le  bonnet  de  docteur  en 
théologie.  Ce  fut  dans  cette  ville  qu'ayant 
été  pris  pour  chirurgien  des  pestiférés,  à 
cause  de  son  scapulaire  blanc,  il  fut  pour- 
suivi à  coup  de  pierres,  et  courut  risque 
de  la  vie.  Cet  accident  lui  donna  occa- 
sion d'écrire  à  Lambert  Brunius,  secré- 
taire de  Jules  II,  pour  demander  la  dis- 
pense de  ses  vœux  :  il  l'obtint.  De  Bolo- 
gne, il  pa.ssa  à  Venise,  ensuite  à  Padoue, 
enfin  à  Rome ,  oh  ses  ouvrages  l'avaient 


ERA  çft 

annoncé  avantageusement.  Le  pape,  les 
cardinaux,  en  particulier  celui  de  Médicis 
(depuis  Léon  X),  le  recherchèrent  et  l'ap- 
plaudirent. Erasme  aurait  pu  se  faire  un 
sort  heureux  et  brillant  dans  cette  ville; 
mais  les  avantages  que  ses  amis  d'Angle- 
terre lui  faisaient  espérer  de  la  part  de 
Henri  VIII,  lui  firent  préférer  le  séjour  dfe 
Londres.  Thomas  Morus,  grand-chancelier 
du  royaume,  lui  donna  un  appartement 
chez  lui.  Erasme  s'étant  présenté  à  lui 
sans  se  nommer,  Morus  fut  si  agréable- 
ment surpris  des  charmes  de  la  conversa- 
tion de  cet  inconnu,  qu'il  lui  dit.  «  Vous 
»  êtes  Erasme  ou  un  démon.  »  On  lui  of- 
frit une  cure  pour  le  fixer  en  Angleterre  ; 
mais  il  la  refusa.  Il  fit  un  second  voyage 
en  France,  l'an  1510,  et  peu  de  temps 
après  il  retourna  encore  en  Angleterre. 
L'université  d'Oxford  lui  donna  une  chaire 
de  professeur  en  langue  gi-ecque.  Soit 
qu'Erasme  fût  naturellement  inconstant, 
soit  que  cette  place  lui  parût  au-dessous 
de  son  mérite,  il  la  quitta  pour  se  retirer 
à  Bâle ,  d'où  il  allait  assez  souvent  dans 
les  Pays-Bas,  et  même  en  Angleterre,  sans 
que  ses  fréquentes  courses  l'empêchassent 
de  donner  au  public  un  grand  nombre 
d'ouvrages.  Léon  X ,  ayant  été  élevé  sur 
le  saint  Siège,  Erasme  lui  demanda  la  per- 
mission de  lui  dédier  son  édition  grecque 
et  latine  du  nouveau  Testament,  et  reçut 
la  réponse  la  plus  obligeante.  Il  ne  fut 
pas  moins  estimé  par  le  successeur  de 
Léon ,  et  par  les  autres  souverains  pon- 
tifes. Paul  III  voulait  l'honorer  de  la  pour- 
pre romaine  ;  Clément  VII  et  Henri  VIII 
lui  écrivirent  de  leur  propre  main ,  pour 
se  l'attacher.  Le  roi  François  I,  Ferdinand, 
roi  de  Hongrie ,  Sigismond ,  roi  de  Polo- 
gne, et  plusieurs  autres  princes ,  essayè- 
rent en  vain  de  l'attirer  auprès  d'eux. 
Erasme,  ami  de  la  liberté,  autant  qu'en- 
nemi de  la  contrainte  des  cours,  n'accepta 
que  la  charge  de  conseiller  d'état ,  que 
Charles  d'Autriche  (depuis  empereur  sous 
le  nom  de  Charles -Quint),  lui  donna. 
Cette  place  lui  acquit  beaucoup  de  cré- 
dit, sans  lui -procurer  beaucoup  de  gjêne. 
L'hérésiarque  Martin  Luther  tâcha  de  l'en- 
gager dans  son  parti,  mais  inutilement. 
Erasme ,  prévenu  d'abord  en  faveur  des 


9?- 


ERA 


léfcrmateurs  ,  se  dégoûta  d'eux  quand  il 
les  eut  mieux  connus.  Il  les  regardait 
comme  une  nouvelle  espèce  d'hommes 
obstinés  y  médisans,  hypocrites,  men- 
teurs ,  trompeurs,  séditieux  ,  forcenés , 
incommodes  aux  autres,  divisés  entre 
eux...  «  On  a  beau  vouloir,  disait-il  en 
«  plaisantant,  que  le  luthéranisme  soit 
»  une  chose  tragique  ;  pour  moi ,  je  suis 
i>  persuadé  que  rien  n'est  plus  comique , 
»  car  le  dénouement  de  la  pièce  est  tou- 
y>  jours  quelque  mariage.  >'  Les  réforma- 
teurs devenant  tous  les  jours  plus  bril- 
lans  à  Bâle,  il  se  retira  à  Fribourg,  qu'il 
quitta  après  un  séjour  de  sept  ans ,  pour 
revenir  à  Bàle ,  où  il  mourut  d'une  dys- 
senterie  en  163C,  à  69  ans.  Il  avait  été  du- 
rant tout  le  cours  de  sa  vie  d'une  ccm- 
plexion  délicate;  il  fut,  sur  la  fin  de  ses 
jours,  tourmenté  par  la  goutte  et  la  gra- 
velle.  Sa  mémoire  est  aussi  chère  à  Bàle, 
qu'il  avait  illustrée  en  y  fixant  sa  demeure, 
qu'à  Rotterdam,  qui  jouit  de  la  gloire  de 
lui  avoir  donné  le  jour.  Ses  compatriotes 
lui  ont  fait  élever  une  statue  au  milieu 
de  la  grande  place,  sui-  la  base  de  laquelle 
on  lit  ces  paroles  : 

Dctiderio  Erasmo 
Map;iio  srieiiliarum  atque 

Litleralurœ  polilioris 
Viodici  et  iiistauralori. 

Pour  faire  cette  statue,  on  fit  fondre  un 
magnifique  crucifix  de  bronze;  ce  qui 
donna  lieu  à  Yondel,  poète  hollandais,  de 
faire  une  épigramme  saillante  sur  le  pa- 
triotisme des  Rotterdamois  {voyez  Yon- 
del). Il  fut  le  plus  bel  esprit  et  le  savant 
le  plus  universel  de  son  siècle.  C'est  à  lui 
principalement  qu'on  doit  la  renaissance 
des  belles-lettres ,  les  premières  éditions 
de'  plusieurs  Pères  de  l'Eglise,  la  saine 
critique.  Il  ranima  les  illustres  morts  de 
l'antiquité,  et  inspira  le  goût  de  leurs 
écrits  à  son  siècle.  Il  avait  formé  son  stile 
sur  eux.  Le  sien  est  pur,  élégant,  aisé;  et 
quoiqu'un  peu  bigarré,  il  ne  le  cède  en 
rien  à  celui  des  meilleurs  écrivains  de  son 
éiècle.  On  a  reproché,  non  sans  raison,  à 
Erasme ,  une  trop  grande  liberté  sur  les 
matières  qui  concernent  la  religion.  Il 
cxprce  souvent  une  critique  mal  fondée 
contre  les  saints  Pères,  Il  se  plaîtà  gros- 


ERA 

sir  les  vices  de  son  temps;  jamais  sa  plu- 
me n'est  plus  féconde  en  satires,  que 
quand  il  parle  des  religieux  el  des  ecclé- 
siastiques ;  il  se  rend  ju'^tice  à  lui-même, 
lorsqu'il  dit  (lib.  1 ,  epist.  1 1  ;  :  Ut  ingé- 
nue, quod  verum  est,  fatcar,  sum  natu- 
ra  propensinr  ad  jocos  quam  fartasse 
deceat ,  et  linfjuœ  libérions  quam  non- 
nunquam  expédiât.  On  peut  voir  sur  ce 
point  la  Préface  du  Père  Canisius  sur  les 
Epîtres  de  saint  Jérôme ,  et  V Apparat 
sacré  du  Père  Possevin.  Se  fiant  trop  sur 
ses  propres  lumières  dans  les  matières  de 
religion,  il  s'est  quelquefois  écarté  du 
vrai  chemin.  C'est  pour  cela  que  plusieurs 
de  ses  ouvrages  ont  été  censurés  par  les 
facultés  de  théologie  de  Paris  et  de  Lou- 
vain ,  et  mis  à  Y  Index  du  concile  de 
Trente.  Damnatus  in  plerisque ,  dit  un 
auteur  moderne,  suspectus  in  multis, 
caute  legendus  in  omnibus.  Il  faut  cepen- 
dant avouer  que  quelques-uns  ont  poussé 
la  critique  trop  loin  contre  Erasme.  Il  est 
certain  qu'il  a  vécu  et  qu'il  est  mort  dans 
le^sein  de  l'église  catholique,  comme  l'a 
montré  Jacques  MarsoUier  dans  son  Apo- 
logie d'Erasme ,  Paris ,  1713  :  ouvrage 
d'ailleurs  trop  favorable  à  Erasme,  et  con- 
tre lequel  le  Père  Tournemine  s'éleva  avec 
force.  Peu  de  jours  avant  sa  mort,  Erasme 
écrivit  à  Conrard  Goclenius  sou  intime 
ami,  qu'il  voudrait  finir  ses  jours  ailleurs 
qu'à  Bàle,  à  raison  des  divisions  que  les 
nouvelles  sectes  avaient  produites  dans 
cette  ville  :  Ob  dogmatum  dissensionem 
malim  alibi  finire  vitam.  Cet  homme  cé- 
lèbre essuya  plusieurs  orages  qu'il  ne  sup- 
porta pas  avec  trop  de  patience.  Naturel- 
lement sensible  à  l'éloge  el  à  la  critique, 
il  traitait  ses  adversaires  avec  dédain  el 
avec  aigreur.  Il  eut  toute  sa  vie  une  pas- 
sion extrême  pour  l'étude  ;  il  préféra  ses 
livres  à  tout,  aux  dignités  et  aux  richesses. 
Il  était  ennemi  du  luxe  ,  sobre  ,  sincère  , 
ennemi  de  la  flatterie,  bon  ami  et  con- 
stant dans  ses  amitiés  ;  en  un  mot,  il  n'é- 
tait pas  moins  aimable  Irbmme,  qu'homme 
savant.  Toutes  ses  OEuvres  furent  re- 
cueillies à  Bàle  par  le  célèbre  Froben  son 
ami,  en  9  vol.  in-fol.  Les  deux  premiers  et  le 
quatrième  sont  consacrés  uniquement  aux 
ouvrages  de  grammaire,  de  rhétorique  et 


t 


ERA 

de  philosophie.  On  y  trouve  VEloge  de 
la  folie  et  les  Colloques,  les  deux  produc- 
tions d'Erasme  les  plus  répandues.  La 
première  est  une  satire  assez  triviale  con 
tre  les  désordres  et  ridicules  de  son  temps, 
ou  contre  ce  qui  lui  a  paru  tel.  «  Les  dé- 
»  tails,  dit  un  critique,  en  sont  froids, 
«  prolixes,  exagérés,  quelquefois  plats  et 
»  dégoûtans.  Il  est  inconcevable  que  ce 
»  livre  ait  pu  jouir  d'une  si  grande  vo- 
w  gue;  il  n'y  a  que  ic  si-.e  et  le  nom  de 
V  l'auteur  qui  peuvent  avoir  produit  cet 
);  enchantement.  »  On  ne  doit  pas  juger 
plus  favorablement  ses  Colloques,  qu'on 
lit  plus  pour  la  latinité  que  pour  le  fond 
des  choses.  Il  y  a  çà  et  là  des  endroits  lu- 
briques et  obscurs,  déplacés  dans  tout  ou- 
vrage ;  mais  surtout  dans  un  prétendu 
livre  d'éducation,  qu'Erasme  écrivait  pour 
le  fils  de  Froben  :  quand  on  réfléchit  que 
l'auteur  avait  alors  GO  ans,  on  ne  sait  plus 
qu'en  penser ,  ou  bien  on  ne  le  sait  que 
trop.  Le  3*  volume  renferme  les  c'pitres, 
dont  plusieurs  ont  rapport  aux  affaires  de 
l'Egli-^e  ;  le  6*,  les  livres  de  piété,  écrits 
avec  une  élégance  qu'on  ne  trouve  point 
dans  les  autres  mystiques  de  son  temps  ; 
le  6*,  la  Version  du  nouveau  Testament, 
avec  les  notes;  le  "*,  ses  Paraphrases 
sur  le  nouveau  Testament;  le  8*,  ses 
traductions  des  ouvrages  de  quelques 
Pères  grecs;  le  dernier,  ses  apologies. 
Jean  Le  Clerc  a  donné  une  nouvelle  édi- 
tion de  tous  ces  différens  ouvrages,  eu 
11  vol.  in-foiio,  à  Leyde,  chez  Vander- 
Aa,  1703.  L'Eloge  de  la  Folie  a  été  im- 
primé séparément ,  cum  notis  variorum, 
1676,  in-8;  et  à  Paris,  Barbou,  1765,  in-1 2. 
On  en  a  une  assez  mauvaise  traduction 
française,  par  Gueudeville,  Amsterdam, 
1728,  in-8;  Paris,  1761,  in-8  et  in-4,  fi- 
gures; et  une  autre  de  M.  Barrett,  Paris, 
1789,  in-1 2.  Les  Elzevirs  ont  donné  une 
édition  de  ses  Adages,  1650,  in-1 2;  de 
.ses  Colloques,  1636,  in-1 2.  Il  y  en  a  une 
édition,  cum  notis  variorum,  1664  ou 
1693,  in-8.  Ils  ont  été  traduits  en  français 
par  Gueudeville,  Leyde,  1 7  20,  6  vol.  in-1 2, 
fig.  Barrett  a  donné  en  1789  une  nouvelle 
traduction  de  VEloge  de  la  folie.  On  a 
imprimé  séparément  à  Leyde,  à  la  Haye 
et  a  Amslerdam,  ses  meilleurs  ouvrages 


ERA  93 

au  nombre  de  24,  qui  peuvent  se  relier 
en  13  vol.  petit  in-l2.  Ceux  qui  voudront 
connaître  Erasme  plus  en  détail,  peuvent 
lire  l'Histoire  de  sa  vie  et  de  ses  ouvra- 
ges, mise  au  jour  en  1757,  par  M.  de  Bu- 
rigny,  ea  2  vol.  in-1 2.  Quoique  assez  mal 
écrite,  elle  est  intéressante  dans  plusieurs 
endroits.  On  voit  encore  à  Bâle,  dans  un 
cabinet  qui  excite  la  curiosité  des  étran- 
gers, son  anneau,  son  cachet,  son  épée, 
sou  couteau,  son  poinçon,  son  testament 
écrit  de  sa  propre  main,  son  portrait  par 
le  célèbre  Holbein,  avec  une  épigramme 
de  Théodore  de  Bèze.  On  lui  a  fait  cette 
épitaphe  : 

Palliila  mors  magnum  nobis  accepit  Erojmum  , 
Sed  Desiderium  tollere  non  potuit. 

Il  existe  à  la  bibliothèque  de  l'Arsenal  une 
vie  d'Erasme  par  Claude  Joly,  ouvrage 
qu'on  croyait  perdu,  et  que  Burigny  re- 
grettait de  n'avoir  pu  lire.  Il  a  été  re- 
trouvé par  M.  Boulard  dans  le  recueil 
manuscrit ,  inscrit  sous  le  n"  826. 

ERASTE  (Thomas) ,  médecin,  né  en 
1524,  à  Bade  en  Suisse,  enseigna  avec 
réputation  à  Heidelberg ,  puis  à  Bâle ,  où 
il  mourut  en  1583.  On  a  de  lui  :  1°  di- 
vers ouvrages  de  médecine  ,  principale- 
ment contre  Paracelse,  ainsi  qu'une  Vie 
de  ce  philosophe,  médecin  et  charlatan  ; 
on  y  voit  qu'il  se  mêlait  de  magie,  et 
que  le  diable  lui  rendait  des  visites,  Bâle, 
1572,  in-4.  2"  Des  thèses  qui  ont  fait 
beaucoup  de  bruit  dans  le  temps,  Zurich, 
1595,  in-4.  3°  Opuscula  ,  1590,  in-fol. 
4°  Consilia ,  Francfort,  1598,  in-fol. 
5"  De  aura potabili ,  in-8.  6°  De putre- 
dine,  in-8.  1'^  De  theriaca,  Lyon,  1606, 
in-4.  8°  De  lamiis  seu  strigibus ,  Bâle  , 
1577,  in-8.  9°  Des  thèses  contre  Vex- 
communication,  et  l'autorité  des  consis- 
toires,  Amsterdam ,  1649,  in-8.  Il  paraît 
que  l'auteur  était  dans  le  cas  de  les  crain- 
dre. Le  médecin  était  préférable  chez  lui 
au  controversiste  ;  mais  ni  l'un  ni  l'autre 
ne  méritaient  le  premier  rang. 

ERATOSTHEÎNE  ,  Grec  cyrénéen  , 
bibliothécaire  d'Alexandrie,  mort  196 
ans  avant  J.  C. ,  cultiva  à  la  fois  la  poé- 
sie, la  grammaire  ,  la  philosophie»  les 
mathématiques,  et  excella  dans  le  pre- 
mier et  le  dernier  genre.  On  lui  donna 


ç)4  ERC 

le  nom  de  Cosmographe ,  H' Arpenteur 
dcF  univers,  de  second  Platon.  Il  trouva, 
dit-on ,  le  premier  la  manière  de  mesurer 
la  grandeur  de  la  circonférence  de  la 
terre,  qu'on  n'a  pu  cependant  encore 
perfectionner  jusqu'à  s'assurer  d'un  cal- 
cul précis  ;  et  s'il  est  vrai  que  la  terre  n'a 
point  une  figure  parfaitement  régulière , 
ri  n'y  en  aura  jamais  (-voy^sCoiNDAMiîNE}. 
11  forma  le  premier  observatoire  ,  et  ob- 
serva l'obliquité  de  l'écliptique.  Il  trouva 
encore  une  méthode  pour  connaître  les 
nombres  premiers ,  c'est-à-dire  les  nom- 
bres qui  n'ont  point  de  mesure  commune 
-  entre  eux.  Elle  consiste  à  donner  l'exclu- 
sion aux  nombres  qui  n'ont  point  cette 
propriété.  On  la  nomma  le  crible  d'Era- 
toslhène.  Ce  philosophe  composa  aussi 
nn  traité  pour  perfectionner  l'analyse,  et 
il  résolut  le  problème  de  la  duplication 
du  cube,  par  le  moyen  d'un  instrument 
composé  de  plusieurs  planchelles  mobi- 
les. Parvenu  à  l'âge  de  80  ans  et  accablé 
d'infirmités ,  il  se  laissa  mourir  de  faim. 
Le  peu  qui  nous  reste  des  ouvrages  d'E- 
ratosthène  a  été  imprimé  à  Oxford ,  en 
1672,  1  vol.in-8,  età  Gottingue  en  1794. 
On  en  a  deux  autres  éditions  dans  l' Ura- 
nologia  du  Père  Pétau,  1C30  ;  et  à  Am- 
sterdam, dans  le  même  format,  1703.  (Les 
savans  modernes  le  regardent  comme  le 
père  de  l'astronomie.  ) 

ERATOSTRA.ÏE.  Foyez  Erosthate. 

ERCHEMBERT,  Lombard,  vivait  dans 
le  9"  siècle.  Il  porta  les  armes  dès  sa  pre- 
mière jeunesse,  et  fut  prisonnier  de 
guerre.  Il  se  retira  au  Mont-Cassin ,  oii  il 
embrassa  la  règle  de  Saint-Benoît  à  l'âge 
d'environ  25  ans.  On  lui  donna  le  gou- 
vernement d'un  monastère  voisin  ;  mais 
il  y  fut  exposé  à  tant  de  traverses ,  qu'il 
se  vit  encore  contraint  de  se  retirer.  Ce 
fut  dans  le  lieu  de  sa  retraite  qu'il  écrivit 
un  Supplément  dejjuis  l'an  7  74  jusqu'en 
888,  à  V Histoire  des  Lombards,  par 
Paul  Diacre.  Il  ajouta  à  ce  Supplément 
l'Histoire  de  la  ruine  et  de  la  restaura- 
tion du  Mont-Cassin  ,  et  de  V incursion 
des  Arabes  jusqu'à  l'an  884.  On  lui  at- 
tribue la  Fie  de  Landulplie ,  e'vcque  de 
Capoue,  en  vers ,  et  un  Abrégé  de  F  his- 
toire des  Lombards  ;  mais  on  doute  qu'ils 


ERC 

soient  de  lui.  Antoine  Caraccioli,  prêtre 
de  l'ordre  des  Clercs-réguliers  ,  a  publié 
son  supplément  qui  oft're  quelques  faits 
curieux  ,  avec  d'autres  pièces,  à  Naples, 
en  1020,  in-4.  CamillcPérégrinl'a  donné 
de  nouveau  au  public  dans  son  Histoire 
des  princes  Lombards ,  en  1C43,  in-4. 
(Il  mourut  l'an  889.  ) 

ERCILLA-Y-CU?s'IGA  (  don  Alonzo 
d'  ) ,  fils  d'un  jurisconsulte  célèbre ,  était 
gentilhomme  de  la  chambre  de  l'empe- 
reur Maximilien.  Il  fut  élevé  dans  le  pa- 
lais de  Philippe  II ,  et  combattit  sous  ses 
yeux  à  la  célèbre  bataille  de  Saint-Quen- 
tin, en  1557.  Le  guerrier,  entraîné  par 
le  désir  de  connaître  les  pays  et  les  hom- 
mes, parcourut  la  France,  l'Italie,  l'Al- 
lemagne ,  l'Angleterre.  Ayant  appris  à 
Londres  que  quelques  provinces  du  Pérou 
et  du  Chili  s'étaient  révoltées  contre  les 
Espagnols,  il  brûla  d'aller  signaler  son 
courage  sur  ce  nouveau  théâtre.  Il  passa 
sur  les  frontières  du  Chili  dans  une  petite 
contrée  montagneuse ,  oii  il  soutint  une 
guerre  aussi  longue  que  pénible  contre 
les  rebelles,  qu'il  défit  à  la  fin.  C'est  cette 
guerre  qui  fait  le  sujet  de  son  poème  de 
VArnucana ,  ainsi  appelé  du  nom  de  la 
contrée.  On  y  remarque  des  pensées  neu- 
ves et  hardies.  Le  poète-conqxiérant  a 
mis  beaucoup  de  chaleur  dans  ses  ba- 
tailles. Le  feu  de  Ja  plus  belle  poésie 
éclate  dans  quelques  endroits.  Les  des- 
criptions sont  riches ,  quoique  peu  va- 
riées; mais  nul  plan,  point  d'unité  dans 
le  dessein ,  point  de  vraisemblance  dans 
les  épisodes,  point  de  décence  dans  les 
caractères.  Ce  poème ,  composé  de  plus 
de  trente-six  chants,  et  trop  long  de  la 
moitié,  fut  imprimé  pour  la  première 
fois  en  1597,  in-12;  mais  la  meilleure 
édition  est  celle  de  Madrid,  1632  ,  2  vol. 
in-12.  (Après  son  expédition  contre  les 
peuples  du  Pérou  et  du  Chili,  il  prit  avec 
lui  30  soldats  et  chercha  de  nouvelles 
aventures  ;  il  alla  dans  le  pays  qui  est  en- 
ti'e  le  détroit  de  Magellan  et  l'île  de  Chiloé, 
en  prit  possession  et  parcourut  beaucoup 
d'autres  pays.  Il  rentra  ensuite  en  Espa* 
gne  oii  il  mourut  vers  l'an  1 195.  ) 

ERCKERN  (  Lazare  ) ,  surintendan^ 
des  mines  de  Hongrie,  d'Allemagne  et  di 


ERII 

Tyrol ,  sous  trois  empereurs ,  a  écrit  sur 
la  métallurgie  a\ec  beaucoup  d'exacti- 
tude. Son  livre  est  en  allemand  ;  maison 
l'a  traduit  en  latin  avec  des  notes.  11  pa- 
rut pour  la  première  fois  en  1 694,  à  Franc- 
fort, in-fol.  On  y  trouve  presque  tout  ce 
qui  regarde  l'art  d'essayer  les  métaux. 

*  ERDT  (  Paulin  ) ,  religieux  francis- 
cain allemand ,  professeur  de  théologie 
à  l'université  deFribourg  en  Brisgaw,  né 
à  Wertoch  en  1737,  s'est  distingué  par 
son  zèle  à  combattre  les  incrédules ,  soit 
dans  les  écrits  dont  il  fut  auteur ,  soit 
dans  ceux  qu'il  traduisit  de  l'anglais  et  du 
français.  Son  principal  ouvrage  est  une 
Histoire  littéraire  de  la  théologie  eulatin, 
4  vol.  in-8.  Il  a  fait  paraître  aussi  quel- 
ques écrits  sur  la  bibliographie. 

ERECTHÉE,  roi  d'Athènes,  succéda 
à  Pandion  son  père  ,  vers  l'an  1400  avant 
J.  C.  Il  partagea  tous  les  habitans  de  son 
royaume  en  quatre  classes  (  c'est-à-dire , 
en  guerriers ,  artisans ,  laboureurs  et  pâ- 
tres), pour  éviter  la  confusion  qui  pour- 
rait naître  du  mélange  des  conditions.  Il 
fut  père  de  Cécrops ,  deuxième  du  nom  , 
qui ,  après  avoir  été  détrôné  par  ses  ne- 
veux, se  retira  chez  Pylas  son  beau- 
père  ,  roi  de  Mégai'e.  Ce  prince  régna  60 
ans. 

*  ERÏIMANN  (  Frédéric-Louis  ) ,  phy- 
sicien célèbre,  né  en  1741,  faisait  à  Stras- 
bourg depuis  1res  long-temps  un  cours 
de  physique  très  suivi,  lorsqu'il  fut  nom- 
mé professeur  de  cette  science  à  l'école 
centrale  duBas-Rhin.  Il  mourut  dans  cette 
ville  peu  de  temps  après  en  1 799,  à  l'âge 
de  58  ans.  Il  s'est  acquis  une  réputation 
justement  méritée  de  .savant,  par  des  dé- 
couvertes et  des  ouvrages  précieux.  Ainsi, 
il  est  l'inventeur  des  lampes  à  air  inflam- 
mables ,  et  à  cette  occasion  il  a  public 
Description  et  usage  de  quelques  lampes 
à  air  inflammables,  avec  une  planche  in- 
diquant les  pièces  nécessaires  à  leur  con- 
fection. Il  s'occupa  beaucoup  aussi  de 
l'invention  des  ballons,  fit  un  grand  nom- 
bre d'expériences  et  publia  des  Observa- 
tions sur  les  Mongolfières ,  ou  ballons 
aérostaliques,  sur  l'art  de  les  faire,  sur 
les  expériences  qui  ont  déjà  été  faites , 
et  l'histoire  des  deux  premiers  voyageurs 


ERI  95 

aériens,  1784,  în-8.  Les  leçons,  qu'il  a 
faites  à  l'école  centrale ,  ont  été  recueil- 
lies et  publiées  en  français  sous  le  titre 
d'Elémcns  de  physique,  ouvrage  qui  est 
très  estimé.  Enfin  Ei'bmann  a  traduit  en 
allemand  les  mémoires  de  Lavoisier  sur 
l'action  du  feu  augmenté  par  le  gaz  oxi- 
ghne  avec  des  notes  très  intéressantes. 

*  ERIC,  nom  commun  à  plusieurs  rois 
de  Suède  et  de  Daneraarck. —  Eric  I ,  sur- 
nommé le.  Bon,  roi  de  Danemarck ,  ré- 
gna dans  le  1  !<=  siècle.  Il  fit  la  guerre  aux 
Vandales,  et  s'empara  de  leur  capitale 
dans  l'île  de  Rugen ,  qui  servait  d'asile  aux 
pirates  qui  infectaient  les  mers  et  les  cô- 
tes du  Danemarck.  Un  meurtre  qu'il  avait 
commis  l'engagea  d'entreprendre  un  pè- 
lerinage à  Jérusalem  ;  mais  il  mourut  en 
route,  dans  l'île  de  Chypre,  vers  l'an 
1106.  Ce  prince  se  fit  chérir  de  la  no- 
blesse et  du  peuple ,  et  respecter  de  tou- 
tes les  puissances  voisines.  Les  anciennes 
chroniques  disent  qu'il  vivait  avec  ses 
sujets  comme  un  père  avec  ses  enfans ,  et 
qu'aucun  malheureux  ne  le  quittait  sans 
consolation. 

ERIC  IX  (  Saint  ) ,  fils  de  Jeswar ,  fut 
élu  par  les  Suédois  pour  être  leur  roi  l'an 
1 1 60  ;  mais  en  même  temps  les  Goths  éle- 
vèrent sur  le  trône  Charles ,  fils  de  Suer- 
cher.  Cette  double  élection  occasiona  de 
grands  débats.  Enfin,  les  deux  partis  con- 
vinrent qu'Eric  régnerait  seul  sur  les 
Goths  et  les  Suédois,  qui  ne  feraient  plus 
qu'une  même  nation  ,  que  Cbarlcs  lui 
succéderait  après  sa  mort.  Eric,  attaqué 
par  les  Finlandais  en  1 1 64,  gagna  sur  eux 
une  bataille  qui  le  rendit  maître  de  leur 
pays.  Ils  étaient  idolâtres.  Eric  leur  en- 
voya des  missionnaires ,  à  le  tète  desquels 
il  mit  saint  Henri ,  archevêque  d'Upsal  , 
dont  le  siège  avait  été  érigé  en  métropole 
l'an  1148,  par  le  pape  Eugène  III.  Ce 
prélat  gagna  la  couronne  du  martyre  dans 
sa  mission  l'an  1 167.  Eric  s'appliquait  en 
même  temps  à  policer  ses  états  par  de 
bonnes  lois.  On  a  de  lui  un  code  qui  porte 
son  nom.  Le  zèle  de  ce  prince  pour  le 
bon  ordre  et  sa  piété  lui  firent  des  en- 
nemis qui  l'assassinèrent  le  jour  de  l'As- 
cension, 17  mai  1162.  Il  est  honoré 
comme  martyr.  Israël  Erland  a  donné  sa 


96  ERI 

vie  en  latin,  et  Jean  Scbcpffer  l'a  enrichie 
de  notes;  Stockholm,  107 5,  in-8. 

ERICXIII,  roi  de  Suède,  de  Dane- 
marck  et  de  Norwége ,  dut  la  première 
couronne  à  la  reine  Marguerite,  appelée 
la  Sêiniramis  du  Nord,  et  obtint  la  se- 
condé après  la  mort  de  cette  héroïne  en 
1 4 1 2  ;  mais  il  ne  sut  conserver  ni  l'une  ni 
l'autre.  Il  déplut  aux  Suédois,  parce  qu'au 
lieu  de  suivre  les  conventions  qu'il  avait 
confirmées  par  serment ,  il  les  opprimait 
par  ses  gouverneurs.  Il  mécontenta  de 
même  les  Danois  par  ses  longues  absen- 
ces ,  et  parce  qu'il  voulut  rendre  hérédi- 
taire la  couronne  qui  était  élective.  Les 
peuples ,  secondés  par  la  noblesse  et  le 
clergé ,  le  déposèrent.  Eric  voulut  se  sou- 
tenir sur  le  trône  par  les  armes;  mais 
n'ayant  pu  s'y  maintenir,  il  se  retira  l'an 
1438,  en  Poméranie  ,  où  il  passa  les  res- 
tes d'une  vie  obscure  et  languissante. 

ERIC  XIV,  fils  et  successeur  de  Gus- 
tave I  dans  le  royaume  de  Suède ,  fut  aussi 
faible-et  encore  pjus  cruel  qu'Eric  XIII.  Il 
aurait  désiré  de  se  marier  avec  Elisabeth, 
reine  d'Angleterre,  qui  ne  voulait  pas 
d'époux;  mais  n'espérant  pas  d'obtenir  sa 
main,  il  partagea  son  trône  et  son  lit  avec 
la  fille  d'un  paysan.  Celte  alliance  indi- 
gne aliéna  le  cœur  de  ses  sujets.  Des  soup- 
çons très  mal  fondés,  le  portèrent  à  faire 
arrêter  Jean  son  frère ,  et  à  le  tenir  pen- 
dant cinq  ans  dans  une  dure  prison.  Ce 
prince  infortuné,  ayant  obtenu  sa  liberté, 
excita  une  révolte.  Il  assiégea  Eric  dans 
Stockholm,  le  prit,  et  l'obligea  de.renon- 
cer  à  la  couronne  en  15G8.  Le  monarque 
détrôné  fut  enfermé  à  son  tour  ;  et  traîné 
de  prison  eu  prison ,  il  fut  enfin  confiné 
dans  le  château  d'Euriby  dansl'Uplande. 
En  vain  y  invoqua-t-il  en  sa  faveur  les 
lois  qu'il  avait  fait  taire  quand  il  faisait 
mourir  des  innocens,  ou  qu'il  assassinait 
ceux  qui  lui  faisaient  des  remontrances  ; 
elles  restèrent  muettes  pour  lui ,  et  il 
mourut  le  26  février  1 57  7 .  Il  n'avait  régné 
que  huit  ans.  Olof  Celsius  a  donné  l'his- 
toire de  ce  prince,  qui  a  été  traduite  en 
français  pas  Genêt ,  Paris ,  1777. 

ERIC  (  Pierre  ),  navigateur  hardi 
mais  cruel ,  obtint  de  la  république  vé- 
uitienne  le  commandement  d'une  flolte 


ERI 

sur  la  mer  Adriatique.  En  1584  ,  il  prit  nn 
vaisseau  poussé  par  la  tempête,  où  élait 
la  veuve  de  Ramadan,  bâcha  de  Tripoli. 
Cette  femme  emportait  à  Constantinople 
pour  800  mille  écus  de  bien.  Lorsqu'Eric 
se  fut  rendu  maître  de  ce  navire ,  et  de 
ceux  qui  étaient  à  sa  suite, il  fit  tuer  250 
hommes  qu'il  y  trouva  ;  perça  lui-même 
de  son  épée  le  fils  de  la  veuve  entre  les 
Lras  de  sa  mère  ;  et  après  avoir  fait  violer 
40  femmes  qu'il  fit  couper  par  morceaux , 
il  ordonna  qu'on  les  jetât  dans  la  mer. 
Cette  barbarie  atroce  ne  demeura  pas 
impunie.  Le  sénat  de  Venise  lui  fit  trati- 
cher  la  tête,  et  fit  rendre  à  Amurat  IV, 
empereur  des  Turcs  ,  tout  le  butin  qu'E- 
ric avait  fait. 

ERIGÈNE.  royez  Scot. 

ERINNE,  dame  grecque,  contempo- 
raine de  Sapho,  composa  des  poésies, 
dont  on  possède  quelques  fragmens  dans 
le  Carmina  novem  paet.  Feminaritm , 
Anvers,  1568,  in-8.  On  en  trouve  des  imi- 
tations en  vers  français  dans  le  Parnasse 
des  Dames ,  de  M.  Souvigny. 

ERIOCA  ou  Arioch  ,  roi  des  Eliciens 
ou  Elyméens,  le  même  que  le  roi  d'Elas- 
sar  qui  accompagna  Chodoriahoinor, 
lorsque  ce  prince  vint  châtier  les  souve- 
rains de  Sodome  et  de  Gomorrhe.  Ses 
états  étaient  entre  le  Tigre  et  l'Euphrate. 
Ce  fut  sur  ces  terres  que  se  donna  cette 
sanglante  bataille  entre  Arphaxad,  roi  de 
Médie,  et  Nabuchodonosor,  roidesChal- 
déens,  où  le  premier  fut  tué. 

ERITHRiEUS  (  Janus-Nitius  ).  F  oyez 
Rossi. 

ERIZZO  (Paul  ) ,  d'une  des  plus  an-W 
ciennes  familles  de  Venise ,  se  signala  e»ll 
1409  par  la  défense  de  Négrepont,  dont 
il  était  gouverneur.  Après  avoir  fait  une 
vigoureuse  résistance,  il  se  rendit  aui 
Turcs  sous  promesse  qu'on  lui  conserve- 
rait la  vie.  Mahomet  II ,  sans  avoir  aucun 
égard  à  la  capitulation ,  le  fit  scier  en 
deux,  et  trancha  lui-même  la  tête  à  Anne, 
fille  de  cet  illustre  malheureux,  parc^ 
qu'elle  n'avait  pas  voulu  condescend! 
à  ses  désirs. 

ERIZZO  en  latin  Erius  ou  Echini 
(Sébastien),  noble  vénitien,  mort 
1585,  se  fit  un  nom  par  plusieurs  ci 


ERL 

frages  de  litlérature.  Il  s'adonna  aussi  à 
la  science  nuiuistnalisque,  et  a  laissé  un 
Traité  en  italien  sur  les  médailles  :  la 
meilleure  édition  de  cet  ouvrage  assez 
estiuié  ,  est  celle  de  Venise  ,  in-4 ,  dont 
les  exemplaires  pour  la  plupart  sont  sans 
date,  mais  dont  quelques-uns  portent 
celle  de  1571.  On  a  encore  de  lui  :  1  °  Des 
Nouvelles  en  six  journées,  Venise,  156T, 
in-4.  2°  Tratto  délia  via  inventrice  e 
deir  instrumenta  de  gli  aniichi,  Venise , 
1564,  in-4.  Ce  savant  avait  exercé  quel- 
ques emplois  dans  sa  patrie  :  il  fut  du 
conseil  des  dix. 

ERKIVINS  de  Steinbach ,  architecte , 
mort  en  1305 ,  a  donné  le  plan  de  la  ma- 
gnifique cathédrale  de  Strasbourg,  dont 
il  dirigea  la  construction  pendant  28  ans, 
€t  qui  fut  achevée  sur  ses  dessins.  La  tour 
ne  fut  achevée  qu'en  1449.  Elle  a  514 
pieds  d'élévation.  La  solidité  en  égale  la 
légèreté  et  la  délicatesse. 

ERLACH  (  Jean-Louis  ) ,  né  à  Berne , 
d'une  maison  de  Suisse,  très  distinguée 
par  l'ancienneté  de  sa  noblesse  et  parles 
grands  hommes  qu'elle  a  produits,  et  la 
première  des  six  familles  nobles  de  Berne. 
Il  porta  les  armes  de  bonne  heure  au  ser- 
vice de  la  France ,  et  se  signala  en  diver- 
ses occasions.  Sa  valeur  et  ses  explois 
furent  récompensés  par  les  litres  de  lieu- 
tenant-général des  armées  de  France,  de 
gouverneur  de  Brisach,  de  colonel  de 
plusieurs  régimens  d'infanterie  et  de  ca- 
valerie allemand£.  Louis  XIII  dut  à  sa 
bravoure  l'acquisition  de  Brisach  en  1639; 
et  Louis  XIV,  en  partie,  la  victoire  de 
Lens  en  1648,  et  la  conservation  de  son 
armée  en  1649.  Ce  prince  lui  confia  cette 
année  le  commandement  général  de  ses 
troupes  ,  lors  de  la  défection  du  vicomte 
de  Tureune.  D'Erlach  mourut  à  Brisach 
l'année  d'après ,  à  55  ans.  Un  de  ses  des- 
ccndans  publia  en  1784  à&s,  mémoires àe 
sa  vie ,  4  vol.  in-12.  Il  y  a  des  *raits  in- 
téressans  ;  mais  aussi  beaucoup  d'inutili- 
tés et  de  petitesses ,  dont  la  suppression 
eût  prévenu  l'ennui  de  plus  d'un  lec- 
teur. —  Il  ne  faut  pas  le  confondre  avec 
Rodolphe-Louis  d'Erlacii,  membre  du 
conseil  souverain  de  Berne ,  dont  il  a 
paru  en  1789  un  prétendu  Code  du  bon- 
V. 


ERN  97 

heur ,  6  vol.  in-8  ,  fruit  de  l'impiété  et 
d'une  verbiageuse  déraison. 

*  ERLACH  (Charles-Louis  d') ,  naquit 
à  Berne  en  1726.  Il  avait  servi  en  France 
avant  la  révolution ,  et  il  était  maréchal 
de  camp  lors  de  l'invasion  du  pays  de 
Vaud  par  les  Français.  Le  gouvernement 
de  Berne  lui  conféra  le  commandement 
de  son  armée ,  qu'il  devait  faire  agir  au 
moment  oîi  finirait  l'armistice  conclu 
avec  le  général  Brune.  Lorsqu'il  allait 
commencer  les  attaques  ,  il  reçut  l'ordre 
de  suspendre  les  hostilités  :  le  gouverne- 
ment avait  abdiqué  ses  pouvoirs.  A  la 
nouvelle  de  la  prise  de  Berne,  d'Erlach 
fut  massacré  par  ses  propres  soldats ,  qui 
le  soupçonnèrent  d'avoir  des  intelligen- 
ces avec  les  Français. 

*  ERMAN  (Jean-Pierre),  pasteur  de  la 
colonie  française  de  Berlin,  né  dans  cette 
ville  en^l  7  33 ,  y  est  mort  en  1 8 1 4.  Il  était 
principal  du  collège  français ,  directeur 
du  séminaire,  conseiller  du  consistoire 
supérieur,  membre  de  l'académie  des 
Sciences  et  Belles-Lettres  :  il  se  fit  remar- 
quer par  son  zèle  à  maintenir  les  métho- 
des d'enseignement  que  les  réfugiés 
avaient  apportées  de  France.  La  reine, 
épouse  de  Frédéric  H ,  l'admettait  sou- 
vent à  sa  cour.  Il  a  rédigé ,  avec  le  pas- 
teur Reclam ,  les  Mémoires  pour  servir 
à  l'histoire  des  réfugiés  Français  dans 
les  états  du  roi  de  Prusse,  Berlin,  1782- 
94  ,  8  vol.  in-8  ;  recueil  trop  prolixe  et 
d'un  stile  généralement  trop  négligé; 
mais  on  y  trouve  des  faits  intéressans  et 
des  anecdotes  curieuses.  Il  a  fait  aussi  l'é- 
loge historique  de  la  reine  de  Prusse  , 
Sophie-Charlotte  épouse  de  Frédéric  I , 
des  mémoires,  des  traductions ,  des  ser- 
mons, des  discours  académiques  insérés 
dans  la  bibliothèque  germanique  et  dans 
quelques  autres  recueils. 

ERIVECOURT.  For/ez.  Blamont. 

ERNEST,  archiduc  d'Autriche ,  3*  fils 
de  l'empereur  Maximilien  II,  frère  de 
Rodolphe  II ,  fut  nommé  par  Philippe  H, 
gouverneur  des  Pays-Bas  après  la  mort 
d'Alexandre  de  Parme  en  1592  ;  il  n'arriva 
à  Bruxelles  qu'au  commencement  del  694, 
et  essaya  d'abord  les  moyens  de  concilia- 
lion  et  de  paix  ;  mais  les  rebelles  ne  lui 


I 


98  ERN 

répondirent  que  par  des  injures ,  et  pré- 
tendirent qu'il  avait  Toulu  faire  assassi- 
ner le  comte  Maurice  de  Nassau  par  un 
prêtre.  Quand  on  considère  la  fausseté  de 
de  tout  ce  qu'ils  débitaient  alors  contre 
les  Espagnols  et  les  catholiques,  et  sur- 
tout la  manière  dont  ils  agissaient  avec 
les  prêtres,  qu'ils  faisaient  mourir  par  des 
supplices  inouïs,  uniquement  en  haine 
du  sacerdoce  catholique  (  voyez  Cor- 
neille Musius  et  Ferdinand  de  Tolèuk  ) , 
on  ne  peut  considérer  cette  inculpation 
que  comme  une  calomnie  dont  ils  ne  pro- 
duisirent aucune  espèce  de  preuve,  et 
qui  essuya  les  variations  les  plus  propres 
à  la  réfuter  ;  car  plusieurs  de  leurs  ga- 
zettes font  de  ce  prétendu  assassin ,  un 
soldat  garde-du-corps ,  exécuté  à  Berg- 
ob-Zoom ,  d'autres  un  prêtre  de  Kamur  , 
exécuté  à  la  Haye.  Aussi  Bentivoglio  , 
dans  son  Histoire  des  guerres  de  Flandre, 
oii  il  parle  de  Maurice  de  Nassau  dans  le 
plus  grand  détail,  ne  dit  pas  un  mot  de 
la  prétendue  conspiration.  Les  compila- 
teuis  du  Moréri  de  Paris,  1759,  qui  rap- 
portent cette  fable ,  la  réfutent  en  même 
temps  par  le  portrait  qu'ils  font  d'Ernest. 
«  C'était,  disent-ils,  un  prince  paisible, 
»  doux,  civil  et  de  bon  cœur.  Si  ses  ver- 
j>  tus  n'étaient  point  éclatantes,  on  peut 
)>  du  moins  dire  qu'il  n'avait  point  de 
))  vices.  «  Il  mourut  le  20  février  1595 , 
ayant  à  peine  gouverné  les  Pays-Bas  l'es- 
pace d'un  an. 

*  ERIS ESTI  (  Jean  Auguste  )  le  Cicéron 
de  l'Allemagne,  l'un  des  plus  illustres  cri- 
tiques qu'ait  produits  ce  pays  de  l'érudi- 
tion, né  en  1707  à  Tœnnstadt  en  Thu- 
ringe.  Il  fut  docteur  et  professeur  en 
théologie  à  Leipsick.  L'un  des  premiers , 
il  sépara  en  Allemagne  la  théologie  de  la 
religion  ;  distinction  que  l'on  regarde 
comme  la  source  des  innovations  subsé- 
quentes que  sans  doute  il  n'aurait  pas 
voulu  approuver.  Il  mourut  à  Leipsick  le 
1 1  septembre  1 7  8 1 .  On  a  de  lui  1  "  Opus- 
cula  philologico-critica  ,  Amsterdam  , 
1762,  in-8.  2°  Opuscula  oratoria,  ora- 
tiones ,  proUisiones  et  elogia  ,  Leyde , 
1762  et  17G7  ,.in-8.  3°  Opuscula,  oratio- 
nes,  nova  coUectio,  Leipsick,  1791, 
ifk^^i^ir^  ArcIi6ologia  UUeraria,  iu-8, 


ERN 

1768  et  1790.  Cette  dernière  édition,  qui 
est  revue  et  augmentée  par  J.  H.  Martin, 
est  très-estimée.  5"  Initia  doctrinœ  soli- 
dioris,  Leipsick,  173G,  7*  édition,  1783, 
in-8 .  G"  Institutio  interpretis  novi  Testa- 
menli,  Leipsick,  1761  ,  in-8,  4*  édition, 
1 792.  7°  Des  sermons  en  allemand ,  Leip- 
sick, 1768-82,  4  vol.  in-8  ,  oii  le  savant 
se  montre  plus  que  l'orateur  chrétien. 
8"  Opuscula  Ihcologica,  1773,  et  1792, 
in-8.  d" Nouvelle  bibliothèque  the'ologique 
en  allemand,  Leipsick,  1760  68,  10  vol. 
in-8,  Ebcrt  et  d'autres-savans  ont  eu  part 
à  cet  ouvrage.  Ernesti  a  donné  aussi  des 
éditions  estimées  et  recherchées  d'Ho- 
mère, Leipsick,  in-8,  1 7 59-64-65  ;  de  Cal- 
limaque  ,  Leyde,  2  vol.  in-8,  1761  ;  de 
Polybe,  Leipsick,  1763-64;  de  Xe'nophon, 
à'Aristote ,  et  de  Cicéron,  7  vol.;  Leip- 
sick, 1776,  3^  édition;  de  Tacite,  ibid. 
1772,  in-8  ;  de  Suétone ,  d' Aristophane  , 
etc.  Son  Eloge  par  Auguste  Guillaume  Er- 
nesti a  paru  à  Leipsick ,  1 7  8 1 ,  in-8 . — Er- 
NESïi  (Auguste-Guillaume),  neveu  du 
précédent ,  savant  professeur  de  philoso- 
phie, et  ensuite  d'éloquence,  né  à  Frohn- 
dorf  en  Thuringe  en  17  33,  et  mort  en 
1801,  a  laissé  des  éditions  estimées  de 
Tite-Live,  5  vol.  in-8;  de  Çuintilien , 
d'Ammien  Marcelin  et  de  Pomponius 
Mêla. 

*  ERNEST  (Simon-Pierre) ,  chanoine- 
régulier  et  professeur  en  théologie ,  à 
l'abbaye  de  Bolduc,  devint  curé  d'Afden, 
près  d'Aix-la-Chapelle  vers  1797  ,  et  fut 
nommé  en  1814  membre  de  l'institut 
royal  des  Pays-Bas.  Il  est  mort  en  1818  , 
et  a  laissé  plusieurs  ouvrages  historiques 
sur  le  Brabant  ,  un  Tableau  historique 
et  chronologique  des  suffragans  ou  co- 
e'vêques  de  Liège ,  avec  des  notices  sur 
l'origine  des  maisons  religieuses ,  dans  la 
ville  et  sa  banlieue;  une  Histoire  des  com- 
tes de  Limbourg ,  plusieurs  chronolo- 
gies historiques  dans  le  tome  3  de  l'Art 
de  vérifier  les  dates  ;  un  grand  nombre 
de  brochures  sur  le  serment ,  et  un  écrit 
apologétique  au  nouveau  catéchisme  pu* 
blié  par  ordre  de  Buonaparte. 

*  EROLES  (  Le  baron  d'  ),  né  dans  la 
Catalogne  en  1785,  mort  dans  la  pro- 
vince de  U  Marche  en  septembre  1825, 


I 


ERO 

fit  ses  premières  armes  dans  la  guerre 
de  l'indépendance  en  Espagne.  Il  se  mon- 
tra digne  de  ses  ancêtres  par  la  bravoure 
dont  il  donna  des  preuves  continuelles 
pendant  l'invasion  de  son  pays  par  les 
Français.  Profitant  de  la  connaissance 
parfaite  qu'il  avait  des  localités  ,  il  s'était 
mis  à  la  tête  des  paysans  de  sa  province 
qu'il  avait  organisés  en  milices  et  qu'il 
levait  en  masse  ,  dans  les  momens  oii  les 
générauxfrançaiss'y  attendaient  le  moins. 
Sa  fidélité  et  son  patriotisme  furent  té- 
compensés  dignement  par  Ferdinand  Vil. 
A  l'époque  de  la  révolution  de  1820,  il 
se  prononça  pour  le  roi ,  se  mit  de  nou- 
veau à  la  tète  de  ses  campagnards  mal 
équippés  et  mal  armés ,  et  soutint  pen- 
dant long-temps  les  efforts  des  constitu- 
tionnels. Ce  fut  lui  qui  en  Î822  organisa 
Y  Armée  de  la  Foi  ;  il  était  aussi  l'un  des 
trois  membres  de  la  régence  d!  Urgel.  Il 
seconda  de  tous  ses  efforts  en  1823  les 
Français  qui  entrèrent  en  Espagne  pour 
délivrer  le  roi  des  mains  des  révolution- 
naires. Il  était  capitaine  général  des  trou- 
pes de  S.  M.  C,  officier  delà  Légion-d'lion- 
neur,  commandeur  de  l'ordre  de  Saint- 
Louis;  l'auteur  anonyme  d'une  notice  in- 
titulée Nécrologie  sur  le  baron  d'£ rôles, 
par  un  volontaire  de  l'armée  de  la  Foi, 
Paris,  1825,  in-8,  a  dit  avec  raison  de  lui 
qu'il  avait  été  l'un  des  plus  fermes  ap- 
puis de  la  religion  catholique  et  de  la  lé- 
gitimité. Cette  notice  a  été  insérée  dans  le 
journal  de  V Etoile  du  20  septembre  1 826, 
et  dans  la  Gazette  de  France  du  29  du 
même  mois.  On  peut  consulter  le  tome 
28  des  Victoires  et  cowyHe/ej,  pour  avoir 
de  plus  amples  détails  sur  ce  général  es- 
pagnol. 

EROPE ,  Mropus ,  fils  de  Philippe  I , 
roi  de  3Iacédoine ,  monta  sur  le  trône 
étant  encore  enfant.  Les  Illyriens,  vou- 
lant profiter  de  cette  minorité ,  attaquè- 
rent et  défirent  les  Macédoniens  ;  mais 
ceux-ci  ayant  porté  le  jeune  roi  à  la  tête 
de  l'armée,  ce  spectacle  ranima  tellement 
les  soldats,  qu'ils  vainquirent  à  leur  tour, 
vers  l'an  598  avant  J.  C.  ,  le  prince  ré- 
gna environ  35  ans,  avec  assez  de  gloire. 

EROS,  affranchi  de  Marc-Antoine  le 
triumvir.  Ployez  cet  article. 


E1\R  99 

EROSTRATE  ou  Eratostratk, 
homme  obscur  d'Ephèse, voulant  rendre 
son  nom  célèbre  à  la  postérité  ,  brûla  le 
temple  de  Diane  ,  l'une  des  sept  merveil- 
les du  monde,  l'an  35G  avant  J.  C.  le 
jour  même  oîi  Alexandre  le  Grand  vint 
au  monde.  Les  Ephésiens  firent  une  loi 
qui  défendait  de  prononcer  son  nom. 
Cette  loi  singulière,  loin  de  produire  un 
tel  effet,  servit  l'intention  du  scélérat: 
ce  fut  un  moyen  de  répandre  et  de  per- 
pétuer sa  mémoire;  mais  il  n'y  gagna 
rien,  car  elle  n'existe  que  pour  être  un 
objet  d'exécration. 

ERPEjN'IDS  ou  d'Erpé  (  Thomas  ) ,  né 
à  Gorcum  en  Hollande  l'an  1584,  s'ap- 
pliqua'à  l'étude  des  langues  orientales  à 
la  persuasion  de  Scaliger  ;  parcourut  une 
grande  partie  de  l'Europe  ,  s'arrêta  long- 
temps à  Venise,  parce  qu'il  y  trouva  plu- 
sieurs juifs  et  quelques  niahométans  qui 
l'aidèrent  dans  l'étude  qu'il  y  fit  des  lan- 
gues arabe,  perse,  turque  et  éthiopienne. 
De  retour  dans  son  pays  en  ICI 3,  il  fut 
fait  professeur  des  langues  orientales  à 
Leyde ,  où  il  mourut  en  1G24.  Il  laissa 
plusieurs  ouvrages  sur  l'arabe,  sur  l'hé- 
breu, etc.,  dans  lesquels  on  remarque 
une  profonde  connaissance  de  ces  lan- 
gues. Les  principaux  sont  :  1°  Gram- 
maire arabe,  Leyde,  1636,  1G56,  1748 
et  1T67,  in-4  ,  estimée.  2"  Grammaire 
hébraïque,  Leyde,  1659.  3°  Grammaire 
syriaque  et  chaldàique,  Leyde,  1659. 
h'^  Grammaire  grecque  ,  Leyde,  1662. 
5"  Psalterium  Dalidicum  Syriacum  cum 
versione  latina.  6"  Historia  saraccnica 
Georgii  Elmacini  cum  versione  latina  , 
Leyde,  1622,  in-folio,  édition  enrichie 
de  cartes  géographiques  et  généalogi- 
ques. 7°  Lncmani  fabulœ  et  Arabum 
adagia  cum  interpretatione  latina  et  no- 
//j,  Amsterdam,  1656,  in-4.  C'était  un 
homme  laborieux,  d'un  esprit  vif,  d'une 
mémoire  étendue  ,  attaché  à  ses  livres  et 
à  sa  patrie,  qui  refusa  toutes  les  offres 
qu'on  lui  fit,  pour  l'attirer  en  Espagne 
et  en  Angleterre.  Voyez  Nicéron,  tome5. 
Voyez  aussi  sur  ce  célèbre  orientaliste, 
G.  J.  Vossius,  et  le  Père  Scriverius.  :, 

*  ERRA1NTE  (  Joseph  ) ,  peintre  ita- 
lien ,  né  à  Trapani ,  en  Sicile ,  en   1 760, 


loo  ERR 

étudia  son  art  dans  sa  ville  natale,  puis 
•  à  Falerme,à  Naples,  d'où  il  passa  à  Rome 
où  il  se  perfectionna.  Errante  avait  le  ta- 
lent d'imiter  les  plus  grands  maîtres  au 
point  que  l'on  confondaitsouvent  ses  co- 
pies avec  les  modèJcs.  On  doit  à  cet  ar- 
tiste une  importante  découverte ,  c'est- 
à-dire  une  manière  sûre  et  facile  de  res- 
taurer les  vieux  tableaux.  Il  avait  gagné 
la  conAance  du  duc  de  Monte-Leonc  dont 
il  avait  fait  le  portrait  :  la  reconnaissance 
de  ce  seigneur  alla  jusqu'à  lui  faire  une 
pension  de  60  ducats  par  mois  (  environ 
240  fr.  ).  La  cour  de  Naples  chargea  cet 
artiste  de  décorer  le  château  de  Caserte. 
Lors  de  la  révolution  française,  dont  les 
principes  subversifs  avaient  pénétre  jus- 
que dans  les  états  romains  et  le  royatime 
de  Naples,  Errante,  qui  les  avait  adoptés, 
fut  contraint  de  se  réfugier  à  Milan ,  avec 
son  prolecteur  le  Duc  de  Monte-Leone. 
Dans  cette  ville ,  il  lutta  avec  succès  con- 
tre un  habile  adversaire ,  le  peintre  Ap- 
piani ,  qui,  de  son  côté  ,  était  émule  de 
Benvcnuti  de  Florence.  L'artiste  sicilien 
peignait,  en  outre,  le  portrait  avec  un 
talent  remarquable ,  et  excellait  à  faire 
des  armes,  exercice  auquel  les  Siciliens 
se  livrent  avec  plus  d'ardeur  que  tous  les 
autrespeuplesde  l'Europe. Errante  croyait 
que  cet  art  n'était  pas  moins  utile  aux 
peintres  que  l'avait  été  la  gymnastique 
aux  anciens  ,  et  se  proposait  de  publier 
un  traité  sur  le  mouvement  des  muscles  ; 
projet  que  d'autres  occupations  l'empê- 
chèrent de  réaliser.  Après  la  chute  de 
Napoléon  et  la  nouvelle  réorganisation 
de  l'Italie ,  il  retourna  à  Rome ,  centre 
de  tous  les  arts  ;  il  y  mourut  en  juillet 
1821 ,  âgé  de  61  ans.  On  cite  comme  ses 
meilleurs  tableaux  Artcmise  pleurant 
sur  les  cendres  de  Mausole  ;  la  Mort  du 
comte  Ugolin ,  au  milieu  de  ses  enfans  ; 
JEndymion  ;  le  Concours  de  la  beauté; 
diffcrens  tableaux  de  Psyché,  et  des 
portraits.  Il  est  auteur  des  ouvrages  sui- 
vans  :  1  °  Traité  sur  les  couleurs  em- 
ployées par  les  plus  célèbres  artistes  ita- 
liens et  flamands  :  2°  Essai  sur  les  cou- 
leurs. Il  y  une  Notice  sur  cet  artiste , 
faite  par  le  savant  a)>bé  Cancellieri  ;  et 
on  lui  a  élevé  à  Rome  un  beau  mouu- 


ERS 

ment ,  exécuté  par  Léonard  Jennio  ,  ha- 
bile sculpteur  sicilien. 

•  ERSCH  (Jean-Samuel),  professeur  à 
Halle,  né  le  23  juin  1760  à  Gross-Glogau 
en  Silésic,  habita  d'abord  léna  où  il  coo- 
pérait à  des  ouvrages  périodiques  sur  la 
géographie  et  la  statistique  et  où  il  tra- 
vaillait à  des  traductions  de  relations  de 
voyagea  publiées  dans  les  pays  étrangers. 
Il  fit  paraître  en  1788,  un  Catalogue  des 
ouvrages  anonymes  et  pseudonymes  de 
V Allemagne  pour  servir  de  supplément  à 
l'Allemagne  savante  de Meusel.  En  1790- 
92,  un  Répertoire  des  journaux  et  au- 
tres ouvrages  périodiques  allemands  sur 
la  géographie  et  l'histoire,  Lemgo,  3  vol. 
Il  mourut  de  fatigue  et  de  chagrin  le  16 
janvier  1828. 

'  ERSKINE  (  Jean  ) ,  célèbre  presby- 
térien écossais,  né  en  1721  ,  fut  ministre 
à  Edimbourg,  et  mourut  le  19  janvier 
1803.  Il  a  laissé  1°  des  sermons,  1798, 
in-8,  estimés  pour  la  liaison  du  discours 
et  la  pureté  du  slile.  2°  Esquisses  de 
l'histoire  de  l'Eglise,  1 790-97,  2  vol.  in-8, 
ouvrage  rempli  de  documens  intéressans 
sur  l'état  delà  religion  dans  l'Europe  con- 
tinentale, et  où  il  dévoile  la  conjuration 
formée  par  les  incrédules  contre  la  reli- 
gion. On  dit  qu'il  était  vertueux  et  tolé- 
rant pour  les  catholiques. 

ERSKIIVE  (Lord  David  Dun).  Foyez 
Dun  (  David  Erskine ,  lord  ). 

'  ERSKINE  (  Charles  ) ,  cardinal,  ori- 
ginaire d'Irlande,  né  le  13  février  1753, 
à  Rome ,  où  sa  famille  suivit  celle  des 
Stuarts ,  lorsque  cette  dernière  eut  cessé 
de  régner.  Destiné  d'abord  au  barreau , 
il  s'y  distingua  de  bonne  heure  et  fixa 
l'attention  de  Pie  VI  qui  l'engagea  à  chan- 
ger de  carrière.  Le  jeune  Erskine,  devenu 
ecclésiastique,  ne  tarda  pas  à  être  évêque, 
puis  chanoine  de  Saint-Pierre.  Envoyé 
comme  ministre  plénipotentiaire  à  Lon- 
dres, au  moment  où  se  formait  la  coali- 
tion contre  la  France ,  il  resta  8  années 
en  Angleterre.  Pendant  son  séjour  dans 
cette  île,  on  le  vit  à  plusieurs  reprises 
parler  en  faveur  de  l'émancipation  des 
catholiques.  A  son  retour  qui  eut  lieu 
après  la  paix  d'Amiens ,  il  reçut  le  cha- 
peau de  cardinal  ;  Pie  Vil  eut  pour  Ers- 


ERS 
tine  la  même  bienveillance  que  son  pré- 
décesseur ;  il  l'envoya  auprès  du  gouver- 
nementconsulaire,  et  Buonaparte  le  reçut 
avec  distinction.  Le  cardinal  Erskine  re- 
vint à  Rome,  où  il  mourut  le  19  mars 
1811.  Il  passait  pour  un  des  cardinaux 
les  plus  instruits,  parlait  et  écrivait  cinq 
langues ,  avec  autant  de  pureté  que  de 
_        facilité,  et  fut  pendant  long-temps  un 
M       des  plus  beaux  ornemens  de  la  cour  de 
m      Rome. 

m  '  ERSKIiVE  ( Henri),  avocat  célèbre , 

*^  naquit  en  Ecosse ,  suivit  la  carrière  de  la 
jurisprudence  avec  beaucoup  de  distinc- 
tion ,  fut  reçu  au  nombre  des  avocats  de 
la  faculté  écossaise  dans  un  âge  peu  avan- 
cé ,  fut  relardé  dans  ses  succès  au  bar- 
reau par  quelques  écrits  de  jeunesse  , 
et  répara  bientôt  les  pertes  de  temps  et  de 
réputation  qu'il  avait  faites.  Enfin  il  ac- 
quit une  célébrité  très  grande  dans  sa  pa- 
trie. Il  embrassa  les  opinions  des  Whigs 
avec  chaleur,  devint  le  premier  orateur 
de  l'assemblée  qu'ils  tenaient ,  fut  recher- 
jk'.  cUé  par  les  personnages  les  plus  influens 
de  ce  parti ,  notamment  par  Fox  qui  lui 
donna  la  place  de  lord-avocat  ,  qu'il 
n'exerça  que  jusqu'à  la  mort  de  ce  mi- 
nistre. Henri  Erskine  est  devenu  le  doyen 
de  la  faculté  des  avocats  d'Edimbourg.  11 
est  mort  en  1817. 

*  ERSKIIVE  (Thomas,  lord), membre  du 
parlement  d'Angleterre,  célèbre  juriscon- 
sulte ,  né  en  Ecosse  vers  17  50,  perdit 
de  bonne  heure  son  père,  et  dut  les  soins 
de  son  éducation  à  son  frère  aîné ,  qui 
lui  fit  suivre  la  carrière  de  la  marine 
(  voyez  l'article  précédent).  Il  n'y  resta 
que  peu  de  temps.  Entré  comme  enseigne 
dans  le  1"  régiment  d'infanterie  (1768  ), 
et  n'y  trouvant  pas  un  avancement  assez 
rapide,  il  quitta  le  service  militaire  (177  4) 
et  se  livra  à  l'étude  du  droit.  Après  avoir 
terminé  ses  cours  aux  universités  de  Cam- 
bridge et  de  Lincols-Inn ,  il  fut  reçu  avo- 
cat en  1778.  Bientôt  son  éloquence  le  fit 
placer  au  rang  des  jurisconsultes  les  plus 
distingués;  Erskine  prit  même  dans  ses 
plaidoyers  une  route  différente  de  celle 
qu'avaient  suivie  jusqu'alors  les  avocats  ; 
abandonnant  la  vieille  et  pédantesque 
routine  ,   il  étonna  l'auditoire  par  son 


ERS  loi 

premier  discours.  Parmi  le  grand  nombre 
de  causes  qu'il  défendit ,  on  remarque 
les  plaidoyers  qu'il  prononça  en  faveur 
du  capitaine  Baillie,  du  libraire  Carnan, 
^e  Pamiral  Keppel ,  de  lord  Gordon  ,  de 
Thomas  Paine,  de  M.  Hastings,  du  doyea 
de  St.-Asaph ,  et  surtout  dans  le  procès 
des  criminels  d'état  en  1814.  Sa  clientelle 
était  si  nombreuse  qu'il  gagnait ,  dit-on  , 
plus  de  100,000  fr.  par  an.  Nommé  mem- 
bre de  la  chambre  des  Communes  en  1 7  8 3 
par  le  bourg  de  Porstmouth ,  il  fut  con- 
stamment réélu  jusqu'en  180G,  où  il  fut 
appelé  à  la  pairie.  Il  ne  laissa  échapper 
aucune  occasion  de  combattre  le  minis- 
tère ,  surtout  dans  la  guerre  contre  la 
révolution  française,  et  en  1800 lorsqu'il 
parla  avec  tant  de  violence  de  la  nécessité 
de  faire  la  paix  avec  la  France ,  et  de  l'im- 
possibilité de  songer  an  rétablissement  de 
la  famille  des  Bourbons.  En  général ,  on 
peut  dire  qu'il  ne  soutint  pas  à  la  tribune 
la  réputation  qu'il  avait  au  barreau  et 
qu'il  continuait  toutefois  à  y  justifier.  Les 
Anglais  lui  attribuent  toutefois  l'extension 
et  le  développement  des  deux  institutions 
fondamental  es  de  leur  gouvernement,  la  li- 
berté de  la  presse  et  le  jugement  par  jury. 
Après  la  mort  de  Pitt  (1806),  il  fut  nommé 
membre  du  conseil  privé  ,  créé  baron 
avec  le  titre  de  lord,  élevé  à  la  dignité 
de  grand  chancelier  et  d'orateur  de  la 
chambre  des  pairs.  Il  perdit  cette  der- 
nière place  l'année  suivante  par  la  chute 
du  ministère  de  lord  Grenville.  Pendant 
qu'il  la  remplit,  il  ne  donna  pas  la  preuve 
de  celte  grande  connaissance  des  lois 
qu'elle  suppose  ;  aucune  de  ses  décisions 
n'est  citée  comme  autorité.  Lord  Erskine 
avait  une  belle  élocution,  mais  peu  de 
profondeur  dans  les  idées  et  peu  de  con- 
naissances en  droit.  Sa  carrière  politique 
fut  dès  lors  terminée.  Il  mourut  le  1 7  oc- 
tobre 1823.  Il  a  publié  Considérations 
sur  les  causes  et  les  conséquences  de  la 
guerre  actuelle  avec  la  France,  1797, 
pamphlet  qui  eut  43  éditions  la  même  an- 
née ,  traduit  en  Français  sur  la  23*  édi- 
tion, sous  ce  titre  :  Coup  d' œil  sur  les  cau- 
ses et  les.  conséquences  de  la  guerre 
actuelle  avec  la  France,  Paris,  17  97  , 
in- 8  ;  la  Préface  des  Discours  de  Fox  , 


loa  ERX 

et  plusieurs  brochures  récentes  en  faveur 
des  Grecs.  Ses  meilleurs  Discours  ont 
été  recueillis  et  publiés  par  ses  amis  eu 
6  vol.  in-8, 2" édition,  Londres,  1816.  Les 
plus  remarquables  ont  été  traduits  eli 
français  dans  le  tome  2  de  l'ouvrage  in- 
titulé barreau  anglais,  Paris,  1824;  il 
avait  aussi  composé  des  poésies  qui  ne 
sont  pas  sans  mérite,  entr'autres  un  petit 
poème  intitulé  Geranicum ,  qui  fut  attri- 
bué à  Shéridan ,  et  un  roman  politique 
en  2  vol. ,  intitulé  Armata. 

*  ERTBORN  ou  Hertborn  (  Joseph- 
Charles-Emmanuel  ,  baron  van  ) ,  littéra- 
teur distingué,  né  à  Anvers  en  1778. 
remplit  dans  son  pays  plusieurs  emplois 
administratifs  à  l'époque  de  la  domination 
française  ;  il  était  chargé  de  quelques 
fonctions  financières  assez  imporiantes 
lors  de  la  révolution  opérée  dans  la  Bel- 
gique en  1814.  Lorsque  le  royaume  des 
Pays-Bas  fut  définitivement  organisé,  il 
fut  nommé  directeur  des  contributions 
indirectes  de  la  province  de  Liège.  En 
1819  ,  il  fit  partie  du  conseil-général  des 
monnaies  à  Utrecht,  et  en  1821,  de  la 
chambre  des  comptes  du  royaume.  Il  s'oe- 
cupait ,  dans  les  loisirs  que  lui  laissaient 
ses  occupations  administratives,  de  tra- 
vaux scientifiques  et  littéraires;  il  s'était 
adonné  à  l'élude  des  langues ,  et  possé- 
dait très  bien  le  grec,  le  latin,  le  français, 
le  hollandais ,  l'italien  et  l'allemand.  Il  a 
publié  un  volume  de  Recherches  histo- 
riques sur  Vacade'mie  d^ Anvers,  et  sur  les 
peintres ,  sculpteurs ,  graveurs  et  archi- 
tectes qu'elle  a  produits  (  en  français  } , 
1806. 

"ERXLEBEN  (Dorothée -Chrétienne 
Léporin  ) ,  naquit  à  Quediinbourg  le  1 3 
novembre  1715.  Faible  et  valétudinaire, 
elle  assistait  avec  plaisir  aux  leçons  de 
médecine  données  à  son  frère  par  leur 
père ,  le  docteur  Chrétien-Polycarpe  Lé- 
porin. Cette  assiduité  détermina  en  elle 
son  goût  pour  la  médecine,  qu'elle  étu- 
dia sous  son  père  et  dans  les  meilleurs 
auteurs,  tels  que  Stahl,  HolTman,  Boer- 
haave ,  etc. ,  et  oii  elle  fit  de  rapides 
progrès.  Elle  fut  mariée  en  1743  à  Jean 
Chrétien  Erxlcben,  ministre  du  saint 
Evangile  à  Quediinbourg;  et  l'on  doit  dire 


ERX 

à  sa  louange  que  son  goût  pour  une  étude 
et  un  travail  qui  ne  semblent  pas  être  l'a- 
panage de  son  sexe ,  ne  l'empêcha  pas  de 
remplir  avec  un  .soin  scrupuleux  les  de- 
voirs d'épouse  et  de  mère.  Le  12  juin  1754, 
elle  obtint  solennellement  le  doctorat  à 
l'université  de  Halle.  Le  candidat  discuta 
avec  beaucoup  de  sagacité  dans  sa  disser- 
tation une  question  importante  :  Quod 
nimis  cito  ac  jucunde  curare  ,  sœpius 
fiat  causa  minus  tutce  curationis.  Parmi 
les  nombreuses  félicitations  qu'elle  reçut 
de  tous  côtés,  on  en  remarque  une  en 
stile  lapidaire  ,  du  professeur  Bochmer, 
qui  annonce  que  cette  cérémonie,  auto- 
risée par  le  grand  Frédéric,  roi  de  Prusse, 
n'avait  jamais  eu  lieu  en  Allemagne, 
Stupetc.  nova,  lit teraria.  in.Italia  non- 
nunquam.  in.  Germnnia.  Nunquam. 
visa.  vel.  audita.  etc.  Au  moment  de 
son  mariage,  elle  publia  un  opuscule  en 
allemand,  intitulé:  Examen  des  causes 
qui  e'ioigncnt  les  femmes  de  l'e'tude , 
dans  lequel  on  prouve  qu'il  leur  est  pos~ 
sible  e^  utile  de  cultiver  les  sciences  g 
Berlin,  1742,  in-8.  La  préface  appar- 
tient à  son  père.  Madame  Erxlcben  mou- 
rut le  13  juin  17G2,  laissant  quatre  en- 
fans,  dont  plusieurs  se  montrèrent  di- 
gnes d'elle. 

*  ERXLEBEN  (  Jean  -  Chrétien-  Poly- 
carpe  ) ,  naturaliste ,  fils  de  la  précé- 
dente, né  à  Quedlimbourg  en  Saxe  le  22 
juin  1744,  fut  reçu  à  23  ans,  docteur  en 
philosophie  à  l'université  de  Gottingue , 
le  5  mai  1767.  Sa  mère  avait,  par  une 
exception  honorable  et  inouïe  en  Alle- 
magne, obtenu  le  doctorat  en  médecine 
à  l'université  de  Halle  (  Voyez  l'article 
précédent);  lui-même  étudia  les  diverses 
branches  de  l'art  de  guérir  ;  mais  il  cul- 
tiva avec  prédilection  l'histoire  naturelle 
et  la  physique.  Il  fut  nommé  professeur 
ordinaire  de  philosophie  en  17  75,  et 
jouissait  déjà  d'une  réputation  étendue, 
lorsqu'il  mourut  à  la  fleur  de  l'âge ,  le  19 
août  17  77.  Il  a  laissé  plusieurs  ouvrages 
en  allemandrechcrchcs  comme  des  modè- 
les d'exactitude  et  de  précision  :  1°  Elé~ 
mens  d'histoire  naturelle,  Gottingue, 
1768  et  1773  ,  in-8,  réimprimé  en  1782 
et  noi ,  avec  des  additions  de  J.  Gcmc- 


ERY 

liu.  i"  Considérations  sur  les  causes  de 
l'imperfection  des  systèmes  mineralogi- 
ques ,  17G2,  in-4.  3°  Introduction  à  la 
médecine  vétérinaire  ,  Gotliiigue,  1709, 
in-8.  'i°  Elémens  de  physique,  1772, 
in-8  ,  réinii)rimés  plusieurs  fois  avec  des 
augmentations  importantes  par  G.  C. 
Lichtenberg.  5°  Elémens  de  chimie,  1775, 
in-8  ,  17  84  et  1790,  avec  des  notes  sup- 
plémentaires par  J.  C.  Wiegleb.  G°  Sys- 
tema  regni  animalis  cum  synomjmia  et 
historia  animalium  ,  classis  1  mamma- 
lia,  Leipsick,  17  77.  Il  n'existe  point  en 
zoologie  de  traité  plus  exact  et  plus  com- 
plet que  cette  histoire  des  mammifères. 
7°  Mémoires  physico-chimiques  ,  1777  , 
in-8.  Erxlelien  a  encore  rédigé  une  Bi- 
bliothèque physique,  dont  il  a  paru  4  vol. 
in-8 ,  et  fourni  plusieurs  articles  à  divers 
journaux. 

ERYCEYRA.  (Ferdinand de  Mknesés, 
comte  d'  ),  naquit  à  Lisbonne  en  1614. 
Après  avoir  puisé  dans  les  premières  étu- 
des le  goût  de  la  bonne  littérature  ,  il 
alla  prendre  des  leçons  de  l'art  militaire 
en  Italie.  De  retour  dans  sa  patrie  ,  il  fut 
successivement  gouverneur  de  Péniche  , 
de  Tanger  ,  conseiller  de  guerre ,  gentil- 
homme de  la  chambre  de  l'infant  don 
Pedro,  et  conseiller  d'état.  Au  milieu  des 
occupations  de  ces  diverses  places,  le 
comte  d'Eryccyra  trouvait  des  momens  à 
donner  à  la  lecture  et  à  la  composition. 
On  peut  consulter  le  Journal  étranger  , 
de  17  57,  sur  ses  nombreux  ouvrages.  Les 
principaux  sont  :  1  °  L'Histoire  de  Tan- 
ger,  imprimée  in-folio,  en  1723.  2° 
L'Histoire  de  Portugal,  depuis  1640, 
jusqu'en  1657  ,  en  2  vol.  in-folio.  Z°  La 
vie  de  Jean  I ,  roi  de  Portugal.  Ces  dif- 
férens  livres  sont  utiles  pour  la  connais- 
sance de  l'histoire  de  son  pays. 

ERYCEYRA  (  François-Xavier  de  Me- 
HEsÈs,  comte  d'  ),  arrière  petitfils  du 
précédent  et  héritier  de  la  fécondité  de 
son  bisaïeul,  naquità  Lisbonne  en  1672. 
Il  porta  les  armes  avec  distinction ,  ob- 
tint, en  1735,  le  titre  de  mestre-de-camp 
général  et  de  conseiller  de  guerre,  et 
mourut  en  1743,  à  70  ans.  Il  n'était  pas 
grand  seigneur  avec  les  savans:  il  n'était 
qu'homme  de  lettres ,  aisé ,  poli ,  com- 


ESC  io3 

municatif.  Le  pape  Benoît  Xlll  l'honora 
d'un  bref;  le  roi  de  France  lui  fit  présent 
du  Catalogue  de  sa  bibliothèque.  L'aca- 
démie de  Pétersbourg  lui  adressait  ses 
mémoires  ;  une  partie  des  écrivains  de 
France,  d'Angleterre,  d'Italie,  etc.  ,  lui 
faisaient  hommagede  leurs  écrits.  Ses  an- 
cêtres lui  avaient  laissé  une  bibliothèque 
choisie  et  nombreuse ,  qu'il  augmenta  de 
15,000  volumes  et  de  1000  manuscrits. 
Sa  carrière  littéraire  a  été  remplie  par 
plus  de  cent  ouvrages  différens.  Les  plus 
connus  en  France  sont  :  1°  Mémoire  sur 
la  valeur  des  monnaies  de  Portugal  y 
depuis  le  commencement  de  la  monar- 
chie ,  in-4  ,  1 738.  2°  Réflexions  sur  les 
études  académiques.  3°  58  parallèles 
d'hommes  et  i2  de  femmes  illustres. 
4°  La  Henriade  ,  poème  héroïque ,  avec 
des  observations  sur  les  règles  du  poème 
épique,  in-4,  1741.  5°  L' art  poétique 
de  Boileau  ,  traduit  en  portugais. 

ERYTROPHILE  (  Rupert  ) ,  théolo- 
gien du  17^  siècle,  et  ministre  à  Hano- 
vre, est  auteur  d'un  Commentaire  métho- 
dique sur  l'histoire  de  la  Passion.  On  a 
encore  de  lui  :  Catence  aureœ  in  harmo- 
nium evangelicam. ,  in-4. 

ESAU ,  fils  d'isaac  et  de  Fiébecca  ,  né 
l'an  1836  avant  J.  C,  vendit  à  Jacob, 
son  frère  jumeau  ,  son  droit  d'aînesse,  à 
40  ans,  et  se  maria  à  des  chananéennes 
contre  la  volonté  de  son  père.  Ce  respec- 
table vieillard  lui  ayant  ordonné  d'aller  à 
la  chasse  pour  lui  apporter  de  quoi  man- 
ger ,  lui  promit  sa  bénédiction;  mais  Ja- 
cob la  reçut  à  sa  place,  par  l'adresse  de 
sa  mère  (  voyez  Rébecca  ).  Les  deux  frè- 
res furent  dès  lors  brouillés  ;  mais  ils  se 
réconcilièrent  ensuite.  Jacob  se  retira 
chez  son  oncle  Laban.  Esaù  mourat  à 
Seïr  en  Idumée,  l'an  1710  avant  J.  C.  , 
âgé  de  127  ans,  laissant  une  postérité  très 
nombreuse. 

ESCALE  (Mastin  del'  ),  d'une  famille 
que  Villani  fait  descendre  d'un  faiseur 
d'échelles  nommé  Jacques  Fico  ,  fut  élu 
en  1259  podestat  de  Vérone ,  où  ses  pa- 
rens  tenaient  un  rang  distingué.  On  lui 
donna  ensuite  le  titre  de  capitaine  per- 
pétuel ,  et  il  fut  dès  lors  comme  souve- 
rain. Mais  quoiqu'il  gouvernât  ce  petit 


io4  ESC 

état  avec  beaucoup  de  prudence,  son 
grand  pouvoir  souleva  contre  lui  les  plus 
riches  habitans.  Il  fut  assassiné  en  1273. 
Ses  descendans  conservèrent  et  augmen- 
tèrent même  l'autorité  qu'il  avait  acquise 
dans  Vérone.  Mastin  III  de  l'Escale,  génie 
remuant  et  ambitieux ,  ajouta  non-seu- 
lement Vicence  et  Bresce  à  son  domaine 
de  Vérone  ;  il  dépouilla  encore  les  Car- 
rare de  Vadoue  dont  il  fit  Albert  son 
frère  gouverneur.  Celui-ci ,  livré  à  la 
débauche  ,  vexa  ses  sujets ,  et  enleva  la 
femme  d'un  des  Carare  dépossédés,  qui 
sachant  dissimuler  à  propos,  flattèrent 
l'orgueil  des  deux  frères.  Mastin  ,  le  plus 
entreprenant  des  deux ,  ne  tarda  pas  de 
s'attirer  la  haine  des  Vénitiens  en  faisant 
faire  du  sel  dans  les  lagunes.  Ces  répu- 
blicains ,  jaloux  de  ce  droit  qu'ils  vou- 
laint  rendre  exclusif,  firent  la  guerre 
aux  l'Escale,  rendirent  Padoue  aux  Car- 
rare, s'emparèrent  de  la  Marche  Tré- 
visane,  et  enfermèrent  Mastin  en  1339 
dans  son  petit  état  de  Vérone  et  de  Vi- 
cence. Ce  tyran  subalterne  avait  commis, 
dans  le  cours  de  la  guerre ,  des  cruautés 
inouïes.  Barthélemi  de  l'Escale ,  évêque 
de  Vérone ,  ayant  été  soupçonné  de  vou- 
loir livrer  cette  ville  aux  Vénitiens, 
Mastin  son  cousin  le  tua  sur  la  porte  de 
son  palais  épiscopal  le  28  août  1338.  Le 
pape  ayant  appris  ce  meurtre ,  soumit  à 
une  pénitence  publique  Mastin,  qui,  après 
l'avoir  subie,  jouit  paisiblement  du  Vé- 
ronais.  Mais  en  1387  il  fut  enlevé  à  sa 
famille.  Antoine  de  l'Escale,  homme 
courageux,  mais  cruel,  souillé  du  meur- 
tre de  son  frère  Barthélemi ,  se  ligua 
avec  les  Vénitiens  pour  faire  la  guerre 
aux  Carrare.  Son  bonheur  et  ses  succès 
alarmèrent  le  duc  de  Milan ,  qui  s'empa- 
ra en  1387  de  Vérone  et  de  Vicence.  An- 
toine ,  réduit  à  l'état  de  simple  particu- 
lier, obtint  une  asile  et  le  titre  de  noble 
k  Venise.  Mastin  III  avait  eu  un  fils  ap- 
pelé Caç  le  Grand ,  et  ce  fils ,  un  bâtard 
pommé  Guillaume ,  héritier  de  sa  valeur 
et  de  son  ambition.  Celui-ci,  secondé  par 
François  Carrare,  seigneur  de  Padoue, 
ge  remit  en  possession  de  Vérone  et  de 
Vicence  en  1403.  Son  pouvoir  commen- 
çait à  être  respecte ,  lorsque  le  même  Car- 


ESC 

rare,  qui  l'avait  aidé  à  reprendre  l'auto- 
rité de  ses  ancêtres  ,  l'empoisonna  pen- 
dant le  cours  d'une  visite  qu'il  lui  avait 
faite ,  sous  prétexte  d'aller  lui  faire  com- 
pliment. Cptte  perfidie  fut  un  crime 
inutile.  Les  Vicentins  et  les  Véronais, 
ne  voulant  pas  reconnaître  ce  scélérat , 
et  las  d'être  disputes  par  de  petits  ty- 
rans ,  se  donnèrent  à  la  république  de 
Venise  en  1406.  Bnuiorode  l'Escale,  der- 
nier rejeton  de  cette  famille  ambitieuse, 
tenta  en  vain  en  1410  de  rentrer  dans 
Vérone  :  il  échoua  contre  les  forces  Véni- 
tiennes. Les  Scaliger  qui  portèrent  dans 
la  république  des  lettres,  le  ton  d'inso- 
lence et  de  hauteur  que  les  l'Escale 
avaient  à  Vérone  prétendaient  être  des- 
cendus d'eux  ;  mais  on  leur  prouva  que 
leur  vanité  se  fondait  sur  des  chimères. 

ESCALIN.  Foycz  Garde  (  Antoine  Is- 
calin  ,  et  non  Escalin  baron  de  la  ). 

*ESCARS  (Jean-François  de  Pérusse, 
duc  d'  ),  naquit  le  13  novembre  1747. 
II  avait  un  frère  aîné  qui  était  l'espoir  de 
ses  parens  et  qui  mourut  jeune  encore. 
Avant  cet  événements!  malheureux  pour 
sa  famille,  Jean-François  d'Escars  était 
entré  comme  cadet  dans  l'ordre  de  Malte 
cil  il  servit  d'abord  sur  mer ,  et  ensuite 
sur  terre.  En  1774,  il  devint  colonel  des 
dragons  d'Artois.  Après  avoir  épousé  en 
1783,  la  fille  du  fameux  banquier  La- 
borde ,  il  devint  en  17  88,  maître-d'hô- 
tel du  roi  en  survivance,  et  maréchal- 
de-carap.  En  1791  ,  il  quitta  la  France 
et  se  rendit  auprès  des  princes  qui  étaient 
réunis  sur  les  bords  du  Rhin,  et  qui  le 
chargèrent  d'une  mission  diplomatique 
auprès  de  Gustave  III ,  roi,  de  Suède. 
Il  resta  plusieurs  années  à  la  cour  de 
Stockholm ,  oii  il  paraissait  jouir  d'un 
grand  crédit ,  et  où  il  n'en  eut  cependant 
pas  assez  pour  empêcher  que  l'envoyé  de 
la  république  française  ne  fut  accueilli 
par  la  gouvernement  suédois  (  1792  ).  Le 
baron  d'Escars  était  encore  en  Suède  lors- 
que le  roi  Gustave  tomba  sous  les  coups 
d'un  assassin.  Après  ce  fatal  événement, 
il  reçut  de  nouvelles  instructions  des 
princes,  et  se  rendit,  d'après  leur  ordre,  à 
Berlin ,  oii  le  gracieux  accueil  qu'il  reçut 
du  roi  l'engagea  à  reprendre  du  service 


I 


I 


ESC 

dans  l'année  prussienne.  C'est  à  cette  épo- 
que qu'il  contracta  un  nouveau  mariage 
avec  M""*  de  Nadaillac,  femme  d'esprit , 
que  quelques  imprudences  commises  sous 
le  gouvernement  impérial  firent  exiler  aux 
îles  Ste. -Marguerite,  d'où  elle  eut  ensuite 
la  permission  de  se  rendre  dans  la  Tou- 
raine.  Le  baron  d'Escars  fut  nommé  lieu- 
tenant-général par  Louis  XVllI ,  qui  lui 
donna  la  charge  de  premier  maître-d'hô- 
tel.  Il  reçut  aussi  le  litre  de  duc  dans  le 
mois  de  mars  1816,  et  mourut  le  9  sep- 
tembre 1828.  C'était  un  de  ces  hommes 
de  cour  dont  la  fidélité  à  leur  maître  ne 
fut  jamais  couverte  d'aucun  nuage. 

*  ESCARS  (  François- Nicolas -René, 
comte  de  Pérusse  d'  ) ,  cousin  du  précé- 
dent ,  pair  de  France,  né  le  1 2  mars  1759, 
fut  élu  député  aux  états-généraux  par  la 
noblesse  de  Châteilerault.  Dans  cette  as- 
semblée signalée  par  tant  de  trahisons, 
il  resta  fidèle  aux  principes  de  la  monar- 
chie ;  il  se  prononça  contre  la  révolution 
et  signa  toutes  les  protestations  que  fit 
la  minorité  monarchique  contre  les  déci- 
sions de  la  majorité  constitutionnelle.  U 
quitta  la  France  avec  le  comte  d'Artois, 
dont  il  était  le  gentilhomme  d'honneur 
et  qui  le  fit  son  capitaine  des  gardes.  Il 
prit  pari  aux  campagnes  des  émigrés  ;  ce 
qui  lui  valut  en  1794  le  grade  de  maréchal- 
de-camp.  Lorsque  les  Bourbons  revinrent 
en  France,  le  comte  d'Escars  fut  nommé 
lieutenant  -  général ,  reprit  sa  place  de 
capitaine  des  gardes  de  Monsieur,  fut 
élevé  au  rang  de  commandeur  de  St.- 
Louis ,  et  de  pair  de  France.  U  fut  aussi 
gouverneur  de  la  4™®  division  militaire, 
et  mourut  le  30  décembre  1822.  Il  appar- 
tient, comme  le  précédent,  à  une  famille 
chez  laquelle  la  fidélité  au  roi  est  une  ha- 
bitude, je  dirais  presque  une  nécessité. 

*  ESGHELS-KROON  (  Adolphe  )  , 
voyageur  danois,  né  en  1736  à  JN'ieblura 
dans  le  duché  de  Sleswich ,  passa  18  ans 
dans  les  Indes  orientales ,  où  il  fut  d'a- 
bord résident  de  la  compagnie  hollan- 
daise ,  ensuite  agent  du  Danemarck  ;  en- 
fin il  se  retira  à  kiel,  où  il  mourut  le  18 
octobre  1793.  On  a  de  lui  en  allemand  : 
1°  Description  de  l'île  de  Sumatra,  con- 
sidérée principalement  sous  le  rapport 

V. 


ESC  io5 

du   commerce,    1782,  in-8,  avec    une 
bonne  carie.  Celle  relation  est  utile  pour 
rectifier  beaucoup  de  notions  fausses  que 
des  ouvrages  publiés  antérieurement  pou- 
vaient faire  prendre  sur  Sumatra.  2°  Re- 
lation authentique  de  Ve'tat  actuel  des 
principales  îles  de  VOcéan  indien,  sur- 
tout de  Bornéo.  3"  Description  de  Ban- 
da, d'Amboine,  de  Ceylan,  etc.  Cette 
dernière  description  a  été  traduite   en 
français  par  Langlès,  dans  le  recueil  in- 
titulé Description  du  Pcgu  et  de  Vile  de 
Ceylan ,  Paris ,  1793. 
*      *  ESCHENBURG  (Jean-Joachim),  cri- 
tique allemand,  né  à  Hambourg  le  7  dé- 
cembre 1 7  48, et  mortle  29  février  1 820, fut 
gouverneur  public  des  élèves  du  collège 
Carolinà  Brunswick.  U  consacra  toute  sa 
vie  à  l'enseignement;  et  les  bons  prin- 
cipes de  morale  qu'il  répandit  furent  pro- 
fessés par  cet  ami  de  la  jeunesse  ,  non- 
seulement  par  ses  paroles ,  mais  encore 
par  ses  actions.  Il  a  publié  les  ouvrages 
suivans  ;  1°  Muse'e  britannique  pour  les 
allemands,  Leipsick,  1770,  1781,  7  vol. 
in-8;  2°  Commentaire  de  Hurd  sur  les 
épitres  d'Horace  ,  traduit  de  l'anglais  , 
Leipsick,  1772,  2  vol.  in-8;  Z°  Théâtre 
de  Shakespeare,  traduit  de  l'anglais,  Zu- 
rich, 1776-87,  14  vol.  in-8;  2«  édition, 
1798-1806,  12  vol.  in-8  ;  celte  traduction 
est  préférée  à  celle  de  Wielaud  ;  4"  Pré- 
cis d'une  théorie  et  d'un  cours  de  belles- 
lettres ,  Berlin,  1783,  in-8;  6«  édition, 
1813,  traduit  en  français  par  Storch,  sous 
le  titre  de  Principes  généraux  de  belles- 
lettres ,  Saint-Pétersbourg,   1789,  in-8; 
b°  Manuel  de  la  littérature  classique  de 
l'antiquité,  et  de  la  mythologie ,  Berlin, 
1 7  83,in-8;6«  édition,  1816,  traduit  en  fran- 
çais par  Cramer,  Paris,  1 802,  2  vol.  in-8; 
Q°Collection  d'extraits  tirés  des  meilleurs 
auteurs  anciens  et  modernes  dans  tous 
les  genres  de  poésie  et  d'éloquence,  Ber- 
lin, 1788-95,  9  vol.  in-8;  7°  Manuel  de 
l'étude  des  sciences,  1792  et  1800,  in-8; 
8°  Monumens  de  la  poésie  et  de  la  langue 
allemande  ancienne,  Brème,  1799,  in-8; 
9°  plusieurs  traductions  d'ouvrages  fran- 
çais et  anglais,  entre  autres  celle  de  VEs~ 
ther  de  Racine ,  en  vers  allemands.  II  a 
coopéré  à  un  grand  nombre  de  journaux 

1". 


io6  ESC 

et  recueils  përiodiques.  11  a  donné  en  ou- 
tre une  édition  des  œuvres  posthumes  de 
Lessing,  avec  des  notes,  Berlin,  nUO. 

*  ESCHER,  DE  La  Linth  (Jean  Conrad), 
géologue  suisse,  né  à  Zurich  le  24  août 
nC7,  mort  dans  la  même  ville  le  9  mars 
1823,  était  fils  d'un  conseiller  d'état  de 
ce  canton.  Il  At  ses  études  à  Genève  d'où 
il  revint  dans  sa  patrie  pour  s'occuper  de 
ses  intérêts  politiques.  Après  avoir  con- 
sacré quelque  temps  aux  exercices  mili- 
taires imposés  à  tous  les  habitans  de  la 
Suisse ,  il  étudia  les  dififérens  gouverne- 
mens  des  cantons  et  chercha  à  connaître 
ce  qui  pouvait  contribuer  le  plus  à  leur 
prospérité  réelle  et  présente.  Il  fixa  son 
attention  sur  Véconomie  industrielle  et 
rurale.  Ce  fut  dans  le  but  d'étudier  celte 
science  qu'il  fit  un  séjour  de  deux  ans  à 
l'université  de  Gottingue  où  il  s'occupa 
aussi  de  la  minéralogie,  de  la  géologie, 
et  de  la  statistique  II  parcourut  aussi  l'An- 
gleterre et  l'Italie  pour  y  visiter  et  con- 
naître leursprincipales  manufactures. Mal- 
gré ces  goûts  qui  semblent  être  l'apanage 
exclusif  des  âmes  tranquilles,  il  adopta 
les  principes  de  la  révolution  française, 
fut  élu  membre  du  grand  conseil  helvé- 
tique et  coopérer  à  la  rédaction  du  j  ournal 
démocratique  qui  paraissait  alors  sous  le 
titre  de  Républicain  suisse.  Lorsque  Buo- 
naparte  eut  imposé  son  joug  sur  l'helvé- 
tie,  Escher  rentra  dans  la  vie  privée. 
Quelques  années  après  il  devint  conseil- 
ler d'état  ;  mais  il  ne  s'occupa  guère  que 
du  dessèchement  des  marais  de  la  Linth 
dont  il  fut  chargé  par  la  diète  concur- 
ramment  avec  une  commission  dont  il  fut 
nommé  président.  Abandonné  pendant 
l'exécution  de  ce  projet  éminemment 
utile,  il  n'en  discontinua  pas  ses  travaux  : 
il  alla  lui-même  habiter  ces  marais  pesti- 
lentiels, et,  de  1807  à  1816,  il  ne  s'occupa 
que  de  cet  objet.  Ses  efforts  furent  cou- 
ronnés par  le  plus  heureux  succès.  La 
Linth  qui  se  perdait  autrefois  dans  des 
terres  marécageuses,  coule  maintenant 
par  deux  canaux  dont  l'un  conduit  une 
partie  de  ses  eaux  dans  le  lac  de  Wesen 
et  l'autre  dans  celui  de  Zurich.  Dès  lors 
le  pays  qui  avait  été  jusqu'à  cette  époque 
très  malsain   a  vu  disparaître  les  fièvres 


ESC 

qui  désolaient  ses  habitans.  Pour  prix 
d'un  si  grand  bienfait ,  Escher  ne  voulut 
recevoir  que  le  surnom  de  la  Linth  ajouté 
à  son  nom.  On  trouve  sur  les  travaux  qu'il 
a  fait  exécuter  des  détails  curieux  dans 
la  Bibliothèque  universelle  de  Genève  , 
(sciences  et  arts,  année  1819),  et  dans  le 
tome  27  de  la  Revue  encyclopédique.  On 
remarque  dans  la  même  Bibliothèque 
universelle  et  dans  différens  journaux  al- 
lemands, des  Mémoires  et  Dissertations 
d'Escher  sur  divers  points  de  la  géologie 
de  la  Sui.sse.  Des  tnédailles  d'or,  d'argent 
«t  de  bronze  ont  été  gravées  pour  conser- 
ver sa  mémoire;  et  le  professeur  Vaucher 
a  publié  une  notice  assez  étendue  sur  sa 
vie,  insérée  dans  le  tome  22  de  la  Biblio- 
thèque de  Genève. 

*  ESGHERNY  (François -Louis  n' ) , 
comte  du  St. -Empire,  ancien  chambellan 
du  roi  de  Wurtemberg,  naquit  à  Neuchàtel 
(Suisse)  en  1734,  et  mourut  à  Paris  en 
1816.  11  est  auteur  des  ouvrages  suivans  : 
1  °  Lacunes  de  la  philosophie,  1 7  8  3,  in- 1 2 . 
2°  Correspondance  d'un  habitant  de  Pa- 
ris avec  ses  amis  de  Suisse  et  d'Angle- 
terre, sur  les  événemens  de\1 90 jusqu'au 
4  avril  1791,  Paris,  1791  ,  in-8,  réim- 
primée en  1816,  sous  le  litre  de  Tableau 
historique  de  la  révolution,  2  vol.  in-8; 
3°  de  V Egalité,  ou  Principes  généraux 
sur  les  institutions  civiles ,  politiques  et 
religieuses,  précédés  de  V éloge  de  J.  J. 
Rousseau,  1796,  2  vol.  in-8;  reproduits 
sous  ce  titre  :  la  Philosophie  de  la  poli- 
tique, ou  Principes  généraux  sur  les  in- 
stitutions sociales,  Paris,  1798,  in-8. 
4"  Mélanges delittérature,  d'histoire,  de 
morale  et  de  philosophie ,  1809,  3  vol. 
in-12  ;  quelques  volumes  portent  le  titre 
de  la  seconde  édition  avec  la  date  de  1 8 1 5; 
5"  Fragmens  sur  la  musique,  etc.,  1 809, 
in-12.,  extrait  du  précédent. 

ESCHINE,  célèbre  orateur  grec,  na- 
quit à  Athènes  l'an  397  avant  J.  C. ,  3  ans 
après  la  mort  de  Socrate  et  16  ans  avant 
la  naissance  de  Démosthènes.  Si  l'on 
ajoute  foi  à  ce  qu'il  dit  de  lui-même ,  il 
était  d'une  naissance  distinguée,  et  il 
avait  porté  les  armes  avec  éclat  ;  et  si 
l'on  adopte  le  récit  de  Démosthènes, 
E.schine  était  le   fils  d'une  courtisane. 


ESC 

Il  aidait  sa  mère  à  initier  les  novices  dans 
les  mystères  de  Bacchus ,  et  courait  les 
rues  avec  eux.  Il  fut  ensuite  greffier  d'un 
petit  juge  de  village;  et  depuis  il  joua 
les  troisièmes  rôles  dans  une  bande 
de  comédiens,  qui  le  chassèrent  de  leur 
troupe.  Ces  deux  récits  sont  fort  dif- 
férens  :  si  celui  de  Démosthènes  est 
faux,  il  sert  à  prouver  que,  dans  tous  les 
temps ,  les  gens  de  lettres  ont  été  jaloux 
les  uns  des  autres;  et  que  cette  jalousie  a 
produit,  dans  les  siècles  passés  comme 
dans  le  siècle  présent,  des  injures  et  des 
personnalités  révoltantes.  Qjioi  qu'il  en 
soit,  Eschine  ne  fit  éclater  ses  talens  que 
dans  un  âge  assez  avancé.  Ses  déclama- 
tions contre  Philippe  ,  roi  de  Macédoine, 
commencèrent  à  le  faire  connaître.  On  le 
députa  à  ce  prince  ;  et  le  déclamateur 
emporté  ,  gagné  par  l'argent  du  monar- 
que ,  devint  le  plus  doux  des  hommes.  Dé- 
mosthènes le  poursuivit  comme  prévari- 
cateur ,  et  Eschine  aurait  succombé  sans 
le  crédit  d'Eubulus.  Le  peuple  ayant  vou- 
lu quelque  temps  après  décerner  une 
couronne  d'or  à  son  rival ,  Eschine  s'y 
opposa  ,  et  accusa  dans  les  formes  Ctési- 
phon ,  qui  avait  le  premier  proposé  de 
la  lui  donner.  Les  deux  orateurs  pronon- 
cèrent en  cette  occasion  deux  discours , 
qu'on  aurait  pu  appeler  deux  chefs-d'œu- 
vre ,  s'ils  ne  les  avaient  encore  plus  char- 
gés d'injures  que  de  traits  d'éloquence. 
Eschine  succomba;  il  fut  exilé.  Dégoûté 
du  métier  de  rhéteur,  il  passa  à  Samos, 
cil  il  mourut  peu  de  temps  après ,  à  7  5  ans. 
Les  Grecs  avaient  donné  les  noms  des 
Grâces  à  trois  de  ses  harangues ,  et 
ceux  des  Muses  à  neuf  de  ses  épîtres. 
Ces  trois  discours  sont  les  seuls  qui  nous 
restent.  Eschine  ,  plus  abondant ,  plus 
orné  ,  plus  fleuri ,  devait  plutôt  plaire  à 
ses  auditeurs  que  les  émouvoir  ;  Démos- 
thènes ,  au  contraire ,  précis ,  mâle,  ner- 
veux, plus  occupé  des  choses  que  des 
mots ,  les  étonnait  par  un  air  de  gran- 
deur ,  et  les  terrassait  par  un  ton  de  force 
et  de  véhémence.  Le  premier  avait  plus 
d'esprit ,  le  second  plus  de  génie.  Les  ha- 
rangues d'Eschineont  été  recueillies  avec 
celles  de  Lysias ,  d'Andocides ,  d'isée ,  de 
Dioarque,  d'Antiphon,  dcLycurgue,  etc., 


ESC 


lO- 


par  les  Aides ,  3  vol.  in-fol.,  1513.  (  Us  se 
trouvent  aussi  dans  les  orateurs  grecs 
deReiske,  Leipsick,  1770-7  5.  L'abbé  Au- 
ger  a  donné  une  traduction  d'Eschine  avec 
celle  de  Démosthènes,  Paris,  177  7,5  vol. 
in-8.  Cette  Traduction  a  été  revue  par 
Planche  avec  le  texte  grec  en  regard,  1 820- 
1822,10vol.  in-8.  J 

ESCHINE,  philosophe  grec.  On  ignore 
le  temps  auquel  il  vivait.  Nous  avons  de  lui 
des  dialogues  avec  les  notes  de  Le  Clerc, 
Amsterdam,  1711,  in-8,  qui  se  joignent 
aux  auteurs  cum  notis  variorum. 

*ESCHroS  (Nicolas)  naquit  en  1507 
à  Nordwik ,  près  Bois-le-Duc.  Ayant  été 
ordonné  prêtre  à  Cologne,  son  savoir  et 
sa  piété  lui  valurent  l'offre  honorable  de 
se  charger  de  l'éducation  du  jeune  duc  de 
Juliers.  Mais  la  vie  de  la  cour  ne  conve- 
nait pas  au  caractère  d'Eschius  :  il  n'au- 
rait pu  être  témoin  des  désordres  qui  y 
régnent  ordinairement.  Il  refusa  cet  em- 
ploi honorable,  préférant  consacrer  ses 
tî-'p.ns  à  la  direction  d'une  modeste  école. 
Il  y  forma  des  élèves  aussi  utiles  à  l'état 
qu'à  l'Eglise.  On  compte  parmi  ceux  qui 
profitèrent  le  plus  de  ses  soins,  Pierre  Caui- 
sius,  jésuite,  et  Laurent  Surius,  chartreux. 
S'étant  lié  avec  ce  dernier  et  plusieurs 
autres  religieux  du  même  ordre ,  il  réso- 
lut d'embrasser  leur  institut  ;  mais  la  fai- 
blesse de  sa  santé  s'opposa  à  son  pieux 
dessein.  Il  voulut  du  moins  imiter  leur 
vie  solitaire ,  et  obtint  une  cellule  dans 
la  chartreuse ,  où  il  mena  une  vie  édi- 
fiante. Les  supérieurs  ecclésiastiques  pen- 
sant devoir  employer  ses  talens  et  sa  piété 
à  procurer  le  salut  d'autrui ,  le  nommè- 
rent archiprêtre  de  Diest ,  et  le  chargè- 
rent en  même  temps  de  la  direction  du 
béguinage  de  cette  ville.  Eschius  s'ac- 
quitta avec  zèle  de  ces  deux  emplois  et 
forma  divers  établissemens  pieux.  Il  ter- 
mina en  1578  une  carrière  qu'il  avait 
sanctifiée  par  la  pénitence  et  les  bonnes 
œuvres.  Sa  vie  a  été  écrite  par  Arnould 
de  Jean ,  son  successeur  dans  la  direc- 
tion du  béguinage  de  Diest.  On  a  de  ce 
vénérable  ecclésiastique  1°  Exercices 
de  piété,  en  latin  ,  Anvers ,  1 563  ,  in-8, 
15G9,  in-16.  Ils  ont  été  traduits  en  fla- 
mand et  réimprimés  en  1713.  On  trouve 


io8  ESC 

dans  celle  dernière  édilion  la  yie  d'Es- 
chiiis,  traduite  aussi  en  flamand.  2°  Isn- 
goge  ad  vitam  introversam  capcssen- 
dam ,  à  Ja  tête  d'un  livre  intilulé  :  Tem~ 
plum  animœ  publié  par  Eschius,  An- 
vers, 15G3,  in-8.  Margarila  cvnngeUca  , 
Jivre  de  spiritualité,  traduit  du  flamand 
en  latin.  Cet  ouvrage  et  le  Tcmplum 
animée  apparliennent  à  une  sainte  fille 
dont  on  ignore  le  nom.  La  Margarila 
a  été  souvent  réimprimée  en  latin ,  en 
français,  en  flamand  et  en  allemand. 

ESCHYLE,  né  à  Athènes  d'une  des 
plus  illustres  familles  de  l'Allique ,  signa- 
la  son  courage  aux  journées  de  Marathon, 
de  Salamine  et  de  Platée;  mais  il  est  moins 
célèbre  par  ses  combats  que  par  ses/>oe'«e,r 
dramatiques.  II  perfectionna  la  tragédie 
grecque,  que  Thespis  avait  inventée.  Il 
donna  auxacteursun  masque  unhabitplus 
décent,  une  chaussure  plus  haute,  appe- 
lée cothurne,  et  les  fit  paraître  sur  des  plan- 
ches rassemblées  pour  en  former  un  théâ- 
tre. Auparavant  ilsjouaient  sur  un  tom^'j- 
reau  ambulant,  comme  quelques-uns  de 
ïios  comédiens  de  campagne.  Eschyle  ré- 
gna sur  le  théâtre,  jusqu'à  ce  que  Sophocle 
lui  disputa  le  prix  et  l'emporta.  Ce  vieil- 
lard ne  put  soutenir  l'atfront  d'avoir  été 
vaincu  par  un  jeune  homme.  Il  se  retira 
\i  la  cour  d'Hiéron ,  roi  de  Syracuse ,  le 
plus  ardent  protecteur  qu'eussent  alors 
les  lettres.  On  raconte  qu'il  perdit  la  vie 
par  un  accident  très  singulier.  Dn  jour 
qu'il  dormait,  dit-on,  à  la  campagne,  un 
aigle  laissa  tomber  une  tortue  sur  sa  tête 
chauve,  qu'il  prenait  pour  la  pointe  d'un 
rocher.  Le  poète  mourut  du  coup  vers 
l'an  477  avant  J.  C.  Il  paraît  que  l'aigle 
a  la  vue  trop  perçante ,  pour  ne  pas  dis- 
tinguer la  tête  d'un  homme ,  de  la  pointe 
d'un  rocher.  Cependant  les  historiens  se 
plaisent  à  répéter  celte  catastrophe  sin- 
gulière. On  ajoute  qu'un  astrologue  avait 
prédit  à  Eschyle  qu'il  mourrait  delà  chute 
d'une  maison  ,  et  que  pour  cela  il  se  tenait 
presque  toujours  en  rase  campagne  Ce 
poète  a  de  l'élévation  et  de  l'énergie;  mais 
elle  dégénère  souvent  en  enflure  et  en 
rudesse.  Ses  tableaux  offrent  de  trop 
grands  traits,  des  images  gigantesques 
et  épouvantables  ;  ses  fictions  sont  hors 


ESC  . 

de  la  nature,  ses  personnages  mon- 
strueux. Il  écrivait  en  énergumène,  et, 
pour  tout  dire,  en  homme  ivre.  La  repré- 
sentation de  ses  Eumdnides  était  si  ter- 
rible, que  l'effroi  et  le  tumulte  qu'elle 
causa ,  fit  écraser  des  enfans  et  blesser 
des  femmes  enceintes.  (Ses  tragédies  sont 
au  nombre  de  60  ,  d'après  l'auteur  grec 
de  sa  vie  et  de  90  selon  Suidas.  Sept 
seulement  ont  été  conservées.  )  Les  meil- 
leures éditions  de  ces  pièces  sont  celles 
de  Henri  Etienne ,  1 557  ,  in-4  ;  et  de  Lon- 
dres, in-fol.,  1GG3,  par  Stanley,  avec 
des  scholies  grecques,  une  version  latine 
et  des  commentaires  pleins  d'érjudition. 
Celle  de  Paw,  la  Haye',  1745,  2  vol, 
in-4  ,  est  moins  estimée  ;  mais  celle  de 
Glascow,  1746,  2  vol.  in-8,  est  précieuse 
pour  la  beauté  de  l'exécution.  M.  Schutz 
en  a  donné  une  très  bonne  édition  en 
1 782,  Halle,  3  vol.  in-l  8.  (Brunck  et  MM. 
Hermann  ,  Wolf  et  Bloomfidd  ont  isolé- 
ment publié  différentes  pièces  de  ce  grand 
tragique  dont  la  Trilogie  éditée  par  le 
professeur  F.  Th.  Welker  a  paru  en  1824, 
Darmstadt,  grand  in-8.)  On  en  a  imprimé 
une  traduction  française,  élégante  et  fi- 
dèle, Paris,  17  70,  in-8,  par  M.  Le  Franc 
de  Pompignan.  M.  Laporte  du  Theil  en  a 
publié  une  nouvelle  traduction,  Paris, 
1794,  2  vol.  in-8,  accompagnée  du 
texte  grec ,  d'après  l'édition  de  Stanley. 
(Cette  dernière  fait  partie  du  théâtre  des 
grecs  du  P.  Brumoy  que  vient  de  revoir 
et  de  réimprimer  M.  Raoul-Rochette.  ) 

ESCOBAR  (  Barthélerai  )  ,  pieux  et 
savant  jésuite,  né  à  Séville  en  1558, 
d'une  famille  noble  et  ancienne ,  avait 
de  grands  biens ,  qu'il  employa  tous  en 
œuvres  de  charité.  Son  zèle  le  conduisit 
aux  Indes ,  où  il  prit  l'habit  de  religieux. 
Il  mourut  à  Lima  en  1624.  On  a  de  lui 
1  °  Conciones  quadragesimales  et  de  Ad- 
ventu,  in-fol.  2°  De  fe.slis  Domini.  3" 
Scrmones  de  historiis  sacrœ  Scripturœ. 
Ses  ouvrages  ne  sont  guère  connUs  qu'en 
Espagne. 

ESCOBAR  (  Marine  d'  ) ,  née  à  Valla- 
doliden  (554,  morte  saintement  en  1633, 
est  la  fondatrice  de  la  récollection  de 
Sainte-Brigitte  en  Espagne.  Le  P.  Du- 
pont, sou  confesseur,  laissa  des  mémoirei 


I 


ESC 

sur  sa  vie,  qu'on  fit  imprimer  in  fol.  Ce 
livre  est  devenu  très  rare. 

ESCOBAR  (  Antoine  )  ,  de  l'illustre 
maison  de  Mendoza ,  jésuite  ,  né  à  Valla- 
dolid  en  1689,  mort  en  16G9  ,  k  80  ans  , 
est  auteur  de  plusieurs  ouvrages ,  dont 
les  plus  connus  sont  ses  Commentaires 
sur  l'Ecriture  sainte,  Lyon,  1667  ,  9  vol. 
in  folio ,  et  sa  Théologie  morale ,  (Lyon , 
1663 ,  7  vol.  in  folio  dans  laquelle  il  élar- 
git un  peu  trop  le  chemin  du  salut.  Ses 
principes  de  morale  ont  été  tournés  en 
ridicule  par  Pascal  :  ils  sont  commodes , 
mais  l'Evangile  proscrit  ce  qui  est  com- 
mode. Il  ne  faut  cependant  pas  croire  que 
ces  sortes  d'ouvrages,  quoique  certaine- 
ment répréhensibles ,  aient  fait  autant  de 
mal  que  quelques  zélateurs  l'ont  pré- 
tendu. Ce  ne  sont  que  les  savans  ou  les 
gens  consciencieux  qui  les  lisent;  les 
hommes  dissipés  ou  libertins  ne  s'en  oc- 
cupent point.  «  Je  n'ai  connu  '  aucun 
3>  homme  de  mauvaise  vie ,  dit  un  auteur 
w  judicieux,  qui  eût  beaucoup  lu  les  ca- 
»  suistes;  et  je  n'ai  connu  ni  grand  ca- 
«  suiste ,  ni  grand  liseur  de  casuistes  qui 
»  ait  été  homme  de  mauvaise  vie.  »  Un 
jour  qu'un  certain  réformateur  décla- 
mait contre  les  casuistes  relâchés,  en 
présence  d'un  ecclésiastique  respectable, 
et  lui  demandait  quel  auteur  il  fallait  lire 
pour  la  morale  ;  Lisez  ,  lui  dit  celui-ci , 
Caramuel  et  Escobar,  ils  sont  encore 
trop  se'vères  pour  vous.  «  Vainement, 
»  disent  les  encyclopédistes,  lesprédica- 
w  leurs  de  l'irréligion  voudraient-ils  s'au- 
))  toriser  de  ces  réflexions  pour  innocen- 
»  ter  leurs  propres  égaremens  ,  pour  ren- 
»  dre  odieux  les  théologiens  qui  les  font 
»  remarquer  et  les  réfutent.  Leurs  er- 
>>  reurs,  qu'ils  publient  eux-mêmes,  sont 
»  d'une  toute  autre  conséquence  que 
-»  celles  des  casuistes  ;  on  ne  peut  excu- 
»  ser  les  premiers  par  aucun  motif  loua- 
»  ble;  les  ouvrages  des  incrédules  ont 
M  fait  plus  de  mal  en  dix  ans,  que  tous 
»  les  casuistes  de  l'univers  n'en  ont  fait 
»  dans  un  siècle.  »  (  Encyclop.  mé- 
tliod.  article  casuistes).  Voyez  Busem- 
BAUM,  Pascal,  Rangé.  (Escobar  avait  com- 
posé plus  de  20  ouvrages  formant  42  vol. 
presque  tous  in-folio.  ) 


ESC  109 

*  ESCOIQTJÏTZ  (don  Juan),  ministre 
d'état  espagnol,  naquit  en  1762  dans  la 
province  de  Navarre  et  mourut  en  An- 
dalousie le  18  novembre  1820. 11  fut  d'a- 
bord page  de  Charles  III ,  puis  chanoine 
de  Saragosse,  et,  parla  faveur  de  Godoï, 
gouverneur  du  prince  des  Asturies,  depuis 
Ferdinand  VII.  Il  est  difficile  de  dire  si 
l'ambition  ou  l'intérêt  qu'il  portait  à  son 
jeune  maître,  le  guida  dans  la  conduite 
qu'il  tintjà  l'égard  de  Godoï,  dont  l'Europe 
entière  a  connu  les  intrigues  ;  ce  qu'il 
y  a  de  certain,  c'est  qu'il  se  déclara  con- 
tre lui,  et  Godoï  le  fit  exiler  à  Tolède  où 
il  fut  nommé  archidiacre.  3Iais  lorsque  le 
jeune  Ferdinand  fut  monté  sur  le  trône  de 
son  père,  il  fut  rappelé,  et  nommé  conseil- 
ler privé  :  il  exerça  même  la  plus  grande 
influence  sur  la  destinée  de  la  famille 
royale  d'Espagne.  Ebloui  par  Buonaparte, 
il  rattacha  le  sort  de  la  monarchie  espa- 
gnole aux  promesses  trompeuses  de  ce 
prince  ambitieux  :  ce  fut  sous  sa  dictée 
que  son  élève  écrivit  cette  fameuse  lettre 
à  l'empereur  des  Français  dans  laquelle  il 
lui  demandait  à  s'allier  à  la  famille  du 
grand  homme ,  et  ce  furent  ses  conseils 
qui  décidèrent  Ferdinand  à  faire  le  voyage 
de  Baïonne.  Escoiquitz  reconnut,  mais 
trop  tard,  combien  il  avait  été  imprudent; 
il  chercha,  mais  en  vain ,  à  réparer  sa 
faute  :  ses  taleq^,  sa  fermeté  et  même  sa 
souplesse  ne  purent  parvenir  à  amener 
un  changement  heureux  dans  la  fortune 
de  ses  princes  :  il  n'eut  pas  même  le  triste 
dédommagement  de  recevoir  des  récom- 
penses de  Buonaparte  qui  se  contenta  de 
lui  adresser  quelques  complimens  et  qu'il 
appelait  le  petit  Ximenès.  Indigné  des 
insultes  journalières  que  recevaient  les 
princes  espagnols ,  il  s'en  plaignit  amè- 
rement ;  et  comme  ses  plaintes  n'étaient 
suivies  d'aucune  réponse  favorable,  il  fit 
entendre  à  M.  de  Champagny ,  alors  mi- 
nistre des  relations  extérieures,  ces  pa- 
roles vraiment  prophétiques  -.V E spagne 
vengera  ses  injures;  elle  rendra  cent 
fois  les  outrages  qu'on  lui  prodigue.  Il 
suivit  ses  maîtres  à  Valenray.  Dans  un 
voyage  qu'il  fit  à  Paris,  il  eut  plusieurs 
conférences  avec  les  ambassadeurs  d'Au- 
triche ,  de  Russie,  de  Prusse  et  de  quel- 


iio  ESC 

ques  autres  états  de  la  confédt^ration 
du  Rhin,  dans  le  but  de  déterminer  une 
coalition  européenne  contre  Buonaparte  : 
ses  démarches  fixèrent  l'attention  du  gou- 
vernement français  qui  le  contraignit 
de  se  fixer  à  Bourges  ;  toutefois  il  prit 
la  plus  grande  part  aux  négociations  qui 
amenèrent  le  rétablissement  des  Bour- 
bons sur  le  trône  d'Espagne.  De  retour  à 
Madrid  avec  Ferdinand  VU ,  il  ne  tar- 
da pas  à  être  en  butte  à  des  jalousies 
de  cour  :  à  l'époque  de  la  disgrâce  de  Ma- 
canaz  et  des  changemens  qui  survinrent 
dans  le  ministère,  il  fut  disgracié  lui- 
même  :  retiré  à  Saragosse  ,  il  fut  renfer- 
mé ensuite  au  château  de  Murcie.  Après 
avoir  été  rappelé  pendant  quelques  in- 
stans ,  il  fut  relégué  à  Ronda  en  Anda- 
lousie où  il  mourut.  Escoiquitz  a  laissé 
plusieurs  traductions  d'ouvrages  anglais 
et  français  et  quelques  œuvres  originales  : 
on  cite  de  lui  1°  les  Nuits  d'Voung,  tra- 
duites en  vers  espagnols,  Madrid,  1797, 
2  vol.  in-8;  2°  Mexico  conquise,  poème 
épique,  1802,  in-8  ;  le  Paradis  perdu  de 
Milton ,  traduit  en  vers  espagnols,  Bour- 
ges ,  1812,  3  vol.  in-8,  fig.;  k°  Exposé 
des  motifs  qui  ont  engagé,  en  1 8 1 2,  Fer- 
dinand f^II  à  se  rendre  à  Bàionne,  pré- 
senté à  V Espagne  et  à  l'Europe,  ouvrage 
traduit  et  réimprimé  plusieurs  fois  dans 
toutes  les  langues,  notamment  en  français 
par  Aimé  Joseph  Bruand.  Voyez  pour 
plus  de  détail  les  mémoires  historiques 
sur  la  révolution  d^ Espagne,  de  M.  de 
Pradt,  Paris,  1816.  Ces  deux  auteurs  ont 
besoin  d'être  composés  ensemble.  La  meil- 
leure traduction  française  est  celle  de 
Paris,  1816,  in-8,  avec  portraits;  6°  Jié- 
futation  d'un  mémoire  contre  l'inquisi- 
tion ;  C°  M.  Botte ,  roman  traduit  de  Pi- 
gault  Le  Brun ,  avec  des  suppressions  et 
des  corrections. 

*  ESCORBIAC  (Jean  d') ,  seigneur  de 
Bayonnete ,  né  à  Montauban ,  dans  le  16" 
siècle,  était  neveu  du  trop  célèbre  du 
Bartas,  qui  lui  inspira  du  goût  pour  la 
poésie.  On  a  de  lui  La  Christiade ,  con- 
tenant l'histoire  sainte  du  prince  de  la 
vie,  Paris,  1613,  in-8.  Il  remonte,  dans 
le  1'^'  livre ,  à  la  création  du  monde  et  au 
péché  originel ,  et ,  ce  qui  est  très  plai- 


£SD 

sant ,  il  comprend  les  mauvais  vers  dan» 
rénumération  des  maux  qu'a  causés  la 
chute  de  l'homme.  Il  a  à  se  reprocher 
d'avoir,  pour  sa  part,  aggravé  ce  fléau. 

ESCOUBLEAU  (François  d'  } ,  cardi- 
nal de  Sourdis,  archevêque  de  Bordeaux, 
mérita  la  pourpre  par  les  services  que  sa 
famille  avait  rendus  à  Henri  IV ,  et  sur- 
tout par  ses  vertus  et  sa  piété.  Léon  XI , 
Paul  V,  Clément  Vhl,  Grégoire  XV, 
Urbain  VIII ,  lui  donnèrent  des  marques 
distinguées  de  leur  amitié  et  de  leur  es- 
time ,  dans  les  dilTérens  voyages  qu'il  fit 
à  Rome.  Le  cardinal  de  Sourdis  convo- 
qua ,  en  1 624 ,  un  concile  provincial.  Les 
ordonnances  et  les  actes  de  ce  synode 
sont  un  témoignage  du  zèle  dont  il  était 
animé  pour  la  discipline  ecclésiastique. 
Il  mourut  en  1628  ,  à  53  ans. 

ESCOUBLEAU  (  Henri  d'  ) ,  frère  du 
précédent,  son  successeur  dans  l'arche- 
vêché fle  Bordeaux ,  avait  moins  de  goût 
pour  les  vertus  épiscopales ,  que  pour  la 
vie  de  courtisan  et  de  guerrier.  Il  suivit 
Louis  XIII  au  siège  de  La  Rochelle,  et  le 
comte  d'Harcourt  à  celui  des  îles  de  Lé- 
rins  qu'il  reprit  sur  les  Espagnols.  Ce  pré- 
lat était  d'un  caractère  hautain  et  impé- 
rieux. Le  duc  d'Epernon ,  gouverneur  de 
Guienne ,  homme  aussi  fier  que  l'arche- 
vêque de  Bordeaux,  eut  un  différend  très 
vif  avec  lui.  Le  duc  s'emporta  jusqu'à  le 
frapper.  Le  cardinal  de  Richelieu ,  enne- 
mi de  d'Epernon ,  prit  cette  affaire  fort  à 
cœur;  mais  Cospéan,  évêque  de  Lisieux, 
ramena  l'esprit  du  cardinal,  en  lui  disant: 
«  Monseigneur ,  si  le  diable  était  capable 
»  de  faire  à  Dieu  les  satisfactions  que  le 
«  duc  d'Epernon  offre  à  l'archevêque  de 
»  Bordeaux,  Dieu  lui  ferait  miséricorde.  » 
Ce  différend  fut  terminé  bientôt  après, 
mais  d'une  manière  bien  humiliante  pour 
l'orgueilleux  d'Epernon ,  qui  fut  obligé 
d'écrire  la  lettre  la  plus  soumise  à  l'ar- 
chevêque ,  et  de  se  mettre  à  genoux  de- 
vant lui  pour  écouter  avec  respect  la  ré- 
primande sévère  qu'il  lui  fit  avant  de  le- 
ver l'excommunication.  Sourdis  mourut 
en  164à,  après  avoir  donné  plusieurs 
scènes  odieuses  ou  ridicules. 

ESCURE.  F'oyezLv.scvKt. 

ESDRAS,  fils  de  Saraïas,  souverain 


ESD 

pontife,  que  Nabuchodonosor  fit  mourir, 
exerça  la  grande  prêtrise  pendant  la  cap- 
tivité de  Babylonne.  Son  crédit  auprès 
d'Artaxercès-Longueniain  ,  fut  utile  à  sa 
nation.  Ce  prince  l'envoya  à  Jérusalem 
avec  une  colonie  de  Juifs.  Il  fut  chargé 
de  riches  présens  pour  le  temple  qu'on 
avait  commencé  de  rebâtir  sous  Zoroba- 
bcl ,  et  qu'il  se  proposait  d'achever.  Ar- 
rivé à  Jérusalem  l'an  467  avant  J.  C. ,  il 
y  réforma  plusieurs  abus.  Il  proscrivit 
surtout  les  mariages  des  Israélites  avec 
les  femmes  étrangères ,  et  se  prépara  à 
faire  la  dédicace  de  la  ville.  Cette  céré- 
monie ayant  attiré  les  plus  considérables 
de  la  nation,  Esdras  leur  lut  la  loi  de 
Moïse.  Les  juifs  l'appellent  le  prince  des 
docteurs  de  la  loi.  C'est  lui  qui ,  suivant 
les  conjectures  communes,  recueillit  tous 
les  livres  canoniques ,  les  purgea  des  fau- 
tes qui  s'y  étaient  glissées ,  et  les  distin- 
gua en  22  livres ,  selon  le  nombre  des 
lettres  hébraïques.  On  croit  que  dans 
cette  révision  il  changea  l'ancienne  écri- 
ture hébraïque ,  pour  lui  substituer  le  ca- 
ractère hébreu  moderne,  qui  est  le  même 
que  le  chaldéen.  Les  rabbins  ajoutent 
qu'il  instilua  une  école  à  Jérusalem ,  et 
qu'il  établit  des  interprètes  des  Ecritu- 
res ,  pour  en  expliquer  les  difficultés ,  et 
pour  empêcher  qu'elles  ne  fussent  alté- 
rées. Ceux  qui  ont  prétendu  qu'il  était 
l'auteur  du  Pentateuque ,  n'ont  pas  réflé- 
chi sur  ce  qu'il  y  avait  dans  cette  opinion 
d'absurde  et  d'impossible ,  de  contraire 
aux  notion»  chronologiques  et  histori- 
ques, et  à  tout  le  contenu  des  livres  de 
Moïse.  Nous  avons  quatre  livres  sous  le 
nom  d'Esdras  ;  mais  il  n'y  a  que  les  deux 
première  qui  soient  reconnus  pour  cano- 
niques dans  l'église  latine.  Le  premier 
est  constamment  d'Esdras ,  qui  y  parle 
souvent  en  première  personne.  Il  contient 
l'histoire  de  la  délivrance  des  Juifs ,  sor- 
tis de  la  captivité  de  Babylonne,  depuis  la 
première  année  de  la  monarchie  de  Cy- 
rus ,  jusqu'à  la  vingtième  du  règne  d'Ar- 
laxercès-Longuemain ,  durant  l'espace 
de  82  ans.  Le  second  ,  dont  Néhémie  est 
l'auteur,  en  contient  une  suite,  l'espace 
de  31  ans.  Le  troisième  et  le  quatrième  , 
sans  être  canoniques  ,  ne  laissent  pas  de 


ESK  î I t 

jouir  d'une  grande  considération:  plu- 
sieurs Pères  s'en  sont  servis  pour  prouver 
des  vérités  précieuses,  par  exemple,  le 
péché  originel,  clairement  exprimé  (Liv. 
4,  chap.  3  ,  4  et  7  ).  Sixte  de  Sienne  , 
Driédo,  Mariana  et  plu.sicurs  rabbins, 
attribuent  à  Esdras  les  deux  livres  desPa- 
ralipomènes. 

*  ESKIL ,  ou  EscHiL ,  célèbre  archevê- 
que de  Lunden ,  en  Scanie ,  et  primat  de 
Dahemarck,  naquit  au  commencement 
du  12*  siècle.  On  croit  qu'il  était  fils  de 
Suénon ,  évêque  de  Wiborg.  Envoyé  à 
Hildeshein  pour  y  faire  ses  études,  il  y 
fut  attaqué  d'une  maladie  dangereuse, 
pendant  laquelle  il  fit  vœu  d'établir  cinq 
monastères ,  s'il  recouvrait  la  santé.  De 
retour  en  Danemarck,  il  fut  d'abord  nom- 
mé chanoine ,  ensuite  archidiacre  de  la 
cathédrale  de  Lunden.  En  1134,  il  ob- 
tint l'évêché  de  Roschils ,  et  quatre  ans 
après,  il  fut  élevé  sur  le  siège  épiscopal 
et  primatial  de  Lunden.  Parvenu  à  cette 
dignité,  il  se  souvint  de  son  vœu,  et 
saint  Bernard  lui  envoya  ,  à  sa  prière ,  un 
de  ses  religieux,  Guillaume, qui  présida 
à  la  fondation  du  monastère  d'Esrole.  Ce- 
pendant les  soins  qu'il  donnait  à  son 
église  ne  lui  faisaient  pas  négliger  les 
affaires  temporelles ,  et ,  né  avec  un  pen- 
chant à  l'ambition,  il  cherchait  assez 
souvent  à  la  satisfaire.  Il  prit  part  à  tou- 
tes les  discussions  politiques,  et  se  dé- 
clara tantôt  pour,  et  tantôt  contre  son 
souverain ,  à  qui  il  fit  même  une  guerre 
ouverte.  Cependant,  au  milieu  de  ces 
agitations  mondaines,  il  ne  pouvait  voir, 
sans  un  sentiment  d'admiration  ,  les  ver- 
tus sublimes  de  saint  Bernard  ,  pour  qui 
il  eut  une  vénération  toute  particulière. 
Il  fit  même  plusieurs  voyages  en  France 
pour  lui  parler.  Flottant  entre  Dieu  et  le 
monde,  il  était  depuis  long-temps  pressé 
de  se  consacrer  entièrement  à  la  retraite, 
dans  la  solitude  de  Clairvaux  ;  mais  de 
trop  forts  liens  l'attachaient  encore  au 
monde.  Il  fit  un  voyage  à  Rome  pour  y 
visiter  Adrien,  qu'il  avait  connu  lors  de 
sa  légation  dans  le  Nord.  Ce  pape  étant 
mort ,  il  en  résulta  un  schisme  ;  l'arche- 
vêque se  déclara  pour  Alexandre  III,  tan- 
dis que  son  roi  Valdemar  prit  le  parti  de 


11^2 


ESM 


Victor  ni.  De  là  une  lutte  violente  entre 
le  roi  ctEskil.  Le  prélat  ayant  succombé, 
fut  obligé  de  fuir ,  et  fit  un  voyage  à  la 
Terre-Sainte.  A  son  retour,  il  resta  quel- 
que temps  en  France ,  et  fut  ensuite  ré- 
tabli dans  sa  dignité.  Après  quelques 
nouveaux  tracas ,  il  connut  enfin  le  néant 
des  grandeurs  humaines;  et  quoique  saint 
Bernard  ne  fût  déjà  plus,  il  se  retira  dans 
la  solitude  de  Clairvaux ,  pour  y  termi- 
ner, dans  la  paix  et  l'exercice  des  devoirs 
de  la  religion ,  une  carrière  qui  n'avait 
été  que  trop  agitée  ;  il  mourut  le  8  sep- 
tembre 1187  ,  dans  un  âge  très  avancé. 
En  quittant  son  siège ,  il  avait  recom- 
mandé Absalon  pour  son  successeur.  Il 
se  tint  sous  son  pontificat  un  concile  na- 
tional à  Lunden ,  auquel  assistèrent  les 
évêques  de  Danemarck,  de  Suède,  de 
Norwége,  et  Theodignus,  légat  du  saint 
Siège.  On  connaît  de  ce  prélat  :  Droit 
ecclésiastique  de  Seanie ,  Copenhague , 
1 505 ,  avec  le  Code  civil  de  la  même  pro- 
vince. Cet  ouvrage  a  depuis  été  inséré 
en  danois  et  en  latin ,  dans  le  recueil  des 
Lois  ecclésiastiques  de  Danemarck,  que 
G.  J.  Torkelin  adonné,  Copenhague, 
1781. 

"ESMENARD  (Joseph- Alfonse),  mem- 
bre de  l'Institut ,  né  à  Pélissane  dans  la 
Provence  en  17  70  ,  fit  ses  études  chez  les 
Pères  de  l'Oratoire  de  Marseille,  et  partit 
ensuite  pour  St.-Domingue.  Il  avait  fait 
deux  voyages  en  Amérique  lorsque  la  ré- 
volution vint  à  éclater.  Député  à  Paris 
en  1790,  il  s'occupa  de  la  rédaction 
de  plusieurs  journaux  politiques  consa- 
crés à  la  défense  du  roi.  Obligé  de  fuir 
après  le  10  août  1792,  il  se  retira  en  An- 
gleterre, où  il  s'embarqua  pour  la  Hol- 
lande. Il  passa  de  là  en  Allemagne,  en 
Italie,  et  se  rendit  peu  de  temps  après  à 
Constanlinople ,  où  il  fut  accueilli  d'une 
manière  distinguée  par  M.  de  Choiseul- 
Gouffier.  En  revenant  à  Venise ,  il  offrit 
ses  services  à  3Ionsieur  (  Louis  XVIII  ).  Il 
rentra  en  France  en  1797,  fut  un  moment 
attaché  à  l'ambassade  de  Hollande,  et  tra- 
vailla quelques  mois  ù  la  Quotidienne. 
Après  la  révolution  de  18  fructidor,  il  fut 
enfermé  au  Temple,  et  ne  put  en  sortir 
que  pour  ôtre  de  nouveau  banni  de  la 


ESM 

France.  La  chute  du  Directoire  lui  permit 
de  revenir  à  Paris  en  1799;   il  coopéra 
à   la   rédaction  du  Mercure    de   France 
avec  Laharpe  et  Fontanes,    publia  des 
fragmens  de  son  poème  de  la  Navigation 
dont  il  s'occupait  depuis  long-temps,  et 
quitta  ses  occupations  littéraires  pour 
suivre  le  général  Lecierc  à  Saint-Domin- 
gue. De  retour  en  Trance  avec  les  malheu- 
reux restes  de  cette  expédition,  il  fut 
nommé  chef  du  bureau  des  théâtres  au 
ministère  de  l'intérieur ,  place  à  laquelle 
il   renonça  pour  accompagner  l'amiral 
Joyeuse  à  la  Martinique.  A  son  retour  en 
1805,  il  fut  nommé  successivement  cen- 
seur des  théâtres,  censeur  de  la  librairie, 
chef  de  la  troisième  division  de  la  police 
générale  et  membre  de  l'institut.  Une  sa- 
tire contre  l'envoyé  russe,  imprimée  dans 
\e journal  des  Débats,  l'obligea  encore  de 
quitter  la  France  et  de  se  retirer  en  Ita- 
lie. Il  partait  de  Naples,  après  trois  mois 
d'exil ,  pour  revenir  dans  sa  patrie,  lorsque, 
sur  le  chemin  de  Fondi ,  il  fut  tout  à  coup 
entraîné  par  des  chevaux  fougueux  vers 
un  précipice ,  et  se  brisa  la  tête  contre 
un  rocher.  Il  expira  le  25  juin  1811,  lais- 
sant une  femme  et  trois  filles  sans  for- 
tune. Ses  principaux  ouvrages  sont  1°  La 
Navigation ,  poème  en  8  chants ,  Paris  , 
1805  ,  2  vol.  in-8  ;  seconde  édition  en  6 
chants  seulement ,  1806,  1  vol.  in-8.  U 
travailla  long-temps  à  ce  poème ,  et  il 
entreprit  plusieurs  de  ses  voyages  pour 
être  à  portée  d'étudier  le  sujet  qu'il  avait 
choisi.  Comme  Vernet ,  il  brava  les  ora- 
ges de  la  mer  pour  les  décrire  ,  et  ne  fit 
ses  tableaux  qu'en  présence  des  objets 
qu'il  avait  à  peindre  ;  ce  qui  donne  à  ses 
descriptions  poétiques  ce  ton  de  vérité , 
ce  mérite  d'exactitude  qu'on  trouve  pres- 
que toujours  chez  les  anciens  ,  mais  ra- 
rement chez   les    modernes.  La  poésie 
d'Esmenard  est  brillante ,  elle   a  de   la   ■ 
force ,  de  la  noblesse ,  quelquefois  de  la 
chaleur  et  de  l'harmonie  ;  mais  cette  har- 
monie est  plus  sonore  et  retentissante  > 
que  douce  et  gracieuse  ;  de  sorte  qu'à  la 
longue  elle  élourditplus  qu'elle  ne  flatte,    , 
ce  qui  tient  peut-être  au  défautde  variété    ' 
et  de  flexibilité  dans  les  tons.  Ou  peut 
encore  reprocher  à  l'auteur  beaucoup 


ESO 

d'épitbètes  oiseuses ,  des  inversions  for- 
cées, des  transitions  qui  ne  le  sont  pas 
moins  ,  des  hémistiches  et  même  des  vers 
très  dui's  ,  d'autres  très  prosaïques ,  des 
images  fausses ,  des  constructions  vi- 
cieuses ,  quelques  larcins  trop  peu  dis- 
simulés. Le  sujet  ensuite  en  est  beau- 
coup trop  vague  et  ne  pouvait  faire  la 
matière  d'un  poème.  Malgré  tous  ces 
défauts,  il  mérite  de  survivre  à  l'auteur, 
parce  qu'on  y  trouve  de  véritables  beau- 
tés qui  le  placent  parmi  les  bons  poètes 
du  18"  siècle.  2»  Trajan ,  opéra  en  3  ac- 
tes, représenté  en  1807  ,  qui  obtint  plus 
de  cent  représentations,  grâce  à  plusieurs 
beaux  morceaux  de  musique  de  Le  Sueur, 
aux  brillantes  décorations  qui  l'embellis- 
sent, et  à  celles  surtout  de  la  scène  du 
triomphe  de  Trajan.  3°  Fcrnnnd  Cortez, 
opéra  en  3  actes ,  joué  en  1 809  ,  et  qui 
n'eut  aucun  succès.  Il  l'avait  fait  en  so- 
ciété avec  M.  de  Jouy,  qui  y  fit  deschan- 
gemens  considérables  en  1807;  alors  il 
eut  plusieurs  représentations,  ainsi  qu'en 
1808.  4"  des  pièces  de  vers  sur  les  cir- 
constances, particulièrement  en  faveur 
de  Buonaparte,  insérées  dans  la  couronne 
poétique  de  Napoléon  dont  il  fut  un  des 
chantres  les  plus  féconds.  5°  Des  noies 
historiques  et  littéraires ,  qui  accompa- 
gnent la  première  édition  du  poème  de 
Y  Imagination ,  par  Delille.  G"  Des  arti- 
cles fournis  à  la  biographie  universelle 
de  Michaud. 

ESOPE,  le  plus  ancien  auteur  des  apo- 
logues, après  Hésiode  qui  en  fut  l'in- 
venteur, naquit  à  Armorium,  bourg  de 
Phrygie.  Il  fut  d'abord  esclave  de  deux 
philosophes,  de  Xanthus  et  d'Idmon.  Ce 
dernier  l'affranchit.  Son  esclave  l'avait 
charmé  par  une  philosophie  assaisonnée 
de  gaîlé,  et  par  une  âme  libre  dans  la  ser- 
vitude. Les  philosophes  de  la  Grèce  s'é- 
taient fait  un  nom  par  de  grandes  sen- 
tences enflées  de  grands  mots;  Esope  prit 
un  ton  plus  simple,  et  ne  fut  pas  moins 
•  célèbre  qu'eux.  Il  prêta  un  langage  aux 
animaux  et  aux  êtres  inanimés,  pour  en- 
seigner la  vertu  aux  hommes  ,  et  les  cor- 
riger de  leurs  vices  et  de  leurs  ridicules. 
H  se  mît  à  composer  des  apologues,  qui , 
sous  le  masque  de  l'allégorie ,  et  sous  les 
Y. 


ESO  ii3 

agrémens  de  la  fable ,  cachaient  des  mo- 
ralités utiles  et  des  leçons  importantes. 
Le  bruit  de  sa  sagesse  se  répandit  dans  la 
Grèce  et  dans  les  pays  circonvoisins. 
Crœsus ,  roi  de  Lydie,  l'appela  à  sa  cour, 
et  se  l'attacha  par  des  bienfaits  pour  le 
reste  de  sa  vie.  Esope  s'y  trouva  avec  So- 
lon,  n'y  brilla  pas  moins  que  lui,  et  y 
plut  d'avantage.  Mais  tous  ces  faits  sont 
très  incertains.  L'existence  même  d'Esope 
est  révoquée  en  doute  par  des  savansqui 
pensent  que  c'est  un  personnage  imagi- 
naire, fabriqué  par  les  Grecs  sur  celui  de 
Locman.  Et  c'est  peut-être  pour  cela  que 
les  Grecs  le  font  voyager  en  Perse  et  en 
Egypte  ,  pour  lui  donner  un  air  asiati- 
que ,  et  expliquer  ce  qui ,  sans  cette  pré- 
caution ,  ne  paraîtrait  pas  lui  convenir.  Il 
est  certain  encore  que  Planudes ,  moine 
grec,  auquel  on  doit  les  fables  d'Esope, 
telles  que  nous  les  avons  ,  a  entassé ,  sous 
le  nom  du  fabuliste  phrygien ,  beaucoup 
d'apologues  plus  anciens  ou  plus  moder- 
nes que  les  siens.  Enfin  jusqu'aux  dispu- 
tes qui  se  sont  élevées  sur  sa  figure,  sur  sa 
bosse,  etc.,  tout  contribue  à  répandre  des 
doutes  sur  son  existence  (  voyez  Locman  , 
Planudes,  Salomon  ).  Les  meilleures  édi- 
tions des  Fables  d'Esope ,  sont  celles  de 
Plantin,  16C5,in-16;  des  Aides  avec  d'au- 
tres fabulistes,  1505,  in-foi.  ;  de  Robert 
Etienne ,  1 546  ;  d'Oxford  ,  1718,  in-8  ; 
de  J.  Chr.  Gottl.  Ernestiv,  Leipsick,  1781, 
in-8;  de  Fr.  du  Furia ,  Florence,  1709, 
2  vol.  in-8  ;  de  J.-G.Schneder,  BresLau, 
1811.  La  plus  conrplèle  est  celle  du  Dr. 
Coray,  Paris,  1810,  in-8,  qui  se  distingue 
par  la  beauté  de  l'impression  ,  la  correc- 
tion du  texte  et  les  notes  excellentes  qui 
l'accompagnent.  Elles  ont  été  traduites 
enfrançais,  etpresquedans  toutes  leslan- 
gues.  Lafontaine  s'en  est  approprié  une 
grande  partie  qu'il  embellit  par  le  stile 
et  par  la  morale.  Boursault  a  mis  Esope 
sur  la  scène,  dans  deux  pièces,  l'une 
intitulée  Esope  à  la  cour,  l'autre,  Esope 
à  la  ville. 

ESOPUS  (  Clodius  } ,  comédien  célè- 
bre, vers  l'an  84  avant  J.  G.  Roscius  et 
lui  ont  été  les  meilleurs  acteurs  qu'on  ait 
vus  à  Rome.  Esopus  excellait  dans  le 
tragique,  et  Ro.scius  dans  le   comique. 

8 


ii4  ESP 

Cicéron  prit  des  leçons  de  d<5clanialion 
de  l'un  et  de  l'autre.  Esopus  était  d'une 
prodigalité  si  excessive,  qu'il  fit  ser- 
vir dans  un  repas,  au  rapport  de  Pline  , 
un  plat  de  tejre  qui  coûtait  dix  mille 
francs  :  il  n'était  rempli  que  d'oiseaux 
qui  avaient  appiis  à  chanter  et  à  parler  , 
et  qu'on  avait  payés  chacun  sur  le  pied 
de  GOO  livres.  Esopus,  malgré  ses  gran- 
des dépenses,  laissa  un  héritage  qui  va- 
lait près  de  deux  millions.  Son  ftls,  avec 
moins  de  talcns,  ne  fut  pas  moins  prodi- 
gue. On. assure  qu'il  fit  boire  une  fois  à 
ses  convives  des  perles  distillées.  Ces  ri- 
chesses énormes  des  historiens  prouvent 
bien  à  quel  point  de  fureur  le  mimisme, 
cause  et  mesure  de  la  corruption  des  peu- 
ples, était  parvenu  chez  celui  de  Rome 
(voj/ezhARO^  ,  Garrick  ,  Roscius).  »  Les 
»  Grecs  ,  dit  d'AleniLert,  considéraient 
})  Esopus ,  par  la  même  raison  qu'ils  ad- 
))  miraient  Euripide  et  Sophocle.  Les 
»  Grecs,  ainsi  que  les  Romains,  mettaient 
«  entre  les  histrions  et  les  hommes  de 
j>  génie  un  espace  immense  ;  mais  ils 
n  payaient  ceux-là  comme  tous  les  in- 
»  strumensde  luxe  et  déplaisir.  »  On  voit 
ici  en  passant,  que  d'Alembert  croyait 
qu'Esopus était  un  comédien  grec.  L'éru- 
dition de  cet  encyclopédiste  et  de  ses  col- 
lègues est  sujette  à  de  plaisantes  bévues, 
voyez  Panjsonius.  On  ignore  l'époque  de 
sa  mort. 

ESPAGNAC  (  Jean -Baptiste -Joseph 
d'AMARZiT  DE  Sahugcet,  barou  d'),  na- 
quit d'un  apothicaire,  à  Brive-la  Gail- 
larde, en  1714,  A  peine  âgé  de  19  ans, 
il  parut  dans  la  carrière  des  armes ,  et  s'y 
lit  remarquer.  En  n  34 ,  il  se  distingua  en 
Italie,  et  fut  aide-dt-camp  dès  1742, 
dans  les  campagnes  de  Bavière.  Ce  fut 
alors  qu'il  connut  le  comte  Maurice  de 
Saxe,  qu'il  suivit  dans  les  campagnes  de 
Flandre,  y  jouissant  de  son  estime  et  de 
l'avantage  de  le  seconder  ,  soit  en  qualité 
d'aide-major -général  d'infanterie,  soit 
comme  colonel  de  l'un  des  régimens  des 
grenadiers  créés  en  17  46.  Revêtu  en  1754 
du  gouvernemcutde  Bresse  et  du  Bugey, 
il  reçut  en  J767,  l'expectative  du  gou- 
vernement de  l'hôtel  royal  des  Invalides, 
qu'il  n'eut  en  entier  qu'en  17CG.  L'ordre 


ESP 

qu'il  n'a  cessé  d'y  entretenir ,  le»  réfor- 
mes utiles  qu'il  y  a  faites ,  démontrent 
que  personne  n'était  plus  digne  que  lui 
de  cette  place  importante.  En  1780,  il 
reçut  le  grade  de  lieutenanl-général ,  et 
mourut  le  28  février  17  83.  Toujours  oc- 
cupé de  l'art  pour  lequel  il  était  né,  il 
publia  successivement  les  ouvrages  sui- 
vans  :  1"  Campagnes  du  roi  en  1745,  4G, 
47  eM8  ,  4  vol.  in-8.  2"  Essai  sur  la 
science  delà  guerre,  17  57  ,  3  vol.  in-8. 
3"  JEssai  sur  les  grandes  opérations  de  la 
guerre,  llhb,  4  vol.  in-8.  4"  Supple'- 
ment  aux  Rêveries ,  ou  Mémoires  de  la 
guerre  du  maréchal  de  Saxe,  1757. 
5"  Histoire  du  maréclial  de  Saxe,  Paris, 
17  73,  2  vol.  in-12,  ou  3  vol.  in-4.  Tous 
ces  ouvrages  annoncent  des  connaissan- 
ces multipliées ,  des  vues  saines  et  diri- 
gées par  l'expérience. 

*  ESPAGPSAG  (M,  R.  Sahuguet,  abbé 
d'  ),  fils  du  précédent,  né  à  Paris,  en 
1754,  devint  chanoine  de  la  cathédrale 
de  cette  ville,  et  se  fit  d'abord  distinguer 
par  ses  talens  littéraires ,  ensuite  par  son 
goût  pour  les  entreprises  lucratives.  Ayant 
fait  connaissance  avec  M.  de  Galonné 
contrôleur  général ,  il  devint  son  agent 
secret,  et  s'immisça  dans  plusieurs  opé- 
rations <le  finances ,  qui  lui  valurent 
beaucoup  d'argent.  Exilé  lors  de  la  dis- 
grâce de  son  protecteur,  il  reparut  en 
17  89  ,  se  fit  recevoir  au  club  des  révolu- 
tionnaires, et  obtint,  lorsque  la  guerre 
fut  déclarée,  la  fourniture  de  l'armée  des 
Alpes,  ensuite  celle  des  charrois  militaires 
del'arméedeDumouriez.  Ce  général  ayant 
été  proscrit,  il  fut  dénoncé  parCambon 
comme  fournisseur  infidèle  :  d'Espagnac 
trouva  moyen  de  se  justifier  tant  qu'on  eut 
besoin  de  lui  ;  mais  il  succomba  ensuite 
et  fut  condamné  à  mort  avec  Bazire, 
Chabot,  Danton,  etc.,  le  5  avril  1794. 
On  a  de  lui  1"  Eloge  de  Catinat ,  in-8  , 
qui  obtint  un  accessit  à  l'académie  fran- 
çaise en  1775.  2°  Réflexions  sur  l'abbé 
Suger,  et  sur  son  siècle,  1780,  in-8, 
ouvrage  peu  réfléchi ,  qui  lui  attira  beau- 
coup de  critiques. 

ESPAGNAÎNDEL  (Matthieu  l'),  sculp- 
teur célèbre,  florissait  à  la  fin  du  17* 
siècle.  Quoique  prolestant,  il  embellit 


ESP 

diverses  églises  de  Paris,  On  cite  entre 
autres  le  rétable  de  l'autel  des  Prémon- 
trés ,  et  celui  de  la  chapelle  de  la  grande 
salle  du  palais.  Le  parc  de  Versailles  lui 
doit  quelques  morceaux  excellens ,  tels 
sont  Tigrane  ,  roi  d'Arménie  ;  un  fleg- 
matique ;  deux  termes  représentant  l'un 
JDiogène ,  l'autre  Socrate. 

ESPAGiVE  (  Charles  d'  ) ,  un  des  fa- 
voris du  roi  Jean  ,  eut  l'épée  de  connéta- 
ble en  1360.  Ce  n'était  pas  pour  récom- 
penser ses  services  ;  il  n'en  avait  rendu 
aucun.  Son  mérite  pour  cette  charge  lut 
sa  naissance  et  la  faveur.  Il  était  si  fier 
de  l'une  et  de  l'autre,  qu'il  s'attira  la 
haine  de  Charles  le  Mauvais,  comte  d'E- 
vreux  et  roi  de  Navarre.  Ce  monarque , 
indigné  de  ce  que  d'Espagne  empêchait 
qu'on  ne  lui  fit  justice  au  sujet  de  quel- 
ques terres  qu'il  réclamait,  résolut  de  le 
faire  tuer.  11  mena  cent  gendarmes  l'inves- 
tir dans  le  château  de  l'Aigle, petite  ville 
de  Normandie.  Les  assassins  escaladèrent 
le  château,  et  massacrèrent  le  connétable 
dans  son  lit ,  entreonze  heures  et  minuit, 
k  G  janvier  1354.  —  Louis  d'Espagne, 
son  frère  aîné,  servit  sous  Philippe  VI, 
dans  la  guerre  contre  les  Anglais,  et  sous 
Charles  de  Blois  ,  à  la  conquête  de  la  Bre- 
tagne, il  prit  dans  cette  province  sur 
Jean  de  Montfort,  concurrent  deCharles 
de  Blois,  Guérande  d'assaut,  et  Dinan 
par  composition.  Il  fut  amiral  de  France 
en  1341. 

ESPAGiNE  (  le  cardinal  d'  ),  voyez 
Mendoza  (  Pierre-Gonzalez  ). 

ESPAG-NE  (  Jean  d'  ) ,  natif  du  Dau- 
phiné,  ministre  de  l'église  française  de 
Londres  au  17*  siècle,  a  compose  divers 
opuscules ,  publiés  en  1G70  et  1G74,  la 
Haye,  2  vol.  in-12.  On  y  voit  une  criti- 
que de  la  Bible  de  Genève  et  de  la  Ver- 
sion anglicane.  On  cite  principalement 
celui  qui  a  pour  titre  :  Erreurs  popu- 
laires sur  les  points  généraux  qui  con- 
cernent V intelligence  de  la  religion.  Ce 
ministre  n'y  a  pas  épargné  le  catéchisme 
de  Calvin. 

"ESPAGNE  (N....D'),  général  français, 
fit  pendant  la  révolution  ses  premières 
campagnes  d'une  manière  brillante  :  dans 
plusieurs  occasions,  il  développa  ses  ta- 


ESP  ii5 

lens  pour  l'art  militaire ,  et  obtint  en 
1 804  le  commandement  de  la  2 1  *  division 
militaire  qui  étaità  Poitiers.  Employé  sous 
Alasséna  en  Italie  ,  (  1805) ,  il  commanda 
la  division  des  chasseurs  à  cheval ,  et  se 
distingua  dans  plusieurs  combats,  et,  l'on 
peut  ajouter  ,  dans  toute  la  campagne  de 
180G.  Il  passa  à  Naples,  oîi  il  obtint  des 
succès  contre  les  insurgés  calabrois,  fut 
pourvu  du  commandement  de  la  province 
de  Labour  et  des  deux  principautés  qui 
en  dépendent.  Appelé  à  la  grande  armée 
avec  une  division  de  cuirassiers  pour 
faire  la  campagne  de  Prusse,  il  arriva  à 
Berlin  vers  le  milieu  de  décembre  180G  ^ 
et  se  signala  en  beaucoup  d'occasions , 
notamment  au  combat  de  Heilsberg,  oîi 
il  fut  blessé,  le  10  juin  1807.  Enfin  il 
donna  de  nouvelles  preuves  de  valeur 
dans  la  campagne  d'Autriche,  et  fut  tué 
à  la  bataille  de  Wagram  leG  juillet  1809. 
Il  était  officier  de  la  Légion-d'honneur: 
sa  statue  devait  être  élevée  sur  le  pont 
Louis  Xyi. 

ESPAGNET  (  Jean  d')  ,  président  au 
parlement  de  Bordeaux ,  distingué  par 
ses  lumières  et  ses  vertus,  est  auteur 
d'un  Encliiridionphysicœ  restituiez,  im- 
primé à  Paris  en  1G23,  in-8,  et  traduit 
en  français  sous  ce  titre  :  La  Philosophie 
des  anciens,  rétablie  en  sa  pureté,  1 G5 1 , 
in-8.  Le  nom  de  l'auteur  est  désigné  par 
ces  mots  :  Spes  mea  est  in  Âgno.  On  y 
trouve  un  traité  de  la  pierre  philosopliale, 
intitulé  Arcanum  hermeticœ  philoso- 
phiœ.  Ce  savant  publia  encore  en  1 G 1 G  un 
vieux  manuscrit  in-8,  \nW\.\\\(i Rozier  des 
<7«e/7'e,y,qu'il  accompagna  d'iinTraitésur 
l'institution  d'un  jeune  prince.  Il  croyait 
que  ce  manuscrit  n'avait  pas  encore  vu 
le  jour;  mais  il  y  en  avait  une  édition- 
dès  1523  ,  in-fol.  Le  public  fit  un  accueil 
favorable  à  cesdiftërens  ouvrages. 

ESPAGNOLET  (Joseph  Ribela,  dit  l'), 
peintre,  naquit  en  15S0  à  Xativa  ,  dans 
le  royaume  de  Valence  en  Espagne.  Il  étu- 
dia la  manière  de  Michel-Ange  de  Cara- 
vage  ,  qu'il  surpassa  dans  la  correction 
du  dessin  ;  mais  son  pinceau  était  moins 
moelleux.  Les  sujets  terribles  et  pleins 
d'horreurs ,  étaient  ceux  qu'il  rendait 
avec  le  plus  de  vérité;  mais  peut-être 


1 16  ESP 

avec  trop  de  férocité.  Son  goût  n'était  ni 
noble  ,  ni  gracieux.  Il  mettait  beaucoup 
d'expression  dans  ses  têtes.  L'Espagnolet, 
né  dans  la  pauvreté,  /'"vccut  long-temps; 
un  cardinal  l'en  tira  et  le  logea  dans  son 
palais.  Ce  changement  de  fortune  l'ayant 
rendu  paresseux  ,  il  rentra  dans  sa  misère 
pour  reprendre  le  goût  du  travail.  Na- 
ples  où  il  se  fixa ,  le  regardait  comme 
son  premier  peintre.  Il  obtint  un  appar- 
tement dans  le  palaisdu  vice-roi,  et  mou- 
rut dans  celte  ville  en  J  C56  ,  laissant  de 
grands  biens  et  de  beaux  tableaux.  Le 
pape  l'avait  fait  cbevalier  du  Christ.  Ses 
principaux  ouvrages  sont  à  Naples  et  à 
l'Escurial  en  Espagne.  (Ce  sont  le  mar- 
tyre de  saint  Janvier  ,  saint  Jérôme  , 
la.  Trinité.,  Démocrite,  Heraclite,  Ixion 
sur  la  roue.  Mater  dolorosa,  F  Adora- 
tion des  bergers.  Ce  dernier  tableau  est 
au  Musée  royal  de  Paris.  Ce  peintre  a 
gravé  à  l'eau-forte,  et  on  a  gravé  d'a- 
près lui. 

ESPARRON  (  Charles  d'Arcussia,  vi- 
comte d'  ) ,  s'occupa  de  la  fauconnerie 
\ers  le  milieu  du  IG*  siècle.  Il  fit  part  au 
public  de  sesamusemens,  dans  un  traité 
assez  estimé,  in-4  ,  Rouen  ,  1644. 

ESPEISSES.  Foyes  Desfeissks,  Bau- 

VES. 

*  ESPEJO  (  Antoine  ) ,  voyageur  espa- 
gnol, qui  découvrit  le  Nouveau-Mexique, 
néàCordoue,  vers  1550.  Augustin  Ruiz, 
religieux  franciscain,  qui  demeurait  au 
Vieux-Mexique,  ayant  appris  de  quelques 
Indiens,  appelés  Cuchos,  qu'ily  avaitau 
nord  de  grands  et  riches  pays ,  résolut 
de  vérifier  ce  fait.  Deux  de  ses  confrères 
s'étant  réunis  à  lui ,  ils  entreprirent  ce 
voyage ,  accompagnés  d'un  certain  nom- 
bre de  soldats.  Ils  avaient  parcouru  deux 
cent  cinquante  lieues  vers  le  Nord,  lors- 
que attaqués  par  les  Indiens  Tignas,  les 
deux  religieux,  compagnons  de  Ruiz, 
périrent  dans  la  mêlée.  La  troupe  revint 
aux  minesde  Sainte-Barbe,  dans  la  nou- 
velle Biscaye  ,  à  cent'soixante  lieues  de  la 
ville  de  Mexico  ,  d'où  elle  était  partie  , 
bien  décidée  à  ne  plus  s'exposer  à  une  en- 
treprise aussi  périlleuse.  Il  se  trouvait 
à  ces  mines ,  comme  intéressé  dans  leur 
exploitation  ,  un  bourgeois  de  Cordoue , 


ESP 

nommé  Espejo  ,  jeune  encore,  et  qu'au- 
cun danger  ne  pouvait  effrayer.  Il  se  pro- 
posa de  pénétrer  plus  avant  que  ne  l'a- 
vait fait  le  Père  Ruiz ,  se  rendit  au  val 
Saint-Barthélemi  pour  en  obtenir  la  per- 
mission de  l'alcade-major  ou  gouverneur 
de  la  province  ,  qui  lui  accorda  des  sol- 
dats et  des  provisions.  Il  partit  le  10  no- 
vembre 1582.  Arrivé  dans  le  pays  des 
Cuchos ,  et  puis  dans  celui  des  Possa- 
gnatcs ,  il  y  reçut  un  bon  accueil  et  des 
provisions  abonda.ites.  Ces  peuplades 
étaient  d'un  caractère  doux,  cultivaient 
la  terre  ,  et  demeuraient  dans  des  caba- 
nes aussi  propres  que  commodes.  Espejo 
avec  sa  troupe,  poursuivant  sa  marche, 
rencontra  de  riches  mines  d'argent,  au- 
près desquelles  se  trouvaient  les  Indiens 
Toboses ,  qui  s'enfuirent  en  voyant  des 
soldats,  parce  que  peu  d'années  aupara- 
vant des  militaires  égarés  les  avaient 
maltraités  et  pillés.  Cependant  des  pré- 
sens et  des  paroles  de  paix  les  firent  re- 
venir auprès  des  Espagnols;  ils  les  gui- 
dèrent pendant  plusieurs  lieues,  jusqu'au 
pays  des  Jumanes.  Ce  peuple  était  civi- 
lisé ,  et  très  belliqueux  :  à  l'approche  des 
Espagnols,  ils  se  formèrent  en  bataille, 
et  lancèrent  leurs  flèches,  qui  tuèrent 
six  à  huit  chevaux.  Les  soldats ,  en  sui- 
vant le  conseil  d'Espejo,  n'en  tirèrent  pas 
vengeance  ;  ils  se  comportèrent  de  ma- 
nière que  la  concorde  fut  bientôt  établie 
entre  eux  et  les  Indiens.  Parmi  les  nom- 
breuses rivières  qui  coulent  dans  ce  pays, 
il  y  en  a  une  aussi  grande  que  le  Guadal- 
quivir.  Eu  la  côtoyant,  les  Espagnols 
trouvèrent  près  de  ses  bords  plusieurs 
peuplades  dont  ils  ignoraient  la  langue  et 
le  nom.  Parvenus  jusqu'aux  Tignas ,  ceux 
qui  avaient  tué  les  deux  religieux  s'en- 
fuirent, ainsi  que  tous  les  autres  Indiens, 
de  crainte  d'être  punis  pour  ce  meurtre. 
Espejo ,  qui  commençait  à  manquer  de 
provisions,  et  prévoyait  qu'il  pourrait 
trouver  encore  des  ennemis,  fut  sur  le 
point  de  retourner  aux  mines  de  Sainte- 
Barbe  ;  mais  s'étant  avancé  encore  de 
plusieurs  lieues ,  quelques  Indiens  moins 
prévenus  contre  les  Espagnols,  lui  assu- 
rèrent qu'il  existait  à  l'orient  un  grand  et 
riche   pays.    Quelques-uns    des  soldats 


ESP 

avaient  déjà  abandonné  Espejo;  il  ne  lui 
en  restait  que  douze ,  avec   lesquels  il 
continua  son  voyage.  A  mesure  qu'il  pé- 
nétrait dans  le  pays,  de  belles  plaines 
s'otTraient  à  ses  yeux,  et  il  voyait  sou- 
vent des  indices  certains  que  ce  pays  était 
fertile  en  mines.  Les  Indiens  qui  l'habi- 
taient paraissaient  être  plus  civilisés  que 
les  autres.  Leurs  habitations  itaient  plus 
élégantes,  plus  soignées;    et   pour  se 
garantir  de  l'ardeur  du  soleil ,  ils   por- 
taient  des   parasols   assez  semblables  à 
ceux    des   Chinois.    Espejo  se   trouvait 
alors  à  la   hauteur  de  37°  38,    de   lati- 
tude boréale.  Vers  l'ouest  comme  vers 
le   nord,  il  rencontrait  des  peuplades 
plus  civilisées;  dans  le  pays  de  Civola,  il 
remarque  des  croix  qu'y  avait  plantées, 
en   1542,  le  voyageur  Coronado.  D'au- 
tres renseignemens  vinrent  le  raffermir 
dans  son  projet.  Il  apprit  qu'à  la  distance 
de  soixante  journées  (  ou  450  lieues  envi- 
ron) se  trouvait  un  lac  spacieux ,  autour 
duquel  s'élevaient  de  grandes  villes ,  oîi 
l'argent  et  l'or  abondaient.  Ces  nouvelles 
ranimèrent  le  courage  d'Espejo  ,  mais  il 
n'en  fut  pas  de   même  à  l'égard  de  ses 
compagnons ,  dont  la  plupart  se  séparè- 
rent de  lui.  Eniin,  après  différentes  cour- 
ses ,  il  arriva  au  pays  des  Tanins ,  d'où  il 
vit  se  développer  un  immense  continent, 
celui  auquel  on  donna  ensuite  le  nom  de 
Nouveau-Mexique.  Espejo  aurait  voulu 
pénétrer  dans  le  pays,  mais  les  Tarnas 
lui  ayant  refusé  des  provisions  ,  n'ayant 
pas  même  voulu  le  recevoir,  il  fut  con- 
traint de  retourner  à  la  Nouvelle  Bis- 
caye. Il  eut  pour  guide  un  Indien  ,   qui 
lui  fit  côtoyer  la  rivière  des  Vaches ,  et 
il  arriva  avec  sa  petite  troupe  au  val  Saint- 
Barthélemi,au  commencement  de  juillet 
'  583  ,  après  un  voyage  d'environ   huit 
mois.  Ayant  écrit  une  Relation  de  sa  dé- 
couverte ,  il  la  fit  parvenir  au  comte  de 
laCoruna,  vice-roi  du  Mexique,  qui  l'en- 
voya en  Espagne  au  conseil  des  Indes. 
Cette  Relation  se  trouve  au  tome  1,13* 
partie  des  Grands  voyages^  dansHaklint 
et  dans  V Histoire  de  la  Chine  ,  du  Père 
Mendoza.  Les  RR.  PP.  Garces  etPonte  vi- 
sitèrent, de  1771  à  1776,  les  pays  du 
nord  du  Mexique  ;  et ,  dans  la  Relation 


ESP  tl^ 

qu'ils  écrivirent  de  leur  voyage ,  ils  sont 
parfaitement  d'accord  avec  Espejo  sur  la 
civilisation  des  Indiens  de  ces  contrées. 
Leur  relation ,  insérée  dans  la  Chroni- 
que seraphique  du  collège  depropaganda 
fide(en  espagnol)  (Mexico,  17  92,  in- 
fol.  ) ,  a  'été  traduite  en  français  par  M. 
Humboldt. 

ESPEIN   (  Zeger-Bernard  Va?«  ) ,  né  Ji 
Louvain  en  164G,  docteur  en  droit  en 
1675,  remplit  avec  beaucoup  de  succès 
une  chaire  du  collège  du  pape  Adrien  YI. 
Son  association  aui  ennemis  de  l'églke, 
ses  sentimens  sur  le  Formulaire  et  sur  la 
bulle  Unigenitus,  l'apologie  qu'il  fit  du 
sacre  de  Steenoven,  archevêque  schisraa- 
tique  d'Utrecht ,  remplirent  ses  derniers 
jours  de  chagrins  qu'il  eût  pu  aisément 
s'épargner.  Il  se  retira  à  Maestricht,  puis 
à  Amersfort,  où  il  mourut  en  1728.  Van 
Espen  est  sans  contredit  un  des  plus  sa- 
vans  canonistes  de  son  temps.  Le  meil- 
leur et  le  plus  recherché  de  ses  ouvrages 
est  son  Jus  ecclesiasticum  universum. 
Les  points  les  plus  importans  de  la  dis- 
cipline ecclésiastique ,  y  sont  quelque- 
fois discutés  avec  autant  d'étendue  que 
de  sagacité  ;  mais  on  reconnaît  sans  peîne 
qu'il  ne  tire  pas,  à  beaucoup  près,   tout 
ce  qu'il  dit,   de  son  érudition  person- 
nelle. «  Ceux  qui  ont  lu  Thomassin  et 
»  Van  Espen,  dit  un  critique,  s'aperce- 
»  vront  sans  peine,  que,  quant  à  ce  qui 
u  concerne  la  science  ecclésiastique  ,  le 
»  second  ne  fait  que  répéter  le  premier  ; 
«  que  c'est  le  riche  fonds  où  il  a  puisé 
»  sans  cesse,  et  dont  il  a  fait  un  usage 
»  aussi  commode  que  profitable  à  sa  i"é- 
»  putation  :  peut-être  cependant  la  doit- 
«  il  particulièrement  à  la  secte  dont  il 
M  épousa  si  vivement  les  intérêts.  )>  En- 
tre diverses  réflexions  qu'il  fait  sur  les 
écrits  des  canonistes   du  siècle  dernier 
(Operum,  part.  F.  p.  194  ,  edit.  Colon. 
17  48  ),  il  a  soin  d'avertir  qu'il  faut  se  dé- 
fier de  certaines  opinions  relâchées  où  le 
torrent  les  a  entraînés.  La  remarque  est 
en  place  ;  et  l'on  peut  y  ajouter  qu'il  n'est 
pas  moins  nécessaire  d'être  en  garde  con- 
tre le  rigorisme  outré  de  quelques  autres 
canonistes,  qui  par  un  respect  affecté 
pour  la  discipline  de  l'église  ancienne  , 


n3  ESP 

osent  s'élever  contre  des  pratiques  géné- 
ralement adoptées  par  l'église  moderne 
(  a>oy.  Fleury  ,  Morin  (  Jean  ) ,  Tiiomas- 
siN  ).  On  a  donné  à  Paris ,  sous  le  nom  de 
Louvain,  en  1753  ,  un  recueil  de  tous  les 
ouvrages  de  Van  Espen  ,  en  4  vol.  iti- 
fol.  Cette  édition,  enrichie  des  observa- 
tions de  Gibert  siir\e  Jus ecclcsiasticum, 
offre  ce  que  la  morale ,  le  droit  canoni- 
que et  même  le  civil  ont  de  plus  impor- 
tant. On  trouve  divers  détails  curieux  et 
intéressans  touchant  cet  auteur  dans  une 
petite  brochure  assez  rare,  intitulée  :  De 
Zegcro  Bernai  do  Van  Espen  ,  etc. , 
authore  IVilhclnio  Bachusio.  Ce  Bachu- 
sius  avait  été ,  comme  Van  Espen ,  lié 
avec  le  parti  deQuesnel,  qu'il  abandonna 
ensuite;  et  les  renseignemens  qu'il  en 
donne  ,  sont  d'un  homme  qui  est  au  fait 
de  la  chose  qu'il  traite.  Il  en  résulte  de 
fâcheuses  impressions  contre  le  caractère 
et  les  qualités  morales  de  Van  Espen. 
Voyez  Bachusius  (  Du  Parc  de  Bellegarde 
a  écrit  aussi  la  Vie  de  Van  Espen  ). 

ESPENCE  (  Claude  d'  ) ,  né  à  Châlons 
sur  Marne  en  1611  ,  de  parens  nobles, 
prit  le  bonnet  de  docteur  de  Sorbonne, 
et  fut  recteur  de  l'université  de  Paris.  Le 
cardinal  de  Lorraine ,  qui  connaissait  son 
mérite,  se  servit  de  lui  dans  plusieurs 
affaires  importantes.  D'Espence  le  suivit 
en  Flandre  l'an  1544,  dans  le  voyage  que 
cette  éminence  y  fit  pour  la  ratification 
de  la  paix  entre  Charles-Quint  et  Fran- 
çois L  Le  cardinal  de  Lorraine  le  mena  à 
Rome  en  1555.  D'Espence  s'y  distingua 
tellement ,  que  Paul  IV  voulut  l'honorer 
de  la  pourpre  afin  de  le  retenir  auprès  de 
lui.  Le  docteur  français  aimait  mieux  le 
séjour  de  Paris.  Jl  revint  dans  cette  ville, 
et  parut  avec  éclat  aux  étals  d'Orléans  en 
1560,  et  au  colloque  de  Poissy  en  15G1. 
Il  mourut  de  la  pierre  en  1571.  C'était  un 
des  docteurs  les  plus  judicieux  et  les 
plus  modérés  de  son  temps.  Ennemi  des 
voies  violentes,  il  n'en  était  pas  moins 
fortement  attaché  aux  moyens  de  main- 
tenir et  de  répandre  la  foi  catholique.  Il 
était  très  versé  dans  les  sciences  ecclésia- 
stiques ctprofanes.  Les  ouvrages  que  nous 
avons  de  lui,  sont  presque  tous  écrits  en 
latin ,  avec  une  dignité  cl  une  noblesse 


ESP 

que  les  théologiens  de  son  temps  ne  con- 
naissaient presque  pas.  Il  se  sent  pour- 
tant de  l'école,  suivant  Richard  Simon, 
qui  rabaisse  un  peu  le  savoir  de  d'Espence. 
On  a  de  lui  1°  un  Traité  des  mariages 
clandestins  ;  il  y  soutient  que  les  fils  da 
famille  ne  peuvent  valablement  con- 
tracter des  mariages,  sans  le  consente- 
ment de  leurs  parens  :  question  qui  de- 
mande que  nous  nous  y  arrêtions  im  mo- 
ment. On  ne  peut  douter  qu'il  n'y  ait  eu 
autrefois  une  loi  ecclésiastique  qui  an- 
nule ces  mariages.  Un  passage  de  saint 
Basile  (  Epist.  ad  Amphil  ).  ne  laisse 
aucun  doute  là-dessus.  Les  Pères  du  con- 
cile de  Cologne  de  l'an  1536,  souhai- 
taient qu'on  renouvcKîl  dans  un  concile 
général,  le  canon  Aliter,  que  Graliea 
rapporte  comme  fait  par  le  pape  Evariste, 
contre  les  mariages  que  les  enfans  (con- 
tractent malgré  leurs  parens  :  Optamus 
ut  canon  Evaristi  pontificis  concilio  gê- 
ner alirenovctur  ,  tollanturque  illa  clan- 
destina  matrimonia  ,  quœ ,  invitis  pa~ 
rentibus  et  propinquis ,  veneris  potius 
quani  Dei  causa  contrahuntur.  Interea 
vero  donec  ccclesîa  de  hoc prospiciat  si 
non  irrita,  prohibita  saltem  sint ,  et 
excotnmunicationi  contrahcntes  ,  et  qui 
/lis  ope  et  consilio  adfuerint,  subjaceant 
(  Conc.  Colonicns.  ,  anno  1536  ).  On  voit 
par  là  que  la  loi  a  existé ,  et  qu'elle  est 
tombée  en  désuétude.  Il  est  cependant 
des  auteurs,  tels  que  Juennin  et  d'Es- 
pence (  dont  il  s'agit  dans  cet  article  )  , 
qui  prétendent  qu'elle  existe  encore  en 
France.  Mais  il  est  difficile  d'accorder 
celte  opinion  avec  le  concile  de  Trente, 
avec  la  déclaration  de  Louis  XIII ,  qui 
assura  au  clergé  que  tous  les  réglemens  , 
touchant  celle  matière  ,  ne  regardaient 
que  les  effets  civils,  nullement  la  validité 
du  mariage.  Les  plus  habiles  juristes  fran- 
çais, Bochel,  Blondeau,  etc., sont  dece 
sehtiment ,  que  Benoît  XIV  {de  Sin.  diœ- 
ces.  ,  lib.  IX.  )  établit  d'une  manière  très 
solide.  Cependant  pour  les  mariages  des 
princes  du  sang,  contractés  contre  la  vo- 
lonté du  roi ,  l'assemblée  du  clergé ,  en 
1G55,  a  déclaré  que  la  Coutume  de  France, 
qui  les  regarde  comme  non  valables , 
«  est  affermie  par  une  légitime  prescrip- 


ËSP 

»  tton,  et  autorisée  par  l'Eglise  »  [voyez 
Launoi  ,  Gerbais  ,  GiBERT  ).  2°  Des  Com- 
mentaires sur  les  e'pîtres  de  saint  Paul 
à  Timothc'e  et  à  Tite,  pleins  de  longues 
digressions  sur  la  hiérarchie  et  la  disci- 
pline ecclésiastique.  3°  Plusieurs  iraite's 
de  controverse  ;  les  uns  en  latin,  les  au- 
tres en  français.  Tous  ses  ouvrages  latins 
ont  été  recueillis  à  Paris  en  ICI 9,  in-fol. 

*ESPERDUT,  troubadour,  vivait  dans 
le  13*  siècle;  il  a  laissé  quelques  Chan- 
sons et  une  Sirvente  contre  les  lâches  et 
mauvais  seigneurs. 

ESPER1EÎ\TE(  Philippe  Callimaque)^ 
né  à  San-Geminiano  en  Toscane ,  de  l'il- 
lustre famille  de  Buonacorti ,  alla  à  Rome 
sous  le  pontificat  de  Pie  II,  et  y  forma  avec 
Pomponius  Lœtus  une  académie,  dont 
tous  les  membres  prirent  des  noms  latins 
ou  grecs.  Le  savant  dont  nous  parlons 
changea  son  nom  àc  Buonacorti  en  celui 
de  Callimaco  ;  mais  son  génie  pour  les 
affaires  lui  fit  donner  le  surnom  A'Espc- 
riente.  Paul  II  croyant  que  la  nouvelle 
académie  cachait  quelque  mystère  per- 
nicieux ,  persuasion  que  le  secret  des  as- 
sociés justifiait,  en  poursuivit  les  mem- 
bres avec  rigueur.  Esperiente  se  vit  obligé 
de  se  retirer  en  Pologne  ;  le  i-oi  Casimir 
III  lui  confia  l'éducation  de  ses  enfans, 
et  le  fit  quelque  temps  après  son  secré- 
taire. Ce  prince  l'envoya  successivement 
en  ambassade  à  Constantinople,  à  Vienne, 
à  Venise  et  à  Rome.  De  retour  en  Polo- 
gne ,  le  feu  prit  à  sa  maison ,  et  consuma 
ses  meubles,  sa  bibliothèque  et  plusieurs 
de  ses  écrits.  H  mourut  peu  de  temps 
après  à  Cracovie,  en  1496.  On  a  de  lui 
t"  Commentarii  rerum  Persicarum, 
Francfort,  ICOl,  in-folio.  2°  Historia  de 
iisquœ  à  Fcnetis  ientata  sunt,  Pcrsis 
et  Tarturis  contra  Turcas  movdndis , 
etc.  Il  y  a  des  recherches  dans  cet  ou- 
vrage, ainsi  que  dans  le  précèdent ,  avec 
lequel  il  ne  forme  qu'un  même  volume. 
3"  Attila ,  in-4  ,  ou  histoire  de  ce  roi  des 
Huns.  4.  Historia  de  rege  Uladislao , 
seu  clade  Farnensi,  in-4.  Esperiente  l'a 
emporté  dans  cet  ouvrage,  suivant  Paul 
Jove,  sur  tous  les  historiens  qui  ont  écrit 
depuis  Tacite  :  il  la  compare  à  la  Vie  d'A- 
gricola.  L'article  sur  Esperiente,  qu'on 


ESP  trg 

trouve  dans  le  Dictionuaire  de  Bayle , 
est  fort  inexact. 

ESPERNON  (Jean-Louis  de  Nogabkt 
de  la  Valette.  Ployez  Valette. 

ESPINASSE  (  Philibert  de  l'  ) ,  sire  de 
La  Clayetle,  chevalier  surnomme  le  grand 
conseiller  du  roi  Charles  F" ,  servit  sous 
Eude,  duc  de  Bourgogne,  en  qualité  de 
bachelier,  avec  deux  écuyers.  En  1340  le 
roi  le  chargea  d'aller  faire  rompre  les 
chaussées  des  étangs  de  Rue,  pour  la 
conservation  du  Ponthieu.  Il  fut  un  des 
plénipotentiaires  envoyés  à  Bruges  en 
1375  ,  pour  la  trêve  que  l'on  conclut  avec 
le  roi  d'Angleterre.  Philibert  assista, 
comme  conseiller  du  roi ,  aux  procédures 
qu'on  instruisit  au  parlement  et  à  la  tour 
du  Temple  contre  les  domestiques  du  roi 
de  Navarre  ,  accusés  d'avoir  été  les  agens 
de  ce  méchant  prince  pour  empoisonner 
le  roi  Charles  V.  Il  fut  encore  attaché  à 
l'éducation  du  dauphin,  en  1380.  Enfin 
il  accompagna  en  Angleterre  le  sire  de 
La  Trémouille,  dans  la  descente  qu'y 
firent  les  Français.  Il  est  la  tige  des  bran- 
ches de  La  Clayette ,  de  Saint-André , 
de  Sully ,  de  La  Faye  et  autres ,  qui  tou- 
tes ont  porté  son  nom. 

*  ESP1]\ASSE(  M""  Julie-Jeanne-Eléo- 
nore  de  l'  ) ,  célèbre  par  les  relations 
qu'elle  eut  avec  d'Alembcrt,  naquit  à  Lyon 
en  1732  ,  d'une  femme  d'un  rang  élevé  , 
qui  vivait  depuis  long-temps  séparée  de 
son  mari.  Cette  dame,  pour  lui  assurer 
une  existence  indépendante ,  lui  avait 
laissé  en  mourant  une  cassette  précieuse; 
un  abus  de  confiance  lui  enleva  cette  res- 
source. Connaissant  alors  sa  triste  des- 
tinée, elle  se  retira  d'abord  dans  un  cou- 
vent ,  ensuite  elle  entra  dans  la  famille 
du  mari  de  sa  mère  comme  étrangère 
et  en  qualité  de  gouvernante  d'enfans. 
Elle  y  était  depuis  4  années ,  lorsque  M"* 
du  Deffant  l'y  trouvant  en  1752  ,  désira 
se  l'attacher,  et,  deux  ans  après,  l'emmena 
avec  elle  à  Paris  pour  rendre  sa  maison 
plus  agréable.  Ces  deux  dames  allèrent 
habiter  la  Rue  St. -Dominique.  M"«  de 
L'Espinasse  qui  avait  un  esprit  cuflivé 
i-éussit  facilement  et  se  fit  d'illustres  amis 
qui  obtinrent  pour  elle  une  pension  du 
roi.  Après  dix  ans  d'une  amitié  qui  pa- 


120  ESP 

raissait  sincère ,  elle  quitta  brusquement 
sa  protectrice  qui,  devenue  aveugle, 
avait,  plus  que  jamais,  besoin  des  secours 
de  l'amitié  et  de  la  reconnaissance,  et 
elle  prit  une  maison ,  oii  «  elle  rassembla , 
»  dit  Laharpe  ,  la  société  la  plus  choisie 
))  et  la  plus  agréable  en  tout  genre  ;  de- 
»  puis  cinq  heures  du  soir  jusqu'à  dix , 
w  on  était  sûr  d'y  trouver  l'élite  de  tous 
))  les  états,  hommes  de  cours,  hommes 
V  de  lettres ,  ambassadeurs ,  femmes  de 
»  qualité  :  c'était  presque  un  titre  de 
»  considération  d'être  reçu  dans  cette  so- 
»  ciété.  Elle  en  faisait  le  principal  agré- 
«  ment.  Je  puis  dire,  ajoute  ce  littérateur 
»  distingué ,  que  je  n'ai  pas  connu  de 
»  femme  qui  eût  plus  d'esprit  naturel, 
»  moins  d'envie  d'en  montrer,  et  plus  de 
»  talens  pour  faire  valoir  celui  des  autres; 
«  elle  mettait  tout  son  monde  à  sa  place, 
})  et  chacun  était  content  de  la  sienne. 
3)  Avec  un  grand  usage  du  monde,  elle 
»  avait  l'espèce  de  politesse  la  plus  ai- 
»  mable,  celle  qui  a  le  ton  de  l'intérêt. 
3>  Ce  ton  lui  était  facile  :  son  âme  siugu- 
j)  lièrement  aimante ,  attirait  tout  ce  qui 
j)  avait  en  ce  genre  des  rapports  avec  elle. 
))  Aussi  personne  n'a  jamais  eu  autant 
»  d'amis,  et  chacun  d'eux  était  aimé 
w  comme  s'il  eût  été  seul  à  l'être.  On  n'a 
M  jamais  eu  plus  d'activité  et  plus  deplai- 
»  sir  à  obliger.  »  M''*'  de  L'Espinasse  n'é- 
tait pas  jolie  ;  car  elle  était  défigurée  par 
la  petite  vérole.  De  tous  ses  admirateurs 
les  plus  dévoués  furent  sans^  contredit  le 
philosophe  d'Alembert ,  et  le  vieux  pré- 
sident Hainaut.  Cependant  avec  tous  les 
avantages  dont  elle  était  environnée ,  M^^^ 
de  L'Espinasse  fut  malheureuse,  parce 
qu'elle  nourrissait  dans  son  cœur  des 
passions  désordonnées ,  et  qu'elle  perdit 
les  objets  de  ses  affections.  On  a  cru 
long-temps  que  la  mort  prématurée  du 
comte  de  Mora ,  jeune  espagnol  qui  lui 
avait  promis  sa  main,  et  qui  mourut  à 
Bordeaux  en  venant  la  rejoindre ,  fut  la 
cause  du  chagrin  qui  la  précipita  au  tom- 
beau ;  mais  deux  volumes  d'une  corres- 
pondance inconnue  (  Lettres  de  M"'  de 
L' Espincisse,  écrites  depuis  Vannée  17  73 
jusqu'àl  année  17  76,  Paris,  1809,  et  réim- 
primées en  1811  ) ,  ont  dévoilé  à  tous 


ESP 

les  yeuj  le  secret  d'un  autre  amour  (  pour 
M.  Guibert  qui  y  répondait  faiblement  ) , 
amour  qu'elle  était  parvenue  à  cacher, 
même  à  ceux  de  ses  amis  qui  avaient  le 
plus  sa  confiance  ;  il  paraît  qu'elle  est 
mortevictime  de  cette  passion.  Ces  lettres 
ont  pu  ajouter  à  l'itlée  qu'on  avait  de  son 
esprit  ;  mais  elles  ont  nui  à  l'intérêt  qu'a- 
vait inspiré  son  caractère  et  ses  malheurs 
connus.  Elle  passa  les  derniers  jours  de  sa 
vie  dans  un  affaissement  total  ;  on  la  fai- 
sait revenir  avec  des  cordiaux.  Peu  de 
temps  avant  sa  mort ,  on  la  souleva  : 
«  Est-ce  que  je  vis  encore ,  »  dit-elle?  Ce 
furent  ses  dernières  paroles  ;  elle  expira 
le  23  mai  1770.  Avec  moins  de  répu- 
tation et  une  vie  plus  simple  elle  eût  pu 
être  beaucoup  plus  heureuse.  D'Alembert, 
qui  fut  un  de  ses  plus  chauds  partisans , 
et  qui  s'était  fixé  dans  la  même  maison , 
fut  nommé  son  exécuteur  testamentaire. 
Quoiqu'il  eût  beaucoup  à  se  plaindre  de 
M"^  de  L'Espinasse ,  et  qu'il  lui  donnât 
le  nom  de  son  injuste  et  cruelle  amie , 
la  douleur  qu'il  montra  en  celte  occasion, 
était  si  connue ,  qu'elle  excita  une  sorte 
d'intérêt  public.  Laharpe  a  prétendu  que 
le  président  Hainaut  épousa  M'^*  de  l'Espi- 
nasse,  quoiqu'il  eût  70  ans;  mais  ce  fait 
est  contesté  :  il  paraît  au  moins  que  pour 
sauver  certaines  convenances ,  cette 
union  ne  fut  pas  rendue  publique.  M"« 
de  L'Espinasse  ajouta  deux  chapitres  au 
Voyage  sentimental  de  Sterne. 

ESPINAY  (Timoléon  d'),  seigneur  de 
Saii\t-Luc,  servit  sur  terre  et  sur  mer.  Il 
commandait  la  première  escadre  avec 
rang  de  vice-amiral ,  à  la  défaite  des  Ro- 
chelois  en  1622.  Ses  services  le  firent  es- 
timer du  cardinal  de  Richelieu  ;  cepen- 
dant, comme  ils  n'étaient  point  assez 
grands  pour  élever  Saint-Luc  jusqu'au 
comble  des  honneurs,  il  n'y  fût  parvenu 
qu'avec  peine,  s'il  ne  se  fût  démis  du 
gouvernement  de  Brouage,  que  ce  minis- 
tre voulait  avoir.  Saint-Luc  eut  pour  ré- 
compense le  bâton  de  maréchal  de  France, 
et  la  lieutenance  de  roi  en  Guienne, 
l'an  1628.  Il  ne  songea  depuis  qu'à  vivre 
dans  le  luxe  et  les  plaisirs.  Il  mourut  à 
Bordeaux  le  12  septembre  1C44. 

*  ESPINOSA  (  Jean  ),  poète  espagnol , 


ESP 

né  à  Beilovado  Tcrs  1Ô40,  suivit  lo^nr- 
ricre  des  armes ,  et  fut  secrétaire  de  don 
rédro  Gonzalès  de  Mendoza ,  vice-roi  de 
Sicile.  Il  a  écrit  plusieurs  ouvraf^es  en 
vers,  qui  eurent  beaucoup  de  succès;  et 
oncifeentrcautresson  Traité àlalouanrjc 
des  femmes,  Miha,  1580,  in-4.  Il  mourut 
ver<;  159G. 

*  ESPIXOSA  (Antoine) ,  poèlc  espa- 
^ol ,  né  à  Antcquera  en  Andaiousie  vers 
l'an  1 582,  fut  aumônier  du  duc  de  Médina 
Sidonia,  directeur  du  collège  de  Saint- 
Alphonse  àSan-LucardeBarraméda,  où  il 
mourut  en  IGôO,  après  avoir  publié  I"une 
bonne  traduction  en  vers  des  Psaumes 
pe'nitcntiaux  ,  Malaxa,  162.0,  h\-i.  2°  Le 
Panégyrique  du  duc  de  Médina  Sidonia, 
iG2^;Z"Bltesoroescondito,  Madrid,  1 G44. 
V  Art  de  bien  mourir,  1G51.  5"  Tesoro 
de  poesias,  1C53.  Ce  recueil  est  fait  avec 
beaucoup  de  discernement  et  de  goût. 
L'auteur  y  inséra  quelques-unes  de  ses 
poésies,  qui  ne  sont  pas  inférieures  à  cel- 
les des  auteurs  les  plus  renommés. 

*ESPI3iOSA  (Hyacinthe-Jérôme),  pein- 
tre espagnol,  naquit  en  1 600  à  Coeentena, 
village  du  royaume  de  Valence,  sedistin- 
gua  de  bonne  heure  dans  ses  compositions 
par  le  talent  avec  lequel  il  faisait  le  clair- 
obscur,  par  la  correction  du  dessin,  lu 
grâce  et  l'expression  des  ligures.  Il  s'était 
perfectionné  en  Italie.  On  a  un  grand 
nombre  de  ses  tableaux,  tous  sur  des  su- 
jets sacrés  ;  les  plus  remarquables  sont 
un  Christ ,  une  Madeleine  ,  Y  Apothéose 
de  S.  Louis,  Bertrand,  S.  Joachim , 
S.  Pierre  martyr ,  une  Naissance  du 
Sauveur ,  la  Nativité  de  S.  Jean-Lap- 
tiste,  une  Cène.  Il  mourut  à  Valence  en 
1680. 

ESPINOY  (Philippe  d'),  né  en  Flandre 
en  1Ô52  d'une  bonne  famille,  s'attacha  à 
rechercher  les  antiquités  et  les  généalo- 
gies des  nobles  de  son  pays.  Le  titre  de 
son  ouvrage  est  :  Recherche  des  antiqui- 
tés et  noblesse  de  Flandre,  etc..  Douai, 
1632,  in-fol.  avec  fig.  Il  mourut  vers 
l'an  1633. 

ESPRÉMÉNIL.  Voyez  F.pbkmknil. 

ESPRlT(Jacques),  né  à  Béziers  enl  Cl  1 , 
entra  en  1C29  dans  l'Oratoire,  qu'il  quitta 
cinq  ans  après  pour  rentrer  dausle  monde. 
▼. 


T^V  is'i 

n  avait  toutes  les  qualités  propres  pour  r 
plaire,  de  l'esprit,  de  la  ligure.  Le  du:; 
de  la  Rochefoucault ,  le  chancelier  Sé- 
guier  et  le  prince  de  Conli ,  lui  donnè- 
rent des  témoignages  de  leur  estime  et 
de  leur  amilié.'  Le  premier  le  produisit 
dans  le  monde  ;  le  second  lui  obtint  une 
pension  de  2,000  liv.  et  un  brevet  décon- 
seiller d'état  ;  le  troisième  le  combla  de 
bienfaits,  et  le  consulta  dans  toutes  ses 
affaires,  flsprit  mourut  en  1  GTS, à 67  ans, 
dans  sa  patrie.  Il  était  membre  de  l'acadé- 
mie française,  et  fut  un  de  ccux/jui  brillè- 
rent dans  l'aurore  de  celle  compagnie. 
Les  ouvrages  d'Lsprit  sont  \°  àcs  Para- 
phrases de  quelques  psaumes ,  qu'on  ne 
peut  guère  lire  avec  plaisir ,  quand  on 
connaît  celles  de  Massillon.  2°  La  Faus- 
seté des  vertus  humaines  ,  Paris,  2  vol. 
in-12,  1G78,  et  Amsterdam,  in-8,  1716  : 
livre  médiocre,  qui  n'est,  à  quelques 
égards ,  qu'un  commentaire  des  pensées 
du  duc  de  La  Piochefoucault  ;  mais  qui  ne 
prête  pas  à  la  même  critique,  l'auteur 
ayant  moins  généralisé  son  objet. 

*ESQU1YEL  (  Hyacinthe  ) ,  religieux; 
de  l'ordre  de  Saint-Dominique,  naquit 
en  Biscaye,  en  1 501  ,  d'une  famillenoble. 
Il  professa  d'abord  la  philosophie  dans 
les  couvens  de  son  ordre.  Ayant  ensuite 
conçu  le  dessein  de  se  consacrer  aux  mis- 
sions étrangères,  et  se  proposant  surtout 
d'exercer  son  zèle  dans  le  Japon ,  il  par- 
tit pour  3Ianille  en  1625.  A  son  arrivée 
dans  cette  île,  il  y  fut  nommé  professeur 
de  théologie,  et  il  s'appliqua  en  même 
temps  à  l'étude  de  la  langue  japonaise. 
11  passa  ensuite  à  l'île  de  Sormola  ,  oîi  il 
fit  de  nombreuses  conversions.  Mais,  tou- 
jours occupé  de  l'idée  de  pénétrer  au  Ja- 
pon ,  il  s'embarqua  avec  un  frère-mineur 
sur  un  vaisseau  de  cette  nation.  Le  ca- 
pitaine avait  promis  de  les  conduire  eu 
sûreté  à  leur  destination';  mais  il  les  fit 
périr  pendant  la  traversée.  Cet  événe- 
ment arriva  en  1636.  On  connaît  de  ce 
religieux  :  1°  Vocabulaire  japonais  et 
espagnol ,  ^\avSS\e. ,  1630;  2°  Vocabu- 
laire de  la  langue  des  Indiens  de  Tan- 
ehuy  ,  en  Vile  de  Formose,  et  traduction 
en  cette  langue  de  toute  la  doctrine  chré~ 
tienne  ,  ibid. ,  en  1691. 

8.. 


122  ESP 

*  ESQtJIVEL  DE  ALAVA  (  Diego 
de  ),  prêtre  espagnol  et  théologien  dis- 
tingué, florissait  au  iit"  siècle  vers  l'an 
1492.  Il  était  né  à  Viltoiia,  et  y  avait 
fait  ses  études  ;  il  entra  dans  l'état  ecclé- 
siastique. Versé  dans  les  langues  latine  et 
grecque ,  il  s'appliqua  à  l'étude  des  Pères 
et  des  conciles,  remarquant,  dans  ses 
uombreuses  lectures ,  avec  un  soin  par- 
ticulier, ce  qui  concernait  la  discipline 
ecclésiastique,  et  leschangemens  qui  s'y 
étaient  introduits.  De  ce  travail  et  de  ses 
propres  réflexions  résulta  un  ouvrage  au- 
quel il  donna  pour  titre  :  I)e  Comitiis 
universalibus  ac  de  Us  quœ  ad  rcligio- 
nis  et  reipublicœ  christianœ  reformatio- 
nem  institucndam  apta  videntur ,  Gre- 
nade, 1583,  in-fol.  Esquivel  mourut  à 
Vittoria  en  156?.,  et  n'eut  pas  la  satisfac- 
tion de  voir  son  livre  imprimé.  On  y 
trouve  des  vues  utiles  sur  la  réformation, 
et  il  fut  bien  accueilli  du  public. 

ESSÉ.    Voyez.  MONTALEMBERT. 

*  ESSEN  (Jean-Henri ,  comte  d'),  feld- 
marcclial  suédois ,  issu  d'une  famille  li- 
vonienne,  naquit  en  17  55  à  Kasioës  dans 
la  Westro-Gothie.  Après  avoir  fait  ses 
études  aux  universités  d'Upsal  et  de  Got- 
tinguc ,  il  entra  de  bonne  heure  au  ser- 
vice militaire  et  fut  oilicier  de  dragons. 
En  1771  il  fut  appelé  à  Stockholm,  pour 
prendre  part  à  un  tournois  que  Gustave  III 
donnait  alors  :  l'adresse  et  la  grâce  que  le 
jeune  d'Essen  y  déploya,  l'intérêt  qu'in- 
spiraient sa  belle  figure  et  les  agrémens 
d'un  esprit  cultivé  lui  valurent  à  la  cour 
l'accueil  le  plus  flatteur  et  bientôt  après 
les  faveurs  les  plus  grandes.  Nommé  otB- 
cier  supérieur  et  écuyer  de  la  cour,  il  fut 
décoré  de  plusieurs  ordres  et  conserva , 
dès  cette  époque  jusqu'à  la  fin  de  ce  rè- 
gne, les  bonnes  grâces  du  roi,  sans  jamais 
en  abuser,  et  sans  en  faire,  comme  les 
autres  courtisans,  un  trafic  honteux.  D'Es- 
sen accompagna  le  roi  dans  ses  nombreux 
voyages  en  Italie,  en  France  et  en  Alle- 
magne (1783).  En  1788  il  le  suivit  dans 
la  campagne  de  Finlande  qui  fut  si  fatale 
à  la  Suède,  campagne  au  milieu  de  la- 
quelle les  armées  suédoises  échouèrent 
devant  les  villes  les  plus  faible."!,  et  où  les 
généraux  refusèrent  de  continuer  des  hos- 


ESP 

tilil^  qu'ils  disaient  intempestives  :  pre- 
mier signe  du  mécontentement  dont  les 
effets  devaiciU  être  si  déplorables.  Dans 
sa  retraite,  le  roi  toujours  accompagné  de 
son  fidèle  d'Es.sen,  se  rendit  à  Gothem- 
bourg  :  cette  ville  était  menacée  par  une 
invasion  de  troupes  norwégiennes  entrées 
dans  les  provinces  du  centre  du  royaume, 
pour  agir  comme  auxiliaires  de  la  Russie  : 
le  roi  eût  été  infailliblement  fait  pri- 
sonnier sans  le  dévouement  et  l'activité 
d'Essen  qui  parcourut  les  provinces  voi- 
sines, fit  des  levées  de  paysans  et  en 
forma  une  armée  qui  contribua  à  la  déli- 
vrance du  roi.  D'Essen  fut  instruit  par  des 
voies  indirectes  du  complot  qui  menaçait 
les  jours  de  Gustave  :  il  fit  d'inutiles  ef- 
forts pour  empêcher  le  roi  de  se  rendre 
au  bai  oii  on  liU  avait  dit  qu'il  recevrait 
la  mort,  et  ce  fut  à  sa  prudence  que  l'on 
dut  l'arrestation  de  l'assassin.  Voyez  l'ar- 
ticle Anckarstroem.  Il  fie  quitta  point  son 
maîîredontlesangrojaillitsurlui(lGmaFS 
17C2J.  Dans  l'année  qui  avait  précédé  la 
guerre  de  Finlande,  le  roi  lui  avait  donné 
en  mariage  l'une  des  plus  riches  et  des 
plus  belles  héritières  de  la  Suède;  celle 
union  qui  avait  été  contrariée  par  l'oppo- 
sition d'un  jeune  homme ,  fut  la  cause 
d'un  duel  dans  leqjicl  d'Essen  reçut  an 
coup  d'épée  ;  celte  affaire  n'eut  pas 
d'autre  suite.  Sous  le  règne  des  princes 
qui  succédèrent  à  Gustave  III ,  le  comte 
d'Essen  jouit  d'un  grand  crédit  à  la  cour. 
En  1795  il  accompagna  le  duc  de  Suder- 
Manie  (Charles  XIII)  et  le  jeune  roi  Gus- 
tave-Adolphe à  Saint-Pétersbourg.  A  son 
retour  il  fut  nommé  gouverneur  de  Sloc- 
kholm.  En  1 800  Gustave-.\dolphe  lui  con- 
fia le  gouvernement  général  de  la  Pomé- 
ranie  suédoise.  En  1807,  d'Essen  com- 
manda en  chef  l'armée  réunie  dans  cette 
province,  et  pendant  deux  mois  et  demi 
il  soutint  alors  le  siège  de  Stralsand  et 
dut  à  sa  valeur  un  honorable  armistice. 
Lorsque  Gustave-Adolphe,  mécontent  de 
ses  généraux,  prit  l'héroïque  mais  inutile 
résolution  de  commander  lui-même  ses 
armées ,  le  comte  d'Essen  se  retira  dans 
ses  terres  d'Uplande.  3Iais  après  la  révo- 
lution de  1800  et  l'abdication  du  roi,  les 
états-généraux  de  Suède  le  rappelèrent 


ESS 
an  conseil  d'état.  Le  roi  Charles  XIII  lui 
confia  la  même  année  l'ambassade  de 
Paris  et  le  chargea,  avec  le  conseiller  d'é- 
tat Lagerbielke,  des  négociations  relatives 
à  la  paix  qui  fut  en  efi'ct  accordée  le  17 
septembre  1809  et  qui  rendit  momenta- 
nément lePoméranieàla  Suède.  En  1814, 
d'Essen  commanda  les  troupes  destinées 
à  occuper  la  Norwtge;  après  s'être  em- 
paré de  Kerby  et  de  Prestbacka  ,  il  éta- 
blit son  quartier  général  à  Hafslund  ,  et 
reçut  par  capitulation  la  ville  de  Fredrich- 
stadt.  Nommé  gouverneur-général  de  la 
Norwègc,  pendant  la  minorité  du  prince 
Oscar ,  il  ne  conserva  celte  place  que 
jusqu'en  1 8 1 G  ,  époque  où  il  donna  sa  dé- 
mission et  oîi  il  reçut  le  titre  de  grand 
maréchal  du  royaume  de  Suède.  Le  comte 
d'Essen  a  peu  joui  de  sa  prospérité;  sa 
première  épouse,  qu'il  affectionnait  ten- 
drement ,  est  morte  jeune  encore  ,  lui 
laissant  un  Als  unique  qui  donnait  les 
plus  belles  espérances  et  qui  est  mort  en 
peu  d'heures  d'une  maladie  aiguë  ;  il 
avait  épousé  en  secondes  noces  une  de  ses 
nièces.  Il  a  terminé  son  honorable  carrière 
dans  le  mois  de  juillet  1 824  à  Uddcvella, 
où  il  était  allé  prendre  les  bains  de  mer. 
ESSEX  (  Robert  d'Evreux  ou  Devereut, 
comte  d'  ),  fils  d'un  comte  maréchal  d'Ir- 
lande ,  d'une  famille  originaire  de  Nor- 
mandie ,  né  le  10  novembre  1 5G7  à  Nelhe- 
vood,  maison  de  campagne  de  son 
père,  dans  le  comté  d'Héréford,  est  fa- 
meux par  ses  aventures  et  par  sa  mort. 
S'élant  un  jour  présenté  devant  la  reine 
Elisabeth,  lorsqu'elle  allait  se  promener 
dans  un  jardin ,  il  se  trouva  un  endroit 
rempli  de  fange  sur  le  passage.  Essex  dé- 
tacha surle-champ  un  manteau  broche 
d'or  qu'il  portait,  et  l'étendit  sous  les 
pieds  de  la  princesse,  qui  fut  touchée  de 
cette  galanterie.  La  reine,  âgée  de  58 
ans,  prit  bientôt  pour  lui  un  goût  que  son 
âge  paraissait  mettre  à  l'abri  des  soup- 
çons. Il  était  aussi  brillant  par  son  cou- 
rage que  par  sa  bonne  mine.  En  1585,  il 
accompagna  Leycester  en  Hollande  et  ob- 
tint à  la  suite  de  cette  campagne  le  grade 
de  général  de  cavalerie.  En  159)  ,  Elisa- 
beth lui  confia  le  commandement  des 
troupes  qu'elle  envoyait  au  secours  de 


.  ESS  123 

Henri  IV  ;  d'Essex  ne  resta  pas  long-temps 
en  France.  Bientôt  après  il  fut  envoyé  en 
Espagne  et  s'empara  de  Cadix.  Il  avait 
demandé  la  permission  d'aller  con- 
quérir à  ses  dépens  un  canton  de  l'Irlande, 
et  se  signala  souvent  comme  volontaire. 
Il  fit  revivre  l'ancien  esprit  de  la  cheva- 
lerie ,  portant  toujours  à  son  bonnet  un 
g-ant  de  la  reine  Elisabeth.  Cette  prin- 
cesse le  fit  grand-maître  de  l'artillerie,  lui 
donna  l'ordre  de  la  Jarretière ,  le  nom- 
ma chancelier  de  l'unive  rsilé  de  Cambrid- 
ge et  enfin  le  fit  son  conseil  privé.  H  eut 
quelque  temps  le  premier  crédit  ;  mais  il 
ne  fit  jamais  rien  de  mémorable.  En  1 599 
il  alla  en  Irlande  contre  les  rebelles,  à  la 
tète  d'une  armée  de  20  mille  hommes, 
et  il  n'eut  guère  de  succès.  Peu  après ,  la 
reine  lui  ôta  sa  place  au  conseil ,  suspen- 
dit l'exercice  de  ses  autres  dignités,  et 
lui  défendit  la  cour.  Eile  avait  alors  08 
ans  ;  ce  qui  n'empêcha  pas  qu'on  ne  la 
crût  très  attachée  au  comte.  Nous  ne  dis- 
cuterons pas  les  bruits  qu'on  a  répandus 
à  ce  sujet ,  nous  dirons  seulement  que  le 
comte  fut  accusé  de  conspiration,  et  exé- 
cuté le  25  février  IGOl.  Il  n'avait  que  34 
ans.  On  prétend  qu'Elisabeth  hésita  à  si- 
gner l'arrêt  de  moVt;  ce  qui  est  sûr,  c'est 
qu'elle  le  signa.  —  Son  fils,  que  Jacques  I. 
rétablit  dans  tous  les  honneurs  militaires, 
dont  il  avait  été  privé  par  la  sentence  qui 
avait  condamné  son  père  à  mort ,  Jut  gé-- 
néral  du  parlement  contre  Charles  I.  Il 
donna  sa  démission  en  1C45,  et  mourut 
l'année  suivante  «Sa  mort,  dit  Hume, 
«  fut  un  grand  malheur  pour  l'Angleterre. 
M  Convaincu  des  fatales  conséquences 
»  qu'on  avait  à  redouter,  il  avait  résolu 
»  d'amener  les  deux  partis  à  faire  la  paix 
»  et  de  remédier  autant  qu'il  serait  en 
))  son  pouvoir  à  tous  les  maux  auxquels 
M  il  avait  contribué,  plutôt  par  erreur 
»  que  par  mauvaise  intention.  Sa  mort 
»  affaiblit  considérablement  danslescom- 
»  munes  le  parti  presbytérien  ou  modéré, 
»  et  les  faibles  restes  d'autorité ,  dont 
»  jouissait  encore  la  cliambre  des  pairs  , 
»  furent  totalement  anéantis.  » 

*  ESSEX  (  Robert  d'Evreux  ,  ou  Deve- 
reux  comte  d'  ) ,  né  en  1 592 ,  était  fils  de 
Robert  comte  d'Essex,  fameux  par  la  fa- 


124  ESS. 

vc'iir  ù'Eiisabeth,  sa  souveraine,  et  par 
la  lin  maliieurcuse  que  lui  attirèrent  la 
jalousie  de  ses  ennemis  et  son  ambition 
jiropre.  Une  année  après  la  mort  de  son 
père ,  !e  jeune  comte  d'Essex  fut  rétabli 
]»ar  Jacques  1"  dans  tous  les  honneurs 
liéréditaires  dont  on  avait  dépouillé  sa 
maison.  Quoique  fort  jeune,  il  faisait 
déjà  paraître  toute  la  fierté  de  son  père, 
et  il  en  donna  uue  preuve  frappante. 
Jouant  un  jour  à  la  paume  avec  Henri, 
prince  de  Galles,  une  dispute  s'éleva  en- 
tre eux ,  et  le  jeune  prince  l'appela  traî- 
tre. Robert ,  irrité  ,  répondit  par  un  coup 
de  raquette,  et  il  ue  fallut  rien  moins 
que  l'autorité  du  roi  pour  apaiser  la 
querelle.  A  peine  âgé  de  14  ans,  il  fut 
marié  à  lady  Charlotte  Howard,  quibien- 
lùt  commença  contre  son  époux  un  pro- 
cès qui  la  couvrit  d'une  honte  person- 
nelle ,  et  qui  se  termina  par  le  divorce , 
le  roi  était  intervenu  dans  cet  arrêt.  Le 
comte  d'Essex  se  relira  dans  ses  terres,  et 
se  livra  à  toutes  les  diversions  que  lui  of- 
frait sa  campagne.  Mais,  bientôt  fatii^ué 
de  celte  vie  oisive  ,  il  passa  en  Hollande, 
et  y  fit  la  guerre  dans  les  armées  de  l'E- 
lecteur palatin  ,  gendre  de  Jacques  F' , 
sous  le  prince  Maurice.  Revenu  en  Angle- 
terre, il  figura  au  parlement,  dans  le 
pai'ti  de  l'opposition  ,  ce  qui  lui  aliéna  la 
cour.  Il  s'attacha  alors  davantage  au  ser- 
vice étranger,  et  commanda,  en  1624,  un 
régiment  levé  en  Angleterre  pour  les  Pro- 
vinces-Unies. Lorsque  Charles  P'  monta 
^ur  le  trône ,  il  fut  employé  comme  vice- 
amiral  dans  une  expédition  infructueuse 
contre  les  Espagnols.  Après  une  autre 
campagne,  en  1025,  dans  les  Pays-Bas , 
il  contracta  un  second  mariage  ;  mais 
cette  union  ne  fut  pas  plus  heureuse  que 
la  première  ;  les  procédés  de  sa  femme 
furent  tels ,  qu'il  fut  obligé  au  bout  de 
deux  ans  de  recourir  au  divorce.  Ne  pou- 
vant goûter  les  douceurs  de  la  vie  domes- 
tique, il  saisit  ardemment  l'occasion  qui 
se  présenta  déjouer  un  rôle  dans  la  car- 
rière politique.  Il  chercha  à  captiver  la 
faveur  du  peuple,  et  à  s'attacher  les 
principaux  officiers  de  l'armée  et  les  mi- 
nistres puritains.  Cependant  Charles  I*' 
l'employa  eneore  dans  plusieurs  occa- 


ESS 
tions  importantes ,  comme  dans  l'arme- 
ment qui  eut  lieu  en  103.^),  et  dans  la 
campa ofne  contre  les  Ecossais ,  quatreau- 
iiécs  après.  D'Essex  donna  partout  des 
preuves  de  bravoure  et  d'inteiligcnce,  et 
soutintl'honncur  des  armes  du  roi.  H  at- 
tendait avec  raison  que  ces  services  lui 
mériteraient  quelque  reconnaissance  de 
la  part  de  la  cour  ;  mais  lorsqu'elle  n'eut 
plus  besoin  de  lui ,  cilc  le  remercia  froi^ 
dément.  Sa  fierté  fut  vivement  choquée 
d'un  pareil  accueil;  il  resta  cependant 
fidèle  au  roi.  En  1640,  il  fut  un  des  douze 
pairs  qui  signèrent  une  pétition  dans  la- 
quelle ils  priaientChatlesP'  déterminer 
les  différends  qui  s'élevaient ,  et  de  con- 
voquer un  parlement.  Peu  de  temps  après^ 
d'Essex  fut  un  des  connnissaires  chargea 
de  traiter  avec  les  Ecossais,  et  quand,  à 
l'ouverture  de  ce  long  parlement  qui  de- 
vait le  conduire  à  l'échafaud ,  le  roi  vou- 
lut se  rendre  populaire ,  il  admit  dans 
son  conseil  le  comte  d'Essex ,  elle  nomma 
son  chambellan.  Il  paraît  même  que  l'ar- 
mée lui  serait  restée  fidèle,  s'il  avait  cédé 
aux  instances  de  ses  sujets  les  plus  dé- 
voués, qui  lui  conseillaient  de  mettre 
d'Essex  à  la  tête  des  troupes  ;  mais  il  ne 
voulut  jamais  y  consentir.  Cependant, 
forcé  par  la  nécessité  de  recourir  à  ses 
services ,  il  le  nomma  ,  avant  de  partir 
pour  l'Ecosse ,  lieulenant-général  de  ses 
forccsau  sud  delà  Trcnt.  Les  pairs,  de  leur 
côté,  lui  donnèrent  uue  marque  de  con- 
fiance non  moins  honorable,  en  le  nom- 
mant président  du  comité  permanent, 
pendant  tout  le  temps  qu'ils  resteraient 
ajournés.  Lor.sque  le  roi  fut  revenu  d'E- 
cosse, la  chambre  des  communes,  crai- 
gnant les  entreprises  d'une  populace  tur- 
bulente,.qui  commençait  à  se  rassembler, 
demanda  qu'il  fût  créé  dans  la  cité, 
pour  la  sûreté  du  roi  et  du  parlement , 
une  garde  dont  le  commandement  serait 
donnéau  comte  d'Essex.  Charles  ne  trouva 
pas  à  propos  d'accéderà  celle  mesure,  et, 
avant  de  quitter  Londres,  il  ordonna  à 
d'Essex  de  le  suivre.  Le  comte  refusa,  al- 
léguant son  devoir  qui  le  retenait  au  par- 
lement. Ce  relus  lui  coûta  toutes  ses  pla- 
ces à  la  cour.  Piqué  contre  le  roi ,  et  cir- 
convenu par  des  hommes  artiâeieux ,  il 


ES3 

consentit,  en  ir.42,  à  se  chargep  du 
commandemenl  de  l'armée,  levée,  disait- 
on,  pour  Ja  sûreté  du  roi,  taudis  (ju'e!!e 
était  uniquement  destinée  à  protéger  les 
deux  chambres,  qui  remercièrent  d'Essex 
en  jurant  de  vivre  et  de  mourir  pour  lui. 
Dès  que  le  roi  apprit  la  levée  des  troupes 
parlementaires,  il  rassembla  de  son  côté 
une  armée,  et  refusant  d'écouter  les  pro- 
positions de  paix  que  lui  fit  faire  d'Essex, 
il  le  déclara  traître  à  son  roi  et  à  soa 
paj"S.  Les  deux  armées  en  vinrent  aux 
mains  à  Edgc-Hill,  le  23  août  1642.  On 
combattit  de  part  et  d'autre  avec  un  égal 
acharnement ,  et  chaque  parti  s'attribua 
la  vicioire.  Le  comte  n'en  reçut  pas 
moins  les  remercîmens  du  parlement ,  et 
tine  gratification  de  5,000  livres  sterling, 
11  prit  l'année  suivante  Reading.  Une  ma- 
ladie qui  se  mit  dans  son  armée  l'ayant 
empêché  de  rien  entreprendre  d'impor- 
tuut ,  les  meneurs  du  parlement  parlèrent 
de  le  destituer  ;  mais  ces  démêlés  n'eu- 
rent aucun  résultat  fâcheux  pour  d'Essex, 
qui ,  renforcé  par  de  nouvelles  troupes  , 
lit  lever  le  siège  de  Gloceslcr ,  s'empara 
de  Circenster ,  où  étaient  les  magasins 
de  l'armée  royale,  et  livra  au  roi  une  se- 
conde bataille  à  iiewbery ,  le  23  septem- 
bre 1G43;  il  y  montra  beaucoup  de  va- 
leur ;  l'avantage  fut  encore  balancé;  mais 
d'Kssex  réussit  à  couvrir  Londres.  S'étant 
cîisuile  dirigé  vers  la  Cornouaiile ,  où  on 
l'avait  assuré  qu'il  trouverait  beaucoup 
de  partisans  ,  il  y  fut  suivi  par  le  roi  et 
serré  de  si  prèsqu'il  n'avait  plus  la  liberté 
d'agir  ,  et  que  les  vivres  commençaient  à 
lui  manquer.  Charles,  le  voyant  dans 
cette  position  ,  lui  fit  proposer  un  traité; 
mais  il  répondit  que  n'étant  pas  le  maî- 
tre, il  ne  pouvait  rien  accepter.  Se  voyant 
abandonné  d'une  partie  de  ses  troupes, 
il  n'eut  d'autre  ressource  que  de  s'embar- 
quer à  Plimoulh,  et  de  gagner  Londres 
par  mer.  Il  fut  reçu  avec  beaucoup  de 
marques  de  respect  et  d'estime  ;  mais  il 
en  éprouva  peu  de  satisfaction  ;  et  pres- 
sentant déjà  les  vues  ambitieuses  de  Crom- 
>vel ,  qui  après  avoir  renversé  le  trône  , 
voulait  s'établir  sur  ses  ruines ,  il  proposa 
dans  un  conseil  qui  se  tint  chez  lui ,  de 
l'attaquer  en  plein  parlement  comme  un 


EST  125 

incendiaire.  Cette  proposition  n'eut  d'au- 
tre résultat  que  d'augmenter  la  haine  que 
Cromwel  lui  avait  juré-e.  Par  l'ordonnance 
de  Self-Dcnyiiig,  ou  ùc  renoncement  à 
soi-même,  qui  interdisait  toutes  les  char- 
ges aux  membres  du  parlement,  d'Essex 
fut  privé  du  commandement  de  l'armée, 
et  il  parut  s'en  démettre  avec  plaisir.  Ce- 
pendant ,  le  parlement ,  pour  ne  pas  se 
priver  d'un  homme  aussi  marquant,  vota 
qu'il  serait  élevé  au  rang  de  duc ,  et 
qu'une  pension  de  10,000  liv.  par  an  lui 
serait  accordée  pour  soutenir  sa  nouvelle 
dignité;  mais  une  mort  soudaine  l'empê- 
cha de  jouir  de  ces  nouveaux  honneurs. 
Elle  arriva  le  14  septembre  1G4U.  On 
soupçonna  que  le  poison  avait  terminé 
ses  jours,  comme  ceux  de  son  aïeul.  Le 
parlement  lui  prodigua  jusqu'à  la  fin  les 
plus  grandes  marques  d'estimeet  de  con- 
sidération. Il  lui  décerna  des  funérailles 
publiques,  qui  eurent  lieu  avec  la  plus 
grande  pompe  ,  à  l'aljbaye  de  Westmin-» 
ster,  oli  il  fut  enterré.  Le  comte  d'Esset 
avait  reçu  plusieurs  affronts  delà  cour,  et 
avait  vu  ses  services  ma!  récompensés,  et 
c'est  ce  qui  l'excuserait,  s'il  pouvait  l'ê- 
tre, d'avoir  pris  les  armes  contre  son  sou- 
verain. On  doit  cci»endant  lui  rendre  cette 
justice,  qu'il  chercha  à  entretenir  la  ba- 
lance entre  les  deux  partis,  et  que  ,  par 
conséquent,  il  n'avait  d'autres  vues  que 
celles  de  les  amener  à  faire  la  paix.  Mal- 
gré ses  fautes.  Hume  et  d'autres  histo- 
riens anglais  ont  regardé  la  mort  d'Esses 
comme  un  grand  malheur  pour  l'Angle- 
terre, et  l'ont  accusé,  dans  les  maux  aux- 
quels il  contribua,  plutôt  d'erreur  que 
de  mauvaise  intention.  Charles  V"  se  vit 
délivré  par  la  mort  du  comte  d'Essex  d'un 
redoutable  ennemi  ;  mais  ce  n'était  que 
pour  succomber  sous  un  autre  bien  plus 
cruel,  le  farouche  Cromv,el. 

EST.  ^oj/e:;  Alfoxse  d'Est. 

*  EST  (  Hercule  HI ,  Renaud  d'  ) ,  der- 
nier duc  de  Modène,  né  en  1727  ,  avait 
succédé  à  son  père  en  1 780.  Le  duc  d'Est 
était  alors  dans  un  âge  très  avancé  ;  il  ne 
lut  pas  plutôt  investi  du  pouvoir  qu'il  s'en 
servit  ])our  amasser  de  l'argent;  dans  ce 
but  il  établit  dans  l'armée  et  dans  son  pa- 
lais une  parcimonie  telle ,  qu'il  indisposa 


176  EST 

tous  ses  sujets  ;  aussi  en  1796,  lorsque  les 
armées  françaises  eutrèrent  dans  la  Loni- 
bardie ,  les  Modéiiois  furent  les  premiers 
à  se  déclarer  en  leur  faveur.  Hercule  , 
obligé  de  s'enfuir,  se  retira  à  Venise ,  où 
il  avait  déjà  mis  en  sûreté  ses  trésors.  Le 
traité  de  Gampo-Formio  (  9  juillet  1797  ), 
priva  la  maison  d'Est  des  duchés  de  Rcg- 
gio  et  de  Modène  qui  entrèrent  dans  la 
confédération  Cisal]iinc  ;  on  promit  au 
duc  Hercule  de  lui  donner  en  indemnité 
le  Brisgaw  ;  mais  il  mourut  en  1 802  à 
Trieste  avant  que  cette  promesse  fût  réa- 
lisée. Ce  fut  son  gendre  l'archiduc  Fer- 
dinand ,  frère  des  empereurs  Joseph  H 
et  Léopold  H  qui,  à  la  paix  de  Lunéville, 
obtint  cette  province.  En  1814,  àla chute" 
de  Buonaparlc,  le  petit -fils  d'Hercule, 
François  -  Joseph  -  Jean  de  Lorraine  , 
archiduc  d'Autriche,  fils  de  l'archidnc  Fer- 
dinand qui  avait  reçu  le  Brisgaw  et  qui 
était  mort  en  180G,  et  de  Marie  Béatrix 
fille  d'Hercule,  rentra  eu  possession»! de 
l'état  de  Modène,  en  vertu  du  congrès  de 
Vienne,  18f6. 

*  ESTAIjNG  ou  EsTEisG ,  nom  d'une 
ancienne  famille  du  Rouergue  nommée  de 
Stagna  dans  les  actes  du  10*  siècle.  Es- 
TAiNG  (  Charles  Hector  ,  comte  d'  )  né  au 
château  de  Ruvel,  en  Auvergne,  en  1729, 
commença  à  servir  dans  l'Inde  sous  les 
ordres  de  Lally.  Fait  prisonnier  par  les 
Anglais  au  siège  de  Madras,  il  fut  relâché 
sur  parole.  Mais  ayant  été  repris  les  ar- 
mes à  la  main  avant  son  échange,  il  fut 
traité  avec  sévérité  et  jeté  dans  un  cachot 
à  Portsmoulh.  Rentré  en  France,  il  voua 
une  haine  éternelle  aux  Anglais.  En  17G3, 
il  obtint  le  grade  de  lieutenant-général 
des  armées  de  France,  et  en  1778  il  fut 
envoyé  en  Amérique  en  qualité  de  vice- 
amiral  avec'  12  vaisseaux  de  ligne,  pour 
favoriser  l'indépendance  américaine.  Les 
vents  contraires  retardèrent  tellement  la 
traversée,  qu'il  ne  put  arriver  à  l'embou- 
chure de  la  Ware  que  huit  jours  après  le 
départ  de  l'amiral  Howe  :  celui-ci  ren- 
forcé par  l'escadre  de  lord  Byron  ,  crut 
vaincre  facilement  l'amiral  français  :  il 
l'attaqua  avec  vigueur.  D'Estaing  eut 
son  vaisseau  démâté  et  rasé  comme  un 
ponton  :  dans  cet  état  il  fut  environné  par 


EST 

plusieurs  vaisseaux  ennemis  et  ne  dut  son 
salut  qu'à  son  courage  à  sa  présence  d'es- 
prit. Après  avoir  rallié  sa  flotte  à  Boston 
et  s'être  renforcé  par  le  comte  de  Grasse 
et  Lamolhe,  il  entreprit  de  secourir  les 
colonies  françaises  menacées  par  les  An- 
glais :  Sainte-Lucie  était  déjà  tombée  en- 
tre leurs  mains  :  il  fit  de  vains  cflbrls  pour 
la  reprendre.  Alors  il  se  vengea  d'un  au- 
tre côté  du  mauvais  succès  de  celte  entre- 
prise. Il  remporta  une  victoire  navale 
devant  l'île  de  la  Grenade,  dont  il  s'em- 
para avec  intrépidité,  et  fit  des  prises 
considérables.  Il  ramena  ensuite  sa  flotlc 
dans  la  nouvelle  Angleterre  et  ïissiégea 
Savanah  :  il  échoua  par  sa  faute  et  fut 
découragé  par  deux  blessures  qu'il  reçut 
dans  cette  affaire.  De  retour  en  France 
en  1780,  il  éut  l'année  suivante  le  com- 
mandement d'une  flotte  qu'il  ramena  de 
Cadix  à  Brest.  Au  commencement  de  la 
révolution,  quoique  comblé  des  bien- 
faits de  la  cour ,  il  .se  jeta  dans  le  parti 
populaire,  et  ne  fui  cependant  pas  nommé 
aux  Elats-gcnéraux.  Il  commandait  la 
garde  nationale  de  Versailles,  les  5  et  6 
octobre  ,  et  il  ne  donna  aucun  ordre  à  la 
garde  nationale;  il  laissa  commettre  tou- 
tes les  horreurs  dont  ces  deux  journées 
présentèrent  le  douloureux  spectacle.  Il 
se  rendit  ensuite  à  Paris ,  oîi  il  servit 
comme  simple  grenadier  dans  la  garde 
nationale;  et,  lors  du  voyage  du  roi  à 
Varennes,  il  protesta  de  son  dévouement 
à  l'Assemblée  qui  ne  lui  demandait  rien. 
Sa  conduite  toute  patriotique  ne  put  le 
sauvçr  de  la  proscription.  Il  fut  traduit 
au  tribunal  révolutionnaire,  et  condamné 
à  mort  le  28  avril  1 794.  Il  figura  dans  le 
procès  de  la  reine  parmi  les  témoins  à 
charge  ;  il  avait  écrit  à  cetleprincesse  en 
1789  pour  l'engager  à  user  de  l'influence 
qu'elle  exerçait  sur  l'esprit  du  roi  pour  le 
détourner  du  projet  qu'il  avait  formé  de 
quitter  la  France. 

ESTAMPES  (  Léonor  d'  ) ,  d'une  illus- 
tre maison  de  Berri ,  fut  placé  sur  le  siégé 
de  Chartres  en  1620,  et  transféré  à  l'ar- 
chevêché de  Reims  en  1 64 1.  Il  signala  son 
zèle  pour  la  France  dans  l'assemblée  dit 
clergé  de  1626,  contre  deux  ouvrages  oii 
l'on   soutenait   des   opinions  alors  très 


EST 

enmnu'.nes ,  mais  qui  n'en  ëtaîenl  pas 
moins  fausses  louchant  l'autorité  des  rois. 

ESTAMPES -VALEI\ÇL\Y  (  Achille 
»'  ) ,  connu  soHS  le  nom  de  cardinal  de 
Falencay,  naquit  à  Tours  en  1593.  Il  se 
*  sit^nala  au\  sièges  de  Montauban  et  de  La 
Rochelle.  Après  la  réduction  de  celte 
viile,  il  fut  fait  maréchal-dc-camp.  Il  passa 
ensuite  à  Malte  ,  où  il  avait  été  reçu  che- 
valier de  minorité  dès  l'âge  de  18  ans.  La 
religion  lui  confia  la  place  de  général  des 
galères.  Son  courage  éclata  dans  toutes 
les  occasions,  et  surtout  à  la  prise  de  l'île 
de  Ste. -Maure  dans  l'Archipel,  Le  pape 
Urbain  VI!I  l'ayant  appelé  à  Rome  pour 
se  servir  de  son  bras  contre  le  duc  de 
Parme,  il  mérita  par  ses  services  d'être 
créé  cardinal  en  1043.  Ce  fut  vers  le 
même  temps  qu'il  souliiit  les  intérêts  de 
la  France  contre  l'ambassadeur  d'Espagne 
avec  tant  de  vigueur  ,  qu'il  l'obligea  de 
rendre  visite  au  cardinal  protecteur  de  la 
France.  Le  cardinal  de  Valenray  mourut 
en  1G4G  ,  avec  la  réputation  d'un  homme 
brave,  fier,  hardi,  entreprenant.  Les 
choses  les  plus  difficiles  ne  lui  coulaient 
guère  plus  à  faire  qu'à  proposer. 

ESTAMPES  (  Jacques  d'  ) ,  de  la  fa- 
mille du  précédent,  plus  connu  soua  le 
nom  de  maréchal  de.  la  Fcrtc'-Imbaut , 
chevalier  des  ordres  du  roi ,  lieutenant- 
général  de  l'Orléanais,  etc.,  porta  les 
armes  dès  sa  jeunesse,  et  se  signala  en  di- 
vers sièges  et  combats.  Il  fut  envoyé  am- 
bassadeur en  Angleterre  l'an  1G41,  et  rap- 
pelé quelque  temps  après,  pour  avoir  ré- 
vélé le  secret  du  roi  son  maître.  La  reine 
Anne  d'Autriche  lui  procura  le  bâton  de 
maréchal  de  France  en  1 051.  C'était  une 
récompense  due  à  son  exactitude,  à  sa 
vigilance  et  à  sa  bravoure.  Il  mourut  dans 
son  château  de  Mauny ,  près  de  Rouen,  le 
20  mai  ICG8,  à  78  ans. 

ESTAMPES  (  la  duchesse  d'  ).  Foyez 

PiSSELEU. 

ESTERHAZI  (Paul  ),  de  Galantha, 
prince  du  St.-Empire,  Palatin  et  vice-roi 
de  Hongrie,  chevalier  de  la  Toison-d'Or, 
fils  de  Nicolas  Esterhazi ,  d'une  des  pre- 
mières familles  de  Hongrie ,  naquit  en 
1635.  La  nature  et  l'éducation  concouru- 
rent à  en  faire  un  grand  homme.  Il  fit  des 


EST  127 

progrès  rapides  dans  les  belies-lettres,  et 
voyagea  ensuite  pour  acquérir  des  lumiè- 
res que  l'élude  seule  ne  peut  donner.  Fer- 
dinand III,  Léopold  1 ,  Joseph  I  et  Char- 
les IV  lui  donnèrent  des  marques  de  leur 
estime,  en  l'élevant  aux  plus  grands  em- 
plois dans  le  militaire  et  dans  le  gouver- 
nement des  provinces.il  montra  pendant 
toute  sa  vie  qu'il  était  digne  de  ces  hon- 
neurs. Il  fut  présent  à  presque  tous  les 
combats  qui  se  donnèrent  en  Hongrie,  et 
partout  il  donna  des  preuves  de-son  intel- 
ligence et  de  sa  bravoure.  Il  ne  contribua 
pas  peu  à  la  délivrance  devienne  en  1G85. 
L'année  d'après ,  il  leva  à  ses  propres  frais 
plusieurs  régimens,  et  engagea  les  nobles 
Hongrois,  à  son  exemple,  à  fournir  des 
troupes  pour  former  le  siège  de  Bude. 
Le  commandement  de  ces  troupes  lui  fut 
confié  ;  et  Leopold  leur  dut  en  grande 
partie  le  succès  de  ses  armes.  Il  mourut  le 
2G  mars  1713,  et  fut  enterré  à  Eysenstad, 
oîi  on  lit  sur  son  tombeau  ces  deux 
vers  latins  : 

Bi s  deries  quatuor  rnmniisi  prarlia  ,  nunquam 
Viilit  U'rgu  Lostis     setl  lanien  bîo  jaceo. 

On  voit  en  Hongrie  beaucoup  de  monu- 
mens  de  sa  piété,  de  sa  munificence  et  de 
la  protection  qu'il  donnait  aux  lettres. 
L'étude  et  les  exercices  de  pieté  occu- 
paient tout  le  temps  qu'il  ne  consacrait 
pas  au  service  de  l'état.  La  famille  d'Es- 
terhazi  a  produit  plusieuis  autres  grands 
hommes. 

*  ESTEVE  (Pierre-Jacques) ,  médecin 
espagnol,  naquit  à  Tortose  en  1512  ,  s'é- 
tablit à  Valence  oii  il  exerça  et  enseigna 
la  médecine  avec  la  plus  grande  distinc- 
tion. Il  a  publié  plusieurs  ouvrages  parmi 
lesquels  on  cite  une  traduction  latine  des 
Epidc'miques  d'Ilippncrale  avec  des 
commentaires  tics  e'tcndits  ,  Valence  , 
1553,  1  vol.  in-folio.  On  a  supposé  que 
cet  ouvrage  était  de  Gallien,  tant  on  y 
trouvait  de  science  ;  mais  cette  supposi- 
tion est  hors  de  toute  vraisemblance. 

*  ESTEVE  (Pierre) ,  membre  de l'aca-. 
demie  de  Montpellier,  naquit  dans  cette 
ville  vers  l'an  1 725 ,  a  publié  en  1 750  un 
opuscule  intitulé:  Problème:  si  T  expres- 
sion que  donne  V  harmonie  est  préférable 
a  celle  quje  fournit  la  mélodie.  Presque 


128  EST 

tous  ECS  ouvraf^ës  sont  au  dessous  de  la 
nii^diocritc  et  ont  été  condamnés  ù  l'ou- 
bli :  toutefois  on  cile  1°  Esprit  des 
beaux-arts,  1G53,  2  vol.  in-12,qui  a 
eu  un  moment  de  vogue.  2"  Nouvelle 
découverte  du  principe  de  Vharmotiic , 
avec  un  examen  de  ce  que  M.  Hameau 
a  publie',  sous  le  titre  de  Démonstration 
de  ce  principe,  Paris,  1751  ,  in-8.  3" 
lée.ttre  à  un  ami  sur  l'exposition  des  ta- 
bleaux au  Louvre,  17  63,  in-12;  A" Mé- 
moire contre  M.  de  Causans  sur  la  qua- 
drature du  cercle  ;  5"  Traité  de  la  dic- 
tion ,  1755,  in-12;  C"  Histoire  générale 
et  particulière  de  l'astronomie  ,  Paris  ^ 
1755,  3  vol.  in-12;  V  Dialogue  sur  les 
arts ,  1 7  56  ,  in-1 2.  On  lui  attribue  encore 
Origine  de  r univers,  1758,  ii)-12;  la 
Toilette  du  pfiilosophe ,  1751  ,  in-12;. 
Lettre  à  wi  partisan  du  bon  goût. 

ESTHER  ou  Edissa  ,  nom  qui  dans 
Un  dialecte  de  la  langue  hébraïque  veut 
dire  Myrte  ,  juive  de  la  tribu  de  Ccnja- 
min,  tille  d'AbihaïI ,  cousine-germaine 
de  Mardocbée.  Le  roi  Assuérus  l'épousa , 
après  avoir  répudié  Vaslbi.  Ce  monarque 
avait  un  favori  nomme  Aman  ,  ennemi 
déclaré  de  la  naiion  juive.  Ce  favori, 
irrité  de  ce  que  Mardocbée  lui  refusait 
les  respects  que  les  autres  courtisans  lui 
rendaient,  résolut  de  venger  ce  prétendu 
affront  sur  tous  les  Juifs.  11  fit  donner  un 
édit  pour  les  faire  tous  exterminer  dans 
un  temps  marqué.  Estber  ayant  imploré 
la  clémence  du  roi  en  faveur  de  sa  nation, 
obtint  la  révocation  de  l'édit,  et  la  per- 
mission de  tirer  vengeance  de  leur  enne- 
mi ,  le  même  jour  qu'Aman  avait  destiné 
à  leur  perte.  Les  historiens  ne  convien- 
nent pas  entre  eux  du  temps  auquel  cet 
événement  est  arrivé ,  ni  du  roi  de  Perse, 
que  l'Ecriture  appelle  Assuérus.  Cepen- 
dant les  circonstances  marquées  dans  le 
livre  à'Est/ier,  paraissent  convenir  à 
Darius,  fi!s  d'Hyslaspes.  La  vérité  de 
l'histoire  d'Esther  est  attestée  par  un  mo- 
nument non  suspect,  par  une  fête  que 
les  Juifs  établirent  en  mémoire  de  leur 
délivrance  ,  et  qu'ils  nommèrent  Purim, 
les  Sorts  ou  le  jour  des  Sorts,  parce 
qu'Aman ,  leur  ennemi ,  avait  fait  tirer 
au  sort ,  par  ses  devins,  le  jour  auquel  tous 


rsT 

tes  Juifs  devaient  être  massacrés.  Il  est 
parlé  de  celte  fête  dans  le  2"  livre  des 
Macbabécs  ,  cbap.  15,  y.  37.  Josèphe  en 
parle  {ylntiq.  Jud.  liv.  1 1  ,  cb.  G  ).  Elle 
est  marquée  dans  le  calendrier  des  Juifs 
au  4"  jour  du  mois  Adar.  On  ne  sait  pas 
avec  une  entière  certitude,  qui  est  l'au- 
teur de  ce  livre.  Saint  Augustin ,  saint 
Epipbanc,  saint  Isidore,  Tattribuent  à 
Esdras ,  Eusèbe  le  croit  d'un  écrivain  plus 
récent.  Quelques-uns  le  donnent  à  Joa- 
chim  ,  grand-prêtre  des  Juifs ,  et  pelit-fils 
de  Josedccb;  d'autres  à  la  synagogue, 
qui  le  composa  sur  les  lettres  de  Mardo- 
cbée; mais  la  plupart  des  interprèles 
l'attribuent  à  Mardocbée  lui-mcrtie  ;  ils  se 
fondent  sur  le  çhap.  9,  y.  20  de  ce  livre, 
oîi  il  est  dit  que  Mardocbée  écrit  ces  cho- 
ses, et  envoie  des  lettres  à  tous  les  Juifs 
dispersés  dans  les  provinces,  etc.  Le 
texte  grec  dit  qu'Eslhcr  y  ajouta  quel- 
ques pa.ssages;  et  ce  sont  sans  doute  ceux 
qni  semblent  être  détachés  du  corps  de 
l'ouvrage  et  ne  présentent  que  des  expli- 
cations et  des  détails  sur  des  choses  dites 
sommairement.  Les  Juifs  l'ont  mis  dans 
leur  îjncien  cano:i;  cependant  il  ne  se 
trouve  pas  dans  les  premiers  catalogues 
des  chrétiens,  mais  il  est  dans  celui  du 
concile  de  Laodicée  de  l'an  3GC  ou  3G7. 
Il  est  cité  comme  Ecriture  sainte  par 
saint  Clément  de  Rome  et  par  Clément 
d'Alexandrie,  qui  out  vécu  long-temps 
avant  le  concile  de  Laodicée.  Saint  Jé- 
rôme a  rejeté  comme  douteux  les  six  der- 
niers chapitres,  parce  qu'ils  ne  sont  plus 
dans  le  texte  hébreu ,  et  il  a  été  suivi  par 
plusieurs  auteurs  catholiques  jusqu'à 
Sixte  de  Sienne,-  mais  le  concile  de  Trente 
a  reconnu  le  livre  entier  comme  canoni- 
que. C'est  un  tableau  admirable  des  res- 
sources que  la  Providence  .sait  ménager 
pour  l'humiliation  des  superbes  et  la  dé- 
livrance de  ses  serviteurs  :  rien  de  plus 
propre  à  nourrir  l'espérance  et  le  cou- 
rage des  fidèles  dans  les  lemps  de  persé- 
cution, du  triomphe  apparent  et  toujours 
éphémère  de  l'impiété  revêtue  du  pou- 
voir. J.  Barnès  a  donné  une  histoired'Es- 
theren  versgrecs,  Londres,  1769,  in-8. 
On  connaît  ces  beaux  vers  de  Racine  dans 
sa  tragédie  d'jB'*//Krr  : 


EST 

J'iî  TO  l'impie  «^oré  »iir  ta  lerre; 
Pareil  au  i-èdre  il  portait  cluus  les  cieux 
Son  front  audarieux. 
Il  teiiibUit  à  «OD  gré  gouTeriier  In  toniierrff. 

Foulait  aux  pieds  ses  ennemis  vainctis  : 
Je  n'ai  fait  que  passer,  il  u'élait  déjà  plui^ 

ESTIEIV^'E  (  François  d'  )  seigneur  de 
Saint-Jean  de  La  Salle  et  de  Monlfuron, 
fut  conseiller  au  parlement  d'Aix  sa  pa- 
trie ,  ensuite  président  aux  enquêtes  au 
parlement  de  Paris,  et  enfin  président  à 
mortier  au  parlement  de  Provence.  Ce 
magistrat,  l'un  des  plus  savaus  juriscon- 
^sultes  du  16^  siècle,  a  laissé  un  livre 
estimé ,  sous  le  titre  de  Decisiones  Ste- 
phani. 

ESTIENNE,  les  imprimeurs.  Foyez 
Etiesne. 

ESTIUS  (  Guillaume  )  ou  William  Hes- 
SELs  VAN  Est,  né  l'an  1542,  à  Gorum 
en  Hollande,  de  l'ancienne  famille  d'Est, 
prit  le  bonnet  de  docteur  à  Louvain  en 
1 580.  Ses  talcns  le  firent  appeler  à  Douai, 
cil  il  fut  à  la  fois  professeur  en  théologie, 
supérieur  du  séminaire,  prévôt  de  l'é- 
glise de  àaint-Pierre  et  chancelier  de  l'u- 
niversité. Estius  mourut  dans  cette  ville 
en  1G13,  à  11  ans,  avec  la  réputation 
d'un  savant  laborieux  et  modeste,  et  d'un 
prêtre  vertueux.  Benoît  XIV  le  qualifie  de 
doctor  fondatissimus.  On  doit  à  ses 
veilles  fun  excellent  Commentaire  sur 
le  Maître  des  sentences ,  eu  2  vol.  in-fol., 
Paris,  1696  ;  Aaples,  1720  ,  avec  des  notes 
de  l'éditeur.  Cet  ouvrage ,  nourri  des  pas- 
sages de  l'Ecriture  et  des  Pères ,  est  fort 
recommandé  aux  jeunes  théologiens  par 
Dupin.  2°  Un  commentaire  sur  les  e'pî- 
tres  de  saint  Paul,  2  vol.  in-fol. ,  Rouen, 
1709  ,  rempli  d'une  vaste  et  solide  éru- 
dition. On  en  a  donné  un  abrégé ,  dont 
la  meilleure  édition  est  celle  de  Louvain, 
1776.  Un  auteur  moderne  avertit  qu'en 
lisant  ce  commentaire ,  il  faut  se  souve- 
nir qu'Estius ,  quoique  bon  catholique , 
a  été  discip'e  de  Hessels  et  de  Baïus,  et 
qu'il  a  emprunté  quelquefois  leur  façon 
de  parler.  3"  Des  notes  sur  les  endroits 
difficiles  de  V Ecriture  sainte.  Douai , 
1G28,  in-folio,  et  Anvers ,  1699,  avec  des 
augmentations.  Cet  ouvrage  est  très  infé- 
rieur à  l'autre,  quoiqu'il  y  ait  de  la  clarté 
et  de  la  solidité.  4"  Orationes  théologie  es 

V. 


EST  129 

XIX,  Louvain.  Il  y  eu  a  une  (  la  v^.  ) , 
contre  ceux  qui  sont  économes  de  leur 
savoir  ,/et  qui ,  renfermant  leurs  lumières 
dans  le  cabinet ,  refusent  de  les  commu- 
niquer au  dehors ,  soit  au  public  en  gé- 
néral par  de  bons  ouvrages,  soit  aux  par- 
ticuliers par  des  avis.  On  la  trouve  toute 
entière  à  la  suite  du  Tractatus  triplex, 
de  ordine  amoris ,  de  François  Van-Viane. 
6°  Hisloria  Martyrium  Gorcomiensium, 
Douai,  1603,  in-8.  6°  Martyrium  Ed- 
mundi  CampianiS.  J.  e  gallico  sermone 
in  latinuni  translatum.  Tous  les  écrits 
d'Estius  sont  en  latin. 

ESÏOILE  (  Pierre  de  l'  ) ,  grand-au- 
diencicr  de  la  chancellerie  de  Paris ,  mort 
en  1611  ,  s'est  fait  un  nom  par  son  Jour- 
nal de  Henri  III,  dont  l'abbé  Lengiet  du 
Fresnoi  a  donné  une  édition  en  17  4  4  ,  en 
5  vol.  in-8.  L'éditeur  l'a  augmenté  de 
plusieurs  pièces  sur  la  ligue ,  qui  eussent 
pu  rester  dans  l'oubli.  Ce  journal  com- 
mence au  mois  de  mai  1574,  et  finit  au 
mois  d'aoiit  1589.  Le  Duchat  en  avait 
donné  une  édition  en  2  vol.  in-8,  que 
celle  de  l'abbé  Lengiet  a  effacée.  On  a 
aussi  de  lui  le  Journal  du  règne  de  Henri 
ir ,  avec  des  remarques  historiques  et 
politiques  du  chev.  C.  B.  A.  (l'abbé Len- 
giet du  Fresnoi  ),  la  Haye,  1741  ,  4  vol. 
in-8.  U  laut  observer  que  les  années  1 598 
et  les  trois  années  suivantes  manquent 
dans  le  journal  de  L'Esloile.  On  a  placé 
dans  cette  édition  le  supplément  concer- 
nant ces  années,^  par  unauteuranonyme, 
qui  avait  paru  pour  la  première  foi»  eu 
1636.  Ces  deux  journaux  avaient  été  pu- 
bliés à  Cologne  (Bruxelles)  par  Godcfroi. 
Le  premier  sous  le  titre  de  Journal  de 
Henri  III,  4  vol.  in-8;  le  second,  sous 
le  titre  de  Mémoires  pour  servir  à  V his- 
toire de  France  ,  depuis  1515  jusqulen 
1611,  2  vol.  in-8,  1719.  Comme  ces  mé- 
moires renferment  plusieurs  choses  que 
l'abbé  Lengiet  du  Fresnoi  a  retranchées 
dans  son  édition  ,  il  n'est  pas  surprenant 
que  les  curieux  les  recherchent,  d'autant 
plus  qu'ils  sont  devenus  rares.  L'Estoile 
parait  dans  ses  dsux  journaux  ,  un  hom- 
me véridique ,  qui  dit  également  le  bien 
et  le  mal. 

ESTOILE  (  Claude  de  i.'  ) ,  filp  du  pré 

9 


i3o  EST 

cèdent ,  mourut  en  1G52,  âgé  d'environ 
68  ans  suivant  les  uns ,  et  suivaut  d'au- 
tres en  ICâl ,  à  54  ans.  Peu  accommodé 
des  biens  de  la  fortune,  il  aimu  mieux 
quitter  la  capitale  ,  que  d'y  mendier  à 
la  table  d'un  financier ,  ou  d'être  incom- 
mode k  ses  amis.  Pélisson  dit  de  lui  qu'il 
avait  plus  de  génie  que  d'étude  et  de  sa- 
voir. On  a  de  Jui  deux  pièces  de  théâtre 
très  médiocres,  et  des  odes  qui  le  sont 
un  peu  moins  :  ces  dernières  se  trouvent 
dans  \q  Recueil  des  poètes  français ,  1692, 
6vol.in-12. 

*ESTOURMEL  (  Louis-Marie,  mar- 
quis d'  ) ,  lieutenant-général ,  naquit  le 
11  mars  1744  en  Picardie,  d'une  noble 
et  riche  famille.  Ayant  embrassé  la  car- 
rière des  armes ,  il  entra  d'abord  dans  les 
mousquetaires  ,  devint  ensuite  et  succes- 
sivement officier  supérieur  dans  la  gen- 
darmerie, colonel  en  second  au  régiment 
de  Conti ,  brigadier ,  et  colonel  du  régi- 
ment  de  Pologne,    cavalerie.    Nommé 
membre  des  notables  en  17  87  ,  il  fut  dé- 
puté par  la  noblesse  du  Cambrésis  aux 
Etats-généraux  en    1789,   et  vota,  non 
dans  le  sens  d'une  licence  aveugle  et 
anarcbique,  mais  pour  une  sage  liberté 
qui ,  sous  une  monarchie  modérée  ,  put 
corriger  quelques  abus  inévitables  sous 
toute  espèce  de  gouvernement.  Dans  la 
mémorable  séance  du  4  août,  il  renonça 
pour  lui  et  pour  sa  famille,  aux  privilè- 
ges nobiliaires ,  et  à  tous  les  droits  féo- 
daux et  en  particulier  à  celui  de  Liège, 
aux  états  de  la  province  d'Artois  ;  mais  il 
défendit  les  privilèges  et  capitulations  du 
Cambrésis  dont  il  pouvait  croire  que  la 
défense  lui  était  confiée.  Les  états  de  sa 
province  ayant  été  accusés  de  s'opposer 
secrètement  à  l'exécution  des  ordres  de 
l'assemblée ,   il  les  défendit  énergique- 
ment,   et,  le  18  mai  1790,   il  demanda 
que  Robespierre   fût  rappelé  à  l'ordre , 
pour  avoir  insulté   !a  personne  du  roi. 
Les  couvens  venaient  d'être  .supprimés, 
et  l'on  avait  accordé  aux  différens  reli- 
gieux une  modique    pension   qu'on  ne 
payait  pas  :  d'Estourmel  s'éleva  contre 
cet  oubli  impardonnable,    et  sollicita, 
quoiqu'en  vain,  l'accomplissement  des  dé- 
crets. Il  demanda  et  o'bliut,  en  mars  1791, 


KST 

kl  mise  en  liberté  de  MM.  Hautefeuille , 
ari-èlés  illégalement  à  Saint-Germain.  Peu 
de  jours  après ,  il  combattit  le  projet  de 
loi  qui  fixait  la  résidence  du  roi,  et  dé- 
nonça la  correspondance  qu'entretenaient 
les  sociéléspopulaires  avec  les  divers  corps 
d'armée  ;  correspondance  qui  causait  une 
infinité  de  désordres.  A  la  fin  de  la  ses- 
sion, d'Estourmel  fut  employé  par  le  roi 
comme  inspecteui-- général  des  armées, 
et  servit  ensuite  dans  celle  du  nord,  sous 
les  ordres  du  général  Custines.  Bientôt  la 
mésintelligence  s'établit  entre  lui  et  ce 
chef,  qui  l'accusa  des  revers  de  l'armée. 
D'Estourmel  se  justifia  ,  et  un  décret  du 
26  mai  décliara  son  innocence.  Pendant  le 
régime  de  la  terreur ,  il  put  échapper 
aux  persécutions  ;  il  demeura  ignoré  sous 
le  consulat,  et  ne  parut  sur  la  scène  po- 
litique qu'au  moment  oîi  Napoléon  devint 
empereur.  Il  obtint  alors  la  croix  d'hon- 
neur, et  fut  nommé  parle  département 
de  la  Somme  (  en  1 804  ) ,  député  au  corps 
législatif,  oîi  il  fut  réélu  en  181 1  ;  il  en 
faisait  partie  en  1814.  Il  fut  un  des  pre- 
miers à  adhérer  à  la  déchéance  dcBuona- 
parle  ,  et  au  retour  de  ses  princes  légiti- 
mes. A  l'époque  où  Napoléon  reparut  (  le 
20  mars  1815  )  sur  le  sol  de  la  France, 
accablé  de  chagrin  et  d'infirmités,  il  se 
retirades  afTaires  ;  et,  heureux  par  les 
souvenirs  des  services  nombreux  qu'il  avait 
rendus  à  sa  patrie ,  il  mourut  le  1 3  dé- 
cembre 1823,  âgé  de  plus  de  soixante- 
dix  neuf  ans.  Il  avait  alors  le  grade  de 
lieutenant-général.  D'Estourmel  a  publié: 
Recueil  des  opinions  émises  à  FAssem- 
ble'e  constituante ,  cl  comptes  rendus  à 
mes  commet  tans ,  Paris,  1811  ,  in-8. 

ESTOUTEVILLE  (  Guillaume  d'  ) , 
cardinal ,  archevêque  de  Rouen ,  était 
fils  de  Jean  d'Estouteville,  d'une  an- 
cienne et  illustre  famille  de  Normandie. 
Il  fut  chargé  de  commissions  importan- 
tes sous  les  règnes  de  Charles  VU  et  de 
Louis  XI ,  reforma  l'université  de  Paris  , 
fut  grand  partisan  de  la  pragmatique- 
sanction  ,  et  protégea  les  savaus.  Il  mou- 
rut à  Rome  ,  étant  doyen  des  cardinaux, 
le  22  décembre  1483,  à  80  ans.  Outre 
l'archevèdié  de  Rouen,  il  possédait  6 
évêchés  tant  en  France  qu'en  Italie,  4 


1 


EST 

aljbayes  et  3  grands  prieurés;  mais  il  en 
employait  la  meilleure  partie  à  la  déco- 
ration des  églises  dont  il  é'ait  chargé  , 
et  au  soulagement  des  pauvres.  Ce  fut  lui 
qui  commença  le  l)eaii  château  de  Gail- 
lon.  Il  a  paru  en  1 788  un  prétendu  éloge 
de  ce  cardinal  y.  baibouillage  philosophi- 
que, sur  lequel  on  aurait  tort  de  le  ju- 
ger. La  suflnsance  du  siècle  croit  honorer 
les  grands  hommes  des  temps  passés  ,  en 
leur  donnant  des  traits  qu'ils  n'eurent 
jamais  et  qu'ils  eussent  rougi  d'avoir. 

ESTRADES  (  Godefroi,  comte  d'  ) , 
maréchal  de  France  ,  et  vice-roi  de  l'A- 
mérique ,  servit  long-temps  en  Hollande 
sous  le  prince  Maurice,  auprès  duquel  il 
faisait  les  fonctions  d'agent  de  France. 
Il  se  montra  à  la  fois  bon  capitaine  et 
grand  négociateur.  De  retour  à  Paris,  il 
fut  envoyé  à  Londres  en  ICCl  ,  avec  la 
qualité  d'ambassadeur  extraordinaire.  Il 
y  soutint  avec  une  vigoureuse  fermeté 
les  prérogatives  de  la  couronne  de  France, 
contre  le  baron  de  W'atteville,  ambassa- 
deur d'Espagne  ,  qui  avait  voulu  prendre 
le  pas  sur  lui.  Le  comte  d'Estrades  passa 
l'année  d'après  en  Hollande  avec  la  même 
qualité  ,  et  y  conclut  le  traité  de  Bréda. 
Il  ne  se  distingua  pas  moins  en  1G73, 
lorsqu'il  fut  envoyé  ambassadeur  extraor- 
dinaire aux  conférences  de  Mmèguepour 
la  paix  générale.  Il  mourut  en  1C8C,  à 
79  ans,  comme  il  venait  d'être  nommé 
gouverneur  du  duc  de  Chartres.  Les  Né- 
gociations du  comte  d'Estrades  ont  été 
imprimées  à  la  Haye  en  17  42,  9  vol. 
in-12.  Ce  n'est  qu'un  extrait  des  origi- 
Daux  ,  qui  contiennent 22  vol.  in-folio, 
dont  le  moindre  est  de  900  pages.  Jean 
Aymond,.  prêtre  apostat,  eu  vola  quel- 
ques- uns  dans  la  bibliothèque  du  roi ,  et 
les  publia  à  Amsterdam  en  1709,  in-12  , 
après  les  avoir  tronqués. 

ESTREES  (  Jean  u'  ] ,  grand-maître  de 
l'artillerie  de  France  ,  ué  en  148G ,  d'une 
famille  distinguée  et  ancienne,  mort  en 
1667  ,  à  81  ans,  fut  d'abord  page  de  la 
reine  Anne  de  Bretagne.  Il  rendit  de 
grands  services  aux  rois  François  I  et 
Henri  II.  C'est  lui  qui  commença  à  mettre 
l'artillerie  de!  France  sur  un  meilleur 
pied.  Il  se  signala  à  la  prise  de  Calais  en 


EST  i3i 

I  &5S  ,  et  donna  ,  dans  plusieurs  autres 
occasions ,  des  preuves  d'intelligence  et 
de  courage.  On  dit  que  c'est  le  premier 
gentilhomme  de  la  Picardie,  qui  ait  em- 
brassé la  religion  prétendue  réformée.  (  U 
existe  un  discours rfe^  villes  et  châteaux, 
forteresses  battues ,  assaillies  ,  prises 
sous  Jean  cTEstrées  ,  grand  maîlre  de 
T artillerie  par  Fr.  de  la  Treille  ,  Paris  , 
1563.) 

ESTRÉES  (  François- Annibal  d'  ), 
duc  ,  pair  et  maréchal  de  France ,  né  eu 
1573,  embrassa  d'abord  l'état  ecclésias- 
tique, et  le  roi  Henri  IV  le  nomma  à  l'é- 
vèché  de  Laon  ;  mais  il  quitta  cet  évè- 
ché  pour  suivre  le  parti  des  armes.  U 
se  signala  £n  diverses  occasions ,  secou- 
rut le  duc  de  Mantoue  en  1G2G  ,  prit  Trê- 
ves, et  se  distingua  par  son  esprit  autant 
que  par  sa  valeur.  ]\'ommé  en  1G3G  am- 
bassadeur extraordinaire  à  Rome,  il  .sou- 
tint avec  honneur  les  intérêts  de  la  cou- 
ronne, mais  non  pas  avec  prudence.  Ses 
brusqueries  et  son  humeur  violente  le 
brouillèrent  avec  Urbain  Vlll  et  avec  se.s 
neveux.  On  fut  contraint  de  le  rappeler. 

II  en  eut  un  si  grand  dépit,  qu'il  refusa 
de  venir  à  la  cour  rendre  compte  de  sa 
conduite.  Il  mourut  à  Paris  en  1G70» 
à  98  ans.  Le  maréchal  d'Estrées  était 
plus  propre  à  servir  le  roi  à  la  tète  des 
armées,  que  dans  une  négociation  épi- 
neuse. Non  content  de  faire  respecter 
son  caractère  ,  il  voulait  faire  craindre 
sa  personne.  Il  était  frère  de  la  belle  Ga- 
brielle  d'Estrées,  que  Henri  IV  aurai! 
épousée ,  si  la  mort  ne  l'eût  enlevée. 
Nous  avons  de  lui  1°  Des  Mémoires^  de 
la  régence  de  Marie  de  Médicis.  Ils  sont 
recherchés,  de  l'édition  de  Paris,  1GG6  , 
in-12,  où  il  y  a  une  lettre  préliminaire 
de  Pierre  Le  Moine.  2°  Une  Relation  du 
siège  de  Mantoue ,  en  1 630  ;  et  une  autre 
du  Conclave  ,  dans  lequel  le  pape  Gré- 
goire XV  fut  élu  eu  1G21.  H  règne  dans 
ces  difîérens  ouvrages  un  air  de  vérité, 
qui  fait  favorablement  augurer  de  la  fran- 
chise de  l'auteur  :  mais  son  stile  incor- 
rect prouve  que  le  maréchal  ne  savait  pas 
aussi  bien  écrire  que  combattre, 

ESTRÉES  (  César  d'  ) ,  cardinal ,  abbé 
de  Saint-Germain-des-Prés ,  né  en  1628, 


i3a  EST 

fils  du  precédcnl',  fut  élevé  sur  le  siège 
de  Laon  eu  1G53,  après  avoir  reçu  le 
bounet  de  docteur  de  Sorbonne.  Le  roi 
le  choisit  peu  de  temps  après  pour  mé- 
diateur entre  le  nonce  du  pape  et  les  amis 
des  quatre  évêques  d'Aleth ,  de  Beauvais, 
de  Pamicrs  et  d'Angers.  D'Estrées  avait 
Fart  de  ramener  les  esprits  les  plus  oppo- 
sés ,  de  les  persuader  et  de  leur  plaire. 
Ses  soins  procurèrent  un  accommode- 
ment ,  qui  donna  à  l'église  de  France  une 
paix  passagère,  parce  que  les  espritsqui 
la  recevaient ,  aimaient  la  guerre.  Le  car- 
dinal désirées  passa  ensuite  dans  la  Ba- 
Tière ,  où  Louis  XIV  l'envoya  pour  traiter 
■Je  mariage  du  daupbin  avec  la  princesse, 
électorale  ,  et  pour  y  ménager  d'autres 
afiàires  importantes.  Il  se  rendit  quelque 
temps  après  à  Rome,  y  soutint  les  droits 
de  la  France  pendant  les  disputes  de  la 
régale,  et  fut  chargé  de  toutes  les  aflaires 
après  la  mort  du  duc  son  frère  en  1G89. 
Il  accommoda  celles  du  clergé  avec  Rome, 
et  eut  beaucoup  de  part  aux  élections 
d'Alexandre  VIII ,  d'Innocent  XII  et  de 
Clément  XI.  Lorsque  Philippe  V  partit 
pour  le  trône  d'Espagne ,  le  cardinal 
d'Estrces  eut  ordre  de  le  suivre  pour  tra- 
vailler avec  les  premiers  ministres  de  ce 
prince.  Il  revint  en  France i'an  1703,  et 
mourut  à  son  abbaye  en  1714,  à  87  ans. 
Le  cardinal  d'Estrées  était  très  versé  dans 
les  affaires  de  l'Eglise  et  dans  'celles  de 
l'état.  A  un  génie  vaste ,  il  joignait  des 
manières  polies,  une  conversation  aima- 
ble ,  un  caractère  égal ,  l'amour  des  let- 
tres et  la  charité  envers  les  pauvres.  S'il 
ne  fut  pas  toujours  heureux  dans  ses  né- 
gociations, ce  ne  fut  ni  la  faute  de  son 
esprit ,  ni  celle  de  sa  prudence.  (  On  con- 
serve à  la  bibliothèque  du  roi  ses  négo- 
cia tions  à  Rome,  1671-1687.) 

ESTRÉES  (  Gabrielle  d'  ) ,  sœur  de 
Franrois-Annibal  d'Estrées  ,  reçut  de  la 
nature  tous  les  dons  qui  peuvent  enchaî- 
ner les  cœurs.  Henri  IV,  qui  la  vit  pour 
la  première  fois  en  1591  au  château  de 
Cœuvres ,  oii  elle  demeurait  avec  son 
père ,  fut  si  touché  de  sa»  figure  sédui- 
sante et  des  agrémens  de  son  esprit, 
qu'il  résolut  d'en  faire  sa  maîtresse  fa- 
vorite. Il  se  déguisa  un  jour  en  paysan 


EST 

pour  aller  la  trouver ,  passa  à  travers  le» 
gardes  ennemies  et  courut  risque  de  s» 
vie.  Pour  la  voir  plus^librement,  il  lui 
fit  épouser  Nicolas  d'Amerval,  seigneur 
deLiancourt,  avec  lequel  elle  n'habita 
point  ;  expédient  qui  ne  peut  honorer  la 
mémoire  de  ce  monarque.  La  mort  fu- 
neste de  Gabrielle.  en  1599,  finit  cette 
Ijaison  scandaleuse.  On  prétend  qu'elle 
fut  empoisonnée  par  le  riche  financier 
Zamet.  Ce  qu'il  y  a  de  certain ,  c'est 
qu'elle  mourut  dans  des  convulsions  épou- 
vantables. La  tête  de  celte  femme,  une 
des  plus  belles  de  sonsiècle,  était  toute 
tournée  le  lendemain  de  sa  mort ,  et  le 
visage  si  défiguré ,  qu'ellite  n'éta  plusre- 
connaissable.,  «  Spectacle  bien  propre, 
»  dit  un  auteur,  à  guérir  des  passions  in- 
»  sensées,  si  l'homme  qui  en  a  une  fois 
V  subi  le  joug,  pouvait  être  ramené  par 
»  de  telles  leçons  à  une  raison  qui  n'existe 
»  plus  chez  lui,  et  dont  il  travaille  a  étein- 
«  dre  ce  qui  lui  reste  peut-être  encore  de 
j>  son  importune  lumière.  »  De  toutes  les 
maîtresses  de  Henri  IV ,  c'est  celle  qu'il 
aima  le  plus.  Il  la  fit  duchesse  de  Beau- 
fort.  Il  eut  d'elle  trois  enfans:  César ,  duc 
de  Vendôme  j  Alexandre,  et  Henriette, 
qui  épousa  le  duc  d*Elbœuf.  Ce  sont  ces 
anecdotes  si  multipliées  dans  la  vie  de  ce 
monarque,  qui  ont  fait  dire  àBayle,  qu'il 
n'y  eut  jamais  d'homme  plus  indigne  d'a- 
voir une  épouse  fidèle. 

ESTRÉES  (  Victor-Marie  d'  ),  né  en 
16G0,  succéda  à  Jean,  comte  d'Estrées, 
son  père  ,  dans  la  charge  de  vice-amiral 
de  France ,  qu'il  exerça  avec  beaucoup 
de  gloire  dans  les  mers  du  Levant.  Il  bom- 
barda Barcelonne  et  Alicante  en  1C91,  et 
commanda,  en  1G97,  la  flotte  au  siè- 
ge de  Barcelonne.  Nommé  en  1701  lieute- 
nant général  desarmées  navales  d'Espagne 
par  Philippe  V,  qualité  qu'il  joignit  à 
celle  de  vice-amiral  de  France  ,  il  réunit 
le  commandement  des  flottes  espagnole  et 
française.  Deux  an|  après  il  fut  fait  ma- 
réchal-de-France ,  et  prit  le  nom  de  ma- 
réclialde  Cœuvres.  Cette  dignité  fut  sui- 
vie de  celles  de  grand  d'Espagne  et  de 
chevalier  de  la  Toison  d'or.  Il  les  mé- 
ritait par  une  valeur  héroïque ,  mais  pru- 
dente, et  par  les  qualités  du  cœur  pré- 


i 


EST 

féi'iibles  à  tous  les  talens  militaires.  An 
milieu  des  occupations  bruyantes  de  la 
guerre,  il  avait  cultivé  les  lettres.  Il  mou- 
rut à  Paris  en  1737  ,  à  77  ans.  Il  ne  laissa 
point  d'enfant  de  sa  femme  Fucre-Félicité 
de  ÎSoailles.  Sa  mort  éteignit  le  titre  de 
duché-pairie  ,  attaché  à  la  terre  de  Cœu- 
vres,  sous  le  nom  d'Estrées,  depuis  1G45. 
Ses  biens  passèrent  dans  la  maison  de 
Louvois  par  sa  sœur  qui  avait  épousé 
]e  marquis  de  Courtanvaus. 

ESTRÉES  (  Louis-César ,  duc  d'  ) , 
maréchal  de  France  et  ministre  d'état , 
naquit  à  Paris  en  1099,  de  François-Michel 
Le  Tellier  de  Courtanvaux ,  capitaine- 
colonel  des  Cenl-Suisses  ,  et  de  Marie- 
Anne-Catherine  d'Estrées  ,  fille  de  Jean  , 
comte  d'Estrées,  vice-amiral  et  maréchal 
de  France.  Il  fit  ses  premières  armes  dans 
la  guerre  passagère  que  le  duc  d'Orléans 
rcgent  fit  à  l'Espagne  ,  et  sernt  sous  les 
ordres  du  maréchal  de  Berwick.  Parvenu 
par  ses  services  aux  grades  de  maréchal 
de  camp  et  d'inspectcur-général  de  cava- 
lerie ,  il  se  signala  dans  la  guerre  de  1 7  4 1 . 
On  se  souviendra  long-temps  du  blocus 
d'Egra  ,  du  passa  du  Mein  à  Selingestadt, 
de  la  journée  de  Fontenoy ,  du  siège  de 
Mons,  de  celui  deCharleroy,  etc,  etc. 
11  eut  la  plus  grande  part  à  la  victoire  de 
Lawfeldt  ;  et  le  maréchal  de  Saxe  lui 
confia  ,  dans  diverses  occasions ,  les  ma- 
nœuvres les  plus  délicates.  Une  nouvelle 
guerre  ayant  été  allumée  en  175G,  Louis 
XV ,  qui  l'avait  honoré  du  bâton  de  ma- 
réchal le  24  février  17  57,  lui  donna  le 
commandement  de  l'armée  d'Allemagne , 
forte  de  plus  de  cent  mille  hommes.  Le 
général  montra  au  monarque  le  plan  des 
opérations ,  et  ne  craignit  point  de  lui 
dire  :  «  Aux  premiers  jours  de  juillet, 
»  j'aurai  conduit  l'ennemi  au-delà  du 
î>  Wéser,  et  je  serai  prêt  à  pénétrer  dans 
M  le  pays  d'Hanovre.  »  Kon  content  de 
tenir  parole ,  il  livra  bataille  au  duc  de 
Cumberland,  et  remporta  la  victoire  le 
2G  juillet  à  Hastembeck.  La  perte  fut  ce- 
pendant presque  égale  de  part  et  d'autre  ; 
mais  les  Hanovriens  découragés  laissè- 
rent prendre  Ilamelen  ,  et  se  disposaient 
à  abandonner  l'électorat ,  lorsque  M.  de 
AicUelicu  vint  relererM.  d'Estrées  ,  avant 


ETC 


i33^ 


qu'on  sût  à  la  cour  des  nouvelles  de  sa 
victoire.  Les  courtisans  l'accusaient  de 
lenteur.  Après  la  bataille  de  Rosbach  que 
les  Français  perdirent,  ils  ne  firent  qu'es- 
suyer successivement  de  nouveaux  mal- 
heurs. On  avait  les  yeux  tournes  sur  3L 

■  d'Estrées ,  comme  seul  capable  de  rendre 
aux  armées  françaises  la  gloire  qu'elles 
avaient  perdue.  Mais  son  grand  âge ,  ses 
infirmités,  ne  lui  permirent  pas  de  rc- 

,  prendre  le  commandement.  Cependant 
après  la  défaite  à  Minden  en  17G9,  il  se 
rendit  de  nouveau  à  l'armée ,  pour  y  con- 
certer avec  M.  de  Contades  le  reste  des 
opérations  de  la  campagne;  et  les  Fran- 
çais le  virent  partir  avec  regret  au  mois 
de  novembre ,  sans  prendre  le  comman- 
dement de  l'armée.  H  obtint  le  brevet  de 
duc  en  1763,  et  l'état  le  perdit  le  2  jan- 
vier 7771.  (Voyez  dans  la  galerie  fran- 
çaise l'abre'ge'de  sa  vie,  17  71,  in-fol.  ) 

'  ETCHÈVERRI ,  ou  Echeverri  (  Jean 
de  ) ,  célèbre  poète  basque ,  né  vers  1 650, 
h  Trafalla  ,  dans  la  iVavarre ,  entra  dans 
l'état  ecclésiastique ,  et  devint  docteur 
en  théologie.  Il  se  livra  particulièrement 
à  l'étude  de  sa  lang-ue  maternelle  ,  inin- 
telligible pour  tous  les  autres  Espagnols, 
et  pour  ceux-là  mêmes  qui  avoisinent  les 
provinces  de  Navarre ,  de  la  Biscaye  ,  ou 
de  l'ancienne  Cantabre.  Plusieurs  philo- 
logues prétendent  que  le  basque  fut  la 
langue  primitive  des  Espagnols  ;  d'autres 
pensent  qu'elle  dérive  du  phénicien; 
d'autres  lui  assignent  une  origine  cartha- 
ginoise ;  et  d'autres  enfin  croient  que  ce 
n'est  qu'un  mélange  de  ces  deux  Lingues, 
On  a  public  plusieurs  traites  sur  ce  sujet, 
et  dift'érentes  grammaires  qui  n'ont  pas 
encore  déterminé  ces  doutes.  Quoi  qu'il 
en  soit,  Etcheverri  la  choisit  pour  ses 
vers,  auxquels  sa  souplesse  et  sa  douceur 
la  rendent  très  propre.  La  première  pro- 
duction d'Etcheverri  fut  une  Ode  oii  il 
célébrait  la  vertu  et  la  beauté',  réunies 
ensemble.  Ses  autres  poésies,  dans  la 
même  langue,  sont  :  1°  Vie  de  Je'sus- 
Christ  ;  2"  Les  Mi,  stères  de  la  foi  ;  3"  Pi  u- 
sieurs  f^ies  de  Saints  •  le  tout,  réuni  dans 
un  volume,. fut  public  ,  pour  la  première 
fois,  à  Bayonne,  en  1640,  in-8.  Le  slile 
de  l'auteur  est  pur,  énergique  ,  élégant , 


i34  ETE 

et  peut  passer  pour  classique  dans  la  lan- 
gue basque. 

*  EÏEMARE  (  Jean-Bapliste  Le  Sesnk 
DE  Menilles  u'  ) ,  prêtre  appelant ,  né  au 
château  de  Méniilcs  en  ISormandie,  en 
1G82,  etitraau  séminaire Saint-Magloire, 
où  était  alors  l'abbé  Duguct,  et  fut  or- 
donne prêtre  en  1709.  C'était  l'année  de 
la  desli  notion  de  Port-Royal  ;  mais  on 
assure  que  d'Etcmarccnt  encorele  temps 
d'y  aller  faife  un  pèlerinar^e  avant  celte 
catastrophe,  et  qu'il  promit  de  se  consa- 
crer à  la  défense  des  jansénistes.  On  ne 
lui  reprochera  pas  d'avoir  manqué  à  sa 
jiarole.  Son  premier  écrit  fut  des  lettres 
Ihéologique.s  contre  une  instruction  pas- 
torale du  cardinal  de  Dissy.  On  y  entre- 
voyait déjà  ses  idées  sur  l'état  de  l'Eglise, 
et  ce  système  de  fig^ures  qu'il  avait  puisé 
dans  les  leçons  de  Duguet ,  qu'il  outra 
depuis  d'une  manière  bizarre  et  ridicule. 
La  bulle  Unigenitus  vint  donner  de  l'a- 
liment à  son  zèle.  Il  publia  contre  elle  un 
grand  nombre  de  mémoires ,  et  fut  dès 
lors  de  tous  les  conseils  des  appelans,  et 
eut  part  à  toutes  leurs  démarches.  Il  alla 
à  Rome  en  1725,  dans  l'espérance  d'y  ob- 
tenir une  bulle  doctrinale  qui  lui  fût  fa- 
vorable, et  il  n'y  réussit  point.  Il  en  con- 
çut, de  nouvelles  préventions  contre  la 
cour  de  Rome,  et  suivit  de  plus  en  plus 
son  système  favori,  en  publiant  VEssai 
de  parallèle  des  temps  de  Jésus-Christ , 
avec  les  nôtres ,  Pcxplication  de  quel- 
ques prophéties,  la  tradition  de  V Eglise 
sur  la  future  conversion  des  Juifs,  etc. 
Il  voyait  partout  des  figures  de  la  défec- 
tion de  l'Eglise  et  de  la  conversion  des 
Juifs.  Il  les  annonçait  dans  ses  écrits, 
dans  ses  conférences,  dans  ses  conversa- 
tions ,  et  devint  le  chef  d'un  parti  qui 
s'abandonna  aux  plus  folles  illusions  qui 
préparèrent  et  fomentèrent  les  scènes 
déplorables  des  convulsions.  D'Etemare 
eut  le  triste  honneur  d'être  un  des  direc- 
teurs de  cettea?«i'/'c  absurde  et  ridicule, 
qui  mit  la  division  parmi  les  appelans. 
Les  plus  modérés  se  dégoûtèrent  de  ses 
rêveries  et  de  ses  turpitudes ,  et  d'Ele- 
mare  essaya  inutilement  de  les  ramener 
par  son  autorité  et  ses  conseils.  On  se 
moqua  de  ses  décisions.  Il  chercha  alors 


ETH 

à  épurer  le  parti  des  convulsions,  el  H 
finit  par  s'apercevoir  lui-même  que  cette 
œuvre  n'était  pas  aussi  divine  (\u'ïi  l'avait 
imaginé,  sans  pourtant  qu'il  paraisse 
avoir  reconnu  sincèrement  le  principe  et 
l'étendue  de  son  illusion.  Son  crédit  souf- 
frit, en  cette  occasion,  de  rudes  attein- 
tes. La  Taste  d'un  côté ,  et  de  l'autre , 
l'abbé  Débonnaire  et  M'"  Mol,  dévoilè- 
rent des  traits  peu  honorables  pour  d'E- 
temare  ,  qui,  un  peu  honteux,  parut  en- 
1735,  se  condamner  à  la  retraite ,  et  il  y 
resta  presque  constamment  pendant  10 
ans.  Il  avait  fait  un  voyage  en  Angleterre 
en  1729  ,  avec  Le  Gros  ,  pour  tâcher  d'y 
former  un  parti  ;  mais  il  ne  fut  pas  plus 
heureux  qu'à  Rome.  Ilalla  souventdcpuis 
en  Hollande,  où  il  avait  connu  Qiiesnel  dès 
1714,  et  il  prit  part  à  l'établissement 
d'un  episcopat  dans  ce  pays.  Sur  la  fin  de 
sa  vie  il  s'y  fixa,  assista  à  l'espèce  de  con- 
cile qu'on  tint  àUtrecht  en  176-3  ,  et  fut, 
en  quelque  sorte,  l'âme  de  toutes  les  dé- 
marches de  ce  parti.  Il  mourut  à  Rhyn- 
vick  près  d'Utrecht,  dans  un  âge  fort 
avancé.  Il  avait  joui  parmi  les  siens  d'une 
haute  réputation;  il  est  à  peine  connu 
aujourd'hui.  C'est  ce  qui  doit  arriver  à 
tous  ceux  qui,  au  lieitde  se  rendre  re- 
commandables  par  des  ouvrages  utiles  et 
d'un  intérêt  général ,  ne  se  font  que  les 
échos  d'une  faction.  Leur  nom  passe  avec 
celui  du  parti  qu'ils  ont  servi,  et  leurs 
écrits  meurent  avec  les  petites  passions 
qui  les  ont  fait  naître.  Ceux  de  l'abbé 
d'Etemare ,  quoique  très  nombreux,  sont 
aujourd'hui  complètement  oubliés.  On 
en  trouve  la  liste  dans  les  Nouvelles 
ecclésiastiques  ,.27  février  1771. 

ETHELBERT ,  roi  de  Kent  en  Angle- 
terre l'an  5G0,  épousa  Berthe,  fille  de 
Caribert ,  roi  de  France.  Cette  princesse  | 
travailla  à  la  conversion  du  roi ,  qui  fut  f 
suivie  de  celle  de  plusieurs  seigneurs  an- 
glais, par  le  zèle  de  saint  Augustin,  que 
le  pape  saint  Grégoire  envoya  en  Angle- 
terre. Ethelbert  régna  heureusement ,  et 
mourut  en  1616,  à  56  ans,  après  avoir 
fondé  les  églises  de  Londres  et  de  Ro- 
chester.  «  Les  vingt  années  qu'il  vécut 
«après  son  baptême ,  dit  un  historien, 
»  furent  entièrement  con.sacrées  à  la  rc- 


r 


FfH 

»  ligion.  La  bienfaisance  devint  une  de 
»  ses  principales  vertus  ,  et  ses  peuples 
»  en  éprouvèrent  continuellement  les 
«  heureux  eft'ets.  Il  porta  de  sages  lois , 
»  que  l'on  observait  encore  en  Angle- 
«  terre  plusieurs  siècles  après  sa  mort. 
3>  Son  attachement  à  la  religion  lui  fai- 
M  sait  saisir  toutes  les  occasions^d'élen- 
»  d:c  l'empire  et  la  connaissance  du  nom 
»  de  Jésus-Christ.  Il  abolit  les  supersti- 
»  tions  païennes ,  renversa  les  temples 
»  des  idoles ,  ou  les  consacra  au  vrai 
»  Dieu.  »  Ethelbert  est  nommé  dans  le 
Martyrologe  romain  ,  et  dans  ceux  d'An- 
gleterre. 

EÏHELRED  ou  Ethelbert  II,  roi 
d'Angleterre,  filsd'Edgard,  succéda  en 
978  à  son  frère  Edouard  II.  C'était  un 
prince  barbare;  il  fit  tuer  tous  les  Danois 
qui  s'étaient  établis  en  Angleterre.  On 
ajoute  qu'il  fit  enterrer  leurs  femmes  jus- 
qu'à la  moitié  du  corps,  afin  d'avoir  le 
plaisir  de  voir  dévorer  tout  le  reste  par 
des  dogues  affamés.  L'avarice  et  la  dé- 
bauche le  rendirent  l'horreur  de  tousses 
sujets.  Ils  se  révoltèrent  ;  et  Suéuon,  roi 
des  Danois,  s'étant  rendu  maître  de  ses 
états,  l'obligea  de  se  retirer  chez  Richard 
II,  duc  de  Normandie,  dans  il  avait  épousé 
la  sœur.  Après  la  mort  de  Suénon  ,  Canut 
son  fils  lui  succéda  :  mais  étant  mort  en 
1015,  Ethelred  fut  rappelé  en  Angleterre, 
oîi  il  mourut  bientôt  après,  l'an  1016.  Il 
laissa  Alfred  et  saint  Edouard. 

ETHELWERDUS  ou  Elswardus  ,  de 
la  famille  d'Ethelred  I,  roi  d'Angleterre, 
florissait  vers  l'an  980.  On  a  de  lui  une 
Histoire  depuis  le  commencement  du 
monde  ,  jusqiCa  la  mort  du  roi  Edgnrd 
en  974  ,  insérée  dans  le  Rerum  anglicà- 
rum  s criptor es  àe^àsWi  j  Londres,  169G, 
in-fol. 

ETllELWODE  (  S.  ) ,  élève  de  saint 
Dunstan  ,  abbé  d'Abbendon  ,  en  930  ,  et 
évèque  de  Winchester  en  961  ,  mourut 
en  984,  après  avoir  travaillé  avec  beau- 
coup de  zèle  à  la  restauration  de  la  dis- 
cipline monastique.  On  conserve  en  ma- 
nuscrit ,  dans  quelques  bibliothèques 
d'.\nglcterre,  la  traduction  Ac  la  règ'e 
de  saint  Benoît  en  langue  saxonne ,  et 
quelques  autres  ouvrages  dans  la  même 


ETH  i35 

langue,  touchant  cette  régule  par  saint 
Ethelwode.  Vincent  de  Ceauvais  et  saint 
Antonin  font  mention  d'un  ouvrage  con- 
tre le  mariage  des  prdlrcs  ,  par  le  même 
saint. 

ETHODE,  \"  àc  ce  nom,  roi  d'Ecosse 
dans  le  2"  siècle,  monta  sur  le  trône  après 
Conar.  Il  eut  tant  de  reconnaissance  pour 
Argard  ,  qui  avait  gouverné  l'état  sous  le 
règne  de  son  prédécesseur ,  et  que  les 
gi'ands  du  royaume  avaient  mis  en  pri- 
son ,  qu'il  le  fit  grand  administrateur  de 
la  justice.  Argard  fut  tué  dans  l'exercice 
de  son  emploi.  Ethode  irrité  fit  mourir 
plus  de  300  de  ceux  qui  avaient  eu  par^ 
à  ce  meurtre.  Il  fut  malheureusement 
assassiné  lui-même  par  un  Hibernois, 
joueur  de  flûte,  qui  couchait  dans  sa 
chambre.  On  prétend  que  ce  fut  vers  l'an 
194.  Tous  ces  faits  sont  assez  mal  appuyés, 
et  les  commencemens  de  l'histoire  d'E- 
cosse sont  un  chaos  ,  ainsi  que  ceux  de 
toutes  les  histoires. 

ETHRYG  (  George),  né  à  Thames 
dans  le  comté  d'Oxfort,  était  savant  dans 
les  mathématiques,  la  médecine  et  les  lan- 
gues hébraïque  et  grecque.  Ferme  dans 
ses  principes,  malgré  la  perversion  pres- 
que générale ,  il  demeura  attaché  à  la  re- 
ligion de  ses  pères,  et  gagna  la  confiance 
de  plusieurs  gentilshommes  catholiques, 
qui  lui  confièrent  l'éducation  de  leurs 
enfans.  Il  mourut  en  1588.  On  a  de  lui 
àes  poc'sics  latines ,  et  Hypomnemata.  in 
aliquot  libros  Pauli  jEginetœ,  1588,  ir.-3. 

ETHULPHE  ou  Etiiklavolph,  fut  le 
second  roi  de  la  3"  dynastie  d'Angle- 
terre, et  succéda  l'an  836  à  son  père  Eg- 
bert.  C'était  un  prince  pacifique.  Il  ne  se 
réserva  d'abord  que  le  royaume  de  West- 
sex,  et  céda  à  A!destan  ,  son  fils  naturel , 
les  royaumes  (te  Kent,  d'Esscx  et  de 
Sussex,  que  son  père  avait  conquis.  Il  les 
remit  depuis  en  sa  possession,  par  la  mort 
de  ce  fils.  Il  y  avait  peu  d'années  qu'il 
régnait,  quand  les  Danois  firent  des  cour- 
ses eu  Angleterre ,  et  prirent  même  Lon- 
dres, mais  il  les  défit  entièrement.  Elhul- 
phe  se  voyant  sans  ennemis,  offrit  à  Dieu 
la  dixième  partie  de  ses  états ,  et  alla  à 
Rome  sous  le  pontificat  de  Léon  IV.  Il 
rendit  loua  ses  royaumes  tributaires  en- 


»36  ETI 

vers  le  saint  Siège,  d'un  sterling  ou  d'un 
Bol  pour  chaque  famille ,  au  lieu  qu'au- 
paravant il  n'y  avait  que  ceux  de  Westsex 
et  de  Sussex  qui  le  payaient  ;  «  ne  croyant 
»  pouvoir  mieux  témoigner  ,  dit  un  his- 
»  lorien  ,  son  attachement  à  la  foi  ca- 
»  tholique ,  qu'en  contribuant  à  la  splen- 
»  deur  de  la  nouvelle  Jérusalem  et  du 
»  siège  de  son  pontife.  »  Ce  tribut,  éta- 
bli, dit-on,  dès  l'an  7  26  ,  par  Ina  ,  roi  des 
Saxons,  s'est  payé  jusqu'au  temps  de 
Henri  "VllI  :  et  c'est  proprement  ce  qu'on 
appelle  le  romescot  ou  le  denier  de  saint 
Pierre.  Quoi  qu'il  en  soit,  Ethulphe  , 
de  retour  de  son  pèlerinage,  épousa, 
l'an  856  ,  en  secondes  noces  ,  Judith  de 
France ,  fille  du  roi  Charles  le  Chauve. 
Son  fils  Ethelliald  profita  de  son  absence 
pour  se  révolter  contre  lui  ;  mais  il  dis- 
sipa les  factions  par  son  retour,  et  mourut 
en  857  ,  après  avoir  partagé  le  royaume 
entre  les  quatre  fils  qu'il  avait  eus  d'Os- 
burge  sa  première  femme. 

ÊïIEjNKE  (S.  ),  premier  martyr  du 
christianisme,  l'un  des  sept  diacres,  fut 
lapidé  l'an  33  par  les  Juifs,  qui  l'accu- 
saient d'avoir  blasphémé  contre  Moïse  et 
contre  Dieu.  La  sagesse  et  la  constance 
■avec  laquelle  il  confondit  ses  barbares  en- 
nemis ,  pour  lesquels  il  pria  Dieu  en  mou- 
rant ,  toutes  les  circonstances  de  son  mar- 
tyre, tel  qu'il  est  rapporté  dans  les  Actes 
des  apôtres,  ont  quelque  chose  de  tou- 
chant et  de  persuasif,  qui  pénètre  le 
chrétien  d'un  sentiment  profond  de  piété, 
en  même  temps  que  sa  foi  reçoit  uti  ac- 
croissement de  lumière  et  de  force. 

ETIENNE  I  (  S. } ,  monta  sur  la  chaire 
pontificale  de  Rome  en  253  ,  après  le  mar- 
tyre du  pape  Lucius.  Son  pontificat  est 
célèbre  par  la  question  sur  la  validité  du 
baptême  donné  par  •  les  hérétiques. 
Etienne  décida  «  qu'il  ne  fallait  rien  in- 
»  nover.  »  La  tradition  de  la  plupart  des 
«glises  prescrivait  de  recevoir  tous  les 
hérétiques  par  la  seule  imposition  des 
mains ,  sans  les  rebaptiser ,  poui-vu  qu'ils 
eussent  reçu  le  baptême  avec  de  l'eau  et 
au  nom  des  trois  personnes  de  la  Trinité. 
Saint  Cyprien  et  Firmilien  assemblèrent 
4les  conciles,  pour  s'opposer  à  celte  dé- 
cision ,  contraire  à  la  pratique  de  leurs 


ETI 

églises.  Le  pape  réfuta  le  sentiment  de 
Cyprien  ;  il  usa  de  commandemens  et  de 
menaces  pour  lui  faire  quitter  son  sen- 
timent, et  refusa  de  communiquer  avec 
les  évêques  d'Afrique  députés  à  Home,  ce 
qui  était  une  marque  publique  d'impro- 
bation  et  non  pas  un  eHct  certain  de  l'ex- 
commmiication  (  voyez  S.  Cypries  ). 
«  Ce  grand  pape  ,  dont  la  prudence  éga- 
»  lait  lu  sainteté,  savait ,  dit  Vincent  de 
»  Lérins ,  que  la  piété  ne  permettait  ja- 
»)  mais' de  recevoir  d'autre  doctrine  que 
»  celle  qui  nous  est  venue  de  la  foi  de 
»  nos  prédécesseurs,  et  que  nous  étions 
»  obligés  de  la  transmettre  aux  autres 
»>  avec  la  même  fidélité  que  nous  l'avions 
»  reçue  ;  qu'il  ne  fallait  pas  mener  la  re- 
»  ligion  partout  où  nous  voulions ,  mais 
M  la  suivre  partout  oii  elle  nous  menait  j 
w  que  le  propre  delà  modestie  chrétienne 
«  était  de  conserver  fidèlement  les  saintes 
«  maximes  que  nous  ont  laissées  nos 
»  pères,  et  non  pas  de  faire  passer  nos 
))  idées  à  la  postérité.  Quelle  a  donc  été 
»  l'issue  de  cet  événement  ?  Celle  qu'ont 
»  coutume  d'avoir  de  pareilles  aftaires  : 
»  on  a  retenu  la  foi  ancienne,  et  l'on  a 
))  rejeté  la  nouveauté.  »  En  efiet ,  la  ques- 
tion fut  solennellement  décidée  au  con- 
cile de  Nicée  en  faveur  d'Etienne.  Ce 
saint  pape  mourut  martyr  le  2  août  257, 
durant  la  persécution  de  Valérien. 

ETIENNE  II,  romain,  succéda  en  752 
à  un  autre  Etienne,  que  plusieurs  écri- 
vains n'ont  pas  compté  parmi  les  papes  , 
parce  que  son  pontificat  ne  fut  que  de 
trois  ou  quatre  jours.  Astolphe  ,  roi  des 
Lombards,  menaçait  la  ville  de  Rome 
après  s'être  emparé  de  l'exarcat  de  Ra- 
venne.  Etienne  implora  le  secours  de 
Constantin  Copronyme,  empereur  d'O- 
rient ,  prince  faible  ,  indolent ,  subjugué 
par  le  fanatisme  des  iconomaques,  qui 
renvoya  le  pontife  au  roi  Pépin.  Etienne 
se  détermina  à  aller  en  Lombardie  trou- 
ver Astolphe,  malgré  les  pleurs  et  les  ef- 
forts que  firent  les  Romains  pour  le  re- 
tenir. N'ayant  rien  pu  gagner  sur  l'esprit 
de  ce  roi ,  il  passa  en  France  pour  deman- 
der du  secours.  Pépin  ,  par  le. conseil  du 
pape  ,  envoya  jusqu'à  trois  fois  des  am- 
bassadeurs à  Astolphe.  Ce  prince  persista 


l 


constamment  dans  son  refus.  Alors  !*epirt 
marcha  contre  lui.  Quand  ses  troupes 
furent  à  mi-chemin ,  il  envoya  de  nou- 
veau des  ambassadeurs  ',  à  la  sollicitation 
du  pape  qui  voulait  éviter  l'effusion  du 
sang  des  chrétiens.  Astolphe  ne  répon- 
dant que  par  des  menaces ,  Pépin  franchit 
les  monts ,  assiégea  le  prince  des  Lom- 
bards dans  Pavie,  et  lui  fit  promettre 
de  restituer  Ravenne  ;  mais  à  peine  Pépin 
eut  repassé  les  monts ,  qu' Astolphe  parut 
devant  Rome.  Etienne  eut  recours  à  son 
protecteur  ,  et  lui  trouva  les  mêmes  dis- 
positions. Pépin  passa  de  nouveau  en  Ita- 
lie ,  dépouilla  le  roi  des  Lombards  de  son 
exarcat,  et  lui  enleva  22  villes,  dont  il 
fit  présent  au  pape.  Cette  donation  est  le 
premier  fondement  de  la  seigneurie  tem- 
porelle de  l'église  romaine  ;  car,  pour  la 
donation  de  Constantin ,  on  sait  qu'elle 
n'a  jamais  existé.  Le  pape ,  pour  hâter 
l'arrivée  du  roi  français  en  Italie,  lui  avait 
écrit  une  lettre  au  nom  de  saint  Pierre , 
où ,  par  une  prosopopée  touchante  et 
persuasive,  il  faisait  parler  cet  apôtre 
comme  s'il  eût  été  encore  vivant  :  et  avec 
saint  Pierre ,  la  sainte  Vierge ,  les  anges, 
les  martyrs,  les  saints  et  les  saintes. 
«  Je  vous  conjure,  disait  saint  Pierre, 
»  par  le  Dieu  vivant ,  de  ne  pas  permet- 
»  tre  que  ma  ville  de  Rome  soit  plus 
»  long-temps  assiégée  par  les  Lombards.  » 
M.  Fleury  blâme  ce  pape  d'avoir  em- 
ployé les  motifs  de  la  religion  pour  une 
affaire  d'état.  Mais  la  délivrance  du 
pape,  opprimé  par  Astolphe,  celle  de 
l'église  de  Rome ,  oii  les  Lombards  com- 
mettaient tant  de  cruautés  et  tant  de  pro- 
fanations, était-elle  donc  une  affaire  d' é- 
tal  ?  Et  voudrait-on  que  Pépin  n'ait  pas 
mérité  devant  Dieu  en  la  procurant? 
Quant  à  la  donation  faite  au  saint  Siège 
par  ce  prince,  M.  Fleury  convient  qu'elle 
est,  aujourd'hui  surtout,  de  la  plus  grande 
importance  pour  le  bien  de  l'Eglise.  Tant 
«  que  l'empire  romain  a  subsisté,  dit- 
w  il ,  il  renfermait  dans  sa  vaste  étendue 
»  presque  toute  la  chrétienté  :  mais  de- 
•  »  puis  que  l'Europe  est  divisée  en  plu- 
»  sieui-s  princes  indépendans  les  uns  des 
»  autres  ;  si  le  pape  eût  été  sujet  de  l'un 
»  d'eux ,  il  eût  été  à  craindre  que  les 
V. 


ETt 


,37 


»  autres  n'eussent  eu  de  la  peine  à  le  re- 
»  connaître  poui*  père  commun ,  et  que 
))  les  schismes  n'eussent  été  fréquens.  On 
))  peut  donc  croire  que  c'est  par  un  effet 
»  de  la  Providence ,  que  le  pape  s'est 
»  trouvé  indépendant  et  maître  d'un  état 
>'  assez  puissant,  pour  n'être  pas  aisément 
»  opprimé  par  les  autres  souverains  ;  afin 
«  qu'il  fût  plus  libre  dans  l'exercice  de 
»  sa  puissance  spirituelle ,  et  qu'il  pût 
»  contenir  plus  aisément  les  autres  évi- 
»  ques  dans  le  devoir.  >>  Le  président 
Hénault ,  l'abbé  Terrasson ,  et  le  philo- 
sophe Hume ,  ont  fait  sur  cet  objet  des 
réflexions  du  même  genre  (t'oy.  la  Chro- 
nologie qui  est  au  commencement  du  1  «"^ 
tome,  pag.  49  ).  Etienne  mourut  en  757, 
après  5  ans  de  pontificat.  Ce  pape  as- 
semblait souvent  son  clergé  dans  son  pa- 
lais ,  l'exhortait  à  l'étude  de  l'Ecriture 
.sainte  et  des  conciles ,  pour  avoir  tou- 
jours de  quoi  répondre  efficacement  aux 
ennemis  de  l'Eglise.  Il  nous  reste  de 
ce  pape  cinq  lettres  et  un  recueil  de  quel- 
ques constitutions  canoniques. 

ETIENNE  III,  romain,  originaire 
de  Sicile,  élu  pape  en  768.  Un  sei- 
gneur, nommé  Constantin,  s'était  em- 
paré du  pontificat  (  c'est  le  premier  exem- 
ple d'une  pareille  usurpation  du  saint 
Siège);  on  lui  arracha  les  yeux,  ainsi 
qu'à  quelques-uns  de  ses  partisans ,  et  on 
intronisa  Etienne ,  qui  assembla  un  con- 
cile l'année  d'après ,  pour  condamner 
l'usurpateur.  Dans  la  troisième  session , 
on  statua  que  les  évoques  ordonnés  par 
Constantin  retourneraient  chez  eux  pour 
y  être  élus  de  nouveau ,  et  reviendraient 
ensuite  à  Rome  pour  être  consacrés  par 
le  pape.  Etienne ,  paisible  possesseur  du 
saint  Siège  ,  en  jouit  pendant  3  ans  et 
demi ,  et  omirut  en  7  7  2.  Rome  fut  dans 
l'anarchie  avant  et  après  son  pontificat  ; 
mais  on  ne  valait  pas  mieux  ailleurs.  Des 
yeux  et  des  langues  arrachées  ,  sont  les 
événemens  les  plus  ordinaires  de  ces  siè- 
cles malheureux. 

ETIENNE  IV,  romain  ,  monta  sur  la 
chaire  de  Saint-Pierre  après  le  pape  Léon 
III ,  le  22  juin  816.  Aussitôt  qu'il  fut  or- 
donné ,  il  vint  en  France ,  et  y  sacra  de 
nouveau  l'empereur  Louis  le  Débonnaire. 

9- 


»38  ËTÏ 

Il  mourut  le  25  jauvier  81 1 ,  à  Rom6  ^ 
trois  mois  après  son  retour. 

ETIENNE  V,  romain,  pape  après 
Adrien  III ,  fut  intronisé  à  lu  fin  de  sep- 
tembre, en  885.  Il  écrivit  avec  force  à 
Basile  le  Macédonien  ,  empereur  d'Orient, 
pour  défendre  les  papes  ses  prédécesseurs 
contre  Pliotius.  Il  mourut  en  891.  «  Ce 
>»  pape,  dit  un  historien,  était  de  race 
))  noble  et  d'un  détachement  exemplaire. 
)k  II  s'opposa  de  tout  son  pouvoir  à  son 
»  élévation  ;  pour  le  porter  sur  le  trône 
»  pontifical ,  il  fallut  rompre  les  portes 
»  de  sa  maison  oîi  il  s'était  enfermé.  La 
3j  charité  et  la  piété  éclataient  surtout 
»  entre  les  vertus  de  ce  pontife.  Il  nour- 
3)  rissait  les  orphelins  comme  ses  enfans , 
»  et  les  admettait  souvent  à  sa  table.  A 
w  son  avènement  au  pontifical ,  les  biens 
»  de  l'Eglise  se  trouvant  presque  tous 
»  dissipés ,  il  distribua  libéralement  son 
3)  riche  patrimoine.  Il  célébrait  la  messe 
)>  tous  les  jours,  et  donnait  à  l'oraison  ou 
»  à  la  psalmodie ,  tout  le  temps  que  lui 
»  laissaient  les  fonctions  de  la  charité  et 
j>  de  la  sollicitude  pastorale.  11  s'appli- 
M  qua  sur  toute  chose  à  s'associer  dans  le 
»  gouvernement  de  l'Eglise,  les  hommes 
3>  les  plus  éclairés  et  les  plus  vertueux 
»  qu'il  put  découvrir.  » 

ETIENNE  YI ,  mis  sur  le  siège  pon- 
tifical en  896 ,  après  l'antipape  Boniface 
VI.  Ce  pontife  fit  déterrer  l'année  d'après, 
en  897  ,  le  corps  de  Formose,  son  prédé- 
cesseur et  son  ennemi ,  parce  qu'il  avait 
quitté  l'évêché  de  Porto  pour  celui  de 
Rome  :  translation  inouïe  alors ,  mais 
qui  ne  méritait  pourtant  pas  qu'Etienne 
donnât  à  la  chrétienté  la  farce,  aussi 
horrible  que  ridicule ,  de  violer  la  .sépul- 
ture d'un  souverain  pontife ,  et  de  faire 
jeter  son  cadavre  mutilé  dans  le  Tibre.  Le 
pape  Etienne  se  rendit  si  odieux  par  cette 
vengeance ,  que  les  amis  de  Formose 
ayant  soulevé  les  citoyens,  le  chargèrent 
de  fers  ,  et  l'étranglèrent  en  prison  quel- 
ques mois  après.  Jean  IX  assembla  un 
concile  qui  condamna  tout  ce  qui  s'était 
passé  dans  l'assemblée  de  quelques  évè- 
ques  à  Rome,  en  897,  contre  la  mémoire 
et  le  corps  de  Formose.  Les  Pères  du  con- 
cile remarquèrent  que  Formose  avait  été 


ÈTi 

transféré  par  nécessité  dii  siège  de  Porto 
à  celui  de  Rome  :  Neccssitatis  causa  de 
Portuensi  ecclesia  Formosus,  pro  vit  té 
merito  adapostolicam  sedem  provectus 
est.  Voyez  Formose,  Auxilius. 

ETIENNE  VII ,  successeur  de  Uon 
VI ,  mourut  en  931 ,  après  2  ans  de  pon- 
tificat. 

ETIENNE  Vin,  allemand,  parent 
de  l'empereur  Othon ,  fut  élevé  sur  le 
saint  Siège  après  Léon  VII,  en  939.  Les 
Romains ,  alors  aussi  séditieux  que  bar- 
bares, conçurent  contre  lui  tant  d'aver- 
sion, qu'ils  eurent,  dit-on,  la  cruauté 
de  lui  découper  le  visage.  Il  en  fut  si  dé- 
figuré ,  qu'il  n'osait  plus  paraître  en  pu- 
blic. Il  mourut  en  942. 

ETIENNE  IX ,  était  frère  de  Gode- 
froi  le  Barbu ,  duc  de  la  Basse  Lorraine. 
Il  se  fit  religieux  au  Mont-Cassin  ,  en  de- 
vint abbé ,  et  fut  élu  pape  le  2  août 
1057  ,  après  la  mort  de  Victor  II.  Il  com- 
mença son  pontificat  par  tenir  plusieurs 
conciles ,  pour  remédier  principalement 
à  la  vie  déréglée  des  clercs.  Il  rechercha 
tous  ceux  qui  avaient  transgressé  les  lois 
de  la  continence.  Ceux  même  qui  ren- 
voyèrent leurs  concubines  et  embrassè- 
rent la  pénitence ,  furent  exclus  du  san- 
ctuaire pour  un  temps,  et  privés  pour 
toujours  du  pouvoir  de  célébrer  les  saints 
mystères.  Ce  pontife  mourut  à  Florence, 
en  odeur  de  sainteté ,  le  29  mars  1058. 
ETIENNE  DE  MURET  (  Saint  >,  fils 
du  comte  de  Thiers  en  Auvergne,  suivit 
son  père  en  Italie,  où  des  ermites  cala- 
brois  lui  inspirèrent  du  goût  pour  la  vie 
cénobitique.  De  retour  en  France,  il  se 
retira  sur  la  montagne  de  Muret  dans  le 
Limousin,  et  vécut  50  ans  dans  cedésert, 
entièrement  consacré  à  la  mortification  , 
au  jeûne  et  à  la  prière.  En  1073  ,  il  ob- 
tint ime  bulle  de  Grégoire  VU,  pour  la 
fondation  d'un  nouvel  ordre  monastique, 
suivant  la  règle  de  St. -Benoît.  La  répu- 
tation de  sa  vertu  lui  attira  une  foule  de 
disciples  et  des  visites  honorables.  Sur  la 
fin  de  ses  jours,  deux  cardinaux  vinrent 
le  voir  dans  son  ermitage.  Ils  demandè- 
rent au  saint  homme,  s'il  était  chanoine, 
ou  moine  ,  ou  ermite  ?  Etienne  leur  ré- 
pondit :  «  Nous  sommes  des  pécheurs , 


ETI 

u  conduits  dans  ce  désert  par  la  misëri- 
»  corde  divine  pour  y  faire  pénitence.  » 
Ce  n'était  pas  répondre  trop  nettement  k 
la  question  des  cardinaux  ;  et  on  a  été 
assez  embarrassé  ,  long-temps  après  ,  à 
déterminer  à  quel  ordre  sa  famille  appar- 
tenait. Etienne  l'édifia  jusqu'à  sa  mort , 
arrivée  en  1 124  ,  à  78  ans.  Ses  enfans  in- 
quiétés après  la  mort  de  leur  père ,  par 
les  moines  d'Ambazar  ,  qui  prétendaient 
que  Muret  leur  appartenait,  emportèrent 
le  corps  de  leur  fondateur  qui  était  leur 
seul  bien  ,  et  le  transportèrent  à  un  lieu 
nommé  Grandniont,  dont  l'ordre  a  pris 
le  nom.  Les  annales  de  cet  ordre  furent 
imprimées  à  Troyes,  en  16G2.  Il  a  été 
supprimé  en  1769;  et  les  religieux  ont 
été  pensionnés.  On  a  de  saint  Etienne 
du  Muret •  sa  Règle,  164.5,  in-12;  et  un 
recueil  de  maximes,  17  04,  in-12,  eu 
latin  et  en  français. 

ETIEINISE  (Saint),  né  en  Angleterre, 
3^  abbé  de  Cîteaux ,  travailla  beaucoup 
pour  l'accroissement  de  son  ordre ,  fondé 
depuis  peu  par  Robert,  abbé  de  Molesme. 
Un  grand  nombre  de  disciples  se  mit 
sous  sa  conduite ,  entre  autres  saint  Ber- 
nard, l'homme-  le  plus  illustre  que  Cî- 
teaux ait  produit.  Parmi  le  grand  nom- 
bre de  monastères  qu'Etienne  bâtit,  on 
compte  ceux  de  La  Ferté  ,  de  Pontigny  , 
de  Clairvaux  et  de  Morimond  ,  qui  sont 
les  quatre  filles  de  Citeaux  dont  dépen- 
dent toutes  les  autres  maisons.  Etienne 
leur  donna  des  statuts ,  approuvés  en 
1119  par  Caiixte  IL  Ce  saint  abbé  mou- 
ret  à  cîteaux  le  28  mars  1 134. 

ETIENNE  I  (  Saint),  roi  de  Hongrie , 
succéda  en  997  à  son  père  Geisa,  pre- 
mier roi  chrétien  de  Hongrie ,  et  mourut 
à  Bude  en  1038.  Il  fut  comme  l'apôtre 
de  ses  états ,  publia  des  lois  très  sages , 
vécut  et  mourut  en  saint.  Lorsqu'il  sentit 
qu'il  approchait  de  sa  fin  ,  il  fit  assem- 
bler la  noblesse  pour  lui  recommander 
le  choix  de  son  successeur,  l'obéissance 
au  saint  Sicge  ,  et  la  pratique  des  vertus 
chrétiennes.  Quarante-cinq  ans  après  sa 
mort ,  son  coqjs  fut  levé  de  terre ,  ren- 
fermé dans  une  chasse ,  et  déposé  dans 
une  chapelle  de  l'église  de  Notre-Dame 
à  fiude.  Benoit  IX  le  canonisa.  Ba  valeur 


ETI  ^^ 

égalait  sa  piété  ;  il  fut  l'effroi  des  Barba- 
res ,  et  s'attira  le  respect  et  l'admiratiou 
des  nations  chrétiennes.  Ses  vertus  do- 
mestiques ne  brillaient  pas  d'un  moindre 
éclat  que  ses  qualités  royales.  Son  fils 
Emeric  puisa  ,  dans  une  éducation  chré- 
tienne et  les  leçons  de  l'exemple ,  cette 
innocence  et  cette  pureté  de  mœurs  qui 
l'a  fait  mettre  au  nombre  des  saints.  Ses 
magnifiques  fondations  furent  presque 
toutes  détruites  sous  le  règne  de  Joseph  II; 
mais  sa  mémoire  est  toujours  en  grande 
vénération  chez  les  Hongrois ,  qui  ne 
prononcent  son  nom  qu'avec  attendrisse- 
ment et  enthousiasme.  Ils  se  servent  en- 
core de  sa  couronne  pour  le  sacre  de 
leurs  rois.  Quelques  légendaires  ont  don- 
né à  cette  couronne  une  origine  fabu- 
leuse, «  Jlais  elle  n'a  pas  besoin  de  faux 
»  titres ,  dit  un  critique ,  pour  être  une 
»  pièce  très  respectable.  Son  antiquité  , 
)j  le  grand  pape  qui  la  donna ,  le  grand 
»  et  saint  roi  qui  la  porta ,  la  nation  qui 
»  l'a  si  long-temps  défendue  contre  les 
M  infidèles  ,  et  qui  l'a  toujours  regardée 
»  comme  la  possession  caractéristique  du 
»  roi  légitime,  tout  cela  concourt  à  la  ren- 
»  dre  intéressante.  Vainement  Voltaire 
»  s'estmil  moqué  de  l'importance  que  les 
w  Hongrois  attachent  à  cette  couronne , 
»  jusqu'à  n'avoir  jamais  voulu  reconnai- 
»  trepour  roi  celui  qui  ne  l'avait  pas.  Si 
»  quelque  chose  doit  être  bien  constaté  et 
«sanctionné,  c'est  bien  la  royauté.  » 
Joseph  II  l'avait  fait  enlever  et  transpor- 
ter à  Vienne  ;  mais  en  1 790  ,  elle  fut  ren- 
due aux  Hongrois ,  qui  l'a  reçurent  avec 
une  pompe  et  des  réjouissances  extraor- 
dinaires. C'est  du  roi  saint  Etienne  que 
vient  le  titre  A^ apostolique,  donné  long- 
temps par  les  papes  aux  rois  de  Hongrie, 
et  renouvelé  en  faveur  de  Marie-Thérèse , 
héritière  de  Charles  VI. 

ETIENNE  D'ORLÉANS ,  d'abord 
abbé  de  Sainte-Geneviève  en  117  7,  eu- 
suite  évèque  de  Tournay  en  1191,  eut 
part  aux  affaires  les  plus  considérables 
de  son  temps.  Il  mourut  en  1203.  On  a 
de  lui  des  sermons  ,  des  e'pilres  curieu- 
ses ,  1682  ,  .in-8  ,  et  d'autres  ouvrages. 

ETIENNE  BATTORI.  Foy.  Battori. 

ETIEJNJNE    Dk    Bïsa»cE)    grammai- 


i4o  ETI 

rien  du  6«  siècle ,  auteur  d'un  Diction- 
naire géographique,  dont  nous  n'avons 
qu'un  mauvais  abrège',  fait  par  Hermo- 
laiis  sous  l'empereur  Justinien  ,  et  publié 
à  Leyde  en  1694  ,  in-fol.,  eu  grec  et  en 
latin ,  par  Gronovius ,  avec  les  savans 
commentaires  de  Berkelius.  Il  y  en  aune 
autre  édition  de  1678  ,  qu'on  jointà  celle 
de  1694  ,  à  cause  des  changemens  ;  on  y 
joint  encore  les  notes  d'Holstenius , 
Leyde,  1684,  in-fol.  Vabrégé  d'Hermo- 
laiis  nous  a  sans  doute  fait  perdre  l'ori- 
ginal ,  qui  eût  été  d'un  prix  inestimable 
pour  la  connaissance  des  dérivés  et  des 
noms  des  villes  et  provinces. 

ETIENNE,  vayvode  de  Moldavie,  dans 
le  16' siècle,  se  mit  sur  le  trône  par 
les  armes  des  Turcs,  après  en  avoir 
chassé  le  légitime  possesseur,  qu'il  fit 
mourir.  11  régna  en  tyran.  Les  Boïards 
ne  pouvant  plus  supporter  le  joug,  le 
massacrèrent  dans  sa  tente ,  avec  2,000 
hommes ,  partie  Turcs  ,  partie  Tarlares , 
qui  composaient  sa  garde. 

ETIENNE  ou  EsTiENNE  (Henri),  pre- 
mier du  nom ,  imprimeur  de  Paris ,  mort 
à  Lyon  en  1 620 ,  est  la  souche  de  tous  les 
autres  savans  de  ce  nom  qui  ont  tant  il- 
lustré la  presse  et  la  littérature.  Il  est 
connu  par  l'édition  de  quelques  livres  ; 
et  surtout  par  un  Psautier  à  cinq  colon- 
nes, publié  en  1609. 

ETIENNE  (Robert),  second  fils  du 
précédent ,  et  parisien  comme  lui ,  sur- 
passa son  père  parla  beauté  et  l'exactitude 
de  ses  éditions.  Il  travailla  d'abord  sous 
Simon  de  Colines,  qui  avait  épousé  sa 
mère  ;  mais  depuis  il  travailla  seul.  Ro- 
bert ennoblit  son  art  par  une  connais- 
sance parfaite  des  langues  et  des  belles- 
lettres.  Il  est  le  premier  qui  ait  imprimé 
les  Bibles  distinguées  par  versets.  Les  ser- 
vices qu'il  rendait  aux  lettres ,  lui  au- 
raient concilié  une  estime  générale ,  sans 
son  penchant  pour  les  nouvelles  opinions. 
Il  avait  publié  une  Bible ,  avec  une  ver- 
sion par  Léon  de  Juda ,  et  des  notes  al- 
térées par  Calvin.  Pour  donner  plus  de 
cours  k  cet  ouvrage  ,  il  l'attribua  à  Va- 
table,  qui  s'en  défendit  comme,  d'iui 
crime.  Les  docteurs  deSorbonnc  en  ayant 
censuré  les  notes ,  Robert  se  retira  à  Ge- 


ETI 

nève  en  1651 ,  et  y  finit  ses  jours  en 
1 669 ,  à  66  ans.  On  dit  que  pour  rendre 
ses  éditions  plus  correctes,  il  en  faisait 
exposer  les  feuilles  dans  les  places  pu- 
bliques, et  qu'il  donnait  des  récom- 
penses à  ceux  qui  y  trouvaient  quelque 
faute.  Parmi  ses  belles  éditions,  on 
distingue  sa  Bible  hébraïque,  1644,  8 
vol.  in-16,  l'in-4  est  moins  estimée;  et 
le  Nouveau  Testament  grec,  1646,  2vol. 
in-16.  Outre  les  éditions  dont  il  a  enri- 
chi la  république  des  lettres ,  nous  lai 
devons  son  Thésaurus  Unguœ  lalinœ, 
chef-d'œuvre  en  ce  genre,  publié  en 
1636  et  en  1643,  réimprimé  plusieurs 
fois  à  Lyon  ,  à  Leipsick ,  à  Bâle  et  à  Lon- 
dres. L'édition  de  Londres,  1734  ,  4  vol. 
in-folio ,  est  magnifique  ;  et  celle  de 
Bâle,  1740,  4  vol.  in-folio,  9  quelques 
augmentations.  Ce  dictionnaire  est  véri- 
tablement un  trésor.  On  y  trouve  tout  ce 
qu'on  peut  désirer  pour  l'intelligence  de 
la  langue  latine. 

ETIENNE  (  Charles) ,  troisième  fils  de 
Henri ,  imprimeur ,  joignit  à  l'art  de  son 
père  la  science  médicale.  Il  mourut  en 
1564,  à  60  ans.  On  a  de  ce  typographe 
médecin  1"  Z?e  re  rustica,  in-8.  2"  De 
vascuUs ,  in-8.  3"  Une  Maison  rustique, 
in-4.  11° \]a  Dictionnaire  historique,  géo- 
graphique et  poétique ,  Londres ,  1686  , 
in-fol.  6°  La  traduction  de  la  comédie 
italienne,  intitulée  :  le  Sacrifice,  parles 
Acad.  de  Sienne //z/ro/îo/i,  1643,  in-16; 
et  sous  le  titre  des  Abusés,  1660 ,  iu-16 , 
etc. 

ETIENNE  (Henri),  fils  de  Robert, 
né  à  Paris  en  1628  ,  ouvrit  les  trésors  de 
la  langue  grecque ,  comme  son  père  avait 
fouillé  ceux  de  la  latine.  Son  ouvrage  en 
ce  genre,  est  en  4  vol.  in-fol.,  1672.  On 
doit  joindre  à  ce  livre  deux  glossaires , 
imprimés  en  1673,  et  un  appendix -par 
Daniel  Scholt ,  Londres ,  1746,  2  vol.  in- 
fol.  On  doit  encore  à  Henri  Etienne ,  plu- 
sieurs auteurs  qu'il  mit  en  lumière  et  qu'il 
corrigea  avec  beaucoup  de  soin  :  ces  édi- 
tions lui  ont  fait  un  grand  nom  parmi  les 
savans.  Mais  ce  qui  l'a  fait  le  plus  con- 
naître à  ceux  qui  ne  se  piquent  que  d'une 
littérature  légère ,  c'est  sa  version  d^A- 
nacréon  en  vers  latins.  Henri  était  calvi- 


ETÏ 

niste,  et  osait  en  faire  profession  à  Paris, 
dans  un  temps  oii  ceux  de  cette  secte 
étaient  vivement  poursuivis.  Une  satire 
atroce  qu'il  publia  contre  le  clergé  régu- 
lier ,  sous  le  titre  de  Préparation  à  l'A- 
pologie pour  Hérodote ,  l'obliga  de  s'en- 
fuir de  sa  patrie.  Il  passa  à  Genève  et  de 
là  à  Lyon ,  oii  il  mourut  à  l'hôpital  en 
l.')98  ,  à  70  ans,  presque  imbécille.  Outre 
les  ouvrages  dont  nous  avons  parlé ,  ou 
a  de  lui  1"  des  corrections  sur  Cicéron  , 
en  latin ,  la  plupart  très  judicieuses.  2" 
De  origine  mendorum.  3"  Juris  civilis 
fontes  et  rivi,  in-8.  L'objet  de  cet  ou- 
vrage est  de  montrer  que  la  plupart  des 
lois  d'Egypte  ,  ayant  été  tirées  de  celles 
de  Moïse ,  et  ayant  donné  lieu  à  celles  des 
Grecs,  c'était  dans  la  même  source  qu'on 
devait  puiser  les  principes  des  lois  ro- 
maines. 4"  V Apologie  pour  Hérodote^ 
publiée  par  Le  Duchat,  en  3  vol.  in-8, 
17  35  :  rapsodie  infâme  d'invectives  con- 
tre la  religion  catholique ,  et  de  contes 
sur  les  prêtres  et  sur  les  moines ,  recher- 
chée par  quelques  savans  d'un  goût  bi- 
zarre ,  qui  aiment  mieux  les  décombres 
de  la  littérature  gauloise,  que  les  bons 
livres  des  beaux  jours  de  Louis  XIV.  Henri 
Etienne  intitula  son  fatras  :  Apologie 
pour  Hérodote  ,  parce  que  son  but  était 
de  justifier  les  fables  de  cet  historien , 
par  celles  qu'il  prétendait  que  les  catho- 
liques avaient  débitées  sur  les  saints  , 
etc.  5°  Poetœ  greci  principes ,  1 566  , 
in-fol.  6°  Medicce  artis  principes  post 
Hippocratem  et  Galenum  ;  collection 
rare  et  chère ,  imprimée  à  Paris  ,1677,2 
vol.  in-fol.  La  version  qu'il  fit  de  ces 
auteurs,  et  qu'il  joignit  au  texte  ^  est  es- 
timée. 7°  Traité  de  la  prééminence  des 
rois  de  France.  8°  La  prémices ,  ou  le 
premier  livre  des  Proverbes  épigranima- 
tisés ,  ou  des  Epigrammes  provcrbiali- 
sées,  1594  ,  iu-8  :  recueil  indigeste,  oîi, 
parmi  quelques  bonnes  pointes,  on  en 
trouve  une  foule  de  triviales.  9"  Narra- 
iiones  cœdis  Ludovici  Borbonnii,  in-S  , 
1569.  10"  Artis  typographie œ  qucrimo- 
nia ,  poème  dont  M.  Lottin  ,  imprimeur, 
a  donné  une  traduction  française,  Paris, 
1785.  Henri  Etienne  y  fait  des  plaintes 
très  vives  contre  les  imprimeurs  de  sou 


ETT  »4ï 

temps ,  regardé  à  si  juste  titre  comme  le 
siècle  d'or  de  la  typographie.  Que  dirait- 
il  aujourd'hui ,  en  voyant  la  plupart  des 
imprimeurs  qtii  savent  à  peine  l'ortogra- 
phe  de  leur  langue  maternelle  ?  Son  zèl« 
s'allumait ,  surtout  quand  il  voyait  des 
imprimeurs  qui  ignoraient  absolument  le 
latin.  La  famille  des  Etienne  a  produit 
plusieurs  autres  imprimeurs  célèbres.  Le 
dernier  de  tous  fut  Antoine ,  petit-fils  du 
précédent.  Il  mourut  aveugle  à  l'Hôtel- 
Dieu  de  Paris  en  1674,  à  80  ans.  Les 
Etienne  sont  placés  à  la  tête  des  premiers 
imprimeurs  du  monde  ,  par  la  beauté  et 
la  correction  de  leurs  éditions.  Les  hom- 
mes les  plus  savans  et  même  les  plus  il- 
lustres de  leur  temps ,  ne  dédaignaient 
pas  de  corriger  leurs  épreuves. 

*  ETIENNE  ou  EsTiE.NNE  (Robert), 
libraire  de  Paris,  né  en  1723  ,  prétendait 
descendre  des  précédens.  Il  mourut  en 
1794.  On  lui  doit  les  ouvrages  suivans 
qui  ont  paru  la  plupart  sous  le  voile  de 
l'auonyme  :  1  °  un  Eloge  de  l'abbé  Plu- 
che ,  mis  en  tête  d'un  ouvrage  intitulé 
Concorde  de  la  géographie  des  différens. 
âges.  1°  Causes  amusantes  et  peu  con- 
nues,  Paris,  1769  ,  2  vol.  in-12.  3"  Ser- 
mons pour  les  jeunes  dames  et  les  jeunes 
demoiselles ,  traduit  de  l'anglais  de  For- 
dyce,  Paris,  1778.  4°  Etrcnnes  de  la 
vertu ,  contenant  des  actions  de  bienfai- 
sance ,  de  courage  et  d'humanité,  Paris  , 
1782-1794,  2  vol.  in-8.  Il  a  été  l'éditeur 
des  Opuscules  de  Rollin ,  Paris,  1771  , 
2  vol.  in-12,  et  il  a  ajouté  des  notes  à 
l'éloge  de  cet  écrivain  ,  par  de  Boze. 

ETIENNE  (François  d').  Voyez  Es- 

TIENNE. 

ETTMULLER  (  Michel  ) ,  né  à  Leip- 
sick  en  1646,  mort  dans  cette  ville  en 
1683  ,  y  professa  long-temps  et  avec  un 
succès  distingué  la  botanique,  la  chimie 
et  l'anatomic.  Dans  ses  nombreux  voya- 
ges, il  parcourut  presque  toute  l'Europe. 
Il  est  auteur  de  plusieurs  ouvrages  de 
médecine,  recueillis  à  Naples  en  5  vol. 
in-folio,  1728.  Sa  chirurgie  médicale  a 
été  traduite  en  français  à  Lyon  en  1698  , 
in-12.  On  a  aussi  des  traductions  de  pres- 
que tous  SCS  autres  ouvrages  ,  in-8  et 
in-12.  EttmuUcr,  savant  dans  la  théorie 


!4a  EUC 

et  heureux  dans  la  pratique  ,  oi&e  dans 
ses  écrits  des  recherches  curieuses  et  des 
observatious  utiles. 

ETTMULLER  (Michel-Ernest),  fils  du 
précédent ,  aussi  célèbre  que  lui ,  donna 
au  public  la  vie  et  les  ouvrages  de  son 
père.  Il  professa  et  exerça  la  médecine 
avec  réputation ,  et  mourut  à  Leipsick  en 
1 732 ,  laissant  plusieurs  dissertations  sur 
différens  objets  de  son  art. 

EUBULIDE.  Foyez  Euclide. 

EUCHER  (  Saint  ),  premier  évêque  de 
Trêves  ,  fonda  ce  siège  au  3*  siècle.  Quel- 
ques légendes  le  font  mal  à  propos  disci- 
ple de  saint  Pierre.  Son  corps  repose  dans 
l'église  de  Saint-Mathias ,  près  de  Trêves. 

EUCHER  (  S.  ) ,  archevêque  de  Lyon, 
d'une  naissance  illustre  et  d'une  piété 
éminente ,  se  retira  avec  ses  fils  ,  Salonc 
et  Verau,  dans  la  solitude  de  Lérins,  après 
avoir  distribué  une  partie  de  ses  biens  aux 
pauvres,  et  l'autre  partie  à  ses  filles,  qui  ne 
le  suivirent  pas  dans  sa  retraite.  Il  quitta 
l'île  de  I,érins  où  ses  vertus  lui  attiraient 
trop  d'applaudissemèns ,  et  passa  dans 
celle  de  Léro ,  aujourd'hui  Sainte-Mar- 
guerite, Ce  ne  l'ut  qu'à  force  d'instances 
qu'on  le  tira  de  ce  désert ,  pour  le  placer 
sur  le  siège  de  Lyon  vers  434.  Il  assista 
en  cette  qualité  au  premier  concile  d'O- 
range en  441  ,  et  y  signala  sa  science  au- 
tant que  sa  sagesse.  «  On  vit  en  lui ,  dit 
))  Claudien  Mamert ,  un  pasteur  fidèle , 
»  soupirant  sans  cesse  après  la  céleste 
»  patrie ,  humble  d'esprit ,  riche  en  bon- 
»  nés  œuvres ,  puissant  en  paroles ,  ac- 
»  compli  en  tout  genre  de  sciences ,  et  de 
«  beaucoup  supérieur  aux  plus  grands 
»  évoques  de  son  temps.  »  Il  mourut  vers 
l'an  454.  L'Eglise  lui  est  redevable  i°  d'un 
Eloge  du  désert ,  adressé  à  saint  Hilairc. 
Celui  de  Lérins  y  est  peint  avec  des  cou- 
leurs bien  propres  à  le  faire  aimer.  Le 
stile  de  cet  ouvrage  est  aussi  noble  qu'é- 
légant ;  2°  d'un  Traite  du  mépris  du 
monde.  Saint  Eucher  montre  dans  le 
monde  un  gouft're  affreux ,  sous  une  su- 
perficie brillante.  «  J'ai  vu  ,  dit-il ,  des 
»  hommes  élevés  au  plus  haut  faîle  des 
j)  honneurs  et  des  richesses.  La  fortune , 
»  prodigue  eu  leur  faveur,  avait  accu- 
»  mule  tous  les  biens  sur  leurs  têtes,  sans 


Eue 

u  leur  dontier  même  le  temps  de  les  dé- 
»  sirer  ;  leur  prospérité ,  parvenue  à  sou 
»  comble ,  ne  laissait  plus  d'activité  à 
»  leurs  passions.  Mais  ils  ont  disparu  dans 
»  un  moment  ;  leurs  vastes  possessions  ont 
»  été  dispersées ,  et  eux-mêmes  ne  sont 
»  plus.  »  La  latinité  de  cet  ouvrage  est 
presque  digne  du  siècle  d'Auguste.  On  y 
admire  la  douceur  et  la  facilité  du  stile , 
la  beauté  des  tours,  la  noblesse  des  pen- 
sées, l'énergie  de  l'expression,  la  vivacité 
et  le  naturel  des  images,  la  clarté  de  la 
méthode.  Ce  traité  a  été  traduit  en  fran- 
çais par  Arnaud  d'Andilly  ainsi  que  le  pré- 
cédent, 1672  ,  in-12.  Tous  les  deux  sont 
en  forme  de  lettres  ;  celui-ci  est  adressé 
à  Valérien,  son  parent.  3°  D'un  Traité  des 
formules  spirituelles  ;  ce  sont  des  expli- 
cations de  quelques  endroits  de  l'Ecriture, 
que  saint  Eucher  écrivit  pour  l'usage  de 
Yeran  ,  un  des  ses  fils.  On  n'y  trouve  ni  la 
même  élégance ,  ni  la  même  beauté  de 
stile ,  que  dans  les  deux  ouvrages  précé- 
dens;  mais  le  sujet  ne  le  comportait  pas,  et 
la  simplicité  est  le  caractère  distinctif  de 
ce  genre  d'écrire.  4°  De  l'Histoire  de  saint 
Maurice  et  des  martyrs  de  la  Légion 
thébaine.  Le  témoignage  seul  de  cet  an- 
cien et  illustre  auteur  suffit  pour  anéantir 
les  doutes  qu'un  écrivain  fameux  a  tâché 
d'élever  sur  l'histoire  de  ces  saints  mar- 
tyrs (  voyez  Maurice  ).  Cette  histoire  a 
été  traduite  en  français  par  Dubourdieu , 
et  imprimée  à  Amsterdam  en  1705  avec 
une  dissertation  critique  très  vantée  par 
Bayle  ,  mais  réfutée  avec  énergie  par  D. 
Joseph  Delisle  ,  bénédictin.  Les  différens 
écrits  de  saint  Eucher  sont  dans  la  biblio- 
thèque des  Pères.  Ses  deux  fils,  Salone  et 
Veran,  furent  évêques,  du  vivant  même  de 
leur  père. 

EUCLIDE ,  né  à  Mégare ,  et  disciple 
de  Socrate  ,  était  passionné  pour  les  le- 
çons de  son  maître.  Les  Athéniens  ayant 
défendu,  sous  peine  de  mort,  aux  Méga- 
riens d'entrer  dans  leur  ville,  Euclide  s'y 
glissait  de  nuit,  en  habit  de  femme,  pour 
entendre  Socrate.  3Ialgré  son  attachement 
pour  ce  philosophe ,  il  s'éloigna  de  sa  ma- 
nière de  penser.  Le  philosophe  athénien 
s'attachait  principalement  à  spéculer  sur 
la  morale  >  le  mégarieu  s'appliqua  à  e&er*' 


fcer  l'esprit  de  ses  disciples  par  les  vairiéé 
subtilités  de  la  logique.  Sa  secte  fut  ap- 
pelée Disputante  et  Querelleuse.  Le  phi- 
losophe Euclide  ne  méritait  pas  moins  ces 
ëpitiiètes  ;  il  disputait  en  énerguniène. 
Ses  disciples  héritèrent  de  son  impétuo- 
sité. La  rage  de  la  chicane  les  posséda  tel- 
lement, qu'Eubulide,  l'un  d'entre  eux  , 
réduisit  en  système  ,  non  pas  l'art  de  rai- 
sonner ,  mais  l'art  d'obscurcir  la  raison 
par  des  subtilités  aussi  vaines  que  bar- 
bares. Il  fut  l'inventeur  de  divers  sophis- 
mes  si  captieux  et  si  embarrassans  que 
plusieurs  de  ses  disciples  moururent  de 
déplaisir  de  n'avoir  pu  les  résoudre.  Ces 
travers  passèrent ,  dans  les  siècles  d'igno- 
rance, des  livres  des  philosophes  païens, 
dans  quelques  écoles  chrétiennes.  Le  dia- 
lecticien Abailard  les  y  introduisit  avec 
éclat.  Cette  manière  de  raisonner  a  pro- 
duit de  mauvais  effets  ;  la  théologie,  cette 
science  respectable ,  simple  et  divine,  en 
devint  presque  méconnaissable.  Mais  l'on 
ne  sauiait  disconvenir  qu'elle  a  servi  à 
maintenir  les  règles  d'une  sûre  et  rigou- 
reuse logique ,  règles  si  essentielles  dans 
tous  les  genres  de  sciences  ,  et  négligées 
aujourd'hui  et  violées  par  les  hommes  les 
plus  célèbres  dans  la  république  des  let- 
tres. Tant  l'esprit  humain  est  sujet  aux 
extrêmes!  A  peine  est-il  guéri  de  la  ma- 
nie de  raisonner  avec  une  exactitude  af- 
fectée et  chicaneuse,  qu'il  donne  dans 
un  défaut  directement   opposé.    Foyez 

DU.NS. 

*  EUCLIDE,  le  mathématicien,  était  d'A- 
lexandrie, où  il  professait  la  géométrie 
SOUS  Ptolémée,  fils  de  Lagus.  Il  a  laissé 
des  élémens  de  cette  science  en  1 5  livres, 
dont  les  deux  derniers  sont  attribués  à 
Hypsicle  ,  mathématicien  d'Alexandrie. 
C'est  un  enchaînement  de  plusieurs  pro- 
blêmes et  théorèmes  tirés  les  uns  des  au- 
tres ,  et  démontrés  par  les  premiers  prin- 
cipes. L'antiquité  ne  nous  a  pas  transmis 
d'ouvrage  plus  important  sur  cette  ma- 
tière ;  il  a  été  loug-temps  le  seul  livre 
dans  lequel  les  modernes  ont  puisé  les 
connai-ssances  mathématiques.  Les  meil- 
leures éditions  des  Elémens  d'Euclide 
sont  celle  qui  a  paru  à  Baie,  1550,  in-fol., 
celle  de  Barrow,in-8,  Londres,  lG78j 


tm 


143 


dé  DàVld  Grégory,  in-folio  ,   1Î03,  en 
grec  et  en  latin  ;  et  celle  de  Robert  Sim- 
son ,  in-4 ,  en  latin ,  puis  en  anglais,  réim- 
primée pour  la  sixième  fois  en  1781^  On 
y  trouve  d'excellAites  Notes  critiques  et 
géométriques ,  oii  l'éditeur  redresse  les 
erreurs  dont  Théon  et  d'autres  ont  défi- 
guré ces  Elémens.  Nous  en  avons  plu- 
sieurs traductions  françaises  ;  la  plus  es- 
timée est  celle  du  père  de  Châles,  iu-12. 
(  Les  OEuvres  d'Euclide  en  grec,  latin  et 
français ,  d'après  un  manuscrit  très  an- 
cien,  qui  était  resté  inconnu  jusqu'à  nos 
jours,  ont  été  publiées  par  F.  Peyrard  ,  à- 
Paris,  1814,  in-4.  )  On  a  encore  quelques 
Fragmens  d'Euclide  ,  dans  les  anciens 
auteurs  qui  ont  traité  de  la  musique ,  Am- 
sterdam,  1652,  2  vol.  in-4.  M.  Peyrard  a 
donné  une  édition  des  OEuvres  d'Eu- 
clide en  grec ,  en  latin  et  en  français , 
d'après  un  manuscrit  très  ancien,  qui 
était  J'este  inconnu  jusqu'à  nos  jours  , 
Paris,  1814-18,  3  vol.  in-4,  fig.  Il  avait 
déjà  publié  en  1804  les  Elémens  de  géo- 
métrie d'Euclide  ;  traduits  littéralement  y 
1  vol.  in-8  ,  avec  un  supplément,  1810, 
in-8  ,  pour  les  parties  qui  étaient  omises 
ou  incomplètes  dans  Euclide.  Euclide  était 
doux,   modeste.   Il  accueillit  favorable- 
,  ment  tous  ceux  qui  cultivaient  les  sciences 
exactes.  Le  roi  Ptolémée  voulut  être  son 
disciple  ;  mais  rebuté  par  les  premières 
difficultés ,  il  demanda  s'il  n'y  avait  point 
de  voie  plus  aisée  pour  apprendre  la  géo- 
métrie ?  «  Non  ,  répondit  Euclide ,  il  n'y 
en  a  point  de  particulière  pour  les  rois.  » 
*  EUCLIDE  ,  premier  archonte  d'A- 
thènes,  403   ans  avant  J.  C,  et  dans  la 
2''  année  de  la  94*^  olympiade.  Il  se  ren- 
dit par  son  sage  gouvernement  aussi  cé- 
lèbi-e  que  les  deux  autres  Euclides  le  fu- 
rent, celui  de  Mégare  par  les  subtilités 
de  sa  dialectique,   et  celui  d'Alexandrie 
pour  avoir  donné  ses  premiers  élémens 
de  géométrie.  Euclide  l'archonte  fut  élu 
aussitôt  après  l'expulsion  des  trente  ty- 
rans, qu'il  fit  excepter  de  l'amnistie  ac- 
cordée à  tous  ceux  qui  avaient  eu  part 
aux  guerres  civiles.  Il  fit  faire  une  révision 
générale  des  lois  de  la  république  ,  et  l'on 
en  exclut  les  pernicieuses  ou  inutiles. 
Dans  les  actes  publics,  il  fit  adopter  l'ai 


t44 


ËtfD 


phahet  ionien  ^  de  24  lettres ,  Comme 
plus  simple  que  celui  dont  les  Athéniens 
avaient  fait  usage  jusqu'à  ce  jour.  Eu- 
clide  parvint  à  réunir  tous  les  esprits ,  et 
son  archontat  est  souveftt  cité  avec  éloge 
par  les  anciens  auteurs. 

*  EUCLIDE ,  fameux  sculpteur  athé- 
nien. Du  temps  de  Pausanias ,  on  admi- 
rait ses  ouvrages  dans  l'Achaïe,  et  surtout 
dans  la  ville  de  Bure ,  où  l'on  voyait  plu- 
sieurs statues  de  cet  artiste ,  toutes  en 
marbre  pantélique ,  et  chacune  dans  un 
temple  particulier ,  savoir ,  celles  de  Cé- 
rts ,  habillée;  de  Vùius ,  de  Bacchus  et 
de  Lucine  ;  on  voyait  encore  un  Jupiter 
assis ,  dans  un  temple  de  la  ville  d'Egire. 
Euclide  est  un  des  plus  anciens  sculpteurs 
grecs  ;  on  croit  qu'il  vivait  vers  l'an  450 
avant  l'ère  chrétienne. 

EDCRITE.  Voyez  Evephknb. 

EUD^MON-JEAN  (  André  ) ,  né  dans 
l'île  de  Candie,  jésuite  à  Rome,  mort 
dans  cette  ville  en  1G25,  composa  divers 
ouvrages.  Le  plus  connu  a  pour  titre  Ad- 
monitio  ad  regem  Ludovicum  XIII, 
1G26  ,  in-4  ,  et  en  français,  1C27  ,  in-4  , 
plein  d'excellens  avis ,  mais  contenant 
quelques  propositions  contraires  aux  ma- 
ximes de  l'état ,  que  bien  d'autres  avaient 
enseignées  avant  lui ,  et  qui  ne  sont  rien 
en  comparaison  de  celles  qu'on  a  ensei- 
gnées depuis.    Voyez  Santarel  ,    Jou- 

VENCY. 

EUDES  ,  duc  d'Aquitaine ,  régnait  en 
souverain  sur  toute  cette  partie  de  la 
France  qui  est  entre  la  Loire,  l'Océan, 
les  Pyrénées ,  la  Septimanie  et  le  Rhône. 
î.e  roi  Chilpéric  II  l'ayant  appelé  à  son 
secours  contre  Charles  Martel  en  7 1 7  ,  le 
reconnut  pour  souverain  de  toute  l'Aqui- 
taine. Eudes  marcha  avec  lui  contre  Char- 
les, qui  ayant  eu  tout  l'avantage,  lui  de- 
manda de  lui  livrer  Chilpéric  avec  ses 
tré.sors.  Le  duc  d'Aquitaine  ,  soit  par 
crainte,  soit  par  faiblesse,  abandonna  le 
vaincu  au  vainqueur,  et  fit  tui  traité  d'al- 
liance avec  lui.  C'était  en  719.  Deux  ans 
après,  en  721 ,  il  défit  Zama,  général  des 
Sarrasins,  qui  avait  mis  le  siège  devant 
Toulouse.  Les  infidèles,  malgré  cette  dé- 
faite ,  se  rendirent  de  jour  en  jour  plus 
formidables.  Eudes ,  pour  arrêter  leurs 


ËtJfi 

iirogrës ,  iît  sa  paix  avec  Manuza  leur  gé* 
néral,  et  lui  donna  sa  fille  en  mariage.  La 
guerre  recommença  en  732.  Eudes  ayant 
favorisé  le  soulèvement  d'une  des  provin- 
ces d'Abdérauie,  roi  des  Sarrasins,  ce 
prince  passala  Garonne  pourlecombatlre. 
Le  duc  d'Aquitaine  pressé  de  tous  côtés , 
après  avoir  perdu  beaucoup  de  soldats  et 
de  places,  implora  le  secours  de  Charles- 
Martel.  Les  deux  princes  réunis  rempor- 
tèrent une  victoire  signalée  entre  Tours 
et  Poitiers.  Les  Sarrasins  y  perdirent ,  à 
ce  qu'ont  raconté  quelques  historiens 
exagérateurs ,  plus  de  300,000  hommes. 
Eudes,  débarrassé  des  Sarrasins ,  se  battit 
avec  le  prince  qui  l'avait  aidé  à  les  chas- 
ser. La  guerre  se  ralluma  entre  lui  et 
Charles-Martel ,  et  ne  finit  que  par  la 
mort  d'Eudes  en  736. 

EUDES,  comte  de  Paris,  duc  de  France, 
et  l'un  des  plus  vaillans  princes  de  son 
siècle ,  était  fils  de  Robert  le  Fort.  En  887 
il  contraignit  les  Normands  de  lever  le 
siège  de  Paris.  L'année  suivante,  il  fut 
proclamé  roi  de  la  France  occidentale,  et 
défit  peu  de  temps  après  l'armée  des  Nor- 
mands ,  qu'il  poursuivit  jusque  sur  la 
frontière.  Il  obligea  Charles  le  Simple  de 
se  retirer  dans  la  Neustrie,  prit  Laon  ,  et 
mourut  à  La  Fère  en  Picardie ,  le  5  jan- 
vier 898. 

EUDES  DE  MONTREUIL,  architecte 
du  13^  siècle,  fut  fort  estimé  du  roi  saint 
Louis,  qui  le  conduisit  avec  lui  dans 
son  expédition  de  la  Terre-Sainte ,  oii  il 
lui  fit  fortifier  la  ville  et  le  port  de  Jaffa. 
De  retour  à  Paris,  il  bâtit  plusieurs 
églises,  celle  de  Sainte-Catherine  du  Val- 
des  Ecoliers  ,  de  l'Hôtel-Dieu  ,  de  Sainte- 
Croix  de  La  Bretonnerie,  des  Blancs-Man- 
teaux ,  des  Mathurins ,  des  Cordeliers  et 
des  Chartreux.  Il  mourut  en  1289. 

EUDES  (  Jean  ) ,  frère  de  l'historien 
Mézerai ,  né  à  Rye  dans  le  diocèse  de 
Seès,  en  1601  ,  forma  son  esprit  et  régla 
ses  mœurs  dans  la  congrégation  de  l'Ora- 
toire ,  sous  les  yeux  du  cardinal  de  Bé- 
ruUe.  Après  y  avoir  demeuré  18  ans,  il  en 
sortit  en  1043,  pour  fonder  la  congréga- 
tion des  Eudistcs.  Ses  anciens  confrères 
s'étant  opposés  à  l'établissement  de  cette 
société ,  Eudes  cacha  une  partie  de  son 


I 


EUD 

projet.  Il  se  borna  à  demander  une  mai- 
son à  Caea  pour  y  former  des  prêtres  à 
l'esprit  ecclésiastique  ;  «  mais  sans  aucun 
j»  dessein  ,  dit-il ,  de  former  un  nouvel 
«  institut.  »  Le  sien  se  répandit  néan- 
moins avec  beaucoup  de  fruits.  Eudes 
prêchait  assez  bien  pour  son  temps,  où 
l'éloquence  de  la  chaire  n'avait  pas  été 
portée  si  loin  que  dans  le  nôtre  ;  ce  talent 
le  fit  rechercher,  et  sa  congrégation  y 
gagna.  <f  Le  clergé  de  Normandie ,  dit 
»  l'abbé  Berauit ,  où  elle  est  particulière- 
i)  ment  répandue,  en  fait  encore aujour- 
»  d'hui  l'éloge ,  par  sa  régularité  et  par 
)j  ses  lumières.  Aussi  le  nom  du  Père  Eudes 
»  y  est-il  toujours  dans  la  plus  grande 
«vénération;  ce  qui  n'a  point  empêché 
»  l'historien  fugitif  du  jansénisme ,  de  le 
M  représenter ,  dans  le  vrai  stile  de  la 
)>  Hollande  hérétique,  comme  un  fana- 
n  tique ,  ennemi  déclaré  de  la  grâce  du 
»  Sauveur.  C'est  un  témoignage  de  plus, 
))  en  faveur  de  ce  saint  prêtre  relativement 
»  à  la  foi,  c'est-à-dire  à  la  vertu,  sans 
»  laquelle  toute  sainteté  n'en  est  que  le 
w  simulacre.  »  Eudes  mourut  à  Caen  en 
1C80  ,  à  79  ans,  laissant  des  ouvrages  qui 
ont  plus  fait  d'honneur  à  sa  dévotion  qu'à 
son  esprit.  Celui  qui  a  fait  le  plus  de 
bruit ,  est  le  traité  De  la  dévotion  et  de 
l'office  du  cœur  de  la  F'ierge,  in-12,  IG50. 
Eudes  y  adopte  phusieurs  pratiques  nou- 
velles, inspirées  par  une  piété  mal  réglée 
et  par  un  zèle  plus  ardent  qu'éclairé.  On 
a  encore  de  lui  une  J^ie  de  Marie  des 
Vallées,  manuscrite,  en  3  vol.  in-4. 

EUDOXE  de  Guide  ,  fils  d'Eschine , 
fut  à  la  fois  astronome ,  géomètre ,  mé- 
decin ,  législateur  ;  mais  il  est  principale- 
ment connucommeastronome.Hipparque 
et  lui  donnèrent  un  nouveau  jour  au 
système  du  monde  d'Anaximandre.  Eu- 
doxe  mourut  l'an  350  avant  J.  C,  après 
avoir  donné  des  lois  à  sa  patrie.  C'était 
un  géomètre  laborieux.  Il  perfectionna  , 
dit-on ,  la  théorie  des  sections  coniques. 
EUDOXE,  fils  de  saint  Césaire  martyr, 
né  à  Ârabisse  ,  ville  d'Arménie ,  embrassa 
l'arianisme ,  et  fut  un  des  principaux  dé- 
fenseurs de  celte  hérésie.  Il  fut  fait  évê- 
que  de  Germanicie  dans  la  Syrie ,  par 
ceux  de  sa  communion  ;  il  assista  au  con- 


EUD  145 

cîle  de  Sardique  et  à  plusieurs  autres.  En 
358  ,  Eudoxe  usurpa  le  siège  d'Antioche. 
Deux  ans  après,  l'empereur  de  Constance 
l'éleva  au  patriarchat  de  Constantinople. 
Il  persécuta  les  catholiques  avec  fureur , 
et  mourut  l'an  370  à  Nicée ,  en  sacrant 
Eugène ,  arien  comme  lui ,  et  évêque  de 
cette  ville, 

ECDOXIE  (  ^lia  ) ,  fille  du  comte 
Bauton ,  célèbre  général  sous  le  grand 
Théodose ,  était  française  ;  elle  joignait 
les  agrémens  de  l't  sprit  aux  grâces  de  la 
figure.  L'eunuque  Europe  la  fit  épouser  à 
Arcade ,  et  partagea  d'abord  avec  elle  la 
confiance  de  ce  faible  empereur  ;  mais 
ayant  voulu  ensuite  s'opposer  à  ses  des- 
seins ,  elle  chercha  les  moyens  de  perdre 
ce  rival,  et  elle  les  trouva.  Maîtresse  de 
l'état  et  delà  religion ,  cette  femme  régna 
en  roi  despotique  :  son  mari  n'était  em- 
pereur que  de  nom.  Pour  avoir  encore 
plus  de  crédit  que  ne  lui  en  donnait  le 
trône ,  elle  amassa  des  richesses  immenses 
parles  injustices  les  plus  criantes.  Saint 
Jean-Chrysostôme  fut  le  seul  qui  osa  lui 
résister.  Eudoxie  s'en  vengea,  en  le  faisant 
chasser  de  son  siège  par  un  conciliabule , 
l'an  403.  Une  des  causes  de  la  haine  de 
l'impératrice  contre  le  saint  prélat ,  était 
un  sermon  contre  le  luxe  et  la  vanité  des 
femmes,  que  les  courtisans  envenimèrent. 
Eudoxie  rappela  Chrysostôme  après  quel- 
ques mois  d'exil;  mais  le  saint  s'etant 
élevé  avec  force  contre  les  profanations 
occasionées  par  les  jeux  et  les  festins , 
donnés  au  peuple  à  la  dédicace  d'une  sta- 
tue de  l'impératrice  ,  elle  l'exila  de  nou- 
veau en  404.  Cette  femme ,  implacable 
dans  ses  vengeances  et  insatiable  dans 
son  ambition ,  mourut  d'une  fausse  cou- 
che quelques  mois  après.  Ses  médailles 
sont  très  rares. 

EUDOXIE  (^lia),  fille  de  Léonce, 
philosophe  athénien,  s'appelait  AthénaUs 
avant  son  baptême  et  son  mariage  avec 
l'empereur  Théodose  le  Jeune.  Son  père 
l'instruisit  dans  les  belles-lettres  et  dans 
les  sciences  ;  il  en  fit  un  philosophe,  un 
grammairen  et  un  rhéteur.  Le  vieillard 
crut  qu'avec  tant  de  talens  joints  à  la 
beauté ,  sa  fille  n'avait  pas  besoin  de  bien, 
et  la  déshérita.  Après  sa  mortelle  voulut 

]o 


i46  EUD 

rentrer  dans  ses  droits;  mais  ses  frères  les 
lui  contestèrent.  Heureuse  ingratitude  , 
puisqu'elle  la  fit  impératrice  !  Kudoxic  se 
voyant  sans  ressource,  alla  à  Constanti- 
nople  porter  sa  plainte  à  Pulchérie ,  sœur 
de  Théodose  II.  Cette  princesse  étonnée 
de  son  esprit,  autant  que  charmée  de  sa 
beauté ,  la  fit  épouser  à  son  frère  en  421 . 
Les   frères    d'Athénaïs ,   instruits  de  sa 
fortune  ,  se  cachèrent  pour  échapper  à  sa 
vengeance.  Eudoxie  les  fit  chercher ,  et 
les  éleva  aux  premières  dignités  de  l'em- 
pire :  générosité  qui   rend   sa  mémoire 
plus  chère  aux  âmes  bien  nées ,  que  sa 
fortune  même.  Son  trône  fut  toujours  en- 
vironné de  savans.  Paulin  ,  un   d'entre 
eux,  plus  aimable  ou  plus  ingénieux  que 
les  autres ,  fut  le  plus  en  faveur  auprès 
d'elle.  L'empereur   eu  conçut  de  la  ja- 
lousie ;    elle  éclata  au  sujet  d'un  fruit 
que  l'impératrice  donna  à  cet  homme  de 
lettres.  Ce  fruit  fut  une  pomme  de  dis- 
corde. Théodose  crut  sa  femme  coupable, 
fit  tuer  Paulin,  congédia  tous  les  officiers 
d'Eudoxie,  et  la  réduisit  à  l'état  de  simple 
particulière.  Cette  princesse,  aussi  illustre 
qu'infortunée,  se  retira  dans  la  Palestine , 
et  embrassa  les  erreurs  d'Eutychès.  Tou- 
chée ensuite  par  les  lettres  de  saint  Si- 
méon  slylite  ,  et  par  les  raisons  de  l'abbé 
Euthymius,  elle  retourna  à  la  foi  de  l'E- 
glise ,  et  passa  le  reste  de   ses  jours  à 
Jérusalem  dans  la  piété  et  dans  les  lettres. 
Elle  mourut  l'an  4G0,  après  avoir  juré 
qu'elle  était  innocente  des  crimes  dont 
son  époux  l'avait  soupçonnée.  Eudoxie 
avait  composé  beaucoup  d'ouvrages  sur 
le  trône,  et  après  qu'elle  en   fut  des- 
cendue. Photius  cite  avec  éloge  une  tra- 
duction en  vers  hexamètres  des  huit  pre- 
miers livres   de  V Ecriture.  On  attribue 
encore  à  cette  princesse  un  ouvrage  ap- 
pelé  le  Cenlon   d'Homère  qu'on  trouve 
dans  la  Bibliothèque  des  Pères.  C'est  la 
vie  de  J.  C.  composée  de  vers  pris  de  ce 
père  de  la  poésie  grecque.    Du  Cange 
pense  que  cet  écrit  est  tout  ce  qui  nous 
reste  de  ses  ouvrages  ;  mais  la  plupart  de 
ses  critiques  conviennent  qu'il  n'est  ni 
d'elle,  ni  digne  d'elle.  Yillefore  a  écrit  sa 
rie. 
EUDOXIE  LA   Jeune  (Licinia),    ua- 


EUD 

quit  à  Constantinopleen  422.  Elle  était 
fille  de  Théodose  II  et  d'Eudoxie,  et 
femme  de  Valentinien  III ,  que  Maxime , 
usurpateur  de  l'empire,  fit  assassiner.  Le 
mcurlirer  força  la  femme  de  l'empereuf 
tué  à  accepter  sa  main.  (  Eudoxie  ignorait 
que  son  nouvel  époux  fût  souillé  du  sang 
du  premier).  Lorsque  Maxime  osa  le  lui  ré- 
véler, outrée  de  colère ,  elle  appela  à  son 
secours  Genséric  ,  roi  des  Vandales.  Ce 
prince  passa  en  Italie  à  la  tête  d'une  nom- 
breuse armée,  mit  tout  à  feu  et  à  sang , 
saccagea  Rome  et  emmena  Eudoxie  en 
Afrique.  Après  7  ans  de  captivité ,  elle 
fut  renvoyée  à  Constantinople  en  462  , 
et  y  finit  sa  vie  dans  les  exercices  de  la 
piété.  Ses  médailles  sont  très  rares  ,  et  les 
vertus  qui  la  signalèrent  sont  plus  rares 
encore.  Elle  ne  fit  usage  de  son  pouvoir 
que  pour  soulager  les  malheureux ,  qui 
furent  en  grand  nombre  sous  son  règne. 
Elle  supporta  les  vices  de  Valentinien 
avec  un  courage  tranquille ,  et  ne  lui  fut 
pas  moins  attachée ,  que  si  cet  époux 
infidèle  et  livré  à  une  vie  infâme,  eût  été 
un  homme  de  bien. 

EUDOXIE,  veuve  de  Constantin 
Ducas,  se  fit  ])roclaraer  impératrice,  avec 
ses  trois  fils ,  aussitôt  après  la  mort  de 
son  époux  en  10G7.  Romain  Diogène,  un 
des  plus  grands  de  l'empire  ,  avait  voulu 
lui  enlever  la  couronne  :  Eudoxie  le  fit 
condamner  à  mort  ;  mais  l'ayant  vu  avant 
l'exécution,  elle  fut  si  touchée  de  sa  bonne 
mine ,  qu'elle  lui  accorda  sa  grâce ,  et  le 
fit  même  général  des  troupes  de  l'Orient. 
Romain  Diogène  répara  par  sa  valeur  ses 
anciennes  fautes.  Eudoxie  résolut  de  l'é- 
pouser ,  afin  qu'il  l'aidât  à  réparer  les 
malheurs  de  l'empire ,  et  à  conserver  le 
sceptre  à  ses  fils.  Pour  exécuter  ce  projet, 
il  fallait  retirer  des  mains  du  patriarche 
Xiphilin  un  écrit,  par  lequel  elle  avait 
promis  à  Constantin  Ducas  de  ne  jamais 
se  remarier.  Un  eunuque  de  confiance , 
d'un  esprit  délié,  va  trouver  le  patriar- 
che, lui  déclare  que  l'impératrice  veut 
passera  de  secondes  noces,  mais  que  son 
dessein  est  d'épouser  le  frère  du  patriar- 
che. Xiphiliu  ne  trouva  dès  lors  aucune 
difficulté,  rendit  ce  papier,  et  Eudoxie 
épousa  Romain  en  10G8.  Trois  ans  après, 


EUG 

Michel  son  fils ,  s'étaut  fait  proclamer 
empereur,  la  renferma  dans  un  monas- 
tère. Elle  avait  eu  sur  le  trône  les  qualités 
d'un  grand  prince  ;  elle  eut  dans  le  cou- 
vent les  vertus  d'une  religieuse.  Elle  cul- 
tiva la  littérature  avec  succès.  Nous  avons 
d'elle  un  manuscrit  qui  est  dans  la  biblio- 
thèque du  roi  de  France  :  c'est  un  recueil 
sur  les  généalogies  des  dieux ,  des  héros 
et  des  héroïnes  et  qui  a  pour  titre  lonia. 
On  trouve  dans  cet  ouvrage  tout  ce  qu'on 
a  dit  de  plus  curieux  sur  les  délires  du 
paganisme.  Il  décèle  une  vaste  lecture. 
Il  a  été  imprimé  à  Venise  par  les  sains 
de  M.  de  Villoison  dans  les  yinecdota 
grœcuy  1781  ,  2  vol.  in-4  ;  le  l^'  volume 
est  occupé  par  ce  manuscrit  ;  le  2®  con- 
tient des  extraits  de  différens  auteurs 
grecs.  Cette  princesse  composa  plusieurs 
autres  ouvrages. 

EUDOXIE  Lapouccin  ,  impératrice 
de  Russie ,  première  femme  de  Pierre  le 
Grand  et  mère  de  l'infortuné  Alexis,  fut 
répudiée  et  reléguée  dans  un  couvent , 
près  du  lac  Ladoga.  On  l'avait  accusée 
injustement ,  à  ce  qu'il  paraît ,  d'avoir 
eu  un  commerce  illicite  avec  un  seigneur, 
nommé  Rlébou ,  qui  expira  dans  des  tour- 
mens  horribles.  Au  milieu  de  l'exécution, 
le  jaloux  et  cruel  Pierre  le  sollicita  d'a- 
vouer son  crime;  mais  Klébou  lui  ré- 
rondit  d'une  manière  bien  propre  à  jus- 
tifier l'impératrice.  «  Il  faut  que  tu  sois 
M  aussi  imbécile  que  tyran  ,  pour  croire, 
»  que  n'ayant  rien  voulu  avouer  au 
«  milieu  des  tourmens  inouïs  que  tu  m'as 
«  fait  souffrir  ,  à  présent  que  je  n'ai  plus 
»  d'espérance  de  vivre ,  j'irai  flétrir  l'in- 
»  nocence  et  l'honneur  d'une  femme  ver- 
»  tueuse,  en  qui  je  n'ai  jamais  connu 
»  d'autre  tache  que  de  t'avoir  aimé  :  va 
»  monstre,  ajouta-t-il  en  lui  crachant  au 
)'  visage ,  retire-toi  et  laisse-moi  mourir 
»  en  paix.  »  Eudoxie  fut  rappelée  par 
Pierre  II  et  mourut  quelque  temps  après. 

EUFÉMIî:.  Fotjez  Eupiiémie. 

EUGÈNE  I  (  S.  ) ,  Romain,  fut  vicaire- 
général  de  l'église  durant  la  captivité  du 
pape  saint  Martin,  et  son  successeur  dans 
la  chaire  pontificale  en  654.  Il  mourut  le 
1"  juin  668. 

EUGEJNE  II ,  romain ,  pape  après  Pas- 


EUG  i47 

chai  I,  l'an  82i ,  mort  en  827,  fut  re- 
commandable  par  son  humilité.  On  ne 
doit  pas  avoir  une  grande  idée  de  son  es- 
prit, s'il  est  vrai ,  copime  plusieurs  au- 
teurs l'assurent ,  qu'il  établit  l'épreuve 
de  l'eau  froide.  Il  est  vrai  que  dans  ces 
siècles,  les  moyens  de  connaître  la  vérité 
étaient  si  peu  lumineux  et  si  peu  sûrs, 
qu'on  est  presque  tenté  d'approuver  le 
recours  aux  preuves  surnaturelles  :  et  au- 
jourd'hui même  que  notre  jurisprudence 
est  si  fièrede  ses  lumières,  le  résultat  de 
beaucoup  de  procès  civils  et  criminels 
ne  présente  rien  de  plus  avéré  que  l'é- 
preuve de  l'eau  froide  [voyez  Charlkma- 
gne).  Noël  Alexandre  soutient  qu'on  a 
attribué  sans  fondement  à  ce  pape  l'éta- 
blissement de  ce  genre  d'épreuve.  Pape- 
broch,  dans  le  Pro/?y/euw,  page  128, 
est  du  même  avis.  Les  épreuves  de  ce 
genre  furent  procrites  par  le  concile  de 
Worms  en  821). 

EUGÈNE  III,  religieux  dé  Cîleaux 
sous  saintBernard,  ensuite  abbé  deSaint- 
Anastase,  fut  élevé  sur  la  chaire  pontifi- 
cale de  Rome,  en  1145.  Il  était  de  Pise 
ets'appelait  Bernard.  Les  Romains  étaient 
animés  de  l'esprit  de  révolte,  lorsqu'il 
monta  sur  le  saint  Siège.  Us  avaient  ré- 
tabli le  sénat  et  élu  nn  patricc  ;  ils  vou- 
lurent qu'Eugène  III  appi'ouvàt  tous  ces 
changemens.  Le  pape  aima  mieux  sortir 
de  Rome.  Il  y  rentra  à  la  fin  de  l'année, 
après  avoir  soumis  les  rebelles  par  les  ar- 
mes des  Tiburtins ,  anciens  ennemis  des 
Romains.  Lé  feu  de  la  rébellion  n'était 
pas  éteint  :  les  séditieux  le  soufflaient  de 
tous  côtés.  Eugène ,  fatigué  du  séjour 
orageux  de  Rome ,  se  retira  à  Pise ,  et  de 
là  à  Paris  en  1147.  Il  assembla  un  concile 
à  Reims  l'année  d'après ,  et  un  autre  à 
Trêves,  oîi  il  permit  à  sainte  Hildegarde,  ' 
religieuse,  d'écrire  ses  visions.  De  retour 
en  France,  il  vint  à  Clairvaux.  Il  y  avait 
été  simple  moine ,  il  y  parut  en  pape  ; 
mais  en  pape  qui  n'avait  pas  oublié  son 
ancien  état  :  il  portait  sous  les  orneniens 
pontificaux  une  tunique  de  laine.  Sur  la 
fin  de  cette  année  il  reprit  le  chemin  d'I- 
talie ,  et  mourut  à  Tivoli  en  1 153  ,  après 
un  pontificat  de  plus  de  huit  ans,  aussi 
agité  qu'il  méritait  peu  de  l'être.  Les  Ro- 


i48  EUG 

mains  ne  sentirent  la  grandeur  de  leur 
perte,  que  quand  on  rapporta  chez  eux  le 
corps  de  ce  magnanime  et  modéré  pontife, 
qu'ils  arrosèrent  de  leurs  larmes.  C'est  à 
lui  que  saint  Bernard  adresse  ses  livres 
de  la  Considération.  Eugène  le  regarda 
toujours  comme  son  maître,  et  faisait  le 
plus  grand  cas  de  ses  avis.  De  faux  esprits 
ont  abusé  de  ces  avis  pour  exagérer  les 
abus  que  Bernard  reprenait,  au  lieu  d'ad- 
mirer et  la  sagesse  personnelle  du  pon- 
tife ,  et  celle  d'un  gouvernement  où  les 
conseils  et  les  leçons,  énoncés  même  quel- 
quefois durement,  sont  reçus  avec  re- 
connaissance et  avec  fruit.  On  a  d'Eugène 
des  décrets ,  des  épîtres ,  des  constitu- 
tions. On  peut  consulter,  sur  les  actions 
et  les  vertus  de  ce  pape ,  V Histoire  de 
son  pontificat ,  écrite  avec  beaucoup  de 
netteté  par  Don  Jean  de  Lannes ,  biblio- 
thécaire de  l'abbaye  de  Qairvaux,  Kancy, 
1737,  1  vol.  in-12. 

EUGÈNE  IV  (  Gabriel  Condolmhro  ) , 
vénitien ,  d'une  famille  roturière,  est  une 
preuve  de  ce  que  peut  le  talent ,  et  sur- 
tout celui  des  affaires.  Il  fui  d'abord  cha- 
noine régulier  de  la  congrégation  de  saint 
Grégoire  in  alga,  ensuite  évêque  de  Sien- 
ne ,  cardinal ,  enfin  pape  en  1431,  après 
Martin  V ,  l'année  même  de  l'ouverture 
du  concile  de  Bâle.  Il  y  eut  beaucoup  de 
mésintelligence  entre  le  pontife  et  les 
Pères  de  cette  assemblée.  Eugène  lança 
une  bulle  pour  la  dissoudre.  Le  concile 
n'y  répondit  qu'en  donnant  un  décret 
pour  établir  son  autorité ,  et  en  confir- 
mant les  deux  décrets  de  lai*  et  de  la  6* 
session  du  concile  de  Constance,  qui 
soumettent  le  pape  au  concile  :  décret 
donné  en  temps  de  schisme ,  où  il  exis- 
tait des  doutes  sur  le  pape  légitime,  et  où 
l'unité  n'a  pu  se  rétablir  que  par  la  dépo- 
sition de  tous  les  coutendans.  Le  pontife 
romain,  après  deux  ans  de  délais ,  se  ren- 
dit enfin  à  Éàle.  L'empereur  Sigismond 
avait  été  le  lien  de  l'union  d'Eugène  avec 
les  Pères  de  Bâle  ;  cette  union  finit  à  la 
mort  de  ce  prince.  Le  pape  assembla  un 
nouveau  concile  à  Ferrare,  après  avoir 
dissous  une  seconde  fois  celui  de  Bâle , 
qui  ne  laissa  pas  de  se  maintenir.  La  pre- 
mière session  se  tint  le  10  février  1438. 


EUG 

L'objet  de  cette  assemblée  était  l'union 
de  l'église  grecque  avec  la  latine.  Jean 
Paléologue,  empereur  d'Orient ,  voulait 
réconcilier  les  deux  églises,  parce  qu'il 
avait  alors  besoin  des  Occidentaux  contre 
les  Turcs.  Il  arriva  à  Ferrare  au  mois  de 
mars ,  avec  Joseph ,  patriarche  de  Con- 
stantinople,  21  évêqueset  une  nombreuse 
suite.  La  peste  se  mit  dans  cette  ville  ; 
on  transféra  le  concile  à  Florence.  Après 
avoir  discuté  avec  les  Grecs  la  procession 
du  Saint-Esprit,  la  primauté  du  pape,  | 

le  purgatoire,  la  réuuion  tant  déairéefut  i 
terminée  dans  la  6*  et  dernière  session  , 
tenue  le  6  juillet  1439.  Le  décret,  dressé 
en  grec  et  en  latin ,  fut  souscrit  de  part 
et  d'autre.  L'empereur  et  les  prélats  grecs 
partirent  fort  contens  de  la  générosité  du 
pape:  Eugène  leur  donna  beaucoup  plus 
qu'il  n'avait  promis  par  son  traité.  Il  est 
certain  qu'il  se  prêta ,  avec  autant  de  sa- 
gesse que  de  zèle,  à  rétablir  l'intelligence 
entre  l'église  d'Orient  et  celle  d'Occi- 
dent ;  mais  malgré  tous  ces  soins,  l'union 
ne  fut  pas  durable.  Les  Grecs  s'élevèrent 
contre  elle ,  dès  que  Paléologue  leur  en 
eut  montré  le  décret.  Ils  recommencè- 
rent le  schisme  ;  et  depuis  ce  temps,  il 
n'a  pas  pu  être  éteint.  Eugène  fut  mal 
récompensé  à  Bâle  des  services  qu'il  ve- 
nait de  rendre  à  l'église  latine.  Le  concile 
qui  était  fort  diminué ,  et  où  il  ne  se 
trouvait  plus  guère  de  personnes  distin- 
guées ,  le  déposa  du  pontificat ,  comme 
«  perturbateur  de  la  paix ,  de  l'union  de 
M  l'Eglise  ;  simoniaque ,  parjure  ,  incor- 
»  rigible,  schismatique  et  hérétique.  j> 
Les  rois  de  France  et  d'Angleterre,  l'em- 
pereur et  les  princes  d'Allemagne,  qui 
jusque  là  avaient  gardé  une  espèce  de 
neutralité,  en  furent  indignés  et  s'en  plai- 
gnirent au  concile.  Le  pape  cassa  ce  dé- 
cret, dans  lequel  il  annule  tous  les  actes 
de  l'assembléedeBâle.  Le  concile  ou  plu- 
tôt l'assemblée  qui  continuait  à  s'appeler 
ainsi ,  après  avoir  déposé  Eugène,  lui  op- 
posa Amédée  VIII ,  duc  de  Savoie ,  qui 
fut  élu  pape  sous  le 'nom  de  Félix  V.  L'E- 
glise fut  encore  une  fois  déchirée  par  le 
schisme.  Eugène  était|toujours  à  Florence, 
renvoyant  les  foudres  que  le  concile  de 
Bâle,    devenu  ua  coucilabule,  lançait 


EUG 

contre  lui.  En  1442,  il  transféra  le  con- 
cile à  Rome ,  et  mourut  5  ans  après  en 
1447  ,  lassé  et  détrompé  de  tout.  Dans  ses 
derniers  momens,  il  s'écria  devant  tout 
le  monde  :  «  O  Gabriel  !  (  c'était  son  nom 
M  de  baptême  ) ,  ô  Gabriel  !  qu'il  te  serait 
»  bien  plus  avantageux  de  n'avoir  jamais 
«  été  ni  pape  ,  ni  cardinal ,  ni  évêque  ; 
M  mais  d'avoir  fini  tes  jours  comme  tu  les 
M  avais  commencés,  en  suivant  paisible- 
»  ment  dans  ton  monastère  les  exercices 
»  de  ta  règle  !  »  «  Ce  fut  toutefois ,  dit 
»  un  célèbre  historien,  un  des  plus  grands 
u  papes,  quoiqu'un  des  moins  heureux. 
»  Il  eut  toutes  les  qualités  qui  font  révé- 
»  rer  et  chérir  les  grands  ;  l'élévation  de 
»  l'esprit,  la  fermeté  du  courage,  la  no- 
»  blesse  des  goûts  et  des  manières ,  la  li- 
»  béralité  et  la  bienfaisance ,  le  don  de 
))  la  parole,  le  talent  des  affaires ,  l'amour 
«  des  lettres ,  sans  être  bien  savant  lui- 
»  même;  et,  ce  qu'on  ne  peut  trop  ap- 
»  précier  dans  sa  place  et  dans  son  siècle, 
»  la  sagesse  de  ne  point  se  mêler  dans 
»  les  différends  temporels  des  princes.  Sa 
»  vie  fut  édifiante  et  réglée  ;  il  se  montra 
»  extrêmement  charitable  envers  lespau- 
»  vres,  et  très  zélé  pour  la  réduction  des 
u  sectes  qu'il  eut  le  bonheur  de  réunir 
»  en  grand  nombre  au  centre  de  l'unité.  » 
Un  historien  ecclésiastique,  plus  abon- 
dant que  judicieux  dans  sa  compilation  , 
l'accuse  d'une  ambition  odieuse,  et  d'a- 
voir entretenu  le  schisme  dans  la  seule 
vue  de  maintenir  son  autorité.  Mais  ne 
lui  eût-on  pas  reproché  avec  plus  de  sens 
et  de  justice,  l'imprudence,  la  pusilla- 
nimité, l'abandon  du  devoir,  la  trahison 
même  et  la  prostitution  de  l'épouse  de 
Jésus-Christ,  si  à  l'ordre  de  huit  évêques, 
et  d'un  amas  confus  de  clercs  travestis 
en  successeurs  des  apôtres,  il  fût  descendu 
de  la  chaire  apostolique,  pour  y  élever 
un  intrus  avéré  ?  Eugène  IV  était  natu- 
rellement si  modeste,  qu'en  le  voyant  en 
public ,  on  l'eût  pris ,  dit  un  écrivain  du 
temps,  pour  une  vierge  timide  qui  n'a 
pas  l'assurance  de  lever  les  yeux.  Il  eut 
le  chagrin  de  voir  les  progrès  des  Turcs, 
et  les  suites  funestes  du  conseil  donné  par 
son  légat  àUladislas,  de  rompre  son  traité 
avec  Amurat  II.  Foy.  ce  mot,  et  Césarusi. 


EUG  149- 

EUGÈNE  (S.),  évêque  de  Carthage,  fut 
élevé  sur  ce  siège,  l'an  481 .  H  gouvernait 
cette  église  en  paix,  lorsque  le  roi  Hun- 
neric  ordonna  que  tous  les  évêques  ca- 
tholiques se  trouvassent  à  Carthage,  pour 
y  disputer  avec  les  prélats  ariens.  La  con- 
férence se  tint  en  484  ;  mais  les  ariens  la 
rompirent  sous  de    mauvais   prétextes; 
Hunneric,  leur  partisan,  persécuta  leurs 
adversaires  sous  des  prétextes  encore  plus 
mauvais.  Il  ordonna  aux  évêques  de  jurer 
«  que  leur  désir  était  qu'après  sa  mort , 
»  son  fils  eût  le  trône.  »  La  plupart  des 
évêques  crurent  qu'ils  pouvaient  faire  ce 
serment  ;  les  autres  le  refusèrent.  Hun- 
neric les  condamna  tous  également  :  les 
premiers,  comme  réfractaires  aux    pré_ 
ceptes  de  l'Evangile  qui  défend  de  jurer 
les  autres,  comme  infidèles  à  leur  prince.' 
Il  donna,  peu  de  temps  après,  des  ordres 
pour  rendre  la  persécution  générale.  Un 
grand  nombre  de   vierges  consacrées  à 
Dieu,  furent  cruellement  tourmentées  ;  il 
y  en  eut  plusieurs  qui  expirèrent  sur  le 
chevalet.  Les  évêques,   les  prêtres,  les 
diacres,  les  laïques  distingués  qui  furent 
bannis,  furent  au  nombre  de  4,9G6.  A 
Carthage  on  fit  souffrir  le  tourment  des 
coups  de  fouets  et  des  coups  de  bâton  à 
tout  le  clergé ,  composé  de  plus  de  500 
personnes;  après  quoi  on  les  bannit.  Eu- 
gène fut  du  nombre  des  exilés.  Le  peuple 
suivit  les  évêques  et  les  prêtres  avec  des 
cierges  à  la  main  ;  les  mères  portaient 
leurs  enfans  dans  leurs  bras  ;  puis  les  dé- 
posant aux  pieds  des  confesseurs ,  elles 
leur  disaient,  les  yeux  baignés  de  larmes  : 
«  A  qui  nous  laissez-vous,  en  courant  au 
»  martyre  ?  Qui  baptisera  nos  enfans?  Qui 
w  nous  donnera  la  pénitence  ?  Qui  nous 
»  délivrera  de  nos  péchés  par  le  bienfait 
»  de  la  réconciliation  ?  Qui  nous  enterrera 
»  après  la  mort  ?  Qui  offrira  le  divin  sa- 
»  crifice  avec  les  cérémonies  ordinaires? 
>»  Que  ne  nous  est-il  permis  d'aller  avec 
»  vous  ?  w  Qui  nobis  pœnilentiœ  munus 
collaturi  sunt,  et  reconciliationis  indul- 
gentia  obstrictos  peccatorum  vincuUs 
soluturi  ?  A  quibus  divinis  sacrificiis  ri- 
tus est  exhibendus  consuetus?  Vobiscum. 
et  nos  libeat  pergere,  si  liceret  !  (S.  Vie. 
Vit.,  1.  2,  p.  33).  On  voit  qu'alors  on  ne 


i5o  EUG 

songeait  pas  encore  à  faire  des  évcques 
vonsUfulionnels,  et  que  ni  le  peuple  chré- 
tien ,  ni  même  le  tyran  Hunncric  ne  re- 
gardèrent une  telle  invention  comme  pos- 
sible. Eugène  fut  rappelé  sous  le  règne 
de  Gombaud,  et  exilé  encore  par  Thrasa- 
mond  son  successeur.  On  l'envoya  dans 
les  Gaules.  Eugène,  retiré  à  Albi,  cou- 
ronna par  une  mort  sainte ,  en  505,  une 
vie  aussi  glorieuse  que  traversée.  On  a  de 
lui  une  lettre  dans  Grégoire  de  Tours. 

EUGEiNE,  évêque  de  Tolède,  gouverna 
cette  église  pendant  onze  ans,  et  mourut 
en  64a.  Il  possédait,  assez  bien  pour  son 
temps,  celle  partie  des  mathématiques 
qui  sert  aux  calculs  astronomiques.  (Il 
passait  pour  un  savant  astronome,  il  as- 
sista aux  6%  G«et  7«  conciles  de  Tolède.) 

EUGÈNE,  évêque  de  Tolède,  succes- 
seur du  précédent,  est  auteur  de  quelques 
Traites  de  théologie,  et  de  quelques  o/>u.y- 
ciiles  en  vers  et  en  prose ,  publiés  par  le 
Père  Sirmoiid,  en  161 U,  in-8,  avec  les 
poésies  de  Draconce.  Le  style  d'Eugène 
manque  de  politesse;  mais  les  pensées 
en  sont  justes ,  et  les  sentimens  pieux.  (  H 
avait  voulu  fuir  l'épiscopat  :  mais  sa  re- 
traite fut  découverte,  et  le  roi  Récésuinte 
le  força  d'occuper  le  siège  de  Tolède.  U 
présida  les  8%  9"=  et  1 0«  conciles  de  Tolède, 
633-656.  ) 

EUGENE,  homme  obscur,  qui  avait 
commencé  par  enseigner  la  grammaire 
et  la  rhétorique,  fut  salué  empereur  à 
Vienne  en  Dauphiné,  par  le  comte  Arbo- 
gaste ,  gaulois  de  naissance,  après  la  mort 
du  jeune  Valentinien,  l'an  31)2.  U  se  dé- 
clara pour  le  paganisme,  conduisit  son 
armée  sur  le  Rhin,  fit  la  paix  avec  les  pe- 
tits rois  des  Francs  et  des  Allemands,  et, 
ayant  passé  les  Alpes,  s'empara  de  Milan. 
Enfin  ce  ridicule  usurpateur  fut  vaincu 
et  tué  le  6  septembre  394  ,  par  ordre  de 
l'empereur  Théodose,  qui  le  fit  décapiter 
sur  le  champ  de  bataille.  Eugène  avait 
régné  plutôt  en  esclave  qu'en  prince.  Ar- 
bogaste  ne  l'avait  tiré  de  la  place  de  maî- 
tre du  palais  qu'il  occupait,  pour  le  pla- 
cer sur  le  trône,  que  dans  l'espérance  de 
régner  sous  son  nom.  En  effet,  Eugène  lui 
abandonna  entièrement  le  soin  du  gou- 
vernement et  le  commandement  des  tiou- 


EUG 

pesi,  et  ne  fut  qu'un  fantôme  d'empe- 
reur. 

EUGÈNE  (François-Eugène  de  Savoie, 
plus  connu  sous  le  nom  de  prince),  gé- 
néralissime des  armées  de  l'empereur , 
naquit  à  Paris  eu  1663  ,  d'Eugène-Mau- 
rice, comte  de  Soissons,  et  d'Olympe 
Mancini ,  nièce  du  cardinal  Mazarin.  11 
était  arrière-petit-fils  de  Charles-Emma- 
nuel ,  duc  de  Savoie.  Il  porta  quelque 
temps  le  petit  collet  sous  le  nom  de  Vab- 
be'de  Carignan,  et  le  quitta  ensuite  pour 
le  service  militaire.  Cet  homme,  si  dan- 
gereux depuis  à  Louis  XIV,  ne  parut  pas 
pouvoir  l'être  dans  sa  jeunesse.  Le  roi,  le 
jugeant  peu  propre  aux  fatigues  de  la 
guerre,  lui  refusa  un  régiment.  Le  prince 
fut  piqué  de  ce  refus;  il  protesta  devant 
plusieurs  de  ses  amis,  qu'il  irait  servir  ail- 
leurs, et  qu'il  ne  reviendrait  en  France 
que  les  armes  à  la  main.  En  effet,  Eugène 
alla  servir  en  Allemagne  contre  les  Turcs 
en  qualité  de  volontaire,  avec  les  princes 
de  Conti,  en  1683.  Les  prodiges  de  valeur 
qu'il  fit  dans  cette  campagne,  lui  méritè- 
rent un  régiment  de  dragons.  L'empereur 
se  félicitait  d'avoir  acquis  un  tel  homme. 
Le  prince  Eugène  avait  toutes  les  qualités 
propres  à  le  faire  devenir  ce  qu'il  devint  : 
il  joignait  à  une  grande  profondeur  de 
desseins,  une  vivacité  prompte  dans  l'exé- 
cution. Ses  talens  parurent  avec  beau- 
coup plus  d'éclat  après  la  levée  du  siège 
de  Vienne.  L'empereur  l'employa  en  Hon- 
grie sous  les  ordres  de  Charles  V,  duc  de 
Lorraine,  et  de  Maximilien-Emmanuel , 
duc  de  Bavière.  En  1691,  il  parut  sur  un 
nouveau  théâtre.  Il  délivra  Coni,  que  le 
marquis  de  Bulonde,  subalterne  du  ma- 
réchal de  Catinat ,  tenait  assiégé  depuis 
onze  jours.  U  investit  ensuite  Carma- 
gnole ,  et  le  prit  après  quinze  jours  de 
tranchée.  Sa  valeur  fut  récompensée  en 
1697  par  le  commandement  de  l'armée 
impériale.  Le  1 1  septembre  de  cette  an- 
née, il  remporta  la  victoire  de  Zcnta,  fa- 
meuse par  la  mort  du  grand-visir ,  de  17 
bâchas,  de  plus  de  vingt  mille  Turcs,  et 
par  la  présence  du  grand-.seigneur.  Celle 
journée  abaissa  l'orgueil  ottoman,  et  pro- 
cura la  paix  de  Carlowitz ,  oii  les  Turcs 
reçurent  la  loi.  Toute  l'Europe  applaudit 


EUG 

à  celte  victoire,  eicepté  les  ennemis  per- 
sonnels d'Eugène.  Il  en  avait  plusieurs  à 
la  cour  de  Vienne.  Jaloux  de  la  gloire  qu'il 
allait  acquérir,  ils  lui  avaient  fait  envoyer 
nne  défense  formelle  d'engager  une  ac- 
tion générale.  Ses  succès  augmentèrent 
leur  fureur;  et  il  ne  fut  pas  plus  tôt  arrivé 
à  Vienne  qu'on  le  mit  aux  arrêts  et  qu'on 
lui  demanda  son  épée.  «  La  voilà  ,  dit  ce 
»  héros,  puisque  l'empereur  la  demande  ; 
»  elle  est  encore  fumante  du  sang  de  ses 
>)  ennemis.  Je  consens  de  ne  plus  la  re- 
}>  prendre,  si  je  ne  puis  continuer  à  l'em- 
»  ployer  pour  son  service.  »  Celte  géné- 
rosité touclia  tellement  Léopold,  qu'il 
donna  à  Eugène  un  écrit  qui  l'autorisait 
à  se  conduire  comme  il  le  jugerait  à  pro- 
pos, sans  qu'il  pût  jamais  être  recherché. 
La  chrétienté  fut  tranquille  et  heureuse 
après  la  paix  de  Carlowitz  ;  mais  ce  ne 
fut  que  pour  quelques  années.  La  succes- 
sion à  la  monarchie  d'Espagne  alluma 
bientôt  une  nouvelle  guerre.  Eugène  pé- 
nétra en  Italie  par  les  gorges  du  Tirol , 
avec  trente  mille  hommes ,  et  la  liberté 
entière  des'en  servir  comme  ilvoudrait.il 
amusa  les  généraux  français  par  des  fein- 
tes, et  força  le  9  juillet  1701,  le  poste  de 
Carpi ,  après  5  heures  d'un  combat  san- 
glant. Ce  succès  rendit  l'armée  allemande 
maîtresse  du  pays  entre  l'Âdige  et  l'Adda; 
elle  pénétra  dans  le  Bressan,  et  le  maré- 
chal de  Câlinât ,  qui  commandait  l'ar- 
mée française,  recula  jusque  derrière  l'O- 
glio.  Le  maréchal  de  Villeroi  vint  lui  ôter 
le  bâton  de  commandement,  et  fut  encore 
moins  heureux;  il  passa  l'Oglio  pour  at- 
taquer Chiari ,  dans  le  duché  de  Modène. 
Le  prince  Eugène,  retranché  devant  ce 
poste  rempli  d'infanterie,  battit  le  géné- 
ral français ,  et  le  contraignit  d'abandon- 
ner presque  tout  le  Mantouan.  La  cam- 
pagne finit  par  la  prise  de  La  Mirandole, 
le  22  décembre  1701.  Au  cœur  de  l'hiver 
de  l'année  suivante ,  tandis  que  Villeroi 
dormait  tranquillement  dans  Crémone , 
Eugène  pénètre  dans  cette  ville  par  un 
égoût ,  et  le  fait  prisonnier.  Son  activité 
et  sa  prudence,  jointes  à  la  négligence  du 
gouverneur,  Uiiavaientdonné  cette  place; 
le  hasard  cl  la  valeur  des  Français  et  des 
Irlandais  la  lui  olèrent.  Il  fut  contraint  de 


fXG  i5j 

se  retirer  le  soir  du  1  *■■  février,  après  avoir 
combattu  tout  le  jour  en  héros.  Le  duc 
de  Vendôme ,  rais  à  la  place  de  Villeroi, 
se  signala  le  1 5  août  à  Luzzara.  Cette  ba- 
taille, douteuse  en  elle-même,  et  pour 
laquelle  on  chanta  le  Te  Deitm  à  Vienne 
et  à  Paris  ,  parut  se  déclarer  pour  la 
France,  par  la  prise  de  Guastalla  et  de 
quelques  villes  voisines.  Le  prince  Eu- 
gène quitta  l'Italie  pour  passer  en  Alle- 
magne ;  il  n'avait  pas  remporté  de  victoire 
contre  Vendôme;  mais  il  laissait  les  trou- 
pes en  bon  ordre.  L'empereur  se  l'atta- 
cha par  de  nouvelles  grâces;  il  le  nomma 
président  du  conseil  de  guerre,  et  admi- 
nistrateur de  la  caisse  militaire.  Le  com- 
mandement des  armées  d'Allemagne  lui 
fut  confié.  Eugène,  Marlborough  et  Hcin- 
sius,  maîtres  en  quelque  sorte  de  l'em- 
pire ,  de  l'Angleterre  et  de  la  Hollande , 
étroitement  unis  par  l'esprit  et  par  le 
cœur,  formèrent  une  espèce  de  triumvirat 
fatal  à  la  France  et  à  l'Espagne.  Les  deux 
premiers  gagnèrent  en  17  04  la  bataille  de 
Hochstet ,  livrée  assez  mal  à  propos  par 
l'électeur  de  Bavière ,  secondé  du  maré- 
chal de  Tallard.  Celle  victoire  fut  décisive 
et  changea  la  face  des  affaires.  Plus  de  la 
moitié  de  l'armée  française  et  bavaroise 
fut  détruite;  le  reste  regagna  avec  peine 
les  bords  du  Rhin,  abandonnant  toutes  les 
villes  de  la  Bavière  et  de  la  Souabe.  De 
retour  en  Italie,  l'an  1705,  Eugène  com- 
battit le  duc  de  Vendôme  à  la  journée  de 
Cassano,  près  de  l'Adda  :  journée  san- 
glante, dont  les  deux  partis  s'attribuèrent 
la  gloire.  L'armée  française  ayant  assiégé 
Turin  l'année  d'après,  Eugène  vola  à  son 
secours.  Il  passe  le  Tanaro  aux  yeux  du 
duc  d'Orléans,  après  avoir  passé  le  Pô  à  la 
vue  de  Vendôme.  Il  prend  Correggio , 
Reggio  ;  il  dérobe  une  marche  aux  Fran- 
çais, les  force  dans  leurs  lignes  ,  et  leur 
fait  lever  le  siège.  Après  avoir  délivré 
Turin  et  battu  les  Français ,  il  fit  rentrer 
le  Milanais  sous  l'obéissance  de  l'empe- 
reur ,  qui  lui  en  donna  le  gouvernement. 
La  fortune  continua  de  lui  être  favorable 
en  1707.  Les  troupes  françaises  et  espa- 
gnoles évacuèrent  la  Lombardie  ;  le  géné- 
ral Daun  s'empara  du  royaume  de  Naples. 
Eugène  pénétra  peu  de  temps  après  en 


1 5i  EUG 

Provence  et  en  Dauphiné  par  le  Col  de 
Tende.  Cette  invasion,  heureuse  au  com- 
mencement ,  finit  comme  toutes  les  inva- 
sions faites  dans  ces  provinces.  On  avait 
mis  le  siège  devant  Toulon  ;  on  fut  oblii^é 
de  le  lever.  La  Provence  fut  bientôt  déli- 
vrée, et  le  Dauphiné  sans  danger.  La  prise 
de  Suze  fut  tout  le  fruit  de  cette  campa- 
gne. Le  prince  Eugène,  ayant  passé  en 

17 08  des  bords  du  Var  aux  bords  de  l'Es- 
caut, mit  en  déroute  les  Français  au  san- 
glant combat  d'Oudenarde ,  le  1 1  juillet. 
Ce  n'était  pas  une  grande  bataille,  dit  un 
auteur ,  mais  ce  fut  pour  les  Français  une 
fatale  retraite.  Le  vainqueur ,  maître  du 
terrain,  mit  le  siège  devant  Lille ,  défen- 
due par  Bouflers.  Celte  ville  ,  si  bien  for- 
tifiée ,  se  rendit  après  une  défense  de  4 
mois.  Il  dut  en  partie  son  succès  au  dé- 
couragement des  généraux  français  :  aus- 
si ,  dans  un  âge  plus  avancé,  il  rejetait 
les  louanges  qu'on  lui  donnait  sur  cette 
entreprise,  trop  téméraire  dans  le  projet, 
pour  être  glorieuse  dans  l'exécution. 
Cette  conquête  fut  suivie  de  la  batiiille 
de  Malplaquet ,  gagnée  le  10  septembre 

1709  ,  sur  les  maréchaux  de  Villars  et  de 
Bouflers,  qui  lui  disputèrent  long-temps 
Ja  victoire.  Marlborongh  ayant  été  dis- 
gracié ,  Eugène  passa  à  Londres  pour  se- 
conder sa  faction  ;  mais  ce  voyage  fut 
inutile,  il  retourna  seul  achever  la  guerre. 
C'était  un  nouvel  aiguillon  pour  lui  d'es- 
pérer de  nouvelles  victoires ,  sans  com- 
pagnon qui  en  partageât  l'honneur.  Il 
prit  la  ville  du  Quesnoy  en  1712  ,  et 
étendit  dans  le  pays  une  armée  d'environ 
100,000  combattans.  Quoique  privé  des 
Anglais ,  il  était  supérieur  de  20,000 
hommes  aux  Français  :  il  l'était  surtout 
par  sa  position  ,  par  l'abondance  des  ma- 
gasins ,  et  par  9  ans  de  victoire.  La  Fran- 
ce et  l'Espagne  étaient  dans  l'alarme. 
Une  faute  qu'il  fit  à  Landrecie  qu'il  as- 
siégait ,  les  délivra  de  leurs  inquiétudes. 
Le  dépôt  des  magasins ,  placés  à  Mar- 
cbiennes  ,  était  trop  éloigné  ;  le  général 
Albermale  ,  posté  à  Denain  ,  n'était  pas 
à  portée  d'être  secouru  assez  tôt,  s'il  était 
attaqué.  Il  le  fut.  Le  maréchal  deVillars, 
après  avoir  donné  le  change  au  prince 
Eugène ,  tomba  sur  Albermale ,  et  rcm- 


EUG 

porta  une  victoire  aussi  aisée  qae  oom- 
piète.  Eugène  arrivé  trop  tard ,.  se  relira, 
après  avoir  fait  d'inutiles  efforts.  Quel- 
ques jours  auparavant  il  avait  voulu  rap- 
procher ses  magasins;  mais  par  une  éco- 
nomie mal  entendue ,  les  députés  des 
Hollandais  s'y  opposèrent.  Cet  événement 
amena  la  paix.  Eugène  et  Villars ,  héros 
au  champ  de  bataille ,  excellens  négo- 
ciateurs dans  le  cabinet,  la  conclurent 
le  6  mai  1 7 1 4 ,  à  Rastadt ,  et  elle  fut  sui- 
vie du  traité  de  Baden  en  Argaw.  La  puis- 
sance ottomane ,  qui  aurait  pu  attaquer 
l'Allemagne  pendant  la  longue  guerre  de 
1701  ,  attendit  la  conclusion  totale  de  la 
paix  générale.  Le  grand-visir  Ali  parut 
sur  les  frontières  de  l'empire  avec  160,000 
Turcs ,  Eugène  le  battit  en  1716,  à  Pé- 
terwaradin ,  et  s'empara  de  Témeswar. 
En  1717,  il  entreprit  le  siège  de  Belgra- 
de ;  les  ennemis  vinrent  l'assiéger  dans 
son  camp;  et  non  contens  de  le  bloquer, 
ils  avancèrent  à  lui  par  des  approches  et 
des  tranchées.  Le  prince  Eugène ,  après 
leur  avoir  laissé  passer  un  ruisseau  qui 
les  séparait  de  son  camp  ,  sortit  de  ses 
retranchemens ,  les  défit  entièrement, 
leur  tua  plus  de  20,000  hommes ,  et  s'em- 
para de  leurs  canons  et  leurs  bagages. 
Belgrade  n'ayant  plus  de  secours  à  espé- 
rer, se  rendit  au  vainqueur.  Une  paix 
avantageuse  fut  le  fruit  de  ses  victoires. 
Couvert  de  gloire,  il  retourna  à  Vienne  , 
où  ses  ennemis  voulaient  lui  faire  faire 
son  procès ,  pour  avoir  hasardé  l'état 
qu'il  avait  sauvé  et  dont  il  avait  reculé 
les  frontières.  La  double  élection  faite  en 
Pologne  ayant  rallumé  la  guerre  en  1733, 
le  prince  Eugène  eut  le  commandement 
de  l'armée  sur  le  Rhin.  Les  Français  pri- 
rent Philisbourg  à  sa  vue.  Il  n'y  avait 
plus  dans  l'armée  impériale  que  l'ombre 
du  prince  Eugène  :  il  avait  survécu  à  lui- 
même,  et  il<;raignait  d'exposer  sa  répu- 
tation si  solidement  établie ,  au  hasard 
d'une  dix-huitième  bataille.  Il  mourut 
subitement  à  Vienne  en  17  36,  regretté 
de  l'empereur  et  des  soldats.  Les  mai 
heurs  de  l'année  suivante  ne  justifièrent 
que  trop  ces  regrets.  L'empereur ,  qui 
lui  devait  la  gloire  de  son  règne,  disait 
au  milieu  des  pertes  qui  suivirent  sa 


EUG 

mort  :  La  fortune  de  l'état  est-elle  morte 
avec  ce  héros  ?  Le  prince  Eugène  fut  le 
plus  beiireux  général  et  le  plus  habile 
ministre,  que  la  maison  d'xVutriche  eût 
eu  depuis  plusieurs  siècles.  Tl  avait  un 
esprit  plein  de  justesse  et  d'élévation, 
les  qualités  et  le  courage  nécessaires  pour 
triompher  des  capitaines  les  plus  expé- 
rimentés. S'il  échoua  quelquefois  dans 
ses  entreprises  ,  les  circonstances  qui  les 
lui  firent  manquer  lui  valurent  de  [nou- 
veaux éloges.  Il  n'était  pas  toujours  le 
maître  de  faire  ce  qu'il  voulait.  Un  de 
ses  amis  lui  demanda  un  jour ,  pendant 
la  longue  guerre  pour  la  succession 
d'Espagne ,  la  cause  de  la  profonde  rêve- 
rie où  il  le  voyait  plongé.  «  Je  fais  ré- 
w  flexion ,  dit-il ,  que  si  Alexandre  le 
»)  Grand  avait  été  obligé  d'avoir  l'appro- 
»  bation  des  députés  de  Hollande  pour 
•)  exécuter  ses  projets  ,  ses  conquêtes 
»  n'auraient  pas  été  à  beaucoup  près  si 

»  rapides »  Le  courage  n'était  pas  la 

seule  qualité  du  prince  Eugène.  Les  trai- 
tés de  Rastadt  et  de  Passarowitz  ont  au- 
tant immortalisé  son  nom  que  ses  victoi- 
res. Il  était  le  père  des  soldats  et  le  mo- 
dèle des  ministres,  philosophe,  doux, 
humain  ,  bienfaisant  ,  sans  orgueil  ,  sans 
dédain ,  sans  faste  ,  et  d'une  générosité 
peu  commune.  Son  attachement  à  la  re- 
ligion était  aussi  solide  que  sincère.  Il 
portait  avec  lui ,  au  milieu  de  ses  opéra- 
tions militaires,  le  petit,  mais  le  précieux 
livre  de  l Imitation  de  Je'sus-Christ ,  et 
le  lisait  dans  des  momens  de  calme  et  de 
réflexion.  Quoique  froid  et  réservé,  il 
était  sensible  aux  charmes  de  l'amitié.  Il 
cultiva  les  lettres  dans  le  cours  de  ses 
victoires ,  et  les  protégea  dans  le  cours 
de  son  ministère.  Tous  les  beaux  arts 
avaient  des  attraits  pour  lui.  «  De  trois 
»  empereurs  qu'il  avait  servi,  le  premier, 
»  Léopold,  avait  été ,  disait-il ,  son  père, 
»  parce  qu'il  avait  eu  soin  de  sa  fortune 
»  comme  de  celle  de  son  propre  fils  ;  le 
»  second,  Joseph ,  son  frère,  parce  qu'il 
w  l'avait  aimé  comme  un  frère  ;  le  troisiè- 
)>  me  Charles  VI ,  son  maître,  parce  qu'il 
w  l'avait  récompensé  en  roi.  «  Ses  Ba- 
tailles ont  été  imprimées  en  deux  vol. 
in-fol. ,  auxquels  on  a  joint  un  supplé- 

V. 


EUG 


i53 


ment.  On  peut  aussi  voir  Yllistoire  du 
prince  Eugène ,  imprimée  à  Vienne  en 
17  70,  en  5  vol.  in-12.  Elle  offre  quelques 
particularités  curieuses,  quoiqu'elle  ne 
soit  très  souvent  qu'une  compilation  de 
gazettes  ,  et  que  l'auteur  ,  calviniste  ré- 
fugié ,  donne  quelquefois  l'essor  aux  pré- 
jugés de  sa  secte. 

*  EUGENE  ou  EuGKsios  Bclcasis  ,  sa- 
vant prélat  grec ,  né  à  Corfou  en  1710, 
professa  la  philosophie  dans  les  collèges 
les  plus  célèbres  de  sa  nation  ,  et  visita 
les  universités  d'Italie.  En  1767,  ayant 
éprouvé  quelques  désagrémens  à  Con- 
stantinople ,  il  passa  en  Allemagne ,  et  il 
employa  son  séjour  à  Leipsick  à  se  per- 
fectionner dans  les  mathématiques  sous 
Segner,  dont  il  traduisit  les  Elemens  de 
mathématiques  en  grec  ancien.  Il  donna 
aussi  une  édition  des  OEuvres  de  Joseph 
de  Brienne ,  et  fit  imprimer  plusieurs  de 
ses  ouvrages ,  particulièrement  sa  Logi- 
que ,  dont  il  s'était  répandu  plusieurs  co- 
pies tronquées  ou  inexactes.  Sa  réputa- 
tion étant  parvenue  jusqu'en  Russie , 
l'impératrice  Catherine  II  l'appela  auprès 
d'elle,  et  le  nomma  en  1776  à  l'arche- 
vêché de  Slavinie  et  de  Cherson,  qui 
venait  d'être  créé.  Il  résigna  cette  di- 
gnité en  1779,  en  faveur  de  Nicéphore 
Théotoki ,  et  mourut  à  St.-Pétersbourg  en 
1 80G.  (  Il  possédait  le  latin,  le  grec  ,  l'hé- 
breu et  presque  toutes  les  langues  de  l'Eu- 
rope. )  On  a  de  lui ,  outre  les  ouvrages  que 
nous  avons  cités,  1°  un  Traité  historique 
de  1(1  dispute  sur  Vémanation  du  St.-Es- 
prit ,  et  un  Examen  de  la  logique  de  Ni- 
céphore  Blemmidès ,  insérés  dans  l'édi- 
tion des  OEuvres  de  Joseph  de  Bryenne. 
2°  Opinion  des  philosophes ,  ou  Elemens 
de  philosophie  naturelle  ,  Vienne ,  1 804  , 
in-4.  3"  Une  traduction  des  Questions 
théologiques  d' AdamZarnicevius  contre 
les  sentimens  de  V église  latine,  avec  des 
notes ,  Moscou ,  2  vol.  in-fol.  4"  Amuse- 
mens  théologiques ,  en  grec  moderne , 
Moscou,  2  vol.  in-8.  5°  Aperçu  compa- 
ratif  des  trois  systèmes'  d'astronomie  ^ 
Venise,  in-4,  aussi  en  grec  moderne.  6°  Plu- 
sieurs traductions  d'ouvrages  de  mathé- 
matiques ,  de  géométrie ,  de  métaphysi- 
que ,  en  grec  moderne.  7°  Une  traduc-^ 


i54  EUL 

tion  en  vers  grecs  héroïques  de  V Enéide 
et  des  Ge'orgiques  de  p^irgile ,  St.-1'clers- 
bourg,  4  vol.  in-fol". 

EUGIPPIUS  ,  originaire  de  la  Nori- 
que  ,  suivit  sa  nation  lorsqu'Odoacre  la 
transféra  en  Italie  l'an  488  ;  il  y  fut  abbé 
de  Lucullano ,  près  de  N'aples.  Il  est  au- 
teur 1°  du  Thésaurus  ex  S.  Auguslino, 
in-fo). ,  Bàle,  1642.  2°  D'une  Fie  de  S. 
Augustin  de  Favinnes ,  insérée  dans  Bol- 
landus.  3°  D'une  Fie  de  S.  SeWrin,  apô- 
tre de  la  Norique ,  insérée  dans  les  OEu- 
vres  de  Marc  Velser.  La  l'ègle  qu'il  avait 
donnée  à  ses  moines  est  perdue. 

EULALIE  (  Sainte  )  naquit  à  Mérida  , 
capitale  de  la  Lusitanie  en  Espagne ,  fut 
élevée  dans  la  religion  chrétienne ,  et  fit 
paraître  dès  son  enfance  une  admirable 
douceur  de  caractère,  une  modestie  rare, 
une  tendre  piété  ,   et  un  grand   amour 
pour  l'état  de  virginité.  Elle  n'avait  que 
douze  ans ,  lorsque  parurent  les  édits  de 
Dioclétien,  par  lesquels  il  était  ordonné 
à  tous  les  chrétiens  de  sacrifier  aux  dieux. 
Malgré  sa  jeunesse ,  elle  regarda  la  publi- 
cation de  ces  édits  comme  le  signal  du 
combat ,  et  se  présenta  d'abord  au  juge 
pour  lui  reprocher  l'impiété  dont  il  se 
rendait  coupable,  en  voulant  faire  abju- 
rer la  seule  vraie  religion.  Le  juge  nom- 
mé Dacien  la  fit  arrêter ,  et  après  avoir 
employé  inutilement  tous  les  moyens  de 
séduction,  il  en  vint  aux  menaces,  fit 
exposer  à  ses  yeux  les  instrumcns  destinés 
à  la  tourmenter ,  et  lui  dit  qu'elle  ne  su- 
birait aucune   torture ,    si   elle  vcAilait 
■   prendre  seulement  du  bout  du  doigt  un 
peu  de  sel  et  d'encens.    Eulalie,  pour 
montrer  qu'elle  ne  se  laisserait  pas  sédui- 
re ,  renversa  l'idole  et  foula  aux  pieds  le 
gâteau  destiné  pour  le   sacrifice.  Ce  fut 
alors  que  deux  bourreaux,  par  ordre  du 
juge,  lui  déchirèrent  les  côtés  avec  des 
crocs  de  fer ,  et  lui  découvrirent  tous  les 
os.  Elle  appelait  trophées  de  Jésus-Christ, 
les  plaies  qu'on  lui  faisait.  On  lui  appli- 
qua ensuite  des  torches  ardentes  sur  la 
poitrine  et  sur  les  côtés.  Elle  souftVil  cette 
torture  sans  se  plaindre,  et  elle  n'ouvrit 
la  bouche  que  pour  louer  le  Seigneur. 
Le  feu  ayant  pris  à  ses  cheveux ,  elle  fut 
étouffée  par  la  fumée  et  par  la  flamme. 


EUL 

Les  chrétiens  L'enterrèrent  près  du  lieu 
de  son  martyre ,  et  on  y  bâtit  depuis  une 
magnifique  église.  Prudence  a  célébré  le 
triomphe  de  cette  sainte.  —  Il  ne  faut 
pas  la  confondre  avec  une  autre  sainte 
EiTi-ALiiî,  viergeet  martyre  de  Barcelonne, 
sous  l'empire  de  Dioclétien ,  dont  le  nom 
est  plus  connu  que  le  détail  de  ses  ac- 
tions et  de  ses  souffrances. 

EULALIUS  ,  antipape,  qu'une  cabale 
opposa  au  pape  Boniface  I  en  4 1 8  ,  et  que 
l'empereur  Ilonorius  fit  chasser  comme 
un  intrus. 

EULER.  (  Léonard  ) ,  professeur   de 
mathématiques,    membre   de^  plusieurs 
académies  ,  naquit  en  1707  à  Bâie ,  où  il 
s'appliqua  avec  succès  à  la  philosophie 
et  à  l'étude  des  langues  orientales  :  ses 
progrès  dans  les  sciences   lui  acquirent 
l'estime  de  Jean  Bernouilli.  Les  fils  de 
cet  habile  géomètre  l'invitèrent  à  se  rendre 
à  St.-Pétersbourg,  oîi  ils  avaient  été  ap- 
pelés eux-mêmes  en  1725.   Euler  y  rem- 
plit successivement  les  chaires  de  pro- 
fesseur de  physique  et  de  mathématiques, 
perfectionna  le  calcul  intégral,  inventa 
le  calcul  des  sinus,  simplifia  les  opéra- 
tions analytiques ,  et  répandit  un  nou- 
veau jour  sur  toutes  les  parties  des  scien- 
ces mathématiques.  En  1741  ,  il  se  rendit 
à  Berlin ,  contribua  beaucoup  à  donner 
du  lustre  à  l'académie  naissante  ,  et  re- 
.  tourna  en  176G  à  St.-Pétersbourg,  où  il 
perdit  la  vue,  sans  que  cela  l'empêchât 
de  travailler  et  d'enrichir  le  public  de 
ses  productions.  Il  mourut  le  7  septembre 
1783.   Peu   de   géomètres  ont  embrassé 
tant  d'objets  à  la  fois,  et  les  ont  traités 
avec  plus  de  succès.  On  a  de  lui  un  grand 
nombre  d'ouvrages;  1°  une  Dissertation 
sur  la  nature  et  la  propagation  du  son, 
en  latin,  Bâle ,  1727  ,  in-4.  2°  ....sur  la 
mâture  des  vaisseaux ,  que  l'académie 
de  Paris  honora  de  l'accessit  en  1727. 
3"   Mechanica,    sive  motus   scientia, 
anahjtice    exposita ,    St.-Pétersbourg, 
1 736  ,  2  vol.  in-4.  4"  Mémoire  sur  la  na- 
ture et  les  propriétés  du  feu  ,  couronné 
par  l'académie  de  Paris  en  1738.  6°  Ten- 
tamen    novce  Iheoriœ  musicte ,  St.-Pé-i 
tersbourg,  1739,  in-4.  Q'^  Mémoire  sur  le 
flux  et  le  reflux  de  la  mer ,  couronne 


EUL 

parla  même  académie  en  1740.  Il  y  expli- 
que l'action  du  soleil  et  de  la  lune  sur  la 
mer ,  et  appuie  son  explication  de  beau- 
coup de  géométrie  et  de  calculs  :  ce  qui 
n'a  point  empêché  plusieurs  sa  vans  de  la 
regarder  comme  peu  satisfaisante.  C'est 
une  chose  singulière  que  l'extrême  va- 
rrété  et  le  peu  de  consistance  des  opi- 
nions établies  à  ce  sujet.  Descartes  qui 
attribue  ce  phénomène  à  la  pression  de 
l'air  ,  Newton  qui  en  fait  honneur  à  l'at- 
traction ,  sont  au  pied  du  mur  quand  on 
objecte  que  les  marées  sont  plus  hautes 
sous  les  zones  tempéi'éesque  sous  la  zone 
lorridc  ;  et  surtout  quand  on  leur  fait  ob- 
server que  le  baromètre  ne  monte  ni  ne 
baisse  lorsque  la  lune  passe  au  méridien. 
Aussi  Galilée  se  moquait-il  amèrement 
de  Kepler  qui,  avant  Newton,  avait  rap- 
porté ce  phénomène  à  la  lune  ;  mais  par 
un  raisonnement  plus  étrange  encore , 
il  le  fit  dériver  du  mouvement  de  la  terre. 
Un  physicien  de  ce  siècle  a  eu  recours  à 
la  dilatation  de  l'air ,  produite  par  l'ac- 
tion du  soleil  ;  un  autre  à  la  fonte  des 
glaces  polaires  ;  on  a  imaginé  des  gouf- 
fres qui  absorbaient  et  levomissaient  les 
eaux  alternativement ,  etc.  Le  doute  et 
l'indécision  d'un  vieux  poète  sont  peut- 
être  plus  raisonnables  que  tout  cela  : 

Quœrile ,  qups  agitât  mundi  labor  :  at  mihi  sempcr 
Tu ,  qusrcuinque  nioves  tara  crebros  ,  causa,  mcatus , 
Ct  tuperi  Toluere ,  laie. 

Lcr.is.  Pam.  ,  1.  i. 

«  Je  ne  sais ,  dit  un  philosophe ,  si  l'on 
j>  saisit  assez  l'énergie  de  cet  ut  superi 
»  volucre.  Quand  on  songe  que  depuis 
»  Lucain  ,  on  n'a  rien  dit  de  plus  raison- 
.  »  nable  sur  cet  objet,  que  les  physiciens 
»  de  son  temps  ;  quand  on  réfléchit  d'un 
j»  autre  côté  que  c'est  un  objet  visible, 
»  palpable,  immense,  se  renouvelant  deux 
»  fois  par  jour,  dans  toute  l'étendue  des 
>»  deux  hémisphères ,  observé  de  près  par 
"  500  raillions  d'hommes  ,  l'espace  de  5 
»  à  6  mille  ans  ;  on  comprend  ou  du 
»  moins  l'on  peut  comprendre  alors  toute 
»  la  vérité  de  cet  ut  superi  -voluere.  » 
3"  Mcthodus  invcniendi  lineas  curvas 
jnnximi,  minimive  proprietnte  gauden- 
tes,  Lausanne,  1744,  in-4.  %°  Introdiictio 
inanalysin.  infinitorum,  Lausanne,  1744, 


EUL  ï55 

et  Lyon  ,  1 796  ,  traduite  en  français  avec 
des  notes,   par  Labey,   2  vol.   in  4.  9' 
Theoria  motuum  planetarum  et  come- 
tarum,  Berlin,  1744,  in-4.  10"  Opuscula 
rmrii argumeniijUerVm,  174G,  3  vol.  in-4. 
1  \°Sciejitia  navalis,  seu  tractât  us  de  con- 
struendis  ne  dirigendis  navibus,  Saint- 
Pétersbourg  ,1749,2  vol.  in-4.  12°  Theo- 
ria motus  lunœ  ,  Berlin,  17'i3  ,  in-4.  13° 
Disscrlatio  de  principio  miiiimœ  actio- 
nis ,  una  cum  examine  ohjcctionum  Koe~ 
«/(//i,  Berlin  ,    17  53,  in-4.   \¥>  Institu- 
tiones  calcuU  differentialis  cum  ejus  usu 
in  analysi  infinitorum  ac  docirinâ  se- 
rierum,  1755,  in-4,  1787  et  1804,  2  vol. 
in-4.    15°   Constructio  lenlium  objecti- 
varum  ,  etc.,  Saint-Pétersbourg,  17G2, 
in-4.  16°  Meditationes  de  perturbatione 
motus  conietarum  ,  ab  attrnctionc  pla- 
netarum orta  ,  St.-Pétersbourg,    l'i62, 
in-4.  17°  Theoria  motus  corporum  soli" 
dorum  seu  rigidorum  ,    1765,  in-4.   18° 
Instilutiones  calculi  integralis ,   St.-Pé- 
lersbourg,  1768,  3  vol.  in-4,   1792,   4 
vol.  in-4.  19°  Dioptrica,    1769,   3  vol. 
in-i.  20"  Opuscula  analyiica,   1783,   2 
vol.  in-4.  21°  Cinq  Mémoires  sur  diffé- 
rentes questions  de  mathématiques  ,  dans 
les  Me'langes  de  Berlin  ;  c'est  peut-être 
ce  qu'il  y  a  de  mieux  dans  cette  collec- 
tion.  22°  Plusieurs  Dissertations  dans 
les  mémoires  des  académies  de  St.-Pé- 
lersbourg  et  de  Berlin.  23°  Ele'mens  rf'rtZ- 
grè^re,  en  allemand.  Cet  ouvrage,  qu'il 
fit  étant  aveugle  ,  a  été  traduit  en  français 
et  en  russe  ;  il  est  écrit  avec  clarté  et 
méthode.  La  traduction  française  qui  est 
de  M.  Bernouilli ,  avec  des  notes  par  La- 
grange  et  Garnier,  a  été  réimprimée  plu- 
sieurs fois.   La  dernière  édition  est  de 
1 807  ,  2  vol.  in-8  ,  fig.  24°  Lettres  à  une 
princesse  d' Allemagne ,  sur  divers  sujets 
de  physique  et  de  philosophie  ,    St.-Pé- 
tersbourg,   1768-72,  et  Berne,  1778,3 
vol.  in-8.  Il  y  attaque  avec  force  le  sys- 
tème de  Newton  sur  les  couleurs,  et  d'au- 
tres opinionsaccréditées.  M.  de  Condorcet 
en  a  donné  une  nouvelle  édition  en  1 787  , 
cil  il  s'est  permis  de  faire  plusieurs  re- 
tranchemens  qui  portent  particulièrement 
sur  les  endroits  de  ses  lettres  les  plus 
favorables  à  la  religion  ,  afin  de  laisser 


i56 


EUL 


ignorer  le  cbristianiside  d'Eulcr  et  sou- 
iagcr  les  incrédules  du  poids  de  son  au- 
torilé  qui  les  accable,  parce  que  l'exemple 
de  cet  illustre  géomètre ,  joint  à  celui  de 
tant  de  savans  du  premier  ordre ,  montre 
avec  évidence  qu'on  peut  allier  la  con- 
viction la  plus  profonde  des  vérités  ré- 
vélées, avec  le  génie  le  plus  pénétrant 
et  les  plus  vastes  connaissances.  Quelle 
honte  pour  des  hommes  si  fiers  de  leurs 
lumières,  d'être  ainsi  réduits  pour  la  dé- 
fense de  leur  cause ,  à  user  de  semblables 
supercheries,  aussi  contraires  à  l'hon- 
nêteté qu'à  la  bonne  foi.  Et  combien  ces 
ruses  indiquent ,  décèlent  le  peu  de  con- 
fiance qu'ils  ont  dans  leurs  moyens  !  Les 
œuvres  d'Euler  ne  sont  pas  les  seules  d'oii 
ils  aient  essayé  de  faire  disparaître  toutes 
les  traces  du  christianisme  ou  de  les  af- 
faiblir ;  celles  de  Liunée ,  de  Kewton  et 
de  Bacon  nouvellement  travesti  en  incré- 
dule ,  en  offrent  des  exemples  aussi  scan- 
daleux. Il  n'y  a  pas  même  jusqu'à  Pascal 
que  Condorcet  n'ait  eu  l'audace  de  dé- 
naturer en  plus  d'une  manière ,  dans  la 
dernière  édition  qu'il  a  donnée  de  ses 
Pensées  (('oyez  Condorcet).  Les  Lettres 
à  une  princesse  d'Allemagne  ont  été  réim- 
primées à  Paris  en  1812,  2  vol.  iu-8,  d'a- 
près la  première  édition ,  avec  des  notes , 
parLabey.  25°  Théorie  complète  de  la  con- 
struction et  de  la  manœuvre  des  vais- 
seaux,  St.-Pétersbourg,  17  73  ,  et  Paris, 
17  76,  in-8  ,  fig. ,  retouchée  pour  le  stile. 
L'homme  en  lui  était  aussi  estimable  que 
le  savant.  Bon  époux ,  bon  père ,  bon 
ami ,  bon  citoyen ,  il  se  montra  constam- 
ment fidèle  à  tous  les  rapports  de  la  so- 
ciété. Ennemi  de  l'injustice ,  s'il  en  voyait 
commettre  quelqu'une ,  il  avait  la  fran- 
chise de  la  censurer  et  le  courage  de  l'at- 
taquer sans  avoir  égard  à  la  personne.  11 
avait  beaucoup  de  respect  pour  la  religion 
et  remplissait  avec  soin  les  devoirs  d'un 
chrétien.  Doux  et  honnête  envers  tout  le 
inonde,  s'il  a  jamais  senti  de  l'indignation, 
ce  n'a  été  qu'envers  les  ennemis  du  chris- 
tianisme dont  il  a  pris  avec  ardeur  la 
défense  contre  les  objections  des  athées , 
dans  un  ouvrage  qu'il  publia  à  Berlin  en 
1747  ,  intitulé  Essai d£  défense  touchant 
la  révélation  divine  contre  les  esprits 


EUM 

forts.  Cet  essai ,  traduit  en  italien  par 
Nicolas  Onérati ,  Naples,  17  88  ,  fait  d'au- 
tant plus  d'honneur  à  ses  principes,  que 
les  prétendus  esprits  forts  contre  lesquels 
il  s'élève ,  dominaient  alors ,  et  donnaient 
le  ton  dans  la  capitale  de  la  Prusse,  oii  il 
faisait  sa  résidence  [voyez  Embry).  Euler 
a  laissé  plusieurs  fils  qui  marchent  sur 
les  traces  de  leur  père ,  entre  autres  J.  H. 
Euler  l'aîné  ,  mort  à  St.-Pétersbourg,  le 
6  septembre  1800,  qui  a  remporté  des 
prix  dans  différentes  académies  ,  et  pu- 
blié un  grand  nombre  de  mémoires  inté- 
ressans  sur  l'astronomie  ,  la  physique,  la 
mécanique  et  l'optique,  dans  les  collec- 
tions académiques  de  Berlin  ,  de  Munich 
et  de  Gotlingue.  Voyez  VEloge  de  Léo- 
nard Euler,  par  Nicolas  Fuss,  son  élève, 
Berlin,  1784,  in-4. 

EU  LOGE ,  pieux  et  savant  patriarche 
d'Alexandrie  en  681  ,  mort  en  607  ,  laissa 
divers  ouvrages  contre  les  novatiens  et 
contre  d'autres  hérétiques  de  son  temps. 
Il  fut  uni  d'une  étroite  amitié  avec  saint 
Grégoire  le  Grand. 

EULOGE  DE  CORDOUE  (Saint), 
prêtre,  élu  archevêque  de  Tolède,  la  même 
année  qu'il  fut  martyrisé  par  les  Sarra- 
sins en  869  ,  fortifia  par  ses  écrits  et  par 
ses  discours  ses  frères  dans  la  foi.  Ceux 
qui  nous  restent  de  lui  sont  1°  Memo- 
riale  sanctorum  ;  c'est  une  histoire  de 
quelques  martyrs.  2°  Libri  très  de  mar- 
tyribus  Cordubcnsibus ,  et  ^pologcticon 
pro  gestis  eorumdem.  3°  Exhortation 
au  martyre  ,  et  plusieurs  lettres.  Ces  ou- 
vrages se  trouvent  dans  le  4*  vol.  de 
VHispania  illuslrata ,  et  dans  la  Biblio- 
thèque  des  Pères. 

EU31E1\ES  de  Cardie,  capitaine  grec , 
l'un  des  plus  dignes  successeurs  d'Alexan- 
dre le  Grand  ,  était  fils  d'un  voiturier.  U 
avait  les  qualités  qui  font  le  héros  dans 
la  guerre  ,  et  l'homme  estimable  dans  la 
paix  ,  et  il  dut  son  élévation  à  ces  quali- 
tés. Alexandre  lui  fit  épouser  la  sœur  de 
Barsine ,  l'une  de  ses  femmes.  Après  la 
mort  de  ce  conquérant ,  Eumènes  acheva 
la  conquête  de  la  Cappadoce  et  de  la  Pa- 
phlagonie ,  et  fut  gouverneur  de  ces  deux 
provinces;  mais  Autigoue  ne  voulut  point 
l'y  laisser  établir.  Se  voyant  sans  res- 


i 


ELM 

source,  il  se  rendit  auprès  de  Perdiccas, 
qui  le  charjïea  de  porter  la  guerre  sur  les 
bords  de  l'Hellcspont,  contre  les  princes 
ligués  contre  lui.  Il  défit  Cratère  et  Néo- 
ptolème,  et  tua  celui-ci  dans  un  combat 
singulier.  Cratère  périt  aussi  dans  le  cours 
de  cette  guerre ,  le  vainqueur  pleura  le 
vaincu,  son  ancien  ami,  lui  rendit  les 
derniers  devoirs ,  et  fit  porter  ses  cendres 
en  Macédoine  à  sa  famille  :  action  de  gé- 
nérosité ,  dont  un  historien  chrétien  se 
charge  avec  plus  de  plaisir ,  que  du  dé- 
tail fatigant  de  tant  de  meurtres  inutiles. 
Eumènes  marcha  ensuite  contre  Antipa- 
ler  ,  le  vainquit  et  s'empara  de  plusieurs 
provinces.  Après  la  mort  de  l'ambitieux 
Perdiccas,  il  eut  à  combattre  Antigone. 
On  donna  une  bataille  à  Orcinium  en 
Cappadoce,  l'an  320  avant  J.  C.  Eumène 
y  fut  vaincu  par  la  trahison  d'Appolo- 
nide,  commandant  de  la  cavalerie.  Le 
traître  fut  pris  et  pendu  sur-le-champ. 
Eumènes,  obligé  d'errer  et  de  fuir  sans 
cesse,  congédia  une  partie  de  ses  troupes, 
et  s'enferma  dans  le  château  de  Nora  sur 
les  frontières  de  la  Cappadoce  et  de  la 
Lycaonie.  Il  y  soutint  un  siège  d'un  an. 
Après  diflerens  succès,  mêlés  de  revers, 
Antigone  tailla  en  pièces  l'arrière-garde 
de  son  ennemi  et  prit  le  bagage  de  son 
armée  ;  c'est  ce  qui  décida  la  victoire  en 
fa  faveur.  Le  vainqueur  fit  dire  aux  offi- 
ciers et  aux  argyraspides ,  phalange  de 
Macédoniens ,  qu'il  leur  rendrait  tout  ce 
qui  leur  appartenait ,  s'ils  lui  livraient 
Eumènes.  Ils  eurent  la  lâcheté  de  recou- 
vrer à  ce  prix  leur  bagage.  L'illustre  in- 
fortuné fut  mis  à  mort  dans  sa  prison  l'an 
315  avant  J.  C.  C'est  l'ambition  qui  com- 
mit ce  meurtre.  Antigone,  autrefois  le 
meilleur  amî  d'Eumènes ,  l'estimait  trop 
pour  ne  pas  le  craindre.  L'armée  du  vain- 
cu étant  sans  chef  fut  bientôt  dissipée. 
Antigone  se  défiant  des  traîtres ,  les  fit 
exterminer. 

EUMEÎNES  I ,  roi  de  Pergame,  succéda 
à  Philéthère  son  oncle  l'an  2C4  avant 
J.  C.  Il  remporta  une  victoire  sur  Antio- 
chus ,  fils  de  Séleucus ,  et  augmenta  ses 
étals  de  plusieurs  villes ,  qu'il  prit  sur  les 
rois  de  Syrie.  Ce  prince  aimait  les  lettres 
et  encore  plus  le  vin.  Il  périt  d'un  ex- 


EUN  iS-j 

ces  en  ce  genre ,  après  22  ans  de  règne. 

EU3IENES  II ,  neveu  du  précédent , 
monta  sur  le  trône  après  Attale  son  père, 
l'an  198  avant  J.  C.  Les  Romains,  dont 
il  cultiva  l'amitié,  augmentèrent  ses  étals, 
après  leur  victoire  sur  Antiochus  le  Grand. 
(  Eumène  ayant  appris  l'alliance  de  Persée 
et  de  Prusias,  en  avertit  les  Piomains. 
Persée  s'en  vengea  en  payant  des  assas- 
sins qui  le  laissèrent  pour  mort.  Attale 
son  frère  croyant  qu'il  avait  cessé  de  vi- 
vre, épousa  sa  femme  et  prit  les  rênes  du 
gouvernement.  Eumènes  se  contenta  de 
lui  dire  quand  il  reparut  dans  son  palais  : 
avant  d'épouser  la  femme  d'un  autre , 
assurez-vous  de  sa  mort.  )  Il  vainquit  Pru- 
sias et  Antigone,  et  mourut  l'an  IfiO  avant 
J.  C.  Ce  prince  protégeait  et  cultivait  les 
lettres  ;  il  augmenta  considérablement  la 
fameuse  bibliothèque  de  Pergame ,  qui 
avait  été  fondée  par  ses  prédécesseurs 
sur  le  modèle  de  celle  d'Alexandrie.  Ses 
frères  Attale ,  Philéthère  et  Athénée  lui 
furent  si  attachés  ,  qu'ils  voulurent  être 
du  nombre  de  ses  gardes. 

EUMÈNES,  orateur,  originaire  d'Athè- 
nes ,  professa  la  rhétorique  avec  beau- 
coup d'éclat  à  Autun  sa  patrie.  Il  y  ra- 
mena le  goût  des  arts  et  de  l'éloquence. 
Constance-Chlore  et  Constantin  son  fils 
lui  donnèrent  des  marques  de  leur  es- 
time. Il  prononça  l'an  309  \e panégyrique 
de  ces  deux  princes.  Son  discours  le  plus 
célèbre  est  celui  dans  lequel  il  tâcha  d'en- 
gager Piiccius  Varus ,  préfet  de  la  Gaule 
Lyonnaise ,  à  rétablir  les  écoles  publi- 
ques, ruinées  par  les  barbares  qui  avaient 
inondé  les  Gaules.  Eumènes  ofl'rit  de  con- 
tribuer à  ce  rétablissement;  il  cédait  une 
année  des  appoinleraens  qu'il  avait  eu 
qualité  d'un  des  premiers  secrétaires  des 
empereurs ,  ce  qui  faisait  une  somme 
considérable.  Ce  rhéteur  mourut  vers  le 
milieu  du  4*  siècle.  Le  Père  de  La  Baune, 
jésuite,  a  recueilli  ce  qui  nous  reste  de 
ses  harangues ,  dans  ses  Panegyrici  ve- 
ieres  ad  usum  Delphini,  1G7G,  in-4. 
Son  slile  se  sent  un  peu  de  la  décadence 
de  la  latinité  ,  et  il  y  a  plus  de  lieux  com- 
muns que  de  pensées. 

EUNAPE,  natif  de  Sardes  en  Lydie, 
sophiste  ,   médecin   et   historien  du  4* 


i58  EUN 

sièc'e  (le  l'ère  chrétienne,  sous  les  rè- 
gnes de  Valenlinien ,  de  Valens  et  de 
(iratifiii,  écrivit  V Histoire  des  Césars, 
dont  Suidas  nous  a  conservé  quelques 
fragmens.  l'.ous  n'avons  de  lui  que  les 
f^ies  des  philosophes  de  son  temps, 
écrites  avec  précision ,  et  avec  assez  de 
netteté  et  d'élégance.  — A.  Junius  en  a 
donné  une  traduction  latine  avec  le  texte 
grec,  159G,  in-8.0n  en  trouve  un  extrait 
dans  les  Ëxcerpla  de  le(/ationil}us,Tavis, 
1648  ,  in-folio,  qui  font  partie  de  la  Bi- 
zantine.  Celte  histoire  des  philosophes 
est  pleine  d'injures,  indignes  de  la  saine 
philosophie.  Le  but  de  l'auteur  parait 
être  de  relever  l'idolâtrie  et  de  rabaisser 
le  christianisme.  Il  exagère  les  vertus  des 
philosophes  puïens ,  et  atténue  celles  des 
solitaires  chrétiens  (voyezZénoTn).  Il  in- 
sulte même  à  leurs  martyres  ;  et  autant 
qu'on  peut  en  juger  par  cet  ouvrage  ,  Eu- 
nape  était  un  de  ces  hommes  passionnés 
qui  couvrent  leurs  emportemcns  du  man- 
teau de  la  sagesse ,  et  qui  ont  sans  cesse 
le  mot  de  philosophie  dans  la  bouche  , 
parce  qu'ils  sentent  qu'ils  ne  l'ont  point 
dans  le  cœur. 

EUJNOME,  célèbre  musicien  de  Lo- 
cres  en  Italie.  Comme  il  disputait  le  prix 
de  son  art  à  un  autre  musicien  ,  une  ci- 
gale vint ,  suivant  la  fable ,  se  poser  sur 
son  luth ,  pour  suppléer  à  une  corde  qui 
s'était  rompue. 

EUNOME ,  Eunomius ,  hérésiarque , 
natif  de  Cappadoce,  d'abord  maître  d'é- 
cole à  Coustantinople,  ensuite  disciple 
d'Aétius ,  parvint  à  l'évèché  de  Cysique 
par  la  protection  d'Eudoxe ,  patriarche 
arien  de  Coustantinople.  Ce  prélat ,  en 
l'ordonnant ,  lui  conseilla  de  cacher  les 
erreurs  qu'il  avait  sucées  auprès  d'Aétius. 
Eunome  ayant  négligé  cet  avis,  et  s'étant 
fait  chef  de  parti,  fut  déposé  parEudoxe 
son  ami ,  et  exilé  en  divers  endroits  ;  il 
mourut  dans  sa  patrie  en  393.  C'était  un 
arien  outré.  11  soutenait  que  Jésus-Christ 
n'était  Dieu  que  de  nom;  qu'il  ne  s'était 
pas  uni  substantiellement  à  l'humanité  , 
mais  seulement  par  sa  vertu  et  par  ses  opé- 
rations. Il  rebaptisait  ceux  qui  l'avaient 
été  dans  la  foi  de  la  Trinité,  et  croyait 
que  la  foi  pouvait  sauver  sans  les  œuvres. 


EUP 

Ses  impiétés  étaient  d'autant  plus  dan- 
gereuses, qu'il  réunissait  à  quelque  talent 
beaucoup  d'artifice.  Saint  Grégoire  de 
Nice  et  saint  Basile  signalèrent  leur  élo- 
quence et  leur  zèle  contre  ce  sectaire 
factieux.  (Ses partisans  s'appelaient  EunO' 
miens  :  ils  furent  proscrits  par  Gratien.) 

EDNUS ,  esclave  syrien ,  ne  pouvant 
supporter  les  malheurs  de  sa  condition, 
fit  d'abord  l'enthousiaste  et  l'inspiré  de 
la  déesse  de  Syrie.  Il  se  disait  envoyé  des 
dieux ,  pour  procurer  la  liberté  aux  es- 
claves. Pour  s'insinuer  dans  l'esprit  des 
peuples,  il  mettait  dans  sa  bouche  une 
noix  remplie  de  soufre  eu  poudre  :  il  y 
glissait  adroitement  le  feu,  et  en  souf- 
flant il  paraissait  von\ir  des  flammes.  Ce 
prétendu  prodige  le  fit  regarder  comme 
un  dieu.  Deux  mille  esclaves,  pressés 
par  leur  misère,  se  joignirent  à  lui,  et 
il  se  vit  à  la  tète  de  50,000  hommes, 
avec  lesquels  il  défit  les  préteurs  romains. 
Perpenna  ,  envoyé  contre  ces  rebelles, 
les  réduisit  par  la  faim,  et  fit  mettre  en 
croix  tous  ceux  qui  tombèrent  entre  ses 
mains. 

EUPHÉMIE  (  Sainte  ) ,  vierge  et  mar- 
tyre de  Chalcédoine  ,  au  4^  siècle  ,  sous 
Dioclétien  ,  vers  l'an  307  de  Jésus-Christ. 
Ses  actes  sont  sans  authenticité;  mais 
l'église  grecque  l'honore  de  la  même 
manière  que  les  plus  célèbres  martyrs , 
et  sa  fête  se  célèbre  dans  presque  tout 
l'Orient.  Il  y  avait  anciennement  à  Cou- 
stantinople quatre  églises  sous  son  invo- 
cation. Celle  qui  portait  son  nom  à  Chal- 
cédoine ,  était  fort  célèbre  ,  et  ce  fut  là 
que  se  tint  le  quatrième  concile  général 
qui  proscrivit  les  erreurs  d'Eutychès,  en 
451.  On  transporta  depuis  ses  reliques 
dans  l'église  de  Sainte-Sophie  à  Constan- 
tinople ,  où  elles  restèrent  jusqu'au  temps 
de  l'impie  Constantin  Copronyme ,  qui 
voulut  les  jeter  à  la  mer.  On  trouva  le 
moyen  de  les  conserver,  comme  on  l'ap- 
prend de  Constantin ,  évêque  de  Tio  dans 
la  Paphlagonie ,  qui  a  fait  un  discours 
sur  ce  sujet.  Elles  sont  présentement  à 
Syllébrie,  entre  Coustantinople  et  An- 
drinople.  On  en  conserve  une  portion 
dans  l'église  de  la  maison  de  Sorbonne 
de  Paris.  Ou  voyait  à  Rome  du  temps  de 


à 


EUP 

saint  Grégoire  ie  Grand  ,  une  église  qui 
portait  le  nom  de  Sainte-Euphémie.  Il 
paraît  que  c'est  la  même  que  celle  qui  a 
été  réparée  par  le  pape  Urbain  Mil ,  et 
qui  subsiste  encore  aujourd'hui.  Une 
ville  de  Caiabre  qui  portait  son  nom , 
fut  engloutie  par  un  tremblement  de 
terre,  le  27  mars  1C38. 

EUPHÉMJUS  , patriarche  de  Constan- 
tinople  l'an  490 ,  illustre  par  sa  science 
et  par  ses  vertus ,  efifaça  des  dyptiques 
le  nom  de  l'hérétique  Monge,  ouverte- 
ment déclaré  contre  le  concile  de  Chal- 
cédoine.  Il  y  rétablit  celui  du  pape  Félix 
III ,  qui  en  avait  été  ôté.  Ce  pontife  lui 
refusa  néanmoins  sa  communion ,  parce 
qu'il  conservait  les  noms  de  quelques 
prélats  hérétiques  ou  soupçonnés  de 
l'être.  Euphémius  s'obstina  à  y  laisser 
celui  d'Acace  ,  dont  il  ne  voulait  pas  ou- 
trager la  mémoire.  Le  pape  Gélase ,  suc- 
cesseur de  Félix,  refusa  aussi  de  commu- 
niquer avec  lui.  L'empereur  Anaslase 
l'envoya  en  exil  en  495.  Ce  patriarche 
mourut  à  Ancyre  en  515,  victime  de  son 
opiniâtreté. 

*  EUPHRAÎN'OR ,  célèbre  sculpteur 
et  peintre  de  Corinthe,  qui  avait  com- 
posé plusieurs  \o\umes  sur  la si/me'lrie  et 
sur  les  couleurs.  Il  florissait  vers  l'an  340 
avant  J.  C.  Quintilien  le  cite  comme 
ayant  porté  l'art  de  la  peinture  au  der- 
nier degré  de  perfection.  Pline  écrit  qu'il 
avait  fait  un  grand  nombre  de  belles 
statues  de  bronze  ou  de  marbre ,  parmi 
lesquelles  on  distinguait  un  Paris  que 
les  Grecs  ne  se  lassaient  pas  d'admirer  ; 
une  Minerve  et  une  Lntone  qui  furent 
transportées  à  Rome  :  on  citait  aussi  un 
t^ulcnin  ;  Alexandre  et  Philippe  portés 
sur  des  quadriges,  etc.  Pline  le  range 
parmi  les  artistes  athéniens. 

EUPHRASIE  ou  Eupraxie  (Sainte), 
illustre  solitaire  et  religieuse  de  la  Tbé- 
baïdc,  fille  d'Antigone ,  gouverneur  de 
Lycie,  et  parente  de  l'empereur  Théodose 
l'Ancien,  naquit  vers  l'an  380,  et  mou- 
rut à  l'âge  de  30  ans ,  dans  l'un  des  mo- 
nastères de  la  Thébaïde,  où  elle  avait 
donné  des  exemples  admirables  de  vertu. 

EL  PHRATE ,  philosophe  stoïcien  sous 
l'empereur  Adrien ,  demanda  à  ce  prince 


EUP  1Ô9 

la  ridicule  permission  de  s'ôtcr  la  vie, 
qui  n'était  plus  qu'un  fardeau  pour  lui. 
Adrien  le  lui  permit,  et  le  prétendu  sage 
se  donna  la  mort  l'an  1 1 S  de  Jésus-Christ. 
EUPHROAE  (  Saint  ) ,  évoque  de 
Tours ,  petit-fils  du  B.  Grégoire  ,  évêque 
de  Langres,  ne  dut  son  élévation  qu'à 
ses  vertus  et  à  sa  capacité.  Sacré  en  556, 
il  assista  l'année  suivante  au  concile  de 
Paris,  oîi  Ton  arrêta  de  sages  réglcmens 
touchant  les  biens  ecclésiastiques,  les 
ordinations  des  évêques,  et  les  mariages 
illégitimes.  La  ville  de  Tours  ayant  été 
presque  toute  réduite  en  cendres  par 
une  suite  de  la  guerre  civile  qui  s'était 
allumée  en  France ,  ce  saint  évêque 
donna  des  marques  éclatantes  de  sa  cha- 
rité. Il  pourvut  à  la  subsistance  des  pau- 
vres ,  trouva  les  moyens  de  procurer  des 
ressources  aux  habitans  de  la  ville ,  et 
s'opposa  à  l'établissement  d'une  taxe  ,  à 
laquelle  le  comte  Gaison  voulait  assujétir 
le  peuple.  En  5GC ,  Euphrone  assembla 
dans  sa  ville  épiscopale  un  concile  qui 
est  appelé  le  second  de  Tours ,  et  dans 
lequel  on  fit  vingt-sept  canons  de  disci- 
pline. Ce  prélat  jouit  de  la  plus  haute 
considération  auprès  des  rois  Clotaire  I 
et  Charibert.  On  rapporte  qu'étant  en 
route  pour  aller  à  la  cour  du  dernier,  il 
revint  sur  ses  pas ,  en  disant  que  sott 
voyage  serait  inutile  ,  parce  que  le  roi 
était  mort  :  ce  qui  se  trouva  vrai.  Il  fut 
également  estimé  de  Sigebert ,  roi  d'Aus- 
trasie.  Ce  fut  lui  que  ce  prince  choisit 
pour  faire  la  translation  de  la  vraie  croix 
dans  le  monastère  de  Sainte-Radegonde  à 
Poitiers.  Ce  saint  évêque  mourut  le  4 
août  57  3  ,  et  eut  pour  successeur  saint 
Grégoire ,  son  parent ,  qui  est  regardé 
comme  le  père  de  l'histoire  de  France. 
—  Il  ne  faut  pas  le  confondre  avec  saint 
EuPHKOîiE  ,  évoque  d'Autun  ,  qui  eut  beau- 
coup de  part  à  la  lettre  adressée  à  Tha- 
lasse  d'Angers  ,  contenant  divers  régle- 
mens  sur  les  fêtes  et  le  service  divin  ,  sur 
les  ecclésiastiques  bigames  ,  etc. ,  et  sou- 
scrivit au  concile  qui  fut  assemblé  k  Arles 
en  475,  à  l'occasion  du  prêtre  Lucide. 
On  ignore  en  quelle  année  il  mourut.  Ou 
sait  seulement  qu'une  sainteté  éminente, 
une  prudence  consomméç  et  un  savoir 


i6o  EUR 

profond  le  firent  généralement  respcctei". 

EUl^OLIS ,  poète  comique  de  l'an- 
cienne comédie,  sur  Icqnel  on  a  débité 
beaucoup  de  fables,  était  d'Athènes,  et 
florissait  vers  l'an  440  avant  J.  C.  Il 
monta  sur  le  théâtre  dès  l'âge  de  1 7  ans, 
et  fut  couronné  plusieurs  fois.  On  dit 
qu'Alcibiade  le  fit  mourir  pour  avoir  fait 
des  vers  contre  lui  ;  d'autres  prétendent 
qu'il  périt  dans  un  naufrage.  Il  nous 
reste  de  lui  un  ouvrage  intitulé  S ententiœ, 
imprimé  à  Bâle  en  1560,  in-8. 

EURIC.  roijez  EvARic. 

EURIPIDE,  poète  tragique  grec  ,  né 
à  Salamine  l'an  480  ou  486  avant  J.  C  , 
fut  disciple  de  Prodicus  pour  l'éloquence, 
deSocrate  pour  la  morale,  et  d'Anaxagore 
pour  la  physique.  Les  chagrins  que  ce 
dernier  s'attira  par  ses  rêveries  philoso- 
phiques, l'ayant  dégoûté  de  la  philoso- 
phie ,  il  s'adonna  à  la  poésie  dramatique. 
Il  s'enfermait  dans  une  caverne  pour 
composer  ses  tragédies,  qui  firent  l'ad- 
miration de  la  Grèce  et  des  pays  étran- 
gers. L'armée  des  Athéniens  commandée 
par  Nicias,  ayant  été  vaincue  en  Sicile, 
la  plupart  des  soldats  rachetèrent  leur 
vie  et  leur  liberté ,  en  récitant  des  vers 
du  poète  grec.  Euripide  florissait  à 
Athènes ,  dans  le  même  temps  que  So- 
phocle. L'émulation  qui  s'éleva  entre  lui 
et  ce  redoutable  concurrent,  dégénéra  en 
inimitié.  Aristophane  l'immola  à  la  risée 
publique  dans  ses  comédies.  Euripide 
médisait  sans  cesse  des  femmes  et  dans 
la  conversation  et  sur  le  théâtre  :  il  se 
maria  pourtant  deux  fois ,  et  deux  fois  il 
répudia  ses  épouses.  Cette  conduite  four- 
nissait beaucoup  à  la  plaisanterie  du  co- 
mique grec.  Euripide  très  sensible,  et 
ne  pouvant  soutenir  plus  long-temps  les 
railleries  des  auteurs  et  du  public,  quitta 
Athènes,  et  se  retira  à  la  cour  d'Arché- 
laiis,  roi  de  Macédoine.  Ce  prince,  pro- 
tecteur des  gens  de  lettres,  le  fit  son 
premier  ministre,  si  l'on  en  croit  Solin. 
Euripide  fit,  suivant  quelques-uns,  une 
fin  tragique.  On  prétend  qu'il  se  prome- 
nait dans  un  bois,  et  qu'il  rêvait  pro- 
fondément suivant  sa  coutume  ,  lorsqu'il 
fut  rencontré  un  peu  à  l'écart  par  les 
çbiçns   du  prince,  qui  le  mirent  en 


EUR 

pièces.  De  quelque  façon  qu'il  ait  terminé 
sa  carrière,  les  chronologistes  placent 
sa  mort  l'an  407  avant  J.  C.  Euripide 
était  un  homme  grave  et  sévère  ,  malgré 
la  poésie.  Il  travaillait  difficilement.  Le 
poète  Alcestis,  qui  avait  la  facilité  des 
mauvais  écrivains  ,  se  vantait  qu'il  avait 
fait  cent  vers  dans  trois  jours,  taudis 
qu'Euripide  n'en  avait  fait  que  trois.  «  Il 
w  y  a  encore  cette  différence  entre  vos 
»  écrits  et  les  miens  ,  dit  le  poêle  au  ver- 
»  sificateur ,  que  les  vôtres  dureront  trois 
«  jours,  et  les  miens  perceront  l'étendue 
»  des  siècles.  »  De  84  tragédies  qu'il 
avait  composées ,  il  ne  nous  en  reste 
que  19  :  He'cube,  les  Phéniciennes, 
Médée,  Alceste,  Hyppolite ,  Iphigénie 
en  yiulidc ,  Andromaque ,  Electre ,  les 
Suppliantes,  les  Bacchantes ,  Iphigénie 
en  Tauride,  etc.  «  Son  stile ,  dit  Quin- 
))  tilien ,  est  plein  de  belles  sentences, 
»  et  soit  qu'il  fasse  parler  ou  répliquer 
»  ses  personnages ,  je  le  trouve  compa- 
))  rable  à  ce  que  nous  avons  de  plus  disert 
»  au  barreau.  »  Mais  à  considérer  ses 
pièces,  selon  les  règles  du  théâtre,  il 
n'y  en  a  presque  point  qui  soient  à  l'abri 
des  plus  justes  reproches.  Duplicité  d'ac- 
tion ,  nœuds  mal  tissus,  incidens  sans 
liaison  ou  mal  préparés ,  dénoùmens 
postiches ,  expositions  froides  et  puériles; 
enfin  tous  les  défauts  qui  supposent  l'i- 
gnorance de  l'art  et  qui  détruisent  l'imi- 
tation de  la  nature ,  se  trouvent  fré- 
quemment rassemblés  dans  ses  tragédies.  1 
Il  semble  quelquefois  avoir  jeté  des  scènes 
au  hasard ,  et  n'avoir  eu  d'autre  dessein 
que  d'assembler  des  dialogues  philosophi- 
ques ou  politiques.  Cependant  son  An- 
dromaque fit  une  impression  si  vive  sur 
les  Abdérites ,  qu'ils  furent  tous  atteints 
d'une  espèce  de  folie,  causée  par  le 
trouble  que  la  représentation  de  cette 
pièce  avait  jeté  dans  leur  imagination. 
Les  principales  éditions  d'Euripide  sont 
celle  que  l'on  appelé  l'édition  Princeps, 
publiée  par  Lascaris  vers  la  fin  du  1 5* 
siècle  et  qui  ne  contient  que  4  tragé- 
dies :  celles  d'Aide ,  1 503  ,  in-8  ;  de  Plan- 
tin,  en  1571  ,  in-16  ;  de  Commelin,  en 
1597,  in-8  ,  sont  remplies  de  fautes.  Paul 
Etienne  en  a   donné  une  passable   ca 


1 


EUR 

1604  ,  in-4  ;  on  peut  citer  celle  de  Josué 
Barnès,  en  1694,  in-folio;  mais  Wal- 
kenaer  et  Reiske  en  ont  montré  l'insuf- 
lisancc.  Les  meilleures  sont  celle  de 
Musgrave ,  en  17  78,  4  vol.  in-4;  et 
celle  de  Leipsick,  1779-88  ,  3  tomes 
i»-4 ,  commencée  par  Morus ,  et  achevée 
par  Beck.  Voyez  le  Théâtrç  des  Grecs 
du  père  Brumoy ,  qui  a  traduit  les  plus 
lieaux  morceaux  d'Euripide.  M.  Prévôt 
de  Genève,  de  l'académie  de  Berlin  ,  en 
a  donné  en  1783  ,  une  traduction  fran- 
çaise estimée ,  quoiqu'elle  ne  soit  pas 
toujours  exacte,  Paris,  4  vol.  in-12. 
Euripide  a  aussi  été  traduit  en  anglais 
et  en  allemand.  (Deux  des  pièces  d'Euri- 
pide, YHyppoUte  et  VIphige'nie  en  Au- 
lide  ont  donné  naissance  à  deux  chefs- 
d'œuvre,  la  Phèdre  et  ïlphigénie  de 
Racine.) 

EURYCLES,  fourbe  de  Lacédémone, 
qui  s'étant  rendu  à  Jérusalem ,  et  ayant 
gagné  les  bonnes  grâces  du  roi  Hérode  , 
et  de  ses  enfans ,  découvrait  aux  uns  les 
secrets  des  autres ,  pour  en  avoir  de  l'ar- 
gent. Il  fut  cause  par  ce  moyen  de  la  mort 
d'Alexandre  et  d'Aristobule.  Ce  perfide 
étant  retourné  dans  son  pqys ,  en  fut 
chassé  par  ses  propres  concitoyens. 

EERYDICE,  femme  d'Amyntas,  roi  de 
Macédoine ,  donna  quatre  enfans  à  son 
époux  :  trois  fils,  Alexandre,  Perdiccas  et 
Philippe,  et  une  fille  nommée  Euryone. 
La  reine  ,  amoureuse  de  son  gendre,  lui 
promit  l'empire  et  sa  main  ;  mais  ces  dons 
\'"unestes  devaient  être  le  prix  de  la  mort 
de  son  mari.  Euryone  préserva  son  père 
de  ce  malheur  en  lui  découvrant  ces  dé- 
test'ables  complots  de  sa  mère.  Amyntas 
«utJa  faiblesse  de  lui  pardonner.  Après  sa 
mort ,  Eurydice  sacrifia  à  sa  fureur  ambi- 
tieusft  Alexandre,  son  fils  aîné ,  qui  avait 
succéàéàson  père.  Perdiccas,  son  autre 
fils ,  pincé  sur  le  trône  après  Alexandre, 
périt  co  mme  lui.  Les  historiens  ne  nous 
disent  point  si  ce  monstre  fut  puni  de  ses 
exécrable.^  forfaits.  Philippe ,  son  3*  fils , 
père  d'Ale.tandre  leGrand,semiten  garde 
contre  ses  i^mbùches ,  et  régna  paisible- 
ment. 

EURYDICE ,  fille  d' Amyntas ,  fut  ma- 
riée à  son  o\icle  Aridce,  ^Is  naturel  du 

V. 


EUS  i6i 

roi  Philippe.  Aridce  monta  sur  le  trône 
de  Macédoine  après  Alexandre  le  Con- 
quérant ;  mais  la  reine  tint  seule  le  scep- 
tre. Cette  femme  ambitieuse,  qui  gou- 
vernait despotiquement  sous  un  roi  titu- 
laire ,  écrivit  à  Cassandre  de  se  joindre  à 
elle  contre  Polyperchon ,  qui  ramenait 
Olympias  de  l'Epire  avec  son  petit-fils 
Alexandre,  et  Roxane,  mère  du  jeune 
roi.  Cassandre  vole  à  la  tête  de  l'élite  de 
ses  troupes  en  Macédoine  ;  mais  lorsque 
les  deux  armées  furent  en  présence ,  les 
Macédoniens  abandonnèrent  le  parti  d'Eu- 
rydice, pour  se  ranger  du  côté  du  jeune 
Alexandre  qu'ils  regardaient  comme  leur 
prince  légitime.  Olympias  fit  percer  de 
flèches  Aridée,  et  obligea  sa  femme 
de  s'ôter  elle-même  la  vie,  lui  donnant 
le  choix  du  poison  ,  du  poignard  ou  du 
cordeau.  Elle  s'étrangla ,  l'an  318  avant 
J.C.      ^ 

EUSEBE  (Saint) ,  grec  de  naissance, 
succéda  au  pape  saint  Marcel ,  le  20  mai 
310;  il  sut  maintenir  la  pieuse  rigueur 
de  la  pénitence  canonique,  surtout  par 
rapporta  ceux  qui  étaient  tombés  pendant 
la  persécution.  Son  zèle  lui  attira  plu- 
sieurs ennemis,  entre  autres  Héraclius, 
homme  turbulent,  qui  lui  suscita  toutes 
sortes  de  contradictions,  dont  Eusèbe 
triompha  par  sa  patience.  Ce  saint  pape 
fut  exilé  en  Sicile  par  le  tyran  Maxence, 
et  mourut  le  26  septembre  de  l'année  de 
son  élévation  au  pontificat. 

EUSÈBE  (Pamphile),  évêque  de  Cé- 
sarée  en  Palestine  ,  naquit  vers  la  fin  de 
l'empire  de  Gallien.  On  ne  sait  rien  de 
sa  famille  ;  on  ignore  même  le  lieu  de  sa 
naissance.  Il  s'unit  de  la  plus  étroite  ami- 
tié avec  Pamphile ,  prêtre  de  Césarée. 
Son  ami  ayant  été  martyrisé  en  309,  il 
prit  son  nom  pour  éterniser  sa  mémoire 
dans  son  cœur.  Eusèbe  s'était  adonné  de 
bonne  heure  aux  lettres  sacrées  et  pro- 
fanes. On  disait  de  lui  «  qu'il  savait  tout 
))  ce  qui  avait  été  écrit  avant  lui.  »  Il  éta- 
blit une  école  à  Césarée ,  qui  fut  une  pé- 
pinière de  savans.  Son  mérite  le  fit  éle- 
ver sur  le  siège  de  cette  ville  en  313. 
L'arianisme  infectait  alors  l'Eglise  et  l'em- 
pire. Eusèbefutune  des  colonnes  secrètes 
de  celte  hérésie.  Au  concile  de  Nicéc ,  eu 
1  ( 


i62  EUS 

825 ,  11  arait  été  placé  à  la  droite  de 
Constantin.  Il  y  anathématisa  les  erreurs 
d'Arius ,  et  proposa  une  formule  de  foi 
orthodoxe  ;  mais  il  eut  quelque  peine  à 
souscrire  au  mol  de  consubstantiel  que 
les  Pères  ajoutèrent  à  sa  formule.  Il  as- 
sista en  331  avec  les  évêques  ariens  au 
concile  d'Antioche ,  où  saint  Eustathe  fut 
déposé.  Les  ariens  le  firent  nommer  à  ce 
siège  ;  mais  il  refusa ,  soit  parce  qu'il 
condamnait  ces  sortes  de  changemens, 
soit  qu'il  voulût  augmenter  son  crédit 
par  celte  preuve  de  désintéressement, 
ce  qui  dans  un  évêque  courtisan  n'est 
point  sans  vraisemblance.  Quatre  ans 
après,  il  condamna  saint  Alhanase,  de 
concert  avec  les  évêques  des  conciles  de 
Ccsarée  et  de  Tyr.  Le  saint  évèque  refusa 
de  se  trouver  dans  ces  assemblées,  parce 
qu'il  détestait  les  artifices  d'Eusèbe  et 
qu'il  redoutait  son  crédit.  Les  prélats  as- 
semblés à  Jérusalem  pour  la  dédicace  de 
l'église  du  St.-Sépulcre ,  le  députèrent  à 
l'empereur  Constantin ,  pour  défendre  le 
jugement  inique  qu'ils  avaient  rendu  con- 
tre l'illustre  défenseur  de  la  divinité  de 
J.  C.  Cetévêquè  courtisan  surprit  la  re- 
ligion du  prince ,  et  abusa  de  sa  con- 
fiance. Il  noircit  les  innocens  et  blanchit 
les  coupables.il  obtint  le  rappel  de  l'hé- 
résiarque Arius  et  l'exil  d'Alhanase.  Il 
connut  le  faible  de  Constantin,  et  fit 
quelquefois ,  de  ce  fondateur  du  christia- 
nisme dans  l'empire  ,  le  persécuteur  des 
Trais  chrétiens.  Il  prononça  le  panégy- 
rique de  ce  prince ,  à  l'occasion  de  la 
réjouissance  qu'il  fit  faire  au  commence- 
ment de  la  30*  année  de  son  empire,  qui 
fut  la  dernière  de  sa  vie.  On  croit  qu'il 
survécut  peu  à  ce  prince  ;  il  mourut  vers 
338.  Eusèbe  laissa  beaucoup  d'ouvrages 
dignes  de  passer  à  la  postérité  qui  en  a 
une  partie.  Les  principaux  sont  1°  VHis- 
ioire ecclésiastique,  en  10  livres,  depuis 
l'avènement  du  Messie  ,  jusqu'à  la  défaite 
de  Licinius.  C'est  le  plus  considérable  de 
tous  ses  écrits  ;  il  lui  a  mérité  le  titre  de 
Père  de  l'histoire  ecclésiastique.  Il  peut 
tenir  lieu  des  historiens  originaux  des 
trois  premiers  siècles.  Elle  a  été  traduite 
et  continuée  jusqu'à  la  mort  du  grand 
Tbéodose,   par  Rufin  d'Aquilée.  Eusèbe 


ECS 

rejette  les  narrations  fabuleuses  avec  plu* 
de  soin  que  n'ont  fait  saint  Epiphane  et 
d'autres  anciens.  Son  stile,  sansagrémens 
et  sans  beauté,  est  plutôt  celui  d'un  com- 
pilateur que  d'un  historien.  Il  avait  plus 
de  finesse  dans  le  caractère  que  dans  l'es- 
prit. Ce  qu'on  ne  peut  lui  pardonner , 
c'est  le  coupable  silence  qu'il  garde  sur 
l'arianisme  dans  son  Histoire  :  nouvelle 
preuve  contre  ceux  qui  forcent  le  sens  de 
ses  mauvaises  expressions ,  pour  faire  un 
homme  orthodoxe  d'un  intrigant,  recon- 
nu par  toute  l'antiquité  pour  arien  d'es- 
prit et  de  faction.  De  toutes  les  éditions 
de  l'Histoire  ecclésiastique  d'Eusèbe  ,  la 
plus  correcte  est  celle  de  Henri  de  Va- 
lois ,  dans  la  Collection  des  Historiens 
ecclésiastiques  grecs,  3  vol.  in-fol.,  à 
Paris  en  lGC9,puis  en  1C77,  avec  une 
version  en  latin  qui  a  mérité  l'estime  du 
public  savant,  ensuite  augmentée  et  re- 
vue à  Cambridge,  en  1720,  3  vol.  in- 
folio. Le  président  Cousin  en  a  donné 
une  excellente  traduction  en  français , 
4  vol.  in-4  ,  ou  5  tomes  en  C  vol.  in-12. 
2"  La  Fie  de  Constantin ,  en  4  livres. 
C'est  un  panégyrique  sous  le  titre  d'his- 
toire. Elle  forme  la  2*  partie  du  tome 
1"'  de  l'Histoire  de  l'Eglise  ,  de  Cousin  , 
in-12,  qui  manque  quelquefois  ;  et  quand 
elle  y  est,  il  y  a  6  vol.  3°  Une  Chronique^ 
qui  renfermait  les  événemens  depuis  le 
commencement  du  monde,  jusqu'à  la 
20«  année  du  règne  de  Constantin.  La 
traduction  qu'en  fit  saint  Jérôme  nous  a 
fait  perdre  une  partie  de  l'original,  d'au- 
tant plus  précieux,  qu'Eusèbe  entassait 
dans  tous  ses  ouvrages  les  passages  des 
auteurs  les  plus  anciens.  Joseph  Scalig;er 
a  prétendu  nous  donner  toute  la  Chroni- 
que d'Eusèbe,  dont  il  avait  ramas.'.é  les 
fragmens  épars  dans  différens  écrivains. 
On  trouve  en  effet  que  son  édition ,  im- 
primée à  Amsterdam  ,  chez  Janson  ,  in- 
folio ,  1C58,  est  presque  toute  conforme 
à  la  traduction  de  saint  Jérôme.  Cette 
édition  a  perdu  beaucoup  de  un  valeur 
par  la  découverte  que  l'on  a  faite  récem- 
ment d'une  traduction  complète,  en  ar- 
ménien ,  de  la  Chronique  d'Eusèbe,  dont 
on  a  donné  deux  éditions  :  la  première 
sous  ce  titre  :  Eusebii  Pamphili  chroni- 


EUS 

corum  canonum  libriduo.  Milan,  1818, 
grand  in-4  ;  production  importante  qui 
a  devancé  celle  du  texte  arménien  ;  la 
deuxième ,  intitulée  Eusehii  Pampliili , 
Cœsariensis  episcopi,  chronicon  bipnr- 
iitum,  etc.,  Venise,  1818,  2  xol.  grand 
in-4.  4°  Les  livres  de  la  Préparation  et 
de  la  Démonstration  évangéliquc.  C'est 
le  traité  le  plus  savant  que  l'antiquité 
nous  fournisse  ,  pour  démontrer  la  vérité 
de  la  religion  chrétienne  et  la  fausseté 
du  paganisme.  De  20  livres  dont  la  Dé- 
monstration évangélique  était  composée, 
il  ne  nous  en  reste  que  10.  Le  com- 
mencement et  la  fin  du  1*''  livre  et  du 
lO*",  manquent  dans  toutes  les  éditions; 
mais  Fabricius  les  publia  eu  1725  dans 
sa  Bibliothèque  des  auteurs  qui  traitent 
de  la  religion.  La  meilleure  édition  de  la 
Préparation  et  de  la  Démonstration  ,  est 
celle  de  Paris,  1628  ,  en  2  vol.  in-folio, 
avec  une  version  nouvelle  des  15  livres 
de  la  Préparation ,  par  le  jésuite  Vigier, 
et  celle  de  Donat ,  jointe  aux  livres  de  la 
Démonstration.  5"  Commentaires  sur  les 
Psaumes  et  sur  Isaie  ,  publiés  par  don 
de  Montfaucon  ,  dans  les  2  premiers  tom. 
de  la  collection  des  Pères  grecs,  Paris, 
170C  ,  in-folio.  Il  n'y  a,  du  Commentaire 
sur  les  psaumes ,  que  ce  que  le  savant 
éditeur  en  a  pu  trouver  dans  les  îinciens 
manuscrits,  c'est-à-dire,  ce  qu'Eusèbe  a 
fait  sur  les  1 1 9  premiers  psaumes.  On 
trouvera  dans  cet  ouvrage  des  preuves 
de  son  ajianisme.  Le  Père  Montfaucon, 
contre  la  coutume  des  éditeurs  presque 
tous  enthousiastes  de  leur  original ,  a 
employé  plusieurs  autorités  pour  prouver 
qu'il  était  arien,  et  ses  autorités  sont  con- 
vaincantes. G"  Des  opuscules  qui  portent 
son  nom,  et  que  le  Père  Sirmond  fit  impri- 
mer en  latin,  l'an  1643,  Paris,  in-8.  On 
peut  voir  les  passages  des  anciens  pour  et 
contre  Eusèbe  ,  recueillis  fort  exactement 
par  Valois,  à  la  tète  de  l'édition  de  son 
Histoire  ecclésiastique.  On  a  aussi  d'Eu- 
sèbe :  Onomasticon  urbium  etlocorumsa- 
crœ  Scripturœ ,  imprimé  avec  les  notes 
de  Bonfrérius  et  de  Le  Clerc  à  Amsterdam, 
in-folio.  (Voyez  l'analyse  des  ouvrages 
d'Eusèbe  dans  la  Bibliothèque  choisie  des 
Pères  de  l'Eglise  par  M.  l'abbé  Guillon  ). 


EUS  i63 

EUSÈBE  (Saint),  évêque  de  Verceil 
au  4*  siècle,  mérita  ce  siège  par  sa  scien- 
ce, des  mœurs  douces  et  une  piété  tendre. 
l\  signala  sou  zèle  pour  la  foi  au  concile 
de  Milan  en  355.  Il  proposa  d'abord  dé- 
faire souscrire  tous  les  évêques  à  celui  de 
Kicée ,  avant  que  de  traiter  aucune  af- 
faire; mais  l'empereur  Constance  se  ren- 
dit maître  de  l'assemblée.  11  fit  souscrire 
]a  plupart  des  évêques  à  la  condamnation 
d'Athanase ,  par  menaces  ou  par  surprise. 
Ceux  qui  eurent  la  force  de  résister ,  fu- 
rent bannis  ;  Eusèbe  fut  de  ce  nombre. 
Après  la  mort  de  l'empereur ,  ce  saint 
homme  retourna  à  son  église.  Il  parcou- 
rut la  Grèce,  l'illyrie,  l'Italie;  et  par- 
tout il  opposa  une  digue  aux  ravages  de 
l'arianisme.  Il  finit  saintement  ses  jours 
en  373.  Saint  Ambroisc  (ou l'auteur  d'un 
sermon  qui  lui  est  attribué)  dit  que  c'est 
le  premier  qui,  eu  Occident,  joignit 
la  vie  monastique  à  la  vie  cléricale,  ren- 
forçant ainsi  les  vertus  sacerdotales  par 
le  mépris  des  possessions  terrestres  :  Pri- 
mus  in  Occidentis  partibus  in  eadem  ec- 
clesia  eosdem  monachos  instHuit  esse 
quos  clcricos ,  ut  esset  in  ipsis  viris  et 
contemptus  rerum  et  accuratio  levita- 
rum.  Voyez  Jonadab,  Norbert  (S.).  Jean- 
André  Irici ,  docteur  du  collège  Ambro- 
sicn,  fit  imprimer  à  Milan  en  17  48,  en  2 
vol.  in-4,  le  livre  des  Evangiles,  écrit 
de  la  propre  main  d'Eusèbe ,  qu'on  avait 
trouvé  parmi  les  manuscrits  de  l'église 
de  Verceil.  11  a  enrichi  cette  édition  d'une 
préface,  de  notes  et  d'une  concordance 
avec  les  autres  manuscrits  des  Evangiles 
et  les  versions  des  saints  Pères.  On  trouve 
deux  de  ses  lettres  dans  la  bibliothèque 
des  Pères.  H  avait  traduit  en  latin  le  Com- 
mentaire sur  les  psaumes  d'Eusèbe  de 
Césarée  ;  mais  cette  traduction  est  perdue. 

EUSÈBE  (  Saint  ),  évcque  de  Samosate, 
illustre  par  sa  foi  et  par  son  amour  pour 
l'église.  Il  fut  d'abord  lié  avec  les  ariens. 
Le  siège  d'Antioche  étant  venu  à  vaquer, 
ils  convinrent  avec  les  orthodoxes  de 
choisir  Mélècepour  le  remplir.  Ils  confiè- 
rent à  Eusèbe  le  décret  de  cette  élection  ; 
mais  saint  Mélèce  s'étant  aussitôt  déclaré 
pour  la  foi  "catholique ,  les  ariens ,  ap- 
puyés par  l'empereur  Valens ,  résolurent 


i64  EUS 

de  le  déposer.  Eusèbe ,  averti  de  leur  per- 
nicieux dessein  ,  se  retira  dans  son  dio- 
cèse avec  l'acte  qu'on  lui  avait  confié. 
On  fit  courir  après  lui,  et  l'envoyé  de 
l'empereur  le  menaça  de  lui  faire  couper 
la  main  droite ,  s'il  ne  rendait  l'acte  d'é- 
lection ;  mais  Eusèbe  présentant  ses  deux 
mains,  dit  avec  fermeté  :  «  qu'il  se  les 
3>  laisserait  couper ,  plutôt  que  de  se  des- 
■u  saisir  de  cet  acte ,  à  moins  que  ce  ne 
»  fût  en  présence  de  tous  ceux  qui  le  lui 
«  avaient  mis  en  dépôt.  »  Ce  digne  évê- 
que  souscrivit  à  la  foi  de  Nicée  dans  le 
concile  d'Antioche  en  353,  et  se  trouva 
à  Césarée  en  Cappadoce  l'an  371 ,  pour 
élire  saint  Basile,  évêque  de  cette  ville, 
à  la  prière  de  saint  Grégoire  de  Nazianze 
le  Père.  La  fermeté  avec  laquelle  il  s'op- 
posa aux  ariens  ,  lui  attira  une  foule  de 
traverses.  Valens  l'exila  en  373.  Durant 
cet  exil ,  il  se  déguisait  en  soldat  pour 
aller  consoler  les  orthodoxes  persécutés, 
fortifiant  les  faibles,  et  animant  les  forts. 
Après  la  mort  de  son  persécuteur,  Eu- 
sèbe se  trouva  au  concile  d'Antioche  en 
378  ,  et  y  parla  en  digne  défenseur  de  la 
divinité  de  Jésus-Christ.  11  parcourut  en- 
suite diverses  églises  d'Orient.  Ayant 
voulu  mettre  Maris  en  possession  de  l'é- 
vêché  de  Dolique  en  Syrie ,  une  femme 
arienne  lui  jeta  sur  la  tête  une  tuile  qui 
le  blessa  à  mort.  Le  digne  prélat,  avant 
.i'expirer ,  fit  promettre  à  ceux  qui  étaient 
présens ,  de  ne  point  poursuivre  cette 
femme  en  justice.  On  la  poursuivit  néan- 
moins ;  mais  les  catholiques,  pour  rem- 
plir la  dernière  volonté  de  ce  saint  évê- 
que ,  demandèrent  et  obtinrent  sa  grâce. 
EUSÈBE ,  évêque  de  Béryte ,  puis  de 
Nicomédie ,  enfin  de  Constantinople ,  fa- 
vorisa le  parti  d'Arius ,  dont  il  avait  em- 
brassé les  erreurs.  Il  les  abjura  au  concile 
de  Nicée  ;  mais  cette  abjuration  forcée  ne 
l'empêcha  pas  de  convoquer  quelque 
temps  après  un  concile  en  Bithynie,  où 
Arius  fut  rétabli  avec  pompe.  Les  trou- 
bles qu'il  excitait  dans  l'église ,  forcèrent 
Constantin  à  l'envoyer  en  exil.  Il  en  fut 
rappelé ,  et  peignit  Arius  auprès  de  l'em- 
pereur comme  le  plus  orthodoxe  des 
hommes ,  et  Athanase  comme  le  plus  re- 
inu.-int.  Il  l'accusa  d'avoir  Itiis  MQ  tribut 


EUS 

«ur  les  Egyptiens,  d'avoir  favorisé  la  ré- 
bellion d'un  certain  Philumène  ;  et  pour 
accabler  plus  sûrement  le  saint  prélat ,  il 
assembla  des  conciles,  le  fit  déposer, 
exiler,  et  fit  recevoir  Arius.  Il  se  fit  élire 
par  force  évêque  de  Constantinople ,  l'an 
338 ,  après  l'injuste  déposition  de  Paul , 
dont  il  ambitionnait  la  place.  Eusèbe  de 
Césarée  répandait  sourdement  l'arianis- 
nie  ;  Eusèbe  de  Nicomédie  en  tirait  vanité. 
Il  fut  chef  de  parti ,  et  voulut  l'être.  Ses 
sectateurs  furent  nommés  euse'biens.  Quel- 
ques mois  avant  sa  mort,  en  341  ,  il  fit 
admettre  dans  un  concile  d'Antioche  les 
impiétés  ariennes  comme  des  points  de 
foi.  Eusèbe  de  Césarée  a  voulu  le  faire 
passer  pour  un  saint  :  il  loue  jusqu'à  ses 
défauts  ,  mais  ce  sont  les  éloges  d'un 
homme  de  parti ,  qui  veut  canoniser  son 
chef. 

EUSÈBE-EMISSENE ,  ainsi  nommé , 
parce  qu'il  était  évêque  d'Emèse ,  fut 
disciple  d'Eusèbe  de  Césarée ,  et  mourut 
vers  359.  Il  était  natif  d'Edesse  en  Méso- 
potamie. Saint  Jérôme  lui  attribue  plu- 
sieurs ouvrages  contre  les  juifs,  les  gen- 
tils ,  les  novatiens ,  et  des  homélies  sur 
les  Evangiles  ;  mais  il  ne  nous  en  reste 
rien.  On  convient  aujourd'hui  que  la  plu- 
part des  homélies,  publiées  sous  son 
nom ,  ont  été  composées  par  des  évêques 
gaulois  dans  les  premiers  temps  de  Pé- 
glise  gallicane.  On  en  attribue  plusieurs 
à  saint  Patient,  évêque  de  Lyon.  Eusèbe 
était  du  parti  d'Arius. 

EUSEBE ,  avocat  à  Constantinople , 
s'éleva  ,  n'étant  que  simple  laïque,  contre 
l'hérésie  de  Nestorius ,  et  fit  une  protes- 
tation au  nom  des  catholiques,  en  429. 
Devenu  évêque  de  Dorylée ,  il  se  signala 
avec  le  même  zèle  contre  les  erreurs  d'Eu- 
tychès.  Cet  hérétique  était  son  ami  ;  il 
tâcha  de  le  ramener  par  la  douceur  ;  mais 
le  trouvant  plus  obstiné ,  il  se  rendit  son 
accusateur  dans  un  concile  de  Constan- 
tinople de  l'an  448.  Ces  sectaires  s'en 
vengèrent  en  le  faisant  déposer  dans  cette 
assemblée,  qui  fut  si  bien  nommée  le 
Brigandage  d'Bphèse.  Eusèbe  se  trouva 
encore  au  concile  général  de  Chalcédoine 
en  451  ,  oîi  il  poursuivit  la  condamnation 
de  ce  qui  avait  été  fait  à  Ephèse  ;  il  y  re- 


EUS 

çut  une  pleine  justification  ,  et  mourut 
peu  de  temps  après. 

EUSÈBE  de  Strip,onie ,  riche  seigneur 
hongrois ,  qui  après  avoir  distribué  ses 
biens  aux  pauvres,  se  retira  dans  les  fo- 
rêts. Plusieurs  personnes  s'étant  jointes 
à  lui,  il  fonda  le  monastère  de  Pisilie 
sous  le  titre  de  St. -Paul,  premier  ermite  , 
mais  sous  la  règle  des  chanoines  réguliers 
de  St.-.\ugustin.  Les  ermites  de  St.- 
Paul ,  qui  ont  subsisté  en  Hongrie  jus- 
qu'au règne  de  Joseph  II ,  lui  devaient 
leur  fondation.  Eusèbe  mourut  dans  le 
monastère  de  Pisilie  le  20  janvier  1270. 
Sa  piété  et  ses  autres  vertus  lui  ont  acquis 
le  titre  de  bienheureux. 

EUSEBIA  (Aurélia) ,  femme  de  l'em- 
pereur Constance  dans  le  4*  siècle,  était 
née  à  Thessalonique  d'un  homme  consu- 
laire. Elle  avait  de  la  beauté,  des  grâces, 
des  vertus ,  de  l'esprit  et  du  goût  pour 
les  arts.  Ces  qualités  furent  ternies  par 
son  attachement  à  l'arianisme.  Le  dépit 
qu'elle  eut  de  n'avoir  point  d'enfans ,  la 
porta  à  faire  donner  une  potion  à  Hélène , 
sœur  de  Constance  et  femme  de  Julien  , 
afin  de  la  rendre  stérile.  On  dit  même 
qu'elle  corrompit  la  sage-femme  de  cette 
princesse,  et  que,  dès  qu'elle  fut  accou- 
chée, cette  malheureuse  fit  périr  le  fruit. 
Eusebia  mourut  vers  361.  Ce  fut  elle  qui 
engagea  Constance  à  donner  à  Julien  le 
titre  de  César.  Ce  prince  fit  son  panégy- 
rique, et  nous  l'avons  parmi  ses  ouvra- 
ges. 

'  EUSTACE  (  John-Chetwôde) ,  prêtre 
catholique  romain,  issu  d'une  ancienne 
famille  du  comté  de  Lancastre,  présida  à 
l'éducation  de  plusieurs  jeunes  anglais 
qu'il  accompagna  dans  leurs  voyages  :  il 
parcourut  avec  eux  l'Italie  ,  la  Suisse  et 
la  France.  Il  a  publié  quelques  ouvrages 
parmi  lesquels  on  remarque  :  Voyage 
classique  en  Italie,  1813,  2  vol.  in-4  , 
plusieurs  fois  réimprimé. 

EUSTACHE  DE  SAINT -PIERRE. 
Voyez  Saitjt-Pierbe. 

EUSTACHE  (Saint),  martyr,  qu'on 
croit  avoir  souffert  la  mort  avec  sa  femme 
et  ses  enfans,  sous  l'empire  de  Trajan, 
Les  actes  de  son  martyr ,  tels  que  nous 
les  avons ,  sont  supposés  ou  considéra- 


EUS  i65 

blement  altérés.  Le  Père  Rircher  a  fait  de 
vains  efforts  pour  en  établir  l'authenti- 
cité ;  ce  qui  ne  prouve  rien  du  tout , 
contre  le  culte  qu'on  lui  rend.  Voyez 
Catherine  (sainte),  vierge  d'Alexandrie  ; 
RocH  (saint) ,  etc. 

EUSTACHE  (Barlhélemi  ) ,  professeur 
d'anatomie  et  de  médecine  à  Rome  ,  vers 
l'an  lô-SO,  laissa  des  planches  anatomi- 
ques,  publiées  à  Rome  en  1728  ,  in-fol. 
Elles  sont  très  propres  à  faire  connaître 
la  structure  du  corps  humain.  On  les 
trouve  aussi  dans  le  Theatrum  anatomi- 
cum  de  Manget.  Albin  les  a  publiées  de 
nouveau  à  Leyde,  1744  ,  in-fol.  avec  des 
explications  latines.  Nous  avons  encore 
d'Eustache  :  1°  Opuscula  ,\ie\i\. ,  1726, 
in-8.  2°  Erotiani  collectio  vocum  quœ 
sunt  apud  Hippocratem ,  Venise ,  1 566  , 
in-4. 

EUSTATHE  (Saint),  né  à  Side  en 
Pamphylie ,  d'abord  évêque  de  Bcrée  , 
ensuite  d'Antioche  en  323.  Il  se  distingua 
au  concile  de  Nicée  par  son  zèle  et  par 
son  éloquence.  Les  ariens ,  excités  par 
Eusèbe  de  Nicomédie ,  prélat  intrigant  et 
vindicatif,  conspirèrent  sa  perte.  On  su- 
borna une  femme  publique ,  qui  soutint 
avec  serment  au  saint  homme  qti'elle 
avait  eu  un  enfant  de  lui.  Sur  celte  fausse 
accusation ,  il  fiit  déposé  et  exilé  par 
Constance ,  et  selon  quelques-uns  par 
Constantin.  Il  mourut  dans  son  exil  à  Phi- 
lippes  en  Macédoine ,  vers  337  ,  et  fut  en- 
terré à  Trajanopolis.  Eustathe  fut  un  des 
premiers  qui  combattirent  l'arianisme  ;  il 
le  fit  avec  autant  de  clarté  que  de  force. 
Les  anciens  vantent  beaucoup  ses  ouvra- 
ges ;  nous  ne  les  avons  plus ,  et  c'est  une 
véritable  perte ,  s'il  est  vrai  que  le  stile 
en  fut  aussi  pur ,  les  pensées  aussi  nobles, 
les  expressions  aussi  élégantes  que  Sozo- 
mène  le  dit.  On  lui  attribue  un  Traité 
sur  la  Pythonisse  ,  mis  au  jour  en  1629 , 
in-4,  parle  savant  Allatius,  avec  un  autre 
Traité  sur  V ouvrage  des  six  jours ,  ou 
Hexameron,  qu'il  donne  aussi  h  Eustathe. 
Ce  dernier  écrit  qu'on  croit  être  d'un  au- 
teur plus  récent,  parut  à  Lyon  en  1624  , 
in-4.  On  le  trouve  aussi  dans  la  Biblio- 
thèque des  Pères. 

EUSTATHE,  évêqu  e  de  Sébasle  ,  joua 


i66  EUS 

un  rôle  singulier  dans  l'église  au  4*  siè- 
cle. C'était  un  fourbe  qui  savait  prendre 
toutes  sortes  de  formes  selon  ses  intérêts. 
Tantôt  arien  pur ,  tantôt  semi-ai-ien  ;  or- 
thodoxe un  jour ,  le  lendemain  macédo- 
nien ,  il  faisait  toutes  les  professions  de 
foi  que  les  circonstances  exigeaient.  Au 
concile  d'Ancyre ,  il  condamne  la  doc- 
trine d'Actius  son  disciple ,  il  est  déposé 
au  concile  de  3Iélitine ,  se  trouve  avec  les 
semi-ariens  à  Séleucie.  Député  par  ceux- 
cien  Occident  l'an  3G5,  il  en  imposa  au 
pape  Libère  qui  l'admit  à  sa  communion  : 
il  trompa  de  même  les  Pères  du  concile 
de  Thyane  qui  le  rétablirent  sur  son  siège  ; 
mais  il  n'y  fut  pas  plutôt  remonté ,  qu'il 
tâcha  de  communiquer  avec  les  ariens 
qui  ne  voulurent  point  le  recevoir  ;  il 
tinit  par  se  rendre  avec  Eunomius,  chef 
des  ennemis  de  la  divinité  du  Saint-Es- 
prit, et  mourut  vers  l'an  370.  Quelques 
auteurs  ont  cru  qu'il  était  cet  Eustathe 
qui  condamnait  le  mariage  et  la  posses- 
^iion  des  biens  temporels,  et  dont  les  er- 
reurs furent  proscrites  au  concile  de 
Gangre  ;  mais  Baronius  et  presque  tous 
les  critiques  modernes  sont  d'un  avis 
contraire  ,  et  croient  avec  plus  de  vrai- 
semblance ,  que  cet  hérésiarque  était  un 
moine  d'Arménie. 

EUSTATHE,  évêque  de  Thessaloni- 
que  dans  le  12*  siècle,  était  un  habile 
grammairien.  Il  laissa  des  Commentaires 
sur  Homère  et  sur  Denys  le  Géographe. 
Son  travail  sur  le  poète  grec  est  fort 
étendu  et  très  estimable  ;  il  a  saisi  la  force 
et  l'énergie  de  son  original,  et  la  fait 
sentir  à  ses  lecteurs.  Outre  les  notes ,  on 
trouve  dans  son  ouvrage  des  disserta- 
iions  historiques  et  philosophiques  écri- 
tes avec  beaucoup  de  sagacité.  On  lui 
attribue  aussi ,  mais  sans  aucun  fonde- 
ment ,  le  roman  (ÏTsmène  et  Ismc'nie , 
Paris,  1618  ,  in-8  ,  traduit  en  français, 
Paris,  1743  ,  in-8  ,  fig.  Colletet en  avait 
donné  une  en  1636,  in-8.  La  meilleure 
édition  des  commentaires  d'Eustalhe  sur 
Homère,  est  celle  de  Rome,  1542  à  1550, 
en  grec,  4  vol.  in-fol.  Celle  de  Froben  , 
1559  et  1560,  2  vol.  in  fol. ,  est  moins 
estimée.  11  en  a  paru  à  Florence  (  en 
1730,  32  et  35  )  3  vol.  d'une  nouvelle 


EUS 

édition  ,  avec  les  notes  et  les  ttaduclions 
d'Alex.  Politi  et  d'Ant.  Marie  Salvini,  qui 
n'est  pas  achevée.  A  l'égard  des  commen- 
taires sur  Denys  ,  ils  ont  été  souvent 
réimprimés  depuis  1547,  qu'ils  furent 
publiés  par  Robert  Etienne  avec  le  seul 
texte. 

EUSTOCHniM  ou  Eustoghik  (  Sain- 
te), de  la  famille  des  Scipion  et  des  Emile, 
illustre  par  sa  piété  et  par  la  connais- 
sance des  langues ,  fut  disciple  de  saint 
Jérôme.  Elle  suivit  son  maître  en  Orient, 
et  se  renferma  ensuite  avec  Sle.-Paule  , 
sa  mère ,  dans  un  monastère  de  Bethléem, 
dont  elle  fut  supérieure.  Elle  savait  l'hé- 
breu, le  grec,  et  employait  la  plus  grande- 
partie  de  son  temps  à  méditer  les  saintes 
Ecritures.  Ellemourut  en  419.  Vainement 
les  novateurs  ont  voulu  se  servir  de  son 
exemple  ,  pour  mettre  la  Bible  entre  les 
mains  de  tout  le  monde  pour  eu  faire  la 
lecture  habituelle  des  femmes  et  des. 
idiots.  «  Il  est  vrai ,  ditFénélon  dans  son 
«  excellent  discours  sur  la  lecture  dcl'E- 
»  criture  sainte  en  langue  vulgaire,  ({\ïq 
»  les  livres  de  l'Ecriture  sont  les  mêmes  y 
»  mais  tout  le  reste  n'est  plus  au  même 
»  état;  les  hommes  qui  portent  le  nom 
»  de  chrétiens ,  n'ont  plus  la  même  sim- 
»  plicité ,  la  même  docilité  ,  la  même  pré- 
»  paration  d'esprit  et  de  cœur.  Il  fautre- 
»  garder  la  plupart  de  nos  fidèles  comme 
»  des  gens  qui  ne  sont  chrétiens  que  par 
»  leur  baptême  ,  reçu  dans  leur  enfance, 
«  sans  connaissance  ni  engagement  vo- 
»  lontaire;  ils  n'osent  en  rétracter  les 
j)  promesses  ,  de  peur  que  leur  impiété 
«  ne  leur  attire  l'horreur  du  public.  Ils 
»  sont  même  trop  inappliqués  et  trop  in- 
»  différens  sur  la  religion  ,  pour  vouloir 
»  se  donner  la  peine  de  la  contredire.  Ils 
«  seraient  néanmoins  fort  aises  de  trou* 
»  ver  sans  peine ,  sous  leur  main  ,  dans 
»  les  livres  qu'on  nomme  divins ,  de  quoi 
»)  secouer  le  joug  et  flatter  leurs  passions  ; 
))  à  peine  peut-on  regarder  de  tels 
»  hommes  comme  des  catéchumènes.  Les 
«  catéchumènes  qui  se  préparaient  au- 
»  trefois  au  martyre  en  même  temps  qu'au 
»  baptême ,  étaient  infiniment  supérieurs 
j)  à  ces  chrétiens  qui  n'en  portent  le  nom 
»  que  pour  le  profaner....  Eu  notre  temps 


EUS 

M  chacun  est  son  casuiste  ,  chacun  est 
»  son  docteur  ,  chacun  décide  ,  chacun 
«  prend  parti  pour  les  novateurs ,  sous 
»  de  beaux  prétextes,  contre  l'autorité  de 
Il  l'Eglise;  on  chicane  sur  les  paroles, 
»  sans  lesquelles  les  sens  ne  sont  plus  que 
»  de  vains  t'untômes  :  les  critiques  sont 
»  au  comble  de  la  témérité  ;  ils  dessèchent 
n  le  cœur  ;  ils  élèvent  les  esprits  au-des- 
«  sus  de  leur  portée  ;  ils  apprennent  à 
»)  mépriser  Ja  piété  simple  et  intérieure. 
»  Ils  ne  tendent  qu'à  faire  des  philoso- 
»  phes  sur  le  christianisme  et  non  pas 
«  des  chrétiens.  Leur  piété  est  plutôt  une 
»  étude  sèche  et  présomptueuse ,  qu'une 
»  vie  de  recueillement  et  d'humilité.  Je 
t>  croirais  que  ces  hommes  renverseraient 
i>  bientôt  l'Eglise,  si  les  promesses  ne  me 

V  rassuraient  pas.  Les  voilà  arrivés  ces 
M  temps  où  les  hommes  ne  pourront  plus 
«  souffrir  la  saine  doctrine ,  et  où  ils  au- 

V  ront  une  démangeaison  d'oreilles  pour 
"  écouler  les  novateurs.  J'en  conclus 
»  qu'il  serait  très  dangereux  dans  de  telles 
»  circonstances ,  de  livrer  le  texte  sacré 
»  indifféremment  à  la  téméraire  critique 
«  de  tous  les  peuples.  Il  faut  songer  à  ré- 
»  tablir  l'autorité  douce  et  paternelle  : 
>>  il  faut  instruire  les  chrétiens  sur  l'E- 
»  criture ,  avant  que  de  la  leur  faire  lire  : 
»  il  faut  les  y  préparer  peu  à  peu ,  en 
y>  sorte  que  quand  ils  la  liront ,  ils  soient 
»  déjà  accoutumés  à  l'entendre,  et  soient 
»  remplis  de  son  esprit  avant  que  d'en 
»  voir  la  lettre  -.  il  ne  faut  en  permettre 
»  la  lecture  qu'aux  âmes  simples,  doci- 
«  les  ,  humbles  ,  qui  y  chercheront  non 
»>  à  disputer ,  non  à  décider  ou  à  critiquer, 
n  mais  à  se  nourrir  en  silence.  Enfin  ,  il 
»  ne  faut  donner  l'Ecriture  qu'à  ceux  qui 
>j  ne  la  recevant  que  des  mains  de  l'E- 
«  glise,  ne  veulent  y  chercher  que  les  sens 
»  de  l'Eglise  même.  »  Voyez  Algasie  , 
Arodel  (  Thomas  )  ,  Harney  ,  Prodicus. 

EUSTRATE ,  archevêque  de  Nicée  au 
1 2*  siècle  ,  soutint  avec  force  le  senti- 
ment des  Grecs  sur  la  procession  du  St.- 
Esprit ,  dans  un  <r«j7e'qui  se  trouve  ma- 
nuscrit dans  plusieurs  bibliothèques. 
Léon  Allatius  fait  mention  de  cinq  autres 
traités  du  même  auteur  ;  mais  nous  n'a- 
▼ons  rien  d'imprimé  de  lui ,  que  quelques 


EUT  167 

commentaires  sur  Aristote  ,  In  Analyti~ 
ca ,  grœce ,  Venise,  1 534 ,  in-Ibl.  In  Ethi- 
ca,  grœce,  Venise,  153G,  in-fol.  et  la- 
tine, Paris,  1543,  in-fol. 

EUTHYCRATES ,  sculpteur  de  Sicyo- 
ne,  fils  et  disciple  de  Lysippe,  vivait  300 
ans  avant  J.  C.  ;  Il  s'appliqua  principale- 
ment à  observer  lesproportions.  Les  statues 
d'Hercule  et  d'Alexandre  lui  acquirent 
une  grande  réputation,  aussi  bien  que  sa 
Médée ,  qui  était  traînée  dans  un  char  à 
quatre  chevaux.  (  Il  eut  pour  élèves  son 
fils  qui  fut  ensuite  un  peintre  distingué, 
et  Amocrate  qui  le  surpassa  dans  la  sculp- 
ture. ) 

*  EUTHYME  (  Saint  ),  dit  le  Grand,  ar- 
chimandrite naquit  à  Métilène  dans  la  pe- 
tite Arménie  en  377,  fut  d'abord  supé- 
rieur-général de  tous  les  monastères  de 
sa  province ,  devint  abbé  fl'une  multi- 
tude de  solitaires  en  Palestine ,  et  ne  se 
borna  pas  aux  exercices  de  la  vie  monas- 
tique :  il  prêcha  avec  succès  l'Evangile 
aux  Sarrasins  ,  combattit  les  nestoriens 
et  les  eutychiens ,  fit  abjurer  leurs  er- 
reurs à  beaucoup  de  manichéens ,  ramena 
l'impératrice  Eudoxie  à  la  foi  orthodoxe, 
et  devint  l'oracle  de  l'église  d'Orient.  Il 
mourut  le  20  janvier  47  3,  dans  sa  96* 
année.  Son  culte  d'abord  établi  dans  la 
Palestine  passa  dans  les  autres  églises 
d'Orient. 

EUTHYMIUS,  ouEuTHYME,  surnom- 
mé Ze  Syncelle,  patriarche  de  Coustan- 
tinople  ,  natif  d'Isaurie,  fut  mis  l'an  906 
à  la  place  de  Nicolas  le  Mystique ,  que 
l'empereur  Léon  VI  avait  chassé  de  son 
siège.  Il  avait  été  moine.  Ses  vertus  et  son 
mérite  lui  acquirent  l'estime  de  ce  prince, 
qui  le  choisit  pour  son  confesseur  ;  mais 
Alexandre  II ,  successeur  de  Léon ,  bannit 
Euthymius,et  rétablit  Nicolas.  Il  mourut 
en  exil  l'an  920. 

EUTHYMIUS  ZIGABENUS,  moine 
basilien  du  12®  siècle,  composa,  par 
ordre  de  l'empereur  d'Orient ,  un  traité 
contre  toutes  les  hérésies.  Cet  ouvrage, 
intitulé  Panoplie ,  est  une  exposition  et 
une  réfutation  de  toutes  les  erreurs, 
même  de  celles  des  mahométans.  Il  fut 
traduit  en  latin  par  un  chanoine  de  Vé- 
rone en  1 586 ,  et  depuis  U  a  été  inséré 


1^8  EUT 

dans  la  grande  Bibliothèque  des  Pères. 
Oiia  encore  de  ce  savant  moine  des  Cnm- 
nientaires  sur  les  Psaumes  ,  iur  les  Can- 
tiques ,  sur  les  Evnncjiles  ,  littéraux,  mo- 
raux et  allégoriques  ;  mais  ses  allégories 
sont  moins  déraisonnables  que  celles  des 
commentateurs  de  son  temps. 

EUTICHE  ,  Eutichius ,  de  la  ville  de 
Fostat  en  Egypte  ,  joignit  aux  études  ec- 
clésiastiques celle  de  la  médecine,  fut 
fait  patriarche  d'Alexandrie  le  8  février 
933  ,  et  mourut  le  12  mai  940.  Il  a  laissé 
des  aniuilcs  en  arabe  ,  depuis  le  commen- 
cement du  monde  jusqu'en  940,  peu  exac- 
tes pour  l'histoire  et  la  chronologie  ,  ainsi 
que  la  plupart  des  autres  histoires  ara- 
bes. Pocok  les  publia  à  Oxford  en  1659 , 
avec  une  version  latine  ,  en  2  vol.  in-4  , 
et  des  notes.  Selden  prétend  prouver  par 
ces  Annales •,  que  dans  les  premiers  siè- 
cles de  l'Eglise,  il  n'y  avait  point  de  dif- 
férence véritable  entre  les  prêtres  et  les 
évêques  ;  mais  le  savant  Assémani  lui  a 
démontré  le  contraire.  On  a  encore  en 
manuscrit  de  ce  patriarche  1°  Histoire 
des  usurpations  des  Sarrasins  en  Si- 
cile. 2°  Dispute  entre  les  hétérodoxes  et 
les  catholiques  contre  les  jacobites. 
Z°  Trois  discours  sur  le  jeûne  et  la  par- 
que ,  sur  la  fête  des  chrétiens  et  sur  les 
patriarches ,  etc.  4°  QuCiques  ouvrages 
de  médecine. 

EUTOGIUS  d'Ascalon,  commentateur 
^Apollonius  et  à'Archimède  ,  sous  l'em- 
pire de  Justinien ,  est  un  des  mathémati- 
ciens les  plus  intelligens  qui  aient  fleuri 
dans  la  décadence  des  sciences ,  chez  les 
Grecs.  Ses  deux  commentaires  sont  très 
bons ,  et  on  leur  doit  bien  des  traits  sur 
l'histoire  des  mathématiques.  Le  premier 
se  trouve  dans  l'édition  d'Apollonius  par 
Halley  ;  le  second  a  été  publié  à  Bàle , 
grec  et  latin,  en  1544  ,  in-fol. 

EÙTROPE  (  Flavius  Eutropius  ) ,  his- 
torien latin.  On  ignore  d'oîi  il  était ,  et 
qui  il  était.  On  conjecture  qu'il  avait  vu 
le  jour  dans  l'Aquitaine ,  et  l'on  sait  qu'il 
exerça  de  grandes  charges.  Il  ditlui-même 
qu'il  porta  les  armes  sous  Julien ,  dans  sa 
malheureuse  expédition  contre  les  Perses  ; 
mais  le  rang  qu'il  obtint  dans  les  armées 
nous  est  inconnu.  Plusieurs  croieut  qu'il 


EUT 

fut  sénateur,  parce  qu'ils  trouvent  à  la 
tetc  de  son  ouvrage  le  titre  de  clarissimey 
qui  ne  se  donnait  qu'aux  sénateurs.  >'ous 
avons  de  lui  un  Abrégé  de  l'histoire  ro- 
maine, Breviarum  rerum  romanarum,  en 
dix  livres,  depuis  la  fondation  de  Rome, 
jusqu'à  l'empire  de  Valens  ,  auquel  il  le 
dédia.  Eutropeavait  composé  divers  écrits 
sur  la  médecine  sans  être  médecin.  Son 
Histoire  est  le  seul  de  ses  ouvrages  qui 
nous  reste.  Cet  abrégé ,  quoique  court , 
est  assez  bien  fait  ;  lesévénemens  princi- 
paux y  sont  exposés  avec  netteté ,  mais 
sans  élégance.  Cette  histoire  a  été  tra- 
duite en  français  par  Faret ,  1621,  in-18  ; 
par  de  Préfontaine,  1710,  petitin-12;  par 
l'abbé  Lezcau  a  vec  des  notes ,  en  17 1 7  , 
in-12.  Cette  dernière  traduction  a  été 
retouchée  par  de  Vailly  et  réimprimée 
en  1804,  in-12,  avec  le  texte;  mais 
on  a  supprimé  la  plupart  des  notes. 
L'abbé  Paul  en  a  publié  une  nouvelle 
traduction  plus  exacte  en  1809.  La 
première  édition  de  cet  auteur  est  de 
Rome,  1471,  in-folio;  celle  ad  usum 
delphini,  in-4,  est  de  1683.  Il  est  impri- 
mé avec  une  version  grecque  à  Oxford ,  j 
1703,  in-8;à  Leyde,  1729,  in-12,  et  en  1 
1762,  in-8.  M.  de  Line  en  a  donné  une 
édition  latine  en  17  46  ,  à  Paris  chez  Me- 
rigot ,  et  ensuite  chez  Barbou  ,  avec  un 
nouveau  frontispice  sous  la  date  de  1754, 
avec  les  observations  de  Tunuegny.  Le 
Fèvre.  M.  Capperonnier  en  a  publié  en 
1793  une  nouvelle  édition,  in-12,  en  y 
joignant  Aurelius  P^ictor  et  Sextus  Ru- 
fus.  Voyez  Paul  ,  diacre  d'Aquilée. 

EUTROPE ,  fameux  eunuque ,  sous 
l'empire  d'Arcadius ,  et  son  plus  cher  fa- 
vori ,  parv  int  aux  premières  charges ,  et 
fut  même  élevé  au  consulat.  Cette  digni- 
té ,  autrefois  si  émiuente ,  avait  à  la  vé- 
rité été  donnée  à  un  cheval  sous  Caligula  ; 
mais  elle  n'avait  pas  encore  été  avilie  au 
point  d'être  occupée  par  un  eunuque  tel 
qu'Eutrope.  Son  insolence ,  sa  cruauté  et 
sa  lubricité  ,  soulevèrent  tout  le  monde 
contre  lui.  Gainas ,  goth  ,  général  ro- 
main ,  fit  révolter  les  troupes,  et  ne  pro- 
mit de  les  apaiser  qu'à  condition  qu'on 
lui  livrerait  la  tête  d'Eutrope.  Arcadius , 
pressé  d'un  côté  par  la  crainte ,  de  l'autre 


EUT 

par  les  prières  de  sa  femme  Eiidoxie ,  que 
J'eunuqiie  avait  menacée  de  faire  répti- 
tlier,  le  dépouilla  de  toutes  ses  dignités 
et  le  chassa  du  palais.  Eutrope  ,  livré  à 
la  vengeance  du  public ,  se  sauva  dans 
une  église.  On  voulut  l'en  arracher  ;  mais 
saint  Jean-Chrysostômc  apaisa  la  popu- 
lace par  un  sermon  >  qui  passe  pour  un 
■chef-d'œuvre  d'éloquence.  Au  bout  de 
•quelques  jours  il  en  sortit;  on  lui  fit  son 
procès ,  et  il  perdit  la  tête  sur  un  écha- 
/a«d  en  309. 

EUTYCHES ,  hérésiarque  ,  se  relira 
<lès  sa  première  jeunesse  dans  un  monas- 
tère près  de  Constantinople.  Ses  vertus 
•et  ses  lumières  charmèrent  tous  ses  con- 
frères, qui  le  choisirent  d'une  voix  una- 
nime pour  leur  abbé.  Il  passa  toute  sa  vie 
dans  les  CRercices  de  la  pénitence  la  plus 
austère.  Il  ne  sortit  de  sa  solitude  que 
pour  aller  combattre  les  erreurs  de  >'es- 
toritts;  mais  il  tomba  lui-même  dans  une 
hérésie  contraire,  et  non  moins  funeste. 
11  soutenait  que  la  divinité  de  Jésus-Christ 
et  son  humanité  n'étaient  qu'une  nature, 
depuis  l'Incarnation  ;  qu'après  l'union  du 
Verbe  avec  l'humanité ,  il  n'était  resté  en 
J.  C.  que  sa  nature  divine ,  sous  l'appa- 
rence du  corps  humain.  Eusèbe  ,  évêque 
de  Dorjiée,  son  ami  et  son  admirateur, 
ayant  tenté  vainement  de  le  ramener  à  la 
vérité,  se  rendit  son  accusateur  auprès 
du  concile  de  Constantinople,  convoqué 
en  448  par  Flavien,  évêque  de  cette  ville. 
L'hérésiarque  ayant  persisté  dans  ses  sen- 
timens  ,  y  fut  condamné ,  dcpo.se  du  sa- 
cerdoce et  du  gouvernement  de  son  mo- 
nastère,  et  excommunié.  L'austérité  de 
ses  mœurs  lui  avait  fait  des  partisans  ; 
l'eunuque  Chrysaphius,  favori  de  l'em- 
pereur Théodose  le  Jeune,  était  son  ami. 
Il  obtint  de  ce  prince,  qu'on  assemblerait 
uni  autre  concile  pour  revoir  les  actes  de 
celui  de  Constantinople ,  et  que  Dioscore, 
évêque  d'Alexandrie,  autre  partisan  d'Eu- 
tychès  ,  en  aurait  la  présidence.  C'est 
cette  assemblée  qu'on  a  nommée  le  bri- 
gandage d'Ephcse.  Eutychès  y  fut  absous 
sansautre  explication  qu'une  requcteéqui- 
voque  ,  dans  laquelle  il  déclarait  en  géné- 
ral quil  analhématisaittoutes  les  héré.sies. 
Flavien  et  Eiisèbe  ses  adversaires  furent 


EUT  \Cyç) 

non -seulement  déposés,  mais  cruelle- 
ment maltraités.  Marcicn,  successeur  de 
Thcodose  ,  fut  plus  favorable  à  la  doctrine 
catholique.  Il  fit  assembler  en  461  le  con- 
cile de  Chalcédoine,  le  4^  général.  Veu- 
iychianisme  Y  fut  proscrit,  Dioscore  dé- 
posé ,  et  la  paix  rendue  à  l'Eglise.  Mais 
la  secte  ne  laissa  pas  de  subsister  et  d'in- 
triguer par  différentes  chicanes  ;  elle  se 
divisa  en  différentes  branches ,  dont  une 
des  principales  était  celle  des  acéphales, 
ainsi  nommés,  parce  qu'ils  étaient  d'a- 
bord sans  chef  ,  également  séparés  de 
l'église  catholique,  et  de  Pierre  Jîoug, 
faut  patriarche  d'Alexandrie ,  le  boute- 
feu  de  l'eutychianisme.  Marcicn  connais- 
sant l'esprit  querelleur  et  pointilleux  de.s 
Grecs,  fit  plusieurs  lois  pour  défendre  de 
disputer  publiquement  sur  la  religion. 
Ses  édits  ne  purent  arrêter  la  fureur  dog^ 
matiquedeseutychiens.  Il  en  fut  de  leurs 
erreurs  comme  de  celles  des  nesloriens. 
Le  mal  se  perpétua  de  génération  en  gé- 
nération ;  et  cette  secte,  connue  aujour^- 
d'hui  sous  le  nom  de  jncobitcx ,  domine 
encore  en  Ethiopie,  et  est  répandue  en 
Egypte  et  en  Syrie.  Les  philosophes  mo- 
dernes, toujours  lestes  en  raisonncmcns 
lorsqu'il  s'agit  de  religion,  ont  prétendu 
que  l'eutychianisme  n'était  qu'une  affaire 
de  mots;  il  est  aisé  de  voir  qu'en  niant 
deux  natures  en  Jésus-Christ,  cette secte^ 
anéantissait  le  mystère  de  l'Incarnation. 
«  Tout  ce  mystère  ,  dit  un  théologien  ,  est 
»  fixé  avec  uneprécision  si  exacte,  qu'oi» 
))  ne  peut  rien  dire  de  plus  ou  de  moins» 
»  sans  qu'on  aperçoive  l'écart  ;  ce  qu'on 
»  remarque  surtout  d?.ns  la  doctrine  lu- 
«  mineuse  (jue  la  théologie  appelle  com- 
M  miinicaiinn  d^idiômcs.  Si  l'hérétique 
»  veut  se  déguiser,  s'il  cherche  à  s'enve- 
j)  lopper,  je  le  poursuis  dans  tous  ses  faux- 
)>  fuyons  :  je  Je  serre  de  près  et  je  ne 
»  quitte  pas  prise  qu'il  ne  se  soit  expli- 
M  que  nettement  pour  ou  contre  la  véritt; 
î)  révélée.  »  t^oycz  Ar.ius  ,  CsEtLius,  Kes- 
Tonius  ,  SootN  (  Lélie  et  Fauste  ). 

EUTYCHIEN  ,  pape  et  martyr,  suc- 
céda à  Félix,  en  janvier  27  5.  Il  ordonna 
f[ue  l'on  ensevelirait  les  corps  des  mar- 
tyrs dans  dc&  luniquc-î  de  pojM'pre.  Il  fui 
martvrisé  le  8  décembre  233. 


i7«  ET  A 

EUTYCHICS.  frayez  EoTTCHk». 

EUTYQUE  ,  Eutychius ,  patriarche 
de  Côtistanlinople ,  présida  au  concile 
écuménique  de  cette  ville  en  553.  Il  avait 
été  d'abord  moine  d'Amasée  dans  le  Pont; 
il  fut  élevé  sur  le  siège  de  Constantinople 
par  Justiiiien  ,  à  qui  il  avait  plu.  Cet  em- 
pereur étant  tombé  dans  l'erreur  des  in- 
corruptibles (  qui  soutenaient  que  le  corps 
de  Jésus-Christ ,  n'avait  été  susceptible 
d'aucune  altération  ,  et  n'avait  jamais  en- 
duré la  faim  ,  la  soif,  ni  aucun  autre  be- 
soin naturel  ),  consacra  celte  rêverie  dans 
un  édit.  Eutyque  refusa  de  le  signer,  et 
fut  disgracié  et  exilé  l'an  565 ,  après  avoir 
été  déposé  dans  un  synode.  A  la  mort  de 
Justinien  ,  il  fut  rétabli  sur  son  siège.  Ce 
fut  alors  qu'il  composa  un  Traite  de  la 
Résurrection ,  dans  lequel  il  soutenait 
que  le  corps  des  ressuscites  serait  si  dé- 
lié ,  qu'il  ne  pourrait  plus  être  palpable. 
La  fureur  des  Grecs  dans  ce  siècle  et  dans 
les  suivans  ,  fut  de  disputer  sans  relâche 
sur  des  questions  que  l'ignorance  hu- 
maine ne  pouvait  résoudre,  et  sur  les- 
quelles la  Divinité  n'a  rien  révélé.  Saint 
Grégoire,  député  du  pape  Pelage  II,  dé- 
trompa Eutyque  de  son  erreur.  Ce  pa- 
triarche mourut  peu  de  temps  après  en 
582,  à  l'âge  de  70  ans  ,  après  avoir  fait 
sa  profession  de  foi  en  présence  de  l'em  - 
pereur,  et  dit  en  prenant  sa  peau  avec  sa 
main  :  «  Je  confesse  que  nous  ressusci- 
w  terons  tous  en  cette  même  chair.  » 

EUZOIUS ,  diacre  d'Alexandrie  ,  fut 
déposé  en  même  temps  qu'Arius  par  saint 
Alexandre ,  évêque  de  cette  ville ,  et  con- 
damné au  concile  de  Nicée;  mais  ayant 
présenté  en  335  à  l'empereur  Constantin 
une  confession  de  foi ,  orthodoxe  en  ap- 
parence, il  fut  nommé  évêque  d'Antioche, 
l'an  361  ;  ce  qui  fut  cause  que  les  catho- 
liques commencèrent  à  tenir  leurs  assem- 
blées à  part  ;  c'est  lui  qui  baptisa  l'empe- 
reur Constance.  Il  mourut  en  376. 

EVAGORAS  I,  roi  de  Chypre,  reprit 
la  ville  de  Salamine  qui  avait  été  enlevée 
à  son  père ,  et  se  prépara  à  se  défendre 
contre  Artaxercès,  roi  de  Perse,  qui  lui 
avait  déclaré  la  guerre.  Il  arma  sur  terre 
et  sur  mer.  Secouru  par  les  Tyriens ,  les 
Egyptiens  et  les  Arabes,  il  fut  d'abord 


•ETA 

vainqueur.  Il  se  rendit  maître  des  vais- 
seaux qui  apportaient  des  vivres  à  l'enne- 
mi ,  et  fit  beaucoup  de  ravage  parmi  les 
Perses.  Le  sort  des  armes  changea.  Gaos, 
général  persan,  lit  périr  une  partie  de  sa 
flotte ,  mit  le  reste  en  fuite ,  pénétra  dan» 
l'île ,  et  assiégea  Salamine  par  mer  et 
par  terre.  Evagoras  n'obtint  la  paix  qu'à 
condition  qu'il  se  contenterait  de  la  seule 
ville  de  Salamine  ,  que  les  autres  places 
de  l'île  appartiendraient  au  roi  de  Perse, 
qu'il  lui  payerait  un  tribut ,  et  qu'il  ne 
traiterait  avec  lui  que  comme  un  vassal 
avec  son  seigneur.  Evagoras  fut  assas- 
siné peu  de  temps  après ,  l'an  375  avant 
J.  C,  par  un  eunuque.  «  C'était,  dit  un 
»  historien ,  un  prince  sage ,  modéré , 
»  sobre,  courageux.  Il  avait  une  gran- 
u  deur  d'âme  digne  du  trône.  Mais  ce 
»  qu'il  y  avait  de  plus  royal  en  lui,  et 
»  qui  lui  attirait  pleinement  la  confiance 
»  de  ses  sujets ,  de  ses  voisins ,  et  même 
»  de  ses  ennemis,  était  sa  sincérité  et  la 
»  haine  qu'il  témoignait  pour  tout  dégul- 
»  sèment  et  mensonge.  »  On  lui  reproche 
néanmoins  d'avoir  employé ,  contre  la 
foi  des  sermens,  la  force  et  la  politique^ 
pour  rentrer  dans  tous  les  états  que  son 
père  avait  possédés ,  et  dont  une  partie 
appartenait  aux  Perses  par  droit  de  con- 
quête. 

EVAGORAS  II,  petit-fîls  du  précé- 
dent, et  fils  de  Nicoclès,  fut  dépouillé  du 
royaume  de  Salamine  par  son  oncle  pa- 
ternel Protagoras.  Il  eut  recours  au  roL 
Artaxercès  Ochus,  qui  lui  donna  une 
souveraineté  en  Asie ,  plus  étendue  que 
celle  qu'il  avait  perdue.  Ce  prince ,  ayant 
été  accusé  auprès  de  son  bienfaiteur,  fut 
obligé  de  s'enfuir  dans  l'île  de  Chypre  , 
où  il  fut  mis  à  mort. 

EVAGRE  (S.),  patriarche  de  Con- 
stantinople, élu  en  370  par  les  orthodo- 
xes, après  la  mort  de  l'arien  Eudoxe,  fut 
chassé  de  son  siège  et  exilé  par  l'empe- 
reur Yalens.  Son  élection  fut  l'origine 
d'une  persécution  contre  les  catholiques. 
S.  Grégoire  de  ^'azianze  l'a  décrite  élo- 
quemmcnt  dans  un  de  ses  discours. 

EVAGRE ,  patriarche  d'Antioche ,  fut 
mis  à  la  place  de  Paulin  ,  en  389.  Flavien 
avait  succédé  dès  38 1  à  Mélèce;  de  façon 


EVA 

qu'Ëvagre  ne  fut  reconnu  évèque  ,  quo 
par  ceux  qui  étaient  restés  du  parti  de 
Paulin.  Cette  scission  continua  le  schisme 
dans  l'église  d'Antioche.  Le  pape  Sirice 
fit  confirmer  l'élection  d'Evagre  dans  le 
concile  de  Capoue  en  390.  Ce  patriarche 
mourut  deux  ans  après.  Saint  Jérôme,  son 
ami ,  assure  que  c'était  un  esprit  vif.  Il 
composa  quelques  ouvrages.  On  ne  lui 
donna  point  de  successeur,  et  ceux  de 
son  parti  se  réunirent ,  après  quelques 
difficultés,  à  ceux  du  parti  de  Flavien. 

EVAGRE  du  Pont,  dans  l'Asie-Mi- 
neure ,  vivait  vers  la  fin  du  4*  siècle.  On 
lui  attribue  le  deuxième  livre  de  la  Vie 
des  Pères,  et  plusieurs  autres  ouvrages 
infectés  des  erreurs  d'Origène,  qui  furent 
traduits  en  latin  par  Rufin. 

EVAGRE,  né  àEphiphanie  en  Syrie 
vers  l'an  536  ,  fut  appelé  le  scolastique  : 
c'était  le  nom  qu'on  donnait  alors  aux 
avocats  plaidans.  Evagre  exerça  cette  pro- 
fession. Après  avoir  brillé  quelque  temps 
dans  le  barreau  d'Antioche,  il  fut  fait 
questeur  et  garde  des  dépêches  du  préfet. 
L'église  lui  doit  une  Histoire  ecclésiasti- 
que en  16  livres,  qui  commence  oîi  So- 
crate  et  Théodoret  finissent  la  leur,  c'est 
à-dire  vers  l'an  431  ;  Evagre  a  poussé  la 
sienne  jusqu'en  594 .  Elle  est  fort  étendue, 
et  appuyée  ordinairement  sur  les  actes 
originaux  et  les  historiens  du  temps.  Son 
stile ,  un  peu  diffus  ,  n'est  pas  pourtant 
désagréable  :  il  a  assez  d'élégance  et  de 
politesse.  Evagre  paraît  plus  verse  dans 
l'histoire  profane  ,  que  dans  l'ecclésicisti- 
que.  On  croit  s'apercevoir  en  lisant  son 
histoire,  qu'il  donnait  dans  les  erreurs 
d'Eutychès.  Robert  Etienne  avait  donné 
l'original  grec  de  cet  historien  ,  sur  un 
seul  manuscrit  de  la  bibliothèque  du  roi- 
Son  édition  a  été  éclipsée  par  celle  du 
savant  Henri  Valois,  qui  avait  eu  sous  les 
yeux  deux  manuscrits.  Celle-ci  est  enri- 
chie d'une  nouvelle  version  et  de  savantes 
notes,  Paris,  1673,  in -fol.  Elle  a  été 
réimprimée  à  Cambridge  en  1720. 

•  EVANGELI  (  Antoine  ) ,  poète  et  lit- 
térateur italien,  né  à  Cividale,  dans  le 
Frioul ,  en  1742  ,  entra  chez  les  religieux 
somasques  à  Venise ,  où  il  avait  fait  ses 
premières  études ,  et  où  il  fut  employé  à 


EVA  171 

renseignement.  Il  occupa  la  chaire  de 
belles-lettres  à  Padoue  pendant  plus  de 
30  ans,  et  se  retira  à  Venise  dans  la  mai- 
son professe  de  son  ordre ,  où  il  mourut 
le  28  janvier  1 805.  Ou  a  de  lui  :  1°  Amor . 
musico ,  poemelto  in  otlava  rima ,  Pa- 
doue ,  1776.  2°  Poesieliriche  délia  Bib- 
bia  esposte  in  vcrsi  italiani ,  Padoue , 
1793.  On  y  admire  la  vigueur  et  la  fidé- 
lité avec  laquelle  il  a  rendu  les  beautés 
de  l'Ecriture.  3°  Scella  cTorazioni  italia- 
ne  de  migliori  scrillori ,  Venise,  1796  , 
2  vol.  in-8.  Ce  choix,  fait  avec  beaucoup 
de  soin  ,  est  bon  pour  former  le  goût  dé 
la  jeunesse.  On  lui  doit  encore  la  publi- 
cation des  leçons  latines  de  VElliica  de 
Steliini,  dont  il  mit  en  ordre  les  manu- 
scrits, et  des  opère  varie,  du  même  Stel- 
iini ,  qu'il  a  enrichis  de  notes  savantes. 
Steliini  avait  été  son  guide  dans  ses  étu- 
des littéraires. 

EVANS  (  Corneille  ) ,  imposteur,  natif 
de  Jlarseille,  voulut  jouer  un  rôle  pen- 
dant les  guerres  civiles  d'Angleterre.  Il 
était  fils  d'un  anglais  de  la  principauté' 
de  Galles,  et  d'une  provençale.  Sur  quel- 
que air  de  ressemblance  qu'il  avait  avec 
le  fils  aîné  de  Charles  I ,  il  fut  assez  hardi 
pour  se  dire  le  prince  de  Galles.  Ce  fourbe 
fit  accroire  au  peuple  qu'il  s'était  sauvé  ds 
France,  parce  que  la  reine  sa  mère  avait  eu 
dessein  de  l'empoisonner.  Il  arriva  le  1 3 
mai  1648  dans  une  hôtellerie  de  Sand- 
wick,  d'où  le  maire  le  fit  conduire  dans 
une  des  maisons  les  plus  distinguées  de 
la  ville  ,  pour  y  être  servi  et  nourri  en 
prince.  Sa  fourberie  fut  dévoilée.  Le  che- 
valier Thomas  Dishington ,  que  la  reine 
et  le  véritable  prince  de  Galles  avaient 
envoyé  en  Angleterre,  voulut  voir  le  pré- 
tendu roi.  Il  l'interrogea ,  et  ses  réponses 
découvrirent  son  imposture.  Cet  impu- 
dent ne  laissa  pas  de  soutenir  effronté- 
ment son  personnage  ;  comme  les  roya- 
listes allaient  le  faire  saisir,  il  prit  la  fuite. 
On  l'atteignit ,  et  il  fut  conduit  à  Cantor- 
béri ,  et  enfin  dans  la  prison  de  îN'ewgate 
à  Londres  ,  d'où  il  trouva  encore  le 
moyen  de  s'évader ,  et  ne  parut  plus.  Ou 
ne  sait  pas  ce  qu'il  devint. 

•  EVANSON  (  Edouard  ) ,  thëologictt 
anglais,  né  k  Warington  en  1731  , obtint 


ï7a  EVE 

plusieurs  LëiiéAccs ,  ciitru  autres  la  cure 
de  Tewkesbury,  qu'il  fut  obligé  de  rési- 
gner Gu  1778,  pour  avoir  prêché  uu  ser- 
mon en  faveur  d'une  réforme  à  faire  dans 
la  doctrine  de  l'éjjlise  anglicane ,  relati- 
vement à  la  Trinité  et  à  l'Incarnalioii.  11 
publia  à  ce  sujet  un  ouvrage  en  1772.  On 
encore  de  lui  1  "une  Lettre  xurles pvoplie'- 
iies  du  nouveau  Testament,  1777,  in-8. 
2°  Argument  pour  et  contre  F  observation 
sabbatique  du  dimanche  par  la  cessation 
de  tout  travail,  1792,  in-8.  3°  Disso- 
nance des  quatre  évangiles.  II  exclut  du 
eanon  de  l'Ecriture  les  évangiles  de  saint 
îlattliicu,  saint  Marc  et  saint  Jean,  et 
u'admet  comme  authentique  que  celui  de 
saint  Luc  ,  du  moins  dans  sa  plus  grande 
partie.  Ce  théologien  était  du  nombre  des 
enquirers  ,  et  secondait  Priestley  dans 
ses  recherches  sur  ce  que  ces  demi-incré- 
dules appelaient  les  corruptions duchris- 
tiànisme.  Evanson  est  mort  à  Collbrd , 
uu  comté  de  Gioccslcr,  le  25  septembre 
Ï805. 

EVARIC  ou  EuRio,  7"  roi  des  Goths 
ca  Espagne,  fils  de  Théotloric  I ,  et  frère 
de  Théodoric  II,  auquel  il  succéda  en 
46C,  ravagea  la  Lusitanie  ,  la  haute  Es- 
pagne et  la  Navarre  ,  prit  Arles  et  Mar- 
seille ',  mit  le  siège  devant  Clermont  ;  dé- 
fit l'empereur  Anthémius ,  secouru  des 
Bretons;  pilla  l'Auvergne,  leBerry,la 
Touraine  et  la  Provence  ',  et  mourut  à  Ar- 
les en  48.5.  (  Il  fit  un  recueil  des  anciennes 
lois  et  en  ajouta  de  nouvelles:  on  lui  re- 
proche la  mort  de  son  frère  Théodoric 
et  la  persécution  contre  les  catholiques  ; 
il  était  attaché  à  l'arianisme. } 

EVARISTE  ,  pape  et  successeur  de 
saint  Clément  l'an  lOOdeJ.  C,  marcha  sur 
les  traces  de  son  prédécesseur,  et  mourut 
saintement  le2G  ou  27  octobre  109.  Sous 
son  pontificat,  l'Eglise  fut  attaquée  au 
dehors  par  la  persécution  de  Trajan ,  et 
déchirée  au  dedans  par  divers  hérétiques. 
Quelques  auteurs  ecclésiastiques  attri- 
buent à  ce  pape  l'établissement  djEs  pa- 
roisses de  Rome.  Saint  Alexandre  lui  suc- 
céda. 

EVE,  la  première  des  femmes,  fut 
ainsi  nommée  par  Adam  ,  -son  mari ,  le 
premier  des  hommes.  Dieu  la  forma  lui- 


EVE 

même  d'une  des  côtes  d'Adam ,  et  la  plaça 
dans  le  jardin  des  délices,  d'Dù  elle  fui 
chassée  pour  avoir  désobéi  à  Dieu  qui 
avait  mis  sa  fidélité  et  son  obéissance  ii 
l'épreuve  {voyez  Adam  ).  Il  faut  que  ITiis- 
toire  d'Eve  séduite  par  le  démon ,  revêtu 
de  la  figure  du  serpent,  soit  d'une  con- 
naissance et  d'une  croyance  bien  an- 
ciennes parmi  les  nations  païennes ,  puis- 
que la  fable  d'Ophionée  (  voyez  ce  mot  ) 
est  indubitablement  greffée  sur  cetévéne- 
nient  et  sur  la  chute  des  anges  qu'il  sup- 
pose.... Les  rabbins  ont  conté  mille  fables 
sur  !a  mèi'C  du  g^enre  humain  ;  quelques 
commentateurs  imbéciles  ou  fanatiques 
les  ont  répétées;  elles  ne  méritent  que 
le  mépris.  La  manière  dont  la  formation  J 
d'Eve  est  racontée  dans  ruisloire  sainte,  ' 
a  donné  lieu  à  quelques  raillciùes  froides, 
et  à  des  imaginations  bizarres  qui  ne  va- 
lent pas  la  peine  d'être  réfutées  ;  mais 
c'est  une  grande  leçon  donnée  au  genre 
humain.  Dieu  a  voulu  par  là  faire  con- 
naître à  la  femme  la  supériorité  de 
l'homme  de  qui  elle  a  été  formée  ;  à 
l'homme  ,  combien  sa  compagne  doit  lui 
être  chère,  puisqu'elle  est  une  partie  de 
sa  propre  substance  ;  et  à  tous  les  deux , 
qu'ils  doivent  conserver  entre  eux  l'union 
la  plus  étroite,  de  laquelle  dépend  leur 
bonheur  et  celui  de  leurs  enfans.  «Toutes 
»  les  épigrammes  de  nos  beaux  esprits, 
«  dit  un  vrai  philosophe ,  sur  la  création 
«  et  sur  l'état  de  nos  premiers  parens, 
»  sont  un  jeu  bien  puéril.  Deux  créatures 
»  innocentesplacéesparla  main  de  Dieu, 
w  sur  un  sol  riant  et  de  facile  culture  : 
»  voilà  l'homme  dans  son  origine.  Dé- 
»  généré  depuis ,  il  a  appelé  les  arts  à 
»>  son  secours  ;  mais  ces  légers  adoucis- 
»  semens  ne  compensent  pas  les  dons  de 
»  la  nature  et  de  la  grâce ,  versés  sur  lui 
M  avec  profusion.  Que  ces  hommes  qui  ne 
»  veulent  pas  croire  nos  Ecritures  ,  nous 
«disent  d'où  vient  l'homme  ici -bas? 
M  De  quelque  manière  qu'ils  arrangent 
»  cette  création  ,  elle  sera  toujours  aussi 
»  étonnante quelcrécitdeMoyse.  y>[Foy. 

MOYSE  ). 

EVEILLON  (Jacques),  savant  et  pieux 
chanoine  et  grand-vicaire  d'Afigers,  sa 
patrie ,  sous  quatre  évêquc  différcns  ,  né 


en  1582,  mourut  en  IGol  ,  amèrement 
pleuré  des  pauvres  dont  il  était  le  père. 
I!  légua  sa  bibliollièque  aux  jésuites  de  La 
Flèche  :  c'était  toute  sa  richesse.  Comme 
on  lui  reprochait  un  jour  qu'il  n'avait 
point  de  tapisseries  :  «  Quand  ,  en  hiver, 
»  j'entre  dans  ma  maison  ,  répondit-ii , 
w  les  murs  ne  me  disent  pas  qu'ils  ont 
»  froid  ;  mais  les  pauvres  qui  se  trou- 
w  vent  à  ma  porte  ,  tout  tremblans  ,  me 
»  disent  qu'ils  ont  besoin  de  vêtemens.  » 
Malgré  la  multitude  des  affaires,  et  une 
rigoureuse  exactitude  au  chœur,  il  don- 
nait beaucoup  de  momens  à  son  cabinet. 
Les  principaux  fruits  de  ses  travaux  sont  : 
i°J)e  Proccssionibuseccle.siasticis,  in-8, 
Paris,  lG'i5.  L'auteur  remonte,  dans  ce 
savant  traité,  à  l'origine  des  processions  ; 
il  en  examine  ensuite  le  but,  l'ordre 
et  les  cérémonies.  2''  De  recta  psallendi 
rnlionc,  in-4,  La  Flèche,  1646.  Ce  devrait 
être  le  manuel  des  chanoines.  3"  Traite 
des  excommunications  et  des  monitoires, 
in-4,  Angers,  t751,  et  réimprimé  à  Paris 
en  1672  ,  dans  le  même  format.  Le  docte 
écrivain  y  réfute  l'opinion  assez  commu- 
nément établie,  que  l'excommunicatiou 
ne  s'encourt  qu'après  la  fulmination  de 
l'agrave.  Son  sujet  y  est  traité  à  fond  ; 
mais  il  a  trop  négligé  ce  qui  regarde 
l'ancien  droit  et  l'usage  de  l'Eglise  des 
premiers  siècles.  Il  avait  été  fort  jeune 
professeur  de  rhétorique  à  Nantes ,  curé 
à  Soulerre  pendant  13  ans,  puis  curé  de 
SI. -Michel  à  Angers,  chanoine  en  1620. 
EVELIN  ou  EvELYiN  (  Jean  ) ,  né  à 
Wolton  dans  le  comté  de  Surrey  ,  l'an 
1G20,  partagea  son  temps  entre  les  voya- 
ges et  l'étude.  Il  obtint  pour  l'université 
d'Oxford  les  marbres  d'Arundel  ;  et  en- 
suite pour  la  société  royale,  la  biblio- 
thèque môme  de  ce  seigneur.  Evelin  avait 
plus  d'une  connaissance  :  la  peinture, 
la  gravure  ,  Jes  antiquités,  le  commerce, 
etc. ,  lui  étaient  familiers.  Les  livres  que 
nous  avons  de  lui  en  sont  une  preuve  : 
J"  Sculptura,  1662,  in-8.  Cet  ouvrage 
concernant  la  gravure  eu  cuivre  contient 
les  procédés  et  l'historique  de  cet  art  ;  il 
mériterait  d'être  traduit.  2"  Sylva,  16TJ, 
in-fol.  Il  y  traite  de  la  culture  des  arbres. 
3"  L'origine  et  les  progi  es  de  la  naviga- 


EVE  173 

lion  et  du  commerce ,  en  anglais ,  in-8  , 
1674.  4"  Nitmismata ,  in-folio,  1667. 
C'est  un  discours  sur  les  médailles  des 
anciens  et  des  modernes.  Sa  nation  lui 
doit  la  traduction  de  quelques  bons  ou- 
vrages français,  tels  que  Le  parfait  Jar- 
dinier de  La  Quintinie,  et  des  Traités  de 
l'architecture  de  Cambray.  Il  mourut  le 
24  mars  1705. 

EVENSSON  (David),  savant  théolo- 
gien suédois,  né  l'an  1699,  fut  pasteur 
à  Kiobing  dans  la  Westmanie  ,  et  chape- 
lain du  roi  de  Suède.  Il  mourut  en  1  7  50, 
laissant  plusieurs  dissertations  estimées 
par  ceux  de  sa  communion,  entre  autres  : 
1°  Deportione  pauperibus  relinquendâ. 
2"  Ve  aquis  supra  cœlestibus.  3°  De 
prœdestinatione  ,  etc. 

EVEINUS  III ,  roi  d'Ecosse  après  Eder 
son  père,  était  si  vicieux,  que  pour  au- 
toriser son  libertinage,  il  ordonna  par 
une  loi  expresse,  qu'un  homme  aurait 
autant  de  femmes  qu'il  pourrait  en  nour- 
rir ;  que  les  rois  auraient  droit  sur  les 
femmes  des  nobles ,  et  que  les  genlils- 
hommes  seraient  maîtres  des  femmes  du 
peuple.  Ce  prince  cruel ,  avare  et  san- 
guinaire, aliéna  tous  les  cœurs.  Les  grands 
du  royaume  s'étant  soulevés  contre  lui, 
le  mirent  dans  une  prison,  où  il  fut  étran- 
glé quelque  temps  après.  Son  règne  ne 
fut  que  de  7  ans. 

EVEPHENE,  philosophe  pythagori- 
cien ,  condamné  à  mort  par  Denys,  tyran 
de  Syracuse,  pour  avoir  détourné  les  Mé- 
tapontains  de  son  alliance.  Il  demanda 
permission,  avant  que  de  mourir,  d'aller 
dans  son  pays  pour  marier  une  sœur.  Le 
tyran  lui  demanda  quelle  caution  il  don- 
nerait ?  Il  offrit  Eucrite  son  ami ,  qui  de- 
meura à  sa  place.  On  admira  l'action 
d'Eucrite  ;  mais  on  fut  beaucoup  plus  sur- 
pris du  retour  d'Evéphène,  qui  se  pré- 
senta à  Denys  au  bout  de  six  mois,  comme 
on  était  convenu.  Alors  le  tyran,  charmé 
de  la  vertu  de  ces  deux  amis,  leur  rendit 
la  liberté  et  les  pria  de  les  admettre  pour 
troisième  dans  leur  amitié.  On  raconte  la 
même  chose  de  Damou  et  de  Pythias.  Il 
peut  se  faire  que  les  mêmes  sentimens 
aient  inspiré  les  mêmes  vertus  à  des  per- 
sonnes dîffcrciî'es  ;  mais  il  est  plusappa- 


174  EVR 

rent  que  la  fabuleuse  antiquité  a  fait  deux 
histoires  d'un  seule ,  ou  qu'elles  sont  tou- 
tes les  deuxcontrouvées. 

EVERARD.  Foyez  GRuniufe,  Second. 

EVILMÉRODAC,  roi  de  Babylone, 
succéda  à  son  père  Nabuchodonosor,  vers 
l'an  6G2  avant  J.  C.  Ce  jeune  prince  avait 
gouverné  despotiquement  le  royaume 
pendant  les  sept  années  de  la  démence 
de  son  père.  Kabuchodonosor  étant  re- 
monté sur  le  trône  après  avoir  recouvré 
la  raison  ,  arrêta  toutes  les  entreprises  de 
son  fils  contre  lui;  il  le  tint  enfermé.  Ce- 
lui-ci, dans  sa  prison',  lia  une  étroite 
amitié  avec  Jécbonias,  roi  de  Juda,  que 
Nabuchodonosor  tenait  aussi  dans  les 
fers.  Ce  prince  étant  mort ,  Evilmérodac 
monta  sur  le  trône ,  tira  Jécbonias  de 
prison  ,  et  le  combla  de  faveurs.  On  dit 
qu'il  eut  la  cruauté  de  priver  de  la  sépul- 
ture le  corps  de  son  père,  et  même  qu'il 
le  fit  hacher  en  morceaux.  Il  fut  assas- 
siné par  son  beau-frère  Kéréglissor,  après 
un  règne  de  deux  ans. 

EVRARD  ,  Everhardus,  célèbre  er- 
mite du  pays  de  Trêves ,  passa  sa  jeunesse 
à  garder  les  troupeaux  ,  et  sanctifia  cette 
paisible  et  innocente  occupation  par  la 
prière  et  les  vertus  chrétiennes.  Il  se  re- 
tira ensuite  dans  la  solitude  d'une  mon- 
tagne voisine ,  pour  ne  plus  songer  qu'à 
Dieu.  Sa  cellule  est  devenue  l'origine 
d'une  grande  abbaye  de  chanoines  ré- 
guliers de  Saint-Augustin ,  fameuse  par 
le  concours  des  pèlerins  qui  viennent  y 
invoquer  la  Sainte  Vierge.  «  Lebon  Ever- 
»  hardus,  dit  un  voyageur,  paraîtra  sans 
»  doute  n'avoir  pas  été  bien  philosophe. 
»  Cependant  l'image  de  la  Vierge  qu'il  a 
»  placée  en  ce  lieu,  entretient  la  piété 
»  et  le  précieux  sentiment  de  la  religion 
»  parmi  des  hommes  assemblés  là  où  il 
»  n'y  avait  que  des  haies  et  des  bruyères, 
n  II  en  a  résulté  un  monastère  qui  fait 
»  du  bien  à  tous  les  environs  ,  qui  nourrit 
»  et  loge  les  voyageurs;  oii  deS  hommes 
»  ayant  des  mœurs ,  de  la  probité ,  de  la 
«bienfaisance,  chantent  avec  édifica- 
»  tion  les  louanges  de  l'Eternel.  Tous 
»  les   écrits    des  philosophes  n'ont  pas 

V  encore  produit   tant  de  bien.  Il  s'en 

V  faut  de  beaucoup.  »  C'est  près  de  cette 


EXI 

abbaye,  nommée  Everhardus  Clauss 
(  Cellule  d'Evrard  ) ,  que  les  Français 
furent  défaits  par  M.  de  Seckendorflf,  gé- 
néral des  impériaux,  le  19  octobre  1735. 

EVREMONT.  roy.  Saint-Evrkmont. 

EVREUX  (  Robert ,  comte  d'  ).  rayez 
Robert,  second  fils  de  Richard,  dans 
lequel  vous  trouverez  les  diiférentes  mu- 
tations du  comté  d'Evreux.  1 

*  EWALD  (  Jean  ) ,  poète  danois  ,  né     1 
en  1 7  43  dans  le  duché  de  Slesvviek,  mort     1 
en  1781  ,  a  laissé  1°  des  trage'dies,  parmi      j 
lesquelles  on  cite  la  Mort  de  Ji aider , 
dont  le  sujet  est  tiré  de  la  mythologie 
Scandinave  ;  et  qui  est  un  des  chefs-d'œu- 
vre de  la  littérature  danoise;  Bolf  ou 
liollon  ,  tirée  de.  l'histoire  ancienne  du 
Danemarck  ;  Adam  et  Eve,  ou  la  chute  de 
l'homme  ,  drame  oii  l'on  trouve  de  beaux 
passages.  2"Deuxpastoralesles  Pécheurs, 

et  Phile'mon  et  Baucis.  3°  Des  odes  ou 
chants  lyriques.  4°  Des  élégies  très  esti- 
mées. Celle  intitulée  V Espérance  et  le 
souvenir,  peut  être  comparée  à  ce  que  les 
modernes  ont  de  plus  beau  en  ce  genre.  | 
On  a  fait  une  belle  édition  de  ses  OEuvres  ''  j 
complètes  en  4  vol.  in-8,  Copenhague , 
17  81-91,  avec  des  gravures  de  Chodo- 
■wiecki. 

*  EWALD  (  Le  général  ) ,  frère  du  pré- 
cédent ,  né  en  1726 ,  fut  lieutenant-géné- 
ral des  armées  danoises  ,  et  ofiicier  de  la 
Légion  d'honneur.  Après  avoir  fait  ses 
premières  armes  en  Amérique ,  au  service 
du  landgrave  de  Hesse  ,  et  perdu  un  œil 
dans  cette  campagne ,  il  entra  au  service 
du  gouvernement  danois.  A  la  tète  d'un 
corps  de  troupes  danoises  et  hollandaises, 
il  poursuivit  le  fameux  major  Schill ,  qui 
faisait  la  guerre  contre  la  France  en  son 
propre  nom ,  et  qui  avait  déjà  remporté 
plusieurs  avantages  sur  les  troupes  en- 
voyées contre  lui  ;  il  le  força  de  se  renfer- 
mer dans  Stralsund  ;  Ewald  emporta  la 
place  d'assaut ,  et.  le  brave  Chili ,  avec  la 
plupart  de  ses  of&ciers ,  tous  nobles  prus- 
siens, périrent  dans  ce  combat.  Le  géné- 
ral Ewald  mourut  à  Riell,  le  28  mai  1813. 
On  a  de  lui  un  ouvrage  très  estimé  sur  la 
guerre  des  troupes  légères. 

*  EXIMENO  (  Don  Antoine  ) ,  savant 
jésuite  espagnol ,  né  en  17  32  à  Balbastro 


J 


EXP 

dans  l'Aragon,  fut  chargé  d'enseigner  les 
mathématiques  et  l'artillerie  aux  jeunes 
seigneurs  élevés  à  l'école  de  Salamanque, 
puis  à  celle  de  Ségovie.  En  commenrant 
son  cours  en  17G2,  il  leur  adressa  un 
discours  sur  la  nécessite  d'e'tudier  Vart 
de  la  guerre  par  principes;  et  publia  pour 
leur  instruction  plusieurs  ouvrages  esti- 
més. A  la  suppression  des  jésuites  il  passa 
en  Italie,  et  se  fixa  à  Rome,  oii  il  conti- 
nua de  consacrer  tous  ses  momens  à  l'é- 
tude des  sciences.  Il  s'y  occupa  surtout  de 
musique ,  et  composa  sur  cet  art  un  ou- 
vrage qui  fixa  sur  lui  les  regards  de  toute 
l'Italie  et  le  fit  connaître  du  reste  de  l'Eu- 
rope. Il  est  mort  en  1798.  Ses  principaux 
ouvrages  sont  1°  Historia  militar  de  Es- 
pana,  Ségovie,  1769,  in-4.  C'est  une  his- 
toire des  grands  capitaines  espagnols.  Elle 
est  aussi  exacte  que  bien  écrite.  2°  Ma- 
nual  del  artillero ,  17  72,  in-8  ,  estimé. 
3°  Dell'  origine  et  délie  regole  délia  mu- 
sica ,  colla  storia  del  suo  progressa , 
decadenza  e  renovazione ,  17  74,  in-4.  Il 
établit  dans  cet  ouvrage ,  que  le  but  de 
la  musique  étant  de  flatter  l'oreille  ,  on  a 
cherché  mal  à  propos  le  principe  de  cet 
art  dans  des  combinaisons  purement  ma- 
thématiques ,  et  il  relève  à  cet  égard  avec 
autant  de  force  que  de  goût  les  erreurs 
dans  lesquelles  sont  tombés  Euler,  Ra- 
meau et  d'Alembert.  Son  système ,  fondé 
sur  la  prosodie  ,  et  applicable  aux  diffé- 
rentes langues  parlées  de  l'Europe  ,  a 
trouvé  partout  de  nombreux  partisans. 
4°  Dubbio  diD.  Antonio  Eximeno  sopra 
il  saggio  fondamentale  pratico  di  con- 
irappunto ,  delR. padre  maestro  Giamb. 
Martini,  h^ome ,  1776,  in-4.  S"  Leftera 
sopra  l'opinione  del  signor  Andres  in- 
torno  la  letteratura  ecclesiastica  de'  se- 
coli  barbari ,  Manloue ,  1783.  C'est  une 
apologie  de  l'ouvrage  d'Andrès,  son  ami , 
en  réponse  aux  critiques  qui  en  avaient 
été  faites. 

EXPILLY  (  Claude  d'  ) ,  président  au 
parlement  de  Grenoble ,  ami  et  disciple 
des  plus  célèbres  jurisconsultes  de  son 
temps,  naquit  à  Voiron  en  Dauphiné  l'an 
1661  ,  et  mourut  à  Grenoble  en  IG-IG, 
âgé  de  75  ans.  Henri  IV  et  Louis  XIII  se 
«ervirent  utilement  de  lui  dans  le  comtat 


EXP  175 

Venaissin ,  en  Piémont  et  en  Savoie.  C'é- 
tait un  homme  très  estimable ,  l'ami  et  le 
protecteur  des  gens  de  lettres.  Qui  méri- 
tait son  amitié  (  dit  Chorier,  historien 
du  Dauphiné  },  l'avait  infailliblement  ;  et 
c'était  la  mériter,  que  d'avoir  du  savoir 
et  de  la  vertu.  Le  président  d'Expilli  était 
orateur,  historien  et  poète;  mais  il  ne 
remplit  bien  aucun  de  ces  titres ,  du 
moins  si  l'on  compare  les  ouvrages  qui 
nous  restent  de  lui ,  à  ceux  de  nos  bons 
écrivains.  Ses  Plaidoyers  ,  imprimés  à 
Paris,  in-4,  en  1612,  ne  sont  plus  lus. 
Ses  poésies,  publiées  in-4  eu  1624,  et  la 
Fie  de  Bayard,  in-12,  1660,  ne  méri- 
tent guère  davantage  de  l'être.  Son  Traité 
de  l'orthographe  française ,  a  Lyon , 
in-fol.,  1 61 8 ,  ne  renferme  qu'une  théorie 
peu  judicieuse,  et  une  pratique  bizarre 
et  hors  d'usage.  Le  magistrat  valait  mieux 
en  lui  que  l'écrivain.  Foyez  sa  vie ,  Gre- 
noble, 1660,  in-8,  parBonieldeChàtillon. 

*  EXPILLY  (Jean-Joseph),  littérateur 
et  diplomate ,  naquit  à  St.-Remy  en  Pro- 
vence l'an  1719  ,  fut  successivement  se- 
crétaire d'ambassade  du  roi  de  Sicile, 
examinateur  et  auditeur  général  de  l'évê- 
ché  de  Sagona  en  Corse ,  chanoine  tré- 
sorier du  chapitre  de  Ste. -Marthe  de  Ta- 
rascon  ,  membre  de  plusieurs  académies  ; 
il  parcourut  une  partie  de  l'Europe  en 
recueillant  des  observations  intéressante» 
sur  les  pays  qu'il  viskait  :  il  a  laissé  deux 
ouvrages  géographiques  qui  sont  encore 
recherches  et  estimés  à  cause  de  l'exacti- 
tude des  détails  sur  le  climat,  les  mœurs, 
la  population  et  les  rapports  politiques 
des  diverses  contrées.  Expilly  était  ecclé- 
siastique :  il  mourut  en  1793. 

*  EXPILLY  (Louis-Alexandre)  naquit 
à  Brest.  Après  avoir  fait  ses  études  théo- 
logiques à  Paris ,  il  devint  curé  de  St.- 
Martin  de  Marlaix  en  Bretagne.  En  f  78& 
le  clergé  de  St.-Pol  de  Léon  le  députa  aux 
Etats-généraux,  où  il  se  rangea  du  côté  des. 
novateurs.  Il  fut  membre  du  comité  char- 
gé d'examiner  et  de  publier  le  livre-rouge, 
fit  à  l'assemblée  un  rapport  contre  le  droit 
de  propriété  du  clergé ,  prêta  le  serment 
à  la  constitution  civile  dont  il  passe  pour 
avoir  été  l'un  des  rédacteurs,  et  fut  élu 
évêque  constitutionnel  du  Finistère  le  3t 


176  EXU 

octobre  1790.  Avant  de  se  faire  sacrer, 
il  écrivit  au  pape  pour  lui  demander  son 
agrément  ;  il  ne  s'en  fit  pas  moins  ordon- 
ner sans  l'avoir  reçu,  et ,  quoique  le  sou- 
verain pontife  cassât  son  élection  (  bref 
du  13  avril  1791  ),  il  n'en  prit  pas  moins 
possession  de  son  évêché  ,  dans  lequel  il 
eut  beaucoup  de  désagrémens  et  ne  fut 
soutenu  que  par  les  révolutionnaires. 
Lorsque  la  révolution  ,  conséquente  avec 
ses  principes  irréligieux,  eut  supprimé 
l'exercice  du  culte ,  l'évêque  Expilly  de- 
vint président  du  Directoire  de  son  dé- 
partement ;  mais,  ayant  pris  part  à  ce  que 
l'on  appelait  le  fédéralisme. ,  il  fut  accusé 
avec  les  autres  membres  du  Directoire  , 
condamné  et  exécuté  avec  eux  le  21  juin 
1794  à  Brest.  Il  n'a  laissé  pour  tout  ou- 
vrage que  ses  discours  politiques  et  ses 
lettres  pastorales. 

EXUPÉRANCE,  préfet  des  Gaules,  et 
parent  du  poète  Rutilius,  était  de  Poi- 
tiers. Son  frère  Quintilien  ,  retiré  à  Beth- 
léem ,  y  menait  une  vie  d'anachorète.  Ce 
fut,  à  ce  qu'on  croit,  à  la  prière  de  ce- 
lui-ci ,  que  saint  Jérôme  écrivit  à  Exu- 
pérance  la  lettre  que  nous  avons  encore, 
pour  l'exhorter  à  renoncer  aux  espérances 
du  siècle  ,  et  à  se  consacrer  uniquement 
au  service  de  Dieu,  Cette  lettre  resta  sans 
effet.  Exupérance,  occupé  à  rétablir  les 
lois  dans  l'Aquitaine  ,  fut  tué  par  ses  sol- 
dats, vers  l'an  424  à  Arles,  dans  une  sé- 
dition militaire. 

EXUPÈRE  (  Saint  ) ,  évèque  de  Tou- 
louse, illustre  par  sa  charité  durant  une 
grande  famine.  Après  avoir  distribué  tous 
ses  biens  ,  il  vendit  encore  les  vases  sa- 
crés d'or  et  d'argent,  pour  assister  les 
pauvres.  Il  fut  réduit  à  porter  le  corps 
de  Jésus-Christ  dans  un  panier  d'osier,  et 
son  sang  dans  un  calice  de  verre.  Saint 
Jérôme  le  compare  à  la  veuve  de  Sarepta, 
et  lui  a  dédié  son  Commentaire  sur  le 
prophète  Zacharie.  Le  pape  Innocent  lui 
a  adressé  une  dccrétale,  célèbre  dans 
l'histoire  ecclésiastique.  Saint  Eïupère 
mourut  vcrs4n,  plein  dejoui-s  et  de  ver- 
tus.—  Il  ne  faut  pas  le  confondre  avec 
saint  ExopÈRE ,  évoque  de  Bayeux,  au  4" 
siècle.  Celui-ci ,  honoré  encore  .sous  le 
nom  de  saint  Spire,  et  un  des  premicrsévô- 


EYM 

qucs  qui  apportèrent  le  flambeau  de  ]'E> 
vangile  en  Neustrie  (  aujourd'hui  Nor- 
mandie). 

*  EYBEL  (  Joseph-Valentin  ) ,  profes- 
seur de'  droit  canon  à  Vienne,  mort  en 
1805,  a  composé  les  ouvrages  suivans  : 
1°  Ordre  des  principes  de  la  jurispru- 
dence ecclésiastique ,  1775.  2"  Corps  de 
droit  pastoral  moderne  ;  introduction  au 
droit  ecclésiastique  des  catholiques  ^ 
1777,  3  vol.,  mis  à  l'index  par  décret  du 
6  décembre  17  84.  3"  Qu'est-ce  que  le 
pape  .'pamphlet  destiné  à  affaiblir  le  res- 
pect et  l'attachement  des  peuples  pour 
le  chef  de  l'Eglise.  Le  cardinal  Gerdil  ré- 
futa cet  écrit ,  qui  fut  condamné  par  uir 
bref  du  28  novembre  17  86.  4"  Que  con- 
tiennent les  monumens  de  l'antiquité' 
chrétienne  sur  la  confession  auriculaire? 
autre  pamphlet  qui  fut  proscrit  le  1 1  no- 
vembre 1784. 

EY BEN  (  Huldéric  ) ,  savant  juriscon- 
sulte, né  à  Norden  l'an  1629  ,  d'une  fa- 
mille noble,  devint  conseiller  et  anté- 
cesseur  à  Helmstadl ,  puis  juge  dans  la 
chambre  impériale  de  Spire,  enfin  con- 
seiller au  conseil  aulique  de  l'empereur 
Léopold.  Il  mourut  en  1699,  laissant  des 
ouvrages ,  imprimés  à  Strasbourg  en 
1708,  in-fol.  On  ne  les  connaît  guère  en 
France  ,  quoiqu'estimés  de  leur  temps. 

EYCK.  roijez  Eick.. 

*  EYMAR  (  Etienne),  prêtre  de  l'Ora- 
toire, né  vers  1097,  et  mort  à  Forcalquier 
le  26  janvier  1767  ,  est  connu  par  les  ou- 
vrages suivans  :  1°  Lettre  à  Vévêque  de 
Poitiers  sur  la  théologie  de  ce  diocèse  ; 
2"  Lettres  à  l'évêque  d'Angers  sur  les 
Conférences  de  ce  nom  ;  3°  Lettres  à  M. 
Tjafiteau  (  évèque  de  Sisteron  )  sur  ses 
Entretiens  d'Anselme  et  d'Isidore;  4" 
Ijcttrc  d'un  Bordelais  sur  la  vie  de  la 
Sainte  Vierge,  par  ce  prélat,  avectabbé 
Barlhélemi  de  Lapnrtc.  {F.  Laporte.); 
5°  Réplique  au  mandement  du  même 
évèque,  du  8  septembre  1760.  [Voyez 
Lafiteau  Pierre-François.  ) 

■^  EYMAR  (Ange-Marie  comte  d'), 
député  de  la  noblesse  du  bailliage  de  For- 
calquier aux  états-généraux  de  1789,  se 
réunit  au  tiers-état,  et  suivit  les  idées  de 
la  révolution.   Admirateur  enthousiaste 


EZE 

de  J.  J.  Rousseau,  il  lui  fit  élever  une 
statue.  Envoyé  en  ambassade  en  Piémont, 
il  prit  part  à  la  révolution  qui  força  le 
roi  de  Sardaigne  à  quitter  ses  états,  et  se 
conduisait  avec  une  sévérité  qui  lui  fit 
beaucoup  d'ennemis.  Rappelé  par  le  Direc- 
toire ,  il  fut  quelque  temps  après  nommé 
préfet  du  département  du  Léman,  et 
mourut  à  Genève  le  H  janvier  1803.  On 
a  de  lui  1°  Bc'/lcxioiis  sur  la  nouvelle  di~ 
vision  du  royaume,  1 7  90,  in-8 .  2"  Anec- 
dote sur  F'ioti,  in-12.  3"  Une  Notice  his- 
torique sur  Dolomieu,  qu'il  avait  accom- 
pagné dans  son  excursion  sur  les  Alpes. 
11  paraît  que  l'ouvrage  intitulé  :  De  l'in- 
fluence de  la  se'vérite'  des  peines  sur  les 
crimes  qu'on  lui  a  attribué  ,  n'est  pas  de 
lui.  Il  a  traduit  de  l'espagnol ,  El  delin- 
quente  honorado  de  Kp.  me'ch.  jovellor- 
nos ,  Marseille  ,  1777,  in-8 . 

EYMERICK.  F  oyez  Nicolas. 

EZÉCHIAS ,  roi  de  Juda  ,  successeur 
d'Achaz  ,  son  père  ,  l'an  727  avant  J.  C. , 
imita  en  tout  la  piété  de  David.  Il  détrui- 
sit les  autels  élevés  aux  faux  dieux,  brisa 
les  idoles,  et  mit  en  pièces  le  serpent 
d'airain  que  les  Israélites  adoraient.  Il 
fit  ouvrir  ensuite  les  portes  du  temple , 
et  assembla  les  prêtres  etleslévitespour 
le  purifier.  Après  cette  cérémonie,  le 
saint  roi  y  monta  avec  les  principaux  de 
Jérusalem,  y  immola  des  victimes,  et 
rétablit  le  culte  du  Seigneur.  Son  zèle 
fut  récompensé;  il  reprit  les  villes  dont 
les  Philistins  s'étaient  emparés  sous  le 
règne  d'Achaz ,  son  père.  Vainqueur  des 
Philistins  ,  il  voulut  secouer  le  joug  des 
Assyriens,  et  leur  refusa- le  tribut  ordi- 
naire. Sennachérib,  outré  de  ce  refus, 
porte  la  guerre  dans  le  royaume  de  Juda; 
il  y  était  entré,  lorsqu'Ezéchias  fut  at- 
taqué d'une  maladie  pestilentielle.  Le  pro- 
phète lasïe  vint  lui  annoncer  sa  mort 
prochaine.  Dieu  ,  toiiché  par  ses  prières, 
lui  renvoya  le  prophète  pour  lui  annon- 
cer sa  guérison  miraculeuse.  Isaïe  con- 
firma la  certitude  de  sa  promesse  par  un 
prodige  nouveau  :  il  fit  reculer  de  dix 
degrés  l'ombre  du  soleil  sur  le  cadran 
d'Achaz.  Quelques  interprètes  ont  cru 
<iue  le  soleil  rétrograda  dans  son  cours  ; 
mais  quoique  les  grandes  révolutions  ne 

V, 


EZE  177 

coûtent  pas  plus  à  Dieu  que  les  petites , 
il  est  plus  simple  et  plus  naturel  de  bor- 
ner le  prodige  demandé  par  Achaz ,  au 
lieu  où  il  s'exécuta.  Ezéchias  exprima  sa 
reconnaissance  par  le  beau  cantique, 
plein  de  sentiraens  profonds  et  des  plus 
touchantes  images,  qu'on  lit  auchap.  38 
d'Isaïe  :  Ego  dixi  in  dimidio  dierum  meo- 
rum ,  etc.  Méredac  Baladan ,  roi  de  Ba- 
bylone ,  ayant  su  les  différentes  mer- 
veilles opérées  en  faveur  d'Ezéchias,  lui 
envoya  des  ambassadeurs  pour  l'en  féli- 
citer. Le  monarque ,  sensible  à  cet  hom- 
mage, leur  étala  tous  ses  trésors.  Isaïe 
le  reprend  de  ce  mouvement  de  vanité, 
et  lui  prédit  que  tout  sera  transporté  à 
Babylone.  Ezéchias  s'étant  humilié  sous 
la  main  qui  le  menaçait,  obtint  qu'il 
ne  verrait  point  ce  malheur.  Cependant 
Sennachérib  s'était  rendu  maître  des  plus 
fortes  places  ,  et  menaçait  Jérusalem.  La 
paix  ne  se  fit  qu'aux  conditions  les  plus 
dures.  Le  vainqueur  exigea  du  vaincu , 
qu'on  lui  payerait  une  somme  immense. 
Ezéchias  épuisa  ses  trésors  et  dépouilla  le 
temple  pour  satisfaire  à  ses  engagemens  ; 
mais  à  peine  avait-il  compté  l'argent,  que 
Sennachérib  rompit  le  traité,  et  revint 
ravager  la  Judée,  blasphémant  contre  le 
Dieu  qui  la  protégeait.  Il  s'avançait  vers  Jé- 
rusalem, mais  l'ange  du  Seigneur  ayant  tué 
dans  une  seule  nuit  185,000  hommes  de 
son  armée,  il  fut  obligé  de  prendre  la  fuite. 
Ezéchias ,  délivré  de  ce  redoutable  en- 
nemi, chercha  Dieu  de  tout  son  cœur, 
le  trouva  ,  et  mourut  l'an  698  avant  J.  C. 
à  63  ans.  Génebrard  assure,  d'après  les 
hébreux ,  qu'il  était  savant  dans  les  ma- 
thématiques ,  et  qu'il  fit  une  réformation 
de  l'année  des  Juifs ,  par  i'intercallation 
du  mois  de  Nisan  au  bout  de  chaque 
troisième  année. 

EZÉCHIEL ,  l'un  des  quatre  grands 
prophètes,  fils  du  sacrificateur  Buzi ,  fut 
emmené  captif  à  Babylone  avec  Jécho- 
nias.  Il  commença  à  prophétiser  l'an  595 
avant  J.  C.  Il  fut  transporté  en  esprit 
dans  le  temple  de  Jérusalem,  où  Dieu 
lui  montra  les  abominations  qui  s'y  com- 
mettaient. Il  eut  ensuite  plusieurs  visions 
miraculeuses  sur  le  rétablissement  du 
peuple  juif  et  du  temple,  sur  le  règne  du 

12 


178  EZE 

Messie  et  la  vocation  des  gentils.  Il  con" 
tinua   de  prophétiser  pendant  20  ans, 
et  fut  tué  à  ce  que  l'on  croit,  par  un 
prince  de  sa  nation  ,  à  qui  il  avait  repro- 
ché son  idolâtrie.  Dieu  lui  ordonna  plu- 
sieurs   actions    symboliques,    qui    ont 
fourni  des  plaisanteries  bien  déplacées 
aux   incrédules  modernes.  On  sait  que 
l'un  d'eux,  particulièrement  fameux  par  la 
légèreté  et  l'indécence  de  ses  critiques, 
parlait   volontiers    du  pain  d'Ezéchiel, 
cuit  avec  des  excrémens  séchés  au  soleil 
(comme  il  est  d'usage  dans   plusieurs 
plages  d'Orient ,   oîi  le  bois  est  rare  )  , 
mais  que  le  dégoûtant  commentateur  re- 
présentait sous  un  autre  aspect.  Il  suffit 
de  remarquer,  1  °  que  la  plupart  des  choses 
dont  les  incrédules  ont  tourné  en  ridi- 
cule la  représentation  réelle  et  physique, 
ne  se  passèrent  qu'en  vision.  Il  ne  faut 
qu'en  lire  le  récit  pour  en  être  convaincu. 
2°  Le  langage  typique  était  alors  usité 
dans  la  plus  grande  partie  de  l'Asie  ;  plu- 
sieurs peuples  de  l'Orient  le  conservent 
encore  ;  on  l'a  retrouvé  dans  l'Amérique. 
Si  les  actions  symboliques  des  prophètes 
étaient    surprenantes  par  leur  singula- 
rité, quelquefois  même  par  leur  durée, 
elles  constataient  par-là  même,  devant 
le  peuple  nombreux  qui  les  voyait,  l'exi- 
stence de    la  prophétie;  elles  ne    lais- 
saient aucun   lieu  de  soupçonner  apràs 
l'événement,  qu'elle  eût  été  controuvée. 
Les  malheurs    annoncés    par    les    pro- 
phètes   faisaient  plus  d'impression  sur 
les  coupables  par  l'appareil  de  l'avertis- 
sement. Le  langage  typique  est  en  gé- 
néral le  plus  énergique  et  le  plus  pro- 
pre à  faire  impression.   «  Trasibule   et 
»  Tarquiu,  dit  l'auteur  de  l'Emile,  cou- 
»  pant  des  têtes  de   pavots  ;  Alexandre 
»  appliquant  son  sceau  sur  la  bouche  de 
»>  son  favori  ;  Diogène  marchant  devant 
»  Zenon ,  ne  parlaient-ils  pas  mieux  que 
»  s'ils  avaient  fait  de  longs  discours  ?  Da- 
»  rius  engagé  dans  la  Scythie  avec  son 
»  armée ,  reçoit  de  la  part  du  roi  des 
»  Scythes  un    oiseau,  une  grenouille, 
M  une  souris  et  cinq  flèches.  Cette  haran- 
»  gue  fut  entendue,  et  Darius  n'eut  plus 
})  grande  hâte  que  celle  de  regagner  son 
»  pays  comme  il  put.  »  Ces  observations 


EZE 

ont  lieu  à  l'égard  de  plusieurs  passages 
de  Jérémie  et  des  autres  prophètes.  Des 
philosophes  hypocrites  se   sont  récriés 
sur  quelques  images  et  expressions  de  ce 
prophète ,    et  lui  ont  reproché  d'avoir 
peint  l'idolâtrie  de  Jérusalem  et  de  Sa- 
marie  sous  l'image  de  deux  prostituées, 
dont  la  lubricité  est  représentée  avec  des 
expressions  que  nos  mœurs  ne  supportent 
pas.  Mais  il  ne  faut  pas  juger  des  mœurs 
anciennes  par  les  nôtres.  «  Chez  un  peuple, 
»  dit  un  auteur,  dont  les   mœurs  sont 
»  simples  et  pures ,  le  langage  est  moins 
»  châtié  que  chez  les  autres.  Lorsqu'il  y 
»  a  peu  de  communication  entre  les  deux 
j>  sexes,  les  hommes  parlent  entre  eux 
V  plus  librement  qu'ailleurs.  Les  enfans 
I)  et  les  personnes  innocentes  parlent  de 
«  tout  sans  rougir;  elles  ne  pensent  pas 
»  qu'on  puisse  en  tirer  de  mauvaises  con- 
»  séquences.   C'est  le  désir  coupable  de 
»  faire  entendre  des  obscénités  ,  qui  en- 
»  gage  les  impudiques  à  se  servir  d'ex- 
M  pressions  détournées  ,  afin  de  révolter 
»  moins  ;  ainsi ,  plus  les  mœurs  sont  dé- 
j>  pravées ,  plus  le  langage  devient  me- 
»  sure  et  chaste  en  apparence.  Celui  des 
»  Hébreux ,  qui  est  très  naïf  et  très  libre, 
»  loin  de  prouver  la  corruption  de  leurs 
»  mœurs,  démontre  précisément  le  con- 
»  traire,  v  C'est  probablement  à  l'épo- 
que où  les  mœurs  commencèrent  à  se 
dépraver  par  la  suite  des  siècles ,  que  les 
Juifs  comprirent  que  les  tableaux  tracés 
parEzéchiel,  pouvaient  être  dangereux, 
et  qu'ils  ne  permirent  plus  de  lire  ses 
prophéties  avant  l'âge  de  30  ans  (  voyez 
Salomon    ).    Les   Prophe'ties   d'Ezéchiel 
sont  fort  obscures ,  surtout  au  commen- 
cement et  à  la  fin.  Elles  sont  au  nombre 
de  vingt-deux ,  et  disposées  suivant  l'or- 
dre des  temps  qu'il  les  a  faites.  Prado  et 
Villalpand ,  jésuites ,  ont  fait  de  savans 
commentaires   pour    les   cclaircir.  Son 
stile ,    suivant   saint  Jérôme ,   tient   un 
milieu  entre  l'éloquent  et  le    grossier. 
Il  est  rempli  de  sentences ,  de  comparai- 
sons ,  de  visions  énigmatiques.  Ce  pro- 
phète parait  très  versé  dans  les  choses 
profanes. 

EZËCHIEL,  juif,  poète  grec,  floris- 
sait  après  le  milieu  du  1*'  siècle  de  l'ère 


I 


FAB 

cbrëtîenne ,  ou  selon  Huet ,  un  siècle ,  et 
selon  Sixte  de  Sienne,  40  ans  avant  J.  C. 
D'une  tragédie qu^il  avait  faitesurla  sortie 
des  Hébreux  hors  de  l'Egypte ,  il  ne  reste 
plus  que  des  fragmens  que  FrédéricMorel 
a  traduits  en  prose  et  en  vers  latins.  Ils 
parurent  à  Paris  en  1598,  in-8.  On  les 
trouve  aussi  dans  Corpus  Poetarum  grce- 
corum,  Genève,  160G  et  1614,  2  vol, 
in-folio. 

EZZELINO  ou  EcKLiso,  tyran  ori- 
ginaire d'Allemagne ,  mais  né  à  Onéra 
dans  la  Marche  Trévisane  en  Italie,  se 
montra  si  pervers  dès  son  enfance,  qu'on 
disait  de  son  temps  qu'il  avait  été  en- 
gendré par  le  démon.  Après  avoir  été 
quelque  temps  à  la  tôle  des  Gibelins ,  il 
quitta  ce  parti  pour  régner  despotique- 
ment  sur  Vérone ,  Padoue  ,  et  sur  quel- 
ques autres  villes  d'Italie  dont  il  s'était 
emparé.  Les  papes  Grégoire  IX,  Inno- 
cent IV  et  Alexandre  IV  ,  lancèrent 
inutilement  contre  ce  scélérat  les  foudres 
du  Vatican.  Le  seule  Antoine  de  Padoue 
mit  pendant  quelque  temps  un  frein  à  ses 
fureurs.  «  Ce  saint  et  courageux  reli- 
»  gieux,  dit  un  historien  du  temps,  alla  le 
»  trouver  à  Vérone,  et  lui  demanda  une 
»  audience  qui  lui  fut  accordée.  Lors- 
»  qu'on  l'eut  introduit  dans  l'apparte- 
»  ment  d'Ezzelino ,  il  le  vit  assis  sur  un 
a  trône,  et  environné  d'une  troupe  de 
»  soldats,  prêts  à  lui  obéir  au  moindre 
»  signe.  Ce  spectacle  ne  l'effraya  point  ; 
»  il  osa  même  dire  au  tyran ,  que  ses 
M  massacres ,  ses  pillages  et  ses  sacrilèges 
»  criaient  vengeance  au  ciel ,  et  que  tous 
»  ceux  qu'il  avait  dépouillés  de  la  vie  ou 
»  de  leurs  biens,  étaient  devant  Dieu 
»  comme  autant  de  témoins  qui  deman- 
»  daient  justice.  Il  dit  encore  d'autres 


FAB  179 

»  choses  qui  ne  supposaient  pas  moins 
î)  de  hardiesse.  Les  gardes  s'attendaient  à 
»  tout  moment  qu'ils  allaient  recevoir 
»  l'ordre  de  tomber  sur  le  saint.  Mais 
»  ils  ne  purent  revenir  de  leur  étonne- 
»  ment ,  lorsqu'ils  virent  Ezzelino  des- 
»  cendre  de  son  trône ,  pâle  et  trem- 
«  blant,  se  mettre  une  corde  au  cou, 
»  se  jeter ,  fondant  en  larmes ,  aux  pieds 
»  d'Antoine,  et  le  conjurer  de  lui  obte- 
»  nir  de  Dieu  le  pardon  de  ses  péchés. 
»  Le  saint  le  releva ,  et  lui  donna  des 
»  avis  convenables  à  la  situation  oii  il 
a  se  trouvait.  Quelque  temps  après  Ez- 
»  zelino  envoya  un  riche  présent  à  An- 
»  toine  ;  mais  celui-ci  le  refusa ,  en  di- 
»  sant  que  le  plus  agréable  présent  que 
»  le  prince  pût  lui  faire,  était  de  resti- 
»  tuef  aux  pauvres  ce  qu'il  leur  avait 
»  injustement  enlevé.  Ezzelino  parut  d'a- 
»  bord  avoir  changé  de  conduite.  Mal- 
»  heureusement  ces  belles  dispositions 
»  s'évanouirent ,  il  retomba  dans  ses  pre- 
M  miers  excès.  »  On  prêcha  la  croisade 
contre  lui.  Toutes  les  villes  de  la  Marche 
Trévisane,  et  les  princes  de  Lombardie, 
se  liguèrent  pour  en  délivrer  l'Italie.  Il 
fut  pris  devant  Milan  qu'il  allait  attaquer. 
On  le  mena  à  Socino ,  oii  il  mourut  dés- 
espéré en  1259,  après  avoir  exercé 
pendant  40  ans  la  tyrannie  la  plus  bar- 
bare et  la  plus  odieuse.  La  ville  de  Pa- 
doue ayant  tenté  plusieurs  fois  de  secouer 
le  joug,  Ezzelino  fit  mourir  plus  de  onze 
raille  citoyens  de  toute  condition.  Ce 
monstre  était  aussi  superstitieux  que 
cruel.  Il  n'entreprenait  rien  ,  sans  avoir 
consulté  quatre  astrologues,  ployez  sa 
Vie  écrite  en  italien  par  le  Père  Gérard , 
1560,  in-8  ,  et  traduite  en  français  par 
François  Cortaud,  Paris,  1644,  in-l2. 


F 


FABBRONI.  Voyez  Fabroni. 

FABER  (  Gilles  ) ,  carme  ,  mort  à  Bru- 
xelles en  1 506 ,  parut  avec  distinction 
dans  la  chaire,  en  un  temps  où  le  minis- 
tère de  la  parole  était  avili  par  le  ridicule 


et  le  burlesque  que  les  prédicateurs  mê- 
laient aux  vérités  sacrées.  Jean  Trilhème 
lui  attribue  une  Chronique  de  son  ordre ,. 
une  Histoire  de  Brahant ,  des  Commçn-^ 
taires  et  d'autres  ouvrages. 


i8o  FAB 

FABER  (  Jean  ),  jurisconsulte  célèbre, 
appelé  ainsi  qu'un  de  ses  livres ,  le  Mar- 
teau des  hérétiques ,  naquit  à  Leutkirch 
eu  Souabe  vers  l'an  1470,  entra  dans 
l'ordre  de  Saint-Dominique,  et  brilla 
dans  les  universités  d'Allemagne  L'évo- 
que de  Constance  le  fit  son  vicaire-gé- 
néral en  1519;  et  Ferdinand,  roi  des 
Romains ,  depuis  empereur ,  le  choisit 
pour  son  confesseur  en  152G.  Ce  prince 
le  nomma  en  1531  à  l'évèché  de  Vienne , 
que  son  zèle  contre  les  hérétiques  lui  avait 
mérité.  Il  mourut  le  12  juin  1541  ,  âgé 
de  G3  ans ,  laissant  plusieurs  ouvrages 
d'histoire  ,  de  controverse  et  de  piété, 
en  3  vol.  in-fol. ,  Cologne ,  1537  et  1541. 
Celui  de  ses  écrits  qui  lui  fit  le  plus  d'hon- 
neur ,  est  son  Malleus  hœreticorum  , 
dans  lequel  les  questions  controversées 
sont  traitées  avec  beaucoup  de  solidité  et 
de  chaleur.  —  Quelques  auteurs  distin- 
guent ce  Jean  Faber  d'avec  un  autre  Jean 
Faber  ,  également  dominicain,  et  né  aussi 
en  Souabe ,  qui  vivait  dans  le  même 
temps ,  écrivait  dans  le  même  genre  et 
de  la  même  manière  :  ils  font  naître  ce- 
lui-ci à  Heilbron  en  1 500  et  il  mourut 
selon  leur  opinion  en  1570.  Ils  lui  at- 
tribuent 1°  Enchiridion  Biblioruni  , 
Augsbourg,  1549  ,  in-4.  2°  Fructus  qui- 
tus dignoscuntur  heretici ,  ouvrage  so- 
lide et  curieux ,  oii  l'on  trouve  des  par- 
ticularités remarquables  touchant  Luther. 
3°  Libcllus  quod  fides  esse  possit  sine 
charitate.  Augsbourg,  1548,  in-4. 

FABER  (  Pierre  ) ,  né  en  Savoie ,  fut 
un  des  neuf  premiers  compagnons  de  saint 
Ignace  de  Loyola ,  et  seconda  les  travaux 
du  zélé  fondateur ,  tant  pour  l'établisse- 
ment de  la  compagnie,  que  pour  le  bien 
général  de  l'Eglise.  Il  fit  plusieurs  courses 
apostoliques  en  Italie ,  en  Espagne  et  en 
Allemagne,  convertit  un  grand  nombre 
de  libertins  et  d'hérétiques,  et  répandit 
l'instruction  chrétienne,  particulièrement 
dans  les  villages  et  parmi  les  pauvres.  Il 
mourut  l'an  154G. 

FABER  (  Basile  ) ,  né  à  Soraw  en  Si- 
lésie  l'an  1 520 ,  fut  recteur  du  collège 
d'humanités  à  Erfort,  oii  il  mourut  en 
1576,  et  s'est  fait  connaître  par  son  Thé- 
saurus eruditiotùs  scholastiae  y  qu'il  pu- 


FAB 

blia  en  1571.  Auguste  Buchmer,  Cella- 
rius,  Greevius  firent  successivement  des 
augmentations  à  ce  dictionnaire  ,  dont  les 
citations  sont  fort  exactes.  La  dernière 
édition  est  de  la  Haye,  1735,  2  vol.  in-fol. 
Faber  a  donné  aussi  une  traduction  alle- 
mande des  remarques  latines  de  Luther 
sur  la  Genèse ,  et  fut  un  des  disciples  les 
plus  ardens  de  cet  hérésiarque. 

*  FABER  (  Jean-Ernest  ) ,  savant  pro- 
fesseur de  langues  orientales  et  de  phi- 
losophie, dans  l'université  de  Kiel ,  en- 
suite dans  celle  d'iéna  ,  était  né  en  17  45 
à  Simmerhausen  ,  dans  le  duché  d'Hild- 
burhauscn  en  Saxe,  et  mourut  à  léna  le 
15  mars  177  4.  On  lui  doit  i"  Descriptio 
commentarii  in  septuaginta  interprètes^ 
Gottingue,  1768-69, 2 parties  in-4.  THis- 
toria  mannœ  intcr  Hebrœos,  1770-73 
3°  Programma novumdc  Messia  ,  exac- 
tis  490  annis  post  exilium  Judœorum 
babijlonicum  ,  nascituro  ex  Zacharia, 
cap.  3  ,  3^.  S  ,  9  ,  10.  4"  Jésus  ex  nata- 
liuni opportunitate  Messins ^  léna,  1772, 
in-8.  5"  Archéologie  des  Hébreux ,  ea. 
Allemand,  première  partie.  Halle,  1773, 
in-8.  Faber  a  publié  en  outre  les  2  pre- 
miers numéros  de  la  Nouvelle  bibliothè- 
que philosophique,  en  allemand,  Leipsick, 
177  4  ,  continuée  par  J.  C.  Hennings. 

FABER.  Foyez  Fabbe,  Favkk,  Fevre, 
Le  Fèvre. 

FABERT  (  Abraham  ) ,  maréchal  de 
France,  naquit  à  Metz  en  1599.  Son  père, 
maître  échevin  de  cette  ville  et  fils  d'un 
riche  libraire  de  Nancy  ,  avait  été  anobli 
par  Henri  IV.  Il  destina  son  fils  au  bar- 
reau ou  à  l'Eglise  ;  mais  le  jeune  Fabert, 
né  pour  la  guerre  ,  voulut  suivre  son 
penchant.  Dès  l'âge  le  plus  tendre,  il 
s'occupait  à  différens  exercices  d'infan- 
terie avec  des  figures  de  carton ,  qu'il  fai- 
sait mouvoir  suivant  le  commandement. 
Il  servit  sous  le  duc  d'Epernon  dans  plu- 
sieurs occasions  importantes.  Il  se  signala 
surtout  en  1635.  On  commença  dès  lors 
à  conter  mille  particularités  fabuleuses 
sur  la  cause  de  ses  succès.  On  lesattribua 
au  diable  ,  quoique  l'on  ne  put  mécon- 
naître son  courage  et  ses  talens.  Il  sauva 
l'armée  du  roi  à  la  retraite  de  Mayence  , 
cl  ne  se  distingua  pas  avec  moins  d'éclat 


I 


FAB 

> 

en  Italie  qu'en  Allemagne.  Blessé  à  la 
cuisse  au  siège  de  Turin,  il  ne  voulut  ja- 
mais souffrir  qu'on  la  lui  coupât.  «  Il  ne 
»  faut  pas  mourir  par  pièces  ,  dil-il  à  Tu- 
»  renne  et  au  cardinal  de  La  Valette,  qui 
»  l'exhortaient  à  cette  opération  :  la  mort 
))  m'aura  tout  entier,  ou  elle  n'aura  rien.  » 
En  1G54,  il  prit  Stenai.  Ses  services  fu- 
rent payés  par  le  gouvernement  de  Se- 
dan ,  et  par  le  bâton  de  maréchal  de 
France  en  1668.  Le  roi  lui  offrit  depuis 
le  collier  de  ses  ordres  ;  il  le  refusa  ,  ne 
se  trouvant  pas  en  état  de  produire  les  ti- 
tres nécessaires  pour  recevoir  cet  hon- 
neur. Louis  XIV  lui  répondit ,  «  que  le 
M  refus  qu'il  faisait ,  lui  inspirait  plus 
»  d'estime  pour  lui ,  que  ceux  qu'il  hono- 
»  rait  du  collier  ne  recueillaient  de  gloi- 
»  re  dans  le  monde.  »  Fabert  mourut  en 
1662  ,  à  63  ans.  On  fit  des  contes  sur  sa 
mort ,  qui,  tout  étranges  qu'ils  étaient, 
ne  laissèrent  pas  de  se  répandre ,  et 
trouveront  encore  quelques  partisans 
dans  ce  siècle  philosophe.  On  avait  ima- 
giné qu'il  était  sorcier  ;  on  prétendit  que 
le  diable  l'avait  enlevé.  Ce  qui  a  pu  ac- 
créditer ces  bruits ,  c'est  que  le  maréchal 
Fabert  avait  du  goût  pour  l'astrologie  ju- 
diciaire, et  d'autres  curiosités  vaines  ou 
dangereuses  (  voyez  Fausïus,  Luxem- 
bourg, Philippe  u'Orléans,  etc.  ).  Le  Père 
Barre ,  chanoine  de  Sle. -Geneviève ,  a 
publié  sa  Fie  en  1752  ,  en  2  vol.  in-12. 
Il  y  a  des  choses  curieuses ,  mais  trop  de 
minuties  et  de  détails  étrangers  au  ma- 
réchal. Voici  un  trait  qui  fait  l'éloge  de 
son  caractère.  Les  troupes  de  Galas ,  gé- 
néral de  l'empereur,  ayant  pénétré  en 
Champagne ,  manquèrent  de  vivres.  Les 
généraux  français  les  ayant  obligés  de  se 
retirer ,  elles  tuèrent  dans  leur  retraite 
tous  ceux  qui  leur  en  refusèrent.  Fabert , 
qui  les  poursuivait,  entra  dans  un  champ 
abandonné  et  couvert  d'officiers  et  de 
soldats  autrichiens  blessés  et  mourans. 
Un  français  qui  avait  l'âme  féroce ,  dit 
tout  haut  :  «  Il  faut  achever  ces  malheu- 
■»  reux  ,  qui  ont  massacré  nos  camarades 
»  dans  la  retraite  de  Mayence.  —  Voilà 
»  le  conseil  d'un  barbare  ,  reprit  Fabert , 
»  cherchons  une  vengeance  plus  noble.  » 
Aussitôlil  fitdistribueràceux  qui  purent 


FAB  i8i 

prendre  une  nourriture  solide ,  le  peu  de 
provisions  que  son  détachement  avait  ap- 
portées. Les  malades  furent  ensuite  trans- 
portés àMézières,  où,  après  quelques  jours 
de  soin,  la  plupart  recouvrèrent  la  santé. 
Le  père  du  maréchal  Fabert  est  auteur 
des  Notes  sur  la  Coutume  de  Lorraine  , 
1667  ,  in-folio. 

FABIEN  (  Saint  ) ,  romain  ou  italien, 
monta  sur  la  chaire  de  Saint-Pierre  après 
Anthère,  en  236.  Il  bâtit  plusieurs  égli- 
ses dans  les  cimetières  où  reposaient  les 
corps  des  martyrs.  Il  envoya  des  évêques 
dans  les  Gaules  pour  y  annoncer  l'Evan- 
gile ;  mais  plusieurs  auteurs  datent  la 
première  mission  des  évèques  envoyés  en 
France,  du  pontificat  de  saint  Clément. 
Saint  Fabien  mourut  pour  la  défense  de 
la  foi,  au  commencement  de  la  persécu- 
tion de  Dèce,  en  250,  après  un  pontificat 
de  14  ans,  1  mois  et  10  jours.  On  lui  at- 
tribue des  décrétales({\x\  sont  visiblement 
supposées. 

FABIOLE  (  Sainte  ),  dame  romaine, 
célèbre  par  ses  vertus,  surtout  par  sa  cha- 
rité et  sa  pénitence  ,  dont  saint  Jérôme 
fait  le  plus  beau  et  le  plus  touchant  éloge 
dans  son  Epitaphium  Fabiolœ.  Sa  vie 
fournit  une  preuve  décisive  contre  ceux 
qui  soutiennent  la  dissolubilité  du  ma- 
riage en  cas  d'adultère.  Cette  femme  il- 
lustre, après  s'être  séparée  d'un  mari  adul- 
tère, en  avait  épousé  un  autre.  Les  lois 
civiles,  dont  plusieurs  émanées  des  em- 
pereurs païens  subsistaient  encore  dans 
le  code  impérial ,  paraissaient  autoriser 
ce  second  mariage.  Mais  Fabiole  ne  tarda 
pas  à  reconnaître  son  erreur  et  sa  faute  ; 
elle  en  fit  le  jour  même  de  Pâques  une 
pénitence  éclatante ,  à  la  vue  de  tout  le 
peuple  romain.  Il  ne  se  trouva ,  ni  dans 
cette  capitale  du  monde ,  ni  dans  tout 
l'empire,  de  théologien  qui  prétendît  ou 
justifier  le  mariage  ou  blâmer  la  péni- 
tence. L'opinion  de  Launoy  n'était  donc 
pas  connue  alors  parmi  les  chrétiens.  Et 
qu'on  ne  dise  pas  que  c'est  pour  être  pré- 
cisément contraire  aux  lois  ecclésiasti- 
ques que  ce  mariage  fut  réprouvé  :  car  il 
le  fut,  comme  formellement  contraire  à 
la  doctrine  de  l'Evangile  :  Putabat ,  dit 
saint  Jérôme,  à  se  virum Juste  dimis- 


iSa 


FAB 


tum,  NEC  EVANGELII  RIGORESl  ROVERAT  , 
IN  QDO  NUBKNDI  UNIVERSA  EXCUSATIO,  VI- 
VENTIBUS    VIRIS     FOEMINIS     AMPUTATUR 

Aliœ  sunt  leges  Cœsarum  ,  aliœ  Chris- 
ti  :  aliud  Papinianus ,  aliud  Paulus 
noster  prœcipit  (  Hier.  Fpit.  Fabiolœ  ). 
Qu'on  juge  après  cela  ou  de  rignorauce 
ou  de  la  mauvaise  foi  des  écrivailleurs , 
qui  ,  dans  ces  dernières  années ,  ont  osé 
se  servir  de  l'exemple  de  Fabiole  pour 
autoriser  le  divorce  !  Celte  sainte  mourut 
à  Rome  ,  \ers  l'an  400.  «  Rome ,  dit  saint 
y  Jérôme ,  était  un  champ  trop  étroit 
»  pour  sa  grande  charité.  Elle  s'élançait 
»  dans  les  îles ,  et  parcourait  les  rivages 
»  de  la  mer ,  tantôt  en  personne  ,  tantôt 
«  par  les  ministres  de  ses  bienfaits.  »  An- 
gusta  misericordia  ejus  Romafuit.  Per- 
agrabat  insulas  ;  et  reconditos  curvo- 
rum  littoriim  sinus,  vel proprio  corpore^ 
vel  transmissa  muuiflcentia  circuibat. 

FABIUS  MAXIMUS  (  Quinlus  ) ,  dit 
RuUianus ,  est  le  premier  de  la  famille 
des  Fabiens  qui  fut  honoré  du  titre  de 
Maximus ,  pour  avoir  ôté  au  petit  peuple 
la  disposition  des  élections.  Général  de 
la  cavalerie,  l'an  324  avant  J.  C.  ,  il  força 
le  camp  des  Saninites  et  remporta  une 
victoire  complète.  Le  dictateur  Papirius, 
fâché  qu'il  eût  donné  la  bataille  contre 
son  ordre  ,  voulut  punir  sa  désobéissance; 
mais  le  peuple  romain  et  l'armée  obtin- 
rent sa  grâce.  Fabius  fut  cinq  fois  consul, 
deux  fois  dictateur  et  une  fois  censeur. 
Il  refusa  cette  charge  une  seconde  fois , 
disant  que  c'était  contre  la  coutume  de 
la  république.  Il  triompha  des  Âpuléiens 
et  des  Lucériens  ,  puis  des  Samniles ,  et 
enfin  des  Gaulois ,  des  Umbriens ,  des 
Marses  et  des  Toscans.  Ce  fut  lui  qui  régla 
que  les  chevaliers  romains,  montés  sur 
des  chevaux  blancs ,  iraient ,  le  15  juil- 
let ,  depuis  le  temple  de  l'Honneur  jus- 
qu'au Capitolc. 
FABIUS  MAXIMUS  (  Quintus  ) ,  fils 
'  du  précédent.  Pendant  son  consulat,  son 
père  vint  à  lui  sans  descendre  de  cheval  ; 
il  lui  fit  ordonner  de  mettre  pied  à  terre. 
Alors  cet  illustre  romain ,  embrassant  son 
fils ,  lui  dit  :  n  Je  voulais  voir  si  tu  sa- 
»  vais  ce  que  c'est  que  d'être  consul .  » 
FABIUS  (Quintus  Maximus  Verruco- 


FAB 

sus  ) ,  surnommé  Cunctator  ou  le  Tem- 
poriscur ,  un  des  plus  grands  capitaines 
de  l'ancienne  Rome ,  fut  élevé  cinq  fois 
à  la  dignité  de  consul.  Pendant  son  pre- 
mier consulat,  l'an  233  avant  J.  C.  ,  il 
défit  les  Liguriens.  Sa  patrie ,  réduite  à 
l'extrémité  après  la  bataille  de  Trasimène, 
eut  recours  à  lui  ;  on  le  créa  dîclaleur. 
Il  imagina  une  nouvelle  façon  de  com-  ^ 
battre  Annibal.  Il  voulut  le  fatiguer  par  i 
des  marches  et  des  contre-marches,  sans 
jamais  en  venir  aux  mains.  Ces  ruses  lui 
méritèrent  le  nom  de  Tcmporisr.ur.  Les 
Romains ,  raéconlens  de  ces  remises,  dont 
ils  ne  pénétraient  pas  la  finesse,  le  rap-  i 
pelèrent  sous  prétexte  de  le  faire  assister 
à  un  sacrifice  solennel ,  et  donnèrent  la 
moitié  de  son  autorité  à  son  lieutenant 
Minulius  Rufus,  homme  aussi  ardent  que 
Fabius  était  réservé.  Ils  revinrent  bientôt 
de  leur  erreur.  Le  téméraire  lieutenant 
s'étant  engagé  dans  une  embuscade ,  son 
sage  général  le  tira  de  ce  péril.  Slinutius, 
pénétré  de  reconnaissance  envers  son  li- 
bérateur, lui  remit  ses  troupes  ,  content 
d'apprendre  sous  lui  à  vaincre  et  à  com- 
mander. Fabius  combattit  avec  sa  pru- 
dence ordinaire.  On  lui  décerna  le  nom 
de  Bouclier  de  Rome.  Après  la  bataille 
de  Cannes ,  il  lassa  tellement  les  trou- 
pes d'Annibal ,  qu'elles  ne  furent  plus  en 
état  de  se  défendre  contre  les  Romains. 
11  reprit  Tarente  sur  le  général  Carthagi- 
nois. Ayant  réglé  avec  lui  le  rachat  des 
captifs ,  et  le  sénat  refusant  de  ratifier 
son  accord ,  il  vendit  tous  ses  biens  pour 
s'acquitter  de  sa  parole.  On  rapporte 
qu'Annibal  ayant  appris  la  ruse  que  Fa- 
bius avait  employée  pour  se  rendre  maî- 
tre de  Tarente ,  il  s'écria  plein  d'étonne- 
ment  :  «Quoi,  les  Romains  ont  donc  aussi 
»  leur  Annibal  !  »  .Ce  dernier  tenta  vai  - 
nement  d'attirer  le  romain  au  combat. 
Il  lui  fit  dire  un  jour  :  «  Si  Fabius  est 
»  aussi  grand  capitaine  qu'il  veut  qu'on 
»  le  croie ,  il  doit  descendre  dans  la  plaine 
»  et  accepter  la  bataille.  »  Fabius  répon- 
dit froidement  :  «  Si  Annibal  est  aussi 
»  grand  capitaine  qu'il  le  pense ,  il  doit 
w  me  forcer  à  la  donner.  »  Cet  homme 
illustre  mourut  quelques  années  après , 
âgé  de  près  de  cent  ans .  si  l'on  en  croit 


FAB 

Valère-Maxime,  l'an  204  avant  J.  C.  C'est 
de  lui  qu'Ennius  a  dit  : 

Chus  honio  nobi^  cuiirtando  reslituït  rem; 
Non  (ioiiebat  eiiiui  rumorea  au  te  tatuleni. 

FABIUS  PICTOR,  le  premier  des 
Romains  qui  écrivit  l'Histoire  de  sa  pa- 
trie, vivait  vers  l'an  21 G  avant  J.  C.  L'ou- 
vrage que  nous  avons  sous  son  nom ,  est 
une  pièee  supposée,  et  du  nombre  de  celles 
qui  ont  été  publiées  par  Aunius  de  Vi- 
terbe.  Ceux  de  cette  famille  prirent  le 
nom  de  Pictor ,  parce  que  celui  dont  ils 
descendaient ,  avait  fait  peindre  les  murs 
du  temple  de  la  Santé. 

FABIUS  DOSSENNUS  ou  Dorsenus, 
composa  des  farces  appelées  par  les  Ro- 
mains Atellanes ,  de  la  ville  d'Attella 
dans  le  pays  des  Osques,  où  elles  prirent 
naissance.  Horace ,  Sénèque  et  Pline  par- 
lent de  ce  poète.  On  ne  sait  pas  en  quel 
temps  il  a  vécu. 

FABIUS  aiARCELLINUS ,  historien 
du  3*  siècie ,  est  cilé  par  Lampride , 
comme  auteur  d'une  Fie  cC Alexandre 
Mamme'c. 

FABIUS  RUSTICUS,  historien  du 
temps  de  Claude  et  de  Néron,  fut  ami  de 
Sénèque.  Tacite  loue  son  stile  dans  ses 
Annales  et  dans  la  Fie  d'Agricola  ;  et 
cet  éloge  d'.un  historien  qui  passait  pour 
satirique ,  est  un  préjugé  en  faveur  des 
écrits  de  Fabius. 

FABRE  (Jean-Claude)  naquit  à  Paris 
le  15  avril  1668  ,  d'un  père  chirurgien.  H 
entra  chez  les  Pères  de  l'Oratoire  et  y 
professa  avec  distinction.  Une  édition  du 
Dictionnaire  de  Rickelet ,  dans  laquelle 
il  inséra  plusieurs  articles  sur  les  matières 
de  théologie ,  et  des  satires  odieuses  dic- 
tées par  l'esprit  de  parti,  l'obligea  de 
sovtir  de  sa  congrégation.  Il  y  rentra  en 
1715,  et  y  mourut  en  1753,  dans  la  mai- 
son de  St. -Honoré  à  Paris,  à  85  ans.  Il 
avait  prêché  avec  quelque  succès ,  et  son 
esprit  se  pliait  facilement  à  tous  les  genres 
d'étude.  On  a  de  lui  1°  L'édition  citée 
du  Dictionnaire  de  Riclielet ,  revue , 
corrigée  et  augmentée  ,  en  2  vol.  in-fol., 
Lyon,  1709,  sous  le  titre  d'Amsterdam. 
2°  Un  petit  Dictionnaire  latin  et  fran- 
çais ,  in-8  ,  dressé  sur  les  meilleurs  au- 
teurs classiques ,  et  dont  ou  a  fait  plu- 


FAB  i83 

sîeurs  éditions.  3°  Une  traduction  des 
OEuvres  de  Firgile  ,  avec  des  disserta- 
tions ,  des  notes  et  le  texte  latin  ,  en  3 
vol.,  Lyon  ,  1721 ,  réimprimé  en  1741,4 
vol.  in-12.  Cette  version,  lâche  et  prolixe, 
n'est  guère  au  dessus  de  celle  de  Marti- 
gnac.  4°  Une  Continuation  de  l'Histoire 
ecclésiastique  de  Fleuri/,  en  16  vol.  in-4 
et  in-1 2  ,  depuis  1414,  jusqu'à  l'an  1 595. 
On  en  a  une  nouvelle  édition  ,  1777.  Il 
l'avait  poussée  beaucoup  plus  loin  ;  mais 
les  deux  derniers  tomes  ayant  été  chan- 
gés en  quantité  d'endroits  par  des  mains 
étrangères,  et  lui  ayant  d'ailleurs  été  dé- 
fendu de  donner  de  nouveaux  volumes  , 
la  suite  est  restée  manuscrite.  Le  conti- 
nuateur est  bien  inférieur  à  l'auteur  qu'il 
continue ,  pour  l'onction  du  stile  et  pour 
le  choix  des  matières ,  et  surtout  pour  la 
sagesse  et  l'éloignement  de  l'esprit  de 
parti.  Il  étend  avec  excès  son  travail,  et 
mêle  à  l'histoire  ecclésiastique  trop  d'his- 
toire civile.  Ce  n'est  proprement  qu'une 
compilation  écrite  d'un  stile  facile,  mais 
sans  correction  et  sans  élégance.  L'abbé 
Rondet  qui  l'a  continuée  après  lui ,  a  en- 
core plus  mal  réussi,  et  donné  au  fana- 
tisme de  la  petite  église  un  essor  plus 
libre.  C'est  cependant  celte  continuation 
de  Fleury,  qui  est  continuellement  citée 
par  les  compilateurs  du  jour  ;  le  fanatique 
Fabre ,  le  fanatique  Rondet  sont  sans  cesse 
allégués  comme  des  autorités  légales,  par 
des  gens  même  qui  veulent  avoir  des  ti- 
tres à  la  philosophie.  Tel  est  le  sort  de 
l'histoire  dans  ces  jours  de  subversion  et 
de  mensonge.  5°  Entretiens  de  Christine 
et  de  Pélagie,  sur  la  lecture  de  l'Ecri- 
ture sainte,  in-12.  6"  Un  Abrégé  de 
r Histoire  ecclésiastique  en  manuscrit.  7* 
La  table  de  la  traduction  française  de 
l'Histoire  du  président  de  Thou  ,  in-4.  Il 
avait  aussi  commencé  la  table  du  Journal 
des  savans ,  dont  il  se  déchargea  peu 
après  sur  M.  l'abbé  de  Claustre,  à  qui  on 
est  redevable  de  cet  ouvrage  en  10  vol. 
in-4.  —  Il  ne  faut  pas  le  confondre  avec 
un  abbé  Fabde  ou  Fa vre  ,  qui  a  donné  des 
Lettres  sur  la  visite  de  M.  des  Achards ,  ' 
ouvrage  dicté  par  l'esprit  du  même  parti 
et  supprimé  par  un  décret  du  saint-office 
le  16  juin  1746. 


ï84  FAB 

•  FABRE  D'EGLANTINE  (PUiHppe- 
François-Nozaire  ) ,  membre  de  la  Con- 
Tcntion  et  poète  dramatique ,  né  à  Car- 
cassonnc  eu   1766,    avait  un  caractère 
changeant  et  d'une  mobilité  extraordi- 
naire ;  après  avoir  quitté  la  maison  pater- 
nelle, il  fut  successivement  peintre,  gra- 
veur ,    musicien  ,  comédien ,   poète  et 
législateur.  Ayant  remporté  une  eglantine 
au  concours  des  Jeux  floraux ,  il  ajouta 
le  nom  de  cette  fleur  à  son  nom.   Après 
avoir  quitté  le  théâtre  comme  comédien, 
il  y  reparut  comme  auteur.  Sa  carrière 
poétique  ne  fut  point  commencée   par 
des  chefs-d'œuvre  ;    ses  premiers  essais 
furent  F  Amour  et  V  intérêt^  et  le  Pré- 
somptueux^ ouvrages  dont  il  n'est  plus 
question  nullepart.  Bientôt,  aprèsavoir lu 
\ Optimiste  ou  Vlwmme  content  de  tout , 
de  Colin  d'Harleville ,  il  s'indigna  que 
dans  ce  moment  de  bouleversement  gé- 
néral,  on  pîit  trouver  quelqu'un   dans 
cette  position  ;  il  fit  alors  le  Phylinte  de 
Molière  ou  la  suite  du   Misanthrope , 
comédie  en  5  actes  et  en  vers ,  qui  est 
sans  contredit  le  chef-d'œuvre  de  ce  poète, 
c'est  la  plus  forte  conception  dramatique 
que  l'on  ait  faite  depuis  Molière  ;  mais 
sous  le  rapport  du  stilc ,  elle  présente 
des  imperfections  qui  ont  éprouvé  de 
nombreuses  critiques.  En  1791  il  fit  re- 
présenter r/«/n5'we  épisiolaire ,  comédie 
en  6  actes  et  en  vers ,  qui  maintint  par 
sa  gaîté  communicative  la  réputation  de 
l'auteur.  En  même  temps  que  Fabre  ac- 
quérait des  titres  à  une  immortalité  glo- 
rieuse ,  il  paraissait  sur  une  autre  scène , 
sur  la  scène  politique  où  sa  conduite  et 
ses  principes  lui  donnaient  des  titres  à 
une  célébrité  d'un  autre  genre.  Il  avait 
embrassé  avec  ardeur  le  parti  de  la  révo- 
lution. Membre  de  la  société  des  Jacobins, 
ami  et  secrétaire  de  Danton ,  membre  de 
la  municipalité  usurpatrice  qui  s'installa 
«Ue-même  dans  la  nuit  du  9  au  10  août 
1 792 ,  il  partagea  tous  les  excès  de  cette 
époque.  Député  à  la  Convention  par  la 
ville  de  Paris ,  il  se  prononça  pour  les 
mesures  les  plus  violentes ,   et  dans  le 
procès  du  roi ,  il  vota  la  mort  sans  sursis 
et  sans  appel.  Ce  farouche  républicain  ne 
tarda  pas  à  être  accusé  de  royalisme  ;  en 


FAB 

lui  reprocha  plus  tard  d'être  le  chef  du 
modérantisme.  Son  crime ,  aux  yeux  des 
révolutionnaires,  était  d'avoir  mis  de  l'in- 
dépendance dans  les  mesures  tyranniques 
qu'il  proposait ,  et  de  ne  s'être  point  atta- 
ché au  char  de  Robespierre.  D'abord  on  lui 
reprocha  des  forfaits  qu'il  n'avait  point 
commis,  et,  lorsqu'il  voulut  se  justifier,  il 
fut  interrompu  par  les  cris  à  la  guil- 
lotine. Arrêté  comme  falsificateur  d'un 
décret  relatif  à  la  compagnie  des  Indes,  il 
repoussa  avec  énergie  dans  son  Mémoire 
cette  fausse  inculpation.  Sorti  victorieux 
de  cette  accusation ,  il  retomba  bientôt 
sous  le  poids  d'une  autre ,  et  lui ,  qui  était 
si  fier  de  se  dire  français  ,  fut  arrêté  com- 
me complice  d'une  conspiration  de  l'é- 
tranger. Condamné  à  mort  avec  Danton, 
Camille    Desmoulins  ,  etc.  ,    il  mourut 
avec  eux  le  6  avril  1794.  Comme  person- 
nage politique,  Fabre  a  laissé  un  nom 
odieux  :  partisan  des  mesures   révolu- 
tionnaires ,  assassin  de  Louis  XVI ,  il  est 
voué  à  l'exécration  des  siècles.  Sa  gloire 
littéraire  jettera  peut-être  un  jour  quel- 
que voile  sur  ses  infamies  politiques.  La 
postérité  a  presque  oublié  le  rôle  que 
joua  dans  la  révolution  d'Angleterre  l'au- 
teur du  Paradis  perdu  -.  nous  désirons 
que  l'histoire  fasse  paix  au  conventionnel 
Fabre,  pour  ne  rappeler  que  les  composi- 
tions du  poète.  Outre  les  pièces  que  nous 
avons  citées,  il  fit  d'autres  comédies  par- 
mi lesquelles  on  remarque   encore  les 
Précepteurs ,  en  6  actes  et  en  vers,  jouée 
après  la  mort  de  l'auteur,  imprimée  en 
1799,  in-8,  et  traduit  en  allemand  par 
M™^  Kl)tzebue.  11  avait  fait  aussi  une  tra- 
gédie, quelques  pièces  de  vers  et  d'au- 
tres écrits  qui  ont  été  réunis  sous  le  titre 
d'OEuvres  mêlées  et  posthumes,  Paris, 
1802,  2  vol.  in-8  et  in-12.  On  a  publié 
en   1796  une  Correspondance  de  Fabre 
d'Eglantine,  précédée  d'une  notice  his- 
torique sur  son  existence  ,  morale,  phy- 
sique et  dramatique,  et  d'un  fragment 
de  sa  vie  écrite  par  lui-même  ,  Paris ,  3 
vol.  in-12. 

•  FABRE  D'OLIVET  (Antoine),  litté- 
rateur, naquit  à  Ganges  (Héraut)  le  8  dé- 
cembre 1768.  Il  appartient  à  la  même  fa- 
mille que  le  précédent,  et  il  était  comme 


I 


Paë 

lui  de  la  religion  protestante.  Deslîuéau 
commerce,  il  vint  à  Paris  à  l'âge  de  12 
ans.  S'étant  lie  avec  quelques  jeunes  au- 
teurs, il  prit  du  goût  pour  les  lettres  et 
pour  la  musique ,  auxquelles  il  se  livra 
bientôt  entièrement,  lldtbuta,  en  1789, 
par  un  opéra  intitulé  La  Prise  de  Tou- 
Ion ,  et  donna  ensuite  quelques  autres 
pièces  qui  furent  assez  bien  accueillies  du 
public  ,  mais  qui  sont  aujourd'hui  entiè- 
rement oubliées.  Il  ne  parait  pas  qu'il  ait 
figuré  dans  nos  troubles  révolutionnaires, 
ni  occupé  d'emploi ,  au  moins  un  peu 
important ,  ayant  presque  toujours  vécu 
à  la  solde  des  libraires.  Il  est  mort,  à 
Paris ,  au  commencement  du  mois  de  mai 
1 825.  On  a  de  lui  indépendamment  de  la 
pièce  déjà  citée  :  1"  Ze  Sage  de  l'Indos- 
tari,  1 79C,  ejiun  acte  et  en  vers  ;  2"  ^za- 
laïs  ,  ou  le  gentil  Aimar ,  1 800  ,  in-8.  3° 
Lettres  à  Sophie  sur  l'histoire,  1801  , 
2  vol.  in-8.  C'est  le  meilleur  ouvrage  de 
l'auteur;  i°Gue'rison  de  Rodolphe  Grivel, 
sourd  et  muet  de  naissance,  1811,  in-8. 
Fabre  d'Olivet  avait  cru  trouver  dans  des 
livres  orientaux  le  moyen  de  faire  parler 
les  muets,  d'après  une  méthode  pratiquée 
par  les  prêtres  de  Memphis  :  il  en  fit  l'es- 
sai sur  le  jeune  Grivel ,  qu'il  assura  avoir 
guéri  ;  ce  qui  éleva  une  contestation  en- 
tre lui  et  MM.  Sicard  et  Prony  ,  qui  pré- 
sentèrent au  ministère  un  rapport  sur  ce 
fait.  Le  livre  de  Fabre  d'Olivet  a  été  réim- 
primé en  1819  sous  le  titre  de  notions 
sur  le  sens  de  Fouie  ;  5"  Les  vers  dorés 
de  Pythagore  ,  expliqués  et  traduits  , 
pour  la  première  fois ,  en  vers  eumolpi- 
ques  français ,  1813,  in-8  ;  G"  La  langue 
hébraïque  restituée ,  et  le  véritable  sens 
des  mots  hébreux  ,  rétabli  et  prouvé  par 
leur  analyse  radicale,  181G,  3  parties 
in-8.  7"  De  F  état  social  ou  vues  philoso- 
phiques sur  t état  du  genrchumain,  1 822, 
2  vol.  in-8.  8°  Le  Troubadour ,  poésies 
occitaniques  au  12*  siècle,  1804  ,  2  vol. 
in-8.  9^  Caïn,  mystère  dramatique  de  lord 
Byron,  traduit  en  français,  Paris,  1823, 
in-8  :  le  litre  de  cet  ouvrage  fut  changé 
en  1 824  :  l'auteur  l'intitula  alors  Histoire 
philosophique  du  genre  humain.  Fabre 
d'Olivet  a  eu  part  à  la  rédaction  de  la 
Bibliothèque  deslîomaps.  Il  ne  manquait 
V. 


PAS 


j85 


pas  d  instruction  ni  d'imagination ,  mais 
on  trouve  dans  ses  écrits  des  idées  plus 
que  singulières,  souvent  extravagantes. 

*  FABRE  (Pierre-Jean) ,  médecin ,  re- 
çu à  la  faculté  de  Montpellier  ,  exerça  sa 
profession  à  Castelnaudary  avec  un  suc- 
cès assez  grand  et  en  tirant  ses  ressources 
moins  de  la  science  médicale  que  de  la 
chimie  dont  il  avait  fait  une  étude  par- 
ticulière. 11  a  fait  paraître  un  grand  nom- 
bre d'ouvrages  que  ses  propres  éloges 
ont  contribué  à  faire  i-éussir  :  ils  ont  joui 
parce  moyen  d'une  vogue  peu  méritée; 
ils  ont  même  été  traduits  en  allemand. 
Les  principaux  sont  :  1°  Palladium  spa- 
giricum,  Toulouse,  1G24,  in-8;  2°  In- 
signes curationcs  variorum  morborum 
medicamentts  chymicis  jucundissima 
methodo  curatorum,  Toulouse,  1627, 
in-8  ;  3°  Myrothccium  spagiricum  sive 
Pharmacopcea  chymica  ,  Toulouse  , 
1G28  ,  in-8  ;  4"  Alchymista  christianus , 
Toulouse,  1632,  in-8,  le  plus  curieux 
de  ses  ouvrages  ;  5°  Panchymici  scu  ana- 
tomiœ  tolius  universi  Opus,  Toulouse, 
164G,  iu-8. 

*  FABRE  (Pierre),  chirurgien,  na- 
quit en  17  16  à  Tarascon,  fut  professeur 
royal  au  collège  de  chirurgie  et  conseil- 
ler du  comité  de  l'académie  royale  :  il 
s'est  fait  connaître  avantageusement  par 
plusieurs  ouvrages  dont  Prudhomme  a 
donné  la  liste  dans  son  dictionnaire  :  il 
est  d'atitant  plus  fâcheux  que  ce  biogra- 
phe ait  négligé  d'indiquer  à  chacun  des 
ouvrages  de  ce  chirurgien  la  date  et  le 
lieu  de  publication  ,  que  loin  de  réparer 
cette  omission  ,  on  l'a  confondu  quelque- 
fois avec  son  frère  Antoine  Fabre  dans  la 
plus  savante  des  collections  biographi- 
ques publiées  postérieurement.  Les  prin- 
cipaux sont  Essai  sur  les  maladies  -vé- 
nériennes ,  1 7  58  ,  in-1 2  ;  Traité  des  ma- 
ladies vénériennes ,  1765,  2  vol.  in-1 2, 
souvent  réimprimé  et  traduit  en  alle- 
mand en  1777  ;  Essai  sur  différens 
points  de  physiologie  ,  1778  ,  in-8  ,  tra- 
duit en  allemand  par  Plâtrier,  1778,  in  8  ; 
Recherches  sur  la  nature  de  l'homme 
considéré  dans  télat  de  santé  et  dans 
Vélat  de  maladie,  17  76,  in-8  ;  Réflexions 
sur  la  chaleur  animale,  1  784,  in-8  ;  Es- 

12.. 


i86  FAB 

sai  sur  tés  facultés  de  Vâme,  Amsterdam , 
1786,  in-12,  réimprimé  en  1787;  He- 
cherches  sur  les  vrais  principes  de  Vart 
de  guérir,  1790,  in-8.  Pierre  Fabre  a  in- 
séré aussi  plusieurs  Mémoires  dans  la 
collection  de  l'acade'mie  royale  de  chi- 
rurgie.—  Fabre  (Antoine),  son  frère,  né 
à  Tarascon  en  1710,  entra  et  fit  profes- 
sion dans  l'ordre  des  grands  carmes ,  où  il 
se  fit  connaître  par  son  talent  pour  la 
chaire  ,  et  fut  chargé  en  1743  par  les  au- 
torités civiles  et  ecclésiastiques  d'Arles 
où  il  habitait  alors ,  de  faire  le  panc'gy- 
rique  de  cette  ancienne  ville.  Ce  savant 
opuscule  a  été  imprimé  à  Aix  ;  mais  le 
recueil  des  sermons  de  l'auteur  n'a  ja- 
mais vu  le  jour.  Antoine  Fabre  est  mort 
à  Aix  en  1793. 

*  FABRE  (Jean),  né  à  Nîmes  le  18 
août  1727,  mort  à  Cette  en  1797,  est 
connu  par  un  trait  de  piété  filiale  qui  a 
fourni  à  Fenouillot  de  Falbaire  le  sujet 
d'un  drame  intitulé  VHonnête  criminel. 
Ses  parens  étaient  commerrans  et  pro- 
testans  -.  Louis  XIV,  en  révoquant  Vc'dit 
de  Nantes  ,  avait  interdit  aux  piotcstans 
l'exercice  public  de  leur  culte  :  il  leur 
était  défendu  ,  sous  peine  des  galères,  de 
se  réunir  pour  leurs  cérémonies  religieu- 
ses. Le  l*"^  janvier  17  56,  Jean  Fabre  ac- 
compagna son  père  dans  le  lieu  où,  mal- 
gré les  ordres  du  prince ,  on  se  livrait 
aux  exercices  du  protestantisme.  La  force 
armée  vint  dissiper  cette  réunion  et  s'em- 
para des  coupables.  Plusieurs  s'enfuirent  : 
le  jeune  Fabre  était  du  nombre  ;  mais  à 
la  vue  de  son  père  saisi  par  les  soldats , 
il  s'élance  auprès  de  l'oflicier  qui  les 
commandait,  et  le  supplie  de  le  laisser 
prendre  la  place  du  vieillard  qui  est  en- 
tre leurs  mains  et  qui  s'oppose  vainement 
à  cet  acte  généreux.  L'ofiicier  consent  à 
cet  échange ,  et  le  jeune  Fabre  accusé 
d'avoir  enfreint  les  ordres  du  roi ,  est 
conduit  à  Montpellier  où  le  tribunal  le 
condamne  aux  galères.  Ce  ne  fut  qu'au 
bout  de  six  ans  que  la  cour  ,  informée  de 
ce  trait  d'amour  filial ,  le  rendit  à  la 
liberté.  Rentré  dans  sa  famille ,  il  revit 
son  vieux  père  ,  épousa  une  de  ses  paren- 
tes ,  s'adonna  au  commerce  et  passa  une 
vie  heureuse  que  le  souvenir  de  son  dé- 


i'Afl 

vouement  devait  embellir  tous  les  jôul'S. 

*  FABRE  DE  L'HÉRAULT  (  N ) , 

avocat  de  Montpellier,  fut  député  à  la 
Coipvention  ,  vota  dans  le  procès  de  Louis 
XVI  la  peine  de  mort  sans  sursis  ni  ap- 
pel, et  joua  du  reste  le  rôle  le,  plus  insig- 
nifiant, jusqu'à  l'époque  où  il  fut  en- 
voyé à  l'armée  des  Pyrénées  orientales, 
en  qualité  de  commissaire.  Sans  aucune  es- 
pèce d'idéede  stratégie,  il  voulut  se  mêler 
de  la  conduite  des  troupes  qu'il  désorga- 
nisa: on  peut  attribuer  ainsi  aux  fautes  que 
l'ignorance  de  l'art  militaire  lui  fit  com- 
mettre ,  la  défaite  de  Dagobert  à  Truillas 
le  22  septembre  1792,  la  retraite  forcée 
de  Turreau  et  l'inaction  de  Doppet.  Il 
chercha  du  moins  à  réparer  par  son  cou- 
rage les  désastres  qu'il  avait  amenés  par 
son  incapacité.  Attaqué  par  le  général 
Lacuesta  ,  il  combattit  avec  valeur  et  fut 
tué  au  moment  où  il  ralliait  les  fuyards. 
La  Convention  lui  accorda  les  honneurs 
du  Panthéon ,  et  à  sa  veuve  une  pension. 

*  FABRE  (Marie-Jacques-Joseph-Vic- 
torin  ) ,  l'un  des  littérateurs  du  1 9*  siècle 
les  plus  précoces  et  les  plus  célèbres ,  na- 
quit à  Jaujac  (A,''dèche),  le  19  juillet 
17  85.  H  débuta  dans  les  lettres  à  l'ngede 
de  19  ans  par  un  Eloge  de  Boileau  et 
quelques  pièces  de  vers  :  ses  essais  furent 
accueillis  par  les  hommes  de  lettres  les 
plus  recommandables  comme  l'annonce 
du  plus  beau  talent  ;  Parny  et  Ginguené 
prédirent  à  l'auteur  un  avenir  de  gloire. 
En  1805  ,  Fabre  concourut  pour  le  prix 
de  poésie  que  l'académie  française  avait 
proposé  sur  \! Indépendance  de  ï homme 
de  lettres  :  Millevoie  remporta  la  palme; 
mais  la  pièce  de  Victorin  Fabre  moins 
travaillée  peut-être  que  celle  du  poète 
lauréat ,  reçut  un  autre  genre  de  récom- 
pense presque  aussi  flatteur  :  l'académie 
regretta  de  n'avoir  pas  deux  couronnes 
à  offrir,  et  ses  vers  furent  traduits  en 
plusieurs  langues  étrangères.  Dans  le 
concours  de  l'année  suivante  ,  dont  le 
sujet  était  le  Voyageur ,  les  deux  rivaux 
furent  couronnés  à  la  fois.  Yictorin  Fa- 
bre publiait  en  même  temps  d'autres  ou- 
vrages en  vers  :  on  remarqua  surtout  son 
discours  intitulé  de  Vlnfluence  des  lu- 
mières sur  ia  destinée  des  empires.  Ce 


I 


FAB 

poète  quittait  quelquefois  sa  muse  poé- 
tique et  adressait  ses  hommages  à  la 
muse  de  l'éloquence  :  son  talent  ne  bril- 
lait pas  moins  dans  cette  nouvelle  car- 
rière, et  ce  fut  à  l'unanimité  et  avec 
enthousiasme  que  l'académie  couronna 
son  Eloge  de  Corneille.  Le  public  ratifia 
ce  jugement,  et  il  n'est  presque  aucun 
écrivain  de  cette  époque  qui  n'a>it  eu  sur  ce 
beau  discours  l'opinion  la  plus  favorable. 
Pendant  plusieurs  mois,  et  en  France  c'est 
extraordinaire,  il  ne  fut  question  que  de 
cet  Eloge,  soit  dans  les  journaux,  soit  dans 
les  salons.  (Voyez  \e&  Mémoires  sur  la  lit- 
térature par  Palissot ,  article  VIctorin 
Fabre).  Le  cardinal  Maury,  Suart  et  Fran- 
çois de  Neuchàteau  ont  consigné  dans 
leurs  écrits  leur  jugement  sur  cet  ouvrage. 
Un  prix  avait  été  proposé  pour  le  meil- 
leur Tableau  littéraire  du  18"  siècle,  et 
ce  sujet  fut  mis  plusieurs  années  de  suite 
au  concours.  Des  hommes  du  plus  grand 
mérite,  notamment  M.  de  Barante,  M.  Eu- 
scbe  Salverte,  etc.,  sont  entrés  dans  la 
lice  :  quelques-uns  ont  même  fait  imprimer 
leurs  ouvrages  ;  Victorin  Fabre  et  M.  Jay 
furent  couronnés.  Dans  la  même  séance 
du  mois  d'avril  1810,  Fabre  reçut  une 
autre  palme  pour  son  Eloge  de  La- 
bruyère.  L'année  suivante ,  il  fut  cou- 
ronné pour  la  sixième  fois  ;  ce  fut  pour 
une  Ode  sur  les  embcUisscmens  de  Paris. 
Indépendamment  de  ses  succès ,  d'autres 
prix  lui  étaient  décernes  par  plusieurs 
académies  de  province  :  celle  des  Jeux 
floraux  lui  en  accorda  un  pour  son  Ode 
sur  le  Tasse  ,  et  celle  du  Gard  pour  son 
Poème  sur  la  Mort  de  Henri  IV.  Dans 
l'intervalle  ,  Fabre  avait  fait  paraître  un 
assez  grand  nombre  de  pièces  de  vers , 
des  Epîtres  ,  des  Elégies  ,  des  Discours 
philosophiques  ei  quelques  petits  poèmes 
d'après  les  croyances  attribuées  aux  Ca- 
lédoniens. Plusieurs  de  ces  pièces  furent 
traduites  par  des  poètes  étrangers  ;  tou- 
tes eurent  en  France  le  plus  grand  suc- 
cès. Un  homme  qxii  jouissait  d'une  répu- 
tation aussi  brillante  devait  être  applaudi 
partout  :  Fabre  le  fut  dans  la  chaire  de 
La  Harpe  et  de  Chénier  ,  à  l'Athénée  de 
Paris  ;  et,  quoique  ses  leçons  n'aient  point 
été  imprimées,  elles  ont  laissé  de  pro- 


MB 


187 


fonds  souvenirs  chez  tous  ceux  qui  ont 
eu  le  plaisir  de  l'entendre.  En  1811  ,  Fa- 
bre parut  encore  dans  les  concours  de 
l'académie,  et  donna  son  Eloge  de  Mon- 
taigne :  c'était ,  suivant  le  cardinal  Mau- 
ry ,  une  grande  création  oratoire ,  sui- 
vant Garât ,  un  chef-d' œuvre  ,  et  selon 
l'académie  elle-même,  cette  production 
était  plus  forte  et  mieux  écrite  que  les 
autres  ouvrages  du  même  auteur  :  cepen- 
dant Fabre  n'eut  qu'une  mention  hono- 
rable. Le  public  fut  indigné,  et  les  journa- 
listes qui  avaient  montré  le  moins  de  bien- 
veillance pour  Fabre ,  désapprouvèrent 
hautement  ce  singulier  jugement.  Voyez 
surtout  le  Journal  de  V Empire  du  7  mai 
1813.  On  chercha  les  motifs  qui  avaient 
dirigé  les  académiciens  dans  cette  aifaire  ; 
on  en  trouva  de  politiques  et  de  litté- 
raires. Fabre  n'avait  pas  chanté  le  héros 
du  jour  :  son  nom  était  le  seul ,  avec  celui 
de  Delille,  qui  n'ait  pas  paru  dans  la  Cou- 
ronne poétique  de  Napoléon  le  Grand  ;  et 
les  jalousies  littéraires ,  la  vue  ennuyeuse 
de  cette  gloire  acquise  dans  un  âge  où 
tant  d'académiciens  ne  sont  encore  que 
des  personnages  obscurs ,  que  sais-je  ? 
tout  ce  que  l'amour-propre  blessé  peut 
exciter  dans  l'âme  si  irritable  de  l'homme 
de  lettres,  voilà  ce  que  répétait  le  public 
avec  malice ,  et  il  faut  le  dire ,  avec  véri- 
té. Buonaparte  avait  mieux  jugé  le  talen^t 
de  Fabre  ;  il  ne  vit  personne  qui  pût 
mieux  célébrer  la  gloire  militaire  de  la 
France  que  le  jeune  écrivain  qui  avait 
cueilli  tant  de  palmes  dans  les  concours 
académiques  :  il  le  chargea  de  raconter 
nos  triomphes ,  devant  le  cercueil  de 
Bessières  :  Fabre  accepta  cet  honneur,  et 
tous  les  cœurs  palpitèrent  en  entendant 
cette  Oraison  funèbre  { cet  éloge  est  res- 
té inédit).  Depuis  celte  époque,  Fabre 
fut  en  butte  à  des  malheurs  multipliés  : 
presque  toute  sa  famille  descendit  dans 
la  tombe,  et  il  consacra  plusieurs  années 
aux  soins  les  plus  affectueux  qu'il  prodi- 
gua à  ses  parens.  Pendant  quatre  ans  ,  il 
resta  au  chevet  du  lit  d'un  frère  chéri  ;  ce 
frère  qu'il  arracha  à  la  mort  par  sa  tendre 
affection  j  il  l'avait  déjà  sauvé,  à  l'âge  de 
20  ans,  en  le  retirant ,  au  péril  de  sa  vie, 
des  flots  du  Rhône  où  il  était  englouti. 


iB8  FAB 

En  1821,  Fabre  revint  à  Paris,  et  eu 
ISSi  et  1825,  il  contribua  de  sa  plume 
et  de  sa  bourse  aux  succès  du  recueil  qui 
parut  alors  sous  le  titre  de  la  Semaine. 
Bientôt  le  chagrin  ,  les  fatigues  ,  des  en- 
uuis  de  tous  genres  minèrent  sa  santé 
et  «br<?gèrent  ses  jours  :  il  est  mort  au 
commencement  de  l'année  1831  ,  laissant 
en  portefeuille  un  grand  nombre  d'ou- 
vrages ,  parmi  lesquels  on  ci  le  un  vol.  de 
Fables  politiques  ,  un  poème  en  quatre 
chants  et  en  vers  de  dix  syllabes,  intitu- 
lé la  Tour  (V E glantine  ,  dont  deux  frag- 
mens  ont  été  publiés  au  commencement 
de  1824  ;  un  Songe  du  Floréal ,  in- 12  , 
et  un  grand  Ouvrage  de  politique ,  dont 
quelques  fragmens  ont  été  lus  à  l'Athé- 
née en  1 822.  On  assure  que  son  frère  doit 
faire  paraître  une  édition  de  ses  OEu- 
vres  complètes.  Victorin  Fabre  appar- 
tient, par  ses  écrits  littéraires  comme 
par  ses  opinions  politiques  et  religieuses, 
à  l'école  philosophique. 

*  FABRE  DE  L'AUDE  (Jean-Pierre  , 
comte},  pair  de  France,  né  à  Carcas- 
sonne  le  8  décembre  17.55,  exerçait 
avant  la  révolution,  la  profession  d'avo- 
cat au  parlement  de  Toulouse,  et  aA^ait  été 
en  1783  député  aux  Etats  du  Languedoc. 
Kommé  en  1790  commissaire  du  roi  pour 
organiser  le  département  de  l'Aude ,  puis 
procurcur-gcnéral-syndic  ,  et  enfin  com- 
missaire-royal près  le  tribunal  criminel 
de  Carcassonne  ;  il  remplit  ses  diverses 
fonctions  avec  un  zèle  et  un  talent  qui 
pe  furent  pas  les  moindres  causes  de  son 
élévation.  Pendant  le  régime  de  la  ter- 
reur, il  fut  proscrit;  et  lorsqu'un  gou- 
vernement un  peu  moins  oppresseur  eut 
succédé  aux  comités  et  aux  tribunaux  ré- 
volutionnaires, le  département  de  l'Aude 
le  députa  au  conseil  des  Cinq-cents  (24 
vendémiaire  an  4,  IG  octobre  1795), 
oii  il  s'occupa  presque  exclusivement  de 
finances.  Pendant  1 4  ans ,  il  fut  rappor- 
teur des  commissions  de  finances  soit 
dans  ce  conseil  soit  au  tribunal.  Ce  fut 
Fabre  de  l'Aude  qui  signala  dans  le  mois 
deseptembre  1 796,  les  abus  qui  régnaient 
dans  l'administration  des  postes,  indiqua 
de  sages  améliorations  et  s'opposa  à  ce 
que  le  Directoire  afTcrmàt  cette  branche 


FAB 

du  revenu  public.  Ce  fut  encore  lui  qui , 
dans  le  mois  de  novembre  de  la  même 
année  ,  demanda  la  régularisation  de  la 
perception  des  droits  pour  l'entretien  des 
routes;  qui  fit  décréter  en  17  97  l'impôt 
sur  les  billets  de  spectacle ,  au  profit  des 
hospices  dont  la  plupart  avaient  été  rui- 
nés par  les  dilapidations  des  révolution- 
naires. Ce  fut  sans  doute  dans  des  vues 
d'utilité  publique ,  mal  entendue  il  est 
vrai,  qu'il  proposa  de  couvrir  un  déficit 
de  125,000,000  sur  les  dépenses  ordi- 
naires de  l'année ,  par  le  rétablissement 
de  la  loterie  et  par  l'impôt  sur  le  sel  :1a 
morale  et  la  religion  repoussent  l'un  ,  et 
l'autre  est,  de  l'avis  de  tous  les  économis- 
tes confirmé  par  Texpérience  des  labou- 
reurs ,  opposé  à  la  pro.spérité  de  l'agri- 
culture (29  août  1797).  Le  29  octobre 
1797,  Fabre  fit  un  rapport  sur  le  mode 
d'imposition  et  de  paiement  des  charges 
départementales  et  communales.  Le  4 
juillet  1798,  il  demanda  le  rétablissement 
des  octrois  de  bienfaisance.  En  même 
temps  il  donna  un  plan  général  de  comp- 
tabilité pour  toute  la  France ,  s'opposa 
plus  tard  à  une  coupe  extraordinaire  des 
bois  de  l'Etat,  et  quelques  jours  après  il 
s'éleva  contre  les  effets  déplorables  qu'a- 
vaient produits  l'emprunt  force'  et  la  loi 
des  otages  :  il  mit  dans  cette  dernière 
discussion  une  chaleur  qu'il  n'avait  pas 
l'habitude  d'apporter  dans  ses  discours  , 
et  termina  son  opinion  par  ces  mots  qui 
faillirent  le  faire  envoyer  à  l'Abbaye  : 
P^oilà  de  quoi  dessiller  les  yeux  des 
Quinze-vingts.  Nous  n'avons  fait  que 
donner  une  faible  partie  des  travaux  fi- 
nanciers de  Fabre  de  l'Aude  .  pour  bien 
les  connaître ,  il  faudrait  méditer  les  dis- 
cussions auxquelles  ont  donué  lieu  ses 
diverses  propositions.  Ce  qu'il  y  a  3e 
certain ,  c'est  qu'il  améliora  le  système 
des  impôts  qui  était  alors  bien  incomplet 
et  qui  a  encore  été  perfectionné  depuis  ; 
c'est  qu'il  fit  prendre  des  mesures  utiles 
pour  la  vérification  des  recettes  des  pré- 
posés aux  finances ,  et  que  l'emploi  des 
contributions  fut  mieux  assuré.  Ou  lui 
doit  en  outre  l'organisation  des  ponts 
et  chaussées ,  administration  si  dispen- 
dieuse ,  et  qui ,  malgré  les  soins  que  l'on 


1 


FAB 

a  apportt^s  et  que  l'on  apporte  continuel- 
lement pour  utiliser,  de  la  manière  la 
plus  profitable;  les  millions  qu'on  lui 
confie  tous  les  ans,  est  encore  bien  loin 
de  répondre  à  l'attente  ou  aux  justes  exi- 
gences du  public.  A  l'époque  oii  fut  éta- 
bli le  gouvernement  consulaire,  Fabre 
de  l'Aude  fut  envoyé  dans  le  Midi  en 
qualité  de  commissaire,  pour  chercher  à 
concilier  les  partis.  De  retour  à  Paris , 
oii  il  fit  dès  lors  partie  du  tribunal,  il 
continua  à  ne  s'occuper  que  de  finances. 
Ce  fut  à  peu  près  à  cette  époque  qu'il  fit 
paraître  un  écrit  intitulé  :  Recherches 
sur  Vimpôt  du  tabac  et  moyen  de  l'a- 
mc'Uorer ,  ouvrage  que  MM.  de  Humboldt 
et  Bompland  ont  cité  dans  leur  Essai 
politique  sur  le  Mexique  ,  et  dans  lequel 
on  trouve  V idée  fondamentale  qui  a  pré- 
sidé à  t établissement  des  droits  réunis 
(1"  ventôse  an  10,  20  février  1802.) 
L'année  suivante  il  développa  cette  opi- 
nion et  en  fit  l'objet  d'une  proposition  for- 
melle ,  par  suite  de  laquelle  fut  établie 
une  administratioij^cciale  embrassant  la 
régie  de  toutes  les  taxes  indirectes  :  le  bud- 
get de  1 804  présente  la  création  des 
droits  réunis.  Peu  auparavant  (27  ventôse 
an  1 1,1 8  mars  1803)  Fabre  avait  proposé  de 
déclarer  la  contribution  foncière  fixe  et  im- 
muable, et  il  regardait  l'adoption  de  cette 
proposition  comme  le  seul  moyen  qui  pût 
faire  disparaître  l'inégalité  de  la  reparti  - 
tion,  etdonnerquelques  capitaux  à  l'agri- 
culture. Fabre  ,  nommé  président  du  tri- 
bunal ,  félicita  Buonaparte  devenu  empe- 
reur ,  et  dans  les  discours  qu'il  prononça, 
soit  alors,  soit  plus  tard,  devant  la  famille 
impériale,  il  employa  un  langage  indigne 
delà  haute  position  sociale  qu'il  occupait. 
Toutefois  nous  ne  sommes  pas  de  ceux 
qui  croyons  aux  niaises  calomnies  pro- 
pagées par  le  libelliste  anglais  ,  Golds- 
mith,  dans  le  Cabinet  de  St.-Cloud,  et 
nous  ne  pouvons  supposer  que  l'impiété 
et  le  mauvais  goût  de  Fabre  aient  clé  jus- 
qu'à dire  à  la  mère  de  Buonaparte  :  La 
conception  que  vous  avez  eue  en  portant 
dans  votre  sein  le  Grand  Napoléon  ,  n'a 

Été  SUREMENT    QU'u.'HE    INSPIRATION  DIVINE. 

11  fut  chargé  d'aller  complimenter  en  Al- 
lemagne le  guerrier  vainqueur  de  tant  de 


PAS  189 

peuples  ;  maïs  ni  Fabre  ni  la  députation 
dont  il  était  le  chef,  ne  purent  atteindre 
le  rapide  conquérant.  Arrivé  à  Lintz  ,  il 
reçut  170  drapeaux  pris  sur  l'ennemi ,  et 
il  les  apporta  en  France.  Nommé  com- 
mandant de  la  Légion  d'honneur  à  l'épo- 
que de  la  création  de  cet  ordre  ,  il  fit 
partie  du  sénat  conservateur  le  14  août 
1807  ,  après  avoir  été  présenté  deux  fois 
par  son  département.  Il  avait  reçu  en 
même  temps  le  litre  de  comte ,  et  plus 
lard  (1810)  il  fui  élu  membre  du  grand 
conseil  d'administration  du  sénat  :  peu 
de  temps  après,  Buonaparte  le  nomma 
procureur-général  près  le  conseil  du  sceau 
des  titres.  Quoiqu'il  eût  été  comblé  de 
bienfaits  par  le  gouvernement  impérial, 
Fabre  ne  tarda  pas  à  voir  en  1814  que 
l'ordre  public  exigeait  une  grande  répa- 
ration ,  et  que  le  trône  de  Louis  XVI  que 
la  révolution  avait  détruit  le  10  août 
1792  ,  devait  être  relevé  pour  le  bonheur 
de  la  France  :  il  oublia  ses  affections  pour 
ne  songer  qu'à  sa  patrie ,  et  dans  la  séance 
du  l*'  avril  1814,  il  fut  un  des  67  pairs 
qui  votèrent  la  création  d'un  gouverne- 
ment provisoire ,  et  indiqua  par  une  mo- 
tion d'ordre  les  principales  bases  consti- 
tutionnelles qui  furent  adoptées  à  St.- 
Ouen.  Chargé  de  faire  un  rapport  sur  le 
projet  de  constitution  présenté  par  le 
gouvernement  provisoire ,  il  proposa  le 
principe  et  la  rédaction  de  la  proposition 
qui  tendait  à  abolir  la  confiscation  ;  et,  en 
énonçant  cette  proposition ,  il  déclara 
qu'il  n'avait  jamais  voulu  acquérir  ni 
biens  d'émigrés  ni  biens  du  clergé.  L'or- 
donnance royale  du  3  juin  1 8 1 4  ,  le  com- 
prit au  nombre  des  pairs  de  Louis  XVIII  : 
il  vota  continuellement  dans  le  sens  du 
gouvernement,  et  fut  de  l'avis  du  minis- 
tère qui  demanda  des  mesures  restrictives 
contre  la  liberté  de  la  presse.  Fabre  de 
l'Aude  fit  aussi  partie  de  la  chambre  des 
pairs  des  cent  jours  ,  et ,  quoiqu'il  se  fût 
opposé  à  la  proclamation  de  Napoléon  II, 
et  qu'il  eût  fait,  après  la  bataille  de  Wa- 
terloo, des  démarches  assez  nombreuses , 
avec  M.  de  Larochefoucault  et  d'autres 
Pairs ,  pour  supplier  Louis  XVIII  de  re- 
venir à  Paris,  il  fut  regardé  comme  dé- 
missionnaire ,  et  ne  rentra  à  la  chambre 


îQo  FAB 

des  pairs  qu'en  1819.  Depuis  cette  épo- 
que ,  Fabre  est  i-aremeut  monte  à  la  tri- 
bune :  cependant  nous  ne  pouvons  pas- 
ser sous  silence  le  discours  remarquable 
qu'il  prononça ,   dans  la  séance  du  23 
mars  1822,  sur  le  projet  de  résolution 
relatif  à  la  compétence  et  au  mode  de 
procéder  de  la  chambre  des  pairs  en  ma- 
tière correctionnelle  et  criminelle  :  son 
discours  fut  imprimé  par  ordre  de  la  cham- 
bre. Fabre  \olait  ordinairement  avec  le 
ministère  :  cependant  ses  opinions  avaient 
une  tendance  libérale  qui  résultait,  sans 
doute,  des  anciennes  habitudes  qu'il  avait 
prises  au  conseil  des  Cinq-cents  et  au 
tribunat  dont  il  ne  fut,  dit-on,  nommé 
président,  que  parce  que  Buonaparte  vou- 
lait lui  imposer  silence.  Ses  connaissances 
en  matière  financière  étaient  très  éten- 
dues ,  et  on  lui  doit  plusieurs  améliora- 
tions importantes  dans  la  levée  des  con- 
tributions et  en  général  dans  la  compta- 
bilité du  trésor.  Une  violente  attaque  de 
choléra-morbus  l'a  enlevé  en  peu  de  jours 
dans  le  commencement  de  juillet  18-32. 
Fabre  de  l'Aude  a  publié  \°  Lettre  à  mon 
/ils sur  maconduite politique,  181  G,  in-8j 
2°  Traduction  d^un  ouvrage  italien,  in- 
titule'. Réflexions  politiques  et  morales , 
avec  des  notes  du  traducteur  en  italien 
et  en  français,  Paris,  1817,  4vol.in-12. 
FABRETTI  (  Raphaël  ),  né  à  Urbin 
en  Ombrie  l'an  ICI 9,   mort  à  Rome  en 
1700,  fut  secrétaire  du  pape  Alexandre 
YIII ,  chanoine  de  la  basilique  du  Vati- 
can, et  préfet  des  archives  du  château 
Saint- Ange  sous  Innocent  XII.  11  s'adonna 
à  l'étude  de  l'antiquité ,  et  il  ne  lui  man- 
qua rien  de  ce  qui  doit  faire  un  habile 
homme  en  ce  genre  :  connaissance  de 
l'histoire  grecque  et  romaine,  des  lan- 
gues ,  des  critiques ,  des  philosophes  ; 
correspondances  avec  les  savans,  etc.  On 
a  de  lui  plusieurs  ouvrages  en  latin ,  es- 
times des  antiquaires  :   1"  De  aquis  et 
aquœ  ductibus  vetcris  Romœ ,  Rome , 
1680,  in-12,  nouvelle  édition,  augmen- 
tée de  notes ,  Rome,  1788,  in-4.   2"  Z^e 
columna  Trajani,  cum  yïlp/wnsi  Ciaco- 
nii  liistoria  utriusque  bclli  Dacici  a  Tra- 
Jano  gesti ,    etc.,  Rome,   1683,  in-fol. 
3"  Jœsithcei  ad  Gronoviuni  apologcma 


FAB 

in  ejusque  Titilivitia ,  sive  de  TitO'Livio 
somnia ,  animadversiones ,  1686,  in-4, 
i°  Inscriptionum  antiquqrum  explicatio, 
Rome,  1699  ,  in-fol.  Ce  livre  est  regardé 
comme  un  trésor  pour  les  savans  qui  s'oc- 
cupent de  l'antiquité.  Fabretti  avait  un 
esprit  vif,  une  conception  facile  et  une 
mémoire  excellente.  Il  aimait  l'étude  avec 
passion,  et  ce  qu'il  y  a  de  singulier^  c'est 
que  loin  d'affaiblir  son  tempérament  , 
qui  fut  très  faible  jusqu'à  l'âge  de  30  ans, 
elle  le  fortifia. 

FABRI.  Foycz  Fèvre. 
FABRI  (  Honorât  ou  Honoré) ,  né  dans 
le  diocèse  de  Belley  en  1607  ,  jésuite  en 
Ï62G  ,  professeur  de  philosophie  à  Lyon 
dans  sa  société,  mourut  en  1688  à  Rome, 
où  il  fut  long-temps  pénitencier.  C'était 
un  homme  extrêmement  laborieux.  Il  em- 
brassa toutes  sortes  de  connaissances , 
philosophie,  mathématiques,  théologie, 
morale,  et  il  laissa  des  écrits  sur  toutes 
ces  matières.  On  a  de  lui  :  1°  Notœ  in 
notas  ÏFiUielnù  ïVendrokii ,  sous  le  nom 
àe  Bernard  Stubrock ,  insérées  dans  le 
Recueil  ou  la  grande  Apologie  de  la 
Doctrine  morale  de  la  Société  de  Jésus , 
Cologne,  1672,  in-folio,  et  ensuite  mises 
à  Vindex  à  Rome.  2°Suinmula  theologiœ, 
in-4.  3"  Un  Dialogue  en  faveur  de  lapro- 
babilité,  réfuté  par  l'abbé  Gradi ,  biblio- 
thécaire du  Vatican,  Rome,  1659,  in-8. 
Le  Père  Fabri  était  plus  propre  pour  la 
physique  et  les  mathématiques,  que  pour 
la  théologie.  Ses  écrits  dans  le  premier 
genre  sont  :  1°  une  Physique,  en  latin, 
Lyon,  1669,  4  vol.  in-4.  2"  Dialogiphy- 
sici,  Lyon,  1C69,  in-8.  3"  De  plantis, 
de  gcneratione  animalium,  et  de  liomine, 
Paris,  1666,  in-4.  C'est  dans  ce  traité, 
page  204 ,  qu'il  prouve  avoir  enseigné  la 
circulation  du  sang  avant  que  le  livre  de 
Guillaume  Harvée  eût  pu  tomber  entre 
ses  mains,  k"  Synopsis optica,  Lyon,  1667, 
in-4 .  (5"  Opusculum  geometricum  delinea 
sinuum  et  Cycloïde.  Il  a  laissé  en  outre 
onze  volumes  in-4  de  manuscrits  :  ce 
sont  des  notes  sur  l'histoire  naturelle  de 
Pline,  des  apologies,  des  aphorismes,  des 
parallèles,  etc.  ) 

FABRICE  ou  Le  Fèvrk.  Foy.  Fabri- 
cius(  François). 


^AËRICE  (  André  ),  prol'esseUr  dô 
philosophie  à  Sainte-GertrudeàLouvain, 
conseiller  des  ducs  de  Bavière  et  prévôt 
d'Ottingen,  natif  de  Hodeige,  village  du 
pays  de  Liège ,  mourut  en  1 68 1 .  On  a  de 
lui  Harmonia  confessionis  Augustance, 
Cologne  ,  1687  ,  in-folio  ;  des  Notes  sur 
le  Catéchisme  romain,  et  des  tragédies 
sacrées. 

FABRICE  (  George  ) ,  né  à  Kemnilz 
dans  la  Misnie  le  24  avril  151G,  mort  le 
13  juillet  1571  ,  à  55  ans,  a  laissé  des 
poésies  latines ,  imprimées  à  Bâle  en  2 
vol.  in-8  ,  en  15G7.  On  y  remarque  beau- 
coup de  pureté  et  de  naturel.  Il  a  été  prin- 
cipalement fort  attentif  sur  le  choix  des 
mots.  Il  n'en  emploie  aucun  dans  ses  poè- 
mes sacrés,  qui  ressentent  la  fable  et  le  pa- 
ganisme. On  a  encore  de  lui  1°  un  Art 
poétique,  en  7  livers,  en  latin,  1589, 
in-8  ;  2°  une  Collection  des  poètes  chré- 
tiens latins ,  in-8,  Bàle,  1562.  On  lui  a 
reproché  d'avoir  altéré  quelquefois  les 
auteurs  qu'il  publiait.  .3"  Une  Descrip- 
tion de  Rome.  4°  Origines  Sa.ronicœ , 
Leipsick,  IGOfi  ,  en  2  vol.  in-folio  ;  com- 
pilation estiméepar  les  savans.  On  y  trouve 
les  portraits  des  électeurs  de  Saxe,  gravés 
par  Wolfg  Killian.  5"  Rerum  Misnica- 
rurn  libri  septcm.  Ce  sont  des  annales  de 
la  ville  de  Meissen ,  réimprimées  à  Leip- 
sick en  1G60  ,  in -4,  et  remplies  de  pro- 
fondes recherches.  6°  Rerum  Germaniœ 
et  Saxoniœ  volumina,  duo,  Leipsick ,  in- 
folio, 1G09,  etc.  (Voyez,  pour  connaître 
la  liste  des  ouvrages  de  Fabrice ,  le  tome 
32  des  mémoires  de  JN'iccron ,  et  dans  la 
Centurin  Fabriciorum.) 

FABRICE  (  Guillaume  ) ,  surnommé 
Uildanus,  de  Hilden,  village  de  la  Suisse, 
où  il  naquit  en  loGO  ,  savant  chirurgien 
dont  les  ouvrages  ont  été  imprimés  h 
Francfort,  1CS2,  in-folio,  avec  fig.  Il 
mourut  à  Berne  en  1G34. 

Fx\BRICIUS  (Caïus),  surnommé  Lus- 
cinus  à  cause  de  la  petitesse  de  ses  yeux, 
fut  consul  romain  l'an  282  avant  .T.  C. ,  et 
mérita  les  honneurs  du  triomphe  par'plu- 
sieurs  victoires  sur  les  Samnites,  les  Bru- 
tiens  et  les  Lucaniens.  Le  butin  qu'il  rem- 
porta dans  ces  victoires  était  si  considé- 
rable ,  qu'après  avoir  récompensé  les  sol- 


FAB  igi 

ciats  et  restitué  aux  citoyens  de  Rome  ce 
qu'ils  avaient  fourni  pour  la  guerre ,  il 
lui  resta  400  talens,  qu'il  fit  porter  à  l'é- 
pargne le  jour  de  son  triomphe.  Député 
deux  ans  après  vers  Pyrrhus,  il  refusa  les 
présens  et  les  honneurs  de  ce  'prince , 
qui  voulait  corrompre  sa  fidélité.  Ce  roi 
eut  bientôt  un  nouveau  sujet  d'admira- 
tion. Son  médecin  vint  offrir  à  Fabricius, 
pour  lors  consul,  d'empoisonner  son  maî- 
tre ,  pourvu  qu'on  lui  payât  ce  parricide. 
Le  généreux  romain  renvoya  le  monstre 
à  Pyrrhus ,  pour  être  puni  comme  il  le 
méritait....  Les  Samnites  lui  ayant  offert 
une  somme  considérable ,  il  répondit  à 
leurs  ambassadeurs,  en  portant  la  main 
à  ses  oreilles ,  à  ses  yeux  et  à  sa  bouche  : 
«  Tant  que  je  pourrai  commander  à  tou- 
î)  tes  ces  parties-la  ,  vos  offres  me  sont 
»  inutiles...  »  Fabricius  fut  censeur  l'an 
277  avant  J.  C,  avec  Erailius  Papus , 
homme  aussi  austère  que  lui.  Le  premier 
avait  pour  toute  argenterie  une  petite  sa- 
lière ,  dont  le  pied  n'était  que  de  corne  ; 
l'autre  un  petit  plat,  pour  présenter  ses 
offrandes  aux  dieux.  Les  deux  censeurs 
cassèrent  de  concert  un  sénateur  nommé 
Cornélius  Rufinus ,  qui  avait  été  deux 
fois  consul  et  dictateur,  parce  qu'il  avait 
chez  lui  dix  livres  d'argent  en  vaisselle 
de  table.  «  Admire  qui  voudra,  dit  Saint- 
M  Evremont ,  la  pauvreté  de  Fabricius  ; 
»  je  loue  sa  prudence,  et  le  trouve  fort 
»  avisé  de  n'avoir  eu  qu'une  salière  d'ar- 
T>  gent ,  pour  se  donner  le  crédit  de  chas- 
n  ser  du  sénat  un  homme  qui  avait  été 
»  nommé  deux  fois  consul ,  qui  avait 
»  triomphé ,  qui  avait  été  dictateur,  u 
Quoi  qu'il  en  soit  de  celte  réflexion ,  et 
des  motifs  de  Fabricius,  ce  romain  vécut 
et  mourut  pauvre.  Le  sénat  fut  obligé  de 
marier  ses  filles  aux  dépens  du  public. 

FABRICIUS- YÉIENTO,  auteur  la- 
lin  sous  ?.éron  ,  vers  l'an  -^9  de  J.  C. ,  fit 
des  libelles  diffamatoires  contre  les  séna- 
teurs et  les  pontifes,  et  fut  chassé  d'Italie 
pour  ses  crimes.  Tacite  remarque  que 
ce  Fabricius  étant  préteur ,  attelait  des 
chiens  aux  chariots  ,  au  lieu  de  chevaux. 
Ses  livres  furent  brûlés  par  ordre  de  Né- 
ron ,  comme  des  satires  atroces. 

*  FABRICIUS  (Théodore),  l'un  des 


lç,i  FAC 

premiers  artisans  de  la  réforlne ,  né  le2 
février  1601  à  Anholt-sur-rVssel ,  dans 
le  comté  de  Zutphcn ,  naquit  de  parens 
pauvres ,  et  n'eut  pendant  long-temps , 
aucun  moyen  de  s'instruire  ;  il  fut  même 
obligé  de  faire  subsister  sa  mère  des  se- 
cours qu'il  obtenait  de  la  charité  publi- 
que. Enfin,  à  17  ans,  il  put  commencer 
ses  études  à  Emmerick  ;  et  son  zèle  et 
son  amour  pour  le  travail  lui  firent  bien- 
tôt obtenir  des  succès  rapides.  Après  avoir 
terminé  à  Cologne  son  éducation  ,  Fabri- 
cius  passa  à  Wittemberg ,  oîi  il  devint 
élève  de  Luther  et  de  Mélaucthon.  Etant 
revenu  dans  sa  patrie  au  bout  de  4  ans, 
il  ouvrit  à  Cologne  une  école  d'hébreu  ; 
mais  comme  on  ne  tarda  pas  à  s'aperce- 
voir que  ,  sous  le  prétexte  d'enseigner 
cette  langue,  il  cherchait  à  répandre  ses 
nouvelles  erreurs,  il  futchassé  de  la  ville. 
Retiré  auprès  du  landgrave  de  Hesse 
(  Philippe  le  Magnanime),  le  patron  des 
réformés,  il  fut  choisi  pour  être  son  aumô- 
nier, et  devint,  en  153G  ,  curé  à  Allen- 
dorf  sur  laWerra  ;  mais  l'aumônier,  mau- 
vais courtisan  ,  s'élant  avisé  de  prêcher 
contre  la  polygamie,  le  landgrave,  à  qui 
Luther  avait  permis  de  prendre  deux  fem- 
mes ,  non  content  de  lui  retirer  ses  fa- 
veurs ,  le  fit  mettre  en  prison  et  confisqua 
ses  biens.  Fabricius  recouvra  cependant 
sa  liberté  quelque  temps  après ,  et  re- 
tourna à  Wittemberg  en  1543  ,  où  il  pro- 
fessa l'hébreu  et  la  théologie.  En  1544, 
il  fut  nommé  pasteur  de  l'église  Saint- 
Nicolas  à  Zerbst ,  oii  son  zèle  un  peu  trop 
tracassier  lui  attira  encore  des  ennemis. 
Accusé  d'hétérodoxie  dans  sa  secte  ,  il  fut 
plusieurs  fois  obligé  de  se  justifier.  Enfin 
il  termina  le  15  septembre  1550  son  ora- 
geuse carrière.  Il  a  laissé  1"  Insiilutiones 
grammaticœ  in  linguam  snnctam,  Co- 
logne,.1528,  1531  ,  in-4;  2°  AiiicuU 
pro  evangelica  doctrina,  ibid.;^°  Tabu- 
Ice  diiœ  de  nominibus  et  de  verbis  Hœ- 
brœorum,  Bàle,  Henri  Pierre,  1545; 
4°  des  Honie'lies ,  des  Sermons  et  des 
Discours  en  allemand.  On  ne  croit  pas 
qu'ils  aient  été  imprimés  ;  5°  un  Abrc'ge' 
de  sa  Vie,  que  Théodore  de  Hase  a  in- 
séré dans  le  premier  fascicule  de  sa  Bi- 
blolheca  Breniensis. 


'FABRICIUS  (Samuel),  né  vers  la 
fin  du  1 6*  siècle  à  Eislcben  en  Saxe ,  et 
ministre  de  Zerbst,  est  connu  par  un  ou- 
vrage qui  a  pour  titre  :  Cosmotheoria 
sacra,  Francfort-sur-le-Mcin ,  1625, 
in-8.  Il  en  a  été  fait  une  seconde  édition, 
avec  des  Considérations  sur  les  bienfaits 
de  Dieu,  Bàle,  1675.  Ce  sont  des  ré- 
flexions sur  le  psaume  104  ,  Confitemini 
Domino ,  etc.  J.  Fabricius  dit  que  ces 
réflexions  durent  naissance  aux  Concioncs 
du  même  auteur,  sur  ce  psaume;  elles 
sont  divisées  en  sept  livres,  qui  traitent 
du  monde  en  général ,  du  ciel ,  des  nua- 
ges, de  l'air,  des  anges,  delà  terre,  des 
eaux ,  de  la  pluie,  des  fruits  de  la  terre , 
etc.  —  Fabricius  (Etienne),  ministre  à 
Berne  au  17'  siècle,  a  laissé  1"  Con- 
ciones  in prophetas  minores,  1641,  in- 
fol.  ;  2"  Conciones  sacrœ  in  Decnlogum, 
1649  ,  in-4  ;  3"  Conciones  sncrœ  infesti- 
vitalibus  annuis  habitœ ,  1656,  in-4; 
4"  In  CL  Psnlmos  Davidis  et  aliorum 
prophetarum  conciones  sacrœ,  1664, 
in-fol. 

*  FABRICIUS  (Frédéric),  premier 
pasteur  de  l'église  de  Saint-ÎNicolas  à 
Stettin  ,  et  docteur  en  théologie  de  l'u- 
niversité de  Wittemberg,  avait  étudié 
avec  succès,  à  Leyde  et  à  Utrecht,  les 
langues  orientales.  Il  a  laissé  une  Tra- 
duction de  l'hébreu  du  Commentaire  du 
rabbin  David  Kimchi ,  sur  Malachie,  et 
plusieurs  Sermons  et  Traités  de  théolo- 
gie polémique,  écrits  en  allemand.  Il  est 
mort  le  11  novembre  1703,  âgédcOl 
ans. 

*  FABRICIUS  (Christophe-Gabriel  ) , 
né  à  Schackdorf ,  ville  de  la  basse  Lusa- 
ce,  le  18  mai  1684  ,  fit  ses  cours  de  théo- 
logie à  l'université  protestante  de  Wit- 
temberg. En  1703,  il  fut  chargé  d'aller 
prêcher  l'Evangile  en  langue  slave,  dans 
la  basse  Lusace,  et  en  1740  ,  dans  la  Lu- 
sace  supéricm-e.  Il  y  mourut  le  12  juin 
1757-  lia  laissé  1"  un  Catéchisme  en 
langue  slave  ;  2"  Hcrrcnhutfi  démasqué, 
Wittemberg,  1743;  3"  Découverte  de 
l'esprit  de  secte  des  herrenhuthers , 
Wittemberg,  1749,  in-8.  Ces  deux  ou- 
vrages sont  écrits  en  allemand.  Christo- 
phe Fabricius  y  combat  la  secte  des  lier- 


I 


FAB 

renhulbers  ;  il  cherche  à  faire  voir  com- 
bien sont  dangereuses  les  vues  que  ces 
sectaires  cachent  sous  des  dehors  reli- 
gieux ,  et  quelles  suites  funestes  ces  er- 
reurs peuvent  avoir  pour  le  christianis- 
me.   Voyez  ZiNZKNDORF. 

FABRICIUS  nommé  aussi  Lefkvrk 
(François),  savant  philosophe,  né  en  1 524 
à  Duren  dans  le  duché  de  Juliers,  vint  à 
Paris  au  collège  de  France  suivre  les  le- 
çons de  Ramus  et  de  Turnèbe ,  fut  rec- 
teur du  collège  de  Dusseldorff  en  1550  , 
et  mourut  en  1573  dans  sa  78^  année.  On 
a  de  lui  :  1°  Pauli  Orosii...  Historiarum 
îibri  septem ,  Cologne  ,  1 582  ,  in-12.  Fa- 
bricius  s'attache  dans  ses  notes ,  à  dé- 
terminer la  véritable  manière  de  lire  le 
texte ,  à  indiquer  les  endroits  des  histo- 
riens profanes ,  qui  ont  rapport  à  ce  que 
dit  Paul  Orose  ,  et  enfin  à  fixer  les  points 
de  chronologie.  Le  Père  André  Schott  en 
a  donné  une  édition  à  Mayence  en  1115, 
avec  les  notes  de  Fabricius  et  celles  de 
Lautius.  2°  In  Terentii  comœdias  annota- 
tiones,  Anvers,  1565.  3°  Ciceronis  histo- 
ria ,  Cologne ,  1 564  ;  Gronovius  y  a  ajouté 
des  notes ,  et  elle  a  été  insérée  par  l'abbé 
d'Olivet  à  la  fin  de  son  édition  de  Cicéron. 

FABRICIUS  (Jérôme),  né  en  1537  , 
plus  connu  souslenom  à' Aquapendente, 
sa  patrie ,  fut  disciple  et  successeur  de 
Fallope  dans  la  chaire  d'anatomie  de  Pa- 
doue.  Il  l'occupa  pendant  40  ans  avec 
beaucoup  de  distinction.  La  république 
de  Venise  lui  donna  une  pension  de  cent 
écus  d'or ,  et  l'honora  d'une  statue  et 
d'une  chaîne  d'or.  Ce  savant  médecin 
mourut  en  1619,  à  Padoue,  laissant  plu- 
sieurs ouvrages  sur  la  chirurgie ,  l'ana- 
tomie  et  la  médecine ,  justement  estimés 
par  ceux  qui  s'appliquent  à  ces  arts  uti- 
les. Ses  OEuvres  anatomiques  ont  été 
imprimées  à  Leyde  en  1738,  in-fol.  Il  re- 
marqua le  premier,  en  1574,  les  valvules 
des  veines  ;  mais  il  ne  connut  ni  leur 
structure ,  ni  leur  usage.  Fabricius  tra- 
vaillait plus  pour  la  gloire  que  pour  l'in- 
térêt. Ses  amis  lui  firent  divers  présens , 
pour  récompenser  son  généreux  désinté- 
ressement. Il  les  mit  dans  un  cabinet  par- 
ticulier ,  avec  cette  inscription  :  Lucri 
neglecti  lucntm. 


FAB  193 

FABRICIUS  (Vincent),  poète  allemand, 
né  à  Hambourg  le  25  septembre  1613,  fut 
successivement  conseiller  de  l'évêque  de 
Lubec ,  syndic  de  la  ville  de  Dantzick  , 
bourgmestre  et  député  de  cette  ville  à 
Varsovie  ,  où  il  mourut  le  1 1  avril  1G67. 
Ses  charges  ne  l'avaient  pas  empêché  de 
se  livrer  à  la  poésie  latine.  Daniel  Hein- 
sius  l'engagea  à  publier  les  fruUs  de  sa 
muse  en  163l2.  On  en  a  donne  une  édi- 
tion plus  complète  à  Leipsick,  en  1667. 

FABRICIUS  (  François  ) ,  né  à  Am- 
sterdam, le  10  avril  1663,  fut  ministre  et 
professeur  en  théologie  dans  l'université 
de  Leyde ,  dont  il  a  été  quatre  fois  rec- 
teur. On  a  de  lui  plusieurs  dissertations 
recueillies  en  5  vol.  in-4,  Leyde,  1727. 
Les  principales  sont  1°  Christus  eccle- 
siœ  fundamentum.  2°  Sacerdoiium 
Christi.  3°  Christologia  Noachica  et 
Abrahamica ,  seu  disscrtatioiies  ad  se- 
lectos  textusveteris  et  novi  Testamenti. 
4°  De  fide  christiana  patriarcharum  et 
prophetarum  ,  etc.  Il  a  fait  aussi  impri- 
mer 6  sermons  en  hollandais.  Ce  savant 
mourut  le  27  juillet  1738. 

FABRiaUS  (  Jean- Albert  ),  né  à 
Leipsick,  en  1668,  s'acquit  de  bonne 
heure  la  réputation  de  littérateur  poli  et 
de  savant  profond.  Il  avait  un  esprit  fa- 
cile ,  une  mémoire  heureuse  et  beaucoup 
de  pénétration.  Après  avoir  fait  ses  étu- 
des avec  distinction  dans  sa  patrie ,  il  se 
rendit  à  Hambourg,  oîi  Mayer  lui  confia 
le  soin  de  sa  bibliothèque.  La  mort  de 
Vincent  Placcius  ayant  fait  vaquer  la 
chaire  de  professeur  d'éloquence  de  cette 
ville ,  Fabricius  l'obtint.  Cette  place  le 
fixa  à  Hambourg,  et  il  y  passa  le  reste  de 
sa  vie,  chéri  et  honoré.  En  1 7 1 9,  le  land- 
grave de  Hesse-Cassel  lui  offrit  deux  pos- 
tes importans:  la  chaire  de  premier  pro- 
fesseur de  théologie  à  Giessen,  et  la  place 
de  surintendant  des  églises  de  la  confes- 
sion d'Augsbourg.  Fabricius  fut  tenté  de 
les  accepter  ;  mais  les  magistrats  de  Ham- 
bourg ,  plus  ardens  à  le  retenir  qu'il  n'é- 
tait à  les  quitter,  augmentèrent  en  1720 
ses  gages  de  200  écus.  Il  y  mourut  en 
1736  ,  à  68  ans.  C'était  un  homme  mo- 
deste ,  sa  douceur  le  faisait  aimer,  autant 
que  ses  lumières  inspiraient  restime. 
id 


igi  FAfi 

Peu  de  savans  ont  été  plus  laborieux  ;  il 
suflisait  à  tout,  leçons  publiques,  corres- 
pondances littéraires ,  composition  d'ou- 
vrages. Ceux  qui  l'ont  fait  connaître  le 
plus  avantageusement  dans  la  république 
des  lettres,  sont  :  1"  Codex  apocryphus 
novi  Testamenti  coUectus  ,  castigatus  , 
Hambourg,  3  vol.  in-8,  1719.  C'est  une 
collection  curieuse  et  exacte  de  beau- 
coup de  morceaux  inconnus  au  commun 
des  lecteurs  ,  et  même  au  commun  des 
savans.  On  y  trouve  une  notice  de  tous 
les  faux  évangélistes  ,  des  faux  actes  des 
apôtres  et  des  apocalypses ,  dont  l'Eglise 
fut  inondée  dans  sa  naissance.  Ce  recueil 
estimé  est  enricbi  de  plusieurs  remarques 
critiques,  et  ne  peut  que  servir  à  consta- 
ter pleinement  l'authenticité  des  quatre 
Evangiles  et  autres  écrits  canoniques, 
constamment  et  généralement  reconnus, 
tandis  que  tout  ce  qui  n'avait  pas  le  ca- 
ractère de  l'inspiration  ,  est  allé  au  fond 
de  l'oubli.  2°  Bibliotheca  grœca,  1 4  vol. 
in-4,  publiés  à  Hambourg  depuis  1705, 
jusqu'en  1728.  Cette  notice  des  anciens 
auteurs  grecs ,  de  leur  vie,  de  leurs  ou- 
vrages ,  est  précieuse  aux  bibliographes. 
Il  n'y  a  d'ailleurs  presque  aucun  volume 
qui  ne  contienne  quelques  écrits,  entiers 
ou  en  partie,  des  auteurs  grecs  anciens 
et  modernes.  Il  faut  que  le  premier  vo- 
lume soit  de  1718,  ou  au  moins  de  1708  : 
éditions  plus  amples  que  celle  de  1705. 
Les  volumes  suivans  sont  semblables , 
quoique  réimprimés.  Il  y  a  une  4«  édition 
augmentée,  1790-1811,  12  vol.  in-4. 
Elle  n'est  pas  achevée ,  et  ne  peut  avoir 
moins  de  16  à  17  vol.  3»  Bibliotheca  la- 
tina  ecclesiasHca ,  Hambourg  ,  1718, 
in-folio.  C'est  le  recueil  des  écrits  latins 
sur  les  matières  ecclésiastiques.  4°  Me- 
morice  Hamburgenses ,  7  vol.  in-8  ,  aug- 
mentés d'un  8«  en  1745,  par  Evers, 
gendre  de  Fabricius.  On  y  trouve  la  vie 
et  les  éloges  des  illustres  Ilambourgeois. 
6°  Codex  pseudopygraphus  veteris  Tes- 
tamenti, in-8,  2  volumes,  1722etl823. 
L'auteur  a  exécuté  à  l'égard  de  l'ancien 
Testament,  ce  qu'il  avait  pratiqué  à  l'é- 
gard du  nouveau  ,  dans  son  Codex  apo- 
cryphus. G"  Une  savante  édition  àcSex^ 
tuS  SmpiiicuSt  grecque  et  latine,  Lcip^ 


FAB 

sick,  1718,  in-fol.  1°  Un  Recueil  en  Uiiû 
des  auteurs  qui  ont  prouve  la  ve'rile'du 
christianisme,  1725,  in-4.  8"  Un  excel- 
lent ouvrage  en  allemand,  traduit  en 
français  sous  ce  titre,  Théologie  de  l'eau, 
1743  ,  Paris,  in-8  ;  avec  de  nouvelles  re- 
marques communiquées  au  traducteur. 
9°  Les  écrivains  de  F  histoire  d^  Allema- 
gne et  du  Nord,  publiés  par  Lindenbro- 
gius ,  auxquels  il  joignit  les  Origines  de 
Hambourg  par  I^mbeccius ,  ?t  les  In- 
scriptions de  cette  même  ville  p  r  Anckel- 
man  :  le  tout  orné  de  notes  sa  ^ntes  et 
d'appendices,  in-fol.  10°  Une  éd. 'ion  du 
Theatrum  anonymorum  etpseudo.  vmo- 
rum  de  Placcius,  in-fol.  ;  il  y  ajouta  une 
préface,  et  la  vie  de  l'auteur.  \\°  Biblio- 
theca latina  ,  1 707  ,  1 708  et  1 721  ,  in-8 , 
3  vol.,  réimprimée  à  Venise  en  1728, 
2  vol.  in-4,  etàLeipsick,  1773-74,  3  vol. 
in-8.  Elle  devait  avoir  un  4*  vol.  qui  au- 
rait contenu  les  auteurs  chrétiens  1 2°  Bi- 
bliotheca mediœ  et  infimœ  latinitatis, 
17  34,  in-8,  5  vol.,  réimpriméeà  Padoue, 
1754,6  vol.  in-4.  13°  Biblingraphiaan- 
iiquaria,  Hambourg,  1760,  2  vol.  Cet 
ouvrage  est  une  notice  des  écrivains  qui 
ont  travaillé  sur  les  antiquités  hébraï- 
ques, grecques,  romaines  et  ecclésiasti- 
ques. 14°  Centuriœ  duœ  Fnbriciorum 
scriptis  clarorum  qui  jam  diem  suiim 
obicrunt,  Hambourg,  1707,  in-8.  15" 
Une  édition  du  Polyhistor ,  de  Morhof, 
Lubeck,  1747  ,  2  vol.  in-8.  (Il existe  une 
notice  sur  la  vie  et  les  écrits  de  Fabricius 
avec  son  portrait  et  sous  ce  titre  :  De  vita 
et  scriptis  Joannis  Alberti  Fabricii  com- 
mentarius,  1737,  in-8.  par  H.  S.  Reimar 
son  gendre.  ) 

*FABRICroS  (Jean-Chrétien),  cé- 
lèbre entomologiste,  élève  de  Linnée,  né 
en  1742,  à  Tundern  dans  le  duché  de 
Sleswick  ,  annonça  dès  ses  premières 
années  beaucoup  de  goût  pour  l'histoire 
naturelle ,  et  suivit  les  cours  de  Linnée 
à  l'université  d'Upsal.  Forcé  d'embrasser 
un  état,  il  étudia  la  médecine.  Il  futreçu 
docteur  à  l'âge  de  25  ans  :  mais  bientôt, 
nommé  professeur  d'histoire  naturelle  à 
l'université  de  Riel ,  il  se  livra  enlière- 
"tnenlà  ses  études  favorites  pour  lesquelles 
il  entreprit  plusieurs  voyag^es  en  diUï-: 


fentes  parties  de  l'Europe.  Il  devint  coù- 
seiller  d'état  du  roi  de  Danemarck ,  et 
professeur  d'économie  rurale  et  politi- 
que. Il  était  en  France  aumomentoù  son 
pays  était  en  guerre  avec  la  Grande-Bre- 
tagne. Péniblement  afYecté  du  désartre 
de  sa  patrie,  il  partit  pour  le  Danemarck, 
quand  il  apprit  la  nouvelle  du  siège  de 
Copenhague.  Il  offrit  sesservices  à  son  roi; 
mais  il  mourut  peu  de  temps  après  son 
arrivée,  en  1807.  Ses  principaux  ouvrages 
sont  1°  Systema  entomologiœ ,  Flens- 
burg,  1775,  in-8.  Ce  livre  donna  une 
nouvelle  face  à  la  science.  On  y  trouve 
non-seulement  l'exposition  des  carac- 
tères essentiels  des  classes  et  des  genres 
du  nouveau  système  que  l'auteur  voulait 
établir,  mais  encore  toutes  les  espèces 
alors  connues.  2°  Gênera  insectorum, 
Kiel ,  in-8  ,  faisant  suite  à  l'ouvrage  pré- 
cédent. 3"  Phihsophia  entomologica, 
Hambourg,  in-8,  1778.  C'est  le  meilleur 
ouvrage  que  nous  ayons  en  ce  genre.  4° 
Entoniologia  syslematica,  Copenhague, 
1792  à  1796  ,  7  vol.  in-8.  5°  Supplcmen- 
tum  entomologiœ  systcmaticœ  ,  1 798  , 
in-8.  Il  faut  joindre  à  ce  volume  un  Index 
àlphaheiicus  de  52  pages  qui  ne  parut  que 
deux  ans  après.  Fabricius  a  publié  sépa- 
rément un  species  pour  chaque  classe 
d'insectes  en  particulier,  sous  ces  titres  : 
Systemaeleutheratoruni,  1 80i  ;  Systema 
rliyngotorum,  1803;  Systema  piezaio- 
rwn,  1804,  Systema  antliatoriim,  1805  , 
avec  vlvl  index  in-4  pour  chacun.  G"  Con- 
sidérations sur  l'ordre  général  de  la 
nature,  Hambourg  ,  1781  ,  in-8,  en  alle- 
mand. 7°  Résultat  des  leçons  sur  V his- 
toire naturelle,  Kiel,  1804,  aussi  en 
allemand. 

*  FABRICIUS  (Otto),  prédicateur  pro- 
testant,  naquit  en  1744  -.  les  ouvrages 
de  Mans  Hegedc  sur  le  Groenland  qu'il 
lisait  ù  l'université,  lui  inspirèrent  le  dé- 
sir d'aller  prêcher  l'Evangile  dans  les 
pays  septentrionaux.  Il  fut  nommé  mis- 
sionnaire pour  les  colonies  danoises  de 
Frédcriksaad  ,  et  partit  pour  ce  pays  du 
Nord  en  1768.  Pendant  son  séjour  qui 
dura  jusqu'en  1773  ,  il  répandit  la  parole 
sainte  parmi  les  Groenlandais  dont  il  vi- 
sitait souvent  les  cabanes;  il  s'occupa 


fAB  195 

beaucoup  de  leur  langue ,  et  s'adonna  à 
la  recherche  des  plantes  du  pays ,  sans 
études  préliminaires ,  sans  autre  livre 
que  le  sytema  naturœ  ,  sans  autres  con- 
seils que  ceux  du  célèbre  Otto-Frédéric 
Muller  avec  lequel  il  était  en  relation.  De 
retour  à  Copenhague ,  il  fut  pourvu  suc- 
cessivement de  plusieurs  cures  ,  et  en 
dernier  lieu  (1789)  de  celle  de  Christia- 
nia où  il  mourut  avec  le  titre  et  le  rangd'é- 
vêque  le  1 2  avril  1 822  à  l'âge  de  72  ans.  Il 
s'était  occupé  de  la  rédaction  de  ses  notes  : 
son  principal  ouvrage  a  pour  titre  :  Fau- 
na  groenlandica ,  Copenhague,  17  80: 
il  l'a  fait  honorablement  connaître  du 
monde  savant.  Des  deux  mariages  que 
contracta  Fabricius ,  il  eut  1 G  enfans. 

*  FABRICY  (le  Père  Gabriel) ,  domi- 
nicain et  célèbre  bibliographe ,  né  vers 
1725  à  St.-Maximin  près  d'Aix  en  Pro- 
vence ,  entra  fort  jeune  dans  l'ordre  de 
Saint-Dominique  dans  lequel  il  devint 
provincial ,  puis  lecteur  en  théologie  à 
Rome.  Ses  vastes  connaissances  le  firent 
choisir  pour  l'un  des  docteurs  théolo- 
giens de  la  fameuse  bibliothèque  de  Ca- 
sanata,  léguée  en  1700  par  le  cardinal 
de  ce  nom  aux  dominicains  du  couvent 
de  la  Minerve.  Il  mourut  à  Rome  en  1 800. 
Fabricy  était  membre  de  l'académie  des 
Arcades.  On  lui  doit  1°  Recherches  sur 
l'époque  de  l'e'quitation  et  l'usage  des 
chars  équestres  chez  les  anciens  ,  in-8  , 
1764.  2°  Mémoires  pour  servir  à  l'his- 
toire littéraire  des  Pères  yînsaldi,  Ma- 
machi,  Patuzzi ,  Richini  et  de  Rubeis , 
imprimés  dans  le  Dictionnaire  universel 
des  Sciences  ecclésiastiques  du  Père  Ri- 
chard .  3°  Des  titres  primitifs  de  la  ré- 
vélation, ou  Considérations  critiques 
sur  la  pureté  et  l intégrité  du  texte  ori- 
ginal des  livres  saints  de  V ancien  Testa- 
ment, 2  tom.  in-8,  Rome,  17  72  :  c'est  le 
plus  célèbre  et  le  plus  estime  de  ses  ou- 
vrages. 4"  Censoris  theologi  diatribe , 
qua  bibliogrnphiœ  antiquariœ  et  sacrœ 
criticcs  capita  aliquot  illustrantur , 
Rome,  1782  ,  in-8.  On  le  trouve  à  la  suite 
du  Spécimen  variarwn  leclionum  sacrl 
textus  de  J..  B.  de  Rossi.  Le  Père  Fabricy 
a  aussi  travaillé  avec  le  Père  Audifredi  au 
magnifique  Catalogue  de  la  bibliothèque 


196  FAB 

de  Casanata ,  dont  il  n'a  été  publié  que  4 
volumes. 

FABR INI  (Jean),  grammairien  flo- 
rentin ,  \ivait  dans  le  milieu  du  16*  siè- 
cle. Nous  avons  de  lui  des  notes  et  des 
commentaires  sur  P^irgilc,  Horace ,  Té- 
rence,  et  sur  quelques  Epîtrcs  de  Cicé- 
ron.  Us  sont  assez  bons  pour  leur  temps. 
Il  est  auteur  de  quelques  autres  ouvrages 
sur  sa  langue. 

*  FABRONI  (Ange) ,  célèbre  biogra- 
phe italien,  naquit  le  7  septembre  17  32,  à 
Marradi ,  village  de  Toscane  ,  d'une  fa- 
mille distinguée,  mais  peu  riche  :  il  était 
le  dernier  de  onze  enfans.  Après  avoir 
fait  ses  premières  études  dans  sa  patrie , 
il  obtint,  en  17  50,  une  place  à  Rome 
dans  le  collège  Bandinelli  qu'un  boulan- 
ger de  ce  nom  avait  fondé  pour  l'éducation 
d'un  certain  nombre  déjeunes  toscans.  Fa- 
broni  fit  des  progrès  rapides,  reçut  le  doc- 
torat à  Césène,  et  prit  les  ordres  en  1 7  58. 
Présenté  au  prélat  Bottari ,  l'un  des  sou- 
tiens du  parti  janséniste ,  qui  le  prit  en 
amitié,  il  fut  chargé  de  remplir  pour  lui 
les  fonctions  d'un  canonicat  de  Sainte- 
Marie  Transtevère.  Ce  prélat  l'engagea  à 
traduire,  en  italien  ,  la  Préparation  à  la 
mort,  duPèrcQuesnel,  les  Principes  et  rè- 
gles de  la  vie  chrétienne  de  Le  Tourneur , 
et  les  Maximes  de  la.  marquise  de  Sable'. 
Fabroni  publia  ensuite,  en  latin,  une  f^ic 
du  pape  Cle'ment  XII,  qui,  quoique  fort 
médiocre  ,  lui  valut  une  récompense  ma- 
gnifique delà  part  du  cardinal  Néri  Cor- 
sini  et  l'avantage  de  prononcer ,  devant 
le  saint  Père,  un  discours  latin  sur  l'A- 
scension. Quelque  temps  après,  il  fut 
chargé  de  V oraison  funèbre  du  préten- 
dant Jacques  Stuart ,  qu'il  prononça  de- 
vant le  cardinal  d'York  fils  de  ce  prince, 
et  reçut  encore  un  présent  considérable. 
Il  entreprit  ensuite  une  traduction  ita 
lienne  des  Entretiens  de  Plwcion,  de 
l'abbé  de  Mably  ;  mais  cette  publication 
ne  fut  pas  approuvée  et  nuisit  même  à 
son  avancement.  Il  conçut  alors  l'idée 
d'écrire ,  en  latin  ,  les  Fies  des  savons 
italiens  qui  ont  fleuri  dans  les  17  et  18" 
siècles.  C'est  celui  de  ses  ouvrages  qui  a 
le  plus  contribué  à  sa  réputation.  Il  en 
publia  le  premier  volume  en  1766.  L'an- 


FAB 

née  suivante,  il  quitta  Rome  pour  alléf  se 
fixer  à  Florence ,  et  obtint ,  du  grand-duc 
Léopold,  la  place  de  prieur  du  chapitre 
de  la  basilique  de  St. -Laurent.  Il  parta- 
gea ,  dès  ce  moment ,  son  temps  entre  les 
fonctions  religieuses  de  sa  place  et  ses 
travaux  littéraires  qui  devinrent  son  seul 
amusement.  Fabroni  ayant  été  alors  dé- 
signé pour  précepteur  des  enfans  du 
grand-duc,  craignit  que  cette  faveur  ne  lui 
attii'àt  des  ennemis  :  pour  se  soustraire  à  ce 
danger,  il  voyagea  en  attendantle  moment 
d'entrer  en  fonction;  il  parcourut  laFrance 
et  l'Angleterre  ;  mais  à  son  retour  en  Tos- 
cane ,  il  n'obtint  point  la  place  pour  la- 
quelle il  avait  été  choisi,  et  ne  connut  ja- 
mais la  cause  du  changement  du  grand- 
duc  à  ce  sujet.  L'avènement  au  pontificat 
de  Ganganelli  (  Clément XIV) ,  qu'il  avait 
compté  autrefois  parmi  ses  protecteurs , 
l'engagea  néanmoins  à  retourner  à  Rome 
quelques  années  après,  et  ce  pape  qui 
estimait  Fabroni ,  le  nomma  l'un  des  ]»ré- 
lats  de  la  chambre  pontificale ,  et  cher- 
cha à  le  retenir  auprès  de  lui.  Cependant 
la  reconnaissance  l'entraînant  vers  le 
grand-duc  qui  venait  de  le  créer  prové- 
diteur  de  l'université  de  Pise  et  prieur 
de  l'ordre  de  St.-Etienne ,  il  résista  aux 
instances  du  saint  Père ,  et  après  avoir 
fait  un  voyagé  à  Naples,  oîi  il  fut  bien 
accueilli  de  la  reine  et  des  personnages 
les  plus  distingués ,  il  retourna  à  Flo- 
rence, oii  il  usa  de  son  crédit  auprès  du 
grand-duc ,  pour  obtenir  la  permission 
de  tirer  des  archives  de  Médicis,  des  let- 
tres de  savans  du  17"  siècle,  adressées 
au  cardinal  Léopold  de  Médicis  ,  qu'il  pu- 
blia en  2  volumes,  et  qui  jettent  beau- 
coup de  lumière  sur  l'histoire  littéraire 
de  ce  temps-là.  Il  voyagea  ensuite  en 
Allemagne,  en  Saxe  et  en  Prusse,  et  se  lia 
avec  les  principaux  savans.  De  retour  en 
Toscane  en  1773,  il  se  fixa  à  Pise,  oii  il 
entreprit,  avec  des  gens  de  lettres,  le 
journal  De'  Icttcrati,  dont  il  faisait  pa- 
raître quatre  volumes  par  an  et  qu'il 
poussa  jusqu'au  105*;  les  trois  derniers 
contiennent  une  table  générale.  Il  s'occu- 
pait en  même  temps  de  son  recueil  bio- 
graphique qui  devint  plus  que  jamais  son 
travail  de  prédilection ,  et  il  l'augmenta 


II 


FAfî 

de  plusieurs  nouveaux  volumes;  le  18* 
parut  en  1799 ,  et  les  1 9«  et  20"  après  sa 
mort  à  Lacques  en  1804  et  1805.  Cette 
collection ,  qui  a  obtenu  un  grand  suc- 
cès ,  et  qui  le  mérite  sous  plusieurs  rap- 
ports ,  renferme  1 54  vies  ,  y  compris  la 
sienne.  Excepté  vingt-une,  elles  sont  tou- 
tes de  Fabroui.  On  lui  reproche  sa  par- 
tialité pour  les  jansénistes  et  contre  les 
jésuites.  Vers  les  dernières  années  de  sa 
vie ,  il  sembla  se  reprocher  son  peu  de 
ménagement  pour  cet  ordre.  Sentant  sa 
fin  approcher,  il  se  retira  dans  une  soli- 
tude auprès  de  Lucques ,  appelée  Saint- 
Cerbon,  chez  les  franciscains  réformés, 
ovi  il  passa  un  mois  uniquement  occupé 
de  se  préparer  à  la  mort.  De  retour  à  Pise, 
il  vécut  encore  quelques  mois  et  expira 
le  22  septembre  1803  ,  après  avoir  rem- 
pli tous  les  devoirs  de  la  religion.  On  a 
encore  de  lui  1°  Laurentii  Medicis  ma- 
gnifici  vita,  Pise  ,  1784  ,  2  vol.  in-4.  2° 
Magni  Cosmi  Medieei  vita,  1789,  2  vol. 
in-4 .  3°  Leonis  Xpontificis  maximi  vita, 
1797.4°  Historia  lycœi  Pisani,  Pise, 
1791-95,  3  vol.  in-4.  S°  Elogi  d'illustri 
Italiani,  Pise,  178C-89,  2  vol.  in-8.  6° 
Elogi  di  Dante,  di  Poliziano,  diAriosto 
e  di  Torqualo  Tasso,  Parme,  180G,  7° 
Abrège  du  voyage  d'Anacharsis,  en  ita- 
lien, qui  lui  mérita  des  éloges  de  l'au- 
teur lui-même.  «  Rien  n'est  omis  dans 
»  votre  ouvrage ,  lui  écrivit  l'abbé  Bar- 
»  thélemi  ;  j'admire  le  choix  et  la  liaison 
)»  des  faits,  la  propriété  des  termes  et 
»  la  rapidité  du  stile.  » 

*rABROM  (Jean),  chimiste  et  sa- 
vant italien ,  naquit  à  Florence  en  1 748  , 
fut  envoyé  à  Paris  en  1 798  ,  par  son  sou^ 
verain,  le  grand-duc  de  Toscane, pour  as- 
sister à  une  réunion  de  savans,  char- 
gés de  trouver  un  système  de  poids  et 
mesures  générales  pour  tous  les  peuples 
civilisés.  Il  était  employé  au  cabinet  du 
Muséum  d'histoire  naturelle  de  Florence 
qu'il  contribua  ,  sous  le  grand-duc  Lco- 
pold,  à  enrichir  et  à  rendre  l'un  des  plus 
beaux  de  l'Europe.  Il  s'occupa  surtout 
avec  succès  de  la  chimie  agricole  et  in- 
dustrielle, et  il  a  fait  à  ce  sujet  plusieurs 
ouvrages  excellens.  Estimé  et  respecté 
sous  tous  les  gouvernemeiis  qui  se  succé- 


FAB  197 

dèrént  éu  Toscane  après  l'invasion  des  « 
Français ,  il  fut  membre  de  la  députation 
des  finances  de  la  reine  régente  d'Etrurie 
{Foyez  Marie-Louise),  veuve  de  Louis 
I*'  de  Bourbon.  Quand  la  Toscane  fit 
partie  de  l'empire  français ,  Napoléon  le 
nomma  maître  des  requêtes  ,  conseiller 
d'Elat,puis  directeur-général  des  ponts 
et  chaussées  pour  les  départemens  au- 
delà  des  Alpes.  Appelé  au  Corps  législa- 
tif par  le  département  de  l'Arno ,  il  obtint 
la  croix  de  la  Légion  d'honneur ,  et  les  n 
titres  de  baron  et  de  commandant  de  l'or- 
dredelaRéunion.  Fabroni  était,  en  outre, 
un  des  quarante  de  la  Société  italienne^ 
et  de  celle  des  Géorgophiles,  correspon- 
dant de  l'Institut  de  France,  professeur 
honoraire  des  universités  de  Pise  et  de 
Wilna,  etc.  La  chute  de  Napoléon  ayant 
ramené  en  Toscane  le  grand-duc  Ferdi- 
nand III ,  ce  prince  appela  auprès  de  lui 
Fabroni ,  le  nomma  directeur  de  la  mon- 
naie de  Florence ,  commissaire  royal  des 
forges  et  des  mines ,  et  le  décora  de  la 
croix  de  l'ordre  du  Mérite.  Il  remplit 
tous  ces  divers  emplois ,  qu'il  devait  à 
ses  talens  et  à  ses  lumières ,  avec  le  zèle  , 
et  la  probité  qui  distinguaient  son  carac- 
tère. Fabroni  est  mort  à  Florence ,  d'un 
coup  d'apoplexie,  le  17  décembre  1822. 
Il  a  laissé  les  ouvrages  suivans,  tous, 
excepté  un  seul ,  écrits  en  italien  ;  \°  Ré- 
flexions sur  l'état  actuelde  l'agriculture, 
ou  Exposition  du  véritable  plan  pour 
cultiver  les  terres  avec  le  plus  grand 
avantage  et  pour  se  passer  des  engrais. 
Traduit  en  français,  Paris,  Nyon  l'aîné, 
17  80 ,  in-1 2  ;  Du  ver  à  soie  et  du  byssus 
des  anciens,  Pérouse,  1782,  in-8,  fig. 
L'auteur  pense  que  la  soie  est  le  byssus 
antique ,  mais  M,  Fleury  a  prouvé  dans 
une  dissertation,  insérée  dans  la  Revue 
encyclopédique  (tome  1*'  page  241), 
que  le  byssus  n'est  autre  chose  que  le 
duvet  des  chèvres  de  Cachemire.  3°  In- 
structions élémentaires  d'agriculture , 
Venise,  1787,  in-12;  Turin,  «791  ,  in- 
12,  avec  Ae%  Notes  du  docteur  J.  Gio- 
bert  ;  traduit  en  français  par  Alex.  Vallée, 
1805  ,  in-8.  L'auteur  écrivit  cet  ouvrage 
par  ordre  du  grand-duc  de  Toscane  Léo- 
pold  I.  4°  Dissertations  sur  la  manière 


198  PAS 

de  perfectionner  les  vins  des  états  rô^ 
mains,  Rome,  1793  ,  in-8  ;  5"  Discours 
sur  une  singulière  espèce  de  briques, 
Venise,  1791.  Ce  sont  des  briques  fabri- 
quées avec  une  substance  appelle  farine 
fossile  ,  découverte  en  France  par  M. 
Faujas  de  Saint-Fonds ,  et  qui  rend  les 
briques  flottantes.  6°  Nouveau  thermo- 
mètre staiionnaire,  en  1793;7°5u7-r«n- 
tiquite'y  les  avantages  et  la  me'thode  de 
la  peinture  encaustique,  2*  édition  ,  Ve- 
nise, J800,  in-8;  8°  Synopsis  planta- 
rum  horti  botanici  regii  florentini ,  Flo- 
rence, 1794  ,  in-4  ;  9°  Les  loisirs  de  la 
campagne ,  ou  Libre  Discussion  sur 
quelques  raisonnemens populaires,  1 800, 
in-8  ;  10°  De  t  économie  rurale  des  Chi- 
nois ,  Venise ,  1 802 ,  in-8  ;  1 1  °  £a  Biblio- 
thèque, Modène  ,  1803.  Cette  bibliothè- 
que est  une  lettre  qu'on  trouve  insérée 
dans  les  Mémoires  de  la  société  italienne 
(  tome  2  ,  p.  92  ) ,  dans  le  Magasin  en- 
cyclopédique de  Stellini.  Elle  est  adres- 
sée au  Père  Pozzetlo  des  Ecoles  pies ,  et 
donne  un  excellent  moyen  de  préserver 
les  livres  des  insectes.  1 2"  Origine  et  ci- 
vilisation des  anciens  habitant  de  l'Ita- 
lie, Florence  ,  1803  ,  in-8  ;  13°  Des  ap- 
provisionnemcns  publics ,  Florence  , 
1 804 ,  in-8  ;  1 4°  De  la  pesanteur  spéci- 
fique des  matières  d'or  et  d'argent,  Mo- 
dène,  1806,  in-4;  16"  La  Statère phi- 
lippique,  ou  Essai  sur  la  bonté  et  le  ti- 
tre de  l'or  natif,  Florence,  1808.  ht  sta- 
tère est  une  monnaie  macédonienne.  16° 
Du  bronze  et  des  autres  métaux  connus 
de  t  antiquité ,  Livourne  ,  1810.  Fabroni 
publia  ces  trois  derniers  écrits  lorsqu'il 
était  directeur  des  monnaies,  lia  donné 
divers  Mémoires  dans  plusieurs  journaux 
périodiques,  notamment  au  Journal  de 
physique  (de  1799  à  1800);  et  il  fut  un 
des  rédacteurs  des  Mémorie  oa  Mémoires 
de  la  Société  agraire  de  Florence.  Les 
principaux  articlesqu'ila  fournis  au  Jour- 
nal  de  physique  sont  ceux  relatifs  à  la 
force  réfrigérante  des  liquides,  aux  al- 
carazas  d'Espagne,  à  l'action  chimique 
des  différens  métaux  entre  eux. 

FABROT  (  Charles -Annibal)  était 
d'Ais  en  Provence  ,  où  il  vit  le  jour  l'an 
1580.  Sa  profonde  éruditiou  et  ses  vastes 


PAS 

Connaissances  dans  la  jurisprudence  ci-< 
vile  et  canonique,  lui  obtinrent  l'amitié 
du  fameux  Peiresc,  protecteur  de  tous  les 
gens  de  mérite.  Le  président  du  Vair, 
qui  l'estimait  aussi,  devenu  garde  des 
sceaxix  en  1617  ,  attira  Fabrot  à  Paris.  Il 
n'avait  que  36  ans ,  et  depuis  8  années 
il  occupait  avec  distinction  une  chaire  de 
droit  dans  l'université  d'Aix.  Il  retourna 
dans  cette  ville  après  la  mort  de  son  pro- 
tecteur ,  et  y  reprit  ses  fonctions  de  pro- 
fesseur. On  le  revit  à  Paris  en  1637,  pour 
y  faire  imprimer  des  Notes  sur  les  Ih- 
stitutes  de  Justinien.  Cet  ouvrage,  dédié 
au  chancelier  Séguier,  fut  honorable  et 
utile  à  l'écrivain.  Il  fit  à  Fabrot  un  grand 
nom  dans  la  république  des  lettres ,  et 
lui  valut  une  pension  de  2,(000  livres 
qui  lui  fut  accordée  pour  travailler  à  la 
traduction  du  Basilicon  :  c'est  la  collec- 
tion des  lois  romaines,  dont  l'usage  s'é- 
tait conservé  dans  l'Orient ,  et  de  celles 
que  les  empereurs  de  Constantinople  y 
ont  ajoutées.  Cette  collection  avait  été 
faite  par  ordre  de  l'empereur  Léon  VI. 
La  traduction  coûta  à  Fabrot  dix  années 
d'application  constante,  et  lui  mérita 
une  charge  de  conseiller  au  parlement 
de  Provence  ,  dont  les  circonstances  du 
temps  ne  lui  permirent  pas  de  jouir.  Cet 
ouvrage  parut  en  1657  à  Paris,  en  7  vol. 
in  fol.,  auquel  il  faut  joindre  le  Supplé- 
ment par  Piuhnkenius,  Leyde,  1766, 
in-fol.  En  1649,  Fabrot  publia  une  édi- 
tion des  OEuvres  de  Cédrène ,  de  Ni- 
cétas ,  d'Anastase  le  bibliothécaire ,  de 
Constantin  Manassès,  et  des  Institutes 
de  Théophile  Simocatte  ,  qu'il  enrichit 
de  notes  et  de  dissertations.  On  a  en- 
core de  lui  des  observations  sur  quelques 
titres  du  Code  Théodosien  ;  un  Traité 
sur  l'usure  contre  Sanmaise;  quelques 
maximes  de  droit  sur  Théodore  Balsa- 
mon,  sur  l'histoire  ecclésiastique,  sur  les 
papes,  et  plusieurs  traités  particuliers 
sur  diverses  matières  de  droit.  En  1G62  , 
ce  docte  et  infatigable  écrivain  com- 
mença la  révision  des  OEuvres  de  Cujas , 
qu'il  corrigea  sur  plusieurs  manuscrits, 
et  qu'il  donna  au  public  à  Paris,  l'an  1658, 
en  10  vol.  in-fol.,  avccd'excellentes«o/c.y 
aussi  curieuses  qu'instructives.  L'appli- 


J 


FAB 

cation  excessive  qu'il  mit  à  ce  grand  ou- 
vrage,  lui  causa  une  maladie,  dont  il 
mourut  le  16  janvier  1659  ,  à  Paris,  âgé 
de  79  ans.  On  trouva  parmi  les  papiers 
de  ce  savant  homme ,  des  Commentaires 
sur  les Institutes  de  Justinien,  des  notes 
sur  Aulugèle  ;  et  le  Recueil  des  ordon- 
nances ou  constitutions  ecclésiastiques 
qui  n'avaient  pas  encore  vu  le  jour  en 
grec.  Ce  dernier  ouvrage  a  été  inséré 
dans  la  Bibliothèque  du  droit  canon ,  pu- 
bliéeenlGGl  par  Voël  et  Justel. 

*  FABRY  (  Henri- Jean -Baptiste  ) , 
comte  d'Autrey,  chevalier  de  Saint-Louis, 
ué  en  1723  et  mort  en  1777  ,  est  auteur 
de  \' Antiquité  justifiée  ,  ou  Réfutation 
de  r Antiquité  dévoilée,  1766,  in-12, 

*  FABRY  (  Jean-Baptiste-Germain  ) , 
avocat  à  la  cour  royale  de  Paris  ,  né  en 
1780  à  Cornus,  dans  le  Rouergue,  diocèse 
de  Vabres,  se  fit  connaître  avantageuse- 
ment par  son  attachement  aux  saines 
doctrines ,  et  il  consacra  sa  vie  à  les  ré- 
pandre par  des  écrits  ou  des  recueils  qui 
font  honneur  à  son  esprit  et  à  son  cœur. 
Envoyé  à  Paris  pour  y  faire  ses  études 
de  droit,  ses  principes  et  sa  conduite  ne  se 
démentirent  point  au  milieu  des  dangers 
de  la  capitale.  Reçu  avocat  en  1 804,  il  pa- 
jutau  barreau  :  mais  il  s'occupa  plus  spé- 
cialement des  événemens  politiques  et  de 
littérature  religieuse.  Il  fut  secrétaire  du 
ministre  de  la  police  générale  de  France, 
Fouché,  duc  d'Otrante.  Son  empressement 
à  obliger  fut  la  cause  de  sa  mort  :  en 
allant  chercher  le  docteur  Dubois  à  cinq 
heures  du  matin  pour  une  de  ses  parentes 
dans  le  travail  d'un  accouchement  diffi- 
cile ,  il  glissa  sur  le  perron  dans  l'obscu- 
rité ,  et  tomba  sur  une  pointe  de  fer  qui 
lui  entra  dans  la  cuisse  et  lui  rompit  une 
artère.  Il  expira  quelques  minutes  après  , 
le  4  janvier  1821.  On  lui  doit  1°  le 
Spectateur  français  au  19-  siècle,  ou 
yariétés  morales,  politiques  et  litté- 
raires, recueillies  des  meilleurs  écrits 
périodiques ,  collection  précieuse  par  le 
choix  des  matériaux  qui  la  composent. 
Elle  forme  12  vol.  in-8,  Paris,  1805  à 
1812.  2°  Chefs-d'œuvre  de  V éloquence 
chrétienne ,  ou  Sermons  de  Bourdaloue, 
£os5aeti  Fénélon,  Massillon^  sur  la 


FAB  199 

vérité  de  la  religion  ,  formant  un  corps 
d'ouvrage,  Paris,  1810,   2   vol.    in-12. 
3"  La  régence  à  Blois ,  ou  Les  derniers 
momens   du    gouvernement     impérial, 
1814,  in-8,  6*  édition,  1815.  A°  Itiné- 
raire de  Buonaparte  depuis  son  départ 
de  Doulevent ,  le  28  mars ,  jusqu'à  son 
embarquement  à  Fréjusle28  avril  1814, 
in-8  ,  3*  édition,  1815.   5°  Itinéraire  de 
Buonaparte  de  tîle  d'Elbe  à  V île  de  Sainte 
Hélène,  ou  Mémoires  pour  servir  à  f  his- 
toire des  événemens  de  18\b,  in-8,  1816, 
réimprimé  l'année    suivante,    avec   des 
augmentations  considérables ,  en  2  vol. 
in-8.  6°  Mémoires  pour  servira    F  his- 
toire de  r instruction  publique ,  depuis 
1189  jusqu'à  nos  jours ,  ou  Le  génie  de 
la  révolution  considérée  dans  l'éduca- 
tion ,  où  l'on  voit  les  efforts  réunis  de  la 
législation  et  de  la  philosophie  rfu  18® 
siècle  pour  anéantir  le  christianisme ,  3 
vol.  in-8.  On  y  trouve  des  pièces  et  des 
faits  très  curieux  sur  les  moyens  pris , 
à  différentes  époques  de  la  révolution  , 
pour  pervertir  l'éducation.  7°  Monumens 
de  la  reconnaissance  nationale  votés  en 
France  depuis  17  89,  in-8,  1819.  7°  Les 
missionnaires   de    1793,  in-8,  1819  et 
1 820.  L'auteur  y  rappelle  les  prédications 
anarchiques,  impies  et  cruelles  des  révo- 
lutionnaires de  1793  ,  et  remarque  l'af- 
fection et  l'intérêt  que  certains  écrivains 
portent   à  ces  missionnaires   si   dignes 
d'eux ,  tandis  qu'ils  ont  en  horreur  ceux 
qui  prêchent  l'ordre ,  la  religion   et  la 
charité.  Le  but  de  ces  écrivains  débontés 
n'est  pas  équivoque  ;  et ,  comme  c'est  en 
déclamant  contre  les  nobles  et  les  prêtres 
qu'on  est  parvenu  à  opérer  la  révolution, 
M.  Fabry  a  pensé  qu'il  serait  utile  d'en 
rappeler  les  pages  sanglantes  pour  nous 
préserver  des  mêmes  malheurs;  mais  il 
n'a  rien  exagéré  :  il   cite   toujours  ses 
sources  et  ses  garans  ;  il  s'est  même  im- 
posé la  loi  de  ne  donner  les  faits  que  sur 
les  pièces  officielles   insérées    dans    le 
Moniteur.  Rien  n'est  donc  plus  authen- 
tique que  son  histoire  des  Missions  de 
1793,  comme  rien  n'est   plus   légitime 
que  sa  généreuse  indignation  contre  ces 
sanglans   missionnaires.  Il    avait    com- 
mencé des  recherches  pour  faire  une  his>^ 


îoo  FAC 

toire  de  la  lëgislation  révolutionnaire  sur 
la  religion  et  les  prêtres  ;  il  est  à  regret- 
ter qu'il  n'ait  pas  terminé  ce  travail  : 
personne  n'était  plus  en  état  que  lui  de 
traiter  ce  sujet;  il  connaissait  parfaite- 
ment la  révolution  et  son  esprit,  et  il  la 
jugeait  très  bien  dans  ses  causes ,  ses 
moyens  et  ses  résultats.  Tous  ses  ou- 
vrages ont  paru  sous  le  voile  de  l'a- 
nonyme :  on  peut  en  voir  la  liste  dans  la 
Bibliographie  de  France,  1825  ,  p.  119 
et  223.  VAmi  de  la  religion  et  du  Roi 
lui  a  consacré  une  notice  intéressante 
tom.26,  pag.  285-288. 

FACCIARDUS  ou  F.ïcciakdi  (Chris- 
tophe ) ,  né  dans  le  territoire  de  Rimini, 
passa  de  l'institut  des  mineurs  conven- 
tuels à  celui  des  capucins  dans  la  pro- 
vince de  Bologne ,  oii  il  se  fit  un  grand 
nom  parmi  les  prédicateurs  de  son  temps. 
L'on  rapporte  qu'en  prêchant  un  jour  à 
Bologne  sur  l'aumône,  il  fit  tant  d'im- 
pression sur  l'esprit  des  assistans ,  qu'a- 
vant de  sortir  de  l'église  ,  ils  se  dépouil- 
lèrent de  leur  argent  et  de  leurs  joyaui 
les  plus  précieux  ,  pour  contribuer  à  l'é- 
tablissement de  l'hôpital  des  orphelins  , 
que  Facciardus  venait  de  leur  recom- 
mander. L'on  a  de  lui  :  1°  Exercilia 
spiritualia  ex  sanctis  patribus  collecta, 
3  vol.  in-8,  Londres,  1590;  Venise,  1597 
et  1C05.  2°  Fitœet  gesta  sanctorum  ec- 
clesiœ  Verruchinœ,  in-8,  Venise,  IGOO. 
2°  Porta  aurea  et  sanctuarium  sanctœ 
theologiœ ,  tum  scJiolasticœ ,  tuni  posi- 
tivée ,  aperta.  4°  Meditazioni  dei  prin- 
cipali  mysteri  délia  vita  spirituale,  in-4, 
1599. 

*  FACCIOLATO  (Jacques  ) ,  savant 
professeur  de  logique  de  l'université  de 
Padoue,  né  àToreglia  près  de  celte  ville 
dans  les  Monts  Euganées,  mort  en  1769, 
a  consacré  toute  sa  vie  à  des  recherches 
sur  des  méthodes  pour  faciliter  l'étude 
approfondie  des  langues  anciennes.  Ses 
principaux  ouvrages  sont  :  1"  Une  nou- 
velle édition  du  dictionnaire  en  sept 
langues,  connu  sous  le  nom  de  Calepin, 
Padoue,  1718,  2  vol.  in-folio,  depuis 
plusieurs  fois  réimprimé.  2"  Ortografia 
moderna  italiana  con  qualche  cosa  di 
tinguaper  uso  del  seminario  de  Padova, 


FAC 

1721,  in-4.  i°  Orationes  latinœ,  Padoue, 
1744  et  1767  ,  in-8.  Ce  sont  les  harangues 
qu'il  prononça  chaque  année  à  l'ouver- 
ture des  études.  Elles  ajoutèrent  beau- 
coup à  sa  réputation.  4°  De  gymnasio 
patavino  syntagmata  duodecim  ex  ejus- 
dem  gymnasii  fastis  excerpta  ,  Padoue, 
1752,  in-8.  5°  Fasti  gymnasU  patavini 
ab  anno  1268  ad  annum  1752,  Padoue, 
1757,  in-4.  6°  Epistolœ  latince,  Padoue, 
1765,  in-8.  Il  a  beaucoup  contribué  au 
grand  dictionnaire  latin,  publié  par  For- 
celiini. 

FACIO  ou  Fazio  (  Barthélemi) ,  né  à 
Specia  ou  Spezzia ,  dans  l'état  de  Gènes , 
mort  vers  l'an  1465 ,  fut  secrétaire  d'Al- 
phonse d'Aragon ,  roi  de  Naples.  ^neas 
Sylvius,  pape  sous  le  nom  de  Pie  II ,  fut 
très  lié  avec  lui ,  ainsi  que  la  plupart  des 
érudits  de  son  siècle.  On  doit  aux  veilles 
de  ce  profond  littérateur  :  i°  De  bello 
veneto-claudiano ,  seu  inter  Venetos  et 
Geniienses, Ljon,  1578,  in-8,  etc.  2<*  Une 
Histoire  de  son  temps,  jusqu'à  l'année 
1455,  en  latin.  3°  De  vit  ce  fclicitate, 
Leyde,  1628  ,  in-24.  4°  Un  Traité  des 
hommes  illustres  de  son  temps  ,  aussi  en 
latin  ,  publié  à  Florence  en  1745 ,  in-4  , 
par  l'abbé  Méhus.  5"  Traduction  latine 
de  V Histoire  d'Alexandre  le  Grand  en 
grec ,  par  Arien.  6°  Quelques  opuscules, 
mis  au  jour  par  Treher,  à  Hanovre,  1611, 
in-4.  Ce  savant  était  un  ennemi  irrécon- 
ciliable. Il  conserva  jusqu'au  tombeau  sa 
haine  pour  Laurent  Valla. 

FACUNDUS  ,  évèque  d'Hermiane  en 
Afrique,  assista  en  547  à  la  conférence 
que  le  pape  Vigile  tint  à  Constantinople 
sur  la  dispute  des  trois  chapitres.  Il  s'a- 
gissait dans  cette  affaire  de  l'orthodoxie 
de  Théodore  de  Mopsueste,  des  écrits  de 
Téodoret ,  et  de  la  lettre  d'Ibas.  Facundus 
les  soutint  avec  une  ardeur  qui  le  fit 
exiler.  >'ous  avons  encore  l'ouvrage  qu'il 
composa  sur  cette  matière  :  il  est  écrit 
d'un  stile  véhément,  plein  de  feu  et  avec 
beaucoup  d'art  ;  mais  l'auteur  sort  sou- 
vent des  bornes  de  la  modération.  Le  ■ 
savant  Père  Sirmond  publia  cet  écrit  en  ■ 
1629,  in-8,  avec  des  notes  ;et  il  futinséré 
depuis  dans  l'édition  d'Optat,  faite  à 
Paris.  Facundus  mourut  vers  l'an  653. 


FADUS  (Cuspius).   f^oyez  Ccspiirs 

l'ADDS. 

FAERNE  (  Gabriel  ) ,  de  Crémone  en 
Italie,  mit  en  vers  latins ,  dans  le  16» 
siècle ,  cent  fables  d'Esope  ,  distribuées 
en  o  livres.  Pie IV  l'engagea  à  ce  travail, 
et  n'eut  pas  à  s'eù  repentir.  La  morale  y 
est  rendue  d'une  manière  ingénieuse  ;  le 
stile  a  cette  précision,  ce  naturel,  cette 
variété ,  qui  font  le  principal  mérite  de 
ces  sortes  d'ouvrages.  Faërnene  vit  point 
mettre  au  jour  le  fruit  de  son  travail  :  son 
recueil  de  fables  ne  parut  qu'en  1  oG4  ,  3 
ans  après  sa  mort,  avec  une  dédicace  à 
saint  Charles  Borromée,  archevêque  de 
Milan.  Ce  recueil,  imprimé  à  Rome  en 
1 664  ,  in-4  j  et  depuis  à  Padouc  en  1718 
et  1730,  et  à  Londres,  1743,  in-4,  orné 
de  planches ,  fit  connaître  Faërne  sur  le 
théâtre  littéraire.  Denyse  en  donna  une 
traduction  française  en  1699,  petit  in-12, 
et  Perrault,  de  l'académie  française,  les 
traduisit  en  vers  français,  in-12,  Ams- 
terdam 1718.  Trombeiîi  en  a  donné  une 
bonne  édition  italienne,  Venise,  1736. 
Faërne  était  aussi  bon  critique  qu'excel- 
lent poète.  On  a  encore  de  lui  :  I"  Cen- 
sura emendationum  Livianarum  Sigonii. 
2°  De  mctris  comicis.  Z°  Une  édition  de 
Te'rcncc.  4°  Des  remarques  sur  Catulle 
et  sur  plusieurs  ouvrages  de  Cice'ron, 
6"  Dialotjie  antiquitatum ,  etc.  G"  tti 
luikeranos  elegiœ.  Il  mourtlt  à  Rome  en 
16G1.  Pie  IV  et  le  cardinal  Charles  Bor- 
romée ,  neveu  de  ce  pontife,  l'honoraient 
d'une  estime  particulière ,  ou  plutôt 
s'honoraient  en  rendant  justice  à  son 
mérite.  Il  faut  remarquer  que  Faërne 
écrivait  dans  le  temps  où  les  tables  de 
Phèdre  n'étaient  pas  encore  connues , 
de  manière  que  le  mérite  en  est  tout-à- 
fait  original.  Ce  n'est  que  20  ans  après  la 
première  édition  des  fables  de  Faërne, 
que  celles  de  Phèdre  furent  découvertes. 
•  FAESI  (  Jean-Conrad  ) ,  né  à  Zurich 
en  1727,  fut  curé  à  Flaach  près  de  Scbaf- 
fouse,  et  mourut  en  1790.  Ce  fut  un  écri-. 
Tain' aussi  laborieux  qu'estimable  :  il  fit 
one  étude  particulière  de  l'histoire  et  de 
la  statistique  de  la  Suisse.  On  lui  doit 
les  ouvrages  suivans  qui  sont  écrits  en 
allemand  :  1°  Description  géographique 


FAQ  ao< 

et  statistique  de  la  Suisse,  17C5àl768, 
4  vol.  in-8.  2°  Me'moire  sur  divers  sujet» 
de  rhistnire  ancienne  et  moderne ,  1765, 
2  vol.  in-8.  Z°  Histoire  de  la  paix  d'U- 
trecht ,  1770.  Il  a  traduit  en  allemand 
y  Histoire  d'Afrique  et  d^  E  spagne  de 
Cardone,  et  publié  plusieurs  mémoires 
dans  \es  Journaux  historiques  de  Mcusel. 
FAGAjN  (  Ch  ristophe  -  Barthélemi  ) 
naquit  à  Paris,  en  1702,  du  premier 
commis  au  grand  bureau  des  consigna- 
tions. Il  y  eut  lui-même  un  emploi ,  qui 
l'occupait  peu  ,  et  qui  lui  laissa  la  li 
berté  de  s'attacher  aux  belles-lettres. 
Fagan,  avec  une  partie  de  l'esprit  de  La 
Fontaine,  avait  à  peu  près  le  même  carac- 
tère, la  même  indolenee,  la  même  aver- 
sion pour  les  affaii-es.  Son  extérieur  né- 
gligé, son  air  distrait  et  timide,  n'an- 
nonçaient point  tout  ce  qu'il  était.  Il 
avait  beaucoup  de  talent  pour  le  théâtre-. 
Il  travailla  tour-à-tour  pour  le  Français  , 
l'Italien ,  et  pour  celui  de  la  Foire.  On 
remarque ,  dans  toutes  ses  pièces ,  un 
enjouement  naïf  et  fin.  Les  plus  applau- 
dies, soit  pour  le  bon  comique,  soit  pour 
la  conduite  ,  sont  le  Rendez-vous  et  la 
Pupille.  Celle-ci  mérite  d'être  mise  à  côté, 
et  si  on  ose  le  dire,  au  dessus  de  quel- 
ques petites  pièces  de  Molière.  Pes- 
seiier  a  rassemblé  en  J7C0,  en  4  vol. 
in-12,  les  différens  ouvrages  dramatiques 
de  Fagan.  Les  ornemeris  dont  il  a  ac- 
compagné cette  édition  ,  sont  un  Eloge 
historique  de  l'auteur,  et  une  Analyse  de 
ses  œuvres.  Fagan  mourut  à  Paris  en 
1755. 

FAGE  ou  BiicHLiN  (  Paul  ) ,  Fagius , 
né  à  Ptheinsabern  dans  lePalatinat,  d'un 
maître  d'école,  se  distingua  par  ses  con- 
naissances dans  la  langue  hébraïque. 
Appelé  en  Angleterre  par  Crammer ,  ar- 
chevêque de  Cantorbéry ,  il  fut  chargé 
de  faire  des  leçons  publiques  à  Cam" 
bridge,  oii  il  mourut  en  1 550 ,  âgé  de  45 
ans.  Ce  savant  protestant  a  beaucoup 
contribué  à  répandre  la  connaissance  de 
la  langue  hébaïque  par  ses  ouvrages, 
dont  voici  les  principaux  :  1*  Apophm 
thegmata  patrum  ;  Scntentiœ  mondes , 
1642,  in-4.  2°  Tobias  hebraïcus ,  1542, 
in-4.  3°  Expositio  dictionum  liebrajca- 
i3.. 


20?.  FAG 

rum  ,  ihAi  ,  in-4.  h'  Notée  in  Pentateu- 

chum,  1Ô46  ,  in-fol.,  etc. 

FAGë  (Raimond  de  la  )  naquit  en 
1648  àLisleen  Albigeois.  11  s'adonna  au 
dessin  sanssecours,  sans  maître,  maigre 
ses  pareus,  et  devint  bientôt  un  dessina- 
teur excellent.  Il  mettait  dans  ses  produc- 
tions,  surtout  dans  les  sujets  libres,  un 
goût ,  un  esprit  qui  surprenaient  les  ar- 
tistes. Son  atelier  ordinaire  était  le 
cabaret.  Il  s'était  établi  depuis  plusieurs 
jours  chez  un  au'uergiste  ,  et  y  faisait  une 
dépense  qui  paraissait  au  dessus  de  sa 
fortune.  Lorsqu'il  fallutpajer,  il  crayonna 
au  dos  du  mémoire  qu'on  lui  présenta , 
un  dessin  ,  que  l'aubergiste  porta  à  un 
amateur.  Le  curieux  en  donna  ce  qu'on 
lui  demanda ,  et  fit  encore  remettre  de 
l'argent  à  La  Fage.  Ce  maître  mourut  en 
1690.  Il  des.sinait  à  la  plume  et  au  lavis. 
Ses  dessins  dans  le  premier  genre  sont 
fort  recherchés.  Carie  Maratte  faisait 
beaucoup  de  cas  de  ses  ouvrages. 

*  FAGES  (  Joseph  ),  chirurgien  habile, 
naquit  à  Toulouse  le  1*''  août  1764,  de' 
parens  qui  étaient  sans  fortune ,  créa  lui- 
même  son  avenir  et  sentit  de  bonne  heure 
l'instinct  de  son  art.  A  1 4  ans  il  entra  au 
service  de  l'hôpital  de  St. -Joseph  de  la 
Grâce ,  et  s'y  fit  remarquer  par  des  succès 
surprenans,  dûs  à  son  travail  et  à  ses  dis- 
positions précoces.  Agé  à  peine  de  18 
ans  ,  il  faisait  déjà  un  cours  de  chirurgie 
et  d'accouchement.  Un  concours  ayant 
été  ouvert  en  1785  à  Montpellier  pour 
une  place  de  premier  chirurgien  interne 
de  l'Hôtel-Dieu  de  celte  ville  ,  le  jeune 
Fages  vint  disputer  cet  emploi  ;  mais , 
quoique  sa  supériorité  fût  incontestable, 
il  ne  l'obtint  point  alors  ,  les  usages  vou- 
lant que  celle  place  fût  donnée  à  celui 
qui  occupait  la  place  inférieure;  et  ce 
ue  fut  que  quelque  temps  après  et  à  la 
suite  d'un  nouveau  concours  qu'il  parvint 
enfui  à  se  voir  dans  le  rang  qu'il  avait 
déjà  mérité  depuis  long-teuips.  Il  se  livra 
dès  lors  à  plusieurs  travaux  scientifiques 
e.t  pratiques,  relatifs  à  sa  profession  ;  plu- 
sieurs médailles  lui  furent  décernées  par 
l'académie  royale  de  chirurgie  ;  le  célè- 
bre Louis  apprécia  son  talent  et,  à  plu- 
sieurs reprises ,  il  l'iavita  à  se  rendre  au- 


FAG 

près  de  lui.  En  l'an  3 .  Fages  fut  nommé 
chirurgien  en  chef  de  l'armée  des  Pyré- 
nées-Orientales, et  peu  de  temps  après 
il  eut  le  même  titre  à  l'hôpital  militaire 
de  Montpellier.  Alors  les  écoles  de  méde- 
cine et  de  chirurgie  étaient  supprimées  : 
Fages  ne  laissa  pas  périr  cet  enseigne- 
ment, et  parmi  ses  nombreux  élèves,  il 
compta  dessujets  distinguésqui,  plus  tard, 
illustrèrent  la  chirurgie  militaire.  Aux 
leçons  théoriques  qui  étaient  les  seules 
que  l'on  donnât  à  l'ancienne  université, 
Fages  ajouta  un  cours  de  chirurgie  cli- 
nique qu'il  fonda  lui-même.  Malgré  ses 
talens,  malgré  les  services  qu'il  avait 
rendus ,  malgré  la  haute  position  sociale 
dans  laquelle  l'avaient  placé  les  uns  et 
les  autres ,  des  inimitiés  particulières ,  si 
fréquentes  dans  le  corps  des  médecins 
et  des  chirurgiens,  empêchèrent  qu'il  ne 
fût  compris  parmi  les  professeurs,  lors  de 
la  réorganisation  de  la  faculté  de  méde- 
cine de  Montpellier ,  et  ce  ne  fut  qu'après 
deux  concours  brillans  qu'il  obtint  la 
chaire  de  médecine  opératoire.  Depuis 
celle  époque  jusqu'à  sa  mort  arrivée  le 
4  juin  1824,  il  n'a  cessé  de  donner  ses 
soins  à  ses  malades  et  à  ses  élèves.  Si  d'un 
côté  l'on  admirait  son  habileté  dans  l'art 
de  guérir ,  de  l'autre  on  n'était  pas  moins 
étonné  de  la  facilité  de  son  éloculion ,  de 
l'heureux  choix  des  expressions  qu'il  em- 
ployait ,  de  l'érudition  dont  il  faisait 
preuve  sans  pédanterie,  de  l'exactitude 
de  ses  observations,  en  un  mot  de  la  pro- 
fondeur de  sa  science  ;  aussi  avait-il  une 
clientelle  nombreuse ,  et  la  salle  oii  il 
donnait  ses  cours  était  toujours  remplie 
d'une  foule  d'auditeurs.  Sa  perte  a  laissé 
un  vide  à  Montpellier. 

*  FAGET  DE  BAURE  (Jean-Jacques), 
ancien  avocat  au  parlement  de  Pau ,  na- 
quit à  Orthez  le  30  octobre  Mhh,  d'une 
famille  ancienne  et  distinguée  dans  la 
magistrature.  Après  avoir  terminé  ses 
études  au  collège  de  Juilly,  il  fit  des 
.progrès  si  rapides  dans  le  droit  qu'à  19 
ans  il  était  avocat-général  au  parlement 
de  Pau.  Privé  de  celte  place,  dans  laquelle 
il  avait  débuté  d'une  manière  si  brillante, 
il  vécut  dans  la  retraite  jusqu'en  1809  : 
alors  Duonaparte  le  nomma  rapporteur 


FAG 

Au  conseil  du  contentieux  de  sa  maison. 
Eq  1810,  Faget  de  Baure  fut  élu  membre 
du  Corps  législatif,  et  il  siégeait  encore 
dans  cette  assemblée  en  1814,  époque 
du  retour  des  Bourbons,  auquel  il  adhéra 
le  G  avril,  en  signant  l'acte  de  déchéance 
de  Buonaparte.  En  1811  ,  il  avait  été  ap- 
pelé à  la  cour  impériale  de  Paris  ,  et  en 
éta  i t  deven  u  l'un  des  présidens;  il  avait  été 
conservé  à  la  cour  royale  sous  le  gouyer- 
iiement  de  Louis  XVIH.  Pendant  la  session 
législative  qui  eut  lieu  en  1814,  il  parla 
plusieurs  fois  à  la  tribune,  et  notamment 
le  9  août,  lorsqu'il  s'agissait  de  la  loi  sur 
la  liberté  de  la  presse  pour  laquelle  il  se 
déclara  ,  sans  toutefois  que  l'on  renonçât 
alors  à  la  censure,  qu'il  regardait  comme 
une  mesure  nécessaire  dans  les  circon- 
stances où  l'on  se  trouvait.  Son  entier 
dévouement  à  la  famille  royale  éclata 
surtout  à  l'époque  où  Buonaparte  revint 
de  rî!e  d'Elbe  :  il  embrassa  avec  chaleur 
la  défense  du  roi.  Après  la  seconde  rentrée 
des  Bourbons ,  il  fut  compris  au  nombre 
des  membres  du  conseil  royal  de  l'in- 
struction publique.  Président  du  collège 
électoral  des  Landes  ,  au  mois  de  juillet 
1815,  il  fut  élu  par  le  département  des 
Basses-Pyrénées,  et  devint  vice-président 
delà  chambre.  Il  fit  partie  de  diverses  com- 
missions, présenta  un  rapport  relatif  à 
l'organisation  de  la  cour  des  Comptes  et 
occupait  le  fauteuil  pendant  la  discus- 
sion de  la  loi  sur  les  élections.  Après  la 
dissolution  de  la  chambre  en  1816,  il 
présida  le  collège  électoral  des  Basses- 
Pyrénées  qui  le  réélut  député.  Il  eut  en- 
core l'honneur  d'être  nommé  vice-prési- 
dent :  il  siégeait  au  côté  droit.  Faget  de 
Baure  mourut  à  Paris  le  30  décembre 
1817.  C'était  un  homme  plein  de  reli- 
gion ,  et  il  avait  une  intégrité  à  toute 
épreuve.  On  a  de  lui  1  °  divers  morceaux 
de  littérature ,  notamment  des  vers  sur 
le  Dante ,  insérés  sans  nom  d'auteur  dans 
le  Spectateur  du  Nord  ;  2°  Histoire  du 
canal  du  Languedoc ,  rédigée  sur  les 
pièces  authentiques,  etc.  .Paris,  1805, 
in  8  ;  3"  Essai  historique  sur  le  Béarn, 
Paris  ,  1818  ,  in-8  ,  ouvrage  posthume. 

*  TAGGI,  ouDEFACGns(Ange),  appelé 
aussi  cjuelquefojs  Sangrino,  du  nom  du 


FAG  lo5 

château  de  Sangro  ,  dans  le  royaume  de 
Naples,  où  il  était  né  vers  l'an  1 500,  est 
un  de  ceux  qui  ont  le  plus  illustré  l'ordre 
de  Saint-Benoît.  Il  était  de  la  congréga- 
tion du  Mont-Cassin.  Sa  vie  offrit  le  mo- 
dèle de  toutes  les  vertus  :  il  partageait 
son  temps  entre  la  pratique  des  devoirs 
religienx  et  l'étude ,  à  laquelle  il  se  Irvra 
avec  une  assiduité  extraordinaire.  Très 
versé  dans  les  langues  grecque  et  latine, 
il  avait  fait  aussi  une  étude  approfondie 
de  l'Ecriture  sainte  et  des  saints  Pères. 
Elu  supérieur  de  diverses  maisons,  il  se 
lit  remarquer  par  la  sagesse  de  son  admi- 
nistration, qu'il  porta  au  plus  haut  degré 
dans  le  gouvernement  du  Mont-Cassin  et 
dans  celui  de  la  congrégation,  dont  la 
présidence  lui  fut  déférée  à  deux  reprises 
différentes.  Le  pape  Pie  V  qui  avait  pour 
lui  la  plus  grande  estime,  l'avait  nommé 
inquisiteur  de  la  foi.  Parvenu  à  un  âge 
très  avancé,  dom  Faggi  se  démit  de  toutes 
ses  places,  pour  consacrer  à  Dieu  tous  ses 
momens ,  et  mourut  au  Mont-Cassin  le 
17  mars  1593,  âgé  de  93  ans.  Parmi  les 
nombreux  ouvrages  qu'il  a  laissés,  on  dis» 
tingue  particulièrement  1°  In  psalterium 
Davidis  régis  et  prophetœ  clarissimi  ^ 
paraphrasis  vario  metri  génère  exculla, 
Venise,  in-4,  1575;  2°  Poesis  christiana 
in  quatuor  libros  distincta,  Padoue,  in-4, 
15G5;  3°  Spéculum  et  exemplar  christi- 
colarum ,  seu  Vita  beati  patris  sancti 
Benedicli ,  monachorum  patriarchœ 
*rt«c/w.H/ni,Florence,  in-4,162G;4''  Trai- 
té sur  f  oraison  des  40  heures,  Florence, 
1583;  5°  Vita  sanctœ  Virginis  Mariœ, 
carminé  elegiaco,  Vérone,  1G49;  6°  Offi- 
cium  40  horarum  ,  varia  metri  génère , 
1 58  3  ;  1°  Sentimens  d^un  pécheur  en  pré- 
sence du  très  Saint-Sacrement ,  en  vers 
héroïques ,  Florence ,  1583;  S°  Psautier 
de  la  Sainte  F'ierge,  en  prose  et  en  vers 
saphiques  ;  9°  Eloge  en  vers  du  Père 
dom  Paul  Picco  de  Pavie,  imprimé  par- 
mi ceux  de  Paul-Prosper  Martinengo; 
10"  Dialogue  sur  les  noms  donnés  à  Dieu 
dans  les  livres  saints.  Elnfin  ,  des  Hym- 
nes,  des  Eloges,  des  P^ies  des  saints,  des 
Sermons,  etc. 

'FAGItlOLI  (Jean-Baptiste),  poète 
comique  et  burlesque  ,  né  à  Florenct  en 


ao4  FAa 

1G60  ,  et  mort  en  1742  ,  fut  reçu,  malgré 
sa  jeunesse ,  dans  Tacadémie  des  Apas- 
listes,  et  commença  dès  lors  à  composer 
des  comédies  dans  lesquelles  il  jouait  lui- 
même  les  rôles  les  plus  plaisans.  Il  occu- 
pait ainsi  les  sociétés  les  plus  distinguées 
de  sa  patrie  par  ses  vers,  son  humeur 
bouffonne  et  ses  bons  mots.  Ce  qui  ne 
l'empêcha  pas  d'exercer  plusieurs  places 
dans  la  magistrature  floreolinc,  )l  a  laissé 
des  poésies  burlesques  sous  ce  titre  :  liiine 
piacevoli  di  Giam-Bnttista  Fagiuoliy 
Florence,  1729,  2  vol.  iu-8;  réimprimées 
à  Lucques,  1733-45,  7  vol.  in-8.  La  dér 
ceuce  qui  y  règne  les  distingue  de  toutes 
les  autres  du  même  genre.  Elles  eurent 
du  succès  de  son  vivant,  quoiqu'elles 
n'aient  ni  l'originalité  ni  la  verve  de  celles 
de  Berni.  Ses  comédies  imprimées  à  Flo- 
rence, 1734-3G,  7  vol.  in-12,  écrites  aussi 
dans  le  stile  facétieux  et  burlesque ,  se 
(ont  remarquer  par  le  bon  ton  qu'il  y  a 
toujours  conservé  et  qui  est  assez  rare 
dans  les  écrivains  de  cette  nation.  Le 
censeur  qui  lésa  approuvées  dit  qu'il  les 
regarde  comme  très  utiles,  étant  une  sa- 
tire continuelle  du  vice. 

•FAGNAN  (Marie-Antoinette,  dame), 
née  à  Paris  dans  le  1 8*  siècle,  préféra  une 
douce  obscurité  à  l'éclpt  dont  elle  aurait 
pu  jouir  dans  la  carrière  littéraire.  Elle 
publia  dejix  ouvrages  de  féerie  qui  curent 
(du  succès.  Le  premier ,  intitulé  Kanor , 
ponte  traduit  du  sauvage,  a  pour  but  de 
prouver  quie  le  vérit^tbic  amour  fait  des 
prodiges;  le  second,  qui  a  pou^  titre  : 
miroir  des  princesses  orientales,  est  un 
instrument  qui  révèle  ce  qui  se  passe  au 
fond  des  cœui's.  Lesage  en  a  pris  les 
i^ées  qui  font  le  fond  de  son  opéra  du 
Miroir  magique.  On  doit  encore  au  même 
^teur  une  bagatelle  agréable,  publiée 
dans  le  Mercure  ^e  France,  sous  le  tilre 
de  Minef  bleu  et  Louvette ,  et  réimpri- 
mée depuis  plusieup  fois  en  1814  dans 
les  Contes  merveilleux .  Le  but  de  ce  petit 
ponte  est  de  prouver  qu'avec  un  bon  cœur 
on  ne  peut  jamais  être  véritablement 
laid.  L'obscurité  dans  laquelle  s'est  en- 
veloppée cette  dame  auteur  fait  qu'on 
ignore  l'époque  précise  de  sa  mort,  qu'on 
croit  cepeadâqt  être  privée  eu  1770. 


FAG 

FAGNANI  ou  Fagnan  (  Prosper },  cé- 
lèbre canoniste,  consulté  à  Rome  comme 
l'oracle  de  la  jurisprudence,  fut  pendant 
lô  ans  secrétaire  de  la  sacrée  congréga- 
tion. Cet  habile  homme  perdit  la  vue  à 
l'âge  de  44  ans,  et  ne  travailla  pas  moins 
jusqu'à  sa  mort,  arrivée  en  1G78,  à  l'âge 
de  80  ans.  On  lui  doit  un  long  Commen- 
taire sur  les  Dc'cre'lalcs ,  Rome,  1461, 
3  vol.  in-fol.,  réimprimé  à  Venise  en 
1697.  Il  fut  entrepris  par  ordre  du  pape 
Alexandre  VII.  La  table  de  cet  ouvrage, 
vrai  chef-d'œuvre  en  ce  genre ,  vaut  seule 
autant  que  le  Commentaire.  Ce  qu'il  y  a 
de  plus  extraordinaire,  c'estqu'un  homme 
aveugle  ait  pu  la  dresser ,  et  la  dresser 
d'une  manière  si  exacte. 

FAGOIN  (Gui  Crescent),  né  à  Paris  au 
jardin  des  Plantes,  le  11  mai  1638,  d'un 
commissaire  des  guerres,  fut  destiné  de 
bonne  heure  à  la  médecine.  II  prit  le 
bonnet  de  docteur  en  1664.  Etant  sur 
les  bancs,  il  soutint  dans  une  thèse  la  cir- 
culation du  sang  :  action  hardie  alors,  que 
les  vieux  docteurs  ne  pardonnèrent  au 
jeune  étudiant,  qu'en  faveur  de  l'esprit 
avec  lequel  il  avait  défendu  ce  paradoxe, 
aujourd'hui  démontré.  Vallot,  premier 
médecin  du  roi ,  ayant  entrepris  de  re- 
peupler le  jardin  royal,  le  livre  commun 
de  tous  les  botanistes,  Fagon  lui  offrit  ses 
soins.  Il  parcourut  les  Alpes,  les  Pyré- 
nées, l'Auvergne,  la  Provence,  le  Lan- 
guedoc, et  n'en  revint  qu'avec  une  riche 
pioisson.  Son  zèle  fut  récompensé  par  les 
places  de  professeur  en  botanique  et  en 
chimie  au  jardin  du  roi.  Sa  réputation  le 
fit  choisir  eu  16G0,  pour  être  le  premier 
médecin  de  M"*  la  daupbine.  Quelques 
mois  après  il  le  fut  de  la  reine ,  et  après 
la  mort  de  cette  princesse,  il  fut  chargé 
par  le  roi  du  soin  de  la  santé  des  enfant 
de  France.  Enfin  Louis  XIV,  après  l'avoir 
approché  de  Iqi  ppr  degrés,  le  nomma  son 
premier  médecin,  en  1693.  Dès  qu'il  fut 
élevé  à  ce  poste ,  il  donna  à  la  cour  un 
spectacle  rare  et  singulier;  il  diminua 
beaucoup  les  revenus  de  sa  charge.  Il  se 
retrancha  ce  que  les  autres  médecins  sub- 
alternes de  la  cour  payaient  pour  leur 
serment  ;  il  abolit  des  tributs  qu'il  trouva 
établis  sur  les  nominations  aux  chaires 


FAH 

royales  de  professeur  en  médecine  dans 
les  diverses  universités.  Devenu  surin- 
tendant du  jardin  royal  en  1698  ,  il  in- 
spira à  Louis  XIV  d'envoyer  ïournefort 
dans  le  Levant ,  pour  enrichir  ce  jardin 
de  nouvelles  plantes.  L'académie  des 
Sciences  lui  ouvrit  son  sein  l'année  d'a- 
près. Fagon  avait  toujours  eu  une  santé 
très  faible.  Elle  ne  se  soutenait  que  par 
un  régime  presque  superstitieux;  et  il 
pouvait  donner  pour  preuve  de  son  habi- 
leté, dit  Fontenelle,  qu'il  vivait.  L'art  cé- 
da enfin,  et  la  France  le  perdit  eu  1718, 
âgé  de  près  de  80  ans.  Il  avait  épousé  Ma- 
rie Nozereau ,  dont  il  a  laissé  deux  fils  : 
l'aîné,  Antoine,  évêque  de  Lombez  ,  puis 
de  Vannes,  njort  le  1 G  février  1 7  42  ;  et  le 
second,  Louis,  consciller-d'état  ordinaire 
au  conseil  royal,  et  intendant  des  li- 
uunces,  mort  à  Paris  le  8  mai  1744,  sans 
avoir  été  marié.  Outre  un  profond  savoir 
dans  sa  profession,  Fagon  avait  une  éru- 
dition très  variée,  fet  embellie  par  l'heu- 
reuse facilité  de  bien  parler.  Son  cœur 
était  encore  au  dessus  de  son  esprit.  Il  était 
humain,  généreux,  désintéressé.  Il  eut 
part  au  Catalogue  du  Jardin  Royal,  pu- 
blié en  1GC5,  sous  le  titre  à'IIoitus  Re- 
gius.  Il  orna  ce  recueil  d'un  ■pelil  poème 
latin,  inspiré  par  son  goût  pour  la  bota^ 
nique.  On  a  encore  de  lui  les  Qualités  du 
quinquina,Vdris,  1703,  in-12.  (Son éloge 
se  trouve  dans  la  notice  des  hommes  tes 
plus  célèbres  de  la  faculté  de  médecine , 
par  J.  A.  Hazon.  Son  oncleGuy  delà  Drosse 
fut  le  fondateur  et  devint  l'intendant  du 
Jardin  des  Plantes.  ) 

FAGUINDEZ  (Etienne),  jésuite  de 
Viane  en  Portugal,  mourut  en  1G46,  à  G8 
jins,  regardé  comme  un  homme  pieux  et 
savant.  On  a  de  lui  1°  Traite' des  contrats , 
Lyon,  1G41,  in-fol.  2°  Traite  sur  le  De- 
calogue,  Lyon,  1G40,  2  vol.  in-folio,  et 
d'autres  ouvrages  de  the'ologie  morflt/equi 
ont  eu  de  la  réputation. 

FAHRENHEIT  (Gabriel-Daniel),  né 
fi  Dantzick  en  1G85,  fut  envoyé  en  Hol- 
lande pour  apprendre  le  commerce,  mais 
son  goût  le  porta  vers  l'étude  de  la  phy- 
sique ;  il  s'appliqua  particulièrement  à  la 
construction  des  baromètres  et  des  ther- 
momètres. En  1720,  il  substitua  à  l'esprit 


FAI  2o5 

de  vin,  dont  on  s'était  servi  jusque-là 
pour  les  thermomètres,  le  mercure,  et 
rend  compte  de  celte  opération  dans  sa 
dissertation  sur  les  thermomètres,  1 724. 
Il  adonne  à  cet  instrument  uneéchelle  et 
un  terme  fixe,  différens  de  ceux  de  Réau- 
mur.  Au  lieu  de  la  glace,  il  a  pris  pour 
terme  l'eau  bouillanlc,  et  son  32^  degré 
répond  au  zéro  de  Réaumur.  Mais  on  ne 
saurait  disconvenir  que  le  thermomètre 
de  celui-ci  est  plus  simple  et  plus  sûr; 
et  que  s'il  est  plus  généralement  adopté, 
c'est  qu'il  mérite  réellement  de  l'être. 
Fahrenheit  est  mort  en  1740.  (Il  avait  pu- 
blié eu  outre  cinq  mémoires  qu'on  trouve 
dans  les  Transactions  philosophiques , 
1724). 

FAIDEAU.  ployez  Feydeau. 

FAIEL  ou  Fayel  (Eudes  de) ,  seigneur 
renomme  du  Vermandois ,  se  signala  par 
une  action  atroce,  que  l'histoire  nous  a 
conservée.  Il  avait  épousé  Gabrielle  de 
Vergy,  ou  plutôt  de  Lévergies,  issue  d'une 
des  meilleures  maisons  du  canton ,  mais 
plus  distinguée  encore  par  sa  beauté  que 
par  .sa  naissance.  Cette  dame,  née  avec 
un  cœur  tendre,  ne  put  résister  aux  ins- 
tances et  à  la  figure  séduisante  de  Renault 
ou  Raoul,  châtelain  de  Coucy,  le  plus  ac- 
compli de  son  temps,  qui  venait  souvent 
au  château  de  Faïel.  Il  se  forma  entre  elle, 
et  ce  jeune  seigneur,  qui  l'aimait  au.ssi 
éperdument,  une  funeste  liaison.  I^  ma- 
ri, homme  violent  et  emporté,  en  fut  in- 
struit ;  mais  comme  ses  soupçons  n'étaient 
pas  pleinement  confirmés,  il  n'osa  en  ve- 
nir à  un  éclat.  Sur  ces  entrefaites,  Coucy 
fut  obligé  de  s'embarquer  sur  un  des  vais- 
seaux de  Richard  Cœur-dc-Lion,  roi  d'An- 
gleterre, pour  la  croisade  dans  laquelle 
il  s'était  engagé.  Son  courage  l'ayant  em- 
porté dans  une  affaire  périlleuse  contre 
les  Sarrasins,  il  reçut  une  blessure  mor- 
telle d'un  javelot,  qui  le  perça  fort  avant 
entre  les  côtes.  Se  voyant  à  l'extrémité, 
il  chargea  sonécuyer,  dès  qu'il  serait  re- 
tourné en  France,  de  remettre  à  la  dame 
de  Faïel  une  lettre  de  sa  main,  un  petit 
coffre  d'argent,  avec  les  joyaux  qu'il  avait 
reçus  d'elle,  à  son  départ  :  il  l'enga- 
gea aussi,  sous  le  serment,  à  prendre  sou 
cœur  après  sa  morî,  et  à  porter  ce  funesla 


2o6  FAI 

présent  à  celle  pour  qui  seule  ce  cœur 
avait  soupiré.  Le  messager  était  déjà  dans 
les  avenues  du  château  de  Faïel,  lorsqu'il 
fut  rencontré  par  le  seigneur ,  qui  le  re- 
connut, et  l'obligea  de  lui  déclarer  le  su- 
jet de  son  arrivée.  Faïel  se  saisit  du  fatal 
dépôt  avec  une  joie  mêlée  de  rage  ;  il 
rentra  dans  le  château,  et  poussé  par  l'ex- 
cès de  sa  jalousie,  il  fit  servir  à  sa  femme 
dans  un  ragoût  le  cœur  de  Coucy,  qu'elle 
mangea  sans  se  douter  de  rien.  «  Ce  mets, 
j)  lui  dit-il,  a  dû  vous  paraître  excellent, 
»  car  c'est  le  cœur  de  votre  amant,  »  En 
même  temps  pour  la  convaincre  mieux  de 
la  vérité  de  cet  horrible  repas,  il  jeta  sur 
la  table  le  petit  coffre  et  les  bijoux.  A  ce 
spectacle,  la  dame  de  Faïel,  frappée 
comme  d'un  coup  de  foudre,  demeura 
ttupide  et  sans  voix,  et  passa  de  cette  in- 
sensibilité apparente  à  l'évanouissement  ; 
elle  ne  revint  que  pour  jeter  les  cris  du 
désespoir,  et  jurer  «  qu'elle  ne  prendrait 
»  plus  de  nourriture  «  ;  ce  qui  la  condui- 
sit en  peu  de  jours  au  tombeau.  Celte  ef- 
frayante catastrophe  arriva  vers  l'an  1 191  : 
elle  a  fourni  le  sujet  d'une  tragédie  à 
MM.  de  Belloy  et  d'Arnaud.  Le  seigneur 
de  Faïel,  dévoré  par  le  chagrin  et  les  re- 
mords, ne  survécut  pas  long-temps  à  l'ac- 
tion qui  les  lui  avait  causés.  Il  mourut 
avec  la  douleur  d'avoir  sacrifié  d'une  ma- 
nière si  barbare  une  femme  qu'il  avait 
toujours  aimée  (  voyez  Mémoires  histo- 
riques sur  la  maison  de  Coucy  et  sur  la 
dame  de  Faïel,  par  M.  de  Belloy,  citoyen 
de  Calais).  On  raconte  le  même  trait  de 
vengeance  d'une  comtesse  d'Astorgas 
(voi/cz  ce  mot)  ;  mais  il  y  a  apparence 
que  ce  n'est  que  l'histoire  de  Faïel  tra- 
vestie :  à  moins  de  supposer  que  les  Mé- 
moires de  M.  de  Belloy  ont  été  fabriqués 
d'après  l'anecdote  de  la  comtesse  d'Astor- 
gas; ce  qui  dans  ce  siècle,  où  l'histoire 
est  devenue  le  jouet  de  l'imagination  et 
une  spéculation  de  lucre,  n'aurait  rien 
de  bien  étonnant  :  et  que  ne  ferait  pas  un 
bel -esprit,  pour  avoir  à  traiter  quelque 
sujet  piquant,  pour  arranger  un  drame 
larmoyant  et  bien  terrible  !  Ployez  l'ar- 
ticle Coucy. 

FAIL  (Noël  du),  seigneur  de  La  Héris- 
saye,  gentilhomme  breton ,  et  conseiller 


FAI 

au  parlement  de  Rennes,  au  16*  siècle  y. 
fut  ami  d'Eginard  Baron  et  de  Duaren. 
On  u  de  lui  divers  ouvrages  qu'on  ne  liC 
plus,  et  qu'on  ne  peut  guère  lire,  si  l'on 
a  le  germe  du  bon  goût.  Les  gens  frivoles 
recherchent  cependant  ses  Contes  ei  Dis- 
cours (VEulrapely  Rennes,  1587,  io-16, 
réimprimés  en  1732,  2  vol.  in-12,  et  le* 
Ruses  de  Rayot ,  l5IG,  in- 16,  réimpri- 
mées aussi  sous  le  titre  de  Propos  rusti- 
ques en  17  32.  Ces  livres  ne  sent  reconi- 
mandables  que  par  leur  naïveté. 

FAILLE  (Germain  de  la),  né  à  Castel- 
naudari  en  1616,  avocat  du  roi  au  prési- 
dial  de  cette  ville,  devint  syndic  de  Tou- 
louse en  1G55,  et  secrétaire  perpétuel  des 
Jeux  Floraux  en  1 694 .  Il  mourut  en  1 7 1 1 , 
à  95  ans,  doyen  des  anciens  capilouls. 
On  a  de  lui  i°  Les  Annales  de  Toulouse, 
en  2  vol.  in-fol.,  1687  et  1701.  L'auteur 
de  la  dernière  Histoire  de  Languedoc 
(M.  du  Rozoi)  a  beaucoup  profité  de  cet 
ouvrage  curieux  et  intéressant,  surtout 
pour  les  Toulousains.  Le  stile  en  est  vif 
et  concis,  mais  peu  correct.  H  s'est  arrêté 
à  l'année  1 6 1 0  ;  son  amour  pour  la  vérité 
ne  lui  permit  point  de  traiter  l'histoire 
des  derniers  temps,  parce  qu'il  craignait 
d'être  obligé  de  la  trahir.  2"  Un  Traité 
de  la  noblesse  des  Capitouls ,  en  1707, 
in-4  ;  il  est  rempli  de  recherches  cu- 
rieuses. Indépendamment  du  mérite  de 
l'érudition  ,  La  Faille  écrivait  facilement 
en  vers  et  en  prose.  U  était  lié  avec  plu- 
sieurs gens  de  lettres,  dont  il  avait  l'es- 
time et  l'amitié.  (Ses poésies  sont  insérées 
dans  le  Recueil  des  Jeux  Floraux  ). 

*  FAINI  (M"°«  Diamante),  poète  ita- 
lienne ,  né  à  Savallo  dans  le  Brescian  au 
commencement  du  1 8»  siècle,  morte  à  Salo 
le  13  juin  17  70,  était  fille  d'un  médecin 
de  Castrezato  qui  cultiva  ses  heureu.ses 
dispositions.  Elle  fit  des  progrès  signalés: 
ses  poésies  sont  charmantes.  Sa  prose 
n'est  pas  moins  facile  et  moins  élégante 
que  ses  vers.  Elle  écrivait  aussi  en  latin 
et  même  en  français  avec  une  rare  pu- 
reté. Elle  possédait  assez  bien  la  science 
astronomique,  et  même  les  matières  théo- 
logiques.  Ses  OEuvres ,  en  prose  et  en 
vers,  ont  été  imprimées  à  Salo  en  1762 
et  1771,  1  vol.  in-8.  Ses  vers  roulent 


\ 


I 


FAI 

presque  tous  sur  des  sujets  sacrés  ou  mo- 
raux. 

•FAIPOULT  ou  Faypoult  (  Guillau- 
roe-Cliarles ,  chevalier  de  Maisoncelles  ) 
adraiuistratcur  et  homme  d'état  sous  le 
régime  républicain,  naquit  en  1752  d'une 
famille  noble  de  Champagne.  Entré  de 
bonne  heure  au  service  militaire,  il  était 
capitaine  du  génie  à  l'époque  où  le 
gouvernement  français  envoya  des  se- 
cours aux  insurgés  de  l'Amérique  du  Nord. 
Il  sollicita  la  faveur  de  faire  partie  de 
cette  expédition  :  le  refus  qu'il  essuya 
du  ministre  de  la  guerre ,  le  détermina 
à  donner  sa  démission.  Dès  cette  épo- 
que jusqu'à  la  révolution  ,  il  se  livra 
entièrement  à  la  culture  des  sciences  et 
des  arts.  Les  principes  proclamés  en 
1789  trouvèrent  en  lui  un  chaud  par- 
tisan :  il  accepta  des  emplois ,  et  devint 
secrétaire-général  du  ministre  de  l'inté- 
rieur sous  Roland  et  Garât.  Banni  en 
vertu  du  décret  qui  chassait  les  anciens 
nobles,  il  revint  à  Paris  sous  le  Directoire, 
et  publia  un  ouvrage  assez  médiocre  in- 
titulé :  Essai  sur  les  finances ,  an  3, 
(  1795  )  in-8.  Peu  de  temps  après  il  fut 
ministre  des  hnances,  et  ce  fut  sous  son 
ministère  que  les  planches  des  assignats 
furent  brisées.  Un  an  après,  ce  portefeuille 
lui  fut  ôté.  Nommé  ministre  plénipoten- 
tiaire à  Gènes,  il  parait  qu'il  se  condui- 
sit avec  prudence  :  ce  qu'il  y  a  de  cer- 
tain, c'est  que  la  ville  de  Gèues  fit  frap- 
per une  médaille  sur  laquelle  se  trouve 
son  buste  à  côté  de  celui  de  Cuonapartc 
avec  cette  exergue  :  A  Napoléon  Buo- 
haparle  et  à  Guillaume  Faypoult,  la 
Liguric  reconnaissante.  Le  jeune  vain- 
queur de  l'Italie  avait  engagé  Faypoult  à 
le  suivre  en  Egypte  ;  les  aftaires  de  l'Ita- 
lie l'empêchèrent  de  prendre  part  à  cette 
expédition  :  Faypoult  fut  envoyé  de  Gè- 
nes à  Milan ,  puis  de  Milan  à  Rome,  et  en- 
fin à  Naples,  et  présida  à  la  création  et  à 
l'organisation  de  presque  toutes  les  répu- 
bliques de  l'Italie.  Une  querelle  très  vive 
qu'il  eut  avec  'le  général  Champion  net 
et  qui  amena  la  destitution  de  celui-ci, 
devint  après  le  1 8  fructidor  le  motif  d'une 
proscription  contre  Faypoult  :  il  fut  dé- 
noneé  en  1799  comme  dilapidateur  et 


FAT  207 

poursuivi  par  le  tribunal  criminel  de  1» 
Seine;  ces  poursuites  s'arrêtèrent  d'elles- 
mêmes.  Après  le  18  brumaire,  Euona- 
parte,  premier  consul,  le  nomma  préfet 
de  l'Escaut,  qu'il  administra  jusqu'en 
1 808,  époque  011  il  fut  destitué.  Une  tem- 
pête affreuse  avait  enlevé  les  digues  des- 
terrains  bas  de  ce  département,  et  la  mer 
en  avait  envahi  une  partie  :  la  faute  qui 
devait  être  imputée  aux  seuls  ingénieurs 
des  ponts  et  chaussées,  retomba  sur  le 
préfet  qui  encourut  la  disgrâce  de  Buo- 
naparte.  Lorsque  Joseph  fut  élevé  sur  le 
trône  d'Espagne,  il  nomma  Faypoult  mi- 
nistre des  finances,  et  celui-ci  occupa  ce 
poste  jusqu'à  la  fin  de  1813,  époque  où  il 
revint  en  France  avec  l'armée  et  la  cour 
du  nouveau  roi.  Buonaparte  lui  confia 
alors  une  mission  importante  en  Italie  : 
malgré  les  nombreuses  difficultés  qu'il 
rencontra,  il  parvint  à  Bologne  auprès  de- 
Murât:  il  vit  aussi  tous  les  princes  d& 
cette  presqu'île  ;  il  s'agissait  sans  doute  de 
les  faire  prononcer  tous  en  faveur  du  gou- 
vernement chancelant  de  l'empereur.  Les 
événemens  qui  survinrent  l'empêchèrent 
de  terminer  ses  négociations,  ou  ne  nous 
permettent  pas  d'en  connaître  le  résultat. 
En  1815,  au  retour  de  Buonaparte,  Fay- 
poult fut  nommé  préfet  deSaône-et-Loire  : 
il  contribua  sans  doute  à  exalter  les  habi- 
tans  de  ce  département  qui  se  levèrent 
presqu'en  masse  pour  se  réunir  à  l'armée 
du  général  Lecourbe  :  il  chercha  aussi  à 
défendre  la  ville  de  Màcon  qui,  malgré 
ses  efforts  multipliés,  tomba  au  pouvoir 
des  Autrichiens.  Faypoult  arrêté  et  jeté 
en  prison,  reçut  ensuite  du  général  au- 
trichien Frimont,  l'ordre  de  continuer  à 
administrer  le  département.  Remplacé 
bientôt  après  par  le  gouvernement  royal, 
il  quitta  Màcon,  alla  dans  les  Pays-Bas  et 
fut  reçu  presqu'en  triomphe  à  Gand.  Cette 
cité  a  fait  placer  son  portrait  en  pied  dans 
la  grande  salle  de  l'hôtel-dc-ville,  où  on 
le  voit  encore.  Il  revint  en  1816  à  Paris, 
où  il  mourut  dans  un  état  voisin  de  l'in- 
digence, au  mois  d'octobre  1817. 

FAIRFAX  (Thomas),  l'un  des  chefs 
des  parlementaires  et  général  de  leur  ar- 
mée, mit  en  déroute  ,  le  24  juin  1645, 
l'armée  de  Charles  I  à  Nazerby.  Ce  prince 


io8  FAR 

y  perdit  toute  son  infanterie,  sofi  Canon 
et  son  bagage.  L'année  suivante,  Fairfax 
se  rendit  maître  d'Oxford;  battit  ensuite 
le  prince  de  Galles ,  força  Eieter  après 
deux  mois  et  demi  de  siège,  et  obtint  en 
1047  la  place  de  gourverncur  de  la  Tour 
de  Londres.  En  JG48  ,  il  se  démit  de  sa 
charge  et  cessa  de  se  mêler  des  affaires 
d'état ,  quand  il  vit  Charles  I  livré  à  la 
chambre  de  justice  ;  ne  se  pardonnant 
pas  les  avantages  qu'il  avait  remportés 
sur  ce  prince  infortuné.  Dès  qu'il  s'aper- 
çut des  intentions  de  Monck  pour  le  réta- 
blissement de  Charles  II,  il  fut  un  des 
premiers  à  lui  offrir  ses  sei^vices.  Le  par- 
lement le  choisit  pour  un  des  députés 
vers  ce  prince,  lorsqu'il  l'invita  à  venir 
reprendre  la  couronne.  Il  mourut  en  avril 
1GC7.  C'était  un  homme  sombre,  hypo- 
condriaque, et  au  talent  de  la  guerre 
près,  une  espèce  d'automate,  qu'on  fai- 
sait agir  comme  on  voulait  :  aussi  Crom- 
wel  en  sut-il  tirer  bon  parti. 

*  FAISTENBERGER  (Antoine),  pein- 
tre d'Inspruck,  né  en  1678,  excellait  dans 
le  paysage.  Les  siens  sont  d'une  compo- 
sition également  grande  et  bien  enten- 
due. Il  aimait  à  représenter  des  chutes 
d'eau  et  des  solitudes.  Ce  peintre  mou- 
rut à  "Vienne,  l'an  1720.  Son  frère  Joseph, 
dont  il  fut  le  maître,  avait  si  bien  imité 
sa  manière,  que  l'on  confond  souvent 
leur  stableaux. 

'  FAITHORIN'E  (William) ,  peintre  et 
graveur  anglais,  né  en  ICI  G,  mort  en 
1691,  fut  banni  de  son  pays  pour  n'avoir 
pas  voulu  prêter  serment  d'obéi.ssance  à 
Cromwel.  A  son  retour  en  Angleterre,  il 
se  livra  particulièrement  à  la  gravure. 
On  cite  de  lui  une  Sainte  Famille ,  d'a- 
près Vouet,  et  le  Christ  au  tombeau,  d'a- 
près Van-Dyck.  Le  genre  oîi  il  s'est  le 
plus  distingué  est  celui  du  portrait  gravé. 
Il  en  a  donné  un  grand  nombre  qui  sont 
très  estimés,  et  publié  un  traite'  sur  Fart 
de  la  gravure,  en  1662.  11  mourut  en 
1691. 

•  FAKim-EDDYN-RAZY ,  historien 
arabe,  un  des  plus  célèbres  docteurs  mu- 
sulmans, né,  selonM.  deSacy,  vers  la  fin 
du  7'  siècle  de  l'hégire  et  au  commence- 
ment du  8"  (vers  l'an  1300  de  J.  G.  ),  et 


rAL 

selon  d'autres  h  Rei  en  Perse ,  l'aù  543  oH 
644  de  l'hégire  (1149  ou  1 1 50  de  J.  C.  ), 
mourut  à  Hérat  Tan  COC  de  l'hégire  (1210 
de  J.  C.  ).  Il  avait  étudié  la  théologie  sco- 
lastique  et  la  philosophie  sous  le  fameux 
Algazaly ,  et  professa  avec  un  succès  tel 
que  l'on  se  rendait  à  ses  cours  de  toutes 
les  parties  de  la  Perse  et  de  la  Mésopota- 
mie. Il  est  connu  par  une  Histoire  chro- 
nologique des  dynasties ,  qui  se  trouve 
parmi  les  manuscrits  arabes  que  possède 
la  bibliothèque  royale.  Cette  histoire  est 
divisée  en  deux  parties ,  dont  la  première 
traite  des  principes  du  gouvernement , 
des  qualités  nécessaires  à  un  prince ,  et 
des  défauts  qu'il  doit  éviter  ;  la  seconde 
présente  succintement  les  différentes  dy- 
nasties qui  ont  gouverné  l'empire  fondé 
par  les  Arabes,  en  commençant  parles 
premiers  califes.  Cette  histoire ,  quoique 
abrégée ,  mériterait,  par  l'importance  des 
faits  qu'elle  renferme  et  les  réflexions  de 
l'auteur  ,  de  passer  dans  notre  langue. 
M.  Sylvestre  de  Sacy ,  en  a  publié  trois 
extraits  dans  sa  Chrestomathie  arabe , 
savoir  :  1"  V Histoire  du  califat  de  Ha- 
roun-Al-Aaschild  ;  2°  V Histoire  du  ca-- 
lifat  de  Moslassem,  dernier  prince  abas- 
side  ;  3°  le  chapitre  intitulé  :  Des  droits 
des  souverains  fur  leurs  sujets.  Il  ne 
faut  pas  confondre  cet  historien  avec  le 
docteur  du  même  nom  ,  né  en  1 160. 

*  FAKHB-ENNISA  (Chohd'ch),  fille 
célèbre ,  qui  mérita  le  nom  ci-dessus  cité, 
et  qui  signifie  la  gloire  des  femmes.  Elle 
naquit  à  Bagdad  vers  l'an  1088  de  J.  C, 
professa  la  jurisprudence  et  la  théologie, 
compta  parmi  ses  disciples  les  hommes 
les  plus  distingués  et  les  docteurs  les  plus 
fameux  de  ce  siècle.  Elle  passa  sa  vie 
dans  le  célibat,  uniquement  occupée  de 
ses  études,  et  mourut  le  1"  juillet  1179 
de  J.  C,  ou  574  de  l'hégire. 

'  FALBAIRE  (Charles-George  FENODit- 
toT  de  ) ,  poète  dramatique ,  né  à  Salins 
le  16  juillet  1727  ,  fil  ses  éludes  au  col- 
lège de  Louis  le  Grand  à  Paris ,  et  dès  sa 
plus  tendre  jeunesse  s'occupa  de  poésie 
et  de  littérature.  Il  occupait  dans  les  fi- 
nances un  emploi  qui  lui  assurait  une 
existence  honorable  tout  en  lui  permet- 
tant de  survre  son  goût  pour  les  lettres. 


â 


FAL 

Nommé  en  1*82  inspecteur-général  des 
salines  de  l'est,  il  s'occupa  avec  succès 
d'en  accroître  le  revenu  pour  l'état.  La 
révolution  le  priva  de  ses  emplois ,  et 
détruisit  sa  fortune.  Il  mourut  le  28  oc- 
tobre 1800,  à  Ste.-iMenehouIt ,  où  il  s'é- 
tait retiré  avec  sa  famille.  Ses  œuvres 
ont  été  réunies  à  Paris,  en  2  vol.  in-8  , 
1787  ;  on  y  troiive  :  1°  L'Iwnnêle  Crimi- 
nel, drame  en  5  actes  et  en  vers ,  dont  le 
sujet  était  tiré  ,  dit-on ,  d'an  événement 
réel  ;  mais  on  assure  que  Falbaire  l'igno- 
rait lorsqu'il  composa  cette  pièce  et  que 
la  première  idée  lui  en  vint  à  la  lecture 
d'un  passage  de  la  Poétique  de  Marmou- 
tel.  Ce  qu'il  y  a  de  plus  certain,  c'est  que 
cette  pièce  est  l'imitation  d'un  drame  es- 
pagnol de  Jovelianos  ,  qui  porte  le  même 
titre.  Pour  s'en  convaincre  ,  il  suffit  de 
rapprocher  les  deux  drames.  Celte  pièce 
par  laquelle  il  débuta  eut  un  grand  suc- 
cès. Il  y  a  des  situations  attachantes; 
mais  le  stile  en  est  faible  et  négligé.  On 
en  a  fait  plusieurs  éditions;  et  elle  a  été 
traduite  en  allemand,  en  hollandais  et 
en  italien.  2°  Le  premier  Navigateur  , 
pastorale  lyrique  en  3  chants.  3"  Les  deux 
avares ,  comédie  en  2  actes  et  en  prose , 
mêlée  d'ariettes ,  dont  quelques  situa- 
tions assez  touchantes  ,  et  surtout  la  mu- 
sique de  Grétry,  firent  le  succès.  Grimm 
en  a  fijit  la  critique  dans  sa  correspon- 
dance. 4°  Le  Fabricant  de  Londres, 
drame  en  5  actes  et  en  prose ,  joué  en 
17  71  ,  et  qui  tomba  dès  la  première  re- 
présentation. Une  mauvaise  plaisanterie 
décida  sa  chute  :  au  cinquième  acte, 
lorsqu'on  vint  annoncer  la  banqueroute 
du  fabricant,  un  homme  du  parterre  s'é- 
cria :  J'y  suis  pour  20  sous  (prix  de  son 
billet).  L'auteur  retira  sa  pièce  le  lende- 
main. Quoique  cette  pièce  soit  froide  et 
assez  mal  conduite,  elle  a  été  traduite  en 
allemand  et  en  italien ,  et  représentée 
à  plusieurs  reprises  sur  les  théâtres  de 
Vienne  et  de  Vicence.  6°  L'Ecole  des 
mœurs,  ou  les  Suites  du  libertinage, 
drame  en  5  actes  et  en  vers ,  joué  sans 
succès  eu  1 7  7  6  et  en  1 7  90  ;  il  a  été  traduit 
en  allemand  et  en  hollandais.  6"  Les  Jam- 
mabos,  ou  le$  moines  japonais ,  tragédie 
en  3  actes  dirigée  contre  les  jésuites  :  c'est 

V. 


FAL  2o<) 

la  plus  mauvahe  de  ses  productions,  car 
elle  pèche  par  le  plan  ,  l'action  cl  le  stile. 
Le  seul  drame  de  V Honnête  Criminel  ob- 
tint du  succès,  qu'il  dut  en  grande  partie 
aux  circonstances  où  il  fut  joué,  et  à  l'in- 
térêt qu'inspire  le  malheur  qui  n'est  iws 
mérité. 

FALCANDUS  ou  Falcand  (Hugues), 
normand  d'origine,  trésorier  de  St. -Pierre 
dePalerme,  dansle  12*  siècle,  laissa  une 
Histoire  de  Sicile  depuis  1 1 52  jusqu'en 
1169,  écrite  avec  simplicité  et  exacti- 
tude. La  meilleure  édition  de  cet  ouvrage 
est  celle  de  Gervais  de  Tournay,  in-8  , 
Paris,  16.')0. 

FALCIDIUS,  tribun  du  peuple  ro- 
main, institua  la  loi  Falcidie,  l'an  40 
avant  J.  C,  ainsi  appelée  du  nofn  de  son 
auteur.  Elle  ordonnait  que  le  quart  des 
biens  de  tout  testateur  demeurerait  à  ses 
légitimes  héritiers.  C'est  ce  qu'on  nomma 
la  Quarte  Falcidique.  On  pouvait  dispo- 
ser du  reste. 

*FALCK  ou  Falk  (Jean-Daniel),  poète 
satirique  allemand  ,  naquit  à  Dantzick 
en  1770,  de  parens  peu  favorisés  par 
la  fortune.  Sa  passion  pour  l'étude  fut 
mise  à  de  rudes  épreuves.  Ayant  embras- 
sé d'abord  la  profession  de  son  père  qui 
était  perruquier ,  il  consacrait  ses  épar- 
gnes à  acheter  quelques  livres  qu'il  dévo- 
rait pendant  ses  momens  de  loisir  ;  mais 
comme  ses  parens  empêchaient  ses  lec- 
tures, il  les  faisait  souvent  dans  la  rue 
auprès  d'une  lanterne,  même  pendant  la 
saison  la  plus  rigoureuse  :  les  poètes  al- 
lemands étaient  ses  auteurs  favoris.  Il 
obtint  cependant  d'apprendrela  musique, 
et  il  y  fit  des  progrès  étonnans.  La  langue 
anglaise  lui  devint  bientôt  familière , 
sous  la  direction  d'un  maître  qui  lui 
avait  permis  d'assister  gratis  à  ses  leçons. 
Enfin  ses  succès  dans  toutes  les  parties 
qu'il  abordait,  déterminèrent  ses  parens 
à  lui  faire  continuer  ses  études  au  Gym- 
nase de  sa  ville  natale  ;  il  les  termina  à 
l'université  de  Halle.  Bientôt  embrassant 
exclusivement  la  profession  d'homme  de 
lettres ,  il  fit  paraître  plusieurs  pièces  de 
vers  dans  le  genre  satirique  et  à  l'imita- 
tion de  Boiieau.  La  considération  qu'il 
acquit  par  ses  ouvrages  lui  méritèrent  eu 

>4 


aïo  Ï'AL 

1778,  de  la  part  du  grand-duc ,  la  place 
de  conseiller  de  légation,  avec  appoiule- 
mens  :  ce  qui  lui  permit  de  se  livrer  euliè- 
rementà  son  goût  pour  l'étude.  En  nOG, 
il  conçut J'idce  d'un  annuaire  orné  de  gra- 
vures et  de  caricatures,  dans  le  but  de  pa- 
rodier  les  classiques  anciens  et  modernes, 
et  de  faire  voir ,  dans  des  observations 
critiques,  les  préjugés  de  cbaque  siècle  : 
cet  annuaire,  qui  parut  depuis  17  97 
jusqu'en  1 803 ,  lui'  attira  beaucoup  de 
désagrémens.  D'abord  il  avait,  dans  ses 
satires,  attaqué  les  vices  et  les  folies 
des  hommes ,  comme  dans  les  Tombeaux 
de  Kam  et  dans  son  poème  des  he'ros  : 
plus  tard ,  il  s'abaissa  jusqu'à  des  per- 
sonnalités ,  et  tourna  en  ridicule  des  per- 
sonnages estimables.  Ses  principaux  ou- 
vrages sont  :  1°  Satires,  Leipsick  et  Al- 
tona  ,  1800,  3  vol.  in-12.  Les  Tombeaux 
de  Kam  se  trouvent  dans  le  second  vo- 
lume. 2°  Almanach  des  Amis  des  sail- 
lies et  de  la  satire,  1797-1803,  7  années, 
in-12.  3"  OEuvres  choisies  en  prose  de 
Swifft  et  d'Arbuthnot ,  traduites  en  al- 
lemand, Leipsick,  1798-1799,  6  vol. 
in-8.  4°  Dissertations  sur  la  poésie  et 
les  arts  ,  Weimar,  1803,  in-8.  5°  Nou- 
veau Recueil  de  contes  et  de  satires,  Ber- 
lin ,  1804  ,  in-8.  Malgré  son  mérite  litté- 
raire, Faick  a  acquis  d'autres  droits  mieux 
fondés  à  la  reconnaissance  publique  ;  en 
1 806  et  en  1 8 1  3  ,  il  rendit  de  grands  ser- 
vices à  la  ville  de  Weimar  et  à  toute  la 
Saxe  :  la  plupart  des  familles^ avaient  été 
ruinées  ou  détruites  dans  l'invasion  des 
Français  :  un  grand  nombre  d'enfans  se 
trouvaient  abandonnés  :  Falck  eut  pitié 
de  leur  sort;  et  il  était  d'autant  plus  por- 
té à  ce  sentiment  de  commisération  qu'il 
venait  lui-même  de  perdre  quatre  enfans 
qui  avaient  fait,  pendant  quelque  temps, 
son  bonheur  et  son  espérance  :  il  vint  au 
secours  de  ces  intéressantes  victimes  de 
la  guerre,  et  se  voua  dès  lors  à  leur  édu- 
cation et  à  leur  entretien  :  ce  fut  dans 
ce  but  qu'il  institua  la  Socic'tt  des  amis 
dans  le  besoin.  Après  les  avoir  élevés, 
il  songea  à  leur  donner  des  étals ,  fonda 
en  conséquence  des  écoles  de  filature,  de 
couture,  de  tricots,  etc.  Ce  bienfaiteur  de 
l'humanité ,  qui  d'abord  en  avait  été'  le 


FAL 

malin  censeur,  mourut  à  TV'eimar  le  14 
février  1826. 

*  FALCKENSTEIN  (Jean-Henri  de), 
écrivain  fécond  et  antiquaire  allemand , 
mort  eu  1760  ,  à  Schwabach  ,  fut  cham-  , 
bellan  du  prince  évoque  d'Eichstctt  de 
1718  à  17  30,  conseiller  aulique  du  Mar- 
grave d'Anspach  de  1730  à  1738  ,  et  ré- 
sident   du    Margrave    d'Erfurt    jusqu'en 

1 740  :  il  était  né  en  1682  en  Silésie.  Il  a 
écrit  en  allemand  un  grand  nombre  d'ou- 
vrages historiques  et  diplomatiques  ;  les 
principaux  sont  \°  Antiquitates  et  memo- 
rabilia  Nordgaviœ  veteris ,  Schwabach, 
1734-43-88,  4  vol.  in-fol.  2"  Chronique 
de  Thuringc,  Erfurt ,  1737-39,  3  vol. 
in-4.  3"  Description  de  Nuremberg ,  Er- 
furt, 17  50,  in-4.  4°  Antiquitates  et  me- 
morabilia  marchiœ  Brandcnburgicœ , 
Bayreuth,  1751  ,  3  vol.  in-4.  5°  Histoire 
du  duché',  ci- devant  royaume  de  Ba- 
vière, Munich,  17  93  ,  3  vol.  in-folio. 

*  FALCO^ER  (Guillaume),  poète 
écossais,  né  à  Edimbourg  vers  17  30, 
s'engagea  fort  jeune  dans  la  marine,  par- 
tit pour  les  Indes  orientales  avec  Je  titre 
de  trésorier  à  bord  de  la  frégate  V Aurore, 
et  périt  en  17C9  dans  un  naufrage  sur  les 
rochers  de  Macao.  On  a  de  lui  1"  un  poè- 
me en  trois  chants,  intitulé  Le  naufrage, 
Londres,  17  62  ,  écrit  avec  beaucoup  de 
chaleur  et  de  poésie  :  il  a  obtenu  plusieurs 
éditions.  Un  premier  naufrage  quel'auleur 
avait  essuyé  dans  une  traversée  d'Alexan- 
drie à  Venise  lui  a  fourni  le  sujet  de  cet 
ouvrage  qui  n'est  pas  sans  mérite.  2°  Un 
poème  sur  la  mort  de  Frédéric,  prince 
de  Galles.  3°  Une  Ode  au  duc  d'York. 
4"  Un  Dictionnaire  de  marine,  in-4  , 
1760,  estimé,  réimprimé  en  1809,  avec 
des  additions  considérables. 

*  FALCOJN'ER  (Thomas) ,  savant  et  lit-  ■ 
térateur  anglais,  naquit  à  Chesler  en  I 
1736,  fit  partie  du  collège  d'Oxford, 

et  a  composé  quelques  ouvrages  parmi 
lesquels  on  remarque  1°  Dévotions  for 
tlœ  sacrament  of  tlie  Lord! s  supper,  etc. 
1786  ,  souvent  réimprimé.  2°  Des  Obser- 
vations sur  le  récit  de  Pline  ,  touchant 
le  temple  d'Ephèse ,  inséré  dans  le  1 1  " 
vol.  de  l'Archéologie.  3°  Des  Tables 
chronologiques  depuis  le  règne  de  Solo- 


â 


FAL 

mon ,  jusqu'à  la  mort  d'Alexandre  le 
Grand j  179C,  in-4  -.  il  a  traduit  aussi  du 
grec,  du  français  et  du  latin  les  ouvrages 
suivans  :  1"  Voyage  d'Hannon,  cclairci 
par  les  relations  des  voyageurs  moder- 
nes ,  1 797,  in-8.  2°  Le  Tocsin  ,  ou  appel 
au  bon  sens,  1798,  in  8.  3°  Foijage 
d'Arricn  autour  de  la  mer  Noire ,  1806, 
in-4.  Trois  Discours  et  une  Dissertation 
géographique  font  partie  de  cet  ouvrage. 
II  avait  préparé  une  nouvelle  édition  de 
Strabon  qui  a  paru  en  1807  ,  latin-grec  , 
par  les  soins  de  son  neveu  ,  2  vol.  in-fol. 

*FALCOi>ER  (William),  médecin  an- 
glais ,  naquit  à  Londres  eu  17  43,  et 
mourut  à  Bath  en  1824.  Il  était  aussi  re- 
marquable par  son  excellent  caractère 
que  par  l'étendue  et  la  variété  de  ses 
connaissances.  Depuis  17CG  jusqu'en 
1805  ,  il  a  écrit  en  anglais  sur  divers  su- 
jets de  médecine  ,  qui  tous  ont  obtenu 
du  succès  et  qui  jouissent  encore  d'une 
réputation  méritée.  On  remarque  surtout: 
Essai  sur  V usage  des  eaux  de  Bath , 
1770,  1775,  1790;  Observations  sur  le 
régime  et  la  diète  recommandés  généra- 
lement aux  personnes  valétudinaires , 
1778,  in-8;  Remarque  sur  V influence 
du  climat,  etc.  ,  1781,  in-4  ;  b" Influence 
des  passions  sur  la  santé  et  les  maladies, 
17  78,  in-8  ;  &° Essai  sur  les  moyens  de  con- 
server  la  santé  des  agriculteurs  ,  1789, 
in-8.  Il  a  aussi  traduit  le  Voyage  d'A- 
rianne  sur  le  Pont  Euxiuy  auquel  il  a 
joint  une  Dissertation  géographique  et 
trois  Discours  préliminaires,  1 805,  in-4. 

FALCOINET  (  Camille) ,  né  à  Lyon  le 
1"  mars  1671 ,  d'une  famille  célèbre  dans 
la  médecine ,  augmenta  la  gloire  de  ses 
ancêtres  par  l'étendue  et  la  variété  de 
son  savoir.  Le  père  Malebranche  qui  le 
connut,  lui  donna  son  estime  et  son  ami- 
tié. L'académie  des  Belles-Lettres  le  mit 
au  nombre  de  ses  membres  en  1 7 1 G  ,  et 
le  perdit  le  8  février  1762.  Il  était  alors 
âgé  de  91  ans,  et  il  avait  du  sa  longue 
vie  autant  à  son  tempérament  qu'à  son 
régime.  Ce  savant  possédait  une  biblio- 
thèque de  45,000  vol.,  de  laquelle  il  avait 
séparé,  dès  1742,  tous  les  ouvrages  qui 
manquaient  à  la  bibliothèque  du  roi. 
Nous  avons  de  cet  auteur  ;  t°  une  tra^ 


FAL  2 I I 

duction  du  nouveau  Système  des  pla- 
nètes, composé  en  latin  par  Villeraot , 
publiée  en  1707  ,  in-12.  2"  Des  éditions 
de  la  pastorale  de  Daphnis  et  Chloéj 
traduite  par  Amyot,  1731,  in-8,  avec 
des  notes.  3°  Du  Cymbalum  mundi ,  par 
Perier,  avec  des  notes,  1732,  in-12.  La 
nature  de  ces  deux  ouvrages  ne  donne 
pas  une  grande  idée  du  choix  et  du  goût 
de  l'éditeur.  4°  Plusieurs  thèses  de  méde- 
cine. Falconct  avait  l'humeur  gaie ,  le 
caractère  prompt ,  l'esprit  vif.  Il  aimait  à 
parler,  et  parlait  fort  bien.  Quiconque 
aimait  les  lettres ,  trouvait  auprès  de  lui 
l'accès  le  plus  facile.  Il  prêtait  ses  livres 
avec  plaisir  ;  mais  il  en  avait  beaucoup 
qui  ne  pouvaient  être  utiles  à  personne. 
Quoiqu'il  n'excellât  pas  dans  la  pratique 
de  la  médecine,  il  connaissait  très  bien 
la  théorie ,  et  brillait  dans  la  consulta- 
tion. 

*  FALCONET  f  Etienne -Maurice  ) , 
sculpteur,  né  à  Paris  en  1  TIG  ,  d'une  fa- 
mille peu  riche  et  originaire  d'Evilles  , 
sur  les  frontières  du  Piémont ,  et  alliée  à 
celle  des  médecins  célèbres  de  ce  nom. 
Après  avoir  travaillé  pendant  quelque 
temps  chez  un  mauvais  sculpteur  ,  il  fut 
accueilli  par  Lemoine ,  et  les  progrès  qu'il 
fit  sous  sa  direction  furent  très  rapides. 
Sa  statue  de  Milon  de  Crotone,  terrassé 
par  le  lion,  qu'il  travailla  longtemps  et 
qui  le  fit  admettre  îi  l'académie  en  1754  , 
est  regardée  comme  une  des  meilleures 
productions  du  ciseau  moderne.  Falconet 
fut  appelé  en  1766  en  Russie,  par  Cathe- 
rine II ,  pour  exécuter  la  statue  équestre 
de  Pierre  le  Grand,  qui  le  retint  12  ans  à 
St.-Pétersbourg,  et  qui  suffirait  seule 
pour  immortaliser  son  auteur.  La  concep- 
tion de  l'artiste  est  grande  ;  il  représente 
ce  grand  prince  franchissant  à  cheval  un 
roc  escarpé  :  un  serpent  écrasé  sous  ses 
pieds  indique  les  obstacles  qu'il  eut  à 
vaincre  pour  commencer  la  civilisation 
de  son  peuple.  Un  rocher  de  granit  qu'on 
trouva  dans  un  marais  à  quelques  milles 
de  St.-Pétersbourg  a  servi  de  base  à  ce 
monument  :  cette  masse ,  longue  de  37 
pieds  sur  22  de  hauteur  et  21  de  lar- 
geur, pesait  près  de  3  millions  de  livres. 
Lorsque  l'on  fondit  la  figure  et  le  cheval , 


ftia  F  AL 

le  métal  manqua  ;  une  deuxième  foute  eut 
lieu  ,  et  Talconet  sut  empêcher  tous  les 
inconvéniensque  l'on  pouvait  craindre  de 
cette  double  opération.  On  ne  sait  à  quoi 
attribuer  la  conduite  de  Catherine,  qui 
n'accorda  pas  la  moindre  récompense  à 
cet  artiste,  lui  donna  seulement  ce  qui 
était  convenu ,  et  le  laissa  partir  sans  lui 
permettre  de  la  voir  :  ce  fut  sans  doute 
une  intrigue  ;  car  le  monument  est  admi- 
rable. En  se  rendant  en  France,  Falconet 
séjourna  quelque  temps  en  Hollande  :  il 
arriva  à  Paris  où  il  est  mort  le  24  janvier 
1791.  Ses  autres  productions  les  plus  re- 
marquables sont  Pygmalion  ,  la  Bai- 
gneuse ,  un  Amour  menaçant ,  produc- 
tions gracieuses ,  qui  furent  moulées  dans 
toute  l'Europe.  Il  exécuta  aussi  des  sujets 
religieux  :  un  Christ  agonisant  ;  une  An- 
nonciation ,  pour  l'église  de  St.-Rocli  : 
lin  Saint-Ambroiss  ,  refusant  l'entrée  de 
la  cathédrale  de  Milan  à  l'empereur  Théo- 
dose, pour  l'église  des  Invalides.  Toutes 
ces  figures,  traitées  dans  l'expression  et 
le  caractère  quijeur  conviennent,  obtin- 
rent tous  les  suffrages.  Falconet  a  public 
des  Réflexions  sur  la  sculpture,  des  obser- 
vations sur  la  statue  de  Marc-Aurèle  ; 
la  traduction  des  34,  35  et  36'  livres  ds 
Pline ,  etc.  Ses  œuvres ,  contenant  plu- 
sieurs écrits  relatifs  aux  arts ,  ont  été  im- 
primées à  Lausanne,  en  1 7  82,  6  vol.  iu-8  ; 
et  ses  œuvres  diverses,  concernant  en- 
core les  arts,  à  Paris  en  17  87  et  1808,  3 
vol.  in-8.  On  reproche  à  cet  auteur  un  ton 
beaucoup  trop  tranchant ,  et  le  défaut  de 
n'avoir  pas  rendu  assez  de  justice  aux  an- 
ciens. La  pauvreté  de  sa  famille  était  pour 
Falconet  un  titre  de  gloire  dont  il  tirait 
vanité.  Dans  le  voyage  qu'il  fit  en  Russie, 
Catherine  lui  donna  le  titre  de  Visoko- 
rodie ,  haute  puissance ,  et  à  cette  occa- 
sion il  disait  :  ce  titre  me  convient  à  mer- 
veille ,  car  je  suis  ne  dans  un  grenier. 

FALCONETTO  (  Jean  -  Marie  ) ,  né  à 
Vérone  en  14.S8 ,  fut  d'abord  peintre  mé- 
diocre ;  mais  son  application  assidue  le 
rendit  excellent  architecte.  Le  cardinal 
Bembo  et  Louis  Cornaro  furent  ses  Mécè- 
nes. Il  fut  le  premier  qui  donna  les  des- 
sins des  théâtres  et  des  amphithéâtres 
des  anciens,  et  introduisit  le  goût  de  la 


FAL 

bonne  architecture  à  Venise.  Il  éleva  plu- 
sieurs édifices  à  Padoue ,  à  Vopo  dan»  le 
Frioul ,  et  à  Venise  ,  qui  sont  la  preuve 
de  ses  talens.  Il  mourut  à  Padoue  en 
1Ô34,  et  fut  enterré  dans  le  caveau  de 
Cornaro. 

FALCONIERI  (  Sainte  Julienne  de) , 
morte  à  Florence  sa  patrie  en  odeur  de 
sainteté,  l'an  1341  ,  donna  en  1307  une 
règle  aux  oblales  ou  converses  des  ser- 
vîtes ,  dont  elle  fut  la  première  supé- 
rieure. Martin  V  l'approuva  en  1424.  La 
pieuse  fondatrice  se  signala  par  les  plus 
grandes  austérités.  Elle  ne  mangeait  point 
le  mercredi  et  le  vendredi.  Benoît  XIII  la 
canonisa  en  1729. 

FALCONIERI  (Ocfavio  ) ,  de  la  même 
famille  que  la  précédehle ,  est  auteur 
d'un  savant  discours  en  italien  sur  la 
pyramide  de  Cn'ius  Sestius ,  qu'on  voit 
près  de  la  porte  d'Oslic  à  Rome.  Nardini 
l'a  inséré  dans  sa  lîoma  antica.  Cet  au- 
teur était  romain.  Il  mourut  en  1C76  ,  à 
l'âge  de  30  ans. 

FALDA  (  Jean-Baptiste  ) ,  graveur  ita- 
lien du  1 8''  siècle,  dont  on  a  des  estampes 
à  l'cau-forte,  d'un  très  bon  goût.  Les  cu- 
rieux recherchent  ses  livres  des  palais , 
des  vignes  et  des  fontaines  de  Rome. 

FALETI  (Jérôme) ,  comte  de  Trigna- 
no ,  natif  de  Sa  voue,  s'appliqua  avec  un 
succès  égal  à  la  poésie  et  aux  affaires. 
Les  ducs  de  Ferrare  lui  confièrent  des 
commissions  importantes.  Les  ouvrages 
sortis  de  sa  plume  sont  1"  un  poème  ita- 
lien ,  en  4  chants,  sur  les  guerres  de 
Flandre.  2°  Douze  livres  de  poésies.  Z" 
Les  Causes  de  la  guerre  d^ Allemagne 
sous  Charles  V ,  italien  ,  1562  ,  in-8.  4* 
Le  Traité  d! Alhénagore  sur  la  Résur- 
rection ,  traduit  en  italien  ,  155G  ,  in-4. 
11  eut  beaucoup  de  part  à  l'immense  re- 
cueil intitulé  Polianlhea.  Cet  auteur  flo- 
rissait  au  16*  siècle. 

FALIERI  (  Ordclafo  ),  doge  de  Venise , 
alla  vers  l'an  1102  au  secours  de  Bau> 
douin,  roi  de  Jérusalem,  avec  une  puis- 
sante flotte.  Après  l'avoir  aidé  à  repren-  fl 
dre  presque  toute  la  Syrie,  il  conquit  la  ^ 
Dalmatie  ,  la  Croatie  et  plusieurs  autres 
provinces.  Il  rentra  en  triomphe  dans  sa 
patrie ,  mais  il  ne  jouit  pas  long-temps 


I 


FAL 

de  sa  gloire.  Zara  en  Dalmatîe  s'étant 
révoltée,  il  mil  le  siège  devant  cette  ville, 
et  y  périt. 

FALIERI  (Marin  ou  Marino  ) ,  doge 
de  Venise  en  1 3.!i4.  Successeur  d'André 
Dandolo,  il  fut  revêtu  de  cette  dignité 
à  l'âge  de  76  ans.  11  forma  le  projet  de 
s'emparer  pour  toujours  du  gouverne- 
ment qui  lui  avait  été  confié  pour  quel- 
ques mois.  Il  fallait  se  défaire  des  séna- 
teurs, et  le  malheureux  avait  pris  des 
mesures  pour  les  faire  tous  assa.ssiner.  La 
conspiration  fut  découverte  par  lui  des 
conjurés.  Le  sénat  veilla  si  attentivement 
sur  les  conspirateurs,  que  16  d'entre  eux 
furent  arrêtés  avec  Falieri  leur  chef.  Il 
eut  la  tète  tranchée,  le  17  avril  1355,  à 
l'âge  de  80  ans  ;  les  autres  furent  pendus , 
et  400  complices  périrent  par  différens 
genres  de  mort.  Lord  Byron  a  composé 
«ne  tragédie  sur  cette  catastrophe. 

FALKEMBERG  (  Jean  de  ) ,  religieux 
dominicain  au  commencement  du  1  &« 
siècle ,  se  mêla  des  querelles  des  cheva- 
liers leufoniques  avec  le  roi  de  Pologne. 
Il  écrivit  contre  ce  prince  un  mauvais 
livre  qui  le  fit  mettre  en  prison  à  Con- 
stance ,  où  se  tenait  alors  le  concile  gé- 
néral. Ce  libelle  est  adressé  à  tous  les 
rois  ,  princes ,  prélats  ,  et  généralement 
à  tous  les  chrétiens.  On  a  vu  depuis  un 
livre  fait  par  un  évêque,  qui  avait  une 
dédicace  toute  semblable ,  et  ne  valait 
pas  mieux  (la  compilation  donnée  sous 
le  nom  de  Fabronius  ).  La  simple  et  mo- 
deste vérité  ne  s'annonce  pas  avec  tant 
d'emphase  ;  et  selon  la  sage  règle  d'Ho- 
race, 

Kon  fumum  ex  fulgore,  scd  ei  fumo  dare  lucem 
Cogitât 

Falkemberg  y  promet  la  vie  étemelle  à 
tous  ceux  qui  se  ligueront  pour  extermi- 
ner les  Polonais  et  Ladislas  leur  roi.  La 
condamnation  du  libelle  fut  résolue  una- 
nimement dans  le  concile.  3Iais  elle  ne 
fut  confirmée  dans  aucune  session  publi- 
que, malgré  les  sollicitations  des  Fran- 
çais ,  qui  s'étaient  joints  aux  Polonais , 
parce  que  les  principes  de  Falkemberg 
étaient  les  mêmes  que  ceux  de  Jean  Petit, 
autre  prédicateur  de  l'homicide. 
FALKLAND  (Lucius  Claby  ,  vicomte 


FAL  21 5 

de  ) ,  secrétaire  d'état  en  Angleterre,  du- 
rant les  convulsions  des  guerres  civiles 
du  règne  de  Charles  I,  naquit  vers  l'an 
1610  à  Brokfort  dans  le  comté  d'Oxford. 
Il  se  livra  dans  sa  jeunesse  à  l'élude  des 
lettres.  Citoyen  éclairé,  vertueux  et  ferme,, 
il  se  montra  d'abord  un  des  plus  ardens  à 
attaquer  les  usurpations  de  la  cour;  mais 
lorsque  la  guerre  civile  éclata  ,  il  défen- 
dit le  pouvoir  qui  restait  à  Charles  I ,  et 
qu'il  jugea  nécessaire  pour  le  soutien  de 
la  liberté  anglaise.  On  croit  que  ce  fut 
lui  qui  composa  ,  avec  le  secours  du  roi, 
presque  tous  les  mémoires  du  parti  mo- 
narchique. Ce  prince  était  si  persuade  de 
sa  supériorité  dans  cette  lutte  littéraire  , 
qu'il  fit  distribuer  les  écrits  du  parlement 
anglais  avec  les  siens ,  pour  mettre  le 
peuple  au  fait  de  la  querelle.  On  assure 
qu'il  s'en  servit  même  dans  ses  dernières 
défenses  contre  les  accusations  des  crom- 
wellistes,  plusieurs  années  après  la  mort 
de  Falkland,  tué  en  1643  à  la  bataille 
de  Newbury,  à  l'âge  de  34  ans.  (Falkland 
a  laissé  diiFérens  écrits  sur  les  questions 
politiques  qui  s'agitèrent  de  son  temps,  et 
l'on  croit  qu'il  a  coopéré  à  l'histoire  du 
protestantisme  de  ClilHngworlh.  ) 

*  FALKNER  (Thomas) ,  missionnaire 
jésuite,  fils  d'un  habile  chirurgien  de 
ftSanchester  en  Angleterre,  étudia  la  chi- 
rurgie sous  son  père ,  et  alla  se  perfec- 
tionner à  Londres.  Il  s'embarqua  ensuite 
pour  la  côte  de  Guinée ,  puis  pour  le  Bré- 
sil. Etant  tombé  malade  à  Buenos-Ayres , 
il  reçut  des  soins  si  affectueux  de  la  part 
des  jésuites  fixés  dans  cette  contrée,  qu'il 
s'attacha  h  eux ,  et  entra  dans  leur  société 
pour  partager  leurs  travaux  apostoliques. 
Son  habileté  dans  la  chirurgie  et  ses  con- 
naissances dans  la  mécanique  furent  très 
utiles  à  la  mission  dans  laquelle  il  fut 
employé  :  40  années  de  sa  vie  furent  con- 
sacrées à  l'exercice  du  ministère  évangé- 
lique  et  à  la  pratique  d»  son  art  dans  le 
Chaco  ,  le  Paraguay  ,  le  Tucuman  et  les 
Pampas.  Après  la  suppression  de  son  or- 
dre ,  il  revint  dans  sa  patrie ,  et  devint 
chapelain  d'un  de  ses  compatriotes  qui 
était  catholique.  Il  s'occupa  alors  d'écrire 
une  Description  de  la  Patagonic  et  des 
pays  voisins  dans  V Amérique  me'ridio- 


2i4  FAL 

nalcy  lîerefort  et  Londres,  1774,  in-4. 
Elle  fut  traduite  en  allemand,  et  abrégée 
en  un  vol.  in-8,  Gotha,  177  5.  Il  y  en  a 
aussi  une  traduction  française  sous  ce 
titre  :  Description  des  terres  Magellani- 
ques  et  des  pays  adjacens ,  traduite  de 
l'anglais  par  M.  D.,  Genève  et  Paris,  1788, 
2  vol.  in-lG.  Ce  livre  ofFre  des  notions 
précieuses  sur  les  contrées  que  l'auteur  a 
décrites,  sur  les  mœurs  des  peuples  qui 
les  habitent,  et  sur  les  productions  de  la 
nature  que  l'on  y  trouve;  mais  on  recon- 
naît qu'il  n'était  pas  très  versé  dans  l'his- 
toire naturelle.  Les  Palagons  qu'il  a  vus 
sont  grands  et  bien  faits  ;  ils  lui  ont  paru 
avoir  sept  pieds  et  quelques  pouces  ; 
mais  il  n'a  point  entendu  parler  de  la  race 
gigantesque  citée  par  plusieurs  voya- 
geurs. Le  Père  Falkner  mourut  en  1780. 

*  FALLET  (  Nicolas  ) ,  poète  français, 
ne  à  Langres  en  1753  ,  mort  à  Paris  le  22 
décembre  1801  ,  a  publié  des  pièces  de 
thc'âtre  et  autres  poésies  aujourd'hui  ou- 
bliées. Sa  tragédie  de  Tibère  et  Sérénus, 
quoique  fort  médiocre,  obtint  cependant 
quelques  représentations,  et  fut  impri- 
mée en  1702  et  1783.  Il  a  travaillé  à  la 
Gazette  de  France,  au  Journal  de  Paris , 
et  coopéré  au  Dictionnaire  historique  et 
critique  des  mœurs  ,  lois  ,  usages  et  cou- 
tumes civiles ,  17  72  ,  4  vol.  in-8. 

'FALLETTI  (Octave-Alexandre),  mar- 
quis de  Bârolo,  né  à  Turin  en  17  53,  mort 
dans  la  même  ville  le  30  janvier  1828  , 
embrassa  d'abord  la  carrière  des  armes , 
et  se  consacra  ensuite  à  des  études  lit- 
téraires qui  ne  furent  interrompues  qu'au 
jnoment  où  son  pays  fut  menacé  de  l'in- 
vasion des  Français  ,  époque  où  il  reprit 
les  armes.  Sa  vie  fut  dès  lors  entièrement 
indépendante  ;  les  devoirs  d'homme  de 
cour  lui  enlevèrent  toutefois  quelques 
momens  précieux.  L'éducation  de  son  hls 
l'occupa  sérieusement,  et  ce  fut  avec  lui 
qu'il  visita  l'Allemagne,  la  Hollande,  la 
Suisse  et  la  Russie.  Ses  principales  pro- 
ductions sont  un  Eloge  de  S  t. -Real ,  des 
Mémoires  sur  des  sujets  de  critique  lit- 
téraire ,  de  philosophie  morale  et  de  mé- 
taphysique, présentés  à  l'académie  de 
Turin  dont  il  était  membre  ,  des  épîtres 
(critiques)  sur  les  OEuvres  posthumes 


FAL 

d'Al/leri,  et  une  espèce  de  roman  des- 
criptif sous  le  titre  de  Voyage  de  Théo 
dore  Callimncchi  en  Italie. 

FALLOPE  ou  Fali-opio  (  Gabriel  ) , 
médecin  italien,  était  profondément  versé 
dans  la  botanique,  l'astronomie,  la  phi- 
losophie ,  et  surtout  dans  l'anatomie.  Il 
naquit  à  Modèue  en  1  523  ,  et  mourut  à 
Padoue  en  15C2,  à  39  ans,  suivant  le 
Père  Nicéron  ;  mais  M.  Eloy  place  sa  nais- 
sance en  1490  ,et  le  fait  mourir  à  7  3  ans  : 
CCS  dernières  dates  paraissentmoinssûres. 
Quoi  qu'il  en  soit,  cemédccin  parcourut 
une  partie  de  l'Europe  pour  se  perfec- 
tionner dans  son  art.  Il  était  méthodique 
dans  ses  leçons,  prompt  dans  ses  dissec- 
tions ,  et  heureux  dans  ses  cures.  Quoi- 
qu'il passe  pour  avoir  découvert  cette 
partie  de  la  matrice  qu'on  nomme  la 
trompe  de  Fallope  ,  il  faut  avouer  qu'elle 
n'était  pas  entièrement  inconnue  aux  an-, 
ciens.  Il  s'est  attribué  quelques  autres  dé- 
couvertes qu'on  lui  a  contestées.  Ses  nom- 
breux ouvrages  out  été  recueillis  en  4 
vol.  in-fol.  ,  à  Venise  en  1584  et  1C06  : 
c'est  la  meilleure  édition.  (  On  peut  voir 
la  liste  de  ses  différentes  productions  dans 
les  Mémoires  de  Nicéron,  tomes  4  et  1 0, 
dans  les  éloges  de  Tamasini  et  surtout 
dans  la  Bibliothèque  des  Ecrivains  moder- 
nes par  Tiraboschi.  ) 

FALLOURS  (  Samuel  ) ,  peintre  hol- 
landais ,  qui  a  peint  les  Curiosités  natu- 
relles ,  poissons ,  écrevisses ,  crabes  qui 
se  trouvent  sur  les  côtes  des  îles  Molu- 
ques ,  et  les  a  fait  imprimer  à  Amsterdam , 
1718,  2  tomes  en  1  vol.  in-folio,  43  plan- 
ches dans  le  premier,  57  dans  le  second. 
Ce  livre  est  rare  ;  mais  il  ne  faut  se  fier , 
ni  à  la  vérité  des  enluminures ,  nia  celle 
des  figures. 

FALS  (  Raimond  ) ,  né  à  Stockholm  en 
1658  ,  passa  à  Paris  en  1C83,  et  s'attacha 
à  Cliéron,  médailleur  du  roi.  Les  mé- 
dailles sorties  de  ses  mains  lui  méritèrent 
une  pension  de  1,200  livrés.  Cet  habile 
artiste  mourut  à  Berlin  en  1703. 

*  FÂLSTER  (Christian  ),  fameux  cri- 
tique danois  j  est  connu  dans  le  monde 
savant  par  plusieurs  ouvrages  d'érudilionj 
dont  les  principaux  sont  1°  Supplemen- 
tum  linguœ  latinte  ,¥lens,bomg  ,  1717;] 


PAN 

5"  Animadverseris  Epistolœ ,  ibid.  ;  3° 
Quœstinnes  romance,  ibid.,  1718;  4° 
Cogitationes  philologie  ce ,  Leipsick,  1719, 
in -8  ;  6°  Sermo  Panegyricus  de  varia- 
rum  gentium  bibliothccus ,  1 720  ,  in-8  ; 
6°  f^igilia  prima  noclium  ripensium , 
conlenant  des  observations  sur  Aulu- 
gèle,  Copenhague,  1721,  in-8;  '°  Amœ- 
nitates  philohgiœ,  Amsterdam,  1729  32, 
3  vol.  in-8;  une  traduction  danoise  de 
la  14*  Satire  de  Juve'iial,  Copenhague, 
1731  ,  in-4. 

*  FANGE  (  Augustin  ) ,  bénédictin  de' 
la  congrégation  de  St. -Vannes,  naquit  à 
Halton-Chàtcl  près  de  Verdun  ;  après 
avoir  fait  ses  vœux  à  l'abbaye  de  Munster 
en  Alsace  le  21  juin  1728,  il  professa 
avec  distinction  les  humanités ,  la  philo- 
sophie et  la  théologie  dans  sa  congré- 
gation. En  173G  il  fut  nommé  coadjuteur 
du  monastère  de  Senones  en  Lorraine , 
et  il  en  devint  abbé  en  1765,  après  la 
mort  de  dom  Calmet  son  oncle  ,  qui  était 
titulaire  de  cette  abbaye.  On  ne  connaît 
pas  l'époque  précise  de  sa  mort.  Parmi 
ses  principaux  ouvrages  on  remarque  1° 
un  Traité  en  latin  des  Sacremeiis  en 
général  et  en  particulier ,  ouvrage  pro- 
fond et  estimé  ;  2°  Iter  helveticum  ou 
Relation  d'un  voyage  qu'il  avait  fait  en 
Suisse  en  1748  ;  3°  le  second  volume  de 
la  ISolice  de  Lorraine;  4°  Fie  de  dom 
Calmet,  1763 ,  in-8.  On  lui  attribue: 
Mémoires  pour  servir  à  Fhistoire  de  la 
barbe  de  V homme  ,  Liège,  1776,  in-8. 
Dom  Fange  a  achevé  V  Histoire  univer- 
selle commencée  par  dom  Calmet,  mis 
en  ordre  ses  œuvres  posthumes ,  et  pu- 
blié ses  ouvrages  en  1762. 

FANNIUS  (  Caïus  ) ,  surnommé  Stra- 
bon  ,  consul  romain  avec  Valérius  Mes- 
sala  ,  l'an  161  avant  J.  C.  Ce  lut  sous  son 
consulat  que  fut  publiée  la  loi  Fannia 
contre  la  somptuosité  de  la  table.  Cette 
loi  fixait  les  sommes  qu'on  pouvait  dé- 
penser pour  le  repas.  On  fut  obligé  de  la 
renouveler  20  ans  après.  Le  luxé  faisait 
tous  les  jours  de  nouveaux  ravages  ,  et  ce 
luxe  était  une  suite  de  la  trop  grande  puis- 
sance des  Romains  ;  Scipion  le  reconnais- 
sait lui-même  et  s'en  plaignait.  Fannius 
réforma  la  formule  de  la  prière  qu'il  était 


FAN  2!5 

d^usage  de  prononcer  à  la  clôture  du 
lustre,  par  laquelle  on  dcfnandait  aux 
dieux  qu'ils  augmentassent  la  puis- 
sance de  la  république  :  il  en  substitua 
une  autre ,  par  laquelle  on  les  priait  de 
vouloir  bien  la  maintenir  toujours  dans 
le  même  état. 

FANNIUS  (Caïus)  ,  auteur  latin  sous 
Trajan  ,  composa  une  Histoire  ,  en  3  li- 
vres ,  des  cruautés  de  Néron ,  et  des  der- 
nières heures  de  ceux  que  ce  monstre 
faisait  exécuter  à  mort ,  ou  envoyait  en 
exil  (  Exitus  occisorum  aut  relegato- 
rum  a  JVerone).  Les  savans,  et  surtout  les 
philosophes,  ne  sauraient  trop  regretter 
la  perle  de  cet  ouvrage  intéressant. 

FANNIUS  CÉPION  ,  complice  d'une 
conjuration  contre  Auguste  ,  qui  fut  dé- 
couverte, se  donna  lui-même  la  mort. 

Ilostem  rum  fuppret,  se  Fanniu»  îp«e  peremil; 
Die,  rogo,  uoii  furor  est,  ne  nioriareniori? 

MlSTItL.  ,lib>  ic. 

Epigramme  qui  dans  le  fond  n'est  qu'un 
jeu  de  mots ,  comme  presque  toutes  celles 
de  Martial.  Quelqueblàmable  que  fut  Fan- 
nius, il  y  avait  certainement  moins  de 
fureur  dans  son  suicide  que  dans  celui 
de  Caton  d'Utique.  Il  cherchait  à  éviter 
une  mort  ignominieuse  et  terrible. 

FANNlÛS  (  Quadratus  ) ,  poète  latin, 
Ses  ouvrages,  quoique  ridicules,  furent 
placés  avecsonportraitdansla  bibliothè- 
que publique  qu'Auguste  avait  fait  con- 
struire dans  le  temple  d'Apollon.  Horace, 
son  contemporain  ,  lui  donne  le  nom  de 
parasite ,  et  le  raille  cruellement. 

FANSHAW  (  Richard  ) ,  anglais,  en- 
voyé des  rois  Charles  1  et  Charles  II  à  la 
cour  d'Espagne  et  à  celle  de  Portugal, 
mourut  à  Madrid  en  1666.  Il  se  distingua 
dans  ses  ambassades,  ainsi  que  sur  1er 
Parnasse.  On  a  de  lui  quelques  ouvrages 
en  vers  et  en  prose,  Londres,  1646  ,  in-4  , 
qu'on  a  lus  autrefois;  (la  traduction  en 
vers  anglais  du  Pastor  fido  ,  de  la  Lu- 
siade  et  des  comédies  espagnoles^  Oïk, 
a  publié  sur  son  ambassade  des  lettres: 
originales  précédées  de  sa  vie,  Londres  ^ 
1702,  in-8.) 

♦  FANTIN-DÉSODOARTS  (  An, 
toine-Etienne-Nicolas  ) ,  né  à  Poqt-rde-t 
Beauvoisin  dans  le  Dauphiné  le  30  décent 


2i6  FAN 

bre  1738 ,  entra  chez  les  jésuites  qui  fu- 
rent supprimés  avant  qu'il  eût  pu  pro- 
noncer ses  vœux.  En  1789  il  élait.prôtrc, 
et  avait  le  titre  de  vicaire-général  d'Em- 
brun ;  mais  il  ne  paraît  pas  qu'il  en  ait 
jamais  exercé  les  l'onctions ,  il  est  proba- 
ble qu'il  s'est  livré  cxclusivcmcntà  ses  tra- 
vaux littéraires.  Il  s'était  rendu  à  Paris 
quelques  années  avant  la  révolution  ,  et 
lorsque  ce  grand  événement  fut  accompli^ 
il  y  devint  un  des  écrivains  les-  plus  la- 
borieux du  parti  révolutionnaire.  Arrêté 
après  le  10  août  comme  prêtre,  il  se  ma- 
ria, entra  dans  les  sections,  et  se  lia  par- 
ticulièrement avec  Robespierre ,  Collot- 
d'Herbois,  Marat  et  Chaumelle  ,  qu'il  ac- 
compagnait quelquefois  au  club  des  Ja- 
cobins. Non  content  de  les  fréquenter, 
il  proclama  et  répandit  leurs  princi- 
pes dans  les  journaux  du  temps.  Après 
la  révolution,  il  ne  fit  parler  de  lui  que 
par  ses  nombreux  ouvrages  :  il  était  mem- 
bre de  l'Institut.  Il  mourut  à  Paris  le 
25  septembre  1820.  Ses  principales  pro- 
ductions sont  :  1°  Dictionnaire  raison- 
né du  gouvernement ,  des  lois  ,  des  usa- 
ges et  de  la  discipline  de  V Eglise  ,  con- 
ciliccs  avec  les  liber te's  et  franchises  de 
l'e'glise  gallicane ,  lois  du  royaume  et  ju- 
risprudence des  tribunaux  de  France , 
1788  ,  6  vol.  in-8.  2"  Nouvel  abrégé  chro- 
nologique de  l'histoire  de  France,  depuis 
Clovis  jusqu'à  la  mort  de  Louis  XIF , 
par  le  président  Ilénault,  continué  depuis 
la  mort  de  Louis  XIV  jusqu'à  la  paix 
de  17  83,  17  88-89,  3vol.  in-8;  augmen- 
tée en  1801  d'une  4«  et  d'une  5«  parties, 
oîi  se,  trouve  V Histoire  de  la  révolution  ; 
réimprimée  en  1807  ,  en  2  vol.  in-8  ,  et 
en  1820  in-4,  avec  une  nouvelle  conti- 
nuation jusqu'à  la  rentrée  de  Louis 
XFIII  en  France.  Cet  ouvrage  porte 
quelquefois  le  titre  à' Histoire  de  France 
depuis  la  mort  de  Louis  XIV.  L'auteur 
y  affichait  déjà  l'admiration  la  plus  dépla- 
cée pour  la  philosophie  moderne.  3°  His- 
toire, philosophique  de  la  révolution , 
6*  édition ,  1807  ,  10  vol.  in-8.  C'est  celui 
de  ses  ouvrages  qui  a  obtenu  le  plus  de 
succès  ,  et  cependant  il  est  rempli  d'er- 
reurs et  de  faux  principes.  On  n'y  remar- 
que ni  plan ,  ni  ensemble ,  ni  méthode  : 


FAN 

ce  sont  des  redites  continuelles,  det  di- 
gressions longues  et  sans  objet ,  des  ré- 
flexions doiuiécs  sans  justesse  comme  sans 
ordre.  Ennemi  de  la  noblesse  et  duclergé, 
il  parle  de  l'une  avec  mépris,  de  l'autre 
avec  haine  :  rien  n'est  plus  mauvais  que 
son  récit  du  procès  de  Louis  XVI  ;  c'est 
un  tableau  entièrement  faux.  M.  Beaulieu, 
auteur  des  Essais  historiques  sur  les 
causes  et  les  effets  de  la  révolulion  de 
France,  a  relevé  entre  autres  ce  para- 
graphe étrange  sur  la  démarche  que  fit 
le  roi  le  16  juillet  1789  :  <t  Louis  X.VI  (  dit 
«  M.  Fantin  )  parut  comme  uu  criminel 
»  devant  ses  juges  ;  il  rejeta  sur  l'impos- 
«  ture  de  ses  ministres  les  fausses  dé- 
»  marches  auxquelles  il  s'était  livré.  Il  dc- 
»  clara  que  les  ordres  étaient  expédiés 
»  pour  l'éloignement  des  troupes  de  Paris 
»  et  de  \ersai!les  ;  qu'il  rappelait  Necker 
«  et  les  autres  ministres  disgraciés,  et  que 
»  désormais  il  ne  prendrait  d'autre  con- 
»  seil  que  ceux  des  représentans  de  la  na- 
»  tion.  Le  président  assis  (M.  l'archevêque 
»  de  Vienne  )  lui  répondit  :  Un  roi  est 
»  coupable ,  quand ,  sous  les  yeux  de 
M  l'Assemblée,  il  écoute  desconseils  étran- 
j)  gers.  Lally-Tolcndal ,  député  de  Paris, 
»  ajouta  :  Un  roi  qui  avoue  sa  faiblesse 
»  et  l'insuffisance  de  ses  moyens ,  mérite 
»  la  clémence  d'une  nation  généreuse.  Il 
»  est  bon  que  les  princes  sachent ,  reprit 
3)  le  président,  en  couvrant  l?i  voix  de 
)>  Lally-Tolendal ,  qu'on  ne  règne  pas 
»  long-temps  avec  sécurité ,  quand  l'in- 
»  triguc,  la  cabale  et  l'astuce,  devenues 
))  ld»mobiles  du  gouvernement ,  sontéri-' 
»  géesen  règle  de  la  conduite  dumonar- 
»  que.  Cette  proposition  fut  justifiée  dans 
«  la  suite.  «  On  voit  qinî  dans  tout  ce 
grossier  galimathias ,  ajoute  M.  Beaulieu , 
il  n'y  a  pas  un  seul  mot,  à  l'exception  de 
l'annonce  de  l'ordre  donné  par  le  roi  pour 
l'éloignement  des  troupes,  qui  ne  renfer- 
me un  iraperlinent  mensonge.  Le  stile 
est  digne  de  l'esprit  qui  y  règne  :  il  est 
tantôt  plat  et  trivial,  tantôt  boursouflé 
jusqu'au  ridicule  ;  enfin  cette  compila- 
tion, dénuée  partout  de  vérité  comme  de 
goût ,  est  tombée  dans  l'oubli  profond 
qu'elle  méritait.  4"  lîévoluiions de  t Ind^ 
pendant  le  1 8"  siècle ,  ou  Mémoires  dt 


■ 


FAN 

Tipoo-Saïb  écrits  par  lui-même ,  et  tra- 
duits de  la  langue  indostane  ,  1 7  9C ,  2 
vol.  in-8  ,  1797,  4  vol.  iu-8.  6°  Louis  XF 
et  Louis  Xrï,  1798  ,  5  vol.  in-8.  6°  His- 
toire d^ Italie  depuis  la  chute  de  la  répu- 
blique romaine  jusqu*aux  premières  an- 
nées du  19e  siècle,  1802  ;  9  vol.  iu-8. 
7°  De  r  institution  des  sociétés  politiques^ 
oû  Théorie  des  gouvernemens ,  1807, 
in-8.  8"  Les  monumens  inédits  de  l'anti- 
quité, expliqués  par  IFinckelmann , 
1808-1809,  3  vol.  iu-4.  ^"Histoire  de 
France  depuis  la  naissance  de  Henri  IF 
jusqu'à  la  moit  de  Louis  XVI,  180G- 
1810,  26  vol.  in-12.  Il  s'est  fait  ainsi  le 
continuateur  de  Velly ,  Villaiet  et  Gai- 
iiier.  Cette  histoire  méritait  un  meilleur 
écrivain.  Il  fut  avec  31crcier*t  Carra  un 
des  premiers  rédacteurs  des  Annales  pa- 
triotiques ,  et  a  laissé  en  oatr<î  un  grand 
nombre  de  manuscrits. 

*  FANTONI  (  Jean  }  ,  célèbre  méde- 
cin et  anatomistc ,  né  à  Turin  en  1675, 
mort  le  1 5  juin  1 758  ,  professa  l'anatomie 
à  l'université  de  cette  ville  pendant  une 
longue  suite  d'années  et  avec  un  brillant 
succès.  Ses  démonstrations  étaient  suivies 
par  un  grand  nombre  d'auditeurs  qui  ne 
pouvaient  assez  admirer  sa  profonde  éru- 
dition, l'importance  des  faits  nouveaux 
qu'il  leur  présentait  continuellement,  son 
éloquence  naturelle  et  cette  latinité  ex- 
quise qu'on  remarque  dans  tous  ses  ou- 
vrages. Les  principaux  sont  1"  Urevis 
manuductio  ad  historiam  anatoniicam  , 
Turin,  1G99,  petit  in-4.  2°  Diîsertatioiies 
anatomicœ XI, ihid.,  1701,  in-12.  Z"Âna- 
tomia  corporis  humani,  1711,  in-4. 
4°  Opuscula  medica  et  physiologica , 
1738  ,  in-4.  5"  Commentarius  de  quibus- 
dani  aquis  medicatis ,  et  historié  a  dis- 
sertât io  de  fcbribus  continuis,  1747,  in-8. 

•  FANTUCCI  (  le  comte  Marc) ,  litté- 
rateur italien,  né  en  1 7  45  à Uavenne,  d'une 
famille  très  noble,  entra  d'abord  dans  la 
magistrature  dans  l'intention  de  se  rendre 
utile  à  ses  concitoyens;  mais  quelques  dés- 
agrémens  qu'il  éprouva  l'engagèrent  à 
y  renoncer.  Il  continua  néanmoins  à  ser- 
vir son  pays ,  qui  lui  fut  redevable ,  en 
1784,  d'une  machine  hydraulique  très 
avantageuse  pour  le  territoire  de  Ravenne. 


FAR 


21' 


tJne  épidémie  étant  venue  en  1780  rava- 
ger cette  province ,  il  s'occupa  des 
moyens  d'y  remédier  pour  l'avenir,  et  pu- 
blia à  ce  sujet  un  excellent  mémoire  dans 
lequel  il  démontra  combien  il  était  urgent 
de  dessécher  les  marais  des  vallées  méri- 
dionales de  cette  contrée.  En  uh  mot 
toute  la  vie  de  Fantucci  a  été  Consacrée 
à  de  nobles  efforts  pour  rendre  à  Ravenne 
l'ancien  éclat  dont  elle  avait  brillé.  I.e 
comte  Fantucci  est  mort  dans  cette  ville  le 
1 0  janvier  1 806.  Pie  VI  avait  pour  lui  une 
prédilection  toute  particulière,  et  il  eu 
étaii  digne  par  ses  vertus  ,  qu'il  portait 
jusqu'à  l'austérité ,  et  par  son  dévoue- 
ment pour,  l'utilité  publique  et  pour  l;i 
gloire  de  sa  patrie.  On  lui  doit  X"  De'  Mo- 
numenti  Ravennati,  G  tomes  in-4.  2" De^ 
Gente  Honcstia  ,  in-fol.  3''  Memorie  di 
vario  argomento  del  conte  Fantucci, 
in-4.  On  est  redevable  à  ses  soins  de  I;» 
magnifique  édition  romaine  des  Papiri 
diplomatici  Raccolti  ed  illustrati  dalU- 
abate  Gaetano  Marini ,  dont  plusieurs 
appartiennent  à  Ravenne. 

*  FANTUZZI  (  Jean  ) ,  noble  Bolo- 
nais et  dernier  rejeton  d'une  famille  illus- 
tre de  ce  nom,  qui  a  fourni  un  grand 
nombre  de  personnages  distingués  dans 
la  carrière  des  lois  et  dans  celle  des  let- 
tres, naquit  en  1742  ,  et  mourut  à  Bolo- 
gne en  1801  ,  avec  le  ^rade  de  colonel. 
Il  avait  servi  pendant  plusieurs  années 
dans  les  gardes  du  corps  du  roi  d'Espa- 
gne. Il  a  laissé  un  ouvrage  important  in- 
titulé Nolizie  degli  scrittori  Bolognesi  , 
Bologne,  1781-94,  9  vol.  in-fol.  Cet  ou- 
vrage est  précieux  par  l'exactitude  et  la 
bonne  critique  qui  y  régnent.  Il  est  d'ail- 
leurs écrit  d'un  stile  élégant  et  correct. 
On  aurait  désiré  que  l'auteur  en  eût  sup- 
primé des  détails  superflus  ;  mais  ils  sont 
vrais  et  puisés  dans  des  sources  authen- 
tiques. 11  était  né  en  1742  et  mourut  en 
1801. 

*  FARCOT  (  Joseph -Jean- Chryso- 
slôme  ),  ancien  dirqgteur  de  la  statistique 
de  la  Seine,  naquit  à  Senlis  le  8  avril 
1744,  et  entra  d'abord  chez  les  oratoriens 
oii  il  fut  successivement  professeur  de 
philosophie,  de  physique  expérimentale 
et  de  mathéraatiqTies.  En  1 7  79  il  fut  forcé 

14.. 


2i8  FAR 

pour  des  affuires  de  fumillc  de  quitter 
cette  congrégation  et  se  livra  au  com- 
merce ;  il  transporta  son  établissement  à 
Paris,  s'occupa  avec  zèle  de  ses  intérêts 
jusqu'en  17  93  ,  oii  ses  magasins  furent 
saisis  et  lui-même  jeté  en  prison.  Après 
onze  mois  de  captivité,  il  fut  appelé  par 
le  gouvernement  aux  discussions  qui 
avaient  lieu  à  l'hôtel  de  Conti  pour  la 
restauration  du  commerce  et  des  arts. 
Nommé  membre  du  Directoire  du  dépar- 
lement de  la  Seine ,  il  fut  chargé  du  ré- 
tablissement des  édifices  destinés  au  culte 
catholique,  et  il  parvint  à  faire  obtenir 
1 5  églises.  Après  avoir  fait  partie  de  la 
commission  chargée  de  dresser  le  tableau 
de  dépréciation  des  assignats  ,  il  fut 
.successivement  depuis  celte  époque  , 
membre  du  conseil  des  arts ,  de  celui  de 
l'instruction  publique ,  et  directeur  de 
la  statistique.  Il  a  fait  à  ce  sujet  plusieurs 
ouvrages  1°  Questions  constitutionnelles 
sur  le  commerce  et  l'industrie ,  et  projet 
d'un  impôt  indirect ,  Paris ,  17  90,  in-8  ; 
2°  Discussions  relatives  à  l'influence  du 
gouvernement  sur  les  arts  et  le  com- 
merce ,  Paris  ,  1 808  ,  in-4  ;  3°  Mémoires 
sur  les  moyens  d'encourager  les  décou- 
vertes utiles ,  Paris,  1819  ,  ouvrage  post- 
hume publié  par  son  fils  M.  J.  Farcot. 
On  a  encore  de  lui  plusieurs  Mémoires 
et  Rapports  sur  les  arts ,  l'agriculture  et 
le  commerce ,  qui  n'ont  pas  été  impri- 
més. Il  est  mort  le  23  août  1815,  à  l'âge 
de  7 1  ans. 

FARUELLA  (  Michel-Ange  ) ,  né  à 
Trapani  en  Sicile  l'an  1 G50  ,  d'abord  fran- 
ciscain ,  ensuite  prêtre  séculier ,  devint 
professeur  d'astronomie  et  de  physique 
dans  l'université  de  Padoue  ,  et  mourut 
à  Naples  en  17 1 8  à  68  ans.  On  a  de  lui  des 
ouvrages  peu  connus  en  France  ,  sur  les 
sciences  auxquelles  il  s'était  consacré. 
C'était  un  homme  d'un  esprit  vif  et  d'une 
imagination  féconde  ,  mais  très  distrait. 
Quoiqu'il  eut  des  appointemens  considé- 
rables, sa  générosit^nvers  ses  amis,  et 
son  caractère  indolent  ne  lui  permirent 
jamais  d'être  riche. 

FARE  (  Sainte),  vierge,  d'une  famille 
noble  de  Bric ,  sœur  de  saint  Faron  ,  évê- 
que  de  Meaux ,  et  de  Changulsc  ,  évêque 


FAR  ? 

de  Laon,  bâtit  le  monastère  de  Faremous- 
lier,  eu  fut  abbesse,  et  mourut  vers  G  55, 
après  une  vie  de  près  de  60  ans,  rem- 
plie par  la  vertu  et  la  mortification. 

FARE.  F'oyez  La  Fark. 

FAREL  (  Guillaume  ) ,  né  à  Gap  eu 
14S9,  vint  de  bonne  heure  à  Paris,  ré- 
genta quelque  tempâ  au  collège  du  car- 
dinal Le  Moine.  Jacques  Le  Fêyre  d'Eta- 
ples,  sou  ami,  lui  inspira  les  nouvelles 
erreurs  que  Luther  répandait  en  Allema- 
gne ,  et  Zuingle  en  Suisse.  Farci  fut  mi- 
nistre à  Genève  avant  Calvin ,  et  y  prê- 
cha la  réforme.  Chassé  de  celte  ville  en 
1 538 ,  il  se  retira  à  Bâle  ,  puis  à  Neuchâ- 
tel ,  où  il  mourut  en  1565.  Ce  novateur 
se  maria  à  l'âge  de  69  ans.  Son  savoir  , 
qui  était  mcSiocre,  fut  terni  par  son  opi- 
niâtreté ,  et  par  son  penchant  pour  toutes 
sortes  d'opinions.  On  a  de  lui  :  \°  Le 
Glaive  de  l'esprit,  ouvrage  qui,  malgré 
la  singularité  de  son  titre  (  qui  dans  le 
fond  n'est  que  la  traduction  du  Gladium 
spiritus  de  saint  Paul  ) ,  offre  de  bonnes 
choses  contre  les  libertins.  2°  De  la  sainte 
Cène  diuSeigneur.  3"  Des  thèses".  Ce  mi- 
nistre fut  accusé  ,  par  ceux  de  son  parti, 
de  renouveler  les  erreurs  de  Paul  de  Sa- 
mosate  ;  mais  iin  synode  de  Lausanne  le 
lava  de  cette  imputation. 

FARET  (  Nicolas  ) ,  né  vers  l'an  1600 
à  Bourg  en  Bresse,  fut  un  des  premiers 
membres  de  l'académie  française ,  et  ré- 
digea les  statuts  de  cette  compagnie  nais- 
sante. Il  fut  secrétaire  du  comte  d'Har- 
court ,  ami  de  Vaugeias  ,  de  Boisrobert, 
de  Coëffeteau  ,  de  Saint-Amand.  Il  mou»- 
rut  à  Paris,  en  16é6.  On  a  de  lui  de  mau- 
vaise prose  et  déplus  mauvais  vers;  l'His- 
toire chronologique  des  Ottomans  ;  l'His- 
toire d'Europe  ,  traduite  en  français  ; 
l'Honnête  Homme ,  tiré  de  l'italien  de 
Castiglione,  in-12  ;  des  lettres  qui  n'ap- 
prennent rien;  àe% poésies  plates,  etc. 
C'est  aux  vers  suivans  de  Boileau ,  qu'il 
doit  sa  célébrité  : 

Ain(.i  tel  aulrrfoii  qu'on  tU  avec  Farci , 
diarbnniierde  «c(  vers  le»  murs  d'un  cabaret 


FARGIS  (  Charles  d'Angennes  du  ) , 
fut  conseiller  d'état  sous  Louis  XIII ,  et 
son  ambassadeur  en  Espagne.  Il  fut  dé- 
jnculi  sur  le  traité  de  Monçon,  qu'il  avait 


FAR 

conclu  en  1626,  pour  n'avoir  pas  suivi 
les  instructions  du  Père  Joseph  ,  et  il  fut 
obligé  de  faire  réformer  ce  traité  sur  les 
nouvelles    instructions  qu'il    reçut.    Sa 
femme,  Madeleine  de  Silly,  comtesse  de 
la  Rochepot,   dame  d'atours  de  la  reine 
Anne  d'Autriche,  entra  dans  quelques  in- 
trigues contre  le  cardinal  de  Richelieu  , 
qui  la  contraignit  de  sortir  de  France. 
Elle  mourut  à  Louvain ,  au  mois  de  sep- 
tembre 1639.  On  trouve  dans  le  Journal 
du  cardinal  de  Richelieu  ,  et  dans  sa  Yie 
par  Le  Clerc  ,17  53,  5  vol.  in-1 2  ,  des  let- 
tres en  chiffres  de  M"®  du  Fargis ,   qui 
furent  interceptées,  et  qui  la  firent  con- 
damner à  être  décapitée  par  arrêt  de  la 
chambre  de  justice  de  l'Arsenal,  en  1631 . 
Elle  eut  un  fils    tué  au  siège  d'Arras  en 
1640,  sans  avoir  été  mariée  ;  et  une  fille , 
religieuse  à  Port-Royal,  morte  en  1691. 
*  FARIA  (  Manoel-Sévérin  de  )  ,  por- 
tugais,  écrivain,   l'un   des  plus  savans 
numismates  de  son  temps ,  naquit  à  Lis- 
bonne en  1681,  ou  82.  Après  avoir  fait 
ses  cours  de  philosophie  et  de  théologie, 
et  avoir  été  reçu  docteur  dans  ces  deux 
facultés  ,  il  fut  chantre  et  chanoine  de  la 
cathédrale  d'Evora  ,  et  mourut  dans  cette 
ville  le  16  décembre  1655.  Il  se  livra  avec 
ardeur  à  l'étude  des  écritures,  delà  théo- 
logie mystique,  de  l'histoire,  de  la  politi- 
que ,  de  la  géographie,  et  des  antiquités 
romaines  et  portugaises  :  il  employa  les 
revenus   de  ses  bénéfices  à  former  des 
collections  précieuses  de  manuscrits  an- 
ciens, de  médailles,  de  monnaies  etd'an- 
tiquitésde  tout  genre.  Il  est  connu  parles 
ouvrages  suivans  :    1°  Noticias  do  Por- 
tugal ,  2  vol.  ;  2°  F'arios  diseur sos  po- 
liticos ,  Lisbonne,  1624,  1vol.  Ces  deux 
ouvrages  ont  été  réimprimés  à  Lisbonne 
en  1624  et  1791.  Dians  le  premier  de  ces 
ouvrages  ,  il  traite  de  l'origine  des  litres 
et  des  armoiries  des  l'amilles  nobles  du 
Portugal ,  des  monnaies  anciennes  ,  soit 
portugaises,  soit  gothiques,  arabes  et  ro- 
maines ,  et  il  en  donne  des  empreintes. 
Après  avoir  parlé  des  différentes  univer- 
sités d'Espagne,  de  la  navigation  des  Por- 
tugais aux  Indes  orientales,  il  termine  le 
second  volume  par  les  vies  de  vingt  car- 
dinaux de  sa  nation.  Le  troisième  volume 


FAR  a^g 

est  consacré  à  la  vie  de  quelques  Portu- 
gais illustres ,  comme  celles  de  l'histo- 
rien Couto,  du  poète  Camoëns,  etc.  Ces 
deux  ouvrages  se  font  remarquer  par  une 
élégance  et  une  pureté  de  stile  qui  rap- 
pellent le  beau  siècle  de  la  littérature 
espagnole. 

FARIA  DE  SOUSA  (  Manoel  ) . 
gentilhomme  portugais  ,  chevalier  de 
l'ordre  du  Christ,  né  à  Catavella  en  1 590, 
mort  à  Madrid  en  1649,  dans  un  état  qui 
n'était  guère  au  dessus  de  l'indigence. 
Les  lettres  lui  firent  trop  négliger  la  for- 
tune. Après  avoir  été  gentilhomme  chez 
domConzalès,  évêque  d'Oporto,  et  avoir 
perfectionné  ses  connaissances  sous  la 
direction  de  ce  prélat,  il  avait  fait  un 
voyage  à  Rome  eu  1 7  3 1  ,  oîi  il  s'acquit  la 
considération  des  savans  qui  étaient  au- 
près du  pape  Urbain  VIII.  Faria  était  un 
homme  un  peu  singulier.  Il  s'habillait 
plutôt  comme  un  philosophe,  que  comme 
un  homme  qui  avait  vécu  à  la  cour.  Son 
humeur  indépendante  et  son  abord  sévère 
furent  sans  doute  un  obstacle  à  sa  for- 
tune. Il  était  cependant  fort  agréable  et 
fort  enjoué  avec  ses  amis.  On  a  de  lui 
1°  une  Histoire  de  Portugal,  conduite 
jusqu'au  règne  du  cardinal  Henri ,  im- 
primée plusieurs  fois.  La  dernière  et  la 
meilleure  édition  est  de  1731,  in-fol. , 
avec  une  continuation,  et  d'autres  pièces 
curieuses.  2"  L'Europe,  l'Asie  et  V A- 
frique  portugaises ,  ei\  a  vol.  in-folio, 
2  pour  l'Europe  ,  3  pour  l'Asie ,  1  pour 
l'Afrique.  VAsia  portuguesa  est  l'his- 
toire des  Portugais  aux  Indes  orientales, 
depuis  leur  premier  voyage  en  1497, 
jusqu'en  1640.  Cet  ouvrage  exact  et  cu- 
rieux a  été  traduit  en  italien ,  en  français 
et  en  anglais.  Faria  a  encore  laissé  7  vol. 
depoe'sies  ;  des  discours  moraux  et  poli- 
tiques; des  commentaires  sur  la  Lusiade. 
Ses  ouvrages  sont  écrits  en  espagnol. 

FARINA.  Ployez  Charles  Borromék 
(S.)  à  l'article  Borromée. 

FARINACCI  (  Prosper  ) ,  célèbre  ju- 
risconsulte, naquit  à  Rome  en  1554,  et 
y  brilla  dans  le  barreau.  Il  se  plut  à  dé  ■ 
fendre  les  causes  les  moins  soutenables. 
Cette  manie  funeste  à  bien  des  familles  , 
i  ointe  à  la  rigueur  et  à  la  sévérité  excessi  vv 


i 


3.ao  PAR 

avec  lesquelles  il  exerça  la  charge  de  pro- 
cureur-fiscal ,  fit  naître  des  murmures  et 
lui  suscita  des  affaires.  Cet  homme ,  si 
rigoureux  pour  les  autres ,  était  très  in- 
dulgent pour  lui-même.  Le  pape  Clé- 
ment VIII  disait  de  lui  à  ce  sujet ,  en  fai- 
sans allusion  au  nom  de  Farinaccio  :  «  La 
»  farine  est  excellente,  mais  le  sac  qui  la 
j)  contient  ne  vaut  rien.  »  Ce  juriscou- 
sulte  mourut  à  Rome  le  même  jour  qu'il 
lUaitné,  le  30  octobre  1618,  à  64  ans. 
Ses  ouvrages  ont  été  recueillis  en  13  vol, 
in-fol.  Anvers,  1 620  et  années  suivantes  ; 
ils  sont  recherchés  par  les  jurisconsultes 
iiltramontains.  "Voici  ce  qu'ils  renfer- 
ment: Decisiones  Rotœ ,  2  vol.  ;  Jioiœ 
novissimœ  ,  1  vol.  ;  Rotœrecentissimœ , 
1  vol.;  Rcpcrtorium  judiciale,  1  vol.  ; 
De  Hceresi,  1  vol.;  Consilia,  2  vol.  ; 
Praxis  criminalis ,  4  vol.  ;  Succus  Pra- 
xis criminalis ,  1  vol.  Malgré  la  critique 
qu'on  peut  faire  de  quelques  endroits,  il 
€st  certain  que  ses  ouvrages  sont  pleins  de 
savoir,  et  qu'il  y  a  pour  les  jurisconsul- 
tes bien  des  choses  à  recueillir. 

FARINATO  {  Paul  ) ,  peintre  célèbre 
et  savant  architecte  ,  mourut  à  Vérone  sa 
patrie  en  1 606  ,  à  8  4  ans. 

*  FARINELLI  (  Charles  Broschi  ,  plus 
connu  sous  le  nom  de),  célèbre  chanteur 
italien,  né  à  Naples  le  24  janvier  1705, 
fut  élève  de  Porpora ,  et  débuta  d'une 
manière  brillante  à  l'âge  de  17  ans  sur  le 
théâtre  d'Aliberti  à  Rome.  En  1734,  il 
passa  à  Londres  et  y  excita  un  enthou- 
siasme universel.  Après  avoir  obtenu  tous 
les  suffrages  en  Italie  et  en  Angleterre  , 
il  fut  appelé  à  la  cour  de  Madrid,  et  sa 
voix  produisit  plus  d'effet  sur  Philippe  V, 
chargé  d'infirmités  ,  et  sur  Ferdinand  VI, 
son  successeur,  tourmenté  d'une  pro- 
fonde mélancolie,  que  tous  les  remèdes 
de  l'art.  Ses  manières  aimables  lui  méri- 
tèrent bientôt  l'estime  et  la  considéra- 
tion de  toute  la  cour.  Sous  le  règne  de 
Ferdinand  VI ,  il  fut  employé  dans  les 
affaires  du  plus  haut  intérêt  politique  , 
tievint  le  canal  de  toutes  les  grâces ,  et 
l'on  peut  dire,  à  sa  louange,  qu'il  ne  les 
accorda  qu'an  mérite  réel ,  et  qu'il  n'a- 
busa jamais  de  son  pouvoir.  Loin  d'écou- 
ter un  vain  orgueil  qui  est  ordinairement 


PAR 

l'apanage  des  parvenus ,  ce  fut  surtout  s< 
modestie  qui  désarma  ceux  qui  auraient 
pu  être  un  obstacle  à  sa  fortune.  Sa  dé- 
férence et  son  respect  pour  les  grands, 
lui  captivèrent  l'amitié  de  la  plupart  d'en- 
tre eux;  à  l'égard  de  ses  ennemis,  il' ne» 
s'en  vengea  jamais  qu'en  répandant  sur 
eux  les  faveurs  du  roi.  La  mort  de  ce 
prince  et  de  la  reine,  arrivée  la  même 
année  (1 762  ),  le  jeta  dans  l'accablement 
le  plus  profond.  Il  quitta  l'Espagne  et  se 
retira  à  Bologne,  oîi  il  fit  bâtir  une  su- 
perbe maison.  Il  y  passa  le  reste  de  ses 
jours ,  uniquement  occupé  de  sa  harpe  et 
de  son  jardin ,  recevant  avec  affabilité 
tous  les  étrangers  qui  désiraient  le  con- 
naître, et  répandant  ses  bienfaits  sur  tous 
les  malheureux  qui  l'environnaient.  W 
encouragea  le  Père  Martini  à  écrire  son 
Histoire  de  la  musique ,  l'aida  de  sa  for- 
tune ,  et  lui  fournit  les  documens  néces- 
saires. Farinelli  mourut  le  1 5  juillet  1782. 

*  FARMER.  (  Hugues),  ministre  pres- 
bytérien à  Londres ,  né  en  1 7 1 4  ,  fut  un 
des  prédicateurs  d'une  congrégation  de 
Dissentcrs,  et  se  fit  une  grande  réputation 
par  son  éloquence  etpar  ses  ouvrages,  qui 
ont  pour  but  d'établir  que  l'univers  est 
gouverné  par  Dieu  seul.  Les  principaux 
sont:  1°  Un  Essai  sur  la  nature  et  le 
dessein  de  la  tentation  de  Jésus-Christ 
dans  le  de'sert  ^  oîiil  soutient  que  c'était 
une  vision  et  non  un  fait  réel ,  Londres, 
1761  ,  et  1765  avec  augmentation.  2°  Une 
Dissertation  sur  les  miracles,  qui  a  pour 
objet  de  prouver  qu'ils  sont  les  argumens 
d'une  interposition  divine  et  despreuves 
absolues  de  la  mission  et  de  la  doctrine 
d'un  prophète.  Z°  Un  Essai  sur  les  dé- 
moniaques du  nouveau  Testament ,  oii 
il  prétendait  que  ces  démoniaques  n'é- 
taient que  des  malades.  Farmer  est  mort 
le  6  février  1787. 

"FARMER  (Richard),  célèbre  critique 
anglais,  né  à  Lcicester  en  17  35,  fut  suc- 
cessivement prédicateur  de  la  chapelle 
royale  de  Whitehall,  principal  du  collège 
Emmanuel  de  l'université  de  Cambridge, 
vice -chancelier  et  principal  bibliothé- 
caire de  cette  université ,  chancelier  de 
Lichtfield  et  de  Covèntry  ,  chanoine  de 
l'église  de  Cantorbéry ,  puis  de  celle  de 


FAR 

Saint-Paul;  il  mourut  eu  17  97.  On  a  de 
lui  un  Essai  sur  Verudition  de  Sha- 
kespcar ,  l'un  des  meilleurs  morceaux  de 
critique  que  possède  la  littérature  an- 
glaise ;  plusieurs  fois  réimprimé  :  il  se 
trouve  dans  l'édition  de  Shakespear,  don- 
née par  Stevens,  J£  vol.  in-8,  1793  ,  et 
dans  celle  de  Reed  et  Harris ,  1803,  1812, 
en  21  vol. 

FARNABE  ou  Farnabî  (Thomas  ), 
célèbre  maître  d'école  anglais,  né  à  Lon- 
dres en  1 675 ,  d'un  charpentier ,  fut  d'a- 
bord serviteur  ;  puis  il  fit  ses  premières 
études  à  Oxford,  et  ensuite  en  Espagne, 
dans  un  collège  des  jésuites.  Il  accompa- 
gna François  Drak  et  Jean  Hawkins  dans 
leurs  courses  maritimes.  De  retour  de  ses 
voyages,  il  se  fit  soldat  dans  les  Pays-Bas, 
déserta  et  retourna  dans  sa  patrie.  Il  ou- 
vrit une  école  de  langue  latine  dans  le 
comté  de  Sommerset.  Il  alla  continuer  le 
même  travail  à  Londres ,  forma  de  bons 
écoliers,  et  s'acquit  la  réputation  d'un 
maître  habile.  Son  attachement  à  la  fa- 
mille royale  lui  attira  des  persécutions  ; 
mais  elles  ne  furent  pas  capables  d'ébran- 
ler sa  fidélité.  11  répondit  toujours  à  ceux 
qui  le  sollicitaient  de  se  déclarer  pour  le 
parti  républicain  :  «  J'aime  mieux  n'avoir 
■»  qu'un  roi,  que  d'en  avoir  cinq  cents,  u 
Il  mourut  exilé  à  Ely-House  en  1547,  à 
7  2  ans.  On  avait  proposé  dans  la  chambre 
des  communes  de  l'exiler  en  Amérique. 
Farnabe  était  aussi  .savant  humaniste,  que 
bon  citoyen.  Il  nous  reste  de  lui  des  édi- 
tions de  Juvénal ,  de  Perse  ,  de  Se'nè- 
que,  de  Martial,  de  Lucain,  de  Fir- 
gile,  de  Te'rence ,  d'Ovide,  avec  des  re- 
marques qui  ne  sont  que  grammaticales; 
elles  seraient  plus  utiles  si  elles  étaient 
quelquefois  historiques ,  géographiques 
et  mythologiques  ;  le  latin  en  est  un  peu 
dur  et  quelquefois  incorrect. 

FARAESE ,  nom  d'une  famille  d'Italie 
dont  la  généalogie  remonte  au  IS'^  siècle 
et  qui  avait  dès  celte  époque  de  la  célé- 
brité. —  Farnèse  (  Pierre-Louis  )  ,  pre- 
mier duc  de  Parme  et  de  Plaisance,  était 
fils  aîné  du  pape  Paul  III  (  Alexandre  Far- 
nèse  },  qui  l'avait  eu  d'un  mariage  secret, 
contracté  avant  sa  promotion  au  pon- 
tificat. Ce  pape  lui  conféra  les  duchés  de 


FAR  22  r 

Parme  et  de  Plaisance  en  1547  ,  sous  une 
redevance  de  8  mille  écus  au  saint  Siège , 
et  donna  en  échange  à  l'état  de  l'Eglise , 
la  principauté  deCamérino  et  la  seigneu- 
rie de  IVépi,  qui  lui  appartenaient.  Dès 
que  Farnèse  eut  été  reconnu  parle  clergé 
et  par  le  peuple ,  il  s'appliqua  à  fortifier 
Plaisance,  et  la  citadelle  qu'il  ^t  con- 
struire fut  regardée  comme  une  des  meil- 
leures forteresses  de  l'Italie.  Comme  il 
chagrinait  les  nobles,  croyant  qu'ils  op- 
primaient le  peuple  ,  quatre  gentilshom- 
mes conspirèrent  contre  lui ,  et  l'assassi- 
nèrentà Plaisance, le  IQ septembre  1547. 
Un  homme  qui  se  mêlait  de  magie,  lui 
avait  annoncé  cette  fin  tragique  ;  on  pou- 
vait la  lui  prédire  sans  être  sorcier  ;  mais 
l'anecdote,  si  elle  est  vraie,  ne  laisse  pas 
d'être  remarquable.  Aussitôt  après  sa 
mort,  les  milices  impériales  qui  étaient 
aux  portes  de  la  ville  obligèrent  les  Plai- 
santins à  prêter  serment  à  l'empereur 
Charles-Quint ,  qui  n'avait  pas  voulu  re- 
connaître la  cession  que  le  pape  en  avait 
faite.  Mais  dans  la  suite,  Octave  Farnèse, 
fils  de  Pierre-Louis,  ayant  épousé  Mar- 
guerite d'Autriche,  fut  reconnu,  par  cet 
empereur ,  légitime  possesseur  du  ducbé 
de  Parme  (  voyez  sa  postérité  dans  les  Ta- 
bles chronologiques  ,  à  l'article  Parme  et 
Plaisance).  Sa  postérité  jouit  de  ces  deux 
duchésjusqu'aucardinal  Antoine  Farnèse, 
mort  en  1 7  3 1 .  Sa  nièce  Elisabeth  Farnèse, 
épouse  de  Philippe  V  ,  roi  d'Espagne,  les 
transmit  au  second  de  ses  fils ,  qui  les 
céda  en  17  35  à  l'empereur  Charles  VI , 
contre  le  royaume  des  Deux-Siciles. 

FARNESE,  pape  qui  a  pris  le  nom  de 
Paul  III.  Voyez  Alexandre  Farnèse. 

FARNSWORT  ou  Farne-\\ert  (  Ri- 
chard ) ,  fut  un  des  premiers  disciples  de 
George  Fox  ,  auteur  de  la  secte  des  qua- 
kers. Il  ajouta  aux  rêveries  extravagantes 
de  son  maître ,  le  précepte  observé  scru- 
puleusement dans  le  quakérisme,  de  ne 
parler  à  personne ,  même  aux  rois  dans 
les  suppliques,  et  même  à  Dieu  dans  la 
prière,  qu'en  tutoyant.  Il  imposa  un 
livre  pour  démontrer  cette  impertinence. 
Il  prétend  que  l'usage  contraire  est  une 
flatterie  indigne  des  enfans  de  lumière  ; 
c'était  le  titre  que  prenaient  les  quakers. 


322  FAT 

Kox  approuva  celte  i(lc>e>  et  il  fut  le  pre- 
mier à  s'y  conformer. 

FïVRON  (Saint),  évêriue  de  Meaui  en 
627,  fonda  l'abbaye  qui  porte  son  nom, 
assista  au  2*  concile  de  Sens  en  657,  et 
mourut  le  28  octobre  672,  à  près  de  80 
ans. 

*FARQTjHAR  (George),  poète  comique 
né  en  1678,  à  Londonderry  en  Irlande, 
mort  en  1 707,  fut  d'abord  comédien,  puis 
lieutenant  au  régiment  du  comte  Orrery 
en  Irlande,  se  fit  remarquer  par  la  dou- 
ceur de  son  caractère  et  de  ses  mœurs. 
Ayant  épousé  une  femme  jeune  et  belle, 
il  ne  put  résister  aux  privations  que  lui 
imposaient  les  besoins  de  sa  maison  :  il 
mourut  de  chaf^rin,  à  l'âge  de  30  ans.  11 
a  laissé  un  nom  dans  le  théâtre  anglais , 
par  l'amusante  vivacité  de  ses  intrigues , 
assez  naturellcïnent  conduites,  quoique 
fondées  presque  toutes  sur  des  supposi- 
tions invraisemblables  et  romanesques. 
Ses  œuvres  ont  été  imprimées  pour  la 
10*  fois  à  Londres  en  1772,  en  2  v.  in-12: 
on  regarde  comme  son  chef-d'œuvre  la 
pièce  qui  a  pour  titre  The  beaux'  Stra- 
tagem,  la  Ruse  du  petit^maître. 

*  FATIO  ou  FAcao  de  Duilles  (Nicolas), 
géomètre  célèbre,  descendait  d'une  fa- 
mille italienne,  naquit  à  Bâle  en  Suisse 
vers  1664.  Il  alla  mourir  dans  le  comté 
de  Worcester  en  Angleterre  l'an  17  63. 
Dès  son  bas  âge ,  il  se  livra  à  l'étude  des 
sciences ,  et  il  n'avait  encore  que  17  ans 
lorsqu'il  se  fit  connaître  par  des  recher- 
ches savantes  sur  la  distance  du  soleil  à  la 
terre,  et  sur  les  apparences  de  l'anneau  de 
Saturne.  Il  s'occupa  de  la  théorie  de  la 
lumière  et  fit  un  mémoire  sur  la  dilata- 
tion et  le  resserrement  de  la  prunelle. 
On  peut  dire  qu'il  parcourut  et  étudia 
avec  succès  toutes  les  sciences  d'observa- 
tion ,  non-seulement  pour  en  concevoir 
l'ensemble  .  mais  encore  pour  en  faire 
d'heureuses  et  utiles  applications.  Ses 
découvertes  en  ce  genre  furent  très  nom- 
breuses; ainsi,  il  trouva  une  manière  nou- 
velle, facift  et  p!us  exacte  de  travailler 
les  verres  des  télescopes ,  de  percer  les 
rubis  et  de  les  faire  concourir  au  perfec- 
tionnement des  montres ,  de  mesurer  la 
vitesse  d'un  vaisseau ,  et  de  profiter  du 


FAU 

mouvemeut  des  eaux ,  occasioné  par  le 
scillage ,  pour  moudre  le  blé  ,  lever  les 
ancres  et  hisser  les  vergues.  Il  imagina 
aussi  une  chambre  d'observation  suspen- 
due ,  construite  de  manière  à  permettre 
d'observer  facilement  les  astres  dans  un 
vaisseau.  On  a  de  lui  un  assez  grand  nom- 
bre d'ouvrages  intéressans  sur  la  méca- 
nique, l'astronomie  et  la  clijmie,  impri- 
més séparément  ou  dans  les  numéros  du 
Gentlemens'  magazine,  de  1737  et  1738. 
Il  existe  aussi  de  lui  au  musée  britanni- 
que plusieurs  lettres  et  autres  manuscrits 
autographes  d'une  assez  grande  impor- 
tance. Fatio  avait  honorablement  parcou- 
ru la  moitié  de  sa  carrière ,  lorsqu'il 
abandonna  tout-à  coup  les  sciences  exac- 
tes pour  les  sciences  occultes.  Livré  tout 
entier  à  l'étude  de  l'alchimie ,  et  de  la  ca- 
bale ,  il  se  montra  en  même  temps  zélé 
partisan  des  Camisards  ou  Pre'dicansdes 
Cévennes  qui  s'étaient  réfugiés  à  Londres 
et  fut  en  butte  à  la  persécution  que  leur 
fit  la  police  anglaise.  Fatio  quitta  l'An- 
gleterre et  partit  pour  la  conversion  de 
l'univers.  Après  un  voyage  malheureux 
qu'il  fit  dans  ce  but  en  Asie,  il  revint 
mourir  obscurément  en  Angleterre  ,  sans 
doute  avec  le  regret  d'avoir  compromis 
son  nom  jusqu'alors  vénéré,  par  des  sys- 
tèmes repoussés  par  la  raison  autant  que 
par  la  religion. 

FATTORE  (le).  Foi/ez  Peîsis!. 

'  FAUCHART  (Pierre),  chirurgien- 
dentiste,  né  en  Bretagne ,  et  mort  à  Paris 
en  1761,  est  regardé  comme  le  créateur 
de  l'art  du  dentiste,  par  son  ouvrage  in- 
titulé le  Chirurgien  dentiste,  1728,2  vol. 
in-12,  réimprimé  en  17  46  et  1786.  Avant 
lui,  il  n'existait  aucun  écrit  qui  enseignât 
la  manière  de  limer,  tailler,  plomber  les 
dents  et  d'en  placer  d'artificielles.  Il  a 
décrit  aussi,  avec  exactitude,  les  abcès 
qui  attaquent  la  substance  intérieure  des 
dents,  sans  en  altérer  la  substance  corti- 
cale. 

*  FAUCHE-BOREL  (  Louis  ) ,  l'un  des 
hommes  les  plus  actifs  et  les  plus  fidèles 
à  la  maison  de  Bourbon ,  naquit  à  Neu- 
châtel  en  Suisse  le  12  avril  1762,  d'une 
ancienne  famille  de  Franche-Comté  que 
la  révocation  de  l'édit  de  Nantes  força  de 


I 


FAU 

s'expatrier.  Il  dirigeait  dans  sa  \ille  na- 
tale un  vaste  établissement  typographi- 
que ,  lorsque  la  révolution  française  écla- 
ta ;  quoiqu'il  fût  né  sous  un  gouverne- 
ment rciiublicain  ,  son  âme  toute  monar- 
chique ne  put  s'empêcher  de  voir  avec 
douleur  cette  foule  d'émigrés  français 
qui  cherchèrent  alors  un  asile  dans  sa 
patrie.  Non-seulement  il  sympathisa  aus- 
sitôt avec  eax ,  mais  encore  il  mit  ses 
presses  à  leur  disposition.  Cette  conduite 
lui  valut  à  lui-même  une  persécution  assez 
violente  :  il  avait  imprimé  dans  ses  al- 
manachs  quelques  pièces ,  et  entr'autres 
le  testament  de  Louis  XVI,  qui  déplurent 
aux  républicains  deNeuchâtel.  Il  fut  exi- 
lé :  il  est  vrai  que  son  exil  fut  borné  à 
six  mois  ;  mais  il  n'en  conçut  pas  moins 
dès  lors  la  haine  la  plus  violente  pour  les 
démagogues ,  et  sa  vie  toute  entière  fut 
consacrée  à  la  plus  courageuse  de  toutes 
les  luttes.  Fauche-Borel  s'empressa  donc 
d'offrir  ses  services  aux  Bourbons  qui  les 
acceptèrent  avec  reconnaissance.  Depuis 
1793  jusqu'en  1814  ce  fut  la  même  idée 
qu'il  poursuivit  avec  une  constance  et  un 
zèle  qui  l'associèrent  à  toutes  les  entre- 
prises dont  le  but  était  la  restauration  du 
trône  des  Bourbons.  Il  fut  de  tous  les  com- 
plots, de  toutes  les  intrigues,  de  toutes  les 
conspirations ,  de  toutes  les  manœuvres , 
qui  furent  faites  pendant  cet  intervalle  en 
faveur  de  cette  auguste  famille.  Nous  ne 
pouvons  le  suivre  dans  toutes  ses  mar- 
ches et  contre-marches  ,  sous  les  di- 
verses dénominations  et  sous  les  déguise- 
mens  multipliés ,  qu'il  fut  obligé  de 
prendre  :  nous  extrairons  seulement 
quelques  détails  des  Mémoires  de  Fau- 
che-Borel lui-même ,  des  papiers  publics 
qui  s'entretinrent  souvent  de  lui ,  et 
enfin  de  divers  récits  qui  nous  ont  été 
communiqués  par  quelques-uns  de  ses 
amis  et  de  ses  compatriotes.  Nous  le 
voyons  en  1795  sous  le  nom  de  Louis 
servir  de  médiateur  entre  le  prince  de 
Coudé  et  le  général  Pichegru.  Il  s'agissait 
d'engager  Pichegru  à  quitter  les  drapeaux 
de  la  république,  et  à  venir  se  joindre 
avec  ses  troupes  à  l'armée  des  royalistes. 
Le  prince  de  Condé  ,  après  avoir  donné 
ses  instructions  et  de  l'argent  à  Fauche- 


FÂU 


223 


Borel  et  à  son  compatriote  Courant,  les 
envoya  l'un  et  l'autre  à  Strasbourg  où 
était  l'armée  de  ce  général  qui  lui-même 
se  tenait  à  lUkirck ,  à  une  lieue  de  Cette 
ville.  Fauche-Borel  acheta  une  maison  à 
Strasbourg  et  y  établit  une  imprimerie.  H 
ne  fut  point  inactif  pendant  le  séjour  qu'il 
fit  dans  la  capitale  de  l'Alsace:  entretenant 
toujours  une  active  correspondance  avec 
le  prince  de  Condé ,  il  avait  lié  connais- 
sance avec  quelques  officiers  de  la  garni- 
son auxquels  il  lit  adroitenient  part* de 
ses  projets  et  qu'il  préparait  à  en  assurer 
l'exécution  :  il  était  arrivé  dans  cette 
ville  le  29  juillet  1796.  Les  deux  émis- 
saires du  prince  de  Condé  avaient  fait  d'i- 
nutiles tentatives  pour  aborder  le  général; 
mais  ils  s'étaient  liés  surtout  avec  M. 
Badouville,  adjudant-général  qui  dès 
lors  leur  fit  connaître  les  démarches  de 
Pichegru;  c'est  par  lui  qu'ils  apprirent 
que  ce  général  devait  se  rendre  dans  le 
Haut-Rhin.  Aussitôt  Fauche-Borel  prend 
la  route  de  Bàle  ,  et  rencontre  le  géné- 
ral à  Huningue  :  ce  fut  à  Blodsheim  que 
Franche-Borel  put  l'aborder.  Après  lui 
avoir  demandé  la  permission  de  lui  dé- 
dier un  ouvrage  inédit  de  Jean-Jacques 
Rousseau  (  sa  correspondance  ) ,  ce  qui 
n'était  que  le  prétexte  de  sa  visite,  il  s'ou- 
vrit bientôt  entièrement,  et  lui  dit  avec  le 
plus  grand  courage  quel  était  le  motif 
de  la  démarche  qu'il  faisait  auprès  de  lui. 
On  sait  que  Pichegru  n'hésita  point  à 
promettre  sa  coopération  en  faveur  de  la 
cause  royaliste  ;  seulement  il  désirait  être 
certain  que  l'Autriche  seconderait  les  ef- 
forts des  émigrés.  Fauche-Borel  ayant 
aunoncé  au  prince  de  Condé  l'heureux 
commencement  de  cette  négociation  ,  re- 
çut de  nouvelles  instructions  pour  en 
amener  le  succès ,  et  une  correspondance 
s'établit  entre  Pichegru  et  le  prince  de 
Condé  sur  la  manière" de  faire  triompher 
le  plan  d'invasion  de  l'Alsace,  et  Fauche- 
Borel  était  le  porteur  de  ces  lettres.  Fau- 
che ne  tarda  point  à  être  dénoncé ,  et 
le  24  décembre  1795,  il  fut  arrêté  par  suite 
de  la  dénonciation  du  journaliste  Cotla,  et 
jeté  dans  la  prison  du  Pont  couvert  :  il 
avait  gagné  le  guichetier  et  était  sûr  de 
s'évader ,  si  l'affaire  devenait  sérieuse  ; 


224  ^Atj 

mais  six  jours  après,  il  fui  mis  en  liberté, 
faute  de  preuves. Cependant  Pichegru  per- 
dit le  commandement  de  l'armée;  il  se  reti- 
ra à  Arbois ,  son  lieu  natal.  (  Voyez  l'arti- 
cle PicHEGRuJ.  Il  était  encore  dans  cette 
retraite  lorsque,  dons  le  mois  de  juin 
1790  ,  Fauche  lui  apporta  ,  de  la  part  de 
Loiiis  XVIII ,  une  lettre  importante.  Le 
général  y  répondit  eu  donnant  au  prince 
qui  lui  avait  écrit  le  plan  qu'il  fallait  sui- 
vre pour  faire  réussir  ses  projets.  Fauche 
remit  cette  réponse  à  Louis  XVIII  qui  se 
trouvait  alors  à  Dilling-en  ;  pendant  quel- 
que temps  nous  ne  savons  ce  qu'il  devint 
ni  ce  qu'il  fit  pour  la  cause  qu'il  servait 
avec  tant  d'activité.  Cette  première  partie 
de  la  vie  de  Fauche-Iîorel ,  ou  du  moins 
celte  tentative  pour  prendre  l'Alsace  est 
racontée  en  détail  par  lui-même  dans 
ses  Mémoires  ;  on  la  trouve  aussi  dans 
le  Mémoire  du  comle  de  Mongaillard 
concernant  la  conjuration  de  Pichegru: 
en  général,  les  faits  sont  racontés  dans 
ces  deux  ouvrages  de  la  même  manière  ; 
seulement  dans  ce  dernier,  les  hommes  y 
sont  mal  jugés ,  les  caractères  y  sont  pré- 
sentés sous  des  dehors  trompeurs  :  à  en- 
tendre l'hislorien ,  il  n'y  eut  dans  celle 
négociation,  que  cupidité,  ambition  et 
incapacité  :  la  passion  seule  a  pu  tenir  ini 
pareil  langage.  En  1707  ,  Pichegru,  élu 
membre  du  conseil  des  Cinq^cents,  fut 
nommé  président  de  celte  assemblée. 
Fauche  s'empressa  ,  d'après  l'ordre  des 
princes ,  d'aller  à  Paris.  Un  projet  de 
contre -révolution  avait  été  formé  par 
ce  général  :  tout  semblait  annoncer  qu'il 
réussirait;  mais  la  révolution  du  18  fruc- 
tidor le  renversa  complètement.  Nomi- 
nativement poursuivi  par  suite  de  la 
découverte  de  la  correspondance  de  Pi- 
chegru trouvée  dans  les  équipages  du 
général  autrichien  Klinglin  ,  Fauche  fut 
obligé  de  se  cacher.  Il  avait  trouvé  un 
asile  chez  un  certain  David  Mounier  qui 
avait  été  autrefois  son  correspondant 
d'affaires  ;, il  ne  tarda  pas  à  méditer  de 
nouveaux  projets.  Ce  Mounier  avait  des 
relations  ivcc  Boltot ,  secrétaire  de  Bar- 
ras :  Fauche  songea  à  profiter  de  cet 
homme  dont  il  eut  bientôt  remarqué  la 
souplesse ,  pour  arriver  jusqu'au  direc- 


FAt 

leur.  Présenté  à  Barras ,  il  lui  dévoile  \i 
complot  qu'il  a  concerté  avec  Piclvcgru  : 
et  il  consent  à  y  entrer.  Pichegru  n'avait 
pas  paru  content  de  ce  que  cette  affaire 
avait  été  remise  ainsi  entre  les  mains 
de  Barras  ;  cependaht  il  ne  recula  point , 
et  dès  lors  cette  intrigue  fut  l'pbjet  de 
l&utes  les  actions  et  de  toutes  les  pensées 
de  Fauche.  Ainsi  à  cette  époque  un  gé- 
néral français,  l'un  des  directeurs  les 
plus  influens,  et  des  hommes  les  plus 
recommandables  par  leur  noblesse  ou  pat 
leur  nouvelle  position  sociale,  travail- 
laient en  commun  au  retour  des  Bourbons 
Ce  n'est  point  dans  un  article  biographi- 
que que  l'on  peut  faire  connaître  tous 
les  ressorts  qui  furent  mis  en  jeu  pour  le 
succès  d'une  pareille  entreprise  :  Fauche 
en  était  l'âme ,  il  voyageait,  il  écrivait , 
il  était  toujours  en  mouvement.  De  Paris 
il  va  à  Mittau,  de  Millau  en  Russie  :  ayant 
reçu  l'ordre,  pendant  son  voyage  auprès 
de  Paul  l",  de  venir  s'établir  à  Wesel,  il  re- 
tourna auparavant  auprès  de  Louis  XVIII 
à  Millau  :  il  écrit  à  Barras  à  plusieurs  re- 
prises; celui-ci  lui  envoya  son  homme 
de  confiance,  le  chevalier  Tropez  de 
Guerins.  Tout  allait  au  gré  de  ses  désirs; 
mais  la  révolution  du  1 8  brumaire  vint 
encore  détruire  ses  espérances  :  Fauche 
était  découragé.  Il  faut  lire  les  détails  de 
cette  seconde  conspiration  dans  les  Mé- 
moires àe  Fauche  Borel  qui  ont  pour  titre: 
Précis  historique  des  différentes  mis- 
sions dans  lesquelles  M.  Louis  Fauche- 
Borel  a  été  employé  pour  la  cause  de  ' 
la  monarchie  ,  suii^i  de  pièces  justifica- 
tives, ouvrage  d'abord  imprimé  en  1815 
à  Paris,  où  il  a  été  supprimé,  et  réimpri- 
mé en  1816  à  Bruvelles  avec  cette  épi- 
graphe ;  pœnam  pro  munere.  Fauche , 
abattu  par  ce  dernier  revers  ,  avait  quil*- 
té  la  France  pour  s'établir  à  Londres  ;  il 
venait  d'y  fonder  une  imprimerie  et  une 
librairie  française,  et  il  semblait  peu  dis- 
posé à  s'occuper  d'affaires  politiques , 
lorsqu'un  nouvel  incident  vint  l'arracher 
à  son  commerce.  C'était  l'époque  oii  l'on 
négociait  le  traité  d'Amiens.  Quelques 
royalislesqui  n'avaient  point  encore  dés 
espéré  de  la  cause  des  Bourbons,  crurent 
que  dans  l'intérêt  de  la  monarchie ,  il  fat 


FAU 
iait  reconcilier  Moi-eau  et  Pichegru.  Fau- 
che fut  choisi  pour  être  le  médiateur  en- 
tre les  deux  généraux;  il  se  chargea  donc 
de  porter,  de  la  part  de  Pichegru  qui  était 
à  Londres ,  des  lettres  aflcctueuscs  à  son 
ancien  compagnon  d'armes.  A  peine  lut- 
il  arrivé  à  Paris  que  reconnu  par  la  police 
à  laquelle  il  était  signalé  ,  il  fut  arrêté  et 
conduit  au  Temple;  il  parvint  à  s'évader: 
dix-huit  heures  après,  il  fut  repris,  et 
passa  dix-huit  mois  enprison.  Son  adresse 
était  si  grande  que ,  malgré  toutes  les 
précautions  que  l'on  prenait  pour  le  te- 
nir au  secret ,  il  entretint  une  correspon- 
dance suivie  avec  Moreau  par  le  moyen 
d'un  de  ses  neveux  ,  nommé  \itel.  Enfin 
sur  la  demande  du  roi  de  Prusse  ,  dont  il 
s'était  déclaré  le  sujet ,  et  sur  les  instan- 
ces de  l'ambassadeur  de  ce  monarque, 
Fauche,  qui  à  plusieurs  reprises  avait 
été  interrogé  sur  ses  relations  avec  Mo- 
reau et  Pichegru  ,  et  qui  avait  persisté  à 
ne  vouloir  rien  dire  ,  fut  reconduit  par 
la  gendarmerie  jusque  sur  le  territoire  de 
Prusse.  Il  avait  reçu  l'ordre  de  ne  point 
retourner  à  Neuchâtel  :  il  partit  donc 
pour  Berlin  où  il  fut  accueilli  par  le  roi 
avec  la  plus  grande  distinction.  Cette 
troisième  affaire  n'ayant  pas  été  plus 
heureuse  que  les  deux  précédentes  ,  il 
chercha  de  nouveaux  moyens  d'arriver 
au  but  honorable  que  jusqu'alors  il  s'était 
toujours  proposé.  Ce  fut  lui  que  le  comte 
d'Avaray  chargea  d'imprimer  à  dix  mille 
exemplaires,  la  proclamation  du  2  décem- 
bre 1804  ,  adressée  par  Louis  XVIII  aux 
Français.  La  distribution  en  fut  faite  par 
ses  soins.  Buouaparle  se  plaignit  auprès 
du  roi  de  Prusse,  et  des  commissaires 
furent  chargés  d'aller  à  Berlin  pour  cet 
objet.  Ce  n'était  pas  là  le  seul  crime  que 
Buonaparte  lui  reprochait  ;  Fauche  était 
parvenu  à  dévoiler  ses  projets  sur  laPrus- 
se ,  et  il  en  avait  conféré  plusieurs  fois 
avec  le  roi  et  ses  ministres  ;  il  avait  même 
remis  des  notes  à  ce  sujet  soit  à  l'am- 
bassadeur de  Russie  ,  soit  au  gouverne- 
ment prussien  :  Fauche  avait  en  outre 
conseillé  en  1804  de  rappeler  des  Etats- 
unis  le  général  Moreau  dont  la  popularité 
pouvait  être  opposée  à  celle  de  Buona- 
parte. Aux  yeux  de  celui  qui  avait  pris  le 
V. 


FAU  ao5 

tr«')nc  des  Bourbons,  c'étaient  des  forfaits 
qu'il  devait  poursuivre  partout.  Aussi  ne 
s'agit-il  rien  moins  que  d'en  arrêter  l'au- 
teur dans  Berlin  même.  Instruit  que  ses 
jours  n'étaient  point  en  sûreté,  même 
dans  ce  pays  étranger.  Fauche  se  hâta 
de  partir  pour  l'Angleterre.  Il  revint 
bientôt  après  en  Suède ,  puis  il  retourna 
à  Londres  oîi  il  forma  de  nouvelles  cor- 
respondances avec  divers  agens  du  parti 
royaliste  ,  notamment  avecPerlet,  ancien 
journaliste.  Nous  ne  pouvons  entrer  dans 
les  détails  sur  toutes  ses  lettres ,  dont  les 
unes  sont  dictées  souvent  par  une  inalté- 
rable fidélité,  et  d'autres  aussi  par  la  plus 
noire  perfidie.  En  .1813,  les  royalistes  ré- 
fugiés en  Angleterre  crurent,  sur  la  foi  de 
quelques-uns  de  ses  témoignages  trom- 
peurs ,  qu'un  débarquement  dirigé  par  le 
duc  de  Berry ,  pourrait  être  tenté  sur  les 
côtes  de  France  :  Fauche-Borel  fut  envoyé 
dans  l'île  de  Jersey  pour  s'assurer  de  la  vé- 
rité de  ces  rapports  :  il  revint  bientôt,  con- 
vaincu que  c'était  un  piège  tendu  par 
les  agens  de  Buonaparte  à  un  prince  loyal 
qu'ils  voulaient  rendre  victime  de  leur 
perfidie.  La  sagesse  de  Fauche-Borel  pré- 
vint les  malheurs  que  cette  expédition 
aurait  entraînés.  En  1814,  il  revint  en 
France  avec  les  Bourbons  :  il  fut  au  mi- 
lieu des  princes  étrangers  qui  lui  témoi- 
gnèrent toutes  sortes  d'intérêt.  Il  se  re- 
tira ensuite  dans  sa  patrie  :  son  projet 
était  de  s'établir  en  France.  Le  débarque- 
ment de  Buonaparte  s'y  opposa.  Toujours 
chargé  de  quelques  missions  particuliè- 
res, il  se  rendit  à  Vienne  ,  puis  à  Gand, 
oii  ses  services  furent  mai  accueillis  par 
quelques-uns  des  ministres  de  Louis  XVIII. 
Enfermé  pendant  huit  jours  dans  un  ca- 
chot à  Bruxelles,  soupçonné  injustement 
de  vouloir  servir  les  projets  de  Buonaparte 
comme  s'il  eût  pu  embrasser  une  autre 
cause  que  celle  du  prince  exilé,  il  dut 
sa  liberté  à  l'intervention  de  l'ambassa- 
deur prussien.  De  là  il  se  rendit  à  Vienne 
oîi  il  se  justifia  pleinement  :  plus  tard , 
sa  justification  fut  plus  complète  et  pas  un 
nuage  ne  vint  ternir  une  vie  toute  en- 
tière consacrée  généreusement  à  la  plus 
sainte  des  caiises.  Il  vint  ensuite  à  Neu- 
châtel ,  entra  en  France  avec  les  troupe» 

i5 


2a6  FAU 

suisses  qui  envahirent  une  partie  des 
départemens  du  Doubs  et  du  Jura ,  con- 
tribua à  faire  placer  le  drapeau  blanc  sur 
le  fort  de  Joux  (19  juillet  1816)  :  il  aida 
aussi  les  opérations  du  corps  des  volon- 
taires royaux ,  commande  par  M.  Gaëlan 
de  La  Rochefoucault  ,  qui  p<5nétra  en 
Franche-Comté  par  la  frontière  suisse. 
La  cause  que  Fauche  avait  soutenue  était 
gagnée  ;  il  fit  part  alors  au  public  des 
moyens  qu'il  avait  employés  pour  la  faire 
réussir;  il  publia  en  181 G  son  Précis  his- 
torique que  nous  avons  déjà  cité.  Cet  ou- 
vrage fut  lu  avec  avidité  ;  mais  on  y  re- 
marque que  Perlet,  qui  avait  été  pendant 
quelque  temps  son  correspondant  ,  y 
était  accusé  de  plusieurs  abus  de  con- 
fiance :  Fauche  lui  reproche  de  l'avoir 
trompé  dans  plusieurs  occasions  impor- 
tantes ;  mais  l'accusation  la  plus  forte 
était  celle  d'avoir  attiré  à  Paris  ,  son 
neveu  Vitel ,  de  l'avoir  livré  à  la  po- 
lice ,  et  d'avoir  causé  la  mort  de  ce  mal- 
heureux jeune  homme.  Perlet  répondit 
par  une  brochure  dans  laquelle  il  pré- 
tendait que  Fauche  avait  trahi  la  cause 
des  Bourbons.  Aussitôt  celui-ci  le  tra- 
duisit en  police  correctionnelle ,  et  le  fit 
déclarer  escroc  et  infâme  calomniateur , 
et  Fauche  fut  reconnu  pour  n'avoir  man- 
qué ni  à  l'honneur  ni  à  la  fidélité  qu'il 
devait  aux  Bourbons.  Plusieurs  Mémoires 
araient  été  imprimés  de  part  et  d'autre 
dans  cette  affaire.  Peu  de  temps  après  , 
Fauche  se  retira  en  Angleterre  d'où  il  est 
revenu  à  Neuchâtel.  Il  avait  obtenu  du 
roi  de  France  une  pension  de  5,000  fr.  : 
ses  affaires  étaient  cependant  en  mauvais 
état  ;  pendant  ses  négociations  il  avait 
contracté  beaucoup  de  dettes  ;  il  se  plai- 
gnit amèrement  de  n'avoir  pas  obtenu 
tous  les  dédommagemens  que  lui  méri- 
taient ses  sacrifices  et  son  dévouement. 
Cette  pensée  le  tourmentait  vivement; 
sa  tête  s'en  est  échauffée  ,  et  depuis  quel- 
que temps  il  croyait  être  entouré  d'enne- 
mis et  de  pièges ,  lorsque  dans  le  mois 
de  septembre  1829,  il  a  mis  fin  à  ses 
jours  en  se  précipitant  du  haut  des  fe- 
nêtres de  sa  maison.  Dans  une  lettre  écrite 
avant  sa  mort ,  il  recommande  son  âme 
à  Dieu ,  lui  demande  pardon  de  ses  pé- 


FAU 

cbés ,  et  déclare  pardonner  à  ses  enne- 
mis. Il  venait,  en  1 828,  de  publier  de  nou- 
veaux Mémoires,  1828,  4  vol.  in-8,  avec 
un  portrait  et  une  collection  de  gravures 
de  dix-sept  portraits.  Ces  Mémoires  sont 
le  récit  fidèle,  mais  beaucoup  trop  éten- 
du de  toutes  ses  opérations.  Ce  n'est 
point  lui  qui  les  a  rédigés ,  mais  bien 
M.  Alphonse  de  Beauchamp ,  d'après  ses 
notes.  On  doit  aussi  à  Fauche-Borel  des 
Notices  sur  les  généraux  Fichegru  el  Mo- 
rel ,  Londres,  180T,  in-8. 

FAUCHET  (  Claude  ) ,  président  à  la 
cour  des  monnaies  de  Paris ,  sa  patrie , 
naquit  vers  l'an  1629.  Il  rechercha  avec 
beaucoup  de  soin  et  de  succès  les  anti- 
quités de  la  France.  Pendant  le  siège  de 
Sienne,  en  1566,  le  cardinal  de  Tournon 
l'envoya  au  roi  pour  prendre  ses  ordres. 
Cette  députation  lui  ouvrit  la  porte  des 
honneurs,  mais  non  celle  de  la  fortune. 
Il  mourut  en  IGOl,  à  72  ans,  laissant  tant 
de  dettes,  qu'il  fallut,  pour  les  acquitter, 
vendre  sa  charge.  Tous  ses  ouvrages  fu- 
rent imprimés  à  Paris  en  1610,  in-4.  Les 
plus  curieux  sont  i"  Antiquités  gauloises 
et  françaises  ;  la  première  partie  con- 
tient les  choses  arrivées  jusqu'à  la  venue 
des  Francs  ;  la  deuxième  contient  les 
choses  avenues  en  France,  depuis  Phara- 
mond  jusqu'à  Hugues -Capet.  2°  Les 
noms  et  sommaires  des  œuvres  de  six- 
vingt  et  sept  poètes  français.  3°  Un 
Traité  des  libertés  de  l'église  gallicane; 
un  autre  de  l'origine  des  chevaliers,  Ar- 
moiries, etc.  4°  L'origine  des  dignités  et 
magistrats  en  France,  1600,  in-8;  5°  De 
la  ville  de  Paris.  Il  y  a  dans  ces  différens 
traités  mille  choses  curieuses  et  qu'on 
chercherait  vainement  ailleurs  ;  mais  il  y 
en  a  aussi  beaucoup  à  ajouter,  ou  à  cor- 
riger. Le  stile  est  dur,  barbare  et  incor- 
rect. 

FAUCHET  (Claude),  né  à  Dorne,  dio- 
cèse de  Nevers,  le  22  septembre  1744, 
embrassa  l'état  ecclésiastique,  fut  précep- 
teur des  enfans  du  marquis  de  Choiseul, 
frère  du  ministre,  et  entra  ensuite  dans  la 
communauté  des  prêtres  de  la  paroisse 
de  St.-Roch  à  Paris.  Ayant  été  interdit 
par  l'archevêque,  il  fit  différens  person- 
nages. Il  parvint  par  ses  intrigues,  autant 


FAU 

que  par  ses  talens,  et  un  geure  d'esprit 
lout-à-fait  singulier,  plein  de  contrastes 
et  de  disparates,  à  être  prédicateur  ordi- 
naire du  roi,  vicaire-général  et  chanoine 
honoraire  de  Bourges,  abbé  commenda- 
taire  de  Montfort,  etc.  La  révolution  le 
mit  à  même  de  donner  l'essor  à  ses  mau- 
vaises qualités  ;  il  y  joua  un  rôle  bruyant: 
(le  14  juillet  1789,  on  le  vit  un  sabre 
à  la  main,  s'avancer  trois  fois  à  la  tête 
des  assaillans  :  il  donnait  des  ordres,  et  fai- 
sait des  discours  :  ce  fut  un  des  héros  de 
cette  journée).  Il  devint  ensuite  évêque 
schismatique  du  Calvados  (  ainsi  nommé 
d'un  rocher  de  la  Manche  contre  lequel 
échoua  le  Calvados,  vaisseau  de  la  fameuse 
flotte  de  Philippe  II),  et  se  signala  par  di- 
vers écrits  oîi  se  trouvent  des  vérités  forte- 
ment énoncées,  à  côté  desplus  monstrueu- 
ses erreurs  :  tels  sont  le  Discours  sur  la 
religionnationale,  Paris,  1 7  89,  in  8  (voyez 
DoMiNis),  trois  discours  sur  la  liberté' 
humaine,  1789;  V Oraison  funèbre  de 
l'abbé  de  VEpée,  \1^0;  Eloge  civique 
de  Franck  lin,  1790;  Sermon  sur  l'ac- 
cord de  la  religion  et  delà  liberté,  1791, 
etc.  Le  6  avril  17  92,  lorsqu'un  décret 
supprima  le  costume  ecclésiastique,  l'ab- 
bé Fauchet  déposa  sur  le  bureau  sa  calotte 
et  sa  croix,  et  ses  confrères  imitèrent  son 
exemple  ;  c'était  le  vendredi  saint!...  Ce- 
pendant lorsqu'il  vit  la  chute  du  trône , 
et  qu'il  lui  fut  impossible  de  se  mépren- 
dre sur  le  but  du  parti  dominant,  contre 
la  religion,,  il  prit  une  marche  rétrograde, 
se  déclara  contre  le  mariage  des  prêtres , 
et  prononça,  lors  du  procès  de  Louis  XYI, 
un  discours  courageux  pour  le  temps,  où. 
il  combattit  ceux  qui  voulaient  la  mort 
du  roi,  et  leur  dit  des  vérités  assez  har- 
dies ,  entremêlées  pourtant  des  phrases 
alors  en  usage  contre  le  tyran  et  la  ty- 
rannie. Dans  les  différens  appels  nomi- 
naux, il  vota  toujours  pour  le  parti  le 
plus  favorijble.  Depuis  il  s'attacha  au  parti 
fédéraliste,  et  lutta  avec  courage  contre 
Marat  et  Robespierre.  Ayant  été  accusé  de 
conspiration  contre  le  parti  jacobin ,  de- 
venu dominantà  la  Convention  nationale, 
il  fut  condamné  à  mort,  et  périt  sous  la 
guillotine,  le  31  novembre  1793,  après 
avoir  abjuré  ses  erreurs,  et  s'être  con- 


FAU  227 

fessé  à  un  prêtre  vertueux,  renfermé  avec 
lui  à  la  Conciergerie,  et  qui  avait  eu  le 
bonheur  de  le  faire  rentrer  en  lui-iflême 
(voyez  les  annales  catholiques ,  tom.  4, 
p.  169).  Dans  les  temps  antérieurs  à  la 
révolution ,  il  avait  prononcé  à  l'acadé- 
mie française  un  panégyrique  de  saint 
Louis,  et  avait  fait  V Oraison  funèbre  du 
duc  d'Orléans ,  père  d'Egalité ,  et  de 
Phéty peaux  d'Herbaud,  archevêque  de 
Bourges;  un  Discours  sur  les  mœurs 
rurales.  On  peut  consulter  \es  Mémoires 
pour  servir  à  l'histoire  de  V église  consti- 
tutionnelle ,  ou  Lettres  à  Claude  Fau- 
chet, oii  Von  trouve  un  précis  de  ses  cri- 
mes et  de  ses  erreurs  ;  Liège,  1793,  in-8. 
Voyez  le  Journal  hist.  et  litt.,  15  décem- 
bre 1793,  p.  15. 

FAUCHEUR  (Michel  le),  ministre 
protestant ,  fut  appelé  de  Montpellier  à 
Charenton.  Son  éloquence  ne  fut  pas 
moins  admirée  à  Paris  qu'en  province. 
Le  maréchal  de  La  Force  dit,  au  sortir 
d'un  de  ses  sermons  sur  le  duel,  «  que  si 
»  on  lui  envoyait  un  cartel ,  il  le  refuse- 
»  rait.  M  II  mourut  à  Paris  en  1607,  esti- 
mé des  catholiques  et  des  protestans.  Sa 
probité  ne  le  cédait  pas  à  son  génie.  On 
doit  à  sa  plume,  aussi  ingénieuse  qu'élo- 
quente 1°  un  Traité  de  V action  de  ï ora- 
teur,  Leyde,  1686,  in-12,  imprimé  d'a- 
bord sous  le  nom  de  Conrart  :  ouvrage 
estimé.  1°  Des  sermons  sur  différens 
textes  de  l'Ecriture,  in-8.  3°  Prières  et 
méditations  chrétiennes.  4°  Un  Traité 
de  l'Eucharistie,  contre  le  cardinal  du 
Perron,  Genève,  1635,  in-fol.  imprimé 
aux  dépens  des  églises  réformées,  par  or- 
dre du  synode  national. 

*  FAUGERES  (Marguerite  Bleeckeb), 
dame  poète,  née  en  17  71,  dans  un  village 
des  Etats-Unis ,  perdit  sa  mère  de  bonne 
heure ,  et  épousa  un  médecin  de  New- 
York,  qui  dissipa  sa  fortune,  et  mourut 
en  17  98  delà  lièvre  jaune.  M"^  Faugères, 
se  consacra  alors  à  l'éducation  des  jeunes 
demoiselles,  et  mourut  en  1 80 1 .  On  trouve 
un  grand  nombre  de  ses  poésies  dans  le 
Muséum  américain,  et  dans  le  Magasin 
de  New- York.  En  1795,  elle  avait  pu- 
blié une  tragédie  de  Bélisaire,  qui  a  ob- 
tenu quelques  succès. 


328  FAU 

*FAUJAS  de  Saint-Fond  (Barthëleuii), 
.savant  fjéolofîue ,  né  à  Montelimar  le  17 
mai  1741  ,  embrassa  la  carrière  du  bar- 
reau ,  après  avoir  fait  son  droit  avec  dis- 
tinction à  Grenoble  :  c'était  un  des  bons 
avocats  de  cette  ville  ;  mais  son  goût  pour 
la  minéralogie  lui  fit  abandonner>sa  pro- 
fcssioîi ,  et  dès  lors  il  ne  s'occupa  plus  que 
de  faire  des  recherches  relatives  à  la  partie 
de  l'histoire  naturelle  dans  laquelle  il 
s'est  rendu  célèbre  :  il  s'est  occupé  sur- 
tout des  produits  volcaniques ,  sur  les- 
quels on  n'avait  obtenu  jusqu'alors  que 
des  données  inexactes  ou  incomplètes. 
Après  avoir  parcouru  et  exploré  les  Alpes 
en  vrai  naturaliste ,  il  visita  les  Puy  de 
Dôme  ou  les  montagnes  de  l'Auvergne. 
En    17  76  il  découvrit  dans  les  monta- 
gnes de  Chenavary  une  riche  mine  de 
Pouzzolane  qu'il  fit  ouvrir  à  ses  frais , 
sur  laquelle  il  tenta  des  expériences  de 
tous  genres  et  dont  le  gouvernement  se 
servit  pour  les  constructions  du  port  de 
Toulon  et  dans  quelques  autres  travaux 
publics.  Depuis  17  76  il  entretenait  une 
correspondance  suivie  avec  Buffon  ,  qui 
le  fit  nommer  en  1779  adjoint  au  jardin 
du  roi,  et  en  1785  commissaire  du  roi 
pour  les  mines.  Toutes  les  années  il  par- 
courait quelques  parties  de  la  France ,  ou 
bien  ii  poussait  ses  voyages  dans  les  dif- 
férentes contrées  de  l'Europe  et  même  jus- 
que dans  les  états  du  nouveau  monde  : 
ses  courses  étaient  toujours  dirigées  dans 
l'intérêt  de  la  science.  Ce  fut  pour  le 
récompenser  de  ses  travaux  importans  et 
de  ses  nombreuses  découvertes,  que  Buf- 
fon fit  nommer  Faujas  son  successeur.  Ce 
géologue  enseigna  sa  science  au  jardin 
des  Hantes  avec  un  talent  que  l'expé- 
rience seule  saurait  donner  :  de  conjec- 
turale qu'elle  était,  il  la  rendit  exacte ,  en 
l'appuyant  sur  des  bases  scientifiques  : 
parmi  les  découvertes  importantes  qu'on 
lui  doit,  nous  ne  saurions  passer  sous 
silence  celle  de  \di  farine  fossile  ,  et  de  la 
mine  de  fer  de  la  voulte  (  Ardèche  ).  En 
octobre  1797  ,  le  conseil  des  Cinq-cents 
lui  alloua  une  somme  de  25,000  francs 
pour  le  dédommager  des  dépenses  qu'il 
vivait  faites  pour  ses  travaux.  Faujas  est 
niort  le  18  juillet  1819.  Il  était  adminis- 


FAU 

traleur  du  jardin  du  roi.  Parmi  ces  nom- 
breux ouvrages  nous  citerons  \°  Me'moires 
sur  des  bois  de  cerf  fossiles  trouvc's  dans 
les  environs  de  Montelimar  ,Vav\s,  17  76, 
petit  in-4  ;  2"  Recherches  sur  les  volcans 
éteints  du  Vivarais  et  du  Velay ,  1778, 
in-folio  ;  c'est  dans  cet  écrit  qu'il  déve- 
loppe sa  théorie  sur   la   formation   des 
volcans ,  théorie  qui  reirase  sur  la  na- 
ture chimique  de  l'eau  qui,  suivant  ce 
géologue,  doit   être  infailliblement   en 
communication  avec  le  foyer    des  vol- 
cans qu'elle  entretient  par  sa  décompo- 
sition. 3°  Histoire  universelle  de  In  pror 
vince  du  Dauphiné,  1781,  in-8,  avec 
fig.  ;  4»  Description  des  expériences  de 
la  machine  ae'rostatiquc  de  MM.  Mon- 
gol fier ,  Paris,  1783  et  1784,  2  vol.  in-8. 
Cet  ouvrage  est  le  plus  complet  sur  celte 
matière.   5°  Minéralogie   des  volcans , 
1 7  84 ,  in-8  ;  6"  Histoire  naturelle  des  ro- 
ches  de    Trapp,    1788,   iu-12,   1813, 
in-12;  7°  Voyage  en  Angleterre^   en 
Ecosse  et  aux  îles  Hébrides  ,  où  ton 
trouve    la   description    détaillée    de    la 
grotte  de  Fingat,  Paris,   1797,   2  vol. 
in-8  ,  avec  figures  ,  traduit  en  anglais  et 
en  allemand  ;  8°  Histoire  naturelle  de  la 
montagne  de  St.-Pierre  de  Maëstricht , 
Paris,  1798,  grand  in-4  avec  54  planches  ; 
9"  Essai  de  géologie  ,  ou  Mémoire  pour 
servir  à  l'histoire  naturelle  du  globe  y 
Paris,  1803  et  1809,  in-8,  avec  figures. 
Il  a  aussi  laissé  des  manuscrits  sur  le  pas- 
sage du  Rhône  et  dci  Alpes  par  Annibal, 
sur  la  fontaine  de  Vaucluse ,  et  un  grand 
nombre  de  Mémoires  relatifs  à  la  géolo- 
gie et  à  quelques  autres  questions  d'his- 
toire naturelle ,  insérés  dans  les  Annales 
du  Muséum  d'histoire  naturelle.  M.  Frey- 
cinet ,  ami  de  Faujas ,  a  publié  :  Essai 
sur  la  vie  ,  les  opinions  et  les  ouvrages 
de  B.  Faujas  de  Saint-Fond,  admini- 
strateur du  jardin  du  rot,  Valence,  1820, 
iu-4. 

FAULCONNIER  (Pierre),  grand- 
bailli  de  la  ville  de  Dunkerque  sa  patrie, 
président  de  la  chambre  de  commerce  , 
s'acquitta  avec  beaucoup  de  zèle  et  de 
désintéressement  des  fonctions  de  ces 
charges  pendant  près  de  60  ans ,  et  mou- 
rut en  1735.  Nous  avons  d€  lui  une  Des- 


FAtT 

cription  historique  de  Duiikerque  ,  Bru- 
ges, 1730,  2  vol.  in-fol.,avec  fig.;  leslile 
en  est  peu  correct. 

FAUR  (Gui  DU  ),  seigneur  dePiBRAC, 
naquit  l'au    1528  à  Toulouse,  d'une   fa- 
mille illustre,  et  parut  avec  éclat  dans  le 
barreau  de  celle  ville.  Il  voyagea  dans  sa 
jeunesse  en  Italie  ,  pour  se  perfectionner 
dans  la  connaissance  du  droit.  De  retour 
dans  sa  patrie  ,  il  fut  élu  juge-mage.  Dé- 
puté aux  états  d'Orléans  en  1 5G0  ,  au  nom 
de  la  ville  de  Toulouse  ,  il  présenta  au  roi 
le  cahier  des  doléances  qu'il  avait  com- 
posé  lui-même.    Quelque  temps  après, 
Charles  IX  le  choisit  pour  être  un  de  ses 
ambassadeurs  au  concile  de  Trente.  Il  y 
soutint  avec  beaucoup  d'éloquence  les 
intérêts  de  la  couronne  et  les  libertés  de 
de   l'église  gallicane.   Le  chancelier  de 
L'Hôpital ,  pénétré  de  son  mérite, lui  fit 
donner   la    charge   d'avocat-général  au 
parlement  de  Paris  en   1565.  Pibrac  fit 
renaître  la  raison   et  l'éloquence  dans  le 
barreau,  livré  depuis  long-temps  à  la  bar- 
barie et  à  l'indécence.   En   1570,  il  fut 
nommé  conseiller  d'état.  Deux  ans  après, 
il  composa  sa  célèbre  jjpologiede  la  Saint 
Bartlidlemi  ;  mais  on   croit  qu'il  ne  se 
prêta  k  cet  acte ,  si  opposé  à  la  douceur 
de  son  caractère ,  qu'après  y  avoir  été 
contraint  par  des  ordres  supérieurs.  Le 
duc  d'Anjou  ayant  eu  la   couronne  de 
Pologne,  Pibrac  accompagna  ce  prince, 
et   répondit  pour  lui  aux  harangues  de 
ses  sujets.  Le  nouveau  roi  ayant  appris 
la  mort  de  son  frère,  quitta  secrètement 
la  Pologne,  laissant  à  Cracovie   Pibrac 
exposé  à  la  colère  des  Polonais,  qui  furent 
près  de  se  venger  de  la  fuite  du  roi  sur  la 
personne  de  son  ministre.    Il  retourna 
heureusement  en  France ,  d'où  on  le  ren- 
voya en   Pologne  ,  pour  tâcher  de  con- 
server la  couronne  à  son  maître  :  ce  qui 
ne  réussit  pas.  Il  fut  plus  heureux  à  son 
retour  en  France,  où  il  procura,  entre 
la  cour  et  les  protestans,  un  traité  depaix, 
dont  il  fut  l'arbitre ,  comme  il  en  avait 
été  l'auteur.  Henri  III  lui  donna ,  pour 
prix  de  ses  services,  une  charge  de  pré- 
sident à  mortier.  La  reine  de  Navarre  et 
le  duc  d'Alençon  le  choisirent  pour  leur 
chancelier.  Il  mourut  en  1584,  à  l'âge 


FAU  2r»9 

de  56  ans  ;  et  la  France  perdit  un  grand 
magistrat  et  uii  bon  écrivain.  Il  nous 
reste  de  lui  plusieurs  ouvrages  en  vers 
et  en  prose  :  1"  Des  plaidoyers,  des  hn- 
7-angues ,  in-4.  2"  Un  Discours  de  l'âme 
et  des  sciences ,  adressé  au  roi.  3"  Une 
belle  lettre  latine  sur  le  massacre  de  la 
Saint -Barthclemi,  157  3,  in-4.  Outre 
ces  écrits  peu  connus  aujourd'hui ,  on  a 
ses  quatrains,  que  tout  le  monde  con- 
naît ;  la  première  édition  est  de  1  57  4  ,  et 
la  dernière  de  174G  ,in-12.  La  matière 
de  ces  petites  productions  est  la  morale  ; 
leur  caractère,  la  simplicité  et  la  gravité. 
Pibrac  a  réuni  dans  les  siens  ces  deux  qua- 
lités ,  l'utile  et  l'agréable  y  sont  mêlés 
avec  goût.  Ses  quatrains  furent  d'abord 
traduits  en  grec  par  Florent  Chrétien  ,  et 
par  Pierre  Dumoulin  ;  d'autres  écrivains 
les  mirent  en  vers  latins  ;  enfin  ils  pas- 
sèrent dans  les  langues  turque,  sfrabe  et 
persane.  Les  Français  leur  firent  un  aussi 
bon  accueil  que  les  étrangers.  On  les 
faisait  apprendre  par  cœur  aux  enfans  ; 
et  malgré  leur  vieillesse,  on  les  lit  encore 
aujourd'hui  avec  quelque  plaisir. 

FAUR  DE  SAINT-JORRI  (  Pierre 
DU  ),  premier  président  au  parlement  de 
Toulouse,  mort  d'apoplexie  en  pronon- 
çant un  arrêt  en  IGOO  ,  âgé  de  60  ans  ,  a 
laissé  un  grand  ncyribre  d'ouvrages  ,  mo- 
numens  de  son  érudition.  Ceux  que  les 
savans  lisent  avec  le  plus  de  fruit  sont  :  1° 
Dodecamcnon ,  sive  de  Dei  nomine  et 
attribuiis  ,  1588,  in-8  ,  écrit  estimable, 
qui  renferme  quantité  de  passages  des 
Pères  greos  et  latins,  éclaircis  ou  corri- 
gés. 2"  Trente-trois  livres  latins  des  5e- 
mesfres,  en  2  vol.  in-4  ,  1598  et  1630, 
plusieurs  fois  réimprimé.  On  y  trouve 
beaucoup  de  recherches  et  de  questions 
éclaircies.  3"  Des  jeux  gymniques  des 
anciens,  traité  aussi  savant  que  le  pré- 
cédent, in-folio,  1595.  Il  y  a  beaucoup 
à  apprendre  dans  ces  différens  ouvrages, 
mais  il  faut  y  chercher  l'instruction  ,  et 
non  le  plaisir.  Il  y  règne  quelquefois  de 
la  confusion,  et  le  stile  n'est  pas  agréable. 
FAURE  (  Charles  ) ,  abbé  de  Ste.-Ge- 
neviève  et  prejnier  supérieur-général  des 
chanoines  réguliers  de  la  congrégation 
de  France  ,  vit  le  jour  à  Luciennes ,  pro- 


23o  FAU 

che  St.-Gerivain  en  Laye  ,  d'une  famille 
noble.  Il  entra  dans  l'abbaye  de  Sainl-Vin- 
cent  de  Senlis ,  et  la  réforma  par  ses  con- 
seils et  par  ses  exemples.  Celte  réforme 
fut  suivie  de  celle  de  l'abbaye  de  Ste.- 
Geneviève  de  Paris  ,  et  de  près  de  60  au- 
tres maisons.  Le  réformateur  fut  nommé 
général  de  celle  nouvelle  congrégation. 
Il  travailla  avec  des  peines  et  des  fati- 
gues incroyables  à  rétablir  l'ancienne 
discipline.  Il  mourut  saintement  en  1644, 
à  50  ans,  laissant  une  Conduite  pour  tes 
novices,  et  d'autres  ouvrages.  La  Con- 
duite a  été  réimprimée  en  177  5.  Le  Père 
Chartonnet  a  publié  la  Vie  duPèreFaure, 
en  lG98,in-4.  Elle  renferme  l'hisloire 
des  chanoines  réguliers  de  la  congréga- 
tion de  France ,  et  l'esprit  de  leur  fonda- 
teur que  le  Père  Faure  avait  commencé 
lui-même.  Elle  est  écrite  d'une  manière 
édifiante. 

FAURE  (  François  ) ,  cordelier  né  en 
1612,  d'une  ancienne  famille  del'Angou- 
raois,  sous-précepteur  de  Louis  XIV, 
évêque  de  Glandèves ,  puis  d'Amiens , 
mort  d'apoplexie  à  Paris  le  1 1  mars  1 687  , 
âgé  de  76  ans,  parvint  à  l'épiscopat  par 
son  talent  pour  la  chaire.  C'est  lui  qui 
fit  cette  application  du  vers  de  Virgile 
à  la  reine ,  lorsque  prêchant  la  passion  à 
Saint-Germain-l'Auxercois ,  il  fut  dans  le 
cas  de  recommencer  son  sermon  à  l'ar- 
rivée de  cette  princesse  : 

Infuiiduin,  regiiia  ,  jubés  reiioTare  doloreni  ; 

application  heureuse, mais  déplacée 
quant  à  la  sainteté  du  sujet  eti  du  lieu. 
On  a  de  lui  plusieurs  oraisons  funèbres , 
entre  autres  celle  d'Anne  d'Autriche,  qui 
avait  fait  beaucoup  de  cas  de  ses  lumières 
et  de  ses  vertus.  C'était  un  homme  de 
bien  et  d'un  grand  zèle  pour  l'ortho- 
doxie; les  jansénistes  ne  lui  ont  pas  par- 
donné d'avoir  censuré  les  Lettres  Provin- 
ciales, et  la  fameuse  traduction  du  nou- 
veau Testament,  de  Mons. 

FAURE.  Voyez  VERSonis. 

•  FAUKE  (  Jean-Baptiste  ) ,  jésuite  , 
naquit  à  Rome  le  25  octobre  17  02,  de 
parens  français  d'origine.  Il  fit  ses  études 
au  collège  romain ,  dirigé  par  le  Pères  jé- 
suites ,   dont  il  prit  l'habit  le  30   mars 


FAU 

1738.  Il  remplit  successivement  les  chai- 
resdephilosophie,deconlroversc,de  théo- 
logie scolastique,  et  des  saintes  écritures. 
Le  Père  Faure  professa  pendant  trente 
années,  et  fut,  sans  contredit,  le  pre- 
mier théologien  de  sou  siècle.  Son  ensei- 
gnement était  solide  :  nullement  embar- 
rassé parcelle  foule  de  questions  inu- 
tiles et  oiseuses  qui  font  perdre  de  vue 
d'autres  plus  importantes,  son  cours  em- 
barrassait plusque  des  discussions  tliéolo- 
giques  ou  une  compilation  de  points  spé- 
culatifs ;  c'était  un  corps  complet  de 
doctrine  théologiqtie.  Les  papes  Benoît 
XIV,  et  Clément  XIII,  ne  dédaignaient 
pas  de  le  consulter  dans  les  matières  les 
plus  graves.  Lors  de  la  suppression  des  jé- 
suites ,  il  fut  enfermé  par  les  ordres  de 
Clément  XIV  dans  le  château  Saint-Ange, 
avec  plusieurs  chefs  de  son  ordre  ;  et  on 
prit  cette  rigoureuse  mesure  envers  le  Père 
Faure ,  parce  que  l'on  craignait  que  sa 
plume  savante  ne  prît  la  défense  de  ce 
même  ordre  qu'on  venait  de  proscrire. 
Pie  VI ,  en  rendant  la  liberté  aux  jésuites 
captifs,  permit  au  Père  Faure  de  demeurer 
dans  sou  couvent  de  Jésus  ;  mais  les  en- 
nemis des  jésuites  l'en  firent  bientôt  ex- 
pulser. Il  se  retira  à  Viterbe,  où  les 
habitans  lui  firent  l'accueil  le  plus  dis- 
tingué, et  où  il  rédigea  en  2  vol.  in-4 ,  une 
Défense  du  fameux  décret  du  roi  Dési- 
dère ,  décret  si  honorable  pour  cette 
ville,  et  qui  existe  dans  son  palais  mu- 
nicipal. La  vie  de  ce  pieux  ecclésiastique 
était  partagée  entre  ses  devoirs  religieux, 
ses  études  et  les  soins  qu'il  donnait  aux 
pauvres  et  aux  infirmes.  Il  mourut  à  Vi- 
terbe, le  25  avril  1777,  âgé  de  75  ans. 
On  lui  fit  de  magnifiques  funérailles  ;  son 
portrait  fut  placé  dans  la  grande  salle  du 
palais  municipal,  et  son  éloge  fut  pronon- 
cé dans  l'académie  littéraire  de  cette  ville. 
Il  a  laissé  1"  Thèses  polemicœ,  etc. 
^ccedit  difsertatio  de  capituUs  S.  Ce- 
lest  ino  II  olint  tributis,  etc.  ,  Rome, 
1754  ;  2°  Dissertatio  polemica  de  jure  re- 
galiœ  et  primarum  pœnnrum  contra 
publicistas  protestantes ,  Rome,  1753; 
3"  Dissertatio  polcmica  in  recentiora 
quœdam  erronea  systemata  de  morum 
dngmatibus  ,  Rome,  1753;  4'  De  praxi 


FAU 

guelphellnnià  in  dilatione  sacramentalis 
absolutionis;  b°  Diserlatio  polcmicn  ad- 
vcrsus  Edmundi  Riclierii poUiiam  eccle- 
sinsticam;  G°These.s  tlieologicœ  etpolemi- 
Ciiedejurenaturœacgentium  contra  Gra- 
lium.. . .  Hobbe^um ,  Puff'cndorfium ,  etc. 
Rome,  1757;  7°  S.  Jugiistini  cnchiri-* 
dion...  noiis  et  assertionibus  theologicis 
illustratum,  Rome,  17  55  ;  8'  Conclusio- 
nés  univevsœ  iheologiœ ,  Rome,  1766; 
9°  Brevis  Apparatus  ad  thcologiam ,  et 
jus  canonicum,  Rome,  1751.  En  italien  : 
10°  Supplément,  ou  Supple'mens  aux 
premières  animadveisions  de  M.  Sam- 
pieri ,  dans  la  cause  du  vénérable  Jean 
Palafox  ;  11°  A  l'auteur  des  deux  Let- 
tres inlhiûées  :  Avis  salutaires,  Naples, 
177  4  :  12"  deux  petits  ouvrages  très  in- 
léressans  sur  la  dévotion  du  sacré  cœur 
de  Jésus  ;  1 3°  Essais  théologiques  pour 
former  un  errata  corrigé,  Lugano, 
1 7  7  3;  1 4"  Jugement  impartial  sur  la  con- 
troverse entre  les  Pères  conventuels  et 
les  observnntins;  ouvrage  posthume,  etc. 
*  FAURIS  DE  SAINT -VINCENT 
(  Alexandre-Jules-Antoiae),  président  à 
la  cour  royale  d'Aix,  naquit  dans  cette 
ville  dans  le  mois  de  septembre  17  50, 
d'une  famille  distinguée  ;  il  était  arrière- 
petit  fils  de  Pauline  de  Grignan,  marquise 
de  Cimiane ,  et  petit-fils  de  M""*  de  Sévi- 
gné.  Avant  la  révolution  il  était  devenu 
président  à  mortier  au  parlement  de 
Provence,  et  il  occupa  celte  place  jus- 
qu'à la  suppression  des  cours  souveraines. 
Pendant  les  premières  années  de  nos 
troubles  politiques ,  il  fut  maire  de  sa 
ville  natale.  Le  département  des  Boucbes- 
du-Rhône  le  nomma  en  1809  député  au 
Corps  législatif,  d'où  il  passa  en  1814  à 
la  chambre  des  députés.  Il  ne  se  passa 
rien  d'intéressant  dans  sa  vie  politique 
et  législative,  et  il  ne  parut  guères  à  la 
tribune  que  pour  demander  la  franchise 
du  port  de  Marseille.  Il  avait  été  nommé 
dans  le  mois  de  juin  1811,  président  à  la 
cour  impériale  d'Aix  ;  il  fut  continué  dans 
les  mêmes  fonctions  à  la  cour  royale  ré- 
formée par  Louis  XVIII.  Les  momens  de 
loisir  que  lui  laissaient  ses  fonctions 
n'étaient  point  perdus  pour  les  lettres  ; 
Fauris  les  employait  à  l'élude  des  sciences 


FAU  a3t 

et  surtout  de  l'archéologie.  11  était  par- 
venu ainsi  à  acquérir  une  connaissance 
approfondie  des  monumens  de  l'antiquité 
et  du  moyen  âge  ;  il  a  laLssé  une  riche 
collection  de  médailles  et  publié  plusieurs 
écrits  estimés ,  parmi  lesquels  on  remar- 
que :  1°  Mémoire  sur  V ancienne  position 
de  la  cité  d'Aix  ,  Paris  ,  1 81 2  ;  2"  Notice 
sur  les  lieux  où  les  Cimbres  et  les  Teutons 
ont  été  défaits  par  Marins ,  et  sur  le 
séjour  et  la  domination  des  Goths  en 
Provence,  Paris,  1814  ;  Z"  Mémoire  sur 
tétat  des  lettres  et  des  arts ,  et  sur  les 
mœurs  et  usages  suivis  en  Provence  dans 
le  1 5*  siècle,  Paris,  1 8 1 4  ;  4"  Mémoire  sur 
les  bas-reliefs^  des  murs  et  portes  exté- 
rieures de  JVotre-Dame  de  Paris ,  et  sur 
les  bas-reliefs  intérieurs  du  chœur  de  la 
même  église ,  Aix  ,  1815,  etc.  L'académie 
des  Inscriptions  et  belles-lettres  avait  ré- 
compensé les  efforts  de  ce  savant  en  le 
plaçant  le  7  août  1816,  sur  la  liste  de  ses 
membres  associés  libres.  Fauris  est  mort 
à  Aix  le  15  novembre  1819  à  l'âge  de  70 
ans. 

FAUST.  Voyez  Fust. 

FAUSTA  (  Flavia  Maximiana  ) ,  fille  de 
Maximilien  Hercule ,  et  femme  de  l'empe- 
reur Constantin.  Dans  les  premiers  temps 
de  son  mariage,  elle  fut  un  modèle  de 
vertu  ;  mais  la  suite  ne  répondit  pas  à  de 
si  heureux  commencemens.  Toutes  les 
pasîsions  s'allumèrent  tout  à  coup  dans 
son  cœur.  Elle  s'abandonna  aux  personnes 
les  plus  viles ,  jeta  des  regards  incestueux 
sur  Crispe ,  fils  de  Constantin  ,  et  ne  put 
l'attendrir.  Irritée  de  sa  résistance  ,  elle 
joignit  la  calomnie  à  l'inceste ,  et  l'accusa 
auprès  de  l'empereur  d'avoir  voulu  la. 
violer.  Elle  fit  mettre  à  mort ,  par  cette 
imposture ,  celui  qui  avait  refusé  de  se 
souiller  d'un  crime  horrible.  Constantin, 
instruit  trop  tard  de  ses  débauches  et  de 
sa  scélératesse ,  vengea  la  mort  de  son 
fils ,  et  son  propre  honneur  si  cruellement 
outragé.  Il  la  fit  étouffer  dans  un  bain 
chaud,  l'an  327  de  Jésus-Christ. 

FAUSTE ,  évêque  de  Riez ,  né  vers  l'an 
390  ,  dans  la  Grande-Bretagne,  quitta  le 
barreau  où  il  brillait ,  pour  s'ensevelir 
dans  le  monastère ,  de  Lérins.  Il  en  fut 
abbé  vers  l'an  433 ,  lorsque  saint  Maxime 


232  F  AU 

quitta  ce  poste  ^our  gouverner  IVglise 
de  niez.  Il  lui  suecMa  dans  cet  évéché 
vers  455,  fut  exile  en  481  ,  et  mourut 
\crs  l'an  485.  On  a  de  lui  un  Traité  du 
libre  arbitre  et  de  la  grâce ,  où  il  relève 
trop  les  forces  de  la  natiue,;  et  d'autres 
ouvrages  ,  dans  la  Bibliothèque  des  Pères. 
Le  nom  de  Fauste  était  autrefois  dans  le 
(Catalogue  des  saints  de  Gcnnadius;  mais 
Molanus  {De  Martyrologiis ,  cap.  13)  a 
montré  qu'il  n'avait  jamais  été  mis  dans 
le  Catalogue  des  saints  par  l'église  ro- 
maine ,  et  qu'il  ne  ge  trouve  ]»as  dans  le 
Martyrologe  d'Usuat-d.  Simon  Bartel ,  au- 
teur d'une  Histoire  chronologique  des 
évêques  de  Riez  ,  a  mis  à  la  fin  de  son 
ouvrage  une  Apologie  de  Fauste ,  que  les 
curieux  pourront  consulter. 

FAUSÏINE  (An/lia  Galcria  Fausti- 
na),  née  l'an  104,  d'Annius  Verus,  préfet 
de  Rome,  joignait  à  la  splendeur  d'une 
origine  très  distinguée,  une  beauté  par- 
faite et  un  esprit  fin,  délié  et  insinuant. 
Klle  épousa  Antonin,  long-temps  avant 
qu'il  parvînt  à  l'empire.  L'envie  de  plaire 
et  le  goût  pour  la  volupté  l'engagèrent 
d'abord  dans  la  galanterie,  et  ensuite  dans 
un  libertinage  effréné.  Elle  devint  la  fable 
de  Rome.  Antonin ,  instruit  de  ses  débau- 
ches, se  contenta  d'en  gémir.  Elle  mou- 
rut comme  elle  avait  vécu,  dans  le  dérè- 
glement, l'an  141.  Antonin  lui  fit  éiever 
des  autels  et  des  temples.  Faustine  sa  fille, 
dont  nous  allons  parler,  se  forma  sur  l'iu- 
fame  modèle  de  sa  mère. 

FAUSTINE  {AnniaFaustina),  dite 
Faustine  la  Jeune,  fille  d'Antonin  le  Pieux 
et  de  la  précédente ,  épousa  l'empereur 
Marc-Aurèle.  La  nature  lui  avait  accordé 
la  beauté,  l'esprit  et  les  grâces;  elle  abusa 
de  ses  dons.  Du  plaisir  elle  passa  à  la  dé- 
bauche, et  de  la  débauche  aux  derniers 
excès  de  la  lubricité.  Le  sénateur  et  le 
chevalier  romain  étaient  confondus  chez 
elle  avec  l'affranchi  et  le  gladiateur.  Pour 
mettre  le  comble  à  ces  horreurs,  elle  s'a- 
bandonna à  son  gendre,  et  écouta  sans 
rougir  les  reproches  que  lui  en  fit  sa  fille. 
Il  ne  lui  resta  aucune  trace  de  pudeur.  On 
assure  que  son  mari,  instruit  de  ses  dé- 
réglemens,  feignit  de  les  ignorer;  qu'il 
alla  même  quelquefois  jusqu'à  récompen- 


FAU 
xer  ses  amans;  et  que  lorsqu'on  lui  con- 
seilla de  la  répudier,  il  répondit  :  «  Il 
»  faudrait  donc  que  je  lui  rendisse  sa 
»  dot  » ,  c'est  à-dire  l'empire.  Réponse 
peu  assortie  aux  brillantes  idées  que  les 
auteurs,  les  modernes  surtout,  nous  font 
t  concevoir  de  Marc-Aurèlc.  On  ajoute  que 
ce  prince  philosophe  éleva  aux  grandes 
charges  de  l'empire  ceux  qui  souillaient 
son  lit ,  et  que  le  peuple  ne  manquait  pas 
d'en  rire.  Faustine,  malgré  ses  débordc- 
mcns  monstrueux,  fut  honorée  dans  les 
temples  comme  une  divinité.  On  institua  ' 
en  son  honneur  les  fêtes  faustinicnnes ; 
et  des  prêtres  mercenaires  firent  fumer 
l'encens  à  l'autel  de  cette  prostituée,  avec 
autant  de  profusion  qu'à  celui  de  Diane, 
la  déesse  des  vierges.  (  Des  mi'daillcs  fu- 
rent faites  en  son  honneur  :  elle  y  porte 
le  titre  de  Diva ,  mater  castrorum ,  pu- 
dicitia,  légende  étrange  pour  une  prosti- 
tuf'e,  )  Elle  mourut  l'an  17  5  au  bourg  de 
Halale,  situé  au  pied  du  mont  Taurus. 
Jacques  Marchand  a  fait  de  vains  efforts 
pour  la  justifier,  dans  une  dissertation  ré- 
futée d'avance  par  tous  les  témoignages 
de  l'ancienne  histoire. 

FAUSTINE  (Maxima  Faustina),  fem- 
me de  l'empereur  Constance,  fils  du  grand 
Constantin,  futmariéeàceprince  en  301, 
après  la  mort  d'Eusébie,  et  resta  enceinte 
d'une  fille  nommé  Constantia,  qui  fut  de- 
puis mariée  à  l'empereur  Gratien.  C'est 
cette  princesse  dont  on  voit  le  buste  sur 
le  bel  onyx  conservé  dans  le  trésor  de  St.- 
Lambert  à  Liège ,  une  des  précieuses  an- 
tiques qu'on  puisse  voir  en  ce  genre. 

FAUSTUS(  Jean),  fameux  nécroman- 
cien dans  le  commencement  du  1 6* siècle, 
que  quelques-uns  disent  natif  de  la  .Soua< 
be;  d'autres  d'Anhalt,  et  d'autres  encore 
de  la  Marche  de  Brandebourg,  près  de 
Soltwedel.  Son  père  était  un  paysan,  qui 
envoya  ce  fils  à  ses  parens  à  Wittemberg, 
où  il  fréquenta  le  collège  et  s'attira  par 
son  esprit  l'affection  de  tous  ceux  qui  le 
connaissaient.  A  l'âge  de  16  ans,  il  alla  à 
Ingolstadt  pour  y  étudier  la  théologie,  cl 
3  ans  après  il  prit  le  degré  de  maître  es» 
arts.  Il  quitta  ensuite  la  théologie,  et 
s'appliqua,  avec  une  assiduité  extraordi- 
naire à  la  médecine,  et  à  l'astrologie  ju- 


FAU 

diclaire.  Philippe  Camerarius  dit  qu'il 
t'tudia  la  magie  à  Cracovie,  où  il  assure 
qu'on  eu  donnait  alors  des  leçons.  Pen- 
dant cet  intervalle  de  temps,  Faustus hé- 
rita des  biens  considérables  de  son  oncle 
paternel  qui  mourut  à  Wittemberg.  Il 
employa  cet  héritage  à  la  débauche,  s'a- 
donna entièrement  à  toutes  sortes  de  sorti- 
lèges et  aux  conjurations  des  esprits,  et  se 
pourvut  de  tous  les  livres  magiques.  Jean 
Wagner,  fils  d'un  prêtre  de  Wasserbourg, 
fut  le  domestique  fidèle  qu'il  se  choisit, 
et  à  qui  il  communiqua  tous  ses  secrets. 
Faustus  se  servit  aussi,  pendant  deux  ans, 
des  instructions  de  Christophe  Rayllin- 
ger, fameux cristallomancien.  Enfin,  l'in- 
fortuné Faustus  conjura,  dit-on,  le  dé- 
mon, traita  avec  lui  pour  24  ans,  et  en 
reçut  un  esprit  familier  pour  son  service, 
nommé  Mcpidstophèles.  On  rapporte  que 
Faustus  joua  des  tours  surprenans  à  la  cour 
de  l'empereur  Maximilien;  mais  qu'à  la 
fin  le  démon  l'étrangla  et  le  déchira  d'une 
manière  effroyable  dans  le  village  de  Rim- 
lich.  Il  avait  alors  41  ans.  George  Rodol- 
phe W'iedeman  raconte  tout  cela  dans 
l'histoire  de  la  Fie  de  Jean  Faustus,  qui 
sans  doute  paraîtra  fort  singulière  ;  mais 
que  les  auteurs  contemporains ,  ceux 
même  qui  ne  passent  ni  pour  crédules  ni 
superstitieux,  rapportent  comme  indubi- 
table. Le  fameux  Mélancbthon,  qui  vi- 
vait dans  ce  temps-là,  en  parle  comme 
d'une  affaire  notoire.  Et  dans  notre  siè- 
cle, où  la  philosophie  a  long-temps  ri  de 
ces  sortes  d'histoires,  on  la  voit  courir 
elle-même  avec  une  criminelle  curiosité 
après  tout  ce  qui  peut  les  reproduire  (1). 

fiî  M.  d'Aiclienliolï  ,  dans  son  Tabieau  de  C Angleterre , 
l'aii»,  1788  ,  fiiit  mention  d'un  docleur  Falkon  ,  qui  peut 
itre  cousidéié  comme  le  pendant  de  Fauslus.  «  Il  y  a,  dit- 
>•  il,  parmi  celte  nation  un  iiomme  extraordinaire  .qui, 
•  depuis  trente  ans  est  célèbre  dans  les  annales  cabalisti- 
»  ques.  11  se  nomme  Caïii  Clientil  Falk ,  et  est  connu  gé- 

■  néialement  sous  le  nom  de  docteur  Falkon.  Un  certain 
»  comte  de    Kanzow  ,  mort   depuis    peu    au   service  de 

France  comme  maréchal  de  camp,  assure  dans  ses  mé- 
»  moires  cabalistiques,  nianiqnes  ,  etc.,  avoir  vu  ce  Falk 
»  dans  le  pays  de  Brunswick,  sur  une  des  terres  de  son 

■  père  ,  en  présence  de  beaucoup  de  personnes  connues  , 
»  qu'il  nomme  toutes  et  qu'il  prend  à  témoin  de  la  vérité 
»  de  ce  qu'il  avance.  Falk  s'est-il  servi  dans  celle  opération 
»  de  la  méthode  de  Schropfer?  Je  n'en  sais  rien.  Ce  qu'il  y 
»  a  de  certain  ,  c'est  que  cet  licmmc  vit  actuellement  à 
»  Londres.  Lorsqu'il  sort,  ce  qui  arrive  très  rarement,  il 
»  est  toujours  revêtu  d'un  long  lai  ir ,  qui  va  très  bien  avec 

■  sa  longue  barbe  blanche  et  sa  ligure  noble  et  iutéres- 

V. 


FAV  233 

F'oijezA.swoDKE,  Bhon  (  le),  Brown  (Tho- 
mas ) ,  DEtRio ,  etc. 

FAEVEAU  ou.  Fulvius  (Pierre), 
poète  latin ,  natif  du  Poitou  ,  ami  de 
Muret  et  de  Joachim  du  Bellay ,  mourut  k 
Poitiers  ,  à  la  fleur  de  .son  âge ,  en  1 562. 
Il  ne  nous  reste  de  lui  que  des  fraginens 
insérés  dans  les  Deliciœ  poetarum  gal- 
lorurn  de  Gruter. 

*  FAVAllT  (Charles-Simon) ,  auteur 
dramatique,  né  à  Paris  le  13  novembre 
1718,  et  mort  le  12  mai  1792,  était  fils 
d'un  pâtissier  qui  s'attribuait  l'inven- 
tion des  échaudés  et  qui  faisait  d'assez 
bonnes  chansons.  Le  jeune  Favart  fit  de 
bonnes  études  au  lycée  Louis  le  Grand. 
Il  débuta  par  une  pièce  de  vers  qui  n'an- 

>  santé.  Il  est  actuellement  âgé  de  70  ans  à  peu  prés. 
»  Je  ne  me  donnerai  pas  la  peine  de  rapporter  ici  toutes 
»  les  choses  incroyables  et  extraordinaires  qu'on  raconto 
»  de  ce  vieillard,...  Du  prince voulut  aller  le  voir,  il  y 

>  a  quelques  années;  il  se  présenta  à  la  porte  de  Falkon  , 
»  et  ne  fut  point  reçu.  »  Le  comte  de  Mirabeau  dans  sa 
Monarchie  ijruisiemie  ,  parle  aussi  en  plusieurs  endroits 
du  pofit  des  philosophes  modernes,  des  princes  et  autres 
brujans  personnages  ,  pour  la  magie,  a  Voyei,  dit-il,  en 
»  Allemagne  tant  de  princes  ivres  de  l'espoir  et  de  l'attentu 
»  desmoyenssurnaturels  de  puissance,  évoquer  les  esprits, 
»  explorer  l'avenir  et  tous  ses  sejrets  ,  tenter  de  découvrir 
«  la  médeciue  universelle  ,  de  faire  le  grand  œuvre  ,  et 
»  pour  étanoher  leur  soif  insatiable  de  domination  et   de 

>  trésors,  ramper  à  la  voix  de  leurs  thaumaturges,  qnu 
»  dirige  un  sceptre  inconnu.  »  Ailleurs  il  parle  d'un  nom- 
mé Schropfer,  cafetier  de  Leipsick  ,  auquel  le  duc  Charles 
de  Courlande  avait  fait  donner  des  cours  de  bâton  ,  mai» 
qui  sut  ensuite  tellement  fasciner  ce  prince,  et  une  grande 
partie  des  personnes  les  plus  considéiahles  de  Dresde  et  de 
Leipsiek,  qu'il  joua  un  assez  grand  rôle.  «  Dealers,  dU-il, 
»  on  vit  reparaître  en  Europe  les  folles  de  l'Asie  ,  de  lit 

I  (Ihine  , la  médecine  universelle,  l'art  de  faire  de  l'or 
»  et  des  diamans,  le  breuvage  du  rimmortarité,  etc.,  etc. 
»  Le  genre  particulier  de  Schropfer  était  surtout  l'éïoca- 

>  tion  des  mânes  :  il  commandait  aux  esprits  ;  il  faisait  ap- 
»  paraître  à  son  gré  les  moris  et  les  puissances  invisibles. 
»  Onsait  quel  futle  dénoûment  de  son  drame.  Aprèsa.oir 
»  consumé  des  sommes  immenses  à  ses  adhéreiis,  après 
»  avoir  aliéné  le  bon  sens  de  plusieurs  d'entre  eux,  dans 
»  l'inipossibililé  de  se  soutenir  plus  long-temps ,  il  se  cassa 
»  la  tête  d'un  coup  de  pistolet,  dans  un  bosquet  près  de 
»  Ltipsick.  A  Schropfer  succéda  Saint-Germain  ,  qu'un 
»  comte  de  Laïubert  avait  annoncé  dans  son  Mémorial 
»  d'un  mondain  ,  etc.  »  Il  est  encore  parlé  plus  amplement 
de  ces  farces  dans  VEsaai  sur  la  secte  des  illuminés,  ou- 
vrage d'ailleurs  indigeste,  où  toutes  les  notions  sont  con- 
fondues. Le  cagliostrocisme  et  le  mesmérisnie  présentent 
des  scènes  du  même  genre.  «  Qui  eût  cru  ,  dit  un  auteur, 
»  qu'un  siècle  où  l'existence  de  Dieu  était  un  problème  , 

II  où  presque  tous  les  hommes  doutaient  de  celle  de  leur 
»  âme  ,  et  ne  répondaient  que  parmi  souris  moqueur  & 
11  lont  ce  qui  supposait  celle  des  anges  et  des  démons;  qui 

>  eût  cru  .  ou  qui  eût  dû  le  prévoir,  qu'un  tel  siècle  ,  ait 
»  lieu  de    finir  par  une  entière   incrédulité,  finirait  par 

>  courir  avec  autant  d'avidité  à  du  surnaturel  de  toute 
Il  espèce  ,  qu'il  avait  couru  si  long-temps  après  des  livres 

>  qui  en  détruisaieut  jusqu'àla  possibilité  ?» 

i5.. 


234  l'AV 

nonçait  pas  un  grand  talent  :  Discours  sur 
la  difficulté  dp.  réussir  en  poésie  :  elle  fut 
suivie  d'un  poèrac  intitule  :  la  France  dé- 
Itprée  par  Jeanne  d'Arc.  C'était  au  théâtre 
qu'il  devait  obtenir  des  succès  réels  ; 
et,  de  tous  ceux  qui  ont  travaillé  pour 
l'opéra  comique,  c'est  lui  qui  a  le  mieux 
saisi  l'esprit  de  ce  genre  de  spectacle.  Il 
a  su  y  répandre  de  l'intérêt,  du  naturel, 
de  la  gaîté,  de  la  finesse  et  tous  les 
agrémens  dont  il  est  susceptible.  Il  a 
donné  à  l'Opéra-comique  et  aux  Italiens 
plus  de  GO  pièces,  presque  toutes  rem- 
plies d'esprit  et  de  délicatesse.  Celles  qui 
ont  obtenu,  et  qui  même  obtiennent  en- 
core le  plus  de  succès  sont  en  grand 
nombre  ,  la  Chercheuse  d'esprit  qui  sera 
toujours  la  plus  ingénieuse  comme  la 
plus  agréable  de  ces  sortes  de  produc- 
tions ,  Nincttc  à  la  cour,  Acajou ,  yîn- 
neite  et  Lubin,  la  Fcte  du  chùteau,  la 
Fée  Urgèle ,  les  Moissonneurs ,  la  Ro- 
sière de  Salency  ,  l  Amitié  à  l'épreuve  , 
la  Belle  Arsène,  l'Astrologue  de  village, 
etc.  Sa  comédie  de  Soliman  II,  ou  les 
Trois  Sultanes,  et  l'Anglais  à  Bordeaux, 
prouvent  qu'il  pouvait  s'élever  au-desstis 
du  genre  de  l'opéra  comique.  Ses  pièces 
de  théâtre  ont  été  réunies  en  8  vol.  in-8, 
Paris,  1763,  10  vol.  in-8.  1770,  et  son 
Théâtre  choisi  en  1809,  3  vol.  in-8,  avec 
la  liste  chronologique  de  tous  ses  ou- 
vrages. 

*  FAVART  D'HERBIGNY  (Nicolas- 
Remi),  général  de  division  dans  le  corps 
royal  du  génie,  né  à  Reims  en  1736  et 
mort  à  Paris  en  1800,  entra  au  service 
dans  l'arme  du  génie,  se  distingua  parti- 
culièrement à  la  défense  de  Belle-Ile 
contre  les  Anglais,  et  eut  la  plus  grande 
part  à  l'exécution  des  ouvrages  exté- 
rieurs, qui  arrêtèrent  l'ennemi  plus  long- 
temps que  la  place  même.  Il  voulut  être 
de  toutes  les  sorties  ,  fut  grièvement 
blessé ,  et  sortit  par  la  brèche ,  ainsi 
que  toute  la  garnison,  avec  du  canon  et 
tous  les  honneurs  de  la  guerre.  11  ser- 
vit ensuite  plusieurs  années  à  la  Marti- 
nique. De  retour  en  France,  il  fut  char- 
gé de  la  construction  du  fort  de  Chà- 
teauneuf,  et  de  la  petite  expédition  de 
Genève  en  1782.  Commandant  la  place 


FAV 

de  Neuf-Brisach  en  1792,  il  eut  le  bon- 
heur de  calmer  une  insurrection  afifreuse 
qui  éclata  dans  les  troupes  campées  sur 
les  glacis,  et  sauva  la  vie  à  plusieurs  per- 
sonnes en  exposant  la  sienne.  Chargé  en- 
suite de  mettre  en  défense  toutes  les 
places  de  l'Alsace ,  il  remplit  cet  ordre 
avec  autant  de  promptitude  que  d'intelli- 
gence. Pendant  la  révolution,  il  se  mon- 
tra modéré  dans  ses  priiicipes  et  ses  ac- 
tions. On  lui  doit  des  Mémoires  précieux 
sur  la  défense  des  côtes  et  sur  les  recon- 
naissances militaires.  C'est  par  erreur 
qu'on  lui  a  attribué  un  dictionnaire  d'his- 
toire naturelle  qui  contient  les  testacées, 
Paris,  1755,  3  vol.  petit  in-8  :  cet  ouvrage 
est  de  son  frère,  Christophe-Elisabeth 
Favart  d'Herbigny  ,  chanoine  de  Reims, 
mort  en  1793. 

*  FAVART  DE  LANGLADE  (Guil- 
laume-Jean ,  baron  )  ,  né  à  St. -Florent , 
département  du  Puy-de-Dôme ,  le  20 
avril  17C2,  fut  reçu  en  17  85  avocat  au 
parlement  de  Paris.  En  1792,  il  fut  en- 
voyé près  le  tribunal  d'Issoire ,  en  qua- 
lité de  commissaire  national ,  place  qu'il 
remplit  avec  beaucoup  de  sagesse  pen- 
dant nos  troubles  révolutionnaires.  En 
1795,  il  fut  élu  membre  du  conseil  des 
Cinq-cents:  réélu  en  1798,  il  devint 
tribun  après  la  révolution  du  1 8  brumaire 
et  fut  élevé  à  la  dignité  de  président  du 
tribunat.  Favart  prit  peu  de  part  aux 
discussions  politiques  de  ces  deux  assem- 
blées ;  mais  il  s'occupa  beaucoup  des 
travaux  de  législation  ,  et  fit  différens 
rapports  très  importans  sur  le  notariat , 
sur  les  successions ,  sur  le  divorce  ,  sur 
les  enfans  naturels,  etc.  En  1804,  il 
vota  pour  la  création  de  l'empire  et  tira 
ses  motifs  de  la  nécessité  d'une  monar- 
chie dans  un  pays  comme  la  France. 
Après  la  bataille  d'Austerlitz  ,  il  fut  de 
la  députation  envoyée  par  le  tribunat 
pour  complimenter  Ruonaparte,  et  à  son 
retour  il  proposa  de  frapper  une  médaille 
eu  l'honneur  du  guerrier  heureux  que  la 
fortune  poursuivait  alors  de  ses  faveurs. 
Le  tribunat  ayant  été  supprimé ,  Favart 
entra  au  Corps  législatif ,  oii  il  fut  pres- 
que aussitôt  président  de  la  section  de 
l'intérieur,  fut  nommé  en  1 809  conseiller 


FAV 

k  la  cour  de  cassation  ,  et  en  1813  reçut 
le  litre  de  maître  des  requêtes  au  conseil 
d'état.  Envoyé  dans  l'Arriège  pour  une 
mission  extraordinaire,  il  lit  révoquer 
une  sentence  de  déportation  prononcée 
contre  deux  curés ,  accusés  à  la  sollicita- 
tion d'un  prêtre  marié.  Sous  la  première 
restauration,  il  conserva  toutes  ses  pla- 
ces. Au  retour  de  Buonaparte ,  il  resta 
à  la  cour  de  cassation  et  ne  fit  plus  par- 
tie du  conseil  d'état.  Le  département  du 
Puy-de-Dôme  le  nomma  membre  de  la 
chambre  des  représentans;  mais,  comme 
il  ne  prit  aucune  part  aux  discussions  de 
cette  assemblée ,  le  fjouvernement  lui 
rendit  son  emploi  de  maître  des  requêtes 
après  le  second  retour  du  roi.  Nommé 
président  du  collège  électoral  de  la  Co- 
rèze ,  il  fut  député  par  le  département 
du  Puy-de-Dôme  à  la  chambre  de  1815, 
qui  a  été  appelée  chambre  introuvable  , 
par  les  uns  ironiquement ,  et  par  les  au- 
tres pour  s'en  faire  honneur  :  Favart  y 
fut  de  la  minorité.  Réélu  en  1810,  il 
vota  constamment  avec  le  ministère.  Il 
fut  nommé  conseiller-d'état  en  service 
ordinaire,  par  ordonnance  du  25  janvier 
1817  ,  et  présida  plus  tard  une  des  sec- 
tions de  la  cour  de  cassation.  Ce  magis- 
trat vertueux  est  mort  le  14  novembre 
1831,  dans  les  sentimens  les  plus  religieux, 
et  après  avoir  reçu  les  consolations  et  les 
sacremens  de  l'Eglise.  C'était  un  homme 
rempli  de  qualités  aimables  et  de  grandes 
connaissances  en  droit  :  l'un  de  ses  plus 
beaux  titres  de  gloire  est  à^ avoir  travaillé 
à  la  rédaction  des  Codes.  Parmi  les  ou- 
vrage qu'il  laisse  ,  on  remarque  1  °  Con- 
férences du  Code  civil  avec  la  discussion 
particulière  du  conseil-d'état  et  du  tri- 
bunal,  avant  la  rédaction  définitive  du 
chaque  projet  de  loi,  1805,  8  vol. 
in-12  ;  2°  Répertoire  de  la  législation  du 
notariat,  1807,  un  vol.  in-4  ;  3"  Manuel 
pour  Vouverture  et  le  partage  des  suc- 
cessions, avec  l'analyse  des  principes 
sur  les  donations  entre  vifs ,  les  tcsta- 
mens  et  les  contrats  de  mariage ,  1811, 
in-8  ;  4°  Traité  des  privilèges  et  des 
hypothèques ,  1812  ,  in-8.  Ces  ouvrages 
sont  très  estimés  ;  ils  se  trouvent  dans 
la  bibliothèque  de  tous  les  gens  de  loi. 


FAV 


23^ 


et  l'opinion  de  leur  auteur  fait  autorité 
en  matière  de  jurisprudence. 

*FAVIER  (N...),  célèbre  publiciste , 
né  à  Toulouse,  au  commencement  du 
18*'  siècle,  d'une  famille  distinguée,  suc- 
céda à  son  père  dans  l'emploi  de  secré- 
taire-général des  Etats  de  Languedoc. 
Après  avoir  dissipé  sa  fortune,  il  vendit 
cette  charge  et  devint  secrétaire  de  M  de 
la  Chétardie ,  ambassadeur  à  la  cour  de 
Turin.  Dès  lors  il  s'adonna  entièrement  à 
la  politique,  et  surtout  à  la  diplomatie. 
M.  d'Argenson ,  qui  avait  eu  occasion  de 
connaître  sestalens,  l'employa  à  la  ré- 
daction de  divers  mémoires  de  la  plus 
haute  importance.  Favier  rédigea ,  d'a- 
près ses  instructions,  un  mémoire  intitulé 
Ré  flexions  contre  le  traité  de  1756,  entre 
la  France  et  l'Autriche.  Ce  mémoire  ,  un 
des  meilleurs  qui  aient  paru  sur  la  diplo- 
matie de  ce  temps-là,  lui  attira  beaucoup 
d'ennemis.  Il  fut  cependant  chargé  de 
diftérentes  missions  secrètes  en  Espagne 
et  en  Russie,  sous  le  ministère  de  M.  de 
Choiseul;  mais  ayant  composé  pour  le 
comte  de  Broglie  ,  chargé  par  Louis  XV 
de  suivre  une  correspondance  secrète 
avec  les  ambassadeurs  de  France  auprès 
de  différentes  cours,  plusieurs  //lemotrey 
dirigés  contre  le  système  et  les  instruc- 
tions ostensibles  du  ministère,  il  fut  obli- 
gé de  s'expatrier.  Il  se  rendit  en  Angle- 
terre et  en  Hollande,  oîi  il  vécut  dans  la 
société  des  hommes  les  plus  distingués 
par  leur  esprit  et  par  leur  rang.  Poursuivi 
par  la  haine  des  puissances  contre  les- 
quelles il  avait  écrit,  il  fut  enlevé  à  Ham- 
bourg, conduit  à  Paris,  comme  impliqué 
dans  une  conspiration  fabuleuse,  avec  le 
baron  de  Bon ,  Ségur  et  Dumouriez ,  et 
renfermé  à  la  Bastille,  oîi  il  resta  plusieurs 
années,  c'est-à-dire  jusqu'à  l'avénemcnt 
de  Louis  X"VI.  Le  comte  de  Broglie  était 
parvenu  à  le  faire  mettre  en  liberté  ;  mais 
il  ne  put  lui  obtenir  la  rentrée  dans  ses 
emplois ,  dont  son  goût  extrême  pour  la 
dépense  lui  faisait  un  impérieux  besoin. 
Il  se  mit  alors  à  composer  des  mémoires 
sur  les  affaires  du  temps ,  et  dissipait  le 
fruit  de  son  travail  aussitôt  qu'il  l'avait 
reçu.  Il  vécut  ainsi  une  partie  de  sa  vie  ,  • 
dans  une  perpétuelle  alternative  de  rai- 


236  FAV 

sère,  d'aisance  et  de  privations,  d'études 
et  de  dissipation.  Le  comte  de  Vergennes 
qui  avait  apprécié  son  mérite,  lui  lit  don- 
ner une  somme  de  40,000  fr.,  pour  payer 
ses  dettes,  et  une  pension  de  6,000  francs. 
Sur  la  An  de  ses  jours,  il  mena  une  vie 
moins  dissolue,  ne  conservant  de  ses  an- 
ciens goûts  que  celui  de  la  table.  Il  mou- 
rut à  Paris  le  2  avril  1784.  M.  de  Ségur  a 
recueilli  une  partie  de  ses  œuvres  politi- 
ques dans  l'ouvrage  intitulé  Politique  de 
tous  les  cabinets  de  t  Europe ,  pendant 
les  règnes  de  Louis  XJ^et  de  Louis  XV I^ 
1793,  2  vol.  in-8,  et  1802,  3  vol.,  avec 
beaucoup  de  notes  et  observations  de  l'é- 
diteur. Les  autres  ouvrages  de  Favicy,  pu^ 
bliés  la  plupart  sans  nom  d'auteur,  sont 
\°  Le  Spectateur  littéraire  sur  quelques 
ouvrages  nouveaux,  Paris,  1750,  in-l2. 
2°  Essai  historique  et  politique  sur  le 
gouvernement  présent  de  la  Hollande, 
Londres,  1748,  2  vol.  in-12.  Z'' Le  poète 
réformé,  ou  Apologie  pour  la  S émiramis 
de  Voltaire,  Amsterdam,  1748,  in-8. 
h°  Mémoires  secrets  de  Milord  Boling- 
broke ,  traduits  de  l'anglais,  avec  des 
notes  historiques ,  1754,  3  vol.  in-8. 
5"  Doutes  et  questions  sur  le  traité  de 
Versailles,  entre  le  roi  de  France  et  V im- 
pératrice ,  reine  de  Hongrie  ,  1778  et 
1791,  in-8.  6°  Ljcttres  sur  la  Hollande  y 
1780,  2  vol.  in-12.  Il  a  travaillé  avec 
Fréron  à  la  rédaction  du  Journal  étran- 
ger. 

FAVIER  DU  BOULAY  (Henri), 
prieurde  Sainte-Croix  de  Provins,  mort  en 
1753,  à  85  ans,  avait  du  goût  et  de  la 
littérature.  Nous  lui  devons  la  seule  bonne 
traduction  que  nous  eussions  de  Justin 
avant  que  l'abbé  Paul  eût  publié  la  sienne. 
Elles  sont  l'une  et  l'autre  en  2  vol.  in-12. 
On  a  encore  de  lui  d'autres  ouvrages , 
mais  moins  connus  que  sa  version.  Il  s'é- 
tait adonné  à  la  chaire ,  et  avait  prêché 
avec  quelque  succès.  Son  oraison  funèbre 
de  Louis  XIV ,  parut  à  Metz  en  1716  , 
in-fol. 
FAVKES.  Voyez  Fawkes. 
FAVORIN ,  sophiste  célèbre  sous 
l'empereur  Adrien,  était  d'Arles.  Quel- 
ques auteurs  veulent  qu'il  ait  été  eiuiu- 
que ,  et  d'autres  hermaphrodite.  Il  en- 


FAV 

seigna  o-vec  répntation  à  Athènes  et  en- 
suite à  Rome.  Adrien  lui  parlait  souvent 
et  lui  témoignait  de  la  confiance  :  mais 
il  s'en  las.sa  et  le  chassa  de  Rome  avec  les 
autres  philosophes  (  voyez  son  article  ), 
On  dit  que  Favorin  s'étonnait  de  trois 
choses  :  de  ce  qu'étant  gaulois,  il  parlait 
si  bien  grec  ;  de  ce  qu'étant  eunuque ,  on 
l'avait  accusé  d'adultère  ;  et  de  ce  qu'il 
vivait  T  étant  ennemi  de  l'empereur. 

FAVORIN  (Varin,  Varinus  ou  Gnarino), 
né  à  Camérino ,  ville  ducale  dltalie  ,  eu 
1460,  entra  dans  la  congrégation  de 
Saint-Silvestre ,  ordre  de  Saint-Benoît ,  et 
parvint  par  son  mérite  à  rérêché  de  No- 
céra.  Ilestauteur  d'un  Zex/cony/'ec,  qui 
a  été  d'un  grand  usage  autrefois.  La  meil- 
leure édition  de  ce  livre  est  celle  de 
Venise,  1712,  chez  Bartoli,  in-folio.  L'au- 
teur mourut  en  1537.  On  a  encore  de  lui 
des  remarques  sur  la  langue  grecque , 
sous  le  titre  de  Thésaurus  cornucopiœ  , 
149G,  Aide,  in-folio. 

*  FAVRAS  (  Thomas  Mahi  ,  marquis 
de  ),  né  à  Blois  en  1745,  d'une  famille 
ancienne,  dont  les  aïeux  avaient  rempli 
les  premières  places  de  la  magistrature 
dans  leur  province ,  entra  dans  les  mous- 
quetaires en  1 755  ,  et  fit  avec  distinction, 
dans  ce  corps,  la  campagne  de  1761.  Il 
passa  ensuite  dans  le  régiment  de  Bel- 
sunce  en  qualité  de  capitaine,  puis  de- 
vint premier  lieutenant  des  Suisses  de 
Monsieur,  grade  qui  lui  donnait  le  rang 
de  colonel.  En  1776,  il  se  rendit  à  Vienne 
pour  faire  reconnaître ,  devant  le  conseil 
aulique  ,  sa  femme  ,  seule  fille  unique  et 
légitime  du  prince  d'Anhalt-Schawen- 
bourg.  Il  commandait,  en  1787,  unelé- 
gion  en  Hollande ,  lors  de  l'insurrection 
contre  le  stathouder.  De  retour  en  France, 
au  commencement  de  la  révolution,  il 
proposa  plusieurs  projets  sur  les  finances 
et  sur  la  politique,  qui  le  rendirent  sus- 
pect aux  révolutionnaires.  On  sait  que , 
dans  l'état  d'exaltation  oîi  se  trouvaient 
alors  les  esprits,  il  suffisait  aux  meneurs 
de  désigner  une  victime,  pour  que  s» 
perte  fût  certaine.  Le  marquis  de  Favras 
l'ut  accusé,  dans  le  mois  de  décembre 
1789,  d'avoir  proposé  au  gouvernement 
de  lever  sur  les  frontières  une  armée  pour 


FAV 

s'opposer  à  la  nouvelle  constitution,  et 
d'avoir  voulu  introduire  la  nuit  dans  Pa- 
ris une  troupe  armée  qui  devait  assassi- 
ner Bailly  et  La  Fayette,  enlever  le  roi  et 
sa  famille  pour  les  conduire  à  Péronne. 
Quoique  cette  accusation  ne  lût  appuyée 
d'aucune  preuve ,  il  fut  arrêté  par  ordre 
du  comité  des  recherches  de  l'Assemblée 
nationale ,  et  traduit  au  Chàtelet ,  oii  sa 
condamnation  fut  demandée  par  le  peu- 
ple ,  avec  des  hurlemens  cffrayans.  Trois 
témoins  ,  Morel ,  Turcate  et  Marquié  ap- 
puyaient l'accusation  de  leurs  témoigna- 
ges :  ils  disaient  avoir  reçu  de  Favras  la 
communication  de  son  projet:  12,000  sui- 
ses  et  12,000  autrichiens  devaient  se  réu- 
nir à  Jlontargis  et  marcher  sur  Paris.  On 
refusa  d'entendre  les  témoins  à  décharge. 
Favras  se  défendit  avec  beaucoup  de  cou- 
rage :  il  embarrassait  ses  juges  par  la 
justesse  de  ses  réponses.  Le  complot 
dont  on  l'accusait  était  mal  conçu ,  in- 
cohérent dans  les  moyens  de  conduite, 
impossible  dans  l'exécution  ;  il  le  prou- 
va ,  détruisit  victorieusement  les  preuves 
qu'on  lui  opposait ,  et  n'en  fut  pas  moins 
condamné  à  être  pendu,  le  18  janvier 
17  90.  «  Votre  vie,  lui  dit  le  lappor- 
»  leur  en  lui  signifiant  sa  sentence , 
»  est  un  sacrifice  que  vous  devez  à  la 
M  tranquillité  et  à  la  liberté  publiques.  » 
Il  ne  montra  aucune  crainte  dans  ce  mo- 
ment, dicta  sans  se  troubler  une  décla- 
ration très  longue  de  son  innocence , 
la  revit  et  corrigea  même  les  fautes  d'or- 
thographe faites  par  le  greffier,  avec  un 
soin  scrupuleux.  La  place  de  Grève  était 
pleine  d'un  peuple  frénétique  qui  de- 
mandait sa  mort  à  grands  cris.  Il  la  tra- 
versa sans  émotion ,  tout  livré  aux  con- 
solations de  son  confesseur.  Arrivé  au 
lieu  de  l'exécution,  il  prononça  d'une 
voix  ferme  :  Je  meurs  innocent,  et  il 
donna  lui-même  le  signal  de  l'exécution. 
Cette  protestation  et  sa  fermeté  frappè- 
rent d'une  espèce  de  stupeur  ce  peuple 
tourmenté  une  minute  auparavant  de 
convulsions  fanatiques ,  et  la  multitude 
se  retira  triste  et  pensive.  On  le  regarda 
comme  une  victime  sacrifiée  à  la  fureur 
populaire,  et  l'on  ne  doute  pas  que  son 
unique  crime  fut  d'avoir  refusé  de  par- 


FAV  237 

tager  le  complot  de  ceux  qui  méditaient 
la  chute  du  trône.  Prudhomme ,  un  des 
journalistes  du  temps,  dont  le  témoi- 
gnage ne  peut  être  suspect,  rendit  compte 
ainsi  de  sa  défense  :  «  Cet  accusé  parut 
«  devant  ses  juges  avec  tousles  avantages 
»  que  donne  l'innocence,  et  qu'il  sut 
»  faire  valoir,  parce  qu'à  un  esprit  or- 
»  né,  il  joignait  la  facilité  de  s'expiimer 
»  avec  grâces  :  ses  paroles  avaient  même 
»  un  charme  dont  il  serait  difficile  de 
))  se  défendre.  Il  avait  de  la  douceur  dans 
»  le  caractère,  de  l'aménité  dans  le» 
«  manières,  de  la  décence  dans  le  main- 
»  tien  ;  il  était  d'une  taille  avantageuse, 
»  d'une  physionomie  noble  et  qui  pré- 
»  venait  en  sa  faveur....  Dans  tout  le 
»  cours  de  sa  défense ,  il  ne  perdit  ja- 
»  mais  cette  attitude  qui  convient  à  l'in- 
»  nocence  ,  et  il  répondit  à  toutes  les 
»  questions  avec  netteté  et  sans  embar- 
»  ras.  »  L'avocat  qui  le  défendit  avec 
chaleur,  publia  deux  me'nioires  dans  le 
cours  de  la  procédure  On  a  fait  paraître, 
peu  de  temps  après  sa  mort,  son  testament 
et  sa  correspondance  avec  son  épouse, 
qui  produisirent  une  vive  sensation , 
mais  le  crime  était  consommé.  Favras  a 
laissé  des  me'moires  relatifs  aux  troubles 
de  la  Hollande ,  et  un  écrit  sur  les  finan- 
ces. 

*FAVRAT  (François-André  de),  gé- 
néral au  service  de  Prusse  et  gouverneur 
de  la  place  de  Glotz ,  né  vers  1730  et 
mort  en  1804  à  l'âge  de  74  ans,  était 
doué  d'une  force  physique  extraordinaire; 
elle  était  si  grande ,  dit-on ,  qu'un  jour 
il  souleva  un  cheval  avec  son  cavalier,  et 
que  plus  d'une  fois  on  le  vit  prendre  une 
pièce  de  canon  et  la  porter  sur  son  épaule 
avec  autant  de  facilité  qu'un  fantassin 
porte  son  fusil.  Cette  force  étonnante  ne 
lui  fut  point  donnée  par  la  providence 
au  détriment  de  ses  facultés  intellec- 
tuelles :  il  a  laissé  l'ouvrage  suivant  qui 
est  estimé  et  qui  a  pour  titre  :  Me'moires 
pour  servir  à  l'histoire  de  la  guerre  de 
la  re'volution  de  Pologne  depuis  1794 
jusqu'en  1796,  Berlin,  1709,  in-8. 

FAYRE ,  en  latin  Faber  (  Antoine  ) , 
né  à  Bourg  en  Bresse  l'an  1  557  ,  fut  suc- 
cessivement juge-mage  de  Bresse,  pré- 


0.38  FAV 

aident  du  Genevois  poiu'  M.  le  duc  de 
Nemours ,  premier  président  du  sénat  de 
Chambéry,  et  gouverneur  de  Savoie  et 
de  tous  les  pays  eu  deçà  les  monts  ;  il 
mourut  en  1G24.  Ses  ouvrages  contien- 
nent 10  vol  in-fol.  Jurisprudentia  Pa- 
pinianea,  Lyon,  1658,  1  vol.;  Decrro- 
ribus  interprctum  juris ,  2  vol.;  Com- 
ment, in  Pandectas ,  seu  de  erroribus 
pragmaticorum ,  1659,  5  vol.;  Codex 
Fabrianiis ,  1661,  1  vol.;  Conjecturée 
juris  civilis ,  1661 ,  1  vol.,  regardé  com- 
me le  meilleur  de  ses  ouvrages,  parce 
que  laissant  là  son  imagination  qui  le 
séduisait  quelquefois ,  il  s'appuie  le  plus 
souvent  de  l'autorité  de  choses  jugées. 
Gn  y  joint  H.  Borgice  investigationes 
juris  civilis  in  Conjecturas  A  F  abri , 
Naples,  1678,  2  vol.  in-fol.  Dans  les 
quatrains  de  Pibrac ,  on  en  trouve  de 
Favre;  il  est  aussi  auteur  d'une  tragédie 
intitulée  les  Gordians  ou  l'Ambition, 
1596,  in-8.  Favre  a  éclairci  plusieurs  opi- 
nions obscures  ;  mais  il  a  poussé  trop 
loin  les  subtilités  dans  l'examen  de  cer- 
taines questions  de  droit  :  il  s'éloigne 
quelquefois  des  principes.  C'était  un  es- 
prit vaste,  propre  aux  affaires  comme  à 
l'étude.  Ce  fut  lui  qui  fut  chargé  de  né- 
gocier le  mariage  de  M"*  Christine  de 
France  avec  le  prince  de  Piémont ,  "Vic- 
tor Amédée.  Le  roi  de  France  lui  offrit 
inutilement  la  première  présidence  du 
parlement  de  Toulouse  ;  il  voulut  rester 
au  service  du  duc  de  Savoie.  (  On  trouve 
l'éloge  de  Favre  par  Jacques  Durandi 
dans  le  tome  3  des  Piemontesi  illustri, 
et  un  long  article  sur  le  même  person- 
nage dans  les  Vies  des  plus  célèbres  juris- 
consultes par  Taisand.) 

FAVRE  (  Claude  ),  seigneur  de  Vâu- 
GELAs  et  baron  de  Péroges,  naquit  du 
précédent,  à  Bourg  en  Bresse,  et  selon 
quelques-uns,  à  Chambéry.  Son  père 
était  consommé  dans  l'étude  de  la  juris- 
prudence. Le  fils  ne  fut  point  indigne 
de  lui  :  mais  son  esprit  fut  plus  juste. 
Le  jeune  Yaugeias  vint  à  la  cour  de  bonne 
heure.  Il  fut  gentilhomme  ordinaire, 
puis  chambellan  de  Gaston ,  duc  d'Or- 
léans, qu'il  suivit  dans  toutes  ses  re- 
traites hors  du  royaume.  Il  mourut  pau- 


FAW 

vre  en  1650  ,  à  65  ans.  On  peut  être  sur- 
pris que  Vaugelas,  estimé  à  la  cour,  réglé 
dans  sa  dépense,  et  n'ayant  rien  négligé 
pour  sa  fortune ,  soit  presque  mort  dans 
la  misère  ;  mais  les  courses  de  Gaston  , 
et  d'autres  accidens ,  avaient  fort  déran- 
gé ses  affaires.  Louis  XIII  lui  donna  une 
pension  de  2,000  livres  en  1619.  Cette 
pension  qu'on  ne  lui  payait  plus,  fut 
rétablie  par  le  cardinal  de  Richelieu, 
afin  de  l'engager  à  travailler  au  diction- 
naire de  l'Académie.  Lorsqu'il  alla  le  re- 
mercier de  cette  grâce ,  Richelieu  lui  dit 
en  riant  :  «  Vous  n'oublierez  pas  du  moins 
»  dans  le  dictionnaire  le  mot  àe pension. 
»  —  Non,  Monseigneur,  répondit  Vau- 
»  gelas  ;  et  encore  moins  celui  de  recon- 
3)  naissance....  »  Ce  littérateur  était  un 
des  académiciens  les  plus  aimables ,  com- 
me des  plus  illustres  ;  il  avait  une  figure 
agréable ,  et  l'esprit  comme  sa  figure. 
Vaugelas  étudia  toute  sa  vie  la  langue 
française  ,  et  travailla  à  l'épurer.  Sa  tra- 
duction de  Quinte-Curce ,  imprimée  en 
1647  ,  in-4  ,  fut  le  fruit  d'un  travail  de 
30  années.  Cette  version,  de  laquelle 
Balsac  disait  dans  son  stile  emphatique: 
«  L'Alexandre  de  Quinte-Curce  est  invin- 
))  cible,  et  celui  de  Vaugelas  est  inimi- 
»  table»  passa  pour  le  premier  bon  livre 
écrit  correctement  en  français.  Malgré  la 
mobilité  et  l'inconsistance  de  la  langue 
française,  il  y  a  peu  d'expressions  qui 
aient  vieilli.  Vaugelas  ne  rendit  pas 
moins  de  services  par  ses  Remarques 
sur  la  langue  française,  dont  la  pre- 
mière édition  est  in-4  :  ouvrage  moins 
nécessaire  qu'autrefois,  parc«  que  la  plu- 
part des  doutes  qu'il  propose ,  ne  sont 
plus  des  doutes  aujourd'hui  ;  mais  ou- 
vrage toujours  utile,  surtout  si  on  le  lit 
avec  les  remarques  dont  Th.  Corneille  et 
d'autres  l'ont  enrichi,  en  3  vol.  in-12. 
FAWKES  (François),  poète  anglais, 
né  dans  le  comté  d'York  en  1721  ,  bri- 
gua les  emplois  de  l'église  anglicanspour 
vivre ,  et  s'adonna  à  la  poésie  par  goût. 
Il  fut  sous-ministre  à Orpington  en  1755, 
ministre  à  Hayes  en  17  74  ,  et  mourut  le 
26  août  1777,  après  avoir  publié  dans 
la  langue  de  son  pays  1°  Traduction 
d'Anacréony    1769,   in-12.    2» de 


I 


FAY 

Théocrite,  1767,  in-S.  3" à! Apollo- 
nius de  Rhodes,  1780.  4°  Le  Recueil  de 
ses  poésies  a  paru  en  1761,  in-8 . 

FAY  (CUarles-Jérônic  de  Cisternai 
du)  ,  capitaine  aux  gardes ,  né  à  Paris  en 
1 662  ,  eut  une  jambe  emportée  d'un  coup 
de  canon  au  bombardement  de  Bruxelles 
en  1095.  Il  n'était  alors  que  lieutenant; 
il  obtint  une  compagnie  ;  mais  il  fut  obli- 
gé d'y  renoncer ,  par  l'impossibilité  de 
monter  à  cheval.  Heureusement  il  aimait 
les  lettres,  et  elles  furent  sa  consolation. 
Il  s'adonna  à  la  recherche  des  livres  rares 
en  tous  genres ,  des  belles  éditions  de 
tous  les  pays  ,  des  manuscrits  qui  avaient 
quelque  mérite.  Il  se  forma  une  biblio- 
thèque bien  assortie,  de  25  mille  écus. 
Le  catalogue  en  fut  dressé  en  1725,  in-8, 
par  le  libraire  Martin.  Le  possesseur  de 
ce  trésor  littéraire  était  mort  deux  ans 
auparavant,  en  17  23. 

FAY  (Charles-François  de  Cisternai 
du  ) ,  fils  du  précédent ,  né  à  Paris  en 
1G98,  servit  quelque  temps  comme  son 
père  ;  mais  ayant  quitté  l'état  militaire , 
il  se  consacra  entièrement  à  la  chimie  et 
à  la  botanique.  Reçu  membre  de  l'aca- 
démie des  Sciences,  il  eut  l'intendance 
du  jardin  royal,  entièrement  négligé 
avant  lui ,  et  qu'il  rendit  en  très  peu  de 
temps  un  des  plus  beaux  de  l'Europe.  Il 
était  né  à  Paris  en  1698  ,  et  il  mourut 
en  17  39.  Cet  académicien  avait  des 
mœurs  douces,  une  gaîté  fort  égale ,  une 
grande  envie  d'obliger,  et  ces  qualités 
n'étaient  mêlées  de  rien  qui  déplut,  d'au- 
cun air  de  vanité,  d'aucun  étalage  de  sa- 
voir, d'aucune  malignité,  ni  déclarée, 
ni  enveloppée.  Il  fit  des  recherches  nou- 
velles sur  le  phosphore  du  baromètre, 
sur  le  sel  de  la  chaux,  inconnu  jusqu'à 
lui  aux  chimistes,  sur  l'aimant,  et  enfin 
sur  l'électricité.  Ses  travaux  en  ce  genre 
sont  consignés  dans  les  Mémoires  de  l'a- 
cadémie des  Sciences,  où  l'on  trouve 
aussi  son  Eloge  par  Fontenelle. 

FAY  (Jean-Gaspard  du),  jésuite,  mort 
vers  le  milieu  du  siècle  dernier,  prêcha 
avec  un  succès  peu  commun.  Ses  Sermons 
sont  en  9  vol. ,  qui  parurent  successive- 
ment depuis  1738  jusqu'en  1743.  Le 
talent    de    l'action    leur    donnait    une 


FAY  239 

beauté  et    une  force ,    qu'ils  perdirent 
presque  entièrement  après  l'impression. 

FAYDIT  ouFaidit  (  Anselme  ou  Gan- 
celme),  poète  provençal ,  mort  vers  l'an 
1220,  se  mit  à  représenter  des  comédies, 
qu'il  composait  lui-même.  Elles  furent 
applaudies ,  et  il  devint  riche  en  peu  de 
temps;  mais  son  penchant  à  la  vanité, 
à  la  débauche  et  à  la  dépense,  le  rédui- 
sit bientôt  à  la  dernière  misère.  Richard 
Cœur-de-Lion  ,  roi  d'Angleterre,  l'en  tira 
par  ses  libéralités.  Ce  prince,  marié  à 
Bérengère  de  Barcelone,  avait  du  goût 
pour  la  poésie  provençale,  dont  la  lan- 
gue approchait  beaucoup  alors  de  la  ca- 
talane. Après  la  mort  de  son  protecteur, 
Faydit  revint  à  Aix ,  et  s'y  maria  avec 
une  fille  pleine  d'esprit  et  de  beauté , 
qui  se  chagrina  de  la  vie  déréglée  de  son 
époux ,  et  mourut  peu  après.  Le  poète  se 
retira  chez  le  seigneur  d'Agoult,  où  il  fi- 
nit ses  jours.  Il  avait  écrit  1°  un  poème 
sur  la  mort  du  roi  Richard ,  son  bienfai- 
teur. 2°  Le  palais  d'Amour,  poème, 
dont  le  titre  annonce  assez  l'esprit. 
3"Plusieurs  comédies,  entre  autres  une  in- 
titulée VHeregia  dels  prestres ,  c'est-;i^ 
dire  V Hérésie  des  préires;  il  y  prône  les 
Vaudois  et  les  Albigeois ,  dont  la  doctrine 
et  les  mœurs  n'étaient  que  trop  assorties 
à  sa  conduite. 

FAYDIT  (Pierre  Valentin),  né  àRiom 
en  Auvergne ,  d'abord  prêtre  de  l'Ora- 
toire, sortit  de  cette  congrégation  en 
1671,  pour  avoir  publié  un  ouvrage  car- 
tésien ,  contre  la  défense  de  ses  supé- 
rieurs. Le  cartésianisme  a  été  presque 
une  hérésie  dans  bien  des  corps  pendant 
long-temps.  Faydit,  né  avec  un  esprit 
singulier  et  ardent ,  se  fit  bientôt  con- 
naître dans  le  monde.  Dans  le  temps  que 
les  différends  du  pape  Innocent  XI  avec 
la  France  étaient  dans  la  plus  grande  cha- 
leur ,  il  prêcha ,  à  St.-Jean-en-Grève  de 
Paris  ,  un  sermon  contre  ce  pontife.  Il  se 
réfuta  lui-même  dans  un  autre  sermon 
publié  à  Liège ,  auquel  il  ne  manqua  pas 
de  répliquer  en  faisantimprimer l'extrait 
de  son  premier  sermon ,  avec  les  preu- 
ves bonnes  ou  mauvaises  des  faits  qui 
y  sont  avancés.  Un  Traité surlaTrinité, 
où  il  établissait  le  trithéisme ,    préteu- 


24o  FAY 

dont  que  la  doctrine  de  ce  mystère  avait 
ëté«  altéréeparlathéologiescolastique;  » 
cet  ouvrage  impie  a  pour  titre  :  Altc- 
ration  du  dogme  theblogique  par  la  phi- 
losophie d'Avistote,  grosin-8  ,  1706.  Uq 
théologien  connu  en  parle  en  ces  termes  : 
«  Un  éci'ivain  asservi  à  la  faction  des  Ar- 
»  nauld  et  des  Quesnel ,  prétend  que  la 
»  scolastiquea  altéré  le  dogme  de  la  Tri- 
unité  qui,  selon  lui,  consistait  ancien- 
»  nement  à  professer  trois  natures  en 
»  Dieu.  Raisonner  de  la  sorte,  c'est  affi- 
»  cherl'ignorance  la  plus  grossière,  parce 
H  qu'il  est  connu  que  les  théologiens  ont 
M  constamment  défendu  contre  les  ariens 
»  et  les  sophistes ,  la  foi  de  Nicée,  et  la 
»  consubstantialité  des  personnes  di- 
»  vines.  C'est  afficher  l'hérésie ,  d'abord 
»  celle  ces  trithéites ,  et  de  plus  celle 
n  des  erreurs  modernes ,  qui  affirment 
i>  que  la  vraie  foi  a  péri  contre  la  pro- 
))  messe  de  Jésus-Christ,  et  qu'elle  ne 
»  s'est  retrouvée  que  dans  quelques  têtes 
»  privilégiées  des  derniers  siècles.  C'est 
M  afficher  l'athéisme,  puisqu'en  détruisant 
i>  l'unité  de  Dieu,  on  en  détruit  l'essence.  « 
L'erreur  de  Faydit  a  été  renouvelée  de- 
puis par  le  docteur  OEhmbs  (  voyez  Jean 
PiuLoroNos  ,  et  le  Journ,  hist.  et  litt.  \" 
février  1 79  l,pag.  1C7).  Cet  ouvrage  extra- 
vagant et  impie  mérita  à  Faydit,  en  1696, 
un  appartement  à  St. -Lazare  à  Paris  :  châ- 
timent qui  ne  changea  ni  son  esprit  ni 
caractère  ;  il  eut  ordre  du  roi  de  se  reti- 
rer dans  sa  patrie,  où  il  mourut  en  1709. 
Outre  les  ouvrages  déjà  cités,  on  a  de  lui 

I  °  Des  remarques  sur  P^irgile,  sur  Homè- 
re et  sur  le  stile  poe'tique  de  V Ecriture 
sainte,  en  2  vol.  in-12  :  mélange  bizarre 
de  pensées  différentes  sur  des  sujets  sa- 
crés et  profanes ,  dans  lequel  l'auteur  se 
donne  trop  de  liberté  à  son  ordinaire. 
2°  La  Télémacomanie ,  in-12,  critique 
méprisable  du  chef-d'œuvre  de  Fénélon  , 
pleine  de  notes  singulières ,  aussi  con- 
traires à  la  vérité  qu'au  bon  goût.  11  faut 
en  excepter  ses  réflexions  contre  les  ro- 
mans; encore  tombent-elles  à  faux,  vu 
Ja  nature  de  celui-ci.  Faydit  avait  atta- 
qué Bossuet ,  avant  de  censurer  Fénélon. 

II  avait  fait  cette  épigrammecontrele  dis- 
cours de  i'évêque  de  Meaux  à  rassemblée 


FAY 

du  clergé  de  1 082.  (  Il  faut  savoir  que  Bos- 
suet avait  cité  Balaam  dans  ce  discours)  : 

Un  aiidlletir  un  ppn  cynique 
Dit  mut  liiiut  en   bàilbnt  d'i'nnui: 
Le  proplii'tc  Babani  e>t  obscur  aujourd'hui; 

<,)u  il  (assp  parler  ca  bourrique, 
EUes'ejpliqucra  plus  clairement  que  lui. 

11  fallait  que  la  démangeaison  de  médire 
en  vers  et  en  prose  fût  bien  forte  dans 
l'abbé  Faydit ,  pour  attaquer  aussi  indé- 
cemment deux  prélats  illustres ,  l'éternel 
honneur  du  clergé  de  France.  3°  Des 
mémoires  contre  ceux  de  Tillemont,  bro- 
chure in-4,  plus  comique  que  sérieuse, 
supprimée  dans  sa  naissance,  et  qui  n'eut 
point  de  §uite.  On  y  voit  Faydit  tel  qu'il 
était  :  un  fou  qui  a  quelque  esprit  et  du 
savoir,  et  qui  prend  la  plume  dans  les 
accès  de  sa  folie.  4°  Le  Tombeau  de  San- 
teuil,  iu-12,  en  vers  latins  d'un  carac- 
tère assez  singulier ,  et  en  prose  française. 
La  prose  est  une  traduction  libre  des 
pièces  latines.  On  a  attribué  mal  à  pro- 
pos les  Moines  empruntés,  2  vol.  in-12, 
à  cet  auteur.  Ils  ne  sont  pas  de  lui,  mais 
de  Haitze. 

FAYE  (Jacques),  seigneur  d'Espeis- 
ses ,  né  à  Paris  en  1 542,  conseiller  au  par- 
lement en  1567,  devint  maître  des  re- 
quêtes de  l'hôtel  du  duc  d'Anjou,  depuis 
Henri  III.  Il  suivit  ce  prince  en  Pologne; 
et  après  la  mort  de  Charles  IX,  il  revint 
en  France ,  pour  porter  de  la  part  de 
son  maître  des  lettres  de  régente  à  la 
reine.  Il  retourna  ensuite  en  Pologne  , 
oîi  il  rendit  des  services  signalés  à  Henri. 
Ce  prince  l'en  récompensa  par  les  char- 
ges de  maître  des  requêtes,  d'avocat- 
général,  et  enfin  de  président  à  mortier 
au  parlement  de  Paris.  Il  mourut  à  Seuils 
en  1590,  à  46  ans,  laissant  des  liaran- 
gues  éloquentes  pour  son  temps. 

FAYE  (  Jean-Elie  Lériget  de  la  )  na- 
quit à  Vienne  en  Dauphiné  l'an  1071.  Il 
prit  le  parti  des  armes ,  fut  d'abord  mous- 
quetaire ,  ensuite  capitaine  aux  gardes, 
se  trouva  à  la  bataille  de  Ramillies,  à 
celle  d'Oudenarde  et  dans  plusieurs  jour- 
nées, et  y  signala  sa  valeur.  Il  avait  tou- 
jours eu  du  goût  et  du  talent  pour  les 
mathématiques.  La  paix  l'ayant  rendu  à 
ses  premiers  penchans,  il  s'appliqua  par- 


I 


FAY 

liculjèremenl  à  la  mécanique,  h  la  phy- 
sique expérimentale.  L'académie  des 
Sciences  lui  ouvrit  ses  portes  eu  ITIG  , 
et  le  perdit  en  17 18,  à  47  ans.  On  trouve 
dans  la  collection  de  cette  compagnie 
deux  mc'moires  de  La  Paye. 

FAYE  (Jean-François  Lériget  de  la  ) , 
frère  puîné  du  précédent,  d'abord  capi- 
taine d'infanterie,  ensuite  gentilhomme 
ordinaire  du  roi,  eut  plus  de  goût  pour 
ïa  littérature  agréa'oleque  pour  les  scien- 
ces sérieuses  qui  avaient  été  le  partage  de 
son  aîné.  Il  obtint  une  place  à  l'académie 
franraiseen  1730,  et  mourut  l'année  d'a- 
près à  57  ans.  On  a  de  lui  quelques  poé- 
sies, oîi  l'on  remarque  un  esprit  délicat  et 
une  imagination  agréable.  Sa  pièce  la 
plus  célèbre  est  son  Ode  apologétique  de 
la  poésie,  contre  le  système  de  la  Motte- 
Houdard  en  faveur  de  la  prose. 

*  FAYE  (  George  de  la  ) ,  démonstra- 
teur à  l'académie  royale  de  chirurgie  à 
Paris  ,  sa  patrie  ,  mourut  dans  cette  ville 
le  1 1  août  17  81.  On  a  de  lui  1  °  Cours  d'o- 
pérations de  chirurgie  par  Dionis,  avec 
des  notes,  1782,  2  vol.  in-S.  2"  Princi- 
pes de  chirurgie,  Paris,  1739,  in- 12,  sou- 
vent réimprimés.  La  dernière  édition 
est  de  1811,  in-8 .  Il  a  été  traduit  en  alle- 
mand ,  en  italien ,  en  espagnol  et  en  sué- 
dois. 

FAYEL.  Foyez  Faïel. 

FAYETTE  (  Gilbert  Motier  de  La  ) , 
maréchal  de  France  ,  se  distingua  à  la 
bataille  de  Baugé  en  Anjou,  l'an  1421  , 
fut  fait  prisonnier  à  la  journée  de  Ver- 
neuil  ;  et  après  sa  délivrance ,  contribua 
beaucoup  à  chasser  les  Anglais  du 
royaume.  Il  mourut  le  23  février  14C4. 

*  FAYETTE  (  Louise  Motier  de  La  ),  de 
la  raêmefamilleque  le  précédent,  naquit 
en  1G18.  Orpheline  dès  le  berceau,  elle 
fut  élevée  par  sa  tante  la  comtesse  de 
Bregy  ,  qui  la  retira  du  couvent  à  l'âge 
de  15  ans,  et  la  plaça  ,  lorsqu'elle  sentit 
sa  fin  approcher ,  en  qualité  de  dame 
d'honneur  dans  la  maison  de  la  reine  Anne 
d'Autriche. M''«  de  LaFayelte  avait  1 7  ans. 
Sa  beauté,  sa  modestie,  sa  discrétion  et 
sa  douceur ,  attirèrent  l'attention  de 
Louis  XIII  ;  sa  conduite  fut  un  modèle  de 
vertu.  Cette    pieuse    demoiselle,  sen- 

V. 


FAY  24t 

sihle  aux  épanchemens  du  cœur  de  ce 
motiarque,  qui  venait  chercher  dans 
sa  société  des  consolations  contre  les 
chagrins  que  lui  causait  un  ministre  im- 
périeux, sous  le  jougduquel  il  s'étaitplacé, 
s'attacha  à  sa  personne,  parce  qu'elle 
s'intéressait  à  sa  gloire ,  et  qu'elle  au- 
rait voulu  qu'il  fût  heureux  dans  sa 
famille  et  au-dehors;  mais  elle  ne  tarda 
pas  à  s'apercevoir  que  Louis  tout  en  sen- 
tant sa  chaîne,  la  croyait  nécessaire,  et 
que  pour  conserver  sa  faveur  il  fallait  se 
résoudre  à  porter  cette  chaîne  avec  lui. 
Trop  fière  pour  dépendre  d'autre  que  du 
roi,  M"^  de  La  Fayette  se  détermina  à 
rompre  un  engagement  qui  commençait 
à  alarmer  sa  sagesse.  Louis ,  ordinaire- 
ment si  réservé  ,  lui  avait  fait  la  proposi- 
tion délicate  de  lui  donner  à  Versailles , 
château  de  plaisir  alors  ,  un  appartement 
oîi  il  irait  la  voir  librement.  Cette  pro- 
position lui  dessilla  les  yeux;  dès  lors  elle 
résolut  de  quitter  le  monde  relie  alla  se 
renfermer  cheziesreligieusesde  la  Visita- 
tion, où  elle  prit  le  voile  en  1G37  ,  avec 
le  consentement  du  roi,  qui,  honteux 
lui-même  de  son  transport,  jugea  qu'il  n'y 
avait  pas  de  meilleur  moyen  de  se  mettre 
en  garde  contre  sa  faiblesse,  et  M"*  de 
La  Fayette  le  détermina  à  relourner  à  son 
épousé.  Le  fruit  de  cette  réconciliation , 
après  22  ans  de  stérilité ,  fut  un  fils ,  et  ce 
fiis  fut  Louis  XIV.  Anne  d'Autriche,  re- 
connaissante des  bons  offices  de  M"^  de 
La  Fayette ,  fit  tous  ses  ciTorls  pour  l'en- 
gager à  revenir  à  la  cour  ;  mais  ils  furent 
inutiles.  Elle  resta  dans  le  cloître, 
montrant  à  l'univers  l'exemple  d'une  fille 
qui,  dans  l'âge  des  passions,  s'immole 
généreusement  elle-même  jiour  ne  pas 
entraîner  dans  sa  chute  un  prince  qu'elle 
aimait.  Elle  mourut  en  16G5  danslecou- 
vent  de  Chaillot  qu'elle  avait  fondé.  On 
trouve  des  détails  sur  sa  vie  dans  les 
Me'moires  de  M"""  de  Motteville ,  6  vol. 
in  12.  M™*  de  Genlis  a  publié  un  roman 
historique  intitulé  :  iW "*  de  La  Fayette, 
Paris,  1812,2  vol.  Jn-12  ;  mais  ceroman, 
qui  est  autant  l'histoire  d'autres  per- 
sonnes qui  ont  vécu  sous  Louis  XIII  que 
celle  de  M"*  de  La  Fayette ,  ne  peut , 
comme  tous  les  ouvrages  de  ce  genre, 
i6 


a4a  FAT 

que  donner  une  fausse  idée  de  cette 
vertueuse  demoiselle.  M""*  de  Genlis 
avoue  elle-même ,  que  les  mémoires  du 
temps  ne  lui  ont  g-uère  fourni  que  des 
caractères,  et  qu'il  lui  a  fallu  inventer  pres- 
que toutes  les  scènes  et  tous  les  détails. 
FAYETTE  (Marie-Madeleine  Pioche  nt: 
lA  Vergse,  comtesse  de  La  ) ,  était  fille 
d'Aymar  de  La  Vergne,  maréchal  de  camp, 
gouverneur  du  Havre-de  -  Grâce.  Elle 
épousa ,  en  1 C55  ,  François  ,  comte  de  La 
Fayette.  Elle  se  distingua  encore  plus  par 
son  esprit  que  par  sa  naissance.  Tous  les 
beaux  esprits  de  son  temps  la  recherchè- 
rent. Parmi  les  gens  de  lettres  ,  Ménage , 
La  Fontaine,  Ségrais,  étaient  ceux  qu'elle 
voyait  le  plus  souvent.  Elle  mourut  en 
1693.  Les  principaux  de  ses  écrits  sont  : 
1*  Zaïde,  roman  qui  eut  la  plus  grande 
vogue.  2°  Ln princesse  de  Clèvcs,  2  vol. 
in-12 ,  autre  roman  ,  attaqué  avec  beau- 
coup d'esprit  par  Valincourt,  qui  en  fit 
la  critique,  n'ayant  pas  encore  22  ans, 
M™"  de  La  Fayette  avait  mis  sous  le  nom 
de  Se'grais  ces  deux  productions.  Ce  bel 
esprit  avait  contribué  à  la  disposition  de 
l'édifice,  et  la  dame  l'avait  orné.  3°  Z« 
Princesse  de  Monfpcnsiej\  in-1 2.  4"  Des 
Me'moires  de  la  cour  de  France  pour  les 
années  1688  et  1689,  in-12.  «  On  luire- 
»  proche  d'avoir  fait  payer  à  M™*  de 
»  Maintenon ,  dit  un  auteur,  la  gloire  d'a- 
i>  voir  été  dans  sa  jeunesse  plus  aimable 
»  qu'elle.  »  6°  Histoire  d'Henriette 
d' Angleterre ,  in-1 2  :  on  y  trouve  peu 
de  particularités  intéressantes.  6"  Divers 
portraits  de  quelques  personnes  de  la 
cour.  Tous  ces  ouvrages  sont  encore  assez 
recherchés.  M™*  de  Sévigné  fait  de  ses 
qualités  le  portrait  le  plus  flatteur.  Mais 
La  Beaumelle  l'a  peint  moins  avantageuse- 
ment, tf  Elle  n'avait  pas,  dit-il  ,  ce  liant 
»  qui  rend  le  commerce  aimable  et  so- 
»  lide  ;  on  trouvait  autant  d'agrémens 
«  dans  ses  écrits ,  qu'elle  en  avait  peu 
»  dans  ses  propos.  Elle  était  trop  impa- 
i>  liente  ;.  tantôt  caressante,  tantôt  impé- 
i)  rieuse  ,  exigeant  des  égards  infinis ,  et 
»  y  répondant  souvent  par  des  hauteurs.  » 
Qualités  qui  n'ont  rien  d'étonnant  dans 
une  femme  qui,  délivrée  des  occupations 
domestiques  et  paisibles  de  son  état ,  est 


FEB 

transportée  dans  les  sociétés  des  beaux- 
esprits  ,  et  tourmentée  des  prétentions 
du  savoir,  à  qui  le  nom  de  mère  et  d'é- 
pouse ,  de  femme  vertueuse ,  douce  et 
modeste,  est  moins  cher  que  celui  d'au- 
teur. «  L'iiomnie-fcmme,  dit  l'auteur  de 
«  V Influence  de  la  philosophie  sur  l'es- 
»  prit  et  le  cœur,  est  aussi  ridicule  que  la 
w  femme-homme  :  ce  sont  de  monstrueux 
»  assemblages  que  notre  siècle,  fertile 
»  en  choses  rares  et  curieuses  ,  réalise  à 
»  chaque  instant.  Depuis  qu'il  y  a  des 
»  petits-maîtres,  il  y  a  des  femmes sa- 
»  vantes  ;  depuis  que  les  hommes  ont 
»  porté  des  colifichets ,  et  ont  affecté  une 
»  toiletté  féminine ,  les  femmes  en  re- 
"vanche,  ont  affecté  la  science  des 
»  hommes ,  et  se  sont  enfoncées  dans 
»  les  études  abstraites.  Lequel  vous  donne 
»  meilleure  opinion  d'une  femme , 
»  en  entrant  dans  sa  chambre,  de  la 
«  voir  occupée  à  des  travaux  de  son 
»  sexe ,  des  soins  de  son  ménage ,  envi'- 
»  ronnée  des  bardes  de  ses  cnfans ,  ou 
«  de  la  trouver  écrivant  des  vers  sur  sa 
»  toilette ,  entourée  de  brochures  de 
»  toutes  les  sortes,  et  de  petits  billets  de 
»  toutes  les  couleurs  ?  Toute  fille  lettrée 
»  restera  fille  toute  sa  vie ,  quand  il  n'y 
»  aura  que  des  hommes  sensés  sur  la 
«terre.  »  Ployez  GÉorniN ,  Grafigny  , 
TeiNcin  ,  SuzÊ.  (Les  oeuvres  de  M"'*  de  La 
Fayette  ont  été  recueillies  avec  celles  de 
M™"  de  Tencin  et  de  Fontaines  ,  Paris, 
1804 ,  5  vol.  in-8  ,  avec  une  Notice  par 
M.  Auger). 

FAYPOULT.  roijez  Faipoult. 

FEBRONITJS.  Ployez  Hontheim. 

FEBVRE  DE  SAINT-MARC.  Foyez 
Saint-Marc  (Charles  Hugues  de  ). 

FEBVRE  ou  Lefeburk  (  Jacques ,  et 
selon  quelques-uns ,  Jean  le  ) ,  jésuite , 
né  à  Glajon  ,  village  du  Hainaut,  en- 
seigna la  philosophie  à  Douai ,  fut  prési- 
dent du  séminaire  archiépiscopal  de  Cam- 
brai ,  établi  à  Beuvrage  ,  près  de  Valen- 
ciennes.  Il  s'y  appliqua  avec  une  ardeur 
et  une  assiduité  infatigable ,  à  former  les 
élèves  qui  lui  étaient  confiés ,  à  la  sub- 
limité des  vertus  qui  illustrent  le  sacer- 
doce ,  et  font  les  pasteurs  chrétiens. 
Dans  sa  dernière  maladie,  il  se  fit  trans- 


FED 

portera  Valenciennes,  où  il  mourut  le  29 
^vril  1755.  II  est  connu  par  deux  ouvrages 
où  il  combat  les  incrédules  avec  beau- 
coup de  succès  ;  le  l  <""  est  intitule  :  Bmjle 
en  petit ,  ou  ^nntomie  de  ses  ouvrages. 
Douai,  17  37,in-12.  Il  reparut  à  Paris  en 
1747  avec  une  suite,  sous  ce  titre  : 
Examen  critique  des  ouvrages  de  Baijle. 
H  y  démontre  que  les  écrits  de  Bayle  con- 
tiennent de  quoi  former  le  plus  mon- 
strueux assemblage  d'obscénités ,  d'hé- 
résies et  d'athéisme.  Il  met  au  grand  jour 
-  les  contradictions,  les  paralogismes ,  les 
calomnies,  les  falsifications  et  les  impos- 
tures de  ce  fameux  sceptique.  Le  second 
■  est  La  seule  religion  véritable  dcniontre'e 
contre  les  athées ,  déistes ,  etc.,  Paris, 
1744,  in-8,  ouvrage  solide  et  métho- 
dique. 

*FEBVRE  (Philippe  le},  président 
honoraire  du  bureau  des  finances  et  de 
la  généralité  de  Rouen ,  mort  à  Cliambéry 
vers  17  80,  a  laissé  plusieurs  ouvrages 
peu  importans.  Le  seul  qui  mérite  d'être 
cité  est  son  Abrégé  de  la  vie  d'Auguste, 
in-1 2,  où  les  faits  principaux  sont  exposés 
avec  une  clarté  élégante. 

•  FEDELE  (Cass'andra) ,  née  en  J4G5, 
à  Venise,  d'une  famille  noble  originaire 
de  Milan  ,  fut  l'admiration  de  son  siècle 
par  l'étendue  et  la  variété  de  ses  con- 
naissances. Elle  cultiva  ,  avec  succès, 
les  lettres  grecques  et  latines,  la  philo- 
sophie ,  l'éloquence ,  l'histoire  et  la 
théologie  ;  la  poésie  et  la  musique  lui 
servaient  de  délassement.  Elle  se  lia  avec 
le  père  de  la  Mirandole,  et  correspondit 
aussi  avec  plusieurs  souverains  ,  tels  que 
pape  Léon  X,  le  roi  de  France  Louis 
XII ,  le  roi  d'Aragon  Ferdinand ,  et 
Isabelle  de  Caslille.  Cette  princesse  voulut 
l'attirer  à  sa  cour ,  et  le  poète  latin  Au- 
gurello  lui  adressa  une  Ode ,  pour  l'en- 
gager à  ce  voyage  ;  mais  la  république 
de  Venise  ne  voulut  pas  se  laisser  ravir  un 
de  ses  plus  beaux  orncmens.  Cassandra 
avaitété  mariée  à  un  médecin  de  Vicence, 
et  elle  le  suivit  à  Candie ,  où  la  république 
l'envoya  exercer  son  art.  Après  la  mort 
de  son  époux  Jean-Marie  Mapelli.  médecin 
de  Vicence ,  elle  fut  nommée,  dans  un 
âge  très  avancé  ,  supérieure  des  hospita- 


FEI  245 

Hères  de  Saint-Dominique  ,  à  Venise.  Elle 
gouverna  cette  maison  pendant  12  ans,  et 
mourut  le  25  mars  1 558  ,  âgée  de  93  ans. 
Thomassini  a  recueilli  les  Ze//7*e^  et  dis- 
cours de  Cassandra ,  et  a  mis  en  tête  la 
Vie  de  cette  femme  célèbre,  Paris,  1C3G  , 
in-8. 

FEDOR.  P'oi/ez  Foedor. 

FEGELI  (François-Xavier),  né  à  Rote 
dans  le  canton  de  Fribourg  en  1C90,  se 
fit  jésuite  en  1710,  enseigna  la  théologie 
pendant  12  ans,  et  mourut  à  Fribourg 
en  1 7  48.  On  a  de  lui  :  1°  De  munere  con- 
fessarii.  2"  De  munere  pœnilentis, 

FEIJGO  (Benoît-Jérôme) ,  bénédictin 
espagnol,  mort  en  17  95,  a  contribué 
autant  par  ses  pièces  critiques  à  éclairer 
ses  compatriotes  sur  leurs  vices  et  leurs 
défauts,  que  Michel  Cervantes  à  corriger 
ceux  de  son  siècle  par  son  roman  de  Don 
Quichotte.  On  a  de  lui  le  Théâtre  critique 
en  17  vol  in-4,  y  compris  une  table  des 
matières.  Une  partie  de  ce  recueil  a  été 
traduite  en  français  par  M.  d'Hermilly , 
4  vol.  in-1 2.  Les  ouvrages  de  Feijoo  ont 
été  plusieurs  fois  réimprimés.  La  meil- 
leure édition  est  celle  publiée  par  les 
soins  de  Campomanès,  Madrid,  1780,  33 
vol.  in-8. 

*  FEITAMA.  (  Sibrand  ) ,  poète  hol- 
landais, né  à  Amsterdam  en  1C84  ,  mou- 
rut en  17  58.  H  débuta  par  la  tragédie  de 
Fabricius,  et  par  un  drame  allégorique 
intitulé  :  Le  triomphe  de  la  poésie  et  de 
la  peinture.  Il  renonça  à  la  composition, 
pour  se  livrer  uniquement  à  la  traduction 
des  ouvrages  français  qu'il  crut  dignes 
d'être  connus  en  Hollande  ;  il  traduisit 
liomulus  ,  les  Machabées  ,  Brut  us  , 
Ahire ,  Pyrrhus ,  etc.  Ce  que  l'on 
estime  le  plus  de  lui,  c'est  sa  traduction 
en  vers  hollandais  du  Télémaque  de 
Fénélon,  et  celle  delà  Henriade  de  Vol- 
taire, aussi  en  vers.  Son  Théâtre  a  été 
publié  en  1735,2  vol.  in-4. 

FEITHIUS  ou  Feith  (Everard), 
d'Elboug  dans  la  Gueldre,se  rendit  très- 
habile  au  IG*  siècle,  dans  les  langues 
grecque  et  hébraïque.  Les  troubles  des 
Pays-Bas  l'obligèrent  de  se  retirer  en 
France  ,  où  il  s'acquit  l'estime  de  Casau- 
bon ,   de  Du  Puy ,  et  du  président  de 


2^4  FEI 

Tlioti.  Il  y  enseigna  quelque  temps  la  lan- 
gue grecque.  Mais  se  promenant  un  jour 
à  La  Rochelle  avec  son  valet,  il  fut  prié 
d'entrer  dans  ha  maison  d'un  bourgeois  ; 
'  et  depuis  ce  moment  on  ne  put  savoir 
ce  qu'il  «était  devenu,  quelque  perquisi- 
tion que  les  magistrats  en  fissent.  On  à 
de  lui  deux  ouvrages  curieux  et  savans , 
in-1 2,  intitulés:  Antiquitntes  Homericce, 
et  Antiquitates  Atlienienses ,  en  huit  li- 
vres, Strasbourg,  1743.  Ils  sont  écrits  en 
bon  latin  ;  il  y  traite  de  la  religion  des 
Grecs,  de  leur  marine  et  de  leurs  usages. 
Tout  cela  est  prouvé  par  des  passages  de 
toutes  sortes  d'auteurs. 

'  FEITll  (Rhynvis),  célèbre  poète 
hollandais,  membre  de  l'Institut  des  Pays- 
Bas,  de  plusieurs  sociétés  savantes,  del'or- 
dre  du  Lion-Belgique,  naquitàZwolledans 
la  province d'Over-Yssel,  le  7  février  1 7  5.3. 
Dès  l'âge  le  plus  tendre  il  montra  d'heu- 
reuses dispositions  pour  la  poésie  ;  en 
même  temps  qu'il  commençait  à  cultiver 
cet  art ,  il  s'adonnait  à  l'étude  du  droit , 
et  fut  reçu  docteur  dans  celte  faculté  en 
1770  à  l'université  de  Leyde-  De  retour 
à  Zwolle,  il  en  fut  nommé  bourguemestre; 
peu  de  temps  après  il  devint  receveur  du 
cojlégc  de  l'Amirauté  dans  la  même  ville. 
Pendant  les  momens  de  loisir  que  lui 
laissaient  ses  fonctions,  il  s'occupait  tou- 
jours de  la  poésie.  Il  avait  aussi  du  goût 
pour  toutes  les  parties  de  la  littérature  et 
composa  plusieurs  ouvrages  en  prose;  ses 
diverses  productions  annoncent  à  la  fois 
un  bon  poète  et  un  élégant  prosateur; 
comme  elles  sont  très  nombreuses  ,  nous 
nous  bornerons  à  citer  les  suivantes  : 
1  **  Le  Bonheur  de  la  paix ,  1779,  poème 
qui  a  remporté  le  premier  prix  d'un  con- 
cours ouvert  par  la  société  poétique  de 
Leyde;  2°  Eloge  de  V amiral  Ruytcr; 
ce  sujet  était  encore  celui  d'un  prix  pro- 
posé par  la  même  société.  Cette  pièce 
obtint  le  premier  prix ,  elle  était  en  vers  ; 
l'auteur  avait  envoyé  au  concours  un 
tloge  en  prose  qui  obtitit  le  deuxième 
prix.  3°  Poème  sur  la  Providence  ;  4"» 
Poème  sur  F  humanité  ;  5°  Poème  de 
Charles  V  à  son  fils  Philippe  //,  en  lui 
remettant  te  gouvernement  des  Pays- 
Bas  ;  6"  Traité  sur  la  foi'ce  de  la  preuve 


FEL 

de  la  vérité,  de  la  divinité  de  la  doc- 
trine de  l'évangile,  déduite  des  miracles 
opérés  par  J.  C.  et  par  ses  apôtre  s  ;  7"  La 
vertu  et  les  mœurs  peuvent-elles  chez 
des  peuples  oit  la  civilisation  a  fait  de 
grands  progrès ,  trouver  un  appui  suffi- 
sant et  une  garantie  durable  dans  les 
meilleures  constitutions  humaines  ,  de 
législation ,  d'économie  politique ,  et  i.é- 
ducation,  sans  avoir  besoin  de  t influence 
des  idées  religieuses?  et  qiC est-ce  que 
V expérience  nous  apprend  a  cet  égard  ? 
L'auteur,  après  la  discussion  la  plus  lu- 
mineuse ,  répond  négativement  à  cette 
question ,  et  cet  ouvrage  ainsi  que  ceux 
qui  le  précèdent ,  obtint  le  premier  prix 
comme  tous  les  autres  au  concours  où 
ils  furent  envoyés;  8"  Odes  et  poésies, 
5  vol.  ;  elles  ont  mérité  à  leur  auteur  la  ré- 
putation de  premier  poète  de  la  Hoiiande  ; 
U"  Lettres  sur  différens  sujets  de  litté- 
rature ,  G  vol .  in-8  ;  1 0°  Ferdinand  et 
Constantin ,  roman  sentimental  qui  eut 
un  grand  succès  en  Hollande,  1786,  2 
vol.  in-8  ;  1 1°  Lettres  en  vers  à  Sophie, 
1809.  Feilh  se  propose  de  prouver  dans 
ces  lettres  que  la  philosophie  de  Kant 
n'est  pas  compatible  avec  l'évangile. 
Elles  ont  été  sévèrement  critiquées  par  le 
professeur  Kinker ,  grand  partisan  de 
Kant,  dans  un  écrit  intitulé  Lettres  de 
Sophie  à  Feilh  ;  1 2°  Odes  et  poésies  di- 
verses ,  1809;  13"  le  Tombeau,  poème 
didactique,  1782.  Ce  poème  a  été  traduit 
en  français  par  A.  Çlavareau  ,  Bruxelles  , 
1827  ,  in-1  S.  Quatre  tragédies.  Feith  est 
mort  à  la  fin  de  1814,  à  l'âge  de  7 1  ans. 
Il  appartenait  à  une  famille  patricienne 
qui  comptait  parmi  ses  membres  des  ma- 
gistrats et  des  écrivains  distingués. 

FÉLIBIEN  (André),  sieur  des .\ vaux 
et  de  Javerci ,  né  à  Chartres  en  1619, 
suivit  à  Rome  l'ambassadeur  de  France 
en  qualité  de  secrétaire.  Il  eut  occasion 
de  .voir  Le  Poussin  dans  celte  patrie  des 
beaux-arts.  Il  lia  amitié  avec  lui ,  et  per- 
fectionna sous  cet  artiste  son  goût  pour 
la  peinture,  la  sculpture  eU'archilecture. 
Foucquet ,  et  Colbert  après  lui ,  em- 
ployèrent ses  talens.  Il  eut  la  place  d'his- 
toriographe des  bâtimens  du  roi  en  1 666, 
et  celle  de  garde  des  antiques  en  1673. 


\ 


I 


FEL 
Deux  ans  auparavant  il  avait  été  nommé 
secrélaire  de  l'académie  d'architecture. 
Sa  probité  ,  aussi  connue  que  son  savoir, 
le  fit  estimer  et  aimer  de  ce  qu'il  y  avait 
alors  de  plus  habiles  et  de  plus  bonnêles 
gens  eu  France.  Les  uns  et  les  autres  le 
pleurèrent ,  lorsqu'il  mourut  en  1G95,  à 
"G  ans.  Celait  un  homme  grave  et  sérieux. 
Sa  conversation  ne  laissait  pas  d'être  fort 
agréable  ,  et  même  enjouée  ,  suivant  les 
occasions.  Il  avait  l'esprit  juste  et  le 
cœur  droit ,  et  était  plutôt  ami  de  la 
vertu  qu'esclave  de  la  fortune.  Il  était 
membre  de  l'académie  des  Belles-lettres. 
Il  lui  a  fait  honneur  par  plusieurs  ou- 
vrages éh'gans,  profonds,  et  qui  res- 
pirent le  goût.  Voltaire  lui  a  reproché 
avec  raison  de  dire  trop  peu  de  chose  en 
trop  de  paroles ,  et  de  manquer  de 
méthode.  Ces  défauts  se  font  sentir  dans 
tous  ses  livres.  Les  principaux  sont  : 
i°  Entretiens  sur  les  vies  et  les  ouvrages 
des  plus  excellens  peintres ,  2  vol.  in-4  , 
Paris,  1G85  ,  réimprimés  à  Amsterdam  en 
6  vol.  in-12  ;  à  Trévoux  en  6  ,  et  tradiiits 
en  anglais.  2"  Traite'  de  Forigine  de  la 
peinture ,  in-4.  3"  Les  Principes  de  l'ar- 
cliitecture ,  peinture  et  sculpture  ,  Paris , 
lG90,in-4.  On  voit  que  Félibien  avait 
médité  sur  tous  ces  arts;  cet  ouvrage, 
rempli  de  réflexions  profondes  et  judi- 
cieuses sur  la  théorie  et  la  pratique,  aida 
les  artistes  et  éclaira  les  savans.  4"  Les 
Cnnfc'renccs  de  Vacade'mie  royale  de 
peinture,  in-4.  6°  Les  quatre  éléniens 
n  peints  par  Le  Brun ,  et  mis  en  tapis- 
-  séries,  décrits  par  Fe'libien,  in-4. 
T  Description  de  la  Trappe,  in-12. 
6°  Traduction  du  Château  de  Came,  de 
sainte  Thérèse,  de  la  Fie  du  pape  Pic  V, 
de  la  Disgrâce  du  comte  d'Olivarès, 
1C58  ,  in-8.  8"  Le  Tableau  de  la  famille 
de  Darius,  décrit  par  le  même,  in-4. 
9°  liCS  divertissemens  de  Versailles , 
donnés  par  le  roi  à  toute  sa  cour,  in- 1 2. 
\Q° Description  sommaire  de  Versailles, 
avec  un  plan  gravé  par  Sébastien  Le 
Clerc  ,  in-12.  (Il"  Fie  du  père  Louis  de 
Grenade  ;  1 2°  Paraphrase  des  lamenta- 
tions de  Jérémie  ,  1G46.  Il  fut  l'un  des 
huit  savans  qui  formèrent  l'académie  des 
Inscriptions,  fondée  par  Colberl  en  16G3. 


FEL  245 

Ce  fut  encore  lui  qui  composa  toutes  les 
Inscriptions  placées  dans  la  cour  del'Hôtel 
de  ville  de  Paris  ,  depuis  IGCO  jusqu'en 
1C8G.  )  Il  laissa  trois  fils  :  Nicolas-André; 
mort  doyen  de  l'église  de  Bourges  en 
1711  ,  et  les  deux  suivans. 

FÉLIBIEN  (  Jean-François  ) ,  fils  du 
précédent,  mort  le  23  juin  17  33  ,  à  l'âge 
de  7  6  ans,  succéda  à  son  père  dans  toutes 
ses  places,  et  eut  comme  lui  le  goût  des 
beaux-arts.  On  lui  doit  1°  Becueil  histo- 
rique de  la  vie  et  des  ouvrages  des  plus 
célèbres  architectes  ,¥av\s ,  1G87  ,  in-4  : 
ouvrage  réimprimé  plusieurs  fois  à  Paris 
et  dans  les  pays  étrangers,  avec  les  jfe'/i- 
tretiens  de  son  père  sur  les  peintres  ^ 
dont  il  est  le  pendant.  2"  La  Descrip- 
tion de  Fersnilles  ancienne  et  nouvelle , 
in-12  ,  avec  la  description  et  l'explication 
des  statues,  tableaux  ,  et  autres  ornemcns 
de  celle  maison  royale.  3"  /,a  Descrip- 
tion de  V église  des  Invalides,  170G  ,  in- 
folio ,  réimprirtiée  en  17  56. 

FÉLIBIEN  (  Dom  Michel  ) ,  frère  du 
précédent,  bénédictin  de  la  congréga- 
tion de  St.-Maur,  né  à  Chartres  le  1  + 
septembre  16G6,  soutint  avec  honneur 
la  réputation  que  son  père  et  son  frère 
s'étaient  acquise.  Les  échevins  de  Paris  , 
informés  de  son  mérite,  le  choisirent 
pour  écrire  l'histoire  de  celle  ville  ;  il  l'a- 
vait beaucoup  avancée  ,  lorsqu'il  mourut 
en  1710.  Elle  fut  continuée  et  publiée 
par  dom  Lobineau,  en  6  vol.  in-fol.  ,  à 
Paris,  1 726.  On  a  encore  de  dom  Félibien, 
V  Histoire  de  Vabbaye  de  S  t. -Denis,  1  vol. 
in-foiio ,  ornée  de  figures ,  pleine  d'é- 
rudition ,  de  recherches ,  et  enrichie  de 
savantes  dissertations.  Elle  parut  à  Paris 
en  1700.  LePère  Félibien  était  un  homme 
d'un  jugement  sûr  et  d'un  esprit  facile; 
mais  sa  faible  santé  fut  un  grand  obsta- 
cle à  SCS  études. 

FÉLIBIEN  (Jacques)  ,  frère  d'André» 
chanoine  et  archidiacre  de  Chartres  ,  oit 
il  était  né  en  1G3C,  a  composé  1°  des 
Instructions  morales  ,  en  forme  de  caté- 
chisme, sur  les  Commandemens  de  Dieu 
et  sur  le  Symbole  ,  tirées  de  l'Ecriture 
sainte.  2°  Pcntateuchus historiens,  Paris, 
1704  ,  in-4.  Ce  livre  a'  été  supprimé  par 
un  anêt  du  conseil  ;  dans  plusieurs  exem- 


246  FËL 

plaires,  les  cartons  retranchés  se  trouvent 
à  Ja  fin  du  volume.  Il  mourut  le  25  no- 
vembre 17 IG,  à  82  ans. 

•  FÉLICE  (  Fortuné-Barlhélemi  de  ) , 
né  à  Rome  le  24  août  1723,  d'une  fa- 
mille orif^inairement  napolitaine  ,  fit  de 
bonnes  éludes  chez  les  jésuites,  et  pro- 
fessa avec  beaucoup  de  succès  à  Rome  et 
à  Naples.  Ayant  enlevé  dans  un  couvent 
une  femme  de  condition  ,  il  fut  obliîjé  de 
fuir,  et  il  se  relira  ,  après  avoir  parcouru 
différens  pays  ,  à  Berne ,  oîx  il  embrassa 
la  religion  protestante,  et  se  lia  intime- 
ment avec  le  célèbre  Haller  ctTscUarner. 
Il  vint  ensuite  établir  une  imprimerie  à 
Yverdun.  Il  publia  avec  ce  dernier  YEs- 
trnto  dclla  letteratura  curopea  ,  journal 
qu'il  continua  pendant  9  ans,  et  qui  se 
fait  remarquer  par  une  saine  critique  et 
une  érudition  variée.  Il  a  donné  en  outre 
un  très  grand  nombre  d'ouvrages ,  les 
principaux  sont  1°  De  Newtoniana  at- 
iractione  ,  unica  cohœrenliœ  nnturnlis 
causa ,  advershs  Clav.  Hambergerum  , 
Berne,  1757,  in-4.  2°  Discours  sur  la 
manière  de  former  l esprit  et  le  cœur  des 
en  fans  1  Yverdun,  17G3,  in-8.  3"  Prin- 
cipes du  droit  de  la  nature  et  des  gens , 
d'après  Burlamaqui,  Yverdun,  8  vol.  in-8. 
Voyez  Burlamaqui.  lien  donna  un  abrégé 
sous  le  titre  de  Leçons  de  droit  de  la  nature 
et  des  gens ,  17G9  ,  4  vol.  in-8.  4^  h' En- 
cyclopédie, ou  Dictionnaire  universel 
raisonné  des  connaissances  humaines , 
Yverdun,  17  70-80,  42  vol.  in-4,  6  vol.  de 
supplément,  et  4  vol.  dephinches,  d'après 
l'édition  de  Paris,  mais  qu'il  crut  pou- 
voir refondre,  améliorer ,  enrichir.  Tous 
les  articles  signés  D.  F. ,  et  toutes  les  addi- 
tions placées  entre  deux  astérisques,  sont 
de  lui.  Il  eut  pour  collaborateurs  Euler,  De- 
leuze,  Tscharner,  Lalande,  Dupuis,  Lieu- 
taud,  Haller,  Formey,elc.  5"  Code det hu- 
manité,on  la  Législation  universelle,  na- 
turelle, civile  et  politique,  Yverdun,  17  78, 
13  vol.  in-4.  Cet  ouvrageesttiré  en  partie 
de  son  Encyclopédie  ;  mais  il  y  a  joint 
des  développemens  nombreux.  C"  Ta- 
bleau philosophique  de  la  religion  chré- 
tienne ,  1779,  4  vol.  in-12.  7"  Tableau 
raisonné  de  V histoire  littéraire  du  18* 
siècle,  Yverdun  ,  1779-83,  in-8.  %"  Elé- 


FEL 

mens  de  la  police  d'un  état,  1781,  2  voï. 
in-12.  Félice  est  mort  le  7  février  1789» 
à  Yverdun. 

*  FÉLICI  (  Le  Père  Louis  ) ,  jésuite , 
naquit  à  Ischio  vers  17  40,  entra  jeune 
dans  la  compagnie  de  Jésus  ,  y  lit  profes- 
sion en  1773  ,  et  se  distingua  par  toutes 
les  vertus  chrétiennes.  Entre  autres  bon- 
nes œuvres,  on  lui  doit  la  fondation  do 
deux  établissemens  qui  rendent  encore 
d'importans  services  à  la  religion  et  aui 
fidèles.  Le  premier  est  la  Congrégation 
de  vignerons  et  d'agriculteurs,  dans  l'é- 
glise de  Saint-Vital,  attachée  au  noviciat 
de  Saint-André.  Celte  pieuse  inslilution» 
que  le  Père  Féliei  fonda  lorsqu'il  était  en- 
core novice  ,  servit  à  inspirer  à  des  gens 
grossiers  des  sentimens  religieux ,  des 
mœurs  plus  pures  ;  mit  fin  aux  rixes  fré- 
quentes que  le  moindre  différend  occa- 
siouail,  et  les  porta  à  s'aimer  et  à  se  se- 
courir mutuellement.  Se  trouvant  à  Rome, 
le  Père  Féliei  fonda  encore  l'association 
connue  sous  le  nom  A'Unio/tdes  Prêtres 
de  Saint-Paul.  Elle  se  forma,  en  17  90, 
dans  l'hôpital  de  la  Consolation ,  où 
d'anciens  jésuites  et  des  prêtres  séculiers 
se  réunissaient  pour  assister  les  malades. 
Il  fut  secondé  dans  celte  édifiante  entre- 
prise par  M5Î.  Vincent  Henri  ,  Joseph 
Manrisi ,  Pierre  Cavallo,  François  BuÛ'a, 
l'abbé  Sozzi ,  Gaétan  Zucchi ,  et  par  les 
PP.  Bordoni,  Paradisi  et  Salvalori ,  jé- 
suites. Le  prélat  Médicis  fut  le  bienfaiteur 
de  celte  société ,  qui  obtint  la  proleclioa 
du  vertueux  cardinal  Colonna.  Le  nom- 
bre des  associés  augmentant  de  jour  en 
jour,  ils  .se rassemblaient  dans  l'église  de 
la  Sapience,  d'où  ils  se  transportèrent  à 
l'Oratoire  de  Saint-Paul ,  dans  l'église  de 
Saint-Stanislas  des  Polonais.  Les  person- 
nes les  plus  distinguées  du  clergé  régulier 
et  séculier,  des  prélats  et  des  cardinaux^ 
assistent  souvent  à  celte  société  et  y  tien- 
nent tous  les  quinze  jours  leurs  confé- 
rences. On  a  divisé  l'association  en  huit 
branches  ,  chacune  soumise  à  un  régula^ 
teur  particulier  ,  dont  le  charilabk  but 
est  de  distribuer  des  secours  spirituels 
aux  malades  des  hôpitaux  ;  de  faire  le  ca- 
téchisme, de  prêcher  les  samedis  et  le.* 
dimanches  aux  matelots  de  toutes  les  n«- 


FEL 

lions  ;  de  propager  par  tout  le  inonde  là 
dévotion  aux  cœurs  de  Jésus  et  de 
Marie  ;  d'instruire  les  troupes,  les  déte- 
nus, les  forçats  et  leurs  gardiens;  de 
réunir  t^ous  les  jours  de  fêtes  les  jeunes  ar- 
tisans, les  écoliers ,  les  pères  de  famille, 
les  marchands  et  artistes;  de  visiter  les 
pauvres  malades  dans  les  maisons  de 
Rome ,  et  leur  porter  des  secours  spiri- 
tuels et  temporels,  d'instruire  les  conva- 
lescens  dans  l'hospice  du  Père  Ange  ;  de 
visiter  fréquemment  les  fous  de  l'hôpital 
de  la  Longara.  Enfin  ,  deux  autres  bran- 
ches se  sont  réunies  aux  huit  premières, 
dont  l'une  s'attache  à  l'instruction  spiri- 
tuelle des  jeunes  éludians  de  l'archi- 
gymnase  romain  ,  et  l'autre  à  celle  des 
élèves  des  beaux-arts.  Le  bien  qu'a  fait 
cette  association  est  incalculable  ;  ce  bien 
est  dû  au  Père  Félici,  et  à  ses  zélés  protec- 
teurs. «  Cela  prouve ,  dit  l'auteur  des 
»  Me'moires  ecclésiastiques  (  M.  Pie  ) , 
»  combien  ce  clergé  (  le  romain)  mérite 
»  le  rang  qu'il  occupe  dans  les  églises  de 
V  la  chrétienté.  Il  était  digne  de  la  capi- 
»  taie  du  monde  catholique  d'offrir,  dans 
»  cette  association  ,  un  modèle  aux  prê- 
»  très  et  aux  fidèles  des  autres  contrées.  » 
Lors  du  rétablissement  de  la  compagnie 
de  Jésus,  le  Père  Félici,  quoique  très 
âgé  et  devenu  aveugle ,  voulut  se  réunir 
à  ses  confrères.  C'est  dans  leurs  bras  qu'il 
est  mort,  le  29  novembre  1819  ,  à  81  ans. 
Ce  pieux  jésuite,  avant  même  qu'il  eût 
fondé  l'Union  des  prêtres  de  Saint-Paul, 
était  révéré  à  Rome  ,  où  il  avait  entrée 
chez  les  principaux  dignitaires  de  l'Eglise. 
Il  était  le  conciliateur,  l'ange  de  paix 
dans  les  familles  ,  le  bienfaiteur  des  pau- 
vres ;  il  était  enfin  chéri  de  toutes  les 
classes,  comme  possédant  toutes  les 
vertus. 

FÉLICIAIVI  (  Porphyre  ) ,  évêque  de 
Foligno ,  mort  en  1G32  ,  à  70  ans,  avait 
été  secrétaire  du  pape  Paul  V.  Il  écrivait 
avec  beaucoup  de  netteté  en  latin  et  en 
italien.  Il  n'eut  point  de  supérieur  eu  son 
temps  pour  la  poésie  italienne.  On  a  de 
lui  (les  lettres  et  des  poe'sies. 

FÉLICISSIME,  diacre  de  Carthage, 
se  sépara  de  saint  Cyprien  avec  les  chré- 
tiens tombés  dans  la  persécution ,  vers 


FEL  î47 

Tan  251.  Il  voulait  qu'on  les  reçût  à  la 
communion  sur  uue  simple  recomman- 
dation des  martyrs ,  et  sans  qu'ils  eussent 
fait  pénitence.  Il  se  joignit  à  Novat  et  h 
quelques  autres  prêtres.  Saint  Cyprien 
les  excommunia. 

FÉLICITÉ  (Sainte) ,  dame  romaine, 
souffrit  le  martyre  avec  ses  sept  fils ,  sous 
Marc-Aurèle  ,  vers  l'an  164.  Les  enfans  , 
encouragés  par  leur  illustre  mère,  sup- 
portèrent les  tourmens  avec  une  con- 
stance admirable.  L'aîné  fut  flagellé 
jusqu'à  la  mort,  avec  des  fouets  garnis 
de  plomb  ;  les  deux  suivans  furent  assom- 
més à  coups  de  bâton ,  et  les  autres  dé- 
collés avec  leur  mère  ,  qui  fut  martyrisée 
la  dernière,  frayez  Perpétue. 

*  FÉLIN  SKI  (Aloïse),  un  des  poètes 
les  plus  distingués  de  la  Pologne,  naquit 
en  1773.  Il  se  trouvait  à  Varsovie  à  l'é- 
poque de  la  diète  constitutionnelle  ;  alors 
il  publia  Senatus-consuUes  sous  le  règne 
de  Jean  Sobicski ,  suivis  de  plusieurs 
questions  de  droit;  à  la  même  époque  il 
fit  paraître  diverses  brochures  politiques 
dans  le  but  de  faire  changer  la  forme  du 
gouvernement  de  la  Pologne.  Félinski 
cdressa  à  plusieurs  personnes  distinguées 
quelques-unes  de  ses  poésies  qui  le  firent 
connaître  avantageusement.  Devenu  en 
1701  précepteur  du  neveu  de  Craski,  il 
fut  ensuite  nommé  secrétaire  des  corres- 
pondances de  France  auprès  du  généra- 
lissime Rosciusko.  Nommé  professeur  d'é- 
loquence et  de  poésie  au  lycée  de  Krze- 
mieniec  et  bientôt  après  directeur  de  cet 
établissement ,  il  s'attira  l'admiration  de 
ses  élèves  et  l'estime  de  tous  ses  conci- 
toyens. Il  avait  entrepris  de  réformer 
l'orthographe  et  même  la  langue  polo- 
naise; son  système  eut  des  partisans  et 
des  ennemis;  le  savant  Jean  Suiadecki, 
qui  .se  rangea  parmi  ses  adversaires,  fut 
un  de  ceux  qui  contribuèrent  le  plus  à 
ce  que  ce  projet  de  réforme  ne  fût  point 
adopté.  Félinski  est  mort  le  12  février 
1822  à  Rrzemieniec  ;  il  était  membre  de 
l'université  de  Vilna  et  de  la  société  des 
amis  des  Sciences  de  Varsovie.  Il  est  au- 
teur d'une  excellente  tragédie  intitulée 
Barbe  Radziwill ,  qui  a  été  traduite  ea 
prose  française  dans  les  chefs-d'œuvre 


248  FEL 

des  théâtres  étrangers  -,  il  a  traduit  aussi 
du  français  V Homme  des  champs  de  De- 
lille,  et  quelques  tragédies.  Ses  OEuvres 
ont  été  publiées  en  1825;  une  première 
édition  avait  déjà  paru  de  l81Gàl821, 
Varsovie,  2  vol.  in-12. 

FELIPIQUE  BARDANES.  Foycz 
Phiuppique. 

FÉLIX,  proconsul  et  gouverneur  de 
Judée,  frère  de  Pallas  affranchi  de  Claude, 
passa  en  Judée  vers  l'an  63  de  J.  C.  Dru- 
sille,  fille  du  vieil  Agrippa,  gagnée  par 
ses  caresses ,  l'épousa  quelque  temps 
après.  Ce  fut  devant  lui  que  saint  Paul  com- 
parut. Néron  le  rappela  delà  Judée,  qu'il 
pillait  et  tyrannisait  de  la  manière  la  plus 
odieuse;  ce  qui  n'empêcha  pasTertullus 
qui  pérorait  contre  saint  Paul,  de  le  flatter 
d'une  manière  lâche  et  indigne ,  pour 
l'engager  à  condamner  ce  grand  apôtre, 
dont  l'éloquence  frappa  tellement  le  gou- 
verneur romain  ,  qu'effrayé  des  grandes 
vérités  du  christianisme ,  il  rompit  brus- 
quement la  conférence.  Act.  24. 

FÉLIX  I  (Saint),  pape,  successeur  de 
saint  Denys  en  2G9  ,  mourut  martyr  l'an 
274.  (Il  vil  la  paix  de  l'Eglise  troublée  par 
l'hérésie  de  PaulSamosale,  et  persécutée 
par  l'empereur  Aurélien).  Il  nous  reste  de 
ce  pontife  un  fragment  de  la  lettre  qu'il 
écrivit  à  Maxime  d'Alexandrie,  contre  Sa- 
bellius  et  Paul  de  Samosate.  Elle  fut  lue 
dans  les  conciles  de  Chalcédoine  et  d'E- 
phèse  et  ce  fragment  est  dans  les  actes  du 
concile  de  Chalcédoine.  Ou  lui  en  attribue 
trois  autres  ,  visiblement  supposés. 

FÉLIX  11 ,  archidiacre  de  l'église  ro- 
maine ,  p'acé  sur  le  siège  pontifical  en 
355,  par  l'empereur  Constance ,  pendant 
l'exil  du  pape  Libère ,  en  fut  chassé  après 
le  retour  du  véritable  pontife.  Constance 
aurait  voulu  que  Libère  et  Félix  gouver- 
nassent tous  deux  l'église  de  Rome,  et  que 
chacun  fût  à  la  tête  de  son  parti  ;  mais  le 
peuple  ayant  entendu  cet  ordre  de  l'em- 
pereur, qu'il  fit  lire  dans  le  cirque,  s'é- 
cria tout  d'une  voix  :  «  Il  n'y  a  qu'un 
»  Dieu,  qu'un  Christ,  qu'un  évêque...  » 
Félix ,  obligé  de  se  retirer  ,  mourut  dans 
une  de  Ses  terres  le  22  novembre  365.  Le 
Martyrologe  d'Usuard  et  celui  de  Rome 
lai  donnent  le  titre  de  martyr  .-  mais  le 


FEL 

Père  Papebroch  prouve  que  c'est  sans 
preuve ,  dans  une  dissertation  insérée 
dans  le  Propylœum  adyfcta  sanclorum, 
p.  5G.  Il  le  dit  cependant  digne  du  culte 
qu'on  lui  rend  comme  saint.  Singularis 
ipsius ,  dit-il ,  ad  obilum  usquepcr  annos 
plusquam  octo  modestia ,  qua  sesc  con- 
ti/iuit  in  humili  rcccssu ,  oblatis  recupe- 
randœ  sedis  occasionibus  numquam 
usas ,  postquam  id  sine  fidei  catholicœ 
periculo  fieri  nonposse  cognovit,  omnem 
a  grata  postcritate  venerationem  com- 
mcruit.  Plusieurs  critiquesie  placent  dans 
le  catalogue  des  papes  ;  mais  il  paraît 
qu'on  doit  le  regarder  plutôt  comme  évê- 
que-vicaire  du  pape  Libère  ,  qui  ,  selon 
quelques-uns,  avait  consenti  qu'on  le 
mît  à  sa  place,  et  qu'il  eût  droit  de  lui 
succéder,  s'il  venait  à  mourir  pendant 
son  exil  ;  par-là  on  excuse  le  clergé  de 
Rome  d'avoir  adhéré  à  son  ordination  et 
de  l'avoir  regardé  pour  pape,  surtout  après 
qu'on  eut  annoncé  à  Rome ,  la  chute  ap- 
parente dans  la  foi  du  pape  Libère.  Le 
tombeau  de  Félix  ,  trouvé  sous  le  pontifi- 
cat de  Grégoire  XllI  l'an  1 582 ,  avec  une 
inscription  honorable,  confirme  le  senti- 
ment des  critiques  favorables  à  sa  mé- 
moire. 

FELIX  UT ,  romain  ,  bisaïeul  de  Gré- 
goire le  Grand,  fut  élu  pape  après  Sim- 
plicius  en  483.  Il  commença  par  rejeter 
l'édit  d'union  ,  publié  par  l'empereur  Ze- 
non ,  et  anathémalisa  ceux  qui  le  rece- 
vaient. Acace  de  Conslanlinople  troublait 
alors  l'Eglise  ;  il  tâcha  de  le  ramener  par 
des  lettres  pleines  de  douceur  ;  mais  ap- 
prenant qu'il  ne  cessait  de  communiquer 
avec  Pierre  Mongus ,  hérétique  anathé- 
matisé  ,  il  prononça  contre  lui  une  sen- 
tence de  déposition  et  d'excommunica- 
tion. Cette  sentence  fut  attachée  au  man- 
teau d'Acace  par  des  moines  acémètes, 
auxquels  cette  hardiesse  coûta  la  vie.  Fé- 
lix assembla  un  concile  à  Rome  en  487, 
pour  la  réconciliation  de  ceux  qui  s'é- 
taient laissé  rebaptiser  en  Afrique  pendant 
la  persécution.  Il  mourut  saintement  en 
492.  C'est  le  premier  pape  qui  ait  em- 
ployé rindiction  dans  ses  lettres.  Athala- 
ric ,  roi  des  Goths ,  quoique  arien  ,  res- 
pecta ses  vertus  et  son  zèle  pastoral.  Fé- 


fFÉL 
lix  en  obtint  plusieurs  grâces  et  actes  de 
7  justice.  Ce  fut  en  sa  considération  que  ce 
prince  donna  un  édit  solennel  en  faveur 
des  libertés  et  privilèges  de  l'Eglise ,  et 
prit  des  mesures  pour  faire  respecter  le 
sacerdoce  chrétien. 

FÉLIX  IV ,  natif  de  Bénévent ,  monta 
sur  la  chaire  de  saint  Pierre,  après  le  pape 
Jean  I,  le  24  juillet  526,  par  la  faveur 
de  Théodoric.  Il  gouverna  l'Eglise  avec 
beaucoup  de  zèle,  de  doctrine  et  de  piété, 
et  mourut  au  commencement  d'octobre 
â30 ,  suivant  Ânastase. 

FELIX  V.  Voyez  Amédée  vin. 

FÉLIX  (  Saint  ) ,  prêtre  de  Noleen 
Carapanie  ,  eut  beaucoup  à  souffrir  pour 
la  foi  sousDèce  et  Valérien.  La  paix  ayant 
été  rendue  à  l'Eglise ,  Félix  reparut ,  et 
continua  à  s'acquitter  des  fonctions  du 
saint  ministère.  Après  la  mort  de  Maxime, 
ëvêque  de  Kole,  on  voulut  le  mettre  à 
la  tète  de  cette  église;  mais  son  humilité 
s'y  opposa.  Il  passa  le  reste  de  ses  jours 
en  paix ,  dans  une  terre  qu'il  labourait 
lui-même.  Il  y  mourut  vers  l'an  256.  Les 
miracles  qui  se  sont  opérés  à  son  tombeau 
sont  attestés  par  saint  Paulin  ,  saint  Au- 
gustin, Sulpice-Sévère,  etlepapeDamase. 
<^uelques-uns  de  ces  illustres  et  saints  écri- 
vains ont  été  témoins  oculaires  des  faits 
qu'ils  rapportent.  Saint  Paulin  atteste  qu'il 
a  vu  de  ses  yeux  un  énergumène ,  marcher 
la  tête  en  bas  contre  la  voûte  d'une  église, 
sans  que  ses  habits  fussent  dérangés,  le- 
quel fut  délivré  par  les  reliques  de  saint 
Félix  de  Noie.  «  Ces  sortes  de  faits,  dit 
«  un  auteur  moderne ,  sont  traités  de 
»  contes  par  les  beaux  esprits  du  jour  : 
»  mais  ils  sont  rapportés  par  des  hommes 
»  de  toute  probité,  et  rejetéspar  des  gens 
M  qui  n'en  ont  pas  assez  pour  être  crus , 
j>  lors  même  qu'ils  disent  des  choses  très 
>'  ordinaires.  »  Félix  a  toujours  été  ho- 
noré à  Noie,  comme  un  saint.  Son  culte 
passa  de  l'Italie  en  Afrique. 

FELIX  (Saint),  succéda  à  saint  Briton 
dans  le  gouvernement  de  l'église  de  Trêves 
en  385.  Son  épiscopat  fut  agité  de  violens 
orages.  Les  évêques  assemblés  à  l'occasion 
de  son  sacre ,  communiquaient  tous  les 
jours  avec  Ithace  et  ses  adhéreus,  qui 
sollicitaient  la  mort  de  l'hérétique  Priscil- 

V. 


FEL  2^9 

lien  et  de  ceux  de  son  parti.  Saint  Martin, 
que  des  affaires  avaient  appelé  vers  le 
même  temps  à  Trêves  ,  communiqua  avec 
les  mêmes  évêques  en  assistant  à  l'ordi- 
nation de  Félix;  faiblesse  qu'il  se  reprocha 
toute  sa  vie.  Saint  Ambroise  plus  ferme 
que  lui ,  refusa  constamment  de  commu- 
niquer avec  Félix  et  les  autres  évêques 
qui  avaient  eu  part  à  son  ordination.  Peu 
de  temps  après  les  évêques  des  Gaules 
s'assemblèrent  en  concile  à  Turin,  où 
après  lecture  faite  des  lettres  écrites  à  ce 
snjet^r  saint  Ambroise  et  le  pape  saint 
Sirice,  il  fut  résoluqu'on  n'accorderait  la 
communion  qu'à  ceux  qui  se  retireraient 
de  celle  de  Félix  :  celui-ci  ne  voulant 
point  être  cause  d'un  schisme  dans  l'E- 
glise ,  se  démit  de  l'épiscopat ,  et  se  re- 
tira auprès  de  l'église  de  la  Sainte-Vierge 
(  aujourd'hui  St. -Paulin  )  à  Trêves,  qu'il 
avait  fait  réparer  ou  construire  ;  il  y 
passa  le  reste  de  ses  jours,  éloigné  de 
tout  commerce  avec  le  monde  ,  et  dans 
l'exercice  des  plus  sublimes  vertus. 

FELIX,  évêqued'Urgel,  ami  d'Elipand, 
évêque  de  Tolède ,  soutenait  comme  lui 
que  Jésus-Christ  est  fils  adoptif.  Cette  er- 
reur fut  condamnée  au  concile  de  Nar- 
bonne  l'an  791  ,  de  Frioul  la  même  an- 
née, de  Ratisbonne  en  792.  Il  fut  envoyé 
ensuite  à  Rome,  où  il  abjura  son  erreur  ; 
mais  il  continua  à  la  répandre  après  son 
retour  à  Urgel .  Alcuin  et  Paulin  d'Aquilée 
la  réfutèrent  victorieusement.  Il  fut  de 
nouveau  condamné  à  Francfort,  en  794, 
à  Rome  en  799  ,  et  la  même  année  à  Aix- 
la-Chapelle.  C'est  dans  cette  dernière  as- 
semblée qu'il  fut  dépossédé  de  l'épiscopat 
à  cause  de  ses  rechutes ,  et  ensuite  relé- 
gué à  Lyon  par  Charlemagne,  dont  le 
jugement  en  cette  affaire  ne  fut  que  l'ex- 
pression del'entière  adhésion  dece  prince 
aux  décisions  de  l'Eglise,  comme  l'a 
prouvéM.  Bossuet(PoZi7.  del Ecrit,  liv.  7, 
art.  4,  prop.  11  ).  Félix  écrivit  du  lieu 
de  son  exil  à  son  peuple  d'Urgel  une  let- 
tre qui  contenait  l'abjuration  de  son  er- 
reur ;  on  doute  qu'elle  fût  plus  sin- 
cère que  les  autres.  «  Félix  d'Urgel  pas- 
»  sa  sa  vie,  dit  l'abbé  Bergier,  dans  une 
«  alternative  continuelle  d'abjurations 
»  et   de    rechutes  ,    et  la  termina  dans 

i6.. 


a5o  FEL 

»  l'hérésie.  >»  11  mourut  vers   l'an  818. 

'  FÉLIX  DE  TASSY  (  Charles-Fran- 
çois ) ,  un  des  plus  habiles  et  des  plus 
savans  chirurgiens  du  17*  siècle,  exerça 
d'abord  son  art  dans  les  hôpitaui  civils 
et  militaires;  puis  il  succéda  en  1676  à 
son  père  dans  la  charge  de  premier  chi- 
rurgien du  roi  .Vers  cette  époque  Louis  XIV 
fut  atteint  d'une  maladie  qui  porta  long- 
temps le  nom  de  maladie  du  roi  (  la  fis- 
tule à  l'anus  )  ;  la  France  fut  vivement 
inquiète  ;  la  chirurgie  n'était  point  assez 
avancée  pour  traiter  ce  mal ,  et  l'on 
ignorait  généralement  le  procédé  que, 
16  siècles  auparavant,  Celse  avait  em- 
ployé et  décrit.  Félix  fit  cette  opération 
avec  le  plus  heureux  succès,  et  il  l'ut  le 
premier  chirurgien  moderne  qui  l'ait 
tentée.  La  reconnaissance  publique  et 
l'amitié  de  son  souverain  le  payèrent 
amplement  du  bienfait  que  son  talent 
avait  produit  ;  mais  une  mort  prématurée 
l'enleva  jeune  encore  le  25  mai  1703. 

FELL.  royez  Fox  (  George  ). 

FELL(Jean),  évêque  d'Oxford  en  1675, 
mort  en  1686 ,  à  61  ans,  fut  sincèrement 
attaché  à  la  famille  royale  de  Stuart. 
Persécuté  par  les  parlementaires,  il  se 
renferma  dans  son  cabinet ,  et  y  acquit 
des  connaissances  très  étendues.  Dans  le 
temps  de  la  révolution,  en  1660,  fil  re- 
parut ,  et  il  fut  récompensé  de  son  zèle 
pour  son  roi ,  par  des  bénéfices  et  enfin 
par  l'évêché  d'Oxford.  On  a  de  lui  le 
1"  vol.  des  Rerum  anglicavum  S crip to- 
res,  Oxford,  1684,  in-fol.  :  la  mort  l'ém- 
is pécha  de  continuer  cette  savante  et  utile 
collection.  Il  avait  donné  ,  avec  Péarson, 
une  très  belle  édition  de  Saint-Cyprien  , 
Oxford,  1682,  in-fol.  avec  des  remarques 
savantes ,  et  une  édition  des  œuvres  de 
saint  Théophile  d'Antioche,  Oxford,  1684. 
Son  nouveau  Testament  grec  avec  les 
variantes ,  imprimé  dans  la  même  ville, 
iD-12,  1675,  est  estimé.  (  On  lui  doit  en- 
core Vie  du  docteur  Henri  Hammond , 
Londres,  1 66 l,in-8,  en  anglais,  souvent 
réimprimée  en  tête  de  la  vie  de  cet  auteur; 
Alcinoi  in  platonicam  philosophiam  in- 
troductio,  Oxford,  1667,  in-8  ;  une  traduc- 
tion latine  des  Antiquités  de  l'université 
tSOxford  de  Wood,  1674, 2  vol.  in-folio.) 


FEL 

FELLER  (  Joachim-Frédéric  ) ,  né  ii 
Leipsick,  en  1673,  fut  secrétaire  du  duc 
de  Veymar.  Il  passa  la  plus  grande  partie 
de  sa  vie  à  voyager ,  pour  visiter  les  sa- 
Tans  et  les  bibliothèques ,  se  maria  en 
-1708  ,  et  mourut  en  1726.  On  a  de  lui  : 
1°  Monumenta  inedita,  par  forme  de 
journal,  en  12  parties,  léna,  1714  ,  in-4. 
2°  MiscelUinea  Leibnitiana ,  Leipsick  , 
1718  ,  in-8.  3"  Généalogie  de  la  maison 
de  Brunswick,  en  allemand,  1717, 
in-8. 

FELLER  (  François  ni).  F,  la  Notice 
sur  sa  vie  et  ses  ouvrages  au  commen- 
cement du  premier  volume. 

FELLON  (  Thomas-Bernard  ),  jésuite, 
né  à  Avignon  le  12  juillet  1672  ,  mort  le 
25  mars  1759,  avait  du  talent  pour  la 
poésie  latine.  On  connaît  ses  poèmes  in- 
titulés :  Faba  Arabica  ;  Magnes.  On  a 
encore  de  lui  :  1  "  Oraisons  funèbres  de 
M.  le  duc  de  Bourgogne,  et  de  Louis XIV. 
2°  Paraphrase  des  Psaumes,  1 7  3 1 ,  in- 1 2 . 
3°  On  lui  a  attribué  par  erreur  un 
abrégé  du  Traitéde  l'amour  deDieu,Tpar 
saint  François  de  Sales  ;  cet  ouvrage  est 
de  l'abbé  Tricallet. 

FELTON  (  Jean  ) ,  gentilhomme  an  - 
glais  ,  très  zélé  pour  la  religion  catholi- 
que ,  afficha  publiquement  aux  portes  de 
la  maison  épiscopale  de  Londres,  la  bulle 
de  Pie  V ,  par  laquelle  ce  pontife  décla- 
rait hérétique  la  reine  Elisabeth,  qui  s'é- 
tait déclarée  chefde  l'Eglise  et  avait  aboli 
le  culte  catholique.  Felton  fut  condamne 
à  être  pendu,  et  il  le  fut  en  1570.  On  le 
détacha  de  la  potence,  pendant  qu'il 
était  encore  en  vie  ;  puis  on  lui  coupa 
les  parties  naturelles ,  qui  furent  jetées 
dans  le  feu  ;  ensuite  on  lui  fendit  l'esto- 
mac ,  pour  lui  arracher  les  entrailles  et 
le  cœur ,  et  après  lui  avoir  coupé  la  tête, 
on  mit  son  corps  en  quatre  quartiers. 
Telle  fut  à  l'égard  de  ce  courageux  défen- 
seur de  l'ancienne  religion,  la  vengeance 
d'une  princesse,  que  la  philosophie  du 
jour  a  tant  exaltée.  Son  fils  Thomas  Fel- 
ton ,  religieux  de  Saint-François  de  Paule, 
périt  également  par  le  dernier  supplice, 
avec  un  autre  prêtre,  le  28  août  1588. 

FELTRE.  Voy.  Claiike,  duc  de  Feltre. 

FÉNÉLON  (Bertrand  de  Salis.'*  ac  mar- 


FEN 

qais  de  ),  a  donné  la  Relation  du  siège 
de  Metz^  1553,  in-4  ;  le  Voyage  de 
Henri  II aux  Pays-Bas ,  1554,  in-8.  On 
a  ses  Négociations  en  Angleterre ,  ma- 
nuscrit, 2  vol.  in-folio  :  elles  étaient 
dans  la  bibliothèque  du  chancelier  Sé- 
guier.  Ce  brave  militaire  se  signala  par 
sa  valeur  et  par  ses  services ,  et  mourut 
en  1599.  Il  était  de  l'illustre  famille  qui 
a  produit  l'archevêque  de  Cambrai,  dont 
nous  allons  parler. 

FÉNÉLOM  (  François  de  Salignac  de 
lA  Motte  )  naquit  au  château  de  Féné- 
lon  en  Querci,  le  6  août  1G51 ,  d'une 
maison  ancienne  et  distinguée  dans  l'état 
et  dans  l'Eglise.  Des  inclinations  heureu- 
ses, un  naturel  doux,  joint  à  une  grande 
vivacité  d'esprit ,  furent  les  présages  de 
ses  vertus  et  de  ses  talens.  Le  marquis  de 
Fénélon  son  oncle ,  lieutenant-  général 
des  armées  du  roi ,  homme  d'une  valeur 
peu  commune ,  d'un  esprit  orné  et  d'une 
piété  exemplaire,  traita  cet  enfant  comme 
son  propre  fils,  et  le  fit  élever  sous  ses 
yeux  à  Cahors.  Le  jeune  Fénélon  fit  des 
progrès  rapides,  les  études  les  plusdiflBi- 
ciles  ne  furent  pour  lui  que  des  amuse- 
mens.  Dès  l'âge  de  19  ans,  il  prêcha  et 
enleva  tous  les  suffrages.  Le  marquis , 
craignant  que  le  bruit  des  applaudisse- 
meus  et  les  caresses  du  monde  ne  cor- 
rompissent une  âme  aussi  bien  née ,  fit 
prendre  à  son  neveU  la  résolution  d'aller 
se  fortifier  dans  la  retraite  et  le  silence. 
Il  le  mit  sous  la  conduite  de  l'abbé  Tron- 
çon, supérieur  de  Saint-Sulpice  à  Paris. 
A  24  ans ,  il  entra  dans  les  ordres  sacrés, 
et  exerça  les  fonctions  les  plus  pénibles 
du  ministère  dans  la  paroisse  de  Saint- 
Sulpice.  Harlay,  archevêque  de  Paris, 
lui  confia,  3  ans  après,  la  direction  des 
Nouvelles-Catholiques.  Ce  fut  dans  cette 
place  qu'il  fit  les  premiers  essais  du  ta- 
lent de  plaire ,  d'instruire  et  de  persua- 
der. Le  roi  ayant  été  informé  de  ses  suc- 
cès, le  nomma  chef  d'une  mission  sur  les 
côtes  de  Saintonge  et  dans  le  pays  d' Aunis. 
Simple  à  la  fois  et  profond  ,  joignant  à 
des  manières  douces  une  éloquence  forte, 
il  eut  le  bonheur  d'opérer  un  grand  nom- 
bre de  conversions.  En  1689,  Louis  XIV 
lui  confia  l'éducation  de  ses  petits-fils, 


FEN 


aSi 


les  ducs  de  Bourgogne,  d'Anjou  et  de 
Berri.  Ce  choix  fut  tellement  applaudi, 
que  l'académie  d'Angers  le  proposa  poiir 
sujet  du  prix  qu'elle  adjuge  chaque  an- 
née. Le  duc  de  Bourgogne  devint,  sous 
un  tel  maître ,  tout  ce  qu'il  voulût.  Fé- 
nélon orna  son  esprit,  forma  son  cœur, 
et  y  jeta  les  semences  du  bonheur  de 
l'empire  français.  Ses  services  ne  restè- 
rent point  sans  récompense  ;  il  fut  nommé 
en  1695  à  l'archevêché  de  Cambrai.  En 
remerciant  le  roi ,  il  lui  représenta  (  dit 
M"*  de  Sévigné  )  «  qu'il  ne  pouvait  re- 
»  garder  comme  une  récompense ,  une 
M  grâce  qui  l'éloignait  du  duc  de  Bour- 
»  gogne.  »  Il  ne  l'accepta  qu'à  condition 
qu'il  donnerait  seulement  trois  mois  aux 
princes,  et  le  reste  de  l'année  à  ses  dio- 
césains.  Il  remit  en   même  temps  son 
abbaye   de   Sain l- Valéry ,    et  son   petit 
prieuré,  persuadé  qu'il  ne  pouvait  possé- 
der aucun  bénéfice  avec  son  archevêché. 
Au  milieu  de  la  haute   faveur  dont  il 
jouissait,  il  se  formait  un  orage  contre 
lui.  INé  avec  un  cœur  tendre  et  une  forte 
envie  d'aimer  Dieu  pour  lui-même ,  il  se 
lia  avec  M"*  Guyon  ,   dans  laquelle  il  ne 
vit  qu'une  âme  éprise  du  même  goût  que 
lui.  Les  idées   de  spiritualité  de  cette 
femme ,  excitèrent  le  zèle    des  théolo- 
giens, et  surtout  celui  de  Bossuet.  Ce 
prélat  voulut  exiger  que  l'archevêque  de 
Cambrai ,  autre  fois  son  disciple ,  alors 
son  rival,  condamnât  M"*  Guyon  avec 
lui ,    et   souscrivît   à   ses   Instructions 
Pastorales.  Fénélon  ne  voulut  sacrifier 
ni  ses  sentimens ,  ni  son  amie.  Il  la  met- 
tait au  nombre  de  ces  mystiques  qui , 
portant  le  mystère  de  la  foi  dans  une  con- 
science pure,  ont  plus  péché  dans  les  ter- 
mes que  dans  la  chose ,  aussi  savans  dans 
les  voies  intérieures ,  qu'incapables  d'en 
instruire  les  autres  avec  l'exactitude  et 
la  précision  que  demande  la  théologie. 
Il  crut  rectifier  tout  ce  qu'on  lui  repro- 
chait, en  publiant  son  livre  de  l'Expli- 
cation des  Maximes  des  Saints  ,  1 C  97  , 
in-12.  Le  stile  en  était  pur  ,  vif,  élégant 
et  affectueux  ;  les  principes  étaient  pré- 
sentés avec  art ,  et  les  contradictions  sau- 
vées avec  adresse.  On  y  voyait ,  dit  un 
historien ,  un  homme  qui  craignait  éga- 


:^5!i  FEN 

lement  d'êlrc  accusé  de  suivre  Moliilos  ,• 
et  d'abandonner  sainte  Thérèse  ;  tantôt 
donnant  trop  à  la  charité ,  tantôt  ne  don- 
nant pas  assez  à  l'espérance.  Bossuet,  qui 
vit  dans  le  livre  de  Fénélon  quelques  rap- 
ports avec  des  assertions  déjà  condamnées 
par  la  proscription  du  Quiétisme ,  s'éleva 
contre  cet  ouvrage  avec  véhémence.  Les 
noms  de  Montan  et  de  Priscille ,  prodi- 
gués à  Fénélon  et  à  son  amie ,  parurent 
indignes  de  la  modération  d'un  évêque.- 
«  Bossuet,  a  dit  un  bel  esprit  de  ce  siècle, 
M  eut  raison  d'une  manière  révoltante  j 
M  et  Fénélon  mit  de  la  douceur ,  même 
»  dans  ses  torts.  »  D'habiles  théologiens 
ont  cru  que  dans  cette  dispute ,  comme 
dans  beaucoup  d'autres ,  il  y  avait  des 
suppositions  qui  n'existent  pas  dans  la 
réalité  ;  que  dans  l'amour  de  Dieu  ou  sup- 
posait tantôt  des  abstractions ,  des  consi- 
dérations précisives  ou  négatives ,  aussi 
inutiles  que  fatigantes  ;  tantôt  des  motifs 
d'intérêt ,  des  espérances  explicites  et 
formelles,  également  inconnues  au  vérita- 
ble amour ,  qui  saisit  et  embrasse  intime- 
ment son  objet,  sans  tant  de  raisonnement 
et  de  calcul.  Quoi  qu'il  en  soit,  un  histo- 
rien très  instruit  du  fond  de  cette  contro- 
verse, rapporte  une  anecdote  qui  sert 
beaucoup  à  faire  connaître  Fénélon.  «  On 
»  conseilla  à  Fénélon  de  faire  diversion , 
V  en  attaquant  à  Rome  les  sentimens  et 
»  les  livres  de  Bossuet,  et  en  les  accusant 
»  de  détruire  la  charité  pour  établir  l'es- 
j)  pérance.  Mais  le  pieux  archevêque  ne 
»  voulut  pas  user  de  récrimination  contre 
»  un  frère  ;  et  comme  on  l'exhortait  à  se 
»  tenir  en  garde  contre  les  artifices  des 
»  hommes,  que  l'expérience  lui  avait  si 
y>  bien  appris  à  connaître,  il  fit  cette  belle 
»  réponse ,  Moriamiir  in  simplicitale 
»  nosticl  (  mourons  dans  notre  simpli- 
cité }.  »  Cela  ne  l'empêcha  iras  de  se  dé- 
fendre comme  il  le  devait ,  et  d'écrire 
beaucoup  pour  s'expliquer  lui-même. 
Mais  ses  livres  ne  purent  empêcher  qu'il 
ne  fût  renvoyé  dans  son  diocèse  au  mois 
d'août  1G97.  Fénélon  reçut  ce  coup  sans 
s'affliger  et  sans  se  plaindre.  Son  palaisde 
Cambrai  j  ses  meubles,  ses  papiers,  ses 
Jivres  avaient  été  consumés  i)ar  le  feu 
dans  le  même  temps,  et  il  l'avait  appris 


FEN 

avec  la  même  tranquillité.  Innocent  XII 
le  condamna  enfin  en  1699,  après  9  mois 
d'examen  :  soit  que  le  savant  et  pieux  pré- 
lat n'eût  pas  assez  distingué  les  principes 
des  vrais  mystiques  d'avec  ceux  de  Moli- 
nos ,  soit  que  dans  des  matières  abstrai-' 
tes,  cachées  dans  l'intimité  de  l'âme  et 
des  voies  secrètes  de  Dieu,  et  dès  lors 
difficiles  à  traiter  sans  obscurité  et  sans 
équivoques ,  il  n'ait  point  mis  cette  exac- 
titude théologique  ,  cette  précision  d'i- 
dées et  de  langage,  que  demande  la  con- 
servation de  la  foi  et  de  la  morale  chré- 
tienne (  voyez  Saint-Jean  de  la  Croix  , 
RusBRocH  ,  ÏAULEBE,  clc.  ).  Le  pape  avait 
moins  été  scandalisé  du  livre  des  Maxi- 
mes ,  que  de  la  chaleur  emportée  de  ses- 
adversaires.  Il  écrivit  à  quelques  prélats: 
Peccavit  excessu  amoris  divini  :  sed  vos 
peccastis  defeclu  amoris  proximi.  Féné- 
lon se  soumit  sans  restriction  et  sans  ré- 
serve ;  il  ne  recourut  pas  à  la  distinction 
du  fait  et  du  droit  ;  il  n'allégua  pas  que 
les  écrits  publiés  pour  sa  défense  étaient, 
malgré  les  efforts  de  ses  adversaires,  res- 
tés hors  d'atteinte.  Il  fit  un  Mandement 
contre  son  livre,  et  annonça  lui-même 
en  chaire  sa  condamnation.  Pour  donner 
à  son  diocèse  un  monument  de  sou  re- 
pentir, il  fit  faire,  pour  l'exposition  du 
Saint-Sacrement,  u?i  Soleil  porte' par  deux 
Anges,  dont  l'un  foulait  aux  pieds  di- 
vers livres  hérétiques ,  sur  un  desquels 
était  le  titre  du  sien ,  quoique  cette  qua- 
lification n'eût  été  donnée  à  aucune  des 
propositions  condamnées.  Après  cette  dé- 
faite, qui  fut  pour  lui  une  espèce  de 
triomphe ,  il  vécut  dans  son  diocèse  eu 
digne  archevêque ,  en  homme  de  lettres, 
en  philosophe  chrétien.  Il  fut  le  père  de 
son  peuple  et  le  modèle  de  son  clergé. 
La  douceur  de  ses  mœurs,  répandue  dans 
sa  conversation  comme  dans  .ses  écrits, 
le  fit  aimer  et  respecter ,  même  des  en- 
nemis de  la  France.  Le  duc  de  Marlbo- 
rough ,  dans  la  dernière  guerre  de  Louis 
XIV ,  prit  soin  qu'on  épargnât  "ses  terres. 
Il  fut  toujours  cher  au  duc  de  Bourgogne  ; 
el  lorsque  ce  prince  vint  en  Flandre  dans 
le  cours  de  la  même  guerre ,  il  lui  dit  eu 
le  quittant  :  Je  sais  ce  que  je  t>otfsdois , 
vous  sa\'ez  ce  que  je  vous  suis.  On  pré- 


tend  qu'il  aurait  eu  part  au  gouverne- 
lueatj  si  ce  prince  eût  vécu.  Le  maître 
ne  survécut  guère  à  son  auguste  élève , 
mort  en  n  12  ;  il  fut  enlevé  à  l'Eglise, 
aux  lettres  et  à  la  patrie,  le  7  janvier , 
en  1715)  à  G3  ans,  et  fut  généralement 
pleuré  j  surtout  par  Clément  XI ,  qui 
lui  destinait  un  chapeau  de  cardinal. 
Plusieurs  écrits  de  philosophie ,  de  théo- 
logie ,  de  belles-lettres ,  sortis  de  sa  plu- 
me, lui  ont  fait  un  nom  immortel.  On  y 
voit  un  homme  nourri  de  la  fleur  de  la 
littérature  ancienne  et  moderne,  et  ani- 
mé par  une  imagination  vive ,  douce  et 
riante.  Son  stile  est  coulant ,  gracieux , 
harmonieux  ;  les  hommes  d'un  goût  dé- 
licat voudraient  qu'il  fût  plus  rapide,  plus 
serré,  plus  fort,  plus  fin,  plus  pensé, 
plus  travaillé  ;  mais  il  n'est  pas  donné  à 
l'homme  d'être  parfait.  Ses  principaux 
ouvrages  sont  1°  he^  Aventures  de  Te'lc'- 
maque ,  composés ,  selon  les  uns ,  à  la 
cour  ;  et  fruit ,  selon  d'autres ,  de  sa  re- 
traite dans  son  diocèse.  Un  valet-de- 
chambre,  à  qui  Fénélon  donnait  à  trans- 
crire cet  ouvrage  singulier ,  qui  tient  à  la 
fois  du  roman  et  du  poème  épique,  en 
prit  une  copie  pour  lui-même.  Il  n'en  fit 
imprimer  d'abord  qu'une  petite  partie , 
et  il  n'y  en  avait  encore  que  208  pages 
sorties  de  dessous  presse ,  lorsque  Louis 
XIV,  injustement  prévenu  contre  l'au- 
teur, et  qui  croyait  voir  dans  le  livre  une 
satire  continuelle  de  son  gouvernement , 
fit  arrêter  l'impression  de  ce  chef-d'œu- 
vre; et  il  n'a  pas  étépermis  d'y  travailler 
en  France ,  tant  que  ce  prince  a  vécu. 
Après  la  mort  du  duc  de  Bourgogne, 
le  monarque  brûla  tous  les  manuscrits 
que  son  petit-fils  avait  conservés  de  son 
précepteur.  Fénélon  passa  toujours,  à  ses 
yeux ,  pour  un  bei-esprit  chimérique  et 
pour  un  sujet  ingr^.  Son  Tcle'maque 
acheva  de  le  perdre  à  la  cour  de  France; 
mais  ce  livre  n'en  fut  que  plus  répandu 
dans  l'Europe.  Les  malins  cherchèrent 
des  allusions,  et  firent  des  applications. 
Hs  crurent  voir  M"»'  de  Montespan  dans 
Calipso,  M"«  de  Fontanges  dans  Eucha- 
ii.s,  la  duchesse  de  Bourgogne  dans  Aii- 
liope,  Louvois  dans  Protùilns,  le  roi  Jac- 
ques dans  Idome'nee,  houia  XIV  dans  Se- 


FËN  553 

sostris.  Les  gens  de  goût ,  sans  s'arrêter 
à  ces  allusions,  admirèrent  dans  ce  ro- 
man moral  toute  la  pompe  d'Homère , 
jointe  à  l'élégance  de  Virgile  ,  tous  les 
agrémens  de  la  fable  réunis  à;  toute  la 
force  de  la  vérité.  Ils  pensèrent  que  les 
princes  qui  les  méditeraient,  appren- 
draient à  être  hommes,  à  faire  des  heu- 
reux et  à  l'être.  «  C'est  la  sagesse  elle- 
»  même ,  dit  un  philosophe  moderne , 
■o  qui  y  donne  des  leçons  aux  rois  et  aux 
»  peuples ,  non  avec  cette  morgue  ,  cet 
■o  apprêt  ridicule ,  ce  verbe  suffisant  et 
ï»  orgueilleux ,  si  fort  en  usage  aujour- 
»  d'hui,  mais  avec  un  ton  simple  et 
»  modeste ,  accompagné  du  charme  de 
u  la  vérité  :  elle  enseigne  aux  rois  les 
«  moyens  de  faire  fleurir  leurs  empires , 
M  de  soutenir  l'éclat  du  trône,  d'augmen- 
»  ter  leur  gloire ,  sans  les  tromper  ni 
■»  les  éblouir  par  des  projets  chimériques, 
»  par  des  systèmes  destructeurs,  par  des 
u  économies  imaginaires  :  elle  leur  mon- 
w  tre  la  source  de  l'abondance  et  du  bon- 
»  heur  public,  dans  l'encouragement  de 
»  l'agriculture  ,  dans  la  protection  active 
w  et  vigilante  du  commerce,  dans  l'abo- 
■o  lition  du  luxe  ,  en  renfermant  chaque 
y>  individu  dans  son  état  par  de  sages  lois. 
»  Loin  de  faire  retentir  sans  cesse  aux 
»  oreilles  des  peuples ,  ce  cri  turbulent 
))  et  inquiet  d'e'galite',  de  liberté' ,  elle 
»  leur  dit  :  Vous  êtes  nés  sous  l'empire 
«  des  lois,  vous  avez  des  maîtres,  la  pa- 
»  trie  vous  porte  dans  son  sein  ;  soyez 
»  soumis  aux  lois  ;  obéissez  à  vos  maîtres; 
»  soyez  sujets  fidèles,  aimez  votre  patrie, 
»  et  songez  que  la  Religion,  l'honneur, 
»  votre  intérêt  personnel ,  sont  des  chaî- 
»  nés  sacrées  qui  vous  lient  à  l'état,  et 
»  que  les  rompre  est  un  crime,  w  Quelques 
gens  de  lettres,  tels  que  Faydit  et  Gueu- 
deville ,  reprochèrent  à  l'auteur  des  ana- 
chronismes  ,  des  phrases  négligées,  de& 
répétitions  fréquentes  ,  des  longueurs , 
des  détails  minutieux,  des  aventures  peu 
liées  ,  des  descriptions  trop  uniformes  de 
la  vie  champêtre  ;  mais  leurs  critiques  , 
tombées  dans  l'oubli ,  u'ôtèreut  rien  de 
son  mérite  q  l'ouvrage  critiqué.  Elles 
n'empêchèrent  point  qu'on  n'en  fît ,  et 
qu'on  n'en  ait  fait  depuis  un  tiès  grand 


a54  FEN 

nombre  d'éditions.  Les  meilleures  sont 
crfles  qui  ont  paru depnis  nU  ,  année 
dans  laquelle  la  famille  de  l'archcTêque 
de  Cambrai  publia  cette  production  ,  sur 
le  manuscrit  de  l'auteur,  en  2  vol.  in-12  , 
et  la  plus  belle  est  celle  d'Amsterdam  en 
1734,  in-fol. ,  a\ec  des  figures  magnifi- 
ques. Il  y  en  a  aussi  de  très  belles  édit, 
réimprimées  récemment,  en  2  vol.  in-4  , 
2  vol.  in-8,  4  vol.  in-18  par  Z?/rfo<aîné,  Di- 
dot']c\xne  et  Crapelet.  On  a  fait  des  éditions 
à  Roterdam  ,  à  Liège  et  ailleurs ,  où  l'on 
explique ,  dans  des  notes,  toutes  les  allu- 
sions qui  furent  faites  d'abord  par  le  pu- 
blic malin;  plusieurs  de  ces  notes  ont  de 
plus  un  ton  d'irréligion  et  de  fanatisme 
de  secte.  Cependant  on  voit  mettre  indif- 
féremment ces  éditions  entre  les  mains  des 
jeunes  gens.  Il  convient  de  leur  donner 
des  éditions  sans  notes.  Les  Aventures 
d".  Téle'maque  ont  été  trad.  en  prose  dans 
toutes  les  langues  de  l'Europe,  et  même  en 
grec  et  en  latin.  Elles  ont  été  mises  en  vers 
français ,  mais  sans  succès ,  Paris ,  Didot , 
n  92  ,  6  vol.  in-1 2  ,  et  trad.  en  vers  alle- 
mands, en  vers  hollandais  (  voyez  Feita- 
ma),  en  vers  italiens  et  en  vers  latins. 
2°  Dialogue  des  Morts,  en  2  vol.  in-12, 
réimp.  plusieurs  fois  en  1  vol.  in-12.  Le 
Téle'maque ,  OM ,  pour  mieux  dire,  les 
principales  réflexions  du  Téltmaque 
avaient  été  données  pour  thème  au  duc 
de  Bourgogne  ;  ces  Dialogues  lui  furent 
donnés  pour  lui  inspirer  quelque  vertu, 
ou  pour  le  corriger  de  quelque  dé- 
faut. Fénélon  les  écrivait  tout  de  suite, 
sans  préparation  ;  à  mesure  qu'il  les 
croyait  nécessaires  au  prince  ;  ainsi  on 
ne  doit  pas  être  surpris  s'ils  sont  quelque- 
fois vides  de  pensées ,  si  on  y  trouve  des 
assertionspeu  réfléchies,  des  imputations 
mal  fondées  et  pleines  de  préjugés  natio- 
naux. 3°  Dialogues  sur  V Eloquence  en 
général  et  sur  celle  de  la  Chaire  enparti- 
culier,  avec  une  Lettre  sur  la  Rhétori" 
que  et  la  Poésie,  I7I8,  in-12,  plusieurs 
éditions.  Cette  Lettre,  adressée  à  l'aca- 
démie Française,  est  un  excellent  mor- 
ceau qui  ne  dépare  point  les  Dialogues. 
L'auteur  du  Télémaque  avait  été  reçu 
dans  cette  compagnie  en  1693,  à  la 
)»lace  de  PelHsson.  Il  lai  fut  utile  plus 


FEN 

d'une  fois ,  par  son  goût  pour  [les  belles- 
lettres,  et  par  sa  grande  connaissance  de 
la  langue.  4"  Direction  pour  laconscience 
d^ un  Roi,  composée  pourle  duc  de  Bour- 
gogne ,  brochure  in-12,  estimée.  On  l'a 
publiée  en  1648,  et  elle  a  été  réimpri- 
mée à  Paris  en  1 7  74 ,  in-8.  5°  Abrégé  des 
f^ies  des  anciens  Philosophes,  autre 
fruit  de  l'éducation  du  duc  de  Bourgo- 
gne, in-12.  Cet  ouvrage  n'est  pas  ache- 
vé. 6°  Un  excellent  Traité  de  l' Education 
des  Filles,  in-12.  7°  OEuvres  philoso- 
phiques, ou  Démonstration  de  Vexis- 
tence  de  Dieu  par  les  preuves  de  la  na- 
ture ,  dont  la  meilleure  édition  est  de 
1726  ,  à  Paris,  in-12.  Le  duc  d'Orléans, 
depuis  régent  du  royaume ,  avait  con- 
sulté, dit  l'auteur  du  Siècle  de  Louir 
XIF,  l'archevêque  de  Cambrai  sur  de& 
points  qui  intéressent  tous  les  hommes. 
Il  demandait  si  on  peut  démontrer  l'exi- 
stence de  Dieu  ;  si  ce  Dieu  veut  un  culte  ? 
11  faisait  beaucoup  de  questions,  de  cette" 
nature,  en  philosophe;  et  l'archevêque 
répondait  en  philosophe  et  en  théologien. 
Le  Père  Tournemine  y  a  fait  des  addi- 
tions. 8°  Des  OEuvres  spirituelles ,  Am- 
sterdam, 1731,  5  vol.  in-1 2,  réimprimées 
plusieurs  fois  en  4  vol.  in-12.  On  y  voit 
un  homme  consommé  dans  les  voies  in- 
térieures ,  dans  la  connaissance  du  cœur 
et  de  l'esprit  humain  ;  plus  on  a  réfléchi 
en  chrétien ,  plus  on  prend  plaisir  à  les 
lire ,  plus  on  en  sent  la  vérité  et  la  pro- 
fondeur. 9"  De^  Sermons,  1744,  in-12, 
faits  dans  la  jeunesse  de  l'auteur,  et  gui 
sont  au  rang  des  productions  médiocres 
en  ce  genre.  10"  Plusieurs  Ouvrages  en 
faveur  de  la  constitution  Unigenitus  et 
du  Formulaire.  Les  ennemis  de  l'arche- 
vêque deCambray  ont  prétendu  qu'il  n'a- 
vait pris  parti  contre  ie  Jansénisme,  que 
parce  que  le  cardiqpl  de  Koailles  s'était 
déclaré  contre  le  Quiétisme;  imagination 
aussi  frivole  que  calomnieuse  ,  directe- 
ment opposée  avec  la  vie  et  le  caractère 
de  cet  homme  célèbre  ,  incapable  de  son 
naturel  et  par  le  genre  de  sa  philosophie, 
et  plus  encore  par  sa  religion  ,  d'une  si 
Kche  et  si  odieuse  hypocrisie.  Pour  se 
convaincre  de  la  sincérité  et  de  l'immu- 
tabilité de  ses  sentimens,  touchant  cette 


1 


FKN 
secte ,  il  n'y  a  qu'à  lire  la  lettre  qu'il 
écrivit  la  veille  de  sa  mort,  et  qui  se 
trouve  dans  ses  OEuvres  spirit.,  tom.  4, 
p.  368.  «  Je  viens  de  recevoir  l'extrême- 
w  onction.  C'est  dans  cet  état ,  oii  je  me 
»  prépare  à  aller  paraître  devant  Dieu , 
M  que  je  vous  prie  instamment  de  repré- 
»  senter  au  roi  mes  véritables  sentimens. 
»  Je  n'ai  jamais  eu  que  docilité  pour  l'E- 
»  glise ,  et  qu'horreur  des  nouveautés 
»  qu'on  m'a  imputées.  J'ai  reçu  la  con- 
u  damnation  de  mon  livre  avec  la  sim- 

»  plicité  la  plus  absolue Je  prends  la 

»  liberté  de  demander  à  sa  majesté  deux 
»  grâces ,  qui  ne  regardent  ni  ma  per- 
j>  sonne  ni  aucun  des  miens.  La  première 
»  est  qu'elle  ait  la  bonté  de  me  donner 
*>  un  successeur  pieux  ,  régulier ,  bon  , 
M  et  ferme  contre  le  Jansénisme,  lequel 
»  est  prodigieusement  accrédité  sur  cette 
>»  frontière,  etc.  L'autre  grâce  est ,  etc.  » 
1 1  •» Quelques  autres  écrits,  et  un  grand 
nombre  de  Lettres  qu'on  a  prorais  au  pu- 
blic. Fénélon  avait  fait,  pour  les  princes 
ses  élèves ,  une  excellente  Traduction  et 
FEnéide  de  Virgile  :  mais  on  ne  sait  ce 
qu'est  devenu  le  manuscrit.  Quelle  perte, 
si  celte  version  était  dans  le  stile  du  Té- 
lémaque  !  Ramsay ,  disciple  de  l'arche- 
vêque de  Cambrai ,  a  publié  la  F^ie  de 
son  illustre  maître,  in-12,ia  Haye,  1*24. 
AL  de  Bausset  a  publié  une  Histoire  de 
Fénelon  très  estimée,  3*  édition,  1817, 
4  vol.  in-8.  Les  curieux  qui  la  consulte- 
ront ,  ne  pourront  s'empêcher  d'aimer  ce 
prélat ,  et  de  le  pleurer.  Il  recevait  les 
étrangers  aussi  bien  que  les  Français,  et 
ne  leur  cherchait  pas  des  ridicules.  La 
politesse  est  de  toutes  les  nations,  disait- 
il,  les  manières  de  V expliquer  sont  diffé- 
rentes, mais  indifférentes  leur  nature. 
Quoiqu'il  eût  beaucoup  à  se  plaindre  de 
Bossuet,  il  prit  un  jour  le  parti  de  ce  pré- 
lat contre  Ramsay ,  qui  ne  rendait  pas 
assez  de  justice  à  son  érudition.  M.  l'abbé 
de  Querbœuf  a  donné  en  1787  ,  et  années 
suivantes ,  une  édition  con;plète  de  ses 
OEuvres,  Paris,  Didot,  9  vol.  in-4.  Elles 
ont  été  réimprimées  à  Paris,  en  1 8 1 0,  en 
10  vol.  in-8  et  in-12,  et  à  Toulouse  en 
19  vol.  in-12  et  en  1821-24,  par  MM. 
Cosselin  «t  Caron ,  22  vol.  ln-8.  L'abbé 


FEN  255 

Jauffret  a  publié  les  OEuvres  choisies 
de  Fénélon  en  6  vol.  in-12  :  deux  édi- 
tions en  ont  paru. 

FÉNÉLON  (Gabriel -Jacques),  neveu 
du  précédent,  eut  les  vertus  de  son  oncle 
réunies  à  tous  les  talens  militaires  :  che- 
valier des  ordres  du  roi ,  lieutenant-gé- 
néral,  ambassadeur  ea  Hollande,  minis- 
tre plénipotentiaire  au  congrès  de  Sois- 
sons,  il  signa  le  traité  de  neutralité  fait 
avec  les  états  en  1733.  Il  fut  blessé  mor- 
tellement à  la  bataille  de  Rocoux ,  étant 
lieutenant-général ,  et  mourut  trois  jours 
après  à  Lantin  ,  le  1 1  octobre  1746.  On  y 
voit  son  épitaphe  dans  l'église  de  ce  villa- 
ge ,  faite  par  le  P.  Baudory .  On  l'y  nomme 
Gallice  et  hostium  desideria.  Voltaire, 
en  parlant  de  ce  héros,  fait  un  aveu  bien 
honorable  au  Christianisme.  «  Son  ex- 
«  trême  dévotion,  dit -il,  augmentait 
»  encore  son  intrépidité.  Il  pensait 
»  que  l'action  la  plus  agréable  à  Dieu 
»  était  de  mourir  pour  son  roi  (  quand  la 
»  raison  et  le  devoir  Fexigent  ).  Il  faut 
»  avouer  qu'une  armée  composée  d'hom- 
»  mes  qui  penseraient  ainsi  serait  invin- 
)>  cible.  V  Histoire  de  Louis  X F,  tom.  1  , 
page  209.  Voyez  Gustave-Adolphe.  Le 
marquis  de  Fénélon  publia  la  première 
édition  régulière  de  Télémaque,  con- 
forme au  manuscrit  de  Fénélon  lui-même. 

•  FÉNÉLON  (J.  B.  A.  Saliguac  de), 
delà  famille  des précédens,  né  en  1714  , 
à  St.-Jean-d'Estissac  en  Périgord,  em- 
brassa l'état  ecclésiastique ,  et  fut  aumô- 
nier de  la  reineMarie  Lecksinska,  épouse 
de  Louis  XV.  Après  la  mort  de  cette  prin- 
cesse ,  il  se  retira  dans  le  diocèse  d'Au- 
tun ,  au  prieuré  de  St.-Sernin-du  Bois, 
dont  il  avait  été  pourvu  en  1 7  4  5 ,  et  il  s'y 
fit  bientôt  remarquer  par  ses  vertus  bien- 
faisantes. Le  pays  ne  contenait  que  des 
roain-mortables;  il  les  affranchit  tous;  il 
encouragea  la  culture  des  terres,  éta- 
blit des  forges  pour  faciliter  le  débit  du 
charbon  abondant  dans  la  contrée ,  et 
abandonna,  pour  les  faire  prospérer,  le 
produit  d'un  étang  qui  formait  la  meil- 
leure partie  de  son  revenu.  Dans  une  an- 
née de  disette  ,  il  fit  ouvrir  à  ses  frais 
une  grande  route  de  St.-Sernin  à  Con- 
ches ,  oîi  se  tenait  un  gros  marché  ;  il 


256  FEN 

procura  ainsi  k  ses  vassaux  le  moyen  de 
pouvoir  transporter  facilement  leurs  den- 
rées ,  et  aux  femmes  ,  aux  enfant,  aux 
"vieillards  employés  dans  ces  travaux,  une 
existence  assurée  dans  ces  temps  de  mi- 
sère. Des  circonstances  imprévues  l'appe- 
lèrent à  Paris;  il  n'y  voulut  loger  que 
dans  un  séminaire ,  celui  des  Missions 
étrangères  ;  bientôt  il  eut  connaissance 
<le  l'établissement  formé  par  l'abbé  de 
Pont-Briant  en  faveur  des  petits  Sa- 
voyards. Chargé  de  la  direction  de  cette 
bienfaisante  institution,  il  entreprit  de 
faire  connaître  à  ces  jeunes  infortunés 
les  utiles  vérités  de  la  religion  ;  et  il  ai- 
dait en  même  temps  de  sa  bourse  ceux 
que  des  maladies  ou  le  défaut  d'ouvrage 
laissait  sans  ressource.  Pour  les  encou- 
rager au  bien,  il  donnait  de  petites  mé- 
dailles de  cuivre  à  ceux  qui  étaient  con- 
stamment appliqués  à  leur  devoir  ;  et  ces 
médailles  ,  bientôt  connues  de  la  police, 
devinrent ,  pour  ceux  qui  en  étaient  dé- 
corés ,  la  plus  puissante  des  recomman- 
dations. On  le  voyait  souvent  s'arrêter 
près  d'eux,  dans  les  carrefours,  pour 
s'informer  de  leurs  gains,  les  consoler 
quand  ils  n'en  avaient  pas  obtenu,  et  leur 
demander  quels  étaient  leurs  besoins  les 
plus  urgens.  Quand  ses  moyens  étaient 
épuisés ,  il  savait  intéresser  les  riches  en 
leur  faveur.  Des  vertus  aussi  modestes 
auraient  dû  le  préserver,  il  semble,  de 
la  rage  des  révolutionnaires  ;  cependant 
il  fut  arrêté  comme  suspect  en  1793  ,  et 
renfermé  au  Luxembourg.  Les  Savoyards 
réclamèrent  en  vain  leur  père  et  leur  uni- 
que appui  ;  il  fut  traduit  au  tribunal  ré- 
volutionnaire, et  condamné  amortie  7 
juillet  1794  ,  à  l'âge  de  80  ans.  Placé  sur 
la  charrette  qui  devait  le  conduire  à  l'é- 
chafaud ,  il  ne  cessa  d'exhorter ,  de  con- 
soler ses  compagnons  d'infortune  jusqu'au 
lieu  du  supplice ,  où  il  prononça  sur  eux 
les  paroles  de  l'absolution;  et  l'on  re- 
marqua que  le  bourreau  lui-même  ,  pé- 
nétré tout  à  coup  d'un  respect  involon- 
taire, s'inclina  devant  ce  saint  prêtre , 
comme  s'il  désirait  d'être  absous  du  crime 
dont  il  allait  être  l'instrument.  L'éloge  de 
ce  respectable  ecclésiastique  est  consigné 
dans  les  Annales pliilosophiques,  morales 


FER 

et  littéraires  faisant  suite  aux  annales  ca- 
tholiques, tome  8  ,  Paris,  1800,  in-8. 
FENOUILLOT.  Foyez  Falbaire. 

*  FEINZI  (François-Marie) ,  patriarche 
•  de  Jérusalem  ,  est  mort  à  Rome  le  9  jan- 
vier 1829,  à  l'âge  de  91  ans;  il  était  le 
doyen  des  évêquesdu  monde  catholique. 
Il  naquit  à  Zara  d'une  famille  noble  le 
24  mars  1738.  Nommé  archevêque  de 
Corfou ,  du  rit  latin ,  le  20  septembre 
1779,  il  donna  sa  démission  en  181G, 
et  fut  créé  patriarche  de  Jérusalem  dans 
le  consistoire  de  la  même  année. 

*  FÉRAUD  (  Jean-François  ),  jésuite  et 
grammairien ,  né  à  Marseille  le  1 7  avril 
1725,  fut  envoyé  après  son  noviciat,  à 
Besançon  ,  où  il  professa  avec  beaucoup 
de  succès,  les  élémens  de  la  langue  latine, 
et  plus  tard  la  réthorique  et  la  philoso- 
phie. Lorsque  son  ordre  fut  supprimé,  il  se 
retira  dans  le  comtat  Venaissin  ,  d'où  il 
obtint  la  permission  de  revenir  dans  sa 
patrie.  Il  y  vécut  presque  ignoré ,  parta- 
geant son  temps  entre  l'exercice  des  de- 
voirs de  la  religion ,  et  les  occupations 
littéraires  qu'il  s'était  créées,  il  émigra 
au  commencement  de  la  révolution  ,  et 
rentra  en  France  en  1798.  Malgré  son 
grand  âge,  il  se  consacra  tout  entier  au 
service  des  autels  qui  se  trouvaient  alors 
presque  abandonnés  faute  de  ministres  ;  il 
fit  avec  beaucoup  de  distinction  des  con- 
férences religieuses  à  l'église  de  St.-Lau- 
rent  de  Marseille ,  et  mourut  dans  cette 
ville  le  8  février  1 807 .  On  lui  doit  1"  Dic- 
tionnaire grammatical  de  la  langue 
française .,  Avignon,  17C1  ;  et  4*  édition 
considérablement  augmentée  ,  Paris  , 
1786  ,  2  vol.  in-8.  Il  a  entrepris  de  figu- 
rer la  prononciation;  mais  n'ayant  pres- 
que pas  habité  Paris ,  ses  remarques  n'ont 
pas  toutes  la  même  justesse.  2°  Diction- 
naire critique  de  la  langue  française  , 
Marseille,  1787-88,  3  vol.  in-4  ;  ouvrage 
important ,  dans  lequel  on  trouve ,  sur 
lîii  grand  nombre  de  difficultés  ,  des  so- 
lutions qu'on  chercherait  vainement  dans 
le  Dictionnaire  de  l'Académie,  et  qui  a 
été  d'une  grande  utilité  à  tous  ceux  qui 
ont  voulu  écrire  sur  la  langue  française. 
L'uuteur  y  avait  fait  de  nombreuses  ad- 
ditions  et  corrections  qiîi  sont   restées 


FER 

manuscrites ,  la  première  édition  n'étant 
pas  épuisée  ;  si  elle  n'a  pas  eu  en  France 
tout  le  succès  qu'elle  méritait ,  on  peut 
l'attribuer  aux  Dictionnaires  abrégés  qui 
ont  paru  dans  un  format  plus  portatif,  et 
qui  en  ont  emprunté  les  remarques  les 
plus  essentielles. 

FÉRAUD.  Voyez  Ferraud  ,  député. 

FERATJLT  (Jean),  et  non  Ferranù, 
né  à  Angers  ,  fut  procureur  du  roi  au 
Mans  vers  1510.  On  a  de  lui ,  entre  autres, 
un  traité  latin  Des  Droits  et  Privilèges 
du  Royaume  de  France  ,  dédié  au  roi 
Louis  XII,  Paris,  1545,  in-8. 

EMPEREURS    d'aLLEMAGSE. 

FERDINAND  I ,  empereur  d'Allema- 
gne ,  second  fils  de  l'archiduc  Philippe 
et  frère  de  Charles-Quint ,  naquit  à  Mé- 
dine  en  Castille  l'an  1 503.  Il  épousa  Anne, 
fille  de  Ladislas  VI ,  roi  de  Hongrie  et  de 
Bohème ,  et  sœur  de  Louis-le-Jeune ,  tué 
\k  la  bataille  de  Mobacs  en  1526.  Après  la 
mort  de  ce  prince ,  Ferdinand  se  crut  en 
droit  de  lui  succéder,  et  se  fit  couronner 
roi  de  Hongrie  et  de  Bohème  en  1527 
{voy.  Zapol).  11  fut  élu  roi  des  Romains 
en  1531.  Charles-Quint  ayant  abdiqué 
l'empire  en  1556,  il  lui  succéda  en  1558, 
l'abdication  n'ayant  été  acceptée  par  les 
princes  d'empire  que  cette  année  là.  Le 
pape  Paul  IV  refusa  de  le  reconnaître  pour 
empereur  légitime ,  parce  que ,  disait  ce 
pontife  ,  l'abdication  de  Charles-Quint , 
faite  sans  la  permission  du  saint-Siége  , 
était  nulle  ;  mais  Pie  IV ,  son  successeur, 
ne  crut  pas  devoir  faire  ces  diflicultés. 
Ferdinand  pressa  ce  pape  de  permettre 
à  ses  sujets  d'Autriche  la  communion  sous 
les  deux  espèces  :  le  pape  s'occupait  de 
cette  affaire ,  lorsque  l'empereur  mourut 
à  Vienne  en  1564,  à  61  ans.  Ce  prince 
sage  et  modéré  voulait  donner  la  paix  à 
l'Eglise  ;  mais  il  ne  connaissait  pas  assez 
l'esprit  des  sectaires,  toujours  plus  tu- 
multueux et  plus  exigeans,  lorsqu'on  pa- 
raît incliné  à  composer  avec  eux.  Il  fit 
une  trêve  de  8  ans  avec  les  Turcs ,  récon- 
cilia plusieurs  princes  ennemis,  et  termi- 
na les  querelles  des  rois  de  Daneraarck 
et  de  Suède.  Un  testament,  qu'il  avait 
fait  20  ans  avant  sa  mort ,  en  1543 ,  et 

V. 


FER  3^7 

auquel  il  ne  dérogea  point  par  ses  der- 
nières volontés,  jeta  de  loin  la  semence 
de  la  guerre  qui  a  troublé  l'Europe  200 
ans  après.  Ce  testament  appelait  ses  filles 
à  la  succession  des  royaumes  de  Bohême 
et  de  Hongrie ,  au  défait  des  héritiers  de 
ses  fils.  Cette  disposition  a  donné  lieu , 
en  1740,  à  la  prétention  que  la  maison 
électorale  de  Bavière  a  formée  sur  ces 
royaumes,  l'archiduchesse  Anne,  fille  de 
Frédéric  I ,  ayant  été  mariée  à  Albert  V, 
duc  de  Bavière.  Mais  le  vrai  sens  du  tes- 
tament ne  regardait  que  ses  filles  propre- 
ment dites  ,  alors  vivantes  ,  non  pas  les 
eufans  qui  en  naîtraient ,  et  qui ,  après 
des  siècles,  s'imagineraient  pouvoir  dis- 
puter la  succession  aux  descendans  de  la 
ligne  directe.  Cela  était  bien  clair  aux 
yeux  de  tout  homme  qui  ne  raisonne  pas 
d'après  la  logique  des  cours ,  et  qui  ne 
connaît  pas  les  sophismes  de  l'ambitieuse 
et  tortueuse  politique.  (On  a  de  cet  empe- 
reur des  lettres  en  latin  adressées  au  pape 
Pie  IV,  Paris,  1563,  in-8.  Sa  vie  a  été 
écrite  en  espagnol  par  UUoa ,  et  en  italien 
par  Dolce  :  son  éloge  se  trouve  dans  le 
recueil  intitulé  :  Orationes  clarorum  vi- 
r  or  uni ,  etc. ,  ad  principes  habit  œ ,  Co- 
logne, 1559.) 

FERDINAND  H,  archiduc  d'Aotrir 
che,  fils  de  Charles,  duc  de  Styrie ,  et 
petit-fils  de  Ferdinand  I,  né  en  1578, 
roi  de  Bohème  en  1 6 1 7  ,  de  Hongrie  en 
1618,  fut  empereur  en  1019,  à  41  ans. 
Les  Bohémiens  révoltés  venaient  de  se 
donner  à  Frédéric  V ,  électeur  Palatin , 
surnommé  roi  d'hiver  (parce  qu'il  n'a 
régné  que  l'espace  d'un  hiver).  L'empe- 
reur attaqua  le  nouveau  roi  et  dans  sou 
royaume  de  Bohême  et  dans  son  électo- 
rat.  La  bataille  de  Prague ,  gagnée  en 
1620  ,  décida  de  son  sort.  Son  électoral 
fut  donné  à  son  vainqueur ,  Maximilien , 
duc  de  Bavière.  Christiern  IV ,  roi  de  Da- 
nemarck ,  s'unit ,  avec  d'autres  princes  , 
pour  secourir  le  Palatin.  Tilli,  un  des 
plus  grands  généraux  de  l'empereur ,  le 
défit  en  1626  ,  ôta  toutes  les  ressources 
au  Palatin  ,  et  força  son  défenseur  le  roi 
Christiern  à  signer  la  paix  en  1629.  Les 
victoires  de  Ferdinand  donnèrent  de  la 
jalousie  aux  princes  protestans  d'Allemar 
17 


258  FER 

gne;  ils  s'uairent  contre  lui  avec  Loui« 
XIII ,  roi  de  France ,  et  Gustave-Adolphe , 
roi  de  Suède.  Gustave ,  le  héros  du  Kord, 
remporta  une  victoire  signalée  à  Leipsick 
sur  Tilli  en  1631  ,  soumit  les  deux  tiers 
de  l'Allemagne  ,  et  perdit  la  vie ,  l'année 
d'après ,  au  milieu  de  ses  triomphes,  à  la 
bataille  de  Lutzen.  Bannier ,  général  du 
roi  mort ,  continua  ses  conquêtes ,  et 
soutint  la  réputation  des  armes  suédoises. 
L'empereur  rompit  le  cours  de  ces  vic- 
toires ,  par  le  gain  de  la  bataille  de  Nort- 
lingueen  1634.  L'année  suivante,  il  con- 
clut à  Prague  une  paix  particulière  avec 
le  duc  de  Saxe  et  d'autres  princes  pro- 
testans ,  et  fut  assez  heureux  ,  deux  ans 
après ,  pour  faire  déclarer  son  fils  roi  des 
Romains.  Enfin,  après  18  ans  d'un  règne 
toujours  troublé  par  des  guerres  intes- 
tines et  étrangères ,  Ferdinand  mourut 
en  1637.  Les  plus  grands  ennemis  de  cet 
empereur  n'ont  pu  refuser  des  éloges  à  sa 
grandeur  d'âme ,  à  sa  prudence  ,  à  sa  fer- 
meté, à  ses  autres  vertus.  Il  semblait  être 
au-dessus  des  événemens ,  dit  un  histo- 
rien ,  et  trouvait ,  jusque  dans  ses  pertes, 
les  moyens  de  parvenir  à  ses  fins.  Il  eût 
été  le  restaurateur  de  la  religion  catho- 
lique eu  Allemagne ,  sans  les  puissans 
secours  que  la  France  et  la  Suède  donnè- 
rent aux  protestans.  Quelques  sectaires 
et  les  philosophistes  des  derniers  temps 
ont  déchiré  le  nom  de  ce  prince  d'une 
manière  indigne ,  et  traité  de  fanatisme 
les  efforts  qu'il  fit  pour  réprimer  les  nou- 
velles erreurs.  Un  écrivain  judicieux  et 
équitable  remarque ,  à  cette  occasion , 
que  (f  le  nom  de  fanatique  n'est  donné 
»  par  nos  prétendus  sages  qu'aux  catho- 
«  liques  qui  ont  combattu  pour  la  foi  de 
»  leurs  pères ,  pour  la  défense  de  leurs 
j>  temples,  de  leurs  sacrifices,  de  leurs 
»  usages.  Charles  V ,  Philippe  II ,  le  duc 
»  d'Albe ,  Ferdinand  II ,  etc. ,  sont  des 
M  fanatiques  ;  Elisabeth  ,  qui  fait  nager 
»  l'Angleterre  dans  le  sang  pour  y  établir 
j)  l'hérésie,  est  une  héroïne.  Gustave- 
»  Adolphe ,  qui  a  pillé  et  dégradé  toutes 
»  les  églises  d'Allemagne ,  et  ravagé  en 
jj  l'honneur  de  Luther  dix  grandes  pro- 
»  vinces  ;  Guillaume ,  qui  détrône  son 
»  beau-père  en  faveur  de  la  religion  an- 


FER 

»  glicane,  etc.,  sont  des  héros.  Qualitë 
)'  distinctive  de  la  vérité ,  elle  seule  attire 
»  la  haine  et  les  malédictions  de  l'er- 
»  reur.  »  (voyez  Jacques  II,  Philippe  II , 
Louis  XIV,  Maintenon.)  Le  Père  Guil- 
laume I^mormaini  a  donné  un  tableau 
des  vertus  de  ce  religieux  empereur,  sous 
le  litre  de  Idea  principis  christiatii,  Co- 
logne, 1638,  in-24  de  298  pages.  Gus- 
tave-Adolphe disait  au  milieu  de  ses  bril- 
lans  succès ,  qu'//  ne  craignait  que  les 
vertus  de  Ferdinand.  Betlem  Gabor,  un 
autre  de  ses  ennemis ,  disait  que  la  guerre 
était  difficile  et  dangereuse  contre  un 
prince  que  la  prospérité  rH élevait  pas , 
et  qui  ne  se  laissait  point  abattre  par 
l'adversité. 

FERDINAND  in  ,  surnommé  Er- 
nest ,  fils  aîné  de  Ferdinand  II ,  naquit 
en  1608 ,  fut  roi  de  Hongrie  en  1625 ,  de 
Bohême  en  1627 ,  des  Romains  en  1636  , 
et  empereur  en  1637.  La  mort  du  père 
ne  changea  rien  à  la  face  des  affaires ,  et 
la  guerre  continua  partout  avec  une  égale 
vivacité  sous  son  fils.  Il  eut  d'abord  quel- 
ques avantages  sur  les  Suédois  ;  mais  Ber- 
nard de  Saxe,  duc  de  Veimar,  devint  un 
ennemi  aussi  dangereux  pour  Ferdinand 
III  ,  que  Gustave-Adolphe  l'avait  été 
pour  Ferdinand  II.  Ce  général  remporta 
4  victoires  en  moins  de  4  mois.  Bannier 
ne  fut  pas  moins  heureux  sous  ce  règne, 
qu'il  l'avait  été  sous  le  précédent.  Il  osa 
assiéger  Ratisbonne ,  où  l'empereur  te- 
nait sa  diète  ;  il  la  foudroya  de  son  canon , 
et ,  sans  un  dégel ,  il  s'en  rendait  maître. 
Les  Français  s'étaient  joints  aux  Suédois. 
Le  maréchal  de  Guébriant  enleva  Lamboi 
et  ses  troupes  à  la  bataille  d'Ordingen , 
en  1643.  Le  duc  d'Enghien,  appelé  de- 
puis le  grand  Condé  ,  força  l'année  sui- 
vante les  retranchemens  de  Fribourg,  et 
gagna  en  1645  une  bataille  à  Nortlingue  , 
dans  cette  même  plaine  oii  les  Suédois 
avaient  été  vaincus  onze  ans  auparavant  ; 
mais  cette  victoire  n'eut  ni  l'importance 
ni  les  effets  de  la  première.  Torstenson  , 
autre  général  suédois ,  pressait  l'Autriche 
d'un  côté ,  Condé  et  Turenne  de  l'autre. 
Ferdinand  ,  fatigué  de  tant  de  revers , 
conclut  enfin  la  paix  de  Westphalie  en 
1648.  Les  traités  signés,  l'un  à  Osnabruck, 


I 


I 


FER 

l'autre  à  Munster  ,  sont  aujourd'hui  le 
code  politique  et  la  principale  des  lois 
fondamentales  de  l'empire  germanique. 
Par  cette  paix,  les  rois  de  Suède  devin- 
rent princes  de  l'empire ,  en  se  faisant 
céder  la  plus  belle  partie  de  la  Poméranie  : 
le  roi  de  France  devint  landgrave  l'Alsace, 
sans  être  prince  de  l'empire  :  la  religion 
luthérienne  et  la  calviniste  furent  auto- 
risées ,  et  l'église  catholique  frappée  du 
plus  grand  coup  qu'elle  eût  encore  essuyé 
en  Allemagne.  Le  saint-Siége  et  le  roi 
d'Espagne  furent  mécontens  de  ce  traité  ; 
l'empereur  lui-même  en  versa  des  larmes; 
mais  il  subit  la  loi  de  la  nécessité ,  et 
mourut  environ  dix  ans  après,  en  1667. 
(  L'histoire  particulière  de  Ferdinand 
III  &  été  publiée  en  italien  par  le  comte 
Galeazzo  Gualdo  Priorato,  Vienne,  1672, 
in-fol.  avec  plusieurs  portraits  et  des 
pians  de  différentes  places  fortes.  ) 

ROIS    DE    CASTILLE,    DE  tÉO.N  ET    d'ESPAGSE. 

FERDINAND  I,  roi  de  Castille   et 
de  Léon ,  dit  le  Grand ,  second  fils  de 
Sanche  111 ,  roi  de  Navarre ,  donna  ba- 
taille à  Alfonse ,  roi  de  Léon ,  et  le  tua 
en  1037.  Maître  de  ce  royaume  et  par  le 
droit  de  conquête  et  par  celui  de  son 
épouse,  il  se  fit  couronner  roi  de  Léon 
et  des  Asturies  en  1038.  Il  tourna  ensuite 
ses  armes  contre  les  Maures ,  leur  prit 
beaucoup  de  villes ,  et  poussa  ses  cou- 
quêtes  jusqu'au  milieu  du  Portugal ,  ou 
il  fixa  la  rivière  de  Mondego  pour  servir 
de  bornes  aux  deux  états.  Quelque  temps 
après,  il  déclara  la  guerre  à  son  frère 
Garcias  IV ,  roi  de  Navarre.  On  en  vint 
aux  mains,  et  Garcias  perdit  son  royaume 
et  la  vie.  Ferdinand  mourut  eu  1066, 
après  avoir  régné  30  ans  eu  Castille ,  et 
28  dans  le  royaume  de  Léon.  Prince  sage , 
grand  capitaine  ,  on  ne  lui  reproche  que 
la  faute  ,  trop  souvent  répétée  dans  ces 
temps  barbares  en  Espagne  et  en  France , 
d'avoir  partagé  ses  états  entre  ses  trois 
fils ,  qui  tous  devinrent  rois  :  faute  qui 
fut  toujours  la  source  des  guerres  civiles. 
FERDINAND  II,  fils  puîné  d' Alfonse 
YIII ,  roi  de  Léon  et  de  Castille  ,  rem- 
porta de  grands  avantages  sur  les  Portu- 
gais, fit  Alfonse  Henriquez  1  eur  roi  pri- 


FER  a59 

sonnier ,  et  usa  avec  modération  de  sa 
victoire.  Il  mourut  en  11 87,  après  un 
règne  de  30  ans. 

FERDINAND  III  (  Saint  ) ,  fils  d'A!-  . 
phonse  IX,  né  l'an   1200  ,  parvint  à  la 
couronne    de    CastHle  par   l'abdication 
volontaire  de  sa  mère ,  la  reine  Béren- 
gère,  en  1217  ,  et  à  celle  de  Léon  par  la 
mort  de  son  père  en  1230.  Dès  l'an  1226, 
il  avait  commencé  à  faire  la  guerre  aux 
Maures,  et  leur  avait  pris  Baeza  et  Useda. 
Ce  fut  en  1 236  que  Cordo'ue  tomba  en 
son    pouvoir.    Elle    contenait    300,000 
âmes;  et  l'on  vit  un  roi  chrétien  occuper 
le  palais  d'Abdérame ,  dit  le  Grand ,  trois 
siècles  après  l'époque  oii  il  fut  construit. 
Il  convertit  eu  église  sa  superbe  mosquée, 
chef-d'œuvre  d'architecture   moresque  , 
oîi  l'on  compte  12,000  colonnes  ,  et  qui 
est  encore  aujourd'hui  la  cathédrale  de 
Cordoue.  Al-Mansour  y  avait  fait  apporter 
les  cloches  de  Compostelle  sur  les  épaules 
des  chrétiens  ,  et  Ferdinand  les  fit  repor- 
ter en  Galice  sur  celles  des  Maures.  Après 
la  prise  de  Cordoue ,  les  rois  maures  de 
Murcie  et  de  Grenade  se  déclarèrent  tri- 
butaires de  Ferdinand.  Ce  prince  tourna 
ses  armes  contre  Séville  :  deux  ans  se 
passèrent  dans  les  préparatifs  et  à  la  con- 
struction d'une  flotte  qui,  placée  à  l'em- 
bouchure du  Guadalquivir ,  bloquait  le 
port  de  Séville  ,  et  interceptait  tous  les 
convois  envoyés   d'Afrique.    Après   une 
opiniâtre  défense  ,  Séville  capitula  faute 
de  vivres.  Peu  de  temps  après ,  Ferdi- 
nand prit  Xérès,  oii  avait  péri  ,   cinq 
siècles  et  demi  auparavant ,  dora  Rodri- 
gue ,  dernier  roi  goth  en  Espagne ,  qui 
tomba  au  pouvoir  des  Musulmans.  Il  mou- 
rut en  1262,  occupé  du  projet  de  con- 
quérir le  royaume  de  Maroc.  Son  succes- 
seur fut  Alphonse  X ,  qu'il  avait  eu  de 
Béatrix  de  Sonabe.  Il   avait  épousé  en 
secondes  noces  Jeanne  de  Ponthieu ,  fille 
du  comte  Simon  et  de  Marie ,  petite-fille 
de  France.  Blanche  de  Castille ,  mère  de 
saint  Louis,  était  sœur  d'Alphonse  IX, 
père  de  Ferdinand.   Ce  prince  ,  cousin - 
germain  de  saint  Louis ,  fut  aussi  saint , 
et  peut-être  plus  grand  homme  que  lui. 
Il  fit  des  lois  sages  comme  ce  roi  de 
France  :  il  humilia  les  grands  qui  tyran- 


26c 


FER 


nisaient  les  petits ,  purgea  ses  états  des 
brigands  et  des  voleurs ,  établit  le  conseil 
souverain  de  Caslille ,  fit  rassembler  les 
lois  de  ses  prédécesseurs  en  un  Code ,  et 
donna  une  nouvelle  face  à  l'Espagne.  Son 
zèle  pour  la  foi  fut  sans  bornes  ;  sa  piété, 
sa  vie  austère  et  exemplaire,  sa  magnifi- 
cence dans  tout  ce  qui  concerne  le  culte 
de  Dieu ,  furent  constamment  regardées 
par  les  peuples  chrétiens  comme  les  vraies 
causes  qui  tenaient  la  victoire  attachée  à 
sa  personne  et  à  ses  armées.  Les  philoso- 
phes ne  lui  pardonneront  pas  d'avoir 
poursuivi  les  hérétiques,  et  fait  punir  les 
dogmatisans  ,"  mais  c'est  une  nouvelle 
preuve  que  leur  suffrage  n'est  pas  fait 
pour  honorer  la  véritable  grandeur.  Clé- 
ment X  le  mit  au  nombre  des  saints.  Le 
cardinal  dom  Rodrigue  Ximenès  ,  arche- 
vêque de  Tolède  et  ministre  de  Ferdinand 
III ,  a  écrit  son  histoire  sous  le  nom  de 
Chronique  ,  ^és'iWe  ,  1616;  Médina  del 
Campo,  1G67  ,  in-fol.  L'abbé  Ligny  a 
écrit ,  en  français  ,  la  Vie  de  ce  prince  , 
Paris,  1759,  in-12. 

FERDINAND  IV  ,  est  surnommé 
V Ajourné ,  parce  que  dans  un  accès  de 
colère  il  fit  jeter  du  haut  d'un  rocher  , 
deux  seigneurs  qui ,  avant  que  d'être  pré- 
cipités, l'ajournèrent  à  comparaître  de- 
vant Dieu  dans  30  jours,  et  qu'il  mourut 
au  bout  de  ce  terme.  Ce  qu'il  y  a  de  cer- 
tain c'est  que  Ferdinand  mourut  subite- 
ment et  fort  jeune  ,  à  24  et  selon  quel- 
ques-unsà27  ans.  Ilétaitparvenuautrône 
de  Castille  en  1295  ,  à  l'âge  de  dix  ans. 
Les  premières  années  de  son  règne  furent 
très  orageuses  ;  mais  la  reine  Marie  ,  sa 
mère ,  se  conduisit  avec  tant  de  sagesse 
et  de  fermeté, qu'elle  assura  la  couronne 
sur  la  tète  de  son  fils.  Il  se  signala  par  ses 
conquêtes  sur  le  roi  de  Grenade  et  sur  les 
Maures  ,  aiuquels  il  enleva  Gibraltar  , 
moins  fort  alors  qu'aujourd'hui.  C'était 
un  prince  violent ,  emporté  et  despotique. 
Voici  comme  un  auteur  contemporain 
rapporte  l'histoire  de  son  ajournement. 
«  Deux  frères ,  accusés  de  meurtre  et  con- 
»  damnés  à  être  précipités  du  haut  d'un 
»  rocher ,  quoiqu'on  n'eût  pas  de  quoi 
7)  les  convaincre  ,  et  qu'ils  persistassent 
»  à  nier  le  fait,  en  appjelèrent  à  l'équité 


FER 

»  des  lois  ;  mais  voyant  que  leurs  repré- 
»  sentations  au  roi  étaient  inutiles,  et 
»  qu'ils  avaient  affaire  à  un  juge  impla- 
»  cable  et  féroce ,  ils  prirent  Dieu  à  té- 
»  moin  de  leur  innocence,  et  citèrent  le 
»  prince  à  comparaître  dans  30  jours  k 
»  son  tribunal.  On  méprisa  ce  discours, 
»  qu*on  regarda  plutôt  comme  un  désir 
»  (,de  vengeance  que  comme  une  prédic- 
»  tion  (1).  Ferdinand  marchait  en  Anda- 
'r>  lousie ,  et  était  arrivé  à  Martos ,  lors- 
»  qu'au  trenlièmejour,  justement  depuis 
»  l'exécution  des  deux  frères ,  le  monar- 
»  que  s'étant  retiré  après  son  dîner  pour 
»  dormir ,  fut  trouvé  mort  dans  son  lit  • 
(  voyez  MoLAY  ). 

FERDINAND  V,  difle  CathoUque,  fils 
de  Jean  H,  roi  d'Arragon,  vit  le  jour  à  Soz 
sur  les  frontières  de  la  Navarre  le  1 0  mars 
H52.il  épousa  en  1469,  Isabelle  deCastil- 
Ic,  sœur  de  Henri  IV,  dit  V impuissant.  Ce 
mariage  joignit  les  états  de  Castille  avec 
ceux  d'.\rragon.  Ferdinand  et  Isabelle 
vécurent  ensemble ,  dit  un  historien ,  non 
comme  deux  époux  dont  les  biens  sont 
communs  sous  les  ordres  du  mari  ,  mais 
comme  deux  monarques  étroitement  unis 
pour  leurs  communs  intérêts.  Us  formè- 
rent une  puissance  ,  telle  que  l'Espagne 
n'en  avait  pas  encore  vue.  Ferdinand  dé- 
clara la  guerre  à  Alfonse ,  roi  de  Portugal , 

{•;  Ces  ajournemensfail»  par  desinnac«nii,  peuTPnt  êtr« 
iff  espères  de  prophéties,  ou  bien  un  recours  lif  et  ron- 
fiaiil  Ters  la  justice  diiine  .  gaiis  cotère  et  «ans  esprit  d* 
Tenjreance.  En  pénéral .  la  proTOCiitinn  ou  appel  au  juge- 
ment de  Dieu  n'est  pas  criminelle,  lorsnu'ellese  fait  sans 
passion  .  par  amour  de  la  justice  ,  dans  les  circoustances 
conrenablrs  et  urgentes.  C'est  ainsi  que  Patid  disait i 
Saiil  :  JiuHnl  Dominas  inter  te  et  tn«  ,  et  uUiualur  me  Do- 
mina!. Et  Zacbarie  condamné  à  la  mort  par  Joas  ;  Fideat 
Dominât  et  requirat.  Et  les  Uachabées  qui  annonçaient  si 
fortemeni  et  si  efficacement  la  prompte  et  terrible  puni- 
tion d'Anliochus.  Et  saint  Paul  qui  ne  Toulail  paa  que  la 
conduite  d'Alexaudrele  Trésorier  restât  impunie  :  Rediet 
itii  Dominut  juxta  opéra  tua.  Et  les  saints  martvr*  qui  daii) 
I'ipocal,vpse  appellent  le  jour  qui  doit  rengcr  leur  taiif  : 
Xhijuequo,  Domine  ,  non  vindieae  tanguinem  not/rum,  etc.  J 
Du  reste  ,  il  est  certain  que  Dieu  exauce  les  voeut  mèma 
criminels  des  misérables;  soit  pour  arcrlir  les  riches  etlei 
puissansdenepoint  mépriser,  moins  encore  opprimer  lei 
faibles  :  soit  pour  rendre  redoutable  1  inroration  de  soo 
saint  nom ,  et  nous  arertir  de  ne  pas  l'employer  légère- 
ment, —  L'efiîCBoe  de  ces  ajournemcns  a  un  rapport  sei>- 
slble  arec  celle  des  malédictions  et  imprécations,  attestée 
par  une  multitude  d'histoires  aTérées ,  et  par  l'autorité  de» 
LiTre*  saints.  Jb  inope  ne  avertat  oculie  propler  iram  ,  «I 
iii'n  retinqunt  qnarentibut  tibi  rein  maledieere.  Ualedietn- 
lit  tibi  in  amaritudine  anima  exaudietur  depreeatio  itfiut  ; 
txtudlcl  autemeim^iii  fetit  illam.  Ecrii.  i.  fNotideFrllcr  ) 


FER 

le  ballil  à  Toro  en  HîC  ,  et  teiinîna  la 
guerre  par  uncpaixavanlageuse.  Leroyau- 
me  de  Grenade  gémissait  sous  le  joug 
des  .Maures  ;  il  le   conquit,   après  une 
guerre  de  8  ans.  Rlaître  de  la  Castille  par 
sa  femme ,  de  Grenade  par  ses  armes ,  et 
de  l'Arragon  par  sa  naissance,  il  ne  lui 
manquait  que   la  Navarre  qu'il  conquit 
dans  la  suite.  Dans  le  même  lems  que 
Ferdinand  faisait  des  conquêtes  en  Eu- 
rope ,    Christophe    Colomb    découvrait 
l'Amérique  et  le  faisait  souverain  d'un 
nouveau  Monde.  Ce  n'était  pas  assez  pour 
Ferdinand  :  il  envoie  en  Italie  Gonsalve 
de  Cordoue  ,  dit  le  grand  Capitaine,  qui 
s'empare  d'une  partie  du  royaume  de 
Naples ,  tandis  que  les  Français  se  ren- 
daient maîtres  de  l'autre.  Ceux-ci  furent 
ensuite  entièrement  chassés  par  les  Es- 
pagnols ,  avec  lesquels  ils  ne  pouvaient 
s'accorder  sur  les  limites.  Cette  conquête 
fut  suivie  de  celle  de  la  NavaiTC.  Henri 
VIII,  roi  d'Angleterre,  était  son  gendre; 
il  lui  proposa  la  conquête  de  la  Guieune. 
Le  jeune  roi  envoie  une  armée ,  et  son 
beau-père   s'en  sert  pour   conquérir  la 
Navarre  :  fondant ,  dit-on  ,  ses  droits  sur 
une  bulle  prétendue  ,  qui  excommuniait 
le  roi  de  Kavarre ,  et  qui  donnait  son 
royaume  au  premier  occupant  ;  mais  puis- 
que Ferdinand  étant  en  guerre  avec  la 
France  ,   avait  autant  de  droit  de  leur 
prendre  la  Navarre  que  toute  autre  pro- 
vince ,  il  est  inutile,  de  lui  supposer  des 
motifs  imaginaires  pour  faire  cette  con- 
quête. Ferdinand,  appelé  le  sage  et   le 
prudent  en  Espagne ,  en  Italie  le  pieux  , 
'  n'eut  pas  en  France  de  surnom  si  honora- 
ble :  on  sait  que  les  Français  ne  disent 
guère  de  bien  de  leurs  vainqueurs.  Ce- 
pendant les  gens  équitables  et  impartialux 
lui  ont  rendu  justice.  «  On  ne  peut  lui 
«  refuser ,  dit  un  auteur  français ,  d'avoir 
»  été  le  plus  grand  roi  de  son  siècle  : 
»  fin ,  souple  ,  adroit ,  laborieux ,  éclairé, 
»  connaissant  les  hommes  et  les  affaires  , 
»  fécond  en   ressources ,  prévoyant  les 
»  événemens ,  faisant  la  guerre  non  en 
»  baladin  ,  mais  en  roi.   »  Ce  monarque 
mourut  en  15)6  ,  au  village  de  Madriga- 
let  ,  d'une  hydropisie ,  causée  par  un 
breuvage  que  Germaine  de  Foix,  sa  se- 


FER  2(rr 

condc  femme ,  lai  avait  douné  pour  le^ 
rendre  capable  d'avoir  des  enfans.  Les 
juifs  furent  chassés  d'Espagne  sous  so» 
règne  ;  ce  bannissement  eut  quelques 
mauvaises  suites',  mais  la  conduite  de 
ces  Israélites  en  avait  fait  appréhender 
de  plus  grandes  ,  si' on  ne  prenait  pas  le 
parti  de  les  éloigner.  Il  humilia  la  haute 
noblesse  ;  il  rendit  la  force  aux  lois  ;  il 
ramena  la  décence  et  la  régularité  diï 
clergé  ;  il  diminua  les  impôts  ;  il  donna 
les  plus  sages  ordonnances ,  il  punit  les 
magistrats  prévaricateurs  :  et  ce  qui  est 
beaucoup  moins  que  tout  cela  aux  yeux 
des  sages ,  il  découvrit  un  nouveau  Mon- 
de ;  il  conquit  Grenade,  Napies,  la  Na- 
varre, Oran,  les  côtes  d'Afrique.  Ce  n'était 
pas  sans  raison  que  Philippe  II  disait  ; 
Ccst  à  lui  que  nous  devons  tout.  Sa  vie 
écrite  par  l'abbé  Mignot ,  2  vol.  in-12  , 
manque  d'exactitude  et  d'impartialité  ;  on 
y  remarque  plus  d'asservissement  aux 
préjugés  nationaux,  que  d'attachement 
à  la  vérité  de  l'histoire.  (L'histoire  de  son 
règne  a  été  faite  aussi  par  Kerriand  de 
Pulgar ,  et  puliliée  sous  le  titre  de  Cro- 
nica  de  los  Rcyes  Ferdinando  y  Dona 
Isabel,  Sarragosse,  1567,  in-fol.  Valence, 
1 7  80,  in-fol.  ;  on  l'a  encore  sous  le  titre  de 
Rerum  a  Ferdinando  et  Isabella  hispa- 
niarum  regibus  gcstarum  décades  duce  , 
Grenade,  1545,  in-fol.) 

FERDINAND  VI,  surnommé  le  Sage, 
fils  de  Philippe  V ,  et  de  Marie  de  Savoie 
sa  première  femme,  né  à  Madrid  le  6  avril 
1712,  monta  sur  le  trône  après  la  mort  de 
son  père  ,  arrivée  en  1746.  Ce  prince  prit 
part  à  la  guerre  de  1 7  4 1  ,  et  surtout  h  la 
paix  signée  en  1748  ,  qui  procura  à  ua 
de  ses  frères  les  duchés  de  Parme  et  de 
Plaisance.  Il  profita  de  ce  calme  pa.ssa- 
ger,  pour  réformer  les  abus  introduits 
dans  les  finances;  il  rétablit  la  marine,  et 
protégea  le  commerce,  les  arts  et  l'agri- 
culture. L'Espagne,  fécondée  par  ses  bien- 
faits, vit  sortir  de  son  sein  des  manu- 
factures en  tout  genre.  Par  ses  soins  les 
Espagnols,  auparavant  tributaires  de  l'in- 
dustrie des  autres  nations,  virent  abon- 
der chez  eux  les  matières  premières  et  les 
productions  des  arts.  Des  canaux  prati- 
qués en  différentes  parties  de  l'état  par- 


26a  FER 

tèrent  l'uboiulunce  dans  les  campagnes  ; 
avec  tout  cela  l'Espagne  n'augmenta  ni 
en  force  ni  en  considération  publique. 
Sa  faiblesse  resta  toujours  la  môme ,  et  ])a- 
vut  même  s'annoncer  par  des  symptômes 
plus  sensibles.  «  Il  en  est  des  royaumes 
»  arrivés  une  fois  à  l'époque  de  leur  dé- 
»  cadence  ,  dit  un  politique,  comme  d'un 
)i  corps  grave ,  dont  la  chute  s'accélère 
»  de  moment  à  autre,  et  qui  ne  peut  être 
M  arrêté  sans  quelque  cause  majeure  , 
»  moins  encore  prendre  une  direction  ré- 
»  trograde.  »  Ferdinand  YI  mourut  sans 
postérité  à  Madrid  le  10  août  1769  ,  à  46 
ans.  Son  frère  Charles  lui  succéda.  Il  fut 
toujours  d'une  santé  faible ,  qui  ne  lui 
permit  pas  de  faire  tout  ce  qu'il  aurait 
voulu.  Il  avait  épousé,  en  1129,  Marie-Ma- 
deleine-Tbérèse,  infante  de  Portugal. 

ROIS    DE    NAPLES. 

FERDINAND  I ,  fils  naturel  d'Alfonse 
d'Arragon  ,  dit  le  Magnanime ,  prit  pos- 
session du  royaume  de  Naples  en  1458  , 
qui  lui  fut  confirmée  par  le  pape  Pie  II 
(  il  avait  alors  34  ans.  )  Il  eut  d'abord  à 
soutenir  une  guerre  contre  plusieurs  prin- 
ces qui  lui  contestaient  ce  royaume  ;  il 
fut  battu  près  de  Sarno  ;  mais  ayant  été 
ensuite  secouru  par  Scanderberg,  ses  ar- 
mes eurent  du  succès  ;  il  battit  le  duc  de 
Calabre.  Tranquille  possesseur  du  royau- 
me, il  ne  tarda  pas  de  tourner  ses  armes 
contre  le  saint  Siège  qui  lui  avait  rendu 
des  services  signalés.  Innocent  VIII  réus- 
sit à  faire  la  paix  avec  lui  ;  mais  ce  fut 
pour  un  moment.  Ce  prince  renouvela 
d'abord  les  hostilités  ;  ce  qui  força  le  pape 
à  l'excommunier;  mais  ayant  montré  du 
regret  de  ses  déprédations ,  le  pontife  si- 
gna derechef  un  traité  de  paix.  Charles 
VIII,  roi  de  France,  ayant  formé  des  pré- 
tentions sur  ce  royaume,  Ferdinand  vou- 
lut détourner  l'orage  en  faisant  des  pro- 
positions avantageuses  à  ce  prince;  elles 
furent  rejetées,  et  ce  refus  affligea  Ferdi- 
nand si  vivement,  qu'il  en  mourut  en 
1 493.  Il  fut  peu  regretté  de  ses  sujets  qu'il 
n'avait  cessé  de  vexer  ainsi  que  ses  voi- 
sins. Alfonse  son  fils  aîné  lui  succéda. 

FERDINAND  II,  fils  d'Alfonse,  fut 
coui'onDé  roi  de  Naples  en  1495;  il  eut 


FER 

d'abord  une  guerre  sangliinte  à  soutenir 
contre  Charles  VIII,  roi  de  France,  et  ses 
propres  sujets  qui  l'obligèrent  de  se  reti- 
rer dans  l'ile  d'Ischia.  Les  Vénitiens  et  les 
Espagnols  travaillèrent  à  le  rétablir  dans 
Naples  occupé  par  les  Français.  Ferdinand 
paraît  devant  cette  ville  avec  une  flotte 
nombreuse  en  1495,  assiège  Montpensier 
retiré  dans  un  des  châteaux  de  Naples, 
l'oblige  à  l'abandonner,  l'investit  ensuite 
dans  Attelle  etie  fait  prisonnier.  Il  ne  jouit 
point  du  fruit  de  ses  victoires.  Il  mourut 
immédiatement  après  que  les  Français  eu- 
rent évacué  le  royaume  de  Naples  l'an 
149C.  Frédéric  son  oncle  lui  succéda. 

'  FERDINAND  III  (  Joseph-Jean- 
Baptîste  )  ,  archiduc  d'Autriche ,  grand- 
du;  de  Toscane ,  fils  de  Léopold  II  et  de 
Marie-Louise ,  infante  d'Espagne,  et  frère 
de  l'empereur  François  II ,  naquit  à  Flo- 
rence le  8  mai  1769.  Son  père  ayant  été 
appelé  au  trône  d'Autriche  par  la  mort 
de  Joseph  II,  son  frère,  Ferdinand,  fut 
proclamé  grand  duc  le  7  mai  1791.  Il  prit 
les  rênes  du  gouvernement  dans  les  cir- 
conslances  les  plus  dilficiles  et  au  mo- 
ment que  la  révolution  française  mena- 
çait tous  les  trônes  de  l'Europe.  Ferdi- 
nand crut  conserver  le  sien  à  force  de 
condescendance ,  n'ayant  pas  de  forces 
suffisantes  pour  s'opposer  à  un  ennemi 
puissant.  Il  fut  un  des  premiers  souve- 
rains qui  reconnurent  la  république  fran- 
çaise. Laflotte,  ministre  du  roi  de  France 
en  Toscane,  ayantélé  confirmé  dans  cette 
qualité  par  la  Convention,  le  grand-duc 
n'hésita  pas  à  le  recevoir ,  et ,  par  un 
acte  du  1 6  janvier  1793,  dit  entre  autres 
choses  :  «  Nous  nous  ferons  un  vrai  plai- 
»  sir  de  l'accueillir...,  et  de  lui  porter 
»  pleine  et  entière  foi  en  tout  ce  qu'il 
M  aura  à  nous  exposer  au  nom  de  la  ré- 
»  publique  française,  à  laquelle  nous 
»  sommes  enchantés  de  pouvoir  donner 
»  des  preuves  continuelles  de  notre  scru- 
w  puleuse  exactitude  à  observer  la  plus 
ï>  parfaite  neutralité,  etde  notre  désir  con- 
»  staut  de  cultiver  la  bonne  intelligence,  i 
M  au  maintien  de  laquelle  nous  avons  tou-1 
»  jours  attachéuu  grand  prix.  »  Ferdinand  | 
n'avait  pas  voulu  entrer  dans  la  première  j 
coalition  contre  la  France.  Les  secoure  j 


FER 

immenses  qui  sortaient  de  ses  états  pour 
subvenir  aux  besoins  des  révolutionnai- 
res, sa  bonne  harmonie  avec  la  républi- 
que française,  ne  pouvaient  que  déplaire 
aux  autres  souverains:  aussi  lord  Hervey, 
ministre  britannique  à  Florence,  exprima, 
dans  les  journaux ,  le  mécontentement  de 
sa  cour  ;  ce  mécontentement  était  d'au- 
tant plus  juste  que  celle  de  Florence  ne 
prit  point  le  deuil  à  la  mort  funeste  de 
Louis  XVI.  La  Russie  fit  les  mêmes  plain- 
tes, et  lui  reprocha  ses  liaisons  avec  les 
régicides  de  son  parent  Louis  XVL  Les 
plaintes  de  François  II,  frère  du  grand- 
duc  ,  et  de  son  oncle  le  roi  d'Espagne , 
furent  encore  plus  vives,  mais  ne  purent 
ébranler  la  résolution  de  Ferdinand,  qui, 
parfois,  montrait  même  pour  l'ennemi 
commun  une  partialité  imprudente.  Le 
8  octobre ,  le  ministre  anglais  vint  inti- 
mer au  grand-duc  de  renvoyer  le  ministre 
républicain ,  faute  de  quoi  l'escadre  an- 
glaise, qui  était  devant  Livourne  ,  bom- 
barderait ce  port ,  et  des  troupes  anglai- 
ses occuperaient  la  Toscane.  Le  grand- 
duc  fut  contraint  d'obéir  :  La  flotte  par- 
tit ;  mais  le  grand-duc  ne  tarda  pas  à 
montrer  encore  ses  véritables  sentimens. 
Les  Anglais  ayant  enlevé  à  Livourne  une 
grande  quantité  de  grains  appartenant  à 
la  république  française  ,  Ferdinand  III, 
par  un  motu  proprio,  du  4  novembre 
1794,  fit  restituer  à  ses  frais  ces  grains 
dans  les  ports  de  Provence.  Les  succès 
des  armées  républicaines  portèrent  Fer- 
dinand à  dépêcher  en  France ,  comme 
ambassadeur  extraordinaire,  le  comte 
Carletti ,  qui,  parmi  les  révolutionnaires, 
passait  pour  un  excellent  patriote.  Car- 
letti arriva  à  Paris  le  31  janvier  1795  :  il 
avait  ordre  de  traiter  directement  avec 
le  comité  de  salut  public,  et  de  rétablir 
la  neutralité  avec  la  France.  Le  3  janvier, 
î!  conclut ,  avec  ce  comité ,  le  traité  qui 
commence  ainsi  :  «  Le  grand-duc  de  Tos- 
B  cane  révoquetoutacte  d'adhésion,  con 
»  sentement  ou  accession  à  la  coalition 
i>  armée  contre  la  république  française  , 
»  etc.,  etc.  )>  SonA.  R.  Madame  (aujour- 
d'hui dauphine)  était  à  cette  époque  dé- 
tenue encore  au  Temple ,  et  sur  le  point 
d'être  renvoyée  en  Autriche.  Le  comte 


FER  a63 

Carlétli  demanda  la  permission  de  pré- 
senter ses  devoirs  à  la  princesse  ;  mais , 
pour  toute  réponse  ,  le  Directoire  lui  in- 
tima l'ordre  de  quitter  Paris  sur-le-champ. 
Cela  n'interrompit  pas  la  bonne  harmo- 
nie de  la  France  avec  le  grand-duc ,  qui 
disgracia  son  ambassadeur,  et  envoya  à  sa 
place  don  Neri  Corsini,  frère  du  prince  de 
ce  nom.  Malgré  les  sacrifices  que  le  grand- 
duc  avait  faits  pour  la  république  fran- 
çaise ,  les  troupes  entrèrent  dans  ses  états 
en  juillet  1796.  Elles  n'étaient  encore 
qu'au  pied  des  Alpes  que  Ferdinand  or- 
donna à  tous  les  émigrés  français  de  sor- 
tir de  la  Toscane.  Outre  cela ,  les  Anglais 
ayant  insulté  à  Livourne  le  pavillon  ré- 
publicain ,  et  le  grand-duc  ne  pouvant 
donner  au  Directoire  la  satisfaction  qu'il 
lui  demandait,  une  division  de  Buona- 
parte  vint  prendre  possession  de  ce  port. 
Le  général  français,  sa  femme  .loséphine, 
et  son  oncle ,  depuis  cardinal  Fesch,  vin- 
rent visiter  le  grand-duc  ,  qui  leur  fit 
l'accueil  le  plus  distingué  et  les  admit  à 
sa  table  ;  moyennant  deux  millions,  que 
ce  prince  paya  ,  Buonaparte  promit  que 
ses  troupes  n'entreraient  pas  à  Florence. 
Mais  le  jacobinisme  avait  pénétré  dans  la 
Toscane ,  et  comptait  un  grand  nombre 
de  partisans.  En  même  temps  que  le  grand- 
duc  reconnaissait  les  républiques  Ligu- 
rienne et  Cisalpine,  et  permettait  que 
ceux  qui  en  dépendaient  portassent  la 
cocarde  tricolore ,  il  fut  obligé  d'établir 
un  tribunal  pour  punir  les  factieux , 
dont  le  chef  était  un  certain  Aletis.  Mais 
cette  mesure  ne  les  découragea  pas ,  et 
ils  aJËchèrent  aux  portes  mêmes  du  pa- 
lais ducal ,  des  pamphlets  ,  dont  l'un  di- 
sait :  Le  peuple  seul  est  souverain.  Le 
complot  éclata  peu  de  jours  après  ;  il 
avait  pour  but  d'assassiner  le  grand-duc, 
d'incendier  Florence  ,  et  de  s'emparer  du 
gouvernement.  Tels  étaient  les  fruits  que 
Ferdinand  allait  recueillir  de  sa  trop  offi- 
cieuse neutralité ,  lorsqu'il  forma  une  ar- 
mée de  16,000  hommes  pour  contenir 
les  factieux.  Cependant  la  guerre  contre 
la  république  continuait  toujours  ;  les 
Napolitains  entrèrent  (en  décembre  1 798) 
dans  Livourne,  le  Directoire  accusa  le 
grand-duc  d'avoir  rompu  la  neutralité  » 


^4  FEÏV 

et  envoya  dans  la  Toscane  le  général  Ser- 
.  rurier.  Mais  Ferdinand,  au  prix  de  quinze 
cent  mille  francs  ayant  obtenu  des  Na- 
politains l'évacuation  de  Livourne,  le  gé- 
néral Serrurier  sortit  de  la  Toscane ,  et 
la  paix  fut  rétablie  jusqu'au  mois  de  mars 
1799.  A  cette  époque  la  Toscane  fut  com- 
prise dans  la  déclaration  de  guerre  faite 
par  la  France  à  l'empereur  d'Allemagne. 
Des  troupes  françaises ,  commandées  par 
Schérer,  MioUis  et  Gautier,  entrèrent 
dans  la  Toscane  sans  que  Ferdinand  fit 
la  moindre  tentative  pour  arrêter  leur 
marche.  Le  25 ,  Florence  était  au  pouvoir 
des  républicains,  et  le  27  le  grand-duc 
quitta  sa  capitale  et  se  dirigea  vers  Vienne. 
Lors  de  l'entrée  de  BuonaparleàFlorence, 
la  Toscane  avait  été  dépouillée  d'une 
grande  partie  de  ses  richesses  en  ta- 
bleaux, sculptures,  entre  autres  de  la 
Vénus  de  Médicis ,  et  de  plusieurs  manus- 
crits précieux  de  la  bibliothèque  Lauren- 
tiana  -.  à  cette  seconde  entrée  des  Fran- 
çais ,  le  pillage  fut  encore  plus  considé- 
rable. Nous  n'avons  point  parlé  du  cou- 
rageux zèle  des  Arétins ,  qui  s'armèrent 
pour  chasser  les  ennemis  de  leur  religion 
et  de  leur  patrie  :  mais  comme  ils  étaient 
en  trop  petit  nombre  ,  et  qu'ils  ne  furent 
point  secondés  pas  les  autres  Toscans , 
il  payèrent  cher  les  pi-emiers succès  qu'ils 
obtinrent  :  un  grand  nombre  fut  égorgé 
par  les  républicains,  qui  mirent  leur  ville 
au  pillage.  On  accorda  à  Ferdinand ,  par 
le  traité  de  Lunéville  (  1802  )  ,  le  duché 
de  Saltzbourg  ;  et  ensuite  on  lui  donna 
(en  1805  )  en  échange  le  pays  de  Wurtz- 
bourg.  Le  grand-duc  vécut  en  bonne  in- 
telligence avec  Buonaparte ,  qui  lui  fit 
espérer ,  dit-on ,  de  le  faire  roi  de  Polo- 
gne ,  et  assista  (en  1810)  au  mariage  de 
Napoléon  avec  sa  nièce  l'archiduchesse 
Marie-Louise.  La  coalition  de  1813  ayant 
rendu  les  trônes  à  leurs  souverains  légi- 
times ,  Ferdinand  revint  à  Florence ,  s'y 
montra  bon  prince ,  et  protecteur  des 
lettres  et  des  arts.  Il  est  mort  d'apoplexie 
eu  janvier  1825.  Son  fils  Léopold  II 
(né  en  1797  )  lui  a  succédé;  Ferdinand 
avait  eu  ce  fils  et  deux  filles  de  son  épouse 
Louise-Marie,  princesse  de  Naples,  morte 
en  1804. 


FER 
*  FERDINAND  IV,  roi  de  Naples  et 
des  Deux-îSiciles,  troisième  fils  de  Char- 
les III,  qui  fut  depuis  roi  d'Espagne ,  et 
d'Amélie  de  Saxe,,  naquit  à  Naples  !e  12 
janvier  1751.  Le  prince  de  Santo-Nicau- 
dro  fut  chargé  de  le  diriger ,  ainsi  que  son 
frère  aîné  Charles  IV,  qui  devint  roi  d'Es- 
pagne. Ce  seigneur  rempli  de  probité  et  de 
zèle,  manquait  toutefois  des  connaissan- 
ces nécessaires  pour  remplir  des  fonctions 
si  difficiles  :  aussi  ses  élèves  ne  furent- 
ils  pas  soignés  comme  ils  le  méritaient, 
et  c'est  à  ce  défaut  d'une  bonne  éduca- 
tion qu'il  faut  attribuer  sans  doute  plu- 
sieurs des  fautes  de  leur  règne.  Dès  son 
enfance,  Ferdinand  manifesta  pour  le  peu- 
ple un  attachement  qui  le  rendit  cher  à  la 
nation  :  il  s'amusait  avec  les  enfans  deson 
âge ,  quelle  que  fût  leur  condition ,  et  il 
les  appelait  ses  camarades  .-  sous  ce  rap- 
port c'était  comme  notre  Henri  IV.  La  mort 
de  Ferdinand  VI  appela  en  17  59  sur  le 
trône  d'Espagne  le  frère  puîné  de  ce  roi , 
Charles  III ,  père  de  Ferdinand  dont  nous 
retraçons  la  vie.  Ce  jeune  prince,  alors 
âgé  de  8  ans,  devint  par-là  même  roi  de 
Naples  :  son  avènement  au  trône  fut  ac- 
cueilli avec  enthousiasme  par  le  peuple 
auquel  il  fut  présenté  par  son  père.  Avant 
le  départ  de  Charles  III ,  un  conseil  de 
régence  fut  présidé  par  le  marquis  de 
Tanucci,  ancien  professeur  de  droit  à 
Pise,  et  alors  premier  ministre  du  royau- 
me de  Naples.  Ce  gouvernement  fut  des- 
potique :  le  président  de  la  régence,  gui- 
dé par  l'ambition ,  chercha  à  détourner 
le  roi  des  afiaires ,  et  ce  fut  dans  ce  hut 
qu'il  l'environna  des  plaisirs  les  plus 
capables  d'égarer  son  esprit  et  son  cœur, 
sans  songer  aux  conséquences  qu'une  pa- 
reille conduite  devait  amener.  En  même 
temps ,  il  abusait  du  pouvoir  et  faisait 
murmurer  les  grands  et  le  peuple.  Sur 
ces  entrefaites ,  le  jeune  prince  fut  marié 
le  7  avril  1768  ,  à  Marie-Caroline-Louise 
de  Lorraine,  archiduchesse  d'Autriche , 
sœur  de  Marie- Antoinette,  reine  de  Fran- 
ce ;  cette  princesse,  remplie  d'érainentes 
qualités,  parvint  en  peu  de  temps  à  s'em- 
parer de  l'esprit  du  roi ,  son  époux ,  et 
sut  dès  lors  le  gouverner  à  son  gré.  Elle 
songea  bientôt  à  tirer  parti  des  mécon- 


1 


FER 
t<>ntemens  qu'avaient  provoqués  les  réfor- 
mes plus  ou  moins  liaidies  |  qu'avaient 
tentées  le  conseil  de  régence  ;  elle  lit  re- 
marquer au  roi  la  haine  que  portait  au 
chef  de  l'Eglise,  son  ministre  Tanucci  ; 
elle  s'efforça  de  le  renverser  ;  elle  y  réus- 
sit (1777).  Celui-ci  ayant  été  remplacé 
par  le  marquis  de  la  Sambuca ,  elle  cher- 
cha à  le  dominer  ;  mais  n'y  étant  pas  par- 
venue ,  elle  finit  par  le  faire  sortir  du 
ministère  (1784).  Elle  mit  à  sa  place  y/c- 
ton  pour  lequel  elle  avait  une  confiance 
sans  borne  ,  qu'il  sut  conserver  pendant 
long-temps.  Voyez  Acton.  Ce  ministre 
fut  successivement  appelé  à  la  marine , 
à  la  guerre  et  aux  finances ,  et ,  quel- 
ques fonctions  qu'il  ait  remplies  ,  il  fut 
toujours  le  chef  et  le  maître  des  autres 
ministres;  il  dirigeait  l'état,  et  était  le  véri- 
table roi.  Cependant  il  associait  à  sa  puis- 
sance la  reine  3Iarie-Caroline  :  un  con- 
seil qu'elle  présidait ,  avait  été  établi  par 
les  soins  de  son  favori ,  et  tout  se  réglait 
d'après  ses  avis.  Ferdinand  n'était  roi  que 
de  nom  ;  il  n'avait  aucune  autorité  ;  le 
seul  droit  qui  lui  ait  été  conservé  était 
celui  de  s'amuser  à  son  gré  ,  et  il  en  usait 
amplement  :  ce  qu'il  y  a  de  remarquable, 
c'est  que  lui-même  connaissait  la  nullité 
du  rôle  qu'on  lui  faisait  jouer ,  et,  quand 
on  s'adressait  à  lui  pour  quelque  affaire  , 
il  répondait  :  allez  parler  à  la  maîtresse 
(c'est  ainsi  qu'il  désignait  la  reine).  Ac- 
ton était  entièrement  dévoué  à  l'Angle- 
terre et  à  l'Autriche  :  il  mettait  de  côté 
Rome ,  la  France  et  presque  l'Espagne. 
Le  saint-Siége  avait  à  se  plaindre  des 
empiètemens  que  l'autorité  civile  faisait 
tous  les  jours  sur  l'autorité  ecclésiasti- 
que ;  plusieurs  églises  et  monastères  fu- 
rent .supprimés,  sans  l'avis  du  souverain 
pontife.  La  France  ,  qui  cependant  avait 
donné  la  famille  royale  à  Naples,  n'était 
nullement  écoutée ,  et  une  frégate  fran- 
çaise ne  put  même  entrer  dans  les  ports 
de  ce  royaume.  Enfin  la  voix  de  Char- 
les III  était  sans  influence  sur  son  fils  :  il 
fallut  pour  le  rappeler  à  ses  devoirs  qu'il 
lui  écrivît  la  lettre  la  plus  pressante:  en- 
core quel  fut  le  résultat  de  celte  démar- 
che ?  une  entrevue  devait  avoir  lieu  en- 
tre le  père  et  le  fils  ;  celui-ci  avait  reçu 

V. 


FER  265 

d'Espagne  un  vaisseau  magnifique  (le 
Joachim) \ioyir  faire  le  voyage  :  lîi  reine, 
le  roi  et  leur  ministre  Acton  s'embarquè- 
rent dans  le  mois  de  mai  17  8G  pour  aller 
auprès  de  Charles  IH;  arrivés  à  Libourne; 
Marie-Caroline  et  Acton  parvinrent  à  faire 
renoncer  Ferdinand  à  ce  voyage;  au  lieu 
de  continuer  leur  route ,  ils  allèrent  à 
Florence  et  revinrent  à  Naples ,  au  mois 
de  novembre  de  la  même  année.  Celte 
conduite  semblait  devoir  amener  une 
rupture  avec  l'Espagne;  mais  Acton  était 
si  adroit;  il  avait  tant  d'influence  sur  la 
reine  et  sur  le  roi  qu'il  détourna  l'orage 
qui  commençait  à  gronder  sur  sa  têle. 
Dès  qu'il  crut  remarquer  que  Marie-Ca- 
roline commençait  à  s'attacher  à  une 
autre  créature,  et  que  son  crédit  pouvait 
être  menacé ,  il  s'empressa  de  faire  dis- 
paraître de  la  cour  celui  qui  lui  portait 
ombrage,  et  le  comte  de  Cavamanica, 
capitaine  des  gardes,  qui  avait  été  appe- 
lé au  conseil  de  la  reine,  fut  envoyé  en 
Sicile  en  qualité  de  vice-roi  ;  encore  ne 
jouit-il  pas  long-temps  de  sa  dignité,  car 
il  mourut  bientôt  après,  du  poison  qui 
lui  fut  donné,  dit-on  ,  par  son  secrétaire. 
La  puissance  d'Acton  prit  à  cette  époque 
un  nouvel  accroissement.  Charles  III  vint 
à  mourir  en  17  88,  et  dès  lors  l'Espagne 
fut  sans  influence  sur  le  royaume  de  Na- 
ples. Tel  était  l'état  de  ce  pays ,  lorsque 
la  révolution  française  éclata  ,  et  alarma 
les  puissances  de  l'Europe.  Acton  ,  fran- 
çais de  naissance  (voyez  ce  mot),  avait 
pour  son  pays  une  aversion  qu'il  ne 
pouvait  dissimuler  ;  et  il  travaillait  moins 
à  venir  au  secours  des  augustes  parens 
du  roi  et  de  la  reine ,  qu'à  contracter 
une  alliance  avec  l'Autriche  et  avec  l'An- 
gleterre. Le  gouvernement  français  ,  mé- 
content des  relalionsactivcs  qui  existaient 
entre  le  cabinet  de  Naples  et  celui  de  Sl.- 
Janies ,  envoya  l'amiral  Latouche  avec 
une  escadre  devant  Naples,  afin  de  faire 
rompre  cette  alliance  avec  l'Angleterre. 
Dans  le  cas  oii  il  n'y  parviendrait  pas , 
il  était  chargé  de  bombarder  la  ville.  Ac- 
ton consentit  à  tout.  11  n'en  continua 
pas  moinsensecretsesrelations,  et  il  était 
d'ailleurs  bien  résolu  de  se  soustraire 
aux  conditions  qui  lui  avaient  été  impo- 
1-7.. 


266  FER 

sées,  4ès  que  les  circonstances  le  lui 
permettraient.  Cette  affaire  avec  la  France 
étant  terminée,  du  moins  en  apparence  , 
Ferdinand  songea  à  se  réconcilier  avec 
le  souverain  pontife ,  et  ce  fut  dans  ce 
but  que  cette  même  année,  1702,  il 
se  rendit  à  Rome ,  convint  avec  Pie  VI 
que  les  rois  de  Naples,  à  leur  avènement 
au  trône,  paieraient  au  saint-Siége  cinq 
cent  mille  ducats ,  et  qu'à  celte  condi- 
tion tous  les  anciens  droits  que  récla- 
mait cette  cour  seraient  abolis.  Tout 
semblait  annoncer  que  les  germes  de 
dissolution ,  qui  fermentaient  depuis 
long-temps  dans  le  royaume  de  Napies  , 
allaient  enfin  être  étouffés  :  il  n'en  fut 
point  ainsi  ;  une  cendre  légère  recou- 
vrait l'étincelle  qui  devait  produire  un 
Taste  embrasement.  Alors  Louis  XVI  suc- 
combait sous  la  liache  révolutionnaire  : 
à  la  nouvelle  de  ce  crime,  une  coalition 
se  forma ,  et  le  roi  de  Napies  ,  qui  s'em- 
pressa d'y  entrer,  réunit  son  escadre  à 
celle  d'Espagne  et  d'Angleterre  pour  ve- 
nir faire  le  siège  de  Toulon.  Pendant  ce 
temps-là ,  Je  mécontentement  s'était  en- 
core accru  à  Napies  ;  on  murmurait  hau- 
tement et  on  demandait  ouvertement  le 
renvoi  d'Aclon  et  de  lady  Hamilton  , 
épouse  de  l'ambassadeur  de  l'Angleterre, 
femme  licencieuse  qui  avait,  par  sa  con- 
duite à  la  cour,  et  les  danses  obscènes 
qu'elle  avait  introduites  à  Napies,  cho- 
qué ,  jusqu'au  scandale ,  la  juste  suscep- 
tibilité des  Napolitains.  Des  vociférations 
tumultueuses  se  firent  entendre  ;  un  com- 
plot eut  lieu;  mais  il  fut  découvert  au 
moment  où  il  allait  être  mis  à  exécution: 
une  junte  suprême  d'e'tat  fut  établie;  les 
conspirateurs  furent  punis  de  la  manière 
la  plus  sévère.  La  tentative  sur  Toulon 
n'ayant  pas  réussi  comme  la  coalition  l'at- 
tendait, les  troupes  napolitaines  se  réu- 
nirent en  Italie  aux  troupes  autrichiennes 
et  se  battirent  pour  la  même  cause ,  c'est- 
à-dire  ,  contre  la  révolution  française 
qui  n'avait  pas  été  étrangère  au  dernier 
complot  découvert  à  Napies.  Les  mécon- 
tens  ne  tardèrent  point  à  former  une  au- 
tre conspiration  beaucoup  plus  sérieuse 
à  laquelle  prirent  part  des  personnes 
de  la  plus  haute  distinction.  Plus  de  700 


FER 

arrestations  eurent  lieu  ;  personne  ne  fit 
d'aveux,  et  l'on  ne  connut  point  d'une  ma- 
nière positive  quels  étaient  les  projets  des 
conjurés.  On  ignore  si  la  haine  contre  Ac- 
ton,  ou  l'amour  de  la  liberté,  ou  bien  les 
idées  révolutionnaires ,  propagées  par  la 
France,  les  avaient  dirigés  dans  cette  péril- 
leuse entreprise.  Quoi  qu'il  en  soit,  Acton 
donna  sa  démission  ;  mais ,  quoiqu'il  ne 
fût  plus  ]»remier  ministre ,  il  exerçait  tou- 
jours la  plus  grande  influence  sur  la  mar- 
che du  gouvernement.  Toutefois  ,  Napies 
fut  tranquille  pendant  quelques  mois  : 
Ferdinand,  vivement  sollicité  parla  cour 
de  Madrid,  consentit  à  faire  avec  la  France 
un  traité  qui  ne  fut  suivi  exactement  ni 
par  les  Français  ni  par  les  Napolitains  ; 
car,  d'un  côté  Acton  n'avait  point  cessé 
d'être  en  relation  avec  l'Angleterre,  et 
la  France  continua  d'avoir  avec  les  mé- 
contensde  Napies,  des  intelligences  dans 
le  but  d'exciter  un  soulèvement.  Ferdi- 
nand lui-même  qui  n'avait  fait  cette  con- 
vention qu'à  regret ,  avec  les  révolution- 
naires français ,  cherchait  une  occasion 
de  guerre.  L'entrée  du  général  Berthier 
dans  les  Etats  romains  ,  vint  la  lui  four- 
nir :  bientôt  en  effet,  ayant  réuni  ses 
troupes  au  nombre  de  GO, 000  hommes, 
à  celles  de  la  Sardaigne ,  de  la  Toscane 
et  de  l'Autriche,  il  s'avance  en  personne 
contré  les  Français  ,  entre  dans  Rome  , 
et  force  ses  ennemis  à  se  retirer  dans  le 
Château  St. -Ange.  Mais  le  général  Cham- 
pionnet  ayant  battu  peu  après  le  général 
Mlcheroux ,  près  d'Ancône ,  et  ensuite  le 
général  Mack  à  Civita-Castellana  ,  il  fut 
obligé  d'évacuer  promptement  la  ville 
de  Rome  et  de  s'en  retourner  à  Napies. 
Dans  la  position  malheureuse  oîi  il  se 
trouvait ,  poursuivi  par  les  armées  fran- 
çaises ,  sentant  qu'il  lui  était  impossible 
de  résister ,  il  prit  le  parti  de  se  retirer 
en  Sicile  :  dans  la  nuit  du  24  septembre 
1 7  08,  il  s'embarqua  avec  ses  trésors,  après 
avoir  laissé  à  Napies  don  François  Pigna- 
lelli-TrongoUi  en  qualité  de  vice -roi. 
Bientôt  tout  est  en  dissolution  dans 
cette  partie  de  l'Italie.  Mack  passe  du 
côté  des  Français  :  les  républicains  de 
Napies  appelaient  les  armées  ennemies; 
enfin  le  vice-roi,  après  avoir  cherché  à 


FER 

se  mettre  à  la  tête  de  l'armée ,  abandon- 
1)6  son  gouvernement ,  et  se  rend  à 
Palerme  ,  où  sa  barbarie  le  fait  jeter  en 
prison.  Les  LazaronL  furent,  pendant 
quelque  moment ,  les  maîtres  de  Naples  : 
le  peuple  se  donna  un  cbef  :  le  sang 
coula  de  toutes  parts  ;  enfin,  pendant  trois 
jours,  l'anarcliie  régna  sur  ce  malheureux 
pays.  Le  général  Cbampionnet  arriva  sous 
les  murs  de  Kaples,  et,  comme  le  peuple 
avait  changé  d'avis ,  et  qu'il  voulait  faire 
\'  résistance ,  ses  troupes  attaquèrent  cette 
Tille  le  21  janvier,  et  s'en  emparèrent  le 
23.  Parvenu  à  empêcher  le  pillage,  Cbam- 
pionnet leva  une  contribution  de  guerre 
de  6,000,000  de  ducats  ,  et  établit  un 
gouvernement  provisoire.  Naples  fut  tran- 
quille ;  mais  les  environs  étaient  agités. 
Les  Calabrois  surtout  levèrent  l'étendard 
de  l'indépendance  :  à  leur  tète  sont  des 
prêtres  et  surtout  le  cardinal  Ruffo ,  la 
poitrine  couverte  d'une  croix  blanche  : 
sous  leurs  drapeaux  se  rangent  les  trou- 
pes de  Sciarpa ,  de  Panganera  et  du  fa- 
meux Fra  Diavolo.  Ruffo  reçoit  le  titre  de 
vice-roi ,  commande  l'armée  ,  défait  les 
Français  et  les  chasse  de  Kaples  le  21 
juin  1799.  Une  république  éphémère  avait 
remplacé  dans  celte  ville  le  gouverne- 
ment de  Ferdinand  :  le  délire  démago- 
gique avait  tourné  une  foule  de  tètes  :  là 
comme  à  Paris  ,  on  avait  établi  des  clubs 
politiques  ;  on  imprimait  des  Journaux 
populaires ,  on  avait  inscrit  sur  les  édifi- 
ces publics  la  devise  au  nom  de  laquelle 
tant  d'innocens  avaient  été  condamnés 
en  France  :  Liberté',  égalité' ,  fraternité' 
ou  la  mort;  et  pour  comble  de  scandale, 
des  prêtres  oubliant  la  dignité  de  leur 
mission  ,  prêchaient  les  idées  révolution- 
naires. Ruffo ,  entré  à  IVapIes ,  appelle 
bientôt  Ferdinand  eu  Italie  ;  ce  prince 
blâma  la  sévérité  de  sa  conduite ,  car 
Ruffo  avait  excepté  de  toutes  les  capitu- 
lations les  malheureux  Napolitains  ;  il  fut 
destitué.  Une  junte  d'e'tat ,  composée  en 
grande  partie  de  Siciliens ,  fut  chargée 
d'examiner  la  conduite  des  accusés  :  pen- 
dant qu'elle  se  livrait  à  ces  investigations, 
le  roi  retourna  à  Palerme.  Il  y  eut  alors 
une  réaction  terrible  :  le  pillage  ,  le  mas- 
sacre sur  les  places  publiques  et  dans  les 


FER  'à67 

prisons  ne  furent  point  ëpai^nés  :  les 
personnages  les  p  us  illustres,  compro- 
mis, il  est  vrai,  sons  le  gouvernement 
républicain,  périrent  ou  dans  le  feu  Ou 
à  une  potence.  Enfin  ,  depuis  le  mois  de 
juin  jusqu'en  décembre  1799,  le  sang  ne 
cessa  pas  de  couler.  Au  mois  de  janvier 
1800,  Ferdinand  revint  à  Naples  avec  la 
reine  et  la  cour  dont  faisait  partie  lady 
Hamilton  :  mais  bientôt  Marie-Caroline 
se  rendit  à  Vienne  avec  les  trois  prin- 
cesses ses  filles,  et  elle  ne  revint  à  Na- 
ples que  lorsque  le  souvenir  des  derniè- 
res exécutions  eût  été  un  peu  effacé. 
Alors  le  cabinet  de  3Iadrid  acquit  une 
grande  influence  sur  celui  de  Naples,  en 
concluant  avec  Buonaparte ,  alors  l'"" 
consul,  un  traité  qui  assurait  l'intégrité 
du  royaume  de  Naples.  Acton  fut  défini- 
tivement éloigné  ,  et  l'alliance  entre  les 
deux  cours  fut  cimentée  par  le  mariage 
d'une  princesse  de  Naples  avec  le  prince 
des  Asturies  (maintenant  Ferdinand  VII) , 
et  par  celui  d'une  infante  d'Espagne  avec 
le  prince  héréditaire  des  deux  Siciles 
(depuis  Ferdinand  V).  Les  deux  mariages 
furent  célébrés  à  Barcelonne  le  6  mai 
1802.  (Les  deux  princesses  moururent 
quelques  années  après.  )  Le  traité  de  Lu- 
néville  plaçait  le  royaume  de  Naples  dans 
une  position  difficile,  puisque  l'Autriche 
faisait  la  paix  avec  la  France,  et  aban- 
donnait Naples  son  ancienne  alliée.  Par 
le  traité  de  Florence  (28  mars  1802), 
Ferdinand  fut  forcé  de  céder  les  Prési- 
des ,  Piombino  et  d'autres  parties  de  ses 
états ,  et  de  recevoir  des  troupes  françai- 
ses sur  différens  points  de  son  royaume , 
jusqu'à  ce  que  les  Anglais  eussent  éva- 
cué l'Egypte.  Lors  du  renouvellement 
de  la  guerre  avec  l'Angleterre  en  1803 , 
Buonaparte  augmenta  sous  un  autre  pré- 
texte ,  le  nombre  des  troupes  qu'il  avait 
déjà  dans  le  royaume  de  Naples.  En  1806, 
Ferdinand  s'engagea ,  par  un  traité  avec 
la  France,  à  garder  la  neutralité  avec 
l'Angleterre  et  avec  les  autres  puissances 
belligérantes  :  le  roi  de  Naples  ne  fut 
point  fidèle  à  sa  promesse  ;  il  reçut  dans 
ses  Etats  12,000  russes  et  anglais.  Mais 
Buonaparte  gagna  la  bataille  d'Auslerlitz  : 
les  Russes  abandonnent  Naples  :  l'empc- 


a(;8  FER 

icur  des  Français  proclame  la  tléchéaûce 
de  Ferdinand  IV  et  l'élévalion  de  Joseph 
au  trône  de  ce' prince  (ISOO).  Ferdinand 
délaissé  de  l'Aulricbe  et  de  tous  ses  alliés, 
retourna  en  Sicile.  Joseph  s'établit  dans 
sa  capitale;  maisbienlôt(l808),  il  échan- 
ge celte  couronne  contre  celle  d'Espa- 
{jne,  et  Joachim  Murât  devient  roi  de 
Naples.  A  Palerme,  la  division  régnait 
entre  la  reine  et  les  Anglais.  Ceux-ci 
voulaient  dominer  ;  ils  étaient  appuyés 
])ar  Acton  qui ,  sans  être  ministre  ,  avait 
repris  son  ancienne  influence.  Deux  par- 
tis se  formaient  :  le  peuple  fut  pour  la 
reine ,  et  de  nouvelles  Vêpres  sicilien- 
nes se  préparaient  :  peut-être  auraient- 
elles  eu  lieu,  si  les  Anglais,  avertis  du 
danger  qu'ils  couraient ,  n'eussent  aug- 
menté leurs  forces.  Ce  fut  vers  cette 
l'poqne  que  mourut  Acton  (1808).  Dans 
le  même  temps ,  le  duc  d'Orléans ,  ac- 
tuellement Louis-Philippe  ,  épousa  la 
princesse  Marie-Amélie,  fille  du  roi  de 
Sicile  (26  novembre  1809).  Enfin  ce  fut 
encore  alors  que  Ferdinand ,  fatigué  des 
divisions  qui  agitaient  sa  cour,  abandon- 
}idi  le  gouvernement  à  son  fils,  et  lui  don- 
na le  titre  de  vicaire-général.  Tous  ces 
divers  événemens  n'avaient  pas  distrait 
la  reine  de  ses  projets  de  domination  : 
elle  voulait  à  toute  force  chasser  les  An- 
glais dont  elle  portait  péniblement  le 
joiig.  Ceux-ci  informés  de  ses  desseins, 
voulurent  en  empêcher  l'exécution ,  et 
le  plus  sûr  moyen  qu'ils  trouvèrent,  fut 
d'éloigner  la  reine  de  la  Sicile ,  et  ils  la 
forcèrent  de  quitter  cette  île  dans  la  sai- 
son la  plus  rigoureuse.  Dès  lors  Ferdi- 
nand ,  se  trouva  placé  sous  la  tutelle  du 
général  ang!ais  Eenlinck  qui  l'obligea  à 
donner  uke  constitution  à  ce  qui  lui  res- 
tait de  sujets  :  le  prince  fut  abreuvé  de 
tant  d'amertumes  qu'il  prit  le  parti  de  se 
retirer  dans  une  dç  ses  maisons  de  plai- 
sance. La  chute  de  Buonaparle  en  1814 
ne  priva  pas  encore  Murât  d'un  trône 
usurpé  :  l'Autriche  le  lui  avait  garanti 
pour  le  détacher  de  son  beau-frère  :  mais 
en  1815,  s'étant  déclaré  pour  lui,  il  fut 
)>attu ,  chassé  du  royaume ,  et  comme  il  y 
reparut ,  il  fut  peu  de  temps  après  fusillé 
i\<>yez  Mubat).  Alors  Ferdinand  revint  à 


FEU 

Naples  après  dix  ans  d'absence  (15  mal 
1815)  :  sa  rentrée  dans  son  royaume  fut 
signalée  par  quelques  exécutions,  surtout 
à  l'occasion  d'une  conjuration  tramée 
contre  le  roi  par  d'anciens  jacobins  unis 
à  des  partisans  de  Murât  :  Louis  de  Médi- 
cis  était  alors  premier  ministre.  Ferdi- 
nand ,  veuf  de  Marie-Caroline  depuis  le 
8  septembre  1814,  épousa  en  1 8 1 G  M»*  de 
Migliaccio,  duchesse  de  Floridia;  il  donna 
sa  petite-fille,  la  princesse  Caroline-Fer- 
dinande-Louise ,  an  duc  de  Bcrry(1816). 
Le  royaume  de  Naples  était  tranquille , 
lorsqu'en  juillet  1820  ,  éclata  une  révo- 
lution dont  la  cau.se ,  selon  les  uns ,  était 
l'augmentation  de  l'impôt,  suivant  les 
autres,  l'esprit  libéral  conservé  par  les 
Carbonari.  Louis  Menichini,  prêtre  de 
Noia,  et  un  lieutenant  au  régiment  de 
Bourbon  (cavalerie) ,  se  mettent  à  la  tête 
d'un  escadron  qui  crie  vive  la  Constitu- 
tion, et  se  dirigent  sur  Avellino  :  les  ha- 
bitans  du  pays  ,  la  milice  organisée  et 
les  soldats  du  général  Pépé  envoyé»  pour 
les  arrêter,  se  réunissent  à  eux  et  deman- 
dent la  constitution  des  Cortès.  Le  roi 
promet  de  l'accorder  huit  jours  après  r 
les  insurgés  trouvant  le  terme  trop  long 
la  veulent  sur-le-champ  :  alors  Ferdinand 
remet  les  rênes  du  gouvernement  entre 
les  mains  de  son  fils  avec  le  titre  de  vi- 
caire-général et  tous  les  droits  de  Valter 
ego.  Alors  Pépé  entra  à  Naples  le  9  ;  et 
le  12  le  roi  et  la  famille  royale  jurèrent 
la  Constitution.  Ce  gouvernement  nou- 
veau fut  signalé  à  Naples  par  des  scènes 
sanglantes  (14  juillet),  et  au  dehors  par 
une  agitation  qui ,  dans  certaines  locali- 
tés, devint  une  véritable  anarchie.  Le  con^ 
grès  de  Laybach  fut  réuni  pour  arranger 
les  afi"aires  d'Italie  ;  invité  à  y  venir ,  le 
roi  de  Naples  partit  (le  IG  décembre) 
pour  cette  assemblée  des  souverains  qui 
désapprouvèrent  les  innovations  introdui- 
tes dans  son  royaume.  L'occupation  mi- 
litaire du  midi  de  l'Italie  fut  décidée,  et 
bientôt  une  armée  autrichienne,  mise 
sous  les  ordres  de  Ferdinand  lui-même, 
attaqua  les  troupes  des  constitutionnels, 
les  battit  dans  une  première  rencontre  , 
et  les  mit  en  déroute  dans  la  deuxième. 
Lg  roi  rentra  dans  sa  capitale  le  2i  mars 


<9 


FER 

1821  :  les  troupes  auxiliaires  sëjournô- 
tent  quelques  mois  dans  ce  royaume , 
qui  recommençait  à  jouir  de  la  tran- 
quillité, lorsque  le  4  janvier  1826  Ferdi- 
nand fut  frappé  d'apoplexie,  et  mourut  à 
l'âge  de  74  ans.  Que  dirons-nous  du  ca- 
ractère faible  de  ce  prince  :  il  fut  gou- 
verné toute  sa  \ie  ;  jamais  il  ne  fut  roi. 
Mais  il  était  bon,  bienfaisant,  charitable; 
il  aimait  son  peuple  :  toujours  il  fut  mal 
entouré  ,  depuis  son  précepteur  jusqu'à 
son  épouse  et  ses  ministres.  Jorani ,  écri- 
vain italien,  qui  a  traité  avec  peu  de 
ménagement  les  souverains  de  l'Italie, 
parle  avec  admiration  des  vertus  de  Fer- 
dinand. Parmi  les  actes  remarquables 
de  ce  prince  ,  on  doit  citer  l'organisation 
qu'il  donna  à  un  petit  village  qu'il  avait 
fondé  près  du  château  de  Caserla  ,  pour 
y  établir  une  manufacture  de  soierie  :  à 
cet  effet,  il  fit  un  recueil  de  lois  qui  est 
intitulé  :  Origine  délia  popolazione  di 
S.-Leucio ,  colle  leggi  correspondcnii  : 
Naples,  1780,  in-8  ,  ouvrage  traduit 
dans  toutes  les  langues.  De  nombreux 
écrits  ont  été  faits  à  la  louange  de 
Ferdinand  :  nous  citerons  JDelle  lodi 
di  Ferdinando,  etc.  P.  F.  M.  Avelino, 
Naples  1825,  in-4  ;  Per  le  solejvii  Esse- 
quie  di  Ferdinando,  etc.,  par  Emm.- 
Taddei,  etc.,  2«  édit.  ibid.,  1825. 

FERDINAND-ALVAREZ ,  duc  d'Al- 
be.  Voyez  Tolède. 

GRANDS-DUCS  DE  TOSCANE. 

FERDINAND  I,  grand-duc  de  Tos- 
cane, succéda  à  son  frère  François  ,  mort 
en  1587.  Il  gouverna  son  petit  état  avec 
une  sagesse  qui  le  fit  aimer  de  ses  sujets 
et  estimer  de  tous  les  princes  dé  l'Eu- 
rope. Il  prêta  généreusement  à  Henri  IV 
de  l'argent  pour  se  soutenir  contre  la  Li- 
gue. Ferdinand  mourut  en  1G09  ,  regardé 
comme  un  bon  politique.  Il  avait  renvoyé 
le  chapeau  de  cardinal  pour  être  grand  - 
duc. 

FERDINAND  II,  grand  duc  de  Tos- 
cane ,  successeur  de  Cosme  II,  ne  se  fit 
pas  moins  estimer  par  sa  prudence  que 
Ferdinand  I.  Il  sut  garder  une  exacte  neu- 
tralité dans  les  guerres  survenues  entre 
la  France  et  l'Espagne.  Comme  la  paix 


FER  269 

dont  il  faisait  jouir  ses  sujets  augmentait 
ses  revenus,  il  en  fit  un  noble  usage  en 
défendant  l'Italie,  et  en  secourant  les  Vé- 
nitiens dans  la  guerre  de  Candie.  Il  mou- 
rut en  1G98  ,  et  gouvernait  l'état  de  Tos- 
cane depuis  1 G20.  En  examinant  l'histoire 
de  ce  prince  et  des  autres  Médicis ,  on  voit 
que  ce  n'est  pas  la  guerre  qui  soutient 
et  fait  prospérer  les  états.  Ils  ont  presque 
tout  obtenu  d'une  sage  politique  :  qua- 
lité plus  estimable  que  tous  les  talens  mi- 
litaires 

*  FERDINAND  (grand-duc  de  Parme), 
infant  d'Espagne  ,  frère  de  Charles  IV , 
naquit  le  21  juin  1751  ,  et  fut  élevé  par 
Condillac.  Devenu  en  1765  maître  des 
duchés  de  Parme  ,  Plaisance  et  Guastalla  , 
il  épousa  le  27  juin  17G9  Marie-Amélie- 
Anloinetle  d'Autriche  ,  sœur  de  l'empe- 
reur régnant.  Pendant  la  révolution  fran- 
çaise ,  il  voulut  s'opposer  à  la  marche  des 
soldats  républicains,  obtint  d'abord  sur 
eux  quelques  avantages  et  fut  fait  ensuite 
prisonnier.  Privé  de  ses  états ,  il  les  re- 
couvra par  suite  des  conventions  qu'il 
conclut  avec  le  général  Buonaparte.  Mais 
à  sa  mort  arrivée  en  1 802 ,  ses  duchés 
furent  réunis  à  l'empire  français.  A  la 
chute  de  Buonaparte  ils  devinrent  l'apa- 
nage de  son  épouse  Marie-Louise ,  an- 
cienne impératrice. 

FERDINAND  de  Cordoue,  célèbre  es- 
pagnol du  1 5"  siècle,  passait  pour  un  pro- 
dige de  scieuceen  son  temps,  et  n'en  se- 
rait pas  un  dans  le  nôtre,  comme  les  sa- 
vans  du  nôtre  n'en  seraient  pas  un  dans 
le  sien.  (  A  dix  ans  il  avait  terminé  ses 
cours  de  latinité  et  de  rhétorique  :  à  25, 
il  était  docteur  dans  toutes  les  facultés  ; 
il  possédait  à  fond  plusieurs  langues,  le 
latin,  le  grec,  l'hébreu,  l'arabe;  il  con- 
naissait les  mathématiques,  la  médecine, 
la  théologie  ,  etc.)  Il  po.ssédaitlesscolas- 
tiques,  Scot,  Alexandre  de  Halès,  Aristote; 
ce  ne  serait  pas  un  sujet  d'éioge  à  pré- 
sent ;  comme  on  eût  été  alors  très  peu  de 
chose  avec  nos  encyclopédies  et  nos  pe- 
tits romans.  (  Sa  mémoire  était  si  grande 
qu'il  répétait  quatre  i>ages  de  Cicéron 
après  les  avoir  lues  une  fois).  Ce  qu'il  y 
eut  de  singulie»  dans  Ferdinand ,  c'est 
qu'outre  ses  vastes  connaissances,  il  pei- 


ano  FER 

giiait,  chantait,  dansait,  jouait  des  instru- 
inens  aussi  bien  qu'aucun  homme  de  son 
temps.  La  réunion  de  tant  de  talens  le  fit 
regarder  par  quelques-uns  de  ses  contem- 
porains, comme  sorcier.  On  prétend  qu'il 
annonça  la  mort  de  Charles  le  Téméraire, 
duc  de  Bourgogne.  On  ajoute  que  les  sa- 
vans  de  Paris  l'admirèrent  beaucoup  en 
14^5.  On  lui  attribue  un  traité  :  Dearti- 
ficio  omnis  scibilis,  et  des  Commentaires 
sur  l Almageste  de  Ptole'me'e ,  et  sur  une 
grande  partie  de  la  Bible.  (Il  servit  avec 
distinction  dans  les  guerres  contre  les 
Maures ,  sous  Jean  il  de  Castille ,  et  fut  en- 
voyé à  Rome  en  1469  auprès  du  pape 
Alexandre  VI,  qui  l'accaeillit  avec  les  plus 
grands  honneurs.  Il  obtint  une  pension 
de  la  reine  Isabelle  de  Castille,  et  mourut 
vers  l'an  1480.) 

FERDINAND  LOPEZ  de  Castaneda, 
portugais,  accompagna  son  père  dans  les 
Indes,  où  il  allait  en  qualité  déjuge  royal. 
A  son  retour,  il  publia  VHistoire  de  son 
voyage.  Elle  a  été  traduite  en  français  par 
Nicolas  de  Grouchi,  Paris,  1554,  in-4,  en 
italien  et  en  anglais.  Nous  ignorons  les 
années  de  sa  naissance  et  de  sa  mort.  Il 
florissait  au  1 6®  siècle. 

FERDINAND  (Charles),  natif  de  Bru- 
ges, poète,  musicien,  philosophe  et  ora- 
teur, quoique  aveugle  dès  l'enfance,  pro- 
fessa les  belles-lettres  à  Paris.  Le  pape 
Innocent  VIII ,  informé  de  la  sainteté  de 
sa  vie  et  de  son  savoir ,  lui  permit  de 
prendre  l'ordre  de  diacre,  en  vertu  du- 
quel il  exerça  le  ministère  de  la  prédica- 
tion avec  beaucoup  de  zèle  et  d'éloquence. 
Il  mourut  l'an  1496,  bénédictin  dans  le 
monastère  de  Chézal-Benoît ,  à  12  lieues 
de  Bourges.  Il  a  laissé  quelques  ouvrages, 
entre  autres  1°  De  tranquillitate  animi, 
Paris,  1512,  qualité  bien  nécessaire  à  un 
aveugle,  et  qui  ne  l'est  guère  moins  à 
ceux  qui  voient  clair.  2"  Monasticorum 
confabulaiioniim  libri  quatuor,  Paris, 
Ï515.  On  lui  attribue  assez  généralement 
Spéculum  monasticœ  disciplinée ,  Pai'is , 
1515,  in-folio. 

FERDINAND  (  Jean  ),  jésuite  de  To- 

Jcde,  mort  à  Palencia  en  1595,  à  59  ans, 

est  auteur  d'un  ouvrage  intitulé  Divina- 

fum  Scripturarum  Thésaurus,  in- fol., 


FER 

1594.  C'est  une  explication  des  passager 
difficiles  de  l'Ecriture-Sainte  par  ordre 
alphabétique.  Il  devait  en  donner  dcui 
autres  vol.  — Il  ne  faut  pas  le  confondre 
avec  Jean  Ferdinand,  dominicain  arrago- 
nais,  qui  a  donné  3  ans  avant  sa  mort,  arri- 
vée en  1625,  un  Commentaire  surVEcclc- 
siaste,k  Rome,  in-fol.  Il  y  prouve  la  con- 
formité de  la  Vulgate  avec  le  texte  hébreu. 

FERDINANDI  (Epiphane),  médecin 
célèbre,  né  à  Messagna  dans  la  terre  d'O- 
trante  le  2  novembre  1569,  professa  la 
poétique ,  la  géométrie  et  la  philosophie 
dans  sa  patrie.  Il  mourut  en  1638,  après 
avoir  publié  quelques  ouvrages.  Le  meil- 
leur est  celui  qui  a  pour  titre,  Observa- 
tiones  et  Casus  Medici,  à  Venise,  in-foK, 
1621.  Ce  livre  a  été  réimprimé  plusieurs 
fois  en  Allemagne  et  en  Hollande.  On  a 
encore  de  lui  1°  Theoremata  Medica^ 
Venise,  1611,  in-fol.  2°  De  vita  propor- 
ganda,  Naples,  1612,  in-4.  3°  De  Peste ^ 
Naples,  1631,  in-4.  Ferdinandi  était  un 
vrai  philosophe  :  il  savait  élever  son  âme 
au  dessus  des  disgrâces.  Un  jour,  pendant 
qu'il  expliquait  Hippocrate ,  on  vint  lui 
annoncer  la  mort  d'un  de  ses  fils ,  jeune 
homme  de  20  ans,  qui  donnait  des  espé- 
rances :  il  se  contenta  de  répondre  comme 
Job  :  Dieu  me  l'avait  donné.  Dieu  me 
l'a  ôté.  Un  de  ses  amis  tâchait  de  le  con- 
soler sur  la  mort  de  sa  femme  qu'il  aimait 
tendrement  :  Je  serais,  lui  répondit-il, 
indigne  du  nom  de  philosophe  ,  si  dans 
de  tels  malheurs  je  ne  savais  pas  me 
consoler  moi-même.  Le  premier  trait 
peint  mieux  le  sage  et  le  chrétien  ;  le  se- 
cond parut  se  ressentir  un  peu  de  l'é- 
goïsme  qui  fait  le  caractère  des  philoso- 
phes profanes  ;  mais  sans  doute  qu'il 
parlait  de  cette  philosophie  qui  suppose 
et  comprend  les  motifs  religieux  qui  seuls 
donnent  une  consolation  solide.  (  On 
trouve  dans  les  f^ite  de'  letteratiSalen- 
tini  de  Dominique  de  Angelis  une  notice 
biographique  sur  Ferdinandi ,  que  Ni- 
céron  a  bien  analysée ,  tom.  21  de  ses 
mémoires.  ) 

FERDOUCY  (Aboul  Cacen  Manssour), 
le  plus  célèbre  des  poètes  persans ,  né  à 
Rizvàn  dans  le  Khoraçân  l'an  de  l'hégire 
304  (de  J.  C.  916),  répara  l'obscurité  de 


FER 

sn  naissance  par  la  beauté  de  son  génie. 
Disciple  d'Assedi,  il  surpassa  de  beaucoup 
son  maître ,  et  se  fit  admirer  de  tout  le 
Levant.  On  a  de  lui  V Histoire  des  Rois, 
ou  ChâhNamch  en  120,000  vers  :  il 
célèbre  dans  cet  ouvrage  les  anciens  sou- 
verains de  Perse.  Ce  poème  fut,  dit-on, 
si  goûté  du  prince  sous  lequel  vivait  Fer- 
dousi ,  qu'il  donna  à  l'auteur  une  pièce 
d'or  pour  chaque  distique  ,  et  l'ouvrage 
<5tait  composé  de  soixante  mille  distiques. 
Il  mourut  l'an  1020  de  J.  C.  ou  411  de 
l'hégire. 

FERG  (François  de  Paule),  célèbre 
peintre  de  paj  sages  ,  né  à  Yienne  en  Au- 
triche, en  1C89.  Son  goût  pour  les  voya- 
ges, et  un  mariage  imprudent  qu'il  fit,  le 
réduisirent  à  la  misère.  On  dit,  qu'il  fut 
trouvé  sur  sa  porte  ,  mort  de  froid  et  de 
besoin,  n'étant  âgé  que  de  51  ans. 

FERGESON  (Jacques),  né  dans  le 
comté  de  Bamf ,  province  de  Bucban  en 
Ecosse,  en  1 7 1 0,  inventa  la  roue  astrono- 
mique, espèce  d'astrolabe  utile  pour  ob- 
.server  les  éclipses  de  lune.  Il  se  rendit 
ensuite  à  Londres,  et  il  y  décrivit  la  ligne 
du  mouvement  de  la  lune,  que  la  société 
royale  avait  proposée  :  la  solution  de  ce 
problème  lui  valut  l'entrée  dans  cette  so- 
ciété et  une  pension  de  60  liv.  sterlings. 
Il  mourut  le  IG  novembre  17  76.  Ses  ou- 
vrages sont  1°  Traite'  de  Mécanique , 
1770.  2°  Introduction  à  l'Electricité', 
1772.  3°  Introduction  à  l'Astronomie. 
4°  L' Astronomie  expliquée  selon  les  prin- 
cipes de  Newton,  17  70.  7«  édit.  1785. 
6°  Leçons  sur  des  sujets  choisis  de  Mé- 
canique, Hydrostatique,  Hydraulique, 
Pneumatique  et  Optique,  5*  édit.,  1776, 
réimprimées  à  Edimbourg,  en  1805, 
2  volumes  in-8,  avec  des  corrections  et 
des  additions  considérables.  6°  Traité  de 
perspective ,  1775.  Ces  ouvrages  ont  un 
grand  cours  en  Angleterre  :  il  y  a  cepen- 
dant des  idées  hypothétiques  mêlées  avec 
les  démonstrations  et  les  faits,  ce  qui 
éloigne  souvent  la  certitude  et  la  solidité 
du  résultat. 

*FERGUSON  (William),  peintreécos- 
sais,  mort  vers  1690,  excellait  à  peindre 
les  oiseaux  morts  ou  vivans. 

•FERGtJSO.N(Adam),  célèbre  écrivain 


FER  27  ï 

écossais,  naquit  en  1724  à  Logierait,  près 
de  Perth.  (Doué  des  plus  heureuses  dispo- 
sitions, il  fut  reçu  en  1 7  39  à  l'université  de 
Saint-André,  et  passa  ensuite  à  celle  d'E- 
dimbourg par  une  faveur  qui  ne  fut  ac- 
cordée qu'à  son  mérite).  Il  devint  d'abord 
chapelain  d'un  régiment  de  montagnards 
écossais  jusqu'à  la  paix  d'Aix-la-Chapelle 
en  1748,  ensuite  professeur  de  philoso- 
phie naturelle  et  de  philosophie  morale 
à  Edimbourg.  Vers  17  7  3,  il  accompagna, 
en  qualité  de  gouverneur  le  jeune  comte 
de  Chesterfield  dans  ses  voyages  sur  le 
continent;  et,  en  1778,  il  fut  nommé  se- 
crétaire de  la  commission  chargée  d'aller 
proposer  des  arrangemens  pacifiques  aux 
Américains.  Il  est  mort  le  22  février  1816. 
On  a  de  lui,  1  "  Essai  sur  la  société  ci- 
vile, 1767,  in-4.  et in-8.;  ouvrage  pro- 
fond ,  qui  commença  sa  réputation  et  fut 
traduit  en  allemand,  en  français  et  en 
suédois.  2°  Institutions  de  philosophie 
morale,  1769,  in-8;  c'est  la  substance  de 
ses  leçons  à  l'Université;  elles  ont  été 
réimprimées  en  1 800  à  Mayence,  à  Franc- 
fort, à  Bdle,  et  traduites  en  allemand  par 
Gave,  et  en  français  par  Reverdit.  3°  His  • 
toire  des  progrès  et  de  la  chute  de  la  ré- 
publique romaine,  1782,  3  vol.  in-4, 
réimprimée  à  Edimbourg  en  1799,  avec 
des  corrections  importantes,  et  à  Londres 
en  1805,  5  vol.  in-8.  Cet  ouvrage,  un  des 
plus  profonds  qui  ait  paru  en  Angleterre 
sur  cette  matière,  a  été  traduit  en  ita- 
lien ,  en  allemand  et  en  français.  Cette 
dernière  traduction  a  été  donnée  par 
M.  Desmeunier,  7  vol.  in-8  etin-12.  Fer- 
guson  s'était  proposé  de  faire,  pour  la 
république,  ce  que  Gibbon  avait  fait  pour 
l'empire  romain.  Considérant  son  sujet 
en  philosophe,  il  néglige  les  petits  détails 
pour  traiter  à  fond  les  grands  événemens, 
et  développe  l'influence  qu'ils  ont  pu 
avoir  .sur  la  constitution  de  l'état.  Son 
stile  est  noble  et  élégant,  quoique  un  peu 
diffus ,  et  quelquefois  même  obscur,  par 
la  longueur  de  ses  périodes.  4°  Principes 
des  sciences  morales  et  politiques,  17  99 
2  vol.  in-4.  C'est  une  analyse  de  ses  le- 
çons, qui  avaient  eu  beaucoup  de  succès 
par  leur  mérite  propre,  et  par  la  grâce 
que  leur  prêtait  son  éloculion.  Piclet  eu 


«a  donné  d'amples  extraits  dans  la  Biblio- 
thèque britannique. 

*  FERINO  (Pierre-Marié-Barthélemi), 
major  d'un  régiment  autrichien,  né  en 
Piémont,  en  17  47,  lit  ses  premières  armes 
en  Autriche  dans  un  régiment  d'infante- 
rie, et  prit  ensuite  du  service  en  France  au 
commencement  de  la  révolution.  Nommé 
général  de  brigade,  il  se  distingua  à  l'ar- 
mée du  Rhin ,  dans  les  campagnes  de 
1794  et  1795.  Bientôt  il  mérita  par  sa 
bravoure,  le  grade  de  général  de  division. 
La  reprise  des  lignes  de  Weissembourg  et 
le  déblocus  de  Landau  furent  une  preuve 
de  ses  connaissances  dans  l'art  de  la 
guerre.  En  1796,  il  effectua,  avec  Desaix, 
le  passage  du  Rhin  à  Kehl,  et  prit  part  à 
toutes  les  opérations  de  cette  campagne. 
Il  faisait  partie  de  l'armée  de  Moreau  qui 
s'illustra  par  sa  belle  retraite,  défendit  le 
pont  d'Huningue  en  1797  de  la  manière 
la  plus  brillante,  et  continua  à  se  couvrir 
de  gloire  dans  toutes  les  occasions  où  il 
combattit.  En  1805,  il  fut  nommé  mem- 
bre Sénat  du  conservateur;  il  obtint  en- 
suite la  Sénatorerie  de  Florence ,  et  fut 
pourvu  en  1807  du  gouvernement  de  la 
ville  et  des  ports  d'Anvers  ;  enfin  il  revint 
siéger  au  Sénat,  et  vota  le  l^""  avril  1814  la 
déchéance  de  Buonaparte.  Le  roi  lui  ac- 
corda la  croix  de  Saint  Louis,  et  des  lettres 
de  naturalisation  :  il  est  mort  le  28  juin 
1816. 

FERTOL.  Foyez  Pont-de-Vesle. 

*  FERLET  (L'abbé  Edme),  naquit  à 
Kancy ,  et  étudia  dans  cette  université , 
cil  il  devint  professeur  de  belles-lettres. 
S'étant  rendu  à  Paris,  il  obtint  un  cano- 
nicat  dans  l'église  de  Saint-Louis  du  Lou- 
vre, et  devint  dans  la  suite  secrétaire  en 

'  second  de  l'archevêché  de  Paris.  La  révo- 
lution lui  fit  perdre  cette  place,  et  il  res- 
ta ignoré  jusqu'à  l'époque  du  concordat, 
en  1801,  qu'il  fut  réinstallé  comme  secré- 
taire. H  est  mort  à  Paris  le  24  novembre 
1821,  âgé  d'environ  70  ans.  On  a  de  lui 
1  °  Sur  le  bien  et  le  mal  que  le  commerce 
des  femmes  a  fait  à  la  littérature.  Cet  ou- 
vrage, couronné  par  l'académie  de  Nancy 
en  1772,  a  été  imprimé  à  la  suite  d'un 
discours  que  prononça  M.  de  Solignac 
«u  nom  de  l'acadéniie.  2°  De  l'abus  de 


FER 

la  philosophie  par  rapport  a  la  litte'rO' 
<ure,  1773,  in-8  ;  3"  Éloge  de  M.  le  chc 
valier  de  Solignac  secrétaire  du  cabi- 
net du  feu  roi  de  Pologne,  Londres  et  Pa- 
ris, 1774,  in-8;  4°  Oraison  funèbre  de 
AI.  de  Beaumont,  archevêque  de  Paris  ^ 
1784,  in-8  ;  4"  Observations  lilte'raires , 
critiques, politiques,  geographiques,etc., 
sur  les  histoires  de  Tacite ,  avec  le  texte 
latin,  1801,  2  vol.  in-8;  Q"  Be'ponse  à  un 
écrit  anonyme  intitulé  :  Avis  aux  lec" 
leurs  sans  partialité,  1801,  in-8.  Cet 
Avis  était  une  critique  de  ses  Observa- 
tions,  à  laquelle  Ferlet  répondit  victo- 
rieusement. 

FER  JEUX.  Voyez  Ferréol. 

*  FERLONI  (Séverin-Antoine),  savant 
ecclésiastique,  né  dans  l'état  de  l'Eglise, 
en  1740,  fut  regardé  comme  un  des  plus 
célèbres  prédicateurs  de  son  siècle.  Ses 
succès  dans  la  chaire  lui  méritèrent  la 
dignité  de  grand  prince  de  l'ordre  Con- 
stantinicn.  Il  s'occupa  alors  de  V Histoire 
des  variations  de  la  discipline  de  l'E- 
glise, qui  pouvait  former,  dit<on,  30  vol., 
et  qu'il  était  sur  le  point  de  terminer  lors- 
que l'irruption  des  armées  françaises 
dans  Rome  en  17  98,  y  donna  naissance 
au  gouvernement  républicain.  Ses  papiers 
furent  brûlés  ou  enlevés,  et  il  perdit  en 
un  instant  le  fruit  de  30  années  de  tra- 
vail. Réduit  presque  à  la  misère  par  la 
perte  de  sesdignilés,  et  manquant  de  cette 
fermeté  de  caractère  qui  tient  l'homme 
vertueux  au  dessus  des  plus  extrêmes  dis- 
grâces, il  vendit  sa  plume  à  ceux  même 
qui  avaient  causé  sa  ruine.  Il  composa  suc- 
cessivement plusieurs  Homélies  en  faveur 
de  Buonaparte  :  son  discours  sur  la  con- 
scription militaire  fut  très  utile  au  gouver- 
nement français.  De  tels  services  lui  valu- 
rent la  place  de  théologien  du  Conseil  par- 
ticulier du  Vice- Roi  à  Milan.  Cefulluiqul 
composa  par  ordre  de  la  cour  ces  adresses 
véhémentes  que  l'on  fit  souscrire  par  quel- 
ques évcques  et  quelques  chapitres  d'Ita- 
lie, et  qui  furent  publiées  avec  ostenta- 
tion à  Milan  et  à  Paris.  Le  complaisant^ 
Ferloni  composa  aussi  un  Traité  de  Vau- 
torité de  l' Eglise,  en  3  vol.  oii  il  soute- 
nait les  principes  que  le  gouvernement 
français  voulait  faire  prévaloir  ;  mais  le 


FER 

censeurs  ayant  courageusement  refusé 
leur  approbation,  le  livre  ne  parut  point, 
et  les  évcnemens  de  1 8 1 4  l'ont  condamne 
à  un  éternel  oiiLli.  Ferloni  mourut  à  Mi- 
lan ,  le  23  octobre  1813,  sans  avoir  joui 
du  fruit  d'une  conduite  si  méprisable  ;  le 
peu  de  secours  pécuniaires  qu'il  recevait 
du  gouvernement,  suffisait  à  peine  pour 
le  faire  subsister. 

FERMAT  (Pierre),  conseiller  au  par- 
lement de  Toulouse,  naquit  en  1595,  et 
mourut  en  1665.  Il  cultiva  la  jurispru- 
dence, la  poésie,  les  mathématiques.  Des- 
cartes, Pascal,  Roberval,  Huygens  etCar- 
cavi  furent  liés  avec  lui.  On  a  de  Fermât 
des  Observations  sur  Diophante,  et  plu- 
sieurs Lettres  dans  le  recueil  de  celles  de 
Descartés.  Ses  ouvrages  furent  publiés  à 
Toulouse  en  1679,  sous  le  titre  à' Opéra 
Mathemalica ,  en  2  vol.  in-fol.  La  géo- 
métrie lui  a  presque  autant  d'obligations 
qu'à  Descartes ,  quoiqu'il  soit  beaucoup 
moins  célèbre.  Sa  sagesse  a  nui  à  sa  ré-- 
putation  ;  il  apprécia  si  bien  la  frivolité 
d'un  grand  nom,  qu'il  évita  de  s'en  faire 
un.  Il  fut  non-seulement  le  restaurateur 
de  la  géométrie  ancienne,  mais  le  pré- 
curseur de  la  moderne.  C'était  d'ailleurs 
un  magistrat  aussi  intègre  que  éclairé. 

*  EERMIN  (Philippe),  médecin  et 
voyageur,  né  au  commencement  du  18* 
siècle  à  Maestricht ,  où  il  devint  membre 
de  la  magistrature  municipale  de  cette 
ville,  passa  en  1774  à  Surinam  où  il  ré- 
sida près  de  10  ans,  recueillit  un  grand 
nombre  d'observations  sur  les  objets  les 
plus  curieux  de  cette  colonie.  A  son  re- 
tour, il  publia  1"  Histoire  naturelle  delà 
Hollande  équinoxiale  ou  de  Surinam , 
Amsterdam,  1765,  in-8,ouvragequifut  vi- 
vement critiqué  et  qu'il  fit  réimprimer , 
en  1769,  sous  ce  titre  :  Description  géné- 
rale ,  historique  ,  ge'ographiquc  et  phy- 
sique de  la  Colonie  de  Surinam.  2  vol. 
in-8.  Les  additions  considérables  qu'il  a 
faites  à  cette  édition  ont  rendu  ce  livre 
l'un  des  meilleurs  que  nous  ayons  sur  les 
colonies.  2°  Tableau  historique  et  poli- 
tique de  Vétat  ancien  et  actuel  de  la  co- 
lonie de  Surinam ,  et  des  causes  de  sa 
décadence,  Maestricht,  1778,  in-8.  Ce 
Tab'.eau  a  été  traduit  en  allemand ,  avec 

V. 


quelques  augmentations,  et  péW  servir 
de  suite  ou  de  supplément  à  sa  descrip- 
tion qu'il  rectifie  en  plusieurs  endroits. 
3°  Traite' des  maladies  les  plus  fréquentes 
a  Surinam,  avec  une  dissertation  sur  le 
fameux  crapaud  de  Surinam  nommé 
Pipa,  Maestricht,  1764,  in-8,  et  Amster- 
dam, 1765. 

*  FERNAN-NUPJÈS  (le  duc  de), 
grand  d'Espagne ,  naquit  à  Madrid  en 
1 7  7  8,  et  entra  de  bonne  heure  à  la  cour  où 
il  se  distingua  par  ses  lumières  et  par  sa 
franchise.  Dévoué  à  la  cause  royale,  il  fut 
un  de  ceux  qui  en  1807  se  prononcèrent 
le  plus  fortement  contre  l'emprisonne- 
Inent  de  Ferdinand  ;  et  lorsque  ce  prince 
eut  recouvré  la  liberté,  il  prit  hautement 
son  parti.  Il  fit  tous  ses  efforts  pour  l'en- 
gager à  ne  point  faire  le  voyage  de  Bayon- 
ne,  et,  quand  il  le  vit  décidé  à  l'entrepren- 
dre ,  il  voulut  du  moins  l'accompagner. 
Le  parti  de  don  Manuel  Godoï  prince  de 
la  Paix .  ayant  prévalu  sur  celui  du  prince 
des  Asturies ,  Fernan-Nunès  était  sur  le 
point  de  se  retirer ,  lorsque  Buonaparle , 
qui  voulait  se  l'attirer,  le  nomma  grand- 
veneur.  Fernan  accepta  malgré  lui  cet, 
emploi  ;  car ,  secrètement  attaché  à  ses 
anciens  maîtres  ,  il  arma  ses  vassaux  et 
soudoya  un  grand  nombre  d'insurgés  dans 
la  Castille.  Proscrit  par  les  ordres  de  Buo- 
naparle ,  il  se  retira  dans  ses  terres,  où  il 
travailla  d'Une  manière  plus  efficace  en- 
core en  faveur  des  ennemis  de  la  France. 
Pour  prendre  une  part  plus  active  à  la 
défense  commune  ,  il  servit  dans  les  trou- 
pes des  Cortès.  Lorsque  Ferdinand  fut  de 
retour  dans  sa  capitale,  il  fut  un  des 
premiers  à  se  présenter  devant  son  roi  ; 
il  fut  aussi  l'un  des  premiers  qui  mon- 
trèrent à  ce  monarque  à  quel  danger  il 
exposait  son  pouvoir  royal  en  adoptant 
la  constitution  des  Cortès.  Pour  récom- 
penser sa  fidélité ,  Ferdinand  lui  donna 
en  1815  l'ambassade  de  Londres  d'où  il 
passa  en  1817  à  celle  de  France,  avec  le 
titre  de  duc  de  Casa  -  Fernan-  Nunès. 
Pendant  la  révolution  de  1820,  il  sus- 
pendit ses  fonctions  d'ambassadeur.  Il 
mourut  à  Paris  en  1821.  Ce  duc  était  fils 
du  comte  Fernan -Nunès  qui  avait  été 
aussi  ambassadeur  en  France,  et  qnrfut 


274  FER 

recoin ranndablc  à  la  fois  par  ses  talenset 
par  ses  vertus. 

FERiVAIND.  r.  Ferdinand  (Charles). 

'  FERNANDÈS  (  Jean  ) ,  navigatear 
portugais,  le  premier  européen  qui  ait 
pénétré  clans  l'intérieur  de  l'Afrique , 
l'an  H-iG,  resta  plusieurs  mois  prison- 
nier des  Maures  Assanhadji  dans  le  voi- 
sinage du  Rio-do-Ouro  en  1447  et  1448  , 
et  recueillit  sur  ces  peuples  nomades  des 
renseigiicmens  qui  offrent  beaucoup  d'a- 
nalogie avec  ceux  de  Mungo-Park.  Fer- 
nandès  fit  un  second  voyage  avec  Diego 
Gilhomen  envoyé  pour  conclure  un  traité 
d'alliance  avec  les  Maures  de  Meça.  Dès 
qu'on  eut  jeté  l'ancre,  il  descendit  à  terre 
pour  examiner  le  pays  au  nord  du  cap 
Nam  ;  mais  une  bourasque  ayant  poussé 
presque  aussitôt  le  bàtimen^  en  mer ,  il 
fut  laissé  sur  cette  côte  élrang"ère  :  on 
ignore  ce  que  devint  ce  hardi  navigateur. 

*FERNAjyDÈS  (Denis),  voyageur  por- 
tugais, équipa  en  1440, un  bâtiment  pour 
faire  de  nouvelles  découvertes  sur  la  côte 
d'Afrique.  Il  y  reconnut  l'embouchure  du 
Sénégal,  et  pénétra  jusqu'au  promontoire 
le  plus  occidental  d'Afrique ,  auquel  il 
donna  le  nom  de  Cnp  Fat ,  à  cause  dli 
grand  nombre  d'arbres  verdoyans  dont 
cette  pointe  de  terre  était  couverte.  Les 
brlsans  qui  entourent  ce  cap  i'alarmërent  ; 
il  n'osa  pas  aller  au  delà. 

*  FERNANDÈS  (Juan),  pilote  espa- 
gnol du  16®  siècle,  navigua  d'abord  le 
long  de  la  côte  de  l'Amérique  méridio- 
nale, arriva  près  du  Chili,  et  découvrit  en 
1 572  les  îles  qui  portent  son  nom  ;  et  deux 
ans  après ,  dans  une  autre  traversée ,  il 
trouva  les  îles  de  St. -Félix  et  de  St.-Am- 
broise  ,  situées  au  nord  des  précédentes. 
Parti  du  Chili  en  1676,  il  rencontra  une 
côte  qui  avait  toute  l'apparence  du  con- 
tinent. Comme  son  navire  était  très  petit 
et  assez  mal  équippé ,  il  ne  poussa  point 
ses  recherches,  et  parut  dans  l'intention 
ue  revenir  avec  une  expédition  plus  con- 
sidérable ;  mais  la  mort  l'empêcha  d'exé- 
cuter son  projet.  On  croit  que  c'est  la 
Nouvelle  Zélande.  Quelques  détails  sur 
l'expédition  de  Fernandès  se  trouvent 
dans  un  ouvrage  espagnol  de  Louis  Arias, 
intitulé  Mémoire  pour  recommaniier  au 


FER 

roi  la  conversion  des  naturels  des  tics 
nouvellement  découvertes ,  1 609 ,  publié 
aussi  en  anglais  par  Dalrymple  (Edim- 
bourg 1773),  qui  en  inséra  un  extrait 
dans  sa  Collection  historique  ;  Vonyiage 
intitulé  Foyage  dans  la  mer  du  Sud  par 
les  Espagnols  et  les  Hollandais ,  traduit 
par  Tréville ,  n'en  est  que  l'abrégé. 
FERNANDEZ    de    Cordoue.    Foyez 

GONSALVE. 

FERNANDEZ  (Antoine),  raquit  à 
Coïmbre  en  1 662 ,  se  fit  jésuite  ,  fut  pro- 
fesseur de  l'Ecriture  sainte  à  Evora ,  et 
se  consacra  ensuite  aux  missions  dans  les 
Indes  Orientales.  De  retour  à  Lisbonne , 
il  y  prêcha  avec  beaucoup  de  fruit,  et 
mourut ,  consumé  de  travaux ,  à  Coïmbre 
le  14  mai  1628.  On  a  de  lui  un  Commen' 
taire  sur  les  visions  de  V Ancien  Testa- 
ment,  imprimé  à  Lyon. 

*  FERNANDEZ  (  Antoine  ) ,  jésuite 
portugais  j  naquit  à  Lisbonne  en  1666. 
Envoyé  à  Goa  en  1002 ,  il  pénétra  deux 
ans  après  en  Abyssinie ,  déguisé  en  ar- 
ménien. Il  résida  trente  ans  dans  ce  pays, 
et  sut  acquérir  l'estime  et  la  protection 
de  Socinios  ou  Melec-Segned ,  qui  était 
monté  sur  le  trône  en  1 607 ,  et  avait  em- 
brassé la  religion  catholique.  Ce  prince 
chargea  Fernandez  d'une  mission  auprès 
du  roi  d'Espagne  Philippe  IV  et  du  pape 
Paul  III.  Le  courageux  jésuite  demanda 
pour  l'accompagner  Féciur-Egzy,  homme 
considéré  en  Ethiopie ,  et  rempli  de  zèle 
pour  la  religion  catholique.  Pour  éviter 
de  traverser  les  provinces  révoltées,  oîi 
ils  auraient  été  arrêtés  et  leurs  dépêches 
saisies,  ils  furent  obligés  de  prendre  la 
route  de  Naréa  ,  qui  est  la  plus  longue  , 
et  d'arriver  par  cette  voie  à  Melinde  sur 
l'Océan  des  Indes.  Fernandez  et  sa  com- 
pagnie partirent  de  Goïam  au  mois  de 
mars  1613.  Arrivés  dans  l'Alaba ,  ils  fu- 
rent arrêtés  et  rais  en  prison  par  ordre 
du  souverain  de  ce  pays ,  prince  maho- 
métan.  Il  les  aurait  fait  mourir  sans  les 
lettres  et  les  présens  du  monarque  des 
Abyssins.  Enfin  il  voulut  bien  les  mettre 
en  liberté ,  mais  à  condition  qu'ils  re- 
brousseraient chemin.  Ils  furent  donc 
obligés  de  revenir  à  Goïam  ,  .après  dix- 
huit  mois  d'un  voyage  pénible  ,  et  dans 


FER 

lequel  iJs  avaient  plusieurs  fois  risqué  de 
perdre  la  vie.  Après  Ja  mort  du  Père  Paèz, 
chef  de  la  mission  ,  il  en  remplit  quelque 
temps  les  fonctions;  mais  Fadillas,  qui 
succéda  à  Socinios,  mort  en  1632  ,  ayant 
expulsé  de  ses  états  tons  les  prêtres  ca- 
tholiques ,  le  Père  Fernandez  revint  à 
Goa,  où  il  mourut  le  12  novembre  1642. 
On  connaît  de  ce  Père,  1"  en  éthiopien  , 
un  Traité  des  erreurs  des  Ethiopiens , 
Goa,  1642,  in-4  ,  imprimé  avec  des  ca- 
ractères éthiopiens  ,  envoyés  par  Urbain 
VIII.  2°  Dans  la  même  langue  ,  une  Tra- 
duction du  Rituel  romain,  1626  ;  3"  en 
dialectique  amharique,  une  Instruction 
pour  les  confesseurs ,  avec  d'autres  ou- 
vrages ascétiques  ;  4°  Voyage  a  Gingiro , 
fait  avec  F éciur  -  E gzy  ,  ambassadeur 
envoijé  par  Vempereur  d' Etliiopic  en 
1613  ,  contenant  la  roule  ^e'nible  et  dan- 
gereuse du  voyageur ,  sa  captivité,  sa 
délivrance  ainsi  que  la  description  des 
royaumes  de  Naréa ,  de  Gingiro  et  de 
Cambate ,  avec  des  particularités  cu- 
rieuses. Ce  voyage  a  été  inséré  dans  le 
tome  2  d'un  recueil  publié  en  hollandais 
par  Vander-Aa,  1707  ,  2  vol.  in-12,  avec 
une  carte  bien  gravée  ,  mais  peu  exacte. 
Cette  relation  y  est  renfermée  en  22  pa- 
ges; elle  est  curieuse,  mais  laisse  bien 
des  choses  à  désirer.  Moréri  attribue  à 
Fernandez  un  autre  ouvrage  en  éthio- 
pien ,  intitulé  Trésor  de  la  foi ,  dans  le- 
quel il  réfute  un  écrit  dans  la  même  lan- 
gue ,  d'un  éthiopien  schismatique,  appelé 
Ras-Athanate. 

*  FERNANDEZ  (Jean-Patrice),  jésuite 
et  missionnaire  au  Paraguay ,  était  aussi 
espagnol.  Il  a  publié  la  Relation  histori- 
que de  la  mission  chez  la  nation  appelée 
Chiquitos,  Madrid,  17 26,  1  vol.  in-8  ; 
elle  a  été  traduite  en  allemand,  Vienne , 
1729,  1  vol.  in-8,  et  en  latin,  ibid.  , 
1733,  1  vol.  in-4;  elle  contient  l'histoire 
des  Chiquitos  et  celle  de  quelques  nations 
voisines.  On  n'y  trouve  guère  d'autres 
détails  que  ceux  qui  ont  rapport  à  la  mis- 
sion. Le  Père  Jean-Patrice  se  disposait  à 
en  aller  fonder  une  à  Chaco  ,  lorsqu'il 
mourut  en  17  72. 

*  FERNANDEZ  NAVARRETE 
(Jean  ) ,  surnommé  el  mudo  (le  muet) , 


FER  S75 

célèbre  peintre  espagnol,  né  à  Logrono 
en  1 526  ,  perdit  l'usage  de  la  parole  à  la 
suite  d'une  maladie  aiguë  ,  dès  l'âge  de 
2  ans.  Cette  infirmité  ne  l'empêcha  pas 
de  manifester  un  goût  décidé  pour  la 
peinture.  Il  fut  plusieurs  années  à  l'école 
du  célèbre  Titien  et  devint  peintre  de 
Philippe  II,  qui  lui  fit  faire  plusieurs 
grands  tableaux  pour  le  monastère  de  l'é- 
glise de  l'Escurial.  Ses  plus  beaux  ouvra- 
ges sont  une  Assomption ,  le  Martyre  de 
St.  -Jacques,  un  St. -Jérôme  dans  le 
désert ,  une  Nativité  de  J.  C. ,  la  Récep- 
tion des  trois  Anges ,  par  Abraham.  Ce 
dernier  est  son  chef-d'œuvre.  Fernandez 
mourut  à  Ségovie  en  157  9.  Il  était  très 
instruit  dans  l'histoire  ,  la  mythologie  , 
et  se  distingua  dans  son  art  par  la  com- 
position ,  la  correction  du  dessin ,  l'ex- 
pression des  figures,  et  surtout  par  le  co- 
loris ,  ce  qui  le  fit  appeler  le  Titien  es- 
pagnol. On  trouve  ses  tableaux  au  palais 
de  l'Escurial.  Il  y  a  eu  plusieurs  autres 
peintres  et  sculpteurs  du  même  nom.  ■  ■ 
*  FERNANDEZ-THOMAS  (Manoël) 
naquit  à  Lisbonne  vers  1760;  il  fut  un 
des  agens  les  plus  actifs  et  le  principal 
auteur  de  la  révolution  de  Portugal ,  du 
26  août  1820.  Il  fut  choisi  pour  être 
membre  de  la  junte  provisoire  du  gou- 
vernement qui  s'installa  à  Oporto,  et  alla 
se  réunir  à  celle  de  Lisbonne.  Don  Manoël 
était  juge  de  Porto ,  lorsqu'en  récom- 
pense de  ses  travaux  révolutionnaires  ,  il 
fut  nommé,  par  le  congrès  constituant , 
débuté  aux  Cortès  ,  dont  il  devint  bien- 
tôt vice-président.  Quand  la  constitution 
fut  publiée ,  il  vota  pour  une  amnistie 
générale.  Après  avoir  opiné  que  le  con- 
grès ne  devait  pas  aller  au  devant  du  roi , 
il  fut  de  la  députation  qui  se  rendit  à 
bord  du  vaisseau  qui  avait  transporté 
S.  M.  de  Rio-Janeiro  au  port  de  Lisbonne. 
Il  s'opposa  ensuite  au  veto  absolu ,  et  de- 
manda que  le  veto  royal  suspensif  ne 
s'appliquât  pas  aux  articles  de  la  consti- 
tution que  le  roi  devait  accepter  ou  re- 
fuser. Il  fit  affecter  les  revenus  des  éta- 
blissemens  ecclésiastiques  supprimés  aus 
créanciers  de  l'état,  et  provoqua  la  loi 
sur  la  liberté  de  la  presse,  pour  les  délits 
de  laquelle  il  vota,  au  maximum  y  nne 


27<5  FER 

forte  amenda  et  dix  années  de  piison. 
Lors  de  l'extinction  du  saint-office  ,  il 
demanda  qu'on  donnât  pour  seuls  motifs 
les  lumières  du  siècle ,  et  son  incompa- 
tibilité avec  un  pays  d'hommes  libres.  Le 
patriarche  de  Lisbonne  n'ayant  pas  voulu 
prêter  serment  à  la  constitution  ,  il  vota 
pour  qu'il  fût  entendu,  jugé  ,  et  fit  en- 
suite supprimer  le  patriarcat.  Il  appuya 
le  projet  tendant  à  écarter  des  emplois 
les  ennemis  de  la  constitution.  11  parla 
en  faveur  de  l'établissement  du  jury , 
dont  les  membres  devaient ,  selon  lui , 
être  élus  par  le  peuple,  et  les  déclara 
juges  compétens  dans  les  matières  reli- 
gieuses. Nous  passerons  sous  silence  d'au- 
tres motions  de  ce  député,  qui  portait 
dans  la  tribune  tout  le  délire  d'un  déma- 
gogue ,  et  qui  se  montra  un  des  plus  ar- 
dens  adversaires  du  roi  et  de  son  auguste 
famille.  Pendant  toute  la  session  il  eierça 
la  plus  grande  influence  sur  ses  collè- 
gues. Il  mourut  à  Lisbonne,  le  20  no- 
vembre 1 822 ,  sans  se  douter  que  le  mon- 
strueux colosse ,  qu'il  avait  contribué  sL 
puissamment  à  élever,  allait  tomber  eu 
ruines. 

FERNANVILLE  (  Pierre-Simon  Cha- 
PEROU  DE  St. -André  de),  prêtre  du  dio- 
cèse de  Meaux,  mort  le  20  octobre  1757, 
âgé  de  68  ans  ,  joua  un  rôle  dans  le  parti 
des  anti-constitutionnaires.  On  a  de  lui 
1  °  La  préface  de  la  seconde  colonne  des 
Exaples.  2°  Explication  de  T Apoca- 
lypse. V  Lettres  a  iJf'"«  Mol,  in-4. 

FERNEL  (Jean -François),  natif  de 
Mont-Didier  en  Picardie ,  vint  au  monde 
en  1606.  Après  avoir  consacré  plusieurs 
années  à  la  philosophie  et  aux  mathéma- 
tiques ,  il  s'appliqua  à  la  médecine  qu'il 
exerça  avec  beaucoup  de  succès.  On  pré- 
tend qu'il  s'avança  à  la  cour  de  Henri  II, 
dont  il  devint  le  px-emier  médecin,  pour 
avoir  trouvé  le  secret  de  rendre  féconde 
Catherine  de  Médicis.  Cette  princesse 
lui  fit  des  présens  considérables.  Cet  ha- 
bile homme  mourut  en  1568.  Nul  d'entre 
les  modernes ,  depuis  Galien ,  n'avait 
mieux  écrit  avant  lui  sur  la  nature  et  la 
cause  des  maladies.  Sa  Pathologie  en  fait 
foi  ;  Fernel  la  vit  lire  de  son  vivant  dans 
)es  écoles  publiques.  On  a  de  lui  plusieurs 


FER 

autres  ouvrages  non  moitis  estimé.<i  ;  les 
principaux  sont  1°  Medicina  universa, 
Utrecht,  1666,  in-4.  2"  Medici  antiqui 
Grœci  qui  de  febribus  scripscrunt ,  Ve- 
nise,  1694,  in-fol.  Les  Médecins  latins 
8ur  la  même  matière  ont  été  imprimés  en 
1647,  in-fol.  3"  Consilia  medicinalia  , 
Francfort,  1586,  in-8.,  etc.  A° Monacos- 
pherium  sive  astrolabii  genus ,  generalis 
horarii  structura,  Paris,  1626,  in-fol.  ; 
6°  De  proportionibus  libri  duo,  1628  , 
in-fol.  6"  Cosmotheoria  libros  duos  com~ 
plexa,  1628,  in-fol.  ;  1^ De naturali parte 
mcdicinœ  libri  septem ,  1642,  in-fol.; 
8°  De  abditis  rcrum  cousis ,  libri  duo , 
1548-52,  in-fol.  ;  réimprimé  plus  de  30 
fois.  9"  Medicina,  Paris,  1554,  etc.  10» 
Therapeutices  unii>ersalis  libri  seplem , 
Lyon  ,  1571,  traduit  en  français  par  Teil , 
Paris,  1648,  in-8.  Cet  illustre  restaura- 
teur de  la  médecine  n'était  point  pour  le 
fréquent  usage  de  la  saignée  ;  et  on  le 
lotie  avec  raison  de  s'être  écarté  de  la 
méthode  d'Hexelius  trop  prodigue  du 
sang.  On  trouve  dans  ses  ouvrages,  outre 
une  savante  théorie,  des  faits  curieux, 
tel  que  celui  d'un  énergumène ,  qui  par- 
lait grec  et  latin  sans  avoir  jamais  appris 
ces  deux  langues  :  «  ce  qui  prouve,  dit 
j)  un  auteur ,  que  Fernel  n'avait  pas  cet 
»  entêtement  philosophique,  déterminé 
»  plutôt  à  nier  des  choses  constatées, 
«  qu'à  convenir  de  l'impossibilité  de  les 
»  expliquer  sans  recourir  à  des  sévérités 
•o  religieuses,  u  Au  mérite  d'excellent 
médecin  ,  Fernel  réunissait  celui  de  bon 
écrivain.  Il  parlait  et  il  écrivait  la  langue 
latine  avec  tant  de  pureté,  qu'on  l'op- 
posa souvent  aux  savansultramon  tains  qui 
nous  reprochaient  le  latin  barbare  de  nos 
écoles,  ff  Ce  grand  médecin ,  dit  un  au- 
»  teur  moderne,  considérait  cette  langue 
V  comme  la  seule  assortie  à  sa  profession, 
»  et  eut  regardé  comme  un  blasphème  en 
»  matière  de  science  comme  en  matière 
1)  de  morale,  le  projet  de  traiter  la  mé- 
»j  decine  en  langue  vulgaire.  Une  telle 
i>  innovation ,  fruit  de  l'ignorance  et  de 
»  la  corruption  de  ce  siècle,  ne  s'était  1 
»  point  offerte  à  l'esprit  des  grands  hom- 
»  mes  qui  nous  ont  devancés  dans  la  car-^  j 
1)  rière  des  connaissances  humaines.  In- 


FER 

»  dépendamment  des  vues  de  décence  et 
»  de  moralité,  qu'une  langue  antique  et 
M  chaste  peut  seule  réaliser ,  la  nature 
)»  même  de  la  médecine,  ses  opérations 
»  et  son  but  s'opposent  à  cette  inversion. 
»  Les  langues  modernes  changent  conli- 
«  nueilement,  le  résultat  des  mots  et  des 
j>  constructions  n'est  point  irrévocable- 
»  ment  fixé.  Il  en  naîtrait  des  équivoques 
i>  terribles,  des  termes  inconnus  et  mal 
M  interprétés ,  qui ,  dans  une  science  de 
jj  celte  nature  ,  seraient  d'une  consé- 
«  quence  affreuse.  Un  médecin ,  quelque 
M  habile  qu'il  fût,  ne  pourrait  soigner 
»  que  les  paysans  ou  les  bourgeois  de  son 
»  canton.  Il  serait  nul  pour  les  malades 
»  dont  il  ne  comprendrait  pas  la  langue  ; 
«  au  lieu  que  la  langue  universelle  le 
»  met  à  même  de  les  servir  tous,  au  moins 
»  ceux  qui  la  savent  également ,  ou  qui 
»  trouvent  un  interprète  de  la  leur;  ce 
j)  qui  ne  manque  nulle  part ,  où  il  y  a 
»  un  ecclésiastique  ou  un  homme  tant 
j>  soit  peu  lettré.  »  L'élude  était  la  prin- 
cipale, ou,  pour  mieux  dire,  la  seule 
passion  de  Fernel.  Quand  il  avait  des 
convives  chez  lui ,  il  ne  faisait  pas  difl'i- 
culté  de  les  quitter  à  la  fin  du  repas,  pour 
se  retirer  dans  son  cabinet  :  excellente 
leçon  pour  ceux  qui  sacrifient  à  une  po- 
litesse parasite  et  mal  entendue  un  temps 
précieux  ;  et  plus  encore  pour  ceux  qui , 
par  cette  frivole  considération,  dérogent 
aux  devoirs  de  leur  état  et  aux  fonctions 
les  plus  respectables. 

*  FERNIG  (  Louis-Joseph  de  ) ,  né  le 
3  octobre  17  35  d'une  famille  noble  d'Al- 
sace, embrassa  la  carrière  des  armes  ,  fit 
avec  distinction  les  campagnes  du  Ha- 
novre (1765-17G2),  quitta  le  service  et 
se  livra  à  la  culture  des  lettres.  Il  fut 
l'ami  de  Voltaire  qui  le  retint  pendant  un 
an  à  Ferney.  Après  la  mort  du  patriarche 
delà  philosophie  moderne,  il  vint  dans  le 
Hainaut  français  où  il  fit  un  mariage  ho- 
norable, se  fixa  à  Morlagne  où  il  était 
administrateur  cl  greffier  général  des 
terres  etchatellenies  de  ce  lieu  ;  en  même 
temps  il  s'occupait  encore  de  littérature 
et  de  science.  Nommé  en  1789  comman- 
dant de  la  garde  nationale  ,  il  empêcha 
Jes  désordres  (jui  eurent  lieu  dans  tant 


FER  277 

d'autres  endroits.  Ce  fut  à  Mortagne  que 
BC  tirèrent  les  premiers  coups  de  fusil 
entre  la  France  et  l'Europe  ;  la  garde 
nationale  de  ce  lieu  s'opposa  à  l'entrée 
des  Autrichiens,  et  fit  le  service  le  plus 
pénible  pendant  plusieurs  mois.  Bientôt 
la  guerre  fut  portée  en  Champagne;  pen- 
dant que  les  gardes  nationales  du  Nord 
allèrent  seconder  les  efforts  des  troupes 
de  ligne,  le  pays  de  Mortagne  fut  sac- 
cagé :  la  propriété  de  Fcrnig  ne  fut  point 
épargnée.  Dumouriez  donna  à  sa  famille 
un  asile  dans  son  camp ,  et  à  lui ,  la  place 
de  capitaine  commandant  les  guides.  Fcr- 
nig combattit  en  cette  qualité  à  Valmy,  à 
Jemmapes  ,  à  jVerwinde,  eut  une  grande 
part  aux  succès  des  campagnes  de  1792 
et  1793  ,  et  quitta  l'armée  avec  Dumou- 
riez. Rentré  en  France  en  1802,  il  vécut 
dans  la  retraite,  cl  mourut  en  1816  d'une 
attaque  d'apoplexie.  Il  était  le  père  de 
l'officier  général  du  même  nom  et  des 
j)lics  Fernig  qui  ont  joué  un  si  grand  rôle 
pendant  la  révolution.  Foyez  l'article 
suivant. 

'  FERNIG  (  les  D"«  Félicité  et  Théo- 
phile de),  connues  par  le  courage  dont 
elles  ont  fait  preuve  pendant  la  révolution, 
étaient  âgées  l'une  de  16  ans,  l'autre  de 
13,  lorsqu'en  1792  elles  prirent  les  ar- 
mes et  allèrent  se  placer  dans  les  rangs 
de  la  garde  nationale  de  Morlagne ,  qui 
tous  les  jours  se  mesurait  avec  les  Autri- 
chiens. Le  général  Beurnonville  instruit 
deleursexploils,  en  informa  la  Convention 
qui  leur  envoya  deux  chevaux  richement 
caparaçonnés.  Lorsque  les  troupes  fran- 
çaises se  portèrent  sur  la  Champagne  qu'a- 
vait déjà  envahie  le  duc  de  Brunswick , 
les  Autrichiens  se  jetèrent  sur  le  village 
de  Morlagne  et  pillèrent  la  propriété  de 
Fernig.  Dumouriez  fit  nommer  les  deux 
sœurs  Fernig  ofiiciers  d'état-major;  elles 
rendirent  à  l'armée,  combattirent  avec  se 
vigueur  à  Valmy,  à  Jemmapes,  à  Auder- 
lecht,  à  Nerwinde,  dans  toutes  les  jour- 
nées des  campagnes  de  1792  et  1793. 
L'histoire  de  ces  deux  campagnes  rap- 
porte plusieurs  actions  glorieuses  dont' 
les  D^'*'''  Fernig  furent  les  auteurs.  Entraî- 
nées dans  la  fuite  de  Dumouriez  ,  elles  re- 
prirent en  pays  étranger  le  costume  et  les 


278  FER 

habitudes  de  leur  sexe.  Cependant  pour- 
suivies en  Hollande,  en  Westphalie  ,  en 
Danemarck ,  elles  furent  euiprisonuées 
dans  le  i)reniier  de  ces  pays  :  i-enducs  à  la 
liberté,  elles  viennent  à  Paris  solliciter  la 
radiation  de  leur  nom  sur  la  liste  des 
émigrés  :  on  ne  veut  ni  de  leur  vie ,  ni 
de  leur  présence  en  France  :  elles  sont 
obligées  de  quitter  le  sol  natal,  et  ne  peu- 
vent y  rentrer  qu'en  1 802.  M'^"*  Théophile 
est  morte  en  1 8 1 0  à  Bruxelles  où  sa  sœur 
s'est  mariée.  Les  D^'"  de  Fernig  avaient 
deux  autres  sœurs  ,  Louise  et  Aimée  qui 
étaient  trop  jeunes  pour  suivre  leur  exem  • 
pie,  et  un  frère  qui  parvint  au  grade  de 
général  de  brigade. 

FERON  (  Jean  le  ) ,  né  à  Compiègne , 
avocat  au  parlement  de  Paris,  publia  en 
155à,  le  Catalogue  des  Connétables, 
Chanceliers ,  Amiraux ,  Maréchaux  de 
France ,  in-fol.  Cet  ouvrage  ,  entière- 
ment refondu  par  Denis  ■Godefroi ,  au 
Louvre,  1G58  ,  a  fait  oublier  l'édition  de 
Feron  ,  qui  mourut  âgé  de  GO  ans  ,  sous 
le  règne  de  Charles  IX.  On  a  encore  de 
lui  quelques  autres  écrits ,  tant  imprimés 
que  manuscrits. 

FERRACTNO  (  Barthélemi  ) ,  né  en 
1692  dans  le  Bassan  j  montra  ,  dès  sa  plus 
tendre  jeunesse ,  ce  que  peut  la  nature 
toute  seule.  Réduit  au  métier  de  scieur 
de  bois ,  il  inventa ,  au  sortir  de  l'en- 
fance ,  une  scie,  qui,  par  le  moyen  du 
vent ,  faisait  très  promplemcnt  un  travail 
exact  et  considérable.  Il  imagina  ensuite 
de  faire  des  tonneaux  à  vin  sans  cerceaux  ; 
et  il  en  fit  qui  étaient  plus  solides  que 
ceux  qui  en  ont.  Ces  succès  agrandirent 
bientôt  la  sphère  de  ses  inventions,  il 
travailla  sur  le  fer ,  et  il  fit  des  horloges 
de  cette  matière,  qui ,  quoique  très  sim- 
ples, produisaient  beaucoup  d'efletsdif- 
férens.  11  inventa  même  une  machine 
hydraulique  aussi  peu  compliquée,  par 
le  moyen  de  laquelle  il  faisait  de  grandes 
roues  dentelées.  Ce  qui  étonna  surtout 
les  mécaniciens,  c'est  la  machine  hydrau- 
lique faite  pour  le  procurateur  Belegno. 
Cette  machine  élève  l'eau  à  35  pieds, 
mesure  du  pays:  c'est  la  vis  d'Archimède. 
Enfin ,  c'est  à  ce  célèbre  ingénieur  que 
la  ville  de  Bassan  doit  le  fameux  pont  de 


PER 

la  Brenta,  aussi  admirable  par  la  hardiesse 
que  par  la  solidité  de  sa  constructiou.i 
Cet  habile  homme  est  mort  à  Solagnii  en 
1777.  M.  François  Memmo  a  publié  la 
J^ie  et  les  inventions  de  ce  mécanicien  , 
à  Venise,  1764,  in-4. 

'FERRAJDOLI  (Nunzio,  dit  Degm 
Affiti  ) ,  peintre  napolitain,  né  à  Nocera 
près  de  Salerneen  16G1,  mort  à  Bologne^ 
excellait  dans  le  paysage.  Ses  composi- 
tions se  font  particulièrement  remarquer 
par  la  variété  des  plans ,  la  beauté  des 
sites  ,  et  par  l'art  avec  lequel  étaient 
rendus  la  dégradation  dans  les  objets  de 
la  nature ,  les  lointains  ,  l'air,  les  feuil- 
lages battus  des  vents,  les  eaux  dans  un 
mouvement  continuel  :  quelques-uns  de 
ses  ouvrages  ont  mérité  d'être  comparés 
à  ceux  de  l'Albane,  Salvator  Rosa  et  de 
Cl.  Lorrain. 

FERR AND  {Fulgentius  Ferrandus), 
diacre  de  l'église  de  Carthage  au  6*  siècle^ 
disciple  de  saint  Fulgence ,  fut  un  des 
premiers  qui  se  déclarèrent  contre  la 
condamnation  des  Trois  Chapitres ,  et 
particulièrement  contre  celle  delà  Lettre 
d'il/as.  On  a  de  lui  une  Collection  abrégée 
des  Canons,  nae.  Exhortation  au  comte 
Reginus  sur  les  devoirs  d'un  capitaine 
chrétien ,  et  quelques  autres  morceaux 
que  le  jésuite  Chifllet  fit  imprimer  à 
Dijon  en  1C49  ,  in-4. 

FERRAND(Jean  de).  Foyes  Ferault. 
FERRAND  (  Jacques  ) ,  natif  d'Agen  , 
docteur  en  médecine  vers  le  commen- 
cement du  dernier  siècle,  a  laissé  un 
Traité  sur  la  maladie  d'Amour ,  in-8  , 
Paris,  1G23. 

FERRAJND  (  Louis  ) ,  né  à  Toulon  le 
3  octobre  1645 ,  était  avocat  au  par- 
lement  de  Paris,  oii  il  mourut  en  1699  ;  fl 
mais  il  est  moins  connu  sous  cette  qua-  V 
lité ,  que  sous  celle  d'érudit.  Il  avait  une 
connaissance  assez  étendue  des  langues 
et  de  l'antiquité  ;  mais  cette  connais- 
sance était  un  peu  confuse.  Il  accable 
sou  lecteur  de  citations  entassées  sans 
choix,  il. écrit  en  savant  qui  n'est  que 
savant ,  et  qui  raisonne  de  même.  On  a 
de  lui  1°  un  gros  Commentaire  latin 
sur  les  Psaumes,  in-i,  1683.  2°  Bé- 
flexions  sur  la  Religion  chrétienne,  1679, 


FER 

2  vol.  iii-12,  qui  offrent  plusieurs  ques- 
tions curieuses  de  chronologie  et  d'his- 
toire ,  et  une  explication  des  prophéties 
de  Jacob  et  de  Daniel  sur  le  Messie. 
3°  Le  Psautier  latin-français,  1G86, 
in-1 2.  4°  Quelques  écrits  de  controverse, 
parmi  lesquels  on  distingua  dans  le  temps 
son  Traite  de  l'Eglise  contre  les  He're- 
iiqiies ,  et  principalement  contre  les 
Calvinistes,  Paris,  1G05,  in-1 2.  Le 
clergé  deFrancefut  si  content  de  cet  ou- 
vrage, qu'il  augmenta  de  deux  cents 
livres  la  pension  de  800  ,  qu'il  lui  avait 
accordée  en  1G80.  5°  Traité  de  la  con- 
naissance de  Dieu ,  publié  avec  des 
notes  par  un  moine  bénédictin  de  Saint- 
Bertin  eu  Artois;  Paris,  1706,in-12. 
6°  Une  Lettre  et  un  Discoure  pour  prouver 
le  monachisme  de  saint  Augustin  :  opi- 
nion qui  n'est  pas  adoptée  par  les  bons 
critiques. 

FERRAIND  (  Antoine  ) ,  conseiller  à 
la  cour-des-aides  de  Paris  sa  patrie,  mort 
en  17  <  9,  à  42  ans,  faisait  de  petites 
chan-sons  galantes.  Il  jouta  avec  Rousseau 
dans  l'épigramme  et  le  madrigal.  L'un  et 
l'autre  eussent  dû  mépriser  un  genre  où 
il  y  avait  peu  de  gloire  à  acquérir,  et  où 
le  succès  est  presque  toujours  la  mesure 
de  la  honte.  La  plupart  des  chansons 
de  Ferrand ,  recueillies  in-8  ,  ont  été 
mises  sur  les  airs  de  clavecin  de  la  com- 
position de  Couperin. 

FERRAA'D  (  Jacques-Philippe) ,  pein- 
tre français,  fils  d'un  médecin  de  Louis 

XIII ,  naquit  à  Joigny  en  Bourgogne  ,  l'an 
1653.  Il  fut  valet-de-chambre  de   Louis 

XIV ,  membre  de  l'académie  de  peinture. 
Il  voyagea  dans  une  partie  de  l'Europe  , 
et  mourut  à  Paris  en  1732,  à  79  ans.  Il 
excellait  dans  la  peinture  en  émail.  On  a 
de  lui  un  Traité  curieux  sur  cette  matière  , 
imprimé  à  Paris  en  1723,  in-1 2.  On  y 
trouve  aussi  un  petit  Traité  de  minia- 
ture. 

*  FERRAIND  (N...),  médecin  et  voya- 
geur français,  né  vers  1670  ,  devint  mé- 
decin du  kan  des  Tartares  de  Crimée  ,  et 
accompagna  le  fils  de  ce  prince  dans  une 
expédition  en  Circassie.  Le  mauvais  état 
des  chrétiens  de  ce  pays  le  toucha  vive- 
ment ,  et  dans  un  voyage  qu'il  fit  en  1 706 


FER  279 

h  Constantinople ,  il  engagea  les  jésuites, 
qui  étaient  dans  cette  capitale,  à  établir 
une  mission  dans  la  Crimée.  Le  père  Dubon 
consentit  à  le  suivre,  et  fonda  une  mission 
qui  eut  les  plus  grands  succès.  Ferrand 
resta  toujours  à  la  cour  des  kans  ,  où  il 
jouit  d'un  grand  crédit  jusqu'à  sa  mort , 
arrivéevers  1720.  Il  a  laissé  :  1°  Jîépnnsc 
à  quelques  questions  faites  au  sujet  des" 
Tartares  Circasscs  ;  2"  Voyage  de 
Crimée  en  Circassie  par  le  pays  des 
Tartares  JVogaïs ,  fait  en  Van  1702. 
Ces  deux  morceaux  ont  été  insérés  dans 
le  tome  10  du  Recueil  des  voyages  au 
nord,  et  dans  le  tome  3  des  Lettres  édi- 
fiantes ,  nouvelle  édition.  Ferrand  se 
montre  dans  ces  deux  ouvrages  judicieux 
et  bon  observateur. 

"FERRAIND  (Marie-Louis),  général 
de  division,  naquit  à  Besancon  le  12 
octobre  17  63.  Après  avoir  fait  de  bonnes 
éludes ,  il  embrassa  le  parti  des  armes  ,  et 
fit  toutes  les  campagnes  d'Amérique  dans 
.  lecorpsdeRochambeau,  avec  son  frère  qui 
était  pharmacien  en  chef.  A  son  retour 
en  France,  il  s'engagea  dans  un  régiment 
de  dragons ,  et  devint  secrétaire  de  son 
colonel.  En  17 92  il  était  chef  d'escadron. 
Arrêté  sous  le  régime  de  la  terreur,  il 
fut  jeté  en  prison  ,  et  n'en  sortit  qu'après 
le  9  thermidor.  Il  eut  alors  un  avancement 
rapide.  Il  servit  en  qualité  de  général  de 
brigade  dans  les  armées  de  l'Ouest,  des 
Ardennes  et  de  Sambre-et-Meuse.  Après 
la  paix  d'Amiens  ,  il  fut  nommé  gouver- 
ncui-  de  Valencienne; ,  et  quelque  temps 
après  commandant  du  département  du 
Pas-de-Calais.  Lorsque  le  gouvernement 
voulut  se  mettre  en  possession  de  Saint- 
Domingue,  dont  la  partie  espagnole 
venait  d'être  cédée  à  la  France  par  le 
traité  des  Pyrénées ,  Ferrand  fut  désigné 
pour  faire  partie  de  l'expédition.  Après  la 
mort  du  général  Leclerc,qui  avait  soumis 
l'île  ent'ère  ea  quatre  mois,  une  insur- 
rection des  Nègres  ayant  éclaté  sur  tous 
les  poinls,le  général  Ferrand  songea  à 
mettre  la  partie  française  à  l'abri  des  ré- 
voltés ;  mais  l'occupation  du  Cap  par 
Dessalines  le  força  de  se  replier  sur  Santo- 
Domingo  :  le  gourvernement  lui  en  fut 
déféré.  Et  lorsqu'en  1805  Dessaiines  s'a- 


a8o  FER 

vanoa  àla  tête  de  vingt-deux  mille  nègres, 
il  iit  avec  le  secours  des  habilans  une 
vigoureuse  défense.  Sur  ces  entrefaites  , 
les  secours  qu'il  avait  demandés  à  l'amiral 
Missiessi  étant  arrivés,  Dessalines  fut 
battu  sur  tous  les  points ,  et  forcé  de  lever 
le  siège.  Dès  ce  moment  la  partie  orien- 
tale jouit  d'une  tranquillité  parfaite  jus- 
qu'au moment  oii  l'on  reçut  en  Amérique 
la  nouvelle  de  l'invasion  de  l'Espagne  par 
les  Français  (1808).  Le  gouverneur  de 
Porto-Rico  en  instruisit  Ferrand  par  une 
déclaration  de  guerre ,  tandis  que  la  plus 
grande  partie  des  colons  commençait  à 
regarder  les  Français  de  mauvais  œil, 
malgré  les  bienfaits  dont  Ferrand  les  avait 
comblés.  Une  révolte  éclata  h  Baraboude 
dans  lespremicrs  jours  d'octobre.  Ferrand 
sortit  de  Santo-Domingo  pour  aller  étouf- 
fer l'insurrection  :  il  joignit  les  rebelles 
le  7  novembre  à  Palo-Himado.  Quoiqu'il 
n'eût  que  cinq  cents  hommes,  et  que  les 
ennemis  fussent  quatre  fois  aussi  nom- 
breux, il  les  attaqua  avec  vigueur.  Le 
combat  fut  long  et  opiniâtre  ;  mais  enfin 
les  Français  succombèrent  sous  le  nom- 
bre ,  et  Ferrand ,  après  des  prodiges  de 
valeur ,  s'ôta  la  vie  d'un  coup  de  pis- 
tolet ,  pour  ne  pas  tomber  au  pouvoir 
des -vainqueurs  (  7  novembre  1808  ).  On 
trouve  des  détails  sur  ce  général  et  ses 
opérations  administratives  dans  un  ou- 
vrage intitulé  :  Précis  historique  des 
e've'nemens  de  la  partie  de  VUe  Saint- 
Domingue,  \i:xT  M.  Gilbert  Guillemin  , 
Paris,  1811  ,  in-8. 

FERRAND  DE  MONTHELON  ,  an- 
cien professeur  de  l'académie  de  St.-Luc 
à  Paris ,  ensuite  professeur  de  dessin  à 
Reims ,  né  h  Paris,  et  mort  dans  cette  ville 
en  1754  ,  eut  beaucoup  de  mérite  en  son 
genre.  On  a  de  lui  un  Mémoire  sur  l'é- 
tablissement de  V Ecole  des  Arts. 

*FERRA]\D  DE  LA  GAUSSADE 
(  Jean-Henri  Becays  ) ,  général  français  , 
né  le  16  septembre  17  36,  à  Mont-Flan- 
quin  en  Agenois,  d'une  famille  noble, 
obtint  en  1746  une  lieutenance  au  régi- 
ment de  Normandie  infanterie  ,  et  fit  les 
campagnes  de  1 7  4  7  et  1 7  4  8 .  Blessé  griève- 
ment au  combat  deOlostercamp  pendant 
la  guerre  de  7  ans ,  il  fut  élevé  au  grade 


FÈR 

de  capitaine  en  1756,  décoré  de  la  croit 
de  Saint-Louis  en  1767 ,  et  fait  major  de 
Valencienneseul763.  Lorsque  la  révolu- 
tion éclata,  il  en  adopta  les  principes,  et 
fut  nommé  commandant  de  la  garde  na-» 
tionale  de  celle  ville,  où  il  eut  le  bonheur 
de  maintenir  le  bon  ordre.  ÎSommé  maré- 
chal-de-camp en  1792,  il  partit  pour 
l'armée  du  Nord,  et  contribua  beaucoup 
au  gain  de  la  bataille  de  Jemmapes.  En 
1793,  il  fut  fait  général  de  brigade,  et, 
quelques  joui-s  après,  général  de  division. 
Il  se  distingua  encore  à  Valenciennes^ 
qu'il  défendit ,  pendant  près  de  trois 
mois ,  contre  l'armée  coalisée ,  forte  de 
150,000  hommes,  quoiqu'il  n'eût  avec 
lui  que  9,500  hommes  de  toutes  armes , 
et  ne  capitula  qu'après  avoir  repoussé 
assauts,  et  ayant  trois  brèches  praticables 
depuis  8  jours  au  corps  de  la  place.  Cette 
défense,  qui  passe  pour  un  des  beaux 
faits  d'armes  de  la  révolulioû  ,  ne  l'em- 
pêcha pas  d'être  incarcéré  pendant  9 
mois,  et  il  ne  recouvra  sa  liberté  qu'à  la 
chute  de  Robespierre.  Le  délabrement  de 
sa  santé  l'obligea  de  demander  sa  retraite. 
En  1802,  il  fut  nommé  préfet  de  la 
Meuse-Inférieure ,  et  fut  rappelé  en  1 80* 
pour  remplir  d'autres  fonctions.  Il  est 
mort  à  la  Planchette ,  près  Paris,  le  28 
novembre  1805.  Quelque  temps  avant  sa 
mort ,  il  publia  un  précis  de  la  défense 
deValenciennes,  Paris,  1805,  in-8. 

♦  FERRAND  (  le  comte  ,  Antoine 
François-Claude  ) ,  pair  de  France ,  minis- 
tre d'état ,  commandeur  de  l'ordre  du 
Saint-Esprit,  etc.,  naquit  en  1751,  d'une 
ancienne  famille  qui  s'était  distinguée 
avant  la  révolution  dans  la  carrière  des 
armes  et  dans  celle  du  barreau.  Parmi 
ses  nobles  ancêtres,  on  distingue  le  chan- 
celier Matthieu  Ferrand,  sous  Philippe  de 
Valois  eu  1328,  et  plus  tard,  Jean-Claude 
Ferrand  conseiller  au  parlement  de  Paris, 
fils  de  Michel ,  doyen  du  parlement ,  mas- 
sacré sur  les  marches  de  l'Hôtel-de-Ville  le 
4  juillet  1652,  victime  de  son  dévouement, 
puisqu'alors  il  venait  défendre  la  cause 
du  roi  pendant  la  guerre  de  la  fronde  : 
ce  fut  cet  illustre  aïeul  que  le  comte 
Ferrand  prit  pour  modèle  et  auquel  il 
adressa  celte  belle  apostrophe  dans  son 


PEB 

W     excellent  ouvrage  de  V Accord  des  prin- 
cipes et  des  lois,  le  premier  qui  soit 
sorti  de  sa  plume  :  «  Otoi  qui  m'as  laissé 
i>  un  nom  que  la  mort  doit  rendre  plus 
w  respectable ,  toi  qui  péris  par  les  mains 
»  des  séditieux ,  en  défendant  la  cause 
»  de  Louis  XIV  encore  jeune  ;  guide  »u- 
i>  jourd'hui  les  travaux  d'un  de  tes  des- 
»  cendaus  !  sans   doute  il   te   fallut  du 
»  courage  pour  t'exposer  à  la  fureur  d'une 
M  populace  révoltée;  peut-être  aujour- 
I)  d'hui  n'eu  faut-il  pas  moins  pour  rap- 
»)  peler  de  grandes  véritésàun  siècle  qui 
»  les  ridiculise  ou  les  persécute.-  «  Le 
comte  Ferrand  était  avant  la  révolution 
conseiller  aux  enquêtes  dans  le  parlement 
de   Paris,    place  qu'il  avait   obtenue  à 
18  ans,  avec  dispense  d'âge.  De  bonne 
heure  il  se  fit  remarquer  par  un  jugement 
sain  et  par  une  mâle  éloquence.  Dans 
plusieurs  occasions  il  fit  preuve  d'une 
noble  indépendance ,  et  son  dévouement 
aux  intérêts  du  trône  comme  à  ceux  de 
]a  nation,  se  manifesta  surtout  lorsque  , 
avec  plusieurs  autres  conseillers  du  par- 
lement, il  représenta  en  1787  ,  à  Louis 
XVI  le  danger  de  créer  pour  5  ans  des  em- 
prunts graduels  et  successifs  :  on  remarqua 
le  discours  qu'il  prononça  devant  le  roi  : 
il  rappelait  ce  qui  s'était  passé  dans  des 
circonstances  financières  à  peu  près  sem- 
blables ,  sous  Louis  XV  qui ,  après  avoir 
formé  le  même  projet  que  celui  contre 
lequel  il  se  prononçait,  adopta  l'avis  de 
la  majorité  et  renonça  à  une  mesure  dont 
on  lui  avait  montré  les  funestes  consé- 
quences. La  voix  de  Ferrand  ne  fut  point 
écoutée.  Peu  de  temps  auparavant ,   ce 
jeune  magistrat ,  âgé  seulement  de   34 
ans,  avait  publié  l'ouvrage  important  qui 
a  pour  titre  :  Accord  des  principes  et  des 
lois.  Son    libraire   avait  mis  en  même 
temps  en  vente,  mais  sans  nom  d'auteur, 
un  poème  erotique  d'un  vieux  président. 
En    arrivant    au   parlement ,    celui  -  ci 
aperçut  M.  Ferrand  ;  Monsieur,  lui  dit-il , 
Je  viens  de  lire  votre  ouvrage  chez  notre 
libraire  :  il  m^a  fait  rougir.   Le  public 
et   mes    confrères  penseront    qu'il  est 
Fœuvre  du  magistrat  à  chcK^eux  blancs , 
et  que  celui  que  je  viens  de  publier  est 
•celui  d'un  jeune  conseiller,  et  que  le  li- 
V. 


FER 


,    281 


braire  lef  a  tronipe's  ;    mais  je  m'em- 
presse de  proclamer  la   vérité' ,   et  de 
prier  ces  Messieurs  de  m'aider  à  faire 
connaître  le  véritable  auteur  de  l'excel" 
lent  ouvrage  que  rnent  de  nous  doiiner 
le  jeune  magistrat  qui  est  déjà  une  des 
lumières  du  Parlement  et  l'un  des  plus 
fermes  appuis  du  trône.  Ferrand  s'oc- 
cupait aussi  de  poésie  :  ses  compositions 
sont  d'un  stile  facile  et  coiTect.    Il  fit 
quelques   tragédies    qui   furent    remar- 
quées ■  il  jouait  lui-même  dans  les  salons 
les  rôles  de  quelques-uns  de  ses  héros. 
Ces  délassemens  passagers  ne  le  fixèrent 
pas  long-temps  :  il  était  appelé  à  traiter 
des  matières  plus  sérieuses.  Ferrand  s'é- 
tait'marié  en  17  80,  avec  la  fille  du  pré- 
sident Rolland  qui  périt  en  1793  ,  sous 
la  hache  révolutionnaire.     Après  avoir 
montré  la  plus  vigoureuse  opposition  aux 
principes  politiques  et  religieux  de  1789, 
il  quitta  la  France  dès  le  mois  de  septem- 
bre de  la  même  année ,  s'attacha  au  prince 
de  Condé ,  dont  il  gagna  la  confiance,  et 
qui ,  dès  la  première  campagne  ,  l'admit 
dans  son  conseil.  Après  la  mort  de  Louis 
XVI ,  il  fit  partie  du  conseil  de  régence. 
Pendant  l'émigration  il  publia  plusieurs 
ouvrages  pour  défendre  les  droits  de  son 
souverain.  Ce  fut  encore  à  la  même  épo- 
que qu'il  écrivit  V éloge  de  Madame  Eli- 
sabeth, d'après  les  notes  que  lui  fournit 
Madame  de  Borabelles  qu'il  rencontra  en 
1795  à  Ratisbonne.   Ferrand  revint  en 
France  en  1800 ,  ne  remplit  aucune  fonc- 
tion ni  sous  le  gouvernement  consulaire 
ni  sous  le  gouvernement  impérial  ,  et 
s'occupa  exclusivement  d'études  littérai- 
res ou  historiques.  Peu  de  temps  après 
son  retour,  il  fit  paraître  le  bel  ouvrage 
<Je  V Esprit  de  l'histoire  ou  Lettres  politi- 
ques et  morales  d'un  père  à  son  fils.  Il 
y  établit  ce  principe  éminemment  con- 
servateur que  nul  n'a  le  droit  de  vouloir 
une  révolution  :  ce  ne  fut  point  celte 
maxime  qui  déplut  à  Buonaparte;  car  il  de- 
vait tenir  au  maintien  de  l'état  de  choses 
qui  existait  alors  ;  mais  ce  fut  le  discours 
deViomandierdans  lequel  il  est  question 
d'un  général  qui  replace  Chiideric,  roi 
légitime  sûr  un  trône  usurpé.  La  police 
défendit  la  pxiblication  de  cet  ouvrage, 
18.. 


282  FER 

qui  n'en  fut  que  plus  recherché,  et  dont 
quelques  exemplaires  se  vendirent  jusqu'à 
deux  Jouis  chacun.  Le  libraire  Dcsenne 
qui  avait  une  haute  opinion  du  talent  de 
Ferrand,  et  qui  possédait  les  manuscrits  de 
l'histoire  de  Pologne  par  Rulhières ,  vint 
lui  proposer  de  la  continuer;  ce  qu'il 
n'accepta  qu'avec  peine  :  il  y  travailla 
pendant  trois  ans,  et,  lorsque  cet  ouvrage 
fut  terminé,  il  éprouva  toutes  sortes  de 
désagrémens.  Il  en  avait  prévu  quelques- 
uns  ,  surtout  ceux  qui  lui  vinrent  de  la 
police,  mais  dont  d'autres  durent  le  sur- 
prendre; car  on  le  traita  de  barbare,  par- 
ce qu'il  n'avait  pas  voulu  conserver  cette 
qualification  que  Rulhières  donnait  ha- 
bituellement aux  Russes,  et  parce  qu'il  ne 
croyait  pas  que  l'on  devait  accuser  une  na- 
tion toute  entière  qui  marche  à  la  civilisa- 
tion plus  rapidement  qu'on  ne  le  croit 
d'ordinaire.  On  lui  proposa  aussi  de  lui 
accorder  la  permissiou  d'imprimer  celte 
histoire,  à  la  condition  sordide  qu'il  aban- 
donnerait la  moitié  des  bénéfices  de  l'é- 
dition. En  1 8 1 2  le  bruit  courut  que  Ferrand 
avait  fait  partie  de  la  conspiration  Mallet  : 
le  fait  était  faux.  Jamais  Ferrand  n'eut  la 
pensée  d'une  conspiration  :  il  attendait 
en  silence ,  comme  tant  d'autres  fidèles 
royalistes  ,  que  les  temps  fussent  accom- 
plis. A  cette  occasion  nous  rappellerons  ce 
qu'il  dit  en  1800,  au  ministre  Bénézéqui 
lui  témoignait  quelque  inquiétude  sur  sa 
présence  en  France  :  Je  vais,  lui  répondit- 
il  ,  me  mettre  bien  à  découvert  vis-à-vis 
de  vous.  Toutes  les  fois  que  l'on  vous 
dira  que  je  suis  entre'  dans  une  conspi- 
ration ,  armiez  que  cela  est  faux  , 
et  vous  aurez  raison.  Mais  quand 
vous  saurez  qu'un  prince  français  a  mis 
le  pied  en  France,  soyez  sûr  que  je  ferai 
V impossible  pour  aller  le  joindre.  Après 
la  déchéance  de  Buonaparte,  quelques 
royalistes  se  réunirent  (  31  mars  1814  ), 
chez  M.  Lepellctier  de  Morfontaine , 
ancien  magistrat ,  pour  aviser  aux  moyens 
d'assurer  le  retour  des  Bourbons  :  il  n'est 
pas  vrai ,  comme  l'ont  dit  tous  les  bio- 
graphes ,  qu'il  proposa  d'avoir  recours 
au  Sénat  :  un  tel  avis  était  totalement 
contraire  à  ses  opinions  et  à  ses  princi- 
pes :  une  députation  fut  envoyée  auprès 


FER 

de  l'empereur  Alexandre  d'après  le  con- 
seil de  Ferrand ,  qui  cependant  n'en  fit 
point  partie.  Louis  XYIII  voulant  récom- 
penser son  zèle  et  sa  fidélité  le  nomma  mi- 
nistre d'état ,  et  directeur-général  des 
postes.  Plus  tard  (  août  1814  )  il  l'éleva 
à  la  dignité  de  comte.  Plein  de  con- 
fiance dans  ses  lumières  il  l'appela  dans 
le  conseil  qui  rédigea  la  Charte,  et  Ferrand 
eut  une  grande  part  à  cet  acte  important 
du  règne  de  ce  prince.  Le  14  novembre 
1814,  sur  la  demande  que  le  prince  de 
Condé  fit  lui-même  au  roi ,  Ferrand  reçut 
la  croix  de  St.-Louis  avec  les  lettres  les 
plus  aimables  du  prince  qui  la  lui  en- 
voyait. Nommé  membre  de  la  commission 
chargée  de  l'examen  des  demandes  en 
restitution  des  biens  non  vendus  des  émi- 
grés ,  il  en  présenta  le  projet  le  1 3  sep- 
tembre à  la  chambre  des  Députés ,  et  en 
développa  les  motifs  dans  un  discours 
remarquable ,  où  il  rappela  les  services 
et  les  malheurs  des  émigrés  ,  et  dit 
qu'en  déclarant  irrévocable  la  vente  des 
biens  nationaux ,  le  roi  avait  agi  dans 
l'intérêt  de  la  pais  intérieure  ,  mais 
que  n'ayant  pu  rendre  légitime  ce  qui 
était  injuste  ,  il  convenait  que  la  nation 
accordât,  quand  les  circonstances  le  per- 
mettraient, de  justes  dédommageraens 
à  ceux  qui  avaient  été  privés  de  leurs 
biens  :  ce  fut  lui  qui  prononça  le  premier 
le  mot  d'indemnité.  Ce  discours  violem- 
ment combattu  par  M.  Bédoch  ,  député , 
fut  défendu  d'une  manière  victorieuse 
par  M.  Mutin  dans  un  article  publié  dans 
le  Journal  des  Débats.  Ferrand  eut  par 
intérim  le  portefeuille  de  la  marine  pen- 
dant la  maladie  et  après  la  mort  de  M. 
Malouet  :  au  mois  de  septembre  il  pré- 
senta au  roi  un  projet  relatif  à  la  traite 
des  Nègres  qu'il  voulait  interdire  entre 
le  Cap  blanc  et  le  Cap  de  Palmes  sur  les 
côtes  d'Afrique.  Il  présenta  aussi  le  20 
octobre  à  la  chambre  des  Députés  un 
projet  de  loi  sur  les  dettes  des  colons  de 
St.-Domingue  :  il  proposait  de  prolonger 
jusqu'à  la  fin  de  la  session  de  1815,  le 
sursis  que  leur  avait  accordé  le  gouver- 
nement précédent.  Il  céda  le  ministère 
de  la  marine  à  M.  Beugnot.  Au  20  mars 
il  fut  obligé  de  remettre  sa  direction  à 


FER 

M.  Lavalelte  :  le  refus  de  chevaux  que  lui 
fit  son  successeur  l'empêcha  d'accompa- 
gner le  roi.  Muni  toutefois  d'un  sauf- 
conduit  ,  il  se  rendit  dans  la  Vendée,  où 
les  émissaires  de  Buonaparte  avaient  déjà 
divisé  les  royalistes,  et  où  par  conséquent 
il  ne  put  faire  le  bien  qu'il  espérait  pour 
la  cause  de  ses  maîtres.  Retiré  secrète- 
ment à  Orléans,  il  fut  découvert  par  la 
police  de  Fouché  qui  connaissait  son 
voyage  dans  la  Vendée  :  il  reçut  l'ordre 
de  sortir  de  France ,  mais  ses  infirmités 
le  firent  révoquer.  La  seconde  restaura- 
tion lui  rendit  ses  titres  et  ses  dig-nités  ; 
seulement  il  ne  rentra  point  à  la  direc- 
tion-générale des  postes;  mais  en  revan- 
che il  fut  créé  pair  de  France  le  17 
août  1816.  Le  20  novembre  de  la  même 
année ,  il  parut  comme  ténioin  dans  le 
procès  de  Lavalette  :  personne  mieux 
que  lui  ne  pouvait  faire  connaître  les 
circonstances  dans  lesquelles  sa  place  de 
directeur  lui  avait  été  enlevée.  Forcé  de 
dire  la  vérité  ,  il  exhiba  le  sauf-conduit 
que  lui  avait  donné  Lavallette.  Ferrand 
fut  chargé  de  faire  à  la  chambre  des 
Pairs  le  rapport  sur  l'établissement  des 
cours  prévotales  ;  et  ce  fut  sur  sa  propo- 
sition ,  motivée  par  le  tableau  des  tenta- 
tives criminelles  du  parti  buonapartiste 
ou  républicain ,  que  la  chambre  adopta 
cette  mesure  à  une  grande  majorité.  Louis 
XVIIF  n'avait  jusqu'alors  récompensé  que 
le  dévouement  politique  de  Ferrand  :  ap- 
préciateur éclairé  du  talent ,  il  ne  pou- 
vait oublier  le  mérite  de  ses  productions 
littéraires;  aussi  le  21  mars  1816  il  le 
nomma  membre  de  l'académie  française, 
et  Je  16  décembre  suivant,  grand-ofiicier- 
secrétaire  des  ordres  de  St. -Michel  et 
du  St. -Esprit.  Déjà  la  santé  de  Ferrand 
s'affaiblissait  ;  et  quoiqu'il  eût  déjà  perdu 
la  vue,  il  alla  prêter  serment  dans  le 
cabinet  du  Roi.  Malgré  ses  souffrances , 
il  a  continuellement  assisté  aux  séances 
de  la  chambre  des  Pairs  oii  il  vota  tou- 
jours avec  le  côté  droit.  Il  est  mort  le  1 7 
janvier  1825,  à  l'âge  de  7  3  ans.  Voici  la 
liste  exacte  de  ses  ouvrages  ;  1°  Accord 
des  principes  et  des  lois  sur  les  évoca- 
tions,  commissions  et  cassations  illéga- 
les, Paris,  1786,  in-8  ;  2°  Essai  d'un 


FER  9.83 

ciloijen ,  Paris,  1789,  in-8;  8°  Nullité 
et  Despotisme  de  V Assemblée  prétendue 
nationale,  décembre  17  90  ,  in-8;  4'» 
Etat  actuel  de  la  France ,  janvier  1 7  90  ; 
5°  Adresse  d'un  citoyen  très  actif,  fé- 
vrier 1790;  6°  Douze  lettres  d'un  com- 
merçant à  un  cultivateur ,  mars ,  avril , 
mai  1790;  1°  Le  dernier  coup  de  la 
ligue  ,  octobre  1 7  90  ;  8°  Lettre  d'an 
ministre  d'une  cour  étrangère  à  M.  le 
comte  de  Montmorin ,  1791  ;  9"  Réponse 
au  post-scriptum  d'une  lettre  du  comte 
de  Lally-Tolendal  à  M.  Burk  ;  10°  Le 
rétablissement  de  la  monarchie ,  juillet 
1793;  11"  Considérations  sur  les  révo- 
lutions sociales,  août  17  94  ;  12°  V Es- 
prit de  l'histoire  ,  ou  Lettres  politi- 
ques et  morales  d'un  père  à  son  fils,  sur 
la  manière  d'étudier  l'histoire  en  géné- 
ral ,  et  particulièrement  de  Vhistoire  de 
France  ,  Paris,  1802-1809,  5«  édition  , 
4  vol.  in-8,  1816.  Ce  livre  est  remar- 
quable par  la  sagesse  du  pian  ,  l'ordre 
des  matières  ,  les  pensées  justes  et  pro- 
fondes :  il  devait  enfin ,  par  les  bons 
principes  qu'il  contient ,  attirer  néces- 
sairement sur  son  auteur  les  persécutions 
d'un  gouvernement  despotique  et  illégi- 
titne.  C'est  à  l'occasion  de  cet  ouvrage  , 
que  l'empereur  de  Russie  envoya  à  l'au- 
teur une  bague  d'un  grand  prix,  accom- 
pagné d'une  lettre  très  flatteuse.  13° 
Eloge  historique  de  M"""  Elisabeth  de 
France,  suivi  de  plusieurs  lettres  de  cette 
princesse  ,  Ratisbonne  ,  1795,  refait  par 
l'auteur  en  1814  ,  et  publié  à  Paris  peu 
de  jours  après  la  restauration.  Les  autres 
ouvrages  du  comte  Ferrand  ,  qui  sont  non 
moins  remarquables  que  les  précédens  , 
ont  pour  titres  :  14°  Théorie  des  révo- 
lutions,  Paris,  1817,  4  vol.  in-8  ;  15° 
Histoire  des  trois  démembremens  de  la 
Pologne,  1820,  3  vol.  in-8  ;  16"  Testa- 
ment politique  ,  1830,  1  vol.  in-8,  œuvre 
posthume.  Il  avait  aussi  fait  plusieurs 
brochures  :  Vues  d'un  pair  de  France  sur 
la  session  de  1821  ,  lïefiexions  sur  la 
question  du  renouvellement  intégral  de 
la  chambre  des  députés  ,  1823  ,  etc. 
Plusieurs  de,  ses  opinions  et  rapports  ont 
été  imprimés  par  ordre  de  la  chambre 
des  Pairs.  On  a  de  lui  quatre  tragédies  ^ 


5.84  TER 

1"  Zoaré,  1779;  2"  Philoctèle,  1780;  3° 
ÎAi  sié{je  de  Rhodes,  1784  ;  4°  Alfred  le 
Grand  ,  17  85.  Le  eomte  Fcrrand  ne  varia 
jamais  dans  ses  principes  politiques.  On 
avait  proposé  à  Buouaparte  de  chercher 
à  l'atlirçr  dans  son  parti  :  Oh  !  celui-là — 
répondit-il ,  il  n'j/  faut  pas  compter  ; 
nous  ne  l'aurons  jamais  :  il  aime  trop 
les  Bourbons. 

FERRARE.  Ployez  Rkmée  de  France  , 
et  Alfosse  d'Est. 

FERRARI  (Barthélemi),  Ferrarius, 
gentilhomme  milauois,  né  en  1497  ,  in- 
stitua en  1 533,  de  concert  avec  Antoine- 
Marie-Zacharie  et  Jacques-Antoine  Mo- 
rizia ,  l'ordre  desBarnabites ,  si  utiles  de- 
puis à  l'Italie  et  à  l'Allemagne.  Il  mourut 
supérieur  de  cette  congrégation  en  1544, 
avec  une  grande  réputation  de  vertu. 

*  FERRARI  (  André,) ,  peintre  génois, 
mort  en  1559.  Il  était  également  habile 
pour  le  paysage  ,  les  fruits ,  les  fleurs , 
les  animaux  ,  et  pour  les  sujets  histori- 
ques. Il  y  a  eu  plusieurs  autres  peintres 
de  ce  nom. 

FERRARI  (  François  -  Bernardin  ) , 
prêtre  de  la  congrégation  des  Oblats, 
docteur  de  Milan  sa  patrie,  naquit  en 
1577  ,  et  mourut  en  1C69  ,  à  92  ans.  Il 
parcourut,  par  ordre  du  cardinal  Frédéric 
Borromée ,  archevêque  de  cette  ville , 
l'Espagne  et  l'Italie  ,  pour  recueillir  des 
livres  et  des  manuscrits.  Il  fit  une  riche 
moisson ,  et  dès  lors  la  Bibliothèque 
Ambroisienne  eut  un  nom  dans  l'Europe 
littéraire.  On  lui  doit  plusieurs  ouvrages, 
pleins  d'érudition  et  de  recherches  cu- 
rieuses. Il  écrit  nettement  et  méthodique- 
ment. Les  principaux  sont  :  \"  De  ritu 
sacrarum  concionum.  Milan  ,  1 620 ,  in-4 . 
Jean-Georges  Grœvius  a  redonné  au  pu- 
blic ce  savant  ouvrage  sur  les  anciennes 
coutumes  de  l'Eglise  à  l'égard  des  prédi- 
cations ;  Utrecht ,  1692,  in-4.  Quelques 
bibliographes  ont  dit  que  le  succès  de  ce 
livre  excita  la.  jalousie  du  cardinal,  et  qu'il 
fit  tout  ce  qu'il  put  pour  le  faire  sup- 
primer, parce  qu'il  vit  que  son  traite  De 
concionante  Episcopo  ,  qu'il  mit  au  jour 
dans  le  même  temps ,  était  éclipsé  par 
celui  de  Ferrari  ;  mais  cette  anecdote , 
déjà  réfutée  par  le  caractère  du  sage  et 


FER 

vertueux  prélat,  l'est  encore  par  les  faits 
et  les  dates.  Le  livre  de  l'archevêque  ne 
vit  le  jour  qu'en  1 632,  après  sa  mort,  et  1 2 
ans  aprèsla  publication  de  celui  de  Fer-' 
rari,  imprimé  en  1620,  in-4.  Cet  ouvrage 
était  un  des  pJus  rares  arabroisicns,  avant 
qu'on  le  réimprimât.  L'édition  originale 
de  1620  est  la  plus  recherchée.  2"  Des 
applaudissemens  et  des  acclamations 
des  Anciens;  ouvrage  divisé  en  sept 
livres ,  et  imprimé  à  Milan  en  1627,  in-4. 
3"  Un  Traité  des  funérailles  des  chré- 
tiens. 

FERRARI  (  Jean-Baptiste  ),  jésuite 
de  Sienne,  né  en  1584 ,  mort  en  1655, 
donna  au  public,  en  1622,  un  Diction- 
naire syriaque ,  in-4 ,  sous  le  titre  de 
Nomenclator  Syrianus,  très  utile  à  ceux 
qui  s'appliquent  aux  langues  orientales. 
L'auteur  s'est  principalement  attaché  à 
expliquer  les  mots  syriaques  de  la  Bible  : 
travail  dans  lequel  il  fut  aidé  par  de  sa- 
vans  Maronites.  On  a  encore  de  lui  :  De 
malorum  aureorum  cultura  ;  Rome, 
164G,  in-fol.  ;  et  De  florum  cultura, 
Rome,  1633  ,  in-4  ;  et  en  italien,  Rome, 
1638,  in-4. 

FERRARI  (  Octavien  )  mi'.anois,  né 
en  1 51 8,  professa  laphilosophie  à  Padoue, 
et  mourut  dans  sa  patrie  en  1 586  ,  estimé 
pour  sa  vertu  et  sa  vaste  littérature.  On 
lui  doit  :  1  "  Clavis  philosophiœ  Aristo- 
telicœ  ,  1606,  in-8.  2°  Un  savant  traité 
de  l'Origine  des  Romains ,  en  latin  : 
Milan,  1607,  in-8.  Grœvius  l'a  inséré 
dans  le  l*""  vol.  de  ses  Antiquités  Ro- 
maines ,  et  y  a  ajouté  les  corrections  né- 
cessaires. Le  stile  de  Ferrari  est  pur  et 
assez  élégant. 

FERRARI  (  Octave  )  naquit  à  Milan 
comme  le  précédent ,  en  1607  ,  et  ne  fut 
pas  moins  estimé.  (  Il  fut  professeur  d'élo- 
quence au  collège  Ambrosien,  et  histo- 
riographe de  la  ville  de  Milan.)  Louis  XIV, 
la  reine  Christine ,  la  ville  de  Milan ,  lui 
firent  des  présens  et  des  pensions.  Il  les 
méritait  par  son  savoir  ;  il  possédait  l'an- 
tiquité. On  a  de  lui  plusieurs  ouvrage» 
savans  et  curieux,  f  Sur  les  Fêtcmens 
des  Anciens,  et  les  Lampes  sépulcrales , 
en  latin  ,  in-4  ,  Padou€ ,  1 68  5  (  voyez  Lt- 
CETi ).  2"  De Mimis  et  Pantomimis,  1714, 


FER 

in-8.  3°  Origines  linfjuœ  ilalicce,in-iol. , 
1676  ;  livre  plein  d'érudition,  mais  dans 
lequel  il  exalte  trop  la  langue  italienne. 
4°  Opuscula,  Hermstadt,  1710,  in-8.  Ce 
savant  mourut  en  1682,  à  74  ans.  C'é- 
tait un  homme  d'une  humeur  douce, 
sincère  ,  affable,  ami  de  la  paix  :  aussi 
l'appelait-on  le  Pacificateur  et  le  Con- 
ciliateur. Son  stile  est  élégant  et  châtié , 
mais  sans  affectation  ;  il  sait  prendre  le 
ton  de  son  sujet,  à  quelques  endroits 
près ,  où  il  imite  un  peu  trop  le  ton  des 
poètes. 

FERRARI  (  Philippe  ) ,  religieux  ser- 
vite  ,  mort  eu  1626  ,  est  connu  par  une 
Typographie  du  Bréviaire  romain  ,  et 
par  un  Dictionnaire  géographique  ,  que 
l'abbé  Baudrand  fit  réimprimer  en  1682, 
augmenté  de  moitié.  Il  ne  corrigea  point 
les  inexactitudes  de  Ferrari,  et  il  en  ajouta 
de  nouvelles ,  suivant  l'usage  de  ces 
compilateurs  iguorans,  qui  joignent  leurs 
rapsodies  aux  ouvrages  des  autres. 

FERRARI  (Gui),  élégant  et  éloquent 
écrivain  du  18"  siècle,  né  en  Italie,  et 
mort  en  1791  ,  s'est  fait  un  nom  distin- 
gué par  plusieurs  ouvrages  latins,  dignes 
(Ju  siècle  d'Auguste.  Il  se  fit  d'abord  con- 
naître par  son  abrégé  d'histoire  De  Fita 
quinque  imperatorum,  ou  Mémoire  de  la 
vie  de  cinq  généraux  autrichiens  qui  se 
sont  distingués  dans  la  dernière  guerre 
avec  la  Prusse,  Vienne,  177  5,  in-8. 
Ceux  que  la  frivolité  du  siècle  n'a  pas 
conduits  jusqu'au  mépris  des  langues  an- 
,  ciennes ,  ne  peuvent  que  lire  avec  plai- 
*  sir  cet  ouvrage.  On  y  trouve ,  outre  le 
mérite  historique,  un  genre  de  narration 
qui  unit  la  précision  avec  la  majesté  et 
la  richesse  du  langage  romain.  Les  cinq 
généraux ,  dont  l'auteur  rapporte  les  ex- 
ploits ,  sont  MM.  Brown ,  Daun ,  Nadasti, 
Serbelloni  et  Laudon.  On  a  donné  le  Re- 
cueil de  ses  Œuvres  à  Lugano ,  1777.  Il 
y  traite  en  détail  les  actions  des  cinq  gé- 
néraux ,  qu'il  n'avait  qu'effleurées  dans 
l'ouvrage  précédent.  Son  stile  en  général 
ressemble  beaucoup  à  Cornélius  Nepos  ; 
mais  lorsqu'il  entre  dans  quelques  détails 
sur  les  opérations  militaires  et  les  révo- 
lutions de  la  guerre ,  il  est  moins  alors 
celui  de  Cornélius  Nepos,  que  celui  de 


FER  285 

Jules-César  ;  eî  c'est  effectivement  là  te 
modèle  des  historiens  de  la  guerre.  L'a- 
brégé de  la  Vie  des  héros  guerriers  est 
suivie  de  celle  de  trois  hommes  célèbres 
dans  la  littérature  d'Italie  :  Jules-César 
Crusato ,  Thomas  Ceva  ,  et  Antoine  Lec- 
chi.  Viennent  ensuite  sept  Oraisons  lati- 
nes, entre  lesquelles  on  distingue  celle 
de  optimo  pâtre- familias  ;  il  y  a  des  ob- 
servations qui  renferment  plus  de  sagesse 
et  d'utilité  sur  l'éducation  des  enfans, 
qu'on  n'en  voit  dans  dix  traités  sur  cette 
matière ,  laquelle  a  été  tant  agitée  dan& 
ces  dernières  années,  et  dont  on  ne  cesse 
encore  d'occuper  le  public.  Le  stile  de 
Ferrari  s'élève  avec  les  choses ,  et  prend 
un  nouvel  essor  quand  il  est  employé  à 
célébrer  de  grands  événemens.  Alors  sa' 
prose  devient  nombreuse ,  ses  périodes 
s'enchaînent,  si»  marche  est  plus  grave  et 
plus  imposante.  C'est  ce  qu'on  remarque 
dans  le  début  de  l'oraison ,  oii  il  célèbre 
la  fameuse  victoire  de  Kolin.  Il  y  a  en- 
core dans  ce  Recueil,  des  plaidoyers  sur 
différens  sujets  plus  ou  moins  intéres- 
sans;  et  c'est  dans  ceux  qui  le  sont  moins, 
et  qui  semblent  ne  pas  se  prêter  à  la  ri- 
chesse et  aux  oniemens  de  l'éloquence, 
que  l'art  et  les  ressources  de  l'auteur  pa- 
raissent plus  à  découvert.  L'on  ne  peut 
cependant  disconvenir  que  quelques-unes 
de  ces  pièces  ont  peu  de  développement, 
peu  de  force ,  et  quelquefois  un  peu  de 
sécheresse.  H  y  a  aussi  des  faits  qui  ne 
sont  pas  rapportés  avec  assez  d'exacti- 
tude ,  et  des  narrations  où  l'on  croit  en- 
trevoir des  anachronismes.  Ployez  le 
Journ.  hist.  et  littér.  1«»"  février  1778, 
p.  168. 

*  FERRARI  (Jean-Baptiste  ,  l'abbé), 
naquit  à  Tresto ,  près  d'Esté,  le  21  juin 
1 732,  et  mourut  à  Padoue  en  1 806,  après 
avoir  été  préfet  des  études  du  séminaire 
de  cette  ville.  Il  montra  de  bonne  heure 
du  goût  pour  les  choses  saintes.  Il  est 
auteur  de  différens  ouvrages  écrits  en 
latin  et  qui  traitent  pour  la  plupart  des 
matières  religieuses.  On  lui  doit  aussi 
quelques  Opuscules  poétiques  f\m  ont  du 
mérite ,  mais  qui  sont  restés  manuscrits  : 
ce  sont  des  Dialogues,  des  Odes,  des  Elé- 
gies et  des  Epigrammes.  Ses  meillcurea 


a86  FER 

productions  sont  -.  1"  Laudatio  in  funere 
Clementis  XIH ,  in-4 ,  l'adoue,  1769; 
2"  rUa  Egid'd  ForcelUni,  ibid.,  1792, 
iu-4  ;  4°  f^itœ  illustrium  virorum  scmi- 
narii  Palavinensis,'\\i\à.,  1799,  in-8  ;  4" 
Vita  Jacobi  Facciolati,  ibid.  17  99, 
in-8  ;  Fita  PU  Fil ,  cum  appendice  , 
ibid.,  1802,  in-4. 

*  FERRARI  (Pierre),  architecte  de  la 
chambre  apostolique,  né  à  Spolète  en 
1763,  se  distingua  de  bonne  heure  par 
une  profonde  connaissance  de  son  art. 
L'administration  française  mit  à  profit 
son  talent  pour  le  bien  de  l'Italie,  en  le 
chargeant  de  plusieurs  travaux  impor- 
tans,  en  qualité  d'ingénieur  en  chef  dans 
le  département  du  Trasimène.  De  con- 
cert avec  le  chevalier  Fontana ,  il  s'oc- 
cupa du  projet  de  canal  de  jonction  de 
la  mer  Adriatique  à  la  mer  Méditerranée. 
Ce  ne  fut  qu'en  ^1825  qu'il  fit  part  au  pu- 
blic de  ses  méditations  sur  cette  utile  con- 
ception :  son  livre  est  intitulé  :  de  l'Ou- 
verture d'un  canal  navigable  qui,  de  la 
vier  Adriatique  en  traversant  V Italie  , 
déboucherait  par  deux  endroits  dans  la 
mer  Méditerranée.  Ferrari  a  donné  aussi 
des  plans  pour  le  dessèchement  des  lacs 
de  Trasimène  et  de  Fucino.  Il  est  mort  à 
Naples  à  l'âge  de  7  3  ans,  le  7  décembre 
1825. 

FERRARI.  Voyez  Giolito  de  Ferrari 
(Gabriel). 

FERRARI.  Voyez  Galateo. 

FERRARIENSIS.  Voyez  Silvestre 
(François  ). 

FERRARIS  (  Jean-Pierre  de  ) ,  célè- 
bre docteur  en  droit,  natif  de  Pavie  au 
14*  siècle,  composa,  dans  un  âge  très 
avancé,  une  Pratique  de  Droit,  1544, 
in-8 ,  peu  connue  aujourd'hui. 

*  FERRARIS  (  Joseph,  comte  de  ), 
né  à  Lunéville  le  20  avril  172G,  d'une 
famille  noble  du  Piémont  établie  en  Lor- 
raine depuis  plus  d'un  siècle,  entra  en 
qualité  de  ^page  à  Vienne,  eir  1735,  chez 
l'impératrice  Amélie,  veuve  de  l'empe- 
reur Joseph  I.  Lors  de  la  guerre  qui  eut 
lieu  après  la  mort  de  l'empereur  Charles 
VI ,  le  comte  de  Ferraris  ,  qui  sortait  à 
peine  de  l'enfance,  sollicita  l'honneur 
de  débuter  dans  la  carrière  militaire,  et 


FER 
il  obtint  un  drapeau  dans  le  régiment  de 
Grune  (  1741).  Blessé  à  la  bataille  de 
Czallau  (  17  mai  1744  ),  après  avoir  fait 
des  prodiges  de  valeur ,  il  eut  une  lieute- 
nance,  et,  avant  la  fin  de  la  campagne  , 
une  compagnie  d'infanterie»  La  paix 
dont  jouit  l'Autriche  pendant  quelques 
années,  retarda  son  avancement;  mais 
la  guerre  de  7  ans  lui  fournit  de  nouveau 
l'occasion  de  signaler  son  courage.  Le  1  4 
octobre  17  58  ,  à  la  bataille  de  Hochkir- 
chen,  il  s'empara  d'une  batterie  de  36 
pièces  de  canon ,  à  la  tète  du  régiment 
de  Charles-Lorraine  dont  il  était  colonel  ; 
ce  qui  lui  valut  la  décoration  de  l'ordre 
de  Marie-Thérèse.  Il  fut  élevé  au  grade 
de  général-major  en  17G1  ,  et  à  celui  de 
lieutenant-général  en  17  73.  En  17  77  ,  il 
fut  nommé  directeur-général  de  l'artille- 
rie des  Pays-Bas.  Il  s'occupa  à  celte  épo- 
que de  la  carte  des  provinces  belgiques. 
Lorsque  la  guerre  eut  éclaté  avec  la  Prusse 
en  1778  ,  Marie-Thérèse  lui  donna  un  té- 
moignage bien  flatteur  de  sa  confiance  , 
en  plaçant  sous  sa  direction  le  jeune  ar- 
chiduc Maximilien,  depuis  électeur  de  Co- 
logne. Son  crédit  se  soutint  également 
sous  le  règne  de  l'empereur  Joseph  II. 
Quoiqu'âgé  de  67  ans,  il  prit  une  part 
active  à  la  campagne  de  17  93  contre  les 
Français  ,  et  il  se  distingua  particulière- 
ment au  combat  de  Famarsetausiége  de 
Valenciennes.  Il  obtint  alors  le  cordon 
de  commandeur,  et,  peu  de  temps  après, 
la  grand'croix  de  Marie-Thérèse,  la  place 
de  vice-président  du  conseil  aulique  de 
guerre,  et  enfin  le  titre  de  feld-maré- 
chal.  Il  est  mort  à  Vienne  le  1*"^  avril  1814, 
universellement  regretté.  Il  joignait  à 
des  talens  peu  communs,  des  mœurs 
douces,  une  politesse  exquise ,  et  une 
loyautéTsans  égale.  On  lui  doit  une  carte 
des  provinces  belgiques  en  25  feuilles, 
qui  peut  soutenir  la  comparaison  avec  la 
grande  carte  de  France  de  Cassini. 

*  FERRAUD  ou  Féraud  (N...),  député 
à  la  Convention  nationale  par  le  départe- 
ment des  Hautes-Pyrénées,  naquit  dans  la 
vallée  d'Aure,  au  pied  des  Pyrénées,  vers 
l'an  17  64.  lise  montra  dès  l'ouverture 
de  la  session  l'ennemi  acharné  de  la  cour, 
fut  chargé  de  faire  un  rapport  sur  les 


FER 

pétitions  des  sections  de  Paris  qui  deman- 
daient la  mise  en  jugement  de  Louis  XVIj 
et  dans  le  procès  de  ce  malheureux  mo- 
narque ,  il  fut  de  la  majorité  qui  le  con- 
damna sans  sursis  ni  appel.  D'un  autre 
côté  ,  il  poursuivit  de  la  même  haine  les 
émigrés  :  il  fit  ordonner  qu'un  nommé 
\iard ,  envoyé  du  ministre  Lebrun  à 
Londres,  accusé  d'être  leur  agent  et 
l'espion  de  l'étranger,  fut  traduit  à  la  barre 
de  l'Assemblée.  Ce  fut  encore  lui  qui  de- 
manda que  le  ministre  Pache  ne  pût  sortir 
de  la  capitale  avant  d'avoir  rendu  compte 
de  sa  gestion.  Dans  plusieurs  occasions, 
Fcrraud  s'était  fait  remarquer  par  ses  con- 
naissances en  économie  politique ,  et  ses 
premiers  travaux  consacrés  aux  subsistan- 
ces, furent  pour  lui  l'occasion  de  présen- 
ter des  vues  très  judicieuses  sur  cette 
partie  du  service  public.  Ferraud  s'était 
attaché  au  parti  de  la  Gironde  ,  qui  vou- 
lait une  république  sans  terreur  :  aussi  le 
vit-on  combattre  de  tous  ses  eftbrts  la  fac- 
tion des  Montagnards  qui  voulaient  arriver 
au  même  but  que  la  Gironde ,  mais  par  la 
guillotine  et  les  échafauds,  comme  ils 
en  ont  donné  l'épreuve  épouvantable 
pendant  qu'ils  ont  été  au  pouvoir.  INul 
doute  que  Ferraud  n'eût  été  compromis 
dans  la  proscription  du  31  mai  17  93,  si 
alors  il  n'eût  été  en  mission.  Ses  amis , 
pour  le  mettre  à  l'abri  de  l'orage  qui  me- 
naçait les  Girondins,  le  firent  envoyer 
successivement  à  l'armée  du  Nord  et  à 
celle  des  Pyrénées-Orientales.  Ferraud 
avait  du  courage  ;  il  ne  put  être  le  té- 
moin inactif  des  efforts  et  des  succès  de 
nos  soldats  :  il  voulut  partager  les  uns 
et  les  autres,  et  à  plusieurs  reprises, 
on  le  vit  se  mêler  avec  les  combattans  : 
un  jour  il  chargea  avec  intrépidité  à  la 
tête  d'une  colonne ,  et ,  quoiqu'il  fût 
blessé,  il  termina  lui-même  cet  enga- 
gement et  parvint  à  repousser  les  en- 
nemis. Rappelé  à  la  Convention  après  le 
9  thermidor  an  2  (  2  juillet  1794),  il 
fut  adjoint  à  Barras  pour  réprimer  les  re- 
belles suscités  par  la  commune  de  Paris  ; 
il  continua  à  poursuivre  avec  un  zèle 
digne  d'éloge  les  démagogues  de  la  Mon- 
tagne, et  contribua  à  l'arrestation  de  Ro- 
bespierre. Renvoyé  à  l'armée  du  Nord , 


FER  287 

il  continua  à  donner  des  preuves  de  son 
intrépidité ,  et  on  peut  placer  son  nom 
parmi  ceux  des  guerriers  qui  se  distinguè- 
rent alors  à  la  prise  de  Frankendal  et  à 
celle  du  fort  du  Rhin.  De  retour  de  Celte 
mission  ,  il  rentra  à  l'assemblée.  La  con- 
duite qu'il  avait  tenue  à  l'égard  de  Ro- 
bespierre et  des  Montagnards  avait  indis- 
posé contre  lui  la  commune  et  ses  fougueux 
satellites  :  la  Gironde  s'efforçait  d'inspi- 
rer des  idées  d'ordre,  et  de  faire  sortir  la 
France  du  chaos  sanglant  dans  lequel 
elle  se  trouvait  plongée  :  d'un  autre  côté, 
la  faction  des  Jacobins  renouvelait  ses 
efforts  ;  elle  fait  arriver  l'abjecte  popu- 
lace des  faubourgs  de  Paris,  au  son  du 
tocsin  sonné  dès  le  milieu  de  la  nuit  du 
20  mai  17  96.  Les  rebelles  furieux  pénè- 
trent à  la  Convention  ;  ils  demandent  à 
grands  cris  du  pain ,  la  liberté  des  pa- 
triotes et  la  Constitution  de  1793.  Fer- 
raud accoutumé  à  braver  les  dangers,  s'é- 
lance pour  empêcher  cette  violation  de 
la  représentation  nationale.  Boissy  d'An- 
glas  est  au  fauteuil  ;  mais  vingt  armes  à 
feu  sont  dirigées  sur  le  président;  Fer- 
raud le  couvre  de  sdn  corps ,  et  dit  aux 
factieux  :  j'ai  e'tc  atteint  plus  d'une  fois 
du  fer  ennemi:  voilà  mon  sein  couvert 
de  cicatrices  ;  je  vous  abandonne  ma 
vie,  mais  respectez  le  sanctuaire  des 
lois.  Ces  paroles  furent  les  dernières  qu'il 
prononça  :  atteint  dans  la  poitrine  par 
un  coup  de  pistolet ,  il  tomba  ,  mais  il 
respirait  encore  ;  une  femme  insulte  à 
cette  victime  de  la  fureur  populaire ,  eu 
lui  frappant  le  visage  avec  ses  galoches  ; 
un  homme  traîne  son  cadavre  dans  le 
couloir  et  lui  coupe  la  tête,  la  place  au 
bout  d'une  pique,  el  la  présente  à  Boissy 
d'Anglas  qui ,  à  sa  vue  ,  se  lève ,  se  dé- 
couvre et  salue  avec  majesté  ces  restes 
d'un  homme  courageux  {voyez  Boissy 
d'ANGLAs  ).  Cet  assassin  était  un  serrurier 
qui  le  lendemain  fut  condamné  à  mort  ; 
mais  la  populace  l'arracha  violemment  à 
l'échafaud  :  peu  de  temps  après ,  il  fut 
repris,  condamné  de  nouveau  par  une 
commission  militaire  et  exécuté.  La  Con- 
vention décréta  que  des  honneurs  funè- 
bres seraient  rendus  à  Ferraud  :  cette 
cérémonie  eut  lieu  le  1 4  prairial ,  et  Lou- 


•>88  FER 

vel  y  prononça  son  oraison  funèbre  qui 

a  été  imprimée  en  nU5. 

FERRE  (  Vincent  ) ,  dominicain  ,  na- 
tif de  Valence  en  Espagne ,  cnseigiia  la 
théologie  avec  réputation  à  Burgos  et  à 
Rome ,  puis  à  Salamanque ,  oii  il  mourut 
vers  1G83.  On  a  de  lui  des  Commentaires 
estimés  en  Espagne  sur  la  Somme  de 
saint  Thomas,  en  8  vol.  in-fol.  Il  résout 
toutes  les  difficultés  avec  beaucoup  de 
netteté  et  de  précision. 

FERREIN  (  Antoine  ) ,  ne  à  Frespech 
en  Agénois ,  l'an  1693  ,  était  médecin  de 
Montpellier.  Il  a  été  de  l'académie  des 
Sciences ,  et  professeur  en  médecine  au 
coUége-royal.  Ses  Leçons  sur  la  Méde- 
cine,  et  celles  sur  la  Matière  médicale, 
publiées  depuis  sa  mort,  chacune  en  3 
vol.  in-12,  par  M.  Arnault  de  Nobleville, 
prouvent  qu'il  avait  bien  médité  sur  l'art 
de  guérir.  Il  l'exerça  avec  succès  jusqu'à 
sa  mort,   arrivée  à  Paris  le  28  février 

1709. 

*  FERREIRA  (  Antoine  ),  célèbre 
poète  portugais,  né  à  Lisbonne  en  1528  , 
mort  le  28  avril  1569  ,  à  peine  âgé  de  41 
ans,  a  publié  les  ouvrages  suivans,  qui 
sont  des  poésies  lyriques  ou  dramatiques, 
et  qui  l'ont  placé  au  rang  des  auteurs 
classiques  de  sa  patrie  :  1°  Inès  de  Cas- 
tro ,  la  seconde  tragédie  régulière  qui 
ait  paru  en  Europe ,  et  que  les  Portugais 
regardent  comme  un  des  beaux  monu- 
mens  de  leur  littérature.  La  Motte  en  a 
emprunté  les  plus  belles  scènes.  2°/'oc- 

'  mas  Lusitanos,  Lisbonne  ,  1598.  3°  Des 
Comédies  imprimées  en  1622  et  1771  , 
avec  celles  de  Sa  de  Miranda. 

FERREIRA  (  Antoine) ,  né  à  Lisbon- 
ne, publia  dans  cette  ville  en  1670  ,  un 
Cours  de  Chirurgie  estimé,  et  plusieurs 
fois  réimprimé  in-fol.  L'auteur  était  chi- 
rurgien de  la  chambre  du  roi  de  Portu- 
gal. Il  mourut  en  1677. 

*  FERREOL  (  S.  ),  premier  évêque  de 
Besançon ,  accompagna  saint  Irénée  dans 
les  Gaules ,  et  fut  envoyé  par  lui  dans  la 
Séquanie  avec  saint  Ferjeux  son  frère  : 
les  deux  apôtres  furent  arrêtés  par  les 
ordres  de  Claude,  préfet  romain.  Malgré 
les  tourmens  qui  leur  furent  infligés,  ils 
restèrent  inébranlables  dans  la  foi  ;  ils 


FER 

eurent  la  tôte  tranchée  l'an  21 1.  Leurs 
tombeaux  existent  encore  dans  un  souter- 
rain près  de  Besançon ,  dans  le  village 
de  Saint-Ferjeux. 

FERREOL  ou  Forgeot  (  S.  ) ,  martyr 
de  Vienne  dans  les  Gaules,  fut  mis  à  mort 
à  ce  que  l'on  croit ,  sous  le  règne  de  Dio- 
clétien  et  de  Maximien.  —  Il  faut  le  dis- 
tinguer de  saint  Ferreol  ,  évêque  de  Li- 
moges en  591  ,  sous  le  règne  de  Cliilpé- 
ric  ;  et  de  saint  Ferreol  ,  évêque  d'Ussez 
en  533.  On  a  de  celui-ci  une  Jièffle  mo- 
nastique ,  insérée  par  Holstenius  dans 
son  Codex  Regularum. 

FERRERA  (  Jean  ) ,  espagnpl ,  entre- 
prit ,  par  ordre  du  cardinal  Ximenès  ,  un  , 
Traité  complet  d^ Agriculture.  Il  ra- 
massa,  dan.î  son  ouvrage,  tout  ce  que 
les  anciens  et  les  modernes  avaient  écrit 
d'important  sur  ce  premier  art  du  genre 
humain.  Uy  joignit  ses  observations  par- 
ticulières, fruits  d'une  longue  expérience. 
Ce  livre  a  été  très  utile  dans  son  temps , 
et  il  a  servi  beaucoup  à  ceux  qui  ont  de- 
puis traité  la  même  matière. 

FERRERAS  (  Don  Jean  de  )  naquit 
le  7  juin  1652  ,  à  Labaneza  en  Espagne. 
Après  avoir  fait  ses  études  avec  beaucoup 
de  succès  dans  l'université  de  Salaman- 
que ,  il  obtint  au  concours  la  cure  de 
Saint- Jacques  de  Talavera  ,  dans  le  dio- 
cèse de  Tolède.  Il  fut  transféré  ensuite  à 
celle  de  Saint-Pierre  de  Madrid  par  son 
confesseur.  (Le  nonce  du  pape  le  fit  théo- 
logien et  examinateur  de  son  tribunal , 
et  l'Inquisition  le  nomma  son  qualifica- 
teur et  son  proviseur.  Le  roi  d'Espagne 
voulut  qu'il  assistât  aux  juntes  d'état  et 
à  son  conseil  privé.)  Ferreras  refusa, 
quelque  temps  après,  deux  évêchés  con- 
sidérables ,  malgré  les  instances  que  lui 
fit  la  cour  pour  les  lui  faire  accepter. 
L'académie  de  Madrid  le  choisit ,  l'an- 
née même  de  sa  fondation  ,  en  1713, 
pour  un  de  ses  membres.  Le  roi ,  en 
confirmant  un  choix  applaudi  par  tous 
les  gens  de  lettres  ,  l'honora  de  la  charge 
de  garde  de  sa  bibliothèque.  Ferreras 
fut  très  utile  à  l'académie  naissante  ,  par 
ses  lumières.  Il  lui  servit  surtout  beau- 
coup pour  la  composition  du  Diction- 
naire espagnol,  entrepris  et  publié  par 


FER 

cette  illustre  compagnie  en  1739,  en 
6  vol.  in-fol.  Ferreras  était  mort  4  ans 
auparavant  en  1735.  On  a  de  ce  savant 
espagnol  plusieurs  ouvrages  de  théologie, 
de  philosophie ,  de  belles-lettres  et  d'his- 
toire. Le  plus  considérable  et  le  plus  connu 
est  son  Histoire  d^ Espagne ,  écrite  en 
sa  langue,  la  meilleure ,  la  plus  complète 
que  nous  ayons  sur  cette  nation  :  M.  d'Her- 
milly  en  a  donné  une  bonne  traduction 
française  en  10vol.  in-4,  Paris,  1731. 

*  FERRÈRE  (  Philippe),  célèbre  avo- 
cat au  parlement  de  Bordeaux ,  né  à  Tar- 
bes  en  1767,  se  plaça  dès  ses  premiers 
débuts  au  rang  des  orateurs  les  plus  dis- 
tingués du  barreau  de  sa  province.  Il  n'a- 
dopta pas  les  principes  de  la  révolution  ; 
aussi  fut-il  obligé  de  quitter  sa  ville  na- 
tale dans  laquelle  il  ne  put  rentrer  qu'a- 
près la  terreur  (  1795  ).  Il  reprit  ses  fonc- 
tions d'avocat  et  y  obtint  des  succès  écla- 
tans.  En  1804  il  refusa  de  faire  partie  du 
tribunat ,  et  sous  la  restauration  il  ne  sol- 
licita aucune  récompense  de  sa  fidélité. 
Il  est  mort  le  14  janvier  1815  à  l'âge  de 
48  ans ,  d'une  maladie  de  poitrine  que  les 
fatigues  de  la  plaidoirie  lui  avaient  oc- 
casionée.  Ses  principaux  discours  ont 
été  imprimés  pour  la  première  fois  dans 
le  Barreau  français  de  MM.  Clair  et  Cla- 
pier, Paris,  1 820  et  années  suivantes  ,  12 
volumes  in-8 .  Ses  plaidoyers  sont  remar- 
quables par  l'élévation  des  pensées,  l'é- 
légance et  l'énergie  du  stile,  et  par  les 
mouvemens  oi'atoires  dont  ils  sont  ani- 
més. 

*  FERRERI  (Zachaîl-),  né  à  Vienne 
en  1479,  étudia  le  droit  canonique  à 
Padoue ,  et  entra  fort  jeune  dans  l'ordre 
de  Saint-Benoît  de  la  congrégation  du 
Mont-Cassin.  Passionné  pour  l'étude,  et 
surtout  pour  la  poésie ,  il  s'était  formé 
dans  sa  cellule  une  bibliothèque  considé- 
rable ;  mais  soit  que  les  livres  ne  fussent 
pas  conformes  aux  études  de  son  état , 
soit  que  cette  espèce  de  propriété  fût 
contraire  à  la  règle  ,  le  président  de  la 
congrégation  fit  enlever  la  bibliothèque. 
Après  avoir  prié  inutilement  qu'on  lui 
rendît  ses  livres  chéris ,  Ferreri  résolut , 
dans  son  chagrin ,  de  passer  dans  l'ordre 
des  Chartreux.  Ses  supérieurs  s'y  oppo- 

V. 


FER  289 

sèrent  ;  cependant ,  sans  tenir  compte  de 
ce  refus,  il  s'y  réfugia.  Mais,  réclamé 
par  ses  supéiùeurs ,  il  fut  forcé  de  revenir 
dans  son  monastère ,  d'oîi  on  l'envoya  , 
en  1 606  ,  continuer  ses  études  à  Rome. 
Après  y  avoir  été  fait  docteur  en  droit 
civil  et  canonique ,  il  y  reçut  la  couronne 
poétique.  Son  dessein  de  se  faire  char- 
treux l'occupait  continuellement.  Etant 
à  Venise  en  1 508  ,  il  entra  au  noviciat 
de  cet  ordre ,  prit  le  nom  de  frère  Zacha- 
rie-Benoît  ;  mais  de  nouveaux  obstacles 
l'empêchèrent  encore  de  faire  sa  profes- 
sion. Son  mérite  et  ses  talens  l'ayant  fait 
nommer  abbé  de  Subbachio ,  il  assista  eu 
cette  qualité  au  concile  de  Pise ,  convo- 
qué en  1511  ,  contre  le  pape  Jules  II;  et 
eu  fut  nommé  secrétaire.  S'é tant  pronon- 
cé fortement  contre  le  pape ,  il  n'avança 
pas  sous  le  pontificat  de  Jules  11,  mais 
Léon  X ,  son  successeur  ,  le  nomma ,  en 
1519,  à  l'évèclié  de  Guardia,  et  l'em- 
ploya   dans    plusieurs  missions   impor- 
tantes en  Allemagne.  A  son  retour  en  Ita- 
lie ,  après  la  mort  de  Léon  X ,  il  fut  nom- 
mé gouverneur  de  Faenza.  Il  mourut  à 
Rome  ,  vers  1526  ou  1527.  Il  a  laissé  1* 
Sancli  carthusiensis  ordinis  origo ,  Man- 
toue,  1509.  C'est  une  vie  de  saint  Bruno, 
suivie  de  diverses  poésies  et  de  l'apologie 
de  l'auteur  ;  elle  est  insérée  dans  la  Col- 
lection des  œuvres  de  saint  Bruno,  Paris, 
1624.  2°  Promotiones  et  progressas  sa- 
cro-sancti  Pisani  concilii,  inchoati  anno 
1511  ,  necnon  acta  et  décréta  sacro- 
sanctœ  gcneralis  Pisanœ  synodi,  in-fol. 
3"  Apologia  sacri  Pisani  concilii  nioder- 
ni ,  Pise ,  1 5 1 1  ;  4"  Acta  scitu  dignissima 
Consiantiensis   concilii.    Milan,   1511, 
in-fol.  ;  5°  Décréta  et  acta  concilii  B asi- 
liensis ,  1511,  in-fol. ,  rare  ,  1512,  in-8  ; 
6°  Lugdunense  somniuni  de  divi  Leonis 
X  pontificis  maximi  ,  ad  summum  pon^ 
tificatum  divina  promotione  ,  carmen  , 
Lyon,  1513,  in-4,  inséré  dans  le  tome 
4  des  Carmina  illustrium  poetarum  ita- 
lorum  ,  Florence,  1721.  On  prétend  que 
ce  poème ,  composé    de  plus  de  mille 
vers ,  fut  achevé  en  trois  jours.  7°  Vita 
sancti  Casimiri ,  Cracovie,  1520,  et  in- 
sérée dans  les  Acta  sanctorum.  de  Bol- 
landus;  8°  Oratio  de  eliminandis  de  regno 

»9 


290  FER 

PoUmiœ  erroneis  traditionibus  Liitheri , 
Cracovie,  1521;  9"  De  rcformatione 
Ecclesiœ,  suasoria  orntio  ad  bcatum 
p^trcm  Iladvianum  Vlpontif.  max.  Ve- 
nise, 1622,  in-8  ;  10"  Hymni  novi  ce- 
clesiastici ,  juxta  vcram  metri  et  lati- 
Tiitalis  normnni ,  Rome,  1525,  in-4> 
ibid.,  1549  ,  in-8  :  ces  hymnes  sont  esti- 
m(!es.  Il  y  a  de  Ferreri  plusieurs  autres 
ouvrages  qui  n'ont  point  été  publiés. 

*  FERRERI  (Matthias  ) ,  capucin  pié- 
iTiontais,  naquit  à  Cavalco-Maggiore, 
dans  le  17*  siècle.  Après  avoir  professé 
la  théologie  dans  divers  couvens  de  son 
ordre ,  il  fut  nommé  définiteur  des  mai- 
sons de  son  ordre.  Ses  talens  pour  la 
chaire  le  firent  choisir  pour  aller  prêcher 
dans  la  vallée  des  Alpes  où  il  y  avait 
beaucoup  de  protestans,  dont  il  eut  le 
bonheur  de  ramener  un  assez  grand  nom- 
bre dans  le  sein  de  l'Eglise.  On  a  de  lui  une 
histoire  des  missions  en  général  et  en  par- 
ticulier de  celles  faites  par  les  religieux 
de  son  ordre  dans  les  vallées  des  Alpes  : 
elle  a  pour  titre  :  Jus  regnandi  aposto- 
licuni  per  miîsiones  apostolicas  religio- 
sorum  iotius  ordinis  hierarchici  ab  iiiitio 
Ecclesiœ ,  sive  Ralioiiarium  chronogra- 
phicwn  missionum  cv  an  g  clic  arum  ab 
apostolicis  operariis ,  prœsertim  capu- 
cinis  ,  in  quatuor  mundi  paitibus  ,  si- 
gnanter  in  Gallia  cisalpina ,  exercita- 
runi,  Turin,  1C59,  2  vol.  in-fol.  On  y 
trouve  des  détails  qui  peuvent  servir  à 
l'histoire  et  à  la  topographie  de  ces  con- 
trées peu  connues. 

*  FERRERO  -  DELLA  -  MARMOR A 
(  Thérèse-Marie-Charles-Yictoire  ) ,  car- 
dinal, né  le  5  octobre  17  57  à  Turin  ,  fut 
évêque  de  Casai  en  1 790 ,  puis  de  Saluzzo 
en  1805  ;  Léon  XII  lui  accorda  la  pourpre 
le  27  septembre  1824  ;  mais  ce  prélat  ne 
parut  point  au  dernier  conclave.  Il  est 
mort  la  nuit  du  30  décembre  1831  ,  dans 
son  palais  abbatial  de  St.-Benigne.  Les 
journaux  du  Piémont  ont  fait  l'éloge  de 
ses  vertus  ;  nous  n'avons  pu  nous  procu- 
rer d'autres  renseignemens  sur  ce  car- 
dinal :  ils  sont  puisés  dans  le  tome  70  de 
VAmi  de  la  religion  et  du,  roi ,  page  616. 

FERRET  ,  ou  Ferrktti  (  Emile  ) ,  né 
à  Caslel-Franco  dans  le  Bolonais,  en  1489, 


FER 

secrétaire  du  pape  Léon  X ,  fut  appelé  à 
Palis  par  François  l*' ,  qui  le  lit  membre 
du  parlement,  et  le  chargea  de  trois  lé- 
gations ,  l'une  vers  les  Vénitiens ,  l'autre 
vers  les  Florentins ,  la  troisième  vers 
l'empereur .  dont  il  s'acquitta  avec  hon- 
neur. Il  mourut  à  Avignon  le  15  juillet 
1552.  Il  cultiva  les  muscs  dans  le  tumulte 
de  la  cour.  C'était  un  homme  modeste , 
modéré,  libéral,  dont  tout  le  plaisir  était 
de  jouer  du  luth  et  de  se  promener.  Il  fit 
mettre  au  dessus  de  la  chaire  de  juris- 
prudence d'Avignon  ,  qu'il  fit  faire  à  ses 
dépens,  cette  inscription  :  Peritum  orno^ 
imperitum  dedccoro.  On  a  de  lui  :  1°  Opé- 
ra juridica ,  1598,  i\x-k°  ;  2°  Ciceronis 
orationes  ad  veterum  codicum  fidem 
castigatœ.  On  trouve  sa  Vie  dans  les 
Vitœ  clarissimorum  jurisconsultorum 
de  Buder,  léna,  1722  ,  in-8. 

FERRETTI ,  poète  et  historien  de 
Vicence  ,  dans  le  14®  siècle,  fut  un  de 
ceux  qui  chassèrent  la  barbarie  répandue 
en  Europe ,  et  qui  firent  renaître  le  bon 
goût  dans  les  belles-lettres.  Parmi  les  pro- 
ductions de  ce  savant  en  prose  et  en  vers , 
il  y  a  une  Histoire  de  son  temps  en  7  li- 
vres, depuis  1250  jusqu'en  1318:  elle 
est  curieuse.  Muratori  l'a  publiée  dans  le 
9' tome  des  écrivains  de  l'Histoire  d'Italie. 
On  a  encore  de  lui  un  Poème  latin  sur  les 
beaux  faits  de  Can  de  l'Escale. 

FERRI  (  Paul  ) ,  ministre  protestant  à 
Metz  sa  patrie  ,  naquit  en  1591 ,  et  mou- 
rut de  la  pierre  en  IGGO.  On  lui  en  trouva 
plus  de  80  dans  la  vessie.  Ferri  était 
connu  de  son  temps  par  ses  écrits  et  par 
ses  sermons  ;  à  présent  il  ne  l'est  plus 
que  par  la  réfutation  que  fit  Bossuet  de 
son  Catéchisme ,  publié  en  1654  ,  inrl2. 
C'est  par  cette  réponse  que  ce  prélat  fit 
son  entrée  dans  la  république  des  lettres. 

FERRI  (Ciro  }.  royez  Ciro-Ferri.... 
F'oyez  aussi  Ferry. 

'  FERRIER  (  Boniface  ) ,  général  de 
l'ordre  des  chartreux ,  naquit  en  1355  à 
Valence  en  Espagne.  Après  avoir  étudié 
le  droit  et  reçu  le  bonnet  à  l'université 
de  Lérida ,  il  exerça  la  magistrature  dans 
sa  ville  natale ,  et  s'étant  marié ,  il  de- 
vint père  de  onze  enfans  ;  mais  ayant 
perdu  son  épouse  et  neuf  de  ses  enfans , 


FER 

il  résolut  de  se  vouer  à  l'état  monastique. 
Son  frère  Vincent  Ferrier ,  religieux  de 
l'ordre  de  Saint-Dominique ,  le  confirma 
dans  ce  pieux  dessein.  Après  avoir  vendu 
ses  biens  et  distribué  aux  pauvres  ce  qui 
n'était  pas  nécessaire  à  l'établissement 
des  deux  fils  qui  lui  restaient ,  il  entra , 
en  1396  ,  chez  les  chartreux  de  la  Porte- 
du-Ciel ,  prit  les  ordres ,  et  se  livra  tout 
entier  aux  éludes  de  sou  nouvel  état.  Elu 
général  de  l'ordre  en  1402,  après  la  mort 
de  Guillaume  Raynaud,  il  gouverna  avec 
sagesse.  Urbain  VI  et  Benoit  XIII  se  dis- 
putaient alors  le  pontificat.  Ce  schisme 
divisa  aussi  les  chartreux ,  partages  entre 
les  deux  obédiences.  Ferrier  était  pour 
Benoit  XIII ,  avec  ceux  qui  l'avaient  élu  ; 
le  reste  était  pour  Urbain  VI.  Etienne  de 
Sienne  avait  été  élu  général  de  cette  par- 
tie. Pour  faire  finir  une  scission  qui  ne 
pouvait  qu'avoir  des  résultats  funestes , 
les  deux  généraux  eurent  la  sagesse  de  se 
démettre ,  afin  qu'on  en  élût  un  troisième 
qui  réunît  tous  les  monastères  sous  son 
autorité.  Ferrier,  malgré  sa  résolution, 
fut  forcé  par  Benoît  XIII  (  Pierre  de  Lune  ) 
de  reprendre  ce  gouvernement.  Il  lui 
resta  encore  attaché ,  mais  lorsqu'il  vit 
son  obstination  à  vouloir  rester  sur  le 
trône  pontifical  malgré  les  maux  de  l'E- 
glise et  les  décrets  du  concile  de  Con- 
stance, il  abandonna  son  parti,  et  mourut 
quelque  temps  après.  Sainte-Marthe  fixe 
sa  mort  au  27  avril  1417  ;  d'autres  ne  la 
placent  que  deux  ans  après.  On  connaît 
de  lui  :  1°  un  Traite  dans  lequel  il  exa- 
mine pourquoi  il  y  a  eu  peu  de  chartreux 
canonisés,  et  pourquoi  on  cite  peu  de 
miracles  de  cet  ordre  ;  2°  une  Traduc- 
tion de  la  Bible  en  espagnol  ;  3"  un  Traita 
adressé  à  Boniface ,  religieux  du  même 
ordre  ;  4°  Dô  approbatione  ordinis  liber 
unus;  6°  des  Sermons  et  des  Lettres.  Il 
se  montra  toujours  fidèle  observateur  de 
la  discipline  régulière. 

FERRIER  (  Armand  du  ) ,  professeur 
en  droit  à  Toulouse  sa  patrie ,  ensuite 
président  aux  enquêtes  à  Paris ,  et  maî- 
tre des-requêtes,  fut  choisi  pour  se  trouver 
en  qualité  d'ambassadeur  au  concile  de 
Trente.  Il  y  soutint  les  intérêts  de  la  France 
avec  une  vivacité  et  une  aigreur  qui  dé- 


FER  291 

plurent  à  plusieurs  prélats.  Par  égard  à 
leurs  plaintes  ,  on  envoya  Ferrier  ambas- 
sadeur à  Venise.  Il  s'y  lia  avec  Fra-Paolo, 
et  lui  fournit  des  mémoires  pour  son 
Histoire  du  Concile  de  Trente ,  pleins 
de  l'esprit  de  secte  dont  il  était  imbu. 
Ferrier  mourut  garde-des-sceaux  du  roi 
de  Navarre  ,  depuis  Henri  IV  ,  en  1 585  , 
âgé  de  79  ans,  laissant  quelques  ouvra- 
ges. Il  fit  profession  publique  du  calvi- 
nisme dans  ses  dernières  années. 

FERRIER  (  Jean  )  ,  né  à  Rhodez  en 
1619 ,  entra  chez  les  jésuites ,  y  professa, 
et  fut  ensuite  confesseur  de  Louis  XIV. 
Il  mourut  en  1674,  laissant  un  Traite' 
sur  la  Science  moijenne ,  et  des  écrits 
contre  les  disciples  de  Jansénius. 

FERRIER  (  Jérémie  ) ,  ministre  pro- 
testant, et  professeur  en  théologie  à  Nîmes, 
embrassa  la  religion  catholique  ,  et  de- 
vint conseiller  d'état.  Il  mourut  l'an  1 626. 
On  lui  attribue  le  Catholique  d'Etat, 
1625,  in-8  :  c'est  une  réponse  aux  repro- 
ches que  les  partisans  de  l'Espagne  fai- 
saient à  la  France.  Il  est  encore  auteur 
d'un  Traité  de  VÂntechrist  et  de  ses 
marques,  in-fol. ,  Paris,  1615.  Sa  fille 
fut  mariée  au  fameux  lieutenant-criminel 
Tardieu  ,  qui  fut  assassiné  avec  elle  par 
des  voleurs,  en  1664.  Son  gendre  et  sa 
fille  étaient  connus  par  l'avarice  la  plus 
sordide. 

FERRIER  (  Louis  ) ,  natif  d'Avignon , 
poète  français ,  fut  mis  à  l'inquisition  de 
cette  ville ,  pour  certaine  maxime  d'Epi- 
cure  : 

L'amour  pour  les  mortels  est  le  toureraln  bien. 

Mauvaise  traduction  du  premier  vers  de 
Lucrèce  : 

£aeadum  genitrix,  dÎTumqae  hominumque  TolupUs. 

Ce  vers  se  trouve  dans  ses  Préceptes  ga- 
lans,  poème  qui  courut  manuscrit  avant 
qu'il  le  publiât  à  Paris  en  1678,  in-12. 
Ferrier  ayant  été  absous  par  le  saint-of- 
fice ,  à  la  prière  'le  ses  amis  ,  se  retira  à 
Paris,  et  devint  précepteur  de?. fi^  du 
duc  de  Saint-Aignan.  Il  mourut  en  i721, 
à  69  ans ,  en  Normandie ,  oîi  il  avait 
acheté  la  terre  de  la  Martinière.  Outre  ses 
Préceptes  galans  ,  dont  le  titre  marque 
assez  que  ce  n'est  point  un  code  de  mœurs. 


29a  FER 

on  a  de  lui  quelques  tragédies  plus  que 
môdiocres ,  et  une  traduction  de  Justin, 
1693,  2  vol.  in-12,  qui  a  été  éclipsée 
par  celle  de  l'abbé  Paul. 

FERRIER.  Voyez  Viîicewt- Fermer 
(S.).        , 

FERRIERE  (  Claude  de) ,  docteur  en 
droit  de  l'université  de  Paris  sa  patrie , 
naquit  en  16-39.  Il  professa  la  jurispru- 
dence à  Paris  ,  puis  à  Reims  ,  oii  il  mou- 
rut en  1 7 1 5  ,  à  7  7  ans.  Ses  ouvrages  sont 
estimés ,  quoiqu'il  ait  composé  la  plu- 
part pour  subvenir  aix  besoins  pressans 
d'une  famille  nombreuse.  Il  enrichit  les 
libraires  ;  mais  ils  ne  l'enrichirent  point. 
Les  honoraires  de  ses  livres  suffisaient  à 
grand'peine  pour  le  dédommager  du 
temps  qu'il  sacrifiait  à  leur  composition  , 
quoiqu'on  ne  puisse  pas  l'accuser  d'avoir 
poussé  ce  sacrifice  trop  loin.  Les  princi- 
paux sont  1°  La  Jurisprudence  du  Code, 
1684  ,  en  2  vol.  in-4.  2"  —  du  Digeste  , 
1688,  2  vol.  in-4.  3°  —  des  Novelles  , 
1688  ,  2  vol.  in-4.  4"  La  Science  des  No- 
taires ,  in-4  ,  portée  par  son  fils  à  2  vol. 
et  réimprimée  sous  ce  titre  :  Le  nouveau 
parfait  Notaire ,  ou  la  Science  des  No- 
taires de  feu  C.  J.  de  Perrière ,  mise  en 
harmonie  avec  les  dispositions  du  code 
civil,  etc.,  par  M.  Massé,  notaire  à  Paris, 
1805,  2  vol.  in-4  ;  4«  édit.  1813  ,  3  vol. 
in-4.  5°  Le  Droit  de  Patronage,  1686  , 
in-4.  6°  Institution  coutumière ,  3  vol. 
m-12.  7°  Introduction  à  la  Pratique, 
1758,  in-12.  8°  Des  Commentaires  sur 
la  Coutume  de  Paris,  2  vol.  in-12.  9°  Un 
Traité  des  Fiefs  ,  1680,  in-4.  1 0"  Le  Re- 
cueil des  Commentateurs  de  la  Coutume 
de  Paris  ,  1714  ,  en  4  vol.  in-fol.  Il  faut 
avouer  que  la  plupart  des  écrits  de  Claude 
de  Perrière  ne  sont  que  des  compilations, 
qui  quelquefois  manquent  d'exactitude  : 
mais  elles  peuvent  être  regardées  comme 
des  répertoires  utiles.  Le  Dictionn.  de 
Droit,  1771  ,2  vol.  in-4  ,  est  de  Claude- 
Joseph  son  fils ,  qui  a  été  doyen  des  pro- 
fesseurs en  droit  dansl'uuiversité  de  Paris, 
dont  nous  avons  encore  la.  Traduction 
nouvelle  des  Institutes  de  Tcmpereur 
Juslinien,  avec  des  observations  pour 
FintelUgcnce  du  texte ,  VappUcalion  du 
droit  français  au  droit   romain,  etc. 


FER 

Cet  ouvrage  ,  qui  est  une  augmentation 
de  celui  que  son  père  avait  donné  sur  la 
môme  matière  ,  peut  être  de  quelque  se- 
cours pour  les  jeunes  gens  qui  étudient  le 
droit.  Si  le  père  ne  parvint  pas  à  la  for- 
tune ,  ce  n'est  pas  qu'il  n'eût  reçu  de  la 
nature  les  dons  de  la  figure  et  de  l'esprit; 
mais  ils  étaient  déparés  par  une  hauteur 
incommode ,  par  une  prévention  outrée 
pour  ses  sentimens ,  et  par  la  manie  de 
critiquer  ceux  des  autres. 

*  FERRIÈIIES  (  Charles-Elie  ,  mar- 
quis de),  né  à  Poitiers  le  27  janvier  1741, 
d'une  famille  noble  et  distinguée  ,  entra 
dans  les  chevau-légers  de  la  garde  du 
roi.  Mais  préférant  l'étude  des  belles-let- 
{res  à  la  vie  militaire ,  il  se  retira  au  châ- 
teau de  Marsay  près  de  Mirebeau.  Au 
commencement  de  la  révolution ,  il  fut 
nommé  député  de  la  noblesse  de  la  séné- 
chaussée de  Saumur  aux  Etats-généraux, 
et  il  y  présenta  un  plan  de  finance  pour 
V établissement  d'une  caisse  territoriale. 
Il  vécut  depuis  dans  la  retraite ,  et  mou- 
rut dans  son  château  de  Marsay,  le  30  juil- 
let 1 804.  On  a  de  lui  :  1°  Le  Théisme ,  ou 
Recherches  sur  la  nature  de  Vhomme  et 
sur  ses  rapports  avec  les  autres  hommes 
dans  l'ordre  moral  et  dans  V ordre  poli- 
tique, 2  vol.  in-12,  2''  édition  1791. 
l'auteur  y  développe  la  doctrine  de  Des- 
cartes, de  Malebranche  et  de  Locke  ,  et 
cherche  à  faire  connaître  le  sort  réservé 
aux  nations  dont  les  mœurs  et  lesgouver- 
nemens  ne  sont  pas  en  rapport  avec  la 
religion  établie  :  c'est  un  bon  ouvrage. 
2°  De  la  constitution  qui  convient  aux 
Français  ,1789,  in-8.  3°  Plan  de  finan- 
ces pour  V établissement  d^ une  caisse  ter- 
ritoriale. 4°  Opinion  contre  F  arrestation 
du  roi  à  Farennes,  1791,  in-8 .  5°  Compte 
rendu  à  mes  commettans ,  1791,  in-8.  - 
6°  De  Tétat  des  lettres  dans  le  Poitou  1 
depuis  l'an  Zdd  jusqu'à  l'année  1789.  ' 
1°  Mémoires  pour  servir  à  l'histoire  de 
V Assemblée  constituante  et  de  la  révolu- 
tion rfe  1789,  3  vol.  in-8,  17.98.  C'est 
son  meilleur  ouvrage.  Ferrières  a  écrit 
avec  la  plus  grande  impartialité;  ses  livres 
sont  devenus  très  rares.  Le  tome  4  qui 
finit  à  la  mort  du  roi ,  est  resté  manu- 
scrit. Il  a  paru  dans  la  Collection  des  mc~ 


FER 

moires  relatifs  à  la  révolution  finnçaisè 
publiée  par  MM.  Berville  et  Barrière  avec 
une  notice  sur  la  \ie  de  l'auteur,  des 
noies  et  des  c'claircissemens,  Paris,  1821. 

FERRON  (  Arnaud  du  ) ,  conseiller 
au  parlement  de  Bordeaux ,  sa  patrie,  est 
auteur  d'une  continuation  en  latin  de 
l'Histoire  de  Paul-Emile  ;  de  savantes  ob- 
servations sur  les  lois ,  et  d'autres  ou- 
vrages qui  lui  ont  assuré  le  surnom  d'At- 
ticus ,  que  lui  donna  Scaliger.  Il  fut  em- 
ployé dans  les  grandes  affaires,  et  mourut 
en  1563  ,  à  48  ans.  Sa  Continuation  de 
Paul-Emile  ,  imprimée  à  Paris  ,  chez  Vas- 
cosan ,  1 555  ,  in-8  ,  est  ample ,  sans  être 
trop  longue.  Elle  s'étend  depuis  le  ma- 
riage de  Charles  VIII  jusqu'au  règne  de 
François  I.  Les  anecdotes  qu'il  rapporte 
sont  curieuses ,  et  ses  détails  fort  exacts. 
Son  père  était  aussi  conseiller  au  parle- 
ment. 

*  FERUCCI  (François),  sculpteur, 
né  à  Fiésolé,  mort  en  1585,  s'est  fait 
connaître  par  ses  ouvrages  qui  sont  tous 
en  porphyre.  On  prétend  que  c'est  lui  qui 
trouva  le  secret  de  tremper  l'acier,  afin 
de  pouvoir  travailler  cette  matière  si 
dure.  Il  réussit  par  cette  invention  à  faire 
le  bassin  de  la  magnifique  fontaine  du 
palais  Pitti  à  Florence,  la  statue  du  grand- 
duc  Cômc,  et  celle  de  la  Justice,  qui  est 
surla  colonne  de  la  Ste.-Tr inité.  Il  y  a  eu 
plusieurs  autres  sculpteurs  de  ce  nom. 

FERRY  (  Jean-Baptiste  ) ,  prêtre ,  de 
la  société  littéraire-militaire,  né  à  Besan- 
çon ,  mort  au  mois  d'avril  1 7  56  ,  âgé  de 
plus  de  60  ans,  était  chanoine  prében- 
dier  de  l'église  de  Sainte-Madeleine  en 
cette  ville.  On  a  de  lui  plusieurs  livres 
(Vèqlise  ,  à  l'usage  du  diocèse  de  Besan- 
çon. ^OjrezFERRI.  <. 

FERTÉ  (Henri  deSenecterre,  maréchal 
de  La),  donna  des  preuves  de  son  courage 
au  siège  de  La  Rochelle  (1628),  àl'altaque 
du  pas  de  Suze ,  au  secours  de  Casai ,  à  la 
prise  de  Moyenvic ,  à  celle  de  Trêves ,  et 
à  la  bataille  d'Avènes.  Il  n'était  alors  que 
colonel  ;  il  fut  fait  maréchal  de  camp  sur 
la  brèche  d'Hesdin ,  pour  avoir  défait  les 
troupes  que  les  ennemis  voulaient  y  je- 
ter. Il  se  signala  à  la  bataille  de  Rocroy, 
et  surtout  à  celle  de  Lens.  Il  défit  le  duc 


FER  293 

de  Lorraine,  et  lui  tua  près  de  2,000 
hommes  au  combat  de  Saint-Nicolas  en 
1650.  Devenu  maréchal  de  France,  le  5 
janvier  1661 ,  il  sauva  Nancy  peu  après  , 
et  prit  la  même  année ,  Chaste,  Mirecourt 
et  Vaudrevange.  Sa  valeur  et  son  expé- 
rience éclatèrent  encore  en  1653,  1655. 
Il  assista  aux  sièges  de  Landrecies  et  de 
Saint-Guilain  ,  fut  fait  prisonnier  à  celui 
de  Valenciennes,  et  racheté  par  Louis  XIV 
pour  100,000  livres.  En  1657  et  1658  ,  il 
prit  Montmédi  et  Gravelines.  Il  mourut 
en  1681  ,  à  82  ans,  chevalier  des  ordres 
du  roi.  Sa  femme,  Madeleine  d'àngenses, 
morte  en  1714  ,  à  85  ans,  a  donné  lieu  à 
un  petit  roman  qui  porte  son  nom,  et 
qui  se  trouve  avec  ceux  de  Bussy.  Son 
fils,  Henri-François,  duc  de  La  Ferté, 
mort  en  1703,  n'a  pas  laissé  de  postérité 
masculine.  Le  maréchal  de  La  Ferté  était 
un  homme  vain  et  présomptueux.  Il  ne 
pouvait  souffrir  les  succès  de  Turenne , 
qu'il  était  incapable  d'égaler,  quoiqu'il  eût 
d'ailleurs  du  mérite.  Malgré  la  violence 
de  son  humeur,  il  était  fort  empressé  à 
faire  sa  cour ,  et  ce  fut  en  partie  ce  qui 
contribua  à  l'élever  aux  dignités. 

FERTÉ-IMBAUT  (Le  maréchal  de  La), 
Voyez  Estampes  (  Jacques  ). 

FERTEL  (  Martin-Dominique  ) ,  im- 
primeur, né  vers  l'an  1670.  Après  avoir 
parcouru  la  France  et  l'Italie,  il  s'établit 
à  Saint-Omer.  Il  a  donné  au  public  :  La 
Science  pratique  de  l'Imprimerie,  Saint- 
Omer,  1723,  in-4,  avec  fig.  :  ouvrage  cu- 
rieux ,  renfermant  tout  ce  qui  tst  relatif  à 
cet  art.  Il  est  mort  l'an  1752. 

FERVAQUES.  Voyez  Hautemkr. 

FERUS.  Voyez  Sauvage. 
*FERUSSAC  (Jean-Baptiste,  d'Au- 
debard,  baron  de),  naquit  le  30  juin 
1745,  à  Clérac  ,  d'une  ancienne  famille 
distinguée  dans  l'armée  :  son  père ,  lieu- 
tenant-colonel du  régiment  de  cavalerie 
de  Clermont-Prince ,  voulut  qu'il  suivit 
la  carrière  de  ses  aïeux  ;  il  le  fit  en  con- 
séquence entrer  en  1754  à  l'école  royale 
militaire,  d'où  il  sortit  en  1762  avec  le 
grade  de  sous-lieutenant  de  grenadiers 
au  régiment  de  Béarn-infanterie.  Le  jeu- 
ne chevalier  de  Férussac  s'occupa  d'étu- 
des sérieuses ,  surtout  de  celles  qui  sont 


294  FER 

nécessaires  pour  entrer  dans  l'arlillerie  : 
bientôt  en  effet  il  passa  dans  le  régiment 
de  Besançon  qui  appartenait  à  cette  arme: 
il  était  capitaine  en  178G.  Employé  dans 
les  principaux  établissemciis  de  l'artille- 
rie ,  il  soigna  surtout  les  outils  des  pion- 
niers auxquels  il  apporta  des  modifica- 
tions avantageuses.  Il  était  sur  le  point 
d'être  nommé  major,  lorsque  la  révolu- 
tion éclata.  Alors  il  quitta  le  service  , 
et  en  1791 ,  il  alla  rejoindre  les  princes. 
Ce  fut  sans  contredit  l'un  des  meilleurs 
officiers  de  cette  armée  :  nommé  chef  de 
brigade ,  puis  lieutenant-colonel,  il  com- 
manda constamment  l'artilleriede  l'avant- 
garde  sous  les  ordres  du  duc  d'Enghien. 
Il  assista  à  toutes  les  affaires  et  se  distin- 
gua surtout  à  celle  de  Schusseuried ,  où 
il  sauva  l'armée  de  Condé  d'un  désastre 
inévitable.  Il  resta  constamment  avec  les 
princes  jusqu'au  départ  de  son  corps 
pour  la  Volhynie.  De  retour  en  France 
(1801) ,  il  se  consacra  dès  lors  à  l'éduca- 
tion de  ses  eufans,  refusant  les  offres 
que  Buonaparte  lui  fit  faire,  et  ne  voulant 
exercer  d'autres  fonctions  que  celle  de 
maire  de  sa  commune.  A  la  rentrée  du 
roi ,  il  accepta  le  litre  honorifique  de 
colonel  avec  une  pension  de  1 ,800  francs. 
Ce  brave  officier  est  mort  au  château  de 
Lagardç  ,  près  de  Lauzerte  en  1816.  De  • 
puis  qu'il  avait  été  rendu  à  sa  patrie  , 
Férussac  avait  continué  ses  études  et  ses 
observations  scientifiques  :  il  a  laissé 
quelques  ouvrages  parmi  lesquels  nous 
citerons  1°  Observations  sur  l'Encyclo- 
pédie ,  brochure  in-8 ,  1 782,  où  il  signale 
les  vices  du  plan  adopté  pour  cet  ou- 
vrage ;  2°  Essai  sur  la  défense  des  îles 
et  des  provinces  maritimes ,  imprimé 
dans  le  Dictionnaire  de  tactique  de  l'En- 
cyclopédie, qui  a  été  traduit  en  plusieurs 
langues  ;  3°  Essai  sur  la  forme  et  la 
construction  la  plus  avantageuse  à  don- 
ner aux  aérostats  pour  parvenir  à  les 
diriger ,  1784  ;  4°  Examen  de  l'effet  de 
l'attraction  ,  Mémoire  inséré  dans  le 
Journal  de  physique;  6"  Essai  d'une 
nouvelle  méthode  conchyologique  ,  insé  - 
ré  dans  le  4*  vol.  "des  Mémoires  de  la 
société  médicale  d'émulation,  et  plusieurs 
autres  observations  dans  les   journaux 


,  FEU 
des  sciences.  Il  à  laissé  en  manuscrit  des 
Mélanges  et  des  mémoires  pour  servir  à 
l'Histoire  de  la  révolution.  On  lui  doit 
aussi  l'Histoire  naturelle  ,  générale  et 
particulière  des  Mollusques  terrestres 
et  ffuviatilles ,  tant  des  espèces  que  Ion 
trouve  aujourd'hui  vivantes  que  des  dé- 
pouilles fossiles  de  celles  qui  n'existent 
plus  :  ouvrage  que  son  fils,  le  baron  de 
Férussac,  officier  supérieur  au  corps  royal 
d'état-niajor ,  a  publié  par  livraisons  :  le 
même  baron  de  Férussac  est  le  rédacteur 
en  chef  du  Bulletin  universel  des  scien- 
ces, dont  les  embarras  de  notre  situation 
politique  ont  suspendu  la  publication. 

FESTUS  (  Pompéius  Sextus  ) ,  célèbre 
grammairien ,  abrégea  le  traité  de  Ver- 
rius  Flaccus  :  De  verborum  significa- 
tione.  Cet  abrégé,  très  utile,  suivant  Sca- 
liger ,  a  été  donné  au  public  par  Dacier, 
ad  usum  Delphini,  Paris,  1G81  ,  in-4  , 
et  Amsterdam,  1699,  in-4.  Cette  der- 
nière édition  ne  vaut  pas  celle  de  Paris. 

FESTUS  (  Porcins  ),  proconsul  et 
gouverneur  de  Judée,  vers  l'an  61  de 
J.  C.  ,  fit  citer  saint  Paul  à  son  tribunal, 
lorsqu'il  était  à  Césarée.  Cet  apôtre,  ayant 
appelé  à  César,  Festus  le  lui  renvoya , 
n'osant  pas  le  condamner  ,  quoiqu'il  eût 
déjà  reçu  une  somme  d'argent  pour  n'ê- 
tre pasfavorable  àsaint  Paul.  Act.  26. 

FETI  (Dominique  ) ,  peintre  romain  , 
disciple  de  Civoli ,  forma  son  goût  sur  les 
ouvrages  de  Jules  Romain.  Il  allia  une 
grande  manière  et  un  coloris  vigoureux, 
à  une  pensée  fine,  à  une  expression  vive, 
et  à  une  touche  spirituelle  et  piquante. 
Le  cardinal  Ferdinand  Gonzague ,  depuis 
duc  de  Mantoue ,  l'employa  à  orner  son 
palais ,  et  lui  aurait  fait  un  sort  heureux , 
si  la  débauche  ne  l'eût  enlevé  en  1624  , 
à  35  ans.  Les  dessins  de  ce  peintre  sont 
d'un  grand  goût,  et  très  rares.  On  en  voit 
quelques-uns  au  Musée  de  Paris ,  notam- 
ment le  mariage  de  sainte  Catherine  , 
la  méditation  sur  le  néant  des  vanités  hu- 
maines. Il  laissa  une  sœur  qui  se  fit  reli- 
gieuse. Elle  peignait  fort  bien.  Le  cou- 
vent où  elle  entra  fut  orné  de  ses  tableaux; 
elle  eu  fit  aussi  pour  les  autres  maisons 
religieuses  de  Mantoue. 

FEU  (François) ,  docteur  de  Sorbqnne , 


J 


FEU 

naquit  à  Massiac  en  Auvergne  l'an  1633. 
11  fut  grand-vicaire  de  Rouen,  sous  Col- 
bert ,  puis  curé  de  Saint-GerVais  à  Paris  , 
en  1686  :  dans  ces  deux  places  il  se  fit  gé- 
néralement estimer  des  grands  et  des  pe- 
tits. Il  mourut  le  26  décembre  1G99  ,  à  66 
ans.  Onadeluilesdeuxpremiersvol.(in-4, 
1G92  et  1695  )  d'un  cours  de  tbéologie, 
qu'il  n'eut  p^s  le  temps  d'achever. 

Ft:U-ARl>E]\T  (  François  ) ,  corde- 
lier,  né  à  Coutance  en  1541  ,  docteur  de 
Sorbonne  en  1576  ,  était  un  zélé  ligueur. 
Il  disserta  en  chaire  contre  Henri  III  et 
Henri  IV.  Il  mourut  en  1610  à  Bayeux, 
et  non  à  Paris  ,  comme  dit  Bayle  ,  lais- 
sant :  1"  Des  Traités  de  controverse  ,  où 
il  y  a  de  bonnes  choses  ;  mais  qui ,  pour 
la  manière,  tiennent  au  goût  de  son  siè- 
cle. 2°  Des  commentaires  sur  plusieurs 
livres  de  la  Bible.  3°  Des  éditions  dequel- 
ques  ouvrages  des  Pères  et  des  scolasti- 
ques.  L'ardeur  qu'il  avait  témoignée  pour 
la  ligue  ,  parut  s'éteindre  dès  qu'il  vit  la 
religion  hors  de  danger. 

FEUILLADE.  Toye-AuBUssois  (Fran- 
çois de  la  ). 

FEUILLÉE  (Louis  ),  minime,  associé 
de  l'académie  des  Sciences  ,  botaniste  du 
roi,  naquit  à  Mane  en  Provence  l'an  1 660, 
11  entreprit,  par  ordre  de  Louis, XIV, 
plusieurs  voyages  dans  les  différentes 
parties  du  monde.  Il  fit  honneur  au  choix 
du  monarque.  Ce  prince  le  gratifia  d'une 
pension,  et  lui  fit  construire  un  observa- 
toire à  Marseille.  Le  Père  Feuillée,  usé 
par  les  fatigues  de  ses  courses  savantes , 
mourut  dans  cette  ville  en  1732.  Un  air 
modeste  et  simple  relevait  beaucoup  le 
mérite  de  ses  connaissances.  On  a  de  lui 
un  Journal  des  observations  physiques  y 
mathématiques  et  botaniques ,  faites  sur 
les  côtes  de  l'Amérique  méridionale  et  à 
la  Nouvelle-Espagne,  Paris,  1714-1725, 
3  vol.  in-4.  Le  tome  3  contient  une  His- 
toire des  plantes  médicinales  en  usage 
au  Pérou  et  au  Chili.  Ce  Journal ,  écrit 
durement ,  mais  aussi  exact  que  curieux, 
peut  servir  de  modèle  aux  voyageurs ,  et 
de  flambeau  à  ceux  qui  naviguent  en  Amé- 
rique. Au  retour  de  la  mer  du  Sud ,  le 
Père  Feuillée  présenta  au  roi  un  grand 
volume  in-folio ,  oii  il  avait  dessiné  d'a- 


FEU  295 

près  nature  tout  ce  que  ce  vaste  pays  con- 
tient de  plus  curieux.  Cet  ouvrage  inté- 
ressant est  en  original  dans  la  bibliothè- 
que du  roi ,  de  même  que  le  Journal  de 
son  -voyage  aux  Canaries  ,  pour  la  fixa- 
tion du  premier  méridien;  à  la  fin,  il  a 
ajouté  l'Histoire  abrégée  de  ces  îles. 

FEUILLET  (  Nicolas  ) ,  chanoine  de 
Saint-Cloud ,  près  de  Paris  ,  prédicateur 
apostolique  et  d'une  morale  qui  a  paru 
sévère,  mourut  à  Paris  le  7  septembre 
1693,  âgé  de  7 1  ans.  On  a  de  lui  (in-1 2, 
1702)  l'Histoire  de  la  conversion  de 
Chanteau,  cousin-germain  de  Caumartin, 
conseiller  d'état.  Feuillet  en  avait  été  le 
principal  instrument.  Cette  Histoire  édi- 
fiante, réimprimée  plusieurs  fois,  est 
très  répandue.  On  a  encore  de  lui  des 
lettres,  qui  peignent  les  sentimens  de 
religion  dont  il  était  pénétré  ;  et  une 
Oraison  funèbre  de  Henriette  d'Angle- 
terre,  duclics  se  d'Orléans.  Son  portrait 
a  été  gravé  par  Edelinck. 

FEUQUIERES.  Foyez  Pas. 

*  FEUTRIER  (  J.F.-Hyacinthe),  né 
à  Paris  le  2  avril  1785 ,  acheva  ses  études 
ecclésiastiques  au  séminaire  de  St.-Sul- 
pice ,  sous  le  respectable  M.  Emery.  Dès 
son  entrée  dans  le  sacerdoce ,  il  montra 
un  talent  distingué  pour  la  prédication, 
et  le  cardinal  Fesch  l'appela  bientôt  à  la 
grande  aumônerie ,  en  qualité  de  secré- 
taire-général. 11  en  remplissait  les  fonc- 
tions pendant  l'époque  la  plus  critique 
du  règne  de  Buonaparte ,  lors  de  ses  ini- 
ques persécutions  contre  le  pape  et  l'é- 
glise catholique  ;  et  l'on  doit  dire  à  son 
honneur  qu'il  fut  également  fidèle  aux 
principes  et  au  malheur.  Il  contribua 
puissamment  à  la  résistance  que  le  con- 
cile national  de  1811  opposa  aux  volon- 
tés tyranniques  de  l'empereur  ,  et  fut  le 
principal  agent  des  secours  pécuniaii*es 
qu'on  fit  secrètement  passer  au  souverain 
pontife  et  aux  cardinaux  exilés.  Au  pre- 
mier retour  de  Louis  XVHï ,  l'archevêque, 
de  Reims ,  depuis  cardinal  et  archevê- 
que de  Paris ,  lui  confia  les  mêmes  fonc- 
tions de  secrétaire-général  de  la  grande 
aumônerie,  qu'il  quitta  pendant  les  cent 
jours,  ayant  résisté  courageusement  à 
toutes  les  offres  de  Buonaparte ,  çt  à  tou- 


âge  FEt5 

tes  les  instances  de  son  oncle ,  le  cardi- 
Dal  Fescli.  Il  refusa  même  de  prêter  au- 
cun serment  au  nouveau  gouvernement , 
et  fit  beaucoup  d'efiforts  pour  persuader 
au  cardinal  de  retourner  à  Rome  et  de 
rester  étranger  aux  affaires  politiques  de 
la  France.  Après  la  seconde  restauration, 
il  fut  fait  successivement  chanoine  hono- 
raire de  St.-Denis  ,  puis  curé  de  la  Mag- 
deleine,  paroisse  un  peu  négligée  sous 
l'administration  d'un  prédécesseur  valé- 
tudinaire :  il  y  déploya  un  zèle  et  une 
activité  extraordinaires,  et  ranima  puis- 
samment la  piété  des  fidèles  et  leur  ar- 
deur pour  les  bonnes  œuvres.  Les  com- 
inencemens  de  son  épiscopat  à  Beauvais 
furent  également  marqués  par  une  vie 
fort  active.  Il  visita  son  diocèse ,  fit  des 
missions  ,  prêchant  et  confessant  lui- 
même;  car  il  aimait  toutes  les  fonctions 
de  son  état ,  et  à  Paris ,  il  dirigeait  beau- 
coup de  personnes ,  prêchait  souvent , 
menait ,  en  un  mot ,  la  vie  du  pasteur  le 
plus  occupé.  Appelé  en  1827  au  minis- 
tère des  affaires  ecclésiastiques,  il  eut 
part  aux  fameuses  ordonnances  du  16 
juin  1828  ,  qui  excitèrent  de  si  vives  ré- 
clamations de  la  part  des  évêques  et  du 
clergé  français ,  et  qui ,  s'il  faut  en  croire 
des  bruits  assez  répandus ,  lui  causèrent 
plus  tard  de  justes  et  amers  regrets.  Il 
mourut  subitement  d'un  anévrisme  dont 
il  était  atteint  depuis  plusieurs  mois ,  le 
27  juin  1830.  Il  avait  été  fait  comte  et 
pair  de  France,  avec  une  pension  de 
1 2,000  fr. ,  peu  de  jours  avant  de  quitter 
le  ministère.  L'auteur  de  cet  article  a 
recueilli  de  la  bouche  d'un  vénérable 
prélat  des  détails  assez  singuliers  sur 
les  circonstances  qui  accompagnèrent 
la  nomination  de  Feutrier  au  siège  de 
Beauvais ,  et  la  translation  de  son  respec- 
table prédécesseur  au  siège  de  Rennes. 
Il  s'ensuivrait  que  les  protecteurs  de  Feu- 
trier, tenaient  beaucoup  à  le  placer  dans 
ce  que  l'on  appelait  jadis  un  évêché  de 
cour,  et  que  la  démission  de  M.  de  L**. 
fut  acceptée  à  Rome ,  sur  l'attestation  de 
l'ambassadeur  d'alors  et  du  ministre  des 
affaires  ecclésiastiques,  avant  d'avoir  été 
donnée  par  lui  selon  les  formes  voulues 
par  l'Eglise.  On  assure  qu'un  autre  évê- 


FEU 

que,  aujourd'hui  sans  siège,  fut  dépos- 
sédé de  la  même  manière  à  peu  près,  sous 
le  même  ministre.  Voilà  ce  qui  arrive 
quand  la  nomination  des  évêques  devient 
une  affaire  administrative,  au  lieu  de  res- 
ter une  affaire  de  conscience,  comme  elle 
aurait  dû  toujours  être.  Le  ministère  de 
Feutrier  fut  une  preuve  nouvelle  de  celte 
grande  vérité  que  les  talens  sont  répar- 
tis à  l'homme  avec  mesure  ,'et  que ,  pour 
avoir  rempli  d'une  manière  brillante  et 
même  avec  succès  des  fonctions  élevées, 
on  n'est  point  assuré  pour  cela  de  réussir 
également  dans  un  poste  supérieur  , 
qui  impose  d'à  utres  devoirs  et  demande 
d'autres  qualités.  Feutrier  possédait  les 
vertus  ecclésiastiques  et  épiscopales  dans 
un  haut  degré  ;  mais  on  peut  croire  qu'il 
manqua  du  courage  et  de  la  franchise 
qui  font  les  hommes  politiques ,  dans  les 
temps  de  troubles  et  de  dissensions.  L'é- 
piscopat  français  n'oubliera  jamais  tout 
ce  que  ce  ministre  employa  de  petites 
ressources  et  de  moyens  équivoques  pour 
assurer  ses  collègues  que  le  pape  désirait 
qu'ils  se  soumissent  aux  ordonnances  ,  et 
pour  leur  persuader,  par  des  dépêches 
télégraphiques  fort  peu  exactes  quant 
au  fond,  qu'on  obéissait  partout  à  la  voix 
du  souverain  pontife.  Le  fait  était  que 
Léon  XII ,  de  glorieuse  mémoire ,  avait 
blâmé  fortement  les  ordonnances  du  16 
juin ,  et  n'avait  engagé  les  évêques  fran- 
çais à  s'y  soumettre ,  que  sur  la  parole 
donnée  par  le  ministre ,  qu'on  ne  les  exé- 
cuterait pas  à  la  rigueur.  Le  fait  est  en- 
core que  la  lettre  du  cardinal  Bernetti, 
écrite  au  nom  du  pape  ,  ne  fût  commu- 
niquée qu'avec  beaucoup  de  mystère  à 
deux  ou  trois  prélats ,  et  que  le  cardinal 
de  Latil  fut  chargé  d'en  donner  une  con- 
naissance telle  quelle  aux  autres  évêques, 
par  une  lettre  rendue  publique  dans 
le  temps.  Il  est  encore  vrai  que  la  plu- 
part des  évêques  ne  voulurent  y  adhérer 
qu'avec  une  infinité  de  restrictions  :  ce 
qui  n'empêchait  pas  le  ttle'graplie  d'an- 
noncer avec  hâte  à  toute  la  France  qu'un 
tel  évêque  avait  adhéré  !  On  doit  à  Feu- 
trier un  Eloge  historique  et  religieux  de 
Jeanne  d'Arc  pour  V anniversaire  de  la 
délivrance  d'Orléans  le  8  mai  1429,  pro- 


1 


FEV 

nonce  dans  la  cathédrale  de  celte  ville  le 
8  mai  1821  et  le  8  mai  1823;  Orléans, 
1823,  in-8.  Oraison  funèbre  de  S .  A.  11. 
Mgr.  le  duc  de  Berri,  qu'il  devait  pro- 
noncer dans  l'église  Ste.-Madeleine  pour 
un  service  qui  n'eut  point  lieu,  1820, 
in-8.  Oraison  funèbre  de  S.  A.  R.  M'"" 
la  duchesse  douairière  d'Orléans,  2*  édit. 
Paris,  1821  ,  in-8. 

FEUTRY  (  Amé-Ambroisè-Joseph  ) , 
avocat  au  parlement  de  Douai ,  né  à  Lille 
Je  9  octobre  1720  ,  et  mort  à  Douai  le  28 
mars  1789 ,  est  auteur  de  quelques  petits 
poèmes ,  où  il  pourrait  y  avoir  un  peu 
plus  de  chaleur  et  d'action  ,  mais  où  il  y 
a  de  l'élégance  et  une  versitication  en 
général  noble  et  forte.  Le  Temple  de  la 
Mort ,  les  Tombeaux  ,  les  Ruihes,  por- 
tent l'empreinte  d'une  mélancolie  douce , 
€t  de  cette  philosophie  sagementsombre, 
qui  donne  dans  le  silence  des  leçons 
utiles.  Le  choix  du  sujet  contraste  avan- 
tageusement avec  tant  de  bruyantes  des- 
criptions de  fêtes ,  de  farces ,  de  folies 
d'amour,  et  de  creuses  spéculations  phi- 
losophiques ,  qui  exercent  lès  talens  ou 
occupent  l'oisiveté  des  écrivains  du 
jour,  et  donnent  de  l'esprit  de  l'auteur 
une  idée  avantageuse.  Dans  le  Temple 
de  la  Mort  on  A  admiré  ce  vers  caracté- 
ristique : 

Le  temps  qui  détruit  tout,  en  atTcrinit  les  niuis. 

On  a  aussi  de  lui:  Choix  d'histoires;  les 
jeux  denfans  ,  poème  en  prose  ;  Dieu, 
ode;  cuix  Nations ,  ode  ;  Mémoires  du 
siècle  d^ Auguste  et  une  édition  de  Robin- 
son  Crusoé.  Voyez  Foé. 

FEVERSHAM  (  Louis  de  Duras, 
comte  de  ) ,  chevalier  de  l'ordre  de  la 
Jarretière  ,  commandait  l'armée  de  Jac- 
ques II,  lorsque  le  prince  d'Orange  fit  sa 
descente  en  Angleterre,  l'an  1688.  Le 
comte  abandonné  de  son  armée,  licencia 
le  peu  de  soldats  qui  lui  étaient  restés 
attachés.  Ce  fut  le  motif  dont  se  servit  le 
prince  d'Orange ,  pour  faire  mettre  en 
prison  ce  fidèle  serviteur ,  prétendant 
qu'il  n'avait  pu  licencier  une  armée  royale, 
sans  sa  permission.  Il  obtint  pourtant  sa 
liberté  dans  la  suite  ,  et  mourut  à  Lon- 
dres, à  l'âge  de  71  ans  ,  en  1709»,  avec 
une  grande  réputation  de  bravoure. 


FEV  297 

FEVRE  (Jean  Le)  ,  avocat  au  parle- 
ment, et  rapporteur-référendaire  en  chan- 
cellerie, sous  Charles  V  ,  roi  de  France, 
est  auteur  d'un  poème  moral ,  intitulé 
Le  respit  de  la  mort ,  1 533  ,  in-8  ,  gothi- 
que. Il  y  en  a  encore  une  édition  de  Paris, 
150fi,in-4. 

FÈVRE  (  Raoul  Le  ) ,  chapelain  de 
Philippe,  duc  de  Bourgogne  en  1364,  est 
auteur  du  Recueil  des  Histoires  troyen- 
nes,  assez  rare,  des  éditions  du  1 5*  siècle, 
in-fol.  Celles  du  1 6",  quoiqu'aussi bonnes, 
ne  sont  pas  recherchées. 

FEVRE  (  Jacques  F  abri  ou  Faber,  ou 
Le)  surnommé  dE tapies  [Stapulensis], 
du  lieu  de  sa  naissance ,  au  diocèse  d'.A- 
miens,  vint  au  monde  vers  l'an  1455.  Il 
fit  ses  études  dans  l'université  de  Paris, 
€t  y  professa  ensuite  les  belles-lettres  et 
la  philosophie.  C'était  encore  le  règne  de 
la  plus  barbare  scolastique.  Le  Fèvre  sut 
s'élever  au  dessus  des  chicanes  de  l'école. 
Il  fut  un  des  premiers  qui  inspirèrent  le 
goût  des  études  solides  ,  et  en  particu- 
lier de  celle  des  langues- mères.  Guillau- 
me Briçonnet ,  évêque  de  Meaux ,  le  choi- 
sit pour  son  grand-vicaire  en  1523;  ce 
prélat  ayant  été  accusé  de  favoriser  les 
novateurs.  Le  Fèvre,  soupçonné  de  l'a- 
voir séduit ,  fut  obligé  de  le  quitter.  Il  se 
retira  à  Strasbourg ,  et  de  là  à  Paris ,  où 
il  fut  nommé  précepteur  du  troisième  fils 
de  François  I.  La  reine  Marguerite ,  sœur 
de  ce  prince ,  infectée  des  nouvelles  er- 
reurs ,  mena  Le  Fèvre  à  Nérac  en  1 530  ; 
c'est  là  que  cet  habile  homme ,  après 
avoir  rouvert  les  yeux  à  la  vérité,  finit 
ses  jours,  sincèrement  converti,  en  1537. 
Ses  principaux  ouvrages  sont  :  1°  Un 
Traité  des  trois  Madeleines ,  solidement 
réfuté  par  les  bollandistes  et  par  d'autres 
savans  [voyez  Fischer  Beda).  2"  Un  Psau- 
tier en  5  colonnes ,  Paris,  in-folio  ,  1 509, 
avec  des  notes  peu  estimées.  3°  Des  com- 
mentaires sur  les  Psaumes,  sur  l'Ecclé- 
siaste,  sur  les  Evangiles  ,  sur  Saint-Paul,  \ 
etc.,  savans,  mais  mal  digérés  et  mal 
écrits.  i°  Agones  martyrum  mensis  ja- 
nuarii ,  in  folio  (  sans  date  ni  lieu,  mais 
du  commencement  du  16*  siècle.  )5''Une 
version  française  de  toute  la  Bible ,  im- 
primée à  Anvers  en  1530,  1534  et  1541, 

19  • 


2<)8  FEV 

iii-folio,  et  en  1728 ,  en  4  vol.  in-8.  L'é- 
dilion  de  1534,  revue  par  des  docteurs 
de  Louvaiu  ,  est  la  plus  correcte,  la  plus 
exacte  et  la  plus  rare ,  parce  qu'elle  fut 
supprimée.  Cette  traduction  ,  son  senti- 
ment sur  la  monogamie  de  sainte  Anne  , 
et  sa  distinction  des  trois  Maries  ,  soule- 
vèrent beaucoup  de  docteurs  contre  Le 
Fèvre  ;  ce  qui  l'obligea  de  se  contredire 
dans  le  traité  De  dupUci  et  unica  Mcuj- 
dalcna  ,  in-4  ,  pour  prouver  qu'on  pou- 
vait soutenir  qu'il  y  en  avait  deux  ou  une 
seule.  A  force  de  varier  et  de  tourner 
celte  question,  iU'asibien  embrouillée, 
qu'on  ne  sait  point  ce  qu'il  en  pensait. 
FÈVKE.  (  Louis  Le).  Voyez  Cjiante- 

REAU_, 

FÈVRE  (  Gui  Le  ) ,  sieur  de  La  Code- 
RiE ,  en  Ba.sse-Normandie ,  où  il  naquit 
l'an  1541.  Savant  dans  les  langues  orien- 
tales, il  eut  beaucoup  de  part  à  la  fameuse 
Polyglotte  d'Anvers  ,  confiée  aux  soins 
d'Arias  Montanus.  Si  on  le  croit,  celui-ci 
n'y  contribua  pas  autant  qu'on  le  pense 
communément.  Le  Fèvre  passa  avec  son 
frère  Nicolas  à  Anvers  ,  pour  l'exécution 
de  ce  grand  ouvrage.  Il  y  travailla  long- 
temps ,  et  y  inséra  le  nouveau  Testament 
en  syriaque ,  avec  une  version  en  latin , 
une  Grammaire  syriaque  et  une  chaldaï- 
que,  et  un  Dictionnaire  de  ces  deux  lan- 
gues. Il  retourna  ensuite  en  France,  ap- 
portant pour  tout  fruit  de  ses  travaux , 
beaucoup  de  fatigues  et  quelque  peu  de 
réputation.  A  son  retour,  il  fut  secrétaire 
du  duc  d'Alençon,  frère  du  roi  Henri  III  ; 
fut  mal  payé  comme  à  Anvers,  et  alla 
mourir  à  La  Boderie  en  1598.  On  a  de 
lui  plusieurs  ouvrages  en  vers  et  en  prose, 
des  traductions,  etc.  Il  mêlait  aux  épines 
de  l'étude  des  langues ,  les  fleurs  de  la 
poésie  française.  Il  eut  de  son  temps  une 
assez  grande  réputation  dans  ce  dernier, 
"  genre  ;  mais  à  l'exception  de  quelques 
pièces,  où  l'on  trouve  une  certaine  naï- 
veté ,  qui  plaît  malgré  la  barbarie  du  lan- 
gage ,  tout  ce  qui  nous  reste  de  lui  est  du 
plus  mauvais  goût  :  stile  ampoulé ,  phra- 
ses inintelligibles,  comparaisons  forcées, 
expressions  basses,  allusions  puériles, 
jeux  de  mots  ridicules,  plaisanteries  froi- 
des. On  peut  consulter  le  Père  Kicéroa 


FEV 

{Mémoires,  tome  38*} ,  qui  donne  la  ca- 
talogue de  ses  ennuyeuses  productions. 

FÈVRE  DE  LA  BODERIE  (  Antoine 
Le  ) ,  frère  du  précédent ,  fut  employé 
par  Henri  IV  et  par  Ivouis  XIII  dans  des 
affaires  importantes.  Il  eut  la  qualité 
d'ambassadeur  à  Rome,  dans  les  Pays-Bas 
et  en  Angleterre.  Jacques  I  lui  fitpréscnt 
d'un  bassin  de  vermeil,  enrichi  de  pierre- 
ries, avec  ces  mots  :  «  Jacques, roi  delà 
»  Grande-Bretagne  ,  à  Antoine  de  La  Bo- 
»  dciie.  "Le  prince  de  Galles  lui  donna  un 
diamant  d'un  grand  prix  ;  elles  seigneurs 
d'Angleterre  ajoutèrent  à  tous  ces  pré- 
sens ,  1 50  haquenées,  que  La  Boderie  dis- 
tribua à  son  retour  à  ses  amis.  Il  n'en  ré- 
serva qu'une  seule,  que  Henri  IV  lui  de- 
manda. «  Il  n'est  pas  juste ,  lui  dit  ce 
))  prince ,  que  je  sois  le  seul  de  vos  amis, 
i>  qui  n'ait  point  de  part  à  vos  libéra- 
■»  lités.  »  La  Boderie  fut  très  utile  à  ce 
monarque,  surtout  dans  l'affaire  du 
maréchal  de  Biron  dont  il  découvrit  les 
intelligences  à  Bruxelles.  11  mourut  en 
1615,  à  GO  ans.  Il  avait  épousé  la  sœur  du 
marquis  de  Feuquières ,  gouverneur  de 
Verdun,  dont  il  eut  deux  filles;  l'une  mou- 
rut fort  jeune  ,  et  l'autre  épousa  M.  Ar- 
naud d'Andilli  en  1613  ,  auquel  elle  aj)- 
porta  la  terre  de  Pomponne.  On  a  de  lui 
un  Traité  de  la  noblesse,  traduit  de  l'i- 
talien de  Jean-Baptiste  Nenna  ,  imprimé 
en  1583,  in-8.  On  a  publié,  en  1749, 
ses  lettres  et  ses  négociations ,  5  vol. 
in-12.  Il  passe  aussi  pour  l'un  des  auteurs 
du  Catholicon  ,  satire  que  l'esprit  de 
parti  a  fait  valoir  dans  le  temps,  mais 
qui,  dans  lefond,  n'est  qu'une  platitude 
dont  la  haine  contre  l'Espagne  et  les  in- 
vectives contre  la  ligue  font  tout  le  mé- 
rite: «  Comme  si  l'association  des  calvi- 
»  nistes,  dit  un  auteur  impartial,  n'avait 
))  pas  été  une  ligue ,  et  une  ligue  compo- 
»  sée  de  sujets  rebelles ,  armée  contre  le 
»)  trône  et  l'autel.  » 

FÈVRE  (Nicolas Le),  né  à  Paris  en 
1544,  se  creva  un  œil  en  taillant  une 
plume.  Cet  accident  n'interrompit  point 
ses  études.  Il  commença  celle  du  droit  à 
Toulouse.  Nicolas  avait  dès  lors  le  goût 
de  l'atitiquité  ;  il  entreprit  le  voyage  de 
Aomç  pour  se  perfectionner.  De  retour 


FEV 

en  France ,  il  se  livra  aux  douceurs  de 
l'étude,  tandis  que  la  plupart  des  gens 
de  lettres  de  Paris  s'occupaient  des 
affaires  de  la  ligue.  Henri  IV,  étant 
enfin  paisible  possesseur  de  sa  couronne, 
choisit  Le  Fèvre  pour  précepteur  du 
prince  de  Condé  ;  et  après  la  mort  de  ce 
roi,  la  reine  lui  confia  l'éducation  de 
Louis  XIU.  Il  mourut  16  mois  après,  en 
ICI 2,  à  C9  ans.  Quoique  Le  Fèvre  eût 
travaillé  toute  sa  vie,  il  n'ambitionnait 
pointle  titre  d'auteur,  ou  peut-être  crai- 
gnait-il les  écueils  de  cette  profession. 
Ses  opuscules  furent  publiés  à  Paris  en 
1G14  ,  in-4  ,  par  Le  Bègue.  On  y  aperçoit 
un  critique  exact ,  sans  être  trop  hardi , 
judicieux  dans  ses  conjectures,  et  juste 
dans  ses  raisonnemens.  Son  stile  est  pur, 
net  et  concis.  Si  ses  talens  le  firent  esti- 
mer ,  son  caractère  ne  le  fit  pas  moins 
aimer  :  il  était  humain  ,  doux ,  commu- 
nicatif.  Il  vécut  dans  la  retraite  avec  la 
politesse  d'un  courtisan  ,  et  à  la  cour 
avec  la  simplicité  d'un  solitaire. 

FEVRE  (Ta^negui  Le)  ,  né  à  Caen  en 
1615,  se  fit  de  bonne  heure  un  nom  par 
ses  succès  dans  l'étude  du  grec  et  du  la- 
tin. Le  cardinal  de  Richelieu  le  gratifia 
d'une  pension  de  2,000  livres,  pour  avoir 
l'inspection  sur  les  ouvrages  imprimés 
au  Louvre.  Cet  illustre  rémunérateur  des 
gens  de  lettres  se  proposait  de  le  faire 
principal  d'un  collège,  qu'il  devait  ériger 
sous  le  nom  de  Richelieu.  Sa  mort  ravit 
ce  nouveau  bienfait  aux  savans ,  et  à  Le 
Fèvre  un  protecteur.  Le  Fèvre,  qui  avait 
plus  de  cupidité  que  de  religion ,  se  fit 
protestant,  et  eut  une  classe  d'humanités 
à  Saumur,  qui  assura  sa  vie  dans  ce 
inonde,  mais  non  pas  son  salut  dans  l'au- 
tre. Il  méprisa,  dit  l'auteur  du  Siècle  de 
Louis  XIV  ,  ceux  de  sa  secte ,  et  vécut 
parmi  eux.  On  lui  envoya  des  jeunes 
gens  de  celte  secte  de  toutes  les  pro- 
vinces du  royaume  et  des  pays  étrangers. 
Les  professeurs  mêmes  assistaient  à  ses  le- 
çons. En  1G72,  il  se  préparait  à  quitter 
Saumur  pour  passer  à  Heidelberg ,  lors- 
qu'une fièvre  continue  l'emporta  à  57 
ans.  Le  Fèvre  était  un  vrai  épicurien  , 
et  n'épargnait  rien  pour  satisfaire  ses 
goûts.  Il  se  parfumait  comme  un  pelil- 


FEV  a<)Ç) 

maître.  Il  lui  manquait ,  à  la  vérité  ,  cet 
air  aisé  du  grand  monde ,  mais  il  y  sup- 
pléait par  un  verbiage  étudié.  Les  fruits 
de  sa  plume  sont  1°  Des  Notes,  sur 
J/iacrcon,  Lucrèce  ,  Virgile  ,  Horace  , 
Te'rence,  Phèdre,  Longin,  Aristophane, 
Elien,  ApoUodore,  Eutrope,  Aurelius- 
Fictor,  Denys  d'Alexandrie,  etc.  Le 
Fèvre  commente  ces  auteurs  ,  en  homme 
qui  connaissait  assez  bien  les  délicatesses 
des  langues,  et  qui  en  possédait  l'esprit. 
2°  Deux  volumes  de  lettres  1659  et  1665, 
in-4.  3°  Les  Vies  des  poètes  grecs,  en 
français,  iri-1 2,  dont  la  meilleure  édi- 
tion est  celle  qu'en  a  donnée  P>o!and,  à 
laquelle  il  a  ajouté  ses  remarques.  6°  Des 
poésies  grecques  et  latines.  Le  latin  de 
Le  Fèvre  est  pur ,  poli ,  délicat ,  mais 
pas  tout-à-fait  exempt  de  gallicismes  ; 
son  siècle  fournit  de  meilleurs  modè'.Cs 
en  ce  genre.  5"  Des  morceaux  de  Platon 
et  de  Plutarque,  qu'il  a  traduits  et  ac- 
compagnés de  notes.  Son  français  n'a  pas 
les  grâces  de  son  latin;  on  voit  un  hom- 
me de  collège,  qui  fait  des  efforts  pour 
prendre  le  ton  d'un  homme  du  monde. 
Il  veut  mêler  le  sérieux  de  Balzac  avec 
l'enjouement  de  Voiture ,  et  les  gâte  tous 
les  deux.  Il  avait  un  attachement  inviola- 
ble à  ses  amis.  Dans  le  temps  que  Pellis-' 
son  était  prisonnier  d'état,  il  eut  le  cou- 
rage de  lui  dédier  son  Lucrèce.  Outre 
jjrae  Dacier  sa  fille  ,  il  eut  un  fils,  auteur 
d'un  petit  traité  paradoxal,  sous  ce  titre  : 
De  futilitate  poetices ,  1697,  in-12. 

FÈVRE  (Nicolas  Le),  célèbre  chi- 
miste du  17®  siècle,  démonstrateur  de 
chimie  au  jardin  royal  des  plantes  de 
Paris,  fut  appelé  en  Angleterre  pour  di- 
riger un  laboratoire  de  chimie ,  que 
Charles  II  avait  formé  à  Saint-James  , 
l'une  de  ses  maisons  royales.  Ce  prince 
l'accueillit  avec  distinction.  On  a  de  lui 
une  Chimie  théorique  et  pratique ,  en 
2  vol.  in-8  ,  dont  la  3"  édition  parut  en 
1674.  On  croit  que  l'auteur  mourut  peu 
de  temps  après.  Son  livre  est  un  des  pre- 
miers où  l'on  ait  établi  des  principes  et 
rassemblé  les  découvertes  faites  sur  la 
chimie. 

FÈVRE  (Claude  Le),  peintre,  né  à 
Fontainebleau  eu  163-3  ,  mort  à  Londres 


3oo  FEV 

en  1675  ,  fil  les  premières  cludes  do  sou 
sirldaiis  les  {galeries  et  les  salles  de  Fon- 
taliicbleau.  Il  se  mit  ensuite  sous  la  dis- 
cipline de  Le  Sueur  et  de  Le  Brun.  Ce 
dernier,  ajant  vu  quelques  portraits  de 
sa  main ,  lui  conseilla  de  s'appliquer  à  ce 
genre  de  peinture.  Le  Fèvre  acquit  en 
effet  un  talent  supérieur  pour  saisir  la 
ressemblance,  et  le  caractère,  en  quel- 
que sorte,  delà  personne  qu'il  représen- 
tait. Sa  louche  est  vraie  et  spirituelle , 
son  coloris  frais  et  piquant.  Le  roi  et  la 
reine  voulurent  être  peints  par  cet  excel- 
lent artiste,  qui  depuis  fut  très  employé 
à  la  cour.  Le  Fèvre  passa  en  Angleterre, 
et  fit  dans  ce  royaume  plusie;irs  tableaux, 
qui  lui  acquirent  beaucoup  de  réputalioa 
et  de  richesses.  Il  a  traité  avec  succès 
quelques  sujets  d'histoire.  Ona  gravé  d'a- 
près ce  maître,  et  il  a  lui-même  gravé  plu- 
sieurs portra^itsà  l'eau-forle.  François  de 
Tfoy  a  été  son  élève. 

FÈVRE  (  Roland  Le  } ,  autre  peintre , 
natif  d'Anjou,  mort  en  Angleterre  en 
1677  ,  excella  à  faire  des  charges. 

FEVRE  (Jacques  Le),  docteur  de  Sor- 
bonne ,  grand-vicaire  de  Bourges ,  né  à 
Coulauces  au  milieu  du  17*  siècle,  et 
mort  à  Paris  en  1716,  s'est  fait  un  nom 
par  les  ouvrages  qu'il  a  publiés  pour  la 
défense  de  l'Eglise.  Les  principaux  sont 
1"  Motifs  invincibles  pour  convaincre 
ceux  de  la  religion  prétendue-re'forme'e, 
Paris,  1682,  in-12.  2°  Nouvelle  Confé- 
rence avec  un  ministre ,  touchant  les 
causes  de  la  séparation  des  protes- 
ians,  1685,  in-12  :  ce  livre  eut  un  grand 
succès.  3"  Instructions  pour  confirmer 
les  nouveaux  Convertis  dans  la  foi  de 
V Eglise.  On  a  encore  de  lui  :  Entretiens 
fFEudoxe  et  d'Euchariste,  sur  l'His~ 
ioire  de  l'arianisme  et  des  iconoclastes 
du  Père  Maimbourg,  1674,  in-12; 
Anti-journal  des  assemblées  de  S  or- 
bonne  :  critique,  ou  plutôt  satire,  con- 
duite par  l'esprit  de  parti. 

FÈVRE.  ^oyezFEBVRE  (Jacques  Le). 

FÈVRE  (André  Le),  avocat,  né  à 
Troyes  ,  était  neveu  de  Houdard  de  La 
Molle.  Son  oncle  ayant  perdu  la  vue, 
l'appela  auprès  de  lui,  et  il  fut  son  lec- 
teur et  son  secrétaire.  Il  s'acquitta   de 


FEV 

ces  deux  emplois  avec  une  assiduité  et 
un  zèle ,  qui  lui  méritèrent  les  éloges  de 
toutes  les  âmes  honnêtes.  11  mourut  à 
Paris  en  1768  ,  après  avoir  passé  ces  der- 
nières années  dans  des  infirmités  conti- 
nuelles. Nous  avons  de  lui  les  Mémoires 
de  l'académie  des  Sciences  de  Troyes , 
1744  ,  in-8  ,  réimprimés  en  1 756  ,  en  2 
part,  in-12.  Cet  ouvrage,  auquel  M.  Gros- 
ley  a  eu  part,  est  dans  le  goût  des  Mathn- 
nnsius ,  mais  plus  sagement  écrit.  Il  y  a 
des  choses  agréables  et  des  recherches 
curieuses. 

FEVRET  (  Charles  ) ,  né  à  Semur  en 
1583,  fut  avocat  au  parlement  de  Dijon 
dès  l'âge  de  19  ans,  et  mourut  dans  celle 
ville  en  1661.  On  a  de  lui  un  Traite'  de 
l'Abus,  composé  à  la  prière  de  Louis  II , 
prince  de  Condé,  et  dont  la  meilleure  édi- 
tion est  de  Lyon,  1 7  36  ,  en  2  vol.  in-folio, 
avec  des  notes  du  célèbre  Gilbert  et  de 
Brunet,  avocat,  Févret  a  approfondi 
cette  matièi-e,  et  son  ouvrage  est  le  fruit 
des  p!us  longues  recherches  ;  il  y  a  ce- 
pendant des  canonisles  qui  trouvent  de 
l'inconvcnienl  dans  la  trop  grande  exten- 
sion de  ses  principes.  Hauteserre,  l'a  ré- 
futé par  ordre  du  clergé,  qui  a  cru  y 
voir  compromis  les  droits  de  l'Eglise.  On 
a  encore  de  lui  l'Histoire  de  la  sédition 
arrivée  à  Dijon  en  1 630,  in-8,  et  d'aulres- 
Guvrages  en  prose  et  en  vers  latins. 

FEVRET  DE  FO^TÈÏE  (Charles- 
Marie),  arrière-petit-fils  du  précédent, 
né  à  Dijon  en  1710  ,  fut  reçu  conseiller 
aupariementde  celteville  en  1736.  Après 
s'être  attaché  pendant  une  longue  suite 
d'années  à  rassembler  une  nombreuse 
collection  d'ouvrages,  et  de  morceaux, 
tant  imprimés  que  manuscrits,  sur  l'his- 
toire de  France,  il  conçut  le  projet  de 
donner  au  public  une  nouvelle  édition 
de  la  Bibliothèque  historique  de  la 
France  du  Père  Le  Long.  C'eslparlesaug- 
mentations  considérables  qu'ont  produi- 
tes les  recherches  et  les  travaux  de  M. 
Fontète ,  que  cet  ouvrage  vraiment  im- 
portant ,  et  dont  l'utilité  peut  s'étendre 
à  tant  d'objets,  après  être  sorti  des  mains 
de  son  premier  auteur  en  un  seul  vol. 
in-folio ,  en  1 7 1 9  ,  est  devenu  un  réper- 
toire immense  qui  forme  aujourd'hui  4 


FIA 

vol.  in-fol. ,  non  compris  les  tables  qui 
en  composent  un  a'".  Ce  magistrat ,  aussi 
recommandable  par  ses  qualités  sociales, 
que  par  ses  lumières  dans  la  jurispru- 
dence,  son  zèle  pour  sa  patrie,  et  son 
amour  pour  les  lettres,  est  mort  direc- 
teur de  l'académie  de  Dijon  en  1172, 
sans  avoir  vu  la  lin  d'une  entreprise  qui 
lui  fait  tant  d'honneur.  M.  Barbeau  des 
Bruyères,  auquel  il  avait  remis  tout  son 
travail  dès  1 7C4  ,  a  présidé  à  l'édition  de 
cet  ouvrage. 

FEYDEAU  (Matthieu),  né  à  Paris  en 
1616,  docteur  de  Sorbonne,  théologal 
d'Alet,  ensuite  de  Beauvais,  mourut  en 
exil  ,  à  Amionay  dans  le  Vivarais  ,  en 
1694,  à  78  ans.  Son  attachement  au 
parti  de  M.  Arnauld  lui  avait  occasioné 
beaucoup  de  chagrins.  On  a  de  lui  ; 
1°  Des  Méditations  sur  la  providence  et 
la  miséricorde  de  Dieu  ,  sous  le  nom  du 
sieur  de  Pressigni,  in-12.  2°  Le  Caté- 
chisme de  la  Grâce,  iu-12,  et  d'autres 
ouvrages. 

FEYDEAU  DE  BROU  f  Henri  ) ,  évo- 
que d'Amiens  ,  delà  même  famille  que  le 
précédent,  mort  en  1706,  âgé  de  53  ans, 
a  donné  au  public  :  1°  Une  lettre  latine 
à  Innocent  XII ,  contre  le  JVodus prœdcs- 
tinationis  du  cardinal  Sfondrate.  2"  Une 
Ordonnance  pour  la  juridiction  des  évè- 
ques  et  des  curés,  contre  le  Père  des  Ira- 
brieux  ,  jésuite.  3°  Lettre  au  sujet  de  la 
lettre  à  un  Curieux  sur  d'anciens  tom- 
beaux découverts  en  1697,  dans  l'abbaye 
de  Saint-Acheul. 

FEYJJOO.  Voyez  Feijoo. 

FIACRE  (Saint),  étant  venu  d'Irlande 
ou  d'Ecosse  en  France  ,  saint  Faron  ,  évo- 
que de  Meaux ,  lui  donna  un  lieu  solitaire' 
oii  il  bâtit  un  hôpital ,  dans  lequel  il  re- 
cevait les  passans  et  les  étrangers.  Il 
mourut  vers  l'an  670.  Les  légendes  lui 
donnent  la  qualité  de  prince.  Sa  Vie 
qui  n'est  guère  authentique ,  a  été  pu- 
bliée dans  le  Recueil  de  Surius ,  dans 
celui  des  Bollandistes  (  tom.  6«  d'août , 
pag.  698  et  suiv.  ) ,  dans  les  Acta  SS. 
ord.  S.  Benedicti  de  Msib'ûlon,  lom.  2, 
et  dans  les  autres  hagiographes  ;  enfin 
nous  en  avons  des  Vies  imprimées  à  part, 
entre  autres  celle  écrite  eu  vers  et  impri- 


FIÂ  3of 

niée  iu-4  ,  sans  date  ,  ni  nom  de  ville  ni 
d'imprimeur,  et  celle  de  dom  Pirou, 
bénédictin  de  Saint-3Iaur,  imprimée  à 
Paris  en  1 636,  in-1 2.  L'ermitage  de  Saint- 
Fiacre  est  devenu  un  bourg  de  la  Brie  , 
fameux  par  ses  pèlerinages  ;  l'église  ou 
chapelle  est  desservie  par  les  bénédic- 
tins, les  femmes  n'entrent  point  dans  le 
sanctuaire  ;  et  l'on  remarque  que  la  reine 
Anne  d'Autriche,  y  venant  en  pèlerinage 
en  lG4i,  se  conforma  à  cet  usage ,  et 
qu'elle  fit  même ,  à  pied ,  le  chemin 
depuis  Monceau  jusqu'à  Saint-Fiacre.  Dou 
du  Plessis  ,  qui  donne  un  article  curieux 
sur  ce  saint  solitaire  (  Hist.  de  Meaux., 
tom.  1 ,  p.  61  et  suiv.)  observe  que  dans 
sa  chapelle  il  y  a  une  pierre,  sur  la- 
quelle vont  s'asseoir  pieusement  les  pè- 
lerins, pour  guérir  des  héniorrhoïdes,  ou, 
selon  d'autres ,  du  fie  ou  mal  de  Saint- 
Fiacre  (  Vistus ,  cancri  gcnus,  carnosis 
partibus  ndhœrere  soUtus ,  primo  qui- 
dem  calli  instar  durcscit;postea  callus  in 
pus  conversus ,  proximas  partes  dcpas- 
citur.  C'est  ainsi  que  Mabillon  désigne 
cette  maladie-dans  les  annales  de  sou  or- 
dre, t.  1  ,  p.  344  ).  On  a  prétendu  que 
le  nom  de  fiacres  avait  été  donné  aux 
carrosses  de  place,  parce  qu'ils  furent 
d'abord  destinés  à  voilurer  jusqu'à  Saint- 
Fiacre  (  en  Brie)  les  parisiens  qui  y  al- 
laient en  pèlerinage  ;  mais  Ménage  ,  dans 
son  Dictionnaire  étymologique,  atteste 
comme  témoin  oculaire,  que  ces  carrosses 
furent  ainsi  appelés  du  nom  de  l'image 
de  saint  Fiacre,  qui  servait  d'enseigne  à 
un  logis  de  la  rue  Saint-Antoine  ,  où  l'on 
a  premièrement  loué  ces  sortes  de  voi- 
tures. On  peut  concilier  ces  deux  senti- 
mens;  en  supposant  que  le  maître  de 
l'auberge  n'avait  pris  saint  Fiacre  pour 
enseigne ,  qu'à  cause  de  la  première  des- 
tination de  ces  voitures  pour  ce  pèle- 
rinage-, la  rue  Saint-Antoine  où  était  l'au- 
berge ,  est  précisément  sur  le  chemin  de 
Paris  à  Saint  Fiacre.  Par  la  suite  il  étendit 
l'usage  de  ses  voitures  pour  le  service 
des  rues  de  Paris. 

FIACRE ,  frère  lai  de  l'ordre  de  Saint- 
Augustin  ,  né  à  3Iarly  en  1609  ,  et  mort  à 
Paris  en  1684,  se  fit  connaître  par  sa 
piété  cl  di verses prédiclionsqui  parurent 


3oa  FIA 

siirnalurcllcs.  Louis  XIII ,  la  reine  Anne 
d'Autriche ,  Louis  XIV,  Marie-Thérèse, 
son  épouse ,  et  d'autres  grands  person- 
nages, avaient  grande  confiance  en  ses 
prières,  et  s'y  recommandaient  souvent. 
Il  était  fort  lié  avec  Claude  Bernard,  sur- 
nommé le  pauvre  prêtre  { voyez  cet  ar- 
ticle ).  Sa  vie  imprimée  à  Paris  en  1722 , 
est  écrite  avec  une  simplicité  qui  attache. 
Dans  son  discours  préliminaire,  l'auteur 
anonyme  (  que  l'on  sait  être  un  augustin, 
nommé  Gabriel  de  Sainte-Claire)  montre 
qn'il  connaissait  les  règles  de  la  critique 
et  qu'il  s'y  est  conformé.  On  y  trouve 
cette  réflexion  :  «  La  disposition  de  nos 
«  pèi-es  était  de  croire  tout  à  l'aveugle; 
>»  ils  se  faisaient  conscience  de  douter  du 
>»  moindre  prodige;  ils  croyaient  trop. 
»  La  disposition  d'esprit  de  nos  jours  (en 
3>  1722)  est  de  ne  croire  rien;  s'il  me  fallait 
»  opter  entre  ces  deux  extrémités ,  j'ai- 
»  merais  mieux  la  puérile  crédulité  de 
5'  ceux  qui  croient  tout,  etc.  »  Du  reste, 
le  livre  est  imprimé  fort  incorrectement, 
et  le  lecteur  est  arrêté ,  à  chaque  pas  par 
des  fautes  grossières  qui  ne  sont  pas 
relevées  dans  Yerrata.  L'abbé  d'Artigny 
en  a  donné,  d'après  un  journaliste,  le 
Précis  de  ce  qui  concerne  la  naissance  de 
Louis  XIV  (  que  la  reine  Anne  attribua 
aux  prières  du  frère  Fiacre  ),  dans  le  tome 
6*  de  ses  Mémoires  ;  mais  on  voit,  par  ce 
précis,  que  l'abbé  n'avait  pas  vu  le  livre 
même. 

*  FIARD  (  Jean-Baptiste,  l'abbé  ) , 
naquit  à  Dijon  ,  d'une  honnête  famille, 
le  23  novembre  I  736.  Entré  d'abord  chez 
les  jésuites,  il  était  professeur  de  rhéto- 
rique à  Aiençon  ,  lorsque  cette  société 
fut  supprimée.  Il  se  rendit  à  Paris,  et  fut 
admis  dans  le  séminaire  de  Saint-Nicolas- 
du  Chardonnet.  Appelé  dans  sa  ville 
natale  par  M.  d'Apchon,  qui  administrait 
ce  diocèse  ,  il  y  remplit  les  fonctions  de 
vicaire  dans  les  paroisses  de  Saint-Phi- 
libert, puis  de  Saint-Pierre.  Il  était  pourvu 
d'un  mdpart  à  Sainl-Michel  lorsque  la 
révolution  .survint.  L'abbé  Fiard  ayant 
refusé  de  prêter  le  serment  dit  civique , 
il  fut  déporté  en  175)3  avec  d'autres  prê- 
tres malheureux.  Il  échappa  aux  maladies 
qui  firent  périr,  à  Rochcfort,  un  grand 


FIA 

nombre  de  ses  compagnons  d'infortune, 
et  revint  dans  son  diocèse  en  1795. 
D'autres  disent  qu'étant  sexagéraire  il  ne 
fut  point  déporté  ;  mais  qu'ayant  voulu 
continuer  ses  fonctions  ecclésiastiques 
avec  son  zèle  habituel ,  il  fut  enfermé 
pendant  2  ans(  17  93-1 7  95).Dès  lors  il  vécut 
retiré  et  mourut  le  30  septembre  1818: 
L'abbé  Fiard  était  pieux,  charitable; 
mais ,  dès  son  enfance,  à  ce  qu'ont  assuré 
des  personnes  qui  l'ont  connu  intime- 
ment ,  il  avait  montré  une  imagination 
exaltéequ'il  avaitencore  enflammée  par  la 
lecture  de  livres  exlravagans.  L'abbé 
Fiard  avait  la  faiblesse  de  croire  à  la  ma- 
gie, et  donnait  à  celle-ci  un  si  grand 
empire,  qu'il  ne  voyait  partout  que  des 
sorciers  et  des  magiciens.  Dans  ses  écrits, 
il  cite  comme  de'monolâtres  les  ventrilo- 
ques, Mesmer,  Cagliostro  et  autres  jon- 
gleurs de  la  même  espèce  ;  il  prend  aussi 
pour  des  sorciers  les  faiseurs  de  tours, 
une  poupée  automate  et  autres  objets  , 
qui  ne  sont,  en  général,  qu'un  résultat 
de  procédés  physiques  ou  de  pur  charla- 
tanisme. Avant  la  révolution  ,  il  avait  an- 
noncé dans  le  Journal  de  Verdun  ,  dans 
le  Journal  eccle'siastique ,  et  dans  le 
Spectateur  de  Toulouse,  l'existence  d'un 
grand  nombre  de  de'monolâtres.  Le  2?. 
octobre  1775,  il  écrivit  une  longue  lettre 
à  l'assemblée  du  clergé  ,  dans  laquelle  il 
lui  dénonçait  également  les  projets  d'une 
foule  de  magiciens  et  de  sorciers ,  qui 
minaient  sourdement  le  trône  et  l'autel. 
Les  persécutions  qu'il  avait  éprouvées  ne 
firent  qu'exalter  de  plus  en  plus  son  ima- 
gination. Selon  lui ,  la  révolution  n'était 
que  l'effet  d'un  ensorcellement ,  et  huit 
cent  mille  Parisiens  étaient  ensorcelés  , 
ainsi  que  Louis  XVI  lui-même.  Tous  les 
ouvrages  qu'il  a  publiés  roulent  sur  ce 
sujet  :  en  voici  les  titres  :  \°  Lettres  phi- 
losophiques sur  la  maffie ,  1801  ,  in-8  ; 
2°  La  France  trompée  par  les  magiciens 
et  les  de'monolâtres  du  1 8«  siècle  ,  1 803  , 
in-8  ;  3"  Le  Secret  d'e'tat ,  brochure  in-8, 
1815.  On  attribue  aussi  à  l'abbé  Fiard 
Le  Mystère  des  magne'tiseurs  et  des 
somnambules  dévoilé ,  par  un  homme 
du  monde,  1815,  in-8.  M.  Deleuze  a 
cru  devoir  réfuter  cet   ouvrage  dans  ses 


1 


i 


Fie 

Annales  du  magnétisme  animal.  { on 
peut  également  voir  les  Annales  politi- 
ques ,  morales  et  littéraires  ,  du  17  dé- 
cembre 1815).  En  1797  ,  l'abbé  Fiard 
soumit  à  La  Harpe  une  partie  de  son  tra- 
vail ,  par  lequel  il  voulait  prouver  Vo- 
riffine  diabolique  et  magique  de  la  révo- 
lution. La  Harpe  se  borna  à  lui  répondre 
«  que  les  révolutionnaires  ne  pouvaient 
»  être  d'aussi  grands  sorciers,  parce  qu'ils 
»  ne  croyaient  ni  en  Dieu  ni  au  diable.» 
Sur  la  fin  de  sa  vie  l'abbé  Fiatd  se  pro- 
menait toujours  seul  dans  les  lieux  les 
plus  solitaires,  ayant  constamment  avec 
lui  quelques-uns  de  ses  ouvrages  sur  la 
magie  et  les  magiciens.  Cependant ,  lors- 
que ,  par  intervalles ,  il  oubliait  sou  sujet 
favori ,  il  raisonnait  fort  juste,  et  parais- 
sait avoir  de  l'érudition.  On  plaignait 
sincèrement  un  homme  estimable  dupe 
d'un  rêve  que  son  imagination  lui  repro- 
duisait sans  cesse,  et  auquel  il  croyait 
de  bonne  foi.  he  Journal  de  Dijon  An 
6  août  1825  contient  une  notice  très 
détaillée  sur  l'abbé  Fiard  ,  par  M.  C.-M. 
Âmanton. 

FICHARD  (  Jean  ) ,  jurisconsulte  de 
Francfort  sur  le  Mein  ,  sa  patrie  ,  syndic 
de  cette  ville  ,  y  mourut  en  I.'jSI  ,  à  70 
ans.  n  savait  les  langues  et  l'histoire  du 
droit.  Il  fut  disciple  du  célèbre  Zalins 
qui  professait  à  Fribourg  en  Rrisgau.  Il 
voyagea  en  Halie  et  s'arrêta  dans  toutes  les 
universités.  On  a  de  lui  :  1°  Onomasticon 
pliilosophico-medico-sytionymum ,  1674, 
in-8;  c'est  un  dictionnaire  d'alchimie; 
2°  Concilium  matrimoniale,  1580, 
in-fol.  ;  3"  De  Cautelis,  1577,  in-fol.;  4» 
f^itœ  virorum  qui  eruditione  claruerunt, 
in-4,  très  rare  ;  5°  f^itœjurisconsultorum, 
1 565 ,  in-4  ,  etc.  ;  ii  fait  suite  à  celui  de 
hem. ?i\il\[ms.Q°LesCoutumes  de  Franc- 
fort ;  7°  Concilia,  etc.,  Francfort,  1590, 
2  vol.  in-fol.  ;  Darmstadt,  1G7  7  ,  3  vol. 
in-fol.,  y  compris  la  vie  de  l'auteur,  par 
II.  P.  Herdesianus.  On  trouve  une  notice 
sur  Fichard  avec  son  portrait  dans  le 
Mercure  allemand.  Deutsche  Mercur. , 
de  1776,  2«  partie. 

FICHET.  rayez  Fischet. 

*  FICHET  (Alexandre) ,  savant  jésuite, 
naquit  en  1588  au  Petit  Bornand,  dans 


Fie  3o3 

le  diocèse  de  Genève.  Ses  supéi'ieurs 
l'employèrent  à  enseigner  à  Lyon  les 
humanités  pendant  sept  ans,  et  la  phi- 
losophie avec  les  mathématiques  pendant 
quatre.  Il  se  consacra  ensuite  au  minis- 
tère de  la  chaire  ,  et  obtint  un  tel  succès, 
que  l'église  n'était  jamais  assez  vaste  pour 
contenir  l'auditoire  qui  se  pressait  pour 
l'entendre.  11  fut  recteur  du  collège  de 
Kîmes  ,  et  envoyé  à  Rome  en  qualité  de 
député  de  la  province  de  Lyon ,  pour  y 
assister  à  la  huitième  congrégation  de  soû 
ordre.  Le  père  Fichet  avait  un  talent  par- 
ticulier pour  développer  dans  ses  écoliers 
la  vocation  à  l'état  jnonastique.  On  en 
compte  un  grand  nombre  qui ,  par  ses 
conseils ,  entrèrent  dans  divers  instituts. 
Ses  ouvrages  sont:  1°  Chorus poctarum 
lustratus  cum  musœo  rhetorico  etpoe- 
tico  ;  c'est  une  édition  purgée  du  Corpus 
poetarum.  \£  nombre  des  poètes  latins 
compris  dans  ce  recueil  est  de  58.  Il  en 
manque  quelques-uns,  qu'il  se  proposait 
d'ajouter  dans  une  autre  édition.  Cet 
ouvrage  a  été  imprimé  à  Lyon  ,  16l6  , 
in-4.  2"  Favus  mellis  ex  variis  sanctis 
collectus ,  Lyon,  1615-1617  ,  in-24.  Ces 
deux  ouvrages  sont  sans  nom  d'auteur. 
3°  La  Vie  de  la  bienheureuse  mère  de 
Chantai,  fondatrice  de  la  Visitation 
Lyon,  1642,  in-4;  4°  la  Vie  de  saint 
Bernard  de  Menthon  ;  5°  Arcana  stu- 
diorum  omnium  methodus,  et  hibliotheca 
scientiarum ,  Lyon,  1649  ,  in-8  ,  réim- 
primé à  la  suite  du  Prodromus  historiœ 
litterariœ  de  Lambecius,  Hambourç 
1710  ,  in-fol.  Cet  ouvrage  est  écrit  avec 
élégance,  et  donne  des  moyens  faciles  de 
faire  des  progrès  dans  les  sciences.  6"  Le 
Triomphe  du  saint-Siége  contre  un  con- 
seiller hérétique  de  Grenoble ,  Grenoble, 
1640.  Il  mourut  à  Chambéry  le  30  mars 
1659. 

*  FICHTÉ  (Jean-Théophile),  célèbre 
philosophe  et  métaphysicien  allemand 
de  l'école  moderne,  naquit  à  Rammenau 
en  Lusacc  le  19  mai  1762,  de  parenspeu 
fortunés.  Son  père  y  avait  une  fabrique 
de  rubans  et  faisait  un  petit  commerce 
de  mercerie.  L'éducation  de  Fichté  eut 
été  probablerrient  très  négligée  si  un 
protecteur  de  sa  famille  ne  s'en  fût  pas 


3o4  Fie 

chargé  et  n'en  eût  pas  pris  le  plus  grand 
soin.  Fichlé  repondit  médiocrement  aux 
bonnes  intentions  de  son  bienfaiteur.  Né 
avec  un  caractère  vif  et  indépendant  il 
ne  put  supporter  le  régime  des  écoles,  et 
plusieurs  fois  il  s'échappa  de  celles  où  il 
avait  été  placé.  Un  jour  il  fut  trouvé  assis 
au  bord  d'une  rivière,  les  jeux  fixés  sur 
une  carte  ;  interrogé  sur  ce  qui  l'occupait 
alors ,  il  répondit  qu'il  cherchait  la  roule 
d'Amérique.  Cependant  la  réflexion  vint 
détruire  son  indocilité  :  il  suivit  ses  études 
avec  exactitude ,  et  se  fit  surtout  distin- 
guer en  philosophie  et  en  théologie.  Après 
avoir  passé  ainsi  quelque  temps  à  Wit- 
temberg  et  à  Lcipsick  où  il  s'acquit  une 
réputation  brillante  parmi  ses  condisci- 
ples ,  il  se  trouva  dans  la  nécessité  de 
pourvoir  Jui-raème  à  ses  moyens  d'exis- 
tence ;  et ,  malgré  l'aversion  qu'il  avait 
pour  toute  espèce  de  dépendance ,  il 
accepta ,  chez  un  seigneur  prussien  qui 
habitait  Roenisberg,  une, place  de  pré- 
cepteur. Ce  fut  dans  cette  ville  qu'il  eut 
l'occasion  de  connaître  le  fameux  Kant , 
dont  les  systèmes  étaient  alors  en  grand 
crédit.  Le  résultat  des  entreliens  qu'il 
cul  avec  ce  nébuleux  professeur,  fut  la 
publication  d'un  ouvrage  que  Fichlé  fit 
paraître  sous  ce  titre  :  Essai  critique  de 
toutes  les  révolutions,  17  92.  Comme  il 
n'y  avait  pas  mis  son  nom  et  que  l'on  y 
rencontrait  toutes  les  idées  de  Kant ,  ce 
fut  à  ce  dernier  qu'on  l'attribua  ;  mais  le 
-véritable  auteur  se  fit  connaître;  et,  sans 
juger  les  opinions  qu'il  y  émit ,  nous  di- 
rons qu'il  annonçait  un  penseur.  Après 
avoir  passé  de  maison  en  maisott ,  sous  le 
titre  d'instituteur,  un  temps  très  précieux, 
«t  s'être  ennuyé  mille  fois  dans  un  emploi 
que  l'on  regarde  souvent  presque  comme 
domestique  et  purement  mercenaire,  il 
se  décida  à  voyager.  Il  venait  de  recevoir 
60  ducats  d'un  magistrat  de  Varsovie 
chez  lequel  il  avait  commencé  à  exercer 
cette  charge  et  avec  lequel  il  n'avait  pu 
s'arranger ,  c'est  avec  celte  modique  som- 
me qu'il  se  mit  en  route.  Il  parcourut  une 
partie  de  l'Allemagne ,  vint  en  Suisse , 
et  se  maria  à  Zurich  avec  la  nièce  du 
poète  Klopstock,  auteur  de  la  Messiade. 
Cette  même  année  (  1793  ) ,  il  publia  ses 


Fie 

Matériaux  pour  rectifier  les  jugement 
du  public  sur  la  révolution  française , 
première  partie.  La  deuxième  n'a  point 
paru ,  parce  que  l'auteur  rencontra  un 
grand  nombre  de  critiques ,  et  ces  criti- 
ques justement  méritées  annoncent  que 
l'ouvrage  avait  été  lu.  La  hardiesse  des 
principes  émis  par  l'auteur  avait  produit 
des  sensations  profondes  et  diverses.  Pour 
légitimer  la  révolution,  il  prétendit  qu'en-  ; 
tre  le  roi  de  France  et  ses  sujets ,  il  y  avait 
un  traité  synallagmatique ,  et  que  dans 
tout  contrat  pareil  il  peut  y  avoir  lieu  à 
résiliement  par  la  seule  volonté  de  l'une 
des  parties.  Dans  cette  argumentation 
tout  était  faux,  et  le  principe  et  l'applica- 
tion ,  en  fait  et  en  droit  :  la  majeure,  la 
mineure  et  la  conséquence  tout  était  vi- 
cieux. Peu  de  temps  après  Fichte  fut  ap- 
pelé à  la  chaire  de  philosophie  d'Iéna ,  à 
Ja  place  de  Reinhold ,  premier  disciple 
de  Kant,  et  professeur  un  peu  moins 
obscur  que  son  maître.  Déjà  la  doctrine 
du  philosophe  de  Koenisberg  avait  subi 
quelques  modifications  en  passant  par  la 
pensée  de  son  élève  :  Fichté  mélangea  le 
système  primitif  et  le  système  modifié  , 
et  de  ce  mélange  sortit  son  système  par- 
ticulier sur  V idéalisme  transcendental , 
auquel  il  donna  le  nom  de  Doctrine  de  la 
science.  Il  en  publia  le  programme  dès 
son  arrivée  à  léna.  Kant  partait  d'une  ana- 
lyse de  l'entendement ,  de  la  raison  pra- 
tique et  du  jugement  :  Reinhold  prit 
pour  base  le  fait  primitif  de  la  conscience  : 
Fichté  à  son  tour  appuya  toute  sa  doc- 
trine sur  l'action  de  la  pensée  qui  se  re- 
plie sur  elle-même ,  et  oflVe  ainsi  l'idée 
d'une  pensée  qui  réagit  aussi  sur  elle- 
même  et  surH'idée  du/woi,  et  équivalent 
de  l'un  et  de  l'autre.  Le  moi  alors  se  pose 
lui-même ,  et  ici  commence  l'existence  ■ 
du  moi  intelligent  et  du  moi  existant,  m 
Ce  moi  absolu ,  libre  ou  sujet ,  forme  la  ^ 
conscience ,  et  suf)pose  un  objet  ou  un 
non  moi.  Fichté  fait  ainsi  de  l'activité  de 
l'âme  l'univers  entier,  et  (selon  lui), 
tout  ce  qui  peut  être  conçu  ou  imaginé 
vient  d'elle.  Il  regarde  ,  en  outre ,  le 
premier  moi  comme  durable ,  et  le  second 
comme  passager.  Le  premier  a  la  puis- 
sance de  créer  ou  de  rayonner  en  lui- 


i 


m 

inèmc  l'image  de  l'uniTers,  et  i\  ne  con- 
sidère le  monde  extérieur  que  comme 
uue  borne  de  notre  existence  ;  borne  sur 
laquelle  notre  pensée  travaille.  Cette 
borne  est  créée  parl'àme,  dont  l'activité 
constante  s'exerce  sur  son  œuvre  propre. 
L'obscurité  de  cette  exposition  prouverait 
aul)Csoin  l'obscurité  du  système,  si  d'ail- 
leurs sa  réputation  à  ce  sujet  n'était  point 
faite.  On  peut  du  reste  trouver  une  juste 
appréciation  de  cette  doctrine  dans  l'/i'.s.mt 
sur  le  premier  problème  de  la  philoso- 
phie ,  l  essai  sur  l'existence  et  sur  les 
derniers  systèmes  de  méthaphysique  qui 
ont  paru  en  Allemarjne  ,  insérés  l'un  et 
l'autre  dans  les  Mélanges  de  littérature 
et  lie  philosophie ,  par  31.  Ancillon ,  Taris, 
1809,  in-8,  et  dans  l'Histoire  comparée 
des philosophies.  L'année  suivante  (1794) 
ce  professeur  cbangca  la  matière  de  ses 
leçons  :  il  traita  de  la  destination  de 
V homme  de  lettres.  En  1 7  96  il  publia  les 
hases  du  droit  de  la  nature,  et  en  17  98 
son  système  de  morale  ;  en  même  temps 
il  rédif^eait  de  concert  avec  îN'ieHiannner 
un  Journal  philosophique  dans  lequel  il 
traitait  les  mêmes  questions.  Ces  diverses 
publications  faisaient  fermenter  les  es- 
prits. Tout  en  ^-oulant  établir  les  bases  de 
la  religion ,  il  prétendait  que  Bien  lui- 
même  n'était  que  l'ordre  moral  de  l'uni- 
vers ;  il  ajoutait  ensuite  :  «  Le  moi,  en 
»  cbercbant  à  remplir  ses  devoirs,  aspire 
j>  à  un  ordre  moral  de  l'univers  ;:  par  là 
»  il  se  rapproche  de  Dieu ,  et  il  a  la  vie 
))  qui  vient  de  Dieu.  Remercier  Dieu 
M  comme  substance  qui  ne  peut  se  repré- 
»  senter  que  dans  le  temps  et  dans  l'es- 
»  pace,  serait  idolâtrie.  »  Cette  question 
fut,  non  sans  fondement ,  jugée  héréti- 
que, et  les  autorités  firent  confisquer 
l'ouvrage  dans  toute  la  Saxe.  L'auteur 
écrivit  un  Appel  au  public  ])our  se  di.s- 
culper  (le  l'accusation  d'athéisme,  et 
toutes  les  plumes  savantes  de  l'Allemagne 
furent  alors  en  mouvement;  mais  heu- 
reu.semenl  les  défenseurs  elles  apologistes 
de  l'ouvrage  de  Fichté  furent  en  petit 
nombre.  Ficlité  ne  put  résister  à  tor.fes 
les  attaques  dont  son  système  fut  i'-objet  : 
le  plus  puissant  de  ses  adversaires  était 
Schelling.  Ce  philosophe  avait  été  da- 
V. 


bord  un  des  panégyristes  dé  4a  Doctrinii 
de  la  science  ;  mais  s'étant  créé  une  autrC 
espèce  àUdéologie ,  il  voyait  les  choses 
dans  un  sens  contraire  à  celui  qu'adop- 
taient Kaiit ,  Reinhold ,  et  surtout  Fichté. 
Schelling ,  en  établissant  son  système  de 
V identité  absolue,  s'élève  à  l'absolu  pri- 
mitif -.  il  a  vu  le  moi  primitif ,  source  de 
toute  réalité  et  de  toute  science  ;  et  si , 
par  ce  moi  primitif  infini,  Schelling  a 
vu  ou  a  cru  voir  l'Etre  suprême  à  qui  ces 
attributs  appartiennent  uniquement,  cer- 
tes il  s'est  rapproché  d'une  idée  plus 
claire ,  plus  juste  et  plus  distincte.  Fichté, 
au  contraire ,  dans  sa  philosophie  tran- 
scendcntalc,  avait  adopté  que  le  moi  sub- 
jectif produit  le  non  moi  objectif,  et 
qu'ainsi  le  contraire  n'a  pas  lieu.  Ne  pou- 
vant triompher  d'ini  si  grand  antagoniste, 
Fichté  se  défendait  de  son  mieux;  mais 
Schelling  le  terrassa  par  son  ouvrage  de 
Bruno  ,  où  il  détruisit  victorieusement  le 
système  de  l'identité  absolue  de  Fichté. 
Ensuite ,  et  dans  son  Exposition  du  vrai  i 
rapport  de  la  philosophie  naturelle  à  la 
dQctrine  de  Fichté  (180G),  il  lui  re- 
proche, avec  justice,  qu'il  donne  tout, 
en  physi({uc  comme  en  philosophie,  à  la 
seule  action  mécanique ,  et  qu'il  n'a  pas 
la  moindre  idée  de  l'énergie  de  la  vie 
dynamique.  Il  se  vit  contraint  d'aban- 
donner sa  place  et  de  quitter  léna  :  il  se 
rendit  à  Berlin  où  il  donna  des  leçons 
particulières  et  oii  il  publia  plusieurs 
écrits  relatifs  à  la  politique.  Toute  l'Alle- 
magne se  déchaîna  contre  lui,  et  l'on  ne 
sait  comment  Fichté  put  résister  à  ce 
torrent  de  critiques  qui  furent  laucé»es 
contre  lui.  Cependant  ayant  été  nommé 
en  I80C  professeur  de  philosophie  tran- 
scendante à  l'université  d'Eriang  ,  il  y  fit 
plusieurs  discours  qui  rétablirent  sa  ré- 
putation. H  publia  les  leçons  qu'il  fit 
alors  ;  ces  discours  étaient  intitulés  :  J)c 
l'état  de  l'homme  de  lettres  et  de  ses 
travaux  dons  l'empire  de  la  liberté;  son 
cours  parut  sous  le  tilre  de  Guide  de  la 
vie  bicnhcui'citse .  Dans  ces  derniers  ou- 
vrages on  voit  s'éciaircir  enfin  sa  téné- 
breuse doctrine,  ou,  pour  mieux  dire,  il  la 
purifia.  Il  cÀ  difficile  de  trouver  un  livre 
philosophique  écrit  avec  plus  d'onction  ; 
20 


ao6  me 

on  voit  qu'il  a  été  tliclé  sous  l'influence 
des  pensées  religieuses  :  on  ne  peut  lire 
sans  admiration  ce  qu'il  dit  de  l'évangile 
de  saint  Jean.  Du  reste  on  n'y  rencontre 
plus  aucune  de  ces  propositions  qui,  buit 
ans  auparavant,  l'avaient  fait  accuser 
d'hérésie,  et  même,  à  droit  ou  à  tort ,  d'a- 
théisme. La  révolution  qui  ébranla  lu  mo- 
narchie prussienne,. força  Fichté  à  quitter 
Berlin.  Après  avoir  fui  à  Koenisberg, 
puis  à  Riga  ,  il  Tcviut  dans  la  première 
de  ces  villes,  oîi  bientôt  il  apprit  que  la 
protection  du  savant  ilumboldt  l'avait 
fait  nommer  recteur  de  rnniversitc  de 
Berlin.  Fichlc  dans  ses  nouvelles  fonc- 
tions mérita  l'estime  publique.  Sa  femme, 
remplie  de  toutes  les  vertus  qui  font  et 
honorent  le  chrétien  ,  s'était  dévouée  au 
service  des  malades  abandonnés.  Atteinte 
d'une  fièvre  putride ,  elle  parviut  à  se 
guérir  ;  mais  elle  communiqua  son  mal  à 
Fichté  dont  la  santé  était  altérée  depuis 
plusieurs  années ,  et  qui  mourut  le  29 
janvier  181  i.  Malgré  les  paradoxes  que 
l'oq  rencontre  dans  les  ouvrages  dcFichté, 
ce  philosophe  n'en  fut  pas  moins  un 
homme  extraordinaire  ,  et,  quoique  son 
système  n'anra  jamais  ,  si  modiiié  qu'il 
.soit,  l'honneur  d'être  universellement  ré- 
pandu ,  c'est  encore  l'œuvre  du  génie  ; 
car  il  y  a  quelquefois  du  génie  même 
dans  des  erreurs.  Il  était  doué  d'une  élo- 
quence pleine  de  chaleur  et  de  force  ; 
quel  que  fût  l'objet  de  son  enseignement, 
il  y  avait  toujours  foule  à  ses  leçons. 
Quoiqu'il  fut  extrêmement  vif,  il  mit 
toujours  dans  ses  discussions  la  plus 
grande  modération  ;  il  voulait  convaincre 
et  non  pas  blesser.  Bon  époux  ,  ami  obli  • 
géant,  il  avait  les  moeurs  pures,  et  si  on 
peut  lui  contester  le  titre  d'homme  de 
génie  que  nous  lui  avons  décerné,  du 
moins  chacun  .s'accorde^  it  lui  donner 
celui  d'homme  estimable.  Les  principaux 
ouvrafjes  de  ce  philosophe  sont  :  1  "  Essai 
/le  critique  de  toutes  les  rcveUations , 
Koenisberg,  1792,  ibid.,  1793,  in-8; 
2"  Matériaux  pour  rectifier  lesjugcmens 
du  public  sur  la  révolution  française  , 
175)3  ,  in-8  ;  3"^  Sur  la  notion  de  la  doc- 
trine de  la  science  appelée  communément 
philosophie,  Wcimar,  V,H,  17  98,  1T99, 


m 

\  vol.  in-8  ;  4°  La  liberté  de  penser  ré- 
clamée des  souverains  de  l'Europe , 
1794,  in-8  ;  5"  Discours  sur  la  destina- 
tion de  l'homme  de  lettres,  léna  ,  1794  , 
in-8;  G**  Bases  de  la  xloctriiui  'de  la 
science  ,  ibid.  ,  17  94  ,  1  vol.  in-8  ,  1801  , 
1802,  2  vol.  ;  7"  Précis  de  ce  qui  carac- 
lérise  la.  doctrine  de  la  science  relative- 
ment à  la  faculté  théorétique ,  ibid.  , 
1774 ,  et  1802  ,  in-8  ;  8°  Bases  du  droit 
naturel  d'après  les  principes  de  la  doc- 
trine de  la  science ,  ibid. ,  179G  et  1797, 
2  vol.  in-8  ;  9"  Système  de  morale  d'après 
les  principes  de  Id  doctrine  de  la  science, 
ibid.,  1798,  in-8;  10°  Nouvel  essai  pour 
servir  à  l'histoire  de  t athéisme ,  Mar- 
bourg ,  in-8  ;  11°  Appel  au  public  sur 
l'imputation  d'athéisme  fuite  a  l'auteur , 
léna,  1709,  in-8,  2"  édition;  12°  /!«  j 
destination  de  Vhomme,  Berlin,  1800,  \ 
in-8;  13°  Discours  sur  la  condition  de 
Vhomme  de  lettres  eÀ  sur  ses  travaux 
dans  V empire  de  la  liberté ,  ibid. ,  1 806  , 
in-8  ;  1  4"  Discours  adressés  à  la  nation 
allemande ,  ihïd. ,  180C,  in-8;  15°  La 
doctrine  de  la  science  exposée  dans  toute 
son  étendue,  Straubing,  1807,  in-8; 
1G°  Principes  fondamentaux  de  toute  la 
doctrine  de  la  science  ,  etc.,  et  esquisse 
du  caractère  distinctif  de  cette  science 
relativement  à  la  faculté  théorétique , 
1810,  in-8;  et  divers  opuscules 'm%éré% 
dans  les  jour?iaux  philosophiques  et  dans 
d'autres  écrits  périodiques  ou  publiés 
séparément. 

"^  FICHTEL  (  Jean  Eiibenreich  } ,  na- 
turaliste hongrois,  ué  en  1732  à  Pres- 
bourg,  s'adonna  à  la  jurisprudence,  qu'il 
abandonna  pour  une  place  d'actuaire  dans 
le  directoire  de  la  nation  Saxonne.  Ce 
directoire  ayant  été  supprimé,  Fichtel 
se  rendit  à  Vienne,  oii  il  fut  d'abord 
employé  dans  la  chambre  des  comptes.  On 
l'envoya  ensuite  en  Transylvanie  pour 
occuper  une  place  de  chef  de  bureau  à  la 
trésorerie.  En  178.5,  il  devint  directeur 
de  la  régie  du  domaine  et  des  douanes  , 
et  en  17  87  conseiller  du  gouvernement 
de  la  même  province.  Il  mourût  presque 
subitement  le  4  février  179.5.  Lesdiflférens 
voyages  qu'il  fut  oblige  de  faire  pour 
remplir  ses  fonctions  Je  mirent  à  même 


PIC 

de  Satisfaire  ses  goûts  pour  l'hisloire  na- 
turelle. Son  cabinet  de  minéralotïie  pas- 
sait pour  le  plus  riche  qui  fût  dans  les 
étals  autrichiens.  On  lui  doit  :  \"  Mé- 
moires sur  la  minérnloc/ic  de  la  Transyl- 
vanie ,  >'ureinberg  ,  1 780,  2  parties  in-4. 
2°  Observations  minéralogiqites  sur  les 
monts  Carpaths ,  Vienne,  179!,  2  part. 
in-8.  3"  Mémoires  minéralogiques , 
Vienne,  1794,  in-8.  i" Notice d'unvolcan 
brillant  en  Hongrie,  Berlin,  17  99. 

FIC1]\  ou  FiciNO  (Marsile  ou  Marsilio }, 
chanoine  de  Florence  sa  patrie ,  savant 
dans  les  lanf^ucs  grecque  et  latine ,  naquit 
le  19  octobre  14  33.  Il  professa  la  philo- 
sophie dans  l'université  de  Florence.  Il 
eut  une  foule  de  disciples  :  car  quoiqu'il 
adoptât  les  rêveries  de  l'astrologie  judi- 
ciaire ,  erreur  qui  lui  était  comihune 
avec  les  philosophes  de  son  temps,  il 
avait  d'ailleurs  beaucoup  de  mérite.  Il 
dut  à  la  libéralité  des  îlédicis,  des  re- 
traites agréables  auprès  de  l^lorcnce.  Il  y 
passait  le  plus  de  temps  qu'il  pouvait, 
avec  des  amis  choisis  qui  philosophaient , 
et  qui  partageaient  avec  lui  les  charmes 
de  la  raison  et  de  la  solitude.  Ficin  avait 
besoin  de  l'air  de  la  campagne.  Son  tem- 
pérament était  mélancolique,  sa  santé 
délicate  ,  et  il  ne  la  conservait  que  par 
des  attentions  presque  superstitieuses.  Il 
changeait  jusqu'à  six  ou  sept  fois  de 
calotte  par  heure.  La  nature  était  trop 
faible  chez  lui,  pour  qu'elle  ne  succombât 
point,  malgré  toutes  les  attentions  de 
l'art.  Il  mourut  en  1499,  à  CG  ans.  Ses 
ouvrages  ont  été  recueillis  à  liàle  en 
1561  ,  en  2  vol.  in-folio.  Ils  ont  été  im- 
primésplu-sieurs  fois  On  y  voitdes  traduc- 
tions d'auteurs  grecs ,  de  Platon ,  de 
Plotin  ,  dont  il  essaie  de  faire  des  chré- 
tiens ,  parce  qu'effectivement  il  se  trouve 
dans  leurs  ouvrages  des  endroits  très  favo- 
rables à  la  religion  chrétienne,  fruits 
sans  doute  de  la  lecture  des  livres  saints, 
ou  de  la  traduction  primitive,  ou  des 
notions  que  les  Juifs  avaient  communi- 
quées aux  autres  nations.  On  y  trouve 
aussi  des  écrits  de  physique,  de  meta - 
phyfiiquc  ,  de  morale,  de  religion  ;  des 
lettres  en  12  livres,  imprimées  séparé- 
ment, Venise,  1 49a  ,  in-fol.,  rares  ,  ainsi 


ne  3o7 

que  son  L^dilion  de  la  Philosophie  pla- 
tonicienne, imprimée  à  Florence  in-folio  , 
1482.  (On  peut  consulter  sur  Ficino , 
Tiraboschi  dans  son  Histoire  desécrivains 
italiens  :  J.  G.  Scheiliorn ,  Aniœnit.  litt. , 
tome  1  ^"^  ;  et  sa  Fie  écrite  par  Jean  Corsi, 
de  Florence,  imprimée  à  Pise  en  1771, 
in-8.  Ficino  eut  pour  élèves  lessavansles 
plus  illustres ,  comme  .Vccolti,  Calverino, 
Cavalcanti ,  Ange  Politieu;  ce  dernier, 
ainsi  que  d'autres  poètes ,  le  célébra  dans 
ses  vers.  ] 

*FICOROM  (François  },  antiquaire 
italien  ,  né  dans  les  environs  de  Rome  , 
en  16G4,  mourut  dans  cette  ville  en  1747, 
âgé  de  83  ans.  Il  fut  membre  associé  de 
l'académie  des  Inscriptions  ,  delà  société 
royale  de  Londres  et  de  plusieurs  autres 
sociétés  savantes.  Il  fonda  la  société 
degt  Inculti  à  home.  On  lui  doit  un 
grand  nombre  d'ouvrages  en  italien  qui 
prouvent  son  érudition.  Les  principaux 
sont  :  1  "  Osservazioni  snpra  Vanticldla  di 
Roma  dcscritlc  nel  diario  italico  publi- 
cato  dal  P.  Bernard  MonI faucon, 
1709,  in-4  ,  ouvrage  curieux  et  estimé. 
2°  Itali  ed  altri  instrumcnti  lusorii  degli 
anticfU  romani ,  Rome,  1 734  ,  in-4  ,  fig., 
curieux  etpeu  commun.  3°  Le  maschere 
sceniche  e  le  figure  corniche  d'antichi 
romani,  Rome,  1736  et  1748,  in-4,  fig.^ 
traduit  en  latin  ,  sous  ce  titre  :  De  larvis 
scenicis ,  en  17  50  ou  1754,  in-4 ,  ftg. 
i° Ipiombi  antichi,  1 7  40  ,  in-4  ,  fig. ,  rare 
et  estimé.  Il  a  été  traduit  en  latin. 
5°  /  vestigi  e  racita  diRoma  nntica ,  ri- 
cercate  e  spiegate,  1744,  grand  in-4. 
6°  Gemmœ  antiquœ  littéral œ,  aliœque 
rariores,  17  57  ,  in-4  ,  fig. ,  publié  après 
la  mort  de  l'auteur,  avec  de  savantes  notes 
de  Galleoli.  •        ■ 

*  FICQUET  (  Etienne  ) ,  graveur  ,  né 
à  Paris  en  1731  ,  mort  en  1794  ,  excellait 
à  peindre  les  portraits  en  petit.  On  lui 
doit  ceux  des  personnages  les  plus  cé- 
lèbres de  France,  qui  forment  une  suite 
connue  sous  la  dénomination  de  Collec- 
tion Ficquet.  Elle  se  compose  des  por- 
traits suivaiis  :  il/"^  de  Maintcnon, 
Molière,  Foliaire,  Montaigne,  Regnard, 
J.  B.  Rousseau  ,  Fénélon ,  Descaries , 
/.  /.    Rousseau,  Lamùthe-LeFayer ^ 


5o8  FID 

Crebillon ,.  Corneille  ,  Fisen,  Fade, 
Chcunevwre ,  el  deux  dift'ërcns  portraits 
de  La  Fontaine.  Il  a  laissé  imparfait 
celui  de  Bossuet ,  qui  devait  Caire  partie 
de  celle  collection;  on  eu  rencontre 
quelques  épreuves.  Ou  a  encore  de  lui 
plusieurs  autres  très  petits  portraits  , 
tels  que  ceux  de  Cice'ron ,  Ne  wton , 
Louis  Xr ,  etc.  Celui  de  M™»  de  Mainte- 
non  est  rc.çardé  comme  un  chef-d'œuvre. 
Il  était  d'un  caractère  original ,  travail- 
lait peu  lorsqu'il  n'était  pas  pressé  par  le 
besoin ,  et  mourut  dans  un  élat  voisin 
de  l'indigence,  en  17  94. 

FIDDLS  (Uicliard),  écrivain  poli  et 
savant  théologien  aiygjais,  né  à  Huu- 
mamby  dans  le  comté  d'York ,  en  167 1  , 
fut  ministre  à  Halsham  ,  lieu  malsain  , 
qu'il  fut  obligé  de  quitter.  I!  se  retira  à 
Pulney,  oii  il  mourut  en  1724.  Il  est  au- 
teur 1  o  D'un  Corps  de  théologie  ,1718- 
1720, 2  vol.  in-fol.  ;  2°  de  cinquante-deux 
discours  pratiques  sur  différens  sujets  , 
1720,  in-fol.  ;  3"  de  la  Fie  du  cardinal 
Wolsey,  Londres,  1724,  in-folio  ;  h°  d'un 
Traité  de  morale,  1724  ,  in-8  ,  où  il  ré- 
fute la  fable  des  Abeilles  de  Mandeville  , 
et  les  Recherches  sur  la  vertu  de  Sha- 
flesbury.  Il  était  plus  fécond  que  solide. 

FIDELE  (  Saint),  né  à  Sigmaringen, 
^^etile  ville  de  la  Sooabe  ,  étudia  la  phi- 
losopu'C  et  la  juris^vudence  dans  l'uui- 
■versité  de  Fribowrg.  Quelques  gentils- 
hommes' curieux  de  voyager,  ayant  désiré 
de  l'âP^oir  pour  compagnon ,  il  parcourut 
avec  eus ,  depuis  1604  jusqu'en  1 C 1 0,  l'Al- 
lemagne, l'Italie,  la  France  et  plusieurs 
provinces  d*Espagnc.  De  retour  dans  sa 
patrie,  il  embrassa  la  .profession  d'a- 
vocat ,  et  devint  célèbre  d«ns  le  barreau; 
mais  •redoutant  les  écucils  dont  cette 
carrière  est  semée,  il  la, quitta  bientôt 
pour  se  faire  capucin.  Le  pape  Grégoire 
W  ,  qui  venait  d'établir  la  congrégation 
de  la  Propagande,  instruit  du  mérite  de 
Fidèle  ,  le  préposa  aux  missions  qui  de- 
vaient se  faire  chez  les  Grisons;  il  s'ac- 
quitta de  son  emploi  avec  un  succès 
digne  de  son  zèle ,  et  tel  qu'on  espérait 
de  ramener  dans  le  sein  de  l'Kglise  tout 
ce  qui  restait  d'hérétiques  chez  celte  na- 
tion ;  mais  quelques-uns   d'entre  eus , 


FIE 

plus  allachés  à  l'erreur,  et  par-là  mém(! 
jaloux  de  ses  succès ,  tésolurent  de  te 
perdre  de  la  manière  la  plus  lâche  et  la 
plus  cruelle.  D'après  une  invitation  si- 
mulée ,  le  Père  Fidèle  s'étant  présenté 
pour  les  instruire ,  [ils  se  jetèrent  tumul- 
tueusement sur  lui  et  le  massacrèrent  le 
24  avril  1622.  Clément  XIII  l'a  mis  au 
nombre  des  saints. 

FIDERI ,  empereur  du  Japon  ,  fils  et 
successeur  de  Taïkosama  en  l.'jOS.  On- 
goschio  son  tuteur  lui  enleva  sa  cou- 
ronne, après  l'avoir  obligé  d'épouser  sa 
fille.  Fideri  leva  une  puissante  armée 
contre  l'usurpateur;  mais  celui-ci  plus 
heureux  le  rétluisit  à  s'enfermer  avec  sa 
femme  cl  les  seigneurs  de  son  parti  dans 
un  palais  ,  où  il  fit  mettre  le  feu. 

FIDIUS.  Fnyez  Da's-FiDius. 

FIELDIPs'G  (Henri),  célèbre  romancier 
anglais,  filsd'un  lieutenant-général,  vil  le 
jour  à  Sharpham-Park ,  dans  le  comté  de 
Sommerset,  le  28  avril  1707.  Né  avec  une 
imagination  vive  et  même  libertine,  il  s'a- 
bandonna,avant  l'âge  de  20  ans,  tellement 
à  la  débauche ,  qu'il  altéra  sa  santé  et  sa 
médiocre  fortune.  A  30  ans  il  épousa  miss 
Cradock ,  beauté  célèbre  du  comté  de 
Salisbury.  Sa  dot  fut  bientôt  consumée 
dans  les  plaisirs.  Fielding  voulut  suivre 
le  barreau  ;  mais  la  goutte,  qui  l'assaillit 
tout  à  coup ,  l'obligea  d'abandonner 
cette  carrière  à  laquelle  il  était  d'ailleurs 
peu  propre.  La  composition  de  plusieurs 
comédies  ou  farces  ,  et  de  plusieurs  ro- 
mans, et  la  place  de  juge  de  paix  dans 
le  comté  de  Midlesex ,  furent  ses  res- 
sources contre  l'indigence.  Une  maladie 
de  langueur,  qui  l'ailligeait  depuis  quel- 
que temps,  l'engagea  d'aller,  en  1753, 
en  Portugal.  Il  mourut  à  Lisbonne  eu 
octobre  1764.  Ses  romans  sont  traduits  en  ■. 
français  :  Tom-Jones  ,  en  4  vol.  ;  Amélie,  m 
en  a  ;  les  Aventures  d'Andrews,  2  vol.; 
Roder ic  Randon,  3  vol.  in-i2  ;  Foyage 
danK  Vautre  monde,  in-12.  Les  comédies ^ 
de  Fielding  ne  sont  pas  du  premier  mé- 
rite; elles  oftVent  pourtant  des  scènes 
agréables ,  et  quelques  ridicules  nou- 
veaux, peints  avec  vérité,  avec  énergie 
et  d'une  manière  originale.  Il  en  a  imité 
deux  de  Molière,  Y  Avare  et  le  Médecin 


FtE 

maUjrc  lui.  Quant  à  ses  romans ,  on  y 
trouve  de  belles  siluations,  des  scnli- 
niens  toucliaiis,  d'cxcellens  caractères, 
dont  quelques-uus  sont  neufs;  mais  l'au- 
teur prodifjileirop  les  réflexions,  les  di- 
{;ressious,  les  portraits  bas  et  les  menus 
détails.  i}\\  a  corritjé  une  partie  de  ces 
défauts  dans  les  traductions  françaises,  du 
moins  dans  celle  d'Âmclie.  Tom-Jones , 
le  chef-d'œuvre  de  l'auleur,  a  été  réduit 
de  C  vol.  i»  4  ;  encore  il  y  en  a  deux  de 
trop.  Chéron  Cn  a  donné  depuis  une  tra- 
duction complète  en  G  vol.  iu-12.  Ficï- 
ding  donna  pendant  quelques  mois  une 
espèce  de  Journal  de  morale,  qui  avait 
les  mêmes  imperfections  que  ses  romans. 
C'était  un  tas  d'observations  faites  à  la 
bâte  et  dans  les  rues  ,  mal  adroitement 
cousues  à  des  lieux  communs ,  satiriques 
el  moraux  ,  dont  l'eft'et  ne  sera  certaine- 
ment pas  de  rendre  les  hommesnicilleurs. 

FiENîVE  (  Robert  de  )  ,  vieux  guer- 
rier,  qui  fut  honoré  de  l'épéede  conné- 
table en  135G  ;  mais  le  roi  Charles  V  vou- 
lant fjratifier  Dugucsclin  de  cette  charge, 
de  Fiennc  donna  sa  démission  en  1370. 
Sa  famille  a  subsisté  jusqu'à  nos  jours. 

FIE^US  (  Thomas  } ,  d'Anvers  ,  né  en 
1 507 ,  fut  appelé  à  !.ouvain  en  1  o93  , 
pour  remplir  une  chaire  de  médecine.  Il 
la  quitta  au  bout  de  sept  ans,  pour  se 
rendre  à  la  cour  de  Maximilien  ,  électeur 
de  Bavière,  en  qualité  de  son  médecin  ; 
iL  n'y  resta  qu'un  an,  et  il  vint  repren- 
dre sa  chair<î  à  Louvain ,  oii  il  mourut 
en  1631.  Il  est  regardé  comme  un  mé- 
decin très  savant.  Il  en  est  peu  de  son 
temps  qui  l'aient  égalé  dans  la  connais- 
sance, de  l'histoire  naturelle  et  la  chi- 
rurgie. On  a  de  lui  :  1"  De  viribus  ima- 
ginât innis  ,  in-8.  2"  De  formaiinnc  cl  de 
animationc  fœtus,  in-8.  3°  ylpolorjia 
pro  Ubroprœccd.  in-8  ,  1G29.  \°  De  cau- 
teriii,  in-8.,  dont  la  mciricurc  édition 
est  de  Londres,  1733,  in- 4.  b"  Libri 
chirurgici,  1G49,  in-i  ;  et  d'autres  livres 
bien  reçus  dans  leur  temps.  — Son  père 
Jean  Fienus,  médecin  à  Anvers,  mort  à 
Dordrecht  en  1  j85,  donna  un  traité  De 
statibus  humanum  corpus  nioleslanli- 
bus,  1G82,  in-8,  curieux. 

FJESQUE(  Jean-Louis  de) ,  comte  de 


FIE  3o9 

Lavagne  ,  d'une  des  plus  grandes  famille-s 
de  Gènes ,  naquit  avec  des  qualités  qui 
auraient  pu  lui  procurer  une  vie  heu- 
reuse; mais  son  ambition  ]ç  perdit.  Xa 
haute  fortune  d'André  Doria  excitait  sa 
jalousie;  il  se  ligua  d'abord  avec  les 
Franr.Tis,'  qni  voulaient  recouvrer  Gènes. 
YjW  des  conjurés  lui  ayant  fait  corapren- 
*lre  que  c'était  l'entreprise  d'une  âme 
lâche  ,  d'aimer  mieux  assurer  sU  patrie  à 
des  étrangers,  que  de  la  conquérir  pour 
lui-même,  il  travailla  à  s'en  rendre  mai 
Ire.  A  l'entrée  de  ia  nuit  du  l"  janvier 
1547,  les  conjurés  commencèrent  d'exé- 
cuter leur  projet.  Us  s'étaient  déjà  rendus 
maîtres  de  la  Darsènc ,  lieu  où  sont  les 
galères,  lorsque  la  planche  sur  laquelle 
le  comte  passait  pour  entrer  dans  une 
galère  s'étant  renversée,  il  tomba  dans 
la  mer  et  .se  noya,  à  l'âge  de  22  ans.  La 
mort  du  chef  rallcntit  l'ardeur  des  cou- 
jurés^  et  !a  république  fut  sauvée.  On 
punit  le  crime  de  Fiesqiie  sur  sa  famille,- 
elle  fut  bannie  de  Gènes  jusqu'à  la  cin- 
quiènse  génération ,  et  sou  palais  fut 
rasé.  Le  cardinal  de  Retz  a  donné  l'His- 
toire de  cette  conjuration,  in-8,  1G66. 
Cet  ouvrage  n'est  qu'une  espèce  d'abré- 
gé de  l'Histoire  de  la  même  conspira- 
lion  ,  publiée  en  italien  par  31ascardi, 
et  traduiteen  français  par  Fontenai-Sainte- 
Geneviève,  1G39,  in-8.  (Schiller  a  donné 
sur  ce  sujet  une  bonne  tragédie  qui  a 
été  imitée  p.ir  .M.  Ancelot,  1825.) 

FIEUBET  (  Gaspard  de  ) ,  seigneur  de 
Ligny,  conseiller  au  parlement  de  Tou- 
louse sa  patrie ,  ensuite  chancelier  de  la 
1  eine  Marie-Thérèse  d'.\utriche  ,  et  con- 
seiller d'état ,  mourut  aux  Camaldules  de 
Grosboisen  lC:)i,  à  G7  ans.  Il  a  laisséquel- 
ques  petites /;iV;c^5  de  poésie ,  répandues 
dansdivers  recueils.  On  les  lit  avec  plaisir, 
pour  la  délicatesse,  la  légèreté  et  le  na- 
turel qui  y  régnent..  Sa  fable  surtout, 
intitulée  Ulysse  et  les  Syrèncs,  est  très 
estimée. 

FIEUX  (  Jacques  de  ),  entra  de  bonne 
heure  dans  l'état  ecclésiastique,  et  fut  doc- 
teur de  la  maison  de  Navarre.  Son  talent 
ponrla  prédication  le  rendit  célèbre,  et  lui 
mérita  l'cvêché  de  Touî  ,  auquel  il  fut 
nommé  eu  I.C7G.  Il  y  publia  l'année  sui- 


3id  FIG 

vante  (les  Statuts  synodaux ,  qui  depuis 
ont  servi  de  règle  en  celle  église  ,  el  fit 
de  fréquculcs  visiles  dans  sou  diocèse, 
toujours  avec  graud  fruit.  Son  zèle  ,  sa 
douceur,  sou  ëloqueuce  4ui  gagnèrent 
tous  les  èœurs.  Ce  digne  pasteur  l'ut  reçu 
partout  comme  il  méritait,  avec  des  té- 
moignages unanimes  d'eslimjc  cl  de  con- 
fiance, surtout  dansla  Vosge,  oîi  l'on 
n'avail  point  vu  d'évèque  de  mémoire 
d'iiomme.  M.  de  Fieux  avait  une  sagacité 
singulière  pour  la  décision  des.  <^s  de 
conscieiice,  et  il  publia  en  1G79,  un 
écrit  sur  l'usure,  très  estimé,  qui  l'ut 
principalement  utile  dans  son  diocèse, 
où  ce  vice  avait  jeté  de  profondes  ra- 
cines. Il  mourut  à  Paris  dans  les  senti- 
niens  de  la  plus  tendre  piété,  qui  avait 
présidé  à  tous  ses  travaux. 

*  FlGUlilREDO  (Antonio  Pébeira 
de),  savant  portugais,  pé  à  Macao  le  H 
février  17*5,  fit  ses  premières  éludes  chez 
les  jésuites ,  et  entra  ensuite  dans  la 
congrégation  des  Pères  de  l'Oratoire  de 
la  maison  du  SaintE<<pril  à  Lisbonne,  oiiil 
enseigna  successivement  lu  grammaire , 
la  rhétorique  el  la  théologie.  Quelques 
diôërends  s'étant  élevés  en^re  la  cour  de 
Rome  et  celle  de  Portugal ,  il  se  pro- 
nonça d'abord  en  faveur  du  sainl-Siége  ; 
mais  il  changea  bientôt  d'opinion ,  et 
soutint  publiquement  les  famenses  thèses 
du  pouvoir  des  rois  sur  les  personnes  et 
les  biens  ecclésiastiques.  Il  publia  peu 
de  temps  après  son  Essai  thénlogiquc , 
oîi  il  défend  la  même  cause.  Cet  ouvrage 
lui  valut  l'einploi  de  député  ordinaire 
dans  le  tribunal  royal  de  la  censure  ,  et 
de  premier  interprète  dans  les  bureaux 
des  affaires  étrangères  et  de  la  guerre. 
Obligé  de  vivre  dans  le  monde ,  il  se 
crut  autorisé  à  quitter  ses  habits  reli- 
gieux ,  démarche  qui  augmenta  l'animad- 
version  de  ses  ennemis,  et  le  fit  regarder 
comme  un  homme  vendu  à  la  cour  et  à 
l'ambition  du  marquis  dé  Pombal.  Ce 
ministre  ne  pouvait  en  efi'el  trouver  un 
homme  qui  fût  mieux  eu  état  de  secon- 
der ses  plans  hardis  de  réforme,  figuei- 
redo  joignait  à  la  plus  grande  activité  , 
la  pénétration  et  l'étendue  du  savoir.  En 
1772,  il  fut  élu  un  des  trois  premiers 


FIL 

députés  de  la  junte  du  subside  liitt'- 
faire  et  de  l' instruction  publique.  Il 
devint  peu  après  membre  de  l'académie 
royale  des  Sciences  dans  la  classe  de  la 
littérature  portugaise.  Sa  grande  assi- 
duité aux  alïaires  et  à  l'élude  altérèrent 
sa  santé.  Sur  lu  fin  de  sa  vie,  il  sembla 
se  repentir  des  erreurs  où  ^Qn  ambition 
l'avait  entruiné ,  et  mourut  d'une  attaque 
d'apoplexie  le  1 4  août  1 71)7 ,  avec  l'habit  de 
son ordrequ'il availdemundé lui-même.  Il 
a  composé  plusieurs  livres  sur  les  langues 
latine  el  portugaise,  qui  éprouvèrent  de 
nombreuses  critiques  de  In  part  des  jé- 
suites ,  contre  lesquels  il  s'était  ouverte- 
ment déclaré.  Celui  desesouvragesqui  lui 
fait  le  plus  d'honneur  ,est  la  sainte  Bible , 
traduite  euparturjuis ,  avec  des  préfaces , 
notes  et  variantes,  1778-90,  23  vol.  in-8. 
Il  a  laissé  un  grand  nombre  de  manuscrits. 
*  FILA-MOJNDO  (Raphaël-Marie),  évê- 
que  de  Suessa ,  né  à  tapies ,  dans  la  2*= 
moitié  du  K**  siècle,  embrassa  l'ordre  de 
Saint-Dominique  dans  le  couvent  de 
Sainte-.Marie  dcUa  Sanilà.  D'excellentes 
études  ,  et  son  application  k  la  théologie, 
le  rendirent  capable  de  professer  de 
bonne  heure  cette  science  avec  succès;  il 
cultiva  en  même  temps  la  littérature  ,  et 
se  fil  connaître  avantageusement  par 
([uelqucs  pièces  de  vers  qu'il  adressa  a 
ses  amis.  Ses  talens  le  firent  appeler  à 
Rome  par  le  supérieur  de  l'ordre,  et  il  y 
fut  nommé  eu  1706  l'uu  des  conserva- 
teurs de  la  fameuse  bibliotlièque  de  la  Ca- 
sanala.  Le  pape  Clément  XI  lui  donna 
l'évêché  de  Suessa  dans  la  terre  de  La- 
bour ,  qu'il  administra  avec  sagesse  jus- 
qu'à sa  mort  arrivée  en  1 7 1 6.  On  connaît 
de  ce  prélat  ;  l"  Ilgenio  bellicoso di Na- 
poti;  Mcmoric  istnriche  (Talcuni  capi- 
tani  celebri  napolitani,  Naples,  1694, 
2  part,  in-fol.  Il  y  en  a  des  exemplaires 
qui  portent  la  date  de  17»  i.  C'est  l'his- 
toire des  célèbres  capitaines  du  royaume 
de  IS'aples.  Elle  est  ornée  de  ôG  portraits. 
2"  Raggunglin  del  viaggio  fatlo  dapadri 
delV  ordinede  Predicatori  nella  Tartaria 
minore,  neW  nnno  16G2  ,  con  la  nuova 
spedizione  del  padrc  Francesco  ,  epis- 
copo  ,  in  Arinriiia  Persia ,  Kaplcs, 
IGOà,  in-8  ;  .3''  TheorhetoncK  idca  ,  ex 


ni 

dtvinis  scriptinis  etpoUlioris  iitterâturœ 
mtjstagngis  dcducta,  Naples,  i:Ot),  2 
Tol.  in-4.  C'est  UD  cours dVloqucnce  sa- 
crée à  l'usage  de  ceux  qui  se  destinent  au 
ministère  de  la  chaire,  le  Père  Echatd 
l'a  dlé  avec  éloge  dans  sa  Bibl.  ord. 
prtedicat. 

FILANGIERI  (  Gaétan  ),  publicisJe 
ccièbre.  rentilhorame  de  la  chambre  du 
roi  des  Deux-Siciles ,  et  conseiller  au  dé- 
partement des  finances ,  ne  à  Naples  le  1 8 
août  l'hi,  et  mort  dans  la  même  ville  en 
1788  à  la  fleur  de  son  âge,   était  fils  du 
prince  d'Aragnello  et   petit-fils  par  sa 
mère  du  duc  de  Fraynito  :  (  il  descendait 
de  ces  aventuriers  normands  qui  dans  le 
1 1  *  siècle  fondèrent  des  royaumes  en  Ita- 
lie. Filangieri  avait  1 4  ans  lorsqu  il  entra 
dans  un  des  régimens  destinés  à  la  garde 
du  roi  ;  mais  il  quitta  bientôt  la  profes- 
sion des  armes  pour  se  livrer  à  l'élude  de 
la  morale  ,  de  la  philosophie  et  des  lois. 
Il  obtint  de  grands  succès  au  barreau.  )  Il 
est  auteur  de  la  Science  de  In  Lc'gisla- 
tioit,  en  italien,  qui  fut  condamnée  par 
un  décret  de  la  cour  de  Rome,  en  date  du 
C  décembre  1784.  11  en  a  paru  plusieurs 
éditions  à  Napics ,  Venise ,  Florence  et 
Milan.  Elle  a  été  traduite  en  allemand  , 
en  espagnol  etc.  I.a  traduction  française 
i  si  de  Gallois,  Paris,  1786-91,  7  vol.  in-8. 
ot    avec   des    notes    de   Benjamin-Con- 
stant ,  1821,  6  vol.  in-8.  Les  maximes  phi- 
losophiques qu'il  a  répandues  dans  cet 
ouvrage,  lui  ont  fait  une  prompte  répu- 
tation  dans  un  certain  monde.   Si  l'on 
tvceple  quelques  passages  sur  le  despo- 
tisme des  rois  et  les  abus  du  gouverne- 
ment militaire,  on  peut  dire  que  ce  n'est 
i|a'une  répétition  de  ce  qu'on  voit  ail- 
leurs, à  quelques  paradoxes  près  qui  sont 
propres  à  l'auteur.  Et  dans  le  fait  ,  que 
pcnt-on  dire  de  nouveau  sur  une  matière 
toile  que  la  législation  ,  sans  se  perdre 
dans  des  spéculations  hasardées  et  dan- 
creuses?  «  Ne  comprendra-l-on  jamais, 
dit  un  VTai  politique,  combien  il  est 
dangereux  dans  un  état  de  souô'rir  que 
des  hommes  sans  mission  ,  souvent  sans 
talent^  et  sans  lumières  j  déclament  à 
lort  et  à  travers  contre  les  usages  reçus, 
contre  les  anciens  élabiisseitiens,  frou- 


m  3ii 

>i  dent  ce  qu'il  y  a  de  plus  reêpeclab'.e  , 
a  foulent  aux  pieds  tous  les  principes , 
»  sous  le  spécieux  prétexte  de  s'élever 
»  contre  les  abus,  et  de  détruire  les  pré- 
u  jugés.  Le  public  toujours  avide  de  ndu- 
»  veautés ,  toujours  disposé  à  confondre 
u  la  témérité  et  l'audace  avec  le  génie , 
«  toujours  dupe  de  l'emphase  et  des  pro- 
)>  messes  des  charlatans,  se  persuade  ai- 
»  sèment  que  des  hommes  qui  jugent  et 
n  qui  condamneutavedtant  de  hardiesse, 
•)  ont  des  vues  supérieures ,  et  que  nos 
w  ancêtres  n'avaient  pas  le  sens  commun  ; 
«  il  se  pénètre  des  idées  et  des  maximes 
u  de  ces  réformateurs  ,  d'autant  plus  flat- 
«  teuses  ,  qu'elles  paraissent  neuves  ;  et 
)'  quel  mal  n'en  résulte-t-il  pas  pour  la  na- 
»  tion  ?  »  En  17  88 ,  il  parut  à  Paris  3  au-  ' 
très  vol.  de  la  Science  de  la  Lc'gislation. 
Ces  trois  volumes  posthumes  ressemblent 
parfaitement  aux  autres  ,  à  cela  près  que 
l'auteur,  devenu  plus    constant,    plus 
hardi,  déguise  moins  certaines  opinions, 
que  le  crédit  toujours  croissant  du  phi- 
losophisme lui  a  paru  rendre  plus  aisé- 
ment admissibles.  Il  y  a  de  bonnes  cho- 
-  ses ,  il  y  en  a  beaucoup  de  mauvaises.  Le 
nombre  de  celles-ci  est  encore  allé  en 
croissant  dans  les  7  et  8"  vol.  publiés  à 
Paris  en  1701.  Il  y  règne  de  plus  un  ton 
de  morgue  et  de  vrai  fanatisme ,  une  lé- 
gèreté et  une  inconséquence  d'idées ,  et 
tant  de  spéculations  creu.ses,   dangereu- 
ses, tyranniques  et  impraticables,  qu'on 
est  fondé  dedouler  que  ce  soit  réellement 
une  suite  et  une  traduction  de  l'ouvrage 
italien,  et  de  présumer. que  c'est  plutôt 
la  production  de  quelque  déaiocrale  pa- 
risien, dont  la  tcle  n'aura  pu  conserver 
une  organisation  saine  aa  milieu  des  mou- 
vemens  de  la  révolution.  (Le premier  li- 
vre de  Fiiangieri  traite  des  règles  géné- 
rales de  la  législation  ;  le  deuxième  des 
lois  politiques  et  économiques  ;  le  troi- 
sième des  lois  criminelles;  le  quatrième 
de  l'éducation,  des  mœurs,  et  de  l'instruc- 
tion publique;  le  cinquième  des  lois  re- 
latives à  la  religion.  Ce  livre  est  resté  in- 
complet,  l'auteur  étant  mort  avant  de 
l'avoir    achevé.    Le    professeur    Joseph 
Grippa  a  réfuté  cet  ouvrage  eh  1782.  D'un 
autre  côté  l'avocat  Tommasi  a  fait  l'éloçe 


3tA  m 

de  FilaDglcri  kvec  Une  analyse  de  sa  tc- 
(fislation  universelle,,  frilangieri  avait  ob- 
tenu en  1777  les  litres  de  f^cntilhonimc 
de  la  cbamlirc  du  roi  ;  de  jtinjordoinc  de 
semaine ,  et  d'officier  du  corps  royal  de 
Ja  marine  II  habita  la  Cour,  et  ce  fut 
alors  qu'il  ûl  paraître  son  ouvrage.  En 
1783  il  épousa  la  comtesse  Caroline  do 
Frendel,  noble  hongroise,  se  démit  de 
toutes  ses  charges,  et  se  retira  à  Cava  pour 
se  livrer  aux  plaisirs  de  l'amitié  et  de  l'é- 
tude. Ferdinand  IV  l'arracha  à  sa  retraite 
en  1787  ,  à  l'époque  où  il  monta  sur  le 
trône,  et  le  fit  membre  du  conseil  suprême 
des  finances.  Un  maladie  grave  le  força 
à  aller  avec  sa  famille  à  Vico-F.qucnsis 
oîi  il  est  mort  à  36  ans.  ) 

*  FILASSIER  (  Jean-Jacques  ) ,  agro- 
nome ,  né  à  VVarwick-sud  ,  dans  la  Flan- 
dre ,  vers  1 73G  ,  d'un  père  riche ,  se  voua 
d'abord  à  l'état  ecclésiastique  auquel  la 
lecture  des  philosophes  le  fit  renoncer, 
La  simplicité  de  ses  goûts  semblait  devoir 
l'éloigner  de  la  capitale:  cependant  il 
saisit  avec  plaisir  l'occasion  de  s'en  rap- 
procher ,  en  se  chargeant  de  la  direction 
de  la  pépinière  de  Clamart,  où  il  vivait 
paisibîemcnt  lorsque  la  ^évolution  éclata. 
Le  vœu  des  habitaus  l'appela  bientôt  à 
la  place  de  procureur-syndic  du  district 
de  Bourg-la-I\einc;  il  fut  ensuite  nommé 
à  l'Assemblée  législative  ,  oii  il  parla  eu 
faveur  de  la  liberté  de  conscience.  Après 
le  10  août,  il  fut  dénoncé  comme  roya- 
liste ;  mais  s'étant  justifié  de  l'accusation 
portée  contre  lui ,  il  retourna  dans  sa 
commune,  dont  il  fut  élu  juge  de  pai.x. 
Suspendu  de  ses  fonctions  après  le  9 
thermidor,  il  reprit  ses  anciennes  etdou- 
ces  habitudes,  ej^mourut  à  Clamart  en 
1806.  On  lui  doit  quelques  ouvrages  es- 
timés, en  faveur  de  l'éducation.  \°  Dic- 
tionnaire historique  de  l  éducation  ,  Pa- 
ris, 1771  ,  2  vol.  in-12,  1784,  2  vol. 
in-8,  1808,  3  vol.  in-8.  C'est  un  recueil 
d'anecdotes  choisies ,  instructives  et  in- 
téressantes,, qu'on  peut  mettre  sans  dan- 
ger entre  les  mains  des  cnfans.  2"  Erns- 
te  ,  ou  VAmi  de  la  jeunesse,  Paris,  1773  , 
petit  in-S  ,  très  souvent  réimprimé.  La 
dernière  édition  est  en  2  vol.  in-g.  On  y 
trouve  un  abrégé  d'histoire  et  de  géogra- 


tIL 

pbîe  avec  d'autres  notions  élémèntaiiurSi 
le  tout  en  forme  d'entretiens  familiers 
d'Eraste  avec  son  élèye.  3°  Eloge  du  Dau- 
phin, père  de  Louis  XVI,  Paris,  1777, 
in-8.  4"  Culture  de  la  grosse  asptrgc , 
dite  de  Hollande,  Paris,  1783,  in-12. 
5"  Dictionnaire  du  jardinier  français , 
Ppris,  1790,  2'VoL  in-8,  ouvrage' très 
utile. 

FILASSIER.  Voyez  FaïAssiER. 

PILASTRE  (  Guillaume  ),  évêquc  de 
Tournai  dans  le  16^  siècle,  dont  nous 
avons  une  espèce  de  chronique  que  les 
curieux  de  tout  ce  qui  concerne  l'histoire 
de  France  recherchent  encore,  quoique 
surannée.  Elle  fut  imprimée  l'an  1517  , 
en  2  vol.  in-fol.  On  a  encore  de  lui  La 
Toison  d'or,  Paris,  1530,  2  vol.  in-folio. 

FILCHIUS  ou  FiLcin.\  (  Benoît),  né 
d'une  famille  noble  de  la  Grande-Breta- 
gne, fut  élevé  dans  les  principes  du  cal- 
vinisme ,  et  attaché  à  la  secte  puritaine. 
Rendu  à  Paris  dès  l'âge  de  21  ans,  il  y 
abjura  celte  secte  ,  qui  ne  faisait  que  de 
naître ,  pour  rentrer  dans  la  religion  de 
ses  pères,  que  ses  compatriotes  n'au- 
raient jamais  abandonnée  ,  si ,  comme 
lui ,  ils  avaient  eu  le  courage  de  se  déter- 
miner en  faveur  de  la.  vérité ,  contre  l'in- 
térêt de  leurs  propres  passions.  Son  grand 
amour  pour  la  vertu  lui  fit  embrasser, 
dans  celte  même  ville,  l'ordre  austère 
des  capucins  ;  après  quoi  iJ  repassa  dans 
Sci  patrie  en  1559,  dans  le  dessein  d'y 
rétablir  la  vraie  religion  :  mais  les  liérc- 
tiques  ayant  découvert  son  état  et  ses 
vues,  le  déférèrent  à  la  reine  Elisabeth, 
qui  le  retint  dans  une  étroite  prison,  pen- 
dant l'espace  de  trois  ans ,  après  lesquels 
Henri  III ,  roi  de  France,  obtint  son  élar- 
gissement ,  le  fit  revenir  à  Paris,  ef  l'ho- 
nora de  sa  bicnveillnncc  particnlièrc.  De 
là,  jusqu'à  sa  mort,  le  Père  Benoît  com- 
posa plusieurs  ouvrages  analogues  à  son 
zèle,  à  sa  piélé  et  à  .ses  lumières,  tels 
que  r*  Régula  pcrfcctionis ,  cantine ns 
brève  ne,  lucidum  compendiuni  totius 
viUe  spiritualis ,  etc.  Cet  ouvrage,  écrit 
d'abord  en  anglais  ,  puis  traduit  en  fla- 
mand et  en  français ,  fut  mis  aussi  en 
lalin  par  l'auteur  lui-même,  quelques 
années  avant  sa  mort.  Il  s'en  fitsuccessi- 


FIL 

vement  plusieurs  éditions  à  Rome,  Paris, 
Lyon  ,  Viterbe  et  ailleurs.  2°  SoUloquium 
piuni  et  grave,  Gic. ,  dans  lequel  il  expli- 
que les  motifs  de  sa  conversion.  3°  Liber 
variorum  exercitiorum  spiritualium , 
etc.,  Viterbe,  1608.  A"  Eques  christia- 
nus,  etc.,  2  vol.  in-12,  Paris,  1609. 
M.  Thajer,  ministre  protestant,  nouvelle- 
ment converti  à  la  religion  catholique, 
fait  le  plus  bel  éloge  de  cette  production, 
qui  n'a  pas  peu  contribue  à  le  ramener 
dans  le  sein  de  l'Eglise.  Voyez  Zrt  Relation 
de  la  conversion  de  M.  Jean  Thayer  , 
4«  édition  ,  Liège,  1780,  page  18  ,  et  le 
Journal  historique  et  littéraire  ,  1  "  fé- 
vrier 1789,  page  174. 

FILESAC  (  Jean  ) ,  docteur  de  Sor- 
bonne  et  curé  de  St.-Jean-en-Grève , 
mourut  à  Paris ,  sa  patrie  ,  doyen  de  la 
faculté  de  théologie,  en  1638.  Il  a  com- 
posé plusieurs  ouvrages  sur  des  matières 
ecclésiastiques  et  profanes,  remplis  d'une 
érudition  assommante.  Ce  n'est  qu'un 
tissu  de  passages ,  qu'il  joint  les  uns  aux 
auti-es  par  quelques  réflexions,  sans  beau- 
coup d'ordre  ni  de  méthode.  Il  passe  du 
sacré  au  profane,  fait  de  longues  digres- 
sions ,  écrites  très  durement ,  et  lasse 
son  lecteur  en  l'instruisant.  Ses  princi- 
paux ouvrages  sont  1°  lui  Traite  de  V au- 
torité des  évêques  ,  Paris ,  1 606  ,  in-8  ; 
2°  un  autre  du  Carême.  3"  De  fOrigine 
des  paroisses.  i°  Des  Traite's  delà  con- 
fession auriculaire ,  de  F  idolâtrie  ,  et  de 
rOrigine  des  anciens  statuts  de  la  Fa- 
culté de  Paris ,  eic.  Ils  sont  réunis  sous 
le  titre  d'Opéra pleraque ,  Paris,  1621  , 
in-S. 

FILTCAIA  ou  FiLicAJA  (  Vincent  de  }, 
poète  lyrique  italien ,  sénateur  de  Flo- 
rence, sa  patrie,  né  en  16 42  et  mort  eu 
1707,  fut  membre  de  l'académie  de  la 
Crusca  et  de  celle  des  Arcades.  Ses 
poésies  ,  publiées  en  1 707  ,  in-fol. ,  par 
son  fils,  réimprimées  à  Venise,  1747  ,  3 
vol.  in-12,  sont  délicates,  et  respirent 
le  ton  d'un  homme  qui  vit  dans  le  grand 
monde  ;  les  meilleures  sont  les  6  odes  ou 
canzoni  qu'il  composa  sur  la  délivrance 
de  Vienne  par  les  Turcs.  Il  n'était  pas 
riche  :  Christine,  reine  de  Suède ,  sachant 
qu'il  avait  de  la  peine  à  faire  subsister  sa 

V. 


FIL  3i3 

iamille  ,  lui  fit  du  bien  ,  et  Sa  générosité 
fut  d'autant  plus  louable  ,  qu'elle  voulut 
qu'on  l'ignorât  entièrement.  Ses  poésies 
lui  valurent  la  dignité  de  sénateur ,  le 
gouvernement  de  la  ville  de  Volterrc, 
puis  celui  de  Pise ,  et  enfin  la  charge  de 
secrétaire  du  tirage  des  magistrats,  qui 
était  alors  très  importante.  Ployez  l'élogfe 
de  ce  poète  dans  les  f^ies  des  Aicndi 
de  Crescimbeni. 

FILLASSIER  (Marin],  prêtre  parisien, 
mort  en  1733,  à  56  ans,  fut  curé  de 
campagne,  et  ensuite  chapelain  des  dames 
de  Miramion.  Il  est  auteur  d'un  ouvrage 
plein  d'onction ,  intitulé  ;  Sentiment 
chrétiens ,  propres  aux  personnes  inflr 
mes,  in-12;  ouvrage  qui  n'est  composé 
que  de  passages  de  l'Ecriture  et  des  Pères . 
Le  Père  Bouhours  en  avait  donné  un  sem 
blable ,  tiré  exclusivement  de  l'Ecriture 
sainte. 

FILLIv(\.lj  (Jean),  professeur  en  droit 
et  avocat  du  roi  à  Poitiers ,  né  eu  1600  , 
mort  en  1682  à  l'âge  de  82  ans,  est 
principalement  connu  par  sa  Relation 
juridique  de  ce  qui  s'est  passé  à  Poitiers 
touchant  la  nouvelle  doctrine  des  jansé- 
nistes ,  imprimée  par  le  commandement 
rfe /a  ret«e  ,  Poitiers  ,  1654,  in-8.  C'est 
dans  le  second  chapitre  que  l'on  trouve 
l'anecdote  connue  sous  le  nom  de  Projet 
de  Bourg  fontaine.  Filleau  raconte  que 
six  personnes  qu'il  n'ose  désigner  que 
par  les  lettres  initiales  de  leurs  noms, 
s'étaient  assemblées  en  1621  ,  pour  déli- 
bérer sur  les  moyens  de  renverser  la  reli- 
gion et  d'élever  le  déisme  sur  ses  ruines. 
On  a  imprimé  en  1 7  56  :  La  Réalite  du 
projet  de  B  our  g  fontaine  ,  2  vol.  in-12  : 
ouvrage  auquel  on  a  opposé  I^a  Vérité  et 
l'innocence  victorieuses  de  la  calomnie, 
ou  Huit  lettres  sur  le  projet  de  Bourg- 
fontaine,  1758,  en  2  vol.  in-12.  Le  plus 
fort  argument  employé  dans  celte  réfuta- 
tion ,  est  que  la  Réalité  a  été  brûlée  par 
arrêt  du  parlement  de  Paris  ,  du  2)  avril 
17  58;  mais  l'auteur  (  D.  Clémencet  )  ne 
songeait  pas  que  les  Provinciales  avaient 
été  brûlées  par  arrêt  du  parlement  de 
Provence,  du  9  février  1667.  Quoi  qu'il 
en  soit ,  la  Réalité,  mal  à  propos  allri- 
buée  au  Père  Patouillet  (  voyez  ce  mot }, 

20.. 


3i4  FIL 

a  été  réimprimée  plusieurs  fois  ,  traduite 
en  latin  sous  le  titre  de  Feritas  consilii 
Burgofonte  initi,  en  allemand,  en  fla- 
mand, et  autres  langues.  Dans  les  der- 
nières éditions,  on  trouve  une  longue 
réponse  aux  huit  lettres.  La   meilleure 
édition  est  celle  de  Liège  ,  1787  ,  2  vol. 
in-8.  «  La  postérité  ayant  sous  les  yeux 
TT  les  événemens  qui  lui  sont  réservés  , 
»  jugera  peut  être  mieux  que  nous,  si  ce 
»  projet  a  existé  ou  non.   »  Voilà  ce  que 
nous  disions   en    1783.    Ces  événemens 
n'étaient  pas  bien   loin.   Peu  d'années 
après  on  vit  le  jansénisme  intimement 
uni  nu  pbilosopUisme  ,  transmettre  à  ce- 
lui ci  ses  erreurs  propres ,  et  ce  fanatis- 
me de  secte  qui  porta  la  dévastation  dans 
l'église  de  France.  Un  auteur  moderne  a 
porté  delà  Réalité,  le  jugement  suivant  : 
«  Je  suis  loin  de  garantir  toutes  les  con- 
»  jectures,  combinaisons  et  rapprocbe- 
»  mens  de  l'auteur.  Quoique  l'ensemble 
w  présente  un  tableau  frappant,  et  que  les 
»  événemens  ne  soient  que  trop  propres  à 
w  lui  concilier  Ja  confiance  des  lecteurs,  je 
»  croisnéanmoinsquel'auteuratroplégè- 
))  i-ement  désigné  quelques  coopérateurs 
H  de  cette  œuvre,  d'abord  si  mystérieuse, 
»  et  aujourd'hui    si  manifeste  dans  ses 
»  effets.  Des  liaisons  d'amitié ,  ainsi  que 
»  des  démarches ,  ou  écrits  inconsidérés , 
»  ne  suffisent  pas  pour  accuser  ces  inten- 
u  tions  ,  surtout  dans  un  temps  oii  le  vé- 
»  ritable  esprit  de  la  secte  était  peu  con- 
1)  nu ,  et  oîi  les  gens  de  bien  ont  pu  être 
»  les  dupes  des  apparences.  Voyez  Ar- 
M  NAULD  (Henri  ).  Quant  aux  six  princi- 
»  paux  auteurs ,  dont  il  est  question  dans 
»  le  projet,  nous  en  abandonnons  le  juge- 
)i  ment  à  ceux  qui  auront  combiné  sans 
»  prévention  leurs  ouvrages  et  leur  con- 
»  duite  ,  avec  la  tcîcbe  respective  que  la 
»  Relation    de    Filleau  leur  attribue   » 
[voyez  Jansémus,  Montgero:s  ,  Paris, 
etc.  )  On  a  encore  de  Filleau  :  \°  Les  Ar- 
rêts notables  du  parlement  de  Paris, 
1631  ,  2  vol.  in-fol,  2"  Les  Preuves  his- 
toriques de  la  vie  de  sainte  Radegonde. 
3"  Traité  de  F  Université  de  Poitiers. 

FILLEAU  DE  LA  CHAISE.  Foyez 
Chaise  (  Jean  de  la  ). 
•FILLEAU   DE  SAINT-MARTIN, 


FIN 

frère  de  Filleau  de  la  Chaise,  mort  vers 
1695  ,  a  publié  une  traduction  du  chef- 
d'œuvre  de  Cervantes,  sous  ce  titre 
Histoire  de  V admirable  Don  Quichotte 
de  la  Manche ,  1677  ,  4  vol.  in-12  ,  très 
souvent  réimprimée  en  6  vol. ,  qui  se  lit 
encore ,  malgré  l'abrégé  de  Florian ,  et 
malgré  la  traduction  complète  de  M,  Bou- 
chon-Dubournial.  Voyez  Cervantes  , 
Florian. 

FILLIUCIUS  (Vincent),  jésuite,  né 
à  Sienne  en  1556,  enseigna  la  philo.so- 
phie ,  les  mathématiques ,  la  théologie , 
fut  pénitencier  à  Rome ,  et  casuisle  en 
chef  du  saint-Office.  Il  mourut  en  1622. 
On  a  de  lui  des  Questions  morales,  Lyon, 
1633  ,  où  il  paraît  quelquefois  enseigner 
une  morale  trop  indulgente. 

*  FILMER  (  Sir  Robert  ) ,  écrivain  po- 
litique anglais,  né  dans  le  comté  de 
Kent,  en  1604,  a  publié  :  1°  L'J- 
narchie  d'une  monarchie  limitée  et 
mixte,  1 646,  réimprimé  en  1 652  et  1 679  : 
il  le  donna  en  réponse  au  traité  de  la 
monarchie  de  Huulon.  V  Le  palriarchf, 
écrit  oîi  il  prouve  que  tout  gouvernement 
a  commencé  par  être  monarchique ,  et 
que  tous  les  titres  légaux  pour  régner  sont 
originairement  dérivés  des  chefs  de  fa- 
mille ,  ou  de  ceux  à  qui  leurs  droits  ont 
été  transférés.  C'est  pour  combattre  les 
principes  exposés  dans  cet  ouvrage  que 
Sidney  a  écrit  son  Discours  sur  le  gou- 
vernement. Filmer  mourut  en  1647. 

'  FINCH  (  Robert  )  ,  littérateur  ,  né 
à  Londres  en  1783,  mort  à  Rome  le  16 
septembre  1 830 ,  fut  l'un  des  collabora- 
teurs de  la  Revue  encyclopédique.  Après 
ses  premières  études,  il  servit  quelque 
temps  dans  l'armée  qu'il  quitta  bientôt 
pour  entrer  à  l'université  d'Oxford.  Mi- 
nistre plein  de  zèle  et  prédicateur  distin- 
gué ,  il  fut  ensuite  le  secrétaire  intime 
de  Pitt.  Employé  dans  plusieurs  missions 
diplomatiques,  il  s'en  acquitta  avec  suc- 
cès ;  mais  à  la  carrière  des  affaires  poli- 
tiques ,  il  préfera  celle  de  la  science ,  fit 
de  nombreux  voyages,  vint  en  France, 
explora  toutes  les  parties  de  l'Italie ,  la 
Grèce,  la  Turquie  d'Europe,  plusieurs 
contrées  de  l'Asie,  la  Palestine,  la  Syrie 
et  la  Perse.  Il  se  fixa  ensuite  à  Rome  oii 


il  resta  presque  conlinuellemenl  jusqu'à 
sa  mort.  Il  avait  fait  plusieurs  traductions 
d'ouvrages  italiens  qu'il  ne  jugea  point 
assez  parfaites  pour  les  publier  ,  et  avait 
entrepris  la  Bibliographie  universelle 
de  l  Italie ,  qu'il  n'eut  pas  le  temps  de 
terminer. 

FINE  (  Oronce  ) ,  mathématicien ,  né  à 
Briançon  en  Dauphiné,  l'an  1494,  fut 
choisi  par  François  I  pour  professer  les 
mathématiques  au  collège  royal.  Il  avait 
beaucoup  de  génie  pour  la  mécanique  ; 
il  fit  une  horloge  d'une  singulière  inven- 
tion. On  a  de  lui  plusieurs  ouvrages  de 
géométrie  ,  à^ optique ,  de  géographie  et 
A'astrologic,  réunis  en  3  vol.  in-fol., 
1532,  42  et  5G.  Il  était  fort  attaché  à 
l'astrologie,  et  plus  qu'un  géomètre 
ti'aurait  dû  l'être  ;  mais  on  l'a  déjà  dit , 
la  géométrie  laisse  l'esprit  comme  elle  le 
trouve.  Fine  mourut  très  pauvre  en  1555. 
Les  beaux  esprits  chargèrent  son  tom- 
beau de  vers  et  d'épitaphes.  Il  avait  pris 
pour  devise  :  Virescit  vulnere  virtus. 
(Voyez  sur  Oronce  les  Mémoires  deNicé- 
ron,  tome  38  ,  celui  de  l'abbé  Gautet  sur 
le  Collège  royal,  et  la  Bibliothèque  du 
Dauphiné,  par  Gui  Allard.) 

*  FINESTRÈS  Y  MONSALVO  (  Jo- 
seph ) ,  célèbre  jurisconsulte  catalan ,  né 
à  Karcelonne ,  le  11  avril  1C88,  se  dis- 
tingua par  l'étendue  de  ses  connaissances, 
enseigna  le  droit  pendant  plusieurs 
années  à  l'université  de  Cervera  ,  et  s'oc- 
cupa de  rétablir  l'éducation  publique, 
qui  avait  été  négligée  pendant  la  guerre 
de  la  succession.  Il  donna  plusieurs  sages 
réglemens  qui  furent  adoptés.  Il  fit  venir 
des  caractères  grecs  qui  manquaient  dans 
cette  province  ,  pour  l'impression  des 
ouvrages  nécessaires  à  l'élude  de  celte 
langue  ,  justement  considérée  comme  in- 
dispensable pour  tous  ceux  qui  se  con- 
sacrent aux  lettres.  On  lui  doit  plusieurs 
ouvrages  remarquables  par  la  précision, 
l'énergie  et  la  clarté  du  stile  :  \"Exerci- 
tationes  academicœ  XII,  H 45,  in-4. 
2"  Hermogcniani  jurisconsulti  juris , 
epitomnrum  libros  scx  commentarius , 
1757  ,  2  vol.  in-4.  Cet  ouvrage  contient 
UQ  abrégé  historique  des  meilleurs  ju- 
risconsultes catalans.  3"  Sylloge  inscrip- 


Plt  3i5 

tionunt  romdhài'um  quœ  in  prtncipatu 
Catalauniœ  vel  extant ,  vel  aliquando 
extiterunt ,  notis  et  observationibus  il- 
lustratarum ,  1760,  in-4,  ouvrage  pré- 
cieux pour  l'histoire  de  l'Espagne  sous 
la  domination  des  Romains.  Finestrès 
mourut  le  17  novembre  1770. 

FINIGUERRA.  Voyez  Maso. 

FIORI  (  -Mario  di  ) ,  peintre.  Voyez 
Mario. 

FIQUET.  Voyez  Ficquet. 

FIRENZUOLA  (Ange),  poète  flo- 
rentin ,  et  religieux  de  la  congrégation 
de  Vallombreuse ,  né  le  28  septembre 
1493,  avait  auparavant  exercé  la  fonction 
d'avocat  à  Home ,  sous  le  nom  de  Nanini, 
qui  était  celui  de  sa  famille.  Il  fut  connu 
et  estimé  du  pape  Clément  VII ,  qui  pre- 
nait plaisir  à  la  lecture  de  ses  ouvrages. 
Il  mourut  à  Rome  peu  après  en  1545.  Il 
a  beaucoup  écrit  en  vers  et  en  prose. 
L'édition  de  ses  œuvres  en  ce  dernier 
genre,  à  Florence,  1548,  in-8  ,  et  celle 
de  ses  poésies ,  1549,  in-8,  sont  recher- 
chées. Sa  traduction  de  i'Ane  d'or,  Ve- 
nise, 15G7  ,  in-8,  est  rare.  On  trouve 
quelques  Capitoli  de  lui  avec  ceux  de 
Berni.  Il  a  aus.si  fait  plusieurs  comédies  : 
//  Lucidi,  Florence,  1549  ,  in-8.  La  Tri- 
nuzia,  1551  ,  in-8,  reimprimée  à  Paris  en 
1818  avec  des  notes  de  M.  Biagioli.  Ses 
OEuvres  ont  été  recueillies  à  Florence 
en  17G3  ,  3  vol.  in-8.  Son  Discours  des 
animaux  A  été  traduit  en  français,  Lyon, 
155C,  in-lG;  et  par  La  Rivey,  1579, 
in-lG.  Son  Discours  de  la  beauté  des 
dames  l'a  été  par  J.  Pallet,  Paris,  1578, 
in-8. 

*  FIRMIAN  (LéopoldMaximiliende). 
archevêque  de  Vienne ,  né  à  Trente  le 
1 1  octobre  1 76G,  d'une  famille  distinguée 
dont  presque  tous  les  membres  ont  oc- 
cupé de  grandes  places  sous  le  gouver- 
nement autrichien ,  eut  pour  père  le 
comte  de  Firmian,  ministre  à  Milan  ,  et 
l'un  des  grands  protecteurs  de  l'uni- 
versité de  Pavie.  Ce  comte  de  Firmian 
avait  pris  l'habitude  de  se  rendre  juge  de 
l'orthodoxie  des  thèses  de  théologie ,  et 
de  gourmander  à  cet  égard  les  docteur."»  ; 
il  publia  aussi  des  réglemens  pour  les 
ëvêques^  et  il  en  adressa  un  en  1709,  qui 


3i6  PlR 

excita  (ië  vives  réclamations  j  voyez  les 
Nouvelles  eccle'siastiques  du  1 1  décem- 
hre  1762  et  du  30  décembre  17 Gi).  Son 
fils  fut  .d'abord  évèque  de  Lavant  en  1 800; 
puis  il  succéda  en  1802  à  M.  de  Hohen- 
wart  sur  le  siège  de  Vienne.  Après  une 
longue  maladie ,  il  est  mort  à  Vienne  le 
28  novembre  1831.  Les  journaux  ont  an- 
noncé que  ce  prélat  emportait  les  regrets 
de  tout  son  diocèse.  A  la  lin  du  dernier 
siècle ,  il  y  eut  deux  prélats  du  nom  de 
Firmiau.  Léopold-Ernest ,  évi^que  de  Sec- 
eau  ,  puis  de  Passau  ,  qui  fut  cardinal  en 
1772  ,  et  qui  mourut  dans  son  diocèse  le 
13  mars  1783  ;  et  Virgile-Marie-Augustin, 
évèque  de  Lavant  en  Corintliie ,  puis 
prélat  du  chapitre  de  Saltzbourg ,  et  se- 
nteur de  celui  de  Passau,  qui  mourut  sur 
la  fin  de  1788.  Ces  deux  évêques  ont  été 
accusés  d'avoir  été  ennemis  des  jésuites, 
et  par  conséquent  d'avoir  adopte  les  idées 
opposées  ;  il  faut  peut-être  se  délier  des 
Nouvelles  ecclésiastiques  qmoniréçdLïyàu. 
ce  bruit.  Us  étaient  frères  du  ministre  du 
même  nom  ,  et  par  conséquent  oncles  de 
l'archevêque  de  Vienne.  Celte  Notice  est 
extraite  de  l'Ami  de  la  religion  et  durai, 
tome  70,  page  361. 

FIRMICUS  MATERIVUS  (Julius), 
fit  paraître,  sous  les  enfans  de  Constan- 
tin, un  excellent  traité  d  cla  Fausseté 
des  Religions  profanes.  L'auteur,  en 
montrant  la  vanité  de  l'idolâtrie ,  établit 
divers  points  de  la  religion  chrétienne. 
On  a  publié  cet  ouvrage  avec  le  Minutius 
Félix  à  Leyde ,  en  1G72,  in-8  ,  et  en 
1G99,  avec  les  notes  de  Jean  Wouwer. 
On  lui  attribue  encore  8  livres  d'astro- 
nomie,  imprimés  par  Aide  Manuce,  en 
1 490  ,  in-fol".  Mais  cette  dernière  produc- 
tion paraît  être  d'un  autre  Julius  Firmicus, 
qui  vivait  dans  le  même  temps.  Elle  est 
jdeine  de  rêveries. 

FIRMILIEN  ,  évèque  de  Césarée  en 
Cappadoce,  ami  d'Origèue,  prit  parti 
pour  saint  Cyprien,  dans  la  dispute  sur 
la  rebaptisation  de  ceux  qui  avaient  été 
baptisés  par  les  hérétiques.  Il  écrivit, 
dit-on  ,  .sur  cette  question  ,  une  lettre  à 
saint  Cyprien ,  dans  laquelle  toutes  les 
raisons,  qui  pouvaient  autoriser  la  pra- 
tique des  églises  d'Afrique,  sont  exposées 


avec  force.  Voyet  Cyprien  (  saint  ).  Ce- 
pendant, dans  une  dissertation  du  père 
Marcellin  Molkenbubr ,  récollet ,  im- 
primée à  Munster  en  Westphalie,  1790, 
in-^ ,  on  prétend  que  cette  lettre  est 
faussement  attribuée  à  Firmilien,  et 
qu'elle  est  de  quelque  dona liste  d'A- 
frique, après  le  4"  siècle,  qui  l'a  attri- 
buée à  Firmilien  pour  lui  donner  plus 
de  poids  ;  les  raisons  détaillées  dans  cette 
dissertation  sont  très  plausibles.  Firmi- 
lien présida  ,  en  2G4  ,  au  premier  concile 
d'Antioche ,  contre  Paul  de  Samosate.  Il 
était  près  de  se  rendre  à  un  second  sy- 
node, oii  cet  hérétique  opiniâtre  devait 
être  anathématisé  ;  mais  il  mourut  en 
chemin ,  l'an  2G9  ,  selon  le  Père  Pagi  et 
M.  Fleury.  Baronius  place  sa  mort  à  l'an 

272.  L'auteur  de  la  dissertation  citée  ci- 
dessus  prouve  que  le  second  concile 
d'Antioche  n'a  pas  été  célébré  avant  l'an 
272  ,  et  que  couséqucramcnt  Firmilien  a 
vécu  jusqu'à  cette  année. 

FIRMIN  ,  nom  de  quatre  évêques  :  le 
premier ,  évèque  d'Amiens  «t  martyrisé 
au  3"  siècle  ;  le  second ,  évèque  de  la 
même  ville,  au  4"  siècle;  le  troisième  , 
évèque  d'Uzès;  et  le  quatrième,  dcMende. 

FIRMIUS  (  Marcus  ) ,  homme  puissant 
de  Séleucie  eu  Syrie ,  se  fit  proclamer 
empereur  en  Egypte  pour  venger  la  reine 
Zéuobie,  dont  il  était  ami.  Aurélien  mar- 
cha contre  lui ,  le  fit  prisonnier ,  et,  après 
lui  avoir  fait  souffrir  toutes  sortes  de 
lourmens ,  il  s'en  délivra  tout-à-fait  l'an 

273.  C'était  un  homme  d'une  taille  gi- 
gantesque ,  et  d'une  force  surprenante. 
On  l'appelait /c  Cyclopc.  On  frappait, 
dit-on,  sur  sa  poitrine  ,  comme  sur  une 
enclume ,  sans  qu'il  eu  ressentît  aucune 
douleur.  Le  commerce  immense  qu'il 
faisait  avec  les  Sarrasins  et  les  Indiens 
lui  avait  acquis  une  grande  considération 
dans  l'Orient. 

*  FIRMOIVT  (  Henri-EssEx-EDGE- 
woRTH  de  ) ,  dernier  confesseur  de  Louis 
XVI,  naquit  en  17  4.')  à  Edgeworth-Town  , 
en  Irlande,  d'un  père  qui  était  ministre 
protestant,  et  qui  vint  en  France  en  1051, 
avec  sa  famille,  après  avoir  embrassé  la 
religion  catholique.  Le  jeune  Firmont  fit 
ses  premières  études  chez  les  jésuites  de 


1 


îoulouse,  se  rendit  ensuite  à  Paris  au  col- 
lège de  Navarre  pour  y  suivre  le  cours  de 
pLilosophie  ,  et  ce  fut  en  Sorbonne  qu'il 
étudia  la  théologie.  Après  avoir  reçu  les 
ordres  sacrés ,  l'abbé  de  Firraont  se  i-etira 
aux  missions  étrangères ,  où  il  s'occupa 
exclusivement  des  devoirs  de  son  état,  et 
surtout  de  la  direction  des  consciences , 
de  l'instruction  des  pauvres  et  du  soula- 
gement des  malheureux.  Il  avait  pris  le 
nom  de  Firmont  qui  était  celui  d'une  an- 
cienne terre  de  sa  famille  ,  non  par  un 
vain«orgueil ,  mais  parce  qu'en  France  on 
avait  quelque  difticulté  à  prononcer  son 
nom  d'Edgeworth.  Son  zèle  était  si  actif 
qu'il  songea  pendant  quelque  temps  à 
aller  prêcher  la  foi  dans  les  contrées 
lointaines  ;  mais  il  ne  voulut  point  pren- 
dre de  parti ,  avant  d'avoir  consulté  sou 
directeur  qui  connaissait  ses  vertus,  et 
qui  pensait  avec  raison  qu'avec  les  qua- 
lités aimables  dont  il  était  doué  ,  il  ferait 
plus  de  bien  en  France  que  chez  les  Sau- 
vages. Les  évêqucs  d'Irlande  offrirent  im 
siège  épiscopal  à  cet  ecclésiastique  zélé 
qui  n'avait  pu  encore  oublier  sa  patrie  : 
mais  il  le  refusa.  En  1 7  7  7  il  devint  confes- 
seur de  M™*  Elisabeth  :  ce  qui  le  mit  en 
relation  avec  la  cour,  et  lui  procura  plus 
tard  le  pénible  et  dangereux  devoir  d'as- 
sister dans  ses  derniers  momens  le  mal- 
heureux monarque  que  la  révolution  avait 
choisi  pour  victime.  Instruit  du  désir 
qu'avait  manifesté  Louis  XVI  de  recevoir 
par  son  ministère  les  consolations  de  la 
religion,  l'abbé  de  Firmont  s'empressa 
de  se  rendre  au  Temple  pour  remplir  ce 
douloureux  devoir  :  malgré  les  périls  dont 
il  était  environné ,  il  trouva  dans  le  sen- 
timent religieux  dont  il  était  pénétré  ,  le 
courage  de  les  braver;  il  s'attendait  à 
mourir  de  la  même  main  qui  tuait  son 
maître  :  mais  ce  martyre  n'effraya  point 
le  pieux  ecclésiastique  qui  entendit  la 
confession  du  roi ,  lui  donna  les  derniers 
sacremens  et  put  célébrer  les  saints  mys- 
tères devant  l'auguste  prisonnier.  Malgré 
la  fermeté  que  Louis  XVI  avait  montrée 
pendant  tous  les  débats  de  son  procès,  il 
sentit  lui-même  qu'aux  approches  de  la 
mort ,  il  avait  besoin  d'une  main  amie 
pour  diriger  ses  derniers  pas  dans  la  vie. 


L'abtc  de  Firmont  l'accompagna  jusque 
sur  l'échafaud.  Lorsque  le  bourreau  se 
présenta  au  roi  pour  lui  lier  les  mains 
derrière  le  dos  ,  celui-ci  manifesta  un 
sentiment  d'indignation  :  ce  fut  en  ré- 
pendant un  torrent  de  larmes  que  l'abbé 
de  Firmont  raffermit  la  constance  de 
Louis  par  ces  paroles  que  la  religion 
seule  a  pu  lui  inspirer  :  Sire  ,  dans  ce 
nouvel  outrage  ,  je  ne  vois  qu'un  trait 
de  ressemblance  entre  votre  Majesté  et 
le  Dieu  qui  va  être  sa  récompense  -.  et 
cette  pensée  rendit  à  ce  malheureux  roi 
la  résignation  chrétienne  dont  il  avait 
encore  besoin  pour  terminer  le  sacrifice  ; 
et  lorsque  les  apprêts  du  supplice  furent 
terminés ,  lorsque  la  hache  révolution- 
naire allait  consommer  le  plus  grand  de 
tous  les  crimes ,  le  Samuel  de  la  France 
dit  alors  à  cette  noble  victime  :  allez  , 
Fils  de  saint  Locis,  montez  au  ciel.  Ces 
paroles  simples  et  sublimes  ont  retenti 
dans  tout  l'uuivers  chrétien,  et  c'est  en 
vain  que  la  modestie  de  ce  pieux  ecclé- 
siastique a  déclaré  que  dans  la  stupeur  où 
il  se  trouva,  quand  la  tête  de  Louis  XVI  fut 
tombée  ,  il  ne  se  rappelait  point  si  réel- 
lement il  les  avait  prononcées  :  la  France 
les  a  entendues,  elles  ont  été  dites;  elles 
sont  maintenant  historiques.  L'abbé  de 
Firmont  fit  montrer  la  tête  de  l'illustre 
victime  au  peuple  français ,  et  le  sang 
ruissela  sur  ses  habits.  Le  rôle  que  venait 
déjouer  d'une  manière  si  magnanime  le 
vertueux  abbé  de  Firmont,  fut  aux  yeux  de 
quelques  forcenés  un  motif  de  proscrip- 
tion :  parmi  les  témoins  de  ce  spectacle 
affreux ,  on  en  vit  qui  désiraient  que 
le  couteau  sanglant  se  relevât  encore  une 
fois  pour  retomber  sur  sa  tète  :  des  cris 
affreux  furent  proférés  contre  lui  ;  mais 
les  troupes  lui  ouvrirent  leurs  rangs  ; 
la  multitude  même  lui  permit  de  s'éloi- 
gner, et  il  s'en  revint  après  cette  doulou- 
reuse mission  répandre  de  nouvelles  lar 
mes  chez  M.  de  Malcsherbes.  Malgré  les 
périls  de  sa  position,  l'abbé  de  Firmont 
resta  en  France  tant  qu'il  put  Croire  être 
utile  à  M^^Elisabeth.  A  plusieurs  reprises 
il  fut  obligé  de  se  cr.cher,  et  il  mena  une 
vie  errante  et  vagabonde  jusqu'au  mo- 
ment où  celte  princesse  alla  comme  ses 


3i^ 


flft 


parens  terminer  ses  jours  sur  un  ^ciia» 
faud.  Il  avait  été  continuellement  en 
correspondance  avec  elle,  et  jusqu'au 
dernier  jour  il  l'avait  soutenue  de  ses 
pieux  conseils.  L'abbé  de  Firmout  se  ren- 
dit alors  en  Angleterre ,  et  alla  trouver 
à  Edimbourg  Monsieur,  frère  du  roi,  pour 
s'acquitter  d'un  message  dont  l'avait 
chargé  M""»  Elisabeth.  De  là  il  se  rendit 
en  Allemagne  auprès  de  Louis  XVIII,  dont 
il  devint  en  quelque  sorte  le  confident , 
et  qu'il  accompagna  à  Mittau  en  1798. 
Pendant  toute  sa  vie,  l'abbé  de  Firmont 
fut  en  quelque  sorte  l'objet  de  la  curio- 
sité publique  :  chacun  voulait  voir  le 
prêtre  courageux  qui  avait  assisté  Louis 
XVI  dans  ses  derniers  momens  :  chacun 
voulait  entendre  de  sa  bouche  quelques 
détails  d'une  mort  si  religieusement  hé- 
roïque. L'empereur  Paul  l" ,  ayant  dé- 
siré de  le  voir ,  Louis  XVIII  le  chargea  de 
porter  à  ce  prince  l'ordre  du  St.-Esprit  : 
à  sa  vue  le  czar  s'inclina ,  demanda  .sa 
bénédiction,  et  montra  la  plus  grande  ad- 
miration pour  ses  vertus  ;  il  lui  fit  don 
de  son  portrait  enrichi  <le  diamans,  d'une 
pension  de  deux  mille  roubles  que  le 
charitable  abbé  de  Firmont  consacra 
au  soulagement  des  malheureux.  De  re- 
tour à  Mittau  il  reprit  ses  exercices  de 
charité  ;  il  mourut  bientôt  victime  de  son 
dévouement;  chargé  par  Louis  XVIII  de  soi- 
gner des  blessés  français  qui  se  trouvaient 
dans  les  hôpitaux  de  celte  ville ,  il  fut 
atteint  par  une  fièvre  épidémique  qui 
l'enleva  en  trois  jours  le  22  mai  1807. 
Toute  la  famille  royale  manifesta  les  plus 
vifs  regrets  pour  la  perte  qu'elle  venait 
de  faire  :  M""  d'Angouléme  lui  avait  pro- 
digué ses  soins,  malgré  le  péril  auquel 
elle  s'exposait  en  restant  dans  la  chambre 
d'un  homme  qui  mourait  d'une  maladie 
contagieuse  :  elle  accompagna  à  pied  , 
ainsi  que  les  princes ,  sa  dépouille  mor- 
telle jusqu'au  cimetière.  Le  roi  annonça 
lui-même  au  frère  de  l'abbé  de  Firmont 
la  perle  douloureuse  qu'il  venait  de  faire, 
et  il  se  chargea  de  composer  soivépilaphe 
qui  véritablement  est  une  oraison  funèbre. 
I).  o.  XI. 

Hic  j»cel  ' 

revemidiuiiiiui  »ir  ^. 

IlEMticis  Essix  EDGEWORTH  de  FiiitiOBT, 


fîft 

•abcta  t)ei  Ecclesia  saccrdoi , 

ticaHtis  gcnerilit  Ecclcsie  parisientii,  elr.i 

qui 

rcdemprorit  nostri  TOliKia  tcnent. 

oculus  raco , 

pe«  claudo, 

pater  pauperum  , 

iiisrentium  ronsolator 

fuit. 

LlDOÏICPU     XVI 

ab  impiit  reliellibutque  inbdili» 

morli  dedituni, 

ad  ulllinum  rertaiiien 

robnra»it , 

>trenuoque  niartyrii  cwloi  apertoi 

o»(eiidil. 

E  manibut  rrglcidarum 

mira  Dei  prolection* 

ereptui , 

LVDOTICO  XVIII 

eum  ad  te  vocaiiti 

ullro   occureiifl. 

ej  per  di^cem   aniios, 

regiip  ejiis  fainiliie 

^lrc  non  f  l  fidolibus  sodalibiK 

eifunplar  lirtutum , 

lerairwn  malorum, 

•eie  prsebuil. 

Per  mullas  et  Tarias  regionri 

temporiini  calainilale 

actus, 

illi  qucm  soliiin  rolebat 

icmper  i>iniilis, 

periransiit  beocracleiido. 

Plenui  tandem  bouis  operibu< 

obiit 

dli'XXII  niaii  mentit, 

tim.  Domini  M.  D  CC.C.  VII. 

selalis  lero  siiar  LXII. 

I{cquie$cat  in  pare. 

L'abbé  de  Bouvens  prononça  à  Londres 
le  29  juillet  1807,  dans  la  chapelle  ca- 
tholique française  Voraisnn  funèbre  de 
l'abbé  de  Firmont  qui  a  été  imprimée  à 
Paris  en  1814,  in-8.  On  a  publié  les  mé- 
moires de  M.  rabbé  Edgeworth  de  Fir- 
mont ,  dernier  confesseur  de  Louis  Xf^I, 
recueillis  par  E.  Sncyd-Edgeworth  , 
et  traduit  de  V anglais  par  le  traducteur 
d'Edmond-Uurke  (M.  Dupont),  Paris, 
1 8 1  G,  in-8  :  ces  mémoires  sont  suivis  d'une 
relation  des  derniers  momens  de  Louis 
XVI  par  l'abbé  de  Firmont  lui  même 
et  de  quelques-unes  de  ses  lettres  sur 
les  révolutions ,  adressées  au  docteur 
Moyland  :  ces  deux  pièces  sont  extrême- 
ment curieuses.  On  a  aussi  les  lettres  de 
l'abbé  Edgeworth,  confesseur  de  Louis 
XVI  à  ses  parens,  à  ses  amis  ,  etc.  ,  re- 
cueillies par  le  révérend  Thomas  R... 
traduites  de  l'anglais  par  M""  Elisabeth 
Lebon,  Paris,  1818,  in-8  :  ces  lettres 
sont  précédées  de  mémoires  sur  la  vie 


FIS 

de  tabbe  de  Firmont ,  en  les  lisant  on 
entre  en  quelque  sorte  dans  l'àme  de 
ce  vertueux  ecclésiastique  ,  dont  le  dé- 
vouement a  excité  l'admiration,  mais  que 
ses  belles  qualités  forcent  d'aimer. 

FIRMUS,    général    des   Maures    en 
Afrique  ,  se  révolta  contre  Valentinien  I , 
l'an  37  5  de  J.  C.  Après  avoir  commis  de 
grands  ravages ,  il  fut  contraint  de  s'é- 
trangler lui-même  ,  pour  ne  pas  tomber 
vif  entre  les  mains  des  Romains. 
FISCHER   ou  FISHER  (  Jean  ) ,  né 
^    au   diocèse  d'York  vers  14.55,  docteur 
et  chancelier   de   l'université  de  Cam- 
bridge,   évêque   de  Rochester,  confes- 
seur de  la  reine  Marguerite  ,  précepteur 
de  Henri  VIII ,  ne  voulut  pas  reconnaître 
son  élève  pour  chef  de  l'église  anglicane, 
lorsque  ce  prince   se   sépara   de  Rome 
pour  une  maîtresse.  Henri  le  fit  mettre 
en  prison ,  et  ayant  appris  que  le  pape 
Paul  IH  lui  destinait  un  chapeau  de  car- 
dinal ,  il  dit  en  se  moquant  du   pape  : 
n  Qu'il  envoie  son  chapeau  de  cardinal 
»  quand  il  voudra  ;  je  ferai  en  sorte  que, 
»  quand  il  arrivera  ,  la  tète  pour  laquelle 
»  il  est  destiné ,  ne  subsiste  plus.  »  En 
effet ,  Henri  fit  aussitôt  faire  le  procès  à 
ce  vénérable  vieillard,  qui  eut  la  tète 
tranchée  le  21  juin  1535.  Son  âge  de  80 
ans ,  et  les  services  qu'il  avait  rendus  k 
ce  monarque,  auraient  dû  lui  épargner 
une  mort  si  cruelle ,  quand  même  ses 
vertus  et  son  innocence  n'eussent  point 
fait  son   éloge.  Fischer  avait  un  grand 
sens  et  un  jugement  très  solide.  C'est  un 
des   meilleurs    controvensistes    de    son 
temps.  Toutes  ses  œuvres  ont  été  pu- 
bliées en  un  volume  in-fol.  à  Wurtzbourg, 
en   1597.    On    y   voit  plusieurs   traités 
contre   les  erreurs  de  Luther ,  un  De 
unica   Maydalena  contre    Jacques  Le 
Fèvre  d'Etaples  et  Josse  Clicthoue  (  vorjez 
Madelaine  ).    On   y  a  ajouté   l'ouvrage 
qui  porte  le  nom  de  Henri  VIII  contre 
Luther,  que  quelques-uns  croient  a  voir  été 
fait  par  Fischer. 

FISCHER  (Jean-Bernard),  architecte 
allemand,  a  construit  les  plus  beaux  édi- 
fices modernes  de  Vienne;  entre  autres 
l'église  deSaint-Charles-Borroméc,  dans 
UJi  des  faubourgs  de  Vienne ,  qui  pass« 


P^S 


Sig 


pour  son  chef-d'œuvre;  les  écuries  de 
l'empereur,  la  chancellerie  de  Bohème,  le 
Belvédère ,  ou  palais  du  prince  Eugène , 
celui  de  Schonbrun.  Il  est  mort  en  1724. 
Si  ces  édifices  ne  sont  pas  sans  défauts, 
ils  sont  dans  leur  ensemble  d'une  compo- 
sition grande  et  noble  ;  le  dernier  surtout, 
quoique  les  décorations  extérieures  soient 
peut-être  trop  chargées,  a  de  grandes 
beautés.  S'il  était  plus  vaste,  on  en  eût 
fait  depuis  long-temps  la  résidence  im- 
périale. Comme  il  fut  bâti  des  dépouilles 
des  Turcs,  un  littérateur  a  proposé  d'y 
mettre  pour  inscription  ,  ce  vers  de  Vir- 
gile : 

Barbarico  po&lcs  auro  spoliisquc  superbi. 

(  On  doit  à  Fischer  Essai  d'une  architec- 
ture historique ,  ou  recueil  de  bâtimens 
antiques,  avec  des  explications  en  alle- 
mand et  en  français,  Leipsick,  1725,  in- 
folio, ouvrage  curieux  et  utile,  mais  mal 
exécuté.  Il  est  composé  de  93  planches  et 
divisé  en  5  livres. 

*  FISCHER  (  Jean-Eberhard  ) ,  savant 
professeur   d'histoire   et  d'antiquités   à 
Saint-Pétersbourg,  naquit  à  Essling,  eu 
Souabe,  en  1C97.  Il  fut  membre  de  l'aca- 
démie impériale  de  Russie,  et  un  des  sa- 
vans  envoyés,  en  1739,  par  la  cour  pour 
faire  des  observations  en  Sibérie  et  au 
Kamtschatka.  De  retour  de  son  voyage  , 
qui  dura  près  de  huit  ans,  il  s'occupa  de 
la  publication  de  ses  observations  ,   et 
mourut  le  24  septembre  1771,  âgé  de  74 
ans.  Il  a  laissé  en  allemand  1°  Histoire 
de  Sibe'rie ,  depuis  la  découverte  de  ce 
pays  jusqu'à  sa  conquête  par  les  Bussei, 
Pétersbourg,  17G8,  2  vol.  in-8.  G.-F.  Mul- 
1er  publia  depuis  une  Histoire  ^lus  com- 
plète de  ce  pays,  mais  qui  n'a  point  nui 
au  succès  de  celle  de  Fischer.  2"  Sur  l'o- 
rigine ,  la  langue  ,  la  mœurs  des  Mol- 
daves ;  cet  écrit  se  trouve  dans  le  Calen- 
drier historique  de  Pétersbourg,  année 
1770  ;  3°  Sur  l'origine  des  Américains , 
ibid.,  1 7  7 1  ;  4°  Questions  Pe'tropolitanes, 
Gbttingue,.  1770,  in-8,   119  pages  :  cet 
ouvrage  contient  quatre  dissertations  ; 
on  parle  dans  la  première  de  l'origine  des 
Hongrois,  que  l'auteuv  place,  non  chez 
les  Huns,  sortis  du  nord  de  In  Chine,  mais 
chez  les  Yon grès,  peuplé  habitant prcsdc 


%2Ù  PIS 

Tourfau.  Selon  Fischer,  leâ  Yongres  pas- 
sèrent dans  la  Bythinie,  d'où,  ayant  été 
chassés  par  les  Patz  inaces,  ils  s'établirent 
dans  la  Pannonic.  Leur  langue  est  com- 
posée du  tartare,  du  scythe  et  de  l'idiome 
des  Vogouls.  La  deuxième  dissertation  est 
intitulée  :  De  gente  et  nomine  Tartaro- 
rum,  item  de  priscis  MogoUs  eorumque 
lingua;  la  troisième  a  pour  titre  De  va- 
riis  nominibus  S  inarum  titulisque  impe- 
ratorum;  la  quatrième,  en  allemand, 
traite  des  peuples  hyperboréens.  Fischer 
a  laissé  en  manuscrit  un  Vocabulaire  si- 
bérien, qu'il  envoya  à  la  bibliothèque  de 
Gottingue,  oii  il  est  conservé. 

"FISCHER  (Chrétien-Gabriel),  natura- 
liste prussien,  né  à  Rœnigsbergvers  la  fin 
du  17*  siècle,  y  enseigna  la  philosophie 
en  1715^  mais  son  zèle  à  soutenir  la  doc- 
trine de  Wolf  lui  attira  Jes  persécutions 
que  cette  philosophie  essuyait  dans  les 
états  de  la  Prusse.  Il  voyagea  en  Italie, 
en  France  et  en  Angleterre,  rentra  à  Kœ- 
nigsberg  en  1736,  et  y  mourut  le  15  dé- 
cembre 17  61.  Il  a  laissé  Premiers  fonde- 
mens  d'une  histoire  naturelle  de  la  Prusse 
souterraine,  Kœnigsberg,  1714  et  1715, 
in-4,  en  allemand;  et  autres  ouvrages 
moins  importans.  Il  a  été  éditeur  et  com- 
mentateur du  bel  ouvrage  de  Job-Henri 
\Anck,  &t  stellis  marinis,  Leipsick,  1733, 
in-fol.  avec  32  planches.  —  Il  ne  faut 
pas  le  confondre  avec  Jacques-Benjamin 
Fischer,  naturaliste  livonien,  élève  de 
Linnée,  né  à  Riga  en  1730,  mort  en  1793, 
auteur  d'un  Essai  d'histoire  naturelle  de 
la  Livoiiic,  Leipsick,  1778,  in-8,  2*^  édi- 
tion, 1791;  d'une  Addition  à  l'Essai 
d'histoire  naturelle,  Riga,  1784,  in-8;  et 
des  additions  et  corrections  à  la  Biblio- 
thèque livonienne  deGadebusch,  insérées 
dans  les  Mélanges  du  Nord  de  Hupel.  Ce 
savant  l'ut  directeur  de  la  maison  des  or- 
phelins de  Riga. 

*  FISCHER  (Jean-Chrétien),  savant 
philologue  allemand,  né  en  1712  à  Schle- 
ben ,  fut  d'abord  professeur  adjoint  de 
philosophie  à  léna,  ensuite  libraire  et  con- 
seiller de  commerce  du  duc  de  Saxe-Wei- 
mar.  Il  mourut  le  21  mars  1793.  Sçs  prin- 
cipaux ouvrages  sont  1°  De  insignibus 
honarum  Ulterarum  secuU  Xlf^  usque 


FIS 

ad  initium  sècuU  XVI  in  Italia  instau- 
ratoribus  dissertatio,  léna,  1744,  in-4. 
2°  Dissertatio  de  Hubertino  Crescenti- 
nate,  elegantiorum  litlerarum  sec.  XV 
in  Italia  instauratore,  léna,  1739,  in-4. 
3°  Bibliothèque  de  jurisprudence  mo- 
derne, en  allemand,  1774-75,  2  cahiers 
in-8.  Il  a  traduit  aussi  en  allemand  du 
français  les  lettres  de  Julie  Catesby  par 
M"""  Riccoboni;  de  l'anglais,  les  lettres  de. 
Bolingbroke,  et  a  donné  une  édition  des 
epistolœ  ad  Thyrenum  et  ad  diversos , 
autore  Jac.-Nic.  Erytreo.  (  Vittorio  de 
Rossi),  Cologne  (léna),  1 7  39,  ou  1 7  40,  in-8, 
avec  une  préface  et  une  vie  de  l'auteur,  et 
une  autre  des  ouvrages  du  savant  jésuite 
Sarasa,  de  Arte  semper  gaudendi,  traduit 
en  italien  1741,  et  en  allemand  1748. 

*  FISCHER  (Frédéric-Christophe-Jo- 
nathan), savant  jurisconsulte  et  publi- 
ciste  allemand,  né  àStutgardcn  1750,  fut 
employé  à  Vienne,  en  1776,  comme  se- 
crétaire d'ambassade  du  prince  de  Bade, 
et  à  Munich,  en  17  78,  comme  secrétaire 
de  légation  du  duc  de  Deux-Ponts.  En 

1779  il  fut  nommé  professeur  du  droit 
des  gens  à  l'université  de  Halle ,  dont  il 
devint  assesseur  ordinaire  l'année  sui- 
vante, et  mourut  le  20  septembre  1797. 
Il  a  laissé  un  grand  nombre  d'ouvrages 
dont  Meusel  donne  la  liste  :  les  princi- 
paux sont  1°  De  prima  expedilione  Atti- 
lœin  Gallias  ac  de  rébus  gestis  fValtheri 
Aquitanorum  principis,  carmcn  epicum 
sec.  VI  nunc  primum  ex  codice  MS. 
membranaceo  produetum,  etc.,  Leipsick, 

1780  et  1792,  2  part.  in-4.  2"  Novissima 
scriptorum  ac  monumentorum  rerum 
Germanicarum  tam  ineditorum  quam 
rarissimorum,  collectio,  Halle,  1781-82, 
2  part.  in-4.  3°  Littérature  du  droit  ger- 
manique, Leipsick,  )  782,  in-8.  A" Histoire 
du  commerce,  de  la  navigation ,  des  arts 
et  manufactures,  agriculture,  police, 
monnaies,  etc.,  et  du  luxe  de  l'Allema- 
gne,  Havovrc,  1785-92,  4  vol.  in-8.  On 
trouve  dans  cet  ouvrage  de  l'érudition  ; 
mais  on  y  désirerait  plus  d'ordre  et  de 
critique.  5°  Histoire  de  Frédéric  II,  roi 
de  Prusse,  Halle,  1787,  2  vol.  in-8,  com- 
pilation assez  médiocre.  Ces  trois  derniers 
ouvrages  sont  en  allemand. 


FIS 

'  FISCHER  (Jean-Frédéric),  savant 
professeur  de  belles-lettres,  né  à  Cobourg 
le  10  octobre  1726,  enseigna  avec  beau- 
coup de  réputation  à  Leipsick,  devint 
recteur  de  l'école  de  Saint-Thomas,  et 
mourut  le  11  octobre  1799.  Ou  lui  doit 
plusieurs  ouvrages  qui  ne  sont  pas  sans 
mérite,  malgré  le  défaut  d'ordre  et  l'exces- 
sive sécheresse  qu'on  pourrait  leur  repro- 
cher. On  en  trouvera  la  liste  complète 
avec  une  exacte  indication  des  titres,  des 
dates  et  des  formats ,  dans  la  notice  de 
M.  Kuinol ,  imprimée  à  la  suite  des  re- 
marques de  Fischer  sur  la  grammaire 
grecque  de  Weller,  1798-1801.  Les  princi- 
paux sont  1  °  des  Remarques  sur  la  gram- 
maire grecque  de  Weller,  Leipsick,  17  81, 
in-8,  2"  édition,  1798-1801,  imprimée 
sous  ce  titre  Animadversionum  ad  J. 
Weller  grammaticam  grœcam.  specimina 
très,  4  vol.  in-8.  On  trouve  à  la  tète  du 
3*  volume  une  excellente  notice  sur  Fis- 
cher. 2"  Des  Commentaires  sur  la  Cyro- 
pe'die'de  Xénophon,  Leipsick,  1803,  in-8. 
Il  a  aussi  donné  des  éditions  estimées 
A'Anacréon  (17  93),  à'Eschine  le  Socra- 
tique (17  88),  de  Théophraste  (17G3),  de 
Platon  (17  83),  etc.  M.  Kindervater  a 
donné  en  allemand  un  Essai  sur  Fischer 
considéré  comme  professeur ,  Leipsick , 
1801  ,  in-8. 

*  FISCHER  (H.-N.)  ,  mathématicien 
et  astronome  habile ,  né  à  Kicsbach  en 
Bavière,  était  entré  fort  jeune  dans  l'or- 
dre des  jésuites.  Lorsque  cet  ordre  fut 
supprimé  ,  il  obtint  une  chaire  de  pro- 
fesseur de  mathématiques  à  Ingolstadt, 
et  devint  ensuite  directeur  de  l'obser- 
vatoire deManheim.  Après  avoirfait,  dans 
l'intérêt  de  la  science,  plusieurs  voyages 
en  Angleterre,  il  fut  appelé  en  1803  à 
la  chaire  d'astronomie  de  l'université  de 
Wûrtzbourg.  Quelques  ennuis  ,  et  même 
une  espèce  de  persécution  dont  il  fut 
l'objet,  l'avaient  forcé  auparavant  à  se  re- 
tirer en  Angleterre  où  il  fit  un  séjour  de 
plusieurs  années.  Il  est  mort  h  Wiirtz- 
bourg  le  21  février  1805.  On  trouve  dans 
les  Ephémérides  géographiques  de  M.  de 
Zach  plusieurs  mémoires  de  Fischer  sur 
l'astronomie  ,  ainsi  que  des  observations 
et  des  notices  très  importantes  dans  le 
V. 


FIS  32 1 

Journal  de  Physique  de  Ilubner.  Fis- 
cher a  publié  aussi  un  ouvrage  sur  la 
lumière  qui  a  remporté  le  prix  en  1779 
à  l'université  de  Goettingue. 

*  FISCHER  (E.  Gotthelf) ,  docteur  et 
savant  chimiste  allemand,  connu  sur- 
tout en  France  par  un  excellent  Traité 
de  physique,  professa  long-temps  les 
mathématiques  et  la  chimie  à  Berlin.  Par- 
mi les  nombreux  ouvrages  scientifiques 
^u'il  a  publiés,  nous  citerons  1"  P^ermium 
intestinalium  brevis  expositio,  1786  , 
1788  ;  2°  sur  les  formes  de  VOs'interma 
xillaire,  Leipsick,  1 800,  in-8;  3°  Mémoire 
pour  servir  d'introduction  à  un  ouvrage 
sur  la  respiration  des  animaux ,  17  98  , 
in-8  ;  4"  Observations  anatomiqucs  sur 
une  Poule  dont  la  tête  présentait  le 
profild'  une  figure  humaine,  insérées  dans 
la  Gazette  de  Santé,  octobre  1816,  et 
dans  les  Annales  encyclopédiques  de 
Millin,  janvier  1817,  avec  une  gravure 
représentant  cet  animal  extraordinaire  ; 
5°  Physique  mécanique ,  traduite  par 
M"»*  Biot ,  avec  d'excellentes  notes  de  M 
Biot,  1806,  in-8,  4«  édition,  1829. 
Fischer  est  mort  en  1831.  M.  Millin  adon- 
né une  Notice  détaillée  des  nombreux 
ouvrages  de  ce  savant. 

FISCHET  ou  FiCHET  (Guillaume),  doc- 
teur de  Sorbonne,  recteur  de  l'université 
de  Paris  en  1467,  appela  deux  ans  après 
(  de  concert  avec  Jean  de  La  Pierre  son 
ami)  Martin  Cranlz,  Ulric  Gering,  et  Mi- 
cliel  Friburger,  imprimeurs  allemands, 
qui  mirent  sous  presse  les  premiers  livres 
qui  aient  été  imprimés  en  France.  Fischet 
s'opposa  au  dessein  de  Louis  XI,  qui  vou- 
lait faire  prendre  les  armes  aux  écoliers. 
Il  alla  à  Rome  avec  le  cardinal  Bessarion, 
en  1470.  Le  pape  Sixte  IV  le  combla  d'hon- 
neurs et  le  fit  son  camérier.  On  a  de  Fis- 
chet une  Rhéthorique  et  des  épures,  dont 
le  stile  est  au  dessus  de  son  siècle;  elles 
furent  imprimées  en  Sorbonne  in-4,  1471. 
—  Il  ne  faut  pas  le  confondre  avec 
Alexandre  Fichet,  jésuite,  mort  à  Cbam- 
béri  en  1649,  qui  se  distingua  par  son  ta- 
lent pour  la  prédication  et  par  son  zèle 
infatigable  pour  l'instruction  de  la  jeu- 
nesse. On  lui  àoïi  Arcana  studiorum  om- 
nium melhoduset  bibliolheca  scientiarum 

31 


3îa  FIT 

librorumque  earuiïi  ordine  tributorum 
universalis ,  1649,  in-8  :  ouvrage  écrit 
avec  élégance,  et  où,  parmi  beaucoup  de 
lieux  communs,  on  trouve  d'exccllcns 
procédés  pour  faciliter  l'étude,  pour  faire 
des  extraits,  etc. 

FISEN  (  Barthélemi  ) ,  ne  à  Liège  en 
1591,  entra  chez  les  jésuites  en  IGIO, 
se  rendit  habile  dans  l'éloquence  latine, 
dans  l'histoire ,  et  les  antiquités  de  son 
pays.  Il  mourut  le  26  juin  1649.  Ses  ou- 
vrages sont  :  1  "  Origo  prima  festi  Coi'" 
poris  Chrisli,  Liège,  1628.  Cette  histoire 
est  écrite  avec  soin  et  a  coûté  beaucoup 
de  recherches.  2"  Historia  ecclesiœ  Léo- 
diensis ,  Liège,  1696,  iu-fol.  C'est  une 
histoire  qui  commence  600  ans  avant 
J.  C.  et  va  jusqu'en  1612.  On  sent  qu'elle 
remonte  trop  pour  que  les  premiers  siè- 
cles ne  soient  farcis  de  faits  plus  qu'in- 
certains. Toute  cette  histoire  est  parta- 
gée en  trente  et  un  livres  ,  suivis  chacun 
de  notes ,  où  l'auteur  éclaircit  les  diffi- 
cultés qu'il  rencontre  en  son  chemin  ,  et 
produit  de  temps  en  temps  des  pièces 
justificatives.  Le  slile  est  beau  et  peut- 
être  trop  oratoire  et  trop  fleuri  pour  une 
histoire.  3°  Flores  ecclesiœ  Leodiensis , 
Lille  ,  1647  ,  in-fol.  Ce  sont  les  vies  des 
saints  du  diocèse  de  Liège ,  rangées  selon 
Tordre  du  calendrier.  Fisen  y  a  fait  en- 
trer des  listes  exactes  des  abbés  et  des 
abbesses  de  tous  les  monastères  du 
diocèse  de  Liège.  Cet  ouvrage  est  utile 
et  curieux. 

FiSHEa.  Toyez  Fischer. 

FITE  (  Jean  de  la  ) ,  ministre  de  la 
religion  prétendue-réformée,  né  dans  le 
Béarn  d'une  famille  noble,  sortit  de 
France  pour  cause  de  reli  gion .  Après  avoir 
achevé  ses  études  en  Hollande,  il  devint 
ministre  de  l'église  française  de  Holtzap- 
pel ,  puis  de  celle  de  Hanau,  où  il  mou- 
rut en  nS?.  Son  ouvrage  le  plus  connu 
est  intitulé  Eclaircissement  sur  la  ma- 
tière de  la  grâce  et  sur  les  devoirs  de 
l'homme,  2  vol.  in-8.  — U  ne  faut  pas  le 
confondre  avec  son  aïeul  Jean  de  la  Fite. 
ministre  de  l'église  de  Pau,  dont  on  a 
des  sermons  et  des  traites  de  contro- 
verse. 

FITZHERBERT  (  Antoine  ) ,  célèbre 


FIT 

jurisconsulte  anglais  du  16*  siècle,  s'il-' 
lustra  par  son  érudition,  et  plus  encor» 
par  sa  probité  et  son  attachement  à  la 
religion  de  ses  pères.  U  prédit  les  mal- 
heurs qui  devaient  naturellement  suivre 
le  schisme,  et  défendit  à  ses  enfans  d'a^- 
cheler  des  biens  enlevés  aux  monastères, 
et  même  d'accepter  ceux  qu'on  pourrait 
leur  offrir.  Sous  le  règne  de  Marie ,  oit 
reconnut  la  vérité  de  sa  prédiction  et  lit, 
sagesse  de  cette  défense.  Il  mourut  le  2| 
mai  1!»38.  On  a  de  lui  1"  JSpitomejuris. 
2°  De  ï office  et  de  Vautorité  des  juges 
de  paix. 

FITZHERBERT  (  Thomas  )  ,  petit- 
fils  du  précédent,  né  en  1532,  jésuite 
en  1614,  mort  en  1640,  est  connu  par  un 
Traité  de  politique  et  de  religion  contre 
Machiavel ,  Douai ,  1615,  in-4  ;  et  par 
une  disquisition  pleine  de  sagesse  et  de 
saine  morale,  intitulée  An  sit  utilitas  in 
scclere  ,  VxomG ,  1610,  in-8. 

FITZHERBERT  f  Mcolas  )  ,  autre 
petit-fils  d'Antoine  et  cousin  du  précé- 
dent, ué  en  1550,  s'attacha  au  cardinal 
d'Alain  ,  et  mourut  en  1612.  On  lui  doit 
1°  Fita  cardinalis  Aluni,  1608.  C'est 
un  tribut  de  reconnaisance  qu'il  paie  à 
son  bienfaiteur.  2"  De  continualione  reli- 
gionis  christinnce  in  anglia  1 608.  3"  Oxo- 
nensii  academiœ  descriptio,  1602. 

FIT Z- JAMES  (  Jacques  de  ) ,  duc  de 
Berwick  ,  fils  naturel  de  Jacques  II  et 
d'Arabelle  Churchill,  sœur  du  duc  de 
Marlborough,  naquit  en  1671  ,  à  Moulins, 
oii  sa  mère  le  mit  au  monde  en  revenant 
des  eaux  de  Bourbon.  U  porta  les  armes 
dès  sa  plus  tendre  jeunesse.  Il  se  trouva 
en  1686)  au  siège  deBude  où  il  fut  bles- 
sé, et  à  la  bataille  de  Mohacs  en  1687, 
que  les  impériaux  gagnèrent  sur  les  Turcs. 
Le  jeune  Berwick  signala  sa  valeur  dans 
cette  journée.  Jacques  II  ayant  été  chassé 
de  son  trône  par  son  gendre ,  Berwick  le 
suivit  en  France ,  lieu  de  son  asile.  Il  re- 
passa ensuite  en  Angleterre ,  pour  com- 
mander en  Irlande,  pendant  l'absence  de 
milord  Tirconnel ,  qui  en  était  vice-roi. 
Il  se  distingua  l'an  1690,  au  siège  de 
Londonderry ,  et  à  la  bataille  de  la  Boine, 
où  il  eut  un  cheval  tué  sous  lui.  Berwick 
ne  montra  pas  moins  de  bravoure  dans 


FIT 

le  cours  de  cette  guerre ,  et  pendant  les 
premières  campagnes  de  la  suivante.  Louis 
XIV  lui  donna  ,  en  1703  ,  le  commande- 
ment général  des  troupes  qu'il  envoya  à 
Philippe  V.  En  une  seule  campagne ,  il 
se  rendit  maître  d'une  foule  de  places 
et  de  forteresses.  Rappelé  en  France,  il 
se  mit  à  la  tète  des  troupes  destinée» 
contre  les  fanatiques  des  Cévennes.  Après 
avoir  réduit  ces  rebelles,  il  alla  meltre 
le  siège  devant  ^'ice ,  s'en  rendit  maître 
le  14  novembre  1105,  et  soumit  tout  le 
comté.  Celte  campagne  lui  mérita  le 
bâton  de  maréchal  de  France  :  dignité  à 
laquelle  il  fut  élevé  le  15  février  1706. 
Le  roi  l'ayant  nommé  la  même  année  pour 
commander  les  troupes  en  Espagne ,  il 
arrêta  les  progrès  des  ennemis  victorieux. 
Il  gagna,  en  1707,  la  bataille  impor- 
tante d'Almanza  sur  milord  Galiowai  et 
le  comte  de  Las  Minas.  Philippe  V  ré- 
compensa le  vainqueur  comme  le  méri- 
faieut  de  si  grands  services.  Il  le  créa 
duc  de  Leria  et  de  Xerica  au  royaume 
de  Valence  ;  le  fit  chevalier  de  la  Toison- 
d'Or,  et  attacha  à  son  duché  une  gran- 
desse  de  la  première  classe.  Eervvick  sou- 
tint la  gloire  qu'il  s'était  acquise  à  Al- 
manza,  par  la  prisedeBarcelonne,  le  12 
septembre  17  H  ;  il  était  alors  généralis- 
sime des  armées  d'Espagne.  La  mort  du 
roi  de  Pologne  ,  Auguste  H  ,  ayant  rallu- 
mé la  guerre  en  17  33  entre  l'empire  et 
la  France ,  le  maréchal  de  Berwick , 
nommé  général  des  troupes  de  France  en 
Allemagne,  alla  mettre  le  siège  devant 
Philisbourg.  Un  coup  de  canon  termina 
sa  glorieuse  carrière  le  12  juin  17  34,  la 
place  ne  fut  prise  que  le  12  juillet  sui- 
vant. Le  maréchal  de  Berwick  était  aussi 
estimable  par  ses  vertus  chrétiennes  et 
civiles  que  par  ses  talens  militaires.  Le 
président  Montesquieu  ,  qui  avait  connu 
particulièrement  cet  illustre  capitaine  , 
nous  en  parle  en  ces  termes  :  «  J'ai  vu 
«  de  loin  dans  les  livres  de  Plutarque, 
»  ce  qu'étaient  les  grands  hommes  ;  j'ai 
»  vu  en  lui  de  plus  près  ce  qu'ils  sont, 
»  je  ne  connais  que  sa  vie  privée  :  je  n'ai 
»  point  vu  le  héros,  mais  l'homme  d'où 
»  le  héros  est  parti....  Il  aimait  ses  amis; 
M  sa  manière  était  de  rendre  des  services, 


FIX  323 

»  sans  vous  rien  dire  :  c'était  une  main 
»  invisible  qui  vous  servait....  Il  avait  un 
»  grand  fonds  de  religion.  Jamais  homme 
«  n'a  mieux  suivi  ces  lois  de  l'Evangile , 
»  qui  coûtent  le  plus  aux  gens  du  monde; 
»  enfin  ,  jamais  homme  n'a  tant  pratiqué 
»  la  religion,  et  n'en  a  si  peu  parlé....  Il 
j)  ne  disait  jamais  de  mal  de  personne  ; 
»  aussi  ne  louait-il  jamais  les  gens  qu'il 
»  ne  croyait  pas  dignes  d'être  loués.  » 
Ses  Mémoires  ont  été  publiés  en  1778, 
2  vol.  in-12.  Ils  sont  pleins  de  cet  in- 
térêt que  donne  la  vérité  énoncée  d'un 
ton  simple,  et  affanchie  des  petits  arti- 
fices de  l'égoïsme.  Ils  sont  d'un  usage 
admirable  pour  réfuter  les  petits  contes 
romanesques  et  calomnieux,  par  lesquels 
on  ne  cesse  de  défigurer  l'histoire  du 
siècle  de  Louis  XIV.  Ceux  que  l'abbé 
Maigon  avait  publiés  en  1737  ,  ne  sont 
plus  lus  que  des  personnes  qui  aiment 
mieux  les  romans  et  les  satires  que  les 
histoires. 

FJTZ-JAMES  (François,  duc  de],  fils 
du  précédent,  renonça  aux  dignités  de 
son  père,  dont  il  avait  la  survivance, 
pour  emhra.sser  l'état  ecclésiastique  en 
1727.  Il  fut  abbé  de  Saint-Victor,  cvêque 
de  Soissons  en  1739,  etmourut  en  1704, 
dans  sa  55"  année.  Ses  Instruclions  pas- 
torales et  son  Rituel,  dont  les  Inslruc- 
lions  sont  imprimées  en  2  et  en  3  vol. 
in-12  ,  ont  fait  beaucoup  de  bruit  ;  quel- 
ques-uns de  ces  écrits  ont  été  condamnés 
à  Rome  et  censurés  par  plusieurs  évêques 
de  France  ;  les  jansénistes  le  regardaient 
comme  un  des  principaux  appuis  du  par- 
ti ;  cependant  l'on  ne  connaît  dalui  au- 
cune démarche  d'opposition  formelle  aux 
décisions  de  l'Eglise.  (Sa  vie  se  trouve 
à  la  tête  de  ses  œuvres  posthumes,  1709, 
2  vol.  in-12,  avec  un  troisième  sous  le 
litre  de  supplément.  ) 

*  FIXLMILLNER  (Placide),  astro- 
nome allemand ,  l'un  des  premiers  qui 
calculèrent  l'orbite  de  la  planète  Ura- 
nus,  né  en  J  7  2 1 ,  au  vil.'age  d'Aehleulhen , 
dans  la  haute  Autriche,  entra  dans  l'ordre 
des  bénédictins  en  1737,  étudia  succes- 
sivement la  théologie,  le  droit ,  les  lan- 
gues orientales,  l'histoire,  les  antiquités 
et- la  musique,  et  devint  professeur  de 


3^4  FLA 

droit  canonique  et  directeur  du  coIlé{>'e 
de  Crernsmunter  établi  dans  l'abbaye 
pour  la  jeune  noblesse.  Il  fut  aussi  revêtu 
de  la  diguité  de  notaire  apostolique  en  la 
cour  de  Rome,  et  mourut  le  27  août 
ï  7  91 .  On  a  de  lui  \°  Meridianus  spcculœ 
astronomicœ  Cremifanensis  ^  Steyer  , 
1765,  in-4  ,  ouvrage  dans  lequel  il  dé- 
termina la  longitude  et  la  latitude  de  son 
observatoire,  qu'il  a  rendu  célèbre  car 
les  observations  qu'il  n*a  cessé  d'y  faire. 
2°  Decennium  astronomicum ,  Steyer , 
1776,  in-4.  C'est  un  recueil  d'observa- 
tions faites  et  calculées  avec  soin  ,  dont 
les  astronomes  font  encore  usage  pour 
leurs  reichercbes.  3°  Acta  asironomica 
Çremifanensia ,  Steyer,  1791  ,  in-4  ,  ou- 
vrage posthume  ,  où  l'on  trouve  les  ob- 
servations de  1776  à  1791  ;  des  mémoires 
sur  la  parallaxe  du  soleil ,  l'occultation 
de  Saturne  en  17  75  ;  l'observation  et  la 
mutation  dans  le  calcul  des  planètes ,  etc. 
Il  a  fait  aussi  un  grand  nombre  d'obser- 
-yàtions  sur  Mercure ,  dont  Lalande  s'est 
servi  pour  construire  des  tables  de  cette 
planète.  On  trouve  une  notice  sur  Fix- 
millner  dans  les  Ephcniérides  géogra- 
phiques du  B.  de  Zach,  novembre  1799. 

FIZES  (  Antoine  ) ,  célèbre  médecin 
de  Montpellier  sa  patrie ,  mourut  dans 
cette  ville  le  l4  août  1765  ,  à  75  ans.  La 
faculté  de  médecine  le  compte  parmi  les 
professeurs  qui  ont  le  plus  servi  à  la  faire 
fleurir.  Il  éclaira  la  pratique  de  son  art 
par  une  théorie  lumineuse.  Nous  avons 
de  lui  plusieurs  ouvrages  qui  lui  ont  fait 
un  nom  en  Europe.  Les  principaux  sont 
1"  Opéra  medica,  17  42,  in-4.  2°  Leçons 
de  chimie  de  l'université' de  Montpellier, 
1750,  in-12.  3°  Tractât  us  de  febrihus  ^ 
1749  ,  in-12.  Cet  excellent  ouvrage  a  été 
traduit  en  français  ,  17  57  ,  in-12.  4°  Trac- 
iatus  de  physiologia,  1750,  in-12.  5° 
Plusieurs  dissertations  sur  différentes 
matières  de  médecine,  science  que  l'au- 
teur possédait  à  un  degré  supérieur.  C'é- 
tait i'Hippocrate  de  Montpellier.  II  joi- 
gnait une  grande  .«implicite  de  mœurs  à 
des  connaissances  très  étendues  et  très 
variées.  F  oyez  sa  vie  par  M.  Estève , 
1765, in-8. 

FLAGCILLE  {MUaFlacciUay,  appe- 


FLA 

léc  quelquefois  par  les  Gvecs  PlaceUa  ou 
Placidia ,  fille  d'Antoine ,  préfet  des 
Gaules  et  ensuite  consul  ropiain ,  naquit 
en  Espagne ,  et  fut  mariée  à  Théodosc  y 
lorsqu'il  n'était  encore  que  particulier. 
Elle  reçut  le  titre  d'Auguste  quand  elle 
monta  avec  lui  sur  le  trône  de  Constan- 
tinoplp.  Elle  contribua  beaucoup  par  son 
zèle  à  la  destruction  de  l'idolâtrie  et  à  la 
propagation  du  christianisme.  Elle  avait 
toutes  les  vertus  que  cette  religion  in- 
spire ;  bienfaisante  avec  discernement , 
simple  dans  ses  manières,  et  modeste 
avec  un  extérieur  plein  de  dignité.  Elle 
portait  Théodose  à  l'indulgence  ,  à  la  clé- 
mence et  au  soulagement  de  ses  sujets. 
Ses  incommodités  l'ayant  obligée  d'aller 
prendre  les  eaux  dans  un  village  de  la 
Thrace,  ell€  y  mourut  en  388.  Elle  fut 
mère  d'Arcadius  et  d'Honorins.  L'église 
giecque  l'a  élevée  au  rang  des  bienheu- 
reux. Saint  Grégoire  de  IN'ysse  prononça 
son  oraison  funèbre. 

FLACCOURT  ou  Flacodrt  (  Etienne 
de),  né  à  Orléans  en  1007,  directeur- 
général  de  la  compagnie  française  de  l'O- 
rient,  avait  commandé,  en  l648,  une 
expédition  dans  l'île  de  Madagascar  :  ex- 
pédition malheureuse,  ainsi  que  toutes 
celles  qui  l'avaient  précédée  ;  mais  qui 
nous  a  procin-c  une  Histoire  de  cette  île, 
qu'il  avait  bien  étudiée  pendant  dix  ans 
de  séjour  sur  les  lieux.  Il  la  fit  imprimer 
à  Paris,  en  un  vol.  in-4,  1G58,  réimpri- 
mée en  1601  et  1664  ,  avec  figures  dessi- 
nées et  gravées  par  lui-même  ;  et  la  dédia 
au  surintendant  Foucquet.  On  y  trouve 
des  choses  curieuses  et  intéressantes., 
telle  que  cette  prière  des  Mndagascariens, 
qui  prouve  l'idée  juste  et  vraie  que  ces 
barbares  ont  de  la  Divinité.  «  O  Eternel  ! 
)>  ayez  pitié  de  moi ,  parce  que  je  suis 
M  passager  ;  ô  Infini  !  parce  que  je  ne  suis 
»  qu'un  point  ;  ô  Fort  !  parce  que  je  suis 
w  faible  ;  ô  Source  de  la  vie  !  parce  que 
M  je  touche  à  la  mort  ;  ô  Intelligent  ! 
»  parce  que  je  suis  dans  l'erreur  ;  ô  Bien- 
»  faisant!  parce  que  je  suis  pauvre;  ô 
»  Tout-Puissant  !  parce  que  je  ne  puis 
»  rien,  u  (  Il  a  publié  aussi  un  Petit  caté- 
chisme madecasse  et  français  avec  les 
prières  du  matin  et  du  soir ,  Paris ,  1 657, 


FLA 

in-8  ;  et  un  Dictionnaire  de  la  langue  de 
Madagascar.  Flaccourt  se  noya  en  reve- 
nant en  France  pour  la  seconde  fois ,  le 
10  juin  IGCO.  C'est  lui  quia  donné  à  l'île 
Bourbon  le  nom  qu'elle  porte). 

FLACCUS  ILLYRICUS.  Foyez  Fban- 

COWITZ. 

FLACÉ  (  René  ) ,  curé  de  l'église  de 
la  Couture ,  dans  un  faubourg  du  Mans  , 
né  à  logent  sur  la  Sarthe,  à  6  lieues  du 
Mans,  en  1630,  mourut  le  16  septembre 
ICOO.  On  a  de  lui,  outre  plusieurs  pièces 
de  théâtre,  divers  autres  ouvrages  en 
prose  et  en  vers  et  surtout  un  Poème  la- 
tin sur  l'origine  des  Manceaux  ,  qu'on 
peut  voir  dans  la  Cosmographie  deBellc- 
forest.  La  Croix  du  Maine  dit  qu'il  était 
poète,  théologien,  philosophe,  historien, 
qu'il  savait  bien  la  musique ,  et  qu'il  prê- 
chait avec  succès. 

*  FLACHAT  (  Jean-Claude  } ,  négo- 
ciant et  voyageur,  né  à  Lyon  vers  1720, 
parcourulla  Hollande  ,  l'Italie,  l'Allema- 
gne, la  Hongrie  et  la  Turquie  :  il  séjourna 
pendant  16  ans  à  Constantinople ,  où  il 
devint  bascrguian  hachi  ou  marchand 
du  grand-seigneur.  Il  profita  de  son  titre 
pour  dessiner  un  grand  nombre  de  mé- 
tiers et  de  machines,  et  s'instruire  de  la 
manière  de  fabriquer  différentes  espèces 
d'étoffes,  de  choisir  les  matières  que  l'on 
doit  y  employer ,  de  teindre  solidement 
le  coton  en  rouge  ,  etc.  ;  enfin  ayant  ob- 
servé que  les  Grecs  avaient  conservé , 
dans  la  pratique  des  arts,  des  procédés 
qui  nous  sont  inconnus ,  et  qu'il  regar- 
dait comme  intéressant  d'introduire  par- , 
minons,  ilse  renditàSmyrne,  et  amena 
en  France  plusieurs  ouvriers  grecs,  qu'il 
établit  dans  la  manufacture  de  Saint-Cha- 
mond  eu  Lyonnais ,  qui  appartenait  à  son 
frère,  et  dont  il  avait  la  direction.  Le 
roi ,  pour  le  récompenser  des  services  im- 
portans  qu'il  avait  rendus  à  l'industrie 
française  ,  accorda  à  son  établissement , 
par  arrêt  du  21  décembre  17  66  ,  le  titre 
de  manufacture  royale  ,  et  divers  privi- 
lèges et  exemptions.  Flachat  a  publié  le 
résultat  de  ses  voyages  sous  le  titre  : 
Observations  sur  le  commerce  et  sur 
les  arts  d'une  partie  de  V Europe ,  de 
Fjésie^  de  T Afrique  et  même   des  Iri- 


FLA  3a5 

des  orientales ,  Lyon ,  1 766 ,  2  vol.  in-1 2- 
Il  a  inséré  dans  son  livre ,  des  mémoires 
sur  la  culture  de  la  garance  ,  sur  la  teinir 
ture  du  coton  filé  en  bleu,  et  sur  la  ma- 
nière de  le  blanchir.  Flachat  est  mort 
vers  1780. 

FLAMEL  (Nicolas) ,  natif  de  Pontoise, 
exerça  la  profession  d'écrivain  libraire- 
juré  à  Paris.  Il  était  né  sans  biens  :  on  le 
vit  tout  à  coup  riche  pour  un  homme  de 
son  état  ;  mais  ses  richesses  étaient  seu- 
lement pour  les  malheureux.  Il  soulagea 
la  veuve  et  l'orphelin ,  fonda  des  hôpi- 
taux, répara  des  églises.  (Le  peuple  igno- 
rant crut  que  Flamel  avait  trouvé  le  se- 
cret de  faire  de  l'or  ;  et  cette  fable  a  été 
accréditée  par  Jean  Gohori,  140  ans  après 
sa  mort.  )  Naudé  attribue  sa  fortune  (  qui 
n'était  pas  aussi  considérable  qu'on  l'a 
dit  )  à  la  connaissance  qu'il  avait  des  af- 
faires (^-es  juifs.  Il  ajoute  que,  lorsqu'ils 
furent  chassés  de  France  en  1394  ,  et  que 
leurs  biens  furent  acquis  au  roi ,  Flamel 
traita  avec  leurs  débiteurs  pour  la  moitié 
de  ce  qu'ils  devaient ,  et  leur  promit  de 
ne  pas  les  dénoncer.  Ce  conte  a  été  ré^ 
futé  par  M.  deSainle-Foix,  danslepremier 
vol.  de  ses  Essais  sur  Paris;  et  il  est 
bien  plus  vraisemblable  que  Fiamel  dut 
sa  fortune  à  la  connaissance  qu'il  avait 
des  principes  du  commerce,  dans  un 
temps  où  tout  le  monde  les  ignorait.  Il 
mourut  en  1418.  Foyez  sur  cet  homme 
singulier  ,  V Histoire  critique  de  Nicolas 
Flamel  et  de  Pernelle  sa  femme,  recueil- 
lie d'actes  anciens ,  qui  purifient  l'ori- 
gine et  la  médiocrité  de  leur  fortune ,  à 
Paris,  chezDesprez,  1761,  in-1 2.  Cet 
ouvrage  est  dcM.  l'abbé  Villain.  On  a  faus- 
sement attribué  à  Flamel  un  sommaire 
philosophique  en  vers ,  1 6G1 ,  in-8  ,  et  un 
traite  de  la  Transformation  des  métaux, 
1G28,  in-8.  On  joint  à  ces  deux  livres 
\ Explication  des  figures  hiéroglyphi- 
ques ,  que  Flamel  mit  au  cimetière  des 
Innocens ,  Paris ,  1G82,  in-4. 

FLAMINIO  (  Marc-Antoine  )  naquit 
à  Imola,  de  Jean-Antoine  Flamimo,  dont 
nous  avons  divers  ouvrages  en  vers  et  en 
prose.  Le  fils  eut  les  goûts  de  son  père, 
et  le  surpassa.  Le  cardinal  Farnèse,  dont 
il  était  le  bel-esprit ,  Iç  fit  nommer  se- 


326  FLA 

crétaire  du  concile  de  Trente  ;  mais  sa 
santé  délicate  l'empêcha  de  remplir  celte 
commission.  Il  mourut  à  Rome  en  1550, 
à  52  ans.  On  a  de  lui  des  lettres  et  des 
épigrammes ,  15(51,  rn-8 ,  traduites  en 
vers  fiançais  par  Anne  deMarquets,  Paris, 
1569,  in-8.  Sa  Paraphrase  de  trente 
Psaumes,  entreprise  à  la  sollicitation  du 
cardinal  Pôlus,  et  imprimée  à  Florence 
en  1558  ,  in-12  ,  offre  d'assez  beaux  vers 
et  une  latinité  pure.  Ses  autres  écrits  ne 
méritent  pas  moins  d'être  lus. 

FLAMIÏNIUS  (Caïus),  consul  romain, 
d'un  caractère  turbulent  et  emporté ,  at- 
tiré au  combat  par  les  ruses  d'Annibal , 
perdit  la  fameuse  bataille  deTrasymène, 
où  il  resta  sur  la  place  avec  un  grand 
nombre  de  sénateurs,  l'an  217,  avant 
Jésus-Christ. 

FLAMINIUS  (  Titus-Qumtus  ) ,  élevé 
au  consulat  par  son  mérite,  l'^jn  198 
avant  J.  C  ,  n'avait  pas  encore  30  ans. 
Il  se  proposa  Scipion  pour  modèle.  Il  ne 
lui  manqua ,  pour  égaler  la  gloire  de  ce 
héros,  que  d'avoir  à  combattre  des  rivant 
aussi  redoutables.  Comme  lui ,  il  avait 
toutes  les  vertus  civiles  et  militaires. 
Nommé  général  des  troupes  romaines 
contre  Philippe  V,  roi  de  Macédoine,  il 
força  l'armée  de  ce  prince  dans  lesdéfilés 
de  l'Epire  ;  il  soumit  presque  entièrement 
cette  province,  réduisit  la  Thessalie,  la 
Phocide,  la  Locride.  Il  joua  dans  la  Grèce 
le  rôle  le  plus  brillant.  Il  lit  publier  aux 
Jeux  Néméens  par  un  crieur  public ,  que 
les  Grecs  étaient  remis  en  liberté.  Il  fut 
en  effet  leur  libérateur  et  leur  père.  La 
république  l'envoya  dans  la  suite  vers 
Prusias  pour  demander  la  tête  d'Annibal, 
sous  le  vain  prétexte  qu'il  tramait  quel- 
que chose  contre  Rome.  U  agit  si  adroite- 
ment auprès  de  ce  prince ,  que  les  Ro- 
mains se  virent  délivrés  de  cet  ennemi. 

FLAMINIUS  NOBILIUS ,  théologien 
et  critique  de  Imcques,  mort  en  1590, 
à  58  ans,  publia  en  1588  àRon\e,  in-fol., 
des  Notes  sur  ta  Bible  di^s  Septante  , 
pleines  d'érudition  ;  et  un  traité:  Deprœ- 
destinatione  j  ibid.  ,  1581  ,  in-4. 

FLAMSTEED  (  Jean  } ,  a.slronçme  ,  né 
à  Derby  en  Angleterre  le  19  août  1C46  , 
prit  du  goût  pour  l'astronomie  en  voyant 


FLA 

une  sphère  de  Sucrobosco.  U  cultiva  cette 
science  avec  beaucoup  de  succès ,  fut 
membre  delà  société  royale  de  Londres, 
en  IC70,  et  la  môme  année  nommé  astro- 
nome du  roi ,  avec  une  pension  de  cent 
livres  sterlings,  ensuite  directeur  de  l'ob- 
servatoire de  Gréenwick.  U  mourut  en 
1720,  à  70  ans.  Cet  astronome  avait  par- 
tagé son  temps  d'une  façon  singulière  : 
il  donnait  le  jour  aux  cafés,  et  la  nuii 
aux  astres.  C'était  un  petit  homme  mai- 
gre ,  qui  n'avait  aucun  goût  pour  les 
femmes:  aussi  mourut-il  dansle  célibat. 
On  a  de  lui  :  1  °  Histnria  cœlestis  britan- 
nica,  Londres,  1725,  en  3  vol.  in-fol. 
2"  Ephémérides.  3°  La  ^Doctrine  de  la 
sphère ,  imprimée  en  1681  ,  avecleA^oM- 
veau  système  de  mathématiques  de  Jo- 
nas  Morus,  le  plus  zélé  protecteur  de 
Flamstécd.  Newton  ayant  trouvé  plu- 
sieurs de  ses  obsei-vations  peu  justes, 
Flamstéed  écrivit  contre  lui  :  l'académie 
des  Sciences  de  Paris  jugea,  en  faveur  de 
son  adversaire  ;  mais  Flamstéed  ne  lai.ssa 
pas  d'avoir  raison  dans  l'esprit  de  plu- 
sieurs savans.  Flamstéed  s'est  surtout  dis- 
tingué par  ses  observations  sur  le  nombre 
des  étoiles  visibles,  et  de  longues  études 
pour  le  déterminer  avec  précision.  On  sait 
qu'il  a  rendu  beaucoup  plus  nombreux  le 
catalogue  qu'en  avait  dressé  Bayer ,  et 
qu'il  les  a  portées  au  nombre  de  3,000  ; 
mais-  ce  qu'un  observateur  philosophe 
ne  doit  pas  négliger,  c'est  qu'il  n'y  a  pas 
deux  astronomes  qui,  dans  aucun  temps, 
aient  pu  s'accorder  dans  ce  calcul.  Sans 
.parler  des  tables  des  anciens,  depuis  l'u- 
sage du  télescope,  Kepler  a  compté  1393 
étoiles  bien  visibles  et  distinctes  dansles 
deux  hémisphères  célestes  ;  Riccioli  en  a 
trouvé  1437  ;  le  Père  Pardies  1491  ;  de  la 
Hire,  1576;  Bayer,  1716;  Royer,  1805; 
Hevelius,  1 888,. Flamstéed  ,  comme  nous 
venons  de  le  dire ,  3000.  Rheita ,  fameux 
astronome  de  Cologne,  assure  en  avoir 
vu  plus  de  2000  dans  une  seule  constel- 
lation :  Galilée  prétend  en  avoir  décou- 
vert 500  dans  une  petite  partie  d'Orion  ; 
M.  de  La  Caille  9800  dans  une  partie  du 
ciel  austral ,  le  Père  Maycr  proteste  en 
avoir  vu,  en  1 777  ,  plusde  200  <lont  per- 
sonne u'a  jamais  entendu  parier.  En  178Ô, 


FLA 

Merschel  en  découvrit  1300  nouvelles» 
précisément  dans  la  classe  des  nébuleu- 
ses ,  et  en  1787  ,  il  «n  compta  50,000 
dans  une  zone  de  1 5  degrés  sur  2  degrés 
de  largeur,  etc.  ,  ce  que  d'autres  astro- 
nomes ont  traité  de  vision.  Et  ces  mêmes 
gens  ne  se  sont  pas  toujours  tenus  au 
même  compte.  D'où  il  s'ensuit  que  non- 
seulement  les  étoiles  en  général,  mais  les 
"étoiles  même  visibles ,  et  exposées  depuis 
six  mille  ans  aux  deux  yeux  de  cinq  cent 
millions  d'hommes ,  sont  réellement  in- 
nombrables ;  que  Dieu  seul  en  connaît  la 
multitude  déterminée,  comme  dit  David, 
et  les  appelle  toutes  par  leurs  noms  :  Qui 
numéral  multitudincni  stcllnrum  et  om- 
nibus eis  nomina  vocal.  Ps.  146. 

*  FLANDRiN  (  Pierre  ),  vétérinaire 
et  anatomiste,  né  à  Lyon  le  12  septembre 
1752,  entra  dès  l'âge  de  14  ans  à  l'école 
vétérinaire  de  cette  ville  ,  et  s'y  distin- 
gua par  son  application  et  son  intelli- 
gence. Il  fut  choisi  quelque  temps  après 
pour  enseigner  l'anatomic  à  ses  camara- 
des, et  ensuite  appelé  à  l'école  d'Alfort , 
près  Paris ,  pour  y  être  professeur  d'ana- 
lomie  ,  et  adjoint  à  son  oncle  Chabert , 
qui  en  était  directeur.  C'est  dans  l'exer- 
cice de  cette  chaire  qu'il  fit  exécuter  la 
belle  suite  de  préparations  anatomiques  , 
qui  enrichit  le  cabinet  de  l'école  d'Al- 
fort. Il  s'acquit  une  réputation  méritée 
par  ses  travaux  sur  l'anatomic  comparée. 
Le  gouvernement  l'envoya  successive- 
ment en  Angleterre  et  en  Espagne,  pour 
y  observer  la  manière  de  conduire  et  di- 
riger l'éducation  des  moulons  à  laine  fine. 
Il  fut  nommé,  en  1791,  correspondant 
de  l'académie  des  Sciences  ,  et  il  venait 
d'être  admis  à  l'Institut  comme  associé, 
lorsque  la  mort  l'enleva  au  commence- 
ment de  juin  179G.  On  a  de  lui  :  1°  Un 
Précis  sur  Vanalomiedu  cheval,  17  87, 
in-8  ,  qu'il  avait  rédigé  pour  ses  élèves  , 
et  oîi  l'on  trouve  quelques  remarques 
neuves  et  justes.  2°  Mémoire  sur  lapos- 
sibililé  d'améliorer  les  chevaux  en 
France, Taris,  1790,  in-8.  Z"  De  lapra- 
tique  de  r éducation  des  moutons,  cl  des 
moyens  de  perfectionner  les  laines,  in-8, 
plusieurs  fois  réimprimé.  4°  .Absorption 
des  vaisseaux  lymplmliques  sur  la  rê- 


FLA  âa7 

tÎTie  ;  b°Sur  la  nature  et  les  attributs  de» 
sarigues,  animal  très  singulier  par  sa 
conformation.  G°  Sur  la  rage  ;  1°  Instruc- 
tions et  observations  sur  les  maladies 
des  animaux  domestiques,  avec  l'analyse 
des  ouvrages  vétérinaires  anciens  et  mo- 
dernes, 1782,  1795,  -3'' édition,  6  vol. 
in-8.  Diverses  observations  ou  disserta- 
tions dans  le  Dictionnaire  anatomique  de 
l'Encyclopédie ,  dans  le  Journal  de  mé- 
decine et  autres  feuilles  périodiques,  ou 
l'on  trouve  des  vues  ingénieuses. 

FLASSAINS  (  ÏARAUDET  de  ),  poète 
provençal,  natif  de  Flassans ,  petit  village 
de  Provence  dans  le  diocèse  de  Fréjus, 
obtint  de  Foulques  de  Ponlevès  une  por- 
tion de  cette  terre  pour  un  poème  inti- 
tulé :  Enseignemens  pour  éviter  les  tra- 
hisons de  V Amour.  Le  Moine,  dit  le 
Monge  des  Iles-d'Or  ,  assure  que  cet  ou- 
vrage valait  beaucoup  plus  ;  mais  qu'il 
fut  inutile  au  vendeur  et  à  l'acheteur, 
trompés  l'un  et  l'autre  par  leurs  maîtres- 
ses. Taraudet  vivait  en  1354.  La  reine 
Jeanne  se  servit  de  lui  pour  faire  des  re- 
montrances à  l'empereur  Charles  IV  qui 
passait  en  Pi-ovence,  et  il  s'en  acquitta 
très  bien. 

FLAUST  (  Jean-Baptiste  ) ,  avocat  au 
parlement  de  Rouen,  né  à  Yire  en  1709  , 
mort  à  sa  terre  de  Saint  Sévère ,  près  de 
cette  ville,  le  21  mai  17  83,  s'est  fait 
connaître  par  son  Explication  de  la  ju- 
risprudence et  de  la  coutume  de  Nor- 
mandie, dans  un  ordre  simple  et  facile , 
2  vol.  in-fol.  L^ne  table  des  matières  ajou- 
tée à  cet  ouvrage  en  rendrait  l'usage 
plus  facile. 

FLAVE  JOSEPHE.  P^oyi;z  Josephe. 

FLAVIEN  (  Saint')  ,.palriarche  d'An- 
tioche ,  d'une  naissance  illustre  et  d'une 
vertu  supérieure  à  sa  naissance,  fut  placé 
sur  le  trône  patriarcal ,,  du  vivant  de 
Paulin.  Cette  élection  confirmée  par  le 
concile  de  Constantinople  en  382  ,  fut 
l'origine  d'un  schisme  éteint  sous  le  pape 
Innocent  I.  Flavien  chassa  de  son  dio- 
cèse les  hérétiques  Messa liens,  qui  l'a- 
vaient infecté  de  leurs  erreurs.  Il  demanda 
grâce  à  l'empereur  Théodose  pour  son 
peuple,  etl'obtint.  Leshabitansd'Antio- 
che  avaient  renversé  et  outragé  dans  une 


3-28  FLA 

sédition  la  statue  de  l'impératrice  Pris^ 
cille  ;  Flavien  parla  pour  eux  avec  l'élo- 
quence que  Cicéron  déploya  autrefois 
pour  Ligarius.  Saint  Chrysostôme ,  qu'il 
avait  ordonné  prêtre,  avait,  dit-on,  com- 
posé sa  harangue.  Ce  grand  prélat  mou- 
rut en  4  04,  après  avoir  gouverné  son  église 
pendant  23  ans.  —  Il  ne  faut  pas  le  con- 
fondre avec  un  autre  saint  Flavikn  ,  pa- 
triarche d'Antioche  en  496  ,  que  l'empe- 
reur Anastase  voulut  obliger  de  souscrire 
VHénotique  de  Zenon ,  et  approuver  la 
déposition  de  Macédonius  de  Constanti- 
nople.  Il  eut  le  courage  de  lui  résister  et 
de  souffrir  l'exil  que  son  refus  lui  attira. 
Il  y  mourut  Tan  518. 

FLAVIEN  ou  Flavunus  (  Saint),  suc- 
céda à  Proclus  dans  le  patriarcat  de 
Constantiiiople ,  en  447.  Cbrysaphius, 
favori  de  l'empereur  Théodose  le  Jeune, 
Toulut  le  faire  chasser  de  son  siège,  le 
saint  prélat  brava  ses  menaces.  Il  ne  se 
montra  pas  moins  ferme  contre  Eutychès , 
qui  commença  à  semer  ses  erreurs  vers 
le  même  temps.  Il  l'anathématisa  dans 
«n  concile  ;  mais  les  partisans  de  l'héré- 
siarque condamnèrent  Flavien  et  le  dé- 
posèrent en  449,  dans  le  fameux  synode 
connu  sous  le  nom  de  brigandage  (VE- 
phèse.  Dioscore  ,  évtique  d'Alexandrie  , 
accompagné  d'une  foule  de  soldats  et  de 
moines,  présidait  à  cette  séditieuse  as- 
semblée. Flavien  appela  de  cette  con- 
damnation à  Rome  ;  mais  Dioscore  ne  ré- 
pondit à  ses  raisonnemens ,  que  par  des 
coups  de  pieds  et  des  coups  de  poings; 
enfin ,  ce  furieux  le  maltraita  si  cruelle- 
ment, que  le  saint  en  mourut  trois  jours 
après  en  449. 

FLAVIGNI  (  Valérien  de  ) ,  docteur 
de  Sorbonhe  en  1 628,  chanoine  de  Reims, 
et  professeur  en  hébreu  au  collège  royal 
en  1630,  naquit  dans  le  diocèse  de  Laon, 
et  mourut  à  Paris  le  29  avril  1674  ,  dans 
un  âge  assez  avancé.  C'était  un  homme 
plein  de  feu  dans  sa  conduite  et  dans  ses 
écrits.  Il  déféra  à  la  faculté  de  théologie 
une  thèse  soutenue  chez  les  jésuites  du 
collège  de  Clermont ,  appelé  depuis  le 
collège  de  Louis  le  Grand.  On  préten- 
dait dans  cette  thèse  ,  que  le  sy.stème  de 
Copernic ,  étant  contraire  à  l'Ecriture , 


FLÀ 

et  condamné  par  les  inquisiteurs  de 
Rome,  on  tic  pouvait  le  soutenir  en 
France.  Flavigni  voulut  démontrer  qu'une 
pareille  assertion  violait  les  droits  du 
royaume  et  du  parlement ,  ce  qui  n'était 
pas  trop  clair.  Ce  docteur  savait  de  l'hé* 
breu ,  de  la  théologie  ,  des  belles-lettres  ; 
mais  il  cherchait  trop  à  déprimep  ceux 
qui  en  savaient  autant  et  plus  que  lui.  Il 
écrivait  d'ailleurs ,  plutôt  avec  l'impé- 
tuosité d'un  jeune  Hibernois  qui  argu- 
mente sur  les  bancs ,  qu'avec  la  gravité 
d'un  vieux  théologien.  On  a  de  lui  la 
Défense  d'une  thèse  qu'il  avait  signée 
en  qualité  de  grand-maître  d'études.  Il  y 
était  dit  que  Ve'piscopat  n'est  pas  un  sa- 
crement distinct  de  la  prêtrise  :  senti- 
ment qu'il  ne  faut  pas  confondre  avec 
l'erreur  ,  qui  n'attribue  aux  évèques  rien 
au  dessus  des  simples  prêtres.  Flavigni 
prétendait  que  c'était  le  même  sacre- 
ment avec  des  effets  plus  étendus,  et 
l'impression  d'un  caractère  plus  grand , 
parce  que  sans  cela  il  y  aurait  plus  de 
sept  sacremens  :  conséquence  que  d'au- 
tres théologiens  admettent ,  en  disant  que 
le  sacrement  de  l'Ordre  étant  considéré 
dans  sa  généralité  ,  et  comme  la  consé- 
cration sacerdotale  dans  toutes  ses  divi- 
sions, est  mis  comme  une  unité  généri- 
que dans  le  nombre  de  sept.  Celte  apo- 
logie a  été  imprimée  à  Tournay  ,  en  1668, 
in-4.  (Il  avait  travaillé  h  [a  Polyglotte  de 
Le  J»y  ,  qu'il  critiqua  plus  tard.  ) 

*  FLAYIGNY  (  César-François,  comte 
de  ) ,  né  vers  1740  à  Craonne  dans  le 
Laonnais,  embrassa  la  profession  des  ar- 
mes, et  parvint  au  grade  de  lieutenant-co- 
lonel d'un  régiment  de  dragons.  Il  obtint 
ensuite  une  compagnie  dans  les  gardes 
françaises ,  et  devint  maréchal  de  camp 
en  1788.  Après  le  licenciement  de  la 
maison  du  roi ,  il  se  retira  dans  sa  terre 
de  Charmes  près  de  Lafère  ,  où  il  mourut 
le  1 1  décembre  1 803.  Il  a  publié  :  1°  Prin- 
cipes fondamentaux  de  la  construction 
des  places ,  avec  un  nouveau  système 
de  fortifications,  traduit  de  l'italien 
d'Antoni,  1775  ,  in-8.  2°  Introduction  à 
l'histoire  naturelle  et  à  la  géographie  de 
r  Espagne,  traduite  de  l'anglais  de  Bow- 
Ics,  1776,  in-8.  3"  Correspondance  de 


^eniand  Cortez  avec  tempereur  Char- 
les'Çuint ,  sur  la^onquêie  du  Mexique  , 
1878  ,  in-12.  4°  Rc flexions  sur  la  déser- 
tion et  sur  la  peine  des  déserteurs  en 
France,  Paris,  1768,  in-8. 

*  FLAVIGNY  (  A.  L.  J  ) ,  fils  unique 
du  précédent ,  né  en  1764,  ayant  obtenu 
une  lieulenance  dans  les  gardes-franoaises, 
fut  un  des  gentilsbommes  qui  se  mon- 
trèrent le  plus  dévoués  au  service  du 
malheureux  Louis  XVI.  Il  se  rendit  con- 
stamment auprès  de  sa  personne,  à  cha- 
que crise  politique  qui  menaçait  ses  jours, 
et  fut  arrêté  après  le  10  août  1792.  il 
resta  près  de  18  mois  détenu  dans  la 
maison  de  Saint-Lazare,  et  fut  condamné 
à  mort  par  le  tribunal  révolutionnaire  le 
24  juillet  1794  ,  comme  complice  de  la 
conspiration  des  prisons,  au  moment  où 
la  chute  de  Robespierre  allait  le  rendre 
à  son  père  et  à  son  pays. 

•  FLAVITAS  ou  Fravitas  ,  patriarche 
de  Constantiitople  après  Acace  ,  en  489  , 
employa  la  ruse  pour  se  faire  élire.  L'em- 
pereur Zenon  avait  fait  mettre  sur  l'autel 
de  la  grande  église  de  Constantinople , 
un  papier  blanc  et  cacheté ,  comptant 
que  Dieu  ferait  écrire  par  un  ange  le  nom 
du  prêtre  qu'il  destinait  à  la  chaire  pa- 
triarcale ;  Flavitas  corrompit  l'eunuque 
qui  avait  la  garde  de  l'église ,  et  écrivit 
son  nom  sur  le  papier.  Ouelques  histo- 
riens ont  révoqué  en  doute  ce  trait  d'im- 
posture. On  peut  voir  ce  qu'en  dit  M.  de 
Tillemont  dans  ses  Mémoires  pour  servir 
à  l'Histoire  ecclésiastique ,  où  ce  fait  est 
amplement  discuté.  Cette  supercherie  le 
fit  ])atriarche.  C'était  le  plus  fourbe  et  le 
plus  artificieux  des  hommes.  Dans  le 
même  temps  qu'il  jurait  aux  hérétiques 
qu'il  ne  voulait  avoir  aucune  communi- 
cation avec  le  pontife  de  Rome ,  il  écri- 
vait sourdement  au  pape  Félix.  Sa  mort , 
arrivée  en  490,  lui  épargna  un  châti- 
ment exemplaire.  Il  n'occupa  ce  siège 
(pie  quatre  mois. 

*  FLAXMAN  (  John  ) ,  sculpteur  an- 
glais ,  né  en  1754,  passa  la  plus  grande 
partie  de  sa  jeunesse  en  Italie,  où  il  a 
laissé  les  souvenirs  les  plus  honorables. 
On  admire  même  encore  à  Rome  plusieurs 
de  ses  statues  et  bas-reliefs.  De  retour  en 

V. 


fLÊ 


âag 


Angleterte  il  a  enrichi  sa  patrie  dé  tnonu- 
mens  remarquables  par  leur  goût  et  par 
leur  correction  ;  peut-être  une  critique 
sévère  désirerait-elle  dans  ces  composi- 
tions plus  d'expression,  plus  de  moelleux, 
de  grâce  et  de  fini.  Ses  principaux  ou- 
K'ragcs  comme  sculpteur  sont  le  beau 
mausolée  du  poète  Collins  dans  la  cathé- 
drale de  Chichester,  celui  du  lord  Mans- 
field  dans  l'abbaye  de  Westminster ,  ceux 
de  lordHowe  et  du  général  Abercromby; 
la  statue  de  sir  Reynolds  et  de  Washing- 
ton. Il  a  publié  Série  de  gravures  pour 
expliquer  l^  poème  d'Homère ,  Londres , 
1793,  2  vol.  in-4,  2*  édition,  1805.  Il 
a  aussi  donné  en  1805  Acs  Séries  de  gra- 
vures pour  V Eschyle ,  2  vol.  in-fol. ,  et 
pour  le  Dante ,  2  vol .  in-fol.  ;  et  en  1 8 1 7, 
Deuxième  série  de  dessins  pour  illustrer 
et  expliquer  les  travaux ,  les  jours  et  la 
théogonie  d'Hésiode,  1  vol.  in-fol.  Flax- 
man  était  professeur  à  l'académie  royale 
de  peinture  de  Londres ,  et  avait  reçu  le 
brevet  de  peintre  du  roi.  Lord  Eigiri 
ayant  enlevé ,  comme  chacun  le  sait ,  des 
monumens  d'Athènes ,  des  frises ,  des  bas-, 
reliefs  et  d'autres  débris  de  sculpture 
antique ,  une  commission  fut  nommée 
par  le  parlement  pour  juger  le  mérite  de 
ces  acquisitions.  Ce  fut  d'après  l'avis  de 
Flaxman  que  ces  différens  objets  ont  été 
achetés  par  le  gouvernement  et  sont  de- 
venus propriété  nationale. 

FLECHELLES.  Foyez  Guerin  (Hu- 
gues ). 

*  FLECHEUX ,  astronome  et  mécani- 
cien, mort  à  Paris  le  4  novembre  1793  à 
l'âge  de  55  ans ,  a  donné  un  Planétaire 
ou  Planisphère,  propre  à  mettre  sous 
les  yeux  de  la  jeunesse  le  mouvement  des 
astres.  On  lui  doit  cacoï&V Oxocosme  ou 
Démonstration  du  mouvement  annuel 
de  la  terre  autour  du  soleil,  1  784,  in-8. 

FLÉCHIER  (  Esprit  ) ,  évêque  et  ora- 
teur .sacré  ,  né  le  10  juin  1G32  à  Pernes, 
petite  ville  du  diocèse  de  Carpentras ,  fut 
élevé  dans  le  sein  des  lettres  et  de  la  vertu, 
auprès  d'Hercule  Audififret ,  son  oncle , 
général  des  Pères  de  la  doctrine  chré- 
tienne ,  où  il  était  entré  à  l'âge  de  16  ans. 
(Obligé  suivant  la  règle  de  la  maison ,  de 
se  livrer  à  l'euseigneinent ,  il  professa  la 


33o 


Plifl 


rhétorique  à  Narbosoe }.  Fléchitii'  y  ayant 
quitté  cette  congrégation ,  après  la  mort 
de  son  oncle,  parut  à  Paris  oîi  ii  remplit 
dans  l'une  des  paroisses  l'emploi  aussi 
modeste  qu'utile  de  catéchiste  des  petits 
enfans ,  fut  ensuite  précepteur  des  fils  de 
Louis  Caumartiu  intendant  des  finances 
et  conseiller  d'état.  Une  pièce  de  vers  la- 
tins sur  le  Carrousel  (  Circulas  regius  }, 
donné  par  le  roi  en  1G62  ,  commença  sa 
réputation  :  ses  sermons  y  ajo!itèrent 
beaucoup.  Il  fut  nommé  lecteur  du  dau- 
phin par  le  crédit  du  duc  de  Montansier 
qui  l'honorait  de  sou  amitié.  Il  eut  part 
aux  bienfaits  que  Louis  XIV  répandit  sur 
les  gens  de  lettres.  Fléchier ,  encouragé 
par  ces  récompenses,  fit  de  nouveaux  ef- 
forts ,  et  balança  bientôt  la  réputation  de 
Bossuct  dans  l'oraisou  funèbre.  C«lle  de 
Turenne,  son  chef-d'œuvre,  fit  pleurer 
ie  monarque,  et  mit  le  comble  à  la  gloire 
de  l'orateur.  On  admira  surtout  le  beau 
parallèle  du  maréchal  de  France  avec  Ju- 
das Machabée.  U  est  vrai  qu'il  n'était  pas 
le  premier  qui  eût  transporté  auv  géné- 
raux modernes  les  éloges  donnés  à  cet 
ancien  capitaine.  Lingendes ,  évèque  de 
]^àcon ,  et  Fromentïères  ,  évèque  d'Aire, 
s'en  étaient  déjà  servis  :  l'un  ,  dans  l'o- 
raison funèbre  de  Charles-Emmanuel,  duc 
de  Savoie  ;  l'autre  ,  dans  celle  du  duc  de 
Beaufort.  Mais  Fléchier  se  rendit  propre 
ce  lieu  commun  ,  par  les  orneinens  dont 
il  l'embellit  dans  son  exorde  ,  qui  est  un 
chef-d'œuvre  par  l'harmonie  et  le  carac- 
tère majestueux  et  sombre  qui  y  régnent. 
La  cour  récompensa  .ses  talens,  en  1685, 
par  l'évêché  de  Lavaur,  et  en  1687,  par 
celui  de  Nîmes.  Louis  XIV  lui  dit  en  le 
nommant  au  premier  évêché  :  «  Ne  soyez 
»  pas  surpris  si  j'ai  récompensé  si  tard 
»  votremérite;  j'appréhendaisd'ètre  privé 
M  du  plaisir  de  vous  entendre.  »  Le  dio- 
cèse de  Nîmes  était  plein  d'hérétiques  ; 
il  se  conduisit  avec  eux  en  bon  pasteur. 
Il  les  instrui.sit  tous  par  la  solidité  de  .ses 
discDui-s,  et  plus  encore  par  la  régularité 
de  ses  mœurs.  Il  mourut  à  Montpellier  le 
16  février  1710,  à  78  ans,  regretté  de 
ses  diocésains  catholiques  et  huguenots, 
et  laissant  plus  de  25,000  écus  aux  pau- 
vnss.  L'académie  française  s'était  associé 


FLË 

Fléchier,  après  là  mort  de  Godeau  en 
1 C7  3.  Il  y  entra  le  mèm^our  que  Racine. 
C'est  sur  le  modèle  de  cette  compagnie 
qu'il  forma  celle  de  Nîmes  ,  dont  il  fut  le 
mentor  et  le  père.  On  a  de  lui  1"  Des 
œuvres  mêlées ,  in-1 2,  en  vers  et  en  prose. 
On  a  loué  avec  raison  ses  vers  français  et 
latins.  Les  pensées  en  sont  délicates,  les 
expressions  heureuses,  les  termes  bien 
choisis ,  la  cadence  harmonieuse.  2°  L'é- 
dition d'un  ouvrage  fort  curieux  d'An- 
toine Marie  Gratiani  :  De  casibus  iltus- 
triuni  virorum  ,  in-i  ,  avec  une  préface 
en  latijn.  Le  stile  en  est  aussi  pur  qu'élé- 
gant. 3"  Des  Panégyriques  des  saints, 
mis  au  rang  des  meilleurs  ouvrages  de  ce 
genre,  Paris,  1690,  en  4  vol. in-4  ;  1697, 
2  vol.  in-12;  1739,  3  vol.  in-1 2.  4°  Re- 
cueil d'oraisons  funèbres ,  en  un  vol. 
in-4  et  in-12.  Il  y  a  moins  d'élégance  et 
de  pureté  de  langage  dans  celle  de  Bos- 
suet  ;  mais  on  y  trouve  une  éloquence 
plus  forte,  plus  niàle,  plus  nerveuse.  Le 
stile  de  Fléchier  est  plus  coulant,  plus 
arrondi ,  plus  uniforme.  Celui  defiossuet, 
moins  égal ,  moins  soutenu ,  est  plus 
rempli  de  ces  traits  hardis,  deces  Agures 
vives  et  frappantes  qui  caractérisent  le 
génie.  Fléchier  est  plus  heureux  que  lui 
dans  le  choix  et  dans  l'arrangement  des 
mots;  mais  son  penchant  pour  l'antithèse 
répand  une  sorte  de  monotonie  sur  son 
stile.  11  devait  autant  à  l'art  qu'à  la  na- 
ture ;  Bossuet  devait  plus  à  la  nature  qu'à 
l'art.  5°  Des  Sermons  en  3  vol.  in-12, 
qui  ne  sont  pas  de  la  même  force  que 
ses  oraisons  funèbres  et  ses  panégyri- 
ques. On  y  trouve  de  belles  périodes ,  et 
très  peu  de  raisonnemens.  Il  avait  cher- 
ché de  bonne  heure  dans  nos  vieux  pré- 
dicateurs des  traits  d'éloquence  et  des 
pensées  ingénieuses ,  dont  il  faisait  un 
usage  plus  ingénieux  encore  ;  aussi  lui 
trouve-t-on  quelquefois  ,  quant  au  fonds 
des  choses ,  un  air  antique,  l'air  du  com- 
mencement de  son  siècle.  11  prêchait  avec 
un  vieux  goût  et  un  stile  moderne.  6°  His- 
toire de  tempereur  Théodose  le  Grand , 
Paris,  1679  ,  in-4,  réimprimée  très  sou- 
vent in-12;  elle  est  estimée  pour  l'élé- 
gance du  stile ,  autant  que  pour  l'intérêt 
de  la  narration.  Ceux  qui  ont  cru  qu'il 


FLE 

flattait  son  héros ,  «'ont  pas  rendu  justice 
à  cet  empereur  qui  ,  dans  le  vrai ,  <?tait 
grand  homme  et  grand  prince  à  tous 
égards.  7°  La  P^ie  du  cardinal  Ximenès  , 
eu  2  vol.  in-12,  et  un  in-4.  Il  peint  ce 
cardinal  comme  un  saint;  l'abbé  Marsol- 
lier  .  dans  une  histoire  de  Ximenès,  pu- 
bliée vers  le  même  temps  que  celle  de 
Fléchier ,  en  tit  un  politique  ;  ce  grand 
ministre  avait  été  l'un  et  l'autre  ;  mais 
Marsollier  était  un  esprit  trop  mobile  pour 
peindre  dignement  un  homme  d'un  ca- 
ractère si  ferme.  8°  Des  lettres ,  2  vol. 
iu-12.  On  y  trouve  des  détails  affligeans 
sur  les  excès  des  calvinistes  ,  qui  dès-lors 
répandaient  l'efifroi  partout  et  préludaient 
aux  scènes  affreuses  qui  ont  désolé  JN'îmes 
en  nyO  et  1791.  9°  La  Fie  du  cardinal 
Commendnn  ,  traduite  du  latin  d'Antoine- 
Marie  Graliani  in-4.  ,  et  2  vol.  in-12, 
plusieurs  fois  réimprimée.  10°  Des  OEu- 
vres posthumes ,  en  2  vol.  in-12;  elles 
contiennent  ses  mnndemens  et  ses  lettres 
pastorales ,  oii  la  philosophie  chrétienne 
et  la  tendresse  épiscopale  se  font  sentir 
avec  tous  leurs  charmes.  On  y  a  ramassé 
différens  discours,  complimcns  et  haran- 
gues. L'auteur  du  Dictionnaire  critique, 
en  ti  vol. ,  lui  attribue  un  recueil  manus- 
crit, formant  6  vol.  in- fol. ,  sur  les  anti- 
quités du  Languedoc  ;  mais  il  est  certain 
qu'il  n'est  pas  de  lui  :  c'est  l'ouvrage  d'un 
citoyen  de  >'imes,  appelé  Aulne  Rul- 
man.  L'abbé  Ducreux,  chanoine  d'Au- 
xerre  ,  a  donné  une  éditiou  complète  des 
OEuvres  de  Fléchier  ,  à  Xîmes,  en  17  82  , 
5  tomes  en  10  vol.  in-8.  Ses  poésies  la- 
tines ont  paru  dans  un  recueil  séparé ,  à 
Bâle,  1782,  1  vol.  in-12.  En  1791,  le 
siège  de  ce  grand  homme  fut  souillé  par 
un  nommé  Dumouchel ,  d'abord  garçon 
perruquier ,  puis  prêtre  apostat ,  que  l'As- 
semblée nationale  subrogea  à  l'évèque  lé- 
gitime, foyez  Dumouchel. 

FLEETW  OOD  (  Guillaume  ) ,  évoque 
anglican  .  né  dans  la  Tour  de  Londres  en 
1GÔ6  ,  d'une  famille  noble,  originaire  de 
la  province  de  Lancastre,  se  ht  connaî- 
tre ,  sous  le  règne  de  Guillaume  III ,  par 
ses  ouvrages.  La  reine  Anne,  instruite 
de  son  mérite ,  lui  donna  un  canonicat 
de  Windsor  en   1702,  puis  l'évèçhé  de 


FLE  33 1 

Saint  Asaphen  1 708.  Fleetvcood fut  trans- 
féré de  cetévêché  à  edui  d'Ely  en  1714, 
et  mourut  en  1*23  ,  à  67  ans.  Ses  princi- 
paux ouvrages  sont  :  1  "  Inscriptionum 
antiqunrum  sijlloge ,  Londres,  1691  , 
in-8.  2"  Des  sermons.  3°  Essai  sur  les 
miracles  ,  1701  ,  in-8.  k"  Chronicon pre- 
tiosum.  5°  Explication  du  13"  chnp.  de 
Cépître  aux  Romains.  Sa  vie  est  à  la  tète 
de  ses  sermons.  —  Il  ne  faut  pas  le  con- 
fondre avec  un  autre  Guillaume  Fleet- 
wooD ,  avocat  de  la  reine  Elisabeth  ,  qui 
fut  député  pour  aller  visiter  de  sa  part 
plusieurs  diocèses.  Il  mourut  en  1592. 
On  a  de  lui  1°  Elenchus  annaliuni  Ed- 
vardi  V ,  Ricliardi  III ,  Hcnrici  Fil  et 
Henrici  FUI,  Londres,  1597  ,  in  8.  On 
sent  combien  il  a  dû  les  défigurer,  pour 
qu'on  ne  trouvât  pas  à  chaque  page  la 
condamnation  de  la  réforme  anglicane. 
•2°  \]  Office  déjuge  de  paix ,  1658. 

FLEIX.  Foyez  Foix  (  Raymond  ). 

FLEMALE.  Fnyez  Bertholet. 

'  FLEMING,  ou Flemminge  (Richard; , 
prélat  anglais  ,  naquit  à  Croston  ,  dans 
le  comté  d'Oxford ,  vers  la  fin  du  1 4'=  siè- 
cle. Il  fit  ses  études  à  Oxford ,  et  embras- 
sa, avec  chaleur,  l'hérésie  de  Wiclef  ; 
mais  il  devint  bientôt  son  ennemi.  Il  ap- 
porta à  renverser  l'édifice  la  même  ar- 
deur qu'il  avait  mise  à  le  construire.  En 
1420,  Henri  V  le  nomma  à  l'évêché  de 
Lincoln ,  auquel  le  pape  Martin  V  l'avait 
lui-même  désigné.  Cependant .  lorsque 
ce  même  pape  voulut  le  transférera  l'ar- 
chevêché d'York,  Henri  s'y  opposa,  et 
Fleming  demeura  évêque  de  Lincoln.  Ce 
prélatmourut  en  1430,  après  avoir  fondé, 
à  Oxford  le  collège  de  Lincoln  pour  de 
jeunes  théologiens  ,  destinés  à  combattre 
les  erreurs  de  Wiclef. 

*  FLEMING  (  Patrice  ),  religieux  obser^ 
vantin  ,  né  en  1599  d'une  famille  noble, 
dans  le  comté  de  Louth  ,  en  Irlande  ,  fut 
envoyé  à  Douai ,  à  l'âge  de  1 3  ans  ,  pour 
y  faire  ses  études  sous  la  direction  de  son 
oncle  maternel ,  Christophe  Cusack  ,  su- 
périeur des  collèges  irlandais ,  en  Flan- 
dre. Après  avoir  fait  ses  humanités  ,  il  se 
rendit  à  Louvain ,  oii  il  embrassa  la  règle 
de  saint  François,  dans  le  collège  de 
Saint-Antoine  de  Padouç,  oui  apnarte^ 


332  FLE 

nait  à  des  franciscains  de  sa  nation.  Lors- 
que ses  cours  de  théologie  et  de  philoso- 
phie furent  terminés  ,  il  se  rendil  à  Rome 
avec  le  Père  Hugues  Mac-Caghwel ,  défi- 
niteur  général  de  l'ordre.  En  passant  à 
Paris,  il  s'yJia  d'amitié  avec  le  Père  Hu- 
gues Ward ,  et  ils  formèrent  le  dessein  de 
recueillir  les  matériaux ,  pour  composer 
les  vies  des  saints  d'Irlande.  Ils  fouillè- 
rent tous  les  deux  dans  toutes  les  biblio- 
thèques qui  furent  à  leur  portée.  Fleming 
fit  de  nombreuses  recherches  dans  toutes 
les  villes  de  France,  d'où  il  passa  en  Italie 
et  en  Allemagne.  Une  partie  de  ces  vies 
fut  publiée,  quelques  années  après ,  par 
le  Père  Colgan ,  qui  reconnaît  avoir  tiré 
un  grand  secours  des  recherches  de  Fle- 
ming et  du  Père  Ward.  Le  Père  Fleming 
fut  chargé  d'enseigner  la  philosophie  dans 
le  couvent  de  Saint-Isidore  de  Rome.  Il 
reçut ,  quelque  temps  après  ,  le  même 
emploi  à  Louvain.  Il  fut  ensuite  envoyé 
à  Prague  ,  pour  y  gouverner  le  couvent 
de  l'Immaculée  Conception.  L'Allemagne 
était  alors  en  feu;  et  le  luthéranisme,  ap- 
puyé par  les  armes  victorieuses  des  Sué- 
dois, se  répandait  de  tous  côtés.  Les 
armées  suédoises  et  saxonnes  faisaient 
souffrir  une  cruelle  persécution  aux  catho- 
liques ,  et  surtout  aux  religieux.  Prague 
étant  menacée  d'être  investie  après  la  ba- 
taille de  Leipsick,  le  Père  Fleming,  pour 
ne  pas  tomber  entre  les  mains  d'un  en- 
nemi barbare  ,  quitta  cette  ville  avec  le 
Père  Malhias  Hoav ,  son  confrère.  Mais 
ils  eurent  le  malheur  de  tomber  entre  les 
mains  d'une  troupe  de  paysans  luthériens , 
qui  les  massacrèrent  impitoyablement: 
Moréri  place  cet  assassinat  au  7  novembre 
1631.  Wading,  historien  des  frères  mi- 
neurs ,  le  recule  de  deux  années  ;  mais  la 
prise  de  Prague  ,  qui  eut  lieu  en  1631  , 
doit  faire  préférer  la  première  date.  On 
a  de  ce  religieux  1°  Collectanea  sacra, 
Louvain,  1667;  2"  Fita  R.  P.  Hugonis 
Cavdli  (  Macaghwel.  )  ;  3"  un  Jbrégc  du 
Chronicon  consecrali  Pelri  Ratisbonœ. 
*  FLEMIING  (Robert),  théologien  écos- 
sais ,  naquit  à  Bathens  ,  en  1030.  Il  adop- 
ta les  principes  du  calvinisme ,  et  fut 
expulsé  comme  non-conformiste  de  la 
pure  do  C^u^Iang  ;  h  laquelle  il  AViiit 


FLË 

été  nommé  fort  jeune  ,  en  exécution  de 
l'acte  publié  à  Glascow.  Peu  après  la 
restauration  ,  il  fut  même  arrêté  ;  mais 
ayant  obtenu  son  élargissement,  il  passa 
à  Rotterdam ,  oii  il  fut  élu  ministre  de  la 
congrégation  écossaise.  Il  mourut  le  25 
juillet  1694.  Il  a  laissé  1°  le  Miroir  dt 
V amour  divin  dévoile,  1691  ,  in-8.  C'est 
un  recueil  de  poésies  religieuses.  2"L'^c- 
complissemeiit  des  Ecritures  ;  ouvrage 
très  estimé  ,  surtout  des  dissidens  et  des 
calvinistes. 

*  FLESSELLES  (  Jacques  de  ) ,  né  en 
1721,  d'une  famille  de  robe ,  devint  d'a- 
bord conseiller  d'état ,  ou  maître  hono- 
raire des  requêtes,  et  figura,  lors  des 
troubles  de  la  Bretagne ,  dans  le  parti  du 
duc  d'Aiguillon  contre  le  fameux  procu- 
reur-général La  Chalotais.  Envoyé  en- 
suite en  qualité  d'intendant  à  Lyon,  il 
s'y  fit  chérir  par  sa  douceur ,  sa  bienfai- 
sance et  son  zèle  pour  les  intérêts  de  cette 
grande  cité ,  dont  le  commerce  lui  est  re- 
devable d'établissemens  importans.  Il  y 
fonda  un  prix  en  1 77  7 ,  pour  le  perfection 
nement  de  la  teinture  des  soies  en  noir. 
Au  commencement  de  la  révolution  il  fut 
nommé  prévôt  des  marchands  de  la  ville 
de  Paris;  mais  il  n'avait  ni  la  fermeté  ni 
les  talens  qui  convenaient  à  cette  place 
dans  un  moment  aussi  difficile.  Accusé 
de  trahison  par  le  parti  populaire  le  1 4 
juillet  1789,  jour  de  la  prise  de  la  Bas- 
tille, il  hésita,  balbutia  et  chercha  à 
s'excuser,  à  prouver  son  innocence.  Les 
factieux  enhardis  par  sa  faiblesse  ,  lui  si- 
gnifièrent qu'il  fallait  aller  au  Palais-Royal, 
lieu  de  réunion  de  tous  les  agitateurs  , 
et  que  là  il  serait  entendu.  Le  malheureux 
Flesselles  crut  devoir  consentir  à  cette  dé- 
marche ;  mais  à  peine  fut-il  arrivé  au  bas 
de  l'escalier  qui  descend  sur  la  place  de 
Grève  ,  qu'un  jeune  homme  lui  cassa  la 
tête  d'un  coup  de  pistolet.  La  populace 
se  précipita  aussitôt  sur  son  cadavre  ;  on 
en  sépara  la  tête  qui  «fut  placée  au  haut 
d'une  pique  ,  et  portée  au  Palais-Royal. 
Le  corps  fut  traîné  dans  la  fange.  Ce 
meurtre  commis  sous  les  yeux  de  l'auto- 
rité ,  sans  qu'elle  osât  prendre  des  mesu- 
res pour  en  punir  les  auteurs,  fut  le  signal 
de  l'insurrectioiî ,  et  d«  tous  les  «tten- 


FLE 

tats  qui  le  suivirent.  Flcsselles  était  âgé 
de  68  ans. 

FLETCHER  (Gilles),  poète  anglais 
et  bon  politique ,  qualités  qui  se  ren- 
contrent rarement  ensemble  ,  fut  charge 
de  quelques  commissions  en  Ecosse  et 
en  Allemagne  par  la  reine  Elisabeth  ,  qui 
l'envoya  ensuite  en  qualité  d'ambassadeur 
eu  Moscovie.  Il  était  secrétaire  de  la  cité 
de  Londres  et  trésorier  de  Saint-l*aul , 
quand  il  mourut  en  1610.  On  a  de  lui 
1"  une  Relation  de  son  ambassade  en 
Moscovie,  1590,  in-8.  L'auteur  s'y 
montre  peu  favorable  aux  Russes  qui 
étaient  alors  encore  demi-barbares.  2°  De 
Utteratis  antiquœ  Britanniœ ,  1633, 
in-12. 

FLETCHER  (Jean),  neveu  du  pré- 
cédent, poète  tragique  anglais,  mort  à 
Londres  en  1625,  à  49  ans,  marcha  sur 
les  traces  de  Shakespear  dans  la  carrière 
dramatique  ,  et  obtint  une  des  premières 
places  après  son  modèle.  Le  cabaret  était 
son  Parnasse.  Un  jour  qu'il  y  récitait  une 
trage'dic,  dans  laquelle  il  y  avait  une 
conjuration  contre  la  vie  d'un  roi ,  des 
gens  qui  passaient  dans  la  rue  le  dénon- 
cèrent comme  un  scélérat.  On  le  mit  en 
prison  ;  mais  on  reconnut  bientôt  que  le 
conjurateur  ne  tuait  les  rois  que  sur  le 
théâtre.    Voyez   Beaumost  (  François). 

FLEURANGES.  Votjez  Marck  '(  Ro- 
bert de  La  ),  troisième  du  nom. 

*  FLEURET  ,  ancien  professeur  d'ar- 
chitecture de  l'écoie  royale  militaire  de 
Paris,  mort  le  l*' janvier  1817,  est  au- 
teur de  V Art  de  composer  des  pierres 
factices  aussi  dures  que  le  caillou ,  et  de 
Becherches  sur  la  manière  de  bâtir  des 
anciens,  1808,  in-'4  ,  avec  un  vol.  de 
planches. 

•  FLEURET  (  Elisabeth  ,  Madame  )  , 
née  à  Paris  le  10  juin  1725  ,  est  connue 
des  âmes  pieuses  par  le  Guide  des  supé- 
rieures, 1  vol.  in-12,  178G  ,  ouvrage  que 
M.  Emery ,  supérieur  du  séminaire  de 
St.-Sulpice  de  Paris,  se  plaisait  à  citer 
dans  ses  conférences ,  et  que  l'abbé  de 
Montis  a  revêtu  d'une  approbation  très 
favorable  Elle  a  laissé  aussi  une  suite  à 
ce  livre  :  ce  sont  des  avis  aux  supérieures 
sur  la  direction  spirituelle  des  religieusça 


FLE  333 

et  des  novices ,  et  des  entretiens  spiri- 
tuels et  familiers  ,  qui  formeraient  peut- 
être  trois  volumes  ,  et  dont  la  publica- 
tion ne  serait  pas  utile  seulement  aux 
personnes  qui  vivent  en  communauté  , 
mais  encore  à  toutes  celles  qui  ont  à 
cœur  le  salut  de  leiu-s  âmes.  Cette  pieuse 
dame,  sur  la  mort  de  laquelle  nous  n'avons 
aucun  détail ,  était  fille  d'un  contrôleur 
au  service  du  duc  d'Orléans.  Entrée  chez 
les  religieuses  de  la  congrégation  de  No- 
tre-Dame ,  elle  était  devenue  maîtresse 
des  novices  :  c'est  le  fruit  de  son  expé- 
rience qu'elle  avait  déposé  dans  sou  livre. 

*FLEURL\U  (Louis-Gaston),  doc- 
teur en  théologie  et  évêque  d'Orléans , 
naquit  à  Paris  en  1C62.  Il  avait  d'abord 
été  évêque  d'Aix  en  1698.  Il  passa  à  l'é- 
vêché  d'Orléans  en  1 705  ,  et  eut  en  même 
temps  l'abbaye  de  Saint-Jean  d'Amiens, 
ordre  de  Prémontré.  A  son  avènement 
au  siège  d'Orléans ,  il  racheta  et  fit  déli- 
vrer 854  prisonniers  détenus  pour  dettes. 
Ce  prélat  était  doué  d'une  charité  ad- 
mirable, et  possédait,  à  un  degré  émi- 
uent,  toutes  les  vertus  épiscopales.  Il 
assista  à  l'assemblée  du  clergé  de  1715  , 
et  tint  plusieurs  synodes  dans  sou 
diocèse  ,  veillant  avec  soin  au  maintien 
de  la  discipline  ecclésiastique.  Il  fonda 
à  Orléans  plusieurs  établissemens  utiles, 
entre  autres  une  maison  pour  les  nou- 
velles converties.  Ce  prélat  mourut  le  1 1 
janvier  1733.  Il  a  laissé  des  Re'glemens 
et  avis  synodaux ,  extraits  des  synodes 
qu'il  avait  tenus. 

*FLEURIAU  (Thomas-Charles),  jé- 
suite, qui  vivait  vers  la  fin  du  17®  siècle, 
fut  chargé  par  ses  supérieurs  de  corres- 
pondre avec  les  missionnaires  de  la  com- 
pagnie dans  le  Levant ,  et  de  rédiger  les 
mémoires  qu'ils  envoyaient.  On  en  trouve 
plusieurs  dans  le  Recueil  des  lettres 
édifiantes,  écrites  des  missions  étran- 
gères, 26  vol.  in-12  ou  14  vol.  in-8.  H 
a  publié  en  outre ,  1  "  Etat  présent  de 
l'Arménie ,  Paris  ,.1694,  in-1 2 .  2°  Etat 
des  missions  de  la  Grèce,  Paris,  1695, 
in-12.  3"  Avec  le  père  Monier  :  Nou- 
veaux mémoires  des  missions  de  la  com- 
pagnie de  Jésus  dans  le  Levant ,  Paris  , 
Ï71Î,  et  années  suivantes,  —  Uy  utm 


334 


FLE 


plusieurs  autres  jésuites  du  même  nom  . 
entre  autres  Bertrand-Gabriel  Fleuriau  , 
né  en  1G93,  auteur  des  Principes  de  la 
langue  latine,  mis  dans  un  ordre  plus 
clair  et  plus  exact ,  très  souvent  réim- 
primes. Les  dernières  éditions  ont  été 
retouchées  par  M.  de  Wailly.  (On  a  encore 
de  lui  :  Relation  des  conquêtes  faîtes 
dans  les  Indes,  par  D-F.-M.  d'Almeida , 
traduite  de  l'italien,  Paris,  1769,  in-12; 
f^ie  du  père  Claver,  ibid. ,  17,61  in-12.) 

FLECRIAU.  Foyez  Langlk. 

*  IXEURIE€  (  Charles-Pierre  Claret, 
coqote  de  ) ,  ministre  de  la  marine  sous 
Louis  XVI,  né  à  Lyon  eu  1738,  entra  dans 
la  marine  à  l'âge  de  treize-  ans ,  et  fut 
toujours  un  modèle  d'application  et  de 
bonne  conduite.  Il  profita,  pour  se  livrer 
à  l'étude  avec  une  ardeur  nouvelle  ,  de 
la  paix  conclue  en  1763.  Le  premier  fruit 
de  ses  méditations  fut  des  horloges  ma- 
rines ,  qu'il  exécuta  avec  Ferdinand  Ber- 
thoud,  célèbre  horloger,  qui  s'occupait 
alors  du  même  objet.  Elles  furent  es- 
sayées en  17G8,  sur  la  frégate  FIsis, 
qu'il  commandait  eu  qualité  de  lieutenant 
de  vaisseau,  et  le  succès  sui-passa  les 
espérances  qu'on  avait  conçues.  Il  obtint 
en  1776  la  place  de  directeur-général 
des  ports  et  arsenaux  de  la  marine ,  et  il 
prouva ,  dans  ce  nouvel  emploi ,  oîi  il 
rendit  à  l'état  les  services  les  plus  écla- 
tans ,  qu'il  était  aussi  bon  administrateur 
que  savant  marin.  C'est  lui  qui  rédigea 
tous  les  plans  des  opérations  navales  de 
la  guerre  de  1778  ,  et  ceux  de  toutes  les 
campagnes  de  découvertes,  telles  que 
celles  de  La  Peyrouse  et  de  d'Elntrecas- 
teaux.  On  lui  doit  aussi  la  réduction  de 
V  Ordonnance  du  roi  sur  la  régie  et  l' ad- 
ministration des  ports  et  arsenaux, 
Paris,  1776,  in-4.  Le  27  octobre  1790, 
il  fut  appelé  au  ministère  de  la  marine 
et  des  colonies  ,  et  il  eu  remplit  les  fonc- 
tions avec  l'intégrité  qui  l'avait  toujours 
fait  remarquer,  jusqu'au  17  mai  1791, 
qu'il  fut  obligé  de  donner  sa  démission  , 
le  parti  jacobin  voulant  le  remplacer  par 
une  de  ses  créatures.  Louis  XVI  lui  confia 
alors  l'éducation  du  Dauphin ,  avec  le 
titre  de  gouverneur}  mais  les  orages  de 
n  9?  Ip  forcèrent  4e  se  retirer  des  affaires 


FLE 

publiques,  et  de  chercher  des  consola- 
tions dans  l'étude.  Il  vécut  dans  l'oubli 
jusqu'en  1793  ,  oii  il  fut  arrêté  :  mais  il 
recouvra  bientôt  sa  liberté.  En  1797  il 
vint  siéger  dans  le  conseil  tles  Anciens ,  et 
lut  exclu  de  cette  assemblée  lors  des  évé- 
nemens  du  1 8  fructidor.  Après  le  1 2  bru- 
maire il  devint  sénateur,  et  termina  sa  car- 
rièrele  1 8  août  1 8 1 0.Ona  de  lui  1  °  Foyage 
fait  par  ordre  du  roi,  c/il768en769,  pour 
éprouver  les  horloges  marittes ,  Paris, 
177  4,2  vol.  in-4 ,  fig.  2°  Découvertes  des 
FrançaU  dans  le  sud-est  de  la  Nouvelle- 
Guinée ,  Paris,  1790,  in-4.  3"  Voyage 
autour  du  monde ,  fait  pendant  les  an- 
nées 1790,  1791  et  1792  par  Etienne 
Marc/iand,  Paris,  1798,  4  vol.  in-4. 
Ce  voyage ,  précédé  d' une  introduc- 
tion savante  sur  l'histoire  de  toutes 
les  navigations  à  la  côte  nord-ouest  de 
l'Amérique,  contient  des  remarques 
très  intéressantes  sur  la  navigation  du 
grand  Océan.  Le  quatrième  vol.  contient 
un  grand  nombre  de  cartes  hydrogra- 
phiques. 

•  FLEURIOT-LESCOT  (  J.  A.  C.  ), 
né  à  Bruxelles  en  1761  ,  fut  obligé  de 
quitter  son  pays ,  lors  des  troubles  du 
Brabant ,  et  vint  se  réfugier  à  Paris ,  où 
il  exerçait  la  profession  d'architecte , 
mais  avec  peu  de  succès.  Au  commence- 
ment de  la  révolution  française  il  se  jeta 
avec  fureur  dans  le  parti  des  démago- 
gues ,  comme  presque  tous  les  étrangers 
qui  se  trouvaient  alors  à  Paris ,  et  devint 
successivement  substitut  de  l'accusateur 
public ,  près  le  tribunal  révolutionnaire, 
commissaire  aux  travaux  publics ,  et 
enfin  maire  de  Paris.  Il  s'était  lait  re- 
marquer au  club  des  Jacobins  ,  et  devait 
son  avancement  et  ses  honneurs  à  Ro- 
bespierre. Lorsque  son  protecteur  fut 
arrêté ,  il  montra  une  fermeté  de  ca- 
ractère qu'on  ne  lui  snpposait  pas ,  et 
fut  le  principal  moteur  de  l'insurrection 
dirigée  à  cette  époque  contre  la  Conven- 
tion. Après  avoir  fait  sonner  le  tocsin  , 
rassemblé  le  corps  municipal ,  garni  de 
troupes  la  place  de  l'Hôtel  de  ville  ,  il 
voulut  exciter  le  peuple  à  prendre  la  dé- 
fense de  Robespierre  qu'il  proclamait  le 
sauveur  dç  h  patriç,  )or;$qu'ii  fut  mii 


hors  de  la  loi ,  et  arrêté  par  Bourdon  de 
l'Oise.  Jugé  bientôt  et  condamné ,  il.;fut 
conduit  à  l'échafaud  ,  le  28  juillet  17  94 
avec  ses  complices,  étant  Agé  d'environ 
33  ans. 

FLEURY  (  Claude  ) ,  originaire  de 
Normandie  né  à  Paris ,  le  6  décembre 
1C40  ,  d'un  avocat  au  conseil ,  suivit  le 
barreau  pendant  9  ans  avec  succès.  L'a- 
mour de  la  retraite  et  de  l'étude  lui 
donnèrent  du  goût  pour  l'état  ecclésia- 
stique. Il  rembra.ssa ,  et  il  en  eut  les 
vertus.  PrécepteuV  du  prince  de  Conti , 
en  1672,  il  le  fut  ensuite  du  comte  de 
Vermandoisen  1680.  Ses  soins  auprès  de 
sou  élève  lui  valurent  l'abbaye  du  Loc- 
Dieu  en  1084 ,  et  la  place  de  sous-pré- 
cepteur des  ducs  de  Bourgogne,  d'Anjou 
et  de  Derry  en  1689.  Associé  de  Fénélon 
dans  ce  noble  emploi ,  il  eut  comme  lui 
l'art  de  faire  aimer  la  vertu  à  ses  élèves 
par  des  leçons  pleines  de  douceur  et  d'a- 
grémens,  et  par  ses  exemples  plus  per- 
suasifs que  ses  leçons.  Louis  XIV  avait 
mis  en  œuvre  ses  talens;  il  sut  les  ré- 
compenser. Il  lui  donna  en  1706  le  riche 
prieuré  d'Argenteuil.  L'abbé  Fleury ,  en 
l'acceptant ,  remit  son  abbaye  du  Lor- 
Dieu.  S'il  avait  ambitionné  de  plus 
grandsbiens  etdes  dignités  plus  relevées, 
il  les  aurait  eus  ;  mais  son  désintéresse- 
ment égalait  ses  autres  vertus.  11  vécut 
solitaire  à  la  cour.  Un  cœiir  plein  de 
droiture ,  des  mœurs  pures ,  une  vie 
simple  ,  laborieuse ,  édifiante  ,  une  mo 
destie  sincère ,  une  candeur  admirable  , 
lui  gagnèrent  les  suffrages  des  courtisans 
même  les  plus  corrompus.  Le  duc  d'Or- 
léans jeta  les  yeux  sur  lui  en  1716  ,  pour 
la  place  de  confesseur  de  Louis  XV.  Ce 
choix  fut  approuvé  de  tout  le#ionde.  On 
n'y  trouva ,  dit  l'abbé  Dorsannc  que  le 
défaut  de  7a  ans.  Fleury  ,  après  avoir 
formé  le  cœur  du  père ,  forma  celui  du 
fils.  Sa  vieillesse  l'obligea  de  se  démettre 
de  cette  place  en  1722.  11  mourut  d'apo- 
plexie l'année  d'après  ,  dans  sa  83*  année. 
Il  était  de  l'académie  française.  Les  ou- 
vrages sortis  de  sa  plume  sont ,  1  "  Mœurs 
des  Israélites  .-  livre  qui  est  entre  les 
mains  de  tous  les  fidèles ,  et  que  l'on 
peat  regarder  comme  le  tableau  le  plus 


FLË  335. 

vrai  de  la  vie  des  saints  de  l'ancien 
Testament.  2°  Mœurs  des  chrétiens ,  ou- 
vrage réuni  avec  le  précédent ,  dans  un 
seul  vol.  in-12.  L'un  peut  servir  d'intro- 
duction à  l'histoire  sacrée ,  et  l'autre  à 
l'histoire  ecclésiastique.  L'onction  y  règne 
avec  un  esprit  de  candeur  et  de  vérité 
qui  gagne  le  lecteur  chrétien  ;  et  avec 
un  discernement,  des  lumières  et  des 
vues  qni  ravissent  le  savant  et  le  phi- 
losophe. 3"  Histoire,  eccle'siastique,  en 
20  vol.  in-12,  et  in-4 .  Le  premier,  pu- 
blié en  1 691 ,  commence  à  l'établissement 
de  l'Eglise  ;  et  le  dernier ,  imprimé  en 
1722,  finit  à  l'an  1414.  Elle  a  été  con- 
tinuée par  le  Père  Fabre,  de  l'Oratoire, 
jusqu'à  l'année  1595,  16  vol.;  en  tout 
36  vol.  in-4  et  in-12.  Elle  a  été  réim- 
primée à  Bruxelles  et  à  Caen.  C'est  ce 
que  irous  avons  de  plus  complet  en  notre 
langue  sur  l'histoire  ecclésiastique.  Xéan- 
moins,  dit  l'abbé  Lenglet  du  Fresnoy, 
ce  sont  plutôt  des  extraits  cousus  l'un 
avec  l'autre,  qu'une  histoire  exacte  et 
bien  suivie.  Cet  écrivain  ,  si  l'on  en  croit 
l'abbé  dcLonguerue  ,  travaillait  son  livre 
à  mesure  qu'il  étudiait  l'histoire  de  la 
religion.  On  sent  qu'il  n'est  pas  maître 
de  sa  matière ,  il  ne  marche  qu'en  trem- 
blant, et  presque  toujours  sur  les  traces 
de  Labbc  et  de  Baronius.  Il  en  était  au 
dernier  volume  de  cet  annaliste  célèbre, 
qu'il  ne  connaissait  encore  que  le  premier 
vol.  de  l'excellente  Critique  AuVhte  Pagi, 
en  4lom.  in-fol.  Aussi  plusieurs  écrivains 
ont  écrit  contre  son  Histoire.  Le  Père  Ho- 
noré de  Sainte-Marie  ,  carme  déchaussé  , 
publia  à  Malines  ,  en  1 727  ,  des  Observa- 
tions sur  l'Histoire  eccle'siastique  de 
Vabbé  Flewy ,  adressées  à  N.  S.  P.  le 
pape  Benoit  XIII ,  et  nosseigneurs  les 
e'vêqucs  ,  in-12,  réimprimées  à  Malines 
en  1729,  et  depuis  (en  1740)  sous  lé 
titre  de  Dénonciation  de  t Histoire  ecclé- 
siastique de  Fleury  ,  à  nosseigneurs  les 
évcques  ;  en  1733,  le  Père  Baudoin  de 
Housta  ,  religieux  augustin  des  Pays-Bas^M 
fit  paraître  à  Malines  :  La  mauvaise  foi 
de  M.  F  leury ,  prouvée  par  plusieurs  pas- 
sages des  saints  Pères,  des  conciles ,  et 
d^ auteurs  ecclésiastiques ,  qu'il  a  omis , 
tronqués ,  ou  infidèlement  traduits  dans 


336  t*LË 

son  Histoife.  En  1736  ,  6ii  îiiipninà  a 
Avignon  des  Observations  theologiques, 
historiques,  critiques ,  etc. ,  sur  l'Histoire 
ecclésiastique  de  feu  M.  Vabbéde  Fleuri/, 
avec  des  dissertations ,  analyses  des 
Pères,  et  autres  pièces  détachées,  2  vol. 
m-4.  L'ouvrage  devait  avoir  8  vol. ,  mais 
la  suite  n'a  pas  vu  le  jour  ;  en  1 802  il 
parut  des  Réflexions  sur  l'Histoire  ec- 
clésiastique de  Fleury ,  attribuées  à 
l'abbé  Rossignol  ;  et ,  à  peu  près  dans  le 
même  temps  M.  Marchetti,  archevêque 
d'Ancyre ,  donna  une  Critique  de  l'His- 
toire ecclésiastique  de  Fleury  ,  qui  fut 
traduite  en  français ,  et  imprimée  dans  la 
Belgique  en  1803  ;  elle  a  été  réimprimée 
à  Besançon  en  1819,  en  2  vol.  in-12. 
Quoiqu'on  reproche  à  l'auteur  de  n'avoir 
pas  assez  ménagé  sou  adversaire ,  et  d'a- 
voir qualifié  quelquefois  .ses  méprises 
avec  une  sévérité  un  peu  rigoureuse ,  elle 
doit  trouver  place  dans  les  bibliothèques, 
à  côté  de  l'histoire  de  Fleury  ;  enfin  ,  en 
1807  ,  Muzzarelli  publia  à  Rome  des  Re- 
marques sur  l'Histoire  ecclésiastique , 
et  spécialement  sur  les  discours  de 
Fleury ,  in-8 ,  traduites  en  français  sur 
la  A'  édition.  Dom  Cellier  ,  et  les  auteurs 
de  l'Histoire  de  P Eglise  gallicane ,  ont 
relevé  plusieurs  erreurs  de  faits  et  de 
dates  dans  Fleury.  Les  Actes  des  Martyrs , 
qu'il  a  soin  de  rapporter  avec  trop  de 
détail ,  devraient  avoir  plus  de  précision, 
et  ne  montrer  que  l'héroïsme  de  leurs 
souffrances ,  sans  nous  présenter  un  pro- 
cès-verbal. Son  stile  est  d'une  simplicité 
touchante  et  d'une  onction  qui  édifie  ; 
mais  il  esttrès  sQuvent négligé  ,  languis- 
sant ,  monotone ,  plein  d'héllénismes  et 
de  latinismes.  he&  Discours  préliminaires 
répandus  dans  cet  ouvrage ,  et  imprimés 
séparément  en  1  vol.  in-12  ,  sont  écrits 
avec  beaucoup  plus  d'élégance  ,  de  pu- 
reté, de  précision  et  de  force»  on  y 
trouve  d'excellentes  choses  ,  mais  il  y  en 
a  aussi  qui  ont  été  critiquées  avec  raison 
{voyez  Honoré  de  Sainte-Marie',  Housta). 
On  remarque  dans  l'auteur  une  telle  pré- 
dilection pour  la  discipline  de  la  primi- 
tive église ,  qu'il  semble  improuver  tout 
ce  qui  n'a  pas  l'empreinte  des  premiers 
siècles.  Comme  si  la  discipline  de  l'Eglise 


n^ctaît  pas  essentiellement  variable ,  ou 
que  l'église  primitive  dût  en  tout  servir 
de  modèle  dans  les  siècles  postérieurs. 
«  On  ne  peut  trop  respecter  la  primitive 
»  église ,  dit  un  auteur  modéré  et  équi- 
»  table  ;  mais  la  haute  idée  qu'on  en  a , 
«  ne  doit  pas  servir  à  nous  faire  mépriser 
>'  l'église  des  derniers  siècles.  Dans  la 
»  primitive  église ,  parmi  beaucoup  de 
»  sainteté  ,  il  ne  laissait  pas  de  se  glisser 
»  des  relàchemens ,  et  dans  l'église  des 
»  derniers  siècles,  parmi  des  relâche- 
»  mens  qui  s'y  sont  glissés ,  il  ne  laisse 
)'  pas  d'y  avoir  encore  beaucoup  de  sain- 
»  teté.  »  Il  y  a  aujourd'hui  plusieurs  abus 
réformés  qui  avaient  subsiste  durant  des 
siècles.  En  comparant  sans  prévention 
l'état  de  l'Eglise  de  nos  jours  dans  toutes 
ses  parties ,  avec  son  état  dans  les  pre- 
miers siècles  ,  on  trouvera  que  les  avan- 
tages qu'elle  n'a  plus  sont  remplacés 
par  d'autres.  Erasme ,  qu'on  peut  citer 
hardiment  en  cette  matière ,  après  avoir 
développé  ce  parallèle  dans  toute  son 
étendue,  conclut  que  si  saint  Paul  reve- 
nait sur  la  terre,  V  état  actuel  de  l'Eglise 
ne  lui  déplairait  pas.  «  Croyez-vous  ,  dit 
»  un  homme  d'une  exacte  logique ,  que 
»  l'Eglise  a  le  droit  de  régler  sa  disci- 
»  pline,  et  sur  la  pénitence,  et  sur  les 
i)  appels  ,  et  sur  les  élections,  et  sur  les 
)>  institutions  canoniques  ,  et  sur  les  ex- 
»  emptions ,  et  sur  tout  autre  sujet  reli- 
»  gicux?  Répondez  oui  ou  non.  Si  vous 
»  dites  oui,  eh' bien  !  attendez  donc 
»  qu'elle  ait  substitué  la  règle  ancienne 
)>  à  la  règle  plus  récente.  Si  vous  dites 
»  non ,  il  est  d'un  imbécile  de  nous  pro- 
»  poser  comme  un  retour  aux  règles  de 
))  l'Eglise ,  ce  que  l'Eglise  n'a  pas  le  droit 
»  de  régler*  «  [voyez  Morin  ,  Thomassin). 
L'on  ne  doit  pas  ignorer  que  ces  Discours 
ont  été  altérés  par  des  mains  étrangères. 
On  en  a  pour  garant  la  première  édition 
du  9"  discours  sur  les  libertés  de  l'église 
gallicane,  qui  se  trouve  le  12''  dans  la 
nouvelle  édition.  On  y  a  ajouté,  dans  les 
éditions  postérieures  des  notes,  sous  pré- 
texte de  corriger  le  texte ,  et  ensuite  on 
y  a  changé  ou  supprimé  tout  ce  qui  ne 
s'accordait  pas  avec  la  doctrine  de  ces 
écrivains  téméraires  ,  qui  ont  cru  pou- 


rLË 

voir  mettre  leur  faux  dans  une  tnoîsson 
qui  ne  leur  appartenait  pas.  On  a  donne 
une  table  des  matières  pour  VHistoire 
ecclésiastique  de  Fleury ,  et  la  continua- 
tion du  Père  Fabre ,  ouvrage  fanatique  , 
et  fruit  de  l'esprit  de  secte  {voyez  Fabre), 
en  1  vol.  in  4,  et  4  vol.  in-12.  La  der- 
nière édition  de  cette  Histoire  est  celle 
de  Nîmes,  en  25  vol.  in-8  ,  1779-1780. 
En  général ,  la  lecture  de  Fleury  ne  fait 
pas  aimer  les  pontifes,  et  elle  a  fourni 
des  armes  à  leurs  ennemis.  Aussi  voit-on 
des  personnes  pieuses  et  éclairées  craindre 
de  recommander  sou  Histoire  aux  jeunes 
gens  ou  aux  femmes  qui  prendraient 
trop  au  pied  de  la  lettre  des  réflexions  pré- 
sentées souvent  un  peu  crûment.  Plu- 
sieurs communautés  ne  lisent  pas  publi- 
quement son  ouvrage,  et  des  théologiens 
qui  n'ont  pas  moins  de  sagesse  que  de 
lumière ,  et  qui  sont  pleins  d'ailleurs  d'es- 
time pour  Fleury^,  ont  souvent  regretté 
qu'il  eût  affaibli  l'utilité  de  son  travail 
par  son  penchant  au  blâme ,  et  par  uu 
manque  de  réserve  qui  les  affligeait  et  les 
étonnait  de  sa  part.  L'Histoire  de  Fleury  a 
été  traduite  en  latin,  et  continuée  par  le 
Père  Alexandre  de  Saint-Jean  de  la  Croix, 
carme  déchaussé.  Celte  continuation  est 
un  répertoire  de  tout  ce  qu'on  a  dit 
d'horreurs  contre  la  société  des  jésuites. 
Les  contes  les  plus  absurdes ,  ceux  même 
que  les  protestans  et  les  philosophes  du 
jour  ont  réfelés ,  y  sont  reproduits  comme 
des  matières  dignes  d'une  histoire  ecclé- 
siastique. Cet  ouvrage  a  été  vivement 
attaqué  par  M.  Mangold,  dans  une  cri- 
tique publiée  à  Augsbourg,  1783-1786, 
3  vol.  in-8.  i°  Institution  au  droit  ecclé- 
siastique ,  en  2  Aol.  in-12  ;  ouvrage  fort 
abrégé,  mais  plein  de  bonnes  choses, 
quoiqu'il  y  en  ait  aussi  quelques-unes 
qui  ont  paru  repréhensibles.  M.  Boucher 
d'Argis  en  donna  une  nouvelle  édition 
en  1764,  enrichie  de  notes,  b"  Catéchisme 
historique,  in-12.  Ouvrage  qui  a  eu  le 
plus  grand  cours;  cependant  tout  n'y 
est  pas  rigoureusement  exact  :  M.  Paquot 
en  a  donné  une  édition  avec  des  notes  et 
quelques  changemens.  Le  ton  en  est  sec, 
sans  onction  et  sans  intérêt.  6°  Traité  du 
choix  et  de  la  méthode  des  études ,  in-12. 
V. 


tm 


55^ 


Ces  deux  derniers  ouvrages  ont  été  tra- 
duits en  espagnol,  de  même  que  les 
Mœurs  des  Israélites.  7"  Devoirs  des 
maîtres  et  des  domestiques ,  in-1 2 , 
estimé.  8°  La  f^iede  la  mère  d^ Arbouse , 
réformatrice  du  Val-de-Grace,  in-12. 
9°  VHistoire  du  droit  français ,  in-1 2 . 
On  la  trouve  aussi  à  la  tête  de  Y  Institu- 
tion de  M.  d^Argou.  10°  Le  Traité  du 
droit  public ,  2  vol.  in-12,  17C9  :  ou- 
vrage posthume  ,  et  auquel  il  ne  mit  pas 
la  dernière  main.  On  a  recueilli  les  Opus- 
cules de  Fleury  à  Nîmes  en  1 7  80,  en  5  vol. 
in-8.  (  Ils  contiennent  tous  les  ouvra- 
ges de  Fleury,  à  l'exception  deVIlistoire 
ecclésiastique.  M.  Emery ,  supérieur- 
général  de  la  congrégation  de  Saint-Sul- 
pice,  a  publié  en  18^7  ,  sous  le  titre  de 
Nouveaux  opuscules,  in-12  ,  quelques 
pièces  inédites  de  Fleury ,  et  surtout  le 
manuscrit  autographe  du  Discours  sur 
les  libertés  de  Féglise  gallicane  ,  qui 
avait  été  imprimé  après  la  mort  de  l'au- 
teur ,  avec  des  notes  violentes  et  er- 
ronées, attribuées  à  Débonnaire,  qui 
provoquèrent  un  arrêt  du  conseil ,  du  9 
septembre  1723  ,  pour  supprimer  l'écrit, 
et  qui  firent  mettre  le  discours  à  l'index, 
par  décret  du  13  février  1729.  C'est  donc 
un  service  important  que  M.  Emery  a 
rendu  à  Fleury,  en  publiant  cette  édition, 
qui  fait  connaître  la  véritable  opinion  de 
ce  .savant  ecclésiastique  sur  un  point 
d'un  si  grand  intérêt.  Le  volume  com- 
mence par  une  préface  rédigée  avec 
beaucoup  d'exactitude  et  de  sagacité ,  où 
M.  Emery  traite  plusieurs  questions, 
discute  quelques  assertions  de  Fleury , 
et  porte  uu  jugement  aussi  solide  que 
modéré  sur  cet  auteur ,  que  les  jansé- 
nistes affectaient  de  compter  au  nombre 
des  partisans  de  leur  doctrine ,  ou  au 
moins  de  leur  opposition  à  la  cour  de 
Rome,  tandis  qu'il  est  prouvé  par  plu- 
sieurs affaires  ,  et  notamment  par  celle 
de  l'évêquede  Saint-Pons,  que  ce  célèbre- 
historien ,  loin  d'approuver  les  entre- 
prises des  parlemens  contre  la  cour  de 
Kome  ,  regrettait  au  contraire  l'espèce 
de  guerre  que  l'on  faisait  au  pape ,  et 
souhaitait  que  l'on  gardât  plus  de  mesure 
à  son  égard  ,   et  surtout  qu'on  pesât  les 


m  FLÈ 

conséquences  de  ces  plaintes ,  A,t  ces 
tléAances ,  de  ces  protestations  et  de  ces 
condamnations  si  fréquentes  dans  l'his- 
toire de  la  Biag^istrature. } 

FLEURY  (Apdré-Hercule  de)  naquit 
à  Lodève  le  22  juin  1 G63  ,  et  fut  mené  à 
Paris,  à  l'âge  de  6  ans.  Il  fit  ses  huma- 
nités au  collège  des  jésuites,  et  sa  phi- 
losophie au  collège  d'Harcourt.  Il  brilla 
dans  l'un  et  dans  l'autre.  Destine  à  l'étal 
ecclésiastique ,  il  fut  chanoine  de  Mont- 
pellier et  docteur  de  .Sorbonne.  Introduit 
à  la  cour,  il  fut  aumônier  de  la  reine  et 
ensuite  du  roi.  Une  figure  agréable ,  un 
esprit  délicat,  une  conversation  assai- 
sonnée d'anecdotes,  une  plaisanterie 
fine ,  lui  gagnèrent  généralement  les 
cœurs.  Ou  sollicita  vivement  pour  lui. 
Louis  XIV  le  nomma  en  1698  à  l'évé- 
ché  de  Fréjus.  «  Je  vous  ai  fait  atten- 
»  dre  long-temps ,  lui  dit  ce  prince,  mais 
»  vous  avez  tant  d'amis,  que  j'ai  voulu 
))  avoir  seul  ce  mérite  auprès  de  vous.  » 
L'évèque  de  Fréjus  était  dans  son  diocèse 
lorsque  l'armée  des  alliés  se  répandit  eu 
Provence.  Il  plut  aux  généraux  ennemis; 
le  duc  de  Savoie  et  le  prince  Eugène  lui 
accordèrent  ce  qu'il  voulut.  La  contri- 
bution fut  modique.  La  ville  de  Fréjus 
n'éprouva  aucun  désordre ,  et  la  campa- 
gne des  environs  fut  épargnée.  Louis 
XIV ,  près  de  mourir ,  le  nomma  précep- 
teur de  Louis  XV.  Successeur  des  Bossuet 
et  des  Fénélon,  dans  l'emploi  important 
de  former  les  rois,  il  s'attacha  comme 
eux  à  cultiver  l'esprit  et  lecœur  du  jeune 
monarque,  et  en  fit  de  bonne  heure  le 
bicn-aime  de  la  France.  En  1726,  il 
fut  fait  cardinal,  et  bientôt  après  son 
élève  le  plaça  à  la  tète  du  ministère  :  il 
avait  alors  plus  de  70  ans.  Le  fardeau 
du  gouvernement  nel'eftraya  point,  et  il 
montra  jusqu'à  près  de  90  ans  une  tête 
saine,  libre  et  capable  d'affaires.  Depuis 
1726  jusqu'à  1740,  tout  prospéra.  Il 
commença  et  termina  glorieusement  la 
guerre  contre  Charles  VI.  Il  obtint  la 
Lorraine  pour  la  France.  Cette  guerre  de 
1733  fut  finie  en  173G,  par  une  paix  qui 
ne  donna  le  calme  à  l'Europe  que  pour 
quelques  années.  Une  nouvelle  guerre, 
en  1 740 ,  vint  troubler  les  derniers  mo- 


mens  du  cardinal  de  Fleury.  Il  mourut 
en  1 743 ,  dans  sa  90*  année,  avec  la  dou- 
leur de  n'avoir  vu  en  cette  dernière 
guerre  que  des  malheurs,  et  des  malheurs 
que  le  public  lui  reprochait ,  peut-être 
mal  à  propos,  car  il  est  certain  que  cette 
guerre  avait  été  entreprise  contre  son 
avis.  Comptant  sur  la  paix,  il  avait  né- 
gligé la  marine;  le  peu  qui  restait  à  la 
France  de  forces  maritimes  fut  détruit 
parles  Anglais.  L'économie  qu'il  mettait 
dans  sa  maison ,  il  voulut ,  autant  qu'il 
était  possible ,  l'introduire  dans  l'admi- 
nistration publique.  C'est  pour  cette  rai- 
son qu'il  ne  fit  pas  construire  des  vais- 
.seaux.  Son  caractère  tranquille  lui  fil  peu 
estimer  et  même  craindre  les  esprits  ac- 
tifs et  profonds  ;  il  les  écarta  trop  des 
grandes  places.  Il  se  défiait  plus  des  hom- 
mes ,  qu'il  ne  cherchait  à  les  connaître. 
L'élévation ,  dit  un  homme  qui  l'avait 
beaucoup  connu,  manquait  à  son  ca- 
ractère. Ce  défaut  tenait  à  ses  vertus,  à 
la  douceur,  à  l'égalité,  à  l'amour  de 
l'ordre  et  de  la  paix.  Il  laissa  tranquille- 
ment la  France  réparer  ses  perles  et  s'en- 
richir par  un  commerce  immense  ,  sans 
faire  aucune  innovation.  S'il  s'opposa  vi- 
vement aux  jansénistes  ,  c'est  qu'il  était 
persuadé  qu'en  matière  de  religion  toute 
nouveauté  était  à  redouter  :  et  que  de 
toutes  les  sectes  qui  ont  déchiré  lEglise, 
celle-ci  était  peut-être  la  plus  dange- 
reuse. «  Un  ministre ,  dit  l'éloquent  au- 
»  leur  de  son  Oraison  funèbre ,  guidé 
)>  par  ces  grandes  vues  de  politique  sage 
»  et  vertueuse ,  n'aurait-il  pas  démenti 
M  tous  ses  principes  s'il  avait  négligé  les 
M  intérêts  de  la  religion ,  affligée  parmi 
»  nous  par  tantde  divisions  fatales?  Jours 
■  de  présomption  et  d'indocilité,  où, 
»  par  un  rafanement  de  souplesse  et  de 
«  dissimulation  profonde ,  l'erreur  vaste 
u  et  hardie  dans  ses  projets,  timide  et 
»  mesurée  dans  ses  démarches,  condamne 
»  l'Eglise,  et  ne  la  quitte  pas;  reconnaît 
»  l'autorité ,  et  ne  plie  pas  ;  dédaigne  le 
»  joug  de  la  subordination ,  et  ne  le  se- 
»  coue  pas;  respecte  les  pasteurs,  et  ne  les 
»  suit  pas;  dénoue  imperceptiblement 
»  les  liens  de  l'unité  ,  et  ne  les  rompt 
»  pas;  sans  paix  et  sans  guerre,  sans  ré- 


ta 

«  volte  et  sans  obéissance.  »  Le  cardinal 
de  Fleury  n'était  pas  porté  à  faire  de  la 
peine  ;  il  n'aimait  ni  à  troubler  la  tran- 
quillité des  autres  ni  qu'on  troublât  la 
sienne.  Il  fut  heureux  autant  qu'un  mi- 
nistre peut  l'être.  Il  conserva  dans  l'âge 
le  plus  avancé,  et  dans  les  embarras  des 
affaires  ,  la  sérénité  et  la  gaieté  de  ses 
premières  années.  Il  faut  bien  se  garder 
de  le  juger  d'après  ce  que  Voltaire  et  les 
philosophes  en  ont  dit.  Le  blâme  et  les 
éloges  de  tels  personnages  doivent  tou- 
jours se  prendre  en  raison  inverse. 

*  FLEURY  (  Marie-Maximilien-Hector 
DK  RossKT  de  ),  de  la  même  famille  que  le 
précédent,  né  en  1770,  fut  arrêté  en 
1793  comme  suspect,  et  renfermé  dans 
la  prison  du  Luxembourg,  où  il  conserva 
sa  gaieté  naturelle ,  et  passait  la  journée 
à  jouer  à  la  balle  ou  aux  barres  ;  mais 
ayant  vu  périr  ou  proscrire  sa  famille , 
le  désespoir  s'empara  de  lui ,  et  il  écrivit 
à  Dumas ,  président  du  tribunal  révolu- 
tioniiaire ,  une  lettre  conçue  en  ces  ter- 
mes :  «  Homme  de  sang  !  égorgeur  !  can- 
»  nibale  !  monstre  !  scélérat  !  tu  as  fait 
»  périr  ma  famille  ;  tu  vas  envoyer  à  l'é- 
»  chafaudceux  qui  paraissent  aujourd'hui 
»  devant  ton  tribunal  ;  tu  peux  me  faire 
»  subir  le  même  sort,  car  jeté  déclare  que 
»  je  partage  leurs  sentimens.  «  Voilà  le 
billet  doux  qu'on  m'écrit ,  dit  Dumas  à 
Fouquier-Tinville ,  dis-moi  ce  qu'il  faut 
y  répondre.  «  Ce  Monsieur  paraît  pressé, 
»  répond  Fouquier ,  il  faut  le  satisfaire.  » 
Aussitôt  deux  gendarmes  vont  prendre 
le  jeune  comte ,  le  placent  sur  le  banc 
des  accusés ,  et  il  est  condamné  à  mort 
avec  cinquante  autres  personnes  qu'il 
n'avait  jamais  vues ,  le  18  juin  1794, 
comme  complice  de  rassassinat  de  Col- 
lot  d'Herbois.  Vêtu  d'une  chemise  rouge, 
comme  ses  compagnons ,  il  fut  conduit  à 
l'échafaudle  même  jour. 

FLINCK  (Godefroij,  peintre,  né  à 
Clèves  eu  1616,  eut  dès  sa  plus  tendre 
jeunesse  une  forte  inclination  pour  le 
dessin.  Ses  parens  l'ayant  mis  chez  un 
peintre ,  il  fit  dans  cet  art  des  progrès 
rapides.  Lorsqu'il  se  vit  en  état  de  tra- 
vailler seul,  il  alla  à  Amsterdam.  Le  goîlt 
générai  était  alors  pour  la  maniçi-e  de 


FLI  33g 

Rembrant;  Flinck  se  mit  pendant  un  au 
sous  la  direction  de  ce  fameux  peintre. 
On  assure  qu'il  ne  lui  fallut  pas  plus  de 
temps  pour  imiter  parfaitement  son  maî- 
tre. Il  abandonna  ensuite  sa  manière , 
pour  prendre  celle  des  Italiens,  qu'il 
saisit  parfaitement.  Les  ouvrages  qu'il  fit 
depuis  lui  acquirent  une  si  grande  estime, 
que  les  bourguemestres  d'Amsterdam  le 
choisirent  preférablement  à  tout  autre 
pour  faire  8  grands  tableaux  historiques, 
et  de  4  demoindregrandeur.  Ilmourutau 
milieu  de  ce  travail,  le  2  décembre  1660, 
âgé  seulement  de  44  ans. 

*  FLIIVDERS  (Matthieu) ,  navigateur 
anglais  ,  né  à  Donington  dans  le  Lincoln- 
shire ,  fit  successivement  plusieurs  voya- 
ges pour  la  reconnaissance  des  côtes  de 
la  Nouvelle-Hollande  ou  Notasie  ,  et  il  en 
écrivit  la  relation  en  anglais  sous  ce  titre  : 
Voyage  aux  terres  australes ,  entre- 
pris pour  compléter  la  découverte  de  ce 
grand  pays  et  exécute'  pendant  les  an- 
nées 1801,  1802  et  1803,  Londres,  1814, 
2  vol.  in-4,  avec  un  atlas.  Flinders  mou- 
rut le  19  juillet  de  la  même  année,  peu 
de  jours  après  avoir  corrigé  la  dernière 
feuille  de  son  ouvrage  et  avant  sa  publi- 
cation. Ce  voyage  ne  renferme  presque 
que  des  détails  nautiques,  et  place  ce  na- 
vigateur au  nombre  des  meilleurs  marins 
de  .son  temps  et  des  hydrographes  les  plus 
distingués. 

*  FLINS  DES  OLIVIERS  (  Claude- 
Marie-Louis-Emmanuel  Carbon  de),  litté- 
rateur français ,  né  à  Reims  en  1757,  était 
conseiller  en  la  cour  des  monnaies  au 
commencement  de  la  révolution  ,  qui  le 
priva  de  sa  charge.  Il  se  livra  alors  tout 
entier  à  la  littérature ,  et  il  prostitua  sa 
plume  à  propager  les  opinions  anarchi- 
ques.  Malgré  ses  efforts,  il  resta  long- 
temps oublié  ,  et  il  n'obtint  qu'en  1 802  , 
par  la  protection  de  M.  de  Fontanes ,  la 
place  de  commissaire  impérial  près  le  tri- 
bunal de  Vervius ,  qu'il  occupa  jusqu'à 
sa  mort ,  arrivée  en  180G.  On  a  de  lui 
1°  Voltaire,  poème  lu  à  la  fête  acadé- 
mique de  la  loge  des  Neuf  Sœurs ,  Paris  ^ 
1779,  in-8.  2°  Fragmens  d'un  poème 
sur  r affranchissement  dés  serfs ,  1781, 
in'8 .  3°  Poèmes  et  discours  en  vers ,  lus 


34o  FLO 

et  mentionnés  aux  séances  publiques  de 
l'académie  française ,  1782,  in-8.  k°  Le 
réveild' E piménide  à  Paris,  ou  Les  étren- 
nes  de  la  liberté',  comédie  en  1  acte  et  en 
vers,  1700,  in-8.  b" Le  mari  directeur,  ou 
Le  déménagement  du  couvent,  comédie 
en  1  acte  en  vers ,  1 792  ;  B°  La  jeune  hôtes- 
se, comédie  en  trois^acteseten  vers,  imitée 
de  \aLocondiera  deGoldoni,  1792,  in-8. 
7°  La  papesse  Jeanne,  comédie  en  1  acte 
représentée  de  1790  à  1793,  etc.  Les 
Voyages  de  V opinion,  Paris,  17  89  :  c'est 
une  espèce  de  journal  dont  il  n'a  paru  que 
cinq  numéros.  On  voit  au  titre  de  la  plu- 
part des  ouvrages  de  Flins  quelle  cause  il 
a  servi  par  ses  écrits.  Il  a  été  l'éditeur  des 
oeuvres  du  chevalier  Berlin,  1785,  2  vol. 
i.i  -8  ,  et  l'un  des  collaborateurs  du  jour- 
nal le  Modérateur ,  à  la  relation  duquel 
présidait  Fontanes,  son  ami. 

*  FLIPART  (Jean-Jacques),  graveur, 
né  à  Paris  en  1 723  ,  fut  élève  de  Laurent 
Cars,  et  devint  membre  de  l'académie 
royale  de  peinture.  Cet  artiste,  qui  avait 
une  très  grande  connaissance  du  dessin, 
a  beaucoup  gravé.  Ses  principales  estam- 
pes sont  une  sainte  famille ,  d'après  Ju- 
les Romain  -,10  paralytique  servi  par  ses 
enfans  ;  V accordée  de  village  ;  le  gâteau 
des  rois ,  tous  trois  d'après  Creuse  ;  une 
tempête  d'après  Vernet  ;  deux  sacrifices, 
d'après  Vien  ;  Adam  et  Eve  ;  NotreSei- 
gneur  à  la  piscine  d'après  Dietrich  ,  etc. 
11  est  mort  le  9  juillet  1782. 

FLODOART  ou  Frodoard,  historien, 
né  à  Epernayen  893  ,  mort  dans  un  mo- 
nastère en  9G6  ,  disciple  de  Rémi  d'Au- 
xerre ,  chanoine  de  Reims ,  et  ensuite 
curé  de  Cormicy  et  de  Coroy ,  a  laissé 
une  Chronique  des  derniers  rois  Carlo- 
vitigens ,  et  une  Histoire  de  Ic'glise  de 
Reims.  Sa  Chronique ,  généralement  esti- 
mée des  savans,  commence  à  l'année 
919,  et  finit  en  966.  Pithouet  Duchesne 
l'ont  publiée ,  elle  ne  contient  exactement 
que  ce  qu'il  a  pu  voir  et  discuter  par  lui- 
même  dans  l'espace  de  sa  vie ,  oii  il  jouis- 
sait de  toute  la  force  de  sa  raison.  Aussi 
y  trouve-t-on  un  choix  si  judicieux  des 
événemenis  intéressans  et  mémorables , 
soit  de  France,  soit  des  pays  voisins, 
çru'on  ne  peut  guère  puiser  à  une  meiU 


FLO 

leure  source.  Son  histoire  comprend  toute 
la  suite  historique  de  l'église  de  Reims  , 
depuis  sa  fondation  jusqu'en  949.  La  meil- 
leure édition  de  cet  ouvrage  curieux  et 
intéressant  pour  les  Rémois ,  est  celle  de 
George Covener,  in-8.  Douai,  1617.  (Ni- 
colas Chesneau  en  a  donné  une  traduction 
française  en  1580,  in-4;  maiselle  était 
fautive  et  incomplète.  M.  Guizot  en  a  pu- 
blié une  nouvelle  dans  sa  Collection  des 
mémoires  relatifs  à  l'histoire  de  France 
tome  5  et  6  ).  On  a  encore  de  lui  les  Vies 
des  saints  de  la  Palestine ,  d'Antioche 
et  d'Italie ,  en  vers  ;  l'Histoire  des  pa  - 
triarches ,  des  apôtres  et  des  souverains 
pontifes  jusqu'à  Léon  Vil.  On  conserve 
cet  ouvrage  en  manuscrit  chez  les  Pères 
carmes  déchaussés  à  Lille  ,  avec  des  dis- 
sertations et  des  notes  du  Père  tlonoré  de 
Sainte-Marie.  Le  stile  de  Flodoardse  res- 
sent du  siècle  où  il  a  écrit. 

*  FLOGEL  (  Charles-Frédéric  ) ,  écri- 
vain allemand,  né  à  Jauer  en  Silésie, 
en  1729  et  mort  en  1788,  fut  professeur 
de  philosophie  à  l'académie  des  jeunes 
nobles  de  Leignitz  ;  il  s'est  attaché  d'une 
manière  toute  particulière  à  l'histoire  de  la 
littérature  et  se  proposait  de  la  suivre  dans 
toutes  ses  parties;  il  est  auteur  1°  d'une 
Introduction  àVart  d^ inventer ,  Breslau  , 
1760,  in-8.  2°  Histoire  de  l'esprit  hu- 
main ,  1765  ,  in-8.  Elle  a  été  traduite  en 
italien  et  publiée  à  Pavie  en  1 788.  3°  His- 
toire de  la  littérature  comique,  1784, 
4  vol.  in-8.  Les  3  premiers  volumes  trai- 
tent du  comique  en  général  et  de  la  satire 
chez  tous  les  peuples  anciens  et  moder- 
nes ;  le  4*  est  destiné  à  la  comédie,  i" His- 
toire du  comique  grotesque  ,  1 788 ,  in-8, 
qui  fut  suivie  de  V Histoire  des  fous  en 
titre  d'office ,  et  de  l'Histoire  du  burles- 
que. Ces  trois  ouvrages  ne  furent  publiés 
qu'après  sa  mort.  Toutes  ces  productions, 
écrites  en  allemand,  jouissent  d'une  ré- 
putation méritée. 

FLONCEL  (  Albert-François  ),  né  à 
Luxembourg  en  1697  ,  avocat  au  parle- 
ment ,  censeur  royal,  de  plusieurs  aca- 
démies d'Italie  ,  s'est  fait  un  nom  par  son 
amour  pour  la  langue  italienne.  Nommé 
secrétaire  d'état  de  la  principauté  de  Mo- 
p^CQ  en  nsi  f  il  joignit  à  cette  chargée 


FLO 

celle  (le  secrétaire  des  affaires  étrangères 
en  1735,  sous  MM.  Amelotet  d'Argenson. 
Il  fut  enlev  é  aux  lettres  en  1773.  Sa  bi- 
bliothèque ,  composée  de  8,000  articles 
de  livres  italiens ,  a  été  vendue  après  sa 
mort.  Elle  a  donné  lieu  d'en  faire  un  ca- 
talogue curieux  j  17  74,2  vol.  in-8.  —  M"'® 
Floncel  (  Jeannfi  Françoise  de  Lavau  ) , 
morte  en  1764,  à  49  ans,  avait  traduit  les 
2  premiers  actes  de  l'Avocat  vénitien 
de  Goldoni,  1760,  ia-12. 

'  FLOOD  (  Henri  ),  membre  du  parle- 
ment d'Angleterre,  né  en  1732,  et  mort 
le  2  décembre  1791,  était  fils  du  chef  de 
justice  du  tribunal  du  banc  du  roi  en  Ir- 
lande :  après  avoir  fait  ses  études  d'une 
manière  peu  brillante  au  collège  de  la 
Trinité  de  Dublin,  puis  à  l'université 
d'Oxford,  il  crut  que  ses  richesses  lui 
donnaient  assez  d'esprit,  et  végéta  quelque 
temps  dans  un  état  d'insouciance  assez 
fréquent  chez  les  fils  de  grands  seigneurs. 
Son  gouverneur ,  le  docteur  Markham  , 
pour  le  détromper,  lui  fit  faire  la  con- 
naissance de  jeunes  gens  fort  instrqits. 
Flood  rougit  alors  de  son  ignorance,  tra- 
vailla et  répara  le  temps  perdu.  Elu  en 
1759,  membre  de  la  chambre  des  com- 
munes en  Irlande,  il  se  distijigua  par  une 
éloquence  brillante ,  et  par  Je  zèle  et  la 
persévérance  qu'il  mit  à  soutenir  toutes 
les  mesures  qu'il  regardait  comme  utiles 
à  son  pays ,  et  qu'il  parvint  presque  tou- 
jours à  faire  adopter.  Son  adhésion  et  son 
opposition  alternatives  aux  mesures  mi- 
nistérielles lui  attirèrent  fréquemment 
le  reproche  de  versatilité.  En  1783,  il  fut 
élu  membre  du  parlement  anglais  pour 
la  ville  de  Winchester,  et  il  représenta  le 
bourg  de  Seaford  dans  la  session  suivante. 
Le  dernier  discours  qu'il  prononça  dans 
le  parlement  anglais  en  1790  avait  pour 
objet  une  réforme  dans  la  représenta- 
tion parlementaire;  et  le  plan  qu'il  pro- 
posa obtint  l'approbation  de  Fox  et  des 
hommes  les  plus  éclairés.  Son  influence 
était  pourtant  affaiblie  dans  les  dernières 
années  de  sa  vie.  Il  mourut  d'une  pleu- 
résie qu'il  contracta  en  travaillant  à  étein- 
dre un  incendie  qui  s'était  manifesté  dans 
un  de  ses  bureaux.  Son  éloquence  était 
remarquable  par  la  force  du  raisonnement 


FLO  34 I 

et  par  la  pureté  et  la  richesse  de  son  sti- 
le ,  plein  d'images  et  d'allusions  classi- 
ques. Il  excellait  surtout  dans  la  réplique, 
et  malheur  à  l'adversaire  qui  provoquait 
ses  sarcarmes.  On  a  imprimé  plusieurs  de 
ses  discours  prononcés  dans  le  parlement, 
parmi  lesquels  on  distingue  celui  sur  le 
traite  de  commerce  avec  la  France , 
1787  ,  in-8.  Dans  ses  momens  de  loisir  il 
s'occupait  aussi  de  poésie.  On  a  de  lui 
des  vers  sur  la  mort  de  F réde'ric,  prince 
de  Galles ,  publiés  dans  la  collection 
d'Oxford  en  1751  ;  une  orfe  sur  la  Renom- 
mée, 1785,  in-8;  la  traduction  de  \dL  pre- 
mière ode  pythique  de  Pindare,  1785. 

*  FLOR  (Roger),  né  à  Tarragone,  le 
14  juillet  1262,  prit  l'habit  des  templiers, 
et  fit  sa  profession  à  Barcelonne ,  dans  la 
maison  de  cet  ordre.  Etant  passé  en  Pa- 
lestine ,  l'époque  des  dernières  croisades 
avec  plusieurs  chevaliers  catalans ,  il  s'é- 
tablit à  Saint-Jean-d'Acre  ;  mais  les  infi- 
dèles ayant  assiégé  cette  place,  elle  fut 
prise  d'assaut  en  1291.  Roger,  ramassant 
alors  tous  las  chevaliers  et  les  chrétiens 
dispersés,  en  forma  une  petite  armée  na- 
vale, avec  laquelle  il  porta  des  secours  et 
des  vivres  aux  armées  chrétiennes,  infesta 
les  côtes  et  battit  souvent  les  flottes  de 
l'ennemi.  Il  se  rendit  ensuite  en  Sicile , 
au  secours  de  Frédéric  d'Aragon,  qui  dis- 
putait la  couronne  de  cette  île  aux  rois 
de  Naples  de  la  maison  d'Anjou,  et  il  con- 
tribua beaucoup,  par  son  intelligence  et 
sa  valeur,  à  le  faire  triompher.  De  là  il 
alla  offrir  ses  services  à  l'empereur  Andro- 
nic ,  attaqué  par  les  Turcs.  Roger  ,  à  la 
tête  de  deux  mille  Catalans  qui  l'avaient 
suivi ,  et  aidé  des  troupes  de  l'empereur, 
remporta  sur  les  Turcs  une  victoire  signa- 
lée, qui  rappela  la  tranquillité  dans  l'em- 
pire. Andronic,  pour  récompenser  ce  ser- 
vice, lur  accorda  sa  nièce  en  mariage  (  il 
n'avait  fait  que  des  vœux  simples  ),  avec 
le  titre  de  César.  Il  combla  également 
d'honneurs  et  de  richesses  les  principaux 
officiers  de  Roger  ,  et  notamment  le  comte 
d'Entenca,  qu'il  éleva  à  la  dignité  de 
Magneduc  (généralissime  des  armées  de 
terre  et  de  mer  ).  Mais  ayant  ensuite 
soupçonné  que  Roger  tramait  avec  ses 
Catalans  un  complot  pour  s'emparer  4q 


342  FLO 

son  trône,  il  le  fit  assassiner  une  nuit  (  le 
23  avril  1 306  ) ,  pendant  que  celui-ci  pas- 
sait à  l'appartement  de  sa  femme.  Le 
comte  d'Eutenca ,  arrêté  en  même  temps, 
fut  condamné  à  mort.  Les  Catalans ,  in- 
dignés ,  se  renfermèrent  dans  Gailipoli , 
d'oii ,  par  de  fréquentes  sorties ,  ils  ven- 
gèrent cruellement  la  mort  de  leur  géné- 
ral ,  et  c'est  à  celte  époque  qu'on  doit 
rapporter  les  dégâts  qu'ils  firent  dans 
l'empire,  et  non  au  temps  de  la  guerre 
contre  les  Turcs,  comme  le  prétendent 
•  quelques  historiens. 

FLORE  ,  ou  Floris  ,  ou  Frakcflore 
(  François  ),  naquit  à  Anvers  en  1520. 
Ce  peintre ,  le  Raphaël  de  la  Flandre , 
était  fils  d'un  tailleur  de  pierres,  et  apprit 
la  sculpture  sous  son  oncle  Claude  Flore 
jusqu'à  l'âge  de  20  ans ,  que  la  réputation 
de  Lambert  Lombard ,  habile  peintre , 
l'attira  à  Liège ,  oii  il  devint  un  des  prin- 
cipaux élèves  de  ce  maître.  De  là  il  alla 
à  Rome ,  oii  il  étudia  l'antique  et  les  ou- 
vrages de  Michel-Auge.  De  retour  dans  sa 
patrie,  il  la  décora  de  ses  tableaux.  Il  di- 
visait la  journée  en  deux  parties  égales, 
l'une  consacrée  à  peindre,  et  l'autre  à 
boire.  Il  aimait  moins  le  jeu  que  le  vin  , 
et  le  vin  moins  que  le  travail.  Il  disait 
ordinairement  :  «  Le  travail  est  ma  vie 
»  et  le  jeu  est  ma  mort.  »  Il  mourut  en 
1570,  à  50  ans. 

FLOREJNT  ou  Florentius  est  le  nom 
de  cinq  comtes  de  Hollande  qui  ont  régné 
de  l'an  1062  à  l'an  1296.  —  Florent  V, 
comte  de  Hollande,  fils  de  Guillaume, 
roi  des  Romains ,  perdit  son  père  dès  sou 
jeune  âge.  Livré  à  divers  tuteurs ,  il  y 
eut  beaucoup  de  divisions  dans  son  état. 
Dès  qu'il  put  gouverner  par  lui-même, 
il  fit  la  guerre  aux  Frisons  rebelles.  Ayant 
enlevé  à  un  gentilhomme ,  nommé  Ge« 
rard  de  Velsen  ,  son  épouse ,  il  fut  tué  et 
percé  de  32  coups  d'épce  par  ce  mari  ir- 
rité. Le  meurtrier  ayant  été  pris  fut  con- 
duit à  Loyde  ,  oîi  on  le  mit  dans  un  ton- 
neau plein  de  clous.  On  le  roula  ainsi  dans 
toute  la  ville ,  et  il  finit  sa  vie  par  ce  cruel 
supplice.  Florent  mourut  en  1296,  après 
avoir  régné  40  ans.  Il  laissa  sept  fils 
et  quatre  filles  de  Beatrix,  fille  de  Gui 
4e  D^mpierre,  cwtç  de  Flandre,  qu'il 


FLO 

avait  ëpousëe  après  la  mort  de  Hugues  de 
Châtillon. 

FLORENT  (  François  ) ,  d'Amai-le- 
Duc  ,  professeur  en  droit  à  Paris  et  à  Or- 
léans, mort  dans  cette  dernière  ville  en 
1650,  a  laissé  des  ouvrages  de  droit, 
que  Doujat  publia  in-4,  en  2  parties,  1679. 
La  vie  de  ce  jurisconsulte ,  également  re- 
commandablc  par  sa  probité  et  ses  lumiè- 
res,  est  à  la  tête  de  ses  œuvres. 

FLOREINT-CHRÉTIEJV.  f^oyezCaRÉ- 

TIEN. 

FLORENTIN  (  S.  ) ,  martyr  de  Cha- 
rollois ,  qu'on  croit  avoir  souffert  la  mort 
pour  la  foi  vers  406. 

FLORENTIN  (  S.  ) ,  premier  abbé  du 
monastère  que  fonda  à  Arles  en  548, 
saint  Aurélien  ,  évêque  de  cette  ville,  se- 
condé par  les  libéralités  du  roi  Childe- 
bert.  11  mourut  le  12  avril  553,  à  l'âge 
de  70  ans,  après  avoir  gouverné  ses  reli- 
gieux avec  autant  de  douceur  que  d'édi- 
fication pendant  cinq  ans  et  demi.  Ses 
reliques  renfermées  dans  une  châsse  d'ar- 
gent sont  aujourd'hui  dans  l'église  pa- 
roissialede  Sainte-Croix  de  la  même  ville. 
On  lit  sur  le  tombeau  de  marbre  où  elles 
étaient  autrefois,  l'épitaphe  du  saint  en 
vers  acrostiches.  C'est  le  premier  exemple 
que  fournisse  l'antiquité  ecclésiastique 
de  ce  genre  de  poésie ,  dont  tout  le  mérite 
consiste  en  une  combinaison ,  qui  ne  peut 
que  donner  des  entraves  au  génie ,  sou- 
vent aux  dépens  de  la  vérité  et  de  la 
raison. 

*  FLOREZ  (  Henri  ) ,  savant  espagnol, 
né  à  Valladolid  le  14  février  1701.  Il  prit 
l'habit  religieux  dans  l'ordre  de  Saint- 
Augustin  en  1715,  et  se  fit  bientôt  dis- 
tinguer par  sa  piété  et  ses  talens.  Après 
avoir  professé  pendant  quelques  années 
la  théologie  ,  il  se  livra  exclusivement  à 
l'étude  de  l'histoire  sacrée  et  profane,  et 
devint  très  fort  dans  l'histoire  des  anti-. 
quités.  Ce  savant  religieux  mourut  à  Ma- 
drid le  2  août  selon  les  uns,  et  le  5  mai  sui- 
vantlesautresderannéel773,  après  avoir 
publié  les  ouvrages  suivans  :  1°  un  Cours 
de  théologie,  en  5  vol.  in-4.  2°  Clavc 
historical,  1743,  in-4,  ouvrage  dans  le 
genre  de  l'art  de  vérifier  les  dates,  etre- 
Biarijuable  par  l'e-xactitude ,  l'ordre  et  1» 


précision  qui  y  régnent.  Ce  livre  fut  réim- 
primé pour  la  8«  fois  en  1794.  3°Za  Es- 
pana  sagrada  ,  o  Theatro  geographico- 
historico  de  la  iglesia  de  Espana ,  3Ia- 
drid,  1747-79,  29  vol.  in-4.  Elle  a  été 
continuée  par  le  Père  Risco ,  qui  publia 
le  30*  vol.,  et  le  Père  Fernandès,  qui 
donna  les  tomes  31  à  34.  Cette  histoire 
de  l'église  d'Espagne  se  fait  remarquer 
par  le  choix  et  la  certitude  des  faits,  et 
par  la  marche  sûre  et  rapide  du  discours. 
4*  Espatia  carpetana.  5°  Mcdallas  de 
las  colonias ,  municipios  y  pucblos  an- 
tiguos  de  Espana,  Madrid,  1757-1773, 
3  vol.  grand  in-4  ,  recueil  qui  eut  un 
grand  succès ,  et  fit  recevoir  l'auteur  as- 
socié correspondant  de  l'académie  royale 
des  Inscriptions  et  belles-lettres  de  Ma- 
drid. 6°  Dissertation  de  la  Cantabria , 
Madrid,  1768,  in-4.  7°  Mcmorias  de  las 
reynas  cathoUcas ,  1770,  2  vol.  in-4. 
8"  Un  Traité  sur  la  botanique ,  et  les 
sciences  naturelles ,  etc. 

*  FLORIAN  (  Jean -Pierre -Claris  , 
chevalier  de  ) ,  littérateur  français ,  né  le 
C  mars  17  55,  dans  le  château  de  Florian 
près  de  Sauve  dans  les  Basses-Cévennes , 
d'une  famille  noble  et  distinguée  dans 
les  armes ,  fut  d'abord  envoyé  dans  une 
pension  à  St.-Hippolyte  où  il  fit  peu  de 
progrès  :  mais  ce  que  le  travail  ne  donna 
point,  l'esprit  naturel  et  d'heureuses  dis- 
positions vinrent  l'apporter ,  et  le  jeuuc 
Florian  se  fit  bientôt  remarquer  par  ses 
saillies  fines  et  délicates.  Le  frère  aîné 
du  père  de  Florian  ,  le  marquis  de  Flo- 
rian, avait  épousé  une  nièce  de  Voltaire  : 
celte  alliance  valut  au  jeune  Florian 
l'honneur  d'être  présenté  de  bonne  heure 
au  philosophe  de  Ferncy,  qui  l'accueilit 
avec  amitié,  lui  donna  des  conseils,  et 
l'engagea  fortement  à  étudier ,  comme 
l'y  engageait  déjà  sa  mère  Guillette  de 
Saigne,  castillane  d'origine,  la  langue  et 
la  littérature  espagnoles,  trop  négligées 
en  France  depuis  Louis  XIV.  Florian  ter- 
mina ses  études  littéraires  à  Ferney,  et  à 
l'âge  de  1 5  ans  il  entra  dans  les  pages  du 
duc  de  Pentiuèvre  qui  eut  toujours  pour 
lui  la  plus  grande  bienveillance.  Après 
avoir  fait  son  éducation  mililaire  ,  sui- 
vant les  usages  du  temps ,  il  alla  à  l'é- 


fLÔ 


â4S 


eole  (l'artillerie  de  Bapaunie  i  Mais  en- 
nuyé des  études  sérieuses  auxquelles  il 
était  astreint ,  il  passa  comme  sous-lieu- 
tenant dans  le  régiment  de  dragons-Pen: 
thièvre,  où  il  ne  tarda  pas  à  devenir  ca- 
pitaine. Bientôt  après ,  il  quitta  le  service 
militaire  et  accepta  la  place  de  gentil- 
homme ordinaire  auprès  du  duc  de  Pen- 
thièvre,  qui  le  traita  presque  en  ami,  et 
le  chargea  de  la  douce  mission  de  distri- 
buer ses  bienfaits ,  c'est-à-dire  ,  comme 
le  disait  le  prince  lui-même,  de  partager 
%e^  bonnes  fortunes.  Fidèleàses  maîtres, 
il  ne  prit  aucune  part  à  la  révolution 
dont  il  déplorait  les  honteux  excès.  Forcé 
comme  noble,  en  1793 ,  de  quitter  Paris , 
il  se  retira  à  Sceaux  où  il  fut  arrêté  par  or- 
dre du  comité  de  sûreté  générale,  et  trans- 
féré à  la  prison  de  la  Bourbe,  dite  alors  le 
port-libre  .-  il  ne   recouvra    sa    liberté 
qu'après  le  9  thermidor  ;  il  retourna  dans 
son  asile  de  Sceaux  ;  mais  sa  captivité  avait 
tellement  dérangé  sa  santé,  la  révolution 
lui   avait  fait  éprouver  tant  d'émotions 
violentes,  qu'il  en  conserva  un  sentiment 
profond  de  tristesse  et  de  mélancolie  qui 
abrégea  ses  jours  et  le  conduisit  au  tom- 
beau, à  l'âge  de  38  ans,  le  13  septembre 
1 794.  La  réputation  de  Florian  n'est  point 
fondée  sur  les  événemens  de  sa  vie  que 
nous  venons  de  raconter  :  militaire  et 
courtisan,  il  ne  fit  rien  dans  ces  deux  po- 
sitions qui  mérite   d'être  raconté  avec 
détail;  mais  ce  fut  un  écrivain  distingué, 
qui  eut  un  genre  à  part,  et  qui  a  fait  des 
ouvrages  originaux  que  tout   le  monde 
a  lus.   Dans  les  garnisons  où  il  s'était 
trouvé ,  lorsqu'il  était  sous  les  drapeaux  , 
il  n'avait  pas  consacré  ses  loisirs ,  comme 
la  plupart  de  ses  camarades ,  à  des  plai- 
sirs sans  utilité,  ou  à  ces  sortes  d'amuse- 
mens  qui  cessent  d'être  frivoles  pour  de- 
venir coupables.   Ses  momens  de  repos 
avaient   été  employés  à  l'étude  ,  et  ils 
tournèrent  au  profit  de  son  talent  qui  ne 
tarda  pas  à  se  révéler.  Son  premier  essai 
fut  un  éloge  de  Louis  XII  qui  ne  fut 
pas  généralement  goûté  :  il  réussit  mieux 
dans  une  épître  à  Voltaire  qui:  venait 
d'obtenir  la  liberté  de  quelques  paysans  : 
cette  pièce  ,  qui  a  pour  titre  Foliaire  ou 
le  Serf  du  Mont  Jura,  fut  couronnée  en 


344  fLO 

1782 ,  par  l'académie  française  ',  son  cgh- 
gue  de  Ruth  dictée  par  la  reconnaissance, 
€t  dédiée  au  duc  de  Penthièvre,  obtint 
l'année  suivante  le  même  honneur.  Flo- 
riau  fit  aussi  plusieurs  pièces  de  théâtre 
qui  lui  valurent  l'honneur  d'être  reçu  en 
1788  membre  de  l'académie  française.  Il 
continua  dès  lors  à  donner  au  public  une 
foule  de  petits  ouvrages  qui  furent  lus 
avec  avidité.  Les  principaux  sont,  ou- 
•  tre  ceux  que  nous  avons  déjà  indiqués  , 
1°  àe&  fables  qu'il  faut  placer  au  des- 
sous de  celles  de  La  Fontaine ,  mais  qui 
l'emportent  de  beaucoup  sur  celles  de 
plusieurs  autres  fabulistes  :  c'est  son  prin- 
cipal titre  de  gloire,  et  l'on  peut  dire  que 
Florian  occupe  en  France  le  second  rang 
parmi  ceux  qui  se  sont  occupés  de  ce 
genre.  Ses  fables  seraient  excellentes ,  si 
elles  étaient  plus  originales  ,  plus  natu- 
relles ,  plus  simples  :  elles  sentent  un 
peu  trop  l'art  ;  elles  n'ont  pas  le  sans^ 
façons  le  laissez  -  aller  ,  l'abandon  de 
celles  du  bon  La  Fontaine.  Il  y  a  quelque- 
fois trop  d'esprit  et  pas  assez  de  profon- 
deur. Du  reste,  la  versification  en  est 
élégante  et  facile,  le  stile  pur  et  correct, 
le  but  toujours  moral  ,  et  l'invention 
heureuse  et  piquante.  Il  donna  à  l'apolo- 
gue une  empreinte  de  sensibilité  qui  se 
décèle  facilement ,  surtout  dans  ce  vers 
de  la  fable  qui  a  pour  titre  :  la  Mère  , 
l'enfant  et  les  sarigues  ■ 

L'asile  le  plus  sûr  esl  le  sein  d'une  nièiL'. 

2"  Son  théâtre  qui  est  composé  de  petites 
pièces,  telles  que  les  deux  billets,  le  bon 
ménage,  le  bonpère,  la  bonne  mère,  etc. , 
qui  toutes  eurent  beaucoup  de  succès  ef 
dans  lesquelles  l'auteur  fit  preuve  d'une 
sensibilité  à  la  fois  douce  et  attrayante. 
On  remarque  aussi  celles  dans  lesquelles 
Arlequin  joue  le  principal  rôle  :  ce 
sont  les  meilleures  et  les  plus  morales. 
Florian  a  rendu  le  plus  grand  service  à 
ce  personnage  si  fameux  de  la  comédie 
italienne,  que  nous  ne  connaissions  que 
par  ses  lazzis  et  ses  balourdises.  Il  l'a  placé 
dans  trois  situations  différentes  :  amant 
dans  l'une,  époux  dans  l'autre,  et  père 
dans  la  d""*  ;  et  dans  chaque  situation  , 
il  le  rend  intéressant  par  sa  naïveté, 
sa  bonté  et  sa  franchise  :  on  dirait  que 


FLO 

l'auteur  l'a  doué  de  ses  qualités  pérsoti'» 
nelles.  Florian  jouait  quelquefois  ce  rôle 
dans  les  sociétés,  et  on  assure  qu'il  était 
aussi  fort  que  Carlin  lui-même.  «  Laharpe 
"  dit  que  la  délicatesse  et  la  finesse ,  qui 
»  n'excluent  pas  le  naturel,  distinguent  et 
»  feront  toujours  aimer  les  petites  comé- 
»  dies  de  Florian ,  et  que  tout  l'esprit 
»  qu'on  y  remarque  n'est  qu'un  coidposé 
»  fort  heureux  de  bon  cœur  ,  de  bon  sens 
«  et  de  bonne   humeur.  »  3"  Estelle  , 
1T88  ;  Galatéc  ,   17  83  :  ce  sont  deux  ro- 
mans dont  le  dernier  a  été  puisé  dans 
Cervantes,  et  dont  le  premier  est  entière- 
ment de  sa  création.  On  peut  dire  que 
Florian  a  créé  le  genre  pastoral  parmi 
nolis.  Dans  Estelle ,  il  retrace  les  beau- 
tés pastorales  et  les  beaux  sites  du  pays 
où  il  est  né.  En  général  ses  tableaux  sont 
frais  et  agréables.  4°  Ses  Nouvelles  qui 
sont  au  nombre  de  six,  et  qui  sont  suivies 
de  ses  Nouvelles  Nouvelles -.  c'est  une  suite 
de  récits  charmans,dans  le  genre  des  Con- 
tes de  Marmontel,  qui  a  loué  lui-même  ces 
productions  de  Florian.  Voici  comment  il 
en  parlait  :  lu  nature  lui  a  dit ,  conte  • 
ce  qui  prouve  que  cet  écrivain  voyait 
dans  son  rival  un  auteur  vraiment  doué 
d'un  talent  original.  Mais  ses  contes  sont 
peu  variés,  tout  y  porte  l'empreinte  de  la 
douceur  et  la  tranquillité  des  champs  : 
aussi  un  critique  disait-il  assez  plaisam- 
ment à  ce  sujet  -.faime  beaucoup  les  ber- 
geries de  M.  de  Florian  :  mais  j'y  vou- 
drais un  loup.  Du  reste  ces  Nouvelles 
sont  écrites  avec  soin  et  élégance,  et  on 
les  lit  avec  plaisir.  b°  Gonzalve  de  Cor- 
doue   f  1791 ,  3  vol.  in-16  ).  Florian  fut 
moins  heureux  dans  le  développement  de 
ce  caractère  :  il  a  fait  de  son  héros  castil- 
lan un  chevalier  français.  On  rencontre 
dans  ce  poème  un  mélange  assez  heureux 
des  actions  guerrières  et  des  mœurs  pas- 
torales :  mais   ce  genre  est  trop  indé- 
terminé ,    et   l'auteur    ne   pouvait  pro- 
duire  un  chef-d'œuvre.  Cependant  cet 
ouvrage  est  précédé  d'un  précis  histori- 
que sur  les  Maures  qui  est  un  excellent 
morceau  d'histoire.  G"  Numa  Pompilius 
(  1786,  2  vol.    in-16  )  est  une  froide 
imitation  de  Télémaque ,  et  a  tous  les 
défauts  de  Gonzalve.  1"  GuiUaumc'TeU  ; 


JFLd 

8°  EUe'zer  et  Nephthali,  poèmes  assez 
mëdiocres ,  dont  le  premier  fut  composé 
en  prison,  et  lui  a  donné  occasion  de  dire 
que  c'était  en  prison  qu'il  chantait  les 
héros  de  la  liberté ,  et  dont  le  second 
fut  écrit  après  son  retour  à  Sceaux.  On 
peut  expliquer  par  ces  circonstances  Ja 
faiblesse  de  ces  deux  ouvrages.  9°  Tra- 
duction de  Don  Quichotte  ,  oeuvre  post- 
hume de  Florian  qui  fut  plutôt  un  abrégé 
qu'une  véritable  traduction  ,  et  qui  tra- 
vestit en  pastorale  française  un  ouvrage 
de  mœui's  chevaleresques  :  cette  critique 
des  ridiculesde  la  chevalerie  est  faible  dans 
Florian,  et  il  est  diflicile  de  bien  compren- 
dre le  but  de  Cervantes  :  sous  plusieurs 
autres  rapports,  cette  traduction  est  pré- 
férable à  celle  de  Filleau  de  St.  Martin. 
Les  ouvrages  de  Florian  ont  été  souvent 
réimprimés  :  la  meilleure  édition  de  ses 
œuvres  complètes ,  &m\\es  de  ses  œu- 
vres posthumes,  a  été  publiée  en  13  vol. 
in-8,  par  M.  Briand,  1 823,  1 824  :  en  géné- 
ral Florian  échoua  dans  le  plan  de  ses 
ouvrages  :  avec  de  la  sensibilité  et  de  la 
grâce  ,  il  manquait  essentiellement  de 
force  et  de  génie  ;  mais  l'élégance  et  la 
facilité  de  son  slile,  et  surtout  cette  dou- 
ceur répandue  dans  tous  ses  écrits,  feront 
toujours  lire  cet  auteur  avec  le  plus 
grand  plaisir.  Get  écrivain  est  du  petit 
nombre  de  ceux  qui,  ne  se  laissant  point 
séduire  aux  illusions  de  l'amour-propre  , 
surent  se  renfermer  dans  les  limites  de 
leurs  talens  :  et  si  les  siens  n'obtinrent 
pas  des  succès  brillans  ,  du  moins  n' en- 
courut-il jamais  une  chute  ridicule.  Flo- 
rian était  l'ami  de  Ducis  ,  qui  fit  hom- 
mage à  sa  mémoire  de  la  Famille  arabe. 
Enfin  ,  pour  terminer ,  nous  dirons  que 
le  produit  des  ouvrages  de  Florian  fut 
consacré  à  payer  les  dettes  de  son  aïeul  : 
ces  derniers  traits  le  font  connaître  tout 
entier. 

*  FLORIDA  -  BLANCA.  (  François- 
Antoine  MoxiNo ,  comte  de),  premier 
ministre  de  Charles  III ,  roi  d'Espagne , 
naquit  eu  11 30,  dans  la  province  de 
Murcie,  oii  son  père  exerçait  l'état  de 
notaire.  Après  avoir  reçu  une  éduca- 
tion soignée  et  fait  d'excellentes  études 
à  Salamanque,  il  embrassa  la  carrière  du 
V. 


FLO  34^ 

barreau.  Son  habileté  lui  mérita  bientôt 
les  places  les  plus  distinguées  de  la  ma- 
gistrature, et  enfin  celle  de  ministre  d'Es- 
pagne à  la  cour  de  Rome.  Diplomate  aussi 
distingué  que  bon  jurisconsulte, il  déploya 
dans  cette  place  des  talens  supérieurs 
qui  furent  la  cause  de  son  élévation.  Il 
devint  premier  ministre  après  la  disgrâce 
du  marquis  d'Esquilache.  Son  admini- 
stration fait  époque  dans  l'histoire  d'Es- 
pagne. Ce  ministre  établit  dans  la  capi- 
tale une  police  exacte ,  fit  respecter  le 
pavillon  espagnol  sur  toutes  les  mers , 
maintint  la  paix  avec  la  France ,  vint  à 
bout  de  terminer  les  dissensions  politi- 
ques de  l'Espagne  et  du  Portugal  par  un 
double  mariage ,  et  rendit  en  quelque 
sorte  à  son  gouvernement  son  antique 
splendeur.  Ce  fut  alors  qu'il  reçut  de  son 
souverain  le  titre  de  Florida-B lança. 
Ami  des  sciences  et  des  arts ,  il  institua 
des  écoles  gratuites  de  toutes  les  sciences, 
en  même  temps  qu'il  embellit  Madrid 
par  les  plus  belles  promenades  et  par 
des  édifices  publics.  Il  fut  moins  heu- 
reux dans  les  guerres  qu'il  fit  entre- 
prendre à  son  souverain.  Celle  d'Alger 
en  1777  et  celle  de  Gibraltar  en  17  82 
coûtèrent  à  l'Espagne  près  de  80,000 
hommes.  Renonçant  enfin  au  projet  de 
punir  les  déprédations  des  corsaires  algé- 
riens ,  et  de  chasser  les  Anglais  de  la  pé- 
ninsule ,  il  tourna  toutes  ses  vues  vers  le 
commerce  et  l'industrie,  et  parvint  ainsi 
a  réparer  les  maux  causés  par  la  guerre. 
Son  opposition  aux  principes  de  la  révo- 
lution française  lui  fit  perdre  sa  place  , 
après  la  mort  de  Charles  III ,  au  com- 
mencement de  1792.  Il  fut  remplacé  par 
le  comte  d'Aranda.  Un  chirurgien  fran- 
çais nommé  Perret  avait  tenté  de  l'as- 
sassiner auparavant ,  et  lui  fit  plusieurs 
blessures  qui  ne  se  trouvèrent  pas  mor- 
telles. Florida-Blanca  fut  d'abord  sim- 
plement relégué  dans  laprovincede  Mur- 
cie ;  mais  ses  ennemis  qui  étaient  nom- 
breux ,  surtout  parmi  la  noblesse  qu'il 
avait  dépouillée  d'une  grande  partie  de 
ses  privilèges  pendant  son  élévation,  par- 
vinrent à  le  faire  enfermer  dans  le  châ- 
teau de  Pampelune,  d'où  il  sortit  après 
plusieurs  mois  de  détention ,  et  se  retira 

22.. 


346  FLO 

dans  séâ  terres  situées  près  de  la  ville  de 
Loria.  'Lors  de  l'invasion  des  Français  en 
Esparpe  en  1808  ,  il  fut  appelé  par  le 
vœi  i  de  la  nation  à  présider  les  Corlès  ; 
iP.ais  il  ne  jouit  pas  long-temps  de  cet 
honneur  :  il  mourut  la  même  année ,  le 
20  novembre,  à  Séville,  âgé  de  78  ans. 
Ses  mœurs  furent  toujours  pures ,  son  ca- 
ractère égal ,  son  cœur  humain.  Il  était 
affable  envers  les  malheureux ,  infatiga- 
ble dans  le  travail,  mais  trop  jaloux  de 
son  autorité;  et  les  grands  qu'il  chercha 
souvent  à  humilier  peuvent  lui  repro- 
cher quelques  injustices.  Il  faut  aussi 
avouer  qu'il  s'attacha  trop  à  enrichir  et 
à  élever  ses  parens.  Un  seul  refusa  tous 
ses  dons ,  et  ce  fut  son  père  qui,  devenu 
veuf,  s'était  consacré  à  l'étal  ecclésiasti- 
que. Son  hls  essaya  inutilement  de  lui 
faire  accepter  un  évêché  et  de  riches 
prébendes  ;  il  se  contenta  de  vivre  des 
revenus  d'un  modique  bénéfice.  Florida 
a  composé  plusieurs  traités  sur  la  juris- 
prudence. 

*  FLORIDIA  (Lucie-iMigliaccio,  du- 
chesse de  ) ,  née  à  Syracuse  en  1772, 
perdit  son  premier  mari  le  prince  de 
Partanna,  en  1812.  Bientôt  elle  fixa  les  re- 
gards de  Ferdinand  I*"" ,  roi  de  tapies , 
et,  lorsque  ce  monarque  perdit  la  reine 
Caroline  d'Autriche ,  son  épouse ,  il  se 
maria  en  secret  et  de  la  main  gauche 
avec  celte  dame  sicilienne,qui  était  alors 
âgée  de  43  ans  ,  et  qui ,  malgré  cet  âge , 
avait  conservé  tous  les  charmes  de  la 
première  jeunesse.  Ce  mariage  ,  célébré 
le  27  novembre  1814  ,  resta  caché  jus- 
qu'au moment  oii  le  roi ,  recouvrant  en 
1816  1e  trône  d'Italie,  revint  à  Naples , 
son  ancienne  capitale.  Alors  il  fut  permis 
à  la  nouvelle  épouse  de  Ferdinand  de 
faire  porter  à  ses  gens  la  livrée  du  roi ,  et 
de  loger  cHe-mcme  au  château.  Le  mo- 
narque voulut  qu'à  l'ancien  titre  de  prin- 
cesse de  Partanna ,  elle  subsiatuàt  celui 
de  duchesse  de  Floridia ,  l'un  des  fiefs  de 
la  maison  Migliaccio.  Il  n'eut  point  été 
question  dans  cette  biographie  de  celte 
épouse  de  Ferdinand  qui  ne  joua  aucun 
rôle  politique,  si  elle  n'avait  présenté 
l'exemple  rare  d'un  désintéressement  et 
d'une  vertu   digne  d'éloge.  Douée  des 


FLO 

qualités  les  plus  aimables ,  elle  dut  à  sa 
beauté  son  élévation  extraordinaire.  Pla- 
cée à  côté  du  trône ,  elle  eut  toujours  le 
sentiment  de  sa  position ,  et  jamais  on 
ne  la  vit  se  mêler  à  une  intrigue ,  ni  cher- 
cher à  gouverner  l'état  :  ce  ne  fut  point 
une  Du  Barry,  et  c'est  là  ce  qui  la  recom- 
mande le  plus  à  nos  yeux.  On  assure 
même  qu'il  lui  arrivait  souvent  de  plai- 
santer sur  son  ancien  état ,  et  de  se  rap- 
peler avec  ses  plus  intimes  amis  les  pri- 
vations auxquelles  elle  s'était  vue  exposée 
souvent  dans  la  maison  ruinée  de  sou  pre- 
mier mari.  Cependant  si,  comme  femme, 
elle  était  exemple  de  vanité  ,  elle  avait , 
comme  mère,  de  l'ambition  pour  ses  en- 
fans  ;  elle  parvint  à  les  faire  placer  avan- 
tageusement dans  les  postes  les  plus  éle- 
vés de  l'état.  Comblée  des  bienfaits  du 
roi ,  la  duchesse  de  Floridia  n'a  pas  sur- 
vécu long-temps  à  Ferdinand.  Atteinte 
d'une  maladie  inflammatoire ,  elle  est 
morte  à  Naples  le  29  avril  1826. 

FLORIDUS  (François),  de  Donadeo 
dans  la  terre  de  Sabine ,  mort  en  1547, 
est  auteur  d'un  ouvrage  inlilulé  Lectiones 
subcisii'ce,  Franciorl ,  1602,  in-8,  qui 
lui  fit  un  nom. 

FLORIEN,  Marcus-Antonius-Flo- 
rianus,  frère  utérin  de  l'empereur  Tacite, 
se  fit,  après  .sa  mort  en  276,  proclamer 
empereur  par  l'armée  de  Cilicie ,  mais 
celle  d'Orient  ayant  forcé  Probus  d'ac- 
cepter l'empire,  il  se  prépara  à  marcher 
contre  lui.  Probus  vint  à  sa  rencontre, 
et  refusa  de  composer  avec  Florien ,  qui 
fut  tué  par  ses  soldats,  2  mois  après  qu'il 
eut  pris  la  pourpre.  Ce  prince  avait  de 
l'ambition,  mais  point  de  valeur. 

FLORIMOND  DE  RÉMOIND,  né  à 
Agen,  fut  conseiller  au  parlement  de  Bor- 
deaux en  1570  ,  et  mourut  en  1602.  Il  se 
distingua  moins  comme  magistrat ,  que 
comme  auteur.  11  avait  eu  d'abord  du 
penchant  pour  les  erreurs  de  Calvin;  mais 
il  les  réfuta  ensuite  avec  zèle.  Les  nova- 
teurs, qui  ne  l'aimaient  point,  disaient 
que  c'était  «  un  homme  qui  rend  des  ar* 
M  rets  sans  conscience ,  fait  des  livres 
»  sans  science  ,  et  bâtit  sans  argent  :  » 
turlupinade  qui  ne  prouve  autre  chose 
que  la  faiblesse  et  le  mauvais  goût  de 


FLO 

ceux  qui  se  battaient  avec  de  telles  armes. 
On  a  de  lui  1°  plusieurs  traités,  parmi 
lesquels  on  distingue  celui  de  l'Ante 
christ  :  ouvrage  d'un  but  plus  étendu  que 
le  titre  ne  semble  annoncer,  et  qui  traite 
de  divers  objets  qui  combattent  la  sain- 
teté du  cbristianisme.  Il  y  a  des  faits  cu- 
rieux et  instructifs.  2°  De  Forigine  des 
he're'sies,  2  vol.  in-4  :  livre  qui  manque 
quelquefois  de  critique ,  mais  k  qui ,  dit 
»  l'abbé  Langlet,  n'est  pas  à  mépriser, 
»  et  oîi  il  y  a  bien  des  recbercbes.  »  Le 
même  Langlet  l'attribue  au  P.  Richeome. 

FLORIN ,  prêtre  de  l'église  romaine 
au  2°  siècle,  fut  déposé  du  sacerdoce  pour 
avoir  enseigné  des  erreurs ,  entre  autres 
que  Dieu  est  l'auteur  du  mal.  Quelques 
écrivains  l'accusent  encore  d'avoir  sou- 
tenu qire  les  cboses  défendues  par  la  loi 
de  Dieu  ne  sont  point  mauvaises  en  elles- 
mêmes  ;  mais  seulement  à  cause  de  la  dé- 
fense :  ce  qui  ne  peut  être  vrai  qu'à  l'é- 
gard de  quelques  défenses  particulières 
et  des  lois  purement  positives.  Il  avait 
été  disciple  de  saint  Polycarpe  avec  saint 
Irenée ,  mais  il  ne  fut  pas  fidèle  à  garder 
la  doctrine  de  son  maître.  Saint  Irenée 
lui  écrivit  pour  le  faire  revenir  de  ses 
erreurs  ;  Eusèbe  nous  a  conservé  un  frag- 
ment de  cette  lettre  dans  son  Hist.  ceci., 
liv.  5,  chap.  20.  Saint  Irenée  composa 
enfin  contre  lui  ses  livres  :  Ve  la  monar- 
chie et  de  l'ogdoadc  que  nous  n'avons 
plus. 

*  FLORIO  (Daniel ,  comte  de) ,  poêle 
italien,  né  à  Udine  en  1710,  d'une  fa- 
mille ancienne  et  distinguée,  s'appliqua  à 
l'étude  des  letttes  avec  tant  de  succès,  que 
son  nom  fut  bientôt  répandu  dans  toute 
l'Italie.  Ses  parens  l'avaient  envoyé  à  1 8 
ans  à  l'université  de  Padoue.  Ses  premiers 
essais  dans  la  poésie  lyrique  lui  valurent 
plus  d'une  fois  les  éloges  du  célèbre  Mé- 
tastase :  ce  sont  des  c«n^rt/e5.  Mais  il  réus- 
sissait particulièrement  dans  la  compo- 
sition de  sespetites  pièces  de  circonstance 
Il  avait  recueilli  lui-même  ses  différentes 
productions  sous  ce  titre  ;  Poésie  varie, 
Udine,  1777,  2  vol.  in-4,  ornés  de  vi- 
gnettes. On  y  trouve  des  images  agréa- 
bles et  des  pensées  délicates,  exprimées 
pvçc  autant  de  naturel  que  de  facilité.  Oa 


FLO  347 

peut  dire  qu'il  mérita  presque  tous  les 
éloges  que  ses  compatriotes  lui  ont  pro- 
digués. Il  avait  commencé  un  poème  in- 
titulé la  Jérusalem  détruite,  qui  ne  pa- 
raît pas  avoir  été  achevé.  Le  comte  de 
Florio  est  mort  en  1789. 

FLORIOT  (Pierre),  prêtre  du  diocèse 
de  Langres,  confesseur  des  religieuses 
de  Port-Royal ,  mort  en  1691  ,  à  87  ans , 
s'est  fait  un  nom  par  la  Morale  du  Pa- 
ter, gros  in-4  ,  1709  ,  dans  lequel  il  pa- 
raphrase cette  belle  prière  d'une  manière 
qui  lui  a  causé  du  désagrément.  On  a  en- 
core de  lui  des  Homélies ,  in-4 ,  et  uu 
Traité  de  la  messe  de  paroisse ,  in-8  , 
qu'on  peut  regarder  comme  un  bon  ou- 
vrage de  morale,  et  un  médiocre  traité 
de  liturgie. 

*FLORIS,  prêtre:  aucune  biographie 
ne  donne  des  détails  sur  son  compte  ; 
cependant  son  ouvrage  intitulé  :  Les 
droits  de  la  vraie  religion ,  soutenus 
contre  les  maximes  de  la  nouvelle 
philosophie,  1774  ,  2  vol.  in-12  ,  lui  mé- 
rite une  place  distinguée  parmi  les  dé- 
fenseurs de  la  religion. 

FLORIS  (François).  Voyez.  Flore, 
peintre. 

FLORUS  (L.  Annaeus  Julius),  histo- 
rien latin ,  de  la  famille  des  Annéens , 
qui  avait  produit  Sénèque  et  Lucain , 
composa ,  environ  200  ans  après  Au- 
guste ,  un  Abrégé  de  ï  Histoireromaine, 
en  4  livres,  dont  il  y  a  plusieurs  éditions. 
Les  meilleures  sont  celles  d'Elzévir , 
1638,  in-12;  de  Grœvius,  Amsterdam, 
1702,  in-8  :  c'est  dommage  que  dans 
cette  édition  les  médailles  y  soient  gra- 
vées à  contre-sens ,  ce  qui  gâte  souvent 
l'explication  qu'on  en  a  mise  au  bas  ;  de 
jjrae  Dacier ,  adusum  dclphini  ,  1 67 4  ou 
1726,  in-i  ;  de  Uuker,  1744,  in-8.  Il  y 
a  plusieurs  traductions  françaises  deFlo- 
rus  ;  la  meilleure  est  celle  de  l'abbé  Paul, 
Paris,  1774,  in-12.  On  trouve  dans  cet 
ouvrage  d*;  l'élégance  et  de  la  noblesse; 
mais  elles  dégénèrent  en  enflure.  Dans 
un  abrégé  qui  doit  être  extrêmement  sim- 
ple ,  Florus  prendle  ton  de  déclaraateur , 
«comme  s'il  voulait,  dit  M.  Crevier, 
»  compenser  par  le  faste  des  manières 
■>}  et  du  dehors  j  l'appauvrissement  d'un 


348  FLO 

1)  sujet  réduit  en  squelette.  C'est  lui  qui 
»  paraît  le  premier  avoir  donné  cours 
M  aux  abrégés,  si  commodes  pour  la  pa- 
»  resse,  et  si  propres  à  faire  des  demi-sa- 
»  vans.  »  L'on  ne  peut  cependant  discon- 
venir qu'il  n'y  ait  de  belles  sentences, 
des  expressions  pleines  de  dignité  et  d'é- 
nergie. Florus  était  poète.  Spartien  rap- 
porte que  l'empereur  Adrien  entra  en  lice 
avec  lui,  et  qu'ils  firent  des  vers  l'un 
contre  l'autre.  L'empereur  reprochait  au 
poète  d'aimer  le  cabaret  ;  et  le  poète  n'eut 
gardede  risposter  tout  ce  qu'il  savait  sur 
le  compte  de  son  rival. 

FLORUS  (Drepanius) ,  fameux  diacre 
de  l'église  de  Lyon,  au  9*  siècle,  dont 
on  a  un  écrit  sur  la  prédestination.  Il 
laissa  d'autres  ouvrages,  parmi  lesquels 
on  remarque  une  explication  du  canon 
de  la  messe ,  où  il  donne  trop  dans  le 
sens  mystique ,  et  ne  s'attache  pas  assez 
au  sens  littéral  ;  et  un  Commentaire  sur 
saint  Paul.  On  trouve  ses  dififérens  ou- 
vrages dans  quelques  éditions  du  véné- 
rable Bède ,  et  dans  la  Bibliothèque  des 
Pères. 

FLOUR  (  Saint  ) ,  premier  évêque  de 
Lodève ,  martyrisé  en  Auvergne  l'an 
389  ,  donna  son  nom  à  la  ville  de  Saint- 
Flour. 

•  FLOYER  (  Sir  John  ) ,  célèbre  méde- 
cin anglais,  né  vers  l'an  1649,  mort  en 
1734,  à  Litchfield  oii  il  exerçait  son  art 
avec  la  plus  grande  distinction.  Il  était 
grand  partisan  des  bains  froids,  et  les  or- 
donnait particulièrement  dans  les  rhuma- 
tismes chroniques  et  autres  maladies  ner- 
veuses. Ses  principaux  ouvrages  sont, 
1°  La  pierre  de  touche  de  la  me'decine , 
Londres,  1687,  in-8.  2"  Recherche  sur 
l'usage  raisonnable  des  bains ,  Londres, 
1697 ,  in-8,  qu'il  a  reproduit  en  grande 
partie  dans,  son  Essai  pour  rétablir  le 
baptême  des  enfans  par  immersion , 
1724  ,  in-4.  Cet  ouvrage,  qui  a  été  traduit 
eu  allemand ,  fixa  particulièrement  l'at- 
tention des  anabaptistes.  3°  Traité  sur 
Pasthme,  Londres,  1G98  et  1717  ,  in-8. 
Il  a  été  traduit  en  français  par  Jault , 
1761  et  1785,  in-12,  et  en  allemand  par 
Scherf,  Lcipsick,  1782,  in-8.  4"  L'hor- 
loge du  pouls  des  médecins ,  Londres , 


FOE 

1707  et  1710,  2  vol.  în-8 ,  traduit  en 
italien,  Venise,  1715,  in-4.  5°  Medicina 
geronomica  ou  VArt  de  conserver  la 
santé  des  vieillards,  avec  un  supplément 
à  l'usage  de  Phuile  et  des  onctions,  et  une 
lettre  sur  le  régime  à  suivre  dans  la  jeu- . 
nesse,  Londres,  1724. 

FLUDD  ou  De  Fluctibus  (Robert), 
dominicain  écossais ,  naquit  à  Milgale  , 
dans  la  province  de  Kent,  en  1574  ,  re- 
çut le  bonnet  de  docteur  en  médecine  à 
Oxford ,  et  exerça  cette  profession  à  Lon- 
dres ,  où  il  mourut  le  8  septembre  1637. 
Il  fut  surnommé  le  Chercheur,  parce 
qu'il  fit  beaucoup  de  recherches  dans  les 
mathématiques  et  dans  la  philosophie. 
Il  a  laissé  des  ouvrages  de  médecine ,  de 
philosophie,  d'alchimie,  dont  1» collec- 
tion fut  imprimée  à  Oppenheim  et  à 
Goude  en  1617  et  années  suivantes,  5  vol. 
in-fol.  Les  principaux  sont  :  Apologie  des 
frères  de  la  Rose-Croix,  Leyde,  1616, 
in-8 ,  latin  ;  Tractatus  theologico-phi- 
losophicus  de  vita,  morte  et  resurrec- 
tione ,  1617,  in-8  ;  Utriusque  Cosmi 
metaphysica  physica  et  technica  hitto- 
rica;  f^eritatis  proscenium;  Sophiœ 
cum  moria  certamen  ;  Summum  bono- 
rum  ,  quod  est  verum  magiœ  ,  cabales , 
alchymiœ  ,  fratrum  Roseœ  Crucis  ve- 
rorum  verœ subjectum-,  Philosophia  mo- 
saica  ;  A mphitheatrum  anatomiœ  ;■  Phi- 
losophia sacra ,  etc.  Il  n'civt  guère  possi- 
ble de  reconnaître  dans  tous  ces  ouvrages, 
une  tête  constamment  saine  ;  il  y  a  des 
choses  profondément  méditées,  il  y  en  a 
de  chimériques  et  de  ridicules.  Son  lan- 
gage entortillé  et  mystérieux  l'a  fait  ac- 
cuser de  magie  par  ceux  qui  lui  suppo- 
saient plus  de  malice  qu'il  n'en  avait  en 
effet. 

FLURANCE.  Foyez  Rivaux. 

FOÉ.  royez  FÉ. 

*  FOÉ  (Daniel),  poète  anglais,  naquit  à 
Londres  en  1663  d'un  simple  artisan.  Il 
fut  d'abord  destiné  par  ses  parens  à  une 
profession  mécanique ,  qu'il  abandonna 
bientôt  pour  se  livrer  à  son  penchant 
pour  la  poésie.  Il  épousa  avec  vivacité 
les  intérêts  du  roi  Guillaume,  prince 
d'Orange,  essuya  divers  chagrins  qu'il 
s'attira  par  sa  plume  satirique  :  eu  môme 


FOE 

temps  il  continuait  son  état  de  bonnetier, 
faisait  des  pamphlets ,  des  romans  et  des 
vers.  Condamné  à  2  ans  de  prison,  au  pi- 
lori et  à  une  forte  amende ,  il  écrivit  un 
hymne  au  pilori.  C'est  pendant  sa  cap- 
tivité qu'il  commença  la  Revue  (1704), 
gui  donna  naissance  au  Spectateur  d'Ad- 
disson.  Employé  ensuite  par  Ja  reine 
Anne  à  plusieurs  missions  secrètes,  il  vou- 
lut faire  encore  des  brochures  politiques 
qui  lui  attirèrent  de  nouveaux  désagré- 
inens.  Il  résolut  de  ne  se  livrer  qu'à  la  lit- 
térature. Il  tint  parole ,  eut  plus  de  re- 
pos et  acquit  une  réputation  durable;  il 
mourut  en  1731.  On  a  de  lui  1°  Les 
Aventures  de  Bobinson  Crusnt  en  an- 
glais ,  1 7 1 9  ;  il  a  été  traduit  dès  1 720  par 
St. -Hyacinthe  et  par  Van-Eften  qui  a  été 
faussement  attribué  à  Richard  Steele, 
l'un  des  écrivains  du  Spectateur  -.  ce  ro- 
man est  écrit  d'une  manière  si  naturelle, 
que  long-temps  il  a  passé  pour  une  re- 
lation exacte  d'un  voyageur  véridique 
[voyez^KS  Effen).  M.  Feutry,  avocat 
au  parlement  de  Douai ,  a  donné  une 
édition  de  cet  ouvrage  en  1766  ,  2  vol. 
in-12  ;  il  l'a  abrégé  sans  en  altérer  le  ca- 
t  ractère.  Il  avait  promis  d'en  retrancher 
quelques  déclamations  indécentes  que 
l'auteur  anglican  s'était  permises  contre 
la  religion  catholique  et  ses  ministres  ; 
mais  il  n'a  que  faiblement  rempli  sa  pro- 
messe. L'édition  de  Liège  ,  1G85,  4  vol. 
in-1 2 ,  est  plus  exacte ,  quant  à  ce  point, 
et  remplit  mieux  les  intentions  des  lec- 
teurs catholiques.  Cette  édition  est  en- 
core remarquable  par  l'Histoire  curieuse 
et  intéressante  d'Alexandre  Seikirk,  qu'on 
voit  à  la  fin  du  quatrième  tome.  2"  Le 
vrai  Anglais  de  naissance  ,  poème  fait 
à  l'occasion  de  la  révolution  qui  plaça 
Guillaume  sur  le  trône  de  son  beau-père, 
en  réponse  à  l'ouvrage  intitulé  :  Les 
étrangers.  3"  La  réforme  des  moeurs , 
oii  il  attaque  ouvertement  les  personnes 
du  plus  haut  rang  qui  employaient  leur 
aulorilé  à  soulenir  l'impiété  et  la  disso- 
lution. 4"  Essai  sur  le  pouvoir  du  corps 
collectif  du  peuple  anglais.  Cet  ouvrage 
est  en  faveur  de  la  chambre  des  commu- 
nes. 5°  Le  court  moyen  contre  les  non- 
conformistes,  qui  lui  attira  une  punition 


FOE  349 

publique  plus  ignominieuse  que  cruelle. 
(i°  De  jure  divino ,  poème  latin.  7"  Un 
Plan  de  commerce.  8°  Le  commerçant 
anglais.  9°  L'instructeur  de  famille, 
2  vol.  18°  Plusieurs  ec/iïy  politiques  qui 
n'ont  guère  syi-vécu  aux  événemens  qui 
les  avaient  fait  naître  ;  et  quelques  au- 
tres oii  il  développe  des  idées  qui ,  pour 
être  aujourd'hui  accueillies,  n'en  sont 
pas  plus  solides  ni  plus  conformes  aux 
saines  notions. 

FŒDOR  ou  FÉDOR  ,  fils  aîné  du  czar 
Alexis ,  monta  sur  le  trône  de  Russie  en 
1676.  Il  avait  été  élevé  pour  la  guerre  et 
pour  le  cabinet.  Dès  qu'il  eut  soumis  l'U- 
kraine révoltée,  et  qu'il  eut  fait  la  paix 
avec  les  Turcs,  il  s'occupa  du  soin  de 
policer  ses  états.  Il  encouragea  plusieurs 
citoyens  de  Moscou  à  bâtir  des  maisons 
de  pierres  à  la  place  des  chaumières 
qu'ils  habitaient.  Il  agrandit  cette  capi- 
tale. Il  fit  des  réglemens  de  police  géné- 
rale ;  mais  en  voulant  réformer  les 
boyards ,  il  les  indisposa  contre  lui.  Il 
méditait  de  plus  grands  chaiigemens , 
lorsqu'il  mourut  sans  enfans  en  1682,  à 
la  fleur  de  son  âge.  Son  second  frère, 
Pierre ,  qui  n'était  âgé  que  de  dix  ans ,  et 
qui  faisait  déjà  concevoir  de  grandes 
espérances,  régna  après  lui,  et  acheva 
ce  que  Fœdor  avait  commencé. 

FOES  ou  FoEsius  (Anutius),  médecin 
de  Metz,  mort  en  1595,  à  68  ans,  était 
très  versé  dans  la  langue  grecque.  Son 
amour  pour  l'étude  l'empêcha  de  s'atta- 
cher à  des  princes  qui  auraient  pu  faire 
sa  fortune.  Il  est  auteur  d'une  traduction 
très  fidèle  des  OEuvres  d' Hippocrate 
en  latin ,  accompagnées  de  corrections 
dans  le  texte,  et  ornées  de  scholies,  Ge- 
nève, 1657  ,  2  vol.  in-fol.  On  a  encore 
de  lui  une  espèce  de  Dictionnaire  sur 
Hippocrate,  à  Francfort,  1588,in-foI. 

*  FOGGllNI  (Pierre-François),  prélat 
romain  ,  préfet  de  la  bibliothèque  du  Va- 
tican, né  à  Florence  en  1713.  fut  reçu 
docteur  en  théologie  à  Pise.  Son  père,  cé- 
lèbre architecte  lui  donna  le  goût  des 
arts  :  mais  le  jeune  Fog'gini  avait  préféré 
de  bonne  heure  l'état  ecclésiastique.  Le 
prélat  Bottari ,  son  concitoyen  ,  l'ayant 
invité  à  venir  se  fixer  à  Rome,  il  s'y  ren- 


35o 


FOG 


dit,  et  Benoît  XIV  lui  donna  une  place 
dans  l'académie  d'histoire  pontificale 
qu'il  avait  établie.  Le  cardinal  Chéri- 
Marie  Corsini  le  nomma  ensuite  à  un 
bénéfice  dans  l'église  de  St.-Jean-de-La- 
tran,  et  le  fit  son  théologien.  Sous  Clé- 
ment XIV,  il  fut  employé  dans  les  affaires 
qui  concernaient  les  jésuites,  et  il  paraît 
qu'il  neleurfut  pas  favorable.  Pie  Vile  fit 
depuis  son  camérier  secret  à  la  mort  d'E- 
tienne Evode  Assemanie,  archevêque  d'A- 
pamée,  et  préfet  de  la  bibliothèque  vati- 
cane.  Il  mourut  d'apoplexie  le  2  juin  1 7  8  3 . 
D  a  laissé  un  grand  nombre  d'ouvrages, 
les  principaux  sont  1  "  des  Thèses  histori- 
ques et  polémiques  contre  les  quatre  ar- 
ticles du  clergé  de  France  de  1682.  On 
dit  qu'il  changea  depuis  de  sentiment 
sur  ce  point.  2°  P.  Virgilii  Maronis 
codex  antiquissimus  à  fiufio  Turcio 
Aproniano  distinctus  et  emendatus ,  Flo- 
rence, 1741  ,  in-4.  Cette  édition  est  exé- 
cutée en  lettres  onciales  à  l'instar  du 
manuscrit.  3'V  Accord  admirable  des 
Pères  de  l'Eglise  ,  sur  le  petit  nombre 
des  adultes  qui  doivent  être  sauvés,  en 
latin,  1762.  Lequeux  en  donna  une  tra- 
duction française  en  1760.  4" Une  collec- 
tion d'écrits  des  Pères  sur  les  matières 
delà  grâce,  1754-71  ,  8  vol. 

FOGLIETA  (  Uberto  ),  savant  génois, 
eut  part  aux  troubles  qui  s'élevèrent  à 
Gènes,  et  fut  envoyé  en  exil.  Pour  se 
consoler  des  tribulations  qu'il  avait  es- 
suyées dans  le  monde  ,  il  ne  voulut  avoir 
de  commerce  qu'avec  les  lettres  Le  car- 
dinal d'Est  le  reçut  dans  sa  maison  à 
Rome.  Il  y  mourut  en  1581 ,  âgé  de  63 
ans.  Parmi  les  ouvrages  sortis  de  sa  plu- 
me ,  on  distingue  1°  son  traité  i?e  r«- 
tione  scribcndœ  historiée,  aussi  judicieux 
que  bien  écrit.  2°  Historia  Genuensium , 
1585,  in-fol.  ,  fidèle,  élégante  et  peu 
commune.  François  Serdonati  en  a  fait 
nue  traduction  en  italien:  elle  est  estimée. 
3"  Tumultus  Neapolitani,  1571,  in-4. 
4°  Elogia  clarorum  Ligurum,  in-4. 
It"  De  sacro  fœdere  in  Sclimum ,  in-4 . 
6"  De  Unguœ  usu  et  prœstantiâ,  1723  , 
in-8.  T"  De  causis  magnitudinis  Tur- 
carum  imperii,  in-8.  8"  De  similitudine 
normcp  PoK&fVwfpe,  daps  ses  Opuscules, 


FOH 

Rome,  1579,  in-4.  9°  Délia  republica 
di  Genoa,  in-8  ;  ouvrage  intéressant  pour 
ceux  qui  veulent  connaître  cette  répu- 
blique, du  moins  telle  qu'elle  était  dans 
le  16*  siècle. 

FOHÉ.  roycz  FÉ. 

FOHI,  premier  roi  delà  Chine,  régla, 
dit-on,  les  mœurs  desChinois,  alors  bar- 
bares ,  et  leur  donna  des  lois.  On  pré- 
tend qu'il  fit  plus,  qu'il  dressa  des  tables 
astronomiques  :  mais  vu  l'ignorance  des 
Chinois  modernes  en  fait  d'astiouomie, 
il  est  peu  vraisemblable  que  leurs  fon- 
dateurs aient  été  fort  versés  dans  cette 
science.  De  mauvais  chronologistes  ont 
dit  que  Fohi  régnait  du  temps  des  pa- 
triarches Héber  et  Phaleg  ;  mais  il  n'y  a 
nulle  apparence  que  les  Chinois  aient 
quelques  renseignemens  antérieurs  au  dé- 
luge. Si  le  dieu  chinois,  Fohé,  est  le 
même  que  Noé  (  voyez  FÉ  ) ,  il  est  évident 
que  Fohi  est  très  postérieur  à  Fohé , 
puisque  la  mythologie  a  dû  naturellement 
précéder  l'histoire  de  la  Chine.  Quoi  qu'il 
en  soit,  ce  que  l'on  raconte  de  Fohi 
doit  nécessairement  se  ressentir  du  ton 
fabuleux  qui  règne  dans  l'histoire  chi- 
noise, surtout  dans  celle  des  premiers 
teriips.  Il  ne  sera  pas  inutile  d'en  donner 
ici  un  échantillon,  qui  pourra  servir  de 
règle  aux  lecteurs.  Nous  le  tirons  d'une 
lettre  du  Père  Amiot ,  insérée  dans  le  1 1* 
tome  des  Mémoires  de  la  Chine.  Le  Père 
Amiot,  pour  prouver  que  les  aérostats 
ont  été  connus  à  la  Chine,  rapporte  trois 
passages  tirés  des  plus  fameux  historiens 
de  l'empire.  Il  est  dit  dans  l'un  que 
Chennoung  voulant  mesurer  la  terre, 
ne  sachant  comment  s'y  prendre,  fut 
aidé  dans  .son  opération  par  un  «  homme- 
»  esprit,  dont  la  couleur  était  d'un  vert 
»  tirant  sur  le  bleu;  ses  sourcils  étaient 
j)  épais  ;  il  portait  sur  sa  tête  une  pierre 
»  de  yu ,  et  était  porté  lui-même  par  six 
>)  dragons  volans.  Cet  homme-esprit  mc- 
»  sura  la  terre  ,  détermina  sa  figure  en- 
»  Ire  les  quatre  mers ,  et  trouva  que  son 
«  étendue  d'orient  en  occident  était  de 
»  90  ouan  de  lys  ,  et  de  81  ouan  du  nord 
»  au  sud  (1)  ».   Le  second  passage  porte 

(i]  Ouan  ett  le  nombre  qui  désigne  dix  DiiUe;  le  //<  eit 
DU  dixième  de  lieue.  Qu'pp  calcule  qiainleiiaDl ,  il  iju'op 


fût 

que  l'empereur  Hoangty  sentant  sa  fin 
s'approcher  ,  quitta  la  terre  et  s'envola 
au  ciel,  monte  sur  un  dragon.  On  lit 
dans  un  troisième  passage  que  «  plus  an- 
«  ciennement  encore ,  sous  l'erapire  des 
»  cinq  Loung  (  des  cinq  dragons  )  qui 
«  régnaient  sur  le  ?,tco\ïà  Ae?,  dix  peuples 
»  perdus,  avant  la  fondation  de  l'empire 
»  Chinois  par  Fohi,  les  hommes  logeaient 
»  dans  des  antres  et  des  cavernes,  comme 
»  les  quadrupèdes ,  ou  se  perchaient  sur 
>>  les  arbres  comme  les  oiseaux  ;  tandis 
»  que  leurs  souverains  montés  sur  des 
«  dragons ,  planaient  dans  les  airs  comme 
»  nuages ,  et  gouvernaient  ainsi  leurs 
)>  sujets  de  haut  en  bas.  »  Tout  cela  est 
dit  au  reste  fort  sérieusement  par  le  Père 
Âmiot,  qui  soupçonne  que  ces  dragons 
étaient  remplis  de  gaz.  Voyez  Comte 
(i,e),  Coisrucius,  Halde  (du),  Yao. 

FOIGjNI  ou  CoGîN Y  ( Gabriel  ) ,  corde- 
lier  défroqué ,  se  relira  en  Suisse  vers 
16G7  ,  et  fut  chantre  de  l'église  deMorge. 
En  ayant  été  chassé  pour  quelques  indé- 
cences qu'il  y  commit  à  la  suite  d'une 
débauche  ,  il  alla  se  marier  à  Genève,  où 
il  enseigna  la  grammaire  et  le  français. 
Il  y  fit  paraître ,  en  1676,  V  Australie, 
ou  les  Aventures  de  Jacques  Sadeur , 
in-12  ,  qui  faillirent  l'en  faire  chasser, 
parce  qu'on  y  trouve  des  impiétés  et  des 
obscénités  révoltantes.  On  l'y  toléra  ce- 
pendant ;  maisaubout  dequelque  temps, 
il  fut  obligé  d'en  sortir,  laissant  à  sa  ser- 
vante des  marques  scandaleuses  de  leur 
commerce.  Il  se  retira  en  Savoie,  et  mou- 
rut dans  un  couvent  en  1692. 

FOILLAN  (  Saint  ) ,  fils  de  Fyltan  , 
roi  de  iMomonie  en  Irlande ,  renonça  au 
monde ,  ainsi  que  ses  deux  frères  Fursy 
et  Ultau  ,  et  embrassa  l'état  monastique. 
Fursy ,  qui  en  avait  donné  l'exemple  et 
le  conseil ,  passa  en  Angleterre ,  et  bâtit 
le  monastère  de  Knôbbersburg ,  dans  le 
royaume  des  Est-Angles ,  dont  il  donna 
la  conduite  à  Foillan,  qu'il  avait  fait  venir 
d'Irlande.  Après  la  mort  de  Fursy,  arri- 
vée à  Péronne  (  selon  d'autres  à  Mazerœl- 
les,  près  de  Dourlens  ) ,  le  16  janvier 
6&0,Ultan  et  Foillan  passèrent  en  France. 

en  applique  le  résultat  ^  ces  qualre  mtrs  et  la  («rr«  qui  est 
(nire  tllti,  et  l'on  aura  une  idée  de  la  géographie  chinoise. 


FOI  35 1 

On  lit  dans  quelques  auteurs  que  Foillan 
fit  un  voyage  à  Rome ,  et  qu'il  y  fut  sacré 
évêque  régionnaire.  Quoi  qu'il  eq  soit 
de  cette  ordination ,  il  est  au  moins  cer- 
tain qu'il  ne  tarda  pas  à  rejoindre  Ulfan 
son  frère.  Ils  se  rendirent  l'un  et  l'autre 
à  Nivelle  dans  le  Brabant ,  où  sainte  Ger- 
trude  était  abbesse.  Le  monastère  qu'elle 
gouvernait  ,  avait  été  fondé  par  le  B. 
Pépin  de  Landeu  ,  son  père,  et  par  la 
B.  Ite,  sa  mère.  Il  y  avait  aussi  dans 
le  voisinage  un  monastère  pour  des  hom- 
mes. Les  deux  frères  y  restèrent  quelque 
temps.  En  652  ,  sainte  Gertrude  donna  à 
Ultan  un  terrain  pour  bâtir  un  hôpital  et 
un  monastère  ,  entre  la  Meuse  et  la  Sam- 
bre ,  alors  dans  le  diocèse  de  Maëstricht , 
et  aujourd'hui  dans  celui  de  Liège.  C'était 
l'abbaye  de  Fosse  ,  aujourd'hui  église 
collégiale.  Sainte-Gertrude  retint  Foillan 
à  Nivelle  ,  pour  instruire  les  religieuses. 
Le  saint  homme  se  chargea  aussi  de  l'in- 
struction du  peuple  dans  les  villages  voi- 
sins. S'étant  mis  en  route  avec  trois  com- 
pagnons en  665 ,  pour  aller  voir  son  frère 
à  Fosse ,  il  fut  massacré  par  des  voleurs 
ou  des  infidèles,  dans  la  forêt  de  Sogne, 
qui  faisait  partie  de  la  forêt  Charbonière 
en  Hainaut.  Ses  reliques  se  gardent  avec 
beaucoup  de  vénération  dans  l'église  de 
Fosse. 

FOINARD  (  Frédéric-Maurice  ) ,  curé 
de  Calais  ,  mort  à  Paris  en  1743  ,  âgé  de 
60  ans  ,  était  de  Conches  en  Normandie. 
On  a  de  lui  quelques  ouvrages  dont  les 
plus  connus  sont  :  1"  Projet  pour  un 
nouveau  Bréviaire  ecclésiastique ,  avec 
la  critique  de  tous  les  nouveaux  Bréviai- 
res qui  ont  paru  jusqu'à  présent,  in-12, 
1720.  2"  Breviarium  ecclesiasticum  , 
exécuté  suivant  le  projet  précédent,  2 
vol.  in-12.  Les  auteurs  des  nouveaux 
Bréviaires  ont  profité  de  celui-ci.  3°  Les 
psaumes  dans  l'ordre  historique ,  in-1 2, 
1742.  4"  Deux  vol.  in-12  sur  la  Genèse. 
Des  idées  singulières  que  l'auteur  hasarda 
sur  le  sens  spirituel  les  firent  supprimer. 

FOIX  (  Raimond  Roger  ,  comte  de  }, 
accompagna  le  roi  Philippe-Auguste  à  la 
guerre  de  la  Terre-Sainte  en  1190.  Il 
prit  depuis  le  parti  des  Albigeois  avec 
feu  j  mais  son  ardeur  ne  le  mena  qu'à 


352  I^ÔI 

des  humiliations.  Il  fut  obligé  de  de- 
mander la  paix ,  et  de  reconnaître  pour 
comte  de  Toulouse  Simon  de  Monfort. 
Puylaurens  rapporte  qu'en  une  conférence 
tenue  au  château  de  Foix  entre  les  catho- 
liques et  les  Albigeois ,  la  sœur  du  comte , 
non  moins  ardente  que  son  frère,  voulut 
parler  en  faveur  des  derniers  :  «  Allez  , 
})  Madame  ,  lui  dit  Etienne  de  Minea  , 
3)  filez  votre  quenouille;  il  ne  vous  ap- 
»  partient  pas  de  parler  dans  une  dispute 
})  de  religion.  »  Raimond  Roger  mourut  en 
1222.  L'illustre  maison  de  Foix,  dont 
était  Raimond  ,  descendait  de  Bernard  , 
second  fils  de  Roger  II ,  comte  de  Car- 
cassonne.  Bernard  eut  le  comté  de  Foix 
en  10G2,  et  le  posséda  pendant  34  ans. 
Sa  postérité  subsista  avec  honneur  jusqu'à 
Gaston  III ,  qui  vit  mourir  son  fils  avant 
lui  (  voyez  Gaston  III.  )  Il  mourut  lui- 
même  en  1391  ,  ayant  cédé  le  comté  de 
Foix  à  Charles  VI;  mais  le  roi ,  par  géné- 
rosité ,  le  rendit  à  son  cousin  Matthieu  , 
qui  mourut  en  1 398  ,  sans  enfans  ;  et  dont 
la  sœur  Isabelle  épousa  Archambaud  de 
Grailly  ,  qui  prit  le  nom  de  Foix.  Son 
petit-fils,  Gaston  IV ,  se  maria  avec  Eléo- 
nore  ,  reine  de  Navari-e.  Sa  postérité 
masculine  fut  terminée  par  Gaston  de 
Foix  ,  duc  de  Nemours,  tué  à  la  bataille 
de  Ravenne  en  1512  ,  à  24  ans  (  voyez 
Gaston  de  Foix,  duc  de  Nemours  ).  Mais 
Catherine  de  Foix  ,  reine  de  Navarre  , 
pelite-fiUe  de  Gaston  IV  ,  avait  épousé 
Jean  d'Albret ,  dont  la  pelite-fiUe  fut 
mère  de  Henri  IV...  Archambaud  de 
Grailly  avait  eu  un  second  fils  nommé 
Gaston,  captai  de  Buch,  et  dontles  descen- 
dans  furent  comtes  de  Caudale  et  ducs 
de  Rendan.  Cette  branche  avait  été  ho- 
norée de  la  pairie  sous  le  titre  de  Rendan, 
par  considération  pour  Marie-Claire  de 
Beaufremond,  marquise  de  Senecey,  dame 
d'honneur  d'Anne  d'Autriche,  qui  avait 
épousé  Jean-Bapliste  Gaston  de  Foix , 
comte  de  Fleix,  tué  au  siège  de  Mardick 
en  Jfi46.  Elle  mourut  elle-même  en  1680. 
Ses  trois  fils  n'ont  point  laissé  de  posté- 
rité- Le  dernier, Henri-Charles,  qui  por- 
tait le  nom  de  duc  de  Foix  ,  est  mort  en 
1714.  Il  faut  consulter  sur  cette  famille 
l'histoire  du  comté  de  Foix. 


FOI 

FOIX  (  Pierre  de  ) ,  cardinal,  né  eu 
i  38G  ,  était  fils  d'Archambaud  ,  captai  de 
Buch,  et  d'Isabelle,  comtesse  de  Foix, 
fut  d'abord  franciscain  ,  et  cultiva  avec 
succès  les  lettres  sacrées  et  profanes. 
L'antipape  Benoit  XIII  l'honora  de  la 
pourpre  en  1408,  soit  pour  récompenser 
son  mérite,  soit  pour  attirer  dans  son 
parti  les  comtes  de  Foix.  Pierre  n'avait 
alors  que  22  ans;  il  abandonna  le  pontife 
au  concile  de  Constance,  préférant  les 
intérêts  de  l'Egli.se  à  ceux  de  l'amitié.  Le 
concile  lui  confirma  la  qualité  de  cardi- 
nal, Martin  V  l'envoya  légat  en  Arragon, 
pour  dissiper  les  restes  du  schisme.  Il  y 
réussit,  et  mourut  en  14G4  ,  dans  sa  78" 
année  ,  à  Avignon  ,  dont  il  avait  la  vice- 
légation.  Il  était  aussi  archevêque  d'Arles. 
C'est  lui  qui  a  fondé  à  Toulouse  le  col- 
lège de  Foix.  —  Il  faut  le  distinguer  du 
cardinal  Pierre  de  Foix ,  son  petit-neveu, 
non  moins  habile  négociateur ,  qui  mou- 
rut évêque  de  Vannes ,  à  la  fleur  de  son 
âge, en  1490. 

FOIX  (Odet  de),  seigneur  de  Lautrkc, 
maréchal  de  France  et  gouverneur  de 
la  Guienne  ,  était  petit-fils  d'un  frère  de 
Gaston  IV  ,  duc  de  Foix  ;  il  porta  les  ar- 
mes dès  l'enfance.  Ayant  suivi  Louis  XII 
en  Italie ,  il  fût  dangereusement  blessé 
à  la  bataille  de  Ravenne  eu  1512.  Après 
sa  guérison  ,  il  contribua  beaucoup  au 
recouvrement  du  duché  de  Milan.  Fran- 
çois I  lui  en  donna  le  gouvernement. 
Lautrec  savait  combattre,  mais  il  ne  sa- 
vait pas  comrnander.  Il  fut  chassé  de 
Milan,  de  Pavie,  de  Lodi ,  de  Parme  et 
de  Plaisance ,  par  Prosper  Colonne.  Il 
tâcha  de  rentrer  dans  le  Milanais  par  une 
bataille  ;  mais  ayant  perdu  celle  de  la 
Bicoque  en  1522,  il  fut  obligé  de  se 
retirer  en  Guienne  dans  une  de  ses  terres. 
Sa  disgrâce  rie  fut  pas  longue.  En  1528, 
il  fut  fait  lieutenant-général  de  l'armée 
de  la  ligue  en  Italie,  contre  l'empereur 
Charles  Quint.  Il  emporta  d'abord  Pavie , 
qu'il  mit  au  pillage;  puis  s'avança  vers 
Naplcs ,  et  mourut  devant  cette  place  le 
1 5  août  de  la  même  année ,  après  avoir 
lutté  quelque  temps  contre  l'ennemi ,  la 
peste  ,  la  misère  et  la  famine,  —  Son 
frère ,  Thomas  de  Foix  ,  dit  le  maréchal 


foi 

de  Lescun  ,  passait  pour  un  homme 
cruel  et  extrêmement  avare.  Ses  exactions 
firent  soulever  le  Milanais  en  1 521 .  Après 
la  perte  de  la  bataille  de  la  Bicoque ,  les 
ennemis  l'assiégèrent  dans  Crémone.  Il 
n'y  tint  pas  aussi  long-temps  qu'il  le  pou- 
vait ;  et  en  rendant  la  place  ,  il  promit 
de  faire  évacuer  toutes  celles  du  Mila- 
nais ,  oii  il  y  avait  garnison  française. 
Il  reçut ,  à  la  journée  de  Pavie  en.  1 525  , 
un  coup  de  feu  dans  le  bas-ventre,  dont 
il  mourut  sept  jours  après ,  prisonnier 
de  guerre  à  Milan. 

FOIX  (  Paul  de  ) ,  archevêque  de  Tou- 
louse ,  de  la  même  famille  que  Lautrec  , 
né  en  1528,  se  distingua  dans  ses  am- 
bassades en  Ecosse  ,  à  Venise  ,  en  Angle- 
terre ,  et  surtout  dans  celle  de  Rome , 
auprès  du  pape  Grégoire  XIII.  Il  mourut 
dans  celte  dernière  ville  en  1584  ,  à  56 
ans.  Muret,  dout  il  avait  été  le  bienfai- 
teur ,  prononça  son  oraison  funèbre.  Ce 
prélat  était  homme  de  lettres ,  et  aimait 
ceux  qui  les  cultivaient ,  surtout  ceux  qui 
brillaient  par  leur  éloquence,  ou  qui  pos- 
sédaient les  écrits  d'Aristote ,  dont  il  était 
admirateur  passionné.  On  a  de  lui  des 
Lettres ,  in-4  ,  Paris  ,  1628  ,  écrites  avec 
précision.  Elles  prouvent  qu'il  était  un 
assez  bon  écrivain  et  un  grand  homme 
d'état.  C'est  sans  preuve  qu'on  les  a  attri- 
buées à  d'Ossat  son  secrétaire ,  depuis 
cardinal. 

FOIX  (  François  de  ) ,  duc  de  Candalc , 
commandeur  des  ordres  du  roi ,  et  évêque 
d'Aire  ,  mort  à  Bordeaux  en  1694,  à  90 
ans  ,  traduisit  le  Pimandre  dé  Mercure 
Trismégiste  ,  et  les  Elémens  d'Euclide  , 
qu'il  accompagna  d'un  commentaire.  Il 
avait  une  chaire  de  géométrie  à  Bordeaux. 

FOIX  (  Louis  de  ) ,  architecte  parisien , 
florissait  sur  la  fin  du  16*  siècle.  Il  fut 
préféré  à  tous  les  architectes  de  l'Europe 
par  Philippe  II ,  qui  le  choisit  pour  élever 
le  monastère  et  le  palais  de  l'Escurial. 
De  retour  d'Espagne ,  il  Jïoucha  l'ancien 
canal  de  l'Adour ,  et  en  creusa  un  nou- 
veau en  157  9.  Ce  fut  encore  lui  qui  bâtit 
en  1 595  le  fanal  à  l'embouchure  de  la 
Garonne  ,  qu'on  appelle  communément 
la  Tour  de  Cordouan.  Cette  tour  à  160 
pieds  de  hauteur. 
V. 


FOIX  (  Marc-Antoine  de  ) ,  jésuite  , 
né  en  1627  au  château  de  Fabas,  dans  le 
diocèse  de  Conserans  ,  mort  à  Billom  en 
Auvergne  en  1687  ,  fut  homme  de  let- 
tres ,  théologien  ,  prédicateur  ,  profes- 
seur ,  recteur ,  provincial ,  et  tout  ce  que 
l'étendue  de  ces  titres  exigeait.  On  a  de 
lui  :  1°  L'art  de  prêcher  la  parole  de 
Dieu, 'm-12.  C'est  l'ouvrage  d'un  homme 
instruit  delà  littérature  sacrée  et  profane. 
2°  L'art  d'élever  un  prince ,  in-12  ,  at- 
tribué d'abord  au  marquis  de  Vardes  ; 
bon  ouvrage ,  dont  le  succès  fut  rapide  ; 
on  y  trouve  dés  choses  communes  que 
l'auteur  n'a  pas  cru  devoir  négliger,  pour 
y  substituer  des  vues  rares  et  extraordi- 
naires; son  livre  n'en  est  que  plus  estima- 
ble et  plus  sûrement  utile. 

FOIX  (  Gaston  de  }.    Voyez  Gaston. 

FOIX.    Voyez  Saint-Foix  (  Germain 

POULLAIN    BE  ). 

FOLARD  (  Le  chevalier,  Charles  de}, 
surnommé  le  Ve'gèce  français ,  né  à  Avi- 
gnon le  13  février  lG69,avec  des  inclina- 
tions militaires,  sentit  augmenter  son  pen- 
chant à  la  lecture  des  Commentaires  de 
César.  Il  s'engagea  dès  l'âge  de  1 6  ans  ;  on 
le  dégagea  :  il  se  rengagea  encore,  et  ses 
parens  le  laissèrent  suivre  l'impulsion  de 
la  nature.  De  cadet  dans  le  régiment  de 
Berri ,  devenu  sous-lieutenant ,  il  fit  le 
métier  de  partisan  pendant  tout  le  cours 
de  la  guerre  de  1688  ;  et  ce  métier,  qui 
n'est  pour  tant  d'autres  qu'une  espèce  de 
brigandage  ,  fut  pour  lui  une  école  ;  il 
exécuta  en  petit  tout  ce  qu'il  avait  vu 
faire  en  grand  ;  il  leva  des  cartes ,  il 
dressa  des  plans  ;  il  parut  dès  lors  un 
homme  rare.  La  guerre  de  1701  lui  four- 
nit de  nouvelles  occasions  de  signaler 
son  habileté  et  ses  connaissances.  Le  duc 
de  Vendôme  le  fit  aide-de-camp ,  et  ne 
le  céda  qu'avec  regret  à  son  frère  le  grand- 
prieur  ,  qui  commandait  alors  l'armée  de 
Lombardie.  Le  chevalier  de  Folard  répon- 
dit à  l'idée  qu'on  ajvait  de  lui  ;  il  contri- 
bua beaucoup,  à  la  prise  d'Hostiglia  et  à 
celle  de  la  Cassine  de  la  Bouline,  qui  lui 
mérita  la  croix  de  St. -Louis  et  une  pen- 
sion de  400  livres.  Blessé  dangereusement 
à  la  bataille  de  Cassanoen  1705,  il  réflé- 
chit, au  milieu  des  douleurs  cuisantes 

23 


354  ^01 

que  lui  causaient  trois  coups  de  feu ,  stir 
rarrangement  de  celte  bataille ,  et  forma 
dès  lors  son  système  des  colonnes.  Après 
s'être  distingué  dans  plusieurs  sièges  en 
Italie ,  et  surtout  à  celui  de  Modène  ,  il 
passa  en  Flandre,  fut  blessé  à  Malplaguet , 
et  fait  prisonnier  quelque  temps  après. 
Le  prince  Eugène  ne  put  le  gagner  par 
les  offres  les  plus  avantageuses.  De  retour 
en  France,  il  eut  le  commandement  de 
Bourbourg  ,  qu'il  conserva  jusqu'à  sa 
mort.  En  n  1  4  il  se  rendit  à  Malte ,  assié- 
gée par  les  Turcs,  et  s'y  montra  ce  qu'il 
avait  paru  partout  ailleurs.  Le  désir  de  ser- 
vir sous  Charles  XII,  plutôt  que  l'intérêt , 
l'attira  en  Suède.  Il  vit  ce  roi  soldat ,  et 
lui  fit  goûter  ses  nouvelles  idées  sur  la 
guerre.  Charles  destinait  le  chevalier 
Folard  à  être  un  des  instruniens  dont  il 
voulait  se  servir  dans  une  descente  pro- 
jetée en  Ecosse  ;  mais  la  mort  du  héros , 
tué  au  siège  de  Fridérichshall ,  dérangea 
tous  ses  projets  ,  et  obligea  Folard  à  re- 
venir en  France.  Il  servit  en  1719  sous 
le  duc  de  Berwick ,  en  qualité  de  mestre- 
de-camp ,  et  ce  fut  sa  dernière  campagne. 
Il  avait  étudié  toute  sa  vie  l'art  militaire 
en  philosophe  ;  il  l'approfondit  encore 
plus,  lorsqu'il  fut  rendu  à  lui-même.  Il 
donna  des  leçons  au  comte  de  Saxe  ,  et 
prédit  dès  lors  ses  succès.  Le  chevalier 
de  Folard  exposa  ses  nouvelles  décou- 
vertes dans  ses  Commentaires  sur  Poly- 
be  ,  en  G  volumes  in-'4  ,  Paris  ,  1727  , 
réimprimé  à  Amsterdam  en  176-3,  7. vol. 
in-4,  avec  un  supplément  qui  ne  se  trouve 
pas  dans  l'édition  de  Paris.  Ils  ont  été 
abrégés  en  3  vol.  in-4 ,  Paris,  1 7 67 .  L'au- 
teur peut  être  appelé  ajuste  titre  le  f^e'gè- 
ce  moderne.  En  homme  de  lettres ,  il  a 
su  puiser  dans  les  sources  les  plus  cachées 
tout  ce  qu'il  a  cru  propre  à  nous  instrui- 
re ;  et  en  homme  de  guerre,  il  l'a  exposé 
avec  beaucoup  d'intelligence.  Le  fonds  en 
est  excellent ,  mais  la  forme  n'en  est  pas 
si  agréable.  L'abondance  des  idées  de 
l'auteur  entraîne  une  profusion  de  paro- 
les. Son  slile  est  négligé  ,  ses  réflexions 
sont  détachées  les  unes  des  autres ,  ses 
digressions  ou  inutiles  ou  trop  longues. 
On  a  encore  de  cet  habile  homme  :  1°  Un 
livre  de  Nouvelles  découvertes  sur  la 


tôt 

guerre,  in-12.  Les  idées  y  sont  attssi  pro- 
fondes  et  plus  méthodiques  que  dans  son 
commentaire  ;  2"  un  Traité  de  la  défense 
des  places  ;  3°  un  Traité  du  métier  de 
partisan,  manuscrit,  que  le  maréchal  de 
Belle-Ile  possédait.  Le  chevalier  de  Folard 
aurait  pu  faire  une  fortune  assez  considé- 
rable ;  mais  ses  liaisons  avec  les  défen- 
seurs des  miracles  qu'on  attribuait  à  M. 
Paris  ,^le  firent  regarder  de  mauvais  œil 
par  le  cardinal  de  Fleury.  On  voyait  à 
regret  ce  vieux  militaire  au  milieu  d'une 
troupe  de  convuisionnaires  ,  marmotter 
des  hymnes  à  l'honneur  du  diacre  Paris 
(  voyez.  V histoire  d'un  voyage  littéraire 
fait  en  17  33  en  France,  etc ,  la  Haie, 
1736  ).  Il  revint  de  cette  folie  avant  sa 
mort ,  arrivée  à  Avignon  en  1761 ,  et  se 
soumit  de  la  manière  la  plus  expresse  à 
toutes  les  décisions  de  l'Eglise.  Ceux  qui 
voudront  connaître  plus  particulièrement 
le  chevalier  de  Folard,  peuvent  consulter 
les  mémoires  pour  servir  à  son  histoire  , 
imprimés  à  Paris  ,  sous  le  titre  de  Ratis- 
bonne,  en  1763 , in-12. 

FOLARD  (François  Melchior  de  ) ,  jé- 
suite ,  frère  du  précédent,  membre  de 
l'académie  de  Lyon,  naquit  à  Avignon 
en  1683,  et  mourut  en  1739.  Onade  lui 
OEdipeel  Thémistocle,  tragédies  faibles, 
et  VOraison  funèbre  du  maréchal  de 
Fillars,  non  moins  médiocre. 

FOLENGO  (Jean-Baptiste),  béné- 
dictin n\antouan ,  mort  en  16.b9,  à  60 
ans,  laissa  un  Commentaire  sur  les 
psaumes ,  imprimé  à  Bàle  en  1667  ,  in- 
fol.  ,  et  sur  les  épîtres  catlioliques ,  in-8, 
écrit  noblement  et  purement.  H  com- 
mente en  critique  et  presque  toujours 
avec  intelligence. 

FOLENGO  (Jérôme,  dit  Théophile), 
plus  connu  sous  le  nom  de  Merlin  Coc- 
caye ,  naquit  le  8  novembre  1491  ,  dans 
un  lieu  appelé  autrefois  Cépada  près  du 
lac  inférieur  dans  le  Mantouan.  Il  entra 
comme  le  précédent  dans  l'oi'dre  des 
bénédictins.  Lîf  tournure  de  leur  esprit 
fut  bien  différente  ;  l'un  se  consacra  à 
l'érudition  et  à  la  piété ,  l'autre  à  la 
bouffonnerie  et  à  la  turlupinade  ,  et  se 
fit  des  ennemis.  Ses  supérieurs  voulurent 
le  mettre  en  règle ,  mais  il  échappa  à 


I 

1 


FOL 

leurs  poursuites,  par  la  protection  de 
plusieurs  seigneurs.  II  mourut  en  1544  , 
à  51  ans,  dans  son  prieuré  de  Sainte- 
Croix  de  Campége,  près  de  Bassano, 
après  avoir  erré  pendant  plusieurs  années 
avec  une  jeune  femme  pour  laquelle  il 
avait  quitté  son  couvent ,  après  être  rentré 
dans  son  monastère ,  avoir  dirige  un 
couvent  de  religieuses  et  s'être  fait  chas- 
ser. De  tous  ses  ouvrages  ,  le  plus  connu 
est  sa  Macarone'e,  ou  Histoire  macaroni- 
quc.  Ce  nom  de  macnroniqiie ,  qu'on  a 
donné  à  toutes  les  productions  du  même 
genre  ,  vient  du  mot  macaroni,  qui  est 
le  nom  d'un  gâteau  qu'on  fait  en  Italie 
avec  de  la  farine ,  des  œufs  et  du  fro- 
mage. Le  poème  de  Folengo  fut  reçu 
avec  transport,  dans  un  siècle  où  les 
bouffonneries  pédantesques  tenaient  lieu 
de  saillies ,  les  anagrammes  de  bons 
mots,  et  les  logogriphes  de  pensées.  Il 
est  difficile  de  faire  un  abus  plus  étrange 
de  son  esprit.  Il  s'abandonne  entièrement 
à  son  imagination  aussi  vive  que  bizarre, 
sans  respect  ni  pour  la  langue  latine , 
dont  il  fait  un  mélange  monstrueux  avec 
l'italienne,  ni  pour  le  bon  sens  qu'il 
choque  à  chaque  page.  Avec  tout  cela  , 
l'auteur,  qui  a  l'air  d'un  bouffon,  fait 
d'excellentes  réflexions  sur  les  vices  des 
hommes  :  il  attaque  fortement  les  pas- 
sions, surtout  l'orgueil,  la  paresse,  l'en- 
vie," la  volupté  ,  la  frivolité.  Le  poème  ma- 
ronique  fut  traduit  en  français  en  1G06. 
Cette  version  barbare  a  été  publiée  de 
nouveau ,  sans  aucun  changement ,  en 
1734  ,  2  vol.  in-12;  elle  n'était  ni  assez 
importante  ni  assez  estimée ,  pour  mé- 
riter une  nouvelle  édition.  L'original  de 
la  Macaronée ,  imprimé  sous  le  nom  de 
Merlin  Coccaye,  en  1521  ,  à  Frescati, 
in-12,  est  rare;  l'édition  de  Venise  en 
1554  ,  in-12,  lest  moins.  Il  y  a  encore 
I  de  lui  trois  poèmes  assez  recherchés  : 
1°  Orlandino  da  Limerno  Pitocco , 
Venise,  1526  ou  1539  ou  1550,  in-8, 
réimprimé  à  Londres  en  1773,  in-8  et 
in-12.  2°  Caos  del  tri per  uno,  Venise, 
1527  ,  in-8.  C'est  un  poème  sur  les  trois 
âges  de  sa  vie ,  en  slile  en  partie  maca- 
ronique.  3°  La  Humanita  del  Figlio  di 
Dco,  in  oitava  rima.  Venise,  1533 ,  in-4, 


FOL  355 

FOLIETA.  Voyez  Foglieta. 

FOLKES  (  Martin  ),  antiquaire  ,  phy- 
sicien et  mathématicien  anglais,  né  à 
Westminster  le  29  octobre  1G90  ,  mort  à 
Londres,  le  28  juin  175i,  se  distingua 
dans  les  académies  des  Sciences  déFrance 
et  d'Angleterre  où  il  fut  admis.  Celle-ci 
l'avait  reçu  dans  sou  sein  à  l'âge  de  24 
ans  ;  deux  ans  après  elle  le  mit  dans  son 
conseil.  Newton  le  nomma  ensuite  son 
vice-président,  et  enfin  il  succéda  à  Sloane 
dans  la  présidence  même.  Ses  connais- 
sances et  ses  succès  dans  les  sciences  qui 
sont  l'objet  des  travaux  de  cette  com- 
pagnie ,  furent  les  titres  qui  le  placèrent 
à  sa  tète.  Les  nombreux  mémoires  qu'il 
lui  présenta  ,  et  qu'on  trouve  dans  les 
Transactions  philosophiques ,  justifient 
son  choix.  Cet  auteur  tira  un  grand 
profit ,  pour  la  science  des  antiquités  , 
d'un  voyage  qu'il  fit  en  Italie  ;  et  celui 
qu'il  fit  en  France  le  lia  avec  les  savans 
de  ce  royaume.  Ses  mémoires  roulent 
sur  le  poids  et  la  valeur  des  monnaies 
romaines  ;  sur  les  mesures  des  colonnes 
Trajane  et  Antonine  ;  sur  les  monnaies 
d'or  d'Angleterre ,  depuis  le  règne  d'E- 
douard III  ;  sur  les  polypes  d'eau  douce  ; 
sur  les  bouteilles  dites  de  Florence,  et  sur 
divers  sujets  de  physique.  Lorsqu'il  eut 
été  admis  k  l'académie  des  Sciences  de 
Paris ,  il  présenta  un  mémoire  sur  la 
comparaison  des  mesures  et  des  poids  de 
France  et  d'Angleterre.  Il  finit  sa  carrière 
littéraire  par  un  ouvrage  estimé  de  sa 
nation ,  sur  les  monnaies  d'argent  d'An- 
gleterre ,  depuis  la  conquête  de  cette  île 
par  les  Normands,  jusqu'à  son  temps. 
Les  lettres  remplirent  sa  vie;  ni  les  soins 
du  mariage ,  ni  les  distractions  des 
voyages,  ne  purent  rallentir  son  ardeur 
pour  l'élude.  Il  avait  amassé  une  ample 
bibliothèque  ,  et  un  cabinet  enrichi  d'une 
collection  de  monnaies ,  supérieure  à 
tout  ce  qu'on  connaissait  en  ce  genre. 
Folkes  a  été  enterré  à  l'abbaye  de  West- 
minster où  on  lui  a  élevé  un  beau 
monument. 

*  FOLLEVILLE  (Gabriel  Guyot  bu 
Guillot  de) ,  ecclésiastique,  plus  connu 
sous  le  nom  d'évêque  d'Agra ,  naquit  en 
IBrelagne  d'une  famille  aisée  qiii  le  des- 


356  FOL 

tina  de  bonne  heure  à  l'état  ecclésiasti- 
que. Il  était  vicaire  ou  curé  à  Uol,  lors- 
que la  révolution  éclata.  Après  avoir 
prêté  serment  à  la  constitution  du  clergé, 
il  se  rétracta.  Il  vint  à  Paris ,  d'où  il  se 
réfugia  à  Poitiers  chez  une  de  ses  paren- 
tes :  son  extérieur  pieux  disposa  en  sa 
fiaveur  tous  ceux  qui  dans  ce^e  villç  ai- 
maient encore  la  religion  ,  et  l'on  vit  ac- 
courir à  lui  une  foule  de  personnes  qui 
lui  demandaient  des  conseils ,  ou  qui  dé- 
siraient de  se  servir  de  son  ministère.  On 
assure  que ,  lorsque  la  ville  de  Thouars 
tomba  au  pouvoir  des  Vendéens ,  il  fut 
pris  par  les  royalistes  ;  qu'alors ,  et  l'on 
ne  sait  pourquoi ,  il  était  habillé  en  sol- 
dat ;  qu'il  dit  pour  sa  justification  qu'il 
avait  été  forcé  par  les  républicains  de  se 
mettre  dans  leurs  rangs  ;  qu'ayant  de- 
mandé à  être  conduit  auprès  de  M.  de 
Villeneuve  qui  avait  été  son  camarade 
d'études,  il  se  fit  reconnaître  de  ce  com- 
mandant, et  que  ce  fut  probablement 
alors  qu'il  imagina  la  fable  d'une  mission 
dont  il  aurait  été  chargé  par  le  pape.  Il 
déclara  donc  avec  une  assurance  extraor- 
dinaire qu'il  avait  été  choisi  pour  appor- 
ter la  parole  sainte  dans  l'Ouest  ;  que 
quelques  prélats  fidèles  s'étaient  réunis 
eu  secret  pour  lui  donner  l'ordination 
épiscopale  ;  que  le  pape  avait  non-seule- 
ment confirmé  leur  choix  en  lui  confé- 
rant le  titre  d'évêque  d'Agra ,  mais  en- 
core qu'il  l'avait  chargé  de  venir  dans 
les  provinces  insurgées  pour  réchauffer 
le  zèle  des  amis  de  la  royauté  et  la  piété 
des  fidèles.  Ce  mensonge,  dicté  par  la 
vanité,  ou  peut-être  par  le  désir  d'être 
utile,  fut  accueilli  avec  empressement  : 
le  prétendu  évêque  d'Agra  fut  présenté 
en  grande  pompe  à  l'armée ,  et  tous  les 
Vendéens  virent  en  lui  l'envoyé  du  ciel  : 
rien  ne  pouvait  produire  un  effet  plus 
grand  que  l'apparition  au  milieu  d'eux 
d'un  évêque  que  la  Providence  semblait 
leur  offrir ,  pour  leur  montrer  qu'elle  ne 
les  avait  point  abandonnés.  L'abbé  de 
FoUeville  pontifiait  devant  les  troupes 
réunies,  et  on  le  voyait  encourager  les 
soldats  sur  le  champ  de  bataille ,  relever 
les  blessés ,  leur  prodiguer  tous  les  soins 
»Y66  m  C9ur8|e  Yr9><peRt  meneiUçux , 


FON 

et  donner  aux  mourons  les  derniers  se- 
cours de  la  religion.  Il  avait  été  installé 
en  qualité  de  président  du  conseil  char- 
gé de  l'administration  des  pays  insurgés. 
Dans  cette  position  difficile,  l'évêque 
d'Agra  ne  montra  point  les  taicns  qu'on 
lui  supposait  ;  il  ne  répondit  pas  à  l'i- 
dée que  les  ^Vendéens  avaient  conçue  de 
lui  :  son  imposture  même  avait  été  dé- 
couverte. Le  pape  fit  savoir  aux  chefs 
Vendéens  par  un  bref  du  31  juillet  1793, 
qu'il  n'avait  point  envoyé  d'évêque  dans 
les  pays  insurgés  de  la  France  ;  mais  les 
circonstances  malheureuses  oii  se  trou- 
vait l'armée  catholique  et  royale,  em- 
pêchèrent qu'on  ne  dévoilât  son  scanda- 
leux artifice.  Après  la  déroute  du  Mans  , 
l'abbé  de  FoUeville  tomba  entre  les  mains 
des  républicains  ,  reconnu  par  les  trou- 
pes victorieuses ,  il  fut  condamné  à  mort 
et  exécuté  à  Angers  le  5  janvier  1794.  Il 
subit  son  supplice  avec  courage  ;  sa  ré- 
signation était  toute  chrétienne.  Ou  l'a 
représenté  comme  un  fanatique ,  comme 
un  homme  de  sang  :  le  fait  est  qu'il  avait 
un  caractère  doux  et  pacifique  ;  il  était 
réellement  très  pieux.  La  fraude  dont  il 
se  servit  eut  pu  être  très  utile  à  l'armée 
royaliste  ;  mais  nous  ne  pouvons  ni  l'ex- 
cuser ni  le  justifier.  L'abus  des  choses 
saintes  fut  toujours  un  crime ,  et  c'est  en 
vérité  pour  nous  une  énigme  de  concilier 
les  vertus  de  l'abbé  FoUeville  avec  sa 
prétention  à  l'épiscopat ,  et  l'usurpation 
d'un  titre  que  l'Eglise  ne  permit  jamais 
de  prendre  à  ceux  qui  n'en  ont  pas  le 
droit. 

FONCEMAGNE  (  EUenne  Ladrbault 
de  ) ,  né  à  Orléans  le  8  mai  1694,  mort  à 
Paris  le  26  septembre  1779,  membre  de 
l'académie  française,  fut  sous-gouverneur 
du  duc  de  Chartres.  Il  est  connu  dans  le 
monde  littéraire  par  des  Lettres  au  sujet 
du  Testament  politique  du  cardinal  de 
Ptichclieu ,  où  il  prouve  avec  autant  de 
politesse  que  de  jugement  et  de  raisons 
solides ,  que  ce  Testament  est  réellement 
du  ministre  de  Louis  Xill  ;  par  plusieurs 
mémoires  qui  sont  insérés  dans  les 
recueils  de  l'académie  des  Inscriptions , 
et  qui  roulent  tous  sur  des  points  de 
l'tustoirç  de  France,  excepté  celui  sur  1» 


FON 

déesse  Laverne ,  et  par  la  brillante  réu- 
nion qu'il  avait  chaque  semaine  chez  lui, 
et  qui  s'appelait  la  conversation.  Fone- 
magne  était  très  religieux. 
\  FOJNSECA  (  Antoine  da  ) ,  dominicain, 
né  à  Lisboaue  ,  vint  faire  ses  études  à 
Paris ,  et  publia  dans  cette  ville ,  en  1 539, 
des  Remarques  sur  les  Commentaires  de 
la  Bible  ,  par  le  cardinal  Cajetan ,  in-fol. 
Il  reçut ,  3  ans  après ,  le  bonnet  de  doc- 
teur de  Sorbonne.  De  retour  dans  sa  pa- 
trie ,  il  fut  prédicateur  du  roi ,  et  obtint 
une  chaire  de  théologie  en  l'université 
de  Coimbre.  Il  mourut  eu  1588. 

FONSECA  (  Pierre  da  ) ,  jésuite ,  né  à 
Corticada  en  Portugal ,  docteur  d'Evora , 
mourut  à  Lisbonne ,  le  4  novembre  1 599, 
à  7 1  ans ,  après  avoir  publié  une  Meta- 
physique  en  4  tomes  in-fol.  Cette  méta- 
physique a  eu  un  grand  cours  ,  et  a  été 
long-temps  citée  dans  les  écoles.  Il  y  a 
des  choses  inutiles  par  leur  objet  direct, 
mais  excellemment  propres  à  exercer 
l'esprit,  à  lui  donner  des  idées  justes, 
nettes ,  précises ,  et  à  le  former  à  une 
exacte  logique.  Ployez  Chapklais  ,  Duns, 

OCCAM. 

FOJNSECA  ( Roderic ) ,  médecin ,  natif 
de  Lisbonne  ,  professa  la  médecine  avec 
distinction  au  commencement  du  11^ 
siècle,  à  Pise  et  à  Padoue,  et  composa 
divers  ouvrages  sur  celle  science ,  entre 
autres  :  De  tuendavaletudinc,  et  De  cal- 
culorum  remediis. 

*  FONSECA  (Eléonore ,  marquise  de) , 
dame  d'honneur  de  la  reine  de  Naples , 
née  en  1768,  d'une  famille  illustre  de 
cette  ville,  passa  sa  première  jeunesse  dans 
l'étude  des  sciences  et  des  lettres ,  et  s'a- 
donna particulièrement  à  celle  de  l'his- 
toire naturelle  et  même  de  l'anatomie. 
Elle  correspondit  dans  la  suite  pour  cette 
science  avec  le  célèbre  Spallanzani,  à 
qui  elle  communiquait  ses  observations. 
On  croit  qu'il  en  profita  pour  sa  fameuse 
découverte  des  vaisseaux  lymphatiques. 
Eléonore  épousa  en  1784  le  marquis  de 
Fonseca ,  d'une  ancienne  famille  espa- 
gnole depuis  long-temps  établie  à  Naples, 
et  fut  reçue  à  la  cour  en  qualité  de  dame 
d'honneur  de  la  reine  Marie-Caroline , 
(]ui  lui  accorda  ^a  bienvçillaQce }  mai$ 


FON  35^7 

la  marquise  de  Fonseca  qui  aimait  à  faire 
de  l'esprit ,  ne  sut  pas  la  conserver. 
Des  propos  un  peu  mordans  qu'elle  s'était 
permis  contre  cette  princesse  et  le  mi- 
nistre Acton ,  et  qui  furent  rapportés  à 
sa  majesté  par  des  personnes  jalouses  de 
la  faveur  de  la  marquise,  lui  firent  donner 
l'ordre  de  ne  plus  reparaître  à  la  cour. 
C'est  de  cette  époque  que  date  l'inimitié 
de  M"^  de  Fonseca  pour  la  famille  royale. 
Lorsque  la  révolution  éclata  en  France, 
elle  en  adopta  les  principes,  et  se  servit 
pour  nuire  à  la  cour  de  l'influence  que 
sa  beauté ,  son  esprit  et  son  amabilité  lui 
donnaient  sur  les  personnes  les  plus  re- 
marquables delà  capitale  qu'elle  rassem- 
blait chez  elle.  On  l'a  même  accusée  d'a- 
voir eu  une  correspondance  secrète  avec 
les  Français  qui  approchaient  de  Naples, 
et  d'avoir  eu  ainsi  une  grande  part  aux 
troubles  de  ce  royaume  en  février  1799. 
Le  roi  ayant  été  obligé  d'abandonner 
son  palais,  les  lazzaronis,  qui  alors  lui 
étaient  dévoués,  commirent  les  plus 
grands  excès  contre  les  Français  qui  se 
trouvaient  à  Naples  et  contre  leurs  par- 
tisans. Us  se  proposaient  de  se  porter  à 
l'hôtel  de  la  marquise  de  Fonseca  pour 
exercer  sur  elle  leur  vengeance;  mais 
elle  avait  été  prévenue.  Elle  parvint, 
avec  un  grand  nombre  de  dames,  en- 
nemies comme  elle  de  la  cour ,  qu'elle 
avait  réunies,  à  se  retirer  au  château 
Saint-Elme,  qui  était  déjà  au  pouvoir 
des  Français.  Lorsqu'ils  firent  leur  entrée 
dans  la  ville  ,  elle  entreprit  la  rédaction 
d'un  journal  intitulé  Moniteur  napoli- 
tain ,  dans  lequel  elle  attaqua  sans  mé- 
nagement la  reine  et  ses  ministres.  Les 
succès  du  cardinal  RufiTo  ayant  obligé  les 
Français  d'évacuer  Naples,  la  marquise 
de  Fonseca  s'obstina  à  y  rester,  contre 
l'avis  de  ses  amis ,  afin ,  disait-elle,  d'être 
toujours  à  portée  d'encourager  son  parti; 
mais  elle  fut  arrêtée  et  condamnée  à 
être  pendue.  L'arrêt  fut  exécuté  le  20 
juillet  17  99,  malgré  les  prières  de  sa 
famille  et  des  principaux  seigneurs ,  qui 
demandaient  au  moins  la  commutation 
de  la  peine.  Elle  n'avait  alors  que  3 1  ans. 
FONT  (Joseph  de  La  ) ,  poète  français, 

çs\  m\9wç  ds  çm^  C9t»é4i«8 ,  dont  ka 


358 


FON 


meilleures  sont  l'Epreuve  réciproque  et 
les  Frères  rivaux.  On  a  encore  de  lui 
plusieurs  opéras  et  l'opéra-comique  inti- 
tulé le  Monde  renverse.  La  Font  était  né 
à  Paris  en  1686  ,  et  il  mourut  à  Passy  près 
de  cette  capitale,  en  1726,  à  39  ans.  Il 
était  encore  plus  passionné  pour  Je  jeu 
que  pour  la  poésie. 

FONT  (  Pierre  de  La  ),  né  à  Avignon  , 
devint  prieur  de  Valabrègue  et  officiai  de 
l'église  d'Uzès.  C'était  un  homme  de  Dieu, 
plein  de  zèle  et  de  charité.  Il  se  démit 
du  prieuré  dont  il  était  pouryu  ,  pour  en 
fonder  un  séminaire  dans  la  ville  épisco- 
pale.  Il  en  fut  lui-même  le  premier  supé- 
rieur ,  et  une  des  fonctions  de  cet  emploi 
pénible  nous  a  procuré  cinq  volumes 
d'Entretiens  ecclésiastiques ,  imprimés 
à  Paris,  in-12.  On  en  fait  cas,  ainsi  que 
de  4  vol.  de  prônes,  in-12.  Toutes  les 
preuves  que  fournissent  l'Ecriture,  les 
Pères,  les  conciles,  sur  les  devoirs  des 
ecclésiastiques  et  des  autres  fidèles,  sont 
répandues  dans  ces  deux  ouvrages  avec 
beaucoup  d'intelligence.  Le  pieux  auteur 
termina  sa  carrière  au  commencement  du 
18*  siècle. 

"  FONT  DE  SAVINES(  Charles  La), 
évêque  de  Viviers,  né  à  Embrun  en  17  42, 
fut  sacré  évêque  en  17  78,  et  ne  se  fit 
connaître  qu'au  moment  de  la  révolution 
par  les  écarts  les  plus  malheureux.  En 
1791,  il  donna  la  démission  de  souévêché 
entre  les  mains  des  électeurs  de  son  dé- 
partement ,  comme  pour  réparer  les  vices 
de  son  institution.  Confirmé  par  eux  ,  il 
prêta  le  serment  voulu  par  la  constitu- 
tion civile  du  clergé,  et  la  défendit  par 
ses  écrits.  Il  prit  en  même  temps  le  titre 
d'évêque  de  I'.\rdèche,  et  donna  la  con- 
sécration épiscopale  à  deux  curés  le  24 
juin  1792.  Le  1"  décembre  1793  il  re- 
nonça publiquement  à  ses  fonctions,  en 
se  dépouillant  de  ses  habits  pontificaux 
devant  l'administration  départementale , 
et  en  lui  livrant  sa  crosse,  ses  mitres,  sa 
croix,  son  calice  et  tous  les  ornemensde 
l'église.  Il  prononça  en  cette  occasion  un 
discours  scandaleux  et  impie,  et  écrivit 
depuis  contre  la  célébration  des  fêtes ,  le 
célibat  ecclésiastique  ,  le  jeûne  et  les  rè- 
gles les  plus  saintes  et  les  plus  iayariables 


FON 

de  la  discipline.  Pendant  la  terreur,  il 
fut  néanmoins  arrêté  et  envoyé  à  la  Con- 
ciergerie à  Paris.  Il  sembla  un  moment 
que  ce  châtiment  l'avait  fait  rentrer  en 
lui-même.  Instruit  que  l'archevêque  de 
Vienne  gouvernait  son  diocèse  avec  des 
pouveii's  du  saint-Siége,  il  conseillait  à 
ceux  qui  croyaient  à  la  juridiction ,  de 
s'adresser  à  ce  prélat ,  reconnaissant  que 
lui-même  n'en  avait  réellement  pas.  Cet 
heureux  changement  ne  fut  pas  de  longue 
durée.  En  1797  il  s'éleva  de  nouveau 
contre  le  pape  et  contre  le  métropolitain, 
et  il  parut  vouloir  reprendre  la  conduite 
de  son  diocèse  ;  mais  il  fut  repoussé  par 
l'opinion  de  ses  diocésains.  Il  se  relira 
alors  à  Paris ,  et  revint  cn.suite  dans  sa 
ville  natale  ,  où  il  eut  le  bonheur  de  re- 
connaître et  d'avouer  ses  erreurs.  Il  ne 
cessa  de  les  pleurer  et  d'en  faire  péni- 
tence jusqu'à  sa  mort,  arrivée  au  com- 
mencement de  janvier  1815. 

FONTAINE  (Charles),  né  à  Paris  le 
13  juillet  1616  d'un  commerçant ,  passa 
sa  vie  à  faire  des  vers ,  passables  pour  le 
temps.  Il  se  fixa  à  Lyon ,  oii  il  contracta 
successivement  deux  mariages,  et  mourut 
dans  un  âge  avancé  ,  postérieurement  à 
1 68G.  Ses  principales  poésies  sont  recueil- 
lies en  1  vol.  in-8  ,  imprimé  à  Lyon  en 
1 666,  sous  le  titre  de  Ruisseaux  de  Fon- 
taine. On  a  encore  de  lui  le  Jardin  d*a- 
mour  ,  avec  la  Fontaine  d'amour,  Lyon, 
1688  ,  in-16  :  cette  édition  avait  été  pré- 
cédée de  deux  autres.  Victoire  d! Argent 
contre  Cupido ,  Lyon,  1637,  in-16,  etc. 
Il  a  mis  aussi  le  nouveau  Testament  en 
sixains,  Lyon,  1660,  in-12,  avec  des  fi- 
gures en  bois. 

FONTAINE  (  Jean  de  La  ) ,  le  Fabu- 
liste par  excellence  ,  naquit  à  Château- 
Thierry  ,  le  8  juillet  1621  ,  un  an  après 
Molière.  A  19  ans ,  il  entra  chez  les  Pères 
de  l'Oratoire,  qu'il  quitta  18  mois  après. 
La  Fontaine  ignorait  encore  à  2^2  ans  ses 
talens  singuliers  pour  la  poésie.  On  lut 
devant  lui  la  belle  ode  de  Malherbes  sur 
l'assassinat  de  Henri  IV,  et  dès  ce  mo-. 
ment  il  se  reconnut  poète.  Un  de  ses  pa- 
rens  ayant  vu  ses  premiers  essais,  l'en- 
couragea et  lui  fit  lire  les  meilleurs  au- 
teurs unçieps  et  roodevues,  français  et 


i 


J-ÔN 

étrangers.  On  lui  fit  épouser  Msrîe  Héri- 
card ,  fille  d'une  figure  et  d'un  caractère 
qui  lui  gagnaient  les  cœurs.  La  Fontaine, 
soit  insensibilité ,  soit  vanité  ,  la  quitta 
pour  vivre  dans  la  capitale ,  et  ce  n'est 
pas  ce  qui  prévient  !e  plus  en  faveur  de 
son  caractère.  La  duchesse  de  Bouillon  , 
exilée  à  Cbàteau-Tbierry  ,  avait  connu  La 
Fontaine,  et  lui  avait  même,  dit-on,  fait 
faire  ses  premiers  contes.  Rappelée  à  Pa-| 
ris ,  elle  y  mena  le  poète.  La  Fontaine 
avait  un  de  ses  parens  auprès  de  Fouc- 
quet.  La  maison  du  surintendant  lui  fut 
ouverte,  et  il  en  obtint  une  pension, 
pour  laquelle  il  faisait  à  chaque  quartier 
une  quittance  poétique.  Après  la  disgrâce 
de  son  bienfaiteur,  La  Fontaine  entra  en 
qualité  de  gentilhomme  chez  la  célèbre 
Henriette  d'Angleterre,  première  femipe 
de  Monsieur.  La  mort  lui  ayant  enlevé 
cette  princesse,  il  trouva  de  généreux 
protecteurs  dans  M.  le  prince ,  dans  le 
prince  de  Conti ,  le  duc  de  Vendôme  et 
le  duc  de  Bourgogne ,  et  des  protectrices 
dans  les  duchesses  de  Bouillon ,  de  Maza- 
rin  ,  et  dans  l'ingénieuse  La  Sablière  ; 
celle-ci  le  retira  chez  elle,  et  prit  soin  de 
sa  fortune.  Atladié  à  Paris  par  les  agré- 
mens  de  ia  société ,  et  par  ses  liaisons 
avec  les  plus  beaux  esprits  de  son  siècle, 
La  Fontaine  allait  néanmoins  tous  les  ans 
au  mois  de  septembre  rendre  visite  à  sa 
femme.  A  chaque  voyage  il  vendait  une 
portion  de  son  bien ,  sans  s'embarrasser 
de  veiller  sur  ce  qui  testait.  Il  ne  passa 
jamais  de  bail  de  maison,  et  il  ne  renou- 
vela jamais  celui  d'une  ferme.  Cette  apa- 
thie qui  coûtait  tant  d'ciforts  aux  anciens 
philosophes ,  il  l'avait  sans  effort.  Elle 
influait  sur  toute  sa  conduite  et  le  rendait 
quelquefois  insensible  même  aux  injures 
de  l'air.  M""*  de  Bouillon  ,  aliant  un  malin 
à  Versailles,  le  vit  rêvant  sous  un  arbre 
du  Cours;  le  soir  en  revenant,  elle  le 
trouva  dans  le  même  endroit  et  dans  la  ' 
même  attitude ,  quoiqu'il  fit  assez  froid 
et  qu'il  eut  plu  toute  la  journée.  Il  avait 
quelquefois  des  distractions  qui  lui  ô  talent 
la  mémoire  ;  il  en  avait  d'autres  qui  lui 
ôtaient  le  jugement.  Il  loua  beaucoup  un 
jeune  homme  qu'il  trouva  dans  une  as- 
semblée. «  Eh  !  c'est  votre  fils,  lui  dit- 


FON 


359 


on  ;  »  il  répondit  froidement  1  «  Ah  !  j'en 
»  suis  bien  aise.  »  Il  avait  fait  un  conte , 
dans  lequel ,  conduit  par  sa  matière  ,  il 
mettait  dans  la  bouche  d'un  moine  une 
allusion  fort  indécente  à  ces  paroles  de 
l'Evangile  :  Domine  ,  quinque  talenta 
tradidisti  mihi,  etc.  ;  et  par  un  tour  d'i- 
magination dont  La  Fontaine  seul  pouvait 
être  capable,  il  l'avait  dédié  au  docteur 
Arnauld.  Il  fallut  que  Racine  et  Boileau 
lui  fissent  sentir  combien  la  dédicace 
d'un  conte  licencieux  à  un  homme  grave 
choquait  le  bon  sens.  Racine  le  mena  un 
jour  à  Ténèbres ,  et  s'apercevant  que 
l'oiiice  lui  paraissait  long ,  il  lui  donna 
pour  l'occuper  un  volume  de  la  Bible, 
qui  contenait  les  petits  prophètes.  Il  tom- 
ba sur  la  prière  des  juifs  dans  Baruch ,  et 
ne  pouvant  se  lasser  de  l'admirer ,  il  di- 
sait à  Racine  :  «  C'était  un  beau  génie 
»  que  ce  Baruch  ;  qui  était-il  ?  »  Le  len- 
demain et  plusieurs  jours  suivans,  lors- 
qu'il rencontrait  dans  la  rue  quelques 
personnes  de  sa  connaissance  ,  après  les 
complimens  ordinaires  ,  il  élevait  la  voix 
pour  dire  «.  Avez-vous  lu  Baruch  ?  c'était 
»  un  beau  génie  !  »  L'espèce  de  stupidité 
que  ce  célèbre  fabuliste  avait  dans  son 
air,  dans  son  maintien  et  dans  sa  con- 
versation ,  fit  dire  à  M"^  de  La  Sablière , 
un  jour  qu'elle  avait  congédié  tous  ses 
domestiques;  «  Je  n'ai  gardé  avec  moi 
«  que  mes  trois  bêtes  ,  mon  chien  ,  mon 
))  chat  et  La  Fontaine.  »  Cependant  cet 
homme,  si  insensible  en  apparence  et  si 
apathique ,  était  quelquefois  colère  et 
rancunier.  Ayant  eu  une  dispute  avec  M. 
Choart,  curé  de  St.-Germain-le-Vieil ,  à 
Paris,  il  s'en  vengea  par  la  fable  rfa  curé 
et  du  mort  (  liv.  7  ,  fab.  1 1  ).  C'est  la  plus 
mauvaise  de  toutes  ses  fables ,  elle  se  res- 
sent de  l'humeur  du  poète  ;  le  nom  du 
curé  y  est  défiguré  (  voyez  le  Journal  de 
Paris  ,  1787  ,  n"  107  ).  La  FQntaine  avait 
toujours  vécu  dans  une  grande  indolence 
sur  !a  religion ,  comme  sur  tout  le  reste. 
Une  maladie  qu'il  eut  sur  la  fin  de  1G92 
le  fit  rentrer  en  lui-même.  Le  Père  Poujeit 
de  l'Oratoire ,  alors  vicaire  de  St.-Roch  , 
lui  fit  faire  une  confession  générale.  Prêt 
à  recevoir  le  viatique,  il  délesta  ses  contes 
et  en  demanda  pardon  à  Dieu ,  en  pré- 


36o  fài^ 

sence  de  quelques  membres  de  l'académie 
qu'il  prit  pour  témoins  de  son  repentir. 
Si  ce  repentir  fut  sincère ,  il  ne  fut  pas 
constant.  La  Fontaine  laissa  échapper 
après  sa  conversion  encore  quelques  con- 
tes ;  celui  de  la  Clochette  en  est  un.  C'est 
à  quoi  fait  allusion  son  prologue  cité  dans 
Moréri  : 

O  combien  l'homme  ett  inconstant,  dîrert, 
Faible  ,  léger,  tenant  mal  sa  parole  1 
J'afaiijuri,  même  en  assez  beaux  tera. 
De  renoncer  à  tout  conte  friTole, 
Kl  quand  juré  ?  c'est  ce  qui  me  confond  , 
Puis ,  Piex-Tous  à  rimeur  qui  répond 
D'un  seul  moment...... 

La  Fontaine  réprima  ces  saillies  d'une 
imagination  long-temps  fixée  à  ce  genre 
d'écrire,  qui  n'est  ni  le  plus  noble,  ni  le 
plus  sage.  Il  entreprit  de  traduire  les 
hymnes  de  l'Eglise  ;  mais  sa  verve  émous- 
sée  par  l'âge,  et  peut-être  son  génie  que 
la  nature  n'avait  pas  fait  pour  le  sérieux , 
ne  lui  permirent  pas  de  fournir  long- 
temps cette  carrière.  Il  mourut  à  Paris 
en  1695,  à  74  ans,  dans  les  plus  vifs  sen- 
timens  de  religion.  Lorsqu'on  le  désha- 
billa ,  on  le  trouva  couvert  d'un  cilice. 
Il  s'était  fait  lui-même  celte  épitaphe , 
qui  le  peint  parfaitement  : 

Jeanj'en  alla  comme  il  était  venu. 
Mangeant  ton  fonds  après  son  revenu. 
Croyant  le  bien  chose  peu  nécessaire. 
Quant  à  son  temps,  bien  le  sut  dispenser! 
Deux  parts  en  fit  dont  il  soûlait  passer 
L'une  à  dormir,  et  l'autre  à  ne  rien  faire. 

Parmi  les  ouvrages  qui  noiw  restent  de 
La  Fontaine ,  il  faut  placer  au  premier 
rang  ses  contes  et  ses  fables.  Les  pre- 
miers sont  un  modèle  parfait  du  stile 
historique  dans  le  genre  familier ,  mais 
en  même  temps  un  recueil  de  tableaux 
destructifs  des  mœurs,  qu'une  jeunesse 
TCrlueuse  ne  saurait  trop  redouter.  Ses 
fables  sont  sa  véritable  gloire.  On  y  re- 
connaît le  poète  de  la  nature  ;  une  molle 
négligence  y  décèle  le  grand  maître  et 
l'écrivain  original.  «  On  dirait,  suivant 
»  l'expression  d'un  critique  judicieux , 
»  qu'elles  sont  tombées  de  sa  plume.  U  a 
»  surpassé  l'ingénieux  inveuteur  de  l'a- 
»  pologue ,  et  son  admirable  copiste. 
»  Aussi  élégant ,  aussi  naturel ,  moins 
»  pur  à  la  vérité  ,  mais  aussi  moins  froid 
y  et  moins  nu  que  Phèdre,  il  a  attrapé 


»  le  point  de  perfection  dans  ce  genre.  » 
Si  ceux  qui  sont  venus  après  lui ,  comme 
La  Motte,  Richer ,  d'Ardenne ,  Aubert, 
Desbillons  ,  l'ont  sui-passé  quelquefois 
pour  l'invention  des  sujets ,  ils  sont  fort 
au-dessous  pour  tout  le  reste ,  pour  l'har- 
monie variée  et  légère  des  vers  ,  pour  la 
grâce ,  le  tour ,  l'élégance ,  les  charmes 
naïfs  des  expressions  et  du  badinage.  Il 
jélève,  dit  La  Bruyère,  ses  petits  sujets 
^jusqu'au  sublime.  Sous  l'air  le  plus  sim- 
ple ,  il  a  du  génie  ,  et  même  plus  de  ce 
qu'on  appelle  esprit ,  qu'on  n'en  trouve 
dans  le  monde  le  mieux  cultivé.  On  doit 
à  M.  de  Montenault  une  magnifique  édi- 
tion des  fables  de  La  Fontaine ,  en  4  vol. 
in-fol.,  dont  le  premier  a  vu  le  jour  en 
1 7  55 ,  et  le  dernier  en  1 7  59  ;  chaque  fable 
est  accompagnée  d'une  et  quelquefois  de 
plusieurs  estampes  ;  l'ouvrage  est  précé- 
dé d'une  vie  du  fabuliste.  On  a  une  autre 
édition  des  fables  de  La  Fontaine  par 
Coste,  1744  ,  2  vol.  in-t2  ,  avec  figures 
et  de  courtes  notes,  et  1  vol.  iu-12,sans 
figures.  Elles  ont  depuis  été  réimprimées 
très  souvent,  in-8  ,  in- 12  et  in-18,  avec 
et  sans  figures ,  et  traduites  en  vers  latins 
par  Giraud,  1 7  7  5,  2  vol .  in-8  ou  in- 1 2 .  (Les 
plus  belles  éditions  des  fables  sont  celles 
de  Paris,  Didol  aîné,  1802,  2  vol.  grand 
in-fol. ,  ou  1818,  2  vol.  in-8,  de  Parme 
(veuve  Bodoni),  1814,  2  vol.  grand 
in-fol.)  L'on  a  imprimé  à  Paris  en 
1758,  en  4  jolis  petits  vol.  in-12,  les 
OEiivres  diverses  de  La  Fontaine ,  c'est- 
à-dire  tout  ce  qu'on  a  pu  rassembler  de 
ses  ouvrages  tant  en  vers  qu'en  prose,  à 
l'exception  de  ses  fables  et  de  ses  contes. 
On  y  trouve  quelques  comc'dies,  un  poème  I 
sur  le  quinquina,  que\(pies  pièces  ana-  • 
crêontiques ,  des  lettres  et  d'autres  mor- 
ceaux ,  la  plupart  très  faibles  et  qu'on 
n'aurait  jamais  imprimés  ,  si  les  éditeurs 

(consultaient  la  gloire  des  morts  plutôt 
que  l'intérêt  des  vivans.  Tous  les  ouvrages 
de  La  Fontaine  furent  recueillis  en  1726, 
3  vol.  in-4  ,  belle  édition  encadrée ,  1803, 
8  tomes  en  5  vol.  in-12,  et  1814  ,  6  vol. 
in-8  ,  fig.  (  Il  en  a  paru  plusieurs  éditions 
en  1826  :  le  libraire  Dupont  en  a  fait  une 
en  6  vol.  in-8  ,  avec  les  commentaires  et 
les  notes  de  M.  Walkenaer.  )  La  Fontaine 


FOiS 

avait  essayé  de  beaucoup  de  genres ,  de 
quelques-uns  même  opposés  à  son  génie. 
Voici  comme  il  peint  son  inconstance  : 

Papillon  du  Parnasse,  et  semblable  aux  abeiUei. 
1  qui  le  bou  Platon  compare  nos  merTeil^I 
Je  suis  cbose  légère  ,  el  To!e  à  tout  sujet;* 
Je  tais  de  fleur  en  fleur,  et  d'objet  eu  objet  " 
A  beaucoup  de  plaisir  je  mêle  un  peu  de  (gloire. 
J'irais  plus  haut  peut  être  au  temple  de  mémoire 
Hais  quoi  li«  suis  volageen  Ters  comme  eu  amours,  ete. 

(  Outre  la  traduction  latine  du  Père  Gi- 
raud  que  nous  avons  déjà  citée,  on  a  des 
imitations  ou  des  traductions  de  ces  petits 
chefs-d'œuvre  dans  presque  toutes  les  lan- 
gues :  il  n'est  pas  jusqu'à  la  littérature  russe 
qui  ne  s'honore  d'avoir  son  La  Fontaine  : 
dans  ce  dernier  temps  M.  Krilof  l'a  imité 
avec  plus  de  succès  qu'aucun  autre  poète 
étranger  et  même  français.  L'un  des  plus 
xécens  biographes  de  notre  immortel  fa- 
buliste ,  M.  W  alkenaer ,  est  celui  qui  le 
premier  l'a  bien  fait  connaître  ;  son  livre 
a  pour  titre  Histoire  de  la  vie  et  des  ou- 
vrages de  Jean  de  La  Fontaine^  1.820  , 
3«  édition,  1824,  in-8.  Le  travail  qu'a 
également  donné  M.  A.  A.  Barbier  sur 
l'histoire  bibliographique  de  ce  grand 
poète,  est  'm\.i\.\}\é  Notice  des  principales 
éditions  des  fables  et  des  œuvres  de  La 
Fontaine.  Il  se  trouve  dans  le  tome  2  des 
fables  inédites  publiées  par  M.  Robert , 
Paris,  1825,2  vol.  in-8.  Chamfort  a  fait 
V Eloge  de  La  Fontaine ,  couronné  par 
l'académie  de  Marseille.  ) 

FOINTAirs'E  (Mcolas),  parisien,  fils 
d'un  maître  écrivain,  fut  confié  à  l'âge 
de  20  ans  aux  solitaires  de  Port-Royal. 
11  se  chargea  d'abord  d'éveiller  les  au- 
tres ;  mais  dans  la  suite  il  eut  le  soin  plus 
noble  des  études  de  quelques  jeunes  gens 
qu'on  y  élevait.  Les  heures  de  loisir  qui 
lui  restaient,  il  les  employait  à  trans- 
crire les  écrits  des  savans  qui  habitaient 
celle  solitude.  Il  suivit  Arnauld  et  Nicole 
dans  leurs  diverses  retraites.  Il  fut  en- 
fermé à  la  Bastille  avec  Sacy,  le  13  mai 
166G  ,  et  en  sortit  avec  lui  en  1668.  Ces 
deux  amis  ne  se  quittèrent  plus.  Après  la 
mort  de  Sacy  en  1684  ,  Fontaine  changea 
plusieurs  fois  de  retraite.  Il  se  fixa  enfin 
à  Melun ,  oîi  il  mourut  en  1709,  à  84 
ans.  On  a  de  lui  1°  Vies  des  saints  de 
ï ancien  Testament ,  en  4  vol.  in-8  :  ou- 

V. 


FON  36i 

vrage  composé  sous  les  yeux  de  Sacy , 
qui  peut  être  de  quelque  utilité  pour 
l'histoire  sacrée.  2°  Les  Fies  des  saints, 
in-fol.  et  4  vol.  in-8.  C'étaient  les  plus 
exactes  avant  celles  de  Baillet  ;  mais  les 
unes  et  les  autres  sont  oubliées  depuis 
celles  que  M.  l'abbé  Godescard  a  tradui- 
tes de  l'anglais  ,  12  vol.  gr.  in-8.  3°  Mé- 
moires sur  les  Solitaires  de  Port-Roy  al  y 
en  2  vol.  in-12  ,  très  détaillés ,  et  même 
jusqu'à  la  minutie  :  tout  parait  précieux 
dans  les  saints  d'un  parti  auquel  on  est 
dévoué.  4°  Traduction  des  Homélies  de 
saint  Chrysostôme  sur  les  Epures  de 
saint  Paul,  en  7  vol.  in-8.  On  accusa 
l'auteur  d'être  tombé  dans  le  nestoria- 
nisme  ;  l'archevêque  de  Paris ,  Harlay , 
condamna  Fontaine ,  qui  se  rétracta , 
puis  s'expliqua,  et  prétendit ,  à  l'exemple 
de  tous  les  dogmatisans,  avoir  raison. 
6°  Abrégé  de  l'Histoire  de  la  Bible ,  pu- 
blié sous  le  nom  de  Royaumont ,  in-8 , 
avec  figures ,  communément  attribué ,  et 
peut-être  avec  raison  ,  à  Sacy.    Voye% 

MaISTRE  (  LE  }. 

FONTAINE  (  Jacques  de  La  ) ,  jé- 
suite de  Berg-Sainl-Vinox  ,  travailla  avec 
beaucoup  de  zèle  à  la  défense  de  la  con- 
stitution Unigenitus ,  et  publia  sur  ce 
sujet  un  ouvrage  en  4  vol.  in-fol.  Il 
mourut  à  Rome  le  18  février  1728,  à 
l'âge  de  78  ans. 

FONTAINE  (  Alexis  ),  né  à  Clavai- 
8on  en  Dauphiné ,  s'occupa  principale- 
ment du  calcul  intégral ,  fut  reçu  de  l'a- 
cadémie des  Sciences,  et  mourut  en  1771 
à  Cuiseaux  en  Franche-Comté.  Ses  mé- 
moires ,  qui  sont  dans  le  recueil  de  l'a- 
cadémie ,  ont  été  imprimés  séparément 
en  1  vol.  in-4. 

*  FONTAINE  (  Jean  Claude  ) ,  pro- 
fesseur de  philosophie  au  collège  d'An- 
necy ,  et  chanoine  de  la  collégiale  de  la 
même  ville,  né  à  Talloires  en  1715,  et 
mort  dans  la  même  ville  en  1807,  a 
donné  quelques  ouvrages  peu  connus. 
Les  principaux  sont  :  1"  Réfutation  de  la 
nécessité  et  du  fatalisme ,  Annecy  ,1783, 
2  vol.  in-8.  2°  Le  véritable  système  sur  le 
mécanisme  de  V univers,  ou  Démonstra- 
tion de  V existence  du  premier  moteur  , 
Annecy,  1785,  2  voL  iji-8.  Il  a  laissé 
23.. 


362 


FOl^ 


plusieurs  manuscrits  sur  des  objets  d'as- 
tronomie, de  physique,  etc. 

FONTAIJVE  DE  LA  Roche.  Foyez  Ro- 
che. 

FONTAINES  (  Pierre  Des  ) ,  né  dans 
le  Vermandois  en  Picardie ,  maître  des 
requêtes  de  Saint-Louis  ,  a  réuni  les  usa- 
ges du  Vermandois  sous  le  titre  de  Con- 
seils à  son  ami.  Du  Cangc  les  a  publiés 
avec  l'Histoire  de  Saint-Louis,  de  Join- 
ville  ,  1668  ,  in-fol.  C'est  le  premier  au- 
teur que  l'on  connaisse  qui  ait  écrit  sur 
la  jurisprudence  française.  U  a  aussi  écrit 
une  histoire  sous  le  titre  de  Livres  de  la 
Reigne.  Joinville  dit  que  saint  Louis 
s'en  servait  «  pour  ouïr  les  plaids  de  la 
M  porte  ,  pour  recevoir  les  requêtes  et 
i>  faire  droit  aux  parties.  » 

FONTAINES  (  Marie -Louise -Char- 
lotte DE  Pelakd  de  GivRV ,  épousc  du 
comte  de  ),  fille  du  marquis  de  Givry, 
commandant  de  Metz,  morte  en  1730, 
cultiva  les  lettres  à  l'ombre  du  silence , 
et  cueillit  quelques  fleurs  dans  le  champ 
romanesque.  On  lui  doit  entre  autres  pro- 
ductions, écrites  sans  prétention  et  pour 
le  seul  plaisir  d'écrire  :  La  comtesse  de 
Savoie,  roman  dans  le  goût  de  Zaïde , 
imprimé  en  1722.  {Ame'nophis, prince  de 
Libye.  Ils  ont  été  imprimés  dans  les  œu- 
vres complètes  àe.  Mesdames  de  Lafajette 
et  deTencin  ,  Paris,  1804,  in-8,  et  réim- 
primés sous  le  titre  d'œuvres  de  Mesda- 
mes de  Fontaines,  etc. ,  avec  une  notice 
littéraire,  Paris,  1812,  1  vol.  in-18.) 

FONTAINES  (  Pierre-François  Gtjyot 
des  )  naquit  à  Rouen  le  22  juin  ICSâ, 
d'un  conseiller  au  parlement.  Les  jésui- 
tes ,  chez  lesquels  il  fit  ses  humanités  avec 
éclat,  lui  donnèrent  leur  habit  en  1700. 
Après  avoir  professé  1 5  ans  dans  diffe- 
rens  collèges  de  la  société ,  il  sollicita  sa 
sortie  et  l'obtint  sans  peine.  Son  humeur 
difficile  et  son  génie  indépendant  avaient 
un  peu  indisposé  ses  supérieurs ,  qui  lui 
avaient  conseillé  eux-mêmes  de  rentrer 
dans  le  siècle ,  et  de  quitter  le  cloître 
pour  lequel  il  ne  paraissait  pas  fait.  L'abbé 
des  Fontaines  était  prêtre  alors  ;  on  lui 
donna  la  cure  de  Torigny  en  Normandie, 
mais  il  ne  tarda  pas  de  s'en  démettre.  11 
fieki  quelque  temps  auprès  du   cardinal 


FOIS 

d'Auvergne ,  comme  bel-esprit  et  homme 
de  lettres.  Quelques  brochures  critique» 
lui  firent  un  nom  à  Paris.  L'abbé  Biguon 
lui  confia  en  1 7  24  le  Journal  des  savans, 
mort  dq|la  peste,  comme  on  disait  alors, 
parceique  les  prédécesseurs  de  l'abbé  des 
Fontaines  dans  ce  travail  ne  le  remplis- 
saient que  d'extraits  de  livres  surla  peste 
de  Marseille.  Le  nouveau  journaliste  ra- 
nima ce  cadavre,  et  se  distingua  égale- 
ment par  d'autres  ouvrages  périodiques. 
Le  premier  vit  le  jour  en  1731  ,  sous  le 
titre  de  Nouvelliste  du  Parnasse ,  ou 
Réflexions  sur  les  ouvrages  nouveaux. 
Il  n'en  publia  que  2  vol.  L'ouvrage  fut 
arrêté  par  le  ministère  en  1 7  32 ,  et  ce  fut 
au  grand  regret  de  quelques  littérateurs 
qui  y  trouvaient  l'instruction,  et  des 
gens  du  monde  qui  y  cherchaient  l'amu- 
sement. Environ  trois  ans  après,  en  1 736, 
l'abbé  des  Fontaines  obtint  un  nouveau 
privilège  pour  des  feuilles  périodiques. 
Ce  sont  celles  qu'il  intitula  :  Observa- 
tions sur  les  écrits  modernes,  in-12; 
commencées  comme  les  précédentes  avec 
l'abbé  Granet ,  et  continuées  jusqu'au 
33*  vol.  inclusivement.  On  les  supprima 
encore  en  1743.  Cependant  l'année  sui- 
vante il  publia  une  autre  feuille  hebdo- 
madaire, intitulée  :  Jugemens  sur  les 
ouvrages  nouveau.v ,  en  11  vol.  in-i2, 
dontIes2  derniers  sont  de  Mairault.  L'abbé 
Granet  n'eut  point  part  aux  jugemens, 
comme  le  dit  l'abbé Ladvocatou  son  conti- 
nuateur ;  il  y  avait  2  ans  qu'il  était  mort. 
L'abbé  des  Fontaines  mourut  en  1745,  à 
60  ans.  Ses  critiques  ont  été  taxées  de 
trop  de  sévérité  ;  mais  celte  sévérité ,  dit 
un  auteur  judicieux ,  n'était-elle  pas  né- 
cessaire ,  si  l'on  fait  attention  à  la  rapi- 
dité avec  laquelle  le  goût  se  pervertit 
aujourd'hui  ?  Il  était  naturel  que  l'abbé 
des  Fontaines  fût  sensible  à  la  dégrada- 
tion des  lettres  :  personne  ne  connaissait 
mieux  que  lui  les  règles  et  les  raisons  des 
règles  -,  personne  ne  les  développait  avec 
plus  de  finesse ,  d'agrément  et  de  clarté  ; 
personne  ne  saisissait  avec  autant  de  pré- 
cision les  différens  degrés  du  beau  et  les 
moindres  nuances  du  ridicule  ;  l'œil  sans 
cesse  ouvert  sur  les  moindres  défauts,  il 
les  sentait  vivement  et  ne  faisait  grâce  à 


I 


FON 

rien.  Est-il  étonnant  après  cela  ,  qu'il 
ait  eu  pour  ennemis  les  médiocres  écri- 
vains de  son  temps,  et  naènie  des  écri- 
vains célèbres  qui  ne  voulaient  être  mé- 
diocres en  rien  ?  Delà  ce  déchaînement 
presque  universel  contre  lui.  On  s'efforça 
de  décrier  ses  talens ,  on  attaqua  sa  ré- 
putation, on  calomnia  ses  mœurs,  on 
enfanta  un  délu!j;e  de  libelles,  auxquels 
il  eut  la  faiblesse  d'être  sensible ,  et  qui 
le  rendirent  injuste  à  l'égard  de  ceux 
qui  l'avaient  offensé  ;  mais  si  le  ressenti- 
ment a  aigri  quelquefois  son  slile  ,  on  dé- 
couvre toujours  dans  ses  jugemens  les 
lumières  d'un  homme  fait  pour  régenter 
le  Parnasse.  Toutes  les  fois  qu'il  n'écoute 
que  la  raison  et  le  bon  goût,  on  ne  peut 
s'empêcher  de  le  regarder  comme  le  mo- 
dèle des  bons  critiques.  «  L'abbé  des 
»  Fontaines  (  dit  Fréron  } ,  philosophe 
»  dans  sa  conduite  comme  dans  ses  prin- 
i>  cipes ,  était  exempt  d'ambition  ;  il  avait 
>j  dans  l'esprit  une  noble  fierté,  qui  ne 
»  lui  permettait  pas  de  s'abaisser  à  solli- 
"  citer  des  bienfaits  et  des  titres.  Le  plus 
»  grand  tort  que  lui  aient  fait  les  injures 
«•dont  on  l'a  accablé,  est  qu'elles  ont 
»  quelquefois  corrompu  son  jugement. 
w  L'exacte  impartialité,  je  l'avoue,  n'a 
M  pas  toujours  conduit  sa  plume ,  et  le 
»  ressentiment  de  son  cœur  se  fait  remar- 
»  quer  dans  quelques-unes  de  ses  criti- 
»  ques...  Sil'abbédesFontainesétaitquel- 
«  quefois  dur  et  piquant  dans  ses  écrits , 
»  dans  la  société ,  il  était  doux  ,  affable  , 
>'  poli ,  sans  affectation  de  langage  et  de 
»  manières.  On  doit  cependant  le  mettre 
»  au  rang  de  ceux  dont  on  n'est  curieux 
M  quedelire  les  ouvrages.  Il  paraissaitdans 
»  la  conversation  un  homme  ordinaire, 
»  à  moins  qu'on  n'y  agitât  quelque  ma- 
))  tière  de  littérature  et  de  bel-esprit.  Il 
X  soutenait  avec  chaleur  ses  sentimens  ; 
»  mais  la  même  vivacité  d'imagination  , 
»  qui  l'égarait  quelquefois,  le  remettait 
)'  sur  la  route,  pour  peu  qu'on  la  lui  fît 
»  apercevoir.  «  J.  .1.  Rousseau,^  iM.  Rollin, 
et  tous  ceux  qui  s'intéressaient  aux  pro- 
grès de  la  bonne  littérature,  ont  rendu 
par  leurs  éloges,  justice  à  ses  talens  et  à 
ses  lumières.  L'auteur  delà  Mc'tromnnie 
(  le  célèbre  Piron  )  fut  long-temps  de  ce 


FON  3(5î 

nombre.  Ami  faible  et  inconstant,  comme- 
ne  le  sont  que  trop  ordinairement  les. 
gens  de  lettres,  il  ne  se  brouilla  avec 
l'abbé  des  Fontaines  que  pour  une  baga- 
telle. Voltaire  lui  fut  également  attaché, 
mais  quelques  plaisanteries  sur  la-tragé- 
die de  la  Mort  de  César,  irritèrent  ce 
poète ,  et  furent  le  signal  d'une  guerre 
qui  a  duré  jusqu'à  la  mort  du  critique. 
Outre  ses  feuilles  ,  on  a  encore  de  l'abbé 
des  Fontaines  :  1°  une  Traduction  de. 
Virgile,  en  4  vol.  in-8^,  Paris,  1743, 
avec  des  figures  de  Cochin ,  des  discours, 
bien  écVits ,  des  dissertations  utiles ,  des 
remarquçs  propres  à  diriger  les  jeunes 
gen^dans  la  lecture  de  /^l'rg'iVe et  des  au- 
teurs qui  l'ont  imité.  Il  y  en  a  aussi  une 
édition  en  2  vol.  in-12.  Cette  version  , 
fort  supérieure  aux  traductions  de  Fabre, 
de  Catrou  et  des  autres ,  est  la  meilleure  ;. 
mais  elle  n'est  pas  encore  parfaite.  Quel- 
ques morceaux  sont  écrits  du  stile  de  Tc- 
lémaquc  :  c'était  tout  ce  qu'on  pouvait 
attendre  d'un  traducteur  en  prose;  mais 
dans  plusieurs  autres  fragmens  ,  l'auteur 
de  V Enéide  n'a  que  la  moitié  de  ses  grâ- 
ces. On  trouve  des  endroits  rendus  avec 
chaleur,  mais  avec  trop  peu  de  fidélité; 
d'autres  très  élégans,  mais  froids,  gla- 
cés :  ceux-ci  sont  le  plus  grand  nombre. 
2°  Poésies  sacrées ,  traduites  ou  imitéea 
des  Psaumes,  ouvrage  de  sa  jeunesse  ,  et 
qui  n'en  est  pas  moins  froid.  3°  Lettres 
sur  le  Livre  de  la  Religion  chrétienne 
prouvée  par  les  faits,  par  t abbé Houtte- 
ville,  in-12.  Elles  sont  au  nombre  de  18, 
et  la  plupart  très  judicieuses.  4"  Parado- 
xes littéraires  sur  l'Inès  de  Castro  de  La 
Motte,  in-8.  Cette  critique  fut  très  re- 
cherchée. 5°  Entretiens  sur  les  Voyages 
de  Cyrus  de  Ranisay  ,  autre  critique 
fort  sensée.  6°  i?rtci«e  vengé,  ou  Exa- 
men des  remarques  grammaticales  de 
M.  Vabbé  d'OIivet  sur  les  OEuvres  de 
Racine,  in-12.  Celte  brochure  prouve 
que  l'abbé  des  Fontaines  connaissait  le 
génie  de  .sa  langue.  1°  Les  Voyages  de 
Gulliver ,  traduits  de  l'anglais  de  Swift , 
in-12.  8°  Le  Tiouveau  Gulliver,  2  vol. 
in-12.  Il  ne  vaut  pas  l'ancien;  mais  si 
l'on  n'est  pas  sati.sfait  de  l'invention,  on 
y  reconnaît  du  moins  le  même  goût  d«. 


364  FON 

stilc  et  de  critique  morale ,  qui  avait  fait 
la  réputation  de  celui  de  Swift.  9°  Les 
Aventures  de  Joseph  Andrews ,  tradui- 
tes de  l'anglais,  2  vol.  in-12.  10°  L'His- 
toire de  don  Juan  de  Portugal,  in-12  , 
roman  historique ,  dont  le  fond  est  dans 
Mariana.  11°  L'abbé  des  Fontaines  a  eu 
part  à  la  traduction  de  l'Histoire  du  pré- 
sident de  TLou  :  à  l'Histoire  des  révolu- 
tions de  Pologne  ;  à  celle  des  ducs  de 
Bretagne  ;  à  la  traduction  de  l'Histoire 
romaine  d'Ecbard  ;  à  l'Histoire  abrégée 
de  la  ville  de  Paris ,  par  d'Auvigni  :  au 
Dictionnaire  neologique ,  ouvrage  esti- 
mable fait  pour  guérir  quelques  auteurs 
qui  écrivaientcommeparlaient  les  laquais 
des  Pre'cieuses ,  mais  qu'il  infecta  de  sa- 
tires personnelles.  M.  l'abbé  de  La  Porte 
a  publié  en  17  57  l'Esprit  de  V abbé  des 
Fontaines^  en  4  vol.  in-12.  On  trouve  à 
la  tête  du  premier  volume  la  vie  de  l'au- 
teur ,  un  catalogue  de  ses  ouvrages,  et 
un  autre  des  écrits  publiés  contre  lui. 

FONTANA  (Publie),  prêtre,  né  en 
1548  àPalIuccio,  près  de  Bergame,  eut 
le  talent  de  la  poésie  latine  et  les  vertus 
de  son  état.  Le  cardinal  Aldobrandini  ne 
put  jamais  lui  faire  quitter  sa  solitude. 
Il  mourut  en  1G09  ,  à  62  ans.  Le  principal 
de  ses  ouvrages ,  imprimé  à  Bergame  en 
1 594 ,  in-folio ,  est  son  poème  de  la  Del- 
phinide.  Il  y  a  de  la  grandeur ,  de  la  no- 
blesse ,  de  l'élévation ,  et  peut-être  un 
peu  d'enflure  dans  le  stile. 

FONTANA  (Dominique) ,  né  à  Mili , 
village  sur  le  bord  occidental  du  lac  de 
Lugano ,  en  1643,  vint  à  Rome  à  l'âge  de 
20  ans  pour  y  étudier  l'architecture.  Sixte 
V,  qui  s'était  servi  de  lui  n'étant  que  car- 
dinal ,  le  choisit  pour  son  architecte  lors- 
qu'il eut  obtenu  la  tiare.  Ce  pontife  avait 
conçu  le  projet  de  mettre  sur  pied  l'obé- 
lisque de  granit  d'Egypte ,  qu'on  voit 
actuellement  sur  la  place  de  St.-Pierre  à 
Rome ,  et  qui  alors  était  couché  par  terre, 
près  le  mur  de  la  sacristie  de  cette  église. 
Il  proposa  un  concours  aux  artistes  ingé- 
nieurs et  mathématiciens,  pour  imaginer 
les  moyens  de  redresser  ce  précieux  reste 
de  la  magnificence  romaine ,  haut  de  1 07 
palmes,  d'une  seule  pièce,  et  du  poids 
d'environ  un  million  de  livres.  Les  pro- 


FON 
cédés  dont  les  Egyptiens  et  les  Romains 
s'étaient  servis ,  soit  pour  transporter , 
soit  pour  élever  en  l'air  ces  masses  énor- 
mes, étaient  ensevelis  dans  l'oubli;  la 
tradition  ne  fournissait  rien  à  ce  sujet , 
et  il  fallait  nécessairement  imaginer.  Fon- 
tana  présenta  au  pape  le  modèle  d'une 
machine  propre  à  cette  opération ,  avec 
laquelle  il  exécutait  en  petit,  ce  qui  de- 
vait se  pratiquer  en  grand.  L'exécution 
répondit  à  l'attente  :  l'obélisque  fut  d'a- 
bord transporté  sur  la  place  où  il  devait 
être  élevé ,  distante  de  1 1 5  cannes  du 
lieu  où  il  était  couché  ;  et  le  1 0  septembre 
1 58G  il  fut  dressé  sur  son  piédestal ,  au 
bruit  des  acclamations  réitérées  d'une 
multitude  innombrable  de  spectateurs.  Il 
fut  magnifiquement  récompensé.  Le  pape 
le  créa  chevalier  de  l'Eperon  d'or  et  noble 
romain ,  et  fit  frapper  des  médailles  h  son 
honneur.  A  ces  distinctions  fut  ajoutée 
une  pension  de  2,000  écus  d'or,  réver- 
sible à  ses  héritiers  ;  outre  5,000  écus  de 
gratification,  et  le  don  de  tous  les  maté- 
riaux qui  avaient  servi  à  son  entreprise , 
estimés  à  plus  de  20,000  écus.  C'est  cette 
érection  de  l'obélisque  de  la  place  de  St*.- 
Pierre  qui  a  fait  la  plus  grande  réputation 
de  Fontana.  (  11  transporta  et  éleva  trois 
autres  anciens  obélisques,  l'un  sur  la  place 
de  Ste. -Marie-Majeure ,  l'autre  sur  celle 
de  St. -Jean  de  Latran,  et  le  troisième  sur 
la  place  du  peuple.  Il  répara  les  colonnes 
Trajane  et  Antonine  ,  continua  le  palais 
papal ,  sur  le  mont  Quirinal  nommé  de- 
puis Monte  Cavallo  à  cause  des  deux 
groupes  représentant  des  coursiers  domp- 
tés par  deux  héros ,  que  Fontana  fit 
transporter  dans  ce  lieu  depuis  les  Ther- 
mes de  Dioclélien.  (Il  avait  beaucoup  de 
génie  pour  la  mécanique  ;  mais  il  a  fait 
de  grandes  fautes  en  architecture.  Les 
mauvais  offices  qu'on  lui  rendit  auprès 
du  pape  Clément  VIII ,  et  peut-être  des 
torts  réels,  le  firent  destituer  de  sa  place 
de  premier  architecte  de  sa  Sainteté.  Il 
fut  appelé  à  Naples  en  1 592  ,  par  le  comte 
de  Mirande ,  vice-roi ,  qui  le  créa  archi- 
tecte du  roi ,  et  ingénieur  en  chef  du 
royaume.  Il  construisit  plusieurs  édifices 
dans  cette  ville  ,  et  entre  autres  le  palais- 
royal.  Il  y  mourut  riche  et  fort  considéré, 


I 


FON 

en  1607.  On  a  de  cet  architecte  1  vol. 
in  fol.  imprimé  à  Rome  en  1690  ,  où  sont 
décrits  les  moyens  qu'il  employa  pour  le 
transport  et  l'érection  de  l'obélisque  dont 
nous  avons  parlé. 

FONT  Aïs  A  (Charles) ,  architecte  cé- 
lèbre ,  né  à  Brundolo  dans  le  territoire 
de  Côme  en  16.34 ,  fut  un  des  meilleurs 
élèves  du  cavalier  Bernin  ;  mais  il  n'eut 
point  sa  correction ,  et  donna  dans  le 
singulier.  Innocent  XII  et  Clément  XI 
employèrent  souvent  ses  talens.  Il  a  con- 
struit un  grand  nombre  de  monumens 
publics  à  Rome ,  entre  autres  le  Mausolée 
de  la  reine  Christine  à  St. -Pierre ,  les  pa- 
lais Grimani  et  Bolognetti ,  la  fontaine  de 
Ste. -Marie  in  Transtevcre ,  une  des  fon- 
taines de  la  place  St.-Pierre ,  le  théâtre 
de  Tordionne,  la  bibliothèque  de  la  Mi- 
nerve, le  palais  de  Visconti  à  Frescati , 
etc.,  etc.  Innocent  XI  le  chargea  de  faire 
la  description  de  l'église  de  St.-Pierre. 
Suivant  le  calcul  de  cet  architecte,  les 
dépenses  qui  ont  été  faites  pour  cette 
église  depuis  sa  fondation  jusqu'au  mo- 
ment oîi  il  écrit  (  en  1694  ) ,  montent  à 
46  millions  huit  cent  mille  et  cinquante- 
deux  écus  romains  ,  sans  y  comprendre 
la  dépense  des  modèles ,  la  démolition  de 
l'ancienne  église  et  du  clocher  du  cavalier 
Bernin ,  les  peintures,  les  échafauds,  etc. 
(Suivant  Fontana  ,  la  hauteur  intérieure , 
depuis  le  pavé  jusqu'au  dessous  de  la 
voûte,  est  de  6  3  toises  5  pouces,  et  la  voûte 
a  6  pieds  2  poucesde  diamètre.)  Il  mourut 
à  Rome  le  6  février  1714.  On  a  de  lui  : 
1°  La  description  dont  nous  venons  de 
parler  ,  sous  le  titre  de  Templum  Vali- 
canum  et  ejiis  origo,  1694  ,  in-fol.  Il  ren- 
ferme d'excellens  principes  pour  les  jeu- 
nes architectes.  2"  Anfiteatro  Flavio 
descritto  e  delineato ,  config.  ,  la  Haie, 
1725,  in-fol. 

FONTANA  (François)  ,  habile  ma- 
thématicien et  physicien ,  publia  en 
1 646 ,  un  traité  intitulé  Novœ  cœlestium 
et  terrcstrium  rerum  observationes.  Il 
préparait  d'autres  ouvrages  ,  lorsqu'il 
mourut  de  la  peste  à  Naples,  en  1636. 

*  FONTANA  (Le  Père  Grégoire),  cé- 
lèbre mathématicien  italien ,  né  à  Villa 
de  Nogarola  dans  le  Tyrol,  le  7  décembre 


FON  365 

1735,  s'engagea  fort  jeune  dans  l'ordre 
des  écoles  Pies  à  Rome ,  et  s'y  fit  bientôt 
distinguer  par  ses  talens.  On  l'envoya 
professer  à  Sinigaglia,  à  Milan,  ensuite 
à  Pavie  ,  oii  il  remplaça  le  fameux  Bosco- 
M'ich,  et  où  il  enseigna  avec  distinction 
pendant  près  de  30  ans  les  hautes  mathé- 
matiques. Il  était  en  même  temps  direc- 
teur de  la  bibliothèque  de  l'université 
créée  par  le  comte  de  Firmian,  et  elle 
acquit  sous  lui  son  existence  et  une  grande 
partie  de  ses  richesses.  Lorsque  Buona- 
parte  vint  en  Italie  en  1796  ,  comme  gé- 
néral en  chef  de  l'armée  française,  il  le 
fit  nommer  membre  du  Corps  législatif  de 
la  naissante  république  cisalpine ,  et  il 
eut  la  faiblesse  d'accepter  cette  place  ; 
mais  il  s'en  démit  bientôt.  Il  se  retira  à 
Milan  après  la  bataille  de  3Iarengo ,  et 
devint  membre  du  collège  électoral  de* 
Doiti.  Une  fièvre  ardente  l'emporta  le  24 
août  1803.  Il  a  laissé  1°  plusieurs  disser^ 
tations  ou  opuscules  académiques.  2°  Un 
grand  nombre  de  mémoires  insérés  dans 
la  collection  des  académies  de  Sienne  ,  de 
Turin  et  autres  sociétés  savantes.  3°  Plu- 
sieurs traductions  d'ouvrages  français , 
anglais,  ou  allemands,  tels  que Vllydro- 
namique  de  l'abbé  Bossut;  une  disser- 
tation de  Laurent  Mosheim  sur  rou- 
vrage  d'Origine  contre  Cehus  ;  un  ser- 
mon sur  le  martyre  de  Charles  I,  pro- 
noncé à  Dublin  ;  VEscmpio  délia  Fran- 
cia ,  ou  V E xemple  de  la  France ,  avis 
et  miroir  pour  V Angleterre ,  d'Artur 
Young.  Ces  deux  ouvrages  furent  faits  et 
publiés  à  l'occasion  de  l'attentat  atroce 
commis  contre  la  personne  de  Louis  XVI. 
*  FONTANA  (Le  chevalier  Félix  de), 
savant  physicien  et  naturaliste  italien  , 
frère  du  précédent ,  naquit  en  1730  à  Po- 
marolo  ,  petit  bourg  du  Tyrol.  L'empe- 
reur François  I ,  alors  grand  duc  de  Tos- 
cane ,  le  nomma  professeur  de  philoso- 
phie à  Pise  ,  où  il  resta  jusqu'à  ce  que 
le  grand  duc  Pierre  Léopold ,  depuis  em- 
pereur sous  le  nom  de  Léopold  II ,  le  fit 
venir  à  Florence,  et  le  chargea  de  former 
le  beau  cabinet  de  physique  et  d'histoire 
naturelle  qui  fait  encore  aujourd'hui  l'an 
des  plus  beaux  ornemens  de  celte  ville. 
L'empereur  Joseph  II ,  à  son  passage  à 


366 


FON 


Florence ,  lui  accorda  le  titre  de  cheva- 
lier en  signe  d'admiration  de  ses  travaux. 
Quoique  Fontana  n'eût  pris  aucune  part 
directe  aux  aifaires  à  l'époque  de  la  pre- 
mière occupation  de  la  Toscane  par  les 
Français,  les  déférences  que  les  généraux 
français  lui  témoignèrent  alors  lui  firent 
courir  quelques  risques  au  retour  des 
Autrichiens  ;  et  les  insurgés  d'Arezzo  qui 
les  précédèrent  à  Florence ,  le  jetèrent 
même  en  prison  ;  mais  il  fut  promptement 
mis  en  liberté.  Il  mourut  le  10  mars  1805 
des  suites  d'une  chute  qu'il  avait  faite 
quelques  mois  auparavant  dans  une  rue. 
On  lui  doit  plusieurs  écrits  marquans  sur 
la  chimie,  la  physique  et  la  physiologie. 
1°  Des  Lettres  sur  les  phénomènes  de. 
T irritabilité' ,  insérées  dans  le  troisième 
volume  des  mémoires  de  Hallcr  sur  les 
parties  sensibles  et  irritables.  2"  De' 
moti  deW  irride,  Lucca ,  1765,  in-8.  Il 
prouve  par  des  expériences  très  ingé- 
nieuses sur  les  raouvemens  de  l'iris,  que 
l'irritabilité  de  cette  partie  de  l'œil  est 
dans  certain  cas  soumise  à  la  volonté. 
3°  Ricerche  filoso/iche  sopra  la  fisica 
animale  ,  Florence ,  17  75,  in-4  ;  ouvrage 
qui  vient  à  l'appui  du  précédent ,  et  oîi 
il  cherche  à  prouver  que  l'influence  du 
nerf  sur  la  fibre  ne  doit  être  considérée 
que  comme  un  irritant  extérieur.  4°  Ri- 
cerche snpra'l  veleno  délia  vipera ,  Luc- 
ca ,  1767  ,  in-8.  Il  prétend  dans  ce  re- 
cueil ,  où  l'on  trouve  un  très  grand  nom- 
bre d'expériences ,  que  la  morsure  d'une 
vipère  d'Europe  est  insuffisante  pour  tuer 
un  homme.  5"  Traite'  sur  le  venin  de  la 
vipère ,  sur  les  poisons  américains ,  sur 
le  laurier  cerise ,  et  sur  quelques  autres 
poisons  végétaux  y  etc.,  Florence,  17  81, 
2  vol.  in-4  ,  fig. ,  traduit  en  allemand  en 
1787  ,  2  vol.  in-4  ,  fig.  C°  Plusieurs  opus- 
cules et  mémoires  de  chimie  insérés  dans 
les  recueils  du  temps.  Gébelin  en  a  traduit 
quelques-uns  sous  ce  titre  :  Observations 
physiques  et  chimiques,  Paris,  17  85, 
in-8.  Fontana  prit  surtout  beaucoup  de 
part  aux  recherches  sur  les  gaz  auxquels 
Cavendish,  Priestley  et  LavOisier  avaient 
donné  une  si  grande  impulsion.  On  lui 
doit  l'emploi  du  gaz  nitreux  pour  mesu- 
rer la  salubrité  de  l'air;  et  plusieurs  phy- 


FON 

sicîens  se  servent  encore  de  son  eudin- 
mètre ,  qu'il  avait  conçu  d'après  la  dé- 
couverte de  Priestley  sur  la  propriété 
qu'a  ce  gaz  d'absorber  l'oxigène.  Il  a  par- 
ticulièrement observé  la  faculté  du  char- 
bon d'absorber  les  différentes  espèces 
d'air.  Quoique  Fontana  soit  ingénieux 
dans  tous  ses  écrits,  il  n'est  pas  toujours 
exact,  et  plusieurs  de  ses  expériences  ont 
besoin  d'être  revues  avant  qu'on  puisse 
les  employer  comme  bases  de  doctrine. 
En  1796,  Buonaparte  ,  alors  général  en 
chef  de  l'armée  d'Italie ,  lui  commanda 
une  collection  de  toutes  les  parties  du 
corps  humain  en  cire  coloriée  ,  à  l'instar 
de  celle  que  ce  savant  avait  fait  exécuter 
sous  ses  propres  yeux  pour  le  musée  de 
Florence  ;  mais  les  pièces  envoyées  à  Paris 
s'étant  trouvées  inférieures  à  celles  de 
M.  Laumonier ,  la  collection  fut  donnée  à 
la  faculté  de  médecine  de  Montpellier. 

*  FONTANA  (Mariano  le  Père),  célèbre 
professeur  de  mathématiques,  né  à  Casal- 
Maggiore  le  18  février  17  40,  entra  dès 
l'âge  de  IG  ans  dans  la  congrégation  des 
barnabitcs  ou  clercs  réguliers  de  St. -Paul. 
Il  se  fit  bientôt  distinguer  par  ses  talens 
et  professa  la  philosophie  et  les  mathé- 
matiques d'abord  à  Milan ,  ensuite  à  l'u- 
niversité de  Pavie,  où  il  enseigna  jus- 
qu'en 1802.  11  se  retira  alors  à  Milan  avec 
la  pension  d'éraérite  ;  il  y  mourut  dans 
le  couvent  de  St. -Barnabe  le  18  novem- 
bre 1808.  Son  principal  ouvrage  est  son 
Corso  di  dinamica,  3  vol.  ou  part,  in-4, 
Pavie,  1790,  92  et  95.  On  trouve  dans 
les  atti  ou  actes  de  l'Institut  d'Italie , 
dont  il  était  membre,  un  mémoire  où  il 
essaie  de  réfuter  le  Traité  anahjtique  de 
la  résistance  des  solides  d^égale  résis- 
tance,  publié  à  Paris  en  1798  par  Gi- 
rard. 

*  FONTANA  (  François-Louis  ) ,  car- 
dinal ,  naquit  à  Casal-Maggiore ,  dans  le 
Milanais  le  28  août  1 7  50,  de  parens  riches 
dont  les  quatre  enfans  se  consacrèrent  à 
l'Eglise  :  trois  dans  l'ordre  des  barnabitcs, 
et  le  quatrième  dans  l'état  ecclésiastique. 
François-Louis  entra  dans  la  congréga- 
tion des  barnabitcs,  où  il  avait  reçu  la  pre- 
mière éducation  dans  le  collège  de  Ste.- 
Croix  de  sa  ville  natale,  dirigé  par  des 


1 


FON 

religieux  de  cet  ordre  ;  il  prononça  ses 
■vœux  le  21  octobre  1766  a  Monza.  La 
première  jeunesse  de  Fonlana  avait  été 
un  peu  agitée  :  cet  illustre  personnage , 
qui  dut  à  la  religion  ses  plus  belles  in- 
spirations, faillit  donner  dans  des  erreurs 
très  grandes  ;  mais  il  dut  à  un  jugement 
sain  et  à  un  cœur  droit  de  s'éloigner  de 
l'abîme  dans  lequel  il  était  sur  le  point 
de  se  précipiter.  En  1772,  au  moment 
où  il  venait  de  terminer  sa  théologie,  il 
accompagna  le  Père  Erménégilde  Fini , 
naturaliste  distingué,  appelé  à  Vienne 
par  l'impéjatrice  Marie-Thérèse  pour  vi- 
siter les  mines  de  Hongrie.  Ce  fut  dans 
ce  voya^re  qu'il  se  lia  avec  Métastase  que 
plusieurs  productions  poétiques  avaient 
déjà  rendu  célèbre.  Il  revint  en  Italie  un 
an  après,  et  se  rendit  auprès  de  son  frè- 
re ,  Marino  Fontana  qu'il  aida  dans  la 
direction  du  collège  de  St.-Louis  de  Bo- 
logne :  il  y  professa  les  belles-lettres. 
Nommé  ensuite  professeur  d'éloquence 
dans  les  écoles  Arcimboldes  de  Milan ,  il 
fut  ensuite  professeur  de  belles-lettres 
grecques ,  latines  et  italiennes  dans  le 
collège  des  nobles  de  cette  ville.  Son  en- 
seignement lui  fit  la  plus  grande  réputa- 
tion ;  ses  leçons  avaient  fait  apprécier  en 
lui  un  mérite  littéraire  du  premier  ordre. 
Ce  fut  à  peu  près  à  la  même  époque 
qu'il  fit  paraître  un  petit  poème  en  vers 
italien  dont  le  sujet  est  V Eloge  d'Homère 
(1780).  Son  Essai  des  meilleurs  poètes 
grecs  dans  les  quatre  dialectes;  ses  belles 
Elégies  sur  la  mort  du  mathématicien 
Frisi;  les  Fies  de  plusieurs  sav ans  ita- 
liens dont  Fabroni  avait  parlé  dans  l'ou- 
vrage qui  a  pour  titre  Fitœ  italorum 
doclrina  prœsiantium.  En  général  il 
s'occupa  beaucoup  de  biographie  ;  il 
fournit  des  matériaux  précieux  à  son 
compatriote  Jean  Romain ,  auteur  de 
plusieurs  éluges  historiques  estimés.  Ces 
travaux  ne  restèrent  pas  sans  récompen- 
.se  :  nommé  successivement  procureur- 
général  et  provincial  de  son  ordre  à  Mi- 
lan ,  il  se  fit  remarquer  dans  les  diifé- 
rens  postes  qui  lui  furent  confiés  alors 
et  plus  tard,  par  la  noblesse  de  son  ca- 
ractère ,  par  son  zèle  pour  la  gloire  de 
ta  patrie  et  la  splendeur  de  son  ordre , 


FON  367 

et  surtout  par  l'attachement  à  la  religion. 
Il  a  joué  un  rôle  remarquable  dans  toutes 
les  négociations  ouvertes  entre  la  France 
et  Rome  depuis  le  commencement  de  no- 
tre révolution.  Pendant  les  troubles  qui 
eurent  lieu  de  bonne  heure  en  Italie ,  et 
dont  Milan  était  le  foyer,  la  prudence  du 
Père  Fontana  sauva  de  la  destruction  les 
collèges  qui  étaient  soumis  à  sa  direc- 
tion. Après  l'élection  de  Pie  VII,  il  fut 
appelé  à  Rome  auprès  du  souverain  pon- 
tife par  les  conseils  du  cardinal  Gerdil , 
juste  appréciateur  du  mérite.  Ce  protec- 
teur généreux  mourut  en  1802  :  le  Père 
Fontana  fit  son  éloge  funèbre  qu'il  pro- 
nonça aux  obsèques  de  cet  illustre  écri- 
vain le  1 9  août  dans  l'église  de  St.-Charles 
des  Catinari.  Le  7  janvier  suivant  il  lut 
dans  une  séance  solennelle  de  l'académie 
des  Arcades  un  éloge  littéraire  de  ce  pré- 
lat :  ces  deux  discours  ont  été  publiés , 
et  le  premier  a  été  traduit  en  français 
avec  des  notes  par  l'abbé  d'Auribeau.  Le 
Père  Fontana  avait  entrepris  la  publica- 
tion des  œuvres  du  cardinal  Gerdil ,  de 
concert  avec  le  Père  Léopold  Scati  :  cette 
édition,  commencée  en  1806,  devait 
avoir  20  vol.  in-4  ;  elle  a  été  interrom- 
pue au  ]  5*  vol.  par  les  événemens  po- 
litiques survenus  alors  à  Rome.  A  l'épo- 
que du  premier  voyage  du  St. -Père  à 
Paris ,  le  Père  Fontana  fut  désigné  pour 
en  faire  partie.  Arrivé  à  Lyon ,  il  reçut 
les  derniers  soupirs  du  cardinal  Borgia  , 
qui  était  tombé  malade  en  route ,  et  qui 
mourut  le  3  novembre  1804.  Pendant 
sou  séjour  dans  la  capitale  de  France ,  le 
Père  Fontana  vécut  dans  la  retraite ,  ne 
paraissant  jamais  en  public  ,  n'assistant 
à  aucune  cérémonie  ;  il  disait  pour  excu- 
se qu'il  se  livrait  à  l'étude  :  son  véritable 
motif  était  la  répugnance  qu'il  éprouvait 
pour  l'ordre  de  choses  qui  régnait  alors. 
En  1807  il  fut  nommé  général  de  son  or- 
dre. En  1809  ,  Buonaparte  voulant  faire 
prononcer  son  divorce ,  fit  venir  à  Paris 
tous  les  chefs  des  congrégations  religieu- 
ses pour  obtenir  d'eux  des  concessions 
qu'il  n'avait  pu  arracher  au  saint-Siège. 
Le  Père  Fontana  resta  fidèle  à  ses  doctrines 
et  à  ses  sentimens  :  il  avait  déjà  été  en- 
gagé plusieurs  fois  vainement  par  le  gé- 


368 


FON 


néral  Miollis ,  à  usée  de  son  influence  au- 
près de  Pie  VU,  ai'in  que  le  saint  pontife 
souscrivit  aux  demandes  de  son  persécu^ 
leur.  Pie  VII  fut,  comme  on  le  sait,  arrêté 
dans  son  palais  le  6  juillet  1808,  et  ame- 
né en  France.  Le  Père  Fontana  eut  sa 
part  de  cette  persécution.  Le  12  août  de 
la  même  année ,  à  une  heure  après  mi- 
nuit ,  il  reçut  l'ordre  de  quitter  Rome 
dans  les  24  heures,  et  la  nuit  suivante 
il  fut  forcé  de  partir  avec  les  chefs  des 
autres  congrégations  religieuses  ;  arrivé 
à  Paris ,  on  l'obligea  de  quitter  son  cos- 
tume religieux ,  de  prendre  l'habit  sécu- 
lier et  de  se  rendre  à  Arcis-sur-Aube ,  oii , 
après  avoir  reçu  l'accueil  le  plus  grossier 
d'un  aubergiste ,  il  put  enfin  trouver  un 
logement  honnête  ,  grâces  aux  soins  d'un 
ecclésiastique  vertueux ,  M.  Bétel ,  curé 
de  cette  ville.  Un  mois  après ,  l'ordre  lui 
fut  donné  de  revenir  à  Paris,  où  le  ministre 
des  cultes  le  conduisit  aussitôt  chez  Buo- 
naparte  qui  eut  avec  lui  un  entretien 
long  et  animé.  Dans  celte  conférence  en- 
tre un  empereur  et  un  religieux ,  l'un 
commanda,  l'autre  refusa  de  rien  faire 
qui  fût  contraire  aux  intérêts  de  l'Eglise, 
et ,  avant  de  répondre  sur  les  questions 
qui  lui  étaient  adressées ,  il  demandait 
qu'elles  fussent  écrites  pour  pouvoir  les 
méditer  et  en  voir  toute  la  portée.  Ce- 
pendant les  conférences  sur  les  affaires 
de  l'Eglise  s'ouvrireut.  Le  Père  Fontana 
assista  ,  malgré  lui ,  aux  premières  séan- 
ces ;  mais  une  maladie  assez  grave  le  for- 
ça de  garder  le  lit ,  et  l'empêcha  de  pren- 
dre part  aux  délibérations  de  cette  réu- 
nion. L'abbé  Emeiy,  qui  en  faisait  aus.si 
partie,  montra  un  courage  bien  grand 
qu'il  puisa  dans  ses  propres  sentimens 
et  dans  les  conseils  du  Père  Fontana. 
Voyez  Emery.  Dès  que  le  Père  Fontana 
fut  guéri ,  il  reçut  l'ordre  d'aller  à  Sa- 
vone  remplir  la  mission  dont  l'objet  lui 
avait  été  communiqué  par  Buonaparte 
lui-même  :  le  Père  Fontana  fil  au  cardi- 
nal Fesch  qui  le  lui  communiqua  la  même 
réponse  qu'à  l'empereur.  Sur  ces  entre- 
faites ,  le  cardinal  Maury  reçut  le  fameux 
bref  du  5  novembre  1810,  relatif  à  son 
exaltation  à  l'archevêché  de  Paris.  Op 
accusa  ,  peut-être  justement,  si  toutefois 


JFON 

c'était  un  sujet  de  reproche  ,  le  Père 
Fontana  d'avoir  été  chargé  de  le  lui  en- 
voyer :  des  visites  minutieuses  furent 
faites  vainement  chez  lui  pour  s'assurer 
s'il  ne  le  possédait  pas  :  le  frère  Charles 
du  même  ordre  que  le  Père  Fontana  affir- 
me dans  ses  mémoires  qu'il  en  avait  alors 
plusieurs  copies  qui  furent  soustraites 
aux  agens  de  la  police  impériale.  Mais 
on  trouva  un  papier  sans  signature ,  dans 
lequel  on  blâmait  vivement  la  conduite 
de  Buonaparte  à  l'égard  du  saint-Siége 
et  de  ses  compagnons  d'exil.  Le  Père 
Fontana  arrêté  et  détenu  pendant  trois 
jours  à  la  police ,  ne  voulut  pas  dire  quel 
en  était  l'auteur  (le  chanoine  Muzzarelli)  ; 
il  fut  conduit  à  Vincennes.  On  ne  lui 
permit  pas  d'emmener  avec  lui ,  malgré 
son  âge  et  ses  infirmités,  le  frère  Charles 
qui  l'avait  toujours  accompagné  ,  et  que 
l'on  jeta  dans  une  prison  humide  et  mal 
saine ,  oîi  il  fut  saisi  par  la  fièvre  et  par 
une  fluxion  douloureuse ,  et  d'où  on  ne 
le  tira  qu'au  bout  de  huit  mois,  après 
avoir  été  pendant  tout  ce  temps  presque 
sans  aucun  secours.  Plusieurs  cardinaux 
partageaient  dans  le  même  donjon  la 
captivité  du  Père  Fontana  :  quelques  uns 
d'entr'eux  recouvrèrent  leur  liberté  à 
l'époque  du  concordat  de  Fontainebleau 
(1813).  Mais  M.  de  Gregorio  et  lui  restè- 
rent dans  cette  prison  d'état  jusqu'à  la 
chute  du  gouvernement  impérial.  Le  Père 
Fontana  avait  subi  une  nouvelle  attaque 
de  la  part  d'un  ministre  de  Buonaparte , 
et  il  y  avait  résisté.  Savary,  alors  ministre 
de  la  police ,  vint  auprès  de  lui,  et  em- 
ploya tous  les  genres  de  séductions  pour 
amener  cet  homme  inébranlable  à  don- 
ner son  assentiment  aux  projets  de  l'em- 
pereur :  la  réponse  du  Père  Fontana  fut  a 
toujours  la  même  ;  il  voulait  étudier  ce  * 
qu'on  lui  demandait ,  et  s'en  rapportait 
avant  tout  aux  décisions  du  saint-Siége. 
Ce  fut  pendant  sa  captivité  qu'il  compo- 
sa, pour  différentes  fêtes,  cinq  iVofcne* 
ou  Tridui  que  M.  de  Gregorio  a  publiés 
depuis.  Transportés  en  1814  à  la  Force 
où  ils  trouvèrent  M.  de  Boulogne ,  le  frè- 
re Charles  et  plusieurs  ecclésiastiques . 
ces  deux  captifs  attendirent  encore  quel- 
que   temps  l'heureuse    catastrophe   qui 


1 


devait  leur  ouvrir  les  portés  de  leur 
prison  ;  ce  moment  arriva  pour  le  Père 
Fontana  le  2  avril.  Le  ô  mai  il  partit 
pour  l'Italie.  Son  intention  était  de  se  fi- 
xer à  Monza,  dans  l'ancien  collège  de  son 
ordre  ;  mais  Pie  VII  l'appela  à  Rome ,  et 
le  nomma  secrétaire  de  la  congrégation 
des  affaires  ecclésiastiques.  Dans  le  mois 
de  mars  1815,  pendant  l'invasion  passa- 
gère de  Murât,  le  Père  Fontana  accompa- 
gna le  pape  à  Gènes ,  avec  l'ambassadeur 
de  Louis  XVIII,  tous  les  cardinaux  et  un 
grand  nombre  de  personnages  distingués. 
De  retour  à  Rome,  Pie  VII  créa  dans  le  con- 
sistoire du  1*"^  mars  181 G  plusieurs  cardi- 
naux, parmi  lesquels  on  remarqua  le  Père 
Fontana,  sous  le  titre  de  Sle. -Marie  de  la 
Miner\e,  et  M.  de  Gregorio  son  compagnon 
de  captivité.  Le  Père  Fontana  ne  cessa 
pas  d'être  le  général  de  son  ordre,  au- 
quel il  continua  de  porter  le  plus  vif 
intérêt ,  rétablissant  d'anciens  collèges , 
en  créant  de  nouveaux,  et  surveillant 
l'éducation  do  la  jeunesse  confiée  aux 
soins  des  barnabiles.  Il  fut  nommé  à  la 
même  époque  préfet  de  la  congrégation 
de  Yindex.  Le  souverain  poutit'e  avait 
pour  lui  le  plus  grand  attachement  ;  se- 
crétaire de  la  société  des  livres  orien- 
taux ,  consulteur  du  saint  Office  et  des 
Rites,  censeur  de  l'académie  de  la  Reli- 
gion catholique ,  président  de  la  propa- 
gande ,  il  fut  en  même  temps  membre 
des  premières  académies  de  l'Italie ,  de 
l'académie  Oorentine  ,  de  celle  des  Arca- 
des de  Rome,  de  celle  des  Immobiles  de 
Padoue ,  etc.  Comme  religieux ,  la  con- 
fiance en  ses  lumières  était  si  grande  que 
son  avis  faisait  autorité  dans  les  ques- 
tions théologiques  les  plus  difficiles ,  et 
qu'il  fut  souvent  consulté  ,  soit  par  des 
corporations  ,  soit  par  la  cour  de  Rome 
elle-même  ,  dans  les  circonstances  diffi- 
ciles qu'amenèrent  les  révolutions  de 
France  et  d'Italie.  Comme  savant,  le  Père 
Fontana  réuni!  un  grand  nombre  de  con- 
naissances :  non-seulement  il  était  versé 
dans  toules  les  sciences  ecclésiastiques, 
mais  il  savait  les  mathématiques ,  la  phi- 
losophie ,  les  sciences  naturelles  ;  il  était 
fort  dans  les  antiquités  et  connaissait  le 
stile  lapidaire-,  il  parlait  et  écrivait  les 
V. 


PON 


369 


langues  anciennes  et  plusieurs  langues 
de  l'Europe  :  l'idiome  toscan  lui  était  fa- 
milier, et  il  faisait  de  jolis  vers  grecs. 
Enfin  il  n'était  étranger  à  aucune  des 
parties  de  la  littérature  ancienne  et  mo- 
derne. Outre  les  ouvrages  que  nous 
avons  cités,  il  a  encore  laissé  quelques 
inscriptions  et  quelques /70C.ytei  grecques 
dans  le  genre  de  celles  de  saint  Grégoire 
de  Nazianze.  Le  Père  Fontana  est  mort  .î 
Rome  le  19  mars  1822,  à  l'âge  de  71  ans 
et  6  mois;  son  vieux  compagnon  ,  le  frè- 
re Charles ,  a  reçu  ses  derniers  adieux. 
Son  éloge  a  été  prononcé  par  le  Père 
Placide  Zurla  ,  abbé  camaldule ,  le  26  du 
même  mois  dans  le  collège  de  la  Propa- 
gande. Le  Père  Grandi,  barnal)ile,aécrit 
la  f^iedu  cardinal  F  ontana,  Rome,  1 823, 
in-8. 

*  FONTANELLE  (  Jean-Gaspard  Du- 
bois ),  professeur  de  belles- lettres  aux 
écoles  centrales  du  département  de  l'I- 
sère ,  ensuite  professeur  d'histoire  et 
doyen  de  la  faculté  des  lettres  de  l'aca- 
démie de  Grenoble,  naquit  dans  cette 
ville  le  29  octobre  17  37  ,  et  mourut  le  15 
février  1812.  Il  cultiva  avec  des  succès 
divers,  la  littérature,  la  poésie  et  la  phi- 
losophie. Son  principal  ouvrage  est  une 
traduction  nouvelle  des  Métamorphoses 
d'Ovide,  17G6,  2  vol.  in-8;  1778  et 
1780,  2  vol.  in-12;  et  avec  des  notes, 
1802,  4  vol.  in-8;  1806,  2  vol.  in-12. 
Elle  est  moins  élégante  que  celle  de  l'ab- 
bé Banier,  mais  plus  exacte.  Ses  autres 
productions  sont  1"  deux  comédies  qui 
n'eurent  aucun  succès  :  le  Connaisseur , 
en  2  actes  et  en  vers ,  et  le  Bon  mari ,  en 
un  acte  et  en  vers.  2'  Pierre  le  Grand, 
1766,  in-8,  tragédie  non  repré.sentée. 
3°  Ericie ,  ou  la  f^estale  ,  drame  en  3 
actes,  1768,  in-8,  pièce  dirigée  contre 
les  vœux  monastiques  ,  et  qui  occasiona 
dans  le  temps  un  grand  scandale.  Le  cen- 
seur royal  y  refusa  son  approbation ,  et 
défense  fut  faite  à  l'auleur  de  la  faire  im- 
primer ;  néanmoins  il  la  mit  au  jour,  et 
elle  fut  recherchée  avidement.  Eu  1789 
elle  a  été  représentée  sur  le  théâtre  Fran- 
çais. 4°  Naufrage  et  aventures  de  Pierre 
Fiaud,  \1Q% ,  in-12,  .souvent  réimpri- 
mé. 5"  Effets  des  passions,  ou  Mémoi- 

.4 


3^0 


mn 


res  de  Ptoricdnrt,  1768,  3  toi.  in-12. 
6°  Anecdotes  africaines,  1775,  in-8'. 
7°  Lore'dan ,  tragédie  en  4  actes ,  jouée 
sans  succès,  1776,  in-8.  8°  Nouveaux 
mélanges  sur  diffèrens  sujets ,  contenant 
des  essais  dramatiques  ,  philosophiques 
et  litte'raires,  1781,3  vol.  in-8.  9"  Anna, 
ou  l'Héritière  galloise ,  traduit  de  l'an- 
glais ,  1788,  4  vol.  in-12.  10"  Clara  et 
'.Emmeline  ,  aussi  traduit  de  l'anglais , 
1788  ,  2  vol.  in-12.  11°  Etat  actuel  de 
l'empire  ottoman ,  traduit  de  l'anglais , 
1791 ,  2  vol.  in-8.  12°  Cours  de  belles- 
lettres,  Paris,  1813  ,  4  vol.  in-8,  publié 
par  M.  Renauldon  ,  petit-fils  de  l'auteur. 
Ce  cours  ,  écrit  dans  le  sens  philosophi- 
que ,  n'a  pas  eu  de  succès  et  ne  peut 
convenir  à  la  jeunesse ,  qu'il  ne  peut  qu'é- 
garer en  lui  donnant  de  fausses  idées  sur 
nos  meilleurs  écrivains,  et  même  sur  la 
littérature ,  l'opinion  de  l'auteur  n'étant 
pas  toujours  conforme  à  celle  de  nos 
meilleurs  critiques.  On  a  encore  de  Fon- 
tanelle des  Contes  philosophiques  ,  et 
autres  ouvrages  immoraux  qui  n'ont  pas 
eu  plus  de  succès  que  ses  autres  produc- 
tions. Il  a  travaillé  à  la  Gazette  univer- 
selle de  politique  et  de  littérature ,  de 
Deux-Ponts,  depuis  son  établissement 
en  1770  jusqu'en  17  76;  à  la  partie  poli- 
tique du  Journal  de  politique  et  de  litté- 
rature, dont  Laharpe  rédigeait  la  partie 
littéraire  ;  et  à  la  partie  politique  du 
Mercure  de  France.  En  17  84  il  était  ré- 
dacteur de  la  Gazette  de  France. 

*  FONTANES  (  Louis  ,  marquis  de) , 
fils  de  Jean-Pierre  Marcellin  de  Fontanes, 
inspecteur  des  maniifactures  dans  le  Bas- 
I^nguedoc  et  dans  le  Poitou ,  naquit  à 
Niort  le  10  mars  1757  :  sa  famille  origi- 
naire deGenève  et  précédemment  d'Espa- 
gne, était  noble  et  protestante.  Après 
avoir  quitté  l'Espagne,  ses  parens  étaient 
venus  on  France  et  y  avaient  embrassé 
le  protestantisme  ;  mais,  par  .suite  de  la 
révocation  de  l'édit  de  Nantes  ils  avaient 
été  obligés  de  s'expatrier  dans  les  der- 
nières années  du  règne  de  Louis  XJV. 
Son  père,  né  à  Genève,  vint  en  France 
pour  chercher  à  y  recueillir  quelques 
débris  de  son  patrimoine  ;  il  fut  obligé 
d'accepter  la  place  d'inspecteur  des  ma- 


fÔN 

ùufacturcs,  et  le  Poitou  lui  doit  eh  grande 
partie  le  défrichement  des  terrains  stéri- 
les appelés  lais-de-mer ,  l'amélioration 
de  la  culture  et  la  propagation  des  pépi- 
nières de  garance.  Ce  n'était  pas  non 
plus  un  homme  sans  talcns  littéraires,  et 
l'on  trouve  du  même  écrivain  des  mé- 
moires intéressans  dans  les  Epliéméri- 
des  du  citoyen,  et  dans  les  Recueils  de 
diverses  sociétés  d'agriculture.  Il  laissa 
deux  fils ,  l'aîné  qui  se  fit  connaître  de 
bonne  heure  par  des  essais  poétiques , 
mourut  à  2 1  ans  :  le  cadet  est  celui  dont  il 
est  question  dans  cet  article.  Celui-ci  fut 
élevé  par  sa  mère  dans  la  religion  catho- 
lique, et  fil  ses  études  chez  les  oratoriens 
dans  sa  ville  natale.  Après  avoir  terminé 
ses  clases,  il  vint  à  Paris  oîi  il  ne  tarda 
pas  à  se  faire  une  brillante  réputation. 
Dans  les  premiers  morceaux  de  poésie 
qu'il  publia  ,  on  s'accordait  à  trouver  la 
réunion  bien  rare  d'une  imagination  bril- 
lante ,  d'un  goût  épuré  et  d'une  har- 
monie douce  et  suave.  Ce  jeune  poète 
n'avait  alors  que  20  ans.  L'année  sui- 
vante, il  publia  la  traduction  en  vers 
de  l'Essai  sur  l'homme  de  Pope ,  traduc- 
tion qu'il  revit  avec  le  plus  grand  soin , 
et  dont  la  dernière  publication  eut  lieu 
trois  jours  avant  sa  mort.  Le  caractère 
principal  de  cet  ouvrage  est  la  précision  ; 
peut-être  dégénère-t-elle  quelquefois  en 
sécheresse  ;  mais ,  si  quelques  vers  furent 
l'objet  d'une  juste  critique,  du  moins 
chacun  loua  sans  restriction  ni  réserve 
le  discours  qui  sert  d'introduction.  De- 
puis 17  83  à  1789,  Fontanes  publia  quel- 
ques petits  poèmes  qui  augmentèrent 
encore  sa  réputation  ;  nous  citerons  sur- 
tout le  Jour  des  morts  dans  une  cam- 
pagne, qui  est  une  heureuse  imitation  du 
Cimetière  de  Gray  ;  quelques  f.agmens 
du  Poème  de  I^ucrèce  qui  font  regretter 
que  celte  traduction  n'ait  pas  été  termi- 
née ;  le  Ferger  qui  passe  pour  son  meil- 
leur ouvrage,  et  enfin  VE pitre  à  Louis 
XVI  sur  l'édit  en  faveur  dcsnnn-calho 
ligues,  qui  remporta  le  prix  à  l'académie 
française.  Dans  les  première^  années  de 
la  révolution,  Fontanes  rédigea  le  jour- 
nal intitulé  le  Modérateur ,  dont  le  titre 
indique  assez  dans  quel  esprit  de  pa- 


FON 

cification  il  ëtait  rédigé.  Il  s'était  mon^ 
tré  dès  le  commencement  de  nos  troubles 
civils  opposé  au  bouleversement  que 
méditaient  les  révolutionnaires  ;  et ,  s'il 
publia  son  Poème  séculaire  pour  la  fête 
du  14  juillet  1 7  90 ,  célébrée  au  champ 
de  Mars  sous  le  nom  de  fédération,  il 
osa  rappeler  des  souvenirs  glorieux  de 
la  monarchie  ;  et  les  noms  immortels  de 
Turenne  et  de  Condé  furent ,  au  grand 
scandale  des  fédérés ,  prononcés  dans  ce 
chant  national.  Au  moment  oii  la  terreur 
commençait  à  faire  couler  le  sang  de  tant 
de  bons  citoyens ,  Fontanes  eut  le  cou- 
rage de  rédiger  et  de  faire  présenter  à  la 
Convention  une  pétition  en  faveur  des 
malheureux  habitans  de  Lyon  (17  94).  Ce- 
pendant il  ne  fut  point  alors  persécuté  , 
et ,  après  le  9  thermidor  ,  oii  tomba  Ro- 
bespierre ,  il  fut  nommé  membre  de  l'In- 
stitut (classe  delittératiue),  et  peu  après 
professeur  de  belles-lettres  à  l'école  cen- 
trale des  Quatre-Nations.  La  révolution 
du  1 8  fructidor  qui  proscrivit  les  royalis- 
tes ,  comprit  Fontanes  dans  ses  proscrip- 
tions. Exilé,  il  chercha  d'abord  à  ne 
point  quitter  la  France ,  et  se  cacha  pen- 
dant quelque  temps  dans  les  environs  de 
Paris  ;  puis  découvert  et  poursuivi ,  il 
«rra  d'asile  en  asile  ,  se  retira  enfin  à 
Hambourg  et  passa  en  Angleterre.  Ac- 
cueilli avec  distinction  par  les  princes 
français,  il  retrouva  à  Londres  M.  de 
Chateaubriand  qu'il  avait  déjà  connu  à 
Paris  :  leur  amitié  devint  plus  intime  ;  et 
dèslors  jusqu'à  la  mort  deFonianes,  aucun 
nuage  n'est  venu  la  troubler.  Le  18  bru- 
maire rouvrit  les  portes  de  la  patrie  aux 
malheureux  français  que  nos  troubles 
avaient  disséminés  à  l'étranger  :  Fontanes 
s'empressa  de  revenir  à  Paris,  où  il  fut  l'un 
des  rédacteurs  àa  Mercure  (avec  Laharpe, 
Esmenard  et  M.  de  Chateaubriand  ).  On 
assure  que  ce  fut  Lucien  Buonaparte  qui 
le  lança  dans  le  monde,  ilenavait  fait  son 
secrétaire.  Lorsque  l'on  apprit  la  mort 
de  Wasinghton,  le  gouvernement  prépara 
une  fètc  en  l'honneur  de  ce  fondateur 
de  la  liberté  américaine  ;  Fontanes  fut 
charge  de  faire  l'éloge  de  ce  général , 
et  cette  oraiion  funèbre  fut  prononcég 
tl8»)S  (e  ffmplc  de  Mars ,  çQmip§  i'o|» 


FOÎ^  371 

disait  alors ,  c'est-à-dire  dans  la  chapelle 
des  Invalides  qui  n'était  point  encore 
rendue  au  culte.  On  remarqua  que  cet 
écrivain  royaliste  trouva  moyen  de  pla- 
cer l'éloge  de  la  reine  Marie-Antoinette, 
que  l'on  avait  impitoyablement  immolée 
quelques  années  auparavant,  et  dont  les 
révolutionnaires  ne  purent  jamais  souf- 
frir ni  les  vertus  ni  la  mémoire.  Cette 
princesse  informée  qu'un  jeune  Argill , 
prisonnier  de  guerre  ,  était  en  Amérique 
sous  le  poids  d'une  condamnation  à  mort , 
avait  intercédé  pour  lui  auprès  de  Wasing- 
thon  qui  lui  avait  accordé  sa  grâce.  C'est 
à  ce  trait  d'humanité  que  Fontanes  fit 
allusion  ,  et  chacun  admira  l'audace  ver- 
tueuse de  l'orateur  qui  rappelait  ainsi , 
au  moment  oii  la  révolution  n'était  point 
encore  terminée ,  le  souvenir  des  vertus 
d'une  des  plus  illustres  victimes  de  cette 
époque  sanglante.  Fontanes  rentra  à  l'a- 
cadémie dont  il  avait  été  exclus  pendant 
son  exil  :  nommé  peu  de  temps  après 
membre  du  Corps  législatif,  il  en  devint 
président.  C'était  l'époque  des  grandes 
victoires  de  Buonaparte  :  c'était  aussi  celle 
des  actes  les  plus  sages  de  son  admini- 
.stration  :  Fontanes  loua  les  uns  et  les  au- 
tres. On  lui  en  a  fait  un  crime  ,  et  les 
mots  de  courtisan  et  d'adulateur  lui  ont 
été  prodigués  :  un  écrivain  surtout ,  M. 
de  Mongaillard ,  â  déversé  sur  lui  tout  le 
fiel  de  la  plus  virulente  satire  (  Histoire 
de  France ,  tome  9,  pages  84,  181  ,  287; 
tome  10,  pages  174,  179,  207,  260,  267, 
tome  1 1  ,  pages  47  ,  tCl  ,  282  ,  etc.  )  Ce- 
pendant Fontanes  dans  plusieurs  occa- 
sions fit  preuve  de  courage  et  de  liberté  : 
on  peut  consulter  ce  qu'il  dit ,  comme 
président,  le  29  février  1800,  aux  com- 
missaires du  gouvernement  qui  vinrent 
proposer  au  Corps  législatif  un  décret 
qui  condamnerait  aux  peines  les  plus 
graves  et  «nème  à  la  mort ,  ceux  qui  recè- 
leraient Pichegm  et  Georges  Cadoudal. 
Lorsque  les  Codes  eurent  été  promul- 
gués, on  éleva  dans  la  salle  des  séances 
du  Corps  législatif,  une  statue  en  mar- 
bre en  l'honneur  de  Buonaparte  :  l'inau- 
guration en  fut  faite  avec  apparat ,  et 
Fontanes  prononça  ces  paroles  coura-» 
geuses,  qui  frappaient  de  réprobatiqn  h 


37Î  FON 

révolution  lout  entière  :  La  première 
place  e'tnit  vacante  ;  le  plus  digne  devait 
la  remplir  :  en  y  montant ,  il  rHa  détrôné 
que  Vanarchie  qui  régnait  seule  dans 
V absence  de  tous  les  pouvoirs  légitimes. 
C'est  dans  le  même  sens  qu'il  parla  au 
souverain  Pontife  Pie  VII ,  qui  venait 
pour  couronner  Buonaparte  :  il  lui  disait 
que  la  France  abjurait  de  trop  longues 
erreurs,  et  qu'elle  commençait  enlin  à 
reconnaître  que  toutes  les  pensées  irré- 
ligieuses sont  des  pensées  impolitiques, 
et  que  tout  attentat  contre  le  christia- 
nisme est  un  attentat  contre  la  société. 
Dans  d'autres  occasions  il  osa  donner  des 
leçons  à  un  homme  qui  n'aimait  pas  les 
conseils.  Ainsi,  lorsqu'après  la  conquête 
du  royaume  de  Naples,  on  remit  à  Buona- 
parte les  drapeaux  que  les  armées  fran- 
çaises avaient  enlevés  aux  Italiens  pen- 
dant'cette  guerre,  Fontanes,  en  présence 
de  tout  le  corps  diplomatique  et  d'une 
assemblée  nombreuse ,  dit  au  héros  de 
cette  époque  :  Malheur  à  moi  si  je  fou- 
lais aux  pieds  la  grandeur  abattue  !  Je 
respecte  la  majesté  royale  jusque  dans 
ses  humiliations  ,  et  même  ,  quand  elle 
n'est  plus,  il  reste  je  ne  sais  quoi  de 
vénérable  dans  ses  débris.  Dans  toutes 
les  circonstances  oîi  il  lui  était  possible 
d'adresser  sans  inconvenance  quelques 
vérités  utiles  au  pouvoir ,  il  le  fit  avec 
une  noble  audace.  Mais ,  malgré  toutes 
les  précautions  oratoires  qu'il  avait  le  ta- 
lent de  prendre,  il  choqua  le  maître  , 
qui  ne  permit  point  d'abord  d'imprimer 
ses  discours ,  en  disant  qu'il  suffisait  d'en 
avoir  entendu  un ,  et  qui  plus  tard  lui 
enleva  la  présidence  du  Corps  législatif. 
Quelque  grands  que  fussent  les  éloges  de 
Fontanes  ,  jamais  ils  ne  furent  adressés 
qu'officieusement  comme  président ,  et  au 
nom  du  Corps  législatif  :  comme  simple 
citoyen,  il  n'écrivit  pas  une  seule  ligne , 
pas  un  seul  vers  en  l'honneur  de  Buona- 
parte ,  et  cette  remarque  n'échappa  point 
à  de  lâches  courtisans  qur  s'irritaient 
encore  plus  de  ce  silence,  qui  n'était 
rompu  que  par  des  louanges  officielles. 
Fontanes  avait  reçu  ,  pendant  sa  prési- 
dence le  titre  de  comte;  en  1808  ,  à  la 
préptioft  de  l'université  ,'il  pbtinî  la  cli- 


FON 

gnilé  de  grand-maître ,  et  la  jeunesse 
française  sait  assez  comment  il  sut  faire 
revivre  les  études  si  long-temps  aban- 
données ,  avec  quel  zèle  il  travailla  à  la 
résurrection  des  établissemens  d'instruc- 
tion ,  et  quel  succès  il  obtint  sous  le 
rapport scientifiqueetlittéraire.  On  l'avait 
vu  placer  des  ecclésiastiques  à  la  tête  des 
collèges  ,  rechercher  les  jésuites  ou  les 
oratoriens  pour  leur  confier  la  direction 
deces  établissemens,  accueillir  tous  les  ta- 
lens  pour  les  faire  profiter  à  l'amélioration 
des  éludes.  Si  de  grands  vices  s'atta- 
chèrent à  l'organisation  de  l'université , 
Fontanes  en  pallia  un  bon  nombre  ;  si 
le  despotisme  dirigea  l'éducation ,  c'est 
que  le  despotisme  du  trône  imposait 
toutes  ces  petites  tyrannies  subalternes  ; 
si  le  régime  militaire  fut  celui  de  nos 
écoles  ,  c'est  que  l'empereur  était  un 
guerrier  :  si  la  religion  ne  présida  pas 
entièrement  aux  premières  années  de 
notre  jeunesse  ,  c'est  que  la  religion 
n'avait  pas  repris  tout  son  empire ,  et 
qu'elle  était  peu  encouragée  par  les  hom- 
mes plus  avancés  en  Age.  >'ous  ne  parle- 
rons pas  des  autres  défauts  de  l'adminis- 
tration universitaire  ,  que  Fontanes  ne 
put  faire  disparaître;  de  cette  distinction 
presque  avilissante  entre  les  administra- 
teurs qui  avaient  l'habitude  de  se  réserver 
tous  les  avantages  et  tous  les  honneurs  , 
et  les  professeurs  qui  avaient  toutes  les 
charges  de  l'enseignement  sans  pouvoir 
participer  à  des  réconipenses  justement 
méritées  ;  de  ces  sinécures  connues  sous 
le  nom  de  conseil  royal ,  d'inspection 
générale,  d'inspection  d'académie;  etc. 
La  colère  de  Buonaparte  s'étant  un  peu 
apaisée ,  Fontanes  fut  admis  au  Sénat 
le  5  février  1810.  En  avril  181  i  ,  il  fut 
un  des  premiers  à  parler  en  faveur  des 
Bourbons ,  et  comme  sénateur  il  vota  la 
déchéance  de  Buonaparte.  Maintenu  dans 
son  titre  de  grand-maître,  puis  créé  pair 
de  France  ,  il  prit  part  à  la  rédaction  de 
la  charte  de  Louis  XVIII ,  fit  appeler  au 
conseil  royal  l'abbé  Emery  et  M.  de  Bo- 
nald.  Dans  le  mois  de  février  1815,  il  fut 
décidé  que  l'université  serait  régie  par 
un  conseil  :  Fontanes  perdit  sa  place  de 
Çrand-roaître  ;  mais,  pour  lui  prouver  ^ue 


FON 

ce  n'était  point  une  disgrâce  ,  le  roi  lui 
donna  Je  grand  cordon  de  la  Légion  d'hon- 
neur. Pendant  les  cent  jours  ,  Fontanes 
resta  éloigné  des  affaires  et  devint  à  la 
seconde  restauration  membre  du  conseil 
privé  ;  on  l'entendit  rarement  à  la  cham- 
bre des  pairs;  mais  à  l'académie  fran- 
çaise ,  il  lit  plusieurs  discours  où  l'on 
admira  de  nouveau  son  érudition  et  ses 
talens  oratoires,  notamment  lorsqu'il  reçut 
M.  de  Sèze  dans  cette  compagnie  (25  avril 
1SJ6  ).  Depuis  long-temps  Fontanes, 
devenu  marquis  et  élevé  aux  dignités 
les  plus  émiuentes,  semblait  avoir  ou- 
blié ses  talens  poétiques.  En  1817,  il 
lut  à  l'académie  française  une  Ode  sur  la 
violation  des  tombeaux  de  St. -Denis , 
qui  eut  le  plus  grand  succès,  et  il  la  dé- 
clama lui-même  avec  autant  de  grâce  que 
de  noblesse.  A  l'époque  oii  parurent  les 
Martyrs  de  son  ami  M.  de  Chateaubriand, 
il  composa  aussi  quelques  stances  en  son 
honneur,  et  elles  sont  dignes  de  la  répu- 
tation du  poète  et  de  la  gloire  de  l'écri- 
vain. Après  avoir  souffert  quelque  temps 
d'une  maladie  violente  que  lui  avait 
causée  la  fin  tragique  du  jeune  St. -Marcel- 
lin  mort  dix-huit  mois  auparavant,  il  mou- 
rut à  Paris  le  17  mars  1821  ,  à  l'âge  de 
G 4  ans.  Les  sentimens  chrétiens  qui  l'a- 
nimèrent pendant  ses  derniers  momens, 
avaient  présidé  à  toute  sa  vie ,  et  Fonta- 
nes peut  être  placé  parmi  les  écrivains 
religieux  ^  comme  parmi  les  écrivains 
royalistes.  Il  laissa  en  portefeuille  un 
poème  sur  ladelivrancc  de  la  Grècc(\m  n'é- 
tait pas  entièrement  terminé.  Nous  avons , 
dans  le  cours  de  cette  notice ,  fait  con- 
naître les  principaux  ouvrages  de  Fon- 
tanes. Ce  personnage  célèbre  peut  être 
envisagé  comme  écrivain  et  comme  légis- 
lateur. Les  mêmes  opinions  ])oIitique9t, 
littéraires  et  religieuses  se  font  remarquer 
dans  tous  ses  actes  et  dans  tous  ses  écrits  : 
c'est  un  homme  fidèlement  attaché  à  ces 
principes  d'ordre  et  de  religion  qui  font 
la  sécurité  des  empires.  Partisan  de  la 
légitimité  ,  il  eut  des  regrets  pour  la 
chute  du  trône  des  Bourbons  ;  il  eut  le 
bonheur  de  le  voir  relevé  et  peut-être 
contribua-t-il  à  sa  restauration.  Il  vit 
dans  Buonaparte  le  destructem*  dç  Tîmaf- 


FON  3:3 

chic ,  et  à  ce  titre ,  il  lui  devait  de  la 
reconnaissance  :  tous  les  bons  Français 
ont  éprouvé  le  même  sentiment  pour  cet 
illustre  guerrier.  Dans  le  Corps  législatif, 
comme  au  Sénat  il  se  montra  toujours 
non  l'homme  du  pouvoir,  mais  l'homme 
de  la  France  ,  et  sa  voix  courageuse  fit 
entendre  plus  d'une  sévère  leçon,  prépa- 
rée par  des  éloges  d'autant  plus  grands 
qu'ils  devaient  déguiser  toute  l'âpreté  du 
conseil  ou  même  de  la  réprimande.  Comme 
écrivain,  il  composa  des  ouvrages  en  vers 
et  en  prose  :  ceux-ci  sont  des  discours 
faits  avec  le  plus  grand  talent ,  avec  une 
pureté  et  une  élégance  rare  :  mais  di- 
sons-le ,  on  y  voit  souvent  le  rhéteur 
encore  plus  que  l'orateur  :  ses  poe'sies 
portent  le  même  caractère  :  elles  sont  en 
outre  suaves  et  harmonieuses  :  mais  le 
poète  n'imagina  jamais  le  plan  d'un 
grand  ouvrage  ,  et  ce  défaut  de  con- 
ception l'a  fait  placer  parmi  les  poètes 
du  second  ordre.  Quelques  biographes 
prétendent  que  son  véritable  nom  était 
Fontagnes. 

FOINTAÎS'GES  (Marie-Angélique  de 
ScoRAiLLE  DE  RousiLtE,  duchcsse  dc). 
née  en  lG61  ,  d'une  ancienne  famille  de 
Rouergue,  était  fille  d'honneur  de  Ma- 
dame. «  Belle  comme  un  ange,  dit 
»  l'abbé  de  Choisi,  mais  sotte  comme  un 
)i  panier,  »  elle  n'en  subjugua  pas  moins 
le  cœur  de  Louis  XIV.  A  une  partie  de 
chasse,  le  vent  ayant  dérangé  sa  coiffure, 
elle  la  fit  attacher  avec  un  ruban  dont 
les  nœuds  lui  tombaient  sur  le  front  ;  et 
celle  mode  passa  avec  son  nom  dans 
toute  l'Europe.  Le  roi  la  fit  duchesse; 
mais  elle  ne  jouit  pas  long-temps  de  sa 
faveur.  Elle  mourut,  le  28  juin  1681  ,  à 
20  ans,  à  l'abbaye  de  Port-Royal  de 
Paris,  oîi  elle  s'était  retirée,  après  avoir 
été  abandonnée  par  Louis  XIV  à  la  suite 
de  ses  couches,  pendant  lesquelles  sa  ma- 
ladie l'avait  entièrement  défigurée.  Elle 
voulut  voir  Je  roi  dans  sa  dernière  ma- 
ladie. Louis  XIV  s'attendrit ,  et  elle  lui 
dit  :  n  Je  meurs  contente ,  puisque  mes 
»  derniers  rqgards  ont  vu  pleurer  mon 
»  roi.  »  Faible  consolation  et  bien  peu 
assortie  à  la  nature  du  moment. 


3:4  FOK 

FONTANINI  (  Juste  ) ,  savant  arche- 
vêque d'Ancyre ,  et  chanoine  de  l'église 
de  Ste. -Marie-Majeure ,  camérier  d'hon- 
neur de  Clément  XI,  naquit  en  1 666  dans 
le  duché  de  Frioul ,  et  mourut  à  Rome 
en  1736.  Il  n'y  avait  presque  aucun 
homme  distingué  dans  le  monde  savant, 
avec  lequel  il  ne  fût  en  commerce  de 
lettres.  On  a  de  lui  un  grand  nombre 
d'ouvrages  dont  les   plus  connus    sont 

1  °  sa  Bibliothcca  délia  Eloquenza  ita- 
liana.  C'est  un  catalogue  raisonné  des 
bons  livres  de  la  langue  italienne  dans 
les  dififérentes  classes.  Il  en  fut  fait  plu- 
sieurs éditions  du  vivant  de  l'auteur  ; 
mais  la  meilleure  et  la  plus  ample  est 
celle  qui  a  été  donnée  à  Venise  en  n.î.., 

2  vol.  in-4,  avec  les  notes  d'Apostolo- 
Zéno ,  dans  lesquelles  ce  savant  et  judi- 
cieux bibliographe  a  relevé  une  multitude 
d'erreurs  et  d'rnexactitudesdc  Fontanini. 
2°  Une  Collection  des  bulles  de  canoni- 
sation, depuis  Jean  XV  jusqu'à  Be- 
noît XIII,  1729,  in-fol.en  latin.  3»  Une 
Histoire  Utte'raire  d^ A quile'e  ,  en  latin, 
in-4,  Rome,  17  42  :  ouvi-age  posthume, 
plein  d'érudition  sacrée  et  profane ,  et 
d'une  bonne  critique.  4°  Dissertatio  de 
corona  ferrea  Longobardorutn,  1717.  Il 
prétend  que  la  couronne  de  fer  que  l'on 
conserve  à  Monzal  ,  petite  ville  de  Lom- 
bardie,  est  faite  de  l'un  des  clous  de 
N.  S. ,  et  qu'on  s'en  est  servi  ancienne- 
ment pour  couronner  les  rois  de  Lombar- 
die,  et  ensuite  les  empereurs  d'Allema- 
gne. Muratori  lui  opposa  le  traité  :  De 
coronafcrrea,  où  il  soutient  qtie  la  cou- 
ronne de  fer  était  inconnue  du  temps 
des  rois  Lombards. 

FOjNTANON  (Antoine),  avocat  au 
parlement  de  Paris,  natif  d'Auvergne, 
est  le  premier  qui  ait  rédigé  avec  ordre 
les  ordonnances  des  rois  de  France.  On 
a  de  lui  une  Collection  des  e'dits  de  nos 
rois  depuis  1210  jusqu'à  la  fin  du  16"= 
siècle ,  temps  auquel  cet  auteur  floris- 
sait,en  4  vol.  in-fol.,  Paris,  1611. 

FONTE-MODEftATA,  dame  véni- 
tienne, née  en  1 555 ,  morte  le  5  novem- 
bre 1592,  à  37  an»,  avait,  dit-on,  une 
mémoire  si  heureuse ,  qu'elle  répétait , 
pmr  »lo»i  4irç ,  »9t  powr  mot  m  m" 


FON 

mon ,  après  l'avoir  entendu  une  fois.  On 
a  d'elle  divers  ouvrages  en  vers  et  en 
prose.  Les  plus  connus  sont  un  éloge  de 
son  sexe  en  vers,  intitulé  :  Ilmerito  délie 
donne,  imprimée  à  Venise,  1600,  in-4, 
et  le  Floridoro ,  poème  en  13  chants, 
imprimé  dans  la  même  ville  en  1581  , 
in-4.  Fonte-Moderata  est  un  surnom 
qu'elle  s'était  donné.  Elle  s'appelait  Mo- 
desta  Pozzo,  et  était  mariée  à  un  gentil- 
hommevénitien,  nommé  PhilippeGeorgi. 
Sar/e  a  été  écrite  par  Nie.  Doglioni. 

'  FONTENAILLES  (  André  Perret 
de  ) ,  ecclésiastique  vénérable ,  né  à  Ma- 
çon vers  1754,  mort  à  Paris  le  13  juin 
1831  ,  avait  fait  ses  études  au  lycée 
Louis  le  Grand ,  où  il  fut  envoyé  foçt 
jeune  ,  et  où  il  fit  la  connaissance  intime 
du  jeune  Decalogne,  dont  l'abbé  Proyart  a 
publié  la  vie.  Dirigé  par  M.  l'abbé  Cardin 
principal  de  cet  établissement ,  il  resta 
long-temps  avec  lui ,  etfitmêmesa  théo- 
logie dans  cette  maison.  Il  embrassa  l'état 
ecclésiastique  et  fut  reçu  docteur  en 
théologie  k  la  fin  de  1783.  Nommé  vicaire 
de  la  petite  paroisse  de  Ste. -Croix  dans 
la  Cité  ,  il  devint  peu  après  chanoine  de 
la  cathédrale  deMàcon.  Mais  la  révolution 
lui  réservait  ses  rigueurs  ;  il  lut  du  nom- 
bre des  prêtres  que  la  barbarie  révolu- 
tionnaire jeta  sur  les  pontons  de  Roche- 
fort.  Après  avoir  survécu  comme  par 
miracle  à  celte  persécution  dans  laquelle 
périrent  presque  tous  ses  coj^ipagnous 
d'infortune,  il  reprit  son  ministère  tantôt 
comme  missionnaire  ,  tantôt  comme  curé 
dans  le  diocèse  de  Lyon.  Il  revint  à 
Paris  où  il  prêcha  dans  presque  toutes 
les  églises,  et  donna  des  retraites  qui  pro- 
duisirent les  plus  heureux  effets.  Obligé 
de  s'abstenir  du  tribunal  de  la  pénitence 
^arsuite  d'une  grave  surdité  qui  l'affligea, 
il  ne  resta  pas  oisif  ;  il  chercha  à  se  con- 
soler de  l'inaction  où  le  tenaient  ses  in- 
firmités par  la  publication  de  plusieurs 
écrits,  dont  l'Jmide  la  religion  a  rendu 
un  compte  avantageux.  C'est  d'après  la 
même  feuille  où  nous  aimons  à  prendre 
tous  les  renseignemens  que  nous  y  trou- 
vons ,  parce  qu'ils  sont  dictés  par  l'amour 
dp  l'Eglise  et  de  la  vérité  ;  c'est ,  disons- 
oous ,  d'acres  la  wèiue  fçiiiUe  qjue  nom» 


I 


FÔN 

doûneroùs  la  liste  des  écrits  principaus 
de  ce  vertueux  ecclésiastique  :  1°  Manuel 
religieux  à  l'usage  des  maisons  d'édu- 
cation,  1824,  iu-l8;  2°  Manuel  des 
domestiques  et  des  ouvriers,  1826; 
3°  Instruction  sur  le  jubile',  même  an- 
née ;  4°  le  Guide  de  la  jeunesse  et  suite 
du  manuel  religieux ,  1826,  2  vol.  in-1 8  ; 
ce  sont  des  lectures  spirituelles  pour 
tous  les  jours  de  l'année  ;  5°  le  Guide  de 
la  jeunesse  chrétienne  ou  manuel  reli- 
gieux,  1826,  2  vol.  in-18;  c'est  une 
nouvelle  édition  du  Manuel  de  1824;  la 
seconde  partie  se  vend  séparément  et  est 
destinée  aux  jeunes  gens  qui  ont  terminé 
leur  éducation  ;  6°  Observations  sur  l'é- 
ducation des  jeunes  gens  ,  in-8 ;  1°  Ob- 
servations sur  Féducation  des  jeunes 
ecclésiastiques ,  in-8  ;  ces  deux  écrits 
furent  réunis  dans  une  2^  édition  qui 
parut  en  1829  ,  in-8  de  126  pag.  ;  8"  Dis- 
cours de  morale  à  l'usage  des  missions 
et  des  retraites  spirituelles,  1829,  in-12. 
Enfin  le  mal  empirant  de  jour  en  jour , 
Fonteuailles  se  munit  de  tous  les  secours 
de  la  religion ,  édifia  tous  les  fidèles  par 
sa  piété  ,  par  sa  résignation  dans  les  souf- 
frances et  par  sa  charité  chrétienne.  L'ah- 
bé  de  Fonteuailles  avait  été  quelque  temps 
grand-vicaire  de  Màcon ,  sur  la  fin  de 
l'administration  de  M.  Moreau,  dernier 
évêque  de  ce  siège  ;  il  avait  le  titre  de 
chanoine  honoraire  des  chapitres  de  Bor- 
deaux et  de  Montauban.  Il  mourut  dans 
un  état  voisin  de  l'indigence. 

FOIVTENAY  (  Jean-Baptiste  ,  Blain 
de),  peintre,  né  à  Caen,  l'an  1654,  con- 
seiller à  l'académie  de  peinture ,  mérita 
un  logement  aux  galeries  du  Louvre,  et 
une  pension  par  ses  talens.  Il  avait,  dans 
un  degré  supérieur ,  celui  dépeindre  les 
fleurs  et  les  fruits.  Sa  touche  est  vraie, 
son  coloris  brillant ,  ses  compositions 
variées.  Les  insectes  paraissent  vivre 
dans  ses  ouvrages  ;  les  fleurs  n'y  per- 
dent rien  de  leur  beauté  ,  et  les  fruits  de 
leur  fraîcheur.  Ce  peintre  mourut  à  Paris 
en  1715. 

•FONTENAY  (Pierre-Claude),  jé- 
suite, né  à  Paris  en  1683,  mort  à  La 
Flèche  en  1742  ,  continua  ['Histoire  de 
l'Eglise  gallicane,  après  la   mort  du 


fm 


S75 


Père  Longueval,  et  donna  les  tomes  9 
et  10  de  cetouvrage.il  avait  composé 
une  partie  du  1 1^  vol. ,  que  le  Père  Bru- 
moy  acheva.  Son  stile  est  moins  coulant 
et  moins  historique  que  celui  de  son  con- 
frère ;  mais  ou  y  voit  un  homme  qui  est 
maître  de  son  sujet.  «  Il  joignait,  dit  le 
«  Père  Berthier ,  à  des  manières  faciles  et 
i>  complaisantes  toutes  les  vertus  de  son 
w  état.  »  Il  avait  travaillé  au  Journal  de 
Trévoux.  Il  s'était  occupé  d'une  Histoire 
des  papes  ;  mais  il  n'a  pas  été  possible 
de  tirer  parti  des  manuscrits  qu'il  a 
laissés  sur  ce  sujet. 

*  FOINTENAY  (Louis-Abel  de  Boknk- 
FONS,  plus  connu  sous  Icnom  d'abbé  de), 
né  en  1 7  37  à  Castelnau  de  Brassac  près  de 
Castres,  entra  chez  les  jésuites,  etpiofessa 
les  humanités  à  Tournon.  Après  la  dissolu- 
tion de  cette  société,  il  vint  se  fixer  tî  Paris 
oii  il  se  fit  connaître  sous  le  nom  d'abbe 
de  Fontenay  par  plusieurs  ouvrages  d'un 
mérite  assez  médiocre  :  il  rédigea  succes- 
sivement les  ^/fiches  de  province  et  le 
Journal  général  de  France ,  jusqu'au 
10  août  17  92,  qu'il  fut  proscrit  pour 
avoir  défendu  dans  sa  feuille  les  intérêts 
de  la  monarchie.  Il  passa  dans  l'étranger, 
et  ne  revint  en  France  qu'après  la  ter- 
reur. Il  se  remit  à  ses  travaux  littéraires , 
et  mourut  le  28  mars  1806.  On  a  de  lui 
1  °  Dictionnaire  des  artistes,  1777,  2  vol . 
petit  in-8.  2"  Table  de  l'Histoire  univer- 
selle, traduite' de  l'anglais,  formant  le 
46^  vol.  in-4.  3"  La  plus  grande  partie  du 
texte  de  la  Galerie  du  Palais  Royal, 
17  86-1808,  59  livraisons  in-fol.  4°  La 
suite  du  Voyageur  français.  5°  L'illus- 
tre destinée  des  Bourbons,  17  90,  4  vol. 
iu-12.  G"  Dictionnaire  de  l'élocution 
française,  par  Demandre,  édition  revue, 
corrigée  et  augmentée,  1802,  2  vol. 
in-8.  7°  Une  nouvelle  édition  delaGeb- 
graphie  de  Lacroix,  1805,  2  vol.  in-12, 
etc. 

FOIVTENAY.  Foyez  Brumoï  Lokguk- 

VAL. 

FONTENÈLLE  (Bernard  le  Bovie4 
ou  le  BocYER  de  ),  un  des  savans  les  plus 
aimables  du  18^  siècle,  naquit  le  11  fé- 
vrier 1C57  ,  à  Bouen,  d'un  père  avocat, 
et  d'une  mère  qui  était  la  sœur  du  grand 


3^6 


POfT 


Corneille.  Cet  enfant  destine  4»  vivre 
près  d'un  siècle,  dit  l'abbé  Trublct,  pensa 
mourir  de  faiblesse  le  jour  même  de  sa 
naissance.  Le  jeune  Fonlenelle  fit  ses 
études  à  Rouen  cbcz  les  jésuites  qu'il  a 
toujours  aimés.  En  rhétorique  à  13  ans, 
il  composa  pour  le  prix  des  palinods  une 
pièce  en  vers  latins  ,  qui  fut  jugée  digne 
d'être  imprimée ,  mais  non  d'être  cou- 
ronnée. Après  sa  physique,  il  fit  son  droit, 
fut  reçu  avocat ,  plaida  une  cause ,  la 
perdit,  et  promit  de  ne  plus  plaider.  11 
renonça  au  barreau  pour  la  littérature  et 
la  philosophie  ,  entre  lesquelles  il  parta- 
gea sa  vie.  En  1674  ,  à  17  ans,  il  vint  à 
Paris;  à  20  ans  fl  fit  une  partie  des  opéras 
de  Psyché  et  de  Bellérophon ,  qui  pa- 
rurent en  1678  et  1679,  sous  le  nom 
de  Thomas  Conreille  son  oncle.  En 
1681,  il  fit  jouer  sa  tragédie  A'Aspar. 
Elle  ne  réussit  point;  il  en  jugea  com- 
me le  public ,  et  jeta  son  manuscrit  au 
feu.  Ses  Dialogues  des  morts ,  publiés 
en  1683  ,  reçurent  un  accueil  plus 'favo- 
rable. Ils  offrent  de  la  littérature  et  de  la 
philosophie;  la  morale  y  est  agréable, 
peut-être  même  trop ,  et  le  philosophe 
n'a  pas  assez  écarté  le  bel-esprit.  Voici 
ses  autres  ouvrages  suivant  l'ordre  chro- 
nologique :  1  "Lettres  du  chevalier  d'Er. . 

1685.  Elles  sont  pleines  d'esprit ^  mais 
non  pas  de  celui  qu'il  faudrait  dans  des 
lettres.  On  sent  trop  qu'on  a  voulu  y  en 
mettre,  et  qu'elles  sont  le  fruit  d'une 
imagination  froide  et  compassée.  2°  En- 
tretiens sur  la  pluralité'  des  mondes , 

1686.  n  Ce  livre,  dit  l'auteur  du  Siècle 
»  de  Louis  XIV,  fut  le  premier  exemple 
■»  de  l'art  délicat  de  répandre  des  grâces 
M  jusques  sur  la  philosophie.  »  Mais  ce 
fut  un  exemple  dangereux,  parce  que  la 
véritable  parure  de  la  philosophie  est 
l'ordre,  la  clarté,  et  surtout  la  vérité  ; 
et  que,  depuis  cet  ouvrage  ingénieux ,  on 
n'a  que  trop  souvent  cherché  à  y  substi- 
tuer les  pointes,  les  saillies,  les  faux  orne- 
mens.  Ces  mondes,  déjà  très  douteux  en 
eux-mêmes ,  sont  fondés  en  partie  .sur 
les  chimériques  tourbillons  de  Descartes. 
Ils  ont  été  souvent  réimprimes  :  la  meil- 
leure édition  est  celle  de  1800  ,  enrichie 
tks  notes  de  Lalande.  Us  ont  été  tra- 


duits  en  allemand  par  Gottsched ,  VÀp* 
sick ,  1730,  in-8 ,  et  par  l'astronome 
Bode,  Berlin,  1798,  in-12,  avec  des 
notes  estimées  ;  en  italien ,  par  Vestri- 
ni,  Arezzo ,  1751;  en  anglais  1760; 
en  grec  moderne ,  par  Toussaint  Ko- 
drika  ,  athénien  ,  Vienne,  1794,  in-8. 
3°  Histoire  des  oracles ,  tirée  de  l'en- 
nuyeuse composition  de  Van  Dale  sur  le 
même  sujet.  Cet  ouvrage  écrit  d'un  stile 
léger  et  superficiel  en  lui-même,  fut  ré- 
futé en  1707  par  le  Père  Baltus.  L'ou- 
vrage de  ce  jésuite,  publié  sous  le  titre 
de  Re'ponse  à  V Histoire  des  oracles ,  pa- 
rut si  décisif  à  Fontenelle ,  qu'il  n'y 
répondit  point,  disant  que  le  diable  avait 
gagné  sa  cause.  Il  faut  convenir  néan- 
moins que  son  opinion  sur  les  oracles , 
quoique  historiquement  fausse,  n'aurait 
peut-être  rien  eu  de  répréhensible ,  s'il 
n'y  avait  point  inséré  des  maximes  qui 
pouvaient  se  tourner  contre  les  plus 
grandes  vérités ,  et  conduire  à  un  triste 
scepticisme.  L'esprit  d'irréligion  se  ma- 
nifeste plus  clairement  dans  la  Relation 
de  Vile  de  Bornéo  (  faussement  attribuée 
à  Catherine  Bernard  ) ,  dans  le  Traité 
sur  la  liberté,  ûnnsVE pitre  sur  Basnage 
à  Rome  et  Genève ,  et  dans  quelques  au- 
tres écrits.  4°  Poésies  pastorales ,  avec 
un  discours  surVËgloguc,  et  unedigres^ 
sion  sur  les  anciens  et  les  modernes, 
1C88.  Les  gens  de  goût  ne  veulent  pas 
que  ces  pastorales  .soient  mises,  pour  la 
naïveté  et  le  naturel ,  à  côté  de  celles  de 
Théocrite  et  de  Virgile.  Les  bergers  de 
Fontenelle  ,  disent-ils,  sont  des  courti- 
sans ou  des  petits-maîtres.  C'est  un  nou- 
veau genre  pastoral  qui  tient  un  peu  du 
roman,  et  AoniVAstréeAe  d'Urfé  ,  et  les 
comédies  de  VAmynte  et  du  Pastov  Fido, 
ont  fourni  le  modèle  (  t'oyez  Théocrite  , 
Virgile).  5°  Plusieurs  volumes  des  Mé- 
moires de  l'académie  des  Sciences.  Fon- 
tenelle, nommé  membre  de  cette  Acadé- 
mie en  1691,  et  il  en  devint  secrétaire  en 
1699.  Il  continua  de  l'être  pendant  42 
ans,  et  donna  chaque  année  un  vol.  de 
l'histoire  de  celte  compagnie.  La  préface 
générale  est  estimée.  Dans  l'histoire ,  il 
jette  souvent  de  la  clarté  sur  des  matières 
obscures.  Les  Eloges  des  académiciens , 


fÔN 

répandus  dans  cette  histoire ,  ont  été  im- 
primés séparément  en  2  vol.  C'est  sur- 
tout dans  ses  éloges  qu'il  déploie  toute 
la  coquetterie  du  bel-esprit.  «  Ses  por- 
»  traits,  dit  un  critique,  sont  tracés 
M  avec  art ,  et  quoique  flattés,  ils  conser- 
»  vent  néanmoins  un  certain  air  de  res- 
u  semblance  qui  les  fait  reconnaître.  Il 
»  n'approfondit  rien  ,  effleure  tout ,  pa- 
»  raît  se  jouer  de  son  sujet ,  ne  donne 
»  point  à  penser  au  lecteur ,  cherche 
»  seulement  à  amuser,  le  surprend 
»  même  quelquefois  par  des  traits  ingé- 
»  nieux  et  fins  ;  partout  on  aperçoit  le 
■»  manège  d'une  coquette,  dont  le  fard 
))  fait  tous  les  charmes.  »  6"  L'Histoire 
du  théâtre  français  jusqu'à  Corneille, 
avec  la  vie  de  ce  célèbre  dramatique. 
Cette  histoire  très  abrégée ,  mais  avec 
choix,  est  pleine  d'enjouement.  7°  Bé- 
flexions  sur  la  poétique  du  théâtre  tra- 
gique :  c'est  un  des  ouvrages  les  plus 
pensés  de  Fontenelle,  et  celui  peut-être 
oîi ,  en  paraissant  moins  bel-esprit ,  il 
parait  plus  homme  d'esprit.  8°  Elémens 
de  Géométrie  de  V infini,  in-4,  1 727  :  livre 
dans  lequel  les  géomètres  n'ont  guère 
connu  que  le  mérite  de  la  forme.  9°  Une 
tragédie  en  prose  et  six  comédies  ;  les 
unes  et  les  autres  peu  théâtrales,  et  dé- 
nuées de  chaleur  et  de  force  comique. 
10°  Théorie  des  tourbillons  cartésiens-, 
ouvrage  qui ,  s'il  n'est  pas  de  sa  vieil- 
lesse ,  méritait  d'en  être.  Fontenelle  était 
grand  admirateur  de  Descartes ,  et  dé- 
fendit jusqu'à  la  mort  les  erreurs  dont  il 
s'était  laissé  prévenir  dans  l'enfance. 
1 1  °  Des  Discours  moraux  et  philosophi- 
ques ;  des  pièces  fugitives,  dont  la  poé- 
sieest faible  ;  des  lettres,  parmi  lesquelles 
on  en  trouve  quelques-unes  de  jolies,  etc. 
Tous  ces  dififérens  ouvrages  ont  été  re- 
cueillis en  11  vol.  in-12,  Paris,  1758, 
et  8  vol.  in-8  ,  Paris  ,  1790  (à l'exception 
des  écrits  de  géométrie  et  de  physique  ) , 
sous  le  titre  A'OEuvres  diverses.  L'édi- 
tion la  plus  récente  est  celle  de  Paris, 
1824-1825.  On  en  avait  fait  deux  édi- 
tions en  Hollande ,  l'une  en  .3  vol.  in- fol. 
1829,  l'autre  in-4,  3  vol.  1829,  ornées 
toutes  deux  de  figures  gravées  par  B.  Pi- 
cart.  Les  curieux  les  recherchent  ;  mais 

V. 


fm 


hî 


elles  sont  beaucoup  moins  complètes 
que  l'édit.  en  11  vol.  in-12.  Ce  fut  aussi 
Fontenelle  qui  donna  en  1732  la  nou- 
velle édition  du  Dictionnaire  des  sciences 
et  des  arts ,  par  Thomas  Corneille. 
Malgré  un  tempérament  peu  robuste  en 
apparence ,  Fontenelle  n'eut  jamais  de 
maladie  considérable ,  pas  même  la  pe- 
tite vérole.  Il  n'eut'de  la  vieillesse  que 
la  surdité  et  l'affaiblissement  de  la  vue  ; 
encore  cet  affaiblissement  ne  se  fit  sentir 
qu'à  l'âge  de  plus  de  90  ans.  Il  mourut  le 
9  janvier  1757.  Un  caractère  doux  et  so- 
ciable ne  le  garantit  pas  de  la  misan- 
thropie et  d'un  triste  égoïsme.  «  Les 
»  hommes  sont  sots  et  méchans,  disait- 
»  il;  mais  tels  qu'ils  sont,  j'ai  à  vivre 
»  avec  eux,  et  je  me  le  suis  dit  de  bonne 
»  heure.  »  Ses  amis  lui  reprochèrent 
plusieurs  fois  de  manquer  de  sentiment: 
il  est  vrai  qu'il  n'était  pas  bon  pour  ceux 
qui  demandent  de  la  chaleur  dans  l'a- 
mitié. H  voyait  très  souvent  M""*  de  Ten- 
cin  ;  quand  il  apprit  sa  mort  :  a  Eh  bien  ! 
))  dit-il,  j'irai  dîner  chez  la  Geoffrin.  » 
(  Foyez  ce  mot).  Il  vivait  beaucoup  avec 
l'abbé  Dubois ,  qu'il  appelait  son  ami. 
Un  jour  qu'on  avait  fait  à  celui  ci  présent 
d'une  botte  d'asperges  dans  la  primeui- , 
ils  convinrent  de  la  faire  assaisonner, 
partie  à  l'huile,  partie  à  la  sauce,  pour 
satisfaire  leurs  goûts  respectifs;  avant 
l'entremets ,  l'abbé  Dubois  est  frappé 
d'une  apoplexie ,  et  tombe  sans  connais- 
sance ,  Fontenelle  court  sur  l'escalier  et 
crie  à  la  cuisinière  :  «  Toutes  les  asperges 
»  à  la  sauce ,  toutes  les  asperges  à  la 
»  sauce.  »  Quoiqu'il  fût  né  sans  biens , 
il  laissa  de  grandes  richesses;  sa  philoso- 
phie n'ayant  pu  l'affranchir  d'amasser  et 
d'ajouter  à  la  qualité  de  bel-esprit  celle 
de  financier.  Ou  trouvera  de  plus  amples 
détails  sur  Fontenelle,  dans  les  mémoires 
pour  servir  à  l'histoire  de  sa  vie  et  de 
.ies  ouvrages ,  par  M.  l'abbé  Trublet , 
Amsterdam  ,  1761  ,  in-12  ;  mais  il  faut  se 
souvenir  que  c'est  un  admirateur,  un 
panégyriste  qui  déploie  en  faveur  de 
son  héros  toutes  les  ressources  de  l'en- 
thousiasme. Un  écrivain  aussi  zélé  pour 
les  bons  principes  que  pour  le  bon  goût 
et  la  belle  littérature ,  l'a  appelé  «  un 
24.. 


378  fON 

)>  homme  sans  caractère  et  sans  talent 
3)  prononcé,  moitié  philosophe,  moitié 
»  bel-esprit  ;  grimacier ,  dont  tous  les 
3)  ouvrages  sont  défigurés  par  une  conti- 
»  nuel le  afféterie  d'expressions  et  d'idées, 
»  par  des  tons  précieux  et  maniérés,  par 
;)  des  pointes  ;  qui  dans  les  sciences  n'a 
»  rien  inventé,  et  n'avait  que  le  talent 
»  d'exposer  avec  méthode  et  clarté  les 
»  inventions  d'autrui.  »  *  Fonlenelle 
étant  jugé  ici  un  peu  sévèrement ,  nous 
croyons  devoir  ajouter  au  jugement  de 
Felier  celui  de  l'abbé  Sabathier  :  «  En 
»  envisageant,  dit-il,  M.  de  Fontenelle 
»  comme  poète,  il  faut  oublier ,  pour  sa 
»  gloire,  qu'il  a  fait  des  tragédies,  des 
»  comédies ,  et  ne  se  ressouvenir  que  de 
»  l'opéra  de  Thétis  et  Pelée  (Laharpe 
»  même  dit  qu'il  ne  dut  son  succès  qu'à 
3J  la  musique  et  aux  accessoires  du 
»  théâtre  )  ;  ses  autres  poésies  paraîtront 
»  également  médiocres  à  ceux  qui  préfè- 
»  rent  le  naturel  à  l'affectation  du  bel- 
»  esprit.  Ses  e'glogues  surtout  sont  des 
»  entretiens  de  petits-maîtres  raffinés , 
»  et  non  des  pastorales  dont  la  candeur 
3>  et  la  simplicité  doivent  faire  le  premier 
»  agrément.  Comme  prosateur  il  serait 
»  dangereux  de  prendre  en  tout  sa  ma- 
»  nière  d'écrire  pour  modèle  :  la  finesse 
»  et  l'agrément  trop  recherché,  qui  rè- 
»  gnent  dans  sa  prose ,  sont  des  amorces 
»  séduisantes,  propres  à  égarer  les  jeunes 

3>  esprits he^  Dialogues  des  morts  ne 

»  sont  que  des  assauts  de  pensées  bril- 
»  lantes ,  oîi  l'auteur  cherche  plusàcton- 
»  ner  par  les  interlocuteurs  disparates , 
»  qu'à  instruire ,  en  développant  le  vrai 
»  caractère  :  ce  n'est  pas  ainsi  qu'on  écrit 
»  la  morale  ;  l'élégance  de  l'esprit  ne 
»  peut  que  l'afifaiblir.  Si  l'écrivain  dont 
»  nous  parlons  était  réduit  à  la  seule 
»  gloire  d'avoir  mis  au  jour  de  pareilles 
}>  productions,  sa  célébrité  aurait  fini 
}>  avec  sa  vie  ,  et  même  avant.  Mais  en  re- 
3>  connaissant  les  défauts  du  bel-esprit , 
»  on  ne  peut  s'empêcher  de  rendre  justice 
»  au  philosophe.  Le  talent  particulier 
»  qu'il  a  eu  de  mettre  à  la  portée  de  tout 
»  le  monde  les  matières  les  plus  abstrai- 
»  tes  ;  de  revêtir  de  la  clarté  et  desagré- 
»  mens  du  stile  les  sujets  les  plus  ingrats^ 


fON 

de  répandre  dans  ses  ouvrages  les  con- 
naissances les  plus  étendues ,  sans  af- 
fectation ,  avec  ordre  et  dans  la  plus 
grande  précision  ;  de  dominer,  par  l'ai- 
sance de  son  esprit ,  tout  c  c  qui  se  pré- 
sentait sous  sa  plume  ,  dans  les  genres 
les  plus  opposés  et  les  plus  difficiles,  lui 
assure  la  gloire  d'une  intelligence  fine, 
prompte,  profonde,  et  celle  du  mérite 
rare  d'avoir  su  communiquer  aux  autres, 
sans  effort ,  ce  qui  paraissait  avant  lui 
au  dessusde  la  pénétration  du  commun 
des  lecteurs.  C'est  ce  qu'il  est  facile  de 
remarquer  dans  son  livre  sur  la  Plura- 
lité des  Mondes,  dans  son  Histoire  de  l'A- 
cadémie des  Sciences,  et  dans  les  éloges 
qu'il  a  faits  de  plusieurs  académiciens. 
Le  premier  ouvrage  fait    admirer  un 
esprit  lumineux  qui  se  joue  de  l'embar- 
ras des  systèmes ,  procède  avec  dexté- 
rité à  travers  les  contradictions ,  déve- 
loppe sans  gêne  les  principes  qu'il  a 
établis,  et  fait  adopter  ses  idées ,  non 
en  faisant  sentir  la  touche  intime  de  la 
persuasion ,    encore    moins    la    force 
delà  conviction,  mais  par   le    talent 
de   plaire   et  d'amuser ,  etc.  S'il  s'é- 
gara dans  ses  idées ,  il  n'eut  pas  la  té- 
mérité de  les  réduire  en  systèmes  ;  s'il 
avança  quelques  propositions  un  peu 
hardies ,  il  ne  les  défendit  pas  avec  opi- 
niâtreté ;  s'il  eut  quelques  démêlés  lit- 
téraires,   il  les    soutint  constamment 
avec  honnêteté ,  ou  termina  par  un  si- 
lence ,  toujours  sage  quand  on  n'offre 
aux  autres  que  des  découvertes  oppo- 
sées aux  idées  reçues.  Ces  qualités  ren- 
dirent au  moins  sa  philosophie  respec- 
table dans  ses  sentimens ,  quoiqu'elle 
ne  fût  pas  toujours  sûre  dans  ses  maxi- 
mes. »  Pour  justifier  Fontenelle  sur  sa 
manière  de  penser,  nous  ajouterons  ici  le 
jugement  que  l'auteur  des  Mémoires  pour 
servir  à  l'Histoire  ecclésiastique  a  porté 
sur  cet  écrivain  :  «  Il  donna  en  1G87  YHis- 
»  toire  des  oracles,  tirée  en  partie  de 
j>  l'ouvrage  de  Van  Dale  sur  le  même  su- 
»  jet.  Elle  a  été  réfutée  par  le  Père  Bal- 
»  tus.  Cet  ouvrage  ne  donne ,  ni  en  soi , 
»  ni  par  la  manière  dont  il  est  traité , 
»  aucun  motif  suffisant  pour  suspecter  la 
M  religion  de  Fontenelle.  On  lui  attribue 


FON 

y>\&  Relation  de  l'île  de  Bornéo,  citée 
»  par  Bayle,  et  qui  renferme  une  histoire 
»  allégorique  et  critique  de  l'église  de 
»  Rome  et  de  celle  de  Genève.  Ce  mor- 
j>  ceau  si  court  ne  pourrait  être  regardé 
»  que  comme  une  plaisanterie ,  et  ne  sau- 
»  rait  convaincre  Fontenelle  d'incrédu- 
»  lité.  Fontenelle  ne  parla  jamais  de  la 
»  religion  qu'avec  respect  dans  ses  écrits 
»  avoués.  S'il  lui  eût  été  contraire,  il  au- 
»  rait  pu  glisser  de  temps  en  temps  quel- 
»  ques  traits  contre  elle.  Il  ne  l'a  point 
)'  fait ,  qu'oiqu'il  fût  assez  porté ,  par 
j)  la  trempe  de  son  esprit ,  aux  allusions 
»  fines  et  aux  épigrammes  plus  ou  moins 
»  voilées ,  et  qu'il  les  ait  prodiguées  sur 
»  d'autres  sujets.  Dans  ses  Eloges  des 
3)  académiciens  ,  il  ne  manque  jamais  de 
M  faire  mention  de  leur  attachement  et  de 
)>  leur  respect  pour  la  religion ,  sans  que 
))  sans  doute  rien  ne  l'ohligeât  à  en  parler. 
»  Voltaire ,  dans  sa  Correspondance ,  lui 
1)  reproche  d'avoir  été  un  lâche ,  ce  qui 
j>  veut  dire  apparemment,  qu'il  n'avait 
n  pas  de  zèle  pour  la  philosophie .  Laharpe 
»  dit  qu'il  pratiquait  tous  ses  devoirs  pu- 
»  blics  de  la  religion  ;  et ,  suivant  Moréri, 
»  il  demanda  lui-même  les  sacremens  de 
»  l'Eglise ,  qu'il  reçut  avec  une  parfaite 
n  connaissance.  Il  dit  au  curé  de  l'église 
»  de  St.-Roch  qu'il  avait  vécu  et  voulait 
»  mourir  dans  le  sein  de  l'église  cathoLi- 
»  que.  » 

FONTÈTE.  Foyez  Fevret. 

FOINTIUS  ou  FoNTi  (  Barthélemi  ) , 
natif  de  Florence,  se  fit  estimer  de  Pic 
de  La  Mirandole ,  de  Marsille  Ficin ,  de 
Jérôme  Donato,  et  des  autres  habiles 
écrivains  de  son  siècle.  Mathias  Corvin , 
roi  de  Hongrie ,  l'honora  de  son  amitié  , 
et  lui  donna  la  direction  de  la  fameuse 
bibliothèque  de  Bude.  Les  écrits  de  Fon- 
tius  sont  :  un  Commentaire  sur  Perse  ; 
des  Harangues  ;  le  tout  recueilli  et  im- 
primé à  Francfort,  in-8 ,  1621.  Fonti 
mourut  en  1513. 

FONÏRAILLES  (  Louis  d'AsTAHAC  , 
marquis  de  ) ,  fut  choisi  par  Monsieur 
pour  aller  négocier  en  Espagne  un  traité, 
qui  lui  fournit  les  moyens  de  chasser  le 
pardinal  de  Richelieu;  mais  il  eut  le 
|ïOp)ieur  de  n'être   pas   arrêté  comme 


FOP  379 

M.  de  Cinq-Mars.  Il  revint  en  France 
après  la  mort  du  cardinal,  et  ne  mourut 
qu'en  1677.  (  Il  a  écrit  une  relation  des 
choses  particulières  de  la  cour ,  pendant 
Ui  faveur  de  Cinq-Mars ,  imprimée  au 
tome  1*"'  des  mémoires  de  Montrésor.  ) 

*  FOOTE  (  Samuel  ) ,  comédien  et  au- 
teur comique  anglais,  né  en  172-3  ,  d'une 
bonne  famille  dans  le  comté  de  Cor- 
nouailles ,  fut  destiné  au  barreau  ;  mais 
sa  mauvaise  conduite  lui  ayant  fait  dis 
siper  sa  fortune  patrimoniale ,  il  devint 
membre  du  parlement,  contracta  des 
dettes  nouvelles  qu'il  ne  put  payer ,  et 
devint  comédien  par  nécessité.  Il  débuta 
sur  le  théâtre  de  Hay-Market  à  Londres  en 
1744,  par  le  rôle  d'Othello  et  quelques 
autres  rôles  tragiques  dans  lesquels  il 
n'eut  aucun  succès.  Après  s'être  plongé 
pendant  deux  ans  dans  de  nouvelles  in- 
trigues pour  échapper  à  la  poursuite  de 
ses  créanciers,  il  éleva  pour  son  compte 
un  petit  théâtre  à  Hay-Market  où  il  fut  à 
la  fois  directeur,  auteur  et  acteur.  Il  eut  la 
hardiesse  d'y  mettre  en  scène  des  per- 
sonnages du  temps  :  ce  qui  lui  attirait  la 
foule  ,  mais  lui  causa  des  chagrins.  Par 
suite  des  procès  qu'on  lui  intenta  et  dans 
lesquels  il  fut  obligé  de  payer  des 
amendes  considérables,  son  théâtre  fut 
fermé.  Plus  tard,  après  un  accident  qui 
avait  forcé  de  lui  couper  une  jambe ,  il 
eut  la  permission  d'ouvrir  son  théâtre 
pendant  la  clôture  des  deux  théâtres 
principaux  de  Londres.  Le  public  se  porta 
en  foule  à  ses  représentations  ;  et  il  eût 
acquis  une  fortune  considérable ,  si  le 
jeu  n'eût  dévoré  ses  profits.  Au  milieu 
des  ennuis  qu'il  se  procura ,  les  médecins 
lui  ordonnèrent  de  voyager.  Il  mourut 
presque  subitement  à  Douvres  en  allant 
en  France  pour  sa  santé.  On  l'a  appelé 
V Aristophane  anglais.  Ses  œuvres  ont 
été  imprimées  à  Londres  en  1 778 ,  4  vol. 
in-8. 

FOPPENS  (  Jean-François  ),  né  à 
Bruxelles ,  fut  successivement  professeur 
en  philosophie  à  Louvain ,  chanoine  de 
l'église  de  Bruges ,  chanoine  de  Malines 
et  archidiacre.  Il  mourut  le  16  juillet 
1761,  âgé  de  72  ans.  Ses  talens,  ses 
Ycrtus,  et  surtout  son  zèle  pom-  la  re|i« 


58o  FOR 

gion ,  le  firent  regretter  universellement. 
On  a  de  lui  1°  Bibliotheca  Belgica , 
Bruxelles ,  chez  son  frère  Pierre  Foppens, 
1728,  2  vol.  in-4 ,  où  il  a  fait  entrer  les 
ouvrages  d'Aubert  Le  Mire ,  de  François 
Swertius  et  de  Valère  André  ,  sur  les  au- 
teurs belgiques.  Il  a  fait  de  grandes  ad- 
ditions à  ces  auteurs  ,  et  continué  la  bi- 
bliothèque belgique  depuis  vers  640  où 
finit  celle  de  Valère  André ,  jusqu'à  l'an 
1680.  Cet  ouvrage  est  estimé  et  mérite 
de  l'être  à  bien  des  égards  ;  on  y  désire- 
rait un  peu  plus  de  critique  et  d'exacti- 
tude. 2°  Une  édition  du  recueil  diploma- 
tique d'Aubert  Le  Mire ,  Bruxelles ,  1723, 
2  vol.  in-fol ,  enrichie  de  nouvelles  notes 
cl  de  tables,  augmentée  d'un  grand 
nombre  de  diplômes  inconnus  à  Aubert 
Le  Mire.  Il  ajouta  ensuite  deux  volumes 
in-folio  à  cette  collection,  l'un  en  1 734  , 
l'autre  en  1748.  3°  Historia  episcopatus 
Jntverpiensis,  Bruxelles,  1717,  in-4. 
4°  Historia  episcopatus  Sylvœducensis, 
Bruxelles,  1721,  in-4.  6°  Chronologia 
sacra  episcoporum  Belgii  ab  anno  1561 
ad  annum  1761 ,  in-12;  ouvrage  en  vers 
avec  des  notes  historiques  en  prose. 
6°  Un  grand  nombre  de  poèmes  latins  , 
dénués  la  plupart  d'énergie ,  et  de  cet 
enthousiasme  qui  constitue  la  vraie 
poésie,  mais  toujours  sages  dans  leur 
objet  et  les  vues  de  l'auteur. 

FORBES  (  Jean  ) ,  écossais ,  professeur 
de  théologie  et  d'histoire  ecclésiastique 
dans  l'université  d'Aberdeen ,  mort  en 
1648  ,  à  65  ans,  laissa  des  Institutions 
historiques  et  ihe'ologiques  qu'on  trouve 
dans  la  collection  de  ses  œuvres ,  1703  , 
2  vol.  in-fol.  C'est  un  vaste  recueil ,  où 
l'auteur ,  en  traitant  de  la  doctrine  chré- 
tienne ,  prétend  contre  la  vérité  notoire 
des  faits,  que  diverses  circonstances  y 
ont  apporté  des  changemens.  On  a  fait 
un  abrégé  de  cet  ouvrage  propre  à  nourrir 
les  préjugés  des  protestans.  Son  père 
(Patrice),  évèque  d'Aberdeen,  mort  en 
1635  ,  donna  un  Commentaire  sur  l'A- 
pocalypse,  in-4,  1646. 

FORBES  (Guillaume) ,  premier  évêque 
d'Edimbourg ,  s'est  fait  un  nom  par  ses 
Considérations  sur  les  controverses ,  en 
Jfttin,    imprimées  à  Fruncfçrt,    jn-8, 


FOR 

1707.  Il  mourut  dans  sa  49'  année  en 
1G34  ,  laissant  un  fils  qui  embrassa  la  re- 
ligion romaine. 

FORBES  (  Duncan  ) ,  lord  ,  président 
des  assises  d'Edimbourg ,  mort  au  milieu 
du  18*  siècle,  est  connu  en  France  par 
les  traductions  qu'a  publiées  le  Père 
Houbigant ,  de  ses  Pensées  sur  la  reli- 
gion ,  de  sa  lettre  à  un  e'vêque ,  etc.  , 
Lyon,  1769 ,  in-8.  Ces  écrits  ont  eu  un 
succès  médiocre. 

FORBIN  (  Toussaint  de  ) ,  plus  connu 
sous  le  nom  de  cardinal  de  Janson, 
d'une  famille  illustre  de  Provence,  fut 
successivement  évèque  de  Digne,  de 
Marseille  et  de  Beauvais.  Louis  XIV, 
connaissant  le  talent  singulier  qu'il  avait 
de  manier  les  affaires ,  le  nomma  son 
ambassadeur  en  Pologne.  Jean  Sobieski, 
qui  dut  en  partie  à  son  crédit  le  trône  de 
cette  république ,  lui  en  marqua  sa  re- 
connaissance, en  le  nommant  au  cardi- 
nalat. Envoyé  à  Rome  sous  Innocent  XII 
et  sous  Clément  XI ,  il  traita  avec  tant  de 
sagesse  les  affaires  de  France ,  qu'il  fut 
honoré  en  1706  de  la  charge  de  grand- 
aumônier.  Il  mourut  à  Paris  en  1713,  à 
83  ans.  C'était  un  homme  spirituel  et 
preste  aux  reparties  vives.  Il  fut  un  des 
plus  ardens  adv«rsaires  de  V Apologie  des 
casuistes.  Nous  avons  une  censure  qu'il 
publia  contre  elle ,  étant  évêque  de  Digne. 

FORBIN  (  François-Toussaint  de  ), 
neveu  du  précédent ,  plus  connu  sous  le 
nom  de  comte  de  Rosemberg ,  quitta  la 
France  pour  avoir  tué  en  duel  un  de  ses 
ennemis.  Il  y  rentra  ensuite  ;  mais  ayant 
été  blessé  à  la  bataille  de  la  Marsaille  en 
1693,  il  fit  vœu  de  se  faire  religieux  de 
la  Trappe.  Il  l'accomplit  environ  dix  ans 
après ,  prit  le  nom  de  frère  Arsène ,  et 
fut  envoyé  à  Buon-Solazzo  en  Toscane  , 
pour  y  établir  l'esprit  primitif  de  Cîteaux. 
Il  y  mourut  saintement  eu  1710.  On  a 
publié  la  relation  édifiante  de  sa  vie  et 
de  sa  mort,  traduite  de  l'italien  en  fran- 
çais ,  in-12,  par  l'abbé  Maupertuis. 

FORBIN  (  Claude,  chevalier  de ,^) né 
en  1656  à  Gardane  près  d'Aix  en  Proven- 
ce ,  commença  dès  sa  première  jeunesse 
à  servir  sur  mer ,  et  il  continua  avec 
l^eaucoup  d'inleUiççnçe ,  4ç  çpwF^ge  et 


FOR 

d'activité.  Après  avoir  été  grand-amiral 
du  roi  de  Siam  ,  à  qui  il  fut  laissé  en  1686 
par  le  chevalier  de  Chaumont ,  il  se  si- 
gnala sur  la  mer  Adriatique.  Il  attai^ua 
en  1706  ,  près  du  Texel,  avec  cinq  petits 
vaisseaux  ,  une  escorte  ennemie ,  forte  de 
six  vaisseaux  de  guerre  de  50  à  00  canons. 
Il  en  enleva  un ,  brûla  un  autre ,  coula 
bas  un  troisième ,  et  dispersa  le  reste. 
Devenu  chef  d'escadre ,  il  dissipa  dans 
les  mers  du  IVord  trois  différentes  flottes 
anglaises  destinées  pour  la  Moscovie.  A 
son  retour  il  battit,  avec  Duguay-Trouin  , 
une  autre  flotte  anglaise.  Ses  infirmités , 
ou  plutôt  le  mécontentement  qu'il  avait 
des  ministres,  l'ayant  obligé  de  quitter 
le  service ,  il  se  retira  vers  1710  auprès 
de  Marseille.  Il  y  mourut  en  1733  ,  à  77 
ans.  Forbin  mérita  la  confiance  de  Louis 
XIV  et  l'estime  de  sa  nation ,  par  sa  bra- 
voure et  par  son  application  à  remplir 
ses  devoirs.  Il  s'attachait  à  ceux  qui  ser- 
vaient sous  lui ,  et  ne  laissait  point  échap- 
per l'occasion  de  les  faire  connaître  à  la 
cour.  Forbin  avait  la  tête  d'un  général  et 
la  main  d'un  soldat.  On  trouvera  plusieurs 
traits  d'une  bravoure  singulière  dans  ses 
mémoires,  publiés  en  17  49,  en  2  vol. 
in-12,  par  Reboulet,  et  réimprimés  en 
1781. 

FORBISHER  ou  Frobisher  (Sir  Mar- 
tin ) ,  pilote  anglais  ,  né  à  Devonsbire  , 
se  signala  de  bonne  heure  par  ses  courses 
maritimes.  La  reine  Elisabeth  l'envoya  , 
avec  trois  navires  en  1 576,  pour  chercher 
le  détroit  que  l'on  croyait  être  au  nord 
de  la  Sibérie ,  qui  devait  servir  à  passer 
de  l'occident  en  orient  par  le  nord.  Mais 
ce  voyage ,  ainsi  que  celui  qu'il  entreprit 
deux  ans  après ,  et  tous  ceux  qu'on  a  faits 
depuis  relativement  à  cet  objet ,  n'ont 
rien  produit,  parce  que  ce  passage  n'existe 
réellement  pas  :  car  ,  supposé  que  les 
deux  continens  ne  se  touchent  nulle  part , 
les  monts  de  glaces  rendraient  encore  tout 
passage  impraticable  (  Voyez  Cook  ). 
Forbisher ,  qui  ne  connaissait  rien  en 
histoire  naturelle,  apporta  de  ses  voyages 
une  grande  quantité  de  pierres  qu'il  avait 
fait  tirer  des  montagnes  de  ce  pays-là.  Il 
s'imaginait  qu'elles  renfermeraient  de  l'or 
fit  de  l'argent  ;  roais  après  les  avoir  l)ien 


FOR 


m 


examinées,  il  n'y  trouva  rien ,  et  l'on  s'en 
servit  pour  paver  les  chemins.  Peu  de 
temps  après  ce  second  voyage,  l'amiral 
ïlaward  le  créa  chevalier ,  pour  récom- 
penser les  marques  de  bravoure  qu'il  avait 
données  en  1588  dans  un  combat  entre 
la  flotte  anglaise  et  la  flotte  espagnole. 
Après  s'être  signalé  sur  mer ,  il  se  signala 
sur  terre.  Il  débarqua  en  Bretagne  pour  as- 
siéger le  fort  de  Gradon.  Cette  place  se 
rendit  après  une  vigoureuse  résistance  ; 
mais  Forbisher  y  fut  blessé,  et  mourut  de 
sa  blessure  àPlimouthen  1594. 

*  FORBONNAIS  (  François  Veron  ou 
Veroni  de  } ,  inspecteur-général  des  mon- 
naies de  France ,  de  l'Institut  national ,  né 
au  Mans  ,  le  2  octobre  1722  ,  d'une  fa- 
mille illustrée  dans  le  commerce,  termina 
ses  études  à  Paris ,  et  voyagea  en  Italie  «t 
en  Espagne  pour  les  affaires  de  son  père. 
Ayant  été  appelé  en  1743,  auprès  d'un 
oncle  ,  riche  armateur  à  Nantes ,  il  s'a- 
donna entièrement  à  l'étude  de  l'écono- 
mie politique ,  et  recueillit  un  grand  nom- 
bre d'observations  importantes  sur  les 
manufactures ,  le  commerce  ,  la  marine , 
les  colonies ,  la  valeur  des  monnaies. 
En  17  52,  il  vint  se  fixer  à  Paris,  oii  il 
soumit  au  gouvernement  divers  mémoires 
sur  les  finances ,  qui  ne  furent  point  ac- 
cueillis par  les  ministres.  Il  publia  de 
1753  à  1758  plusieurs  autres  Mémoires 
sur  les  mêmes  matières  ;  ils  furent  mieux 
reçus  du  public  :  eu  1756  ,  il  fut  nommé 
inspecteur-général  des  monnaies.  Sous 
le  ministère  de  M.  de  Silhouette ,  il  pro- 
posa divers  plans  de  finances  et  des  vues 
utiles  ;  la  plus  importante  de  ses  opéra- 
tions fut  de  créer  72,000  actions,  chacune 
de  1000  fr.,  dans  les  fermes  générales  du 
royaume  ;  il  attribua  à  chacune  de  ces 
actions  la  moitié  des  bénéfices  dont  jouis- 
saient les  fermiers-généraux  :  cette  afl'aire 
produisit  en  24  heures,  sans  grever  l'état, 
72  millions.  Il  proposa  d'autres  réformes  ; 
mais  il  fut  contrarié  dans  ses  projets ,  et 
exilé  dans  ses  terres.  Du  fond  de  sa  re- 
traite ,  il  continua  de  correspondre  avec 
les  intendans  des  finances,  et  surtout  avec 
le  fameux  abbé  Terray ,  qui  lui  demanda 
des  mémoires  ,  et  fit  des  effors  jputiles 
poqf  jp  ramener  »h  îinion  dçs  gffairçs,  Il 


382 


FÔR 


se  rendit  à  Paris  en  1790,  sur  l'invitation 
du  comité  des  finances ,  et  il  eut  part  à 
un  travail  relatif  aux  monnaies.  U  mourut 
le  20  septembre  1800.  Il  a  laissé  un  grand 
nombre  d'ouvrages  sur  les  finances  et  le 
commerce  ,  où  l'on  trouve  d'excellentes 
vues;  ils  sont  écrits  d'une  manière  noble , 
facile  et  souvent  élégante.  Les  principaux 
sont  :  1°  Extrait  de  l'esprit  des  lois, 
avec  des  observations,  1753  ,  in-12;  2° 
Théorie  et  Pratique  du  commerce  et  de 
la  marine,  traduit  de  l'espagnol ,  1753  , 
in-4  ;  3°  Considérations  sur  les  finances 
tT Espagne  ,  relativement  à  celles  de 
France,  1753,  in-12;  k"  Le  négociant 
anglais,  1753  ,  2  vol.  in-12;  5°  Elémens 
ducommerce,  Paris,  1754,  2  vol.  in-12, 
plusieurs  fois  réimprimés.  L'édition  de 
1796  a  été  corrigée  et  enrichie  d'addi- 
tions importantes;  6"  Questions  sur  le 
commerce  des  Français  au  Levant,  1 755, 
in-12;  7°  Recherches  et  considérations 
sur  les  finances  de  France ,  depuis  1 595 
jusqu'en  1721  ,  Bâle,  1758  ,  2  vol.  in-4  , 
réimprimés  la  même  année  à  Liège ,  en 
6  vol.  in-12;  8°  Principes  et  observations 
économiques  ,  1767  ,  2  vol.  in-12;  9° 
Analyse  des  principes  sur  la  circulation 
des  denrées  et  Finfluence  du  numéraire 
sur  cette  circulation  ,  1800  ,  in-12  ;  10° 
divers  articles  dans  l'Encyclopédie ,  sur 
le  commerce ,  les  changes ,  la  population. 
Il  a  laissé  en  outre  un  grand  nombre  de 
manuscrits.  Sa  vie  littéraire  a  été  écrite 
par  Dclisle  de  Sales,  Paris,  1801,  in-8. 

FORCADEL  (  Etienne  ) ,  Forcatulus , 
professeur  en  droit  à  Toulouse  ,  était  de 
Béziers,et  mourut  en  1578.  Ses  écrits 
consislent  en  poésies  latines  et  fran- 
çaises, 1579  ,  in-8 ,  les  unes  et  les  autres 
très  médiocres  ;  en  livres  de  droit ,  un 
peu  moins  mauvais  ,  et  en  histoires.  Les 
litres  de  ces  ouvrages  pourront  donner 
une  idée  de  son  stile  précieux  et  affecté, 
1  °  Necromantiœ ,  sive  occultœ  jurispru- 
dentice  tractatus  ,  in  ccntum  viginti 
quinque  dialogos  distinctus.  2°  Spherœ 
legalis  dialogus  unus,  3°  Cupido  juris 
peritus ,  in  viginti  duo  capita  divisas. 
4°  Penus  juris  civilis,  sive  de  alimentis 
capita  triginta  continens.  5°  Aviarium 
juris  civilis ,  in  mvem  capita partifurrii 


FOR 

G°  Commentarius  in  tituXum  de  justitia 
etjure,lib.  1  Digestorum.  1°  Tractatio 
dilucida  rei  criminalis ,  in  quatuor  di- 
gesta  partes.  8°  Commentarius  nobilis 
in  jura  feudorum.  —  Il  avait  pour  frère 
Pierre  Forcadki,  ,  professeur  royal  de  ma- 
thématiques ,  mort  en  1577  ,  dont  on  a 
une  traduction  française  d'Euclide  et  de 
la  géométrie  d'Oronce  Fine  ,  et  une 
arithmétique  en  4  livres. 

FORCÉ  (  Jacques-Nompar  de  Cau- 
MONT  ,  duc  de  La  ) ,  fils  de  François ,  sei- 
gneur de  La  Force  ,  qui  fut  tué  dans  son 
lit,  avec  Armand  son  fils  aîné,  pendant 
le  massacre  de  la  St.-Barthélerai.  Jac- 
ques, qui  n'avait  que  neuf  ans ,  et  qui  était 
couché  avec  eux  ,  se  cacha  si  adroitement 
entre  le  corps  de  son  père  et  celui  de  son 
frère  ,  qu'il  échappa  au  glaive  des  assas- 
sins. C'est  lui-même  qui  a  écrit  cet  événe- 
ment dans  des  mémoires  conservés  dans 
sa  maison,  et  cités  dans  la  Henriade.  U 
porta  les  armes  sous  Henri  IV  ,  et  servit 
ensuite  les  réformés  contre  Louis  XIII  , 
surtout  au  siège  de  Montauban  en  1621. 
L'année  d'après,  La  Force  s'étant  détaché 
des  erreurs  et  des  séditieuses  intrigues  des 
huguenots ,  prit  Pignerol ,  et  défit  les 
Espagnols  à  Carignan  en  1G30.  Quatre 
ans  après  il  passa  en  Allemagne ,  fit  lever 
le  siège  de  Philisbourg ,  secourut  Heidel- 
berg,  et  prit  Spire  en  1635.  Sa  terre  de 
La  Force  ,  en  Périgord  ,  fut  érigée  en 
duché-pairie  l'an  1637.  H  s'y  retira  après 
avoir  rendu  des  services  importans  à 
l'état  ,  et  mourut  plein  de  jours  et  de 
gloire  en  1652,  à  97  ans.  Ce  n'était  pas, 
suivant  l'abbé  Le  Gendre  ,  le  général  le 
plus  renommé  de  son  siècle  ;  mais  ce 
n'était  pas  aussi  le  moins  habile. 

FORCE  (  Armand  IN'ompar  de  Cau- 
BioNï ,  duc  de  La  ) ,  fils  du  précédent,  et 
maréchal  de  France  comme  lui ,  obtint  le 
bâton  en  1652  ,  pour  avoir  servi  avec 
distinction  contre  les  huguenots.  Le  com- 
bat de  Ravon  ,  où  il  défit  2,000  impé- 
riaux ,  et  prit  prisonnier  Colloredo  leur 
général ,  lui  fit  beaucoup  d'honneur.  U 
mourut  en  1675,  à  95  ans.  Une  longue  J 
vie  était ,  ce  semble ,  le  partage  de  cette 
famille  illustre. 

FORCE  (  Cbarlottp'Rosç  de  Caumoht  ' 


de  La  ),  de  l'académie  des  Aicovrati  de 
Padoue  ,  était  petite-fille  de  Jacques  de 
La  Force ,  et  mourut  en  1724  ,  à  70  ans. 
Elle  a  illustré  le  Parnasse  français  par  ses 
vers  ,  et  la  république  des  lettres  par  sa 
prose.  On  a  d'elle,  dans  le  premier  genre, 
une  épître  à  M""*  de  Maintenon  ,  et  un 
poème  dédié  à  la  princesse  de  Conti ,  sous 
le  titre  de  Cliâteau  en  Espagne ,  qui  ne 
manquent  ni  d'imagination  ni  de  génie. 
On  connaît  d'elle ,  dans  le  second  genre  : 

1  "  L'Histoire  secrète  de  Bourgogne  ,  en 

2  vol.  in-12,  roman  assez  bien  écrit, 
Paris,  1G91.  2°  CeWe  de  Marguerite  de 
Falois,  4  vol.  in-12  ,  Paris,  1719.  3°  La 
Vie  de  Catherine  de  Bourbon.  4°  Les 
Fées,  contes  des  contes ,  sans  nom  d'au- 
teur, in-12.  5°  Mémoires  historiques  de 
la  duchesse  de  Bar,  sœur  de  Henri  IV , 
etc.,  in-12.  6°  Gustave  IFasa,  in-12, 
qu'on  ne  lit  guère.  Le  fond  de  presque 
tous  les  ouvrages  de  M'^*  de  La  Force  est 
historique  ;  mais  la  broderie  en  est  ro- 
manesque. Elle  avait  épousé  en  1687 
Cbarles  de  Brion  ;  mais  le  mariage  fut 
déclaré  nul  au  bout  de  dix  jours. 

*  FORCELLIIVI  (  Egidio  ) ,  savant 
ecclésiastique  italien ,  né  dans  un  village 
du  diocèse  de  Padoue  en  1688  ,  fit  ses 
études  dans  le  séminaire  de  cette  ville  , 
et  fut  ensuite  appelé  à  la  direction  du 
séminaire  de  Cénéda ,  et  à  la  chaire  de 
rhétorique  pour  les  jeunes  séminaristes, 
qu'il  fut  obligé  d'y  remplir.  Il  mourut  le 
4  avril  1768.  On  lui  doit  un  grand  dic- 
tionnaire latin  ,  le  meilleur  que  nous 
avons  ,  qu'il  fit  de  concert  avec  Faccio- 
lato  ,  et  qui  absorba ,  pour  ainsi  dire ,  sa 
vie  entière.  11  a  été  publié  après  sa  mort 
sous  ce  titre  :  Totius  latinitatis  Lexicon , 
concilio  et  cura  Jac.  Facciolati ,  opéra 
et  studio  œgidii  Forcellini,  Patavini, 
1771  ,  4  vol.  in-folio  ,  réimprimé  en 
1805.  11  faut  y  joindre  un  supplément, 
publié  en  1816.  Chaque  mot  latin  de  ce 
dictionnaire  est  rendu  en  italien  ,  et  ac- 
compagné du  mot  grec  correspondant. 
La  première  édition  est  la  meilleure.  La 
seconde  ne  renferme  point  d'augmenta- 
tions, quoiqu'elles  soient  annoncées  sur  le 
frontispice.  La  vie  deForcellini  a  été  écrite 
par  l'abbé  J.  B.  Ferrari,  Padoue,  1792,  in-4. 


Î'OA  383 

*  FORDYCE  (  Jacques  ),  célèbre  pré- 
dicateur écossais,  né  en  17  20  à  Aderdeen , 
occupa  long-temps  à  Londres  la  place  de 
pasteur  d'une  congrégation  de  dissenters 
ou  non-conformistes ,  et  mourut  à  Bath 
le  1*"  octobre  1796.  Ses  prédications 
eurent  beaucoup  de  vogue  :  il  avait  le 
secret  de  parler  au  cœur ,  et  joignait  au 
mérite  d'une  composition  élégante  et 
fleurie ,  celui  d'une  élocution  claire  et 
animée.  On  lui  doit  :  1°  Essai  sur  l'ac- 
tion convenable  à  la  chaire ,  in-1 2 ,  im- 
primé à  la  suite  de  Théodore ^  dialogue 
concernant  l'art  de  prêcher  ,  par  David 
FoRDYCE  ,  son  frère  ,  3*  édition  in-12, 
1 7  55.  2"  Le  temple  de  la  vertu ,  songe , 
in-12,  1755  et  1777.  3°  Sermons  aux 
jeunes  femmes ,  2  \ol.  in-i  2,  1796.  Ce 
recueil,  généralement  goûté  des  femmes, 
a  été  traduit  en  français.  4°  Le  caractère 
et  la  conduite  du  sexe  féminin  ,  et  les 
avantages  que  les  jeunes  gens  peuvent 
recueillir  de  la  société  des  femmes  ver- 
tueuses,  17  79,  in-8.  Il  recommande  aux 
jeunes  gens  un  commerce  spirituel  avec 
le  sexe,  qui  ressemble  à  l'amour  platoni- 
que. 5"  Adresses  aux  jeunes  gens ,  1777 
et  1796,  2  vol,  in-12.  6"  Adresses  à  la 
Divinité,  17  85  et  1787,  in-12.  7°  Un  vol. 
de  poésies ,  1786  ,  in-12.  Il  y  a  de  la 
correction  ,  de  la  facilité ,  mais  peu  de 
poésie. 

*  FORDYCE  (  George  ),  célèbre  mé- 
decin ,  né  en  1736,  près  d'Aberdeen , 
ouvrit  des  cours  particuliers  de  méde- 
cine ,  et  s'attira  un  grand  nombre  d'au- 
diteurs par  la  précision ,  la  clarté ,  l'exac- 
titude avec  lesquelles  il  s'exprimait  ;  ce 
qui  vaut  bien  l'éloquence  qui  séduit  tou- 
jours ,  mais  qui  est  souvent  stérile  pour 
la  science.  Il  a  répandu  de  nouvelles 
lumières  sur  le  mécanisme  des  fluxions  , 
et  sur  la  nature  du  liquide  qu'elles  châ- 
tient ;  mais  ce  qui  contribua  davantage 
à  sa  réputation ,  fut  la  belle  série  d'expé- 
riences qu'il  entreprit  en  1774,  avec  au- 
tant de  zèle  que  de  talent ,  sur  la  tempé- 
rature des  animaux  en  général,  et  du 
corps  de  l'homme  en  particulier.  II  mou- 
rut le  25  juin  1802,  laissant  plusieurs, 
ouvrages  en  anglais,  dépourvus  du  char> 
me  du  slile  ,  mais  remarquables  par  des 


384  PÔft 

vues  neuves  et  des  expériences  curieuses  : 
\'' Principes  d'agriculture  et  préceptes 
sur  la  ve'ge'tation  y  Edimbourg  ,  1765  et 
1771 ,  in-8.  Ils  ont  été  traduits  en  alle- 
mand avec  des  notes  et  des  additions , 
"Vienne,  1777  ,  in-8.  2°  Eltmens  de  mé- 
decine-pratique, Londres ,  1768  ,  in-8  , 
souvent  réimprimés  et  traduits  en  alle- 
mand. C'est  le  manuel  qui  servait  de  texte 
à  ses  leçons.  3°  Traite'  de  la  digestion 
des  alimcns ,  Londres,  1791  ,  traduit  en 
allemand  en  1793.  4°  Cinq  dissertations 
sur  la  fièvre  simple,  Londres,  1794-1802, 
in-8, 

FOREIRO  {  François  ) ,  en  latin  Fo- 
reriuSy  dominicain  de  Lisbonne,  mort 
en  1581  ,  fut  un  des  trois  théologiens 
choisis  pour  travailler  au  Cate'chisme  du 
concile  de  Trente  ,  où  il  avait  fait  admi- 
rer son  talent  pour  la  chaire.  On  a  de  lui 
un  savant  Commentaire  surisaïe,  in-fol., 
qu'on  a  inséré  dans  le  Recueil  des  grands 
critiques. 

FOREST  (  Pierre  ) ,  savant  médecin , 
plus  connu  sous  le  nom  de  Forestus ,  né 
à  Âlcmaër  en  1 522 ,  d'une  famille  noble, 
étudia  et  pratiqua  la  médecine  en  Italie , 
en  France  et  dans  les  Pays-Bas ,  oîi  il 
mourut  en  1597.  On  a  de  lui  des  Obser- 
vations sur  la  médecine,  6  vol.  iu-fol., 
Francfort,  1623. 

FOREST  (  Jean  ) ,  peintre  du  roi ,  né 
à  Paris  en  1636  ,  mort  dans  la  même  ville 
en  1712,  était  un  excellent  paysagiste, 
et  joignait  à  ce  talent  beaucoup  d'esprit 
et  un  caractère  plaisant.  Il  fit  le  voyage 
d'Italie  oùPierre-FrançoisMola  lui  donna 
des  préceptes  dont  il  sut  bien  profiter  ; 
et  il  étudia  le  coloris  dans  les  ouvrages 
du  Titien ,  du  Giorgion  et  des  Bassan.  On 
remarque  dans  ses  tableaux  des  touches 
hardies',  de  grands  coups  de  lumière',  de 
savantes  oppositions  de  clair  et  d'ombre, 
un  stile  élevé,  de  beaux  sites  et  des 
ligures  bien  dessinées. 

FORESTI  ou  FoRESTA  (  Jacques- 
Philippe  de  ) ,  est  plus  connu  sous  le  nom 
de  Philippe  de  Bergame ,  sa  patrie.  Il 
entra  dans  l'ordre  des  Augustins,  et  s'y 
fit  un  nom.  Il  mourut  le  15  juin  1520, 
Agé  de  86  ans ,  après  avoir  publié  une 
Chronique  depuis  Adam  jusqu'en  1 503 , 


foft 

et  continuée  depuis  jusqu'en  1535,  Paris, 
1535,  in-folio.  Elle  eut  beaucoup  de 
cours  dans  le  siècle  de  l'auteur  ;  elle  ne 
le  méritait  guère.  Si  l'on  excepte  les 
événemens  dont  il  a  pu  être  témoin , 
tout  le  reste  n'est  qu'une  informe  com- 
pilation des  historiens  les  plus  crédules. 
On  a  encore  de  Foresti  :  Confessionale  , 
ou  Interrogatorium ,  Venise,  14^7, 
in-folio  ;  et  un  Traité  des  femmes  illus- 
tres, Ferrare,  1497  ,  in-fol.  ,  en  latin. 

FORESTIER  (Pierre),  savant  cha- 
noine d'Avalon,  mort  dans  cette  ville  eu 
1 723  ,  à  69  ans ,  est  auteur  de  2  volumes 
ai  Homélies,  et  de  quelques  autres  ou- 
vrages, dont  le  meilleur  est  V Histoire  des 
indulgences  et  des  jubilés ,  in-12. 

*  FORESTIERI  (  François-Benedict  ), 
littérateur  italien ,  né  à  Sinigaglia  eu 
1797,  fut  élevé  à  l'école  de  Frugoni  et  de 
Césarotti.  Il  s'occupa  beaucoup  et  de 
bonne  heure  des  classiques  latins  et  de  la 
poésie  italienne.  On  a  de  lui  des  traduc- 
tions de  quelques-unes  des  élégies  de  Ti- 
bulle  et  des  poésies  latines  de  Pétrarque  : 
il  publia  lui-même  plusieurs  morceaux 
de  poésie  parmi  lesquels  on  distingue  ce- 
lui qu'il  fit  sur  la  mort  de  Perticari  son 
ami.  Ce  jeune  poète  est  mort  en  1828. 

*  FORFAIT  (  Pierre  Alexandre-Lau- 
rent ) ,  ingénieur-constructeur  de  la  ma- 
rine ,  né  à  Rouen  eu  1752,  exerça  d'a- 
bord les  fonctions  d'ingénieur  à  Brest , 
puis  à  Cadix  sous  les  ordres  du  comte 
d'Estaing.  Il  se  recommanda  particulière- 
ment à  l'attention  du  gouvernement  en 
1787  par  la  construction  de  paquebots 
propres  à  recevoir  des  marchandises, 
ainsi  qu'un  grand  nombre  de  passagers , 
et  destinés  à  entretenir  avec  les  Etats- 
Unis  une  navigation  régulière.  Chargé 
ensuite  d'une  mission  de  la  plus  haute 
importance  auprès  de  l'Angleterre ,  il  fut 
nommé  à  son  retour,  membre  de  l'Assem- 
blée législative  en  1791,  et  il  eut  le  cou- 
rage de  s'opposer  à  toutes  les  proposi- 
tions révolutionnaires  faites  par  des  têtes 
exaltées.  Il  alla  ensuite  reprendre  ses 
fonctions  au  Havre  ,  et  devint  successi- 
vement ministre  de  la  marine ,  conseiller 
d'état ,  inspecteur-général  de  la  flotiiie 
destinée  contre  l'Angleterre,  comman- 


FOR 

danl  de  la  Légion  -  d'honneur  ,  préfel 
maritime  au  Havre  ,  puis  à  Gènes.  Des- 
servi par  des  envieux  qui  pai-vinrent  à 
lui  faire  perdre  la  confiance  du  gouver- 
nement, il  se  retira  au  scinde  sa  famille, 
et  mourut  des  suites  d'une  attaque  d'a- 
poplexie le  9  novembre  1807.  Il  a  laissé 
1"  un  Mémoire  en  latin,  sur  les  canaux 
navigables,  couronné  par  l'académie 
de  Mantoue  en  17  73.  2°  Un  Traité  élé- 
mentaire de  la  mâture  des  vaisseaux  , 
Paris,  1788,  1  Yol.  in-4 ,  ouvrage  entre- 
pris par  ordre  du  ministre  de  la  marine, 
pour  l'instruction  des  élèves  ,  et  qui  an- 
nonce que  l'auteur  avait  bien  approfondi 
son  sujet. 

FORGEAT!  (  Saint  ).  Foyez  Ferréol. 

*  FORGEOT  (  Nicolas-Julien  ) ,  auteur 
dramatique  ,  avocat  et  inspecteur  de  l'ad- 
ministration des  postes,  né  à  Paris  au 
mois  de  juillet  1758,  étudia  le  droit , 
se  fit  recevoir  avocat ,  et  mourut  à  Paris 
le  4  avril  1798.  Il  a  donné  plusieurs 
pièces  qui  eurent  du  succès  ,  et  dont 
quelques-unes  sont  restées  au  répertoire  : 
à  l'Opéra ,  les  Pommiers  et  le  moulin  ; 
ôux  Français ,  les  Epreuves ,  la  Ressem- 
blance ;  au  théâtre  Italien ,  les  Deux 
Oncles.,  les  Dettes,  la  Caverne,  etc.; 
au  théâtre  Feydeau ,  le  Double  Divorce , 
la  Rupture  inutile.  Son  chef-d'œuvre  est 
l'Opéra-comique  des  Dettes,  en  2  actes 
et  en  prose,  mêlé  d'ariettes,  musique 
de  M.  Champin,  joué  le  8  janvier  1787. 

FORGES.  Foy.  Desforges-Mailla'rd. 

FORGET  DE  Frksxe  (Pierre),  ha- 
bile secrétaire  d'état,  employé  dans  toutes 
les  affaires  importantes  de  son  temps, 
mourut  en  1610.  C'est  lui  qui  dressa  le 
fameux  édit  de  Nantes.  — Une  faut  pas 
le  confondre  avec  Germain  Forget  , 
avocat  au  bailliage  d'Evreux  ,  dont  on  a 
un  Traité  des  personnes  et  des  choses 
ecclésiastiques  et  décimales ,  Rouen , 
162.'i,  petit  in-8. 

*  FORKEL  (Jean -Nicolas),  célèbre 
musicien  allemand  et  docteur  en  philoso- 
phie, naquit  le  22  février  17  49  à  Méeder 
près  de  Cobourg ,  de  parens  très  pauvres. 
Néanmoins  il  apprit  dès  son  bas  âge  la 
musique,  seul,  uniquement  avec  le  se- 
cours de  l'ouvrage  de  Matthesons,  intitulé 

V. 


FOR  385 

le  Parfait  maître  de  chapelle.  Ses  di.spo- 
sitions  étaient  si  heureuses  et  ses  succès 
furent  si  rapides  ,  qu'à  1 7  ans  il  fut  nom- 
mé préfet  du  chœur  de  l'église  de  Schwe- 
rin.  Le  duc  de  Mecklcmbourg,  ayant  trou- 
vé en  lui  de  l'aptitude  pour  les  sciences 
et  les  lettres,  lui  fournit  les  moyens  de  se 
rendre  à  l'université    de  Gottingue ,  où 
il  s'occupa  du  droit  :  fatigué  d'une  étude 
qui  n'avait  pour  lui  aucun  agrément,  il 
profitait  de  tous  ses  momens   de  loisir 
pour  apprendre  l'art  dont  il  sentait  qu'il 
avait  le  génie  :  il  mit  à  contribution  les 
nombreuses  ressources  que  lui  fournissait 
la  riche  bibliothèque  de  cette  ville ,  et 
étudia  la  théorie  de  la  musique  dans  les 
meilleurs  ouvrages  qui  avaient  paru  jus- 
qu'alors. Chargé  bientôt  de    diriger  le 
concert  académique  ,  il  fut  en  relation 
avec  tous  les  musiciens  célèbres  de  l'Al- 
lemagne. L'université  le  reçut  docteur 
en  philosophie,   et  la  ville  lui  accorda 
le  droit  de  bourgeoisie.  Ce  savant  pro- 
fesseur a  composé  des  symphonies  ,  des 
oratorio  ,   des  cantates  ,  des  concerto  , 
des  sonates.  Il  a  aussi  beaucoup  écrit 
sur  la  partie  théorique  de  son  art.  Ses 
ouvrages  ,  tous  composes  en  allemand , 
sont  :  1"  De  la  Théorie  de  la  musique, 
Gottingue,    1774,   in-4;  2»    Bibliothè- 
que musicale  et  critique  ,  Gotha  ,  17  78, 
3  vol.  in-8  ;  ouvrage  qui  produisit  une 
grande  sensation ,  parce  que  la  princesse 
Amélie  de  Prusse  venait  de  faire  une  cri- 
tique amère  àcV Iphigénic  de  Gluck,  mu- 
sicien qu'il  attaquait  lui-même.  3"  Sur  la 
meilleure  organisation  des  concerts  pu- 
blics ,  1779,  in-4  ;  4"  Développement  de 
quelques  idées  sur  la  musique  ;  6"  Alma- 
nach  musical  pour  V Allemagne  ,  1782 
et  années  suivantes  ;  6°  Histoire  générale 
de  la  musique,  1788-1801  ,  2  vol.  in-4, 
ouvrage  que  3Iarpurg  considérait  commte 
une  production  dont  l'Allemagne  devait 
s'enorgueillir,  et  qui  est  resté  incomplet. 
7°  Sur  la  littérature  universelle  de  la 
musique ,  Lév^?,\ck ,  1790,  livre  destine 
à  faire  connaître  tous  les  écrits  qui  ont 
été  publiés  sur  cette  matière.  Il  avait  an- 
noncé un  Prospectus  pour  un  magnifique 
ouvrage ,  sous  le  titre  de  Monument  de 
Vart  musical  depuis  la  découverte  de  la 


386  FOR 

cantrepointe  jusqu^aux  temps  actuels , 
qui  devait  avoir  cinquante  cahiers ,  et 
contenir  les  chefs-d'œuvre  de  toutes  les 
sortes  de  musique  ;  mais  les  éditeurs 
.-lyant  renoncé  au  traité  qu'ils  avaient  si- 
gné, l'ouvrage  n'eut  pas  de  suite.  Il  çst 
mort  le  20  mars  1818.  Les  académies  de 
Stockholm  et  de  Livourne  l'avaient  admis 
dans  leur  sein. 

*  FORMAGE  (Jacques  Charles-César) , 
littéraleui",  né  à  Coupe-Sartre  près  de 
Lisieus ,  en  1749,  fut  professeur  de  3* 
à  Rouen  en  1779,  occupa  la  chaire  des 
langues  anciennes  à  l'école  centrale ,  et 
fut  attaché  ensuite  au  lycée  de  cette 
ville.  Il  cultiva  les  poésies  latine  et  fran- 
çaise. On  a  de  lui  1°  Iii  liccntiam 
nostrce  poeseos  carmen  ;  2°  Ignis  ;  3"  In 
pestem  quœ  Rothomago  incubiiit; 
4"  Stances  sur  la  guerre  d^ Amérique  : 
ces  trois  poèmes  et  les  stances  ont  été 
couronnes  par  l'académie  de  l'Immaculée- 
Conception  de  Rouen  en  1778,  1779  et 
1780,  insérés  dans  le  recueil  des  pièces  de 
celte  académie  ;  6°  Discours  sur  la  réu- 
nion de  la  Normandie  à  la  couronne  de 
France  sous  Philippe- Auguste ,  cou- 
ronné en  1781  par  la  même  académie, 
et  inséré  par  extraits  dans  son,  recueil  ; 
C"  des  fables  mises  en  vers ,  qui  n'ont 
rien  de  remarquable ,  quoiqu'elles  lui 
aient  fait  quelque  réputation.  Il  est  mort 
à  Rouen  le  11  septembre  1808. 

*  FORMEY  (  Jean-Henri-Samuel  ) , 
ministre  protestant ,  ne  à  Berlin  en  17 1 1 , 
d'une  famille  de  réfugiés  français ,  fut 
nommé  pasteur  à  Brandebourg  à  20  ans, 
puis  a"  Berlin,  où  il  obtint  en  1737  la 
chaire  d'éloquence  au  collège  français 
de  cette  ville,  et  en  1739  celle  de  phi- 
losophie ,  vacante  par  la  mort  de  Lacroze. 
Son  mérite  lui  valut  la  place  de  secré- 
taire correspondant  de  la  princesse  Hen- 
riette-Marie de  Prusse  ,  retirée  au  châ- 
teau deCoepenick,  celle  de  conseiller 
privé  au  Directoire  français,  et  de  secré- 
taire perpétuel  de  l'académie  de  Berlin. 
H  mourut  le  8  mars  1797.  On  dit  qu'il 
était  attaché  à  la  révolution,  et  c'est  peut- 
être  pour  cela  que  Voltaire  l'a  tourné  en 
ridicule.  Il  a  publié  un  très  grand 
nombre  d'ouvrages  ;  les  principaux  sont  : 


FOR 

1°  Mémoires  pour  servir  à  l'histoire  tt 
au  droit  public  de  la  Pologne ,  la  Haie 
1741,  et  Franclort  1754,  in-8.  2°  La 
belle  Wolfienne ,  ou  abrégé  de  la  philo- 
sophie wolfienne  ,  la  Haie  ,1741,6  vol . 
in  8,  et  1774  ,  6  vol ,  in-12.  3"  Conseils 
pour  former  une  bibliothèque  peu  nom- 
breuse, mais  choisie,  1746,  in-12, 
souvent  réimprimés.  4°  Pensées  raison- 
nables opposées  aux  pensées  philoso- 
phiques ,  1 7  49  et  1 756 ,  in-8^  5°  Le  phi-, 
losophe  chrétien,  Leyde,  1750-56,  4  vol. 
in-8  :  c'est  le  recueil  d'une  partie  des 
sermons  de  l'auteur.  6°  Discours  moraux 
pour  servir  de  suite  au  Philosophe  chré- 
tien, 1715,  2  vol.  in-12.  7°  Mélanges 
philosophiques,  1754,  2  vol.  in-8. 
8°  Eloges  des  académiciens  de  Berlin  et 
de  divers  autres  sav ans ,  1757,  2  vol. 
in-12.  9"  Le  philosophe  païen ,  ou  Pen- 
sées de  Pline ,  avec  un  commentant 
littéraire  et  moral,  17  59,  3  vol.  in-12. 
10°  Principes  élémentaires  des  belles- 
lettres  ,  17  58  et  63,  in-12.  \i°  Abrégé 
de  F  histoire  de  la  philosophie ,  1760, 
in-8.  i  2°  Abrégé  de  V histoire  ecclésia>- 
stique  ,  1762,  2  vol.  in-12.  tZ"  Anti- 
Emile ,  1702  et  1764,  in-8.  14°  Emile 
chrétien ,  consacré  à  V utilité  publique. 
Berlin,  1764,  2  vol.  in-8.  i S"  Sermons 
sur  divers  textes  de  V Ecriture-sainte , 
17  76,  2  vol.  in-8.  Il  a  travaillé  à  la  Bi- 
bliothèque germanique  avec  Beausobre  , 
et  commencé  une  autre  collection  sous 
le  titre  de  Nouvelle  bibliothèque  ger- 
manique,  25  vol.  in-8.  Ha  aussi  coopéré 
au  Journal  de  Berlin,  à  la  Bibliothèque 
centrale  ,  à  la  Bibliothèque  des  sciences 
et  des  beaux-arts ,  aux  Nouvelles  litté- 
raires ,  au  Journal  encyclopédique ,  etc. 
FORMOSE ,  évêque  de  Porto ,  suc- 
céda au  pape  Etienne  V  le  1 9  septembre 
891.  C'est  le  premier  évêque  transféré 
d'un  autre  siège  à  celui  de  Rome.  Formo- 
se ,  déjà  évêque ,  ne  reçut  point  de  nou- 
velle imposition  des  mains  .-  il  fut  seule- 
ment intronisé.  Il  mourut  en  896  ,  aprèâ 
avoir  couronné  Arnoul  empereur.  Etienne 
VI ,  successeur  de  Formose ,  après  le 
court  pontificat  de  Bonifacc  VI,  fit  dé- 
terrer son  corps ,  après  avoir  condamné 
sa  mémoire  (  voyez  Etienne  VI }.  Jeau 


FOR 

IX  assembla  un  coucDe  en  898 ,  qui  cassa 
les  articles  du  synode  convoqué  par 
Etienne  VI,  et  rétablit  la  mémoire  de 
Formose.  Voyez  Auxilips. 

FORNARI  (  Marie-Victoire  ) ,  née  à 
Gènes  en  1562  ,  fut  mariée  à  Ange  Strate, 
de  qui  elle  eut  trois  garçons  et  deux  filles, 
qui  tous  embrassèrent  la  vie  religieuse. 
Après  la  mort  de  son  mari ,  elle  institua 
l'ordre  des  Annonciades  Célestes,  et  mou- 
rut en  odeur  de  sainteté  le  1 5  décembre 
1617.  Sa  Vie  a  été  imprimée  à  Paris ,  en 
1770,  in-12.  Son  ordre  a  une  centaine 
de  maisons,  en  Italie,  en  Allemagne,  et  en 
France.  Les  religieuses  sont  habillées  de 
blanc  ,  avec  un  scapulaire  bleu-de-ciel, 
et  le  manteau  Je  même  ;  c'est  de  là 
qu'elles  ont  tiré  leur  nom  de  Ce'lestes. 

*  FORNICI  (  Jean) ,  né  vers  l'an  1762 
et  mort  le  11  avril  1828  à  Rome  ,  où  il 
était  chanoine  de  la  collégiale  de  St.- 
Eustache  ,  maître  des  cérémonies  ponti- 
ficales ,  secrétaire  de  la  congrég-ation  des 
cérémonies,  archiviste  de  la  Pénitencerie 
et  consulteur  de  la  congrégation  des  in- 
dulgences ,  avait  de  grandes  connais- 
sances en  liturgie  :  il  a  laissé  1°  des  In- 
stitutions liturgiques  pour  le  sénat  ro- 
main ;  2°  deux  collections  de  questions 
et  les  réponses  sur  des  doutes  liturgi- 
ques ;  3°  des  notes  imprimées  par  ordre 
de  la  congrégation  des  Rites  ;  4°  un  recueil 
de  panégyriques ,  plusieurs  fois  réim- 
primé. 

*  FORSKAL  (  Pierre  ) ,  naturaliste  et 
voyageur  suédois,  né  en  1736,  fit  pa- 
raître de  bonne  heure  une  dissertation 
intitulée  :  Dubia  de  principiis  philoso- 
phiœ  recentioris.  Son  ami  Linnéc  le  re- 
commanda à  Frédéric  l" ,  roi  de  Dane- 
luarck.  D'après  les  ordres  de  ce  prince, 
il  accompagna  Niebuhr  dans  un  voyage 
en  Asie;  il  alla  ensuite  à  Malte  ,  et  par- 
vint en  Egypte,  où  il  fut  pris  en  re- 
montant le  Nil,  et  dépouillépar  les  Arabes. 
Ayant  été  attaqué  de  la  peste,  il  mourut 
à  Djerim  en  Arabie  le  11  juillet  1763. 
Niebuhr  rassembla  ses  papiers ,  et  publia 
les  ouvrages  suivans  :  1°  Descriptiones 
aninmlium ,  avium  ,  ampliibiorum  ,  quœ 
in  itinere  orientali  obscrvavit  Pet  rus 
Forskal  illAunix,  1775  ,  in-4.  2"  Flora 


FOR  •  387 

œgyptiaco-arabica  ,  sivc  Descriptiones 
plantarum ,  etc.,  1775,  in-4.  3°  Icônes 
rerum  naturaliuni  quas  in  itinere  orien- 
tali depingi  curavit  Forskal,  17  76, 
in-4. 

FORSTER  (  Jean  ) ,  théologien  pro- 
testant, né  à  Augsbourg  en  1495,  ami 
de  Reuchlin  ,  de  Mélanchthon  et  de  Lu- 
ther ,  enseigna  l'hébreu  avec  réputation 
à  Witteraberg,  et  y  mourut  en  1556.  On 
a  de  lui  un  excellent  Dictionnaire  hé- 
braïque, Bàle,  1564  ,  iu-fol.  —  Il  est  dif- 
férent d'un  autre  Jean  Forster,  mort  en 
1613,  (jui  a  laissé  des  Commentaires  sur 
VExode,  Isaïe  et  Jérémie ,  3  vol.  in-4; 
et  De  intcrpretatione  Scripturarum  , 
Wittemberg ,  1608,  in-4 . 

*  FORSTER  (  Froben  ,  en  latin  Fro- 
bcnius),  né  le  30  août  1 709,  à  Konisgsfeld 
en  Bavière ,  entra  dans  l'ordre  de  Saint- 
Benoît  à  l'âge  de  19  ans,  et  fit  profession 
à  Ratisbonne  dans  l'abbaye  de  Saint-Em- 
meran  ,  oîi  il  professa  la  philosophie  de- 
puis 1735 jusqu'à  1744, époque  àlaquelle 
il  fut  appelé  à  l'université  de  Saltzbourg 
pour  y  remplir  les  mêmes  fonctions.  Il 
revint  trois  ans  après  à  Saint-Emmeran 
pour  y  professer  l'interprétation  de  l'E- 
criture sainte;  il  fut  élu  prieur  de  ce 
monastère  en  17  50,  et  prince-abbé  en 
1 762.  Après  s'être  distingué  par  la  sagesse 
de  son  administration,  il  mourut  le  12 
octobre  1791.  Cet  illustre  prélat  avait  utie 
érudition  profonde;  il  aimait  les  sciences  , 
et  il  s'efforça  de  les  faire  fleurir  dans  son 
abbaye.  Il  a  laissé  1°  six  Dissertations 
latines  sur  divers  sujets  de  philosophie  et 
de  théologie;  2°  une  Dissertation  en 
allemand  sur  le  concile  tenu  en  1763  à 
Aschein  ,  dans  la  Haute-Bavière.  Elle  a  été 
insérée  dans  le  tome  1*"^  des  Mémoires  de 
l'académie  des  Sciences  de  Bavière. 
3°  Une  Edition  d'Alcuin,  sous  ce  titre  ; 
Beati  Flacci  Albini  seu Âlcuini. .  opéra. . 
de  nova  collata  ,  multis  locis  emcndala  , 
et  opusculis  prinium  repertis  plurimunt 
aucta ,  2  parties,  1777  ,  4  vol.  in-fol. 
Dom  Catelinot,  bénédictin  de  la  con- 
grégation deSaint- Vannes,  avait  aussi  tra- 
vaillé à  une  édition  d'.\lcuin ,  de  laquelle 
dom  Forster  tira  beaucoup  de  sermons 
pour  la  sienne.  (  Voyez  Cateliïoï.  )  Il  y 


388  FOR 

joignit  en  outre  soixante-onze  lettres 
inédites,  venues  d'Angleterre,  beaucoup 
de  variantes  et  de  corrections ,  fruits 
d'immenses  recherches  laites  dans  les 
bibliothèques  d'Allemagne ,  un  traité  De 
cursu  et  snltu  lunœ  bis-sexto  ;  un  autre 
De  orthographia ,  et  enfin  un  écrit  inti- 
tulé :  Libellas  adversus  hœresin  Fclicis 
(  urgcllensis  )  ad  abbates  et  monachos 
Gothiœ ,  orné  d'une  préface  du  père  Fog- 
gini.  [Voyez  Félix,  évêque  d'Urgel , 
et  FoGiNi ,  qui  avait  envoyé  ce  traité  à 
l'abbé  d'Emmeran  ,  d'après  un  manuscrit 
du  Vatican.  ) 

FORSTER  (  Valentin  )  est  auteur 
d'une  Histoire  du  droit ,  en  latin  ,  avec 
les  Vies  des  plus  célèbres  jurisconsul- 
tes y  jusqu'en  1680,  temps  oti  il  écri- 
vait. —  Nous  avons  eu  dans  le  siècle  der^ 
nier  un  autre  Forster  (  Nathanaël  ) ,  qui 
a  donné  une  Bible  hébraïque ,  sans  points. 
Oxfort,  1750,  2  vol.  in-4  :  édition  es- 
timée. 

*  FORSTER  (  Jeau-Rheinold  )  ,  célè- 
bre naturaliste  et  voyageur  prussien , 
issu  d'une  famille  anglaise  qui  avait  quitté 
sa  patrie,  à  cause  des  troubles  politiques 
du  règne  de  Charles  I ,  naquit  à  Dirs- 
chaw  ,  dans  la  Prusse  Polonaise  le  22  sep- 
tembre 1729.  Après  avoir  fait  ses  études 
au  Gymnase  de  Berlin  et  à  l'université 
de  Halle ,  où  il  s'était  surtout  appliqué 
à  la  connaissance  des  langues  anciennes 
et  modernes,  des  langues  orientales  etde 
la  théologie ,  il  exerça  d'abord  les  fonc- 
tions de  prédicateur  à  Nassenhuben  près 
de  Dantzick  ;  mais  son  revenu  ne  suffisant 
pas  à  l'entretien  d'une  famille  qui  prenait 
de  l'accroissement ,  il  accepta  la  proposi- 
tion qu'on  lui  fit  d'aller  en  Russie  diriger 
les  nouvelles  colonies  de  Saratoff.  Le  peu 
d'avantages  qu'il  tirait  de  ce  poste  lui  fit 
prendre  la  résolution  de  se  rendre  à  Lon- 
dres en  1766,  et  il  fut  choisi  en  1772  pour 
accompagner  comme  naturaliste  le  capi- 
taine Cook  dans  son  second  voyage  au- 
tour du  monde.  La  dureté  de  son  carac- 
tère lui  fit  beaucoup  d'ennemis ,  et  lui 
attira  même  des  châtimens  :  car  Cook  fut 
obligé  de  le  mettre  trois  fois  aux  arrêts. 
A  son  retour,  il  porta  plainte  contre  lui,  et 
celui-ci  fut  «iicore  puni  par  l'amiraulé 


FOR 

qui  le  priva  d'une  partie  des  avantages 
qu'il  pouvait  espérer,  et  lui  défendit 
de  faire  la  relation  de  son  voyage.  Tous 
ces  ennemis  le  décidèrent  à  quitter  un 
pays  dont  le  séjour  lui  était  devenu  in- 
supportable. Frédéric  il,  dont  il  avait  fixé 
l'attention,  lui  fournit  les  moyens  de  re- 
venir (  1780),  le  nomma  professeur  d'his- 
toire naturelle,  et  inspecteur  du  jardin 
botanique  à  Halle.  Malgré  le  zèle  qu'il 
apportait  à  tout  ce  qui  pouvait  faire  fleu- 
rir cette  université,  il  ne  put  gagner  l'a- 
mitié de  ses  confrères  les  professeurs, 
que  son  caractère  vif ,  irritable  et  suscep- 
tible éloignait  de  lui.  Un  goût  désor- 
donné pour  le  jeu  ajoutait  encore  à  ses. 
malheurs  en  épuisant  toutes  ses  ressour- 
ces. La  mort  de  ses  deux  fils  vint  les  ag- 
graver encore.  Il  succomba  à  une  longue 
maladie  le  9  décembre  1798.  Peu  de  sa- 
vans  ont  possédé  des  connaissances  aussi 
étendues  que  Forster  ;  il  savait  dix-sept 
langues  mortes  et  vivantes,  entre  autres, 
le  cophte  et  le  samaritain  ;  et  il  joignait  à 
une  lecture  immense  le  talent  de  bien 
observer.  On  a  de  lui  1°  Introduction  à 
la  minéralogie,  Londres,  1768,  in-8 ,  en 
anglais ,  ainsi  que  les  deux  ouvrages  sui- 
vans.  2"  Catalogue  d'insectes  anglais, 
Warington ,  17"0,  in-8.  3°  Catalogue 
des  animaux  de  l'Amérique  anglaise  , 
avec  des  instructions  succinctes  pour 
rassembler ,  conserver  et  transporter 
toutes  sortes  de  curiosités  naturelles , 
17  70,  in-8.  4°  Flora  jémericœ  septen- 
trionalis  (  or  a  Catalogue  of  tlie  plants 
of  north  Jmerica  ),  1771  ,  in-8.  b°  Cha- 
racteres  generuni  plaiitarum ,  quas  in 
itinerc  ab  insulas  maris  australis  colle- 
gerunt,  descripserunt,  delinearunt ,  an- 
nis  1772-1775,  J.  R.  Forster  et  G.  Fors- 
ter, Gottingue  ,  1776  ,  in-4.  6°  Observa- 
tions faites  dans  un  voyage  autour  du 
monde ,  sur  la  géographie  physique  , 
l'histoire  naturelle  et  la  philosophie  mo^ 
raie,  Londres,  17  78,  in-4,  en  anglais, 
trad.  en  allemand,  en  hollandais,  en  sué- 
dois ,  et  en  français,  par  Pingeron  ,  for- 
mant le  5^  vol.  de  l'édit.  française  in-4 
du  2*  voyage  de  Cook.  C'est  un  résumé 
aussi  instructif  qu'intéressant  de  ce  fa- 
meux voyag".   7"  Zoologice  Indicé  ra- 


I 


FOR 

rioris  spicilcgium ,  avec  une  traduction 
en  allemand  ;  Halle,  1781  et  1793,  in-fol. 
8"  Tableau  de  V Angleterre poup  l annce 
17  80,  continué  jusqu'à  l'année  1783, 
iu-8  ,  en  anglais  :  l'auteur  le  traduisit  en 
allemand.  9"  Histoire  des  découvertes  et 
des  voyages  faits  dans  le  Nord  (  en  alle- 
mand) ,  Francfort-sur-l'Oder ,  1784,  in-8, 
traduit  en  anglais  :  Londres,  1786  ,  et  en 
français ,  d'après  la  version  anglaise  ,  par 
Broussonnet,  Paris,  1788,  in-8.  \(i°En- 
chiridion  historiœ  naturali  inserviens, 
1 788  ,  in-8. 1  i" Magasin  des  voyages  les 
plus  récens  ,  trad.  de  diverses  langues , 
et  enrichis  de  remarques  ,  Halle  ,  1790- 
98,  16  vol.  in-8.  12"  Observations  et 
vérités  jointes  à  quelques  principes  qui 
ont  acquis  un  haut  degré  de  vraisem.' 
blance ,  ou  Matériaux  pour  un  nouvel 
essai  sur  la  théorie  de  la  terre  australe, 
Leipsick,  1798  ,  in-8. 

"  FORSTER  (  Jcan-George-Adara  ) , 
fils  du  précédent,  né  à  Nassenhuben , 
près  de  Dantzick,  suivit  son  père  en 
Bussie ,  à  Londres  et  dans  son  voyage  au- 
tour du  monde  avec  Cook.  Il  vint  à  Paris 
en  17  77  ,  et  passa  ensuite  en  Hollande  et 
en  Allemagne  ,  oii  le  landgrave  de  Hesse 
lui  offrit  une  chaire  d'histoire  naturelle  à 
Cassel,  qu'il  occupa  jusqu'au  moment  où 
le  roi  de  Pologne  lui  en  lit  accepter  une 
à  l'université  de  Wilna ,  où  il  reçut  le 
grade  de  docteur  en  médecine.  Catherine 
II ,  jalouse  de  toute  espèce  de  gloire , 
avait  voulu  aussi,  en  1787,  faire  exécu- 
ter un  nouveau  voyage  autour  du  monde , 
et  avait  nommé  Forster  historiographe 
de  cette  expédition  ;  mais  cette  entre- 
prise n'eut  pas  lieu,  à  cause  de  la  guerre 
contre  les  Turcs.  Se  trouvant  sans  em- 
ploi ,  il  se  rendit  en  Allemagne ,  où  il  se 
fit  une  brillante  réputation  par  la  publi- 
cation de  plusieurs  mémoires  sur  l'his- 
toire naturelle  et  la  littérature.  L'élec- 
teur de  Mayence  le  choisit  pour  son  pre- 
mier bibliothécaire,  et  il  remplissait  cet 
emploi  avec  distinction ,  lorsque  l'armée 
française  s'empara  de  cette  ville  en  1792. 
Ami  chaud  des  nouveautés ,  il  embrassa 
avec  ardeur  les  principes  de  la  révolu- 
tion ,  et  fut  député  à  Paris ,  par  les  Ma- 
jençois ,  pour  solliciter  leur  réunion  à  la 


FOR  38g 

France.  Pendant  cette  mission ,  qu'il  avait 
acceptée  avec  trop  de  légèreté,  les  Prus- 
siens reprirent  Mayence  :  ses  manuscrits 
et  tout  ce  qu'il  possédait  tombèrent  au 
pouvoir  du  prince  de  Prusse  :  sa  femme 
même  qu'il  chérissait ,  séduite  par  un 
Français ,  l'abandonna.  Puni  ainsi  de  son 
ingratitude  envers  son  bienfaiteur,  et  dé- 
goûté de  la  révolution  et  des  biens  chi- 
mériques qu'elle  promettait ,  il  se  livra 
à  l'étude  des  langues  orientales ,  dans  le 
but  d'entreprendre  un  voyage  à  l'Indos- 
tan  et  au  Thibet  ;  mais  sa  santé  altérée 
par  les  secousses  qu'il  avait  éprouvées,, 
et  un  vice  scorbutique  dont  il  était  at- 
teint ,  le  conduisirent  au  tombeau  dans 
le  mois  de  mars  1794,  à  l'âge  de  39  ans. 
lia  laissé  1°  Foyage  autour  du  monda 
sur  le  vaisseau  la  Résolution  ,  comman- 
dé par  le  capitaine  Cook  dans  les  années 
1772-1775,  Londres,  1777  ,  2vol.  in-4  , 
en  anglais.  Il  le  traduisit  en  allemand  avec 
son  père  ,  et  y  fit  diverses  additions,  Ber- 
lin, 1779-80,  2  vol.  in-4,  et  17  84,  3vol. 
in-8.  Cette  relation  ne  diffère  pas  pour 
le  fond  d'avec  celle  de  Cook;  mais  elle 
est  écrite  avec  plus  de  soin  ,  et  contient 
quelques  observations  qui  ne  se  trouvent 
point  dans  la  narration  de  ce  célèbre  na- 
vigateur ;  elles  ne  consistent  la  plupart 
qu'en  allusions  amères  dirigées  contre 
les  vices  des  Européens,  et  même  des 
compagnons  de  voyage  de  l'auteur.  Ces 
sorties  souvent  répétées  lui  suscitèrent 
des  critiques  ,  et ,  quoique  très  jeune  ,  il 
y  répondit  avec  modération  dans  un  écrit 
intitulé  :  Réplique  aux  remarques  de 
M.  fraie,  sur  la  relation  du  dernier 
voyage  de  Cook  ,  publiée  par  M.  Forster, 
Londres  ,  1778  ,  in-8.  2°  F lorulœ insula- 
rum  australium  prodromus,  Goltingen  , 
17  86  ,  in-8.  3°  Mélanges  ou  Essais  sur 
la  géographie  morale  et  naturelle ,  l'his- 
toire naturelle  et  la  philosophie  usuelle. 
Leipsick  et  Berlin,  1789-97,  6  vol.  in  8, 
en  allemand.  Les  deux  derniers  vol.  ont 
été  publiés  après  sa  mort.  4°  Tableau  de 
la  partie  inférieure  du  Rhin ,  du  Rra- 
ba/it ,  de  la  Flandre ,  de  la  Hollande , 
de  l Angleterre,  de  la  France  en  1790, 
Berlin,  1791-94  ,  3  vol.  in-8,  Huber  fit 
paraître  le  dernier  volume,    auquel    il 


Sgo  FOR 

ajouta  une  notice  sur  l'auteur.  U  a  été 
trad.  en  hollandais,  grand  in-8,  et  en 
français  sous  ce  titre  :  Voyage  philoso- 
phique et  pittoresque  sur  les  rives  du 
Mhin ,  à  Liège ,  dans  la  Flandre ,  le 
£rabant,  la  Hollande,  Paris,  1795,  2 
vol.  in-8,  et  Voyage  philosophique  et 
pittoresque  en  Angleterre  ,  suivi  d'un 
Essai  sur  thist.  des  arts  dans  la  Grande- 
Bretagne  ,  1796,  in-8.  Ce  livre  annonce 
beaucoup  d'instruction  ;  mais  on  regrette 
que  l'auteur  se  soit  trop  abandonné  à  sa 
manie  du  sentiment ,  et ,  dans  la  partie 
qui  concerne  l'Angleterre ,  à  sa  mauvaise 
humeur  contre  les  habitans  de  cette  île. 
5°  Souvenirs  de  Vannée  1 790  ,  tableaux 
historiques  avec  figures  du  célèbre  Cho- 
dowiecki;  Berlin,  1793,  Jn-8.  6°  Ma- 
gasin de  Gottingen ,  concernant  les 
arts  et  la  littérature ,  journal  publié  en 
allemand  en  société  avec  Lichtenberg, 
Gottingen  ,  1780-82.  7°  Plusieurs  traduc- 
tions en  allemand  et  divers  mémoires , 
programmes ,  lettres  et  pamphlets  poli- 
tiques ,  relatifs  à  Mayence.  11  a  aussi  tra- 
vaillé à  la  collection  des  voyages  publiés 
par  Sprengel. 

*  FORSTER  (  George  ) ,  voyageur  an- 
glais, né  vers  1750,  était  employé  civil 
au  service  de  la  compagnie  des  Indes- 
Orientales,  lorsqu'il  conçut,  sans  doute 
à  la  sollicitation  de  quelques-uns  des 
chefs  de  la  compagnie ,  l'audacieux  pro- 
jet de  revenir  en  Europe  par  le  nord  de 
l'Inde  et  de  la  Perse  ;  il  partit  de  Calcutta 
le  23  mai  1782,  après  avoir  pris  toutes  les 
précautions  dictées  par  la  prudence  :  il 
avait  appris  les  langues  des  pays  qu'il  de^ 
vait  parcourir,  connaissait  leurs  mœurs, 
et  s'était  vêtu  du  costume  oriental.  Il  vint 
par  les  pays  de  Cachemir  et  de  Candahar , 
et  au  bout  d'un  an  il  était  au  midi  de  la 
mer  Caspienne.  Il  avait  fait  900  lieues  , 
environ  2  lieues  et  demie  par  jour.  Il 
continua  sa  route  et  au  premier  port,  il 
s'embarqua  pour  l'Angleterre  et  termina 
heureusement  ce  voyage,  malgré  les  dan- 
gers sans  nombre  qu'il  eut  à  courir.  De 
retour  dans  l'Inde ,  les  directeurs  de  la 
compagnie  lui  conférèrent  le  titre  et  les 
fonctions  d'ambassadeur  à  la  cour  des  Ma- 
rattcs  orientaux  àPiagpour  dans  le  Bérar. 


FOR 

Il  y  mourut  peu  de  temps  après  son  ar- 
rivée, en  1792.  On  a  de  lui  1"  Jb'siai  sur 
la  mythologie  et  les  coutumes  des  In- 
dous,  brochure  in-8  ,  qu'il  publia  à  Lon- 
dres en  1785,  et  qui  eut  beaucoup  de 
succès.  2°  A  Journey  from  Bengal  to 
england,  Calcutta ,  1790  ,  2  vol.  in-4.  Le 
second  ne  fut  publié  qu'après  sa  mort, 
d'après  les  matériaux  trouvés  dans  ses  pa- 
piers ;  c'est  la  relation  de  son  voyage.  Elle 
est  curieuse  et  instructive ,  et  a  été  tra- 
duite en  allemand ,  et  en  français ,  sous 
le  titre  de  Voyage  du  Bengale  à  Saint- 
Pétersbourg ,  a  travers  l'es  provinces 
septentrionales  de  Vlnde,  le  Cachemire, 
la  Perse,  la  mer  Caspienne,  etc.,  suivi 
de  V Histoire  des  Rohyllahs  et  de  celle 
desSeiks,  par  feu  George  Forster,  tra- 
duit de  Vanglais  avec  des  additions, 
etc.  Paris,  1802,  3  vol.  in-8,  avec  2 
cartes. 

*  FORSTER  (Jean-Chrétien  ) ,  naquit 
le  U  décembre  1735  à  Halle,  et  fut 
professeur  de  philosophie  dans  l'univer- 
sité de  celte  ville.  Il  y  exerça  ensuite  dif- 
férens  emplois  administratifs,  et  fut  char- 
gé ,  en  1791  ,  de  l'inspection  du  jardin 
botanique  et  économique.  Il  est  auteur 
des  ouvrages  suivans  :  1°  Disputatio  de 
dcliriis.  Halle,  1759,  in-4;  2°  Compa- 
ratio  demonstrationis  Cortesii  pro  exis- 
tentia  Dei ,  cum  illa  qua  Ansclinus  can- 
tuariensis  usus  est ,  Berlin ,  1770  ,  in-4. 
Ses  autres  ouvrages  sont  en  allemand  : 
3°  Caractère  des  trois  philosophes  Leib- 
nitz  ,  lyolf  et  Baumgartev ,  2'  édition  , 
Halle,  1765,  in-8.  Cet  ouvrage  est  bien 
écrit  et  conçu  dans  de  bons  principes  ; 
4°  Introduction  à  la  politique ,  d'après 
les  principes  de  Montesquieu ,  ibid. , 
1765,  iu-8  ;  5°  Essai  d^ introduction  à 
V économie  politique ,  Berlin ,  1771  ,  in-8  ; 
0°  Aperçu  de  V  histoire  de  ï  université  du 
Halle ,  pendant  le  premier  siècle  de  sa 
fondation  ,  ibid. ,  1794  ,  in-8  ,  etc. ,  etc. 
Foi-fiter  est  mort  le  19  marà  1798.  —  Il  y 
a  un  autre  Jean-Chrétien  Forster ,  théo- 
logien protestant ,  né  en  Thuringe  vers 
17  54  ,  mort  en  1800  ,  qui  a  donné  en  al- 
lemand quelques  ouvrages  ascétiques  et 
des  sermons. 

FORSTWER   (  Christophe  )  ,  né  en 


]Ft)R 

)  598  ,  mourut  en  1 667  ,  et  publia ,  dès 
l'âge  de  19  ans  ,  un  ouvrage  sur  la  poli- 
tique. Après  avoir  étudié  en  Allemagne  , 
il  alla  en  Italie ,  où  Jean  Cornaro  ,  doge 
de  Venise  ,  le  goûta  tellement  qu'il  l'ho- 
nora de  l'ordre  de  St. -Marc.  Forstner  vint 
ensuite  en  France ,  et  retourna  en  Alle- 
magne. Employé  dans  les  négociations 
de  la  paix  de  Munster ,  il  fit  paraître  tant 
de  prudence  et  de  capacité ,  que  le  comte 
de  Trautmansdorf,  plénipotentiaire  de 
l'empereur,  lui  procura  la  qualité  de 
conseiller-aulique.  Outre  ses  Hypomne- 
mata  politica,  1623,  in-8  ,  on  a  de  lui 
1°  De  principatu  Tiberii,  2°  Notœ  poli- 
ticœ  ad  Taciium.  Z°  Un  recueil  de  ses 
Lettres  sur  la  paix  de  Munster,  etc.,  etc. 
•  FORSYTH  (Guillaume),  jardinier 
distingué ,  né  dans  le  comté  d'Aberdeen 
en  Ecosse  en  1737,  se  livra  de  bonne 
heure  à  la  pratique  du  jardinage  et  s'y 
distingua  bientôt.  Il  vint  à  Londres  en 
1763,  et,  peu  après,  travailla  sous  le 
célèbre  Miller^  jardinier  du  jardin  des 
apothicaires  à  Chelsea  ,  et  lui  succéda  en 
1771.  Le  roi  le  nomma  en  1784  surinten- 
dant de  ses  jardins  royaux  de  Kensington 
et  de  St. -James.  C'est  alors  que  le  talent 
de  Forsyth  encouragé  par  une  telle  dis- 
tinction, prit  un  nouvel  essor.  Il  s'adonna 
particulièrement  à  l'étude  des  arbres  frui- 
tiers et  forestiers,  et  s' occupa  spécialement 
des  remèdes  à  apporter  aux  maladies  aux- 
quelles les  végétaux  peuvent  être  sujets. 
Son  travail  fut  couronné  par  le  plus  grand 
succès  et  lui  fit  découvrir  une  composi- 
tion qui  répondait  à  ses  vues.  L'utilité  de 
celte  découverte  fut  reconnue  générale- 
ment et  le  roi  en  récompensa  généreuse- 
ment l'auteur.  Forsyth  est  mort  le  25 
juillet  1804.  11  était  membre  de  la  société 
des  antiquaires  et  d'autres  corps  savans. 
On  lui  doit  1°  Observations  sur  les  ma- 
ladies ,  les  défauts  et  les  accidens  aux- 
quels les  arbres  à  fruit  et  les  arbres  fo- 
restiers sont  sujets,  Londres  ,  1 791,  in-8. 
'2°  Traite' de  la  culture  des  arbres  frui- 
tiers. Londres,  1802,  in-4.  traduit  en 
français ,  avec  des  notes  par  Pictet-Mallet. 
Genève  et  Paris,  1803,  in-8.  Ce  livre, 
qui  contient  le  résultat  de  tous  ses  tra- 
vaux ,  a  eu  trois  édilioas  en  peu  de  temps . 


FOR  3gt 

FORT  (François  Lk),  d'une  famille 
patricienne  de  Genève ,  naquit  en  cette 
ville  en  1656.  Une  forte  inclination  pour 
les  armes  le  fit  quitter  la  maison  pater- 
nelle dès  l'âge  de  14  ans.  Après  avoir 
servi  en  Hollande  comme  volontaire  ,  il 
eut  une  lieutenance  dans  le  régiment 
d'un  colonel  allemand  au  service  du  czar. 
Le  Fort  était  hardi  et  entreprenant  ;  il 
parlait  assez  bien  4  ou  5  langues.  Il  n'é- 
tait point  savant  ;  mais  il  avait  beaucoup 
lu,  sans  avoir  dans  un  degré  égal  le  ta- 
lent de  digérer  ses  lectures.  Pierre  le 
Grand ,  qui  avait  conçu  le  dessein  de  ré- 
former sa  nation,  le  vit  et  lui  donna  sa 
confiance.  En  1696  ,  le  Fort  eut  la  con- 
duite du  siège  d'Azof.  Il  y  montra  tant 
d'habileté  dans  l'art  de  la  guerre,  que 
le  czar  le  mit  à  la  tète  de  ses  troupes  de 
terre  et  de  mer,  et  le  fit  son  premier  mi- 
nistre d'état ,  avec  la  qualité  d'ambassa- 
deur et  de  plénipotentiaire  dans  toutes 
les  cours  étrangères.  Le  Fort  eut  part  à 
tous  les  changemens  que  Pierre  I  fit  dans 
son  empire.  Il  mourut  à  Moscou  en  1699. 
Le  czar ,  pénétré  de  sa  perte  ,  lui  fit  des 
obsèques  magnifiques  ,  et  y  assista. 
FORT  (  Le  ).  Voyez  Morisière. 

*  FORTE  ou  FoRTio  (Ange),  méde- 
cin vénitien  du  16*  siècle,  est  connu 
par  plusieurs  ouvrages  sur  l'astrologie 
judiciaire  ,  dont  il  s'est  montré  pendant 
toute  sa  vie  le  partisan  le  plus  chaud. 
Parmi  ses  ouvrages  ,  nous  citerons  ;  De 
mirabilibus  humanœ  vitœ  naturalia 
Fundamenta  ,  Venise ,  1 543,  1 556,  in-8; 
et  Veritatis  redivivœ  militia ,  ibid.  y 
1541  ,  in-8. 

*  FORTEBRACCIO  (  Nicolas),  par- 
tisan ou  condottiere  italien  du  1 5*  siècle, 
successeur  du  fameux  Braecio  de  Mon- 
tone ,  son  oncle ,  combattit  tantôt  sou& 
une  bannière,  tantôt  sous  une  autre; 
ainsi ,  il  servit  les  Florentins  contre  Vol^ 
terre  et  contre  Lucques  en  1429  ,  prit  du 
service  sous  le  pape  Eugène  IV ,  déclara 
ensuite  la  guerre  à  ce  souverain  pontife,^ 
et  avait  déjà  eonquis  la  plus  grande  par- 
tie de  ses  états ,  lorsqu'il  mourut  en  1 43.5. 
des  suites  d'une  blessure  qu'il  avait  re- 
çue peu  de  temps  auparavant  à  Capo-di- 
Monte. 


393  FOR 

FORTESCUE  (  Jean },  lord ,  chef  de 
justice  et  grand  chancelier  d'Angleterre, 
80US  le  règne  de  Henri  VI,  naquit  dans 
le  15®  siècle  à  Wear-Giflord  dans  le  De- 
vonshire.  Son  nom  est  très  connu  en 
Angleterre;  sa  réputation  de  juriscon- 
sulte repose  sur  plusieurs  ouvrages  esti- 
més qui  ont  pour  objet  la  Loi  Natufelle  , 
et  les  Lois  de  l'Angleterre.  Le  plus  re- 
marquable de  ses  écrits  est  celui  qui  a 
pour  titre  :  De  laudibus  legiim  Angliœ , 
traduit  du  latin  en  anglais  en  17  37  ,  avec 
des  notes  de  Selden  et  de  nombreuses 
remarques  sur  les  Antiquités ,  l'Histoire 
et  les  Lois  tT Angleterre. 

FORTIGUERRA  (Nicolas),  cardinal, 
natif  de  Pistoie ,  rendit  de  grands  services 
aux  papes  Eugène  IV ,  Nicolas  V  ,  Pie  II 
et  Paul  II.  Il  commanda  l'armée  du  saint- 
Siége  avec  succès  ,  et  mourut  à  Viterbe 
en  1473  ,  à  55  ans. 

FORTIGUERRA  (Nicolas),  savant 
prélat  de  la  même  famille  que  le  précé- 
dent,  mourut  en  1735,  à  61  ans.  On  a 
de  lui  une  version  de  Te'retice  en  vers 
italiens ,  Urbin,  1736  ,  fig.,  avec  le  texte 
latin.  Sa  maison  était  le  rendez-vous  de 
tout  ce  que  Rome  possédait  alors  de  plus 
excellens  littérateurs ,  et  leurs  conversa- 
tions ne  roulaient  que  sur  la  littérature. 
Un  jour  on  disputait  sur  la  prééminence 
entre  le  Tasse  et  l'Arioste  :  l'un  et  l'autre 
trouvèrent  des  partisans  dans  cette  as- 
semblée. Fortiguerra  était  pour  le  Tasse  ; 
et  voulant  prouver  combien  il  était  facile, 
avec  de  l'imagination ,  de  réussir ,  au 
moins  jusqu'à  un  certain  degré ,  dans  le 
genre  de  l'Arioste ,  il  composa  un  poème 
en  30  chants,  qui  fut  commencé  et  fini 
en  très  peu  de  temps.  C'est  le  Ricciar- 
detto  publié  en  1738,  in-4  :  ouvrage 
héroïco-burlesque ,  oîi  l'auteur ,  à  l'exem- 
ple de  l'Arioste  ,  s'est  livré  à  tout  ce  que 
son  imagination  lui  présentait.  Il  y  règne 
un  désordre  et  une  bizarrerie  qui  jettent 
le  lecteur  dans  une  contention  d'esprit 
continuelle ,  et  qui  en  rendraient  la  lec- 
ture insoutenable ,  sans  les  plaisanteries 
et  la  versification  aisée  qu'il  respire  :  la 
pudeur,  la  bienséance  et  la  religion  y 
sont  blessées  tour  à  tour ,  de  l'aveu  même 
du  traducteur.  On  l'a  imité  en  vers  fran- 


FOR 

Çais  en  1766,  2  vol.  in-8  :  l'auteur  (M. 
du  Mourrier),  chevalier  de  St.-Louis  , 
mourut  de  consomption  en  1769,  soit 
que  son  travail  eût  occasioné  sa  maladie, 
soit  que  sa  maladie  eût  déterminé  son 
travail.  Cet  ouvrage  empêcha  Fortiguerra 
d'avoir  la  pourpre  que  lui  destinait  Clé- 
ment XII. 

*  FORTIS  (Jean -Baptiste  Albert, 
l'abbé  ) ,  littérateur  italien  ,  né  à  Vicence 
en  1740 ,  entra  fort  jeune  dans  l'ordre  de 
St.  -  Augustin  ;  mais ,  ennemi  de  toute 
espèce  de  joug ,  il  en  sortit  bientôt ,  et  fit 
plusieurs  voyages ,  où  il  prit  une  manière 
hardie  de  penser  qui  le  fit  nommer  par 
plusieurs  de  ses  compatriotes  le  voyageur 
philosophe.  Pendant  sa  carrière ,  Fortis 
fut  tour  à  tour  physicien,  naturaliste, 
poète],  journaliste ,  bibliographe  et  même 
érudil  ;  mais  son  caractère  ardent  et  son 
imagination  bizarre  ne  lui  permirent  ja- 
mais de  se  fixer.  En  1801  ,  il  fut  nommé 
préfet  de  la  riche  bibliothèque  de  Bolo- 
gne, où  il  mourut  le  21  octobre  1803. 
On  a  de  lui  1°  Saggio  d'osser^azioni  so- 
pra  l'isola  di  Cherso  ed  Osero,  Venise, 
1771,  in-4 .  2"  Fiaggio  in  Dalmazia, 
Venise,  1774,  2  vol.  in-4,  fig.  et  cart. 
Il  a  été  traduit  en  anglais,  Londres,  1778, 
in-4;  et  en  français,  Berne,  1778,  2 
vol.  in-18.  On  convient  en  général  que 
l'imagination  de  l'auteur  l'a  entraîné  un 
peu  loin  ,  et  qu'il  a  accordé  trop  de  con- 
fiance à  des  autorités  suspectes.  On  peut 
consulter  l'excellente  dissertation  intitu- 
lée Osservazioni  sopra  divcrsi  pezzi  del 
viaggio  in  Dalmazia ,  Venise ,  1776, 
in-4.  3°  Voyage  mine'ralogique  dans  la 
Calabre  et  la  Fouille,  ou  Lettres  au 
comte  Thomas  de  Basscgli ,  patricien 
de  Raguse ,  1788,  in-8.  4"  Mémoires 
pour  servir  à  Vhistoire  naturelle ,  et 
principalement  à  Voryctographie  de  FI- 
ialie,  Paris,  1802,  2  vol.  in-8.  5°  Beau- 
coup de  dissertations  disséminées  dans 
les  mémoires  de  diverses  académies  dont 
il  était  membre ,  ou  publiées  séparément. 
Il  a  travaillé  long-temps  au  journal  de 
Grisellini  ,  qui  traitait  principalement 
d'agriculture,  d'arts  et  de  commerce,  et  à 
VEuropa  letteraria ,  ouvrage  périodique , 
publié  à  Venijie  par  M™®  Caminer  Tura. 


FOR 

•  FORTIS  (  Aloys  ) ,  20«  général  des 
jésuites ,  naquit  à  Vérone  le  26  février 
1748 ,  et  fut  reçu  dans  la  compagnie  de 
Jésus  dès  l'âge  de  14  ans.  Ses  premiers 
progrès  dans  la  vertu  et  les  brillans  suc- 
cès qui  couronnèrent  ses  études  de  litté- 
rature et  de  philosophie  annoncèrent  ce 
qu'il  serait  un  jour.  Il  enseignait  la  rhé- 
torique au  collège  de  Ferrare  quand  Clé- 
ment XIV  supprima  la  compagnie  ;  résolu 
cependant  de  consacrer  sa  vie  entière  au 
service  de  l'Eglise ,  il  rentra  dans  sa  pa- 
trie pour  y  faire  ses  études  théologiques. 
Malgré  le  grand  nombre  de  savans  qui  se 
trouvaient  alors  à  Vérone ,  on  lui  donna 
la  chaire  de  philosophie  au  lycée  de  cette 
ville;  il  justifia  l'attente  publique,  s'y  fit 
même  une  grande  réputation  par  le  Pvo- 
dromiis  ad  universam  metaphysicam 
qu'il  y  publia.  Ce  fut  dans  la  même  ville 
et  vers  la  même  époque,  qu'il  entreprit  et 
acheva  conjointement  avec  le  chanoine 
Séraphin  Volta,  l'ouvrage  connu  sous  le 
titre  de  :  Illtistrazione  de  Pesci  impietriti 
dcl  monte  Bolca  in  Ferona.  Comme  la 
compagnie  subsistait  toujours  en  Russie , 
le  Père  Fortis  se  fit  inscrire  de  nouveau 
au  nombre  de  ses  membres ,  et ,  sans  quit- 
ter l'Italie,  alla  rejoindre  à  Parme  ceux 
de  ses  frères  qui  sous  la  protection  du 
duc  Ferdinand  venaient  d'y  rouvrir  le  pen- 
sionnat des  nobles  :  il  y  fut  plusieurs  an- 
nées professeur  de  littérature.  Les  applau- 
dissemens  avec  lesquels  furent  accueillies 
dans  plusieurs  réunions  de  savans  ses  poé- 
sies italiennes,  grecques  et  latines  ont  fait 
regretter  que  par  humilité,  sur  la  fin  de 
ses  jours,  il  ait  livré  aux  flammes  tout  ce 
qui  lui  restait  d'écrits.  Dès  que  la  com- 
pagnie de  Jésus  fut  rétablie  dans  le  royau- 
me de  Naples  (  1 804  ) ,  il  s'y  rendit  avec 
empressement,  mais  à  peine  avait-il  pu 
organiser  les  classes  publiques  du  collège 
de  cette  ville ,  que  les  circonstances  po- 
litiques  le  forcèrent  de  se  retirer  à  Or- 
viète  et  puis  à  Vérone,  d'où  il  se  rendit  à 
Rome  à  l'époque  où  Pie  VII  rétablit  la 
compagnie  par  tout  l'univers  catholique. 
Sa  Sainteté  le  nomma  examinateur  des 
évêques,  et  le  général  Brzozowski,  ré- 
sidant toujours  en  Russie,  le  fit  son  vi- 
caire-général en  Italie.  Elu  général  de 
V. 


FOR  393 

son  ordre  (1820),  il  se  fit  estimer  au 
dehors  et  chérir  de  ses  inférieurs ,  retra- 
çant en  lui-même  toutes  les  vertus  qu'il 
désirait  voir  reluire  dans  les  autres.  Ni  les 
travaux  de  sa  charge ,  ni  ses  dernières  in- 
firmités ne  diminuèrent  jamais  en  lui  l'es- 
prit de  recueillement  et  de  prière  ,  ni  ne 
l'empêchèrent  d'observer  la  vie  commu- 
ne. Il  mourut  à  Rome ,  le  27  janvier  1 829. 

FORTIUS ,  ou  plutôt  Sterk  (  Joa- 
chim  )  ,  philosophe  et  mathématicien  , 
plus  connu  sous  le  nom  de  Fortius  Rin- 
gelbergius  ,  né  à  Anvers  vers  l'an  1499  , 
se  fit  aimer  d'Erasme ,  d'Oporin ,  d'Hy  - 
périus  et  de  plusieurs  autres  savans  de 
son  temps.  On  le  mit  assez  jeune  à  la  cour 
de  l'empereur  Maximilien  I ,  où  il  resta 
jusqu'à  l'âge  de  1 7  ans  ;  de  retour  dans 
son  pays ,  il  fit  des  progrès  étonnans  dans 
l'étude  des  belles-lettres  et  de  la  philoso- 
phie. Il  employa  ses  heures  de  récréation 
à  apprendre  à  dessiner  et  à  graver.  Vers 
l'an  1529  ,  il  se  mit  à  parcourir  les  prin- 
cipales villes  de  la  France.  Arrivé  dans 
une  ville ,  il  se  mettait  aussitôt  à  ensei- 
gner quelque  science ,  dont  le  cours  n'é- 
tait ordinairement  que  d'un  mois.  Il  ne 
fut  pas  possible  de  le  retenir  plus  long- 
temps dans  aucune  ville.  Fortins  était 
passionné  pour  les  langues  anciennes.  On 
l'entendait  souvent  dire  qu'iZ  préférait 
un  mot  de  la  pure  laùnitéà  un  écu  d'or. 
Aucune  science  n'eut  pour  lui  tant  d'at- 
trait que  l'astronomie  ;  mais ,  comme 
presque  tous  les  astronomes  de  son  siècle, 
il  donna  dans  les  chimères  de  l'astrologie 
judiciaire.  Il  mourut  vers  1536.  Ses  ou- 
vrages ont  été  rassemblés  sous  le  titre  de 
Joachimi  Fortii  Ringelbergii  lucubra- 
tiones.  Lyon  ,  1556  ,  iu-8.  On  y  dislingue 
un  traité  De  Rationc  studii ,  Anvers  , 
1 529  ,  dont  Thomas  Erpénius  a  donné 
une  édition  estimée ,  Leyde ,.  1C22.  Cet 
ouvrage  renferme  des  avis  très  judicieux, 
tant  pour  les  maîtres  que  pour  les  éco- 
liers :  mais  ils  sont  balancés  par  des  con- 
seils qui  sentent  le  pédantisme.  Comme 
astrologue ,  il  a  soin  d'y  dresser  l'horos- 
cope de  son  livre. 

FORTUNAT.   Foyez  Venance   For- 

TUNAT. 

FORTUNATIANUS.   Foyez  Curius. 

25.. 


394  FOS . 

*  FORTUNIO  (AugusUn) ,  religieux 
de  l'ordre  des  camaldules ,  naquit  dans 
le  1  G"  siècle  à  Fiesole  dar^s  la  Toscane,  de 
parens  originaires  de  Florence,  qu'il  per- 
dit de  bonne  heure.  Placé  dans  le  collège 
de  Pise  aux  frais  du  grand-duc  ,  il  fit  de 
très  grands  progrès  dans  les  langues  et  la 
littérature  ancienne.  Après  avoir  fait  ses 
vœux  dans  le  couvent  des  Saints-Anges  à 
Florence,  il  se  livra  à  l'exercice  de  ses 
devoirs,  à  l'enseignement  des  langues  et 
à  la  recherche  des  nionumens  qui  pou- 
vaient intéresser  son  ordre.  Il  mourut 
dans  un  âge  peu  avancé  à  Florence  vers 
1 595.  On  a  de  ce  savant  religieux  les  ou- 
vrages suivans  :  i°  Historia  camalclulen- 
sium,  Florence,  première  partie  1575, 
deuxième  partie,  1579,  in -4  :  cette 
histoire  dont  Gui  Grandi  fait  l'éloge  sous 
le  rapport  de  l'érudition ,  mais  non  sous 
celui  de  l'exactitude  chronologique,  est 
inférieure  à  celle  des  PP.  Mittarelli  et  Cos- 
ladoni  ;  2"  Apologia  Augustini  Floren- 
tini  pro  libris  suis  hisloriarum  camal- 
dulensium,  ibid.,  1 592  ,  in-12  ;  c'est  une 
réponse  au  Père  Luc  ermite,  qui  avait  at- 
taqué plusieurs  récits  de  faits  miriàçuleux 
racontés  dans  V Histoire  de  Fortunio  ; 
3"  Cronichelta  del  monte  san  Savino  di 
Toscana,  ibid.,  1583,  in-4,  etc.;  4°  Li- 
ber carminum ,  ibid.,  1591,  in-8  ;  ce 
sont  des  poésies  pieuses  et  sur  des  sujets 
de  dévotion.  On  a  encore  de  Fortunio  des 
opuscules  moins  intéressans. 

FOSCARAUI  (  Gilles  )  ,  dominicain 
bolonais ,  mort  évêque  de  Modène  en 
1564  ,  à  53  ans,  fut  un  des  théologiens 
choisis  pour  travailler  au  Catéchisme  du 
concile  de  Trente.  C'était  un  prélat  sa- 
vant, pieux  et  charitable.  Il  trouva  dans 
sa  frugalité  et  sa  modestie  un  fonds  suffi- 
sant pour  subvenir  aux  nécessités  des 
pauvres ,  pour  fonder  une  maison  des 
Filles-Repenties,  et  pour  embellir  son 
église  et  le  palais  épiscopal.  Dans  un 
temps  de  calamité  ,  il  vendit  jusqu'à  sa 
crosse  et  son  anneau.  (  On  lui  attribue  un 
livre  intitulé:  Ordo  judiciarius  in  fora 
erclesiastico.  ) 

FOSCARI  (François),  d'une  illustre 
famille  de  Veni.se ,  dont  il  augmenta  en- 
core lelu.stre.  Il  fut  en  1415  procurateur 


FOS 

de  St.-Marc ,  et  élu  doge  en  1423^,  après 
avoir  gagné  ou  acheté  les  suffrages.  Vou- 
lant se  rendre  redoutable  à  ses  voisins , 
il  fit  la  guerre ,  et  soumit  à  la  république 
le  Bressan  ,  le  Rergamasque ,  Crémone , 
Ravenneet  d'autres  places.  Ces  conquêtes 
coûtèrent  beaucoup  aux  Vénitiens ,  qui 
murmuraient  hautement  contre  lui  ;  il 
les  apaisa  en  offrant  sa  démission ,  qui  ne 
fut  pas  acceptée.  Ses  ennemis  suscitèrent 
diverses  affaires  à  son  fils,  qui  fut  relégué 
d'abord  à  Trévise ,  et  ensuite  deux  fois  à 
la  Canée.  Le  dernier  exil  accabla  de  dou- 
leur le  malheureux  doge ,  et  il  fut  hors 
d'état  de  gouverner  les  affaires  de  la  ré- 
publique. Il  fut  déposé  à  l'Age  de  84  ans , 
en  1457,  et  Pascal  Maripert  mis  à  sa 
place.  Il  mourut  deux  jours  après.  Son 
fils  était  mort  lui-même  dahs  sa  prison  ; 
on  l'avait  accusé  d'avoir  assa.ssiné  un  sé- 
nateur ;  mais  le  véritable  meurtrier  dé- 
clara ,  au  lit  de  la  mort ,  que  Foscari  était 
innocent.  Il  n'était  plus  temps  :  l'infor- 
tuné Foscari  avait  péri ,  victime  de  la  ca- 
lomnie. 

'  FOSCARI  (  François  ) ,  sénateur  vé- 
nitien ,  célèbre  par  ses  missions  diploma- 
tiques ,  ses  connaissances  et  ses  travaux  , 
mort  le  7  décembre  1790,  a  publié  Thé- 
saurus antiquitatum  sacrarum ,  com- 
plcctens  selcctissima  clarissimorum  vi- 
rorum  opuscula ,  in  quibus  veterum  ffe- 
brœorum,  mores,  leges,  instituta,  ritus 
sacri  et  civiles  illustraniur,  Venise , 
1744-1769,34  vol.  in-fol.  Il  fut  aidé  dans 
cette  immense  collection  par  Ugolini.  Il 
a  publié  aussi  Bibliotheca  veterum  pa- 
trum ,  antiquorum,  scriptorum  ecclesias- 
ticorum  gr œco-latina,  Yenise ,  14  vol. 
in-fol.;  et  les  OEuvres  de  Théophylacte , 
archevêque  de  Bulgarie,  Venise,  1763, 
4  vol.  in-fol. 

FOSCARINI  (  Michel  ) ,  sénateur  vé- 
nitien ,  remplit  différens  postes  dans  sa 
république,  et  mourut  en  1G92,  à  64 
ans.  Il  a  continué  l'Histoire  de  Fenise , 
par  Nani ,  169G,  in-4,  qui  fait  le  tome 
1 0*  de  la  Collection  des  historiens  de 
Venise ,  1718,  in-4  :  collection  a.ssez  mal' 
imprimée,  mais  dans  laquelle  on  n'a  fait 
entrer  que  de  bons  auteurs.  Foscarini 
avait  écrit  par  ordre  de  la  république, 


FOS 

et  il  est  regardé  comme  un  historien  qui 
9  eu  de  bons  documens.  On  trouve  deux 
de  ses  Nouvelles  dans  celles  de  Gli  Aca- 
demici  incogniti ,  1651  ,  in-4. 

•  FOSCARTNI  (Marc),  de  la  même 
famille  que  le  précédent ,  fut  encore  plus 
illustre  et  comme  politique  et  comme 
littérateur.  Né  en  1G95  ,  il  se  distingua 
dès  sa  jeunesse  par  ses  succès ,  ses  con- 
naissances et  ses  mœurs.  Il  entra  de  bonne 
heure  dans  les  charges  publiques ,  et  fut 
bientôt  chevalier  et  procurateur  de  St.- 
Marc.  Envoyé  en  ambassade  dans  plu- 
sieurs cours  de  l'Europe,  il  revint  à  Venise 
où  il  fut  chargé  de  la  direction  des  mo- 
numens  publics ,  puis  de  la  bibliothèque 
deSt.-Marc.  En  1762  les  suffrages  de  ses 
compatriotes  l'appelèrent  à  la  suprême 
dignité  de  doge.  Il  mourut  l'année  sui- 
vante, 10  mois  après  son  élection.  On  a 
de  lui  le  premier  volume  d'une  Histoire 
littéraire  de  Venise,  Padoue,  1752, 
grand  in-fol.  ;  un  Traité  de  V éloquence 
et  des  mémoires  secrets  pour  servir  à 
l'histoire  de  V empereur  Charles  FI.  Tous 
ces  ouvrages  sont  écrits  en  italien. 

FOSCO  (Placide),  italien,  médecin 
de  Pie  V ,  se  distingua  par  sa  science  et 
par  sa  vertu.  Il  mourut  à  Rome  en  1574  , 
âgé  de  64  ans.  On  a  de  lui  un  traité  :  De 
usu  et  ahusu  Astrologiœ  in  arte  medica. 
L'astrologie  et  l'astronomie  étaient  alors 
synonymes ,  et  il  est  très  vraisemblable 
que  cette  dernière  science  n'est  point 
inutile  aux  médecins.  «  Je  voudrais ,  dit 
M  M.  de  la  Lande,  que  les  médecins  con- 
»  sultassent  au  moins  l'expérience  à  cet 
M  égard ,  et  qu'ils  examinassent  si  les 
»  crises  et  les  paroxismes  des  maladies 
»  n'ont  pas  quelques  correspondances 
»  avec  les  situations  de  la  lune  par  rap- 
»  port  à  l'équateur ,  aux  sisigées  et  aux 
»  apsides.  Plusieurs  médecins  m'en  ont 
«  paru  persuadés.  » 

*  FOSCOLO  (  Ugo  ) ,  l'un  des  grands 
poètes  et  littt'rateurs  de  l'Italie ,  naquit 
dans  l'île  de  Zante  en  1777.  Il  quitta  de 
bonne  heure  les  îles  Ioniennes ,  se  rendit 
à  Venise ,  erra  pendant  quelque  temps 
sans  dessein  et  sans  but  sur  les  bords  de 
r.\.driatique  et  dans  quelques  villes  de 
l'Italie ,  et  s'arrêta  eu&n  î^  Padouë  oii  il 


FOS  395 

suivit  le  cours  de  littérature  deCésarotti. 
A  l'école  de  ce  professeur  célèbre ,  il 
puisa  cette  profonde  admiration  qu'il 
conserva  toujours  pour  les  classiques 
grecs ,  latins  et  italiens.  Il  écrivit  lui- 
même  ,  fit  des  vers  tendres  où  régnait 
une  douce  harmonie,  puis  il  chanta  la 
liberté,  enfin  il  rechercha  la  gloire.  Il  la 
rechercha  de  toutes  les  manières,  dans 
tous  les  états  ;  tour  k  tour  poète,  orateur , 
professeur,  il  fut  aussi  tantôt  philosophe, 
tantôt  homme  à  la  mode  ;  quelquefois  il 
affectait  le  stoïcisme  le  plus  sévère ,  d'au- 
tres fois  il  sacrifiait  aux  plaisirs.  Foscolo 
embrassa  la  carrière  dramatique;  il  débuta 
à  Venise  par  sa  tragédie  de  Thyesle  qu'il 
jugea  plus  sévèrement  et  beaucoup  mieux 
que  ses  panégyristes.  Son  imagination 
mobile  se  porta  ensuite  sur  un  autre  objet. 
Après  avoir  lu  Werther ,  il  voulut  se  faire 
connaître  lui-même  ,  se  peindre  dans  la 
position  d'un  amant  désespéré.  Ce  roman 
qu'il  intitula:  Dernières  lettres  de  Jacopo 
Ortis,  est  une  imitation  un  peu  servile 
de  Goethe  :  mais  il  est  plein  de  feu  ;  ses 
allusions  aux  événemens  dont  sa  patrie  a 
été  le  théâtre  ,  et  les  souvenirs  relatifs  k 
quelques-uns  de  ses  contemporains  le 
font  lire  avec  entraînement.  Disons,  pour 
l'honneur  de  la  morale,  qu'il  n'est  pas 
bien  de  voir  un  beau  talent  se  consacrer 
k  la  peinture  d'une  passion  qui  conduit 
au  suicide ,  et  que  c'est  enflammer  les 
lecteurs  d'un  sentiment  qui  peut  deve- 
nir criminel ,  quand  bien  même  il  n'a  pas 
pour  résultat  une  mort  violente.  Dans  un 
discours  prononcé  au  congrès  de  Lyon 
en  1801  ,  Foscolo  fit  l'éloge  des  républi- 
ques italiennes,  et  ce  discours  fut  un 
morceau  d'éloquence.  Déjk  connu  comme 
poète ,  comme  romancier ,  comme  ora- 
teur, il  voulut  avoir  la  réputation  d'é- 
rudit  :  c'est  dans  ce  but  qu'il  traduisit  en 
italien  le  petit  poème  de  Callimaque  sur  la 
chevelure  de  Bérénice ,  que  déjk  Catulle 
avait  mis  en  latin  ;  il  y  ajouta  un  long  com- 
mentaire hérissé  de  notes  et  de  citations 
d'auteurs  qu^il  n'avait  pas  lus.  Cette  fois- 
ci  ,  il  échoua  dans  sa  tentative  ,  et  lui- 
même  plaisantait  de  sa  science  d'emprunt. 
Nommé  k  l'université  de  Pavie  professeur 
de  belles-lettres  »  il  succéda  k  Monti ,  dé-» 


396  FOS 

buta  par  un  discours  sur  V origine  et  les 
règles  fondamentales  de  la  littérature , 
et  'développa  les  théories  philosophiques 
de  Locke  et  de  Condillac.  Ses  fonctions 
ne  l'empêchaient  pas  de  se  livrer  à  de 
nouveaux  travaux  poétiques  :  il  entreprit 
la  traduction  d'Homère  en  vers  sciolti; 
Monti  avait  entrepris  la  même  tâche  ;  les 
deux  poètes  firent  en  même  temps  le  pre- 
mier chant  ;  le  public  applaudit  égale- 
ment à  leurs  efforts  ;  il  admira  la  noblesse 
et  l'harmonie  de  l'un,  la  force  et  la  con- 
cision de  l'autre.  Foscolo  interrompit  sa 
carrière  littéraire  pour  embrasser  celle 
des  armes ,  s'attacha  au  général  Thuillier 
(  1805) ,  se  rendit  à  Calais  pour  prendre 
part  à  l'expédition  que  Buonaparte  mé- 
ditait contre  l'Angleterre.  De  retour  en 
Italie  (1808) ,  il  publia  une  belle  édition 
des  ouvrages  classiques  du  prince  Rai- 
mond  MontecucuUi  avec  des  notes  et  des 
additions  importantes  :  il  en  a  paru  une 
édition  plus  complète  en  1821  à  Turin, 
par  les  soins  de  M.  Grassi.  A  Milan  Foscolo 
donna  la  tragédie  à'Ajax  qui  fut  vive- 
ment attaquée  sous  le  rapport  politique 
et  sous  le  l'apport  littéraire  :  il  n'était 
plus  alors  l'ami  de  Monti ,  et  il  essuyait 
les  vengeances  des  écrivains  qu'il  avait 
maltraités  lui-même.  Dénoncé  par  ses  en- 
nemis ,  il  chercha  un  asile  dans  la  patrie 
du  Dante  et  de  Machiavel ,  à  Florence,  où 
il  donna  sa  Ricciarda ,  jouée  sur  plu- 
sieurs théâtres  d'Italie  ,  imprimée  à  Lon- 
dres et  traduite  en  français  -.  cette  pièce 
est  la  seule  de  Foscolo  qui  se  trouve  dans 
la  collection  des  chefs-d'œuvre  des  théâ- 
tres étrangers.  Redevenu  militaire  après 
la  chute  de  Buonaparte ,  il  fut  aide-de- 
camp  du  général  Pino.  Mais  ses  opinions 
n'étaient  pas  d'accord  avec  le  nouvel  or- 
dre de  choses  :  il  fut  obligé  de  quitter  sa 
patrie  ;  il  passa  ses  dernières  années  à 
Londres.  En  Angleterre ,  il  publia  la  tra- 
duction du  voyage  sentimental  de  Sterne 
sous  le  nom  de  Didimo  Chinexico,  fit 
quelques  articles  dans  les  journaux  ,  ou- 
vrit à  plusieurs  reprises  un  cours  de  lit- 
térature italienne.  Il  est  mort  à  Londres 
le  11  septembre  1827.  Parmi  les  écrits 
qu'il  a  publiés  à  Londres,  on  compte  les 
JSssais  sur  Pe'trarque ,  une  savante  In- 


FOS 

troduction  aux  Nouvelles  de  Boccace , 
un  travail  important  sur  la  divine  comé- 
die du  Dante  dont  le  premier  volume 
seul  a  paru.  VAlcée,  les  Gracej,  quelques 
odes,  plusieurs  sonnets,  sa  pièce  intitu- 
lée Sepolcri  sont  des  morceaux  poétiques 
estimés.  Foscolo  avait  un  beau  talent, 
mais  des  passions  et  des  mœurs  qui  firent 
son  malheur;  et  il  dut  se  reprocher  amè- 
rement les  désordres  de  sa  vie  privée. 
Les  lettres  de  Jacobo  Ortis  ont  été  tra- 
duites par  M.  de  S.  (Senonnes),  1814, 2 
vol.  in-12  :  cette  traduction  a  paru  en 
1814  sous  le  titre  du  Proscrit  ou  lettres 
de  Jacobo  Ortis,  et  en  1830  sous  celui 
d'Amour  et  suicide  ou  le  Werther  de 
P^enise.  Les  mêmes  lettres  ont  été  tra- 
duites par  M.  Truchon,  Paris,  1819,  et 
par  un  anonyme,  Lyon,  1823. 

*  FOSSATI  (Jean-François) ,  bénédic- 
tin de  la  congrégation  du  Mont  Olivet , 
né  à  Milan  vers  la  fin  du  16^  siècle,  fut 
un  excellent  prédicateur  et  devint  évê- 
que  du  diocèse  de  Tortone  qu'il  adminis- 
tra avec  sagesse  jusqu'en  1653,  époque 
où  il  mourut.  On  a  de  ce  prélat  :  1°  Oru- 
zione  funèbre  délia  morte  del  ser.  Cosi- 
mo  II  Medici ,  gran-duca  di  Toscana  , 
Sienne,  1620,  in-4;  2°  Mewionc  istori- 
che  délie  guerre  d'Italia  dcl  secoh  pré- 
sente dall  anno  1600,  Milan  ,  1640,  in-4, 
Bologne,  1641  et  1645,  in-8. 

*  FOSSATI    (George),  architecte  , 
graveur  et  imprimeur ,  né  à  Morco  près 
de  Lugano,  au  commencement  du  18« 
siècle ,  s'est  fait  une  réputation  très  éten- 
due par  le  grand  nombre  d'ouvrage*  sor-  , 
tis  de  son  burin.  On  a  de  lui  1°  un  Re- 
cueil de  diverses  fables  dessinées  et  gra- 
vées par  lui ,  en  italien  et  en  français,     a 
"Venise,  1744,  6  parties  en  3  vol.  petit    I 
in-fol.  fig.  en  couleur.  Les  gravures  font 

le  principal  mérite  de  ce  recueil  très  re- 
cherché des  curieux.  2°  P^ita  dcgli  archi- 
tetti  del  signor  Felibien ,  tradotta  dcl 
francese ,  1755,  in-8.  fig.  On  a  encore 
de  lui,  comme  graveur,  un  recueil  des 
édifices  de  Palladio ,  les  plans  de  Ve- 
nise ,  Bergame ,  Genève ,  et  une  carte 
du  lac  de  Lugano. 

FOSSE  (  Charles  de  La  ) ,  fils  d'un  or- 
fèvre, naquit  à  Paris  en  1640.  Il  entra 


1 


FOS 

dans  l'école  de  Le  Brun,  premier  peintre 
du  roi ,  et  l'imita  si  bien ,  que  le  maître 
ne  dédaigna  pas  d'employer  son  élève 
dans  ses  grands  ouvrages.  Le  voyage  d'I- 
talie le  perfectionna ,  et  à  son  retour  il 
peignit  le  dôme  de  l'hôtel  royal  des  Inva  - 
lides.  Il  fut  regardé  comme  un  des  pre- 
miers coloristes.  Il  excellait  dans  la  fres- 
que, dans  le  paysage,  et  surtout  dans 
l'histoire.  Louis  XIV  lui  accorda  une  pen- 
sion de  mille  écus.  Il  fut  reçu  de  l'acadé- 
mie de  peinture ,  et  en  devint  recteur  et 
professeur.  Il  mourut  à  Paris  en  17 IG.  Sa 
réputation  l'avait  fait  appeler  en  Angle- 
terre, où  milord  Montaigu  l'occupa  à 
décorer  sa  maison  de  Londres.  Les  pein- 
tures de  ce  grand  artiste  furent  admirées 
de  tous  les  connaisseurs.  Le  roi  Guillau- 
me III  étant  venu  les  voir  ,  proposa  à  La 
Fosse  un  établissement  très  avantageux  ; 
mais,  vers  ce  même  temps,  le  célèbre 
Mansard  lui  écrivit  de  revenir  en  France , 
oîi  il  était  désiré.  —  H  y  a  un  graveur  cé- 
lèbre du  même  nom  (  Jean-Baptiste-Jo- 
seph )  ,  né  à  Paris  en  1721  ,  auquel  on 
doit  les  gravures  du  Voyage  de  Naples 
et  de  Sicile ,  par  l'abbé  de  St. -Non,  qui 
excellait  surtout  à  saisir  le  maintien  et  la 
physionomie  de  ses  modèles. 

FOSSE  (  Antoine  de  La  ),  sieur  d'Au- 
bigny,'neveu  du  précédent,  naqtiit  à  Pa- 
ris en  1653  d'un  orfèvre,  comme  son 
oncle.  Il  fut  successivement  secrétaii-e  du 
marquis  de  Créqui  et  du  duc  d'Aumont. 
Lorsque  le  marquis  de  Créqui  fut  tué  à 
la  bataille  de  Luzara ,  il  fut  chargé  de 
porter  à  Paris  le  cœur  du  jeune  héros, 
et  il  chanta  sa  mort  dans  une  pièce  de 
vers  que  nous  avons  encore.  La  Fosse 
parlait  et  écrivaitpurement  l'italien.  Une 
ode  qu'il  fit  en  cette  langue  lui  mérita  une 
place  dans  l'académie  des  Apatistes  de 
Florence.  H  y  prononça  pour  remercîraent 
un  discours  en  prose  sur  ce  sujet  singu- 
lier :  Q^uels  yeux  sont  les  plus  beaux , 
des  yeux  bleus  ou  des  noirs  ?  Il  avait 
encore  plus  detaleut  pour  la  poésie  fran- 
çaise. Ses  vers  sont  extrêmement  travail- 
lés :  il  avouait  lui-même  que  l'expression 
lui  coûtait  plus  que  la  pensée.  On  a  de 
lui  plusieurs  tragédiens,  dont  Manlius 
est  la  meilleure;  et  une  Traduction ^  ou 


FOS  397 

plutôt  une  Paraphrase  en  vers  français , 
des  Odes  d'Auacréon.  On  trouve  après 
cette  version  plusieurs  autres  pièces  de 
poésie.  11  mourut  en  1708 ,  à  65  ans.  Son 
Théâtre  est  en2vol.  in-12,  Paris,  1747. 
Il  en  a  paru  une  autre  édition  en  1755  , 
qu'on  a  grossie ,  par  je  ne  sais  quel  motif, 
de  la  Gabinie  de  Bruéys ,  et  du  Distrait 
de  Regnard. 

FOSSÉ  (  du  ).  Voyez  Thomas. 

*  POSTER  (Samuel) ,  mathématicien 
anglais,  né  à  la  fin  du  16*  ou  au  com- 
mencement du  17' siècle,  étudia  à  l'uni- 
versité de  Cambridge ,  les  mathématiques 
avec  une  ardeur  extraordinaire  :  aussi 
obtint-il  de  grands  succès  :  il  fut  nommé 
en  1636  professeur  d'astronomie  à  Gres- 
ham.  Après  avoir  quitté  cette  place  au 
bout  de  dix  mois ,  il  la  reprit  en  1641  et 
mourut  en  1652,  laissant  les  ouvrages 
suivans  :  1"  Traité  de  gnomonique,  1638, 
in-8  ,  c'est  un  ouvrage  estimé.  2°  OEu- 
ures  posthumes ,  1652,  in-4  ;  Z°  Mélan- 
ges,  ou  Veillées  mathématiques  (  en 
latin  et  en  anglais) ,  1659,  in-fol.  Il  in- 
venta et  perfectionna  plusieurs  instru- 
mens  de  mathématiques  et  d'optique  :  il 
il  avait  fait  des  observations  d'éclipsés. 
Foster  était  de  l'association  savante  qui 
précéda  la  société  royale  de  Londres. 

*  FOSTER  (Jean  ) ,  savant  philologue 
anglais,  né  à  Windsor  en  1731  ,  fit  ses 
premières  études  à  Eton  et  à  l'univer- 
sité de  Cambridge.  Adjoint  au  docteur 
Edouard  Barnard ,  célèbre  maître  de  l'é- 
cole d'Eton ,  il  lui  succéda  en  1765  et 
devint  chanoine  de  Windsor  en  1772.  Sa 
santé  altérée  par  ses  travaux  le  força  d'al- 
ler aux  eaux  de  Spa ,  où  il  mourut  en 
1773.  Foster  n'a  laissé  qu'un  ouvrage; 
mais  il  prouve  sa  vaste  érudition.  Il  a 
pour  titre  :  Essai  sur  la  nature  diffé- 
rente de  Vaccent  et  de  la  quantité,  avec 
leur  usage  et  leur  application  dans  la 
prononciation  des  langues  anglaise ,  la- 
tine et  grecque  ;  contenant  un  précis  et 
une  explication  des  tons  anciens,  et  une 
défense  de  V accentuation  moderne  ,  con- 
tre les  objections  d'Isaac  Vossius ,  Hen- 
ninius ,  Sarpedonius ,  le  docteur  Gally 
et  autres  auteurs,  Cambridge,  1763, 
in-8  (en  anglais).  On  a  consei-vé  avec 


398 


FOT 


soin  les  manuscrits  de  plusieurs  de  ses 
exercices  de  collège. 

POSTER  (  Jacques  ) ,  minisire  an- 
glais ,  non-conformiste ,  né  à  Excester  en 
1697  ,  mourut  le  5  novembre  1753  ,  après 
avoir  publié,  1"  Y  Excellence  de  la  Ré- 
vélation chrétienne  contre  Tiddal  ,1731. 
2"  Discours  sur  la  Religion  naturelle  et 
les  vertus  sociales^  2  vol.  in-4.  3°  Des 
Sermons.  4°  Des  Traités  de  controverse. 

*  FO-THOU-TCHHIING,  célèbre  Sa- 
manéen,  qui  contribua  puissamment  à 
rétablissement  de  la  religion  de  Bouddah 
à  la  Chine ,  naquit  dans  la  contrée  que 
les  Chinois  nomment  Thian-Tchou  (  Hin- 
doustau  ) ,  d'une  famille  qui  se  nommait 
Fe  :  après  s'être  livré  sérieusement  à  l'é- 
tude des  sciences  occultes ,  il  vint  s'éta- 
blir l'an  310àLo-Yang,  maintenant  Ho- 
nan ,  qui  était  la  résidence  des  rois  Tchao, 
princes  Tartares  qui  gouvernèrent  le  nord 
et  l'occident  de  la  Chine  de  l'an  308  à  l'an 
329.  C'est  à  la  cour  de  ces  rois  qu'il  fit 
usage  de  sa  science  mystérieuse  :  il  par- 
vint à  faire  croire  aux  esprits  crédules  de 
cette  province  qu'il  exerçait  un  grand 
pouvoir  sur  la  nature:  qu'il  entretenaitun 
commerce  avec  les  esprits  :  qu'il  avait  à 
sa  disposition  les  bons  et  les  mauvais  gé- 
nies :  qu'il  avait  déjà  vécu  plus  de  cent 
ans,  qu'il  se  nourrissait  d'air,  etc  ;  qu'il 
avait  au  côté  une  ouverture  d'où  jaillis- 
sait pendant  la  nuit  des  torrens  de  flam- 
mes, et  d'oii  il  faisait  souvent  sortir  son 
cœur  et  ses  entrailles  qu'il  lavait  parfois 
à  la  rivière  :  le  son  des  cloches  était  pour 
lui  un  pronostic  d'où  il  tirait  l'indication 
de  l'avenir  ;  les  Saducéens  disent  qu'il  ne 
se  trompa  jamais.  Après  avoir  cherché 
dans  le  désert  un  refuge  contre  les  Chinois 
qui  reprirent  Lo-Yang ,  il  revint  cepen- 
dant auprès  du  généralissime  auquel  il  fut 
très  utile  :  présenté  à  l'empereur  Chi-Le , 
il  fit  devant  lui  des  prodiges  ,  disent 
les  partisans 'de  Bouddah,  et  c'est  ainsi 
que  s'établit  en  Chine  le  Bouddisme.  On 
croit  qu'il  mourut  en  349,  après  avoir  fait 
un  grand  nombre  de  disciples  et  fondé 
plusieurs  monastères. 

'  FOÏHERGÏLL  (Jean),  célèbre  mé- 
decin anglais,  né  le  8  mars  1712  à  Car- 
lend  près  de  Richemont  dans  le  comté 


FOU 

d'York,  et  mort  le  26  décembre  1780,  culti- 
va l'histoire  naturelle  et  la  botanique  avec 
succès ,  mais  il  se  rendit  surtout  recom- 
mandable  par  sa  bienfaisance.  On  grava 
sur  son  tombeau  :  «  Ci-gît  le  Docteur  Fo- 
«  thergill,  qui  dépensa  200  mille  guinées 
»  pour  le  soulagement  des  malheureux.  » 
Son  cabinet  zoologique  et  minéralogique 
était  un  des  plus  complets  de  l'Angle- 
terre. Il  a  enrichi  les  Transactions  phi- 
losop/Uques,  et  les  Mémoires  de  la  socié- 
té médicale  de  Londres  de  plusieurs  ob- 
servations curieuses.  Tous  ses  écrits  ont 
été  rassemblés  après  sa  mort ,  et  publiés 
à  Londres,  en  1781,  in-8,  en  1783,  3  vol. 
in-8,  et  en  1804,  in-4.  Ils  ont  été  traduits 
en  allemand,  Altenbourg,  1785,  2  vol. 
in-8. 

*  FOUCAULT ,  nom  d'une  ancienne 
famille  du  Périgord ,  qui  a  produit  plu- 
sieurs personnages  distingués.  —  Jean 
Foucault  ,  chambellan  de  Charles  VII ,  et 
l'un  des  plus  vaillans  capitaines  de  ce 
prince ,  tomba  au  pouvoir  de  Talbot  au 
siège  de  Laval  (  1 425  ) ,  et  se  racheta  de 
ses  deniers.  En  1429  il  assista  au  sacre  de 
Charles  VU  ,  et  l'année  suivante  il  défen- 
dit avec  bravoure  et  avec  houneur  la  ville 
de  Lagny  contre  les  Anglais.  Il  mouruten 
1466  dans  un  âge  très  avancé. 

*  FOUCAULT  (Jean),  seigneur  de 
l'Ardimalie,  baron  d'Auberoche,  né  dans 
le  Périgord  en  1542  ,  servit  4e  tous  ses 
moyens  la  cause  de  Henri  de  Navarre , 
(  Henri  IV  ) ,  qui  le  nomma,  lorsqu'il  fut 
sur  le  trône ,  son  chambellan  ,  puis  gou- 
verneur du  Périgord  et  vicomte  de  Li- 
moges. Foucault  mourut  d'un  coup  de  ca- 
non à  un  assaut  dans  la  guerre  que  Hen- 
ri IV  soutenait  contre  les  Espagnols.  La 
famille  Foucault  conserve  religieusement 
les  lettres  que  ce  prince  lui  écrivit. 

FOUCAULT  (Louis) ,  comte  de  Dau- 
gnon ,  avait  été  page  du  cardinal  de  Ri- 
chelieu. Il  s'attacha  au  duc  de  Fronsac 
qui  commandait  les  flottes  de  France.  Il 
servit  sous  lui  avec  le  rang  de  vice-ami- 
ral ,  au  combat  donné  devant  Cadix  en 
1640,  et  se  saisit  après  sa  mort  de  la  forte 
place  de  Brouage ,  dont  le  duc  était  gou- 
verneur. Cette  place  fit  la  fortune  de  Fou- 
cault :  car  en  la  remettant ,  on  luidonaK 


FOU 

pour  récompense  le  bâton  de  maréchal 
de  France  le  20  mars  1653.  Il  mourut  en 
octobre  1659  ,  âgé  d'environ  43  ans,  avec 
la  réputation  d'un  homme  avide  de  gloire 
et  d'argent. 

FOUCAULT  (  Nicolas-Joseph  ) ,  pari- 
sien ,  honoraire  de  l'académie  des  belles- 
lettres  ,  fut  successivement  intendant  de 
Montauban  ,  de  Pau  et  de  Caen  ,  et  tra- 
vailla partout  pour  le  bien  de  l'état  et 
des  lettres.  Il  découvrit  en  1704  l'an- 
cienne ville  des  Viducassiens  à  deux  lieues 
de  Caen  ,  et  il  en  envoya  une  relation 
exacte  à  l'académie  des  Belles-lettres.  Il 
avait  fait  la  découverte  ,  quelque  temps 
auparavant ,  du  précieux  ouvrage  de  Lac- 
tancc ,  De  mortibus  persecutorum ,  et 
qu'on  ne  connaissait  que  par  une  citation 
de  Saint-Jérôme.  Ce  fut  sur  ce  manlis- 
crit ,  trouvé  à  l'abbaye  de  Moissac  en 
Querci ,  que  le  savant  Baluze  le  publia 
(  voyez  Lactance  ).  Foucault  mourut  en 
1721  ,  âgé  de  plus  de  80  ans.  Il  joignait 
des  mœurs  douces  à  une  vertu  austère, 
et  des  agrémens  à  un  savoir  profond. 

'  FOUCAULT  de  l'Ardimalie  (  Louis 
marquis  de  ) ,  capitaine  de  chasseurs  à 
cheval ,  fut  élu  député  de  la  noblesse  du 
Périgordaux  Etats-généraux  de  178D  ,  et 
s'y  fit  remarquer  par  son  courage  à  dé- 
fendre les  droits  du  trône  et  de  la  no- 
blesse. Il  avait  peu  d'éloquence,  mais  il 
était  doué  d'une  voix  très  forte  qui  se 
faisait  entendre  au  milieu  des  cris  des 
tribunes  et  du  côté  gauche.  Mirabeau  lui 
rendait  la  justice  de  dire  ,  «  qu'il  redou- 
»  tait  plus  son  gros  bon  sens  que  l'esprit 
»  et  l'éloquence  de  beaucoup  d'autres 
»  membres  du  côté  droit.  »  Lors  de  la 
première  discussion  sur  les  émigrés,  il 
justifia  leur  fuite  par  les  dangers  que 
leur  offraient  les  lanternes  et  les  baïon- 
nettes. Accusé  d'avoir  favorisé  M.  de 
Brune  Saordin ,  il  avoua  à  la  tribune  l'a- 
voir caché  plusieurs  jours  chez  lui ,  et  il 
ajouta  :  «  Que  sa  conscience  l'assurait 
j)  qu'il  n'avait  fait  en  cela  que  ce  qu'or- 
»  donnafent  l'humanité  et  la  justice.  » 
On  le  vit  quelque  temps  après ,  dans  une 
séance  orageuse  oii  il  était  menacé  d'être 
envoyé  à  l'Abbaye ,  défier  hardiment  le 
côté  gauche f  et  déclarer  que  le  côté  droit 


FOU  399 

était  décidé  à  réisister  à  l'oppression.  Il 
parla  plusieurs  fois  contre  les  clubs ,  fut 
un  des  signataires  des  protestations  du  1 2 
et  du  1 5  septembre ,  émigra  après  fa  ses- 
sion et  servit  à  l'avant-garde  de  l'armée 
des  princes ,  ensuite  à  celle  de  Condé ,  où 
il  fut  employé  comme  officier  dans  les 
corps  nobles.  Il  profila  de  l'amnistie  du 
26  avril  pour  rentrer  en  France ,  et  se  re- 
tira dans  les  terres  qui  lui  restaient.  Il 
fut  tué  en  1 804,  dans  son  château  de  l'Ar- 
dimalie par  la  chute  d'un  mur  qu'il  fai- 
sait réparer. 

*  FOUCAULT  (  Jules,  marquis  de  ) 
cousin -germain  du  précédent,  colonel 
du  génie,  membre  de  la  chambre  des  dé- 
putés en  1815,  né  en  1782  au  château 
de  Lubersac  en  Limousin ,  fut  élève  de 
l'école  polytechnique  en  1801,  et  of- 
ficier du  génie  en  1803.  Envoyé  au  siège 
de  Stralsund ,  il  fit  partie  de  l'armée  d'Al- 
lemagne ,  il  passa  ensuite  en  Espagne  et 
servit  avec  distinction  aux  sièges  de  Sar- 
ragosse,  de  Mequinenza ,  deLéridaetde 
Tortose.  Après  avoir  reçu  plusieurs  bles- 
sures, il  devint  chef  de  bataillon  dans 
son  arme,  alla  en  Hollande  (  1811  ),  et  fut 
chargé  de  défendre  le  Helder  où  il  était 
encore  en  1814.  Louis  XVIII  le  nomma 
secrétaire  de  la  commission  des  anciens 
officiers,  et  le  département  de  la  Corrèze, 
son  député  à  la  chambre  de  1 8 1 5.  En  1 8 1 6, 
il  obtint  le  commandement  d'un  régiment 
du  génie.  Il  mourut  à  Metz  en  1821.  Son 
régiment  lui  a  fait  élever  un  monument 
funèbre. 

*  FOUCHÉ  (Joseph) ,  duc  d'Otrante, 
naquit  à  Nantes  le  29  mai  1763,  d'un 
capitaine  de  vaisseau  marchand  qui  le 
destina  d'abord  à  suivre  la  même  profes- 
sion. Ses  études ,  chez  les  oratoriens  où 
il  fut  élevé,  furent  peu  brillantes;  ses 
faibles  progrès  n'étaient  dûs  qu'à  une 
laborieuse  application.  La  délicatesse  de  sa 
constitution  ne  lui  permit  pas  d'embras- 
ser l'état  de  son  père  ;  il  entra  dans  la 
congrégation  de  l'Oratoire,  fut  reçu'dans 
la  maison  de  l'Institution  de  Paris,  et  y 
continua  ses  études ,  avec  quelques  suc- 
cès. Successivement  professeur  à  Juilly, 
à  Arras ,  à  Vendôme  ,  la  révolution  fran- 
çaise le  trouva  préfet  des  classes  au  col- 


4oo  FOU 

légede  Nantes;  il  avait  alors  25  ans.  Dé- 
jà connu  pour  avoir  osé  monter  dans  un 
aérostat  à  l'époque  oii  se  faisaient  les 
premières  expériences  de  cette  nouvelle 
découverte ,  il  ajouta  bientôt  une  triste 
illustration  à  cette  innocente  célébrité , 
et  le  club  de  Nantes  retentit  de  ses  mo- 
tions furieuses.  Peu  après  (septembre  92), 
il  fut  député  de  son  département  à  la  Con- 
vention :  retenu  pendant  long-temps  dans 
un  silence  presqu'absolu  par  la  médiocri- 
té de  ses  talens  oratoires,  il  le  rompit 
d'une  manière  horrible  à  l'époque  du 
procès  de  Louis  XVI  :  on  reconnut  alors 
l'ami  de  Robespierre  et  de  Danton.  «  Il 
3>  semble ,  disait-il ,  que  nous  sommes 
»  effrayés  du  courage  avec  lequel  nous 
7)  avons  aboli  la  royauté  ;  nous  chance- 
V  Ions  devant  l'ombre  d'un  roi.  Sachons 
3)  prendre  enfin  une  attitude  républi- 
■»  caine  ;  nous  sommes  assez  forts  pour 
»  soumettre  toutes  les  puissances  et  tous 
w  les  événemens  ;  le  temps  est  pour  nous 
))  et  contre  tous  les  rois  de  la  terre.  »  La 
mort  sans  appel  ni  sursis  fut  la  conclu- 
.sion  de  ces  diatribes  sanguinaires.  L'ambi- 
tion et  l'avidité  de  Fouché  le  rapprochè- 
rent de  Danton  plutôt  que  de  Robespierre, 
dont  l'incorruptibilité,  si  populaire  à  cette 
époque,  ne  permettaitni  le  luxe  ni  les  exac- 
tions. Poursuivant  la  même  ligne  de  fureur 
républicaine,  Fouché  fit  rendre  deux 
décrets,  l'un  déclarant  nationaux  les 
biens  dépendant  des  établisseraens  d'in- 
struction publique  autres  que  les  collè- 
ges ;  l'autre  ordonnant  la  recherche  des 
biens  d'émigrés  (J4  mars  1793).  Tou- 
jours médiocre  à  la  tribune,  il  brigua  des  . 
missions  :  l'Aube  et  la  Nièvre  furent  tour- 
à-tour  le  théâtre  de  ses  horribles  exploits. 
La  mort  est  un  sommeil  e'ternel ,  telle 
fut  la  folie  philosophique  dont  il  faisait 
emphatiquement  orner  les  portes  des 
cimetières.  Quatre-vingt-trois  prêtres 
furent  envoyés  par  lui  aux  noyades  de 
Nantes.  Célèbre  par  ce  qu'on  appelait 
alors  de  Vénergie ,  il  fut  adjoint  à  Collot- 
d'Herbois  dans  son  expédition  contre 
Lyon.  On  frémit  en  Usant  ses  proclama- 
tions et  sa  correspondance  officielle  : 
«  Nous  le  jurons,  s'écria il-i  1 ,  le  peuple 
»  sera  vengé  ;  ce  sol  qui  fut  rougi  du  sang 


FOU 

»  des  patriotes,  sera  bouleversé,  et  sur 
3)  les  débris  de  cette  ville  superbe  et  re- 
»  belle  ,  s'élèveront  des  chaumières  épar- 
«  ses  que  les  amis  de  la  liberté  et  de  l'é- 
»  galité  s'empresseront  de  venir  habiter.» 
Les  condamnés  devaient  être  conduits 
en  plein  jour  en  face  du  lieu  même  où 
les  patriotes  «ivaient  été  exécutés,  pour 
y  «  expier  sous  le  feu  de  la  foudre  une 
»  vie  trop  long-temps  criminelle.  Le  peu- 
»  pie ,  écrivait-il  encore ,  a  mis  entre  les 
»  mains  de  ses  représentans ,  le  tonnerre 
»  de  sa  vengeance  :  ils  ne  le  quitteront 
»  que  lorsque  tous  ses  ennemis  seront 
»  foudroyés.  «  «  Les  démolitions  sont  trop 
»  lentes ,  écrit-il  à  la  Convention  :  il  faut 
»  des  moyens  plus  rapides  à  l'impatience 
M  républicaine  ;  l'explosion  de  la  mine  , 
»  l'activité  dévorante  de  la  flamme  peu- 
»  vent  seules  exprimer  la  toute-puissance 
»  du  peuple.  »  Toute  sa  correspondance 
de  cette  époque  que  les  courtisans  de  sa 
grandeur  ont  voulu  en  vain  attribuer  à 
CoUot-d'Herbois ,  est  pleine  de  traits 
pareils.  De  retour  à  Paris  le  8  avril ,  il 
fut  nommé  le  G  juin  président  du  club 
des  Jacobins  ;  mais  Robespierre  l'accusa 
à'avoir  déshonoré  la  révolution  par  ses 
excès,  le  fit  chasser  des  Jacobins  comme 
uri  conspirateur  chargé  de  rapines  ;  et 
sans  le  9  thermidor ,  il  aurait  infaillible- 
ment partagé  le  sort  de  Chaumette  que 
V incorruptible  dictateur  avait  envoyé  à 
l'échafaud.  Après  le  9  thermidor ,  il  s'ef- 
forçait de  revendiquer  nue  partie  de  la  ^ 
gloire  de  cette  journée;  «  elle  est  trop 
»  belle  pour  avoir  été  déshonorée  par  sou 
»  secours  ,  »  s'écria  Boissy  -  d'Anglas. 
Chassé  de  l'Assemblée  et  décrété  d'arres- 
tation ,  il  fut  compris  dans  l'amnistie  gé- 
nérale du  26  octobre  1795  ,  et  envoyé  en 
mission  par  le  Directoire  sur  les  frontîtrcs 
d'Espagne ,  puis  exilé  comme  terroriste 
dans  la  vallée  de  Montmorency.  Ses  rap- 
ports avec  Gracchus-Babœuf,  qui  le  firent 
condamner  alors ,  lui  servirent  bientôt  à  ^ 
obtenir ,  par  d'importantes  révélations , 
la  confiance  des  directeurs  :  par  le  crédif 
de  Barras ,  il  fut  nommé  ambassadeur] 
près  la  république  Cisalpine,  y  essaya 
contre  les  réactions  anti-révolutionnaires 
un  1 8  fructidor  en  miniature ,  fut  rap-. 


'A  ■ 

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fOtJ 

pelé  pat  lé  Directoire ,  et  aurait  été  ra- 
mené captif  à  Paris,  sans  ses  liaisons  avec 
le  jjénéral  Joubert  qui  s'y  opposa.  Tou- 
jours soutenu  par  Barras ,  nommé  ambas- 
sadeur près  la  république  Batave ,  il  re- 
vint bientôt  se  saisir  du  portefeuille  de 
la  police.  Ici  se  termine  sa  carrière  de 
démagogue  ,  et  commence  sa  vie  d'hom- 
me d'état.  Il  paralyse  l'exécution  de 
l'horrible  loi  des  otages ,  attaque  vive- 
ment les  clubs,  résiste  aux  fureurs  du 
manège ,  présente  un  rapport  contre  les 
royalistes  du  Morbihan,  supprime  onze 
journaux ,  et  prépare  de  loin  le  1 8  bru- 
maire en  frappant  à  droite  et  k  gauche 
tout  ce  qui  s'opposait  au  pouvoir.  Avec 
le  produit  des  jeux  ,  il  se  fait  des  créatu- 
res, s'attache  Joséphine,  se  lie  intime- 
ment avec  tous  les  Buonaparte ,  arrange 
avec  le  jeune  conquérant  qui  arrivait 
d'Egypte  ,  la  journée  qui  lit  succéder  le 
consulat  à  la  Constitution  de  l'an  3.  Les 
démocrates  comme  les  royalistes  furent 
combattus  ;  le  complot  d'Aréna  ,  Cerac- 
chi  et  Topino-Lebrun  échoua  ;  les  auteurs 
de  la  machine  infernale  furent  décou- 
verts ,  et  300  démagogues  déportés  sous 
ce  prétexte  ;  la  justice  distributive  des 
emprisonnemens  et  des  exils  ,  et ,  il  faut 
l'avouer,  quelquefois  de  la  clémence  et  du 
pardon ,  fut  habilement  balancée  entre 
tous  les  partis  :  mille  noms  seulement 
furent  maintenus  sur  la  liste  des  émigrés: 
peu  après  les  royalistes  étaient  amorcés  , 
les  démagogues  adoucis ,  et  Buonaparte 
lui-même  sentait  ses  caprices  asservis  à 
l'influence  de  son  ministre.  Fatigué  de 
cette  contrainte,  et  plus  confiant  en  ses 
propres  forces  ,  il  s'en  défit  après  la  paix 
d'Amiens  (septembre  1802).  La  sénato- 
rerie  d'Aix  fut  donnée  à  Fouché  comme 
fiche  de  consolation  ;  il  se  vengea  par  des 
bons  mots  du  ministre  de  la  justice  ,  Ré- 
gnier ,  sous  la  direction  de  qui  la  police 
fut  réunie  ;  et  le  sobriquet  de  gros-juge 
lui  restera.  Dans  l'automne  de  l802,  Fou- 
ché fit  encore  partie  d'une  commission 
chargée  de  conférer  avec  les  députés  des 
cantons  suisses,  dont  les  rapports  fédé- 
raux furent  changés  par  le  fameux  acte 
de  me'dintUm.  La  conspiration  de  Georges 
et  de  Pichegru  ,  la  transition  du  consulat 
V. 


POU  4oï 

à  l'empire  l'appelèrent  Fouché  à  la  police 
le  10  juillet  1804.  Ici  fut  l'époque  de  sa 
plus  grande  puissance.  Il  ressuscita  l'an- 
cienne maxime  que  trois  personnes  ne 
pouvaient  se  réunir  et  parler  indiscrète- 
ment des  affaires  publiques  sans  que  le 
lendemain  la  police  n'en  fût  informée.  De- 
venu le  modérateur  de  l'état ,  tous  les 
partis  le  prônèrent  :  son  action  fut  si 
forte  sur  l'opinion  qu'on  attribua  à  lui 
seul  l'avènement  et  le  maintien  au  pou- 
voir de  Napoléon.  Pendant  les  guerres 
de  l'empire,  réunissant  entre  ses  mauis 
le  ministère  de  la  police  et  celui  de  l'in- 
térieur ,  il  dirigeait  presque  en  maître 
absolu  la  politique  générale  ;  et  lors  du 
débarquement  des  Anglais  dans  l'île  de 
Walcheren  ,  il  osa  écrire  :  «  prouvons  à 
«  l'Europe  que  si  le  génie  de  Napoléon 
»  peut  donner  de  l'éclat  à  la  France  par 
w  ses  victoires ,  sa  présence  n'est  pas  né- 
»  cessaire  pour  repousser  nos  ennemis,  u 
Les  Anglais  furent  chassés ,  mais  l'empe- 
reur se  souvint  de  l'audacieuse  circulaire. 
A  peu  près  dans  le  même  temps,  l'empe- 
reur découvrit  une  négociation  diploma- 
tique entamée  à  son  insu  ,  avec  le  marquis 
de  Wellesley,  par  l'entremise  de  l'officier 
irlandais  Fagan.  Napoléon,  qui  en  suivait 
une  autre  parallèlement,  vit  les  deux  en- 
voyés, dontlcspropositionsétaient  contra- 
dictoires sur  plusieurspoints,  pris  pour  des 
espions  et  chassés.  Indigné  contre  son 
audacieux  ministre ,  il  donna  la  police  à 
Savary ,  réclama  de  Fouché  sa  correspon- 
dance, et  ne  pouvant  obtenir,  malgré  une 
sorte  de  visite  domiciliaire  dans  laquelle 
Berthier  et  Real  furent  mystifiés  par 
l'homme  le  plus  ru.sé  de  France,  que  quel- 
ques papiers  iusignifians ,  il  l'exila  dans 
sa  sénatorerie  d'Aix.  Déjà  duc  d'Otrante 
par  le  décret  impérial  du  30  niai-s  sur  les 
grands  fiefs  de  l'empire ,  il  avait  été  nom- 
mé gouverneur  de  Rome  en  même  temps 
que  renvoyé  du  ministère.  Ne  s'abusant 
pas  sur  sa  position  ,  et  craignant  un  dé- 
noûraent  tragique  à  tout  ce  drame  d'in- 
trigues ,  il  s'embarqua  à  Livourne  pour 
les  Etats-Unis  :  mais  ne  pouvant  suppor- 
ter la  mer,  il  prit  son  parti ,  revint  dans 
sa  sénatorerie ,  d'oîi  il  fut  appelé  au  quar- 
tier-général de  Dresde  aprè.s  la  campagne 
26 


4oà  P6V 

de  Russie,  et  envoyé  en  lUyrîe  comme 
gouverneur -général.  Arrivé  à  Leybach 
en  juillet  1813,  sans  forces  contre  l'inva- 
sion autrichienne,  il  se  retire,  intrigue 
avec  Murât  qui,  poussé  par  son  penchant 
naturel  et  par  les  insinuations  de  Fouché, 
se  joint  à  la  coalition  des  puissances  ; 
muni  des  pouvoirs  de  l'empereur,  il  traite 
pour  l'évacuation  de  la  Toscane  et  des 
états  romains ,  revient  à  Lyon ,  est  forcé 
par  la  position  politique  qu'il  avait  ré- 
cemment prise ,  à  gagner  Valence  où.  il 
apprend  l'arrivée  de  Monsieur  comte  d'Ar- 
tois, à  Vesoul.  Il  fut  trop  tard  à  Paris 
pour  faire  partie  du  gouvernement  pro- 
visoire ,  et  ne  put ,  malgré  les  menées 
de  ses  partisans ,  réussir  à  se  faire  nom- 
mer alors  ministre  de  la  police.  Cette 
première  restauration  de  la  monarchie  le 
confina  dans  son  château  de  Ferrières, 
d'où,  il  conserva  des  relations  avec  tous 
les  personnages  politiques.  Il  prétend 
avoir  répondu  à  des  intrigans  dont  le  but 
était  le  renversement  des  Bourbons  ,  et 
dont  les  avances  le  prévenaient  :  «  Je  ne 
5>  travaille  point  en  serres  chaudes  ;  je 
))  ne  veux  rien  faire  qui  ne  puisse  paraître 
))  au  grand  air.  »  Son  plan  était  alors  de 
profiter  de  l'abdication  pour  établir  une 
régence  dont  la  consolidation  d'une  lé- 
gitimité illégitime  eut  été  la  conséquence. 
Cependant  ses  communications  avec  les 
royalistes  continuaient  d'abord,  par  l'in- 
termédiaire de  M.  de  Blacas,  et  ensuite 
par  celui  de  M.  le  duc  d'Havre.  Dans  une 
entrevue  avec  Monsieur  (  depuis  Charles 
X  )  chez  la  princesse  de  Vaudemont ,  il 
s'écria,  en  parlant  de  la  possibilité  de 
sauver  la  couronne  :  «  11  est  trop  tard  ; 
»  sauvez  le  roi  ;  je  me  charge  de  sauver 
»  la  monarchie,  »  mot  plus  connu  qu'il 
n'est  facile  à  bien  comprendre.  On  voulut 
alors  s'assurer  de  sa  personne  ;  mais  il 
escalada  le  mur  de  l'hôtel  d'Hortense 
Beauharnais ,  voisin  du  sien ,  et  échappa 
à  toutes  les  recherches.  Après  le  20  mars, 
Napoléon  lui  rendit  la  police ,  et  triom- 
pha de  ses  efforts  qui  tendaient  à  substi- 
tuer à  la  force  militaire  une  force  révo- 
lutionnaire ,  dont  la  terreur  ressuscitée 
eut  été  le  principal  moyen.  Fouché  par- 
vint ,  par  ses  intrigues  à  neutraliser  la 


Pot] 

Vénààe  :  mais  peu  confiant  dans  lé  flOti^ 
vel  ordre  de  choses  il  communiquait  arec 
Gand.  Maître  de  la  chambre  des  représen- 
tans ,  il  força  Buonaparte  à  abdiquer  après 
Waterloo ,  et  se  trouva  pendant  un  instant 
arbitre  des  destinées  de  la  France  comme 
président  du  gouvernement  provisoire  : 
c'est  en  cette  qualité  qu'il  traita  de  la 
reddition  de  Paris.  Il  eut  bien  voulu  faire 
adopter  son  plan  de  régence ,  et  envoya 
au  quartier  général  des  alliés  cinq  pléni- 
potentiaires à  la  tête  desquels  était  M.  de 
La  Fayette  ,  avec  mission  de  traiter  de  la 
paix  et  d'adhérer  à  toute  espèce  de  gou- 
vernement excepté  à  celui  des  Bourbons. 
Mais  la  France  réclamait  ses  anciens  rois, 
et  elle  les  obtint.  Tous  les  efforts  de  Fouché 
se  concentrèrent  alors  pour  arracher  des 
concessions  à  ceux  qu'il  ne  pouvait  évi- 
ter :  le  6  juin  ,  il  eut  une  conférence  à 
Neuilly  avec  le  duc  de  Wellington ,  et  le 
lendemain  il  fut  présenté  au  roi,  à  Ar- 
nouville  près  St. -Denis.  Il  essaya  de 
persuader  à  Louis  XVIII  qu'il  devait  con- 
solider à  jamais  la  révolution  en  sa  per- 
sonne, en  abandonnant  la  cocarde  blanche 
et  les  émigrés  de  Gand.  Ce  prince ,  qui 
plus  tard  ne  s'abandonna  que  trop  à  des 
conseils  de  ce  genre ,  refusa  de  suivre 
ceux-là ,  et  se  contenta  de  conserver  au 
conseiller  le  ministère  de  la  police.  Car- 
not ,  furieux  de  voir  son  ancien  collègue 
adoucir  si  heureusement  pour  lui  les  plus 
rapides  transitions ,  et  craignant  d'ail- 
leurs sa  surveillance,  lui  écrivit  ces  mots 
pleins  d'une  emphase  toute  lacédémo- 
nienne ,  et  d'un  arrière-goût  de  républi- 
que :  «  Traître,  où  veux-tu  que  j'aille?  » 
—  «  Imbécille,  où  tu  voudras  »  répondit 
Fouché.  Il  contribua  tant  par  son  habileté 
non  contestée  que  par  ses  anciennes  re- 
lations à  aplanir  bien  des  difficultés. 
L'ordonnance  du  26  juillet,  l'arrestation 
de  Ney  et  de  Labédoyère,  la  soumission 
de  l'armée  de  la  Loire ,  le  désarmement 
des  factieux  furent  en  partie  son  ouvrage.  M  i 
Mais  bientôt  de  nouvelles  intrigues  révo-^  | 
lutionnaires ,  des  rapports  confidentiels 
divulgués ,  l'approche  de  la  chambre  in- 
trouvable, et  la  force  réagissante  de  l'opi- 
nion royaliste  le  contraignirent  de  donner 
sa  démission,  ^'ommé  ministre  à  Dresde, 


FOU 

il  y  fut  surpris  par  la  loi  du  12  janvier 
1816  contre  les  régicides.  Ici  finit  sa  car- 
rière politique  si  longue  et  si  bien  l'cm- 
plie.  Doué  d'un  jugement  profond ,  d'une 
prévoyance  rare,  d'un  tact  exquis  des 
hommes  et  des  clioses,  Fouché  prit  tou- 
jours conseil  des  circonstances  ;  sa  vie 
est  partagée  en  deux  époques ,  dont  l'une 
offre  le  beau  idéal  de  la  frénésie  déma- 
gogique ,  et  l'autre  le  type  parfait  du 
despotisme  :  il  a  reflété  son  siècle  :  il  n'a 
point  été  plus  inconséquent  que  le  temps 
oîi  il  a  vécu.  Au  milieu  de  tant  de  con- 
tradictions, il  a  constamment  été  dévoué 
à  dcu,x  intérêts  :  au  sien  d'abord ,  et  avant 
tout  ;  ensuite  à  celui  de  la  révolution  : 
assez  semblable  en  cela  à  Buonaparte ,  ce 
grand  révolutionnaire  -  soldat ,  dont  il 
était  la  contre-épreuve  dans  l'ordre  civil , 
et  dont  il  a  toujours  partagé  la  puissance. 
Une  femme  de  génie  a  surnommé  Napo- 
léon la  révolution  à  cheval  -.  Fouché  fut 
la  révolution  homme  d'affaires  ,  la  révo- 
lution homme  de  cabinet  :  il  la  servit 
contre  Robespierre ,  contre  le  Directoire, 
tontre  l'empereur ,  contre  la  restaura- 
tion ,  dévoué  pourtant  avant  tout  à  sa 
propre  fortune ,  à  sa  propre  ambition  ,  à 
ses  14,000,000  avec  lesquels  il  quittâtes 
affaires.  Du  reste,  sans  fanatisme  d'aucun 
genre  :  la  révolution  l'a  fait  bourreau  , 
l'empire  l'a  fait  despote ,  un  siècle  hon- 
nête l'eut  peut-être  trouvé  honnête  hom- 
me. Fouché  a  épousé  eu  août  1815  M'^^ 
de  Castellane.  Après  son  bannissement  il 
\oyagea  quelque  temps  en  Allemagne,  et 
se  fixa  à  Trieste  oîi  il  mourut  en  1820. 
L'Allemagne  a  été  inondée  par  lui  d'é- 
^crits  apologétiques.  Après  la  première 
restauration  a  paru  :  Copie  d'une  lettre 
adressée  à  S.  A.  R.  Mgr.  le  comte  d'Ar- 
tois ,  par  M.  le  duc  D*''*  le  25  avril 
181 4,  Paris,  juin  1814,  in-8.  On  a  de  M. 
de  St.-Victor  Quelques  observations  sur 
la  lettre  de  Fouché  au  duc  de  IFelUng- 
ton ,  suivies  du  texte  de  cette  lettre  et  de 
quelques  notes  explicatives ,  Paris ,  Ni- 
coUe,  1817,  in-8.  De  M.  Liebaut  (du 
Jura)  Quelques  mots  sur  deux  ex-minis- 
tres {  MM.  de  Talleyrand  et  Fouché).  Des 
anonymes  ont  donné  ;  Fouché  de  Nan- 
/e^ ,  sa  vie  privée ,  politique  et  mQffçlç 


FOU  4o3 

depuis  son  entrée  à  la  Convention  jus~ 
qu'à  ce  jour  ,  1816  ,  in-32  ,  et  Sept  mois 
de  la  vie  de  Fouché  de  Nantes  (  1793- 
94  ) ,  Paris ,  Audin ,  1 8 1 6 ,  in-1 2.  Un  an- 
glais a  publié  un  Mémoire  historique  sur 
Fouché  de  Nantes ,  maintenant  duc 
d'Oli-ante  ,  Paris  ,  Egron ,  1815,  in-8 .  Le 
meilleur  ouvrage  écrit  sur  sa  vie  a  paru 
sous  le  titre  de  Mémoires  de  J.  Fouché, 
Paris,  1824,  2  vol.  in-8;  suivant  M. 
Barbier  [n°  22  ,  937  des  Anonymes)  il  a 
été  rédigé  par  M.  de  Beauchamp  ,  sur  des 
notes  fournies  par  M.  de  Julian  ,  ancien 
agent  de  Fouché.  L'éditeur  (  M.  Lerouge) 
a  eu  à  soutenir  un  procès  pour  cet  ou- 
vrage contre  les  fils  du  duc  d'Otrante. 

FOUCHER  (Simon),  surnommé  le 
Restaurateur  de  la  philosophie  acadé- 
micienne ,  parce  qu'il  travailla  à  ressu- 
sciter la  philosophie  des  anciens  académi- 
ciens, né  à  Dijon  en  1644,  mourut  k 
Paris  en  1696,  après  avoir  publié:  !<> 
Histoire  de  la  Philosophie  académi- 
cienne. 2°  Dissertation  sur  la  recherche 
de  la  vérité,  suivie  d'un  examen  des  sen- 
timens  de  Descartes,  et  plusieurs  autres 
ouvrages  aujourd'hui  oubliés. 

FOUCHÈR  (L'abbé  Paul) ,  de  l'aca- 
démie des  Inscriptions  et  belles-lettres  , 
né  à  Tours  en  1704,  mortà  Paris  en  1778, 
était  un  savant  studieux ,  et  un  homme 
doux  et  honnête.  Il  cultiva  d'abord  les 
sciences  exactes,  et  nous  avons  de  lui 
une  Géométrie  métaphysique,  1758, 
in-8.  Il  se  tourna  ensuite  du  côté  de  l'é- 
rudition ,  et  eut  des  succès  en  ce  genre. 
Son  traité  hastorique  De  la  Religion  des 
anciens  Perses,  divisé  en  plusieurs  Mé- 
moires imprimés  dans  différens  volumes 
du  Recueil  de  l'Académie  des  Belles- 
Lettres  ,  prouve  son  savoir  et  sa  sagacité. 
Ce  sont  des  recherches  curieuses  et  neu- 
ves sur  un  sujet  traité  jusqu'alors  très- 
imparfaitement. 

*  FOUCHER  D'OPSONVILLE  (N*"'*), 
écrivain  français,  né  en  1734  ,  entra  au 
service  en  1752.  Deux  fois  il  fit  par  terre 
le  voyage  de  France  aux  Indes,  chargé, 
dit-on ,  de  missions  importantes  près  des 
souverains  de  ces  contrées  :  il  profita  du 
long  séjour  qu'il  y  fit  pour  bien  étudier 
les  mœurs  des  |i§|}ita}is  ç,\  î§s  |)f  odiiction^ 


4o4  FOI? 

du  pays.  Les  ouvrages  qu'il  publia  sur  ce 
sujet  contiennent  des  particularités  in- 
connues jusqu'alors  :  il  s'occupa  surtout 
des  animaux  dont  les  Arabes  et  les  Juifs 
font  leur  nourriture,  notamment  des  sau- 
terelles ;  il  traita  des  crocodiles,  des  ca- 
méléons et  des  serpens  ;  fit  connaître  les 
causes  de  la  vénération  que  les  liabitans 
de  l'Inde  ont  pour  le  cheval ,  l'âne  et  le 
bœuf;  enfin  il  raconta  les  fréquens  com- 
bats que  dans  ces  contrées  les  hommes 
livrent  aux  tigres  en  les  attaquant  corps 
à  corps.  Atteint  de  la  peste  en  Arabie,  il 
fut  abandonné  dans  le  désert  par  la  ca- 
ravanne  dont  il  faisait  partie,  et  ne  dut  sa 
guérison  qu'à  une  espèce  de  prodige. 
Pour  revenir  en  France ,  il  eut  à  essuyer 
des  maux  incroyables.  Il  mourut  en  1802, 
après  avoir  publié  les  ouvrages  suivans  : 
i  "  JEssais  philosophiques  sur  les  mœurs 
de  divers  animaux  étrangers ,  Paris , 
1783  ,  in-8  ;  ouvrage  curieux,  extrait  du 
Journal  des  voyages  de  l'auteur ,  qui  em- 
brasse aussi  l'histoire  naturelle,  les  mœurs 
et  les  usages  des  peuples  que  d'Opson- 
ville  a  visités.  Il  avait  annoncé  un  autre 
ouvrage  beaucoup  plus  étendu  sur  l'Inde, 
mais  il  n'a  publié  que  le  Bagavadam 
qui  en  faisait  partie,  et  qui,  comme  on 
le  sait ,  contient  la  doctrine  des  Indiens 
sur  l'Etre  suprême ,  les  dieux ,  les  géans 
et  les  hommes,  1788,  in-8;  traduit  sur 
une  version  Tamoule  par  Méridas  Poule , 
interprète  de  la  compagnie  des  Indes.  2° 
Supplément  au  voyage  de  Sonnerai , 
Amsterdam  (Paris),  1785,  in-8,  conte- 
nant des  observations  critiques;  3"  Lettre 
d'un  voyageur  au  baron  de  L.  sur  la 
guerre  des  Turcs,  Paris,  1788,  in-8. 
Il  a  publié  aussi  quelques  brochures  en 
faveur  de  la  révolution. 

*FOUCHY  (Jean-Paul  Grand-Jean  de), 
astronome  et  secrétaire  perpétuel  de  l'a- 
cadémie des  Sciences,  né  à  Paris  en 
1707,  y  mourut  le  15  avril  1788.  Il 
eut  tous  les  goûts  des  âmes  douces.  Né 
avec  un  caractère  paisible ,  il  cultivait 
la  poésie ,  mais  dans  le  secret  de  l'amitié, 
ne  faisant  que  des  vers  de  société.  Il  ai- 
mait aussi  la  musique,  et  touchait  l'or- 
gue presque  tous  les  dimanches  dans  qùcl- 
flues  églises  dç  soq  voisinage  ;  par  là  jl 


FOU 

satisfaisait  à  la  fois  son  goût  pour  la  musi- 
que ,  sa  piété  et  son  zèle  pour  obliger.  On 
trouve  un  grand  nombre  de  ses  me'/no/rcj 
dans  le'recueil  de  l'académie  des  Sciences, 
et  la  description  de  quelques  instrumens 
de  son  invention  dans  le  recueil  des  ma- 
chines de  l'académie  ,  tom.  5  ,  G  ,  7.  Oa 
a  encore  de  lui  des  éloges  de  plusieurs 
académiciens,  Paris,  1761  ,  in-12. 

FOUCQUET  (Nicolas),  marquis  de 
Belle-Ile ,  fils  d'un  conseiller  d'état ,  na- 
quit en  1615.  Sa  mère,  Marie  de  Mau- 
peou ,  damcd'uncpiété  éminenteet  d'une 
charité  extrême,  morte  en  1681  ,  à  91 
ans,  fut  regardée  commela  mère  des  pau- 
vres, auxquels  elle  faisait  distribuer  de 
l'argent  et  des  remèdes.  Elle  est  auteur 
d'un  recueil  très  répandu  sous  le  titre  de 
Remèdes  faciles  et  domestiques ,  2  vol. 
in-12.  Nicolas  Foucquct,  son  fils,  donna 
dès  son  enfance  des  marques  non  équivo- 
ques de  son  esprit.  Il  fut  reçu  maître  des 
requêtes  à  20  ans ,  et  'procureur-général 
du  parlement  de  Paris  à  43  ans.  La  place 
de  surintendant  des  finances  lui  fut  don- 
née en  1053,  dans  un  temps  oîi  elles 
avaient  été  épuisées  parles  dépenses  des 
guerres  civiles  et  étrangères.  Foucquet 
aurait  dû  les  ménager  ;  il  les  dissipa  et 
eu  usa  comme  des  siennes  propres.  Il  dé- 
pensa près  de  36  millions  d'aujourd'hui 
à  faire  bâtir  sa  maison  de  Vaux.  Ses  dé- 
prédations ,  les  alarmes  que  donnaient 
les  fortifications  de  Belle-Ile,' les  tentati- 
ves qu'il  avait  faites  sur  le  cœur  de  mada- 
me de  la  Vallière  :  tout  servit  à  irriter 
Louis  XIV  contre  son  ministre.  On  l'at- 
tira avec  adresse  à  Nantes  ,  et  on  l'arrêta 
le  7  septembre  1661.  Foucquet  s'était  dé- 
fait fort  imprudemment ,  quelque  temps 
auparavant ,  de  sa  charge  de  procureur- 
général.  Son  procès  lui  fut  fait  par  des 
commissaires,  qui  le  condamnèrent  en 
1 664  à  un  bannissement  perpétuel ,  com 
mué  en  une  prison  perpétuelle.  Ce  fui 
dans  la  citadelle  de  Pignerol  qu'il  fut  e 
fermé  ;  il  y  mourut ,  suivant  le  bruit  co 
mun,  en  1680,  dans  de  grands  senlimenS' 
de  piété.  De  tous  les  amis  que  sa  fortune 
lui  avait  faits ,  il  ne  lui  resta  que  Gour- 
ville ,  Pellisson,  mademoiselle  de  Scudé- 
ri,  ceux  (|ui  furent  enveloppé^  dans  S?i  djst 


m-^ 


FOU 

grâce ,  et  quelques  gens  de  lettres  qu'il 
pensionnait.  Le  premier  assure  dans  ses 
Mémoires,  que  Foucquet  sortit  de  sa  pri- 
son quelque  temps  avant  sa  mort.  Le  se- 
cond prit  sa  défense  dans  plusieurs  Mé- 
moires recueillis  en  1 5  volumes,  qui  sont 
des  modèles  d'éloquence.  La  Fontaine 
plaifpiit  ses  malheurs  dans  une  élégie 
touchante.  Il  chercha  à  adoucir  lassévé- 
rité  du  roi  ;  il  osa  môme  lui  adresser  une 
ode  pour  émouvoir  sa  pitié  en  faveur  du 
ministre  disgracié.  En  1789  ,  il  parut  une 
dissertation ,  pour  prouver  que  cet  in- 
tendant était  le  célèbre  Masque-de-fer  ; 
opinion  peu  accréditée ,  et  qui ,  comme 
le  remarque  un  critique ,  ne  s'accorde 
pas  avec  l'extrême  respect  qu'on  porta 
toujours  à  ce  prisonnier ,  et  les  mesures 
extraordinaires  prises  pour  laisser  son 
nom  sous  leplus  grand  secret.  Il  faut  con- 
venir néanmoins  qu'elle  acquiert  quelque 
vraisemblance  quand  on  considère  qu'ef- 
fectivement Foucquet  fut  d'abord  enfermé 
à  Pignerol,  et  qu'on  ne  sait  pas  positive- 
ment ce  qu'il  devint  depuis.  Le  bruit  a 
couru  qu'il  y  était  mort  ;  d'autres  disent 
qu'il  mourut  dans  le  sein  de  sa  famille 
(  f^.  Masque-de-fer.)  Sa  mère,  dont  la  cha- 
rité extrême  a  déjà  été  citée ,  et  qui  fit 
pendant  sa  longue  carrière  sa  plus  douce 
jouissancedu  soulagement  despauvres,  est 
auteur  du  recueil  qui  a  pour  titre  :  Re- 
mèdes faciles  et  domestiques,  2  vol.  in- 
12.  Lorsqu'elle  apprit  que  son  fils  était 
arrêté  à  >'antes ,  elle  se  prosterna  aussi- 
tôt ,  et  dit  :  «  Je  vous  remercie ,  mon 
0)  Dieu  ;  je  vous  ai  toujours  demandé 
j»  son  sîilut ,  et  voilà  le  chemin  !  »  Fouc- 
quet mourut  en  effet  dans  de  grands  sen- 
timens  de  piété.  D'Âuvigny  a  donné  sa 
vie  dans  le  tome  6  des  Vies  des  hommes 
illustres  de  France.  Il  assure  qu'il  com- 
posa dans  sa  prison  divers  ouvrages  de 
piété,  dont  quelques-uns  ont  été  livrés 
au  public,  tels  que  les  Conseils  de  la  sa- 
gesse, ou  Recueil  des  maximes  de  Salo- 
mon,  Paris,  1683,  2  vol.  in-12.  Cet  ou- 
vrage n'est  pas  de  Foucquet,  mais  du 
Père  Boutauld ,  jésuite.  On  peut  consul- 
ter le  Recueil  des  Défenses  de  M.  Fouc- 
.  quel  (en  Hollande)  ,  1665-1668,  15 vol, 
"Jfr-1 2,  et  les  notices  sur  la  mort  du  surin- 


FOTJ  4o5 

tendant  Fouquet ,  recueillies  à  Pignerol 
parM.  Modeste  Paroletti,  Turin,  1812,  in-4. 

FOUCQUET  (  Charles-Armand  ) ,  fils 
du  surintendant  des  finances  ,  né  à  Paris 
en  1657  ,  entra  dans  l'Oratoire  en  1682. 
11  devint  supérieur  de  St.-Magloire  en 
1699 ,  et  fut  quelque  temps  grand-vicaire 
auprès  de  Foucquet  son  oncle ,  évêque 
d'Agde.  Les  abbés  Bignon  ,  Dnguet,  Boi- 
leau  et  Couct ,  furent  très  liés  avec  lui. 
Il  eut  l'amitié  et  la  confiance  du  cardinal 
de  Noailles,  et  mourut  à  Paris  dans  la 
maison  de  Ste.-Magloire,  en  1734.  Après 
la  mort  du  Père  de  la  Tour,  général  de 
l'Oratoire ,  le  Père  Foucquet  lui  aurait 
infailliblement  succédé,  si  son  nom, 
inscrit  sur  la  liste  des  appelons  ,  et  des 
Réappelans ,  ne  l'avait  fait  exclure. 

FOUCQUET  (Charles-Louis-Auguste), 
comte  de  Belle-Ile,  petit-fils  du  surin- 
tendant des  finances,  naquit  à  Villefran- 
che  en  Rouergue ,  l'an  1684,  de  Louis 
Foucquet,  et  de  Catherine-Agnès  de  Le- 
vis.  Les  livres  qui  traitent  de  la  guerre, 
de  la  politique  et  de  l'histoire,  furentdès 
son  enfance  ses  lectures  favorites  ;  il  ne 
les  quittait  que  pour  se  livrer  aux  mathé- 
matiques, dans  lesquelles  il  fit  des  pro- 
grès sensibles.  A  peine  fut-il  sorti  de  l'a- 
cadémie ,  que  Louis  XIV  lui  donna  un 
l'égiment  de  dragons.  Il  se  signala  au 
siège  de  Lille ,  y  reçut  une  blessure  ,  et 
devint  brigadier  des  armées  du  roi  en 
1 708 ,  et  mestre-de-camp-général  des  dra- 
gons en  1709.  Dès  que  la  paix  fut  signée, 
le  comte  de  Belle  Ile  se  rendit  à  la  cour, 
fut  très  bien  accueilli  de  Louis  XIV  ;  et 
les  services  du  pelit-fils  firent  oublier  les 
fautes  du  grand-père.  La  mort  de  ce  mo- 
narque ayant  changé  le  système  des  af- 
faires, la  guerre  fut  déclarée  en  Espagne; 
le  comte  de  Belle  Ile  mérita  alors  d'être 
créé  maréchal-de-camp  et  gouverneur 
de  Huningue.  Il  eut  la  première  place  en 
1718,  et  la  seconde  en  171 9.  Le  duc  de 
Bourbon  ayant  succédé  dans  la  place  de 
premier  ministre  au  duc  d'Orléans,  le 
comte  de  Belle-Ile ,  lié  avec  M.  Leblanc , 
fut  entraîné  dans  la  disgrâce  de  ce  mi- 
nistre, et  enfermé  à  la  Bastille.  Il  n'en 
sortit  que  pour  être  exilé  pendant  quel-. 
(|ue  tentipg  dan?  ses  tprres,  qe  fntdsnMf 


4o6  POU 

calme  de  la  solitude  qu'il  travailla  à  son 
entière  justification.  Il  fut  fait  lieutenant- 
général  en  1731  ,  et  gouverneur  de  la 
ville  de  Metz  et  du  pays  Messin  en  1733. 
La  guerre  venait  d'éclater  ;  il  obtint  le 
commandement  du  corps  d'armée  qui 
devait  agir  sur  la  Moselle,  et  s'empara  de 
la  ville  de  Trêves.  Après  avoir  joué  un 
des  principaux  rôles  devant  Philisbourg, 
il  eut ,  le  reste  de  la  campagne ,  le  com- 
mandement des  troupes  en  Allemagne.  Il 
se  rendit  l'année  suivante ,  1735 ,  à  Ver- 
sailles, moins  pour  y  être  décoré  del'ordre 
du  Saint-Esprit  auquel  le  roi  l'avait  nom- 
mé, que  pour  y  être  consulté  par  le  car- 
dinal de  Fleury.  Les  puissances  belligé- 
rantes avaient  beaucoup  négocié  pour  la 
paix  dès  le  commencement  de  1735.  Ce 
l'ut  Belle-Ile  qui  engagea  le  cardinal  à  ne 
point  se  désister  de  ses  prétentions  sur 
la  Lorraine.  Rendu  à  lui-même ,  il  em- 
ploya le  loisir  de  la  paix  à  écrire  des 
Mémoires  sur  les  pays  qu'il  avait  par- 
courus ,  et  sur  les  différentes  parties  du 
gouvernement;  ouvrage  jugé  un  peu  sé- 
vèrement parle  marquis d'Argenson  dans 
ses  Loisirs.  «  La  preuve ,  dit-il ,  que  ses 
»  idées  ne  sont  ni  bien  lumineuses ,  ni 
M  réellement  grandes ,  c'est  que  son  stile 
»  est  faible  et  même  plat ,  qu'il  n'écrit 
»  ni  purement  ni  fortement.  »  C'est  à  lui 
qu'on  dut  presque  toutes  les  ordonnan- 
ces militaires  qui  parurent  en  1737.  En 
1741  ,  il  reçut  le  bâton  de  maréchal  de 
France  ;  et  la  mort  de  l'empereur  Char- 
les "VI  ayant  rallumé  la  guerre ,  il  fut 
nommé  ambassadeur  plénipotentiaire  à 
la  diète  de  Francfort  pour  l'élection  de 
l'empereur  Charles  VII.  ^La  magnificence 
qu'il  étala  dans  cette  occasion ,  sera  long- 
temps célèbre;  il  semblait  être  plutôt  im 
des  premiers  électeurs,  qu'un  ambassa- 
deur. Il  avait  ménagé  toutes  les  voix  et 
dirigé  toutes  les  négociations.  Le  roi  de 
Prusse ,  informé  de  tout  ce  qu'il  avait  fait , 
ne  put  s'empêcher  de  s'écrier  avec  admi- 
ration :  Il  faut  convenir  que  le  maréchal 
de  Belle-Ile  est  le  législateur  de  l Alle- 
magne. Si  Charles  VU  fut  élu  et  couron- 
né, ce  fut  en  partie  par  ses  soins.  Ce 
prince  eut  quelques  succès,  suivis  de 
grands  ni^lUçursj  Ips  Fr«»P^ai5  furent  l»bf»il'' 


FOU 

donnes  des  Prussiens,  ensuite  des  Saxons. 
Le  maréchal  de  Belle-Ile  se  trouva  enfer- 
mé dans  Prague.  Il  fallut  évacuer  cette 
place  ,  et  cette  opération  n'était  pas  fa- 
cile. Il  surmonta  tous  les  obstacles ,  et  la 
retraite  se  fit  à  la  fin  de  17  42.  A  la  troi- 
sième marche ,  il  fut  atteint  par  le  prince 
de  Lobkowitz,  qui  parut  à  la  tête  d'un 
corps  de  cavalerie ,  au  delà  d'une  plaine 
oii  l'on  pouvait  donner  bataille.  Le  prince 
tint  un  conseil  de  guerre,  dans  lequel  il 
fut  résolu  de  lui  couper  la  retraite ,  et 
d'aller  rompre  les  ponts  sur  la  rivière 
d'Egra ,  par  où  les  Français  devaient  pas- 
ser. Le  maréchal  de  Belle-Ile  choisit  un 
chemin  qui  eût  été  impraticable  en  toute 
autre  saison  :  il  fit  passer  son  armée  sur 
les  marais  glacés.  Le  froid  fut  l'ennemi  le 
plus  redoutable;  grand  nombre  de  sol- 
dats en  périrent  ;  un  des  otages ,  que  le 
maréchal  de  Belle-Ile  avait  amenés  de 
Prague  avec  lui ,  mourut  dans  son  car- 
rosse. Enfin  on  arriva  le  26  décembre  à 
Egra  par  une  route  de  38  lieues.  Cette 
retraite  hardie  ne  laissa  pas  d'être  blâmée 
par  quelques  vieux  militaires ,  parce  que 
le  maréchal  eut  sans  peine  obtenu  une 
capitulation  honorable ,  qui  eut  sauvé 
tant  de  braves  soldats.  C'est  le  parti  que 
prit  M.  de  Chevert ,  resté  à  Prague  avec 
trois  mille  hommes  (  frayez  Cm  e vert  ). 
Cependant  le  maréchal  de  Belle-Ile  se 
rendit  à  Francfort ,  oii  l'empereur  Char- 
les VII ,  qui  l'avait  déjà  déclaré  prince 
du  Saint-Empire ,  le  décora  de  l'ordre  de 
la  Toison  d'or.  De  retour  eu  France,  il 
partagea  ses  momens  entre  les  aiTaires  et 
les  soins  qu'il  devait  à  sa  santé.  Il  passa 
de  nouveau  en  Allemagne  ,  et  il  fut  fait 
prisonnier  le  20  décembre  1743  ,  en  al- 
lant prendre  des  relais  à  la  poste  d'Elbin- 
gerode ,  petit  bourg  enclavé  dans  le  ter- 
ritoire d'Hanovre ,  et  conduit  en  Angle- 
terre, oii  il  resta  jusqu'au  17  août  de 
l'année  suivante.  Revenu  en  France,  il 
lut  envoyé  en  Provence  pour  repousser 
les  Autrichiens  qui  l'inondaient.  Il  les 
chassa  peu  à  peu  de  cette  province ,  et 
leur  fit  repasser  le  Var  en  février  1747. 
Après  quelques  succès,  le  vainqueur  partit 
pour  concerter  à  Versailles  les  opérations 
de  U  campagnç  de  1748»  î-e  foi  qui  l'a-r 


I 

I 


Vait  fait  duc  de  Gisors  en  1742,  lé  créa 
pair  de  France.  Il  était  sur  le  point  d'exé- 
cuter un  plan  qui  devait  le  rendre  maître 
de  Turin ,  lorsqu'il  apprit  la  malheureuse 
affaire  d'Exilés ,  où  son  frère  fut  tué.  La 
paix  de  1748  ayant  mis  fin  aux  hostilités, 
il  continua  à  jouir  de  la  confiance  de 
Louis  XV ,  et  devint  ministre  principal 
en  1757-  L'assiduité  au  travail,  les  mal- 
heurs de  la  France,  les  soins  qu'il  prit 
pour  les  réparer,  le  consumèrent  peu  à 
peu,  et  il  mourut  le  26  janvier  1761  ,  en 
chrétien  et  en  sage.  Le  Père  de  Neuville 
prononça  son  oraison  funèbre ,  chef-d'œu- 
vre d'éloquence  et  de  sentiment,  qui 
sans  flatterie  et  sans  exagération ,  donne 
de  cet  homme  illustre  la  plus  grande  idée  ; 
en  même  temps  que  l'orateur  s'arrête  sur 
des  vérités  sombres  et  salutaires  fortement 
prononcées.  On  a  reproché  au  maréchal 
de  Belle-Ile  d'avoir  engagé  le  roi,  malgré 
toutes  les  remontrances  du  cardinal  de 
Fleury,  à  la  guerre  de  1741,  qui  ruina 
la  France  sans  aucun  avantage ,  et  lui  fit 
perdre  sa  considération  morale  et  sociale 
au  dehors  par  la  violation  de  la  Pragma- 
tique-Sanction solennellement  jurée. 
Dans  les  fonctions  de  son  ministère  on 
l'a  blâmé  de  s'attacher  trop  aux  petits  dé- 
tails ,  et  d'entrer  dans  tous  les  projets. 
Son  esprit  systématique  l'engagea  à  rece- 
voir tous  les  plans  qu'on  lui  présentait , 
et  à  protéger  trop  d'aventuriers  ;  mais  il 
retirait  ses  bontés  dès  qu'il  s'apercevait 
qu'on  l'avait  surpris.  J'ai  fait  des  fautes , 
disait-il  quelquefois  ,  mais  je  n'ai  jamais 
eu  l'orgueil  ridicule  de  ne  pas  en  conve~ 
nir.  Haut  avec  les  grands  ,  il  portait  dans 
les  cours  étrangères  toute  la  dignité 
qu'exigeait  la  grandeur  du  maître  qu'il 
représentait;  mais  affable  et  prévenant 
avec  ceux  qui  étaient  au  dessous  de  lui, 
il  ne  leur  faisait  point  sentir  le  poids  de 
son  autorité.  Il  aima  les  talens  en  homme 
éclairé ,  mais  non  pas  en  ministre  qui  ne 
protège  les  arts  que  par  air.  Le  maréchal 
de  Belle-Ile  était  naturellement  froid;  ses 
conversations  n'étaient  pas  gaies  ,  mais 
ellesétaientinstructives,  et  il  savait  parler 
avec  netteté  et  bien  raconter  un  fait.  IN'é 
sobre,  il  n'aima  jamais  ni  le  jeu ,  ni  la 
table  ;  mais  ou  ne  peut  dissimuler  qu'il 


FÔtl  407 

èul  beaucoup  de  penchant  pour  le  beau-' 
sexe.  Par  son  testament  il  donna  au  roi 
tous  les  biens  qu'il  avait  reçus  en  échange 
de  Belle-Ile ,  à  la  charge  de  payer  ses 
dettes  qui  étaient  considérables.  Le  ma- 
réchal de  Belle-Ile  avait  été  marié  deux 
fois.  Il  eut  de  son  second  mariage  avec 
Marie-Casimire-Thérèse-Geneviève-Em- 
manuelle  de  Bethune ,  un  fils  unique , 
Louis-Marie,  né  le  27  mars  1732,  ap- 
pelé le  comte  de  Gisors,  tué  en  1758  à 
l'armée  du  Rhin  ,  dans  la  malheureuse 
journée  de  Crevelt.  Le  Testament  politi- 
que ,  publié  sous  le  nom  du  maréchal  de 
Belle-Ile,  est  une  pièce  fabriquée  par 
Chévrier  et  Maubert. 

FOUCQUET  (  Henri- Auguste ,  baron 
LA  Motte  ) ,  fils  de  Charles  de  la  Motte 
Foucquet ,  gentilhomme  normand ,  qui 
s'était  retiré  en  Hollande ,  après  la  révo- 
cation de  l'édit  de  Nantes ,  fut  admis  fort 
jeune  en  qualité  de  page  à  la  cour  d'An- 
halt-Dessau  ;  mais  l'ardeur  qu'il  avait  de 
se  distinguer  dans  le  métier  des  armes , 
lui  fit  quitter  secrètement  la  cour  ,  et  il 
s'enrôla  en  qualité  de  simple  soldat  au 
service  de  Prusse.  Sa  valeur  l'éleva  suc- 
cessivement jusqu'au  grade  de  général 
d'infanterie.  Il  se  distingua  surtout  pen- 
dantla  guerre  de  sept  ans.  Schwerin  ayant 
perdu  la  vie  dans  la  sanglante  bataille  de 
Prague ,  Foucquet  remplaça  ce  héros  : 
une  balle  brisa  dans  sa  main  la  garde  de 
son  épée ,  et  le  blessa  grièvement  ;  mais 
il  ne  perdit  point  contenance ,  il  se  fit 
lier  l'épée  à  la  main  blessée ,  et  continua 
de  commander  l'aile  gauche  de  l'armée, 
qui ,  soutenue  par  un  renfort  de  cavale- 
rie ,  acheva  la  victoire.  A  la  bataille  de 
Landshut ,  le  23  juin  1760,  après  7  heures 
de  combat,  il  fut  battu  par  Landon  ,  et 
fait  prisonnier.  Après  la  paix ,  il  se  rendit 
à  Brandebourg  ;  il  y  finit  ses  joui's  le  2 
mai  1773. 

*  FOUGERÊT  (  Anne-Françoise  Dou- 
tremont  ) ,  fondatrice  de  la  Charité  ma- 
ternelle,  était  fille  et  petite -fille  de  ju- 
risconsultes célèbres;  elle  fut  mariée 
fort  jeune  à  M.  Fougeret  receveui'-général 
des  finances.  Douée  d'un  cœur  excellent 
et  d'une  disposition  à  la  bienfaisance, 
que  la  religion  augmentait  encore  che^ 


4o8  FOU 

elle,  l'abandon  des  enfans  avait  toujours 
été  pour  son  cœur  maternel  une  des  plus 
honteuses  plaies  de  l'hunianité.  Les  asiles 
ouverts  par  saint  Vincent  de  Paule  étaient 
encombrés ,  parce  que  la  misère  y  pré- 
cipitait les  enfans  légitimes  avec  ceux 
qui  n'ont  point  de  famille  à  réclamer  ; 
beaucoup   d'entre    eux   manquaient   de 
nourrices  ,  et  tous   les  soins  des  dignes 
filles  de  saint  Vincent  ne  pouvaient  em- 
pêcher qu'une  sorte  de  contagion  n'at- 
teignît la  plupart  des  enfans  qui  séjour- 
naient à  l'hospice.  Pour  remédier  à  ces 
inconvéniens ,  madame  Fougeret    con- 
çut l'idée  d'une   association  qui  aurait 
pour  but  de  secourir  à  domicile  les  mères 
pauvres,  afin  qu'elles  pussent  nourrir  et 
élever  elles-mêmes  leurs  enfans.  Faisant 
un  appel  aux  mères  de  famille  ,  elle  eut 
bientôt  réuni  un  grand  nombre  de  dames 
les  plus  riches  et  les  plus  considérées  de 
la  capitale.   Le  gouvernement  et  la  fa- 
mille royale  encouragèrent  de  leurs  bien- 
faits cette  philanthropique  institution, 
et  dès  la  première  année ,  le  nombre  des 
enfans  légitimes  portés  à  l'hospice  fut 
considérablement    diminué.    Les  régle- 
mensquidirigentaujourd'hui  les  diverses 
sociétés  de  charité  maternelle,  sont  en- 
core  ceux   que  madame  Fougeret  avait 
médités  et  établis  en  1788.  Sa  prudente 
prévoyance  avait  dès  lors  mis  cette  in- 
stitution à  l'abri  des  difficultés  et   des 
dangers  qui  eussent  résulté  de  la  cessation 
des  secours  ,  à  l'époque  oîi  la  révolution 
frappa  dans  leur  fortune  ou  dans  leur  per- 
sonne presque  toutes  les  dames  associées  à 
cette  œuvre.  La  Cliarilé  înaternelle,  dont 
le  nom  même ,  si  l'on  considère  l'époque 
oîi  il  fut  choisi ,  témoigne  en  faveur  de 
l'esprit  religieux  et  sage  de  sa  fondatrice , 
fut  protégée  par  tous  les  gouvernemens 
qui  se  sont  succédé  ;  elle  survécut  à  la  ré- 
publique, fut  pompeusement    adoptée 
par  l'empire,   et  sous  nos  rois  elle  a  re- 
trouvé près  du  trône  la  protection  que 
lui  avait  autrefois  accordée  Marie-Antoi- 
nette. Cette  reine  avait  accepté  le  titre 
de  fondatrice  delà  Charité  maternelle  ,  à 
une  époque  bien  rapprochée  de  celle  de 
ses  malheurs.  Moïse,  sauvé  des  eaux  par 
une  priiicessç.  çt  rendu  à  sa  mère  pour 


FOU 

qu*elle  V allaitât,  avait  été  le  sujet  ingé- 
nieux du  premier  timbre  adopté  par  la 
société.  Rien  n'avait  été  négligé  pour 
faire  reconnaître  au  peuple  trompé  tout 
ce  qu'il  devait  à  la  charité  de  la  souve- 
raine contre  laquelle  on  l'animait  sans 
cesse.  Les  soins  que  prenait  madame 
Fougeret  à  cet  égard  lui  procurèrent  plu- 
sieurs fois  l'honneur  d'être  admise  chez 
la  reine  ;  elle  entendit  ses  plaintes,  elle 
vit  couler  ses  larmes ,  et  baigna  des 
siennes  les  mains  de  celte  princesse  in- 
fortunée, sans  avoir  d'autre  secours  à  lui 
ofifrir  que  son  dévouement  et  ses  impuis- 
sans  efforts.  Traînée  à  son  tour  dans  les 
prisons  avec  ses  enfans,  madame  Fouge- 
ret eut ,  après  trente  années  de  la  plus 
parfaite  union ,  la  douleur  de  voir  périr 
surl'échafaud  un  époux  qui  s'était  associé 
à  toutes  ses  bonnes  œuvres.  Unique  sou- 
tien de  sa  famille  ,  elle  lutta  constamment 
pour  elle  contre  la  spoliation;  et  l'énergie 
de  ses  plaintes  étonna  quelquefois  ceux 
qui  en  étaient  les  auteurs.  Retirée  à  la 
campagne  au  milieu  de  sa  famille  ,  ma- 
dame Fougeret  ne  cessa  point  de  faire  le 
bien  ou  d'en  donner  l'exemple  ;  elle 
mourut  le  13  novembre  1813.  Combien 
dans  une  biographie  rencontre-t-on  de 
personnages  qui  ne  doivent  leur  illustra- 
tion qu'à  la  bienfaisance  chrétienne  ? 

"  FOUGEROUX  (  Augusle-Denis  ), 
membre  de  l'académie  des  Sciences,  né  à 
Paris  le  JO  octobre  17  32  ,  et  mort  le  28 
décembre  1789,  était  neveu  du  célèbre 
Duhamel  ,  et  n'eut  d'autre  ambition  que 
de  l'imiter.  Comme  lui,  il  parcourut 
toutes  les  sciences ,  pour  chercher  dans 
chacune  ce  qu'elle  pouvait  offrir  à  l'éco- 
nomie rurale  et  aux  arts,  et  ce  qui  pou- 
vait contribuer  à  les  perfectionner,  il 
parcourut  l'Anjou  et  la  Bretagne  ,  pour 
y  examiner  les  carrières  d'ardoise  et  les 
'travaux  qui  s'y  exécutent.  Il  voyagea  en- 
suite en  Italie.  On  lui  doit  1°  Mémoire 
sur  la  formation  des  as,  1760,  in-8. 
2°  L'Art  de  tirer  des  carrières  V ardoise, 
de  la  fendre  ci  de  la  tailler,  17C2, 
in-fol.  3"  L'Art  de  travailler  les  cuirs 
dorés,  1762,  in-fol.  4°  L'Art  du  tonne- 
lier, in-fol.  b"  Recherches  sur  les  ruines 
d'Jferculanum,  etc . ,  avec  un  traité  sur  la 


1 


fabrication  des  mosaïques ,  tîC9  ,  in-8. 
G°  L'Art  du  coutelier,  1772,  3  vol. 
in-fol.  7°  Observations  faites  sur  les 
côtes  de  Normandie ,  avec  M.  Tillet , 
1773,  in-4.  8°  Beaucoup  de  Mémoires 
dans  le  recueil  del'académie  des  Sciences. 
FOUILLOUX  (  Jacques  du  j ,  gentil- 
homme poitevin  ,  mort  sous  Charles  IX , 
auquel  il  dédia  son  ouvrage  sur  la  chasse, 
Rouen,  1650  ou  1C56,  Paris,  1063  ,  et 
Poitiers,  iGGl,  in-i.  Cet  ouvrage ,  re- 
marquable par  sa  naïveté  et  le  ton  de  vé- 
rité qui  y  l'ègne,  est  souvent  cité  par 
BuiTon  et  Daubenton.  Il  a  été  traduit  en 
italien  par  César  Parona.  (  A  la  suite  de 
la  Vénerie  ou  la  Chasse ,  on  trouve  un 
petit  poème  intitulé  V Adolescence  de 
Jacques  de  Fouilloux,  et  qui  n'est  re- 
marquable que  par  la  belle  simplicité  du 
stiie.) 

FOUILLOUX  (  Jacques  ) ,  licencié  de 
Sorbonne  ,  né  à  La  Rochelle  ,  et  mort  à 
Paris  en  1736,  à  06  ans  ,  se  donna  beau- 
coup de  mouvemens  en  faveur  du  jansé- 
nisme. Il  eut  grande  part  à  la  première 
édition  de  VAction  de  Dieu  sur  les 
créatures ,  in-4  ,  ou  G  vol.  in-1 2  (  Voyez 
Boursier  )  ;  aux  Quatre  Gémissemens 
sur  Port-Royal ,  in-1 2  ,  aux  grands 
Hexaples  ,  1721  ,  7  vol .  in-4  ;  à  V Histoire 
du  Cas  de  conscience ,  1705  ,  en  8  vol. 
in-1 2  ,  et  à  plusieurs  autres  productions 
polémiques ,  qu'il  est  inutile  de  faire 
connaître,  pai'ce  qu'elles  sont  oubliées 
ou  qu'elles  doivent  l'être. 

*  FOULCOIE,  en  latin  Fulcoius, 
poète  français  du  11®  siècle  ,  naquit  à 
Beauvais  vers  l'an  1020.  Il  embrassa  l'é- 
tat ecclésiastique ,  mais  il  ne  reçut  que 
le  sous-diaconat  II  n'était  pas  seulement 
un  poète  distingué  pour  le  siècle  où  il 
vivait ,  mais  il  était  encore  habile  gram- 
mairien et  savant  iurisconsulte  :  cepen- 
dant il  ne  dut  sa  réputation  qu'à  son  ta- 
lent poétique.  Il  adressait  ses  vers  aux 
personnages  les  plus  remarquables  ;  à 
Manassé ,  "^vchevêque  de  Reims ,  aux 
papes  Alexandre  II ,  Grégoire  VU  ,  et  aux 
principaux  prélats  de  la  cour  de  Rome. 
Mais  de  toutes  les  personnes  qu'il  loua, 
Manassé  fut  celui  qui  se  montra  le  plus 
reconnaissant  ;  FouJcoie  trouva  toujours 
V. 


FÔtî 


409 


en  lui  Un  protecteur.  Ce  poète  mourut 
à  Meaux,  en  1083.  Ses  poésies,  conser- 
vées à  la  bibliothèque  du  roi ,  sont  di- 
visées en  trois  tomes,  dont  le  premier 
est  intitulé:  Z/fri/zn  ;  le  second,  Neu- 
trum  ;  et  le  troisième,  Utrumque.  L'au- 
teur anonyme  d'une  préface  qu'on  trouve 
dans  l'exemplaire  de  la  bibliothèque  ex- 
plique ainsi  ces  titres  singuliers  :  le  pre 
mier  est  intitulé  Utrum  ,  parce  qu'il  ne 
contient  que  des  pièces  de  peu  d'étendue; 
le  second ,  Neulrum ,  parce  que  l'auteur 
y  a  rassemblé  des  ouvrages  plus  impor- 
tans  que  ceux  du  premier,  mais  infé- 
rieurs à  ceux  du  troisième.  Ce  sont  des 
vies  des  saintsdu  diocèse  de  Meaux,  mises 
en  vers.  Le  troisième  enfin  est  intitulé 
Utrumque ,  parce  que  Foulcoie  y  traite 
de  l'un  et  l'autre  Testamensdnns  un  long- 
poème.  On  sent  que  la  versification  de 
Foulcoie  ,  à  cause  du  temps  où  il  écrivait, 
doit  être  très  négligée.  On  ne  trouve 
dans  ses  poésies  aucune  trace  de  goût  ni 
de  règle  ;  et  s'il  a  été  regardé  de  son 
temps  comme  un  poète  célèbre,  on  ne 
doit  l'attribuer  sans  doute  qu'à  l'igno- 
rance de  son  siècle. 

FOULLON  (  Jean-Erard  ),  jésuite ,  né 
à  Liège  eu  1008  d'une  famille  noble, 
prêcha  avec  applaudissement  pendant 
30  ans  ,  et  mourut  recteur  du  collège  de 
Tournay  le  25  octobre  1668.11  fut  la 
victime  de  sa  charité,  en  servant  les 
pestiférés.  L'Ecriture  sainte ,  la  morale 
chrétienne  et  l'histoire  de  son  pays  fu- 
rent les  principaux  objets  de  ses  études. 
Nous  avons  de  lui  :  1"  Commcntarii  liis- 
toriciet  morales  inlibros  Machahœorum, 
Liège,  1659-1665,  2  vol.  in-fol.,  es- 
timés. 2°  Ver  a  Ecclesia ,  omnium  infide 
errorum  commune  remedium ,  Liège , 
1662.  3"  Historiée  Leodiensis  compen- 
dium ,  Liège,  1655,  très  exact.  4"  His- 
toria  Leodiensis,  Liège,  1735,  3  vol. 
in-fol.  Les  deux  premiers  volumes  sont 
du  Père  Foullon  ;  le  troisième  a  pour 
auteurs  MM.  de  Crassier  et  de  Louvrex, 
éditeurs  de  cet  ouvrage.  Le  Père  Foul- 
lon l'a  poussée  jusqu'en  1612  ,  et  les  con- 
tinuateurs jusqu'au  prince  de  Berghes. 
C'est  la  meilleure  Histoire  que  nous 
ayons  de  la  principauté  de  Liège. 
26.. 


4io  f'ôtf 

FOULON  ou  Gnaphkk  (Pierre  Je), 
né  à  Cormette  ,  chassé  de  son  monastère 
pour  son  penchant  à  l'eutychianisme, 
gagna  les  bonnes  grâces  de  Zenon ,  gendre 
de  l'empereur  Léon,  et  obtint  par  son 
crédit  le  siège  d'Antioche.  Il  répandit 
toutes  sortes  d'erreurs ,  se  maintint  sur 
son  siège  malgré  plusieurs  sentences  de 
déposition  ,  et  mourut  en  488. 

FOULON  (Guillaume),  Gnaphœus 
(  c'est  son  nom  en  grec  )  ,  poète  latin ,  né 
à  la  Haie,  mourut  en  1568  ,  à  ^'orden 
en  Frise,  âgé  de  7  5  ans.  Il  fit  d'assez 
plates  comédies  ;  mais  comme  elles  ne 
sont  pas  communes,  quelques  curieux 
les  recherchent.  On  a  de  lui  :  Vita  Joan- 
nis  Pistorii  a  Wocrden,  Leyde,  1649, 
in-8  ;  Hypocrisis ,  tragi-comédie  ,  1544, 
in-8;  Misobarbarus,  comédie.  Acolastus 
de  Filio  Prodigo  ,  comédie  ,  1 554  ,  in-8, 
etc.  Il  était  protestant. 

*  FOULON  (  N. . .),  l'une  dès  premières 
victimes  de  la  révolution ,  naquit  d'une 
famille  bourgeoise ,  vers  1730,  sous  le 
ministère  de  M.  de  Choiseul.  Il  entra 
dans  l'administration  ,  et  fut  successive- 
ment commissaire  des  guerres ,  intendant 
de  l'armée  pendant  les  campagnes  de 
1 7  56 ,  et  conseiller  d'état.  Il  était  parvenu 
à  ce  haut  rang ,  lorsque  IVecker  se  retira 
le  12  juillet  1789  ;  alors  il  fut  nommé  à 
sa  place  contrôleur-général  des  finances  ; 
mais  il  ne  put  pas  être  installé  dans  ses 
fonctions ,  la  révolution  du  1 4  juillet 
l'ayant  empêché  d'en  prendre  possession. 
Plusieurs  fois  la  cour  avait  déjà  pensé  à 
lui  donner  cet  emploi  important ,  car  elle 
était  sûre  de  sa  fidélité  :  mais  il  avait  en 
finances  des  idées  si  singulières  qu'on 
craignait  de  lui  confier  le  trésor  public. 
Il  avait  émis  ce  principe  que  nous  ne  sau- 
rions caractériser  :  c'est  qu'alors  pour 
rttablir  le  crédit  public  il  fallait  faire 
banqueroute.  Cette  opinion  avait  été  di- 
vulguée :  elle  avait  indisposé  contre  lui 
tous  les  créanciers  de  l'état  ;  et  ceux  qui 
attendaient  leur  fortune  d'un  bouleverse- 
ment ,  tous  les  agitateurs ,  tous  les  révo- 
lutionnaires (  le  nombre  en  était  donsi- 
dérab!e),augmentaientencore  les  craintes 
en  commentant  ce  système,  et  déversaient 
sur  son  auteur  toutes  les  haines  publi- 


t'ÔtJ 

^ues  :  on  lui  prêta  même  d'autres  prôpôâ 
qui  devaient  encore  aigrir  davantage  les 
esprits.  Ainsi  on  disait  qu'un  jour  quel- 
qu'un lui  parlant  de  la  misère  du  peuple, 
dans  ce  temps  où  la  disette  se  faisait  sen- 
tir et  oîi  le  blé  était  devenu  très  cher ,  il 
s'écria  avec  dédain  ;  hé  bien!  si  cette 
canaille  rHa  pas  de  pain,  elle  mangera  du 
foin.  Foulon  s'aperçut  bientôt  qu'il  était 
l'objet  de  l'animadversion  des  novateurs, 
et  que ,  s'il  n'y  prenait  garde ,  il  tombe- 
rait sous  leurs  coups  :  en  conséquence 
il  fit  répandre  le  bruit  de  sa  mort 
pour  échapper  aux  recherches  de  leur 
haine  ;  il  se  retira  au  château  de  Viry 
à  quelques  lieues  de  Paris.  Mais  les 
paysans  de  cet  endroit  le  trahirent,  l'ar- 
rêtèrent, l'insultèrent  de  mille  façons: 
en  guise  de  bouquet  que  l'on  portait  à  la 
campagne  les  jours  de  fêtes,  ils  attachèrent 
une  poignée  d'orties  à  sa  boutonnière,  et 
derrière  son  dos  ils  placèrent  une  botte 
de  foin  ,  pour  lui  rappeler  de  la  manière 
la  plus  injurieuse  le  motqu'on  lui  prêtait  : 
et  c'est  dans  cet  état  qu'ils  le  livrèrent 
aux  émissaires  de  Paris  qui  le  conduisirent 
à  l'Hôtél-de-Ville ,  après  lui  avoir  fait 
subir  tontes  sortes  de  tourmcns  pendant 
la  route.  Pour  lui  éviter  de  nouvelles  in- 
sultes ou  même  la  mort  dont  le  menaçait 
la  populace,  M.  de  Lafayette  ordonna 
qu'on  le  conduisît  en  prison ,  et  promit 
qu'ensuite  on  ferait  son  procès.  La  mul- 
titude fut  d'abord  satisfaite  ;  mais  reve- 
nant ensuite  à  des  idées  de  cruauté  que 
la  pensée  de  la  justice  lui  avait  fait  un 
instant  abandonner ,  elle  s'écria  :  qu'on 
nous  le  livre ,  et  nous  en  ferons  justice 
nous-mêmes.  A  peine  Foulon  arrivait-il 
sur  l'escalier  de  l'Hôtel-de- Ville  que  l'on 
se  jette  sur  lui ,  et  qu'on  l'entraîne  sous 
une  lanterne  à  laquelle  on  Vaccroche 
aussitôt.  C'était  le  22  juillet  1789.  Cette 
première  victime  de  la  révolution  expira 
bientôt.  Sa  tête  fut  séparée  du  tronc  ,  et 
tandis  que  les  uns ,  la  portant  au  bout 
d'une  pique,  après  lui  avoir  mis  un  bâillon 
et  lui  avoir  rempli  la  i)ouche  de  foin  ,  si 
rendirent  ainsi  au  Palais-Royal ,  lesautre;i 
traînaient  dans  la  boue  des  rues  le  ca- 
davre du  malheureux  Foulon.  Il  avait  75^ 
ans.  Le  même  jour  on  arrêta  son  gendre 


POtl 

M.  Berlhier  de  Sauvigny  à  Compîègne  ; 
la  voiture  qui  le  conduisait  fut  rencon- 
trée par  ces  cannibales  dans  la  rue  Saint- 
Denis  :  depuis  ce  moment  jusqu'à  son 
arrivée  sur  la  place  de  Grève ,  on  lui  fit 
subir  toute  sorte  d'injures;  on  lui  présenta 
même  à  plusieurs  reprises  la  tête  de  Fou- 
lon. Quelques  circonstances  louchant  l'ar- 
restation et  les  souffrances  de  Foulon  et 
de  Berthier  ne  permettent  pas  de  douter 
que  ces  meurtres  n'aient  été  préparés  d'a- 
vance. 11  faut  lire  dans  les  écrits  du  temps 
l'histoire  de  ces  horribles  journées. 

•FOULOûi  (Nicolas),  bénédictin  de 
la  congrégation  de  St.-Maur ,  naquit  à 
Maxilly-sur-Saône  le  4  mars  1742.  Parti- 
san du  jansénisme ,  il  ne  s'arrêta  point 
dans  ses  erreurs  ;  il  adopta  encore  celles 
des  convulsionnaires.  Il  était  parent  de 
don  Clément ,  savant  bénédictin  ,  né  à 
Bèze,  près  de  Maxilly.  Il  est  probable 
que  c'est  cette  parenté  qui  l'attira  dans  la 
maison  des  Blancs-Manteaux  à  Paris  où  le 
jansénisme  continuait  à  dominer.  Foulon 
se  lia  aussi  avec  le  Père  Lambert ,  domi- 
nicain livre  aux  mêmes  erreurs ,  avec 
Bonjour  curé  de  Fareins,  si  connu  par  ses 
scènes  scandaleuses  de  crucifiement ,  et 
avec  tous  les  chefs  de  ce  parti.  On  s'oc- 
cupait beaucoup  alors  parmi  eux  de  la 
venue  d^Elie  ,  de  la  prochaine  conver- 
sion des  juifs  et  du  renouvellement  dont 
T Eglise  avait  besoin.  Jeune  et  ardent, 
Foulon  adopta  toutes  ces  rêveries ,  et  ne 
tarda  pas  à  faire  paraître  une  vie  de  St.- 
Jtobert ,  abbe' de  Malesme ,  avec  un  of- 
fice propre  ,  Troyes,  17  76,  in-8 ,  et,  peu 
de  temps  après,  un  autre  livre  dans  le 
même  genre  avec  ce  titre  :  Prières  par- 
ticulières en  forme  d^ office  eccle'siastique 
^  pour  demander  à  Dieu  la  conversion  des 
Juifs  et  le  renouvellement  de  l'Eglise  , 
Orléans,  1778,  in-12  :  dans  ces  deux 
ouvrages  et  surtout  dans  le  dernier ,  on 
rencontre  les  idées  favorites  des  appelans, 
et  l'ofiSce  est  fait  dans  le  même  sens  ;  car 
il  reproduit  sous  mille  formes  différentes 
la  vieillesse  de  V église ,  Ui  défection  des 
pasteurs,  V apostasie  générale.  Chargé 
de  rédiger  le  nouveau  bréviaire  de  sa 
congrégation  ,  il  prépara  ,  de  concert 
fLyec  quelques-uns  de  ses  confrères ,  l'é- 


FOU  4ii 

dltîon  qui  fut  publiée  en  1787  en  4  vo- 
lumes ;  elle  ne  reçut  pas  l'approbation 
du  général  des  Bénédictins,  et  ne  fut 
point  adoptée.  L'éditeur  n'avait  pas  jugé 
convenable  d'y  placer  les  saints  sortis 
de  l'ordre  des  jésuites.  On  y   trouvait 
de  nouvelles  litanies  de  N.  S.  et  de  la 
sainte  Vierge  ;  l'éloge  de  quelques  jan- 
sénistes et  en  particulier  de  Rondet  y 
avait  été  placé ,  ainsi  qu'un  tableau  de 
la  religion  dans  lequel  il  était  facile  de 
saisir  les  idées  et  le  langage  de  la  secte. 
Foulon  eut  dans  le  principe  une  grande 
rigidité  de  conduite  ;  il  blâmait  amère- 
ment le  moindre  relâchement  dans  les 
habitudes  monacales  :  on  dut  être  fort 
surpris  lorsqu'on  le  vit  oublier  lui-même 
par  une  conduite  légère  qu'il  apparte- 
nait à  un  ordre  religieux.  Ses  sorties  fré- 
quentes al  laient  déterminer  ses  supérieurs 
à  le  faire  passer  dans  une  autre  maison , 
lorsqu'il  s'évada.  Il  s'était  retiré  à  Mont- 
morenci  chez  son  ami  le  Père  Cotte ,  an- 
cien oratorien  et  curé  intrus  de  ce  lieu. 
Peu  de  temps  après  il  connut  M""*  Ma- 
rotte  du   Coudray  ,    fille    d'un   ancien 
conseiller  au  Châtelet ,  et  l'une  des  sec- 
taires les  plus  rigides  ;  elle  avait  porté 
l'austérité  du  jansénisme  jusqu'à  prendre 
la  détermination  de  ne  jamais  se  marier. 
Dom  Foulon  la  fit  changer  d'avis  ;  le  Père 
Cotte   avait  épousé  aussi   sa  sœur.  On 
ignore  ce  que  devint  Foulon  pendant  la 
révolution.  Il  obtint  une  place  d'huissier 
au  conseil  des  Cinq-cents,  puis  au  Tribu- 
nat  et  enfin  au  Sénat.  Il  conserva  cette 
dernière  place  jusqu'à  sa  mort  survenue 
le  13  juillet  1813.  Il  a  publié  les  ouvra- 
ges suivans  :  1°  Prières  particulières  en 
forme  d'once   ecclésiastique  pour  de- 
mander à  Dieu  la  conversion  des  Juifs , 
et  le  renouvellement  de  l'Eglise  en  Fran- 
ce ,  1778,   in-12;  2°  Histoire  élémen- 
taire ,  philosophique  et  politique  de  l'an- 
cienne Grèce ,  depuis  l'établissement  des 
colonies  jusqu'à  la  réduction  de  la  Grèce 
en  provinces  romaines,    1801,   2    vol. 
in-8.  Il  avait  annoncé  des  Histoires  ro- 
maines et  de  France  sur  le  même  plan  ; 
M.  Grégoire  dit  qu'il  a  laisse  en  manu- 
scrit un  Traité  fort  étendu  en  faveur  du    , 
mariage  des  prêtres.  VAmi  de  In.  reli- 


4i2  FOU 

gion  et  du  roi  lui  a  consacra  une  notice 
élendue  et  très  intéressante  dans  le  tome 
55,  page  305,  19  avril  1828. 

*  FOULONS  (N....  de),  ancien  pro- 
cureur du  roi  au  présidial  de  Langres , 
avait  rempli  à  la  satisfaction  publique 
les  fonctions  de  subdélégué  de  l'inten- 
dance de  Champagne  et  de  président  du 
conseil  général  du  département  de  la 
Haute-Marne.  Après  avoir,  à  l'exemple 
de  sa  famille  ,  honoré  la  magistrature  et 
l'administi'ation  pendant  plus  de  trente 
années ,  il  s'était  livré  à  la  médecine  pour 
consacrer  son  temps  aux  habitans  de  la 
campagne  qui  trouvaient  gratuitement 
chez  lui  non-seulement  les  remèdes  et 
tous  les  secours  nécessaires  à  leur  santé, 
mais  encore  les  conseils  les  plus  utiles 
pour  leurs  affaires  d'intérêt.  Sa  vie  a  été 
pleine  de  bonnes  œuvres ,  et  tout  le  pays 
le  regardait  comme  une  seconde  provi- 
dence. Il  est  mort  dans  le  mois  de  juin 
1827  ,  dans  sa  terre  de  Barges,  près  de 
Bourbonne-les-Bains. 

FOULQUES  I,  comte  d'Anjou ,  dit  le 
Roux ,  mort  en  938  ,  réunit  et  gouverna 
avec  prudence  toutes  les  terces  de  son 
comté. 

FOULQUES  II,  dit  le  Bon  ,  fils  du 
précédent,  mort  à  Tours  en  958,  fit  dé- 
fricher et  cultiver  avec  soin  les  terres  du 
comté  d'Anjou.  Il  s'appliqua  à  faire 
fleurir  la  piété  et  les  sciences  dans  ses 
états.  On  dit  que  le  roi  Louis  d'Outre- 
mer ,  s'étant  moqué  de  ce  que  Foulques 
le  Bon  s'appliquait  à  l'étude  et  allait  sou- 
vent chanter  au  chœur ,  Foulques  lui 
écrivit  ces  mots  :  Sachez ,  Sire ,  qu'un 
prince  sans  lettres  est  un  âne  couronne'. 
(  Foulques  a  laissé  plusieurs  Hymnes  en 
l'honneur  de  saint  Martin.  ) 

FOULQUES  III ,  comte  d'Anjou,  dit 
Nerra  ou  le  Jérosolymitain ,  à  cause  de 
deux  voyages  qu'il  fit  à  la  Terre-Sainte  , 
succéda,  l'an  987  ,  à  Geoffroi  son  père. 
Ce  prince  belliqueux ,  prudent  et  rusé  , 
remporta  divers  avantages  sur  ses  voi- 
sins, et  mourut  à  Metz  le  23  juin  1040. 

FOULQUES  IV ,  dit  le  Rèchin ,  fils 
du  seigneur  de  Châteaulandon ,  et  d'une 
fille  de  Foulques  III  (  article  précédent) , 
succéda  l'an  lOGO  à  son  oncle  maternel 


FOU 

Geoilfroi  Martel.  Il  s'empara  du  Gàtinois 
et  de  la  Tourraine ,  qui  étaient  le  partage 
de  son  frère  aîné ,  et  s'abandonna  au  vin 
et  aux  femmes.  Il  en  épousa  trois  consé- 
cutivement ,  en  les  répudiant  l'une  après 
l'autre.  Mais  enfin  la  dernière,  Bertrade 
de  Montford,  le  quitta  pour  Philippe  I, 
roi  de  France.  Ses  discussions  violentes 
avec  Raoul  archevêque  de  Tours  le  firent 
excommunier  :  mais  plus  lard  il  rentra 
en  grâce  avec  l'Eglise.  Il  mourut  en  1 109. 
Il  avait  composé  une  Histoire  des  comtes 
d'Anjou  ,  dont  il  se  trouve  dans  le  Spi- 
cile'ge  de  d'Achery  un  fragment ,  que 
l'abbé  de  Marolles  a  traduit  dans  son 
Histoire  d'Anjou,  1C81  ,  in- 4. 

FOULQUES ,  archevêque  de  Reims , 
succéda  à  Hincmar  en  883 ,  tint  un  con- 
cile en  892,  où  il  fit  reconnaître  roi 
Charles  le  Simple,  âgé  de  quatorze  ans. 
On  y  menaça  d'excommunication  Bau- 
douin ,  comte  de  Flandre ,  pour  les  usur- 
pations des  biens  d'église ,  et  pour  avoir 
maltraité  des  ministres  de  l'autel.  Le  roi 
Charles  ayant  voulu  dans  la  suite  faire 
alliance  avec  les  Normands  encore  ido- 
lâtres ,  Foulques  lui  fit  des  remontrances , 
qui  paraissent  n'être  pas  assez  modérées. 
Quelques  critiques  l'excusent,  en  disant 
qu'il  avait  sauvé  son  prince  encore  en- 
fant ,  des  mains  de  ses  ennemis  ;  qu'il 
l'avait  élevé  et  lui  avait  conservé  la  cou- 
ronne, et  que  quoique  ces  services  ne  le 
dispensassent  ni  de  la  fidélité  ,  ni  du  res- 
pect qu'il  lui  devait ,  ils  pouvaient  ce- 
pendant faire  tolérer  de  sa  part  certaines 
expressions  trop  libres,  dictées  par  le 
zèle.  Il  fut  assassiné  par  des  vassaux  de 
Baudouin  en  900.  Ce  prélat  était  recom- 
mandable  par  ses  connaissances  et  par 
ses  vertus. 

FOULQUES,  FoUQUKs,  ou  Foulquet, 
évêque  de  Toulouse,  natif  de  Marseille  , 
s'acquit  une  grande  réputation ,  et  se  fit 
aimer  des  princes  par  ses  poésies  ingé- 
nieuses en  langue  provençale.  Il  parut 
avec  éclat  au  4*  concile  de  Latran  en, 
1215,  et  s'y  intéressa  pour  saint  Do- 
minique, son  intime  ami.  Il  mourut  en, 
1231. 

FOUTAINE  (Sir  Andrew) ,  savant  an- 
tiquaire, dont  nous  avons  un  Traite' eu.- 


I 


FOtl 

rieiu  sur  leé  médailles  de  Saxe.  On  l'a 
placé  dans  le  Trc'sor  des  antiquités  du 
Nord,  imprimé  en  latin  à  Londres  en  3 
vol.  in-fol.  (Il  mourut  le  4  septembre 
1753,  après  avoir  été  vice-chambellan  de 
la  reine  d'Anfjleterre ,  gouverneur  du 
prince  Guillaume,  chevalier  du  bain  et 
conservateur  de  la  monnaie.) 

*  FOUQUART  (  Gabrielle  )  ,  née  à 
Abbevillc  en  15C8,  est  la  fondatrice  en 
France  des  religieuses  de  Saint-François- 
de-Paide.  Elle  avait  eu  depuis  sa  plus 
tendre  jeunesse  un  goût  décide  pour  la 
vie  religieuse  ;  mais  son  père  étant  mort, 
elle  se  trouva  soiis  la  dépendance  d'un 
oncle  qui  la  força  de  se  marier  à  l'âge  de 
26  ans.  Restée  veuve  après  deux  ans  de 
mariage ,  et  maîtresse  de  son  sort ,  elle 
revint  à  sou  premier  dessein.  Après  avoir 
donné  quelques  années  à  la  réflexion, 
elle  prit  l'habit  de  Saint-François-de- 
Paule  et  prononça  ses  vœux  à  l'âge  de  33 
ans.  Ayant  alors  réuni  quelques  dames 
séculières ,  qui  voulaient  suivre  son 
exemple,  elle  fonda  à  Abbeville  un  mo- 
nastère ,  sous  le  titre  de  Jésus-Maria , 
et  ce  fut  la  première  maison  de  cet  ordre 
en  France.  Le  pape  Grégoire  XV  autorisa 
cette  fondation  par  une  bulle  du  10  juin 
1623  ,  et  la  mère  Fouquart  en  fut  la  pre- 
mière supérieure  ou  correctrice.  Celte 
vertueuse  fondatrice  mourut  en  1639. 

*  FOUQUERET ,  ou  Foqueré  (  Dom 
Antoine-Michel) ,  né  en  1640  à  Château- 
roux  en  Berri ,  embrassa  l'ordre  de  Saint- 
Benoit  à  l'âge  de  1 7  ans ,  et  prononça  ses 
vœux  Je  3  octobre  1658,  dans  l'abbaye 
de  Saint-Augustin  de  Limoges.  Après 
avoir  enseigne  la  rhétorique  et  le  grec 
dans  le  monastère  de  Mauriac  en  Au- 
vergne ,  il  fut  employé  en  qualité  de  su- 
périeur dans  différentes  maisons  de  son 
ordre ,  et  s'acquitta  de  ses  fonctions  avec 
autant  de  zèle  que  de  sagesse.  Ayant  ob- 
tenu sa  retraite  eu  1693,  il  choisit  pour 
demeure  l'abbaye  de  Saint-Faron  dans  la 
ville  de  Meaux ,  et  y  mourut  le  3  novem- 
bre 1709,  âgé  de  69  ans.  Il  était  de  la 
congrégation  de  Saint-Maur.  On  connaît 
de  lui  :  1"  Synodus  bethlecmetica  pro 
reali  prœsentia  anno  1672  celebrata , 
grœce  et  latine  ,  Paris,  1676  ,  in- 8.  Cette 


FOU  4i3 

_ traduction  n'ayant  pas  paru  assez  exacte, 
Fouqueret  en  donna  une  seconde  édition , 
et  fit  disparaître  ce  qu'il  y  avait  de  dé- 
fectueux dans  la  première.  Il  se  servit 
pour  ce  travail  des  lumières  du  docteur 
Arnault  et  du  Père  Combefis.  Cette  se- 
conde édition  parut  sous  le  titre  de 
Synodus  hierosolymitana.  A  la  fin  de 
cet  ouvrage  ,  Fouqueret  a  fait  imprimer 
en  grec  et  en  latin ,  un  écrit  intitulé  : 
Dyonisii  patriarchœ  constantinopoli- 
tani  super  calvinistarum  erroribus , 
ac  reali  imprimis  prœsentia  ,  responsio , 
anno  1672  édita.  Ces  actes ,  dont  l'au- 
thenticité est  attestée  par'M.  de  Nointel, 
ambassadeur  de  France  à  la  Porte 
ottomane  ,  sont  très  importans  ,  en  ce 
qu'ils  prouvent  la  conformité  de  la 
croyance  de  l'église  grecque  avec  celle 
de  l'église  romaine  sur  le  dogme  de  la 
présence  réelle.  2"  Celebris  historia  mo- 
nothelitarum ,  Paris,  1678,  in-8.  Cet 
ouvrage ,  dédié  à  l'évêque  de  Lavano ,  et 
qui  passe  pour  savant  et  profond,  parut 
sous  le  nom  emprunté  de  Jean-Baptiste 
Tagnamini. 

*  FOUQUET  (Jean-François  ) ,  jésuite 
français  et  missionnaire  à  la  Chine ,  arriva 
dans  ce  pays  le  25  juillet  1699  ,  et  y  de- 
meura jusqu'en  1720.  Les  succès  qu'il 
obtint  dans  sa  mission  ,  lui  valurent  à 
son  retour  le  titre  d'évêque  d'Eleuthéro- 
polis.  Pendant  son  séjour  en  Chine,  il 
étudia  long-temps  le  chou-king,  et  il  fut, 
de  tousses  confrères ,  celui  qui  se  laissa 
le  plus  éblouir  par  l'idée  de  retrouver 
les  mystères  du  christianisme  renfermés 
dans  les  caractères  symboliques  des 
Chinois.  Il  prétend  que  leurs  livres  sacrés 
offrent  une  perpétuelle  allégorie  avec  les 
objets  de  notre  foi.  Malgré  cet  esprit  sys- 
tématique ,  on  ne  peut  lui  refuser  beau7 
coup  de  mérite  et  de  savoir.  Ou  lui  doit 
Tabula  chronologica  historiœ  sinicœ. 
C'est  un  tableau  en  trois  feuilles  où  sont 
placés  ,  suivant  l'ordre  chronologique, 
les  noms  des  princes  chinois  et  les  événe- 
mcns  les  plus  remarquables  de  leur 
règne.  Ce  tableau  a  été  réimprimé  à  Augs- 
bourg,  en  1746  ,  en  deux  feuilles  in-fol. 
Ce  qui  en  fait  le  principal  mérite  ,  c'est 
l'explication  des  nianhao ,  ou  noms  d'an- 


^^ 


4i4  Pov 

nées,  si  nécessaires  pour  la  lecture  des 
historiens  chinois.  On  a  encore  de  Fou- 
quet  une  lettre  au  duc  de  La  Force ,  in- 
sérée dans  les  lettres  édifiantes  ,  oii  il  rend 
compte  des  difficultés  que  les  jésuites 
éprouvèrent  quand  ils  voulurent  s'établir 
dans  la  province  de  Kiamsi ,  et  de  la 
manière  dont  les  Chinois  forment  leurs 
guerriers.  Il  s'étend  particulièrement  sur 
les  Bonzes,  principaux  adversaires  des 
missionnaires.  (On  a  aussi  de  lui  une 
lettre  au  duc  de  la  Force ,  datée  de  Naht- 
chang-fou ,  dans  la  province  de  Kiamsi 
le  26  novembre  1702  ;  elle  se  trouve  dans 
le  Recueil  des  lettres  édifiantes ,  tome  5 
de  la  1  "  édition ,  page  1 2 9  et  tome  1 7  de 
l'édition  de  1781,  page  95.  ) 

*FOUQUET  (Henri),  célèbre  pro- 
fesseur de  médecine ,  né  en  1727  i>  Jlont- 
pellier ,  fut  le  premier  qui  enseigna  dans 
cette  ville  la  médecine  clinique  :  il  eut 
aussi  la  gloire  de  perfectionner  un  mode 
d'enseignement  déjà  adopté  dans  les 
plus  célèbres  universités  étrangères.  Il 
est  mort  le  10  octobre  1806.  On  lui  doit 
plusieurs  dissertations  savantes  ;  la  plus 
remarquable  est  une  Dissertation  sur  le 
tissu  muqueux.  On  a  encore  de  lui  un 
Essai  sur  le  pouls  considère' par  rapport 
aux  affections  des  principaux  organes , 
1767,  in-8  ;  un  Discours  sur  la  clinique, 
1803 ,  in-4  ,  et  plusieurs  articles  impor- 
tans  dans  l'Encyclopédie. 

TOUQUIER-TAINVILLE  ou  Thin- 
VILLE  OU  de  Tain  VILLE  (Antoine-Quen- 
tin), l'un  des  révolutionnaires  les  plus 
odieux,  naquit  en  1747  ,  d'un  riche  cul- 
tivateur d'Hérouelles ,  village  près  de 
St.-Quentin.  Lorsqu'il  eut  terminé  ses 
études  dans  cette  dernière  ville,  il  se 
rendit  à  Paris ,  suivit  quelque  temps  le 
barreau  comme  avocat ,  et  acheta  ensuite 
une  charge  de  procureur  au  Châtelet. 
Fouquier  ne  put  vivre  du  produit  de  cet 
emploi  lucratif  :  il  avait  des  habitudes 
vicieuses  qui  le  forçaient  à  des  dépenses 
exorbitantes.  Poursuivi  par  ses  nombreux 
créanciers  ,  il  vendit  sa  place  ;  et  quand 
on  lui  en  eut  payé  la  valeur ,  il  consacra 
la  somme ,  non  à  l'acquittement  de  ses 
dettes ,  mais  à  ses  débauches  ordinaires. 
Cette  banqueroute  frauduleuse  ne  fut  que 


POt 


le  moindre  de  ces  crimes  :  la  révolution 
vint  bientôt  lui  offrir  la  perspective  d'un 
heureux  avenir  ,  et  comme  le  boulever- 
sement des  fortunes  ne  pouvait  que  lui 
présenter  des  chances  favorables  ,  il  fut 
l'un  des  partisans  les  plus  fougueux  des 
idées  nouvelles  proclamées  alors.  En  at  ■ 
tendant  ce  grand  événement,  il  avait 
cherché  à  tirer  parti  de  quelques  talens 
acquis  dans  ses  éludes  ;  il  fit  des  vers 
pour  vivre  ;  il  en  composa  même  en  l'hon- 
neur de  Louis  XVL...  Lorsqu'en  1789  les 
esprits  se  préparèrent  à  la  grande  catastro- 
phe dont  lesouvenir  glace  encore  d'effroi, 
Fouquier  ne  joua  d'abord  qu'un  rôle  su- 
balterne ;  mais  sa  voix  se  fit  peu  à  peu 
entendre  dans  les  clubs,  et  la  haine  qu'il 
ne  déguisait  point  pour  la  famille  royale, 
la  cour,  les  ministres  ,  les  honnêtes  gens 
et  surtout  les  riches,  le  fit  remarquer 
des  chefs  du  parti  qui  virent  en  lui  un 
homme  dont  la  coopération  leur  serait 
utile.  Après  la  journée  du  10  août  1792 
qui  renversa  le  trône ,  Fouquier  cria  plus 
fort  qu'auparavant  ;  car  jusqu'alors  il  - 
avait  été  quelque  peu  retenu  par  la  crain- 
te de  voir  le  gouvernement  royal  vaincre  \ 
les  projets  des  factieux.  Il  ne  tarda  pas  ; 
à  être  employé  au  service  des  Monta- 
gnards qui  cherchaient  partout  des  bour- 
reaux pour  hâter  leur  horrible  projet  d'e- 
puration  ;  car  l'on  sait  que  leur  but  était 
d'abattre  les  têtes  de  tous  ceux  qui  ne 
partageaient  point  leurs  sanguinaires  opi- 
nions. Fouquier  fut  nommé  juré  au  tri- 
bunal révolutionnaire  :  il  avait  parfaite- 
ment entendu  le  mot  d'ordre  ;  et  docile 
à  l'injonction  de  ses  supérieurs,  il  votait 
dans  toutes  les  causes  pour  la  peine  de 
mort.  Ses  maîtres  et  Robespierre  en  par- 
ticulier, ayant  vu  quel  parti  avantageux 
ils  pouvaient  tirer  d'un  tel  homme,  le  ^ 
nommèrent  accusateur  public  près  le 
même  tribunal.  Le  rôle  de  biographe  de- 
vient ici  d'une  difficulté  insurmontable  ; 
c'est  avec  du  sang  qu'est  écrite  l'histoire  m 
d'un  pareil  monstre.  Aucun  accusé  ne  ■ 
sortit  de  son  tribunal  que  pour  aller  à  la 
mort.  On  vit  des  individus  amenés  pour 
d'autres  ;  l'erreur  était  manifeste  :  n'im- 
porte, ils  furent  envoyés  au  supplice. 
La  chose  ne  serait  pas  croyable ,  s'il  n'é- 


fotl 

tait  facile  d'en  citer  plusieurs  exemples  : 
un  nommé  Gamache  fut  amené  devant 
le  tribunal  :  l'huissier  fit  remarquer  qu'il 
y  avait  deux  détenus  de  ce  nom  ,  et  que 
l'atïaire  qu'on  allait  juger,  concernait 
celui  qui  était  alors  en  prison ,  et  non 
celui  que  l'on  avait  sous  les  yeux  :  c'est 
égal,  ditFouquier ,  celui-ci  vaut  autant 
que  l'autre  ;  il  l'envoya  à  l'cchafaud.  Une 
veuve  Maillet,  ayant  été  conduite  devant 
le  tribunal  pour  M"""  la  duchesse  de  Mail- 
lé ,  Fouquier  lui-même  s'aperçut  de  l'er- 
reur dans  l'interrogatoire  :  n'importe , 
dit-il ,  ce  n'est  pas  toi  que  l'on  voulait 
juger,  mais  autant  vaut  aujourd'hui 
que  demain ,  et  ce  fut  une  victime  de 
plus.  Tous  les  matins  on  voyait  an-iver 
devant  le  palais  une  grande  quantité  de 
charretles  pour  conduire  les  condamnés 
à  l'échafaud.  Comme  on  imputait  à  tous 
les  accusés  le  même  crime ,  Fouquier  fit 
imprimer ,  pour  avoir  plus  tôt  fait ,  les 
actes  d'accusation  dans  lesquels   on  se 
bornait  à  ajouter  les  noms.   Ce  n'était 
plus  le  jury  qui  prononçait ,  c'était  Fou- 
quier dont  il  n'était  que  l'écho.  Et  quand 
on  songe  qu'à  un  tel  excès  de  barbarie  se 
joignait  encore  la  plus  atroce  dérision  , 
on  ne  peut  s'empêcher  de  crier  à  l'abo- 
mination. Ainsi  un  malheureux  vieillard, 
qui  avait  eu  la  langue  paralysée ,  ne  pou- 
vant répondre  aux  questions  que  lui  adres- 
sait Fouquier,  un  de  ses  collègues  fit  re- 
marquer  le  défaut   qui   empêchait    cet 
accusé  de  parler  :  ce  n'est  pas  sa  langue 
qu'il  me  faut,  répondit  Fouquier,  c'est 
sa  tête.  On  raconte  encore  qu'un  jour 
Fouquier  envoya  demander  un  officier 
Corse  déjà  très  âgé,  enfermé  dans  la  prison 
du  Luxembourg  :  comme  il  ne  vint  point, 
un  jeune  étourdi   qui   portait  un  nom 
à  peu  près  semblable ,  se  présenta  à  sa 
place  ;   conduit  au  tribunal ,   ce  jeune 
homme  n'en  sortit  que  pour  aller  à  l'é- 
chafaud.   Mesdames  de   Ste. -Amarante  , 
traînées  devant   Fouquier,  osèrent  faire 
preuve  d'une  noble  contenance  et  d'un 
courage  héroïque  ;  Fouquier  en  avait  été 
étonné   lui-même  ;  mais    il   avait   dit  : 
quelle  effronterie',  il  faut  que  j'aille  les 
i'oir  monter  sur  l'e'chafaud,  afin  derrC as- 
surer si  rcellement  elles  conserveront 


leur  caractère  jusqu'à  ta  fin  ;  j'irai, 
dussé-je  me  passer  de  dîner.  Quelquefois 
Fouquier  affectait  un  certain  respect  pour 
les  formes  de  la  justice ,  et  il  faisait  en- 
tendre des  témoins  ;  mais  ces  témoins 
n'étaient  autres  que  des  hommes  gagés , 
connus  dans  les  prisons  sous  le  nom  de 
moutons  ,  et  leurs  dépositions  mensongè- 
res venaient  servir  de  bases  à  ses  sanglan- 
tes condamnations.  On  rapporte  qu'un 
jour  un  de  ces  témoins  que  Fouquier  n'a- 
vait point  encore  vu  ,  et  dont  par  consé- 
quent il  n'était  point  sûr,  demanda  à 
déposer  :  l'accusateur  public  le  regarda 
d'un  air  inquiet  et  osa  lui  dire  :  si  tu  as 
à  déposer  contre  T  accusé,  tu  peux  parler-, 
si  ce  que  tu  veux  dire  est  en  sa  faveur  , 
tu  n'as  pas  la  parole  -.  au  reste,  ajouta- 
t-il ,  à  demi-voix ,  regarde-moi  et  tu 
sauras  ce  que  tu  dois  faire.  Dans  les 
prétendues  conspirations  de  prisons  qui 
ont  fait  périr  tant  d'innocentes  victimes, 
deux  de  ces  faux  témoins  comparaissaient 
comme  complices  :  Fouquier  oublia  de 
donner  aux  juges  le  mot  qui  devait  les 
avertir  du  rôle  que  jouaient  ces  deux 
moutons;  ils  furent  condamnés  à  mort 
avec  les  autres  accusés  :  ces  deux  té- 
moins réclamèrent  aussitôt  auprès  de 
Fouquier  qui  dit  en  jurant  :  c'est  un  ou- 
bli ,  mais  c'est  égal  :  pour  cette  fois  cela 
passera  comme  ça  ;  et  les  deux  mou- 
tons allèrent  à  l'échafaud.  Les  membres 
qui  composaient  cet  atroce  tribunal  se 
réunissaient  toutes  les  semaines  chez 
Lecointre ,  l'un  des  députés  les  plus 
fougueux  de  la  Convention,  et  c'était, 
au  milieu  d'un  repas  .splendide,  qu'ils 
discutaient  leurs  listes  de  proscription. 
Tous  les  matins,  ils  se  réunissaient  dans 
un  café  voisin  de  la  conciergerie  ;  et  tout 
en  déjeunant  ils  plaisantaient  sur  les 
victimes  de  la  veille  et  sur  celles  du  jour. 
Fouquier  était  surtout  jaloux  de  la  gloire 
qu'acquéraient  ses  collègues  par  leurs 
sanglans  exploits  :  j'ai  fait  gagner  cette 
semaine  ,  disait-il ,  tant  de  millions  à  la 
république  :  la  semaine  prochaine ,  je 
lui  en  ferai  gagner  davantage  -.  je  dé- 
culotterai encore  un'  bien  plus  grand 
nombre  de  riches.  Mais  l'une  des  pre- 
mières victimes  de  Fouquier,   la  plus 


4i6  T6V 

auguste  avec  M"""  Elisabeth,  fut  l'infor- 
tunée Marie- Antoinette  :  jamais  accusé 
ne  fut  l'objet  d'un  acharnement  plus 
odieux  :  jamais  monstre  ne  fit  paraître 
autant  d'atrocité  :  il  fallait  un  sang- 
royal  pour  abreuver  ce  tigre.  Ce  fut  lui 
qui  rédigea  l'acte  d'accusation  de  cette 
princesse  :  donnant  carrière  à  ses  idées 
extravagantes ,  et  voulant  sans  doute 
chercher  dans  un  horrible  scandale  une 
immortalité  qui  ne  pouvait  que  le  cou- 
vrir de  honte ,  il  accumula  sur  le  compte 
de  la  reine  toutes  les  infamies ,  toutes 
les  horreurs ,  toutes  les  absurdités ,  enfin 
tout  ce  que  l'on  peut  imaginer  de  plus 
révoltant  en  politique  et  en  morale  ;  il 
en  fit  une  Je'sabel ,  une  Messaline  ,  une 
Fvédcgonde.  La  reine  pleine  de  courage 
chercha  d'abord  à  se  justifier;  elle  re- 
poussa avec  Une  noble  indignation  les 
attaques  de  son  lâche  accusateur  ;  mais 
lorsqu'elle  en  vint  à  celte  partie  de  l'ac- 
cusation dans  laquelle  on  lui  reprochait 
d'avoir  outrage  la  nature  en  corrompant 
le  prince  royal,  elle  se  tourna  du  côté 
de  l'auditoire ,  et ,  d'un  ton  pénétré,  elle 
fit  entendre  ces  simples  et  sublimes  pa- 
roles :  Teii  appelle  à  toutes  les  mères'.... 
(  Voyez  Marie-Antoinette.  )  On  sait  que 
Fouquier  parvint  à  obtenir  sa  tête.  A 
peine  cette  œuvre  de  scélératesse  était- 
elle  consommée ,  qu'il  fut  chargé  de 
suivre  le  procès  des  22  Girondins  que 
la  Convention ,  subjuguée  par  les  Mon- 
tagnards, envoyait  au  tribunal  révolu- 
tionnaire. Jamais  il  ne  fit  preuve  d'aussi 
peu  de  talens  oratoires  ;  il  représenta  les 
accusés  comme  royalistes  ,  quoique  par- 
mi eux  il  y  en  eût  f(ui  eussent  voté  la 
mort  du  roi  ;  et ,  par  une  contradiction 
encore  plus  choquante ,  il  leur  reprocha 
d'être  fédéralistes ,  c'est-à-dire ,  de  ten- 
dre à  établir  une  république  semblable 
à  celle  des  Etats-Unis  d'Amérique.  Parmi 
ces  Girondins ,  il  y  en  avait  quelques- 
uns  qui  étaient  doués  de  beaucoup  d'élo- 
quence ,  et  qui  repoussèrent  avec  succès 
l'accusation  intentée  contre  eux ,  et  ils 
produisirent  un  effet  si  grand  que ,  pour 
la  première  fois ,  les  juges  du  tribunal 
révolutionnaire  hésitèrent,  incerlainss'ils 
condamneraient  ou  absoudraient  ;  Fou- 


fôû 

quiér  consulta  la  Convention  qui ,  silr  k 
motion  de  Billaud-Varennes ,  décida  que 
le  tribunal  devait  juger  les  Girondins 
révolutionnairement  ;  ils  furent  jugés  re- 
volutiontiairement ,  c'est-à-dire  qu'ils  al- 
lèrent à  l'échafaud.  C'est  de  cette  époque 
que  date  le  f/ouveriicment  révolution- 
naire qui  répandit  tant  de  sang ,  et  dont 
Fouquier  fut  l'un  des  agens  les  plus  ac- 
tifs. Toutes  les  opinions  purent  compter 
leurs  victimes:  royalistes,  constitution- 
nels de  1791  ,  fédératifs,  modérés,  Gi- 
rondins, Montagnards,  etc.,  ont  été  re- 
présentés successivement  sur  l'échafaud 
comme  ils  l'avaient  été  dans  les  assemblées 
législatives  :  ces  jugemens ,  ou  ces  bou- 
cheries, durèrent  jusqu'à  la  chute  de  Ro- 
bespierre (  9  thermidor,  27  juillet  1794). 
En  apprenant  la  ruine  de  son  bienfaiteur, 
Fouquier  dit  :  nul  changement  pour 
nous  ,  car  il  faut  que  la  justice  ait  son 
cours  ;  et  en  même  temps  il  envoya  au 
supplice  42  personnes  dont  plusieurs 
étaient  des  habitans  recommandables  de 
Paris.  Il  fut  chargé  après  l'arrestation  de 
Robespierre  de  constater  en  jtersonne 
l'identité  et  de  requérir  la  condamnation 
de  son  protecteur,  ainsi  quecelle  des  juges 
du  tribunal  révolutionnaire  qui  étaient  ses 
créatures ,  de  ses  amis  et  de  ses  complices. 
Il  eut  l'inexplicable  audace  de  conduire  le 
chefdesMonlagnardsau  supplice,  et  même 
de  venir  à  4a  barre  de  la  Convention  pour 
la  féliciter  de  ce  grand  acte  de  justice. 
Dans  ce  moment  Barrère  monta  à  la  tri- 
bune, et  proposa  de  former  un  nouveau 
tribunal  révolutionnaire  et  de  continuer 
le  même  système  de  terreur  :  en  même 
temps  il  désigna  pour  accusateur  public 
Fouquier  ;  à  ce  nom  mille  voix  s'élevèrent 
pour  s'opposer  à  un  tel  choix.  Frérou, 
qui  avait  aussi  une  triste  célébrité  ,  mais 
à  qui  il  restait  encore  assez  de  pudeur 
pour  ne  pas  consentir  à  ce  que  l'on  accor- 
dât cet  emploi  à  un  tel  monstre,  prit  aus- 
sitôt la  parole,  énuméra  les  crimes  de 
Fouquier  et  conclut  ainsi  :  je  demande 
que  Fouquier  aille  cuver  dans  les  enfers 
tout  le  sang  dont  il  s'est  enivre'.  Peu  de 
jours  après  Fouquier  fut  destitué  et  dé  ■ 
crété  d'accusation  pour  avoir  envoyé  à 
la  mort  sans   arrêt   42  prisonniers   du 


FOU 

Luxembourg.  Cependant  il  ne  fut  mis  éii 
jugement  que  le  mois  d'avril  suivant. 
L'acte  d'accusation  formé  contre  lui  fait 
dresser  d'horreur  les  cheveux  sur  la  tête. 

'Voyez  V Histoire  de  France  de  Mongail- 
lard,  tome  "  ,  page  100  jusqu'à  105  de 
l'édition  in-1 2.  Fouquier  montra  dans  les 
débats  toute  l'audace  d'un  scélérat  con- 
sommé. «  La  Convention ,  dit-il ,  a  mis 
»  la  terreur  à  l'ordre  du  jour;  elle  a  pro- 
»  clamé  l'extermination  des  rebelles  ;  les 
))  comités  me  les  envoyaient  pour  que 
»  je  remplisse  les  formalités  du  jugement  ; 
»  je  n'ai  fait  qu'obéir  à  vos  ordres ,  ci- 
»  toyens  représentans ,  et  vous  m'accu- 
»  sez  !  Lequel  de  vous  m'a  fait  entendre 
M  une  parole  de  réprimandes  ?  Le  sang 
»  découlait  de  la  bouche  de  tous  vos  ora- 
»  teurs ,  et  vos  décrets  surpassaient  en- 
»  core  votre  tribune.  Si  je  snis  coupable, 
»  vous  l'êtes  tous  ,  et  j'accuse  l'Assemblée 
»  entière.  Je  n'ai  été  que  la  hache  de  la 
j)  Convention ,  et  punit-on  une  hache  ?  » 
Son  procès  dura  41  jours  :  400  témoins 
furent  entendus  à  charge  et  à  décharge  ; 
1 5  de  ses  complices  furent  condamnés  à 
mort  et  conduits  avec  lui  à  l'échafaud  ; 
il  fut  exécuté  le  dernier.  Dans  le  trajet 
de  la  conciergerie  à  la  place  de  Grève  , 
la  charrette  ayant  été  forcée  de  s'arrêter 
deux  fois,  il  répondit  aux  huées  de  la 
multitude  par  d'ignobles  grimaces ,  et 
lorsqu'on  criait  :  tu  n'as  pas  la  parole  , 
mot  dont  il  se  servait  quand  il  voulait 
empêcher  les  accusés  de  se  justifier ,  il 
crachait  sur  les  spectateurs ,  proférait 
d'horribles  juremens  et  ajoutait .-  Canail- 
le ,  vas  donc  chercher  à  la  section  tes 
trois  onces  de  pain  ;  moi,  je  m'en  vas  le 
ventre  plein.  Pendant  son  procès  il  avait 
publié  un  Mémoire  pourD .  Fouquier  Tin- 
ville  ,  tx~accusateur public  ,prcs  le  tri- 
bunal révolutionnaire  établi  à  Paris  ,  et 
tendu  volontairement  à  la  conciergerie 
le  jour  du  décret  qui  ordonne  son  arres- 
tation ,  in-4  de  20  pages  :  en  lisant  ce 
titre  ,  on  voit  en  frémissant  que  ,  s'il  eût 
voulu,  ce  monstre  eût  échappé  à  la  jus- 

•  tice  humaine.  «  Profondément  artificieux, 

»  dit  Mercier ,  habile  à  supposer  le  cri- 

»  me,  à  controuver  des  faits,  il  montra 

j»  dans  son  interrogatoire  une  présence 

V. 


vm  4i7 

))  d'esprit  imperturbable.  Wacé  devant 
»  le  tribunal  oîi  il  avait  accusé  tant  de 
»  victimes,  il  écrivait  sans  cesse;  mais, 
•»  comme  un  Argus ,  il  était  tout  yeux  et 
»  tout  oreilles  ;  et ,  en  écrivant ,  pas  un 
»  mot  du  président ,  d'un  accusé ,  d'un 
»  témoin ,  d'un  juge  ,  de  l'accusateur 
M  public ,  ne  lui  échappait.  Il  affecta 
»  de  dormir  pendant  le  résumé  de  l'ac- 
»  cusateur  public ,  comme  pour  avoir 
»  l'air  calme ,  tandis  que  l'enfer  était 
»  dans  son  cœur.  Son  regard  fixe  faisait 
»  malgré  soi  baisser  les  yeux  ;  lorsqu'il 
»  s'apprêtait  à  parler ,  il  fronçait  le  sour- 
w  cil  et  plissait  le  front  ;  sa  voix  était 
»  haute ,  rude  et  menaçante.  Il  niait 
))  d'une  voix  ferme  sa  signature ,  et  ne 
»  tremblait  pas  devant  le  témoin  accu- 
)>  sateur.  Quand  ou  le  conduisit  au  sup- 
»  plice,  son  front  dur  comme  le  marbre, 
))  défia  tous  les  regards  de  la  multitude  ; 
))  on  le  vit  même  sourire  et  proférer  des 
»  paroles  menaçantes  Au  pied  de  l'écha- 
»  faud ,  il  sembla  pour  la  première  fois 
w  éprouver  des  remords  ,  et  il  trembla  en 
M  y  montant.  »  Fouquier  avait  la  tête 
ronde ,  les  cheveux  noirs  et  unis,  le  front 
étroit  et  blême ,  les  yeux  petits  et  ronds, 
le  visage  plein  et  grêlé ,  le  regard  tantôt 
fixe,  tantôt  oblique. 

FOUQUIÈRES  (Jacques),  peintre, 
né  à  Anvers  vers  l'an  1 680,  élève  de  Breu- 
ghel  le  paysagiste,  et  deRubens  qui  l'em- 
ployait quelquefois  à  ses  tableaux  ,  tra- 
vailla au  Louvre  sous  Louis  XllI.  Ce  mo- 
narque l'anoblit.  Les  airs  de  qualité  qu'il 
prit  depuis,  le  firent  appeler  par  dérision 
le  baron  deFouquières.  Il  ne  peignit  pres- 
que plus,  crainte  de  déroger  à  sa  noblesse; 
et  dès  qu'il  prenait  le  pinceau,  il  ne  man- 
quait pas  de  ceindre  sou  épée.  Il  mourut 
pauvre  en  1621.  Ce  peintre  a  également 
réussi  dans  les  grands  morceaux  et  dans 
les  petits.  Il  était  excellent  paysagiste. 
Son  coloris  est  d'une  fraîcheur  admira- 
ble. 

FOUR  (Don  Thomas  du  ) ,  bénédictin 
de  St.-Maur ,  a  laissé  une  Grammaire 
hébraïque,  in-8  ,  fort  méthodique,  Paris, 
164i.  Il  mourut  à  Jumiége  en  1G47,  par- 
venu à  peine  à  sa  34*  année.  Sa  science 
et  sa  piété  étaient  dans  un  degré  égal. 
25 


^ 


4t8  JPÔtî 

Nous  avons  encore  de  lui  un  Testament 
spirituel  pour  servir  de  préparation  à  la 
mort,  in-1  i  ;  et  quelques  autres  ouvrages 
de  piété. 

FOUR  (Philijppe-Sylvestre  du  ),  habile 
antiquaire,  et  marchand  droguiste  à  Lyon, 
était  de  Mauosque.  Il  entretenait  com- 
merce de  lettres  avec  tous  les  savans  anti- 
quaires de  son  temps  et  principalement 
avec  Jacques  Spon  ,  qui  lui  communi- 
quait ses  lumières,  et  auquel  il  ouvrait 
généreusement  sa  bourse.  Du  Four  était 
riche,  et  il  faisait  surtout  de  grandes  li- 
béralités à  ceux  de  sa  secte.  Après  la  ré- 
vocation de  ledit  de  Nantes ,  il  se  retira 
dans  les  pays  étrangers.  Il  mourut  à  Ve- 
vey  en  Suisse,  en  1685,  à  63  ans.  On  a 
de  lui  1°  Instruction  morale  d'un  père  à 
son  fils  qui  part  pour  un  long  voyage , 
in-1 2.  2"  Traités  nouveaux  et  curieux  du 
Cafe\  du  Thé  et  du  C/iocolat,  in-1 2.  Il 
approuve  l'usage  de  ces  boissons ,  mais 
avec  quelques  restrictions.  Son  stile  est 
assez  mauvais ,  et  ses  raisounemcns  ne 
sont  pas  toujours  concluans. 

FOUR  (Charles  du),  curé  deSt.-Ma- 
clou  à  Rouen ,  et  ensuite  abbé  d'Aulnay , 
mort  en  1679 ,  s'est  fait  connaître  par  ses 
disputes  avec  le  Père  Brisacier ,  et  par 
son  zèle  contre  la  morale  relâchée.  Il  est 
auteur  de  divers  écrits  ecclésiastiques  ou 
polémiques.  On  ne  les  lit  plus. 

*  FOURCROY  (  Antoine-François  de }, 
chimiste  célèbre ,  naquit  à  Paris  le  1 5 
juin  1755,  d'un  père  qui  appartenait  à 
une  famille  noble  mais  pauvre,  et  qui, 
après  avoir  été  pharmacien  de  la  maison 
du  duc  d'Orléans  ,  perdit  sa  charge  et  le 
droit  d'exercer  sa  profession  dans  la  ca- 
pitale ,  par  suite  de  la  demande  qu'en 
fit ,  en  vertu  de  certains  arrangcmens , 
la  corporation  des  apothicaires.  Ce  mal- 
heur mit  dans  une  gène  très  grande  toute 
la  famille  de  Fourcroy  qui  continua  néan- 
moins ses  études  et  les  termina  d'une 
manière  brillante.  Il  entra  dans  un  bu- 
reau, et  peut-être  y  aurait-il  végété  d'une 
manière  obscure  pendant  toute  sa  vie, 
si  les  conseils  et  même  les  secours  de 
Wicq-d'Azir  ,  l'ami  de  sa  famille  ,  ne 
l'eu-ssent  déterminé  à  embrasser  une  autre 
carrière.  Fourcroy  suivit  l'école  de  mé- 


decine ,  et  le  grand  anatomiste  qui  était 
son  bienfaiteur  dirigea  ses  premiers  pas 
dans  cette  nouvelle  route  :  en  peu  de 
temps  Fourcroy  fut  dans  le  cas  d'être 
médecin.  Peu  s'en  fallut  qu'il  ne  fût  ar- 
rêté par  le  besoin  d'argent.  Le  docteur 
Diest  avait  légué  à  la  faculté  de  médecine 
des  fonds  pour  qu'elle  accordât  tous  les 
deux  ansdcs  licences  gratuites  à  l'étudiant 
pauvre  qui  le  mériterait  le  mieux  :  Four- 
croy concourut  en  1 7  80, mais  une  injustice 
criante,  fruit  de  l'esprit  de  parti  qui  divi- 
sait la  faculté  et  la  société  royale  de  mé- 
decine, lui  enleva  celte  ressource  ,  et  ce 
fut  avec  le  produit  d'une  collecte  faite 
dans  le  sein  de  cette  dernière  compagnie 
qu'il  paya  ses  frais  d'examen  et  de  diplô- 
me. Tout  en  pratiquant  la  médecine  , 
Fourcroy  s'adonnait  à  la  chimie.  Elève  de 
Bucquet ,  il  fut  chargé  plusieurs  fois  de 
remplacer  ce  professeur  qui  lui  procura 
même  un  amphitéâtre  pour  faire  des  cours 
particuliers.  Fourcroy  était  déjà  savant 
dans  cette  partie  des  sciences  exactes  ;  il 
était  en  outre  habile  démonstrateur  : 
le  timbre  agréable  de  sa  voix  ,  la  pureté 
et  l'élégance  de  son  langage  ,  la  facilité , 
la  clarté  et  la  chaleur  de  son  élocution 
charmaient  son  nombreux  auditoire  ,  et 
souvent  on  voyait  une  foule  de  person- 
nes étrangères  aux  connaissances  chi- 
miques assister  à  ses  leçons  ,  unique- 
ment pour  avoir  le  plaisir  de  l'entendre. 
Bientôt  la  réputation  de  Fourcroy  s'éten- 
dit au  loin,  et,  en  1784,  après  la  mort  de 
Macquer,  Buffon  le  nomma  à  la  chaire  de 
cliimie  du  jardin  du  roi,  et  cet  habile  pro- 
fesseur enseigna  cette  science  avec  la  plus 
grande  distinction  pendant  25  ans.  Admis 
en  1 7  8  5  à  l'académie  des  Sciences  (  section 
d'analomie  } ,  il  passa  bientôt  à  la  section 
de  chimie  où  il  lui  convenait  plus  de  se 
trouver.  Il  fut  aussi  de  la  société  de 
Lavoisier,  et  travailla  avec  lui  aux  grandes 
expériences  qui  lui  valurent  une  si  bril 
lante  renommée.  Jusqu'à  l'époque  oùj 
éclata  la  révolution,  Fourcroy,  vécut  tran- 
quille et  loin  des  affaires.  Alors  mécon- 
tent de  la  cour  dont  il  croyait  avoir  été 
négligé ,  il  se  montra  dans  les  assemblées 
populaires,  et  fut  nommé  en  1792  député 
de  Paris  à  la  Convention  nationale  où  il 


1 


I 


FOU 

ne  siégea  toutefois  qu'après  le  21  janvier , 
*n  remplacement  du  trop  fameux  Marat. 
11  ne  monta  à  la  tribune  que  pour  des 
questions  d'administration  intérieure  et 
d'instruction  publique.  Tant  que  dura  la 
dictature  de  Robespierre  ,  il  fut  membre 
du  comité  d'enseignement  national  et 
de  celui  des  armes ,  et  il  ne  s'occupa  qu'à 
rétablir  l'instruction  publique  et  à  créer 
de  nouveaux  moyens  de  défense.  Il  pro- 
posa de  rappeler  plusieurs  savans  qui 
étaient  expatriés  ou  qui  gémissaient  dans 
les  fers  ;  dans  la  liste  qu'il  présenta  on  ne 
vit  point  le  nom  du  célèbre  Lavoisier,  et 
lorsque  ce  savant  fut  condamné  à  périr 
sur  un  cchafaud ,  on  lui  reprocha  de  n'a- 
voir pas  sauvé  un  homme  qui  lui  inspi- 
rait sans  doute  de  la  jalousie  ,  parce  qu'en 
efifet  le  talent  de  Lavoisier  était  plus 
beau  que  le  sien.  Mais  cette  accusation 
nous  paraît  trop  grave ,  pour  l'admettre 
inconsidérément  et  sans  preuve  :  l'àrae  de 
Fourcroy  était  trop  élevée  pour  avoir  la 
pensée  d'une  pareille  infamie,  et  nous  som- 
mes disposés  à  croire  que  cette  inculpa- 
tion est  une  calomnie.  Quoi  qu'il  en  soit, 
Fourcroy  fut  douloureusement  affecté  de 
ce  reproche  qui ,  dans  plus  d'une  occa- 
sion, fut  répété  avec  amertume.  Après  la 
dissolution  de  la  Convention,  il  entra 
dans  le  conseil  des  Anciens  et,  à  la  suite 
du  18  brumaire  ,  il  iit  partie  du  conseil 
d'état.  En  1801  il  fut  chargé  de  la  direc- 
tion générale  de  l'instruction  publique  : 
ce  fut  lui  qui  substitua  au  pi  an  d'instruc- 
tion organisé  en  l'an  3  le  système  qui  a 
présidé  à  l'établissement  de  l'université  : 
il  rédigea  tous  les  réglemens  et  tous  les 
projets  relatifs  à  l'enseignement ,  établit 
les  écoles  de  médecine  de  Paris,  de  Mont- 
pellier et  de  Strasbourg,  créa  12  écoles 
de  droit ,  organisa  plus  de  trente  lycées, 
aujourd'hui  collèges  royaux  ,  et  plus  de 
300  collèges  communaux.  Chargé  de  pré- 
parer les  décrets  sur  l'établissement  de 
l'université,  il  recommença  23  fois  ce  pé- 
nible travail  sans  pouvoir  obtenir  l'ap- 
probation du  ministère.  Ce  désagrément 
joint  à  d'autres  ennuis  excitèrent  son  mé- 
contentement :  il  osa  s'en  plaindre,  et  on 
le  disgracia.  Ce  fut  Fontanes  qui  obtint  la 
^tectioQ  de  l'université  en  1808.  Four-, 


FOU  4tg 

croy  fut  sensible  à  cette  exclusion,  iltomba 
dans  une  mélancolie  que  ses  amis  essayè- 
rent en  vain  de  combattre.  L'un  d'eux, 
Corvisart ,  crut  qu'un  remède  moral  vau- 
drait mieux  que  tous  les  médicamens ,  et 
un  jour  qu'il  avait  occasion  de  parler  à 
Buonaparte  du  chagrin  qui  souvent  était 
une  maladie  mortelle,  celui-ci  parut  dou- 
ter de  cette  vérité  dont  cependant  il  put  se 
procurer  la  preuve  à  plusieurs  reprises. 
Oui,  sire,  dit  Corvisart,  on  meurt  de  cha- 
grin ,  et  je  connais  quelqu'un  qui  dans 
ce  moment  meurt  de  cette  maladie  :  et  qui 
donc  reprit  vivement  Buonaparte  ?  C'est 
Fourcroy,  sire. — Vous  croyez;...  Mais  ras- 
surez-vous ,  je  me  suis  occupé  de  sa  gué- 
rison.  Allez  levoir  etvousme  rapporterez 
de  ses  nouvelles.  —  Il  avait  en  effet  signé 
plusieurs  jours  auparavant  une  dotation 
de  20,000  fr. ,  en  faveur  de  Fourcroy.  Il 
était  trop  tard;  Fourcroy  mourut  pendant 
cette  conversation  :  c'était  le  16  décembre 
1809.  Son  titre  de  comte  et  sa  dotation 
passèrent  à  son  fils  qui  avait  embrassé  la 
carrière  des  armes  ,  et  qui  mourut  hono- 
rablement sur  le  champ  de  bataille  de 
Lutzen.  Fourcroy  était  membre  de  l'Ins- 
titut, et  faisait  partie  de  toutes  les  sociétés 
savantes  de  la  capitale  ,  et  de  plusieurs 
académies  de  province  et  de  l'étranger. 
Outre  la  chaire  de  chimie  qu'il  avait  au 
jardin  des  plantes,  il  occupait  encore  celle 
de  l'Ecole  polythecnique  ,  et  plusieurs 
fois  il  donna  un  cours  à  l'Athénée.  Il 
s'honorait  de  son  titre  de  professeur  ,  et 
il  le  préferait  à  tous  ceux  que  les  circons- 
tances lui  donnèrent.  Il  fut  un-des  inven- 
teurs de  cette  nouvelle  nomenclature  qui 
est  elle-même  une  analyse  de  la  science, 
et  a  le  mérite  de  définir  les  substances 
qu'elle  désigne.  Il  a  laissé  plusieurs  ou- 
vrages très  ■  estimés  parmi  lesquels  on 
remarque  son  Cours  de  chimie  ou  Leçons 
d'histoire  naturelle  et  de  chimie,  qui  est 
l'abrégé  de  son  enseignement,  1780, 
2  vol.  in-8.  Six  éditions  publiées  en  20 
ans  prouvent  assez  le  talent  avec  lequel 
la  matière  y  est  traitée  :  elles  constatent 
aussi  les  progrès  que  cette  science  a  faits 
pendant  cette  espace  de  temps  ;  car  Fourr 
croy  augmenta  son  ouvrage  à  mesure  que 
les  autres  savans  faisaient  de  nouvellçs 


420  POU 

découvertes.  La  dernière  édition  a  G  vol. 
in-4  ou  1 1  vol.  in-8  ,  et  a. pour  titre  Sys- 
tème des  connaissances  chimiques  et  de 
leur  application  aux  phe'nomènes  de  la 
nature  et  de  Part.  2°  Philosoph.  clmni- 
que,  1792,  1795  et  180G,  trad.  presque 
en  toutes  les  langues  et  même  en  grec 
moderne  ;  3°  Armlyse  de  l'eau  sulfureuse 
d'Enghien,  1738,  1  vol.  in-8.  i°  Essai 
sur  les  maladies  des  artisans ,  trad.  du 
latin  de  Romazzini,  avec  notes  et  addi- 
tions, 1777  ,  in-12.  5°  L'Art  de  connaî- 
tre et  d'employer  les  me'dicamens  dans 
les  maladies  qui  attaquent  le  corps  hu- 
main, 1785,  2  vol.  in-8.  6°  Essai  sur 
le phlogistique  et  les  acides,  1788,  in-8. 
7"  Ze  Médecin  éclairé  par  les  sciences 
physiques,  1792,  4  vol.  in-8.  8"  Pro- 
cédé pour  extraire  la  soude  du  sel  ma- 
rin, 1795,  in-4.  9°  Tableaux  synopti- 
ques de  chimie,  1800-1805,  in-fol.  Il  a 
fourni  en  outre  aux  Annales  de  chimie  et 
a  d'autres  journaux,  ainsi  qu'aux  revues 
de  diverses  sociétés  savantes ,  plus  de  1 50 
mémoires  roulant  tous  sur  des  expériences 
'  qu'il  avait  faites.  On  regarde  comme  les 
plus  importantes  celles  qui  ont  rapport  à 
la  découverte  de  plusieurs  composés  qui 
détonnent  par  la  simple  percussion  ;  aux 
procédés  propres  à  perfectionner  l'ana- 
lyse des  eaux  sulfureuses ,  à  la  séparation 
du  cuivre ,  de  l'étain  et  aux  perfectionne- 
mens  des  analyses  végétales.  Son  éloge  a 
été  fait  par  BI.  Palissot  de  Beauvais  ,1810, 
in-4,  et  par  M.  Cuvier  dans  les  Mém.  de 
l'Institut. 

"FOURCROY  DE  RAMECOURT 
(Charles-René),  ingénieur,  naquit  à 
Paris  le  19  janvier  1715,  eteut  pour  père 
un  avocat  célèbre  :  destiné  lui-même  au 
barreau  dès  son  enfance,  il  étudia  le  droit 
pour  plaire  à  sa  famille  ;  mais  entraîné 
par  un  penchant  irrésistible  vers  les  scien- 
ces ,  il  s'y  livra  en  secret  avec  une  telle 
application,  qu'il  acquit  en  peu  de  temps 
les  connaissances  exigéesalors  pour  entrer 
dans  le  génie.  Admis  dans  ce  corps  en  17  35, 
à  l'âge  de  20  ans,  après  un  examen  très 
brillant,  il  fit  plusieurs  campagnes  pen- 
dant la  guerre  de  1740  sous  les  ordres 
du  maréchal  d'Asfeld.  Vingt  ans  après, 
çp  J16<  ,  pendant  l?i  guerre  de  sept  ans, 


FOU 

il  commanda  le  corps  des  ingénieurs  des 
côtes  de  Bretagne,  il  fit  ensuite  la  cam- 
pagne de  Portugal  et  se  trouva  en  1764 
au  siège  d'Almeida.  Lorsque  la  paix  lui  eut 
permis  de  reprendre  les  études  du  cabi- 
net ,  il  s'appliqua  avec  une  nouvelle  ar- 
deur à  perfectionner  ses  connaissances , 
et  fut  employé  successivement  à  Calais, 
dans  le  Roussillon ,  en  Corse  et  devint 
maréchal-de-camp  ;  enfin  le  comte  de 
St.-Germainvoulantattacher  au  ministère 
de  la  guerre  un  officier  supérieur ,  l'ap- 
pela comme  le  plus  digne  de  remplir  la 
place  de  directeur  de  la  division  du  corps 
du  génie.  En  1776  il  fut  nommé  in.spec- 
teur-général  de  son  armée ,  et  mourut  à 
Paris  le  12  janvier  1791.  On  a  de  lui 
1°  L'Art  du  tuilier-briquetier  et  celui 
du  chaufournier,  dans  le  recueil  des  des- 
criptions publiées  par  l'académie  des 
sciences  dont  il  était  membre.  2°  Mé- 
moire sur  la  fortification  perpendicu- 
laire, Paris  ,  1786.  3"  Plan  de  communi- 
cation entre  V Escaut,  laSambre,  l'Oise, 
la  Meuse ,  la  Moselle  et  le  Rliin ,  pour 
réunir  toutes  les  parties  intérieures  de 
la  France  ;  4"  plusieurs  Mémoires,  dans 
le  recueil  de  l'académie  des  Sciences.  Il 
a  enrichi  de  remarques  et  de  descriptions 
les  ouvrages  des  savans  avec  lesquels  il 
était  lié,  el  notamment  le  Traité  des  pê- 
ches et  le  Traité  des  forêts.  L'académie 
des  Sciences  lui  donna  le  titre  d'associé 
libre. 

*  FOURCROY  DEGUILLERVILLE 
(  Jean-Louis  de  ) ,  frère  du  précédent ,  né 
à  Paris  en  1717  ,  entra  dans  la  compa- 
gnie des  cadets  gentils-hommes  à  Roche- 
fort,  et  partit  avec  le  grade  d'officier  d'ar- 
tillerie pour  St.-Domingue  où  il  demeura 
vingt  ans.  De  retour  en  France,  il  acheta 
une  charge  de  conseiller  au  bailliage  de 
Clermont-sur-Oisc  ;  il  fut  ensuite  juge  au 
tribunal  qui  remplaça  le  bailliage  au  mo- 
ment de  la  révolution,  el  mourut  à  Cler- 
mont  en  1799.  On  a  de  lui  1"  Lettre  sur 
l'éducation  physique  des  enfans  du  pre- 
mier âge,  Paris ,  1770,  in-1 2. 2°  Les  en- 
fans  élevés  dans  l'ordre  de  la  nature,  ou 
Abrégé  de  l'histoire  naturelle  des  enfans  < 
du  premier  âge ,  à  V usage  des  pères  etj^ 
ntères  de  famille,  Pww,  178? ,  W'|?,, 


FOU 

Cet  excellent  ouvrage  a  été  traduit  en 
allemand  par  Cramer  Lubeck,  1781,  2 
vol.  in-8. 

*  FOURIER  (Jean-Baptisle-Joseph, 
baron),  secrétaire  perpétuel  de  l'acadé- 
mie des  Sciences,  membre  de  l'académie 
française,  naquit  à  Auxerre  le  21  mars 
1768,  d'une  famille  originaire  de  Lor- 
raine ,  qui  s'honorait  de  compter  parmi 
ses  membres  Pierre  Fourier ,  réformateur 
et  général  de  l'ordre  des  chanoines  régu- 
liers. Placé  fort  jeune  à  l'école  militaire 
établie  à  Auxerre ,  il  fit  en  peu  de  temps 
et  avec  succès  ses  premières  études.  Dès 
l'âge  de  13  ans,  époque  oîi  il  les  eut 
terminées  ,  il  s'adonna  sérieusement  aux 
mathématiques,  sans  toutefois  négliger 
la  littérature  :  à  1 8  ans  il  avait  publié 
un  mémoire  oii  sont  consignées  les 
découvertes  mathématiques  qu'il  avait 
déjà  faites.  Les  savans  y  trouvèrent  le 
génie  précoce  de  Pascal ,  et  le  jeune  ma- 
thématicien fut  récompensé  de  ses  pre- 
miers travaux  par  une  chaire  dans  l'école 
oîi  il  avait  été  élevé.  A  l'époque  de  la 
formation  de  l'école  normale ,  il  fut  en- 
voyé par  son  département  pour  y  perfec- 
tionner ses  connaissances  sous  les  maîtres 
habiles  qui  devaient  y  donner  leurs  le- 
çons :  mais  à  peine  y  eut-il  paru  qu'on 
le  nomma  maître  de  conférences,  place 
qui  Je  mettait  dans  la  nécessité  de  s'en- 
tretenir avec  les  élèves  sur  ce  qui  avait 
été  l'objet  de  l'enseignement  des  cours. 
Plus  tard ,  Vc'cole  centrale  des  travaux 
publics ,  depuis  l'école  polytechnique  fut 
organisée  sur  des  bases  fixes ,  et  Fourier 
fut  un  des  professeurs  de  cette  institution  : 
son  enseignement  profond  et  lucide  fut 
goûté  ;  son  urbanité  le  fit  chérir  des  élè- 
ves. Bientôt  Buonaparte  voulut  associer 
à  sa  campagne  d'Egypte  des  savans  dont 
la  gloire  devait  encore  augmenter  la 
sienne.  Fourier  fit  partie  de  cette  com- 
mission ,  et  fut  chargé  même  par  le  gou- 
Ycrnement  de  désigner  ceux  des  élèves 
de  l'école  polytechnique  qu'il  élait  con- 
venable d'y  associer.  Après  la  soumission 
du  Caire,  Buonaparte  créa  l'Institut 
égyptien-,  Fourier  en  fut  membre,  et 
bientôt  après  il  en  devint ,  par  le  sufltrage 
linanime  de  ses  confrères  ,  le  secrétaire 


FOU  42 1 

perpétuel  ;  appelé  ensuite  à  faire  les  fonc- 
tions de  commissaire  de  l'armée  française 
près  du  conseil  ou  divan  formé  des 
principaux  ulémas  du  Caire  et  des  pro- 
vinces ,  il  fut  aussi  administrateur  de  la 
justice  pendant  l'expédition  des  Français 
en  Syrie.  Dans  tous  ces  emplois  Fourier 
apporta  les  qualités  convenables,  et  le 
savant  fut  un  bon  administrateur.  L'Ins- 
titut d'Egypte  ayanfr  été  divisé  en  deux 
parties  ,  Fourier  fut  à  la  tète  de  l'une,  et 
dès  lors  les  recherches  dans  la  haute 
Egypte  furent  nombreuses  et  les  décou- 
vertes immenses.  En  même  temps  Fourier 
faisait  des  traités ,  et  contribuait  à  la  pa- 
cification de  l'Egypte,  que  des  circons- 
tances indépendantes  de  sa  volonté ,  ren- 
dirent trop  peu  durables.  Ce  fut  lui  encore 
qui  exprima  les  regrets  de  l'armée  à  la 
mort  de  Kléber,  ainsi  qu'à  la  nouvelle  de 
celle  de  Desaix  ,  et  dans  ces  deux  circon- 
stances, Fourier  fut  l'éloquent  interprète 
de  la  douleur  de  ses  compatriotes.  Bientôt 
il  revit  la  France  :  l'Institut  d'Egypte  rap- 
portait un  grand  nombre  de  documens 
sur  ce  pays  ;  il  était  à  craindre  que  cha- 
cun des  savans  ne  publiât  isolément  le 
résultai,  de  ses  recherches  ;  mais  il  fut 
décidé  que  toutes  ces  richesses  seraient 
déposées  dans  un  grand  ouvrage  ,  impri- 
mé aux  frais  de  l'état.  Fourier  fut  choisi 
pour  en  rédiger  la  Préface  historique  , 
qui  a  été  accueillie  en  France,  en  An- 
gleterre et  en  Allemagne  comme  un  chef- 
d'œuvre  d'élocution ,  et  comme  un  des 
plus  beaux  monumens  de  la  langue  fran- 
çaise. Ce  discours  préliminaire  écrit,  se- 
lon M.  de  Fontanes ,  avec  les  grâces  d'A- 
thènes et  la  sagesse  de  V Egypte ,  con- 
tient ,  mais  à  grands  traits,  les  événemens 
de  l'histoire ,  les  observations  de  la 
science,  et  les  vues  de  la  politique.  Il  fut 
composé  pendant  que  l'auteur  était  préfet 
à  Grenoble ,  place  qui  lui  fut  offerte  en 
récompense  de  ses  services.  11  l'occupa 
depuis  1801  jusqu'en  1815,  et  pendant 
cette  époque  il  ne  se  borna  point ,  dans 
son  administration ,  aux  devoirs  ordinai- 
res de  son  emploi  :  le  plus  remarquable 
de  ses  travaux  administratifs  est  le  Des- 
sèchement des  marais  de  Bourgoin  près 
de  Lyon ,  çatreprise  iminense,  tentée  m- 


w^ 


422  FOU 

fructueusement  à  plusieurs  reprises,  etqui 
fut  terminée  par  les  soins  de  Fourier ,  qui 
assainit  ainsi  le  territoire  de  40  commu- 
nes. Fourier  n'avait  point  perdu  de  vue  la 
science  :  en  1 807 ,  il  obtint  le  prix  proposé 
par  rinstitu  t  sur  une  question  difficile  qu'il 
résolut  d'après  des  méthodes  entièrement 
nouvelles ,  et  qu'il  vérifia  par  des  expé- 
riences curieuses  :  il  s'agissait  de  déter- 
miner les  lois  de  la  propagation  de  la 
chaleur  dans  les  corps  solides  :  en  1811 
il  remit  à  l'Institut  un  me'moire  sur  le 
même  sujet  ;  ces  deux  écrits  formeùt  le 
corps  du  grand  ouvrage  qu'il  a  publié 
plus  tard  sous  le  titre  de  Théorie  analy- 
tique de  la  cJialèur.  Les  Bourbons  avaient 
conservé  à  Fourier  sa  préfecture  de  l'I- 
sère :  lorsque  Buonaparte  revint  en  1 81 5, 
Fourier  quitta  Grenoble >  son  approche; 
mais  ii  fut  ramené  devant  l'empereur  qui 
le  nomma  préfet  du  Rhône  :  il  n'occupa 
cette  place  que  pendant  quelques  semai- 
nes ;  ayant  refusé  d'exécuter  des  mesures 
qu'un  ministre  exigeait  de  lui ,  il  fut 
remplacé  par  M.-  Pons-de-Cette.  Dès  lors 
il  vint  se  fixer  à  Paris  et  ne  s'occupa  plus 
que  des  sciences  et  des  lettres.  En  1815 
l'académie  des  Sciences  le  choisit  pour 
un  de  ses  membres  ;  cette  élection  ne  fut 
pas  confirmée  par  le  roi  :  l'année  sui- 
vante ,  l'académie  le  nomma  une  seconde 
fois  ;  alors  cette  élection  fut  approuvée. 
Il  n'entre  pas  dans  notre  cadre  de  faire 
l'analyse  de  tousMes  travaux  de  ce  savant 
mathématicien.  Le  grand  ouvrage  d'a- 
nalyse mathématique  que  Fourier  a  pu- 
blié ,  et  qui  a  pour  objet  de  soumettre  au 
calcul  les  lois  du  mouvement  de  la  cha- 
leur, intéresse  à  la  fois  l'utilité  publique 
elles  principaux  phénomènes  delà  na- 
ture. Ses  résultats  ont  été  vérifiés  à  l'aide 
d'un  thermomètre  ingénieux  et  d'une 
sensibilité  remarquable,  appelé  par  lui 
thermomètre  de  contact  ,  instrument 
dont  on  peut  se  servir  dans  un  grand 
nombre  d'occasions ,  et  qui  pourrait  être 
utile  à  l'hygiène.  Fourier  avait  été  nommé 
secrétaire-perpétuel  de  l'académie  des 
Sciences  conjointement  avec  son  illustre 
confrère  M.  Cuvier,  dont  le  monde  savant 
déplore  la  perte  récente  :  ses  fonctions 
H  mettaient  dans  le  cas  de  faire  l'éloge 


FOU 

des  membres  que  perdait  l'académie.  Les 
discours  qu'il  a  prononcés  dans  ces  occa- 
sions l'ont  placé  à  côté  de  Fontenelle ,  de 
Condorcet ,  et  de  Vicq-d' Azyr ,  et  lui  ont 
ouvert  les  portes  de  l'académie  française 
en  1827. 11  était  membre  d'un  très  grand 
nombre  de  sociétés  littéraires  et  savantes, 
notamment  de  la  société  royale  de  Lon- 
dres. Il  est  mort  presque  subitement  le 
16  mai  1830.  Plusieurs  discours  ont  été 
prononcés  sur  sa  tombe  par  MM.  Sylves- 
tre, de  Sacy  ,  Cuvier,  Féletz  ,  Girard  et 
Jomard,  son  collaborateur  dans  le  grand 
ouvrage  d'Egypte.  Ce  livre  contient  un 
grand  nombre  de  mémoires  de  Fourier  : 
on  en  trouve  aussi  plusieurs  dans  di- 
verses collections  académiques,  entre 
autres  dans  le  Recueil  de  Vacadémie  des 
Sciences.  Outre  les  ouvrages  que  nous 
avons  déjà  cités ,  on  doit  à  Fourier  1"  Mé- 
moire sur  la  Statistique  (  tome  2  du 
journal  de  l'école  polytechnique  1778). 
2°  Mémoire  sur  la  résolution  générale 
des  équations  algébriques,  présenté  à 
l'Institut  d'Egypte.  3"  Rapport  sur  les 
établissemens  appelés  Tontines ,  Paris , 
1821  ,  in-4  ;  4"  Plusieurs  rapports  sur 
les  sciences  mathématiques ,  Paris,  1822- 
1829.  5"  Plusieurs  mémoires  sur  la  théo- 
rie du  mouvement  de  la  chaleur,  insérés 
dans  les  Mémoires  de  T  Institut ,  tomes 
4  ,  6,  7  et  8.  6"  Recherches  statistiques 
sur  la  ville  de  Paris ,  publiées  d'après 
les  ordres  du  préfet  de  la  Seine.  7"  Les  j 
éloges  de  Sir  JFilliam-Herschel ,  de  De- 
lambre ,  de  Bréguet  et  de  M.  Charles, 
Fourier  a  aussi  fait  plusieurs  articles  des 
géomètres  dans  la  Biographie  univer- 
selle ,  où  ils  étaient  signés  d'un  Z. 

FOURIER  (  Pierre  ).  Foyez  Foorrier. 

FOURMONT  (Etienne),  né  en  1683 
à  Herbelay ,  village  près  de  Paris ,  d'un 
père  chirurgien ,  montra  dès  sa  jeunesse 
des  dispositions  surprenantes  pour  les 
langues.  Il  avait  la  mémoire  si  heureuse, 
qu'après  avoir  appris  par  cœur  toutes  les 
racines  grecques  de  Port-Royal ,  il  les  ré- 
citait souvent  en  rétrogradant.  Il  n'étai(fl 
encore  qu'écolier,  lorsqu'il  donna  ses  Ra<^^ 
cines  de  la  langue  latine  mises  en  vers 
français,  ouvrage  qui  eût  fait  honneur  à 
un  maître.  Après  avoir  étudié  au  collège 


1 


FOU 

des  Trente-Trois  et  à  celui  de  Montaigii 
il  fut  chargé  de  l'éducation  des  fils  du  duc 
d'Antin.  Il  succéda  à  M.  Galland  en  1 7 1 3, 
dans  la  chaire  d'arabe  au  collège  rojal; 
l'académie  des  Inscriptions  se  l'associa  la 
même  année ,  la  société  royale  de  Lon- 
dres en  1738,  et  celle  de  Berlin  en  1741. 
Il  mourut  le  18    septembre  1745,    à  62 
ans.  Il  avait  joui  pendant  sa  vie  de  la  con- 
sidération due  à  son  savoir ,  à  la  droiture, 
à  la  modestie  et  à  la  candeur   qui  l'ac- 
compagnaient. Le  comte  de  Tolède  mi- 
nistre d'Espagne  lui  obtint  une  pension 
de  la  cour,   qui  fut   arrêtée  lors  de  la 
rupture  entre  la  France  et  l'Espagne.  Le 
duc  d'Orléans  le  mit  au  nombre  de  ses 
secrétaires.  Les  savans  français  et  étran- 
gers le  consultaient  dans  tout  ce  qui  con- 
cerne le  grec,  le  persan, le  syriaque,  l'a- 
rabe ,  l'hébreu  et  le  chinois.  On  a  de  lui 
une  foule  d'ouvrages  imprimés  et  manu- 
scrits ,  témoignages  de  son  érudition  et 
de  son  amour  pour  le  travail  \°  Réflexions 
critiques  sur  les  Histoires  des  anciens 
peuples,  jusqu'au  temps  de  Cyrus,  1735, 
1  vol.  in-4,  chargées  de  citations.  2°  Une 
Grammaire  chinoise ,  en  latin,    in-fol. 
1742,  sur  laquelle  on  peut  consulter  le 
Journal  des  savans,  de  mars  et  avril  17  43. 
3"  Meditationcs  sinicœ ,  17  57  ,  in-fol.  : 
ouvrage  qui  renferme  les  préliminaires 
de  la  grammaire  chinoise,  et  l'explication 
de  tout  le  technisme  de  cette  langue. 
4°  Plusieurs  Dissertations  dans  les  Mé- 
moires de  l'académie  des  belles-lettres  , 
semées  d'érudition.  Sa  vie  a  été  écrite 
par   de   Guignes   et    Deshauterayes  ses 
élèves  ;  on  la  trouve  à  la  tête  des  Réfle- 
xions sur  Vorigine  des  anciens  peuples  , 
Paris,  1747  ,  2  vol  in-4;  et  à  la  suite  de 
cette  notice  on  trouve  la  liste  de  ses  ou- 
vrages ,  mémoires,    dissertations,   etc. 
Fourmont  avait   un   frère,    membre  de 
cette  compagnie  comme  lui ,  et  profes- 
seur en  langue  syriaque  au  collège  royal. 
Ce  dernier,  appelé   Michel  Foubmont, 
mourut  en  174G.  Il  était  né  en    1690  à 
Herbelay ,  avait  été  envoyé  en  1 728  dans 
l'Orient  par  ordre  de  Louis  XV  pour  re- 
cueillir des  manuscrits  et  des  inscrip- 
tions. On  trouve  dans  les  archives  de  la 
Bibliothèque  du  roi  le  catalogue  des  ma- 


FOU  4aS 

nuscrits  qu'il  a  rapportés  ;  quelques-uns 
ont  sejvi  à  éclairer  différens  points  de 
l'histoire  grecque.  Fourmont  s'occupait 
de  la  publication  d'un  recueil  de  1200 
inscriptions  qu'il  avait  réunies  dans  ses 
voyages ,  lorsque  la  mort  le  surprit  au 
milieu  de  ce  travail. 

*FOURNEL  (Jean-François),  célèbre 
avocat-consultant  de  Paris,  fut  bâtonnier 
de  son  ordre,  et  il  était  le  doyen  des  avo- 
cats lorsqu'il  est  mort  le  21  juillet  1820. 
Il  était  encore  très  jeune  quand  il  publia 
un  Mémoire  qui  sauva  du  bûcher  la  fille 
Salmon  condamnée  à  être  brûlée  vive .  Ses 
principaux  ouvragessont  fTraite'  des  in- 
jures considérées  dans  Tordre  judiciaire, 
parDareau,  avec  des  obseri>atiohs,,qm 
font  presque  les  deux  tiers  de  l'ouvrage, 
1785,  2  vol.  in-12.  2°  Dictionnaire  rai- 
sonné, ou  Exposition  par  ordre  alpha- 
bétique des  lois  concernant  les  transac- 
tions entre  particuliers ,  1798,  in-S. 
3"  Traité  de  la  contrainte  par  corps  , 

1798,  in-12.  4"   Traité  du  voisinage, 

1799,  in-12;  3«  édit.,  1812,  2  vol.  in-8. 
ouvrage  estimé.  5°  Code  de  commerce, 
accompagné  de  notes  et  observations , 
1807  ,  in-8.  6°  Histoire  des  avocats  au 
parlement  et  du  barreau  de  Paris, 
1790-1813, 2vol.  in-8.  \° Hist. du  barreau 
de  Paris  dans  le  cours  de  la  révolution  , 
1816,  in-8.  C'est  la  suite  de  l'ouvrage 
qui  précède.  8°  Les  Lois  rurales  de  la 
France  rangées  dans  leur  ordre  naturel, 
1819,  2vol.  in-8.  9°  Recueil  des  lois, 
ordonnances ,  règlemens ,  arrêts  et  dé- 
cisions cités  dans  les  Lois  rurales,  1820. 
Ce  volume  forme  le  troisième  volume  des 
Lois  rurales ,  dont  il  est  le  complément 
nécessaire.  ' 

FOURNI.  Fojjez  Fourny. 

FOURNIER  (  Guillaume  ) ,  excellent 
critique  de  Paris ,  professeur  en  droit  à 
Orléans,  mit  au  jour  en  1584,  in-folio  : 
De  verborum  significationibus . 

FOURNIER  (  George) ,  né  à  Caen ,  se 
fit  jésuite,  et  mourut  à  la  Flèche  en  1652, 
à  57  ans.  Ses  principales  productions  sont 
1  "  une  Hydrographie,  1 7  6  7 ,  in  fol .  2°Asiœ 
descriptio,  curante  L.  M.  S.,  1656,  in- 
fol.  :  ouvrages  bons  pour  leur  temps,  et 
qui  ont  servi  à  en  l'aire  de  meilleurs. 


424  FOU 

FOURJNIER  (Pierre-Simon),  graveur 
et  fondeur  de  caractères ,  naquit  à,  Paris 
le  1 5  septembre  1712.  Il  excella  dans  son 
art.  Ses  caractères  ont  embelli  la  typo- 
graphie ,  ses  lumières  l'ont  éclairée.  Il 
publia  en  1737  la  Table  des  proportions 
qu'il  faut  observer  entre  les  caractères, 
pour  déterminer  leurs  hauteurs  et  fixer 
leurs  rapports.  Cette  table  est  une  décou- 
verte, non-seulement  honorable  pour  son 
auteur  ,  mais  très  essentielle  aux  progrès 
de  l'art.  Cet  habile  artiste  remonta  jusqu'à 
la  naissance  de  l'imprimerie,  pour  la  con- 
naître à  fond.  Il  donna  en  différens  temps 
divers  traites  historiques  et  critiques  sur 
l'origine  et  les  progrès  de  la  typogra- 
phie;, dans  lesquels  on  voit  un  savant 
consommé  dans  la  matière  qu'il  traite. 
Ces  différentes  dissertations  ont  été 
recueillies  en  un  vol.  in-8  ,  divisé  en 
trois  parties.  La  dernière  renferme  une 
histoire  curieuse  des  graveurs  en  bois. 
Mais  l'owvrage  le  plus  important  de  Four- 
nier,  est  son  Ma/mcl  typographique  utile 
aux  gens  de  lettres  ,  et  à  ceux  qui  exer- 
cent les  différentes  parties  de  l'art  de 
r imprimerie,  en  2  vol.  in-8.  L'auleur de- 
vait y  en  joindre  deux  autres  ;  mais  il 
fut  prévenu  par  la  mort  en  17G8.  L'hom- 
me n'était  pas  moins  recommandable  en 
lui  que  l'artiste.  Le  calme  de  son  âme, 
l'esprit  de  religion  dont  il  était  animé, 
répandait  autour  de  lui  une  joie  douce 
et  toujours  égale.  Il  aimait  la  retraite  et 
le  travail ,  et  même  avec  excès  ;  car  ce 
fut  sa  constante  application  qui  causa 
sa  mort.  On  a  des  épreuves  des  différens 
caractères  qu'il  avait  gravés,  dans  son 
Manuel  typographique.  On  y  en  trouve 
même  pour  la  musique  :  il  était  l'inven- 
teur de  ces  sortes  de  caractères;  et  ils 
le  disputent ,  pour  la  beauté  ,  à  la  musi- 
que gravée  en  taille-douce.  C'est  lui  qui 
a  péremptoirement  réfuté  M.  Schœpflin 
qui  avait  attribué  l'invention  de  l'impri- 
merie à  Guttemberg  (  voyez  ce  mot) ,  en 
montrant  que  Guttemberg  ne  s'était  point 
sei-vi  de  caractères  mobiles,  mais  de 
planches  gravées.  Ce  qu'il  y  a  de  remar- 
quable ,  c'est  que  le  passage  même  dont 
M.  Schœpflin  étayait  son  opinion,  laren- 
Tcrse  de  fond  en  comble.  Foyez  le  Jour- 


FOU 

nal  historique  et   litte'rairc ,   P' juillet 
1791  ,  page  327. 

*  FOURNIER  (Pierre-Nicolas),  ingé- 
nieur et  architecte  de  Nantes ,  naquit  à 
Paris  en  1747  d'un  financier.  Il  commen- 
ça ses  études  au  collège  Duplessis  ;  mais 
les  désordres  de  sa  jeunesse  forcèrent  ses 
parens  à  le  placer  dans  un  couvent ,  où 
il  parait  qu'il  porta  l'habit  religieux  pen- 
dant quelques  mois.  Il  embrassa  ensuite 
la  carrière  des  armes,  et,  après  avoir  servi 
quel(f  ue  temps  dans  le  régiment  de  colo- 
nel-général ,  et  dans  celui  de  La  Roche- 
foucault,  il  entra  dans  l'artillerie  royale, 
où  il  resta  de  1770  jusqu'en  1783.  Il  se 
retira  à  Nantes ,  où  il  se  chargea  de  l'ad- 
ministration du  grand  théâtre.  Dès  les 
premiers  symptômes  de  la  révolution ,  il 
se  joignit  aux  Nantais  qui  se  rendirent  à 
Rennes  pour  favoriser ,  disaient-ils ,  la 
liberté  nationale.  Après  le  14  juillet,  lors 
de  la  formation  des  compagnies  armées , 
il  servit  comme  chef  de  bataillon  dans 
celle  de  Nantes.  Il  fut  ensuite  nommé 
commissaire-civil  de  la  force  départemen- 
tale, envoyée  à  Paris  par  le  département 
de  la  Loire-Inférieure,  pour  prêter  un 
appui  aux  représentans  du  peuple  et 
veiller  au  maintien  de  la  liberté.  Fournier 
et  son  détachement  furent  ensuite  requis 
pour  aller  combattre  les  Vendéens.  Re- 
venu à  Nantes  avec  les  débris  de  sa  petite 
troupe,  il  s'y  trouva  le  30  juin  1793. 
Lorsque  cette  ville  fut  assiégée  par  les 
armées  combinées  d'Anjou  et  de  Poitou  , 
il  défendit  son  poste  avec  obstination. 
Peu  de  temps  après,  le  gouvernement 
révolutionnaire  ayant  été  organisé,  Four- 
nier fut  compris  dans  les  cent  trente- 
deux  Nantais  que  Carrier  envoyait  à  Paris, 
disait-il,  mais  qui  devaient  être  assassi- 
nés sur  la  route.  Il  dut  la  vie,  comme  ses 
compagnons  d'infortune ,  à  l'humanité 
de  Broussard ,  et  ensuite  à  celle  du  géné- 
ral Danican ,  qui  se  refusèrent  à  cet  ordre 
barbare.  A  leur  arrivée  à  Paris ,  les  Nan-  m 
lais  furent  jetés  en  prison,  où  ils  de-fl 
meurèrent  pendant  plus  d'un  an.  Pendant'  . 
sa  détention,  Fournier  publia  des  Mé- 
moires où  il  retraçait  les  services  qu'il 
avait  rendus  à  la  cause  révolutionnaire. 
Il  fut  défendu  avec  autant  de  zèle  que  de 


i 


FOU 

talent  par  l'acteur  Beauiieu ,  et  acquitte 
avec  les  autres  Nantais,  deux  mois  après 
la  mort  de  Robespierre.  Il  revint  alors  à 
Nantes ,  où  il  ne  s'occupa  plus  que  des 
fonctions  d'ingénieur.  Ayant  trouvé  quel- 
ques médailles  romaines  en  faisant  creu- 
ser un  aqueduc ,  il  prit  du  goût  pour  les 
antiquités ,  fit  faire  des  fouilles ,  et  dé- 
couvrit plusieurs  monumens  antiques, 
sur  lesquels  il  a  écrit  dififérens  Mémoires 
conservés  à  la  bibliothèque  publique  de 
Nantes.  Il  avait  aussi  tracé  le  plan  de  cette 
ville  telle  qu'elle  était  sous  Henri  III,  et 
y  avait  joint  une  savante  dissertation.  Il 
mourut  dans  cette  ville  le  20  septembre 
1810.  Fournier  était  arcbitecte-voyer  de 
Nantes,  membre  de  la  société  des  scien- 
ces ,  lettres  et  arts  de  la  même  ville  ,  et 
correspondant  de  l'académie  celtique. 

*  FOURNIER  (Charles  ou  Claude), 
né  à  Saint-Domingue  vers  17C0,  ou  en 
Auvergne  en  1745 ,  et  surnommé  l'Amé- 
ricain ,  à  cause  du  long  séjour  qu'il  fit 
en  Amérique ,  fut  un  de  ces  brigands  qui 
désolèrent  la  France  pendant  la  révolu- 
tion .  Quelle  que  soit  sa  patrie,  il  était  à  St.- 
Domingue  vers  1772,  servit  dans  les  dra- 
gons blaucs  pendant  13  ans  :  ce  qui  ne 
l'empêcha  pas  de  se  livrer  à  l'agriculture, 
et  surtout  au  commerce  :  il  perfectionna 
aussi  la  fabrication  du  tafia ,  dont  il  fit 
un  nouveau  genre  d'industrie  pour  l'îie , 
et  oîi  il  gagna  des  sommes  immenses 
qui  le  mirent  en  état  d'établir  des  fabri- 
ques considérables;  mais  sa  fortune  de- 
venue colossale  excita  l'envie  des  autres 
fabricans  qui  lui  suscitèrent  des  pei-sécu- 
tions ,  et  le  retinrent  en  prison  pendant 
plus  de  27  ans.  Forcé  de  quitter  St.-Do- 
mingue  après  avoir  vu  incendier  ses  pro- 
priétés ,  il  revint  en  France  où ,  après 
plusieurs  démarches,  on  lui  offrit  une  in- 
demnité provisoire  :  il  voulait  une  répa- 
ration complète  contre  les  autorités  lo- 
cales; mais  la  révolution  qui  survint  lui 
ôta  les  moyens  de  la  poursuivre.  Arrivé 
en  France  avant  ces  temps  désastreux,  il 
se  trouvait  en  prison  au  commencement 
des  troubles,  pour  les  crimes  qu'il  avait 
commis.  Mais  les  portes  des  prisons  s'ou- 
vrirent aux  cris  de  vive  la  liberté,  et  les 
malfaiteurs   eu    sortirent.    Fournver  fut 

V. 


FOU  fyi5 

bientôt  remarqué  par  les  chefs  de  la  ré- 
volution ,  qui  en  firent  un  aboyeiir  de 
place ,  et  l'admirent  ensuite  dans  le  club 
des  Cordeliers.  Le  13  juin  1789,  il  avait 
été  nommé  commandant  des  volontaires  ; 
mais  il  perdit  cette  place  à  l'époque  de 
l'organisation  de  la  garde  nationale.  Quel- 
ques biographes  prétendent  que ,  lors  de 
l'insurrection  du  champ  de  Mars ,  le  1 7 
juillet  1791  ,  M.  de  La  Fayette  étant  arri- 
vé avec  un  faible  détachement  de  la  garde 
nationale ,  pour  faire  cesser  le  désordre , 
ce  fut  Fournier  qui  lui  lâcha  à  bout  por- 
tant le  coup  de  pistolet  dont  il  faillit 
être  atteint.  Mais  ce  qu'il  y  a  de  certain , 
c'est  qu'au  10  août,  il  commandait  la 
horde  des  brigands  dits  Marseillais^  et 
qu'il  fut  un  de  ceux  qui  contribuèrent  le 
plus  aux  attentats  commis  dans  cette 
affreuse  journée.  Le  palais  des  rois  de 
France  fut  inondé  de  sang.  Mais  par  une 
contradiction  qu'on  ne  saurait  expliquer  , 
Fournier  sauva  la  vie  à  plusieurs  person- 
nes ;  tant  il  est  vrai  que  l'humanité  ne 
perd  jamais  entièrement  ses  droits,  m^me 
chez  les  plus  grands  scélérats  :  ce  n'était 
qu'une  modération  passagère.  On  l'a  ac- 
cusé aussi  d'avoir  pris  part  aux  massacres 
des  prisons  de  Paris  des  2  et  3  septembre  : 
c'est  un  fait  trop  grave  pour  l'avancer 
sans  des  preuves  certaines.  Chargé  de 
conduire  les  prisonniers  d'Orléans  à  Ver- 
sailles ,  il  les  fit  tous  massacrer  dans  cette 
dernière  ville  le  9  septembre  17  92.  Dans 
ces  derniers  temps  d'horreurs  et  d'anar- 
chie, les  bourreaux  avaient  aussi  leur 
tour,  et  finissaient  par  diriger  leur  rage 
les  uns  contre  les  autres.  Fournier  fut 
accusé,  le  12  mars  1793  ,  par  Bourdon  de 
l'Oise  et  Marat,  d'avoir  tiré  un  coup  de 
pistolet  sur  M.  de  La  Fayette  ,  et  d'avoir 
présidé  aux  massacres  de  septembre.  Cette 
accusation  n'eut  pas  de  suite.  Après  le 
1 8  brumaire  ,  il  fut  arrêté  et  condamné  à 
la  déportation  ;  mais  on  se  contenta  de 
le  mettre  en  surveillance.  Enfin  il  se 
trouva  impliqué  dans  l'affaire  du  3  nivôse 
(24  décembre  1800) ,  et  fut  déporté  aux 
îles  deséchelles,  d'où  il  parvint  à  s'éva- 
der à  l'aide  d'une  créole ,  après  avoir 
perdu  tous  ses  compagnons  d'infortune. 
Il  gagna  la  Guadeloupe  ,  et  fut  employé 

27.. 


426  FOU 

par  Victor  Hugues ,  son  ami ,  qui  y  com- 
mandait ,  sur  les  corsaires  qui  étaient  à 
SCS  ordres ,  et  s'y  distingua  lorsque  la 
colonie  passa  sous  la  domination  anglaise. 
En  1808  ,  il  revint  en  France,  fut  arrêté 
de  nouveau ,  et  se  trouvait  encore  à  La 
Force  en  1 8 1 6  ;  mais  ayant  demande  des 
Juges ,  il  filt  relâché  et  traîna  sa  pénible 
existence  jusqu'en  1823,  qu'il  mourut 
dans  un  état  voisin  de  l'indigence.  Il  a 
publié  un  Mémoire  pour  se  justi&er  des 
massacres  des  prisonniers  d'Orléans,  et 
quelques  autres  brochures. 

♦  FOURNIER  SARLOVÈSE  (  Fran- 
çois, le  comte),  lieutenant-général,  né  en 
17  75  dans  le  Périgord.  Sespareus  le  des- 
tinèrent d'abord  au  barreau  ;  mais  en  1 7  92 
il  quitta  ses  études  de  droit  pour  embrasser 
Il  carrière  des  armes.  Entré  comme  sous- 
lieutenant  dans  un  régiment  de  dragons,  il 
obtint  la  plupart  de  ses  grades  sur  le  champ 
de  bataille,  et  en  17  98  à  23  ans,  il  était 
déjà  colonel  du  1 2^  régiment  de  hussards. 
Fournier  était  franchement  républicain; 
mais  il  ne  l'était  pas  à  la  manière  des 
Robespierre  ou  des  Marat  ;  il  tolérait  les 
opinions  des  autres ,  et  au  besoin  il  les 
défendait  :  c'est  ce  qu'il  fit  cette  même  an- 
née 1 798 ,  oîi  il  poursuivit  une  bande  d'as- 
sassins qui  avaient  fait  une  irruption  noc- 
turne dans  le  café  de  Garchi ,  rue  de  Ri- 
chelieu, et  qui  étaient  venus  attaquer  plu- 
sieurs personnes  fort  tranquilies ,  qu'ils 
accusaient  d'être  chouans  et  royalistes. 
Le  colonel  Fournier  repoussa  les  agres- 
seurs, et  dans  celte  lutte  il  reçut  plusieurs 
coups  de  sabres.  Personne  n'a  jamais  con- 
testé à  Buonaparte  le  talent  de  connaître 
les  hommes,  il  sut  estimer  la  valeur  et  la 
bravoure  de  Fournier  ;  il  voulut  qu'il  fit 
partie  de  son  corps  d'armée  d'Italie  :  les 
champs  de  Mareugo  ,  la  vallée  d'Aoste , 
les  rives  de  la  Chiuvella,  Montébello, 
furent  successivement  le  théâtre  de  sa 
valeur ,  et  les  bulletins  de  l'armée  répé- 
tèrent souvent  le  nom  du  12*  régiment 
de  hussards  et  de  son  chef.  Les  éloges  de 
Buonaparte  n'apportèrent  aucun  change- 
ment à  ses  opinions  politiques,  et  ce  fut 
à  haute  voix  qu'il  blâma  les  projets  ambi- 
tieux du  premier  consul.  Comme  il  exer- 
çait la  plus  grande  influence  sur  ses  sol- 


FOU 

dats  ,  on  craignit  de  la  part  de  son  régi- 
ment une  opposition  qui  pouvait  se  com- 
muniquer au  reste  de  l'armée.  Par  ordre  de 
Buonaparte,  Fournier.fut  arrêté  à  l'opéra  : 
le  lendemain  il  fut  conduit  dans  son  ap- 
partement, où  l'on  devait  faire  devant  lui 
l'inventaire  de  ses  papiers  ;  mais  à  peine 
y  fut-il  entré  qu'il  enferma  ses  gardiens 
dans  sa  chambre  et  se  sauva.  Cinq  cents 
hommes  de  la  garde  consulaire,  et  la  gen- 
darmerie d'élite  furent  mis  en  mouve- 
ment pour  le  trouver  :  ils  le  saisirent  en 
effet  quelques  jours  après  ,  et  il  fut  jeté 
dans  la  prison  du  Temple  oii  se  trouvait 
alors  le  chef  d'escadron  Donadieu  que 
l'on  accusait  d'avoir,  de  concert  avec 
lui ,  voulu  assassiner  Buonaparte ,  et  que 
néanmoins  il  ne  connaissait  nullement. 
Aucune  preuve  ne  fut  trouvée  contre  lui  ; 
on  ne  l'exila  pas  moins  dans  le  Périgord. 
L'amiral  Villeneuve  fut  peu  après  chargé 
d'une  expédition  en  Amérique  :  Fournier 
reçut  l'ordre  de  l'accompagner.  Au  re- 
tour de  cette  malheureuse  expédition,  il 
fut  confiné  de  nouveau  dans  le  Périgord 
où  ,  s'ennuyant  d'un  repos  ignominieux , 
il  demanda  du  service.  Appelé  à  partager 
les  succès  de  l'armée  d'Allemagne ,  il  re- 
trouva son  ancienne  bravoure,  et  mérita 
les  éloges  d'un  homme  qui  n'aimait  de  lui 
que  sou  courage.  Chacuu  sait  qu'avant  la 
bataille  d'Eylau,  Buonaparte  lui  dit  :  Co- 
lonel ,  dans  votre  affaire,  il  faut  un  bap- 
tême de  sang.  Fouruier  obéit,  se  distin- 
gua dans  cette  journée,  ainsi  qu'à  Fried- 
land  où  il  fut  nommé  membre  de  la  Lé- 
gion d'honneur  et  général  de  brigade. 
Envoyé  en  Espagne  sous  les  ordres  du 
maréchal  Ney,  il  fit  les  campagnes  de 
1808  et  de  1809  ,  se  distingua  particuliè- 
rement à  Lugo,  où  il  se  défendit  avec  trois  fli 
bataillons  et  deux  escadrons  contre  unéa  1 
armée  entière;  ce  qui  lui  valut  la  croix 
d'officier  de  la  Légion  d'honneur  avec  le 
titre  de  comte.  En  1812  il  fit  la  campa- 
gne de  Russie,  et  se  signala  surtout  pen» 
dant  la  retraite,  particulièrement  au  pas 
sage  de  la  Bérézina  où  il  fit  une  charge 
brillante  de  cavalerie  :  le  grade  de  gé- 
néral de  division  et  la  croix  de  commaoi 
dant  de  la  Légion  d'honneur  furent  la| 
récompense  de  sa  valeur.  Quelques  te- 


FOU 

proches  adresses  à  Buonaparte  après  les 
revers  de  cette  campagne,  furent  con- 
sidérés comme  séditieux  ;  Fournier  Tut 
arrêté  et  envoyé  à  Mayence.  Avant  d'ar- 
river dans  cette  ville,  l'escorte  qui  le  con- 
duisait fut  attaquée  par  des  cosaques  ;  il 
profita  de  cette  circonstance  pour  se  sau- 
ver. Comme  le  bruit  se  répandit  bientôt 
après  qu'il  avait  passé  à  l'ennemi,  il  se 
présenta  à  Mayence  et  demanda  des  juges. 
Cette  conduite ,  que  Buonaparte  admira 
lui-même  en  disant  qu'elle  était  digne 
d'un  chevalier,  n'empêcha  point  sa  desti- 
tution qui  fut  prononcée  par  un  décret. 
Fournier  se  retira  en  Périgord  où  il  fut 
sous  la  surveillance  de  la  police  jusqu'à 
la  rentrée  des  Bourbons.  Ces  princes  ne 
tardèrent  point  à  lui  rendre  son  grade  et 
à  lui  donner  la  croix  de  St. -Louis.  Four- 
nierne  servit  point  pendant  les  cent-jours: 
après  la  seconde  restauration,  il  fit  partie 
de  l'état-major  de  l'armée ,  et  fut  à  plu- 
sieurs reprises  employé  comme  inspec- 
teur-général de  la  cavalerie.  Il  fit  impri- 
mer en  1814  des  Considérations  sur  ta 
législation  militaire  ,  dans  lesquelles  il 
prédisait  d'une  manière  positive  que  Buo- 
naparte reviendrait  de  l'iie  d'Elbe,  et  in- 
diquait les  moyens  qui  devaient  contri- 
buer au  succès  de  cette  entreprise  :  cet 
ouvrage  n'a  pas  été  publié.  Le  général 
Fournier  est  mort  dans  le  mois  de  jan- 
vier 1827.  C'était  un  brave  militaire  :  la 
loyauté  de  son  caractère  l'honore  encore 
plus  que  sa  bravoure. 

*  FOURNIER  (Joseph-Augustin,  mar- 
quis d'Aultane),  lieutenant-général,  mem- 
bre de  plusieurs  ordres  français  et  étran- 
gers, naquit  à  Valréas  le  18  août  1769  et 
mourut  le  7  janvier  1828.  Issu  d'une  fa- 
mille ancienne  illustrée  dans  la  carrière 
des  aimes,  il  était  entré  au  service  à  l'âge 
de  16  ans,  et  lorsque  la  révolution  éclata, 
il  avait  le  grade  de  capitaine  de  grena- 
diers. Il  fut  du  petit  nombre  des  anciens 
nobles  qui  restèrent  dans  l'armée,  et  on  le 
•yit  combattre  aux  affaires  de  Menin  ,  de 
Courtray  ,  de  Valmy.  Appelé  à  l'état-ma- 
jor de  l'armée ,  il  fut  nommé  général  de 
brigade.  L'amitié  qui  le  liait  à  Morcau  fut 
la  cause  de  sa  disgrâce  :  pendant  un  an  il 
resta  sans  emploi.  Devenu  ensuite  chef 


FOU  47.7 

d'état-major  au  3"  corps  de  l'arinée  d'Al- 
lemagne, il  se  distingua  à  Austerlitz  et  à 
léna,  fit  la  campagne  de  Pologne,  se 
couvrit  de  gloire  dans  les  champs  de  Pnl- 
tusk,  et  fut  promu  le  31  décembre  1806 
au  grade  de  général  de  division.  Après 
avoir  été  gouverneur  de  Varsovie,  il  passa 
en  Espagne  oii  il  resta  jusqu'à  la  retraite 
de  1814  :  il  termina  ses  glorieuses  cam- 
pagnes de  l'empire  à  la  bataille  de  Tou- 
louse. Sous  la  première  restauration,  il 
fut  inspecteur-général ,  et  dans  le  mois  de 
mars  1815  il  était  chef  d'état-major  de 
l'armée  royaliste ,  sous  les  ordres  du  duc 
d'Angoulême.  Cette  expédition  n'ayant 
pas  été  heureuse,  ce  fut  d'Aultane  qui 
négocia  avec  les  généraux  de  Buonaparte 
la  capitulation  conclue  au  Pont-St.-Es- 
prit,  et  qui  après  avoir  été  convenue,  fut 
deux  fois  suspendue.  Lorsque  le  prince 
se  fut  embarqué  ,  le  général  d'Aultane  se 
rendit  à  Paris  où  il  fut  destitué  et  mis  en 
surveillance.  Après  le  deuxième  retour 
des  Bourbons  ,  il  fut  nommé  commandant 
de  la  7*  division  militaire  :  mais  il  n'ac- 
cepta point  cette  place ,  et  mourut  le  7 
juin  1828.  Ce  brave  militaire  avait  une 
probité  et  un  désintéressement  dont  plu- 
sieurs villes,  entr'autres  Ratisbonne,  ont 
conservé  les  souvenirs  dans  leurs  archi- 
ves. 

FOURNIVAL  (Simon),  commis  au 
secrétariat  des  tr  é.«oriers  de  Fr:.nce,a 
fait  un  Recueil  des  titres  qui  les  concer- 
nent,  Paris,  1655,  in-fol.  ;  qui  est  rare. 
Il  a  été  continué  par  M.  Jean-Léon  du 
Bourgneuf,  trésorier  de  France  à  Orléans, 
et  imprimé  en  cette  ville  in-4,  1745, 
2  parties.  Ces  collections  ont  une  place 
dans  les  grandes  bibliothèques. 

FOURNY  (Honoré  Caille  Du),  audi- 
teur de  la  chambre  des  comptes  à  Paris, 
acquit  une  connaissance  de  l'histoire  de 
France ,  et  des  anciens  titres  et  archives 
qu'on  garde  à  Paris,  qui  lui  fit  un  nom  : 
mais  sa  modestie  et  son  zèle  à  obliger  ses 
amis  le  rendirent  encore  plus  recomman- 
dable.  Un  de  ceux  avec  qui  il  lia  amitié,  fut 
le  Père  Anselme  de  la  Vierge-Marie,  augus- 
tin-déchaussé ,  qui  avait  publié  en  1674 
Y  Histoire  ge'ne'alogique  et  chronologique 
de  la  maison  de  France,  et  des  grands- 


4^8  FOU 

officiers  de  la  couronne.  Du  Fourny  lui 
prodigua  ses  avis  pour  une  nouvelle  édi- 
tion, luiAt  corriger  un  très  grand  nom- 
bre de  fautes,  et  lorsque  ce  religieux  fut 
mort  en  1694  ,  il  continua  de  travailler 
à  perfectionner  ce  grand  ouvrage.  Cepen- 
dant, dans  la  nouvelle  édition  qui  vit  le 
jour  en  1712,  il  voulut  que  les  correc- 
tions parussent  être  toutes  du  premier 
auteur ,  et  il  ne  s'attribua  que  l'honneur 
d'avoir  continué  la  suite  des  grands-of- 
ficiersjusqu'à  cette  année.  L'abbé  de  Lon- 
guerue  l'a  certainement  jugé  avec  trop 
de  sévérité,  quand  il  a  dit  :  «  M.  du  Four- 
»  ny  était  un  bonhomme ,  incapable  de 
»  vouloir  tromper.  Il  savait  sa  chambre 
»  des  comptes  ;  mais  il  ne  savait  que 
»  cela.  Son  livre  fourmille  de  fautes.  On 
»  lui  fournissait  des  mémoires  ;  mais  il 
»  ne  savait  pas  assez  reconnaître  ce  qu'ils 
■»  avaient  de  défectueux.  »  Il  est  bien  vrai 
que  Du  Fourny  n'a  pas  corrigé  toutes  les 
fautes  qui  se  trouvaient  dans  l'ouvrage 
du  Père  Anselme.  Mais  quel  est  le  criti- 
que ,  même  érudit  et  judicieux ,  qui ,  en 
fait  de  recherches  et  de  nionumens  plus 
ou  moins  authentiques ,  puisse  se  flatter 
de  se  déterminer  toujours  avec  certitude  ? 
Du  Fourny  mourut  en  1731.  Gette  77/^- 
toire  est  à  présent  en  9  vol.  in-fol. ,  pu- 
bliés depuis  1726  jusqu'en  17-33,  par  les 
Pères  Ange  et  Simplicicn ,  augustius-dé- 
chaussés,  continuateurs  de  celte  utile 
compilation  ;  ils  ont  mis  le  plus  grand 
soin  à  distinguer  les  pièces  authentiques 
de  celles  qui  ne  l'étaient  pas.  Du  Fourny 
mourut  en  1731. 

FOURQUEVAUX  (  Raimond  de  Bec- 
cari  de  Pavie,  baron  de),  était  d'une 
branche  de  l'ancienne  famille  noble  de 
Beccari  de  Pavie ,  retirée  en  France  au 
temps  des  guerres  entre  les  Guelphes  et 
les  Gibelins,  né  à  Toulouse  en  1 509  ^  il 
commença  à  servir  au  siège  de  Naplës  sous 
Lautrec,  en  1 528.  Il  commandait  un  corps 
considérable  d'infanterie  grisonne  et  ita- 
lienne à  la  bataille  de  Marciano  en  Tos- 
cane, l'an  1554  ;  il  y  futblessé  et  prison- 
nier ,  et  gardé  1 5  mois  dans  le  fort  de 
San-Miniato  à  Florence.  De  retour  en 
France,  il  obtint  le  gouvernement  de 
Narbonne.  On  raconte  qu'il  se  servit  d'un 


FOX 

stratagème  assez  singulier  pour  en  chas- 
ser plusieurs  habitans  mal-intentionnés. 
Il  fit  publier  que  deux  chevaliers  espa- 
gnols devaient  se  battre  en  champ-clos 
hors  de  la  ville.  Il  fit  poser  des  barrières 
pour  les  combattaus,  et  dresser  des  écha- 
fauds  pour  les  juges.  Tout  le  peuple  étant 
sorti  de  la  ville  pour  assister  à  ce  spec- 
tacle, il  en  fit  fermer  les  portes,  et  ne 
laissa  rentrer  que  les  sujets  fidèles  au  roi. 
Il  contribua  beaucoup  en  1562  à  la  déli- 
vrance de  Toulouse ,  dont  les  huguenots 
s'étaient  presque  rendus  maîtres  ;  et  mou- 
rut chevalier  de  l'ordre  du  roi ,  à  Nar- 
bonne,  en  1574,  à  66  ans,  après  avoir 
rendu  des  services  importans  aux  monar- 
ques qui  l'employèrent  dans  la  province 
du  Languedoc.  Fourquevaux  est  auteur 
d'un  livre  intitulé  ;  J^ies  de  plusieurs 
grands  Capitaines  français ,  imprimé  à 
Paris  en  1643,  in-4.  Ces  vies  sont  au 
nombre  de  14.  Elles  sont  compilées  fort 
exactement  d'après  les  historiens  du 
temps  :  c'est  dommage  que  l'auteur  n'en 
ait  pas  rassemblé  un  plus  grand  nombre. 
FOURRIER  (Pierre), de Mathincourt, 
bourg  de  Lorraine  dont  il  était  curé , 
était  d'un  autre  bourg  nommé  Mirecourt, 
oiiilnaquitea  1565.  Il  entra  jeune  parmi 
les  chanoines-réguliers  ,  chez  lesquels  il 
se  distingua  par  sou  savoir  et  sa  piété.  Il 
établit  deux  nouvelles  congrégations , 
l'une  de  chanoines-réguliers  réformés 
qui  enseignent,  et  l'autre  de  religieuses 
pour  l'instruction  des  filles.  Le  pape  Paul 
V  approuva  ces  établissemens  en  1615  et 
1616.  Il  est  difficile  de  dire  tout  le  bien 
qu'elles  ont  opéré  et  qu'elles  opèrent  en- 
core dans  le  monde  chrétien.  Les  reli-  .M 
gieuses ,  nommées  communément  de  la  \ 
Congrégation  de  Notre-Dame,  ont  par- 
ticulièrement estimées  dans  toutes  les 
villes  oii  elles  sont  établies  :  elles  y  jouis- 
sent de  la  confiance  bien  méritée  des  pa- 
rens  pour  l'éducation  de  leurs  enfans ,  et 
répandent  l'instruction  avec  l'amour  de 
la  vertus.  Le  Père  Fourrier  mourut  sain- 
tement en  1640.  Il  a  été  béatifié  en  1730..  • 
FOURS  Y.  FoyezYvv^i.  M 

FOX  (  Jean  ),  né  à  Boston  en  1517 ,  " 
quitta    l'Angleterre  sous  le    règne    de 
Henri  VIII  pour  professeï'  le  calvinisme 


FOX 

en  libelle.  Il  fit  quelques  voyages  dans 
sa  patrie  ,  et  s'y  fixa  entièrement  sous  la 
reine  Elizabelh.  Il  mourut  dans  un  âge 
avancé.  L'ouvrage  par  lequel  il  est  prin- 
cipalement connu,  est  intitulé  :  Acta  et 
monumenta  Ecclesiœ  ,  en  3  vol.  in-fol., 
réimprimé  en  1684.  Péarson  lui  reproche 
des  erreurs,  de  fausses  citations, de  mau- 
vais raisonnemens,  etc.  ;  dans  une  tète 
échaidïée  comme  la  sienne  par  les  nou- 
veaux dogmes,  cela  ne  pouvait  être  au- 
trement. Dans  sa  jeunesse  il  avait  cultivé 
la  poésie,  pour  laquelle  il  avait  quelque 
talent.  On  a  de  lui  plusieurs  pièces  de 
théâtre.  Jacques  Bienvenu  a  traduit  le 
Triomphe  de  Jésus-Christ,  Genève,  1562, 
in-4  ,  rare.  Son  fils  Samuel  Fox  a  écrit  sa 
vie  qui  a  été  imprimée  en  tête  des  actes 
et  monumens  de  t église. 

FOX  (  Georges  ),  fondateur  de  la  secte 
des    Quakers    ou  Trembleurs ,   né    au 
village  de  Breton  dans  le  comté  de  Lei- 
cester,   en   1624,  n'avait  que    19  ans, 
lorsque  sa  tète    s'étant    singulièrement 
exaltée ,  soit  par  quelque  accident  parti- 
culier ,  soit  par  un  effet  de  son  tempé- 
rament, il  se  crut  tout  d'un  coup  in- 
spiré de  Dieu ,  et  se  mit  à  prêcher.  Velu 
de  cuir  ,  depuis  les  pieds  jusqu'à  la  tête, 
il  allait  de   village  en   village,    criant 
contre  la  guerre  et  contre  le  clergé.  Son 
ignorance  dans  les  lettres  humaines  ne 
l'embarrassa  point.  Quoique  fils  d'un  ou- 
vrier eu  soie ,  et  quoiqu'on  ne  lui  eût 
appris  d'autre  métier  que  celui  de  cor- 
donnier, il  s'était  appliqué   de    bonne 
heure  à  parler  le  langage  de  l'Ecriture  et 
de  la  controverse.  Il  avait  de  la  mémoire 
et  de  l'enthousiasme.  Les  provinces  de 
Leicester  ,  de  Nottingham  et  de  Darbi , 
furent  les  premiers  théâtres  de  ce  sombre 
charlatan.  Il  donna  aux  aveugles  enthou- 
siastes  qui    le  suivaient ,  le  nom  à' en- 
fans  de  la  lumière.   Ayant  comparu  à 
Darbi  devant  les  juges  ,  il  les  prêcha  si 
fort  sur  la  nécessité  de   trembler  devant 
le  Seigneur,  que  le  commissaire  qui  l'in- 
terrogeait ,  s'écria  qu'il  avait  affaire  à  un 
quaker,  c'est-à-dire    trembleur  en  an- 
glais ,  nom  qu'on  a  donné  depuis  à  cette 
secte.  Fox  s'associa  des  femmes;  ayant 
counu  dans  la  prison  de  Lancastre  la  dame 


FOX  42g 

Fell,  veuve  d'un   illustre  magistrat  de 
cette  province ,  il  lui  inspira  ses  erreurs 
et  l'épousa.  Le  patriarche  duquakérisme 
emmena  avec  lui  sa  prosélyte  en  Améri- 
que, l'an  1662.  Elle  partagea  les  fonc- 
tions de  son  ministère ,  et  fit  valoir  ses 
extravagances.  Il  y  eut ,  chez  les  sots  et 
les  dupes ,  les  mêmes  succès  qu'il  avait 
eus  dans  une  partie  de  l'ancien  monde. 
Ce  succès  lui  persuada  que  si  l'Europe, 
l'Asie  et  l'Afrique  ne  s'étaient  pas  encore 
rangées  sous  ses  étendards,  c'est  qu'elles 
l'ignoraient.  Il  écrivit  donc  à  tous  les  sou- 
verains des  lettres  insensées  ,  qu'on  paya 
du  plus  profond  mépris.  Fox,  revenu  en 
Angleterre ,  continua  de  répandre  ses  rê- 
veries, et  mourut  en  1681.  Peu  de  temps 
avant  sa  mort ,  il  composa  un  gros  volu- 
me sur  sa  Fie  et  ses  Missions  -.  pour  le 
Rendre  plus  mystérieux ,  il  défendit  par 
son  testament  de  l'imprimer.    On  peut 
voir  ce  qu'en  dit  le  Père  Catrou  dans 
son  Histoire  des  Trembleurs ,  publiée 
en  1733  (  l'oyei  Barclay  Robert).  Dans 
une   réponse  faite  aux  quakers  qui,  en 
1791,  étaient  venus  dans  l'assemblée  na- 
tionale de  France ,  Mirabeau  réfuta  leurs 
principes  en  ces  termes  :  «  Vous  ne  prêtez 
»  point,  dites-vous,  de  sermens  :  mais  vous 
»  vous  trompez  ;  un  serment  n'est  qu'une 
»  pronjesse  faite  à  Dieu  ;  la  conscience 
a  d'une  âme  pure  est  un  temple  de  la  Di- 
»  vinité ,   et ,    en  promettant  sur   votre 
»  conscience,  vous  faites  intervenir  Dieu 
»  dansvosparoles...Le  sang  humain  n'est 
«  jamais  versé  par  vous  sur  la  terre  :  tou- 
»  chante  philosophie!  maisprenez garde; 
u  ne  seriez-vous  pas  dans  une  erreur  que 
M  la  vertu  vous  cache  ?  Auriez-vous  per- 
■»  mis  que  ces  hordes  de  sauvages,  qui 
n  errent  dans  les  déserts  de  l'Amérique , 
»  eussent  porté  le  massacre  dans  la  paci- 
w  fique  Pensylvanie,  qu'ils  eussent  égorgé 
»  vos  femmes,  vos  enfans,  vos  vieillards, 
«  plutôt  que  de  sauver  ces  vies  si  chères 
»  en  donnant  la  mort  à  des  meurtriers  ?  » 
On   sait   qu'un  écrivain  trop  fameux  a 
comparé  le  christianisme  naissant  à  la 
secte  des  quakers.  Un  si  étrange  paral- 
lèle pourrait  faire  soupçonner  qu'il  avait 
lui-même" de  fortes  dispositions  au  qua- 
kérisme.  Quand  la  secte  des  quakers  aura 


43o  FOX 

subjugiifi  les  philosophes  et  les  rois;  quand 
elle  aura  détruit  toutes  les  autres  religions, 
et  cela  dans  un  siècle  aussi  éclairé  que 
celui  d'Auguste;  quand  durant  18  siècles 
elle  aura  eu  le  suffrage  de  tous  les  bons 
esprits ,  elle  aura  pour  elle  un  grand  ar- 
gument. C'est  à  ceux  qui  savent  apprécier 
les  possibilités  et  pressentir  l'avenir,  à 
prononcer  si  le  fanatisme  des  trembleurs 
aura  jamais  ces  succès.  Les  écrits  de  Fox 
ont  été  réunis  en  3  vol.  in  fol.  :  le  pre- 
mier contient  son  Journal,  le  second  sa 
Correspondance ,  le  troisième  ce  qu'il  a 
écrit  sur  sa  doctrine.  Quelques  person- 
nes ont  prétendu  qu'il  n'était  pas  réelle- 
ment l'auteur  de  ces  différens  ouvrages; 
mais  ses  sectateurs  soutiennent  que  tout 
ce  que  ce  recueil  renferme  de  plus  admi- 
rable est  réellement  de  leur  patriarche. 
*  FOX  (Charles- James),  le  plus  grand 
orateur  politique  de  l'Angleterre,  trois 
fois  ministre ,  long-temps  chef  de  l'oppo- 
sition anglaise,  fut  un  de  ces  hommes  dont 
le  génie  opéra  sur  leurs  contemporains  la 
plus  puissante  influence,  en  sorte  qu'à  leur 
nom  se  rattache  l'histoire  de  toute  une  épo- 
que. D'un  autre  côté  Fox  fut  livré  à  toutes 
les  passions  et  à  tous  les  vices  :  les  irrégu- 
larités, les  écarts,  les  fautes  de  sa  vie  pri- 
vée seront  sans  doute  un  jour  effacés  par 
la  gloire  de  ses  grands  talens  :  mais  nous 
sommes  encore  trop  rapprochés  de  lui 
pour  ne  pas  nous  rappeler  ses  liaisons  avec 
les  hommes  les  plus  vicieux  de  l'Angle- 
terre et  des  pays  qu'il  visita ,  ses  débau- 
ches ,  son  amour  effréné  pour  le  jeu ,  les 
moyens  peu  honorables  auxquels  il  eut 
souvent  recours  pour  subvenir  à  ses  pre- 
miers besoins.  Les  anciens  auraient  dit  de 
lui  qu'il  réunissait  les  vices  d'Alcibiade  à 
l'éloquence  de  Démosthène ,  et  nous , 
nous  disons  qu'il  fut  sous  bien  des  rap- 
ports , ,  le  Mirabeau  de  l'Angleterre. 
Tous  les  biographes  ont  reconnu  deux 
hommes  dans  Fox ,  le  libertin  et  l'ora- 
teur ;  ils  les  ont  séparés  avec  soin  ; 
nous,  nous  les  réunissons,  parce  que 
cette  réunion  servira  à  expliquer  plus 
d'un  fait,  et  qu'elle  fera  comprendre  beau- 
coup mieux  le  caractère  extraordinaire  de 
cet  homme  d'état ,  qui  sut  ainsi  de  son 
vaste  génie  toucher  les  deux  extrêmes  de 


FOX 

la  dégradation  et  de  la  noblesse ,  et  met- 
tre son  âme  sous  l'empire  tyrannîque  de 
tant  de  passions  opposées.  Né  à  Londres, 
le  24  janvier  17  48,  il  était  le  S^fils  deHenri 
Fox,  premier  lord  Hoiland,  qui  obtint  le 
ministère  de  la  guerre  sous  Georges  11  et 
fut  presque  toute  sa  vie  le  rival  de  Wil- 
liam Pitt,  lord  Chatam  :  le  fils  de  cet  il- 
lustre personnage  devait  plus  tard  con- 
tinuer cette  lutte.  Le  jeune  Fox  avait 
des  dispositions  heureuses  :  malgré  son 
goût  pour  la  dissipation ,  les  progrès  qu'il 
fit  au  collège  d'Eton  et  à  l'université  d'Ox-, 
ford  dans  différens  genres  d'instruction , 
furent  grands  et  rapides.  Ses  succès  con- 
firmèrent les  espérances  que  son  père 
avait  conçues  de  lui  :  mais  lord  Hoiland 
avait  adopté  le  plus  singulier  et  le  plus 
faux  de  tous  les  systèmes  d'éducation  r 
loin  de  mettre  un  frein  aux  passions  de 
son  fils  ,  il  sembla  les  favoriser ,  cro^'ant 
les  éteindre  par  la  satiété.  Il  connaissait 
peu  le  cœur  humain  :  car,  s'il  Teût  étu- 
dié d'une  manière  sérieuse ,  il  eût  trouvé 
qu'il  est  en  nous  des  appétits  qui ,  sem- 
blables à  la  flamme,  s'accroissent  lors- 
qu'on les  alimente.  Il  laissa  le  jeune  Fox 
abandonné  entièrement  à  lui-même  ;  cet 
élève  de  la  nature  n'éprouva  ni  résistance 
à  ses  volontés  ni  obstacles  à  ses  désirs. 
Dès  l'âge  de  14  ans,  c'était  un  joueur 
consommé  :  tous  les  jours  il  recevait  alors 
cinq  guinées  pour  les  risquer  au  jeu  :  plus 
tard  il  risqua  sur  le  fatal  tapis  sa  fortune , 
son  repos,  l'estime  de  ses  amis ,  sa  repu- , 
talion  :  il  perdit  tout ,  excepté  sa  gloire  ; 
encore  ne  put-il  pas  la  conserver  intacte  : 
la  tache  de  sa  vie  privée  y  est  encore  em- 
preinte. Son  éducation  classique,  quoi- 
que interrompue  par  des  absences  et  des 
voyages,  quoique  distraite  par  le  déran- 
gement de  ses  passions ,  fut  terminée 
d'une  manière  brillante  :  il  étonnait  ses 
maîtres  par  son  savoir ,  et  toute  sa  vie  les 
classiques  grecs  et  latins  amusèrent  ses] 
loisirs.  A  20  ans  Fox  vint  en  France  :  ilj 
s'y  distingua  par  son  gofit  pour  la  toi-^ 
lette  ;  c'était  un  bel  esprit ,  un  fashiona- 
ble ,  dont  les  bons  mots  circulaient  dat 
les  salons.  Elégant  et  bien  fait,  il  pouvait 
sans  peine  devenir  un  homme  à  la  mode,| 
et  il  le  fut  dans  tous  les  pays  du  continent  j 


FOX 

qu'il  parcourut  alors.  Son  dësir  était  de 
se  faire  remarquer  :  il  y  parvint ,  et , 
comme  sur  les  routes ,  il  ne  pouvait  fixer 
ratlention  qu'à  l'aide  de  son  argent,  il 
eut  alors  la  fureur  de  la  dépense  ;  mais  sa 
prodigalité  altéra  sa  fortune  :  les  femmes 
et  le  jeu  en  dissipèrent  les  restes.  Son 
père,  Impatient  de  le  voir  figurer  sur  la 
scène  politique,  le  fit  nommer  en  1768 
membre  de  la  chambre  des  communes  par 
le  bourg  de  Midburst  dans  le  comté  de 
Sussex.   Fox  n'avait  point  encore  l'âge 
voulu  par  les  lois  ;  et ,  ce  qu'il  y  a  de  re- 
marquable ,  sa  nomination  ne  fut  pas  con- 
testée. Il  ne  recula  pas  devant  l'austérité 
des  travaux  législatifs,  et  son  premier 
di-scours  annonça  l'homme  d'état  et  l'o- 
rateur. Les  antécédens  de  lord  Holland 
plaçaient  naturellement  son  fils  dans  les 
rangs  ministériels  :  aussi ,  quand  Fox  dé- 
buta dans  la  carrière  politique,  ce  fut 
sous  la  bannière  du  pouvoir  qu'il  se  plaça  : 
il  parla  contre  la  pétitioo  de  Wilkes ,  dé- 
puté nommé  du  comté  de  Middiessex,  et 
alors  détenu  dans  la  prison  du  Banc  du 
Roi  :  le  pétitionnaire  réclamait  contre  sa 
captivité  qu'il  taxait  d'arbitraire  et  qui  le 
privait  de  siéger  à  la  chambre  ,  et  deman- 
dait à  prouver  la  légalité  de  sa  nomina- 
tion. L'opinion  publique,  cette  bizarre 
et  capricieuse  reine  du  monde ,  avait  pris 
la  défense  de  Wilkes  :  il  n'y  eut  que  le 
ministère  qui  applaudit  à  la  polémique 
de  Fox  ;  mais  chacun  applaudit  à  son  ta- 
lent, à  sa  naissante  éloquence,  et  le  cen- 
seur anonyme  qui  publiait  alors  les  Let- 
tres de  Junius,  lui  donna  même  des  en- 
courageraens.  Lord  JVolh,  chancelier  de 
l'échiquier,  voulant  récompenser  les  ef- 
iprts  du  jeune  député  et  croyant  que  son 
opinion  n'avait  été  qu'un  calcul  d'am- 
bition ,  le  nomma  d'abord  payeur  de  la 
caisse  des  veuves  et  des  orphelins ,  puis 
l'un  des  lords  de  l'amirauté,  et  enfin  mem- 
bre de  la  trésorerie.  Il  se  trompait ,  et,  si 
Fox  vota  avec  le  ministère  jusqu'en  1772, 
souvent  on  le  vit  manifester  des  opinions 
contraires.  Vers  ce  temps-là,  il  commença 
à  se  lier  avec  les  membres  de  l'opposition, 
et  notamment  avec  Burcke  :  cette  liaison 
lui  fit  perdre  sa  place  ;  mais  auparavant 
le  ministère  lui  fit  des  remontrances  qui 


FOX  43 1 

furent  mal  accueillies  :  dans  la  discussion 
du  bill  sur  le  serment  du  Test ,  ou  sur 
l'adhésion  aux  articles  de  religion  dont 
quelques  citoyens  avaient  demandé  à  être 
exemptés ,  il  professa  des  opinions  indé- 
pendantes et  un  système  de  tolérance  peu 
convenable  aux  ministres  (1772).  Lord 
Noth  lui  fit  passer  pendant  la  séance  un 
billet  signé  de  sa  main  :  c'était  sa  desti- 
tution. Fox  s'en  consola  en  reprenant  plus 
que  jamais  sa  vie  dissipée.  Les  femmes,  le 
jeu,  les  paris,  la  table,  tous  les  moyens 
de  dépenses  furent  employés  par  ce  jeune 
étourdi ,  pour  se  donner  du  plaisir  ;  on 
eût  dit  qu'il  cherchait  à  se  ruiner  :  en 
peu  de  temps,  il  dépensa  les  sommes  con- 
sidérables que  lui  avait  procurées  la  vente 
d'une  terre  qu'il  avait  dans  l'île  de  Tha- 
net,  et  bientôt  il  ne  posséda  plus  rien.  Il 
ignorait  peut-être  auparavant  que  l'état 
de  gêne  perpétuelle  est  une  espèce  d'es- 
clavage, et  que  tout  esclavage  dégrade 
l'âme  la  plus  noble  :  il  put  s'en  convain- 
cre lui-même  lorsqu'il  se  vil  contraint  de 
recourir  à  des  moyens  vils  et  honteux 
pour  subvenir  aux  premières  nécessités 
de  la  vie.  Disons  cependant  à  son  hon- 
neur qu'il  préféra  les  persécutions  de  ses 
créanciers  aux  exigeances  du  pouvoir,  et 
qu'il  sut  conserver  son  indépendance  po- 
litique.  Mais  ses  débauches  affaiblirent 
sa  santé  ;  sa  constitution  robuste  ne  put 
lutter  contre  son  goût  efixéné  pour  les. 
plaisirs ,  et  contre  la  nécessité  d'un  tra- 
vail soutenu  pour  les  débats  parlementai- 
res. Dans  le  but  de  réparer  ses  forces  usées, 
il  se  condamnait  à  un  sommeil  de  com- 
mande :  mais  l'abus  du  laudanum  ne  fit  que 
verser  dans  son  corps  fatigué  la  maladie 
à  laquelle  il  devait  succomber.  Malgré  ses 
distractions  ruineuses,  Fox  n'avait  point 
abandonné  la  carrière  politique.  Sou  père 
étai  t  mort  en  1 7  7  4 ,  lui  laissant  une  fortune 
considérable  (  1,500,000  livres  sterlings 
environ)  qui  fut  bientôt  dissipée.  Ce  fut 
à  l'époque  oii  l'on  examina  la  conduite  du 
ministère  relativement  aux  colonies  an- 
glaises,  que  Fox  montra  l'opposition  la 
plus  forte  :  devenu  chef  des  Wighs ,  il 
se  mit  en  avant  dans  toutes  les  discus- 
sions oîi  U  s'agit  de  l'Amérique  :  il  défen- 
dit la  cause  des  peuples  du  nouveau  cou- 


43i  FOX 

tinent,  prétendit  qu'on  n'avait  pas  le 
droit  de  s'opposer  à  la  demande  qu'ils 
faisaient  de  s'imposer  eux-mêmes ,  et , 
quand  il  \it  l'opposition  du  ministère,  il 
sembla  prédire  tous  les  malheurs  qui  al- 
laient résulter  de  cette  faute  pour  la  do- 
mination anglaise ,  et  dit  que  lord  Noth 
aurait  le  talent  de  perdre  dans  une  seule 
campagne  plus  de  provinces  qu^  Alexan- 
dre le  Grand  n^ était  parvenu  à  en  con- 
quérir. Il  y  avait  sans  doute  de  l'exagé- 
ration dans  cette  réflexion,  dictée  un  peu 
par  la  mauvaise  humeur  ;  mais  la  vérité 
est  qu'il  annonça  par  là  la  prochaine  sé- 
paration des  colonies  et  de  la  métropole. 
Après  cette  session  que  bien  des  circon- 
stances contribuèrent  à  rendre  célèbre 
(1776),  Fox  fit  un  voyage  en  France, 
pressentit  les  dispositions  du  cabinet  de 
Versailles,  se  confirma  dans  son  opinion, 
et ,  pendant  toute  la  guerre  d'Amérique , 
il  ne  cessa  d'en  attaquer  les  auteurs.  Dans 
le  mois  de  décembre  1779,  il  éleva  une 
vive  discussion  sur  les  affaires  maritimes, 
reprocha  à  l'amiral  sa  négligence,  deman- 
da sa  destitution ,  accusa  l'amirauté  en 
masse  ,  fit  un  grand  nombre  de  motions 
toutes  dirigées  contre  le  ministère.  A  la 
suite  d'une  de  ses  chaleureuses  improvi- 
sations ,  rapportées  infidèlement  dans  un 
journal ,  Fox  fut  appelé  en  duel  par 
M.  Adam  qui  crut  avoir  été  insulté ,  et  qui 
le  blessa  légèrement  (29  mars  1779).  Fox 
était  devenu  l'homme  du  peuple  après 
avoir  été  l'homme  du  ministère  :  le  peu- 
ple se  porta  en  masse  devant  sa  maison 
pour  s'informer  de  sa  santé  ,  et  une  foule 
nombreuse  se  fit  inscrire  chez  lui.  Ce- 
pendant des  élections  générales  avaient 
été  ordonnées  pour  1780:  Fox,  malgré 
l'opposition  du  ministère ,  fut  élu  député 
par  Westminster.  Dans  le  parlement  qui 
fut  convoqué  alors,  l'opposition  devint 
encore  plus  vive  qu'elle  n'avait  été  jus- 
que là.  On  vit  Fox  blâmer  avec  violence 
et  hardiesse  la  marche  du  ministère  ;  il 
demanda  des  enquêtes  sur  sa  conduite, 
sur  la  guerre  d'Amérique ,  sur  la  mau- 
vaise administration  de  la  marine  ;  enfin, 
nous  le  dirons,  il  accabla  lord  North  et  le 
força  de  se  retirer  (  février  1 782  ).  Le  nou- 
veau ministère  composé  sous  le  nom  du 


FOX 

marquis  Rockingham,  compta  Fox  parmi 
les  secrétaires  d'état  :  il  devint  ministre 
des  affaires  étrangères  :  cet  orateur  n'a- 
vait encore  que  25  ans.  Pendant  la  courte 
durée  de  cette  administration  qui  n'eut 
le  pouvoir  que  pendant  quelques  mois , 
quelques  mesures  favorables  à  la  paix  gé- 
nérale furent  prises  par  le  gouvernement: 
les  chambres  cherchèrent  à  restreindre 
l'influence  de  la  couronne.  Ainsi  les  con- 
tractans  ou  les  fournisseurs  du  gouver- 
nement furent  privés  du  droit  d'entrer  à 
la  chambre  des  communes  ;  les  préposés 
des  douanes  ou  de  Vaccise ,  perdirent  la 
faculté  de  voter  dans  les  élections.  On 
chercha  à  pacifier  l'Irlande,  une  poli- 
tique généreuse  fut  adoptée  à  son  égard. 
Mais  tout  à  coup  la  mort  du  marquis  de 
Rockingham ,  arrivée  dans  le  mois  de 
juillet  de  la  même  année,  amena  un  chan- 
gement dans  le  ministère  :  Fox  n'en  fit 
plus  partie.  Redevenu  simple  député, 
on  eût  cru  qu'il  allait  recommencer  cette 
opposition  qui  avait  été  la  cause  de  sa 
popularité;  il  n'en  fut  point  ainsi.  On  le 
vit ,  au  grand  étonuement  de  toute  l'An- 
gleterre ,  entrer  en  quelque  sorte  en  né- 
gociation avec  l'ancien  ministère,  au- 
quel il  devait  sa  première  destitution  : 
il  était  encore ,  il  est  vrai ,  opposé  au  mi- 
nistère, car  il  ne  pouvait  y  avoir  rien  de 
commun  entre  lord  Noth  et  lui  :  c'étaient 
deux  systèmes  entièrement  opposés  que 
l'ambition  et  le  mécontentement  réu- 
nissaient pour  un  instant  :  c'était  une  coa- 
lition entre  deux  partis  extrêmes  pour 
faire  tomber  un  ennemi  commun.  Cette 
ligue  parvint  à  son  but  :  le  ministère 
dont  Pitt  faisait  partie  tomba ,  et  Fox 
pour  la  seconde  fois  reprit  un  portefeuille 
(  2  avril  1783  ).  Ce  fut  sous  ce  ministère 
qu'eut  lieu  le  traité  de  paix  définitif 
avec  toutes  les  puissances  que  l'Angle- 
terre avait  eues  à  combattre ,  et  Noth 
auteur  opiniâtre  de  la  guerre,  qui  faisait 
aussi  partie  du  ministère,  se  vit  obli- 
gé d'y  concourir.  Ce  ministre ,  ainsi  qu 
Fox  ,  avait  auparavant  combattu  viv 
ment  les  préliminaires  de  la  paix  ;  mais 
chose  bien  singulière ,  et  cependant  fré- 
quente dans  les  gouvernemeiis  constitu- 
tionnels, c'est  qu'il  ne  fût  rien  changé  aux 


I 
1 


FOX 

conditions  proposées  d'abord.  La  neutrali- 
té des  puissances  du  Nord  auxquelles  l'An- 
gleterre défendait  de  fournir  à  la  France 
des  bois  de  construction  fut  un  léger  ob- 
stacle à  la  paix  :  néanmoins  elle  fut  signée 
avec  lesEtats-Unis  dont  l'indépendance  fut 
alors  légitimement  reconnue  ;  avec  la  Hol- 
lande qui  rendit  ses  anciennes  conquêtes; 
avec  l'Espagne  qui  recouvra  Minorque  et 
les  Florides,  mais  redemanda  en  vain  Gi- 
braltar; avec  la  France  dont  l'Angleterre 
redoutait  la  puissance  (3  septembre  1783). 
L'Angleterre  recouvrait  dans  l'Inde  au 
delà  de  ce  qu'elle  perdait  en  Amérique  : 
l'attention  de  Fox  qui  était  ministre  des 
affaires  étrangères,  se  porta  sur  ce  pays  oii 
d'horribles  abus  faisaient  maudire  le  nom 
anglais ,  et  pouvaient  amener  de  sanglan- 
tes représailles  :  il  porta  un  bill  en  vertu 
duquel  les  pouvoirs  de  la  compagnie  des 
Indes  devaient  être  déférés  à  sept  direc- 
teurs qui  ne  pourraient  être  renvoyés  sans 
l'aveu  du  parlement.  Le  discours  qu'il  pro- 
nonça dans  cette  occasion  passe  pour  être 
le  chef-d'œuvre  de  cet  orateur.  Malgré 
l'opposition  de  Pitt,  la  loi  passa  à  une 
«forte  majorité  :  mais  ce  succès,  qui  devait 
le  maintenir  au  pouvoir ,  fut  la  cause  de 
sa  chute  ;  Georges  ÏII  ne  put  voir  avec 
indifférence  la  conduite  d'un  ministre  qui 
diminuait  tous  les  jours  ses  prérogatives 
royales,  et  on  assure  qu'il  agit  en  secret 
pour  faire  rejeter  le  bill  à  la  chambre  des 
Lords  ;  il  réussit  en  effet  ;  mais  comme  les 
députés  des  communes  persistèrent  dans 
leur  première  résolution ,  il  ne  vit  d'autre 
moyen  de  salut  pour  son  autorité  que  de 
renvoyer  un  ministère,  sous  lequel  il  était 
dans  une  espèce  de  tutelle ,  et  dont  le  sys- 
tème ne  pouvait  convenir  à  son  plan  par- 
ticulier de  gouvernement.  Ce  ministère 
avait  duré  peu  de  temps  et  trop  cepen- 
dant pour  que  Fox  qui,  en  y  entrant, 
avait  promis  de  ne  plus  se  livrer  à  la  dis- 
sipation, au  jeu  et  à  la  débauche,  ait  pu 
montrer  qu'au  moins,  lorsqu'il  était  au 
pouvoir,  la  politique  absorbait  ses  pas- 
sions. Cet  homme  d'état  dut  s'apercevoir 
combien  ses  tergiversations  avaient  indis- 
posé contre  lui  la  multitude  ,  puisqu'aux 
élections  qui  eurent  lieu  à  Westminster, 
il  eut  beaucoup  de  difficultés  à  se  faire 
T. 


r'Ox 


433 


élire;  les  élections  durèrent 4 5  jours,  et 
il  ne  l'emporta  sur  son  rival  que  d'un  pe- 
tit nombre  de  vois,  et  quand  bien  même 
il  avait  pour  lui  la  plus  grande  quantité 
des  suffrages ,  on  contesta  la  légalité  de 
l'élection  :  une  enquête  fut  ordonnée  : 
Pitt  et  Fox  en  faisaient  souvent  la  ma- 
tière de  leurs  violens  débats ,  mais  enfin 
après  huit  mois  de  recherches,  le  parle- 
ment déclara  l'élection  valide.  Pitt  de- 
venu secrétaire  d'état  à  l'âge  de  24  ans, 
resta  au  ministère  pendant  iong-temps. 
Fox  de  son  côté  fit  de  son  rival  le  point  de 
mire  de  toutes  ses  attaques.  L'opposition 
s'était  renforcée  d'un  grand  nombre  de  ta- 
lens  :  cependant  elle  n'obtint  aucun  triom- 
phe sur  l'habileté  du  ministre  qui  dirigeait 
alors  les  affaires  de  l'Angleterre.  Mais 
dans  le  mois  d'octobre  1788,  Fox  voya- 
geait en  Italie  lorsqu'il  apprit  la  maladie 
de  Georges  III,  qui  plus  tard  devait  se  dé- 
velopper d'iuie  manière  plus  terrible  : 
aussitôt  il  quitte  Bologne  oii  il  se  trou- 
vait alors,  et  il  vient  à  Londres  auprès  du 
prince  de  Galles  dont  plusieurs  fois  il 
avait  servi  les  intérêts,  et  qu'il  ne  voulait 
point  abandonner  dans  cette  circonstance 
difficile.  Il  appuya  ses  prétentions  à  la 
régence  vivement  disputées  par  le  minis- 
tère. Pendant  que  l'on  discutait  encore, 
le  chancelier  annonça  que  sa  Majesté  d'a- 
près le  rapport  des  médecins ,  était  en 
convalescence  et  que  tout  concourait  à 
donner  l'espoir  d'un  prompt  rétablisse- 
ment ;  qu'il  fallait  ajourner  la  délibération 
(  février  1789  J.  Bientôt  en  effet  la  santé 
du  roi  se  raffermit  et  il  ne  fut  plus  ques- 
tion de  régence.  Sur  ces  entrefaites  la  ré- 
volution française  vint  à  éclater  :  Fox 
s'en  montra  le  partisan  fougueux,  et,  sui- 
vant M.  de  Montgaillard  (  Discours  pré- 
liminaire de  r histoire  de  France  ) ,  ce 
grand  bouleversement  était  aux  yeux  de 
l'orateur  anglais  le  plus  yrand  pas  fait 
pour  l'affranchissement  total  du  genre 
humain.  Burke ,  qui  avait  combattu  avec 
lui  dans  les  rangs  de  l'opposition,  déclara 
qu'il  renonçait  à  l'amitié  d'un  homme 
qui  prêtait  à  de  pareils  désordres  l'auto- 
rité de  son  talent.  Fox  versa  des  larmes , 
conjura  Burke  d'abjurer  une  résolutioa 
qu'il  regardait  comme  un  grand  malheur 

2{5 


434  ^0% 

pour  lui  ;  jnais  leur   liaison  ne  &e  re- 
noua jamais.  En  1790  le  cabinet  de  Lon- 
dres parut  disposé  à  faire  la  guerre  à  la 
Russie  et  à  l'Espagne  :  Fox  combattit  le 
projet  avec  son  éloquente  énergie,  et  le 
discours  qu'il  prononça  dans  cette  cir- 
constance lui  valut  l'honneur  de  voir  son 
buste  placé  par  Catherine  II ,  entre  ceux 
de  Cicéron  et  de  Démosthènes.   Cepen- 
dant la  révolution  française  faisait  de  jour 
en  jour  plus  de  progrès.  De  grands  cri- 
mes se  commettaient ,  et  l'enthousiasme 
de  Fox  ne  diminuait  point.  Lorsque  le  pro- 
cès de  Louis  XVI  fixa  tous  les  regards , 
Fox,  qui  bien  certainement  n'avait  point 
prévu  ce  fait ,  proposa  au  parlement  d'An- 
gleterre d'intervenir  auprès  de  la  Conven- 
tion nationale  en  faveur  du  monarque  qui 
allait  être  jugé  par  ses  sujets.  Il  est  beau 
de  voir  un  étranger  d'un  talent  aussi  dis- 
tingué que  Fox  ,  entraîné  par  des  idées 
de  philanthropie  et  d'humanité,  reculer 
devant  les  conséquences  du  système  ré- 
volutionnaire proclamé  en  France,  et ,  de 
concert  avec  d'autres  hommes  d'état  re- 
commandables  de  son  pays,  sommevle  mi- 
nistère anglais  de  concourir  au  salut  de 
Louis  XVI.  Sur  la  motion  de  Shéridan , 
Fox,  Grey,  etc.,  la  chambre  des  commu- 
nes vota  (20  décembre)  une  adresse  au  roi 
dans  laquelle  elle  exprimait  l'indignation 
et  l'horreur  de  toute  la  nation  sur  l'in- 
justice et  la  barbarie  de  la  catastrophe  qui 
menaçait  le  roi  de  France.  Lorsque  la 
guerre  entre  la  France  et  l'Angleterre  fut 
proposée,  Fox,  malgré  son  mépris  pour 
notreancien  gouvernement,  s'écriait  plein 
d'indignation  :  Le  meilleur  moyen  de  pu- 
nir les  Français  de  ce  meurtre  exécra- 
ble est  de  les  abandonner  à  eux-mêmes , 
puisqu'une  nation  capable  de  commettre 
et  de  souffrir  une  injustice ,  une  atro- 
cité' aussi  manifeste ,  ne  peut  manquer 
d^en  recueillir  bientôt  les  fruits  les  plus 
amers.  Trois  ans  après  il  haranguait  dans 
le  forum  de  Westminster  les  électeurs  dont 
il  sollicitait  les  suffrages  ;  faisant  allusion 
au  même  événement ,  il  disait  encore  :  Il 
n'est  pas  un  européen  hors  de  France 
qui  ne  considère  ce    déplorable  événe- 
ment comme  l'acte  le  plus  révoltant  de 
la  cruauté  et  de  T injustice.  Le  môme  Fox 


fox 

s^exprime  ainsi  dans  son  ouvragé  sur  les 
derniers  Stuarts  :  «  Si  l'on  cifbsidère  les 
»  motifs  qui  déterminèrent  l'arrêt  de  mort 
>»  sous  des  rapports  étendus ,  si  l'on  exa- 
■»  mine  l'effet  général  qu'il  devait  pro- 
»  duire  et  qu'il  produisit  dans  l'opinion  ; 
)>  il  faut  convenir  que  la  courageuse  pa- 
»  tience  et  la  piété  que  Louis  XVI  eut 
»  occasion  de  déployer,  ont  inspiré  pour 
»  sa  mémoire  une  vénération  qu'autre- 
))  ment  il  n'aurait  obtenue  qu'à  un  bien 
»  moindre  degré.  Du  respect  compatis- 
«  sant  qu'on  ressent  pour  celui  qui  souf- 
M  fre  et  de  la  haine  qu'on  porte  à  ses  en- 
»  nemis,  naissent  bientôt  faveur  pour  la 
»  cause  de  l'un ,  aversion  pour  celle  des 
»>  autres  :  ainsi ,  même  en  admettant  (  ce 
»  qui  est  douteux  )  qu'un  exemple  aussi 
»  terrible  pour  les  princes  eût  été  de  quel- 
j)  que  utilité  pour  la  cause  des  peuples , 
M  cet  avantage  fut  bien  plus  que  contré- 
»  balancé  par  la  faveur  que  donnent  à  la 
»  cause  des  rois  les  passions  les  plus  no- 
»  blés  du  cœur  humain,  l'admiration  pour 
»  la  vertu  et  la  pitié  pour  le  malheur.  » 
N'oublions  pas  que  c'est  Fox ,  le  partisan 
de  la  révolution  française  qui  s'exprime 
ainsi.  Cet  attachement  aux  principes  ré- 
volutionnaires lui  avait  entièrement  alié- 
né les  esprits  ;  la  débauche  avait  usé  son 
tempérament  vigoureux,  et  sa  fortune 
était  délabrée  entièrement.  Sans  influen- 
ce et  sans  ressource  ,  il  s'éloigna  des  af- 
faires publiques.  Cependant  ses  amis  po- 
litiques déplorèrent  cet  éloignement  et 
l'engagèrent  à  rentrer  au  parlement.  Ce 
fut  alors  qu'il  s'adressa  aux  citoyens  de 
Westminster,  pour  leur  faire  part  de  la 
triste  position  dans  laquelle  il  se  trouvait; 
cette  explication  fut  bien  accueillie  ,  et 
ses  partisans  se  cotisèrent  pour  subvenir  à 
ses  besoins.  De  retour  au  parlement ,  il 
combattit  l'opinion  du  ministère  qui 
avait  déclaré  qu'il  était  impossible  d'en- 
tamer aucune  négociation  avec  la  Fran- 
ce, tant  que  le  système  de  gouvernement  « 
adopté  par  ce  pays  n'éprouverait  pas  deH 
grands  changcmens.  La  multitude  lui 
était  alors  dévouée  :  le  jour  anniversaire 
de  sa  naissance ,  Fox  fut  entouré  d'une 
foule  innombrable  qui  s'était  rendue  d 
toutes  les  parties  de  la  ville  à  la  tavern» 


I 


FOX 

où  il  dînait  ;  des  discours  v^hëmens  fu' 
rent  prononcés  ,  et  lui-même  but  à  la 
santé  du  PEurLE-souvERAiw.  Le  roi,  infor- 
mé de  la  conduite  de  Fox,  le  raya  lui- 
même  de  la  liste  des  conseillers  de  la 
couronne,  titre  qui  lui  avait  été  conservé. 
Fox  fut  très  sensible  à  cette  disgrâce ,  et 
pendant  quelque  temps  il  ne  parut  pas 
à  la  tribune  ;  cependant  il  triompha,  lors- 
qu'il vit  que  le  gouvernement  anglais 
était  disposé  dès  l'année  1795  à  recevoir 
des  propositions  de  paix  de  la  part  du 
Directoire.  Ce  ne  fut  qu'en  1801  que  le 
traité  d'Amiens  fut  signé.  Alors  Fox  se 
rendit  en  France  ;  accueilli  avec  distinc- 
tion par  Buonaparte ,  il  profita  de  son 
séjour  à  Paris  et  de  la  permission  qui  lui 
en  fut  donnée,  pour  puiser  dans  les  archi- 
ves du  gouvernement ,  les  renseigne- 
mens  dont  il  avait  besoin  pour  l'Histoire 
des  derniers  Stiiarts  dont  il  s'occupait. 
A  peine  fut-il  de  retour  en  Angleterre 
•que  son  pays  déclara  de  nouveau  la 
guerre  à  la  France.  Pitt  s'était  retiré  du 
ministère  avant  que  le  traité  d'Amiens  ne 
fût  signé  ,  mais  Fox  n'y  était  point  ren- 
tré ;  son  rival  devait  reprendre  le  timon 
des  affaires  le  12  mai  1804  ,  et  il  le  con- 
serva jusqu'à  sa  mort  arrivée  en  1806. 
Après  22  ans  de  retraite,  Fox  ambition- 
nait de  se  retrouver  sur  le  théâtre  des  af- 
faires publiques  ;  il  fut  encore  une  fois 
ministre  des  affaires  étrangères.  Aupara- 
vant il  avait  montré  d'abord  quelque 
conformité  entre  ses  vues  et  celle  de 
Pitt,  et  l'on  assure  même  qu'entre  ce 
ministre  et  Fox  il  y  avait  eu  un  rappro- 
chement, d'après  lequel  ce  dernier  devait 
rentrer  au  ministère,  sous  les  auspices 
de  lord  Grenville  ;  mais  le  roi  ne  voulut 
point  alors  entendre  parler  de  Fox  ,  pour 
lequel  il  avait  une  haine  prononcée. 
Lorsqu'il  s'était  vu  ainsi  éloigné  du  gou- 
vernement ,  Fox  avait  repris  son  rôle  de 
chef  de  l'opposition  ;  et  à  la  mort  de  Pitt, 
celte  opposition  étant  plus  violente  que 
jamais  ,  ce  fut  à  la  nécessité  du  moment 
que  Georges  III  céda ,  en  permettant  que 
le  nom  de  Fox  figurât  sur  la  liste  des  mi- 
nistres. Fox  avait  rendu  l'hommage  le  plus 
grand  aux  talens  de  Pitt ,  ainsi  qu'à  ses 
mœurs  et  à  ses  vertus  privées  ;  mais  ei? 


FOX 


435 


rappelant  les  fautes  et  les  erreurs  qu'il 
reprochait  à  sou  rival ,  il  s'était  opposé 
aux  honneurs  que  l'on  voulait  décerner 
à  ce  ministre.  Pendant  la  courte  admi- 
nistration de  Fox ,  on  le  vit  avec  éton- 
nement  proposer  de  faire  la  guerre  au 
roi  de  Prusse  :  on  dit  qu'il  ne  le  fit  que 
dans  l'intention  de  plaire  au  roi  qui  dé- 
sirait reprendre  l'électorat  d'Hanovre  qui 
formait  une  partie  de  son  patrimoine. 
Ce  ne  fut  pas  la  seule  circonstance  dans 
laquelle  on  trouva  dans  cet  homme  d'état 
des  idées  de  courtisan  et  l'oubli  de  son 
ancien  amour  pour  l'indépendance.  Dé- 
jà plusieurs  fois  il  avait  été  q,uestion  au 
parlement  de  la  traite  des  Nègres  ;  la 
proposition  d'abolir  ce  commerce  hon- 
teux avait  été  faite  par  Pitt  ;  elle  fut  re- 
nouvelée par  Fox  qui  partageait  entière- 
ment cette  opinion ,  et  qui  précédem- 
ment avait  dit  :  Depuis  40  ans  que  je 
siège  nu  parlement  y  si  j'eusse  remporté 
cette  victoire  sur  la  cupidité ,  je  me  se- 
rais retiré  de  la  carrière  avec  la  con- 
science d'avoir  senti  mon  devoir  et  de 
ravoir  rempli.  Il  fit  alors  adopter  une 
adresse  au  roi  pour  le  supplier  d'obtenir, 
par  des  négociations ,  le  concours  des 
puissances  étrangères  à  l'abolition  du 
commerce  des  Noirs;  et  il  mérita  ainsi 
que  la  sculpture  plaçât  sur  son  mausolée 
l'image  de  l'Afrique  reconnaissante.  Fox 
mourut  le  13  septembre  1806,  à  l'âge  de 
58  ans,  et  sa  dépouille  mortelle  alla  re- 
joindre celle  de  son  rival  Pitt  sous  les 
caveaux  de  Westminster.  On  rendit  les 
plus  grands  honneurs  à  sa  cendre  ;  et  ses 
funérailles  firent  éclater  des  regrets  pres- 
que universels  ;  car  ses  partisans  per- 
daient leur  chef,  ses  adversaires  un 
homme  de  génie  :  sa  mort  laissait  un 
grand  vide  à  la  tribune ,  oii  sa  voix  avait 
tant  de  fois  fait  entendre  des  paroles  si 
éloquentes.  Il  n'avait  que  58  ans  ,  et,  de- 
puis l'âge  de  20  ans ,  il  avait  toujours  été 
membre  de  la  chambre  des  communes.  Ce 
qui  contribua  le  plus  à  sa  renommée ,  ce 
fut  d'abord  son  système  de  paix  géné- 
rale, et  sa  lutte  contre  le  ministère,  à 
deux  époques  différentes,  lors  de  la  guerre 
d'Amérique ,  et  de  celle  que  l'Angleterre 
déclara  à  la  république  française  \  il  fut 


436 


FOX 


le  partisan ,  le  protecteur ,  l'orateur  des 
deux  révolutions  qui ,  à  la  fin  du  dernier 
siècle,  ont  ébranlé  le  inonde  entier,  et 
dont  toutes  les  conséquences  sont  encore 
loin  d'être  prévues.  Si  nous  sommes  loin 
d'approuver  sa  conduite  dans  ces  deux 
affaires ,  nous  applaudirons  aux  pensées 
pleines  d'humanité  qui  le  dirigèrent, 
lorsqu'il  demanda  l'abolition  de  la  traite 
des  Nègres.  Son  talent  oratoire  n'attei- 
gnait la  haute  élévation  à  laquelle  il  est 
si  souvent  parvenu ,  que  lorsqu'il  était 
animé  :  quand  rien  ne  l'agtiait ,  il  y 
avait  peu  de  méthode  dans  ses  discours  ; 
il  n'était  pas  toujours  très  clair  ,  et  son 
débit  était  quelque  peu  difficile.  Mais  , 
lorsqu'il  était  ému,  sa  dialectique  était 
pressante  et  vigoureuse  •.  c'étaient ,  dit 
Baërt,  cité  par  Montgaillard ,  dans  le  to- 
me 1 0  de  l'histoire  de  France,  des  rayons 
dun  soleil  brûlant  ;  et,  si  en  Angleterre 
comme  en  France ,  il  y  a  quelque  dissen- 
timent sur  la  bonté  de  la  cause  qu'il  défen- 
dit ,  il  n'en  existe  aucun  sur  le  mérite  de 
son  éloquence  :  ainsi  lorsqu'on  dit  que 
celle  de  Pitt  fut  Cice'ronienne ,  on  ajoute 
que  celle  de  Fox  est  De'mosthe'nique. 
En  effet,  il  y  a  chez  lui  plus  de  force 
que  d'ornemens;  il  n'est  jamais  rhéteur, 
il  est  toujours  orateur.  Nous  voudrions 
ne  point  revenir  sur  sa  vie  privée  :  en 
1796  ,  il  avait,  comme  nous  l'avons  dit, 
fait  un  appel  à  ses  amis  qui  lui  firent  une 
pension  de  3,000  livres  sterlings.  Il  avait 
été  pendant  quelque  temps  sans  autre 
ressource,  que  celle  que  lui  fournissaient 
les  chances  du  jeu  ;  et  on  le  voyait  pas- 
ser dans  la  même  nuit  du  parlement  à  un 
tripot,  ou  d'un  tripot  au  parlement.  Ja- 
mais les  pertes  qu'il  fit,  quelque  gran- 
des qu'elles  fussent ,  ne  troublèrent  son 
âme.  On  raconte  qu'un  jour  qu'il  avait 
été  plus  malheureux  que  de  coutume , 
l'un  de  ses  amis  craignit  qu'il  ne  prît 
quelque  résolution  funeste  :  plein  d'in- 
quiétude ,  ii  se  rendit  à  sa  maison  ; 
mais ,  au  lieu  de  le  voir  accablé  des  coups 
du  sort,  il  le  trouva  occupé  d'examiner 
une  nouvelle  édition  ô'He'rodote.  On  ra- 
conte encore  de  lui  qu'étant  avec  un 
compagnon  de  débauche  que  des  huis- 
siers poursuivaient  ainsi  que  lui,  leur 


FOX 

retraite  fut  découverte  ,  et  que  les  gens 
du  roi  vinrent  pour  se  saisir  de  leurs 
personnes  ;  mais ,  au  bruit  que  firent  les 
huissiers ,  Fox,  qui  n'en  connaissait  point 
la  cause ,  regarda  aussitôt  à  la  fenêtre  ;  et 
commeil  eut  bientôt  reconnuleshuissiers, 
il  leur  demanda  gravement  si  ce  jour-là 
ils  chassaient  au  lièvre  ou  au  renard  ? 
(  Son  compagnon  s'appelait  Hare ,  mot 
qui  veut  dire  lièvre ,  et  le  nom  de  Fox 
veut  dire  renard.  )  Les  huissiers  ne  pu- 
rent s'empêcher  de  sourire ,  et  l'un  d'eux 
l'engagea  sinon  à  payer  ,  du  moins  à  in- 
diquer un  terme,  quand  ce  terme  devrait 
être  le  jugement  dernier  :A^o/î,  lui  dit  Fox; 
ce  jour-là  il  se  traitera  des  choses  plus 
se'rieuses  ;  remettons,  si  vous  le  voulez, 
l'affaire  au  lendemain  -.  ces  paroles  an- 
noncent l'esprit  de  Fox  ;  mais  elles  ne 
prouvent  pas  en  faveur  de  sa  probité  ni 
de  sa  délicatesse.  En  général ,  il  négligea 
trop  la  réputation  des  mœurs  qui  sont  si 
nécessaires  à  l'orateur,  lors  même  que 
la  religion  n'en  ferait  pas  un  devoir  ;  et 
en  vérité  l'on  est  honteux  pour  lui  de 
l'entendre  dire  dans  une  de  ses  lettres 
qu'un  seul  genre  d'excès  ne  lui  suffisait 
pas  (  Histoire  d'Angleterre  de  Hume , 
continuée  jusqu'en  1820,  tome  20,  page 
300).  Sa  passion  pour  le  jeu  était  si  forte 
que,  lorsqu'il occupaitquelque  place  dans 
l'administration,  ses  commis  étaient  obli- 
gés d'aller  le  chercher  dans  les  maisons 
publiques  ,  et,  tandis  qu'il  signait  d'une 
main ,  il  tenait  les  cartes  de  l'autre.  Il 
avait  été  pendant  sa  jeunesse  d'une  re- 
cherche étonnante  dans  ses  vêtemens  ; 
sur  la  fin  de  sa  vie  il  était  d'une  saleté 
dégoûtante.  Il  était  d'une  taille  moyenne.  , 
en  avançant  en  âge,  il  grossit  beaucoup.  Â 
Un  visage  large ,  uu  nez  aquilin  ,  des  f 
yeux  vifs,  recouverts  de  sourcils  noirs, 
une  barbe  épaisse  et  souvent  très  longue, 
tels  étaient  les  caractères  principaux  de 
son  portrait ,  dont  il  était  facile  de  faire 
une  caricature,  satisfaction  que  se  don- 
nèrent plus  d'une  fois  ses  ennemis.  Fox 
avait  un  esprit  très  cultivé  ;  il  a  laissé 
quelques  vers  latins  dont  l'élégance  at- 
teste la  profonde  connaissance  qu'il  avait 
de  la  langue  des  Romains.  Il  savait  tout 
aussi  bien  le  grec ,  et  ses  auteurs  favoris 


I 


1 


FOX 

ëtaieut  Homère ,  Longin ,  Thucydide  et 
Démosthènes.  Fox  n'a  fait  imprimer  de 
SOD  T^ivant  que  son  Appel  aux  citoyens 
de  fFeslniinster .  Son  Histqire  des  deux 
derniers  rois  de  la  maison  des  Stuarts , 
suivie  de  pièces  originales  et  justifica- 
tives ,  Londres,  1808,  ia-4 ,  ne  parut 
qu'après  sa  mort  :  c'est  une  apologie 
de  la  révolution  de  1668,  qui  paraît 
avoir  été  faite  plutôt  par  un  avocat  qui 
défend  sa  cause  que  par  un  narrateur 
qui  raconte  les  faits.  Cet  ouvFage  impar- 
fait a  été  publié  par  son  neveu,  lord 
HoUaud;  il  a  été  attaqué  par  M.  Rose  et 
défendu  par  Samuel  Heyvood.  M.  l'abbé 
d'Andrezel  en  a  fait  paraître  une  traduc- 
tion française  en  1800  ,  2  vol.  in-8,  avec 
une  notice  sur  l'auteur  ;  mais  elle  n'a  vu  lé 
jour  qu'après  avoir  été  horriblement  mu- 
tilée par  la  police  de  Buonaparte.  Les  Dis- 
coursde  Fox  ont  été  recueillis  en  1 8 1 4,  6 
volumes  in-8  ,  et  traduits  en  français  par 
MM.  H.  de  Lanvry  et  de  Jussieu,  1819- 
20,  12  vol.  in-8.  On  a  publié  diverses 
biographies  de  Fox  ;  mais  outre  ces  dif- 
férens  ouvrages  historiques  qui  ont  paru 
en  France  et  en  Angleterre,  sur  ce  person- 
nage célèbre ,  on  peut  consulter  1  °  His- 
toire de  la  vie  politique  et  des  services 
publics  comme  orateur  et  homme  d'e'tat 
de  C.  J.  Fox,  Londres,  1783,  in-8; 
2°  Recollections  of  tlie  life,  etc..  Souve- 
nirs de  la  vie  de  Ch.  J.  Fox,  par  B.  C. 
Walpole,  ibid.  1806,  in-12  ;  ^"Mémoire 
surlavie  publique  de  Fox  ,  1808,  1  vol. 
in-4  ;  4°  Caractères  de  feu  Ch.  J.  Fox, 
choisis  et  en  partie  e'crits  par  Philopa- 
tris  Varvicensis  (on  croit  que  c'est  le 
docteur  Parr  qui  s'est  caché  sous  cette 
indication  pseudonyme),  1809,  2  vol. 
in-8  ;  5°  Mémoire  sur  les  dernières  an- 
nées de  Ch.  J.  Fox  ,  par  Jean  Bernard 
Frotter  son  secrétaire,  1811,  in-8; 
6°  Correspondance  de  Ch.  Jame  Fox 
avec  feu  Gilbert  Fakefield ,  de  Vannée 
1796  à  iSOi , principalement  sur  des  su- 
jets de  littérature  classique,  1816,  1 
vol.  in-8;  7°  Fie  politique,  littéraire  et 
privée  de  Fox ,  traduite  en  français  , 
Paris,  1808  ,  in-8.  En  général  il  faut  se 
défier  de  ces  différens  ouvrages  dans  les- 
quels les  auteurs  ont  été  plutôt  exclusi- 


FOY  43^ 

vement  des  panégyristes  quô  dé  vérita- 
bles biographes. 

FOX-MORZILLO ,  Foxus  MorziUus 
(  Sébastien  ) ,  né  à  Séville  en  1 528 ,  fit 
ses  études  eu  Espagne  et  dans  les  Pays- 
Bas,  et  s'acquit  de  la  réputation  par  ses 
ouvrages.  Philippe  II ,  roi  d'Espagne  , 
l'ayant  nommé  pour  être  précepteur  de 
l'infant  don  Carlos  ,  il  quitta  Louvain,  et 
alla  s'embarquer  pour  être  plutôt  auprès 
du  prince  ;  mais  il  fit  malheureusement 
naufrage ,  et  périt  à  la  fleur  de  son  âge. 
On  a  de  lui  des  Commentaires  sur  le 
Timée  et  sur  le  Phédon  de  Platon,  in-fol . , 
et  plusieurs  autres  ouvrages  remplis  d'é- 
rudition. 

*  FOY  (Maximilien-Sébastien),  l'un 
des  lieutenans-généraux  les  plus  distin- 
gués de  l'armée  ,  et  l'un  des  orateurs  les 
plus  éloquens  de  la  chambre  des  députés, 
naquit  à  Ham (Somme)  le  3  février  1775. 
Il  se  destina  de  bonne  heure  à  la  carrière 
militaire ,  et ,  après  avoir  fait  ses  études 
préparatoires ,  il  fut  admis ,  à  l'âge  de  1 5 
ans,  à  la  suite  d'un  brillant  examen,  à 
l'école  d'artillerie  de  Lafère.  Deux  ans 
après,  ayant  terminé  ses  cours  militaires 
et  ayant  obtenu  les  suffrages  de  ses  maî- 
tres et  de  ses  chefs ,  il  fut  nommé  sous- 
lieutenant  d'artillerie  (  l*""  mars  1792), 
puis  lieutenant  au  3""®  régiment  de  la 
même  arme  (septembre  1792  )  ;  ce  fut  en 
cette  qualité  qu'il  fit  la  campagne  du 
Nord  soi's  le  général  Dumouriez.  Les 
premiè;  es  armes  de  Foy  annoncèrent  un 
guerrier  distingué ,  et  ce  fut  en  peu  de 
temps  qu'il  dut  à  sa  belle  conduite  les 
grades  de  capitaine  ,  de  chef  d'escadron 
et  d'adjudant-général  ;  ce  dernier  grade 
lui  fut  donné  sur  le  champ  de  bataille  de 
Diessenoffen  (  1800).  Mais  reprenons  la 
vie  militaire  de  Foy  dont  la  réputation 
mérite  un  récit  plus  circonstancié.  Après 
avoir  fait  les  campagnes  de  Belgique 
(  1792  ) ,  Foy  revint  à  Paris;  désigné  pour 
faire  partie  des  armées ,  commandées 
successivement  par  les  généraux  Dam- 
pierre  ,  Custines ,  Houchard ,  Jourdau 
et  Pichegru,  il  prit  part  à  toutes  les 
affaires  qui  eurent  lieu  pendant  ces  deux 
années  (  1793-1794).  Quelque  temps 
après,  il  fit  à  la  tête  de  la  6®  com- 


438  FOY 

pagnîe  du  i'  régiment  d'artillerie  à 
cheval,  les  campagnes  de  1796,  1796 
et  1797  à  l'armée  du  Khin  et  Moselle  ;  il 
faudrait  citer  toutes  les  actions  de  Foy , 
si  l'on  voulait  faire  connaître  les  faits 
d'armes  qui  lui  ont  acquis  la  réputation 
brillante  dont  il  jouissait  parmi  ses  ca- 
marades :  disons  seulement  qu'il  se  dis- 
tingua de  la  manière  la  plus  éclatante 
au  passage  du  Lech  ,  à  l'assaut  de  la  tête 
du  pont  de  Huuingue,  au  passage  du  Rhin 
à  Diesheim.  Après  avoir  fait  partie  de 
l'armée  expéditionnaire  que  l'on  voulait 
envoyer  dans  la  Grande-Bretagne  (1798, 
an  6  ) ,  il  vint  à  l'armée  de  Suisse  où  il 
servit  sous  les  ordres  du  général  Schauen- 
bourg.  A  l'armée  du  Danube  (1799),  il 
mérita  les  éloges  du  général  Masséna, 
et  l'année  suivante  le  passage  de  la  Lim- 
math  ne  fut  effectué  que,  grâce  à  ses  con- 
seils éclairés  et  à  sa  bravoure  consommée. 
En  1800,  il  était  adjudant-général  à 
l'armée  du  Rhin  d'où  il  passa  peu  de 
temps  après ,  avec  le  corps  du  général 
Moncey  en  Italie ,  pour  se  joindre  à 
l'armée  qui  venait  de  s'illustrer  à  Maren- 
go.  Chargé  du  commandement  d'une 
brigade  d'élite  qui  formait  l'avant-gar- 
de ,  il  vainquit  les  troupes  autrichiennes 
à  Perri ,  à  l'entrée  du  Tyrol  :  ce  qui  lui 
valut  le  grade  de  colonel  du  5™"  régi- 
ment d'artillerie  à  cheval ,  auprès  du- 
quel il  ne  se  rendit  que  lorsque  la  paix 
d'Amiens  eut  été  signée.  Après  la  rupture 
de  ce  traité  en  1803,  il  commanda  les 
batteries  flottantes  destinées  a  la  défense 
des  côtes  de  la  16*  division  militaire.  En 

1804 ,  il  fut  employé  comme  chef  d'état- 
major  d'artillerie  au  camp  d'Utrecht.  En 

1805 ,  il  fit  la  campagne  d'Autriche  dans 
le  2®  corps  de  la  grande  armée ,  et  en 

1806,  il  commanda  l'artillerie  du  corps 
stationné  dans  le  Frioul.  Lorsqu'en  1807 
le  gouvernement  français,  en  vertu  d'une 
convention  particulière,  envoya  1,200 
canoniers  auxiliaires  au  sultan  Selim,  ce 
fut  le  colonel  Foy  qui  les  commanda  ;  ces 
canoniers  furent  obligés  de  revenir  en 
France ,  par  suite  de  la  révolution  qui 
éclata  vers  cette  époque  à  Constantino- 
ple.  Foy  resta  en  Turquie  et  se  chargea 
de  la  défense  des  Dardanelles  contre  les 


FOY 

Anglais.  De  retour  en  France  vers  la  fin 
de  1807,  il  fut  envoyé  en  Portugal  ou 
il  fit  la  campagne  de  1808.  Ce  fut  seule- 
ment alors ,  le  3  septembre  de  cette  an- 
née, qu'il  fut  Bommé  général  de  brigade. 
Il  commanda  dès  lors  une  brigade  de 
l'armée  de  Portugal  jusqu'au  29  octobre 
1810,  époque  où  il  fut  promu  au  grade 
de  général  de  division.  Foy  avait  été 
choisi  par  le  maréchal  Masséna  pour  dé- 
fendre auprès  de  Buonaparte  la  cause  de 
l'armée  de  Portugal  arrêtée  sur  les  bords 
du  Tage  par  des  obstacles  qu'il  ne  dépen- 
dait pas  de  sa  valeur  et  de  son  dévoue- 
ment de  surmonter.  Il  remplit  cette  mis- 
sion d'une  manière  noble  et  honorable,  et 
l'on  croit  qu'il  fut  dans  cette  circonstance 
mieux  apprécié  par  l'empereurqui  le  nom- 
ma seulement  alors  général  de  division. 
Foy  a  prouvé  par  les  savantes  manœuvres 
qu'il  fit  faire  aux  troupes  qu'il  avait  sous 
ses  ordres,  que  depuis  long-temps  il  mé- 
ritait cette  marque  de  confiance,  ou  pour 
mieux  dire  cette  récompense  due  à  tant 
de  services.  Ainsi  après  avoir  dirigé  des 
corps  isolés  composés  de  plusieurs  divi- 
sions ,  il  prit  à  la  bataille  des  Acapiles  ou 
de  Salamanque  (22  juillet  1812)  le  com- 
mandement en  chef  de  l'armée,  qu'il  con- 
serva pendant  toute  la  retraite  dont  il 
assura  les  mouvemens,  et  pendant  tous 
les  engagemens  que  ses  troupes  eurent 
avec  l'armée  anglo-espagnole  ,  jusqu'à 
son  arrivée  sur  le  Duero.  Alors  on  le  vit, 
à  la  tête  de  la  droite  de  l'armée  de  Por- 
tugal ,  s'emparer ,  pendant  la  retraite  des 
Anglais ,  de  la  ville  de  Palentia  le  25  oc- 
tobre 1812  ,  et  opérer  avec  le  plus  grand 
bonheur  le  passage  du  Duero  à  Fordesil- 
las  le  29  du  même  mois.  L'année,  sui- 
vante ,  il  commanda  deux  divisions  dans 
la  Biscaye,  fit  le  siège  de  Castro  Urdiaies, 
et  dispersa  les  bandes  de  guérillas  qui 
infestaient  cette  province.  Après  la  ba- 
taille de  Vittoria  (21  juin  1813),  Foy 
réunit  les  débris  de  l'armée  française 
avec  lesquels  il  forma  un  corps  de  vingt 
mille  hommes.  Il  battit ,  avec  quelques- 
unes  de  ses  troupes,  l'aile  gauche  d6^ 
l'armée  ennemie.  C'est  ici  l'époque  la 
plus  belle  de  la  vie  militaire  de  Foy  : 
attaqué  par  le  général  Graham ,   il  se 


I 
1 


défendit  pied  à  pied  contre  les  Anglais  ; 
et  la  BATAILLE  DB  ToLosA  ,  dans  laquelle 
les  ennemis  firent  tant  de  perte ,  est  sans 
contredit  le  plus  brillant  fait  d'armes  de 
cette  campagne,  et  toute  la  gloire  en 
appartient  au   général  Foy.  Après  avoir 
renforcé  la  garnison  de  Saint-Sébastien 
et  repassé  la  Bidassoa ,  sans  avoir  laissé 
derrière  lui  un  homme ,  un  canon  ,  ou 
même  un  fusil ,  il  commanda  la  gauche 
de  l'armée  à  la  bataille  de  Pampelune  , 
et  à  celle  de  St.-Jean-Pied-de-Port.  Il  eut 
la  part  la  plus  active  à  tous  les  combats 
qui  furent  livrés   pendant  plus  de  six 
mois  pour  la  défense  du  passage  des  Py- 
rénées. Blessé  grièvement  d'un  coup  de 
feu  à  la  bataille  d'Orthez  ,  il  se  retira  le 
27  février   1814  :  on  croyait  que  cette 
blessure  était  mortelle.  Sous  la  première 
restauration, Louis  XVIII  sut  le  distinguer 
d'entre  cette  foule  de  généraux  que  la 
révolution  et  l'empire  avaient  légués  à  la 
royauté  ;  il  le  nomma  inspecteur-général 
et  lui  donna  le  titre  de  comte  avec  la 
croix  de  St. -Louis.  Lorsque  Buonapartc 
essaya  pendant  les  cent-jours  son  gou- 
vernement militaire ,  Foy   oublia    sans 
doute  avec  quelle  lenteur  il  était  arrivé 
au  grade  qu'il  avait  enfin  obtenu  :  peut- 
être,  comme  tant  d'autres  Français  qui, 
(l'on  ne  sait  en  vérité  pour  quel  motif), 
n'avaient  pu  être  attachés ,  même  par  la 
reconnaissance  ,  à  la  cause  de  la  légiti- 
mité, et  rêvaient  une  république  impos- 
sible au  milieu  de  mœurs  corrompues  , 
il  ne  prit  alors  les  armes  que  par  haine 
pour  l'étranger,  et  non  par  attachement 
pour  un  prince  qui  avait  si  long-temps 
refusé    de  lui   donner  un  avancement 
justement  mérité.  Quoi  qu'il    en   soit  , 
le  général    Foy  assista  à  la  bataille  de 
Waterloo  où  il  reçut  une  balle  qui  lui 
perça  l'épaule  :   c'était  la  16*  blessure 
qu'il  recevait  sur  le  champ  de  bataille. 
Cependant  il  combattit  encore  jusqu'à 
la  fin  de  l'action  ,  et  ne  se  retira  que 
lorsqu'il  se  fut  assuré   que  le  désastre 
de  l'armée  était  certain.  Après  le   se- 
cond retour  des  Bourbons ,  le   général 
Foy  se  tint  pendant  quelque  temps   à 
l'écart.  Dans  sa  solitude  il  se  livrait  à  de 
hautes  méditations.  Le  général  Foy  avait 


des  opinions  politiques  arrêtées ,  et  nous 
ne  croyons  faire  aucune  accusation  in- 
juste envers  cet  illustre  personnage  en 
disant  qu'elles  tendaient  au  républica- 
nisme ;  ce  n'était  certainement  pas  le 
républicanisme  de  1793;  il  avait  même 
en  horreur  les  monstres  qui  tourmenté  ■ 
rent  alors  la  France  pendant  trop  long- 
temps. Ainsi  en  1 7  94  ,  à  l'époque  de 
la  terreur,  sa  grande  âme  s'indigna 
de  la  sanglante  tyrannie  dont  la  Fran- 
ce était  alors  la  victime  :  il  osa  même 
s'exprimer  avec  une  noble  hardiesse  au 
sujet  des  massacres  qui  tous  les  jours  se 
renouvelaieat  à  Paris  et  dans  plusieurs 
autres  villes  ,  en  présence  de  Joseph  Le- 
bonqui  le  fit  aussitôt  incarcérer  :  l'ordre 
avait  été  donné  de  le  traduire  devant  le 
tribunal  révolutionnaire ,  dont  les  arrêts 
de  mort  tombaient  sur  presque  tous  les 
accusés ,  lorsque  le  9  thermidor,  jour  oii 
le  monstre  le  plus  féroce  tomba  à  son 
tour  sous  la  hache  révolutionnaire ,  le 
rendit  à  la  liberté  et  à  la  gloire.  Lors- 
qu'en  1 803  éclata  l'affaire  de  Georges  et  de 
Pichegru  à  laquelle  on  rattacha  le  nom 
de  Moreau ,  il  refusa  de  faire  signer  à 
son  corps  une  adresse  au  premier  con- 
sul ;  comme  on  y  désignait  les  accusés 
comme  coupables ,  il  prononça  ces  paro- 
les vraiment  historiques  :  «  Je  féliciterai 
»  autant  qu'on  le  voudra  le  premier  con- 
»  sul  d'avoir  échappé  à  une  conspiration 
M  contre  sa  vie  ;  mais  je  ne  signerai  ja- 
»  mais ,  je  ne  ferai  jamais  signer  à  mes 
»  officiers  une  adresse  qui 'désigne  tels 
»  ou  tels  individus  comme  auteurs  ou 
w  chefs  de  cette  conspiration  ,  parce  que 

»  JK  suis  MILITAIRE   ET  QDK  JE  NE   SUIS    PAS 

»  JUGE.  »  Lorsque  le  guerrier  devenu 
consul  à  vie  ne  se  contenta  plus  de  cette 
haute  dignité,  et  s'aliéna  à  jamais  les 
républicains  dont  il  détruisait  les  espé- 
rances ,  et  les  vrais  royalistes  qui  avaient 
quelques  raisons  de  croire  que  son  œil 
clairvoyant  ne  trouverait  d'autre  parti 
à  prendre  pour  sa  gloire  et  pour  le  repo» 
de  l'Europe  que  celui  de  rappeler  les 
Bourbons ,  Foy  refusa  d'inscrire  son  nom 
sur  les  registres  où  la  bassesse  et  la  flat- 
terie allèrent  déposer  leurs  suffrages  : 
indigné  même  de  voir  un  grand  homme 


44o  FOY 

se  déshonorer  par  cette  usurpation ,  qui 
n'était,  il  est  vrai,  à  ses  yeux  que  la 
destruction  de  la  république  ,  et  échan- 
ger la  couronne  de  lauriers  si  légère 
pour  la  tête  d'un  héros,  contre  la  cou- 
ronne d'or  de  l'empire  si  lourde  même 
pour  les  grands  hommes.  Foy  refusa 
même  dans  un  repas  très  nombreux  de 
porter  uu  toast  au  héros  qui  briguait  le 
titre  d'empereur  ;  il  se  contenta  de  boire 
au  premier  consul.  C'est  à  ces  actes  d'in- 
dépendance qu'il  faut  attribuer  surtout 
le  refus  que  Buonapartc  faisait  continuel- 
lement de  donner  de  l'avancement  au 
colonel  Foy  qu'il  laissa  pendant  9  ans 
avec  ce  grade,  sans  lui  avoir  même  con- 
servé celui  d'adjudant-général  qu'il  avait 
gagné  sur  le  champ  de  bataille.  Le  gé- 
néral Foy  aimait  l'étude  :  pendant  quel- 
que temps  on  le  vit  suivre  à  Strasbourg , 
oîi  il  se  trouvait  pour  soigner  la  blessure 
qu'il  avait  reçue  à  Diershem ,  lors  du 
passage  du  Rhin  ,  les  cours  de  droit  pu- 
blic des  nations  donnés  par  le  professeur 
Koch.  Pendant  sa  retraite  del81dàl819, 
ce  fut  avec  ardeur  qu'il  s'occupa  de  re- 
cherches historiques  ;  il  rédigea  et  mit 
en  ordre  ses  Souvenirs  sur  la  guerre 
d'Espagne.  Nommé  inspecteur-général 
d'infanterie  dans  les  2*  et  16*  divisions 
militaires,  il  reparut  dès  lors  dans  les 
affaires  publiques.  La  même  année  (1819) 
il  fut  élu  à  la  chambre  des  députés  par 
le  département  de  l'Aisne.  Sur  ce  nou- 
veau théâtre ,  le  général  Foy  brilla  peut- 
être  encore  plus  que  sur  les  champs  de 
bataille.  Sans  contredit ,  il  fut  l'un  des 
orateurs  les  plus  éloquens,  je  dirai  pres- 
que le  premier  orateur  de  la  restauration. 
Il  siégeait  au  côté  gauche ,  mais  il  ne 
partageait  point  l'exagération  de  ceux 
de  ses  collègues  qui  occupaient  la  même 
partie  de  la  chambre  :  calme  dans  la  dis- 
cussion la  plus  vive ,  modéré  au  milieu 
des  passions ,  il  parlait  avec  sang  froid , 
avec  aisance  ,  avec  grâce  :  il  y  avait  du 
mouvement  dans  son  stile  ;  on  remar- 
quait des  formes  vives  et  figurées  qui  le 
rendaient  pittoresque  :  son  éloquence 
semblait  être  d'inspiration  :  c'était  son 
âme  qu'il  paraissait  mettre  à  découvert, 
lorsqu'il  exprimait  ses  sentimeus  patrio* 


r^OY 

tiques  qui  ne  sont  pas  le  privilège  exclu- 
sif d'un  parti ,  mais  qui  font  palpiter  le 
coeur  d'un  royaliste  au  moins  autant  que 
celui  d'un  républicain.  Il  avait  une  argu- 
mentation puissante;  ses  raisonnemens 
étaient  fondés  sur  la  charte  de  Louis  XVIII, 
dont  nous  aimons  à  croire  qu'il  était  le 
partisan  sincère.  Foy  était  aussi  l'adver- 
saire le  plus  acharné  des  ministres ,  dont 
il  combattait  le  système  et  les  actions 
toutes  les  fois  qu'il  les  jugeait  contraires 
à  ses  doctrines  qu'il  croyait  être  celles 
de  la  France  entière.  Il  fut  l'ami  de  Ca- 
simir Perrier,  et  nous  croyons  ne  pas 
nous  tromper  en  disant  qu'il  mérita  l'élo- 
ge que  M.  Royer-Collard  a  fait  au  prési- 
dent du  conseil  le  jour  de  ses  funérailes; 
c'est  qu'il  ne  conspira  point.  Foy  est  un 
caractère  à  part  :  au  milieu  de  l'opposi-! 
tion  libérale  dont  tous  les  actes  furent 
loin  d'être  dirigés  dans  l'intérêt  public, 
il  sut  toujours  faire  preuve  de  cette 
loyauté,  de  cette  grandeur  d'âme  dont 
les  camps  lui  avaient  donné  l'habitude , 
et  que  l'étude  avait  encore  agrandie.  On 
pouvait  n'être  point  le  partisan  de  ses 
opinions ,  mais  on  était  forcé  d'être  l'ad- 
mirateur de  son  talent.  L'abbé  de  Mont  • 
gaillard  place  son  nom  à  côté  de  ceux  de 
Mirabeau  et  de  Cazalès.  Nous  ne  pouvons 
point  passer  en  revue  tous  ses  discours  ; 
nous  dirons  seulement  qu'il  parla  sur 
tous  les  projets  importans  qui  furent  dis- 
cutés depuis  1819  jusqu'en  1825.  Il  prit 
à  tâche  surtout  de  défendre  ses  anciens 
compagnons  d'armes  dont  il  redisait  sou- 
vent les  exploits ,  et  en  faveur  desquel 
il  réclamait  l'attention  du  gouvernement.1 
On  peut  dire  qu'il  ne  laissa  échapper  au:-| 
cune  occasion  de  parler,  et  qu'il  trait 
toutes  les  que.stions  d'administration  tani 
civile  que  militaire,  comme  toutes  celle 
d'économie  politique  et  même  de  diploma- 
tie qui  se  présentèrent  ou  qu'on  fit  naître 
dans  les  sessions  auxquelles  il  prit  part, 
venait  d'être  réélu  par  le  département 
qui  l'avait  déjà  nommé  une  fois ,  lors 
qu'il  se  sentit  affaibli  par  les  fatigues  d( 
discussions  continuelles  qu'il  soutenait 
journellement ,  et  de  plus  en  plus ,  avec 
une  ardeur  à  laquelle  ses  forces  physi- 
ques ne  pouvaient  pas  répondre.  Le  tra". 


FOY 

vail  lui  fut  interdit,  et  il  entreprit,  d'après 
l'avis  des  médecins ,  un  voyage  dans  les 
Pyrénées  qui  ne  fit  qu'aggraver  son  mal. 
De  retour  à  Paris ,  il  reçut  les  soins  em- 
pressés de  ses  parens  et  de  ses  amis  ;  mais 
ils  furent  inutiles.  Foy  mourut  le  28  no- 
vembre 1825.  Ses  funérailles  furent  sem- 
blables à  celles  de  tous  les  hommes  po- 
litiques qui  sont  les  chefs  ou  les  repré- 
sentans  d'un  parti.  Le  convoi  fut  composé 
d'une  foule  immense ,  et  des  discours 
furent  prononcés  sur  sa  tombe ,  par  Ca- 
simir Perrier  ,  Méchin  ,  Ternaux  ,  et  le 
général  MioUis  :  mais  grâce  à  l'active 
surveillance  du  gouvernement ,  aucun 
scandale  ne  vint  troubler  celte  pompe  fu- 
nèbre. Il  laissait  une  fortune  de  8,000 
livres  de  rente  :  un  appel  fut  bientôt  fait 
h  tous  les  libéraux  de  France  pour  doter 
cette  famille  que  l'on  disait  malheureuse, 
et  la  souscription  produisit  près  d'un 
million.  Plusieurs  de  ses  Discours  avaient 
déjà  été  imprimés  ;  mais  ils  ont  encore 
été  recueillis  après  sa  mort ,  sous  le  titre 
de  Discours  du  gênerai  Foy  ,  précédés 
dune  notice  biographique  par  M.  P.  F. 
Tissot,  d!un  éloge  par  M.  Etienne  et 
dun  essai  sur  l'éloquence  politique  en 
France,  par  M.  Jay,  Paris,  182G,  2  vol. 
in-8,  avec  portrait  et  fac-similé,  2*  édition, 
1827.  On  avait  déjà  recueilli  les  Pensées 
du  général  Foy ,  tirées  de  ses  discours 
prononcés  à  la  tribune  législative  pen- 
dant les  sessions  de  1819  et  de  1820, 
précédées  d'une  notice  sur  la  vie  de  ce 
général,  Paris,  1821  ,  1  vol.  in-l8.  On 
a  aussi  imprimé  :  Journée  du  30  novem- 
bre 1825  ,  ou  Récit  des  derniers inomens 
et  des  funérailles  du  général  Foy,  Paris  ,* 
1825,  in-8,  et  Couronne  poétique  du  gé- 
néral Foy,  publiée  par  Magallon,  Paris , 
1826;  c'est  un  recueil  des  pièces  de 
•vers  publiées  en  son  honneur.  Sa  veuve 
a  fait  paraître  après  sa  mort  :  Histoire 
de  la  guerre  de  la  péninsule  sous  Napo- 
léon ,  précédée  d'un  Tableau  politique 
et  militaire  des  puissances  belligérantes, 
par  le  général  Foy,  Paris,  1827  ,  4  vol. 
in-8,  avec  atlas.  Cet  ouvrage,  dit  un  jour- 
naliste ,  laisse  beaucoup  à  désirer ,  les 
vues  n'ont  rien  de  large  et  les  critiques 
sont  souvent  dictées  par  des  préjugés  na- 

V. 


FRA  44 1 

tionaux.  Cependant,  comme  cette  pro- 
duction est  d'une  certaine  importance , 
nous  entrerons  dans  plus  de  détails.  Nous 
parlerons  d'abord  des  tableaux  militaires 
qui ,  précédant  celui  de  la  France ,  man- 
quent de  méthode  et  de  suite  ;  l'auteur 
intervertit  souvent  l'ordre  des  faits  ;  mais 
on  y  remarque  des  traits  brillans,  et 
même  sous  le  rapport  littéraire,  c'est 
un  ouvrage  remarquable.  Les  mêmes 
qualités  se  rencontrent  dans  le  Tableau 
de  r/iiitoire  d'Angleterre ,  avec  plus 
d'exactitude  dans  les  faits.  On  y  voit  les 
améliorations  successives  introduites  par 
le  duc  d'York  dans  l'organisation  de  l'ar- 
mée anglaise ,  et  les  progrès  que  nos  éter- 
nels rivaux  ont  encore  à  faire  surtout 
dans  les  armes  savantes.  LesTableaux  de 
l'Espagne  et  du  Portugal,  quoique 
moins  importans ,  présentent  aussi  des 
beautés  et  des  défauts  ;  quant  à  l'histoire 
dont  les  tableaux  ne  sont  que  l'introduc- 
tion ,  la  narration  est  restée  incomplète , 
l'auteur  s'étant  arrêté  à  la  convention  du 
30  août  1808  :  ainsi  sur  6  ans  de  guerre 
il  n'a  tracé  que  la  première  :  peut-être 
les  éditeurs  auraient-ils  dû  donner  à  l'ou- 
vrage le  titre  de  fragment  d'une  histoire 
de  la  guerre  d'Espagne.  Ce  fragment 
serait  encore  assez  recherché ,  puisqu'il 
contient  les  détails  de  Kette  insurrection 
soudaine  qui  en  un  instant  fit  de  l'Espa- 
gne toute  entière  un  champ  de  bataille. 
Les  récits  en  sont  pleins  de  vie  et  de 
mouvement  ;  les  descriptions  de  batailles 
surtout  sont  des  modèles  de  netteté  ,  et 
l'on  doit  regretter  que  l'auteur  n'ait  pas 
terminé  son  ouvrage  et  qu'il  n'ait  pu  y 
mettre  la  dernière  main  ;  sans  doute  il 
aurait  fait  disparaître  en  partie  les  défauts 
qu'on  lui  reproche.  On  a  publié  plusieurs 
P'ies  du  général  Foy. 

FRÀ-BASTIEN.  Voyez  Sébastien. 

FRACASTOR  (  Jérôme  )  naquit]  à 
Vérone  vers  l'an  1483  ,  avec  des  lèvres  si 
fort  attachées  l'une  à  l'autre,  qu'il  fallut 
qu'un  chirurgien  les  séparât  avec  un  ra- 
soir. On  dit  que ,  dans  son  enfance ,  sa 
mère  fut  écrasée  de  la  foudre ,  tandis 
qu'elle  le  tenait  dans  ses  bras,  sans  qu'il 
en  fût  atteint.  Ses  progrès  dans  les  scien- 
ces et  les  beaux-arts  furent  rapides,  il 
28.. 


((4^  FRA 

cultiva  surtout  avec  heaucotip  de  succès 
la  poésie  et  la  médecine.  Le  pape  Paul 
m,  voulant  transférer  d'Allemagne  en 
Italie  le  concile  de  Trente ,  se  servit  de 
lui  pour  y  engager  les  Pères  ;  et  ce  fut 
alors  qu'on  le  transféra  à  Bologne,  et 
mourut  d'apoplexie  à  Casi ,  près  de  Vé- 
rone ,  en  1 553  ,  à  7 1  ans.  Sa  patrie  lui  fit 
élever  une  statue  G  ans  après.  Fracastor 
était  en  relation  avec  les  meilleurs  litté- 
rateurs de  son  temps ,  et  en  particulier 
avec  l'illustre  cardinal  Bembo.  11  était 
digne  de  ce  commerce  par  les  qualités  de 
son  coeur.  Exempt  d'ambition ,  content 
de  peu ,  il  mena  une  vie  saine  et  joyeuse. 
Il  parlait  peu  ;  mais  lorsqu'il  était  en  so- 
ciété avec  ses  amis ,  sa  conversation  était 
aussi  gaie  qu'animée.  Dans  la  médecine , 
il  s'attachait  à  la  guérison  des  maladies 
extraordinaires.  Fracastor  est  principale- 
ment connu  par  l'élégance  avec  laquelle 
il  écrivait  en  latin.  Son  poème  intitulé  : 
Syphilis ,  sive  de  morbo  gaïlico ,  ou- 
vrage dans  le  goût  des  Géorgiques  de  Vir- 
gile ,  n'est  point  indigne  de  l'auteur  qu'il 
a  imité.  Il  a  obtenu  plus  de  20  éditions. 
La  versification  en  est  riche  et  nombreu- 
se ,  les  images  vives ,  les  pensées  no- 
bles. On  en  a  donné  en  1753  ,  in-12,  une 
traduction  en  français  avec  des  notes  : 
elle  est  attribuée  à  Macquer  et  à  Lacombc. 
Il  a  aussi  été  traduit  en  italien.  Il  nous 
reste  plusieurs  autres  ouvrages  de  ce 
poète  médecin,  1°  De  stellis  liber  unus , 
1535-1538,  in-Sj  2°  De  sympathia  et 
antipathia  rcrum ,  1546  ,  a  eu  plusieurs 
éditions  ,  3°  Fiacastorius  sive  de  anima 
Dialogus.  On  les  a  recueillis  à  Padoue  en 
17  35,  en  2  vol.  in-i.  Les/>oeAie^  avaient 
été  imprimées  séparément  dans  la  même 
ville  en  1718,  in-8. 

FRACHEÏÏA  (  Jérôme  ) ,  de  Rovigo 
en  Italie,  se  fit  un  nom  par  ses  ouvrages 
de  politique.  Le  plus  considérable  est  : 
//  seminario  de  Governi ,  di  Stato  c  di 
Guerra,  1648  ,  in-4.  Il  mourut  à Na pies, 
au  commencement  du  dix-septième  siè- 
cle. Il  demeura  quelque  temps  à  Rome  , 
où  il  fut  chargé  par  la  cour  d'Espagne  de 
diversesafl'aires  ;  mais  son  esprit  satirique 
l'obligea  de  quitter  cette  capitale.  Nous 
avoas  encore  de  lui  une  traduction  ila- 


FRA 

liennedu  poème  de  Lucrèce,  avec  d'excel- 
lentes remarques  sur  l'Epicuréisme. 

•FRA-DIAVOLO,  ou  Frère  Diable, 
dont  le  véritable  nom  est  Michel  Pozza  , 
naquit  à  Itri ,  vers  1  7G0.  S'étant  mis  à  la 
tête  d'une  troupe  de  brigands ,  il  désola 
pendant  long-temps  la  Calabre.  Lorsque 
les  Français  envahirent  le  royaume  de 
Naples,  Fra-Diavolo  prit  le  parti  du  roi , 
et  leur  fit  la  guerre.  Le  cardinal  RufFo , 
après  avoir  forcé,  en  1799  ,  les  Français 
à  évacuer  le  royaume  de  Naples ,  lui  ob- 
tint le  pardon  du  passé  et  le  brevet  de 
colonel  ou  de  chef  de  masse  insurgée.  De- 
venu tout  à  coup  un  autre  homme,  il  ne 
s'occupa  que  de  bien  former  sa  troupe,  fit 
la  campagne  de  Rome,  s'y  distingua  par 
son  intrépidité,  et  obtint  plusieurs  récom- 
penses. Lorsque  les  Français,  sous  la  con- 
duite de  Buonapartc ,  eurent  occupé  Na- 
ples une  deuxième  fois  ,  il  fut  chargé  de 
réunirses  camarades,  et  il  se  retira  à  Gaëte. 
Le  souvenir  de  son  ancien  métier  lui  fit 
commettre  quelques  désordres  dans  cette 
ville,  d'où  il  fut  chassé  par  ordre  du  prince 
de  Hessc-Philippsthal ,  qui  en  était  gou- 
verneur. Après  avoir  erré  quelque  temps 
dans  la  Calabre ,  il  se  rendit  à  Palerme , 
oii  il  prit  part  à  l'insurrection  organisée 
par  le  commodore  Sydney  Smith.  Ayant 
débarqué  à  Sperlonga ,  il  délivra  sur  son 
passage  tous  les  malfaiteurs  détenus  dans 
les  prisons ,  pour  en  grossir  sa  troupe , 
et  marqua  sa  route  par  le  meurtre ,  le 
vol  et  l'incendie.  Atteint  par  les  Français, 
il  se  défendit  avec  courage ,  et  parvint  à 
s'échapper;  mais  il  fut  trahi  par  un 
paysan  ,  arrêté  à  Saint-Severino,  et  con- 
duit à  Naples,  où  il  fut  exécuté  le  6  no- 
vembre 1806,  sur  la  place  du  marché, 
en  présence  d'une  foule  immense.  Sa 
mort  est  devenue  le  sujet  d'un  opéra. 

FRAGUIER  (Claude-François),  de 
l'académie  française  et  de  celle  des  bel- 
les-lettres ,  naquit  à  Paris  le  28  août  1 666. 
Les  Pères  la  Baune,  Rapin,  Jouvencl,  lî^l 
Rue  et  Commire  lui  inspirèrent  le  goût] 
des  belles-lettres,  et  surtoutdela  poésie. 
Il  prit  l'habit  de  jésuite  en  1683,  et  I^ 
quitta  en  1694,  soit  qu'il  fût  convainc!) 
que  ce  n'était  pas  sa  vocation  ,  soit  que] 
ses  supérieurs  ne  crussent  pas  qu'il  eû| 


FRA 

l'esprit  de  l'état  religieux.  L'abbé  Bi[ïnon, 
chargé  de  présider  au  Journal  des  Sa- 
vans ,  eilgagea  l'abbé  Fraguier  k  parta- 
ger ce  travail  ,  auquel  il  paraissait  propre 
par  ses  connaissances ,  et  surtout  parce 
qu'il  possédait  diflërentes  langues.  Ren- 
lermc  chez  lui ,  dans  un  âge  peu  avancé, 
par  des  infirmités  continuelles  ,  il  s'oc- 
cupa d'une  traduction  de  Platon ,  que  sa 
santé  l'obligea  d'abandonner;  mais  il  pu- 
blia un  poème  sur  la  pbilosopbie  de  ce 
Grec ,  intitulé  :  Ecole  de  Platon.  Il  y 
montre  ua  grand  respect  pour  ces  vieux 
pédagogues ,  qui  ont  donné  des  leçons 
qu'ils  ne  pratiquaient  guère  ;  leçons  qui 
elles-mêmes  n'étaient  pas  toujours  sages, 
et  respiraient  ou  la  vanité  ou  la  corrup- 
tion des  auteurs ,  et  qui  dans  tous  les  cas 
étaient  sans  ressort  et  sans  sanction  [voyez 
Platon  ,  Lucien  ,  Socrate  ,  Zenon  ,  etc.). 
Ce  poème  et  les  autres  poésies  de  l'abbé 
Fraguier  se  trouvent  dans  le  Recueil  de 
celles  de  Huet,  publié  en  1729,  in-12, 
par  les  soins  de  l'abbé  d'Olivet.  On  a  en- 
core de  l'abbé  Fraguier  plusieurs  Visser- 
tations ,  insérées  dans  les  Mémoires  de 
l'académie  des  belles-lettres.  Il  mourut 
d'apoplexie  en  1728  ,  âgé  de  62  ans.  Le 
célèbre  Huet  et  d'autres  savans  illustres 
avaient  été  ses  amis,  mais  ses  liaisons 
avec  !\inon  de  Lenclos  et  son  enthousias- 
me philosophique  qui  allait  jusqu'à  faire 
l'éloge  du  pédéraste  Socrate ,  éloignèrent 
de  lui  les  hommes  vertueux. 

FRAIN  (  Jean  ) ,  seigneur  du  Trem- 
blai, né  à  Angers  en  1641 ,  membre  de 
l'académie  de  cette  ville,  mourut  en 
1724.  Sa  conversation  était  celle  d'un 
homme  qui  avait  beaucoup  lu,  mais  trop 
entêté  de  ses  idées.  Sur  la  fin  de  ses  jours 
il  devint  presque  misanthrope.  On  a  de 
lui  plusieurs  Traités  de  morale  solidement 
écrits  :  1"  Nouveaux  Essais  de  morale, 
in-12.  2°  Traite'  de  la  vocation  chré- 
tienne des  enfans.  3°  Conversations  mo- 
rales sur  les  jeux  et  les  divertissemcns. 
40  Traité  de  la  confiance  en  Dieu. 

*  FRAMERY  (Nicolas-Etienne  ) ,  poète 
et  musicien  ,  né  à  Rouen  1  e  2  6  mars  1745, 
mort  à  Paris  le  26  novembre  1810  ,  cul- 
tiva tout  à  la  fois  la  poésie ,  l'art  drama- 
tique et  la  musique,  et  il  s'est  fait  connaître 


FRA  443 

dans  ces  différens  genres  par  plusieurs 
ouvrages  qui  ont  du  mérite.  Il  connaissait 
surtout  la  musique,  non-seulement  dans 
sa  théorie ,  mais  encore  dans  ses  différeus 
systèmes.  Il  a  composé  1°  Mémoire  sur 
le  Conservatoire  de  musique,  177  5.2°  Le 
musicien  pratique ,  traduit  de  l'italien 
de  D'Azopardi,  2  vol.  in-8  ,  17  86  ;  c'est 
un  traité  de  contre-point  que  l'on  dit  fort 
médiocre,  et  dont  cependant  M.  Choron 
a  donné  une  nouvelle  édition  en  1823, 
1  vol.  in-4.  ^°  Lettre  à  l'auteur  du  Mer- 
cure (dans  le  Mercure  de  septembre 
17 76  )  où.  il  se  déclare  contre  la  musique 
de  Gluck.  \°Avis  aux  poètes  lyriques,  ou 
de  la  nécessité  du  rhythme  et  de  la  césure 
dans  les  hymnes,  1786,  in-8;  5°  Dis- 
cours couronné  par  l'Institut  sur  cette 
question  :  analyser  les  rapports  qui  e.vis.- 
tent  entre  la  musique  et  la  déclamation, 
et  déterminer  les  moyens  d'appliquer  la 
déclamation  à  la  musique  sans  nuire  à 
la  mélodie,  1802,  in-8  ;  G"  Notice  sur 
Joseph  Haydn ,  Paris ,  1 8 1 0 ,  in-8  ;  7  °  i9c 
rorganisation  des  spectacles  de  Paris , 
1791  ,  in-8;  8°  La  première  partie  du 
Dictionnaire  de  musique  de  l'Encyclo- 
pédie méthodique  ,  avec  Ginguené.  9°  Il 
rédigea  le  Journal  de  musique  en  1770 
et  1771  ,  iu-8.  Framery  fut  le  premier 
qui  parodia  en  français  quelques  opéras 
italiens  :  les  pièces  qu'il  a  parodiées  sont 
la  Colonie  ,  l'Olympiade  ,  l'Infante  de 
Zamora  et  les  deu.x  Comtesses.  Il  réussit 
assez  bien  dans  ce  genre  de  travail  qui 
demande  beaucoup  d'esprit  et  surtout 
l'esprit  de  critique.  Il  avait  à  peine  18 
ans ,  lorsqu'il  donna  aux  Italiens  sa  Nou- 
velle Eve,  dont  la  représentation  fut  dé- 
fendue par  ordre  de  la  police.  Il  fit  pa- 
raître ensuite  Nanette  et  Lucas,  musique 
du  chevalier  d'Herbain  ;  il  retoucha  et 
fit  remettre  en  scène  le  Nicaise  de  Vadé  ; 
il  donna  en  1 7  83  la  Sorcière  par  hasard, 
opéra-comique  dont  il  avait  fait  la  mu- 
sique et  les  paroles.  Enfin ,  un  concours 
ayant  été  ouvert  pour  les  drames  lyri- 
ques ,  Framéry  obtint  le  prix  pour  son 
opéra  de  Médée ,  dont  la  musique  devait 
être  faite  par  Sacchini  qui  mourut  avant 
d'avoir  commencé  son  travail  :  ce  fut 
Framery  qui  se  chargea  de  ce  soin;  la 


444  FRA 

pièce  n'a  jamais  été  représentée.  Parmi 
les  autres  productions  littéraires  de  Fra- 
mery  on  compte  1  °  La  pureté  de  l'âme  , 
ode  couronnée  à  Rouen ,  1770.  2'  Quel- 
ques romans.  3"  Une  traduction  littérale 
en  prose  de  la  Jérusalem  délivrée ,  Paris, 
1785,  5  vol.  in-18,  et  un  autre  du  Ro- 
land furieux ,  Paris ,  1787,  10  ■vol.  in-12  : 
ces  deux  traductions  ont  été  faites  en  so- 
ciété avec  Panckouke. 

FRANC  (Martin  Le) ,  prévôt  et  cha- 
noine de  Lausanne,  puis  secrétaire  de 
l'antipape  Félix  V  et  du  pape  Nicolas  V, 
était  d'Auraale  en  Normandie ,  selon  Fau- 
chet.  Il  publia  un  mauvais  livre  (  contre 
le  roman  de  la  Rose)  intitulé  :  Le  Cham- 
pion des  Dames.  Il  plaide  assez  mal  leur 
cause  ;  cependant  l'édition  de  Paris,  1 530, 
in-8  ,  est  recherchée  des  personnes  fri- 
voles ,  ainsi  que  son  Estrifde  la  Fortu- 
ne et  de  la  Vertu,  Paris,  1519,  in-4. 

FRANC  (Jean- Jacques,  le  marquis  de 
Pompignan  ) ,  premier  président  de  la 
cour  des  aides  de  Montauban,  membre  de 
l'académie  française,  etc. ,  né  en  1709, 
à  Montauban ,  où  il  exerça  d'abord  la 
charge  d'avocat  général  à  la  cour  des  Aides, 
et  succéda  ensuite  à  son  père  et  à  son 
oncle  dans  la  première  présidence  de  ce 
tribunal.  (Il  fut  revêtu  aussi  d'une  place  de 
conseiller  d'honneur  au  parlement  de  Tou- 
louse, distinction  extraordinaire  et  même 
unique.  Son  goût  pour  les  lettres  lui  fit 
quitter  bientôt  toute  espèce  de  fonctions 
publiques ,  et  il  vint  à  Paris  jouir  des 
succès  que  lui  avaient  déjà  mérités  quel- 
ques-uns de  ses  ouvrages.  Il  avait  débuté 
sur  la  scène  tragique  en  1 734  par  sa  pièce 
imitée  de  Métastase ,  de  Didon ,  qui  s'est 
long-temps  maintenue  au  théâtre  :  il  avait 
alors  22  ans.  Dès  lors  tous  les  momens 
de  loisir  que  ses  emplois  lui  avaient 
permis  de  prendre  avaient  été  consacrés 
à  l'étude.  )  Il  s'est  fait  un  nom  très  distin- 
gué dans  divers  genres  de  littérature.  Bien 
différent  de  nos  écrivains  modernes ,  il 
s'était  nourri  de  tous  les  sucs  de  la  saine 
antiquité ,  et  avait  puisé  dans  les  mêmes 
sources  où  s'étaient  abreuvés,  si  l'on 
peut  hasarder  cette  expression  ,  les  Ra- 
cine ,  les  Despréaux  ,  les  J.  B.  Rousseau. 
Le  latin ,  le  grec  ,  l'hébreu ,  ces  trois  lan- 


FRA 

gués  qu'on  peut  regarder  comme  les  trois 
fleuves  de  l'ancienne  érudition ,  étaient 
familières  à  M.  de  Pompignan  :'  il  y  joi- 
gnait l'italien  et  l'anglais.  On  peut  dire , 
sans  crainte  d'être  démenti  par  tout  con- 
naisseur impartial ,  que  M.  de  Pompignan 
est  le  poète  français  qui  approche  le  plus 
de  J.  B.  Rousseau  ,  pour  le  talent  d'expri- 
mer en  vers  les  beautés  des  prophètes. 
Quoiqu'un  grand  poète ,  descendu  de  sa 
sphère  pour  sacrifier  à  sa  passion ,  et  se 
montrer  le  plus  petit  des  hommes ,  ait 
dit  :  Sacrés  ils  sont ,  car  personne  n'y 
touche;  cette  plaisanterie  n'empêchera 
point  que  les  Poésies  sacrées  de  M.  de 
Pompignan  ne  reçoivent  à  jamais  un  juste 
tribut  d'admiration.  On  sera  toujours 
frappé  de  l'ode  où  Isaïe  nous  peint  les 
ombres  hautaines  des  Souverains  de  VE- 
gypte  renversées  dans  les  enfers ,  sous 
la  main  de  Dieu  ;  et  de  plusieurs  autres 
remplies  d'expressions  nobles ,  d'idées 
vastes  et  sublimes.  Partout  on  y  retrouve 
le  poète  instruit,  l'homme  qui  possède 
toutes  les  richesses  de  sa  langue  ,  point 
de  faux  éclat,  le  terme  propre,  la  rime 
conservée  dans  son  exactitude.  Voilà  ce 
qui  distinguera  toujours  M.  de  Pompi- 
gnan de  tous  ces  rimailleurs  qui  se  sont 
avisés  de  vouloir  imiter  J.  B.  Rousseau. 
Ses  Poésies  diverses  n'étincellent  pas  de 
beautés  aussi  frappantes.  Mais  sa  tragédie 
de  Didon  est  sans  contredit  une  des  meil- 
leures qui  ait  paru  sur  le  théâtre  français. 
Son  Voyage  de  Languedoc  plein  d'agré- 
ment ,  de  variété  et  d'intérêt ,  inférieur 
à  celui  de  Bachaumont  et  de  Chapelle  du 
côté  de  la  naïveté  et  de  l'aisance ,  mais 
supérieur  par  la  correction ,  la  noblesse 
et  la  poésie ,  a  paru  moins  occuper  l'at- 
tention du  public  que  sa  traduction  des 
Géorgiques  ,  ouvrage  généralement  ap- 
plaudi, devenu  plus  célèbre  encore  par 
l'espèce  de  lutte  qu'il  a  essuyée  contre 
celui  de  M.  l'abbé  Delille,  et  les  parallèles 
multipliés  qu'on  a  faits  des  deux  traduc- 
tions. «.  La  manière  de  M.  Delille  ,  dit  un 
»  critique  juste  et  éclairé ,  doit  paraître 
»  plus  brillante ,  et  cela  par  un  défaut 
»  qui  a  généralement  réussi  aux  poètes 
»  de  ce  siècle  :  c'est  la  méthode  de  tra- 
M  vailler  en  marqueterie ,  par  de  petites 


FRA 

»  phrases  morcelées  ,  et  en  isolant  leurs 
»  vers.  Cette  méthode,  qui  détruit,  à  la 
»  vérité ,  l'harmonie  générale  d'un  ou- 
«  vrage ,  qui  empêche  d'en  sentir  les  liai- 
»  sons,  d'en  saisir  l'ensemble,  et  d'en 
»  suivre  la  marche ,  a  de  grands  avanta- 
»  ges  pour  briller  aux  yeux  des  lecteurs 
»  superficiels ,  dont  l'attention  décousue 
»  et  le  goût  de  détail  ne  peut  voir  et 
»  juger  qu'un  petit  objet  à  la  fois.  La  ma- 
»  nière  de  M.  de  Pompignan ,  plus  sira- 
«  pie ,  plus  naturelle ,  plus  conforme  en 
M  général  à  la  marche  des  idées  et  aux 
»  phrases  périodiques  du  poète  latin , 
M  plaira  peut-être  davantage  aux  connais- 
»  seurs  qui  sentiront  un  peu  mieux  dans 
»  ses  vers  le  goût  pur  et  vrai  de  l'anti- 
»  quité  ;  d'autant  plus  qu'on  n'aura  point 
»  à  lui  reprocher  ce  clinquant  antithéti- 
»  que,  ces  bluettes  du  bel-esprit,  ces 
»  tours  maniérés,  ces  petits  agrémens 
»  sans  grâce  ,  et  ce  vermillon  éblouissant 
»  dont  M.  l'abbé  Delille  a  souvent  cnlu- 
»  miné  la  muse  de  Virgile.  »  Sa  tra- 
duction d'Eschyle  et  de  quelques  dialo- 
gues de  Lucien  est  d'une  perfection  qu'il 
semble  difficile  de  surpasser;  peu  d'é- 
crivains ont  mieux  gardé  les  règles  de  la 
traduction,  et  mieux  conservé  l'esprit 
des  auteurs  traduits.  Il  a  donné  en  1784 
ses  OEuvres  complètes,  Paris,  6  vol. 
in-8  ,  très  belle  édition.  On  souhaiterait 
qu'il  eût  fait  un  choix,  et  qu'il  n'eût 
point  associé  aux  titres  d'une  gloire  soli- 
de,.des  bagatelles  qui  ne  peuvent  en 
rien  y  contribuer.  On  est  surtout  fâché 
d'y  trouver  la  Prière  universelle  ,  pièce 
remplie  de  maximes  fausses ,  que  l'auteur, 
par  une  complaisance  mal  entendue ,  a 
traduite  de  Pope ,  à  la  sollicitation  de 
quelques  Anglais ,  faux  amis  qui  l'impri- 
mèrent à  son  insu ,  et  que  lui-même ,  par 
une  tendresse  mal  placée  envers  cet  en- 
fant illégitime,  n'a  pas  eu  le  courage  de 
supprimer.  Il  n'avait  jamais  eu  dans  l'es- 
prit les  principes  qu'elle  renferme ,  et  en 
général  il  est  difficile  d'allier  d'une  ma- 
nière plus  étroite  le  génie  avec  la  religion, 
avec  le  respect  des  mœurs  ,  et  les  égards 
dus  à  l'honnêteté  et  à  la  décence.  On 
chercherait  en  vain  dans  ses  epîtres  et 
dans  ses  Discours  philosophiques ,  ce  ton 


FRA  445 

d'aigreur  et  de  cynisme,  qu'un  coloris 
séduisant  n'est  pas  capable  d'adoucir  ; 
ces  maximes  hardies  qui  défigurent  toutes 
les  notions  ;  cet  appareil  de  sentiment  qui 
n'échauffe  que  l'imagination  et  laisse  le 
cœur  froid.  On  y  trouve  en  revanche  des 
traits  de  force  et  de  lumière  ,  des  leçons 
de  morale,  des  règles  de  goût  qu'on  peut 
adopter  sans  craindre  de  s'égarer.  Tout 
ce  que  le  poète  y  débite  est  toujoursd'ac- 
cord  avec  les  vrais  principes.  Qu'on  lise 
avec  attention  son  Epitre  sur  la  déca- 
dence de  la  littérature  française,  on  y 
reconnaîtra  sans  peine  le  danger  des  tra- 
vers qu'il  condamne,  la  nécessité  des 
préservatifs  qu'il  leur  oppose ,  la  sagesse 
des  réflexions  qu'il  présente  ;  on  y  admi- 
rera surtout  un  athlète  vigoureux  ,  lut- 
tant avec  avantage  contre  les  champions 
de  la  nouveauté  et  du  mauvais  goût.  C'est 
un  spectacle  bien  noble  que  celui  d'un 
académicien,  qui ,  au  milieu  de  sa  com- 
pagnie ,  ose  rappeler  les  lettres  à  leur 
première  dignité,  élever  la  voix  en  faveur 
de  la  patrie  et  des  mœurs ,  et  défendre  la 
foi  de  ses  pères ,  sans  que ,  ni  les  murmu- 
res d'une  partie  de  l'assemblée,  ni  la  sur- 
prise et  l'indignation  qui  éclatent  sur  le 
visage  de  certains  auditeurs,  ni  les  re- 
gards sévères  qu'on  lui  lance ,  puissent 
déconcerter  l'intrépide  avocat  d'une  cause 
si  belle.  Opposez  à  ce  tableau  celui  d'un 
malheureux  vieillard  quia  fondé  sa  répu- 
tation sur  la  ruine  de  la  religion  et  des 
mœurs,  égayant  ses  dernières  années  par 
de  coupables  facéties ,  et  rappelant  tou- 
tes ses  forces  pour  jeter  de  la  boue  au 
visage  de  son  respectable  confrère,  parce 
qu'il  a  eu  l'audace  d'exposer  en  pleine 
académie  les  sentimens  d'un  honnête 
homme  et  d'un  bon  citoyen.  Un  homme 
d'esprit  l'a  appelé  le  dernier  des  Romains. 
Il  mourut  le  l**^  novembre  1784,  dans  son 
château  de  Pompignan,  oii  il  était  retourné 
pour  se  soustraire  à  la  tourbe  philosophi- 
que qui  le  persécutait.  M.  de  Sancy  a 
consacré  ces  vers  à  sa  mémoire  : 

Prés  de  Rousseau  Le  Franc  est  au  sacré  Talion  , 
Favori  de  Minerve  ainsi  que  d'Apollon, 

Bien  ne  peut  ternir  sa  mémoire, 

£t  son  triomphe  est  alîernii  : 

Voltaire  fut  sou  ennemi , 

C'est  uu  uouTeau  titre  à  sa  gloire. 


446 


FRA 


Outre  les  ouvrages  dont  nous  avons  parlé, 
ses  Lettres  qui  sont  en  très  grand  nom- 
bre, et  dont  on  se  propose  de  faire  la 
collection ,  ne  seront  pas  le  moindre  titre 
de  sa  gloire.  «  Cet  écrivain,  dit  l'abbé 
î)  Maury ,  dans  un  Discours  où  d'ailleurs 
»  il  ne  lui  a  pas  rendu  assez  de  justice , 
«  semble  amollir  son  stile  et  s'attendrir 
j>  au  nom  de  l'amitié ,  dont  il  a  la  cor- 
»  dialitc,  l'abandon,  les  aimables inquié- 
«  tudes.  Ce  qui  dans  l'art  d'écrire  lui  a 
»  le  moins  coûté ,  sera  peut-être  ce  qui 
»  honorera  le  plus  sa  mémoire  ;  et  il  aura 
»  ce  trait  de  ressemblance  avec  le  chan- 
»  celier  d'Aguesseau  ,  dont  il  fut  chéri  et 
5)  estimé ,  que  ses  lettres  seront  un  des 
»  plus  beaux  monumeas  de  ses  travaux 
5)  et  de  son  génie.  » 

FRANC  (Jean  George  Le  ),  marquis  de 
Pompignan ,  frère  du  précédent ,  né  à 
Montauban  le  22  février  1715,  évêquedu 
Tuy  en  Velay  en  1743,  arjchevêque  de 
Vienne  en  1774,  est  mort  à  Paris  le  30 
décembre  1790,  après  avoir  long-temps 
servi  l'Eglise  par  son  zèle,  édifié  la  France 
par  ses  vertus ,  et  éclairé  par  ses  savans 
écrits,  dont  les  principaux  sont  1°  Ques- 
tions diverses  sur  l  incrt'dulité ,  in- 12  ; 
ouvrage  très  bien  écrit ,  quoique  d'une 
manière  un  peu  prolixe,  et  plusieurs  fois 
i-éimprimé.  Il  y  examine,  l"s'il  y  a  beau- 
coup de  véritables  incrédules.  2°  Quelle 
est  l'origine  de  l'incrédulité.  3°Siïes  in- 
crédules sont  des  esprits-forts.  4°  Si  l'in- 
crédulité est  compatible  avec  la  probité. 
5°  Si  elle  est  pernicieuse  à  l'état.  Toutes 
ces  questions  sont  traitées  avec  autant 
de  profondeur  que  de  sagesse.  2°  V Incré- 
dulité convaincue  par  les  Prophéties , 
Paris,  1759,  3  vol.  in-l 2.  L'accomplisse- 
ment des  prophéties,  dans  l'exposition 
claire  et  précise  qu'en  fait  le  savant  pré- 
lat ,  en  fixe  le  sens ,  et  met  la  vérité  de 
la  religion  dans  le  plus  grand  jour. 
3°  La  Religion  vengée  de  Fincrédulité 
par  l  incrédulité  elle-même,  Paris,  1772, 
in-l  2.  Il  a  l'avantage  d'y  combattre  des 
ennemis  qui  se  détruisent  eux-mêmes  par 
les  contradictions  et  les  absurdités  que 
renferment  leurs  systèmes  comparés 
les  uns  avec  les  autres  ;  il  n'a  besoin , 
pour  les  terrasser ,  que  des  propres  traits 


FRA 

qu'ils  se  lancent  eux-mêmes,  et  il  en  fait 
ré.suller  le  triomphe  le  plus  complet  et 
le  plus  glorieux  pour  la  cause  qu'il  dé- 
fend. \°  La  dévotion  réconciliée  avec 
l'esprit,  17  55,  in-l 2.  Il  y  prouve,  contre 
les  détracteurs  de  la  dévotion  ,  qu'elle 
s'allie  très  bien  avec  l'esprit  des  belles- 
lettres,  des  sciences ,  de  gouvernement , 
des  affaires  et  de  société.  5°  Le  véritable 
usage  de  l'autorité  séculière  dans  les  ma- 
tières qui  concernent  la  Religion ,  Avi- 
gnon ,  1782  ,  in-l  2.  4«  édit.  On  y  trouve 
la  même  solidité  qui  caractérise  les  ou- 
vrages du  savant  évêque  du  Puy  ;  car  tous 
ces  ouvrages  ont  été  publiés  avant  qu'il 
ait  été  élevé  sur  le  siège  de  Vienne  -.  il 
trace  avec  précision  la  ligne  de  démarca- 
tion qui  sépare  les  deux  pouvoirs.  Il  a 
paru  oublier  les  principes  qu'il  y  établit, 
lorsqu'il  a  voulu  jouer  un  rôle  dans  ce 
qu'on  appelait  mal-à-propos  Y  Assemblée 
nationale  de  France;  mais  il  est  à  croire 
qu'il  ne  prévoyait  pas  jusqu'où  les  choses 
seraient  portées.  «  Trop  bon ,  dit  l'abbé 
»  Barruel ,  pour  soupçonner  à  quoi  ten- 
«  daient  ceux  qui  ont  abusé  de  sa  fai- 
»  blesse ,  il  se  laissa  entraîner  par  ce 
«parti,  qui  le  fit,  pour  quinze  jours, 
»  président  de  l'assemblée ,  qui  lui  valut 
»  ensuite  le  ministère  de  la  feuille.  Il  fut 
»  à  la  cour  ce  qu'est  un  honnête  homme 
»  qui  dit  son  avis ,  mais  qui ,  sans  nerf  et 
»  sans  vigueur,  se  contente  de  gémir,  de' 
»  pleurer,  quand  il  voit  prévaloir  des 
»,  desseins  pernicieux  à  l'Eglise.  Il  fut  un 
»  de  ces  hommes  qui,  par  crainte  du 
M  bruit ,  n'osent  pas  même  souffler  quand 
j)  l'ennemi  est  aux  portes ,  qui  se  rangent 
»  même  sous  ses  bannières,  sous  prétexte  i 
»  de  l'engager  à  faire  moins  de  mal:  ilj 
»  lui  en  a  coûté,  je  ne  dirai  pas  des  re- 
»  mords ,  mais  des  larmes  amères ,  qu'il  ' 
»  ne  répandait  même  qu'en  secret  et  en 
»  présence  de  ses  amis.  Il  avait  peur  qu'oaJ 
»  ne  sut  aux  Jacobins  qu'il  avait  pleuré 
«sur  les  maux  de  l'Eglise.  Il  est  mor 
»  pour  avoir  étouffé  sa  douleur.  Bossue 
»  l'eût  exhalée  ;  et  la  cour  et  la  ville 
»  nos  législateurs  auraient  suquelapeul 
M  n'étouffe  pas  la  voix  des  Chrysostôme 
»  devant  les  précurseurs  du  schisme 
»  de  l'hérésie.  Bossuet  n'eût  pas  tenu  soi 


FRA 

>•  le  boisseau  ce  trait  de  lumière  échappé 
»  depuis  long-temps  à  Rome  sur  la  con- 
»  stitntioii  prétendue  civile  du  clergé.  Je 
»  lesaisde  ceuxmêmesqui  ontvuetlu  la 
»  lettre  du  pape  à  M.  de  Pompignan  (1). 
))  Elle  en  disait  assez  pour  décider  notre 
»  opinionsur  cette  malheureuse constitu- 
»  tion  du  clergé.  La  politique  l'a  tenue  se- 
»  crèle  ;  je  reproche  à  cette  politique  les 
»  sermensde  tous  ceux  que  la  manifesta- 
»  tion  du  bref  adressé  à  M.  de  Pompignan 
)»  en  aurait  détournés.  Nous  souhaitons 
»  que  Dieu  ne  fasse  pas  au  prélat  mort  le 
«  même  reproche.  La  peur  excuse  tout , 
»  mais  c'est  la  peur  même  qui  a  besoin 
»  d'excuse,  et  Dieu  seul  connaît  celles  qui 
»  peuvent  la  rendre  pardonnable  dans 
»  un  prêtre.  » 

FRANCESCHINI  (  Marc-Antoine  ) , 
peintre  bolonais,  naquit  eri  1648.  11  fut 
l'élève  de  Cignani.  Il  saisit  tellement  le 
goût  de  son  maître,  que  celui  ci  lui  con- 
fia l'exécution  de  ses  principaux  ouvrages. 
Ce  peintre  mourut  en  1729,  après  s'être 
faite  un  réputation  étendue. 

FRANC-FLORE.  Toyes  Flore  (Fran- 
çois ). 

FRANCHI  (  Nicolas  ) ,  on  plutôt  Ni- 
coLO  Franco,  poète  satirique,  natif  de 
Bénévent  vers  1 609  ,  l'ami ,  ensuite  le  ri- 
val del'Arélin  ,  attaqua  comme  lui  les  vi- 
vans  et  les  morts ,  et  en  fut  récompensé 
comme  lui ,  si  ce  que  nous  avons  dit  à 
l'article  Arétin,  est  vrai.  Pie  V  l'ayant 
fait  arrêter,  ilfutpendu  à  Rome  en  15G9. 
Si  l'on  eu  croit  le  Ghilini ,  il  écrivait 
avec  beaucoup  de  délicatesse  en  vers  et 
en  prose  ;  mais  il  est  vrai  seulement  que 
Franco  écrivait  des  infamies  et  des  or- 
dures avec  beaucoup  de  facilité.  Son  ima- 
gination était  féconde  en  horreurs.  Il  se 
déchaîna  avec  fureur  contre  le  pape  Paul 
III ,  contre  tous  les  Farnèse ,  contre  les 
Pères  du  concile  de  Trente,  contre  Char- 
les-Quint, etc.  On  a  de  lui   1°  Plusieurs 

,'l)  Celle  lettre  ne  fut  trouvée  dan»  les  papier»  de  M.  de 
Pompipiian  qu'après  sa  mort.  Cependant  il  n'est  lien  de 
plu»  »rai  f|ue  eelte  excuse  di»  prêtres  assermentés  ,  fondée 
•urle  silence  prétendu  du  souver-iin  pontife  snrla  consti- 
tution rini/edn  clergé.  L'auteur  de  cette  note  atlesleaToir 
entendu  dire  à  beaucoup  de  prêtres  qu'ils  n'aiaient  prêté 
icrmeni  que  parce  que  le  saint  Pcie  avait  refusé  de  ré- 
pondre. Si  ce»  mêmes  ecclésiastiques  ont  persisté  depuis 
dan»  leur  scrnicut ,  c'est  qu'un  abîme  eu  appelle  un  autre. 


FRA  447 

Sonnets  sur  V Arétin  ,  qui  furent  impri- 
més avec  la  Priapeia,  1548  ,  in-8 ,  de 
225  pages.  1°  Dinlogi  piacevoli,  Venise , 
1542,  in-8.  3°  //  Tcmpio  (Tamore, 
4°  Dialogo  Suella  Belloezza.  On  a  im- 
primé en*  1 777  la  Fie  de  Nicolo  Franco, 
ou  les  Dangers  de  la  satire,  Vàris,  in-12. 

FRANCHI  (Vincent),  président  du 
conseil  royal  de  Naples ,  sa  patrie ,  et  cé- 
lèbre jurisconsulte ,  mort  en  1601  ,  à  70 
ans ,  a  publié  :  Dccisiones  sacrircgiicon- 
silii  neapolitani ,  in-fol. 

FRANCHI  NI  (François),  né  à  Co- 
sença  en  1495,  suivit  Charles-Quint  à 
l'expédition  d'Alger,  et  allia  Mars  avec 
les  Muses.  Il  fut  ensuite  évêque  de  Messa, 
puis  de  Populania  ,  et  mourut  en  1554. 
On  lui  doit  quelques  Dialogues ,  et  d'au- 
tres petits  ouvrages  écrits  avec  assez  d'a- 
grément. (  Les  meilleures  pièces  de  Fran- 
chini  se  trouvent  dans  les  Carmina  illus" 
trium  poetarum  de  Toscano  ,  et  dans  les 
Deliciœ poctarum  italorumdeJ.  Gruter.) 

FRANCIA  (  François  Raibouni  ,  dit 
Le),  peintre  bolonais,  mort  le  7  avril 
1518,  à  68  ans,  excellait  dans  le  dessin, 
et  fut  un  des  premiers  artistes  de  son 
temps  dans  l'art  de  graver  des  coins  pour 
les  médailles.  On  prétend  que  Raphël  lui 
ayant  adressé  un  tableau  de  Ste.-Ce'cile, 
pour  le  corriger  et  le  placer  dans  une 
église  de  Florence  ,  Francia  fut  si  frappé 
de  sa  beauté ,  que  la  jalousie  dégénérée 
en  désespoir,  occasiona  sa  dernière  ma- 
ladie et  sa  mort.  (  Le  Musée  de  Paris  pos- 
sède de  Francia  Joseph  d'Arimathie , 
St.-Jean  et  les  trois  Maries.  ) 

FRANCISQUE,  peintre.  Foy.  Mile. 

FRANCHIS  (Pierre  Franz,  plus  con- 
nu sous  le  nom  de  ) ,  professeur  d'élo- 
quence ,  d'histoire  et  de  grec  à  Amster- 
dam ,  sa  patrie ,  né  en  1645  ,  voyagea  en 
Angleterre,  en  France  et  en  Italie.  Il 
jouissait  d'une  réputation  assez  étendue 
lorsqu'il  mourut  en  1704  ,  à  59  ans.  On  a 
de  lui  \"  Recueil  de  poésies ,  1697,  in-12. 
Ce  Piccueil  contient  des  poésies  héroïques 
oîi  il  y  a  trop  peu  d'élévation  ,  des  églo- 
gucs,  des  élégies  et  des  épigrammes; 
c'est  dans  ces  deux  derniers  genres  que 
Francius  a  réussi ,  surtout  dans  les  épi- 
grammes.  2"  Des  Harangues,  1705,  in-8. 


448  FRA 

3°  Des  OEuvrcs  posihumes,  1706,  in-8. 

FRANCK  ou  Frank  de  Frankknkau 
(Georges),  médecin,  naquit  à  Naum- 
bourg  en  1643.  A  l'âge  de  18  ans,  il  fut 
créé  poète  couronné  k  léna  :  il  mérita 
cet  honneur  par  sa  grande  facilité  à  faire 
des  vers  allemands,  latins,  grecs  et  hé- 
breux. Dans  la  suite  ,  il  devint  successi- 
vement professeur  en  médecine  à  Heidel- 
berg  et  à  Wittemberg  ,  d'où  le  roi  de  Da- 
nemark ^  Christiern  V,  le  fit  venir  à  sa 
cour  :  il  fut  honoré  ,  à  son  arrivée  ,  des 
titres  de  médecin  du  roi  et  de  conseiller- 
aulique.  L'empereur  Léopold  ajouta  ce- 
lui de  comte  Palatin  en  1G92.  Ses  ouvra- 
ges imprimés  sont  1°  Flora  Francien , 
in-12  ;  2°  Satyrœ  medicœ,  3°  Plusieurs 
Lettres.  Il  a  aussi  laissé  un  grand  nom- 
bre de  manuscrits  qui  méritaient  de  voir 
le  jour.  L'académie  Ze'o/;oZrfme,  celle  des 
Ricovrati  de  Padoue ,  et  la  société  royale 
de  Londres,  se  l'étaient  associé.  Il  mou- 
rut en  1704  ,  à  61  ans. 

FRANCK  (Auguste-Herman  ),  théolo- 
gien allemand ,  né  à  Lubeck  en  1663,  fit 
une  partie  de  ses  études  à  Leipsick.  Il  y 
fonda ,  avec  quelques-uns  de  ses  amis , 
une  espèce  de  conférence  sur  l'Ecriture- 
Sainte ,  qui  subsiste  encore  sous  le  titre 
de  Collegium  Philobiblicum.  Devenu  mi- 
nistre à  Erfurt ,  il  fut  obligé  de  sortir  de 
cette  ville  en  1691 .  Le  fanatisme  que  res- 
piraient ses  sermons  lui  attira  cette  ex- 
clusion. L'électeur  de  Brandebourg  l'ap- 
pela dans  ses  états  :  il  s'y  rendit ,  et  il  fut 
professeur  de  grec  et  des  langues  orien- 
tales à  Halle,  puis  de  théologie  en  1698. 
C'est  dans  celte  ville  qu'il  fit  la  fondation 
de  la  Maison  des  orphelins.  Cette  maison 
prospéra  tellement,  qu'il  y  avait,  en  1 7  27 , 
2196  jeunes  gens,  et  plus  de  130  précep- 
teurs. On  y  donnait  à  manger  à  près  de 
600  pauvres  ,  soit  étudians ,  soit  orphe- 
lins. L'empirisme  et  les  charlatanerics 
d'un  certain  Basedow  contribuèrent  de- 
puis à  lui  faire  perdre  sa  réputation. 
Franck  mourut  en  1727  ,  à  64  ans.  On  a 
de  lui  :  1°  des  Sermons  et  des  livres  de 
dévotion  ,  en  allemand.  2°  Mcthodus  stu- 
dii  theologici.  2°  Jntroduclio  ad  lectio- 
nem  Prophelarum.  4°  Commcntatio  de 
scnpo  Ubrorum  Fetcris   et  Novi  Tes- 


FRA 

lamcnti.  5°  Manuductio  ad  lectionem  \ 
Scripturce  sacrœ.  6"  Observationes  M- 
blicœ.  Les  préjugés  de  secte,  qui  réglaient 
les  jugemcns  de  l'auteur,  ont  empêché 
que  ses  ouvrages  ne  fussent  répandus 
hors  des  pays  du  Nord.  j 

FRANCK  (  Simon  ),  né  à  Jemmappes ,  1 
près  de  Liège  ,  en  1741  ,  se  distingua  dès 
le  premier  âge  dans  les  belles-lettres,  par- 
ticulièrement dans  l'éloquence  et  dans 
la  poésie  latine,  comme  on  le  voit  par 
les  pièces  diverses  insérées  dans  les  Musce 
Leodienses  ^  1761  et  1762  ,  2  vol.  in-8. 
Dans  le  premier  de  ces  recueils,  on  dis- 
tingue un  poème  épique  sur  l'établisse- 
ment du  christianisme  au  Japon  ,  plein 
d'épisodes  ,  d'images  et  de  comparaisons 
heureuses ,  et  de  très  beaux  vers  ,  qui  a  « 
été  réimprimé  à  la  suite  de  la  F'ie  de  l'A- 
pôtre des  Indes,  Liège,  1788.  Parmi  les 
pièces  du  second  volume ,  on  remarque 
l'ode  :  In  impios seculi  nostri  scriptores. 
Ayant  embrassé  l'état  ecclésiastique,  et 
s'étant  livré  avec  une  ardeur  extraordi- 
naire aux  fonctions  du  saint  ministère , 
il  mourut  dans  sa  patrie  en  17  72  ,  d'une 
maladie  contagieuse,  qu'il  arSît  contrac- 
tée en  visitant  les  malades ,  avec  un  zèle 
égal  à  ses  autres  vertus...  Qu'il  soit  per- 
mis à  l'auteur  de  cet  article  de  dire  : 

Manibus  dale  lilia  plenis. 
Ilis  «altetn  accumulem  douis,  et  fungar  iiiani 
Munere.  £\£id.  VI. 

FRANCKENBERG(  Abraham  de  ),  sei- 
gneur de  Ludwigsdorff  et  de  Schwirse  dans 
la  principauté  d'Oels,  se  livra  au  fanatisme 
d'une  secte  obscure  etméprisable.  Ilpassa 
la  plus  grande  partie  de  sa  vie  à  Ludwigs-  ' 
dorff,  où  il  était  né  en  1593  ,  et  où  il 
mourut  en  1652.  On  a  de  lui  un  grand 
nombre  de  livres  extravagans ,  en  latin 
et  en  allemand,  remplis  de  rêveries  des 
Boehmistes.  l"Une  Fie  de  Jacques  Bochm, 
fondateur  de  celte  secte.  2°  Fita  veterum 
Sapientum;  3"  Nosce  te  ipsuni,  etc.  Il  y 
a  dans  ces  derniers  ouvrages  quelques 
vérités  triviales,  noyées  dans  le  verbiage, 
et  mêlées  à  diverses  erreurs. 

*  FRANCKENBERG  (  Jean-Henrii 
Ferdinand  de  ),  cardinal ,  archevêque  de 
Matines,  naquit  le  18  septembre  1726  àl| 
Gross-Glogaw  en  Silésie ,  d'une  famille 


PRA 

distinguée.  Il  fit  chez  les  jésuites  ses  pre- 
mières études,  se  voua  bientôt  à  l'état 
ecclésiastique,  et ,  après  avoir  terminé  ses 
cours  de  théologie  et  de  droit  canon  au 
collège  Germanique  de  Rome ,  il  fut  or- 
donné prêtre  le  10  août  1749.  La  veille 
de  la  Toussaint  de  la  même  année,  il  prê- 
cha devant  Benoît  XIV  :  son  éloquence,  sa 
piété  et  son  zèle  pour  le  service  de  la  re- 
ligion le  firent  remarquer  de  bonne  heure, 
et,  lorsqu'il  eut  été  reçu  docteur  en  droit 
canon ,  il  ne  tarda  pas  à  être  élevé  aux 
dignités  ecclésiastiques.  Successivement 
nommé  chanoine  de  Breslau ,  grand-vi- 
caire de  Goritz,  doyen  de  la  collégiale 
de  Toussaint  à  Prague ,  puis  de  celle  de 
Buntslau  en  Silésie ,  il  dut  le  27  janvier 
17.59,  à  Marie-Thérèse  dont  il  était  le  su- 
jet ,  l'archevêché  de  Malines  vacant  par  la 
mort  du  cardinal  d'Alsace.  Sa  présence 
dans  son  diocèse  fut  pour  lui  une  occasion 
de  déployer  son  zèle,  et  pour  ses  diocésains 
un  sujet  d'édification  journalière.  Ses  ver- 
tus le  firent  porter  au  cardinalat  le  l*' juin 
1778.  Marie -Thérèse  lui  avait  accordé 
précédemment  le  titre  de  conseiller  d'é- 
tat avec  la  grand-croix  de  l'ordre  de  St.- 
Etienne.  Le  diocèse  de  Malines  fut  sage- 
ment administré,  et  l'on  peut  dire  que  ce 
prélat  remplissait  avec  exactitude  et  avec 
succès  les  nombreux  et  pénibles  devoirs 
de  l'épiscopat  :  la  célébration  des  saints 
mystères ,  de  longues  et  profondes  médi- 
tations ,  des  études  sérieuses  et  suivies , 
des  prédications  pleines  d'onction  et  de 
foi'ce,  tels  étaient  les  travaux  de  tous 
les  jours  de  ce  respectable  pontife.  Cette 
administration  fut  calme  et  heureuse  pen- 
dant toute  la  durée  du  règne  de  Marie- 
Thérèse  ;  la  mort  de  cette  vertueuse  prin- 
cesse changea  entièrement  la  face  des  af- 
faires :  Joseph  II  qui  succéda  à  sa  mère 
voulut  faire  des  réformes  en  matières  ec- 
clésiastiques, et  à  cette  occasion  il  publia 
plusieurs  édits  contraires  à  la  doctrine  de 
l'Eglise  ou  tout  au  moins  au  vc8u  de  la 
religion  :  nous  ne  citerons  d'abord  que 
la  suppression  des  communautés  religieu- 
ses, qui  ont  jeté  un  si  grand  lustre  sur  l'E- 
glise et  qui  furent  une  pépinière  de  saints. 
Ces  édits  devinrent  l'objet  des  réclama- 
tions du  cardinal  :  mandé  à  Vienne  en 
V, 


MA 


449 


1 78t  pour  rendre  compte  de  sa  conduite, 
il  le  fit  avec  respect ,  mais  avec  coxirage 
et  avec  liberté.  Toutefois  l'empereur  le 
renvoya  à  Malines.  Malgré  l'opposition 
du  clergé  des  Pays-Bas ,  Joseph  continua 
la  publication  de  ses  édits  de  réforme , 
et  ordonna  entr'autres  l'ouverture  d'un 
séminaire  général.  Soit  que  les  profes- 
seurs eussent  un  enseignement  réprében- 
sible  sur  plusieurs  points ,  comme  le  dé- 
clara publiquement  l'archevêque  de  Ma- 
lines, qui  ne  voulut  jamais  y  envoyer  ses 
théologiens ,  soit  que  la  nomination  des 
chefs  qui  devaient  diriger  cet  établisse- 
ment eût  été  faite  par  l'empereur  au  lieu 
de  l'être  par  les  évêques  à  qui  ce  droit  ne 
peut  être  enlevé,  puisqu'ils  sont  les  con- 
servateurs et  les  gardiens  naturels  des 
doctrines  religieuses.  On  peut  affirmer 
que  le  plus  grand  mécontentement  régna 
dès  lors  dans  les  Pays-Bas,  et  ce  mé- 
contentement ne  tarda  pas  à  être  suivi  de 
troubles  sérieux  au  milieu  desquels  les 
Autrichiens  furent  chassés  de  ces  provin- 
ces. Joseph  était  disposé  à  retirer  ses  édits, 
lorsqu'il  mourut,  sans  avoir  pu  rétablir  la 
tranquillité  dans  un  pays  que  ses  ordres 
tyranniques  avaient  soulevé  contre  lui. 
Son  successeur  Léopold  rétablit  l'ancien 
ordre  de  choses ,  et  dès  lors  chacun  s'ef- 
força de  réparer  les  maux  causés  par  les 
derniers  événemens.  Mais  la  révolution 
française  venait  d'éclater  :  de  nouveaux 
orages  menacèrent  aussitôt  la  Belgique. 
Les  Français  y  pénétrèrent  à  la  fin  de  1 7  92, 
et  quoiqu'ils  eussent  invité  les  professeurs 
de  l'université  de  Louvain  à  continuer 
leurs  travaux,  et  qu'ils  eussent  promis  de 
ne  toucher  ni  à  l'enseignement,  ni  au 
culte ,  des  désordres  de  tous  genres  eu- 
rent lieu  :  les  séminaires  furent  abandon- 
nés ,  les  églises  pillées  et  un  peuple  re- 
ligieux, poursuivi  dans  ses  croyances.  Les 
Français ,  chassés  de  la  Belgique  dans  le 
mois  de  mars  1793,  y  rentrèrent  l'an- 
née suivante  avec  des  forces  imposantes. 
Pendant  la  première  invasion,  Francken- 
berg  avait  été  obligé  de  se  cacher.  La 
confiscation  de  ses  biens,  la  spoliation  des 
églises ,  les  insultes  aux  prêtres  n'avaient 
pas  dû  le  rassurer  sur  la  conduite  que  les 
vainqueurs  devaient  tenir  à  son  égard, 

29 


45(1  FRA 

Pend&iit  la  seconde  occupation  des  f*ays- 
Bas  :  il  fut  encore  obligé  de  se  retirer  en 
Hollande  ;  mais  le  besoin  de  revoir  son 
troupeau,  de  partager  ses  malheurs  pen- 
dant ce  temps  de  calamités  publiques ,  le 
déterminèrent,  malgré  les  dangers  qu'il 
pouvait  courir ,  à  revenir  à  Malines  oii  son 
palais  était  occupé,  et  où  il  fut  obligé  d'al- 
ler se  loger  au  séminaire.  En  échange  de 
ses  biens  qui  étaient  saisis ,  on  lui  avait 
promis  une  pension  qu'il  ne  toucha  ja- 
mais. Malgré  tous  les  sacrifices  qu'il  dut 
faire  alors  pour  la  tranquillité  publique , 
il  fut  en  proie  à  une  horrible  persécution, 
par  suite  du  serment  de  haine  à  la  royauté 
et  de  fidélité  à  la  constitution  civile  du 
clergéqu'on  exigea  de  lui,  et  qu'il  refusa 
avec  le  même  courage  que  la  plupart  des 
prêtres  français.  Un  décret  de  déporta- 
tion fut  lancé  contre  lui  par  le  Directoire  : 
transféré  à  Emmerick  au  delà  du  Rhin , 
il  habita  le  monastère  des  religieux  trini- 
taires.  Chassé  en  vertu  d'un  ordre  que  ses 
ennemis  avaient  obtenu  du  roi  de  Prusse  , 
de  ce  lieu  d'où  il  pouvait  facilement  cor- 
respondre avec  son  diocèse  ,  il  se  retira  à 
Berkem  qui  appartenait  encore  à  l'archi- 
duc-électeur  de  Cologne  et  évêque  de 
Munster.  Peu  de  temps  après ,  sur  la  de- 
mande du  pape  ,  il  envoya  sa  démission 
de  son  siège ,  puis  il  alla  s'établir  à  Bréda 
sur  le  territoire  hollandais,  où  après  avoir 
été  invité  par  le  cardinal  Consalvi,  au  nom 
du  souverain  Pontife ,  à  venir  se  fixer  à 
Rome,  il  mourut  d'une  attaque  d'apo- 
plexie le  11  juin  1804.  Son  grand  âge  ne 
lui  avait  pas  permis  de  faire  le  voyage 
d'Italie  :  il  s'était  contenté  d'accepter  de 
la  cour  de  Rome  une  pension  de  3,000 
florins  dont  il  ne  toucha  qu'un  quartier. 
Ce  pieux  et  courageux  prélat  exerça  ses 
fonctions  épiscopales  dans  l'exil  comme 
dans  le  siège  même  de  son  évêché  :  pen- 
dant torute  sa  vie,  il  fut  un  modèle  de 
piété,  et  mérita  d'être  compté  parmi  les 
plus  illustres  prélats  du  IS**  siècle.  On 
trouve  des  détails  fort  intéressans  sur  sa 
vie  et  sur  son  administration  dans  une 
Notice  curieuse  qui  fat  publiée  après  sa 
mort ,  et  dans  l'ouvrage  du  docteur  Yan- 
de-Velde ,  intitulé  :  Synopsis  monumen- 
torum,Giaid^  1822,  3  vol.  in-8. 


MA 

FRANCKENSTEIN  (Christian  Gode- 
froi) ,  né  à  Leipsick  en  1661,  mort  le  26 
août  1717,  après  avoir  voyagé  en  France, 
en  Angleterre  et  en  Suisse ,  exerça  avec 
applaudissement  la  profession  d'avocat  à 
Leipsick.  Il  avait  une  mémoire  prodi- 
gieuse. Ses  principaux  ouvrages  sont  : 
1°  une  Continuation  de  l'introduction  à 
l'Histoire  de  Puffendorff.  2°  Vie  de  la 
reine  Christine.  3°  Histoire  du  1 6*  et  du 
1 7''  siècles,  qui  ne  sont  que  de  mauvaises 
compilations. 

FRANCKENSTEIN  (  Jacques -Au- 
guste ) ,  fils  du  précédent ,  mort  à  Leip- 
sick en  1733,  après  avoir  été  professeur 
de  la  chaire  du  droit  de  la  nature  et  des 
gens,  est  auteur  d'un  grand  nombre  d'ou- 
vrages et  de  dissertations  latines ,  dontla 
plupart  ne  sont  que  des  compilations , 
entre  autres  :  \° De  collatione  bonorum. 
2°  Dejuribus  Judœorum  singularibus  in 
Ger mania.  d°  De  Thesauris,  etc.  etc. 

FRANCKLIN  ou  Fbanklin  (Benjamin  ), 
né  à  Boston  dans  la  Nouvelle-Angleterre 
le  17  janvier  1706,  mort  à  Philadelphie  en 
Amérique  le  17  avril  1790,  dans  la  85« 
année  de  son  âge.  De  simple  prote  d'im- 
primerie, il  parvint  à  se  faire  un  nom  dis- 
tingué parmi  les  savans  et  parmi  les  poli- 
tiques. (  Son  père  natif  d'Angleterre,  fa- 
bricant de  savon  et  de  chandelles  à  Bos- 
ton ,  l'envoya  à  l'âge  de  8  ans  dans  une 
école  ;  mais  il  l'en  retira  deux  ans  après , 
pour  lui  faire  embrasser  sa  profession.  A 
12  ans  le  jeune  Francklin  fut  mis  en  ap- 
prentissage chez  son  frère  James  qui  était 
imprimeur.  Il  y  fit  de  grands  progrès  ; 
car  il  travaillait  avec  assiduité ,  lisait 
beaucoup  et  méditait  encore  plus.  Des 
1721  ,  son  frère  fit  paraître  le  Journal 
de  la  Nouvelle-Angleterre  :  c'était  la 
3®  feuille  périodique  qui  paraissait  en 
Amérique  :  Francklin  y  mit  quelques  ar- 
ticles qui  furent  accueillis  favorablement, 
et  qui  l'engagèrent  à  continuer  ses  tra- 
vaux littéraires.  Il  se  proposa  d'imiter  le 
Spectateur  d'Adisson ,  et  fit  pour  y  arri- 
ver des  épreuves  de  tout  genre.  En  même 
temps  il  lisait  les  poètes ,  les  philosophes, 
les  théologiens  :  cependant  il  quitta  Bos- 
ton et  alla  à  New- York ,  puis  à  Philadel- 
phie, où  il  entra  dans  l'imprimerie  de  M. 


FRA 

Keimer.  Encouragé  par  le  gouverneur , 
WUliam  Keit,  à  établir  une  imprimerie,  lui 
promettant  l'appui  du  ministère ,  il  vint 
en  Angleterre  pour  acheter  le  matériel  né- 
cessaire à  cette  entreprise  ,  ne  trouva  pas 
le  gouvernement  favorable  à  son  projet,  et 
fut  quelque  temps  sans  ressource  (  1724  ). 
Devenu  ouvrier  imprimeur ,  il  économisa 
sur  sa  nourriture  de  quoi  faire  paraître  sa 
Dissertation  sur  la  liberté  et  sur  la  né- 
cessite'., où  il  prétendit  que  la  vertu  et 
le  vice  ne  sont  que  de  vaines  distinc- 
tions. De  retour  à  Philadelphie,  il  fut 
prote  chez  itf .  Keimer,  artiste  industrieux 
et  habile  ;  il  se  rendit  utile  à  cet  établis- 
sement. Cherchant  ensuite  à  sortir  de 
la  gêne  qu'il  éprouvait  par  quelques 
essais  de  commerce  ,  et  par  la  publica- 
tion d'un  journal  qui  eut  quelque  vogue, 
il  fonda  une  société  philosophique  et 
une  bibliothèque  :  il  commença  aussi 
son  Almanach  du  bon-homme  Richard 
qu'il  continua  pendant  25  ans  et  qu'il 
remplit  de  maximes  de  frugalité  et  de 
j  leçons  d'industrie  :  il  en  vendait  jus- 
qu'à 10,000  par  an.  Nommé  en  1736  se- 
crétaire de  l'assemblée  générale  de  Pen- 
sjivanic,  et  en  1737  maître  de  poste,  il 
créa  une  compagnie  d'assurance  contre 
l'incendie ,  une  troupe  de  pompiers ,  une 
société  pour  la  défense  de  la  province  : 
membre  de  l'assemblée  de  Pensylvanie ,  il 
prit  part  à  toutes  les  querelles  entre  le  gou- 
vernement et  les  habitans.  )  En  même 
temps  il  s'appliqua  beaucoup  à  varier  les 
phénomènes  de  l'électricité,  et  à  les  faire 
servir  à  une  théorie  qui  donnât  une  idée 
juste  de  ce  fluide  si  subtil  et  si  merveil- 
leux. Quoique  toutes  ses  idées  n'aient  pas 
joui  de  l'approbation  des  savans  ,  on  ne 
peut  nier  qu'il  n'ait  répandu  des  lumières 
sur  cet  objet ,  et  que  plusieurs  de  ses  con- 
jectures ne  soient  appuyées  de  l'expé- 
rience. Son  projet  d'apaiser  les  tempêtes 
de  la  mer  avec  de  l'huile  et  des  matières 
graisseuses  est  aujourd'hui  reconnu  pour 
une  illusion  complète  (  voyez  le  Journ. 
histor.  et  littér.,  1"  juillet  1782  ,  p.  337, 
et  autres  cités ,  ibid.  ).  On  sait  qu'il  a 
beaucoup  travaillé  à  l'indépendance  des 
colonies  anglaises  en  Amérique ,  et  c'est 
à  ce  titre  que  l'Assemblée  nationale  de 


FRA  45i 

France  a  décerné  un  deuil  de  trois  jours 
pour  honorer  sa  mémoire.  Cependant  la 
guerre  danslaquelle  il  entraîna  la  France, 
a  fait  un  mal  infini  à  ce  beau  royaume  , 
et  l'on  peut  dire  qu'elle  a  mis  le  comble 
au  désordre  de  ses  finances.  «  On  nous 
»  fit  entreprendre,  dit  un  écrivain  de  cette 
«  nation ,  contre  toutes  les  règles  de  la 
»  vraie  politique  autant  que  de  la  jus- 
»  tice,  une  guerre  effroyablement  dispen- 
M  dieuse  ;  guerre  aussi  follement  conduite 
«  que  légèrement  engagée  ;  guerre  où  la 
»  nation  fut  réduite  à  se  regarder  comme 
»  triomphante  quand  elle  n'avait  pas  été 
»  battue ,  et  elle  n'eut  pas  toujours  cette 
)>  étrange  gloire;  guerre  qui,  en  ôtant  à 
)>  nos  rivaux  des  domaines  immenses  en 
»  étendue,  où  leurs  forces  et  leur  com- 
»  merce  s'extravasaient  avec  plus  de  faste 
»  que  d'utilité  réelle  pour  eux ,  leur  en 
»  a  rendu  bien  plus  que  l'équivalent,  puis- 
»  qu'une  paix  plus  humiliante  qu'avan- 
»  tageuse  pour  nous  a  été  suivie  d'un 
»  traité  de  commerce  désastreux ,  extra- 
»  vagant  dans  plusieurs  de  ses  disposi- 
»  tions,  ruineux  dans  toutes,  et  dont  on- 
»  croirait  que  l'objet  a  été  d'indemniser 
»  l'Angleterre  des  pertes  qu'elle  avait 
»  faites  en  Amérique ,  de  lui  assurer  en 
»  Europe,  sur  la  France,  les  tributs  qu'elle 
»  ne  pouvait  plus  retirer  dans  l'autre  con- 
»  tinent.  »  Du  reste ,  c'est  peut-être  ce 
point  de  vue  là  même ,  qui  a  rendu  cher 
le  nom  de  Francklin  à  l'Assemblée  natio- 
nale, puisque,  sous  ce  rapport,  elle  lui 
doit  son  existence.  Cet  homme  célèbre, 
étant  encore  imprimeur ,  s'était  fait  une 
épitaphe  singulière,  où  l'on  voitqu'à  cette 
date  il  croyait  à  la  résurrection  un  peu 
plus  fermement  que  lorsqu'il  demanda 
la  bénédiction  de  Voltaire  pour  son  fils 
(  Foy.  le  Journ.  hist.  et  litt. ,  25  mars 
1778  ,  page  465  ).  Mais  il  paraît  qu'à  la 
fin  il  était  revenu  à  cette  croyance ,  pui.s- 
qu'il  voulut  que  l'épitaphe  fût  mise  sur 
son  tombeau.  La  voici ,  traduite  littérale- 
ment par  M.  Bertin  : 

Le  corpi 

de  Beniamîo  Francklin,  imprimeur, 

(  comme  la  cou»erture  d'un  TÏeux  litre 

dont  la  dedans  est  arraché , 

et  qui  n'a  plus  ni  reliure  ni  dorure  ) 

l«n  ici  de  ptture  «vx  ren  ; 


isl 


FRA 


naùl'eaTrige  en  lui-même  ne  ut»  pu  perdu , 

e«r  il  reparaîtra  un  jour, 

fainsi  qu'il  l'a  toujours  peoié  | 

daos  une  oouTelle  et  plus  belle  éditioo  , 

reTue  et  corrigée 

par  l'auteur. 

Les  œuvres  de  Francklin  ont  été  réunies 
en  3  vol.  in-8.  Londres ,  1 806 ,  en  anglais. 
Barbeu  du  Bourg  a  publié  une  trad.  fran- 
çaise de  la  partie  physique,  Paris,  1773, 
2  vol.  in-4.  En  1 792  ,  on  a  publié  en  2  vol. 
in-8  une  traduction  française  des  Mé- 
moires de  sa  vie  écrits  par  lui-même,  sui- 
vie de  ses  œuvres  morales ,  politiques  et 
littéraires.  Son  éloge  a  été  écrit  par  Con- 
dorcet.  (Il  faut  consulter  sur  sa  vie  les 
Mémoires  qu'il  a  rédigés  lui-même  et 
adressés  à  son  fils  :  ils  ont  été  traduits  en 
français  par  M.  Ginguené,  Paris,  1791, 
in-8.  )  Sa  Correspondance  choisie  a  été 
publiée  et  traduite  en  français  par  M.  de 
la Mardelle ,  Paris,  1 8 1 8,  2  vol.  in-8.  Cha- 
cun connaît  le  vers  de  Turgot  sur  Franc- 
klin : 

Eripuitcœlo  fulmeo   (ceptrumque  tyrannit. 

FRANCO  (Battista),  peintre  véni- 
tien ,  mort  en  1561 ,  égalait  les  plus  ha- 
biles artistes  de  son  temps  dans  le  dessin  ; 
mais  il  était  faible  dans  le  coloris,  et 
peigtiait  d'une  manière  fort  sèche. 

*  FRANCO  (  Antonio  ) ,  portugais ,  né 
en  1662  à  Montalvas  (province  de  l'A- 
lentejo  )  ,  entra  dans  la  société  des  jé- 
suites à  l'âge  de  1 S  ans ,  où  il  mérita 
bientôt ,  par  sa  piété  et  ses  talens ,  l'es- 
time de  ses  supérieurs.  Il  remplit  le& 
charges  les  plus  importantes  de  son  or- 
dre ,  et ,  se  consacrant  en  même  temps  à 
des  recherches  historiques ,  il  contribua 
à  la  gloire  de  la  société ,  en  faisant  con- 
naître les  jésuites  portugais  les  plus  re- 
commandables  par  leur  piété ,  leur  talent 
et  leur  zèle.  Le  père  Franco  mourut  à 
Evorale  3  mars  1 7  32.  Parmi  les  ouvrages, 
soit  en  latin ,  soit  en  portugais  ,  qu'on  a 
de  ce  religieux,  on  distingue  :  \°  Annus 
gloriosus  societatis  Jesu  in  Lusitania , 
complectens  sacras  memorias  illustrium 
virorum  qui  virtutibus,  sudoribus ,  san- 
guine ,  fidem ,  Lusitaniam  et  societatem 
Jesu  in  Asia ,  A  fric  a  ,  America  et 
Europa  feUcissim^exornàrunt ,  "Vienne, 
n20,  iii-4  ;  V  Synopsis  annalium  sq^ 


FRA 

cietatis  Jesu  in  Lusitania  f  ab  anno 
1540,  usque  ad  annum  1725,  Augs- 
bourg,  1726,  in-fol.  ;  3°  Imagem  do 
primeiro  seculo  da  compànhia  de  Jesu 
em  Portugal,  2  vol.  in-fol.  ;  4°  Imagem 
do  segundo  seculo,  un  vol.  Dans  ce  der- 
nier ouvrage  ,  resté  inédit,  sont  rangés 
par  ordre  chronologique  les  événemens 
les  plus  mémorables  des  premiers  150 
ans  de  la  société  de  Jésus ,  dans  la  pro- 
vince du  Portugal.  5°  une  Syntaxe 
abrégée  en  langue  portugaise;  6°  une 
Traduction  en  la  même  langue  de  Vln- 
diculus  universalis  du  Père  de  Pomey. 
(  Voyez  PoMKY.  ) 

FRANCO.  Foyez  Franchi. 

FRANÇOIS  d'Assise  (  Saint  )  naquit 
à  Assise  en  Ombrie  l'an  1182.  On  le 
nomma  Jean  au  baptême  ;  mais  depuis 
on  y  ajouta  le  surnom  de  François ,  à 
cause  de  sa  facilité  à  parler  la  langue 
française ,  nécessaire  alors  aux  Italiens 
pour  le  commerce ,  auquel  son  père  le 
destinait.  La  piété  seule  avait  de  l'attrait 
pour  Jean.  Il  quitta  la  maison  paternelle, 
vendit  le  peu  qu'il  avait ,  se  revêtit  d'une 
tunique  et  se  ceignit  d'une  ceinture  de 
corde.  Son  exemple  trouva  des  imitateurs, 
et  il  avait  déjà  un  grand  nombre  de  dis- 
ciples ,  lorsque  le  pape  Innocent  III  ap- 
prouva sa  règle  en  1210.  Ce  pape  n'avait 
pas ,  dit-on ,  voulu  écouter  un  homme 
que  son  extérieur  annonçait  peu  avan- 
tageusement ;  mais  ayant  vu  en  songe  le 
même  pauvre  qu'il  avait  rebuté,  dans 
l'attitude  de  soutenir  l'église  de  Saint- 
Jean-de-Latran  qui  paraissait  s'écrouler, 
il  le  fit  rappeler  et  lui  accorda  sa  de- 
mande. L'année  d'après ,  le  saint  fonda-  I 
teur  obtint  des  Bénédictins  l'église  de  * 
Notre-Dame  de  la  Portioncule,  près 
d'Assise.  Ce  fut  le  berceau  de  l'ordre  des 
Frères-Mineurs ,  répandu  bientôt  en  Italie, 
en  Espagne  et  en  France.  L'enthousiasme 
qu'inspiraient  les  vertus  de  François  était 
si  vif,  que  lorsqu'il  entrait  dans  quelque 
ville,  on  sonnait  les  cloches;  le  clergé  et  le 
peuple  venaient  au  devant  de  lui,  chantant 
des  cantiques  et  jetant  des'rameauxsurle 
passage.  Sa  nouvelle  famille  se  multiplia 
tellement,  qu'au  premier  chapitre  gé- 
néral qu'il  tint  proche  d'Assise  en  1219, 


il  se  trouva  près  de  6000  frères-mineurs. 
Peu  après  ce  chapitre ,  il  obtint  du  pape 
Honorius  III  une  bulle  en  faveur  de  son 
ordre.  Plusieurs  de  ses  disciples  voulaient 
qu'il  demandât  le  pouvoir  de  prêcher 
partout  oîi  il  leur  plairait ,  même  sans  la 
permission  des  évêques.  Le  sage  fonda- 
teur se  contenta  de  leur  répondre  :  «  Tâ- 
M  chons  de  gagner  les  grands  par  l'hu- 
»  milité  et  par  le  respect,  et  les  petits 
»  par  la  parole  et  le  bon  exemple.  Notre 
»  privilège  singulier  doit  être  de  n'avoir 
»  point  de  privilège.  »  Réponse  digne  de 
l'humble  fondateur  ,  mais  qui  n'empêche 
pas  que  les  exemptions  et  privilèges  des 
religieux  n'aient  été  souvent  utiles  à 
l'Eglise,  et  même  nécessaires  dans  les 
diocèses  dont  les  évêques  étaient  ou  fa- 
vorables à  l'erreur ,  ou  insoucians  sur  le 
salut  de  leurs  ouailles.  Ce  fut  vers  le 
même  temps  que  François  passa  dans  la 
Terre-Sainte  ;  il  se  rendit  auprès  du  sultan 
Hélédin  pour  le  convertir.  Il  offrit  de  se 
jeter  dans  un  bûcher  pour  prouver  la 
religion  chrétienne  ;  le  sultan  n'ayant 
pas  voulu  le  mettre  à  une  telle  épreuve , 
renvoya  François  avec  honneur.  Revenu 
en  Italie,  il  institua  le  tiers-ordre.  Il 
voulut ,  par  cette  institution ,  procurer 
»ux  laïques  le  moyen  de  mener  une  vie 
semblable  à  celle  de  ses  religieux ,  'sans 
en  pratiquer  cependant  toute  l'austérité, 
et  sans  quitter  leurs  maisons.  Après  avoir 
réglé  ce  qu'il  croyait  convenir  le  plus  à 
SCS  diflfèrens  enfâns ,  et  s'être  démis  du 
gënéralat,  il  se  retira  sur  une  des  plus 
hautes  montagnes  de  l'Apennin.  C'est  là 
qu'il  vit ,  à  ce  que  rapporte  saint  Bona- 
Tenture ,  un  Séraphin  crucifié  qui  perça 
ses  pieds,  ses  mains  et  son  côté  droit; 
c'est  l'origine  du  nom  de  Seraphique 
qui  a  passé  à  tout  son  ordre  :  événement 
étonnant ,  mais  bien  prouvé ,  que  le  pape 
Alexandre  rv  a  vérifié  par  lui-même ,  et 
que  le  judicieux  Fleury  (  liv.  79 ,  n°  5  ) 
a  montré  être  hors  des  atteintes  d'une 
critique  équitable.  Le  Père  Chalippe, 
pécollet,  dans  la  Fie  de  saint  François. 
Paris,  1734  et  1736,  réfute  très  bien  ce 
que  Baillet  a  étourdiment  disserté  sur  ce 
sujet.  Le  saint  patriarche  mourut  2  ans 
•près  à  Assise  en  1226 ,  âgé  de  45  ans. 


tKk 


^^ 


Son  amour  pour  la  pauvreté  ,  son  déta- 
chement de  tous  les  biens  de  la  terre ,  et 
sa  profonde  humilité ,  l'ont  fait  regarder 
comme  un  des  plus  parfaits  modèles  de 
l'abnégation  chrétienne,  de  l'indifférence 
et  du  dépouillement  évangélique.  Sa 
maxime ,  ou  plutôt  l'élan  habituel  de  sa 
piété,  était  les  mots  :  Deus  meus  et 
omnia.  «  Paroles  d'un  sens  sublime  et 
»  profond  (dit  un  philosophe  chrétien)  :■ 
»  Dieu  est  tout  ;  quitter  tout  pour  lui , 
»  c'est  ne  rien  quitter ,  puisque  tout  se 
»  retrouve  en  lui  éminemment.  »  Le  Ciel 
ne  tarda  pas  à  faire  éclater  sa  sainteté 
par  plusieurs  miracles  :  ce  n'en  était  pas 
un  petit,  que  la  merveilleuse  propa- 
gation de  son  ordre.  Quoiqu'il  eût  dé- 
fendu de  toucher  à  sa  règle,  à  peine 
fut-il  mort,  qu'on  l'interpréta  de  cent 
manières.  Ce  partage  produisit  dans  la 
suite  les  difierentes  branches  des  Rt- 
collets ,  des  Picpuces,  des  Capucins, 
des  Observantins.  Ces  enfans  du  même 
père  diffèrent  beaucoup  entre  eux  par 
l'habit  et  par  la  façon  de  vivre.  Les  chro- 
niques de  l'ordre  marquent  expressément 
que  le  premier  qui  voulut  se  singulariser 
dans  l'habit,  quoiqu'il  fût  un  des  huit 
anciens  compagnons  du  saint  fondateur, 
fut  frappé  de  lèpre  et  se  pendit  de  déses- 
poir. L'ordre  de  St. -François ,  malgré  ses 
différentes  scissions ,  a  produit  des  hom- 
mes illustres  par  leur  science  et  leur  ver- 
tu,  et  a  donné  à  l'Eglise  cinq  papes ,  et 
un  grand  nombre  de  cardinaux  et  d' évê- 
ques. Les  services  qu'il  a  rendus  à  l'E- 
glise et  qu'il  continue  de  rendre ,  sont 
inappréciables,  et  ont  amplement  vérifié 
la  vision  du  pape  Innocent.  La  haine  que 
les  sectaires  lui  portent,  est  seule  une 
preuve  décisive  du  bien  qu'il  a  opéré  ,  et 
des  combats  qu'il  n'a  cessé  de  livrer  aux 
erreurs.  De  prétendus  réformateurs  ont 
voulu  ramener  ces  religieux ,  ainsi  que 
tous  ceux  qui  embarrassent  les  enne- 
mis de  l'Eglise,  au  travail  des  mains,  en 
usage  chez  les  anciens  solitaires.  Wiclef 
aurait  bien  voulu  ériger  cette  prétention 
en  dogme  ;  et  quoique  l'Eglise  l'ait  con- 
damnée ,  quelques  écrivains ,  parmi  les- 
quels on  est  fâché  de  compter  M.  Fleury, 
ne  se  sont  pas  assç?  écartés  de  ses  erreur;. 


454  FRA 

«  Quels  qu'aient  été  la  vertu'dcs solitaires 
»  d'Egypte ,  dit  un  hagiographe ,  et  le 
M  zèle  pour  leur  sanctiâcation  person- 
»  nelle,  il  serait  déraisonnable  de  vouloir 
V  en  faire  une  règle  complète  et  adéquate 
»  pour  des  religieux  qui ,  sans  professer 
»  la  même  austérité ,  se  dévouent  à  l'in- 
»  struction  des  âdèles ,  à  la  défense  de 
»  la  foi ,  aux  combats  contre  les  héréti- 
»  ques.  Si  leur  vie  est  moins  éclatante  en 
»  mortification  ,  elle  est  parfois  plus  édi- 
»  Aante  en  fait  de  docilité ,  d'humilité  et 
»  d'orthodoxie  :  car  l'on  n'ignore  pas 
)»  avec  quelle  facilité  plusieurs  de  ces 
M  solitaires  se  sont  laissé  entraîner  dans 
»  diverses  hérésies,  et  avec  quelle  obsti- 
3>  nation  ils  y  ont  persévéré  ;  et  de  nom- 
»  breux  monastères  y  persévèrent  encore 
j)  aujourd'hui.  »  On  lit  dans  les  ouvrages 
de  saint  Jérôme ,  un  passage  exactement 
applicable  à  cette  matière  ,  où.  l'on  trouve 
toute  l'éloquence  et  la  sévère  logique  de 
ce  Père  :  Siaut  fiscellamjuncotexerem, 
aut  palmarum  folia  complicarem  ,  aut 
in  sudore  vultûs  mei  comcder^em pancm, 
et  veniris  opus  sollicita  mente  pertrac- 
tarem  ;  nuUus  morderet ,  nuUus  repre- 
henderct.  Nunc  autem  quia  juxta  sen- 
tentiam  Salvatoris ,  volo  operari  cibum 
qui  nonperit,  error  mihi  geminus  infli- 
gitur....  0  fratres  dilectissimi,  pro  fla- 
bello,  calat/iis,  sportellisque,  munuscu- 
lis  jnonachorum  spiritualiahœc  et  man- 
sura  bona  suscipite.  2"  praefat.  in  lib. 
Job.  (  P^oy.  saint  Claude  ,  Saint-Amour  , 
BoNAYENTURK,  Norbert.)  Lameilleure  édi- 
tion des  deux  Règles  du  saint  patriarche 
et  de  ses  Opuscules  est  celle  du  Père  Jean 
delà  Haie,  en  1641,  in-fol.  Elles  ont  été 
réimprimées  en  Allemagne  en  1739, 
in-fol.  LePèreChalippe,  récollet,  a  donné 
sa  Fie,  Paris,  1728  ,  in-4,  et  1736,  2  vol. 
in-12. 

FRANÇOIS  DE  PAULE  (  Saint  ) , 
fondateur  de  l'ordre  des  Minimes ,  naquit 
à  Paule  en  Calabre  l'an  1416.  Un  attrait 
singulier  pour  la  solitude  et  pour  la  piété 
le  conduisit  dans  un  désert  au  bord  de  la 
mer ,  oii  il  se  creusa  une  cetlule  dans  le 
roc.  La  réputation  de  sa  sainteté  attira 
auprès  de  lui  lue  foule  de  disciples ,  qui 
bâtirent   {tuteur   de  son   ermitage    un 


FRA 

Inonastère ,  le  premier  de  son  ordre.  On 
nomma  d'abord  ses  religieux  les  er- 
mites de  saint  François  ;  mais  François 
voulut  qu'ils  portassent  le  nom  modeste 
de  minimes.  Il  leur  prescrivit  un  carême 
perpétuel ,  et  leur  donna  une  règle ,  ap- 
prouvée par  le  pape  Alexandre  VI,  et 
confirmée  par  Jules  II.  Le  nom  du  saint 
fondateur  se  répandit  en  Europe  avec  le 
bruit  de  ses  vertus.  Louis  XI ,  dangereuse- 
ment malade ,  l'appela  eu  France  du  fond 
de  la  Calabre,  espérant  d'obtenir  sa  gué- 
rison  par  ses  prières.  Ce  prince  ,très  ja- 
loux de  tenir  son  rang,  alla  au  devant  de 
lui  et  se  prosterna  devant  l'humble  reli- 
gieux. «  Vous  étiez  alors ,  ô  mon  Dieu  ! 
»  connu  dans  le  monde  (  s'écrie  à  ce  sujet 
»  un  orateur  célèbre  ) ,  et  les  cours  des 
»  princes  n'étaient  pas  des  lieux  inacces- 
M  sibles  à  votre  grâce  ni  à  la  piété  chré- 
>  tienne,  puisque  vos  serviteurs  y  étaient 
»  si  honorablement  traités.  »  Quoique  le 
saint  annonçât  au  roi  une  fin  prochaine , 
au  lieu  de  la  guérison  qu'il  espérait,  il 
continua  à  jouir  de  toute  sa  confiance,  et 
l'aida  à  finir  par  une  mort  chrétienne  une  m 
vie  qui ,  à  bien  des  égards ,  ne  l'avait  1 
pas  été.  François  établit  quelques  maisons 
en  France ,  et  mourut  dans  celle  du  Ples- 
sis-du-Parc  en  1 507  ;  il  fut  canonisé  en 
1519,  par  Léon  X.  Les  Minimes  furent 
appelés  en  France  Bons-Hommes,  du 
nom  de  Bon  Homme  que  les  courtisans 
de  Louis  XI  donnaient  à  leur  père.  Les 
hommes  du  siècle  ne  manquent  jamais  de 
confondre  la  piété  et  la  précieuse  sim- 
plicité de  l'Evangile,  avec  ce  qu'ils  ap- 
pellent Bonhomie.  Le  Père  Hilarionde 
Coste  a  donné  sa  P^ie  ,  in-4. 

FRANÇOIS  XAVIER  (  Saint  ) ,  sur- 
nommé V Apôtre  des  Indes ,  né  au  châ- 
teau de  Xavier  au  pied  des  Pyrénées  le  7 
avril  1 506 ,  était  neveu  du  célèbre  doc- 
teur Navarre.  Il  enseignait  la  philosophie 
au  collège  de  Beauvais  à  Paris ,  lorsqu'il 
connut  Ignace  de  Loyola ,  fondateur  des 
jésuites.  Il  s'unit  étroitement  avec  lui , 
et  fut  un  des  sept  compagnons  du  saint 
espagnol ,  qui  firent  vœu  dans  l'cglia^M 
de  Mont-Martre ,  en  1534,  d'aller  tranS 
vailler  à  la  conversion  des  infidèles.  Jean 
ni,   roi  de  Portugal,   ayant    demandé 


1 


FftA 

des  missionnaires  pour  les  Indes  orien- 
tales ,  Xavier  s'embarqua  à  Lisbonne  en 
1541.  De  Goa  oii  il  se  fixa  d'abord,  il 
répandit  la  lumière  de  l'Evangile  sur 
la  côte  de  Comorin ,  à  Malaca ,  dans 
les  Moluques,  dans  le  Japon.  Un  nom- 
bre infini  de  barbares  reçurent  le  bap- 
tême. Xavier  leur  inspira  le  goût  pour 
le  christianisme ,  autant  par  ses  vertus 
que  par  son  éloquence  ;  et  la  Providet  e 
renouvela  plus  d'une  fois,  en  faveur  de 
ces  nouvelles  églises ,  les  merveilles  des 
premiers  temps  du  christianisme.  Il  mou- 
rut en  1552,  dans  l'île  de  Sancian,  à  la 
vue  de  l'empire  de  la  Chine,  oii  il  brû- 
lait de  porter  la  foi.  Il  était  âgé  de  46 
ans ,  et  en  avait  employé  dix  et  demi  à 
la  conversion  des  Indes.  «  Terme  bien 
j>  court,  dit  l'abbé  Bérault,  quand  il 
»  n'eût  soumis  qu'une  nation  au  joug  de 
»  l'Evangile  !  Mais  s'il  a  établi  la  foi  dans 
»  52  royaumes  plus  ou  moins  étendus  ; 
»  s'il  a  arboré  l'étendard  de  la  croix  dans 
»  3,000  lieues  de  pays;  s'il  a  baptisé  de 
»  sa  main  près  d'un  million  tant  de  Sar- 
»  rasius  que  d'idolâtres  ;  s'il  a  procuré  à 
»  l'Eglise  plus  de  nouveaux  sujets  que  les 
M  fameux  hérésiarques  de  son  siècle  n'ont 
»  fait  de  déserteurs  et  d'apostats ,  ne 
»  peut-on  pas  dire  que  la  rapidité  des 
»  conquérans  les  plus  mémorables  n'égala 
»  pas  la  sienne  ;  et  que  s'il  eût  rempli  la 
»  mesure  commune  de  la  vie  humaine, 
»  le  monde  entier ,  pour  son  zèle ,  plutôt 
«  que  pour  leur  valeur,  eût  été  un  champ 
»  trop  étroit  ?  «  Son  corps,  plusieurs  fois 
relevé  de  terre ,  d'abord  à  l'ile  de  San- 
cian, puis  à  Malaca,  ensuite  à  différentes 
fois  à  Goa ,  fut  trouvé  sans  aucune  cor- 
ruption. En  1782,  il  fut  derechef  dé- 
couvert et  exposé  durant  trois  jours  aux 
yeux  du  public.  {Foyez  la  Relation  de 
M.  Cicala ,  et  sa  Vie  imprimée  à  Liège , 
p.  22.)  Grégoire  XV  le  mit  au  nombre 
des  saints  en  1G22.  Les protestans  mêmes 
lui  ont  donné  ce  nom.  Tavernier  dit  qu^on 
peut  V  appeler  ajuste  titre  le  saint  Paul 
et  le  véritable  apôtre  des  Indes.  Richard 
Haklvit ,  au  second  tome  des  Navigations 
de  la  nation  anglaise  ^  en  parlant  de  l'île 
de  Sancian,  remarque  qu'elle  est  fameuse 
Car  la  mort  de  François  Xavier ,  dont  il 


fait  un  grand  éloge,  auquel  il  ajoute  que 
les  histoires  modernes  des  Indes  sont 
remplies  des  excellentes  vertus  et  des 
œuvres  de  ce  saint  homme.  Baldeus, 
dans  son  Histoire  des  Indes,  après  avoir 
parlé  de  Xavier  comme  d'un  autre  saint 
Paul,  dit  que  les  dons  qu'il  avait  reçus 
pour  exercer  la  charge  de  ministre  et 
d' ambassadeur  de  Je'sus-Christ,  étaient 
si  e'minens ,  qu'il  ne  lui  est  pas  possible 
de  les  exprimer.  Et  quelques  lignes  après, 
adressant  la  parole  au  saint  même  :  Plût 
à  Dieu,  s'écrie-t-il ,  qu'ayant  été  si  cé- 
lèbre par  votre  ministère,  notre  Reli- 
gion nous  permît  de  vous  adopter ,  ou 
que  la  vôtre  ne  vous  obligeât  pas  de 
nous  renoncer  '.  Effectivement ,  la  vie 
et  les  immenses  travaux  de  ce  grand 
homme  sont  le  fruit  visible  de  cette  con- 
viction intime,  de  cette  foi  vive,  de 
cette  charité  active  et  brûlante,  que  les 
systèmes  et  les  opinions  des  hommes  ne 
sauraient  produire  :  aussi ,  le  zèle  pour 
la  conversion  des  infidèles  a-t-il  toujours 
été  et  sera  toujours  propre  à  l'Eglise  ca- 
tholique ;  ceux  des  sectaires  qui  ont  voulu 
l'imiter  n'ont  pu  en  soutenir  long-temps 
les  apparences ,  moins  encore  en  renou- 
veler les  effets  :  et  pour  dire  un  mot  des 
apôtres  de  la  nouvelle  philosophie  ,  con- 
tens  d'enseigner  commodément  dans  des 
brochures  la  prétendue  vérité,  ils  n'ont 
garde  de  quitter  leurs  foyers  pour  l'an- 
noncer à  des  peuples  ignorans  et  sauva- 
ges. On  a  de  saint  François  Xavier  :  1° 
cinq  livres  A'Epîtres,  Paris,  1631  ,  in-8. 
2°  Un  Catéchisme.  i°  Des  Opuscules.  Ces 
ouvrages  respirent  le  zèle  le  plus  animé, 
la  piété  la  plus  tendre,  un  jugement  sûr 
et  solide.  Les  Pères  Tursel in  etBouhours, 
jésuites  ,  ont  élégamment  écrit  sa  Vie  y 
l'un  en  latin ,  l'autre  en  français.  Celle- 
ci  a  été  très  souvent  réimprimée.  On  a 
de  M.  Dulard  une  épopée  intitulée  la 
Xavériade ,  ou  l'apostolat  de  saint 
François  Xavier,  un  peu  froide ,  mais 
pleine  de  grandes  idées  :  il  y  en  a  une 
autre  en  latin  (  voy.  Franck  ). 

FRANÇOIS  DEBORGIA  (Saint), 
vice-duc  de  Gandie  où  il  naquit  en  1510,  et 
roi  de  Catalogne,  jouissai  t  de  la  plus  grande 
considération  à  la  cour  de  Charles-Quint. 


456  fRA 

chargé  de  coDdaire  à  Grenade  le  corps  de 
l'impcratrice  Isabelle ,  pour  y  être  déposé 
dans  le  tombeau  royal ,  et  obligé  d'at- 
tester que  c'était  réellement  le  corps  de 
cette  princesse  qui  avait  été  un  prodige 
de  beauté ,  il  fut  si  frappé  à  l'ouverture 
du  cercueil ,  de  ne  pouvoir  plu^  la  recon- 
naître ,  que  ce  tableau  de  la  mort  devint 
pour  lui  uue  leçon  subitement  efficace. 
Il  vécut  en  saint  au  milieu  de  la  cour,  et , 
après  la  mort  de  son  épouse ,  il  entra 
chez  les  jésuites ,  dont  il  fut  le  troisième 
général.  Tous  les  honneurs  le  poursuivi- 
rent dans  sa  retraite  ;  de  riches  évêchés , 
le  cardinalat,  et  d'autres  dignités  lui 
furent  offerts  à  plusieurs  reprises,  et, 
après  la  mort  de  Pie  V ,  une  partie  des 
cardinaux  voulurent  l'élever  sur  la  chaire 
de  saint  Pierre.  Il  échappa  à  tout  cela, 
et  mourut  à  Rome  quelques  mois  après 
ce  pape,  le  30  septembre  1572,  à  l'âge 
de  62  ans,  après  avoir  établi  sa  compagnie 
dans  un  grand  nombre  de  provinces  et  ren- 
du de  grands  services  à  l'Eglise.  Le  voyage 
qu'il  fit  par  ordre  de  Pic  V  avec  le  cardinal 
Alexandrin,  pour  réunir  les  princes  chré- 
tiens contre  les  infidèles ,  avança  sa  mort, 
ses  forces  et  l'état  de  sa  santé  ne  répondant 
pas  aux  fatigues  de  cette  commission.  C'é- 
tait un  homme  d'une  mortification  extraor- 
dinaire. Sainte  Thérèse  qui  l'appelait  un 
saint  recherchait  et  suivait  ses  conseils 
dans  les  affaires  difficiles.  Charles-Quint 
voulut  le  voir  dans  sa  retraite  de  St.-Juste, 
et  lui  répéta  ce  qu'il  lui  avait  confié 
long-temps  auparavant ,  que  son  exem- 
ple avait  beaucoup  servi  à  le  déterminer 
à  quitter  le  trône  et  le  monde,  et  que 
dès  lors  il  en  avait  conçu  la  résolution  ; 
anecdote  qui  détruit  les  contes  imaginés 
sur  l'abdication  de  ce  prince  (  voyez  Ve- 
SAL  ).  Clément  X  le  mit  au  nombre  des 
saints  en  1671.  Il  laissa  plusieurs  ouvra- 
ges, traduits  de  l'espagnol  en  latin  par 
le  Père  Alfonse  Deza ,  jésuite,  Bruxelles , 
J675,  in-fol.  F  oyez  sa  Fie  ,  publiée  en 
français ,  in-4  ,  par  le  Père  Verjus ,  d'a- 
près Ribadeneira  et  Eusèbe  Niéremberg. 
FRANÇOIS  DE  SALES  (Saint  ) ,  né 
au  château  de  Sales,  diocèse  de  Genève  , 
en  1567  ,  fit  ses  premières  études  à  Paris, 
et  son  cours  de  droit  à  Padoue.  Il  édifia 


FRA 

ces  deux  villes  par  sa  piété  aussi  douce 
que  tendre.  Il  fut  d'abord  avocat  à  Cham- 
béri ,  puis  prévôt  d'Anneci  ;  ensuite  évê- 
que  de  Genève,  après  la  mort  de  Claude 
Garnier  son  oncle  en  1602.  Son  zèle  pour 
la  conversion  des  zuingliens  et  des  cal- 
vinistes avait  éclaté  avant  son  épisco- 
pat  ;  il  ne  fut  que  plus  ardent  après.  Ses 
succès  répondirent  à  ses  travaux.  Il  avait 
gagné  à  l'Eglise  plus  de  70,000  héréti- 
ques, depuis  1592  jusqu'en  1602  qu'il 
fut  évêque.  Il  serait  difficilede  faire  un  dé- 
tail exact  de  ceux  qu'il  ramena  au  bercail, 
depuis  1 602  jusqu'à  sa  mort.  Le  cardinal 
du  Perron  disait  qu'tZ  n'y  avait  point 
d'hérétique  qu'il  ne  pût  convaincre;  mais 
qu'il  fallait  s'adreser  à  F  évêque  de  Genève 
pour  les  convertir.  Un  jour  nouveau  lui- 
sit  sur  le  diocèse  de  Genève ,  dès  qu'il  en 
eut  pris  possession.  Il  fit  fleurir  la  science 
et  la  piété  dans  le  clergé  séculier  et  ré- 
gulier. Il  institua  l'an  1610  l'ordre  de  la 
Visitation  ,  dont  la  baronne  de  Chantai , 
qu'il  avait  détrompée  des  faux  charmes 
du  monde,  fut  la  première  supérieure.  Il 
voulut  qu'on  y  admit  les  filles  d'un  tem- 
pérament délicat,  et  même  les  infirmes, 
qui  ne  peuvent  se  placer  dans  le  monde , 
ni  dans  les  cloîtres  austères.  Cette  con- 
grégation fut  érigée  en  titre  d'ordre  et 
de  religion,  l'an  1618,  par  le  pape  Paul  V. 
Sur  la  fin  de  cette  même  année ,  François 
fut  obligé  de  se  rendre  à  Paris  avec  le 
cardinal  de  Savoie,  pour  conclure  le  ma- 
riage du  prince  de  Piémont  avec  Chris- 
tine de  France.  Cette  princesse  le  choisit 
pour  son  aumônier;  le  saint  évoque,  qui 
avait  déjà  refusé  un  évêché  en  France , 
et  qui  refusa  vers  le  même  temps  la  coad- 
jutoreriede  l'évêché  de  Paris,  ne  voulut 
accepter  cette  place  qu'à  condition 
qu'elle  ne  l'empêcherait  point  de  résider 
dans  son  diocèse  pour  lequel  il  soupirait. 
Il  y  retourna  le  plus  tôt  qu'il  put ,  et 
continua  d'y  vivre  en  pasteur  des  pre- 
miers siècles ;de  l'Eglise,  en  Irénée,  eu 
Augustin.  L'an  1622  ,  ayant  eu  ordre  de 
se  rendre  à  Lyon ,  où  le  duc  de  Savoie 
devait  voir  Louis  XIII ,  il  y  fut  frappé 
d'apoplexie  le  27  décembre,  et  mourii 
le  lendemain ,  à  56  ans.  Saint  François^ 
Sales  était  une  de  ces  âmes  tendres  et  i 


FRA 

bltmes ,  nées  pour  la  vertu  et  pour  la 
piété,  et  destinées  pour  le  Ciel  à  inspirer 
l'une  et  l'autre.  On  remarque  ce  caractère 
dans  tous  ses  écrits  :  la  candeur,  l'onction 
qu'ils  respirent ,  les  rend  délicieux  même 
k  ceux  que  les  lectures  de  piété  ennuient 
le  plus.  Les  principaux  sont  :  t"  Intro- 
duction à  la  vie  dévote.  Le  but  de  ce 
livre  était  de  montrer  que  la  dévotion  n'é- 
tait pas  seulement  faite  pour  les  cloîtres, 
mais  qu'elle  pouvait  être  dans  le  monde, 
et  s'y  accorder  avec  les  obligations  de 
la  vie  civile  et  séculière.  Il  fit  des  fruits 
merveilleux  à  la  cour  de  France  et  à  celle 
de  Piémont.  2°  Un  Traité  de  F  amour  de 
VieUy  mis  dans  un  nouvel  ordre  par  le 
Père  Fellon,  jésuite,  en  3  vol.  11  a  été 
depuis  imprimé  en  2  vol. ,  et  abrégé  eu 
un  seul  par  l'abbé  Tricalet.  Z"Bes Lettres 
spirituelles ,  et  d'autres  ouvrages  de 
piété ,  recueillis  en  2  vol.  in-fol.  Elles 
ont  été  réimprimées  en  1817,  en  3  vol. 
in-8,  avec  un  beau  portrait  et  un  modèle 
de  son  écriture.  Saint  François  de  Sales 
y  paraît  un  des  mystiques  les  plus  judi- 
cieux de  ces  derniers  temps.  Les  lecteurs 
qui  voudront  connaître  plus  en  détail  ses 
ouvrages  et  ses  vertus  ,  peuvent  lire  sa 
f^ie  élégamment  écrite  par  l'abbé  Marsol- 
lier,  en  2  vol. ,  et  son  Esprit,  par  le  Ca- 
mus ,  évêque  de  Belley ,  son  intime  ami. 
Ce  dernier  livre ,  insipidement  prolixe, 
a  été  réduit  par  M.  Collot ,  docteur  de 
Sorbonne  ,  à  un  gros  vol.  in-8,  plusieurs 
fois  réimprimé.  On  a  publié  à  Paris  en 
1823  une  belle  édition  complète  de  ses 
œuvres,  16vol.  in-8. 

FRANÇOIS,  ^oye;  RÉGIS. 
FRANÇOIS  DELORRAINE(Etienne), 
empereur  d'Allemagne ,  naquit  en  1708  , 
de  Léopold ,  duc  de  Lorraine  ,  et  d'Eliza- 
beth-Charlotte  d'Orléans  ,  et  fut  marié  en 
1 73G  avec  Marie-Thérèse  ,  fille  de  l'empe- 
reur Charles  VI  (voyez  ce  mot).  Après 
la  mort  de  ce  prince  ,  il  disputa  la  cou- 
ronne impériale  à  Charles  VII ,  mort  à 
Munich  en  janvier  1746.  Il  fut  élu  empe- 
reur le  1 3  septembre  de  la  même  année. 
Le  fléau  de  la  guerre  désolait  alors  toute 
l'Europe.  On  peut  voir  à  l'article  Brown 
un  précis  des  expéditions  militaires  de  ce 
temps-là.  La  paix  conclue  en  1748  à  Aix- 

V. 


FRA  457 

la-Chapclle  rendit  la  tranquillité  à  l'em- 
pire d'Allemagne.  Une  nouvelle  guerre 
s'étant  allumée  en  17  56,  fut  terminée 
par  le  traité  d'Hubertsbourg  en  Saxe ,  le 
1 5  février  1763.  L'empereur  François  pro- 
fita de  l'heureux  loisir  de  la  paix  pour 
faire  fleurir  le  commerce  ,  les  sciences  et 
les  arts  dans  ses  états ,  qui  le  perdirent 
le  18  août  1765.  Il  mourut  subitement  à 
Inspruck ,  oîi  il  s'était  rendu  pour  les 
noces  de  son  fils  Léopold  avec  l'infante 
Mai'ie-Louise  d'Espagne.  Comme  il  mou- 
rut au  sortir  de  la  comédie,  on  ne  man- 
qua pas  d'en  accuser  l'air  du  spectacle , 
qu'on  sait  être  plus  méphitique  que  dans 
les  salles  d'hôpitaux  et  d'anatomie.  C'é- 
tait un  de  ces  hommes  vertueux  par  reli- 
gion et  par  sentiment ,  qui  font  le  bien 
pour  lui-même ,  et  savent  se  mettre  à 
l'abri  de  cette  célébrité  bruyante,  qui 
flatte  la  faiblesse  et  la  vanité  jusque  sur 
le  trône.  Sa  vie  n'a  été  qu'une  suite  nou 
inierrompue  d'actions  de  sagesse,  de 
justice,  de  bienfaisance;  et  cependant  il 
y  a  peu  d'empereurs  qui  aient  fait  moins 
de  bruit  dans  le  monde  que  François  I. 
Serait-ce  une  propriété  de  la  véritable 
grandeur ,  de  n'être  pas  compromise  par 
la  fausse  science  ? 

ROIS    ET    PRINCES    DE    FRANCE. 

FRANÇOIS  I,  roi  de  France,  parvint 
à  la  couronne  le  l*"^  janvier  1515,  à  21 
ans,  après  la  mort  de  Louis  XII  son  beau- 
père.  Il  était  né  à  Cognac  en  1494,  de 
Charles  d'Orléans ,  comte  d'Angoulème , 
et  de  Louise  de  Savoie.  Petit-fils  de  Va- 
lentine  de  31ilan ,  il  prit  avec  le  titre  de 
roi  de  France ,  celui  de  duc  de  Milan ,  et 
se  mit  à  la  tête  d'une  puissante  armée 
pour  aller  se  rendre  maître  de  ce  duché. 
Il  n'ignorait  pas  que  les  Suisses  s'étaient 
emparés  du  Mont-Genèvre  et  du  Mont-Ce- 
nis ,  les  deux  portes  de  l'Italie  ;  mais  il 
espérait  tout  de  son  courage  et  de  celui 
de  ses  troupes.  On  tenta  de  passer  les 
Alpes  par  les  cols  de  l'Argentière  et  de 
Guillestre,  jusqu'alors  impraticables;  on 
en  vint  à  bout,  et  les  Français  se  virent 
bientôt  aux  plaines  de  Marignan ,  où  ils 
furent  attaqués  par  les  Suisses.  La  ba- 
taille dura  deux  jours ,  les  13  et  14  sep< 

29. 


458  FRA 

teinbre  15t5.  François  I  ne  perdit  point 
]e  sang  froid  dans  cette  action,  aussi  lon- 
gue que  meurtrière  ;  il  passa  une  partie 
de  la  nuit  à  ranger  ses  troupes ,  et  une 
autre  partie  sur  l'afifùt  d'un  canon,  en 
attendant  le  jour.  Le  vieux  maréchal  de 
Trivulce  disait,  des  18  batailles  oîi  il  s'é- 
tait trouve,  «que  c'étaient  des  jeux  d'en- 
»  fans  ;  mais  que  celle  de  Marignan  était 
'•  une  bataille  de  géans.  «  Bayard  avait 
ce  jour  armé  chevalier  son  roi.  Les  Suis- 

,v  ses  fuirent  enfin,  laissant  sur  le  champ 
de  bataille  plus  de  dix  mille  de  leurs 
compagnons,  et  abandonnant  le  Milanais 
aux  vainqueurs.  Plus  tard  ils  devinrent 
les  fidèles  alliés  de  la  France.  Maximilien 
Sforce  lui  en  fit  la  cession ,  et  se  retira 
en  France ,  oii  il  mourut.  Les  Génois  se 
déclarèrent  pour  les  Français.  Le  pape 
Léon  X ,  effrayé  de  leurs  succès ,  vit  le 
roi  à  Bologne ,  et  fit  sa  paix  avec  lui.  Ce 
fut  dans  cette  conférence ,  qu'après  avoir 
obtenu  l'abolition  de  la  pragmatique- 
sanction  ,  il  conclut  le  14  décembre 
1515  ,  le  concordat  pour  la  collation  des 
bénéfices,  confirmé  l'année  suivante  au 
concile  de  Latran.  François  obtint  la  no- 
mination des  bénéfices ,  et  Léon  les  an- 
nales, en  renonçant  aux  mandats,  résci 
ves  ,  expectatives ,  et  autres  droits  dont 
jouissait  le  siège  de  Rome.  Les  universités 
et  les  parlemens  ne  reçurent  le  concordat 
qu'après  de  longues  résistances.  Cèpe; 
dant  les  universités  n'avaient  pas  tac' 
s'en  plaindre ,  puisque  la  troisième  part  i 
des  bénéfices  leur  est  réservée  par  ' 
moyen  de  l'impétration  ;  «t  les  parlemci?- 
ne  faisaient  pas  attention  que  François  I , 
en  accordant  les  annales,  se  procurait 
d'ailleurs  des  avantages  considérables  • 
et  ils  oubliaient  sans  doute  la  maxiuK 
très  raisonnable  comme  très  catholique , 
que  tous  les  chrétiens  doivent  concou.ir 
à  l'entretien  du  premier  pontife,  et  à  :  • 
splendeur  de  son  siège.  «  Maxime  si  pe.. 
»  contestée ,  di^  un  jurisconsulte  de  c.' 
»  siècle,  que  le  concile  de  Baie, en  pro 
M  posant  l'abolition  des  annales ,  deman 
M  liait  en  même  temps  un  moyen  de  les 
i>  suppléer ,  et  de  donner  au  souverain 
»  pontife,  et  à  l'administrateur  de  l'Eglise 

'  M  ooiverselle,  les  secours  nécessaires  à 


FRA 

u  Un  gouvernement  si  vaste  et  si  compo- 
»  se.  Fébronius  lui-même ,  cet  ardent  ad- 
»  versaire  des  pontifes  romains,  convient 
»  que  les  annales  sont  une  rétribution 
»  légitime ,  et  fondée  sur  des  vues  et  des 
u  fins  très  sages.  Et  quand  on  sait  que 
»  tout  le  produit  des  annales  et  autres 
»  droits  quelconques,  attachés  aux  expédi- 
»  lions  romaines,  ne  vont  annuellement 
»  pour  toute  la  France  qu'à  500,000  1., 
»  on  ne  peut  comprendre  les  clameurs 
»  que  produit  ce  mince  objet,  sans  ea 
»  chercher  la  source  dans  la  haine  de 
»  Dieu  et  de  son  culte.  »  L'année  d'après 
la  conquête  de  Milan  en  1516  ,  Charles- 
Quint  et  François  I  signèrent  le  traité  de 
Noyon ,  oii  ils  se  donnèrent  mutuelle- 
ment, l'un,  l'ordre <le  la  Toison-d'or,  et 
l'autre  ,  celui  de  St.-Michel ,  après  s'être 
juré  une  paix  éternelle.  Celte  paix  fut  de 
deux  jours.  Après  la  mort  de  l'empereur 
Maximilien  ,  François  fit  briguer  la  cou- 
ronne impériale.  Charles,  plus  jeune,  et 
moins  craint  par  les  électeurs ,  l'emporta 
sur  lui,  malgré  les  400,000  francs  qu'il 
dépensa  pour  avoir  des  suffrages.  La 
guerre  fut  allumée  dès  lors ,  et  le  fut 
pour  long- temps.  Le  ressentiment  de 
François  éclata  d'abord  sur  la  Navarre.  Il 
la  conquit  et  la  perdit  presque  au  même 
temps.  Il  fut  plus  heureux  en  Picardie  : 
il  en  chassa  Charles  qui  y  était  entré , 
pénétra  dans  la  Flandre ,  lui  prit  Landre- 
cies,  Bouchain ,  Hesdin  et  plusieurs  au- 
tres places;  mais  il  perdit  le  Milanais  par 
les  violences  de  Lautrec ,  et  le  connétable 
de  Bourbon  par  les  injustices  de  Louise 
de  Savoie  sa  mère.  Ce  général  se  jeta  dans 
le  parti  de  l'empereur.  Les  Français, 
commandés  par  Lautrec,  furent  défaits 
le  27  avril  1522,  à  la  Bicoque.  Cette  fu- 
neste journée  fut  suivie  de  la  perte  de 
Crémone  et  de  Gênes.  Bourbon ,  secondé 
par  Antoine  de  Lève,  battit  en  J  524  l'ar- 
rière-garde de  l'amiral  Bonnivet  à  la  re- 
traite de  Rebec ,  oii  Bayard  fut  tué  ;  il 
marcha  vers  la  Provence ,  prit  Toulon , 
et  assiégea  Marseille.  François  1  courut 
au  secours  de  la  Provence ,  et,  après  l'a- 
voir délivrée ,  il  s'enfonça  encore  dans  le 
Milanais  et  assiégea  Pavie.  On  était  dant 
le  cœur  de  l'hiver.  C'était  une  faute  con- 


I 


FRA 

sidérable ,  d'avoir  formé  un  siège  dans 
une  saison  si  rigoureuse.  François  en  lit 
une  autre  non  moins  importante  ,  en  dé- 
tachant mal  à  propos  dii  mille  hommes 
de  sou  armée  pour  les  envoyer  conquérir 
Kaples.  Trop  faible  pour  résister  aux  im- 
périaux, il  fut  battu  le  24  février  1526, 
après  avoir  eu  deux  chevaux  tués  sous 
lui ,  et  fait  prisonnier  avec  les  principaux 
seigneurs  de  France  {voyez  Lannoy).  Son 
malheur  voulut  encore  qu'il  fut  pris  par 
le  seul  officier  français  qui  avait  suivi  le 
duc  de  Bourbon,  et  que  ce  duc  fût  pré- 
sent pour  jouir  de  son  humiliation.  L'ab- 
bé Gervaise ,  dans  la  Vie  de  ^aint  Martin 
de  Tours  ,  semble  attribuer  ce  malheur  à 
la  violation  du  tombeau  de  ce  saint,  d'où 
François  I  venait  de  faire  enlever  une 
grille  d'argent  pour  la  convertir  en  mon- 
naie. Comme  il  paraît  que  le  roi  lui-même, 
ainsi  que  la  reine  ,  était  dans  cette  per- 
suasion ,  il  ne  sera  pas  inutile  de  rap- 
porter ici  le  passage  de  cet  historien , 
homme  raisonnable  et  instruit.  «  Quoique 
»  François  1  eût  fait  serment  comme  les 
j)  rois  ses  prédécesseurs,  lorsqu'il  se  fit 
»  recevoir  abbé  et  chanoine  de  l'église 
»  de  St. -Martin ,  d'en  être  le  protecteur, 
»  quelques  officiers  de  ses  finances  abu- 
»  saut  de  sa  facilité ,  lui  firent  croire  que 
«  dans  les  besoins  pressans  de  l'état ,  il 
î)  pouvait  légitimement  se  servir  du  treil- 
»  lis  d'argent  qui  fermait  le  tombeau  de 
■»  saint  3Iarlin.  Us  vinrent  à  Tours  au 
»  mois  de  juillet  de  l'année  1522,  signi- 
»  fier  aux  chanoines  l'ordre  qu'ils  avaient 
»  de  l'enlever.  On  trouve  dans  les  regis- 
»  très  de  cette  église  la  réponse  que  le 
»  chapitre  leur  fit.  Elle  est  conçue  en  ces 
»  termes  :  Les  chanoines  disent  qu'ils 
»  sont  très  humbles  et  très  obe'issans 
»  cliapelains  et  orateurs  dudit  seigneur 
»  roi,  et  qui  a  vux  n'est  de  querelles, 
»  arguer  et  contester  avec  sa  majesté'; 
«  mais  que  craignant  d'offenser  Dieu ,  le 
M  créateur ,  et  monsieur  saint  Martin,  et 
»  pour  les  causes  par  eux  déjà  alléguées, 
«  et  autres  légitimes ,  ils  n'osent  et  ne 
»  doivent  consentir  ledit  treillis  Jtrepris 
»  ou  enlevé.  Les  officiers  ne  laissèrent  pas 
»  de  passer  outre  ;  le  treillis  fut  mis  en 
»  pièces  le  8  du  mois  suivant ,  et  chargé 


FRA  459 

»  à  la  porte  de  l'église  dans  des  chariots, 
»  escortés  de  plusieurs  compagnies  de 
))  soldats ,  qui  le  conduisirent  à  la  mon- 
»  naie.  On  en  fit  des  testons,  où  d'un 
»  côté  la  figure  de  saint  Martin  est  em^- 
»  preinte.  Il  s'en  trouve  encore  quelqucs- 
«  uns  dans  les  cabinets  des  curieux.  Celle 
»  action  si  peu  attendue  d'un  prince  ca- 
»  tholique,  jeta  tous  les  gens  de  bien 
«  dans  la  consternation.  Ceux  même  qui 
»  s'étaient  chargés  de  cette  entreprise , 
»  la  trouvèrent  si  bonteuse,  qu'ils  ne 
M  voulurent  jamais  permettre  qu'on  en 
»  dressât  un  procès-verbal.  Le  fabricier 
»  de  l'église  et  quelques  chanoines  des 
»  plus  zélés,  s'étant  opiniâtres  à  le  vou- 
»  loir  faire ,  en  furent  chassés  avec  les 
»  notaires.  La  chose  fut  si  loin,  qu'ayant 
»  paru  à  l'une  des  fenêtres  de  l'église  , 
M  pour  voir  ce  qui  s'y  passait ,  l'on  tira 
»  dessus  plusieurs  coups  d'arquebuse  , 
»  dont  heureusement  personne  ne  fut 
»  blessé.  Quelques  historiens  ont  cru  que 
»  les  malheurs  qui  arrivèrent  depuis  à 
»  François  I ,  furent  de  justes  châtimens 
»  de  la  profanation  du  tombeau  de  saint 
»  Martin.  En  effet,  on  remarque  que  co 
»  prince  ayant  peu  de  temps  après  porté 
»  ses  armes  dans  le  Milanais ,  et  mis  le 
»  siège  devant  Pavie,  il  y  fut  abandonné 
»  des  siens  ,  son  cheval  tué  sous  lui  dans 
»  la  retraite,  lui-même  dangereusement 
»  blessé,  et  arrêté  sur  les  terres  que  Char- 
»  lemagne  avait  données  à  l'église  de 
»  St. -Martin.  Il  reconnut  alors,  mais  trop 
»  tard ,  que  ce  n'était  pas  sans  raison  que 
»  Clovis  avait  dit  autrefois  qu'il  n'y  avait 
«  pas  lieu  de  se  promettre  la  victoire  de 
»  ses  ennemis,  après  qu'on  avait  offensé  ce 
»  grand  saint.  Louise  de  Savoie,  sa  mère, 
»  à  qui  il  avait  laissé  la  régence  pendant 
»  son  absence,  sitôt  qu'elle  eût  reçu  la 
»  nouvelle  de  la  prise  du  roi ,  vint  avec 
»  les  princesses,  enfans  de  France,  aa 
»  tombeau  du  saint  ,  implorer  son  se- 
»  cours ,  et  tâcha  de  réparer ,  par  les 
»  présens  qu'elle  y  laissa ,  l'injure  qui 
»  lui  avait  été  faite.  Le  roi  lui-même 
M  n'eut  pas  plutôt  recouvré  sa  liberté, 
»  qu'il  y  vint ,  avant  d'aller  à  Paris ,  pour 
j>  lui  en  faire  une  espfte  de  satisfaction. 
w  La  colère  de  Dieu  éclata  d'une  manière 


46o  FRA 

j>  bien  plus  sensible  contre  la  personne 
»  de  Jacques  Fournier  (  d'autres  le  nom- 
i)  ment  Beaune ,  voyez  ce  mol) ,  seigneur 
i)  de  Semblançai ,  qui  avait  été  l'auteur 
M  d'une  si  méchante  action  ;  car  cinq  ans 
j)  après  ,  le  même  jour  que  le  treillis 
»  avait  été  enlevé ,  sur  une  fausse  accu- 
5)  sation  il  fut  condamné  à  être  pendu , 
j)  et  le  fut  en  effet  quelques  jours  après 
})  à  Moutfaucon  ,  dans  le  fief  du  prieuré 
»  dé  Saint-Martin-des-Cbamps.  »  Quoi 
qu'il  en  soit  de  ces  observations,  Fran- 
çois I"  fut  conduit  à  Madrid ,  où  Cbarles 
le  traita  avec  tous  les  égards  possibles, 
et  lui  rendit  la  liberté  par  un  traité^ 
qu'il  savait  bien  que  son  prisonnier  n'ol> 
serverait  pas.  Par  ce  traité ,  signé  à  Ma- 
drid ,  le  1 4  janvier  1 526  ,  François  re- 
nonçait à  ses  prétentions  sur  Naples ,  le 
Milanais ,  Gènes  et  Ast ,  h  la  souveraine- 
té sur  la  Flandre  et  l'Artois.  Il  devait  cé- 
der le  duché  de  Bourgogne;  mais  lorsque 
Lannoy  vint  le  demander  au  nom  de  l'em- 
pereur, François  I*',  pour  toute  réponse , 
le  fit  assister  à  une  audience  des  députés 
de  Bourgogne,  qui  déclarèrent  au  roi 
«  qu'il  n'avait  pas  le  pouvoir  de  démem- 
»  brer  aucune  province  de  sa  monar- 
V  chie  ;  »  et  comme  l'empereur  se  plaignit 
de  ce  manquement  de  paroles  ,  François 
lui  fit  dire  en  propres  termes  :  «  Vous 
})  avez  menti  par  la  gorge ,  et  autant  de 
»  fois  que  vous  le  direz ,  vous  mentirez.  « 
fit  plus,  il  se  ligua  contre  Charles  avec 
les  Vénitiens  et  presque  toute  l'Italie, 
l.autrec  se  rendit  maître  d'une  partie  de 
la  Lombardie ,  et  aurait  pris  Naples ,  si 
les  maladies  contagieuses ,  favorables  aux 
Espagnols  ,  n'eussent  enlevé  une  partie 
de  l'armée  française  avec  leur  général , 
eu  1528.  Ces  pertes  avancèrent  la  paix: 
elle  fut  conclue  à  Cambray  en  1529.  Le 
roi  de  France  épousa  Eléonore ,  veuve 
du  roi  du  Portugal  et  sœur  de  l'empe- 
reur. Ses  deux  fils  étaient  restés  en  otage 
lorsqu'il  sortit  de  prison  ;  en  .violant  le 
traité  de  Madrid,  «  il  les  exposa,  dit 
»  Voltaire ,  au  courroux  de  l'empereur  ; 
»  il  y  a  des  temps  où  cette  infraction  eût 
»  coûté  la  vie  à  ces  deux  princes  :  » 
mais  le  caractè^  de  Charles  ignorait 
ce  genre  de  vengeance.  François  racheta 


FRA 

ses  enfans  moyennant  deux  militons  d'or. 
Mais  cette  rançon  devint  fatale  à  la  Fran- 
ce ,  parce  que  le  roi  prit  la  résolution  in- 
digne d'un  grand  prince ,  d'altérer  la 
monnaie ,  et  fit  frapper  des  espèces  de 
moindre  aloi  que  celles  qui  avaient 
cours ,  pour  payer  cette  somme.  Cette 
supercherie  ,  jointe  à  la  faiblesse  qu'avait 
eue  François  \"  d'abandonner  ses  alliés 
à  sou  rival,  lui  fit  perdre  la  confiance 
de  l'Europer  A  peine  la  paix  était  con- 
clue, qu'il  travailla  sourdement  à  faire 
des  ennemis  à  l'empereur.  En  1 534 ,  il  en- 
voya en  Amérique  Jacques  Cartier  habile 
navigateur  de  St.-Malo ,  pour  faire  des 
découvertes  ;  et  en  effet  ce  marin  décou- 
vrit le  Canada  (voy-ez  Cartiek).  Il  fonda  . 
le  collège  royal ,  il  forma  la  bibliothèque  ■* 
royale  ;  il  aurait  plus  fait  encore ,  sans  la 
passion  malheureuse  de  vouloir  toujours 
être  duc  de  Milan  et  vassal  de  l'empire 

Tialgré  l'empereur.  Il  passa  encore  en 
Italie  ,  et  s'empara  de  la  Savoie  en  1585. 
L*empereur  de  son  côté  se  jeta  sur  la  Pro- 
vence ,  assiégea  Marseille ,  et  fut  repous-  ^ 
se,  François  1*'  s'unit  avec  Soliman  II; 
mais   cette  alliance  avec  un  empereur 

lahométan  ,    excita   les   murmures  de 
l'Europe  chrétienne,  sans   lui  procurer 

<  jcun  avantage.  Las  de  la  guerre ,  il  con-  ■«» 
;'t  enfin  une  trêve  de  dix  ans   avec 

arles ,  dans  une  entrevue  que  le  pape 
.  ul  III  leur  ménagea  à  Nice  en  153(V- 
>  empereur ,  ayant  passé  quelque  temps 
près  par  la  France  pour  aller  châtier 
'is  Gantois  révoltés,  lui  promit  l'investi- 
î  lire  du  Milanais ,  si  l'on  en  croit  la  plu- 
|i..it  des  historiens  français,  mais  lesEs- 
^i;).jnols  l'ont  constamment  nié  ,  «  Quelle 
!>  apparence  ,    disent-ils  ,  qu'un   prince 

<  sensé  aura  consenti  à  céder  une  grande 
V  et  magnif.que  province ,  pour  avoir  pu 
»  abréger  son  chemin,  et  arriver  quel- 
j/  ques  jours  plus  tôt  aux  portes  d'une  ville 
a  révoltée.  »  Voltaire  lui-même  assure 
que  Charles  ne  donna  qu'une  parole  va- 
gue ;  et  l'on  ne  peut  disconvenir  que  la 
demande  qu'en  fit  François  dans  ces  cir-| 
constances  ne  fût  très  déplacée.  Si  da 
l'alternative  d'être  arrêté  ou  de  promettre 
le  Milanais ,  Charles  eût  pris  ce  dernier 
parti  ;  la  promesse  eût  été  nulle  seloa 


j 


FRA 

toutes  les  règles  du  droit.  Quoi  qu'il  en 
soit,  la  guerre  se  rallume  bientôt  après. 
François  envoie  des  troupes  en  Italie  , 
dans  le  Roussillon  et  dans  le  Luxembourg- 
Le  comte  d'Engbien  bat  les  impériaux  à 
Cérisoles  en  1544  ,  et  se  rend  maître  du 
Montferrat.  La  France,  unie  avec  Bar- 
bero"usse  et  Gustave  Wasa,  se  promet- 
tait de  plus  grands^  avantages ,  lorsque 
Charles-Quint  et  Henri  VIII ,  ligues  contre 
François  l" ,  détruisirent  toutes  ses  es- 
pérances ,  en  pénétrant  dans  la  Picardie 
et  la  Champagne.  L'empereur  était  déjà 
à  Soissons  ,  et  le  roi  d'Angleterre  prenait 
Boulogne.  Le  luthéranisme  fit  le  salut  de 
la  France.  Les  princes  luthériens  d'Al- 
lemagne s'unissent  contre  l'empereur. 
Charles,  pressant  la  France  et  pressé 
dans  l'empire,  fit  la  paix  à  Crespi  en 
Valois  le  18  septembre  1644.  François  I", 
délivré  de  «  l'empereur  ,  s'accommoda 
bientôt  avec  le  roi  d'Angleterre  Henri 
VIII.  Ce  fut  le  7  septembre  lâ4G.  Il  mou- 
rut l'année  d'après  à  Rambouillet ,  le  31 
mars  1547  ,  de  celte  maladie  alors  pres- 
que incurable,  que  la  découverte  du  Nou- 
veau Monde  ,  avait ,  dit-on ,  transplan- 
tée en  Europe ,  mais  que  plusieurs  savans 
croient  être  d'une  date  très  antérieure 
(vot/cz  AsTRUC  ).  Un  long  portrait  de 
François  l"  serait  superflu  :  il  est  assez 
peint  dans  le  cours  de  cet  article.  Il  fut 
plus  brave  chevalier  que  grand  prince. 
Il  eut  plutôt  l'envie  que  le  pouvoir  d'a- 
baisser Charles-Quint,  son  rival  de  gloire, 
mais  plus  puissant,  plus  heureux  et  plus 
circonspect.  «  Charles-Quint ,  dit  l'abbé 
»  Raynal ,  n'agissait  que  par  des  intérêts 
»  d'état ,  et  François  I*' ,  qui  n'avait  en 
»  vue  que  des  passions  particulières,  y 

-  »  portait  ce  motif  petit  et  bas  qui  en- 
»  traînetoujours  à  l'humiliation  «(J^rtecrf. 
hisL  ,  tome  1 ,  page  181).  Comme  il  ré- 
fléchissait peu,  il  entreprenait  les  guerres 
avec  une  légèreté  extrême ,  et  s'exposait 
imprudemment  aux  plus  grands  revers. 
Quoiqu'il  s'occupât  beaucoup   du   soin 

^  d'étendre  son  royaume,  il  ne  le  gouver- 

-  na  jamais  lui-même.  L'état  fut  succes- 
sivement abandonné  aux  caprices  de  la 
duchesse  d'Angoulème  ,  aux  passions 
des  ministres,  à  l'avidité  des  favoris.  Son 


FRA  46« 

zèle  pour  la  religion  fut  singulièrement 
inconséquent  :  tarnlis  qu'il  faisait  brûler 
les  hérétiques  en  France,  il  les  soutenait 
en  Allemagne;  et  c'est  à  lui  que  le  lu- 
théranisme est  redevable  de  n'avoir  pas 
succombé  à  la  puissance  de  Charles- 
Quint.  La  protection  qu'il  accorda  aux 
beaux-arts ,  semble  avoir  couvert  aux 
yeux  des  savans  une  partie  de  ses  défauts. 
Il  se  trouva  précisément  dans  le  temps 
de  la  renaissance  des  lettres  ;  il  en  re- 
cueillit les  débris  échappés  aux  ravages 
de  la  Grèce,  et  il  les  transplanta  en  Fran- 
ce. Son  règne  est  l'époque  de  plusieurs 
révolutions  dans  l'esprit  et  dans  les 
mœurs  des  Français.  Il  appela  à  sa  cour 
les  dames ,  les  cardinaux  et  les  prélats 
les  plus  distingués  de  son  royaume.  La 
justice ,  depuis  la  fondation  de  la  monar- 
chie ,  avait  été  rendue  en  latin  ;  elle 
commença  l'an  1536  à  l'être  en  français. 
François  l"  fut  déterminé  à  ce  change- 
nient  par  une  expression  barbare ,  em- 
ployée dans  un  arrêt  rendu  au  parlement 
de  Paris.  Motif  bien  léger  et  plein  d'in- 
conséquence ,  puisqu'il  eût  été  plus  fa- 
cile et  plus  simple  de  corriger  un  solé- 
cisme, que  de  changer  de  langue.  «  Celte 
1.  iunovafion  ,  dit  un  observateur  moder- 
-'-ne,  a  eu  plus  d'un  mauvais  effet.  D'a- 
»  bord  la  langue  romaine  ,  ce  grand 
w  organe  de  l'érudition  et  des  sciences  , 
)>  cet  idiome  des  grands  modèles ,  a  été 
)'  négligée.  La  jurisprudence  est  deve- 
ti  nue  un  champ  ouvert  à  tout  le  monde  ; 
'  les  ignorans,  toujours  plus  présomp- 
)>  tueux  et  plus  prompts  que  les  gens  in- 
3)  struits,  s'en  sont  emparés.  La  science 
i)  de  Injustice  et  des  lois  a  dégénéré  en 
»  verbiage  et  en  chicane.  Le  nom  d'avo- 
j)  cat  est  devenu  l'étiquette  des  petits- 
j»  maîtres ,  et  un  litre  pour  ceux  qui  n'en 
»  ont  pas  d'autre.  La  magistrature  a  été 
»  considérée  comme  un  groupe  de  gens 
i)  ignares  ou]  intéressés ,  et  quelquefois 
»  comme  un  corps  de  factieux.  De  là  les 
»  termes  de  robinerie ,  de  robinaille ,  de 
»  robinauderie  ,  etc. ,  affectés  aujour- 
I»  d'hui  à  une  profession  qui  mérita  long 
M  temps  le  respect  et  la  confiance  des 
»  peuples.  Tant  il  est  dangereux  de  tou- 
»  cher  aux   usages   établis ,   ne  fût-ce 


46a  FRA 

»  qu'en  matière  de  langue  !  »  Ce  fut  en- 
core François  l"  qui  introduisit  la  mode 
de  porter  les  cheveux  courts  et  la  bar- 
be longue ,  pour  cacher  une  blessure 
qu'il  reçut  dans  un  jeu  en  1521.  Tous 
les  courtisans  eurent  la  plus  longue  bar- 
be qu'ils  purent;  c'était  alors  un  orne- 
ment de  petit-maître.  Les  gens  graves 
et  les  magistrats  n'en  portaient  point  j 
ils  ne  laissèrent  croître  la  leur,  que  lors- 
que les  courtisans  se  furent  dégoûtés  de 
celte  mode.  François  P""  accabla  son  peu- 
ple d'impôts ,  et  il  recommanda  à  son 
fils  en  mourant  de  diminuer  les  tailles. 
Il  laissa  dans  ses  coffres  environ  .six  mil- 
lions d'à-présent.  Son  histoire,  écrite 
par  M.  Gaillard,  8  vol.  in-12  ,  est  le  fruit 
de  la  prévention  et  de  l'esprit  national  ; 
tous  les  faits  et  tous  les  caiactères  y  sont 
défigurés.  Ce  prince  est  mieux  apprécié 
dans  la  Galerie  p/Ulosophique  du  16® 
siècle,  par  M.  de  Mayer,  2  vol.  in-8.  On 
y  trouve ,  après  divers  détails  intéres- 
sans  ,  ce  portrait  en  petit  :  «  François  I*"" , 

,  >»  bon ,  sincère  ,  généreux  ,  populaire , 
»  mais  inconséquent  et  indiscret ,  jamais 
»  méchant  ni  cruel  ,  n'eut  point  de 
»  mœurs ,  énerva  et  ruina  la  nation  sans 
»  le  vouloir.  »  (  Sa  vie  a  été  aussi  écrite 
par  Varillas  ,  Paris,  1G85,  2  vol.  in-4.  On 
a  publié  à  Paris ,  1707  ,  in-12  :  Histoire 
et  parallèle  de  Charles  -  Quint  et  de 
François  I"  ,  tires  d'un  manuscrit  du 
f^atican  ;  M''^  de  Lussan  a  donné  les 
Anecdotes  de  la  cour  de  François  I" , 
Londres  (Paris),  1748,  3  vol.  in-12; 
M.  Rœderer  a  publié  Louis  XII  et  Fran- 
çois 1*',  ou  Mémoires  pour  servir  à  une 
nouvelle  histoire  de  leur  règne.  Enfin  la 
bibliothèque  du  roi  possède  plusieurs 
recueils  manuscrits  de  poésies  et  de  let- 
f.res  de  François  P'  :  l'abbé  Langlet  en 
a  tiré  une  Epître  (  en  vers) ,  traitant  de 
son  parlement  de  France  et  de  sa  prise 
devant  Pavie  ,  et  l'a  publiée  à  la  fin  de 
V Histoire  justifiée  contre  les  romans  , 
Amsterdam ,  Rouen  ,  1735,  in-1 2.  ) 

Î'RAIN'ÇOIS  II ,  roi  de  France  ,  né  à 
Fontainebleau  en  1544  ,  de  Henri  II  et  de 
Catherine  de  Médicis  ,  monta  sur  le  trône 
après  la  mort  de  son  père  en  1559-  Il 

'  avait  épousé  l'année  d'auparavant  Marie 


FRA 

Stuart ,  fille  uniqiie  de  Jacques  V ,  roi 
d'Ecosse.  Quoique  son  règne  ne  fût  que 
de  1 7  mois  ,  il  vit  éclore  tous  les  maux 
qui  depuis  désolèrent  la  France. François, 
duc  de  Guise ,  et  te  cardinal  de  Lorraine, 
oncles  de  ce  roi  enfant,  par  sa  femme, 
furent  mis  à  la  tête  du  gouvernement , 
pour  réprimer  les  calvinistes  qui  mena- 
çaient le  royaume  d'une  entière  subver- 
sion." Antoine  de  Bourbon  ,  roi  de  Na- 
varre ,  et  Louis ,  son  frère  ,  prince  de 
Condé,  fâchés  de  n'avoir  point  de  part 
à  l'administration  ,  résolurent  de  secouer 
le  joug.  Ils  se  joignirent  aux  calvinistes 
pour  détruire  les  Guises  ,  protecteurs 
des  catholiques.  L'ambition  fut  la  cause 
de  cette  guerre  ,  la  religion  ,  le  prétexte, 
et  la  conspiration  d'Amboise  le  premier 
signal.  Cette  conspiration  éclata  au  mois 
de  mars  1560.  Le  prince  de  Condé  en 
était  l'âme  invisible,  et  La  Renaudie  le 
conducteur.  Celui-ci  s'étant  ouvert  à 
Avenelles ,  avocat  de  Paris ,  la  plus  gran- 
de partie  des  conjurés  est  arrêtée  ,  et  ili 
sont  exécutés.  La  Renaudie  fut  tué  en 
combattant ,  et  plusieurs  autres  périrent 
comme  lui  les  armes  à  la  main.  La  con- 
spiration découverte  et  punie,  le  pouvoir 
des  Guises  n'en  fut  que  plus  grand.  Ils 
firent  donner  un  édit  à  Romorantin ,  par 
lequel  la  connaissance  du  crime  d'hérésie 
était  renvoyée  aux  évêques  et  interdite 
aux  parlemens.  Ce  fut  le  chancelier  de 
l'hôpital  lui-même,  quoique  très  favo- 
rable aux  protestans  qui  dressa  cet  édit  ; 
édit  raisonnable  et  assorti  à  la  nature  des 
délits  ,  puisque  les  évêques  sont  les  vrais 
juges  de  la  doctrine.  On  défendit  aux 
calvinistes  de  tenir  des  assemblées.  On 
créa  dans  chaque  parlement  une  chambre  j 
qui  ne  connaissait  que  de  ces  cas-là  ,  et 
qu'on  appelait  la  Chambre  ardente. 
prince  de  Condé ,  chef  du  parti  calvi- 
niste, fut  arrêté  ,  condamné  à  perdre  la 
tête ,  et  allait  finir  par  la  main  du  bour- 
reau, lorsque  François  H,  malade  depui&| 
long-temps  et  infirme  dès  son  enfance, 
mourut  à  1 7  ans ,  le  5  décembre  1 560 
d'un  abcès  qu'il  avait  à  la  tête,  et  doi 
l'humeur  ne  put  entièrement  couler  pal 
son  oreille.  Quelques  auteurs  rapportent) 
que  cet  accident  devint  mortel  par  U 


FRA 

poison  que  le  chirurgien ,  qui  était  hu- 
guenot, mtMa  parmi  les  remèdes,  pour 
délivrer  son  parti  de  la  crainte  que  lui 
inspirait  la  sévérité  indispensable  des 
lois  de  François  II  (  voyez  les  Mémoires 
de  Castelnau,  avec  les  notes  de  Jean  le 
Laboureur). 

FRA^ÇOIS  DE  France,  duc  d'Alen- 
çon,  d'Anjou  et  de  Brabant,  et  frère  de 
François  H,  Charles  IX  et  Henri  III,  né 
en  1 554  ,  se  mit  à  la  tête  des  mécontens 
lorsque  son  frère  Henri  HI  monta  sur  le 
trône.  Catherine  de  Médicis ,  sa  mère ,  le 
fil  arrêter  ;  mais  le  roi  le  remit  en  liberté. 
Il  en  profita  pour  exciter  de  nouveaux 
troubles.  En  1 575 ,  il  se  mit  à  la  tête  des 
Reistres,  parce  qu'on  lui  avait  refusé  la 
lieutcnance  générale  du  royaume.  On 
l'apaisa  ;  mais  quelque  temps  après 
ayant  été  appelé  par  les  confédérés  des 
Pays-Bas ,  il  alla  les  commander  malgré 
son  frère ,  et  se  rendit  maître  de  quel- 
ques places.  Il  revint  en  France,  et  re- 
passa ensuite  dans  les  Pays-Bas,  dont  il 
fut  reconnu  prince.  Il  signala  son  cou- 
rage contre  le  duc  de  Parme  qui  assiégeait 
Cambray  ,  et  se  rendit  maître  de  Cateau- 
Cambresis  en  1581.  Il  passa  la  même  an- 
née en  Angleterre  pourconclure  son  ma- 
riage avec  Elizabelh,  qui  le  joua  ,  et  qui 
ne  voulut  pas  s'unir  avec  lui ,  malgré 
l'anneau  qu'elle  lui  avait  donné  pour 
gage  de  sa  foi.  De  retour  dans  les  Pays- 
Bas  ,  il  fut  couronné  duc  de  Brabant  à 
Anvers  ,  et  comte  de  Flandre  à  Gand  ,  en 
1582  ;  mais  l'année  suivante  ayant  voulu 
asservir  le  pays  dont  il  n'était  que  le  dé- 
fenseur ,  et  se  rendre  maître  d'Anvers  ,  il 
y  fut  entièrement  défait  et  obligé  de  re- 
tourner en  France.  Il  y  mourut  de  phtisie 
en  1584,  à  29  ans,  sans  avoir  été  marié, 
regardé  comme  un  prince  léger,  bizarre, 
qui  mêlait  les  plus  grands  défauts  à  quel- 
ques bonnes  qualités. 

FRANÇOIS  DE  Bourbon,  comte  de 
Saint-Pol  et  de  Chaumont ,  né  en  1491 , 
de  François ,  comte  de  Vendôme ,  signala 
son  courage  à  la  bataille  de  Marignan  en 
1515.  Le  brave  Bayard,  ayant  fait  cheva- 
lier François  I  après  cette  journée,  ac- 
corda le  même  honneur  à  François  de 
Bourbon.  Ce  général  secourut  Mézières  as- 


FRA  463 

siégé  parles  troupes  impériales  en  1521 , 
prit  Mouzon  et  Bapaume,  et  battit  les 
Anglais  au  combat  de  Pas.  A  la  bataille 
de  Pavie  en  1525  ,  il  fut  du  nombre  des 
généraux  prisonniers.  Il  se  sauva,  et  fut 
repris  en  1528  par  Antoine  de  Lève,  qui 
le  surprit  à  Landriano  ,  à  5  lieues  de  Mi- 
lan. Les  Lansquenets  et  les  Italiens  l'a- 
vaient abandonné  dans  ce  péril ,  et  sa  ca- 
valerie s'était  sauvée  à  Pavie  avec  l'avant- 
garde.  Il  mourut  à  Cotignan ,  près  de 
Reims,  en  1545, 

FRANÇOIS  DE  BoDKBON ,  duc  de 
Montpensier,  de  Châtelleraut ,  prince  de 
Dombes,  dauphin  d'Auvergne,  fils  de 
Louis  de  Bourbon  H  du  nom  ,  donna  des 
preuves  de  sa  valeur  au  siège  de  Rouen 
en  15C2,  aux  batailles  de  Jarnac  et  de 
Montcontour  en  1569,  et  au  massacre 
d'Anvers  en  1572.  Henri  III  le  fit  cheva- 
lier de  ses  ordres ,  et  l'envoya  en  Angle- 
terre. Après  la  mort  de  ce  monarque ,  il 
fut  un  des  plus  fidèles  sujets  de  Henri  IV, 
et  un  de  ses  plus  braves  généraux.  Il  se 
distingua  à  Arques  et  à  Ivri  en  1 590.  Il 
mourut  à  Lisieux  en  1 592 ,  à  50  ans  , 
après  avoir  soumis  Avranche  au  roi  et 
lui  avoir  rendu  d'autres  services  non 
moins  importans. 

FRANÇOIS  DE  Bourbon  ,  comte  d'En- 
ghien  ,  gouverneur  de  Hainaut ,  de  Pié- 
mont et  de  Languedoc ,  naquit  au  châ- 
teau de  La  Fère ,  de  Charles  de  Bourbon, 
duc  de  Vendôme.  Son  courage  se  déve- 
loppa de  bonne  heure.  François  I  lui  con- 
fia en  1-543  la  conduite  d'une  armée, 
avec  laquelle  il  se  rendit  maître  de  JN'ice, 
s'avança  dans  le  Piémont ,  prit  Crescen- 
tin  ,  Dezance  ,  et  remporta  la  victoire  de 
Cérisoles ,  le  lundi  de  la  fête  de  Pâques 
de  1544.  Il  s'empara  ensuite  du  Jlontfer- 
rat,  à  l'exception  de  Casai.  L'année  d'a- 
près, ce  prince,  jouant  avec  de  jeunes 
seigneurs  à  défendre  un  fort  de  neige,  y 
fut  tué,  en  1545,  à  27  ans. 

FRANÇOIS  DE  Lorraine,  duc  de  Guise 
et  d'Aumale ,  fils  aîné  de  Claude  de  Lor- 
raine ,  duc  dé  Guise ,  né  au  château  de 
Bar  en  1519,  reçut  au  siège  de  Boulogne 
en  1545,  une  blessure  qui ,  suivant  quel- 
ques auteurs ,  le  fit  appeler  le  Balafré ^ 
quoique  ce  surnom  semble  n'appartenir 


464  FRA 

qu'à  Henri  de  Guise.    Son    courage  se 
montra  d'une  manière  plus  éclatante  en 
1553  à  Metz  ,  qu'il  défendit  vaillamment 
contre    Charles-Quint.   Les    troupes    de 
l'empereur,  engourdies   par    le    froid, 
laissèrent  plusieurs  soldats  après  elles. 
Le  duc  de  Guise ,  loin  de  les  faire  assom- 
mer,  comme  faisaient  quelques  généraux 
de  ces  temps  malheureux ,  les  reçut  avec 
humanité.  Autant  sa  valeur  avait  paru 
durant  le  siège,   autant   sa  générosité 
éclata-t-elle  après.  Plusieurs  autres  avan- 
tages en  Flandre  et  en  Italie  firent  pro- 
poser à  quelques-uns  de  le  faire  vice-roi 
de  la  France  ;  mais  ce  titre  paraissant 
trop  dangereux  dans  un  sujet  puissant  et 
belliqueux ,  on  se  contenta  de  lui  donner 
celui  de  lieutenant-général  des  armées 
du  roi  au  dedans  et  au  dehors.  Les  mal- 
heurs de  la  France  cessèrent  dès  qu'il 
fut  à  la  tête  des  troupes.  En  huit  jours  il 
prit  Calais  et  tout  son  territoire ,  au  mi- 
lieu de  l'hiver.   Il  chassa  pour  toujours 
de  celte  ville  les  Anglais,  qui  l'avaient 
possédée  210  ans.  Celte  conquête,  suivie 
de  celle  de  Thionville,  prise  sur  les  Es- 
pagnols ,  mit  le  duc  de  Guise  au  dessus 
de  tous  les  capitaines  de  son  temps.  Il 
prouva  que  le  bonheur  ou  le  malheur  des 
états  dépend  souvent  d'un  seul  homme. 
Maître  de  la  France  sous  Henri  II ,  il  le 
fut  encore  sous  François  IL  La  conspira- 
tion d'Amboisc ,  tramée  par  les  protes- 
tans  pour  le  perdre ,  ne  fit  qu'augmenter 
son  crédit.  Le  parlement  lui  donna  le 
titre  de  Conservateur  de  la  patrie.  Son 
autorité  était  telle ,  qu'il  recevait  assis  et 
couvert ,  Antoine ,  roi  de  Kavarre ,  qui 
se  tenait  debout  et  tête  nue.  Après  la 
mort  de  François  H ,  cette  autorité  baissa, 
mais  sans  être  entièrement  abattue.  Des 
lors  se  formèrent  les  partis  des  Condé  et 
des  Guise.  Du  côté  de  ceux-ci  étaient  le 
connétable  de  Montmorenci  et  le  maré- 
chal de  Saint-André ,  de  l'autre  étaient 
les  protestans  et  les  Coligni.  Le  duc  de 
Guise,  zélé  catholique  ,  ctl'àme  du  parti 
opposé  aux  protestans,   avait  résolu  de 
maintenir  l'ancienne  religion  dans  son 
éclat.  Passant  auprès  de  Vassi ,  sur  les 
frontières  de  la  Champagne ,  il  trouva  des 
calvinistes  qui  chantaient  les  psaumes  de 


FRA 

Marot  dans  une  grange.  Ses  domestiques 
prirent  querelle  avec   eux.   On  en  vint 
aux  mains;  et  il  y  eut  près  de  soixante 
de  ces  malheureux  tués  et  deux  cents  de 
blessés.  Cet  événement    imprévu ,   que 
les  protestans  appellent  le  massacre  de 
Fassi ,  alluma  la  guerre  civile  dans  tout 
le  royaume.  Le  duc  de  Guise  prit  Ilouen, 
Bourges ,  et  gagna  la  bataille  de  Dreux 
en  1562.  Il  fut  alors  au  comble  de  sa 
gloire.  Vainqueur  partout  oii   il  s'était 
trouvé ,  il  était  chéri  des  catholiques  et 
le  maître  de  la  cour ,  affable,  généreux , 
et  en  tout  sens  le  premier  homme  de 
l'état.  Il  se  préparait  à  assiéger  Orléans, 
le  centre  de  la  faction  protestante  et  leur 
place  d'armes ,  lorsqu'il    fut   tué    d'uu 
coup  de  pistolet  en  1503  par  Poltrot  de 
Méré,  gentilhomme  huguenot.  Les  calvi- 
nistes qui,  sous  François  II  et  Henri  II, 
n'avaient  su  que  prier ,   et  souffrir  ce 
qu'ils  appelaient  le  martyre ,  étaient  de- 
venus ,  dit  un  historien  ,  des  enthousias- 
tes furieux.  Ils  ne  lisaient  plus  l'Ecriture, 
que  pour  y  chercher  des  exemples  d'as- 
sassinats. Poltrot  se  crut  un  Aod,  envoyé 
de  Dieu  pour  tuer  un  chef  philistin.  Le 
parti ,  aussi  fanatique  que  lui ,  fit  des 
vers  en  son  honneur  j  et  il  reste  encore 
des  estampes  avec  des  inscriptions  qui 
élèvent  son  meurtre  jusqu'au  ciel,  quoi- 
que ce  ne  fût  que  le  crime  d'un  furieux 
aussi  lâche  qu'imbécile.  Yalincour  a  écrit 
]sivie  de  François  de  Guise,  in-12.  Il 
parut,   en  1576,   une    satire  sanglante 
contre  lui ,  le  cardinal  son  frère  et  les 
autres  Guise ,  sous  le  titre  de  Légende  de 
Charles,  cardinal  de  Lorraine,  etc.^ 
par  François  de  l'Ile ,  in-8.  On  la  trouve 
dans  le  tome  6  des  Mémoires  de  Condé , 
in-4.  Le  nom  de  l'auteur  est  supposé  ;  on 
la  croit  de  Régnier  de  La  Planche.  Aiu 
traits  flétrissans  que  renferme  cette  sa- 
tire ,  nous  substituerons  ceux-ci  ;  ils  font 
trop  d'honneur  à   ce   héros ,    pour  les 
laisser  dans  l'oubli.   Un  jour  qu'il  visi- 
tait son  camp  ,  le  baron  de  Lunebourg, 
un  des  principaux  chefs  des  Reistres, 
trouva  mauvais  qu'il  voulût  examiner  sa 
troupe,  et  s'emporta  jusqu'à  lui  présenter 
le  bout  de  son  pistolet.  Le  duc  de  Guise 
tira  froidement  l'épée ,  éloigna  le  pisto- 


PRA 

Ict  et  le  fit  tomber.  Montpezal ,  lielile- 
nant  des  gardes  de  ce  prince ,  choqué  de 
l'insolence  de  i'of&cier  allemand ,  allait 
lui  ôter  la  vie ,  lorsque  Guise  lui  crie  : 
»  Arrêtez  ,  Moutpezat ,  vous  ne  savez  pas 
»  mieux,  tuer  un  homme  que  moi.  »  Et  se 
tournant  vers  l'emporté  Lunebourg  : 
»  Je  te  pardonne,  lui  dit-il ,  l'injure  que 
î)  tu  m'as  faite  ;  il  n'a  tenu  qu'à  moi  de 
»  m'en  venger.  Mais  pour  celle  que  tu  as 
>)  faite  au  roi ,  dont  je  représente  ici  la 
»  personne  ,  c'est  à  lui  d'en  faire  la  jus- 
»  tice  qu'il  lui  plaira.  »  Aussitôt  il  l'en- 
voya en  prison ,  et  acheva  de  visiter  le 
camp,  sans  que  les  Reistres  osassent  mur- 
murer, quoiqu'ils  fussent  naturellement 

séditieux On  avait  averti  le  duc  de 

Guise  qu'un  gentilhomme  huguenot  était 
venu  dans  son  camp  à  dessein  de  le  tuer  ; 
il  le  fit  arrêter.  Ce  protestant  lui  avoua 
sa  résolution.  Alors  le  duc  lui  demanda  : 
«  Est-ce  à  cause  de  quelque  déplaisir  que 
>'  tu  aies  reçu  de  moi  ?  —  Non,  lui  ré- 
»  pondit  le  protestant,  c'estparce  que  vous 
j»  êtes  le  plus  grand  ennemi  de  ma  reli- 
»  gion.  — Eh  bien  !  répliqua  Guise  ,  si  ta 
»  religion  te  porte  à  m'assassiner ,  la 
))  mienne  veut  que  je  te  pardonne  ,  »  et 
il  le  renvoya.  Le  duc  de  Guise  avait  une 
intrépidité  que  les  héros  les  plus  fameux 
traiteraient  d'imprudence.  On  lui  montra 
un  jour  un  homme  qui  s'était  vanté  de 
le  tuer  ;  il  le  fit  venir ,  le  regarda  entre 
deux  yeux,  et  lui  trouvant  un  air  embar- 
rassé et  timide  :  «  Cet  homme-là ,  dit-il 
»  en  levant  les  épaules,  ne  me  tuera  ja- 
»  mais  ;  ce  n'est  pas  la  peine  de  l'arrê- 
»  ter.  » 

'FRANÇOIS  (Dom  Claude  et  dom  Phi- 
lippe )  ,  qu'on  réunit  dans  le  même  arti- 
cle pour  éviter  les  redites ,  appartenaient 
tous  deux  à  la  congrégation  de  Saint- 
Vannes.  Dom  Claude,  né  à  Paris  en  1559, 
fut  envoyé  ,  après  avoir  fait  sa  profes- 
sion ,  au  Mont-Cassin,  pour  y  étudier  les 
réglemens  sur  lesquels  la  congrégation 
de  Saint  A'annes ,  encore  au  berceau  , 
voulait  se  modeler.  Dom  Claude  revint 
avec  une  constitution  qu'il  avait  rédi- 
gée ,  et  fut  nommé  président  de  la  con- 
grégation. Il  trouva ,  après  quelques 
années  d'expérience,  que  l'article  des  con- 

V. 


FRA  465 

stitutions  qui  statue  la  vacance  de  la 
supériorité  après  le  terme  de  cinq  ans , 
sans  que  le  supérieur  pût  être  continué, 
offrait  des  inconvéniens.  Les  autres  su- 
périeurs ,  et  particulièrement  dom  Phi- 
lippe ,  ne  partagèrent  pas  son  opinion  ; 
on  écrivit  de  part  et  d'autre  ,  mais  sans 
se  convaincre  mutuellement.  Eu  1630, 
le  pape  mit  fin  à  la  dispute  en  permettant 
de  continuer  le  supérieur  au-delà  de  cinq 
ans ,  lorsque  le  bien  de  la  congrégation 
le  demanderait.  L'union  entre  les  deux 
confrères  ne  souffrit  pas  de  cette  dissen- 
sion ,  et  dom  Claude  ,  après  avoir  rendu 
de  grands  services  à  la  congrégation ,  et 
en  avoir  été  douze  fois  président ,  mou- 
rut à  l'abbaye  de  Saint-Michel ,  le  1 0  août 
ï  G32.  —  François  (  Dom  Philippe  ) ,  dont 
le  véritable  nom  était  Philippe  Colard, 
naquit  à  Lunéviile  en  1579.  Il  était  à 
peine  âgé  de  10  ans  lorsque  son  parent 
Lignarius,  abbé  de  Sénones,  le  prit  dans 
son  monastère  dans  l'intention  d'en  faire 
son  coadjuteur.  Il  prit  l'habit  de  Sainl- 
Benoît,  et  lorsqu'il  eut  fait  profession, 
il  alla  faire  ses  cours  de  philosophie  et 
de  théologie  à  l'université  de  Ponl-à- 
Mousson.  Il  y  étudia  aussi  la  langue 
grecque,  et  avec  tant  de  succès,  que  dès 
ce  moment  il  s'en  servit  habituellement 
pour  correspondre  avec  son  père  ,  qui 
était  très  versé  dans  cette  langue.  Dési- 
rant entrer  dans  un  monastère  où.  la  ré- 
forme fût  en  vigueur ,  il  quitta  secrète- 
ment, en  1603,  Sénones,  malgré  les  avan- 
tages qui  devaient  l'y  retenir,  et  se 
rendit  à  Saint- Vannes ,  oîi  il  fit  profes- 
sion l'année  suivante ,  après  avoir  ensei-; 
gué  la  philosophie  et  la  théologie  à  Saint- 
Michel  ,  où  le  cardinal  de  Lorraine  avait 
introduit  la  réforme.  Rappelé  à  Saint- 
Vannes  ,  il  y  fut  mis  à  la  tête  du  novi- 
ciat. En  1609,  ii  fut  nommé  visiteur, 
et,  trois  ans  après,  prieur  de  l'abbaye 
de  Saint-Airy  de  Verdun  ,  dont  il  devint 
abbé.  En  1622  ,  il  fut  élu  président  de  la 
congrégation.  Il  mourut  à  Saint-Airy,  le 
27  mars  1637  ,  après  avoir  fait  rebâtir  l'é- 
glise de  cette  abbaye ,  et  l'avoir  enrichie 
de  beaucoup  de  choses  précieuses.  C'é- 
tait un  religieux  plein  de  zèle  et  de  piété, 
et  très  attaché  à  la  discipline.  Marie-Jac- 
3o 


466  FRA 

queline  Bouelte  tic  Blemure  ,  religieuse 
bénédictine,  a  écrit  sa  Fie  ,  insérée  dans 
le  2^  volume  des  Hommes  illustres  de 
l'ordre  de  Saint-Benoît.  Dom  Philippe 
écrivit  plusieurs  ouvrages  au  sujet  de 
son  diflerend  avec  dom  Claude.  On  a  en 
outre  de  lui  :  1"  Trésor  de  perfection 
tire'  des  épitres  et  c'vangiles  qui  se  li- 
sent à  la  messe  pendant  Vannée ,  Paris , 
IG 15,  4  vol.  in- 12  ;  2°  Le  Guide  spiri- 
tuel pour  les  novices ,  Paris ,  1 G 1 6 ,  in-1 2  ; 
3°  Le  Noviciat  des  bénédictins  ,  avec  un 
traité  de  la  mort  précieuse  des  bénédic- 
tins, in-12;  4°  Renouvellement  spiri- 
tuel nécessaire  aux  bénédictins  ;  5°  La 
Règle  de  Saint-Benoit ,  traduite  avec 
des  considérations ,  Paris,  1613et  1G20; 
6°  Occupation  journalière  des  religieux; 
7"  Enseignement  tiré  de  la  règle  ;  %" 
Courte  explication  de  ce  qui  se  dit  dans 
ï office  divin ,  contenant  le  sens  littéral 
et  mystique  de  chaque  psaume ,  avec 
des  affections;  9"  Les  Exercices  des 
novices.  Ils  ont  été  traduits  en  latin  ,  et 
étaient  en  usage  dans  presque  toutes  les 
congrégations  de  bénédictins. 

FRANÇOIS  ou  Franciscus  de  Victo- 
ria ,  ainsi  nommé  du  lieu  de  sa  naissan- 
ce ,  dominicain ,  professeur  de  théologie 
à  Salamanque,  mort  en  1549  ,  est  auteur 
de  plusieurs  petits  traités  de  théologie , 
recueillis  en  un  vol.  in-8,  sous  le  titre 
de  Theologicœ  prœlcctiones. 

FRANÇOIS  DE  JÉSUS  Marie  ,  carme 
réformé ,  natif  de  Burgos ,  fut  professeur 
de  théologie  à  Salamanque  et  définileur 
général  de  son  ordre.  Il  mourut  en  1G77  , 
après  avoir  publié  un  Cours  de  théologie 
morale,  imprimé  à  Salamanque,  et  réim- 
primé depuis  à  Madrid  et  à  Lyon ,  en  6 
vol.  in-fol. 

FRANÇOIS  ROMAIN  ,  dit  leYrère 
Romain  ,  de  l'ordre  de  Saint-Dominique , 
naquit  à  Gand  en  1G46.  Il  travailla  en 
1G84  à  la  construction  d'une  arche  du 
pont  de  Maëstricht ,  par  ordre  des  états 
4e  Hollande.  Louis  XIV  l'appela  quelques 
années  après  en  France  pour  achever  le 
pont-Royal,  commencé  par  51.  Gabriel, 
et  qu'on  désespérait  de  pouvoir  finir.  Le 
succès  de  cet  ouvrage  lui  valut  les  titres 
d'inspecteur  des  ponts  et    chaussées  et 


.FRA 

d'architecte  du  roi  dans  la  généralité  de 
Paris.  Il  mourut  dans  cette  ville  en  173â> 
à  89  ans.  Il  était  aussi  bon  religieux  que 
grand  architecte.  Il  donnait  aux  devoirs 
de  son  état  tous  les  momeus  qu'il  pou- 
vait dérober  à  l'architecture. 

FRANÇOIS  (  Laurent  Le  ) ,  né  à  Arin- 
thod,  dans  le  diocèse  de  Besançon,  le  2 
novembre  1G98,  passa  quelques  années 
dans  la  congrégation  de  la  mission  ,  et  s'y 
distingua  par  ses  talens ,  qu'il  continua 
d'employer  utilement  contre  les  erreurs 
du  temps ,  après  en  être  sorti.  Il  mourut 
à  Paris  le  24  février  1782  ,  et  lais.sa  ses 
légataires  universels ,  les  pauvres  de  la 
paroisse  dans  laquelle  il  était  né.  Ses 
vertus  répondaient  à  son  zèle  pour  la  Re- 
ligion ,  dont  il  pratiquait  les  devoirs 
comme  il  en  défendait  les  dogmes.  Nous 
avons  de  lui  :  1°  Lettre  sur  le  pouvoir 
des  démons,  in-4.  2°  Les  Preuves  de  la 
Religion  de  J.  C,  1751,  8  vol.  in-12. 
3°  VExamen  du  Catéchisme  de  l'hon- 
nête homme  ,  17G4,  1  vol.  in-12.  4"  Ré- 
ponses aux  difficultés  proposées  contre 
la  Religion  Chrétienne  par  J.  J.  Rous- 
seau,  1765,  in-12.  b"  Observations  sur 
la  Philosophie  de  l'Histoire ,  et  le  Dic- 
tionnaire philosophique  ,  2  vol.  in-8,  avec 
gravure.  Voltaire ,  dans  une  épître  à  d'A- 
lembert,  traite  l'auteur  àe  pauvre  im- 
bécille ,  qui  a  fait  un  livre  en  deux  vo- 
lumes contre  les  philosophes ,  que  per- 
sonne ne  connaît  et  ne  connaîtra.  H  faut 
cependant  bien  que  le  livre  ait  été  connu, 
puisqu'il  a  donné  tant  d'humeur  à  l'iras- 
cible philosophe  dont  rhonnét«  critique 
ne  trouvait  ni  esprit ,  ni  jugement  chez  les 
gens  qui  réfutaient  ses  erreurs.  6°  Exw- 
men  des  faits  qui  servent  de  findement 
à  la  religion  chrétienne,  1767,  3  vol. 
in-12.  Les  ouvrages  non  imprimés  de  cet 
auteur,  sont  la  Réfutation  du  système  de 
la  nature  ,  4  vol,  et  Réfutation  des  trois 
imposteurs.  Ces  ouvrages ,  sans  avoir  le 
mérite  de  l'élégance  et  de  la  précision  , 
ont  celui  de  la  clarté,  de  la  simplicité» 
de  la  facilité  et  de  l'onction.  Les  excel- 
lens  raisonnemens  opposés  aux  erreurs  dit 
temps,  semblent  quelquefois  s'aSaiblir 
par  la  prolixité  de  l'exposition  et  la  mar- 
che grave  et  modeste  de  l'auteur  ;  mais 


I 
1 


FRA 

pour  peu  qu'on  réfléchisse  et  qu'on  res- 
serre l'ensemble  ,  on  en  saisit  toute  la 
force.  Ce  savant,  comme  la  plupart  des 
modernes,  s'était  laissé enf^ouer  de  l'im- 
portance et  de  la  beauté  des  maximes  des 
anciens  philosophes  grecs  et  perses;  mais 
ayant  examiné  leurs  livres  de  plus  près , 
il  revint  de  son  erreur.  Il  s'aperçut  que 
c'est  une  ruse  de  nos  philosophes  de  nous 
donnerdes  extraits  de  Zoroastre,  de  Con- 
fucius,  et  d'autres  prétendus  saoes  de 
l'antiquité,  pour  faire  croire  que  nous 
n'avions  pas  besoin  de  la  religion  chré- 
tienne ,  pour  avoir  une  bonne  morale  : 
s'ils  donnaient  en  entier  les  ouvrages  de 
ces  anciens,  ils  ne  feraient  point  tant  de 
dupes  :  car  à  côté  d'une  phrase  raisonna- 
ble dictée  par  le  bon  sens,  ils  en  met- 
traient une  autre,  qui  semblerait  naître 
d'une  extravagance  consommée.  «  C'est 
»  raisonner  pauvrement ,  dit  un  savant 
j)  théologien ,  de  dire  :  telle  maxime  de 
»  la  loi  chrétienne  se  trouve  dans  les  phi- 
))  losophes ,  telle  autre  dans  les  législa- 
»  teurs  :  l'une  est  prêchée  à  la  Chine, 
»  l'autre  en  Egypte  ou  au  Japon  :  celle-ci 
w  a  été  connue  du  temps  de  Pythagore  , 
»  celle-là  cinq  ou  six  cents  ans  après, 
j)  Donc  les  hommes  n'ont  pas  été  mieux 
»  instruits  par  Jésus-Christ  que  par  les 
»  païens.  »  F^oy.  Collius  ,  Confucios  , 
EpictÈte,  Zenon,  etc. 

FRANÇOIS  (  Jean-Charles ),  graveur 
des  dessins  du  cabinet  du  roi ,  naquit  à 
Nancy  en  1717  d'une  famille  honnête.  Il 
commença  par  graver  la  vaisselle  ;  mais 
il  était  né  pour  un  travail  bien  supérieur 
à  celui-là.  Après  avoir  perfectionné  son 
talent  pour  la  taille-douce  à  Lyon,  il 
vint  à  Paris  et  y  trouva  des  protcclcurs. 
C'est  dans  cette  ville  qu'il  inventa  ,  dit- 
on  ,  la  gravure  en  dessin ,  que  d'autres 
attribuent  à  Demarteau  (  Voxjez  ce  nom). 
C'est  une  gravure  qui  imite  le  dessin  au 
crayon,  au  point  de  faire  illusion.  Quoi- 
qu'elle n'ait  rien  de  flatteur  à  l'œil ,  elle 
peut  servir  pour  mettre  sous  les  yeux 
des  élèves  d'excellens  modèles  à  étudier 
et  à  copier.  Cette  découverte ,  qu'on  lui 
a  disputée,  lui  valut  une  pension  de  GOO 
liv.  et  le  titre  de  graveur  des  dessins  du 
cabinet  du  roi.  Les  persécutions  que  l'en- 


FRA  467 

vie  lui  suscita  hâtèrent  sa  mort ,  arrivée 
en  1769.  C'était  un  homme  simple,  plus 
occupé  de  son  travail  que  de  ses  succès. 
Ses  principaux  ouvrages  sont  :  1°  un 
livre  à  dessiner.  2°  Le  recueil  des  châ- 
teaux que  le  roi  de  Pologne  occupait  en 
Lorraine  ,  graves  par  ordre  de  ce  monar- 
que. 3°  Le  corps  de  garde  ,  d'après  Van- 
loo.  \°  La  Ficrgc,  d'après  Vien.  5"  Les 
portraits  qui  accompagnent  l'Histoire 
Mes  philosophes  modernes  de  Saverien, 
Une  marche  de  cavalerie ,  d'après  Parro- 
cel,  supérieurement  gravée.  1°  Le  por- 
trait de  M.  Quesnajj  ,  estampe  unique  , 
dans  laquelle  la  taille-douce  ,  le  burin  , 
la  manière  noire  du  crayon ,  toutes  les 
façons  de  graver  sont  réunies. 

*  FRANÇOIS  (  Dom  Jean  ) ,  savant 
bénédictin  de  la  congrégation  de  St.- 
Vannes,  né  le  26  janvier  1722  ,  à  Acre- 
mont  ,  village  près  de  Bouillon ,  y  mourut 
le  22  avril  1791.  Il  avait  pris  l'habit  de 
son  ordre  à  l'abbaye  de  Beaulieu  en  Ar- 
gone ,  et  y  prononça  ses  vœux  à  l'âge  de 
1 7  ans.  Après  avoir  enseigné  la  théologie 
et  occupé  plusieurs  emplois  supérieurs 
de  sa  congrégation  il  devint  successive- 
ment prieur  de  l'abbaye  de  St.-Arnould; 
et  de  St.-Clément,  dans  la  ville  de  Metz. 
A  l'époque  de  la  révolution,  il  se  retira 
dans  le  hameau  qui  l'avait  vu  naître.  On 
lui  doit  1°  une  Histoire  de  Metz,  17  79 
et  années  suivantes  ,  4  vol.  in-4.  2"  Dic- 
tionnaire roman  ,  wallon  ,  celtique  et 
tudesque,  pour  servir  à  l'intelligence 
des  anciennes  lois  et  contrats ,  Bouillon, 
1777,  in-4.  3"  Bibliothèque  ge'ne'rnle  des 
e'crivains  de  l'ordre  de  St. -Benoît ,  pa- 
triarche des  moines  d^Occident,  conte- 
nant une  notice  exacte  des  ouvrages  de 
tout  genre  ,  composés  par  les  religieux, 
des  diverses  branches  ,  filiations  et  re- 
formes,  Bouillon  ,  1777  ,  4  vol.  in-4.  — ■ 
Il  y  a  eu  plusieurs  autres  bénédictins  cé- 
lèbres, du  même  nom  et  de  la  même 
congrégation,  entre  autres  dom  Claude 
Fraïsçois  ,  né  à  Paris  vers  1  559 ,  et  mort 
dans  l'abbaye  de  St. -Michel ,  le  1 0  août 
1632  ,  qui  fut  un  des  premiers  religieux 
de  la  réforme,  et  un  de  ceux  qui  contri- 
buèrent le  plus  à  son  établissement ,  et 
qui  fut  douze  fois  président  de  la  congre- 


468  FRA 

gation  ;  — Dom  Philippe  François  ,  ne  k 
Lunéville  en  1579,  auteur  de  plusieurs 
ouvrages  ascétiques  fort  en  usage  dans 
presque  toutes  les  maisons  de  son  ordre  : 
le  Guide  spirituel  pour  les  novices  ; 
les  Exercices  des  novices  ;  le  Noviciat 
des  be'nédictins  ;  la  Règle  de  S  t. -Benoît  ; 
V Occupation  journalière  des  religieux  ; 
Enseignement  tire'  de  la  règle  ,  etc. 

*  FRANÇOIS  (  Louis-Jean) ,  supérieur 
prêtre  de  la  congrégation  de  St. -Lazare, 
massacré  le  3  septembre  1*92  ,  dans  son 
séminaire  qui  avait  été  converti  en  prison. 
11  a  publié  plusieurs  écrits ,  où  il  manifes- 
tait son  opposition  aux  principes  des  no- 
vateurs ,  savoir  :  Opinion  sur  les  biens 
eccle'siastiques  ;  Point  de  de'mission  ; 
Jie'ponse  à  M.  Camus,  oii  il  vengeait 
l'orthodoxie  et  la  régularité  des  brefs  de 
Pie  YI ,  relatifs  à  la  constitution  civile  du 
cierge';  trois  lettres  sur  la  juridiction  épi- 
scopalc,  en  réfutation  des  écrits  schisma- 
tiques  de  Gratien,  usurpateur  du  siège 
métropolitain  de  Rouen  ;  Mon  apologie  ; 
excellent  ouvrage ,  où  il  démontrait  qu'on 
ne  pouvait  prêter  le  serment,  sans  embras- 
ser l'hérésie  et  créer  un  schisme  ;  Apologie 
du  veto,  apposé  par  le  roi  au  décret 
concernant  la  déportation  des  prêtres, 

FRANÇOIS,  sculpteur.  Foyez  Ques- 
Kov  ( François  du). 
FRANÇOIS  SONNIUS.  Voyez  So:«- 

MIUS. 

•  FRANÇOIS  DE  Nkufchatkau  (Nico- 
las-Louis, le  comte),  littérateur  et  homme 
d'état,  né  à  Neufchâtcau  en  Lorraine  le 
17  avril  1750,  d'un  père  qui  était  maître 
d'école  et  recteur  des  traites  foraines ,  se 
distingua  dans  les  premières  études  qu'il 
ât  chez  les  jésuites  de  son  lieu  natal.  Ses 
progrès  furent  même  si  rapides  et  si 
brillans  qu'à  l'âge  de  1 3  ans ,  il  publia 
un  recueil  de  poésies  qui  lui  ouvrit  deux 
ans  après,  en  1765,  les  portes  de  l'acadé- 
mie de  Dijon,  et  en  1767  celles  de  Lyon 
et  de  Marseille.  En  1766  il  avait  ajouté  à 
son  nom  de  François,  qui  est  très  commun 
dans  son  pays,  celui  de  Neufchâteau  qu'il 
fut  autorisé  à  conserver  par  un  arrêt  du 
parlement  de  Nancy  de  l'an  1777.  En 
17  76  il  acheta  la  charge  de  lieutenant- 
général  au  bailliage  de  Mirecourt.  On  dit , 


FRA 

mais  rien  n'est  moins  prouvé ,  qu'après 
avoir  terminé  ses  études  de  droit ,  il  avait 
obtenu  des  dispenses  d'âge  pour  être 
admis  en  qualité  d'avocat  au  parlement 
de  Reims ,  mais  qu'il  fut  rayé  bientôt 
après  de  la  liste  des  avocats,  parce  qu'il 
avait  reconnu  l'enfant  naturel  d'un  homme 
de  la  plus  haute  naissance,  ou  selon  d'au- 
tres, parce  qu'il  avait  épousé  la  nièce  de 
l'acteur  Prévîlle  ,  le  Roscius  de  ce  temps 
et  que  ce  ne  fut  qu'ensuite  qu'il  acheta 
sa  charge  de  lieutenant-général.  Cequ'ily 
a  de  bien  certain  et  ce  que  nous  pouvons 
affirmer,  c'est  qu'il  épousa  réellement  M"* 
Dubus,  nièce  de  Préville,  que  cette  union 
fut  de  comte  durée,  et  qu'il  s'unit  plus 
tard  avec  une  dame  de  Mirecoutt.  François 
de  Neufchâteau  toujours  adonné  à  la 
poésie  qu'il  cultivait  avec  passion  ,  fut 
nommé  subdélégué  de  l'intendant  de 
Lorraine  eu  1781  ,  et  l'année  suivante 
procureur-général  du  roi  au  conseil  sou- 
verain du  cap  français  dans  l'île  de  St.- 
Domingue  ;  nous  ne  pensons  point  qu'il 
eut  obtenu  cette  place,  s'il  eût  encourru, 
comme  on  le  dit,  la  dégradation  que 
quelques  biographes  lui  reprochent.  De 
retour  en  France  après  la  suppression  de 
son  emploi ,  il  perdit  dans  la  traversée 
ses  précieux  manuscrits,  parmi  lesquels 
se  trouvait  une  traduction  de  Roland 
le  furieux  qu'il  regretta  toujours.  Le  roi 
lui  conféra  en  17  88  le  titre  de  conseiller 
honoraire  au  conseil  supérieur  de  St.-Do- 
mingue.  Dèslorë  François  de  Neufchâteau 
se  livra  exclusivement  à  son  goût  pour  les 
lettres.  Cependant  il  fut  détourné  de  ses 
occupations  par  les  événemens  de  la  révo- 
lution dont  il  embrassa  tes  principes  avec 
ardeur.  Ce  fut  lui  qui  provoqua  à  Toul 
en  1 7  90  un  rassemblement  qui  fut  regardé 
comme  séditieux  :  arrêté  par  ordre  du 
lieutenant  du  roi ,  il  ne  tarda  pas  à  être 
remis  en  liberté.  Peu  de  temps  après , 
il  fut  nommé  successivement  juge  de 
paix  du  canton  de  Vicherey  ,  administra- 
teur du  dépaitement  des  Vosges,  et  enfîa 
député  à  l'Assemblée  législative.  Elu 
secrétaire  de  cette  assemblée,  le  3  octobre^ 
1791  ,  puis  président  le  26  décembre,  il, 
se  montra  pendant  toute  la  session  par- 
tisau  des  idées  révolutionnaires  ,  parla 


I 


FRA 

contre  les  prêtres  non  assermentés ,  pro- 
posa contre  eux  des  mesures  violentes , 
et  vota  la  vente  des  biens  nationaux  par 
petits  lots,  afin  que  l'intérêt  attachât  le 
peuple  à  la  cause  de  la  révolution.  Elu 
membre  de  Ja  Convention  ,  il  n'accepta 
point  celte  dcputation  :  mais  la  Conven- 
tion le  nomma  ministre  de  la  justice  , 
place  qu'il  refusa  pour  cause  de  santé. 
Toutefois  il  se  chargea  des  fonctions  depré- 
sidcnt  de  l'administration  départementale 
des  Vosges.  Il  avait  fait  représenter  en 
1703  sur  le  Théâtre  Français  la  pièce  inti- 
tulée Paméla  ou  la  vertu  récampcnsce  : 
quoique  cette  imitation  de  Goldoni  soit 
assez  froide ,  elle  eut  quelque  succès  : 
mais  le  parti  révolutionnaire  crut  y  voir 
des  principes  contraires  à  ses  opinions  : 
l'auteur  mis  en  prison  comme  suspect  de 
royalisme  ne  recouvra  sa  liberté  qu'après 
le  9  thermidor.  Alors  il  fut  nommé  juge 
au  tribunal  de  cassation  ,  puis  commis- 
saire du  Directoire  de  l'administration 
centrale  du  département  des  Vosges.  Le 
16  juillet  1797,  il  remplaça  Benezech 
au  ministère  de  l'intérieur,  et,  après  le 
18  fructidor,  il  arriva  au  Directoire  oîi  il 
succéda  à  Carnot.  Après  avoir  participé 
au  pouvoir  suprême  seulement  jusqu'au 
9  mai  1798  ,  il  reprit  le  portefeuille  de 
l'intérieur  qu'il  conserva  jusqu'en  1799  , 
époque  où  il  eut  Quinette  pour  succes- 
seur. Pendant  son  second  ministère  , 
Neufchâleau  fut  en  butte  à  bien  des  ac- 
cusations :  d'abord ,  à  la  suite  d'une  in- 
struction dans  laquelle  il  recommandait 
de  poursuivre  les  royalistes  et  les  terro- 
ristes ,  on  lui  reprocha  au  conseil  des 
Anciens  et  à  celui  des  Cinq  cents  d'avoir 
porté  atteinte  à  la  souveraineté  du  peuple. 
Quelque  temps  après  on  lui  reprocha 
encore  de  corrompre  l'esprit  public  en 
faisant  représenter  des  pièces  anti  civi- 
ques, et  d'employer  même  à  cet  eifet  les 
fonds  de  son  département.  Il  ne  remplis- 
sait aucune  fonction ,  lorsque  la  journée 
du  18  brumaire  vint  créer  des  consuls 
à  la  place  des  directeurs.  Nommé  ensuite 
sénateur ,  grand  officier  de  la  Légion 
d'honneur  (  1804  )  ,  grand  cordon  du 
même  ordre  ,  comte  de  l'empire  ,  secré- 
taire du  Sénat,  président  annuel  du  même 


FRA  469 

corps  ,  il  fut  chargé  dans  plusieurs  cir- 
constances de  complimenter  Buonaparte. 
Lorsque  celui-ci  prit  la  couronne,  Ncufchâ- 
teau  lui  adressa  un  discours  dans  lequel 
on  remarqua  ces  paroles  qui  le  terminè- 
rent :  que  Dieu  protégeait  la  France  , 
puisqu'il^  avait  cvéé  Buonaparte  pour 
elle.  «  Soyez  long-temps  vous-même ,  lui 
»  dit-il,  vous  n'aurez  point  eu  de  modèle , 
»  et  vous  en  servirez  toujours.  »  Sans 
être  les  admirateurs  passionnés  du  grand 
homme  qui  tint  en  main  pendant  quelque 
temps  les  rênes  de  la  France  ,  nous  di- 
rons qu'il  y  avait  quelque  chose  de  vrai 
dans  les  phrases  emphatiques  de  Neufchâ- 
teau  :  la  forme  exagérée  dont  il  se  servit 
prêta  seule  au  ridicule ,  et  d'ailleurs  les 
esprits  n'avaient  point  encore  mesuré 
toute  la  portée  du  génie  qui  présidait  aux 
destinées  de  notre  pays;  et  c'est  nous, 
pour  qui  ce  règne  est  déjà  de  l'histoire, 
qui  pouvons  mieux  qu'on  ne  le  faisait  il 
y  a  15  ou  20  ans,  juger  ce  grand  per- 
sonnage dont  la  vie  ne  fut  pas  exempte 
de  fautes  ni  même  de  crimes  ,  mais  qui 
connaissait  nu  suprême  degré  l'art  du  pou- 
voir et  le  talent  de  rétablir  l'ordre.  Foyez 
l'article  Buonaparte.  Xe  reprochons  donc 
point  avec  trop  d'amertume  les  louanges 
que  Neufchâteau  accorda  ,  non  au  vain- 
queur de  tant  de  peuples  qu'il  poursui- 
vait de  sa  haine  ou  de  son  ambition ,  mais 
au  grand  homme  qui  écrasa  la  révolu- 
tion ,  fit  succéder  l'ordre  à  l'anarchie,  et 
permit  enfin  que  les  hommes  religieux 
pussent  adresser  au  ciel  leurs  communes 
prières.  Désigné  dans  le  mois  de  novem- 
bre 1806  pour  féliciter  Buonaparte  sur 
ses  nouvelles  vicfoires  en  Prusse  ,  il  fut 
de  la  députation  qui  rapporta  à  Paris  340 
drapeaux  enlevés  aux  Prussiens  ,  avec 
l'épée,  l'écharpe,  le  hausse-col  et  le  cor- 
don du  grand  Frédéric  ,  trophées  qui  fu- 
rent long-temps  suspendus  à  la  voûte  de 
l'église  des  Invalides.  Depuis  cette  époque 
jusqu'en  1814,  François  de  Neuchâteau 
s'occupa  d'agriculture  et  de  poésie.  Entiè- 
rement oublié  par  les  Bourbons,  et  même 
par  Buonaparte  pendant  les  cent  jours,  il 
ne  fit  partie  depuis  1814  d'aucune  assem- 
blée publique.  Pour  résumer  sa  vie  publi- 
qjie,  nous  dirons  qu'après  avoir  eu  des  dis- 


470  FIIA 

positions  précoces  et  obtenu  des  places 
importantes  avant  la  révolution,  il  fut  par- 
tisan des  idées  révolutionnaires,  mais  non 
un  terroriste  :quependant  son  administra- 
tion, il  protégea  les  sciences  et  les  arts, 
donna  l'idée  de  faire  exposer  en  public  les 
produits  de  l'industrie  française,  et  envoya 
dans  les  départemens  une  foule  de  livres 
qui  pouvaient  contribuer  à1a  propagation 
de  l'instruction.  Il  fut  l'admirateur  exa- 
géré de  Buonaparte,  et  ses  coraplimens 
étaient  trop  souvent  fades ,  à  force  d'èlre 
trop  mielleusement  préparcs.  Comme 
littérateur  et  comme  poète  il  publia  in- 
dépendamment du  recueil  de  poésies  ei 
de  la  pièce  de  Pamc'la  dont  nous  avons 
parlé  ,  une  hymne  à  la  liberté  qv^W  com- 
posa en  prison ,  ainsi  qu'une /jr/ère  à  VE- 
/re,ÇH/?re/neoiisontexpnmcsd'honorabIes 
sentimens.  Après  la  victoire  d'Austerlitz, 
il  fit  paraître  une  Ode  a  CUo  qu'il  intitula 
les  Quatre  dynasties  ou  l'histoire  de 
France.  Membre  de  la  société  d'agricul- 
ture de  Paris ,  il  offrit  au  roi  Louis  XVIH 
en  1 8 1 4  les  Mémoires  que  cette  compa- 
gnie avait  composés  depuis  19  ans.  Il 
était  aussi  membre  de  l'académie  fran- 
çaise depuis  la  création  de  l'institut,  et 
à  plusieurs  reprises  il  a  fait  des  lectu- 
res intéressantes  dans  le  sein  de  ce  corps 
savant.  Après  avoir  consacré  toute  sa  vie 
à  l'étude  et  à  l'administration ,  il  mourut 
le  8  janvier  1828.  Le  catalogue  de  ses 
productions  se  compose  des  ouvrages 
suivans  que  nous  donnons  dans  l'ordre 
chronologique  de  leurs  publications  : 
i"  Poésies  diverses,  17C5,  in-12  ;  2" 
Pièces  fugitives  de  François  de  Neuf- 
château  ,  176G,  in-12-,  3''  Ode  sur  les 
parlemens  ,  1771  ,  in-8  ;  4"  le  Mois 
il' Auguste  ,  épître  à  Foliaire  ,  1 7  7  4  ; 
S°  Discours  sur  la  manière  de  lire  les 
vers,  1775,  in-12;  6"  Anthologie  mo- 
rale, 1784,  in-16;  V  Recueilauthentigue 
des  anciennes  ordonnances  de  Lorraine  , 
J  784  ,  2  vol.  in-8  ;  8°  les  Etudes  du  ma- 
gistrat au  Cap-Français ,  178C  ;  9°  l'Ori- 
gine ancienne  des  principes  modernes 
ou  les  décrets  constitutionnels  conférés 
avec  les  maximes  des  sages  de  l'anti- 
quité, 1791  ,  in-8  ;  10"  les  Lectures  du 
citoyen,  1792  ;  11°  Paméla,  comédie  en 


FRA 

i  actes  et  en  vers  ,  1793  ,  in-8  ;  12"»  des 
Améliorations  dont  la  paix  d^it  être 
l'époque,  1797  ,  in-8  ;  13"  /<?^  Vosges , 
poème,  1796,  in '8  ,  édition  1797;  14» 
l'Institution  des  en  fans  ou  Conseils  d'fin 
père  à  son  fils ,  imités  des  vers  latins  de 
Muret ,  1798  ,  in-8  ;  15°  Méthode  pra- 
tique de  lecture,  1  799  ,  in-8  ;  16°  le  Con- 
servateur ou  Recueil  de  morceaux  choisis 
d'histoire ,  de  politique ,  de  littérature 
et  de  philosophie ,  1800,  2  vol.  in-8  j 
1 7°  Lettres  si.r  le  Robinier,  1 803 ,  in- 1 2  ; 
1 8°  Tableau  des  mces  que  se  propose  la 
politique  anglaise  dans  toutes  les  parties 
du  monde,  1804,  in-8  ;  19°  Histoire  de 
l'occupation  de  ta  Bavière  par  les  Autri- 
chiens ,  en  1778  et  1779,  etc.,  1806, 
in-8  ;  20"  Foyage  agronomique  dans  la 
sénatorerie  de  Dijon,  1806,  in-4  ;  21** 
VArt  de  multiplier  les  grains ,  1810, 
in-8  ;  22°  Fables  et  Contes  en  vers , 
suivis  des  poèmes  de  la  Lupiade  et  de  la 
Fulpéide,  181  4  ,  2  vol.  in-12  ;  23"  Let- 
tre à  M.  Suard  sitr  sa  nouvelle  édition 
de  la  traduction  de  l'histoire  de  Charles- 
Quint  et  sur  quelques  oublis  de  Robert- 
son  ,  1817,  in-8;  24°  Supplément  au 
mémoire  de  M.  Parmentier  sur  le  maïs , 
1817,  in-8  ;  25°  les  Tropes  ou  les  figures 
de  mots  ,  poème  en  4  chants  ;  26°  les 
Trois  nuits  d'un  Goutteux ,  poème  en 
trois  chants  ,  1819,  in-8  ;  27"  Esprit  du 
grand  Corneille  ou  Extrait  raisonné  de 
ceux  des  ouvrages  de  P.  Corneille  qui 
ne  font  pas  partie  du  recueil  de  ses 
chefs-d'œuvre,  1819,  in-S  ,  formant  le 
tom.  45  de  la  Collection  des  meilleurs 
ouvrages  de  la  langue  française  ;  28" 
fine  nouvelle  édition  des  Lettres  pro- 
vinciales, augmentée,  1822  ,  2  vol.  in  8  ; 
29°  Examen  de  la  question  de  savoir  si 
T^esage  est  l'auteur  de  Gilblas  ou  s'il  la 
pris  de  l'espagnol,  imprimé  dans  une 
nouvelle  édition  de  Gilblas ,  1 820  ,  3  vol. 
in-8  ;  30^  Introduction  aux  Pensées  de 
Biaise  Pascal ,  en  tète  d'une  édition  de 
cet  ouvrage,  1821  ,  in-8;  31°  l'Lisfitu- 
iion  des  cnfans  ,  nouvelle  édition  ,  1824- 
1828  ,  in-8  et  in-12  ;  32"  Mémoires  sur 
la  manière  d'enseigner  et  d'étudier  l'agri- 
culture ,  etc.  (  en  1801  ,  à  la  sociélé 
d'agriculture  delà  Seine  ),  1828  ,broch. 


FRA 

in-8.  Il  coopéra  au  Dictionnaire  d'agri- 
■culture  pratique,  1828,  2  vol.  in-8; 
l'introduction  est  de  François  de  Neuf- 
château.  Il  a  composé  en  outre  plusieurs 
Rapports ,  Lettres  ,  Mémoires  et  autres 
pièces  insérées  dans  divers  journaux.  Un 
anonyme  a  publié  :  Essai  historique  sur 
la  vifi  et  les  c'crits  de  François  de  Ncuf- 
château,  entremêle' de  quelques  conseils 
qiion  lui  adressa  sur  son  ministère  , 
1799,  in-8. 

FRANÇOISE  (Sainte) ,  dame  romaine, 
née  en  1384  ,  également  respectable  par 
sa  piété  et  sa  charité,  mariée  dès  l'âge 
de  1 2  ans  à  Laurent  Ponziani ,  morte  en 
1440,  à  5G  ans,  fonda  en  1425  le  monas- 
tère des  Oblales ,  appelées  aussi  Colla- 
Unes,  à  cause  du  quartier  de  Rome,  où 
elles  furent  transférées  en  1463.  «A  toutes 
»  les  vertus  de  la  femme  forte ,  dit  un 
i>  hagiographe,  à  la  prévoyance,  à  l'ac- 
«  tivité ,  au  courage,  elle  joignait  dans 
»  un  degré  rare  toutes  celles  que  le 
»  christianisme  a  portées  si  haut ,  la  dou- 
»  ceur,  la  charité,  la  patience,  l'humi- 
»  lité.  On  voyait  cette  dame  illustre  por- 
»  ter  sur  ses  épaules  ce  qui  était  néces- 
«  saire  à  l'entielien  des  pauvres  et  de  sa 
»  communauté ,  ou  conduire  à  travers  la 
>i  ville  l'animal  qui  porlait  ces  provi- 
«  sions.  On  en  raconte  des  choses  fort  ex- 
»  traordinaires,  que  tant  de  sainteté  rend 
»  très  croyables ,  indépendamment  des 
»  témoignages  sur  lesquels  elles  sont  ap- 
»  puyées.  »  Paul  Y  la  canonisa  ;  on  fait 
sa  fêle  le  9  mars. 

FRANÇOISE,  femme  de  Pierre  II, 
duc  de  Bretagne,  fille  de  Louis  d'Am- 
boise ,  vicomte  de  Thouars ,  naquit  en 
1 427 .  Elle  eut  beaucoup  à  souffrir  de  l'hu- 
meur sombre  et  chagrine  de  son  mari , 
qui  en  vint  jusqu'à  la  frapper  :  outrage  , 
dont  elle  fut  si  affligée  qu'elle  en  tomba 
malade.  Le  duc  la  voyant  à  l'extrémité 
lui  demanda  pardon ,  et  vécut  depuis  avec 
elle  dans  une  grande  union.  Elle  fut  sa 
principale  garde  dans  tout  le  temps  de 
sa  maladie  ;  mais  ni  ses  prières  ,  ni  ses 
soins  n'empêchèrent  point  qu'il  ne  mou- 
rût. Il  dit  avant  d'expirer  «  qu'il  laissait 
j»  son  épouse  aussi  pure,  qu'il  l'avait  re- 
»  çue.  »  Les  parcQs  de  cette  princesse , 


FRÀ 


47  É 


et  le  roi  Louis  XI ,  employèrent  inutile- 
ment les  prières ,  la  ruse  et  la  force  pour 
l'obliger  à  épouser  le  duc  de  Savoie ,  qui 
la  désirait  ardemment  à  cause  de  sa  vertu. 
Elle  se  fit  carmélite  eu  1467  ,  et  mourut 
le  26  février  1486  ,  victime  de  sa  charité. 
Elle  gagna  sa  dernière  maladie  auprès 
d'une  religieuse,  qu'elle  secourut  jusqu'à 
la  mort.  L'abbé  Barrin  a  écrit  sa  P^ie , 
Bruxelles,  1704  ,  in-12. 

Î^RANCOLINI  (Balthasar)  naquit  à 
Fermo ,  dans  la  Marche  d'Aucône ,  ea 
1650,  se  fit  jésuite  en  1666,  enseigna 
avec  distinction  la  philosophie  et  la  théo- 
logie à  Rome,  et  mourut  au  collège  ro- 
main le  10  février  1709,  avec  la  répu- 
tation d'un  religieux  vertueux  et  savant- 
Son  livre  intitulé  Clericus  romanus  con- 
tra nimium  rigorem  munitus ,  imprimé 
à  Rome  avec  les  approbations  ordinaires 
en  1705  ,  et  ensuite  à  Munich  en  1707  , 
a  pour  objet  de  réfuter  les  reproches  des 
jansénistes ,  et  surtout  du  docteur  Ar- 
nauld ,  contre  la  manière  dont  on  admi- 
nistre dans  l'Eglise  le  sacrement  de  péni- 
tence. 

FRANCOWITZ  (  Mathias  )  ,  né  à  AI- 
bona  en  Illyrie,  le  3  mars  1521 ,  est  con- 
nu parmi  les  théologiens  protestans  sous 
le  nom  de  Flaccus  Illyricus.  Luther  eut 
en  lui  un  disciple  ardent  :  ce  fanatique 
s'éleva  avec  force  contre  l'intérim  de 
Charles-Quint ,  et  contre  les  projets  de 
pacification.  Il  eut  beaucoup  de  part  à  la 
composition  des  centuries  de  Magde~ 
bourg  [Voyez  Judex).  Nous  avons  de 
lui  \°  Le  Catalogue  des  témoinsde  la  vé- 
rité',  Francfort,  1672,  in-4.  (  VoycTi 
Eiseingren).  2"  Missa  latina  antiqua^ 
in-8,  Strasbourg,  1557.  La  rareté  de  ce 
livre  l'a  rendu  très  cher.  Cette  liturgie 
contient  la  foi  et  les  usages  anciens  de 
l'église  romaine.  Les  protestans  croyaient 
qu'elle  serait  un  témoignage  contre  les 
catholiques  ;  mais  s'étant  aperçus  qu'elle 
fournissait  des  armes  à  leurs  adversaires  , 
ils  n'oublièrent  rien  pour  en  supprimer 
tous  les  exemplaires;  et  c'est  la  cause  de 
leur  rareté.  On  la  trouve  cependant  en 
entier  dans  les  Annales  du  Père  Le  Cointe, 
et  dans  les  Liturgies  du  cardinal  Bona. 
Francowitz  a  donné  un  Jj>pendix  à  sa 


t^2  FRA 

Missa  latina  dans  son  (^dilion  de  Sulpi- 
ce-Sévèrc ,  Bâle ,  1 65C  ,  in-8.  On  a  encore 
de  lui  une  foule  de  Traites  violens  con- 
tre l'église  romaine.  Il  veut  y  prouver 
«  que  la  papauté  est  une  invention  du 
M  diable,  et  que  le  pape  est  un  diable 
)>  lui'-même.  »  Tous  les  ouvrages  de  cet 
enthousiaste  furieux  sont  peu  communs. 
Ceux  qui  sont  curieux  de  sottises  et  de 
pauvretés  peuvent  en  voir  le  catalogue 
dans  le  tome  24  des  Mémoires  de  Niccron. 
Il  mourut  à  Francfort -sur- le -Mein  en 
167  5,  à  55  ans.  (Ritter  a  publié  une  no- 
tice sur  la  vie  et  les  ouvrages  de  Flaccùs 
Illyricus,  Francfort,  1723  et  1725,  in-4.) 

FRAKCUS  (  Sébastien  ) ,  fameux  ana- 
baptiste du  16"  siècle,  publia  plusieurs 
écrits  remplis  d'erreurs  et  de  fanatisme. 
Les  théologiens  de  la  confession  d'Augs- 
bourg  ,  assemblés  à  Smalcalde  en  1540  , 
chargèrent  Mélanchthon  de  le  réfuter. 
Francus  publia  encore  un  livre  très  sati- 
rique contre  les  femmes  ;  il  fut  réfuté  par 
Jean  Freherus  et  par  Luther ,  qui  se  char- 
gea volontiers  de  la  cause  du  sexe. 

FRANGIPANI  (  François-Christophe, 
comte  de  ) ,  beau-frère  du  comte  de  Serin, 
conspira  avec  lui  contre  l'empereur  Léo- 
pold ,  et  fut  un  des  principaux  chefs  de 
la  révolte  des  Hongrois,  qui  commença 
en  1G65.  Les  points  capitaux  de  l'accusa- 
tion formée  contre  Frangipani ,  n'étant 
que  trop  prouvés  ,  il  fut  condamné  à  avoir 
le  poing  droit  coupé  et  la  tête  tranchée. 
Tous  ses  biens  furent  confisqués  au  profit 
de  l'empereur,  et  sa  famille  dégradée  de 
noblesse  ;  l'exécution  se  fit  publiquement 
dans  la  ville  de  Neustadt ,  oii  il  était  pri- 
sonnier, le  30  avril  1C71.  Frangipani 
mourut  avec  beaucoup  de  résignation  et 
de  constance. 

*  FRANK  (  Jean-Pierre  ) ,  célèbre  mé- 
decin allemand  ,  né  d'une  famille  origi- 
naire de  France ,  à  Rodalben ,  dans  le 
grand-duché  de  Bade,  le  17  mars  1745. 
Il  fit  ses  éludes  à  Heidelbcrg  oii  il  apprit 
l'anatomie  et  la  médecine ,  puis  à  Pont- 
à-Mousson ,  oii  il  reçut  le  grade  de  doc- 
leur.  Après  avoir  exercé  avec  distinction 
sa  profession,  en  Lorraine,  à  Bilche,  où 
il  demeura  quelque  temps,  et  dans  plu- 
sieurs autres   endroits  de   l'Europe,  le 


MA 

prince  évèque  de  Spire  le  nomma  son 
médecin ,  et ,  en  1 7  84  ,  il  obtint  la  chaire 
de  médecine  à  l'université  de  Goltingue , 
avec  le  titre  de  conseiller  de  cour  du  roi 
d'Angleterre.  Etant  allé,  en  1785,  à 
Vienne,  il  y  fit  de  si  belles  cures  que 
l'empereur  le  créa  conseiller  impérial  et 
royal  du  gouvernement ,  et  le  nomma 
professeur  de  médecine  clinique  à  l'uni- 
versité de  Pavie ,  oîi  il  succéda  au  célèbre 
Tissot.  Ses  succès  nombreux  ayant  étendu 
au  loin  sa  réputation  ,  l'empereur  le  rap- 
pela à  Vienne ,  et  lui  confia  la  direction 
du  grand  hôpital  de  cette  ville ,  dans  l'u- 
niversité de  laquelle  il  occupa  le  même 
emploi  qu'il  avait  à  Pavie.  Sur  l'invita- 
tion de  l'empereur  de  Russie  (  Paul  I*''  ) , 
et  à  la  suite  de  quelques  chagrins,  il  se 
rendit  à  Pétcrsbourg  ,  en  1794.  D'abord 
professeur  de  clinique  à  l'université  de 
Wilna,  il  le  fut  ensuite  à  celle  de  Pétcrs- 
bourg ;  peu  de  temps  après,  il  reçut  le 
titre  de  médecin  de  l'empereur,  ou  ar- 
chiâtre  impérial,  avec  le  grade  de  géné- 
ral-major. Il  resta  1 4  ans  en  Russie.  Des 
raisons  de  santé  le  décidèrent  à  revenir  à 
Vienne  :  avant  son  départ  l'empereur 
Alexandre  lui  donna  le  brevet  d'une  pen- 
sion de  3,000  roubles  par  an.  Le  docteur 
Frank  est  mort  dans  cette  ville ,  en  dé- 
cembre 1821  ,  âgé  de  80  ans.  Les  grains 
de  santé  du  docteur  Frank  ont  eu  beau- 
coup de  succès  et  l'ont  fait  connaître  par- 
tout. Il  est  auteur  de  plusieurs  ouvrages , 
dont  les  plus  importans  sont  1"  Epistola 
invitatoria  ad  eruditos  de  communican- 
dis  qiice  ad  poUliam  medicam  spectant , 
principum  et  legislatorum  decretis  , 
Manheim,  177G,  in-8;  2°  Système  sur  j 
la  police  me'dicale  (  en  allemand  ),  ibid. ,  | 
4  vol.  in-8  ,  1 777  ,  1785  ;  3°  Plan  d'école 
clinique ,  ou  Méthode  d' enseigner  la  pra- 
tique de  la  médecine  dans  un  hôpital 
académique  (  en  français  ) ,  Vienne,  1 7  90, 
in-8.  Le  stile  de  cet  ouvrage  est  peitt 
correct  :  Frank  maniait  avec  plus  de  su^H 
ces  les  langues  allemande  et  latine,  dans 
lesquelles  son  stile  peut  passer  pour  clas- 
sique. 4**  De  curandis  hominum  morbis , 
Manheim  ,  17  92,  1 807  ,  G  vol,  in-8.  Il  a 
laissé  aussi  un  opuscule  sur  sa  vie,  et 
qui  a  pour  titre  :  5"  Biograpliie  du  D 


MA 

Scan  '  Pierre  Frank  ,  écrite  par  lui- 
même ,  etc.  Sou  fils  (Joseph)  suit  avec 
honneur  la  profession  de  son  père,  et  est 
auteur  de  plusieurs  ouvrages  très  estimés 
sur  la  médecine. 

*  FRANKLIN  (Eléonore-Anne,  plus 
connue  sous  le  nom  de  miss  Porden),  na- 
quit en  1795,  et  eut  pour  père  William 
Porden ,  architecte.  De  bonne  heure  elle 
montra  du  goût  pour  la  littérature  et 
surtout  pour  la  poésie  qu'elle  cultiva  avec 
passion.  Dès  l'âge  de  17  ans  elle  fit  pa- 
raître un  poème  badin  intitulé  les  Voiles, 
qu'elle  augmenta  dans  la  suite  et  publia 
eu  1815,  en  six  chants.  Trois  ans  après 
elle  donna  un  autre  petit  poème  qu'elle 
intitula  V E xpddition  arctique ,  et  qui  lui 
valut  la  connaissance  du  capitaine Trank- 
lin ,  célèbre  par  les  voyages  de  décou- 
verte qu'il  a  faits  dans  le  nord  de  l'Amé- 
rique. L'admiration  que  ce  marin  éprouva 
pour  le  talent  de  miss  Porden  et  peut-être 
aussi  la  reconnaissance  qu'il  éprouvait 
pour  elle ,  le  déterminèrent  à  demander 
sa  main,  et  il  l'épousa  dans  le  mois 
d'août  1823.  Cette  union  ne  fut  pas  de 
longue  durée  ;  M™^  Franklin  mourut  le 
22  février  1825,  au  moment  où  son  mari 
venait  de  partir  pbur  son  second  voyage. 
Un  an  avant  son  mariage  elle  avait  pu- 
blié encore  un  poème  épique  sous  ce 
titre  :  Cœur-de-Lion  ou  la  troisième 
croisade. 

FRANKLIN  (Benjamin).  F.Franck- 
un. 

FRANTZIUS  ou  Frantz  (Wolfrang), 
théologien  luthérien  ,  né  en  1564  à  Pla- 
wen  dans  le  Voigtland,  devint  professeur 
en  histoire  ,  puis  en  théologie  à  Wittem- 
berg,  où  il  mourut  en  1020.  On  a  de  lui 
1°  Animaliim  hisioria  sacra,  1G65, 
in-12,  Dresde,  1687,  2  vol.  in-8,  ou- 
vrage recherché  et  curieux.  2°  Traclaius 
de  intcrprctatione  sacrarum  scriptura- 
rum,  1634,  in-4 ,  et  d'autres  ouvrages, 
où,  si  l'on  excepte  quelques  préjugés  de 
secte,  il  y  a  des  choses  utiles  à  recueillir. 
Le  célèbre  Schcuchzer  a  consulté  l'His- 
toria  animalium  pour  sa  Physica  sacra. 

FRANZ  (Joseph),  jésuite,  naquit  à 
Linlz  en  1703,  et  fut  professeur  de  phy- 
sique   expérimentale    à    l'académie   de 
V. 


PRA  4-73 

Vienne ,  et  puis  directeur  de  celle  des 
langues  orientales,  fondée  en  1754,  dans 
la  même  ville ,  par  Marie-Thérèse.  Le  Père 
Franz  était  généralement  estimé ,  et  pour 
ses  talens ,  et  pour  la  pureté  de  ses  mœurs. 
On  a  de  lui  1°  Dissertatio  de  natura  elcc- 
iri,  Vienne  ,1751,  in-4  ;  2°  Jeu  de  cartes 
géographiques ,  ibid.,  1759.  On  lui  attri- 
bue un  petit  drame  intitulé  Godefroi  de. 
Bouillon ,  représenté  par  les  élèves  des 
académies  des  langues  orientales,  devant 
leurs  augustes  fondateurs,  le  1 8  décembre 
1757  ,  Vienne,  1761  ,  in-8.  Les  interlo- 
cuteurs s'expriment  dans  les  langues  tur- 
que et  française  ;  cette  dernière  est  écrite 
avec  une  grande  pureté.  Le  Père  Franz 
est  mort  le  13  avril  1 776  ,  trois  ans  après 
la  suppression  de  son  ordre. 

FRA-PAOLO.  Foyez  Sarpi  (Paul). 

FRASSEN  (  Claude  ) ,  né  près  de  .Pé- 
ronne  en  Picardie  en  1620,  définiteur- 
général  de  l'observance  de  St. -François  , 
docteur  de  Sorbonne  et  gardien  de  Paris, 
mourut  en  1 7 1 1 ,  dans  la  9 1  *  année  de  son 
âge.  Ce  savant  religieux  avait  paru  avec 
distinction  dans  le  chapitre  général  de 
son  ordre,  tenu  à  Tolède  en  1682,  et 
dans  celui  de  Rome  en  1688.  A  l'excep- 
tion de  ces  deux  voyages ,  il  vécut  tou- 
jours dans  une  exacte  retraite.  Les  prin- 
cipaux fruits  de  ses  veilles  sont  1°  une 
Philosophie  imprimée  plusieurs  fois  en  2 
vol.  in-4.  2°  Une  Théologie,  en  4  vol. 
iu-folio  ,  Paris,  1672.  Elle  vaut  mieux 
que  sa  Philosophie ,  qui  était  bonne  ce- 
pendant pour  son  temps  :  la  logique ,  la 
métaphysique  et  la  morale  y  sont  très 
bien  traités;  il  y  a ,  comme  c'était  alors 
l'usage ,  plusieurs  questions  plus  subtiles 
qu'importantes  ,  mais  qui  servent  à  ren- 
dre l'esprit  juste  (  voyez  Duns  ,  Occam  ). 
3°  Disquisitiones  biblicœ  ,  Paris  ,J682  , 
en  2  vol.  in-4 ,  le  premier  sur  la  Bible  en 
général ,  le  deuxième  sur  le  Pentateuque, 
réimprimés  avec  des  augmentations,  a. 
Lucques,  1764,  en  2  vol.  in- fol.  L'éru-  . 
dition  brille  dans  cet  ouvrage  ;  mais  on 
y  désirerait  plus  de  méthode  et  de  préci- 
sion. On  lui  reproche  d'avoir  pillé  dans 
la  Démonstration  évangélique  de  M. 
Huet ,  et  d'avoir  masqué  son  larcin  d'une 
ruse  assez  commune  aux  plagiaires.  11 
3o.. 


4^4 


VM 


critiqua  d'une  façon  peu  décente  l'illustre 
prëlat,  à  l'instigation  de  Louis  Ferrand  ; 
mais  dans  la  suite  il  en  demanda  pardon 
à  l'oftensé. 

FRATTA  (  Jean  ) ,  poète  italien  d'une 
famille  noble  de  Vérone ,  vivait  dans  le 
16^  siècle  :  il  laissa  des  c'glogucs ,  et  un 
poème  héroïque  intitulé  la  Maltéide , 
dont  Le  Tasse  faisait  cas.  Ce  poème  fut 
imprimé  à  Venise  en  1 596  ,  in-4 ,  du 
vivant  de  son  auteur. 

*  FRAUNHOFER  (  Joseph) ,  opticien 
célèbre,  né  à  Straubing  en  1787  ,  mort 
à  Munich  en  1 826 ,  fut  obligé  pour  ac- 
quérir l'instruction  à  laquelle  il  doit  sa 
réputation ,  de  vaincre  les  plus  grands  ob- 
stacles que  puisse  rencontrer  un  homme 
dans  la  carrière  des  sciences.  Orphelin  à 
1 1  ans ,  attaché  dès  l'enfance  à  un  travail 
manuel ,  mis  en  apprentissage  chez  un 
maître  très  exigeant,  il  manqua  de  tous 
les  secours ,  même  pour  apprendre  à  lire 
et  à  écrire  ,  et  pourtant  il  apprit.  Retiré 
comme  par  miracle  de  dessous  les  ruines 
de  la  maison  qu'il  habitait  et  qui  s'était 
écroulée  subitement,  il  devint  l'objet 
d'abord  de  la  curiosité  puis  de  l'intérêt 
de  plusieurs  personnages  de  mérite , 
parmi  lesquels  on  aime  à  citer  Maximi- 
lien-Joseph,  roi  de  Bavière.  Ce  ne  fut 
qu'avec  discrétion  que  le  jeune  Fraun- 
hofer  usa  des  secours  qu'on  lui  accorda , 
et  on  le  vit  encore  le  jour  dans  un  atelier 
.ses  outils  à  la  main ,  la  nuit  dans  un  ca- 
binet sans  fenêtre  où  il  lui  était  interdit 
d'avoir  de  la  lumière  :  il  vint  à  bout  d'ap- 
prendre les  mathématiques.  A  l'âge  de 
20  ans  il  fut  reçu  dans  le  bel  établisse- 
ment créé  par  MM.  Reichenbach  et  Utz- 
schneider  pour  la  confection  des  instru- 
mens  de  mathématiques  et  d'optique  : 
dès  lors  il  commença  la  carrière  qu'il  a 
parcourue  avec  tant  de  succès.  En  1823 
il  fut  nommé  conservateur  du  cabinet  de 
physique  de  l'académie  de  Munich  dont 
il  était  déjà  membre.  Associé  à  plusieurs 
académies ,  notamment  à  VInstitution 
astronomique  cC Edimbourg  et  à  l' Univcr- 
sitt  d'Erlnngen ,  il  reçut  du  roi  de  Ba- 
vière la  décoration  de  l'ordre  du  mérite 
civil ,  et  du  roi  de  Danemark ,  celle  de 
l'ordre  de  Danebrog.  Nous  terminons  en 


PRË 

disant  pour  la  gloire  de  Fraunhofer  que 
le  célèbre  télescope  de  l'université  de 
Dorpat  est  son  ouvrage. 

FRAVITA.   Voyez  Flavita. 

FREARD  DU  CASTEL  (  Raoul- 
Adrien  ) ,  né  à  Bayeux  ,  réunissait  aux 
vertus  sociales  les  qualités  d'un  homme 
de  bien.  Ses  momens  de  loisir  étaient 
partagés  entre  l'étude  de  la  géométrie  et 
la  culture  des  fleuré.  Il  mourut  en  1766  , 
après  avoir  donné  :  1°  EUmens  de  la 
géométrie  dEuclide ,  Paris,  1 7 40,  in-1 2  ; 
2°  V Ecole  du  jardinier  fleuriste ,  ibid. , 
1T64,  in-12.  Ces  ouvrages  sont  faible- 
ment écrits. 

FRÉDEGAIRE,  le  plus  ancien  histo- 
rien français  depuis  Grégoire  de  Tours , 
est  appelé  le  scolastique,  parce  qu'autre- 
fois on  honorait  de  ce  nom  les  hommes 
qui  se  distinguaient  par  leurs  écrits.  Il 
composa,  par  ordre  de  Childebrand  frère 
de  Charles  Martel ,  une  chronique  ,  qu'on 
trouve  dans  le  recueil  des  historiens  de 
France  de  Duchesne  et  de  Don  Bouquet. 
Elle  va  jusqu'en  641.  Son  stile  est  bar- 
bare ;  il  manque  de  construction  et  d'ar- 
rangement. Il  coule  d'ailleurs  trop  rapi- 
dement sur  des  événemens  intéressans. 
Cependant ,  tout  abrégé  qu'il  est ,  il  faut 
absolument  recourir  à  lui  pour  cette 
partie  de  l'histoire  de  France.  (  Sa  Chro- 
nique est  divisée  en  6  livres  dont  les  trois 
premiers  ne  sont  qu'une  compilation  des 
chroniques  précédemment  écrites  par  Ju- 
les-Africain, Eusèbe,saint  Jérôme  et  Idace; 
le  i"  est  un  abrégé  de  saint  Grégoire  de 
Tours  ,  et  le  5«  renferme  la  continuation 
de  cette  histoire.  )  Cet  ouvrage  a  eu  des 
continuateurs  anonymes ,  qui  l'ont  con- 
duit jusqu'en  768.  (Il  a  été  imprimé  en 
forme  d'appendice  aux  OEuvres  de  Saint 
Grégoire  de  Tours,  Bâle,.1568  et  1610, 
in-8  ,  sous  ce  titre  :  Fredegarii  Scholas- 
tici  chronicon  quod  illc,  jubentc  Chil- 
debrando  comité  ,  Pipini  régis  patruo 
scripsit;  il  a  été  traduit  en  français  par 
l'abbé  de  Marollcs  et  M.  Guizot  (  Col- 
lection des  historiens  de  France  ).  On 
peut  consulter  sur  cet  ouvrage  la  disser- 
tation d'Adrien  de  Valois ,  de  Fredegario 
ejusque  opcribus ,  la  préface  de  D.  Rui" 
nart  en  tête  des  œuvres  de  Grégoire 


FRE 

Tours  ,  r/ùstoire  littéraire  de  France  de 
D.  Rivet,  tom.  3  ,  et  ï Apologie  de  l'his- 
toire de  Fre'degairc  par  l'abbé  de  Vertot , 
insérée  au  tome  1*""  des  Mémoires  de 
Vacadémie  des  Inscriptions.  ) 

FRÉDÉGO]NDE,femme  de  ChilpéricI, 
roi  de  France,  née  en  543  à  Avancourt 
en  Picardie,  d'une  famille  obscure,  entra 
d'abord  au  service  d'Audouaire  ou  Audo- 
vère ,  première  femme  de  ce  prince.  Elle 
employa  tout  son  esprit  et  toute  sa  beauté 
pour  la  lui  faire  répudier.  Chilpéric  prit 
une  seconde  femme  ;  Frédégonde  la  fit  as- 
sassiner, et  obtint  le  lit  et  le  trône  qu'elle 
occupait.  Ce  monstre  d'ambition  et  de 
cruauté  inspira  sou  mari ,  et  lui  fit  com- 
mettre une  foule  de  crimes.  Il  accabla 
d'impôts  SCS  sujets ,  et  fit  la  guerre  à  ses 
frères.  Frédégonde  seconda  ses  armes  par 
le  fer  et  le  poison.  Elle  fit  assassiner 
Sigebert,  Mérovée,  Clovis,  Prétextât,  etc. 
Après  la  mort  de  Chilpéric  ,  elle  arma 
contre  Childebert,  défit  ses  troupes  en 
591  ,  ravagea  la  Champagne  ,  et  reprit 
Paris  avec  les  villes  voisines  qu'on  lui 
avait  enlevées.  Elle  mourut  en  597  ,  cou- 
verte de  gloire  par  ses  succès ,  et  d'op- 
probre par  ses  crimes.  Nous  parlons ,  dans 
cet  article,  d'après  le  plus  grand  nombre 
des  historiens.  Il  y  a  cependant  apparence 
que  la  haine  publique  exagéra  beaucoup 
les  vices  et  les  maux  attribués  à  Frédé- 
gonde. Dreux  Duradier  a  entrepris  de  la 
justifier  dans  son  Histoire  anecdotique 
des  reines  et  régentes  de  France,  6  vol. 
in-12;  mais  il  a  été  victorieusement  réfuté 
par  Gaillard,  dans  le  Journal  des  savans 
de  janvier  nG3  ,  pag.  13  et  suivantes. 
Voyez  Brunehaut. 

FRÉDÉRIC  (  Saint  ) ,  évoque  d'U- 
Irecht,  et  fils  d'un  grand  seigneur  de 
Frise ,  gouverna  son  diocèse  avec  zèle , 
et  fut  martyrisé  en  838  pour  la  défense 
de  la  foi. 

EMPEREURS   D'ALLEMAGNE. 

FRÉDÉRIC  I ,  dit  Barberousse  ,  fils 
de  Frédéric ,  duc  de  Souabe ,  et  duc  de 
Souabe  lui-même  en  1 1 47  ,  après  la  mort 
de  son  père  ,  était  né  en  1 121 ,  et  obtint 
la  couronne  impériale  en  1152,  à  31  ans, 
^rès  Conrad  III  son  oncle.  |l  avait  déjà 


FRÉ  475 

été  avec  ce  prince  en  Asie,  et  avait  com- 
battu dans  les  rangs  des  croisés  (  1147  )• 
Il  passa  en  Italie  l'an  1155,  pour  la  rece- 
voir des  mains  du  pape.  Adrien  IV  le 
sacra  le  1 1  juin  après  bien  des  difficultés 
sur  le  cérémonial.  On  savait  si  peu  à 
Rome  ce  que  c'était  que  l'empire  romain , 
et  toutes  les  prétentions  étaient  si  con- 
ti'adictoires ,  que  d'un  côté  le  peuple  se 
souleva ,  parce  que  le  pape  avait  cou- 
ronné l'empereur  sans  l'ordre  du  sénat 
et  du  peuple  ;  et  de  l'autre  côté ,  le  pape 
Adrien  écrivait  dans  toutes  ses  lettres  , 
qu'il  avait  conféré  à  Frédéric  le  bénéfice 
de  l'empire  romain.  Frédéric  imposa  si- 
lence aux  députés  du  peuple  :  «  Rome , 
»  leur  dit-il ,  n'est  plus  ce  qu'elle  a  été  ; 
»  Charlemagne  et  Othon  l'ont  conquise , 
»  et  je  suis  votre  maître.  »  Non  moins 
choqué  des  lettres  du  pape,  il  dit  «  qu'il 
»  tenait  son  empire  de  Dieu  et  de  l'élec- 
M  tion  des  princes ,  et  non  de  la  libéra- 
»  lité  des  pontifes  romains.  »  Un  légat , 
devant  qui  il  prononça  ces  paroles,  vou- 
lut le  lui  contester  5  Frédéric  le  renvoya, 
Adrien  lui  envoya  en  1157  à  Besancon 
où  il  était  alors  ,  un  autre  légat  auquel 
l'empereur  fit  protester  que  par  le  mot 
de  bénéfice ,  le  pape  n'avait  entendu  que 
la  bénédiction  ou  le  sacre,  et  non  une 
investiture.  L'année  précédente  (1156) 
Frédéric  avait  répudié  Adélaïde  ,  pour 
épouser  Béatrix ,  fille  de  Renaud ,  comte 
de  Bourgogne  ,  et  réunit  par-là  le  comté 
de  Bourgogne  à  ses  états  ;  mais  ce  pré- 
tendu mariage,  contracté  contre  les  règles 
de  l'évangile  ,  le  mit  mal  dans  l'esprit 
des  peuples,  et  ne  contribua  pas  peu  à  la 
conduite  des  Milanais  envers  la  nouvelle 
impératrice  (  voyez  Béatrix  ).  Après  la 
mort  d'Adrien,  en  1160,  Frédéric,  qui 
voulait  dominer  à  Rome ,  opposa  au  légi- 
time pontife  Alexandre  III ,  l'antipape 
Victor ,  et  successivement  deux  autres. 
Les  Milanais ,  indignés  de  ces  violences , 
secouèrent  le  joug  en  1 161  ,  et  tâchèrent 
de  former  une  république.  Mais  leur  capi- 
tale fut  prise  en  11C2  et  rasée  jusque 
dans  ses  fondemens.  On  passa  la  charrue 
et  on  sema  du  sel  sur  son  terrain.  Bresse , 
Plaisance  furent  démantelées,  et  les  autres 
villes  j  qui  avaient  voulu  être  libres ,  per- 


4:6  FRÉ 

dirent  non-seulement  cet  avantage ,  mais 
leurs  privilèges.  Le  vainqueur  fit  faire  la 
recherche  de  tous  les  droits  et  de  tous 
les  fiefs  usurpés.  Quatre  docteurs  de 
l'université  de  Bologne  qu'il  consulta, 
lui  attribuèrent  tous  ces  droits ,  et  même 
l'empire  du  monde  entier ,  tels  que  les 
empereurs  des  premiers  siècles  l'avaie^ 
possédé.  Le  fameux  Barthole  ne  balafiça 
pas  même  à  déclarer  hérétiques ,  tous 
ceux  qui  oseraient  douter  de  la  monar- 
chie universelle  des  empereurs  romains. 
On  voit  par  cette  plaisante  décision  ,  que 
la  jurisprudence  des  empereurs  n'était 
pas  mieux  en  ordre  que  celle  des  papes  ; 
et  que  ceux  qui  déclament  tant  contre  la 
seconde,  affectent  à  l'égard  de  la  première 
un  silence  qui  tient  de  l'injustice  et  de  la 
mauvaise  foi.  Le  pape  Alexandre  III ,  qui 
avait  été  obligé  de  se  retirer  en  France , 
excommunia  Frédéric  en  1168.  Les  villes 
de  Lombardie  se  liguèrent  ensemble  la 
même  année  pour  le  maintien  de  leur 
liberté.  Les  Milanais  rebâtirent  leur  ville 
malgré  l'empereur.  Ils  remportèrent  sur 
lui  une  victoire  signalée,  près  de  Côme, 
en  1176  :  et  cette  victoire  produisit  la 
paix  entre  Alexandre  et  Frédéric.  Venise 
fut  le  lieu  de  la  réconciliation.  Il  fallut 
que  le  superbe  Frédéric  pliât.  Il  reconnut 
le  pape,  baisa  ses  pieds,  lui  servit  d'huis- 
sier dans  l'église ,  et  conduisit  sa  mule 
dans  la  place  St. -Marc.  La  paix  fut  jurée 
le  1"  août  1177  ,  par  12  princes  de  l'em- 
pire. Tout  fut  à  l'avantage  de  l'Eglise  , 
Frédéric  promit  de  restituer  ce  qui  appar- 
tenait au  saint-Siége.  Les  terres  de  la 
comtesse  Mathilde  ne  furent  point  spéci- 
fiées ,  et  ce  fut  un  nouveau  sujet  de  que- 
relle entre  l'empereur  et  le  pape  Urbain 
III.  Les  progrès  des  Sarrasins  réunirent 
les  esprits.  Saladin ,  le  héros  de  son  pays 
et  de  son  siècle ,  avait  repris  Jérusalem 
sur  les  chrétiens.  Le  pape  engagea  Fré- 
déric à  reconquérir  la  Terre-Sainte.  Ce 
prince  se  croisa  en  1189.  Isaac  Lange , 
empereur  de  Constantinople ,  était  l'allié 
de  Saladin  et  du  sultan  d'Icône.  Frédéric 
fut  donc  obligé  de  combattre  les  Grecs. 
11  força  les  passages  ,  remporta  deux  vic- 
toires sur  les  Turcs,  prit  Icône,  pénétra 
en^Syrie ,  et  alla  mourir  l'année  suivante 


PRE 

1 190,  après  un  règne  de  38  ans,  près  de 
Tarse  en  Cilicie ,  pour  s'être  baigné  dans 
le  Cidnus  ou  le  Senef ,  de  la  maladie 
qu'Alexandre  le  Grand  contracta  autrefois 
dans  le  même  fleuve  suivant  quelques 
critiques  :  mais  la  chose  n'est  pjs  certaine, 
l  laissa  en  mourant  une  réputation  célè- 
bre d'inégalité  et  de  grandeur.  Il  couvrit 
son  orgueil ,  son  caractère  violent  et  em- 
porté ,  par  le  courage ,  la  franchise ,  la 
libéralité  et  la  constance  dans  la  bonne 
et  la  mauvaise  fortune.  Il  avait  une  mé- 
moire surprenante,  et  même  beaucoup 
de  savoir,  pour  un  siècle  oîi  la  rouille  de 
l'ignorance  était  si  épaisse ,  que  presque 
aucun  prince  allemand  ne  savait  ni  lire 
ni  signer  son  nom.  Jamais  les  revenus 
des  empereurs  n'avaient  été  plus  consi- 
dérables que  sous  Frédéric  ;  il  tirait  an- 
nuellement de  l'Italie  et  de  l'Allemagne 
60  talens  d'or ,  ce  qui  revient  à  0  millions 
d'écus  d'Allemagne  :  somme  prodigieuse 
pour  ce  temps-là ,  oîi  le  domaine  des  em- 
pereurs avait  déjà  souffert  des  perles  im- 
menses. C'est  sous  Frédéric  I  que  les 
archevêques  de  Mayence  commencèrent 
à  prendre  le  titre  d'archi-c/iancelicrs  de 
l'empire.  La  f^ie  de  Frédéric  Barbe- 
rousse  a  été  écrite  en  latin ,  Leipsick  , 
1773,  in-4.  On  peut  consulter  sur  ce 
prince  l'un  des  plus  remarquables  qu'ait 
eus  l'Allemagne ,  plusieurs  ouvrages  ,  en- 
tr'autres  la  Chronique  d'Othon  de  Frei- 
singen:  l'ouvrage  de  Gunther,  Ligurinus, 
.vtVe  de  rébus  gestis  Frederici  /,  libri  X, 
Hildelberg ,  1 8 1 2 ,  in-8 . 

FRÉDÉRIC  II ,  petit-fils  de  Frédéric 
I ,  et  fils  de  l'empereur  Henri  VI ,  né  en 
1 1 94 ,  à  lési ,  élu  roi  des  Romains  eu 
1 1 96 ,  du  vivant  de  son  père ,  empereur 
en  1210,  à  19  ans,  ne  fut  paisible  pos- 
sesseur de  l'empire  qu'après  la  mort  d'O- 
thon en  121 8.  Son  règne  commença  par 
la  diète  d'Egra  en  1 21 9.  Ce  fut  dans  celte 
diète  qu'il  fit  jurer  aux  grands  seigneurs 
de  l'empire,  de  ne  plus  rançonner  les, 
voyageurs  qui  passeraient  dans  leur  ter-j 
ritoire  ,  et  de  ne  pas  faire  de  fausse  mon» 
naie  :  usages  barbares ,  que  les  petitsj 
princes  prenaient  pour  des  droits  sacrés 
dans  ces  temps  de  brigandage.  Après] 
avoir  mis  prdre  à  tout  en  AUemag^ne , 


FRE 

passa  en  Italie.  Milan  lui  ferma  ses  portes, 
comme  à  un  petit-fils  de  Barberousse  :  et 
il  alla  se  faire  couronner  à  Rome  par  le 
pape  Honoré  111,  le  22  novembre  1220. 
Il  signala  son  couronnement  par  des  édits 
violens  contre  les  hérétiques,  et  par  le 
serment  d'aller  se  battre  dans  la  Terre- 
Sainte.  Frédéric  né  en  Italie,  et  s'y  plai- 
sant beaucoup ,  ne  se  pressa  pas  de  se 
rendre  à  Jérusalem.  Grégoire  IX ,  succes- 
seur d'Honoré  III,  l'avertit  en  vain  d'exé- 
cuter son  serment,  et  l'excommunia  en 
1 227  et  1228.  Frédéric  part  pour  la  Terre- 
Sainte,  et  y  arrive  en  septembre  1228. 
Mélédin ,  sultan  de  Babylone ,  effrayé  de 
l'orage  qui  allait  fondre  sur  lui ,  conclut 
l'année  d'après  une  trêve  de  dix  ans  avec 
l'empereur.  Grégoire  IX,  irrité  de  ce  que 
Frédéric  avait  abandonné  si  légèrement 
la  cause  des  chrétiens  d'Orient ,  et  exé- 
cuté son  serment  d'une  manière  illusoire, 
l'anathématisa.  Il  assembla  une  armée  , 
et  s'empara  d'une  grande  partie  de  la 
Fouille  ,  dont  il  investit  le  beau-père  de 
Frédéric  II ,  Jean  de  Brienne.  Le  jeune 
Henri  son  fils,  roi  des  Romains,  se  dé- 
clara aussi  contre  son  père ,  et  fit  répan- 
dre le  bruit  de  sa  mort.  Cette  nouvelle , 
quoique  fausse  ,  occasiona  la  révolte  gé- 
nérale de  la  Sicile  et  de  l'Italie.  Frédéric, 
instruit  de  ces  événemens,  repasse  en 
Europe.  Ayant  ramassé  une  armée  à  la 
hâte,  il  se  rend  maître  de  la  Romagne, 
de  la  Marche  d'Ancône ,  des  duchés  de 
Spolette  et  de  Bénévent.  Les  soldats  de 
la  croisade  papale,  appelés  Guelfes ,  -por- 
taient le  signe  des  deux  clés  sur  l'épaule. 
Les  croisés  de  l'empereur  s'appelaient 
Gibelins ,  et  portaient  la  croix  ;  ils  furent 
souvent  vainqueurs.  Le  pape  se  réconcilie 
avec  l'empereur  en  1230,  moyennant  la 
somme  de  130,000  marcs  d'argent  et  la 
restitution  des  villes  qu'il  lui  avait  prises. 
Frédéric  ne  fut  si  facile ,  que  parce  que 
son  fils  s'était  révolté  en  Allemagne.  Il 
va  assembler  une  diète  à  Mayence  ;  con- 
damne en  1235  le  rebelle  à  une  prison 
perpétuelle ,  et  fait  élire  peu  après  son 
second  fils ,  Conrad  IV ,  roi  des  Romains. 
L'Allemagne  pacifiée,  il  repasse  en  Lom- 
bardie  en  1240,  bat  les  Milanais  et  en 
fait  un  gfrand  carnage.  Il  prend  plusieurs 


ME  4:7 

autres  villes ,  soumet  la  Sardaigne,  triom- 
phe des  forces  de  Venise  et  de  Gènes ,  se 
rend  maître  du  duché  d'Urbin  et  de  la 
Toscane,  et  assiège  Rome.  Ce  fut  alors 
que  ce  prince  emporté  et  cruel  lit  fendre 
la  tête  en  quatre ,  ou  marquer  d'un  fer 
chaud  fait  en  croix  ,  les  prisonniers  qu'il 
faisait.  Il  alla  ensuite  saccager  Bénévent , 
le  Mont-Cassin ,  et  les  terres  des  Tem- 
pliers. Rien  n'arrêtait  ses  dégâts ,  et  c'é- 
tait surtout  à  l'égard  des  nrinistres  de 
l'Eglise  qu'il  se  montrait  implacable.  «  Les 
»  temples ,  disent  les  historiens ,  furent 
»  saccagés  ;  les  vases  sacrés  servirent  dans 
))  sa  cuisine  ;  les  cendres  des  saints,  trou- 
»  blées  dans  leur  tombe ,  furent  jetées 
»  aux  vents ,  leurs  ossemens  dispersés  ; 
»  des  ecclésiastiques  languirent  dans  les 
«  fers  ;  à  d'autres  on  creva  les  yeux  ;  d'au- 
3)  très  furent  chassés  de  l'empire ,  ou 
»  égorgés  ou  livrés  aux  flammes.  L'on  fit 
j>  expirer  sur  les  bûchers  des  comtes  et 
»  des  barons  du  parti  guelfe  ;  d'autres 
V  périrent  de  faim  et  de  vermine  dans  les 
}>  prisons  souterrraines  d'antiques  don- 
»  jons.  Des  villes  de  cette  faction  furent 
n  ruinées  de  fond  en  comble.  Ezzelino , 
»  gibelin  furieux  et  sanguinaire ,  fit  périr 
1)  par  la  faim ,  le  fer  et  le  l'eu ,  douze 
»  mille  citoyens  de  Padoue ,  enfermés 
»  dans  l'amphithéâtre  de  Vérone  »  (  voyez 
EzzELi>io).  Frédéric  avait  été  de  nouveau 
excommunié  par  Grégoire  IX  en  1236. 
Le  pape  donnait  pour  motif  de  cette  ex- 
communication ,  que  les  armées  de  ce 
prince  avaient  pillé  des  églises;  qu'il 
avait  fait  juger  par  des  cours  laïques  les 
affaires  ecclésiastiques  ;  et  qu'il  avait 
blasphémé  Jésus-Christ  dans  la  diète  de 
Francfort ,  et  l'avait  mis  au  nombre  des 
imposteurs  qui  avaient  trompé  l'univers. 
Dans  sa  lettre,  adressée  aux  princes  et 
prélats  contre  cet  empereur,  le  12  des 
calendes  de  juin  de  la  1 3^  année  de  son 
pontificat,  1239,  Grégoire  l'accuse  for- 
mellement d'avoir  rangé  le  Sauveur  du 
monde ,  Moïse  et  Mahomet  sur  une  même 
ligne ,  et  rapporte  les  paroles  mêmes  de 
l'empereur  :  A  tribus  Baratatoribus ,  ut 
ejus  verbis  utamur ,  scilicet  Christo 
Jesu ,  Moïse  et  Mahometo ,  totum  mun- 
dum  fuisse  deceptum,  etc.  ^oye?  Vignes 


PRÈ 

(Pierre  de).  Celte  dernière  accusation, 
la  plus  grave  de  toutes ,  fut  niée  par 
l'empereur ,  dans  un  manifeste  envoyé  à 
toutes  les  cours.  Le  pape ,  qui  n'ajoutait 
aucune  fpi  à  cette  protestation ,  et  qui 
avait ,  comme  il  l'assure  dans  sa  lettre  , 
des  preuves  démonstratives  du  fait ,  vou- 
lut faire  assembler  un  concile  ;  mais  les 
prélats  français,  anglais  et  espagnols,  s'é- 
tant  embarqués  à  Gênes ,  furent  faits  pri- 
sonniers par  Henri ,  roi  de  Sardaignc  , 
fils  naturel  de  l'empereur.  Le  pontife  en 
mourut  de  douleur.  Célestin  IV ,  son  suc- 
cesseur, n'occupa  le  trône  pontifical  que 
18  jours.  Le  siège  vaqua  pendant  19  mois. 
Enfin  Innocent  IV  ayant  été  élu ,  ce  pape, 
l'ami  de  Frédéric ,  quand  il  était  cardinal, 
s'efforça  en  vain  de  le  réconcilier  avec  le 
saint-Siége.  Après  bien  des  négociations 
inutiles ,  il  le  déposa  dans  le  concile  de 
Lyon  ,  en  1245;  mais  la  sentence  ne  fut 
prononcée  qu'au  nom  du  pape ,  et  en 
jjrésence  du  concile ,  prœscntc  conciUo , 
non  avec  l'approbation  du  concile  ,  ap- 
probante  coiicilio ,  comme  portent  les 
décrets  oii  le  concile  concourait  avec  le 
pape.  Il  n'a  point  été  question  dans  ce 
concile  du  droit  du  pontife  sur  la  cou- 
ronne du  prince  ;  ce  point  n'y  fut  nulle- 
ment agité,  ni  défini.  Tout  paraît  avoir 
été  supposé  comme  un  article  de  juris- 
prudence reconnu  (  voyez  Martin  IV  , 
Grégoike  vu  ).  Tout  se  réduisait  à  savoir 
si  l'empereur  était  véritablement  coupa- 
ble des  crimes  dont  on  l'accusait  j  c'est  là- 
dessus  qu'intervint  le  jugement.  Des  his- 
toriens et  des  jurisconsultes  ont  écrit  que 
le  point  dont  il  s'agit  ici ,  formait  une 
question  purement  civile ,  très  différente 
de  celle  qui  regardait  le  prétendu  do- 
maine temporel  des  papes ,  et  que  c'était 
une  prétention  de  suzeraineté.  Sous  le 
règne  des  Othon ,  disent-ils ,  non-seule- 
ment le  pape,  comme  souverain  de  Rome, 
conférait  l'empire  ;  mais  il  donnait  en- 
core aux  empereurs  le  pouvoir  de  dési- 
gner leurs  successeurs.  Après  les  Othon  , 
il  donna  à  certains  princes  d'Allemagne 
le  droit  d'élire  les  rois  des  Teutons ,  qui 
étaient  ensuite  élevés  à  la  dignité  impé- 
riale, et  les  empereurs  élus  lui  prêtaient 
serment  de  fidélité  (  Suppl  Baron. ,  /.  ?, 


FRE 

c.  40,  tom.  10,  ann.  964  ,  p.  783,  784 
et  909  ).  Les  papes  prétendirent  en  con- 
séquence que  les  empereurs  tenaient  leur 
couronne  du  saint-Siége,  comme  les 
électeurs  le  droit  d'élection.  Delà  ils  iur 
feraient ,  par  une  conséquence  quelcon- 
que ,  le  droit  de  les  juger  et  de  les  dépo- 
ser. On  voit  par  une  lettre  de  Frédéric  II, 
que  c'était  là  une  des  raisons  sur  les- 
quelles Innocent  IV  appuyait  ses  préten- 
tions ;  elle  est  rapportée  dans  l'Histoire 
de  France ,  par  Daniel ,  tome  4  ,  p.  573, 
édit.  1755.  Quoi  qu'il  en  soit,  les  écri- 
A  assiers  qui  se  sont  épuisés  en  sarcasmes 
contre  la  conduite  des  pontifes  dans  ces 
temps  pénibles  et  difficiles ,  n'ont  pas  eu 
l'équité  d'observer  qu'ils  avaient  les 
mœurs  de  leur  temps ,  qu'ils  en  avaient 
adopté  la  jurisprudence  et  les  maximes  ; 
que  c'est  sur  cet  état  de  choses  qu'il  faut 
les  juger ,  ainsi  que  les  empereurs  qui 
n'étaient  pas  plus  au  dessus  de  leur  siècle 
que  les  papes,  et  dont  la  jurisprudence, 
comme  nous  venons  de  l'observer  à  l'ar- 
ticle de  Fre'déric  I ,  était  plus  défec- 
tueuse encore  et  plus  révoltante.  Les  pa- 
pes d'aujourd'hui  sont  très  éloignés  de 
ces  prétentions ,  et  n'en  ont  pas  qui  leur 
soit  plus  chère  que  celle  de  donner  aux 
souverains  de  la  terre  des  exemples  de 
modération ,  de  douceur ,  de  sagesse  et 
de  justice.  «  C'est  une  chose  singulière , 
»  dit  un  écrivain  moderne  ,  et  elle  serait 
3>  inconcevable  si  on  ne  connaissait  l'hy- 
»  pocrisie  du  siècie  ,  d'entendre  nos  phi- 
»  losophes  déclamer  avec  fureur  contre 
î)  le  droit  que  s'attribuaient  les  papes  sur 
M  des  rois  chrétiens  ,  précisément  en  fa- 
»  veur  de  l'Eglise  qu'ils  troublaient ,  et 
»  que  leur  devoir  était  de  protéger  :  tan- 
«  dis  que  ces  mêmes  philosophes  font 
»  une  profession  ouverte  de  renverser  les 
»  trônes,  de  traiter  en  esclaves  les  rois 
»  les  plus  sages ,  et  d'établir  l'anarchie 
»  la  plus  affreuse  sur  les  débris  de  toute 
))  autorité.  »  Les  peuples  ligués  de  Lom- 
bardie  Iwittircnt  Frédéric  :  les  princes  ne 
le  regardèrent  plus  que  comme  un  impie  ; 
pour  comble  de  malheur,  les  Allemands 
élurent  contre  lui,  en  1246,  Henri  de 
Thuringe ,  puis  Guillaume ,  comte  de 
Hollande,  en  1247,  On  dit  qu'étant  dans 


1 


PRE 

la  Pôuille ,  il  découvrit  que  son  médecin 
voulait  l'empoisonner,  et  qu'il  fut  obligé 
de  prendre  des  mahométans  pour  sa  garde. 
Us  ne  le  garantirent  pas  des  fureurs  de 
Mainlroy,  l'un  de  ses  bâtards,  qui,  à  ce 
qu'on  prétend ,  l'empoisonna  à  Fioren- 
zuela  en  1250,  à  57  ans,  et  l'étouffa  sous 
une  pile  de  carreaux ,  parce  que  le  poison 
n'agissait  pas  assez  promptement.  D'au- 
tres le  font  mourir  d'une  manière  diffé- 
rente. Quoique  d'un  naturel  violent  et 
emporté,  cet  empereur  avait  quelques 
qualités  estimables.  Actif,  vigilant,  cou- 
rageux, il  eût  pu   réprimer,  s'il  avait 
voulu  sérieusement ,  la  puissance  maho- 
niétane  dans  sa  naissance.  Il  fonda  des 
universités,  notamment  celle  de  Padoue; 
il  cultiva  des  beaux-arts  et  les  fit  culti- 
ver. On  a  de  ce  prince  des  vers  en  langue 
romane ,  des  lettres  en  latin ,  et  un  traite 
de  la  chasse  au  faucon  (  De  artc  venandi 
ciim  avibus  ) ,  imprimé   avec  Albertiis 
magnus  ,   De   falconibus  ,   Augsbourg  , 
1596  ,  in-8.  Il  fit  traduire  de  grec  en  la- 
tin divers  livres,  ert  particulier  ceux  A'A- 
ristote,  VAlmagestc  de  Ptolémée  et  plu- 
sieurs traités  de  Gallien.  Ce  fut  un  des 
meilleurs  troubadours  de  son  époque.  Il 
paraît  que  dans  les  dernières  années  de 
sa  vie  il  était  revenu  à  des  sentimens  plus 
religieux ,  puisque  dans  son  testament  il 
charge  son  fils  Conrad  de  restituer  tout 
ce  qui  pouvait  appartenir  à  l'Eglise,  et 
légua  100,000  onces  d'or  pour  le  secours 
de  la  Terre-Sainte.  Quelques  auteurs  pré- 
tendent qu'il  mourut  dans  de  grands  sen- 
timens de  piété  et  de  repentir.  (Les  re- 
cueils de  Frecher ,  de  Goldast  et  de  Mu- 
ratori  renferment  un  grand  nombre  de 
morceaux  précieux  pour  l'histoire  de  ce 
prince  ;  d'autres  ouvrages  parlent  encore 
de  cet  empereur  ;  mais  il  faut  une  critique 
habile  pour  distinguer  ce  que  l'esprit  de 
parti  a  débité  pour  ou  contre  lui.  ) 
^TRÉDÉRIC   m,  dit  le  Beau,   fils 
d'Albert  I  d'Autriche ,  fut  élu  par  quel- 
ques électeurs  en  1 3 1 4  ;  mais  le  plus  grand 
nombre  avait  déjà  donné  la  couronne  im- 
périale à  Louis  de  Bavière ,  qui  le  vain- 
quit et  le  fit  prisonnier  dans  une  bataille 
décisive  en  1322.  Il  mourut  en  1333,  après 
quelques  années  de  prison ,  empoisonné 


ME  4^^ 

par  un  philtre  amoureux ,  seloti  les  uns  ; 
rongé  des  vers,  selon  les  autres.  Duchat 
lui  attribue  cette  devise  :  A.  E.  I.  O.  V. 
que  Matthieu  Tympius  prétend  signifier, 
Aquila  Elccta  Liste  Omnia  Vincit.  L'é- 
vénement fait  voir  qu'elle  convenait  mieux 
à  son  rival.  D'autres  l'ont  expliquée  par 
Austria  Erit  In  Orbe  ritimo  ;  d'autres 
par  Austria  Erit  Imperans  Orbi  Fni- 
verso  ;  d'autres  enfin  par  Audax  Et  Iin- 
probus  Omnia  Fcrtit.  (On peut  consulter 
pour  plus  de  détails  l'ouvrage  de  Beumann 
intitulé  :  Voluntarium  imperii  consor- 
tium inter  Fredericum  Austriacum  et 
Ludovicum  Barbarum,  Francfort,  1735, 
in-fol.  avec  figure.) 

FRÉDÉRIC  lY  ,  empereur  (  ou  III , 
selon  quelques-uns ,  qui  ne  mettent  pas 
Frédéric  III ,  au  nombre  des  empereurs  ), 
dit  Ze  Pacifique ,  né  le  25  décembre  1415 
d'Ernest ,  duc  d'Autriche  ,  monta  sur  le 
trône  impérial  en  1440  ,  à  25  ans ,  et  fut 
couronné  à  Rome  en  1452,  de  la  main 
du  pape  Nicolas  V.  Par  le  serment  qu'il 
prêta  à  ce  pontife ,  il  promit  de  n'exercer 
dans  Rome  aucun  acte  de  souverain,  sans 
son  consentement.  Le  couronnement  de 
Frédéric  est  le  dernier  qui  ait  été  fait  à 
Pkome  ,  et  fut  un  des  moins  éclatans.  Eléo- 
noi'e  de  Portugal ,  qu'il  avait  demandée 
en  mariage,  se  rendit  à  Rome  ,  et  y  fut 
couronnée  impératrice  en  même  temps 
que  son  époux.  Frédéric  ne  voulait  pas 
d'abord  consommer  le  mariage  en  Italie, 
de  peur  que  l'enfant  qui  en  naîtrait  n'eut 
les  mœurs  italiennes.  Il  fallut  qu'Alfonse, 
aïeul  de  sa  femme,  roi  d'Aragon  et  de 
Naples ,  l'y  engageât.  L'empereur  de  re- 
tour en  Allemagne  s'abandonna  à  son  hu- 
meur trop  pacifique,  et  pour  mieux  dire, 
insouciante  ;  il  en  résulta  des  guerres  ci- 
viles. Les  électeurs,  assemblés  à  Franc- 
fort ,  le  sommèrent  de  s'appliquer  aux 
affaires  de  l'état ,  de  rétablir  la  paix  pu- 
blique ,*de  faire  administrer  la  justice  et 
de  punir  le  crime.  On  le  menaça  d'élire 
un  roi  des  Romains ,  qui  aurait  le  gouver- 
nement de  l'empire.  Ces  menaces  furent 
inutiles.  La  Hongrie  se  donna  en  1458  à 
Mathias ,  fils  d'Huniade  son  défenseur. 
Frédéric  se  contenta  de  lui  refuser  lacou- 
ronne  de  saint  Etienne,  qu'il  avait  entre 


48ô  ME 

les  mains  :  refus  qui  produisit  une  guerre 
sanglante.  Mathias  envahit  l'Autricbe , 
prend  Vienne,  en  chasse  l'empereur, 
qui ,  avec  une  suite  de  80  personnes ,  se 
met  à  se  promener  de  couvent  en  cou- 
vent, en  attendant  que  son  vainqueur 
lût  mort.  Il  répétait  sans  cesse  ces  paro- 
les, qui  doivent  être  dans  le  cœur  d'un 
philosophe,  mais  non  dans  celui  d'un 
monarque  :  «  L'oubli  des  biens  qu'on  ne 
»  peut  recouvrer,  est  la  félicité  suprême.  » 
Il  se  conduisit  suivant  ces  principes  ,  et 
finit  la  guerre  par  un  traité  de  paix  hon- 
teux en  1487.  Il  mourut  en  1493,  à  78 
ans ,  après  un  règne  peu  glorieux.  C'est 
au  commencement  du  règne  de  cet  em- 
pereur en  1440,  qu'on  place  l'invention 
de  l'imprimerie.  FoyezYvst.  (On  trouve 
quelques  bons  mots ,  Provcrbia  de  ce 
prince ,  dans  un  recueil  intitulé  Marga- 
rita  facetiarum,  Strasbourg,  1509,  in-4.} 

ROIS   DE  DANEMARK. 

FRÉDÉRIC  I ,  roi  de  Danemark  en 
1 523 ,  après  l'expulsion  du  barbare  Chri*- 
tiern ,  se  maintint  sur  le  trône  par  les 
armes.  Il  fit  alliance  avec  Gustave  I,  qui 
s'était  fait  reconnaître  roi  de  Suède ,  et 
se  IJgTia  avec  les  villes  anséatiques.  Après 
il  introduisit  le  luthéranisme  dans  ses 
états,  l'an  1526.  Il  mourut  en  1533,  à 
l'âge  de  62  ans. 

FRÉDÉRIC  II,  roi  de  Danemark, 
fils  et  successeur  de  Christiern  III ,  aug- 
menta ses  états ,  favorisa  l'académie  de 
Copenhague ,  fit  fleurir  les  lettres ,  aima 
les  savans,  et  protégea  Ticho-Brahé  au- 
quel il  donna  l'île  de  Herven  pour  y  con- 
struire le  fameux  observatoire  d'Ura- 
niembourg.  Son  règne  ne  fut  troublé  que 
par  une  guerre  passagère  avec  la  Suède; 
elle  fut  heureusement  terminée  en  1570. 
11  mourut  en  1588  ,  à  54  ans.  Il  eut  pour 
ministre  Pierre  Oxe  dont  les  talens  amé- 
liorèrent sensiblement  ses. états. 

FRÉDÉRIC  III,  né  en  1609,  d'abord 
archevêque  de  Brème,  ensuite  roi  de  Da- 
nemark en  1648 ,  après  la  mort  de  Chris- 
tiern rV' son  père,  perdit  plusieurs  places, 
que  Charles-Gustave ,  roi  de  Suède ,  lui 
enleva.  Il  mourut  en  1670,  à  01  ans, 
pprès  avoir  obtenu  que  la  couronne,  au- 


ME 

pàraVànt  élective,  serait  héréditaire  dauâ 
sa  maison.  La  noblesse,  qui  traitait  les 
autres  ordres  avec  dureté,  perdit  en  même 
temps  une  partie  de  ses  privilèges. 

FRÉDÉRIC  IV ,  roi  de  Danemark , 
fils  de  Christiern  V,  né  en  1621 ,  monta 
sur  le  trône  de  son  père  en  1699.  Il  se 
ligua ,  avec  le  czar  Pierre  et  le  roi  de  Po- 
logne ,  contre  Charles  XII ,  qui  le  con- 
traignit à  faire  la. paix.  Après  une  guerre 
fort  désavantageuse ,  le  roi  de  Suède  ayant 
été  réduit  à  se  retirer  en  Turquie  par  le 
czar,  Frédéric  se  dédommagea  de  ses 
pertes  et  lui  enleva  plusieurs  placés.  11 
mourut  en  1730  ,  à  59  ans,  après  avoir 
fondé  les  missions  du  Groenland  et  de  la 
Laponie,  la  maison  des  Orphelins  de  Co- 
penhague et  240  écoles  pour  l'instruction 
des  enfans  pauvres. 

*  FRÉDÉRIC  V ,  roi  de  Danemark 
et  de  Norwége ,  fils  de  Christian  VI ,  né 
en  1 723,  succéda  à  son  père  le  6  août  1746, 
et  mourut  en  1 766.  Pierre  III  étant  monté 
sur  le  trône  de  Russie  e»  1762,  leva 
une  armée  considérable  pour  reprendre 
sur  le  Danemark  le  duché  de  Flesseig  dont 
son  père  avait  été  dépouillé.  Déjà  le  géné- 
ralRomanzow,àlatêtede40,000hommes, 
jetait  la  terreur  dans  le  Mecklenbourg, 
et  Frédéric  préparait  une  résistance  for- 
midable ,  lorsque  Pierre  fut  assassiné  et 
que  Catherine  s'empressa  de  retenir  ses 
troupes  et  de  signer  la  paix.  Son  règne 
fut  remarquable  par  plusieurs  institutions 
et  entreprises  propres  à  faire  fleurir  l'in- 
dustrie ,  le  commerce ,  les  sciences  et  les 
arts.  Il  accorda  de  grands  avantages  à  la 
compagnie  asiatique ,  et  parvint  à  rendre 
le  commerce  d'Amérique  entièrement 
libre.  Copenhague  lui  doit  une  académie 
de  peinture  et  une  maison  d'accouche- 
men«  gratuits  :  cet  hôpital  est  devenu 
l'un  desplus  remarquables  de  l'Europepar 
sa  bonne  organisation. 

ROIS    DE    POLOGNE. 

FRÉDÉRIC- AUGUSTE  I,  roi  de  Po- 
logne ,  naquit  à  Dresde  en  1670,  de  Jean- 
George  III ,  électeur  de  Saxe.  Il  eut  cet 
électoral  après  la  mort  de  Jean-George  IV, 
son  frère  ,  en  1694.  Il  fit  ses  premières 
campagnes  contre  les  Français  en  1689 


i 


fKE 

sur  les  bords  du  Rhiu ,  et  y  donna  des 
marques  de  valeur.  Choisi  en  1G95  pour 
commander  l'armée  chrétienne  contre  les 
Turcs ,  il  soutint  sa  réputation  de  bra- 
voure, et  eut  sur  eux  de  jvrauds  avantages. 
Ayant  embrassé  la  religion  catholique 
l'année  suivante ,  il  fut  élu  roi  de  Pologne 
le  27  juin  ,  et  coui-onné  à  Cracovie  le  15 
septembre.  Il  avait  acheté  la  moitié  des 
suffrages  de  la  noblesse  polonaise,  et 
forcé  l'autre  par  l'approche  d'une  armée 
saxonne ,  qu'il  ne  tarda  pas  d'employer 
contre  Charles  XII.  Il  se  jeta  d'abord  .sur 
la  Liyonie  ;  il  y  eut  quelques  succès  contre 
les  Suédois,  mais  ils  furent  suivis  de  plu- 
sieurs échecs.  Il  fut  obligé  de  lever  le 
siège  de  Riga  ,  perdit  la  bataille  de  Clis- 
sow  et  celle  de  Frawstadt  ;  et  après  une 
guerre  où  il  avait  été  aussi  malheureux 
que  brave  ,  il  signa  la  paix  en  1706.  Par 
ce  traité  il  fut  dépouillé  de  la  couronne 
de  Pologne  ,  que  Charles  XIl  avait  fait 
donner  à  Stanislas  Leczinski,  en  1704. 
.\près  la  bataille  de  Pultavva,  Frédéric-Au- 
guste remonta  sur  le  trône  ,  et  s'y  sou- 
tint avec  honneur  jusqu'à  sa  mort ,  arri- 
vée en  17  33.  Ce  monarque  avait  une  force 
de  corps  incroyable  ;  mais  il  était  plus 
connu  encore  par  sa  bravoure  et  surtout 
par  sa  grandeur  d'âme  dans  la  bonne  et 
la  mauvaise  fortune.  Sa  cour  était  la  plus 
brillante  de  l'Europe,  après  celle  de 
Louis  XIV.  Il  signala  son  règne  par  un 
nouveau  code ,  par  l'érection  de  diffé- 
rentes chaires  académiques  ,  par  la  fon- 
dation d'un  gymnase  pour  la  noblesse  â 
Dresde,  et  par  d'autres  établissemeus 
qui  l'ont  immortalisé  dans  le  cœur  de 
ses  sujets. 

FRÉDÉRIC- AUGUSTE  II,  roi  de  Po- 
logne ;  fils  du  précédent ,  naquit  en  1 696, 
et  parvint  au  trône  en  17 34.  Les  dernières 
années  de  son  règne  furent  très  malheu- 
reuses. En  1 7  50  ,  le  roi  de  Prusse  s'em- 
para de  la  Saxe,  qu'il  garda  jusqu'à  la 
paix  conclue  à  Hubertsbourg ,  le  1 5  fé- 
vrier 1763,  Frédéric-.\uguste  mourut  le 
5  octobre  de  la  même  année.  C'était  un 
prince  plein  de  bonté  et  de  générosité  ; 
mais  qui  ayant  des  voisins  puissaus  né- 
gligea trop  le  soin  de  préparer  de  bonne 
heure  les  moyens  de  leur  résister. 
V. 


fRE 


4Bi 


ROI    DE     SUEDE. 


FRÉDÉRIC,  prince  de  Hesse-Cassel , 
épousa,  le  I  avril  1715,  Ulrique  Eléo- 
nore ,  sœur  de  Charles  XII ,  roi  de  Suède. 
Cette  princesse,  après  la  mort  funeste 
du  conquérant  sou  frère ,  succéda  à  la 
couronne  le  3  février  1 7 1 'J  L'année  sui- 
vante elle  associa  son  époux  au  trône 
avec  l'agrément  des  états,  et  Frédéric  fut 
proclamé  roi  de  Suède  le  4  avril  i720.  Il 
fit  la  guerre  aux  Russes ,  qui  battire'ut  ses 
troupes  en  plusieurs  rencontres,  et  m  ou- 
rut  eu  1751  ,  à  75  ans,  sans  postérité. 

ÉLECTEURS    DE    BRAXDEBOUBG. 

FRÉDÉRIC  GUILLAU3ÏE  DE  BRAN- 
DEBOURG, surnommé  le  Grand-Elec- 
teiir  ,  né  à  lîerlin  en  1620  ,  fit  la  guerre 
aux  Polonais  avec  avantage.  Elle  finit  par 
le  traité  de  Braunsberg  en  1657.  Dans 
la  guerre  de  167  4  contre  Louis  XIV,  il 
s'unit  avec  le  roi  d'Espagne  elles  Hollan- 
dais! Il  marcha  dans  l'Alsace  avec  sou 
armée  ;  mais  il  fut  bientôt  contraint  de 
la  retirer ,  pour  s'opposer  aux  Suédois 
qui  s'étaient  emparés  des  meilleures  places 
du  Brandebourg.  Frédéric  les  mit  en  fuite, 
fit  une  descente  dans  l'île  JeRugen,prit 
Fehrschantz,  Stralsund  ,  Gripswalde,  et 
fit  une  paix  avantageuse ,  fruit  de  ses 
victoires.  Il  mourut  en  1688.  L'auteur 
des  Mémoires  de  Brandebourg  en  fait 
ce  portrait ,  ou ,  pour  mieux  dire  ,  ce  pa- 
négyrique :  «  Frédéric-Guillaume  avait 
)>  toutes  les  qualités  qui  font  les  grands 
»  hommes  :  magnanime  ,  débonnaire,  gé- 
n  néreux, humain....  Il  devint  le  restaura- 
•»  teur  et  le  défenseur  de  sa  patrie,  le 
»  fondateur  de  la  puissance  du  Brande- 
»  bourg,  l'arbitre  de  ses  égaux....  Avec 
»  peu  de  moyens  il  fit  de  grandes  choses, 
»  se  tint  lui  seul  lieu  de  ministre  et  de 
»  général ,  et  rendit  florissant  un  état 
»  qu'il  avait  trouvé  enseveli  sous  ses 
»  ruines.  »  Lorsque  Frédéric  II  fit  trans- 
porter les  corps  de  ses  ancêtres  dans  la 
nouvelle  cathédrale  de  Berlin ,  il  voulut 
voir  celui  de  Frédéric-Guillaume ,  son 
bisaïeul.  Après  l'avoir  considéré  long- 
temps en  silence  et  les  larmes  aux  yeux  , 
il  le  prit  par  la  main  et  dit  aux  assistans  : 
«  Messieurs,  celui-ci  a  fait  beaucoup.  » 
3i 


48a  FRË 

FRÉDÉRie  I ,  électeur  de  Brande- 
bourg, fils  du  précédent ,  naquit  à  Kœ- 
nigsbergen  1G5?.  Le  titre  de  roi  tentait 
son  ambition  :  il  fit  négocier  en  1 700  au- 
près de  Léopold,  pour  l'érection  du  du- 
ché de  Prusse  en  royaume.  L'empereur 
avait  refusé ,  en  1695,  de  reconnaître  la 
Prusse  pour  un  duché  séculier  ;  mais  en 
1 700  ,  Frédéric  lui  ayant  promis  du  se- 
cours contre  la  France ,  il  ne  fit  aucune 
difficulté  de  la  reconnaître  pour  un  royau- 
me. L'Angleterre  et  la  Hollande  furent 
gagnées  parle  même  motif.  Les  différends 
entre  la  Suède  et  le  roi  de  Pologne  assu- 
rèrent le  consentement  de  ces  deux  cou- 
ronnes ,  qui  avaient  un  intérêt  égal  à 
ménager  Frédéric  ;  enfin ,  à  la  paix  d'U- 
trecht  ,  il  fut  généralement  reconnu 
comme  roi.  On  lui  confirma  en  même 
temps  la  possession  de  la  ville  de  Guel- 
dres  ,  et  de  quelques  autres  de  ce  duché 
dont  il  s'était  emparé  en  1703.  Il  aug- 
menta encore  ses  étals ,  du  comté  de  Tek- 
lenbourg ,  de  la  principauté  de  Neuchâlcl 
et  de  Valangin.  (  Il  mourut  d'une  frayeur  : 
sa  troisième  femme  Louise  de  Meclden- 
bourg  était  tombée  en  démence  ;  on  cher- 
chait à  le  cacher  au  roi  ;  mais  un  jour 
elle  enfonça  une  porte ,  et  se  présenta 
vêtue  de  blanc  et  tout  ensanglantée  de- 
vant Frédéric  qui  dormait  :  à  sa  vue ,  il 
pensa  voir  le  Fantôme  blanc ,  être  ima- 
ginaire que  l'on  croyait ,  dans  les  idées  su- 
perstitieusesdecette  époque,  présider  aux 
destinées  de  la  famille  de  Brandebourg , 
et  annoncer  la  mort  des  princes  de  cette 
maison.  Trois  semaines  après  il  était 
mort  :  )  c'était  en  1713.  Ce  prince  était 
magnifique  et  généreux ,  mais  c'était  aux 
dépens  de  ses  sujets  .-  il  foulait  les  pauvres 
pour  engraisser  les  riches.  Sa  cour  était 
;superbe ,  ses  ambassades  magnifiques,  ses 
bâtimens  somptueux  ,  ses  fêtes  brillantes. 
Il  fonda  l'université  de  Halle  ,  la  société 
royale  de  Berlin  ,  et  l'académie  des  No- 
bles. Il  dépensait  ordinairement  sans 
choix  l'argent  de  ses  peuples.  Il  donna  un 
fief  de  40  mille  écusà  un  chasseur,  qui 
lui  fit  tirer  un  cerf  de  haute  ramure; 
enfin  ,  pour  nous  servir  de  l'expression  de 
son  petit-fils ,  «  il  était  grand  dans  les  pe- 
V  tites  choses,  et  petit  dans  les  grandes  » , 


FRE 

KOIS    DE   PBUSSE. 

FRÉDÉRIC-GUILLAUME  I  (') ,  roi 
de  Prusse ,  né  à  Berlin  ,  le  1 5  abfit  1088, 
était  fils  du  précédent  :  il  commença  à 
régner  en  1713,  sous  les  auspices  favora- 
bles de  la  paix.  Toute  son  attention  se 
tourna  d'abord  sur  l'intérieur  du  gou- 
vernement. Il  rétablit  l'ordre  dans  les 
finances ,  la  police ,  la  justice  ,  le  mili- 
taire. De  cent  chambellans  qu'avait  eus 
son  père ,  il  n'en  retint  que  douze.  Il  ré- 
duisit sa  propre  dépense  à  une  somme 
modique ,  disant  «  qu'un  prince  doit 
»  être  économe  du  sang  et  du  bien  de 
»  âes  sujets.  »  La  bonne  administration 
de  ses  finances  fit  que,  dès  la  pre- 
mière année  de  son  règne ,  il  entre- 
tint 50  mille  hommes  sous  les  armes , 
sans  qu'aucune  puissance  lui  payât  de 
subsides.  La  France  et  l'Espagne  avaient 
enfin  reconnu  sa  royauté,  et  la  souverai- 
neté de  la  principauté  de  Neuchâtel.  On 
lui  avait  garanti  le  pays  de  Gueidres  et 
de  Kessel,  en  forme  de  dédommagement 
de  la  principauté  d'Orange ,  à  laquelle 
il  renonça  pour  lui  et  pour  ses  descen- 
dans.  Le  Nord  était  en  feu  par  les  que- 
relles de  Charles  XII.  Frédéric  ne  voulut 
pas  s'en  mêler ,  et  tandis  que  ce  héros 
soldat  perdait  ses  plus  riches  provinces  , 
Frédéric  acquérait  la  baronie  de  Lim- 
bourg  dans  la  Souabe.  Il  fut  enfin  obligé 
de  prendre  part  à  cette  guerre ,  et  de  se 
déclarer  contre  le  roi  de  Suède ,  dont  les 
procédés  et  les  hostilités  l'avaient  d'au- 
tant plus  irrité ,  qu'il  ne  voulait  pas  les 
réparer.  Frédéric ,  forcé  de  se  défendre , 
ne  put  s'empêcher  de  s'écrier  :  «  Ah  ! 
»  faut-il  qu'un  roi  que  j'estime,  me  con- 
»  traigne  à  devenir  son  ennemi  ?  »  Ses 
armes  eurent  un  heureux  succès,  il  chassa 
les  Suédois  de  Stralsund  en  1 7 1 5 ,  et  re- 
vint vainqueur  à  Berlin ,  mais  sans  vou- 
loir permettre  qu'on  lui  élevât  un  arc  de 
triomphe.  Eu  méprisant  les  dehors  de  la 

(i!  Ce  Mrait  Fiinétic-Giii-Litii»  II,  »i  l'on  comptait 
FrédrricGuillaume  le  (rrand  électeur;  maif  l'on  date  de- 
puis l'érection  de  la  Prus»c  en  royaume.  —  D'un  autre 
côté ,  il  Taut  observer  que  c'est  l'usage  de  cette  cour  de 
cotisidùrcr  l'ensemble  de  deux  noms  comme  un  nom  dif- 
férent :  c'est  pourquoi  le  grand  Frèdirio  n'est  que  Frédé- 
ric II. 


FRE 

royauté ,  il  en  outrait  cependant  quelque- 
fois les  droits,  et  se  rendait  maître  des 
propriétés.  C'est  ainsi  qu'il  abolit  en 
1717  tous  les  fiefs  dans  ses  états ,  et  les 
rendit  allodiaus.  L'année  suivante,  il 
borna  la  durée  des  procès  criminels  à 
trois  mois.  Il  repeupla  la  Prusse  et  la  Po- 
méranie ,  que  la  peste  avait  dévastées. 
Il  fit  venir  des  colonies  de  la  Suisse ,  de 
la  Souabe  et  du  Palatinat,  et  les  y  établit 
à  grands  Irais.  Beaucoup  d'étrangers  fu- 
rent appelés  dans  ses  états.  Ceux  qui 
établissaient  des  manufactures  dans  les 
villes,  et  ceux  qui  y  faisaient  connaître 
des  arts  nouveaux  ,  étaient  excités  par 
des  bénéfices ,  des  privilèges  et  des  ré- 
compenses. 11  parcourait  annuellement 
toutes  ses  provinces ,  et  partout  il  en- 
courageait l'industrie  et  faisait  naître 
l'abondance.  Dès  l'an  1718,  son  armée 
montait  à  près  de  60  mille  hommes,  nom- 
bre excessif  pour  l'étendue  de  ses  états  ; 
mais  de  ce  mal  il  résulta  quelque  bien  ; 
l'argent  que  les  provinces  payaient  à  l'é- 
tat leur  revenait  sans  cesse  par  le  moyen 
des  troupes.  Les  laines  qu'on  vendait  aux 
étrangers  et  qu'on  rachetait  après  qu'ils 
les  avaient  travaillées,  ne  sortirent  plus 
du  pays.  Toute  l'armée  fut  habillée  de 
neuf,  régulièrement  tous  les  ans.  La  paix 
de  1720  lui  assura  la  ville  et  la  princi- 
pauté de  Stétin.  Frédéric  avait  établi  sa 
résidence  à  Potzdam,  maison  de  plaisance, 
dont  il  fit  une  belle  ville,  oîi  fleurirent 
les  arts.  Il  y  fonda  un  grand  hôpital  où 
sont  entretenus  annuellement  2,500  en- 
fans  de  soldats ,  qui  peuvent  apprendre 
les  professions  auxquelles  leur  génie  les 
détermine.  Il  établit  de  même  un  hôpital 
de  filles  ,  qui  sont  élevées  aux  ouvrages 
propres  à  leur  sexe.  Il  augmenta ,  la 
même  année,  en  17  22,  le  coi-ps  des  ca- 
dets ,  oîi  300  jeunes  gentilshommes  ap- 
prenaient l'art  de  la  guerre.  Tandis  que 
Frédéric  faisait  fleurir  ses  états  au- 
dedans ,  il  les  soutenait  au  dehors.  Il 
signa  en  1727  le  traité  de  Wusterhausen 
avec  l'empereur;  il  consistait  dans  des 
garanties  réciproques.  A  peine  ce  traité 
fut-il  conclu ,  qu'il  pensa  s'allumer 
une  guerre  en  Allemagne  entre  les  rois 
de    Prusse  et    d'Angleterre.    Il   s'agis- 


FRE  483 

sait  de  deux  petits  prés  ,  situés  aux  con- 
fins de  la  vieille  Marche  et  du  duché  de 
Zell ,  et  de  quelques  paysans  hanovricns 
que  des  officiers  prussiens  avaient  enrô- 
lés. Cette  querelle  fut  pacifiée  dans  le 
congrès  de  Brunswick.  L'année  1730  est 
remarquable  par  les  brouilleries  de  Fré- 
déric avec  son  fils ,  qui ,  lié  de  bonne 
heure  avecles  philosophes,  et  lisant  leurs 
livres,  n'avait  pas  pris  les  maximes  qui 
assurent  la  paix  des  familles.  Le  roi  de 
Prusse,  père  tendre  mais  sévère  ,  l'envoya 
prisonnier  à  Custrin  sur  l'Oder,  et  ne  le 
relâcha  qu'après  les  prières  réitérées  de 
l'empereur  et  du  roi  d'Angleterre.  11 
mourut  le  3 1  mai  1 740,  avec  tous  les  sen- 
limensde  religion  qu'on  peut  avoir  hors 
de  la  véritable  Eglise.  «  La  politique  de 
M  Frédéric  ,  dit  son  illustre  fils ,  fut  tou- 
u  jours  inséparable  de  sa  justice.  Moins 
»  occupé  à  étendre  ses  états  qu'à  les  bien 
»  gouverner,  circonspect  dans  ses  enga- 
»  gemens ,  vrai  dans  ses  promesses ,  aus- 
»  tère  dans  ses  mœurs ,  rigoureux  sur 
»  celles  des  autres ,  scruptileux  observa  - 
»  leur  de  la  discipline  militaire,  il  présu- 
»  mait  si  bien  de  l'humanité ,  qu'il  au- 
»  rait  voulu  que  ses  sujets  fussent  aussi 
»  stoïques  que  lui.  »  Il  n'aimait  pas  les 
savans  ni  les  poètes.  La  connaissance  de 
l'histoire,  peut-être  celle  de  la  nature 
humaine ,  lui  avait  persuadé  que  les  let- 
tres cultivées  au-delà  d'un  certain  degré, 
et  devenues  d'un  usage  trop  général,  dé- 
truisaient l'énergie  des  nations  et  prépa- 
raient la  chute  des  empires  ;  et  c'est  peut- 
être  à  la  conduite  qu'il  tint  à  cet  égard, 
qu'il  faut  en  partie  attribuer  la  gloire  du 
règne  suivant.  Ployez  Giraldi  (Lilio) , 
Rousseau  [Jean-Jacques).  «Il  retarda 
»  par  là ,  dit  l'abbé  Denina  ,  les  progrès 
»  d'une  philosophie  destructive  et  de  cet 
»  esprit  léger  qui  commençait  à  se  répan- 
»  dre  de  son  temps.  C'était  à  l'époque  dé 
w  la  régence  du  duc  d'Orléans  ,  que  Fré- 
»  déric-Guillaume  montrait  tant  d'aver- 
»  sion  pour  les  modes  et  les  muses  fran- 
»  raises.  C'était  dans  ce  temps  que  les 
»  Français  les  plus  sensés  se  plaignaient 
»  de  la  futilité  qui  régnait  dans  la  litlé- 
»  rature ,  et  de  la  corruption  du  goût 
»  qui  gagnait  amplement.  »  Les  anecdo- 


484 


PRÈ 


tes  suivantes  achèveront  de  donner  une 
juste  idée  de  son  caractère.  Le  roi  et  le 
prince  royal  (depuis  Frédéric  II),  pas- 
sant quelques  jours  k  Bonn ,  l'électeur 
Clément-Auguste,  de  la  maison  de  Ba- 
vière, les  traita  avec  toute  la  magnificence 
possible.  On  leur  donna  entre  autres ,  un 
hal.  Frédéric-Guillaume  était  toujours 
tort  mal  Iiiibillé ,  car  il  portait  un  uni- 
forme aussi  long-temps  qu'il  le  pouvait  ; 
et  quand  il  se  faisait  faire  un  habit  neuf, 
on  y  mettait  les  boutons  du  vieux.  Le 
prince  royal  n'était  guère  plus  élégant; 
d'ailleurs  il  était  fort  triste ,  et  ne  trou- 
vait aucun  plaisir  à  tous  les  divertisse- 
mens.  Le  roi  s'en  étant  aperçu  lui  de- 
manda la  raison  de  sa  tristesse ,  et  pour- 
quoi il  ne  dansait  pas.  Frédéric  baissa  les 
yeux  et  regarda  son  habit  tout  usé.  Mais 
le  vigoureux  monarque  répondit  en  lui 
appliquant  un  ample  souflletdevant toute 
la  compagnie  ;  et  le  poussa  au  milieu  de 
la  salle,  en  lui  disant  «  Allons,  allons, 
«  marche  !  »  Des  larmes  coulèrent  des 
yeux  du  prince  :  mais  il  fallut  prier  une 
dame  ,  et  danser  avec  elle.  Quand  Fré- 
déric-Guillaume avait  fait  sa  revue ,  il 
allait  se  promener  à  pied  par  la  ville. 
Alors  tout  le  monde  s'enfuyait  au  plus 
vite.  Il  ne  pouvait  pas  souffrir  sur- 
tout uue  femme  dans  les  rues.  Quant 
il  en  rencontrait  quelqu'une ,  il  la  ren- 
voyait chez  elle ,  avec  une  paire  de 
soufflets,  ou  quelques  coups  de  canne 
ou  de  pied ,  en  disant  :  «  Que  fait  ici 
«  cette  gueuse  ?  Les  honnêtes  femmes 
M  restent  dans  leur  ménage.  »  Un  beau 
jour  d'été ,  il  surprit  plusieurs  femmes 
qui  se  promenaient  derrière  le  château 
dans  une  place  publique  ,  nommée yar- 
din  du  Roi,  mais  qui  n'est  qu'une  grande 
place  d'exercice.  A  cette  vue  ,  il  appela 
des  soldats ,  envoya  chercher  des  balais, 
et  obligea  les  belles  dames  à  balayer  la 
place  pendant  une  demi-heure.  Il  ne  pou- 
vait soulYrir  que  les  ministres  de  la  pa- 
role de  Dieu  vinssent  voir  la  parade; 
et  quand  il  en  apercevait  quelques-uns , 
il  les  envoyait ,  à  coups  de  c^nne  ,  lire  la 
bible  et  faire  des  sermons.  (  En  général 
Frédéric  était  dur  :  sa  mère  chercha  vai- 
nement pendant  son  enfance  à  vaincre 


FRE 

son  caractère.  Il  était  prodigue  de  coups 
de  bâton,  et  c'est  de  cette  manière  qu'il 
avait  l'habitude  de  terminer  les  querelles 
de  famille.  Il  aimait  ses  troupes  et  tout 
ce  qui  les  concernait:  lui-même  exerçait 
ses  soldats  et  il  les  désirait  de  la  plus 
haute  taille  :  le  régiment  de  ses  gardes 
était  une  véritable  légion  de  géans.  )  On 
a  public  la  Fie  de  Frédéric-Guillaume  , 
en  2  vol.  in-12,  1*41.  C'est  un  ouvrage 
très  médiocre,  fait  en  partie  sur  les  ga- 
zettes ,  mais  plus  véridique  que  la  plu- 
part des  histoires  modernes,  écrites  avec 
l'emphase  du  faux  esprit  philosophique. 
FRÉDÉRIC  II,  roi  de  Prusse  ,  fils  du 
précédent,  né  le  24  janvier  1 7 1 2,  succéda 
à  son  père,  Frédéric-Guillaume,  le  31 
mai  17-40.  (A  l'âge  de  18  ans,  il  fut  telle- 
ment indigné  des  vexations  tyranniqucs 
dont  il  était  l'objet,  qu'il  voulut  prendre 
la  fuite  :  un  goût  naturel  pour  les  let- 
tres et  les  arts ,  développé  encore  par 
l'éducation  toute  française  qu'il  reçut,  lui 
avait  d'ailleurs  rendu  insupportable  la 
cour  de  son  père.  Aussi  en  1730  il  allait 
partir  ;  mais  son  projet  échoua  par  l'in- 
prudence  d'un  officier  nommé  Katt ,  qui 
devait  être  le  compagnon  de  sa  fuite. 
Frédéric  eut  la  douleur  de  voir  exécuter 
ce  malheureux  jeune  homme  qu'il  ai- 
mait tendrement ,  et  fut  lui-même  con- 
damné à  mort  :  il  passa  plus  d'une  année 
dans  un  emprisonnement  rigoureux  , 
resta  éloigné  de  la  cour,  étudia  dans  la 
retraite,  et  ne  se  montra  guère  qu'en 
1 740  pour  monter  sur  le  trône.  )  Il  entra 
la  même  année  en  Silcsie  à  la  tèle  d'une 
armée ,  pour  enlever  cette  province  à 
l'héritière  de  Charles  VI ,  et ,  par  une  de 
ces  révolutions  dont  la  politique  humaine 
offre  tant  d'exemples  ,  on  vit  le  succes- 
seur du  plus  fidèle  allié  de  l'Autriche, 
tourner  sa  puissance  contre  une  maison 
long-temps  défendue  et  secourue  par  ses 
ancêtres.  Il  ne  trouva  qu'une  faible  ré- 
.sistance,  et  fut  bientôt  maître  des  places 
les  plus  considérables.  L'année  suivante, 
le  9  avril,  il  surprit  à  Molvitz,  le  comte 
de  Neipperg,  commandant  25  mille  au- 
trichiens, cl  le  défit  entièrement,  quoi- 
que le  général  Borner,  à  la  tète  de  la  ca- 
valerie, eût  d'abord  culbuté  l'armée  prus- 


FRE 

sienne.  Cette  victoire  fut  suivie  de  celle 
de  Czaslau,  le  17  mai  1742  ;  mais  la  ca- 
valerie prussienne  y  ayant  été  presque 
détruite,  la  paix  fut  signée  le  11  juin  à 
Breslaw  ;  le  comté  de  Glatz  en  Bohème 
et  la  basse  Silésie  furent  cédés  au  roi. 
1,'extrémilé  oii  les  succès  de  Marie-Thé- 
rèse avaient  réduit  l'empereur  Charles  VII 
et  ses  alliés,  engagea  le  roi  de  Prus.se  à 
reprendre  les  armes.  Il  s'empara  de  Pra- 
gue le  16  septembre  17  44  ;  mais  les  Hon- 
grois la  reprirent  le  17  novembre  de  la 
même  année.  La  victoire  remportée  à 
Friedberg,  le  24  juin  1745,  sur  les  Au- 
trichiens et  les  Saxons ,  fut  suivie  d'un 
nouveau  traité  de  paix  ,  conclu  le  25  dé- 
cembre, oîi  les  cessions  précédentes  fu- 
rent confirmées.  Depuis  cette  époque, 
Frédéric  s'appliqua  entièrement  au  gou- 
vernement intérieur  de  ses  états,  à  pro- 
léger le  commerce,  à  établir  des  manu- 
factures ,  embellir  les  villes  et  surtout  sa 
capitale,  élever  des  forteresses,  etc., 
jusqu'à  ce  qu'en  1756,  sur  le  soupçon 
d'une  alliance  conclue  entre  le  roi  de 
Pologne  et  l'impératrice-reine ,  il  entra 
brusquement  en  ^axe ,  combattit  le  gé- 
néral Brown  à  Lovvositz  en  Bohème ,  le 
1*^'  octobre  17  56,  et  quoique  la  victoire 
parût  indécise,  s'empara  peu  de  jours 
après  de  toute  l'armée  saxonne  ,  compo- 
sée de  14,000  hommes,  renfermée  dans 
le  camp  de  Pyrna.  L'année  suivante,  il 
s'avança  jusqu'à  Prague,,  donna  le  G  mai 
une  bataille  sanglante,  dans  laquelle 
ayant  rapidement  occupé  un  vide  que  les 
Autrichiens,  par  trop  d'ardeur,  avaient 
laissé  dans  leur  centre,  il  obligea  une 
partie  de  leur  armée  de  se  retirer,  et 
l'autre  d'entrer  dans  Prague.  U  assiégeait 
cette  ville,  lorsque  le  comte  de  Daim  lui 
présenta  la  bataille  à  Kolin  ,  le  18  juin. 
Il  y  perdit  ses  meilleures  troupes.  Ses  gre- 
nadiers furent  repoussés  à  six  reprises  dif- 
férentes ;  les  voyant  hésiter  à  obéir  à  l'or- 
dre d'une  nouvelle  attaque,  il  accourut 
en  personne  en  leur  criant  :  ÏVollet  ikr 
daim  ewig  lebcn  ?  (Voulez-vous  donc 
vivre  éternellement?  )  Cette  exhortation 
singulière  les  fit  marcher  à  une  septième 
attaque,  aussi  inutile  que  les  précéden- 
tes. Après  cette  défaite ,  il  leva  le  siège 


FRE 


48â 


et  évacua  la  Bohème.  Le  30  août  de  la 
même  année  ,  ses  troupes ,  commandées 
parle  général  Lehvald,  furent  défaites 
par  les  Russes  à  Gros-Jœgerndorff  dans 
la  Prusse  Brandebourgeoise,  et  le  7  sep- 
tembre, par  les  Autrichiens  sur  la  Neiss, 
dans  la  Lusace;  mais  le  5  novembre  il 
remporta  sur  les  Français  la  fameuse  ba- 
taille de  Piosbach.  Il  perdit  Schweidnitz, 
le  1 2  novembre  ;  et  son  ai-mée  comman- 
dée par  le  prince  de  Beveren  ,  fut  défaite 
à  Bre.slaw  le  22  du  même  mois,  ce  qui 
rendit  les  Autrichiens  maîtres  de  cette  ca- 
pitale de  la  Silésie  ;  mais  ils  la  perdirent 
le  10  décembre,  après  avoir  été  totale- 
ment défaits  à  Lissa ,  5  jours  auparavant. 
Lacàmpagaesuivantcs'ouvritpar  le  siège 
d'Olmutz ,  que  le  roi  commandait  en  per- 
sonne ,  tandis  que  le  comte  de  Daun  s'oc- 
cupait ù  former  une  armée  (car  la  dé- 
faite de  Lissa  avait  presque  anéanti  celle 
qui  triompha  à  kolin  et  à  Breslaw).  Ce 
général  avança  avec  ces  nouvelles  trou- 
pes, intercepta  un  grand  convoi  ;  et  cette 
armée ,  composée  pour  ainsi  dire  de  re- 
crues, que  le  danger  de  la  patrie  avait 
fait  accourir  de  toutes  parts  ,  força  le  roi 
à  lever  le  siège  de  cette  place  importante 
(*).  L'année  17  58  fut  remarquable  par 
la  bataille  donnée  à  Zorndorff  le  25  août  ; 
les  Russes  commandés  par  le  général  Fer-, 
mer,  et  les  Prussiens  par  leur  roi,  s'at- 
tribuèrent également  la  victoire.  La  ba- 
taille de  Hoch-Rirchen  fut  plus  décisive, 
le  camp  des  Prussiens,  leurs  tentes,  leurs 
bagages,  tombèrent  au  pouvoir  du  comte 
de  Daun  ;  mais  ,  ce  qui  est  plus  étonnant 
qu'une  victoire  ,  c'est  que  le  roi  complè- 

\\)  Cetlp  observation  el  d'aulro?  du  même  genre  produi- 
ront peut-être  un  jour  de  grandes  réformes  dans  l'clat 
militaire:  nii  pensera  ((u'unu  armée  de  3>o  à  5o,flOoiioni- 
mes  de  vieilles  troupes  peut  en  peu  de  mo'S,  former  et 
s'incorporer  100,000  recrues  ,  et  qu'une  telle  armée  com- 
posée de  soldats  sains,  robustes  et  de,  bonne  Tolonlé , 
viiut  plus  de  400,000  Loniines  énerri*s  dans  l'oisif  ité,  dans 
la  corruption  morale  et  physique;  bétail  huinatn  ,  comme 
dit  un  homme  d'esprit,  qui  péril  trois  fois  avant  qu'on  en 
ait  besoin.  Le  génie  de  l'humanité  ouvrira  peut-être  un 
jour  les  jeux  des  rois  sur  cet  important  objet;  mais  la 
politique  d'aujourd'hui  est  toute  d'appareil ,  et  elle  n'a 
point  de  calculs  pour  les  moyens  qui  rendent  Tétai  for- 
midable sans  parade  et  sans  bruit.  Et  d'ailleurs ,  quand 
les  gouvernemcns  cesseront-ils  de  consacrer  dans  leur» 
relations  cette  ih'imorale  et  odieuse  miixime  du  dioit  du 
plus  fort,  et  quand  ,  pénétrés  du  senl>n^<'ut  de  la  dignité 
humaine ,  rcsseront-îls  de  verser  avec  si  peg  de  ipénajre. 
ment  le  sang  dvs  pei4p!cs?,.,, 


486  FRE 

tement  battu ,  partit  comme  un  foudre 
pour  la  Silésie  ,  et  fit  lever  le  sicge  de 
^feiss ,  qui  était  sur  le  point  de  se  rendre. 
L'année  1 759  ,  l'armée  prussienne  fut  dé- 
faite à  Zulliehau  le  23  juillet  par  le  géné- 
ral russe  Soltikow  ,  et  à  Kunnersdorff  le 
1 2  août  par  le  même  général  et  un  corps 
d'autrichiens ,  commandé  par  Laudou . 
Dresde  se  rendit  aux  Autrichiens  le  4 
septembre ,  et  les  Prussiens  tâchèrent  inu- 
tilement de  le  reprendre  en  1760.  Ils 
eurent  plus  de  succès  au  combat  de  Peilz , 
le  30  octobre  1750;  mais  le  général  Finck, 
s'étant  placé  avec  20,000  hommes  près  de 
Maxen  sur  lui  plateau  commandé  de  tou- 
tes parts,  fut  environné  parles  Autrichiens 
et  obligé  de  se  rendre  sans  tirer  un  coup 
de  fusil ,  le  20  novembre  1759.  Le  géné- 
ral Fouquet  ne  fut  pas  plus  heureux  le 
23  juin  1760,  ayant  été  l>attu  et  fait  pri- 
sonnier à  Landshut  ,  par  Laudon,  cet 
habile  et  actif  militaire  ,  que  Frédéric 
appelait  sa  sentinelle ,  parce  qu'il  en  était 
partout  observé  et  le  rencontrait  partout. 
Le  3  novembre,  les  Prussiens  eureut  leur 
revanche  à  Torgau ,  oii  le  comte  de  Daun 
avait  d'abord  été  victorieux  ;  mais  les 
Autrichiens  ayant  abandonné  une  mon- 
tagne que  le  général  Ziethen  s'empressa 
d'occuper  ,  l'honneur  de  cette  journée 
resta  à  Frédéric.  Laudon  ayant  pris 
Schweidnitz  d'emblée  en  1761 ,  les  Prus- 
siens le  reprirent  en  1762  après  un  siège 
de  deux  mois.  Mais  Colberg  étant  tombé 
au  pouvoir  des  P»usses ,  et  l'état  menacé 
de  toutes  parts ,  Frédéric  avait  besoin  de 
tout  son  courage  pour  ne  pas  céder  aux 
revers  ,  lorsque  la  mort  de  la  czarine 
Elizabeth,  arrivée  en  17  62,  changea  l'état 
des  affaires ,  et  amena  la  paix  signée  à 
Hubertsbourgle  15  février  1763.  Lerésul- 
lat  de  ce  traité,  fruit  de  tant  de  sang  inu- 
tilement répandu ,  fut  que  tout  resterait 
sur  le  pied  où  il  était  avant  la  guerre. 
Les  divisions  de  la  Pologne  ayant  inspiré 
en  1772  aux  puissances  voisines  le  projet 
de  la  démembrer,  Frédéric  eut  pour  sa 
part  la  Prusse  polonai.se  et  quelques  autres 
districts.  Les  prétentions  que  l'impéra- 
trice forma  sur  la  Bavière ,  après  la  mort 
de  l'électeur  Maximiiien-Joseph  en  1 77  7  , 
rallumèrent  la  guerre,  qui  dura  deux  ans 


FRE 

sans  qu'il  y  ait  eu  de  part  et  d'autre  au- 
cune action  d'éclat.  Par  le  traité  conclu 
à  Teschen  le  13  mai  1779,  on  ajouta  à 
l'Autriche  quelques  districts  de  la  Baviè- 
re ,  et  la  succession  de  Bareuth  et  d'Ans- 
pach  fut  assurée  à  Frédéric.  Ce  monarque 
était  occupé  à  former  une  ligue  qu'il 
croyait  nécessaire  à  la  sûreté  et  à  l'équi- 
libre de  l'Allemagne ,  lorsque  la  diminu- 
tion sensible  de  ses  forces  l'avertit  que 
la  fin  de  son  règne  n'était  pas  éloignée  ; 
une  hydropisie,  qui  se  joignit  à  cet  épui- 
sement ,  avança  sa  mort  et  l'enleva  à 
Sans-Souci ,  près  de  Polzdam ,  le  1 7  août 
1786  ,  dans  sa  7  5^  année.  Il  avait  épousé 
Elizabeth-Christine  de  Brunswick  ,  nièce 
de  l'impératrice  ,  épouse  de  Charles  VI  , 
dont  il  n'eut  point  d'enfans,  (  Voyez 
Marie-Thérèse  ,  Louis  XV,  Bbown,  Dadn  , 
Charles-Alexandre,  etc.  )  Un  génie  vaste, 
vif  et  rapide  ,  une  étendue  de  vues  qui 
embrassait  tout,  une  promptitude  qui 
réunissait  presqu'au  même  instant  le  pro- 
jet et  l'exécution  :  la  science  de  la  guerre 
portée  à  son  comble  ;  une  vie  dure ,  agis- 
sante ,  infatigable  ;  tm  fonds  inépuisable 
de  ressources  personnelles  et  politiques 
dans  les  circonstances  les  plus  pénibles  ; 
une  administration  ferme ,  égale ,  con- 
séquente, seront  toujours  des  idées  atta- 
chées au  nom  de  Frédéric  II.  Il  aima  les 
sciences  et  les  arts ,  il  les  cultiva  lui- 
même,  l'utl'ami  et  le  Mécène  des  savans. 
S'il  se  trompa  quelquefois  sur  l'objet  de 
ses  bienfaits,  si  de  l'encouragement  géné- 
ral il  est  né  quelquefois  un  excès  de  con- 
fiance, si  la  licence  et  l'audace  ont  usurpé 
le  nom  de  liberté,  c'est  qu'il  est  bieu 
difficile  à  la  prudence  humaine  de  faire 
le  bien  sans  mélange  ,  et  d'atteindre 
exclusivement  le  but  qu'elle  se  propose. 
Ceux  qu'on  appelle  aujourd'hui  philoso- 
phes l'ont  regardé  comme  leur  appui  ; 
mais  on  sait  avec  quelle  sévérité  il  les 
châtiait  quand  leur  vanité  et  leur  égoïs- 
me  osaient  compromettre  sa  protection  , 
et  à  quel  point  leur  chef  éprouva  son 
ressentiment.  iSon  zèle  pour  la  justice  a 
pu  s'égarer  dans  sa  roule ,  par  la  céléril 
et  l'ardeur  avec  lesquelles  il  l'a  quelque- 
fois poursuivie  ;  mais  si  dans  le  flegme 
de  la  réflexion  .et  la  lenteur  des  forme; 


PRE 

judiciaires  le  magistrat  peut  s'abuser ,  ne 
jugeons  pas  trop  sévèrement  le  monarque 
dont  la  puissance  ne  prescrit  pas  contre 
l'erreur.  Un  état  militaire  égal  à  celui 
des  plus  grandes  monarchies ,  l'obligea  à 
tirer  de  ses  provinces  des  subsides  pro- 
portionnés à  une  si  vaste  dépense ,  à  éta- 
blir un  ordre  de  finances  qui  semblait 
pressurer  le  peuple  :  mais  dans  toutes  les 
occasions  il  venait  à  son  secours  :  le'S 
villes  et  les  provinces  ne  réclamaient 
jamais  en  vain  le  trésor  public;  il  respecta 
la  propriété  ,  les  possessions  civiles  et 
religieuses  ,  comme  un  dépôt  sacré  con- 
lié  à  sa  défense.  Trop  judicieux  pour  s'en 
tenir  en  fait  de  religion  à  l'inconséquence 
des  principes  protestans  ,  il  fut ,  comme 
tous  les  savans  destitués  de  la  lumière  de 
la  vraie  foi ,  dans  un  état  d'indécision  et 
de  perplexité  ;  mais  la  nécessité  et  l'im- 
portance de  la  religion  en  général  lui 
étaient  connues.  Il  aima  ,  il  protégea  les 
catholiques,  conserva  leurs  églises,  leurs 
prêtres,  et  ne  permit  point  qu'on  donnât 
la  moindre  atteinte  à  leurs  usages,  à 
l'ordre  et  à  la  pompe  de  leur  culte.  Tous 
les  étrangers  admirent  le  beau  temple 
qu'ils  ont  élevé  à  Berlin  sous  ses  aupices. 
Il  était  vivement  touché  de  la  majesté  de 
leurs  cérémonies ,  et  surtout  de  la  pompe 
imposante  du  sacrifice.  Un  jour  qu'il  avait 
assisté  à  la  grand'messe  chantée  dans  la 
cathédrale  de  Breslaw  par  le  cardinal  de 
Zinzendorfif,  il  dit  à  ce  prélat  :  «  Les 
M  calvinistes  traitent  Dieu  comme  un  ser- 
»  viteur ,  les  luthériens ,  comme  leur 
»  égal ,  mais  les  catholiques  le  traitent 
»  en  Dieu.  »  Vers  la  fin  de  son  règne  , 
ayant  appris  qu'une  secte ,  auparavant 
peu  connue  en  AUepiagne ,  et  qui  partout 
se  fait  passer  pour  un  fantôme  ,  faisait 
des  ravages  à  Brinn  et  à  Olmutz ,  il  prit 
toutes  les  précautions  convenables  pour 
en  préserver  le  clergé  de  ses  états.  On 
lui  a  reproché  d'avoir  profité  de  la  fai- 
blesse de  l'Autriche  pour  conquérir  une 
de  ses  provinces ,  d'avoir  ravagé  et  épuisé 
la  Saxe ,  d'avoir  réglé  sur  l'esprit  de  con- 
quêtes et  la  gloire  des  combats ,  des  dé- 
marches que  la  morale  chrétienne  et  la 
rigueur  du  droit  font  dépendre  d'autres 
principes \  mais  «  quel  est  le  prince,  dit 


»  le  maréchal  de  Berwick  dans  s6s  excel' 
»  lens  mémoires ,  quelle  est  la  nation 
u  qui  puisse  se  vanter  d'avoir  toujours 
M  préféré  la  bonne  foi  et  la  justice  à  ses 
-)  intérêts  ?  Il  n'est  question  que  d'un 
»  peu  plus  ou  d'un  peu  moins  :  car  l'on 
"  peut  avancer  hardiment,  qu'il  semble 
»  que  la  religion  ,  l'équité  et  la  parenté 
»  ne  sont  plus  présentement  des  motifs 
»  qui  fassent  impression  ;  et  que  pour 
))  satisfaire  son  ambition  et  se  procurer 
»  quelques  avantages ,  l'on  se  croit  tout 
»  permis.  »  Tout  cela  peut  être ,  et  n'est 
effectivement  que  trop  vrai  ;  mais  dans 
les  jugemens  moraux,  ce  n'est  pas  sur 
ce  qui  est  généralement  pratiqué ,  que 
le  sage  se  règle,  mais  sur  ce  qui  doit  être 
pratiqué.  L'équité  n'eùt-elle  plus  qu'un 
seul  partisan ,  n'en  eût-elle  aucun  ,  c'est 
sur  elle ,  sur  elle  seule,  sur  ses  droits  inva- 
riables et  imprescriptibles ,  que  l'homme 
de  probité ,  que  l'homme  chrétien  se 
décide  pour  distribuer  la  louange  et  le 
blâme.  Nous  ne  rassemblerons  pas  ici 
tous  les  traits  de  ce  monarque  célèbre.  " 
Les  portraits  des  rois  guerriers  surtout 
ne  peuvent  acquérir  qu'avec  le  temps  le 
mérite  d'une  ressemblance  parfaite.  Il  est 
des  traits  qui  doivent  être  aperçus  de 
loin  pour  faire  leur  véritable  eÉfet  dans 
l'ensemble  ;  il  est  des  couleurs  trop  vives 
ou  trop  foncées,  que  le  temps  doit  réduire 
à  des  nuances  convenables.  Si  l'admira- 
tion a  ses  excès  ,  la  censure  a  les  siens. 
Si  la  personne  des  monarques  s'illustre 
par  des  faits  éclatans  ,  la  gloire  des  ac- 
tions publiques  est  quelquefois  obscurcie 
par  des  bruits  sourds  que  l'indiscrétion 
répand  sur  la  conduite  personnelle.  Quel- 
ques anecdotes  suppléeront  à  l'ensemble 
d'un  portrait  complet.  Frédéric  aimait 
les  reparties  libres  ,  et  s'en  o£Pensait 
rarement,  surtout  quand  elles  étaient 
promptes  et  vives ,  et  qu'il  y  avait  donné 
lieu.  Dans  une  revue ,  ayant  aperçu  un 
officier  qui  avait  une  balafre ,  il  lui  dit  : 
«  A  quel  cabaret  avez-vous  attrapé  cela  ? 
»  A  Kolin  ,  répondit  celui-ci ,  oîi  Votre 
»  Majesté  a  payé  l'écot.  »  (  Le  roi  avait 
été  complètement  battu  à  kolin.  )  —  Par 
le  partage  de  la  Pologne  et  la  prise  de 
possession  du  roi ,  i'évêque  de  Warmie 


488  f*RE 

perdit  une  grande  partie  de  se?  revenus. 
Ce  prélat  que  Frédéric  aimait  beaucoup  , 
étant  venu,  eu  1770 ,  lui  rendre  ses  de- 
voirs à  Potzdam  ,  le  monarque  lui  dit  : 
«  Il  est  impossible  qiie  vous  m'aimiez.  » 
L'évêqueréponditqu'iln'oublieraitjamais 
les  devoirs  d'un  sujet  envers  sou  souve- 
rain. «  Pour  moi ,  dit  le  roi ,  je  suis  vvai- 
»  ment  votre  ami,  et  j'ai  beaucoup  compté 
»  sur  votre  amitié.  Si  saint  Pierre  me  refu- 
»  sait  un  jour  l'entrée  du  Paradis,  j'espère 
»  que  vous  auriez  la  bonté  de  m'y  porter 
»  sous  votre  manteau ,  sans  que  personne 
»  s'en  aperçoive.  »  «  Cela  sera  difficile  , 
))  reprit  l'évêquc  ,  car  votre  majesté  me 
«  l'a  tellement  rogné,  que  je  ne  pourrai 
»  jamais  y  cacher  de  la  contrebande.  » 
Le  roi  se  mit  à  rire  et  prit  fort  bien  la 
plaisanterie.  —  Souj)aut  un  jour  avec 
l'abbé  Bastiani ,  un  des  italiens  qu'il  avait 
souvent  auprès  de  lui  ,  Frédéric  lui  dit  : 
«  Quand  vous  aurez  obtenu  la  tiare  (  car 
»  je  ne  doute  pas  que  vos  vertus  ne  vous 
X  la  procurent  un  jour  ) ,  comment  me 
«  recevrez-vous ,  lorsque  j'irai  à  Rome 
»  pour  vous  rendre  mes  hommages  ?  Je 
»  dirai ,  répondit  l'abbé  ,  qu'on  laisse 
))  entrer  l'aigle  noir ,  aiin  qu'il  me  cou- 
9  vre  de  ses  ailes ,  mais  eu  même  temps 
)>  je  me  garderai  de  son  bec.  >>  — Un 
anglais  causait  un  jour  avec  le  roi  de 
Prusse  sur  les  débats  du  parlement  d'An- 
gleterre ,  Frédéric,  se  plaignant  du  peu 
de  ressort  de  l'autorité  royale  dans  le 
royaume  britannique  ,  dit  :  «  Oh  !  si 
»  j'étais  roi  d'Angleterre...  f>  «  Site,  dit 
>;  l'anglais ,  en  l'interrompant ,  si  vous 
3)  étiez  roi  d'Angleterre,  vous  ne  le  seriez 
))  pas  vingt-quatre  heures.  »  —  On  sait 
que  le  roi  faisait  battreiine  grande  quan- 
tité de  petite  monnaie  de  mauvais  aloi , 
que  l'on  nommait^iV'ce.yrfc  six pfcnnings. 
On  payait  avec  ces  pièces  les  soldats  ,  les 
ouvriers ,  et  une  partie  des  pensions  des 
officiers  civils  et  militaires  ;  mais  à  aucune 
caisse  royale  on  ne  recevait  ces  sixpfeii- 
nings ,  de  sorte  que  le  roi  attirait  le  bon 
argent  dans  ses  coffres  pour  n'en  ressortir 
jamais ,  et  distribuait  parmi  le  peuple 
cette  mauvaise  monnaie  qui  ne  rentrait 
plus  dans  ses  coffres.  Un  jour  Frédéric , 
passant  à  Polzdam  devant  la  porte  d'un. 


HÛ 


boulanger  ,  le  voit  disputer  avec  titi 
paysan  ;  il  demande  ce  que  c'est,  on  lui 
dit  que  le  boulanger  veut  payer  en  six 
pfcnnings  du  blé  qu'il  a  acheté  du  paysan, 
et  que  ce  dernier  refuse  de  prendre  cette 
monnaie.  Frédéric  s'avance  et  dit  au 
paysan  :  «  Pourquoi  ne  veux-tu  pas  pren- 
»  dre  cette  monnaie  ?  »  Le  paysan  regar- 
de le  roi ,  et  lui  répond  avec  htiraeur  : 
((  La  prends-tu  toi  ?  »  Le  roi  ne  répondit 
pas  un  mot ,  et  passa  son  chemin.  —  Un 
jeune  officier  quittait  quelquefois  son 
uniforme ,  quoique  cela  fût  défendu  sévè- 
rement ,  et  mettait  un  habit  vert ,  pour 
aller  à  quelques  parties  de  plaisir.  Un 
jour  qu'il  croyait  le  roi  absent ,  il  va  , 
ainsi  vêtu ,  se  promener  avec  sa  maîtresse 
dans  les  jardins  de  Sans-Souci.  Au  détour 
d'une  allée,  il  aperçoit  le  roi,  qui  le  recon- 
naît à  son  épée  qu'il  avait  eu  l'impru- 
dence de  garder.  Qui  êtes-vous  ?  lui  dit 
Frédéric.  «  Sire ,  répond  le  jeuite  homme, 
»  en  se  remettant  de  sa  frayeur ,  je  suis 
»  un  officier ,  mais  je  me  promène  ici 
»  incognito.  »  Le  roi  se  mit  à  rire  et  lui 
dit  :  «  Eh  bien  !  prenez  garde  que  le  roi 
»  ne  vous  voie  ,  »  et  il  passa  son  che- 
min.—  Cependant  cette  indulgence  de 
Frédéric  à  l'égard  de  la  liberté  des  repar- 
ties ,  avait  des  exceptions  ;  quelquefois  il 
en  prenait  de  l'humeur ,  et  ne  pouvait 
s'empêcher  de  la  témoigner,  et  il  reste 
toujours  vrai  en  général  qu'il  n'est  pas 
bon  de  rire  avec  les  rois.  «  Frédéric ,  dit 
»  l'auteur  de  sa  vie  ,  aimait  à  railler  les 
»  autres,  et  la  plaisanterie  lui  était  désa-  ■ 
»  gréable  ,  lorsqu'il  en  était  l'objet.  ■ 
»  Quand  il  voyait  un  médecin ,  la  prc- 
»  mière  chose  qu'il  lui  demandait,  c'était 
»  le  nombre  de  personnes  qu'il  avait  en- 
»  voyées  dans  l'autre  monde.  L'un  d'eux 
»  lui  répondit  :  Pas  tant  que  vous , 
»  Sire.  Il  lui  tourna  le  dos  et  ne  lui  re- 
»  parla  de  sa  vie.  »  —  Ce  qui  avait  irrité 
Frédéric  contre  Voltaire  ,  c'est  que  Mau- 
pertuis  lui  avait  raconté  l'anecdote  sui- 
vante. Ue  jour  que  le  général  Maùstein 
était  dans  la  chambre  de  Voltaire ,  oii 
celui-ci  corrigeait  le  stiledcs  Mémoires 
sur  la  Russie,  composés  par  cet  officier, 
le  roi  lui  envoja  une  pièce  de  vers  de  sa 
facou  à  examiner.  Voltaire  renvoya  Mans- 


FRE 

tein,  en  lui  disant  :  »  Mon  ami,  à  une  autre 
i)  fois  ;  voilà  le  roi  qui  m'envoie  sou  linge 
»  sale  à  blanchir,  je  blanchirai  le  vôtre 
«  après.  M  —  La  Métrie  ayant  dit  au  roi 
qu'on  était  bien  jaloux  de  la  faveur  et  de 
la  fortune  de  Voltaire ,  il  répondit  :  «  Lais- 
»  sez  faire  :  on  presse  l'orange ,  et  on  la 
»  jette  quand  on  en  a  avalé  le  jus.  »  «  Fré- 
»  déric,  ajoute  sou  biographe,  n'eut  ja- 
»  mais  d'autre  dessein  que  de  faire  corri- 
»  ger  et  publier  ses  ouvrages,  par  cet 
»  auteur  à  la  mode.  »  —  Lorsque  l'abbé 
Baynal  vint  à  Berlin  ,  Frédéric  demanda 
à  le  voir ,  et  se  vengea  par  une  petite 
méchanceté  du  passage  de  Yllistoirc 
des  deux  Indes ,  oii  il  n'était  pas  ménagé. 
Le  roi  lui  parla  de  son  Histoire  du  Sla- 
thouderat  et  de  ses  Mémoires  histori- 
ques, et  aiFecta  de  ne  lui  pas  dire  un  mot 
de  V Histoire  des  deux  Indes.  L'abbé  lui 
dit  :  «  Sire ,  j'ai  fait  encore  quelques  au- 
»  très  ouvrages.  — Je  ne  les  connais  pas, 
»  lui  répondit  Frédéric;  »  et  il  parla 
d'autre  chose.  On  prétend  que  l'abbé 
n'aurait  pas  refusé  la  place  de  président 
de  l'académie  si  on  la  lui  eût  offerte  ;  on 
en  toucha  quelque  chose  à  Frédéric,  qui 
rejeta  la  proposition  bien  loin.  Il  écrivit 
en  même  temps  une  lettre  à  d'Alembert, 
oîi  il  disait  les  plus  belles  choses  de  l'ab- 
bé Raynal ,  mais  dans  les  petits  soupers 
on  le  traitait  de  fanatique  et  de  dc'clama- 
teur.  —  Frédéric  se  moquait  de  son  aca- 
démie ,  qu'il  avait  appris  à  connaître  par 
toutes  ses  guerres  intestines ,  aussi  bien 
que  par  la  bizarrerie  et  la  contradiction 
de  ses  jugemens.  «  Un  jour ,  dit  l'auteur 
«  de  sa  f^ie ,  il  voulut  s'assurer  si  les 
M  louanges  que  les  académiciens  prodi- 
«  guaient  à  ses  Mémoires  étaient  bien 
»  sincères.  Pour  cet  effet ,  il  fit  passer  au 
»  secrétaire  perpétuel  un  manuscrit  de 
»  sa  façon ,  en  cachant  soigneusement 
»  d'où  il  venait.  Soit  oubli  ou  négligence, 
»  il  n'en  fut  fait  aucune  mention.  Au 
»  bout  de  quelque  temps ,  le  nom  de 
y>  l'auteur  transpira ,  et  les  louanges  re- 
»  commencèrent,  mais  on  prétend  que 
V  Frédéric  répondit  :  f^ous  m^avez  ap- 
y>  pris  ce  que  je  dois  penser  de  vos  suf- 
»  frages.  »  —  Ce  qui  pouvait  un  peu 
consoler  l'académie,  c'est  que  les  juge- 
V. 


FRE  48ç) 

mens  de  Frédéric  n'étaient  quelquefois 
pas  mieux  motivés.  «  Avant  que  Voltaire 
»  eût  avoué  au  roi  qu'il  avait  fait  la  Pu- 
n  celle  d'Orléans,  Frédéric  prétendait 
»  que  c'était  faire  injure  au  plus  bel 
»  esprit  de  la  France ,  que  de  lui  attribuer 
»  ce  qu'il  appelait  une  infâme  rapsodie, 
»  Quand  on  sut  que  Voltaire  en  était  l'au- 
»  teur,  il  se  la  fit  lire  par  d'Algarotti, 
»  et  dit  :  Ce  n'est  pas  cela  que  j'avais 
»  lu;  ceci  est  charmant,  il  n'y  a  que 
»  f^oltaire  capable  de  faire  un  si  bel  ou- 
»  vrage.  C'était  le  même  ouvrage ,  mais 
»  les  noms  en  imposent.  »  Le  roi  répara 
en  quelque  sorte  cette  inconséquence  par 
les  vers  suivans ,  oîi  la  Pucelle  sert  de 
pendant  à  Candide  -. 

Candide  est  un  petit  Tanricn  , 

Qui  n'a  ni  pudeur  ni  cervelle; 

A  ces  trails  on  le  connaît  bien 

Frère  cadet  de  la   Purelle. 

Leur  xieux  papa,  pour  rajeunir, 

Doiuierait  une  belle  somme:  ^ 

Sa  jeunesse  Ta  rcTenir, 

Il  fait  des  œuvres  de  jeune  homme. 

Tcut  n'est  pas  bien:  lisez  l'écrit  , 

La  preuTe  en  esl  à  chaque  page-. 

Vous  le   Terrez  en  cet  ouvrage  , 

Où  (ou  (esl  nid/,  comme  il  le  dit. 

Quand  Frédéric  eut  bien  apprécié  ses 
académiciens,  non-seulement  il  en  fit  son 
jouet ,  mais  «  il  encouragea ,  dit  l'auteur 
»  de  sa  P^ie,  les  plaisanteries  que  l'on  fit 
»  contre  eus ,  et  donna  même  le  plan 
»  d'un  ouvrage  critique  sur  leurs  Mé- 
»  moires.  Quand  il  les  faisait  venir ,  c'é- 
»  tait  souvent  pour  se  moquer  d'eux.  Il 
3)  appelait  l'un  son  Montesquieu ,  un  au- 
))  treson  d'Alembert,  un  troisième  son 
))  Fontenelle.  Les  bons  académiciens  fai- 
»  salent  de  profondes  révérences ,  et  al- 
»  laient  raconter  ces  beaux  complimens 
»  à  leur  retour  à  Berlin ,  pendant  que 
»  Frédéric  riait  de  leur  crédulité  et  s'ap- 
w  plaudissait  de  son  persifllage.  Il  y  a 
»  dans  une  ville  de  Suisse  un  homme  em- 
))  ployé'  à  la  poste  aux  lettres ,  qui  a  été 
»  académicien  de  Berlin.  Il  ne  manque 
»  pas  pour  se  donner  du  relief,  de  faire 
j>  parade  de  ce  titre.  Un  plaisant  lui  di- 
w  sait  un  jour  :  f^ous  n'avez  guère  chan- 
))  gé d'état  ;  vous  étiez  homme  de  lettres  ; 
»  maintenant  vous  êtes  l'homme  aux 
»  lettres.  Un  autre  suisse ,  aussi  membre 

3i.. 


490  FRE 

M  de  l'acadëmie  de  Berlin ,  a  postulé  dans 
»  sa  patrie  une  place  d'espèce  de  mas- 
>j  sier ,  qui  porte  la  livrée  de  l'état.  Il 
»  n'a  pas  réussi ,  et  a  été  obligé  de  rester 
M  à  Berlin  (*j.  »  —  Après  le  départ  de 
Voltaire ,  Frédéric  défendit  les  plaisan- 
teries irréligieuses;  et  causant  un  jour 
avec  la  comtesse  die  Camas ,  il  lui  dit  qu'il 
estimait  fort  heureuses  les  personnes  qui 
pouvaient  croire  les  vérités  de  la  re- 
ligion ;  mais  que  pour  lui,  ayant  une 
fois  pris  son  parti ,  il  ne  pouvait  plus 
changer;  «  car,  ajouta'-t-il ,  si  mes  sujets 
»  me  voyaient  maintenant  aller  à  l'église, 
w  ils  se  moqueraient  de  moi ,  et  m'accu- 
j)  seraient  de  faiblesse.  —  Non ,  Sire,  lui 
»  répondit  M™*  de  Camas,  on  les  verrait 
M  verser  des  larmes  de  joie.  »  — ^  Nous 
finirons  tous  ces  détails  par  le  jugement 
qu'un  écrivain  connu  vient  de  faire  de 
l'administration  de  Frédéric,  à  l'occasion 
du  panégyrique  de  ce  prince',  publié  par 
l'auteur  de  V Essai  gênerai  de  lactique. 
«  Depuis  cette  guerre  de  sept  ans ,  les 
»  forces  de  Frédéric  n'ont  guère  servi 
»  qu'à  maintenir  la  paix  en  Europe ,  en 
«  épouvantant  ceux  qui  seraient  tentés 
»  de  la  troubler.  Dans  ce  long  repos ,  il 
«  restait  au  roi  de  Prusse  à  acquérir  une 
w  autre  gloire  qui  eût  expié  cette  gloire 
))  du  guerrier  qui,  comme  le  dit  Montes- 
w  quieu ,  laisse  toujours  une  grande 
«  dette  à  payer  à  V humanité'.  Je  parle 
»  de  la  gloire  de  grand  administrateur  et 
»)  de  grand  législateur.  Le  panégyriste  de 
j)  Frédéric ,  attaché  à  la  mémoire  de  ce 
1»  grand  homme  par  quelque  rapport  se- 
j>  cret  de  goût  et  de  génie ,  voudrait  bien , 
»  après  en  avoir  fait  le  premier  des  rois 
»  guerriers ,  lui  assigner  encore  une  des 
V  places  les  plus  honorables  parmi  les 
»  monarques  administrateurs  et  législa- 
»  leurs.  Il  paraît  que  les  esprits  les  plus 

(l)  On  ne  peut  s'empêcher  de  faire  ici  une  rédexinn 
au»i  Trappatile  par  «i  lérilé,  que  Iiuniiliaiite  pour  le>  pe- 
lit!  mprit» ,  qui  >c  croient  «avaiis  ,  p^rre  qu'iU  «ont  mem- 
bres d'un  norpn  répulé  scienlill>|ue.  Si  sous  les  }'eus  d'un 
roi  qui  se  connaissait  en  lioinmes,  et  surtout  en  hnmnies 
de  lettres,  qui  foulait  s'illustrer  par  les  sciences,  par  les 
secours  et  l'éclat  qu'il  leur  doiniait;si.  dis-je  ,  sous  les 
ypux  et  à  la  nomination  immédiate  d'un  tel  prince,  de 
wmblables  personnages  ont  obtenu  des  fauUuili,  que  pen- 
ser des  académiciens  des  autres  pays,  que  penser  de  c« 
f[rnre  d'honneur  en  général ,  que  penser  de  ceux  qui  l'am  ■ 
bitiuuucot?  Fi'jrei  Pitox,  HtsiTOii,  Plessis  (  Armaud  ;. 


FRfe 

»  éclairés  de  l'Europe  résisteront  beau^ 
u  coup  à  ce  jugement  :  ce  n^est  pas  qu6 
le  panégyriste  dissimule  les  reproches 
qui  ont  été  faits  à  son  héros  ;  mais  il 
en  atténue  trop  quelques-uns ,  et  ii 
voudrait  trop  balancer  les  autres  pat 
quelques  biens  particuliers ,  ouvrage 
de  l'ordre  et  de  l'économie  du  roi  de 
Prusse.  Si  on  le  considère  comme  légis- 
lateur ,  ce  Code  Fre'de'ric ,  auquel  il  a 
permis  qu'on  donnât  son  nom ,  ne  mé- 
ritait pas  de  le  porter.  Ce  n'est  guère 
qu'un  extrait  dû  droit  romain ,  qui 
n'est  pas  au  dessus  du  livre  de  notre 
Domat.  Tous  les  défauts  des  lois  romai- 
nes y  sont ,  au  nombre  près ,  parce 
qu'on  a  tout  abrégé  ;  et  il  est  douteux 
qu'on  y  ait  ajouté  une  seule  grande 
vue  de  législation  ;  car  ce  n'en  est  pas 
une  que  cet  amour  de  simplicité  et  de 
rapide  exécution ,  qui  lient  bien  plus 
à  l'esprit  militaire  qu'à  l'esprit  législa- 
teur. Si  on  le  considère  comme  admi-^ 
nistraleur ,  l'inflexible  équité  ordonne 
de  porter  sur  sa  mémoire  un  jugement 
plus  sévère  encore.  On  cite  les  terres 
qu'il  a  fait  défricher,  les  sables  qu'il  a 
rendus  fertiles,  les  nombreux  villages 
qu'il  a  élevés  ou  peuplés;  des  manu- 
factures par  lui  créées  ou  encouragées  ; 
la  population  enfin  augmentée  dans 
son  royaume,  tandis  que  partout  ail- 
leurs elle  a  beaucoup  de  peine  à  se 
soutenir  à  son  niveau.  Tous  ces  faits 
peuvent  n'être  pas  assez  bien  établis  ; 
ils  peuvent  avoir  été  exagérés  ;  et  quand 
ils  seraient  tous  vrais  et  tous  exacts, 
l'administration  du  roi  de  Prusse  pour- 
rait encore  avoir  été  très  vicieuse. 
N'ayant  aucune  cour,  aucun  faste ,  avec 
beaucoup  d'économie ,  il  a  dû  avoir 
beaucoup  d'argent ,  et  avec  de  l'argent 
il  a  pu  faire  des  établisscniens  utiles  : 
il  en  a  fait.  Mais  ce  qu'un  roi ,  tel  puis- 
sant qu'il  soit ,  peut  faire  par  lui-même, 
est  toujours  peu  de  chose  en  comparai- 
son de  ce  que  ferait  sa  nation ,  s'il  la 
laissait  libre  de  toute  gêne  et  de  toute 
entrave  ,  en  protégeant  seulement  son 
industrie.  Cent  mille  esprits  qui  médi- 
tent constamment  sur  leurs  propres  in- 
térêts, voient  toujours  beaucoup  plus 


FRE 

»  de  choses  et  les  voient  mieux  qu'un 
»  seul  homme  de  génie  qui  médite  quel- 
«  quefois  sur  les  intérêts  des  autres.  Fré- 
)>  déric  avait  une  manie  bien  indigne  d'un 
»  esprit  supérieur.  H  voulait  tout  voir  et 
»  tout  administrer  par  lui-même;  au  lieu 
»  que  les  grands  administrateurs,  éclairés 
»  par  un  petit  nombre  de  principes  dont 
"  ils  répandent  la  lumière  sur  leur  na- 
»  tion  ,  sont  des  spectateurs  tranquilles  ; 
w  et  non  des  créateurs  inquiets  d'un  ordre 
»  qui  n'est  jamais  si  beau  ni  si  heureux 
«  que  lorsqu'il  s'établit  par  lui-même  sur 
M  les  lois  éternelles  de  la  nature  des  cho- 
i>  ses  et  des  hommes.  Le  bien  que  Frédé- 
»  rie  a  fait,  est  celui  d'un  particulier 
jj  très  puissant,  plutôt  que  l'œuvre  d'un 
»  souverain  qui  avait  du  génie  :  et  si  vous 
»  voulez  prendre  une  juste  idée  du  nié- 
«  chant  système  d'administration  qu'il 
»  avait  embrassé ,  voyez  à  quelles  misé- 
»  râbles  et  honteuses  pratiques  ce  système 
w  avait  conduit  un  grand  homme  :  voyez 
»  en  quelle  estime  il  avait  pris  cet  art  de 
»  nos  finances ,  dont  notre  désespoir  est 
u  de  ne  pouvoir  nous  délivrer;  voyez-îe 
»  travailler  de  concert  avec  des  faux-mon- 
»  nayeurs  qu'il  devrait  punir  du  dernier 
u  supplice ,  et  faire  servir  son  efi&gie  à 
«  attester  un  mensonge  et  à  couvrir  une 
»  fraude ,  multiplier  des  impôts  à  toutes 
»  les  entrées ,  sur  tous  les  objets  de  con- 
»  sommation ,  et  se  persuader  encore , 
«  comme  les  plus  bornés  de  nos  polili- 
»  ques,  que  ce  qui  est  pris  sur  la  denrée 
»  n'est  pas  pris  sur  la  terre ,  que  ce  qui 
»  est  pris  sur  les  marchandises  étrangères 
»  n'est  pas  pris  sur  les  nationaux  qui  les 
»  achètent  :  voyèz-le  porter  l'inspection 
»  d'un  inquisiteur,  sur  des  actions  aban- 
M  données  à  la  liberté  dans  les  empires 
»  les  plus  despotiques  ;  défendre  à  ses 
M  sujets  riches  de  marier  leurs  filles  sans 
»  sa  permission  ;  leur  interdire  les  longs 
))  voyages  ;  ne  pas  leur  permettre  de 
»  transporter  hors  de  la  Prusse  leur  for- 
»  tune  :  le  royaume  d'un  roi  philosophe 
»  semble  être  converti  en  un  cloître. 
»  Frédéric  oublie ,  ou  il  ignore  que  la 
»  liberté  est  la  chaîne  la  plus  forte  qui 
»  attache  les  hommes  dans  un  pays  ,  et 
»  il  croit  rendre  son  empire  florissant  en 


FRE  491 

X  dépouillant  ses  sujets  des  droits  les  plus 
M  sacrés  de  la  nature.  Je  ne  croirai  donc 
»  pas  à  tout  ce  qu'on  a  dit  des  prospérités 
»  de  son  peuple ,  parce  que  je  ne  crois 
1)  pas  aux  prospérités  des  esclaves  ;  et 
»  quand  même  ce  qu'on  en  a  dit  serait 
i>  incontestable  ,  je  croirai  qu'avec  un 
«  système  opposé ,  Frédéric  eût  fait  cent 
«  fois  plus  de  bien  encore.  Et  qu'on  ne 
»  dise  pas  que  j'oppose  un  principe  gé- 
»  néral  à  un  fait  ;  ce  principe  général  est 
))  fondé  sur  des  faits  universels  ;  au  reste, 
a  et  je  dois  le  répéter ,  le  panégyriste  du 
u  roi  de  Prusse  énonce  lui-même  presque 
«  tous  ces  reproches,  et  s'il  tâche  de  les 
»  adoucir  en  faveur  d'un  monarque  qui  a 
)>  d«  si  grands  droits  à  l'admiration  uni- 
«  verselle,  on  voit  sans  incertitude  qu'il 
j)  ne  partage  aucune  de  ses  erreurs ,  et 
«  qu'il  est  loin  ,  comme  tant  d'autres,  de 
»  se  servir  des  fautes  d'un  grand  homme, 
»  pour  attaquer  des  vérités  auxquelles  on 
"  doit  plus  de  respect  encore.  «  Outre 
la  vie  dont  nous  avons  cité  quelques  pas- 
sages, et  qui  a  paru  à  Strasbourg  en  17  88  , 
4  volumes  in-1 2  ,  l'abbé  Denina  en  a  dop- 
né  une  autre  en  17  89,  beaucoup  plus 
courte,  mais  écrite  avec  plus  de  discer- 
nement et  de  sagesse  ,  1  volume  in-8.  Le 
meilleur  ouvrage  anglais  sur  Frédéric  II 
est  intitulé  Tableau  du  règne  de  Fré- 
déric II ,  avec  un  parallèle  entre  ce 
prince  et  Philippe  II  de  Macédoine ,  par 
Gillies ,  Londres,  1 809.  (  Le  général  Jomi- 
ni ,  dans  son  Traité  des  grandes  opéra- 
tions militaires ,  a  donné  l'Histoire  cri~ 
tique  des  campagnes  de  Frédéric ,  corn,' 
parées  à  celles  de  V empereur  Napoléon. 
On  trouve  dans  les  œuvres  de  Guibert  YE- 
loge  historique  de  Frédéric  II  .•  on  peut 
consulter  encore  P^ie  de  Frédéric  II 
(par  Lavaux  ) ,  Strasbourg  ,  1  788  ,  4  vol. 
in-8  ;  Lettres  sur  Frédéric  II  { par  le 
mêroe  ) ,  ibid.  ,  3  vol.  in-S  ;  l'ouvrage  de 
Busching ,  Caractère  de  Frédéric  II ^ 
traduit  de  l'allemand,  et  les  souvenirs  de 
Thiébaud,  Taris,  1810,  5  vol.  in-8.)  On 
a  publié  ses  OEuvres  primitives ,  c'est- 
à-dire  ,  la  collection  des  ouvrages  qui 
avaient  paru  de  son  vivant,  en  4  vol. 
in-8  ,  Amsterdam ,  1 790,  et  ses  OEuvres 
posthumes ,  en  20  vol.  in-8  ,  avec  Sivie, 


493  FRÈ 

Amsterdam,  1789.  Nous  n'entrerons  pas 
dans  le  détail  de  tout  ce  qu'ils  présentent 
de  matières  propres  à  l'éloge  ou  à  la  cen- 
sure. I!  en  est  peu  qu'on  puisse  regarder 
comme  lui  appartenant  en  entier.  Mais  si 
quelques  philosophes  lui  ont  attribué  les 
leurs ,  un  d'eux  fut  accusé  de  s'être  attri- 
bué les  siens  ;  et  l'on  sait  ce  qu'il  lui  en 
coûta.  Il  n'y  a  pas  d'apparence  qu'un 
prince  qui  avait  un  grand  sens  ait  écrit 
tout  ce  qu'on  lit  dans  quelques-uns  de 
ces  ouvrages  ,  moins  encore  qu'il  l'ait 
pensé.  (  Parmi  ses  ouvrages  on  remarque 
VAnti- Machiavel;  les  Mémoires  pour 
servir  a  l'histoire  de  la  maison  de  Bran~ 
dehourg  ;  les  Poésies  du  philosophe  de 
Sans- Souci;  V Histoire  de  mon  temps 
(1740-45),  V Histoire  de  la  guerre  de 
sept  ans ,  etc.  On  peut  résumer  ainsi  le 
règne  de  ce  prince)  :  il  montra  de  bonne 
heure  du  goût  pour  l'étude  et  les  lettres , 
et  ce  fut  même  un  sujet  de  brouillerie 
avec  son  père ,  qui  connaissait  le  danger 
de  ses  études  philosophiques  (  voyez  Fré- 
déric-Guillaume). Le  jeune  Frédéric  ne 
persista  pas  moins  dans  ses  idées  ;  il  étu- 
dia la  philosophie  de  Wolff,  se  lia  avec 
"Voltaire ,  et  se  permit  avec  lui  les  plai- 
santeries les  plus  indécentes  contre  le 
christianisme  et  contre  les  prêtres.  En 
montant  sur  le  trône ,  il  ne  craignit  pas 
de  renoncer  à  tout  acte  de  religion ,  et  il 
accueillit  successivement  tous  les  écri- 
vains à  qui  leurs  ouvrages  irréligieux  at- 
tiraient quelques  traverses ,  c'est-à-dire  , 
tous  les  hommes  dont  les  idées  d'innova- 
tion menaçaient  leur  pays  d'une  révolu- 
tion prochaine.  Il  est  vrai  que  lorsqu'il 
connut  mieux  leurs  principes ,  il  les  éloi- 
gna de  sa  cour  ;  mais  devait-il  leur  en 
permettre  l'entrée?  N'était-ce  pas  une 
injure  faite  aux  autres  puissances,  que 
de  donner  un  asile  à  des  hommes  pros- 
crits dans  leur  patrie  pour  leurs  principes 
dangereux  ?  Berlin  éprouvera  long-temps 
l'influence  funeste  de  ses  exemples,  de 
ses  écrits  et  de  ceux  des  philosophes  qu'il 
admettait  dans  ses  états  et  même  dans 
son  intimité.  On  a  dit  néanmoins  qu'il 
aima  ,  qu'il  protégea  les  catholiques  ;  ce- 
pendant, on  lit  dans  l'histoire ,  qu'à  son 
entrée  dans  la  Silésie ,  il  favorisa  les  lu- 


FRB 

thériens ,  et  qu'il  étendit  leurs  privilèges 
au  point  qu'ils  eurent  des  églises  de  toute 
part  ;  qu'au  contraire  ,  il  prit  des  mesures 
fâcheuses  contre  les  catholiques ,  qu'il 
défendit  les  pèlerinages ,  supprima  de» 
fêles ,  et  conféra ,  de  sa  propre  autorité  , 
des  bénéfices  à  des  ecclésiastiques  réfu- 
giés dans  ses  états ,  et  suspects  sur  la  re- 
ligion ,  tels  que  l'abbé  de  Prades  et  l'abbé 
Bastiani.  Son  mépris  pour  la  religion  était 
tel,  qu'il  fit  construire,  sur  la  place  des 
Gendarmes  à  Berlin  ,  une  salle  de  spec- 
tacle entre  une  église  catholique  et  un 
temple  luthérien ,  «  de  manière ,  dit  un 
»  historien  de  sa  vie ,  que  les  murs  de 
»  ces  édifices  se  touchaient ,  et  que  sou- 
»  vent  l'office  divin  était  interrompu  par 
»  le  bruit  de  l'orchestre  et  le  chant  des 
»  acteurs.  »  Il  est  triste  de  voir  qu'un 
souverain  qui  devrait  protéger  la  religion 
«n  fasse  ainsi  un  sujet  de  dérision  et  de 
caprice.  Il  n'avait  guère  plus  de  respect 
pour  la  justice ,  que  par  dessus  tout  un 
monarque  devrait  respecter ,  puisque 
c'est  le  lien  de  toute  société  ;  «  comme 
»  il  aimait ,  dit  un  de  ses  historiens  ,  à 
»  être  le  maître  en  tout ,  et  qu'il  ne  pou- 
»  vait  soidfrir  qu'on  lui  résistât  ;  afin 
»  d'entretenir  la  crainte  dans  tous  les 
D  tribunaux  et  les  collèges ,  il  cassait  de 
»  temps  en  temps  des  gens  en  place  sans 
w  examen  ,  sans  donner  raison  de  sa  con- 
»  duite ,  sans  qu'il  y  eût  aucune  appa- 
))  rence  de  faute.  »  Nous  ne  lui  reproche- 
rons pas  Dresde  livrée  au  pillage  ,  la  gar- 
nison de  Nciss  passée  au  fil  de  l'épce,  les 
forteresses  de  Custrin  et  de  Spandaw 
pleines  de  prisonniers  d'état.  Ce  sont  là 
de  ces  traits  propres  à  tous  les  conque- 
rans ,  et  l'on  ne  peut  en  attendre  davan- 
tage d'un  guerrier  incrédule.  Si  nous 
passons  à  l'administration  intérieure  et 
aux  détails  domestiques,  il  était  d'une 
sévérité  implacable,  et  oubliait  aisément 
les  plus  importans  services.  On  lui  re- 
proche aussi  son  goût  pour  la  raillerie  , 
si  peu  séant  pour  un  roi.  Il  n'est  pas  un 
seul  de  ses  amis,  de  ses  courtisans,  de 
SCS  savans ,  de  ses  philosophes,  qu'il 
n'ait  cherché  à  humilier.  On  l'accuse  en- 
core d'une  avarice  excessive  ,  et  ses  his- 
toriens en  citent  des  exemples  peu  hono- 


FRE 

râbles.  L'auteur  du  Voyage  en  Prusse , 
in-8  ,  1807  ,  prétend  qu'il  n'aimait  per- 
sonne ,  et  cite  de  lui  des  traits  étranges 
d'égoïsme  et  de  dureté  ;  il  lui  reproche 
des  actes  iniques,  une  profonde  indiffé- 
rence pour  l'opinion  publique,  son  mé- 
pris pour  ses  sujets  ,  sa  défiance  de  ceux 
qui  l'entouraient.  Il  faut  tirer  le  voile  sur 
ses  mœurs,  Voltaire  en  a  dévoilé  la  tur- 
pitude. Quant  à  ses  écrits ,  on  est  fâché 
d'y  voir  Frédéric  descendre  au  rôle  cho- 
quant d'un  conjuré  ,  et  parler  de  la  reli- 
gion avec  une  licence  révoltante  et  le  ton 
d'un  homme  de  mauvaise  compagnie.  Il 
est  vrai  que  dans  quelques-uns  de  ses  ou- 
vrages il  a  changé  de  langage,  et  qu'a- 
près avoir  approuvé  les  projets  des  phi- 
losophes ,  tant  qu'il  a  cru  qu'ils  n'en  vou- 
laient qu'à  la  religion  ,  il  a  cherché  à 
les  réfuter  ;  mais  c'est  lorsqu'il  les  a  vus 
attaquer  aussi  les  rois.  «  Que  voulez-vous, 
»  écrivait-il  à  d'Alembert,  que  le  public 
«  pense ,  lorsqu'il  voit  des  écrits  du  même 
»  auteur  se  contredire ,  qu'on  voit  des 
»  libelles  infâmes  paraître  contre  le  gou- 
»  vernement ,  et  des  cyniques  effrontés 
»  qui  mordent   indifféremment  tout  ce 
»  qu'ils  rencontrent.  »  Il  écrivait ,  dans 
un  autre  endroit,  toujours   en  parlant 
des  philosophes  :  «  Mon  avis  serait  de 
•»  loger  ces  messieurs  aux  Petites-Maisons , 
»  pour  qu'ils  fussent  les  législateurs  des 
M  fous  leurs  semblables,  ou  de  leur  don- 
»  ner  à  gouverner  une  province  qui  mé- 
»  ritât  d'être  châtiée.  Ils  apprendraient , 
»  par  leur  expérience,  après  qu'ils  y  au- 
»  raient  tout  mis  sens  dessus  dessous, 
M  qu'ils  sont   des   ignorans ,  et   surtout 
»  qu'on    s'expose  à   dire  force    sottises 
»  quand  on  se  mêle  de  parler  de  ce  qu'on 
»  n'entend  pas.  »  Il  est  malheureux  qu'il 
»  n'ait  pas  toujours  pensé  de  même.  «  Fré- 
»  déric  fut ,  dit  un  écrivain  judicieux , 
)>  un  grand  capitaine  ;  mais  le  litre  de 
»  grand  roi  embrasse  de  plus  hautes  qua- 
»  lités.  Les  vertus  guerrières  étendent 
»  les  empires  :  ce  sont  les  vertus  civiles 

M  qui  les  affermissent Frédéric  a  créé 

»  l'armée  prussienne  qui  déjà  n'existe 
»  plus  ;  il  n'a  point  créé  de  nation.  Il  a 
w  fondé  une  tactique  nouvelle  ;  il  n'a 
>'  point  formé  cet  esprit  public  et  social 


FRE  4g3 

»  qui  naît  de  l'amour  de  l'ordre.  Il  a 
M  montré  en  cela  moins  de  prévoyance 
»  qu'il    n'appartient  à  un    prince   d'en 

»  avoir Il  fallait  donc  fonder  son  trône 

»  sur  une  base  plus  solide  qu'une  épée; 
»  il  fallait  rendre  sa  nation  forte  ea 
»  mœurs  et  en  principes ,  y  répandre  cet 
»  esprit  d'ordre  et  de  vertu  qui  résiste 
»  aux  chances  des  combats  et  aux  se- 
»  cousses  des  révolutions  ;  et ,  par  un 
»  insigne  aveuglement ,  ce  prince  ras- 
»  sembla  autour  de  lui  tous  les  esprits 
»  forts  de  l'Europe ,  comme  pour  multi- 
»  plier  dans  son  pays  les  exemples  de 
M  licence,  d'impiété  et  de  dépravation.  « 
Pour  terminer  cet  article  ,  nous  y  ajou- 
terons ce  portrait  de  Frédéric  tracé  en 
peu  de  mots.  Sa  vie  ne  fut  qu'un  enchaî- 
nement d'artifices  :  en  violant  toutes  les 
lois  de  l'humanité  ,  il  avait  l'audace  d'en 
proclamer  les  droits.  Dominé  par  deux 
passions  cruelles ,  l'ambition  et  l'avarice, 
il  se  montra  plus  jaloux  de  l'affermisse- 
ment de  son  pouvoir  que  du  bonheur  de 
ses  sujets. 

*  FRÉDÉRIC-GUILLAUME  II,  roi 
de  Prusse,  né  le  25  septembre  1744  ,  était 
neveu  du  grand  Frédéric ,  qui  lui  té- 
moigna toujours  beaucoup  d'affection  , 
mais  ne  voulut  pas  qu'il  fût  ménagé  sous 
aucun  rapport.  Ainsi  on  l'exposait  aux 
hasards  de  la  guerre  comme  un  simple 
hussai'd.  De  bonne  heure  il  donna  les  plus 
grandesespérances.  Chargé,  dans  la  guerre 
de  la  succession  de  Bavière  ,  de  conduire 
un  corps  d'armée  en  Silésie,  il  le  ramena 
sans  se  laisser  entamer ,  quoiqu'il  fût 
suivi  par  des  forces  beaucoup  supérieures 
aux  siennes.  Il  parvint  au  trône  à  l'âge 
de  42  ans,  le  IG  août  17  86,  et  montra 
d'abord  des  intentions  de  bienfaisance.  Il 
répara  plusieurs  injustices  de  son  prédé- 
cesseur, diminua  quelques  impôts,  abolit 
des  monopoles  vexatoires ,  et  voulut  que 
ses  sujets  jouissent  d'une  plus  grande  li- 
berté ;  mais  d'un  autre  côté ,  il  se  montra 
fort  jaloux  de  son  autorité  ,  et  il  écarta 
successivement  du  ministère  les  hommes 
les  plus  distingués  par  leurs  talens  et 
leur  expérience.  En  même  temps  il  s'a- 
bandonnait à  son  goût  excessif  pour  la 
débauche ,  et  il  se  laissait  dominer  par 


494  FRE 

ses  maîtresses  et  des  favoris  obscurs.  Un 
autre  travers  de  Frédéric  fut  sa  crédulité 
pour  les  illumines ,  alors  très  nombreux 
en  Allemagne,  qu'il  accueillit  dans  son 
palais,  et  qui  parvinrentà  égarer  son  ima- 
gination et  à  tromper  son  esprit.  Dès 
lors,  les  emplois  ne  furent  plus  accordés 
qu'aux  plus  misérables  intrigues;  les  tré- 
sors que  Frédéric  avait  amassés  pour  des 
circonstances  importantes,  furent  dissi- 
pés d'une  manière  bonteuse,  et  l'armée 
qui  cessa  d'être  encouragée  par  la  pré- 
sence de  son  chef,  perdit  tout  à  fait  sa 
supériorité  ;  mais  ce  qu'il  y  eut  de  plus 
malUeureux  encore,  ce  fut  sa  faiblesse  et 
sa  versalililé  dans  les  occasions  les  plus 
importantes.  On  le  vit  successivement 
abandonner  les  Turcs ,  les  Polonais  elles 
Belges ,  après  les  avoir  excités  à  des  at- 
taques imprudentes.  En  1792,  il  serait 
à  la  tète  de  la  coalition  qui  devait  réta- 
blir Louis  XVI  sur  le  trône  ,  et  après  être 
parvenu  à  30  lieues  de  Paris  avec  une 
armée  de  80,000  hommes ,  il  négocia  avec 
Je  parti  révolutionnaire,  au  moment  où 
il  fallait  agir  avec  le  plus  de  vigueur , 
pour  ne  pas  lui  laisser  le  temps  de  se  re- 
connaître. Son  ai-mée  revint  sur  le  Rhin, 
où  elle  combattit  encore  deux  ans  sans 
résultat.  Il  s'occupait  en  même  temps  , 
de  concert  avec  la  Fiussie,  d'un  nouveau 
partage  de  la  Pologne  ,  et  ce  fut  lui  qui 
triompha  en  1794  deKosciusko,  et  s'em- 
para de  Cracovie.  En  1795,  il  se  retira 
tout  à  fait  de  la  coalition  ,  abandonnant  à 
la  république  française  ses  états  de  la  rive 
gauche  du  Rhin,  et  laissant  l'Autriche 
presque  seule  aux  prises  avec  cette  puis- 
sance ,  dans  le  moment  où  son  agression 
et  ses  menaces  avaient  porté  le  parti  ré- 
volutionnaire de  France  à  mettre  sous  les 
armes  une  immense  population.  C'est  à 
une  telle  défection  et  dans  de  pareilles 
circonstances,  qu'il  faut  sans  doute  attri- 
buer tous  les  malheurs  qui  accablèrent 
depuis  l'Europe.  Frédéric-Guillaume  ne 
jouit  pas  lui-même  long-temps  de  la  paix 
qu'il  venait  de  procurer  à  ses  sujets.  Il 
mourut  le  IG  novembre  1797  ,  laissant  la 
couronne  à  son  fils  Frédéric-Guillaume  III . 
M.  le  comte  de  Ségur  aîné  a  publié  en 
1 800 ,  V Histoire  des  principaux  événe- 


FRE 

mens  du  règne  de  Fre'déric-Guillaumc  Ily 
roi  de  Prusse,  et  tableau  politique  de 
l'Europe  depuis  178G  jusqu'en  1796, 
contenant  un  précis  des  révolutions  de 
Brabant,  de  Hollande ,  de  Pologne  et 
de  France,  3  vol.  in-8.  Cette  histoire  est 
écrite  en  général  avec  élégance.  On  y 
trouve  des  portraits  bien  frappés  ;  mais 
on  y  désirerait  de  temps  en  temps  quel- 
que chose  de  plus  précis,  de  plus  mâle, 
de  plus  sévère. 

*  FRÉDÉRIC-GUILLAUME,  premier 
roi  de  Wurtemberg,  naquit  le  6  septem- 
bre 1 7  64 ,  de  Charles-Eugène  duc  de  Wur- 
temberg. Il  était  entré  très  jeune  au  ser- 
vice de  Prusse  en  qualité  de  colonel ,  et 
s'élait  distingué  dans  la  guerre  de  la  suc- 
cession pendant  laquelle  il  avait  obtenu 
le  grade  de  major-général.  L'impératrice 
Catherine  II ,  au  service  de  laquelle  il  s'é- 
tait placé  ensuite,  le  fit  lieutenant-général 
et  lui  confia  le  gouvernement  de  la  Finlan- 
de. Marié  d'abord  à  la  princesse  Auguste- 
Caroline  de  Brunswick-Wolfcnbuttel,  puis 
en  secondes  noces  (  1 8  mai  17  97)  à  Char- 
lotte-Àuguste-Mathilde  d'Angleterre,  il 
fut  appelé  sur  le  trône  ducal  de  Wurtem- 
berg ,  par  la  mort  de  son  père  qui  eut  lieu 
le  23  décembre  17  97.  Son  administration 
est  remplie  d'un  grand  nombre  d'événe- 
mens.  Une  constitution  souscrite  à  Tu- 
bingue  en  1 514  par  le  prodigue  Ulric,  et 
garantie  depuis  par  l'Autriche,  la  Prusse 
et  le  Hanovre,  assurait  aux  Etats  de  Wur- 
temberg le  droit  de  surveiller  l'assiette 
de  l'impôt  et  l'emploi  de  son  produit  :  le 
duc  chercha  à  s'affranchir  de  cette  gêne , 
et  comme  il  trouva  de  la  résistance ,  de 
violens  démêlés  eurent  lieu  entre  lui  et 
les  Etats  :  il  ne  vit  même  dans  cette  op- 
position que  le  résultat  des  idées  déma- 
gogiques dont  ses  sujets  commençaient  à 
être  infectés,  et  fit  arrêter  les  principaux 
membres  de  cette  assemblée,  comme  ac- 
cusés d'entretenir  des  relations  politique» 
avec  les  républicains  français.  Un  traité 
de  subsides  conclu  le  20  avril  1800  avec 
l'Angleterre,  l'intéressant  aux  négocia' 
tions  de  la  paix  d'Amiens ,  il  obtint  après 
leur  conclusion  ,  des  indemnités  assej 
considérables  pour  lui  et  pour  sa  famille 
Dans  le  récès  de  la  députation  de  l'empire 


i 


FRE 

(  25  février  J  80Sj ,  il  reçut,  ainsi  que  cinq 
autres  princes  proteslans  la  dignité  élec- 
torale. Lorsque  la  guerre  fut  déclarée  par 
la  France  à  l'Autriche,  l'électeur  de  Wur- 
temberg oublia  ce  qu'il  devait  à  la  confé- 
dération germanique  pour  ne  plus  songer 
qu'à  ses  idées  ambitieuses  :  il  reçut  Buo- 
naparle  à  Ludwigsbourg,  et  conclut  avec 
lui  le  4  octobre  1805  un  traité  par  lequel 
l'intégralité  de  son  électorat  était  garan- 
tie ,  et  en  revanche  il  devait  fournir  à  son 
prolecteur  un  corps  de  huit  à  dix  mille 
hommes.  C'était  une  époquedeconfusion  : 
chaque  prince  usui-pait  les  titres  ambitieux 
que  son  orgueil  lui  faisait  imaginer  :  ainsi 
l'archiduc  d'Autriche,  François  II,  avait 
déjà  en  1804  pris  de  sa  propre  autorité 
le  titre  impérial  :  les  électeurs  de  Wur- 
temberg et  de  Bavière  suivirent  son 
exemple  ;  ils  prirent  le  titre  de  roi  sous 
lequel  ils  furent  désignés  comme  alliés 
de  Buonaparte  dans  le  traité  de  Pres- 
bourg  :  ils  se  firent  proclamer  dans  leurs 
états  le  l*""  janvier  1806.  Le  nouveau 
roi  de  Wurtemberg  avait  reçu  en  outre 
par  ie  même  traité  les  cinq  villes  dites 
du  Danube,  les  deux  comtés  de  Hohen- 
berg,  le  Landgraviat  de  Nellenbourg 
et  la  préfecture  d'Altorf.  Tout  souriait 
à  ce  nouveau  monarque.  Frédéric  I  avait 
pris  Buonaparte  pour  modèle,  et  il  ten- 
dait comme  lui  au  pouvoir  absolu  :  ce 
qui  était  contraire  à  l'ancienne  organi- 
sation de  cette  principauté.  En  vertu 
de  la  convention  signée  le  1 2  octobre 
1805,  Buonaparte  avait  délégué  à  Fré- 
déric toute  la  puissance  souveraine  : 
voulant  en  conséquence  user  pleinement 
du  droit  que  lui  accordait  son  maître,  il 
cassa  les  Etats  le  3  du  même  mois  :  alors 
disparut  l'ancienne  constitution  du  pays  : 
de  là  de  sourds  mécontentemens  ,  puis 
des  soulèvemens  qu'il  fallut  réprimer  par 
des  moyens  extrêmes ,  enfin  cette  fer- 
mentation des  esprits  qu'une  mesure  in- 
considérée excita  et  entretint  jusqu'en 
1814  ,  époque  où  le  roi  se  vit  contraint 
de  faire  desconcessions  exorbitantes  et  de 
donner  une  constitution  qui  lui  attira  de 
la  part  de  la  noblesse  médiatisée  de  si 
amères  et  de  si  j ustes  censures.  Il  avait  été 
un  des  premiers  à  signer  l'acte  de  confé- 


FRE  495 

déralisme  des  états  du  Rhin  proposé  par 
Buonaparte  (  12  juillet  1806  ).  Après  avoir 
assisté  à  la  conférence  d'Erfurt  qui  eut 
lieu  en  1808  entre  Buonaparte  et  l'empe- 
reur Alexandre,  il  prit  l'année  suivante 
ainsi  que  cinq  autres  princes  de  la  con- 
fédération ,  la  part  la  plus  active  à  la 
guerre  des  Français  contre  l'Autriche.  La 
paix  de  Schœnbrunn  lui  permit  de  s'oc- 
cuper un  peu  de  son  royaume ,  et  on  le 
vit  faire  des  échanges  de  territoire  avec 
le  roi  de  Bavière.  Après  avoir  assisté  en 
1809  à  l'anniversaire  du  couronnement 
de  Buonaparte ,  il  réunit  encore  ses  trou- 
pes aux  troupes  françaises  pour  faire  la 
campagne  de  Russie.  Après  le  désastre  de 
cette  folle  expédition ,  il  resta  encore 
quelque  temps  fidèle  à  son  allié  ;  mais 
cédant  à  la  nécessité  des  circonstances  , 
il  fit  comme  le  roi  de  Bavière  :  il  se  ran- 
gea du  côté  des  Russes  et  des  Prussiens. 
Sa  mémoire  n'est  pas  dans  cette  circon- 
stance entachée  de  trahison  ,  et  ce  n'est 
pas  sur  un  champ  de  bataille  que  se  fit  ce 
grand  revirement.  Dès  le  22  octobre  1813, 
un  de  ses  ministres  entama  des  négocia- 
tions à  ce  sujet,  et  le  8  du  mois  suivant  le 
comte  de  Zeppelin  signait  à  Fulde,  en 
son  nom  ,  un  traité  par  lequel  il  promet- 
tait de  donner  12,000  hommes  aux  puis- 
sances alliées.  On  a  remarqué  le  mani- 
feste qu'il  publia  dans  cette  circonstance  r 
il  se  borne  à  reprocher  à  Buonaparte  d'a- 
voir laissé  dégarnies  de  troupes  et  expo- 
sées à  l'invasion  des  ennemis,  les  fron- 
tières du  royaume  que  l'acte  de  con- 
fédération lui  imposait  de  protéger.  Lors- 
que les  événemens  qui  amenèrent  la  chute 
de  Buonaparte  eurent  été  accomplis,  il 
se  rendit  à  Vienne  et  assista  au  congrès 
qu'il  quitta  brusquement  pour  revenir  à 
Stuttgard<  son  titre  de  roi  avait  été  main- 
tenu par  les  hautes  puissances.  Il  convo- 
qua les  Etats  pour  le  15  mars  1815,  et, 
lorsqu'ils  furent  réunis  ,  il  leur  présenta 
l'acte  constitutionnel  qu'il  donnait  à  son 
peuple.  Cet  événement  produisit  une  sen- 
sation très  forte  dans  toute  l'Allemagne, 
et  l'on  assure  que  cette  concession  blâ- 
mée partons  les  souverains ,  empoisonna 
le  reste  de  sa  vie.  Il  mourut  le  30  septem- 
bre 181 G  :son  fils  Guillaume  1%  né  le  2 T 


496  FRÉ 

septembre  1807  lui  a  succédé.  Le  carac- 
tère de  Frédéric  présente  de  singulières 
variations  :  pendant  presque  toute  sa  vie, 
il  fut  l'ennemi  des  idées  libérales  et  ten- 
dit au  pouvoir  absolu  :  c'était  cet  amour 
de  l'autorité  qui  avait  excité  celte  lutte 
qu'il  avait  eu  à  soutenir  avec  les  Etats  5 
c'était  la  même  passion  qui  l'avait  en- 
gagé dans  l'alliance  qu'il  contracta  avec 
Buonaparle,  et  voilà  qu'à  la  fin  de  sa  vie, 
il  renonça  à  un  système  auquel  il  avait 
dû  sa  puissance,  avec  ses  titres  d'élec- 
teur et  de  roi.  Yit-il  dans  la  chute  de  son 
protecteur  une  grande  leçon,  et  redouta- 
t-il  une  même  catastrophe  due ,  comme 
la  sienne ,  à  l'abus  du  pouvoir  ?  ou  bien 
céda-t-il  à  cette  puissance  secrète  qui 
agit  sur  tant  d'esprits  en  1814,  et  qui , 
en  préconisant  les  idées  modifiées  de  la 
révolution  française  ,  opéra  l'état  de  crise 
politique  où  se  trouvent  maintenant  tous 
les  états  de  l'Europe.  Frédéric  avait  du 
goût  pour  les  arts ,  mais  il  les  encoura- 
gea avec  trop  peu  de  discernement.  Il 
avait  donné  l'une  de  ses  filles  en  mariage 
à  l'un  des  frères  de  Buonaparte ,  Jérôme , 
alors  roi  de  Westphalie. 

*  FRÉDÉRIC -AUGUSTE,  premier 
roi  de  Saxe,  né  le  23  décembre  1750, 
était  fils  de  l'électeur  Frédéric-Christian  , 
auquel  il  succéda  en  1763  :  le  jeune  prince 
n'avait  alors  que  13  ans.  Jusqu'en  1768 
la  régence  fut  entre  les  mains  du  prince 
Xavier,  l'aîné  de  ses  oncles.  Alors  la  Saxe 
eut  beaucoup  à  soufi'rir  de  la  mauvaise 
administration  de  ce  prince ,  ensorte  qu'à 
l'époque  oii  le  jeune  électeur  prit  les  rê- 
nes de  l'administration  ,  il  avait  bien  des 
maux  à  réparer.  Cependant  la  sagesse  de 
sa  conduite,  l'économie  sévère  qu'il  ap- 
porta dans  les  finances ,  et  le  soin  qu'il 
mit  à  faire  oublier  le  dernier  gouverne- 
ment, contribuèrent  en  peu  de  temps  à 
changer  la  face  de  ses  étals.  Il  était  di- 
rigé par  les  habiles  conseils  de  son  mi- 
nistre Gutschmid,  et  ce  fut  grâce  à  son 
zèle  et  aux  bonnes  intentions  de  l'élec- 
teur que  l'on  vit  bientôt  renaître  l'indus- 
trie, et  le  papier  monnaie  qui  était  discré- 
dité reprit  sa  valeur,  en  même  temps  que 
les  esprits  commençaient  à  avoir  quelque 
confiance  danslegouverneraent.  En  1 769, 


FRÉ    > 

Frédéric  épousa  la  princesse  Marie-Amélie- 
Auguste,  sœur  de  l'électeur  de  Bavière. 
Frédéric  s'occupa  continuellement  de  la 
égislation  criminelle  de  ses  états;  il  y 
apporta  des  modifications  dictées  pat 
l'humanité  :  ainsi  en  17  70  il  fit  abolir  la 
question  et  la  torture.  Malgré  ses  inten- 
tions paternelles  hautement  manifestées, 
il  se  forma  contre  lui  en  1776  un  com- 
plot, auquel  on  a  prétendu  qu'avait  parti- 
cipé sa  mère  rélectrice  douairière,  mécon- 
tente de  ce  qu'on  l'avait  éloignée  des  af- 
faires. Ce  fut  le  cabinet  de  Berlin  qui  en 
eut  connaissance  et  qui  en  instruisit  l'E- 
lecteur. Le  colonel  Aydolo ,  saxon  d'ori- 
gine ,  était  le  chef  de  la  conspiration  :  il 
fut  arrêté  et  renfermé.  Au  reste  dans  cette 
circonstance  malheureuse,  Frédéric  eut 
des  preuves  éclalantes  de  dévouement  et  de 
zèle  de  la  part  d'un  de  ses  chambellans  ^ 
nommé  xMariolini.  Lorsque  le  roi  de  Prusse* 
Frédéric  II,  prévoyant  les  ambitieux  pro- 
jets de  l'Autriche,  voulut  former  une  ligue 
pour  tenir  cette  puissance  en  échec  ,  il 
y  entraîna  facilement  le  jeune  électeur 
de  Saxe,  qui  ne  cherchait  qu'à  défendre 
les  droits  échus  à  sa  mère  par  la  mort  de 
l'électeur  de  Bavière,  Maximilien-Joseph, 
dernier  enfant  mâle  de  sa  maison.  Le 
traité  de  Teschen  signé  le  16  mai  1779  , 
mit  fin  à  la  guerre ,  et  en  mênie  temps  il 
fut  convenu  que  l'Autriche  renoncerait 
à  toutes  ses  prétentions  sur  la  Bavière ,  et 
que  Frédéric  serait  substitué  à  tous  les 
droits  de  sa  mère.  Ce  prince  donna  plus 
tard  une  grande  preuve  de  sagesse ,  lors- 
qu'en  1791  il  refusa  la  couronne  de  Po- 
logne rendue  héréditaire  :  elle  lui  était 
proposée  par  la  diète  polonaise.  Il  savait 
que  le  but  de  cette  nation  était  <le  se  sous- 
traire à  l'influence ,  toujours  malheureuse 
pour  elle ,  de  la  Russie ,  et  qu'il  était  im- 
possible de  se  maintenir  sur  ce  trône  nou- 
veau, sans  l'agrément  de  cette  puissance 
toujours  rivale.  Au  reste  il  était  dirigé 
alors  par  les  cabinets  de  Berlin  et  de 
Vienne,  qui  le  dirigèrent  encore  dans  les 
conférences  de  Pilnitz,  faites  à  la  suite 
des  progrès  de  la  révolution  française.  Il 
prit  part  à  la  coalition  qui  fut  organi- 
sée contre  la  France,  et  fournit  son  con- 
tingent dans  les  armées  qui  combattirent 


FRE 

les    troupes   françaises  jusqu'en    1796, 
époque  où  fut  conclu  le  traité  de  Berlin 
(  6  août  1 796  ) ,  entre  la  république  fran- 
çaise et  le  roi  de  Prusse  ,  relativement  à 
la  neutralité  du  nord  de  l'Allemagne  : 
alors  Frédéric  se  rangea  à  ce  système 
de  neutralité ,  et  ses  troupes  ne  fui-ent 
plus  employées  que  pour  la  garde  de  ses 
états  :  elles  couvrirent  ses  provinces  mé- 
ridionales. D'ailleurs  il  avait  conclu  avec 
Je  général  Jourdan  un  armistice  dans  le 
même  but.  En  1806  il  était  toujours  sous 
l'influence  de  laPrusse  et  comme  la  guerre 
était  déclarée  à  ce  royaume  par  la  France, 
non-seulement  il  permit  aux  troupes  prus- 
siennes de  passer  sur  ses  états ,  il  fournit 
encore  22,000  hommes  destinés  à  agir  de 
concert  avec  elles.   Après  les  victoires 
d'Iéna  et  de  Auerstaedt,  la  Saxe  fut  occu- 
pée militairement  par  les  Français,  et  il 
ne  fut  permis  à  Frédéric  de  rester  neutre 
qu'à  la  condition  de  payer  une  contribu- 
tion de  guerre  de  26  millions  :  les  fortifi- 
cations de  Dresde  furent  même  démolies. 
Cependant  Buonaparte  aggrandit  bientôt 
la  Saxe  ,  et  donna  à  l'Electeur  le  litre  de 
roi.  C'est  en  cette  qualité  que  ce  prince 
signa  le  11  octobre  1 806,  l'acte  par  lequel 
il  s'associait  à  la  confédération  du  Khin. 
Bientôt  en  échange  du  bailliage  de  Gom- 
mern,  du  comté  de  Barby  et  d'une  partie 
du  comté  de  Monsfeld ,  il  reçut  le  cercle 
de  Cotbus,  et,  après  le  traité  de  Tilsitt,  les 
provinces  méridionales  enlevées  au  ter- 
ritoire prussien ,  la  nouvelle  Prusse  orien- 
tale et  occidentale  et  la  nouvelle  Silésie. 
Ce  royaume  était  considérable  ;  le  prince 
qui  le  gouvernait  dut  témoigner  sa  re- 
connaissance à  son  bienfaiteur;  il  le  tit 
de  la  manière  qui  convenait  à  Buonaparte  ; 
car  il  tint  continuellement  à  sa  disposition 
une  armée  de  20,000  hommes.  Ces  troupes 
combattirent  avec  valeur  dans  la  guerre 
de  1809  contre  l'Autriche.   Les  ennemis 
envahirent  ses  états  :  sa  capitale  fut  oc- 
cupée, et  lui-même,  réduit  par  la  chance 
des  combats,  à  fuir  devant  les  vainqueurs, 
se  retira  à  Francfort.  Buonaparte  le  ra- 
mena dans  sa  capitale,  après  avoir  vaincu 
l'archiduc  Charles ,  et  le  traité  de  Vienne 
qui  fut  conclu  le  li  octobre  1809,  le  dé- 
dommagea des  ennuis  de  cette  campa- 
Y. 


fRE 


497 


gne;  il  obtint  en  effetle  duché  de  Varsovie 
et  les  districts  de  l'ancienne  et  de  la  nou- 
velle Gallicie ,  qui  avaient  été  acquis  par 
l'Autriche  en   1772  et  1796.  Le  roi  de 
Saxe  assista  la  même  année  à  l'anniver- 
saire du  couronnement  de  Buonaparte , 
célébré  avec  la  plus  grande  pompe  à  Pa- 
ris. Jusqu'en  1812  Frédéric  ne  s'occupa 
que  de  l'administration  de  son  royaume. 
Alors  Buonaparte   réunit  à  Dresde  tous 
les  princes  de  l'Allemagne  avec  le  roi  de 
Prusse  et  l'empereur  d'Autriche.  Il  les 
trouva  tous  dévoués  à  ses  intérêts  ;  tousl'a- 
bandonnèrent  après  le  désastre  de  la  cam- 
pagne de  Russie.  Le  seul  Frédéric  lui  resta 
fidèle ,  et  quand  l'empereur  vaincu  tra- 
versa la  Saxe,  il  trouva  delà  part  du  roi 
son  vassal  les  mêmes  marques  d'attache- 
ment. Bientôt  les  armées  alliées  s'appro- 
chèrent de  son  royaume  :  avant  de  le  quit- 
ter, il  déclara  à  ses  sujets  par  une  pro- 
clamation, qu'il  restait  fidèle  aux  enga- 
geraens  qu'il  avait  contractés  depuis  six 
ans ,  et  en  même  temps  il  remettait  entre 
les  mains  des  Français  ses  places  les  plus 
importantes.  Cependant  les  victoires  de 
Lutzen  et  de  Bautzen  l'avaient  rauiené 
dans  sa  capitale  ;  il  vit  les  dispositions  de 
ses  sujets  qu'avait  électrisés  la  proclama- 
tion de  l'empereur  Alexandre  ;  il  lutta  en 
vain  contre  l'opinion  hautement  mani- 
festée. On  sait  que  les  Saxons  pendant  la 
bataille  de  Leipsick  abandonnèrent  les 
Français ,  et  d'amis  qu'ils  étaient  le  matin 
ils  furent  ennemis  dès  le  milieu  de  la 
journée.  Cette  trahison,  quelle  qu'en  soit 
la  cause,  a  été  justement  blâmée,  et  est  une 
grande  tache  dans  l'histoire  de  la  Saxe  : 
les  soldats  de  Frédéric  pouvaient  quitter 
la  cause  de  l'homme  qui  les  avait  tyran- 
nisés ;  mais  ce  n'était  point  au  milieu  d'une 
bataille  déjà  engagée  qu'ils  devaient  faire 
cette  déclaration.  Ce  crime  ne  doit  point 
être  imputé  à  Frédéric  qui  le  vit  com- 
mettre  avec   douleur  :    lui-même   fut 
conduit  et  retenu  à  Berlin  ,  lorsque   la 
puerre  fut   terminée.    Quand    les  puis- 
sances alliées  réglèrent  le  sort  des  peu- 
ples au  congrès  de  Vienne ,  peu  s'en  fal- 
lut que  la  Saxe  ne  fût  rayée  de  la  liste  des 
nations.  Cependant  la  France  et  l'Autri- 
che se  déclarèrent  en  faveur  de  Frédéric  : 
32 


498  FRE 

lui-même  protesta  contre  toute  cession , 
mais  le  9  février  1815,  il  fut  obligé  de  si- 
gner à  Presbourg  un  traité  qui ,  en  le  ren- 
dant à  ses  sujets ,  détacha  de  sa  souverai- 
neté plusieurs  provinces  qui  furent  don- 
nées a  la  Prusse,  à  rAulrichc  et  à  la  Russie, 
et  qui  réduisirent  son  royaume  à  une  su- 
perficie de  938  lieues  carrées.  A  l'épo- 
que de  la  seconde  invasion  des  alliés  en 
France ,  il  fournit  son  contingent  :  il  ac- 
céda à  la  sainte-alliance  le  1*'  mai  1817. 
Dès  lors  il  ne  s'est  plus  occupé  que  du 
soin  de  faire  oublier  à  ses  sujets  les  maux 
dont  la  guerre  les  a  long-temps  accablés. 
Il  était  ami  des  arts  et  les  protégea  avec 
discernement.  Le  5  mai  1827  ,  la  mort  a 
enlevé  ce  prince  à  ses  sujets  qui  l'ont  vi- 
vement regretté.  Il  a  eu  pour  successeur 
son  frère  Antoine. 

FRÉDÉRIC  DE  HOLSTEIN.  Voyez 
Adolvhk-Frédéric. 

FRÉDÉRIC  V,  électeur  Palatin,  sur- 
nommé roi  cV hiver,  Voy.  Ferdinand  II , 
empereur. 

FREDOLI  (Berenger),  né  à  Benne, 
en  Languedoc ,  d'une  famille  noble,  mort 
à  Avignon  en  1323  ,"  était  habile  dans  le 
droit.  Il  fut  choisi  en  1298  par  Boniface 
"VIII,  pour  faire  la  compilation  du  Sexte , 
c'est-à-dire,  du  6*  livre  des De'cre'taks , 
avec  Guillaume  de  Mandagot  et  Richard 
de  Sienne.  Clément  V  l'honora  du  cha- 
peau de  cai'dinal  en  1325. 

*  FRÉE  (Jean),  ecclésiastique  an- 
glican ,  né  à  Oxford  en  1711,  consacra 
sa  vie  à  la  prédication ,  à  l'instruction  de 
la  jeunesse  et  à  la  culture  des  lettres.  Il  fut 
directeur  de  l'école  de  grammaire  de 
Saint-Sauveur ,  et  occupa  successivement 
plusieurs  cures.  Il  mourut  dans  un  état 
voisin  de  l'indigence,  le  9  septembre 
1791 .  Son  principal  ouvrage  est  une  His- 
toire de  la  langue  anglaise ,  en  4  parties , 
qui  a  eu  plusieurs  éditions.  La  4«  est  de 
1788.  On  a  encore  de  lui  des  sermons  et 
plusieurs  écrits  de  controverse,  dirigés 
la  plupart  contre  les  méthodistes  ,  et  des 
poésies  diverses. 

FRÉGOSE,  FuLGosE,  ou  Campo-Fré- 
cosE ,  nom  d'une  illustre  famille  génoise 
d'origine  plébéienne,  qui  s'éleva  dans  le 
H«  siècle  au  dessus  de  la  noblesse  et 


FRE 

fournit  plusieurs  doges  à  la  république. 
Les  membres  les  plus  remarquables  de 
cette  famille  sont  Frégosk  (  Paul),  cardinal, 
archevêque  de  Gènes,  sa  patrie,  doge  en 
1462  :  il  perdit  cette  placre  quelque  temps 
après,  la  recouvra  en  1463,  et  l'occupa 
encore  deux  fois.  Il  mourut  à  Rome  en 
1498. 

FRÉGOSE  (  Baptiste  ) ,  neveu  du  pré- 
cédent ,  né  à  Gènes  vers  l'an  1 440,  fut  élu 
doge  en  1478.  Il  ne  conversa  que  très 
peu  de  temps  cette  dignité.  La  hauteur 
de  son  caractère  et  la  sévérité  de  son  gou- 
vernement le  firent  déposer  la  même  an- 
née. Il  fut  exilé  à  Trégui  ;  mais  nous  igno- 
rons quand  il  mourut.  Il  égaya  sa  re- 
traite par  la  lecture  et  le  travail.  On  doit 
à  sa  plume  :  1°  un  ouvrage  italien  en  9 
livres ,  mais  qui  n'a  paru  qu'en  latin , 
Milan  ,  1 509 ,  in-folio  ,  de  la  traduction 
de  Camille  Ghilini ,'  sur  les  actions  mé- 
morables, danslegoûtde  Valère  Maxime. 
Les  meilleures  éditions  de  ce  traité ,  sou- 
vent réimprimé ,  sont  celles  de  Juste  Gail- 
lard, avocat  au  parlement  de  Paris,  qui 
y  a  fait  des  additions,  des  corrections, 
et  l'a  orné  d'une  préface.  2"  La  Vie  du 
pape  Martin  V.  3°  Un  Traité  latin  sur 
les  femmes  savantes.  4°  Un  autre  en  ita- 
lien contre  l'amour,  Milan,  1496,  in-4, 
traduit  en  français ,  1581,  in-4  ;  l'origi- 
nal et  la  version  sont  également  rares. 

FRÉGOSE  (  Frédéric  ) ,  né  à  Gènes  en 
1480,  archevêque  de  Salerne  et  cardinal, 
de  la  même  famille  que  les  précédens , 
défendit  la  côte  de  Gènes  contre  Corto- 
gli ,  corsaire  de  Barbarie ,  qui  la  rava- 
geait. Il  surprit  ce  pirate  dans  le  port  de  , 
Biserte ,  passa  à  Tunis,  et  à  l'île  de  Gerbes, 
et  revint  à  Gènes  chargé  de  gloire  et  de 
butin.  Les  Espagnols  ayant  surpris  Gènes 
en  1622,  Frédéric  chercha  un  asile  en 
France.  François  I  le  reçut  avec  distinc- 
tion ,  et  lui  donna  l'abbaye  de  Saint-Be- 
nigne  de  Dijon.  De  retour  en  Itïilie ,  il 
fut  fait  cardinal  et  évêque  d'Engubio ,  où 
il  mourut  en  1541.  La  langue  grecque  et 
l'hébraïque  lui  étaient  familières.  Son  sa- 
voir était  soutenu  par  les  vertus  épisco- 
pales.  On  a  de  lui  un  Traite' de  VoraisoKi 
en  italien  ,  Venise  ,  1542 ,  in-8. 

FRÉGOSE  (Antonio  Phileremo),  poèt 


FRE 

italien  ,  du  commencement  du  16"  siècle, 
dont  la  Cerva  Bianca ,  et  autres  poésies 
ont  été  réunies  à  Milan  en  2  vol.  in-8  ; 
le  i"  en  1615,  le  2'=  eu  1525,  assez 
rares. 

FRÉGOSE.  Foyez  Fulgose. 

FREHER.  Foyez  Marquart-Fkehkr. 

'  FREISLEBEN  (  Christophe-Henri  ) , 
jurisconsulte  allemand,  conseiller camé- 
ral  du  duché  de  Saxe-Gotha  et  des  mines 
d'Altembourg ,  mort  vers  l'an  17  33,  a 
laissé  plusieurs  ouvi'ages  fort  utiles  pour 
celle  du  droit  :  1"  Corpus  juris  civilisaca- 
dernicum,  Altembourg,  1721 ,  in-4,  très 
souvent  réimprimé.  La  dernière  édition 
est  de  1789.  2°  Corpus  juris  canonici 
academicum,  177  8,  in-4.  La  dernière 
édition  est  de  Bâle,  1773.3"  Schutzius  il- 
lustratus  sive  compendium  juris  Schut- 
zio  Lauterbachianum  ex  complurium 
ccleberrimorumjurisconsultorum,  scrip- 
lis  ac  notis  illustratum  ,  Altembourg  , 
1734  ,  2  vol.  in-4  ,  compilation  fort  bien 
faite ,  destinée  à  expliquer  l'abrégé  fait 
par  Schutz  du  CoUegium  juris,  de  Lau- 
terbach.  4°  Une  traduction  allemande  de 
VHomme  de  cour ,  de  Balt.  Gracian  ,  et 
quelques  opuscules  moins  importans- 

FREIG  (  Jean-Thomas  ) ,  Freigius  , 
natif  de  Fribourg  en  Brisgaw ,  enseigna 
le  droit  avec  réputation  à  Fribourg,  à 
Bâle  et  à  Altorf,  et  mourut  de  la  peste 
vers  1583.  On  a  de  lui  des  Paralitles  sur 
le  digeste ,  in-8  ,  et  d'autres  ouvrages. 

FREIIND  (Jean)  naquit  en  1675,  à 
Croton ,  dans  le  comté  de  Nort-Hampton, 
d'un  père  ministre.  Westminster  fut  sa 
première  école.  Dès  l'âge  de  21  ans,  il 
mit  au  jour  deux  discours  grecs,  l'un 
d'Eschine ,  l'autre  de  Démosthènes ,  avec 
une  traduction  et  des  remarques.  Il  se 
consacra  ensuite  à  la  médecine.  Lecomte 
de  Péteiboroug  l'emmena  avec  lui  en 
1705  en  Espagne,  alors  le  théâtre  de  la 
guerre.  Après  y  avoir  exercé  sa  profes- 
sion pendant  deux  ans ,  il  passa  à  Rome 
et  s'y  lia  avec  tous  les  savans  qui  culti- 
vaient son  art.  Freind ,  de  retour  en  An- 
'  gleterre ,  fut  renfermé  à  la  tour  de  Lon- 
dres ,  soupçonné  d'être  d'intelligence 
avec  les  ennemis  de  l'état  :  malheureuse-' 
pient  les  philosophes  et  les  lettres  ne  sont 


FRE  499< 

que  trop  souvent  dans  ce  cas- là  (  voyez 
VïsPASiEji  ).  On  sollicita  en  vain  son  élar- 
gissement pendant  six  mois; mais  au  bout 
de  ce  temps,  le  ministre  étant  tombé  ma- 
lade ,  Méad  (  voyez  ce  mot } ,  confrère  ' 
du  prisonnier,  ne  voulut  lui  ordonner, 
aucun  remède ,  que  Freind  ne  fût  sorti  de 
la  tour  :  conduite  très  blâmable  et  qui  ne 
prouve  pas  que  Méad  fût  convaincu  de 
l'innocence  de  son  ami.  Cependant  Freind 
fut  élargi ,  et  obtint  la  place  de  premier 
médecin  de  la  princesse  de  Galles ,  depuis 
reine  d'Angleterre.  Il  mourut  à  Londres 
à  52  ans ,  en  1728,  membre  de  la  société 
royale.  Freind  était  aussi  heureux  dans 
la  pratique  ,  qu'éclairé  dans  la  théorie. 
Ses  opinions  étaient  reçues  en  Angleterre, 
comme  celles  d'Hippocrate  dans  la  Grèce. 
Des  ouvrages  qu'il  a  laissés  les  princi- 
paux sont  :  1°  Histoire  de  la  médecine^ 
depuis  GaUien  jusqu'au  ii^  siècle  .-  li- . 
vre  savant  traduit  de  l'anglais  en  fran- 
çais, par  M.  Noguez,en2  vol.  in-4, 1728. 
2"  V Emmetioloyie ,  ou  Traité  de  V éva- 
cuation ordinaire  des  femmes,  traduit 
en  français  par  Devaux ,  1730,  in-12. 
3"  Lectiones chymicœ,  Amsterdam,  1710, 
in-8.  4°  J'razïe'rfe/a^èt're.  Tous  les  écrits 
""de  Freind  ont  été  recueillis  à  Londres  , 
in-fol. ,  1733,  et  à  Paris,  1735,  in-4;  sa 
Fie  est  à  la  tête  de  cette  collection. 

FREINSHEMIUS  (Jean)  naquit  en 
1608  à  Ulm  en  Souabe.  Mathias  Berneg- 
ger ,  savant  de  Strasbourg ,  lui  confia  sa 
bibliothèque  et  lui  donna  sa  fille.  L'uni- 
versité d'Upsa  luiayantproposé  des  avan- 
tages considérables ,  il  y  alla  professer 
l'éloquence  pendant  5  ans.  La  reine  Chris- 
tine ,  qui  l'enviaità  l'université,  le  choisit 
pour  son  bibliothécaire  et  son  historio- 
graphe ,  avec  sa  table  et  2,000  écus  d'ap- 
pointemens.  Il  fut  bientôt  obligé  d'aban- 
donner ces  honneurs  et  de  revenir  dans 
sa  patrie ,  pour  rétablir  sa  santé ,  que  le 
climat  de  Suède  avait  dérangée.  L'élec- 
teur Palatin  lui  donna  un  an  après  son 
départ  d'Upsal,  en  1656  ,  une  place  de 
professeur  honoraire  de  l'université  de 
Heidelberg,  et  une  charge  de  conseiller 
électoral.  Freinshemius  n'en  jouit  pas 
long-temps,  étant  mort  en  1660,  à  52 
aps,  Ce  savant  possiklait  les  langues  n)Qrtei| 


5oo  PRE 

et  presque  toutes  les  langues  vivantes.  Il 
joignait  à  une  littérature  choisie,  de 
l'esprit  et  du  goût.  Il  s'occupa  toute  sa 
vie  avec  autant  de  zèle  que  de  succès  à 
réparer  les  brèches  que  le  temps  avait 
faites  à  quelques  auteurs.  (Il  entreprit  de 
faire  des  Supplémens  à  Qulhte-Curce , 
et  il  y  réussit ,  dans  l'édition  qu'il  donna 
avec  un  index  et  des  commentaires , 
Strasbourg,  1640,  2  vol.  in-8.  Il  fit  avec 
le  même  succès  un  semblable  travail  sur 
Tite-Live  dont  il  publia  (  Lib.  XI  ad  XX  ) , 
Strasbourg,  1649,  in-12,  et  donna  en- 
suite une  édition  qui  contient  60  livres, 
Strasbourg,  1654,  in-4  ;  enfin  Doujat  réu- 
nit les  95  livres  dans  son  édition  de  Tite- 
Live  ad  usum  Delphini.  Les  supplémens 
de  Tite-Live,  moins  estimés  que  ceux  de 
Quinte-Curce  ont  été  cependant  insérés 
dans  les  éditions  latines  de  Jean  Leclerc 
et  de  Crevier ,  de  Lemaire  ,  et  traduits 
en  français  par  Durier,  Guérin,  Bureau 
de  la  Malte.  )  Il  fut  moins  heureux  dans  ses 
supplémens  de  Tacite ,  parce  que ,  pour 
faire  revivre  cet  historien  inimitable  ,  il 
fallait  un  génie  aussi  fort ,  aussi  vigou- 
reux, aussi  profond  que  le  sien,  et  il 
s'en  trouve  à  peine  un  dans  vingt  siècles. 
Le  Père  Brotier  y  a  depuis  complètement 
réussi.  On  a  encore  de  Freinshemius  des 
Commentaires  sur  Florus ,  et  quelques 
autres  auteurs  latins ,  qu'il  a  ornés  de  sa- 
vantes tables. 

FREIRE  DE  ANDRADA  (  Hyacin- 
the ) ,  abbé  de  Ste. -Marie  de  Chans  ,  né  à 
Bëja  en  Portugal ,  l'an  1 597  ,  parut  d'a- 
bord avec  distinction  à  la  cour  d'Espa- 
gne ;  mais  son  attachement  à  la  maison 
de  Bragance  indisposa  le  ministère  con- 
tre lui.  Il  s'éclipsa  jusqu'au  temps  que 
Jean  IV  fut  proclamé  roi  de  Portugal,  en 
1640.  Il  se  rendit  auprès  de  lui,  et  en 
fut  très  bien  reçu.  Ce  monarque  lui  offrit 
l'évèché  de  \isen  qu'il  refusa ,  prévoyant 
que  le  pape,  qui  ne  reconnaissait  pas  d'au- 
tre roi  de  Portugal  que  celui  d'Espagne, 
ne  lui  accorderait  point  ses  bulles.  Il 
mourut  à  Lisbonne ,  en  1657  ,  à  60  ans. 
Freire  avait  l'esprit  léger ,  mais  le  cœur 
généreux  et  plein  de  franchise.  Il  défen- 
dait ses  amis  en  secret ,  et  les  reprenait 
çn  face.  Il  cultiva  avèb  succès  la  poésie 


PRE 

et  l'histoire.  On  a  de  lui  :  1°  la  Fie  de 
don  Juan  de  Castro ,  in-fol. ,  traduite  en 
latin  par  Rotto,  jésuite  italien.  C'est  un 
des  livres  les  mieux  écrits  en  portugais. 
2°  Des  Poésies  portugaises ,  en  petit 
nombre ,  mais  élégantes. 

FREITAG  (Jean) ,  né  à  Nieder-We- 
sel,  dans  le  duché  de  Clèves,  en  1581  , 
fut  professeur  en  médecine  à  Helmstadt, 
médecin  en  différentes  cours  d'Allema- 
gne ,  et  enfin  professeur  à  Groningue , 
oii  il  mourut  en  1641.  Il  ne  cessa  de  cri- 
tiquer les  ouvrages  du  célèbre  Daniel 
Sennert ,  auquel  il  ne  semble  pas  avoir 
rendu  assez  de  justice,  quoique  plusieurs 
de  ses  critiques  soient  fondées.  Les  prin- 
cipaux ouvrages  de  Freitag  sont  1  "  Noc- 
tes  medicœ ,  Francfort,  1616,  in-4.  2" 
Aurora  medicorum,  1630,  in-4  [voyez 
Manget  ,  Bibliotheca  script,  medicor. 
1. 1 1 ,  p.  346  ).  —  Il  ne  faut  pas  le  confon- 
dre avec  Jean  Freitag  ,  né  à  Perleberg 
en  1 587  ,  qui  pratiqua  la  médecine  avec 
réputation  à  Ratisbonne,  où  il  mourut 
en  1654,  après  avoir  publié  De  melan- 
cholia  hypochondriaca  ;  ni  avec  Jean- 
Henri  Freitag  ,  qui  publia  un  ouvrage 
sur  la  chimie  en  1635  ,  à  Quedlimbourg  ; 
ni  avec  le  major  Freitag,  devenu  célèbre 
pour  avoir  donné  à  Francfort  des  coups 
de  bâton  à  M.  Arouet  de  Voltaire ,  par 
ordre  de  Frédéric  II ,  roi  de  Prusse. 

*  FREMIN  (René) ,  sculpteur,  né  en 
1673  à  Paris,  où  il  prit  les  premières  le- 
çons de  son  art,  alla  à  Rome  pour  se  per- 
fectionner ,  et  se  distingua  à  son  retour 
par  divers  ouvrages ,  tels  que  la  Samari- 
taine ;  le  Maître-autel  de  St.-Louis  ;  la 
Statue  de  sainte  Sylvie.  Appelé  en  Espa- 
gne par  Philippe  V ,  qui  faisait  alors  con- 
struire la  Granja,  à  St.-Ildefonse,  il  con 
tribua  beaucoup  à  orner  les  jardins  de  ce 
palais ,  il  fit  un  grand  nombre  de  statues 
et  de  groupes  ;  mais  l'ouvrage  qui  lui  fit 
le  plus  d'honneur  fut  la  fontaine  dile 
des  Grenouilles.  On  loue,  dans  cet  ar- 
tiste, l'élégance  et  la  facilité  avec  la- 
quelle il  exécutait  ses  ouvrages  ;  mais  on 
critique  l'attitude  de  ses  statues  et  le  ca- 
ractère qu'il  imprimait  à  ses  dieux  et  à 
ses  nymphes ,  qui  manquent  de  cette 
simplicité  grecque  dont  il  aurait  dû  sç 


FRE 

pënëtrer  à  Rome.  Il  est  mort  à  Paris , 
comblé  d'honneurs  et  de  richesses,  en 
1746. 

FREMINET  (Martin)  ,  peintre,  ne  à 
Paris  en  1567  ,  fit  le  voyage  de  Rome 
dans  un  temps  que  les  peintres  étaient  par- 
tagés entre  Michel-Ange  de  Caravage,  et 
Joseph  d'Arpino  dit  le  Giospin.  Il  s'atta- 
cha à  prendre  ce  que  ces  deux  peintres 
avaient  de  meilleur,  et  y  réussit.  Fremi- 
net  était  très  instruit  dans  les  sciences 
relatives  à  son  art  :  il  savait  l'anatomie , 
la  perspective  et  l'architecture.  Il  fut  un 
grand  dessinateur,  et  l'on  remarque 
beaucoup  d'invention  dans  ses  tableaux  ; 
mais  sa  manière  fière ,  les  expressions 
fortes  de  ses  figures ,  des  muscles  et  des 
nerfs  durement  prononcés ,  et  les  actions 
de  ses  personnages  trop  recherchées ,  ne 
sont  point  du  goût  de  tout  le  monde.  Ses 
dessins  sont  terminés.  Henri  IV  le  fit  son 
premier  peintre ,  et  Louis  XIII  l'honora 
du  cordon  de  St. -Michel.  Il  peignit  le 
plafond  de  la  chapelle  de  Fontainebleau , 
et  mourut  à  Paris  en  1619. 

FREMI N VILLE  (Edme  de  la  Poix 
de  ),  né  en  1 680  à  Verdun  en  Bourgogne , 
du  lieutenant-général  de  cette  ville ,  de- 
vint lui-même  bailli  de  La  Palisse.  Les 
matières  féodales  sont  les  principales  qui 
se  présentent  à  traiter  devant  un  juge  de 
grandes  seigneuries  ;  il  en  fit  une  étude 
particulière.  Le  fruit  de  ses  travaux  fut  le 
Traité  des  dîmes ,  1  vol.  in-12;  la  Pra- 
tique des  terriers ,  en  5  vol.  in-4  ,  qui 
est  un  excellent  traité  des  fiefs.  Il  fit  un 
6*  volume,  pour  les  droits  des  habitaus. 
Il  a  extrait ,  par  ordre  alphabétique ,  le 
Traité  de  la  police  du  commissaire  La 
Marre ,  sous  le  titre  de  Dictionnaire  de 
la  police,  en  1  vol.  in-4  ;  ouvrage  esti- 
mé, et  réimprimé  en  province,  in-8. 
Freminville  mourut  à  Lyon,  le  14  no- 
vembre 1773.  C'était  un  homme  savant 
et  laborieux. 

FREMIOT.  Voyez  Chantal. 

FREMIOT  (André),  archevêque  de 
Bourges,  né  à  Dijon  "en  1573,  d'une  fa- 
mille noble  et  féconde  en  personnes  de 
mérite ,  fut  chargé  d'a£faires  importantes 
sous  Henri  IV  et  Louis  XIII ,  et  s'en  ac- 
quitta en  homme  intelligent.  On  a  de  lui 


FRE  Soi 

un  discours  des  marques  de  V Eglise  con- 
tre les  hérésies,  1610,  in-8  ,  et  d'autres 
ouvrages.  Ce  prélat  estimable  mourut  à 
Paris  le  13  mai  1641. 

*  FREMOPsT  (Dom  Charles),  religieux 
et  réformateur  de  l'abbaye  de  Grammont , 
naquit  à  Tours  en  1610.  Dès  qu'il  eut 
pris  l'habit,  à  l'âge  de  18  ans,  il  ne  tarda 
pas  à  s'apercevoir  du  relâchement  qui 
régnait  dans  la  discipline  de  l'abbaye  ; 
il  n'en  fit  pas  moins  son  noviciat  avec 
une  exactitude  exemplaire  ,  et  redoubla 
de  ferveur  et  de  zèle  pour  ses  devoirs. 
Lorsqu'il  eut  fait  sa  profession ,  son  abbé 
le  nomma  prieur  de  l'abbaye.  Dora  Fré- 
mont  s'eftorça  ,  par  son  exemple  et  ses 
discours,  d'établir  parmi  ses  confrères 
plus  de  régularité  ;  ne  pouvant  y  parve- 
nir ,  il  demanda  et  obtint  la  permission 
d'aller  à  Paris  terminer  ses  études  dans  le 
collège  que  l'ordre  y  avait  près  de  l'uni- 
versité. Ayant  été  présenté  au  cardinal  de 
Richelieu,  il  lui  fit  agréer  un  plan  de 
réforme  qu'il  avait  dressé.  Nommé  par  le 
ministre ,  prieur  d'Epoisse ,  près  de  Di- 
jon ,  dom  Frémont  aidé  de  son  confrère 
dom  Joseph  Baboul ,  y  jeta  les  premiers 
fondemens  de  sa  réforme.  Pour  ne  pas 
paraître  affecter  la  singularité  ,  il  se  con- 
tenta de  remettre  en  vigueur  dans  sa 
communauté  la  règle  telle  que  le  pape 
Innocent  IV  l'avait  mitigée.  Le  prieuré 
de  Thiers  en  Auvergne ,  lieu  de  Ja  nais- 
sance de  saint  Etienne ,  instituteur  de 
l'ordre,  prit  aussi  la  réforme,  ainsi  que 
six  ou  sept  autres  monastères,  mais  sans 
se  soustraire  à  la  juridiction  de  l'abbé  de 
Grammont.  Dom  Frémont  gouverna  pen- 
dant 30  ans  le  prieuré  de  Thiers,  et  y 
mourut  saintement  en  1689,  âgé  de  79 
ans.  On  connaît  de  ce  religieux  :  La  Vie, 
la  Mort  et  les  Miracles  de  saint  Etien- 
ne ,  confesseur ,  et  fondateur  de  P ordre 
de  Grammont  ,  dit  vulgairement  des 
Bons-Hommes,  Dijon,  1647,  in-8.  On 
trouve  à  la  suite  de  cet  ouvrage  La  Vie 
du  bienheureux  Hugues  de  Lacerta , 
disciple  de  saint  Etienne.  Il  a  composé 
en  outre  plusieurs  OEuvres  de  piété 'a 
l'usage  de  ses  confrères. 

*    FRÉMONT  -  D'ABLANCOURT 
(  Nicolas  ) ,  diplomate  et  littérateur  fran* 


5oa  FRE 

çais ,  né  à  Paris  en  1625  ,  mort  à  la  Haie 
en  1693,  était  neveu  du  fameux  Perrot 
d'Ablancourt  qui  fut  son  maître.  Il  acquit 
sous  son  oncle  une  grande  réputation 
d'esprit  et  de  savoir ,  et  plusieurs  princes 
d'Allemagne ,  en  ayant  entendu  parler , 
s'empressèrent  de  l'attirer  auprès  d'eux. 
Malgré  les  offres  les  plus  brillantes ,  il  ne 
voulut  point  quitter  le  service  de  sa  pa- 
trie ,  où  d'ailleurs  Turenne ,  qui  l'avait 
pris  sons  sa  protection,  le  fît  nommer 
ambassadeur  de  France  près  la  cour  de 
Portugal ,  et  quelque  temps  après  résident 
à  Strasbourg.  De  retour  à  Paris ,  après  la 
mort  de  Turenne ,  il  partageait  son  temps 
entre  la  société  des  beaux  esprits  de  l'é- 
poque et  la  culture  des  lettres,  lorsque  la 
révocation  de  l'édit  de  Nantes  le  força  de 
s'expatrier  dans  un  âge  encore  peu  avancé . 
Il  se  retira  en  Hollande  où  le  prince  d'O- 
range le  nomma  son  historiographe  et 
lui  accorda  une  pension.  Frémont  a  com- 
posé les  ouvrages  suivans  :  1  °  Dialogues 
de  la  santé,  Amsterdam,  1784,  in-l2; 
2°  Perrot  d^ Ablancourt  venge  ou  Ame- 
lot  de  la  Houssaye  convaincu  de  ne  pas 
parler  français  et  de  mal  expliquer  le 
latin,  Amsterdam,  17  86,  in-12  ;  3°  Mé- 
moires concernant  V histoire  de  Portugal, 
depuis  le  traité  des  Pyrénées  (1059) 
jusqu'en  1668,  avec  les  révolutions  ar- 
rivées dans  ce  temps-là  à  la  cour  de 
Lisbonne,  Paris,  1701,  in-12,  réimprimes 
la  même  année  en  Hollande.  Frémont  a 
ajouté  à  la  traduction  des  OEuvrcs  deLu- 
cien,  par  Perrot  d'Ablancourt  le  Dialogue 
des  lettres  de  Valphabet  et  le  Supplément 
à  Vhisloire  véritable.  Il  a  aussi  revu  la 
traduction  de  V Afrique  par  Marmol ,  et 
a  travaillé  au  Dictionnaire  des  rimes  de 
Richelet. 

FRENICLE  (Nicolas ) ,  poète  français, 
né  à  Paris  en  1600,  fut  conseiller-général 
eu  la  cour  des  monnaies,  et  mourut  doyen 
de  la  même  cour  après  l'an  1661.  On  a 
de  lui  plusieurs  pièces  de  théâtre  :  V  Pa- 
lémon  et  Niobé,  in-8 ,  deux  pastorales. 
2°  V Entretien  des  bergers ,  autre  pasto- 
rale. 3°  Un  poème  intitulé  Jésus  crucifié. 
4°  Une  Paraphrase  des  psaumes ,  en 
vers,  etc.  Tous  ces  ouvrages  sont  très 
médiocres. 


FRE 

FRENICLE  DE  BESSY  (Bernaxd), 
frère  du  précédent,  mort  en  1675,  fut 
grand  arithméticien  et  ami  de  Descartes. 
Ce  philosophe  faisait  grand  cas  de  son 
arithmétique ,  qui  le  conduisait  à  des  dé- 
tails où  «l'analyse  a  bien  de  la  peine  à 
parvenir  ;  mais  il  s'étonnait  que  sans  le 
secours  de  l'algèbre ,  dont  en  effet  il  ne 
faisait  aucun  usage ,  Bessy  fût  devenu  si 
profond  dans  cette  science.  On  trouve 
plusieurs  de  ses  écrits  dans  le  5'  tome 
des  anciens  mémoires  de  F  académie  des 
Sciences ,  dont  il  était  membre  :  entre 
autres ,  une  méthode  pour  trouver  la  so- 
lution des  problèmes  par  les  exclusions. 
Condorcet  a  écrit  son  éloge. 

*  FRÈRE  (  George  ) ,  comte ,  lieute- 
nant-général,  naquit  le  2  octobre  1764 
à  Montréal.  A  l'âge  de  17  ans  (  1791  ) ,  il 
entra  dans  le  2*  bataillon  de  l'Aude,  et , 
y  ayant  déployé  du  courage  et  de  l'intel- 
ligence ,  il  fut  nommé  capitaine  en  1 792. 
Devenu  chef  de  bataillon  l'année  sui- 
vante ,  à  l'armée  des  Pyrénées-Occiden- 
tales, il  se  distingua  bientôt  après  à  celle 
des  Pyrénées-Orientales,  d'où  iljpassa  en 
Italie,  y  fit  les  campagnes  de  1794  et 
1795,  et  fut  blessé  aux  redoutes  de  Séza. 
Lorsque  les  Français  entrèrent  dans  le 
Piémont ,  il  reçut  à  la  journée  de  la  Bren- 
ta  une  nouvelle  blessure ,  qui  lui  valut 
le  grade  de  chef  de  brigade.  De  retour 
en  France,  après  le  traité Ae.  Campo-For- 
mio,  il  servit  dans  les  armées  de  l'Ouest, 
de  la  Hollande  et  du  Rhin ,  fut  nommé 
ensuite  commandant  de  la  garde  du  pre- 
mier consul ,  devint  général  de  brigade 
en  septembre  1802 ,  et  fut  employé  dans 
l'armée  de  Hanovre  et  à  la  grande  armée, 
pendant  les  campagnes  de  1 805 ,  1 806 
et  1807 .  Le  général  Frère  fut  souvent  cité  J 
avec  éloge  dans  les  bulletins  du  temps  ;  r 
et  notamment  (en  1806)  à  la  prise  de 
Lubeck ,  où  il  entra  un  des  premiers.  Un 
de  ses  plus  beaux  faits  d'armes  fut  la  dé- 
fense (le  la  tête  du  pont  de  Spandau  sur 
la  Vassarge.  Avec  un  seul  régiment  et 
quatre  pièces  de  canon  ,  il  soutint  l'atta- 
que de  10,000  Russes,  qui  revinrent  six 
fois  à  la  charge  pour  s'emparer  de  ce  pont, 
et  furent  forcés  de  se  retirer,  après  avoir 
éprouY^  wie  perte  considérable.  \\  fut 


FRE 

nommé  successivement  comte,  comman- 
dant de  la  Légion  d'honneur  et  général 
de  division.  Le  6  mai  1808  ,  il  se  rendit 
en  Espagne ,  et  le  7  juin ,  il  s'empara  de 
la  ville  de  Ségovie.  Il  alla  ensuite  appuyer 
l'armée  du  maréchal  Moncey ,  qui  assié- 
geait Valence  ;  et,  après  la  prise  de  cette 
ville ,  il  coopéra  au  siège  mémorable  de 
Saragosse,  en  qualité  de  chef  d'état-major 
du  maréchal  Lannes.  Appelé  à  la  grande 
armée ,  le  général  Frère  se  trouva  à  la 
bataille  de  Wagram,  où  il  se  distingua 
de  nouveau  et  reçut  des  blessures  graves. 
A  peine  guéri ,  il  retourna  en  Espagne 
et  assista  aux  sièges  d'Ostalric,  de  Tor- 
tose  et  de  Tarragone.  H  revint  en  France 
en  1813,  et  passa  au  commandement  de 
la  1 3*  division  militaire  à  Rennes ,  puis 
à  la  16"  à  Lille.  Lors  de  la  première  res- 
tauration ,  Louis  X\IIl  le  créa  chevalier 
de  Saint-Louis.  Après  le  débarquement 
de  Buonaparte  à  Cannes ,  le  20  mars  1815, 
et  pendant  les  cent  jours ,  le  général 
Frère  se  conduisit  avec  une  réserve  ex- 
trême. Cependant ,  s'il  ne  s'empressa  pas 
de  se  ranger  sous  les  drapeaux  de  son 
ancien  général ,  il  ne  se  montra  pas  non 
plus  fort  zélé  pour  la  cause  des  Bourbons  ; 
conduite  équivoque  qui  rendit  justement 
suspecte  sa  véritable  opinion.  Aussi,  au 
retour  du  roi ,  et  dès  le  commencement 
de  1 81 G  ,  il  fut  mis  en  non  activité,  et  y 
resta  jusqu'à  sa  mort,  arrivée  le  1 7  février 
1^20. 

FRERET  (Nicolas) ,  secrétaire  perpé- 
tuel de  l'académie  des  Belles-lettres ,  né 
à  Paris  le  15  février  1G88,  d'un  procu- 
reur au  parlement ,  se  fit  recevoir  avo- 
cat par  complaisance  pour  sa  famille.  La 
nature  ne  lui  avait  donné  aucun  goût 
pour  le  barreau  ,  et  par  conséquent  pres- 
que point  de  talent  ;  il  le  quitta  pour  se 
livrer  à  l'histoire  et  à  la  chronologie,  ses 
premières  passions.  L'académie  des  In- 
scriptions lui  ouvrit  ses  portes  dès  l'âge 
de  25  an5.  Il  signala  son  entrée  par  un 
Discours  sur  l'origine  des  Français, 
rempli  de  propos  indiscrets  sur  l'affaire 
des  princes  avec  le  régent ,  qui  le  fit 
renfermer  à  la  Bastille.  Bayle  fut  presque 
le  seul  auteur  qu'on  lui  donna  pour  égayer 
sa  prison  ;  il  le  lut  tant  de  fois ,  qu'il  le 


FRE  6o3 

savait  presque  par  cœur.  Les  erreurs  de 
ce  fameux  sceptique  s'inculquèrent  dès 
lors  dans  son  esprit.  On  ne  s'en  aperçoit 
que  trop ,  lorsqu'on  jette  les  yeux  sur 
ses  Lettres  de  Tlirasibule  à  Leucippe  , 
où  l'on  trouve  le  triste  athéisme  réduit 
en  principes ,  quoique  adroitement  enve- 
loppé ;  et  sur  V Examen  des  apologistes 
du  christianisme,  1767,  in-8  :  ouvrage 
posthume,  non  moins  rcpréhensible  que 
le  précédent ,  mais  qui  n'est  pas  de  lui. 
L'abbé  Bergier  l'a  réfuté  victorieusement 
par  son  ouvrage  intitulé  Certitude  des 
preuves  du  christianisme.  Fréret  ayant 
obtenu  sa  liberté ,  s'adonna  entièrement 
à  ses  anciennes  études.  On  lui  doit  1" 
plusieurs  me'moires ,  pleins  d'érudition 
et  de  discussions  épineuses.  Ils  sont  ré- 
pandus dans  les  différens  volumes  de  la 
collection  académique  des  Belles-lettres. 
Ceux  dans  lesquels  il  essaie  d'éclaircir  la 
chronologie  lydienne  et  la  chinoise ,  ont 
été  d'abord  recherchés  ;  mais  l'on  s'est 
convaincu  depuis ,  que  ces  fabuleuses 
histoires  n'avaient  rien  gagné  aux  travaux 
de  ce  savant ,  beaucoup  plus  crédule  en 
matière  de  vieilles  annales,  qu'en  matière 
de  religion.  2°  La  pre'face ,  les  notes,  et 
une  partie  de  la  traduction  du  roman 
espagnol ,  intitulé  Tyran  le  Blanc ,  2 
vol.  in-12.  3°  Défense  de  la  chronologie 
contre  le  système  de  Newton ,  Paris  , 
1758  ,  in-4  ;  4°  Quelques  ouvrages  frivo- 
les ,  qui  n'amuseront  jamais  les  lecteurs 
sages.  Fréret  avait  une  vaste  littérature. 
Il  connaissait  l'intrigue  de  presque  toutes 
les  pièces  des  différens  théâtres  de  l'Eu-, 
rope.  Sa  mémoire  était  immense.  Il  écri- 
vait avec  netteté  et  avec  ordre ,  mais  il 
avait  du  penchant  pour  les  opinions  sin- 
gulières ;  ses  Lettres  de  Thrasihule  an- 
noncent au  jugement  d'un  critique  judi- 
cieux, «  un  esprit  dur  et  un  cœur  cor- 
»  rompu.  »  L'auteur  du  Dictionnaire 
philosophique  s'est  souvent  paré  de  l'éru- 
dition de  Fréret ,  et  n'en  a  pas  fait  un 
meilleur  usage.  Il  mourut  en  1749.  (La 
plus  grande  partie  des  ouvrages  de  Fréret 
se  trouve  dans  les  Mémoires  de  V acadé- 
mie. On  a  imprimé  à  Paris,  en  1796,  20 
vol.  in-8  de  prétendues  OEuvres  com- 
plètes de  Fréret,  qui  sont  loin  de  justifier 


5o4  fRË 

leur  titre  :  les  premiers  volumes  de  celte 
édition  incomplète  ont  été  publiés  par 
Leclerc  de  St. -Chênes.  En  1792 ,  il  a  paru 
4  volumes  diOEuvres  philosophiques  de 
Fréret  dont  la  plus  grande  partie  n'est 
pas  de  lui  {voyez  le  n"  IS,!".")  du  Dic- 
tionnaire des  anonymes  )  ;  celte  collec- 
tion contient  l'ouvrage  publié  dans  le 
siècle  dernier  sous  le  nom  de  Fréret  et 
intitulé:  Examencritique  des  apologistes 
de  la  religion  chrétienne;  il  est  aujour- 
d'hui certain  qu'il  a  été  composé  par  Bu- 
rigny  :  on  trouve  à  ce  sujet  de  très  longs 
et  très  curieux  détails  dans  le  Diction- 
naire des  anonymes ,  n"  6129.  De  tous 
les  ouvrages  philosophiques  attribués  à 
Fréret,  le  seul  dont  il  soit  véritablement 
l'auteur  est  le  suivant  :  Lettre  de  Thra- 
sibiile  à  Lcucippe ,  Londres,  sans  date, 
(  17G8) ,  in-12  ;  celte  lettre  revue  ,  cor- 
rigée et  refaite  en  plusieurs  endroits  par 
Naigeon ,  est  insérée  dans  le  Dictionnaire 
de  Philosophie  de  ï Encyclopédie,  article 
Fréret.  La  meilleure  édition  des  OEuvres 
de  Fréret  est  celle  de  ChampoUion-Fi- 
geac,  Paris,  182i  ,  8  vol.  in-8  ,  précédée 
d'une  notice  sur  Fréret  par  l'éditeur. 

FRÉRON  (  Elic  -  Catherine  )  ,  né  à 
Quimper  en  1 7 1 9 ,  montra  de  bonne  heure 
des  talens.  Il  entra  chez  les  jésuites ,  pour 
les  y  perfectionner.  Il  professa  pendant 
quelque  temps  avec  succès  au  collège  de 
Louis  le  Grand.  Les  Pères  Brumoi  et  Bou- 
geant le  dirigèrent  dans  ses  éludes,  et 
lui  inspirèrent  le  goût  de  la  belle  littéra- 
ture. Quelques  mécontcntemcus  l'ayant 
obligé  de  sortir  des  jésuites  en  1739,  il 
aida  d'abord  l'abbé  des  Fontaines  dans 
la  composition  de  ses  feuilles  ,  et  donna 
ensuite  un  petit  journal ,  sous  le  litre  de 
Lettres  de  M™"  la  comtesse,  in-12, 
1746.  Celte  comtesse  était  l'interprète  de 
la  raison  et  du  bon  goût,  et  elle  s'expri- 
mait avec  autant  d'esprit  que  de  sel. 
Comme  la  réputation  de  plusieurs  beaux 
esprits  n'était  pas  ménagée  dans  ces 
feuilles ,  ils  eurent  le  crédit  de  les  faire 
supprimer.  Elles  reparurent  en  1749, 
sous  un  autre  titre.  C'est  au  commence- 
ment de  celle  année  que  Fréron  publia 
ses  Lettres  sur  quelques  écrits  de  ce 
temps ,   qui ,  renfermant    une  critique 


aussi  vive  que  piquante ,  ne  plurent  pas 
plus  à  un  grand  nombre  d'écrivains, 
que  celles  de  la  comtesse.  Elles  furent 
quelquefois  interrompues  ,  et  ce  fut 
presque  toujours  au  regret  du  public, 
qui  aime  à  s'amuser  des  critiques  et  de 
ceux  qui  en  sont  l'objet.  Après  avoir  pu- 
blié 13  vol.  de  ce  journal,  l'auteur  le  fit 
paraître  en  1754,  sous  le  titre  à! Année 
littéraire ,  et  il  en  a  publié  régulièrement 
8  vol.  par  année,  à  l'exception  de  1754, 
qu'il  n'en  donna  que  7  ,  jusqu'à  sa  mort 
arrivée  en  mars  17 "6.  Beaucoup  d'esprit 
naturel ,  de  la  gaité  ,  un  goût  sûr  ,  un 
tact  fin ,  le  talent  de  présenter  les  défauts 
d'un  ouvrage  avec  agrément  :  telles  fu- 
rent les  qualités  de  ce  redoutable  jour- 
naliste. De  la  partialité,  une  malignité 
quelquefois  trop  marquée ,  de  la  préci- 
pitation dans  les  jugemens  :  tels  furent 
ses  défauts.  Il  avait  des  mœurs  douces, 
et. sa  société  était  facile  et  enjouée  ;  mais 
le  ressentiment  des  injustices  le  rendit 
quelquefois  injuste.  Ses  autres  ouvrages 
sont  \°  un  recueil  d'opuscules ,  en  3  vol. 
in-12  ,  parmi  lesquels  on  trouve  des  poé- 
sies qui  ne  sont  pas  sans  mérite.  L'Ode 
sur  la  bataille  de  Fontenoi  est  une  des 
meilleures  qui  aient  paru  depuis  Bous- 
seau.  2°  Les,  Amours  de  Vénus  et  d'A- 
donis,  in-12,  1748  :  brochure  traduite 
de  l'italien  du  cavalier  Marini.  Fréron 
était  très  peu  conséquent  dans  rattache- 
ment qu'il  alBchail  pour  les  bonnes 
mœurs.  Diverses  analyses  qu'on  voit  dans 
\ Année  littéraire ,  en  sont  une  autre 
preuve.  3°  Il  travailla  pendant  quelque 
temps  au  Journal  étranger.  Il  l'aban- 
donna pour  s'occuper  entièrement  de  son 
Année  littéraire,  dont  le  privilège  a  été 
continué  à  sa  veuve. 

*  FRÉRON  (Louis-Stanislas),  fils  du 
précédent,  l'un  des  plus  fougueux  mem- 
bres de   la  Convention  ,  né  à  Paris  en 
1755,  eut  pour  parrain  Stanislas,  roi  dej 
Pologne,  et  pour  protectrice  M*^»*  Adélaïde! 
tante  de  Louis  XVI.  Il  fut  élevé  gratuite- 
ment au  collège  de  Louis  le  Grand,  et,} 
à  la  mort  de  son  père  (1776) ,  il  lui  suc-J 
céda  dans  le  privilège  de  V Année  litté- 
raire ;  mais  il  ne  fut  que  le  prèle-noi 
de  l'abbé  Royou  et  de  Geoffroy  qui  furent] 


FRE 

les  rédacteurs  de  cette  feuille.  Il  avait 
été  le  condisciple  de  Robespierre  ;  il  en 
devint  l'ami,  et,  lorsque  la  révolution 
éclata ,  il  fut ,  malgré  les  antccédens  de 
sa  famille,  malgré  les  liens  qui  l'atta- 
chaient à  des  maisons  royales ,  l'un  des 
plus  violeus  partisans  des  innovations 
de  cette  époque.  Au  lieu  de  travailler  au 
journal  dont  son  père  lui  avait  transmis 
la  propriété,  à  laquelle  il  renonça  d'ail- 
leurs en  1790,  il  rédigea  l'Orateur  du 
peuple  où  il  montra  moins  de  talent  que 
d'exagération  ;  et ,  pour  nous  servir  des 
expressions  d'un  biographe  peu  suspect , 
il  parut  avoir  moins  le  dc'sir  d'éclairer , 
que  celui  de  faire  croître  et  de  propager 
l incendie. [Ployez  la  Biographie  des  con- 
temporains, article  Fréron.)  Celte  feuille 
circula  avec  profusion  dans  les  halles , 
les  cabarets  et  tous  les  lieux  où  se  rend 
d'ordinaire  la  multitude  ;  mais  bientôt 
elle  pâlit  devant  Y  Ami  du  peuple  de 
Marat,  que  celui-ci  avait  créé  à  la  même 
époque.  Cependant  Fréron  avait  donné 
à  la  révolution  des  gages  suffisans  de 
dévouement  :  son  zèle  lui  valut  une 
place  de  député  à  la  Convention  natio- 
nale. Ne  devait-il  pas  être  uu  de.ï  mem- 
bres les  plus  furieux  de  cette  fougueuse 
assemblée ,  le  journaliste  qui  s'était  fait 
gloire  d'avoir  déclaré,  après  le  retour  de 
Varennes  ,  qu'il  n'y  avait  plus  de  roi  en 
France  ;  d'avoir  demandé  l'accusation  et 
la  mise  en  jugement  de  Louis  XVI  ;  d'avoir 
appelé  à  grand  cris  l'établissement  de 
la  république  ;  le  démagogue  impie  et 
cruel  qui ,  au  club  des  Cordeliers,  avait 
si  souvent  parlé  contre  la  religion ,  les 
riches  et  les  nobles  ;  qui ,  dans  les  ter- 
ribles journées  des  3  et  d'octobre,  avait 
figuré  dans  la  horde  des  brigands  de  cette 
époque  sanglante  ;  l'Orateur  du  peuple 
qui  haranguait  dans  les  rues  et  sur  les 
places  publiques;  qui  avait  eu  la  plus 
graiule  part  à  la  conspiration  du  Champ 
de  Mars ,  et  qui ,  après  avoir  été  obligé 
de  quitter  la  capitale'  avec  Danton ,"  Ca- 
mille Desmoulins,  Marat ,  et  d'autres  per- 
sonnages du  même  bord ,  était  rentré  à 
Paris  avec  les  intentions  les  plus  hostiles 
à  la  royauté  ;  un  homme  enfin  qui ,  après 
avoir  repris  son  journal ,  y  avait  propagé 
V. 


les  maximes  révolutionnaires  dont  il  se 
faisait  honneur?  Fréron  vota  la  mort  de 
Louis XVI ,  et  l'exécution  dans  les  2  i  heu- 
res ,  en  se  vantant  en  même  temps  Hl  avoir 
deux  ans  auparavant  déjà  demandé  le 
supplice  du  tyran;  et  d'être  allé mcmeV at- 
taquer dans  son  palais.  On  ne  pouvait 
mieux  attendre  d'un  membre  delà  muni- 
cipalité ou  de  la  commune  du  lO  août. 
Envoyé  quelque  temps  après  Iç  procès  de 
l'infortuné  monarque,  en  mission  dans 
les  départémens  du  Midi ,  il  se  rendit  à 
Marseille  avec  Barras,  Salicettï,  et  îe  frère 
de  Robespierre  :  ces  députés  lurent  char- 
gés de  punir  cette  ville  d'avoir  montré 
quelque  pitié  en  faveur  des  malheureux 
députés  proscrits  par  suite  de  la  révolu- 
tion du  31  mai  1793;  Fréron  l'emporta 
sur  ses  collègues  en  férocité  :  par  ses 
ordres  les  échafauds  furent  dressés  ;  de 
nombreuses  exécutions  curent  lieu  ;  des 
maisons]  furent  détruites  ,  et  la  réunion 
de  celles  qu'il  lui  plut  de  conserver 
fut  appelée  ville  sans  nom.  Pendant  ce 
temps-là,  Toulon  était  tombé  au  pouvoir 
des  Anglais  et  des  Espagnols,  qui  défen- 
daient la  cause  de  la  royauté.  Ce  que  l'on 
concevra  difficilement ,  c'est  que  Fréron 
et  ses  collègues  proposèrent  de  laisser 
aux  ennemis  le  terrain  situé  depuis  les 
bords  de  la  mer  jusqu'à  la  Durance  ;  cette 
proposition  faillit  être  taxée  de  trahison  , 
et  peu  s'cii  fallut  que  les  commissaires  ne 
fussent  arrêtés  ;  mais  ils  appartenaient 
d'une  manière  si  intime  au  parti  de  la 
Montagne  qui  dominait  alors,  qu'il  leur 
fut  envoyé  seulement  des  instruction.^ 
sur  la  conduite  qu'ils  avaient  à  tenir  ; 
et  ces  instructions  furent  .si  précises 
qu'il  ne  leur  fut  plus  permis  d'hésiter  : 
Toulon  fut  pris.  [F oyez  l'article  Blosa- 
PARTE.)  Cette  ville  changea  son  nom  con- 
tre celui  de  Port-la-Montngnc.  Nous  ne 
savons  comment  raconter  ce  qui  se  passa 
ensuite  dans  cette  malheureuse  cité  ;  et 
quand  nousdirious  que  les  commissaires 
de  la  Convention  ordonnèrent  à  800  des 
principaux  citoyens  de  la  ville  de  se 
rendre  au  champ  de  aiars  sous  prétexte 
d'y  recevoir  des  communications  impor- 
tantes; que  lorsqu'ils  y  furent  arrives  et 
placés  dans  le  lieu  qui  leur  fut  indiqué  , 
3?...       ■ 


566  FRÊ 

une  batterie  qui  avait  été  masquée  ,  tira 
sur  eux  à  mitraille ,  on  ne  pourrait  pas 
ajouter  foi  à  un  pareil  récit  ;  c'est  cepen- 
dant ce  qui  arriva  :  mais  ce  qui  dépasse 
toute  croyance,  c'est  que  le  canon  ayant 
épargné  quelques-unes  des  victimes  des 
commissaires,  et  celles-ci  restant  étendues 
sur  le  terrain  pour  faire  croire  qu'elles 
avaient  été  tuées,  Fréron  et  ses  collègues , 
qui  s'étaient  aperçus  que  la  mitraille 
n'avait  pas  atteint  tout  le  monde ,  par- 
coururent ce  champ  de  carnage  ,  en  s'é- 
criant  :  que  ceux  qui  ne  sont  pas  morts 
se  lèvent ,  la  Re'publique  leur  fait  grâce: 
et  aussitôt  une  foule  de  Toulonnais,  trom- 
pés par  cette  promesse ,  se  lèvent  ;  mais 
c'est  pour  tomber  sous  le  feu  de  la  mous- 
queterie  :  les  blessés  furent  achevés  par 
le  sabre ,  la  baïonnette  ou  les  crosses  de 
fusils.  En  vérité ,  on  ne  pourrait  croire 
à  de  pareilles  horreurs,  si  ceux  qui  en  ont 
été  les  auteurs  ne  s'en  étaient  pas  van- 
tés. On  rapporte  que  Fréron  écrivait  à 
son  collègue  Moïse  Bayle  :  «  Nous  avons 
3)  requis  12,000  maçons  pour  raser  la 
j)  ville  :  tous  les  jotirs  depuis  notre  arri- 
»  vée,  nous  faisons  tomber  200  têtes.  Il 
»  y  a  déjà  800  Toulonnais  de  fusillés. 
»  Toutes  les  grandes  mesures  ont  été 
»  manquées  à  Marseille,  par  Albitte  et 
»  Carteaux;  si  l'on  eut  fait  fusiller  com- 
»  me  ici  800  des  conspirateurs  dès  l'en- 
3>  trée  des  troupes ,  et  qu'on  eût  créé  une 
»  commission  militaire  pour  condamner 
»  le  reste  des  scélérats,  nous  n'en  serions 
M  pas  oii  nous  sommes  :  »  Une  autre  de  ses 
lettres  renferme  ce  passage  :  «  Les  fusil- 
w  iades  sont  ici  à  l'ordre  du  jour  ;  et , 
»  sans  la  crainte  de  faire  périr  d'innocen- 
i>  tes  victimes,  telles  que  les  patriotes 
»  détenus ,  tout  était  passé  au  fil  de  l'é- 
M  pée  :  comme  ,  sans  la  crainte  d'incen- 
}>  dier  l'arsenal  et  les  magasins,  la  ville 
»  eût  été  livrée  aux  flammes  ;  mais  elle 
»  n'en  disparaîtra  pas  moins  du  sol  de 
»  la  liberté.  Demain  et  jours  suivans , 

«  nous  allons  procéder  au  rasement 

»  Fusillade  jusqu'à  ce  qu'il  n'y  ait  plus  de 
»  traîtres.  »  De  retour  à  Marseille ,  Fréron 
et  ses  collègues  recommencèrent  leurs 
proscriptions  ,  et  déjà  400  personnes 
étaient  tombées  sous  les  coups  de  ces  fé- 


FRÊ 

toces  proconsuls ,  lorsque  le  comité  de 
salut  public  rappela  ses  agens  :  Fréron 
fut  à  peine  arrivé  à  Paris  qu'il  se  présen- 
ta à  la  société  des  Jacobins  oîi  il  fut  pro- 
clamé le  Sauveur  du  Midi.  Cette  espèce 
d'ovation  déi)lut  à  Robespierre  qui  jura 
sa  perte.  Pour  l'éviter ,  Fréron  s'associa 
avec  énergie  à  ceux  qui  conspirèrent 
celle  de  ce  dictateur  sanguinaire.  Il  crai- 
gnait pour  ses  jours  :  Hébert,Clootz,Chau- 
mette,  Danton,  venaient  de  périr  sur 
l'échafaud  ;  les  autres  clubistes  de  la 
même  faction  redoutant  le  même  sort , 
se  réunirent  pour  renverser  ce  tyran ,  et 
ils  amenèrent  la  révolution  du  9  ther- 
midor an  2  (28  juillet  1794).  Adjoint 
à  Barras  ,  Fréron  avait  été  chargé  d'atta- 
quer riiôtel-de-ville  où  Robespierre  s'é- 
tait retiré  avec  ses  complices  ;  et ,  lors- 
que ce  monstre  eût  été  arrêté ,  ilproposa 
de  démolir  la  maison  commune  ;  mais  sa 
proposition  fut  rejetée.  Devenu  riche  au 
milieu  du  bouleversement  de  toutes  les 
fortunes  ,  Fréron  réclama  l'ordre  comme 
condition  essentielle  de  la  conservation 
des  propriétés.  Il  reprit  la  direction  de 
son  Journal;  mais  V Orateur  du  peuple 
fut  rédigé  sur  un  autre  plan,  et  cette 
feuille  fut  consacrée  dès  lors  à  poursuivre 
les  restes  du  parti  teiToriste  dont  naguè- 
res  il  était  l'un  des  agens  les  plus  terri- 
bles. Lorsque  Barrère  proposa  de  recom- 
poser le  tribunal  révolutionnaire  ,  et 
qu'en  même  temps  il  indiqua  Fouquier- 
Thinville  comme  accusateur  public  ;  non, 
s'écria  Fréron ,  tout  Paris  réclame  son 
supplice  ;  je  demande  contre  lui  un  dé- 
cret d'accusation,  et  que  ce  monstre  aille 
cuver  dans  les  enfers  tout  le  sang  dont  il 
s'est  enivre'.  (Voyez  Fouquier  Thinville.) 
Quelle  différence  pouvait-on  établir  en- 
tre l'accusateur  et  l'accusé  ?  Tous  deux 
avaient  répandu  en  abondance  le  plus 
beau  sang  de  leur  pays.  Mais  Fréron  plus 
adroit  que  son  collègue ,  avait  habile- 
ment viré  de  bord  :  sou  Journal,  ré- 
digé de  concert  avec  Dussault ,  qui  lui 
prêta  .sa  plume  en  conservant  l'anonyme, 
parut  être  une  œuvre  courageuse  ;  les 
jeunes  gens  les  plus  distingués  de  la  ca- 
pitale ,  que  l'on  appela  dans  cette  cir- 
constance la  Jeunesse  dorée  de  Fréron , 


FRE 

devinrent  ses  partisans;  ils  traînèrent 
dans  la  boue  le  buste  de  Marat.  Le  20 
mai  1795  (1"  prairial,  an  3),  Fréron 
fut  envoyé ,  avec  Barras  et  Laporte  , 
contre  le  faubourg  St.-Antoine,  qui  s'é- 
tait soulevé  ;  fidèle  à  sas  anciennes  habi- 
tudes de  démolition  ,  il  donna  l'ordre  de 
l'incendier  ;  mais  le  général  Menou ,  qui 
fut  cliargé  de  l'exécution  ,  refusa  coura- 
geusement d'obéir.  Ce  rôle  de  contre- 
révolutionnaire  ne  pouvait  pas  convenir 
long'^temps  à  Fréron  ;  il  ne  tarda  pas  à  se 
rattacher  à  ses  anciens  amis  :  il  avait 
cessé  d'être  populaire ,  et  il  ne  fut  pas 
réélu  à  l'assemblée  qui  remplaça  la  Con- 
vention. Il  accepta  donc  une  mission 
dans  le  3Iidi ,  retourna  à  Marseille  où  il 
déploya  plus  de  luxe  dans  ses  habitudes 
que  l'on  n'aurait  pensé  de  la  part  d'un  dé- 
magogue de  1793  :  il  fit  preuve  de  fer- 
meté ,  employa  un  appareil  de  force  ar- 
mée presque  inutile  dans  la  circonstance, 
et  répara  du  moins  jusqu'à  un  certain 
point  les  malheurs  de  ses  premières  mis- 
sions :  néanmoins  il  fut  accusé,  se  défen- 
dit avec  arrogance  et  obtint  encore  l'im- 
punité. Il  revint  à  Paris  :  n'ayant  point 
encore  cette  fois  été  réélu  dans  l'un  des 
deux  conseils ,  il  vécut  dans  l'obscurité 
jusqu'au  18  brumaire  an  8  (9  novembre 
1799).  Buonaparte  qu'il  avait  connu  au 
siège  de  Toulon,  était  alors  premier  con- 
sul :  on  assure  que  Fréron  devait  en 
épouser  la  sœur,  qui  fut  depuis  mariée 
au  général  Leclerc  et  ensuite  au  prince 
Camille  Borghèse ,  mort  en  1832.  Voyez 
BoRGHÈsE  ;  mais  une  première  épouse 
délaissée  vint  se  plaindre  à  Buonaparte , 
et  le  mariage  fut  rompu.  Le  consul  lui 
donna  une  place  peu  importante  dans 
l'administration  des  hospices  ;  et ,  lors 
de  l'expédition  de  Saint-Domingue,  il 
lui  confia  la  place  de  sous -préfet  de 
l'un  des  arrondissemens  de  cette  île 
(partie  Sud).  Au  bout  de  deux  mois  , 
Fréron  succomba  à  l'influence  du  climat 
et  peut-être  à  la  conviction  que  les  fonc- 
tions lointaines  qu'on  lui  avait  confiées 
étaient  un  véritable  exil  (  1802  ).  Fréron 
n'avait  pas  plus  de  35  ans.  Il  a  publié  en 
1 7  96  un  Mémoire  historique  sur  la  ré- 
çLction  royale  et  sur  les  massacres  4u 


FRE  5<>7 

Midi,  avec  des  notes  et  des  pièces  jusU-^ 
ficatives ,  première  partie  an  4 ,  in-8  (  il 
n'en  a  pas  été  publié  d'autres  parties  )  ; 
il  fut  répondu  à  cette  brochure  par  une 
autre,  intitulée  .hnardà  Fréron,  oiil'on 
réfute  cette  prétendue  justification.  On 
peut  remarquer  deux  hommes  dans  le 
personnage  dont  nous  traçons  la  vie  :  le 
fils  de  Fréron  qui  sut  se  mesurer  avec 
Voltaire ,  l'homme  de  lettres  et  le  légis- 
lateui-  ;  son  humeur  insouciante  semblait 
peu  disposée  à  concevoir  et  encore  moins 
à  exécuter  les  horreurs  révolutionnaires. 
Jusqu'en  1789,  Fréron  avait  partagé  sou 
temps  entre  les  Muses  et  les  plaisirs  ;  il 
aimait  Pétrarque,  et  personne  n'aurait 
jamais  songé  que  l'aimable  traducteur  de 
quelques-unes  des  pages  de  ce  galant 
écrivain  ,  eût  pu  jamais  tracer  les  lignes 
sanglantes  de  V Orateur  du  peuple.  Les 
circonstances  changèrent  Fréron ,  et  une 
tache  ineffaçable  est  empreinte  sur  le  nom 
du  révolutionnaire  dont  la  mémoire  est 
encore  eu  horreur  à  Toulon  et  à  Marseille. 
On  assure  qu'un  jour  le  lieutenant  de 
police  le  manda  auprès  de  lui  à  l'occa- 
sion d'une  critique  uniquement  relative 
au  talent  d'un  comédien,  et  lui  prescrivit, 
sous  peine  d'être  envoyé  à  Bicêtre ,  une 
rétractation  humiliante.  Alors  Fréron 
était  jeune  ;  il  obéit  en  frémissant  :  ce 
fut  dans  cet  état  de  fermentation  que  le 
trouva  la  révolution.  Moins  disposé  au 
pardon  que  ne  l'avait  été  son  père ,  il 
combattit  eu  énergumène  la  monarchie 
et  toutes  les  institutions  qui  se  ratta- 
chaient à  l'ancien  ordre  de  choses  ;  il 
triompha ,  mais  l'histoire  qui  redit  son 
triomphe,  lui  a  consacré  une  page  de 
sang. 

*FRESIA  d'Oglianto  (iMaurice-Ignace), 
lieutenant-général  des  armées  françaises, 
né  à  Saluées  en  1746  d'une  ancienne  fa- 
mille du  Piémont ,  entra  à  20  ans  au  ser- 
vice de  Sardaigne ,  après  avoir  reçu  à 
Turin  une  éducation  distinguée.  Cornette 
dans  le  régiment  du  roi  (  dragons  ),  il  par- 
vint de  gradé  en  grade  jusqu'à  celui  de 
colonel  qu'il  obtint  en  1793,  d'abord 
dans  le  régiment  de  Chablais,  puis  dans 
celui  des  chevau-légers  du  roi.  Il  avait 
fait  jusqu'alors  toutes  ses  campagnes  çqi^- 


5o8  FRE 

trela  France  :  nommé  général  en  1796  ,' 
il  passa  l'année  suivante  sous  les  dra- 
peaux français  et  consen^a  son  grade.  Le 
général  Frésiase  distingua  dans  plusieurs 
occasions  :  il  commandait  unebrif)ade  de 
dragons  avec  laquelle  il  se  battit  dans  les 
deux  affaires  qui  eurent  lieu  successive- 
ment sous  les  murs  de  Vérone.  Sans  en- 
trer dans  le  détail  de  tous  les  faits  d'ar- 
mes par  lesquels  il  signala  sa  valeur,  nous 
dirons  que  ce  fut  h  sa  brillante  réputa- 
tion qu'il  dut  le  commandement  général 
des  troupes  piéraontaises  au  service  de 
France,  qui,  sous  les  ordres  d'un  tel  cbef , 
se  couvrirent  de  gloire  en  rivalisant  de 
couTage  avec  les  soldats  français.  Frésia 
fut  fait  prisonnier  axi  bord  de  l'Adda;  mais 
bientôt  échangé,  il  repanit  à  la  tête  de 
ses  troupes,  et  continua  à  se  faire  remar-^ 
quer  par  ses  talens  militaires.  Lorsque  le 
Piémont  fut  réuni  à  la  France,  le  géné- 
ral Frésia  fut  chargé  du  commandement 
du  département  de  la  Haute-Loire  et  en- 
.suite  de  celui  de  l'Hérault.  Il  organisa  en 
1803  à  Montpellier  le  corps  piémontais 
que  l'on  appela  la  Ze'grtow  rff^m«V/t.  Il  fit  les 
campagnes  de  1805  et  de  180G  en  Italie, 
et  celle  de  1807  en  Prusse ,  il  obtint  alors 
le  grade  de  général  de  division,  com- 
manda la  cavalerie  piéniontaise  à  la  ba- 
taille de  Friedland  et  conduisit  ensuite 
un  corps  de  cavalerie  en  Espagne  d'oii  il 
revint  par  suite  de  la  capitulation  de 
Baylen  que  fit  le  général  Dupont.  Après 
avoir  commandé  pendant  quelque  temps 
la  18*  division  militaire,  il  fut  envoyé  à 
la  cour  de  Toscane  oîi  il  remplit,  à  la  sa- 
tisfaction du  gouvernement,  l'importante 
mission  dont  il  était  chargé.  Employé  de 
nouveau,  à  son  retour,  à  la  grande  armée, 
il  commanda  ensuite  la  4"  division  mili- 
taire du  royaume  d'Italie,  fut  chargé  pro- 
visoirement du  gouvernement  de  Venise, 
et  fit  en  1813  la  campagne  de  Saxe.  Nom- 
mé commandant  militaire  des  provinces 
lllyriennes ,  il  pourvut  à  la  défense  de  Lay- 
bach  et  de  Trîeste.  Lorsque  les  événe- 
mens  le  forcèrent  de  quitter  ces  provin- 
ces, il  revint  en  France  oii  il  reçut  le  com- 
mandement de  la  division  de  réserve  que 
l'on  organisait  dans  le  Piémont.  Au  com- 
mencement de  1 8 1 4  il  fut  chargé  de  l^  dé^ 


PRE 

fense  de  Gènes  qu'il  ne  rendit  au  général 
Bentink  qu'après  avoir  obtenu  une  ho- 
norable capitulation.  Les  événemens  de 
1814  ne  ramenèrent  point  le  général 
Frésia  dans  sa  pairie  ;  il  continua  de  res- 
ter eu  France  oii  il  obtint  sa  retraite  en 
1816,  et  ob.  il  est  mort  dans  le  mois  d'oc- 
tobre 1826^ 

FRESNAYEf  Jean Vaiquelai.n dk la  ), 
ne  en  1534  a  La  Fresnaye  en  Normandie , 
fut  d'abord  avocat  du  roi  au  bailliage  de 
Caen  ,  ensuite  lieutenant-général,  et  pré- 
sident au  présidial  de  cette  ville;  il  y 
mourut  en  1606,  à  72  ans.  C'est  le  pre- 
mier poète  français  qui  ait  fait  des  fafire.y. 
Celles  de  La  Fresnaye,  plus  sensées  que 
plaisantes ,  n'ont  ni  l'énergie,  ni  le  pi- 
quant de  Régnier  ;  et  par  conséquent  sont 
moins  lues  par  les  Français ,  naturelle- 
ment amis  du  sel  et  del'épigramme.  On  a 
encore  de  La  Fresnaye  ;  1°  un  Art  poéti- 
que qu'on  ne  lit  plus  et  qu'on  ne  doit 
plus  lire,  parce  que  ce  qu'il  y  a  de  bon 
se  trouve  ailleurs ,  et  que  le  reste  n'est 
qu'un  recueil  de  préceptes  triviaux ,  ver- 
sifiés faiblement.  2°  Un  poème  intitulé  -. 
Pour  la  Monarchie  de  ce  royaume  contre 
In  division  ,  ouvrage  d'un  y.élé  patriote. 
3"  Deux  livres  à'Tdylles ,  et  trois  autres 
à' Epig ranimes ,  à^Epitriphes  et  de  Son- 
nets. Toutes  ces  poésies  ont  été  recueil- 
lies par  lui-même,  in-8  ,  1605  ,  à  Caen. 
Il  était  père  de  Des  Ivetaux.  Voyez  ce 
mot. 

FRESNE  (  Abraham-Alexis  Quinaolt 
Du  )  naquit  d'une  famille  attachée  au 
théâtre  depuis  long-temps.  Il  était  d'un 
caractère  extrêmement  hautain ,  comme 
Baron.  Il  disait  modestement ,  en  parlant 
de  lui  :  «  On  me  croit  heureux  :  erreur 
M  populaire!  Je  préférerais  à  mon  état 
»  celui  d'un  gentilhomme  qui  mangerait 
»  tranquillement  douze  mille  livres  de 
»  rente  dans  son  vieux  château.  »  Du 
Fresne  était  si  glorieux,  qu'il  parlait  à 
peine  à  ses  domestiques  ;  et  lorsqu'il  était 
question  de  payer  un  fiacre  ou  un  porteur 
de  chaise ,  il  se  contentait  de  faire  un 
signe,  ou  de  dire  d'un  air  dédaigneux  : 
Qu'on  paie  ce  malheureux,  n  Ce  n'est  du 
»  reste  pas  à  ces  mimes  qu'il  faut  s'en 
»  prendre,  dit  un  auteur,  s'ils  sont  pleins 


I 


FRE 

))  d'insolence  et  d'orgueil ,  mais  à  l'en- 
»  gouement  dupublicquileurfaitperdre 
»  La  tète  par  des  applaudisseinens  exagé- 
))1ls,  et  par  des  richesses  qui  tes  mettent 
»  de  niveau  avec  les  plus  grands  sei- 
»  gneurs.  »  (  Voyez  Baro.n  ,  Esopus,  Gar- 
RicK,  Roscius).  Cet  histrion  est  mort  en 
1767. 

FRESNE.  Voyez  Cange  (or). 

FRESINE.  Voyez  Forget. 

*  FRESINEL  (  Augustin-Jean  ) ,  physi- 
cien célèbre,  membre  de  l'Institut  (  aca- 
démie des  Sciences)  et  delà  société phi- 
lomatique,  ingénieur  en  chef  au  corps 
royal  des  ponts  et  chaussées,  naquit  à 
Broglie  (Eure)  le  10  mai  1788;  il  avait 
trois  frères  :  l'aîné ,  officier  d'artillerie , 
mourut  en  1807  en  Espagne  ;  le  troisiè- 
me est  ingénieur  des  ponts  et  chaussées  , 
et  le  quatrième  suit  avec  succès  la  car- 
rière des  lettres.  Son  père  qui  était  archi- 
tecte et  entrepreneur  de  travaux  publics  , 
n'ayant  point  adopté  les  principes  de  la 
révolution  ,  se  vit  forcé  ,  par  l'anarchique 
volonté  des  tyrans  de  cette  époque,  de 
renoncer  aux  entreprises  de  son  art,  et 
vint  en  179  4  chercher  un  asile  dans  une 
petite  campagne  qu'il  possédait  dans  les 
environs  de  Caen  oîi  il  s'occupa  unique- 
ment de  l'éducation  de  ses  enfans.  Les 
progrès  d'Augustin  furent  retardés  par  sa 
mauvaise  santé  ;  pendant  quelque  temps 
il  ne  montra  aucune  disposition  bien  mar- 
quée ;  l'infidélité  de  sa  mémoire  et  la  len- 
teur de  sa  pensée  firent  craindre  qu'il  ne 
fût  bon  à  rien  :  mais  bientôt  il  .montra  à 
ses  parens  qui  ne  le  perdaient  pas  de  vue, 
un  esprit  d'observation ,  de  recherche  et 
même  d'invention ,  qui  leur  fit  espérer 
qu'un  jour  il  pourrait  se  distinguer.  A  13 
ans  le  jeune  Fresnel  fut  envoyé  à  Caen 
pour  y  terminer  ses  études.  Entré  à  l'âge 
de  16  ans  à  l'école  polytechnique,  il 
choisit  la  partie  des  ponts  et  chaussées  : 
le  rang  "élevé  qu'il  occupait  dans  l'école 
lui  permettait  de  désigner  la  carrière 
qu'il  voulait  parcourir.  Il  fut  envoyé  suc- 
cessivement dans  les  départemens  de  la 
Vendée,  de  Ja  Drôme  et  d'Ile-et-Vilaine. 
Pendant  plusieurs  années  il  se  trouva 
presque  absorbé  parles  travaux  de  routes 
qui  lui  étaient^  confiés  :  cependant  il  sa- 


PRE  5o<5 

vait  trouver  quelques  momens  de  loisir 
qu'il  consacrait  à  la  science.  En  1814  et 
1 8  f  6  il  se  montra  attaché  à  ses  devoirs  de 
français,  il  alla  dans  le  midi  se  réunir  à 
l'armée  royaliste ,  pendant  l'époque  oii 
pour  la  seconde  fois  la  France  eut  à  su- 
bir le  joug  de  Buonaparte.  Jamais  il  ne  se 
prévalut  de  cet  acte  de  dévouement  que 
le  délabrement  de  sa  santé  rendait  dou- 
blement méritoire.  Ce  fut  à  ÎN'iort  que  Fres- 
nel fit  ses  premières  observations  sur  les 
phénomènes  nouveaux  que  lui  présenta 
la  diffraction  de  la  lumière.  Il  en  rendit 
compte  dans  un  mémoire  imprimé  en 
1815  à  l'académie  des  Sciences.  Peu  de 
temps  après  ,  cette  société  savante  pro- 
posa pour  sujet  de  prix  V Examen  géné- 
ral de  tous  les  phénomènes  de  la  diffrac- 
tion :  Fresnel  obtint  le  prix.  Il  était  de 
retour  à  Paris  depuis  1815,  oîi  son  admi- 
nistration l'avait  fixé.  Notre  but  ne  peut 
être  de  faire  connaître  la  doctrine  scien- 
tifique de  Fresnel  :  il  nous  suffira  de  dire 
qu'avec  la  théorie  des  ondulations ,  il  a 
expliqué  entièrement  la  diffraction.  Vin- 
flexion  ,  la  réflexion  ,  la  polarisation  , 
la  réfraction  ,  la  double  réfraction ,  etc. , 
de  telle  manière  que  tous  ces  phénomènes 
qui  jusqu'alors  avaient  été  considérés  in- 
dépendamment les  uns  des  autres,  forment 
dans  la  théorie  de  Fresnel,  un  système  en- 
tier. Ces  découvertes  ont  été  présentées 
dans  plusieurs  mémoires ob.  les  ressources 
de  la  géométrie  et  de  l'analyse  sont  ap- 
pliquées aux  expériences  les  plus  délica- 
tes et  les  plus  ingénieuses.  Les  recher- 
ches auxquelles  il  se  livrait  sur  la  fin  de 
sa  vie  ont  eu  pour  objet  la  différence  du 
pouvoir  dispersif  des  divers  milieux  com- 
parée à  leur  pouvoir  réfringent.  Ces  di- 
vers travaux  valurent  à  Fresnel,  en  1819, 
son  admission  à  la  société  philomathique, 
en  1823  sa  réception  à  l'académie  des 
Sciences  (  à  l'unanimité  des  suffrages , 
honneur  que  peu  de  savans  ont  obte- 
nu avant  lui).  Il  fut  en  1824  décoré  de 
la  Légion-d'honneur;  et  en  1825  admis 
à  la  société  royale  de  Londres.  En  1827  il 
obtint  le  prix  fondé  dans  cette  société  par 
M.  de  Piumford  pour  la  plus  belle  décou- 
verte sur  la  chaleur  et  la  lumière.  En 
même  temps  que  Fresnel  se  liyrait  à  des 


Bià 


FRE 


recherches  aussi  savantes  y  il  était  con- 
duit à  appliquer  ses  principes  à  l'éclai- 
rage des  phares.  Appelé  en  1819  à  faire 
partie  de  la  commission  chargée  des  pha- 
res ,  il  trouva  le  moyen  de  corriger  pres- 
qu'enlièrementraberration  de  sphéricité, 
et  cette  invention  parut  tellement  avan- 
tageuse qu'elle  a  été  considérée  comme 
un  service  des  plus  utiles  rendu  à  l'hu- 
manité pendant  ce  siècle.  De  concert  avec 
M,  Arago,  il  a  construit  des  phares  dont 
l'effet  est  beaucoup  plus  considérable  que 
celui  que  l'on  avait  obtenu  par  les  plus 
grands  réflecteurs  employés  jusqu'à  pré- 
sent. Des  phares  de  ce  genre  sont  placés 
depuis  1825  à  l'entrée  de  la  Gironde  sur 
la  tour  de  Cordouau ,  à  Dunkerque  et  à 
la  pointe  de  Grave.  L'administration  met 
aussi  en  usage  pour  l'éclairage  des  côtes 
de  France  ce  système ,  qui  a  été  bientôt 
apprécié  en  Angleterre ,  en  Hollande ,  en 
Danemark,  en  Russie,  en  Toscane,  etc. 
Cette  invention  valut  à  son  auteur  la  mé- 
daille d'or  donnée  par  la  société  d'encou- 
ragement, et  le  jury  d'examen  de  l'exposi- 
tion de  1823  demanda  pour  lui  la  croix  de 
St. -Michel.  La  manière  dont  Fresnel  par- 
vin  ta  cette  découverte  est  digne  de  remar- 
que. Le  gouvernenjent  informé  des  succès 
qu'il  obtenait  dans  ses  recherches  sur  la  lu- 
mière, l'engagea  à  faire  des  essais  sur  les 
phares.  Fresnel  travailla  et  obtint  l'heu- 
reux résultat  que  nous  avons  indiqué  : 
aussi  a-t-on  dit  que  c'est  la  première  fois 
qu'une  découverte  a  été  faite  par  ordre. 
Fresnel  était  chargé  en  même  temps  par 
ses  fonctions  du  cadastre  du  pavé  de  Paris. 
En  1821,  il  fut  nommé  examinateur  de 
physique  et  de  géométrie  descriptive  à  l'é- 
cole polytechnique.  En  1824,  à  la  suite 
d'un  examen  qu'il  avait  fait  à  cette  école , 
il  éprouva  des  symptômes  alarmans  qui 
annonçaient  un  épuisement  presque  total  : 
depuis  cette  époque ,  il  la  toujours  été  lan- 
guissant; il  est  mort  à  Ville-d'Avray,  le 
14  juillet  1827.  On  trouve  plusieurs  Mé- 
moires et  Notes  de  lui  dans  les  Annales 
de  physique  et  de  chimie ,  années  1 81 6  à 
1825,  dans  le  Bulletin  de  la  société phi- 
lomatique,  1822,  23  et  24,  et  dans  les 
tomes  5  et  7  des  Mémoires  de  tacadémie 
des  Sciences,  Son  mémoire  sur  Véclai" 


FRE 

rage  des  phares  a  été  imprimé  séparément 
en  1822.  Fresnel  a  laissé  plusieurs  tra- 
vaux inédits ,  dont  on  fait  espérer  la  pu- 
blication. M.  Duleau,  ingénieur  despdBts 
et  chaussées ,  a  publié  sur  lui  une  excel- 
lente Notice  y  où  l'on  trouve  d'amples 
détails  sur  ses  découvertes.  Voyez  la 
Revue  encyclopédique  àe  1828  tome  l". 
FRESNOY  (  Charles-Alfonse  Du  ) ,  né 
à  Paris  en  1611,  d'un  apothicaire,  fut 
destiné  à  la  médecine  par  ses  parens ,  à 
la  poésie  et  à  la  peinture  par  la  nature. 
Les  beaux  arts  l'emportèrent  sur  la  phar- 
macie ,  malgré  les  mauvais  traitemens 
que  sa  famille  lui  fit  esSuyer.  11  prit  d'a- 
bord des  leçons  de  dessin  chez  Perrier  et 
chez  Vouet.  De  cette  école  il  passa  dans 
celle  d'Italie,  sans  autre  secours  poiu' 
vivre  que  son  pinceau.  Du  Fresnoy  fut 
obligé ,  pour  subsister ,  de  peindre  des 
ruines  et  des  morceaux  d'architecture. 
Pierre  Mignard ,  avec  lequel  il  lia  une 
amitié  qui  durti  jusqu'à  la  mort ,  {vint 
le  trouver  à  Rome,  et  l'aida  à  sortir  de 
l'indigence.  Chaque  jour  étendait  la 
sphère  de  ses  connaissances;  il  étudiait 
Raphaël  et  l'antique ,  et  à  mesure  qu'il 
avançait  dans  la  théorie  de  son  art ,  il 
écrivait  ses  remarques  en  vers  latins  pour 
s'aider  dans  la  pratique.  De  ces  observa- 
tions rassemblées  naquit  son  poème  ; 
De  arte  graphica,  de  l'art  de  la  pein- 
ture :  production  admirable  pour  les  pré- 
ceptes ,  mais  dénuée  d'ornemens  et  de 
grâces ,  et  très  inférieure,  pour  la  pureté 
et  l'élégance  du  stile ,  au  poème  latin  de 
l'abbé  de  Marsy,  sur  le  même  sujet.  Du 
Fresnoy  prenait  tour  à  tour  la  plume  et 
le  pinceau.  Il  approche  du  Titien  pour 
le  coloris  et  de  Carrache  pour  le  des- 
sin. Ses  tableaux  et  ses  dessins  ne  sont 
pas  communs.  Le  musée  de  Paris  pos- 
sède deux  tableaux  de  cet  artiste  :  une 
S  te. -Marguerite  eluneNymple  avec  des 
Ndiades.  Il  mourut  en  1 665 ,  chez  un  de 
ses  frères ,  dans  le  village  de  Villiers-le- 
Bcl,  à  4  lieues  de  Paris.  Son  poème  sur 
la  peinture  a  été  traduit  en  français  par 
Roger  de  Piles.  La  meilleure  édition  de 
ce  poème  est  celle  de  Paris,  1673  ,  qu'on J 
a  ornée  des  ligures  de  Le  Clerc  ,  in-12.| 
Renou  eu  a  donné  en  1789  une  tr«duQ<| 


tîon  libre  et  en  vers,  avec  des  remarques  ; 
enfin  M.  Rabany-Beaurefïard  en  a  publié 
une  nouvelle  traduction  à  Clermont-Fer- 
rand,  1810,  in-8. 

FRESNOY.  Foycz  Lknglet  du  Fres- 
NOY  (  Nicolas  ). 

FRESNY  (  Charles  Rivière  Dn  ) ,  ne  à 
Paris  en  1648,  passait  pour  petit-fils  de 
Henri  IV  ,  et  lui  ressemblait.  11  joignait 
à  un  goût  général  pour  les  arts ,  des  ta- 
lens  particuliers  pour  la  musique  et  le 
dessin.  Sans  crayon ,  sans  pinceau  ,  sans 
plume  ,  il  faisait  des  tableaux  cliarnians. 
Il  excellait  surtout  dans  l'art  de  distri- 
buer les  jardins.  Ce  talent  lui  valut  le 
brevet  de  contrôleur  des  jardins  du  roi , 
et  le  privilège  d'une  manufacture  de 
glaces.  Du  Fresny,  extrêmement  prodi- 
gue ,  le  céda  pour  une  somme  médiocre. 
Il  se  fit  rembourser  en  même  temps  nue 
rente  viagère  de  3,000  livres,  que  Louis 
XIV  avait  ordonné  aux  entrepreneurs  de 
lui  faire.  Ce  prince  disait  :  «  Il  y  a  deux 
"  hommes  que  je  n'enrichirai  jamais,  » 
du  Fresny  et  Bontems.  C'étaient  ses  deux 
valets-de-chambre ,  et  presque  aussi  dis- 
sipateurs l'un  que  l'autre.  Du  Fresny 
quitta  la  cour  ,  après  avoir  vendu  toutes 
ses  charges.  Ses  ouvrages  ont  été  recueil- 
lis en  1731 ,  en  6  vol.  in-12.  Ils  renfer- 
ment :  1°  Ses  Pièces  de  théâtre.  2°  Des 
Cantates  ,  qu'il  a  mises  lui-même  en  mu- 
sique. 3°  Plusieurs  chansons.  4°  Les  Amii- 
semens  sérieux  et  comiques,  petit  ou- 
vrage souvent  réimprimé  ,  et  plein  de 
peintures  vives  et  plaisantes  de  la  plu- 
part des  états  de  la  vie.  5°  Des  Nouvel- 
les historiques ,  etc.  On  remarque  dnns 
toutes  ces  productions  tine  imagination 
enjouée  et  singulière. 

*  FRESSINET  (Philibert ,  le  baron  ), 
lieutenant-général,  né  le  21  juillet  1707, 
à  Marcigny  (  Saône  et  Loire  ) ,  entra  à 
1 G  ans  comme  volontaire  dans  un  régi- 
ment de  dragons  ,  et  dut  à  sa  valeur  la 
rapidité  de  son  avancement  ;  car  il  était 
déjà  adjudant-général  en  17  07.  Il  avait 
été  fait  sous-lieutenant  en  1 7  92,  en  récom- 
pense de  l'intrépidité  qu'il  avait  déployée 
à  St.-Domingue  lors  de  la  première  in- 
surrection des  Noirs,  et  ce  fut  en  se  battant 
continuellement  avec  la  plus  grande  va- 


FRE  6m 

leur  contre  ces  peuples  révoltés  qu'il 
parcourut  d'une  manière  aussi  brillante 
les  premiers  degTés  de  l'échelle  militaire. 
A  son  retour  en  France  ,  il  fut  confirmé 
dans  son^  grade  d'adjudant-général,  et  fit 
en  cette  qualité  les  campagnes  d'Allema- 
gne, de  Suisse  et  d'Italie,  depuis  1797 
jusqu'en  1802.  Pendant  ces  diverses  expé- 
ditions ,  il  continua  d'acquérir  de  la 
gloire  et  d'obtenir  de  l'avancement  :  il 
fut  fait  général  de  brigade ,  après  avoir 
contribué  puissamment  à  la  conquête  de 
la  Valteline,  et  avoir  coopéré  à  la  victoire 
remportée  à  TaufFers ,  sur  le  général  au- 
trichien Laudon.  Il  servit  aussi  de  la  ma- 
nière la  plus  glorieuse  sous  les  ordres  du 
général  Championnet  en  Piémont  et  par- 
ticulièrement à  Castelleto  et  Montauera 
près  de  Coni ,  et  ensuite  sous  le  général 
Joubert,  avec  lequel  il  se  battit  contre  les 
Autrichiens  à  Novi  où  il  fut  grièvement 
blessé.  On  cite  encore  parmi  ses  faits 
d'armes  le  combat  opiniâtre  qu'il  soutint 
pendant  sept  heures  sur  les  hauteurs  d'Al- 
bizola  près  de  Savonne,  contre  le  général 
Mêlas  qui  marchait  sur  Gênes  où  Masséna 
était  bloqué.  Le  lendemain  de  cette  vic- 
toire fut  encore  pour  lui  un  jour  de  triom- 
phe :  il  dégagea  le  corps  du  général  Soult 
qui  était  environné  près  de  Sacello  par 
les  ennemis  beaucoup  plus  nombreux  , 
et  qui  était  privé  de  munitions  et  de 
vivres  :  ces  huit  mille  français  durent  leur 
salut  à  la  rapidité  avec  laquelle  Fressinet 
franchit  les  montagnes  escarpées  qui  le 
séparaient  du  corps  de  Soult,  et  à  la  vi- 
gueur avec  laquelle  il  attaqua  inopiné- 
ment les  Autrichiens.  Ce  général  continua 
à  servir  en  Italie  .sous  le  général  Brune  : 
à  la  tête  de  sa  brigade  ,  il  fut  de  toutes 
les  affaires  qui  curent  lieu  à  cette  époque, 
et  qui  ont  immortalisé  la  valeur  française. 
Il  se  distingua  surtout  au  passage  du  Min- 
cio  qu'il  effectua  le  premier  ainsi  que 
celui  du  Tagliamento.  Après  avoir  ainsi 
acquis  iine  réputation  de  valeur  justement 
méritée ,  il  fut  appelé  :i  faire  partie  de 
l'expédition  de  St.-Domingue  commandée 
par  le  général  Leclerc  :  il  s'embarqua  sur 
l'escadre  hollandaise  à  Flessingue,  et  ne 
fut  pas  plutôt  arrivé  dans  cette  colonie 
qu'il  eut  gagné  la  confiance  des  princi- 


Si2  fRÈ 

paux  chefs  des  insurgés.  Clirisloplie  et 
Toussaint  -  Louverture  qui,  l'avaient  déjà 
connu  ,  lorsqu'il  était  venu  quelques 
années  auparavant  dans  leur  île ,  ne  firent 
aucune  difficulté  pour  entrer  en  négo- 
ciation avec  lui,  et  ce  fut  à  sa  persuasion 
qu'ils  consentirent  à  poser  les  armes. 
C'était  un  service  immense  que  Fiessiuet 
avait  rendu  à  l'expédition.  11  crut  que 
les  Kègres  seraient  traités  comme  il  en 
était  convenu  avec  eux  ;  mais  il  n'en  fut 
point  ainsi;  le  général  Leclerc,  qui  sans 
doute  avait  reçu  des  ordres  de  Buoua- 
parte ,  crut  ou  feignit  de  croire  que , 
parmi  les  anciens  insurgés ,  il  y  en  avait 
qui  fomentaient  l'esprit  de  rébellion,  et 
ce  fut  sous  ce  prétexte  que ,  sans  songer 
qu'il  violait  le  droit  des  gens,  que  l'on 
doit  tout  aussi  bien  observer  envers  les 
Noirs  qu'envers  les  Blancs ,  sans  voir  que 
c'était  une  tache  dont  il  chargeait  la  mé- 
moire de  son  maître  comme  aussi  la  sienne 
propre ,  il  fit  arrêter  Toussaiiit-Louver- 
ture  et  l'envoya  en  France.  Ce  malheureux 
Nègre  transporté  dans  un  pays  lointain 
fut ,  comme  on  le  sait ,  jeté  dans  une 
prison  d'état ,  et  ce  fut  dans  un  cachot 
glacé  du  fort  de  Joux  ,  dans  les  monta- 
gnes du  Jura  ,  près  de  Pontarlier  ,  qu'il 
mourut  de  douleur,  d'ennui  et  de  froid. 
Fressinet  ne  dissimula  pas  son  indigna- 
tion :  la  désapprobation  qu'ilfit  de  cetacte 
despotique  fut  punie  par  uue  disgrâce  de  5 
ans.  Arrêté  lui-même  ,  il  fut  renvoyé  en 
France.  Dans  la  traversée  il  tomba  au 
pouvoir  des  Anglais  qui  le  retinrent  pen- 
dant 1 4  mois  en  captivité.  De  retour  tlaus 
sa  patrie  il  ne  désavoua  point  devant  le 
ministre  de  la  guerre  le  blâme  qu'il  avait 
jeté  sur  la  conduite  des  Français  dans 
la  colonie  de  St.-Domingue,  et  la  censure 
était  d'autant  plus  juste,  qu'on  pouvait 
à  cette  époque,  par  les  revers  que  nos 
troupes  avaient  subis  dans  cette  île ,  s'as- 
surer que  ces  prévisions  n'étaient  point 
exagérées.  Fressinet  n'en  fut  pas  moins 
envoyé  en  exil  successivement  à  Bor- 
deaux ,  en  Italie  et  à  Tours.  Ce  ne  fut 
qu'en  1812  que  Icgouvernement  lui  ren- 
dit du  service,  et  l'envoya  dans  la  Calabre. 
La  même  année  il  alla  à  Vérone  avec  les 
troupes  qui  se  trouvaient  dans  le  royaume 


Pré 

de  Naples  et  fit  partie  du  ti"""  corjis  de 
la  grande  armée  que  le  général  Gérard  y 
organisait.  Après  avoir  traversé  le  Tyrol 
et  l'Allemagne,  il  rejoignit  le  prince 
Eugène  sur  les  frontières  de  la  Pologne , 
et,  pendant  cette  campagne  de  1813, 
il  signala  son  intrépidité  dans  de  fré- 
quentes occasions.  Les  bulletins  de  l'ar- 
mée citèrent  ses  faits  d'armes  :  ainsi  lors 
de  la  défection  des  Prussiens ,  qui  fu- 
rent les  premiers  îi  abandonner  les  Fran- 
çais ,  il  contribua  efficacement  à  sauver 
l'armée  du  prince  Eugène  que  cette  dé- 
fection plaçait  dans  une  position  difficile. 
Nommé  commandant  de  la  Gl"""  division 
militaire,  il  battit  les  Prussiens  le  5  avril 
à  la  droite  de  l'Elbe  ,  en  avant  de  .Magde- 
bourg  ,  et  le  30  du  même  mois  ,  il  par- 
vint après  plusieurs  combats  à  opérer  à 
jN'ewbourg  la  jonction  des  troupes  com- 
mandées par  le  prince  Eugène  avec  l'ar- 
mée de  Buonaparte ,  et  dès  le  surlende- 
main, 2  mai ,  il  se  fit  remarquer  par  son 
intrépide  sang  froid  à  la  mémorable  et 
meurtrière  bataille  de  Lutzcn  oii  furent 
vaincus  les  Prussiens  et  les  Russes  réunis. 
Ce  fat  lui  qui  dans  cette  journée  glorieuse 
s'empara  avec  une  poignée  d'hommes,  du 
village  d'Esdorf  occupé  par  un  grand 
nombre  de  grenadiers  russes  qui  inquié- 
taient les  troupes  françaises,  et  après  s'en 
être  emparé  non  .sans  peine,  il  le  garda 
pendant  tonte  l'action,  et  ne  ces.sa  de  com 
battre  que  lorsque  le  succès  de  cette  af- 
faire eut  été  entièrement  décidé.  Buona-  i 
parle  avait  remarqué  la  bravoure  de  Fres- 1 
sinet  :  le  prince  Eugène  lui  témoigna 
devant  toute  l'armée  combien  sa  conduite 
était  digne  d'éloges.  Fressinet  reçut  le 
titre  de  général  de  division  ,  avec  la  di- 
gnité de  baron  et  les  croix  de  comman- 
dant de  la  Légion  d'honneur  et  de  com- 
mandeur de  l'ordre  de  Saint-Joseph  de 
Wurtzbourg.  Ces  récompenses,  quoique 
tardives  ,  furent  pour  Fressinet  de  puis- 
sans  encouràgemcns.  li  fit  encore  preuve 
dé  talent  et  de  valeur  au  pas.sage  de 
l'Elbe  près  de  Dresde  ;  il  réussit  à  s'em- 
parer des  bateaux  que  l'ennemi  n'avait 
point. pu  détruire,  et  à  reconstruire  le 
pont  au  milieu  d'une  grêle  de  balles. et 
de  boulets.  A  la  bataille  de  Bautzcn  ,  il 


FRE 

ooininandait    one    division    de    réserve 
(  22  mai  1813  ).  Déjà  un  des  corps  d'ar- 
mée avait  été  repoussé  par  les  ennemis 
qui  commençaient  à  seporter  sur  la  droite 
pour   envelopper  les    Français  ,  lorsque 
Fressinet  s'élance  avec  impéttiosité  contre 
les  alliés,  et  leur  enlève,  malgré  une  rési- 
stance vigoureuse,  les  positions  avanta- 
geuses dont  ils  s'étaient  emparés.  Destiné 
ensuite  à  aller  en  Italie  pour  renforcer 
l'année  du  prince  Eugène ,  il  ne  put  s'y 
rendre,  parce  que  les  chemins  étaient  in- 
terceptés ;  il  assista  par  conséquent  à  la 
bataille  de  Leipsick  (  1 8  et  1 9  octobre  )  ; 
il  s'y  couvrit  de  gloire  et  servit  d'aide-de- 
camp  à  Buonaparte  :  dans  le  mois  de  dé- 
cembre suivant  il  alla  commander  la  3™* 
division  d'Italie.  Après  la  défection  de 
Murât ,  le  prince  Eugène  se  décida  à  fran- 
chir le  Mincio  pour  aller  chercher  l'en- 
nemi et  lui  livrer  bataille  :  mais  il  avait 
laissé  Fressinet  à  Monzanbanopour  garder 
le  haut  Mincio.  Ce  fut  Fressinet  qui  fut 
attaqué   :    18,000   ennemis    se  jetèrent 
sur  6,000  français  :  le  combat  dura  sept 
heures  :  il  fut  si  acharné  que  les  soldats 
de  Fressinet,  manquant  de  munitions,  se 
servirent  de  l'arme  blanche.  La  mêlée 
durait  encore  lorsque  le  prince  vint  atta- 
quer les  Autrichiens  et   délivrer  cette 
troupe  de  héros.  Cette  affaire  prépara  la 
Tictoire  que  le  prince  remporta  sur  le 
3Iincio  le  même  jour  (  8   février  1814  }. 
Après  la  chute  de  Buonaparte ,  le  général 
Fressinet  rentra  en  France  où  il  reçut  la 
crois  de  Saint-Louis  et  fut  mis  en  non-acti- 
vité. L'amitié  qui  le  liait  au  général  Ex- 
celmans  le  détermina  à  aller  prendre  sa 
défense  devant  le  conseil  de  guerre  de 
Lille  qui  devait  le  juger  :  il  eut  la  satis- 
faction de  le  voir  absous  à  l'unanimité  : 
il  dut  attribuer  ce  succès  à  la  logique 
pressante  qu'il  avait  su  employer  ,  et  à 
l'éloquence  toute  militaire  dont  il  avait 
fait  preuve.  Pendant  les  cent  jours ,  Fres- 
sinet fut  chargé  de  plusieurs  missions 
particulières ,  notamment  k  Rouen  et  à 
Toulouse ,  où  il   fit  des  proclamations 
analogues  aux  circonstances.  Chargé  pro- 
visoirement du  commandement  de  la  1  G'"» 
division  militaire ,  il   organisa  la   26'"« 
cohorte  active ,  doùt  le  commandement 

V. 


PRE  5i3 

hit  donné  au  général  Decaen.  Il  revint 
ensuite  à  Paris,  où  il  apprit  aussitôt  le 
désastre  de  Waterloo.    Il  fit  partie   de 
l'état-major  du  maréchal  Davoust,  et  fut 
l'un  de  ceux  qui  signèrent  une  adresse  de 
dévouement  à  la  chambre  des  représen- 
tans  :  on  assure  même   qu'il  en  fut  le 
rédacteur.  Il  fut  aussi  l'un  des  généraux 
qui  se  prononcèrent  le  plus  fortement 
pour  la  défense  de  la  capitale,  et  fit  tous 
ses  efforts  pour  faire  adopter  cette  réso- 
lution. L'ordonnance  royale  du  24  juillet 
1815  comprit  Fressinet  parmi  ceux  qui 
furent  exilés.  Réfugié  en  Belgique ,  il  fut 
arrêté   à  Flessingue   au   moment  où  il 
allait  mettre  à  la  voile  pour  l'Amérique , 
cependant  il  parvint  à  s'échaper ,  et  il  ' 
regagna  le  navire  où  sa  femme  l'attendait 
(  1 7  février  1818  ).  On  trouve  dans  la  Bi- 
bliothèque historique  les  adieux  de  Fres- 
sinet à  sa  patrie.  Débarqué  à  Buénos- 
Ayres  dans  le  Paraguai,  il  quitta  cette  ville 
après  un  séjour  d'un  an ,  alla  ensuite  à 
Montevideo  ,  puis  à  Rio-Janeiro  où  il  se 
proposait  d'aller  combattre  sous  les  ordres 
du   général  St.-Martin  ,   lorsqu'il   reçut 
l'ordonnance  royale  qui  le  rappelait  eu 
France.  Parti  le  7  février  1820,  il  arriva 
au  Havre  dans  le  mois  de  mai  suivant 
après  5  ans  d'exil.   Bientôt  après  il  fut 
arrêté  et  détenu  pendant  G  semaines  à  la   , 
Conciergerie.  L'année  suivante,  après  une 
audience  qu'il  obtint  du  roi,  il  fut  replacé 
sur  le  cadre  de  disponibilité  :  mais  il  ne 
jouit  pas  long-temps  du  bonheur  d'avoir 
retrouvé  sa  patrie  :  il  mourut  à  Paris  le  9 
août  1821.  Fressinet  est  auteur  de  la  bro- 
chure qui  a  pour  titre  :  Appel  aux  généra- 
lions  présentes  et  futures  sur  la  conven- 
tion de  Paris  faite  le  Z  juillet  1815,  par  un 
ofhcier-général ,  témoin  des  événemens. 
Genève  (  Paris,  1 81 T  ) ,  in-1 2 ,  réimprimé 
clandestinement  à  Paris  en   1820  ,  in-8. 

"  FRETEAU  DE  SAINT-JUST  (  Em-  , 
manuel-Marie-Michel-Philippe  ) ,  conseil- 
ler de  grand'chambre  au  parlement  de 
Paris,  beau-frère  du  président  Dupaty,  né 
vers  1745,  se  voua  au  commencement  de 
la  révolution  au  parti  d'Orléans,  et  se 
déclara  contre  les  mesures  proposées  au 
parlement  par  les  ministres ,  et  relatives 
à  l'impôt  graduel.  Arrêté  par  suite  de 
33 


5i4  FRE 

ces  diffi^rcnds ,   il  fut   relâché  après  la 
disgrâce  du  cardinal  de  Rriennc ,  et  nom- 
mé ,  par  le  bailliage  de  Melun ,  députe  de 
la  noblesse  aux  Etats-généraux,  Il  fut  un 
des   premiers  membres  de  la  minorité 
qui  passa   à  la  chambre  du  tiers-état , 
et  fut  eulicrement  dévouée  au  parti  dé- 
mocratique. Sou  empressement  à  parler 
sur  toutes  les  matières ,  et  à  vouloir  se 
mêler  de  tout ,  le  fit  surnommer  par  Mira- 
beau ,   la  commère  Frétcau.  Il  proposa 
de  donner  à  Louis  XVI  le  titre  de  roi  des 
Français  ,  et  d'ajouter  à  ces  mots  :  Louis 
roi  par  la  grâce  de  Dieu,  ceux-ci  :  et 
par  la  loi  constitutionnelle  de  Vétat ,  ap- 
puya toutes  les  mesures  coptre  la  cour , 
dénonça  les  bastilles  secrètes,  demanda 
l'abolition  des  ordres  religieux  et  la  vente 
des  biens  du  clergé.  Il  vota  ensuite  pour 
que  le  droit  de  guerre  et  de  paix  appar- 
tînt à  la  nation,  adhéra  à  l'abolition  de  la 
noblesse,  et  fit  une  violente  sortie  contre 
les  ennemis  de  la  constitution.  Il  voulut 
s'opposer  au  nouveau  serment  du  clergé, 
mais  il  ne  fut  pas  écoulé.  Son  rapport 
alarmant  sur  la  situation  de  la  France  en 
1791  lui  attira  une  foule  de  sarcasmes. 
Cependant ,  à  la  suite  de  ce  rapport ,  on 
ordonna  au  prince  de  Condé  de  rentrer 
en  France ,  et  il  fit  rendre  le  28  juin  un 
décret  qui  défendait  à  tous  les  Français 
de  sortir  du  royaume.  Après  la  session ,  il 
fut  nommé  juge  du  tribunal  du  2*  arron- 
dissement de  Paris.  Les  jacobins  le  firent 
arrêter  comme  suspect  en  1 793  ,  et  il  fut 
condamné  seulement  à  la  détention  par 
mesure  de  sûreté  générale  ;  mais  pour- 
suivi par  la  haine  de  Robespierre,  on  l'en- 
veloppa dans  une  prétendue  conspira- 
tion des  prisons,  et  il  fut  mis  amortie  14 
juin  1794. 

*  FRETEAD  (  Jean-Marie-Nicolas  ) , 
médecin  et  chirurgien ,  né  à  Meslai,  ci- 
devant  diocèse  de  Rennes,  en  1765, 
d'un  avocat  au  parlement  de  cette  ville , 
vint,  en  1788  ,  terminer  ses  éludes  mé- 
dicales à  Paris ,  fut  successivement  nom- 
mé chirurgien-major  à  l'armée  des  côtes 
de  Brest ,  et  obtint  le  même  titre  aux  hô- 
pitaux des  volontaires  de  la  Loire-Infé- 
rieure. Il  exécuta  avec  succès  presque 
tout£s  les  opérations  de  la  haute  chirur- 


FRE 

gie,ctfutun  des  premiers  qui  imaginèrent 
des  moyens  mécaniques  propres  à  corriger 
les  difformités  corporelles.  Il  était  de  la 
société  académique  de  Nante».  Il  acquit , 
en  outre ,  beaucoup  de  réputation  comme 
accoucheur.  Freteau  mourut ,  le  9  avril 
1823,  âgé  de  cinquante-huit  ans.   On  a 
de  lui   1"  Mémoire  sur  les  moyens  de 
guérir  facilement  et    sans  danger   les 
vieux  ulcères  des  jambes ,  même  chez 
les  vieillards ,  Paris ,  1 803  ;  2°  Essai  sur 
Fasphyxie  de  l'enfant  nouveau-né ,  Pa- 
ris, F.  Louis,    1803;  3"   Considérations 
pratiques  sur  le  traitement  de  la  go- 
norrhée  virulente ,  etc.  ,  Paris ,  Le  for- 
mant, 1 S 1 3,  in-S"  de  300  pages  ;  4°  Traité 
élémentaire  sur  Uemploi  légitime  et  mé- 
thodique des  émissions  sanguines  dans 
Fart  de  guérir,  avec    application  des 
principes  à  chaque  maladie  ,  Paris ,  Ga- 
bon, 181G,  in-8.  Cet  ouvrage  avait  été 
couronné  par  la  société  de  médecine  de 
Paris  ,  le  5  juillet  1814.  5°  Considérations 
sur  l'asphyxie  de  fenfant  nouveau-né, 
18 10.  C'est  la  réponse  à  une  critique  de 
son  ouvrage  sur  le  même  sujet ,  qu'il  dé- 
veloppe plus  amplement,  et  d'une  ma- 
nière victorieuse.  Il  a  donné,  ^  outre, 
un    grand  nombre  de    mémoires    dans 
plusieurs  your«a«ar  savons  et  de  méde- 
cine ,  comme  sur  Y  Heureux  effet  de  l'al- 
laitement artificiel.  —  Sur  la  ligature 
d'un  polype  utérin.  —  Sur  une  hémorr- 
hagie  très  sérieuse  dont  la  cause  a  étélong- 
temps  inconnue.  — Sur  la  doctrine  des  né- 
croses,  et  la  nécrose  du  tibia.  —  Sur  une 
intumescence  de  la  langue,  «t'ecprolon- 
gement  hors  de  la  bouche. — Divers  articles 
sur  V agriculture ,  le  magnétisme,  etc 
♦  FREUNDWEILER  (Henri) ,  pein- 
tre suisse,  né  à  Zurich  en  17  55,  fit  plu- 
sieurs voyages  en  Allemagne ,  et  séjourna 
quelque  temps  à  Dresde  et  à  Berlin.  Le 
prince  de  Dessau  chercha  à  se  l'attacher  ; 
mais  cet  artiste  préféra  son  indépendance, 
et  revint  en  Suisse  ,  où  il  cultiva  surtout 
le  genre  historique.  La  plupart  de  ses  ta- 
bleaux sont  tirés  de  V histoire  de  sa  na- 
tion. On  loue  la  vérité  de  leurs  détails 
cl  la  beauté  de  leur  coloris.  • 

'  FREVIER  (  Charles-Joseph  ) ,  né  à 
Rouen  le  11  novembre  1689  ,  entra  fort 


I 


FRE 
jeune  dans  la  société  des  jésuites,  où  il 
fut  destiué  à  l'enseignement.  On  n'est 
pas  sûr  de  l'époque  de  sa  mort  ;  mais  il 
vivait  encore  en  17  70  ,  après  la  suppres- 
sion de  son  ordre  :  il  paraît  qu'il  survé- 
cut peu  à  cette  époque.  Il  est  connu  par 
le  différend  littéraire  qu'il  eut  avec  ses 
confrères  les  journalistes  de  Trévoux.  Le 
Père  Widenhoffer,  jésuite  allemand,  pas- 
sant par  Malines ,  remarqua  dans  la  bi- 
bliothèque des  jésuites  de  cette  ville  un 
manuscrit  de  Bellarmin ,  qui  contenait 
une  dissertation  sur  la  Yulgate  ;  il  en  fit 
un  précis;  mais  trouvant  ensuite  plus  à 
propos  de  faire  imprimer  le  manuscrit 
lui-même,  il  en  obtint  une  copie  colla- 
tionnée  du  Père  Holvoët,  bibliothécaire 
du  collège  de  Malines ,  et  le  publia  sous 
ce  litre  :  jdpographus  ex  manuscripto 
autographe  venerabilis  Dei  servi  Ro- 
berti  Bellarmini  e  societate  Jesu ,  S.  R. 
E .  cardinalis ,  de  editione  J^ulgata , 
quo  sensu  a  concilio  tridetitino  defmitum 
sit,  ut  en  pro  authcntica  haberetur.  Le 
Père  Berthier ,  en  rendant  compte  de  cet 
écrit  dans  son  Journal  de  Trévoux ,  éta- 
blit que  le  sentiment  de  Bellarmin  et 
même  du  cardinal  Pallavicin  était  que  le 
concile  de  Trente ,  en  déclarant  la  Yul- 
gate authentique,  avait  voulu  direqu'el'e 
était  exemple  de  toute  erreur  en  matière 
de  foi  et  de  mœurs ,  et  qu'elle  seule  de- 
vait être  en  usage  dans  les  églises  et  les 
écoles,  mais  qu'il  n'avait  pas  prétendu 
qu'il  ne  s'y  trouvait  pas  de  fautes.  Le 
Père  Frévier  s'éleva  contre  cette  opinion , 
qu'il  trouvait  dangereuse  ,  dans  un  livre 
qu'il  publia  sous  ce  titre  :  La  Fulgate 
authentique ,  authentique  dans  tout  son 
texte  ,  plus  authentique  que  le  texte  hé- 
breu ,  que  le  texte  grec ,  qui  nous  res- 
tent; théologie  de  Bellarmin ,  son  apo- 
logie contre  récrit  annoncé  dans  le 
Journal  de  Trévoux,  article  85  ,  juillet 
1750,  Rome,  1753,  in-12.  Il  y  soutient 
que  la  Vulgate  est  le  seul  texte  pur ,  et 
que  ni  le  texte  hébreu  ni  le  texte  grec 
n'ont  pas  cet  avantage ,  et  que  c'est  ainsi 
qu'a  voulu  l'établir  le  concile  de  Trente. 
Quant  à  l'opinion  de  Bellarmin  et  du  car- 
dinal Pallavicin ,  il  prouve,  d'après  des 
passages  tires  de  leurs  écrits  ,  que  leur 


FRE  5i5 

sentiment  était  le  même  que  le  sien  ,  et 
que  le  manuscrit  trouvé  à  Malines  ne 
peut  prouver  le  contraire,  étant  une 
pièce  sans  conséquence ,  un  mémorial 
oii  Bellarmin  ,  jeune  encore ,  aurait  re- 
cueilli le  résultat  de  ses  lectures,  et  qu'il 
aurait  ensuite  jeté*  comme  un  écrit  indi- 
gne de  lui.  Mais  c'était  moins  pour  com- 
battre le  Père  Berthier  que  Frévier  avait 
composé  ce  livre ,  que  pour  ne  pas  laisser 
croire  que  les  Ecritures  saintes  pouvaient 
être  exposées  à  un  soupçon  de  corrup- 
tion. 

FREY  (  Jean-Cécile  ) ,  né  à  Keisers- 
tul  en  1580,  professa  la  philosophie  au 
collège  de  Montaigu  à  Paris  ,  et  y  mourut 
de  la  peste  l'an  1631 .  Ses  ouvrages  latins 
de  philosophie  furent  imprimés  en  cette 
ville ,  in-8  ,  2  vol.  ;  le  1  "  en  1 655  ,  le  2= 
en  1646.  On  trouve  dans  celui-ci  quel- 
ques écrits  de  médecine  ,  science  en  la- 
quelle il  avait  été  passé  docteur.  La  liste 
des  autres  ouvrages  que  renferme  cette 
collection  se  trouve  dans  le  Dictionnaire 
de  Moréri  et  dans  le  tome  39  des  Mé- 
moires du  Père  Nicéron. 

FREY.  Voyez  Neuville. 

FREY  (  Jean-Jacques  ) ,  né  à  Lucerne, 
le  17  février  1681 ,  fut  l'un  des  plus  célè- 
bres graveurs  de  son  temps  ,  vécut  long- 
temps à  Rome  ,  et  y  mourut  le  12  janvier 
1751.  Il  a  gravé  d'après  les  plus  grands 
maîtres,  tels  que  Raphaël,  le  Guide,  le 
Dominiquin  ,  Annibal  Carrache  ,  Carlo 
Maratti ,  le  Poussin.  Son  burin  est  vif  et 
expressif.  Le  recueil  de  ses  gravures  forme 
2  gros  vol.  in-folio  et  s'élève  à  plus  de 
cent  planches,  outre  l'estampe,  qui  passe 
pour  être  son  chef-d'œuvre  et  qui  est 
appelée  :  In  conspectu  angelorum  psal- 
lam  tibi. 

FREZIER  (  Amédée-François  ) ,  in- 
génieur et  voyageur ,  né  à  Chambéry  en 
1682,  d'une  famille  distinguée  dans  la 
robe ,  originaire  d'Ecosse ,  vint  à  Paris 
pour  étudier  la  jurisprudence  ;  mais  les 
mathématiques  ayant  plus  d'attrait  pour 
lui ,  il  s'y  livra  entièrement ,  et  entra 
dans  le  corps  du  génie  en  1707.  La  cour 
le  chargea  d'aller  examiner  les  colonies 
espagnoles ,  au  Pérou  et  au  Chili  en 
1711  ,  et  employa  sou  talent  pour  les 


5r6  FRI 

fortifications  à  Saint-Malo,  à  Saiiit-Domin- 
gne  en  1719,  h  Landau  en  1728.  Ce  fut 
aussi  cette  même  année  qu'il  reçut  la 
croix  de  St. -Louis  ,  et  qu'il  se  maria.  Il 
parvint  ensuite  au  grade  de  lieutenant- 
colonel  ,  et  enfin  de  directeur  de  toutes 
les  fortifications  de  la  Bretagne.  Il  mourut 
en  1772  ,  à  l'âge  de  92  ans.  Nous  avons 
de  lui  divers  ouvrages  :  1°  Traité  des 
feux  (V artifice,  1747  ,  in-8  ;  2°  Voyage 
de  la  mer  du  Sud ,  1716,  in-4  ,  et  2  vol. 
in- 12  ,  1717  ;  3°  Théorie  et  pratique  de 
la  coupe  des  pierres  et  des  bois ,  Stras- 
bourg, 1769,  3  vol.  in-4.  Il  donna  l'abrégé 
de  ce  livre  sous  le  titre  â!Elémens  de 
sicréotomie  ,  Paris,  1769,  2  vol.  in-8. 

FREZZI  DE  FoiiGNo  (  Frédéric  ),  évê- 
que  de  Foligno  sa  patrie ,  avait  été  domi- 
nicain ,  il  fut  décoré  de  la  mitre  par  Bo- 
niface  IX  en  1 403  ,  assista  au  concile  de 
Pise  en  1409  ,  et  mourut  en  1410  à  Con- 
stance ,  pendant  la  tenue  du  concile.  Il 
est  auteur  d'un  poème  fort  estimé  des 
Italiens  ,  intitulé  :  Il  quadriregio ,  ou 
Les  quatre  règnes  de  la  vie  de  l  homme  ; 
le  1*'  règne  est  celui  de  Cupidon,  le  2* 
celui  de  Satan ,  le  3*  celui  des  Vices , 
et  le  4"  celui  de  Minerve  ou  de  la  Vertu. 
Il  fut  imprime  pour  la  première  fois  à 
Foligno  en  1481  ,  in-fol. ,  et  cette  édition 
est  rare  et  recherchée.  La  derrière  et  la 
meilleure  est  celle  de  Foligno,  1725,2 
vol.  in-4.  Quelques  critiques  ont  voulu 
enlever  cet  ouvrage  à  Frezzi ,  pour  le 
donner  à  Nicolas  Malpigli,  Bolonais;  mais 
les  meilleurs  bibliographes  d'Italie  sou- 
tiennent qu'il  est  certainement  de  Frezzi. 

FRIART  ou  FRÉAR.  Voyea  Cham- 
BRAY  (  Roland  ). 

FRIBURGER.  Voyez  Gerwg. 

*  FRIEDEL  (  Adrien-Chrétien  )  na- 
quit à  Berlin  le  13  mars  1753.  Il  vint  à 
Paris  dès  sa  première  jeunesse ,  et  fut 
professeur  en  survivance  des  pages  du 
roi.  Il  publia  plusieurs  comédies  tradui- 
tes de  l'allemand  ,  comme  La  Piété 
filiale,  d'Engel  ,  1781;  Le  Page,  du 
même,  1781  ,  etc.  Il  donna  en  outre  le 
Nouveau  théâtre  allemand ,  ou  Recueil 
des  pièces  qui  ont  paru  avec  succès  sur 
les  théâtres  des  capitales  de  l'Allema- 
gne,  1782-1785,  12   vol.    iu-8.  M.  Bou- 


FRI 

ncvillc  a  en  part  à  cette  traduction.  Le 
Nouveau  théâtre  contient  vingt-huit 
pièces  des  meilleurs  auteurs  allemands. 
A  la  tête  du  premier  volume ,  on  trouve 
une  histoire  de  leur  théâtre.  Friedel  est 
mort  en  1786. 

*  FRIEDEL  (  Louise-Béate-Augustine, 
Utecht  dame),  née  en  1768àColnow 
en  Poméranie ,  morte  à  Carcassonne  en 

1818,  a  publié  deux  ouvrages  qui  ont 
sauvé  son  nom  de  l'oubli  :  1"  VArt  du 
confiseur,  Paris,  1802,  souvent  réim- 
primé ;  2°  Mémoire  d'une  mère  infor- 
tunée à  ses  filles  ;  la  14«  édition  faite  ea 

1819,  1  vol.  in-12,  est  précédée  d'une 
Notice  sur  l'auteur. 

*  FRISCH  (  Joseph-Léopold  ) ,  minis- 
tre protestant ,  fut  très  instruit  dans  les 
sciences  naturelles  et  dans  la  philologie , 
et  naquit  à  Berlin  ,  le  29  octobre  1714. 
On  a  de  lui  :  1  °  Musei  hoffmaniani  pé- 
tri ficata  et  lapides ,  Halle  ,  1741  ,  in-4  ; 
Tableau  systématique  des  quadrupèdes , 
distribués  en  ordres  ,  genres  et  espèces, 
Glogaw,  17  75  ,  in-4  ;  3°  Des  avantages 
et  des  inconvéniens  que  présentent  les 
quadrupèdes ,  Bulaunz,  1776,  in-8.  Ces 
deux  ouvrages  sont  écrits  en  allemand. 
Frisch  mourut  en  1787. 

*  FRISCH  (  Jean-Léonard  ) ,  ministre 
protestant  et  philologue  allemand,  né  à 
Sulzbach  le  1 9  mars  1 6G6 ,  passa  la  moitié 
de  sa  vie  à  voyager  en  Allemagne ,  en 
France,  en  Suisse,  en  Italie,  en  Hollande, 
en  Turquie ,  etc.  S'étant  fixé  à  Berlin  en 
1700,  il  y  enseigna  la  langue  russe  à 
Leibnilz.  Il  exerça  tour  à  tour,  auprès 
de  divers  gentilshommes,  l'emploi  d'éco- 
nome ,  d'intendant  et  de  précepteur ,  et 
devint  recteur  de  la  société  prussienne 
en  1726.  Il  fut  chargé  en  17  31  de  diriger 
la  classe  historico-philologico-germani- 
que,  et  mourut  à  Berlin  le  21  mars  1743. 
On  a  de  lui  un  grand  nomhrc  d'ouvrages 
qui  attestent  la  variété  de  ses  connais- 
sances :  1°  Spécimen  lexici  germanici , 
Berlin,  1723  ,  iu-8  ;  2'^  Dictionnaire  alle- 
mand-latin,  1741,  in-4;  3°  Nouveau 
dictionnaire  des  passagers  ,  français- 
allemand  et  allemand-français,  Leipsick, 
1712,  très  souvent  réimprimé  en  1  et  2 
vol.  îu  8  ;  4"  Programma  de  origine  cha- 


\ 


FRÏ 

racteris  slavonici ,  vulgb  dicH  cinitici , 
Berlin,  1727  ,  in-4  ;  5"  Continuationes 
historiœ  linguœ  slavonicœ,  1727  ,  1729 
et  1734  ,  in  4  ;  G°  Description  de  tous 
les  insectes  de  l'Allemagne,  Berlin,  1720- 
1738  ,  13  cahiers  in-4  ,  ouvrage  estimé  ; 
7°  Description  ci  figure  des  oiseaux  de 
l'Allemagne  ,  in-folio ,  figures  coloriées  , 
très  bel  ouvrage ,  qui  a  été  continué  par 
son  fils  Josse-Léopold ,  mort  en  1787  , 
auquel  on  doit  Musei  Hoffmannianipe- 
trefactaet  lapides,  Uaile ,  1741  ;  8**  Jte- 
cherches  d'histoire  naturelle  ,  Berlin  , 
17  42,  et  autres  ouvrages  qui  ont  pour 
objet  la  minéralogie  et  la  zoologie. 

FRISCHE  (  Dom  Jacques  du),  bénédic- 
tin de  la  congrégation  de  St,-Maur  ,  né  à 
Séez  en  1640,  donna,  en  1686  et  1690, 
avec  D.  Nicolas  Le  Nourri ,  une  nouvelle 
édition  de  St.-Ambroise  ,  accompagnée 
de  savantes  notes,  en  2  vol.  in-fol.  Ou 
lui  doit  aussi  la  Vie  de  saint  Augustin  , 
qui  se  trouve  à  la  tête  des  œuvres  de  ce 
saint  docteur  ;  il  y  travailla  avec  D. 
Vaillant  sur  les  mémoires  de  l'abbé  de 
Tillemont.  D.  Frische  travaillait  à  une 
nouvelle  édition  de  saint  Grégoire  de 
Nazianze ,  lorsqu'il  mourut  à  Paris  en 
1693,  avec  la  réputation  d'un  savant 
vertueux.  Pinsson,  avocat  au  parlement,  a 
fait  l'éloge  de  Don  Frische  dans  une  lettre 
imprimée  en  1694. 

FRISCIILIN  (  Nicodème  ) ,  philologue 
allemand ,  né  à  Balingen  ,  dans  le  duché 
de  Wittemberg  le  22  septembre  1547, 
se  tua  en  1590 ,  à  43  ans  ,  en  voulant  se 
sauver  d'une  tour  ou  ses  vers  l'avaient 
fait  enfermer.  Il  avait  beaucoup  de  talent 
pour  la  poésie.  On  a  de  lui  seize  livres 
iH élégies,  sept  comédies,  deux  tragédies , 
etc.  Sa  comédie  de  Rébecca  lui  valut  une 
couronne  de  laurier  d'or,  que  l'empereur 
Kodolphe  voulut  lui  donner  solennelle- 
ment à  la  diète  de  Ratisbonne.  Il  était 
partisan  de  Piamus  :  ses  écrits  en  matière 
grammaticale  eu  font  foi.  Il  a  travaillé 
aussi  sur  Callimaque,  Aristophane ,  Vir- 
gile ,  Perse  ,  etc.  ,  qu'il  a  ou  traduits  ou 
éclaircis  par  des  notes.  Ses  OEuvres 
poétiques  parurent  en  4  vol.  in-8  ,  1598 
à  1607.  (On  a  encore  de  lui  des  ouvrages 
sur  Y  astronomie  y  sur  les  Hébreux ,  cl  un 


FRI  5i7 

dictionnaire  grec-latin-allemand.  Lange 
a  publié  à  Brunswick  en  1 727  :  Frischll- 
ni  Vita,fama,  scriptis  et  vitœ  exitu 
memorabilis.  Voyez  la  liste  de  ses  ouvra- 
ges dans  le  tome  19  des  Mémoires  de 
Nicéron. ) 

FRISCHMUTH  (  Jean  ),  né  en  1019  à 
W.ertheim  ,  dans  la  Franconie ,  iut  rec- 
teur ,  puis  professeur  des  langues  à  léna , 
où  il  mourut  en  1687.  On  a  de  lui  :  1° 
des  explication^ Ae  plusieurs  endroits 
difficiles  de  l'Ecriture  sainte  ,  dont  quel- 
ques-unes sont  assez  heureuses;  2°  plus 
de  60  dissertations  in-4  ,  philologiques 
et  théologiques ,  sur  des  sujets  curieux  , 
pleines  d'érudition. 

*  FRISI  (  L'abbé  Paul  ) ,  célèbre  ma- 
thématicien et  physicien  ,  né  à  Milan  le 
13  avril  1728,  entra  à  l'âge  de  15  ans 
chez  les  clercs  de  Saint-Paul  de  l'ordre 
des  Barnabites  ,  et  composa  à  22  ans  sa 
fameuse  Dissertation  sur  la  figure  de  la 
terre.  Il  professa  la  philosophie  à  Milan  , 
ensuite  à  Pise.  En  1764  ,  il  fut  rappelé 
dans  sa  patrie  pour  occuper  la  chaire  de 
mathématiques  dans  les  écoles  palatines. 
Il  était  membre  de  presque  toutes  les 
académies  de  l'Europe  ,  et  fut  honoré  de 
la  protection  du  pape  Clément  XIII ,  de 
l'empereur  Joseph  II ,  de  Catherine  II , 
et  des  rois  de  Prusse  et  de  Danemark. 
Pise  lui  avait  donné  la  permission  de  se 
séculariser.  Il  parcourut  alors  à  plusieurs 
reprises  l'Italie,  l'Allemagne,  la  "France 
et  l'Angleterre,  partout  consulté,  partout 
donnant  d'excellens  avis  sur  tous  les  su- 
jets de  mathématiques  pures  ,  d'astrono- 
mie ,  de  physique  et  particulièrement 
d'hydraulique.  Il  apprit  aux  Milanais  à  se 
servir  des  paratonnerres.  Il  mourut  à 
Milan  en  1784.  Ses  principaux  ouvrages 
sont  :  1  °  Disquisitio  mathematica  in  cau- 
sant physicam  figurœ  et  magnitudinis 
telluris  /zo^frœ,  Milan  ,  1751  ;  2°  Nova 
electricitatis  theoria,  e/c.  Milan,  1755; 
3°  De  motu  diurno  terrce  disscrtatio  , 
Pise,  1 7  58  ;  4"  Del  modo  di  regolare  i 
fiumi  c  torrenti  principalmente  delBolo- 
gnese  e  délia  Romagna  ,  libri  tre ,  Luc- 
ques,  1762  et  1768,  3^  édition  augmen- 
tée ,  Florence,  1770.  On  en  a  publié  une 
traduction  française  à  Paris  en   177  i  ; 


5i8  FRI 

5"  Saggio  sopra  VarclUtectura  gotica  , 
Livourne,  1766  ;  6°  Z?e  giavilalc  univer- 
sali ,  libri  très ,  Mifan  ,  1768.  Bernouilli 
dit  que  cet  ouvrage  est  un  des  plus  pro- 
fonds et  des  plus  utiles  qu'il  y  ait  sur 
l'astronomie;  7°  Cosmographiœ physicœ 
et  mathematicœ ,  etc.  Milan ,  17  74,  2 
vol.  in-4.  Ce  livre  est  regardé  comme  le 
chef-d'œuvre  de  Frisi  ;  8°  Paoli  Frisa 
opéra.  Milan,  1782-1783,  3  vol.  in-8. 
Il  a  écrit  en  outre  plus^urs  éloges,  parmi 
lesquels  il  n'a  pas  oublié  celui  de  d'Alem- 
bert ,  sou  ami.  Ce  savant  laborieux  a  pu- 
blié de  f751  à  1784,  29  ouvrages,  la  plu- 
part en  italien  et  quelques-uns  en  fran- 
çais et  en  latin.  Le  comte  Verri  a  dédié 
àCondorcet  l'éloge  de  Frisi  intitulé  :  Me- 
tnorie  appartcnenti  alla  vita  ed  agli 
.  studj  del  signor  don  Paolo  Frisi,  Milan, 
1787  ,  in-4. 

FRIZON  (  Pierre  ),  du  diocèse  de 
Reims,  d'abord  jésuite,  ensuite  grand- 
maîlre  du  collège  de  Navarre,  et  docteur 
de  Sorbonne,  mort  en  1051  ,  laissa  :  1° 
une  histoire  des  cardinaux  français,  sous 
le  titre  de  GaUia  puipurata,  1638,  in-fol. 
ouvrage  très  estimé  d'abord  ,  mais  qui 
perdit  quelque  chose  de  son  crédit ,  lors- 
que Baluze  en  eut  dévoilé  les  bévues  dans 
son  Anti-Frizonius  ;  2"  une  édition  de  la 
Bible  de  Louvain,  avec  les  moyens  de  dis- 
cerner les  Bibles  françaises  catholiques 
d'avec  les  hérétiques,  1621,  in-fol.  — Il  ne 
faut  pas  le  confondre  avec  Nicolas  Frizon, 
jésuite  lorrain, mort  au  commencement  du 
18*  siècle,  après  avoir  publié:  1  °  La  vie  du 
cardinal  Bellarmin,  Nancy,  1708  ,  in-4  ; 
2"  La  vie  du  vénérable  Jean  Berchmans, 
in-8  ;  3"  Abrégé  des  méditations  du  Père 
Louis  du- Pont,  Châlons,  1 7 1 2.  Cet  abrégé 
est  très  bien  fait  ;  on  en  a  donné  une 
nouvelle  édition  en  1786  ,  à  Paris  ,  chez 
Nyon  ,  4  vol.  in-12. 

•  FRIZIERI  ou  Fbiedzkri  (N...  ),  cé- 
lèbre compositeur ,  né  à  Vérone  le  6  jan- 
vier 1741  ,  mort  à  Anvers  dans  le  mois 
d'octobre  1825,  à  85  ans ,  était  devenu 
aveugle  à  l'âge  d'un  an.  Une  intelligence 
précoce  qui  se  développa  presque  d'elle- 
même  le  dédommagea  ,  s'il  est  possible , 
de  la  perte  de  la  vue  :  sou  adresse  était 
si  grande  qu'à  l'âge  de  1 1  ans  il  fit  une 


FRO 

mandoline  ,  et  apprit  seul  à  jouer  de  cet 
instrument.  Il  était  parvenu  aussi  à  jouer 
très  bien  de  la  flûte ,  du  cor ,  de  l'orgue, 
du  violon  ,  etc.  Bientôt  il  songea  à  quit- 
ter la  maison  paternelle  pour  profiler  de 
ses  talens,  et,  dès  l'âge  de  24  ans  ,  il  alla 
chercher  des  applaudissemens  dans  plu- 
sieurs villes  d'Italie.  Il  s'arrêta  d'abord  à 
Novarre,  où  il  produisit  leplus  grand  effet 
à  l'aide  de  sa  mandoline  et  de  son  violon. 
Il  séjourna  long-temps  à  Strasbourg  et  à 
Paris.  Ce  que  l'on  distinguait  en  lui ,  c'é- 
tait la  précision  de  son  exécution  et  sur- 
tout la  facilité  avec  laquelle  il  improvisait 
des  accompagnemens  de  sonates.  Un  de 
ses  grands  mérites  était  aussi  de  retenir 
les  plus  longs  morceaux  de  musique  dès 
qu'il  les  avait  entendus  une  fois.  Il  a  donné 
à  Paris  plusieurs  opéras-comiques  qui  ont 
eu  du  succès,  entr'autres  les  Deux  mili- 
ciens ,  les  Souliers  mordorés  ou  la  Cor- 
donnière allemande,  ]e  Billet  de  mariage  .- 
on  lui  attribue  aussi  Lucette  ;  mais  quel- 
ques biographes  pensent  que  cet  opéra 
n'est  pas  de  lui.  Il  avait  établi  aussi  à  Paris 
une  société  philharmonique  où  l'on  en- 
tendit ses  deux  filles  exécuter  de  la  ma- 
nière la  plus  brillante  les  concerto  de 
Viotti  sur  le  violon.  L'explosion  de  la 
machine  infernale  ayant  détruit  son  éta- 
blissement ,  il  alla  à  Anvers  où  il  est  mort. 
Il  avait  aussi  publié  à  Paris  un  OEuvrc 
de  duo  de  violons,  une  symplwnie  con- 
certante pour  deux  violons,  deux  recueils 
de  six  romances,  avec  accompagnement 
de  piano  ;  une  scène  tirée  de  son  opéra 
des  Thermopyles  et  un  livre  de  quatuor. 
FROBEN  (  Jean  ) ,  célèbre  imprimeur 
d'Hammelburg  dans  la  Franconie ,  alla 
exercer  sa  profession  à  Bâle.  Il  fut  le  pre- 
mier en  Allemagne  qui  eut  de  la  délica- 
tesse dans  l'art  d'imprimer ,  et  du  discer- 
nement dans  le  choix  des  auteurs.  Il  pu- 
blia les  ouvrages  de  saint  Jérôme ,  de 
saint  Augustin  ,  d'Erasme  ,  qui  vint  lui- 
même  à  Bâle ,  attiré  par  sa  réputation. 
Ces  trois  impressions  sont  les  plus  cor- 
rectes de  toutes  celles  de  Froben.  Il  se 
proposait  de  mettre  au  jour  les  Pères 
<]frec.T,  lorstju'il  mourut  en  1527  d'une 
chute.  Son  fils  et  son  gendre  soulinrcut 
son  nom  avec  honneur. 


FRO 

FROBISHER.  Foyez  Forbisher. 

*  FROCHOT  (Nicoias-Thérèsc  Benoît, 
comte  j,  ancien  préfet  du  département  de 
la  Seiuc,  était  notaire  royal  et  prévôt  avant 
la  révolution.  Il  s'était  engagé  auparavant 
dans  le  service  militaire  et  avait  été  pen- 
dant quelque  temps  simple  soldat  ;  mais 
sesparens  obtinreutson  congé,  et  dès  lors 
le  jeune  Frochot  avait  travaillé  sérieuse- 
ment pour  se  donner  un  établissement 
honorable.  Il  y  était  parvenu ,  lorsqu'en 
17  89  il  fut  choisi  par  le  tiers-état  de  Chà- 
tillon-sur-Scine  pour  député  aux  états- 
généraux.  Frochot,  qui  avait  adopté  les 
principes  politiques  les  plus  favorables  à 
la  liberté,  s'attacha  bientôt  à  îilirabeau 
dont  il  admirait,  encore  plus  que  tout  le 
monde,  les  talens  oratoires,  et  dont  il 
partageait  toutes  les  opinions.  Placé  à 
côté  de  lui  dans  l'Assemblée,  il  recueil- 
lait pour  cet  orateur  des  notes  qui  lui  fu- 
rent souvent  d'une  grande  utilité.  Bien- 
tôt il  devint  son  secrétaire  à  titre  officieux 
et  plus  tard  il  fut  son  exécuteur  testamen- 
taire. Frochot  ne  parla  qu'une  fois  pen- 
dant cette  session  ;  ce  fut  pour  la  sup- 
pression des  fours  banaux.  Après  la  mort 
de  Mirabeau,  il  parut  plus  souvent  à  la 
tribune.  Lorsqu'il  eut  pris  connaissance 
de  la  succession  de  son  ami ,  il  vint  dire 
à  l'Assemblée  que  Mirabeau  était  mort 
comme  quelques-uns  des  grands  hommes 
de  la  Grèce ,  et  demanda  que  le  trésor 
public  se  chargea  des  frais  de  ses  funé- 
railles. Un  grand  débat  eut  lieu  entre 
M"^  Du  Saillant  sœur  de  Mirabeau  et  Fro- 
chot, sur  cette  déclaration  d'insolvabilité  ; 
il  n'en  résulta  qu'une  chose,  c'est  que  l'on 
sut  pluspositivement  encore  que  ses  créan- 
ciers perdraient  au  moins  50  pour  100. 
Frochot  se  mêla  ensuite  à  plusieurs  discus- 
sions importantes,  et,  dans  celle  qui  fut 
élevée  sur  la  réforme  des  constitutions  et 
sur  les  conventions  nationales,  il  fit  un 
discours  où  les  principes  de  la  liberté  fon- 
dée sur  la  souveraineté  du  peuple,  étaient 
posés  sans  détour  :  les  idées  révolution- 
naires coramenraient  à  être  à  l'ordre  du 
jour  :  ce  discours  fut  par  conséquent 
goûté  par  l'Assemblée  devant  laquelle  il 
fut  prononcé  et  qui  en  ordonna  l'impres- 
sion. Ses  admirateurs  dirent  même  qu'il 


FRO  Sig 

était  digne  de  l'ami  de  Mirabeau  (.  3t 
août  17  9 1  ).  En  17  92,  Frochot  accepta  une 
place  de  juge  de  paix  à  Paris  ;  éloigné 
dès  lors  des  affaires  politiques  ,  il  resta 
uniquement  occupé  de  ses  utiles  et  mo- 
destes fonctions  jusqu'au  mois  de  novem- 
bre 1799  oîi  il  fut  élu  membre  du  Corps 
législatif.  Nommé  peu  de  temps  après 
préfet  de  la  Seine ,  il  donna  sa  démission 
de  sa  qualité  de  représentant ,  pour  se  li- 
vrer entièrement  aux  devoirs  de  sa  place 
qu'il  occupa  12  ans.  Son  administration 
fut  sage  et  prudente  ;  il  fit  preuve  de  zèle 
et  de  talens  administratifs  :  son  autorité 
protégeait  tous  les  intérêts.  C'est  à  lui  que 
Paris  est  redevable  de  l'ordre  élabli  dans 
toutes  les  parties  de  son  administration 
municipale  ,  et  de  tant  de  monumens  où 
la  magnificence  est  unie  à  l'utilité.  Le 
canal  de  l'Ourcq  ,  un  grand  nombre  de 
fontaines  publiques,  etc. ,  sont  des  bien- 
faits de  sa  sollicitude.  C'est  sur  sa  propo- 
sition et  par  ses  soins  que  l'on  doit  la 
création  de  plusieurs  établisscmens;  le 
nouveau  mode  d'inhumation  ,  la  réorga- 
nisation de  l'instruction  primaire,  etc. 
Tout  Paris  prit  part  à  la  disgrâce  qu'il 
encourut  en  1 8 1 2  et  qui  lui  enleva  sa  place. 
En  voici  la  cause.  Un  chef  de  bataillon 
nommé  Souiller,  commandant  la  18" co- 
horte, alors  en  garnison  à  Paris ,  s'él<iit 
présenté  le  23  octobre  1812  à  7  heures  du 
matin  à  l'hôtel-de  ville ,  et  il  avait  déclaré 
qu'en  vertu  des  ordres  qu'il  avait  reçus 
du  général  Mallet ,  il  venait  en  prendre  la 
garde  et  s'entendre  avec  lepréfet  pour  évi- 
ter toute  espèce  de  désordre.  Frochot  re- 
venait alors  de  sa  campagne  près  de  Nogen  t 
et  à  8  heures  du  matin  du  même  jour, 
au  moment  où  il  traversait  le  faubourg 
St.-Martin ,  un  billet  lui  avait  été  donné 
de  la  part  d'un  de  ses  chefs  de  division  ; 
il  était  conçu  ainsi  :  on  attend  M.  lepré- 
fet ,  FUIT  iMPEKATOE.  Tout  étouné  d'unc 
communication  aussi  peu  attendue ,  Fro- 
chot arrive  sur  la  place  de  Grève  qui 
alors  était  couverte  de  soldats  :  le  com- 
mandant Souiller  vint  lui  confirmer  la 
nouvelle  de  la  mort  de  Buonapartc  arri- 
vée ,  disait-il ,  le  7  octobre  à  Moscou.  En 
même  temps  il  lui  présenta  une  lettre  du 
général  Mallet,  qui  prenait  le  titre  de  com- 


Ô20  FRO 

mandant  de  Paris  :  elle  contenait  les  in- 
struclioDS  qu'il  avait  données  àcccbef  de 
bataillon  :  il  ne  s'agissait  rien  moins  que 
d'abolir  le  gouvernement  impérial >  d'é- 
tablir une  commission  provisoire  à  l'hô- 
tel-de-ville  et  de  faire  sonner  le  tocsin 
pour  appeler  le  peuple.  Frochot  ne  dou- 
tait point  de  la  mort  de  Buonaparte  ;  mais 
il  voulait  s'entendre  avec  les  grands  fonc  - 
tionnaircs  de  l'état  pour  aviser  à  ce  qu'il 
fallait  faire  dans  des  circonstances  aussi 
difficiles.  Il  songeait  donc  à  s'évader,  lors- 
que Souiller  le  requiert  de  prendre  les 
dispositions  nécessaires  pour  recevoir  la 
commission  provisoire  et  l'état-major. 
Frocbot  donne  des  ordres  en  conséquence  : 
il  allait  se  retirer,  lorsqu'on  vient  lui  an- 
noncer que  le  général  Mallet  a  été  arrêté 
et  qu'il  était  à  la  tète  d'une  grande  con- 
spiration que  l'on  vient  de  faire  écbouer. 
Il  était  évident  que  Frochot  n'était  point 
de  la  conspiration,  et  que  la  manière 
dont  elle  avait  été  ourdie  n'avait  pas  per- 
mis ni  de  la  prévoir  ni  de  la  prévenir  : 
Buonaparte  en  jugea  autrement.  Dès  qu'il 
fut  de  retour  à  Taris,  il  fit  assembler 
les  sections  du  conseil  d'Etat  :  celle  de  la 
guerre  demanda  la  mise  en  jugement  de 
Frochot  :  toutes  les  autres  pensèrent  que, 
sans  être  coupable  de  trahison ,  le  préfet 
avait  montré  dans  cette  circonstance  une 
coupable  pusillanimité.  Exclu  du  conseil 
d'état ,  Frochot  fut  en  même  temps  desti- 
tué de  la  préfecture  qui  fut  confiée  à 
M.  de  Chabrol.  Louis  XVIU  donna  à  Fro- 
chot le  titre  de  conseiller  d'état  honoraire, 
et  sur  la  demande  du  conseil-général  de 
la  Seine,  il  lui  fut  alloué  une  pension  de 
15,000  francs  sur  les  revenus  de  Paris. 
Pendant  les  cent  jours  il  accepta  la  pré- 
fecture des  Bouches-du-Rhône  ;  ce  qui 
lui  fit  perdre  à  la  seconde  restauration  le 
titre  de  conseiller  d'état  honoraire.  Re- 
tiré dès  loi-s  dans  sa  campagne  près  de 
Chaumont ,  il  y  vécut  dans  l'obscurité.  Il 
est  mort  à  l'âge  de  G8  ans,  le  30  juillet 
1828  avec  la  réputation  d'un  bon  admi- 
nistrateur. 

FRODOARD.   Foycz  Flodoabt. 

FRCELICH  (  GuUlaume  ),  né  en  1 492 
à  Soleurc  en  Suisse,  servit  avec  beaucoup 
de  zèle  et  de  gloire  les  rois  François  I , 


PRO 

Henri  II  et  Charles  rx.  ;  il  commanda  en 
qualité  de  colonel ,  plusieurs  régimens 
suisses  au  service  de  ces  princes ,  et 
mourut  à  Paris  en  1 5C2  ,  après  40  ans  de 
service.  On  lui  éleva  un  mausolée  dans 
l'église  des  grands  Cordeliers.  Frœlich 
était  zélé  pour  la  religion  catholique , 
autant  que  pour  le  service  militaire.  Il 
quitta  sa  patrie,  lorsqu'elle  embrassâtes 
nouvelles  erreurs.  Brantôme  et  de  Thou 
font  un  grand  éloge  de  ce  brave  officier. 

FR(BLICH  (  Erasme  ) ,  né  à  Gratz  en 
Styrie  en  1700,  entra  chez  les  jésuites 
en  1716.  Il  professa  les  belles-lettres  et 
les  mathématiques  à  Vienne ,  oîi  il  eut 
occasion  de  suivre  son  inclination  pour 
la  connaissance  des  médailles.  Il  était 
bibliothécaire  du  collège  Thérésien  de 
cette  ville,  lorsqu'il  y  mourut  le  7  juillet 
1758.  De  1733  à  1757  il  a  publié  outre 
un  grand  nombre  d'opuscules ,  1 G  ou- 
vrages importans  sur  les  médailles  et  les 
monnaies  des  rois  et  des  villes  grecques , 
romaines  et  asiatiques  :  nous  citerons  seu- 
lement les  suivans  :  1  "  Utilitas  rei  num- 
maricB  vetcris  ,  compendio  proposita , 
etc.  ,  Vienne,  1733,  in-8  ;  2"  Annales 
compendlarii  regum  et  reriim  Syriœ ,  1 
nummis  veteribus  illuslrati ,  deducti  aJf 
obitu  Alexandri ,  etc. ,  Vienne,  1744,  in- 
folio ;  2®  édition  augmentée  ibid.,  1754  , 
in-fol.  ;  3°  Regum  veterum  numismata 
anecdota ,  aut  perrara  ,  nolis  illustrnta , 
etc.  ,  ibid.,  1752,  in-4  ;  4°  Quatuor  ten- 
tamina  in  re  nummariâ  ,  Vienne,  1 737  , 
in-4  ,  réimprimés  en  1750  ;  5°  De  figura 
telluris,  V&ssau,  1757,  ih-4  ;  6°  Annales 
rerum  et  regum  Syriœ ,  1751  ,  in-folio  ; 
7°  Des  dissertations  sur  des  médailles 
particulières,  parmi  lesquelles  on  distin- 
gue Familia  F'abaUathi  nummis  iUus- 
trata,  1762,  in-4,  etc. 

FROIDMONT  ou  Fromont  (  Libert } , 
Fromondus ,  né  à  Hacourt ,  village  du 
pays  de  Liège  ,  en  1587  ,  docteur,  inter- 
prète royal  de  l'Ecriture  sainte  à  Lou- 
vain ,  mourut  doyen  de  la  collégiale  de 
St.-Pierre  de  cette  ville  en  1653.  Dcs- 
cartcs  et  Jansénius  étaient  ses  amis  ;  il 
publia  VAugustinus  du  dernier  avec 
Henri  Calénus ,  chanoine  et  ensuite  ar- 
chidiacre de  Malincs ,  et  évêquc  de  Rare- 


FRO 
monde  :  service  dont  on  doit  leur  savoir 
peu  de  gré ,  quand  on  rëflécbit  aux  trou- 
bles que  ce  livre  a  fait  naître  (  voye:i 
CALEiHUS  et  Jassenius  ).  On  a  de  Froid- 
mont  :  1°  un  Commentaire  latin  sur  les 
Epîlres  de  saint  Paul,  2  tom.  in-folio  , 
1670.  C'est  proprement  un  abrégé  de 
celui  d'Estius;  2°  Des  Commentaires  sur 
les  Cantiques  des  Cantiques  et  sur  l'Apo- 
calypse ,  peu  utiles  ,  et  qui  se  ressentent 
des  erreurs  qu'il  avait  adoptées  ;  3°  Fin- 
centii  lenis  tlieriaca  contre  les  Pères 
Petau  et  Deschainps  ,  jésuites.  Ce  dernier 
ouvrage  est  polémique.  On  a  encore  de 
lui ,  dans  le  même  genre ,  avec  des  titres 
bizarres  et  ridicules  :  la  Lampe  de  saint 
Aug  ustin  ;  les  Mouchettes  de  la  Lampe; 
Colloques  en  rimes  entre  saint  Augustin 
et  saint  Ambroise  ;  ces  écrits  sont  en 
latin. 

FROILA  ,  P'  de  ce  nom  ,  roi  d'Espa- 
gne ,  à  Oviédo ,  à  Léon  et  dans  les  Astu- 
ries ,  était  fils  d'AlXonsc  I ,  et  commença 
de  régner  l'an  757.  Il  fit  d'abord  de  belles 
ordonnances  pour  la  police  du  royaume 
et  s'opposa  aux  courses  des  Maures.  De- 
puis il  remporta  ,  l'an  760  ,  une  célèbre 
victoire  sur  Omar  ,  prince  des  Sarrasins 
eu  Galice ,  et  tua  54  mille  de  ces  barba- 
res. Froila  souilla  sa  gloire  par  le  meurtre 
de  son  frère  Vimazan  ;  meurtre  vengé 
bientôt  après  par  Aurèle  son  autre  frère  , 
qui  lui  ôta  le  trône  et  la  vie  en  768. 

FROILA  II.    royezFRUELA. 

FROILA  III,  frère  d'Ordogno,  roi  de 
Léon  en  Espagne  ,  lui  succéda  l'an  923  , 
parce  que  les  enfans  de  son  frère  n'étaient 
pas  en  état  de  régner.  Il  ne  sut  imiter 
son  prédécesseur  que  dans  ce  qu'il  avait 
fait  de  mal.  A  son  exemple  ,  il  fit  mourir 
les  enfans  d'un  grand  seigneur  de  Cas- 
tille  ,  nommé  don  Osmond.  Celte  action 
acheva  de  révolter  les  Castillans.  Ils  pri- 
rent les  armes  ouvertement ,  s'érigèrent 
en  espèce  de  république ,  et  firent  choix 
de  deux  magistrats  souverains  pour  les 
gouverner.  Froila  mourut  de  la  lèpre  en 
935  ,  après  avoir  régné  un  peu  plus  d'un 
an. 

FROISSARD  ou  Froissart  (  Jean  ) , 
naquit  à  Valenciennes,  en  1333.  Un  esprit 
vif  et  inquiet  ne  lui  permit  pas  de  se  fixer 
V. 


FRO 


521 


long-temps  aux  mêmes  occupations  et  aux 
mêmes  lieux.  Il  aimait  la  chasse,  la  mu- 
sique ,  les  fêtes ,  la  parure ,  la  bonne 
chère  ,  le  vin ,  les  femmes.  Ces  goûts  , 
fortifiés  par  l'habitude  ,  ne  moururent 
qu'avec  lui.  (  Tourmenté  du  désir  d'ap- 
prendre et  de  faire  des  récits  ,  Froissard 
passa  la  plus  grande  partie  de  sa  vie  dans 
les  diverses  cours  de  France  et  d'Angle- 
terre ,  lisant  ses  vers  aux  dames,  deman- 
dant aux  chevaliers  et  aux  vieux  écuyers 
le  détail  des  faits  d'armes  dont  ils  avaient 
été  les  acteurs  et  les  témoins.  Il  compta 
parmi  ses  protecteurs  Madame  Philippa 
deHainaut,  femme  d'Edouard  III,  Gastou- 
Phébus  comte  de  Foix ,  et  Venceslas  duc 
de  Brabant,  en  la  société  duquel  il  com- 
posa son  recueil  de  poésies.  (On  croit 
qu'il  finit  ses  jours  à  Chimay ,  où  il  était 
chanoine  et  trésorier  vers  1402.  Froissard 
était  poète  et  historien  ;  mais  il  est  plus 
connu  sous  cette  dernière  qualité  que 
sous  la  première.  Sa  Chronique  de  France, 
d'Angleterre,  d'Ecosse,  d'Espagne,  de  Bre- 
tagne, etc.,  a  été  imprimée  plusieurs  fois. 
La  meilleure  édition  et  une  des  moins 
communes  était  celle  de  Lyon,  in-fol.  eu 
4  vol.  1569,  réimprimée  à  Paris  en  1574. 
(  On  estime  beaucoup  celle  qui  vient 
d'être  publiée  d'après  les  manuscrits 
avec  des  notes  par  M.  Buchon ,  dans 
sa  Collection  des  chroniques  nationales 
françaises ,  écrites  en  langue  vulgaire 
du  13^  au  16^  siècle,  Paris,  Verdière , 
1824,  et  suivans.  M.  Dacier  a  travaillé 
à  cette  publication.  On  prétend  qu'il  y 
a  un  manuscrit  de  sa  chronique  à  Bres- 
law  ,  plus  fidèle  que  tous  les  imprimés.) 
Cette  chronique  s'étend  depuis  1326  jus- 
qu'en 1400.  Jean  Sleidan  l'a  abrégée. 
Monstrelet  l'a  continuée  jusqu'en  1467. 
On  y  trouve,  dans  un  détail  très  ci  rconstan- 
cié,  même  quelquefois  jusqu'à  la  minutie, 
les  événemens  les  plus  considérables  ar- 
rivés de  son  temps  en  Europe.  Elle  a  été 
traduite  en  anglais  par  Bourchier  ,  Lon- 
dres, 1723-1725  ,  2  vol.  in-folio;  3«  édi- 
tion,  Londres,  1812,  2  vol.  in-4,avec  de 
nombreuses  cori'ections,  etc.,  etc.  Johnes 
en  a  donné  une  nouvelle  traduction  an- 
glaise imprimée  avec  le  plus  grand  luxe , 
1803-1807  ,  4  vol.  in-4  ,  avec  un  supplé- 
33.. 


522  PRO 

ment  publié  en  1810.  (La  cbrotaique  de 
Froissard  a  été  abrégée  en  français  par 
Belleforest  sous  le  titre  de  Recueil  diligent 
et  profitable  ,  Paris  1572,  in-16  ;  en  latin 
par  Sleidan ,  ibid.  1637,  in-8  ;  en  anglais 
par  P.  Godling  ,  Londres,  1608  ,  in-4.) 
On  a  encore  de  Froissard  plusieurs  jjjcce* 
depoe'sies ,  parmi  lesquelles  on  distingue 
ses  pastourelles ,  un  peu  trop  libres  pour 
les  productions  d'un  chanoine.  Froissard 
fut  un  des  premiers  qui  mit  en  vogue  la 
ballade. 

FROLAND  (  Louis  ) ,  avocat  au  par- 
lement de  Rouen ,  mort  en  1436 ,  exerça 
sa  profession  à  Paris,  et  y  fut  singuliè- 
rement consulté  sur  la  coutume  de  Nor- 
mandie qu'il  possédait  très  bien.  On  a  de 
lui  quelques  ouvrages  de  droit,  relatifs  à 
la  Coutume  de  son  pays.  1°  Mémoires 
concernant  la  prohibition  d'évoquer  les 
décrets  d'immeubles  situés  en  Norman- 
die ,  1722  ,  in-4.  2° Mémoires  concernant 
les  statuts,  1729,  2  vol.  in-4.  3°  Mé- 
-  moires  sur  le  sénatus-consulte  velléien  , 

1722,   in-4.  4°  sur  la  comté-pairie 

d'Eu,  in-A. 

*  FROMAGE  DES  FEUGRÈS  (  Char- 
les-Micbel-François),  né  en  1770  à  Viette 
près  Lisieux ,  professa  la  philosophie  au 
collège  de  cette  ville ,  fut  ensuite  nommé 
élève  à  l'école  normale,  puis  à  celle  d'Al- 
fort ,  oîi  il  fut  professeur  de  médecine  et 
de  chirurgie ,  devint  vétérinaire  en  chef 
de  la  gendarmerie  de  la  garde  impériale, 
et  périt  malheureusement  pendant  la  dé- 
sastreuse retraite  de  Moscou ,  à  la  fin  de 
1812.  On  lui  doit  :  1°  Correspondance 
sur  la  conservation  et  l'amélioration 
des  animaux  domestiques ,  1811 ,  4  vol. 
in- 1 2 .  2°  De  la  garantie  dans  le  commerce 
des  animaux,  Paris,  1 805,  in-8.  3"  Traité 
de  r engraissement  des  animaux  domes- 
tiques,  1805  et  1806  ,  in-12.  4°  Impor- 
tance de  V amélioration  et  de  la  multi- 
plication des  chevaux  en  France ,  1805, 
in-8.  5°  Moyens  de  rendre  Vart  vétéri- 
naire plus  utile,  1805,  in-8.  Il  a  publié 
ces  quatre  derniers  articles  avec  Chabert. 
6°  Plusieurs  articles  dans  la  continuation 
du  Cours  complet  d'agriculture  de  Ro- 
ziev,  et  dans  V Abrégé,  en  6  volumes 
in-8  ,  publié  sous  le  titre  de  Cours  com- 


PRO 

put  d^  agriculture  pratique,  Paris,  1809. 
FROMAGEAU  (Germain) ,  parisien , 
docteur  de  Sorbonne,  succéda  à  Dela- 
met  dans  la  décision  des  cas  de  conscien- 
ce. Son  désintéressement  le  porta  à  re- 
fuser tous  les  bénéfices  ,  et  sa  charité  à 
accepter  l'emploi  héroïque  d'assister  ceux 
qui  sont  condamnés  au  dernier  supplice. 
Il  l'exerça  long-temps  avec  beaucoup  de 
zèle.  Il  mourut  en  Sorbonne  l'an  1705, 
]^aissant  grand  nombre  de  décisions  de 
cas  de  conscience,  recueillies  avec  celles 
de  son  prédécesseur  en  2  vol.  in-folio , 
à  Paris,  1733. 

*  FROMAGEOT  (  Jean-Baptiste  ), 
avocat  au  parlement  de  Dijon ,  et  pro- 
fesseur en  droit  à  l'université  de  cette 
ville,  y  naquit  le  10  septembre  1724  ,  et 
mourut  k  Besançon  le  14  août  1753,  Il 
eut  plusieurs  querelles  avec  le  président 
Bouhier.  On  lui  doit  les  Lois  ecclésiasti- 
ques tirées  des  seuls  livres  saints,  1753  , 
in-1 2,  etplusieursrft^*er/afton.ï  anonymes 
sur  différens  sujets  de  jurisprudence. 

FROMAGET  (N.),  mort  à  Paris  en 
1759,  poète  médiocre,  donna  quelques 
romans  et  quelques  opéra-comiques  déjà 
presque  oubliés. 

*  FROMENT  (François-Marie) ,  roya- 
liste fidèle,  naquit  le  9  juillet  1756  à  Nî- 
mes, où  il  était  avocat.  Dès  le  commence- 
ment de  la  révolution,  il  se  fit  remarquer, 
ainsi  que  son  père  et  ses  frères ,  par  son 
opposition  aux  nouveaux  principes.  Ce  fut 
lui  qui  donna  dans  le  midi  de  la  France 
le  signal  de  l'insurrection  royaliste.  Ce  fut 
encore  lui  qui  organisa  avec  d'autres  Fran- 
çais de  la  même  opinion  que  lui ,  le  ras- 
semblement connu  sous  le  nom  de  camp 
de  Jalès.  Il  avait  été  auparavant  le  prin- 
cipal moteur  de  la  pétition  présentée  à 
l'Assemblée  nationale  par  les  catholiques 
de  Nîmes,  qui  demandaient  que  leur  re- 
ligion fût  toujours  la  religion  de  l'état  : 
ce  qui  l'exposa  aux  plus  grands  dangers, 
à  l'époque  oîi  éclatèrent  les  troubles  de 
Nîmes.  Froment  a  donné  la  Relation  de 
ces  massacres  dans  une  brochure  publiée 
à  cette  époque  (  1790  ).  Celte  même  an- 
née il  avait  été  k  Turin,  où  il  fut  accueilli 
avec  distinction  par  le  comte  d'Artois  qui 
l'encouragea  dans  ses  projets  de  résis- 


FRO 

tance  avec  l'armée  royaliste  de  France. 
En  1814  il  fut  annobli;  mais  il  ne  put 
obtenir  les  indemnités  qu'il  réclamait 
pour  des  voyages  périlleux  que  les  prin- 
ces lui  avaient  fait  entreprendre  dans  leurs 
intérêts,  en  Espagne,  en  Angleterre  et 
même  en  France ,  comme  il  a  cherché  à 
le  prouver  dans  la  brochure  s  Recueil  de 
divers  écrits  relatifs  à  la  révolution , 
Paris,  1816,  in-8.  Froment  est  mort  le 
22  septembre  1825. 

FROMENTHAL  (Gabriel  Bkrthon  de), 
juge-mage  du  Puy  en  Velay ,  mort  vers 
1762  ,  fut  l'oracle  de  son  pays  par  son 
savoir ,  et  ne  fut  pas  moins  estimé  pour 
son  intégrité.  Ses  Décisions  de  droit  ci- 
vil, canonique  et  français,  1740,  in- 
folio ,  sont  consultées  de  tous  les  juris- 
consultes. 

FROMENTIÈRES  (  Jean-Louis  de) , 
évêque  d'Aire ,  naquit  en  1632  à  Saint- 
Denis  de  Gastines ,  dans  le  Bas-Maine.  Il 
prêcha  l' Avent  devant  Louis  XI V  en  1 6  7  2 , 
et  le  Carême  en  1680  ,  et  toujours  avec 
succès.  Elève  du  Père  Sénaut ,  de  l'Ora- 
toire, il  mit  comme  lui,  dans  ses  ser- 
mons ,  de  l'élévation  et  de  la  solidité. 
Quoiqu'il  eût  défendu  en  mourant  de  les 
imprimer,  on  les  publia  en  1684  ,  6  vol. 
in-12.  Cet  orateur,  plus  attentif  au  fond 
des  choses  qu'à  la  forme ,  néglige  quel- 
quefois l'harmonie ,  l'élégance  et  la  pu- 
reté dulaagage.  Il  mourut  en  1684,  extrê- 
mement regretté  de'son  diocèse ,  malgré 
les  réformes  qu'il  y  avait  introduites. 

FROMOND.  Voyez  Froidmoxt. 

FRONSAC.  ^oye;  Maillé- Brezé. 

FRONSPERG  (  George  ,  comte  de  ) , 
d'une  maison  illustre  du  Tyrol ,  naquit 
en  Souabe  à  Mindla ,  près  de  Memming- 
hen.  C'était  un  homme  d'une  valeur  et 
d'une  force  extraordinaires.  Il  servit  deux 
fois  l'empereur  Charles  V  en  Italie,  avec 
beaucoup  de  gloire ,  particulièrement  à  la 
bataille  de  Pavie  ;  mais  ses  emportemens 
allèrent  jusqu'à  la  fureur  contre  l'église 
romaine.  Fronsperg  était  luthérien  ,  et  au 
fanatisme  d'un  hérétique ,  il  joignit  la  fé- 
rocité d'un  soldat.  Ayant  levé  des  troupes 
pour  l'empereur  contre  le  pape  Clément 
VII ,  il  fit  publier  qu'il  enrichirait  ceux 
qui  le  suivraient  des  dépouilles  de  Rome. 


FRO  ÔaS 

Les  luthériens  accoururent  en  foule.pour 
s'enrôler  sous  ses  enseignes  ;  et  sur  l'espé- 
rance du  sac  de  Rome,  ils  se  contentèrent 
d'un  écu  par  tète.  Fronsperg  ayant  for- 
mé une  armée  d'environ  1 8,000  hommes, 
se  mit  en  marche  au  mois  d'octobre  pour 
entrer  en  Italie.  Ce  fut  alors  qu'il  fit  faire 
un  cordeau  tissu  d'or  et  de  soie ,  qu'il 
portait  en  écharpe  à  la  vue  de  tout  le 
monde.  Il  disait  à  ceux  qui  lui  en  deman- 
daient la  raison  ,  «  que  c'était  pour  traiter 
»  le  pape  comme  les  Ottomans  traitaient 
»  leurs  frères.  »  Ce  barbare  joignit  l'ar- 
mée du  duc  de  Bourbon  sur  la  fin  du 
mois  de  janvier  1627  ;  mais  il  n'alla  pas 
jusqu'à  Rome  ;  car  pendant  que  les  trou- 
pes étaient  dans  le  Bolonais ,  il  fut  frappé 
d'une  apoplexie  dont  il  mourut  à  Fer- 
rare  ,  sur  la  fin  du  mois  de  mars. 

FRONTEAU  (  Jean  ) ,  chanoine-ré- 
gulier génovefain ,  et  chancelier  de  l'u- 
niversité de  Paris ,  naquit  à  Angers  en 
1614  ,  enseigna  la  philosophie  et  la  théo- 
logie, s'attacha  pendant  quelque  temps 
au  parti  des  anti-constitutionnaires ,  et 
fut  exilé  dans  un  prieuré  de  l'Anjou.  Ayant 
quitté  l'esprit  de  parti ,  il  revint  à  Paris 
et  fut  fait  curé  de  la  paroisse  de  Ste.-Ma- 
deleine  à  Montargîs ,  où  il  mourut  dix 
jours  après  sa  prise  de  possession  en  1 662. 
On  a  de  lui  divers  ouvrages  :  X"  De  diebus 
festivis ,  in-fol. ,  dans  le  Kalendarium 
romanum,  1652,  in-8.  2"  Antithèses 
Augustini  et  Calvini ,  1651,  in-16. 
3°  Epistolœ  de  origine  parochiarum ,  de 
jure  episcoporum  ,  de  priscorum  chris- 
tianorum  moribus ,  de  signo  crucis.  An- 
notata  in  romanum  Kalendarium,  etc. 
La  meilleure  édition  est  celle  de  Vérone, 
1733,  in-8.  4°  Des  Dissertations  pour 
prouver  que  l'Imitation  de  Jésus-Christ 
est  de  Thomas  à  Kempis  ,  et  de  non  pas 
de  Gerson  ni  de  Gersen  (  voyez  Amort  ). 
5°  Une  édition  des  œuvres  doives  de 
Chartres  ,  Faxis ,  1647,  in-fol,  accom- 
pagnée de  remarques  savantes  et  judi- 
cieuses ,  et  d'une  vie  de  ce  pieux  docteur. 
Le  PèreFrohteau  possédait  neuf  langues; 
ce  fut  lui  qui  dressa  la  belle  bibliothèque 
de  Ste.-Geneviève.  Sa  piété  était  aussi  so- 
lide qu'affectueuse ,  et  ne  lui  permit  pas 
de  rester  long-temps  dans  un  parti  qui 


524  FI^O 

n'en  avait  que  les  dehors ,  et  qui  dans  le 
dedans  nourrissait  l'orgueil  delà  rébellion 
contre  l'Eglise.  (  Véloge  du  Père  Fron- 
teau  a  été  fait  en  latin  par  le  Père  Lalle- 
mand chancelier  de  Ste.-Geneviève,  Paris, 
1633,  in-4.) 

FRONTIN  (  Sextus  Julius  Fronti- 
nus  ) ,  brave  guerrier  et  savant  juriscon- 
sulte romain  ,  fut  préteur  l'an  70  de  J.  C. 
et  ensuite  3  fois  consul.  Vespasien  l'en- 
voya en  78  contre  les  Anglais,  et  il  les 
battit  plusieurs  fois.  La  lecture  des  au- 
teurs militaires ,  grecs  et  romains ,  per- 
fectionna beaucoup  ses  connaissances  sur 
l'art  de  la  guerre.  Il  a  laissé  quatreli- 
vres  de  stratagèmes  de  guerre ,  écrits ,  à 
ce  que  l'on  croit,  sous  Domitien,  et  impri- 
més avec  les  autres  auteurs  qui  ont  traité 
de  l'art  militaire  dans  les  f^eteres  de  rc 
militari  scrip tores,  Wesel,  1670  ,  2  vol. 
in-8  ;  et  plusieurs  fois  séparément,  Leyde , 
1731  ,  in-8  ,  et  Paris,  sans  notes,  1763, 
in-12.  Ils  sont  traduits  en  français  avec 
Polyen,  1770,  3  vol.  in-12.  C'est  l'ou- 
vrage d'un  capitaine  autant  que  d'un-sa- 
vant.  L'expédition  d'Angleterre  l'avait 
encore  plus  instruit  que  ses  lectures.  Ner  va 
lui  donna  l'intendance  des  eaux  et  des 
aqueducs  de  Rome ,  sur  lesquels  il  com- 
posa un  ouvrage  en  deux  livres ,  imprimé 
à  Bâle  et  à  Florence,  et  intitulé  :  (De  aquœ- 
duclibus  urbis  Romœ.  M.  Rondelet  a  pu- 
blié une  traduction  de  cet  ouvrage  sous 
ce  titre  :  Commentaire  de  Frontin  sur 
les  aqueducs  de  Rome ,  traduit  avec  le 
texte  en  regard,  précédé  d'une  notice 
sur  Frontin,  Paris,  1820,  un  vol  in-4. 
avec  un  atlas.  )  Son  traité  De  qualitate 
agrorum  vit  le  jour  à  Paris  par  les  soins 
de  Turnèbe,  avec  les  autres  auteurs  qui 
ont  écrit  sur  les  limites.  On  a  encore  de 
lui  un  petit  livre  :  De  coloniis.  Ses  li- 
vres :  De  scientiâ  militari ,  qu'il  avait 
dédiés  à  Trajan ,  sont  perdus.  (  Frontin 
mourut  l'an  106  de  J.  C.  (  859  de  Rome  ). 
L'édition  princeps  des  œuvres  de  Fron- 
tin a  paru  à  Bologne  ,  1494,  in-fol.  et  est 
devenue  fort  rare.  ) 

FRONTO  ou  FoNTOîf  (  Marchus-Cor- 
nélius  ) ,  rhéteur  latin  ,  eut  pour  disci- 
ples L.  Vérus  et  Marc-Aurèle ,  qui  fit  éri- 
ger une  statue  à  son  maître ,  et  qui  le 


FRO 

nomma  consul.  Son  éloquence  n'était  pas 
fleurie  ,  mais  elle  était  noble  et  majes- 
tueuse ,  et  respirait  une  certaine  gravité 
austère  :  quelques-uns  disent  que,  pour 
cette  partie,  il  était  l'émule  de  Gicéron. 
(  Nous  n'avons  guère  de  Fronto  que  quel- 
ques fragmens  cités  par  les  grammai- 
riens. ) 

FRONTO  (  Marchus  Julius  ),  consul 
l'an  96  de  J.  C.  ,  osa  s'écrier  en  plein  sé- 
nat, en  parlant  des  abus  qui  se  glissaient 
dans  la  punition  des  délateurs  :  «c  II  est 
»  dangereux  d'être  gouverné  par  un  prince 
»  sous  qui  tout  est  défendu  (  il  voulait 
»  parler  de  Néron  )  ;  et  encore  plus  dan- 
»  gereux  de  l'être  par  un  prince  sous  qui 
»  tout  est  permis.  »  Ces  dernières  pa- 
roles tombaient  sur  la  facilité  de  Nerva  , 
qui  remédia  bientôt  aux  désordres  dont 
elle  avait  été  la  source. 

FONTO  DUC^US.  Voyez  Duc. 

*  FRORIEP  (  Just-Frédéric  ),  ministre 
prolestant  et  savant  orientaliste  d'Alle- 
magne ,  naquit  en  1 745  à  Lubeck,  oîi  il  fit 
d'excellentes  études  qu'il  perfectionna 
ensuite  k  Leipsick.  Il  était  à  peine  âgé  dfe 
22  ans  lorsqu'en  1767,,  il  se  fit  graduer 
en  philosophie  dans  l'université  de  cette 
ville.  Reçu  bachelier  en  théologie  l'an- 
née suivante,  il  fut  nommé  prédicateur  du 
temple  dans  la  même  université ,  et  se  fit 
dans  cette  carrière  évangélique  une  répu- 
tation très  brillante.  Bientôt  il  obtint, 
encore  dans  la  même  université,  la  place 
de  professeur  extraordinaire  de  théolo- 
gie ;  mais  il  occupa  très  peu  de  temps 
cette  chaire  qu'il  échangea  contre  celle 
de  théologie  à  Augsbourgen  1 7  7 1 ,  et  plus 
lard  contre  celle  des  langues  orientales 
à  l'université  d'Erfurth.  En  1792,  Froriep 
fut  destitué  :  alors  il  se  retira  à  Wctziar 
où  il  vécut  dans  la  retraite,  et  où  il  fut 
quelque  temps  prédicateur.  Après  avoir 
publié  un  grand  nombre  d'ouvrages  sur  la 
philosophie  sacrée  et  la  littérature  orien- 
tale ,  dont  on  trouve  la  liste  dans  le  Dic- 
tionnaire de  Meusel ,  il  mourut  dans  cette 
ville  en  1800.  Ses  productions  les  plus  im- 
portantes sont  1  "  De  utilitate  linguœ  ara- 
bicœ  in  defcndcndis  nonnuUis  lacis  S. 
Scriplurœ  spécimen  primum ,  Leipsick , 
1767  ,  i»-4.  2°  Corani  caput  primum  et 


FRO 

secundi  priores  versus  arahice  et  latine , 
cum  animadversionibus  historicis  et  phi- 
lologicis,  1768,  in-8.  Z"*  Arabische  bi- 
bliotek,  Leipsick,  in-8.  A°  Dissertalco 
inauguralis  de  nova  ratione  conjungendi 
theologiam  dogmnticam  cum  theologia 
morali,  Helmstadt,  1772,  in-i.  5"  Bi- 
bliothèque des  connaissances  theologi- 
ques ,  en  allemand  ,  premier  vol.  Lemgo , 
1771-1773,  deuxième  vol.  ibid.  1774- 
1778.  —  Froriep  (  Amélie-Henrielle-So- 
phie  ) ,  femme  du  précédent ,  née  à  Ros- 
tock  en  1762,  morte  à  Gotha  en  1784,  a 
traduit  en  allemand  les  deux  ouvrages 
suivans  :  la  Nouvelle  Clémentine,  ou  Let- 
tres de  Henriette  de  Bervllle  de  Léonard 
Weimar,  1782,  in-8.  Correspondance  de 
jRollin  avec  le  roi  de  Prusse,  Gotha, 
1 783,  in-8.  Elle  avait  aussi  composé  Ame- 
lie  de  Nordheim  ou  la  Mort  prématu- 
rée, 1783  ,  2  vol.  in-8.  Elle  était  fort  in- 
struite et  très  vertueuse. 

*  FROSSARD  (N...)  professeur  de 
théologie  protestante  à  Montauban,  est 
mort  dans  cette  ville  le  3  janvier  1830  à 
l'âge  de  78  ans.  Né  à  Nyon  dans  le  can- 
ton de  \"aud  ,  il  exerça  d'abord  le  mini- 
stère de  pasteur  à  Lyon  ;  mais  la  réro- 
lution  le  jeta  hors  de  ses  fonctions  ecclé- 
siastiques qu'il  ne  reprit  qu'en  1802  à 
Montauban.  Lorsqu'on  forma  une  faculté 
de  théologie  dans  cette  ville,  il  en  fut 
nommé  doyen,  et  fut  en  même  temps  pro- 
fesseur de  morale  et  d'éloquence  de  la 
chaire.  On  a  de  lui  une  Traduction  des 
sermons  de  Bloii  et  d'un  livre  de  Wil- 
berforce  ,  intitulé  :  le  Christianisme  des 
gens  du  monde  mis  en  opposition  avec 
le  véritable  christianisme ,  Paris  ,  1821  , 
2  vol.in-S.Frossard  fut  un  des  grands  pro- 
moteurs de  l'affranchissement  des  Nègres. 

*  FROTTÉ  (  Le  comte  Louis  de  ) , 
chef  des  royalistes  de  Normandie,  gen- 
tilhomme de  cette  province  ,  servit  dans 
l'infanterie  avant  la  révolution  française, 
et  se  montra  de  bonne  heure  l'adversaire 
de  toutes  les  innovations  politiques  de 
cette  époque.  Il  prit  le  parti  de  l'émigra- 
tion en  1792  ;  mais  la  guerre  extérieure 
ne  remplissant  point  ^on  attente,  il  quitta 
l'Angleterre  deux  ans  après,  et  passa  en 
France  pour  faire  insurger  la  Normandie, 


FKO 


§25 


oùil  avait  des  intelligences.  En  débarquant 
sur  la  côte  de  Saint-Malo  avec  plusieurs 
autres  gentilshommes,  il  eut  à  soutenir 
un  combat  avec  les  troupes  républicaines  ; 
mais  il  leur  échappa  ,  et  parvint  dans  la 
basse  Normandie ,  où  il  commença  à  figu- 
rer parmi  les  chpuans  royalistes  en  qua- 
lité de  général.  Il  avait  tout  ce  qu'il  faut 
pour  réussir ,  un  grand  courage  ,  une  pa- 
tience à  toute  épreuve ,  des  talens  mili- 
taires naturels  et  le  désir  de  se  faire  un 
nom.  Il  se  rendit ,  le  l*'  avril  1795  ,  aux 
conférences  de  La  Mabilais  en  Bretagne , 
et  refusa  de  signer  le  traité  négocié  par 
Cormatin ,   en  déclarant  qu'il   n'y  avait 
pour  les  royalistes  de  sécurité  que  dans 
les  armes.  Il  regagna  alors  la  Normandie, 
et  organisa  l'insurrection  dans  les  can- 
tons limitrophes  du  Calvados  et  de  la  Man- 
che. Il  n'eut  d'abord  sous   ses  ordres, 
que    300  hommes   peu    aguerris  ;    mais 
sa  persévérance  et  son  infatigable  acti- 
vité lui  valurent  des  succès  partiels  et 
répétés  contre  des  détachemens  de  ré- 
publicains. En  179.5  il  fit  une  incursion 
dans  le  Maine,  s'empara  momentanément 
de  la  petite  ville  de  Mayenne,  et  s'efforça 
de  coordonner  ses  opérations  avec  celles 
des  autres  chefs  de  l'Anjou ,  du  Maine  et 
de  la  Bretagne.  La  malheureuse  issue  de 
l'expédition  de  Quiberon  vint  arrêter  l'es 
sor  de  ses  vastes  projets.  Il  ne  perdit  ce- 
pendant pas  courage,  et  remporta  quel- 
ques avantages  sur  plusieurs  bataillons 
républicains  ;  mais  il  fut  battu  à  son  tour. 
Ayant  reçu  des  subsides  du  ministère  an- 
glais, il  redoubla  de   zèle,  forma  une 
compagnie  organisée  sous  le  nom  de  gen- 
tilshommes de  la  couronne ,    et    devint 
redoutable  aux  troupes  qui  lui  furent  op- 
posées ;  il  essaya  même  de  s'emparer  de 
la   petite  ville  de  Tinchcbray ,  qui  avait 
quelques   fortifications  ;  mais  il  fut  re- 
poussé avec  perte.  Poursuivi  par  le  géné- 
ral Hoche  ,  qui  avait  soumis  la  Vendée  , 
il  se  vit  contraint ,  après  une  résistance 
opiniâtre,  de  se  rembarquer  pour  l'Angle- 
terre. Il  y  resta  jusqu'à  l'époque  de  la 
rupture  des  conférences  de  Rasladt ,  en 
1799,  oiiles  royalistes  purent  reprendre 
les  armes.  Alors  il  débarqua  en  Normandie, 
et  se  trouVa  bientôt  à  la  tête  de  forces  consi- 


526  FRU 

dërables  cpie  l'on  peut  porter  jusqu'à  i  0 
mille  hommes.  Il  prit  plusieurs  bourgs , 
et  délivra  sa  mère  et  un  grand  nombre  de 
royalistes  qui  venaient  d'être  emprison- 
nés ,  en  exécution  de  la  loi  des  otages.  Il 
fit  ensuite  une  expédition  assez  heureuse 
dans  le  midi  du  département  de  la  Man- 
che, puis  il  éprouva  quelques  revers.  Mais 
après  le  1 8  brumaire  qui  promettait  plus 
de  stabilité  au  nouvel  état  de  choses, 
presque  tous  les  autres  chefs  royalistes 
capitulèrent,  et  il  résistait  encore ,  reje- 
tant toute  espèce  de  pacification.  Enfin 
accablé  par  des  forces  toujours  croissan- 
tes ,  il  se  détermina  à  écrire  ,  le  28  jan- 
vier 1800,  au  général  Guidai  pour  lui 
déclarer  qu'il  se  soumettait  aux  lois  de  la 
république.  Il  se  rendait  à  Alenron  pour 
négocier  son  accommodement,  lorsqu'au 
mépris  de  la  foi  jurée  il  fut  arrêté  avec 
six  de  ses  officiers,  et  traduit  devant  une 
commission  militaire  formée  à  Verneuil. 
Il  parut  devant  ses  juges  avec  l'audace 
qui  l'avait  toujours  caractérisé,  et  fut  con- 
damné à  être  fusillé.  Il  ne  voulut  pas  se 
laisser  bander  les  yeux ,  et  attendit  de- 
bout et  avec  calme  le  coup  qui  devait  lui 
ôter  la  vie.  Il  avait  environ  45  ans.  Son 
supplice  fut  un  des  premiers  crimes  po- 
litiques de  Buonaparte.  On  assure  qu'il 
avait  donné  des  ordres  secrets  pour  son 
arrestation  et  pour  sa  condamnation. 

FROUMEINTEAU  (  Nicolas  )  ,  nom 
sous  lequel  s'est  caché  un  écrivain  pro- 
testant du  16*  siècle,  qu'on  n'a  pas  en- 
core découvert  selon  les  uns ,  et  qui  réel- 
lement s'appelait  Barnaud.  Ses  ouvrages 
sur  le  rétablissement  des  finances  sous 
le  malheureux  règne  de  Henri  III ,  sont 
encore  recherchés  malgré  leur  stile  sur- 
anné ,  par  la  candeur ,  la  bonhomie  et 
les  vues  utiles  qui  y  régnent.  Le  pre- 
mier est  intitulé  :  Secret  des  finances  de 
France ,  in-8 ,  1 581  ;  le  second  :  Cabinet 
du  roi  de  France^  1582,  in-8.  Ce  der- 
nier ouvrage  contient  des  infamies  qui 
font  presque  oublier  les  bonnes  observa- 
tions qui  y  sont  mêlées. 

FRUCTUEUX  (Saint),  évêquc  de 
Tarragone ,  souffrit  le  martyre  en  259 , 
par  ordre  d'Emilieu ,  gouverneur  de  cette 
ville. 


FRU 

FRUCTUEUX  (Saint),  archevêque 
de  Drague  au  7*  siècle,  se  retira  dans 
une  solitude  et  y  bâtit  un  monastère  qu'il 
nomma  Complutum ,  parce  qu'il  le  con- 
sacra à  Dieu ,  sous  l'invocation  des  saints 
Justin  et  Pasteur ,  martyrs  de  Complute , 
aujourd'hui  Alcala  de  Hénarez,  dans  la 
Castille.  Malgré  l'amour  qu'il  avait  pour 
la  retraite ,  ses  vertus  l'élevèrent  à  l'épis- 
copat.  On  l'ordonna  d'abord  évêque  de 
Dume,  et  en  656,  le  10*  concile  de  To- 
lède le  plaça  sur  le  siège  archiépiscopal 
de  Brague.  Il  mourut  en  665  ,  après  avoir 
édifié  le  monde  et  comme  évêque  et 
comme  religieux.  Ses  reliques  sont  à 
Compostelle.  On  a  encore  deux  règles , 
dont  il  est  l'auteur.  La  première  est  dite 
de  Complute  ,  parce  qu'elle  était  parti- 
culière à  l'abbaye  de  ce  nom.  La  seconde, 
appelée  Règle  commune,  s'observait  dans 
les  autres  communautés  d'hommes  et  de 
femmes  ,  dont  il  était  fondateur.  Sa  vie , 
écrite  par  un  auteur  contemporain ,  se 
trouve  dans  Bollandus,  Mabillou  et  Bul- 
teau. 

FRUELA  ou  Froila  ,  usurpateur  du 
royaume  de  Léon ,  vers  le  milieu  du  9" 
siècle,  était  fils  du  roi  Véremond,  et 
comte  de  Galice.  L'ambition  le  perdit.  Il 
ne  put  voir  sans  envie  la  couronne  sur 
la  tête  d'Alfonse  III ,  son  neveu  qui  avait 
succédé  à  Ordogno ,  et  qui  par  ses  belles 
qualités  était  digne  de  régner  :  il  se  fit 
proclamer  roi  dans  cette  province.  Al- 
fonse,  dont  la  prudence  ne  s'étendait 
pas  jusqu'à  soupçonner  de  trahison  ceux 
qui  lui  étaient  unis  par  le  sang,  n'apprit 
cette  révolte  que  par  la  marche  de  Frue- 
la ,  qui  venait  se  présenter  devant  Oviédo 
avec  une  armée  assez  forte  ;  mais  bientôt 
après  il  trouva  le  moyen  de  faire  poi- 
gnarder l'usurpateur  et  de  se  rétablir  sur 
le  trône  vers  l'an  866. 

FRUGONI  (  Charles-Innocent  ) ,  poète 
italien,  né  à  Gênes  le  21  novembre  1G92, 
entra  dans  l'ordre  des  clercs  réguliers 
Somasqucs,  et  enseigna  les  belles-lettres 
pendant  plusieurs  années.  Il  se  dégoûta 
ensuite  de  son  état ,  sollicita  et  obtint  du 
pape  la  permission  de  quitter  son  ordre. 
Il  était  prêtre ,  et  vécut  le  reste  de  sa  vie 
à  Parme ,  où  l'infant  dom  Philippe  l'ho- 


FUA 

Qorait  de  son  estime.  Il  y  mourut  en 
1768.  La  collection  de  ses  poésies,  fort 
estimées  des  Italiens ,  a  paru  à  Parme  , 
en  1779  ,  en  9  vol.  in-8.  On  a  réimprimé 
à  Brescia  en  1782  un  Choix  des  poésies 
de  Frugoni,  en  2  yoI.  in-8. 

FRUMENCE  (Saint) ,  apôtre  de  l'E- 
thiopie ,  était  tyrien.  Etant  allé  dans 
l'Ethiopie  avec  Edresse  son  frère,  et  Mé- 
Tope,  marchand  et  philosophe  de  Tyr, 
les  deux  frères  plurent  tellement  par  leur 
sagesse  et  leur  science  au  roi ,  qu'il  en 
fit  ses  favoris  ;  il  fit  Edresse  son  échan- 
son,  et  Frumence  son  trésorier.  Fru- 
mence  se  servit  de  son  crédit  pour  établir 
la  religion  chrétienne  dans  l'Ethiopie , 
dont  il  fut  ordonné  évêque  l'an  331  ,  par 
saint  Athanase.  Le  christianisme  fit  de 
grands  progrès  par  son  moyen  dans  ce 
vaste  empire.  Ces  peuples  reconnaissent 
qu'ils  sont  principalement  redevables  à 
saint  Frumence  de  leur  conversion  au 
christianisme.  Ils  tombèrent  depuis  dans 
l'hérésie  d'Eutychès,  et  encore  aujour- 
d'hui ils  ne  reconnaissent  qu'une  nature 
en  Jésus-Christ.  Dans  le  10*  siècle  leur 
roi  envoya  une  ambassade  au  pape  Clé- 
ment VII.  Il  se  forma  des  missions  dans 
leur  pays.  Grégoire  XIII  leur  envoya  des 
jésuites  ;  les  succès  répondirent  d'abord  à 
leurs  travaux ,  mais  ne  se  soutinrent  pas  : 
ces  missionnaires  furent  martyrisés  en 
1670. 

FRUTER  ou  plutôt  Fruitiers  (Luc)  , 
Fruterius,  critique,  né  en  1541  à  Bru- 
ges ,  vint  à  Paris  en  1 566 ,  et  y  mourut 
ayant  à  peine  25  ans.  Il  était  ami  de 
Muret  et  de  plusieurs  autres  savans.  On 
a  de  lui  quelques  ouvrages,  158i,  ln-8, 
bien  écrits  en  latin ,  et  qui  promettaient 
beaucoup  à  la  république  des  lettres. 
Quoique  très  jeune ,  il  avait  le  jugement 
aussi  sain  que  les  vieillards  les  plus  ex- 
périmentés. 

'  FUALDES  (  N....  )  ancien  procureur 
du  roi  à  Rhodez ,  dont  l'assassinat  a  re- 
tenti dans  toute  l'Europe,  et  a  été  l'occa- 
sion d'un  procès  célèbre,  naquit  vers 
1 761  au  Mur-de-Barrey ,  et  fut  reçu  quel- 
ques années  avant  la  révolution  avocat  au 
parlement  de  Toulouse.  Il  resta  ignoré 
pendant  nos  troubles  politiques.  Il  était 


PUC 


Ô27 


procureur  du  roi  à  Rhodez ,  lorsqu'il  fut 
assassiné  le  1 9  mars  1817,  de  la  manière 
la  plus  affreuse  dans  la  maison  d'un  cer- 
tain Bancal ,  manouvrier  de  cette  ville. 
La  police  ayant  découvert,  après  d'activés 
recherches ,  les  auteurs  du  meurtre  atroce 
de  ce  magistrat ,  le  procès  fut  instruit  de- 
vant la  cour  d'assises  de  l'Aveyron.  Les 
débats  de  cette  cause  très  compliqués  ont 
fixé  pendant  assez  long-temps  l'attention 
générale  :les  dépositions  d'une  dame  nom- 
mée Manson ,  ont  servi  d'épisode  dans  ce 
drame  épouvantable ,  et  n'ont  contribué 
qu'à  jeter  dans  cette  affaire  plus  d'intérêt 
que  de  lumière.  Nous  ne  chercherons 
point  a  en  reproduire  les  détails  qui  se 
trouvent  d'ailleurs  amplement  exposés 
dans  l'ouvrage  intitulé  :  Histoire  et  pro- 
cès complet  des  assassins  de  M.  Fualdès 
par  le  Sténographe  français  (  M.  Latou- 
che),  Paris,  1818,  2  vol.  in-8,  3« édition, 
et  dans  tons  les  journaux  du  temps.  Il  y 
en  a  qui  ont  prétendu  que  ce  meurtre 
était  le  résultat  d'une  vengeance  politi- 
que ;  mais  ce  fait  ne  résulte  pas  des  dé- 
bats. 

*  FUCHS  (Théophile),  poète  alle- 
mand, né  en  1720  à  Leppersdorff  dans  la 
Haute-Saxe ,  était  fils  d'un  pauvre  paysan 
qu'il  assista  dans  ses  travaux  agrestes 
jusqu'à  l'âge  de  18  ans.  Il  n'avait  reçu 
d'autre  instruction  que  celle  que  lui 
donna  le  maître  d'école  du  lieu  ;  mais  par- 
venu à  cet  âge ,  il  sentit  le  besoin  d'étu- 
dier :  ce  fut  pour  lui  une  passion  irrésis- 
tible. Ayant  obtenu  de  ses  parens  la  per- 
mission de  se  rendre  à  l'université  de 
Leipsick ,  il  reçut  en  partant  de  son  frère, 
la  somme  de  7  florins  et  demi  qui  était  le 
montant  de  sa  part  dans  la  succession  à 
venir  de  sa  famille.  Avec  cette  modique 
somme ,  il  se  met  en  route  ;  il  n'a  aucune 
autre  ressource ,  aucune  protection  ,  plus 
d'asile  ;  mais  il  est  plein  d'espoir,  il  brûle 
d'ardeur,  et  chemin  faisant,  il  compose 
le  long  de  la  route  un  poème  en  vers 
alexandrins,  dans  lequel  il  opposait  d'une 
manière  originale  et  neuve  sa  misère  ac- 
tuelle et  ses  brillantes  espérances  de  for- 
tune. Ce  poème ,  qui  était  un  essai  encore 
bien  informe ,  fut  lu  avec  plaisir  par  plu- 
sieurs personnes,  et  notamment  par  le 


528  FUC 

poète  Hagedorn  qui  fit  en  sa  faveur  une  col- 
lecte de  700  écus  :  ce  qui  lui  permit  de 
suivre  les  cours  pendant  5  ans.  Le  célèbre 
professeur  Gottsched  l'avait  recommandé 
dans  sa  NonvelleBibliothèque  des  sciences 
et  des  arts,  comme  un  jeune  bomme  plein 
de  mérite ,  mais  sans  moyen  d'existence. 
Les  ressources  que  lui  fournirent  ses  pro- 
tecteurs lui  permirent  de  terminer  ses  étu- 
des :  il  s'était  attacbé  surtout  à  la  théolo- 
gie ,  sans  toutefois  négliger  la  poésie  à 
laquelle  il  était  redevable  de  sa  position 
actuelle,  et  qui  devait  être  à  ses  yeux  la 
source  de  son  bonheur  à  venir.  En  1751 
Fuchs  vint  à  Dresde,  fut  nommé  diacre 
dans  un  bourg  près  de  Meissen  où  il  se 
maria  en  1752.  Pendant  la  guerre  de  sept 
ans  son  domicile  fut  pillé ,  et  il  faillit  re- 
tomber dans  la  misère;  mais  la  poésie  lui 
donna  du  courage,  et  il  lui  dut  ses  plus 
beaux  momens  comme  ses  plus  douces 
consolations.  Nommé  en  17G'J  prédica- 
teur à  Taubenheim  près  de  Friedberg ,  il 
occupa  cette  place  jusqu'en  1787  où  il 
prit  sa  retraite.  Il  vint  se  fixer  à  Meissen 
où  il  mourut  vers  1810.  Les  poésies  de 
Fucbs  sont  presque  toutes  dans  le  genre 
lyrique;  elles  n'ont  pas  le  goût,  l'élé- 
gance ,  la  grâce  qu'on  pourrait  désirer  : 
ce  qui  tient  à  ce  que  Fuchs  habita  tou- 
jours la  campagne.  Il  avait  cherché  à 
marcher  sur  les  traces  de  Hagedorn  son 
bienfaiteur ,  et  le  restaurateur  du  bon 
goût  en  Allemagne.  Fuchs  est  placé  au 
nombre  des  poètes  allemands  du  troi- 
sième ordre.  Ses  poésies  ont  été  pour  la 
plupart  insérées  dans  le  Recueil  de  Chris- 
tophe-Henri Schmid,  et  dans  les  Anlho- 
logies  lyriques  de  Ramier  et  Mathisson  : 
il  publia  lui-même  les  Poésies  d'un  fils 
de  paysan,  Dresde,  1752,  in-8  ;  nouvelle 
édition  augmentée,  ibid.  1771  ,  in-8,  et 
Ma  vie  jusqu'à  Vàge  de  11  ans ,  briève- 
ment racontée  pour  la  gloire  de  Dieu 
et  la  consolation  des  pauvres,  1796, 
in-8- 

'FUCHS  (Jean-Christophe),  physi- 
cien et  littérateur  allemand,  né  le  1*'' 
mars  1 7  2G  à  Gross-Germersleben  dans  le 
duché  de  Magdebourg ,  était  à  l'âge  de 
28  ans  gouverneur  des  pages  du  roi  et  de 
la  reine  de  Prusse,  et  conserva  cet  emploi 


FUE 

jusqu'à  sa  mort  arrivée  en  septembre  1 795. 
H  s'est  distingué  comme  amateur  éclairé 
des  sciences  physiques  et  naturelles.  Dans 
les  loisirs  que  lui  laissait  sa  place ,  il  com- 
posa quelques  mémoires  intéressans  qui 
ont  été  insérés  dans  les  recueils  de  \A- 
cadémie  des  Scrutateurs  de  la  nature,  de 
Berlin ,  dont  il  était  membre  :  nous  cite- 
rons 1"  Mémoires  sur  l'histoire  des  fos- 
siles et  des  pétrifications.  2°  Mémoire 
sur  un  os  maxillaire  et  une  défense  d^é~ 
léphant  trouvés  près  de  Postdam  r  «  1 7  68 . 
3°  Mémoires  sur  les  paratonnerres.  D'au- 
tres dis.sertations  du  même  savant  ont  été 
insérées  dans  d'autres  recueils  académi- 
ques. Il  a  laissé  aussi  quelques  opuscules 
inédits.  Tous  ses  ouvrages  sont  écrits  en 
allemand. 

FUCHSIUS.  Foyez  Fosch. 

FUENTE.  Foyez  Po?iCK  de  la  Fue.nte. 

'  FUENTÈS  (Le  comte  de) ,  général 
espagnol,  né  à  Yalladodid  le  18  septem- 
bre 1 5G0  ,  servit  avec  distinction  sous  le 
règne  de  Philippe  III  et  sous  celui  de  Phi- 
lippe IV.  En  16  43  il  commandait,  quoi- 
que octogénaire,  cette  célèbre  infanterie 
espagnole  regardée  comme  invincible 
jusqu'au  moment  où  le  grand  Condé  en 
triompha  à  la  bataille  de  P»ocroi.  Fuentès, 
alors  tourmenté  de  la  goutte ,  se  fit  por- 
ter sur  le  champ  de  bataille ,  où  il  mou- 
rut percé  de  coups  le  19  mars  1643. 
Condé ,  en  apprenant  sa  mort ,  s'écria 
qu'il  aurait  voulu  mourir  comme  lui ,  s'il 
n'avait  pas  vaincu. 

FUESI  (Pie),  dominicain,  né  en  1703 
à  Comaron  en  Hongrie,  de  parens  pro- 
testans ,  embrassa  la  religion  catholique 
et  entra  dans  l'ordre  des  Dominicains.il 
mourut  à  Yaitzen  en  1769.  On  a  de  lui 
1°  Otia  poetica.  Vienne,  1744;  2°  Tri- 
bunale  confessariorum  et  ordinandorum 
Martini  Wigardt  in  brève  compcniliuni 
collectum ,  1 745  ;  3° Fasciculus  biblicus, 
Bude,  1746;  4°  Fie  de  saint  Fincent 
Ferrier  ,  en  hongrois ,  OEdenbourg  , 
1749  ;  5°  Catonis  moralia  disticlui,  ad 
hungaricos  versus  magna  elêgantia  re- 
dacta ,  plusieurs  fois  réimprimés ,  der- 
nière édition,  Bude,  1772. 

*  FUESSLI  (  Jean-Melcbior  ),  graveur 
et  écrivain,  naquit  à  Zurich  en  1677-  H 


I 


i 


FtJË 

a  exécuté  plusieurs  plancbes ,  panni  les- 
quelles on  cite  la  Cérémonie  des  sermens, 
qui  représente  l'alliance  jadis  stipulée 
entre  la  république  de  Venise  et  les  can- 
tons de  Zurich  et  de  Berne.  Fuessli  a 
aussi  laissé  un  ouvrage  estimé  ,  qui  a 
pour  titre  Histoire  des  meilleurs  pein- 
tres de  la  Suisse,  de  1755  à  1780,  4 
vol. ,  avec  un  Supplément  et  portraits. 
Fuessli ,  après  avoir  long-temps  voyagé 
en  Allemagne ,  oîi  il  s'attira  l'amitié  des 
artistes  et  des  gens  de  cour,  revint  en 
Suisse ,  s'y  maria  ,  occupa  quelque  temps 
la  place  de  chancelier,  et  y  mourut  en 
17  36.  —  Son  fils  aîné  ,  Jean  Rodolphe, 
mort  à  Vienne  en  1 806  ,  avait  entrepris 
le  Catalogue  raisonné  des  meilleures  es- 
tampes gravées  d'après  les  artistes  les 
plus  célèbres  de  chaque  école,  dont  il  n'a 
publié  que  les  4  premiers  volumes,  1798 
à  1806.  Ils  comprennent  les  écoles  fla- 
mandes et  italiennes.  Il  a  gravé  les  por- 
traits et  les  vignettes  dej  l'Histoire  des 
peintres  de  la  Suisse ,  de  son  père. 

"FUESSLI  (Jean-Conrad),  né  en  1 704  à 
Wetzlan,  oîi  son  père  originaire  de  Zurich 
était  pasteur,  fut  ministre  à  Veltheim  en 
1744,  et  mourut  en  1775.  On  a  de  lui  1" 
Tliesaurus  historiée  helveticœ ,  Zurich, 
1735  ,  jn-fol.  ;  c'est  un  recueil  des  histo- 
riens latins  de  la  Suisse.  2°  Un  Abrégé 
de  V histoire  de  la  Suisse  à  la  suite  de 
Helvetiorumrepublica  de  Simler,  Zurich, 
1734.  Son  fanatisme  contre  la  religion 
catholique  perce  partout  oii  il  a  trouvé 
occasion  de  le  montrer. 

*  FUESSLI  (Matthieu) ,  peintre  ,  né  à 
Zurich  en  1 598  ,  se  distingua  dans  la  re- 
présentation des  scènes  effrayantes  ;  telles 
que  batailles,  combat  naval,  incendies 
et  pillages.  Il  mourut  en  1604. 

*  FUESSLI  ou  FusELi  (Henri),  peintre  et 
professeur  de  dessin  à  l'académie  de  Lon- 
dres, naquit  à  Zurich  en  1 7  4  2  d'une  famille 
qui  avait  déjà  fourni  plusieurs  hommes  cé- 
lèbres dans  la  carrière  des  beaux  arts  (  V. 
les  articles  précédens).  Henri  fit  ses  étu- 
des dans  sa  patrie,  et  se  rendit  ensuite  à 
Berlin ,  ou  il  suivit  les  leçons  des  grands 
maîtres  de  l'école  allemande.  Après  s'y 
être  pénétré  de  la  lecture  des  poètes  les 
plus  distingués  de  ce  pays ,  surtout  de 
V. 


Kleist ,  de  Wieland ,  de  Klopstock ,  il  s'at- 
tacha au  fameux  Lavater  avec  lequel  il 
voyagea  en  1761  dans  une  partie  de  l'Alle- 
magne, avec  l'intention  d'y  étudier  les  ou- 
vrages des  plus  fameux  peintres.  Il  se  ren- 
dit ensuite  en  Angleterre  oîi  il  se  lia  avec 
le  fondateur  de  l'école  de  peinture  de  ce 
pays ,  Reinolds ,  qu'on  appelle  le  Corrége 
de  la  Grande-Bretagne.  De  là  il  passa  en 
Italie  pour  y  étudier  les  chefs-d'œuvre  de 
Michel-Ange  et  des  autres  grands-maîtres 
de  cette  terre  classique  des  beaux  arts.  Il 
vint  enfin  se  fixer  en  Angleterre  en  1 778 , 
et  ses  tableaux  ont  été  accueillis  avec  tant 
de  faveur  qu'on  l'a  placé  après  le  fameux 
West.  Il  est  mort  le  26  avril  1825  à  Pult- 
ney-Hill  dans  un  état  voisin  de  l'indi- 
gence. Son  œuvrie  précédé  d'une  îiotice 
historique  a  paru  à  Zurich  en  1 806,  4  vol. 
in-fol.  Parmi  ses  principaux  tableaux  on 
remarque  lady  Macbeth;  quelques  scè- 
nes de  l'Espiègle ,  le  Spectre  de  Dion , 
d'après  Plutarque,  une  suite  de  sujets 
tirés  de  Milton;  Hercule  combattant  les 
chevaux  de  Diomède.  Fuessli  ne  se  borna 
point  à  peindre ,  il  fit  encore  des  ouvrages 
sur  la  peinture. 

FUET  (  Louis  ) ,  célèbre  avocat  au  par- 
lement de  Paris,  mort  en  1739,  âgé 
d'environ  50  ans,  est  auteur  d'un  Traité 
estimé  sur  les  matières  bénéficiales , 
1723  ,  in-4.  Rousseau  de  Lacombel'a  re- 
donné sous  le  titre  de  Jurisprudence  ca- 
nonique,  in-folio,  1771  ,  après  l'avoir 
rectifié  et  augmenté. 

FUGGER  (  Ulric  ) ,  né  en  1 528  à  Augs- 
bourg ,  d'une  famille  riche ,  fut  d'abord 
camérjer  du  pape  Paul  III ,  et  se  fit  en- 
suite protestant.  Il  faisait  des  dépenses  si 
considérables  jiour  acquérir  les  manus- 
crits des  auteurs  anciens ,  que  sa  famille 
lui  fit  ôter  l'administration  de  son  bien. 
H  se  retira  à  Heidelberg ,  où  il  mourut  en 
1584  ,  à  58  ans.  Il  légua  sa  bibliothèque, 
qui  était  très  belle,  à  l'électeur  Palatin. 
C'est  le  seul  individu  de  cette  famille 
célèbre  qui  ait  abandonné  la  religion  ca- 
tholique. Il  arriva  même  contre  son  in- 
tention qu'il  rendit  grand  service  à  cette 
religion  en  destinant  1000  florins  pour 
une  œuvre  pieuse ,  et  engageant  ses  pa- 
rens  à  en  faire  autant  ;  car  cette  somme, 
34 


53o  FUL 

beaucoup  acct-ue ,  servit  ensuite  à  la  fon- 
dation du  magnifique  collège  de  St.-Sau- 
veur  à  Augsbourg,  un  de  ceux  qui  furent 
les  plus  utiles  à  l'église  catholique  en 
Allemagne.  Les  jésuites  l'occupaient  en- 
core après  leur  suppression,  en  1791 ,  et 
il  en  sortit  une  multitude  d'ouvrages 
contre  les  erreurs  et  les  faux  docteurs 
du  temps.  On  peut  voir  sur  ce  sujet , 
Origo  collegii  S.  J.  ad  sanctum  Salva- 
torem,  A.  V .  Fuggeriane  pietatis  mn- 
numentum ,  Augsbourg,  1786,  1  vol. 
iii-8. 

FUHRMANN  (  Mathias  ),  savant  moine 
autrichien  ,  de  l'ordre  de  St. -Paul  ,  pre- 
mier ermite,  était  définiteur-général  de 
la  province  d'Autriche ,  et  mourut  en 
1773.  Il  a  publié  plusieurs  ouvrages  eu 
allemand  :  1°  L'Autriche  ancienne  et 
moderne.  Vienne,  1734,  4  part.  in-8. 
2°  Païenne  ancienne  et  moderne,  1738  , 
2  part.  in-8.  3°  P^ie  et  miracles  de  St.- 
Se'verin ,  apôtre  du  Nordgau  ou  de  l'Au- 
triche ,  1746,  in-8.  4°  Description  his- 
torique de  la  ville  et  des  faubourgs  de 
Vienne,  1766-67  ,  2  vol.  in-8.  5"  Histoire 
générale ,  ecclésiastique  et  civile  des 
états  héréditaires  de  la  maison  d^ Autri- 
che,  depuis  Auguste  jusqu'à  Van  ZZl  de 
J.  C. ,  1769,  in-4,  fig.  6"  Historia  sacra 
de  baptismo  Constantini  Max.  Aug. 
colloquiis  familiaribus  digesta ,  Rome  , 
17  43-47  ,  2  part,  in-4  ,  fig.,  ouvrage  plein 
d'érudition  ,  mais  dont  la  seconde  partie 
est  défigurée  par  de  nombreuses  fautes 
d'impression.  7°  Dux  vice  angelicus  ad 
urbem  Romam ,  1749  ,  in-8.  Il  a  été  tra- 
duit en  allemand,  la  même  année. 

FULBERT,  54«  évêque  de  Chartres  en 
1007,  chancelier  de  France,  suivant 
quelques-uns ,  avait  été  disciple  de  Ger- 
bert,  depuis  pape  sous  le  nom  de  Syl- 
vestre II.  11  passa  d'Italie  en  France ,  et 
fit  des  leçons  de  théologie  dans  les  écoles 
de  l'église  de  Chartres.  Il  mourut  le  10 
avril  1028  ,  regardé  comme  le  prélat  de 
son  temps  qui  connaissait  le  mieux  l'an- 
cienne discipline,  et  qui  la  faisait  obser- 
ver avec  le  plus  d'exactitude.  Ses  œuvrer 
ont  été  publiées  en  1G08 ,  in-8.  On  peut 
voir  dans  ses  épîtres  combien  il  était  con- 
sidéré de  tous  les  princes  de  son  temps. 


PUL 

Elles  sont  d'ailleurs  bien  écrites,  et  sur- 
tout fort  utiles  pour  l'histoire ,  la  disci- 
pline et  les  usages  de  son  siècle.  Ses  au- 
tres ouvrages  sont  des  sermons,  des 
hymnes ,  Ae& proses  ;  mais  ce  ne  sont  pas 
les  plus  précieuses  parties  de  ses  Œuvres. 

FULGENCE  (Saint),  Fabius  Claudlus 
Gordianus  Fulgentius ,  né  à  Lepté  dans 
la  Bizacène ,  province  d'Afrique ,  en  467, 
ou  bien  en  463 ,  de  parens  nobles,  quitta 
le  monde  ,  oii  il  aurait  pu  briller  par  ses 
talens,  pour  se  renfermer  dans  un  mo- 
nastère. Il  devint  le  père  d'une  grande 
communauté  en  494  ,  fut  ordonné  prêtre 
à  Rome  en  500.  On  le  tira  de  sa  soli- 
tude ,  pour  l'élever  sur  le  siège  de  Ruspe 
en  Afrique,  en  508.  Son  zèle  contre  l'a- 
rianisme  déplut  à  Trasimond  ,  roi  des 
Vandales ,  qui  l'exila  en  Sardaigne.  Hil- 
déric ,  successeur  de  ce  prince  barbare , 
le  rappela  en  523.  Son  peuple  le  reçut 
comme  en  triomphe.  Pendant  son  exil  il 
avait  composé  plusieurs  ouvrages.  r.,e 
Père  Sirraond  en  a  publié  quelques-uns , 
Paris,  1684,  in-4  :  car  nous  n'avons  pas 
tous  ceux  qui  sont  sortis  de  sa  plume.  Le 
principal  de  ceux  qui  nous  restent  est 
son  Traité  de  la  prédestination  et  de  la 
grâce ,  en  3  livres.  Il  y  défend  avec  zèle 
la  doctrine  de  saint  Augustin.  Il  mourut 
en  533  ,  après  avoir  fait  un  bien  infini  en 
Afrique  par  une  science  profonde ,  unie 
à  une  rare  vertu. 

FULGENTIUS  -  PLANCIADES  (  Fa- 
bius) est  auteur  de  trois  Livres  de  my- 
thologie, publiés  à  Amsterdam  en  1681 , 
2  vol.  in-8  ,  avec  Julius-Hyginius ,  Lac- 
tancius-Placidus  et  Albricius ,  par  Munc- 
ker ,  sous  le  titre  de  Mythographi  latini. 
11  était ,  dit-on,  évêque  de  Carthage  dans 
le  6*  siècle.  Nous  avons  encore  de  lui  un 
traité  curieux  :  De  priscis  vocabulis  la- 
tinis ,  Paris,  1586,  in-4. 

FULGOSE  ou  Fregose  (Raphaël  ) ,  en- 
seigna ,  vers  l'an  1438  ,  le  droit  avec  ré- 
putation à  Pavie  et  à  Plaisance ,  puis  à 
Padoue ,  où  il  mourut ,  laissant  divers 
ouvrages  peu  lus ,  même  par  les  juris- 
consultes. —  Il  y  a  un  autre  Fulgosk  ou 
Fregose  (Baptiste) ,  qui  fut  doge  de  Gè- 
nes, sa  patrie,  en  1478.  Voyez  Frkgosk 
(Baptiste). 


FUL 

*  FULLEBORN  (  George-Guslave),  sa- 
vant professeur  allemand ,  naquit  à  Glo- 
gau  le  2  mars  1769.  Après  avoir  com- 
mencé ses  études  sous  son  père ,  homme 
profond  et  distingué  par  ses  connaissan- 
ces littéraires  ,  et  qui  était  conseiller  du 
bailliage  de  Glogau,  il  alla  les  terminer  k 
l'université  de  Halle ,  oii  il  publia  bientôt 
une  Dissertation  latine  sur  le  livre  de 
Xe'nophon  :  Ze'non  à  Gorgias ,  ordinai- 
rement attribue'  à  Aristote.  De  retour  k 
Glogau  en  1*89,  il  prêcha  dans  l'église 
luthérienne  de  celte  ville ,  et  fut  nommé 
troisième  diacre.  Appelé  à  Breslau  pour 
y  enseigner  les  langues  hébraïque ,  grec- 
que et  latine,  en  remplacement  du  célèbre 
professeur  Gedicke,  dans  l'établissement 
appelé  E lisahethanum ,  il  ne  remplit 
pas  long-temps  ces  fonctions  dans  les- 
quelles il  avait  acquis  une  grande  répu- 
tation. Atteint  d'une  maladie  de  cœur, 
il  mourut  k  la  fleur  de  l'âge  le  1 6  février 
1803.  Quoiqu'enlevé  bien  jeune  encore  , 
il  a  laissé  un  grand  nombre  d'ouvrages 
dont  les  principaux  sont  :  1  "  une  édition 
des  satires  de  Perse ,  avec  ime  traduc- 
tion et  des  notes  en  allemand ,  Zullichau , 
1794  ;  2°  Théorie  abrégée  du  stile  latin  , 
en  allemand,  Breslau,  1783,  in-8  ;  3° 
Quelques  contes  populaires  dans  la  même 
langue,  1791-93.  i"  Des  mélanges  inti- 
tulés Feuilles  diverses,  d'EdelwaldeJus- 
tus ,  1795  ;  5°  Fragmens  de  Parménide 
avec  luie  traduction  et  des  notes  en  alle- 
mand, Zullichau,  1795,  in-8.  6"  Georgi 
Gemistlii  S.  Plethonis  et  Mich.  apostoliy 
orationes  funèbres  duce ,  in  quibus  de 
immortalitate  animi  exponitur ,  nunc 
primum  e  M  SS.  editi,  Leipsick  ,  1793, 
in-8.  7"  Encyclopedia  phihlogica  , 
Breslau,  2«  édit.  1803,  1  vol.  iu-8.  8" 
Une  édition  des  œuvres  posthumes  du 
célèbre  Lessing ,  Berlin,  1795,  in-8. 
9°  Un  morceau  sur  le  dialecte  silésien,  in- 
séré dans  le  Journal  de  Silésie.  10"  Des 
fragmens  pour  servir  à  l'histoire  de  la 
Philosophie ,  en  1 2  parties ,  Zullichau  et 
Freystadt,  1791  ,  3  vol.  in-8.  11°  Notes 
et  dissertations  jointes  à  la  traduction 
de  la  politique  d' Aristote ,  publiées  par 
Garve ,  Breslau  ,  1799-1800,  in-8.  12°  Un 
ouvrage  périodique  eu  allemand  sous  le 


FUL 


53 1 


titre  de  Conteur  de  Glogau,  depuis  le 
4*  cahier,  1800  ,  jusqu'à  sa  mort  :  il 
a  dicté  les  derniers  numéros  depuis  son 
lit. 

FULLER  (  Nicolas  ) ,  de  Southampton, 
fut  successivement  secrétaire  de  Robert 
Horn  ,  évêque  de  Winchester ,  pasteur  de 
l'église  d'Aldington  ,  chanoine  de  Salis- 
bury ,  et  recteur  de  Waltham.  Il  mourut  à 
Aldington  en  1623.  On  a  de  lui  :  1°  Mis- 
cellanea  theologica  et  sacra ,  Londres , 
1617  ,  in-4  ;  2°  un  Appendix  k  cet  ou- 
vrage, Leyde,  l622  ,  in-8.  On  y  trouve 
beaucoup  d'érudition.  L'auteur  possédait 
très  bien  les  langues  orientales. 

FULLER  (  Thomas  ) ,  historien  an- 
glais, né  en  1608  ,  fut  ministre  en  diffé- 
rens  endroits ,  chanoine  de  Salisbury , 
prédicateur  k  Londres.  Le  zèle  qu'il  mon- 
tra pour  Charles  I  l'exposa  k  des  tracas- 
series de  la  part  de  l'usurpateur ,  qui  le 
dépouilla  de  ses  emplois  ;  il  fut  ensuite 
réintégré  dans  son  canonicat  de  Salis- 
bury, où  il  mourut  le  16  août  1661.  On 
lui  doit  :  1°  Description  de  la  Palestine 
et  des  régions  adjacentes ,  et  des  choses 
mémorables  y  arrivées  sous  Tancien  et 
le  nouveau  Testament ,  Londres,  1662, 
in-folio ,  en  anglais.  11  s'y  montre  habile 
critique  ;  2°  Histoire  de  V Eglise  depuis 
Jésus-Christ  jusqu'en  1648,  Londres, 
1655  ,  in-fol.  On  comprend  qu'elle  n'est 
pas  exempte  de  préjugés  ,  surtout  quant 
aux  derniers  temps  ;  3°  Histoire  des  croi- 
sades ,  Cambridge,  1651  ,  in-folio;  4" 
F'ies  des  hommes  illustres  de  F  Angle- 
terre, 1662, in-folio,  réimpriméeen  1810, 
en  2  vol.  in-4  ,  avec  des  notes  explicati- 
ves ;  5°  De  la  vie  des  théologiens  mo- 
dernes ,  1651  ,  in-4  ;  6"  Des  sermons  et 
des  livres  de  controverse.  Tout  ce  qu'il 
a  écrit  est  en  anglais. 

FULRADE,  abbé  de  St. -Denis  en 
France  ,  archichapelain  du  roi  Pépin , 
mort  en  784,  se  distingua  par  sa  piété, 
par  ses  talens  et  sa  capacité  dans  les  af- 
faires et  les  négociations  importantes  dont 
il  fut  chargé.  Il  sut  mériter  la  conhance 
des  princes  et  des  papes.  Etienne  II  lui 
accorda  divers  privilèges  pour  son  ab- 
baye de  St. -Denis,  où  il  logea  lorsqu'il 
vint  en  France  solliciter  du  secours  au- 


532  FUL 

près  de  Pépin  ,  contre  Astolfe.  Voyez 
Etienne  II. 

*  FDLTON  (  Robert  ),  célèbre  méca- 
nicien américain  ,  né  vers  1767  ,  dans  le 
comté  de  Lancastre ,  état  de  Pensylvanie , 
fut  d'abord  destiné  à  la  profession  de 
joaillier,  qu'il  abandonna  pour  se  livrer 
à  la  peinture ,  suivit  à  Londres  les  leçons 
de  West  originaire  d'Amérique ,  et,  après 
avoir  passé  plusieurs  années  sous  ce  grand 
peintre  d'histoire,  il  exerçait  son  art  dans 
le  comté  de  Devon  lorsqu'il  fit  la  connais- 
sance du  mécanicien  Rumsey  son  com- 
patriote. Par  suite  de  cette  liaison , 
l'élève  de  West  résolut  de  quitter  une 
carrière  dans  laquelle  il  ne  pouvait  espé- 
rer une  grande  célébrité;  il  se  livra  à 
l'étude  de  la  mécanique  dont  il  attendait 
avec  raison  des  résultats  plus  avantageux. 
Il  suivait  cette  direction  nouvelle  ,  lors- 
qu'un américain,  Joël  Barlow,  l'attira  en 
France  pour  travailler  à  un  panorama. 
Cette  entreprise  lui  attira  gloire  et  profit, 
et  il  continua  ses  études  de  mécanique. 
Il  retourna  aux  Etats-Unis,  oîi  il  publia 
successivement  la  découverte  d'un  mou- 
lin pour  scier  et  polir  le  marbre  ;  un 
sj'stème  de  canaux  de  navigation  ;  une 
machine  à  faire  des  cordes  ;  l'invention 
d'un  bateau  pour  naviguer  sous  l'eau ,  le 
torpédo ,  ou  moyen  de  faire  sauter  en 
mer  les  vaisseaux  ennemis  ;  et  enfin  le 
sleamboat ,  ou  bateau  à  vapeur ,  décou- 
verte qui  suffirait  seule  pour  l'immorta- 
liser. Il  conçut  depuis  ,  pour  la  défense 
des  ports  en  temps  de  guerre ,  une  espèce 
de  frégate  qu'on  peut  manœuvrer  au 
moyen  de  cette  machine ,  et  il  eut  la 
satisfaction  de  voir  ses  expériences  réus- 
sir au-delà  de  ses  espérances.  Il  fut  nom- 
mé immédiatement  membre  de  la  société 
philosophique  de  Philadelphie  et  de  la 
société  militaire  des  Etats-Unis.  Le  con- 
grès^  venait  de  lui  accorder  5000  dollars , 
pour  le  mettre  à  même  de  continuer  ses 
expériences  du  torpédo  ,  lorsqu'une  mort 
prématurée  l'enleva  aux  sciences,  le  24 
février  1815.  Plusieurs  de  ses  découver- 
tes ont  été  décrites  en  français  dans  les 
Annales 'des  arts  et  manufactures ,  et 
dans  le  Bulletin  de  la  société  d'encoura- 
gement. Sou  système  des  canaux  a  été 


FUL 

traduit  par  M.  de  Recicourt ,  sous  ce 
titre  :  Kecherches  sur  les  moyens  de 
perfectionner  les  canaux  de  navigation , 
etc. ,  Paris,  1799  ,  in-8  ,  fig.  La  vie  de 
Fulton  a  été  écrite  par  son  ami  Cadwaller 
D.  Colden  ,  New-York  ,  1819  ,  in-8. 

FUL  VIE,  dame  romaine,  de  la  famille 
Fulvia  qui  donna  tant  de  grands  capitai- 
nes à  la  république  ,  mariée  d'abord  au 
séditieux  Clodius  ,  ensuite  à  Curion  , 
enfin  à  Marc-Ântoine  ,  eut  part  à  toutes 
les  exécutions  barbares  du  triumvirat. 
Elle  était  aussi  vindicative  que  son  mari. 
Lorsqu'oYi  lui  apporta  la  tète  de  Cicéron , 
elle  perça  sa  langue  avec  un  poinçon 
d'or,  et  joignit  à  cet  outrage  toutes  les 
indignités  qu'une  femme  eu  fureur  peut 
imaginer.  Antoine  l'avait  quittée  pour 
Cléopâtre,  dont  il  était  éperdûment  amou- 
reux :  elle  voulut  qu'Auguste  vengeât  cet 
affront  ;  mais  n'ayant  pu  l'obtenir  ,  elle 
prit  les  armes  contre  lui ,  et  les  fit  pren- 
dre à  Lucius-Antoine,  frère  de  son  mari. 
Auguste  ayant  été  vainqueur ,  elle  se  re- 
tira en  Orient ,  fut  très  mal  reçue  par 
Antoine  ,  et  eu  mourut  de  douleur  à  Sy- 
cionc  ,  l'an  40  avant  J.  C. 

FULVIUS  NOBILIOR  (  Servius  )  , 
de  l'illustre  famille  Fulvia ,  dont  nous 
venons  de  parler  ,  fut  élevé  au  consulat , 
l'an  255  avant  J.  C. ,  avec  Emilius  Pau- 
lus.  Ils  signalèrent  leur  administration 
par  des  victoires  et  des  malheurs.  Ayant 
appris  l'infortune  de  Régulus ,  fait  pri- 
sonnier en  Afrique  ,  ils  y  allèrent  pour 
soutenir  la  réputation  des  armes  romai- 
nes. Ils  chassèrent  les  Carthaginois  qui 
assiégeaient  Clupéa  ;  et  après  avoir  fait 
un  grand  butin ,  ils  périrent  dans  un 
naufrage ,  avec  près  de  200  navires.  — 
Marcus  Folvius  Nobilior  ,  petit-fils  du 
consul,  fut  envoyé  l'an  189  avant.!.  C. 
en  Espagne ,  et  y  rendit  de  grands  ser- 
vices à  la  république.  Il  fut  aussi  hoiuiré 
du  consulat  l'an  193.  Il  se  distingua  par 
la  prise  d'Ambracie,  près  du  golfe  de 
Larta ,  et  obligea  les  Etoliens  de  deman- 
der la  paix.  —  Il  y  eut  du  temps  d'Au- 
guste un  sénateur  nommé  Fulvius  ,  qui 
ayant  eu  la  faiblesse  de  dire  à  sa  femme 
un  secret  important,  que  l'empereur  lui 
avait  confié  et  qui  fut  divulgué  sur-le- 


I 


FUL 

champ  ,  se  donna  la  mort  de  regret.  Sa 
femme  suivit  cet  exemple  funeste. 

FULVIUS— URSINDS  ou  Fluvio- 
Orsini  ,  romain  ,  bâtard ,  dit-on ,  de  la 
maison  des  Ursins.  Un  chanoine  de  La- 
tran  l'éleva  et  lui  donna  son  canonicat; 
il  en  employa  les  revenus  à  ramasser  des 
livres.  Il  mourut  à  Rome  en  1000  ,  à  70 
ans ,  laissant  des  notes  sur  Cicéron  ,  Var- 
ron  ,  Columelle ,  Festus-Pompéius,  etc.  , 
et  plusieurs  ouvrages  sur  l'antiquité.  Ou 
distingue  ses  traités  ■.\°  De  familiis  Ro- 
jnanorum,  1663,  in-folio;  2°  De  Tri- 
clinio  Romanorum,  1689,  in-12,  oii  il 
a  mis  à  profit  tout  ce  que  la  belle  littéra- 
ture ,  dirigée  par  le  goût ,  peut  fournir 
pour  éclaircir  cette  matière. 

*  FULYY  (  Philippe-Louis  Orry  ,  mar- 
quis de)  naquit  en  1 7  30  à  l'île  de  France, 
suivant  les  uns,  et  suivant  les  autres  à  Ver- 
sailles, ou  bien  ailleurs,  d'un  conseiller 
d'état,  Jean-Henri-Louis  Orry  qui  fut  in- 
tendant des  finances  et  qui  établit  à  ses 
frais  à  Vincennes  la  belle  manufacture  de 
porcelaine  qui,  à  sa  mort,  fut  transférée  à 
Sèvres ,  et  qui  est  maintenant  une  manu- 
facture royale.  Le  jeune  de  Fulvy  se  retira 
en  Angleterre  au  commencement  de  la  ré- 
volution, et  il  y  resta  jusqu'à  sa  mort  arri- 
véele  18  janvier  1823.  Il  cullivales  lettres 
pendant  toute  sa  vie  :  avant  1789  il  avait 
inséré  un  grand  nombre  de  morceaux  de 
poésies  dans  les  Journaux  et  dans  les 
Recueils  périodiques.  On  en  trouve  dans 
le  Mercure,  dans  V Alrnanach  des  Muses 
et  dans  les  Etrennes  d' Apollon.  Il  a  laissé 
un  Recueil  de  133  fables  ,  Madrid,  1798. 
Il  en  existe  à  la  bibliothèque  royale  un 
exemplaire  ,  peut-être  le  seul  qui  soit  en 
France.  Le  Journal  des  Débats  du  If) 
juin  1823  lui  a  consacré  une  petite  No- 
tice dans  laquelle  il  représente  le  mar- 
quis de  Fulvy  copime  un  homme  d'esprit 
et  comme  le  modèle  des  chevaliers  fran- 
çais. Voyez  le  tome  premier  des  Souve- 
nirs et  mélanges  de  M.  A.  de  Labouisse 
qui  s'est  caché  sous  le  pseudonyme  de 
M.  de  Rochefort.  On  a  dit  que  le  nom  de 
Fulvy  n'était  qu'un  faux  nom  dont  s'était 
servi  Louis  XVIII  pour  publier  ses  divers 
ouvrages  de  poésie  ;  mais  c'est  une  er- 
reur. 


FUM 


533 


*  FUMAGALLI  (  Le  Père  Ange  ) ,  sa- 
vant historien  de  la  Lombardie  et  abbé 
de  l'ordre  de  Cîteaux ,  entra  à  l'âge  de  15 
ans  dans  cette  congrégation,  et  il  y  étudia 
les  langues  orientales  et  la  théologie. 
Lors  de  la  création  de  l'Institut  des  scien- 
ces ,  lettres  et  arts  du  royaume  d'Italie  , 
il  fut  choisi  des  premiers  pour  donner  de 
l'illustration  à  cette  compagnie  naissante; 
mais  la  suppression  de  son  ordre  devint 
pour  lui  la  cause  d'un  chagrin  mortel  : 
il.  n'y  survécut  que  peu  de  temps  ,  et 
mourut  à  Milan  le  12  mars  1804.  Il  a 
laissé  des  mémoires  intéressans  et  utiles 
sur  l'irrigation  des  prairies  et  sur  d'au- 
tres objets  d'économie  rurale,  et  plusieurs 
Dissertations  savantes  sur  Vorigine  de 
V idolâtrie,  sur  un  manuscrit  grec  de  la 
liturgie  ambroisicnne  ,  etc.  ;  mais  l'ou- 
vrage qui  lui  fait  le  plus  d'honneur  est 
son  Institution  diplomatique, ^lïaxi,  1 802, 
2  vol.  in-4  ,  sujet  qui  n'avait  pas  encore 
été  traité  en  Italie  avec  un  aussi  grand 
détail ,  et  qu'il  a  exposé  d'une  manière 
tellement  supérieure ,  que  cet  ouvrage 
est  regardé  comme  classique.  Son  stile 
est  élégant ,  pur  et  correct. 

*  FUMARS  (  Etienne  ) ,  littérateur  et 
poète,  né  le  22  octobre  1743,  dans  un 
bourg  des  environs  de  Marseille.  Il  fut 
chargé  de  l'éducation  des  enfans  du 
comte  de  Grave ,  et  ensuite  de  celle  des 
enfans  du  comte  de  Vérac  ,  qu'il  accom- 
pagna dans  son  ambassade  en  Danemark. 
Il  s'y  maria  ,  et  devint  professeur  de  lit- 
térature française  à  l'université  de  Kiel, 
et  ensuite  à  celle  de  Copenhague.  Il 
mourut  subitement  dans  cette  ville  le  30 
novembre  1800.  On  a  publié,  après  sa 
mort ,  à  Paris  ,  le  recueil  de  ses  fables , 
en  1  vol.  in-8  et  iu-12  ,  1807  :  quelques- 
unes  joignent  à  la  facilité  du  stile  l'ori- 
j;[inalité  des  idées  ;  mais  le  plus  grand 
nombre  sont  faibles  d'invention  et  de 
couleur. 

FUMÉE  (  Adam  ) ,  premier  médecin 
de  Charles  VII ,  de  Louis  XI ,  et  de  Charles 
VIII ,  eut  lès  sceaux  par  commission  en 
1492  ,  comme  doyen  des  maîtres  des  re- 
quêtes ,  et  les  eut  jusqu'à  sa  mort ,  qui 
arriva  au  mois  de  novembre  l494.  Il 
était  mathématicien  ,  médecin ,   poète  , 


534  FUN 

historien.  Louis  XI,  qui  l'estimait  beau- 
coup ,  l'avait  souvent  employé  dans  des 
négociations. 

FU3IÉE.  Voyez  Beucblin. 

FUMEX.  (  Jean-Fclix-Henri  de  ) ,  né  à 
Toulouse  en  ITH  ,  fit  ses  études  à  St.- 
Sulpice  et  l'ut  sacré  évèque  de  Lodève  en 
1 750  :  il  illustra  son  épiscopat  par  les  ver- 
tus et  les  œuvres  que  la  religion  inspire 
aux  vrais  ministres  de  Jésus-Christ.  Il  fut 
pendant  trente  ans  le  père  et  le  consola- 
teur de  son  peuple.  Indépendamment  des 
travaux  propres  de  son  ministère ,  aux- 
quels il  se  livrait  avec  une  activité  in- 
croyable ,  payer  les  dettes  des  pauvres , 
secourir  des  familles  honteuses  ,  étaient 
ses  actes  de  bienfaisance  de  chaque  jour. 
Les  curés  du  diocèse  trouvaient  toujours 
chez  lui  des  ressources  pour  leurs  parois- 
ses. L'église  de  la  cathédrale ,  l'Hôtel- 
Dieu ,  l'hôpital ,  ont  été  les  objets  de  sa 
générosité.  Il  aimait  surtout  l'hôpital 
qu'il  s'est  appliqué  à  rendre  utile  et  com- 
mode à  force  de  dépenses^  et  qu'il  a  in- 
stitué son  héritier.  Par  le  spectacle  de  ses 
vertus  autant  que  par  ses  instructions , 
il  a  ramené  à  la  religion  catholique  un 
grand  nombre  de  calvinistes ,  et  leur  a 
assuré  un  état  honnête  ,  surtout  aux  en- 
fans  persécutés  ou  abandonnés  de  leurs 
parens  (  voyez-en  un  exemple  touchant 
dans  le  Journal  historique  et  littéraire  , 
15  juillet  1784,  page  411  ).  Il  mourut  le 
2  janvier  1790  ,  au  milieu  des  ruines  de 
l'église  de  France  ,  et  dans  le  pressenti- 
ment douloureux  des  scènes  plus  affreu- 
ses encore  qui  allaient  s'ouvrir.  Il  n'a  eu 
d'autre  oraison  funèbre  que  les  sanglots 
des  pauvres  et  les  larmes  de  tous  les  ca- 
tholiques de  son  diocèse.  On  a  de  lui  deux 
Instructions  pastorales,  o\\  il  s'élève  par- 
ticulièrement contre  les  incrédules;  et 
le  Culte  de  V amour  divin ,  ou  De'votion 
au  sacré  cœur. 

FUNCH,  FUNECCIUS  ou  Funccius 
(  Jean  ) ,  ministre  luthérien  ,  né  à  Wer- 
den,  près  de  Nuremberg ,  en  1 518  ,  s'at- 
tacha à  la  doctrine  d'Osiander,  dont  il 
épousa  la  fille,  et  exerça  le  ministère 
dans  la  Prusse.  Il  ne  put  se  défendre  de 
l'esprit  de  trouble  qui  agitait  tous  les  ré- 
formateurs de  son  siècle.  Ayant  été  con- 


FUR 

vaincu  de  donner  à  Albert,  duc  de  Prusse, 
dont  il  était  chapelain ,  des  conseils  dés- 
avantageux à  l'état  de  Pologne,  il  fut 
condamné  avec  quelques  autres ,  comme 
perturbateur  du  repos  public.  Il  eut  la 
tète  tranchée  à  Kœnisberg  en  1 566.  On  a 
de  lui  ime  Chronique  depuis  Adam  jus- 
qu'à 1560,  Wittemberg,  1570,  in-fol, , 
et  quelques  autres  ouvrages  auxquels  son 
supplice  donna  de  la  célébrité  autrefois , 
mais  qui  n'en  ont  plus  aucune  aujour- 
d'hui. 

FURETIÈRE  (Antoine),  parisien, 
abbé  de  Chalivoi ,  de  l'académie  fran  - 
çaise,  fut  exclu  de  cette  compagnie  en 
1685.  L'académie  l'accusait  d'avoir  pro- 
fité de  sou  travail  pour  composer  le  dic- 
tionnaire français  qui  porte  son  nom.  Il 
se  justifia  dans  des  factums  ;  mais  il  ajou- 
ta aux  raisons  des  injures  contre  plu- 
sieurs académiciens  ,  à  la  vérité  écrites 
avec  esprit ,  mais  qui  n'en  étaient  pas 
moins  des  injures.  On  prétend  qu'il  cher- 
cha à  se  raccommoder  avec  eux  avant  sa 
mort,  arrivée  en  1688,  à  68  ans.  Son 
Dictionnaire  ne  vit  le  jour  que  deux  ans 
après,  en  1690  ,  2  vol.  in-fol.,  ou  3  vol. 
in-4.  Basnage  de  Beauval  le  retoucha  , 
l'augmenta,  et  en  publia  une  édition 
))eaucoup  meilleure  que  la  première,  en 
1701  ,  3  vol.  in-folio,  réimprimée  à  Ams- 
terdam ,  1725,  4  vol.  in-folio.  On  a  dit 
que  ce  dictionnaire  avait  donné  naissance 
à  celui  de  Trévoux ,  dont  la  dernière  édi- 
tion est  de  1771,  8  vol.  in-fol.  Si  cela 
est,  il  faut  convenir  que  les  imitateurs 
ont  tellement  perfectionné  l'ouvrage , 
qu'on  n'y  reconnaît  plus  le  premier  ar- 
chitecte. Furetière  s'était  fait  connaître 
par  d'autres  ouvrages:  1°  V&t  cin({  satires 
en  vers,  in-12,  et  Ac?,  paraboles  évan- 
(je'Uques ,  aussi  en  vers ,  1672,  in- 1 2  ;  les 
unes  et  les  autres  sont  écrites  faiblement. 
2"  Par  son  Roman  bourgeois,  satire  mo- 
rale et  un  peu  trop  personnelle  ,  qui  eut 
beaucoup  de  cours  dans  .son  temps.  3"  Par 
une  Relation  des  troubles  arrivés  au 
royaume  d^ Eloquence ,  in-1 2  ,  allégorie 
forcée.  4"  Un  Recueil  de  poésies .  5°  Voya^ 
(je  de  Mercure.  On  publia ,  après  sa  mort, 
un  Furetcriana ,  recueil  où  il  y  a  bien  des 
choses  qui  lui  sontabsolument étrangères. 


I 


FUR 

*  FURGAULT  (  Nicolas  ) ,  professeur 
à  l'université  de  Paris ,  né  en  170G  à  St.- 
Urbain  près  de  Joinville ,  diocèse  de 
Châlons- sur -Marne,  fit  ses  éludes  avec 
distinction  au  collège  de  Troyes,  s'adonna 
particulièrement  aux  langues  latine  et 
grecque  dans  lesquelles  il  vint  se  perfec- 
tionner à  Paris,  et  fut  appelé  ensuite 
dans  l'université  où  il  professa  d'abord 
la  sixième ,  puis  la  septième  au  collège 
Mazarin.  Personne  n'eut  plus  que  lui  le 
talent  de  l'enseignement  de  la  grammaire 
et  des  humanités  ;  il  se  fit  remarquer  sur- 
tout par  la  patience  et  l'aménité  de  son 
caractère  :  aussi  fut-il  toujours  chéri  par 
tous  ses  élèves  ,  qui  voyaient  plutôt  en  lui 
un  ami  qu'un  maître.  Son  zèle  pour  la 
jeunesse  le  porta  à  composer  un  grand 
nombre  d'ouvrages  qui  sont  tous  destinés 
à  son  instruction.  Il  a  publié  1°  un  Nou- 
vel abrégé  de  la  Grammaire  grecque  , 
Paris,  1746,  in-8  ,  ouvrage  élémentaire 
qui  fut  tellement  goûté  par  l'ancienne 
université  qu'elle  en  fit  un  usage  constant 
jusqu'au  moment  de  sa  suppression  ;  on 
en  a  fait  depuis  plusieurs  réimpressions 
parmi  lesquelles  nous  remarquons  les 
éditions  de  »I.  Jeannet ,  Paris,  1813  et 
1816,  in-8.  2"  Abrégé  de  la  quantité  ou 
mesure  des  syllabes  latines,  Paris,  17 40, 
in-8  ;  cet  ouvrage  était  à  sa  neuvième 
édition  en  1 8 1 3  ;  3°  Dictionnaire  d^ anti- 
quités gi'ecqucs  et  romaines,  Paris,  1768 
et  1786,  petit  in-8;  Z"  édition,  1809; 
in-8.  4°  Dictionnaire  géographique  his- 
torique et  mythologique  portatif,  Paris  , 
1776,  petit  in-8;  5"  Les  principaux 
idiotisme  s  grecs  avec  les  ellipse  t  qu'ils 
renferment,  Paris,  1780  ,  1784  et  1789, 
in-8  ;  cet  ouvrage  fait  suite  à  la  gram- 
maire grecque.  6°  Les  ellipses  de  la  lan- 
gue latine ,  précédés  d'une  courte  ana- 
lyse des  différens  mots  appelés  parties 
d'oraison,  Paris,  1780,  in-l2.  Tous  ces 
ouvrages  annoncent  les  grandes  connais- 
sances élémentaires  de  Furgault ,  et  , 
quand  bien  même  d'autres  ouvrages  du 
même  genre  ont  été  publiés  depuis  ,  on 
peut  assurer  qu'ils  n'ont  point  détruit  la 
réputation  que  mérite  à  tout  égard  le  sa- 
vant grammairien  dont  nous  retraçons 
brièvement  la  vie,  et  dont  le  souvenir  sera 


PUR  535 

long-temps  gardé  par  tous  les  amis  des 
bonnes  études.  Furgault  avait  été  nommé 
professeur  émérite  de  l'université  ;  il 
jouissait  en  paix  de  ce  titre  modeste ,  lors- 
que la  révolution  le  força  de  quitter  Paris. 
11  se  retira  dans  son  lieu  natal  où  il  mou- 
rut le  21  décembre  1795.  Il  avait  pris 
l'habitude  de  se  faire  lire  quelques  mor- 
ceaux de  Sénèque  après  son  dîner ,  par 
une  de  ses  nièces  qui  habitait  avec  lui  ; 
et ,  c'est  pendant  luie  de  ces  lectures  sur 
la  brièveté  de  la  vie ,  qu'un  jour  celle-ci 
le  croyant  endormi,  s'aperçut  bientôt 
après  qu'il  avait  cesse  de  vivre. 

FDRGOLE  (Jean-Baptiste),  avocat 
au  parlement  de  Toulouse ,  né  en  1690  à 
Castel-Ferrus ,  dans  le  bas  Armagnac,  joi- 
gnit à  la  science  la  plus  profonde  des  lois 
de  la  jurisprudence  française,  des  usa- 
ges ,  des  coutumes ,  la  connaissance  de 
cette  partie  de  l'histoire  ,  qui  est  relative 
à  la  législation  de  tous  les  temps  et  de 
tous  les  pays.  Le  chancelier  d'Aguesseau, 
qui  l'estimait  beaucoup  ,  l'encouragea  à 
entreprendre  un  Commentaire  sur  Vor- 
donnance  concernant  les  donations  ,  du 
mois  de  février  1731,.  Cet  ouvrage  ,  im- 
primé d'abord  à  Toulouse  en  un  seul  vol. 
in-4  ,  a  été  réimprimé  en  2  ,  en  1761. 
Après  avoir  publié  cet  ouvrage,  il  com- 
mença son  Traité  des  curés  primitifs, 
etc ;  un  vol.  in-4,  1736,  dont  l'édition 
est  épuisée  depuis  long-temps.  Il  se  rendit 
à  Paris  pour  présenter  lui-même  son 
Traité  des  Testamens  et  autres  dispo- 
sitions de  dernière  volonté.  Le  chance- 
lier parcourut  cet  ouvrage ,  et  donna  de 
justes  éloges  à  l'auteur.  Il  parut  en  4  vol. 
in-4  ,  1745-48  ,  et  tous  les  exemplaires  se 
trouvèrent  enlevés  à  mesure  que  chaque 
volume  vit  le  jour.  La  nouvelle  édition  , 
imprimée  à  Paris  en  1779,  quoiqu'en  3 
vol. ,  est  beaucoup  plus  complète.  Il  se 
préparait  à  faire  imprimer  son  Commen- 
taire sur  V  ordonnance  des  substitutions , 
lorsque  le  roi  lenomniacapitoulen  1745. 
Les  occupations  de  cette  charge  l'empê- 
chèrent de  finir  l'édition  de  cet  ouvrage, 
qui  n'a  été  publié  qu'en  17G7  ,  par  les 
soins  de  Poucet  de  la  Grave ,  en  1  vol. 
in-4.  Il  travailla,  en  attendant,  à  son 
Traité  de  la  seigneurie  féodale  univer- 


536  PUR 

seUe ,  et  du  Franc-Aleu  naturel ,  qui  a 
paru  à  la  même  époque,  in-12.  On  a  réim- 
primé ses  OEuvves  complètes,  Paris, 
1776  et  1776 ,  8  vol.  in-8.  Cette  édition 
est  moins  estimée  que  rin-4.  Ce  savant 
jurisconsulte  est  mort  en  mai  1761. 

FURIUS-BIBACULUS  (Marcus),  de 
Crémone,  poète  latin  vers  l'an  103  avant 
J.  C. ,  écrivit  des  Annales  en  vers ,  dont 
Macrobe  rapporte  quelques  fragmens ,  et 
qui  ne  donnent  pas  une  grande  idée  de 
ses  talens.  C'est  de  \và  que  parle  Horace 
dans  ce  vers  : 

Furiuni  hibernas  cana  nÏTe    conspuit    Alpes. 

FURST  (  Walter  ) ,  Fursius ,  suisse 
du  canton  d'Uri ,  fut  un  des  fondateurs 
de  la  liberté  helvétique.  Il  se  joignit  en 
1307  à  plusieurs  de  ses  compatriotes  ani- 
més du  désir  de  secouer  le  joug  d'Albert 
d'Autriche.  Furst  travailla  ,  de  concert 
avec  ses  compagnons  ,  à  s'emparer  de 
toutes  les  citadelles  bâties  pour  les  con- 
tenir. On  les  démolit,  et  ce  fut  le  pre- 
mier signal  de  la  liberté.  Voyez  Tell  et 
Melchtal. 

FURSTEMBERG  (Guillaume  de), 
issu  d'une  des  plus  illustres  maisons  d'Al- 
lemagne ,  grand-maître  de  l'ordre  de  Li- 
vonie ,  ou  des  Porte-Glaives,  défendit 
cette  province  contre  les  armes  des  Mos- 
covites; moins  heureux  en  1560,  il  fut 
fait  prisonnier,  et  on  l'emmena  en 
Moscovie  ,  où  il  mourut. 

FURSTEMBERG  (Ferdinand  de), 
évêque  dePaderborn,  puis  de  Munster,  né 
àBilstein,  en  1626 ,  fut  lepère  de  son  peu- 
ple et  le  Mécène  des  hommes  de  lettres. 
On  lui  est  redevable  de  plusieurs  monu- 
mens  de  l'antiquité ,  qui  étaient  dans  son 
diocèse  de  Paderborn.  Il  les  fit  renouveler 
à  grands  frais,  les  embellit  de  plusieurs 
in.scriptions ,  et  eu  publia  de  savantes 
descriptions  dans  ses  Moniime.nta  Pa- 
derbornensia ,  Amsterdam,  1G72,  et 
Francfort,  1713,  in-4  :  collection  utile  et 
curieuse.  On  lui  doit  encore  des  poésies 
latines,  imprimées  au  Louvre  en  1684, 
in-folio  ,  et  dignes  de  cet  honneur ,  par 
la  pureté  du  stile  et  la  noblesse  des  pen- 
sées. L'auteur  ne  vit  point  cette  magnifi- 
que édition ,  étant  mort  le  6  juin  de  l'an- 
née précédente. 


FUR 

FURSTEMBERG  (François  Egon, 
prince  de  ) ,  fils  d'Egon ,  comte  de  Furs- 
temberg,  naquit  en  1626.  Il  fut  grand- 
doyen  et  grand-prévôt  de  Cologne ,  et 
l'un  des  principaux  ministres  de  l'élec- 
teur de  cette  ville.  Ayant  été  élu  évêque 
de  Strasbourg  en  1^65 ,  il  conçut  le  des- 
sein d'y  voir  rétablir  la  religion  catholi- 
que, et  s'attacha  à  la  France,  qui  s'em- 
para de  cette  ville  en  1681.  Il  mourut 
à  Cologne,  le  1"  avril  de  l'année  sui- 
vante. 

FURSTEMBERG  (  Guillaume  Egon  , 
prince  de  ) ,  frère  du  précédent ,  lui  suc- 
céda dans  son  évêché.  Il  s'attacha  aussi 
à  la  France ,  devint  cardinal  et  abbé  de 
Saint-Germain-des-Prés  à  Paris,  où  il 
mourut  le  10  avril  1704,danssa75^année. 
Il  avait  été  postulé  de  1  i  voix  pour  l'évè- 
ché  de  Cologne  en  1088  ;  mais  le  prince 
Clément  de  Bavière  l'emporta  sur  lui , 
après  un  procès  vivement  poussé  de  part 
et  d'autre ,  et  décidé  par  Innocent  XI. 
Louis  XIV  en  conçut  un  chagrin  très  vif, 
et  ce  ne  fut  pas  la  moindre  cause  qui 
décida  la  guerre  de  1688,  terminée  par 
la  paix  de  Ryswick  en  1697.  Ce  cardinal 
était  un  homme  instruit ,  et  doué  de  qua- 
lités très  estimables. 

FURSY.  Voyez  Foillan. 
FUSCHIUS  ou  FuscH  (Léonard),  ap- 
pelé VEginète  d'Allemagne ,  naquit  à 
>Yembdingen,  en  Bavière,  l'an  1501.  Il 
professa  et  exerça  la  médecine  avec  beau- 
coup de  réputation  à  Munich  ,  à  Ingols- 
tadt ,  etc.  L'empereur  Charles-Quint  l'a- 
noblit, et  Cosme,  duc  de  Toscane,  lui 
offrit  600  écus  d'appointemens  pour  l'at- 
tirer dans  ses  états.  Il  s'attacha  surtout  à 
la  partie  la  plus  essentielle  de  la  méde- 
cine, à  la  botanique.  Son  exemple  et  ses 
leçons  la  firent  renaître  en  Allemagne , 
et  excitèrent  l'émulation  en  France  et  en 
Italie.  Parmi  le  grand  nombre  d'ouvrages 
qu'on  a  de  lui,  on  ne  citera  que  son Bis- 
tnria  Stirpium,  le  meilleur  de  tous, 
Bâie,  1542,  in-fol.  Il  mourut  en  1566  à 
Tubingcn,  âgé  de  65  ans.  —  Il  ne  faut 
pas  le  confondre  avecRemacle  Fuscnius, 
de  la  ville  de  Limbourg,  médecin,  mort 
chanoine  de  Saint-Paul  à  Liège  en  1587  , 
et  qui  a  aussi  donné  une  Histoire  des 


FUS 

plantes  y  Anyers,  1544  ,  et  Vies  des  mé- 
decins,  Paris,  1542. 

*  FUSELIER.  Voyez  Fuzelier. 
FUSI  (Antoine) ,  docteur  de  Sorbon- 

ne ,  et  curé  de  Saint-Barthélemi  et  de 
Saint-Leu  son  annexe ,  fut  privé  de  ses 
bénéfices  par  seûtence  de  l'officialité, 
rendue  sur  des  accusations  de  magie.  La 
sentence  ayant  été  confirmée  par  la  pri- 
matie,  il  se  retira  à  Genève  en  1619  ,  s'y 
maria ,  et  y  mourut.  11  a  publié  sous  le 
nom  de  Juvain  Solonicque,  une  satire 
contre  Vivian  ,  maître  des  comptes,  mar- 
guillier  de  Saint-Leu ,  intitulée  Le  Mas- 
tigophore  ,  1609,  in-8  ;  et  depuis  sa  re- 
traite à  Genève ,  il  a  donné  Le  franc-ar- 
cher de  la  véritable  Eglise ,  1619  ,  in-8. 
Il  eût  un  fils  digne  de  lui ,  qui  se  fit  ma- 
hométan  à  Constantinople,  pour  décliner 
la  juridiction  de  l'ambassadeur  de  France, 
qui  devait  le  juger  pour  un  crime  qu'il 
avait  commis. 

*  FUSS  (Nicolas)  naquit  en  1754  à 
Bâle  d'où  il  partit  à  l'âge  de  1 8  ans  pour 
St.-Pétersbourg ,  après  avoir   reçu   une 
éducation  très  distinguée.  Ce  fut  son  maî- 
tre Daniel  Bernouilli  qui  lui  fit  faire  ce 
voyage  dans  le  but  d'aller  servir  d'adjoint 
au  célèbre  Euler  qui  était  aveugle.  Fuss 
séjourna  long-temps  dans  la  maison  de  ce 
savant.  Associé  de  bonne  heure  à  l'aca- 
démie des  Sciences  de  St.-Pétersbourg 
(  1776  ) ,  il  en  devint  membre  en  1783  , 
puis  secrétaire  en  1 800  :  son  zèle  et  sa 
science  furent  très  utiles  à  celte  société 
qu'il  dirigea  pendant  long-temps.  L'em- 
pereur Alexandre  le  nomma  en  1 802  mem- 
bre d'une  commission  chargée  de  faire 
des  statuts  pour  l'académie  ,  les  univer- 
sités et  les  écoles  de  l'empire.  Il  le  choi- 
sit aussi  plus  tard  pour  la  direction  gé- 
nérale des  écoles  que  l'on  venait  d'orga- 
niser. On  peut  dire  que  Fuss  rendit  de 
très  grands  services  à  l'instruction  publi- 
que en  Russie.  Il  avait  été  nommé  con- 
seiller   d'état   et   chevalier    des   ordres 
de  St.-Wladimir.   Il    faisait  partie  d'un 
grand  nombre  de  sociétés  savantes.  Il  est 
mortle23  décembre  1825.0nluidoitplu- 
ivRvxs,  Mémoires  importans  sur  les  mathé- 
matiques pures  ou  appliquées  :  quelques- 
uns  ont  été  traduits  en  plusieurs  langues. 

V. 


-      FUS  ^^ 

FUST  ou  Faust  (Jean),  orfèvre  de 
Mayence ,  fut  un  des  trois  artistes  qu'on 
associe  ordinairement  pour  l'invention 
de  l'imprimerie;  les  deux  autres  sont 
Guttemberg  et  Schœffer.  11  paraît  qu'on 
lui  doit  particulièrement  les  caractères 
sculptés  mobiles  ;  car  il  est  vraisemblable 
que  Guttemberg  a  imprimé  avant  lui ,  ou 
vers  le  même  temps  que   lui ,   sur  des 
planches  gravées.  A  l'égard  de  Schœffer, 
qui  était  écrivain  de  profession  ,  et  devint 
depuis  gendre  de  Faust,  on  ne  peut  lui  dis- 
puter la  gloire  d'avoir  imaginé  les  poin- 
çons et  les    matrices ,  à  l'aide  desquels 
cet  art  admirable  fut  porté  à  sa  perfec- 
tion. Le  premier  fruit  de  ce  nouveau  pro- 
cédé, qui  constitue  l'origine  du  vérita- 
ble art  typographique,  fut  le  Durandt 
rationaledivinorum  officiorum,  que  Faust 
et  Schœffer  publièrent  en  1459,  et  qui 
fut  suivi  l'année  d'après  fdu  Catholicon 
Joannis  Januensis.  Parut  ensuite  la  Bible. 
de  1462,  si  recherchée  des  amateurs  de 
raretés  typographiques.  Ces  trois  ouvra- 
ges avaient  été  précédés  de  deux  éditions 
du  Psautier  parles  mêmes  artistes,  la  pre- 
mière en  1457  ,  et  la  2*  en  1459;  mais 
exécutées,  au  jugement  de  quelques  sa- 
vans ,  l'une  et  l'autre  avec  des  caractères 
en  bois  sculptés,  quoique  d'autres  pré- 
tendent qu'elles  sont  imprimées  avec  des 
caractères  en  fonte ,  excepté  les  capitales. 
Ces  deux  éditions  du  Psautier ,  excessive- 
ment rares,  sont  des  chefs-d'œuvre  de  ty- 
pographie, qui  étonnent  les  gens  de  l'art, 
tant  par  la  hardiesse,  la  propreté  et  la  pré- 
cision avec  laquelle  l'industrieux  Schœf- 
fer en  a  taillé  les  caractères ,  qui  imitent 
la  plus  belle  écriture  du  temps ,  que  par 
la  beauté  et  l'élégance  des  lettres  initia- 
les ,  imprimées  par  rentrées  de  trois  cou- 
leurs ,  bleu ,  rouge  et  pourpre ,  à  la  ma- 
nière des  camaïeux,  et  par  la  justesse  et 
la  netteté  de   l|jpipression.  On  connaît 
cependant  des  livres  que  l'on  juge  plus  an- 
ciens que  ceux  que  nous  avons  cités,  quoi- 
que la  date ,  ni  le  nom  du  lieu  et  de  l'im- 
primeur n'y  soient  pas  marqués.  Tels  sont  : 
1"  une  Bible  de  la  bibliothèque  maza- 
rJne ,  imprimée  avec  des  caractères  en 
bois  mobiles,  en  2  vol.  in-fol.  2°Le  Spécu- 
lum vilcehumancef  en  58  planches.  3°  Une 
34.. 


538  FUS 

Histoire  de  l'ancien  et  du  nouveau  Testa- 
ment, représentée  en  40  figures,  gravées 
en  bois ,  avec  des  sentences  et  des  expli- 
cations latines  sculptées  sur  les  mêmes 
planches.  4°  L'Histoire  de  saint  Jean 
l'e'vangc'liste ,  de  même  en  48  planches. 
ô°  j4rs  moriendi ,  en  24  pages ,  impri- 
mées seulement  d'un  côté.  Chaque  page 
est  composée  d'une  estampe  en  bois,  qui 
représente  un  exemple  des  misères  de  la 
vie  humaine  avec  quelques  explications 
gravées  sur  la  même  planche.  Ce  livre  a 
été  vendu  1 000  liv.  à  la  vente  du  cabinet 
de  M.  Mariette,  en  177  5.  Ces  trois  der- 
niers livrets ,  qui  sont  in-folio  précèdent 
sûrement  l'impression  en  caractères  mo- 
biles, et  peuvent  remonter  jusqu'en  1440. 
La  Bible  doit  avoir  été  imprimée  entre 
1450  et  1455.  L'abbé  Ghesquière,  long- 
^mps  associé  aux  bollandistes ,  prétend 
qu'on  a  un  petit  livret  d'une  date  pour 
le  moins  aussi  ancienne,  imprimé  par  un 
Jean  Brito  de  Bruges  ;  mais  il  paraît  cer- 
tain que  cet  ouvrage  n'est  point  un  fruit  de 
la  typographie  ,  mais  un  manuscrit  exé- 
cuté avec  de  nouveavx  soins  et  une  mé- 
thode particulière,  quoique  l'inscription, 
prise  dans  un  sens  absolument  littéral , 
semble  dire  autre  chose  (voyez  le  Journ. 
histor.  du  l'^^août  1780,  pag.  514).  On  a 
écrit  et  répété  bien  des  fois ,  que  Fust , 
étant  venu  à  Paris  pour  y  vendre  une  par- 
tie de  son  édition  de  la  Bible  de  1 462 ,  et 
en  ayant  vendu  les  exemplaires  à  vil  prix, 
en  comparaison  de  ce  qu'on  payait  alors 
les  Bibles  manuscrites,  mais  à  des  prix 
fort  différens,  avait  été  poursuivi  en  jus- 
tice par  quelques  acheteurs  qui  se  plai- 
gnaient de  les  avoir  surpayés  ;  qu'ayant 
même  été  accusé  de  magie  à  cause  de  la 
parfaite  ressemblance  qu'on  avait  remar- 
quée entre  les  caractères,  il  avait  été  obli- 
gé de  s'enfuir.  Mais  s'il  est  vrai  que  Faust 
ait  vendu  à  Paris  des  exemplaires  d'une 


FUZ 

bible,  ce  ne  peut  être  de  celle  de  1462  , 
puisque  le  Psautier  imprimé  cinq  ans  au- 
paravant ,  absquc  calami  exaratione ,  ]ui 
ôtait  le  moyen  de  faire  des  dupes.  Quant 
à  l'accusation  de  magie ,  c'est  un  vieux 
conte  qui  doit  son  origine  à  l'histoire  du 
docteur  Faustus  ouFaust  (voyez  Faustus). 
L'on  ne  peut  douter  néanmoins  que  Faust 
n'ait  fait  plusieurs  voyages  à  Paris.  Il  y 
était  en  1 46G,  et  la  preuve  en  résulte  d'un 
exemplaire  des  Offl.ces  de  Cice'ron ,  pu- 
bliés cette  année  par  le  même  Faust  et 
Schœfifer,  son  gendre,  existant  dans  la 
bibliothèque  publique  de  Genève ,  à  la  fin 
duquel  le  premier  possesseur  de  ce  livre  a 
noté  de  sa  main ,  «  qu'il  lui  a  été  donné 
»  par  Jean  Faust ,  à  Paris,  au  mois  de  juil- 
»  let  l466.»OnpeutcroirequeFaustmou- 
rut  de  la  peste ,  qui ,  cette  même  année , 
enleva  40,000  habitans  à  la  capitale,  pen- 
dant les  mois  d'août  et  de  septembre ,  et 
d'autant  mieux  qu'on  ne  trouve  plus  que 
le  nom  de  Schœfifer  seul  dans  les  souscrip- 
tions des  livres  imprimés  postérieurement 
à  Mayence.   Voyez  Guttembkrg. 

*  FUZELIER  (  Louis) ,  parisien,  cul- 
tiva les  lettres  dès  son  enfance.  Il  fut  ré- 
dacteur du  Mercure ,  conjointement  avec 
La  Bruyère ,  depuis  le  mois  de  novembre 
1744  ,  jusqu'à  sa  mort  arrivée  le  19  sep- 
tembre 1752,  dans  la  80«  année  de  son 
âge.  Cet  auteur  travailla  seul  ou  en  société 
pour  tous  les  théâtres  de  Paris.  Parmi  ses 
pièces  on  en  compte  36  dont  une  seule  est 
passable,  c'est  Momus  fabuliste  :  l'auteur 
a  voulu  faire  une  critique  de  La  Fontaine. 
Laharpe,  dans  son  Cours  de  Littérature,  dit 
«  qu'il  affichait  des  prétentions  fort  mal 
»  placées  ;  et  qu'il  était  bien  le  plus  froid 
»  et  le  plus  plat  rimeur,  le  bel  esprit  le 
»  plus  glaçant  et  le  plus  glacé ,  qui  ail 
»  fait  chanter  à  l'opéra  des  fariboles 
»  dialoguées.  » 


FIN    DG  TOME    CINQUIEME. 


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Francaois  Xav 

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naire  historique 

8e 

éd.  -- 

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