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Full text of "Dictionnaire historique et géographique de la province de Bretagne"

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University  of  Ottawa 


http://www.archive.org/details/dictionnairehist04og 


AVIS 

Sur     le    Diciionnaire   Hijlorique   &     Géographique 
de   la    Province    de    Bretag^ne. 

\J  N  Ouvrage  aufîi  volumineux  que  le  Diftionnaire  de  Bretagne, 
un  Ouvrage  qui  embrafle  autant  d'objets ,  étoit  fufceptible  de  beau- 
coup d'erreurs  &  d'omiflions.  Il  étoit  ,  en  quelque  forte ,  impofîible 
de  ne  pas  oublier  des  faits  importants ,  des  remarques  utiles  ,  des 
réflexions  néceffaires  ;  on  ne  pouvoit  fçavoir  bien  des  chofes  qu'on 
ne  peut  apprendre  que  des  perfonnes  intérefTées  à  les  publier. 
L'Auteur  ell  fâché  de  ce  qu'on  lui  ait  envoyé  trop  tard  une  mul- 
titude d'anecdotes  intérelTantes ,  qui  auroient  pu  enrichir  fon  Livre  ; 
mais  ce  mal  ne  paroît  pas  irréparable  :  le  Supplément  qu'il  fe  pro- 
pofe  de  faire ,  corrigera  les  erreurs  nombreufes  dans  lefquelles  il 
avoue  fincérement  être  tombé,  malgré  l'attention  la  plus  fcrupu- 
leu  e  ,  &  réparera  les  oublis  &  les  omiflîons  effentiels  qu'il  n'étoit 
pas  en  fon  pouvoir  d'éviter.  Pour  parvenir  à  fatisfaire ,  par  ces  cor- 
reftions  indifpenfables ,  le  Public  ,&  la  Nation  à  laquelle  il  a  dédip 
fon  Ouvrage  j  il  invite  fes  lefteurs  &  les  perfonnes  éclairées  à  lui 
fournir  les  notes  néceffaires  ;  car  ,  pour  corriger  une  erreur ,  il  faut 
la  connoître.  L'Auteur  en  connoît  un  grand  nombre  :  mais  il  a  lieu 
de  croire  quun  plus  grand  nombre  encore  peut  lui  échapper. 
Cet  aveu,  qui  prouve  fa  franchife  ,  fa  bonne  volonté,  &  le  defir 
toujours  confiant  qu'il  a  de  fatisfaire  le  Public ,  doit  le  mettre  à 
l'abri  des  reproches  qu'il  pourroit  effuyer  dans  la  fuite.  On  fent 
qu'on  ne  feroit  pas  fondé  à  lui  ajouter  des  fautes  qu'on  auroit  pu 
lui  épargner,  en  les  lui  indiquant;  fur-tout,  fi  ces  objeftions  lui 
étoient  faites  par  des  perfonnes  intérefTées    à   relever  ces  fautes. 

Le  Supplément  contiendra  une  Table  générale  &  alphabétique 
de  toutes  les  villes  &  bourgs  de  la  Province  ;  &  à  chaque  article 
on  fera  les  obfervations  convenables  :  il  formera  un  Volume  z/z-^^, 
dont  on  retardera  Timpreffion  le  plus  qu'il  fera  pofTible ,  pour 
donner  la  facilité  à  ceux  qui  auront  des  remarques  à  faire ,  de  lui 
envoyer  leurs  notes,  qu'il  recevra  ^franches  de  port  ^  à  fon  adreffe, 
au  faux  bourg  de  Gigan  ^  à  Nantes^ 


DICTIONNAIRE 

« 

HISTORIQUE 

E  T 

GÉOGRAPHIQUE, 

DELA    P  ROVJKCE 

DE    B  R  E  T  A 'i|i^^  E  : 

DÉDIÉ  ^~:C^ 

A  LA  NATION  BRETONNE; 

Par  M,   O  GÉE^    Ingénieur-Géographe  de  cette  Province» 

TOME     QUATRIEME. 

'^ 

-^ 

2?^  nom  Imprimenc, 

Va  T  a  R  ,  fik  aîné ,  feul  Imprimeur  -  Libraire  ordinaire  du  Roi  ,  &  de  la  Chambre  à.^% 

Comptes  ,  à  Nantes  ,  place  du  Pilori, 


M.     D  C  C.     L  X  X  X. 

Avec    Approbation  &  Privilège   du    Roi, 


AVIS. 

Le  Public  ejl  averti  que  cette  Edition  ,  faite  fous  les  yeux  de 
r  Auteur ,  efl  la  feule  à  laquelle  on  doit  ajouter  foi  :  on  la  reconnoîtra. 
à  la  flgnature  &  au  paraphe  ci-dejfous^   ^        /*  ^ — \ 


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DICTIONNAIRE 

iï  /  5  r  O  il  /  Q  t/  £ 


E  T 


GÉOGRAPHIQUE 

DE    LA    PROVINCE 

DE    BRETAGNE. 


R 


ADENAC  ;  à  7  lieues  deux  tiers  au  Nard  de  Vaniies  ,  Ton 
Evêchéj  à  \6  lieues  &  demie  de  Rennes;  &  à  2  ligues  de  Jof- 
félin,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroifle ,  dont  la  Cuie  efl  à  l'al- 
ternative, reflbrtit  a  Ploermel ,  &  compte  950  communiants.  Son 
territoire ,  d'une  fuperficie  plane ,  offre  à  la  vue  des  terres  cul- 
tivées,  des  prairies,  des  arbres  à  fruits,  6^  des  landes.  En  1067, 
Maeng ,  Evêque  de  Vannes,  donna  aux  Moines  de  Sainte-CroiX 
de  Quimperlé ,  tout  ce  qui  dépendoit  de  fon  Evêché  dans  la  Pa- 
roifle  de  Radenac.  En  reconnoiffance  de  ce  don ,  ces  Religieux 
donnèrent  au  Prélat  un  cheval  &  foixante  fols ,  &  s'obligèrent  à 
lui  donner  un  repas  dans  l'année.  La  maifon  noble  de  Ker-ual'el 
appartenoit,  en  1430  ,  à  Jean  de  Lantivi, 


4  R  AN  =RED 

R ANNÉE  ;  fur  la  route  de  la  Guerche  à  Chateaubriand  ;  à  9 
lieues  à  l'Eft-Sud-E/l  de  Rennes ,  Ton  Evêché  ;  de  à  une  demi- 
lieue  de  la  Guerche  ,  fa  Subdélégation  &  f^  trêve.  Cette  Paroiffe 
compte ,  y  compris  ceux  de  la  Guerche  ,  3  600  communiants  : 
la  Cure  ell  à  l'alternative.  La  haute-Juftice  des  Régaires  appar- 
tient à  M.  l'Evêque  de  Rennes.  Le  territoire  eft  plat ,  fi  l'on  en 
excepte  un  vallon  coupé  par  la  petite  rivière  d'Ardenne  }  on 
y  voit  des  terres  bien  cultivées  ,  beaucoup  d'arbres  à  fruits ,  peu 
de  landes ,  le  bois  de  la  Haye  ,  Oc  partie  de  la  forêt  de  la 
Guerche. 

REDENÉ  ;  fur  une  hauteur  ;  à  1 2  lieues  à  l'Oueft-Nord-Ouefl 
de  Vannes,  fon  Evêché;  à  29  lieues  de  Rennes  j  &  à  3  heues  & 
demie  de  l'Orient ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  relevé  du 
Roi ,  reffortit  à  Hennebon ,  &  compte  2000  communiants,  y 
compris  ceux  de  Saint-David  ,  fa  trêve  :  la  Cure  ell  à  l'alter- 
native. Il  s'exerce  une  haute  -  Juftice  dans  l'endroit.  En  1 070  , 
Maeng ,  Evêque  de  Vannes ,  donna  aux  Religieux  de  Sainte- 
Croix  de  Quimperlé  les  dîmes  qu'il  poffédoit  dans  cette  Paroiffe, 
Le  territoire ,  coupé  de  ruiffeaux  qui  arrofent  des  prairies ,  offre 
à  la  vue  des  terres  bien  cultivées ,  quelques  landes ,  des  arbres 
à  fruits,  &  autres.  Les  maifons  nobles  qui  exiffoient  en  1440  à 
Redené  ,  étoient  :  le  manoir  de  Rofengrat  ouRofgrand,  à  Louis 
du  Tertre  j  la  Villeneuve  ,  à  Jean  le  Bourhic  ;  Limiziec  ,  à 
Charles  de  Keriec  -,  le  manoir  du  Pleffis ,  au  Sieur  de  Quirech  ; 
le  manoir  de  Prateufmonter  ,  à  Jean  de  Kerneau;  le  manoir 
de  Ker-doharn  ,  à  Jean  de  Renervenj  &  le  manoir  de  Benerven, 
à  Robin  le  Digouedet. 

REDON  j  ville  fermée  d'un  rempart ,  fur  la  rivière  de  Vilaine , 
par  les  4  degrés  2  5  minutes  de  longitude ,  &  par  les  47  degrés 
36  minutes  20  fécondes  de  latitude;  à  11  lieues  de  Vannes, 
f on  Evêché  ;  &  à  1 3  lieues  de  Rennes.  Cinq  grandes  routes 
aboutiffent  à  cette  ville ,  dans  laquelle  on  remarque  un  Gouver- 
nement de  place ,  une  Communauté  de  ville ,  qui  députe  aux 
Etats  de  la  province;  une  Subdéiégation,  une  Brigade  de  Ma- 
réchauffée  ,  une  Pofce  aux  lettres  ;  une  Paroiffe  ,  &  trois  Com- 
munautés ,  dont  on  parlera  fous  l'année  de  leur  fondation.  Le 
nombre  des  habitants  ell  de  2500.  Il  fe  tient  dans  l'endroit  fept 
foires  confidérables  par  chaque  année  ,  &  un  marché  tous  les 
lundis  de  chaque  femaine.  La  Châtellenie  de  Redon  appartient 


RED  j 

à  l'Abbé  de  Saint  -Sauveur ,  de  même  que  la  haute- Juflice  de 
Saim-Nicolas  i  la  haute-Juftice  de  la  Rouardais,  à  M.  du  Bot  de 
la  Grignonais  ;  la  moyenne-Jullice  de  Lenruax  ,  à  M.  Ofmond  ; 
&  la  moyenne-Juftice  de  Beaumoiit ,  à  M.  Mauduit  de  Ker- 
livio. 

L'hifloire  rapporte  que  ,  vers  Tan  833,  Convion,  homme  d'une 
naiffance  liiuftre  ,  &  Archidiacre  de  l'Églife  de  Vannes ,  dégoûté 
des  plaiiirs  du  monde  &  porté  d'inclination  à  la  retraite ,  fe  retira 
avec  quelques  Eccléfialliques  ,  admirateurs  de  l'on  zèle  &  de  fa 
vertu ,  dans  le  lieu  appelle  Rothonum ,  &  rélblut  d'y  bâtir  un 
Monailere.  Comme  il  étoit  fort  inquiet  du  lieu  où  il  devoit  placer 
fon  Oratoire ,  il  fe  mit  à  genoux  avec  fes  cogjpagnons  pour  de- 
mander les  lumières  du  Ciel.  Vers  la  troilien^e^çijre ,  ils  apperçu- 
rent  en  l'air  une  croix  éclatante,  qui  vint  fe'jjxç^ans  l'endroit 
où  eft  aujourd'hui  le  Monailere  de  Redon.  Je  ne  garantis  point 
le  merveilleux  de  ce  récit  \  on  fçait  affez  què"""c'étoit  l'ufage 
chez  nos  pères  d'uiventer  des  miracles ,  ou  de  prendre  pour  des  pro- 
diges des  effets  très-naturels  ,  que  l'ignorance  du  temps  faifoit  re- 
garder comme  des  événements  extraordinaires ,  interprètes  de  la 
volonté  du  Ciel.  Ce  qui  paroît  certain  ,  c'eil  que  le  Moriaftere 
bâti  par  Saint  Convion  ,  a  été  le  principe  de  l'exiftence  de  Redon, 
Nominoé  ,  qui  étoit  alors  Gouverneur  de  la  Bretagne  fous  Louis  le 
Débonnaire ,  attiré  par  la  réputation  de  Convion ,  alla  le  voir , 
&  conçut  tant  d'eflime  pour  lui  qu'il  lui  fit  des  donations  confîdé- 
rables.  Louis  le  Débonnaire ,  qui  vint  environ  dans  le  même 
temps  en  Bretagne,  ajouta  aux  conceffions  du  Gouverneur, 
&:  accorda  au  nouveau  Monaftere  la  poifeflion  de  la  Paroilfe  de 
Bains  dans  laquelle  il  étoit  fitué ,  l'endroit  appelle  Landegon  ou 
Langon  ,  &  plufieurs  autres  biens  dont  Nominoé  leur  confirma 
la  jouiffance  dans  la  fuite.  Nominoé,  fur  le  Trône  de  Bretagne, 
fuivit  en  tout  les  avis  de  Saint  Convion ,  qui  s'accordoient  très- 
bien  avec  fes  vues ,  &  fit  de  grands  changements  dans  la  Hié- 
rarchie eccléfîaftique  de  fon  Royaume.  (  Voyez  l'Abrégé  de 
l'Hiftoire  de  Bretagne,  page  Ixxxj  du  tome  I  de  ce  Di61ion- 
naire.  )  Ce  Prince ,  fatisfait  du  faint  Abbé ,  enrichit  confidéra- 
blement  fon  Monaflere ,  qui  devint  célèbre  dans  toute  l'Europe. 
Déjà  cette  Maifon  le  difputoit  en  richefTes  &  en  réputation  aux 
plus  fameufes  Abbayes ,  lorfqu'en  869 ,  les  Normands ,  qui  ne 
refpe6loient  rien ,  la  pillèrent  &  la  ruinèrent.  Ritcand  ,  qui  en 
étoit  Abbé,  eut  recours  au  Roi  Salomon,  &  lui  demanda  une 
retraite.  Le  Prince ,  touché  du  malheur  de  ces  Solitaires ,   leur 


é  RED 

donna  Ton  Palais  de  Plélm,  où  ils  féjournerent  quelque  temps, 
&  régla  que  les  Abbés  de  c.  t  e  Maifon  feroient  à  l'avenir  élus  par  le 
Chapitre  de  la  Communauté,  iuivant  la  Kcgle  de  Saint-Benoît. 
Quelques  années  après ,  ils  firent  bâiir  leur  Monallere  &  leur 
Egliie.  La  conftruftion  de  ces  deux  édifices  annonce  leur  ancien- 
neté :  ils  font  fitués  au  bord  de  la  rivière  de  Vilaine. 

Après  la  mort  de  l'Abbé  Mainard  ,en  1029  ,  dit  l'hirtoire ,  les 
Religieux  de  Redon  coniulterent  Dieu,  le  Duc,  leur  Evêque, 
&  les  Barons ,  fur  le  choix  d'un  autre  Pafleur.  11  fe  tint,  à  cette 
occafion ,  une  nombreufe  alTemblée  des  Eccléliartiques  &  des 
Grands  du  Duché  dans  cette  Abbaye.  Catuallon  ,  frère  du  Duc 
Alain  m ,  fut  élu.  Le  Prince  ,  ravi  de  ce  choix ,  donna ,  par  re- 
connoilTance ,  aux  Moines ,  l'ifle  de  Belle-îlle  &  plufieurs  autres 
biens.  L'Abbaye  de  Redon  avoit  encore  beaucoup  fouiïert  des 
incurfions  &  des  pillages  des  Normands  :  à  ces  maux  temporels , 
fe  joignoit  le  refTcntiment  d'avoir  lailîé  échapper  la  plupart  des 
droits  fpirituels;  l'Abbé  avoit  perdu  fon  droit  de  fupériorité  indé- 
pendante fur  {on  Abbaye.  Les  Moines  s'en  plaignirent  vivement 
à  Judicaël ,  Evêque  de  Vannes ,  &  le  fuppherent  d'accorder  à 
Catuallon  le  Préfulat ,  Prœfulatum  ,  &  l'Archidiaconat ,  Archidia- 
conatum ,  dont  fes  prédécefTeurs  jouiiToient  jadis  par  concellion 
&  du  confentement  des  Evêques  de  Vannes.  Le  Prélat  acquiefça 
à  leurs  demandes ,  & ,  par  reconnoilTance  ,  les  Rehgieux  s'obli- 
gèrent à  dire  fept  fois  l'Office  des  Morts  pour  l'Evêque  Judicaël 
&fesfucce(reurs  lorfqu'ils  viendroient  à  mourir,  àinfcnre  leur  nom 
fur  le  martyrologe ,  &  à  réciter  trois  fois  l'Office  des  Morts  pour  les 
Chanoines  de  la  Cathédrale.  Dans  la  fuite,  les  fucceffeurs  de 
Judicaël  refuferent  de  reconnoître  la  légitimité  des  droits  accordés 
à  l'Abbé  de  Redon  :  il  y  eut  des  conteilations  très-féncufes  à  ce 
fujetj  la  Cour  de  Rome  s'en  mêla;  enfin,  l'Evêque  Morvan  fe 
laiffa  vaincre  ,  &  confirma  cette  Abbaye  dans  la  jouifTance  des 
droits  concédés  par  fes  prédécefîéurs.  Cette  Maiibn  étoit  très- 
riche  dès  le  onzième  fiecle  ;  elle  faifoit  venir  d'Anjou  le  vin 
dont  elle  avoit  befoin.  On  trouve  une  lettre  de  1038  ,  adrefîee 
par  l'Abbé  Catuallon  à  Hildegarde  ,  ComtefTe  d'Anjou  ,  qu'il 
prie  de  protéger  un  de  fes  Moines  qui  va  acheter  du  vin  dans 
îbn  pays,  dans  la  crainte  que  la  méfintelligence  qui  regnoit  entre 
les  Princes  Bretons  &  Angevins  ne  lui  fît  éprouver  des  obftacles 
infurmontables. 

En  1069,  le  Pape  Alexandre  juge  une  conteftation  qui  s'étoit 
élevée  entre  les  Moines  de  Marmoutier  6c  de  Redon,  au  fujet 


RED  7 

de  l'Eglife  de  Baîrîac,  au  diocefe  de  Nantes.  On  ne  connoît 
point  aujourd'hui  d'Eglife  qui  porte  ce  nom  ;  on  croit  que  c'eft 
Sauit-Jean-de-3eré  à  Chateaubriand.  Les  Moines  de  Redon,  pré- 
voyant que  la  déciiion  du  Pape  ne  leur  feroit  pas  favorable, 
avoient  feint  de  vendre  cette  ÊgUfe.  Cette  rufe  ne  réuflit  pas: 
i'Abbé  de  Redon  fut  déclaré  excommunié  jufqu'à  ce  qu'il  eût 
reftitué  cette  Eglife. 

L'an  1116,  Alain  Fergent ,  Duc  de  Bretagne,  fe  fentant  at- 
taqué d'une  maladie  dangereul'e  ,  fe  retira  dans  l'Abbaye  de  Saint- 
Sauveur  Je  Redon ,  félon  la  coutume  du  temps ,  qui  ne  vouloit 
pas  qu'on  mourût  lans  le  froc  d'un  Moine.  Cette  coutume  géné- 
rale venoit  de  la  haute  idée  qu'on  avoit  de  la  fainteté  de  vie  des 
Religieux.  îorfqu'on  gucrifloit  de  fa  maladie,  on  rentroit  dans 
le  monde,  &  l'on  reprenoit  fes  occupations  civiles.  Alain, 
plus  fcrupuleux  ,  ou  peut-être  dégoûté  des  plaifirs  du  monde 
&  du  rang  fupréme  ,  plaifirs  qui  ne  font  jamais  fans  inquiétude , 
renonça  tout  de  bon  à  fon  Trône  ,  &  reila  dans  fon  Abbaye. 
A  fon  exemple,  Ermengarde,  fa  féconde  femme,  fe  fit  Reli- 
gieufe  dans  l'Ordre  de  Fontevrault ,  qu'elle  quitta  pour  entrer 
dans  celui  de  Cîteaux.  Alain  Fergent  mourut  dans  fon  Monaftere , 
&  y  fut  inhumé.  Tous  les  Evêques  &  les  grands  Seigneurs  af- 
filièrent à  fes  funérailles  ,  qui  fe'  firent  avec  une  pompe  funèbre  qui 
rappelloit  les  belles  aftions  &  la  gloire  d'un  Prince  qui  fe  montra 
toujours  digne  de  fon  rang. 

Sur  les  anciennes  vitres  de  l'Eglife  de  cette  Maifon ,  on  re- 
marque les  portraits  de  plufieurs  Ducs  &  DuchcfTes  de  Bretagne, 
&  de  quelques  Seigneurs  des  maifons  de  Rohan ,  de  Rieux,  de 
Rochefort ,  de  Chateaubriand  ,  &  de  Malcflroit.  Selon  toutes  les 
apparences,  ce  font  les  bienfaiteurs  de  cette  Communauté.  Cô 
fait  prouve  la  reconnoiffance  des  Religieux,  &  ne  peut  que  leur 
faire  honneur  5  il  ell  même  à  croire  que ,  plus  judicieux  que  plu- 
fieurs Chapitres  &  Communautés  de  la  province ,  ils  conferve- 
ront  ces  monuments  érigés  à  la  bienfaifance  ,  &  ne  détruiront 
pas  ces  relies  précieux  de  l'antiquité,  qui  font  le  fondement  le 
plus  fur  des  vérités  hillonques. 

1 1 26  ou  II 27.  Olivier  de  Pontchâteau  s'étoit  révolté  &  met- 
toit  tout  à  feu  &  à  fang  en  Bretagne.  Le  Duc  Conan  III  marcha 
contre  lui ,  le  pourfuivit ,  &  le  prefTa  fî  vivement  qu'il  le  força 
à  fe  cacher  dans  TEghfe  de  Saint-Sauveur  de  Redon  ,  qu'il 
fouilla  parles  plus  abominables  facrileges.  Après  le  fiege,  Hervé, 
Abbé   de   Redon  ,  pria  les  Evêques  de  réconcilier  fon  Eglife. 


8  RED 

Conan ,  qui  avoit  été    en  quelque  partie    caufe  de   ce  qu  elle 
avoir  été   fouillée,  fe  repentit  d'avoir  pouffé  les  rebelles  fi  loin, 
&  écrivit  au  Pape  pour    lui  demander   pardon,  &  le  prier   de 
rétablir   l'Eglife  de  Redon   dans  fon  ancien  état.  Hervé  ,    Abbé 
de  Redon ,  porteur  de  cette  lettre  ,  expofa  au  Pape  l'état  mal- 
heureux de  fon  Monaftere  &  les  torts  occafionnés  par  ce  fiege. 
Le  Saint-Pere  ,  indigné ,  ordonna  au  Légat  du  Saint-Siege  de  punir 
les  coupables  fuivant  les  Canons,  &  de  les  forcer  à  réparer  les 
dommages  caufés  par  eux  -,  il  permit  enfuite  à  l'Abbé  ^  d'appeller 
tous  les  Eccléiiaffiques  qu'il  voudroit  pour  la   réconciliation   de 
fon  Eglife.  Celui-ci  appella  l'Archevêque  de  Tours  &  les  Suffra- 
gants,  qui  fe  rendirent  au  mois  de  Novembre  à  Redon,  où,  en 
préfence  du  Duc  &  de  la  Ducheffe  Ermengarde ,  fa  mère  ,   ils 
confacrerent  le   principal   autel  ,    &  réconcilièrent    l'Eglife.  Les 
Seigneurs  Geoffroi  &  Alain  de  Porhoët ,  Payen  de  Malertroit, 
Guethenoc   de   Rieux ,  Savari    de    Donges ,    Garzire    de   Retz 
&  fon  fils  Arfcoid,  Guethenoc  d'Ancenis ,  Geoffroi  de  Chateau- 
briand ,  Haimon  de  la  Guerche ,  Raoul  de  Montfort ,  affifterent 
à   cette  cérémonie ,  avec   un  peuple  innombrable.  Les   Evêqucs 
s'affemblerent  enfuite  en  Concile  ;  mais  les  aftes  de  cette  affem- 
blée  ne  font  pas  venus  jufqu'à  nous.  Ce  Concile  eff  placé  fous 
l'année  1133   par  d'autres  hiftoriens ,  qui  difent  que  Hildebert, 
Archevêque  de  Tours ,  y  préfida  ,  &  que  Guegon  de  Blain   y 
donna  aux  Moines  de   Redon  quelques  domaines  qu'il  poffédoit 
dans  la  Paroiffe  de  Pierric.   Les  Moines  de  Redon,  à  l'exemple 
des  autres   Monafteres ,    qui  craignoient  toujours  que  des   mains 
profanes   n'envahiffent  leurs   biens,   fuppHerent  le  Pape  de    les 
prendre  fous  fa  proteftion  &  celle  du  Saint-Siège.   L'an  1147, 
le  Pape  leur  accorda  cette  faveur  lignalée ,  &  leur  écrivit  à  ce 
fujet.  La  lettre  du  Saint-Pere  porte  :  «  qu'à  la  mort  de  l'Abbé , 
5»  fon  fucceffeur  doit  être    élu  du  confentement    général    de    la 
»  Maifon,  &  que,  s'il  ne  fe  trouve  parmi  eux    perfonne  digne 
»  de  cette  place ,  ils  doivent  recourir  au  Souverain  Pontife ,  qui 
y>  leur   donnera  un  Abbé  de  fa  propre  main  j    que  les  Moines 
»  nommés  pour   deffervir    les  Cures ,    doivent   être   préfentés   à 
M  l'Evêque  diocéfain ,    afin  que ,  fi  le  Prélat  les  juge  incapables 
»  de  cet  emploi ,  il  les  éloigne  du  miniftere  ;   que   ces    Moines- 
M  Curés  font    tenus  de   rendre   compte  au    Prélat  du  gouverne- 
»>  ment  fpirituel  ,  &  aux  Moines  des  revenus  temporels  de  leur 
»  Paroiffe ,  &  qu'ils  doivent  prendre  les  Saintes-Huiles  de  la  main 
v>  des  Evêques ,  pourvu  qu'ils  ne  foient  pas  excommuniés  ,  ou 

»  qu'ils 


RED  9 

*  qu'ils  ne  fafTent  pas  difficulté  de  les  accorder;  car  ,  en  ce 
»  cas  ,  il  leur  eft  r  srmis  d'en  demander    aux  Evêques  voifms.  » 

La  place  de  Sén-chal  à  Redon  étoit  occupée,  l'an  11(^7,  par 
Guillaume  Lanvallei.  Les  Moines  de  Quimperlé  donnèrent .  Tan 
1172,  l'Eglife  de  Notre-Dame  de  Nantes  à  l'Abbaye  de  :>ajit- 
Sauveur  de  Redon  ,  qui  la  garda  plus  de  quatre  cents  ans. 
(  Voyez  Nantes.  ) 

1208.  L'Evêque  de  Vannes  &  l'Abbé  de  Redon  étoient  depuis 
long-temps  en  conteftation.  Le  premier  prétend  oit  la  fupériorité 
fur  le  fécond;  &  celui-ci  foutenoit  fon  indépendance  de  tout 
autre  que  du  Pape.  Après  plufieurs  traités  &  tranfaftions ,  tou- 
jours inutiles,  les  parties  convinrent  de  s'en  rapporter  à  la  dé- 
cifion  des  Evêques  de  Nantes  &  de  Saint-Brieuc  ,  &  jurèrent 
d'exécuter  le  jugement  qu'ils  prononceroient.  Les  Juges,  après 
un  mûr  examen  ,  reconnurent  que  l'Abbé  de  Redon  étoit  in- 
dépendant de  la  Jurifdiftion  du  Prélat  ;  mais  que  les  Eglifes 
polTédées  &  deffervies  par  les  Religieux  du  Monaftere  ,  telles  que 
Bains,  Langon ,  Brains,  les  deux  ParoifTes  de  Redon  ,  dédiées  à 
Saint-Pierre  &  à  Notre-Dame  ,  (  aujourd'hui  il  n'y  en  a  qu'une,) 
&  Saint-Gozual ,  dévoient  reconnoître  l'autorité  de  l'Evêque , 
qui  ,  cependant  ,  à  caufe  de  la  petitefTe  de  ces  Eglifes ,  ne 
pouvoit  prendre  que  quatre  procurations ,  quoiqu'elles  fuffent 
au   nombre  de    fîx.   Le    Pape   confirma    cette    fentence  ,    Tan 

Ï2I0. 

L'an  1227,  la  NoblefTe  de  Bretagne  s'aflembla  à  Redon, 
pour  prendre  des  mefures  contre  le  Clergé.  Elle  avoir  à  fa  tête 
le  Duc  Pierre  de  Dreux.  Dans  ce  temps,  la  majeure  partie  du 
territoire  de  Redon  &  des  environs  étoit  plantée  en  vignes ,  qui 
y  font  aujourd'hui  très -rares.  Les  conteftations  , ci-devant  alTou- 
pies  entre  les  Evêques  &  les  Abbés  de  Redon ,  s'étoient  renou- 
veliées  en  1237.  Ils  convinrent  de  prendre  un  intervalle  de 
quinze  ans  pour  difcuter  leurs  droits  refpeftifs  :  on  ne  fçait  point 
la  fuite  de  cette  affaire. 

L'Abbaye  de  Redon  étoit  prefque  déferte  en  1253  ,  dit  l'auteur 
de  l'Hiftoire  de  Bretagne  ,  par  les  mauvais  traitements  que 
Pierre  de  Dreux  fit  elTuyer  au  Clergé  de  fou  Duché.  Cette 
Maifon  enfin  rétablie  dans  fa  première  tranquillité  ,  les  Moines 
fugitifs  retournèrent  en  leur  Couvent  ,  qu'ils  trouvèrent  en  (î 
Tiiduvais  état  qu'il  leur  fallut  le  rebâtir,  il  ne  leur  en  coûta  pas 
beaucoup  :  les  aumônes  oC  les  bienfaits  des  Fidèles  contribue- 
tent  en  partie  à  cette  dépenfe.  Une  Dame  que  l'hiftoire 
Tome  IF.  B 


lo  RED 

nomme   la   Comtejfe  Agnès ,   leur   fit   préfent    du   Crucifix   que 
Ton   voit  encore    au    (grand   autel    de    leur   Eglife. 

Jean  de  Tréal ,  ABbé  de  Redon  ,  qui  fuivoit  le  parti  de 
Charles  de  Blois  dans  la  fameufe  guerre  pour  la  fucceffion  à 
la  Couronne  de  Bretagne  ,  fut  fait  prifonnier ,  &  ne  recouvra  fa 
liberté  qu'en  payant  une  rançon  confidérable.  Il  eut  la  douleur  de 
voir  tous  fes  domaines  expofés  au  pillage  de  l'ennemi  j  &  la 
vilk  de  Redon  auroit  fans  doute  éprouvé  le  même  fort ,  fi  cet 
Abbé  n'eût  pris  la  précaution  de  l'entourer  de  bonnes  murailles. 
De  cette  manière,  il  fçut  la  défendre  &  la  conferver  jufqu'à  la 
bataille  d'Aurai.  Charles  ayant  perdu  la  vie  dans  ce  combat, 
en  1 3  64  ,  l'Abbé  de  Redon  fongea  à  faire  fa  paix  avec  le 
Comte  vainqueur.  Il  n'attendit  pas  qu'il  fe  préfentât  devant  fes 
murailles  -,  il  alla  le  trouver  ,  accompagné  des  principaux  habi- 
tants de  la  ville ,  &  conclut  avec  lui  un  traité  qui  portoit  : 
«  que  l'Abbaye  &  la  ville  de  Redon  feroient  confervées  dans 
»  la  pofTeffion  de  tous  leurs  droits  ,  &  que  l'Abbé  jouiroit  du 
»  privilège  de  nommer  le  Capitaine  ;  »  privilège  qui  a  fubfillé 
jufqu'à  l'étabhfiement  des  Commendes. 

L'an  1422  ,  le  Duc  Jean  V  établit  à  Redon  un  Hôtel  des 
Monnoies.  L'Abbé  de  Saint-Sauveur ,  regardant  cet  étabUffement 
comme  préjudiciable  à  fes  droits ,  s'en  plaignit  au  Duc ,  qui 
eut  la  bonté  de  l'afTurer  qu'il  n'avoit  eu  aucun  deiTein  de  lui 
faire  tort  ,  puifqu'il  n'avoit  violé  aucuns  des  privilèges  de  fon 
Abbaye  5  mais  que ,  fi  les  Monétaires  faifoient  quelques  fautes , 
il  lui  donnoit toute  permiffion  de  les  punir,  malgré  leur  privilège: 
il  ajouta  que  cette  fabrique  de  monnoie  ne  fubfifi:eroit  à  Redon 
que  pendant  deux   ans,  qu'ainfi  il  pouvoit  être  tranquille. 

Le  Roi  Charles  VII ,  étant  à  Nantes  le  12  Juillet  1425, 
accorda  aux  Moines  de  l'Abbaye  de  Redon  le  droit  de  quin- 
taine  fur  les  nouveaux  mariés.  Les  Officiers  de  la  Jurifdiftion , 
en  robes  ^  à  la  tête  des  Moines  ,  font  préfents  à  cette  cérémo- 
nie bizarre. 

L'an  1429  ,  Guillaume  Chefnel,  Abbé  de  Redon,  fit  com- 
mencer la  conrtruftion ,  en  pierres ,  des  ponts  &  chaufîees  de 
Saint-Nicolas ,  qui  auparavant  étoient  en  bois.  Il  obtint ,  pour  le 
dédommager  de  cette  dépenfe ,  la  permiffion  de  lever  des  droits 
fur  les  denrées  qui  entroient  dans  la  ville.  Yves  le  Sénéchal, 
fils  d'Even  ,  Seigneur  de  Carcado  ,  fuccefieur  de  Guillaume 
Chefiiel ,  fit  achever  ce  pont ,  que  la  mort  de  fon  prédécefieur 
avoit  laifie  imparfait.  On  ne  connoît  pas  l'époque  de  la  fonda- 


RED  II 

don  de  THôpital  de  Redon  ;  tout  ce  qu'on  fçair  de  plus  ancien 
fur  cette  maifon,  c'eft  qu'en  1439,  Louis,  Député  du  Concile 
de  Bafle ,  en  Bretagne ,  permit  de  bânr  une  Chapelle  èc  un  au- 
tel pour  la  commodité  &  fatisfaftion  des  malades  qu'on  rece- 
voit  dans   cet  Hôpital. 

En  1449  ,  le  Duc  François  I  obtint  du  Pape  l'éreftion  de 
l'Abbaye  de  Redon  en  Evêché.  Il  devoit  erre  compofé  des  Pa- 
roilFes  qui  dépen(;loient  immédiatement  de  l'Abbaye  &  de  quel- 
ques autres  détachées  des  Evêchés  de  Rennes  ôc  de  Saint-Malo. 
L'Evêque  de  Saint-Brieuc  fut  chargé  de  l'exécution  de  la  Bulle  ; 
mais  les  Prélats  intéreffés  s'y  oppoferent  fortement  ,  &  la  mort  du 
Duc  fit  échouer  ce  projet ,  auquel  on  ne  penlàplus  dans  la  fuite. 

En  1453,  le  Pape  Nicolas  V  chargea  l'Abbé  de  Saint-Sauveur 
de  Redon  d'ordonner ,  de  fa  part.,  aux  Evéques  de  Bretagne , 
de  refferrer  &  même  diminuer  les  afyles.  Ces  lieux-,  dans  lef- 
quels  la  Jullice  ne  pouvoir  exercer  aucune  Jufifdi^bion ,  étoient 
très-multipliés  en  Bretagne  ;  toutes  les  Egtifes  jouiiroient  de  ce 
privilège  :  on  regardoit  aufii  comme  afyles  inviolables  les  endroits 
célèbres  par  la  demeure  de  quelques  Saints ,  &  plufieurs  autres 
cantons,   comme,  par  exemple,  la  ville  de  Sa.int-Malo. 

L'an  1455  5  ^^  Comte  de  Tancarville  époufa ,  à  Redon, 
Yolande  de  Laval.  La  cérémonie  de  ce  mariage  fut  faite  avec 
beaucoup  de  magnificence.  Louis  ,  Dauphin  de  France ,  fit , 
environ  le  même  temps,  dans  l'Eglife  de  Redon,  une  fondation , 
pour  laquelle  il  donna  douze  cents  écus  d'or. 

Au  mois  d'Avril  1460  ,  &  au  mois  de  Septembre  1461  ,  le 
Duc  François  II  aflembla  fes  Etats  à  Redon.  Ils  lui  accordèrent 
un  nouveau  fouage  de  cinquante-deux  fols  fix  deniers ,  par  chaque 
feu ,  dans  l'étendue  de  fon  Duché.  L'année  fuivanre  ,  François  fe 
rendit  à  Redon  pour  recevoir  le  Roi  de  France.  Ce  même  Duc , 
en  1463  ,  envoya  une  ambaflade  au  Pape  au  fujet  des  différents  qu'il 
avoit  avec  l'Evêque  de  Nantes.  Les  Ambafiadeurs,  fuivant  les  ordres 
de  leur  maître ,  fe  plaignent  vivement  de  la  nomination  d'Artur 
de  Montauban  à  l'Abbaye  de  Redon.  C'étoit  cet  Artur  connu 
il  défavantageufement  par  la  mort  de  l'infortuné  Gilles  de  Bre- 
tagne. Pour  éviter  les  rigueurs  de  la  Jufbce ,  ce  cournian ,  am- 
bitieux &  coupable  ,  s'étoit  fait  Céleibn  &  enfuite  Bénédidin. 
Yves  le  Sénéchal,  Abbé  de  Redon ,  s'étoit  démis  de  fa- dignité, 
à  la  foUicitation  du  Roi ,  en  faveur  de  cet  homme  noirci  de 
tous  les  crimes.  Les  Ambafiadeurs  dévoilèrent  aux  yeux  du  Pape 
la  conduite  fcandaleufe  d'Artur.  Le  Saint-Pere ,  furpris ,  le  fit  citer 


it  RED 

en  Cour  de  Rome ,  &  cette  citation  fut  publiée  en  Bretagne. 
L'Evêque  de  Vannes  fut  chargé  de  pourfuivre  le  coupable  ôc  fes 
complices.  Yves  le  Sénéchal,  voyant  l'orage  qui  menaçoit  Artur, 
reprit  le  gouvernement  de  ce  Monaftere.  Cette  affaire  n'eut  pas 
de  fuites.  Montauban  renonça  à  (es  prétentions  ,  &  fçut  fi 
bien  fe  conferver  les  bonnes  grâces  du  Roi,  qu'il  fut  nommé 
Archevêque  de  Bourges. 

Le  3  Août  1475  ,  ^^  ^"^  François  II  alTembla  fes  Etats  à 
Redon ,  &  ratifia ,  pendant  cette  tenue ,  le  traité  de  paix  qu'il 
venoit  de    conclure  avec  le  Roi  Louis  XI. 

1487.  La  Noblefle  du  parti  du  Roi,  affiege  Redon,  &  fait 
prifonniere  la  Dame  de  Rieux ,  qui  fe  trouvoit  dans  cette  ville. 
Cette  Dame  eft  rendue  à  fon  mari,  à  la  follicitation  du  Roi, 
qui  écrivit  de  Chateaubriand  au  Chef  de  l'armée. 

1489.  Odet  de  la  Rivière  ,  Abbé  de  Redon ,  donne  à  la  Du- 
chefïe  Anne  un  calice  d'or ,  du  poids  de  feize  marcs ,  que  l'on 
confervoit  depuis  long -temps  dans  cette  Abbaye.  .En  recon- 
noiflance  de  ce  préfent ,  la  Reine  donna  à  l'Abbé  un  autre 
calice  d'argent ,  du  poids  de  trente  marcs ,  &  lui  afTigna  cent 
livres  de  rente  fur  fon  domaine.  L'hiitoire  ne  dit  point  quel 
ufage  fit  la  Princeffe  du  calice. 

En  1536,  on  connoifToit ,  dans  le  territoire  de  Redon ,  les 
maifons  nobles  de  Beaumont ,  à  N...  de  Tehallac  ;  Buhurel  ,  à 
Bertranne  Juguen,  qui  pofTédoit  aufîi  les  Chapelais;  le  Parc- 
Angers,  à  N...  Coudeloué  ;  le  Boèguidon  ,  à  Guillaume  Coflardj 
le  Fezet,  à  Guillaume  Lambartj  Brais ,  Langal,  &  la  Diarrais, 
à  Jean  Boisjean. 

Au  mois  de  Mars  1588,  le  Duc  de  Mercœur  entra  dans  la 
ville  de  Redon ,  fans  aucune  réfiflance  de  la  part  de  la  garnifon 
de  cette  place ,  gagnée  par  les  Moines  ,  qui  font  Seigneurs  d'une 
partie  de  la  ville.  Talhouet  en  fut  nommé  Gouverneur ,  &  y 
commanda  pendant  toute  la  guerre  de  la  Ligue  ou  de  la  Sainte- 
Union.  En  1595,  ce  Gentilhomme  ,  voyant  que  le  Duc  de 
Mercœur  ne  vouloit  pas  faire  fa  paix  avec  le  Roi ,  prit  le  fage 
parti  de  fair^  fon  accommodement  particulier.  Il  fe  rendit  au 
camp  devant  Comper ,  auprès  du  Maréchal  d'Aumont ,  qui  lui 
fit  préfent ,  de  la  part  du  Roi ,  d'une  écharpe  blanche ,  de  la 
valeur  de  cinq  cents  écus,  &  lui  promit  l'expeftative  de  l'Ab- 
baye de  Redon  pour  un  de  fes  enfants.  Il  l'afTura  aufîi  de  la 
fomme  de  vingt  mille  écus  de  gratification  ,  d'un  brevet  de 
Maréchal  de  Camp  dans  l'armée  du  Roi,  &  le  continua  dans 


R  ED  =  R  E  G  ij 

fa  place  de  Gouverneur  de  Redon ,  dont  la  furvivance  fût  pro- 
mife  à  fon  fils.  Le  Duc  de  Mercœur ,  voulant  punir  Talhouet , 
eflaya  de  furprendre  Redon  ,  mais  inutilement.  Ne  pouvant  réuf- 
fir  par  la  rufe ,  il  Tattaqua  à  force  ouverte  j  mais  le  vaillant 
Gouverneur  fe  défendit  u  bien ,  que  le  Prince  Lorrain  fut  obligé 
de  renoncer  à  fon  entreprife. 

Les  Etats  de  la  province  s'aiTemblerent  à  Redon  en  1 612.  Les 
Religieufes  Bénédi6Hnes  &  Urfulines  ,  qui  ont  des  Communautés 
dans  cette  ville ,  furent  fondées  dans  ce  fiecle. 

En  1644,  deux  Moines  de  l'Abbaye  de  Saint -Sauveur  de 
Redon  fe  rendirent  à  celle  de  Sainte-Croix  de  Quimperlé ,  d  où 
ils  apportèrent  los  d'un  bras  de  Saint  Gurloës,  premier  Abbé 
de  cette  dernière  Maifon.  Cette  Relique  fiit  dépofée ,  avec  une 
grande  folenmit^ ,  dans  l'Eglife  des  Bénédiftines  du  Calvaire , 
à  Redon. 

Arrêts  du  Confeil,  des  années  1752  &  I7<^^,  portant  aug- 
mentation d'oftrois  pour  la  ville  &  Communauté  de  Redon ,  qui 
faifoit   réparer  la  chauffée  de  Saint-Nicolas, 

Les  Abbés  de  Redon  ont  des  revenus  confidérables  &  des 
Jurifdi6lions  très-étendues ,  avec  droit  de  menée  au  Préfîdial  de 
Rennes.  Ils  poffedent  la  majeure  partie  de  la  ville ,  ôc  jouiffoient 
autrefois  du  château  qui  exifloit  auprès  de  leur  Abbaye.  Le  tré- 
for  de  leur  Eghfe  renferme  des  ReHques  précieufes  :  au  devant 
du  grand  autel,  eu  un  Crucifix  d'argent  ,  d'une  grandeur  pro- 
digieufe ,  que  quelques-uns  difent  être  celui  que  Saint  Félix , 
Evêque  de    Nantes,  plaça  dans  fon  Eglife  Cathédrale, 

REGUINI  j  à  8  lieues  au  Nord  de  Vannes ,  fon  Evêché  ;  à 
18  lieues  de  Rennes;  &  à  3  lieues  de  JofTelin ,  fa  Subdéléga- 
tion. Cette  ParoilTe  relTortit  à  Ploermel  ,  &  compte  1200  com- 
muniants :  la  Cure  efl  à  l'alternative.  Le  territoire ,  d'une  fuper- 
ficie  plane  ,  renferme  la  fource  de  la  rivière  d'Evelle  qui  l'ar- 
rofe ,  des  terres  bien  cultivées  ,  des  prairies ,  &  des  landes  ;  il 
produit  beaucoup  de  fruits. 

Les  hifioriens  de  Bretagne  difent  que  Saint  Clair,  premier 
Evêque  de  Nantes,  mourut  dans  cette  Paroiffe  ,  le  10  Oc- 
tobre 309. 

En  1430,  on  connoiflbit  dans  cette  Paroiffe ,  le  manoir  de 
Ker-efcon,  qui  appartcnoit  à  Euftache  Serot  j  Boudoul ,  à  Anne 
de  Gouezillac  ;  Châteauriec  ,  au  Sieur  d'Efluer  ;  Ker-angail  ,  à 
Olivier  Gicquel.  On  y  connoit  aujourd'hui  le  château  de  Porman , 


,4  R  EG=REM 

décoré  de  bois  de  futaie ,  étang  &  moulin  ;  la  maifon  feigneu- 
riale  de  Coetrigueni  le  manoir  de  Bergare,  avec  haute,  moyenne 
&  bafleJuftice  -,  domaines  qui  relèvent  du  Duché  de  Rohan ,  èc 
appartiennent  à  M.  de  la  Touche-Porman  :  la  lîiaifon  feigneu- 
riale  de  Rutauvré  ,  avec  moyenne  -  Jultice ,  à  M.  de  Montigni  5 
&  le  Rello ,  avec  haute ,  moyenne  &  baffe-Juilice ,  qui  relevé 
du  Comté  de    Porhoèt,  à  M.  Colas. 

RELEC  j  Abbaye  de  l'Ordre  de  Cîteaux  ,  dans  la  ParoifTe 
de  Plouneourmencz  ;  à  7  lieues  au  Sud-Eil:  de  Saint -Pol- de- 
Léon  ,  fon  Evêché  j  &  à  3  5  heues  de  Rennes.  Cette  Maifon , 
fîtuée  près  la  fource  d'une  petite  rivière ,  dans  un  vallon  ,  au 
defîlis  duquel  efl  une  allez  grande  forêt  ,  fut  fondée  le  1 2  des 
calendes  d'Août  1132.  On  n'en  connoît  point  les  fondateurs  :  les 
uns  nomment  les  Comtes  de  Penthievre  ,  les  autres  les  Comtes 
de  Léon  ;  tout  ce  qu'on  en  peut  dire  de  certain ,  c'efl  qu'elle 
a  été  bâtie  fur  les  ruines  d'un  ancien  Monaflere ,  nommé  Gerber^ 
qui  exiftoit  du  temps  de  Saint  Pol ,  premier  Evêque  de  ce  dio- 
cefe.  On  ignore  le  nom  de  fon  premier  Abbé. 

RÉMINIAC;  fur  la  route  de  Maleftroit  à  Guer  ;  à  19  lieues 
au  Sud-Sud-Oueft  de  Saint-Malo ,  fon  Evêché  ;  à  1 1  lieues  de 
Rennes  ;  &  à  4  lieues  de  Plélan  ,  fa  Subdélégation.  Cette  Pa- 
roifTe reffortit  à  Ploermel ,  &  compte  5  5  o  communiants  :  la  Cure 
efl  à  l'alternative.  Le  territoire  offre  à  la  vue  des  vallons ,  des 
coteaux,  des  monticules,  quelques  terres  en  labeur,  des  prai- 
ries, beaucoup  de  landes.  Le  fol  efl  de  mauvaife  qualité.  Le 
château  de  la  Villemorin  appartenoit ,  en  141 2,  à  Yves  de 
Lantivi ,  aujourd'hui  à  M.  de  Lantivi,  de  la  même  famille  ;  la 
maifon  noble  de  la  Boue  appartenoit,  en  1420,  à  Jean  de 
la  Boue. 

REMUNGOL^  à  7  lieues  au  Nord-Nord-Oueft  de  Vannes, 
fon  Evêché  ;  à  20  lieues  de  Rennes  ;  &  à  4  lieues  de  Pontivi, 
fa  Subdélégation.  Cette  ParoifTe  reffortit  à  Ploermel,  &  compte 
a,ooo  communiants ,  y  compris  ceux  du  Moufloir ,  fa  trêve  :  la 
Cure  efl  à  l'alternative.  Le  territoire ,  arrofé  de  la  rivière  d'E- 
velle ,  efl  un  pays  plat  &  couvert  d'arbres  &  buiffons.  On  y 
remarque  des  terres  bien  cultivées ,  quelques  prairies ,  &  beau- 
coup de  landes.  Au  mois  de  Juin  1296,  Henri  de  Kergouet 
vendit  au  Vicomte  de  Rohan  toutes   les  rentes  qu'il  pofîëdoit 


•      RE  M  =H  E  N  15 

dans  cette  ParoifTe.  En  1400,  on  y  connoilToît  le  manoir  de 
Ker-grois ,  au  Sieur  de  Kergrois  j  (  cette  Terre ,  qui  a  une  bafTe- 
Juftice ,  appartient  aujourd'hui  à  M.  de  Lambili  :  )  le  Polfan ,  à 
Jean  Guillard  j  le  manoir  du  Brel ,  à  Jean  le  Godec;  le  manoir 
de  Ker-efequel  ,-à  Jean  de  Keraudren  ;  6cCoët-Hardenion  ,  à  Jean 
le  Beaudouin.  Les  Terres  de  Ker-veno ,  Meneguen ,  &  Ker- 
aaron  ,  ont  chacune  une  bafTe-JufHce  ,  &  appartiennent  à  M.  de 
Lambili ,  qui  poffede  encore  dans  la  même  Paroiffe  une  verrerie, 
qui  fut  conlbuite  lur  les  ruines  d'une  forge  à  fer. 

RENAC  ;  fur  la  route  de  Rennes  à  Redon  ;  à  1 2  lieues  à  l'Eft 
de  Vannes ,  fon  Evêché  ;  à  1  o  heues  &  demie  de  Rennes  -,  & 
à  2  lieues  &  demie  de  Redon ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe 
reffortit  à  Ploermel,  &  compte  1200  communiants  :  la  Cure  ell 
à  l'alternative.  Il  fe  tient  deux  foires  par  an  dans  l'endroit.  Le 
territoire  ,  arrofé  des  eaux  de  la  Vilaine  ,  offre  à  la  vue  de  belles 
prairies  ,  beaucoup  de  marais  qui  donnent  la  facilité  aux  habitants 
de  nourrir  beaucoup  de  bétail ,  des  terres  en  labeur  d'affez  bonne 
qualité ,  des  landes  très-étendues ,  &  des  carrières  d'ardoifes  , 
dont  quelques-unes  font  exploitées.  Cette  Paroiffe  eff  très-ancienne. 
En  850,  Charles  le  Chauve  la  donna  aux  Moines  de  l'Abbaye 
de  Saint-Sauveur  de  Redon.  Les  dîmes  de  la  Vieille-Perche  ap- 
partenoient ,  en  1390,  à  Jean  Herpedaine  &  à  Jeanne  d'Apre- 
mont ,  fon  époufe.  La  Seigneurie  du  Bois-Raoul  &  de  Renac 
appartenoit  à  la  Comte  ffe  d'Etampes  &  de  Vertus,  mère  du  Duc 
François  II ,  qui ,  par  fes  lettres  datées  de  Nantes  le  1 3  No- 
vembre 1462,  donna  ces  deux  Terres  à  Tanguy  du  Châtel, 
fon  Chambellan  &  fon  Maître- d'Hôtel ,  &c  le  créa  Chevalier 
Banneret ,  avec  permiffion  de  faire  conffruire ,  au  lieu  du  Bois- 
Raoul  ,  un  château  &  place  forte  ,  &  de  lever ,  fur  les  hommes 
fujets  defdites  Terres,  un  guet  pour  la  garde  de  ce  château. 

En  1530,  on  voyoit  dans  cette  Paroiffe  les  maifons  de  la 
Touche,  à  Jean  Buinard  de  la  Villevoifin  j  le  Broffai  Se  le  pont 
de  la  Peffelaye  ,  à  Julien  Conay;  le  Vau-Boueffis  &  Piguel,  à 
Jean  du  Frefne;  Crepeon ,  à  Pi.obert  Gougeon  ;  la  Noë,  à  Guil- 
laume Michel  i  le  Frefche,  à  Robert  du  Frefne  j  le  Gaff  ,  à 
Tannegui  de  la  Grée  ;  le  Petit-Bois  ,  au  Sieur  du  Juret ,  (  cette 
Terre  a  une  moyenne-Juffice  ,  &  appartient  à  Madame  Peland  :  ) 
Virel ,  à  Jean  du  Frefne  ;  elle  a  auffi  une  moyenne -Juffice,  6c 
appartient  à  M.  du  Frefne  de  Virel  :  &  Launaye ,  au  Sieur  de 
la  Ville-Créon  de  Couvrantorler  ;  cette  dernière  a  encore  moyenne 


,é  REN  • 

&  bafîe-Juftice  ,  &  appartient  à  M.  Morau  du  Deron,  quîpof- 
fede  auffi  la  moyenneJuftice  du  Pont  ,  la  moyenne-Juftice  de 
Pinet,  &  la  moyenne  &  baffe  de  Juft.  La  haute-Juflice  de 
Renac  appartient  à  M.  du  Frefne  de  Renac  y  AUerac ,  haute- 
JulHce  ,  à  iM.  le  Fournier  d'AUerac  -,  la  Durantais  ,  moyenne- Juftice  , 
&  le  Bot  ,  moyenne  -  Juîlice  ,  à  M.  Collobel  du  Bot;  le  Val- 
Hamon ,  moyenne-Juftice ,  à  M.  de  Becdelievre  de  Saint-Maure  j 
&  Couefpel ,  moyenne-Juftice ,  à  M.  Gouyon  de  Couefpel  ;  le 
moulin  à  vent  de  Couefpel  forme  un  des  beaux  points  de  vue 
de  la  province. 

RENNES  ;  ville  épifcopale ,  par  les  4  degrés  2  minutes  4  fé- 
condes de  longitude ,  &  par  les  48  degrés  6  minutes  de  latitude. 
Le  diocefe   de  Rennes  eft  borné,  au  Nord,  par  ceux  de  Dol 
&  d'Avranches  j  au  Sud ,  pai  celui  de  Nantes  ;  à  l'Eft ,  par  ceux 
d'Angers  &  du  Mans;  &  à  l'Oueft,  par  ceux  de  Vannes  &  de 
Saint-Malo.  Il  renferme  deux  cents  vingt-une  Paroiffes  ,  dix  villes, 
deux  cents  onze  bourgs ,   onze  trêves  ou  fuccurfales ,  trois  Ab- 
bayes d'hommes ,  deux  de  femmes ,  quinze  Couvents  d'hommes, 
dix-fept   Couvents  de  femmes,  fix  Hôpitaux  ,  un  Hôtel -Dieu, 
trois  Collégiales  ,  fept  Doyennés  ruraux,  cinquante-deux  Prieurés, 
quatorze  forêts ,  &  plufieurs  rivières.  On  y  compte  290900  com- 
muniants. Le  territoire  produit  du  grain ,  des  pâturages  abondants  , 
du  beurre  très-eftimé ,  du  lin ,  Se  d  excellent  cidre.  L'Eglife  Ca- 
thédrale eft  fous   le   vocable  de  Saint-Pierre.    Le   Chapitre   eft 
compofé  de  cinq  Dignitaires ,  feize  Chanoines ,  quatre  Semi-Pré- 
bendés ,  d'un  Sous-Chantre  ,  &  d'un  Sacrifte.  Onze  grandes  routes 
aboutiffent  à  cette  ville ,  qui  eft  fermée   d'un  mur  en  mauvais 
état  ,  &   qui  a  mille  quatre  cents  trente-fept  toifes  de  pourtour  : 
fes    fauxbourgs  font    d'une  grande  étendue  ;   ils  comprennent , 
avec  la  ville ,  dix  Paroiffes  ,  deux  Abbayes  ,  dix  Prieurés  ,   fept 
Chapelles ,    fept    Couvents  d'hommes ,   treize  Communautés  de 
femmes ,  quatre  Hôpitaux  ;  une  Ecole  des  Droits ,  un  Collège  ,  trois 
Ecoles  Chrétiennes  pour  les  garçons ,  fix  pour  les  filles ,  une  Ecole 
gratuite  de  Deffein  relative  aux  arts  &  métiers  ;  de  belles  Biblio- 
thèques publiques ,  parmi  lefquelles  on  diftmgue  celle  des  Avocats  , 
qui  ouvre  trois  fois  la  femaine  ;  le  grand  &  le  petit  Séminaire  ,  ce 
aernier  eft  gratuit,  pour  l'inftruftion  des  je'mes  gens  qui  afpirent 
aux  Ordres  facrés.  Les  Cures  des   Paroiffes  font  à   la  nomina- 
tion de  différents  préfentateurs.  Saint-Etienne  eft  préfenté  par  les 
Chanoines   de  la  Cathédrale  ;  Touffaint ,    Saint-Pierre-en-Saint- 

Georges, 


■  R  E  N  tf 

Georges  j  Saint-Sauveur ,  fous  le  fief  du  Roi ,  pat  FAbbefle  de 
Saint-Georges  ^  Saint-Germain,  Tous  le  fief  du  Roi ,  par  un  Cha- 
noine j  Saint-Laurent,  par  un  Chanoine  ;  Saint-Aubin,  par  l'Evê- 
que  ;  Saint-Helier  ,  par  un  Chanoine;  Saint-Jean  &  Saint- Martin, 
par  l'Abbé  de  Saint-Melaine  (  cz  ).  Les  Prêtres  qui  defîervent  la 
Chapelle  Sainte-Anne ,  font  nommés  par  la  Confrairie  érigée 
fous  l'invocation  de  Saint  Roch  &  de  Saint  Eutrope.  Les  deux 
Abbayes  font  de  l'Ordre  de  Saint-Benoît  :  celle  de  Saint-Me- 
laine pour  les  hommes ,  &  celle  de  Saint-Georges  pour  les  fem- 
mes. Les  Couvents  d'Hommes  font  :  les  Jacobins  ,  les  Carmes , 
les  Cordeiiers,  les  Capucins,  les  Auguftins,  les  Minimes,  &  les 
Carmes-Déchaufies.  Les  Communautés  de  Filles  font  :  les  grandes 
&  petites  Urfulines ,  les  Calvairiennes  de  Saint-Cyr ,  les  Carmé- 
lites ,  les  Hofpitalieres  ,  la  grande  Vifitation  ,  la  Trinité ,  les  Cal- 
vairiennes de  Cucé  ,  les  Vilitandines  du  Colombier  ,  les  Filles  de 
Saint-Thomas-de-Villeneuve,  les  Filles  du  Bon-Palleur ,  les  Filles 
de  la  SagefTe  ,  &  les  Sœurs  de  la  Charité.  Les  quatre  Hôpitaux 
font  :  Samt-Yves,  l'Hôpital-Général ,  l'Hôpital  de  Saint -Méen, 
&  les  Incurables.  La  Chapelle  de  Brequigni  eft  une  fuccurfale 
de  Saint-Etienne.  L'Evêque  eft  Seigneur  d'une  partie  de  fa 
ville  épifcopale  ,  qui  peut  compter  42600  habitants.  On  remarque 
à  Rennes  une  Cour  de  Parlement ,  une  Chancellerie ,  une  Cour 
des  Aides,  une  Table  de  Marbre,  un  Siège  préfidial  ;  les  Sièges, 
du  Confulat ,  des  Eaux ,  Bois  &  Forêts ,  de  la  Prévôté  ,  de  la 
Police ,  &  plufieurs  autres  Jurifdiftions  qui  s'exercent  dans  la 
baffe  falle  du  Préfidial  ,  &  qui  appartiennent  à  différents  Sei- 
gneurs ,  fçavoir,  les  Régaires  de  l'Evêque  &  ceux  du  Chapitre, 
Brequigni ,  l'Abbaye  de  Saint-Georges,  l'Abbaye  de  Saint-Me- 
laine ,  le  Comté  de  Mejufleaume ,  la  Châtellenie  de  la  Motte- 
au-Vicomte  ,  la  Freflonniere  ,  la  Martiniere ,  le  Prieuré  de  Saint- 
Cyr  ,  Cucé ,  la  Cotardais ,  les  Gailleuls ,  les  Loges  ,  le  Prieuré 
de  Saint-Moran  ,  le  Prieuré  de  Saint-Michel ,  Montbarot ,  la  Pré- 
valaye  ,  la  Thébaudaye-Chenaudiere  ,  la  Vicomte  ,  la  Ville-Afie- 
lin ,  le  Prieuré  de  Saint-Martin ,  la  Plefiê ,  les  Chefnai ,  &  la 
Lande-Coëtlogon  ;  ces  deux  dernières  s'exercent  dans  la  ParoifTe 
de  Saint-Martm. 

Rennes  eft  un  Gouvernement  particulier  de  la  Lieutenance  du: 
Roi  en  Breragne.  Dans  la    même    ville    eft   l'Intendance  de  la 


(<ï)  Les  Cures    qui  font  à  la    nomina-  Tentées  par  l'Evêque  diocéfain  ,  parce  que 

ùon  de  l'Abbé  de  Saint-Melaine  ,  font  pré-         l'Abbaye  eft  unie  à  TEvèduv 

Tonu  IV^  C 


,8  R  E  N 

province,  quoique  le  Siège  de  cette  Généralité  dût  être  à  Nantes, 
où  réfident  les  Généraux  des  Finances  Se  Tréforiers  de  France 
réunis  à  la  Chambre  des  Comptes.  Le  Prévôt  général  de  la  Ma- 
réchaufTée  fait  aufli  fon  féjour  à  Rennes  ,  avec  trois  Brigades.  On 
remarque  un  Hôtel  des  Gentilshommes ,  une  Commiflion  Inter- 
médiaire qui  s'afTemble  deux  fois  lafemaine,  le  Greffe  des  Etats, 
une  Communauté  de  ville ,  une  Recette  des  Domaines  ,  les  Poftes 
aux  lettres  &  aux  chevaux,  un  Bureau  de  Meffagerie,  Sec. 

Le  commerce  de  Rennes  n'eft  pas  fort  étendu  :  il  confifte  prin- 
cipalement dans  l'importation  &  l'exportation  des  denrées  né- 
ceffaires  à  la  vie.  On  trouve  néanmoins  dans  la  ville  plufîeurs 
manufactures ,  de  bonnets ,  de  bas ,  de  toiles ,  d'étoffes ,  &  de 
fayance.  L'occupation  la  plus  ordinaire  des  femmes  du  peuple  eft 
de  broder  la  mouffeline  pour  le  linge.  Le  beurre  eft  la  branche 
la  plus  étendue  du  commerce  des  Rennois  ;  ils  en  font  paffer 
une  quantité  prodigieufe  à  Nantes  c^  dans  les  autres  villes  de 
Bretagne,  &  même  jufqu'à  Paris.  La  fituation  de  leur  ville 
ne  leur  permet  pas  de  fe  livrer  immédiatement  au  commerce 
maritime.  La  Vilaine  leur  donne  la  facilité  de  faire  venir  de 
Redon  &  d'y  conduire ,  par  le  moyen  des  éclufes  conftruites 
fur  cette  rivière ,  les  marchandifes  importées  &  exportées  ;  mais 
cette  navigation  eft  pénible  &  coûteufe ,  &  il  n'eft  pas  vraifem- 
blable  que  jamais  la  ville  de  Rennes  brille  par  fon  commerce, 
à  moins  qu'on  ne  rende  navigables  les  rivières  qui  font  dans 
cette  partie  de  la  province.  Aulîi  le  peuple  ,  qui  n'a  pour  toute 
reffource  que  le  revenu  modique  d'un  travail  journalier  &  peu 
lucratif,  eft-il  généralement  pauvre.  Le  corps  du  commerce  eft 
compofé  des  Marchands  de  draps,  Epiciers,  &  Merciers.  La 
rivière  d'Ifte  ,  qui  traverfe  deux  des  fauxbourgs  &  qui  fe  jette 
dans  k  Vilaine ,  n'eft  point  navigable. 

Fv.ennes  eft  certainement  une  des  anciennes  villes  des  Gaules, 
mais  l'époque  de  fa  fondation  eft  abfolumcnt  inconnue.  Les  fa- 
bles qu'on  a  débitées,  les  conjeftures  qu'on  a  formées,  fur  fon 
origine ,  ne  prouvent  que  l'impoffibilité  de  la  découvTir.  Je  ne 
rapporterai  point  ici  les  différentes  opinions  adoptées  par  les 
amateurs  du  merveilleux  :  je  me  bornerai  à  dire  ,  qu'avant  la 
conquête  des  Romains  ,  Prennes  fe  gouvernoit  en  RépubUque 
comme  les  autres  villes  de  l'Armorique  ,  qui  ne  reconnoiffoient 
aucun  Souverain  particqlier.  On  ne  peut  mieux  comparer  leur 
Gouvernement  qu'à  celui  des  Suiffes ,  ou  à  celui  qui  fe  forme 
actuellement   dans   le  Nord  de  l'Amérique.   Jules -Céfar,   après 


R  E  N  19 

avoir    conquis  une  partie   des  Gaules  ,    envoya  CrafTus   contre 
Rennes.    Ce   Lieutenant  la  prit  &  la  fournit  à  la  domination  ro- 
maine.   Les  anciennes  cartes  géographiques  lui  donnent  le  nom 
de  Condate  Redonum  ;  nom    qu'elle   a  quitté  pour  prendre  celui 
du  peuple  qui  l'habitoit ,  Rhedoncs ,    dont ,  par  corruption  ,    on 
a  formé  le   mot  Rennes,  Le  pays    de  ces  Rhedones  s'étendoit  le 
long  de  la  Vilaine  jufqu'à    la  mer.   Quelques  hiiloriens  préten- 
dent que    cette  ville    étoit    anciennement    iituée    fur    la  rivière 
d'Ille ,  &  que  fon  enceinte  s'étendoit  depuis  la  Paroifle  de  Saint* 
Martin  jufqu'à   celle  de  Saint-Laurent,    qui  efl:   encore  une   des 
ParoilTes  de  la  ville.   Quoiqu'elle  en  foit  éloignée  de  trois  quarts 
de  lieue,  on  a  remarqué,  dans"  cet  intervalle  ,  une  longue  fuite 
de  murs  qui  commencent  au  bas  de  la  rue  de  Saint-Dominique  , 
dans  le  champ  de  la  Cochardiere.   On  y  apperçoit   l'emplace- 
ment d'une  grande  tour,  qui  fe  connoît  à  la  couleur  du  gazon 
qui   eft  bien    moins  frais    qu'aux   environs.    Quoi  qu'il    en  foit, 
Céfar  donna  le  Gouvernement    de  Rennes  à  Craffus ,  qui  l'avoit 
prife.  Ce  Romain  fut  en  même  temps  Magiftrat  &  Gouverneur, 
&  plutôt  le  Roi  que  le  protecteur  des  Rennois.  Ils  ne  pouvoient 
rien  entreprendre  ni  rien  décider  fans  fon  approbation;  il  préii- 
doit   à  toutes   les   affemblées  ,  &  fa   volonté  étoit  une   loi  qu'il 
falloit  fuivre.   Cette  forme  de    Gouvernement  s'établit    de   telle 
forte  dans  cette  ville ,  qu'elle  fubfiftoit  encore  dans  le  quinzième 
fiecle.  Les  plus  anciens  titres   qui  fe  voient  aux  archives  de  la 
Maifon  de -Ville ,  font  des    années  1410  &   141 8  :  ils  nous  ap- 
prennent que  l'autorité  réfidoit  toute  entière  dans  la  perfonne  du 
Gouverneur  ;    en  fon  abfence  ,  dans  celle  de  fon  Lieutenant  ;  & 
fucceffivement  dans    les  deux   Connétables.   On  ignore  les  révo- 
lutions que  peut  avoir  éprouvées   la    ville  de  Rennes ,  quoiqu'il 
foit  vraifemblable  qu'elle    n'en  a  pas   été   exempte  ;    mais   nous 
croyons  devoir  rapporter  deux  infcriptions ,  qui  ne  peuvent  qu'aider 
à  percer  l'obfcurité    des   premiers  fiecles    de  notre  Ere.  Sur  un 
des  parements  de  la  porte  Mordelaife  ,  fe  lit  celle-ci  : 

IMP,    CJES,    ANTONIO. 
GORDIANO.   PIO.    FEL.   AUG.  P.  M, 

TR,  P.    COS.   O.  R.    le.    Clv'uas  Redonis^ 

S'il  étoit  certain  que  l'infcription  &  la  pierre  euffent  été  pFa- 
cées  là  à  deflein,  on  pourroit  aiïurer  que  cette  porte  fut  bâtie 
dans  le  troifieme  fiecle,  puifque  Gordien  fut  reconnu  Empereur 


lo  R  E  N     . 

en  236,  Se  qu'il  fe  tua  en  238.  On  pourroit  encore  conclure 
de  là  que  l'ancienne  ciré  de  Rennes  ,  qu'on  appeila  la  Ville- 
Rouo-e ,  fut  bâtie  dans  les  deuxième  &  troifierne  fiecles  ;  mais 
ce  n'ell  qu'une  foible  conjedure,  puifqu'il  fe  peut  très-bien  faire 
que  cette  pierre ,  détachée  d'un  monument  érigé  à  l'Empereur 
Gordien  ,  ait  été  placée  là  fans  autre  defiein  du  ccnftrufteur 
ou  du  maçon,  que  celui  de  faire  ufage  d'une  pierre  commode.* 
Cette  infcription  ne  peut  donc  rien  prouver  Voyons  maintenant 
fi  l'autre  nous  donnera  des  connoifîances  plus  certaines.  Elle  fut 
trouvée,  en  1741,  fous  une  lame  de  bronze  ,  dans  la  cour  de 
M.  de  Salis ,  près  la  place  de  la  vieille  Monnoie.  La  voici  : 

Heic  ubï  Junonis  cchhrantur  facra  momtce,  , 
Venus  &  Liber  jongont  pia   Numina  dextras  ; 
Non  procul  à  madidis  qiice  ambit   Vivcnia  praùs  , 
Turba  Sacerdotom  ,    Martis  Jlreidcnte  procella  , 
Condit  hiimi  paieras ,    cyathofq.  &   vajti    Liceî. 
Nu  niji  pojl  longam  cztatcm ,  ferofque  ncpotes  , 
Com  reget  Armoricas  Princtps    aquijf.   oras , 
Effodientur  opes  :  hic  diva   tcmpla  momtce^ 
Rejiituet  ,  facramque  viris  plaudcntibus  cedem 
Aura ,  non   color  ejl  ,  ni  jujlo  fplcndeat  ufu. 

Cette  infcription ,  trouvée  dans  le  terrein  formé  par  la  porte 
Mordelaife  ,  ell  certainement  du  temps  des  Romains.  Elle  nous 
apprend  qu'il  y  avoir  dans  cet  endroit  un  tempie  confacié  à  Junon- 
Monete  ;  que  ce  temple  n'étoit  pas  éloigné  de  la  Vilaine  j  & 
que,  dans  un  temps  de  guerre  &  de  pillage ,  les  Prêtres  ,  crai- 
gnant que  leurs  tréfors  ne  devinrent  la  proie  de  l'ennemi ,  les 
avoient  enfoui  fous  terre  dans  le  lieu  même.  On  i^ait  qu'à  Rome 
le  temple  de  Junon-Monete  étoit  deftiné  à  conferver  l'argent 
monnoyé  :  celui  de  Rennes  pouvoir  fervir  au  même  ufage. 

Au  travers  des  nuages  qui  nous  dérobent  la  lumière  ,  on  n'ap- 
perçoit  qu'une  foible  clarté  qu'on  ne  peut  prendre  pour  guide 
qu'aux  rifques  de  s'égarer  :  cependant ,  en  réuniflant  les  conjec- 
tures formées  par  les  deux  infcriptions ,  on  peut  croire  que  l'en- 
droit, où  la  cierniere  a  été  trouvée,  faifoit  partie  de  l'ancienne 
cité  de  Rennes  j  &  ,  félon  toutes  les  apparences ,  la  ville  des 
Celtes-Rennois  étoit  dans  ce  lieu-là.  Malheureufement  ce  monu- 
ment eft  fans  date  ,   &   l'on  ne  peut  fçavoir  quelle  étoit   cette 


R  E  N  II 

guerre  qui  défoloit  alors  la  Bretagne.  Pouffons  encore  plus  loin 
nos  conje6lures  ,  d'après  les  découvertes  faites  depuis  quelques 
années.  Au  côté  oriental  de  la  place  de  la  vieille  Monnoie  ,  on 
trouva,  en  creufant  les  fondements  d'un  édifice,  en  1774,  à 
environ  fept  pieds  de  profondeur  ,  quelques  offements ,  &  une  pa- 
tere  décorée  de  feize  médailles  impériales.  Cette  patere  ell  d'une 
efpece  unique  par  fa  grandeur  ,  ayant  neuf  pouces  cinq  lignes 
de  diamètre  :  elle  eft  ornée,  dans  le  fond,  d'un  bas  relief  qui 
repréfente  les  Bacchanales.  Les  ouvriers  trouvèrent  de  plus ,  dans 
le  même  endroit  ,  quatre-vingt-quatorze  médailles ,  de  pur  or 
comme  la  patere  :  elles  font  de  différents  Empereurs,  depuis 
Néron,  qui  fe  tua  l'an  de  grâce  70,  jufqu'à  Aurclien,  qui  par- 
vint à  l'Empire  vers  270.  On  trouva  encore  quatre  médailles  en- 
châffées  dans  des  cercles  travaillés  en  filagrammes ,  avec  une  be- 
liere  à  chacune,  &  trois  chaînes  d'or.  Ces  précieux  monuments, 
qui  fe  font  confervés  ,  pefent  enfemble  huit  marcs  cinq  onces 
quatre  gros  d'or.  Le  Chapitre  les  envoya  à  M.  le  Duc  de  Pen- 
thievre ,  Gouverneur  de  la  province ,  qui  fut  prié  de  les  pré- 
fenter  au  Roi.  La  même  année  ,  les  ouvriers  employés  au  bâ- 
timent du  Chapitre  ,  trouvèrent ,  dans  le  même  heu ,  une  mé- 
daille d'or  ,  d'Antonin  le  Pieux ,  qui  parvint  à  l'Empire  l'an 
138    de  lEre    chrétienne. 

On  voit  que ,  parmi  les  médailles  ou  monnoies  trouvées ,  il 
y  en  a  qui  font  de  la  fin  du  troifieme  fiecle  :  ce  n'eff  donc  que 
dans  ce  fiecle ,  ou  dans  l'autre ,  qu'elles  ont  été  mifes  en  terre  j 
&  de  là  on  peut  préfumer  que  la  guerre  dont  parle  l'infcription  , 
eft  celle  que  caufa  l'arrivée  de  Maxime  &  de  Conan  dans  l'Ar- 
morique.  Je  fçais"  bien  qu'on  peut  m'objefter  que  Rennes  avoit 
des  Ev  £'ques  quelque  temps  avant  cette  époque  ;  mais  ces  Evê- 
ques  n'avoient  qu'un  très-petit  troupeau.  Saint  Clair ,  Evêque  de 
Nantes  ,  n'avoit  pas  deux  cents  feftateurs  dans  fa  ville  épifcopale; 
&  il  efl  probable  que  l'Evêque  de  Rennes  n'avoit  pas  fait  de 
plus  grands  progrès.  Le  Paganifiiie  fubfifta  dans  l'Armorique  ,  non- 
feulement  jufqu'au  règne  de  Conan ,  mais  encore  long-temps 
après.  D'ailleurs,  je  ne  prétends  pas  donner  cette  opinion  pour 
une  vérité  incontellable  :  ce  n'eff  qu'une  conjefture  fondée ,  qui 
ne  peut  fe  changer  en  certitude  ,  ou  fe  détruire ,  que  par  de 
nouvelles  découvertes.  Il  feroit  donc  à  defîrer  que  l'on  continuât 
ces  fouilles ,  &  qu'on  les  poufîilt  plus  avant  :  mais ,  pour  en  tirer 
tout  l'avantage  qu'elles  fcmblent  annoncer  ,  il  faudroit  que  l'entre- 
prife  fût  protégée  par  le  Gouvernement ,  &  qu'elle  fut  confiée 


li  ï^  E  N 

à  quelque  fçavant  antiquaire.  Il  paroît  que  Ton  ne  perdroit  pas 
tout  à -fait  fon  temps,  li  l'on  en  juge  d'après  l'infcription  &  les 
précieux  monuments  qu'on  a  déjà  trouvés. 

L'hiftoire  politique  de  la  ville  de  Rennes  n'offre  prefque  rien 
de  certain  avant  l'arrivée  de  Maxime  &  de  Conan  Meriadec.  Elle 
obéiiToit  aux  Romains,  &  fuivoit  les  loix  de  l'Empire.  La  Reli- 
gion Chrétienne  commencoit  à  s'y  établir.  Il  y  avoit  enviion 
quarante  ans  que  Modéran  ,  fon  premier  Evêque ,  y  avoit  jette 
les  femences  de  la  foi  ;  mais  elle  tenoit  encore  à  fes  anciennes 
erreurs,  &  peu  de  perfonnes  avoient  eu  le  courage  de  les  aban- 
donner. Maxime,  fuivi  de  Conan  &  d'une  armée  nombreufe  de 
Bretons,  débarqua  dans  l'Armovique  ,  vers  l'an  383.  D'après  le 
récit  des  hiiloriens ,  il  eft  probable  qu'ils  mirent  pied  à  terre  à 
l'embouchure  de  la  Vilaine.  Ils  remontèrent  cette  rivière,  &  ayant 
défait  les  troupes  qui  s'oppofoient  à  leur  paffage  ,  ils  fe  préfen- 
terent  devant  Rennes ,  &  fommerent  cette  ville  de  fe  rendre. 
Sulpice ,  Capitaine  Gaulois ,  qui  y  commandoit  pour  l'Empe- 
reur, obéit  fur  le  champ,  &  ouvrit  fes  portes.  Nantes  fe  fou- 
rnit enfuite ,  &  toute  l'Armorique  fuivit  l'exemple  de  ces  deux 
villes.  Maxime  donna  à  Conan  le  pays  qu'il  venoit  de  conqué- 
rir ,  &  continua  fa  route  (  a  ). 

On  croit  que  les  Eglifes  paroiffiales  de  Saint-Etienne ,  Saint- 


(d)Tci,il  fe  préfente  une  quaftion  que 
l'on  a  louvent  agitée ,  &  qui  pourtant  n'a  pas 
encore  été  réiolue.  Quelle  éloit  la  capitale 
du  Royaume  de  Conan  &  de  la  Bretagne, 
dans  les    fiecles    fuivants    &    jufqu'à  nos 
jours  ?  £toit-ce  Rennes  ?  t toit-ce  Nantes? 
Il  ne  paroit  pas  que  le  conquérant  de  l'Ar- 
morique ait  jamais  penfé  à  aflîgner  un  rang 
à  ces  deux  villes.  Nous  a  ons  vu  qu'avant 
d'être    fournis  à    la    domination  roiHaine , 
«lies  fe  (îouvernoient  en  République.  Dans 
cet  état  d'indépendance  .  ni  l'une  ni  l'autre 
ne  pouvoit  piéienJre  au  titre  de  préémi- 
nence. Réunies  fous  le  même  joug  par  les 
Romains  ,  illes  reconnoilToient  la  Métro- 
pole de  la  t.-oifieme  1.  yonnaife  ,  6c  ne  te- 
noient  par  conféquent  que  le  rang  de  villes 
fubalternes-  Conan  ,  devrnu  maitre  de   la 
Bretngne  ,    ne  fut  pas   afl'ei  tranquille  fur 
fon  Trône  pour  fe  fixer  dans  une  de  ces 
villes  plutôt  que    dans  l'autre.    S'il  fit  fon 
féjour  orc^inaire  à  Nantes  plutôt  qu'à  Ren- 
nes ,    c'eft  que  fes   affaires   exigeoient  fa 
préfence  dans  cette  dernière.  La  baiïe  Bre- 


tagne étoit  tranquille  fous  fes  loix,  &  l'autre 
côté  de  fon  Royaume  n'avoit  pas  beaucoup 
à  craindre  ,  puifque  les  provinces  qui 
loignoient  TArmorique  reconnurent  l'em- 
pire de  Maxime  tant  qu'il  vécut.  C'é- 
toLt  donc  du  côté  de  l'Aquitaine  que 
Conan  avoit  de  fortes  précautions  à  prendre. 
Ce  pays,  riche  &  peuplé,  qui  s'étendoit 
depuis  Nantes  jufqu'auxfrontieresde  l'Efpa- 
gne ,  obéiffoit  aux  Empereurs ,  qui  avoient 
donné  ordre  à  leurs  Lieutenants  de 
réprimer  l'audace  des  Bretons.  La  crainte 
&  l'ambition  dévoient  donc  retenir  Conan 
à  Nantes.  Maxime,  en  le  quittant,  lui 
avoit  même  ordonné  d'entrer  dans  l'Aqui- 
taine ,  &  de  pouffer  fes  conquêtes  dans 
cette  partie  aulfi  loin  qu'il  le  pourroit.  Le 
Prince  Breton  exécuta  (es  ordres,  &  tout 
le  canton  ,  depuis  la  Loire  jufqu'à  Tiffau- 
ges  ,  fut  fournis  à  fes  loix.  On  ne  peut 
donc  rien  décider  fur  cet  objet  pour  le 
règne  de  Conan.  Ses  fuccefleurs  ,  par  le 
même  motif,  fe  fixèrent  à  Nantes  de  pré- 
féreace  ,  juf^u  a  ce  que  la  Bretagne  ,  par- 


REN  ij 

Germain^  Se  de  ToufTaint,  furent  fondées  vers  la  fin  du  qua- 
trième fiecle ,  ou  au  commencement  du  cinquième.  On  prétend 
qu'alors  les  Eglifes  n'étoient  point  dans  l'enceinte  des  cités, 
parce  qu'on  craignoit  que,  fous  prétexte  d'entendre  la  Mefle, 
des  étrangers ,  mal-intentionnés ,  n'entraflent  dans  les  villes  &  ne 
les  furprilîent.  11  n'y  avoit  ,  dit-on,  dans  la  cité  de  Rennes, 
d'autre  Chapelle  que  celle  de  Notre-Dr.me ,  qui  fervoit  de  Cathé- 
drale. Les  dix  Paroifles,  avec  les  Abbayes  de  Saint-Melaine  6c 
de  Saint-Georges  ,  ont  été  pendant  long-temps  hors  des  murs  ;  & 
ce  n'eft  que  par  l'agrandifl'ement  de  la  ville  qu'elles  fe  trouvent 
aujourd'hui  renfermées  dans  fon  enceinte ,  comme  on  le  verra 
dans  fon  temps. 

L'hiftoire  politique  &  civile  de  Rennes  ne  nous   offre   aucuns 
faits  dignes    de    mémoire  dans    les  quatrième  ,  cinquième  ,    & 


tagée  entre  plufieurs  Souverains,  formât, 
pour  ainfi  dire  ,  autant  d'Etats  différents 
qu'elle  avoit  de  villes.  Pendant  plufieurs 
fiecles ,  Nantes,  tantôt  françaife  tantôt 
bretonne,  ne  put  obtenir  la  primauté,  ni 
la  céder  à  une  autre.  Sous  Nominoé  , 
c'eft  Dol  qui  joue  le  premier  rôle.  Cette 
ville  obtient  le  titre  de  Métropole  ,&  fon 
Archevêque  jouit  du  privilège  de  facrer 
les  Rois.  Ce  privilège  lui  fut  enlevé  a. ec 
fon  titre  ,  &  les  Ducs  prirent  la  Couronne 
à  Rennes.  Il  femble  que  dès -lors  cette 
dernière  devoir  être  regardée  comme  ca- 
pitale du  Duché.  Point  du  tout ,  diront 
ceux  qui  favorilent  la  ville  de  Nantes. 
Conclure^-vous  que  Rheims  eft  la  capitale 
de  la  France  ,  parce  que  Us  Rois  vont  s'y 
faire  fjcrer  ?  //  efl  vrai  que  les  Souverains 
de  Breijgne prenaient  la  Couronne  à  Rennes, 
maij  ils  fai/oient  ordinairement  leur  fejour  à 
fiantes,  il  n'ell  pas  facile  de  réfuter  ce 
raironncment  ,  &  l'on  peut  encore  re- 
garder jufqu'alors  la  queftion  comme  in- 
décife. 

Sous  les  derniers  Ducs  de  Bretagne , 
Nantes  commençoit  à  occuper  la  première 
place,  &  elle  auroit  infailliblement  pris  le 
dedus  fans  la  révolution  qui  urit  la  Bre- 
tagne à  la  Couronne  ;  elle  conferva  même 
La  fupériorité  fous  les  règnes  de  C  harles 
VIll  &  Louis  XII.  Ce  dernier  Monarque 
parut  même  vouloir  lui  afTurer  la  préémi- 
nence ,  en  y  Bxant  la  Chambre  des  Comp- 
tes ;  mais  dans  la  fuite  tout  changea  de  face , 
&  Nantes  ne  put  que  cooferver  l'égalité. 


Lors  de  rétab'.iiïement  du  Parlement,  les 
deux  villes  firent  leurpoflible  pour  obtenir 
cette  Cour.  Pour  les  fatisfaire  ,  on  décida 
que  les  féances  feroient  partagées  entr'elles. 
Cet  arrangement  ne  fubhlla  pas  longtemps. 
Chacune  des  villes ,  voulant  l'emporter  fur 
fa  rivale,  mit  tout  en  oeuvre  pour  obtenir 
i:n  Arrêt  du  Confeil  tavorable  à  (es  pré- 
tentions. Rennes  fut  favorilée,  &  devoit 
l'être  par  les  raifons  qui  fe  trouvent  dé- 
taillées dans  l'Arrêt  du  Conleil  de  1580. 
Nantes  ne  renonça  pourtant  point  encore 
au  titre  de  capitale ,  &  demanda  qu'il  lui 
fût  confirmé  :  elle  obtint  même  un  Arrêt 
du  Confeil  à  ce  fujet  ;  mais  le  Parlement 
ne  l'enrégiftra  qu'avec  cette  clau/e  ,  fans 
préjudice  des  droits  de  la  viiie  de  Rennes,  Le 
Roi  Henri  IV  ,  par  fes  lettres  -  patentes 
données  à  Nantes ,  en  1 590,  qualifie  Nantes 
de  capitale  de  la  province. 

Cependant  Nantes  n'a  pu  conferverfon 
rang  :  on  s'eft  accoutumé  à  regarder  .Rennes 
comme  la  capitale  de  la  province.  C'eft 
dans  cette  ville  que  le  Gouverneur  fait  fa 
première  entrée  ;  que  le  Commandant  ré- 
fide;  que  le  Parlement  tient  fes  féances; 
que  l'Intendant  s'eft  fixé.  C'eft  dans  cette 
ville  ,  enfin  ,  que  les  Etats  de  la  province 
s'affemblent  ordinairement.  Bientôt  on  aura 
oublié  jufqu'aux  prétentions  de  la  ville  de 
Nantes.  En  vain  furpafl"era-t-e!le  fa  rivale 
par  fa  magnificence  &  fes  richelTes  ;  elle 
fera  plus  brillante-  mais  moins  confidérée 
que  celle  d'où  partent  les  loix  &  les  rè- 
glements. 


14  R  E  N 

fixieme  fiecles.  En  ^93  ,  l'Eglife  de  Saint-Melaine  fut  réduite  en 
cendres.  Salomon ,  Roi  de  Bretagne ,  la  fit  rebâtir  y  &  cette 
conftruftion  l'a  fait  regarder,  par  quelques  hiftoriens  ,  comme  le 
fondateur  de  cette  Abbaye.  La  Martiniere  combat  ce  fentiment,, 
&  attribue  cette  fondation  à  Saint  Paterne ,  Evêque  du  Mans. 
On  peut  prendre  un  milieu  entre  les  deux  opinions.  Il  eft  certain 
que  i'Evêque  Paterne  fit  conllruire  ce  Monaftere  ;  mais  il  eft 
douteux  s'il  y  attacha  des  revenus ,  &  s'il  y  plaça  des  Religieux. 
Salomon  lui  donna  des  biens  confidérables ,  mais  on  ne  fçait  en 
quel  temps  les  Moines  de  Saint-Benoît  l'habitèrent.  Salomon» 
voulut  être  enterré  dans  cette  Abbaye ,  dont  il  eft  reconnu  le 
principal  bienfaiteur.  Elle  a  été  depuis  attachée  à  la  Menfe 
épifcopale ,  &  les  Evêques  de  Rennes  en  font  les  Abbés  nés. 

658.  Les  Français  prennent  Rennes,  &  la  foumettent  à  la 
domination   du  Roi  Clovis. 

843.  Charles  le  Chauve,  Roi  de  France,  aflemble  fon  armée 
à  Poitiers,  &  vient  faire  le  fiege  de  Rennes.  Cette  ville  efi  fî 
bien  défendue  que  le  Monarque  eit  forcé  d'abandonner  fon  en- 
treprife. 

874.  Après  la  mort  de  Salomon,  Pafquiten  &  Gurvand ,  fes 
meurtriers,  fe  partagent  la  Bretagne.  Pafquiten  eut  ,  pour  fon 
partage  ,  Vannes  &  tout  le  pays  fitué  au  Midi  de  la  pro- 
vince ',  &  Gurvand  eut  le  Comté  de  Rennes.  Ces  deux  Comtes 
ne  vécurent  pas  long-temps  en  bonne  intelligence.  Pafquiten, 
gendre  de  Salomon  ,  plus  ambitieux  que  fon  rival,  voulant  régner 
feul ,  appella  une  troupe  de  Normands  à  fon  fecours ,  entra  fur 
les  terres  du  Comte  de  Rennes,  &  y  commit  les  plus  affreux 
ravages.  Il  marche  enfuite  contre  la  ville  &  l'affiege.  Les  habi- 
tants ,  étonnés  du  grand  nombre  des  ennemis  ,  prennent  la  fuite  -, 
il  ne  refte  à  Gurvand  qu'environ  mille  braves  difpofés  à  féconder 
fon  courage.  Ils  lui  repréfenterent  cependant  qu'il  n'étoit  pas  pof- 
fible  de  fe  foutenir  contre  une  fi  grande  armée  ,  &  s'efforcèrent  de 
lui  perfuader  qu'il  falloir  céder  aux  circonflances  &  attendre  une 
meilleure  occafion ,  &  qu'il  valoir  mieux  éviter  le  danger  que 
de  s'expofer  à  une  mort  certaine ,  en  réfiftant  à  une  armée  fi 
nombreufe.  Gurvand  ,  naturellement  intrépide ,  leur  répondit  que 
jamais  une  honteufe  fuite  ne  terniroit  la  gloire  qu'il  s'étoit  acquife 
dans  les  combats  ;  qu'il  préféroit  une  mort  glorieufe  à  la  honte  de 
vivre  dans  l'ignominie  &  l'exil  ;  &  que  la  viftoire  ne  dépendoit 
pas  toujours  du  nombre  des  combattants  &  de  l'aveugle  fortune  ^ 
mais  du  Dieu  des  armées  &  du  courage  des  foldats^  Ces  braves ,, 

excités. 


R  E  N  zj 

excités  par  ce  difcours ,  promirent  à  Gurvand  de  le  fuivre  &  de 
périr  avec  lui's'il  le  falloir.  Ils  firent  une  fortie ,  &:  attaquèrent  fî 
vigoureulement  l'ennemi  qu'ils  le  mirent  en  fuite.  Pafquiten  re- 
tourna dans  fes  Etats  ;  &  les  Normands  ,  échappés  du  carnage ,  fe 
retranchèrent  dans  l'Abbaye  de  Saint-Melaine ,  d'où  ils  n'olerent 
fortir  qu'à  la  faveur  de  la  nuit  ,  pour  fe  retirer  en  Heu  de  fureté. 
Raoul,  Chef  des  Normands,  avoit  époufé  la  fille  du  Roi  de 
France ,  qui  lui  avoit  donné  la  Neuflrie  &  la  fouveraineté  de  la 
Bretagne.  Ce  dernier  don  devoit  paroître  d'autant  plus  fîngulier, 
que  les  Rois  de  France  ne  jouifToient  de  cette  fouveraineté  qu'au- 
tant qu'ils  pouvoient  contraindre  (  a  ) ,  par  la  force  des  armes  , 
les  Bretons  à  la  reconnoitre.  Mais  le  Roi  qui  vouloit  s'attacher 
l'étranger ,  6c  qui  d'ailleurs  étoit  bien  aife  de  mettre  de  la  divi-» 
fion  entre  deux  peuples  redoutables,  confidéra  moins  la  juflice 
que  fes  intérêts  en  cette  occafion.  Le  Duc  Normand  ne  fut  pas 
plutôt  établi  dans  le  pays  qui  lui  avoit  été  afligné  ,  qu'il  fomma 
les  Comtes  de  Bretagne  de  venir  lui  rendre  hommage.  Ils  n'é- 
coutèrent cette  fommation  qu'avec  colère  ,  &  y  répondirent  avec 
indignation.  Raoul  entre  en  Bretagne  en  910,  &,  par  des  fuc- 
cès  multipliés ,  force  Berenger ,  Comte  de  Rennes ,  à  lui  faire 
hommage.  Cet  a6le  de  foumiffion  déplut  entièrement  au  peuple  j 
mais  la  Bretagne ,  trop  foible  pour  repouffer  les  efforts  de  fon 
ennemi ,  fut  obHgée  de  plier.  Dans  la  fuite  ,  les  Bretons  ne  vou- 
lurent point  acquiefcer  aux  prétentions  injuites  des  Normands, 
Fiers  de  leur  liberté ,  ils  bravèrent  à  la  fois  les  Rois  de  France 
&  les  Ducs  de  Normandie.  Les  hiftoriens  de  la  nation ,  refpec- 
tant  les  préjugés  du  peuple  ,  ont  quelquefois  palIé  fous  filence 
les  humiliations  auxquelles  la  force  des  armes  &  la  néceffiré 
força  les  Princes  Bretons  de  fe  foumettre.  Par  exemple ,  quel- 
ques-uns ont  prétendu  que  les  Ducs  de  Bretagne  n'ont  jamais 
rendu  hommage  aux  Ducs  Normands.  Pour  conferver  l'honneur 
de  la  nation,  il  ne  s'agiffoit  pas  de  taire  une  vérité  reconnue» 
Comme  ce  n'efl  pas  la  force  qui  fait  le  droit ,  il  falloit  exa- 
miner fi  les  prétentions  des  Normands  étoient  fondées ,  &  en  dé- 
montrer rinjuflice  ;  ce  qui  ne  paroît  pas  difficile.  Si  Pierre  de 
Dreux  &  fes  fucceffeurs  fe  font  fournis  à  faire  hommage  au  Roi 
de  France ,  par  devoir  ou  par  intérêt  de  fe  conferver  la  pro- 
ie6lion  de  cette  Couronne  ;  c'eft  ce  que  je  n'entreprendrai  pas  de 


(a)   DiiïertaiioQ  fur  le    Uroii  légitime» 

Tome  IK,  D 


i5  R  E  N 

démontrer ,  d'autant  plus  que  cette  queflion  eft  très-indifFérente 
aujourd'hui ,  puifque  la  province  a  le  bonheur  d'être  unie  à  la 
Couronne  :  je  ne  fuis  entré  dans  ce  détail  que  pour  prouver 
la  mauvaife  foi  des  auteurs  Bretons  au  fujet  de  l'hommage  rendu 
au  Duc  de  Normandie. 

1007.  Les  Bourgeois  de  Rennes  accordent  le  droit  de  Bouteil- 
lage  aux  Chanoines  de  leur  Eglife  Cathédrale.  Le  Duc  Geoffroi 
ratifie  cet  afte  de  piété ,  dans  la  même  Eglife ,  en  préfence  de 
la  Ducheffe  &  des    Barons. 

1020.  AfTemblée  des  Evêques  de  Bretagne  :  on  ne  fçait  dans 
quel  lieu.  Les  Prélats  approuvent  le  rétabhfïement  des  Monafteres  de 
Saint-Gildas  de  Rhuis  ,  de  Lominé  ,  &  de  Saint-Georges  de  Rennes. 
La  première  Abbeffe  de  cette  Maifon  fut  la  fœur  d'Alain,  Duc 
de  Bretagne ,  qui  dota  l'Abbaye.  Le  premier  terrein  qu'il  donna 
étoit  un  champ  qui ,  quoique  petit ,  dit  l'afte  de  concefTion , 
n'étoit  pas  à  méprifer  :  il  renfermoit  des  vignes  abondantes ,  des 
prairies  arrofées  par  une  rivière  poifTonneuié ,  &  deux  moulins. 
Ce  champ  touchoit ,  du  côté  du  Nord ,  au  chemin  public  ;  du 
côté  du  Midi ,  à  la  Vilaine  ;  du  côté  de  l'Orient ,  à  Saint-Me- 
laine  ;  &  du  côté  de  l'Occident ,  aux  fauxbourgs  de  la  ville. 
Le  Duc  leur  donna,  en  outre,  le  village  nommé  Taiteniac^  avec 
fon  Eglife ,  fes  biens  préfents  &  à  venir ,  &  exempta  de  toute 
impoiition  les  domaines  de  ces  Rehgieufes,  préfents  &:  futurs, 
&  leur  permit ,  dans  tous  les  lieux  de  fa  domination ,  d'acheter 
&  de  vendre  toutes  les  marchandifes  qu'elles  voudroient ,  6cc. 
Sur  la  fin  de  l'acte ,  le  Duc  enjoint  aux  Evêques  de  Bretagne  d'ex- 
communier le  premier  audacieux  qui  ofera  violer  ou  attenter  aux 
droits  ci-defTus  accordés.  Cette  pièce  efl  fignée  du  Duc  Alain  ;  de 
Junkeneus ,  Archevêque  de  Dol  \  &  de  tous  les  Evêques  de 
Bretagne.  L'Eghfe  du  Couvent  de  Saint-Georges  fut  bâtie  fur  les 
ruines  d'un  ancien  temple  ,  dont  on  apperçoit  encore  quelques 
veftiges,  qui  ont  été  adaptés  à  cette  Eglife  ;  elle  forme  une  des 
Paroiffes  de  la  ville.  L'Abbaye  de  Saint-Georges  ell  le  Monafliere 
le  plus  célèbre  &  le  plus  diftingué  de  la  province.  On  n'y 
reçoit  que  des  filles  de  condition  noble  ,  quoiqu'il  n'y  ait 
aucune  conftitution  pour  fondement  de  cet  ufage ,  qui  s'obferve 
plus  réguhérement  que  beaucoup  de  loix  folemnelles.  L'illuftre 
naifTance  d'Adelle  de  Bretagne,  fœur  du  Duc  Alain  III,  qui  fut 
la  première  Abbeffe  de  ce  Couvent,  où  elle  vécut  avec  des 
Demoifelles  du  premier  rang  ,  a  été  le  motif  de  Fexaftitude 
qu'on    apporte   à  n'admettre   dans   cette  Communauté   que  des 


R  E  N  xj 

perfonnes  de  la  première  diftinftion.  Parmi  les  Religieufes  de 
cette  Maifon ,  on  compte  phifieurs  PrincefTes  5  &  les  plus  an- 
ciennes familles  de  la  province  fe  font  toujours  fait  honneur  d'y 
confacrer  à  Dieu  des  Dames  de  leur  maifon.  C'eft  de  là ,  fans 
doute ,  que  font  venues  les  richeffes  immenfes  de  cette  Abbaye. 
On  fçait  qu'autrefois ,  pour  prendre  le  voile  comme  pour  porter 
le  capuchon  ,  il  falloit  faire  des  donations  confidérables  aux  Mo- 
nafleres  dans  lefquels  on  entroit.  Plus  on  ctoit  riche ,  plus  on 
exigeoit  ;  &  il  n'eft  pas  étonnant  qu'une  Communauté  qui  n'ad- 
mettoit  que  les  filles  de  grands  Seigneurs  ,  ait  trouve  le  moyen 
de  fe  faire  des  revenus  prodigieux. 

Le  Prieuré  de  Saint-Cyr ,  litué  à  l'extrémité  du  fauxbourg 
l'Evêque  ,  fut  fondé  ,  vers  l'an  1037  ,  par  le  Duc  Alain  III ,  qui 
prit,  à  ce  fujet,  l'avis  de  plufieurs  Abbés,  &  particulièrement 
de  Richard  ,  Abbé  de  Saint- Julien  ,  qui  fe  tranfporta  fur  les  lieux, 
&  convint  avec  le  Duc  de  faire  habiter  ce  nouveau  Monailere 
par  des  ReUgieux  de  {q\\  Ordre ,  dépendants  de  fon  Abbaye. 
Alain,  toujours  porté  à  favorifer  les  Moines,  donna,  en  1039  , 
le  dixième  de  la  Seigneurie  de  Rennes  à  l'Abbaye  de  Saint-Me- 
laine,  comme  nous  l'apprend  un  cartulaire  de  cette  Maifon.  Il 
fit  en  même  temps  frapper  des  fols  &  des  deniers  d'argent  à 
Rennes. 

1055.  GeoiFroi  le  Bâtard,  Comte  de  Rennes,  &  Berthe  de 
Dol ,  fon  époufe ,  font  rétabHr  l'Abbaye  de  Saint-Melaine ,  qui 
avoit  été  ruinée  par  les  malheurs  de  la  guerre ,  &  la  donnent 
à  Even,  Moine  de  Saint-Florent  de  Saumur,  qui  prit  le  titre 
d'Abbé. 

Eudon ,  Comte  de  Penthievre ,  tuteur  de  Conan  II ,  fait  frapper 
des  deniers  &:  des  fols  Rennois  ,  avec  une  efpece  de  mon- 
noie  appcUée  Popelicans  ou  Popelicains.  Le  11  Septembre  1066, 
le  Duc  Conan  meurt  en  commençant  la  guerre  contre  le  Duc 
de  Normandie  :  fon  corps  eft  transféré  à  Rennes  ",  &  porté  par 
les  quatre  Barons  de  Bretagne  dans  l'Eglife  de  Saint-Melaine, 
où  il  eft  enterré.  Berthe ,  Comteffe  de  Blois ,  n-iere  de  ce  jeune 
Prmce ,  donne  aux  Chanoines  de  l'Eglife  Cathédrale  de  Rennes, 
pour  prier  Dieu  pour  lui,  le  tiers  des  pâturages  qu'il  pofTédoit 
dans  la  forêt  de  Mon-Mohon.  Even,  Abbé  de  Saint-Melaine,  fe 
rend  recominandable  par  la  plus  fage  conduite.  Son  Abbaye , 
qui  ci-devant  ne  pouvoit  nourrir  que  quelques  Religieux  ,  eft 
rétabhe  dans  fa  première  fplendciu:  i  fcs  revenus  font  augmen- 
tés, &  fourmfTent  aux   befoms  de   cent    Moines.  L'Archevêquje 


î8  R  E  N 

de  Tours  affemble ,  en  1 079  ,  un  Concile  à  Rennes ,  où  fe  trouve 
le  Duc  Hoël.  Cette  aflemblée  décide ,  «  qu'un  homme  ,  à  qui 
»  Ton  a  impofé  une  pénitence  publique  ou  fecrette  pour  l'expia- 
»  tion  de  quelques  grands  crimes ,  ne  peut ,  en  fureté  de  conf- 
»  cience  ,  ni  s'appliquer  au  Commerce ,  ni  porter  les  armes ,  à 
»  moins  que  cenefoit  pour  la  défenfe  de  l'Ègliie  ,  de  la  patrie, 
»  ou  des  pauvres.  »  En  1080,  le  Duc  Geoffroi  donne  à  l'Ab- 
baye de  Saint -Georges  une  prairie  lituée  fur  les  bords  de  la 
Vilaine  ,  qui ,  depuis  ce  temps ,  a  pris  le  nom  de  prairie  de 
Saint-Georges.  Au  commencement  de  l'année  1084,  le  même 
Prince  cède  à  Sylveftre  de  la  Guerche  Evêque  de  Rennes, 
fon  droit  de  haute-Juftice  autour  de  l'Eglife  Cathédrale ,  du  faux- 
bourg  l'Evêque ,  &  dans  la  Paroiffe  de  Bruz  j  &  (qs  fucceffeurs 
en   ont  joui   jufqu'aujourd'hui. 

1084.  Hoël  II,  Duc  de  Bretagne,  meurt  le  13  Avril.  Alain 
IV ,  fon  fils  &  fon  fucceffeur ,  veut  aller  prendre  la  Couronne 
à  Rennes.  Geoffroi,  fon  oncle.  Comte  de  cette  ville,  lui  en 
refufe  l'entrée.  Ce  procédé  irrite  le  jeune  Duc ,  qui  vient  affiéger 
cette  place  ,  la  prend  d'affaut ,  &  Geoffroi  n'a  que  le  temps  de 
fe  déguifer  pour  fe  dérober  à  la  colère  de  fon  neveu.  Le  Prmce, 
fugitif,  s'enferme  dans  le  château  de  la  Guerche ,  a  huit  lieues 
trois  quarts  de  Rennes.  Alain  fe  fait  couronner,  &  envoie  contre 
la  Guerche  une  armée  qui  prend  prifonnier  fon  oncle ,  qui ,  deux 
ans  après ,  meurt  dans  fon  exil  à  Quimper.  L'année  fuivante 
1085  ,  Alain  époufe  à  Caen  Conffance ,  fille  de  Guillaume  le 
Conquérant ,  Roi  d'Angleterre.  L'arrivée  de  ces  deux  époux  à 
Rennes  eff  célébrée  par  des  fêtes  &  des  réjouiffances.  La  Prin- 
ceiîe  meurt  en  1090,  fans  pofférité ,  &  ell  enterrée  dans  l'Eglife 
de  Saint-Melaine.  En  TI19,  l'Abbé  &  les  Moines  de  Saint-Me- 
laine  font  excommuniés  ,  on  ne  fçait  pour  quelle  raifon  ;  &  le 
Pape  charge  l'Evêque  Marbodus  de  bien  faire  garder  l'excom- 
munication. 

Le  Duc  Alain  IV  ,  revenant  de  la  Terre-Sainte ,  où  il  avoit 
été  accompagné  par  un  grand  nombre  de  Seigneurs  Bretons , 
trouve  fon  Duché  rempli  de  défordres.  Pendant, fon  abfence,  les 
Grands  avoient  vexé  le  peuple ,  &  la  Juffice  n'avoit  point  été 
adminiffrée.  Pour  remédier  à  tous  ces  maux  &  en  tarir  la  fource , 
il  établit  un  Siège  de  Judicature  à  Rennes,  y  crée  un  Sénéchal, 
&  foumet  à  fon  Tribunal  tout  le  refte  de  la  Bretagne  ,  à  l'ex- 
ception du  Comté  de  Nantes.  Toutes  les  caufes  dévoient  reffortir 
devant  ce  premier  Tribunal ,  par  contredit ,  qui  étoit  une  forme 


R  E  N  '  .  ,  *9 

-de  réclamation  de  jugement  ou  d'appel.  Rennes  eu  affligée  de 
la  difette  en  1126.  Les  habitants  écrivent  au  Duc  Conan  le 
Gros  &  à  la  DuchefTe,  fa  mère  ,  leur  peignent  leur  fituation 
malheureufe,  leur  défefpoir  ,  &  leur  demandent  des  fecours. 
Deux  ans  après,  cette  ville  infortunée  eft  réduite  en  cendres.  Le 
Duc  Conan  a  la  douleur  d'être  témoin  de  ce  trifte  fpeftacle.  On 
continue  toujours  de  battre  monnoie  à  Rennes ,  &  le  Duc  con- 
firme, en  II 39  &  II 58,  à  l'Abbaye  de  Saint-Melaine ,  le  don 
que  lui  a  voit  fait,  en  1039,  le  Duc  Alain  III,  du  dixième  des 
monnoies  quife  faifoient  dans  cette  ville.  Ce  Prince  haulTe ,  environ 
le  même  temps  ,  le  prix  des  monnoies.  Cette  augmentation  de 
valeur  idéale  a  des  fuites  fâcheufes.  Le  peuple  de  Rennes  écrit 
au  Duc  que  ce  changement  a  fait  augmenter  les  denrées ,  qui 
étoient  déjà  trop  chères  ,  &  que  les  pauvres  font  réduits  au 
défefpoir;  il  finit  par  le  iuppUer  de  rétablir  les  choies  fur  l'an- 
cien pied.  L'expérience  a  prouvé  que  les  révolutions  dans  le 
prix  des  monnoies,  étoient  toujours  défavantageufes. 

II 40.  Ermengarde  d'Anjou,  veuve  du  Duc  Alain  III,  fonde 
le  Prieuré  de  Saint-Michel ,  &  fait  bâtir,  auprès  de  fon  château, 
une  petite  Chapelle  fur  une  tour  appellée  la'  Tour-au- Comte.,  où 
font  maintenant  les  prifons.  La  porte  de  Saint-Michel  s'appelloit  alors 
la  porte  C hôtelière.  L'année  fuivante  ,  le  Duc  Conan  fait  venir  un 
Rehgieux  de  l'Abbaye  de  la  Roë,  dans  l'Anjou,  pour  delTervir 
cette  Chapelle,  &  fonde  lui-même  la  Chapelle  de  Saint-La- 
zare ,  qu'il  donne  à  la  même  Abbaye ,  avec  tous  les  revenus 
attribués  au  Chapelain.  La  Chapelle  de  la  Magdeleine ,  dans  le 
fauxbourg  de  ce  nom ,  date  de  la  même  époque  ,  &  reconnoît 
le  même  fondateur.  Le  fimxbourg  de  la  Magdeleine  ne  porte 
ce  nom  que  depuis  1 400  ;  il  fe  nommoit  auparavant  le  faux^ 
bourg  du  Lazare, 

Alain  ,  furnommé  le  Noir ,  Seigneur  de  la  Rochederien  & 
Comte  de  Richemont ,  fils  cadet  du  Comte  de  Penthievre  ,  époufe 
Berthe  ,  fille  du  Duc  Conan  III.  Il  a  de  fon  mariage  un  fils , 
nommé  Conan,  &  deux  filles;  &  meurt  le  30  Mars  11 46, 
Berthe ,  fon  époufe  ,  prend  ,  en  fécondes  noces ,  Eudes  II  du 
nom ,  Vicomte  de  Porhoèt ,  à  qui  elle  porte  le  Duché  de  Bre- 
tagne après  la  mort  de  Conan  III ,  fon  père ,  arrivée  l'an  1 1 48. 
Conan ,  fils  d'Alain  ,  étoit  pafTé  en  Angleterre.  Après  la  mort 
de  fa  mère,  il  demande  du  fecours  au  Roi  d'Angleterre  pour 
chalTer  de  fon  Trône  le  Vicomte  de  Porhoët ,  fon  beau-pcre  , 
qui  l'occupoit  injuflement.   Le   Monarque    Anglais  fe  rend  à    fa 


30  REN 

prière,  &  Conan  repafTe  en  Bretagne  l'an  115 5  ou  11 5(5.  Les 
Bretons  de  ion  parti  fe  joignent  à  lui  &  prennent  quelques 
places.  Conan  met  le  fiege  devant  Rennes ,  eft  battu  &  forcé 
de  retourner  en  Angleterre.  Il  foilicite  &  obtient  de  nouveaux 
fecours_,  repafle  la  mer,  &,  plus  heureux  que  la  première  fois  , 
il  fe  rend  maître  de  la  ville ,  &  met  Eudon  dans  les  fers. 
D'Argentré  dit  que  cette  ville  étoit  alors  fort  étendue  &  bien 
fermée.  Je  le  crois ,  quant  au  fécond  point  ;  mais,  quant  au  pre- 
mier ,  il  paroît  qu'il  fe  trompe ,  li  l'on  en  juge  par  l'enceinte 
de  cette   ancienne  cité. 

Au  mois  de  Mai  1169,  &  non  115  5,  comme  le  prétend 
d'Argentré  ,  Geoffroi  d'Angleterre ,  fils  du  Roi  Henri  II ,  époufe 
Confiance  de  Bretagne  ,  fille  du  Duc  Conan  IV ,  &  vient  avec  fou 
époufe  &  le  Roi ,  fon  père ,  à  Rennes ,  où  ils  font  tous  magni- 
fiquement reçus  par  l'Evêque  &  le  Clergé.  Geoffroi  eft  reconnu 
Duc  de  Bretagne  ,  &  prend»  poffefîion  de  ce  Duché  dans  cette 
ville.  Conan  IV  fe  voit  ainii  dépouiller  de  fa  Couronne  fans 
ofer  proférer  la  moindre  plainte ,  &  le  Monarque  Anglais  gou- 
verne la  Bretagne  ,  au  nom  de  fon  fils ,  depuis  1 1 69  jufqu'en 
II 82,  que  le  jeune  Prince,  parvenu  à  l'âge  de  majorité  ,  prend 
lui-même  les  rênes  de  fes  Etats. 

II 76.  Synode  provincial ,  alïemblé  à  Rennes  par  l'Archevêque 
de  Tours  :  on  ignore  les  aftes  de  ce  Concile.  L'an  1 1 80 ,  l'E- 
vêque Philippe  fait  commencer  la  démolition  de  fon  Églife 
Cathédrale  qui  menaçoit  ruine ,  &  la  fait  rebâtir  dans  le  même 
lieu ,  mais  fur  un  plan  nouveau.  Un  hillorien  de  Bretagne  dit 
que  ce  Prélat  n'avoit  point  d'argent  pour  cette  enîreprife  ^  mais 
que ,  perfuadé  qu'il  trouveroit  un  tréfor  dans  la  démolition  de 
l'édifice  ancien ,  il  n  héfita  point  à  commencer  l'exécution  de 
fon  projet.  Il  ne  fut  pas  trompé  dans  fon  efpérance  :  il  trouva, 
félon  le  même  auteur ,  autant  d'argent  qu'il  en  falloit  pour  la 
confeftion  de    l'ouvrage. 

II 82.  Geoffroi  d  Angleterre  ,  Duc  de  Bretagne  ,  âgé  de  vingt- 
un  ans  ,  prend  en  main  le  gouvernement  de  lés  Etats.  Son  père 
veut  le  forcer  à  rendre  en  même  temps  hommage  à  Henri ,  fon 
frère  aîné ,  Roi  d'Angleterre  &  Duc  de  Normandie ,  &  au  Roi 
de  France  Louis  le  Jeune.  Le  Duc  &  les  Seigneurs  refufent 
nettement  d'obéir.  Henri ,  outré  de  ce  refus ,  envoie  en  Bre~ 
tagne  une  armée ,  qui  prend  Rennes  &  met  cette  ville  à  feu  & 
à  iang.  Geoffroi  accourt  à  fon  fecours ,  mais  trop  tardj  il  ne 
lui  refte  que  la  coiifolatioa  de  réparer  les,  ruines  de  cette  ville 


R  EN  ji 

faccagée.  Il  y  afTemble  fes  Etats  en  1185,  ^  7  P^"^^  ^^ 
fameule  loi  concernant  le  partage  des  fiefs  de  Baronnie  &  de 
Chevalerie  entre  aînés  &  cadets  nobles.  Cette  Ordonnance  efl 
encore  appellée  l'ajjife  du  Comte  GeoffroL  (  Voyez  le  tome 
premier,  page  cxvij.  ) 

Les  Moines  de  Saint -Melaine  ,  à  la  mort  de  leur  Abbé, 
avoient  coutume  de  choifîr  Ion  fiiccelTeur  parmi  les  Religieux 
du  Couvent  de  Saum.ur,  lorfqu'il  ne  fe  trouvoit  perfonne  parmi 
eux  capable  d'occuper  cette  place.  L'Abbé  étant  mort  l'an 
II 84  ou  1 185  ,  ils  procédèrent  à  l  ele6lion ,  &  nommèrent  un 
des  leurs.  Le  Duc  Geoiiroi ,  apparemment  fâché  de  n'avoir  pas 
été  appelle  au  Chapitre ,  ou  confulté  fur  le  choix  ,  fit  enlever 
l'élu  ,  &  traita  les  Moines  avec  la  dernière  rigueur.  L'Abbé , 
pour  appaifer  le  Prince ,  fe  démit  de  fa  place ,  &  les  Pveligieux 
de  Saint-Melaine  jetterent  les  yeux  fur  un  fujet  du  Couvent  de 
Saumur.  Cette  éleélion  ne  fut  pas  plus  du  goût  de  Geoffroi 
que  la  première.  Ce  Prince  nomma  un  Moine  d'une  autre 
Maifon ,  &  le  mit ,  par  force  ,  en  pofîeffion  de  fa  place.  Une 
conduite  fi  oppofée  aux  principes  de  l'Eglife ,  fit  fuir  prefque 
tous  les  Bénédidins  de  Saint-Melaine.  Ils  fe  retirèrent  à  Saumur, 
&  inftruifirent  le  Pape  de  ce  qui  fe  pafibit.  Le  Pontife  écrivit 
fur  le  champ  à  FEvêque  d'Angers,  à  l'élu  de  Nantes  ,  &  à 
l'Abbé  de  Thouars ,  &:  les  chargea  de  fe  rendre  à  Saint-Me- 
laine ,  de  choifir  éanoniquement  un  fujet  ,  &  de  l'établir 
Abbé  de  cette  Maifon ,  en  vertu  du  pouvoir  qu'il  leur  donne , 
malgré  les  Moines  eux-mêmes,  s'ils  ofoient  s'y  oppofer.  On  ne 
fçait  point  la  fuite  de  cette  affaire;  mais  il  eft  à  croire  que 
les  ordres  du  Pape  furent  exécutés.  L'an  1194  ,  la  DuchefTe 
Confiance  accorda  à  l'Abbaye  de  Saint-Melaine  le  droit  de 
faire  rendre  la  jultice  à  fes  vafiaux  j  elle  ne  fe  réferva  que  le 
droit  de  glaive. 

Pierre  de  Dinan  ,  Evêque  de  Rennes ,  établit  quatre  Cha- 
noines-Réguhers  dans  fon  Eglife  Cathédrale ,  &  leur  affigne  des 
fonds  &  des  revenus  pour  leur  fubfiftance  ,  à  la  charge  d'y 
afllfter ,  comme  les  autres  Chapelains  ,  à  toutes  Heures  cano- 
niales, &  d'y   célébrer   la  MelTe. 

Les  Chapellenies  de  Saint-Michel  &  de  Saint-Lazare,  fondées 
par  la  Duchefie  Ermengarde  &  le  Duc  Conan  III ,  ayant  été 
données  au  Chapitre  de  la  Cathédrale,  furent  réunies ,  pour  être 
defiervies  dans  la  fuite  par  un  feul  Religieux  de  l'Abbaye  de 
la  Roë ,  qui  devoit  fervir  de  Chapelain  dans  la  Cathédrale.  Les 


32.  ï^EN 

Moines  &  le  Chapitre  convinrent  &  décidèrent ,  «  que  le  R-eligieur 
»  leroit  nommé  &  choifi  par  le  Chapitre  ;  qu'il  aflifteroit  à  toutes 
»  les  Heures  canoniales  dans  la  Cathédrale  ;  qu'on  lui  afligneroit  un 
»  autel  particulier  pour  dire  la  MelTe  ;  &  ,  qu'au  cas  que  ,  forcé. 
»  d'aller  la  célébrer  dans  la  Tour-au-Comte ,  il  ne  pût  la  dire  dans 
»  la  Cathédrale  ,  il  feroit  tenu  de  la  faire  acquitter  par  un  Prêtre 
»  féculier.  »  On  fit  plufîeurs  autres  arrangements  pour  établir 
une  parfaite  union  entre  l'Evêque ,  les  Chanoines ,  les  Chape- 
lains ,  &  les  Moines ,  non-feulement  pour  ce  qui  concernoit  le 
fpirituel ,  mais  même  encore  le  temporel  ;  &  le  tout  fut  approuvé 
par  l'Evêque  Pierre  de  Dinan,  l'an  1206.  L'original  efl  aux  ar- 
chives du  Chapitre ,  avec  plufieurs  pièces  de  procédures  pour 
faire  exécuter  le  règlement  ;  mais  on  n'a  pu  jufqu'ici  y  réuffir.. 
Les  Moines  ne  font  point  de  réfidence ,  &  n'ont  point  dit  la 
Meffe  qu'ils  doivent  tous  les  jours ,  depuis  l'année   1656. 

L'Abbaye  de  Rillé  fourniffoit  d'abord  &  afïez  exaftement  quatre 
Chapelains  à  l'Eglife  Cathédrale  de  Rennes  ^mais  fans  aucune  obli- 
gation. Le  Chapitre  ,  par  reconnoiflance ,  donna  à  ces  Chapelains 
la  Chapelle  de  Saint-Denis  ,  {ituée  fur  fon  fief,  avec  fes  dépen- 
dances ,  quelques  maifons  pour  fe  loger ,  &  autres  revenus  pour 
leur  fubfiftance.  Ces  Rehgieux ,  dégoûtés  dé  leurs  occupations  5 
fe  retirèrent  ,  fous  divers  prétextes,  dans  leur  Abbaye.  Le  Cha- 
pitre ,  voyant  que  l'Abbé  favonfoit  cette  évafion ,  fans  les  obliger 
à  renoncer  aux  revenus  &  aux  domaines  qu'on  leur  avoir  aiîi- 
gnés ,  fe  pourvut  contre  eux  en  Jullice.  Après  de  longues  procé- 
dures, on  confentit  enfin  à  un  accommodement,  qui  fut  propofé 
par  les  Moines.  On  convint ,  que  l'Abbaye  ne  fourniroit  pas  au- 
tant de  Moines  que  par  le  paflé  ;  qu'au  lieu  de  vingt  livres  qu'on 
payoit  ci-devant  au  Prieur ,  il  n'auroit  que  vingt  fols ,  le  relte 
demeurant  au  Chapitre  ;  que  la  Cure  feroit  préfentée  par  le 
Prieur ,  qui  feroit  tenu  à  réfider  &  affifter  exa^lement  aux  Offices 
de  jour  6c  de  nuit,  &  à  dire  ou  faire  dire  ,  félon  la  coutume, 
la  MefTe  à  l'autel  de  Saint  André.  Cet  accommodement  fut  ac- 
cepté &  ratifié ,  en  1 3  5 1  ,  par  les  parties  ;  mais  les  conventions 
n'ont  point  été  rempUes.  Les  Prieurs  ont  perçu  les  revenus  fans 
acquitter  les  charges ,  malgré  les  fentences  &  jugements  obtenus 
contre  eux.  Les  originaux  font  aux  archives  du  Chapitre  :  ils  prou- 
vent l'injuitice  &  la  mauvaife  foi  des  Moines,  qui  ,  depuis  165(5, 
n'ont  célébré  aucune  des  Meffes   qu'ils  doivent  tous  les  jours. 

1210.  L'Archevêque  de  Tours  alTemble  un  Concile  à  Rennes. 
On  y  termine  la  conteflation  entre  l'Evêque  de   Quimper  & 

Gui 


R  E  N  3j 

Gui  de  Thouars ,  Duc  de  Bretagne ,  au  fujet  du  château  que  ce 
dernier  avoit  fait  bâtir  contre  les  murs  de  Quimper.  Le  Prince, 
qui  avoit  été  excommunié ,  reconnoît  Tes  torts ,  fait  démolir  la 
maifon,  &   en  donne  tous  les  matériaux  au  Prélat. 

121 5.  Pierre  de  Dreux,  Duc  de  Bretagne,  par  fon  ma- 
riage avec  Alix ,  héritière  de  ce  Duché ,  va  prendre  la  Cou- 
ronne à  Rennes.  Pierre  de  Fougères ,  ci-devant  Chancelier  du 
Duc  Artur ,  alors  Evêque  de  ce  diocefe ,  fait  la  cérémonie 
du  couronnement  ,  que  nous  allons  détailler  ici  pour  la  fatis- 
fa6lion  des  leéleurs. 

Les  Ducs  fe  préfentoient  à  la  porte  Mordelaife ,  &  ,  avant 
d*entrer ,  ils  juroient  de  conferver  la  Foi  Catholique  ,  de  pro- 
téger l'Eglife  de  Bretagne  ,  de  défendre  fes  libertés ,  de  gouverner 
fagement  fon  peuple ,  &  de  lui  rendre  une  exafte  juftice.  Ils 
entroient  enfuite  dans  la  ville ,  &  pafToient  le  jour  &  la  nuit 
devant  l'autel  de  la  Cathédrale  ,  jufqu'après  les  Matines  du  len- 
demain. Après  les  Vêpres  &  les  Comphes ,  le  Prince  fe  rendoit 
à  fon  logis  &  s'y  repofoit.  Avant  la  Grand'Mefle  du  jour  fui- 
vant ,  on  alloit  proceiïlonnellement  le  chercher.  Il  fortoit  de  fa 
chambre  à  l'arrivée  de  la  proceflion  ;  &  l'Evêque  ,  en  habit 
pontifical  ,  récitoit  les  prières  d'ufage.  Deux  autres  Evêques , 
aufli  en  habit  de  chœur  ,  fe  plaçoient  à  droite  &  à  gauche  du 
Prince,  &  l'on  retournoit  à  l'Eglife  :  les  Barons  &  le  peuple 
fuivoient.  On  faifoit  deux  ftations ,  l'une  à  la  porte  de  l'Eglife , 
l'autre  à  l'entrée  du  chœur,  A  ce  dernier  endroit ,  on  donnoit  à 
deux  Chanoines  l'épée  &  le  cercle  Ducal,  &  l'on  entroit  dans  le 
chœur ,  que  l'on  avoit  eu  foin  d'orner  magnifiquement.  Le  Duc 
étoit  conduit  par  les  Evêques  jufqu'au  maître-autel ,  où  il  fe 
mettoit  à  genoux  fur  fon  prie-Dieu.  L'Evêque  de  Rennes  fe  pla- 
çoit  à  fes  côtés  fur  un  autre  prie-Dieu ,  &  commençoit  l'hymne 
Veni ,  Creator^  après  laquelle  on  chantoit  les  Litanies  des  Saints, 
&  on  demandoit  la   bénédiftion  du  Ciel  pour  le  Duc. 

Pendant  ces  difTérentes  prières ,  le  plus  ancien  des  Chanoines , 
au  côté  droit  de  l'autel ,  tenoit  à  la  main  l'épée  nue  j  &  un  autre 
Chanoine  ,  au  côté  gauche ,  tenoit  le  cercle  Ducal.  Toutes  les 
Oraifons  finies  ,  le  Chanoine  donnoit  l'épée  à  l'Evêque ,  qui 
la  béniffoit ,  &  la  préfentoit  au  Duc  ,  en  lui  difant ,  à  voix 
moyenne  :  On  vous  donne  cette  épée  au  nom  de  Monfeigneur  Saint 
Pierre  ,  comme  on  L'a  donnée  aux  Rois  &  Ducs ,  vos  prédécejfeurs , 
en  Jîgne  de  Jufiice ,  pour  défendre  l'Eglife  Ù  le  peuple  qui  vous 
ç[i  commis ,  en  Prince  équitabU^  Dieu  veuille  que  ce  foit  par  ceue 
Tome  IF.  E 


34  R  E  N 

manière  que  vous  en  puijjie':^  rendre  vrai  compte  au  jour  du  jugement , 
au  fauvemem  de  vous  &  dudit  peuple» 

Le  Prélat  lui  ceignoit  enfuite  1  epée  ,  &  lui  pofoit  le  cercle 
Ducal  fur  la  tête  ,  en  difant  :  On  vous  baille  ,  au  nom  de  Dieu 
&  de  Monfeigneur  Saint  Pierre  ,  ce  cercle  qui  déjigne  que  vous 
receve^  votre  puijfance  de  Dieu  y  le  Tout-puijfant ,  puifqu  étant  rond  y  ~ 
il  n'a  ni  fin  m  commencement.  Ce  Dieu  vous  réjerve  une  couronne 
plus  durable  daîis  le  Ciel ,  fi  vous  remplijfe:^  vos  devoirs ,  en  con- 
tribuant ,  par  vos  foins  ,  à  l'exaltation  de  la  Foi  ^&  à  la  tranquillité 
de  V Egiife    &   de    vos  Jujets, 

Après  cette  cérémonie ,  le  Duc  montoit  à  l'autel ,  &  faifoit 
le  ferment  ordinaire  ,  en  la  forme  qui  fuit  :  Vous  jurei  à  Dieu , 
difoit  TEvêque ,  &  à  Monfeigneur  Saint  Pierre  ,  fur  les  faints 
Evangiles  &  les  faintes  Reliques  qui  font  ici ,  que  vous  con- 
ferverez  les  libertés,  franchifes ,  immunités ,  &  coutumes  de 
l'Eglife  de  Rennes  \  que  vous  ne  ferez  aucun  tort  ,  aucune  in- 
juliice,  ni  à  nous  ,  ni  à  vos  autres  fujets;  &  que  vous  ferez 
rendre  la  juftice  félon  votre  pouvoir.  Le  Duc  mettoit  la  main 
fur  l'autel,  &  répondoit  ,  Amen.  Il  retournoit  enfuite  à  fon  prie- 
Dieu  ,  &  l'Evêque  ,  après  quelques  Oraifons ,  commençoit  le 
Te  Deum  ;  après  quoi ,  on  faifoit  une  autre  proceffion  à  la- 
quelle alTiftoit  le  Duc ,  l'épée  à  la  main^  De  retour  à  l'autel , 
on  la  mettoit  dans  le  fourreau,  &  on  la  donnoit  au  Maréchal, 
qui  la  tenoit  pendant  la  Meiïe.  Tandis  que  le  Prélat  étoit  à  s'ha- 
biller ,  le  Duc  recevoit  l'hommage  de  fes  Barons ,  &  affiftoit 
enfuite  à  la  Melie  du  Saint- Efpnt  qu'on  céiébroit  fur  le  champ. 

1222.  Le  Chapitre  de  Tours  demande  à  Pierre  de  Fougères, 
Evêque  de  Rennes ,  la  permilîion  de  faire  une  quête  dans  fon 
diocefe  pour  les  malheureux  ruinés  par  la  guerre.  Après  la  mort 
de  celui-ci,  Jofîèlin  de  Montauban ,  fon  fuccefTeur ,  voulant 
avoir  dans  fa  Cathédrale  deux  Religieux  de  l'Abbaye  de  Saint- 
Jacques  de  Montfort ,  donna  à  cette  Maifon  l'Eglife  paroifîiale 
du  bourg  des  Comptes ,  avec  tous  les  revenus  qui  en  dépen- 
doient.  Le  devoir  de  ces  Religieux  étoit  de  fervir  au  chœur  de 
l'Eglife  Cathédrale  ,  &  d'y  aliifter  à  tous  les  Offices.  L'afte  fut 
drefîe  &  arrêté  dans  un  Chapitre  général ,  tenu  le  lendemain  de 
la  Chandeleur.  Trois  ans  après  ,  la  fondation  fut  augmentée 
d'une  Chapellenie  nouvellement  dorée  par  Guillaume  Berenger, 
Chanoine  &  Scholaftique  de  Rennes ,  pour  le  fonds  de  laquelle 
les  Moines  de  Saint- Jacques  de  Montfort  donnèrent  les  deux  tiers 
des  dîmes  qui  leur   appartenoient  dans  la   FaroifTe   de   Lang;.in, 


R  E  N  }^ 

au  diocefe  de  Dol.  Les  deux  Moines  appelles  troîîv  ans  après 
pour  le  fervice  de  la  Cathédrale  ,  furent  donc  chargés  de  deC- 
fervir  cette  Chapelle ,  moyennant  les  dîmes  de  Langan  ,  dont 
leurs  fuccefTeurs  ont  joui  jufqu'à  préfent. 

Les  Prieurs  de  Saint-Mauran  ont  réfidé  aflez  exaftement  dans 
ces  derniers  temps  ;  mais  ils  n'ont  rendu  aucun  fervice  au  chœur , 
&  n'ont  acquitté  aucune  Meffe  depuis  1656.  Ils  ne  doivent  que 
quatre  Meffes  par  femaine ,  comme  nous  l'apprenons  d'une  fen- 
tence  de  l'Officialité  de  Rennes,  rendue  dès  l'année  1401.  Cette 
pièce ,  qui  condamne  le  Prieur  de  ce  temps  à  célébrer  ou  faire 
célébrer  quatre  Melîes  par  femaine  à  l'autel  de  Saint-Jacques , 
dnns  la  Cathédrale ,  prouve  que  ce  n'eft  pas  d'aujourd'hui  que  les 
fondations   ne  font  point   acquittées. 

123  I.  Adam,  Chanoine  &  Tréforier  du  Chapitre  de  Rennes, 
fonde  ,  dans  fa  Cathédrale ,  une  Chapellenie  ;  pour  le  fonds  de 
laquelle  il  donne  fa  bibHotheque  ,  qui  étoit  coniidérable  pour  le 
temps.  Les  Rehgieux  de  l'Abbaye  de  Paimpont,  au  diocefe  de 
Saint-Malo ,  demandèrent  cette  bibUotheque ,  qui  leur  fut  accor- 
dée aux  conditions  fuivantes  :  1°.  de  fournir  un  de  leurs  Reli- 
gieux ,  qui  feroit  tenu  de  célébrer  tous  les  jours  la  Méfie  ,  Se 
d'afiiller  de  jour  &  de  nuit  aux  Heures  canoniales.  2^.  De  lui 
afligner  un  revenu  fur  &  fuffifant  pour  fa  fubfiftance.  3*^.  De 
ne  point  le  révoquer ,  fi  ce  n'eft  pour  quelques  excès  j  &  ,  en 
ce  cas ,  d'en  envoyer  un  autre ,  au  choix  du  Chapitre.  En  con- 
féquence ,  l'Abbé  &  les  Moines  de  Paimpont  offrirent  trente  quar- 
tiers de  bled  à  prendre  fur  les  dîmes  qui  leur  appartenoient  dans 
la  Paroifie  de  Meffac.  Ces  trente  quartiers  produifent  maintenant 
quatre  cents  boifieaux  ,  qui  valent ,  année  commune  ,  environ, 
huit  cents  livres  de  revenu.  En  1237,  on  défîgna  au  Prieur  la 
petite  Chapelle  de  Saint-Martin  ,  qui  fubfifte  encore  près  l'Hôtel 
de  Ville  ,  pour  y  célébrer  la  Méfie.  Le  tout  fut  approuvé  &  ra- 
tifié par  les  Rehgieux  de  Paimpont ,  qui  reconnurent  avoir  été 
faifis  de  la  bibliothèque.  Quand  la  Chapelle  de  Saint-Martin  ne 
fut  plus  en  état,  on  donna  au  Prieur  la  liberté  de  la  célébrer 
à  l'un  des  autels  de  la  Cathédrale,  Un  de  fes  fuccefieurs  s'étant 
enfuite  plaint  que  la  maifon  de  fon  Prieuré  étoit  fi  mauvaife , 
faute  de  réparations ,  qu'il  ne  pouvoit  y  féjourner  plus  long-temps 
fans  rifquer  de  perdre  la  vie  ,  Bertrand  de  Marillac  ,  alors  Evéque 
de  Rennes ,  &  fon  Chapitre  ,  ajoutèrent  à  la  fondation,  en  1 568, 
la  Chapellenie  de  Dom  Raoul  Hurel ,  chargée  d'une  Melle  au 
jour  de  lundi  ^  &  la  mailbn  qui  lui  cfl  affeÛée  vaut  encore  au 


36  R  E  N 

Prieur  trois  cents  livres  de  revenu  en  logements  :  il  s  efl  trouvé 
chargé  de  huit  Mefles  par  femaine  en  acquit  des  deux  fondations. 
Le  tout  eft  conftaté  par  aftes  dépofés  aux  archives  du  Chapitre. 
Wais ,  malgré  tous  les  bienfaits  des  Evêques  &  des  Chanoines, 
les  Prieurs  n'ont  d'autre  foin  que  celui  de  percevoir  les  revenus, 
fans  fe  foucier  d'acquitter  les  fondations  auxquelles  ils  font  tenus. 
Le  Chapitre  ,  ennuyé  de  l'ingratitude  des  Moines  &  de  leur  mau- 
vaife  foi,  s'en  plaignit  en  JulHce ,  l'an  159^.  Le  Préfidial  &  le 
Parlement  les  condamnèrent  fuccefîivement  à  faire  réiidence  & 
à  afliiler  à  l'un  des  pupitres  du  chœur  j  &,  en  cas  de  refus, 
ils  autoriferent  les  Chanoines  à  faifir  les  revenus  du  Prieuré.  Ces 
jugements  n'ont  point  été  exécutés.  Frère  du  Breil  ,  pourvu  de 
ce  Prieuré  en  l'an  1 7 1 9 ,  a  bien  fait  réfîdence  dans  la  ville 
pendant  dix  ans  ;  mais  il  n'a  point  affifté  au  chœur  ,  &  par  con- 
féquent  n'a  point  rempli  fon  devoir.  Le  Chapitre  ,  voulant  pour- 
fuivre  l'affaire ,  fe  mit  en  devoir  de  faire  faifir  les  revenus  des 
Prieurés.  Les  Prieurs ,  voyant  cette  façon  d'agir ,  fe  joignirent 
tous  enfemble  ,  &  prétendirent  qu'étant  Chanoines-Réguhers  ils 
dévoient  avoir  le  rang  &  le  pas,  immédiatement  après  les  Cha- 
noines ,  devant  les  Semi-prébendés   &  le  bas-chœur. 

1237.  Pierre  de  Dreux,  Duc  de  Bretagne,  fait  creufer  de 
nouveaux  foffés  autour  de  la  ville  :  ils  font  connus  ,  dans  les 
anciens  titres,  fous  le  nom  de  Fojps-Gahier  -,  ils  s'étend  oient  d'un 
côté  jufqu'aux  mouHns  du  fauxbourg  l'Evêque ,  &  de  l'autre  côté 
jufqu'au  puits  ou  fontaine  de  Beaumont.  C'eft  ce  que  nous  ap- 
prend la  réformation  de  l'année  144  5,  qui  dit,  que  le  Duc  pof- 
lédoit  des  fonds  près  la  Verrerie ,  fous  le  nom  de  Fojfés-Gakier, 
Cette  même  année  1237,  Pierre  de  Dreux  affemble  fes  Etats  à 
Rennes ,  &  abdique  la  Couronne  en  faveur  de  Jean  I ,  dit  le 
Roux ,  fon  fîis ,  qui  eft  reconnu  fur  le  champ  Duc  de  Bretagne 
par  l'affemblée.  Le  Prince  va  tout  de  fuite  rendre  hommage 
de  fon  Duché  au  Roi  ,  &  revient  à  Rennes  ,  où  il  fait  fon 
entrée ,  &  fe  fait  couronner  par  l'Evêque  Jean  Gicquel ,  le  1 8 
Novembre. 

Les  Abbé  &  Moines  de  Saint-Melaine  avoient  juré  de  ne  point 
donner  leurs  Bénéfices  à  des  Prêtres  féculiers  -,  fans  doute ,  parce 
qu'ils  penfoient  pouvoir  les  deffervir  eux-mêmes.  Dans  la  fuite, 
ils  fe  repentirent  de  leur  ferment ,  &:  ils  auroient  bien  voulu  le 
faire  annuller.  Ils  firent  part  de  leur  embarras  au  Légat  du 
Pape ,  qui  donna  commifîlon  à  l'Evêque  de  Rennes  de  les  re- 
lever de  leur  ferment  j  ce  qu'ils  firent   l'an  1243.   A  la  même 


REN  57 

époque  ,  Geoffroi  de  Pouencé  &  Geoffroi  de  la  Guerche  fondè- 
rent, dans  la  Cathédrale,  la  Chapellenie  de  Saint  -  Martin.  Le 
Prieur  de  Saint-Martin  de  Rennes  ,  Chanoine-Régulier  de  l'Abbaye 
de  Paimpont ,  fut  chargé  de  la  deffervir  dans  la  Cathédrale.  Les 
Evéques  de  Rennes  8l  de  Saint-Malo  foufcrivirent  à  cette  fon- 
dation. 

1265.  L'Evêque  Maurice  de  Treziguidi  cite  le  Duc  de  Bre- 
tagne à  la  Cour  du  Roi  de  France ,  pour  y  répondre  aux  plaintes 
qu'il  portoit  contre  lui.  Le  Prince  ne  veut  point  fe  foumettre  à 
cet  ajournement ,  &  fe  contente  d'écrire  au  Roi  que  ,  s'il  ell  né- 
cefTaire  qu'il  plaide  à  fa  Cour,  il  va  citer  l'Evêque  à  y  com- 
paroître  ,  pour  lui  faire  raifon  des  entreprifes  continuelles  qu'il 
formoit  fur  fa  Jurifdiftion.   Le  Prélat  eft  obligé  d'en  relier  là. 

1273.  Le  22  Mai,  fe  fait  l'ouverture  du  Concile  affemblé  à 
Rennes ,  par  Jean  de  Montforeau  ,  Archevêque  de  Tours.  Il  nous 
rerte  fept  Canons  de  ce  Synode  provincial.  Le  premier  porte 
excommunication  contre  celui  qui  frappera  un  Evêque,  un  Abbé, 
ou  une  Abbeffe ,  &  le  déclare  ,  s'il  efl  Clerc  ,  privé  de  fes  Béné- 
fices &  inhabile  à  en  pofTéder  de  nouveaux  ;  & ,  s'il  efl  Laïque, 
incapable ,  lui  &  fa  pollérité  jufqu'à  la  troifieme  génération ,  de 
recevoir  la  Tonfure.  Le  fécond  veut  que  ,  puifque  les  biens  des 
Eccléfîalliques  font  le  patrimoine  des  pauvres ,  &  leur  maifon  com- 
mune à  tout  le  monde ,  les  Gens  d'Eglife  doivent  leur  donner 
tout  leur  fuperflu,  &  qu'une  conduite  contraire  efl  une  ufurpa- 
tion  damnable.  Il  ajoute  qu'on  ne  peut  légitimement  affermer 
une  Eglife  paroifTiale  ,  fans  laifTer  au  fermier  une  portion  fuffi- 
fante  pour  exercer  l'hofpitalité.  Le  troifieme  &  le  quatrième  font 
l'explication  de  ce  dernier  :  ils  enjoignent  aux  Êccléfîafliques 
d'exercer  l'hofpitalité  ,  de  recevoir  les  pauvres  dans  leurs  maifons, 
de  les  confoler,  &  de  loger  les  paffants. 

1286.  Les  archives  du  château  de  Nantes  confervent  un  con- 
trat de  cette  année  ,  qui  porte  que  Hamon  de  Plumaugat  vendit 
au  Duc  Jean  I  une  rente  de  quarante-cinq  livres  monnoie  fur  la 
cohue  de  Rennes ,  que  le  Sieur  de  Plumaugat  avoit  achetée  de 
Raoul  de  Montfort.  Cette  rente  coûta  au  Duc  une  fomme  de 
fix  cents  foixante-quinze  livres. 

Les  Evêques  de  Rennes  &  de  Dol  étoient  exempts  de  fuivre 
en  perfonne  le  Duc  à  la  guerre  -,  mais  ils  étoient  obligés  d  y  faire 
marcher  leurs  vaffaux.  En  1294,  le  Duc  ,  ayant  alfemblé  fon 
armée ,  les  hommes  du  fief  de  l'Evêque  de  Rennes  y  furent  en- 
voyés,   à  l'exception  pourtant  du  Camérier,  du  Muletier,  du 


58  REN 

Boulanger,  &  du  Fournier  du  Prélat,  qui  en  étoîent  exempta* 
En  1303,  l'Evêque  Egide  fe  ibumet  à  faire  ferment  de  fidélité 
au  Duc ,  &  à  le  reconnoître  pour  fon  Souverain.  L'Eglife  com- 
mençoit  à  abandonner  fes  prétentions  ridicules ,  &  les  Princes 
étoient  réfolus  de"  brifer  une  idole  qu^ils  avoient  trop  long-- 
temps  révérée.  En  1315,  pendant  les  Etats  aflemblés  à  Ren- 
nes ,  les  Prélats  Bretons  reconnoiffent  publiquement  le  Duc 
pour  le  garde  naturel  &  légitime  de  leur  Eglife ,  &  avouent 
qu'en  cette  qualité  il  a  le  droit  de  percevoir  les  fruits  &  re- 
venus des  Evêchés  vacants.  Ils  reconnoiffent  de  plus  ,  que  leurs 
Jurifdiftions  doivent  reffortir  au  Parlement  du  Duc ,  &  qu'ils 
ne  peuvent  appeller  des  fentences  de  ce  Parlement  ailleurs  que 
devant  le  Pape.  Cette  déclaration  ,  qui  annonce  la  chute  d'un 
pouvoir  illégitime  &:  l'aurore  de  la  raifon  ,  fut  enrégiRrée  au 
Parlement,  au  mois  d'Avril  de  cette  année. 

1332.  Le  Duc  accorda  à  Nicolas  de  Bréal,  Abbé  de  Saînt- 
Melaine ,  la  permiffion  de  tenir  tous  les  ans  une  foire ,  le  14 
Septembre. 

Pendant  la  guerre  pour  la  fucceffion  au  Duché  de  Bretagne , 
la  ville  de  Rennes  changea  fouvent  de  parti.  En  1341  ,  elle  fut 
affiégée  par  Jean  de  Montfort  ,  qui,  après  plufieurs  attaques, 
défefpéroit  de  s'en  rendre  maître ,  lorfque  les  afîiégés ,  ayant 
fait  une  fortie ,  perdirent  Henri  de  Spinefort ,  leur  Gouverneur. 
Le  Comte  de  Montfort  reprit  courage  ,  &  réfolut  de  tirer  profit 
de  cet  événement.  Avant  de  tenter  de  réduire  les  habitants  par 
la  force  ,  il  voulut  effayer  la  rufe.  Comme  il  fçavoit  que  Spine- 
fort etoit  cher  aux  habitants ,  il  leur  fit  dire  que ,  s'ils  ne  lui 
rendoient  fur  le  champ  la  ville  ,  il  alloit  faire  pendre  le 
Capitaine.  Cette  menace  eut  fon  effet.  Les  Rennois  ,  pour  fau- 
ver  une  vie  fi  précieufe ,  ouvrirent  leurs  portes  ,  &  le  vain- 
queur mit  dans  leur  ville  une  bonne  garnifon  ,  dont  il  donna 
hi  commandement  à  Guillaume  Cadoudal. 

Au  printemps  de  l'année  1343,  Charles  de  Blois  partit  de 
Nantes  avec  fon  armée,  &  alla  mettre  le  fiege  devant  Rennes, 
qu'il  pouffa  avec  tant  de  vigueur  que  la  ville  fut  forcée  de 
capituler  &  de  fe  rendre  au  mois  de  Mai  fuivant.  La  capitu- 
lation portoit  ,  que  les  troupes  de  Montfort  fortiroient  vies  & 
bagues  fauves.  En  conféquence ,  Charles  de  Blois  fit  fon  entrée 
à  Rennes  ,  reçut  le  ferment  de  fes  habitants  ,  &  leuf  donna 
lane  bonne  garnifon.  Guillaume  Cadoudal  alla  rejoindre  la  Com- 
teffe  de  Montfort  à  Hennebon.  La  même  année  p  le  Roi  d'Angle- 


R  E  N      ^  39 

terre  vint  en  Bretagne ,  &  afliégea  en  même  temps  les  villes  de 
Rennes  ,  de  Nantes,  &  de  Vannes.  Il  n'en  put  prendre  aucune, 
&  réunit  toutes  Tes  forces  contre  la  première ,  dont  il  ne  put 
s'emparer ,  malgré  toute  Ton  aftivité  &  fa  valeur.  Cette  ville  fut 
tranquille  jufqu'en  1356.  Le  3  Oftobre  de  cette  année,  le 
Duc  de  Lancaflre  fe  préfenta  devant  fes  murailles  avec  une 
armée  coniidérable  ,  invellit  cette  place  de  toutes  parts ,  &  ferma 
fi  bien  toutes  les  ilTues  qu'il  étoit  impofîible  de  ia  fecourir  & 
de  lui  faire  paffer  des  vivres.  Le  defîein  du  Prince  Anglais 
étoit  de  fe  faire  un  afyle  &  une  place  d'armes  de  cette  ville. 
Il  n'en  avoit  point  dans  toute  la  province ,  &  il  avoir  juré  qu'il 
ne  quitteroit  Rennes  que  lorfqu'il  s'en  feroit  rendu  maître.  Cepen- 
dant ,  Bertrand  du  Guefclin ,  qui  n'avoir  pu  s'enfermer  dans  la 
ville  afîiégée  ,  cherchoit  tous  les  moyens  de  faire  échouer  les 
entreprifes  des  Anglais  :  il  couroit  la  campagne  ,  côtoyoit 
perpétuellement  les  Anglais ,  s'emparoit  de  leurs  convois  ,  enle- 
voit  leurs  quartiers,  détroufToit  leurs  Vivandiers  &  leurs  Mar- 
chands ,  les  battoit  aux  fourrages ,  &  leur  faifoit  tous  les  jours 
des  prifonniers.  En  vain  les  afllégeants  prenoient-ils  contre  lui 
toutes  les  précautions  pofTibles,  il  fe  conduifoit  avec  tant  de 
fagelTe  qu'ils  ne  purent  jamais  l'attaquer  à  leur  avantage.  Au 
moment  qu'ils  fe  croy oient  bien  éloignés ,  il  étoit  à  leur  trouffe, 
&  jamais  ils  ne  le  trouvoient  où  ils  le  cherchoient.  Il  fit  pri- 
fonnier  un  des  Chefs  de  leur  armée  ,  nommé  le  Baron  de  la 
Poole  ,  recommandable  par  fa  bravoure  &  fon  illuflre  naiffance. 
Le  nom  de  cet  Anglais  donna  lieu  à  la  plaifanterie  des  foldats 
de  du  Guefclm ,  qui  difoient  que  Vaille  biaonne  avoit  plumé  la 
poule  anglaife, 

Bertrand ,  fâché  de  ne  pouvoir  entrer  dans  Rennes ,  ofTrit  au 
Baron  la  remife  de  fa  rançon ,  à  condition  qu'il  iroit  demander 
au  Duc  de  Lancaflre ,  &  en  obtiendroit ,  pour  lui  &  les  fiens , 
la.  liberté  du  pafTage  pour  pénétrer  dans  la  ville.  La  Poole  fe 
rendit  auprès  du  Duc ,  qui  lui  répondit  qu'il  fe  garderoit  bien 
d'accepter  une  telle  condition  ,  8c  qu'il  aimeroit  mieux  apprendre 
que  cinq  cents  Archers  feroicnt  entrés  dans  Rennes  que  du 
Guefclin  tout  feul.  Le  Baron  rejoignit  fon  vainqueur  avec  cette 
réponfe ,   &   fe    conflitua  fon   prilbnnier. 

Cependant  le  fiege  continuoit  malgré  l'extrême  rigueur  de 
l'hiver  ,  &  les  incommodités  de  la  faifon  n'interrompoient  point 
les  courfes  de  du  Guefclin.  Il  n'avoir,  pour  l'ordinaire,  le  jour 
&  la  nuit  ',  que  le  ciel  pour  couvert ,  di.  les  forêts  de  Renues  3c 


40  R  E  N  ^ 

de  Châteaubiiand  pour  retraites  ;  ce  qui  fatiguoit  extrêmement 
les  hommes  &  les  chevaux  :  mais  il  étoit  tellement  aimé  de  fes 
foldats  qu'ils  ne  fe  refufoient  à  rien  fous  fes  ordres.  Les  Anglais 
commencèrent  à  murmurer  dans  leur  camp.  Fatigués  par  le  froid 
excefîif ,  maltraités  par  ceux  de  la  ville ,  ils  ne  vouloient  plus 
entendre  parler  d'aflaut  ni  d'efcalade.  Le  Duc  de  Lancaftre, 
quoiqu'il  fût  auffi  rebuté  que  fes  troupes ,  ne  vouloit  pas  aban- 
donner fon  entreprife  avant  d'avoir  tenté  tous  les  moyens  pof- 
fîbles.  Il  fit  creufer  un  fouterrain  ,  qui  devoir  aboutir  au  milieu 
de  la  ville  ,  par  lequel  il  feroit  entrer  autant  de  monde  qu'il 
en  faudroit  pour  la  prendre.  On  commença  fur  le  champ  l'exé-^ 
cution  de  ce  projet  ;  &c ,  en  moins  de  fix  femaines ,  cette  ga- 
lerie étoit  prefque  achevée  ,  lorfque  les  afliégés  s'apperçurent  du- 
danger  qui  les  menaçoit.  Ils  vérifièrent  bien  exa6lement  fi  leurs 
craintes  étoient  fondées  ;  Se ,  quand  ils  en  furent  certains ,  Ber- 
trand de  Saint-Pern  fit  faire  l'ouverture  de  la  mine  ,  fe  jetta 
dedans  avec  quelques  hommes  d'élite ,  maiTacra  un  bon  nombre 
d'Anglais ,  poufla  les  autres  ,  &  mit  le  feu  aux  merrains  qui 
foutenoient  les  terres ,  &  le  fouterrain  fut  combla. 

Cet  échec  enflamma  le  Duc  de  Lancaftre  de  colère ,  &  iL 
perfifia  dans  la  réfolution  de  prendre  Rennes.  Effeftivement ,  il 
feroit  venu  à  bout  de  fon  deffein  fans  les  incidents  qui  l'en  em- 
pêchèrent. La  difette  commençoit  à  fe  faire  fentir  ,  &  la  conf- 
ternation  étoit  générale.  Pour  avifer  aux  moyens  de  fe  tirer 
d'affaire,  Penhoët,  Gouverneur  de  la  ville,  affembla  fon  confeiL 
de  guerre.  On  propofa  divers  expédients  j  mais  ils  ne  pouvoient 
remédier  aux  maux  preffants  de  la  ville.  Le  réfultat  fut  donc  qu'il 
falloit  fe  rendre ,  &  tâcher  d'obtenir  une  capitulation  honorable- 
Tous  les  habitants  avoient  été  appelles  à  cette  délibération,  Se 
la  réfolution  étoit  prife  de  traiter  avec  l'ennemi ,  lorfqu'un  Bour- 
geois ,  connu  dans  la  ville  par  fa  vertu  &  l'amour  qu^il  avoit 
pour  fa  patrie  (^),  fe  leva  &  demanda  audience.  «  Meffieurs  y 
»  dit  il ,  le  parti  que  l'on  vient  de  prendre  me  paroît  un  peu 
»  précipité  j  il  eft  extrême  ,  & ,  s'il  eu  fuivi ,  notre  Prince  perd 
»  pour   jamais  le  Duché  de  Bretagne.  Cette   confidération  doit 


i,  a  )  \  'i\ifto';re  auroit  dû  conferver  le  nom 
de  ce  brave  citoyen  ,  comparable  aux  héros 
de  Calais.  11  méritoit ,  comme  eux ,  une  fta- 
tue  élevée  dans  la  place  publique  :  ce  qui 
Viaifen^blablement  a  empêché  que  fon  nom 
Ofi.  foit  parvenu  jufq^u'à  nous ,  ç'eil  la  chute 


du  parti  pour  lequel  il  combattoit.  Si  le 
Comte  de  Blois  fût  monté  furie  Trône  de 
Bretagne  ,  l'aftion  de  cet  honnête  Bour-. 
geois  lui  eût  valu ,  fans  doute  ,  une  rér 
compenfe  qui  auroit  immortalifé  fa  gloire*. 

î»  nous 


R  E  N      ^  41 

»  nous  retenir,  &,  fur-tout,  nous  empêcher  de  rendre  cette 
»  ville  fans  la  participation  de  notre  Souverain.  Il  faut  le  prévenir 
»  de  notre  Situation ,  6c  voici  ce  que  j'ai  à  vous  propofer  :  Je 
»  me  rendrai  au  camp  des  Anglais;  je  feindrai  un  mécontente- 
»  ment  qui  m'a  forcé  de  m'échapper  de  la  ville  j  je  dirai  au 
i>  Duc  de  Lancaftre  qu'on  attend  à  tout  moment  ici  un  renfort 
»  de  quatre  mille  hommes  d'armes  Français  &  Allemands  ;  je 
»  lui  enfeignerai  la  route  qu'ils  doivent  tenir ,  &  l'engagerai  à 
«  aller  au  devant  d'eux  pour  les  combattre ,  &  ôter  tout  ef- 
»  poir  de  fecours  à  la  ville ,  qui  ell  déjà  à  toute  extrê- 
»  mité  ;  je  tâcherai  enfuite  de  m'évader  &  de  me  rendre  à 
»  Nantes  auprès  de  notre  Souverain.  Je  fçais  bien  que  l'ennemi 
»  me  fera  mourir  s'il  découvre  mon  projet  5  mais  je  fais ,  de 
»  bon  cœur,  le  facrifice  de  ma  vie  à  Dieu  ,  à  mon  Prince, 
»  &  à  vous.  Je  n'ai  qu'une  grâce  à  demander  :  c'eft  que  , 
»  fi  je  péris  dans  mon  entreprife  ,  l'alfemblée  veuille  bien  pour- 
ra voir  aux  befoins  de  ma  femme  &  de  mes  enfants.  » 

Cette  propo{ition  fut  reçue  avec  un  applaudiffement  général, 
on  fonna  toutes  les  cloches  en  forme  de  réjouiffance  ,  &  le 
lendemain  on  fait  une  fortie.  Le  brave  Bourgeois,  mêlé  parmi 
les  foldats ,  fe  rend  aux  Anglais ,  &  demande  à  parler  au  Duc 
de  Lancaftre ,  qu'il  a  le  bonheur  de  perfuader.  Le  Prince  Anglais 

Eart  la  nuit  fuivante  pour  aller  au  devant  du  fecours  prétendu» 
e  Bourgeois  trouve  le  moyen  de  s'échapper ,  &  prend  le  che- 
min de  Nantes.  Il  trouve  fur  la  route  du  GuefcHn  ,  auquel  il 
raconte  fon  ftratagême.  Celui-ci ,  tranfporté  de  joie  ,  fe  tourne 
vers  fes  gens ,  &  leur  dit  avec  enthouiiafme  :  «  Marchons  har- 
»  diment ,  nous  entrerons  aujourd'hui  dans  la  ville.  »  Il  retient 
avec  lui  le  Bourgeois ,  députe  un  des  fiens  à  Nantes ,  &  s'a- 
vance vers  Rennes.  Arrivé  au  camp  des  Anglais  ,  il  charge  la 
garde  avancée ,  la  met  en  fuite  ,  &  entre  pèle  -  mêle  dans  le 
camp  avec  les  fuyards.  C'eft  là  qu'il  déploie  toute  fa  valeur, 
A  la  tête  de  fa  troupe  ,  il  fait  du  camp  des  Anglais  un  fpeftacle 
de  meurtres ,  de  feu  ,  èz  de  fang ,  prend  enfuite  le  chemin  de 
Rennes ,  rencontre  fur  fa  route  deux  cents  charriots  de  farine 
&  de  viandes  que  les  payfans  conduifoient  aux  Anglais ,  les  fait 
défiler  vers  la  ville  ,  &  y  entre  lui-même  à  la  tête  du  convoi ,. 
avec  fon  butin  &  un  bon  nombre  de  prifonniers.  11  fut  reçu 
comme  en  triomphe  ,  tous  lui  prodiguoient  les  noms  de  fauveur 
de  leur  patrie ,  de  leur  honneur^  &  de  leur  liberté.  Il  commença 
par  faire  payer  aux  payfans  la  valeur  de  leurs  marchandifes  ,  les 
Tome  IF.  I 


41  ï^  E  N 

menaçant  que,  s'il  s'appercevoit  qu'ils  fourniflent  dans  la  fuite 
des  vivrez  aux  Anglais ,  il  les  feroit  pendre.  Il  les  chargea  en- 
fuite  d  aller  trouver  le  Duc  de  Lancaflre  ;  de  lui  remettre ,  de 
fa  part ,  cent  bouteilles  d'excellent  vin  qu'il  leur  donna  j  de 
l'affurer  que ,  tandis  qu'il  en  auroit ,  il  fe  feroit  un  vrai  plaifir  de 
lui  en  fournir  ;  de  lui  faire  obferver  que ,  s'il  lui  avoit  permis 
d'entrer  dans  la  ville ,  comme  il  l'en  avoit  prié  ,  il  lui  auroit 
épargné  la  peine  de  s'y  introduire  au  prix  de  tant  de  fang  an- 
glais 5  &  ,  enfin  ,  de  préfenter  à  ce  Prince  fon  humble  refpeél. 
Les  payfans  s'acquittèrent  de  leur  commiffion ,  rendirent  compte 
de  ce  qu'ils  avoient  vu  ,  &  apprirent  au  Duc  que  du  Guefclin 
n  avoit  avec  lui  que  foixante  hommes.  Du  Guefclin  ,  après  avoir 
congédié  les  payfans ,  fe  fit  infi:ruire  de  tout  ce  qui  s'étoit  paffé , 
&  vifîta  toutes  les  fortifications  de  la  place.  En  faifant  fa  ronde, 
il  apperçut  de  delTus  les  remparts  un  troupeau  de  plus  de  deux 
mille  porcs  appartenant  aux  Anglais ,  dans  la  prairie  du  Pré- 
Raoul ,  auprès  des  foffés.  Vis-à-vis  de  cette  prairie  &  de  la  rivière 
qui  la  féparoit  de  la  ville  ,  étoit  une  fauffe  porte  qu'on  tenoit 
toujours  fermée.  Bertrand  la  fit  ouvrir,  y  fit  placer  une  truie,  & 
lui  fit  tenailler  les  oreilles.  Aux  cris  de  cet  animal,  tous  les 
cochons  fe  mirent  à  la  nage ,  paflerent  la  rivière ,  &  étoient  déjà 
entrés  par  la  porte  au  nombre  de  plus  de  douze  cents,  avant 
que  les  Anglais  s'en  apperçulfent. Ils  accoururent;  mais  les  foldats, 
placés  pour  protéger  l'opération ,  en  tuèrent  environ  une  tren- 
traine,  en  prirent  un  pareil  nombre  ,  Se  firent  fuir  les  autres. 
Ces  heureux  commencements  ramenèrent  l'efpérance  &  la  joie 
dans  le  cœur  des  Rennois.  Le  même  jour,  tous  les  Seigneurs 
Anglais  étant  rendus  chez  le  Duc  ,  on  parla  de  du  Guefclin. 
Ce  qu'on  en  dit ,  &  ce  que  le  Prince  fçavoit  déjà  ,  lui  infpira 
tant  d'admiration  pour  ce  Gentilhomme ,  qu'il  témoigna  ouver- 
tement qu'il  defiroit  finguUérement  voir  de  près  un  homme  fi  ex- 
traordinaire. Le  Comte  de  Pembroc  lui  dit  que  la  chofe  étoit 
très-facile.  A  juger  ,  dit-il ,  de  du  GuefcHn,  par  fa  grandeur  d'ame 
&  par  tout  ce  que  j'en  ai  oui  dire  ,  il  me  femble  qu'il  ne  fera 
pas  difficulté  de  fe  rendre  ici  à  votre  invitation.  A  l'inflant ,  le 
Duc  fit  expédier  un  fauf- conduit,  &  un  Héraut  fut  chargé  de 
le  porter.  Le  lendemain ,  le  Héraut  fe  préfente ,  &  demande  à 
parler  au  Capitaine  du  Guefclin.  Penhoët  vient ,  reçoit  le  fauf- 
conduit ,  le  meffager ,  &  lui  montrant  du  Guefclin  qui  venoit 
avec  quelques  Gentilshommes  ,  il  lui  dit  :  «  Celui  que  tu  demandes 
»  eft  précifément  celui  que  tu  vois  vêtu  d'un  jupon  noir  avec  fa 


REN  4} 

»  hache  pendue  à  fon  col.  >>  Il  n'efl  pas  poffible,  répond  le  Héraut, 
il  a  plus  l'air  d'un  voleur  de  grand  chemin  que  d'un  Capitaine. 
«  Celt  pourtant  lui  ,  reprend  Penhoët  j  mais  garde-toi  bien  de 
»  lui  dire  quelque  chofe  d'offenfant ,  il  t'abattroit  la  tête  avec  fa 
»  hache.  »  Le  Héraut  profite  de  l'avis  ,  met  un  genou  en  terre  ,  & 
dit  à  du  Guefchn  :  Sire ,  le  Duc  de  Lancaftre ,  mon  maître , 
vous  prie  de  le  venir  voir  dans  fon  camp  ,  &  m'a  chargé  de  vous 
préfenter  le  fauf- conduit.  Bertrand  le  fait  lire  tout  haut,  &  ré- 
pond que  le  Prince  lui  fait  trop  d'honneur  pour  qu'il  n'ait  pas 
celui  d'aller  lui  baifer  les  mains.  Il  fe  prépare  fur  le  champ  à  ce 
voyage  ,  &  fait  donner  au  Héraut  un  Jupon  de  velours  &  cent 
florins  d'or;  fomme  confidérable  pour  le  temps.  Après  fon  dîner, 
il  part  avec  trois  Gentilshommes ,  &  fe  rend  au  camp  des  An- 
glais ,  à  l'entrée  duquel  il  trouve  quatre  Seigneurs  qu'on  avoit 
envoyés  pour  le  recevoir.  Le  bruit  de  fa  venue  avoit  attiré  un 
grand  nombre  d'Anglais  fur  fa  route  -,  ils  étoient  tous  étonnés  de 
fon  air.  Les  uns  le  trouvoientlaid  ,  les  autres  noir  ,  d'autres  difoient 
qu'il  avoit  les  poings  quarrés  ;  mais  tous  le  regardoient  avec  ad- 
miration. A  la  porte  de  l'appartement  du  Duc  ,  il  fut  reçu  par 
Jean  Chandos  ,  le  du  Guejclin  de  V Angleterre*  Ce  Prince  étoit 
environné  de  toute  fa  Cour.  Bertrand  entra  &  mit  un  genou 
en  terre  fuivant  Tufage.  Le  Duc  le  releva  promptement ,  &  lui 
fît  mille  honnêtetés  \  mais  du  Guefclin  ne  put  entendre  de  fang 
froid  la  propofition  qu'il  lui  fit  de  quitter  le  parti  de  Charles  de 
Blois  pour  s'attacher  à  celui  du  Roi  d'Angleterre.  «Ma  foi  cil 
»  engagée,  dit-il  avec  fermeté,  elle  n'eft  plus  à  moi.  Charles  de 
»  Blois  eft  mon  légitime  Souverain ,  &  je  me  déshonorerois  en 
V  l'abandonnant.  »  La  converfation  fut  interrompue  par  l'arrivée  de 
Guillaume  Brembro  ,  Chevalier  Anglais ,  qui ,  fans  refpefter  la 
préfence  du  Duc,  vint  droit  à  du  Guefclin  ,  &  lui  dit  :  Bertrand, 
vous  êtes  Gentilhomme ,  j'ai  une  prière  à  vous  faire.  Vous  avez 
tué  de  votre  main  Brembro  ,  mon  parent ,  il  faut  m'en  faire  raifon. 
Du  Guefchn  lui  tendit  fièrement  la  main.  «  Je  n'ai  jamais  refufé 
vperfonne,  lui  dit-il,  je  vous  accède  votre  demande.»  Le  Duc 
approuva  le  combat  &  le  fixa  au  lendemain ,  avec  afTurance  à 
du  Guefchn  qu'il  ne  lui  feroit  rien  fait  contre  les  loix  de  l'hon- 
neur ,  foi  de  Prince.  Brembro  étoit  homme  de  qualité  ;  mais  cela 
n'empêcha  pas  que  fon  a<^ion  ne  tournât  au  détriment  de  la  répu- 
tation du  Duc  de  Lancaftre.  On  s'imagina  qu'il  n'avoit  invité  du 
Guefchn  à  le  venir  voir  ,  &  ne  lui  avoit  fait  tant  d'amitié  que 
pour  le  faire  infulter  par  Brembro ,  &  le  commettre  vis-à-vis  du 


44  Ï^EN 

plus  vaillant  &  du  plus  adroit  Gendarme  qui  fût  en  Angleterre: 
mais  ces  accufations  font  dénuées  de  preuves  j  le  Prince  jouilîoit 
d'une    réputation   qui  les   détruifent.  Il  fit  préfent  du  plus  beau 
de   fes   chevaux    à   du   Guefclin ,    qui  fut    reconduit    avec   les 
mêmes  cérémonies  que  la  veille.  Le  lendemain  ,  le  héros  Breton 
fe  prépara  au  combat ,  malgré  tout  ce   que  (es  amis ,   qui  crai- 
gnoient  quelques  perfidies ,  purent  lui  dire  pour  Fen    détourner. 
Il  communia  ,  fe  fit  armer ,  &  promit ,   en  partant ,  à  fa  tante  , 
qui  fondoit  en  larmes ,  de  venir  manger  avec  elle  un  bon  dîner 
qu'il   la  pria  de  préparer.    A  la  fortie ,   il  trouva  le    Chevalier 
de  Penhoèt ,  qui  lui  permit  d'aller  rempUr  fa  promeffe.  Il  trouva 
hors  des  portes  les  trompettes  anglaifes  qui  l'attendoient ,  &  qui 
le  conduifirent  fur  le  champ  de  bataille ,  où  étoit  déjà  Brembro 
&  tous  les  Seigneurs  Anglais.  Les  deux  champions  étoient  armés 
de   toutes  pièces  ,   &  montés    avantageufement.    Le    fignal    fe 
donne  ,    &  le  combat  commence.  La  première  courfe  eft  heu- 
reufe  pour   du  Guefclin ,   qui  bleffe  légèrement  fon  ennemi.  La 
féconde  ell:  inutile  ,  & ,  à  la  troifieme ,  l'armure  de  du  Guefclin 
efl:  fendue  ;  &,   fans   la  bonté  de  cette  pièce ,  il  eût  peut-être 
perdu  la  vie.  Le  combat  devoit  finir  là ,  puifqu'on  n'avoit    de- 
mandé que  trois  coups    d'épée  ;  mais  Bertrand  dit  à  Brembro  : 
Jufqu'ici  je  vous  ai  ménagé  par  égard  pour  la  préfence  du  Prince, 
mais ,  fi  vous  voulez ,  nous  fournirons  une  quatrième  carrière  en 
l'honneur  des   Dames ,  &  vous  verrez  ce  que  je  fçais  faire.  Le 
Duc  le  permit.    Brembro ,  piqué  de  la  bravade ,    efpéroit  avoir 
raifon    de   fon    adverfaire.     En  effet  ,   il  courut  avec   tant  de 
fureur  que  fon  épée  perça  fi  fortement  l'écu  de  Bertrand    qu'il 
ne  la  put  retirer.    Celui-ci  profita  de  l'événement,    &  lui  pafla 
fon  épée  au  travers  du  corps  jufqu'à  la  garde.  Brembro  chancela 
deux  ou  trois  fois  fur  fon  cheval ,  &  tomba  mort.  Du  Guefclin 
faifit  vite  les  rênes  ,  falua  le  Prince  ,  le  remercia  ,  &  retourna  à  la 
ville,  où  il  fut  reçu    aux  acclamations  de  tout  le  monde.    Cet 
événement   avoit   opéré  une   trêve   de   deux   jours ,  pendant  la- 
quelle les    Anglais  avoient  confi:ruit  un  beffroi ,   efpece  de   tour 
quarrée  de  la  hauteur  des  remparts ,  avec  un  pont  roulant  que  l'on 
pouffoit  jufqu  au  parapet  des  murs  ;  de  forte  que  les  affiégés  & 
les  afTiégeants  combattoient  de  la  main  à  la  main.   L'utilité  de 
cette  machine  étoit  d'épargner  aux  afîiégeants  les  peines  &  les 
dangers  de  l'efcalade ,  les   travaux  de  la  mine  &  de  la  fappe. 
Ces  tours  ne  craignoient  que  le  feu  j  & ,  pour  les  en  garantir , 
on  les  couvroit  de  fer  blanc  &  de  cuirs  de  bœufs.  Celle-ci  fut 


R  E  N  4j 

conduite  jufqu'aux  pieds  des  murs  ,  Se  l'aflaut  qui  fuivit  fut 
très-meurtrier.  Les  foldats  de  la  ville  diminuoient  tous  les  jours, 
&  il  n'y  reftoit  prefque  plus  que  des  Bourgeois.  Les  afliégés 
étoient  très-inquiets  du  luccès ,  &  ils  n'avoient  plus  d'efpérance 
û  cette  fatale  machine  fubfilloit.  La  feule  reflburce  étoit  de  la 
brûler;  mais  l'entreprife  n'étoit  pas  facile,  parce  que  les  An- 
glais avoient  pris  des  précautions.  Du  Guefclin  ne  fe  laiiTa  point 
abattre  par  les  difficultés  :  il  forma  le  projet  de  détruire  le  bef- 
froi ,  &  l'exécuta.  Il  fit  fortir  cinq  cents  arbalétriers  chargés  chacun 
d'une  fafcine  foufrée ,  &  en  difpofa  cinq  cents  autres  dans  la  ville  , 
avec  quelque  Cavalerie  ,pour  les  foutenir  en  cas  de  befoin.  Au  point 
du  jour,  du  Guefclin  fort,  une  torche  à  la  main,  fon  épée  de  l'autre, 
charge  vigoureufement  les  Anglais ,  en  tue  trois  cents  ,  pouffe  les 
autres,  brife  la  porte  de  la  tour  à  coups  de  hache  ,  &  la  brûle  avec 
ceux  qui  étoient  dedans.  Le  Duc  de  Lancailre ,  furieux  ,  envoie 
le  Comte  de  Pembroc  pour  couper  la  retraite  à  du  Guefclin, 
qui  reftoit  là  avec  fes  cinq  cents  arbalétriers  poiâ"  empêcher  qu'on 
n'éteignît  l'incendie.  Du  Guefclin ,  voyant  le  deffein  de  l'ennemi, 
&  la  tour  étant  déjà  brûlée  ,  marche  aux  Anglais,  qui  font  en 
même  temps  chargés  en  tête  &  en  queue  par  le  corps  de  ré- 
ferve  qu'on  avoir  placé  au  dedans  de  la  ville.  Ils  font  taillés  en 
pièces  ,  &  le  petit  nombre  qui  peut  échapper  prend  la  f\ïite.  Le 
Duc  de  Lancaftre  accourt  avec  une  troupe  plus  nombreufe  ; 
mais  il  eft  défait ,  &  eft  forcé  de  s'en  retourner  fans  avoir  pu 
tirer  vengeance  d'un  échec  fi  terrible.  Des  fuccès  fi  conftants 
de  la  part  des  affiégés  ,  la  longueur  du  fiege  ,  l'affoibUffement  de 
l'armée  des  Anglais ,  la  difette  qui  commençoit  à  fe  faire  fentir 
dans  leur  camp ,  tout  demandoit  qu'ils  levaflent  le  fiege  ;  mais 
le  Prince  avoir  fait  un  ferment  folemnel  de  prendre  la  ville, 
&  il  ne  pouvoir  fe  décider  à  la  quitter  fans  l'avoir  rempli  :  fa 
gloire  auroit  été  compromife.  Il  lui  fembloit  bien  dur  de  renoncer 
à  la  prife  d'une  ville  qui  n'avoir  prefque  plus  d'autre  défenfe 
que  fa  bourgeoifie  ,  après  avoir  gagné  tant  de  vi61:oires  &c  forcé 
tant  de  places.  Ne  fçachant  donc  quel  parti  prendre,  voici  à 
quoi  il  s'arrêta  :  il  fit  paffer  dans  la  ville  cinq  ou  fix  Seigneurs 
Anglais ,  fous  le  prétexte  fpécieux  de  traiter  avec  les  afliégés  ; 
mais ,  en  effet ,  pour  examiner  l'état  a6i:uel  de  la  place.  Il  leur 
enjoignit  de  ne  donner  aucune  parole  au  Gouverneur  ni  aux 
habitants ,  fe  réfervant ,  fur  leur  rapport ,  de  prendre  le  parti 
qu'exigeroit  la  prudence.  On  propofa  donc  aux  Rennois  de  re- 
cevoir dans  leur  ville  fix  des  principaux  Seigneurs  Anglais  ,  &c 


46  ,,   ^^^ 

la  propofition  fut  acceptée j  mais,  comme  les  aflîégés  fentoient 
bien  le  motif  du  Duc  de  Lancallre  ,  ils  voulurent  leur  rendre 
fineffe  pour  iinefle.  Du  Guefclin  fut  celui  qui  trouva  le  meilleur 
expédient  ;  ce  fut  d'ordonner  aux  Marchands  de  chofes  comef- 
tibles  de  mettre  en  parade  fur  leurs  boutiques  tout  ce  qu'ils  en 
avoient ,  & ,  pour  faire  paroître  plus  d'abondance ,  de  drefler 
des  tonneaux ,  &  d'en  couvrir  le  fond  comme  s'ils  euflent  été 
pleins  &  comblés.  Cette  rufe  trompa  les  Anglais  qui  fe  prome- 
nèrent dans  tous  les  quartiers  ,  &  qui  crurent  que  la  ville  étoit 
pourvue  de  vivres  pour  long  -  temps.  Ils  en  parlèrent  en  ce 
fens  au  Prince  ,  qui  en  fut  perfuadé  comme  ils  l'étoient  eux- 
mêmes. 

Il  reftoit  à  fç  avoir  comment  le  Général  Anglais  fe  tirer  oit  de 
fon  ferment ,  &  fatisferoit  fon  honneur  &  fon  fcrupule.  On  ima- 
gina de  propofer  aux  affiégés  que  le  Prince  entrât  dans  la  ville, 
lui  dixième  j  qu'il  plantât  de  fa  main,  comme  s'il  eût  été  vifto- 
rieux ,  fon  enfeigne  fur  une  des  portes ,  &  qu  aufîi-tôt  il  leveroit 
le  fiege.  Les  habitants  ne  refuferent  pas  la  proposition ,  & ,  dès 
le  lendemain,  le  Duc  entra  dans  la  ville,  oii  il  reçut  tous  les 
honneurs  dus  à  un  vainqueur  &  à  un  Prince  refpeftable  à  tous 
égards.  Penhoët  fe  trouva  à  la  porte,  &  lui  préfenta  les  clefs 
de  la  ville.  Le  Duc  fut  compUmenté  par  tous  les  Ordres  &  Com- 
munautés ,  enfin ,  traité  magnifiquement  &  régalé  de  préfents. 
Dans  l'après-midi ,  il  monta  fur  les  murailles ,  &  planta  lui-même 
fa  bannière  fur  une  des  portes.  Alors  du  Guefclin  lui  demanda 
agréablement  où  feroit  la  guerre  après  la  levée  du  fiege  ?  Le 
Prince  lui  frappa  fur  l'épaule  ,  en  lui  difant  :  «Intrépide  Bertrand, 
♦>  foyez  fur  que  je  vous  le  ferai  fçavoir.  »  Après  la  cérémonie ,  il 
defcendit  &  reprit  le  chemin  de  fon  camp.  Comme  il  fortoit 
de  la  ville  ,  quelques-uns  des  habitants  faillirent  à  tout  gâter  ^ 
ils  arrachèrent  la  bannière  anglaife,  en  criant  affez  haut  pour 
fe  faire  entendre  :  //  a  bien  été  dit  quelle  y  feroit  mife ,  mais  non 
pas  quelle  y  rejleroit i  &  fur  le  champ  ils  la  jetterent  fur  le 
pont,  préciiement  aux  pieds  du  Duc,  qui  en  fut  vivement  of- 
îenfé ,  &  qui  auroit  bien  voulu  retenir  fa  parole  ;  mais  elle  avoit 
été  donnée  avec  trop  d'appareil  pour  qu'il  pût  s'en  dédire.  Il 
exécuta  les  conventions ,  leva  le  fiege  _,  quitta  la  province ,  & 
emmena  fon  armée  qui  étoit  diminuée  de  moitié.  Charles  de 
Blois  rentra  dans  Rennes^  &  y  remercia  le  Ciel ,  par  de  publi- 
ques aftions  de  grâces ,  de  lui  avoir  confervé  cette  place.  Il  ré- 
compenfa  fes  bons  ferviteurs ,  &  fur-tout ,  du  Guefclin ,  auquel 


R  E  N  ^  47 

il  donna  la  Seigneurie  de  la  Rochederien.  Ce  n'efl:  pas ,  lui  dit 
ce  bon  Prince  ,  la  récompenfe  de  vos  fervices  ,  mais  feulement  un 
témoignage  de  ma  bienveillance  que  je  vous  donne  ,  en  attendant 
que  la  fortune  &  votre  valeur  me  fournilTent  les  moyens  de 
vous  prouver  ma  reconnoiflance.  Du  Guefciin  reçut  avec  refpe8: 
un  bienfait  de  la  main  de  fon  Prince  ;  mais  le  compliment  dé- 
licat dont  il  fut  accompagné  ,  le  fit  rougir.  Il  répondit  modefte- 
ment  au  Comte  que  l'honneur  d'être  né  fujet  de  la  Ducheffe, 
fon  époufe,  l'obligeoit  à  facrifier  fa  vie  pour  fon  fervice  ,  &  que  ja- 
mais rien  ne  lui  feroit  oublier  un  devoir  fi  facré.  Le  Prince  l'embrafla 
tendrement,  &  le  carefla  avec  cette  franchife  naturelle  anix  hé- 
ros, &c  plus  commune  dans  le  quatorzième  fiecle  que  dans  le 
nôtre.  Telle  fut  l'iiTue  du  fiege  de  Rennes ,  fiege  fameux  par  les 
grandes  allions  qui  s'y  firent ,  la  longueur  ,  le  nombre ,  &  Tin- 
trépidité  des  combattants.  L'hiftoire  nous  en  offre  peu  de  plus 
mémorables,  &,  par  une  contradidion  affez  étrange,  peu  de 
moins  connus.  ' 

L'an  1352,  Jean  le  Bart ,  Abbé  de  Saint-Melaine  ,  avoit 
acheté  quelques  maifons  dans  la  rue  du  Four  du  Chapitre ,  près 
la. Chapelle  de  Saint-Melaine  le  Petit,  pour  s'y  loger  avec  fes 
Moines  à  l'abri  de  l'infulte  de  l'ennemi.  Les  Chanoines  confen- 
tirent  à  cet  étabHfTement ,  à  condition  qu'ils  retourneroient 
dans  leur  Abbaye  aufli-tôt  que  la  paix  feroit  faite,  &  qu'ils 
vendroient  leur  hofpice  à  des  laïques.  La  Bretagne  n'ayant  été 
paifible  que  long-temps  après ,  les  Moines  fe  réferverent  cet  afyle 
pour  s'y  retirer  dans  le  befoin  ;  &  ce  ne  fut  qu'en  1614  qu'ils 
afféagerent  ces  domaines  à  Paul  Hay  des  Nétumieres  &  à  Gilles 
Dulis  du  Tertre ,  pour  la  fomme  de  cent  livres  de  rente.  L'Hô- 
pital de  Saint-Yves  fut  fondé ,  l'an  1358,  par  Eudon  le  Boutellier , 
Prêtre. 

L'Eglife  Cathédrale  de  Saint-Pierre ,  commencée  Tan  1 1 80 
par  l'Evêque  Philippe,  ne  fut  achevée  qu'en  1359;  elle  fut 
confacrée ,  le  3  Novembre  de  cette  année ,  par  l'Evêque  Pierre 
de  Guemené.  L'édifice  étoit  vaûe  ;  le  retable  de  l'autel ,  en 
bois  doré  &  fculpté  ,  repréfentoit  la  naifTance  &  la  vie  du  Sau- 
veur. La  menuiferie  qui  le  couvroit ,  pour  le  confcrver ,  repré- 
fentoit auffi  quelques  traits  de  l'Hifloire-Sainte  &  de  l'Ancien- 
Teftament.  Les  gradins  du  maître-autel ,  le  parquet ,  &  la  ba- 
lulhade  du  fanctuaire  étoient  aufïï  en  bois  :  on  y  voyoit  feu- 
lement quatre  colonnes  de  cuivre  furmontées  d'une  frife  ornée 
&  d'un  amortilTement  de  même  métal.  Les  ftalles  &  l'entrée  du 


48  R  E  N  .  , 

chœur,  avec  les  figures  des  douze  Apôtres  fur  le  couronnement^ 
étoient  aufli  en   bois. 

1362.  Charles  de  Blois  apporte  de  Lamballe  à  Rennes  des 
Reliques  de  Saint  Yves  ,  qui  avoit  été  canonifé  le  1 9  Mai  1 3  47» 
Il  en  fit  préfent  à  trois  Eghfes  différentes ,  auxquelles  il  les  porta 
pieds  nuds.  Le  premier  jour  ,  il  fe  rendit  à  la  Cathédrale  ;  le 
fécond  ,  à  l'Abbaye  de  Saint-Georges  ;  &  le  troifieme ,  à  l'Ab- 
baye de  Saint-Melaine.  Il  fit  enfuite  bâtir  dans  la  Cathédrale 
une  Chapelle  en  l'honneur  des  Saints  Salomon  &  Judicaël  ,  Rois 
de  Bretagne;  des  Saints  Martyrs  Donatien  &  Rogatien ,  frères  ; 
&  de  Saint  Yves.  Il  donna  à  cette  Cathédrale  des  tapifferies 
d'Arras   &  plufieurs  ornements  de  grand  prix. 

Le  Couvent  des  Jacobins  de  Rennes  fut  fondé  par  Jean    de 
Montfort.   Pendant  la   bataille  d'Aurai ,  ce    Prince  ,  voyant  font 
armée  en  défordre ,  fit  vœu  de  fonder  une  Eglife  &  un  Monaf- 
tere  à  Rennes   en    l'honneur  de    la    Sainte  Vierge.  Ses  troupes 
s'étant  ralliées ,  &  Charles  de  Blois    ayant  été  tué ,    un  Héraut 
fe  préfenta   au    Comte  de  Montfort,  &    lui  dit  :  Monfeigneur ^ 
je  vous  annonce  bonne  nouvelle  ,   vous  êtes  Duc  de  Bretagne,  DariS 
l'inftant ,  le  vainqueur  confirma   fon  vœu ,  &  déclara  pubUque- 
ment  que    l'EgHfe  qu'il  feroit    bâtir   feroit    dédiée    à  la  Sainte 
Vierge ,  fous  le  nom  de  Notre-Dame  de  Bonne- Nouvelle  ;  ce  qu'il 
ratifia  aux  Etats  affemblés  à  Rennes  en  1366.  A  la  foUicitation 
des    Evêques   de  Nantes  &    de  Tréguier ,    qui  avoient  été    de 
l'Ordre  de  Saint-Dominique  ,  il  voulut  que  cette  EgUfe  ïxit  def- 
fervie  par  des  Jacobins.  En  conféquence  ,  on  écrivit  fur  le  champ 
à  EHe  Raimond ,   Général  de  l'Ordre ,  qui  commanda  au  Pro- 
vincial de  France  d'envoyer  à  Rennes  des  ReHgieux  du  Couvent 
de  Dinan ,  qui  s'établirent  d'abord  dans  la  Chapelle  Ducale  de 
Saint-Vincent ,  fituée  près  le  cimetière  Sainte-Anne ,  hors  la  ville, 
&  qui  obtinrent ,  à  peu  près  dans  le  même  temps ,  l'EgUfe  pa- 
roifliale    de   Saint- Aubin,  bâtie  depuis  quelques  années.   Le  ter- 
rein  ,   où  étoit  fituée  cette  Chapelle  Ducale ,   étoit   trop    petit 
pour  fervir  d'emplacement  au  nouveau  Monaftere  j  mais  les  pro- 
priétaires des  maifons  &  terreins  contigus  ne  firent  pas  difficulté 
de  leur  céder  leurs  poiTefTions  dans  ce  quartier.  L'an  1368,   le 
Refteur  de  Saint-Aubin  s'oppofa  à   cet   établiffement   des   Reli- 
gieux ,  qu'il  prévoyoit  devoir   lui  caufer  quelque  préjudice  ;  mais 
l'Evêque  Raoul  de  Tréal  fçut  fi  bien  ménager  cette  affaire  que  le 
tout  s'arrangea  à  l'amiable.  On  commença  donc  l'édifice ,  & ,  le 
z  du  mois  de  Février  1369,  le  Clergé  fe  rendit  proceflionnel- 

lement 


R  E  N  49 

lement  fur  les  lieux ,  avec  le  Duc ,  les  Seigneurs  de  fa  Cour , 
&  le  peuple.  Après  les  cérémonies  de  TEglife,  le  Duc  ,  paré 
d'un  tablier  garni  de  fourrures  d'hermines ,  muni  d'une  truelle  & 
d'un  marteau  d'argent  doré ,  pofa  la  première  pierre  ,  &  fe  dé- 
clara fondateur  de  la  Communauté.  Il  donna  enluite  cent  flo- 
rins d'or  à  l'offrande  :  les  Seigneurs  &  le  peuple  donnèrent  aufli , 
chacun  félon  fes  facultés ,  de  forte  que  les  offrandtis  de  cette 
journée  payèrent  une  partie  de  l'édifice. 

Au  mois  de  Janvier  1373  ,  Bertrand  du  Guefclin  époufa  ,à 
Rennes ,  Jeanne  de  Laval.  Ce  mariage  fut  célébré  avec  beaucoup 
de  magnificence. 

L'an  1382,  le  Duc  Jean  IV  afiembla  fes  Etats  dans  cette 
ville,  dans  le  Couvent  de  Bonne-Nouvelle,. &  y  inftitua  l'Ordre 
de  l'Hermine.  Le  collier,  compofé  de  deux  chaînes  d'or,  étoit 
attaché  par  les  deux  bouts  à  deux  couronnes  ducales ,  dans  lef- 
quelles  étoit  renfermée  une  hermine  pafTante.  Une  de  ces  cou- 
ronnes pendoit  fur  la  poitrine  ,  &  l'autre  fur  le  col.  (  Voyez 
Brech.  )  Les  fucceffeurs  de  Jean  IV  ajoutèrent  un  autre  colUer, 
nommé   de   M  Epi ,  parce  qu'il  étoit  compofé  d'épis  de  bled. 

L'an  1386,  le  Roi  Charles  VI  voulut  empêcher  le  Duc  de 
Bretagne  de  faire  battre  de  la  monnoie  blanche.  Le  Duc  foutint  fon 
droit ,  qui  avoit  été  reconnu  lui  appartenir  par  le  Roi  Charles  V  , 
fon  pcre.  (Voyez  l'Abrégé  de  l'Hilloire,  pag.  dix  du  tome  pre- 
mier de   ce   Diftionnaire.  ) 

Une  lettre  de  Dame  Julienne  du  Guefclin ,  AbbelTe  de  Saint- 
Georges,  en  date  du  5  Août  1399,  qui  fe  trouve  aux  archives 
du  château  de  Nantes,  nous  apprend  que  cette  Dame  avoit 
confenti  à  la  levée  d'un  fubfide  de  vingt  fols  par  feu  fur  les 
hommes  &  fujets  des  Paroiffes  de  Tinteniac  &  de  Hedé  ,  pour 
trois  ans  feulement.  Nous  croyons  que  c'ell  là  l'époque  de  l'éta- 
bbllemcnt  des  fouages  en  Bretagne. 

Le  plus  ancien  compte  qui  fe  trouve  aux  archives  de  Rennes, 
nous  donne  une  idée  de  l'état  de  cette  ville  en  1400.  A  cette 
époque  ,  la  porte  Mordelaife  ,  ainfi  nommée  parce  qu'elle  con- 
duit à  la  Paroiffe  de  Mordelles  ,  s'appelloit  la  Porte  Royale^ 
Anciennement ,  dit-on ,  il  y  avoit  tout  auprès  un  temple  dédié 
à  Minerve.  Quoi  qu'il  en  foit,  c'étoit  par  cette  porte  que  les 
Ducs  &  les  Evêques  faifoient  leur  entrée.  Les  murs  s'étend  oient 
depuis  cet  endroit  jufqu'à  la  tour  de  Saint- Vlauran  ;  de  là  à  la 
Motte,  où  étoit  le  château;  du  château,  fuccefîlvement  aux  portes 
de  Saint-Michel ,  de  Saint-James ,  &  de  Jacquet.  (  Cette  dermere 
Tome  IV.  G 


50  R  E  N 

ouvroît  fur  la  rue  de  la  Bourcerie  ,  depuis  nommée  des  Changes 
ou  du  MefniL  )  De  là ,  ces  murailles  pafToient  par  les  rues  Neu- 
ve &:  Tnllain,  au  carrefour  de  la  Laiterie  &  de  la  Poiffonnerie, 
où  étoit  une  porte  appellée  Baudrerle  ,  qui  a  donné  fon  nom  aux 
rues  Baudrairies  ;  puis  continuoient  jufqu'à  la  porte  Aiviere , 
porta  aquaria ,  ainfi  dite  ,  de  la  proximité  de  la  rivière  ;  &  ai- 
loient  joindre  la  poterne  ,  s'étendant  enfuite  le  long  du  Pré- 
Raoul jufqua  la  tour  du  Fourgon  :  elles  enfermoient  dans 
leur  enceinte  le  placis  Conan  ou  place  de  la  vieille  Monnoie, 
&  finiffoient  à  la  porte  Mordelaife.  Dans  cette  enceinte ,  il  n  y 
avoit  de  principaux  édifices  que  l'Eglife  Cathédrale  avec  (qs 
cloîtres  ,  le  manoir  épifcopal ,  Notre-Dame  de  la  Cité,  qui  joi- 
gnoit  le  temple  de  Minerve  ;  les  quatre  Prieurés  de  fondation 
ducale  ,  fçavoir  ,  Saint-Denis  ,  Saint-Martin  ,  Saint-Mauran  ,  6c 
Saint-Michel  ;  l'Eglife  paroifîiale  de  Saint-Sauveur  ;  les  Ecoles  pu- 
bliques fituées  dans  l'endroit  où  étoit  anciennement  la  Syna- 
gogue ,  entre  la  porte  Mordelaife  &  la  tour  de  Saint-Morand  j 
l'Auditoire  de  la  Juftice  ordmaire  ;  une  petite  place  fur  laquelle 
étoit  un  pilier  ;  &  la  grande  &  la  petite  halle ,  près  Saint-Sauveur: 
ony  voyoit  auiîi  trois  temples  des  faux  Dieux,  l'un  fitué  au  côté 
feptentrional  de  la  porté  Mordelaife  ,  connu  fous  le  nom  de 
temple  de  Minerve  ;  l'autre ,  près  la  tour  ,  derrière  Saint- James  ; 
&  un  troifieme ,  près  l'Abbaye  de  Saint-Georges.  Cette  cité  avoit 
cinq  portes  qui  fermoient  &  ouvroient  avec  une  poterne  qui 
avoit  une  ifTue  fur  la  rivière  avec  un  petit  pont  fort  étroit  : 
elle  ne  comprenoit   pas    plus  du  quart  de  la  ville   afliuelle. 

141 5.  Pierre  de  la  Morinaye  ,  Abbé  de  Saint-Melaine  ,  obtient 
du  Pape  Jean  XXIII  le  privilège  de  porter  les  ornements  pon- 
tificaux. Le   Pape  Nicolas  V  confirme  ce  privilège  en  1449. 

Le  25  Oftobre  141 5,  fe  donna  la  fameufe  bataille  d'Azin- 
court ,  bourg  fitué  au  diocefe  d'Amiens  en  Picardie ,  où  les 
Anglais  viftorieux  avoient  détruit  toutes  les  forces  de  la  nation 
Françaife.  Ces  fiers  vainqueurs ,  ne  trouvant  plus  d'ennemis  à 
combattre  ,  ravagèrent  les  provinces  feptentrionales  de  la  France. 
Les  traitements  cruels  que  ces  étrangers,  enorgueillis  de  leurs 
fuccès,  firent  aux  Normands,  les  forcèrent  à  quitter  lear  pays, 
&  à  fe  réfugier  en  Bretagne.  La  plupart  fe  fixèrent  à  Rennes; 
&,  pour  vivre  plus  agréablement  dans  cette  nouvelle  retraite, 
ils  y  établirent  des  manufa6lures  de  draps ,  qui  enrichirent  à  la 
fois  les  ouvriers  &  les  habitants.  Le  nombre  de  ces  réfugiés  étoit 
fî  grand  que   la  ville   ne   pouvoit   les   contenir.  Le    Comte   de 


REN  51 

Richemont  ,  étant  à  Rennes  lors  de  ces  émigrations ,  confeilla 
au  Duc  Jean  V  de  faire  agrandir  l'enceinte  de  cette  cité.  Le 
Prince  fuivit  un  confeil  Ci  utile  à  fes  intérêts ,  &  fit  commencer, 
en  1421  ,  la  rue  Neuve,  qui  ne  fut  achevée  qu*en  1428.  La  di- 
rection de  l'ouvrage  fut  confiée  à  Jean  de  Saint-Gilles ,  Seigneur 
de  Betton  ,  comme  le  prouvent  les  lettres  du  Duc  Jean  V  ,  du 
12  Juillet  1421,  lefquelles  difent  pofitivement  qu'il  en  fut  chargé 
aux  appointements  de  deux  cents  livres.  Les  nouveaux  édifices 
s'étendoient  depuis  le  château  jufqu^à  la  porte  au  Foulon  ,  qui 
prit  fon  nom  du  moulin  à  fouler  les  laines  ,  qui  étoit  dans  cet 
endroit.  Ce  mouHn  étoit  dans  un  des  foliés  larges  &  profonds  de 
la  ville,  où  paflbit  une  partie  de  la  Vilaine.  De  la  porte  au 
Foulon ,  on  conduifit  les  murs  jufqu'à  la  poterne  ,  aujourd'hui 
la  porte  Saint-François  j  de  là  ,  à  la  Tour-le-Bal ,  à  la  porte  Saint- 
Georges  y  ik.  de  ce  point ,  en  fuivant  la  rivière ,  jufqu'à  la  porte 
Saint-Germain  ;  on  conilruifit  trois  tours  dans  ce  dernier  efpace  : 
de  la  porte  Saint-Germain ,  les  murs  furent  continués  jufqu'à  celle 
de  Vilaine  &  à  l'ancienne  clôture,  près  la  poterne  ,  derrière 
Saint-Yves.  Cet  accroiflement  occafionna  la  démolition  de  la 
porte  Jacquet  &  de  la  porte  Baudriere  ,  qui ,  fe  trouvant  renfer- 
mées dans  la  nouvelle  enceinte ,  devenoient   inutiles. 

141 9.  Le  Duc  Jean  V  tombe  malade  de  la  rougeole  à  Rennes, 
& ,  pour  obtenir  fa  guérifon  ,  il  fait  vœu  de  faire  le  voyage  des 
fept  Saints  ;  ce  qu'il  exécute  en  la  compagnie  du  Sire  de  Porhoet, 
Cette  dévotion  étoit  autrefois  de  mode  en  Bretagne  -,  il  y  avoit 
même  un  chemin  tracé  exprès,  &  dont  on  voit  encore  îesvef- 
tiges  près  Dinan.  On  croit  que  ces  fept  Saints  étoient ,  Saint 
Pol  de  Léon ,  Saint  Malo  ,  Saint  Tugdual ,  Saint  Samfon ,  Saint 
Méen ,  Saint  Judicaël ,  &  Saint  Corentin. 

La  Chapelle  de  Briller ,  derrière  le  grand  autel  de  la  Cathé- 
drale ,  fut  fondée  par  l'Evêque  Guillaume  Briller ,  oncle  des  Sei- 
gneurs des  Nétumieres  ,  fur  la  pierre  qui  fervoit  de  clef  à  la 
voûte  de  cette  Chapelle.  Le  Prélat  fit  graver  fes  armes ,  qui 
étoient  d'argent  à  trois  têtes  de  loup  de  fable.  Il  y  fonda  deux 
Chapellenies ,  dont  l'une  étoit  de  quatre  Méfies  par  femaine  :  oui 
ne  fçait  point  combien  en  portoit  l'autre. 

Le  31  Août  1429,  Olivier  du  Tertre  légua  à  l'Eglife  Cathé- 
drale de  Rennes  quelques  rentes  &  domaines,  pour  la  fondation 
d'une  Chapellenie  dans  la  Chapelle  de  Saint-Luc ,  en  l'honneur 
de  Dieu  &  des  Saints  Corne  &  Damien  ;  elle  doit  trois  Méfies 
par  femaine,  félon  les  titres  dépofés  au  Chapitre..  La  préfenta- 


ji  R  E  N 

tion  de  cette  Chapellenie  appartient  à  M.  de  Saint-Gilles ,  en  fa 
qualité  de  Seigneur  de  la  Durantaye. 

Thomas  Conefte ,  Religieux  Carme ,  né  à  Rennes ,  fe  rendit 
célèbre  par  fon  talent  pour  la  chaire,   &  un    zèle  trop    ardent 
qui  le   perdit.  Ce  ReUgieux  avoit  une  telle  réputation  que ,  dès 
qu'il  étoit  arrivé  dans  une  ville ,  on  lui  dreffoit  un  théâtre ,  fur 
lequel  il  moutoit  fur  le  champ  pour  prêcher.  Il  ne  manquoit  pas 
d'auditeurs  -,  il  déclamoit  fur-tout  contre  le  luxe  &  la  parure  des 
femmes.  Bayle   dit    de   ce  Religieux  ,  qu'il  étoit  regardé  comme 
un  nouvel  Apôtre  :  fon   éloquence  étoit   (î  perfuafive  ,  que  les 
femmes  de  la  première  qualité ,  qui  accouroient  à  fes  fermons, 
fe  fentoient   touchées  au  point  que    quelques-unes  lui  portoient  - 
leurs  joyaux  ,  qu'il  faifoit  brûler  publiquement  fur  le  théâtre  où  il 
étoit  monté  pour  prêcher  j  mais ,  lorfqu'il  étoit  parti ,  on  oublioit 
bientôt  le  Prédicateur  &  fes  principes,  &  on  reprenoit  fa  façon 
de  vivre  ordinaire.  Le  zélé  Rehgieux  parcourut  ainfi  la  France , 
palTa  enfuite  en  ItaHe ,  &  réforma  l'Ordre  des  Carmes  à   Man- 
toue.  De  là    il  fe  rendit  à  Venife  ,   &  accompagna  les  Ambaf- 
fadeurs  de  cette  RépubUque  à  Rome.  Les  mœurs  corrompues  de 
cette  grande  ville  excitèrent  fon  indignation  :  il  fe  hvra  à  toute 
l'ardeur  de  fon  zèle ,  s'emporta  contre  les  vices ,  fans  épargner 
le  facré  Collège  ,  &  porta  même  la  témérité  jufqu'a  blâmer  pu- 
bliquement la  conduite  du  Pape  Eugène  IV.  Le  Pontife ,  irrité ,  fit 
faifir  &    mettre  en  prifon    l'audacieux  Carme,   &  donna   ordre 
aux  Cardinaux  de  Navarre  &  de  Rouen  de  lui  faire  fon  procès. 
Il  fut  condamné  à  être  brûlé  &  exécuté  fur  la  place  publique  à 
Rome,  l'an  1441  ou    1442. 

Le  premier  agrandiiïement  de  la  ville  de  Rennes,  commencé, 
comme  nous  l'avons  dit ,  par  ordre  du  Duc  Jean  V  ,  ne  fut 
achevé  que  vers  l'an  1440  :1e  fécond  fut  confié  aux  foins  de 
Henri  de  Villeblanche  ,  créé  Lieutenant  delà  ville  en  1442,  & 
Gouverneur  en  1450.  Cet  accroifTement  commençoit  au  coin 
d'une  place  nommée  la  Buanderie  de  Saint-Georges ,  vis-à-vis  la 
rue  des  Voifins  ,  &  fut  poufïé  jufqu'au  boulevard  de  Porte- 
Blanche  ,  qui  prit  fon  nom  de  Henri  de  Villeblanche  ,  qui  y  fit 
graver  fes  armes.  Sur  deux  pierres  ,  qui  étoient  au  deiTus  de  la 
porte,  fe  hfoit  une  infcription  en  partie  effacée  à  coups  de  ci- 
•îeaux.  Voici  ce  qu'il  en   refloit  en  1769: 

Pierre  ,   Prince  d'un  grand  renom  ,•  , 

Le  derrain  jour,  fin  de  Septembre, 


R  E  N  5J 

A  ceft  portail  donna  ce  nom. 


Comme  il  remembre , 

Deflus  étoit  écrit  mil  quatre  cent 

Que  fut  cinquante  &  deux  ans. 

Les  armes  de  Henri  de  Villeblanche    fubfîfterent  à  cette  porte , 
jufqu'à  fa  démolition,  qui  fut  faite  en   1775. 

L'Eglife  de  ToufTaint  fut  enfermée  dans  la  ville  ,  &  on  fit 
une  porte  du  nom  de  cette  Eglife.  L'enceinte  fut  conduite  juf- 
qu'au  bout  de  la  rue  Champdolent ,  où  l'on  reconftruifit  une 
nouvelle  porte  ;  &  l'ancienne  &  la  nouvelle  clôture  fe  joignirent 
à  la  tour  du  Fourgon  ,  que  l'on  croit  être  la  plus  ancienne  des 
fortifications  de  Rennes ,  comme  fa  caducité  femble  le  confirmer. 
Les  portes  de  Saint-Germain,  Baudriere,  &  Aiviere,  qui  fe  trou- 
voient  renfermées  dans  cette  enceinte ,  furent  fupprimées. 

Les  murs  du  premier  accroiffement  n'étoient  pas  encore  ache- 
vés lorsqu'on  commença  celui-ci  ;  le  tout  n'étoit  fermé  que  de 
palifTadc'S  en  bois.  Cette  nouvelle  enceinte  étoit  très-étendue,  & 
devoit  coûter  des  fommes  immenfes,  fur-tout,  dans  un  pays  où 
la  pierre  eu  fort  rare.  Les  murs  ne  pouvoient  fe  conftruire 
qu'avec  beaucoup  de  temps  &  une  grande  dépenfe ,  à  laquelle 
la  Ville  n'étoit  point  en  état  de  fournir.  Aufîi  le  premier  re- 
nable  de  ce  dernier  accroiflernent  ne  fut-il  rendu  qu'en  1460, 
comme  le  prouve  le  procès-verbal  du  4  Oftobre  de  la  même 
année.  Il  '  reftoit  encore  beaucoup  d'ouvrage  à  faire  ;  mais  on  n'y 
travailla  pas  fur  le  champ  ,  &  ce  ne  fut  que  long-temps  après 
que  l'on  procéda  au  rembourfement  des  particuliers  dont  on 
avoir  pris  les  fonds  pour  ces  travaux.  Suivant  une  commiflion  du 
Duc  François  II ,  référée  au  compte  de  l'an  1 464  ,  les  ouvrages 
qui  reltoient  à  achever  croient  les  boulevards  &  les  nouvelles 
portes ,  qui  ne  furent  finis  qu'en  1490;  on  y  ajouta  dans  la 
fuite  plufieurs  fortifications ,  auxquelles  on  travailla  jufqu'en  1530. 

Le  Duc  François  I ,  par  fes  lettres  données  à  Nantes ,  le  6 
Juillet  1448,  permit  aux  Religieux  grands  Carmes  de  s'étabHr  à 
Rennes  ,  Se  engagea  tous  les  fujets  de  fon  Duché  à  contribuer 
à  cette  fondation  ,  par  argent  ,  meubles  ou  héritages.  Le  Prince 
nomma  Frère  Olivier-Jacques,  du  Couvent  de  Nantes,  Proçu- 


j4  R  E  N 

reur  du  nouveau  Monaftere  ,  pour  demander  &  recevoir  les 
dons ,  bienfaits ,  &  aumônes  qu'on  voudroit  bien  lui  accorder 
pour  ce  nouveau  Monaftere.  Jean ,  Sire  de  Maleftroit ,  Maréchal 
de  Bretagne,  fut  un  des  premiers  à  donner  l'exemple  de  la 
générofité.  Pour  cette  fondation  monaftique  ,  il  accorda  aux 
Religieux  une  maifon ,  avec  un  jardin  ,  anciennement  appellée 
V Hôtel  du  Vicomte ,  &  fituée  dans  l'ancienne  cité  de  Rennes  ^ 
entre  la  rue  des  Dames  &  celle  du  Chapitre ,  à  condition  que 
Jean  de  Maleftroit  auroit  fon  logement ,  avec  deux  lits ,  au  Cou- 
vent des  Carmes,  lorfqu'il  viendroit  à  Rennes.  Le  Duc  Fran- 
çois II,  en  1475  ^  ^47^)  donna  à  ces  Religieux  le  Four  com- 
mun ,  avec  trois  maifons  &  deux  jardins,  &  n'exigea  des  Moines, 
pour  toute  rétribution ,  qu'une  place  fituée  auprès  de  l'Hôpitai 
Samt-Yves ,  qu'ils  avoient  achetée  à  très-bon  marché ,  pour  y 
bâtir  un  four  &  une  maifon  j  de  forte  que  ce  Monaftere  ne 
tarda  pas  à  être  établi  fur  de  folides  fondements.  Les  bâtiments 
font  vaftes   &  décorés    d'un  grand  &  beau  jardin. 

L'an  1449,  Mathurin  le  Lyonnais  ,  Abbé  de  Saint-Melaine ,  fe 

rendit   à  Rome ,  pour  fe  plaindre  au  Saint-Pere  ,  &  lui  demander 

juftice  contre  l'AbbefTe   de  Saint-Georges  &  les  Archidiacres  de 

Rennes,  qui  lui  difputoient  le  premier  pas  dans  les  cérémonies 

publiques.  Ces  plaintes  furent  fuivies  d'une   convention  qui  por° 

toit ,  que  les  parties  s'en  rapporteroient  à  l'arbitrage  des  Evêques 

de  Rennes  &  de  Saint-Brieuc  j  de  Robert  d'Epinai ,  Grand-Maître 

de  la  maifon  du    Duc  ;  &  des  Sénéchaux    de   Rennes    &   de 

Vannes.  Les  Arbitres   décidèrent    que  l'Abbé  auroit  le  premier 

rang    après   le  Prélat ,  &   que  ,  dans  l'abfence  de  ce  dernier ,. 

i'Abbé  &:  la  première  Dignité    du  Chapitre  porteroient  enfemble 

Le  Saint-Sacrement ,  l'Abbé  à    droite ,  &  le  Chanoine  à  gauche». 

Le  Duc  Pierre  II  &  Françoife  d'Amboife  ,  fon  époufe ,  arri- 

verent  à  Rennes  au  mois  de  Septembre  1450,  &  donnèrent  des 

ornements    précieux   à   l'Eglife  de  Bonne-Nouvelle.  Le  Duc   fit 

conftruire  dans  le  même  temps  les  prifons  de  la  SénéchaufTée    de 

cette  ville.    L'Auditoire  de  la    Prévôté  ,    commencé  à  bâtir  en 

1440,  étoit  achevé.  Le  Duc  y  étabht  un  Juge  pour  connoître 

des  caufes  mobiliaires  des  habitants  des  ville  &  fauxbourgs  de 

Rennes.  La  SénéchaufTée  comprenoit  alors  non-feulement  cet  Evê- 

ché,  mais  encore  partie  de  ceux  de  Tréguier  &  de  Saint-Brieuc» 

On  agrandit  le  bâtiment  de  cette  Prévôté ,  &  on  en  fit  l'Audi» 

toire  commun   de  toutes  les  Jurifdiftions  de  la  ville.  Les  Juges 

du  Duc  retinrent  l'étage  fupérieur ,  &  le  raiz-de-chauffée  fut  deftiné 


R  EN  .  .    SS 

pour  les  Juges  des  Seigneurs  particuliers,  dont  les  Jurifdiflions 
s'exercent  dans  ia  ville.  Comme  les  procès  n'étoient  pas  fort 
nombreux,  la  conftitution  du  Duc  Jean  V,  de  l'année  1420,  dé- 
fendoit  à  tous  les  Juges  fubalternes  de  tenir  plus  de  huit  audiences 
par  chaque  année ,  en  matière  d'immeubles ,  ni  plus  de  feize  au- 
diences mobiliaires  ;  &c  par  conféquent  cette  falle  étoit  afTez  grande 
pour  le  temps.  Mais  les  affaires  s'étant  multipHées  ,  les  Juges  fe 
trouvèrent  trop  refTerrés.  Ceux  de  Vitré  fe  logèrent  dans  la  par- 
tie baffe  du  bâtiment ,  &  la  falle  fer  vit  pour  les  Jurifdiélions  des 
Seigneurs  particuliers  qui  y  tenoient  leurs  plaids  généraux.  En 
cette  année  14^0  ,  Henri  de  Villeblanche ,  Gouverneur  de  Rennes, 
&  Renée  de  Bargas ,  fon  époufe  ,  firent  bâtir  la  Chapelle  de 
Saint-André,  derrière  le  choeur  de  l'Eglife  Cathédrale.  En  1452, 
le  13  Juillet,  le  Duc  Pierre  II  affembla  à  Rennes  fes  Etats ,  dont 
l'ouverture  fe  fit  par  une  procefîion  folemnelle  de  l'EgHfe  Cathé- 
drale à  celle  du  Couvent  de  Bonne-Nouvelle ,  dont  la  fondation 
fut  de  nouveau  confirmée.  Les  Etats  accordèrent  une  augmen- 
tation de  privilège  à  ce  Monaftere. 

La  conteflation  qui  s'étoit  élevée  entre  les  Abbés  de  Saint-Me- 
laine  &  les  AbbelTes  de  Saint -Georges  ,  pour  la  préféance , 
n 'étoit  point  encore  terminée.  Ils  avoient  l'un  &  l'autre  une  chaife 
dans  l'Eglife  Cathédrale  de  Rennes  aux  jours  des  grandes  fêtes. 
En  1453  ,  la  difpute  fe  renouvella  avec  plus  de  force  que  jamais. 
L'affaire  fut  portée  devant  le  Pape ,  qui  ordonna  que  l'Abbé  de 
Saint -Melaine  ,  dans  toutes  cérémonies  rehgieufes  &  politi- 
ques ,  auroit  la  préféance  ,  «  d'autant  mieux  ,  dit  le  Pontife  ,  que 
»  perlbnne  n'ignore  combien  il  eft  dangereux  &  même  fcandaleux 
>»  de  voir  des  Religieufes  ,  oubliant  les  loix  de  la  clôture  &  de 
»  l'honnêteté  ,  de  la  pudeur  &  de  la  modeffie  qu'exige  leur  fexe  , 
»  fe  mêler  dans  les  affemblées  publiques ,  s'offrir  aux  regards  des 
»  hommes  ,  &  s'expofer  à  offcnfer  l'Etre-Suprême  à  qui  elles  fe 
»  font  confacrées  ,  &c.  »  Le  Duc  Pierre  II  intervint  dans  cette  af- 
faire ,  &  parvint  à  conciUer  les  parties.  Il  fut  dit ,  que  l'Abbé, 
dans  toutes  les  occafions ,  occuperoit  la  première  place ,  par 
honneur  pour  la  dignité  facerdotale  ;  &  que  cependant,  s'il  leju- 
geoit  à  propos,  il  l'offriroit,  par  galanterie,  à  l'Abbefîe  ,  qui , 
par  humilité,  la  rcfuferoit.  Ce  traité  fut  conclu  à  Chateaubriand, 
le  28  Mars  1453  ,  &  les  parties  promirent  de  le  faire  agréer 
&  ratifier  par  leurs  Communautés  refpeftives. 

1455.  Le  Duc  Pierre  II  &:  la  Ducheffe  ,  fon  époufe,  vien- 
nent à  Rennes  ,  &  font  une  magnifique  réception  au  Prince  de 


56  R  E  N 

Navarre  qui  Ce  rend  dans  cette  ville.  Uannée  fuivante ,  le  Pape 
annuUe  la  fentence  qu'il  avoit  portée  contre  les  Officiers  du 
Duc  à  la  Sollicitation  de  TEvêque  de  Rennes  -,  & ,  reconnoiflant 
que  le  Prélat  étoit  le  plus  coupable  ,  il  mande  aux  Abbés  de  Saint- 
Méen ,  de  Quimperlé ,  &  de  Bégars ,  d'abfoudre  ces  Officiers 
de  l'excommunication  lancée  contre  eux, 

1461.    Arrivée  du   frère  du  Roi  Louis  XI    à  Rennes.  Toutes 
les  prifons  font  ouvertes  ,  &  tous  les  prifonniers  élargis. 

L'Evêque  Jacques  d'Epinai  affembla  un  Synode  à  Rennes ,  le 
jeudi  d'après  la  Pentecôte  1465  ;  &  ,  félon  la  coutume  du  temps , 
il  fit  divers  llatuts  en  faveur  de  l'Eglife.  Il  prononça  excom- 
munication contre  les  perturbateurs  du  repos  de  l'Eglife  ,  les  in- 
frafteurs  de  fes  loix ,  &  les  violateurs  de  fes  privilèges  multi- 
pliés. Il  défendit ,  fous  la  même  peme  d'excommunication  &  de 
dix  livres  d'amende ,  de  citer  les  Prêtres  &  les  Clercs  devant 
les  Juges  féculiers,  &  aux  Juges  d'agir  contre  eux  ,  &  fe  ré- 
ferva  à  lui  feul  la  faculté  d'abfoudre  les  coupables.  Il  recom- 
manda exprefTément  l'obfervation  des  fêtes  de  la  Circoncifion , 
de  l'Epiphanie ,  des  Saints  Fabien  &  Sébalben  ,  Martyrs  ;  de 
Saint  Vincent,  de  la  Converfion  de  Saint  Paul,  de  la  Purifi- 
cation de  la  Vierge  ,  de  la  Chaire  Saint  Pierre ,  de  Saint  Ma- 
thias  _,  de  l'Annonciation ,  des  trois  fêtes  de  Pâques ,  de  Saint 
Marc ,  des  Saints  Philippe  &  Jacques  ,  Apôtres  -,  de  l'Invention 
de  la  Sainte  Croix  ,  de  Saint  Jean  Porte-Latine  ,  de  Saint  Yves , 
de  l'Afcenfion ,  des  deux  fêtes  de  la  Pentecôte  ,  de  la  Fête- 
Dieu ,  de  Saint  Barnabe  ,  de  la  Nativité  de  Saint  Jean-Baptifte, 
des  Saints  Pierre  &  Paul ,  Apôtres  ;  de  la  Vifitation ,  de  Sainte 
Marie-Magdeleine ,  de  Saint  Jacques ,  de  Saint  Pierre  aux  liens, 
de  la  Transfiguration ,  de  Samt  Laurent ,  de  l'Affomption  ,  de 
Saint  Barthelemi  ,  apôtre;  de  la  Décollation  de  Saint  Jean- 
Baptifte,  de  la  Nativité  de  Notre-Dame,  de  l'Exaltation  de 
la  Sainte  Croix ,  de  Saint  Michel ,  de  Saint  Denis  &  de  {es 
Compagnons ,  de  Saint  Luc  ,  Evangélille  ;  des  Saints  Simon  & 
Jude ,  Apôtres  ;  de  tous  les  Saints ,  de  la  Commémoration  des 
Défunts,  de  Saint  Melaine,  de  Saint  Martin  ,  de  Saint  Malo  , 
de  la  Préfentation  de  Notre-Dame,  de  Sainte  Catherine,  de 
Saint  André ,  de  Saint  Nicolas ,  de  la  Conception  ,  de  Saint 
Thomas,  de  la  Nativité  de  Notre-Seigneur  ,  de  Saint  Etienne, 
de  Saint  Jean ,  Apôtre  &  Evangélifle  ;  des  Saints  Innocents  ;  & 
quelques  autres.  Il  impofa  une  amende  de  dix  fols  monnoie  à 
toutes  perlonnes    qui  s'appuieroient   fur   l'autel  ou  fur  les  fonts 

de 


R  E  N  57 

de  baptême  ,  de  même  qu'à  ceux  qui  s'entretiendroient  de  choies 
inutiles  dans  l'Eglife.  Il  ordonna  enfuite  d'exécuter  la  Bulle  du 
Pape,  qui  avoit  enjoint  de  faire  des  proceflions ,  tous  les  premiers 
Dimanches  du  mois ,  pour  les  Croifés  j  mais  de  tous  ces  ftatuts 
fynodaux  ,  le  plus  utile ,  à  mon  avis ,  eft  celui  qui  fait  un  de- 
voir aux  Curés  de  tenir  un  regiltre  exaft  des  morts ,  des  naif- 
fances ,  &  des  mariages. 

1467.  Les  habitants  de  Rennes  forment  le  projet  de  fe  procurer 
une  horloge   pubUque.  On  choiiit ,  pour  la  placer  ,  une  tour  de 
la  ville  ,  lituée  derrière  la  Chapelle  Saint-James.  Cette  tour ,  de- 
venue inutile  par  les  différents  accroiflements  de  la  cité ,  avoit 
été  donnée  par  le  Duc   à  un   Seigneur  de  fa  Cour ,  duquel    les 
Bourgeois  de  Rennes   l'achetèrent    pour  l'exécution   de   leur  en- 
treprife.   Le   Duc  François  II  voulut  que  cette  horloge  fût  une 
des  plus  belles  de   fon  temps ,  &  il    recommanda  expreffément 
aux   habitants  de  ne  rien  épargner  pour   la  rendre  parfaite.   Le 
premier  marché  pour  la  fonte  de  la  cloche   fut  fait  le  17  Jan- 
vier 1468,  &c  ne  fut  rempli  qu'en  1470.  Cette  fonte    fe  fit  à 
l'endroit  où  eft  fitué  le  puits  du  Champ-Jacquet  ;  &  la  cloche , 
manquée   jufqu'à  trois  fois ,  réuffit  à  la  quatrième.    La  charpente 
de  l'édifice  étoit  d'une  beauté  admirable  $  le  bois  en  fut  pris  fur 
les  Terres    de  la  Seigneurie   de    Treflan  ,   dans   la   ParoifTe  de 
Longaulnai.    La  cloche   fut  montée  par  le  moyen  d'une   grande 
ouverture    faite   à  la  tour.  Un  compte   de  l'an  1483  ,  nous  ap- 
prend que  cette  cloche  s'étant  cafi^ee ,  fans  qu'on  fçache  par  quel 
accident,  on  la  defcendit  pour  la  refondre.  Pierre  Hurel  «L^  Jean 
Guiibert,  Fondeurs,  Normands,  qu'on  avoit  fait  venir,  fe  char- 
gèrent du  projet ,  pour  une  fomme  de  trois  cents  trente-trois  livres, 
qui  leur  fut  payée  ,  tant  pour  la  fonte  de  la  cloche  que  pour  celle 
des  trois  appeaux.  On  y  employa  trente-neuf  mille    deux  cents 
foixante-trois  livres   de  métal ,  &  quatre  cents  trente-fept  livres 
d'étain.  Le  nommé  Jean  Saliou^  Menuifier,  reçut  une  fomme  de 
trois   cents  vingt  livres  pour  monter  &  defcendre   cette   cloche. 
En   1 564  ,  elle  fe  fendit  j  &  comme  le  froiflement  des  deux  lèvres 
empêchoit  de  bien  compter  les  heures  ,  on  fut  obligé  de  la  faire 
fcier  ,  en  1 565 ,  &  elle  fervit  de  cette  façon  jufqu'en   1720   qu'elle 
fut  fondue  dans  l'incendie  qui  brûla  une  partie  de  la  ville.  Dans  fou 
entier  ,  elle  avoit  huit  pieds  de  diamètre  ,  fix  pieds  de  hauteur  ,  non 
compris  les  anfes  :  fon  épaifleur ,  à  la  lèvre  ,  étoit  de  huit  pouces. 

Le   29  Mars  1476,  le  Duc  François  H  donna  commifîion  aux 
Capitaine ,  Sénéchal ,  &  Prccuicui    de    k  ville  de  Rennes  y  de 
Tome  IK  H 


58  REN 

vifîter  les  maifons  des  habitants  ,  &  de  faire  procès-verbal  de 
leurs  armes,  vivres,  &  munitions.  Le  8  Février  1485,1e  même 
Prince  aflembla  fes  Etats  dans  la  grande  falie  du  Palais  épifcopal 
à  Rennes ,  pour  affurer  la  furvivance  de  fon  Duché  à  fa  fille 
aînée.  Les  Seigneurs  &  les  autres  Membres  de  l'aflemblée  jurè- 
rent ,  fur  la  Croix  &  les  famtes  Reliques  que  leur  préfenta 
l'Evêque  Guibé ,  qu'après  la  mort  du  Duc  ils  reconnoitroient 
pour  leur  Souveraine ,  Anne  de  Bretagne  ,  &  ,  à  fon  défaut ,  la 
PrinceiTe  Ifabeau  ,  fa  fœur. 

Il  y  a  apparence  que  la  grande  halle ,  qui  étoit  auprès  de  la 
place  de  Saint-Sauveur,  avoir  été  conftruite  avant  l'an  1400:  il 
n'en  eft  fait  aucune  mention  dans  les  archives  de  la  ville  qui 
reftent  de  ce  fiecle  ;  mais  les  lettres  que  les  habitants  obtinrent , 
en  i484,^pour  la  conftruftion  des  trois  autres  halles  ou  cohues, 
infinuent  que  la  première  fubfiftoit  déjà  depuis  long-temps.  De 
ces  trois,  une  fut  placée  près  l'Eglife  de  Saint- Germain  ;  une 
autre  ,  à  la  Poiflbnnerie  ;  &  la  troifieme  ,  à  Cartage  ,  pour  les 
poids ,  les  cuirs ,  &  les  merceries.  Elles  furent  bâties  aux  années 
1485  &  i486  :  il  n'en  relte  plus  qu'une  aujourd'hui.  Celle  de 
la  PoifTonnerie  ,  qui  étoit  conftruite  fur  la  rivière ,  eft  tombée  -, 
&  celle  de  Cartage  fut  incendiée  en   171 2. 

Le  17  Mai  i486,  le  Duc  François  II  ordonna  d'augmenter  de 
nouveau  l'enceinte  de  la  ville  de  Rennes.  Ce  dernier  accroiffe- 
ment  de  voit  être  beaucoup  plus  confidérable  que  les  précédents, 
puifqu'il  devoir  s'étendre  depuis  la  tour  derrière  Saint-Georges, 
enfermer  l'Abbaye  de  Saint-Melaine ,  pafTer  derrière  le  Tabor , 
fe  rendre  à  la  Barre  Saint- Juil:  &  aux  moulins  de  Saint- Martin, 
&  j  le  long  de  la  rivière  d'Ifle ,  au  pont  du  fauxbourg  l'Evêque  ,  & 
tout  en  droiture  jufqu'à  l'ancienne  clôture  près  la  porte  ou  tour 
de  Champdolent  ;  ce  qui  faifoit  un  contour  de  dix-huit  mille 
huit  cents  pieds  de  Roi.  Pour  faciliter  l'exécution  du  projet,  le 
Confeil  du  Duc  avoit  arrêté  d'établir  un  impôt  fur  le  vin  qui  fe 
débiteroit  dans  le  diocefe  de  Rennes  ;  mais  la  mort  du  Duc ,  qui 
arriva  le  8  Septembre  1488,  &  les  guerres  qui  en  furent  la 
fuite  ,  firent  évanouir  ce  projet.  Henri  IV  le  reprit ,  &  en  or- 
donna l'exécution,  par  fes  lettres  du  3  Juillet  1609,  expédiées 
en  conféquence  de  l'Arrêt  du  Confeil  du  jour  précédent  :  elles 
font  aux  archives  de  la  ville.  La  mort  du  Monarque  fit  encore 
échouer  ce  projet ,  &  la  Communauté  de  ville  en  obtint  la 
décharge,  par  Arrêt  du  Confeil  du  15  Juin  1610.  Avant  de 
mourir ,  le  Duc  ,  qui  defiroit  ardemment  l'exécution  de  ce  projet, 


R  E  N  59 

avoît  acheté,  l'an  1488,  quelques  terreins  auprès  de  la  ville, 
pour  y  conftruire  des  fortifications.  Le  journal  étoit  alors  compté 
à  leize  filions,  contenant  chacun  trois  cordes  trois  quarts  bc 
foixante  cordes  au  journal ,  la  corde  de  vingt-quatre  pieds.  C  etoit 
précifément  les  trois  quarts  de  notre  journal  aftuel. 

Le  28  Juillet  1488,  les  Français,  commandés  par  le  Duc  de 
la  TrimouiUe  ,  vamquirent  les  Bretons  à  la  fameufe  bataille  de 
Saint-Aubin  du  Cormier.  Le  lendemain  de  cette  journée  ,  le 
Général  Français  fit  fominer  les  habitants  de  Hennés  de  fe  fou- 
mettre  &:  d'ouvrir  leurs  portes  à  l'armée  du  Roi.  On  demanda 
un  délai  de  quatre  jours  pour  délibérer.  Le  Duc  le  refufa  ,  &  les 
menaça  de  marcher  fur  le  champ  contre  eux,  s'ils  ne  luidonnoient 
uneréponfe  prompte  &  décifive.  En  conféquence  ,  on  s'aflembla 
dans  l'Eglife  Cathédrale;  &  ,  après  une  mûre  délibération,  il  hit 
réfolu  de  braver  les  forces  de  la  France.  On  députa  le  Seigneur 
du  PlefTis-daliflbn  ;  Jean  le  Voyer,  Chanoine  de  la  Cathédrale; 
&  Jacques  Bouchard,  Greffier  du  Pailemcnt  du  Duc,  avec 
ordre  de  fe  rendre  à  la  porte  de  la  ville  ,  &  de  déclarer  au 
Héraut  la  réfolution  des  habitants.  Le  Duc  de  la  Tnmouille  ne 
voulut  point  fe  bazarder  à  faire  le  fiege  de  la  ville  ,  il  décampa 
fur  le  champ,  &  marcha  vers  la  bafîe  Bretagne. 

Au  mois  d'Oèlobre  1490  ,  la  DuchefTe  Anne  rendit  une  Ordon- 
nance, portant  défenfeaux  Chapitres  &  aux  Abbayes  debretagne  de 
procéder  à  aucune  élection  d'£vêques  ou  d'Abbés  fans  l'aveu  de 
cette  Fnnceiîè  ,  &  de  recevoir  aucunes  Bulles  qui  n'auroient  pas  été 
préfeniées  au  Confeil  de  la  province  ,  fous  peine  de  banniffement 
&  de  faifie  du  temporel  des  infra8:eurs  de  l'Ordonnance.  Au 
mois  d'Oftobre  de  la  même  année  ,  Louis,  Duc  d'Orléans,  vint 
à  Rennes  ,  par  ordre  du  Roi  Charles  VI II,  ik  y  fut  reçu  avec 
beaucoup  de  joie  par  les  habitants  ,  qui  efpéroient  que  l'arrivée 
de  ce  Prince  pourroit  faire  cefler  les  troubles.  C'étoit  aufii  le 
dcfièin  du  Roi  &  de  fon  Ambafîadeur.  La  Duchefle  Anne  étoit 
promife  à  Maximilien ,  Roi  des  Romains  ,  &  le  mariage  étoit 
fur  le  point  de  fe  conclure ,  lorfque  Charles ,  confidérant  de 
quel  intérêt  il  étoit  pour  lui  d'empêcher  cette  union ,  prit  le 
fage  parti  d'époufer  lui-même  la  PrinceiTe  Bretonne.  Le  Duc 
d'Orléans  fut  chargé  de  venir  la  demander.  Cette  commifiion 
ne  pouvoit  lui  être  bien  agréable.  Il  aimoit  pailionnément  la 
Duchefle ,  &  il  étoit  forcé  de  la  difpofer  à  donner  fa  main 
à  un  autre  ;  mais  ce  Prince  étoit  déjà  marié  ,  &  le  bien  de 
VLidt  cxi^eoit  ce  grand  facnfice.  Il  eut  le  bonheur  de  réufllr. 


éo  R  E  N 

La  PrincefTe  confentit  à  cette  union  ,  Se  le  Roi  vint  la  voir  à 
Rennes,  au  mois  de  Décembre  1491  :  il  relia  peu  de  temps 
dans  cette  ville ,  &  partit  pour  Langeais ,  où  la  DuchelTe  le 
fuivit  ,  &  où  cet  heureux  mariage    fut    célébré. 

Ifabeau  de  Bretagne ,  Ibeur  de  la  Duchefle  Anne  ,  étoit  morte 
à  Rennes,  le  10  du  mois  de  Juin  1490  :  elle  fut  inhumée  dans 
le  choeur  de  l'Eglife  Cathédrale.  Lors  de  la  démolition  de  cet 
édifice,  en  1755  >  ^^  trouva  une  plaque  de  cuivre  enchâflee 
dans  un  mauvais  parquet,  fur  laquelle  étoient  ces  mots  <  Cy  gifi 
le  corps  JUfabelU  de  Bretagne^  jœur  unique  de  la  Reine  Anne ^ 
qui  décéda  le  X  de  Juin  M.  IIIICC^  IIII^X.  IX,.,..  de  fon  âge. 
L'écu  de  Bretagne  au  bas  de  la  plaque  étoit  accompagné  de 
ces  mots  :  Prie:^  Dieu  p.  elle.  Cette  plaque  fut  mife  entre  les  mains 
du  Chapitre  de  la  Cathédrale ,  avec  obligation  de  la  repréfenter 
quand  il  en  feroit  requis.  Le  corps  de  la  jeune  Princefle  étoit 
dans  un  cercueil  de  bois,  pofé  fur  deux  barres  de  fer ,  dans  un 
caveau  en  maçonnerie.  Ce  cercueil  étoit  prefque  tout  pourri; 
on  y  trouva  une  partie  du  crâne ,  des  cheveux  trelTés  &  ornés 
de  perles ,  des  morceaux  de  velours  cramoili ,  avec  des  fourrures; 
mais,  dès  qu'on  y  touchoit  ,  tout  tomboit  en  pouffiere.  Ces 
triftes  relies  furent  mis  dans  une  boîte  de  plomb ,  &  confiés 
aux  Chanoines  de  la  Cathédrale. 

Un  compte  de  l'an  1492  nous  apprend  que  la  Chambre  des 
Comptes  du  Duc  fe  tenoit,  en  ce  temps-là  ,  aux  Cordeliers  de 
Rennes.  Après  l'union  de  la  Bretagne  à  la  Couronne  ,  la  con- 
tagion qui  regnoit  à  Nantes  ,  en  1587,  obhgea  le  Roi  à  trans- 
férer cette  Cour  à  Rennes  ,  où  elle  tint  fes  féances  au  Couvent 
des  Carmes.  Ce  fait  eft  prouvé  par  un  procès-verbal  &  un  bail 
des  réparations  qui  furent  faites  à  cette  Communauté  de  la  part 
de  la  Ville.  Les  habitants  de  Rennes ,  qui  defiroient  que  la 
Chambre  des  Comptes  continuât  de  tenir  fes  féances  dans  leur  ville  , 
préfenterent ,  à  ce  fujet ,  un  placet  au  Roi,  qui  leur  accorda 
leur    demande,  mais  fans  aucun   effet. 

L'an  1492  ,  la  Communauté  de  Ville  fit  venir  à  Rennes  les 
eaux  d'une  fource  très-abondante  ,  qui  fe  trouva  fur  le  bord 
d'une  pièce  déterre  ,  à  une  demi-lieue  de  la  ville  ,  fur  le  grand 
chemin  de  Dinan ,  &  fit  creufer  le  réfervoir  du  Puits-Laurent 
pour  les  recevoir.  Elle  y  joignit  aufli  d'autres  fources  qui  fe 
trouvèrent  dans  la  pièce  de  Goule-Brunes.  En  1652,  l'eau  fortoit 
gros  comme  le  bras,  par  deux  gargouilles,  à  la  fontaine  de  la 
place  du  Cartage ,   qui   fut   détruite  en    1679.  ^^^  partie  de 


R  E  N  6i 

cette  eau  reftoit  au    pont  Saint -Martin  pour    l'ufage   du    faux- 
bourg  ,  &  l'autre ,  à  la  porte  Saint-Pierre  ,  devant  le  portail  de 
la    Cathédrale.    Ce    dernier   réfervoir    fut    fupprimé    en     1 680. 
Dans  la  fuite  ,  la  fource  s'étant  affoiblie,  on  y  en  joignit  quelques 
autres  qui  avoient  été  découvertes  aux  environs  du  Puits-Laurent. 
Elles  portoient  leurs  eaux  à  la    gargouille  du  pont   Saint-Martin 
Se  à  une  autre  gargouille  placée   au  bas  de  la  rue  Saint-Louis, 
Se  non  devant  l'Eglife  des  Minimes,  où  elle  avoit   été  d'abord. 
La  caufe   de  l'affoiblifîement  de  la  première   fource    vint  de  la 
conceffion  faite,   le  4  O8:obre   161 3,   au   Sieur  de    la  Touche- 
Cornulier ,  Général  des  Finances  ,    propriétaire  de  la  maifon  des 
Trois-Croix  ,  d'un  douzième  des  eaux  ,  à  condition  qu'il  n'en  ufe- 
roit ,  dans  fa  cuiline,  que  par  une  clef  qu'il  y  feroit  pofer  pour 
le  fervice  aftuel  de  fa  maifon  ;  mais  le  robinet  demeura  ouvert. 
Se  on  en  accrut   l'ouverture.  Suivant  le  compte  de  i')06,  l'eau 
du  Puits-Laurent  &  de  Goule-Brunes    pafToit  fous  la  rivière    au 
pont  Saint-Martin  ;  il  en  coiita  cinquante-cinq  livres  pour  la  faire 
pafîer  fur  le  pont.  Par   le  compte  de  1507,   nous  apprenons  que 
la  Communauté  de  Ville  déiintéreifa  le  propriétaire    de    Goule- 
Brunes  ,  pour  avoir  la  difpolition  de  trois  fources,   qu'elle  réunit 
dans  un  baflln  qui  y  fut  conllruit.  Ces  eaux  étoient  les  meilleures 
de  toutes  celles  qui  fe  rendoient  à  Rennes.    Vers  la  fin   du  der- 
nier fiecle  ,    on   ht    pofer  fur   chacune    des    fources  une    groiïe 
borne  de  pierre  de  grain ,  de  trois  pieds  de  hauteur.  Pour  con- 
ferver  la  conduite  des  eaux   libre  &  prohibitive  fur   les  terreins 
oii  elles  pafîbient,   &   pouvoir  faire  tous  les  travaux  nécelTaires 
pour  l'entretien  des  canaux,  la  Communauté  de  Ville  commença 
par  acheter  le  terrein  fur  lequel  ils  pafToient  dans  la  largeur  de 
îept   pieds,   fpécialcment  depuis  la  Chapelle   Sainte -Marguerite 
juiqu'au  jardm  du  presbytère  de  Saint-Etienne  :  elle  avoit  même 
acheté   les  pierres  du  Puits-Laurent  &  de  Goule-Brunes.  En  con- 
féquence,  il   fut  défendu  d'enfermer  ou   d'occuper    ces  terreins; 
& ,  quand  il  eu  arrivé  ^  quelqu'un  d'y  faire  creufer  ou  d'y  jetter 
des  immondices  ,   ou  d'y  établir  des  fofles  -  mortes  ,  la  Commu- 
nauté y  3l  fait  mettre   ordre  ,  tantôt  par  Juflice ,  tantôt   de  plein 
droit,  par  fes  Députés.'  Le  4   Mai  1630,  le  Sénéchal  de  Rennes 
rendit   une  fentence  contre   tous  les  voifins  de   la  conduite  :  ils 
furent  condamnés  à  enlever  les  immondices  qu'ils  y  avoient  jettées, 
&  à    démolir   les  latrines  qui  fe  trouvoient  le  long  des  canaux  ; 
.faute  de  quoi  ,  on  y   mettroit  des  ouvriers  à  leurs  frais ,  &  ,    en 
cas  de  récidive ,  ils  furent  taxés  à  fix  livres  d'amende.  Deux  Arrêts 


éa  R  E  N 

de  la  Cour  de  Parlement,  des  années  1605  &  1705 ,  portent 
injon6lion  aux  propriétaires  des  terreins  adjacents  à  ceux  de  la 
conduite  prohibitive ,  de  les  faire  clorre  inceiïamment  par  un 
mur  ou  une  haie  d'épines  double  ;  en  forte  que  perfonne  ne 
puifle  pafler  fur  ces  terreins,  &  à  ceux  qui  pourroient  y  avoir 
conilruit  des  maifons ,  creufé  des  foliés ,  &c.  de  les  détruire  in- 
ceflamment  ,  avec  défenfe  d'y  creufer  à  l'avenir.  Au  mois  de 
Juillet  1632,  la  Communauté  fit  faire  un  procès-verbal  par  fes 
Députés;  &,  par  fa  délibération  du  12  Oftobre  1662  ,  elle 
chargea  de  nouveaux  Députés  de  détruire  tous  les  étabhfléments. 
qui  fe  trouveroient  fur  les  terreins  du  palTage  des  eaux.  Perfonne 
n'a  jamais  voulu  s'oppofer  aux  ouvertures  nécélîaires  pour  viiiter 
&  réparer  les  canaux.  Les  ReUgieufes  de  la  Trinité  ,  voulant 
s'exempter  de  l'embarras  de  ces  ouvertures  ,  ont  fait  faire  une 
voûte  avec  des  tuyaux ,  de  manière  qu'on  peut  faire  la  vifite 
fans  ouverture.  Le  27  Novembre  1690,  on  arrêta  de  faire  tranf- 
porter  la  conduite  entre  les  rues  Haute  &  BafTe  ;  mais  les  Ex- 
perts,  nommés  en  1700,  ayant  reconnu  que  ce  changement 
étoit  très-dangereux,  ce  projet  fut  abandonné. 

L'époque  de  la  conltruftion  de  l'Hôtel  de  Ville  &  de  la  place 
de  la  Monnoie  ,  n'cil  pas  bien  certaine  ;  il  paroît  néanmoins 
qu'ils  furent  commencés  l'an  1493  ,  puifque  ,  le  24  Juillet  de 
cette  année ,  un  Seigneur  d'Epinai  forma  oppofition  à  la  conf- 
truftion  de  cet  édifice.  Lors  de  l'entrée  du  Roi  Henri  IV  à  Rennes^ 
en  1598,  il  fut  réparé  &  embeUi.  En  1693  ,  il  étoit  en  fi  mau- 
vais état,  qu'on  forma  le  projet  de  le  bâtir  à  neufj  ce  qui  fut 
exécuté  aux  années  1695  &  1696.  On  employa  à  cette  conllruc- 
tion  les  quatre  mille  huit  cents  cinquante-cinq  livres  dont  les 
Sieurs  Loaifel  fe  trouvèrent  redevables  à  la  Communauté  de  Ville. 
L'édifice  fut  augmenté  d'un  pavillon ,  vers  le  foffé  de  la  ville ,. 
en  la  forme  alors  uiitée.  Pendant  le  temps  du  travail ,  les  affem- 
blées  fe  tenoient  chez  les  Pères  Minimes  ,  Se  elles  ne  fe  firent 
à  l'Hôtel  de  Ville  qa'en  l'année  1697. 

Le  8  Mai  1493  ,  Michel  Guibé ,  Evêque  de  Rennes,  publia 
des  ftatuts.  Ce  Prélat  y  recommande  l'ufage  de  faire  des  terta- 
ments,  comme  très-utile  au  falut  des  âmes.  Il  fe  plaint  de  quel- 
ques Relieurs  des  Paroiffes,  qui  détournoient  les  malades  du  def- 
fein  de  configner  fur  le  papier  leurs  dernières  volontés  ;  &,  pour 
remédier  à  cet  abus,  il  défend  exprelTément  à  tous  Refteurs  & 
autres  Eccléiialhques  ,  fous  peine  de  fufpenfe  ,  d'excommunica- 
tion j  ôc  de  dix  livres  monnoie  d'amende ,  d'empêcher  les  teita- 


R  E  N  (?j 

ments ,  &  il  ordonne  à  tous  les  Refteurs  de  mettre ,  tous  les  mois , 
aux  mains  de  l'Official  ou  Commiflaire  député  en  caufe  de  tefla- 
ment ,  les  noms  &  furnoms  des  hommes  &  femmes  décédés  dans 
leurs  Paroifîes  ,  avec  cliftin61:ion  de  ceux  qui  ont  fait  leur  tefta- 
ment  d'avec  ceux  qui  ne  l'auront  pas  fait.  Il  fut  enjoint  à  chaque 
Curé  de  publier  ,  tous  les  Dimanches,  ces  ftatuts  aux  prônes  des 
Meffes  Paroifliales.  Un  autre  abus  ,  dont  le  Prélat  fe  plaignoit, 
étoit  que  les  faintes  Huiles  étoient  portées  çà  &  là  par  des  Laï- 
ques. Il  défendit  aux  Refteurs  de  leur  en  donner  la  permifîion, 
fous  peine  d'excommunication  &  de  dix  hvres  d'amende. 

Environ  le  même  temps,  le  Pape  permit  aux  Religieux  de 
Saint-Melaine  de  percevoir  les  héritages  qui  leur  viendroient  en 
mobilier ,  comme  s'ils  étoient  dans  le  monde. 

La  Chapelle  de  Guibé  fut  fondée  par  Robert  Guibé ,  Evêque 
de  Rennes  &  Seigneur  de  Saint-Jean  fur  Coefnon.  Le  Vicaire 
de  cette  Chapelle  ell  à  la  nomination  du  Marquis  de  la  Do- 
biais  ,  de  la  Seigneurie  duquel  elle  dépend.  Ce  Marquifat  appar- 
tient aujourd'hui  à  M.  Paul  Hay ,  Chevalier  ,  Marquis  des  Né- 
tumieres ,  du  chef  de  Dame  Marie-Rofe  de  Latran  de  Kercadio 
de  Rochefort,  fon  époufe  ,  petite -fille  du  Préfident  de  la  Co- 
querie,  Patron, fondateur,  &  préfentateur  de  la  Chapelle  de  Guibé. 

L'Eglife  paroifTiale  de  ToufTaint  avoit  été  bâtie  par  les  pre- 
miers Comtes  de  Rennes ,  dans  un  heu  aflez  éloigné  de  la  ville. 
Elle  étoit  d'abord  ifolée  j  mais ,  dans  la  fuite ,  les  terreins  vagues 
qui  l'environnoient  furent  afféagés  à  des  particuliers  qui  y  firent 
conftruire  des  maifons.  En  1 505 ,  on  projetta  d'y  faire  un  cime- 
tière, pour  l'emplacement  duquel  Gui ,  Comte  de  Laval ,  Seigneur 
du  lieu ,  donna  quelques  maifons  dont  le  Général  de  la  ParoifTe 
s'obligea  de  lui  payer  la  rente  ,  avec  un  cierge  à  la  Chande- 
leur. On  plaça  ,  par  reconnoiflance ,  plufieurs  écuflbns  aux  armes 
de  cette  maiion ,  dans  l'EgUfe  de  Toufiaint  &  au  coin  du  nou- 
veau cimetière.  Jufques-là ,  le  presbytère  de  la  Paroifle  avoit  été 
dans  la  rue  du  Chapitre  ,  renfermée  dans  l'ancienne  cité.  Les 
habitants ,  qui  fentoient  combien  cet  éloignemcnt  étoit  incom- 
mode pour  eux  &  pour  leurs  Prêtres,  achetèrent,  en  1506,  un 
terrcin  plus  voifin  de  l'Eglife,  où  ils  placèrent  la  Cure.  L'année 
fuivante   1 507  ,  leur  nouveau  cimetière  fut  béni. 

L'an  1508  ,  le  Roi  Louis  XII  &  la  Reine  Anne  accordèrent 
aux  Paroifiiens  de  ToufTaint  le  terrein  de  la  rue  Traverfine , 
pour  l'incorporer  à  leur  cimetière.  Cette  rue  féparoit  l'ancien 
cimetière  du  nouveau  &  de  leur  Eglife. 


64  R  E  N 

Les  regilîres  de  la  Communauté  de  Ville  nous  apprennent  qu*eii. 
ce  temps ,  Jacques  de  Tours ,  Médecin  ,  avoit  îbixante  livres 
d'appointements.  Il  étoit ,  félon  toutes  les  apparences ,  le  feul 
de  ion  art  qui  réfîdât  à  Rennes. 

Par  lettres  données  à  Blois,  au  mois  de   Mai  1510,  la  Reine 
Anne   accorda  de  nouveaux  privilèges  au  Couvent  des  Jacobins 
de  Rennes ,  &  y  fit  de  nouvelles  fondations  :  elle   donna  à  ce 
Monaftere  fa  couronne  ducale  ,  avec  trois  ornements  complets, 
pour  la  célébration  du  Service  divin.  Le  premier  avoit  été  fait 
*  de  fa  robe  de  noces  avec  Charles  VIII ,  &  de  fon  manteau  ducaL 
Il  étoit  inappréciable ,   parce  que    ces  vêtements  étoient    ornés 
de    pierreries    d'une  grande   beauté  :   ce  riche    préfent  ne  fub-- 
fifte  plus.  En  1 5 1 9 ,  on  établit  une  foire  franche  à  Rennes  pen- 
dant  quinze  jours  j  foire  qui  depuis  a  été  fupprimée  ,  on  ne  fçait 
pourquoi.  Le  z6  Novembre  1 52.4  ,  les  Etats  ,  affemblés  à  Rennes^ 
rendirent  hommage  au  Roi ,  qui  envoya  dans  cette  ville  des  Com- 
mifîaires  pour  recevoir  le  ferment  de  fidélité  de  cette  afTemblée. 
En   15 16,  Noël  du  Margat,  Abbé  de  Saint- Melaine  ,  fit  réparer 
l'Eglife  &  les  bâtiments  de  fon  Abbaye,  qui  tomboient  en  ruines.. 
On  doit  rendre  juftice  à  cet  Abbé ,  dont  la  fageffe    réforma  les 
abas  de  fa  Maifon  &  les  défordres  de  fes  Moines.  Les  AbbeiTe 
&  Rehgieufes   de    Saint  -  Georges  fe    déshonoroient    alors  ,    par 
une  conduite    très-Hcencieufe  ,  fous  le    gouvernement    d'Ifabeau 
Hamon  ,  fœur  des  Evêques  de   Nantes  Se  de  Vannes ,  élue  Ab- 
befTe  en  1523.  Ce  Couvent  porta  le  défordre  à  fon  comble  j  il 
continua  fous  Chriftine  Touftain  (  a  )  ,   qui  mourut  en  1 5  27.  Le 


(  J  )  Je  ne  fçais  pourquoi  Taillandier , 
continuateur  de  Dom  Morice ,  a  pafle  fous 
fiJence  Chriftine  Touftain.  Il  eft  à  croire  qu'il 
ne  la  connoifToit  pas  :  elle  fe  trouve  néan- 
moins mentionnée  dans  une  efpece  de 
vieille hiftoire  eccléffeftique  &  monaftique  , 
imprimée  in-4°.  &  dans  un  autre  gros  in- 
4°.  qui  eft  à  la  bibliothèque  de  Saint-Geor- 
ges. Dans  l'un  de  ces  deux  livres  ,  on  a 
mis  Toutain  au  lieu  ds  Touflain  ,  faute  com- 
mune à  beaucoup  d'auteurs  &  imprimeurs, 
qui  penfent  que  Vf  ne  fe  prononce  pas. 
Elle  eft  aufïi  rappellée  dans  des  mémoires 
domeftiques  ;  mais  on  ne  fçait  fi  elle  étoit 
bâtarde  ou  légitime.  Cependant  la  dignité 
à  laquelle  elle  fut  élevée  ne  permet  pas  de 
ibupçonner  aucune  tache  dans  fa  naiflance. 
On  çonnoit  l'exai^tude  des  Religieufes  de 


cette  Abbaye  à  n'admettre  parmi  elles  que 
des  perfonnes  de  la  première  diftinftion; 
On  ne  fçait  pas  mieux  fi  cette  Chriftine 
Touftain  étoit  de  l'ancienne  maifon  de  Touf- 
tain-Frontebofc  en  Normandie  ,  laquelle  a 
donné  les  Marquis  &  Comtes  de  Carenci 
en  Artois  ,  les  Marquis  &  Comtes  de  Virai 
en  Lorraine,  les  Châtelains  d'Ecrennes  en 
Beauce  ,  &  dont  une  branche  eft  repréfen- 
tée  en  Bretagne  par  M.  le  Vicomte  de 
Touftain-Richebourg  ,  reconnu,  avec  la  qua- 
lité de  Chevalier  ,  au  Parlement  de  Rennes  , 
&  affilié  aux  Etats  de  la  province,  en  vertu 
de  fa  naifl^ance  &  de  fon  mariiige  avec  De- 
moifelle  du  Bot  de  la  Grée-Calac. 

Toftain,Thorftein,  Tuftin  ,Tuftain,  Touf^ 
tain,Turftain  ,Tofton,nom  avantageufement 
rappelle  dans  les  cartulaires   de  Normandie 

refpedlable- 


R  E  N  éj 

refpeftable  Evêque  ,  Yves  de  Mayeuc  ,  defîrant  faire  cefTer  un 
fcandale  qui  ne  pouvoit  que  nuire  à  la  Religion  ,  voulut  ufer 
de  fon  autorité  pour  rétablir  la  difcipline  dans  cette  Abbaye  j 
mais  le  mal  avoit  pris  de  trop  fortes  racines.  Les  Religieufes 
mépriferent  fes  avis  &  bravèrent  fon  autorité.  Le  Prélat  fut 
obligé  d'avoir  recours  à  la  puiflance  royale ,  avec  le  fecours  de 
laquelle  il  parvint  à  faire  rentrer  dans  le  devoir  &  dans  la  retraite 
ces  Dames  que  l'amour  du  monde  avoit  fçu  féduire. 

L'année  1527  eft  remarquable  par  l'établilTement  de  la  Chambre 


&  d'Angleterre  ,  dès  le  dixième  fiecle ,  & 
dans  les  Chroniques  6c  monuments  du 
Nord  ,  dès  le  faptieme ,  eft ,  au  fentiment 
de  M.  Hu2t,  dans  fes  Origines  de  Caen^  & 
deM.Taflin ,  dans  fa  Diplomatique  ,\^  même 
nom  Danois  diverfement  écrit  &  prononcé  : 
Tujlanus  y  génère  Danorum ,  dit  le  Monajli- 
con  Anglicanum ,  fous  l'an  970.  Sans  qu'il 
foit  néc:flaire  d'établir  une  jondHon  avec 
la  maifon  de  Steinftur ,  (  anagramme  de 
Turftcin  ,  )  dont  étoit,en  1521,  le  grand 
Adminiftrateur  de  Suéde  ;  ni  avec  la  maifon 
de  Torftenfon ,  ou  fils  de  Torftein ,  très- 
dlftinguée  dans  le  même  Royaume  ;  ni  avec 
les  Tulfton  &Stoufton  ,  Pairs  d'Angleterre: 
il  eft  certain  que  dans  une  famille  Nor- 
mande ,  de  nobhfTe  immémoriale  ,  ce  nom 
ne  peut  annoncer  qu'une  origine  antique  & 
îlluflre.  Il  étoit  afFe£té  par  des  Chefs ,  Sei- 
gneurs ,  &  Guerriers ,  Danois  ou  Scandi- 
naves ,  attachés  à  leur  idole  Tur  ou  Tor , 
(  Dieu  du  tonnerre  ,  )  auquel  ils  facrifioient 
fur  une  pierre,en  tudefque,y?«Vî.  A  cette  racine 
trcs-plaufible  ,  adoptée  parle  fçavant  Huet , 
M.  de  la  Sauvagere  en  fubftitue  une  autre 
affez  vraifemblable  ,  &  qui  n'ôteroit  rien  de 
l'antiquité  du  nom.  Ce  font  bien  les  mêmes 
mots ,  mais  l'interprétation  eft  différente. 
11  le  fait  donc  dériver  de  la  racine  tur , 
<jui  fignifie ,  en  hébreu  &  en  celte  ,  mon- 
tagne ,  &  de  Jlein  ,  qui  veut  dire  ,  en  tudef- 
que ,  rocher ,.  pierre.  Or  ,  dit-il ,  les  Seigneurs 
d'un  château  fitué  fur  une  haute  montagne , 
ainfi  qu'étoient  bâties  toutes  les  fortereffes 
dans  lantiquité ,  en  auront  pris  le  nom  de  Turf 
tein  ,  d'où  ,  par  corruption  ,  fera  venu  le  mot 
Toujlain.  Tur,  fuivant Ménage  ,  a  fignifié /ô/-- 
tis  ,  audaXy  &  flein ,  regio  ,  pagus  ;  en  forte 
^ue  Turjlàn  auroit  pu  fignifier  originaire- 
ment le  guerrier ,  le  chef,  le  défenfeur  du 
Ëays.  Il  eft  encore  à  remarquer  que  les 
formands ,    ayant    u  -.e   fois    embrafle  le 

Tome    IV^ 


Chriflianifme ,  le  nom  de  Touftaln  fut 
fouvent  pris  au  baptême  par  de  grands 
Seigneurs  ,  &  que  plufieurs  de  leurs  def- 
cendants  l'ont  enfuite  adopté  comme  fixe 
&  patronimique  ,  en  mémoire  des  a^î^ions, 
dignités ,  &  vertus  de  leurs  ancêtres.  Ceux 
qui  ne  fçavoient  pas  que  l'y  du  nom  fe 
prononce ,  ont  quelquefois  écrit  Toutain. 
Par  exemple  ,  on  lit  dans  l'hiftoire  de 
Rouen  ,  par  Favin  ,  Chapitre  de  l'ancienne 
Nobleffe  ,  Guillaume  Toutain  ,  Seigneur  de 
Betencourt  &  de  Honguemare  ,  à  la 
montre  des  Nobles  de  i486, au  lieu  de 
Guillaume  Touftain ,  &c.  Ce  Guillaume 
Touftain  ,  mari  de  Demoifelle  Jacqueline 
Gouel  ,  héritière  de  Limefy-Frontebofc, 
vendit ,  en  1487 ,  au  Seigneur  Gouel  de 
Poville  ,  le  fief  noble  de  Hautbert  &  de 
Betencourt  ,  dont  Colin  Touftain  ,  Ecuyer  , 
fon  arrière  grand-oncle ,  avoit  payé  le  re- 
lief &  treizième  au  Seigneur  de  Baque- 
ville  ,  en  1 284 ,  après  l'avoir  acheté  du 
Seigneur  de  Bré\4Lle.  Quant  à  la  Terre 
de  Honguemare  ,  entrée  dans  la  même 
maifon  par  le  mariage  de  Jean  Touftain^ 
Ecuyer,  aïeul  dudit  Guillaume ,  avec  De- 
moifelle Jeanne  le  Vavaffeur ,  elle  n'en 
eft  fortie  qu'en  i68a  ,  environ  trois  cents 
ans  après  cette  alliance.  Tous  les  aftes 
jufHficatifs  de  cet  expofé  ont  été  produits 
&  reconnus  à  la  Commiftion  Intermé- 
diaire ,  au  Parlement  ,  &  aux  Etats  de 
Bretagne,  en  1774.  Plufieurs  Touftain  ont 
été  Comtes  d'Hyefmes  au  onzième  fiecle  ; 
&  l'étymologie  celtique  du  nom  de  cette 
ville,  telle  que  la  donne  M.  Deric,  page  5  a 
de  fon  Introdu6Kon  à  rHiftoireEccléfiaftique 
de  Bretagne,  auroit  la  même  fignification 
que  celle  donnée  par  M.  de  la  Sauvagere 
au  nom  Touftain.  (  Voyez  la  page  cv 
du  tome    premier   de    ce   Di^bonnaire.  ) 


\ 


6S  R  E  N 

Royale  à  Rennes,  pour  la  réformation  de  laNobleffe.  Le  travail 
dura  plus  de   vingt  ans.    Au  mois  d'Août    1532,  les  Etats  s'af- 
femblerent  à  Vannes ,  le  Roi  y  aflifta.  L'aéle  de  l'union  de  la  pro- 
vince à  la  Couronne  fut  pafle  le  12    de  ce  mois,   &  le  Dau- 
phin fut  reconnu  Duc   de  Bretagne.  Le  9  Août   1532,  les  ha- 
bitants de  Rennes  furent  avertis  que   le    Prince  devoit  faire  fon 
entrée   dans  leur  ville.  René  de  Montboucher ,  Seigneur  du  Bor- 
da2;e,  premier  Pannetier  de  la  Reine  &  Gouverneur  de  Rennes, 
fit  ^:ous  les   préparatifs   pour  la  réception  du  nouveau  Duc ,  qui 
arriva  le   1 2  du  mois  d'Août ,  fur  les  onze  heures  du  matin  :  il 
n'entra  point  en  ville  ;  il  fe  retira  à  l'Abbaye  de  Saint-Melaine. 
On  tira  toute  l'artillerie ,  &  on  fonna  la  groffe  horloge  en  ma- 
nière  de  tocfin.  Le    Prince  étoit   accompagné    du  Cardinal   de 
Grammont  i  du  Marquis  du  Pont,  fils  aîné  du  Duc  de  Lorraine  j 
du  Sire  de  Chateaubriand,  Lieutenant  général  en   Bretagne  j  & 
de   quelques  autres   Seigneurs.    Cette   iliuftre  compagnie  dina  à 
Saint-Melaine.  Après  le  dîner ,    le    Prince  donna  audience  aux 
Seigneurs  qui  avoient  droit  d'affifler  au  couronnement.  Louis  de 
Rohan ,  Sire  de  Guemené ,   demanda   d'être  maintenu  dans  fon 
droit  de  tenir  &  garder  ,  pendant  le  couronnement ,  la  couronne 
du  Prince  -,  ce  qui  lui  fut   accordé   :   mais  il   fut   dit  que  ,  fans 
déroger  au  droit   dudit  Seigneur  de  Rohan  ,  &  pour  cette  fois 
feulement ,  le  Marquis  du  Pont  prendroit  la  couronne  fur  la  tête 
du  Prince ,  pour  la  donner  au  Sire  de  Guemené ,  fur  un  carreau 
préparé  à  cet  effet.  Ce  premier  point  réglé ,  le  Sire  de  Quebriac , 
Grand-Ecuyer ,  à  caufe  de  fa  Terre  de  Brecé ,  fut  reçu  à  porter 
l'épée   d'honneur    devant   le  Prince   à   fon  entrée.    François    de 
Niaure,  &  Alain  de  Trouvarlen  ,  Seigneur  de  la  Terre  de  Molac, 
furent   reçus  à  porter  les  deux  premiers  cantons  du  poêle  fur  la 
perfonne  du  Dauphin    :  René  Tornemine  ,    &  François  Brulon, 
Sieur  de  la  Muce ,  furent   reçus  à  porter  les   autres  cantons  du 
même  poêle  -,  mais  Pierre  Chauvin ,  Sieur  de  la  Muce-Chauvin , 
&  Claude  de  Maleftroit,  Sieur  de  Keraër,  prétendant  au  même 
privilège ,  le  Confeil   décida  que ,  fans  préjudicier  aux  droits  des 
parties ,   &  pour  terminer  le  différent ,  le  poêle  feroit  porté  par 
Antoine  de  Montboucher  ,  Seigneur  du  Pleffis,  François  de  Maure, 
Ôe  Alain  de  Trouvarlen. 

Le  lendemain ,  1 3  du  même  mois  ,  on  dreffa  à  la  porte  de 
l'Abbaye  de  Saint-Melaine  un  grand  théâtre  décoré  de  belles 
tapifferies  en  or  &  en  foie ,  fur  lequel  le  Prince  fe  plaça  dans 
un  fauteuil   de  velours  yerd,  accompagné   des   premiers  de  fa 


R  E  N  ^7 

Cotir  ;  &  on  fit  pafTer  devant  lui  trois  colonnes  de  gens  de  pied 
armés  en  guerre,  avec  piques,  hallebardes,  &  fulils,  qui  for- 
moient  un  nombre  de  quinze  cents  hommes.  La  première  étoit 
habillée  de  blanc  ,  gris ,  &  violet  ;  &  les  deux  autres  avoient  la 
couleur  de  la  ville ,  blanc  &  noir.  Les  Capitaines  étoient  accou- 
trés des  couleurs  de  leurs  troupes  ,  en  velours  &  draps  d'argent , 
avec  des  bofles  d'or  &  des  devifes  relatives  à  la  cérémonie. 
Chaque  Capitaine,  à  fon  rang,  préfenta  au  Duc  le  fervice  de  fa 
Compagnie ,  &  lui  fit  un  compUment  en  vers.  Ces  trois  colonnes 
étoient  fuivies  d'une  autre  troupe  richement  vêtue  ,  en  velours , 
fatin  ,  &  taffetas ,  nommée  la  troupe  de  la  Ba-^oche ,  avec  fes 
Capitaines  &   Officiers ,  faifant  en  tout  trois  cents  hommes  de 

Eied.  A  leur  fuite ,  parut  le  Clergé  fécuUer  &  réguUer ,  en  ha- 
its  de  chœur ,  avec  les  croix  &  les  bannières.  Les  ReHgieux  de 
Saint-Melaine  portoient  leurs  ReHques  à  cette  cérémonie.  René  de 
Montboucher ,  Capitaine  de  la  ville ,  précédé  des  quatre  Trom- 
pettes ,  avec  des  robes  aux  armes  de  la  ville  ,  dont  l'écufTon  étoit 
environné  d'une  cordelière,  paroiffoit  richement  habillé,  &  ac- 
compagné des  Officiers  municipaux  &  des  principaux  Bourgeois 
magnifiquement  parés ,  au  nombre  d'environ  deux  cents.  Quand  ils 
furent  devant  le  théâtre  ,  les  Trompettes  commencèrent  leurs 
fanfares.  Le  Capitaine  mit  pied  à  terre  avec  les  Connétables 
&  fept  à  huit  des  plus  notables  Bourgeois  ,  &  harangua  le 
Prince.  Louis  du  Defert,  Confeiller  ,  Maître  des  Requêtes  du 
Prince  ,  &  Garde-fcel  en  fa  Chancellerie ,  répondit  à  la  harangue, 
&  témoigna  le  contentement  du  Prince.  Ceux-ci  étoient  luivis 
des  Sergents  ,  des  Notaires ,  &  des  Avocats  ,  en  robes  de  Palais  & 
bien  montés  :  ils  précédoient  les  Officiers  fupérieurs.  Pierre  d'Ar- 
gentré ,  Sénéchal  de  la  ville  ,  defcendit  de  cheval ,  &  fit  fa 
harangue. 

Suivoient  le  Chapitre  de  la  Cathédrale,  portant  les  ReHques; 
les  Trompettes  de  la  ville ,  &  les  Hérauts  d'armes  ;  le  Vice- 
Chanceher  j  les  Maîtres  des  Requêtes  ;  les  Abbés  de  la  Chaume 
&  de  Montfort  j  les  Evêques  de  Saint -Malo  &  de  Coutances,, 
(ce  dernier  étoit  Grand-Aumonier  ;  )le  Sire  d'Avaugour  portant 
le  bâton  de  Maréchal  j  &  Louis  de  Nevers  ,  chacun  en  leur 
rang.  Le  Duc  ,  vêtu  d'une  robe  de  velours  bleu  avec  des  bro- 
deries en  or ,  monté  fur  un  cheval  enharnaché  de  velours  noir 
avec  des  boucles  d'or ,  paroiffoit  enfuite ,  ayant  à  fa  droite  le 
Cardinal  de  Grammont  ,  &  à  fa  gauche  le  Marquis  de  Lor- 
Baine.  11  étoit  fuivi  de  Louis  Hainaft  ,  Chevalier  de  l'Ordre  diL 


é8  R  E  N 

Roi ,  Gouverneur  du  Duc ,  &  de  plufieurs  autres  Seigneurs.  Lorfque 
le  Duc  commença  à  marcher  ,  la  grofle  horloge  fonna  jufqu'à 
ce  qu'il  fût  arrivé  à  l'Eglife  de  Saint-Pierre.  Quand  il  fe  pré- 
fenta  à  la  porte  au  Foulon  ,  le  peuple  cria  :  P^ive  le  Duc ,  &  l'ar- 
tillerie tira.  Cette  porte  étoit  fermée  fuivant  l'ufage.  L'Evêque 
de  Rennes,  accompagné  du  Sire  de  Chateaubriand,  qui  fit  ou- 
vrir la  porte  ,  préfenta  au  Duc  le  livre  des  Evangiles  &  les  Re- 
liques, fur  lefquels  le  Duc  fit  ferment  de  conferver  les  droits 
de  l'Eghfe  de  Bretagne ,  Se  {es  Minières  dans  leurs  privilèges  & 
anciennes  libertés.  Le  Seigneur  de  Chateaubriand  reçut  le  même 
ferment  pour  la  NoblelTe  ,  les  Villes ,  &  le  Peuple.  Le  Duc  en- 
tra ,  &  on  lui  préfenta  un  riche  poêle  de  damas  bleu  &  de  fatin 
blanc ,  orné  de  fleurs  de  lis  d'or  &  d'hermines ,  fous  lequel  étoit 
le  Seigneur  de  Quebriac ,  Grand-Ecuyer ,  à  cheval ,  &  ayant 
l'épée  ceinte  avec  une  écharpe  émaillée  de  fleurs  de  lis  d'or.  Ce 
Seigneur  fe  retira,  &  céda  fa  place  au  Duc,  devant  lequel  il 
continua  de  marcher.  Les  rues  étoient  richement  tapifl^ees ,  &  les 
carrefours  étoient  décorés  de  théâtres ,  avec  des  emblèmes  &  des 
devifes  relatives  à  la  cérémonie.  Quand  le  Prince  fut  rendu  au 
manoir  épifcopal,  le  poêle  que  le  Sire  de  Maure  prétendit  lui 
appartenir ,  fut  faifi  par  les  domelliques  de  ce  Seigneur.  Le  Duc 
entra  à  Saint- Pierre  ,  monta  au  chœur  ,  &  fe  plaça  ,  pour  aflifl:er 
à  Vêpres ,  fous  un  poêle  de  drap  d'or  qu^on  lui  avoit  préparé 
du  côté  de  l'Evangile.  A  Magnificat ,  l'Evêque  donna  l'encens 
au  Duc  &  au  Gouverneur  de  la  province.  Après  les  Vêpres ,  le 
Duc  fe  retira  au  Palais  de  l'Evêque  ;  &  le  lendemain  1 4 ,  à 
fept  heures ,  le  Clergé  de  la  Cathédrale ,  portant  les  Reliques , 
les  Evêques  de  Rennes ,  de  Saint-Malo  ,  &  de  Coutances ,  en 
habits  pontificaux  ,  &  accompagnés  des  Abbés  de  Montfort  & 
de  la  Chaume  ,  fe  rendirent  au  Palais  épifcopal ,  &  trouvèrent  le 
Duc  au  bas  du  vefl:ibule.  L'Evêque  lui  préfenta  un  livre ,  qu'il 
baifa ,  &  enfuite  il  fit  ferment  de  défendre  la  Foi  CathoHque, 
l'Eglife  de  Bretagne ,  &  fes  Minifl:res.  On  marcha  enfuite  pro- 
ceflionnellement  à  la  Cathédrale.  Le  Clergé  commehçoit  la 
marche  :  venoient  enfuite  les  Trompettes  ;  le  premier  Huifîier 
du  Duc  ',  deux  Maîtres-d'Hôtel ,  vêtus  de  robes  de  fatin  violet , 
leurs  bâtons  blancs  à  la  main  ;  les  Hérauts  de  Bretagne  &  de 
Champagne  ;  Claude  de  Villeblanche,  Seigneur  de  Broons,  por- 
tant un  carreau  de  drap  d'or  ;  le  Marquis  de  Lorraine  ;  le  Duc 
de  Nevers  ;  puis  le  Duc ,  ayant  à  fa  droite  le  Cardinal  de  Lor- 
raine ,  &  à  fa  gauche  le  Gouverneur  j  le  Seigneur  d'Humieres  j 


R  EN  ^9 

&  le  Grand-Maître  des  Eaux  &  Forets ,  avec  plufîeurs  grands 
Seigneurs  ,  tous  magnifiquement  vêtus,  &  les  Archers  de  la 
garde. 

On  avoit  préparé  une  efpece  d'échafaud  dans  la  Cathédrale, 
pour  le  couronnement.  Quand  le  Prince  fut  arrivé ,  il  fe  mit  à 
genoux  ,  au  bas  de  cet  échafaud  ,  fur  un  carreau  que  lui  préfenta 
le  Seigneur  de  Broons  ;  &  ,  quand  il  eût  fait  fa  prière ,  il  fut 
conduit  ,  par  le  moyen  d'un  petit  pont ,  fur  lechafaud ,  par  le 
Gouverneur  &  le  Cardinal  de  Grammont.  Le  Sire  d'Avaugour 
tenoit  l'épée  ducale.  Le  Duc  s'affit  fur  une  chaife  de  drap  d'or: 
on  lui  ôta  la  robe  qu'il  avoit ,  &  on  lui  mit  un  manteau  de  ve- 
lours pourpre  &  fourré  d'hermines ,  qui  étoit  ouvert  par  les  cô- 
tés. M.  de  Nevers  lui  mit  le  coUier  de  l'Hermine,  Se  enfuite 
celui  de  l'Ordre  du  Roi.  Le  couronnement  fe  fit  à  la  manière 
accoutumée,  comme  on  l'a  dit  ci-devant.  Après  la  Méfie,  le 
Duc  fut  reconduit  au  Palais  épifcopal ,  &  on  cria  ,  à  haute 
voix  ,  «  que  le  Duc  tiendroit  Cour  ouverte  ,  &  que  ceux  qui  vou- 
»  droient  fe  trouver  à  fon  dîner  n'en  feroient  pas  empêchés.  » 

Le  Duc  ,  ayant  quitté  les  ornements  ducaux  ,  excepté  la  cou- 
ronne ,  vint  dans  la  falle  du  fefiin.  Quand  il  parut,  les  Trompettes 
fe  firent  entendre  j  & ,  quand  on  voulut  fe  mettre  à  table  ,  on 
lui  ôta  la  couronne.  A  chaque  fervice ,  les  Trompettes  répétoient 
leurs  fanfares.  Les  grâces  furent  dites  par  le  Cardinal  de  Gram- 
mont ,  &  le  Duc  donna  ,  pendant  deux  heures ,  audience  à  ceux 
Sui  avoient  afi'aire  à  lui.  Il  alla  à  Vêpres  au  Monafi:ere  de  Saint- 
reorges ,  accompagné  de  fa  Cour  &  des  gens  de  Jufiice.  Les 
Compagnies  qui  avoient  affilié  à  l'entrée ,  ayant  été  averties ,  fe 
trouvèrent  à  la  fortie  du  Duc ,  le  conduifirent  à  Saint-Georges  , 
&  le  ramenèrent  à  fon  logis  ,  au  miUeu  des  décharges  réitérées 
de  l'artillerie.  Quand  il  fut  rentré ,  le  Comte  de  Laval ,  le  Sei- 
gneur du  Bordage  ,  &  les  principaux  de  la  ville,  lui  offrirent, 
au  nom  des  habitants,  une  hermine  d'or  émaillée ,  entre  fix  lis, 
environnée  d'un  riche  chapeau  de  triomphe ,  du  poids  de  huit 
marcs  d'or  :  c'étoit  la  figure  de  l'union  qui  venoit  de  fe  faire , 
aux  Etats  de  Vannes ,  de  la  Bretagne  à  la  Couronne.  On  fit 
une  harangue  au  Duc  ,  qui  ôta  fon  bonnet ,  &  témoigna  fa 
fatisfaftion. 

Le  mercredi ,  1 4  Août ,  au  foir ,  un  des  Ecuyers  du  Roi 
vint  à  Rennes ,  où  il  apporta  la  nouvelle  que  le  Roi  étoit  à 
Nantes  ;  qu'on  y  préparoit  un  tournois  ;  &  que  l'intention  de 
Sa  Majefté  étoit ,  que  le  Dauphin  ,  Duc  de  Bretagne  ,  fe  rendit 


70  R  E  N 

à  Nantes.  En  conféquence  ,  le  Prince  partit  le  lendemain,  Se 
fut  conduit  par  le  Seigneur  du  Bordage  &  fa  troupe  jufqu'à  la 
lande  Salibart,  où  ils  prirent  congé  de  lui,  &  lui  recomman-r 
derent  la  ville  &  les  habitants  de  Rennes.  Le  Cardinal  de 
Grammont  répondit  que  le  Prince  étoit  fort  content  des  Rennois  ,, 
qu'il  les  remercioit  -,  puis  il  prit  congé  d  eux.  Alors  les  troupes 
firent  une  décharge  générale  de  leurs  armes  &  s'en  retournèrent , 
&  le  Dauphin  marcha  vers  Nantes» 

Les  premières  éclufes  qui  parurent  fur  la  Vilaine ,  furent  conf* 
truites,  l'an  1539  ,  par  ordre  du  Roi;  &,  l'an  1542  ,  on  com- 
mença à  naviger  fur  cette  rivière ,  depuis  Rennes  jufqu'à  Meffac. 
Les  premiers  bateaux  étoient ,  comme  ceux  d'aujourd'hui ,  fort 
plats ,  &  ne  portoient  qu'environ  vingt  milliers»  La  première  pierre 
de  l'Eglife  Cathédrale  de  Rennes  fut  pofée  le  1 5  Septembre 
15  41,  comme  on  le  voit  dans  les  archives  de  la  ville.  Dom 
Lobineau  prétend  que  ce  fut  Yves  de  Mayeuc  qui  la  pofa  j  il  fe 
trompe  :  ce  Prélat  étoit  alors  dangereufement  malade  à  Brutz  ,  & 
mourut  de  fa  maladie.  La  cérémonie  fe  fit  donc  feulement  en  fon 
nom..  Ses  tours  ,  au  nombre  de  deux  ,  réuniffent  les  cinq 
ordres  d'archite6lure  ,  qui  font  entafTés  les  uns  fur  les  autres.  La 
plate-bande  du  portail  efl  admirée  de  tous  les  connoiffeurs.  En 
1755  ,  le  vailTeau  de  cette  Eglife  menaçant  ruine,  elle  fut  dé- 
molie ,  à  l'exception  des  deux  tours  qui  fubfiftent  encore.  On 
y  trouva  le  corps  d'Yves  de  Mayeuc  dans  une  châiTe  de  plomb , 
avec  fa  bague  d'Evêque  au  doigt»     ■ 

La  ville  de  Rennes  efluya,  en  1544,  un  tremblement  de 
terre  fi  violent  ,  que  les  meubles  s'entre-choquoient  dans  les 
piaifons, 

1 5  5  4.  Le  Roi  Henri  ïî  établit ,  au  mois  de  Novembre  ,  un  Siège- 
de  Grand-Maître-Réformateur  des  Eaux  &  Forêts  à  Rennes.  Le 
même  Monarque  créa  aufli  fix  charges  de  Maîtres  des  Requêtes 
dans  la  Chancellerie  de  Bretagne,  oii  ci-devant  il  n'y  en  avoit 
que  fix.  On  voit  au  nombre  des  lettres  de  nos  Rois  ,  concernant 
les  privilèges  de  la  Communauté  de  Rennes,,  trois  copies  des- 
lettres de  Charles  VIII  ^  portant  que  la  Chancellerie  étoit  fixée 
à  Rennes ,  indépendamment  du  Parlement ,  qui  n'y  fiégeoit  que 
quelques  mois.  Ce  règlement  fut  confirmé  par  les  lettres  du  Roi 
François  I  -,  mais  aux  dernières  lettres  de  l'an  1631  ,  on  a  joint 
les  pièces  d'une  groffe  procédure  au  Confeil ,  pendant  les  années 
1542  &  1543  ,  contre  les  habitants  de  Nantes,  qui  avoient  furpris. 
zxL  Dauphm  Henri  ,^  Duc  de  Bretagne  ^  deux  lettres  portant  que 


R  EN  7r 

la  Qiancellerie  tiendroit  fix  mois  à  Nantes ,  &  fix  mois  à  Rennes, 
fans  jugement  décifif  fur  ce  point.  On  ne  trouve  même 
aucune  fentence  qui  fixe  la  Chancellerie  près  le  Parlement.  Le 
Siège  préfidial  de  Rennes,  compofé  de  fept  Confeillers ,  d'un 
Avocat  du  Roi,  &  dun  Greffier,  fut  créé,  par  Edit  du  Roi 
Henri  II ,  donné  à  Rheims  au  mois  de  Mars  1 5  5 1 .  Le  Parlement 
fut  créé  en  1 5  5  3  ,  &  tint  fa  première  féance  au  mois  d'Août  1554, 
dans  le  Couvent  des  Cordeliers.  (Voyez  tome  premier ,  pag.  cciv.) 
Cette  Cour,  qui  s'eft  toujours  diflinguée  par  fes  lumières,  fon 
équité,  &  fa  fageffe,  fait  foigneufement  obferver  les  loix.  La 
province  fent  tout  le  prix  d'un  établiffement  fi  nécefTaire.  La  for- 
tune des  citoyens  eft  aftuellement  en  fureté  :  le  riche  &  le  puif- 
fant  n'oppriment  plus  impunément  le  pauvre  &  le  foible  ,  &  l'on 
n'a  point  à  craindre  l'ambition  &  la  rufe  d'un  injufte  raviffeur. 
Mais ,  fi  la  Bretagne  retire  beaucoup  d'avantages  de  fon  Parle- 
ment, la  multiplicité  des  Jurifdiftions  inférieures  eft  un  abus  qui, 
félon  bien  des  gens ,  mérite  l'attention  d'une  adminiftration  éclai- 
rée.  C'eft  à   ceux  qui  connoifTent  le  mal  d'indiquer  le  remède. 

Le  15  Juin  1559  ,  le  Roi  Henri  II  entra  au  Parlement,  pour 
s'inftruire ,  par  lui-même ,  du  nom  &  des  qualités  des  fauteurs  de 
la  nouvelle  doftrine.  Il  Rit  auffi  furpris  qu'indigné  de  voir  plu- 
fieurs  Confeillers  fe  déclarer  en  faveur  de  la  prétendue  réforme. 
Il  les  fit  arrêter ,  &  ordonna  de  leur  faire  leur  procès.  Cette  fé- 
vérité  n'empêcha  pas  deux  nouveaux  Minifi:res  de  prêcher  en  Bre- 
tagne. On  fit  à  Rennes  la  cérémonie  de  la  Cène  ,  la  veille  du  Di- 
manche des  Rameaux  ,  dans  la  maifon  de  la  Prévalaye  j  &  on  la 
renouvella,  à  la  Pentecôte  ,  dans  la  maifon  de  la  Motte-au-Chan- 
ceher  ,  fituée  hors  la  ville  ,  dans  la  Paroilfe  de  Saint-Etienne. 

Artur  de  Collé,  fils  de  Charles,  Comte  de  BrifTac,  Maréchal 
de  France,  fut  nommé  Abbé  de  Saint-Melaine ,  Tan  1560,  & 
Evêque  de  Coutances ,  en  1561.  Ce  Prélat,  qui  aimoit  beaucoup 
l'argent,  enleva  à  l'Abbaye  de  Saint-Melaine  les  vafes  facrés, 
l'argenterie  ,  &  les  plus  précieux  ornements  de  l'Eglife.  Les  Moines 
s'en  plaignirent  j  mais  leurs  plaintes  eurent  un  mauvais  fuccès. 
Artur,  irrité,  fe  faifit  de  toute  leur  vaifTelle  &  de  tout  ce  qu'il 
trouva  de  fon  goût  :  il  traita  même  durement  les  Moines;  &, 
quand  il  vit  qu'il  ne  pouvoit  plus  rien  leur  prendre ,  il  permuta , 
en   1570,    avec  l'Abbé  du  Mont-Saint-Michel. 

L'an  1565  ,  les  Jurifdiftions  royales  deHedé  &  de  Saint-Aubin 
du  Cormier  furent  unies  &  incorporées  à  la  Sénéchauflée  de 
Rennes ,  par  Edit  du  mois  d'Odobre. 


71  R  E  N 

Avant  l'union  de  la  Bretagne  à  la  Couronne  de  France  ,  Fran- 
çois II,  par  {es  lettres  du  22  Septembre  1485  ,  avoir  établi  un 
Parlement,  qui  devoit  fe  tenir  à  Rennes  &  à  Vannes.  Cet  arran- 
gement iubfiita  jufqu'en  1 5 5 ^  j  époque  de  lereftion  du  Parlement 
aftuel ,  qui  fut  fixé  pendant  fîx  mois  à  Rennes ,  &  pendant  fîx 
mois  à  Nantes.  Cette  alternative  donna  lieu  à  de  grandes  &  longues 
conteftations  entre  ces  villes  ,  qui  vouloient  polTéder  cette  Cour 
inclufivement.  Les  Nantais  fuccomberenti  &  l'Arrêt  du  Confeil 
du  2  Mars  1580,  décida  que  le  Parlement  demeureroit  dans  la 
ville  de  Rennes.,  Comme  cette  affaire  étoit  niiportante  ,  les  habi- 
tants de  Rennes  n'avoient  rien  épargné  pour  faire  juger  en  leur 
faveur.  Le  8  Février  de  cette  année ,  ils  avoient  député  le  Vi- 
comte de  Mejufîeaume  ;  François  Dugué ,  Chevalier  des  Ordres, 
du  Roi,  Gouverneur  de  leur  ville;.  &  le  Sieur  de  Meziere,  pour 
aller  défendre  leur  caufe  en  Cour.  Les  Nantais  ne  s'étoient  pas 
oubliés  :  ils  avoient  aufîl  fait  partir  des  Députés  ;  mais  leurs  raifons. 
n'étoient  pas  aufîi  fortes  que  celles  de  leurs  adverfaires.  La  ville 
de  Rennes  avoir ,  à  Paris ,  Gilles  Lezot  de  la  Ville-Geffrai  ,  fon 
Procureur-Syndic,  qui  repréfenta  «  combien  il  étoit  incommode 
»-  de  porter  de  Rennes  à  Nantes  les  regjftres  du  Parlement,  tous 
>x  les  fix  mois.  »  Il  ajouta  :  «  que  la  ville  de  Nantes ,  déjà  riche 
»  par  fon  commerce  ,  n  avoir  pas  befoin  de  cette  nouvelle  fource- 
»  de  richeffes  ;  &  qu'étant  fîtuée  à  l'un  des  bouts  de  la  province,. 
»  à  près  de  quatre-vingt  lieues  de  Brell:  &  de  Saint-Renant  ^ 
»  c'eût  été  porter  un  préjudice  très-grand  aux  habitants  de  ces, 
w  cantons ,  que  de  fixer  fi  loin  d'eux  une  Cour ,  où  ils  ne  pou- 
>>  voient  manquer  d'être  obligés  d'aller  chercher  la  Juflice.  >> 

1 5  89.  Commencement  des  guerres  de  la  hgue  en  Bretagne.  Le. 
2  Mars ,  le  Duc  de  Mercœur  fit  arrêter  fecrétement  le  Seigneur 
de  Ris  ^  Premier  Préfident  du  Parlement ,  avec  fon  fils  &  fon 
gendre ,  qui  revenoient  de  Paris.  Ils  furent  conduits  &  enfermés 
au  château  de  Nantes.  Quelques  jours  après ,,  on  fit  trois  pro- 
cefTions  générales  à  Rennes  pour  la  confervation  de  la  Religion; 
Catholique.  Le  peuple  y  marcha  avec  des  cierges  &  des  flam- 
beaux :  plufieurs  y  marchèrent  pieds  nuds  j  &  les  autres  fimple- 
ment  en  chemifes.  Cette  dévotion  ne  fut  pas  approuvée  du  Gou- 
verneur de  la  ville  ,  René-Marc  de  Montbarot  ^  Huguenot  zélé^ 
qui ,  après  les  procefîions  y  s'empara  de  toutes  les  forterefles  ,  où. 
il  mit  des  troupes  de  fa  ReHgion  &  les  Catholiques  qu'il  crut 
ks  plus  fivdelesau  Roi ,  dans  la  crainte  que,  par  un  zèle  aveugle,  les 
Catkoliques  ne  livrafTent  la  ville  au  Duc  de  Mercœur»  Celui-ci  ^ 

n'ayant 


R  E  N  7j 

n'ayant  pu  mettre  la  ville  de  Rennes  dans  fes  intérêts ,  transféra , 
de  fon  autorité  privée,  le  Préfidial  &:  la  Cour  des  Monnoies  à 
Dinan.  Le  1 2  Mars  de  la  même  année  ,  un  foldat  catholique ,  qui 
croit  en  fa6tion  à  la  tour  de  la  porte  au  Foulon ,  fut  arraché  de 
fon  polie  par  violence ,  &  on  lui  fubftitua  un  foldat  de  la  Reli- 
gion Proteftante.  Ce  procédé  caufa  la  plus  prompte  révolution. 
Les  Cathohques,  mécontents  ,  fe  précipitèrent  dans  cette  tour, 
&  s'en  rendirent  les  maîtres.  Dans  le  moment ,  toutes  les  rues 
fiirent  barricadées  ;  Ôr ,  deux  jours  après ,  on  introduifit  le  Duc 
de  Mercœur  dans  la  ville,  où  il  fut  comblé  d'honneurs  par  les 
EccléfîalHques ,  les  gens  de  Juftice  ,  &  les  habitants.  Il  relia  à 
Rennes  jufqu'au  28  du  même  mois ,  qu'il  partit  pour  Fougères. 
Le  Prince  Lorrain  ne  fut  pas  long- temps  le  maître  de  Rennes. 
Le  5  Avril,  le  parti  du  Roi  voulut  faire  un  dernier  effort  pour 
arracher  cette  place  au  Duc  de  Mercœur.  Gui  le  Méneux  de 
Brequigni ,  Sénéchal  de  Rennes ,  concerta  avec  plufieurs  fidèles 
fujets  du  Roi  le  moyen  d'exciter  unx  émotion  dans  la  ville ,  en 
faifant  crier,  Vive  le  Roi,  dans  toutes  les  rues  &  les  fauxbourgs, 
L'entreprife  eut  le  plus  heureux  fuccès.  Dans  l'inflant  que  les  cris 
fe  firent  entendre ,  l'émotion  devint  générale  ;  les  Royaliftes  furent 
les  plus  forts  :  le  Capitaine  Charonniere ,  commandant  pour  le  Duc 
de  Mercœur ,  fut  obligé  de  remettre  les  clefs  de  fa  place  au  Sé- 
néchal ,  qui  eut  la  fatisfaftion  de  foumettre  à  fon  maître  la  capi- 
tale d'une  grande  province.  Cette  généreufe  aftion  fut  récom- 
penfée.  Les  Etats  ordonnèrent  à  leurs  Tréibriers  de  faire  frapper 
une  médaille  d'or ,  avec  une  chaîne  ,  du  poids  de  trois  cents 
foixante  écus ,  fur  un  côté  de  laquelle  feroient  les  armes  de  Bre- 
tagne ,  &  de  l'autre  ,  celles  du  Seigneur  de  Brequigni ,  avec  cette 
légende  :  La  ville  de  Rennes  a  jait  pour  fon  libérateur  ,  ce  quon 
faifoit  autrefois  pour  ceux  qui  avoient  bien  fervi  la  République,  Le 
parti  du  Roi  reprit  donc  le  deffus  dans  Rennes  j  les  Ligueurs  fu- 
rent forcés  de  fe  cacher,  &  les  fujets  fidèles  qui,  dans  le  temps 
de  la  révolution  ,  avoient  pris  la  fuite ,  retournèrent  au  fein  de 
leurs  foyers.  Ce  qui  venoit  d'arriver  faifoit  craindre  pour  l'avenir. 
Le  Gouverneur,  René  de  Montbarot,  crut  devoir  prendre  toutes 
les  précautions  que  lui  diftoit  la  prudence ,  pour  éviter  la  furprife 
d'un  ennemi  ruié  &  aftif.  Jufques-là  ,  il  avoir  été  d'ufage  que 
rAbbeffe  de  Saint-Georges  fût  la  dépofitaire  de  la  clef  de  la  porte 
de  ville  de  Saint-Georges.  Montbarot  abolit  cet  ufage ,  qui  depuis 
n'a  plus  été  renouvelle.  L'Abbeffe  aftuelle,  outre  qu'elle  avoit 
obligation  de  fa  dignité  au  Duc  de  Mercœur ,  étoit  encore  tante 
Tome  IV^  K 


74  R  E  N 

de  la  Ducheffe  ,  Ton  époufe.  Deux  motifs  auflî  puiffants  ne  pou- 
voient  manquer  de  faire  pencher  rAbbeffe  en  faveur  de  la  Ligue  ; 
&  Montbarot  ne  pouvoit ,  fans  imprudence  ,  lui  laifTer  les  moyens 
de  fe  livrer  à  fon  penchant.  Il  la  pria  donc  de  lui  remettre  cette 
clef;  ce  qu'elle  ne  put  lui  refufer.  Le  12  Avril,  le  Roi  rendit 
un  Edit ,  portant  tranllation  de  la  Chambre  des  Comptes  ,  de 
la  Cour  des  Monnoies  ,  &  de  l'Univerfité ,  de  Nantes  à  Rennes, 
€n  punition  du  parti  que  cette  ville  avoit  pris  contre  fon  Prince, 

Le  Roi  Henri  III  ayant  été  afTafliné  à  Saint-Cloud ,  le  2  Août 
1589,  le  Duc  de  Mercœur ,  qui  étoit  alors  à  Fougères,  fut 
celui  qui  reçut  le  premier  la  nouvelle  de  cet  horrible  attentat. 
Sur  le  champ ,  il  dépêcha  le  Sénéchal  de  Fougères  à  Rennes , 
pour  y  porter  la  nouvelle  de  la  mort  du  Roi  &  la  publier.  Le 
Sénéchal  ne  fut  pas  plutôt  arrivé  qu'il  s'acquitta  de  fa  commif- 
fîon.  Le  Parlement ,  fans  s'informer  û  la  nouvelle  étoit  vraie  ou 
faufîe ,  &  jugeant  que  l'intention  du  meflager  étoit  d'exciter 
unefédition  ,  le  fit  arrêter,  lui  fit  faire  fon  procès,  &  le  fit  pendre, 
comme  perturbateur  du  repos  public  ,  le  foir  même  de  fon  arrivée. 
Ce  procédé  irrita  le  Duc  de  Mercœur ,  qui  s'en  vengea ,  quelque 
temps  après  ,  fur  le  Juge  d'une  Jurifdiétion  du  Maine  ,  qui 
avoit  eu  l'indifcrétion  de  condamner  le  Duc  de  Mercœur  comme 
rebelle  à  fa  Jurifdiftion.  Ce  malheureux ,  ayant  été  pris ,  fut 
pendu  fur  la  place  du  Bouffai ,  à  Nantes ,  plutôt  pour  venger  la 
mort  du  Sénéchal  de  Fougères,  que  pour  punition  de  fon  audace. 

Le  8  Janvier  1590,  la  Chambre  des  Comptes  tint  fa  pre- 
mière féance  au  Couvent  des  Carmes  à  Rennes.  Le  27  Février, 
le  Parlement  rendit  un  Arrêt  qui  déclaroit  fauffaires  quatorze 
Membres  de  la  Chambre  Souveraine  du  Duc  de  Mercœur ,  pour 
s'être  fauflement  attribués  la  qualité  de  Juges ,  &  en  outre ,  cri- 
minels de  leze-majefié,  comme  compHces  de  l'exécrable  parri- 
cide commis  en  la  perfonne  du  feu  Roi  ;  & ,  comme  tels ,  il  les 
condamne  à  faire  amende  honorable ,  à  être  pendus  &  étranglés , 
à  être  traînés  fur  la  claie  ,&,  vingt-quatre  heures  après ,  à  être 
attachés  à  la  juftice  patibulaire ,  &  leurs  offices  fupprimés.  L'Ar- 
rêt ne  fut  exécuté  qu'en  effigie. 

Noël  du  Fail,  Seigneur  de  la  Heriffaye ,  Confeiller  au  Parle- 
ment de  Rennes ,  Jurifconfulte  célèbre  ,  fe  faifoit  alors  remarquer 
par  fes  connoiiTances  profondes  dans  la  Jurifprudence  :  il  a  com- 
pofé  plufieurs  Ouvrages  ,  notamment  une  Hiltoire  de  Bretagne  j 
ôc  a  fait  un  Recueil  d'Arrêts  de  fon  Parlement ,  en  trois  Hvres. 
Eginard  Baron  &  François  Duaren ,  l'engagèrent  à  réduire  le  Droit 


R  E  N  7î 

Civil  en  lieux  communs.  Il  entreprit  cet  Ouvrage ,  à  leur  folli- 
citation  ,  &  l'acheva.  Il  enrichit  le  public  de  plufieurs  autres 
produ6Hons  ,  comme  nous  l'apprend  la  Bibliothèque  Françaife , 
par  la  Croix  du  Maine. 

Le  14  Mai  1590,  on  commença  les  retranchements  derrière  la 
rue  de  la  Reverdiais ,  fauxbourg  de  Rennes.  Le  20  du  même  mois, 
on  fit  une  procefîion  générale  à  Rennes  ,  pour  demander  à  Dieu 
un  temps  favorable  &  une  bonne  paix.  Le  Parlement ,  la  Chambre 
des  Comptes  ,  tous  les  Ordres  &  Corps  de  citoyens  y  marchèrent. 

Le  3  Août ,  on  fit ,  dans  la  Cathédrale  ,  l'anniverfaire  des 
obfeques  du  feu  Roi  Henri  ÏII.  Le  Prince  de  Dombes  y  aflifia, 
avec  un  grand  nombre  de  Gentilshommes.  Des  difficultés  fur  le 
cérémonial,  entre  la  Noblefi^e  &  le  Parlement,  empêchèrent  cette 
Cour  de  s'y  trouver.  Quelques  jours  après,  elle  fit  faire  un  Ser- 
vice particuHer  dans  l'EgUfe  des  Pères  Cordeliers ,  dans  le  Cou- 
vent defquels  elle  tenoit  alors  fes  féances.  Le  Dimanche  ,10  Dé- 
cembre ,  on  fit  une  féconde  procefîion  générale  &  folemnelle , 
pour  demander  à  Dieu  qu'il  lui  plût  bénir  les  armes  du  Roi.  Le 
27  du  même  mois  ,  l'ouverture  des  Etats  fe  fit  dans  le  Couvent  des 
Jacobins  de  Rennes  :  il  ne  s'y  trouva  pas  un  feul  Evêque.  L'Ordre 
de  l'Eglife  n'étoit  compofé  que  de  cinq  perfonnes  ;  celui  de  la 
Noblefîe  ,  de  quarante  ;  &  de  fept ,  dans  l'Ordre  du  Tiers-Etat. 
Ces  cinquante-deux  perfonnes  conclurent  les  Etats  dans  un  très- 
court  efpace  de  temps.  Le  3  Novembre  1591,  le  Théologal  de 
Rennes  &  le  Prieur  des  Carmes  eurent  un  différent  très-férieux  : 
ils  portèrent  leur  animofité  au  point  qu'ils  ne  s'épargnoient  pas 
même  dans  leurs  fermons: 

«  Tant  de  fiel  entre-t-il  dans  lame  des  dévots  ?  » 

Jufqu'ici  nous  n'avons  point  parlé  de  l'ére^Hon  de  la  Commu- 
nauté de  Ville  de  Rennes ,  parce  que ,  comme  on  l'a  remarqué 
au  commencement  de  cet  article  ,  les  Capitaines  ou  Gouverneurs 
de  la  ville  tenoient  Heu  de  Maires  &  Echevins.  Les  révolutions 
qui  fe  firent  dans  le  gouvernement  &  dans  l'état  de  la  ville  , 
donnèrent  nailTance  à  cette  Communauté.  Les  différents  accroif- 
fements,  les  foins  qu'ils  exigèrent,  l'augmentation  des  habitants, 
l'union  de  la  province  à  la  Couronne  ,  l'éloignement  du  Souve- 
rain ,  de  nouveaux  principes  ,  néceffiterent  fa  création.  La 
première  chofe  qu'elle  s'appropria  ,  après  l'adminiflration  des 
travaux  publics  &  de  la  police  ,  fut  celle  du  produit  du 
devoir  de  doaifon.  Elle   continua  de  nommer ,  tous    les   ans ,, 


76  R  E  N 

des  habitants  pour  en  faire  la  perception,  avec  akributîon  de 
quatre  deniers  pour  livre.  A  mefure  que  la  Communauté  fe  forma , 
elle  nomma  tous  les  Officiers  qu'elle  jugea  néceffaires ,  tant  mu- 
nicipaux que  fubalternes  ,  à  l'exception  du  Procureur  -  Syndic , 
dont  la  nomination  fe  fit  d*abord  par  les  Ducs.  Au  commen- 
cement ,  elle  ne  s'afTembloit  qu'une  fois  par  mois  ,  &  le  Dimanche 
feulement.  Il  eu  prouvé  par  les  anciens  com.ptes ,  qu'elle  n'avoit 
point  de  Greffier  ,  ni  même  de  lieu  fixé  pour  fes  afïemblées. 
Elle  tint ,  en  premier  lieu ,  fes  féances ,  dans  la  tour  de  la  porte 
Mordelaife ,  qui  fervoit  de  logement  au  Gouverneur ,  & ,  dans 
la  fuite ,  tantôt  au  reverfaire  de  la  Cathédrale ,  tantôt  au  Cha- 
pitre des  Cordeliers ,  &  quelquefois  dans  une  maifon  fituée  au 
grand  bout  de  la  cohue  -,  maifon  qui  appartenoit  à  un  de  (es 
Membres  :  elle  y  avoit  dépofé  un  coffre  qui  fermoir  à  trois  clefs , 
dans  lequel  elle  confervoit  fes  titres.  Au  défaut  de  Greffier  ,  les 
déhbérations  étoient  fignées  de  tous  les  affifi:ants.  Vers  l'an  1509, 
elle  acheta  un  logement  fur  la  place  de  la  Monnoie. 

La  préfidence  aux  aifemblées  fut  continuée ,  félon  l'ancien 
ufage  5  au  Capitaine-Gouverneur  ;  en  fon  abfence ,  à  fon  Lieu- 
tenant j  & ,   au  défaut  de  celui-ci ,   au  Connétable. 

Par  Edit  du  mois  de  Mars  de  cette  année  ,  la  Communauté  de 
Ville  ayant  été  érigée  en  Corps  de  ville  régulier ,  la  préfidence 
leur  fut  encore  accordée  par  continuation.  Ils  en  jouirent  pai- 
fiblement  jufqu'en  1659.  A  cette  époque,  les  Officiers  du  Pré- 
fidial  voulurent  s'en  attribuer  le  droit,  &  furent  déboutés  de 
leurs  prétentions. 

Par  Arrêt  du  Confeil  du  13  Mai  1^559  ,  les  Gouverneurs, 
Lieutenants ,  &  Connétables ,  furent  maintenus  dans  leur  an- 
cienne pofieffion  ,  conformément  à  un  autre  Arrêt  du  Confeil 
du  29  Mars  1629,  qui  porte,  qu'en  leur  abfence  la  préfidence 
fera  attribuée  aux  Députés  eccléfiafi:iques  des  Officiers  préfi- 
diaux.  En  1592,  la  Communauté  avoit  demandé  la  création 
d'un  Maire ,  &  que  cette  charge  fût  jointe  à  la  place  de  Gou- 
verneur ;  elle  obtint  fa  demande ,  par  Edit  donné  au  camp 
devant  Rouen,  au  mois  de  Mars   1592. 

Le  14  Février  de  cette  année  ,  le  Parlement  donna  un  Ar- 
rêt ,  portant  défenfe  à  toutes  perfonnes  de  la  ville  &  des  faux- 
bourgs,  de  manger  de  la  viande  pendant  le  Carême  ,  &  à  tous 
Bouchers  &  Traiteurs  d'en  fournir  ,  fous  peine  d'être  pendus. 
C'étoit ,  fans  doute  ,  les  Protefi:ants  qui  avoient  donné  lieu  à 
cet  Arrêt.  Les  papiers  de  ce  temps  nous   apprennent  que  Ion 


R  E  N  77 

ne  faifoit  prefque  plus  d'abftinence  à  Rennes,  On  mangeoit  pu- 
bliquement de  la  viande  dans  les  rues  j  ce  qui  fcandalifoit  les 
Catholiques  zélés  &  pieux.  Les  Etats,  aiTemblés  à  Rennes,  dans 
le  Couvent  de  Bonne-Nouvelle,  le  27  Décembre  1592.  ,  fup- 
plierent  le  Roi  de  ne  mettre  des  garnifons  que  dans  les  villes 
de  Rennes,  Vitré,  Ploermel ,  Malelboit,  Moncontour  ,  Mont- 
fort  ,  Paimpol ,  &  dans  les  châteaux  de  Tonquedec  ,  de  Chffon , 
de  Derval ,  &  de  Maumuran.  L'aiïemblée  nationale  ne  fut  pas 
nombreufe  :  elle  termina  fes  féances  le  4  Janvier  1593. 

Un  événement  iîngulier  fe  paiTa  à  Rennes  en  1593.  Françoife 
Couaron  ,  qui  tenoit  l'auberge  de  la  Bannière  ,  dans  la  rue 
de  la  Fannerie  ,  tomba  en  léthargie  ,  pendant  le  cours  d'une 
maladie  dangereufe.  On  la  crut  morte  ,  &  on  fe  difpofa  à  l'en- 
terrer. Sa  fœur  ,  qui  étoit  à  la  campagne ,  arriva  comme  on  alloit 
la  porter  en  terre.  Elle  fit  arrêter  le  convoi  &c  ouvrir  la  châffe. 
A  la  vue  de  cette  fœur  qu'elle  chériffoit ,  elle  fit  un  cri  perçant, 
&  pria  Notre-Dame  de  Bonne -Nouvelle  de  reflufciter  la  dé- 
funte. Sur  le  champ  ,  cette  femme  recouvra  l'ufage  de  fes  fens, 
guérit  de  fa  maladie  ,  &  ,  quinze  jours  après,  elle  fe  rendit  au 
Couvent  de  Bonne-Nouvelle  remercier  le  Ciel  de  la  grâce  qu'il 
lui  avoir  faite  ,  6c  fit  porter ,  dans  l'Eglife  de  ce  Monallere ,  fon 
fuaire  &  fa  châfTe  ,  qui  y  furent  dépofés. 

Le  28  Décembre  1593  ,  fe  fit  l'ouverture  des  Etats,  au  Cou- 
vent de  Bonne-Nouvelle.  Cette  alTemblée  créa  les  Commifùons 
Intermédiaires  ,  pour  régir  les  affaires  de  la  province  depuis  une 
tenue  jufqu'à  l'autre.  Ces  Commifîions  font  au  nombre  de  neuf, 
une  dans  chaque  Evêché.  Celle  de  Rennes ,  qui  fait  la  corref- 
pondance  générale ,  ell  compofée  de  dix-huit  perfonnes  ;  les  au- 
tres font  compofées  de  neuf  perfonnes  feulement ,  trois  de  l'Eglife , 
trois  de  la  Nobleffe  ,  &  trois  du  Tiers.  Le  16  Janvier  1594* 
on  fit  une  procefîion  générale  à  Rennes,  pour  demander  la  paix. 
Le  Maréchal  d'Aumont ,  le  Parlement ,  &  tous  les  Corps  de  la  ville 
y  affiiterent.  Le  22  Mars,  même  année,  on  reçut  à  Rennes  la 
nouvelle  de  la  reddition  de  Paris  fous  l'obéiffance  du  Roi  -,  nou- 
velle qui  caufa  une  joie  inexprimable ,  qui  fe  manifeila  par  le 
chant  du  Te  Deum,  &:  une  proceflion  générale  ,  à  laquelle  tous 
les  Corps  affilièrent.  Le  Maréchal  d'Aumont  ,  qui  avoit  été  blefle 
à  la  jambe,  y  marcha  à  cheval ,  à  côté  des  Préfidents  Harpin  & 
Rogier,  qui  étoient  à  la  tête  du  Parlement.  Après  cette  adion 
de  grâces ,  le  Capitaine  Fontelebon  ,  qui  venoit  d'arriver  à 
Rennes,  alla  trouver  le   Maréchal,  ôc   lui  dit,  qu'il  venoit   de 


yS  R  E  N 

foumettre  à  lobéiffance  du  Roi  le  château  de  Quebriac ,  atl  dîo-- 
cefe  de  Saint -Malo.  Le  Parlement  fit  arrêter  &  emprifonner 
Fontelebon,  pour  l'obligera  acquitter  fes  dettes.  Le  Maréchal,, 
piqué  de  l'outrage  fait  à  un  guerrier  fidèle  ,  chargea  le  Préfi- 
dent  de  la  Grée  de  prier  le  Parlement  de  mettre  ce  brave  8c 
courageux  Gentilhomme  en  liberté.  Sur  le  refus  de  la  Cour,  le 
Maréch-al  fe  rendit  lui  -  même  à  la  prifon ,  en  fit  enfoncer  les 
portes,  &  mit  le  prifonnier  en  liberté.  Ce  Gentilhomme  étoit 
venu  à  Rennes  avec  un  fauf-conduit ,  8c  il  venoit  de  faire  une 
bonne  aftion.  Le  procédé  du  Maréchal  n'eut  pas  de  fuites.  Le 
Parlement  fe  contenta  de  faire  rapporter  un  procès-verbal  de  rup- 
ture ^  mais  ayant  trouvé ,  quelque  temps  après ,  l'occafion  de  mor- 
tifier le  Maréchal,  il  la  faifit.  Ce  Gouverneur  avoit  mis  une 
impofition  fur  les  habitants  de  Rennes ,  qui  préfenterent  au: 
Parlement  une  requête  pour  s'en  faire  décharger.  Elle  fut  ré- 
pondue d'un  qu'il  en  fou  communiqué  avec  M,  le  Maréchal,  Ce  Sei- 
gneur fe  rendit  au  Parlement ,  &  eut  le  défagrément  de  voir 
toute  la  Compagnie  s'élever  contre  luio  Le  réfultat  fut  qu'il  laif- 
feroitles  habitants  en  repos.. 

D'Aumont  avoit  pafTé  fa  vie  dans  le  métier  des  armes  :  il  avoit 
blanchi  fous  le  cafque..  Après  une  carrière  longue  &  glorieufe, 
malgré  le  froid  de  l'âge  ,  il  fut  la  viftime  d'une  paffion  terrible» 
Ce  fut  l'amour ,  qui  abrégea  les  jours  de  ce  vieux  guerrier.  Il 
aimoit  paflionnément  Anne  d'Alegre  ,  ComtefTe  de  Laval ,  Dame 
du  château  deComper.  Cette  place  importante  étoit  au  pouvoir  des. 
Ligueurs,  qui,  en  connoifTant  toute  l'utilité,  y  entretenoient  une 
bonne  garnifon.  La  ComtefTe  ,  certaine  de  L'empire  qu'elle  avoit  fur 
le  Maréchal ,  le  prefTa  de  l'affiéger ,  &  employa  de  fi  bonnes  rai- 
fons  qu'elle  y  réuffit.  Le  vieux  Général  accorda  tout  à  l'amour. 
Il  ^  le  fiege ,  &  le  pouffa  avec  vigueur;  mais  il  fut  bleffé  aU; 
bras ,  &  contraint  d'abandonner  fon  entreprife.  Cette  blefTure ,, 
qui  d'abord  n'avoit  pas  paru  dangereufe  ,  devint  mortelle ,  foit 
par  l'ignorance  des  Chirurgiens ,  ou  par  les  chaleurs  de  l'été.  Le 
Maréchal  mourut  au  Palais  épifcopal  de  Rennes,  le  19  Août 
1595.  On  rendit  à  ce  Gouverneur  tous  les  honneurs  dus  à  fa 
dignité  :  fon  corps  fiit  embaumé,  &  expofé  fur  un  lit  de  parade 
julqu'au  6  du  mois  fuivanî ,  dans  la  Chapelle  de  l'Evêché.  La 
cérémonie  de  fes  funérailles  fe  fit  dans  la  Cathédrale ,  qui  étoit 
toute  tendue  de  velours  noir,  à  cinq  rangs  dans  le  chœur  & 
trois  dans  la  nef,  avec  les  armes  du  défunt,  &  une  grande  illu- 
aaination.   Tous   les  Corps  de   ville  afîiflerent   à  cette   pompe 


R  E  N  79 

fonebre  ,  dont  la  cérémonie  fut  faite  par  iEmar  Hennequin , 
Evêque  de  Rennes.  L'Oraifon  funèbre  fut  prononcée  par  Pef- 
chard.  Le  Comte  de  Chappes  fut  le  feul  de  la  famille  du  Maré- 
chal qui  aflifta  à  fes  funérailles ,  après  lefquelles  il  fit  porter  le 
corps  de  fon  père  dans  la  province  de  Poitou ,  où  il  fut  enterré» 
Le  Général  fut  regretté  de  toute  la  Bretagne  :  il  étoit  aimé  du 
peuple  ,  Se  d'autant  plus  eilimé  qu'il  n'avoit  jamais  chancelé  dans 
le  fervice  du  Roi.  Il  avoit  gagné  l'affe^on  des  foldats  par  (es 
libéralités  &  fa  franchife.  Le  Marquis  de  Lavardin  fut  honoré 
à  fa  place  du  bâton  de  Maréchal  de  France.  Le  6  Oftobre  de 
cette  année ,  on  chanta ,  dans  la  Cathédrale  de  Rennes  ,  un  Te 
Deum  folemnel ,  en  aftions  de  grâces  de  ce  que  le  Pape  Clément 
VIII  avoit  levé  l'excommunication  lancée  contre  le  Roi  Henri 
rV  &  fes  fidèles  ferviteurs. 

Le  10  Décembre  1595,  la  Communauté  de  Ville  rendit  fa 
première  Ordonnance  :  elle  prefcrit  aux  habitants  de  placer  ,  à 
leurs  frais ,  de  douze  en  douze  maifons ,  des  lanternes  publiques 
pour  éclairer  pendant  la  nuit.  Le  19  Février  1621  ,  elle  renou- 
vella  la  même  Ordonnance,  qui  fut  encore  réitérée  en  1629, 
&  confirmée  par  un  Edit  de  l'an  1697.  L'étabhlTement  de  ces 
lanternes  a  duré  jufqu  à  nos  jours  ,  qu'elles  viennent  d'être  chan- 
gées en  réverbères  ,  qui  éclairent  beaucoup  mieux. 

La  nouvelle  d'une  trêve  entre  le  Roi  &  le  Duc  de  Mercœur , 
&  la  converfion  de  ce  Monarque  ,  cauferent  tant  de  joie  aux 
habitants,  que,  le  26  Décembre  i  Ç95  ,  on  fit  une  procefTion  gé- 
nérale à  Rennes,  Le  Parlement ,  la  Chambre  des  Comptes ,  le 
Préfidial ,  la  Maifon  de  Ville  y  affifterent  en  habits  de  cérémo- 
nie. Cette  proceflion  fe  rendit  à  l'Eglife  de  ToufTaint ,  où  l'Evêque 
célébra  pontificalement.  Le  foir,  on  alluma,  dans  toutes  les  places 
publiques  ,  des  feux  de  joie ,  &  la  fête  continua  au  fon  de  toutes 
les  cloches  &  au  bruit  du  canon.  Elle  réjouifToit  autant  les 
Cathohques  qu'elle  déplaifoit  aux  Proteftants.  La  joie  fut  diminuée 
par  la  difette  qu'occafionna  l'abondance  des  pluies.  Les  moiflbns 
manquèrent  entièrement ,  &  la  guerre  multiplioit  fes  ravages.  On 
fit  une  nouvelle  proceflion,  le  29  Novembre  ,  pour  demander 
à  Dieu  la  paix. 

Au  mois  de  Mars  1597,  le  bled  étoit  fi  cher  que  la  majeure 
partie  des  habitants  étoit  réduite  à  mendier  dans  les  rues.  La 
campagne  n'étoit  pas  plus  heureufe  ;  de  forte  que  la  Commu- 
nauté de  Ville  rendit  une  Ordonnance  qui  portoit ,  qu  elle  feroit 
une  aumône  publique   aux  malheureux  qui  manquoient  de  pain. 


8o  R  E  N  ^ 

Le  15  Juillet  de  cette  année,  mourut  la  Dame  de  Montbarot.;, 
époufe  du  Gouverneur  de  la  ville.  Elle  étoit  de  la  Religion  Pro- 
teftante  ,  mais  d'un  mérite  rare.  Le  lendemain  ,  fur  les  huit  heures 
du  foir ,  Ton  corps  fut  porté  à  Saint- Aubin ,  dans  une  châfTe  de 
plomb,  par  des  Gentilshommes  &  des  Officiers  de  la  maifon  de 
îbn  mari ,  pour  être  inhumé  dans  l'enfeu  de  fa  famille.  Le  convoi 
étoit  compofé  d'un  grand  nombre  de  Calviniftes  :  il  n'y  avoir  ni 
Prêtres  ni  Moines ,  mais  pluiieurs  pauvres  en  habits  noirs ,  avec 
des  flambeaux.  Le  Gardien  de  Samt-Yves  les  avoit  rangés  par 
ordre ,  il  les  conduifoit ,  &  ils  marchoient  devant  le  corps.  Pierre 
AUeaume ,  Refteur  de  Saint-Etienne  ,  accompagna  le  convoi  avec 
une  grande  multitude  de  Bourgeois,  quelques-uns  des  Echevins, 
&  quelques  Membres  du  Parlement ,  mais  tous  marchant  fans< 
ordre. 

Le  Duc  de  Mercœur ,  voyant  fon  parti  abattu ,  &  la  foudre 
prête  à  l'écrafer,  écouta  enfin  le  confeil  de  la  prudence,  &  fit 
îa  paix  avec  le  Monarque.  Cette  heureufe  nouvelle  fut  portée 
à  Rennes  par  de  Montmartin.  Le  Te  Deum  fut  chanté  au  bruit  du 
canon  &  au  fon  de  toutes  les  cloches  de  la  ville,  &  l'on  finit  les 
réjouiflances  par  une  proceffion  générale.  Le  6  Mai  1 598 ,  le  Roi 
Henri  IV,  accompagné  de  l'Amiral,  du  Grand-Ecuyer,  des  Ducs 
de  Bouillon,  de  BrilTac  ,  du  Chanceher,  du  Grand-Prévôt,  8c 
des  Officiers  de  fa  maifon ,  partit  de  Nantes  pour  fe  rendre  à 
Rennes.  Sa  Majefté  alla  coucher  au  château  de  Fontenai.  Cette 
place ,  qui  eft  fituée  dans  la  ParoifTe  de  Chartres ,  appartenoit  à 
la  Maréchale  de  BrifTac.  Le  Roi  partit  le  9  du  château  de  Fon- 
tenai pour  fe  rendre  à  Rennes.  La  Communauté  de  Ville  alla  au- 
devant  de  Sa  Majefté ,  jufqu'au  delà  du  fauxbourg  de  la  Magde- 
leine  ,  où  elle  reçut  le  comphment  des  Officiers  municipaux,  aux- 
quels elle  dit:  /^  vous  annonce  la  paix  générale  dans  tout  mon  Royaume^. 
ce  qui  fit  beaucoup  de  plaifir  à  tout  le  monde.  Toutes  les  Com- 
pagnies de  la  Mihce  Eourgeoife  étoient  fous  les  armes.  Lorfque 
le  Roi  fut  prêt  d'entrer  fur  le  premier  pont  de  la  porte  de  ville 
de  ToufTaint ,  qui  étoit  fimplement  parée  des  armes  de  France  Ô£ 
de  Navarre  y  le  Maréchal  de  BrifTac  prit  des  mains  de  Montbarot, 
Gouverneur  de  Rennes ,  trois  clefs  de  la  ville  ,  &  les  préfenta 
à  Sa  Majefléyqui  les  reçut  &les  baifa,en  difant  :  Voilà  de  belles 
clefs  ,  mais  j'aime  mieux  encore  les  clefs  des  cœurs  des  habitants» 
Enfuite  le  Monarque  pafîa  les  deux  autres  ponts,  &  entra  dans  la 
ville ,  au  bruit  du  canon  &  au  fon  de  la  cloche  de  lagrofTe  horloge* 
Comme  le  Roi  avoit    défendu  de  faire  des  dépenfes  pour  fon 

entrée  3, 


REN  8i 

entrée ,  on  avoit  '  Simplement  placé ,  entre  les  deux  tours  de  la 
porte  Saint-Germain  ,  un  arc  de  triomphe  ,  en  verdure  ,  avec 
le  portrait  du  Roi  au  naturel.  On  plaça  auffi  fon  portrait  à 
l'Evêché ,  où  il  logea.  Le  Parlement ,  en  Corps  &  en  robes 
rouges,  alla  faluer  le  Roi,  fur  les  trois  heures  de  l'après-midi, 
dans  l'Églife  Cathédrale.  Le  lendcmam  lo  ,  jour  de  la  Pentecôte, 
Sa  Majefté  entendit  la  MefTe ,  qui  fut  célébrée  dans  la  Cathé- 
drale par  Charles  de  Bourgneuf ,  Evêque  de  Nantes ,  qui  com- 
munia le  Monarque.  Après  la  MefTe  ,  le  Roi  toucha  les  malades 
des  écrouelles ,  qui  étoient  en  grand  nombre  dans  la  cour  de 
l'Evêché.  Dès  le  foir  précédent ,  on  avoit  fait  pubUer ,  à  fon  de 
trompe ,  que  ces  malades  eulTent  à  fe  trouver  à  la  Cathédrale. 
A  quatre  heures  du  matin  ,  le  Cardinal  de  Joyeufe  arriva  à 
Rennes ,  où  il  relta  avec  le  Roi.  Le  1 1  ,  le  Roi  fit  une  partie 
de  chafTe  ,  &  alla  dîner  au  château  de  la  Piévalaye ,  à  trois 
quarts  de  lieue  au  Sud-Sud-Efl  de  Rennes ,  au  bord  de  la  ri- 
vière de  Vilaine.  Ce  même  jour  ,  il  arriva  un  accident  dont 
le  Roi  fut  fort  touché.  Le  Prince  de  Moldavie  &  de  Valachie  , 
qui  étoit  à  la  Cour  de  France,  fut  tué,  dans  la  rue  Reverdiais, 
par  fix  Anglais.  Le  Roi  apprit  cette  nouvelle  à  fon  arrivée;  mais 
on  ne  crut  pas  devoir  pourfuivre  la  vengeance  de  cette  affaire, 
d'autant  mieux  qu'on  n'en  fçavoit  pas  la  véritable  caufe.  On  croit 
feulement  que  cet  afTaflinat  s'étoit  commis  chez  des  femmes  pu- 
bHques.  Monrgommeri  fe  fit  prefque  prier  pour  venir  voir  le  Roi 
à  Rennes.  Pour  le  mortifier  ,  le  Roi  dit ,  en  fa  préfence ,  à  Sour- 
déac  :  Sourdcac ,  la  Jête  des  Rois  efl  paffée.  Il  .Vouloir  dire  par 
là ,  qu'avant  la  paix ,  il  y  avoit  autant  de  Rois  que  de  Capi- 
taines en  Bretagne.  Le  13  ,  le  Roi  retourna  à  la  chalTe  à  la 
Prévalaye.  On  prit  un  loup ,  &  un  lièvre  remarquable  par  fa 
iîngularité  :  il  avoit  deux  corps,  huit  jambes,  une  tête,  &  trois 
oreilles.  Cette  chafle  fut  fuivie  de  luttes  &:  de  plufieurs  diver- 
tiffements.  Le  1 5 ,  comme  le  Roi  fortoit  de  la  Meffe  de  la  Ca- 
thédrale ,  un  des  habitants  ,  nommé  GraveUe^  fe  préfenta  devant 
Sa  Majefté ,  &  lui  dit  :  «  Je  fuis  Duc  de  Bretagne  ,  &  je  vous 
H  fais  prifonnier.  »  Cette  extravagance  fut  accompagnée  de  plu- 
fieurs autres  folies ,  dont  le  Roi  eut  l'air  de  rire  ;  mais  on  fe  hâta 
d'éloigner  ce  fou  ,  &  de  le  conduire  en  pnfon.  Montbarot  fut 
fort  blâmé  de  ne  l'avoir  pas  fait  enfermer  plutôt.  Le  Roi  devoit 
partir  ce  jour-là  pour  aller  coucher  à  Vitré  ,  mais  il  fut  retenu 
par  le  defir  de  voir  la  fille  de  Jean  Yger  de  Launay  ,  Avocat  de 
Rennes ,  qui  étoit  parfaitement  belle.  Cette  jeune  perfonne  toucha 
Tome  IF.  L 


8i  REN 

le  cœur  fenfible  du  Monarque  ,  Se  Ton  prétend  qu'il  eut  un  tète* 
à-tête  avec  elle.  Quoi  qu'il  en  foit,  le  Roi  ne  partit  que  le  i6, 
à  quatre  heures  du  matin ,  &  alla  coucher  à  Laval ,  d'où  il 
écrivit ,  le  17  ,  pour  la  convocation  des  Etats  ,  dont  l'ouverture  fe 
fit,  le  18,  au  Couvent  de  Bonne -Nouvelle.  Toute  la  Nobleffe 
s'étoit  rendue  à  Rennes  lors  de  l'arrivée  du  Roi.  Avant  l'entrée 
de  ce  Monarque  en  leur  ville ,  les  habitants  étoient  obligés  de 
monter  la  garde  jour  &  nuit  aux  portes  &  fur  les  remparts.  Le 
Monarque  abolit  cette  coutume ,  &  la  garde  ne  fut  plus  montée 
que   la  nuit  pour  le  bon  ordre  &  la  police. 

L'an  1599,  le  Roi  accorda  à  l'Hôpital  de  Saint-Yves,  pouir 
neuf  ans ,  le  quart  des  cafuels  de  la  SénéchaulTée ,  pour  récom» 
penfer  cette  maifon  des  dépenfes  qu'elle  avoit  faites  pour  foigner 
les  foldats  bleffés  &  malades  qu'elle  avoit  reçus  &  traités  pen- 
dant les  neuf  années  de  guerre  &  de  troubles  dans  cette  pro- 
vince. Le  6  Juin  1602,  la  Maifon  de  Ville  marcha,  pour  la 
première  fois ,  en  Corps ,  à  la  proceflion  de  la  Fête-Dieu.  Le 
déjeuner  de  ce  jour,  référé  fur.  fes  regiftres,  ne  monta  qu'à  la 
fomme  de  vingt-une  livres  onze  fols.  Ce  fut  dans  ce  temps  que 
Jean  Jubin ,  Prieur  de  Notre-Dame  de  Bonne-Nouvelle ,  fit  élar- 
gir fon  Eglife  du  côté  du  cloître.  Le  fommet  des  tours  de  la 
ville  fut  démoli,  en  1602  &  1603  ,  par  ordre  du  Monarque. 

Le  25  Août  1586  ,  fut  faite  la  première  délibération  pour 
Fétabliffement  des  Jéfuites  à  Rennes ,  dans  le  Prieuré  ou  Collège 
de  Saint-Thomas ,  qui  dépendoit  de  la  Communauté ,  à  raifon 
du  don  qui  lui  en  avoit  été  fait  dès  l'an  1533.  Les  archives 
de  la  Communauté  de  Ville  n'ont  point  confervé  le  nom  du 
donateur,  parce  que  les  comptes  de  ce  temps  manquent.  La 
Communauté  de  Ville  entretenoit ,  dans  ce  Collège,  un  Principal 
&  divers  Régents ,  qui  y  donnoient  des  leçons  publiques ,  depuis 
qu'on  avoit  transféré  dans  cet  endroit  les  Ecoles  qui  auparavant 
fe  tenoient  au  bas  de  la  rue  de  la  Cordonnerie,  dans  un  ancien 
bâtiment  fitué  près  la  Synagogue.  La  réputation  des  Jéfuites  en- 
gagea la  Communauté  à  leur  donner  ce  Collège.  Le  Roi  approuva 
le  projet  &  donna  un  Edit  en  conféquence.  Le  18  Juin  1604,  on 
décerna  afte  à  la  Communauté  de  la  repréfentation  de  l'Edit  rendu 
à  ce  fujet ,  &  il  fut  arrêté  qu'il  feroit  enrégiftré.  Le  27  Oftobre 
1606,  fut  faite  la  repréfentation  du  contrat  paffé  avec  eux  pour 
la  fondation  du  Collège ,  qui  fubfille  encore  aujourd'hui.  La  Com- 
munauté cède  à  ces  Pères  les  maifons  &  les  jardins  de  Saint- 
Thomas  ,  avec  toutes  leurs  dépendances  j  le  tout  bien  préparé 


R  E  N  85 

pour  les  recevoir.  On  leur  donna  encore  trois  mille  livres  de 
rente  ,  à  prendre  fur  le  papegai  i  &  ,  dans  la  fuite  ,  elle  leur  pro- 
cura &:  unit  à  leur  Collège  les  Prieurés  de  Brequen,  Fains, 
Noyai ,  &  Livré.  La  Communauté  de  Ville  acheta  encore  le 
terrein  fur  lequel  leur  Eglife  çft  bâtie,  avec  fes  dépendances, 
&  la  fit  conilruire  à  fes  dépens  j  ce  qui  lui  coûta  des  fommes 
immenfes. 

Le  17  O6lobre  1^07,  la  Communauté  reçut,  pour  la  pre- 
mière fois ,  fes  redevances  ;  ce  qu'elle  a  continué  depuis  ce 
temps.  Le  8  Août  161 4,  les  Jéfuites  requirent ,  pour  la  première 
fois ,  la  Communauté  de  Ville  d'aflifter  aux  jeux  publics  &  à 
la  difbribution  des  prix  qu'elle  a  fondés.  Les  regiltres  de  l'an 
1620  &  les  fuivants  portent  précifément ,  que  la  MefTe  que  les 
Jéfuites  dévoient  à  la  Communauté  de  Ville ,  le  jour  de  Saint- 
Luc ,  à  la  fin  de  laquelle  ils  lui  préfentoient  un  cierge  armorié, 
pour  marque  de  leurs  redevances,  doit  être  célébrée  en  musqué, 
èc  fuivie  d'un  régal.  Ils  manquèrent  une  fois  à  s'acquitter  de  ce 
devoir,  &  la  Ville  s'en  plaignit  vivement.  Le  22  Juillet  1624, 
fut  pofée  la  première  pierre  de  l'Eglife  de  ces  Pères  :  elle  fut 
dédiée  &  confacrée  le  2  Septembre  1657. 

Le  28  Août  1658  ,  la  Communauté  de  Ville  décida  que 
les  Jéfuites  feroient  leurs  jeux  publics  dans  la  cour  de  leur  Col- 
lège ,  &  non  ailleurs  ;  qu'ils  en  viendroient  donner  avis ,  &  pré- 
fenter  les  profpectus  à  la  Communauté,  un  mois  avant  l'exécu- 
tion ;  &  qu'à  la  Saint-Luc  ,  époque  fixée  pour  l'ouverture  des 
clafTes ,  ils  apporteroient  la  lifte  des  livres  claffiques  dont  ils  fe 
ferviroient.  On  a  compté  jufqu'à  quatre  mille  Ecoliers  dans  ce 
Collège,  où  les  Jéfuites  ont  enfeigné  jufquà  la  fuppreffion  de 
la  Société  en  1764.  Dans  le  plaidoyer  de  M.  Arnaud,  pag.  37, 
il  eu  dit  que  les  Jéfuites  excitèrent  une  fédition  à  Rennes  -,  mais 
il  ne  dit  pas  en  quelle  année  &  à  quelle  occafion.  Ce  Collège 
eft  aftuellement  dirigé  par  des  Prêtres  féculiers  ,  &  fert  de  Sémi- 
naire pour  l'inflru^lion  des  jeunes  Etudiants  qui  afpirent  aux 
Ordres  facrés. 

L'an  1 604 ,  la  Communauté  de  Ville  acheta  le  fonds  pour  Féta-^- 
bliffement  des  Pères  Capucins  :  il  coûta  une  fomme  de  cinq  mille 
fix  cents  vingt  livres.  La  Ville  y  fit  conftruire,  à  fes  frais  ,  les 
enclos,  les  logements,  &  la  Chapelle;  elle  acheta  le  tableau 
du  maître-autel,  qui  coûta  une  fomme  de  huit  cents  livres.  Ce 
tableau  fut  peint  par  Corcord  ,  Peintre  de  Nantes ,  qui  fit  aufli 
le  portrait  du  Roi  Louis  XIII,  qui  efl  dans  la  chambre  duConfeili 


84  R  E  N 

de  la  Ville.  Le  4  Juillet  161 4,  il  fut  arrêté  que  la  Communauté 
de  Ville  afîifleroit  à  la  dédicace  de  l'Eglife  des  Pères  Capucins , 
en  fa  qualité  de  fondatrice  de  ce  Monaftere. 

1605.  La  Communauté  de  Ville  forme  le  projet  d'ouvrir  la 
rue  d'Orléans  ,  &  de  bâtir  le  Pont -Neuf  qui  eft  au  milieu, 
afin  d'établir  une  communication  entre  la  haute  &  la  baffe  ville. 
Elle  obtient ,  à  ce  fujet ,  des  lettres-patentes  du  Roi  Flenri  IV  ; 
&,  en  1606  ,  elle  fait  procéder  à  la  levée  du  plan  &  au  procès- 
verbal  des  ouvrages.  Les  maifons  &  jardins  qu'on  prit  pour  for- 
mer cette  rue,  furent  achetés  &  payés  aux  propriétaires.  Phi- 
lippe ,  Comte  de  Bethune ,  Lieutenant  général  en  Bretagne , 
Gouverneur  de  Rennes ,  &  ci-devant  Gouverneur  du  Duc  d'Or- 
léans, nomma  la  nouvelle  rue,  rue  £  Orléans,  Ce  Seigneur  partit, 
peu  de  temps  après ,  pour  Saint-Malo ,  accompagné  de  Bertrand 
du  Guefclin  ,  furnommé /^yi^^  Roberie ,  &  de  plulieurs  autres  Sei- 
gneurs. Ils  s'embarquèrent  pour  fe  rendre  à  l'ifle  Cefembre, 
éloignée  d'une  lieue  de  la  ville  j  mais  le  vaiffeau  qui  les  portoit 
ayant  été  battu  de  la  tempête ,  toute  cette  illuftre  compagnie  fe 
noya  dans  le  trajet.  L'an  1609,  fe  fit  le  procès-verbal  du  devis 
de  la  conftruftion  du  Pont-Neuf,  dont  l'adjudication  fut  faite  le 
23  Janvier  1610.  Il  nous  apprend  que  ces  travaux  &  la  conf- 
truftion  de  l'éclufe  de  la  Poinonnerie ,  coûtèrent  une  fomme  de 
vingt  mille  huit  cents  livres.  La  première  pierre  de  ce  pont 
fut  pofée  au  mois  de  Juin  161 2.  Ce  fut  alors  que  le  Roi  voulut 
faire  exécuter  les  projets  d'agrandiffements  dont  j'ai  ci-devant 
fait  mention  fous  l'année  i486;  mais  la  Communauté  de  Ville 
obtint  la  décharge  de  ces  travaux ,  par  Arrêt  du  Confeil-  du  1 5 
Juin  1610.  Le  3  Avril  161  5  ,  la  Communauté  de  Ville  reçut  les 
Religieufes  Urfulines  ,  qui  s'établirent  au  heu  du  Pré- Botté;  &, 
le  21  Avril  1620,  on  accorda  à  ces  Rehgieufes  la  cloche  de 
la  porte  de  Touffaint ,  qui  fervoit  à  annoncer  l'ouverture  ou  la 
fermeture  de  cette  porte.  Les  Urfuhnes  s'obHgerent  à  la  rendre 
quand  elles  en  feroient  requifes. 

Le  4  Janvier  161 6,  la  Communauté  arrêta  d'établir  la  pa- 
trouille 5  pour  la  fureté  &  la  tranquillité  des  citoyens ,  pendant  la 
nuit  ;  &  ,  en  conféquence  ,  on  acheta  vingt  -  quatre  moufquets , 
pour  cet  ufage.  Le  21  Décembre  1618  ,  on  admit  à  Rennes  les 
Rehgieufes  Carmélites;  &,  par  a6le  paffé  le  19  Janvier'  161 9, 
il  fut  expreffément  ftipulé  qu'elles  feroient  mettre  les  armes  de 
la  Ville  fur  la  principale  porte  de  leur  Couvent  ;  ce  qu'il  leur  fut 
encore  ordonné  de  faire.  Le  16  Janvier  1638  ,  la  Communauté 


R  E  N  85 

prît  le  titre  de  leur  fondatrice ,  en  vertu  du  don  de  Cix  mille 
livres  qu  elle  leur  fit  pour  leur  étabiiflement.  II  ne  paroît  pas  cepen- 
dant qu'elles  aient  exécuté  les  ordres  de  leurs  Officiers  munici- 
paux. La  délibération  de  1638  nous  apprend  que  la  rente  de 
deux  cents  livres  que  leur  paie  la  Communauté,  aux  termes  de 
l'Arrêt  du  Confeil  de  1681  ,  provient  dune  fubrogation  que  leur 
fit  le  Sieur  de  la  Bodinaye-Lezot,  par  a6le  du  16  Odobre 
ï6i6 ,  du  conftitut  de  cette  rente,  pour  trois  mille  deux  cents 
livres  de  principal  que  la  Communauté  avoit  emprunté  pour 
acquitter  la  fomme  de  fix  mille  livres  qu'elle  avoit  accordée  aux 
Religieufes  pour  leur  fondation.  Le  30  Avril  1619,  fur  les  huit 
heures  &  demie  du  foir,  on  entendit  dans  la  ville  de  Rennes, 
&  à  plus  d'une  lieue  à  la  ronde ,  un  bruit  qui  reflembloit  à  celui 
de  plufieurs  charriots  roulants  ,  avec  un  vent  confidérable ,  qui 
fut  fuivi  d'un  tremblement   de  terre. 

Le  Maréchal  de  Briflac ,  Lieutenant  général  pour  le  Roi  en 
Bretagne  ,  mourut  à  Rennes,  le  5  Juillet  1621.  Après  les  céré- 
monies des  funérailles  ,  fon  cœur  fut  mis  dans  une  boîte  de 
plomb  ,  qui  fut  enfermée  dans  un  petit  coffre  de  pierre  de  taille  , 
couvert  d'une  plaque  de  cuivre  avec  une  infcription,  &  on  le 
dépofa  dans  la  Chapelle  de  la  Vierge  ,  fous  l'orgue  de  l'Eglife 
Cathédrale.  Son  corps  fut  transféré  à  Brifiac  en  Anjou ,  où  il  fiit 
inhumé.  Le  jour  de  la  mort  de  ce  Général  ,  fe  fit  à  Rennes 
l'ouverture  des  Etats. 

Comme  il  n'y  avoit  point  encore  de  Pofte  établie  ,  par  déli- 
bération du  1 1  Novembre  &  par  Ordonnance  du  Maréchal  de 
Briflac  &  du  Parlement ,  on  avoit  établi  un  courier  à  pied  ,  toutes 
les  femaines ,  pour  Paris.  Le  30  Juin  1674,  l'entreprife  des  Hol- 
landais fur  Belle-Ifie  néceflita  l'établiflement  d'un  courier  extraor- 
dinaire pour  Vannes  &  Aurai.  Il  ne  fubfill:a  que  jufqu'au  25  Juillet 
fuivant  qu'on  apprit  la  retraite  de  l'ennemi.  La  celTation  de  cette 
dépenfe  fut  fuivie  d'une  autre.  La  Communauté  de  Ville  fit  une 
levée  de  trois  cents  hommes  qu'elle  arma  ,  &:  qu'elle  défraya  jufqu'à 
Belle-Ifle  ;  &  ,  en  1692  ,  comme  elle  craignoit  une  nouvelle  def- 
cente  dans  la  provmce  que  menaçoient  les  Hollandais,  elle  fît 
un  pareil  armement  pour  Dinan  j  ce  qu'elle  réitéra  aux  années 
1702   &    1703. 

La  Chapelle  de  Bonne-Nouvelle,  rebâtie ,  comme  on  l'a  dit, 
par  Hyacinthe  Charpentier  ,  Prieur  de  ce  Couvent,  fut  dédiée 
&  bénite  ,  le  22  Février  1622,  par  Pierre  de  ComuUier ,  Evêque 
de  Rennes.  Ce  Prélat  contribua  beaucoup  à  1  étabiiiTement  des 


86  R  E  N 

Pères  Minimes ,  qui  furent  fondés  dans  la  rue  Saint-Louis.  La  Com- 
munauté de  Ville  reçut  ces  Religieux  j  &^  le  25  Mai  1635 ,  ^^^^ 
leur  donna  la  cloche  qui  étoit  au  defTuJde  la  porte  de  Saint- 
Michel,  aux  mêmes  conditions  qu'on  avoit  accordé,  en  1620, 
celle  de  Touffaint  aux  Urfulines  j  mais  il  paroît  que  ces  Reli- 
gieux n'acceptèrent  pas  le  don,  puifqu'on  voyoit  encore  une 
cloche  fur  cette  porte  en  1701.  L'obhgation  que  la  Ville  con- 
traria d'entretenir  le  pavé  au  devant  du  Couvent  des  Pères 
Minimes  ,  eft  une  grâce  particulière  qu'elle  leur  accorda,  le  12 
Février  1621  ,  fans  tirer  à  conféquence  pour  les  autres  Monaf» 
teres.  Par  un  contrat  du  4  Décembre  1655,  les  Pères  Minimes, 
s'obligèrent  à  célébrer  la  MefTe  du  premier  jour  de  l'an,  Se 
d'y  convier  la  Communauté  de  Ville  quelques  jours  auparavant» 
Ils  s'obHgerent  aulTi ,  par  ce  contrat ,  à  mettre  ,  aux  deux  extré- 
mités du  dehors  de  leur  mur,  deux  éculTons  aux  armes  de  la 
ville ,  gravés  fur  une  pierre  de  grains  j  mais  il  ne  paroît  pas  qu'ils 
aient  rempli  cette  obhgation. 

Le  24  Août  1626,  le  Roi  partit  de  Nantes  pour  fe  rendre  à 
Rennes.  Nous  ignorons  quelle  réception  les  habitants  firent  à 
ce  Monarque.  Le  premier  Septembre  1628,  les  Religieufes  de 
la  Vifitation  s'établirent  à  Rennes ,  dans  la  rue  de  Saint-Melaine. 
Le  26  Janvier  1629  ,  il  fut  arrêté  que  les  Mifeurs  de  la  ville 
enverroient  ,  au  jour  de  la  Chandeleur ,  deux  cierges  de  cire 
blanche  ,  chacun  d'un  quarteron  ,  à  tous  les  Membres  du  Corps  5 
ce  qui  fut  enfuite  étendu  jufqu'à  leurs  veuves ,  par  délibération, 
du  16  Janvier  1 646 ,  &  l'on  arrêta  de  donner  quatre  livres  de 
bougies  pour  accompagner  ce  cierge.  Cet  ufage  n'exiftoit  plus 
en  1700.  Le  12  Juillet  1630,  les  Religieufes  du  Ca^Kire  fu- 
rent reçues  à  Saint-Cyr ,  &  placées  à  l'extrémité  du  fauxbourg^ 
FEvêque. 

Une  maladie  contagieufe  défoloit  la  ville  &  le  diocefe  de 
Rennes.  Pour  appaifer  la  colère  de  Dieu ,  les  habitants  de  cette 
capitale  ,  qui  ont  toujours  témoigné  une  dévotion  particuHere  à 
la  Sainte  Vierge  ,  firent  vœu  de  préfenter  à  Notre-Dame 
de  Bonne-Nouvelle  un  monument  en  argent ,  qui  repréfentoit 
k  ville.  Le  2  Oftobre  1626,  fur  l'avis  donné  à  la  Commu- 
nauté d'une  proceffion  générale  pendant  trois  jours,  pour  ap- 
paifer la  contagion ,  il  fut  arrêté  qu'elle  y  marcheroit  en  habits 
de  cérémonie.  La  fomme  pour  l'acquit  de  ce  vœu,  fut  formée 
par  une  quête  faite  dans  toute  la  ville.  L'ouvrage  fut  travaillé 
par  des  Orfèvres  de  Paris,  &  ne  fut  achevé    que  deux    ans 


R  E  N  87 

après.  Il  repréfente  la  ville,  fes  portes,  Tes  remparts,  fes  tours, 
&  fes  principaux  édifices.  L'image  de  la  Sainte  Vierge  domine 
fur  le  refle  du  monument  :  elle  a  la  main  étendue  fur  la  ville , 
&  le  p,etit  enfant  qu'elle  tient  entre  fgs  bras  ,  eft  repréfente 
donnant  la  bénédiction  :  le  tout  pefe  cent  dix-neuf  marcs.  Il  fut 
apporté  à  Rennes  au  mois  d'Août  1 63  4 ,  &  dépofé  dans  l'Hôtel 
de  Ville  jufqu'au  8  Septembre  fuivant  ,  jour  de  la  Nativité, 
qu'on  le  porta  à  l'Eglife  Cathédrale  ,  avec  la  plus  grande  fo- 
lemnité.  Les  Hérauts  de  la  ville  ,  parés  de  leurs  cafaques  de  velours 
blanc  femé  d'hermines,  ouvroient  la  marche  de  la  cérémonie: 
ils  étoient  fuivis  de  violons  &  de  cent  enfants  fuperbement 
vêtus ,  fous  douze  guidons.  Les  mufettes ,  la  grande  enfeigne , 
&  les  hautbois  précédoient  le  vœu ,  qui  étoit  porté  fur  un  bran- 
card,  &  couvert  d'une  houlTe  de  fatm  blanc  fûjeé  d'hermines  j 
il  étoit  environné  de  vingt-quatre  enfants ,  habin|â*',comme  on 
repréfente  les  Anges  -,  chacun  d'eux  portoit  un  t^lè^  en  écu , 
où  étoit  repréfente  quelque  miracle  de  la  Saûgîfr^¥ierge. 
Tout  le  Corps  de  Ville  fuivoit.  On  avoit  drelfé ,  dans^^Bjaut 
de  la  nef  de  la  Cathédrale  ,  un  autel ,  autour  duquel  %s^  (A^- 
noines,  les  Religieux  de  l'Abbaye  de  Saint  -  Me  laine  ,  IcPà*-. 
lement,  le  Préfidial  en  robes,  étoient  placés.  Le  Corps  de  Vill^* 
fe  plaça  au  bas  du  parquet  ,  auprès  du  vœu.  Pierre  de  Cor^ 
nullier  ,  Evêque  de  Rennes ,  fit  un  fermon ,  après  lequel  il  célébra 
pontificalement  la  Mefle.  Quand  elle  fut  finie  ,  les  Echevins 
préfenterent  le  vœu  à  ce  Prélat,  qui  le  reçut  fur  l'eftrade  de 
l'autel.  Les  deux  Connétables  &  le  Procureur-général-Syndic , 
après  avoir  expofé  à  l'Evêque  le  fujet  du  vœu  &  de  l'aflemblée, 
le  fupplierent  de  le  recevoir  ,  de  le  bénir ,  &  de  l'offrir  à  la 
Sainte  Vierge  ,  au  nom  de  la  ville  &  de  fes  habitants.  Lorfqu'il  fut 
béni,  on  termina  les  prières  par  le  Te  Deu/n  ^  qui  fut  chanté 
en  mufique ,  &  on  fit  une  proceffion  générale  à  Notre-Dame  de 
Bonne-Nouvelle.  La  marche  commença  par  les  Confrairies ,  fui- 
vies  des  bannières  de  toute  la  ville ,  des  Muficiens  vêtus  de 
coton ,  des  cent  enfants  ,  &  de  quatre  hautbois  avec  des  robes 
de  flanelle  blanche  rayée  de  rouge ,  &  des  couronnes  de  fleurs. 
Ces  inllruments  jouoient  l'hymne  :  Ave  ,  maris  Jlella,  Le  Clergé 
régulier  marchoit  enfuite  ,  chaque  Communauté  fous  fa  croix: 
il  étoit  fuivi  des  Prêtres  féculiers  ,  qui  avoient  des  cierges  à  la 
main.  Après  eux  ,  venoient  les  Rehgicux  de  Saint-Melaine  ,  vêtus 
de  leurs  plus  beaux  ornements,  &  iuivis  de  quatre  hautbois  vêtus 
de  cafaques  de  futame  blanche  rayée  de  foie  bleue  &  incarnat ,  & 


88  R  E  N 

couronnés  de  fleurs.  Ils  jouoient  l'hymne  :    Ogloriofa  Domina,  Le 
grand  étendard  de  la  cérémonie  paroiflbit  enfuite  :  il  étoit  de  taffetas 
blanc,  de    dix-huit  pieds  en  quarré,  femé    de    fleurs  de  lis  & 
d'hermines.  D'un  côté ,  étoit  repréfentée  la  Sainte  Vierge  tenant 
l'Enfant  Jefus   entre  fes  bras ,  &   élevée  au  deffus  de  la  ville  ; 
de  l'autre ,  étoient  peints  Saint  Sébaftien  &  Saint  Roch  ;  & ,  au 
au  bas   de    l'enfeigne ,    étoient    les    armes  de   France  &  de  la 
Ville.   Vingt-quatre  enfants ,  vêtus   en  Anges ,    marchoient   fous 
cet  étendard  j  leurs  habits   étoient  d'étoffes    d'or  ou  d'argent ,  ils 
avoient  la  tête  couronnée  de  petits  foleils   d'or  entourés  de  lau- 
riers ,  &   le  vœu  étoit  au  miUeu  d'eux.  Les  Mufîciens  ,  qui  ve* 
noient  immédiatement ,  précédoient  le  Chapitre  de  la  Cathédrale  , 
qui    étoit     fuivi    du  Parlement  ,    du   Prélldial  ,    du    Corps    de 
Ville  5   &  de  plus  de  cinquante  mille    perfonnes.    Les  rues  par 
où  paffa  la  proceffion,  étoient  tendues  de  tapifferies.  A  l'entrée 
du  cimetière  Sainte -Anne,  on  avoit  dreffé  un  arc  de  triomphe, 
qui  avoit  vingt-cinq  pieds  de  hauteur ,  &  qui  étoit  orné  de  fept 
tableaux.  Au  côté  droit  de  cet  arc  ,  étoit  un  choeur  de  mufîque» 
La  porte  du  cimetière  de  Bonne-Nouvelle  étoit  ornée  des  armes- 
du  Pape ,  du  Roi ,  de  la  Bretagne ,  du  Cardinal    Duc  de  Ri- 
chelieu ,  de  l'Evêque ,  &  de  la  Ville.  A  l'entrée  de  l'Eghfe  de 
Notre-Dame  de  Bonne-Nouvelle  ,    étoit   un  portique   décoré  de 
trois  pyramides  ,  entre  lefquelles  on  voyoit  deux  figures  d'Anges  ,, 
vêtues  de  fatin  blanc  en  broderie  d'or.  D'une  main  elles  donnoient 
de  l'encens,  &  de  l'autre   elles  préfentoient  des  fleurs.   Lorfque 
la  proceflîon  fut    entrée  dans  l'Églife ,  on  plaça  le  vœu  fur  ua 
autel  de  marbre  noir ,  fur  deux  colonnes  de  marbre  jafpé ,  de 
l'ordre   Corinthien ,    avec  leurs  chapiteaux  dorés.    On  y  voyoit 
une  plaque  aufli  de  marbre   noir,   fur  laquelle  étoient  gravés^ 
en  latin  &  en  lettres  d'or  ,  ces  mots  :  Vœu    confacré  à  Dieu  & 
à  la  Sainte  Vierge  ,  Mère  ,  pour  avoir  délivré  de  la  pefte  la  ville 
de  Rennes  ,  Van  z(^jz.    Dès  que  le  vœu  fut  placé,  on   s'en  re» 
tourna  à  la  Cathédrale  dans  le  même  ordre.    En  paflTant  fur  les 
Lices ,  on  mit  le  feu  à    un  bûcher  qu'on  y  avoit  préparé.  Les 
cérémonies  durèrent  jufqu'au  foir  de  cette  journée ,  dans  laquelle  on 
commença  les  prières  de  quarante  heures.  Le  lendemain ,  la  procef- 
fion générale  fe  fit  à  l'Hôpital  de  la  Santé.  L'Evêque  célébra,  dans 
la  Chapelle  de  cette  maifon ,  une  Meffe ,  pour  ceux  qui  étoient 
morts  de  la  pefte;  &  on  porta  les  clefs  de  cet  Hôpital  &   les 
autres  clefs  qui  avoient  fervi  à  fermer  les  portes  des  pefl:iférés 
morts  3^  devant  l'image  de  Notre-Dame  de  Bonne-Nouvelle.  La 

cérémonie 


REN  89 

cérémonie  dont  on  vient  de  parler,  dura  quatre  jours,  pen- 
dant lefquels  il  étoit  venu  du  monde  de  toute  la  Bretagne ,  de 
la  Normandie  ,  du  Maine ,  &  de  l'Anjou  ;  &  l'on  afTure  qu'il  y 
avoit  à  Rennes  plus  de  deux  cents  cinquante  mille  perfonnes, 
y  compris  les  habitants.  Le  7  Septembre  163  5  ,  on  arrêta  que  tous 
les  ans ,  le  lendemain  de  la  Nativité  de  la  Sainte  Vierge  ,  jour  auquel 
on  avoit  offert  le  vœu  dont  on  vient  de  parler  ,  en  la  Chapelle 
de  Bonne-Nouvelle ,  le  Cerps  de  Ville  iroit  entendre  une  Mefle 
qu'il  fonda  dans  la  Cathédrale,  avec  le  confentement  du  Prélat, 
du  refte  de  la  quête  faite  pour  la  dépenfe  du  vœu  ,  &  que ,  de  là  , 
il  fuivroit  la  proceffion  générale  ,  aufîl  fondée  tous  les  ans 
à  pareil  jour ,  à  l'Eghfe  de  Bonne-Nouvelle  ;  mais  deux  chofes 
forcèrent  la  Ville  d'abandonner  cette  fondation.  La  première , 
fut  le  refus  obftiné  de  l'Evêque  de  laifTer  appofer  les  armes  de 
la  ville  au  retable  de  la  Chapelle  ,  qu'on  conjftruifit  exprès  pour 
deflervir  cette  fondation  dans  la  Cathédrale ,  au  bout  de  1  aile 
qui  joignoit  le  manoir  épifcopal ,  contre  la  convention  exprefle 
inférée  dans  l'afte  paffé  entre  lui ,  le  Chapitre ,  &  la  Commu- 
nauté de  Ville,  le  7  Septembre  KJ35  ,  à  raifon  de  la  fomme 
que  cette  dernière  avoit  donnée  pour  la  conftruftion  de  cette 
Chapelle ,  comme  nous  l'apprennent  les  regiftres  de  ce  temps-là. 
La  féconde  raifon  fut  que,  le  8  Septembre  1637  ,  la  Com- 
munauté ayant  été  avertie  que  quelques  Confeillers  du  Préfî- 
dial  ,  fans  former  Corps,  vouloient  prendre  le  pas  fur  elle  à  la 
procefîion  ,  en  fuivant  immédiatement  les  Membres  du  Par- 
lement qui  y  afliftoient  par  dévotion  ,  le  Syndic  fe  plaignit  au 
Préfident  de  Marbœuf,  qui  décida  en  faveur  de  la  Commu- 
nauté :  mais ,  l'année  fuivante ,  le  Préiidial  ayant  pollé  fur  les 
avenues  tous  les  Sergents  ,  pour  s'en  faire  appuyer  dans  la 
marche,  la  Communauté  de  Ville  arrêta  de  ne  plus  fe  trouver, 
ni  à  la  Meffe  de  fondation ,  ni  à  la  proceflion  qui  devoir  fe 
faire  enfuite  ;  mais  de  fe  rendre  feulement  en  droiture  à  l'Eglife 
de  Bonne-Nouvelle  ,  pour  afTifter  à  la  Meffe  que  les  Religieux  fe 
font  obligés  de  dire  à  perpétuité  ,  en  confidération  de  l'exemption 
des  droits  d'éclufes  ,  qui  leur  a  été  accordée ,  &  dont  ,  depuis  ce 
temps ,  il  a  été  fait  expreffe  réfervation  dans  tous  les  baux  qui  en 
ont  été  adjugés.  La  Communauté  arrêta  encore  que  le  cierge 
qu'elle  recevoir  tous  les  ans  des  Pères  Jéfuites,  le  jour  de  Saint- 
Luc  ,  feroit ,  au  même  temps ,  porté  à  Bonne-Nouvelle  ,  préfenté 
à  la  Sainte  Vierge ,  6c  allumé  pendant  ladite  Meffe  ;  ce  qui , 
peu  après ,  tomba  en  défuétude.  Au  furplus ,  la  Communauté 
Tome  IF.  M 


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s'étant  pourvue  au  Confeil  contre  le  Préfidial ,  à  faifon  de  ceâ 
troubles,  elle  obtint  en  1693  un  Arrêt,  qui  défendoit  aux  Mem- 
bres de  ce  Siège  de  marcher  devant  elle ,  fi  ce  nei\  en  Corps. 
Le  Préfidial  fe  pourvut  contre  cet  Arrêt ,  &  il  en  fut  rendu  un 
fécond  qui,  pour  couper  cours  à  ces  conteftations,  portoit,  que 
la  Communauté  de  Ville  ne  marcheroit  plus  en  Corps  aux  pro- 
cédions publiques ,  que  lorfque  le  Parlement  &  le  Préfidial  y 
marcheroient. 

Ce  fut  le  5  Septembre  1658 ,  que ,  pour  la  première  fois,  deux  Re- 
ligieux Jacobins  allèrent  convier  la  Con>munauté  de  Ville  d'aflifter  à 
laMefîe  du  vœu  en  leur  Eglife  ;  ce  qui  s'efl:  toujours  pratiqué  depuis. 
Le  premier  Septembre  1 668 ,  fur  la  crainte  qu'on  avoit  que  la 
pefte  ,  qui  ravageoit  alors  la  Normandie  ,  ne  vînt  en  Bretagne,  il 
fut  arrêté  que  ,  le  8  du  mois ,  il  feroit  fait  une  proceffion  géné- 
rale ,  à  laquelle  ledit  vœu  fut  porté  par  des  Echevins  détachés 
du   Corps  de  Ville ,  qui  y  affilia  en  habits  de  cérémonie. 

Le  3  Mars  1634,  il  fut  permis  aux  Religieufes  de  la  Vifitation 
de  faire  un  fécond  établilTement  de  leur  Ordre  au  Colombier. 

Les  23,  26,  &  27  Juinde  cette  année  ,  furent  marqués  par  des 
réjouiffances.  Le  fils  d'un  Prince  de  Guinée  fut  baptifé  par  TÈvêque 
de  Rennes,  &  tenu  fur  les  fonts  de  baptême  ,  au  nom  du  Roi,  par 
M.  de  Cucé  ,  Premier  Préfident  au  Parlement ,  &  la  Demoifelle 
de  Coëtquen.  Le  4  Juillet  1636,  les  Religieufes  de  Sainte-Cathe- 
rine ,  de  l'Ordre  de  Saint-Dominique ,  obtinrent  la  permiffion  de 
s'établir  à  Rennes ,  dans  la  rue  Hue.  Le  22  Juin  1638  ,  fur  ce  que 
le  Parlement  avoit  arrêté  de  ne  point  marcher  à  la  proceffion  de 
la  Fête-Dieu ,  à  caufe  de  quelques  différents  qu'il  avoit  avec  l'E- 
vêque ,  la  Communauté  de  Ville  arrêta  qu'elle  n'y  marcheroit  pas 
non  plus.  Le  1 3  Août,  fut  repréfentée  la  Déclaration  du  Roi  Louis 
XÏII ,  au  fujet  de  la  proceffion  qui  fe  faifoit  tous  les  ans ,  en  exécution 
du  vœu  du  Monarque  ^  qui  avoit  mis  fon  Royaume  fous  la  protec- 
tion de  la  Sainte  Vierge.  La  proceffion  fefit ,  pour  la  première  fois, 
à  Rennes,  le  1 5  du  mois  d'Août  1638.  Le  22  Juin  1642,  furent 
reçues  les  ReHgieufes  Hofpitalieres,  &  ,  le  3  Juillet  1676  ,  on  leur 
donna  la  Chapelle  de  Saint- Yves.  Le  17  Novembre  1645  ,  la  Com- 
munauté ,  réfléchifTant  fur  l'établifTement  des  Maifons  Religieufes, 
qu'elle  avoit  reçues  au  nombre  de  huit  depuis  cinquante  ans ,  ar- 
rêta de  n'en  plus  recevoir  ,  &  fit  homologuer  la  déUbération  prife 
à  ce  fujet ,  par  Arrêt  du  24  du  même  mois.  En  1609,  la  Commu- 
nauté pouvant  difpofer  de  fes  deniers,  par  la  fin  de  la  guerre, 
aux  frais  de  laquelle  elle  avoit  été  obligée  de  les  facriiier  jufqu'à 


REN         /  91 

çe  jour,  commença  à  projetter  la  con{lru6lion  du  Palais  pour  le 
Parlement ,  &  obtint  la  permiiîlon  de  bâtir  cet  édifice  ,  par  lettres 
du  Roi  Henri  IV  y  lettres  qui  furent  vérifiées  au  Parlement  le  2  Dé- 
cembre 161 3.  Le  31  O8:obre  161 4,  fut  préfemé  à  la  Communauté 
de  Ville,  le  premier  plan,  qui  futdreffépar  ordre  de  la  Cour.  Le  Roi 
accorda  à  ce  Corps  politique  le  droit  de  lever  un  fol  par  pot  de 
boiflbn  qui  fe  débiteroit ,  à  condition  d'employer  les  deux  tiers 
du  produit  de  cet  impôt  à  la  conllruftion  du  bâtiment  projette ,  & 
l'autre  tiers  pour  les  néceffités  des  habitants.  En  conféquence ,  la 
Cour  ordonna  par  un  Arrêt ,  que  les  maifons  &  héritages  qui  fe 
trouvoient  fur  le  lieu  deftmé  à  ce  Palais ,  feroient  inceflamment  pri- 
fés  &  eflimés,  afin  qu'on  en  pût  payer  le  montant  aux  proprié- 
taires. Le  15  Septembre  161 8,  fut  pofée  la  première  pierre  ;  &, 
le  26  Mars  1624  ,  le  Sieur  Cormeau ,  Architefte ,  fut  nommé  pour 
conduire  l'ouvrage  à  fa  perfeftion.  L'édifice  ne  fut  achevé  qu'en 
1654.  Il  confiée  dans  une  grande  cour  bordée  de  galeries  &  de 
boutiques  de  Marchands ,  dans  un  arriere-corps ,  &  quatre  gros 
pavillons.  Le  grand  efcaUer  eil  très-beau  &  admiré  des  connoif- 
feurs.  Le  Parlement,  qui  tenoit  ci-devant  fes  féances  au  Couvent 
des  Cordeliers ,  fit  fon  entrée  au  Palais  le  11  Janvier  1655.  Les 
cérémonies  de  cette  entrée  furent  très-brillantes ,  par  les  foins  de 
la  Communauté  de  Ville ,  qui  n'oubha  rien  pour  refidre  cette  fête 
folemnelle.  Les  acclamations  du  peuple ,  les  décharges  d'artille- 
rie ,  &  les  feux  de  joie  peignoient  l'alégrefTe  publique.  Le  Corps 
de  Ville,  en  habits  de  cérémonie,  avec  fes  Officiers  ordmaires, 
fe  trouva  fur  le  perron  ;  &  ,  lorfque  le  Parlement  fe  préfenta  dans 
toute  fa  pompe ,  le  Sieur  Douart ,  Procureur-Syndic ,  le  compli- 
menta, &  le  pria  d'aller  occuper  ce  Siège,  &  rendre  fes  oracles 
dans  ce  nouveau  Palais.  Tout  le  peuple  donna  à  la  Compagnie 
mille  bénédiftions ,  &  demanda  que  ce  jour  folemnel  î\M  marqué 
furies  rcgiilres  ,  comme  un  des  plus  fortunés  pour  la  ville. La  MefTe 
fut  célébrée  dans  le  Palais  j  &,  lorfqu'elle  fut  dite  ,  on  alla  à  la 
Grand'Chambre  de  l'Audience ,  dans  le  parquet  de  laquelle  s'étoit 
placé  le  Corps  de  Ville  pour  recevoir  les  Magiftrats  ,  qui  accor- 
dèrent à  la  Communauté  le  droit  de  faire  mettre  fes  armes  fur  le 
haut  du  perron.  A  Tiflue  de  l'Audience ,  le  Corps  de  Ville ,  avec 
fes  Officiers ,  fe  retira  dans  le  même  ordre  qu'il  étoit  venu ,  & 
alla  mettre  le  feu  au  bûcher  préparé  devant  le  Palais  ,  où  le 
peuple  ,  qui  étoit  afTemblé  ,  témoigna  de  nouveau  fa  joie  par 
des  acclamations  réitérées  &  par  une  nouvelle  décharge  d'artil- 
lerie. La  première  caufe  ,  ou  procès,  qui  fut  plaidée  dans  le  nouveau 


91  R  E  N 

Palais ,  fut  celle  des  Fermiers  du  domaine.  Le  Maréchal  de  BrifTac; 
mort  à  Rennes  l'an  1621  ,  pofledoit ,  fous  le  fief  du  Roi,  plu- 
fîeurs  Seigneuries,  dont  les  Fermiers  demandoientle  rachat.  Le  Duc 
de  Briflac  contefta  la  demande ,  &  fut  condamné  par  Sentence 
du  Préfidial.  L'appel  fut  porté  au  Parlement ,   Se  plaidé. 

Le  Parlement  ayant ,  comme  nous  Tavons  obfervé ,  permis  à 
la  Communauté  de  Ville  de  faire  graver  fes  armes  fur  le  haut  du 
perron  du  Palais  de  la  Juftice,  les  Officiers  municipaux  les  firent 
fculpter  en  1656  fur  une  pierre;  mais,  avant  de  la  placer,  il  fut 
arrêté  qu'on  feroit  refTouvenir  le  Parlement  de  cette  concefTion, 
que  cette  Cour  parut  avoir  oubliée ,  &  les  armes  ne  furent  point 
pofées.  La  même  année  ,  pendant  la  proceffion  de  la  Fête-Dieu ,  un 
Proteflant  commit  une  irrévérence  devant  leSaint-Sacrem.ent,  lorf- 
qu'il  pafToit  devant  le  puits  du  Mefnil.  La  populace  &  les  Eco- 
liers vengèrent  l'outrage  fait  à  la  majeflé  du  Sauveur  du  monde, 
en  brûlant ,  le  Dimanche  fuivant  ,  le  temple  des  Calvinillcs.  Le 
18  Août  de  cette  année  ,  on  préfenta  à  la  Communauté  des  let- 
tres du  Roi ,  portant  permilTion  de  tranfporter  le  Couvent  des 
Rcligieufes  de  la  Cordonnerie  au  Pré- Botté  ;  ce  qui  ne  fut  pas 
exécuté  pour  lors  :  l'entreprife  en  fut  remife  au  24  Mai  1681, 
&  difTérée  jufqu'en  1693. 

L'an  1659,  des  voleurs  enfoncèrent  la  porte  de  la  chambre  où 
étoient  renfermés  les  anciens  titres  delà  Sénéchauffée  de  Rennes, 
des  lettres-patentes  ,  des  mandements  des  Ducs,  &c.  Ces  fcélé- 
rats  emportèrent  prefque  tous  ces  papiers  ,  &  les  vendirent  à  des 
Marchands  Epiciers.  On  s'en  apperçut,  mais  trop  tard  :  on  ne 
put  recouvrer  qu'un  petit  nombre  de  ces  monuments.  La  Ville, 
qui  avoit  déclaré  ne  vouloir  plus  recevoir  de  Religieux ,  confentit 
pourtant  à  recevoir ,  en  1 663  ,  ceux  de  la  Trinité  ,  auxquels 
elle  donna  l'alignement  pour  l'étabUfTement  de  leur  Couvent.  Le 
27  Août  fuivant ,  elle  donna  aux  Auguftins  une  maifon  &  des  jar- 
dins ,  en  forme  d'hofpice  ,  au  haut  du  fauxbourg  l'Evêque.  Ces  Re- 
ligieux ,  ne  fe  trouvant  pas  bien  dans  cet  endroit,  font  defcendus 
jui'qu'à  l'entrée  de  ce  fauxbourg,  par  la  proteftion  des  PuifTances. 
Magdeleine  delà  Fayette ,  Abbefie  de  Saint-Georges  ,  fit  rebâtir, 
dans  le  courant  de    cette   année ,  une  partie  de  fon  Monaftere. 

René-Jofeph  Tornemine  naquit  à  Rennes,  l'an  1661  ,  d'une  an- 
cienne &  illullre  maifon  de  cette  province.  C'étoit  un  Jéfuite 
célèbre  par  fa  belle  érudition  :  il  travailla  long-temps  au  Jour- 
nal de  Trévoux  ,  ce  qui  lui  procura  une  correfpondance  avec 
les  fçavants  du  premier  mérite.  Il  fut  fait  Bibliothécaire   de  la 


R  E  N  .   .       9J 

Maifon  ProfefTe  ,  à  Paris ,  &  forma  lui-même  une  bibliothèque 
de  plus  de  fept  mille  volumes  choiiis.  Il  mourut  à  Paris  , 
l'an   1739. 

Le  15  Juillet  166^  ,  fe  fit  une  députation  pour  l'ouverture  de 
la  poterne.  L'ouvrage  qui  avoit  été  interrompu ,  fut  renouvelle  , 
en  exécution  d'Arrêts  donnés  à  ce  fujet  le  8  Juillet  1667  &  le 
8  Mars  1668.  Le  terrein  des  deux  côtés,  au  dedans  de  la  ville, 
fut  donné  aux  Cordeliers ,  à  la  charge  de  dire,  tous  les  ans,  une 
MefTe  folemnelle  ,  le  jour  de  Saint- François,  &  de  veniry  inviter  la 
Maifon  de  Ville.  La  Communauté  de  Ville  arrêta  qu'elle  y  aflif- 
teroit  en  habits  de  cérémonie  ;  ce  qui  s'efl  pratiqué  jufqu'à  ce  jour. 
Depuis  l'ouverture  de  la  poterne  ,  il  y  a  une  porte  de  ville , 
nommée  /a  porte  de  Saint-François  ;  elle  ne  fert  que  pour  les  gens 
de  pied,  lorfque  le  Parlement  eft  affemblé,  &  l'on  y  met  une 
barrière  pour  empêcher  les  voitures  de  paffer.  On  levé  la  bar- 
rière lorfque  l'afTemblée  eft  féparée.  L'an  1670,  on  découvrit, 
fous  la  tour  qui  eft  à  l'entrée  de  l'Eglife  de  Saint-Melaine ,  les  tom- 
beaux de  Conan  II ,  Duc  de  Bretagne  ;  de  la  DuchelTe  ,  fon 
époufe  ;  &  de  Berthe ,  Comteffe  de  Blois  ,  fa  mère. 

Gui-Alexis  Lobineau,  Religieux  Bénédiftin ,  né  à  Rennes  en 
1 6GG  ,  fe  livra  à  la  feule  étude  de  l'Hiftoire  :  il  finit  celle  de  la 
ville  de  Paris  ,  que  Dom  Fehbien  avoit  très-avancée.  Elle  parut, 
en  1725  ,  en  cinq  volumes  in-fol.  Il  acheva  auffi  l'Hiiloire  de  Bre- 
tagne ,  à  laquelle  le  Père  le  Gallois  avoit  long-temps  travaillé. 
On  lui  a  attribué  les  Aventures  de  Pomponius ,  Chevalier  Romain  ; 
mais  on  afTure  que  cet  Ouvrage  fatyrique  efl  dû  à  M.  le  Che- 
valier de  Jaucourt-Chemifeuil. 

Les  RcHgieufes  du  Petit-Calvaire  furent  établies  dans  l'hôtel 
de  Cucé ,  a  la  grande  pompe  ,  &  furent  reçues  par  Madame  de 
Cucé ,  époufe  du  Premier  Préhdent  au  Parlement.  L'a61:e ,  en  date 
du  25  Novembre  1671  ,  appuyé  des  lettres-patentes  du  Roi,  fut 
pafTé  fans  participation  de  la  Communauté  de  Ville.  Ces  Reli- 
gieufes  s'étoient  d'abord  introduites  dans  la  maifon  d'Afferac , 
près  la  place  Saint-Pierre ,  au  haut  de  la  rue  des  Dames ,  &  y 
avoient  fait  arborer  une  croix  fur  la  porte,  vers  l'an  1658  ou 
1659.  Sur  la  remontrance  qu'en  avoit  faite  le  Sieur  de  la  Gue- 
rinaye-le-Comte  ,  alors  Syndic,  il  avoit  été  arrêté  de  faire  def- 
cendre  cette  croix,  &  de  renvoyer  les  Rcligieufes  dans  leur  Cou- 
vent de  la  porte  Saint-Cyr,  parce  qu'il  ne  leur  avoit  été  accordé, 
le  \6  Février  1657  ,  que  la  fimple  permifïïon  dun  petit  hofpice, 
à  raifon  de  leur  éioignement  des  Médecins. 


94  R  E  N 

:•  Il  '  y  avoit  anciennement  à  Rennes  trois   fortes  d'oifeaux  ^  ou: 
papegais ,  qui  dépendoient  de  la  Communauté  de  Ville.  Les  deux 
premiers  ,  félon  la  permiflion  qui  en  fut  donnée  fan  1 544,  furent 
établis  à  la  place  de  la  Butte ,   &  prirent  leur  nom  du  but  qui 
y  étoit  pofé  ;  il  s'étendoit  le  long  du    mur  de   Champ- Jacquet , 
depuis  l'hôtel  de  Tizé  jufqu'à  l'efcalier  qui  monte  fur  ce  mur. 
Le  troiiieme  ,  nommé  de  VArquebufe ,  étoit  planté  fur  la  tour  du 
Chefne,  derrière  l'Hôtel  de  Ville.  Il  ne  fe  trouve  plus  à  l'Hôtel 
de    Ville  aucun  des    titres  primordiaux  de  leur  inlHtution  ^  foit 
qu'ils  aient  été  divertis  ,  foit  qu'en  conféquence  du  tranfport  qui  fe 
m  des  droits  des  deux  premiers  aux  Jéfuites ,  pour  leur  fubfiftance  , 
on  les  eût  aufli  rendus  propriétaires  des  titres.  Quoi  qu'il  en  foit , 
ils  furent  abolis ,  &  il  ne  refta  plus   que  le  papegai  de  i'arque- 
bufe,   qui  ne  fubiîfta  que  du  peu  de  revenu  qui  y  demeura  at- 
taché. On  apprend  néanmoins ,  par  la  lefture  de  pluiieurs  pièces, 
qui  fe  trouvent  dans  la  liafle  de  celles  qui  concernent  les  deux 
papegais ,  qu'ils  furent  inflitués  ,  pour  la  première  fois  ,  par  le  Duc 
François  II,  l'an  1460,  &  qu'ils  furent  depuis   confirmés  par  le 
Roi  Charles  IX  ,  aux  années  1 566  &  1 568.  Au  refte  ,  il  eft  porté 
dans  tous  les  anciens  regiftres ,  que  la  préfentation  de  cette  der- 
nière efpece  d'oifeau  ,  confîilant  dans  une  forme  de  pigeon ,  s'eft 
toujours    faite    par    le    Prévôt    &    le    Roi   de   chaque    année  ;. 
qu'avant  le  premier  de  Mai  ,    le  Roi  le  préfentoit  tous   les  ans 
à  la  Communauté  ,  pour  l'examiner  ,    &  juger  fî  la  fabrique  ea 
étoit    bonne    ,    &    l'alTemblée  l'acceptoit    ou    le  rejettoit.  An- 
ciennement ,  fa  fabrique  étoit  de  fer  bien  battu ,  &  il  étoit  planté 
au  bout  d'une  gaule ,  auiïi  de  fer  bien  battu  ,    d'environ  c[uatre 
pieds  de  longueur  ;  de  groffes  goupilles   l'arrêtoient  par  deffus  ^ 
&   de  gros  boutons  ,    qu'on   attachoit  par    deffous ,  le  garantif«- 
foient    de    quantité  de    coups.  Cette  gaule  étoit   attachée,    par 
fon   extrémité  du  bas  ,    à  une  longue    pièce  de  bois  ,  élevée , 
en  forme  de  mât,  fur  une  machine  de  charpente,  qu'on  plantoit 
fur  la  tour  du  Chefne  ,  &  on  le   tiroit  de  delTus  un  parquet  qu'oa 
conftruifoit  exprès  tous  les  ans  auprès  du  mur  de  l'Hôtel  de  Ville 
qui  regardoit  la  tour.  Il  étoit  très-difEcile  de  l'abattre ,  &  il  du-^ 
roit  quelquefois  plus   d'un  mois  ;  mais ,    en  1 700 ,  on  Le  fit  de 
bois ,  &  on  fe  contenta  de  l'attacher ,  à  hauteur  d'homme ,  à  uïi 
poteau;  ce  qui   faifoit   qu'il   ne  duroit  que  quatre  à   cinq   jours. 
A  l'égard  des  droits  &  attributs  qui  y  font  reftés  attachés ,  orL 
voit  ,  par  une  déclaration  du  c^  Janvier  1670,  que  la  Commu- 
nauté de  Ville  donnoit  à  celui  qui  Tabattoit  cent  quinze  livres 


R  E  N  95 

fur  les  anciens  Devoirs  ;  &  ,  en  conféquence  d'un  Arrêt  du  Conleil 
du  27  Juillet  1671  ,  il  devoit  toucher  du  Fermier  des  Devoirs 
cinq  cents  livres,  Se  quelquefois  davantage  ,  pour  l'exemption  de 
vingt  tonneaux  de  vin.  Le  Roi  de  la  fête ,  outre  Toifeau  ,  devoit 
encore  j^réfenter ,  avant  le  premier  Mai ,  à  la  Communauté  de 
Ville ,  un  fufîl,  de  la  valeur  au  moins  de  dix  écus,  pour  tirer  au 
blanc.  Les  Chevaliers  tiroient  à  tour  de  rôle  ,  &  celui  qui  ap- 
prochoit  le  plus  près  du  centre  ,  devenoit  le  pofTefTeur  légitime 
du  fufîl  ',  mais ,  par  un  abus  affez  étrange  ,  on  laiffoit  tirer  le 
premier  venu  qui  Te  préfentoit.  Le  i6  Mai  161 4,  il  fut  enjoint 
à  l'Huifîier  de  la  Ville  d'avertir  ,  auffi-tôt  l'oifeau  abattu  ,  le  Pro- 
cureur-Syndic de  fe  trouver,  avec  le  Greffier,  en  l'Hôtel  de 
Ville,  pour  affilier  à  fon  adjudication  &  au  ferment  du  Roi  de 
la  cérémonie!  Le  28  Avril  1625  ,  on  arrêta  que  le  papegai  ne 
feroit  point  tiré  cette  année,  &  que  fon  revenu  feroit  employé 
au  foulagement  des  malades ,  qui  étoient  d'autant  plus  nombreux 
que  la  ville  de  Rennes  étoit  défolée  par  une  épidémie.  Le  25 
Mai  1632  ,  la  Communauté  ayant  jugé  que  l'oifeau  avoit  été 
mal  abattu  ,  il  fut  ordonné  que  le  revenu  en  feroit  employé  à 
la  conftruftion  des  murs  de  l'Hôpital  de  Santé,  auquel  on  tra- 
vailloit  alors.  Il  n'y  a  aucun  titre  aux  archives  de  la  Commu- 
nauté de  Ville,  qui  fafTe  mention  des  droits  du  jeu  de  l'Oie  :  elles 
difent  feulement  que  le  Dire6leur  des  Devoirs  avoit  coutume 
d'accorder  le  débit  de  deux  à  trois  banques  de  vin  à  ceux  qui 
le  couroient.  Ce  jeu  eft  aboli  depuis  plufieurs  années  ,  ainfi  que 
celui  du  papegai ,  fupprimé  en  1770.  Le  13  Décembre  1685,  la 
Communauté  de  Ville  affilia  au  Te  Dmm  chanté  en  aftions  de 
grâces  de  l'union  des  Proteltants  à  l'Eglife.  Le  Parlement  ,  qui 
avoit  été  transféré  à  Vannes  l'an  1675  ,  fut  rappelle  à  Rennes, 
par  Edit  du  mois  d'Oftobre  1689.  Le  Roi  y  créa  un  Préfident  à 
Mortier  &  fix  Confeillers ,  trois  par  femeftre.  Les  Carmes-Dé- 
chaulTés ,  voulant  s'établir  à  Rennes ,  demandèrent  la  proteftion 
de  Madame  de  Pontchartrain ,  Chanceliere  de  France,  par  l'in- 
terceffion  de  laquelle  ils  furent  reçus  le  11  Mai  1690,  aux  con- 
ditions portées  dans  la  délibération.  Par  un  Edit  de  l'an  1691,1e 
Roi  fupprima  l'Amirauté  de  Rennes.  Le  1 1  Novembre  de  cette 
année  ,  la  Communauté  réfolut  de  conftruire  deux  arches  ,  l'une, 
vis-à-vis  la  ruelle  de  Gronmalon,  au  delà  du  pont  Saint-Martin; 
&  l'autre  ,  au  bas  de  la  prairie  de  la  Lande  ,  hors  la  barrière 
du  même  pont  j  afin  de  faciliter  le  paffiige  dans  ces  endroits.  Ce 
fut  en  1 696  que  fut  impofée  ,  pour  la  première  fois ,  la  Capitation 


ç)6  R  E  N 

à  Rennes.  L'inventaire  fait  ,  par  ordre  de  la  Communauté  de 
Ville,  en  1698,  des  aftes  &  titres  de  l'Hôpital  Saint- Yves ,  nous 
apprend  qu'il  fut  fondé,  comme  on  l'a  dit  ci- devant,  par 
Eudon  le  Bouteiller  ,  Prêtre  du  diocefe  de  Tréguier ,  en  1358, 
&  que  la  direftion  en  fut  dès-lors  commife  à  la  Communauté  y 
qui  nommoit  deux  Bourgeois  pour  exercer  cette  charge  ,  &  à  l'Au- 
mônier de  Saint-Melaine  ,  auquel  elle  fut  d'abord  conférée  -,  ce 
qui  a  toujours  continué  ,  &  c'eft  à  la  Communauté  que  les 
comptes  de  l'adminiftration  de  cet  Hôpital  ont  toujours  été  rendus. 
La  Communauté  de  Rennes  nomma  les  Gardiens  &  autres 
Prêtres  de  cet  Hôpital ,  &  celui  de  Sainte-Anne ,  qui  font  ref- 
peftivement  tenus,  à  tous  les  premiers  jours  de  l'an,  de  repré- 
fenter  leurs  clefs  à  la  Communauté  -,  &  les  regiftres  apprennent 
que  le  Gardien  de  Sainte-Anne  remplit  ce  devoir  en  1605.  Le  5 
Juillet  1 676 ,  la  Chapelle  de  Saint-Yves  fut  accordée  aux  Reli- 
gieufes  HofpitaUeres  qui ,  depuis  leur  réception  à  cet  Hôpital ,  k 
27  Juin  1644,  i^e  s'étoient  fervi  que  d'une  petite  Chapelle  pra- 
tiquée au  dedans  de  leur  enclos.  Le  13  Février  1562,  &  autres 
jours  fuivants ,  fe  fit  une  délibération  très-férieufe  pour  la  fubfif- 
tance  des  mendiants.  En  1563  ,  fe  fit  l'établilTement  de  l'Hôpital 
de  Santé,  à  l'endroit  nommé  la  Croix- Rochcraud ^  pour  les  pelli- 
férés  mendiants;  & ,  le  5  Juin  1626,  fut  fait  l'enrégiftrement  de 
plufieurs  articles  du  règlement  à  ce  fujet.  Au  mois  d'Avril  161 5 ,  les 
Officiers  municipaux  nommèrent  des  Collefteurs  des  aumônes  qu'on 
voudroit  donner  à  cet  Hôpital,  fur  les  rôles  des  Cinquanteniers, 
fuivant  une  fentence  de  Police  j  ce  qui  fut  encore  renouvelle  le 
25  Avril  1625.  Le  Parlement,  ne  jugeant  pas  devoir  tolérer  ces 
quêtes  ,  donna  plufîeurs  déclarations  pour  en  abolir  i'ufage,  fans 
qu'on  fçache  précifément  le  temps  où  il  ceffa.  Ce  qu'on  peut  dire 
de  certain,  c'efl  qu'il  exifloit  encore  en  1636.  Quoiqu'il  en  foiî, 
on  en  rappella  la  pratique  en  1680  &  1681  ,  mais  on  changea  la 
forme  de  la  perception  ;  au  lieu  qu'auparavant  chacun  étoit  libre  de 
donner  ce  qu'il  vouloir  félon  fes  facultés  &  fon  intention ,  on  fixa, 
par  une  taxe  générale,  non  le  don,  mais  l'obligation  de  chaqi^ 
citoyen.  Le  16  Février  1657,  on  forma  le  projet  d'ériger  un  nouvel 
Hôpital  pour  y  renfermer  les  pauvres  mendiants ,  &  de  faire  de 
celui  de  la  Santé  un  Hôpital  général.  Les  articles  des  règlements 
de  cette  nouvelle  maifon  avoient  été  rédigés,  &  ils  furent  repré- 
fentés  en  Communauté  le  8  Juillet  1658  :  ils  furent  confignés  fur 
les  regiflres  de  la  Ville  ,  avec  l'Arrêt  de  leur  homologation  y  le  26 
Décembre  1659  j  fur  quoi  s'efl  arrêté  l'Hôpital  général. 

Le 


R  E  N  97 

Le  3  Juin  1 6j6 ,  la  Communauté  de  Ville  confentît  que  l'Hô- 
pital-général  fût  établi  en  celui  de  la  Santé ,  à  condition  que  les 
pauvres  en  fortiroient  en  cas  de  pefte.  Le  20  Juin  1680,  l'affem- 
tlée  de  la  Ville  prit  des  mefures  pour  faire  joindre  à  cet  Hôpital  le 
refte  de  l'ancien  droit  du  papegai.  Le  14  Août,  on  fit  une  autre 
affemblée  pour  avifer  aux  moyens  d'établir  une  taxe  fur  les  habi- 
tants pour  la  fubfillance  des  pauvres,  &  l'on  nomma  des  Députés 
pour  paflér,  avec  la  Dame  Budes ,  l'afte  du  don  qu'elle  vouloir  faire 
à  cette  maifon  ;  afte  qui  fut  repréfenté  en  l'afTemblée  fuivante. 
Le  27  Février  1681  ,  on  députa  vers  i'Adminillrateur  de  l'Hôpital, 
pour  conférer  fur  la  fixation  du  fonds  néceffaire  pour  la  fubfif- 
tance  des  pauvres;  &,  le  29  du  même  mois,  on  lui  accorda  une 
fomme  de  douze  mille  livres  par  an  ,  à  prendre  fur  les  habitants  de 
Rennes.  Cette  fomme  ayant  été  trouvée  trop  confidérable ,  on  ceffa 
de  la  percevoir  en  1702.  Par  Arrêt  du  Conl'eil  du  2 1  Mars ,  elle  fut 
transférée  fur  l'entrée  des  vins  &  cidre.  La  taxe  fut  fixée  à  quatre  li- 
vres dix  fols  fur  chaque  tonneau  de  vin  étranger  ;  à  quarante-cinq 
fols  par  tonneau  de  vin  de  Nantes  ,  &  autre  du  crû  de  la  province  j 
&  à  vingt-cinq  fols  par  chaque  tonneau  de  cidre  &  de  bière.  Le  24 
Juillet  1686,  on  fit,  à  la  requifition  de  l'Evêque,  une  députation 
pour  afîifter  à  l'examen  du  compte  de  cet  Hôpital. 

Dans  une  maifon  près  la  porte  Mordelaife ,  étoit  un  puits ,  dans 
lequel  un  maçon,  qui  travailloit  auprès,  en  1703  ,  laifla  tomber  fon 
marteau.  Il  defcendit  pour  le  chercher  ;  mais ,  lorfqu'il  fut  à 
une  certaine  diftance  de  l'eau ,  il  tomba  mort.  Un  autre  y  def- 
cendit ,  pour  retirer  le  noyé ,  &  mourut  auffi.  Un  troifieme  ,  qui 
fuivit ,  eut  le  même  fort.  Un  quatrième  fe  préfenta  pour  y  def- 
cendre ,  mais  on  prit  des  précautions  :  il  s'enivra  à  moitié ,  on  le 
mit  dans  un  grand  panier  attaché  à  une  corde  ,  &  on  le  defcendit 
de  cette  forte ,  après  lui  avoir  bien  recommandé  de  crier  lorfqu'ii 
fentiroit  la  moindre  incommodité.  Etant  arrivé  à  une  certaine  dif- 
tance  de  l'eau,  il  cria,  &  on  le  remonta  aufli-tôt.  Il  dit  qu'il 
avoit  fenti  une  chaleur  dévorante ,  qui  lui  brûloir  le  corps  ;  & 
l'effet  de  cet  air  brûlant  avoit  fait  des  progrès  fi  rapides ,  que 
cet  homme  mourut  au  bout  de  trois  jours.  On  defcendit  enfuite 
un  chien  ,  qui  cria  à  l'approche  de  l'eau  ;  on  le  retira ,  &  il  mou- 
rut prefque  fur  le  champ.  On  buvoit  de  l'eau  de  ce  puits, 
&  perfonne  n'en  étoit  incommodé;  mais,  après  cet  événement^ 
on  le  combla ,  dans  la  crainte  de  pareil  accident. 

Le  petit  Séminaire  fut  établi  à  Rennes ,  par  lettres-patentes  du 
mois  de  Mai  1708.  La  Table  de  Marbre  fut  fupprimée,  parEdit 
Tome  IV,  N 


o8  REN 

du  mois  de   Mal  1711.  La  ftatue  équeftre  du  Roi  Louis  XIV, 
en  bronze  ,  qu'on  voit  fur  la  place  du  Palais ,  arriva  à  Nantes, 

Dans   la  nuit   du  21  au  22    Décembre  1720,  un  Menuifîer, 
qui  étoit  ivre ,  mit  le  feu  à  fa  boutique  ,  fituée  vers  le  milieu  de 
la  rue  Triltain.  Le  feu  gagna  fur  le  champ  les  maifons  voifmes, 
&    dans  très-peu  de  temps ,  les   deux  côtés  de  la  rue  &  la  rue 
Neuve  furent  embrafés.  Comme  les  maifons  n'étoient  bâties  qu'en 
bois ,  &  les  rues  fort  étroites ,  l'incendie  devint  bientôt  général. 
La  charpente  de  l'horloge  ,  fituée  fur  la  tour  derrière  Saint-James  , 
fut  brûlée  ;  la  cloche  ,  qui  pefoit  près  de  quarante  milliers,  tomba 
avec  toute  la  charpente  ,  le  23  ,  vers  les  deux  heures  du  matin; 
"     elle  fit  un  bruit  terrible.  Le  feu  dura  fept  jours,  puifqu'il  ne  s'é- 
teignit que  le  29.   Il  y  eut  huit  cents  cinquante  maifons  c enfu- 
mées, dans  une  étendue  de  feize  journaux  foixante-quatorze  cordes 
quarrées  de  terrein  j  ce  qui  faifoit  à  peu  près  le  cinquième  de  cette 
ville,  qui  contient  en  tout  quatre-vingt-huit    journaux  quarante- 
une  cordes  de  terrein  renfermé  entre  fes  murs.  Cette  grande  quan- 
tité de  maifons  réduites  en  cendres   ne  fut  pas  regardée  comme 
la  plus  grande  perte  j  mais  ce  fut  celle  des  meubles,  de  l'argent 
monnoyé ,  &  autres.  Les  titres  de  la  plus  grande  partie  des  fa- 
milles de  la  province  ,  qui  fe  trouvoient  chez  les  Juges ,  Avocats , 
Procureurs,  &  Notaires,    furent  brûlés  prefque   fans  exception. 
Dans  ce  temps ,  les  rues ,    comme  on  vient  de  le  dire ,  étoient 
à         fort  étroites  ;  &  les  maifons  bâties  en  bois  étoient  fi  élevées  ,  que, 
les  rayons    du  foleil  ne    pouvant  pénétrer  dans  les   rues  ,  eHes 
étoient  toujours  fort  humides  &  très-fales.  La   Communauté  s'oc- 
cupant  de  la  reconftruftion  des  maifons  incendiées,  il  fut  dreffé 
deux  plans  par   le  Sieur   Robelin ,  Ingénieur.  Le   premier,  pour 
rélévation  des  façades  ;  &  le  fécond ,  pour  le  plan  &  la  coupe 
ordinaire  des  maifons ,  fur  deux  différentes  grandeurs.    Ces  plans 
furent  communiqués  à  la  Communauté  de  Ville ,  pour  y  faire  fes 
■  '  obfervations.  Préfentés  au  Confeil  du  Roi ,  ils  furent  agréés;  &, 
le   14  Juin   1723  ,  Sa  Majefté  ordonna   qu'ils  feroient  exécutés. 
L'Ordonnance  contient  neuf  articles,    i''.  Que  les  maifons  feront 
toutes  à  la   hauteur    marquée    dans  le  plan  des    façades  ;  mais 
qu'au  lieu  de  trois  étages  qui  y  font  deffinés ,  il  fera  libre  à  ceux 
qui  feront   bâtir  de  n'en  faire  que  deux,  excepté  néanmoins  fur 
les  places  publiques,  où  le  plan  doit  être  exécuté,  tant  pour  la 
hauteur  que  pour   la  diftribution  des  étages.   2^.  Que  ,   hors  les 
places    publiques  ,  il  fera   permis  de    faire    des   cours  à   porte 


R  E  N  99 

cochefe  fur  la  rue,  fans  obligation  d'obferver ,  à  cet  égard ,  la  façade 
marquée  fur  le  plan ,  au  lieu  de  laquelle  on  fuivra  celle  qui  fera 
propofée  par  l'Ingénieur ,  &  approuvée  par  le  Commiffaire  dé- 
parti. 3°.  Que  les  maifons  feront  bâties  de  pierres  de  taille  juf- 
qu'au  premier  étage ,  &  percées  en  arcades  ,  ainfi  qu'il  eft  mar- 
qué fur.  le  plan.  4^.  Qu'il  fera  libre  de  faire  des  caves  à  l'ordi- 
naire, ou  de  les  coûter,  ainfi  qu'il  fera  jugé  à  propos  par  celui 
qui  fera  bâtir.  5^.  Qu'on  ne  fera  point  de  conduits  publics  pour 
les  maifons  à  rebâtir ,  mais  des  fofTes  d'aifance  dans  chacune 
fauf  à  employer  les  moyens  convenables  pour  remédier  à  l'in- 
commodité que  les  maifons  qui  fubfiiî:ent  actuellement  pourroient 
recevoir  de  la  fuppreffion  des  anciens  conduits.  6^.  Qu'il  fera  libre 
à  ceux  qui  bâtiront  de  faire  les  murs  d'entre-fonds  de  leurs  mai- 
fons ,  foit  de  pierres  ,  de  brique ,  de  bois ,  ou  autrement  ,  ainfi 
qu'ils  aviferont  j  bien  entendu  néanmoins  que  ,  s'ils  y  adoffent  des 
cheminées  ,  ils  feront  obligés  de  faire  les  murs  de  pierres,  "j^.  Que 
la  couverture  des  maifons  fera  faite  à  la  manfarde.  8°.  Que  les 
particuliers  &  Communautés  qui  feront  bâtir  feront  obligés  de  fe 
conformer  aux  ufages  prefcrits  par  les  anciens  règlements  ,  à 
peine  de  démolition  ou  telle  autre  peine  infligée  par  le  Commif- 
faire départi.  9^.  Que  les  plans  drelTés  par  le  Sieur  RobeHn ,  & 
vifés  par  le  Commiffaire  départi  ,  feront  dépofés  à  l'Hôtel  de 
.Ville  ,  avec  l'expédition  en  forme  dudit  Arrêt ,  pour  y  avoir  re- 
cours dans  le  befoin.  Enjoint,  Sa  Majefté  ,  au  Commiffaire  dé- 
parti de  tenir  la  main  à  l'exécution  du  préfent  Arrêt ,  qui  fera 
exécuté,  nonobstant  oppofîtion  ou  autre  empêchement  quelconque. 

Le  9  Mai  1724,  le  Confeil  donna  un  autre  Arrêt ,  concernant 
les  biens  incendiés  appartenant  à  l'EgHfe  :  il  porte,  que  les  ter- 
reins  eccléfiafliques  délîgnés  dans  le  plan  pour  le  rétabliffement  de 
la  ville  de  Rennes ,  feront  vendus  &  adjugés  avec  les  autres  ter- 
reins  compris  dans  l'emplacement  où  ils  font  fitués  ,  tout  ainfi  & 
de  la  même  manière  que  les  terreins  appartenant  aux  Laïques 
doivent  l'être ,  aux  termes  de  l'Arrêt  du  Confeil.  Ces  terreins 
n' étoient  vendus  qu'après  que  les  propriétaires  avoient  déclaré  ne 
vouloir  ou  ne  pouvoir  rebâtir ,  pour  fe  conformer  au  plan ,  afin 
de  ne  pas  laiffer  la  Ville  à  moitié  bâtie  dans  fon  intérieur  ,  ce  qui 
auroit  paru    ridicule. 

Philippe  Néricaut  des  Touches,  né  à  Rennes,  ci-devant  chargé 
des  affaires  de  France  à  la  Cour  d'Angleterre ,  fut  reçu  à  l'Aca- 
démie des  Belles-Lettres,  le  25  Août  1724.  Le  29  Avril  1725, 
le  Confeil  d'Etat  avoit  approuvé  ,  par  fon  Arrêt ,  les  changements 


ïoo  R  E  N 

faits  par  le  Sieur  Gabriel  aux  plans  drefTés  pour  la  conftruârioîî 
de  la  ville  de  Rennes.  On  avoit  projette  de  bâtir  cinq  ponts 
fur  la  Vilaine,  qui  traverfe  la  ville,  afin  de  faciliter  les  commu- 
nications. Sa  Majefté  les  réduifit  à  trois  ,  qui  font ,  le  pont  de 
riflette ,  le  Pont-Neuf,  &  le  pont  Saint-Germain ,  qui  parurent 
fuffifants.  Les  obfervations  &  changements  du  Sieur  Gabriel  font 
fort  étendus  ;  &  c'efl  la  raifon  qui  m'empêche  de  les  inférer  ici  : 
je  dirai  feulement  que  le  Roi  nomma  le  Sieur  le  Moufleux  ,  Archi- 
tefte ,  Ingénieur  en  Chef,  aux  appointements  de  quatre  mille 
livres  par  an  ,  &  le  Sieur  Huguet ,  Sous-Ingénieur ,  pour  veiller 
à  l'exécution  des  projets  du  Sieur  Gabriel.  Les  Etats  ,  voulant 
contribuer  au  rétabliflement  de  la  ville  de  Rennes,  donnèrent, 
le  II'  Décembre  172.4,  une  fomme  de  trois  cents  mille  livres, 
qu'ils  deftinerent  à  cet  objet.  Un  Arrêt  du  Confeil ,  du  3  Août 
1725  ,  approuva  cette  délibération.  La  Communauté  de  Ville 
avoit  fupplié  Sa  Majefté  d'ordonner  que  cette  fomme  fût  employée, 
i^.  au  rétabHlTement  de  l'horloge  publique.  1^.  A  la  réparation 
des  Fontaines.  3  °.  A  rendre  la  rivière  de  Vilaine  navigable  pen- 
dant toute  l'année ,  au  moins  depuis  Rennes  jufqu  à  Meffac  ,  dans 
une  longueur  de  huit  lieues.  4*^.  A  la  conftruftion  d'un  nouvel 
hôtel  pour  le  logement  du  Lieutenant  général  au  Gouvernement 
de  Bretagne ,  au  Heu  où  étoit  l'ancien  hôtel  détruit  par  l'incendie. 
Les  habitants  de  la  Paroiffe  de  Saint-Sauveur  de  Rennes  préfen- 
terent  aufli  leur  requête  au  Roi ,  pour  obtenir  quelques  fecours  > 
fur  la  fomme  de  trois  cents  mille  livres ,  pour  le  rétablifTement 
de  leur  Eglife  paroiffiale ,  qui  avoit  été  en  partie  détruite  par  l'in- 
cendie. Le  Roi  déclara  fes  intentions  fur  l'emploi  &  la  deftina- 
tion  de  cette  fomme  de  trois  cents  mille  livres.  Il  ordonna  qu'il 
feroit  prélevé  une  fomme  de  vingt  mille  livres  pour  le  rétablif- 
fement  de  la  Cathédrale,  &  que  le  furplus  feroit  employé,  i^.  au 
dédommagement  du  Sieur  du  Crevi ,  pour  les  terreins  &  ma- 
tériaux de  fa  maifon  iife  dans  la  partie  incendiée  ,  laquelle 
maifon  devoir  être  démolie  pour  exécuter  les  plans  projettes  5  dé- 
dommagement que  Sa  Majeflé  avoit  évalué  à  vingt  mille  livres, 
2^.  A  la  dépenfe  jugée  néceffaire  pour  le  rétabhffement  de  la 
façade  &  de  la  place  du  Palais ,  qui  devoit  être  baiflée  de  plu- 
fieurs  pieds  pour  en  adoucir  la  pente  ,  &  pour  l'indemnité  des 
Religieux  Cordeliers  qui  ont  deux  boutiques  fous  le  perron  du 
Palais,  qui  doit  être  démoli.  3°.  A  la  conftru6lion  des  conduits 
publics  de  la  ville ,  ordonnée  par  l'article  1 4  de  l'Arrêt  du  Con- 
feil du  29   Avril ,  Se   des  Fomaines  d'eau  potable  ,   qui  feront 


R  E  N  ^  ^  loï 

jugées  néceflaîres  pour  la  commodité  Sc  l'utilité  publiques  des 
habitants  de  Rennes.  4°.  Aux  écluies  &  autres  ouvrages  nécef- 
faires  pour  rendre  la  rivière  de  Vilaine  navigable  ,  pendant 
toute  l'année,  au  moins  depuis  Rennes  juiqu'à  Meflac.  5°.  A  la 
réédification  de  l'horloge  publique.  6^.  A  la  conllruftion  de  l'hôtel 
du  Lieutenant  général  e\\  Bretagne ,  au  même  lieu  où  étoit  l'an- 
cien hôtel  détruit  par  l'incendie  ;  &  enfin ,  au  rétablifTement  de 
l'Eglife  paroifliale  de  Saint-Sauveur ,  jufqu'à  la  concurrence  de 
trois  mille  livres  feulement  ;  &  feront  les  fommes  néceflaires  à 
chacune  des  deftinations  ci-defTus ,  prifes  ,  par  préférence  les 
unes  aux  autres  ,  fuivant  l'ordre  &  rang  dans  lefquels  elles  font 
ordonnées.  Enjoint,  Sa  Majeité  ,  au  Commilîaire  départi  pour 
l'exécution  de  fes  ordres  en  la  province  de  Bretagne,  de  faire 
exécuter  le  préfent  Arrêt.  Fait  au  Confeil  d'Etat ,  à  Chantilly , 
le  3  Août  1725.  Cet  Arrêt  fut  fuivi  d'un  autre  donné  à  Fon- 
tainebleau, le  16  Novembre  1727,  portant  fixation  du  prix  des 
bois  &  chantiers  publics  de  la  ville  de  Rennes.  Le  Roi  avoit 
accordé  mille  arpents  de  bois ,  à  prendre  dans  les  forêts  de 
Rennes  &  du  Gavre  ,  pour  le  rétabUffement  de  la  Ville.  Les  dé- 
bris de  la  tour  de  l'horloge,  avec  les  efcaliers  &  leurs  empla- 
cements, furent  vendus,  le  28  Avril  1729,  à  MM.  Defclos  Se 
Boishamon ,  au  profit  de  la  Communauté  de  Ville ,  qui  en  retira 
une  fomme  de  cinq  mille  fix  cents  livres.  La  Chapelle  de  Saint- James 
fut  rebâtie  à  neuf,  l'an  173  i  ,  par  M.   de  Cucé. 

La  première  pierre  de  l'Hôtel  de  Ville  ,  où  eflla  grolTe  horloge,  ^ 
futpofée  en  1742,  avec  cette  infcription  :  «  Ce  jour  jeudi,  pre- 
»  mier  Février  1742,  cette  première  pierre  a  été  pofée  par 
>♦  Haut  &  Puiflant  Seigneur  Meiîire  Antoine-Arnaud  de  la  Briffe, 
»  Chevalier ,  Seigneur  d'Amilly  ,  Confeiller  du  Roi  en  tous  fes 
»  Confeils ,  Maître  des  Requêtes  ordinaire  de  fon  Hôtel  ,  Pre- 
»  mier  Préfident  du  Parlement  de  Bretagne.  »  La  promenade 
des  Champs-EUfées  fut  plantée  au  mois  de  Janvier  1744,  auprès 
du  Mail ,  autre  promenade  publique  qui  a  trois  cents  foixante- 
douze  toifes  de  longueur  ,  avec  quatre  rangs  d'arbres  ,  de 
chacun  cent  quatre-vmgt-fept  :  ce  qui  fait ,  pour  les  quatre 
rangs  ,  fept  cents  quarante-huit  arbres  ;  mais  il  en  manque  plulieurs. 

L'Hôtel  des  Gentilshommes  fut  établi ,  à  Rennes ,  par  lettres- 
patentes  de  1748  &  1749-  Ces  lettres  renferment  des  ftatuts  & 
des  règlements  pour  cet  Hôtel.  En  1752  ,  le  Roi  donna  de  nou- 
velles lettres-patentes  pour  la  réunion  de  quelques  maifons  à  cet 
Hôtel.  En  1746 ,  on  avoit  fait  un  Mémoire  pour  l'établiffement 


loz  REN    _ 

de  cette  Maifon ,  en  faveur  des  Gentilshommes  dénués  de  for* 
tune.  On  commença  par  faire  des  fondations  de  brevets.  Ces 
brevets  font  des  places  fondées ,  dont  les  fondateurs  ont  pu  fe 
réferver  la  nomination  ,  &  la  lailîer ,  après  eux  ,  à  ceux  qu'ils  ont 
voulu  choifir.  Elles  font  chacune  de  trois  cents  livres  de  rente , 
qui  pouvoient  être  données  en  argent  ou  biens-fonds ,  ou  être 
hypothéquées  fur  telle  terre  ou  eiiets  fûrs  qu'on  vouloit  affigner.. 
Le  fécond  étoit  la  réunion  des  dénéfices  fimples  à  cet  établiffe- 
ment.  Les  préfentateurs  pouvoient  aulîi  fe  réferver  la  nomination 
aux  brevets  fondés  du  revenu  de  ces  Bénéfices.  La  chanté ,  tou- 
jours ingénieufe  ,  infpira  aux  perfonnes  bien  intentionnées  plufieurs 
autres  moyens  d'aflurer  &  d'augmenter  cette  belle  enîreprife* 
On  nomma  ,  par  chaque  diocefe  ,  deux  Gentilshommes ,  auxquels 
on  pouvoit  s'adrelTer  pour  ce  qui  concerne  rétabliffement  en 
queftion.  Ils  recevoient  les  différents  dons  qu'on  vouloit  faire  re- 
mettre à  cette  Maifon  -,  & ,  comme  tout  le  monde  n'étoit  pas  en 
état  de  fonder  des  brevets ,  chacun  avoit  la  facilité  de  donner , 
félon  fes  facultés ,  une  fomme  plus  ou  moins  grande.  Sur  le  re- 
venu de  trois  cents  livres ,  on  devoit  retenir  le  brevetaire  pen- 
dant toute  l'année  ,  &  le  faire  jouir  de  tous  les  avantages  de 
la  Maifon,  où  il  demeuroit  jufqu'à  ce  qu'il  fût  libre  de  prendre 
lui-même  un  parti.  L'âge  de  réception  eft  depuis  fept  jufqu'à 
douze  ans.  On  exige  que  les  jeunes  récipiendaires  n'aient  pas 
de  maladies  contagieufes  ,  ni  reçu  de  la  nature  certaines  dif- 
graces  qui  puiffent  les  empêcher  de  prendre  parti  dans  les  armes 
ou  dans  l'Eglife.  L'objet  de  cet  étabUflement  étant  l'éducation 
de  la  feule  pauvre  Nobleffe,  la  .loi  fondamentale  eft  qu'on  ne 
doit  y  recevoir  aucun  enfant  qui  ne  foit  noble  &  pauvre  ,  & 
conféquemment  aucun  penfionnaire ,  fous  quelque  prétexte  que 
ce  foit.  La  pauvreté  fe  prouvera  par  trois  atteftations ,  i  °.  de 
l'Evêque  du  diocefe ,  & ,  en  fon  abfence  ,  du  premier  Grand- 
Vicaire  j  2°.  &  3°.  des  deux  Gentilshommes  ci-defTus.  On  en- 
tend par  pauvreté  ,  une  Situation  de  fortune  qui  met  hors 
d'état  de  payer  la  penfîon  d'un  enfant  au  Collège ,  pour  y  faire 
fes  études.  Quant  à  la  nobleffe  ,  il  faut  qu'elle  foit  prouvée  par  les 
anciennes  réformations ,  ou  au  moins  par  celle  de  1 668.  Les  ré- 
cipiendaires font  préfentés  par  une  perfonne  établie  à  Rennes, 
&  connue ,  pour  y  avoir  recours  au  befoin.  On  travaille  princi- 
palement à  les  former  à  la  reHgion  &  à  la  piété ,  &  à  leur 
infpirer  des  fentiments  d'honnête  homme.  Pour  cela  ,  on  met 
en  ufage   les  règlements    des  penfîons  les   mieux  dirigées.  Dès 


R  E  N  loj 

qu'ils  font  capables  de  Sixième ,  ils  vont  étudier  au  Collège  de 
la  Ville.  Aux  études  ordinaires ,  on  joint  ce  qui  peut  concourir 
à  leur  donner  une  éducation  digne  de  leur  naiflance ,  comme 
l'Hiftoire ,  le  Blafon ,  le  DefTein ,  la  Géographie ,  les  Fortifica- 
tions ,  &  la  Navigation.  On  leur  donne  à  tous  des  Maîtres  de 
Danfe ,  &  ,  à  ceux  qui  f'e  deflinent  au  monde  ,  des  Maîtres 
d'Armes.  Pour  éviter  les  méfintelligences  que  pourroit  occafionner 
la  jaloufie  entre  ces  jeunes  gens  ,  ils  font  tous  également  vêtus 
&  nourris.  Les  Laïques  ont  un  habit  blanc  complet  avec  un 
bouton  de  cuivre  doré  -,  &  les  Eccléiîafliques  font  habillés  de 
noir.  Aucun  ne  fort  de  la  Maifon  fans  être  accompagné  d'un 
Maître  ou  fuivi  d'un  domeftique.  Quand  ils  ont  fini  leurs  exer- 
cices &  leurs  clafles,  on  fait  fon  pofîible  pour  rendre  le  bien- 
fait complet ,  en  leur  donnant  la  fomme  dont  ils  ont  befoin  pour 
embrafler  l'état  dont  ils  ont  fait  choix.  Le  gouvernement  de  la 
Maifon  eft  confié  à  un  Supérieur  Principal ,  noble  de  naiffance,  qui 
peut  prendre  un  fécond  &:  un  troifieme ,  s'il  ell  néceifaire,  fur 
lefquels  il  puifle  fe  décharger  d'une  partie  des  exercices  de  la 
maifon  &  -du  temporel.  Il  prend  auiîi  des  Maîtres  &  des  do- 
meftiques  fuivant  le  befoin.  L'Affemblée  ou  le  Confeil  décide,  à 
la  pluralité  des  voix,  de  la  réception  des  fujets  ;  on  examine  les 
titres  de  nobleffe ,  les  preuves  de  pauvreté  ,  &  autres  conditions 
requifes.  Le  Confeil  efl:  compofé  de  TEvêque  de  Rennes ,  &  ,  en 
fon  abfence  ,  de  fon  prem.ier  Grand- Vicaire;  de  deux  Gentils- 
hommes connus  dans  la  province  ;  &  du  Supérieur  Principal.  Tous 
les  papiers  concernant  l'établifTement ,  font  mis  en  dépôt  dans 
une  armoire  de  la  Maifon ,  afin  d'y  avoir  recours  dans  le  befoin  : 
l'Evêque  ,  celui  des  deux  Gentilshommes  le  plus  voifin  de  la 
ville ,  &  le  Principal ,  en  ont  chacun  une  clef.  On  a  cru  ne  pou- 
voir donner  de  nom  plus  convenable  à  cette  Maifon  que  celui 
d'Hôtel  des  Gentilshommes,  Lors  de  fon  établiffement ,  il  y  en 
avoit   douze. 

L'an  1 749  ,  M.  le  Duc  &  Madame  la  DuchefTe  de  Penthievre 
donnèrent  leurs  portraits  à  la  ville  de  Rennes.  La  ftatue  pé- 
deftre  du  Roi  Louis  XV ,  avec  les  figures  de  la  Bretagne  & 
de  la  Santé ,  en  bronze ,  de  la  fculpture  du  Sieur  le  Moine ,  fut 
pofée  fur  la  Place  Royale ,  à  Rennes  ,  pendant  les  Etats  aflem- 
blés  en  cette  ville,  l'an  1754.  Cette  aiiemblée  gratifia  cet  Ar- 
tifte  d'une  fomme  de  cinquante  mille  livres,  dont  elle  lui  fit 
préfent.  Arrêt  du  Confeil  du  premier  Oftobre  1754,  ^  lettres- 
patentes  du  5  Novembre  fuivant ,  qui  permettent  à  la  Communauté 


104  R  E  N 

de  Ville  d'emprunter  une  fomme  de  trois  cents  mille  livres.  Pendant 
les  Etats  affemblés  à  Rennes  en  1757,  les  Evêques  de  la  pro- 
vince inflituerent  la  fête  des  Anges  Gardiens  du  Roi  &  du 
Royaume  ,  en  avions  de  grâces  de  ce  que  Dieu  avoit  confervé 
Louis  XV  de  l'horrible  attentat  du  nommé  François -Robert 
Damiens, 

Auguflin-Marie  Duparc  Poullain ,  Avocat  au  Parlement ,  mar- 
cTiant  fur  les  traces  de  fon  père ,  qui  pafla  pour  un  des  plus 
fçavants  Jurifconfultes  du  Royaume,  étudia,  dès  fa  jeunefTe,. 
nos  Coutumes  &  nos  Loix.  Ses  mœurs ,  fes  connoifîances  ,  fon 
mérite  lui  acquirent  de  bonne  heure  l'eftime  de  fes  concitoyens  ^ 
il  la  méritoit,  &  il  l'a  prouvé  :  il  a  donné  au  Public  un  Ou- 
vrage immenfe ,  fruit  d'un  travail  afTidu  pendant  plus  de  vingt 
ans ,  fur  la  Coutume  ,  les  Ordonnances ,  &  le  Droit  Public»  La 
reconnoiflance  publique  a  payé  fon  zèle  j  la  gloire  a  couronné 
fes  talents  j  &  le  Roi  récompenfa  fes  travaux  ,  en  lui  accordant ,, 
en   1763  ,  des  lettres  de  nobleffe. 

Les  Dames  Budes ,  de  Rennes ,  cédèrent  leurs  maifon  &  terrein 
à  la  Communauté  de  Ville ,  &  tranfporterent  leur  demeure  au  faux- 
bourg  de  Saint-Helier ,  en  1768.  Le  Roi  donna  des  lettres-patentes, 
portant  permàffion  à  la  Ville ,  de  vendre  les  terreins  &  bâtiments 
acquis  des  Dames  Budes.  Le  3  Mai  1770,  la  Cour  de  Parlement 
rendit  un  Arrêt ,  portant  qu'il  feroit  fait ,  en  fon  nom ,  un  em- 
prunt de  la  fomme  de  quatre-vingt-dix  mille  livres  ,  pour  être  em- 
ployée en  achat  de  bled  venant  de  l'étranger,  que  l'on  vendroit 
dans  les  lieux  où  la  difette  fe  faifoit  fentir  plus  vivement.  Il 
permit  aux  Généraux  des  ParoifTes  de  prendre  dans  leurs  coffres 
l'argent  néceffaire  pour  acheter  du  bled ,  du  pain ,  du  riz ,  & 
autres  comeftibles ,  à  diftribuer  aux  pauvres.  Au  mois  de  Septembre 
1771  ,  le  Roi  donna  un  Edit,  portant  fuppreffion  &  rembourfe- 
fnent  d'Offices  dans  le  Parlement  de  Bretagne  ;  Edit  qui  fut  fuivi 
d'un  autre ,  portant  création  d'Offices  dans  cette  même  Cour.  Le 
Roi  Louis  XVI  a  rétabli  dans  leurs  charges  les  Magiftrats  dé- 
poffédés. 

Les  Etats ,  toujours  occupés  du  bonheur  de  leurs  concitoyens ,, 
fondèrent ,  en  1 778  ,  un  Hôtel ,  à  Rennes ,  pour  un  certain 
nombre  de  jeunes  Demoifelles  de  condition  ,  qui  y  feront  re- 
çues ,  après  avoir  donné  des  preuves  de  nobleffe  ,  &  y  vivront 
fous  k  direftion  de  plufîeurs  Dames,  &  de  M.  l'Abbé  de  Ker- 
gus ,  Direfteur  de  l'Hôtel  des  Gentilshommes ,  dont  on  a  parlé 
en  l'année  de  fa  fondation. 

Après 


R  E  N  .105 

Après  avoir  parlé  des  différents  établiflements  faits  dans  la 
capitale  de  la  Bretagne  ,  qu'il  me  foit  permis  de  montrer  mon 
étonnement  de  ce  qu'une  aufli  grande  province  n'ait  point  encore 
formé  une  Académie  Royale  des  Sciences  1  II  y  en  a  dans  toutes 
celles  qui  nous  avoilinent.  La  Normandie  ,  la  Bourgogne, 
le  Languedoc  ,  ont  des  Académies  florifTantes ,  qui  y  opèrent  un 
accroilîément  remarquable  dans  les  Sciences  &  dans  les  Arts: 
ne  pourrions-nous  pas  nous  procurer  le  même  avantage  } 

Je  fçais  qu'un  particulier  de  la  ville  de  Nantes  a  propofé  d  y 
former  une  Société  des  Sciences  &  des  Ans,  Le  commerce  étendu 
qui  s  y  fait  efl:  propre  à  féconder  fes  vues  patriotiques  ;  mais 
les  circonftances  favoriferont-elles  fes  intentions  ?  Il  eft  à  fouhaiter 
que    tout  fe  prête  à   un  projet  aufli  noble. 

\]n  Officier  ,  dont  le  mérite  eft  connu,  M.  de  Pommereul , 
Capitaine  au  Corps  Royal  d'Artillerie  ,  Correfpondant  de 
l'Académie  Royale  de  Marine  ,  m'a  communiqué  un  projet  de 
règlement  (  a  )  pour  l'établiflement  d'une  Académie  Royale 


(  <j  )  «  Les  voluptés  du  patriote  font  de  faire 
il  le  bien ,  de  le  méditer,  de  le  vouloir  conf- 
ia tamment,  de  le  provoquer  fortement  de  la 
»>  part  des  autres ,  lorfqu'il  n'a  pas  le  crédit 
»)  ou  les  moyens  de  l'opérer  par  lui-même.  » 
Difc.  fur  le  Patrieiifme  ;  par  M.  Elie  de 
Beaumont. 

La  plus  grande  partie  des  provinces  de 
France  ,  à  l'imitation  de  la  capitale ,  ont 
formé  des  Sociétés  pour  le  maintien  &  l'en- 
couragement des  Sciences  &  des  Arts. 
Plufieurs  d'entr'elles  ,  beaucoup  moins 
vaftes  que  la  Bretagne ,  ont  tellement  re- 
connu l'utilité  de  ces  inftitutions  ,  qu'elles  ne 
fe  font  pas  bornées  à  en  avoir  une  feule. 
Pourquoi  la  Bretagne  ,  en  créant  chez  elle 
un  femblable  établiffement ,  n'y  ajouteroit- 
elle  pas  la  perfc6lion  dont  il  eft  fufceptible  , 
&  dont  il  manque  prefque  par  -  tout  ?  elle 
peut  même  ,  en  imitant ,  devenir  créatrice. 
Ceft  à  une  nation  qui  a  conferv'é  le  noble 
privilège  de  s'aflcmbler en  Corps,  pour  dif- 
cuter  les  droits  les  plus  chers ,  décider  fes 
intérêts  les  plus  précieux,  &  pourvoira  fes 
befoins  bien  reconnus  ;  c'eft  à  une  telle 
nation  qu'il  appartient  de  démontrer  qu'elle 
eft  à  la  fois  vigilante  ,  éclairée  ,  &  q.i'at- 
tentive  à  tout  ce  qui  peut  contribuer  à  fon 
bien  -  être  ou  à  fa  gloire ,  elle  ne  fçait  né- 
gliger aucuns  des  moyens  qui  tendent  à 
procurer  à  fes  concitoyens  une  plus  grands 

Tome  IV, 


fomme  de  connoiflances  &  de  bonheur. 
La  Bretagne  eut,  il  y  a  peu  d'années  ,  la 
fagelTe  de  former  une  Société  d'Agricul- 
ture, &  la  gloire  de  la  créer  la  pre- 
mière. Toute  la  France  ,  à  l'envi ,  s'em- 
prefTa  d'adopter  cette  heureufe  idée  ;  & 
l'on  ne  fçauroit  fe  diiTimuler  le  bien  que 
ces  Sociétés  ,  à  peine  naiffantes ,  ont  déjà 
procuré.  Ce  bien  eft  moins  encore  dans 
les  expériences  ,  dans  les  recherches ,  dans 
les  obfervations  utiles  qu'elles  ont  faites  & 
publiées,  que  dans  l'amour  qu'elles  ont  inf- 
piré  pour  le  féjour  de  la  campagne  ,  qu'elles 
apprennent  à  mieux  connoître  dans  le  goût 
de  l'agriculture  qu'elles  ont  communiqué 
aux  riches  propriétaires ,  feuls  en  état  de  faire 
des  eflais  en  grand.  Ce  goût  de  l'agricul- 
ture ,  le  premier  des  Arts  ,  fur  lequel  repo- 
fent  les  fondements  de  la  profpérité  des  na- 
tions ;  celui  de  l'hiftoire  naturelle  ,  aujour- 
d'hui fi  répandu  ,  femblent  avoir  réconci- 
lié les  Dieux  de  la  terre  avec  la  na- 
ture &c  les  champs.  Leur  féjour  s'embellit 
&  s'enrichit  de  leur  préfence  ;  &  ,  peut- 
être  ,  ces  goûts ,  réunis ,  feront  le  germe 
de  la  plus  heureufe  des  révolutions.  Peut- 
être  ,  on  leur  devTa  de  voir  renaître  les 
mœurs  &  l'antique  fimplicité  ;  peut-être  que 
notre  poftérité  ,  meilleure  que  nous  &  nos 
aïeux ,  n'ayant  ni  nos  vices  ni  leur  igno- 
rance ,  étonnera  le  monde ,  en  lui  offrant  le 

o 


io6  R  E  N 

DES  Sciences  ,  en  Bretagne.  Comme  ce  morceau  n'a  que 
quelques  rapports  avec  ce  que  j'ai  dit,  &  qu'il  n'eft  pas  de 
moi ,  je  l'ai  mis  ici  en  note. 


fpeflacle  d'une  génération  à  la  fois  inftruite 
&  vertueufe. 

Dans  des  temps  orageux ,  qu'on  doit  s'em- 
prefler  d'oublier  ,  la  Société  d'Agriculture , 
qui  avoit  honoré  la  Bretagne  ,  &  s'étoit 
elle-même  illuftrée  ,  participa  aux  malheurs 
qu'efluy erent  la  plupart  des  Corps ,  &  tomba 
dans  un  tel  état  de  langueur  &  d'inertie , 
que  fes  fondateurs  mêmes  crurent  devoir 
retirer  fes  fonds  devenus  inutiles.  Lorfqu'un  fi 
grand  nombre  de  Corps  fe  font  vus  détruire 
&  bientôt  après  régénérer ,  la  Société  d'Agri- 
culture feule  ne  pourroit-elle  relever  fa  tête 
du  milieu  de  tant  de  débris  ?  ne  pourroit- 
elle  efpérer  de  fe  voir  auflî  reffufciter  par 
ceux  dont  autrefois  ells  reçut  la  vie  ? 

Je  n'examinerai  point  fi  l'état  de  lan- 
gueur dans  lequel  elle  étolt  tombée,  n'eft 
pas  une  forte  de  léthargie  inhérente  à  fa 
nature  ,  &  fi  le  \'ice  conftitutionnel  de  n'a- 
voir qu'un  feul  but ,  un  feul  objet,  ne  l'ex- 
poferoit  pas  à  une  féconde  rechute  après 
Ion  rétabliflement.  Quoi  qu'on  en  pulffe  croi- 
laBretagne,  qui l'avoit  créée,  peut  per 


re 


feftionner  fofi  premier  ouvrage.  On  ne  fçau- 
roit  douter  que  le  nouvel  exemple  qu'elle  eft 
la  maîtrefle  de  donner  aux  nations  ,  ne  folt 
bientôt  fuivi  par  elles ,  &  n'excite  leur 
admiration  ,  &  leur  reconnoiflance  pour  un 
peuple,  qui,  enparoiffant  ne  s'occuper  que 
de  fes  propres  intérêts  ,  fçait  former  des  éta- 
bliflements  d'une  utilité  générale ,  &  leur 
donner  une  perfeiiion  capable  de  les  faire 
fervir   de  modèle. 

C'ell  ainfi  qu'en   fervant  fon   pays ,  on 
fert  l'humanité  entière.  Qui  pourroit  ,   en 
effet ,  ne  pas  fentir  le  bien  que  lui  ont  fait 
les  Académies ,  ces  affociations  de  fçavants , 
qui ,  depuis  deux  fiecles  ,  ont  répandu  l'éclat 
d'une  lumière  inconnue,perfa£tionné  tous  nos 
arts  ,  &  ajouté  à  toutes  nos  jouifTances  ?  Si^ 
l'homme  peut  vivre  des  jours  plus  heureux; 
fi  fes  lumières  ont  augmenté  les  degrés  de 
fa  civilifation  &  le  nombre  de  fes  plaifirs  ; 
fi  les  crimes  font  devenus  plus  rares ,  moins 
■atroces,  &  l'obéiffance  aux  loix  plus   en- 
tière ;   fi  les  gouvernements  mêmes  ,  forcés 
de  fuivre  la  direftion  des  lumières  répan- 
dues ,  &  la  pent«   irréfiftible  des  efprits  , 
ont  pam  s'occuper  davantage  du  fort  des 


hommes  :  ofonsle  dire ,  ces  heureux  effets  ne 
font  que  le  réfultat  des  grandes  révolutions 
qu'ont    produit  les  Sciences   &  les  Arts. 

Il  fut  un  temps  ,  fans    doute ,   où    leur 
utilité  dut  être  moins  grande  &  moins  (tn- 
tie.  Quand  des  inondations  de  Barbares  rava- 
gèrent la  France  ;  quand  on  s'occupa  d'en 
chafler  les  Anglais   qui  l'opprimoient  fous 
un  fceptre  de  fer  ;  quand ,  dans  nos  mal- 
heureufes  diffenfions   civiles  ,  il  fallut  l'em- 
pêcher de  fubirle   joug  Efpagnol  ;  l'art  le 
plus  néceflaire devint,  avec  raifon,  celai  de 
la   guerre.    Le   moment  de  s'occuper    des 
fciences  n'efl  point  celui  où  il  faut  repouf- 
fer la  force  qui  vient  vous  charger  de  fers. 
Mais  depuis  que  la  conftitution  de  l'Europe 
eft  devenue  telle  que  les  peuples,  &  fur- 
tout  en  France  ,  ne  s'apperçoivent  de  l'hor- 
rible fléau  de  la  guerre  que  par  l'accroifle- 
ment  des   contributions  ,  il  femble  que  la 
nécefîité    de    propager  les  lumières  fe  foit 
augmentée   :  les  peuples  n'éprouvant  plus 
de  grandes  révolutions ,  jouiffant  d'un  re- 
pos prefque  abfolu ,  &  ne  pouvant  guère 
être  heureux  ou  malheureux   que   par   les 
loix  de  l'adminiftration ,  leur  devoir ,  comme 
leur  premier  befoin,  eft   de  chercher  aies 
connoître   &  à  les  perfeâionner.  Si  les  im- 
pôts augmentent ,  il  faut ,  pour  ne  pas  tom- 
ber dans  la  mifere  ,    que  l'indurtrie    fuive 
leurs  progrès.  Comment  un  peupla  fera-t-il 
faire  ce  chemin  à  l'induftrie ,  fi ,  tout  entier 
occupé  de  pourvoir  aux  befoins  du  moment, 
il  n'eft  pas  aidé  des  fecours  ,  &  dirigé  par 
les  lumières  d'une  claffe  fupérieure  ,  qui  fait 
fa  gloire  &    fon  bonheur  de    veiller   aux 
fiens.  Cette   claffe  éclairée  doit  donc  s'oc- 
cuper effentiellement  des  moyens  d'accroî- 
tre fon  commerce  &  la  culture  de  fon  pays  ; 
ces   deux  branches    d'induftrie    auxquelles 
tiennent  &  dont  dépendent  tous  les  autres 
arts ,   fans  cependant    néghger  de   cultiver 
certaines  fciences  ,  qui ,  n'étant  pas  propre- 
ment deftinées    à  grofïlr    la  maffe    des  ri- 
cheffes  de  ce  peuple ,  tendent  d'une  autre 
manière   à    augmenter   fa  civilifation  ,  fes 
joulffances  ,  &  fa  félicité. 

On  auroit  pu  douter  autrefois  de  la  pofTibilité 
d'établir  une  Académie  en  Bretagne. En  effet, 
ce  n'étoit  que  de  loin  à  loin ,  &  dans  le  long 


REN 


107 


L'utilité   des  Académies  n'eft   point  équivoque  ;   je  peux    en 
donner  pour   preuve  le  dépériflement  fenfible  qui  s'eft  manifefté , 


éfpace  de  fix  cents  ans  ,  que  cette  province 
avoit produit ,  Abailard  ,  Baron,  le  Baud  , 
d'Argentré  ,  Duaren ,  du  Fail ,  le  brave  & 
fçavant  laNoUe  ,  le  célèbre  Duc  de  Rohan , 
&  Hai  du  Châtelet.  La  plupart  des  fça- 
vants  qui  leur  ont  fuccédé  font  morts  dans 
ce  fiecle  ;  mais  depuis  qu'elle  a  donné  ,  en 
même  temps  ,  un  Secrétaire  perpétuel  à 
l'Académie  Françaife  ,  un  Préfident  à  l'Aca- 
démie Royale  de  Pruffe  ,  un  Hiftoriographe 
à  la  France  ;  depuis  qu'elle  a  vu  naître  L)u- 
clos  ,  Maupertuis ,  Saint-Foix  ,  la  Mettrie  , 
le  Comte  de  Bréhand  de  Plélo ,  l'Abbé 
Trublet ,  la'  Croze  ,  le  Sage ,  Bouguer , 
le  Comte  de  la  Garaye  ,  BofFrand  ;  les 
Pères  Tornemine  ,  Bougeant ,  Hardouin, 
Pezron  :  quand  elle  voit  un  des  trônes  de 
la  Littérature  trançaife  dignement  occupé 
par  M.  l'Archevêque  de  Boisgeflin ,  & 
qu'elle  peut  encore  s'honorer  de  MM.  de 
la    Chalotais ,  Duparc  Poullain  ,    de  Ker- 

fuelen  ,  de  Keraho ,  Robinet ,  le  Comte 
e  la  Touraille  ,  le  Vicomte  de  Touilain , 
le  Chevalier  de  Catuelan,  de  la  Bedoyere, 
Ginguené,Bonami,Montaudouin,ie  Marquis 
de  Luker ,  Girard ,  l'Abbé  Ruffelet ,  l'Abbé 
Deric,  M.  Maréchal,  &c.  &c.  il  femble' 
qu'elle  doit  être  fûre  de  trouver  ,  parmi 
tes  feuls  enfants  ,  une  Société  de  gens 
de  lettres ,  qui  ,  diftingués  par  elle  & 
réunis  en  Corps ,  formeront  la  fouche  d'où 
doivent  fortir  des  rejettons  capables  d'il- 
hiftrer  à  la  fois  &  la  province  dont  les 
bienfaits  &  les  encouragements  leur  auront 
donné  naiflance ,  &  l'Académie  dont  les 
places  auront  été  le  but  &  le  prix  de  leurs 
travaux. 

On  propofe  donc ,  à  NofTeignein-s  les 
Etats  ,  de  créer  l'Académie  Royale  de  Bre- 
tagne; d'afligner,  pour  fes  dépenfesjun  fonds 
annuel  de  vingt-quatre  mille  livres  ;  de  lui 
faire  obtenir  du  Roi  des  lettres-patentes, 
&  de  défigner  l'hôtel  deftiné  à  fes  féances. 

Après  avoir  lu  avec  attention  les  régle- 
jnents  d'un  grand  nombre  d'Académies , 
voici  celui  qui  nous  a  fcmblé  le  plus  avan- 
tageux à  la  bonne  conftitution  de  l'Aca- 
démie Royale  de  Bretagne  :  le  Roi  &  les 
Etats  font  d'ailleurs  les  maîtres  de  l'adopter 
ou  de  le  modifier. 

L'Académie  Royale  de  Bretagne  aura 
pour  Protçdteurs  Nofleigneurs  les  Buts ,  6c 


fera  compofée  d'un  Vice-Protefteur ,  d'un 
Diredleur ,  de  deux  Secrétaires  perpétuels  , 
d'un  Tréfoner  ,  de  fix  Académiciens  hono- 
raires ,  de  quatorze  Académiciens  penfion- 
naires  ,  de  vingt  Académiciens  ordinaires, 
de  vingt  Affociés  hbres ,  &  d'un  nombre 
iUimité  de  Correfpondants  ;  en  tout ,  foixan- 
te-deux  Membres,  non  compris  les  Cor- 
refpondants. 

Le  Vice-Prote£teur  fera  éligible  au  choix 
de  l'Académie.  Le  Direfteur,  amovible, 
fe  tirera  au  fort  tous  les  trois  mois ,  &  ne 
pourra  être  pris  que  dans  la  clafle  des 
penfionnaires  ;  des  deux  Secrétaires  perpé- 
tuels ,  pris  dans  cette  même  clafle  ou  dans 
celle  des  Académiciens  ordinaires  ,  l'un, 
fera  pour  les  Sciences  &  Arts,  &  l'autre 
pour  les  Belles-Lettres.  Le  Tréforier  fera 
toujours  le  Tréforier  général  de  la  province» 
L'éleftion  d'un  Secrétaire  fera  vaquer  la 
place  qu'il  occupoit  dans  la  claffe  dont  il 
fera  tiré. 

Des    quatorze    Académiciens     penfion- 
naires ,  trois  feront  Géomètres ,  Agrono- 
mes ,  ou  Méchaniciens  ;  trois  Anatomifles  , 
Chymiftes ,  ou   Botanifles  ;    deux    Phyfi- 
ciens  ;    &  fix  feront  connus   par  des  Ou- 
vrages d'Hiftolre ,  de  Poéfie ,  de  Légifla- 
tion ,  d'Economie  rurale  ou  politique ,  ou 
de  Belles-Lettres.  Les  vingt  Académiciens 
ordinaires  feront  également  partagés  en  qua- 
tre claflesjde  même   efpece  que  celles  ci- 
defTus.  La   première    &.  la  féconde  feront 
compofées  de  quatre  Académiciens  chacune  ; 
la  troifieme  le  fera  de  trois  ;  &.  la  qua- 
trième de  neuf.  Les  Académiciens  penfion- 
naires &  ordinaires  feront  nés  Bretons ,  & 
ne  pourront  être  reçus  s'ils  ne  font  connus 
par  un  Ouvrage  imprimé,  qui  indique l'ef- 
pece  de  fcience  qu'ils  ont  cultivée  ,  &  dont 
le  fuccès  puifle  juftifier  le  choix  de  l'Aca- 
démie. Les  honoraires  feront  provinciaires 
ou  feulement  habitants  de  la  province ,  & 
recommandables    par  leur    goût   pour    les 
Lettres ,    &   par  leur    intelligence    connue 
dans  quelques   parties  des  Sciences  ou  des 
Arts.  Les    Aflbciés    libres  &  les   Corref- 
pondants feront  indifféremment   extra-pro- 
vinciaires  ou  Bretons.  Les  réguliers  feront 
admis   dans  la  feule  clafle  des   honoraires. 
Les  Académiciens  penfionnaires  feront  pris 
à  l'anciennctc  parmi  les  ordiioaires,  fuivant 


io8  R  E  N 

foit  dans  la  Littérature  foit  dans  les  Manufaftures  des  provinces 
où  l'amour  des  Lettres  a  éprouvé  un  relâchement  fenlible.  Mon 


l'ordre  de  leur  réception  &  l'efpece  de  la 
place  qui  fera  vacante  ;  c'eft-à-dire  ,  qu'un 
penfionnaire  de  la  première  ou  de  la  qua- 
trième clafTe  fera  remplacé  par  le  premier 
Académicien  ordinaire  de  la  première  ou 
quatrième  claffe  ,  afin  que  la  compofition  de 
l'Académie  puifTe  fe  maintenir  telle  que, 
fuivant  ce  plan ,  on  a  jugé  qu'elle  devoit 
être  pour  fe  rendre  également  utile  en  tout 
temps. 

Le  Vice-Protefteur  ,  le  Direfteur ,  les 
deux  Secrétaires  perpétuels ,  les  Académi- 
ciens honoraires  ,  penfionnaires  ,  &  ordi- 
naires ,  auront  feuls  voix  délibérative  dans 
les  élevions  &  les  affaires  concernant  l'Aca- 
démie. En  matière  de  fciences  &  pour  le 
jugement  des  prix  ,  les  AlTociés  libres  don- 
neront  leurs  voix. 

Les  Académiciens  honoraires ,  penfion- 
naires ,  &  ordinaires ,  &  les  Affociés  libres  , 
n'auront  point  de  rang  entr'eux  aux  féan- 
ces  de  l'Académie  :  chacun  fe  placera  fui- 
vant l'ordre  dans  lequel  il  fera  arrivé  à  la 
féance.  A  l'une  des  extrémités  de  la  ta- 
ble ,  feront  deux  fauteuils  deftinés ,  l'un  au 
Vice  -  Protecteur  ,  qui  ne  pourra  jamais 
être  occupé  que  par  lui  ;  l'autre  au  Di- 
refteur ,  que  lui  feul  aura  droit  de  prendre. 
A  l'extrémité  oppofée ,  feront  pareillement 
deux  fauteuils  femblables ,  qui  devront  être 
occupés   par  les  Secrétaires  perpétuels. 

Ceux  des  Membres  des  Etats  ,  dont  les 
connoifïànces  dans  le  Droit  Public  leur  au- 
ront fait  un  nom  dans  cette  illuftre  aflem- 
blée ,  n'auront  pas  befoin  d'autres  titres 
pour  être  éligibles  en  qualité  d'Académi- 
ciens. Ceux-là  feuls  feront  au  deffas  de  la 
loi  précédemment  énoncée ,  qui  veut  que 
nul  ne  puifTe  être  élu  fans  avoir. fait  un 
Ouvrage  imprimé ,  dont  le  fuccès  foit  ca- 
pable de  juftifier  l'éleftion  de  fon  auteur. 
C'eft  ,  fur-tout ,  à  l' Académie  Royale  de 
Bretagne  ,  que  les  lumières  des  Montmu- 
ran ,  des  Chevaliers  de  Guéri,  ne  peuvent 
manquer  d'être  utiles. 

L'Italie  ,  dont  la  France  n'a  fait  que  fui- 
vre  l'exemple  en  établiffement  des  Acadé- 
mies ,  n'a  pas  cru  devoir  en  interdire 
l'accès  aux  femmes.  L'Académie  des  Jeux 
Floraux  ,  à  Touloufe ,  les  Académies  de 
Lyon  ,  de  Rouen ,  &c.  ont  imité  en  cela 
liîalie.  L'exclufion  qu'on   leur   a   donnée 


ailleurs  ,  efl  un  refte  de  barbarie  gothique.' 
Des  femmes ,  juftement  célèbres  &  con- 
nues par  des  Ouvrages  imprimés  ,  pour- 
ront donc  être  admàfes  à  l'Académie  Royale 
de  Bretagne ,  mais  dans  la  feule  clafie  des 
Affociés  libres,  &  fans  pouvoir  y  avoir 
voix  délibérative. 

Les  différentes  clafTes  dans  lefquelles  on 
a  partagé  l'Académie  Royale  de  Bre- 
tagne ,  ayant  pour  objet  d'exciter  l'émula- 
tion &  le  travail,  ce  ne  fera  point  de 
droit  que  les  Affociés  libres  deviendront 
Académiciens  ordinaires.  L'Académie ,  lorf- 
qu'il  vaquera  une  de  ces  places  ,  choifira 
celui  des  Affociés  Hbres  qu'elle  jugera  le 
plus  en  état  de  la  rempUr  ,  ayant  tou- 
jours foin  de  ne  pas  changer ,  par  des 
choix  mal  faits ,  l'ordre  de  la  compofition 
de  fes  claffes.  Il  en  fera  de  même  des  Cor- 
refpondants  ,  qui  ne  pourront  devenir  Affo- 
ciés Hbres  que  par  le  choix  de  l'Académie. 
Nul  ne  pourra  folliciter  de  vive  voix  ,  ou 
par  écrit ,  fon  admiflîon  à  l'Académie.  De 
pareilles  démarches  ,  tendant  toujours  à 
forcer  la  Hberté  des  fuffrages  ,  feront  feules 
un  motif  d'exclufion  ;  mais  tous  ceux  qui  defl- 
reront  y  être  reçus  ,  feront  obligés  de  fe  faire 
infcrire  chez  l'un  des  Secrétaires  perpétuels  , 
&  de  lui  remettre  ,  en  même  temps,  les 
Ouvrages  imprimés  dont  ils  feront  les  au- 
teurs ,  &  en  vertu  defquels  ils  afpirent  à 
une  place  d'Académicien.  Ce  Secrétaire 
rendra  compte  au  Direfteur  de  leur  infcrip- 
tion ,  de  leur  defir  ,  &  préfentera  les  Ou- 
vrages qu'il  en  aura  reçus. 

Tous  les  Académiciens  auront  droit  de 
propofer  les  objets  fur  lefquels  l'Académie 
pourroit  avoir  à  délibérer.  Les  Secrétaires 
prendront  note  de  ces  propofitions  ,  qui  ne 
pourront  être  mifes  en  délibération  qu'à  la 
féance  fuivante.  Dans  l'intervalle  de  ces 
féances,les  Secrétaires  devront  prévenir  les 
Membres  de  l'Académie  réfidents ,  &  qui 
fe  feroient  trouvés  abfents  à  la  première 
féance ,  des  objets  fur  lefquels  on  devra 
délibérer  dans  la  fuivante. 

Ces  formes  duement  remplies ,  toutes  les 
délibérations  prifes  aux  deux  tiers  des  voix  , 
l'affemblée  étant  au  moins  compofée  de 
douze  Académiciens ,  non  compris  le  Di- 
refteur ,  feront  valides. 

Le  jour  des  élections  aux  places  vacantes 


R  E  N  109 

fentîment  trouvera  fûrement  des  critiques  ;  mais  il  n'y  aura  point 
de  gens  fenfés  qui  ne  foient  de  mon  avis ,   &  qui  ne  croient , 


fera  fixé  ,  un  mois  d'avance  ,  &  tous  les 
Académiciens  réfidant  en  Bretagne  devront 
en  être  prévenus  par  les  Secrétaires,  qui  leur 
écriront  dans  les  trois  ou  quatre  premiers 
jours  de  ce  mois,  afin  qu'ils  aient  le  temps  de 
fe  rendre  ,  s'il  eft  pofTible  ,  à  ces  impor- 
tantes convocations.  Les  Secrétaires  ,  quant 
au  travail  des  délibérations  &  convocations 
de  l'Académie  ,  le  feront  par  femeftre  ; 
quant  à  fa  correfpondance ,  leur  titre  indi- 
que fuffifamment  celle  dont  chacun  doit 
être  chargé. 

Pour  être  élu  Correfpondant  ,  Aflbcié 
libre  ,  Académicien  ordinaire ,  penfionnaire , 
honoraire ,  Secrétaire  perpétuel ,  Direfteur  , 
Vice-Prote£teur ,  il  faudra  réunir ,  par  la 
voie  du  fcrutin  ,  les  deux  tiers  des  fuffrages 
des  Membres  préfents  à  la  délibération ,  la 
convocation  ayant  été  faite  dans  la  forme 
prefcrite  ci-deffus.  Le  Directeur,  dans  tou- 
tes les  délibérations ,  recueillera  les  fuf- 
frages ,  &  annoncera  les  décifions  de  lAca- 
démie.  Les  différents  Afpirants  à  ces  places 
feront  propofés  par  le  Directeur  ,  d'après 
les  notes  que  lui  auront  remifes  les  Secré- 
taires ,  &  les  Ouvrages  des  impétrants  fe- 
ront tous  fur  le  bureau.  Quant  aux  charges 
ou  dignités  de  l'Académie ,  le  Direfteur 
fera  obligé  de  propofer  au  moins  trois  fu- 
jets  pour  chacune  ,  &  de  changer  fa  pro- 
portion ,  fi  l'un  des  trois  premiers  propofés 
ne  réunit  pas  au  fcrutin  les  deux  tiers  des 
voix. 

Lors  de  la  nomination  d'un  Académicien 
ordinaire  à  la  place  de  penfionnaire  ,  celui 
qui  l'obtiendra  pouvant  fe  trouver  trop  riche 
pour  avoir  befoin  de  la  penfion  attachée  à 
cette  place,  tous  ceux  qui  feront  appelles 
à  l'occuper  ,  feront  tenus  ,  lors  de  leur  élec- 
tion ,  de  déclarer  &  de  faire  porter  fur  les 
regiftres  de  l'Académie  ,  qu'ils  acceptent 
ladite  penfion  pour  en  jouir  ,  ou  qu'ils 
l'abandonnent  à  l'Académie  ;  mais  ,  dans 
ce  cas,  ils  refteront  les  maîtres  d'en  défi- 
gner  l'emploi,  foit  qu'ils  veuillent  qu'elle 
ferve  à  l'achat  des  ftatues  &  tableaux  dont 
il  fera  parlé ,  foit  qu'ils  la  deftinent  à  aug- 
menter les  fonds  de  la  bibliothèque  ,  ou 
des  cabinets  d'antiques  &  d'hifloire  natu- 
relle ,  ou  à  l'achat  d'inftruments  de  Phyfi- 
ffue  ,  ou  enfin  aux  émoluments  annuels 
Qun  nouveau   prix  ,   dont  ib  auroient  le 


droit  de    propofer   le  fujet   à    l'Académie. 

Pour  commencer  à  former  l'Académie, 
il  convient  que  les  Etats  nomment  les  deux 
premiers  Académiciens  honoraires ,  les  trois 
premiers  penfionnaires  ,  les  trois  premiers 
ordinaires.  Ces  huit  Académiciens,  aflem- 
blés  i  choihront  enfuite  fux  Académiciens 
penfionnaires.  Ces  quatorze  Académiciens 
nommeront  alors  le  Vice-Protefteur  ,  le 
Dire6teur ,  un  Secrétaire  ,  &.  formeront 
enfuite,  parleur  choix  fucceflif,  le  Corps 
complet  de  l'Académie  ,  qui  n'aura  de  fé- 
cond Secrétaire  que  lorfque  fes  Membres 
feront   au  nombre  de  trente. 

L'Académie  Royale  de  Bretagne  aura 
tous  les  ans  deux  grandes  féances  publiques  , 
au  jour  anniverfaire  de  la  délibération  des 
Etats  qui  l'auront  créée  ,  &  à  celui  de  l'ex- 
pédition des  lettres -patentes  du  Roi  qui 
l'auront   autorifée.    La   diflribution    de  (es 

Êrix  fe  fera  dans  ces  deux  grandes  féances. 
Ile  aura ,  en  outre ,  quatre  autres  féances 
publiques  ,  aux  anniverfaires  des  jours  de 
i'avénement  au  Trône  par  François  I ,  le 
reftaurateur  des  Lettres  ;  Louis  XII  & 
Henri  IV,  les  pères  de  la  patrie  ;&  Louis 
XIV,  le  protecteur  des  Sciences  ,  des  Arts , 
&  le  fondateur  des  Académies.  Dans  ces 
quatre  féances  ,  un  Orateur  de  fon  choix 
prononcera  l'éloge  de  l'un  de  ces  Monarques. 

Les  afTemblées  ordinaires  de  l'Académie 
fe  tiendront  tous  les  jeudis  de  chaque  fe- 
maine.  Si  une  fête  fe  rencontre  aux  jours 
fixés  pour  quelqu'une  de  fes  féances ,  elles' 
feront  renvoyées  au  premier  jour  ouvrable 
fuivant  ,  &  fe  tiendront  toujours  l'après- 
midi. 

L'Académie  aura  fes  vacances  pendant  la 
quinzaine  de  Pâques  ,  depuis  Noél  jufqu'aux 
Rois  ;  &  de  la  Nativité  à  la  Saint-Martin. 
Elle  fera  dire  ,  tous  les  ans ,  le  jour  de 
Saint-Louis,  une  Grand'Meffe  ,  à  laquelle 
elle  affiliera  en  Corps  ;  &.  un  Prédicateur  , 
nommé  par  elle  ,  prononcera ,  après  la 
Mefle ,  alternativement  par  année,  les  pa- 
négyriques de  Saint  Cnarlemagne  &  de 
Saint   Louis. 

Les  Etudiants  du  Collège  de  Rennes  ,' 
qui ,  dans  le  cours  de  l'année  précédente  , 
auront  remporté  les  premiers  prix ,  auront 
le  droit  d'affifter  à  toutes  les  féances  pu- 
bliques   de   l'Académie  ,  dans  des  places 


,10  I!^  EN 

comme    moi,  qu'une    Académie,    qui  ne  s'éloignera  point  des 
principes  de  fbn  inflitution  ,  dont  les  travaux  feront  continuelle- 


ou'elle  leur  afTignera.  Cette  faveur  fera  un 
nouveau  fujet  d'émulation  ,  ajouté  à  tous 
ceux  qu'on  doit  prodiguer  à  ces  jeunes 
fujets  qui  font  alors  l'elpérance  de  la  pa- 
trie ,  &  qui  peuvent  un  jour  faire  fa  gloire. 

L'Académie  publiera  tous  les  ans  trois 
recueils  féparés ,  fous  le  format  in-4°.  des 
Mémoires  faits  par  fes  Membres  ou  Cor- 
refpondants  ,  &  adoptés  par  elle  :  l'un ,  fous 
le  titre  à'Hijhirc  ,  Légijlaùon ,  Adminiftra- 
tion  ;  l'autre  ,  fous  le  titre  de  Sciences  &• 
Arts  ;  le  troifieme ,  fous  celui  de  Littéra- 
ture. Elle  fera  tous  les  ans  ,  fous  le  même 
format,  un  recueil  des  Ouvrages  qu'elle 
aura  couronnés  ;  &  ,  tous  les  deux  ans  , 
elle  ira  ,  en  Corps  ,  le  préfenter  aux  Etats  , 
lorfqu'ils  fe  tiendront  à  Rennes  ,  &  leur 
enverra  une  députation  ,  lorfqu'ils  feront 
aiiemblés  ailleurs ,  pour  leur  rendre  le  même 
hommage.  Le  Direfteur  ,  lors  de  cette 
cérémonie  ,  aura  le  privilège  de  pouvoir 
haranguer  les  Etats  ;  dans  fon  abfence  ,  le 
Chef  de  la  députation  jouira  de  la  même 
prérogative.  Le  Direfteur ,  ou  le  Chef  de  la 
députation ,  remettra  à  chacun  des  Préfidents 
des  trois  Ordres  des  Etats ,  un  exemplaire 
des  Ouvrages  couronnés  les  deux  années 
précédentes.  L'Académie  aura  foin  de  faire 
imprimer ,  toujours  fous  le  même  format , 
tous  les  Difcours  de  réception  de  fes  Mem- 
bres ,  lefquels  feront  aftreints ,  après  les 
compliments  d'ufage  ,  à  traiter  ,,  dans  ces 
Difcours,  un  fujet  de  leur  choix;  les  ré- 
ponfes  des  Direéeurs  à  ces  Difcours  ,  les 
harangues  prononcées  par  les  Députés  aux 
Etats  ,  &  les  éloges  funèbres  faits  par  l'un 
des  Secrétaires  perpétuels  à  la  mort  de 
chaque  Académicien.  Tous  les  Ouvrages, 
anunis  de  l'approbation  de  l'Acadéipie ,  & 
faits  par  un  de  fes  Membres,  pourront, 
fans  paffer  à  aucune  autre  cenfure ,  ctre  im- 
primés fous  le  privilège  fpécial  qu'à  cet 
effet  le  Roi  lui  accorde  par  cet  article. 

Tout  Breton  qui  aura  remporté  un  des 
prix  de  l'Académie ,  à  l'exception  de  celui 
de  Deffein,  fera  de  droit  Correfpondant 
de  l'Académie  ;  tout  Breton  qui  en  aura 
remporté  trois  ,  obtiendra  de  droit  la  pre- 
mière place  vacante  d'Aflbcié  libre. 

L'Académie  aura ,  dans  l'hôtel  deftiné  à 
fes  féances  ,  une  bibliothèque  publique  ,  qui 
fera  ouverte  trois  fois  la  femaine  i  §C  un 


cabinet  d'hiftoire  naturelle ,  qui  le  fera  le 
même  nombre  de  fois.  On  commencera 
par  raflembler  à  la  bibliothèque  tous  les 
Ouvrages  imprimés  ou  manufcrits  ,  relatifs 
à  l'Hiftoire  civile  ,  politique  ,  eccléfiaf- 
tique  ,  &  du  Commerce  de  Bretagne  , 
avant  d'en  acheter  d'une  autre  efpece^ 
Près  de  la  bibliothèque ,  fera  un  cabinet 
d'antiques  &  de  médailles  trouvées  en  Bre- 
tagne ,  ou  ayant  rapport  avec  l'hiftoire  de 
cette  province.  La  colleâion  du  cabinet 
d'hiftoire  naturelle  comprendra  d'abord 
celle  de  tous  les  végétaux  &  minéraux  de 
Bretagne  ,  fa  conchyliologie  ,  fes  oifeaux, 
animaux ,  &  poiflbns  defféchés  ou  empail- 
lés. On  raffemblera  dans  le  jardin  de  l'hô- 
tel de  l'Académie  toutes  les  plantes  de  la 
province ,  &  celles  enfuite  qui  pourroient 
en  faire   une  Ecole  de  Botanique. 

Le  Bibliothécaire  fera  en  même  temps 
garde  du  cabinet  d'antiques  ;  &  le  Natura- 
lise ,  chargé  du  cabinet  d'hiftoire  natu- 
relle ,  le  fera  aufli  du  jardin  de  Botanique. 
Choifis  parm.i  les  Académiciens  penfion- 
naires  &  ordinaires  ,  leurs  emplois  feront 
à  vie  ,  &  ils  devront  tous  les  deux  être 
logés ,  comme  les  Secrétaires  perpétuels , 
dans  l'hôtel  de   l'Académie. 

Les  économies  que  l'Académie  pourra 
faire  fur  fes  fonds  ,  &  les  bénéfices  réfultant 
de  la  vente  de  fes  recueils  ,  dont  fon  Im- 
primeur ,  nommé  par  elle ,  fera  obligé  de 
tenir  compte  à  1  un  des  Secrétaires  perpétuels, 
feront  employés  à  fe  procurer  les  portraits 
de  tous  les  Hommes  illullres  de  Bretagne, 
ou  à  faire  exécuter  en  marbre  leurs  buftes 
ou  ftatues ,  lefquels  feront  deftinés  à  orner 
les  falles  de  fon  hôtel ,  &  à  éternifer ,  par 
l'éclatant  homnwge  rendu  à  leurs  vertus  ou 
à  leurs  talents ,  la  mémoire  des  héros  ou 
fçavants  qui  auront  illuftré  leur  patrie.  Pour- 
quoi cette  apothéofe  civique  ne  feroit-elle  pas 
le  germe  fécond  qui  reproduiroit  &  rendroit 
à  la  Bretagne  les  grands  hommes  dont  elle 
n'auroit  voulu  ,  par  cette  glorieufe  inflitu- 
tion ,  que  perpétuer  le  fouvenir  ? 

L'Académie  jouira  du  privilège  exclufif 
de  publier  une  feuille  périodique  pour  la 
Bretagne  ,  qu'elle  fera  compofer  par  un  de 
fes  Membres  ,  &  dont  l'auteur  s'attachera , 
fur-tout,  à  remplir  les  objets  que  le  journal 
des  fçavants ,  les  obfervations  de  Phyfique, 


REN  m 

ment  dirigés  vers  le  plus  grand  bien   pour  les  hommes,  ne  foit 
une   Société    précieule  pour    la  province   qui   aura  le  bonheur 


le  journal  de  Jurifprudence  ,  &  les  bonne» 
feuilles  littéraires  le  font  efforcés  jufqu'ici 
de  remplir.  Le  produit  de  cette  feuille  fera 
employé  ,  foit  aux  dépenfes  ci-deflus  ,  foit  à 
l'augmentation  de  la  bibliothèque. 

L'Académie  s'occupera  principalement  de 
la  rédaftion  d'une  bonne  hiftoire  de  Bre- 
tagne, cherchera  tous  les  moyens  qui  ten- 
droient  à  améliorer  le  fol ,  augmenter  l'in- 
duftrie  ,  étendre  le  commerce  de  cette  pro- 
vince ;  cultivera  l'étude  de  fon  Droit  public 
&  particulier ,  toutes  les  autres  Sciences  ,  & 
les  Belles-Lettres  ,  qui  forment  le  but  ordi- 
naire des  autres  Académies.  Elle  fera ,  en 
français ,  les  infcriptions  de  tous  les  monu- 
ments publics  de  Bretagne ,  la  légende  des 
jetons  des  Etats ,  &c.  C'eft  ainli  qu'elle 
pourra  réunir  les  mérites  variés  des  Aca- 
démies des  Sciences  ,  des  Infcriptions  , 
Belles  -  Lettres  ,  6c  Arts  ,  des  Sociétés 
d'agriculture  ,  de  commerce  ,  &  d'ému- 
lation. 

Le  fujet  du  prix  d'Hiflolre  que  l'Acadé- 
mie diftribuera ,  fera  d'abord  ,  &  le  plus 
fouvent  que  faire  fe  pourra ,  tiré  de  l'hif- 
toire  de  Bretagne  ,  ou  du  moins  y  fera 
analogue.  Celui  d'Eloquence  fera  l'éloge  des 
Guerriers  ,  Magiftrats  ,  Eccléfiaftiques , 
Ecrivains,  ou  Artiftes,  dont  la  province 
peut  s'honorer.  Les  programmes  qu'elle  pu- 
bliera ,  détermineront  ,  au  refte,  le  fujet  des 
prix  de  Poéfie  ,  de  Mathématiques  ,  de 
Chymie  ,  de  Botanique  ,  d'Agriculture  ,  de 
Commerce. 

L'Ecole  gratuite  de  Defleln  ,  établie  à 
Rennes ,  expofera  les  defleins  de  fes  Ele- 
vés ,  à  un  jour  fixé ,  dans  une  des  falles 
de  l'hôtel  de  l'Académie.  Les  defleins  feront 
fignés  par  l'auteur  ,  &  certifiés  par  le  Pro- 
feiïeur  de  Defleln.  Cette  expoîitlon  fera 
publique,  &  durera  quinze  jours.  L'Aca- 
démie décernera  le  prix  de  Deffein  à  celui 
qui  aura  le  fuccès  le  plus  mérité. 

Voici  quel  fera  l'emploi  des  fonds  accor- 
dés à  l'Académie ,   &.  fes  dépenfes  : 

Prix  d'Hlftoire 300  1. 

— —  d'Eloquence 300 

de  Poéfie 300 

— —  de  Mathématiques 300 

Ci 1100  1. 


Ci- contre.  .  .     1200  1% 

Prix  de  Phyfique  ,  Chymie  ,  Sc 
Botanique  ,  alternative- 
ment        300 

d'Agriculture 300 

de  Commerce 300 

de  Defleln 300 

donné    au    meilleur    projet 

pour  la  province 30O 

Achats  pour  la  bibliothèque  ,  &  le 
cabinet  d'antiques 
&  médailles.  .    .  .     300O 

le  cabinet  d'hlftolre 

naturelle  &  jardin 
des  plantes.  .   .   .     2000 
Penfions  des  quatorze  Académi- 
ciens penfionnaires.  .     8400 
Traitements  des  deux  Secrétaires 

perpétuels.  .   .     .     2000 

— — du  Bibliothécaire.    .      1500 

du  Naturalifte.  ...     15  00 

Gages  du  Suifle  ,  logé  dans  l'hô- 
tel   .    .    .  .       ^03 

Pour  frais  de  Mefles ,  feu ,  bougie , 

&  meubles 1400 

d'imprefllon    des    Re- 
cueils, 5cc 1000 


Total 24000  1, 

Cette  fomme  ,  dans  fes  différentes  fubdî- 
vifions ,  feroit  comptée  à  l'Académie  fans 
aucune  retenue  de  la  part  du  Tréforier ,  & 
même  fans  l'acquit  des  droits  de  fac  &  de 
quittance.  Lorfqu'il  s'aglroit  du  paiement  des 
prix ,  le  Tréforier  le  délivrerolt  fur  un 
mandat  du  Direfteur,  fcellé  du  fceau  de 
l'Académie ,  dont  feroit  chargé  le  plus  an- 
cien Secrétaire.  Lorfqu'il  s'aglroit  des  autres 
fonds  ,  les  mandats,  toujours  fcellés  du  fceau 
de  l'Académie  ,  ferolent  fignés  par  le  Di- 
refteur,  les  deux  Secrétaires  ,  le  Biblio- 
thécaire ,  le  Naturalifl:e,  chacun  pour  fa 
partie.  LeSulffe  feroit  payé  fur  un  mandat 
du  Directeur.  Quant  à  l'acquit  des  pen- 
fions ,  la  quittance  de  chaque  penfionnalre 
fufliroit  à  la  comptabilité  du  Tréforier.  Les 
fonds  deflinés  à  la  bibliothèque  ,  ferolent 
remis  ,  par  le  Dlreéleur  ,  au  Bibliothécaire  ; 
&  ainfi  pour  ceux  deflinés  au  cabinet  d'an- 
tiques ,  a  celui  d'hiftoire  naturelle  ,  au  jardin 
des  plantes.  Les  fonds  uccenaires  aux  autres 


„i  REN 

de  la  pofféder.  Ces  affemblées  font ,  ordinairement  ,  compofées 
de  perlonnes  nées  dans  la  province  où  elles  fe  tiennent ,  ou  qui 
y  ont  fixé  leur  féjour  :  elles  ont  ,  par  conféquent ,  un  intérêt 
égal ,  à  augmenter  les  connoifTances  &  à  prodiguer  leurs  veilles 
pour  épurer  les  moeurs.  Ce  dernier  foin  n'eft  pas  le  moins  utile 
de  ceux  qu'on  doit  attendre  d'elles  :  les  effets  s'en  étendent , 
peu-à-peu ,  fur  les  claffes  des  citoyens ,  &  préparent  à  la  poftérité 
un  bonheur  dont  on  ne  connoît  le  prix  que  lorfqu'il  exifte. 

Je  laiffe  à  mes  lefteurs  le  plaifir  de  faire ,  fur  cette  note  ,  les 
réflexions  qu'elle  doit  faire  naître  dans  un  pays  où  régna  û  long- 
temps l'ignorance.  Il  efl  flatteur  pour  un  citoyen  de  contribuer 
aux  progrès  des  Sciences  &  des  Arts  ;  il  jouit ,  en  quelque  forte  ^ 
par  Tefpoir  des  établiflements  qui  procurent  leur  perfeftion., 
On  aura ,  fans  doute ,  de  la  reconnoiflance  pour  l'Officier  efti- 
mable  qui  a  conçu  ce  projet,  que  je  publie  de  fon  aveu. 


dépenfes  de  l'Académie ,  feroient  partagés 
éc^alement  entre  les  deux  Secrétaires  char- 
gés de  folder  ces  dépenfes._ 

Tous  les  ans  ,  ces  différents  Officiers 
rendroient  leur  compte,  le  même  joui-,  à 
l'Académie  ,  qui ,  fur  le  vu  de  leurs  quit- 
îlances  &  de  leurs  achats,  feroit  expédier 
au  Tréforier  une  quittance  générale  ,  fcellée 
du  fceau  de  l'Académie  ,  que  figneroient 
le   Direfteur  &  les  deux  Secrétaires. 

Nous  ofons  croire  qu'un  tel  établiffement 
mérite  d'être  fondé  par  les  Etats.  Si  des 
événements,  qu'il  ne  nous  eff  pas  permis 
de  prévoir  ,  amenoient  la  fuppreffion  de 
quelques  Maifons  Rehgieufes  dans  la  ville 
de  Rennes  ,  ne  pourroient-ils  pas  obtenir 
du  Roi  que  leurs  bâtiments  fuffent  méta- 
morphofés  en  ce  mufcEum  que  la  province 
auroit  confacré  à  l'utilité  publique  ,  à  l'en- 
couragement des  Sciences  &  Arts  ,  à  l'em- 
belliffement  &  à  la  décoration  de  fa  ca- 
pitale ?  Quant  aux  moyens  d'affurer  le 
fonds  annuel  de  vingt-quatre  mille  livres 
à  l'Académie  Royale  de  Bretagne  ,  nous 
penfons  que  le  moins  onéreux  feroit  d'ob- 
tenir du  Roi ,  que  ce  paiement  annuel  de 
Tingt-quatre  miÛe  livres  fut  luie  des  con- 
ditions ajoutées  au  Bail  des  Fermes  de 
la  province  ,  qui  ,  pour  cette  modique 
rétribution ,  pour  cette  charge  de  plus , 
»e  rifqueroit  pas  de  voir  les  compagnies 
de  Financiers  diminuer  leurs  enchères ,  ou 
fe  montrer  moins  avides  de  les  obtenir. 
D'autres  citoyens,  plus  éclairés,  trouve- 


ront ,  fans  doute  ,  mille  autres  moyens  de 
fe  procurer  ces  vingt-quatre  mille  livres. 
Nous  avons  propofé  le  nô-tre ,  c'eft  à 
eux  à  faire  connoître  ceux  qu'il  faudroit 
préférer  à  celui  que  j'indique. 

Si  c'eft  une  forte  de  crime  envers  la 
patrie  que  de  ne  pas  divulguer  un  projet 
qui  lui  peut  être  utile  ,  la  pubUcité  que 
nous  donnons  aux  idées  que  nous  venons 
de  développer  ,  porte  avec  elle  fon  ex- 
cufe.  Le  bon  Abbé  de  Saint-Pierre ,  dom 
un  grand  Prince  nommoit  les  projets  les 
rêves  d'un  homme  de  bien  ,  mourut  fans 
avoir  la  fatisfaélion  de  les  voir  exé- 
cuter. Nous  jouilTons  aujourd'hui  du  fruit 
de  fes  heureufes  méditations ,  &  l'on  n'a  pas 
allez  remarqué  que  la  moitié  de  fes  idées 
s'eft  déjà  réalifée ,  fans  qu'on  ait  même, 
fongé  à  en  faire  honneur  à  fa  mémoire. 
11  y  auroit  trop  de  préfomption  3  fans 
doute  ,  à  croire  que  le  projet  que  nous 
venons  de  donner  aura  plus  de  fuecès  que 
ceux  de  cet  excellent  citoyen ,  &  nous 
fommes  très- éloignés  de  nous  bercer  de 
cette  chimère  ;  mais  le  fort  qu'ont  enfin 
eu  les  fiens,nous  avertit  afTez  qu'une  idée 
utile  n'eft  pas  toujours  perdue  ,  qu'il  faut 
la  femer  dans  le  Public  ,  qu'elle  y  germe 
plus  ou  moins  lentement ,  &  qu'enfan  elle 
îe  développe  &  porte  avec  elle  les  fruits 
qu'on  avoit  droit  d'en  attendre.  Faudroit-il 
donc  ne  jamais  confier  aucune  femence  a 
la  terre ,  parce  qu'on  n'eft  pas  toujours 
certain  de  rec\ieillir^ 

Tableau 


R  E  N 


IlOMS. 


Tableau   des   Gens  de 

KailTances.     Morts. 


1531. 

1509. 


1531. 
1579- 

Ï593- 


1142. 
II 17, 


1509. 
1550. 


XI  Siècle, 

Abailard.  IO79. 

Robert  d' A  rbriffelles. 

XII ,  XIII ,  xiy^ 

Siècles, 
Rien. 

XF  Siècle, 

Mefchlnot. 

Eginard-Baron,  ^495' 

Lebaud. 

xri  Siècle, 

Cartier ,    vivoit    ea 

Le  P.  CheflTontaînes, 

Jéiuite ,  &  enfulte 

Archevêque. 
Bertrand  d'Argentré. 
Duaren. 
Du  Fail ,  vivoit    en 

1550. 
LaNoiie,  bras  de  fer. 
Le    Duc  de  Rohan. 
Hai  du  Châtelet. 

XVII  Siècle, 

Le  P.  André  ,  léfuite.  1673.     ^7^4 

Le    Père  Bagot  ,  Jéf.  1764 

L' Abb.de  Beilegarde.  1648.     1734 

Pelordeau. 

L'A b.  Hois- Morand.  1680.      1740 

Boffrand.  1667.     ^754 

Le  Père    Bougeant  , 

Jéluite.  1690.      1743 

Bouguer.  1698.      1754 
Le  P.  du  Cambout  , 

Jëfuite.  1634.      1690 

Charnacé.  1^37 

D'Argenrré  ,   Evéq.  1673.      1740 

M''^-  Deicartes.  1706 
Frairt. 

Le  f.  deCenne<;,Jér.  1687.     1748. 

Tome    IV„ 


595- 
590. 

559- 


591. 
638. 
636. 


Le  P.   Baudori,  Jëf. 

Le  P.  Beauvais ,  Jél. 

Bertrand. 

L'Ab.  de  la  Rletterle. 

Le  Com.  deBréhant 

de  Plélo. 
Corvaifier. 
Desforges  -  Maillard. 


1684. 
1677. 
1666. 
1698. 
i6)0. 


Lettres  de  la    Bretagne, 

Noms.  Naiffances. 

Le     Comte    de    la 

Garaye. 
Du  Gué  -  Trouin. 
Le  Père  Hardouin  , 

Jéfuite. 
Hévin. 
La  Roque. 
Le    Père  la  Santé  , 

Jéfuite. 
Le  Sage. 
Dom  Loblneau. 
Maupertuis. 
Menard. 
Montplaifir  ,   vivoit 

en  1650. 
Dom  Morice. 
Le    Père     Nepveu  , 

Jéfuite. 
L'Abbé  Noulleau, 
Le  Pays. 
Perchambault. 
Le  P.  Pezron  ,  Ora- 

torien. 
Le  Card.  de  Rohan. 
La   Princ.  Eléonore 

de  Rohan. 
Le  P.  de  Saint-Luc. 
Sauvageau. 
Le    P.   Tornemine  > 

Jéfuite. 
L'Abbé  Trublet. 
L'Abbé  Vauge. 
LeP.  Vlfddou,  Jéf. 

6>c   Archevêque. 

XVIII  Siècle, 


1639. 

1604. 
1636. 


1639. 
i6z8. 


1661. 
1697. 


1710. 
1693. 
1701. 
1696. 


1719. 
1699. 

p 


iij 


Morts, 


1673. 

1735. 

1646. 

1729. 

I66I. 

I73I. 

1763; 

»747- 

1747- 

1759- 
1717. 


1^93.  1750. 


I  (372; 
1690. 


170^. 
1681. 


1674.  1749. 


1739- 
1770. 

Ï739' 


1656.  1737. 


1749. 
1770. 
175X. 
1772. 

1734- 

1758. 

1768. 


114 

Noms. 

Naiirancei 

Duclos. 

1705. 

Duport  Dutcrtre. 

1715. 

Freron. 

1719. 

Kerfaufon, 

La  Croze. 

1661. 

La  Mettrle. 

1709. 

L'Abbé   Moreau   de 

Saint-Etienne. 

17OI. 

R  EN 


Morts. 

1772. 

»759- 

1776. 

1739- 
1751. 

1754- 


Noms. 

PontBriand. 

Le  Père  Plefle,  Je- 

fuite. 
Saint-Foix. 
Travers ,  Prêtre. 
Rofnevet, 
Dom  Jamin. 
Robinet. 


NaiiTaiices. 


1704. 
1698. 


Mortj. 
1767. 

17^(3. 
1776. 
17  $0. 


i<S83.     175S. 

Cette  nomenclature,  toute  imparfaite  qu'elle  peut  être,  pourra 
fervir  de  guide,  à  celui  de  nos  auteurs  Biographes  qui  voudra 
enrichir  notre  Littérature  nationale  de  recherches  fur  la  vie  des 
auteurs  précédents ,  &  d'une  analyfe  raifonnée  de  leurs  Ouvrages. 
Ce  travail ,  intéreffant  pour  la  Bretagne ,  lui  manque  abfolument. 
J'aurois  pu  ajouter  ici  la  liite  affez  nombreufe  des  auteurs  Bretons 
vivants  j  mais  j'ai  cru  devoir  m'en  difpenfer. 

Cat ALOGi/E  hiflorique  des   Evêqucs   de  Rennes»    • 

* 

Quelques  écrivains  ont  prétendu  ,  contre  toute  vraifemblance, 
que  la  ville  de  Rennes  avoit  des  Evêques  long-temps  avant  le  qua- 
trième {îecle.  Ils  admettent  un  Maxnnien ,  du  temps  des  Apôtres, 
Prélat  imaginaire,  qui,  félon  eux,  eut  pour  fuccefleurs,Suffremin, 
Rambert ,  Servius  ,  Saint  Jull ,  Honorât ,  &  Placide  ,  Martyrs  ; 
&  Saint  Léonore.  Le  premier  Evêque  de  Rennes,  dont  on  ait 
connoiffance  ,  &  dont  l'exiftence  foit  prouvée ,  eft  Modéran ,  que 
les  uns  placent  en  358,  &  les  autres  en  388. 

Saint  JulHn  fut  fon  fuccefleur.  Dom  Lobineau  prétend  qu'il 
avoit  été  Difciple  de  Saint   Clair ,  premier   Evêque  de  Nantes. 

EUeran  ou  Eie6lran,  fut  le  troifieme  Evêque  de  Rennes. 

Jean  ,  furnommé  Alhius ,  monta  enfuite  fur  le  Siège.  C'eft  fou5 
fbn  Epifcopat  que  s'opéra  la  révolution  qui  arracha  'Armorique 
aux  Romams  ,  &  la  fournit  à  Conan  Meriadec. 

Riothifme  ou  Riothime ,  fut  le  cinquième  Evêque  de  Rennes, 
il  l'on  en  croit  un  manufcrit  de  la  Bibliothèque  publique  de  Nantes. 
Ces  cinq  Evêques  ont  occupé  le  Siège  épifcopal  dans  l'ordre  ci- 
delîus.  Tous  les  hiftoriens  font  d'accord  fur  ce  pomt  ;  mais  on  ignore 
ce  qu'ils  ont  fait  l'année  de  leur  avènement  à  l'Epifcopat,  &  celle  de 
leur  mort.  Ils  n'avoient  point  encore  de  domaines  temporels  :  ils 
n'exerçoicnt  fur  les  Fidèles  que  l'autorité  que  leur  donnoit  la 
dignité  fpirituelle  ;  autorité  plus  réelle,  plus  refpeftable  que  celle 
dont  jouiffent  aujourd'hui  nos  Prélats.  Les  premiers  éairices,  con- 


REN  115 

facrés  publiquement  au  culte  du  vrai  Dieu,  à  Rennes,  furent, 
fans  doute ,  élevés  fous  l'Epifcopat  d'Albius  ou  de  Riothifme. 

Athenin,  Atheme  ou  Artenius,  afîlfta  aux  Conciles  de  Tours, 
en  461 ,  &:  de  Vannes,  en  461  ou  465.  C'ell  le  premier  Evêque 
de  Rennes  qui  foit  bien  connu. 

Saint  Amand ,  élu  vers  l'an  47  5  ,  gouverna  fon  Evêché  jufqu  en 
508 ,  année  de  fa  mort.  Il  fur  enterré  dans  le  lieu  où  l'on  a 
depuis  bâti  une  Eglife  à  Saint  Melame ,  fon  fuccelTeur.  La  ville 
de  Rennes  regarde  Saint  Amand  comme  fon  Patron  ,  ëc  elle 
Tmvoque ,  en  cette  qualité ,  dans  toutes  les  nécefTités  publiques. 

Saint  Melaine ,  né  dans  la  ParoifTe  de  Brains ,  au  diocefe  de 
Vannes ,  fuccefleur  de  Saint  Amand ,  afîifla  au  Concile  d'Or- 
léans, en  511.  La  réputation  de  ce  Prélat  fut  fi  grande,  qu'elle 
lui  mérita  l'eftime  de  Clovis,  Roi  de  France,  alors  maître  de 
Rennes.  La  Gaule  étoit  alors  partagée  en  cinq  dominations: 
celle  des  Français ,  des  Romains  ,  des  Bretons ,  des  Vifigots , 
&  des  Bourguignons.  Saint  Melaine  mourut  le  6  Novembre  530, 
&  fut  enterré  auprès  de  Saint  Amand ,  fon  prédéceffeur.  L'an 
531  ,  Saint  Paterne  &  les  habitants  de  Rennes  firent  élever,  fur 
le  tombeau  de  ces  deux  faints  Evêques  ,  une  Eglife  d'une  grande 
beauté.  Cet  édifice ,  dit  Saint  Grégoire  de  Tours ,  néioit  pas 
un  maufolée  ,  mais  une  Eglife  ,  ou  Bafilique ,  où  l'on  entrait  par 
plufieurs  portes  j  &  le  bâtiment  étoit  très-vafle.  Telle  fut  l'origine 
de  l'Abbaye  de  Saint-Melaine ,  aujourd'hui  fort  riche. 

Febediol,  Evêque  de  Rennes,  aflifta  au  Concile  d'Orléans, 
en  540. 

Victorien  ou  Viâ:oire ,  affifta  à  la  dédicace  de  l'Eglife  de  Nantes , 
fous  Clotaire ,  en  559  ou  560;  au  Concile  de  Paris,  en  559; 
&  à  celui  de  Tours  ,  en  567  ;  8c  foufcrivit  à  la  lettre  que  les 
Evêques  écrivirent   à  Sainte  Radegonde. 

Marius  fut  élu,  en  594.  Ce  fut  fous  fon  Epifcopat  que  Salomon, 
Roi  de  Bretagne,  fit  rebâtir  l'Eglife  de  Saint-Melaine  ,  qui  a  voit  été 
réduite  en  cendres ,  comme  on  vient  de  le  dire.  Quelques-uns 
regardent  ce  Prince  comme  le   fondateur  de  cette  riche  Abbaye. 

Duriothere  affilia ,  par  Procureur  ,  au  Concile  de  Châlons ,  en 
644  i  &,  félon  d'autres  ,  en  6ço. 

Guillaume  fut  nommé  Evêque,  en  (^55  ,  &  mourut  fan  686. 

Defiderius  lui  fuccéda,  en  687. 

Agathée ,  Evêque  de  Rennes ,  fut  en  même  temps  Evêque 
de  Nantes  &  de  Rennes  j  mais  c'étoit  un  de  ces  Evêques  qui 
portoient  tour -à -tour  la  mitre  &  l'épée  :   il  mourut  l'an  703. 


lié  R  EN 

Saint  Modérand  ou  Morand ,  élu  en  703  ,  alla  en  pèlerinage 
à  Rheims ,  &  enfuite  aux  tombeaux  des  Saints  Apôtres ,  avec 
le  confentement  du  Roi  Chilperic.  De  retour  à  Rennes,  en 
718,  il  abdiqua  en  720,  &  fe  retira  au  Monaftere  de  Berifte , 
où  il  mourut,  en  odeur  de  fainteté ,  le  22  Oftobre  730.  ^ 

Aurifcand  fut  Evêque  de  Rennes ,  vers  l'an  720 ,  par  l'abdi- 
cation de  Modérand. 

Rothand  fut  le    fuccefleur  d"* Aurifcand. 

Etienne  ,  qui  occupa  enfuite  le  Siège  épifcopal ,  vit ,  en  8 1 1  ^ 
Charlemagne  conquérir  une  partie  de  la  Bretagne ,  &  s'emparer 
de  la  ville  de  Rennes. 

Aurifcand  II  du  nom  ,  vit  fa  ville  afîiégée  par  le  Roi  Charles 
le  Chauve  ,  qui  ne  put  la  prendre,  en  843.  A  cette  guerre  étran- 
gère fuccéderent  les  dilTenfions  domeftiques  entre  Pafquiten  &: 
Gurvand. 

L'an  887 ,  Guarin  monta  fur  le  Siège  épifcopal.  Les  Pères  du 
Concile  de  Toul  lui  écrivirent.  Le  Père  Sirmond  dit  mal-à-propos 
que  ce  Prélat  étoit  Evêque  d'Aleth  :  il  eft  confiant  qu'il  étoit  Evêque 
de  Rennes. 

Elearan  fut   élu  l'an  %66. 

Nodoard  lui    fuccéda. 

Aurifcand ,  qui  fut  enfuite  Evêque  de  Rennes ,  eft  placé ,  paf 
la  chronique  de  Nantes  ,  fous  l'année  987. 

Deotbalde  ou  Theobalde,  fe  maria  pendant  fon  Epifcopat.  De 
fa  première  femme ,  il  eut  Galter  ;  & ,  de  fa  féconde ,  Trifcan, 
Gaiter  ,  fils  aîné  du  précédent,  lui  fuccéda,  vers  1000  :  il  fe 
maria  ,  &  eut   un  fils   nommmé   Garin. 

Garin   fut  le  fucceffeur   de  fon  père. 

Trifcan  ,  oncle  de  Garin  ,  &  frère  de  Galter ,  monta  fur  le 
Siège  épifcopal  après  la  mort  de  fon   neveu. 

Maine  ou  Maino,fut  Evêque  de  Rennes,  en  1047.  Il  aflifla 
au  Concile  de  Rome  ,  tenu,  l'an  1050,  contre  Berenger,  Chef 
des  Sacramentaires.  Le  Pape  Léon  IV  y  préfida.  Maine  mourut 
au  mois  de  Janvier  1076. 

Sylveftre  de  la  Guerche ,  Seigneur  de  Pouencé ,  avoit  été 
marié  ,  &  avoit  eu  deux  fils  ,  Guillaume  &  Geofïroi  de  la 
Guerche.  Après  la  mort  de  fon  époufe ,  ce  Seigneur  entra  dans 
l'Etat  eccléfiaflique ,  &  fut  fait  Evêque  de  Rennes  en  1 076.  Le 
Duc  de  Bretagne  &  le  Comte  de  Rennes  lui  donnèrent  le  faux- 
bourg  l'Evêque  ,  qui ,  depuis  ce  temps ,  a  toujours  dépendu  des 
Evêques  de  Rennes.  Ce  n  efl  que  depuis  qu'on  y  a  confirait  des 


R  E  N  1 17 

maifons ,  qu'il  porte  le  nom  de  fauxbourg.  La  coutume  vouloit 
alors,  qu'à  la  mort  des  Evêques  de  Rennes,  les  gens  de  la  mailbn 
du  Comte  semparafTent  de  tous  les  meubles  du  Prélat  défunt. 
Cet  ufage  fut  aboli  fous  Tépifcopat  de  Sylveftre  ,  avec  défenfe 
de  le  renouveller.  L'amitié  que  Geoffroi  ,  Comte  de  Rennes , 
avoit  pour  Sylveflre ,  le  porta  à  donner  à  ce  Prélat  fon  droit 
de  Jurifdiftion  autour  de  l'Eglife  Cathédrale  ,  dans  le  fauxbourg 
l'Evêque ,  &  dans  la  Paroifle  de  Brutz.  Voici  les  propres  termes 
de  la  donation  :  «  Le  Comte  Geoffroi  donne  à  Saint -Pierre, 
»  pour  le  falut  de  fon  ame ,  pour  l'ufage  des  Evêques  à  per- 
»  pétuité ,  tout  ce  qu'il  avoit  acquis  du  droit  confulaire  dans 
>»  le  cloître  de  Saint-Pierre  ,  dans  le  bourg  Saint-Pierre ,  tant  au 
»  dedans  qu'au  dehors  de  la  ville ,  &  dans  la  paroiffe  de  Brutz.  » 
Sylveftre  de  la  Guerche ,  Evêque  de  Rennes ,  mourut ,  au  mois 
d'Avril  1 096.  Hardouin  lui  donne  ,  pour  fuccelTeurs ,  un  Hoël  & 
un  Gosfrede ,  qui  font   fuppofés. 

Marbodus  ,  élu  en  1096,  fut  facré  au  mois  de  Mars  de  la 
même  année.  Sous  fon  Epifcopat,  les  Moines  de  Saint-Melaine 
furent  excommuniés ,  on  ne  fçait  pour  quel  fujet  ;  &  le  Pape  recom- 
manda à  ce  Prélat  de  bien  faire  garder  l'excommunication.  Pendant 
le  Concile  de  Tours ,  tenu  par  le  Pape  Urbain  II  ,  Marbodus 
abdiqua,  &  prit  l'habit  de  Bénédictin:  il  mourut  en  1123.  Le 
Siège  fut  vacant  pendant  quelques  années. 

Rotalde  ou  Roalde ,  fuccelTeur  de  Marbodus ,  ne  refla  pas  long- 
temps fur   le  Siège. 

Hamelin  fut  élu  l'an  1 1 27.  Lobineau  dit  que  ce  Prélat  permit 
à  deux  perfonnes ,  qui  avoient  un  différent ,  de  le  terminer  en 
duel.    Il  mourut  l'an   1140   ou    1141. 

Alain  fut  élu  Evêque  de  Rennes  en  11 41.  Le  Pape  lui  écrivit, 
en  1 1 5  3  ,  de  rappeller  un  Prêtre  qu'il  avoit  mis  dans  une  Eglife 
appartenant  aux  Moines  de  Marmoutier  ,  fans  les  confulter.  Alain 
mourut  en  11 56.  Nous  avons  de  lui  une  lettre  écrite  à  l'Abbé 
Suger   en    11 48. 

Etienne  de  la  Rochefoucaud ,  Abbé  de  Saint-Florent ,  homme 
fçavant ,  éloquent,  &  religieux,  fut  fon  fucceffeur,  en  11 56, 
cC  mourut  en  1 1 66  :  il  fut  inhumé  dans  le  cloître  de  l'Abbaye 
de  Saint-Melaine,  auprès  de  la  porte  de  l'EgUfe,  où  il  avoit 
choifi   fa   lépulture. 

Robert,  Chanoine  de  l'Abbaye  de  Rillé  ,  près  Fougères,  fut 
nommé  ,  le  9  Décembre  de  la  même  année ,  Evêque  de  Rennes, 
&  mourut  en   11 67  ou  1168. 


ii8  REN 

Etienne  de  Fougères ,  homme  fçavant  &  lettré ,  Chapelain 
de  Henri  II ,  Roi  d'Angleterre ,  fut  élu  Evêque  de  Rennes ,  l'an 
II 69.  Ce  Prélat  reçut  Geoffroi,  fils  du  Roi  d'Angleterre,  lorf- 
qu'il  fit  fon  entrée  à  Rennes,  l'an  1178.  Etienne  de  Fougères 
mourut  le  23  Décembre  de  cette  année. 

Philippe  ,  Abbé  de  Clermont ,  de  l'Ordre  de  Cîteaux ,  au 
diocefe  du  Mans,  fut  élu,  Tan  1178.  Il  fit  commencer  la  démo- 
lition de  fon  Eglife  Cathédrale,  qui  menaçoit  ruine.  Le  jeune 
Duc  Geofîroi  le  fit  Chancelier  de  Bretagne  :  mais  il  n'exerça 
cette  charge  que  fort  peu  de  temps  j  il  la  perdit ,  avec  la  vie , 
l'an  1181   ou  II 82. 

Jacques ,  fon  fucceffeur ,  ne  fut  Evêque  que  deux  ans  :  on 
place  fa  mort  fous  l'année   11 84. 

Herbert  ou  Hubert  ,  qui  monta  fur  le  Siège  Tan  1 1 84 ,  mou- 
rut le  10  Décembre  11 98  :  il  fut  inhumé  dans  fon  Eglife 
Cathédrale ,  que  l'on  bâtilToit  alors.  On  lui  attribue  des  miracles 
après   fa   mort. 

Pierre  de  Dinan  ,  fils  de  Roland  ,  Seigneur  de  Montafilant , 
Chanoine  &  Archidiacre  de  l'Eglife  d'York  en  Angleterre ,  fut 
élu,  en  1199,  Evêque  de  Rennes.  Il  fut  fait  Chancelier  du  Duc 
Artur  ,  &  mourut  en   1206. 

Henri ,  fuccelTeur  de  Pierre ,  mourut  en    1 208. 

Pierre  de  Fougères  ,  ci-devant  ChanceHer  du  Duc  Artur, 
élu  en  1 208  ,  couronna ,  dans  fon  Eglife  Cathédrale ,  Pierre  de 
Dreux ,  devenu  Duc  de  Bretagne ,  par  fon  mariage  avec  Théri- 
tiere  du  Duché.  Ce  Prélat  mourut  en  1222. 

JofTelin  de  Montauban,  nommé  en  1222,  fonda,  en  1234, 
dans  fon  Eglife  Cathédrale  ,  dans  les  EgHfes  de  Saint-Melaine 
&  de  Saint-Georges ,  des  anniverfaires  qui  doivent  être  célé- 
brés le  vendredi  avant  la  ToufTaint.  Ce  Prélat  mourut  le  31 
Oftobre  1234  ,  &  fut  inhumé  dans  l'Eglife  de  l'Abbaye  de 
Saint-Jacques  de   Montfort. 

Alain  ,  qui  lui  fuccéda ,  fit  une  efpece  de  traité  avec  les 
Moines  de  Saint-Melaine  ,  comme  le  prouvent  les  cartulaires 
de  cette  Abbaye.  Ce  font  les  feules  preuves  de  l'exiftence  de 
ce  Prélat  :  il  n'en  eft  fait  mention  nulle  part  ailleurs  ,  & 
les  hifloriens  ne  mettent  point  d'Evêque  depuis  1234,  époque 
de   la  mort   de    JofFelin,  jufqu'à  l'an  1239. 

Jean  Gicquel ,  né  en  la  ParoifTe  de  Guer ,  au  diocefe  de 
Saint-Malo ,  monta  fur  le  Siège  épifcopal  ce  Rennes,  en  1239. 
Ce  Prélat   couronna  Jean  I  ,  dit  le    Roux,  Duc  de  Bretagne, 


R  E  N  IT9 

L'Evêque  Gicquel  foufcrivit  ,  en  1 243  ,  à  la  fondation  de  la 
Chapellenie  de  Saint-Martin  ,  faite  par  les  Seigneurs  de  la  Guerche 
&  de  Pouencé.  Il  fit  le  voyage  de  la  Terre-Sainte  ,  au  rapport  de 
Joinville ,  qui  dit  que  ce  Prélat  fe  fignala  dans  les  combats 
que  les  Croifés  livrèrent  aux  Sarralins.  il  fonda  un  anniverfaire 
dans  fon  Eglife  Cathédrale,  &  mourut  au  mois  de  Novembre 
I2Ç7  ou  1258. 

Égide  lui  fuccéda  ,  en  1257,  &  mourut  en  1259. 

Maurice  de  Treziguidi  ,  né  au  château  de  Treziguidi ,  ParoifTe 
de  Saint -Ségal,  au  diocefe  de  Quimper  ,  fut  nommé  Evêque 
de  Rennes  en  1160,  Ce  Prélat  cita  ,  en  1265  ,  le  Duc,  fou 
Souverain,  à  la  Cour  du  Roi  de  France,  où  ce  Prince  ne  vou- 
lut point  comparoître.    Maurice  mourut  le    6   Septembre   1282, 

Jean ,  qu'on  croit  avoir  été  fon  fucceffeur  ,  n'ell  pas  bien 
connu  pour   Evêque. 

Guillaume  de  la  Roche-Tanguy ,  Do£leur  en  Théologie ,  & 
très-verfé  dans  les  Sciences,  fut  nommé  en  1283  ,  &  mourut 
en    1297. 

Jean  de  Semois ,  de  l'Ordre  de  Saint-Benoît ,  félon  les  uns , 
& ,  félon  les  autres ,  de  celui  des  Freres-Mineurs  ,  ne  fit  que 
paroître  fur  le  Siège. 

Egide ,  fon  fucceffeur ,  fit  ferment  de  fidélité  au  Duc ,  en  ces 
termes  :  «  Moi,  par  la  grâce  de  Dieu,  Evêque  de  Rennes,  je 
»  jure  &  promets  à  mon  très-illuftre  Seigneur,  Jean,  Duc  de 
»  Bretagne,  d'être  fujet  fidèle  &  fincere ,  de  lui  obéir,  &  de 
»  l'honorer  comme  fondateur  de  mon  temporel.  Fait  au  mois  de 
»  Mars,  &c.  »  Ce  PréLit  mourut  en   1302. 

Yves,  qui  le  remplaça,  mourut  en  1304.  Au  mois  de  Juillet 
de  cette  année,  Robert  Raguenel,  Chevaher,  Seigneur  du  Châ- 
telaugers ,  fonda  la  Chapellenie  de  Notre-Dame  du  Pilier ,  dans 
FEghfe  Cathédrale  de  Rennes  ,  &  la  dota  de  plufieurs  revenus.  11 
s'en  réferva ,  à  lui  &  à  (es  héritiers  ,  la  préfentation  ,  &  en 
laifla  la  collation  à  l'Evêquc  de  Rennes. 

Egide,  élu  en  1305  ou  i';o6,  fait  ferment  de  fidélité  au 
Duc  ,   &  meurt  dans  le  coure; ut   de  l'année. 

Alain  de  Châteaugiron ,  Secrétaire  du  Duc  Artur  II ,  &  Tré- 
forier  de  TEghfe  Cathédrale  de  Rennes,  fut  nommé  en  1306, 
&   mourut    en   1327. 

Alain  de  Châteaugiron  II  du  nom  ,  Archidiacre  de  Rennes, 
élu  au  mois  de  Juin  1327,  mourut  au  mois  d'Oftobre  1328, 
&  fut  inhumé  derrière  lé  grand  autel  de  la  Cathédrale. 


110  R  E  N 

Guillaume  Ouvroing  fut  fuccefleur  d'Alain  de  Châteaugîron, 
On  ignore  l'année    de  fa  mort. 

Yves  de  Rofmadec ,  nommé  en  1347,  mourut  le  15  Oâ:o- 
bre   1349. 

Arfcand ,  qui  le  remplaça  ,    mourut  en  1354. 

Pierre  de  Laval,  élu  en  1354,  mourut  ou  fut  transféré  ail- 
leurs en  13  57. 

Guillaume  ,  fucceffeur  de  Pierre  ,  efl  connu  par  les  cartu- 
laires  de  Saint-Méen  &  de  Saint-Melaine.  Sous  fon  Epifcopat, 
en  1358,  Eudon  le  Bouteiller,  Prêtre,  de  l'Evêché  de  Tré- 
guier  ,  fonda  l'Hôpital  de  Saint -Yves,  à  Rennes  j  Hôpital  qui 
eft  gouverné  par  des  Prêtres  qui  y  font  les  fondions  curiales. 
Les  malades  y  font  foignés  par  les  Religieufes  Hofpitalieres  de 
la  Miféricorde. 

Pierre  de  Guemené  fit  fon  entrée  le  3  Novembre  1359,  & 
confacra,  le  même  jour,  l'Eglife  Cathédrale  de  Saint  -  Pierre  ^ 
qui  avoit  été  rebâtie  :  elle  avoit  été  recommencée  par  l'Evêque 
Philippe  ,  l'an  1 1 80.  Cet  édifice  étoit  vafte  &  d'une  grande 
beauté. 

Raoul  de  Tréal  ,  homme  riche  &  d'une  famille  diftinguée, 
élu  eu  1563  ,  employa  une  grande  partie  de  fes  revenus  à  l'em- 
belliffement  de  fon  Eghfe  Cathédrale,  &  au  foulagement  des 
pauvres.  Il  travailla  avec  fuccès  à  la  réformation  de  fon  dio- 
cefe ,  &  défendit  avec  fermeté  les  droits  de  fon  Siège.  Il 
eut  un  différent  très-féneux ,  au  Concile  d'Angers ,  avec  l'Evêque 
du  Mans  pour  la  préféance.  De  retour  à  Rennes,  il  s'appliqua 
à  faire  obferver  les  Canons  de  ce  Concile  j  ce  qui  lui  attira 
quelques  difgraces.  Sa  fermeté,  &  peut-être  fon  zeie,  lui  firent 
des  ennemis  :  il  fut  accufé  d'adultère  &  de  plufieurs  autres  cri- 
mes. Soit  que  l'accufation  fut  vraie  ou  fauffe ,  le  Pape  nomma, 
le  21  Juillet  1383,  des  CommifTaires  pour  en  informer,  avec 
pouvoir  de  le  livrer  au  bras  féculier  ,  au  cas  que  l'accufation 
fût  fondée.  On  ne  fçait  quelle  fut  la  fuite  de  cette  affaire  :  û. 
eft  à  croire  cependant  que  Raoul  confondit  fes  accufateurs.  Il 
mourut  le  13  Février  1383,  &:  fut  inhumé  dans  fon  Eglife 
Cathédrale. 

Guillaume  de  Briz  fit  fon  entrée  folemnelle  à  Rennes ,  an 
mois  de  Juin  1385.  Il  avoit  été  recommandé  au  Duc  par  le 
Pape  Clément  VII ,  qui  avoit  la  Bretagne  fous  Ion  obédience. 
Il  changea  un  ufage  très-ancien  dans  la  cérémonie  de  l'entrée 
des  Evêques,  La  veille  de  ce  jour ,   ces  Prélats  defcendoient  à 

l'Abbaye 


R  E  N  XII 

l'Abbaye  de  Saint-Melaine ,  où  ils  étoient  nourris  aux  dépens 
de  la  Communauté.  Guillaume  de  Briz  y  defcendit  comme  ies 
prédécelTeurs  j  mais ,  au  lieu  de  la  nourriture,  il  convint  avec  l'Abbé 
&  les  Moines,  qu'il  recevroit  d'eux  la  fomme  de  foixante  ibis, 
&  que  la  même  fomme  feroit  payée  à  fes  fucceffeurs.  Ce  Prélat 
mourut  au  commencement  de  l'année   1387. 

Antoine  de  Lovier ,  originaire  du  Dauphiné ,  élu  le  i  8  Avril 
1387,  lut  transféré  fur  un  autre  Siège  en  1389. 

Anfelme  de  Cantemerle  ,  recommandé  au  Duc  par  le  Pape 
Clément  Vil ,  fit  fon  entrée  folemnelle  ,  l'an  1390.  Les  rares  qua- 
lités de  ce  Prélat  lui  attirèrent  l'eftime  &  l'amitié  des  Ducs  de 
Bretagne.  Il  fut,  fur-tout,  l'ami  intime  d'Artur ,  Comte  de  Riche- 
mont  ,  Connétable  de  France  ,  &  frère  du  Duc  Jean  V.  Ce  fut 
ce  Prélat  qui  établit  la  fête  de  la  Préfentation  de  la  Vierge , 
dans  fon  Eglife.  11  accompagna  le  Duc  dans  le  voyage  qu'il 
fit  à  Tours,  ea  1389,  à  la  Cour  àe  France.  Il  légua,  en  mou- 
rant ,  aux  ParoilTesde  fon  diocefe  ,un  calice  d'argent ,  à  chacune, 
du  poids  de  vingt  livres.  Sa  mort  eft  rapportée  au  premier  Sep- 
tembre   1427  :  il  fut  inhumé  dans  fa  Cathédrale. 

Guillaume  Brillet  ,  natif  de  Vitré ,  fut  transféré  de  l'Evêché 
de  Saint-Brieuc  à  celui  de  Rennes,  l'an  1427.  Ce  Prélat  fe  ren- 
dit recommandable  par  la  douceur  de  fon  caraélere  &  fa  piété. 
L'an  1433  ,  ^^  Clergé  de  Bretagne  lui  donna  commiflion  de 
lever  un  mipôt  fur  les  biens  eccléfiaftiques  du  Duché.  Ce  Prélat 
abdiqua   en  1447,  ^   mourut  le   premier  Février  1448. 

Robert  de  la  Rivière  ,  fils  de  Jean ,  Seigneur  de  la  Rivière , 
Chambellan  &  Chancelier  de  Bretagne ,  fut  nommé  Evêque  de 
Rennes,  en  1447,  fur  la  démiflion  de  Guillaume,  fon  oncle  & 
fon  prédécefleur.  Il  affilia  au  Concile  d'Angers  ,  en  1448.  Le 
Duc  lui  avoit  envoyé  cinq  cents  faluts  pour  payer  les  frais 
de  fon  entrée.  L'an  1449  ,  ce  Prélat  fut  envoyé  vers  le  Roi  de 
France  ,  Charles  VII ,  pour  lui  demander  du  fecours  contre  les 
Anglais  qui  avoient  furpris  la  ville  de  Fougères.  Robert  mou- 
rut en   1450. 

Jean  de  Coètquis,  élu  en  1450,  fut  transféré  à  Tréguier  au 
mois  de  Juillet   1453. 

Jacques  d'Epinai  occupa  le  Siège  épifcopal,  à  Rennes,  en 
vertu  d'une  Bulle  du  Pape,  que  le  Duc  défapprouva  ,  parce  que 
le  Prélat  étoit  accufé  d'avoir  confpiré  à  la  mort  de  Gilles  de 
Bretagne.  Jacques  d'Epinai  fut  prcfque  toujours  en  mauvaife  in- 
telligence avec  les  Ducs  Pierre  II  ,  Artur  111  ,  &  François  IL 
Tome  IK»  .  Q 


lii  R  E  N 

Il  fut  obligé  dé  faire  le  voyage  de  Rome ,  où  il  plaida  û  bien 
fa  caufe  ,  qu'il  obtint  du  Pape  un  Bref  jullifîcatif ,  avec  lequel 
il  revint  en  Bretagne.  Il  tint,  pendant  quelque  temps,  une  con- 
duite plus  réglée,  &  rentra  même  dans  les  bonnes  grâces  du 
Duc  Pierre  IL  Son  efprit,  brouillon  &  pétulant  ,  le  ht  bientôt 
fortir  des  bornes  de  la  fageffe.  Il  excommunia  quelques  Officiers 
du  Duc  i  & ,  par  cette  démarche  imprudente ,  il  s'attira  une 
foule  de  nouvelles  difgraces.  Infenfible  à  la  colère  du  Prince, 
il  cherchoit  bien  plus  à  augmenter  qu'à  appaifer  fon  reffentimentj 
de  forte  que  le  Duc  ,  ne  pouvant  plus  tolérer  de  femblables 
excès ,  le  fomma  à  comparoître  devant  lui ,  &  donna  ordre  de 
ramener  de  force  ,  s'il  refufoit  d'obéir.  Il  commit  encore  quelques 
violences  dans  fon  diocefe,  &  Landais  profita  de  cette  circonf- 
tance  pour  porter  des  plaintes  au  Pape  contre  le  Prélat.  Le  Pon- 
tife nomma  des  Commiflaires  pour  informer  des  crimes  dont  on 
l'accufoit  ;  fon  temporel  fut  faifi  ,  &  cet  Evêque  mourut  de 
chagrin,  au  mois  de  Janvier  1482  ou  1483.  Il  fut  inhumé  dans 
l'Eglife  Collégiale  de  Champeaux  :  il  avoit  pubUé  des  llatuts 
en  1464. 

Michel  Guibé,  Evêque  de  Dol  &  Coadjuteur  de  Jacques 
d'Epinai ,  avec  expectative  ,  fut  reconnu  Evêque  de  Rennes  au 
mois  de  Janvier  1482  ou  1483.  Ce  Prélat  étoit  fils  d'Adenet 
Guibé  &  d'Olive  Landais  ,  lœur  du  fameux  Tréforier  de  ce 
nom.  Ce  Prélat  publia  des  ftatuts ,  le  12  Mai  1483.  Le  dernier 
défend  à  tous  les  Eccléfiaftiques  du  diocefe  ,  fous  peine  de  dix 
fols  monnoie  ufuelle ,  appHcables  à  la  bourfe  aumôniere  du 
Prélat,  de  porter  de  longues  barbes  &  des  cheveux  longs,  à 
moins  qu'ils  ne  foient  en  voyage  ;  Se  il  leur  enjoint  de  porter 
de  longues  robes  jufqu'aux  talons,  &  de  ne  point  hanter  les 
cabarets  &  autres  lieux  déshonnêtes.  Il  publia  encore  de  nou- 
veaux flatuts ,  en  1493  ,  &  mourut  en  1499. 

Robert  Guibé,  transféré  de  Tréguier  à  Rennes  en  1499,  fut 
encore  transféré  de  Rennes  à  Nantes  en  1506. 

Gui,  le  Lyonnais,  fut  élu  en  15065  mais,  voyant  que  fon 
éleftion  déplaifoit  à  la  Duchefle  Reine  Anne  de  Bretagne  ,  il 
abandonna  fes  prétentions. 

Pierre  le  Baud,  Doyen  de  Saint-Tugdual  de  Laval,  s'étoit 
attiré  Feftime  &  les  bonnes  grâces  de  la  Reine  Anne ,  par  la 
publication  d'une  hilloire  de  Bretagne  ,  qu'il  avoit  préfentée  à 
cette  PrincefTe.  Anne ,  pour  lui  témoigner  fa  fatisfaftion  ,  l'avoit 
fait  fon  Aumônier  ,  &  lui  fit  donner  l'Evêché  de  Rennes ,  en  1 5  06* 


REN  iij 

Ce  Prélat  ne  jouit  pas  long-temps  de  fa  nouvelle  dignité  :  il 
mourut  le   19  Septembre  de  cette  année. 

Yves  de  Mayeuc ,  né  dans  la  Paroiffe  de  Plouvorn  ,  au  dio- 
cefe  de  Saint-Pol-de-Léon ,  de  parents  qui  faifoient  le  commerce 
dans  le  pays,  entra  chez  les  Dominicains,  le  27  Août  1487.  Il 
devint  ConfefTeur  de  la  Reine  Anne ,  qui  le  fit  nommer  à  l'E- 
vêché  de  Rennes,  Tan  1506.  Il  obtint  fes  Bulles  le  29  Janvier 
1507.  Il  affilta,  par  Procureur,  au  Concile  de  Tours,  en  1528^ 
fit  des  flatuts^qui  ne  font  encore  que  manufcrits  ;  &  couronna. 
Duc  de  Bretagne  ,1e  Dauphin,  fils  de  François  I  &  de  la  Reine 
Claude,  le  12  Août  1537.  Il  prit,  en  1539,  pour  Coadjuteur, 
Claude  Dodieu  :  il  mourut  le  17  Septembre  1541  ,  &  fut  inhu- 
mé ,  le  20  du  même  mois ,  dans  fon  EgUfe  Cathédrale.  Claude 
Dodieu ,  fucceffeur  d'Yves  de  Mayeuc  ,  mourut  à  Paris  le  4 
Avril  1558.  Ce  Prélat  avoit  été  AmbalTadeur  auprès  du  Pape 
Paul  III  &  de  l'Empereur  Charles  V.  Il  afîifta  au  Concile  de 
Trente. 

André  Dodieu,  nommé  Evêque  en  1559,  fut  envoyé,  par 
le    Roi,  en  Efpagne ,  en  1560,   &  y  demeura  jufqu'en   1561. 

Bernardin  Bouchetel ,  Secrétaire  des  Rois  François  I  &  Henri 
II ,  nommé  Evêque  de  Rennes ,  ne  fut  point  facré.  Il  fit  ferment 
de  fidélité  le  3  Février  1565.  Il  fut  chargé  de  différentes  négo- 
ciations ;  mais  il  fut  peu  de  temps  Evêque  de  Rennes  :  il  fe 
démit  de  fon   Siège   dans  la   même  année. 

Bertrand  de  Marillac  ,  Religieux  de  l'Ordre  des  Frères-Mi- 
neurs,  nommé  Evêque  de  Bennes  en  i'j6<^,  prêta  ferment  de 
fidélité  le  23  Janvier  1566  ,  &  mourut  le  29  Mai  1573.  U 
pafTa  pour  un  des  grands  Prédicateurs   de  fon  temps. 

iEmar  Hennequin ,  défîgné  par  le  Roi  en  1 573  ,  prit  féance 
au  Parlement  de  Bretagne  ,  comme  Confeiller-né  de  cette  Cour, 
Il  afîilla  aux  Etats  de  Blois ,  en  1576  ;  à  l'afTemblée  du  Clergé 
de  France,  en  1577;  au  Concile  de  Tours  ,  en  1583  j  réforma 
le  Bréviaire  de  Hennés,  en  1589;  mourut  le  13  Janvier  159^^, 
&  fut  inhumé  dans  fa  Cathédrale.  Il  étoit  fçavant.  Nous  avons 
de  lui  quelques  Opufcules  théologiques  &  des  Traductions.  On  le 
blâme  d'avoir  favorifé  le  parti  rebelle. 

Arnaud  Doffat ,  né  dans  un  village  du  Comté  d'Armagnac  , 
de  parents  pauvres ,  nommé  par  le  Roi  à  l'Evêché  de  Rennes, 
obtint  fcs  Bulles  le  9  Novembre  1596.  Il  fut  fait  Cardinal-Prêtre  , 
du  titre  de  baint-Eufebe  ,  en  1 598  ,  &  fut  transféré  à  Bayeux  en 
1600.  Ce  Prélat  efl  un  des  plus  grands  Hommes  &  des  meilleurs 


IZ4  R  E  N 

citoyens  qu*ait  eu  la  France.  Nous  avons  de  lui  un  volume  de 
Lettres  qui  paiTent  pour  un  chef-d'œuvre  de  politique.  Le 
Père  Turquin  Guliés ,  Jéfuite,  a  fait  l'oraifon  funèbre  de  ce 
grand    Homme. 

Séraphin  Olivier  ,  né  à  Lyon  ,  fut  fait  Auditeur  de  Rote  ; 
emploi  qu'il  exerça  pendant  quarante  ans.  Les  Papes  Grégoire 
XIII,  Sixte  IV  ,  &  Clément  VIII,  l'employèrent  en  diverfes  non- 
ciatures. Ce  dernier  le  fit  Patriarche  d'Alexandrie.  Nommé,  en 
1600,  par  le  Roi  Henri  IV,  à  l'Evêché  de  Rennes,  il  fut  fait 
Cardinal  en  1602  ,  &  réfigna  fon  Evêché  à  François  l'Archiver. 

François  l'Archiver,  originaire  de  la  ParoiiTe  dePlouezoc,  au 
diocefe  de  Tréguier  ,  Evêque  de  Rennes  par  réfignation  du 
Cardinal ,  fit  fon  entrée  folemnelle  le  premier  Septembre  1 602  ; 
fit  imprimer  le  Propre  des  Saints  de  Rennes  en  1 609  ;  affifta  aux 
Etats  Généraux  à  Paris,  en  1614  &  161 5  ;  &  mourut  le  22  Fé- 
vrier 1619.  Ce  Prélat,  fi  digne  de  l'être,  fe  conduifoit  par  cette 
maxime  de  l'Evangile  :  Kous  ave^  reçu  gratuitement  ,  donne\  de 
même.  En  conféquence  ,  il  ne  permit  jamais  que  fon  Secré- 
taire reçût  la  moindre  rétribution  pour  les  expéditions  qu'il  dé- 
livroit. 

Pierre  Cornullier,  transféré  de  Tréguier  à  Rennes  en  1(^19, 
fit  fon  entrée  folemnelle  le  24  Mai  5  affifta  à  l'afiemblée  du  Clergé, 
en  1621  j  &  mourut  le  22  Juin  1639. 

Henri  de  la  Motte  Houdancourt ,  défigné  en  i<^39  ,  facré  le 
6  Janvier  1642,  affilia  aux  alTemblées  du  Clergé  des  années 
1653  &  1654,  pour  la  réception  de  la  Bulle  du  Pape  Innocent 
X,  contvQ  ï Augujlinus  de  Janfenius ,  donnée  le  31  Mai  K553. 
Ce  fut  lui  qui  fit  inférer  cette  Bulle  dans  les  regiirres  du  Parle- 
ment, le  10  Septembre  1655.  Ce  Prélat  mourut  l'an    1660. 

Charles -François  de  la  Vieuville  ,  facré  le  30  Avril  1661, 
mourut  l'an  1679. 

Jean-Baptifte  de  Beaumanoir  de  Lavardin ,  nommé  en  1 6jjy 
affifta  àTaflemblée  du  Clergé,  à  Paris,  en  1681  j  afiemblée  dans 
laquelle  on  reconnut  l'indépendance  du  Roi  dans  le  temporel, 
la  fupériorité  du  Concile  général  fur  le  Pape,  qui  fut  jugé  non- 
infaillible.  Ce  Prélat  affilia  auffi  au  Concile  provincial  de  Tours  ,  en 
1699,  fit  des  fiatuts  en  1682,  &  érigea  la  place  de  Grand- 
Pénitencier  dans  fon  diocefe  ;  place  qu'il  dota ,  en  y  unifiant 
ies  revenus  de  quatre  Chapellenies ,  dont  il  fupprima  les  titres, 
du  confentement  des  Patrons  laïques  :   il  mourut  en  1712. 

Louis-Chrifi:ophe  Turpin  Crifle  de  Sanzai ,  défigné  en   1 7 1 2 , 


R  E  N  =  R  EZ  115 

fut  un  des  quarante  Prélats  qui,  en  171 4,  reçurent  la  Bulle 
Unigenitus  ,  &  y  joignirent  des  commentaires  pour  l'expliquer. 
Ce  Prélat  fut  transféré  à  Nantes  le   17   Oftobre  172.3. 

Charles-Louis-Augufte  le  Tonnelier  de  Breteuil ,  fut  nommé  le 
17  Oftobre  1723  ,  facré  le  15  Juillet  1725,  mourut  le  24 
Avril  1732. 

Louis-Gui  Guerrepin  de  Vauréal  ,  nommé  l'an  1732,  facré 
le  24  Août  de  la  même  année  ,  envoyé  Ambafladeur  auprès  de 
Sa  Majefté  Catholique,  en  1741  ,  mourut  l'an.   .  .  . 

N Defnos ,    Abbé  de  Redon ,    fut  facré    Evèque   de 

Rennes  le  1 6  Août  1761^  &  transféré  à  Verdun   l'an.  .  .  . 

M.  François  Barreau  de  Girac ,  transféré  de  l'Evêché  de  Saint- 
Brieuc  à  celui  de  Rennes,  en  1770,  gouverne  aftuellement 
le  diocefe. 

RETIERS  ;  à  6  lieues  Se  demie  au  Sud-Eft  de  Rennes ,  fon 
Evêché  &  fon  refTort  j  &  à  2  lieues  un  tiers  de  la  Guerche, 
fa  Subdélégation  i  on  y  compte  2200  communiants  :  la  Cure 
eft  à  l'alternative.  Cette  ParoiiTe  eft  très-ancienne.  On  prétend 
qu'elle  exilloit  du  temps  du  Roi  Salomon ,  en  860.  L'an  1190, 
Briand  de  Coefmes  donna  la  moitié  des  dîmes  de  Retiers  à 
l'Abbaye  de  Savigné ,  fituée  dans  la  Normandie.  Briand  de 
Coefmes  pofTédoit  alors  le  manoir  de  la  Chefnaudiere ,  qui ,  en 
1420,  appartenoit  à  Jean  de  Coefmes,  l'un  de  fes  defcendants. 
La  Terre  &  Seigneurie  de  Coefmes  devoir,  en  1294,  un  Che- 
valier à  l'armée  du  Duc  de  Bretagne.  Cette  Seigneurie ,  qui  ap- 
partient à  M.  du  Hallai ,  a  une  haute- Juftice.  Le  même  Sei- 
gneur poiTede  aufli  la  haute-Juftice  de  Retiers.  En  1330,  Guil- 
laume du  Hallai  pofTédoit ,  dans  le  même  territoire ,  les  manoirs 
de  la  Borderie  &  du  Bois-Macé.  Le  château  du  Hallai  fut  forcé , 
pillé  ,  &  brûlé ,  en  »  5  90 ,  par  les  partifans  du  Duc  de  Mer- 
cœur  :  c'étoit  une  place  forte.  En  1430,  le  manoir  de  la  Pe- 
tite-Onglée appartenoit  à  Guillaume  Bagar.  Dans  le  même 
temps ,  Jean  le  Bigot  pofTédoit  la  maifon  noble  de  la  Bigotiere  : 
cette  Terre  a  moyenne-JufHce ,  &  appartient  à  M.  de  la  Bigo- 
tiere. Le  territoire  de  Retiers,  couvert  d'arbres  &  buifTons,  eft 
arrofé  au  Nord  par  la  rivière  de  Seiche  :  il  produit  du  grain, 
du  foin  ,  &  du  cidre  j  on  y  voit   des   landes. 

REZÉ  ;  dans  un  fond  ;  à  deux  tiers  de  lieue  au  Sud  de  Nantes,  fon 
Evêché,  fa  Subdclégation ,  &   fon  refTort  j  on  y  compte  3700 


1x6  RE  Z 

communiants  :  la  Cure,  jadis  préfentée  par  FAbbé  de  Saint- 
Jouin  ,  a  été  remife ,  depuis  quelques  années ,  à  l'Evêque  dio- 
céfain.  Le  territoire  ,  couvert  d'arbres  &  buiffons  ,  renferme  des 
terres  en  labeur,  des  prairies  excellentes  fur  le  bord  de  la  Loire, 
des  vignes  ,  &  quelques  landes  au  Sud  de  fon  bourg ,  fur  le 
chemin  de  Nantes  à  la  Rochelle.  Cette  ParoifTe  relevé  du  Roi. 

Ce  bourg  a  long-temps  exercé  la  plume  des  écrivains  ;  mais 
tous  ces  écrits  ne  nous  ont  rien  appris  de  certain  touchant  fon 
antiquité.  Les  uns ,  fans  aucun  motif  fondé ,  ont  prétendu  que 
c'étoit  jadis  la  pnncipale  cité  des  Nantais,  tandis  que  la  rail'on 
&■  Ihirtoire  fe  réunifToient  pour  contredire  cette  opinion.  Les 
Romams ,  difent-ils  ,  ayant  défait  les  Venetes ,  vinrent  à  Nantes , 
dont  les  habitants  furent  traités  avec  la  dernière  rigueur  par  ces 
conquérants ,  qui  vouloient  les  punir  d'avoir  fecouru  leurs  voi- 
fins.  L'ancienne  cité  de  Nantes  fut  rafée  ;  &  c'ell:  de  là  que 
Rezé  a  pris  fon  nom.  Les  autres ,  enchérilTant  fur  ce  fyllême ,, 
&  ajoutant  l'extravagance  à  l'erreur,  ont  voulu  que  la  tour  de 
Pirmil  ait  été  bâtie  parCéfar,  qui  lui  donna  ce  nom,  en  l'hon- 
neur du  célèbre  Paul-Emile  ,  vainqueur  de  Perfée ,  Roi  de  Ma- 
cédoine. Ainfî,  par  l'analogie  de  ces  deux  noms  ,  tout  ell  ex* 
pliqué,  tout  eu  découvert;  &  voilà  une  vérité  hiftorique  dans 
tout  fon  jour.  Rien  de  plus  certain  que  cette  affertion  :  «  le  bourg 
M  de  Rezé  a  ,  fans  doute ,  été  une  ville  que  les  Romains  ont  rafée  j 
>»  &  Pirmil  a  trop  de  relTemblance  avec  Paul-Emile  pour  qu'on 
»  puifTe  nier  que  cette  tour  doit  fa  fondation  aux  Romains.  »  Il  faut 
convenir  que  voilà  une  plaifante  manière  de  décider  une  quelîion., 

Mais ,  dira-t-on  ,  qu'eft-ce  qu'étoit  Rezé  dans  fon  origine  ?  Je 
n'en  fçais  rien ,  &: ,  vraifemblablement ,  on  ne  le  fçaura  jam.ais.. 
11  en  eÛ  de  ce  bourg  comme  des  villes  de  Nantes ,  Rennes  ^ 
d'Aleth ,  de  Vannes ,  &c.  dont  on  ne  peut  affigner  la  fondation.. 
Les  Celtes,  nos  pères,  qui  feuls  pouvoient  nous  en  inftruire ,  n'ont 
laifTé  aucun  monument  qu'on  puifTe  confulter.  Cependant ,  û  R'èzé 
eût  été  le  chef-lieu  des  Nantais ,  détruit  par  les  Romains ,  il  eft 
à  croire  que  Céfar  &  les  autres  hiftoriens  de  cette  nation  n'au- 
roient  pas  pafTé  fous  filence  la  dellruftion  d'une  cité  aufîi  con- 
sidérable :  les  Nantais  auroient  d'ailleurs  confervé  des  domaines 
dans  cette  partie,  &  un  certain  attachement  pour  leur  ancien 
féjour  ;  &  l'on  içait  que ,  dans  les  premiers  fiecles ,  les  habi- 
tants de  cette  ville  regardoient  ceux  de  la  rive  oppolee  comme 
des  étrangers  pour  eux.  Rezé  ne  dépendoit  pas  de  l'Evêché  de 
Nantes ,  mais  de  celui  de  Poitiers,  &  faifoit  partie  de  l'Aquitaine» 


R  E  Z  117 

Cependant  Rezé  étoit  un  lieu  confidérable  :  les  ruines  qu'on  y 
remarque  le  prouvent  ;  &  l'on  peut  affurer  que  ce  lieu  étoit 
très-anciennement  habité.  Il  eft  même  à  préfumer  que  c'étoit  là 
une  des  principales  villes  du  pays  de  Retz  ;  & ,  ft  l'on  y  fait 
quelque  jour  des  fouilles ,  la  conjecture  pourra  fe  changer  en 
certitude.  Quoi  qu'il  en  foit  ,  Saint  Lupier ,  que  l'on  nomme 
Saint  Lucien ,  eft  né  dans  cette  ParoiiTe  ,  &  y  a  reçu  le  bap- 
tême,  l'an  3  40 ,  fous  l'Epifcopat  d'Eumelius  ,  Evêque  de  Nantes, 
par  Saint  Hilaire  ,  Evêque  de  Poitiers  ;  & ,  en  ce  temps ,  Rezé 
s'appelloit  Rofiaré,  Après  la  mort  de  Saint  Lupier  ,  les  miracles 
qui  fe  firent  fur  fon  tombeau,  engagèrent  le  peuple  à  bâtir, 
en  fon  honneur ,  une  Chapelle  ,  qui  forme  aujourd'hui  un  riche 
Prieuré,  qui  appartient  à  l'Abbaye  de  Genefton.  Conan  Me- 
riadec  avoit  conquis  une  partie  de  l'Aquitaine ,  &  les  Princes 
Bretons ,  qui  tenoient  Rezé  fous  leur  domination ,  y  faifoient 
battre  monnoie  en  570.  Il  nous  en  relie  un  tiers  de  fol  d'or ,  avec 
une  tête  ceintrée  d'un  diadème  perlé ,  &  deux  légendes  portant 
ces  mots,  Ratiate  &  Theodoncom,  Cette  médaille  eft  probable- 
ment du  Comte  Théodoric ,  fils  de  Budic  ,  Comte  de  Vannes, 
Le  diadème  qu'on  y  remarque  nous  le  montre  régnant  à  Rezé. 
Le  bourg  de  Rezé ,  dit  l'auteur  de  la  DifTertation  fur  les  Mon- 
noies  de  Bretagne  ,  lieu  remarquable  par  les  grandes  ruines 
qu'on  y  voit,  &  où  il  y  avoit  autrefois  un  Port  que  quelques- 
uns  foupçonnent  être  le  portas  Sichor  ou  portas  PiBonum  ,  eft 
afTurément  la  ville  de  Ratiate.  On  y  trouva  ,  il  y  a  peu  d'années  , 
des  médailles  de  l'Empereur  JuUen ,  dans  des  fondements.  Cette 
ville  ,  riche  par  fon  commerce  de  mer  &  fur  la  Loire ,  fut 
ruinée ,  par  un  débordement  d'eau ,  dans  le  feptieme  fiecle.  Le 
château  de  Begon ,  fur  la  rive  gauche  de  la  Loire,  en  Rezé, 
fut  bâti  par  Begon  ,  époux  de  Hildegarde ,  fille  de  l'Empereur 
Louis  le  Débonnaire.  Charles  le  Chauve  ,  fon  beau-frere ,  le 
fit  Comte  de  Poitiers  ,  après  la  mort  du  Comte  Rainauld ,  tué 
par  Lambert  l'an  843.  Gunfer  prit  ce  château,  &  y  fit  fa  de- 
meure jufquen  853  ,  qu'il  fut  brûlé  par  les  Normands.  En  1292, 
le  Seigneur  de  Rezé  devoir  un  Chevalier  au  Duc,  pour  la  re- 
monte de  fes  troupes,  tant  pour  le  fief  de  Rezé  que  pour  les 
habitants  du  lieu.  En  1625  ,  il  fut  érigé  deux  foires  à  Pont- 
Roufleau ,  en  faveur  de  Jacques  Barrin  ,  Premier  Préfident  de 
la  Chambre  des  Comptes.  La  Terre  &  Seigneurie  de  Rezé , 
avec  haute-Juftice ,  fut  érigée  en  Comté,  Tan  1681,  en  faveur 
de   N....  de  Monti ,  à  la  pollérité  duquel  elle  appartient  encore. 


ii8  R  E  Z=  R  I  A 

En  1450  ,  l'Abbé  de  Villeneuve  avoit  une  maifon  dans  cette 
Paroifle.  La  Salmoniere  appartenoit  ,  dans  le  même  temps,  à 
Jean  Morin  ;  la  Grande-Haye ,  au  Sieur  de  Ses-Maifons  ;  la  mé- 
tairie de  la  Chaterie  ,  à  Robert  l'Epervier  j  &  celle  de  la  Fouexon- 
niere  ,  à  Georges  l'Epervier. 

RIAILLÉ  j  dans  un  fond ,  près  la  rivière  d^Erdre  ;  à  9  lieues 
au  Nord-Elt  de  Nantes,  fon  Evêché  &  fon  reflbrt  5  à  16  lieues 
de  Rennes  j  &  à  5  lieues  un  quart  de  Chateaubriand ,  fa  Sub- 
délégation.  On  y  compte  1300  communiants  :  la  Cure  eft  à 
rOrdmaire.  Le  territoire  deRiaillé,  arroie  de  la  rivière  d'Erdre, 
qui  le  coupe,  &  de  plufieurs  étangs,  renferme  des  terres  en 
labeur  ,  des  prairies ,  &  des  landes  très-étendues ,  dont  le  fol 
paroît  mériter  les  foins  du  cultivateur.  Il  produit  du  cidre.  Au 
Nord  de  fon  clocher,  eft  la  forêt  d'Ancenis,  qui  contient  en- 
viron trois  mille  arpents  de  terrain  planté  en  taillis  &  futaie  j. 
elle  appartient  à  M.  le  Duc  de  Charoft,  Seigneur  de  Riaillé» 
Ce  fut  dans  cette  forêt  que  l'on  prit  le  bois  pour  la  conftruc- 
tion  des  trois  plus  beaux  vaifleaux  de  hgne  qui  aient  paru  fous 
le  règne  de  François  I.  Ces  vailîeaux,  qui  fe  nommoient  le 
Nompareil ,  le  grand  Henri ,  &  le  grand  Carraquon ,  furent  conf- 
truits  à  Nantes.  A  l'un  des  bouts  de  cette  forêt ,  font  les  ruines 
d'une  Chapelle  dédiée  à  Saint  Laurent ,  que  la  tradition  dit  être 
très-ancienne.  Les  habitants  du  pays  ,  ayant  trouvé  quelques 
pièces  d'argent  dans  fes  ruines,  prétendirent  qu'il  y  avoit  un 
tréfor  caché  daijs  fes  fondations.  En  conféquence,  plufieurs  y 
ont  fait  des  recherches  très-inutiles.  On  remarque ,  dans  le  même 
territoire ,  trais  forges  à  fer ,  qui  font ,  celles  de  la  Vallée ,  de. 
la  Provôtiere ,  &  de  la  Poiteviniere.  L'an  1558,  la  Communauté 
de  Nantes  acheta  quatre  miUiers  de  balles  de  fer  à  cette  forge; 
elle  appartenoit  alors  à  Madame  de  Rieux  ,.  aujourd'hui  elle  eft  à 
M.  le  Duc  de   Bethune ,  qui  pofTede  aulîi  les   deux  autres. 

En  1420,  on  connoiffoit  dans  ce  territoire  les  maifons  nobles 
fuivantes  :  la  Meilleraye  ,  à  Jean  du  Pont  ;  elle  a  une  haute- 
Juftice  ,  &  appartient  à  M.  de  Vouvantes  :  le  Bouais,  à  Jamet 
de  Rougé  ;  Samt-Ouen  ,  dont  il  ne  refte  plus  que  les  ruines ,  à 
Guillaume  le  Vicomte ,  Sieur  de  Saint-Ouen  ;  Pannecé  &  Che-- 
vane ,  haute-JulHce ,  à  M.  de  Lavau  de  la  PiardierCc 

RIANTEC  j  au  bord  de  la  mer  ;  à  9  lieues  à  FOueft  de 
Vannes,  fon  Evêché  &  fon  refibrt^  à   28    lieues  de  Rennes^ 


RI  A  =  RI  E  119 

&  à  I  lieue  un  quart  de  l'Orient ,  fa  Subdélégation.  Cette  ParoifTe 
relevé  du  Roi,  &  compte  3200  communiants  :  la  Cure  eft  à 
l'Ordinaire.  Le  territoire ,  borné  au  Sud  par  la  mer  ,  renferme 
des  terres  très-fertiles  &  affez  exaftement  cultivées.  Il  offre  à  la 
vue  des  monticules  &  des  vallons.  Dans  l'ifle  Sainte  -  Cathe- 
rine ,  formée  par  la  rivière  de  Blavet  ,  eft  un  Couvent  de  Ré- 
collets, fondé ,  l'an  1446,  par  Louis  de  Rohan  ,  Seigneur  de 
Guemené ,  &  Louife  de  Rieux  ,  fon  époufe.  L'an  1590,  les 
Seigneurs  d'Aradon  forcèrent  ce  Couvent,  où  le  Duc  de  Mer- 
cœur  avoit  mis  une  garnifon ,  qui  fut  prefque  toute  paffée  au  fil 
de  l'épée.  Le  petit  nombre  qui  échappa  fut  dangereufement 
bleffé. 

Maifons  nobles  :  en  1530,  Rochedan  ,  à  la  Demoifelle  de  la 
Pommeraye;  Ker-pulz  ou  Ker-palz  ,  à  Marie  de  Kerpulz  ou 
Kerpalz  ;  les  Salles ,  au  Sieur  de  Cadoudal  ;  Toulelan ,  à  Pierre 
de  (Jombourg  ;  Coetnos-Ker-bern  ,  à  N,.,.  Coëtros  5  &  Ker-fabiec, 
à  Claude    des  Portes. 

RIEC;  fur  une  hauteur;  à  8  lieues  au  Sud-Eil  de  Quimper, 
fon  Evêché  ;  à  34  Heues  de  Rennes;  &à  trois  lieues  de  Quim- 
perlé ,  fa  Subdélégation  &  fon  reflbrt.  On  y  compte  2500  com- 
muniants :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  M.  le  Marquis  de  Pont- 
callec  eft  Seigneur  de  cette  Paroiffe ,  où  il  pofTede  le  château 
de  la  Porte-neuve.  Le  territoire  ,  borné  au  Sud  par  la  mer , 
offre  à  la  vue  des  terres  bien  cultivées ,  des  prairies ,  des  val- 
lons ,  des  coteaux ,  &  quelques  landes.  En  1400 ,  le  Sire  de  Rof- 
madec  étoit  Seigneur  de  l'endroit  ,  où  l'on  remarquoit  alors  les 
manoirs  de  Coetaffan  ,  à  Quequen-Richard  ;  Godenet ,  à  Guil- 
laume Bifîen  ;  Ker-tutgoal ,  au  Sire  Demur  :  le  château  de  Bel- 
Ion  appartient  à  M.  de  Tinteniac.  Alain  Morel  &  Alain  An- 
gal ,  nés  dans  cette  Paroiffe ,  occupèrent  le  Siège  Epifcopal  de 
Quimper  :  le  premier ,  dans  le  treizième  fiecle  ;  &  le  fécond , 
dans  le  quatorzième. 

RIEUX  ;  dans  un  fond  ,  au  bord  de  la  rivière  de  Vilaine  ; 
à  10  lieues  &  demie  à  l'Eft  de  Vannes,  fon  Evêché  ;  à  14  heues 
de  Rennes  ;  &  à  i  lieue  de  Redon  ,  fa  Subdélégation.  Cette 
Paroiffe  reffortit  à  Ploermel ,  &  compte  1800  communiants,  y 
compris  ceux  de  Saint-Jean  des  Marais,  fa  trêve  :  la  Cure  ell 
un  Prieuré  ,  qui ,  en  1630,  dépendoit  encore  de  l'Abbaye  de 
Saint-Gildas  de  Rhuisj  mais,  depuis,  elle  a  été  mife  à  l'alterna- 
Tomc  IK  R 


I50  RIE 

tive.  Le  territoire  offre  à  la  vue  des  terres  bien  cultivées  >  de 
bonnes  prairies ,  des  marais  j  la  forêt  de  Rieux ,  plantée  en  bois 
taillis  ;  quelques  autres  bois  ;  &  une  grande  quantité  de  landes , 
particulièrement  au  Nord-Oueft  de  fon  clocher. 

Rieux  étoit  une  ville  confidérable  autrefois  ,  &  par  fes  forti- 
fications 5  Se  par  l'avantage  de  fa  fituation  ,  avec  un  château 
très-fort  qui  dominoit  fur  la  Vilaine.  Il  n'y  a  plus  qu'un  des 
fauxbourgs  qui  porte  le  nom  de  ville  :  la  charrue  palfe  main- 
tenant fur  les  anciens  murs.  Il  y  avoir  un  pont  de  bois  fur  la 
rivière  ,  qui  apparemment  fe  rompoit  pour  le  paffage  des  navires* 
On  tient  que  des  frégates  de  trente  pièces  de  canons  pouvoient 
monter  jufqu'à  Rieux ,  qui  avoir  un  autre  fauxbourg  au  bout  du 
pont ,  dans  la  ParoifTe  de  Fégréac  -,  fauxbourg  dont  on  apperçoit 
encore  des  veftiges  &  du  tuilage  des  maifons.  Dom  Maurice  a 
donné  une  Géographie  ancienne  où  l'on  voit  que  Rieux  portoit 
un  autre  nom  dans  des  temps  plus  reculés  -,  nom  plutôt  celtique 
que  latin  ,  &  que  je  ne  me  rappelle  pas.  Ce  qui  ell  certain , 
c'eft  que  cette  ville  portoit  fon  nom  a6luel  dès  le  huitième 
fiecle.  Je  n'en  parlerai  ici  que  d'après  des  hifloriens  dignes  de 
foi,  les  titres  originaux,  &  les  cartulaires.  En  1490,  la  Reine 
Anne,  pour  fe  venger  ,  félon  toutes  les  apparences  ,  du  Maré- 
chal de  Rieux ,  ordonna  de  démoHr  les  châteaux  d'Elven ,  de 
Rochefort ,  d'Ancenis  ,  &  de  Rieux  ,  qui  appartenoient  à  ce 
Seigneur  ,  auquel  elle  accorda  pour  indemnité  une  fomme 
de  cent  mille  écus  :  il  ne  paroît  pourtant  pas  que  ces  ordres 
aient  été  exécutés  quant  au  château  de  Rieux ,  qui  ne  fut  com- 
mencé à  démohr  que  du  temps  de  la  Ligue.  Sous  le  miniftere 
du  Cardinal  de  Richelieu ,  on  commanda  dix-fept  Paroiifes  pour 
le  faire  fauter ,  mais  tout  cela  n'aboutit  qu'à  faire  tomber  quel- 
ques pans  de  murailles  dans  les  fofTés ,  où  ils  font  encore ,  &  à 
faire  pencher  le  donjon ,  qui  eft  refté  dans  la  même  attitude  , 
fans  qu'il  s'en  détache  une  feule  pièce.  Il  y  avoit  autrefois  un 
port  ou  baffin  fous  le  château ,  mais  ce  n'eit ,  depuis  bien  du 
temps ,  que  marécages  &  prairies.  Une  vieille  chronique  impri- 
mée ,  qu'on  lit  à  Redon ,  dit  que  le  bateau  que  l'on  conferve 
précieufement  dans  l'EgUfe  de  Saint-Sauveur ,  fe  préfenta ,  pouffé 
par  la  marée ,  dans  ce  port  ,  il  y  a  environ  dix  (iecles  , 
n'ayant  pour  nautonnier,  que  le  Crucifix,  plus  que  de  grandeur 
naturelle  ,  &  couvert  d'une  feuille  d'argent,  qui  occupe  le  reta- 
ble du  maître  -  autel  ;  mais  que  des  lavandières  le  repouffe- 
rent    avec   leur   battoir  ,    &c   qu'ainfi  renvoyé   il  monta  jufqu'à 


RIE  751 

Redon ,  011  les  Religieux  le  reçurent  :  il  avoit  donné  fa  malédic- 
tion au  port  de  Rieux  ;  &  dès-lors  de  pieux  Anachorètes ,  qui 
ne  meurent  pomt  Se  qui  Ibnt  toujours  mineurs  fans  l'être  jamais , 
ont  fî  bien  tiré  parti  de  ce  prétendu  miracle  ,  qu'ils  ont  attiré  à 
Redon  tous  les  navires  &  le  commerce ,  &  que  le  port  de  Rieux 
eft  devenu  défert  ;  en  quoi  ils  ont  été  bien  fécondés  par  la  né- 
gligence des  Seigneurs  de  Rieux ,  beaucoup  plus  occupés  alors 
de  guerre  &  du  Gouvernement  féodal  que  du  bien-être  de  leurs 
vafTaux. 

Alain  Rebré  ou  le  Grand,  fils  de  Pafquiten ,  Comte  de  Vannes, 
fut  d'abord ,  à  la  mort  de   fon  père ,  Comte   de  Vannes    autre- 
ment Broherec ,  &  Seigneur  de  Rieux  ,  l'une  des  principales  for- 
terefles  de  ce    Comté.  11  fut  élu   Duc  de  Bretagne  ,  par  toute 
la   nation ,  après  la  mort  de  Judicaël ,  en  879  :  Ion  féjour  ordi- 
naire étoit  le  château  de  Rieux ,  qu'il  avoit  fait  rebâtir  vers  l'an 
870 ,  &  dans  lequel  il  venoit  fe  délaffer  de  fes  expéditions  mi- 
litaires. L'ancien  cartulaire  de   l'Abbaye  de  Redon  dit ,  que ,  le 
fils  aîné  de  ce  Prince  étant  à  l'extrémité  ,  le  père  fe  rendit,  avec 
toute  fa  Cour ,  à  Saint-Sauveur ,  pour  y  faire   fa  prière   devant 
le    grand  Crucifix   dont  je   viens  de  parler  ;  que ,  pendant  qu'il 
en  étoit  occupé ,  toutes  les  cloches    de   l'Abbaye   fe   prirent   à 
fonner  d'elles-mêmes  ;  &  que ,  s'en  retournant  à  Rieux  ,  il  trouva 
des  gens  qui  venoient   lui   annoncer  la  parfaite  guérifon  de  ce 
cher  fils.  La  démarche  peut  être  vraie ,  elle  ell:  même  naturelle  ; 
mais  on   defireroit  fçavoir    quels  bras  invifibles  pouvoient   être 
foupçonnés  d'avoir  mis  les  cloches  en  branle.  J'ai  rapporté  cette 
anecdote  d'une  autre  manière ,  &  avec  des  circonftances  diffé- 
rentes à  l'article  Allaire,  Les  hiftoriens  ne  s'accordent  pas  fur  ce 
prétendu  prodige.  Alain  chafTa  les  Normands  qui  infeftoient  tout 
le  pays  ,  où  ils  s'étoient  rendus  redoutables  par  leurs  cruautés  , 
&:  les  repouffa  fi  vivement  que  ,  tant  qu'il  vécut ,  on  n'en  vit 
plus   reparoître  :  il  mourut    l'an   907  ,  &  on  s'apperçut  bientôt 
que  ce  Prince  n'étoit  plus.  Les  Normands  reparurent  en  fi  grand 
nombre  &  avec  tant  de  fureur  ,  qu'ils  refi:erent  les  maîtres ,  avec 
d'autant  plus  de  facilité  ,  que  de  tous  les  Princes  voifins ,  occupés 
eux-mêmes  à  s'en  'défendre  ,  aucun  ne  put  donner   fecours.  La 
famille  d'Alain  fut  obligée ,  comme  les  autres ,  de  céder  au  tor- 
rent des  Barbares  ,  de  pafier  la  mer  ,  &  de  fe  réfugier  dans  la 
•Grande-Bretagne  j  elle  y  refi:a  pendant  tout  le  temps  de  ces  défo- 
lations ,  qui  durèrent   tien  des   années ,  &   repalFa  enfin  :  mais 
pous  ne  voyons  pas  qu'aucun  des  fils  d'Alain  ait  occupé  le  Trône 


151  RIE 

du  père.  Raoul  I,  Tun  d'eux  &  peut-être  l'aîné  de  tous,  fut 
Comte  de  Vannes  &  Seigneur  de  Rieux  ;  Terre  qui  fît  enfuite 
tout  le  patrimoine  de  fa  famille.  Il  prenoit  le  titre  de  Prince, 
&  le  premier  qui  prit  le  nom  de  Rieux  fut  fon  fils,  Raoul  II, 
qui  paroît ,  avec  Alain ,  fon  fils ,  dans  une  charte  de  l'Abbaye 
de  Redon  ,  de  102 1  :  il  avoir  un  autre  fils,  nommé  Raoul ^  comme 
lui ,  qui  paroît  dans  les  aftes  de  ce  temps.  Dom  Lobineau  & 
Dom  Maurice  après  lui ,  font  remarquer  que ,  dès  le  dixième 
fiecle  ,  les  Seigneurs  de  Rieux  paroijfoiem  avec  éclat  à  la  Cour 
des  Ducs ,  &  quils  en  tenoient  une  confidérahle  cheT^  eux»  Guethe- 
noc  de  Rieux  comparut,  en  11 12,  avec  plufieurs  Chevaliers 
de  fa  fuite  ,  ferè  cum  omnibus  fuis  militibus ,  à  la  donation  que  le 
Duc  Conan  III  fit  à  l'Abbaye  de  Redon ,  pour  l'entretien  d'Alain 
Fergent ,  fon  père ,  qui  s'y  étoit  retiré. 

Les  Seigneurs  de  Rieux  ont  un  droit  de  coutume  fur  les  mar- 
chandifes  ,  bateaux  ,  &  barques  qui  montent  Se  defcendent  la 
rivière  de  Vilaine.  L'acquit  de  ces  droits  fe  faifoit  anciennement 
vis-à-vis  le  château  de  Rieux,  où  le  bureau  étoit  établi;  il  fe 
fait  préfentement  à  Redon ,  pour  la  commodité  des  marchands. 
Autrefois  ,  vis-à-vis  ce  château  ,  étoit  un  pont ,  auquel  aboutiffoit 
un  chemin  pavé  qu'on  apperçoit  encore  par  intervalle  :  il  con- 
duifoit  de  Fégréac  à  Rieux,  Il  ne  refle  plus  que  des  débris  du 
pont,  qui  fubfiftoit  encore  l'an  1543.  Les  marchandifes  voiturées 
par  terre ,  payoient ,  en  pafTant  deflus ,  un  devoir  ou  coutume  , 
dont  les  deniers  étoient  employés  à  fon  entretien.  Quelques-uns 
prétendent  que  l'origine  de  ce  droit  efl:  de  1281  ,  &  que  les 
Seigneurs  de  Rieux  ne  fe  chargèrent  des  réparations  à  faire  à 
ce  paffage  ,  que  moyennant  certaines  redevances,  qui  leur  furent 
accordées  par  le  Duc  Jean  I.  On  trouve  ,  dans  les  archives  du 
château  de  Nantes ,  un  afte  du  lundi  d'après  la  Converfion  de 
Saint  Paul ,  qui  dit  que  Geoffroi  de  Rieux  avoir  été  en  procès 
avec  le  Duc ,  à  l'occafion  du  pont  de  Rieux ,  que  Geoffroi  ne 
vouloir  point  entretenir  &  qu'il  avoir  remis  au  Duc.  Par  le 
même  aère  il  le  rend  à  Guillaume  ,  fils  de  Geoffroi ,  qui  promet 
&  s'oblige  ,  fur  tous  fes  biens,  de  le  tenir  en  bon  état  j  mais  cette 
pièce  ne  parle  point  des  droits  exigibles  pour  ce  paffage.  Quoi 
qu'il  en  foit ,  en  1 543  ,  ce  pont  ayant  été  détruit  ,  on  y  fubffi- 
tua  un  bac ,  qui  eff  encore  affermé  au  profit  des  Seigneurs  de 
Rieux.  Le  paffage  d'Auqueferre ,  fur  la  rivière  d'Ouff ,  dans  le 
territoire  de  Rieux  ,  fait  partie  de  cette  Seigneurie.  Anciennement 
il  avoit  été  afféagé  aux  habitans  du  village  de  fon  nom,  fous 


RIE  ijî 

Tobligation  d'y  entretenir  des  batCv^ux ,  &  de  payer  au  Sire  de 
Rieux  une  rente  annuelle  de  quatre  deniers  ;  rente  dont  ils 
rendirent  des  aveux  aux  années  1407  &  1504.  Ce  paffage  fut 
ainfi  poiïédé  par  les  habitants  jufqu'à  l'année  1 542  ,  qu'ils  l'aban- 
donnèrent :  il  retourna  donc  à  la  dilpofition  du  Seigneur  de 
Rieux  ,  qui  le  donna  ,  aux  mêmes  conditions ,  au  Sieur  du  Pleflis- 
Limeur ,  qui  en  rendit  incontinent  aveu  à  la  Seigneurie.  Ses  def- 
cendants  le  poffederent  jufqu'en  1670  ,  que  ,  la  maifon  du  Plefîis 
ayant  été  vendue  judiciairement ,  le  Seigneur  de  Rieux  retira 
le  tout  par  droit  de  fief.  En  1672  ,  on  propofa  de  conftruire 
un  pont  dans  cet  endroit  :  la  pierre  étoit  déjà  taillée  &  les 
matériaux  tous  préparés  pour  l'exécution  de  l'entreprife  ,  lorfque 
l'on  fentit  que  cet  établiflement  nuiroit  à  la  navigation,  &  le 
projet  fut  abandonné.  Ce  pafTage  eft  encore  affermé  à  un  par- 
ticulier ,  qui ,  en  conféquence  de  fa  ferme ,  eft  obligé  à  une  re- 
devance dont  l'acquit  fe  fait  d'une  manière  bizarre.  La  nuit  de 
Noël ,  ce  palTager  eft  obligé  de  fe  trouver  à  la  MefTe  de  minuit, 
dans  l'Eglife  de  Saint-Sauveur  de  Redon ,  &  il  fe  place  à  l'en- 
trée du  chœur.  Entre  les  deux  élévations ,  les  Diacres  lui  crient 
à  haute  voix,  par  trois  fois:  Pajfager d' Auque ferre ^  P^J^l  ^^  ^''^^^ 
que  vous  devei  au  Seigneur.  Le  fermier  obéit ,  &  met  fur  l'autel 
quelques  pièces  de  monnoie.  Cette  cérémonie  ,  aufîi  ridicule 
qu'indécente ,  feroit  croire  que  les  Moines  de  Redon  feroient  les 
Seigneurs  de  ce  pafTage.  J'ai  demandé  à  ce  fujet  des  inflru6tions 
que  je  n'ai  pu  obtenir. 

Roland  de  Rieux  avoit  amené  des  Religieux  Trinitaires  de  la 
Terre-Sainte  fur  la  fin  du  douzième  fiecle  ;  ils  furent  entretenus 
dans  le  château  ,  oii  ils  firent  l'Office  pendant  plus  d'un  fiecle  ,  & 
jufqu'en  134c.  On  voit  même  que,  vers  la  fin  du  treizième 
fiecle,  Anne  de  Rieux,  fille  de  cette  maifon,  morte  en  13 18, 
le  19  Avril,  leur  avoit  déjà  donné  des  rentes  &  une  Chapelle 
garnie ,  Capella  mun'ita.  Le  1 6  Janvier  1345,  Jean  de  Rieux  , 
premier  du  nom  ,  fonda  ,  &  fit  bâtir  à  fes  frais  auprès 
de  fon  château ,  l'Eghfe  &  le  Couvent  de  ces  Rehgieux ,  & 
dota  leur  Monallere  de  terres,  prairies,  rentes,  fournitures  de 
poifTon  &  bois ,  pour  la  fubfifiance  de  neuf  Religieux ,  à  la 
charge  d'acquitter  les  prières  portées  dans  l'afte  de  fondation , 
de  tenir  de  lui  &  de  fes  fuccefTeurs  tous  ces  biens ,  &  de  ne 
pourfuivre ,  en  première  infiance ,  fes  vafTaux ,  que  par  fa  Cour. 
La  féconde  fondation ,  qui  efl:  un  fupplément  à  la  première  , 
fut  faite  par  Jean  de  Rieux,  fils  du  précédent,  le  26  Juin  14».^: 


154  RIE 

ce  Seigneur  ajouta  de  nombreux  revenus  aux  anciens,  aux 
mêmes  conditions ,  8c  les  Religieux  fe  fournirent  à  lui  obéir , 
comme  les  vaflaux  font  tenus  de  faire  à  l'égard  de  leur  Seignv  ur^ 
&  même  ils  s'obligèrent  à  lui  préfenter  ,  chaque  année  ,  une 
paire  de  gants  blancs ,  &  à  l'appeller  aux  aflemblées  pour  1  élec- 
tion des  Minières  j  aflemblées  dans  lefquelles  fon  fuffrage  vau- 
droit  deux  voix.  Les  Seigneurs  de  Rieux  ont  toujours  joui  de 
ce  droit.  Il  y  avoit  jadis  un  ancien  Prieuré  de  Bénédiftins ,  au  bout 
du  fauxbourg  de  Rieux  :  ce  Prieuré  n'exifte  plus  que  pour  le 
produit ,  l'Eglife  ayant  été  abandonnée  à  la  Paroifle. 

La  Terre  de  Rieux  a  titre  de  Comté,  &  relevé  du  Roi  :  elle 
s'étend  dans  les  diocefes  de  Vannes  &  de  Nantes  j  quinze  Pa- 
roifles ,  la  plupart  très-grandes  ,  en  relèvent ,  &  cinq  rivières 
navigables  la  traverfent.  La  Juftice  s'y  rendoit  dans  trois  Sièges  ^ 
qui  font  ;  Rieux ,  Peillac ,  &  Fégréac  :  ce  dernier  vient  d'être 
réuni  à  celui  de  Rieux.  Lobineau  dit  que  Peillac  portoit  titre 
de  Comté  dès  le  dixième  iiecle  :  ce  qui  le  perfuaderoit  encore  ^ 
c'efl:  que  deux  Terres,  qui  en  étoient  dérivées  très-anciennement 
par  inféodations ,  ont  toujours  porté  titre  de  Vicomte ,  &  qu'elles 
le  portent  encore.  J'ai  fait  quelques  voyages  dans  ce  pays  ,  mais 
peu  de  féjour  ;  je  n'y  ai  rien  remarqué  de  plus  ancien  que  le 
château  de  Rieux,  û  ce  n'efl  le  grand  chemin  qui  doit  être  de 
conftruftion  romaine  ;  il  reflemble  parfaitement  aux  autres  ou- 
vrages qui  nous  reftent  de  ces  conquérants.  Je  ne  l'ai  vu  que 
dans  la  forêt  de  Rieux  ,  &  ne  l'ai  fuivi  qu'une  demi-lieue  de  chemin , 
n'ayant  point  eu  d'occafîon  de  le  fuivre ,  ni  en  avant ,  ni  en  ar» 
riere.  On  dit  qu'il  partoit  de  Nantes  ,  paffoit  le  pont  de  Rieux , 
&  aboutifl!bit  à  Vannes.  Le  vulgaire ,  pour  qui  tous  ouvrages  font 
égaux ,  veut  que  ce  foit  la  Reine  Anne  qui  ait  fait  conftruire 
celui-ci ,  pour  voyager  d'une  de  ces  villes  à  l'autre ,  fans  penfer 
combien  cette  confliruftion  étoit  au  deflus  des  forces  d'une  Sou- 
veraine de  Bretagne.  D'ailleurs ,  dans  quel  temps  cette  PrincefTe 
àuroit-elle  fait  exécuter  cette  conilruftion  ?  Auroit-ce  été  pendant 
une  minorité  orageufe ,  &  troublée  fans  cefTe  par  mille  traverfes 
&  par  des  armées  étrangères  !  car  c'eft  Tunique  temps  qu'elle  ait 
habité  la  province.  Une  autre  raifon  contre  cette  idée  ,  c'eft  que  les 
annales  &  les  archives  de  la  nation  auroient  confervé  le  fouvenir 
d'une  conftruftion  de  cette  nature,  &  il  ne  fe  trouve  aucun  mo* 
nument  qui  en  fafîe  mention.  Avouons  donc  que  c'eft  une  erreur 
d'attribuer  a  la  Reine  Anne  ces  ouvrages,  &  les  autres  de  la 
même  efpece  qui  fe  trouvent  dans  la  province.  Sur  les  bords  de 


R  I  E  =  R  I  M  135 

la  Vilaine,  du  côté  oppofé  &  pour  ain^î  dire  en  face  de  la 
ville ,  eft  une  butte  de  terre  très-élevée  -,  ouvrage  des  hommes 
plutôt  que  de  la  nature.  On  ne  fçait  à  quel  ufage  elle  étoit 
deilinée  ;  mais  il  eu  à  croire  qu'elle  ell  d'une  grande  antiquité. 
Les  ténèbres  qui  couvrent  l'origine  de  la  ville  de  Rieux  ,  qui 
peut-être  étoit  une  ville  confidérable  des  Celtes,  rendent  inu- 
tiles toutes  les  conje6lures  que  l'on  pourroit  faire  fur  cette 
montagne. 

J'aurois  defiré  joindre  ici  la  généalogie  de  la  maifon  de  Rieux ^ 
qui  n'a  point  encore  été  imprimée  exa6lement  ;  mais  ,  comme 
mes  connoifTances  fur  cette  famille  n'étoient  point  alTez  éten- 
dues ,  j'aurois  craint  de  joindre  des  inexactitudes  à  celles  qui 
fe  trouvent  dans  les  hiftoriens  qui  nous  ont  précédé  :  je  me 
bornerai  à  dire  qu'elle  a  l'avantage  de  tirer  fon  origine  de  la 
maifon  fouveraine  de  Bretagne  ;  elle  réunit  la  gloire  d'être  al- 
liée à  l'iUuftre  maifon  de  Bourbon  ,  &  d'avoir  produit  des 
Maréchaux  de  France  &  de  Bretagne.  Certainement  il  efl:  peu 
de  familles ,  dans  l'Europe ,  qui  puilTent  lui  difputer  pour  l'an- 
cienneté. Ses  armes  font  :  contre-écartelé  de  Bretagne,  fur  le 
tout  de  gueules  à  deux  faces  d'or  qui  eil  Harcourt  -,  &  ,  pour 
devile ,  à  toute  heure  ,   Rieux, 

Outre  la  haute-Juftice  du  Seigneur ,  on  connoît  encore  dans  le 

territoire  de  Rieux  celles  de  Commenant ,  haute-Juftice  ,  à  M.  de 

la    Bedoyere  j   de  la  Jouardais  -  Beaulieu ,  moyenne-Juftice  ,  oc 

des   Allaires ,  moyenne-Jultice  ,   à  M.  de  la  HoufTais  ;  &  de  la 

Tabariais,  moyenne- Jullice ,    à   M.    de    Folval.  En    1530  ,   on 

voyoit  dans    cette    Paroifle   les    maifons  nobles  des  Grais  ,   au 

Sieur  de  Carmenan  :  de  Launay  &    de  la  Bourrelais,  à  Marie 

de  la  Bourrelais  ;  (  cette  maifon  s'appelle  aujourd'hui  la  Boujfe- 

lais ,    &    appartient  à  M.   de  Forge  :  )  la  Lande    appartenoit 

au  Sieur  de  Helfau  j   Guengo ,    au  Sieur  de  Guengo  j  Limeur  , 

au  Sieur    de  Limeur  ;   la  Ricardais ,  à  François  de  Chambalan  j 

la  Villeneuve ,  au  Sieur  du  Pleffis-Saint-Dolai  ;  la  Terre ,  à  Jean 

Gaberit  j  &  Rohedas ,  à  N.,..  de  la  Pommeraye.  ' 

» 

RIMON  ;  au  bord  de  la  rivière  de  Couefnon  ;  à  5  lieues  au 
Sud-Eft  de  Dol ,  fon  Evêché  j  à  7  lieues  de  Rennes  ;  &  à  1 
iieues  d'Antrain  ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroifle  ,  qui  fe  trouve 
enclavée  dans  le  diocefe  de  Rennes ,  relevé  du  Roi ,  refTortit 
à  Bazouges ,  &  compte  600  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'Or- 
dinaire.  Le   territoire,  pays    couvert    d'arbrçs  &  builTons  ,    efl 


i3é  RIM  =ROC 

alTez  bien  cultivé ,  &  produit  du  grain ,  du  foin ,  Se  du  cidre. 
La  maifon  noble  du  Bois-Baudri  appartenoit,  en  1350  ,  à  Guil- 
laume du  Bois-Baudri,  François  du  Bois-Baudri  époufa ,  au  mois 
de  Juillet  1505  ,  Ifabeau,  fille  de  Guillaume  de  Sevigné  &  de 
Jacquette  de  Montmorenci.  François  du  Bois-Baudri  fut  Che- 
valier de  Malte,  en  161 5.  Gilles  du  Bois-Baudri,  Sieur  de 
Langan  ,  étoit  Avocat  général  au  Parlement  de  Bretagne  ,  en 
1 670  ;  cette  Terre  a  une  haute- Juftice ,  &  appartient  à  Made- 
jnoifelle  de  la  Ville-Théar  :  la  maifon  de  Montmoron ,  avec  haute- 
Juftice ,  appartenoit ,  en  1280,  à  Jamet  de  Sevigné  j  en  1 371, 
à  Jean  de  Montmoron  ,  Ecuyer  dans  la  Compagnie  de  Bertrand 
du  Guefclin  j  &c  aujourd'hui,  à  M.  du  Haflai. 

ROCHEFORT  j  petite  ville  Se  trêve  de  la  Paroiffe  de  PIu- 
herHn ,  près  la  rivière  d'Ars  ;  à  7  lieues  à  l'Efl  de  Vannes ,  fon 
Evêché  j  à  1 5  lieues  de  Rennes  ;  &  à  4  Heues  &  demie  de 
Redon ,  fa  Subdélégation.  Le  féjour  de  l'endroit  eu.  fort  agréa- 
ble ;  on  y  remarque  un  très -beau  château  Se  une  Collégiale* 
Le  plus  ancien  Seigneur  de  Rochefort ,  que  nous  connoiflions , 
eft  Thibaud,  qui  vivoit  en  1280;  il  portoit  pour  armes  j  vairé 
d*or  Se  d'azur.  Cette  Seigneurie  fut  érigée  en  Châtellenie  ,  l'an 
1304  ,  par  le  Duc  Jean  I ,  en  faveur  de  Thébaud,  auquel  Artur 
II,  par  fes  lettres  de  Tan  1309,  donna  la  qualité  de  Bachelier. 
Guillaume  de  Rochefort  fut  pourvu  de  l'Evêché  de  Saint-Pol-de- 
Léon.  L'an  1349,  la  Seigneurie  de  cette  ville  pafla  dans  la 
maifon  de  Rieux ,  par  le  mariage  de  Jean  III  du  nom ,  Sire  de 
Rieux,  avec  Jeanne  de  Rochefort,  Baronne  d'Ancenis  ,  le  16 
Février  1374.  L'an  1440 ,  Jean  ,  Sire  de  Rieux  ,  fonda  le  Monaf^ 
tere  des  Cordeliers  de  Saint-François  de  BodeHo,  à  trois  quarts 
de  lieue  de  Rochefort  :  c'eft  une  maifon  de  force.  Jean  ,  Sire 
de  Rieux  Se  de  Rochefort,  Maréchal  de  Bretagne,  ordonna, 
par  fes  lettres  du  30  Mars  1498,  de  dire  tous  les  jours ,  pen- 
dant fa  vie,  en  l'Eglife  de  la  Tronchaye,  fituée  dans  la  ville 
de  Rochefort,  Matines,  Prime,  Tierce,  Sexte,  None,  Vêpres^ 
Se  Compiles,  avec  une  MefTe  votive,  à  Diacre  Se  Sous-Diacre, 
comme  dans  les  EgUfes  Cathédrales  ou  Collégiales  :  il  défigna 
même  les  Meffes  qu'on  devoit  célébrer ,  Se  les  prières  Se  hymnes 
qu'on  devoit  joindre  à  l'Office.  En  conféquence  ,  il  créa  fix  Cha- 
pelains Se  un  Doyen  ,  Se  afligna  aux  premiers  trente  livres 
monnoie,  de  rente.  Se  aux  féconds  quarante  livres,  Se  quinze 
livres  qu'il  promit  pour  l'entretien  du  luminaire  3  ce  qui  faifoit  un 

total 


R  O  C  =  RO  H  137 

total  de  deux  cents  trente -cinq  livres  :  le  Sire  de  Rieux  le 
réferva  le  droit  de  congédier  ceux  des  Chapelains  qui  ne  s'ac- 
quitteroient  pas  de  leur  devoir ,  en  leur  payant  leurs  honoraires 
pendant  le  temps  qu'ils  auroient  paffé  au  fervice  de  cette  Cha- 
pelle. Comme  cette  fondation  n'étoit  que  pour  la  vie  du  Maré- 
chal ,  Claude  de  Rieux  ,  fon  fils ,  par  fes  lettres  du  premier  Juin 
1527  ,  la  rendit  perpétuelle,  &  voulut  que  cette  Collégiale  fôt 
deflervie  par  un  Doyen  ,  un  Chantre ,  cinq  Chanoines  ,  quatre 
Chapelains  ,  &  deux  Enfants  de  chœur.  Il  fe  réferva  la  pré- 
fenration  du  Doyenné ,  &  laifTa  la  collation  des  Prébendes  au 
Chapitre ,  qu'il  dota  de  fix  cents  dix  livres  de  rente ,  rachetable 
pour   la  fomme  de  douze  mille  deux  cents  livres. 

Au  mois  de  Novembre  1592,  le  Prince  de  Conti  &  le  Ma- 
réchal d'Aumont  alîiégerent  les  ville  &  château  de  Rochefortj  mais 
cette  place  réfifla  à  leurs  attaques  ,  &  à  plus  de  deux  mille  cinq 
cents  coups  de  canons  qui  ne  purent  faire  une  brèche  pour 
l'aflaut.  Le  10  Décembre  fuivant ,  le  Duc  de  Mercœur  fit 
lever  le  ficge.  En  1594,  N....  de  Talhouet  prit  le  château,  & 
le  fit  rafer.  Il  a  depuis  été  rebâti  fur  fes  ruines ,  &:  efl  tombé 
dans  la  maifon  de  Nétumiere ,  qui  en  jouit  aujourd'hui.  Roche- 
fort  ,  Keralio  ,  &  annexes  ,  forment  une  haute-Jullice  ,  qui  appar- 
tient à   Madame  de   Nétumiere. 

ROCHE-MENTRU  ;  fur  une  hauteur  ;  à  1 2  lieues  au  Nord-Efl 
de  Nantes,  fon  Evêché  &  fon  refibrt  ;  à  16  heues  de  Rennes; 
&  à  6  lieues  de  Chateaubriand  ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte 
200  communiants  :  la  Cure  eu  un  Prieuré  préfenté  par  l'Abbé 
de  ToufTaint  d'Angers.  Ce  territoire  ,  qui  joint  la  province 
d'Anjou  ,  eft  très-peu  étendu  &  mal  cultivé  ;  on  y  voit  beau- 
coup de  landes,  dont  on  pourroit  tirer  parti;  &  un  vallon  coupé 
par  le  ruifTeau  de  Mandie  ,  qui  traverfe  la  ParoifTe  ,  &  qui  fer- 
tilife  les  prairies  qui  font  ,fur  fes  bords.  Les  habitants  font  du 
cidre.  La  haute-Juftice   de  l'endroit  appartient  à  M.  le  Prieur. 

ROHAN  ;  petite  ville,  avec  titre  de  Duché-Pairie  de  France , 
fur  la  rivière  d'Ouft  ;  à  i  o  heues  au  Nord  de  Vannes  ,  fon 
Evêché;  à  17  lieues  de  Rennes;  &  à  3  Heues  de  Pontivi, 
fa  Subdélégation.  Cette  ville  refîbrtit  au  Parlement ,  &  compte 
1200  communiants,  y  compris  ceux  de  Saint-Gouvri ,  fa  trêve: 
la  Cure  eft  à  l'alternative.  M.  le  Duc  de  Rohan-Lliabot  en 
ell  le  Seigneur.  Le  territoire  renferme  des  terres  bien  cultivées. 
Tome  IV*  S 


158  ROH 

des  prairies  ,    des  bois  ,   &  des  landes.    On    y  fait  du  cidre  5 
il  s'y  tient  un  marché  par  femaine  &  plufieurs  foires  par  an. 

La  maifon  de  Rohan  eft  une  des  plus  anciennes  &  des  plus 
illuftres  de  la  Bretagne  ;  elle  s'ell  ,  de  tout  temps  ,  mainte- 
nue dans  le  plus  grand  éclat ,  tant  par  elle-même  que  par  fes 
alliances.  Ceux  de  cette  famille  ont  rang  de  Princes  en  France , 
en  qualité  de  defcendants  des  premiers  Souverains  de  Bretagne , 
comme  il  eft  conflaté  par  les  aftes  du  Parlement  général  af^ 
femblé  à  Nantes,  l'an  1087-,  par  le  Duc  Alain  Fergent ,  qui 
y  régla  les  rangs  des  Evêques  &  des  Barons.  Un  a8:e  de  ce 
Parlement  ,  qui  fait  mention  de  cette  reconnoilTance ,  &  qui  fe 
trouve  dans  les  archives  de  la  Chambre  des  Comptes  de  Bre- 
tagne ,  fut  reconnu  pour  authentique  par  le  Roi  Louis  XIV , 
féant  en  fon  Confeil  ,1e  premier  Avril  1692.  Cette  famille  pof- 
fede  ,  depuis  près  -de  800  ans ,  les  biens  qui  lui  tombèrent  en 
partage  j  &  fes  domaines ,  loin  de  diminuer  par  le  laps  de  temps, 
n'ont  fait  qu'augmenter  jufqu'à  nos  jours.  Quelques  hiftoriens 
ont  donné  le  nom  de  Royaume  aux  Terres  de  la  maifon  de 
Rohan.  Ils  entendoient ,  félon  toutes  les  apparences ,  les  Vicomtes 
de  Rohan  &  de  Porhoët ,  qui  fe  joignent  &  font  effeftivement 
une  alTez  grande  étendue  de  pays  ,  puifque  la  Vicomte  de 
Rohan  a,  fous  fon  fief,  112  Paroiffes,  qui  en  relèvent  proche- 
ment  &  qui  relTortilTent  aux  Barres  de  cette  Seigneurie.  Le 
grand  nombre  des  vaflaux  obligea  le  Vicomte  de  multiplier  leurs 
Jurildiftions.  En  1479,  ^^  Seigneur  de  Rohan  établit  des  Sièges 
à  Pontivi ,  à  Gouarec  ,  à  Corlai ,  à  Loudéac ,  &  à  Baud.  Sous 
les  Ducs  ;  quand  ces  Princes  mettoient  quelques  taxes  fur  les 
vins  vendus  en  détail ,  ou  même  des  fouages  ,  des  tailles ,  & 
autres  impôts  fur  les  fujets  de  la  province  j  les  vaffaux  de 
Rohan ,  Peret ,  Noyai ,  Pontivi ,  &c.  étoient  exempts  de  payer 
ces  impôts  ,  à  raifon  de  l'indépendance  de  la  Vicomte  de  Rohan. 
Le  château  de  Rohan  fut  bâti,  l'an- 11 04,  par  le  Vicomte  de 
Porhoët.  Alain  I  du  nom  fut  aufîi  le  premier  des  Seigneurs  de  cette 
famille  qui  prit  le  nom  de  Rohan  :  il  portoit  le  titre  de  Prince , 
comme  il  eft  prouvé  par  plufieurs  aftes.  Il  affifta ,  l'an  11 27, 
avec  le  Duc  Conan  III ,  à  la  bénédiftion  de  l'Eglife  de  Saint- 
Sauveur  de  Redon,  qui  avoir  été  fouillée  par  Olivier  de  Pont- 
château  &  Savari  de  Donges.  La  même  année  ,  Alain  ,  Vicomte 
de  Rohan ,  fonda ,  dans  le  bourg  de  Rohan ,  à  la  porte  de  fon 
château ,  un  Prieuré ,  qu'il  donna  aux  Moines  de  Marmoutier , 
établis  dans  le  Prieuré  de  Saint-Martin  de  JolTelin. 


R  OH  =:R  O  M  13^ 

L'an  1345  ,  le  Comte  de  Northampton  ,  envoyé  en  Bretagne 
par  le  Roi  d'Angleterre  au  fecours  du  Comte  de  Montfort ,  prit 
le  château  de  Kohan ,  le  fit  piller  &  brûler.  Cette  place  fut 
rebâtie ,  Se  pafToit  pour  une  des  plus  fortes  de  la  province ,  dans 
le  quinzième  fiecle.  En  1456  ,  le  Cardinal  d'Avignon,  Légat 
en  France  ,  permit  au  Vicomte  de  Rohan  d'avoir  un  autel  por- 
tatif, pour  y  faire  célébrer  la  MefTe.  Le  Roi  Charles  VIII, 
par  les  lettres  données  à  Amboife ,  le  8  Mars  1495  ,  en  faveur 
du  Vicomte  de  Rohan,  lui  permit  de  lever,  pendant  cinq  ans, 
le  droit  d'impôt  &  billot  fur  les  vaflaux  de  fes  Seigneuries ,  pour 
lui  faciliter  les  moyens  de  réparer  fes  places  &  châteaux ,  fitués 
dans  le  Duché  de  Bretagne  ,  lefquels  avoient  été  en  partie  dé- 
molis &  ruinés  par  les  guerres.  La  Vicomte  de  Rohan  fut  érigée 
en  Duché-Pairie  par  le  Roi  Henri  IV,  l'an  1^03,  en  faveur  de 
Henri ,  Vicomte  de  Rohan ,  fon  coufin  ,  petit-fils  d'Ifabeau  d'Al- 
bret ,  fœur  de  la  Reine  de  Navarre.  Le  Duché  qui  s'étend  dans 
les  Evêchés  de  Vannes ,  de  Saint-Brieuc ,  &  de  Saint-Malo ,  eft 
diftingué  par  des  coutumes  particulières ,  qu'on  nomme  ufances  de 
Rohan.  Il  efi:  pafle  dans  la  maifon  de  Chabot,  en  1645  ,  par  le 
mariage  de  Marguerite  ,  fille  unique  &  héritière  de  Henri ,  Duc 
de  Rohan  ,  avec  Henri  Chabot ,  Gouverneur  d'Anjou ,  qui  prit 
le  nom  de  Rohan ,  &  en  faveur  duquel  le  Roi  Louis  XIV  re- 
nouvella  l'éreftion  de  cette  Pairie.  Cette  maifon  a  contra6lé 
plufieurs  alliances  avec  la  maifon  Royale  &  les  autres  familles 
Souveraines  de  l'Europe.  Elle  portoit  jadis ,  au  premier  de  gueu- 
les ,  aux  raies  d'efcarboucles  pommetés  d'or ,  à  la  double  chaîne 
en  fautoir  de  même,  qui  efi:  Navarre;  au  quatrième  de  France, 
au  bâton  compofé ,  d'argent  &  de  gueules  ,  brochant  fur  le  tout ,. 
qui  ell  Evreux  j  au  deuxième  &  troifieme  de  gueules ,  à  neuf 
macles  d'or  3.  3.  3.  qui  eft  Rohan:  fur  le  tout  d'argent,  à  la 
guivre  ou  biffe  ondée  d'azur  en  pal ,  jettant  un  enfant  de 
gueules  par  la  bouche ,   qui  eft  Milan» 

ROMAGNÉ  ;  fur  un  coteau ,  &  fur  la  route  de  Rennes  à 
Fougères;  à  8  lieues  au  Nord-Oueft  de  Rennes ,  fon  Evéché;, 
&  à  I  lieue  de  Fougères ,  fa  Subdélégation  &  fon  reifort.  Cette 
Paroifle  relevé  du  Roi ,  &  compte  1500  communiants;  la  Cure 
elt  préfentée  par  l'Evêque.  Les  Innclcs  occupent  tout  le  terrein 
qui  elt  au  Nord  &  à  l'Ouefl:  de  fou  bourg  :  au  Sud  &  à  l'Ell  font 
les  terres  labourées,  des  prairies  ,  des  arbres  fruitiers  &  autres,  & 
plufieurs  ruilTeaux  qui  vont  fe  jetter  dans  la  rivière  de  Couefiion^ 


ï4o  ROM 

ROMAZI  ;  au  bord  de  la  rivière  de  Couefnon ,  fur  la  route 
de  Rennes  à  Saint- James ,  en  Normandie  ;  à  7  lieues  au  Nord- 
Nord-Efl:  de  Rennes ,  fon  Evêché  j  &  à  2  lieues  d'Antrain ,  fa 
Subdélégation  &  fon  relTort.  Cette  Paroiffe  relevé  du  Roij  on 
y  compte  300  communiants  :  la  Cure  eft  un  Prieuré  préfenté 
par  l'Abbé  de  Saint-Florent  d'Angers.  Son  territoire  ,  peu  étendu , 
ofFre  à  la  vue  des  terres  cultivées  ,  des  prairies  ,  des  landes , 
&  des  arbres  fruitiers  qui  produifent  beaucoup  de  cidre. 
Auprès  du  bourg,  eft  un  chemin  Romain,  au  fujet  duquel  j*ai 
demandé  des  inftruftions  que  je  n'ai  pu  obtenir.  Le  21  Juillet 
1596,  René  de  Montbarot,fe  rendant  du  château  du  Bordage 
à  Pontorfon ,  où  il  alloit  tenir  fur  les  fonts  de  baptême  l'enfant 
de  Montgommeri ,  les  habitants  de  Romazi,  voyant  ce  Gentil- 
homme pafler  avec  fa  fuite,  crurent  que  c'étoient  des  ennemis, 
leur  dirent  des  injures  ,  &  leur  tirèrent  même  des  coups  de  fufils, 
mais  fans  bleffer  perfonne.  Mombarot  fe  vengea  bien  de  cette  in- 
fulte  ,  après  la  cérémonie  du  baptême  :  ilrevmt  à  Romazi,  bien  ac- 
compagné ,  tua  quatorze  des  habitants  ,  &  fit  mettre  le  feu  au 
bourg ,  dont  une  partie  des  maifons  fut  confumée. 

ROMILLEYjà  II  lieues  au  Sud  de  Saint  Malo,  fon  Evêché  5 
à  3  lieues  &  demie  de  Rennes ,  fon  relTort  ;  &  à  2  lieues  de 
Montfort ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  2000  communiants  : 
la  Cure  ell  préfentée  par  l'Abbé  de  Saint-Jacques  de  Montfort. 
Le  territoire ,  couvert  d'arbres  &  buiifons  &  d'une  fuperficie 
plane ,  eft  très-bien  cultivé  ;  il  produit  des  grains  de  toutes  ef- 
peces ,  beaucoup  de  foin  ,  &  le  plus  excellent  cidre  du  canton.  Ce 
pays  eil  marécageux  ;  on  y  remarque  un  bois  taïUis ,  qui  peut 
avoir  une  lieue  &  demie  de  circuit.  Il  s'y  tient  quatre  foires  par  an. 

Romilley  eft  très-ancien  :  c'étoit  autrefois  une  ville  {ituée 
auprès  du  château,  qui  étoit  encore  très-fort  en  1480.  C'eft  une 
Châtellenie  qui  relevé  du  Roi  :  elle  étoit  jadis  du  nombre  de 
celles  qui  étoient  tenues  baronnéaiwient  ,  avec  le  droit  de  fe  dé- 
livrer à  congé  de  perfonne  &  de  menée  à  la  Barre  &  Sénéchauflee 
de  Rennes  ;  ce  qui  étoit  le  privilège  des  Terres  tenues  baronnéau- 
ment.  Celle-ci  fut  long-temps  pofTédée  par  les  Seigneurs  de  Laval. 
En  1 5 1  o  ,  elle  appartenoit  à  Jean  de  Laval ,  Sire  de  Chateau- 
briand j  elle  efl  aujourd'hui  à  M.  de  Saint-Gilles-Perronnet.  Le 
château  de  Saint-Gilles-Perronnet  eft  une  Seigneurie  de  la  Pa- 
roille,  qui  paffe  pour  une  des  plus  diftinguées  du  re (Tort  de  Rennes  j 
elle  appartenoit,  en   1350,  à  Rodolphe  de  Saint-Gilles.  Gilles- 


R  O  M  =ROS  141 

Olivier,  fon  fils,  fut  Gentilhomme  de  la  Chambre;  Françoife 
de  Saint-Gilles  époufa,  en  1607,  Pierre  de  Chateaubriand.  Elle 
a  une  haute,  moyenne  &  balle -Juftice  ,  &  avoit  encore  un 
château  fortifié  en  1500;  il  appartient  à  M.  de  Saint-Gilles-Per- 
ronnet ,  qui  poflede  aufli  la  Durantais-Perronnet ,  hauteJuftice. 
La  maifon  noble  de  Vaunoife  n'eil:  pas  moins  ancienne.  Jean  de 
Vaunoife  ,  né  dans  cette  maifon  ,  fut  d'abord  Abbé  de  Saint- Jac- 
ques de  Montfort,  puis  Evêque  de  Dol ,  l'an  1189.  ^^  ^^^  ^^ 
fa  confidération  que  Geoffroi ,  Seigneur  de  Montfort  ,  céda  à 
l'Abbaye  de  ce  nom  tous  les  droits  qu'il  avoit  fur  la  Terre  de 
Vaunoife.  En  1520,  elle  appartenoit ,  avec  la  métairie  Chevrier, 
à  François  de  Vaunoife  ;  elle  a  une  moyenne-JulHce  qui  s'exerce 
à    Plumeleuc  ,   &:  appartient  à   M.  de  Saint-Gilles- Perronnet. 

La  Melléere  ,  avec  haute-Jufiice ,  jadis  pofTédée  par  les  Tem- 
pliers ,  fait  préfentement  partie  d'une  Commanderie  de  l'Ordre 
de  Malte  :  cette  Terre  étoit  noble  d'ancienneté  dès  le  quator- 
zième fiecle.  Le  Breilhay  appartenoit ,  en  i  5 1 2  ,  à  Bertrand  de 
Keradreux.  Dans  le  même  temps,  la  Couplaye  appartenoit  à 
Pierre  de  Partenay  :  Launaye ,  jadis  à  Jean  de  Saint-Pern  ;  en 
1512,  à  Guillaume  Penelais  :  le  Guirper ,  à  Guillaume  Duguéj 
la  Haye,  à  Michel  le  Bart  ;  Quinformer ,  à  Bertrand  de  Quin- 
former  ;  la  Couvrie ,  à  Bertrand  Gaefdon  ;  la  Touche  ,  à  Jean 
de  Bouquille  ;  la  Geluezaye  ,  à  N....  ;  la  Cage  ,  à  N....  j  le  Breil- 
hay ,  moyenne-Juftice ,  appartient  à  M.  de  Cacé. 

ROSCANVEL;  à  10  lieues  au  Nord-Ouefl  de  Quimper ,  fon 
Evêché  &  fon  reflbrt  ;  à  47  lieues  de  Rennes  ;  &  à  6  Keues  du 
Faou  ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  550  communiants  :1a 
Cure  efi:  préfentée  par  un  Chanoine  de  Daoulas.  Ce  territoire 
forme  une  prefqu'ifle  ou  pointe  ,  qui  s'avance  dans  la  rade  de 
Bref!:.  Il  ne  fournit  pas  à  la  fublifiance  des  habitants,  parce  que 
le  fol  eu  plein  de  rochers  ou  couvert  par  les  fables  de  la  mer.  Us 
font  tous  marins  ou  pêcheurs. 

Au  mois  de  Mars  1594,  les  Efpagnols ,  qui  étoient  venus  au 
fecours  du  Duc  de  Mercœur  ,  en  Bretagne ,  commencèrent  la 
confl:ru6lion  d'un  Fort  dans  la  pointe  de  Kofcanvel.  Leur  deflein 
étoit  d'empêcher  l'entrée  des  vaifTeaux  dans  le  port  de  Brefi: , 
qui  n'efi:  qu'à  une  lieue  &  demie  de  cette  pointe ,  Se  de  tenir, 
en  cet  endroit,  un  grand  nombre  de  vailTeaux  à  couvert,  pour 
incommoder  toute  cette  partie  de  la  cote  &  s'en  rendre  les  maî- 
tres. Ce  Fort ,  qui  avoit  une  forme  triangulaire ,  étoit  environné 


141  R  O  S 

de  précipices  de  tous  côtés,  à  l'exception  de  l'entrée  qui  avoit 
environ  quatre-vingt  toiles  de  largeur ,  avec  deux  baftions ,  un 
de  chaque  côté  de  la  porte.  Les  gens  du  pays  avoient  pris  la 
fuite  à  l'approche  des  Efpagnols  ,  mais  ces  étrangers  ,  qui 
avoient  befoin  d'ouvriers  ,  les  pouriuivirent  &  fe  faifirent  de 
plufieurs,  qu'ils  forcèrent  de  travailler  aux  ouvrages  du  dehors; 
car  il  leur  étoit  défendu  d'entrer  dans  l'intérieur  du  Fort ,  où  les 
feuls  Efpagnols  pouvoient  pénétrer.  Ils  firent  venir  d'Efpagne  la 
chaux  &  les  pierres  toutes  taillées ,  &  conftruifirent  cet  édifice , 
qui  avoit  environ  cent  cinquante  pieds  de  hauteur  du  côté  de 
la  mer.  Lorfqu'il  fut  achevé  &  mis  en  état  de  défenfe,  on  y 
plaça  une»  garnifon  de  quatre  cents  Efpagnols  ,  commandée 
par  Thonias  Praxelde ,  Capitaine  brave  &  expérimenté.  Cette 
garnifon  ne  refla  pas  long-temps  en  repos  -,  Je  Fort  fut  attaqué  par 
Farmée  du  Roi  Henri  IV ,  que  commandoit  le  Maréchal  d'Au- 
mont ,  &  après  un  fiege  aiïez  long ,  qui  fit  périr  beaucoup  de 
monde  y  la  place  fut  forcée  le  1 8  Novembre  de  l'année  de  fa 
''conftruftion.  Toute  la  garnifon  fut  paffée  au  fil  de  l'épée  ,  & 
les  gens  du  pays  détruifirent  fur  le  champ  ce  Fort  qui  leur 
avoit  été  fi  nuifible.  Depuis  ce  temps  ,  cette  pointe  porte  le 
nom  de  Pointe  des  Efpagnols,  En  1420,  le  manoir  du  Sez  ap- 
partenoit  à   Olivier  de  Keraer» 

ROSLANDRIEUX  ;  à  une  petite  lieue  à  l'Oueft  de  Dol , 
fon  Evêché  &  fa  Subdé'égation  ;  &  à  1 1  lieues  de  Rennes. 
Cette  Paroiffe  refTortit  à  Dinan ,  &  compte  850  communiants: 
la  Cure  eft  à  l'Ordinaire.  Le  territoire  offre  à  la  vue  ,  du  côté 
du  Nord  &  de  rEft  ,  des  marais  qui  font  partie  de  ceux  de 
Dol  ;  du  côté  du  Sud  &  de  l'Efi: ,  des  terres  bien  cultivées  , 
de  bons  pâturages ,  &  quelques  landes.  Les  produftions  du  ter- 
roir font  ,  le  grain ,  le  cidre ,  le  lin  ,  &  le  chanvre.  A  peu  de 
diftance  du  bourg ,  efi:  le  moulin  à  vent  de  la  Ville-Julienne , 
qui  forme  un  beau  point  de  vue.  La  maifon  noble  de  la  Chef- 
naye  eft  très- ancienne  :  elle  appartenoit ,  en  1200,  à  Geoffroi 
le  Bouteiller ,  Sieur  de  la  Chefnaye;  &,  en  145Q,  à  Georges 
le  Bouteiller ,  qui  fut  Chambellan  des  Ducs  Jean  V ,  Fran- 
çois I,  &  Pierre  IL  Ce  Seigneur  mourut ,  l'an  1454,  ne  laifiant 
qu'une  fille  unique,  qui  porta  fes  biens  dans  la  maifon  de  Par- 
tenay ,  par  fon  mariage  avec  le  Seigneur  de  ce  nom.  Clémence 
de  Partenay  porta  cette  Seigneurie  à  Louis  de  Quenquet  _,  qu'elle 
époufa  ea  152.0»  Les  autres  maifons  aobles,  en  1500  ^étoient  :; 


R  O  s  I4J 

le  Gage ,  à  Jean  de  Chux  ;  la  Coretigere ,  à  Bertrand  De- 
lormej  la  Chefnaye  &  la  Cour-de-Ros,  à  Jean  de  Partenayjle 
Han  &  la  Metrie ,  à  Jean  du  Han  ;  l'Iflette  ,  à  Guillaume  de 
Vauclerc;  la  Maugatelaye  ,  à  Pierre  Guitté  ;  Montrien  ,  à  Fran- 
çois Marzuei  ;  la  Roche ,  à  Jean  de  Tremigon  ;  les  Salles  ,  à 
Olivier  de  Mauclerc  ;  le  Petit-Motrien ,  à  Gilles  du  Cobaz  -,  Ig 
Guihemoraye  ,  à  Georges  Louvel  ;  la®  Ville  Julienne  ,  à  N...  ;  1^ 
Haute-Folie,  à  N....  j  &  le   Hac-Boutier,  à  N.... 

ROSNOHENj   fur  la    rivière  d'Aulne;  à    6  lieues  &  demie 
au  Nord-Nord-Oueft   de  Quimper ,  fon  Evêché  -,  à  ^i^^ues  de 
Rennes  ;  &  à  une  petite  lieue  du  Faou ,  fa  trêve  &  ^^Subdé- 
légation.  Cette   ParoifTe  refîbrtit  à  Châteaulin ,   relevé  du -Jlq}^. 
&  compte    1 1  oo  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'alternative,  te^lti 
territoire,  borné  à  l'Ouell  par  la  rade  de  Breft ,  Se  au  Sud  p^^ 
la  rivière  d'Aulne ,  offre   à  la  vue  des  terres  bien  cultivées ,  deSj^^î^^ 
prairies  de  bonne  qualité ,  des  vallons ,  des  monticules ,  &  quel-  ^^^^ 
ques   landes.   En   1420  ,  on   connoiflbit  dans   cette  Paroiffe  les    ^' 
manoirs  de  Rinadguinieuc  ,   au  Vicomte  du  Faou  ;   Ker-guftan- 
lun  ,  à   Olivier   de    Keraèr  ;   Quillibihan  ,   au    Sieur    du    Juch; 
Ker-audren,   à  Jacob   Clerc  ;    de  Léfarte,  à  Jacob   Dufeu;    du 
Pareil ,  à  Hervé  du  Parch  ;  de  Langan ,  à  Marguerite  du  Faou^ 
3c  Ker-modien,  à  Noël  de  Kermodien. 

ROSPEZ  ^  à  3  lieues  à  l'Ouefl:  de  Tréguier  ,  fon  Evêché  j  à 
32  lieues  de  Rennes;  &  à  i  lieue  de  Lannion ,  fa  Subdéléga- 
tion &  fon  reffort.  On  y  compte  850  communiants  :  la  Cure 
eft  à  l'Ordinaire.  Le  territoire  renferme  des  terres  bien  cultivées, 
des  prairies ,  Se  des  landes.  A  peu  de  diftance  au  Sud-Eft  du 
bourg  ,  eft  une  butte  fort  élevée ,  en  forme  de  cône  ,  fur  le 
fommet  de  laquelle  eft  un  très-beau  point  de  vue.  Les  maifons 
nobles  de  l'endroit  font  ;  Ker-non  &  Ker-litel. 

ROSPORDEN  ;  petite  ville  qui  relevé  du  Roi ,  Se  trêve  de 
la  Paroiffe  d'Elliant  ;  à  4  lieues  &  demie  au  Sud-Eft  de  Quim- 
per ,  fon  Evêché  ;  à  3  5  lieues  de  Rennes  ;  &  à  2  lieues  Se  de- 
mie de  Concarneau  ,  fa  Subdélégation.  I3eux  grandes  routes  ar- 
rivent à  cette  ville  ,  où  il  y  a  une  Pofte  aux  chevaux ,  &  où 
l'on  compte  900  habitants.  11  s'y  tient  quatorze  foires  par  an,  Se 
un  marché  par  femaine.  On  y  remarque  un  très-bel  étang ,  qui 
forme  la  rivière  de  Pont-d'Aven,  L'an   1334,    le  Duc  Jean  IIÏ 


144  R  O  S 

donna  à  Jean  de  Bretagne  ,fon  fils,  la  petite  ville  de  Rofporden, 
avec  toutes  les  Seigneuries  &  Jurifdiftions  qui  en  dépendoient, 
&  les  foires  &  marchés  qui  y  étoient  établis.  La  Jurifdi6lion 
royale  de  cette  ville  fut  unie  &  incorporée  au  Siège  préfidial  de 
Quimper  ,  par  Edit  du  Roi  Charles  IX ,  donné  à  Troyes  en 
Champagne,  le  29  Mars  1564.  La  haute-Juftice  de  Coëtcanton 
appartient  à  M.  de  Ploeuc  ;  &  la  haute- Juilice  de  Garlot ,  à 
M.  de  Guernifac. 

ROS-SUR-COUESNON;    fur    une  hauteur  ^    à   3   lieues  au 
Nord-£iL  de  Dol ,  fon  Evêché  &  fa  Subdélégation  ;    &    à   1 1 
lieues -tP Rennes  ,   fon  relTort.  Cette  ParoifTe  relevé  du.  Roi,  & 
compte   1250    communiants  :  la  Cure  eft  à  l'Ordinaire.  Son  ter- 
ritoire ,  borné  au  Nord  &  à  l'Eft  par  la  mer ,   forme  à-peu-près 
une  plaine  ,  fi  l'on  en  excepte  deux  ou  trois   vallons.  Les  terres 
exactement  cultivées  produifent  du  grain  ,  du  Hn  ,  &  du  chanvre* 
L'an    1143  ,    Hervé   le   Bouteiller  ,  Seigneur   de    Roflandrieux, 
donna  l'Eglife  de  Ros-fur-Couelhon  aux  Moines  de  Saint-Florent 
^d'Angers i  &  ,  en  1199  ,  Hervé  le   Bouteiller  ,  fon  fils,  &  Ytier 
de  Ros,   donnèrent   aux  Moines  de    Saint-Florent ,  fous  Dol,  la 
troifieme  partie  des  dixmes  de  la  ParoilTe.  La  maifon    feigneu- 
riale    de    Malchapt    appartenoit ,   en    1371  ,   à    Berthelot   Mal- 
chapt ,  Ecuyer  au    fervice   du  Roi   de  France    Charles  V  ;   & 
Geoffroi  de  Malchapt ,   fon  fi-ere  ,  fervoit  dans  la  Compagnie  de 
Bertrand   du  Guefclm  ,    Connétable   de  France  :  cette  maifon  ^ 
qui  a  haute-Juftice ,  appartient  à  M.  Bruner  de  Mont-Louet.  En 
1 500  ,  Launay-Morel ,  haute-Juftice  ,  à  Chriftophe  de  Lignieres.j 
aujourd'hui,  à  M.  du  Bois-Baudri  :  la  Commanderie  du  Temple 
de  Carentoir  ,  moyenne-Juftice  ,  jadis  poffédée  par  les  TempUers, 
appartient    aujourd'hui  à   M.   le    Commandeur    de    l'Ordre    de 
Malte  :  Chantegruë,  en  1500  ,  à  François  du  Bois-Baudri  5  Mon- 
tortour  ,    à  Pierre   Jehan  &   à    Afiénette  de    la  Marche  ,    fon 
époufe  j  Launay-Henri ,  à  N....   :  la  moyenne-Juftice  de  Chemel 
appartient  à  M.  de  Beaumont-l'Orgereft  j  &   celle  de  Chevert,, 
à  M.  de  Vauvert  Marc-Bodin, 

P.OSTRENEN  ;  petite  ville ,  fituée  au  pied  d  une  montagne, 
fur  la  route  de  Pontivi  à  Carhaix  j  à  15  lieues  à  l'Eft-Nord-Eft 
de  Quimper  ,  fon  Evêché  ;  à  26  Heues  de  Rennes  ;  &.  à  4  lieues 
de  Corlai ,  fa  Subdélégation.  Ceft  une  trêve  de  la  Paroiffe  de 
Ker-grift-Moelou ,  qui  relTortit   à    la  Barre  royale    de   Carhaix. 

Oa 


ROS=KOU  145 

On  y  voit  une  Eglife  Collégiale,  dont  Madame  la  Princefle 
d'Elbeuf  préfente  les  Canonicats.  Il  y  a  dix  foires  par  an ,  & 
marché  tous  les  mardis  de  la  femaine.  En  800  ,  toute  cette  ville 
confiftoit  dans  le  château  de  ce  nom ,  dont  il  ne  relie  plus  que 
les  veftiges  ;  château  qui  appartenoit  aux  Seigneurs  de  Roftre- 
nen.  Cette  famille  eft  très-ancienne  ,  &  tous  les  hiftoriens  de- 
meurent d*accord  que  c'eft  elle  qui  a  donné  à  la  France  fon 
premier  Connétable ,  fous  l'Empereur  Louis  le  Débonnaire.  Ce 
Connétable  mourut  au  fervice  de  fon  Prince,  l'an  834.  Elle  a 
produit  plusieurs  autres  grands  Officiers  de  la  Couronne  :  fes  ar- 
mes font  de  Bretagne  à  trois  faces  de  gueules. 

Le  8  Avril  1593,  René  de  Rieux ,  Seigneur  de  Si^urdéac , 
Lieutenant  pour  le  Roi  en  Bretagne  ,  donna  commiffion  au  Ca- 
pitaine du  Lifcouet  de  fortifier  les  ville  &  château  de  Roftrenen, 
&  d'obliger  les  habitants  de  quarante  ParoiiTes  des  environs  à  venir 
travailler ,  deux  jours  par  chaque  mois ,  aux  fortifications  de  cette 
place,  qu'on  vouloit  mettre  en  état  de  défenfe.  L'an  1727,  le 
Seigneur  de  Rortrenen  fit  un  grand  nombre  d'afféagements ,  qui 
lui  procurèrent  un  des  fiefs  les  plus  confidérables  &  les  mieux 
cultivés  de  la  province. 

ROUANS  j  fur  la  rivière  du  Tenu  ;  à  5  lieues  &  demie  au 
Sud-Sud-Ouelt  de  Nantes ,  fon  Evêché  &  fon  refTort  ;  à  23 
lieues  de  Rennes  ;  &  à  3  lieues  trois  quarts  de  Bourgneuf ,  fa 
Subdélégation.  On  y  compte  1 800  communiants  :  la  Cure  efi:  à 
l'Ordinaire.  C'efl:  un  Prieuré  qui  a  long-temps  dépendu  des  Ab- 
bayes de  Saint-Serge  &  de  Saint-Bach,  qui  poffédoient  la  Cha- 
pelle de  Saint-André  de  Prono.  Le  territoire  eft  très-exaélement 
cultivé  &  très-fertile  -,  il  produit  du  grain  &  du  foin  en  abon- 
dance ,  &  une  petite  quantité  de  vin.  Sous  l'Epifcopat  de  Budic , 
qui  fut  Evêque  de  Nantes  depuis  1041  jufqu'en  1049,  Glavichen 
nt  don  à  l'Aobaye  de  Saint-Serge  d'Angers  de  tous  les  droits  ec- 
cléfiaftiques  qu'il  avoit  à  Rouans ,  dont  le  nom ,  porté  dans  les 
titres ,  étoit  alors  Roniote  ou  Rotohenge  au  pays  de  Retz  j  &  fonda , 
par  fa  donation,  le  Prieuré  de  ce  lieu. 


ROUGÉ  ;  fur  une  hauteur  &  fur  la  route  de  Rennes  à  Cha- 
teaubriand i  à  1 5  lieues  au  Nord  de  Nantes ,  fon  Evêché  ;  à  8 
lieues  un  tiers  de  Rennes ,  fon  reffort  ;  &  a  2  lieues  de  Cha- 
teaubriand,  fa  Sabdéîcgation.  On  y  compte  30  o  communiants, 
y  compris  ceux  de  Soulevache  ,  fa  trêve  :  la  Cure  ell  à  l'Ordi- 
Tomc  IV.  T 


,4é  ROU 

naire.  Le  territoire,  qui  eft  aflez  exa6lement  cultivé  &  fertile, 
produit  du  grain,  du  foin,  &  du  cidre.  Dans  le  bois  de  la  ga- 
renne de  Rougé ,  on  remarque  les  ruines  de  l'ancien  château  des 
Salles ,  on  en  diilingue  encore  les  douves  qui  paroiffent  fur  une 
largeur  de  douze  ou  quinze  pieds ,  avec  un  puits  qui  peut  avoir 
huit  à  dix  pieds  de  profondeur  ;  mais  la  maçonnerie  de  ce  der- 
nier efl  tout-à-fait  dégradée.  Auprès  de  ces  ruines ,  eft  une  riche 
mine  de  fer,  qui  fournit  abondamment  aux  forges  de  Martigné, 
de  la  Hunaudiere ,  &  de  Pouancé.  On  remarque  auffi ,  dans  ce 
territoire ,  les  ruines  de  l'ancien  château  de  la  Minière  ;  il  parok 
encore  deux  mafles  détours,  au  midi  de  la  cour  de  ce  château, 
dans  lefquelles  on  voit  des  canonnières.  Ce  qui  reftoit  du  principal 
corps  du  logis ,  écroula  en  1742.  M.  de  Boiileve  en  prit  les  plus 
belles  pierres  pour  la  conftruftion  du  château  &  de  la  Chapelle 
de  Chamballan.  La  Seigneurie  de  la  Minière  ,  haute- JulHce ,  s'é- 
tend dans  les  Paroilîes  d'Ercé  ,  de  Fercé,  &  de  Rougé.  En  1766  , 
M.  de  Gouyon  vendit  les  droits  féodaux  de  la  Mmiere  à  M.  du 
Bois-Péan;  &;,  en  1768,  les  héritiers  de  M.  de  Gouyon  vendi- 
rent à  M.  de  Geril  le  château  &  les  domaines  de  la  Seigneu- 
rie ,  avec  les  Seigneuries  de  Chamballan  &  du  Rouvre  :  ces  deux 
dernières  ont  chacune  hauteJullice.  Le  château  du  Rouvre  ap- 
partenoit,  en  1400,  à  Jean,  Seigneur  du  Rouvre.  Vers  1594, 
du  temps  des  guerres  de  la  Ligue  ,  ce  château  fut  pillé  ,  brûlé, 
&  réduit  en  cendres  :  on  n'y  remarque  plus  que  quelques  par- 
ties des  douves  qui  le  cernoient,  avec  un  pavillon  qui  paroît 
d'une  conftru61ion  plus  moderne.  En  1400,  Jean  du  Rouvre 
pofledoit  les  maifons  nobles  du  Verger  &  du  Bouail-Bournin  -,  le 
château  de  Chamballan  appartenoit ,  dans  le  même  temps  ,  à 
Charles  ,  Seigneur  de  Chamballan  ,  qui  pofTédoit  auffi  le  Bois- 
Jouan  ,  Treguel ,  &  la  Fourche -Encoul.  En  1400,  la  Marbon- 
niere  appartenoit  à  Jean  delà  Ferriere  ;  elle  aune  haute- Jufti ce, 
&  efl  poffédée  par  Madame  Lambert  de  Lorgeril  :  la  Grée, 
haute-JulHce ,  à  M.  de  la  Vallette  5  la  Plumante,  moyenne- Juf- 
ticô  ,  à  M.  de  la  Ville-Blanc  ;  ces  deux  dernières  iont  dans  la 
trêve  de  Soulevache.  Auprès  de  l'Eglife  de  cette  trêve ,  eil  une 
ancienne  tour  fous  laquelle  on  prétend  qu'il  y  a  un  fouterrainj 
mais  je  n'ai  pu  fçavoir  rien  fur  cette  antiquité. 

La  maifon  de  Rougé ,  l'une  des  plus  anciennes  de  la  province 
de  Bretagne  ,  tire  fon  nom  de  la  Seigneurie  de  Rougé.  Les  pre- 
miers Sires  de  Rougé  dont  on  ait  connoifTance  ,  vivoient  au  com- 
mencement   du    onzième   fiecle.  Jufqu'à   Yvon  de  Rougé ,  qui 


R  O  U  147 

vîvoit  en  11 30,  ils  ne  font  connus  que  par  des  donations  ou 
fondations  d'Abbayes.  En  1183  ,  Bonabes  I  de  Rougé  ,  fe  ligua 
avec  plufieurs  Seigneurs  contre  Henri  II ,  Roi  d'Angleterre.  Bo- 
nabes Il  eft  fouvent  cité  aux  Etats  de  Rennes,  pour  avifer  aux 
moyens  de  venger  l'aflaflinat  du  Duc  Artur.  En  1275,  Olivier 
de  Rougé  époufa  Agnès  de  Derval  ;  elle  lui  apporta  la  Baronnie 
de  Derval  &  tous  les  biens  de  cette  maifon  iiluftre.  Son  fils,  Guil- 
laume de  Rougé,  époufa  la  fille  du  Sire  de  Neuville, qui  lui  donna, 
entr'autres  ,  beaucoup  de  biens  fitués  dans  la  province  d'Anjou. 
Au  commencement  du  quatorzième  fîecle  ,  la  maifon  de  Rougé 
fe  fépara  en  plufieurs  branches  :  la  cadette  s'établit  en  Anjou , 
où ,  félon  l'ufage  du  temps  ,  elle  prit  le  nom  de  la  Terre  des 
Rues ,  qu'elle  eut  en  partage  en  confervant  les  armes  de  fa 
maifon.  La  Roque  ,  dans  fon  Traité  de  la  Nobleffe ,  au  nombre 
des  Barons ,  Bannerets  ,  Chevaliers,  mandés  parle  Roi  en  1350, 
cite  le  Sire  de  Rougé  à  l'article  Bretagne ,  &  le  Sire  de 
Rougé  à  l'article  Touraine  ,  Anjou,  &  Maine.  MM.  de  Rougé, 
établis  en  Anjou,  y  ont  toujours  pofTédé  la  Terre  des  Rues  & 
la  pofTedent  encore  ;  ils  ne  reprirent  leur  nom  qu'après  l'extinc- 
tion de  leurs  aînés.  Bonabes  IV  de  Rougé  quitta  le  fervice  du  Duc 
de  Bretagne  ,  &  s'attacha  à  celui  du  Roi  Jean.  Il  fut  fait  prifon- 
nier  avec  lui  à  la  bataille  de  Poitiers ,  en  1356;  &,  après  avoir 
payé  fa  rançon ,  ce  Monarque  lui  donna  la  Vicomte  de  la  Guerche. 
Gal-Hot  de  Rougé ,  fon  fils  ,  époufa  Marguerite ,  fille  de  Jean 
de  Beaumanoir ,  Maréchal  de  Bretagne ,  &  de  Marguerite  de 
Rohan  :  Jean  de  Rougé,  fon  fils,  époufa  Béatrix,  fille  de  Jean 
de  Rieux,  Maréchal  de  France,  &  de  Jeanne  de  Rochefort, 
fa  fœur  &  fon  héritière  :  Jeanne  de  Rougé  porta  les  grands 
biens  de  fa  branche  dans  la  maifon  de  Maleftroit-Châteaugiron) 
fa  fille  Valence  époufa  Geofïroi  de  Maleflroit ,  fon  coufin  ;  fon 
fils,  Jean  de  Malelboit ,  Seigneur  de  Châteaugiron  ,  de  Derval, 
de  Rougé  ,  &c.  époufa  Hélène  de  Laval ,  fille  de  Gui  IV  ,  Comte 
de  Laval  &  de  Montfort,  Baron  de  Vitré  ,  &  d'Yolande  de  Bre- 
tagne, fille  du  Duc  de  Bretagne  Jean  V,  &de  Jeanne  de  France, 
fille  du  Roi ,  Charles  VI ,  &  d'Ifabeau  de  Bavière  :  les  biens 
de  la  branche  aînée  de  la  maifon  de  Rougé  pafî'erent  fuccefïï- 
vement  dans  les  maifons  de  Laval  ,  de  Montmorcnci,  &  de 
Condé  j  c'efl  M.  le  Prince  de  Condé  qui  en  pofî'ede  aujourd'hui 
la  principale  partie.  Les  montres  &  revues  du  temps  prouvent 
le  rang  que  les  Sires  de  Rougé  tenoient  dans  leur  province,  & 
les  grands  biens  qu'ils  y  poffédoient  j  ils  prirent  leurs  alliances 


Î48  R  O  U  =  R  U  C 

dans  les  maifons  de  Derval ,  Neuville,  la  Rochedîré,  Rîeux, 
Beaumanoir  ,  Tornemine  ,  Maillé  ,  Châteaugiron  ,  &  autres  : 
ils  font  connus  indiilinftement  fous  le  nom  de  Sire  de  Rou^éy 
Sire  de  Derval,  &  Vicomte  de  la  Guerche.  Depuis  la  donation 
du  Roi  Jean,  Pierre  des  Rues  reprit,  dans  le  quinzième  fiecle, 
le  nom  de  Rougé,-  après  l'extinftion  de  fes  aînés.  Le  Vicomte 
de  Rougé ,  Capitaine  de  Cavalerie  avec  promefTe  d'obtenir 
le  premier  Régiment  qui  viendroit  à  vaquer ,  fut  tué  à  la  bataille 
de  Minden  ;  &  l'Evêque  de  Périgueux ,  fon  frère  ,  mourut  en 
1773.  Gabriel-François  de  Rougé,  dit  le  Comte  de  Rougé ^  au- 
jourd'hui Maréchal  des  Camps  ,  a  pour  époufe  Mademoifelle  de 
Croy ,  fille  de  feu  M.  le  Duc  d'Havre,  Lieutenant  général,  tué 
au  fervice  de  fon  Prince ,  en  1761  :  Pierre-François,  Marquis  de 
Rougé ,    Lieutenant  général  ,  Gouverneur  de  Givet  &  de  Char- 

lemont,  a  été  tué  à  la  bataille  de en  1761  j    il  avoit  époufé, 

en  1748,  JuHe  de  Coëtmen ,  fille  du  Marquis  de  Coëtmen,  Ma- 
réchal des  Camps  &  Commandant  en  baffe  Bretagne ,  &  de 
Jeanne- Julie  de  Goyon  :  il  en  a  eu  deux  filles  ,  mariées  au  Comte 
Doria  &  au  Baron  de  Vifme,  &  deux  garçons,  Bonabes- Jean- 
Catherine-Alexis  ,  Marquis  de  Rougé  ,  Colonel  en  iécond  du 
Régiment  delà  Fere ,  marié ,  depuis  1777,  à  Vifturnienne-Del- 
phurie-Nathalie  de  Mortemart ,  fille  de  feu  M.  le  Duc  de  Mor- 
temart ,  Duc  &  Pair  de  France ,  &  de  Charlotte-Nathalie  de 
Manneville  j  &  François -Pierre -Olivier  de  Rougé,  Comte  du 
PlefTis-Belliere ,  Capitaine  au  Régiment  de  Flandres  ,  marié  ,  en 
1779  ,  à  Marie-Jofephe-Vincente  de  Lignerac  ,  fille  de  M.  le  Duc 
de  Caylus ,  Grand  d'Efpagne  ,  &  de  Marie  Odette  de  Levi. 
MM.  de  Rougé  ont  verfé  beaucoup  de  fang  au  fervice  de  leurs 
Rois  ,  comme  anciennement  à  celui  de  leurs  Ducs.  Leurs  der- 
nières alHances  font  celles  des  maifons  de  Lorraine  ,  de  Crequi , 
d'Albert ,  de  Chaulnes ,  de  Coëtmen  ,  de  Croy  ,  de  Rochechouart , 
de  Mortemart ,  de  Lignerac ,  &c. 

RUCA  j  à  7  lieues  à  FEfl  de  Saint-Brieuc ,  fon  Evêché  ;  à  i  5 
lieues  de  Rennes  ;  &  à  3  Heues  &  demie  de  Lamballe ,  fa  Sub- 
délégation. Cette  Paroiffe  reffortit  à  Jugon  ,  &  compte  450  com- 
muniants :  la  Cure  efi:  à  l'alternative.  Le  territoire,  d'une  fuperficie 
plane ,  efi:  coupé  par  un  bras  de  la  rivière  de  Frémur  &  par 
un  ruifTeau  :  on  y  voit  des  terres  bien  cukivées ,  &  beaucoup 
d'arbres  à  fruits.  En  1470,  on  connoifToit  dans  ce  territoire  les 
maifons  nobles  ci-après  :  le  Bois-Gerbault ,  à  Guillaume  Coudri  j 


R  U  C  =  R  U  F  149 

elle  a  haute-Juflice  ,  &  appartient  aujourd'hui  à  M.  de  Kergus , 
qui  poflede  aufîi  les  hautes-Jullices  du  Bois-Riou  &  de  la  Tou- 
che-Richebois  :  le  manoir  du  Merga ,  à  Bertrand  du  Bois-Riou  ; 
le  Caign,  à  Alain  Berat,  Sieur  de  la  Ville-Héart  ;  l'Hébergement 
de  la  Ville-Piron ,  à  Gilles  Simon  ;  la  Ville-Hulin ,  au  Seigneur 
des  Amais  :  la  haute-JulHce  de  Galinée  appartient  à  M.  Picot  -, 
Se  la  moyenne-Juftice  de  la  Salle ,  à  M.  de  Guerrande. 

RUFFIAC  j  dans  un  fond  ;  à  9  lieues  à  l'Efl-Nord-Ell:  de 
Vannes ,  fon  Evêché  ;  à  i  3  lieues  de  Rennes  ;  Se  k  i  lieue  Se 
demie  de  Maleftroit ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  reflbrtit  à 
Ploermel ,  &  compte  2400  communiants,  y  compris  ceux  de 
Saint-Nicolas ,  fa  trêve  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire , 
coupé  par  la  rivière  d'Oufl  &  arrofé  de  plufieurs  petits  ruifTeaux , 
offre  à  la  vue  des  terres  fertiles  en  toutes  fortes  de  grains ,  de 
belles  prairies ,  des-  arbres  fruitiers ,  &  des  landes  très-étendues , 
qui  paroifTent  mériter  les  foins  du  cultivateur.  Le  Prieuré  de 
lluffiac,  haute,  moyenne  &  baffe -Juilice,  à  l'Abbaye  de  Re- 
don; le  Greffin,  moyenne  &  baffe-Juffice,  à  M.  de  Menorayj 
la  Houffays,&  la  Salle,  moyenne  &  baffe-Juffice, 

RUFFIGNÉ  ;  fur  une  hauteur  ;  à  13  lieues  au  Nord  de 
Nantes ,  fon-  Evéché  &  fon  reffort  ;  à  9  lieues  de  Rennes  ;  Se 
à  2  heues  de  Chateaubriand  ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte 
950  communiants.  M.  le  Prince  de  Condé  eft  le  Seigneur  de 
la  Paroiffe  ,  dont  la  Cure  eff  à  l'alternative.  Le  territoire  eft 
occupé  au  Nord  Se  à  l'Oueft  par  une  partie  de  la  forêt  de 
Teille ,  qui  contient  environ  quatre  mille  arpents  de  terrein  , 
planté  en  futaie  Se  taillis  ,  Se  qui  appartient  à  M.  le  Prince  de 
Condé  :  le  refte  du  terrein  eft  affez  bien  cultivé  ,  Se  produit 
du  grain ,  du  foin ,  Se   du  cidre. 

L'an  1221  ,  Geoffroi ,  Seigneur  de  Chateaubriand  ,  fonda, 
dans  la  forêt  de  Teillé ,  la  Chapelle  de  Saint-Martin  ,  qui  fut 
donnée  aux  Jacobins.  Ces  Religieux  y  bâtirent  un  Couvent  au 
commencement  du  quinzième  fiecle  ;  & ,  en  1428  ,  Robert  de 
Dinan ,  Seigneur  de  Chateaubriand,  mit,  dans  ce  nouveau  Mo- 
naftere ,  des  Cordehers  Réformés ,  qui  y  font  reftés  jufqu'à  ce 
jour.  La  maifon  Seigneuriale  du  Rouvre  appartenoit,  en  1371  , 
à  Elie ,  Chevalier  ,  Seigneur  du  Rouvre  ,  au  fervice  du  Roi  de 
France  Charles  V.  Cette  Terre ,  avec  celle  de  la  Malorais , 
forme  une  haute-Juftice  ,  qui  appartient  à  M.  de  la  Cheviere. 


1^0  s  A  F 

^  AFFRÉ  ;  à  7  lieues  au  Nord  de  Nantes ,  fon  Evêché  &  fon 
reflbrt  ;  à  1 5  lieues  de  Rennes  ;  &  à  4  lieues  de  Derval ,  fa 
Subdélégation.  On  y  compte  2000  communiants  :  la  Cure  eft  à 
l'alternative.  Ce  territoire ,  d'une  lUperficie  plane ,  &  couvert  d'ar- 
bres &  buifTons ,  eft  très-étendu.  On  y  remarque  la  forêt  de 
Saffré  ,  plantée  en  bois  taillis  j  elle  contient  environ  mille  quatre 
cents  cinquante  journaux ,  &  appartient  à  M.  O-Riordan  ,  Sei- 
gneur de  la  Paroiffe.  Les  productions  ordinaires  font  le  grain  , 
le  vin  ,  &  le  cidre  -,  les  landes  y  font  fort-étendues ,  malgré  la 
bonté  du  fol  qui  mérite  certainement  tous  les  foins  du  culti- 
vateur :  il  paroît  fur-tout  excellent  pour  la  plantation  du  bois , 
qui  y  croît  très-promptement  ^  &  il  eft  certain  qu'on  tireroit  un 
parti  avantageux  de  ces  landes ,  fi  l'on  y  femoit  du  gland.  L'air 
du  pays  eft  fort  humide.  C'eft  dans  ce  territoire  qu'eft  la 
fource  de  la  petite  rivière  d'Ifac  ,  qui  va  fe  jetter  dans  la  Vi- 
laine. La  Seigneurie  de  Saffré  relevé  du  Roi  ;  elle  a  titre  de 
Châtellenie ,  avec  haute-Juftice.  Le  château  ne  paroît  pas  avo-ir 
jamais  été  une  place  bien  forte ,  quoique  l'hiftoire  affure  qu'il  a 
ibutenu  des  {îeges.  Les  Seigneurs  de  Saffré  tenoient  un  rang  dif- 
tingué  à  la  Cour  des  Ducs  de  Bretagne. 

A  peu  de  diftance  du  château  ,  dans  un  terrein  marécageux 
qui  forme  une  prairie,  eft  un  gouffre  dont  on  ne  trouve  point  le 
fond  On  prétend  que  c'eft  la  principale  fource  de  la  rivière 
d'Ifac.  C'eft  d'abord  un  torrent  dont  les  eaux  coulent  dans  un 
petit  lit  l'efpace  d'un  quart  de  lieue  ;  il  fe  perd  enfuite  fous 
terre  ,  fans  qu'on  puiffe  dire  quelle  eft  fa  vraie  direftion ,  &  va 
enfin  fe  jetter  dans  la  rivière  d'Ifac.  Ce  gouffre  eft  plein  de 
poiffon  5  l'eau  en  eft  très-froide  en  été  &  chaude  en  hiver.  Il 
y  a  quelques  années  qu'on  voyoit ,  dans  la  forêt  de  Saftré ,  les 
ruines  d'un  édifice ,  que  l'on  dit  être  le  château  du  fief  Robert  : 
©n  n'y  voit  plus  qu'un  puits  en  partie  comblé.  On  ne  fçait  ce 
que  c'étoit ,  ni  à  qui  cette  maifon  appartenoit.  Les  anciens  di- 
fent  qu'il  y  a  environ  foixante-dix  à  quatre-vingts  ans ,  qu'auprès 
de  ce  château  étoit  une  vigne  appel lée  la  vigne  du  fief  Robert, 
Aucun  monument  n'a  confervé  le  fouvenir  des  poffeffeurs  de 
cette  habitation.  On  peut  croire  que  le  terrein  occupé  par  la  forêt, 
étoit  autrefois  habité  ,  puifqu'on  y  voit  encore  une  fontaine 
revêtue  de  murs  ,  qu'on  appelle  la  fontaine  des  Chaffeurs.  Il  y 
avoit  autrefois  des  maifons  dans  ce  lieu-là.  On  faifoit  de  la  chaux 
à  Saffré  en  1490.  Le  Maréchal  de  Gié  y  prit  celle  dont  il  avoir 


s  A  F  =  s  A  I  T  5 1. 

befoin  pour  la  confliuftion  de  fon  château  de  la  Motte-Glain. 
En  1 590,  le  Prince  de  Dombes  prit  le  château  de  SafFré,  défendu 
par  les  troupes   du  Duc  de  Mercœur.  *. 

SAINT-AARON  ;  à  4  lieues  à  l'Ell  de  Saint-Brieuc ,  Ton  Evê- 
ché  &c  fon  reflbrt  ;  à  16  Heues  un  tiers  de  Rennes;  &  à  i  lieue 
un  quart  de  Lamballe ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  300 
communiants  :  la  Cure  ei\  à  l'alternative.  Son  territoire  eft  un 
pays  plat ,  couvert  d'arbres  &  buiflbns.  L'Eglife  de  Saint-Aaron 
fut  poflédée  comme  héritage  laïque  jufqu'en  l'année  11 44,  que 
Trehéan ,  qui  en  étoit  propriétaire  ,  la  remit  à  Roland ,  Evêque 
de  Saint-Brieuc,  pour  la  donner  à  des  Moines  de  Marmoutier 
qui  réiîdoient  à  Saint-Aaron  ,  &  dans  le  Monaftere  defquels 
Trehéan  prit  l'habit  de  Saint-Benoît.  Cette  Paroifîe  reconnoît 
pour  fon  Patron  ,  Saint-Aaron  ,  qui  vivoit  dans  le  fixieme  fiecle, 
dans  l'iile  d'Aaron ,  aujourd'hui  Saint-Malo.  En  1207,  Guillaume, 
Evêque  de  Saint-Brieuc  ,  donna  la  collation  de  la  Cure  de  cette 
Paroilîe  à  l'Abbaye  de  Marmoutier ,  qui  depuis  l'a  mife  à  l'al- 
ternative. En  1254  ,  Pierre  de  Lamballe  ,  né  à  Saint-Aaron,  étoit 
Archevêque  de  Tours.  Beauregard ,  movenne-Juflice  ,  appartient 
à  M.  le  Bégéré  de  Beauregard  :  IHôpital  ,  balTe  -  Jultice  ,  à 
M.  Duquellcnec  j  &  Porterio  ,  baffe  -  Juftice  ,  à  M.  de  la  Ville- 
Blanche. 

SAINT-ABRAHAM  ;  fur  une  hauteur  -,  à  20  lieues  au  Sud- 
Sud-Oueil  de  Saint-Malo ,  fon  Evêché  j  à  1 3  lieues  &  demie  de 
Rennes  ;  &  à  2  Ueues  de  Ploermel ,  fa  Subdélégation  &  fon 
relTort.  On  y  compte  400  communiants  :  la  Cure  ell:  à  l'alter- 
native. Le  territoire  eft  bien  cultivé  ;  il  offre  à  la  vue  des  mon- 
ticules ,  des  coteaux ,  &  quelques  landes  de  très-peu  d'étendue. 
La  Terre  &  Seigneurie  du  Crevi  appartenoit ,  en  1330  ,  à  Jean 
de  Derval  ,  Seigneur  du  Crevi.  Cette  Terre  paffa  à  Anne ,  Ba- 
ronne de  Montejan  ,  qui  la  vendit,  en  1554,  à  Guillaume  de 
Queleneuc ,  Sieur  de  la  Ville-Hubault ,  pour  une  fomme  de  fept 
mille  fix  cents  livres  ;  elle  valoir  davantage ,  mais  comme  elle 
devoit  des  rentes  conddérables  en  grain,  au  Prieuré  de  Saint- 
Armel  &  à  celui  de  Saint-Nicolas ,  l'acquéreur  refufa  d'en  donner 
un  plus  haut  prix.  La  Baronne  la  retira  pourtant  lors  de  fon  ma- 
riage avec  Jean  d'Acigné  ,  &c  elle  la  revendit ,  pour  la  féconde 
fois ,  au  même ,  en  1 5  6  3  ,  pour  la  fomme  de  douze  mille  livres. 
En  1593,  les  Capitaines   de  Lahideuc ,  de  lu    Connelaye  ,  Se 


1^%  s  A  I 

autres ,  qui  étoient  dans  Maleftroit ,  allèrent  affiéger  cette  place, 
qu'ils  ne  purent  prendre  malgré  la  vivacité  de  leurs  attaques.  Ce 
château  appartient  maintenant  à  M.  de  Briac* 

SAINT- AIGNAN  ;  fur  le  bord  du  lac  de  Grand  -  Lieu  -,  à  2 
lieues  trois  quarts  au  Sud-Oueft  de  Nantes ,  fon  Evêché ,  fa  Sub- 
délégation ,  &  fon  refîbrt  j  &  à  24  lieues  trois  quarts  de  Rennes. 
On  y  compte  1000  communiants  :  la  Cure  efl:  à  l'Ordinaire, 
&  doit  deux  Méfies  par  femaine.  La  Chapellenie  de  Jeanne 
Bidé  ,  préfentée  par  fes  héritiers ,  doit  une  MefTe  ,  le  vendredi 
de  chaque  femaine  ,  à  l'autel  de  Saint- Jean  ;  &  le  Salut ,  aux 
quatre  Fêtes  folemnelles ,  à  l'ifTue  des  Vêpres.  La  Chapellenie 
des  Trois-Maries  ,  préfentée  par  le  Seigneur  temporel  de  Saint- 
Aignan ,  doit  trois  MelTes ,  par  femaine ,  à  l'autel  de  la  Vierge. 
La  Chapellenie  de  Souche  ,  préfentée  par  le  Seigneur  de  Souche, 
doit  une  Méfie,  le  mercredi,  à  l'autel  de  la  Magdeleine.  Le  Légat 
de  Matthieu  le  Teiller  ,  préfenté  par  les  Fabriqueurs ,  doit  une 
Meffe,  par  femaine  ,  à  l'autel  de  la  Vierge.  Le  Légat  de  M.  Jean 
de  Fuys ,  préfenté  par  les  Fabriqueurs  ,  doit  aufii  une  Méfie  ,  par 
femaine ,  à  l'autel  de  la  Vierge.  Le  Légat  du  feu  Miflire  Pierre 
Gérard  ,  préfenté  par  la  famille  ,  doit  une  Méfiée ,  par  femaine ,  à 
l'autel  de  la  Vierge.  Le  territoire  de  Saint-Aignan  efi:  borné  au 
Sud  par  le  lac  de  Grand-Lieu ,  qui  efi:  bordé  de  prairies  &  de 
marais  :  on  y  remarque  des  terres  en  labeur ,  des  vignes  ,  des 
bois ,  &  des  landes.  Le  Pvoi  a  plufieurs  fiefs  dans  cette  Pa- 
roifie  ,  dont  la  Forêt  bafi^e  fait  partie.  (Voyez  le  Pont-Saint^ 
Martin.  ) 

Les  hiftoriens  difent  que  le  Duc  Alain  Barbe-torte  attaqua  les 
Normands ,  retranchés  dans  une  plaine  ,  à  peu  de  difiance  du 
lac  de  Grand-Lieu,  dans  la  Paroifie  de  Saint  -  Ai  gnan  j  que  la 
vi8:oire  demeura  indécife  ;  que  les  Bretons,  excédés  de  fatigue, 
fufpendirent  le  combat  ;  &  qu'il  alla  ,  avec  fon  armée ,  fe  rafraî- 
chir à  la  fontaine  de  Fauxcboux,  qui  exifie  encore  aujourd'hui. 
Cette  fontaine  efi:  en  grande  vénération  dans  le  pays.  Alain  , 
après  quelques  heures  de  repos  ,  retourna  au  combat  ,  atta- 
qua les  Normands ,  en  tua  un  grand  nombre ,  &  obligea  les 
autres  à  prendre  la  fuite.  Cette  aftion  fe  paffa  l'an  936.  (Voyez 
Nantes.  )  Au  bord  du  lac ,  près  le  château  de  Saint-Aignan ,  on 
voit  l'ifie  d'Un ,  dans  laquelle  on  remarque  les  veftiges  d'un 
camp  retranché  ,  &  entouré  de  douves  pleines  d'eau.  Ce  camp 
pourroit  contenir  quatre  mille  hommes,  &  il  efi  à  croire  qu'il 

fut 


s  A  I  153 

fut  fait  par  les  Normands.  L'ifle  fut  arrentée ,  au  mois  d'Avril 
171 5  ,  pour  trois  tonneaux  de  bled  feigle,  au  profit  des  Religieux 
de  l'Abbaye  de  Villeneuve.  René  Roufleau ,  Procureur  général 
à  la  Chambre  des  Comptes  de  Bretagne  ,  obtint  une  foire  ,  qui 
doit  fe  tenir,  le  6  Avril  de  chaque  année ,  au  bourg  de  Saint- 
Aignan.  La  haute-Juftice  appartient  à  M.  de  Saint-Aignan.  Le 
château  de  Souche ,  avec  titre  de  Châtellenie  ,  étoit  autrefois 
une  tortereiTe  fituée  dans  un  marais  :  il  a  foutenu  plufieurs  fieges  5 
on  y  voit  encore  les  veitiges  de  fes  fofTés.  Il  appartient  à  M.  de 
Souche. 

SAINT-ALBAN;  dans  un  fond;  à  4  lieues  à  l'Eft  -  Nord  -  Eft 
de  Saint -Brieuc  ,  fon  Evêché  &  fon  relTort  ;  à  17  lieues  de 
Rennes  ;  &  à  2  lieues  &:  demie  de  Lamballe ,  fa  Subdélégation. 
On  y  compte  850  communiants  :  la  Cure  ell  à  l'alternative. 
Le  territoire ,  borné  au  Nord  par  la  mer ,  offre  à  la  vue  des 
terres  de  bonne  qualité,  quelques  prairies ,  &  beaucoup  de  landes 
dont  le  fol  paroît  mériter  les  foins  du  cultivateur.  On  remarque 
dans  le  bourg  les  veihges  d'un  chemin  que  l'on  dit  être  des 
Romains  ;  il  conduit  de  Matignon  à  Saint  -  Brieuc.  Saint  Guil- 
laume ,  Evêque  de  Saint-Brieuc ,  naquit  en  cette  Paroiffe  ,  l'an 
1 1 84.  Ce  Prélat  alloit  fouvent  au  château  de  l'Hôtellerie  d'Abra- 
ham ,  qui  lubfiftoit  alors  ,  &  crui  appartenoit ,  en  1 530  ,  à  Mar- 
guerite de  Brehand  ,  qui  pofîédoit  auffi  les  maifons  nobles  de 
Beleftre  &  de  Mefenic.  En  1 400 ,  on  connoiffoit  dans  ce  terri- 
toire les  manoirs  nobles  nommés ,  la  Ville-Tual ,  les  Salies ,  la 
Ville-Renaud  ,  Saint-Vergnes ,  les  Fontaines ,  Traveffement ,  l'Hô- 
tellerie ,  la  Goublai ,  Horealo,  les  Clos,  la  HoufTaye  ,  Mauny, 
la  Ville-Etienne  ,  la  Ville-Meno  ,  la  Ville-Nain  ,  Saint-Ureguet , 
Beaulieu  ,  la  Chapelle  ,  Traver-Pettel ,  les  Venereuc ,  Vaunabre , 
la  Ville-Marquer ,  la  Villéon  ,  la  Ville-Feffan  ,  Haut-Reollo  ,  la 
Ville-Piron  ,  Château-Preux ,  la  vallée  Saint-Alban ,  la  Ville-Bot- 
terel ,  la  Ville-Cottars ,  Lire  ,  la  Vi'.le-Blanche,  &  la  Vilie-Théard  : 
cette  dernière  appartenoit,  en  1650,  à  François  Vifdeloup , 
Sieur  de  la  Ville-Théard  ,  qui  eut  un  fils  Evêque  de  Samt-Pol-de- 
Léon.  En  1662  ,  Jacques  Vifdeloup,  ChevaUer  de  l'Ordre  du  Roi , 
époufa  l'héritière  de  Lohéac.  La  bafTe-Juflice  de  Saint-Ureguet 
appartient  à   M.    d'Argarai  de   Saint-Ureguet. 

SAINT-ALLOUESTRE  j  dans  un  fond  ;  à  6  lieues  au  Nord  de 
Vannes ,  fon   Evêché  j  à  j  8    lieues  de  Rennes  ;  &:  à  3   Heues 
Tome    IK  V 


154  S  A  I 

de  JoiTelin ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  fefTortît  à  Ploermeî  9 
&  compte  1500  communiants,  y  compris  ceux  de  Buléon ,  {i 
trêve  :  la  Cure  eft  préfentée  par  le  Chapitre  de  la  Cathédrale 
de  Vannes.  Des  terres  en  labeur  ,  des  prairies ,  des  landes ,  Se 
le  bois  de  Ker-enrioj  voilà  ce  que  ce  territoire  offre  à  la  vue. 
En  1280  ,  Pierre  de  Tronchâteau  ,  ChevaUer  ,  Seigneur  de 
Tronchâteau,  vendit  cette  Terre  à  Geoffroi  de  Rohan.  En 
1400, le  manoir  de  Ker-jualan,  à  Jean  Loret  5  Bernac  ,  à  Eon 
Chefney  ;  &  la  Ferriere ,  à  Pierre  de  Lantivi  ,  Sieur  de  la 
Ferriere. 

SAINT-ANDRÉ-DES-EAUX  ;  à  i  ^  lieues  à  l'Oueft-Nord-Ouefî: 
de  Nantes,  fon  Evêché;  à  22  lieues  de, Rennes;  &  à  2  lieues 
de  Guérande,  fa  Subdélégation  &  fon  refTort.  On  y  compte 
1200  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'Ordinaire.  La  Chapellenie  du 
château ,  qui  eft  préfentée  par  le  Seigneur  de  Saint-Denac ,  doit 
une  Mefte  par  femaine.  Les  Chapellenies  de  Saint -Vincent  & 
de  Guillio,  préfentées  par  M.  de  Ses- îVlaifons,  doivent  chacune 
une  Mefte  par  femaine.  Les  Chapellenies  de  Notre-Dame  &  de 
Notre-Dame  de  la  Blanche ,  doivent  chacune  une  Mefte  par  fe- 
maine. La  Chapellenie  de  Notre-Dame  eft  préfentée  par  M.  de 
Saint-Denac  ,  &  doit  une  Mefte  par  femaine.  Le  territoire  ren- 
ferme une  partie  des  marais  de  Montoir,  d'où  l'on  tire  des 
mottes  à  brûler  ;  des  terres  en  labeur ,  des  prairies,  &  des  landes. 
Le  Roi  y  poftede  plufieurs  fiefs.  On  voit  dans  cette  Paroiffe  les 
ruines  du  château  d'Uft,  qui  avoir  des  Seigneurs  de  fon  nom, 
très-diftingués  à  la  Cour  des  Ducs  de  Bretagne.  Cette  Terre  a 
une  haute-Juftice ,  &  appartient  ,  depuis  plufieurs  fiecles ,  à  M. 
de  Ses-Maifons.  En  1473  ?  J^^"  ^^  Ses-Maifons  ,  qui  avoir  été 
fait  prifonnier  par  les  Français ,  paya  fa  rançon  ,  montant  à  inille 
royaux ,  au  timbre  de  Martres  &  ftx  arbalêtres.  La  maifon 
noble  de  Ker-cabu  appartenoit ,  en  1460,  à  Jean  de  Kercabu  ; 
&  celle  de  Coëft"al ,  en  1480,  à  Michel  Boteuc ,  Sieur  de  Coëf- 
fal  :  Saint-Denac  ,  haute-Juftice  ,  à  M.  de  Saint-Denac  ;  RanUen  , 
haute-Juftice,  à  M.  du  Drenen.  Depuis  environ  douze  ans,  on 
a  étabU  à  Saint- André-des-Eaux  un  marché ,  qui  fe  tient  tous 
les  mardis  ,  dans  le  bourg ,  où  l'on  à  conftruit  une  halle  &  un 
auditoire  pour  les  Ofticiers  de  la  Jurifdiftion. 

S  AL\T- ANDRÉ -DES -EAUX;  à  6  lieues  au  Sud-Oueft  de 
Dol ,  fon  Evêché  ;  à  8  lieues  un  quart  de  Rennes ,  &  à  2  lieues 


s  A  I  T55 

de  Dinaii,  fa  Subdélégation  &  fon  refTort.  On  y  compte  400 
communiants  :  la  Cure  eft  à  l'Ordinaire.  Le  territoire ,  arrofé 
des  eaux  des  rivières  de  Rance  &c  de  Linnon ,  eft  fertile  en  grain 
&  fom  ;  il  produit  aufli  du  cidre.  On  y  trouve  un  fable ,  que  les 
habitants  nomment  faMe  de  Saint-Grégoire ,  dans  lequel  on  trouve 
beaucoup  de  coquilles  entières,  particulièrement  des  coeurs,  des 
cannes  ,  des  teillieres  ,  des  peignes ,  des  dents  de  poillbns  ,  du 
corail  blanc  ,  des  madrépores  ,  des  gallets ,  &  des  vermiffeaux 
tubulaires. 

SAINT-ANDRÉ-DE-TREIZE -VOIX  j  à  7  lieues  au  Sud-Sud- 
Eft  de  Nantes,  fon  Evêché  &  fon  refTort;  à  29  lieues  de  Rennes; 
&  à  4  lieues  de  ClifTon ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  900 
communiants.  Cette  ParoifTe  ell  un  ancien  Prieuré ,  jadis  occupé 
par  des  Bénédiftins  ,  qui  l'abandonnèrent  pendant  les  guerres  de 
la  Ligue.  Le  Roi ,  de  qui  dépendoit  ce  Prieuré ,  le  donna  à  la 
Cathédrale  de  la  Rochelle  ,  qui  le  préfente.  Le  Curé  retient  le 
titre  de  Prieur.  M.  de  Juigné  eft  Seigneur  de  cette  ParoifTe ,  dont 
Vieillevigne  étoit  autrefois  la  trêve.  Le  territoire  produit  du  grain , 
du  foin ,  &  du  vin  :  il  efl  borné  à  l'Efl,  à  l'Oueft,  &  au  Sud,  par 
la  province  du  Poitou. 

SAINT  -  ARMEL  ;  fur  un  coteau  ;  à  3  Heues  au  Sud  -  Eli:  de 
Rennes  ,  fon  Evêché  ,  fa  Subdélégation ,  &  fon  refTort.  On  y 
compte  650  communiants  :  la  Cure  efl  à  l'Ordinaire.  Cette  Pa- 
roifTe doit  fa  naifTance  à  Saint  Armel ,  à  qui  le  Roi  Childebert 
donna  des  terreins  vagues  ,  dans  TEvêché  de  Rennes  ,  où  il 
édifia  un  Monaftere  dans  lequel  il  vécut  avec  plufieurs  de  fes 
compagnons.  Il  mourut  dans  le  fixieme  fiecle ,  &  fut  enterré 
dans  fon  Monaflere ,  qui  fut  peu  après  érigé  en  ParoifTe ,  fous  le 
nom  de  fon  glorieux  fondateur ,  dont  on  voit  encore  le  tombeau. 
Cette  Paroifîe  relevé  du  Roi.  Son  territoire  ,  arrofé  des  eaux 
de  la  rivière  de  Seiche ,  produit  du  grain ,  du  foin,  &  du  cidre: 
les  landes  font  très-étendues.  Les  terres  bolaires  font  afTez  com- 
munes dans  le  diocefe  de  Rennes  ;  on  en  voit  de  couleur  de 
chair ,  de  jaunes ,  de  rouges ,  &  de  blanches  :  il  s'en  trouve  de 
très-pures ,  &  le  fablon  des  autres  eft  fi  fin  qu'on  ne  le  trouve 
qu'entre  les  dents.  L'on  trouN  e  dans  ce  territoire ,  dans  la  lande 
de  Saint-Armel,  un  bol  de  couleur  rougeâtre,  &  en  afTez  grande 
quantité.  Le  24  Juillet  1589,  cette  ParoifTe  fut  ravagée  par  les 
troupes  du  Duc  de  Mercœur ,  qui  pijlerent  le  bourg ,  violèrent 


156  s  A  I 

les  femmes  &  les  filles ,  Se  commirent  toutes  fortes  de  cruautés,' 
La  Riviere-Orant  &  le  manoir  de  la  Prunelai ,  font  des  maifons 
nobles  très-anciennes.  La  Vicomte  de  la  Motte  Saint-Armel  & 
Chambiere  forment  une  haute-Juilice  ,  qui  appartient  à  M.  de  Sars- 
fiels  :  la  Châtellenie  de  Meneuf,  haute-JuÔice ,  à  M.  l'Evêque 
de  Clermont. 

SAINT- AUBIN-D'AUBIGNÉ  -,  fur  la  route  de  Rennes  à  Saint- 
James  ,  en  Normandie  -,  à  4  lieues  au  Nord-Nord-Efl:  de  Rennes , 
fon  Evêché ,  fa  Subdélégation  ,  &  fon  refîbrt.  On  y  compte  800 
communiants  :  la  Cure  eft  un  Prieuré.,  qui  dépendoit  encore, 
en  idoo,  de  l'Abbaye  de  Saint-Melaine ,  &  qui  efl  aujourd'hui 
préfentée  par  l'Abbeffe  de  Saint-Sulpice.  Le  territoire  offre  à  la 
vue  des  terres  en  labeur ,  quelques  prairies  ,  des  bois ,  des  lan- 
des ,  &  beaucoup  d'arbres  fruitiers.  On  y  trouve  du  fable  ,  que 
les  habitants  appellent  faille  de  Saint- Grégoire  ,  &  dans  lequel  font 
des  coquillages,  des  dents  de  poiffons,  &  autres  foffiles.  En  1 500, 
le  manoir  de  Saint-Aubin  appartenoit  à  Bonabes  Freflon  ;  ceux 
de  Gatinen  ,  de  la  Guesfrais ,  de  la  Rivière ,  de  la  Corbière , 
de  la  Grande-Rivière ,  &  de  la  Pignelais ,  à  N.... 

SAINT-AUBIN-DES-BOIS  j  Abbaye  de  l'Ordre  de  Cîteaux , 
fituée  dans  la  forêt  de  la  Hunaudaie  ;  à  6  lieues  un  quart  à  l'Eft 
de  Saint-Brieuc  ,  fon  Evêché  ;  &  à  14  lieues  deux  tiers  de  Rennes. 
Cette  Maifon ,  dont  Philippe  fut  le  premier  Abbé  ,  fut  fondée , 
le}  Janvier  1 137,  par  Olivier  de  Lamballe,  Comte  de  Penthievre. 
Elle  fut  brûlée  l'an  1240,  &  rebâtie  par  les  bienfaits  de  Denife , 
Dame  de  Matignon.  L'EgHfe  fut  achevée  &  confacrée  l'an  1255. 
En  161 4,  la  Réforme  de  Cîteaux  fut  introduite  ,  par  l'Abbé  Jean 
Pépin ,  dans  ce  Monaftere ,  qui  a  une  haute-Jultice. 

SAINT-AUBIN-DES-CHATEAUX  ;  près  la  rivière  de  Chère  -, 
à  13  lieues  au  Nord  de  Nantes,  fon  Evêché  &  fon  reffort  ;  à  10 
lieues  de  Rennes  ;  &  à  2  Ueues  de  Chateaubriand  ,  fa  Subdélé- 
gation. On  y  compte  1200  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'Or- 
dinaire. Ce  territoire  offre  à  la  vue  des  terres  en  labeur ,  des 
prairies ,  des  landes  ,  des  arbres  à  fruits  &  autres.  Le  cidre  éll: 
de  médiocre  qualité.  L'an  1183  ,  Bonabes  de  Rougé  donna  les 
dîmes  qu'il  pofîedoit  dans  cette  Paroiife  à  l'Abbaye  de  Meilleraye, 
le  jour  que  l'on  fit  la  dédicace  de  l'EgHfe  de  ce  Monaflere.  En 
1420,  on  connoiffoit  dans  cette  Paroifîe  les  manoirs  nobles  fui- 


s  A  I  157 

vatits  :  le  Plefîîs ,  au  Sieur  de  Vendôme  ;  la  Coquerie ,  à  Yves 
Beaucen  ;  &  la  Conobetiere  ,  à  Jean  Beaucen.  La  haute  ,  moyenne 
&  baffe  -  Jullice  de  Saint -Aubin  appartient  à  M.  de  Virel  ^  & 
îa  haute  ,  moyenne  &  bafle  -  JulHce  de  Domnaiche  ,  à  M.  de 
Lavaux. 

SAINT-AUBIN-DES-LANDES  ;  fur  un  coteau  ;  à  6  lieues  & 
demie  à  l'Eft  de  Rennes ,  (on  Evêché  &  ion  refTort  j  &  à  i 
lieue  &  demie  de  Vitré ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  600 
communiants  :  la  Cure  eft  préfentée  par  l'Abbé  de  Saint- Melaine. 
Le  territoire  ,  couvert  d'arbres  &  buifTons ,  Se  arrofé  de  la  ri- 
vière de  Vilaine  &  d'un  ruilTeau  fur  lequel  le  bourg  eil  iitué ,  pro- 
duit du  grain  &  du  cidre. 

SAINT -AUBIN-DU-CORMIER  ;  petite  ville  qui  relevé  du 
Roi ,  fur  la  route  de  Rennes  à  Fougères  ;  à  5  lieues  un  tiers  au 
Nord-Eft  de  Rennes ,  fon  Evêché.  On  y  compte  1 200  commu- 
niants :  la  Cure  eft  préfentée  par  le  Roi.  On  y  remarque  une 
JurifdiôKon  royale  &  une  Subdélégation.  Il  s'y  tient  un  marché 
le  jeudi ,  &  cinq  foires  par  an.  Le  territoire  offre  à  la  vue  des 
terres  en  labeur ,  quelques  prairies  ,  des  landes  ,  &  les  bois  de  la 
Chaine  &  de  Rumigon  ,  qui  appartiennent  à  Sa  Majeffé  :  le  pre- 
mier peut  contenir  cent  foixante  arpents  ;  &  le  fécond  ,  deux 
cents  foixante.  On  prétend  que  fous  l'un  de  ces  bois  coule 
un  torrent ,  fur  lequel  j'ai  demandé  des  éclairciffements  que 
je  n'ai  pu  obtenir.  Les  hiftoriens  de  cette  province  s'accordent  à 
dire  que  les  ville  &  château  de  Saint-Aubin-du-Cormier  furent 
fondés  l'an  1223  ,  par  Pierre  de  Dreux,  Duc  de  Bretagne,  qui 
fit  conffruire  cette  place  pour  défendre  l'entrée  de  fon  Duché 
du  côté  de  la  Normandie  &  du  Maine.  Comme  ce  Prince  aimoit 
la  chaffe ,  il  fe  plaifoit  beaucoup  dans  cette  nouvelle  habitation , 
qui  joignoit  la  forêt  du  grand  &  petit  Sevail ,  qui  s'en  trouve 
maintenant  éloignée  d'environ  une  demi-heue.  Cette  forêt  fe 
confondoit ,  dans  le  même  temps ,  avec  celle  de  Rennes ,  dont 
*  elle  eft  auffi  féparée  aftuellement.  Les  arbres  ont  été  coupés  dans 
une  affez  grande  étendue  -,  &  le  terrein  a  été  défriché ,  de  forte 
que  ces  forêts  ne  renferment  maintenant  qu'un  très-petit  efpacc, 
en  comparaifon  de  celui  qu'elles  occupoicnt.  Le  Duc  Pierre  de 
Dreux  n'acheva  que  le  donjon  du  château  ,  le  refte  fut  fait  à 
plufieurs  reprifes  ;  &  l'on  a  remarqué  que  les  ouvrages  faits  par 
le  Duc  Pierre   étoient   plus  foUdes  que   les  autres  :  ce  que  IVn 


158  ,  .  s  AI 

peut  vérifier  par  les  débris  du  donjon  que  le  Roi  Charles  VIIÎ 
fit  abattre  -,  le  mortier  à  chaux  &  ciment  eft  plus  dur  que  la 
pierre.  Auprès  de  ce  château ,  étoit  un  étang  qui  fubfifle  encore» 
Pierre  de  Dreux ,  pour  peupler  plus  promptement  Tendroit ,  ac- 
corda plufieurs  privilèges  aux  habitants  :  il  les  exempta  de  tailles^ 
des  coutumes,  &  des  péages;  il  leur  permit  de  trafiquer  par 
toute  la  Bretagne  ,  moyennant  une  redevance  de  cinq  fols , 
payables  à  la  fête  de  Noël  de  chaque  année ,  &  à  la  charge 
de  prendre  les  armes ,  dans  le  befoin ,  pour  la  défenfe  du  pays. 
Il  leur  accorda  encore  le  privilège  d'envoyer  leurs  belHaux 
paître  dans  la  forêt ,  &  d'en  prendre  le  bois  mort  pour  le  chauf- 
fage. En  1^37,  ce  Prince  établit  un  marché  à  Saint- Aubin-du- 
Cormier ,  pour  être  tenu  le  mardi  -,  mais  cet  arrangement  déplut 
à  André  de  Vitré ,  qui  ayoit  aufîi  établi  un  marché  à  Chevré  ^ 
au  jour  de  mardi.  Il  fit ,  à  ce  fui  et ,  des  repréfentations  au  Duc^ 
qui  fixa  le  fien  au  jeudi,  afin  de  ne  pas  porter  préjudice  au 
Baron  de  Vitré.  L'an  1341  ,  Charles  de  Blois  arriva,  avec  fon 
armée,  devant  Saint-Aubin-du-Cormier,  qui  tenoit  pour  le  Comte 
de  Montfort.  Les  habitants ,  ayant  à  leur  tête  la  garnifon  de  leur 
ville ,  firent  une  fortie  pour  repouflTer  l'ennemi.  Charles  les  at- 
tendit de  pied-ferme  ,  les  vainquit ,  &  les  pourfuivit  avec  tant 
de  vivacité,  qu'il  entra  avec  eux  dans  la   ville,  qu'il  brûla. 

Thomas  James,  né  à  Saint- Aubin- du -Cormier,  fut  d'abord 
Chapelain  du  château  de  Saint-Ange  ,  fous  le  Pontificat  de  Sixte 
ÏV.  En  1478,  il  fut  nommé  à  l'Evêché  de  Saint-Pol-de-Léon ,  & 
transféré  à  celui  de  Dol  en  1 48  2  :  il  obtint  plufieurs  privilèges- 
des  Papes ,  &  fut  efl:imé  du  Duc  François  II ,  qui  l'envoya  en 
AmbafTade  ,  &  le  chargea  de  plufieurs  commiffions  honorables» 
Ce  Prélat  mourut,  l'an  1503  ,  regretté  de  tous  les  gens  de  bien. 

Le  28  Juillet  1488,  fe  donna  la  faineufe  bataille  de  Saint- 
Aubin-du-Cormier ,  entre  l'armée  du  Roi  de  France  Charles  VIII 
&  celle  du  Duc  de  Bretagne  François  IL  Les  Bretons  furent 
vaincus ,  &  perdirent  environ  fix  mille  hommes ,  parmi  lefquels 
étoient  plufieurs  Seigneurs  diftingués.  La  perte  des  Français  fut 
d'environ  quinze  cents  hommes.  Le  Général  vainqueur  fit  démolir 
les  fortifications  de  Saint-Aubin- du- Cormier.  Le  château  étoit 
petit,  mais  très-fort.  Je  ne  m'attacherai  point  à  faire  un  plus 
long  détail  de  cette  aftion ,  rapportée  dans  toutes  les  hifioires 
de  France  &:  de  Bretagne.  La  Jurifdiftion  royale  de  Saint-Aubin- 
du-Cormier  fut  unie  &  incorporée  à  la  SénéchaufTée  de  Rennes,, 
par  lettres  du  Roi  Charles  IX ,  données  au  mois  de  Mars  1 564^ 


s  A  I  159 

SA1NT»AUBIN-DU-PAVA1L  ;  à  4  lieues  à  TEft-Sud-Eft  de 
Rennes,  ion  Evêché,  Ta  Subdélégation  ,  ^fon  relîbrt.  On  y  compte 
650  communiants  :  la  Cure  ell  à  l'alternative.  Le  territoire,  au 
milieu  duquel  paffe  le  grand  chemin  de  Rennes  à  la  Guerche, 
offre  à  la  vue  des  terres  en  labeur,  quelques  prairies,  peu  de 
landes ,  beaucoup  d'arbres  &:  huilions  j  les  habitants  font  du  cidre. 
Les  manoirs  de  Saint-Aubin  &  de  la  Challaye  appartenoient , 
en  1400,  au  Sieur  de  Saint-Aubin,  &  celui  de  la  Touche-Fou* 
quet,  à  Alain  de  Châteaugiron. 

SAINT-BENOIT-DES-ONDES  ;  à  3  lieues  à  FEil-Sud-Eft  de 
Saint-Malo  ,  Ton  Evêché  &  fa  Subdélégation  ;  &  à  1 3  lieues  de 
Rennes.  Cette  ParoifTe  reffortit  à  Dinan  ,  &  compte  450  com- 
muniants. Le  territoire  ,  borné  au  Nord  par  la  mer ,  forme  une 
plaine  arrofée  par  la  rivière  de  Bied-Jean.  Les  terres  font  très- 
bien  cultivées  j  mais  les  fables  de  la  mer  couvrent  une  partie 
du  terroir ,  particuHérement  du  côté  de  Cancalle ,  où  eft  une 
grève  fur  laquelle  on  a  établi  une  pêcherie.  La  haute-Juftice  de 
Saint-Benoît  appartient  à  M.  de  la   Chalotais» 

SAINT-BREVIN  j  fur  la  côte  j  à  10  Heues  à  l'Oueft  de  Nantes, 
fon  Evêché  &  fon  refTort  j  à  23  Heues  de  Rennes  j  &  à  2  Heues 
de  Paimbœuf ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroifle  relevé  du  Mar- 
quifat  de  la  Guerche  ;  on  y  compte  1 1 00  communiants  :  la  Cure 
eil  à  l'Ordinaire.  Cette  Paroifle  fut  d'abord  pofTédée  par  des 
Laïques ,  qui  y  étabHflbient  des  Prêtres  à  leur  gré  ,  pour  y  faire 
le  Service  divin.  Ces  Prêtres  n'avoient  d'autre  approbation  que 
celle  des  poffefTeurs  de  la  Cure  ,  qui  les  renvoyoïent  quand  bon 
leurfembloit  jmais ,  fous  l'Epifcopat  de  Benoît ,  Evêque  de  Nantes, 
Barbotte ,  propriétaire  de  ce  Bénéfice  ,  intimidé  par  les  me- 
naces des  Conciles,  qui  avoient  prononcé  excommunication  contre 
les  Laïques  poffefTeurs  de  biens  eccléfiaffiques ,  prit  le  parti  de 
donner  fon  Eglife  aux  Moines  de  Saint- Aubin  d'Angers.  L'Evêque 
Benoît  approuva  cette  pieufe  réfolution  ,  &  l'Abbé  de  Saint- 
Aubin  vint  en  Bretagne.  L'afte  de  la  donation  fut  paffé,  l'an 
II 04,  en  préfence  de  l'Evêque  &  de  fon  Chapitre,  du  donateur, 
de  fa  mère ,  de  l'Abbé  de  Saint-Aubin ,  &  de  pluHeurs  autres 
Eccléfiaffiques  &  Laïques.  Cette  pièce  porte  :  «  qu'en  récom- 
»  penfe  de  ce  bienfait ,  les  Moines  donneront  l'habit  de  leur  Ordre 
>>  aux  deux  fils  de  la  mère  du  donateur,  &  une  certaine  rede- 
»  vançe  à  fa  fille  j  &  que ,  fi  l'enfant  de  cette  jeune  perfonne 


i6o  ^  A  ï    . 

»  eft  un  garçon,  Se  qu'il  devienne  Prêtre,  les  mêmes  Religieux 
»  feront  tenus  de  lui  abandonner  une  partie  des  revenus  de  l'E- 
M  glife  de  Saint  - Brevin  ,  &  de  l'en  établir  Prieur  jufqu'à  fa  mort: 
»  après  quoi ,  ils  en  refteroiertt  les  feuls  &  uniques  pofTefTeurs.  » 
Ce  Prieuré  ne  pouvant  fuffire  à  l'entretien  de  deux  Moines, 
l'Abbé  de  Saint-Aubin ,  qui  poffédoit  aufTi  celui  de  Sainte-Oppor- 
tune dans  la  même  ParoifTe ,  pria  l'Evêque  Daniel  d'unir  en- 
femble  ces  deux  Prieurés.  Le  Prélat  y  confentit ,  &  l'acle  d'union 
fut  paffé  eh  1319.  H  porte  :  «  que  les  deux  Moines  réfideront 
»  à  Saint-Brevin ,  qu'ils  y  feront  l'Office  ,  &  qu'ils  feront  tenus 
>^  de  dire  deux  MefTes ,  par  femaine ,  dans  la  Chapelle  de  Sainte- 
»  Opportune.  »  Ceft  tout  ce  que  l'on  fçait  de  plus  ancien  fur 

cette  ParoifTe. 

La  tradition  veut  que  Saint-Brevin  ait  été  jadis  un  lieu  confî- 
dérable ,  qui  avoir  même  le   titre    de   ville.  C'étoit    un  port   de 
mer  où  les  barques  &  les  navires  abordoient  fort  heureufement  ; 
mais  ,  par  le  laps    de   temps  ,  il   s'eft  bouché ,   &  cet  endroit 
a  eu  le    fort  de  tous  les   autres  ,   qui    font  abandonnés  fi  -  tôt 
qu'ils  font  bouchés  ,  &  fermés  à  la  navigation  &   au   commerce. 
Les  habitants  fe  fouviennent  que  ,  dans  leur  enfance  ,  c'eft-à-dire  , 
il  y  a  environ  foixante-dix   ans,  les  eaux  de  la   mer  baignoieat 
les  murs  de  leur  cimetière ,  dont  elle   efl  aujourd'hui  éloignée  de 
cinq  cents  toifes.  Saint-Brevin  n'a  confervé  de  fon  ancienne  gran- 
deur que  le  Fort  de  Mindin ,  û  célèbre  parmi  les  Etrangers  &  ceux 
des  nationaux  qui  ne  l'ont  pas  vu;  mais  ce  fameux  Mindin,  que 
plufieurs  regardent  comme  une  ville,  n'efl   qu'un  fimple  rocher 
fitué  fur  le  bord  de  la  mer  ,  avec  un  Fort  de  fon  nom  ,  bâti ,  en 
1754,   aux  frais  du  Roi.  Il  y  avoit  autrefois,  dans  ce  lieu,  un 
village  qui  n'exifle  plus.  Ce  qui  lui  a   donné  la  réputation  éton- 
nante dont  ir jouit,  c'cfl  la  fureté  de  fon  mouillage ,  précifément 
à  l'embouchure  de   la  Loire.   C'efl  de  là  que  les  marins    datent 
leur  départ ,  pour  les  voyages  de  long  cours ,  &  leur  entrée  en 
rivière  à  leur  arrivée. 

La  Terre  &  Seigneurie  de  la  Guerche  fut  érigée  en  Marqui- 
fat,  par  lettres  du  mois  de  Février  1682 ,  enrégiflrées  à  la  Chambre 
des'  Comptes  en  1684  ,  &  au  Parlement  en  1686,  en  faveur 
de  René  de  Bruc,  Chevalier,  Seigneur  de  Montplaifir,  Maréchal 
de  Camp  ,  81  Lieutenant  de  Roi  des  ville  &  château  d'Arras. 
Cette  Seigneurie ,  avec  haute-Juflice  &  piUers  à  quatre  poteaux , 
appartient  aujourd'hui  à  M.  le  Marquis  de  Bruc  de  Montplaifir, 
Chevalier  de  Saint  -  Louis ,  &L  Colonel  d'Infanterie.  Il   y  a   à 

Saint-Brevin 


s  A  I  i6i 

Saint-Brevin  trois  Jurifdiftions  ;  fçavoir  :  celle  de  M.  de  Bruc, 
qui  eft  la  plus  étendue  ;  celle  de  Taron-Limur  ;  &  enfin  ,  celle 
du  Roi  ,  qui  eft  la  moins  confidérable.  Le  territoire  ,  borné  au 
Nord  par  la  rivière  de  Loire  ,  &  à  l'Ouelt  par  la  mer ,  renferme 
des  terres  bien  cultivées,  des  prairies  ,  quelques  cantons  de  vignes, 
&  la  forêt  de  la  Guerche ,  qui  appartient  à  M.  le  Marquis  de  Ëruc. 
Les  fables  couvrent  environ  mille  journaux  de  terrein  dont  on  ne 
peut  tirer  aucun  parti. 

SAINT-BRIAC  -,  à  i  lieues  à  l'Oueft-Sud-Oueft  de  Saint-Malo  , 
fon  Evêché;  à  14  lieues  de  Rennes  j  &  à  4  lieues  de  Dinan , 
fa  Subdélégation  &  fon  reffort.  Cette  Paroiffe  compte  1200  com- 
muniants :  la  Cure  eft  à  raiternative.  Ce  territoire ,  borné  au 
Nord  Se  à  rOueft  par  la  mer  ^  offre  à  la  vue  deux  vallons  dans 
lefquels  pafTent  deux  bras  de  mer  ;  des  terres  bien  cultivées ,  & 
au  Sud  une  lande  fort  étendue.  On  y  remarque  la  maifon  noble 
de  Pontbriand  ;  elle  appartenoit,  en  1485,  à  Jean  de  Pontbriand, 
que  le  Duc  François  II  chargea  de  la  défenfe  de  Chateaubriand, 
menacé  par  les  Français.  Le  Seigneur  de  Pontbriand  accompagna 
la  DuchefTe  Anne ,  lorfqu'elle  fe  rendit  auprès  du  Roi  Charles 
VIII  ,  qu'elle  devoir  époufer.  Le  4  Avril  1 562  ,  le  Duc  d'Etampes 
donna  un  brevet  de  Capitaine  d'Artillerie,  de  l'arriere-ban  de 
Saint-Malo  ,  à  Julien  du  Breil ,  Chevaher  ,  Seigneur  de  Pont- 
briand ;  place  vacante  par  la  mort  de  Jean  l'Evêque  ,  Sieur  de 
Pont-Harouar.  Le  27  Août  1589,  Henri  de  Bourbon,  Prince  de 
Dombes ,  Lieutenant  général  en  Bretagne  pour  le  Roi  Henri  III, 
envoya  à  Julien  de  Pontbriand  un  ordre,  daté  du  camp  devant 
Vitré ,  de  fortifier  fon  château  de  Pontbriand  ,  &  d'y  établir 
trente  Arquebufiers  à  pied ,  fous  l'autorité  du  Roi  ,  pour  la 
défenfe  de  cette  place,  qui  fut  attaquée,  l'an  1590,  par  les 
habitants  de  Saint-Malo  &  de  Dol ,  qui  en  firent  le  fiege,  &  la 
battirent  avec  quatre  pièces  de  canons.  Le  Seigneur  de  Pont- 
briand ,  qui  étoit  dans  la  place  ,  la  défendit  avec  la  plus  grande 
valeur  j  mais ,  ayant  été  dangereufement  blefle ,  il  fut  forcé  de 
capituler  &  de  rendre  la  place  au  Duc  de  Mercœur  ,  qui  en  fit 
démohr  les  fortifications.  La  Paroiffe  de  Saint-Briac  cil  fous  la 
mouvance  de  la  Châtellenie  de  Pontbriand. 

SAINT-BRICE  ;  fur  la  route  de  Dol  à  Fougères  ;  à  9  lieues  au 
Nord-Nord-Eff  de  Rennes ,  fonEvêchéj  &:  à  3  lieues  de  Fougères, 
fa  Subdélégation  &  fon  reffort.  On  y  compte  1200  communiants: 
Tome  IK,  X 


i6l  s  a  I 

la  Cure  eu  préfentée  par  l'Abbé  de  Saint-Florent  de  Saumur ,  qui 
poflede  aufTi  le  Prieuré  de  Saint-Brice,  avec  l'Eglife  de  Saint-Ger- 
main &  celle  de  Saint-Léodegars ,  avecfes  dépendances.  Il  y  avoit 
encore  des  Moines  dans  ce  Prieuré  en  1636.  Le  territoire,  d'une 
luperfîcie  plane ,  paroît  exaétement  cultivé  &  produit  du  cidre. 
La  Terre  &  Seigneurie  de  Saint-Brice  fut  érigée  en  Marquifat, 
en  1650,  en  faveur  d'Amice  de  Volvire ,  Seigneur  de  Saint- 
Brice  ,  Confeiller  au  Confeil  d'Etat  &  Privé  ,  &  de  celui  de 
Finances  :  elle  forme ,  avec  les  Seigneuries  de  Saint-Etienne  & 
du  Rocher-Portail,  une  haute  -  JulHce ,  qui  appartient  à  M,  le 
Marquis  de  Saint-Brice. 

SAINT-BRIEUC  -,  ville  épifcopale  ;  à  trois  quarts  de  lieues  de 
la  mer ,  par  les  5  degrés  5  minutes  2  fécondes  de  longitude ,  & 
par  les  48  degrés  30  minutes  18  fécondes  de  latitude  j  &  à  20  lieues 
de  Rennes.  L'Evêché  de  Saint-Brieuc  ell:  borné,  au  Nord ,  par 
dix-huit  lieues  de  côtes  de  mer  ;  au  Sud ,  par  l'Evêché  de  Vannes  ; 
à  ÏEû ,  par  celui  de  Saint-Malo  ;  &  à  l'Ouelt ,  par  les  Evêchés 
de  Quimper  &  de  Tréguier.  Il  renferme  plufieurs  villes  ,  cent 
quatorze  Paroifles,  douze  trêves  ou  fuccurfales  ,  non  compris 
quatorze  ParoifTes  &  une  trêve  de  Dol  enclavées  dans  ce  dio- 
cefe  j  quatre  Abbayes ,  quatre  Collégiales  ,  dont  deux  de  fonda- 
tion ducale  ;  huit  Prieurés ,  des  Duchés ,  des  Baronnies ,  quatre 
forêts  &  des  bois.  Le  nombre  des  habitants  efl  de  173200.  Le 
territoire  eft  fertile ,  mais  il  n'eft  pas  cultivé  par-tout  -,  &  le 
grand  nombre  de  landes  qu'on  y  voit  encore  aujourd'hui,  ne 
prouve  que  trop  la  juftice  des  plaintes  de  M.  Hamel  du  Mon- 
ceau, un  de  nos  plus  célèbres  agronomes.  Il  rend  néanmoins 
juftice  aux  payfans  des  environs  de  Saint-Brieuc.  «  Il  y  a  ,  dit  cet 
»  auteur  ,  aux  environs  de  Saint-Brieuc ,  un  petit  canton  où  la  cul- 
»  ture  des  terres  eft  depuis  long-temps  portée  à  fon  plus  haut  point 
»  de  perfeftion  ;  &  cependant  l'exemple  de  ces  laborieux  cultivateurs 
»  influe  peu  fur  leurs  voifîns.  »  On  va  effeftivement ,  par  curiofité, 
vifiter  ces  champs ,  qu'on  ne  peut  voir  qu'avec  admiration.  Ces 
eftimables  agriculteurs  ont  trouvé  le  fecret  de  faire  croître  de 
très-beau  bled  fur  des  rochers  -,  &  il  femble  que  la  nature  fe  plaît 
à  récompenfer ,  par  les  plus  abondantes  récoltes ,  leurs  foins  in- 
duftrieux   &  pénibles. 

On  trouve  dans  le  diocefe  de  Saint-Brieuc  plufieurs  fources 
d'eaux  minérales.  Ces  eaux  font  ,  en  général,  ferrugineufes ,  ôc 
contiennent  une  portion  de  Mars  très-divifée  ,  qui ,  au  bout  de 


s  A  I  1^3 

quelques  jours ,  fe  dépofe  dans  des  vafes  fous  la  forme  d'une 
ochre  jaune.  Les  plus  célèbres  font  celles  dePaimpol,  de  Saint- 
Brieuc,  de  Lamballe ,  du  Fail  près  Quintin  5  &  il  n'y  a  pref- 
que  pas  de  Paroiffe  dans  l'Evêché  où  il  ne  s'en  préfente  aux 
yeux  de  l'obfervateur  le  moins  attentif.  Ces  fources  indiquent  des 
mines  de  fer  ,  qui  font  efFeftivement  fort  abondantes  dans  ce 
diocefe  ,  quoiqu'il  n'y  ait  que  celle  du  Vaublanc  qui  foit  ex- 
ploitée. Quelques  recherches  qu'on  ait  faites,  on  n'a  pu  encore 
découvrir ,  dans  ce  diocefe ,  des  pierres  calcaires.  Celles  qui  pa- 
roiffent  en  approcher  le  plus ,  telles  que  celles  de  Plouriveau  & 
de  Pledran ,  font  de  vrais  cailloux ,  qui  refirent  à  l'aftion  du 
feu  ;  mais  on  trouve ,  aux  environs  de  Lanvollon  &  dans  la  Pa- 
roiffe de  Plounez ,  une  efpece  de  tuffeau  qui  fe  durcit  à  l'air. 
Cette  pierre  fe  travaille  ailément ,  &  ell:  très-propre  à  faire  des 
tombeaux ,  des  bas  reliefs  ,  des  écuffons.  Ce  diocefe  fournit  aufli 
quantité  de  beau  granit ,  qu'on  envoie  jufqu'à  Paris.  Les  bornes 
de  la  place  de  Louis  XV  en  font  tirées.  L'air  du  pays  eft  doux 
&  tempéré  à  caufe  du  voifînage  de  la  mer.  Les  principales 
rivières  qu'on  y  remarque  font ,  l'Ouft  ,  l'Arguenon  ,  le  Demen  , 
Gouet ,  &c.  La  mer  y  forme  auffi  plusieurs  ports ,  dont  les  prin- 
cipaux font  ceux  de  Saint- Brieuc  ,  du  Légué,  de  Binic  ,  de  Paim- 
pol ,  de  Daouet ,  &c. 

Le  commerce  des  Briochins  a  plufieurs  branches ,  dont  voici 
les  principales.  1°.  Les  toiles  appellées  de  Bretagne  ,  qui  fe 
fabriquent  à  Quintin ,  Moncontour,  Uzel ,  Loudéac  ,  &  Paroiffes 
circonvoifînes ,  font  de  deux  efpeces  :  les  unes  appellées  trois 
quarts  ,  les  autres  petites  laifes.  Les  trois  quarts  ont  de  laife  trente- 
cinq  pouces  ,&  les  petites  laifes  vingt-cinq.  Lorfque  ces  toiles  font 
pliées  en  coupons ,  on  les  met  en  balles  ,  en  diftinguant  le  gros 
d'avec  le  commun  ,  le  fin  d'avec  le  fuperfin ,  les  trois  quarts 
d'avec  les  petites  laifes.  Les  balles  des  trois  quarts  contiennent 
ordinairement  foixante  pièces  ou  coupons  de  cinq  aunes  chacune  j 
ce  qui  fait  trois  cents  aunes.  On  en  fait  aufli  de  cinquante  pièces 
de  fix  aunes  :  on  les  appelle  balles  réduites  à  cinq  &  Jix  aunes. 
Les  balles  de  petites  laifes  contiennent  ordinairement  cent  pièces 
de  cinq  aunes ,  faifant  cinq  cents  aunes  :  ces  toiles  en  balle  ne 
font  point  de  débit  dans  le  Royaume  j  les  Négociants  les  vendent 
à  Saint-Malo  ,  Morlaix  ,  Saint-Brieuc  ,  &  Nantes  ,  pour  être  por- 
tées à  l'Etranger ,  ou  bien  ils  les  envoient  eux-mêmes  pour  leur 
compte.  On  a  fupputé  que,  de  ces  quatre  ports  ,il  fortoit,  chaque 
année ,  en  temps  de  paix ,  fept  mille  balles  de    toiles ,  dont  le 


1^4  S  A  I 

prix  varie  fuivant  les  cîrconftances.  Il  y  a  encore  une  autre  ef- 
pece  de  toile  en  deux  tiers  de  laife ,  qui  fe  fabrique ,  en  petite 
quantité  ,  à  Uzel  &  à  Loudéac.  Ces  toiles  font  vendues  en  pièces 
longues ,  fans  aucune  forme  ni  apprêt  que  le  blanc.  2°.  La  pêche 
de  la  morue.  Les  ports  de  Saint-Brieuc  ,  Bmic  ,  Daouet ,  Por- 
trieuc  ,  envoient ,  en  temps  de  paix  ,  chaque  année  ,  à  cette  pêche  , 
le  nombre  d'environ  quinze  ou  feize  vailTeaux  depuis  cent  juf- 
qu'à  trois  cents  tonneaux.  Ces  vaifTeaux  ,  pour  la  plupart ,  vont 
vendre  leur  morue  dans  les  ports  de  Marfeille  ,  Nantes,  le  Ha- 
vre ,  &c.  Les  retours  font  en  huiles ,  favons  ^  fruits  fecs  ,  &  autres 
denrées.  La  navigation  de  Terre-Neuve  efl  fort  avantageufe  à  la 
province ,  qu'elle  enrichit ,  &  au  Royaume  en  général ,  par  le 
grand  nombre  d'excellents  navigateurs  qu'elle  produit  ;  efpece 
d'hommes  aufli  néceflaire  que  précieufe  à  l'Etat,  tant  en  temps 
de  paix  qu'en  temps  de  guerre.  3°.  Les  bleds,  lorfque  l'expor- 
tation efl  permife.  4°.  Le  fer  des  forges  du  Vaublanc ,  dont 
il  fe  fait  un  grand  débit  dans  la  province ,  fur-tout  en  temps  de 
guerre  ,  pour  les  armements  de  la  Marine.  5°.  Le  plomb  de  la 
mine  de  Châtel-Audren.  Cette  mine,  découverte  en  1762,  par 
M.  Valmont  de  Bomare ,  fçavant  Naturalifte  ,  offre  une  nouvelle 
fource  de  riche ffes ,  où  l'on  commence  à  pnifer  avec  avantage: 
elle  étend  fes  rameaux  dans  les  Evêchés  de  Tréguier  &  de  Saint- 
Brieuc.  Elle  eft  une  galène  grenelée  &  à  tifTu  d'antimoine  ;  on 
y  trouve  aufli  de  petits  cryftaux  très -durs  de  mine  fpatique  de 
plomb.  Le  minéral  contient  depuis  fept  jufqu'à  dix  onces  d'ar- 
gent par  c{uintal  ;  mais  l'arfenic  en  rend  l'exploitation  un  peu 
difficile  ,  èc  a  déjà  fait  abandonner  quelques  puits.  6°.  Les  fils. 
Ils  font  de  plufieurs  fortes,  &  il  s'en  fait  un  grand  commerce 
dans  les  marchés  du  diocefe.  Les  fils  de  Quintin ,  Uzel ,  Lou- 
déac ,  Moncontour ,  Ploeuc,  &  ParoilTes  circonvoifmes,  font  les 
plus  fins,  &  font  employés  à  la  fabrique  des  toiles  appellées 
Bretagne  ;  ceux  de  Saint-Brieuc  ,  Lamballe  ,  Binic  ,  Panupol , 
font  bons  pour  les  teintures  de  Rennes  ,  &  font  aufTi  employés 
à  faire  des  toiles  moins  fines.  7*^.  Le  cabotage.  C'efl  le  com- 
merce que  font  les  barques  dans  les  difTérentes  parties  du  dio- 
cefe de  Saint-Malo  ,  au  Croific  ,  Bordeaux,  Rouen,  Bayonne , 
&c.  Ce  commerce  ell:  d'une  utilité  très-grande  :  il  verfe  dans 
la  province  les  réfines,  les  graines  de  lin  ,  les  charbons  de  terre, 
&c.  8°.  Les  cires  &  les  miels  forment  aufîi  une  branche  de 
commerce  ,  qui  deviendroit  plus  importante  fi  elle  étoit  culdvée. 
Cinq   grandes  routes  aboutifTent  à  la  ville  épifcopale ,  où  l'on 


s  Aï  165 

compte  6600  habitants  :  elle  ne  renferme  qu'une  ParoifTe ,  fous 
le  nom  de  Saint-Michel ,  dont  la  Cure  ell:  à  Talternative  ;  les 
Couvents  des  Capucins ,  des  Cordeliers ,  des  Calvairiennes ,  des 
Urfulines ,  des  Sœurs  de  la  Croix  ;  un  Hôpital  ,  un  Collège ,  & 
un  Séminaire.  On  y  remarque  un  Gouvernement  de  place,  une 
Lieutenance  de  Roi,  un  Bureau  de  la  Commiffion  Intermédiaire, 
une  Communauté  de  ville  avec  droit  de  députer  aux  Etats  ; 
un  Siège  royal ,  qui  a  plus  de  cent  Paroi ffes  fous  fon  reflbrt , 
&  des  fiefs  en  trois  Evêchés ;  une  Amirauté  {  a)  ,  une  Jurifdic- 
tion  des  Traites,  un  Bureau  des  ClafTes ,  une  Subdélégation,  une 
Recette  ;  &  les  Portes  aux  lettres  &  aux  chevaux.  11  s'y  tient 
deux  marchés  par  femaine ,  le  mercredi  &  le  famedi ,  &  quatre 
foires  par  an.  La  ville  de  Saint-Brieuc  porte  pour  armes  d'azur 
au  griffon  d'or,  armé-béqué  &  lampaffé  de  gueules.  L'Eglife 
Cathédrale  eft  dédiée  à  Saint  Etienne.  Le  Chapitre  eft  com- 
pofé  du  Doyen ,  du  Tréforier ,  des  Archidiacres  de  Penthievre 
&  de  Goëlo,  du  Scholaftique  ,  du  Chantre,  &  de  vingt  Pré- 
bendes, dont  une  eft  affeftée  à  la  Pfallette ,  &  une  autre  au 
Principal  du  Collège.  M.  le  Duc  de  Penthievre  eft  Chanoine 
honoraire  de  cette  EgUfe.  Les  Prébendes  font  à  l'alternative. 
La  Collégiale  eft  dédiée  à  Saint  Guillaume. 

La  ville  de  Saint-Brieuc  eft  mal  bâtie ,  &  fes  pavés  font 
mal-propres.  On  y  remarque  feulement  la  Cathédrale  ,  l'Hôtel 
de  ville  ;  l'hôtel  "'&  le  parc  de  M.  le  Marquis  de  Maillé ,  Sei- 
gneur d'une  partie  de  la  ville.  Ce  parc  eft  la  feule  promenade 
des  habitants.  M.  l'Evêque  eft  Seigneur  des  trois  quarts  de  la 
ville.  Sa  Jurifdiftion  des  Régaires  reffortit  au  Parlement  :  il  re- 
tire de  l'Office  de  Sénéchal  des  Régaires  fept  cents  cinquante 
Hvres  par  an  ;  trois  cents  cinquante  livres  de  celui  de  Procu- 
reur fifcal  j  foixante-douze  livres  de  chaque  Office  de  Notaire  & 
de  Procureur  ;  &  douze  livres  de  chaque  Sergent.  J'ignore  ce 
qui  fe  pratique  ailleurs  5  mais  il  feroit  à  defirer  que  la  Juftice 
fût  rendue  gratis  ,  &:  que  les  Prélats  &  les  Seigneurs  de  fiefs 
imitaffi^nt ,  en  ce  point ,  le  défintéreflement  de  Tt^vêque  &  du 
Chapitre  de  Saint-Malo.  La  Jurifdiftion  des  Régaires  s'étend  fur 
la  ville  ,  le  territoire  de  Saint-Brieuc ,  &  fur  les  Paroifîes  de 
Trégueux,  Langueux,  &  Floufragan.  Le  Juge  du  Prélat  a  droit 
de  police   dans  la    ville  ,  comme  on  le  verra  ci-après. 


(  û  )  Les  Jurifdiftions  des  Traites  &  de     |     Portrieuc  ,  Binic  ,   Paimpol  ,    Brchat ,  Er- 
r Amirauté  s'étendent  iur  les  ports  du  Légué,     !     qui ,  Daouet ,  &  le  por.  Aladuc. 


i66  S  AI 

En  qualité  dfe  Seigneur  temporel ,  TEvêque  de  Saint-Brieuc 
jouit  de  plufieurs  droits  féodaux.  Tel  eft  celui  de  quintaine  (  a  )  , 
qui  s'exerce ,  le  lundi  de  Pâques ,  fur  les  poifTonniers ,  &  le  pri- 
vilège de  faire  fa  provision  de  beurre ,  dans  les  mois  d'Avril 
&  de  Mai ,  avant  que  perfonne  la  puifle  faire.  Ce  droit  tient 
encore  à  l'anarchie  féodale ,  &  eftprefque  aufîi  ridicule  que  ceux  de 
marquette  &  de  cuifTage  que  les  Moines  s'attribuoient.  Si  le 
Prélat  avoit  la  mauvaife  volonté  de  retarder  fa  provifionjufqu'au 
dernier  jour  du  dernier  mois ,  il  faudroit  donc  fe  priver  de  cette 
denrée  d'utilité  première.  Le  droit  le  plus  fingulier  dont  jouifîe 
le  Prélat  eft  celui-ci  :  Sur  une  maifon  fituée  rue  de  l'AUée- 
Menault ,  dans  la  ville  de  Saint-Brieuc  ,  il  efl  dû  à  l'Evêque  douze 
deniers  monnoie  de  rente  féodale.  De  plus ,  au  jour  de  la  fête 
de  Saint  Jean-Baptifte ,  le  propriétaire  de  la  maifon ,  à  l'heure 
des  Vêpres ,  efl:  obHgé  de  fortir ,  un  bâton  blanc  à  la  main ,  de 
frapper  par  trois  fois  dans  l'eau  qui  paffe  vis-à-vis  la  maifon, 
&  de  crier ,  à  la  première  &  féconde  fois  :  Paix  ,  grenouilles  , 
Monfeigneur  dort  y  &  ,  à  la  troifieme  fois  :  TaiJe\-vous  ,  gre- 
nouilles ,  laijjei  dormir  Monfeigneur.  Suivant  ce  droit ,  il  faut  que 
l'Evêque   de  Saint-Brieuc  dorme  pendant  les  Vêpres. 

Le  Port  de  Saint-Brieuc ,  diftant  de  trois  quarts  de  lieue  de 
la  ville ,  eft  appelle  le  Légué.  Ce  port  efl  facile  d'entrée  ,  fur- 
tout  par  les  vents  de  Nord  &  de  Nord-Eft.  La  rade  eft  un 
peu  incommode  par  fon  éloignement.  Il  eft  fur  &  très-bon ,  & 
il  pourroit  devenir  coniidérable  ft  on  vouloit  le  creufer.  Les 
Etats  de  la  province  y  ont  fait  bâtir  à  leurs  frais  des  quais ,  qui 
prouvent  leur  zèle  pour  le  bien  public.  Le  Père  Touflaints  de 
Saint-Luc  dit,  que  les  Briochins  font  de  leur  naturel,  bons,  civils  , 
&  dociles  5  qu'ils  aiment  l'étude  &  les   fciences  j  &  que  l'expé- 


(  tf  )  La  quintaine ,  telle  qu'elle  fe  pra- 
tique à  Saint-Brieuc,  eft  une  forte  de  jeu 
ou  d'exercice  militaire  ,  qui  confifte  à  frap- 
per fi  adroitement  la  figure  d'un  homme 
armé ,  qu'on  puifle  éviter  le  coup  qu'on 
en  recevroit  foi-même  ,  fi  on  ne  la  frappoit 
pas  comme  il  faut.  Cette  figure  eft  pofée 
fur  un  poteau  ,  &  tourne  fur  un  pivot  : 
de  forte  que  celui  qui ,  avec  fa  lance ,  ne 
frappe  pas  cette  figure  au  milieu  de  la 
poitrine ,  mais  aux  extrémités  ,  la  fait 
tourner  ;  & ,  comme  elle  tient  de  la  main 
droite  un  bâton  ou  une  épée  ,  &  de 
la  gauche  un  bouclier ,  elle  en  frappe  celui 
qui  a  mal  porté  fon  coup.  Cet  exercice  étoit 


fort  à  la  mode  autrefois  :  il  en  eft  parlé 
d?ns  les  chroniques  de  Bertrand  du  Guefclin.: 
Devenu  un  droit  feigneurial  ,  il  n'eft  plus 
exercé  que  par  des  vaflaux ,  qui  ne  s'en 
acquittent  que  par  néceflité.  À  Nantes ,  où. 
l'Evêque  jouit  du  même  droit ,  la  cérémo- 
nie eft  différente.  On  plante  folidement  en 
terre  un  poteau  ,  qui ,  dans  le  haut ,  préfente 
une  furface  plate  ,  de  la  largeur  d'environ  un 
pied.  Le  vaffal ,  monté  fur  un  cheval ,  dont 
quelqu'un  tient  la  bride ,  court  contre  ce 
poteau  ,  &  y  brife  ,  s'il  le  peut ,  une  gaule 
qu'il  tient  à  la  main.  Le  même  exercice  fe 
tdXt  fur  la  rivière ,  en  bateau. 


s  A  I  i6y 

rience  fait  voir  qu'ils  réufllfTent  dans  tous  les  états  où  ils  font 
appelles.  C  eft  peindre  en  peu  de  mots  les  Briochins ,  &  en  donner 
l'idée  la  plus  avantageufe. 

Cette  partie  de  la  province  de  Bretagne  ,  qui  forme  aujourd'hui 
le   diocefe  de  Saint-Brieuc ,  n'a  pas  toujours  porté    ce  nom  ;  elle 
n'a  pas  toujours  formé   un  canton  diflingué,  un  pays  qui  eut  fes 
bornes  &  fes  limites  particulières ,  &  un  nom  qui  lui  fut  propre. 
Cette  partie  de  l'ancienne  Armorique  fut  d'abord  habitée  par  les 
Venetes ,  les  Offirmiens ,    &  les  Curiofolites,  peuples  ancienne- 
ment célèbres ,  dont  la  domination  s'étendoit  fort  au  loin ,  même 
au  delà    de  la  province  de   Bretagne.  L'hiftoire  de  ces  anciens 
peuples  eft  donc   aufli  celle  des  Briochins.  Ce  font  les  Briochins 
qui,  fous  le  nom  de  Venetes  ,  de  Curiofolites ,  &  d'OfTifmiens, 
font  des  conquêtes  en  Italie  &  en  Allemagne ,  y  établirent  des 
colonies ,  entretiennent  un  commerce  floriflant  avec  les  habitants 
de    la   Grande-Bretagne  ,    combattent   courageufement    contre 
Céfar ,  font  des  derniers  à   pKer  fous  le  joug  de  la  domination 
Romaine ,  &  des  premiers  à  recouvrer  leur  liberté.   On  ne  fçait 
point  jufqu  où  s'étendoit ,  dans  le  diocefe  de  Saint-Brieuc ,  le  do- 
maine de  chacun  des  peuples  dont  je  viens  de  parler ,  ni  quelles 
en  étoient  les  bornes  précifes.    On  fçait  feulement,  en  général, 
que  la  partie   du  Sud   étoit  habitée  par   les  Venetes  -,  celle  de 
TEll,  par  les  Offifmiens  ;  &   celle  de  l'Oueft,  par  les   Curiofo- 
lites.   Il   paroît   que   le  territoire    des    CuriofoHtes    ne   s'étendoit 
point  ,    de  ce  côté  -  là ,  au  delà  de  la  ParoifTe  d'Iffiniac.   C'eft 
le  fentiment   du   fameux   Géographe    M.   Banville.  Il   fe  fonde 
fur  l'analogie    du  nom    d'Iffiniac ,  avec    le  terme  latin  ad  fines, 
ordinairem-ent  employé  dans  les  anciens  Itinéraires  &  dans  la  Table 
Théodofienne  ,  pour  marquer  des  bornes  &  des  limites.  La  capi- 
tale des  Venetes  s'appelloit  Dariorigum.  Il  eft  bon  d'obferver  que 
ces  trois  peuples  ,  réunis  aux  Nantais ,  aux  Rennois ,  &  aux  Dia- 
blintes  ,  formoient ,  dans  l'Armorique  ,  autant   de  petites   Répu- 
bliques dont  le  Gouvernement  étoit  ariftocratique.  Indépendantes 
les  unes  des  autres  ,  elles   fe  réunifToient  pour  la   défenfe    com- 
mune ;  mais  elles  formoient  chacune  un  Etat   à  part,  qui  avoit 
fes  loix  ,    fes  ufages  ,  fes    Magillrats  ,   un   Sénat  ,  une  cité   ou 
ville   capitale  ,  &:   un    territoire  dépendant  de  la  cité.  Dans  ce 
territoire ,  étoient  compris  plusieurs  cantons  particuliers ,  appelles 
pagi.  Comme  on  ne  connoiiToit  point  encore  ce  que  c'étoit  que 
fief,  vafl'alité ,  feigneurie  ,  tous  ces  cantons   ou  pagi  dépendoient 
de  la  ville  principale ,   &  en  recevoient  la  loi.  Il  eft  probable 


,68  S  AI 

que  pMeurs  de  cespagl  ont  donné  naiffance  à  plufieurs  de  nos 
villes  d'aujourd'hui ,  dont  quelques-unes  font  devenues  affez  con- 
fidérables  par  la  fuite  pour  éclipfer  même  les  anciennes 
cités.  Le  pafTage  &  l'établiffement  des  Bretons  infulaires  dans 
l'Armorique  ,  dans  les  cinquième  &  fixieme  fiecles  ,  apportèrent  de 
grands  changements  dans  le  Gouvernement  civil  &  politique  de 
cette  province.  Les  nouvelles  villes  qu'ils  y  fondèrent ,  les  nou- 
veaux Evêchés  qui  s'y  établirent  alors ,  introduifirent  de  nou- 
veaux noms,  de  nouvelles  divifions  géographiques  ,  qui  infen- 
fiblement  firent  oublier  les  anciennes.  Les  Offifmiens  ,  les  Dia- 
blintes  ,  les  Curiofolites  difparoiflent  alors  de  notre  hiftoire  :  ils 
font  remplacés  par  les  Malouins ,  les  habitants  de  Dol ,  les  Brio- 
chins  ;  &:  c'erf  ici  la  féconde  époque  de  l'hilloire  de  Saint- 
Brieuc. 

On  forme  fur  l'origine  de  cette  ville  deux  principaux  fyftêmes. 
Les  uns  la  font  fort  ancienne  ,  &  prétendent  qu'elle  exiftoit  long- 
temps avant  Saint  Brieuc  ;  &  que  c'elt  d'elle  dont  il  eft  parlé 
dans  Ptolomée ,  fous  le  nom  de  Bidiie  ou  Biduce,  Les  autres 
croient  que  cette  ville  n'exiftoit  point  encore  ,  lorfque  Saint  Brieuc 
paffa  dans  l'Armorique  avec  fes  Difciples,  &:  que  ce  font  eux 
qui  en  jetterent  les  premiers  fondements.  On  ne  peut  pas  diiîi- 
muler  que  le  premier  fentiment  s'accorde  difficilement  avec  ce 
que  l'hifloire  &  les  anciens  monuments  nous  apprennent  des 
Biducéens.  Les  Biducœfi  ou  Biducaffi  de  Ptolomée  font ,  fuivant 
M.  Valois,  le  même  peuple  que  les  Viducaffes  de  Pline  :  or, 
les  Viducaffes  de  PHne  font  indubitablement  un  peuple  de  Nor- 
mandie ,  qui  n'a  jamais  habité  à  Saint-Brieuc.  On  voit  encore 
aujourd'hui  les  ruines  de  leur  ancienne  capitale  ,  à  deux  heues 
de  la  ville  de  Caen ,  dans  la  ParoilTe  de  Vieux ,  à  quelque 
diftance  de  la  rive  gauche  de  la  rivière  d'Orne.  Les  mé- 
dailles ,  les  infcriptions ,  les  débris  de  colonnes  ,  un  gymnafe , 
un  aqueduc  ,  &  plufieurs  autres  reftes  d'antiquités,  découverts 
en  cet  endroit ,  prouvent  qu'il  y  avoit  là ,  autrefois ,  une  ville 
célèbre  ;  &  le  fameux  marbre  de  Thorigni  (  a  )  ne  permet 
pas  de  douter  que  cette  ville  n'ait  été  la  capitale  des  Viducaffes 
ou  Biducéens. 


(  a  )  Ce  marbre ,  trouvé  à  Vieux  ,  fut 
tranfporté  à  Thorigni ,  fous  le  reene  de 
François  I  ,  par  les  foins  de  Joachim  de 
Matignon.  On  voit ,  par    l'infcription  qui 


fe  lit  fur  ce  marbre ,  qu'il  fervoit  de  bafe 
à  une  ftatue  que  les  trois  Gaules  avoient 
fait  ériger  en  l'honneur  de  P.  Sennius  So- 
lennis ,  natif  de  la  ville  des  Viducafles. 

Ceux 


s  A  I  1(39 

Ceux  qui  ont  voulu  faire  defcendre  les  Briochins  des  anciens 
Caleti  ou  Caletcc ,  dont  il  eft  parlé  dans  Pline  &  dans  Ptolomée , 
n'ont  pas  été  plus  heureux  dans  leurs  conjeftures.  On  fçait  au- 
jourd'hui que  ces  Caleti  étoient  aufli  un  peuple  de  Normandie , 
qui  habitoitle  pays  de  Caux,  &  dont  la  capitale  étoit  Liflebonne. 
Il  eft  donc  très-probable  que  la  ville  de  Saint-Brieuc  n'exirtoit 
point  lorfque  Saint  Brieuc  pafîa  dans  l'Armorique ,  &  que  c'efl 
lui  qui  en  a  jette  les  premiers  fondements.  Lorfque  Saint  Brieuc , 
ou  lés  Difciples ,  vinrent  aborder  au  port  ou  havre  du  Légué, 
il  ne  paroît  pas  qu'il  y  eut  là ,  ni  aux  environs ,  d'autres  habi- 
tations que  celle  du  Comte  Rigual.  Ce  Seigneur ,  qui  y  avoir 
un  château  fitué  au  milieu  d'un  bois  ,  ayant  reconnu  Saint  Brieuc 
pour  fbn  parent ,  lui  céda  cette  habitation  pour  y  bâtir  un  Mo- 
naftere.  C'efl:  ce  Monaftere  qui  a  donné  naiiîance  à  la  ville  de 
Saint-Brieuc  :  mais ,  quand  a-t-il  été  bâti  ,  ce  Monaltere  ?  c'eft 
fur  quoi  il  n'ell  pas  facile  de  prononcer  aujourd'hui.  La  difficulté 
vient  de  ce  qu'on  n'eil  pas  d'accord  fur  le  temps  auquel  Saint 
Brieuc  a  vécu  :  fes  aftes  ne  le  marquent  point  j  on  ne  peut  donc 
former  là  deffus  que  des  conje6^ures  plus  ou  moins  probables. 
Ces  conjeftures  roulent  principalement  fur  le  Saint  Germain  dont 
Saint  Brieuc  a  été  Difciple.  Ce  premier  point  éclairci,  les  autres 
difficultés  difparoiiTent ,  ou  cefTent  d'être  embarraffantes  :  l'époque 
du  Maître  fixe  alors  celle  du  Difciple  ;  mais ,  quel  étoit-il  ce 
Saint  Germain  ?  Etoit-ce  Saint  Germain  d'Auxerre ,  ou  Saint  Germain 
de  Paris  ,  ou  un  certain  Germain  ou  Gorman  ,  Evêque  d'Ir- 
lande, qui  vivoit  dans  le  feptieme  fiecle  ^  Ce  dernier  fentiment, 
qui  eft  celui  de  Baillet,  paroît  abandonné  aujourd'hui  par  les 
fçavants.  Nous  nous  bornerons  à  rapporter  fuccinftemcnt  les 
principales  preuves  des  deux  premiers.  Ceux  qui  croient  que 
Saint  Brieuc  a  été  Difciple  de  Saint  Germain  de  Paris,  fe  fon- 
dent I  °.  fur  l'autorité  de  fes  anciens  aftes  ,  qui  le  difent  très-formelle- 
ment :  Mittetis  eum  ad  civil atem  Parifîacam ,  ad  beatum  vwum  Ger- 
maman  ejufdem  civitatis  Epifcopum.  2°.  Sur  ce  que  Saint  Brieuc, 
ayant  été  contemporain  de  Rigual ,  ou  Hoël  I ,  Roi  de  Bretagne  , 
mort  en  54c,  &  lui  ayant  même  furvécu ,  il  n'a  pu  être  Dif- 
ciple de  Saint  Germain  d'Auxerre  ,  mort  pkis  d'un  fiecle  aupa- 
ravant. Autrement,  il  taudroit  dire  que  Saint  Brieuc  a  vécu  plus 
de  cent  ans  ;  ce  qui  eft  contraire  à  {qs  aftes.  Ces  preuves, 
quoique  folides ,  ne  paroifTent  pas  décifives  à  ceux  qui  veulent 
que  ce  foit  de  Saint  Germain  d'Auxerre  &  non  de  Saint  Germain 
de  Paris  que  Sr-int  Brieuc  ait  été  Difciple.  Au  témoignage  de 
Tome  IV.  Y 


lyo  S  A  I 

l'ancienne  légende ,  ils  oppofent  celui  de  la  nouvelle ,  qui  dit  ; 
que  c'eft  aux  ibins  de  Saint  Germain  d'Auxerre  que  Saint  Brieuc 
fut  confié  par  fes  parents  -,  Beato  Germano ,  Altijjidiorenjî  Epif" 
copo  y  eîidiendus  traditur  :  &  ce  qui  prouve  clairement ,  nous 
difent-ils ,  la  méprife  de  l'ancien  légendaire  au  fujet  du  Saint 
Germain  dont  il  fait  Saint  Brieuc  Dil'ciple ,  c'efl:  ce  qu'il  ajoute 
lui-même  au  fujet  de  Saint  Patrice  &  de  Saint  Hiltut.  Il  dit,  que 
Saint  Brieuc  eut  le  bonheur  de  trouver  ces  deux  Saints  à  l'école 
de  Saint  Germain ,  &  qu'ils  formèrent  avec  lui  une  étroite  liai- 
fon  :  Duo  ,  prce.  cœteris  ,  Patricius  Jcilicet  &  Eltutus  ,  Jinc^ro  eum 
amore  ampkxad  funt.  Or ,  Saint  Patrice  &  Saint  Hiltut  n'ont  cer- 
tainement point  été  Difciples  de  Saint  Germain  de  Paris ,  beau- 
coup poftérieur  au  temps  où  ont  vécu  ces  deux  Saints  :  ils  n'ont 
pu  l'être  que  de  Saint  Germain  d'Auxerre  j  c'ell:  donc  de  ce  der- 
nier que  l'ancien  légendaire  a  voulu  parler ,  quoique  ,  par  er- 
reur ,  il  ait  mis  Saint  Germain  de  Paris.  Quant  à  l'obje^lion  tirée 
du  Prince  Rigual  ,  qu'on  veut  avoir  été  contemporain  de  Saint 
Brieuc  ,  elle  ne  paroît  point  embarraffante  à  ceux  qui  foutien- 
nent  que  Saint  Brieuc  a  été  Difciple  de  Saint  Germain  de  Paris. 
Ils  difent  donc  que  le  Rigual  des  aftes  de  Saint  Brieuc  n'eft 
point  du  tout  ce  fameux  Rigual ,  ou  Hoël  I ,  Roi  de  Bretagne , 
que  fa  valeur  &  fes  exploits  rendirent  fi  célèbre  dans  le  fixieme 
fiecle.  La  raifon  qu'ils  en  donnent  ,  c'eft  que  Saint  Brieuc  étoit 
Prêtre ,  ou  même  Evêque  ,  lorfqu'il  fut  connu  de  Rigual ,  & 
qu'il  en  reçut  le  fonds  fur  lequel  il  bâtit  fon  Monaftere.  Or, 
Hoël  I ,  Roi  de  Bretagne ,  étoit  mort  long-temps  auparavant  que 
Saint  Brieuc  eût  été  ordonné  Prêtre  j  s'il  eft  vrai ,  comme  on  le 
prétend  ,  qu'il  ait  été  fait  Prêtre  par  Saint  Germain  de  Paris  : 
car  Saint  Germain  ne  fut  promu  à  l'Epifcopat  qu'en  5  5  5  ,  & 
Rigual,  ou  Hoël,  Fvoi  de  Bretagne,  étoit  mort  dès  545.  Le 
Rigual  des  aftes  de  Saint  Brieuc  n'eft  donc  point  celui  qui  regnoit 
en  Bretagne  au  milieu  du  fîxieme  iiecle.  L'anachronifme  eft 
ici  trop  fenfible.  En  vain  voudroit-on  lui  fubftituer  Rigual,  ou 
Hoël  II ,  aufli  Roi  de  Bretagne.  La  mort  précipitée  de  ce  Prince , 
arrivée  deux  ans  après  celle  de  fon  père  ,  s'oppofe  encore  à 
cette  fuppofition.  Mais,  quel  étoit  donc  ce  Rigual,  ouRivallon, 
fi  célèbre  dans  l'hiftoire  Briochine ,  &  qui  a  partagé  avec  Saint 
Brieuc  l'honneur  de  fonder  une  des  principales  villes  de  la  pro- 
vince ?  Ce  Rigual  étoit  un  Seigneur  particulier  fort  riche,  fort 
libéral  envers  l'Eglife ,  mais  dont  on  ne  fçait  que  ce  que  les 
a6les  mêmes  de  Saint  Brieuc  nous   apprennent. 


s  AI  171 

L'auteur  du  Chronicon  Briocenfe ,  qui  vivoît  dans  le  quatorzième 
{îecle ,  nous  apprend  que  Childebert ,  Roi  de  France ,  fut  fort 
libéral  envers  les  Monafteres  de  Saint-Brieuc  ,  de  Saint -Tug- 
dual,  &  de  Saint-Samfon  :  Plurlmas  iibenates  &  franchlfias  coti- 
cejjît  Monafieriis  Sancii  Tugdualdi ,  Sancli  Brïoci ,  &  Sancli  Sam- 
fonis.  On  fçait  que  Childebert  eli  mort  en  558.  Le  Monaftere 
de  Saint-Brieuc  exiftoit  donc  dès-lors.  Or ,  ii  on  fait  Saint  Brieuc 
Difciple  >de  Saint  Germain  de  Paris  ,  on  ne  peut  pas  dire  qu'il  eût 
dès-lors  bâti  Ton  Monaftere  ,  puifqu'il  n'auroit  eu ,  en  558,  que 
douze  ou  treize  ans.  En  voici  la  preuve.  Saint  Brieuc  étoit  fort 
jeune  lorfqu'il  fut  envoyé ,  par  fes  parents ,  à  l'école  de  Saint 
Germain.  11  n'avoit  qu'environ  dix  ans  5  Cum  nondàm  decimum 
cEtatis  annum  excederet  :  &  Saint  Germain  étoit  dès-lors  Evêque. 
Saint  Germain  n'eft  monté  fur  le  Siège  de  Paris  qu'en  55c.  En 
fuppofant  donc  même  que  Saint  Brieuc  lui  ait  été  confié  dès 
la  première  année  de  fon  Epifcopat ,  il  s'enfuivroit  toujours  qu'il 
n'auroit  eu  en  558,  temps  de  la  mort  de  Childebert,  que 
douze  ou  treize  ans.  Dira-t-on  qu'il  avoit  dès-lors  bâti  fon  Mo- 
naftere  ?  on  fent  tout  le  ridicule  d'une  pareille  fuppofîtion. 

Il  faut  avouer  que  cette  dernière  preuve ,  fi  elle  n'eil  pas  dé- 
cifive  ,  donne  au  moins  une  très-grande  vraifemblance  au  fen- 
timent  de  ceux  qui  veulent  que  Saint  Brieuc  ait  été  Difciple 
de  Saint  Germain  d'Auxerre  ,  Ôc  qu'il  ait  par  conféquent  jette 
les  premiers  fondements  de  la  ville  qui  porte  aujourd'hui  foa 
nom ,  vers  la  fin  du  cinquième  fîecle  ,  ou  au  commencement  du 
fixieme.  Les  miracles  qui  éclatèrent  fur  fon  tombeau,  après  fa 
mort ,  appellerent  dans  ce  lieu  un  grand  nombre  d'habitants,  qui, 
à  l'exemple  de  ceux  qui  s'y  étoient  fixés  pendant  la  vie  du 
Saint  Prélat ,  s'y  bâtirent  des  maifons ,  qui  fe  multiplièrent  de 
telle  forte  qu'elles  formèrent  en  peu  de  temps  une  ville  con- 
fidérable. 

Alain  Barbe-torte  remporta  ,  en  939,  une  viftoire  complette 
fur  les  Normands ,  auprès  de  Saint-Brieuc.  Pour  récompenfe  de 
ce  fervice ,  il  fut  proclamé  Duc  de  Bretagne  ,  par  une  accla- 
mation générale  des  Grands  &  du  Peuple. 

Eudon ,  Comte  de  Penthievre ,  chef  de  cette  maifon ,  mourut 
en  1079  ,  &  fut  enterré  dans  l'Eglife  Cathédrale  de  Saint- 
Brieuc  (a).  Cet  Eudon  efl  le  chef  de  la  maifon  de  Pendue  vre  ; 
&  quelques-uns  ont  prétendu   que  c'cioit  de  lui ,  ou  de  fon  fuc- 

■  '     '  I      I       i.iiMr  I  , 

(  û  )  Son  tombeau  a  été  détruit  lors  de   la  rcédification  de  cette   Egllfe. 


lyi  S   A   I 

cefleur,  qne  les  Evêques  de  Saint-Brieuc  tenoient  leur  Jurifclic- 
tioii  temporelle  j  cette  opinion  compte  peu  de  partifans.  On 
dit ,  avec  plus  de  vraifemblance ,  que  la  ville  de  Saint-Brieuc 
n'a  jamais  fait  partie  de  la  Seigneurie  de  Penthievre  j  que  Saint 
Brieuc  reçut,  en  toute  propriété ,  du  Comte  ëe  Rigual,  le  ter- 
rein  où  il  bâtit  fon  Monaftere ,  &  celui  qui  l'environnoit^  que 
les  Rois  Dagobert  &  Nominoé  accordèrent  à  ce  Couvent  plu- 
fieurs  droits  &  privilèges  -,  &  que ,  fi  les  premiers  Seigneurs  de 
Penthievre  furent  enterrés  dans  la  Cathédrale,  s'ils  y  reçurent 
des  honneurs ,  qui  ont  été  confervés  à  leurs  defcendants  &  à 
leurs  fuccefîeurs  ,  c'eft  qu'ils  furent  les  bienfai8:eurs  particuliers 
de  cette  Eglife  -,  c'eft  à  raifon  de  leur  naiflance  illuilre ,  puif- 
qu'ils  étoient  de  la  maifon  régnante.  Ils  augmentèrent,  peut-être, 
fa  Jurifdiftion  ;  mais  ils  ne  la  fondèrent  pas.  Ces  Princes  étoient , 
d'ailleurs  ,  regardés  comme  des  Souverains  dans  leur  canton. 
Penthievre ,  dans  fon  origine ,  comprenoit  près  d'un  tiers  de  la 
province.  Ces  Princes  avoient  toujours  une  Cour  fort  brillante; 
ils  reconnoifToient  peu  l'autorité  des  Ducs  de  Bretagne ,  &  don- 
noient  à  leurs  principaux  valTaux  le  titre  de  Barons  ;  titre  faf- 
tueux  alors  ,  &  fi  refpefté  qu'on  le  donnoit  aux  habitants  du 
Ciel.  On  difoit  le  Baron  Saint  Jacques ,  comme  on  a  dit , 
depuis  ,  Monfeigneur  Saint  Denis;  &  comme  les  payfans  di- 
fent  encore  ,  le  bon  M,  Saint  Pierre  ,  la  bonne  Madame  Sainte 
Anne,  On  s'embaronnoit  alors  ,  comme  on  s'eft  emmarquifé  de- 
puis. Geoffroi  Rufus  ,  Archevêque  de  Dol ,  tint  un  Concile  à 
Saint-Brieuc.  On  y  termina  les  différents  furvenus  entre  les 
Moines  de  Saint-Melaine  &  différents  particuliers,  au  fujet  de 
l'ifle  de  Bréhand.  Etienne ,  Comte  de  Penthievre ,  étant  mort , 
l'an  1 1 3  8  ,  fut  inhumé  ,  dans  la  Cathédrale  de  Saint-Brieuc  , 
auprès  du  Comte  Eudon,  fon  père.  L'an  1148  ,  Rolland,  Evêque 
de  Saint-Brieuc  ,  donne  aux  Moines  de  Marmoutier  l'Eglife  de 
Saint-Aaron  ;  il  fe  réferva  feulement  les  droits  de  repas  ,  de 
procuration  ,  &  de  redevance  fynodale.  Cette  Eglife  avoit  été 
poffédée  par  un  Laïque ,  qui  l'avoit  remife  entre  les  mains  de 
l'Evêque ,  pour  la  donner  à  Marmoutier ,  où  il  s'étoit  fait  Moine. 
12 10.  Pierre,  Evêque  de  Saint-Brieuc,  obtient  des  Moines 
de  Saint-Serge  d'Angers ,  une  partie  des  Reliques  de  Saint-Brieuc  , 
c'eft-à-dire ,  un  bras ,  deux  côtes ,  ou  un  morceau  de  la  tête  ou 
du  col.  Ces  Reliques  avoient  été  tranfportées  à  Angers  du  temps 
d'Erifpoé ,  pour  les  dérober  aux  profanations  facrileges  des 
Normands.   Cette  tranllation,  par  l'Evêque  Pierre/  fe  ht. avec 


s  A  I  175 

la  plus  grande  folemnité.  Alain  ,  Comte  de  Penthievre  ,  le  plus 
puiiTant  Seigneur  du  Duché ,  reçut  ces  précieux  relies  entre  fes 
bras  ,  &  voulut  les  porter  ,  lui-même ,  dans  l'Eglife  Cathédrale  , 
en  préfence  de  tout  le  peuple.  Une  ancienne  chronique  dit 
qu'alors  Alain  commandoit  dans  la  ville  de  Saint-Brieuc  ,  ap- 
paremment comme  Lieutenant  de  la  Duchefle  AUx,  qui  avoit 
été  promife  en  mariage    à  Henri ,  fon   fils  aîné. 

1223.  Juhel ,  Archevêque  de  Tours,  vifite  le  diocefe  de  Saint- 
Brieuc.  C'ell  à  cette  époque  que  commença  l'exiftence  de  la 
Paroiiïe  de  Saint-Brieuc.  Elle  exifloit  bien  dès  le  commen- 
cement de  la  ville ,  mais  elle  étoit  attachée  à  la  Cathédrale. 
L'Archevêque  ,  pour  laiffer  plus  de  temps  aux  Chanoines  de 
faire  l'Office,  les  déchargea  du  foin  de  la  FaroifTe ,  &  leur 
permit  de  nommer  un  Vicaire ,  approuvé  de  l'Evêque ,  avec 
deux  Chapelains  fous  lui.  Cet  Archevêque  établit  auffi  les 
Prêtres  ,  Diacres  ,  &  Sous -Diacres  du  bas- chœur  de  la  Ca- 
thédrale. 

1235.  Enquête  faite  fur  les  droits  de  Henri  d'Avaugour  , 
Comte  de  Goëlo.  Il  eft  dit,  dans  cette  enquête  ,  qu'Alain,  Comte 
de  Penthievre,  a  tenu  la  régale  de  Saint-Brieuc ,  &  que  l'Evê- 
que Sylveflre  a  été  préfenté  à  Henri ,  fon  fils.  Ceux  qui  croient 
que  la  ville  de  Saint-Brieuc  a  fait  autrefois  partie  des  do- 
maines de  Penthievre ,  ne  manquent  pas  de  faifir  cette  preuve. 

1259.  Raoul,  Evêque  de  Saint-Brieuc,  efi:  envoyé  en  Angle- 
terre ,  pour  négocier  le  mariage  de  Jean  de  Bretagne ,  fils  aîné 
du  Duc  Jean  le  Roux  ,  avec  Béatrix ,  fille  de  henri  III ,  Roi 
d'Angleterre. 

En  1376,  le  Roi  Charles  V  accorda  les  fruits  de  la  régale  à 
Laurent  de  la  Paye ,  élu  de  Saint-Brieuc  ;  ce  qui  prouve  que  le 
Roi  commandoit  alors  dans  l'Evêché  de  Saint-Brieuc  :  c'étoit  le 
temps  des  brouilleries  du  Duc  Jean  IV  avec  la  Cour  de  France. 
En  1394,  le  Connétable  Olivier  de  ChfTon  fit  le  fiege  de  la 
ville  de  Saint-Brieuc.  Les  Briochins  fe  réfugient  dans  la  Cathé- 
drale ,  &  y  font  forcés  après  quinze  jours  de  fiege ,  pendant  lef- 
quels  les  affiégeants  battirent  la  place  avec  des  machines  ,  & 
firent  des  brèches  confidérables.  Le  Duc ,  touché  de  cette  perte, 
tacha  de  la  réparer.  Il  marcha  vers  Saint-Brieuc  avec  une  armée 
de  beaucoup  fupérieure  à  celle  de  Chflon  ,  6c  lui  fit  offrir  le 
combat.  Clilfon ,  certain  de  ne  pouvoir  être  forcé  dans  fes  re- 
tranchements ,  ne  juge  pas  à  propos  d'en  fortir.  Le  Duc  l'at- 
tendit inutilement ,  pendant  cinq  à  fix  jours ,  fur  les  grèves  de 


174  S  A  I 

Hillion.  La  Cour  de  France  ayant  offert  fa  médiation  pour  ap- 
pailer  ce  différent ,  Cliffon  &  les  Français  qui  étoient  avec  lui 
dans  Saint-Brieuc ,  eurent  permifîion  d'en  fortir  j  &  le  Duc  con- 
gédia fes  troupes.  Ce  Duc ,  quoique  grand  Capitaine  ,  n'étoit  pas 
heureux  dans  fes  entreprifes  fur  Saint-Brieuc  -,  il  en  avoit  déjà 
levé  le  fîege  une  autre  fois  en  *'i375  :  ce  qui  prouve  que  cette 
ville ,  ou  plutôt  la  Cathédrale ,  étoit  une  place  forte  en  ce  temps- 
là.  Il  paroît  que  la  tour  de  Ceffon  n'exiitoit  point  encore,  puif- 
qu'il  n'en  efl  point  parlé  dans  ces  guerres.  C'ell:  peut-être  dans 
ce  temps-là  qu'elle  fut  bâtie  ;  &  je  l'aflurerai  d'autant  plus  volon- 
tiers ,  que  j'ai  lu  quelque  part  que  Louis  de  Robien  en  étoit  Ca- 
pitaine en  1395. 

En  1 404 ,  Guillaume  Angers ,  Evêque  de  Saint-Brieuc  ,  affifte 
à  l'hommage  que  rend  Jean  V  ,  Duc  de  Bretagne ,  à  Charles  VI , 
Roi  de  France.  Après  bien  des  conteftations  fur  la  nature  de 
cet  hommage ,  il  fut  convenu  qu'on  le  recevroit  tel  qu'il  devroit 
être,  félon  le  droit  &  l'ancien  ufage.  Ceux  qui  prétendent,  dit 
M.  l'Abbé  Ruffelet ,  que  cet  hommage  étoit  hge  y  nous  donnent 
une  fauffe  idée  de  l'hommage  lige  ;  cet  honneur  n'étoit  dû  que 
pour  un  fief  originairement  détaché  de  la  Couronne ,  &  par  con- 
îequent  ne  pouvoit  convenir  à  la  Bretagne  qui  n'efl  point  un 
démembrement. 

En  1 406 ,  les  habitants  de  Saint-Brieuc  fe  révoltent  contre  le 
Duc  de  Bretagne.  Apparemment  que  quelques  importions  nou- 
velles en  étoient  le  motif.  Le  Duc  y  envoya  fon  frère  ,  le  Comte 
de  Richemont ,  avec  quelques  troupes.  Ce  Prince  vint  aifément 
à  bout  d'y  rétabHr  le  calme  &  la  tranquillité.  Ce  font  les  pre- 
mières armes  de  ce  fameux  guerrier  ,  qui  devint ,  dans  la  fuite , 
Connétable  de  France  ,  &  enfin  Duc  de  Bretagne ,  par  la  mort 
de  fes  deux  neveux  François  I  &  Pierre  IL 

1441,  Les  Etats  s'affemblent  à  Vannes  ,  oii  Jean  Pregent ,  Evê- 
que de  Saint  -  Brieuc  ,  difpute  la  préféance  à  celui  de  Vannes. 
Ce  n'étoit  pas  encore  la  coutume  que  l'Evêque  diocéfain  préfidât 
de  droit  aux  Etats  affemblés  dans  fon  diocefe.  On  voit  même 
que  fous  les  Ducs ,  les  Evêques  de  Dol  étoient  en  pofTefïion  de 
précéder  les  autres.  En  1468,  le  Duc  de  Berri,  frère  du  Roi 
Louis  XI ,  ayant  fait  fon  entrée  à  Saint-Brieuc ,  l'arrivée  de  ce 
Prince  fait  ouvrir  les  prifons^,  &  tous  les  prifonniers  font  élargis. 
En  1484,  fut  pafîee  ,  entre  l'Evêque  &  le  Chapitre  de  Saint- 
Brieuc  ,  une  tranfaftion  ,  par  laquelle  le  Chapitre  efl:  maintenu 
dans  les  droits  de  iods  &  ventes  ^  hommage  &   aveu  fur  fes 


s  A  I  17S 

vaflaux  ;  &:  le  droit  de  Jurifdiélion  efl  confervé   à  l'Evéque  fur 
lefdits  vafTaux. 

1503.  Etabliflement  des  Cordeliers  à  Saint-Brieuc.  Ces  Reli- 
gieux, appelles  à  Saint-Brieuc  dès  145 1  ,  par  le  Duc  Pierre  II, 
logèrent  d'abord  dans  un  Hôpital  ruineux ,  dit  r Hôpital  de  Saint- 
Antoine ,  qu'on  croit  avoir  été  ntùé   près  le  Légué.  Ils   avoient 
commencé  à  y  bâtir ,  lorfque  Chriftophe  de  Penmarch ,  Evêque 
de  Saint-Brieuc  ,  ayant  acquis,  en  1503  ,  de  Thibaud  de  Kerei- 
merk  &  de  Jeanne  de  Couvran,  fon  époufe ,  la  maifon   de  la 
Haute-Garde  ,  à  condition  qu'ils  feroient  reconnus ,  &:  leurs  def- 
cendants ,  pour  fondateurs ,  y  fît  bâtir  le  Monaftere  que  ces  Re- 
ligieux occupent  aujourd'hui.  L'Eglife  ne  fut  achevée  que  fous 
Olivier  du  Châtel  ,  qui  en  fit  la  dédicace  le  26   Juillet  151 5. 
La  maifon   de   Couvran    efl:  aujourd'hui  fondue    dans   celle  de 
Eudes  :  elle  tiroit  fon  origine ,  fuivant  le  Laboureur ,  des  anciens 
Seigneurs  de  Caouvren ,  dans  l'ancien  Comté  de  Hasbain.  Sous 
l'Epifcopat  d'Olivier  du  Châtel ,  mort  en  1 5  2  5  ,  fut  bâtie  ,  ou  du 
moins  rétabUe,  la  Chapelle  de  Sainte- Anne ,  dans  l'Eglife  Collégiale 
de  Saint-Guillaume.  Cette  Eglife  efl  fort  ancienne ,  &  l'on  n'en  con- 
noît  point  l'origine.  Lobineau  fe  trompe  ,  lorfqu'il  dit  qu'elle  n'a  été 
bâtie  que  depuis  la  mort  de  Saint  Guillaume.  Les  livres  de  compte 
de  cette  EgHfe  ,  fort  antérieurs  à  cette  époque ,  prouvent  qu'elle  eft 
beaucoup  plus  ancienne.  Elle  étoit  connue  alors  fous  le  nom  de 
Notre-Dame  de  la  Porte.  Après  la  mort  &  la  canonifation  de  Saint 
Guillaume ,  les  Chanoines  demandèrent  &  obtinrent  qu'il  leur  fût 
permis  de  choifîr  ce  faint  Evêque  pour  leur  fécond  Patron.  Cette 
Collégiale  eft  royale  ,  &  fes  Bénéfices ,  comme  ceux  des  Cathé- 
drales ,  tombent  en  régale ,  &  hors  le  temps  de  la  régale ,  font 
fujets  à  l'alternative  du  Pape  &  de  l'Evéque ,  excepté  ceux  qui 
font  en  patronage  laïque.    La  Chapelle   de  Saint- André  ,  dans  la 
même  Eglife  ,  a  été  fondée    par  les  Seigneurs  de  la  Ville-Bou- 
gault ,  fous  l'Epifcopat  d'André  le  Porc  de  la  Porte ,  qui  en  fit 
la  dédicace  le   24  Août   1625.   La   Confrairie  de   la  Croix,  qui 
s'afTemble  dans    cette  Chapelle,  a  commencé    en  1707,  &   eft 
par  conféquent  plus  ancienne  que  celle  de  Saint-Pierre,  qui  n'a 
commencé  qu'en   17 10.  Cette  dernière  tint  fes  premières  afTem- 
blées  dans  la  Chapelle  de  Notre-Dame  de  la  Fontaine.  Ce  ne 
fût  qu'en   171 6  que   les  Confrères  de  cette  Société  obtinrent    de 
Madame  de  Plelo    la  permifTion  de  s'afTembler  dans  la  Chapelle 
de  Saint-Pierre ,  qu'ils  ont  depuis  rebâtie  &  décorée. 

1539.  Etabliflement  du  Papegault  dans  la  ville  de  Saint-Brieuc, 


176  SAI 

par  le  Roi  François  I  :  il  a  été  fupprimé ,  comme  tous  les  autres , 
en  1769.  La  feule  ville  de  Saint-Malo  a  confervé  ce  privilège 
en  Bretagne.  En  1565,  fut  donné  un  Edit  portant  réunion  de 
la  Seigneurie  royale  de  Goèlo  à  la  Seigneurie  de  CelTon  ,  & 
tranflation  de  Lanvollon  à  Sai||f-Brieuc.  Cette  tranflation ,  qui 
avoit  été  follicitée  par  la  Communauté  de  Saint-Brieuc ,  donna 
lieu  à  un  fort  long  procès  entre  cette  Communauté  &  l'Evêque 
de  Saint  -  Brieuc  ,  au  fujet  des  droits  de  cette  Jurifdiétion.  Ce 
procès  fut  terminé  par  une  tranfaftion  du  2  Juillet  1580,  par 
laquelle  il  fut  reconnu  que  l'Evêque  avoit  feul ,  à  Saint-Brieuc ,, 
toute  haute-Juflice  &  tout  droit  de  Police.  Les  Juges  royaux 
acquiefcerent  à  cette  tranfaftion ,  &  aux  lettres-patentes  confir- 
matives  du  droit  de  l'Evêque,  du  23  Septembre  1580.  Cinquante 
ans  après  cet  accord ,  ils  renouvellerent  leurs  prétentions  au  fujet 
de  "la  Police.  Ils  en  furent  déboutés  par  l'Arrêt  du  25  Juin  1630, 
par  lequel  les  Officiers  de  l'Evêque  furent  maintenus  au  droit 
&  pofTeffion  de  faire  la  Police  dans  la  ville  de  Saint-Brieuc  ,  avec 
défenfe  aux  Juges  royaux  &  à  tous  autres  de  les  y  troubler.  Les 
Juges  royaux  s'étant  oppofés  à  l'exécution  de  cet  Arrêt ,  il  fut 
confirmé  par  un  autre  du  premier  Juillet  1^33,  contradi£loire 
avec  tous  les  Officiers  de  la  Jurifdiftion  royale.  Ces  Arrêts  font 
fondés  fur  ce  que  le  Roi  n'a  ni  proche-fief ,  ni  Jurifdi6î:ion  dans  la 
ville ,  ni  dans  l'étendue  des  Régaires  de  Saint-Brieuc. 

1591.  Siège  de  la  tour  de  Cefîbn,  proche  Saint-Brieuc,  par 
Saint- Laurent ,  Capitaine  du  Duc  de  Mercœur.  C'étoit  le  temps 
de  la  Ligue  en  Bretagne  ;  temps  d'horreur  &  de  confufion. 
Le  château  de  CefTon  tenoit  pour  le  Roi,  &  Saint-Laurent  étoit 
zélé  hgueur.  Rieux  de  Sourdéac ,  Commandant  pour  le  Roi  en 
baffe  Bretagne  j  accourt  au  fecours  de  cette  place.  Saint-Laurent, 
averti  de  fa  marche  ,  vient  au  devant  de  lui.  Le  combat  efl  vif 
de  part  &  d'autre  :  la  viftoire  ,  long-temps  difputée ,  fe  déclare 
enfin  pour  les  RoyaUlles.  Saint-Laurent  efl:  fait  prifonnier  &  ren- 
fermé dans  cette  même  tour  où  il  avoit  compté  d'entrer  d'une 
autre  manière.  Parmi  ceux  qui  fe  diflinguerent  à  cette  aftion , 
on  fait  principalement  mention  des  Sieurs  de  Sourdéac ,  Kergomar, 
Kermorvan ,  fon  freré,  Pécréan ,  Lifcouet ,  &  François  Budes  5 
qui  y  fut  bleffé  d'un  coup  de  pique  dans  la  gorge.  Le  Duc  de 
Mercœur  ne  tarda  pas  à  venger  l'honneur  de  fon  Lieutenant  , 
il  vint  lui-même  mettre  le  fiege  devant  cette  place,  &  la  prit 
par  capitulation ,  après  lui  avoir  fait  effuyer  quatre  cents  volées 
de  canons.  Elle  demeura  au  pouvoir  des  ligueurs  jufqu'en  1598, 

qu'elle 


s  A  I  177 

(qu'elle  fut  reprife  par  le  Maréchal  de  Brifîac.  On  ne  fçait  pas  au 
jufle  quand  cette  tour  avoit  été  bâtie  :  il  paroît  que  ce  fut  vers  la 
fin  du  quatorzième  {iecle  ,  par  le  Duc  Jean,  dit  le  Conquérant^ 
pendant  fon  mariage  avec  Jeanne  de  Navarre  ,  fa  troifieme  femme, 
comme  on  peut  le  prouver  par  les  armes  de  Navarre,  qu'on  voit 
en  alliance  ,  fur  cette  tour  ,  avec^celles  de  Bretagne.  Après  les  lon- 
gues &  funeftes  guerres  qui  avoient  défolé  la  Bretagne  fous 
Henri  III  &  Henri  IV,  ce  dernier  ,  enfm  devenu  paifible 
pofTefTeur  du  Royaume  ,  pour  prévenir  les  maux  infinis  que  les 
garnifons  de  plufieurs  places  fortes  avoient  caufé  à  la  Bretagne, 
en  ordonna  la  démolition.  De  ce  nombre  fut  la  tour  de  Cellon. 
Les  Sieurs  de  Pécréan  ,  &  Ruffelet ,  Sénéchal  royal  de  Saint- 
'Brieuc,  furent  chargés,  en  1598,  de  l'exécution  des  ordres  du 
Roi ,  &  cette  tour  fut  démolie  la  même  année.  Ce  qui  en  refle 
aujourd'hui ,  fait  voir  combien  elle  étoit  folidement  bâtie. 

1592.  La  ville  de  Saint-Brieuc  efl  pillée  par  l'armée  des  Ef- 
pagnols ,  Lorrains ,  Lanfquenets ,  &  autres  gens  de  guerre.  En 
1.60 1  ,  Saint  -  Brieuc  ell:  affligé  d'une  pefte ,  qui  emporte  beau- 
coup de  monde.  Les   Etats   s'aflemblent  à  Saint-Brieuc   en  1602. 

1609.  Délibération  pronale  en  l'Eglife  de  Saint-Brieuc  ,  où  l'on 
nomme  des-  Egailleurs  &  Collcfteurs ,  pour  caufe  des  aides  dus 
au  Roi  fur  la  ville  de  Saint-bneuc.  Cette  ville  ell:  exempte  de 
fouages ,  moyennant  une  fomme  annuelle  de  quatre  cents  vingt 
livres,  qui,  en  1609,  1615,  &  1620,  s'égailloit  encore  fur  le 
général  des  habitants.  Cette  fomme ,  qui  fe  paie  aujourd'hui  fous 
le  nom  laides  ,  a  paflé  en  nature  de  charge  ordinaire  ,  fuivant 
les  Arrêts  du  Confeil  de  I670&  1681  ,  portant  règlement  pour 
cette  Communauté.  Bertrand  ,  Havart ,  &  Jean  ,  Chapelains , 
députés  de  Saint-Brieuc,  afliftent,  en  1609,  aux  Etats  de  Nantes. 
11  paroît,  par  plufieurs  lettres  de  Henri  IV,  écrites  à  la  Commu- 
nauté de  ville  ,  qu'elle  a  eu  autrefois  le  droit  de  députer  deux  no- 
tables Bourgeois  aux  Etats  de  la  province.  Cet  ufage  fubfifloit  en- 
core lors  de  l'Arrêt  de  règlement  pour  cette  Communauté ,  du 
18  Août  1670.  En  i6i2,  le  pont  de  Gouedic  fut  conftruit.  Le 
Couvent  des  Capucins  fut  fondé  ,  l'an  161  5,  par  MM.  de  Bré- 
hand.  La  Communauté  de  ville  favorifa  aufll  cet  établifTement , 
pour  lequel  elle  donna  une  fomme  de  trois  mille  fix  cents  livres-, 
&  lors  de  la  confl:ru6bon  du  nouveau  bâtiment,  en  1733,  ^^^ 
en   accorda  une  autre  de  deux  mille  livres. 

1624.  La  Révérende  mère  Fortin,  àSx.^  des  Anges ^  Supérieure 
des  Urfulincs  de  Dinan  ,  eft  envoyée  à  Saint-Brieuc  ,  à  la  prière 
Tome  IV,  Z 


lyS  S  A  I 

de  l'Evêque  ,  pour  y  fonder  une  maifon  de  Ton  Ordre.  On  lui 
avoir  donné  pour  compagnes  trois  Mères  de  Chœur  &  deux 
Sœurs  Converfes.  L'Evêque  de  Saint-Brieuc  leur  fit  bâtir  un  très- 
beau  Monailere  ,  dont  l'Eglife  eft  fous  l'invocation  de  Saint 
Charles.  Les  BénédiéHnes  de  la  Congrégation  du  Calvaire  ,  re- 
çues la  même  année  à  Saint-Brieuc ,  logèrent  d'abord  dans  un 
hofpice ,  près  le  Collège ,  &  ne  prirent  poffeffion  de  la  maifon 
qu'elles  occupent  aujourd'hui  qu'en  162^.  En  1628,  on  com- 
mença à  bâtir  les  murailles  de  la  ville  de  Saint-Brieuc.  Sous  la 
première  pierre ,  fut  pofée  une  plaque  de  cuivre  ,  où  font  gravées 
les  armes  d'André  le  Porc  de  la  Porte ,  Evêque  de  Saint-Brieuc  ; 
de  Nicolas  le  Clerc ,  Sénéchal  royal  -,  &  du  Syndic  de  la  Com<- 
munauté. 

En  1643,  Denis  de  la  Barde,  Evêque  de  Saint-Brieuc,  pro- 
nonce ,  en  préfence  des  Etats  aÔemblés  à  Vannes ,  l'Oraifon  fo- 
nebre  du  Cardinal  de  Richelieu,  Gouverneur  de  la  province. 
En  1664,  ce  Prélat,  voulant  fonder  le  Séminaire  de  Saint-Brieuc, 
acheta  la  maifon  de  la  Grenouillère  ,  où  il  bâtit  à  neuf  le  grand 
corps  de  logis  qu'on  y  voit  aujourd'hui  -,  enfuite  l'Eglife  ,  qui  ne 
fut  achevée  qu'après  fa  mort.  Il  mit  cette  maifon  fous  la  direc- 
tion des  Prêtres  de  la  Congrégation  de  la  Miffion ,  dite  de  Saint" 
La:{CLre, 

1 667,  Lettres-patentes  du  Roi ,  portant  provifion  du  Gouver- 
nement de  la  ville  de  Saint-Brieuc  &  tour  de  CefTon ,  en  faveur 
d'Yves-Olivier  de  la  Rivière ,  fon  fils  aîné  j  ledit  Gouvernement 
vacant  par  la  démiffion  de  Meffire  Claude  d'Acigné ,  Chevalier, 
Seigneur  de  Carnavalet.  Le  premier  Gouverneur  de  Saint-Brieuc 
dont  on  ait  connoiilance  ,  efl  Elie  du  Rouvre ,  Seigneur  du  Bois- 
BoeiTel ,  qui  vivoit  en  1 3  8 1  ;  mais  il  ne  faut  pas  s'imaginer  que 
nos  Gouverneurs  de  villes  &  châteaux  fuffent  fous  nos  Ducs 
ce  qu'ils  font  aujourd'hui.  Ce  n'étoit  ordinairement  que  des  com- 
miflions  données  pour  un  certain  temps ,  pendant  la  guerre  ou 
pendant  l'abfence  des  Ducs.  Ces  commifîions  n'a  voient  d'autre 
durée  que  celle  du  befoin  qui  les  occafionnoit.  Le  Gouvernement 
de  Saint-Brieuc,  qui,  depuis  1667,  eft  dans  la  maifon  de  la  Ri- 
vière ,  vient  d'y  être  fverpétué  par  la  furvivance  que  M.  le  Comte 
de  la  Rivière  en  obtint ,  en  1 766 ,  pour  fon  neveu  le  Vicomte  de 
la  Rivière. 

1669,  Arrêt  du  Parlement  de  Bretagne,  rendu  entre  le  Sei- 
gneur ,  le  Chapitre  ,  &  le  Seigneur  du  Bois-Boëflel ,  la  Commu- 
nauté de   ville   intervenant,  par  lequel  les   habitants  de  Saint- 


s  A  I  179 

Brieuc  font  confirmés  dans  le  droit  de  choifir,  parmi  les  moulins 
de  ces  trois  Seigneurs ,  celui  qu'ils  voudront.  Vers  1672 ,  mourut 
Jean-Baptifte  Nouleau ,  né  à  Saint-Brieuc  en  1 604  :  il  étoit  entré 
dans  la  Congrégation  de  l'Oratoire  à  vingt  ans,  &  avoit  été  pourvu 
de  la  Théologale  de  Saint-Brieuc  en  1 640  :  il  fe  livra  à  la  pré- 
dication &  à  la  compofition  de  plufieurs  ouvrages  de  fpiri- 
tualité ,  mais  l'indifcrétion  de  fon  zèle  &  quelques-uns  de  fes 
livres  lui  attirèrent  des  difgraces.  Les  Etats  tinrent  à  Saint-Brieuc 
en  1677,  &  l'Evêque  Fortin  de  la  Roquette  y  préfîda  pour  le 
Clergé.  Ceil  fous  l'Epifcopat  de  Marcel  de  Coètlogon  ,  en  1681, 
que  le  Roi  d'Angleterre ,  Jacques  II ,  vint  à  Saint-Brieuc.  Le  bon 
accueil  que  le  Prélat  fit  à  ce  Monarque  malheureux ,  fut  tel , 
que  Louis  XIV  daigna  lui  en  témoigner  fa  reconnoiffance.  En 
1687,  les  Etats  s'aflemblent  à  Saint-Brieuc.  Cette  tenue  eu. 
célèbre  par  les  règlements  que  les  Etats  s'y  firent  à  e«x- 
mêmes ,  fous  le  bon  plaifir  de  Sa  Majefté ,  &  qui  fervent  en- 
core aujourd'hui  de  bafe  à  leur  adminiflration  publique  &:  par- 
ticulière. 

1688.  Ordonnances  de  Louis  XIV  pour  l'établifTement  des 
Milices.  Celles  du  diocefe  de  Saint-Brieuc  ont  fervi,  avec  dif- 
tin6Hon  ,  fous  M.  le  Maréchal  de  Saxe  &  dans  les  dernières 
guerres.  Cette  MiUce  a  quelque  rapport  avec  l'ancienne  Milice 
Bourgeoife  des  Romains  &  avec  celle  des  Communes ,  qui  a  fub- 
ûûé  en  Bretagne  jufqu'au  règne  de  Charles  VII.  En  1691  ,  fe 
fait  l'établifTement  de  la  JurifdiRion  des  Traites  &  du  Siège 
royal  de  l'Amirauté  de  Saint-Brieuc.  En  1692  ,  fut  donné  l'Edit 
de  création  des  Maires  &  autres  Officiers  Municipaux.  Ces  charges 
furent  fupprimées  en  1717^  rétablies  en  1722;  fupprimées  de- 
rechef en  1724  i  &  rétablies  fur  le  pied  où  elles  font  à  préfent 
en  1733.  Avant  l'établifTement  des  Maires  ,  la  Communauté 
étoit  gouvernée  par  des  Syndics ,  dont  l'origine  ,  également  que 
celle  de  la  Communauté ,  fe  perd  dans  l'obfcurité  des  temps. 
On  peut  cependant  conjefturer  que  ce  fut  vers  le  douzième 
iîecle  que  les  Communautés  de  Bretagne  fe  formèrent ,  à  l'exemple 
de  celles  de  France ,  qui  prirent  nailTance  dans  le  même  fiecle. 
Louis  le  Gros,  pour  mettre  les  habitants  des  villes  en  état  defe 
défendre  des  Seigneurs ,  dans  ces  temps  de  violence ,  leur  ac- 
corda une  efpece  de  Sénat ,  &  des  Milices ,  qui  dévoient  être 
prêtes  à  marcher  aux  ordres  du  Souverain.  C'étoit  rendre  aux 
villes  un  droit  qu'elles  avoient  eu  fous  les  Romains.  Les  grands 
Seigneurs ,  &  fur-tout  les  Ducs  de  Bretagne  ,  imitèrent  cet  exem- 


i8o  S  AI 

pie.  Tel  efl  le  rétabliffement  du  droit  des  Communes  en  France 
&  en  Bretagne. 

1697.  Mort  d'Ange  le  Prous ,  de  l'Ordre  des  Hermites  de  Saint- 
Auguftin.  La  reconnoifTance  publique  a  confacré  fa  mémoire.  Sa 
charité  envers  les  pauvres  le  porta  à  inftituer  une  Société  de  Filles 
pieufes  pour  le  lervice  &  le  rétablifTement  de  plufieurs  Hôpitaux, 
pour  lors  négligés.  Il  mit  cette  Société  fous  la  proteftion  de  Saint 
Thomas  de  Villeneuve ,  qui  venoit  d'être  canonifé.  Cette  Société 
s'ell  répandue  dans  toute  la  Bretagne ,  où  elle  exerce ,  fous  nos 
yeux ,  les  plus  pénibles  &  les  plus  importants  emplois. 

1700.    Le   Sieur  Coulon  de  Portalain  ,    Tréfoner  de   l'Eglife 
paroiffiale   de  Saint-Michel  de  Saint-Brieuc  ,  fait  abattre  l'aiguille 
du  clocher  de  cette  EgHfe  j  elle  étoit ,    dans  fon  origine  ,   une 
Chapelle    dédiée  fous   l'invocation  de  cet  Archange.  On  ne  fçait 
point  précifément   quand  cette  Chapelle  efl  devenue    Paroifle  ; 
mais  il    paroît  que   ce  fut  vers  la  fin  du  quinzième  fiecle.  La  Pa- 
roilTe  de  Saint-Brieuc ,  non  moins  ancienne  que  la  ville  même , 
n'a  pas  toujours   été  régie  de  la   même  manière.  D'abord  ,   elle 
fut  deffervie   par  des  Moines ,  &   dépendit  du   Monaftere    que 
Saint  Brieuc  avoit  bâti.   Ces  Moines  ,  devenus    Chanoines ,   ne 
perdirent    pas  pour  cela  leur    qualité  de  Palleur  j  &  l'Eglife  du 
Monaftere  ,  devenue  Cathédrale ,  continua  d'être',  comme  aupa- 
ravant ,  le   Siège  des   fondions  curiales.   Juhel  ,  Archevêque  de 
Tours,    faifant  fa  vifite   à  Saint-Brieuc,  en  1233,  trouva  que  le 
nombre  des  Chanoines ,   qui  n'étoit  que   de  douze  ,   fuffifant  à 
peine  pour  les  fondions  du  chœur ,  il  étoit  néceffaire  de  les  dé- 
charger des  fondions  curiales   :   c'eft  pourquoi ,  après  en   avoir 
conféré    avec   Saint   Guillaume  ,    pour   lors   Evêque    de    Saint- 
Brieuc  ,    il    établit    un    Vicaire  ,    avec    deux   Chapelains  ,  qui 
furent  chargés  du  foin  de  la  ParoiiTe  ;  mais  l'exercice   des    fonc- 
tions curiales    continua    de    fe  faire ,    comme  auparavant  ,  dans 
la  Cathédrale  ;  le  Vicaire  &  les  Chapelains  étoient  même  obligés 
d'y  afTifler  aux  Heures  Canoniales ,  lorfque  leurs  fonélions  le  leur 
permettoient  j  &,  dans  l'afte  de  Juhel,  il  n'eft  fait  aucune  men- 
tion   de    l'Eglife    de    Saint-Michel.    La    Cure    s'appelloit    alors 
Vicariat  de  Saint-Brieuc,  Ce  ne  fut  que  vers  la  fin  du  quinzième 
fiecle  que  le  nombre  des  habitants  s'étant   beaucoup  multiplié  , 
&  les  fondions  curiales  troublant  l'Office  pubUc ,  on  commença 
à  permettre    au   Vicaire    &    à    fes    Chapelains     d'exercer    une 
partie  de  leurs  fonèHons  dans   la  Chapelle  de  Saint- Michel  5    & 
c'eft   ainfi   que  ,  peu  à   peu ,    cette   Chapelle  efl  devenue  Pa- 


s  A  I  i8i 

roifîe.  D'anciens  ftatuts  de  ce  diocefe  nous  apprennent  que  le 
Vicaire  perpétuel  de  Saint-Michel  étoit  tenu  de  donner ,  le  jout 
de  Pâques ,  à  l'Evêque  &  à  fes  Chanoines ,  des  balles  de  paume 
&  des  raquettes.  Cette  récréation  étoit  fort  en  ufage  parmi  le 
Clergé  :  les  Chanoines  d'Auxerre  fe  la  permettoient  jufques 
dans  l'Eglife  même  j  abus  qui  a  été  fagement  réformé.  Ce  fut 
aufîi  vers  la  fin  du  même  fiecle ,  c'ell-à-dire  vers  1490,  que 
fut  bâtie  la  tour  de  Saint-Michel.  Il  eft  probable  que  l'Eglife  fut  re- 
bâtie ,  ou  du  moins  beaucoup  accrue  dans  le  même  temps.  La  Cha- 
pelle du  Bois-BoëfTel ,  qu'on  y  voit  aujourd'hui,  eft  un  ouvrage  du 
dernier  fiecle ,  &  a  été  bâtie  par  Jehan  de  Bréhand ,  mort  en 
1640  ;  mais  elle  a  fuccédé  à  une  autre  beaucoup  plus  ancienne, 
&  on  voit  que,  dès  1496,  les  Seigneurs  du  Bois-BoèlTel  préfen- 
toient  à  une  Chapelle  fondée  en  Saint-Michel.  Juhel  ,  Arche- 
vêque de  Tours  ,  fit  un  règlement  pour  la  réfidence  des  Cha- 
noines :  il  la  réduifit  à  fix  mois,  mais  elle  n'a  pas  toujours  été 
religieufement  obfervée.  Il  y  a  d'anciens  flatuts  du  Chapitre  de  la 
Cathédrale ,  qui  n'exigent  que  trois  mois.  Ces  flatuts ,  qui  fen- 
toient  le  relâchement  ,  furent  abolis  ,  &  l'on  en  revint  à  la  réfi- 
dence de  fix  mois.  M.  Vivet  de  Montclus  l'a  étendue  jufqu'à 
neuf,  &  c'eft  la  règle  d'aujourd'hui.  C'ell:  à  cette  occafion  qu'un 
poète  Briochin  a  dit  : 

Sic  Clcro  injigni  Vivet ,  pîctatis  amator , 
Aurea   connexlt    vincula  ,   vincla  taimn. 

C'eft  en  1706,  fous  l'Epifcopat  de  N....  de  BoifTieux  ,  que 
les  Filles  de  la  Croix  furent  établies  à  Saint-Brieuc.  Les  Etats 
s'afTemblent ,  en   1709,   dans   cette    ville.  N....   de   Boifîieux    y 

Êréfide  pour  le  Clergé,  &  le  Duc  de  Rohan  pour  la  Noblefi^e. 
n  171 1  ,  les  Soeurs  de  la  Charité  font  appeliées  à  Saint-Brieuc, 
parle  Sieur  l'Abbat,  Chanoine  de  la  Cathédrale;  étabhfi^cment 
précieux  ,  qu'on  ne  fçauroit  trop  favorifer  &  multipher.  Les  Etats 
s'afiTemblent  ,  en  1715  ,  à  Saint-Brieuc.  N....  de  Boifiieux  y  pré- 
fide  pour  le  Clergé;  il  affifie  aufïï  ,  en  1720,  aux  Etats  d'An- 
cenis,  011  il  fe  montre  zélé  défenfcur  des  droits  de  la  province, 
&  meurt  quelques  jours  après  la  clôture  des  Etats,  emportant 
avec  lui  les  regrets  des  bons  patriotes.  La  Communauté  de 
Saint-Brieuc  fait  une  penfion  de  trois  cents  livres  à  M.  Jacques 
Concri ,  Doftcur  en  Médecine.  Cette  penfion  ,  augmentée  de  cent 
livres,  fut  continuée  à  fonfils ,  aufli  Dofteur-Médecin  ;  &,  après  fa 
mort,  elle  ell  pafTée  à  M.  Cartel.  N...  Lenduger,  célèbre  MifFion- 


i8i  S  AI 

naire  ,  Chanoine  &  Scholaftique  de  l'Eglife  Cathédrale  de 
Saint-Brieuc  ,  &  auteur  d'un  Livre  intitulé  ,  Bouquet  de  la  Mif- 
fion,  mourut  en  1722.  Les  Etats  s'affemblerent  à  Saint-Brieuc 
en  1724,  1726, &  1729.  A^cette  dernière  époque, furent  conftruits 
les  ponts  du  Légué  &  de  Saint- Barthelemi.  Le  nouveau  pont 
de  Gouedic  fut  fait  Tan  1744.  Le  Sieur  Vittu  de  Querfain  eft 
inftallé,  en  1734  ,  Maire  ancien  ,  Mi-triennal  en  titre  de  la  ville- 
de  Saint-Brieuc  ,  &  fes  provifions  font  enrégillrées. 

Dès    1609,  le  Collège  fut  fixé  dans  l'endroit  où  il  eft  aujour- 
d'hui. La  Communauté  de  ville  avoit  eu  intention  de  le  placer 
dans  la  rue  Saint-Pierre,  &  avoit  acheté,  pour  cela,  une  mai- 
-fon  qui  y  étoit  fituée ,  avec  des  terres  en  dépendantes.  Ayant 
changé  d'avis  ,  elle  revendit  cette  maifon  à  Jean  de  Bréhand  ,  Vi- 
comte de  Lille  j  &,  en  1609,  elle  acheta  celle  où  fe  tient  le 
Collège,    &  où   il  fe  tenoit  dès-lors,   pour  la  fomme  de  mille 
huit  cents  quatre  -  vingt-dix  livres.  Les  bâtiments  ont  reçu  depuis 
différents  accroiffements.    La  Chapelle  &  le  grand  bâtiment  qui 
raccompagne  furent  commencés  en  1739.  La  Communauté  fournit , 
pour    la   confeftion  de  cet  édifice,  une  fomme   de  trois  mille 
livres.  Il  n'eut  point   d'abord  de  Profeffeur  de  Théologie.   Cet 
établiffement  eft  dû  à  N...  de  la  Vieuxville ,  Evêque  de  Saint- 
Brieuc  i  &  celui  du  Second  Régent  de  Philofophie ,  à  N...  de 
Montclus.  Le  ton  des  bonnes  études,  le  mérite ,  &  les  talents  de 
ceux  qui  y  préfident ,  rendent  ce  Collège  un  des  plus  célèbres  de 
la  province.    En    1740,    l'illuftre    Pape  Benoît  XIV  donna  la 
Bulle  qui  établit  le  concours.  En  1742,  la   Cour  rendit,  furies 
conclufions  du  Procureur  général  ,  un  Arrêt ,  qui  ordonne  que  le 
Général  de  la  Paroifîe    de   Saint-Michel  demeurera   détaché  de 
la  Communauté  de  ville.  En  1743  ,  le  Sieur  Vittu  de  Querault 
f\it  inftallé  Avocat  du  Roi  de  la  Communauté  de  Saint-Brieuc. 
La  finance  eft   de  douze  cents  trente  livres ,    &  les  gages    de 
trente  fix  livres.  Lettres-patentes  du  Roi ,   enrégiftrées  au  Parle- 
ment de  Bretagne ,  qui  confirment  le  Chapitre  de  la  Cathédrale 
de  Saint-Brieuc  dans  le  droit  qu'il  a  de  jouir  des  dîmes  de  FE- 
vêché    pendant    la    vacance  du  Siège,   parce    qu'il  demeurera 
chargé  lui  feul  des  réparations  &  ornements  de  l'Eglife  Cathé- 
drale. En  1746,  le  Sieur  Buegni  fut  reçu  &  inftallé  en  la  charge 
de  Lieutenant  de    Roi  de    Saint-Brieuc  :  la  finance  étoit  de  fix 
mille  neuf  cents  dix-huit  livres  quinze  fols.  La  même  année ,  le 
Confeil  rendit  un  Arrêt ,  par  lequel  il  eft  ordonné  que  le  Mifeur 
de  la  Communauté  de  Saint-Brieuc  aura  rang,  féance,&  voix 


s  A  I  18} 

délibérative  ,  Immédiatement  après  le  Maire ,  dans  les  affemblées 
de  la  Communauté  ,  &  prendra  place,  immédiatement  après  lui, 
dans  les  alTemblées  publiques.  Arrêt  de  la  Cour  ,  portant  règle- 
ment pour  la  Paroiffe  de  Saint-Michel  de  Saint-Brieuc.  M.  le 
Duc  de  Penthievre  ,  qui  ,  fur  la  nouvelle  de  la  defcente  des 
Anglais  à  l'Orient ,  étoit  accouru  au  fecours  de  la  province ,  fait 
fa  première  entrée  dans  la  ville  de  Saint-Brieuc  ,  &  eft  reçu , 
en  grande  folemnité  ,  Chanoine  honoraire  dans  l'Eglife  Cathédrale. 
Plufieurs  Seigneurs  de  France  jouiflent  du  même  titre  dans  dif- 
férentes Eglifes  du  Royaume.  Nos  Rois  font  Chanoines -nés 
d'Angers ,  d'Auxerre  ,  de  Tours  ,  de  Lyon ,  &c.  C'étoit  autre- 
fois une  dévotion  à  la  mode  ,  &  plufieurs  Seigneurs  fe  faifoient 
un  honneur  d'aflifter,  en  cette  qualité,  &  revêtus  d'habits  ec- 
cléfîailiques  ,  aux  Offices  divins.  Le  pieux  &  fçavant  Roi  Robert, 
fils  de  Hugues-Capet ,  ne  manquoit  jamais ,  aux  jours  de  grandes 
fêtes ,  d'amrter  à  l'Office ,  revêtu  d'une  chape  précieufe ,  &  d'y 
chanter  avec  les  Chantres ,  la  couronne  fur  la  tête  &  le  fceptre 
à  la  main.  Ces  Canonicats  ,  ou  Prébendes ,  dont  les  Laïques 
jouilTent  en  différentes  EgUfes ,  ne  font  point  de  vrais  Bénéfices  : 
ce  font  des  efpeces  de  preflimonies  que  les  Eglifes  accordent 
en  reconnoiffance  des  biens  ou  de  la  prote6lion  qu'elles  ont 
reçus ,  ou  bien ,  ce  font  des  droits  que  ces  mêmes  Seigneurs  fe 
font  réfervés  en    les   fondant. 

1748.  Arrêt  du  Parlement  de  Bretagne  ,  portant  règlement 
fur  le  droit  de  minage  en  la  ville  de  Saint-Brieuc.  Ce  droit  eft 
de  deux  onces  par  boiffeau  de  bled  expofé  en  vente  au  mar- 
ché pubhc.  Procès- verbal  des  Juges  de  Saint-Brieuc  ,  qui  donne 
pour  apuré  que  le  boiffeau  pubHc  de  cette  ville  contient  feize 
pots,  mefure  de  Chapitre  ,  qui  fe  trouvèrent  pour  lors  pefer 
quarante  livres  fix  onces  &  un  feizieme  d'once.  Arrêt  di* 
Confeil  ,  qui  réunit  aux  Communautés  de  ville  les  Offices 
municipaux  non-aHénés.  Les  Offices  réunis  à  la  Commu- 
nauté de  ville  de  Saint-Brieuc,  font,  1°.  une  des  charges  de 
Maire  i  2°.  celle  du  Procureur  du  Roi  Syndic  ;  3°.  celles  de  deux 
Lieutenants  de  Maire,  de  quatre  Echevins,  de  quatre  Afrefleurs, 
de  deux  Secrétaires-Greffiers  ,  &  de  deux  Contrôleurs  du  Greffe. 
Les  Offices  aliénés  font ,  i  °.  une  des  charges  de  Maire  ;  2^.  celle 
d'Avocat  du  Roi;  3".  celles  de  deux  Contrôleurs  Se  de  deux 
Receveurs  des  octrois.  La  Communauté  de  Saint-Brieuc  eft  au- 
jourd'hui compofée  de  quatre  Ordres  de  déhbérants  ;  1°.  des 
Officiers  municipaux  ci-deffus    en   exercice  ;    i"^,   des    anciens 


i84  S  AI 

Officiers  municipaux  ;  3®.  des  premiers  Capitaines  des  fept 
Compagnies  de  Milice  Bourgeoife  j  4°.  de  quatre  Habitants 
notables  élus  par  la  Communauté ,  conformément  aux  ordres  de 
M.  le  Duc  de  Penthievre ,  enrégiilrés  au  Greffe  de  cette  ville 
les  23  Avril  &  24  Mai  1756.  Les  Offices  non-aliénés  font  à 
la  nomination  de  la  Communauté  j  refte  précieux  de  l'ancienne 
liberté   des  éleftions. 

En  1750,  furent  données  des  lettres-patentes ,  confirmatives  de 
rétabliiît  ment  de  l'Hôpital  de  cette  ville ,  fous  le  titre  d Hôtel- 
Dieu  Royal ,  pour  jouir  des  privilèges  attachés  à  ce  titre  ,  lef- 
dites  lettres  enrégiftrées  au  Parlement  le  6  Mars  175 1.  Le  foin 
de  cet  Hôpital  fut  confié  aux  Filles  de  Saint-Thomas -de -Ville- 
neuve ,  en  1666:,  mais  il  exiiloit  auparavant;  &,  dès  1620, 
la  Communauté  de  Saint-Brieuc  étoit  en  poffeffion  d'en  nommer 
l'Adminilîrateur ,  comme  il  paroît  par  une  fentence  de  la  Ju- 
rifdiftion  royale  de  Saint-Brieuc ,  de  la  même  année ,  qui  dé- 
boute le  Sieur  Dutertre  -  Clavier  de  fon  excufe  d'accepter  la 
charge  d'Adminiftrateur  de  l'Hôpital  de  la  Magdeleine ,  à  la- 
quelle il  avoir  été  nommé,  pour  un  an  ,  par  la  Communauté 
de  ville.  Cet  Hôpital  a ,  peut-être ,  fuccédé  à  un  autre  plus 
ancien,  qui  tomboit  en  ruines,  appelle  de  S aint- Antoine ,  & 
que  le  Duc  Pierre  II  donna,  en  1453,  aux  Pères  Cordèliers , 
pour  y  bâtir  un  Couvent  ;  donation  qui  fut  confirmée  par  le 
Duc  Artur ,  en  1457.  La  tradition  nous  apprend  qu'il  y  avoit 
encore  un  autre  petit  Hôpital ,  ou  Hofpice ,  proche  Saint-Brieuc. 
Cet  Hôpital  joignoit  la  Chapelle  de  Goëdic,  à  Tentrée  de  la 
ville.  La  Chapelle  de  Goëdic  ou  Goadic  avoit  été  fondée  en 
1337,  &  elle  fut  réunie,  par  une  Bulle  de  Jules  II,  à  la  Pa- 
roiffe  de  Ceffon ,  en  1509.  Autres  lettres-patentes,  qui  permet- 
tent à  la  Communauté  de  Saint-Brieuc  de  lever  ,  pendant  vingt 
ans,  les  oftrois,  tant  anciens  &  nouveaux  que  par  augmenta- 
tion ,  confiftant  en  deux  fols  par  pot  de  vin ,  neuf  deniers  par 
pot  de  cidre,  huit  deniers  par  pot  de  bière,  &  trois  deniers 
par  pot  d'eau-dè-vie ,  qui  fe  vendent  en  détail  dans  la  ville , 
fauxbourgs  ,  &  quarts  de  Heue  aux  environs  de  Saint-Brieuc. 
Ces  oftrois  ont  fucceffivement  augmenté.  Sous  Henri  IV ,  en 
1 603  ,  ils  n'étoient  encore  que  d'un  fol  par  pot  de  vin ,  &  trois 
deniers  par  pot  de  cidre  ou  de  bière.  Le  bail  de  1750  eft  de 
quinze  mille  fix  cents  livres. 

1751.  Réédification  de  la  façade  de  THôtel  de  Ville  de  Saint- 
Brieuc  Cet  Hôtel  confifle  en  plufieurs  corps  de  logis,  qui  ont 

été 


\ 


s  A  I  185 

été  achetés  à  différentes  reprifes.  La  première  partie  vers  le  four 
Pohel ,  confiftant  en  deux  corps  de  logis ,  l'un  au  devant  fur  la  place 
du  Pilori ,  l'autre  au  derrière  avec  un  jardin ,  a  été  achetée  , 
en  1609,  pour  la  fomme  de  quatre  mille  livres:  &:  la  féconde 
partie  ,  qui  regarde  l'hôtel  du  Samt-Efprit ,  pour  celle  de  cinq  mille 
cinq  cents  Hvres.  La  Communauté  de  Ville  s'afîémbloit ,  aux  années 
1608  &  1609,  dans  la  Chapelle  de  Saint-Gilles.  En  parlant  des 
acquittions  faites  par  la  ville  de  Saint-Brieuc ,  il  ne  faut  pas 
oubher  de  parler  de  fes  canons  :  la  manière  dont  les  Briochins 
les  ont  acquis  eft  trop  honorable  pour  qu'il  n'en  foit  pas  fait 
mention  dans  cet  article.  Voici  le  fait  :  La  France  étoit  en 
guerre  avec  l'Allemagne  &  la  Hollande ,  en  1675  j  une  frégate 
Oilendaife ,  pourfuivant  un  vaiileau  marchand  de  l'Evêché  de 
Vannes ,  vint  échouer  fur  la  grève  de  Plerin.  Les  Milices  de 
Plerin ,  commandées  par  les  Sieurs  Gauthrot  &  Ruffelet  ;  celles 
de  Saint-Brieuc  ,  aux  ordres  du  Sieur  de  Kerfïchard  ,  fe  mettent 
aulîi-tôt  en  marche,  &  viennent  l'attaquer.  Les  Oflendais  font  la 
plus  vigoureufe  réfiftance  j  les  Milices  montent  à  l'abordage, 
malgré  le  feu  des  ennemis,  &  les  obligent  enfin  à  fe  rendre. 
Telle  eft  l'hilloire  de  la  conquête  des  canons  de  Saint-Brieuc  , 
dont  le  Roi  voulut  bien  faire  préfent  à  la  Ville  ;  récompenfe  mi- 
litaire bien  honorable  aux  Briochins.  La  Ville  avoir  déjà  deux 
canons  ;  elle  en  a  huit  aujourd'hui  ,  dont  deux  font  hors  de 
fcrvice. 

En  1754,  fe  fit  l'inflallation  du  Sieur  Souveftre  de  la  Villemain 
en  la  charge  de  Confeiller  du  Roi ,  Maire  ancien  en  titre  & 
^i-triennal  de  la  ville  de  Saint-Brieuc.  Par  Edit  de  1733  ,  con- 
firmatif  de  celui  de  1706,  il  avoit  été  créé  dans  toutes  les 
Communautés  de  Bretagne  deux  charges  de  Maire,  Tun  ancien, 
l'autre  alternatif.  La  charge  de  Maire  ancien  a  été  levée  par 
M.  de  la  Villemain  :  celle  de  Maire  alternatif  eft  demeurée 
réunie  au  Corps  de  la  Communauté  ,  qui  a  droit  d'y  éhre.  Les 
Ecoles  Chrétiennes  avoient  été  fondées  dès  1 746 ,  dans  la  ville 
de  Saint-Brieuc,  par  M.  du  Pleflis  de  Querfaliou ,  Chanoine  & 
Doyen  de  l'EgHfe  Cathédrale  ,  pour  enfeigner  gratuitement  aux 
pauvres  de  la  ville  ,  fauxbourgs ,  &  dépendances  d'icelle,  à  lire, 
écrire,  l'arithmétique,  Se  le  catéchifme.  En  1757,  le  Comte 
de  la  Rivière  ,  Gouverneur  de  Saint-Brieuc  ,  eft  reçu ,  par  le 
Roi ,  Capitaine-Lieutenant  des  Moufquetaires  noirs ,  à  la  place  du 
Marquis  de  Montboiflier. 

1758.  Le   13  Janvier,  le  Juge  des   Régaires  de    Saint-Brieuc 
Tome  JV,  A  2 


i8é  S  AI 

rend  une  Sentence  pour  la  pancarte  des  droits  de  coutume  & 
entrées  que  l'Evêque  prétendoit  lui  être  dus ,  aux  fins  d'aveu  & 
d'inféodations  ,  &  en  vertu  dune  polî'efTion  immémoriale.  En  1771, 
le  Confeil  rend  un  Arrêt  qui  adjuge  la  provifion  feulement  à 
l'Evêque.  La  même  année  1758,  combat  à  Saint-Caft ,  où  les 
Anglais  font  vaincus.  Les  Etats  afTemblés  à  Saint -Brieuc  font 
frapper  une  médaille ,  pour  conferver  la  mémoire  de  cet  événe- 
ment. Cette  médaille  préfente ,  d'un  côté ,  l'effigie  du  Roi  j  de 
l'autre  ,  on  voit  la  Bretagne  ,  fous  l'emblème  d'une  femme ,  avec 
une  ép'ée  ,  &  les  troupes  qui  avoient  com>battu  pour  fa  défenfe , 
fous  celui' d'un  guerrier,  la  foudre  à  la  main.  Chacune  de  ces 
figures  élevé  &  paroît  vouloir  attacher  un  bouclier  à  un 
palmier.  On  lit  fur  celui  préfenté  par  la  femme ,  vinus  duàs  & 
militum  j  &  fur  l'autre ,  foutenu  par  le  foldat ,  vlrtus  nobilitads  & 
populi  armorici.  M.  le  Duc  d'Aiguillon  préfide  à  ces  Etats ,  célè- 
bres par  l'acquifition  qu'y  fit  la  province  des  domaines ,  con- 
trôles ,  fiancs-fiefs  ,  impôts  ,  billots  ,  &  autres  droits ,  pour  la 
fomme  de  quarante  millions.  MM.  l'Evêque  de  Saint-Brieuc  & 
le  Duc  d'Aiguillon  mettent  la  première  pierre  au  quai  du  Légué, 
avec  cette  infcription  : 

Régnante  Ludovlco  XV, 
aufpicibus 
Armando  Rkhelio  ab  Aiguilloîiio  Duce , 
AngLici  exercitûs  in    Caftrenfi  ripa  viclore  ', 
illuflrijjimo  Prœfule  &  Domino 
H,  iV.   Thepault  du  Breignon  ; 

adniteiite 
gênerai,   provincice  Comitiorum  munificentiâ^ 

cxtruBa  moles  ^ 
marltimi  Gommerai  prœfidium  ^ 
Briocenjis  ponûs  tutamcn  &  omamentum  : 

pofuêre 
Armandus  Richelius  ab  Aiguillonio  Dux  ^ 

Britannicc  vindex  ; 
Herveus  -  Nicolaus  Thepault  du  Breignon , 
Prcefulurbis  ^  Dominus  &  pater: 

M.  DCC  LVIIL 

Vers   1760,  mourut  un  célèbre  Wrateur  Briochin  :  c'eil  le 
Père  Pleffe ,  fort  diflingué  chez  les  Jéfuites ,  dont  il  avoit  em- 


s  A  I  187 

brafTé  l'inflitut.  Il  étoit  affocié  au  Père  Bertier  dans  la  compofî- 
tion  du  journal  de  Trévoux.  En  1762,  le  Parlement  ordonna  par 
un  Arrêt,  que  les  héritiers  du  feu  Abbé  des  Bois  ne  feroient 
tenus  qu'aux  réparations  ulufruitieres  &  locatives  de  la  maifon 
Prébendale  que  cet  Abbé  occupoit,  &  que  le  Chapitre  feroit 
les  grofles  réparations  abfolument  néceflaires.  Cet  Arrêt  fut  con- 
firmé par  un  autre  du  Confeil  d'Etat  privé ,  du  2  5  Avril  1 768. 
Par  un  accommodement  pollérieur  fait  entre  le  Chapitre  &  l'Evê- 
que  ,  toutes  les  maifons  Prébendales  ont  été  réunies  au  Chapitre  , 
excepté  celle  qui  joint  le  Palais  épifcopal  auquel  elle  a  été 
annexée  ;  &  il  a  été  créé  fur  ces  maifons  un  certain  nombre 
de  penfions ,  qui  ne  pourront  être  données  qu'à  des  Chanoines , 
mais  dont  la  préfentation  a  été  réfervée  à  l'Evêque ,  pour  le 
dédommager  de  celle  des  maifons  qu'il  avoir  auparavant  :  ledit 
accommodement  pour  avoir  Heu  à  la  mort  des  Chanoines  qui 
pofledent  aujourdhui  ces  maifons. 

1765.  Mort  du  Marquis  de  Bréhand  ,  Maréchal  de  Camp  & 
Infpefteur  général  d'Infanterie  ,  Seigneur  d'une  partie  de  la  Pa- 
roifle  de  Saint-Michel  de  Saint  -  Brieuc.  Ce  Gentilhomme  n'a 
laifle  qu'une  fille  ,  mariée  au  Comte  de  Maillé  ,  de  l'illuftre 
famille  de  ce  nom  ,  qui ,  par  ce  mariage ,  eft  devenu  proprié- 
taire de  la  Terre  du Bois-Boëilel.  Selon  quelques-uns,  cette  Terre 
étoit  l'ancien  féjour  du  Comte  Rigual  ou  Rivalon ,  qui  accueillit 
fi  gracieufement  Saint-Brieuc  ;  mais ,  comme  il  n'en  donne  point 
de  preuves ,  il  cil  permis  d'en  douter.  C'ell  à  caufe  de  cette 
Terre  que  les  Seigneurs  de  Bréhand  ont  prétendu  être  les  Vi- 
dâmes de  l'Evêché  de  Saint-Brieuc  ;  qualité  abfolument  inconnue 
en  Bretagne ,  &  qui  confifioit  à  défendre  l'Eghfe  contre  fes  en- 
nemis ,  &  à  conduire  à  l'armée  les  Milices  dont  les  Evêques 
étoient  autrefois  tenus  envers  l'Etat.  Les  Evêques  leur  contelfent 
cette  qualité,  &  ne  leur  accordent  que  celle  d'Ecuyer,  ou  de 
Sergent  féodé.  Ces  Sergenteries  féodées  étoient  autrefois  très- 
confidérables.  Les  Seigneurs  de  Quintin  ,  de  Matignon  ,  de  la 
Hunaudaie  ,  étoient  Sergents  féodés  du  Duché  ;  celui  de  Molac 
rétoit  de  la  Vicomte  de  Kohan.  Pour  fe  former  une  idée  de 
la  charge  d'Ecuyer,  par  rapport  aux  Evêques  de  Saint-Brieuc, 
il  faut  fe  tappeller  quelques-unes  des  cérémonies  qui  fe  prati- 
quoient  anciennement  à  leur  entrée  ;  cérémonies  ridicules ,  il  elt 
vrai ,  m:Ji  qui  fondent  encore  aujourd'hui  quelques  prétentions. 
Au  jour  marqué  pour  l'entrée  de  l'Evêque ,  le  Seigneur  du  Bois- 
BoëfTel   alloit    le   recevoir   à   la   porte  de    la    ville  ,  &  là  oa 


i88  S  A  I 

préfentoit  au  Prélat  une  haquenée  richement  caparaçonnée  j  le 
Seigneur  du  Bois-Boëffel ,  en  qualité  d'Ecuyer  féodé ,  tenoit 
rétrier  tandis  que  l'Evêque  montoit  fur  cette  haquenée  ,  &  la 
conduifoit  enfuite  par  la  bride  jufqu'au  Palais  épifcopal.  Lorfque 
le  Prélat  étoit  defcendu  ,  il  prétendoit  que  la  haquenée  devoit 
lui  appartenir.  Dans  le  feftin  de  cérémonie  qui  fuivoit  cette  en- 
trée ,  le  Gentilhomme  qui  avoit  le  titre  de  Maître-d'Hôtel  féodé 
de  l'Evêque ,  lui  donnoit  à  laver  avant  qu'il  fe  mît  à  table  -,  il 
lui  verfoit  à  boire  pendant  le  repas ,  &  il  prétendoit  avoir  pour 
cela  l'aiguiere ,  la  ferviette ,  la  coupe  d'or  ou  d'argent  dans  la- 
quelle le  Prélat  avoit  bu ,  &  ce  qui  reftoit  de  viande  dans  le 
grand  plat ,  pour  en  manger  ce  qu'il  voudroit  -,  le  relie  il  devoit 
le  donner  au  Maréchal  ferrant  :  celui-ci ,  après  en  avoir  mangé 
aufli  autant  qu'il  vouloit ,  alloit  aux  priions  de  l'Evêque  inviter 
les  prifonniers  à  faire  bonne  chère  de  ce  qui  reftoit  ;  le  Maréchal 
ferrant  étoit  obHgé  de  ferrer  la  haquenée  -,  le  Maître  -  d'Hôtel 
étoit  tenu  ,  &  cette  obhgation  fubfifle  encore  aujourd'hui ,  de 
donner  les  hautbois  ,  mufettes ,  &  violons,  avec  un  jambon  ,  le 
jour  du  mardi-gras  de  chaque  année ,  fur  la  place  du  Martrai 
à  Saint-Brieuc  ;  &  tous  les  Cabaretiers  de  la  ville  font  obhgés 
d'apporter  à  la  table,  du  jambon,  un  pot  de  vin  ou  de  telle 
autre  boilTon  qu'ils  débitent.  Ce  droit  eft  attaché  à  la  Terre  de 
l'Epineguen;  &  celui  du  Maréchal  ferrant  à  une  maifon  fîtuée 
rue  Clinquaine.  Au  refte ,  les  Seigneurs  du  Bois-BoëfTel  pré- 
tendent encore  au  droit  de  haquenée  à  l'entrée  de  chaque  Evê- 
que ,  fans  aucun  fervice  de  quelque  efpece  que  ce  foit.  Les  pré- 
tentions refpeftives  des  Prélats  &  de  ces  Seigneurs,  ont  occafionné 
un  procès  dont  j'ignore  la  décifion  ;  peut-être  n'eft-il  pas  en- 
core terminé. 

Par  Déclaration  du  Roi,  Sa  Majefté  a  décidé  qu'il  ne  feroit 
à  l'avenir  pourvu  qu'à  vie  aux  Offices  de  Gouverneurs  &  de 
Lieutenants  de  Roi,  créés  par  l'Edit  de  1733,  &  que  l'emploi 
des  gages  ou  appointements,  qui  feroient  réglés  fuivant  leurs  fi- 
nances ,  feroit  fait  dans  les  états  de  l'Ordmaire  des  Guerres. 
En  1767  ,  le  Confeil  rendit  un  Arrêt,  qui  ordonne  que  le  Comte 
de  la  Rivière  ,  Gouverneur  de  Saint-Brieuc  ,  continuera  de  jouir 
des  logements  qu'il  occupe  aftuellement  dans  l'Hôtel  commun 
de  cette  ville  ,  en  la  même  forme  &  manière  qu'il  en  a  joui 
jufqu'à  préfent  ;  veut  &  ordonne  en  outre ,  Sa  Majeflé  ,  que  ledit 
Cotr.te  de  la  Rivière  continue  à  jouir  de  fix  cents  livres  en  ef- 
peces ,  payables ,  par  chacun  an  ,  par  la  Communauté  de  Saint- 


s  AI  189 

Brîeuc  ,  fuivant  l'Arrêt  du  Confeil  du  1 8  Juillet  1 68 1 .  On  voit  par 
ce  dernier  Arrêt ,  qu'en  cette  même  année  les  charges  ordinaires  de 
la  Communauté  de  Saint- Brieuc  ne  montoient  qu'à  deux  mille  huit 
cents  quarante-deux  livres ,  non  compris  cependant  le  fol  pour 
livre  du  prix  des  baux  des  oftrois  dus  au  Mifeur.  Ces  charges 
ont  augmenté  depuis  confidérablement ,  puifqu'elles  montent  à 
près  de  fept  mille  livres. 

M.  Ogier  ,  Préhdent  honoraire  au  Parlement  de  Paris,  eft 
nommé  par  le  Roi,  en  1768,  pour  tenir  les  États  extraordinai- 
ment  convoqués  dans  la  ville  de  Saint-Brieuc  :  ils  fe  tiennent 
encore  dans  cette  ville  dans  le  courant  de  la  même  année  j 
c'eft  la  quatorzième  fois  qu'ils  s'y  aflemblent  depuis  1567.  Ces 
deux  dernières  tenues  font  des  plus  célèbres,  &  fournilTent  des 
preuves  éclatantes  de  l'amour  des  Bretons  pour  leurs  Rois. 

C'eft  aux  foins  de  M.  Bagot ,  Do6leur-Médecin  &:  ancien  Maire 
de  Saint-Brieuc ,  que  cette  ville  doit  la  reconnoifTance  d'une 
bonne  adminiil:ration.  C'efI:  par  fa  vigilance  que  le  port  du  Légué , 
près  Saint-Brieuc  ,  a  été  mis  en  état  de  recevoir  des  vaifTeaux 
d'un  certain  rang  :  il  a  facilité  l'entrée  du  port  en  faifant 
faire  une  faignée  dans  le  canal.  Ce  canal  feroit  encore  fufcep- 
tible  d'accroilfement ,  il  fuffiroit  de  déblayer  le  ht  de  la  rivière  : 
à  ce  moyen ,  deux  navires  pourroient  entrer  enfemble  ,  fans  être 
expofés  à  s'aborder  &  à  briiér  leurs  manœuvres  j  ce  qui  eu  pour- 
tant arrivé  ,  eu  égard  à  la  pofition  trop  étroite  du  canal  ,  6c 
occafionna  une  avarie  Se  un  procès.  Au  furplus ,  la  dépenfe  à 
faire  ne  feroit  pas  excefiive  ;  pour  l'agrément  &  commodité 
du  port ,  on  pourroit  faire  un  quai  femblable  à  celui  d'Aurai ,  du 
côté  de  la  ville  ,  en  face  de  la  côte  de  Plerin.  Cette  ville  ob- 
tint,  en  1776,  un  Arrêt  du  Confeil,  qui  lui  accorde  la  fran- 
chife  de  fon  port  &  la  hberté  d'armer  pour  les  Ifles  &  Colonies 
Françaifes,  en  conformité  des  lettres -patentes  du  mois  d'Avril 
171 7.  C'eft  encore  à  M.  Bagot  que  l'obligation  en  eu.  due, 
également  que  de  l'établifTement  du  Bureau  de  la  marque  aux 
toiles.  Rien  n'égale  le  zèle  que  M.  Bagot  montra  pendant  fa 
Mairie. 

Des  Négociants  Briochins  ont  déjà  envoyé  des  toiles  à  Cadix, 
&  leur  navire  avoit  un  chargement  complet.  Lorfque  les  fpécu- 
lateurs  auront  combiné  les  avantages  de  la  diminution  des  frais 
pour  le  tranlport  des  toiles  de  Bretagne  &  la  fureté  du  port  du 
Légué ,  il  elt  certain  qu'on  accordera  la  préférence  à  ce  port  fur 
celui    de  Saint-Malo.   Deux  raifons  concourent  pour  le  décider 


1^0  s  A  I 

ainfî  :  la  première ,  eft  la  facilité  d'y  tranfporter  les   toiles  de 
Quintin ,  Uzel ,  &:   ailleurs ,   d'être  près    de  fon    domicile ,   & 
d'être  à  l'abri  des  dangers  du  pafTage  de   Dinard  à  Saint-Malo, 
paflage  très-périlleux  :  la  féconde ,  c'ell  que   le   port  du  Légué 
efl   à  l'abri   des   mauvais  temps  ,   étant  placé   entre  deux  mon- 
tagnes j  au   lieu  qu'à  Saint-Malo  un  navire  qui  fait  un    charge- 
ment de  toiles ,  refte  fouvent  deux  &  trois  mois  dans  la  Rance  y 
expofé  à  des  coups  de   vent  fi  violents  par  fois,  qu'un  navire, 
tendu  à  quatre  amarres,  n'en  chalTe  pas  moins  fur  l'arriére  & 
fait  de  l'eau.  Tout  le  monde  fçait  l'événement  arrivé  aux  navires 
le  Grelot  ôc  le  Condé -,  &  il   n'ell  aucun  Négociant  qui  ne  con- 
noiffe  le  danger  d'expofer  un  chargement  de  toiks  à  être  mouillées, 
comme  le  furent  celles  de  ces  deux  navires.  Il  feroit  utile  d'éta- 
blir un  Confulat  à  Saint-Brieuc.   Ce  Tribunal  feroit  plus    com- 
mode que  d'aller  à  Saint-Malo  chercher  une  juftice  très-éloignée, 
&  rendue  par  des  Juges  plus  inftruits  de  la  navigation  que  des  loix» 
Le  Chapitre  de  la  Cathédrale  de  Saint-Brieuc  obtint ,  au  mois  de 
Juin    1778,  des  lettres-patentes,  par  lefquelles  Sa  Majefté  con- 
firme  aux  impétrants  le  droit  de  jouir  ,   pendant  la   vacance  en 
régale  du  Siège  épifcopal  de  Saint-Brieuc  ,  des  dixmes  &  revenus 
fpirituels  de  l'Evêché ,  comme  il  en   jouilToit    de    temps  immé- 
morial ,  fuivant  les  conftitutions  des  Ducs  de  Bretagne  &  depuis 
la  réunion  de  cette  province  à  la  Couronne.  Ces  lettres-patentes 
ont  été  enrégiftrées  au  Greffe  du   Parlement  le    17  Août   1778, 
à  la  Chambre  des  Comptes    le    15  Septembre  ;,  au  Greffe  de  la 
Généralité  des  Finances  ie  22  Septembre,  &  au  Siège  royal  de 
Saint-Brieuc  le  10  Oftobre ,  fur  les  conclufions  de  M.   Befné  de 
la  Hauteville ,  ancien  Avocat  au  Parlement ,  comme  Subftitut  de 
M.  le  Procureur    générai.  Le  premier  titre    produit  par  le  Cha- 
pitre, eft  de   1424.  Ce  droit  fut  confirmé  alors  par  le  Duc  Jean 
IIL   Les  autres   titres ,  qui  juftifient   le  droit  &  la  poffeffion  du 
Chapitre,  font  des  années    1525,    1 596 ,  1618  ,  1653  ,    1654, 
1705,  17C6,   1707,    1727,    &  1745.  Ce    droit  de    régale    eit 
l'unique  dont  les  Chapitres  du  Royaume  jouiffent. 

Catalogue  Historique  des  Evêques  de  Saint-Brieuc^ 

On  ignore ,  comme  on  l'a  déjà  dit ,  le  temps  précis  de  la  vie 
de  Saint  Brieuc.  Il  naquit  en  Angleterre  :  on  ne  fçait  dans  quel 
canton.  Il  fonda,  dans  fa  patrie,  un  Monaftere  ,  qu'il  fut  forcé 
d'abandonner ,  pour  fe  dérober  aux  ravages  des  Piftes  &  des 
Saxons.  Il  fe  réfugia  en  Bretagne ,  &  fut  gracieufement  accueilli 


s  A  I  191 

du  Comte  Rigual  ou  Rivalon,  fon  parent,  qui  lui  donna  un 
terrein  où  il  bâtit  un  Monaftere.  L'abftinence  ,  le  travail  des 
mains,  l'éloignement  du  monde  ,  &  le  chant  des  Pfeaumes , 
faifoient  Toccupation  &  la  règle  monaflique  de  ces  pieux  So- 
litaires. Saint  Brieuc  étoit  Evêque  :  l'infcription  trouvée  fur  fa 
châfTe  le  prouve  clairement  j  mais  il  ne  fut  point  reconnu  fous 
cette  qualité  en  Bretagne ,  fi  ce  n'efl:  fous  le  titre  A' Evêque 
régionnaire.  Tous  les  hiftoriens  s'accordent  à  dire  que  le  Siège 
épifcopal  de  Saint-Brieuc  ne  fut  érigé  que  vers  l'an  848  ,  par 
Nominoé ,  Roi  de  Bretagne  ,  qui ,  en  même  temps ,  créa  un 
Archevêché  à  Dol  &  un  Evêché  à  Tréguier.  Clutwoyon  fut 
le  premier  Evêque  en  titre  ,  nommé  par  le  Prince  ,  en  848 
ou  849. 

Garrubrius  lui  fuccéda.  Le  Concile  de  Toul  en  fait  mention. 
On  ne  fçait  point  quels  furent  fes  fuccefTeurs  jufqu'en  990. 
Peut-être  n'en  eut-il  aucun  ,  dans  ces  temps  de  défolation  où  les 
Normands  firent  fentir  leur  férocité  à  Saint-Brieuc  comme  ail- 
leurs. C'efl:  vers  860  qu'on  croit  que  le  corps  de  Saint  Brieuc 
fut  tranfporté  à  Angers. 

Rocladus  ou  Roaldus  fut  élu  en  990 ,  félon  une  charte  de 
Saint-Michel. 

Adam  ,  fon  fuccefTeur ,  foufcrivit  à  la  fondation  de  Saint- 
Georges  de  Rennes  ,  vers  1030. 

Hamon  ,  élu  en  1069  ,  mourut,  félon  Lobineau ,  en  1088.  Les 
CommifTaires  du  Pape  tinrent  un  Concile  à  Saint-Brieuc  ,  fous 
fon  Epifcopat ,  au  fujet  des  prétentions  des  EgUfes  de  Dol  & 
de  Tours  pour  le    titre  de  Métropole. 

Guillaume  I,  en  1088,  foufcrivit  à  l'afte  de  la  donation  de 
la  ComtelTe  de  Porhoët,  en  fiiveur  de  Sainte-Croix  de  JofFelin, 
&  fonda  un  anniverfaire  dans  fa  cathédrale. 

Etienne,  nommé  en  1095 ,  ,  mourut  quelques  années  après. 

Guillaume  11,   dit  le    Bej'cheux  ,  mourut  vers   1106. 

Jean ,  élu  en  1 1 09  ,  aiîiila  aux  Conciles  de  Latran  en  ii\6 , 
de  de  Rheims  en  1131.  11  ordonna  de  faire  des  cimetières,  & 
défendit  d'enterrer  déformais  les  corps  auprès  des  croix  placées 
fur  les  grands  chemins  ;  il  ratifia  les  donations  faites  à  Saint-Flo* 
rent  de  Saumur ,  &  lui  donna  les  Eglifes  de  Planguenoual  &  de 
Bréhand  :  la  dernière  appartenoit,  à  titre  d'héritage,  à  des  Laï- 
ques, qui  s'en  démirent  entre  les  mains  de  leur  Evêque.  Geoffroi 
le  Roux,  Archevêque  de  Dol ,  tint,  fous  fon  Epifcopat ,  à  Saint- 
Brieuc  ,  un  Concile  ,  dans  lequel  on  termina  les  différents  furvenus 


191  s  A  I 

entre  des    particuliers    &    les   Moines   de    Saint -Melaine  ,    au 
fujet  de  l'ifle  de  Bréhand. 

Rolland  fut  facré  par  le  Pape,  à  condition  de  reconnoître 
l'Archevêque  de  Dol.  Il  eft  fait  mention  de  ce  Prélat  dans  deux 
chartes  de  Marmoutier  ,  où  il  eft  dit  qu  André  ,  Evêque  de  Saint- 
Brieuc  en  1255  ,  confirma  ce  qu  avoir  fait  autrefois  l'Evê- 
que  Rolland ,  fon  prédéceffeur. 

Robert  lui  fuccéda.  Albert  de  Morlaix  &  jM.  l'Abbé  Ruffelet 
le  donnent  pour  fuccefleur  à  Guillaume  I  :  j'ai  préféré  le  fen- 
timent  de  Martene  ,  qui  dit  qu'il  fut  ordonné  par  Geoffroi , 
Evêque   de  Dol,  en  11 30. 

Jofcius  ou  Jofthon,  en  1151  ,  fut  transféré  à  Tours  en  11 57. 
Judicaël  mourut  en  1161.  La  chronique   de   Nantes  en  parle 
svec  eloffe. 

Olivier  du  Teillai,  de  Tilli ,  ou  du  Rillet,  lui  fuccéda. 
Geoffroi ,  élu  en    1 1 63  ,    affifta  au  troifieme  Concile   de  La- 
tran,  en  1179. 

Pregent,  élu    en   11 80,  mourut  l'an  1192. 
Geoffroi  Hernon ,  Evêque  de  Saint-Brieuc ,  dédia  l'Eglife  de 
Notre-Dame  de  Lamballe ,  en    1200. 

Joffelin,  qui    lui    fuccéda   vers  1202,  mourut  en  1206. 
Guillaume  III  ne  fit  que    paroître  fur  le  Siège. 
Pierre,  élu  en  1207,  obtint  ,  en  1210,  de  l'Abbé  de  Saint- 
Serge  d'Angers ,  une  partie  des  Reliques  de  Saint  Brieuc. 
Sylveftre  ,  élu  en  1213  ,  mourut  en  1220. 
Guillaume  IV  ,  dit  Pinchon  ,  d'une  famille  noble  du  diocefe  de 
Saint-Brieuc  ,  fut  d'abord  Chanoine   de  Saint-Gatien  de  Tours. 
Elevé  fur  le  Siège  épifcopal  de  Saint-Brieuc,  en  1220,  il   dé- 
fendit avec  zèle  les  droits  de  l'Epifcopat  contre  les  prétentions 
de  Pierre  de  Dreux.  Obligé   de  fe  retirer  à  Poitiers  ,  pour  éviter 
les  effets    de  la   colère    du  Prince  ,    il  y  fit ,  pendant   quelque 
temps,  les  fondions  de   Coadjuteur  de  l'Evêque  diocéfam ,  qui 
étoit  infirme.  De  retour  en  fon  diocefe ,  il  entreprit  de  bâtir  fon 
Eglife  ,  qui  tomboit  en  ruines.  Il  ne  put  l'achever ,  ayant  été  fur- 
pris  par  la  mort  au  mois  de  Juillet  1234.  Les  miracles  nombreux 
qui  éclatèrent  fur  fon  tombeau  ,   engagèrent  Innocent    III  à    le 
canonifer  treize   ans  après   fa    mort.   Les  offrandes   des   Fidèles 
fournirent  de  quoi  achever  l'Eglife  qu'il  avoit  commencée.  Ainfi 
s'accomplit ,    dit   M.    l'Abbé    Ruffelet ,    la  prédiftion  qu'il   a  voit 
faite,  que,  mon  ou  vij\  il  bàtiroit  fon  Eglife,   Après   la  mort  ^  de 
Saint  Guillaume  ,  le  Chapitre,  affemblé  ,  nomma  Nicolas,  Maître 

^  des 


s  A  I  193 

des  Ecoles  ,  ou  Théologal  de  l'Eglife  de  Saint- Brieuc  ;  mais 
réle6lion  fut  trouvée  défeftueufe  &  déclarée  nulle.  Il  s'afîembla 
une  féconde  fois ,  Se  nomma  Alain ,  Tréforier  de  l'Eglife  de 
Vannes  &  Chanoine  de  celle  de  Saint -Brieuc.  Cette  élection 
eut  le  fort  de  la  première  ;  &  l'Archevêque  ufa  de  fon  droit 
en  nommant  lui-même  l'Evêque. 

Philippe,   nommé  &   facré,  en   1234  ,    par  l'Archevêque  de 
Tours,  acheva,  par  le  moyen  des  offrandes  des  Fidèles,  l'EgUfe 
que  fon  prédécefleur   avoit   commencée  ;  ceiie   Eglife  ell:   d'une 
architefture  gothique  ,  comme  toutes  nos  anciennes  Cathédrales 
mais  d'un  gothique  qui  n'ell  pas  dépourvu   de  beautés. 

Jean  II  étoit  Evêque  de  Saint-Brieuc  en  1247. 

André  ,  en  1251  ,  écrivit  ,  en  1255  ,  à  .Pierre  de  Lam- 
balle  ,   Archevêque  de  Tours. 

Raoul,   en  1257,  fut    envoyé  en  ambaffade    en  Angleterre 
ôc  mourut   en  1259,  ou  fut  transféré  ailleurs. 

Simon,  en  1260,  s'excufa  auprès  de  l'Archevêque  de  Tours 
de  n'avoir  pu  affifler  au  facre  de  l'élu  de  Nantes,  en  116},  Se 
de  celui  de  Saint-Malo ,  en  1 264  :  il  mourut  en  1 270.  Quelques- 
uns  lui  donnent  pour  fucceffeur  un  Thébaud  de  Pouencé ,  qui 
ne  fut  jamais  Evêque  de  Saint-Brieuc ,  mais  de  Dol. 

Pierre  de  Vannes,  élu  en  1271  ,  fut  choifî  par  Jean  le  Roux, 
Duc  de  Bretagne,  pour  un  de  fes  exécuteurs  teftamentaires. 

Alain  de   Lamballe  ,  défigné  en   1290,  mourut  en  1297. 

Guillaume  V,  dit  Gueguen  ^  élu  en  1297,  affifta  au  Concile 
de  Rome,  en  1302,  &  fit  beaucoup  de  bien  à  fon  Eglife. 

Geoffroi ,  élu  en  1303,  mourut  en    131 1. 

Louis  d'Avaugour ,  fon  fucceffeur ,  a  été  omis  par  la  plupart 
des  hifloriens  :  il  mourut  en  1320,  &  fut  enterré  chez  les  Cor- 
deliers  de  Guingamp. 

Jean  III,  fils  de  Henri  d'Avaugour,  Comte  de  Goélo  ,  Se  de 
Marie  de  Brienne,  élu  vers   1320  ,  fut  transféré  à  Dol  vers  1327. 

Matthieu  ,  élu  en  1328,  a  été  omis  par  prefque  tous  les 
hifiioriens. 

Raoul    Defcar  ou    de  la  F'eche ,    élu  en   1334,  mourut  en 

I335-. 

Gui  de  Montfort ,  élu,  confirmé,   &  facré,  en  133  5,  mourut 

en   1359    :   on  lui   attribue  la   fondation    de    la  Chapellenie    de 

Montibrt. 

Hugues  de  Montrelais ,  d'une  famille  noble  de   Bretagne,  fut 

fuccellivement  Chantre,  Doyen,   Archidiacre,   élu   de  Nantes, 

To.-'c   IV,  B  2 


^94  S  A  I 

puis  Evêque  de  Trégmer ,  d'où  il  fut  transféré  à  Saînt-Brieuc.  Il 
fuivit  le  parti  du  Comte  de  Blois ,  Se  affifta ,  en  qualité  de  Plé- 
nipotentiaire de  la  Comtefle ,  fa  veuve ,  au  traité  de  Guérande. 
Son  attachement  à  la  maifon  de  Penthievre  ne  le  rendit  point 
fufpeft  à  Jean  le  Conquérant ,  qui  l'éleva  à  la  dignité  de  Chan- 
celier de  Bretagne  j  place  importante  ,  où  il  fervit  utilement 
fon  Prince.  Il  donna  des  preuves  de  fon  zèle  &  de  fa  capa- 
cité, lors  de  l'hommage  rendu  par  le  Duc  Jean  IV  au  Roi 
Charles  V.  Il  foutmt  ôc  prouva  iî  bien  que  cet  hommage'  ne 
devoit  point  être  lige ,  qu'on  fe  détermina  à  le  recevoir  tel  qu'on 
le  voudroit  rendre.  Cependant ,  ennuyé  de  vivre  dans  un  pays 
fans  ceffe  bouleverfé  par  des  faftions  &  des  guerres ,  il  fe  retira 
à  Avignon.  Grégoire  IX ,  connoiffant  fon  mérite ,  le  revêtit  de 
la  pourpre,  en  1375,  &  lui  donna  l'Evêché  de  Sabine  j  il  prit 
Je   titre  de  Cardmal  de   Bretagne. 

Robert ,  fait  Evêque  de  Saint-Brieuc ,  fur  la  démifîion  de  fon 
prédéceiTeur ,    a  été  omis  par   plufieurs  hiftoriens. 

Geoffroi  de  Rohan ,  ci-devant  Evêque  de  Vannes ,  admis  par 
les  uns  ,  rejette  par  d'autres.  Albert  lui  donne  pour  fuccelTeur  un 
Alain  de  la  P.ue  ,  qui  eft  fuppofé. 

Laurent  de  Faye ,  Maître  des  Requêtes  de  l'Hôtel  du  Roi 
Charles  V,  élu  en  1376,  fut  transféré  à  Avranches  en  1379. 
Albert  place  ici  Thébaud  de  Maleftroit ,  qui  n'a  jamais  été  Evê- 
que  de  Saint-Brieuc  ,   mais  de  Tréguier  &   de  Quimper. 

Guillaume  VI,  en  1379,  ratifia  le  traité  de  Guérande,  & 
mourut  en  1385. 

Guillaume  Angers  VII  du  nom ,  fils  de  Thibaud  ,  Seigneur 
du  Plcffis- Angers ,   &  de  Marguerite  de  Chateaubriand,  mourut 

en   1404. 

Etienne   Cœuvret ,    fon  fuccefiTeur  ,    fut  transféré   à   Dol  au 

commencement   de    1405.  ^  r^       > 

Jean  de  Maleflroit ,  en  1405  »  '^^'^  nommé,  par  le  Conné- 
table Olivier  de  Clifion ,  pour  un  de  fes  exécuteurs  tellamen- 
taires.  Il  fut  transféré  à  Nantes  en  141 9.  C'efi:  lui  qui  donna 
au  Chapitre  de  Saint-Brieuc  la  Terre  de  Brie,  au  diocefe  de 
Rennes.   Il  aflifia ,    par  Procureur ,  au  Concile  de  Pife. 

Alain  de  la  Rue,  Chanoine  de  Nantes,  Dofteur  en  Droit, 
Evêque  de  Saint-Brieuc  en  1419?  mourut  en  1424. 

Guillaume  VIII ,  dit  Bnllet ,  natif  de  Vitré  ,  recommandable 
par  fa  piété  &  la  douceur  de  fon  caraftere  ,  fut  pourvu  de  l'Evêché 
de  Sàint-Brieuc  en  1 424 ,  &  fut  transféré ,  la  même  année ,  à  Rennes, 


SAI  Î95 

Guillaume  IX,  dit  Eder^  Doyen  de  l'Eglife  de  Nantes,  fuc- 
ceffeur  du  précédent ,  affilta ,  en  1 43 1  ,  au  Concile  de  Nantes. 
Son  teftament  nous  refte  :  il  eft  du  4  Décembre  1431.  Après 
fa  mort ,  le  Chapitre  élut  Guillaume  de  Maleftroit ,  qui  ne  fut 
pomt  agréé  du  Duc. 

Hervé  Uguet,  élu  par  l'autorité  du  Duc  en  1431,  eut  de 
grandes  conteftations  avec  les  Moines  de  Beauport.  Le  Pape 
nomma  le  Doyen  de  Liège  pour  connoître  de  cette  affaire.  II 
paroît  que  le  jugement  ne  fut  pas  favorable  à  l'Evêque.  Cétoit 
alors  le  règne  des  Moines. 

Olivier  du  TiUai  fut  transféré ,  par  le  Pape  Eugène  IV  ,  de 
l'Evêché  de  Léon  à  celui  de  Saint-Brieuc ,  en  1435.  Pierre  de 
Laval,    qu'Albert  fait  Evêque  en  1440,  eft  fuppoié. 

Jean  l'Epervier  ,  en  1439,  sffifta  en  perfonne  au  couronne- 
ment du  Duc  François  l-,  à  l'hommage  que  ce  Prince  rendit  au  Roi 
Charles  VII  ;  & ,  par  Procureur  ,  au  Concile  d'Angers  ,  en 
1448. 

Jean  Prigent  fut  tt-ahsféré  de  Saint-Pol-de-Léon  à  Saint-Brieuc^" 
en  1450.  Cette  tranflation  ne  fut  point  approuvée  du  Pape,  qui 
nomma  à  cet  Evêché  Jacques  Peurel  de  Penhoëdic  j  ce  qui 
occafionna  un  long  procès  entre  les  deux  prétendants.  Jacques 
Peurel  fut  fait  Auditeur  de  Rote,  en  1461;  &  Jean  Prigent, 
devenu  paifible  polTeffeur  de  fon  Siège ,  fit  bâtir  la  belle  Cha- 
pelle du  Samt  -  Sacrement ,  où  repofent  les  cendres  de  Saint 
Guillaume.  C'eft  fous  fon  Epifcopat  que  fut  enfin  réprimé  l'abus 
des  Minihis  ou  Aziles. 

Pierre  de  Laval ,  fils  de  Gui ,  Comte  de  Laval ,  &  d'ifabelle 
de  Bretagne,  fut  élu  Evêque  de  Saint-Brieuc  en  1472  ,  & 
transféré  à  Rheims  par  le  Pape,  qui  lui  permit  de  tenir  l'Evêché 
de  Saint-Brieuc  en  commende  pendant  trois  ans.  Il  obtint  une 
autre  Bulle  pour  retenir  l'adminillration  de  cet  Evêché  pendant 
fa  vie,  mais  le  Duc  s'y  oppofa.  Cette  oppofition  occafionna 
un  long  procès  entre  Pierre  de  Laval  &  Chrifiophe  de  Pen- 
march ,  fon  fuccefîeur,  qui  eut  enfin  l'avantage.  L'Archevêque 
s'en  dédommagea  ,  en  quelque  forte  ,  puifqu'il  obtint  une 
Bulle  qui  lui  donnoit  l'Evêché  de  Saint-Malo  en  commende.  Ce 
Prélat  avoit  ,  en  outre ,  trois  Abbayes. 

Chriftophe  de  Penmarch ,  fils  de  Louis ,  Sire  de  Pcnmarch , 
&  d'Ahx  de  Coëtivi ,  transféré  de  Dol  à  Saint-Brieuc  ,  fous  le 
bon  plaifir  du  Duc  ,  aflifia  au  contrat  de  mariage  de  la  Reine 
Anne  avec  Louis  XII ,  fit  des  confiitutions  en  1476,  &:  mourut, 


19e  s  A  I 

en  ifo5,  au  mois  de  Janvier.  Il  eu.  le  fondateur  de  la  Cha-, 
pellenie  de  Saint-Gilles. 

Olivier  du  Châtel ,  fils  d'Olivier ,  Sire  ^  du  Châtel ,  &  de 
Marie  de  Poulmic ,  fut  pourvu  de  l'Evêché  de  Saint-Brieuc  en 
1505,  fit  des  conftitutions  en  1523,  &  mourut,  en  1525, 
le  16  Mai.  Il  renouvella  les  ilatuts  fynodaux  de  fes  prédécef- 
feurs ,  &  y  en  ajouta  de  nouveaux. 

Jean  de  Rieux  ,  troifieme  fils  du  Maréchal  de  Rieux,  &  d'I- 
fabelle  de  Brofîe ,  dite  de  Bretagne ,  fut  d'abord  pourvu  de  l'Ab- 
baye de  Prières ,  Se  nommé  à  l'Evêché  de  Saint-Brieuc.  N'ayant 
encore  que  dix-huit  ans ,  il  en  adminiftra  le  temporel  pendant 
vingt  ans  ;  mais  enfin  ,  préférant  l'épée  à  la  mitre  ,  il  donna  fa 
démiflion  en  1545,  &  époufa ,  en  1548,  Béatrix  de  Jon- 
cheres ,  dont  il  eut  deux  garçons  &  deux  filles.  Les  deux  gar- 
çons ont  fait  les  deux  branches  de  Châteauneuf  &  de  Sourdéac, 
qui  font  aujourd'hui  éteintes.  Il  avoit  eu  pour  SufFragant,  Geof- 
froi  ,  Evêque  de  Tibériade.  On  appelloit  alors  Evêques  Suffra- 
gants  ou  Coadjuteurs ,  ceux  qui  faifoient  les  fondions  épifcopales 
pour  ceux  qui  les  employoient.  On  les  appelloit  aufli  Evêques 
portatifs  :  ils  ne  fuccédoient  point  de  droit  à  ceux  dont  ils 
étoient  les  Coadjuteurs. 

François-Michel  de  Mauni ,  fut  pourvu  de  l'Evêché  de  Saint- 
Brieuc,  fur  la  démiflion  du  précédent ,  en  1545,  &  fut  transféré 
à  Bordeaux  en  1553.  La  Cour  de  Rome  ne  voulut  point  le  re- 
connoître ,  &  nomma  fucceflivement  trois  Prélats ,  qui  n'eurent 
que  le  titre  d'Evêque ,  fans  en  avoir  les  revenus.  Le  dernier  de 
ces  Prélats ,  nommé  Jean  du  Bellai ,  céda  fon  droit. 

Jean  Dutillet ,  fur  la  démiflion  du  précédent ,  fit  ferment  de 
fidélité,  le  8  Décembre  1553.  H  réfigna  à  Nicolas Langelier ,  en 
retenant  une  penfion  ;  il  compofa  plufieurs  ouvrages  de  dogme 
&  de  piété.  Jean  de  Vienne ,  Chanoine  de  Luçon ,  fut  nommé 
par  le  Roi ,  fur  le  bruit  que  Jean  Dutillet  étoit  mort.  C'eil  fous 
î'Epifcopat  de  Jean  Dutillet,  en  1562,  que  le  Roi  donna  un 
Edit  en  faveur  du  Clergé  de  Saint-Brieuc.  Les  Ofliciers  de  Juf- 
tice  ,  ne  faifant  point  aflez  d'attention  à  l'efprit  de  la  loi ,  fai- 
fiflbient  les  Bénéfices  de  ceux  qui  ne  réfidoient  pas ,  quoique 
ces  Eccléfiaftiques  fiflent  deflervir  leurs  Bénéfices  par  des  Prêtres 
approuvés  :  ces  faifies  étoient  fuivies  des  plus  injuiles  vexations 
qui  confommoient  les  revenus  entiers  des  Bénéfices.  Le  Clergé, 
ne  pouvant  plus  fupporter  ces  perfécutions ,  eut  recours  au  Roi , 
qui  donna  un  Edit,  portant  qu'il  feroit  permis  à  tout  Prêtre  de 


s  A  I  197 

pofféder  deux  ou  plufieurs  Bénéfices  qui  obligêoient  à  réfidence, 
pourvu  qu'on  fît  deffervir  celui  ou  ceux  dans  lefquels  on  ne  ré- 
fidoit  pas ,  par  des  perfonnes  approuvées  de  l'Evêque.  Le  même 
Edit  donnoit  en  même  temps  main-levée  de  tous  les  Bénéfices 
faifis.  Cet  Edit  fut  adreffé  à  la  Cour  de  Parlement ,  &  aux  Juges 
de  Rennes,  Nantes,  Vannes,  Quimper ,  Goëlo,  ècc. 

Nicolas  Langelier ,  pourvu  fur  la  démiflion  de  fon  prédécefieur 
en  1565,  fut  un  des  plus  zélés  défenfeurs  des  libertés  de  l'Eglife 
Gallicane  :  il  s'acquit  une  grande  réputation ,  &  il  étoit  digne 
de  l'Epifcûpat ,  autant  par  fes  vertus  que  par  fes  talents  ;  il  en 
remplit  toutes  les  obligations  avec  un  zèle  infatigable.  Il  affilia, 
en  1583,  au  Concile  provincial  de  Tours,  dont  il  rédigea  les 
aftes.  Ce  Concile  eft  un  des  plus  célèbres  de  cette  province. 
Il  ordonna  d'établir  des  bibliothèques  communes  dans  toutes  les 
Eglifes  Cathédrales  &  Collégiales  ,  &  prefcrivit  la  forme  des 
furplis  ;  mais  l'Arrêt  le  plus  terrible  qu'il  porta ,  fut  contre  les 
barbes  des  Moines  qu'il  ordonna  de  rafer.  Apparemment  que  les 
Capucins  avoient  des  privilèges  ou  qu'ils  obtinrent  des  difpenfes, 
puifqu'ils  ont  trouvé  le  fecret  de  conferver  leurs  barbes  jufqu'à 
préfent.  Nicolas  Langelier  fut  député  de  la  province  aux  Etats 
de  Blois  en  1588,  &  plufieurs  fois  en  Cour  pour  des  affaires 
importantes.  Il  répondit  toujours  à  l'idée  qu'on  avoir  conçue  -de 
fon  mérite.  On  lui  reproche  fon  attachement  à  la  Ligue  ;  atta- 
chement qui  fait  une  tache  à  la  mémoire  de  cet  Evêque ,  fi  re- 
commandable  d'ailleurs.  Il  mourut  en  1595. 

Melchior  de  Marconai ,  d'une  famille  noble  du  Poitou  & 
Abbé  de  Rillé ,  fut  pourvu  de  TEvêché  de  Saint-Brieuc  en  1601, 
Son  zèle  pour  la  difcipline  eccléfiaflique  le  porta  à  recueillir  les 
anciens  ftatuts  de  fes  prédécefTeurs ,  auxquels  il  en  ajouta  de 
nouveaux,  &  le  tout  fut  imprimé  en  1606.  Voici  ce  qu'on  y 
remarque  de  particulier  :  i^.  la  défenfe  faite  aux  Eccléfiafiiques 
d'attifer  leurs  cheveux  &  leurs  barbes  à  la  façon  des  mondains. 
Cette  défenfe  pour  les  barbes  feroit  penfer  que  les  Eccléfiaftiques 
n'avoient  pas  encore  obéi  aux  déciets  du  Concile  rapporté  ci- 
deflus.  2°.  La  défenfe  faite  aux  mêmes  Eccléfiaftiques  de  faire 
les  fonctions  d'Avocats  ou  de  Procureurs  devant  des  Juges  fécu- 
iiers.  3°.  La  liberté  de  fe  fervir  en  particulier  du  Bréviaire  Ro- 
main, ou  Briochin,  à  fa  volonté,  pourvu  que  ce  dernier  fût  feul 
en  ufage  dans  l'Office  public.  4^'.  La  permiffion  donnée  à  quel- 
ques Eccléfiafliques  de  dire  deux  fois  la  Meffiï  le  Dimanche , 
ce  qui  prouve   une  rareté  de  Prêtres.  5''.  La  défenfe  faite  aux 


198  s  AI 

ConfefTeufS  d'enjoindre  des  pénitences  publiques  pour  des  péchés 
occultes  j  ce  qui  femble  indiquer  que,  pour  les  péchés  pubUcs  ,  la 
pénitence  pubHque  étoit  encore  en  ufage.  6°.  La  défenfe  de 
porter  des  bagues  aux  doigts ,  d'affifter  à  la  condamnation  des 
coupables  punis  de  mort ,  d'écrire  leur  fentence ,  &c.  7*^.  La 
fufpenfion  des  Prêtres  concubinaires ,  s'ils  perfiftent  après  les  mo- 
nitions  requifes.  8*^.  La  défenfe  de  tenir  plufieurs  Bénéfices  à 
charge  d'ames  ,  &  de  recevoir  dans  le  diocefe  les  quêteurs  8c 
porteurs  de  certains  pardons  accordés  par  le  Concile  de  Trente. 
9°.  Les  Fêtes  à  obferver  dans  le  diocefe ,  au  nom|||e  de  cjua- 
rante-huit.  Ce  Prélat  fit  aufli  imprimer  un  Rituel ,  où  il  parle 
des  lépreux,  &  emploie  un  Chapitre  entier  à  marquer  la  ma- 
nière dont  ils  doivent  être  féparés  du  refte  des  Fidèles  ;  ce  qui 
prouve  qu'il  y  avoit  encore  alors  des  lépreux  en  Bretagne.  Cette 
maladie  ,  autrefois  fi  commune  en  France ,  y  avoit  été  apportée 
par  les  Croifés ,  &  y  avoit  fait  de  fi  grands  ravages ,  qu'il  n'y 
avoit  prefque  pas  de  ville  &  même  de  bourgade  un  peu  con- 
fidérable  qui  n'eût  fa  Léproferie  ou  Ladrerie  -,  car  c'eft  le  nom 
qu'on  donnoit  aux  Hôpitaux  defl:inés  pour  les  lépreux ,  parce 
qu'ils  étoient  dédiés  fous  l'invocation  de  Saint  Lazare ,  que  le 
peuple  appelloit ,  par  corruption  ,  Saint  Ladre,  Melchior  de  Mar- 
conai  mourut  en   161 8. 

André  le  Porc  de  la  Porte  de  Vefins ,  originaire  d'Anjou , 
fils  de  René  le  Porc  &  d'Anne  de  la  Tour-Landri ,  fut  nommé 
en  161 9,  publia  des  ftatuts  en  1624,  &  mourut  en  1631, 
par  l'ignorance  des  Médecins ,  qui ,  dit-on ,  le  laifïerent  périr 
de  faim. 

Etienne  de  Villazel ,  Touloufain  ,  Abbé  de  Saint-Severe  &  Pré- 
dicateur du  Roi,  fut  facré  par  l'Archevêque  de  Paris  le  premier 
Février  1632,  affifta  aux  Etats  de  Dinan  l'année  fuivante,  à 
FaiFemblée  du  Clergé  en  1639,  &  mourut  en  1641. 

Denis  de  la  Barde  ,  Chanoine  de  Notre-Dame  de  Paris,  Au- 
mônier &  Prédicateur  du  Roi,  fut  facré  en  1642,  approuva  le 
livre  de  la  Fréquente  Communion  le  24  Juin  1643  ,  ck  afîifta  , 
en  1653  ,  à  raffemblée  du  Clergé  où  fut  reçue  la  Bulle 
contre  Janfenius.  Auffi  éloquent  que  fçavant ,  il  s'acquit  une 
grande  réputation  par  fes  Oraifons  funèbres.  Il  préfida  aux  Etats 
de  Saim-Brieuc  en  1659,  &  à  ceux  de  Nantes  en  1661  Se 
1663.  La  fondation  du  Séminaire  eft  un  monument  qui  prouve 
fon  zèle.  Ce  fut  lui  qui  fit  défendre  à  la  Marquife  de  la  Mouf- 
faye  de    continuer  fon    château   de    Quintin ,  &    d'y    tenir  des 


s  À  I  199 

aflemblées  de  gens  de  fa  religion ,  c'eft-à-dire  de  Calvinifles.  Ce 
Prélat  étoit  lié  d'amitié  avec  le  Maréchal  de  Guébriand ,  avec 
lequel  il  avoit  fait  fes  premières  études.  Il  facra ,  dans  la  Cathé- 
drale de  Saint-Brieuc ,  Pierre  le  Neboux  de  la  BrofTe  ,  Evêque 
de  Saint-Pol-de-Léon  ,  &  mourut  le  22  Mai  1674. 

Hardouin  Fortin  de  la  Hoquette ,  natif  de  Périgord ,  Agent  du 
Clergé  en  1670,  fut  nommé,  en  1675  ,  à  l'E'^éché  de  Saint- 
Brieuc,  &  fut  transféré  à  Poitiers  en  168 1  j  il  mourut  Archevê- 
que de  Sens  en  171 5. 

Louis  Marcel  de  Coëtlogon  ,  Abbé  de  Begars ,  Evêque  de 
Saint-Brieuc  en  1681  ,  étoit  d'une  maifon  illullre  de  ce  diocefej 
ce  qui  fit  dire  à  Louis  XIV  qu'il  l'avoit  fait  Prophète  dans  fon 
pays.  Peu  de  Prélats  ont  été  plus  chers  à  leurs  diocéfains ,  & 
ont  mérité  davantage  leur  attachement  :  affable  ,  populaire  ,  bien- 
faifant,  humain  ;  ces  vertus  recevoient  encore  un  nouveau  luftre 
des  manières  obligeantes  dont  ce  bon  Evêque  fçavoit  les  accom- 
pagner. Sur  quelques  conteftations  qui  s'étoient  élevées  au  fujet 
de  l'exercice  de  la  Police  dans  la  ville  de  Saint-Brieuc,  il  paffa, 
en  1695  ,  une  tranfaftion  avec  les  Juges  royaux  de  cette  ville, 
par  laquelle  ils  acquiefcerent  à  fon  univerfalité  de  Jurifdi6lion  & 
de  Pohce  dans  la  ville  &  les  fauxbourgs  de  Saint-Brieuc ,  même 
fur  les  maifons  prébendales  &  les  fiefs  amortis.  C'ell  ce  Prélat 
qui  fit ,  au  Roi  d'Angleterre  Jacques  II ,  la  belle  réception  dont 
nous  avons  ci -devant  parlé.  Voici  comment  le  Père  PhiHppe 
décrit  la  manière  pleine  de  douceur  avec  laquelle  M.  de  Coët- 
logon ,  pour  lors  Evêque  de  Saint-Brieuc  ,  travailla  à  la  conver- 
fion  des  Hérétiques  de  fon  diocefe  ,  lors  de  la  révocation  de 
l'Edit  de  Nantes.  «  L'Evêque  arrête  le  foldat  qui  venoit  à  fon 
»  fecours  ,  &  accompagné  feulement  du  Marquis  de  la  Côte , 
»  Lieutenant  général  en  baffe  Bretagne  ,  illuilre  ami  dont  les 
«  vertus  répondoient  à  celles  du  Prélat,  il  va  chercher  les  brebis 
î>  errantes ,  s'infinue  dans  les  coeurs ,  les  convertit ,  les  change  ; 
>>  &  le  Lieutenant  général  voit ,  avec  plaifir  ,  fon  miniftere  de- 
^>  venu  inutile  par  la  douceur  du  Prélat ,  qui  fçait  tout  vaincre 
»>  fans  autre  fecours  que  celui  des  armes  Evangéliques.  »  Louis 
Marcel  de   Coètlogon  fut  transféré  à  Tournai  en  1705. 

Louis  de  Frétât  de  Boifîieux  ,  parent  des  Cardinaux  de  Noailles 
&  de  Polignac ,  &  d'une  très-bonne  maifon  d'Auvergne  ,  avoit 
d'abord  fervi  dans  la  Marine  où  il  s'étoit  diilingué.  Il  étoit  Ca- 
pitaine de  Vaifleau ,  lorfqu'au  retour  de  la  campagne  qui  lui 
avoit  mérité  cet  honneur,  il  voulut  faire  une  retraite  pour  fc 


2.00  S    A   I 

difpofer  à  faire  fes  Pâques.  Le  fruit  de  cette  retraite  fut  de  lui 
infpirer  un  grand  dégoût  du  monde ,  qui  le  porta  à  renoncer  aux 
efpérances  flatteufes  qu'il  lui  offroit ,  pour  fe  confacrer  entière- 
ment à  Dieu  dans  l'Etat  Eccléfîallique.  Pourvu  de  TEvêché  de 
Saint-Brieuc  en  1705  ,  il  fe  fit  remarquer  par  lardeur  de  fon  zèle 
ôc  la  fainteté  de  fes  mœurs.  Prélat  digne  des  premiers  fiecles 
de  l'Eglife ,  il  ne  fut  occupé ,  pendant  fon  Epifcopat ,  que  des 
befoins  de  fon  troupeau,  dont  il  fut  toujours  le  père  &  le  mo- 
dèle. Il  entreprit  de  rebâtir  la  grande  voûte  de  fon  Eglife  qui 
menaçoit  ruines  ;  &  quoique  déjà  plufieurs  eulTent  aflez  mauvaife 
opinion  des  facultés  d'un  Cadet  d'Auvergne  ,  il  en  vint  à  bout 
arec  les  fecours  que  lui  procura  M.  le  Comte  de  Touloufe , 
Gouverneur  de  la  province ,  &  ceux  que  lui  fournifToit  fa  ma- 
nière de  vivre  fimple  Se  frugale  :  on  lui  doit  aufll  l'autel  à  la 
Romaine  de  l'Eglife  Cathédrale.  Perfuadé  qu'un  trop  grand  nombre 
de  fêtes  eft  plus  nuifible  qu'avantageux  ,  il  en  retrancha  plu- 
fîeurs  de  celles  qui  s'obfervoient  dans  fon  diocefe.  En  17149 
il  fit  une  Ordonnance  fynodale  pour  l'acceptation  pure  Se  fimple 
de  la  Bulle  l/nigemtus  ,  &  la  condamnation  du  Livre  des  Ré- 
flexions morales  du  Père  Quefnel.  Il  tint  un  Synode  en  1720,  & 
mourut  la  même  année  à  Ancenis ,  peu  de  jours  après  la  clôture 
des  Etats ,  pendant  lefquels  il  s'étoit  difiingué  pour  la  défenfe 
des  droits  &  des  privilèges  de  la  province.  Son  corps  fut  ap- 
porté à  Saint-Brieuc ,  &  les  cérémonies  de  fes  funérailles  furent 
faites  par  l'Evêque  de  Saint-Malo.  Il  fut  enterré  dans  le  choeur 
de  la  Cathédrale ,  au  pied  du  grand  pilier  qu'il  avoit  fait  conf- 
truire.  Les  Chanoines ,  en  reconnoiflance  de  ce  que  ce  Prélat 
avoit  fait  pour  fon  Eglife,  arrêtèrent  qu'on  feroit,  chaque  année , 
un  Service  folemnel ,  avec  fon  de  cloches  extraordinaire  ,  pour 
le  repos  de  fon  ame.  On  a  placé  au  deffus  de  la  fépulture  de 
ce  digne  Prélat  un  marbre  noir,  fur  lequel  eft  gravée ,  en  lettres 
d'or ,  fon  épitaphe ,  qui  contient  en  abrégé  les  principaux  faits 
de  fa  vie. 

Pierre-Guillaume  de  la  Vieuville ,  Abbé  de  Carnoët  Si  Grand- 
Vicaire  de  Nantes  ,  fut  nommé  le  8  Juin  1721  ,  fit  imprimer  les 
fiatuts  du  diocefe  de  Saint-Brieuc  en  1723  ,  préfida  aux  Etats 
affemblés  à  Saint-Brieuc  en  1724  ,  &  mourut  d'apoplexie  au  mois 
de  Septembre  1727.  C'efi:  fous  fon  Epifcopat  que  mourut  l'Abbé 
Gallet,  Briochin  ,  qqj  a  réfuté  l'Abbé  de  Vertot  au  fujet  des  origines 
Bretonnes.  On  dit  que  l'Abbé  de  Vertot  ayant  lu  l'ouvrage 
de  Gallet ,  avoua  qu'il  s'étoit  trompé  &  que  celui-ci  avoit  raifon, 

Louis- 


s    A    I  2.0I 

Loiûs-François  Vivet  de  Montclus ,  Abbé  de  Franquevaux  & 
de  Beauport ,  fut  nommé  le  20  Oftobre  1727,  &  facré  en  1728  : 
il  étoit  fils   de   Jacques  Vivet  ,  Préfident   en    la   Chambre    des 
Comptes  &   Cour   des  Aides    de    Montpellier.  En  1 731,  il  fit 
imprimer  un   nouveau  Propre  pour  Ion  diocefe.  Le   Roi  ayant 
donné ,  en    1742  ,   une    Déclaration  touchant    le  concours   des 
Cures  de  Bretagne ,  M.  de  Montclus  donna   un  Mandement ,  le 
29  Août  de  la  même  année ,  pour  ordonner  l'exécution  de  cette 
Déclaration  dans  fon  diocefe.  La  voie  du  concours  ,  pour  parvenir 
aux  Bénéfices-Cures  ,   a   été  inconnue  dans  TEgUfe  jufqu'au  temps 
du  Concile  de  Trente.  Les  Pères  du  Concile ,  confidérant  l'impor- 
tance des  devoirs  qu'impofent   les    Cures    à   ceux  qui   en    font 
pourvus,  jugèrent  à  propos  d'étabHr  le  concours  pour  ces  fortes 
île  Bénéfices.  Le  concours  n'eft  cependant  reçu  en  Bretagne,  que 
pour  les  vacances  qui  arrivent  dans  les  mois  du  Pape.  Comme 
une  des  conditions  de  l'alternative  étabHe  entre  les  Papes  &  les 
Evêques  de  Bretagne ,  étoit  que  les   Cures ,  vacantes    dans  les 
mois  affe61és  aux    Papes ,  feroient   données  à  des  Eccléfiaftiques 
Bretons  ,  cela  attiroit  à  Rome  un  grand  nombre  d'Eccléfiafliques. 
Pour  remédier  aux   abus   qui   pouvoient  en  arriver ,  Benoît  XIV 
donna  ,  en  1740,  une  Bulle,  par  laquelle  il  ordonna  que  le  con- 
cours pour   les   Cures  de  Bretagne  ne  fe  feroit    plus  à  Rome  ^ 
mais  devant  les  Ordinaires  des  lieux  où  feroient  fituées  ces  Cures. 
Cette  Bulie,  revêtue  de  lettres- patentes  ,  fut  enrégiftrée  au  Parle- 
ment de  Bretagne  le  6  Février    1741.  Elle  n'empêcha  cependant 
pas  que  quelques  Eccléfiaftiques ,  qui  craignoient  l'examen  de  leur 
Evêque  ,  ne  continuaflent  encore   à   fe    faire    pourvoir  en  Cour 
de  Rome  ,  les  uns  pcr  oh'num ,  les  autres /'ar  dévolut.  Pour  arrêter 
ce  dcfordre ,  Louis  XV ,  à   la  prière   des   Evêques  ,  donna  ,  ea 
1742  ,  une  nouvelle  Déclaration  ,  par  laquelle  il  afTigne  au  con- 
cours une  forme  confiante ,  &   ote  à  l'ambition  tout  moyen  de 
fe  foufliaire  à  une  loi  fi  fagement  établie  ,  &  Ci  propre  à  donner 
à  l'Eglife  des  Minifires   éclairés.  C'eft    aufTi  fous  l'Epifcopat  de 
M.  Vivet  de  Montclus,  que  le    Général  de  la  Paroifîé  de  Saint- 
Michel  de  Saint  -  h'ricuc  fut  détaché  de  la  Communauté  de  ville. 
C'étoit  elle  qui  auparavant  nommoit  leurs  Tréforiers  &  recevoir 
leurs  comptes.  Le  premier  Tréforier  de  cette  Paroiflc,dont  nous 
ayons   connoifTance  ,  efi:   un   nommé    Thomas  Durans ,  en    1 490. 
Il  paroLt  que  cVfl  aufîi  à-peu-près  ce  temps   où  cette   Eglife  eft 
•  devenue  Paroiire.  Le  cimetière  qui  la  joignoit  étoit   peut-être  aufîi 
l'ancien  cimetière  de  la  Cathédrale  ,  dans  le  temps  où  il  n'étoit 
Tome  IF.  C  2 


2.02»  o  A  1 

pas  permis  d'enterrer    dans  les  villes  ;  permîilîon  qui  n'auroît 

jamais  dû  être   accordée.  M.  de  Montclus  fut  transféré  à  Alais, 

en  1744' 

Hervé  -  Nicolas  Thépault  du  Breignon,  Chanoine  &  Grand- 
Vicaire  de  Quimper ,  fils  de  Maurice ,  Seigneur  du  Breignon , 
3c  d'Anne -Marie -Hélène  du  Châtel  de  Kerlech,  fut  nommé  le 
3  Septembre  1744,  &  facré  le  7  Mars  1745.  En  175  i,U 
donna  un  Mandement  portant  condamnation  d'un  livre  intitulé. 
Lettres  Ne  revuo-nate ,  comme  contenant  plufieurs  proportions  ref^ 
peftivement  captieufes , téméraires ,  impies,  contran-es  à  l'Ecriture- 
Sainte ,  &  renouvellant  des  erreurs  déjà  condamnées  par  l'Eglife. 
Il  préfida  aux  Etats  de  Saint-Brieuc  en  1758,  &  fut  député  de 
la  province  de  Tours  à  l'alTemblée  du  Clergé  de  1765  5  alTem- 
blée  célèbre  par  la  condamnation  de  plufieurs  livres  que  la  re- 
ligion réprouve.  11  fit  des  règlements  très-fages  pour  les  céré- 
monies Eccléfiaftiques  ,  s'appliqua  à  détruire  des  fuperftitions  grof- 
fieres,  &  mourut  en  1766,  pleuré  fur-tout  des  pauvres,  dont 
les  larmes  font  toujours  l'éloge  de  la  bienfaifance  -,  il  fut  inhumé 
dans  fa  Cathédrale,  fous  un  tombeau  de  marbre,  avec  cette 
épitaphe  : 

D,  O.  M. 

Hic  jacet  R.  R.  in  XO.  P,  D.  D.  H.  N.  Thépault  du 
Breignon ,  Ep,  &  D»  San-Briocenjis  ,  religlonis  quam  femper 
coluit  &  fovit 

Aniantïjjimus  ; 
în  pauperes  profufus  , 
In  omms  beneficus  : 
Obiit  die  %6  Jan.  lyCC, 
Requiefcat  in  pau, 

M.  François  Barreau  de  Girac ,  natif  d'Angouléme ,  nommé 
&  facré  en  1766,  fut  transféré  à  Rennes  en  1769. 

M.  Perron  de  la  Ferronais,  facré  en  17^9  )  ^  ^^^  transféré  à 

Bayonne.  ,  -k»  -n 

L'Eglife  de  Saint-Brieuc  efl  aauellement  gouvernée  par  M.  Re- 

gnault  de  Bellefcife. 

Le  territoire  de  Saint-Michel  renferme  plufieurs  maifons  nobles , 
doiit  on  va  donner  les  noms.  Trompés  par  de  faux  renfeigne- 
ments  ,   on  a    placé  à  l'article    Châtelaudren  la  Terre  du  Bois- 


s  A  I  20} 

BoëfTel  ;  c'eû  une  erreur  qu  on  doit  re6Hfier.  Elle  eft  à  un  quart 
de  lieue  de  Saint-Brieuc  ;  fa  Junfdiftion  s'exerce  dans  cette  ville , 
dans  l'auditoire  des  Régaires  de  l'Evêché ,  par  emprunt  de  terri- 
toire :  elle  appartenoit ,  en  1 3  8 1  ,  à  Elle  du  Rouvre  ,  Gouver- 
neur de  Saint-Brieuc.   Elle  pafTa ,  dans  le  feizieme  fiecle ,  à  la 
inaifon  de  Bréhand,  par  le  mariage   de  Jean  de  Bréhand  avec 
Jacquemine  ,   fille   de   Bertrand  ,  Seigneur    du    Rouvre.    M.  le 
Marquis  de  Bréhand  ,  Maréchal  de  C  amp ,  étant  mort  fans  pof- 
térité  mafculine  ,  fa   fille    unique  l'a   portée  dans    la  maifon   de 
Maillé  ,  par   fon    mariage    avec  M.  de  Maillé ,  premier  Gentil- 
homme de  M.  le  Comte  d'Artois.  Les  Seigneurs  prétendent  que 
cette  Terre    eft    une  Vidamie    de    l'Evêché    de    Samt  -  Brieuc , 
(  voyez  ce  que  l'on  a  dit  ci-deflus  fous  l'année  1765.)  En  i  «op-, 
la  maifon    de   Sainte-Claire  ,  à  Ifabelle  Dollo  ;   la  Ville-Jijiefe 
à  Françoife   Dollo  ,  femme    d'Olivier    Poullain;  la  Ville-Hàk)j^> 
jadis  à  Alain  de    Ploufragan ,  en   1500,  à  Alain  Sylveilre  ;.|bsy^ 
Rues,  à  Jean  Tourmeboy  ;  la  Vilie-Berno ,  à  Pierre   Moro  ^,^^L%'j0k 
Grange  ,  à  Chriftophe  Tournegouet  -,  Clofa ,  à  la  veuve  du  Sieuî'  ^% 
de   Penmarch  ;   le  Pré-Tifon ,  en   litige  entre   Jean  le   Voyer,^^jJl 
Fourrier  du  Roi ,  &  le  nommé  Hazais  ;  la  Ville-Ernaud ,  à  Jean  ^'^^ 
Rofmar  ;  la   Huguenorais ,  à  Jacques  Tournegouet  ;  Ker-foa  ,  à    X^ 
Rolland  le  Neveu  ;  la  Ville-Salio ,  à  Hélène  Sollet  ;  Pleine-Ville- 
Gouicquet ,  à  Alain  Gouicquet  ;  la  Pleine-Ville  &  la  Ville-Geoffroi , 
à  Alain  Vifdelou» 

SAINT-BRIEUC-DE-MAURON ;  dans  un  fond;  à  14  lieues 
au  Sud-Sud- Oueft  de  Saint -Malo,  fon  Evêché  ;  à  11  lieues 
de  Rennes  ;  &  à  6  lieues  de  Montauban  ,  fa  Subdélégation. 
Cette  Paroiiîe  refibrtit  à  Ploermel,  &  compte  650  communiants: 
la  Cure  eft  préfentée  par  l'Abbé  de  Paimpont.  Le  territoire  offre 
beaucoup  plus  de  landes  que  de  terres  cultivées.  La  maifon 
noble  delà  Gaptiere  appartenoit,  en  1430,  àSébaiHen  TroufTiers 
de  la  Gaptiere.  Jean  Trouffiers  fut  ChevaHer  de  l'Ordre  du  Roi. 
Le  Pont-Menard  appartenoit,  en  1430,  à  Guillaume  de  Saint- 
Brieuc  ;  &  la  Ville  -  Jourdan  j  à  N,...  le  Métayer,  Sieur  de 
Lai  vrai. 

SAÏNT-BRIEUC-DES-IFFS;  dans  un  fond;  à  9  lieues  au 
Sud-Sud-Ell  de  Saint-Malo ,  fon  Evêché  ;  à  5  lieues  un  quart  de 
Rennes  ;  &  à  i  lieue  de  Hédé ,  fa  Subdélégation  &  fon  refibrt. 
On   y   compte    600   communiants  :  la  Cure   eil  amovible.  Le 


» 


*- 


104  '         S  A I 

territoire  ,  plein  de  vallons  &  de  collines ,  offre  à  la  vue  des 
terres  en  labeur ,  des  prairies ,  &  des  landes  ;  il  eft  couvert  d'ar- 
bres fruitiers  qui  produifent  beaucoup  de  cidre.  En  1420,  on  y 
remarquoit  plufieurs  maifons  nobles  ;  fçavoir  :  la  Boucheraye ,  la 
Rougeraye  ,  la  Rabiere  ,  Bourg  -  Marin  ,  Gourmelet ,  la  Gode- 
linaye  ,  la  Bouderaye  ,  la  Durantaye  ,  la  Pied-Louay ,  la  Becoe- 
zaye,  la  Calmachiere ,  la  Pontelaye ,  Camboul ,  la  Medeliere, 
la  Motte-Pontel ,  les  Lichieres ,  &  le  Pont  de  la  Haye. 

SAINT -BROLADRE;  dans  un  fond,  au  bord  d*un  ruifleau 
qui  fait  la  fource  du  canal  de  la  Banche  ;  à  3  lieues  à  l'Eft- 
Nord-Eft  de  Dol  ,  fon  Evêché  &  fa  Subdélégation  ;  &  à  1 1 
lieues  de  Rennes ,  fon  relTort.  On  y  compte  1500  communiants: 
la  Cure  efl:  préfentée  par  l'Abbé  du  Mont-Saint-Michd.  Le  ter- 
ritoire ,  borné  au  Nord  par  la  mer  ,  offre  à  la  vue  quelques 
vallons  &  coteaux,  des  terres  exaftement  cultivées  &  fertiles 
en  grains ,  lin  ,  &  chanvre.  Une  partie  des  dîmes  &  autres  droits 
facerdotaux  de  cette  Paroiffe ,  fut  donnée ,  en  1075,  à  l'Abbaye 
du  Mont-Saint-Michel ,  par  Tréhan  de  Saint-Broladre  ;  &  ,  l'an 
II 10,  Guillaume  d'Irfois-Croifé  lui  donna  l'autre  partie  des  mê- 
mes droits.  Le  Prieuré  de  Bourgrain  étant  tombé  en  régale  ,  le 
Roi  Henri  II  y  nomma,  en  1548,  Guillaume  de  Lignieres, 
Confeiller  au  Parlement  de  Bretagne  ôc^Abbé  de  Saint- Aubin- 
des-Bois.  Les  maifons  nobles  de  ce  territoire  font  :  la  Ville- 
Guillaume  ,  moyenne  &  baffe-Juffice  ,  à  M.  le  Cordier  de  Par- 
fouroj  Carlac  ,  moyenne  &  baffe-Juffice  ,  à  M.  de  Saint-Pair  de 
Carlac  j  Juette  &  Cheros  ,  moyenne-Juftice,  aux  enfants  de 
M.  de  Saint-Pair  de  la  Jugaudiere  ;  la  Pichaudiere,  moyenne- 
Juftice  ,  à  M.  Uguet  de  Laumône  ;  les  Hommeaux  ,  moyenne- 
Juftice ,  à  M.  de  Saint-Geni.  Auprès  de  cette  dernière ,  font  des 
moulins  à  vent  fur  une  monticule,  fur  le  fommet  de  laquelle 
on  découvre  une  grande  étendue  de  pays. 

SAINT-CARADEC  ;  dans  un  fond ,  au  bord  de  la  rivière 
d'Oulh  à  21  lieues  à  l'Eft-Nord-Eff  de  Quimper,  fon  Evêché; 
à  19  lieues  de  Rennes  5  &  à  3  lieues  de  Pontivi,  fa  Subdé- 
légation. Cette  Paroiffe  reffortit  à  Ploermel  ,  &  compte  1 500 
communiants  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire  ell:  coupé 
de  ruiffeaux  qui  coulent  dans  les  vallons,  &  vont  fe  jetter 
dans  la  rivière  d'Ouff.  Ceft  fur  leurs  bords  qu'on  voit  des  terres 
en  labeur  &  quelques  prairies  j   le  reffe   du  terroir   n'eff  point 


s  A  I         -  205 

cultivé  ,  ce  font  des  landes  d  une  étendue  conddérable.  Quelques 
particuliers  en  ont  défriché  une  partie  qui  leur  procure  d'abon- 
dantes récoltes.  Il  eft  à  croire  que  l'intérêt  engagera  leurs  com- 
patriotes à  les  imiter.  Il  fe  tient  une  foire  dans  l'endroit ,  tous 
les  premiers  mardis  du  mois ,  depuis  le  mois  de  Mars  jufqu'à 
celui  d'Oftobre.  Louis-Eudo  de  Kerlivio  ,  né  en  cette  ParoifTe 
le  14  Novembre  1621,  fut  Refteur  de  Plumergat ,  au  diocefe 
de  Vannes,  où  il  mourut,  en  odeur  de  fainteté ,  le  21  Mars 
1685.  La  moyenne -JuiHce  de  Carcado  appartient  à  M.  de 
Molac. 

SAINT-CARADEC-HENNEBON  j  ParoifTe  féparée  de  la  ville 
de  Hennebon  par  la  rivière  de  Blavet.  On  y  compte  2200  com- 
muniants :  la  Cure  eft  à  ralternative.  Le  territoire  produit  du 
grain  &  du  foin.  La  Terre  &  Seigneurie  de  Saint-Caradec  ap- 
partenoit,  en  1334,  à  Guillaume  TrefTan  :  elle  relevoit  de  la 
Seigneurie  de  Hennebon ,  qui  appartenoit  à  Hervé  de  Léon.  Il 
fe  tient  deux  foires ,  par  chaque  année ,  dans  cette  ParoifFe ,  où  il 
fe  vend  une  grande  quantité  de  beftiaux.  Le  manoir  de  Merdi 
appartenoit,  en  1420,  à  Pierre  Raoullinj  &  le  manoir  de  Ker- 
lehouez ,  à  Jean  du  Pont  :  ceux  de  Ker-goufluon ,  Ker-andruff, 
Ker-amoalez ,  &  Ker-flemzre  ,  font  plus  modernes. 

SAINT-CARADEC-TRÉGOMEL  ;  à  13  lieues  au  Nord-Ouefl 
de  Vannes ,  fon  Evêché  ;  à  26  lieues  de  Rennes  -,  Se  k  6  lieues 
de  Hennebon ,  fa  Subdélégation  &  fon  refTort.  On  y  compte 
1300  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire, 
coupé  de  ruiffeaux  &  par  la  rivière  de  Scorf,  renferme  des 
terres  en  hibeur ,  des  prairies  ,  &  des  landes.  C'eft  un  pays 
couvert ,  qui  produit  beaucoup  de  fruits.  Il  fe  tient  un  marché 
tous  les  fa  médis ,  &  une  foire  tous  les  m.ois  de  l'année.  La 
conftruftion  de  la  Chapelle  de  Ker-nafqueden  eft  admirée  des 
connoilleurs.  La  Terre  &  Seigneurie  de  Guerlofquet  appartient 
à  M.  du  Cluoraifon ,  Seigneur  d'une  partie  de  la  ParoifTe.  Ker- 
merien  &  le  Crano ,  haute  ,  moyenne  &  bafTe-Juftice ,  aux 
héritiers  de  M.  de  Saint-Georges  :  Ker-aingar  ,  l'hôtel  du  Rof- 
quet,  le  PlefTis-Briand ,  le  Rufquet ,  &  Ker-merien,  font  des 
maifons  très-anciennes. 

SAINT-CARNÉ  ;  fur  une  !  hauteur  ;  à  6  lieues  au  Sud-Oueft 
de  Dol,  fon  Evêché  j  à  10  lieues  de  Rennes  j  &  à  1  lieue  de 


zo6  S  A  I 

Dinan ,  fa  Subdélégation  &  fon  reflbrt.  On  y  compte  600  com- 
muniants :  la  Cure  efl  à  l'Ordinaire.  Le  territoire  ,  arrofé  des 
eaux  de  la  rivière  de  Rance  &  de  plulieurs  ruilTeaux,  offre  des 
terres  bien  cultivées ,  quelques  prairies ,  &  peu  de  landes.  Ceft 
un  pays  couvert ,  qui  produit  beaucoup  de  cidre.  La  haute- 
JulHce  Dupin  appartient  à  M.  de  Bruc. 

SAINT-CAST  ;  fur  la  côte  5  à  8  lieues  à  FEft-Nord-Eft  de 
Saint -Brieuc ,  fon  Evêchéj  à  15  lieues  de  Rennes  j  &  à  5 
lieues  de  Lamballe ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  reffortit  à 
Jugon,  &  compte  1000  communiants.  M.  de  Valentinois  en  eft 
le  Seigneur  :  la  Cure  ell  à  l'alternative.  Le  territoire ,  borné  au 
Nord,  à  rOueft,  Se  à  rEft,par  la  mer,  forme  une  prefqu'ifle^ 
Elle  ofFre  à  la  vue  de  très-beaux  coteaux  ,  fur  lefquels  font  fîtués 
les  moulins  à  vent  du  Chefne  &  d'Anne ,  d'où  l'on  découvre  de 
fort  loin  des  terres  affez  bien  cultivées ,  mais  dont  une  bonne 
partie  eft  couverte  par  les  fables  de  la  mer.  En  1520,  onvoyoit 
dans  cette  Paroiffe  le  Bois-Berard  ,  à  Marguerite  Berard  j  Beau- 
lieu,  à  Jean  de  la  Ville -Hermoifcj  la  Garde,  à  N...  de  Tréal, 
Sieur  de  Beaubois  :  Buzantel ,  au  Sieur  du  Bois-Raiîier  5  Pen- 
guen,  au  Sieur  de  Launay-Gouyonj  Huchegault,  à  Mathurin  de 
Bréhand  j  Beaucorps ,  au  Sieur  de  Beaucorps  -,  &  le  Champ-Ge- 
rault ,  à  Catherine  de  la  Lande, 

Le  3  Septembre  1758,  à  cinq  heures  du  matin,  la  flotte 
Anglaife  ,  compofée  de  cent  neuf  voiles  ,  parut  à  fix  lieues  du 
Cap-Frehel ,  &  ,  à  fix  heures  du  foir ,  elle  vint  mouiller  à  une 
lieue  par  l'Eft  du  château  de  la  Latte.  Le  4 ,  à  dix  heures  du 
matin ,  elle  vint  mouiller  devant  la  baie  de  Saint-Briac  ,  &:  y 
débarqua ,  fans  obftacle  ,  huit  mille  hommes ,  dont  quatre  cents 
Dragons  à  cheval.  L'Infanterie  campa  au  bas  de  la  montagne 
Garde-Guerin  ,  &  les  Dragons  dans  les  villages  voifins.  Quelques 
détachements  de  Dragons,  pour  reconnoître  le  pays ,  s'avancèrent 
jufquà  la  pointe  de  Dinart ,  &  fe  retirèrent  le  foir.  Six  corfaires 
de  Saint-Malo  &  la  frégate  du  Roi,  la  Renoncule  ^  s'embofferent 
devant  Dinart  &  à  l'ouverture  de  la  rade  ,  pour  défendre  aux 
Anglais  l'entrée  de  la  rivière  de  Rance.  On  craignoit  qu'ils  euf- 
fent  deffein  de  venir  par- là  s'emparer  de  la  pointe  de  la  cité,, 
pour  y  établir  des  batteries  &  bombarder  Saint-Malo.  La  nuit 
du  4  au  5 ,  les  Anglais  brûlèrent  vingt-deux  barques  de  pêcheurs 
dans  le  port  de  Saint-Briac.  Le  5  ,  à  quatre  heures  du  matm,  ils 
diviferent  leur  premier  établiffement  en  trois  camps ,  dont  un  fut: 


s  A  I      "  207 

pouffé  jufqu'à  une  demi-lleue  de  la  pointe  de  Dînatt.  Ils  portè- 
rent fur  la  rive  gauche  de  la  rivière  de  Rance  quelques  déta- 
chements d'Infanterie  &  de  Dragons ,  que  le  feu  de  nos  corfaires 
obligea  de  fe  retirer.  Ce  jour-là,  M.  le  Comte  de  la  Tour  d'Au- 
vergne ,  Colonel  du  Régiment  de  Boulonnais ,  qui  étoit  à  Saint- 
Malo ,  ayant  reçu  ordre,  à  midi,  de  faire  fortir  les  Grenadiers 
de  fon  Régiment ,  pour  obferver  la  marche  des  ennemis ,  MM.  le 
Comte  de  Robien  ,  Lieutenant  des  Grenadiers  à  cheval  ;  le 
Marquis  de  Cucé  ,  Sous-Lieutenant  de  la  première  Compagnie 
de  Moufquetaires  ;  le  Comte  du  Bois  de  la  Motte ,  Capitaine  des 
vaifleaux  du  Roi  ;  le  Marquis  de  Montaigu  ,  Colonel  retiré  ; 
Dorey ,  Capitaine  d'Invalides  &  Chevalier  de  Saint-Louis  ;  de 
Narbonne  &  de  Caud ,  Gardes-du-Corps  du  Roi  j  de  Boifeau- 
voyer  &  des  Tullais ,  Moufquetaires  j  de  Kerguezec  ,  de  la 
Cornilliere  ,  de  Montrnuran  ,  de  Scot ,  de  Pont-Fili ,  &  de  Vau- 
couleurs ,  Officiers  de  corfaires ,  Gentilshommes  Bretons ,  qui 
s'étoient  rendus  à  Saint-Malo  de  différents  endroits  de  la  pro- 
vince ,  au  premier  bruit  de  la  defcente ,  fe  joignirent ,  en  qua- 
lité de  Volontaires  ,  à  la  Compagnie  des  Grenadiers  du  Régiment 
de  Boulonnais ,  &  fortirent  avec  elle  de  Saint-Malo.  Cette  Com- 
pagnie fut  occupée  à  obferver  l'ennemi,  à  l'inquiéter  dans  (qs 
marches ,  &  à  faire  la  petite  guerre  jufqu'au  i  o  qu'elle  rejoignit 
fon  Régiment.  Elle  fit  ,  dans  ces  cinq  jours  ,  plufîeurs  prifon- 
niers.  Les  6  &  7  ,  les  troupes  débarquées,  à  l'exception  des 
partis  &  des  détachements ,  réitèrent  dans  le  même  état ,  &  les 
vaifTeaux  ne  remuèrent  que  pour  éviter  les  courants  &  les  mau- 
vais mouillages.  Le  8  ,  à  trois  heures  du  matin ,  les  Anglais  bat- 
tirent la  générale  :  à  fept  heures,  ils  baifferent  leurs  tentes,  & 
relièrent  en  bataille,  à  la  tête  de  leur  camp  ,  jufqu'à  midi,  que, 
fe  reployant  par  leur  droite  ,  ils  allèrent  camper  à  Saint-Jacut , 
appuyant  la  droite  de  leur  nouveau  camp  à  la  rivière  du  Guildo  , 
&  la  gauche  au  marais  Drouet,  M.  le  Duc  d'Aiguillon ,  Com- 
mandant dans  la  province ,  arriva  à  Lamballe ,  d'où  il  envoya 
un  Bataillon  de  Volontaires-Etrangers ,  avec  un  Efcadron  du  Ré- 
giment de  Dragons  de  Marbœuf ,  aux  ordres  de  M.  le  Comte 
d'Aubigni ,  occuper  Dinan,  dont  la  fureté  étoit  importante,  tant 
pour  conferver  la  communication ,  que  parce  que  nous  y  avions 
des  magafins,  &:  que  c'étoit  le  lieu  de  raffemblée  d'une  colonne 
de  nos  troupes.  M.  Rioull  de  Villes-Audrains ,  habitant  de  Ma- 
tignon, informé,  la  nuit  précédente  ,  delà  pofition  des  Anglais, 
raffembla  environ  quatre-vingts  hommes  payfans  &  autres,  &  f e 


xo8  S  AI 

propofa  d'empêcher  les  Anglais  de  pafTer  le  gué  du  Guîldo  :  îî 
pofta  fa  petite  troupe  dans  les  mailbns  du  port  &c  derrière  les 
murs  du  jardin ,  le  long  de  la  rivière ,  qui  fe  trouvoit  alors  à 
fec ,  la  mer  étant  retirée.  Entre  neuf  &  dix  heures  du  matin , 
l'armée  parut ,  &  fe  difpofa  à  palTer  ;  mais  elle  fut  arrêtée  par 
le  feu  vif  &  continuel  de  la  troupe  de  M.  de  Villes-Audrains , 
dont  les  ennemis  ne  connoilToient  pas  la  foiblefTe  :  ils  fe  retirè- 
rent avec  perte.  Vers  les  trois  heures  de  l'après-midi ,  les  Dra- 
gons fe  préfenterent  pour  palTer  à  Quatrevaux  ;  mais  ils  en  furent 
empêchés  par  une  partie  de  cette  petite  troupe  de  braves.  Ils 
£rent  venir  trois  pièces  de  canons ,  &c  tentèrent  encore  inutile- 
ment le  palTage ,  que  le  retour  de  la  marée  rendit  enfin  imprati- 
cable. Ils  fe  repHerent  fur  leur  camp,  en  brûlant  toutes  les  mai- 
fons  du  village  fur  la  rive  droite.  M.  le  Duc  d'Aipuillon  en- 
voya ordre  à  M.  d'Aubigni  de  fe  porter  à  Plouer  avec  le  Ré- 
giment de  Brie  ,  le  premier  Bataillon  des  Volontaires-Etrangers, 
le  Bataillon  de  Marmande  ,  trois  Bataillons  de  Garde-côtes ,  & 
deux  Efcadrons  de  Marbœuf  M.  de  Pohgnac  ,  Colonel  de  Brie , 
qui  fut  tué  dans  le  combat ,  avança  jufqu'à  Pleurtuit  avec  un  fort 
détachement.  M.  de  Béon ,  Lieutenant-Colonel  de  Boulonnais , 
fortit  de  Saint-Malo  avec  un  détachement  de  cinq  cents  hommes, 
pour  fe  porter  fur  Ploubalai  à  la  droite  de  M.  de  Polignac  & 
à  la  gauche  des  ennemis.  Le  lendemain  9 ,  à  la  pointe  du  jour, 
le  feu  recommença  de  part  &  d'autre ,  &  dura  jufqu'à  cinq 
heures  du  foir,  que  les  ennemis  trouvèrent  le  moyen  de  faire 
reconnoître  la  petite  troupe  ,  par  un  efpion  qui  échappa  à  la 
vigilance  de  M.  de  Villes-Audrains.  Les  ennemis  pafTerent  fur  le 
champ  le  Guildo  ,  &  campèrent  entre  Saint-Jeguhel  &  le  Bois- 
Duval.  M.  de  Saint-Pern  fut  détaché ,  pendant  la  nuit ,  avec  fix 
cents  hommes ,  pour  éclairer  leur  marche.  Le  10,  à  quatre 
heures  du  matin ,  les  Anglais  fe  portèrent  à  Matignon  ,  &  y 
établirent  leur  camp.  M.  d'Aubigni  pafTa  le  Guildo  avec  fon  dé- 
tachement ,  &  fut  joint ,  vers  les  deux  heures  après-midi ,  par- 
la Compagnie  des  Grenadiers  de  Boulonnais  &  Le  Corps  de 
Noble fTe  qui  s'y  étoit  incorporé  le  5  a  Saint-Malo ,  par  le  Régi- 
ment de  Boulonnais,  le  Bataillon  de  f  ontenay-le-Comte  ,  &  deux 
Bataillons  de  Garde-côtes.  M.  d'Aubigni  arriva  dans  cet  état  ^  à 
quatre  heures  du  foir ,  fur  les  ennemis ,  par  leur  droite.  Il  parut 
à  toute  fa  divifion  que  c'étoit  le  moment  d'attaquer ,  &  les 
troupes  montroient  le  plus  grand  defir  de  combattre  j,  mais 
M.  d'Aubigni   jugeant  l'ennemi   trop   nombreux ,  n'ayant  point 

d'ordre  y. 


s  A  I  2.09 

d'ordre,  &  ignorant  où  étoit  M.  le  Duc  d'Aiguillon,  qu'il  avoit 
fait  chercher  inutilement  par  M.  de  Laumône  ,  Gentilhomme  Vo- 
lontaire  qui    connoiffoit    le  pays  ,    il    étabUt    fes    troupes    par 
échelons   dans  les  champs  à  droite  &  à  gauche  du  grand  chemin, 
&  fe  repha ,  dans  cet  ordre  ,  fur  la  droite  de  Samt  -  Potan ,  où 
il  paffa  la  nuit.  M.  le  Duc  d'Aiguillon  y  arriva  le  foir  ;  &  M.  de 
Broc ,  avec  un  détachement  de  trois  cents  hommes ,   fut  chargé 
d'inquiéter  les  polîes  avancés  des   ennemis ,   Se   d'éclairer    leurs 
mouvements  pendant  la  nuit.   Le    11,    à  fix  heures  du  matin  , 
M.  de  Broc  rendit  compte  de  fa  nuit  à  M.  le  Duc  d'Aiguillon , 
&  l'informa   que  les  ennemis  avoient   commencé  leur   retraite , 
&  qu'ils  travailloient   au   rembarquement  de  leurs  troupes  dans 
l'anfe  de  Saint-Caft.  Sur  le  champ,  la  colonne  de  M.  d'Aubigni 
fe  mit  en  marche  ,  &c  arriva,   en  courant,  fur  les    hauteurs    de 
Saint-Call.  La  flotte   ennemie  étoit  en  hgne  ,  &   les  chaloupes 
travailloient   au  rembarquement.    L'arriére  -  garde    des   ennemis  , 
compofée  de   trois   mille   hommes,  étoit   fur  la  plage,  dans    le 
fond  de  l'anfe ,  préfentant  le  plus  bel  ordre  de  bataille ,  derrière 
des  retranchements  de  trois  pieds  d'élévation.  Dès  que  notre  In- 
fanterie fut  apperçue  fur   la  montagne  ,  fept   frégates  &  quatre 
bombardieres ,  emboffées  tout  près  des  terres,  commencèrent  un 
feu  très-vif.  Nos  troupes  refterent  en  bataille ,  dans  cet  endroit, 
environ   une  demi-heure  ,   tandis    qu'on  preflbit  la  marche    des 
canons  qui  fuivoient  nos  Régiments.   Huit  de  ces  canons  arrivè- 
rent &  furent  fur  le  champ  mis   en  batterie ,  &  commandés  avec 
la  promptitude  &  la   valeur  qui    caraftériient    M.  de   la  Ville- 
Patour ,  aujourd'hui  ïnfpefteur  général    du  Corps  royal  d'Artil- 
lerie ,   Maréchal   de  Camp  ,    Grand-Croix  de  l'Ordre   de  Saint- 
Louis.  Cet  illullre  Officier  fçut ,  par  fon  feu ,  retenir  dans  leurs 
retranchements  les   ennemis,  qui  parurent  vouloir  fe   former   en 
colonne    par  leur    centre  ,  &  marcher   à  nous  fur   la  grève.  Ils 
dévoient  être  attaqués ,   en  même  temps ,  par  la   droite  ,  par  la 
gauche  ,  &  par  le    centre.  C'étoit ,  dit-on ,  le  plan   de    M.    le 
Duc  d'Aiguillon  ;  mais ,  foit  que  M.  d'Aubigni  jugeât  la  colonne 
capable  d'enfoncer   celle  des  ennemis  ,    ou   qu'il    craignît  qu'ils. 
ne  fe   rembarquaffent ,  à    notre  barbe  ,  fans  combattre  ,  comme 
ils  avoient  fait,  trois  mois  auparavant,  à  Cancalle,   il   n'y   eut- 
que  la    colonne   gauche,  qu'il  commandoit  ,  à  charger.  Rendue, 
vers  les  dix  heures  du  matin ,  au  village   du  Ros ,  par  un  petit 
chemin  coupé  derrière  la  montagne ,  la  tête  fit  une   halte  d'en- 
viron  un  quart  d'heure ,  pour  donner  le  temps  à  la   queue    de 
Tome  IV.  D  2 


2,10  S  A  I 

joindre.  M.  cfAubigni  arriva  &  commanda  de  marcher.  La  tète 
de  cette  colonne  étoit  compofée ,  fur  la  gauche  ,  d'une  Compagnie 
de  Grenadiers  des  Volontaires-Etrangers  -,  au  centre ,  de  douze 
à  quinze  Officiers  &  Gentilshommes  Bretons ,  faifant  le  premier 
rang  de  la  Compagnie  des  Grenadiers  de  Boulonnais  ;  &  fur  la 
droite ,  les  Grenadiers  de  Brie.  Ceux  de  Boulonnais  débouchè- 
rent les  premiers  du  village,  par  un  défilé  qui  comportoit  à 
peine  quatre  hommes  de  front.  Ils  effuyerent  des  vaifTeaux 
emboffés  un  feu  particulièrement  dirigé  fur  ce  débouché.  Ils 
gagnèrent ,  en  courant  environ  trente  pas ,  une  petite  dune , 
derrière  laquelle  ils  fe  formèrent  &  dont  ils  s'épaulèrent  pendant 
trois  à  quatre  minutes ,  ne  jugeant  pas  qu'il  fût  poffible  de  fran- 
chir près  d'une  demi- lieue  de  grève  plate  ,  prefque  fous  les 
vaiiTeaux,  pour  aller  attaquer  l'ennemi.  Dans  cet  endroit  & 
dans  ce  moment  ,  M.  le  Marquis  de  Cucé  reçut  un  coup  de 
fufil  à  l'épaule,  dont  il  mourut;  M.  le  Marquis  de  Montaigu, 
un  coup  de  fufil  à  la  jambe ,  dont  il  mourut  ;  M.  de  Narbonne , 
un  coup  de  fufil  au  travers  de  la  cuifiTe  ;  M.  le  Comte  d'Au- 
vergne fut  renverfé  de  trois  coups  de  fufil ,  dont  un  lui  cafToit 
les  reins  &  un  autre  le  genou  ,  ce  qui  ne  l'empêchoit  pas  d'en- 
courager fes  Grenadiers  avec  une  gaieté  Se  des  expreffions  dont 
lui  feul  eft  capable  dans  de  femblables  moments.  Prefque  tous 
les  Officiers  des  Grenadiers  avoient  été  dangereufement  bleflTés, 
&  la  Compagnie  ne  marchoit  pas.  M.  d'Aubigni  ,  qui  donna, 
par  habitude  ,  des  preuves  de  la  plus  grande  valeur  &  de  la 
plus  ferme  intrépidité,  accourut  aux  Gentilshommes  Volontaires, 
qui  faifoient  le  front  de  l'attaque  :  Allons ,  Mefjieurs ,  leur  dit-il , 
dojijiei  l'exemple  à  ces  gens-là.  Sur  le  champ ,  les  Volontaires 
partent  &  courent  de  toutes  leurs  forces  aux  retranchements.  Ils 
font  accompagnés  des  Grenadiers  de  Boulonnais ,  qui  fe  mêlent 
avec  eux  ,  en  courant  à  toutes  jambes  ,  fous  le  feu  continuel  de 
l'artillerie  &  de  la  moufqueterie  des  vailTeaux ,  &  en  efiîiyant 
cinq  décharges  de  la  moufqueterie  de  terre.  On  arriva  à  vingt 
pas  des  retranchements.  Les  Volontaires  &  les  trois  Compagnies 
de  Grenadiers  qui  faifoient  le  front  de  l'attaque ,  déjà  confidé- 
rablement  entamés  ,  ne  pouvant  attendre ,  dans  une  pofition  fi 
défavantageufe,  la  colonne  à  peine  fortie  du  débouché  ,, em- 
ployèrent leur  feu,  qu'ils  avoient  confervé  jufques-là,  &  fe  mi- 
rent à  pouffer  unanimement,  de  toutes  leurs  forces,  les  cris  de 
ViUoire ,  Vive  le  Roi ,  en  courant,  aux  retranchements  avec  les 
bayonnettes.  Cette  valeur ,  dont  il  n'y  a  pas  d'exemple ,  puifqu'à 


SAI  iir 

peine  étoient-ils  trois  cents  hommes  raflemblés ,  &  qu'ils  arrivoient 
par  deux ,  par  trois ,  à  toutes  jambes  &  fans  ordre ,  épouvanta 
l'ennemi  &  lui  fit  prendre  la  fuite.  A  l'exception  de  quelques 
foldats ,  qui  défendirent  pendant  quelques  moments  l'entrée  des 
retranchements  à  coups  de  bayonnettes  ,  chacun  jetta  fes  armes  , 
en  criant  ,  Mijérkorde ,  brave  France  y  &  chacun  chercha  à  fe 
fauver,  foit  en  gagnant  la  pointe  de  l'anfé  oii  étoient  les  cha- 
loupes ,  foit  en  fe  jettant  dans  la  mer  pour  fe  rendre  aux  vaiffeaux 
à  la  nage.  M.  le  Chevalier  de  Caud  ,  qui  reçut ,  dans  cette 
occafion,  un  coup  de  bayonnctte  à  la  cuifTe  &  une  bleffure  à 
la  tête ,  entré  un  des  premiers  dans  les  retranchements ,  appella 
les  étendards.  11  fe  fervit ,  par  habitude  ,  de  cette  expreflion 
propre  à  la  Cavalerie  ,  &  elle  fut  répétée  par  le  cri  de  pajfc 
parole ,  dans  toute  la  colonne  ,  quoiqu'il  n'y  eût  que  de  l'Infan- 
terie. Les  ennemis  ,  qui  n'a  voient  pu  fortir  des  retranchements, 
y  étoient  à  genoux ,  fe  couvrant  de  chapelets  ,  &  criant ,  miféri- 
corde;  mais,  comme  le  feu  continuoit  des  vaiffeaux  qui  tiroient 
dans  ce  moment  à  mitraille  ,  &  nous  tuoient  beaucoup  de  monde, 
le  foldat ,  furieux ,  ne  fit  guère  de  quartier  dans  le  commencement; 
&  il  y  a  grande  apparence  qu'il  auroit  fini  de  même ,  {i  M.  d'Au- 
bigni ,  qui  conferva  toujours  fur  la  gauche  la  hauteur  de  notre 
première  hgne,  ne  fe  fût  porté  par-tout,  avec  autant  de  valeur 
que  d'humanité ,  pour  arrêter  la  rage  des  vainqueurs ,  faire  ceffer 
le  feu ,  &  ordonner  qu'on  fît  des  prifonniers;  Les  Officiers  & 
foldats  entroient  dans  la  mer  jufqu'à  la  gorge  pour  arrêter  les 
ennemis  qui  cherchoient  à  fe  fauver ,  ou  gravilloient  après  eux 
fur  les  rochers.  De  trois  mille  Anglais  qui  étoient  à  terre,  au- 
cun ne  regagna  les  vaiffeaux  y  mille  à  douze  cents-  furent  tués 
fur  la  place,  huit  cents  périrent  dans  l'eau  ,  &  le  refle,  dont 
trente  Officiers  de  remarque  ,  fut  fait  prifonnier.  Quatorze 
Compagnies  de  Grenadiers  ,  de  mille  hommes  chacune  ,  & 
deux  Bataillons  des  Gardes  à  pied  du  Roi  d'Angleterre,  l'élite 
des  troupes  de  cette  nation,  furent  défaits  dans  ce  combat  ,  où 
les  troupes  Françaifés  donnèrent  les  plus  grandes  preuves  de 
valeur,  &  où  la  Noblefîé  Bretonne  fignala  fon  zèle  ordinaire 
pour  le  fervice  du  Roi  &  la  défenfc  de  la  patrie.  Le  feu  finit  à 
une  heure  après-midi.  Les  troupes  fe  formèrent  fur  la  montagne, 
&  M.  le  Duc  d'Aiguillon  leur  envoya  ordre  de  rentrer  fur  le 
champ  dans  leurs  quartiers,  laiffant  feulement  fix  cents  hommes 
pour  enterrer  les  morts  8c  pour  obferver  la  flotte.  Telle  fut 
i'iflùe  du    combat  de  Saint  -  Cafl  ,    qui    fit    tant    d'honneur    au 


iii  SAI 

Commandant  de  la  province.  Le  peuple  étoit  dans  renthouiiafme; 
&  les  poètes  Bretons  s'emprefferent  de  célébrer  cette  viftoire 
par  des  pièces  de  poéfîes ,  dont  quelques-unes  font  l'éloge  de 
leurs  auteurs.  Non-feulement  la  Noblefle  Bretonne  montra ,  dans 
cette  occafion,  qu'elle  n'avoit  point  dégénéré  de  la  valeur  de 
fes  ancêtres ,  &  de  fon  zèle  pour  la  défenfe  de  fon  pays ,  mais 
tous  les  citoyens ,  en  général ,  prouvèrent  qu'ils  étoient  prêts  à 
facrifier  leurs  vies  à  l'intérêt  de  la  patrie.  On  a  confervé  les 
noms  de  plufieurs  de  ceux  qui  s'y  trouvèrent  ;  &  ils  méritent 
d'être  tranfmis  à  la  poftérité.  Les  voici  :  MM.  le  Baron  de 
Pontual  ;  Grou,  père  &  fils;  Beauvais ,  né  à  Rennes,  &  Pro- 
cureur à  Saint-Malo  ,  (  il  mourut  de  fa  bleffure ,  le  6  Oftobre 
1758;  )  de  Quelent  ,  Exempt  des  Gardes  du  Roi;  de  la  Bli- 
naye ,  Officier  au  Régiment  de  la  Reine  ,  Dragons  ;  de  la  Bli- 
naye  ,  Sous-Lieutenant  au  Régiment  des  Gardes-Françaifes  -,  du 
Bois-Geflin ,  de  la  Baronnais,  Baudran  de  Maupertuis,  Bédé  de 
la  Boëtardais ,  de  Bois-Hardi,  le  Chevalier  de  Bois-Huè  ;  de  la 
Bretonniere  ,  (  il  fut  blefîé  ;  )  de  Caflan ,  de  Chateaubriand ,  de 
CGueffin  ,  de  Bart  de  la  Ville-Tanet ,  Ferron  du  Chêne  ,  le 
Gobien ,  de  la  Goublais ,  de  Langegu ,  de  Langourla-Sanglois , 
de  Sceaux  ,  de  Trouffier  ,  de  la  Ville-Esbrune  -,  Duvantion ,  (  il 
fut  tué;  )  du  Champ-Millet,  Loquet  du  Château  d'Acy,  Magon 
de  la  Ville-Huchet ,  Carlac  de  Saint-Pere ,  (  il  fut  tué  ;  )  de  la 
Ville-Saint-Germain ,  de  la  Villéon  ;  de  la  Ville-Valio ,.  fils ,  au- 
jourd'hui Chevalier  de  Saint-Louis  j  la  Motte  deLefnagé,  Nouail 
de  la  Ville-Gille  ,  Saint-Pern  du  Lattai ,  de  la  Motte  Villes- 
Comte  ,  le  Chevalier  de  Prémorvan ,  de  la  Planche  ;  des  Landes- 
Daniel ,  bourgeois  de  Saint-Malo  ;  de  la  Barre,  du  Rocher-Nodé, 
Saint-Pern-Ligouyer  ,  Menard  ,  du  Rocher,  du  Bois-Bollan; Minet, 
frères  ;  Quêtier,  fils  ;  de  l'Aulne  ,  ancien  Officier  de  corfaire  ;  &  Davy 
de  Villée  ,  Procureur  à  Rennes.  L'aflemblée  des  Etats  de  Bretagne, 
deux  mois  après ,  récompenfa  ,  par  des  penfions ,  la  conduite 
de  MM.  de  Caud  &  de  Narbonne.  Il  y  eut  trois  autres  Volon- 
taires penfionnés ,  dont  on  ne  fe  rappelle  pas  les  noms.  L'affem- 
blée  demanda  des  lettres  de  noblefle  pour  M.  Soyer  de  Vau- 
couleurs  ,  auffi  Volontaire.  Le  Roi  accorda  des  penfions  ,  la 
commiffion  de  Capitaine  ,  &  la  Croix  de  Saint-Louis ,  à  MM.  de 
Narbonne  ,  Boifeauvoyer  ,  des  TuUais  ,  &  de  Caud  ,  quoique 
ce  dernier  n'eût  que  trois  ans  de  fervice  dans  les  Gardes  du 
Roi.  Le  Chapitre  de  Saint-Malo  fonda  un  Service  folemnel, 
à  perpétuité ,  pour  le  repos  des  âmes  des   Officiers   &  foldats 


s  A  I  iij 

Français  tués    à  Saint -Caft  :  cette   fondation  efl  dîgfte   de   re- 
marque ,   &  fait  honneur  à  ce  Corps    eccléfiaftique. 


route 

fon  Evêché  &  fon  reflbrt  j  &  à  3  lieues  de  Vitré  ,  fa  Subdélégî 
tion.  On  y  compte  300  communiants  :  la  Cure  eft  préfentée 
par  l'Abbé  de  Saint-Florent  de  Saumur.  En  1630,  deux  Moines 
de  cette  Maifon  y  faifoient  encore  les  fondions  curiales.  Le 
territoire  offre  à  la  vue  des  coteaux ,  un  étang  très-étendu ,  près 
le  bourg  ;  des  terres  affez  bien  cultivées ,  &  beaucoup  d'arbres. 
Il  elt  environné  de  landes  qui  ,  je  crois  ,  ne  font  pas  dans 
fon  enceinte.  Les  hautes-Juftices  de  Malnoë  &  de  la  Ronce , 
appartiennent  à  M.  de  Farci  de  la  Ville-du-Bois. 

SAINT-CHRISTOPHE- DE- VALAINS;  à  7  lieues  au  Nord- 
Nord-Elt  de  Rennes ,  fon  Evêché  ;  &  à  2  lieues  &  demie  de 
Saint-Aubin-du-Cormier ,  fa  Subdélégation  &  fon  reffort.  Cette 
Paroiffe  relevé  du  Roi,  &  compte  200  communiants  :  la  Cure 
eft  préfentée  par  l'Abbé  de  Rillé.  Le  territoire,  coupé  par  les 
rivières  de  Couefnon  &  de  Minette  ,  eft  peu  étendu.  Les  terres 
produifent  du  grain  ,  du  foin  ,  &  du  cidre  j  on  y  voit  peu 
de  landes. 

SAINT  -  COLOMBIN  -,  dans  les  baffes  Marches  ;  à  5  lieues 
au  Sud  de  Nantes ,  fon  Evêché  &  fon  reffort  j  à  27  lieues  de 
Rennes  ;  8c  à  5  lieues  un  quart  de  Cliffon ,  fa  Subdélégation., 
On  y  compte  1 200  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  M.  le 
Prince  de  Soubife  en  eft  le  Seigneur.  Le  territoire ,  dont  la  fu- 
perficie  eft  plane ,  offre  à  la  vue  des  terres  bien  cultivées  ,  des 
prairies  ,  des  vignes ,  &  beaucoup  de  landes,  dont  le  fol  excellent 
paroît  mériter  les  foins  du  cultivateur.  En  1500,  les  maifons 
nobles  de  Beffon  &  la  Rouliere  appartenoient  à  Jean  de  la  Tri- 
bouille.  Les  droits  de  péages,  prétendus  par  les  Abbé,  Prieur, 
ôc  Moines  de  Genefton ,  fur  le  Pont  -  James  ,  fitué  fur  la  ri- 
vière de  Boulogne ,  furent  fupprimés  par  Arrêt  du  Confcil ,  du 
8  Mars  1729. 

SAINT-CONGAR  ;  dans  un  fond  ;  à  8  lieues  à  l'Eft-Nord- 
Eft  de  Vannes ,  fon  Evêché  j  à  1 3  lieues  de  Rennes  j  &  à  i 
lieue  &  demie  de  Maleftroit ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe 


214  SAI 

refTortit  à  Ploermel ,  &  compte  600  communiants  :  la  Cure  efî 
à  l'alternative.  Le  territoire  renferme  quelques  terres  labourables, 
beaucoup  de  landes  -,  Ôc  un  Couvent  de  Camaldules ,  fondé ,  l'an 
i6ji,  par  Henri  de  Guenegaud ,  Marquis  de  Plancy.  La  maifon 
noble  de  Brignac  appartenoit,  en  1480,  au  Sieur  Decaftelan  j, 
&  celle  de  Billic ,  à  N. ...  :  la  moyenne  -  Juftice  de  Beflée  6c 
annexe,  appartient  à  Madame  de  Boyac. 

SAINT-COULIT  ^  à  3  lieues  &  demie  au  Nord  de  Quimper ,. 
fon  Evêché  ;  à  38  lieues  de  Rennes  j  &  à  trois  quarts  de  lieue 
de  Châteaulin  ,  fa  Subdélégation  &  fon  reflbrt.  Cette  ParoifTe 
relevé  du  Roi,  &  compte  500  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'al- 
ternative. Le  territoire ,  coupé  au  Nord  par  la  rivière  d'Aulne ,, 
offre  à  la  vue  ,  dans  cette  partie  ,  des  terres  fertiles  &  bien 
cultivées  j  mais  au  Sud ,  font  des  montagnes  &  des  landes  dont 
la  valeur  eft  prefque  nulle. 

SAINT-COULOMB  ;  à  4  lieues  au  Nord-Oueft  de  Dol ,  fon^ 
Evêché  ;  à  1 4  lieues  de  Rennes  j  &  à  2  lieues  de  Saint-Malo , 
fa  Subdélégation.  Cette  ParoifTe,  qui  eft  enclavée  dans  le  diocefe 
de  Saint-Malo,  reffortit  à  Dinan,  &  compte  1400  communiants: 
la  Cure  eil  à  l'Ordinaire.  Le  territoire ,  borné  au  Nord  par  la 
mer,  offre  à  la  vue  des  coteaux,  des  vallons  coupés  de  ruif- 
feaux  qui  vont  fe  perdre  dans  la  mer ,  des  terres  très-exaftement 
cultivées.  L'an  1026,  Bertrand,  premier  du  nom,  &  un  des 
ayeux  de  Bertrand  du  Guefclin ,  acheta  la  Seigneurie  de  Saint- 
Coulomb.  Le  château  de  Guarphc  ou  du  Guefclin  ,  fitué  fur 
un  rocher  ,  à  quelques  dillances  dans  la  mer ,  fut  bâti ,  l'an  1 160,. 
par  Bertrand  II,  dit  le  Jeune  ,  qui  venoit  de  quitter  le  châ- 
teau Richeux ,  qu'il  habitoit  dans  la  ParoifTe  de  Saint  -  Meloir. 
Dans  le  même  territoire  de  Saint  -  Coulomb  ,  étoit  un  autre  châ- 
teau ,  place  forte,  nommé  le  Plejfis- Bertrand,  L'an  1207,  les 
partifans  du  Roi  d'Angleterre  fortifièrent  le  château  de  Guarplic 
ou  du  Guefclin  ;  &  les  Anglais  vinrent  en  prendre  poffefTion  au 
nom  de  leur  Maître.  Ce  Monarque  étoit  fâché  du  mariage  d'Ahx 
de  Bretagne  avec  le  Duc  Pierre  de  Dreux  ,  &  il  fe  rendit 
maître  de  plufieurs  places  du  Duché  :  il  ne  fut  pas  long -temps 
polTefTeur  du  château  du  GuefcHn ,  le  Roi  Philippe  le  fit  afîiéger 
par  le  Comte  de  Saint-Pol ,  qui  en  chafTa  les  Anglais.  Le  châ- 
teau du  Hindré  appartenoit ,  dans  le  même  temps ,  au  Seigneur 
du   Guefclin.    En   1230,  Henri   d'Avaugour  prêta  ferment    de 


s  A  I  115 

fidélité  au  Roi  Louis  IX,  pour  la  garde  du  château  du  Guefclin, 
qui,  en  1500,  appartenoit  à  Guillaume  de  Chateaubriand.  Ce 
Seigneur  polTédoit  auffi  la  Terre  de  Beaufort.  En  1589,  Dame 
Charlotte  de  Montgommeri ,  Douairière  de  Beaufort ,  vendit  à 
Gui  de  Rieux,  Seigneur  de  Châteauneuf,  la-  Terre  du  Plefîis- 
Bertrand  avec  toutes  fes  dépendances  ,  &  l'emplacement  du 
château  du  Guefclin ,  qui  venoit  d'être  démoli  par  ordre  du 
Roi  Henri  III.  La  Terre  du  Pleffis  -  Bertrand  fut  érigée  en 
Comté,  au  mois  de  Juin  1702,  en  faveur  de  Jacques  -  Louis 
Beringhem. 

La  Terre  &  Seigneurie  de  la  Motte- au -Chauf  efl  aufli  très- 
ancienne.  Hervé  le  Chauf,  né  en  1030,  Chevalier,  Seigneur  de 
la  Motte -au -Chauf,  époufa  Adélaïde  de  Lohéac.  Les  Seigneurs 
de  ce  nom  ont  pris  des  alliances  dans  les  maifons  de  Khuis  , 
de  Châteauneuf,  de  CHfTon ,  &  de  Derval.  Charles  le  Chauf, 
Grand-Chambellan  &  Capitaine  de  la  ville  de  Rennes  ,  figna 
le  traité  fait,  en  1427,  entre  le  Duc  de  Bretagne  &  le  Comte 
de  Belfort ,  &  époufa  Jeanne  de  Château-d'Acy .  Alain  fut  Grand- 
Sénéchal  &  Gouverneur  de  Lamballe  :  Catherine  le  Chauf  vendit, 
en  1658  ,  la  Terre  de  la  Motte-au-Chauf,  avec  moyenne-Juf- 
tice  qui  s'exerce  à  Cancalle ,  à  N....  Grou  de  la  Ville-Jaquin  ; 
elle  appartient  actuellement  à  M.  Grou  de  la  Motte.  L'ancienne 
&  illultre  famille  des  Chauf  fubfifte  encore  aftuellement 
dans  la  perfonne  de  M.  le  Chauf ,  demeurant  à  Guérande. 
En  1500,  on  voyoit,  dans  le  même  territoire,  les  maifons 
nobles  de  Bouais ,  du  Cartier ,  de  la  Ville-Galbrun ,  du  Vieux- 
Châtel  ,  de  la  Motte-Jean ,  de  la  Foffe-Hingant ,  &  de  Saint* 
Thomas. 

SAINT-CYR  ;  à  8  lieues  au  Sud-Ouefl  de  Nantes ,  fon  Eve- 
ché&  fon  reffbrt  ;  à  30  Heues  &  demie  de  Rennes;  &  à  i 
lieue  de  Bourgneuf,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  1 100  com- 
muniants :  la  Cure  eft  un  Vicariat  amovible  ,  dépendant  de  la 
Cure  de  Bourgneuf.  Le  territoire,  borné  à  l'Oueft  par  la  mer, 
produit  du  grain  de  toutes  efpeces  &  du  vin.  Autrefois  il  y 
avoit  beaucoup  de  marais  falants  dans  ce  canton ,  mais  à  pre- 
fent  que  la  mer  perd  de  ce  côté  ,  les  falines  diminuent  tous  les  ans. 
En  1 3  1 2  ,  Daniel  ,  Evéque  de  Nantes ,  s'étant  plaint  au  Pape 
Clément  V  que  fon  Eveché  ne  valoit  que  mille  quarante  livres 
petit  tournois  de  revenu  annuel;  le  Pontife  lui  permit ,  par  une 
Bulle  donnée  à  raifon  ,  d'unir  la  Paroifle  de  Saint-Cyr  à  la  Menle 


2i6  s  A  I 

épifc opale.  La  baffe- Juftice  de  la  Touche-Gerbaud  appartientà 
Mademoiielle  Montaudouin. 

SAINT-DENOUAL  ;  à  6  lieues  à  l'Eft  de  Saint-Brieuc ,  fou 
Evêché  ;  à  1 5  lieues  de  Rennes  j  &  à  2  lieues  un  quart  de 
Lamballe  ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  reffortit  à  Jugon , 
&  compte  350  communiants.  Le  territoire  eft  coupé  par  deux 
grands  chemins  qui  conduifent  de  Saint-Malo  à  Lamballe  :  on  y 
voit  des  terres  labourables  ,  quelques  prairies  ,  des  landes ,  & 
quelques  arbres  &  buiffons.  La  Terre  &  Seigneurie  de  Saint- 
Denoual  a  titre  de  Vicomte  -,  elle  appartenoit ,  en  1 440 ,  à 
Pierre  de  Saint-Denoual.  Le  13  Août  1482,  le  Duc  François  îï 
fit  remife  à  Olivier  ,  Chevalier ,  Seigneur  de  Saint-Denoual ,  du 
rachat  de  cette  Terre,  dont  il  hérita  par  la  mort  de  Jean  de 
Saint-Denoual,  fon  oncle.  En  1667,  Amauri- Charles  de  la 
Mouffaye  étoit  Vicomte  de  Saint-Denoual.  Cette  Seigneurie  a 
haute-Juflice ,  &  appartient  à  M.  de  la  Mouffaye ,  qui  poffede 
auffi  les  hautes-Juftices  de  Saint-Quetas  ,  de  Henan ,  Châtellenie  , 
&  de  Langourian.  Au  commencement  du  quinzième  fiecle  ,  on 
connoiffoit  dans  le  territoire  les  maifons  nobles  nommées  la 
Touche-aux-Louis ,  à  Pierre  de  Saint-Denoual  ;  la  Gourhandais ,. 
à  Jean  de  Guérande  j  la  Guymaye  ,  à  Gilles  l'Effanchu  j 
le  Parc  -  Guéri ,  à  André  Rivalen  5  &  le  Bignon  ,  à  André: 
Maupetit.  , 

SAINT -DIDIER;  à  4  lieues  &  demie  à  FElt  de  Rennes,, 
fon  Evêché  &  fon  reffort  ;  &  à  3  Ueues  un  tiers  de  Vitré ,  fa 
Subdélégation.  On  y  compte  900  communiants  :  la  Cure  eft 
préfentée  par  l'Abbé  de  Saint- Melaine.  Le  territoire  eff  coupé,, 
au  Nord  de  fon  bourg ,  par  la  rivière  de  Vilaine ,  &  de  plu- 
fieurs  ruiffeaux  qui  arrofent  de  bonnes  prairies  :  les  terres  font 
très-exa^lement  cultivées ,  &  produifent  du  grain  &  du  cidre* 
Les  auteurs  de  la  vie  des  Saints  de  Bretagne  ,  difent  que  Saint. 
Goulven  ,  fixieme  Evêque  de  Saint- Pol- de- Léon  ,  quitta  fon» 
Siège  ,  quelques  années  avant  fa  mort  ^  pour  fe  retirer  dans  une 
folitude ,  au  territoire  de  Saint  -  Didier  j  qu'il  y  bâtit  un  petit 
Oratoire,  dans'  lequel  il  mourut;  &  que  c'eff  précifément  dans 
cet  endroit  que  l'on  plaça  l'EgUfe  paroiffiale  de  Saint  -  Didier , 
dans  laquelle  on  dépofa  les  ReUques  de  Saint  Goulven.  En  1300^ 
Béatrix  de  Bourgogne  ,  Comteffe  de  la  Marche  &  d'Angoulême ,, 
poffédoit  un  château  très-fort  à  Saint-Didier..  Les  maifons  nobles, 

de 


s    AI  txy 

He  ce  territoire  font  aujourd'hui ,  la  Rocherie ,  le  Val-Marîon  ,  Se 
le  château  du  Pleffis-Raffré  ,  fitué  au  bord  d'un  étang ,  dont  les 
eaux  remphlTent  fes  foliés  :  cette  place  a  foutenu  des  fieges 
pendant  les  guerres  de  la  Ligue.  La  haute-Jullice  de  Meneui 
appartient  à  M.  de  Cucé. 

SAINT-DOLAY  ;  à  1 3  lieues  au  Nord-Ouefl  de  Nantes ,  fou 
Evêché  &  fon  refTort  ;  à  1 6  lieues  de  Rennes  j  &  à  2  lieues 
un  tiers  de  la  Rochebernard  ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte 
1700  communiants  :  la  Cure  eil  à  l'Ordinaire.  On  affure  qu'elle 
eft  la  meilleure  du  Comté  Nantais ,  & ,  en  ce  cas  ,  on  peut  éva- 
luer fes  revenus  à  quinze  ou  feize  mille  livres.  M.  le  Marquis 
de  Cucé  eil  Seigneur  de  l'endroit.  Le  territoire  offre  à  la  vue  des 
vallons ,  des  coteaux  ,  des  terres  en  labeur  ,  des  bois  ,  &  une 
prodigieufe  quantité  de  landes ,  au  miheu  de  l'une  defquelles  eil 
un  bois  de  haute-futaie ,  peu  confîdérable ,  que  l'on  nomme  U 
bois  de  la  Table- ronde.  M,  du  Cange  dit  que  la  Table -ronde 
étoit  une  joute  ou  combat  fingulier ,  &  que  les  combattants  al- 
loient  fouper  chez  celui  qui  avoir  donné  la  ïète ,  où  ils  étoient 
afîls  à  une  table  ronde.  Les  hifforiens  Bretons  affurent  que  ce  fut 
Artur,  Roi  ou  Duc  de  Bretagne  ,  qui  inventa  les  tournois  ,  la  joute, 
&  la  Table-ronde.  Ce  fait  n'elt  pas  prouvé ,  &  peut-être  n'ell-il 
pas  probable.  XJn.  zèle  inconfidéré  pour  la  gloire  de  leur  patrie  ,  a 
îbuvent  porté  les  écrivains  à  inventer  des  menfonges  &  à  trahir 
la  vérité  :  ils  ne  réfléchiiïbient  pas ,  fans  doute  ,  que  des  fables 
ne  font  jamais  que  des  fables  ,  &  que  ce  qu'on  ne  peut  prouver  ne 
doit  pas  être  avancé.  Les  Anglais ,  par  un  principe  aulli  ridicule  , 
&  fur  des  motifs  auffi  peu  tondes,  prétendent  que  la  première 
Table-ronde  qui  ait  parue ,  &  qui  a  donné  fon  nom  à  toutes  les 
autres ,  eft  celle  qui  eil  attachée  à  un  mur  de  l'antique  château 
de  Winchefter.  Quoi  qu'il  en  foit ,  le  Bois  dont  je  viens  de 
parler  porte  le  nom  de  Table-ronde  ;  mais  je  n'ai  remarqué  aux 
environs  aucuns  vciligcs  d'anciens  bâtiments.  En  1 400 ,  les  mai- 
fons  nobles  de  l'endroit  étoient  :  le  Cleyo  ,  à  Jean  Bezit  de 
LefquilUou  ;  la  Coudraye  ,  à  Pierre  de  la  Grenaudaye  i  l'Armor, 
au  "seigneur  de  Mareil  ;  &  Cadouzan  ,  à  Jacques  du  Bezit  : 
la  raaifon  noble  du  PleiTis  eil  plus  moderne  ,  elle  fut  bâtie  en- 
viron l'an  1430,  &  elle  appartenoit ,  en  1480,  à  Gilles  du 
Guel'clin ,  parent  du  Connétable  ;  elle  appartient  aftucllement  à 
M.  le  Duc  de  Gêvres,  qui  a  époulé  l'héritière  de  cette  illuilre 
famille  :  elle  forme,  avec  celle  de  Fai^  une  moyenne -Juilice. 
Tome  IV,  E  z 

/ 


ii8  SA! 

M.  de  BegafTon  de  la  Lardais  pofTede  la  moyenne  -  Jufllce  de 
la  Frefnai ,  de  Mareil ,  &  annexes.  Dans  la  même  Paroiffe  font 
deux  Chapelles  ,  l'une  dédiée  à  Sainte  Anne ,  &  l'autre  à  Sainte 
Lienne, 

SAINT-DOMINEUC  ;  fur  la  route  de  Rennes  à  Saint-Malo  5 
à  7  lieues  au  Sud-Sud-Eft  de  Saint-Malo,  fon  Evêché  5  à  7 
lieues  de  Rennes  ;  &  à  2  lieues  de  Hédé ,  fa  Subdélégation^ 
Cette  Paroifle  reffortit  à  Dinan ,  &  compte  900  communiants: 
la  Cure  eft  préfentée  par  l'AbbelTe  de  Saint-Georges  de  Rennes. 
Le  territoire  ,  aflez  bien  cultivé  &  couvert  d'arbres  &  buiffons, 
produit  du  grain,  du  foin,  &  du  cidre. 

SAINT  -  DONAN  -,  fur  une  hauteur  ;  à  2  lieues  un  tiers  à 
rOueft-Sud'Oueft  de  Saint-Brieuc ,  fon  Evêché  Se  fon  reiïbrt  j 
à  2 1  Heues  de  Rennes  5  &  à  2  Heues  de  Quintin  ,  fa  Subdélé- 
gation. On  y  compte  2000  communiants  :  la  Cure  eft  à  Tal- 
ternative.  Le  territoire  eft  coupé  de  ruiffeaux  qui  coulent  dans 
les  vallons ,  &  qui  vont  tomber  dans  la  rivière  de  Gaël.  On  y 
voit  des  terres  en  labeur ,  des  prairies ,  des  landes  ,  &  beau- 
coup d'arbres  à  fruits.  Les  maifons  nobles  ,  en  1500  ,  étoient  : 
le  Rufflai,  à  Triilan  du  Rufïlai  ;  elle  a  moyenne -Juftice  ,  & 
appartient  à  M.  du  Port-Martin,  Seigneur  de  la  ParoifTe  :  la 
Villeroux ,  la  Terre-Neuve ,  &  le  Billet ,  à  Jean  du  Rufïlai  ;  le 
Four-Janvier,  à  Louife  du  Lifcouet  ;  la  Follevilie  ,  à  Jean  Boi- 
zart  5  la  Ville-Boutier ,  à  Gilles  le  Gafcoing  j  Flfle-Milon  ,  à  Syl- 
veftre  de  Kervenan  &  ThomalTe  de  Robien  ,  fon  époufe  ;  Gui- 
cois  ,  à  François  Joffe  ;  Lanlande  &  Brangol ,  à  Pierre  le  Fo- 
relHerj  la  Ville -Taneau  ,  la  Salle,  &  la  Ville  -  Sufanne ,  à 
Jeanne  de  Rofmadec  ;  Brangol ,  à  N...  le  Charpentier  de  Ker- 
gonan  j  &  le  Clos-Briand ,  à  N.... 

SAINT-DONATIEN  -,  fur  la  route  de  Nantes  à  Angers  ;  à  un 
tiers  de  lieue  au  Nord-Nord-Eft  de  Nantes ,  fon  Evêché  ,  fa 
Subdélégation,  &  fon  reffortj  &  à  22  Heues  de  Rennes.  On 
y  compte  4000  communiants  :  la  Cure  efl:  à  l'Ordinaire ,  ainfî 
que  les  Chapellenies  qui  s'y  deffervent.  Le  territoire  eft  d  une 
grande  étendue  :  on  y  voit  des  terres  labourables,  des  prairies, 
des  vignes ,  &  beaucoup  de  jardins  qui  fourniffent  une  bonne 
partie  des  légumes  qui  fe  vendent  à  Nantes.  Ces  jardins ,  ainfi 
que  ceux  des  ParoifTes  voifines    de  la   ville,  font  d'un  revenu 


s  A  I  2.1^ 

confîdérable ,  puifque  des  curieux  ont  remarqué  qu'il  fe  vend  oit, 
par  an  ,  à  Nantes,  pour  plus  de  vingt  mille  livres  de  raves 
feulement.  Cet  objet ,  fi  petit  en  apparence  ,  doit  faire  juger  du 
refle.  Cependant ,  malgré  les  avantages  qu'ofFre  le  voifmage 
d'une  ville  peuplée  &  nche ,  fon  territoire  n  eft  pas  exadement 
cultivé  :  on  y  apperçoit  des  landes  qui  n*ont  aucune  valeur  au- 
jourd'hui ,  &  qui  fer  oient  vivre  â  Taife  trois  à  quatre  mille  âmes  5 
ce  qui  prouve  l'indifférence  blâmable  des  propriétaires.  Les  ha- 
bitants font  prefque  tous  Jardiniers,  Blanchifieurs ,  Cotonniers, 
Journaliers  ,  ou  Laboureurs.  Le  nombre  de  ces  derniers  eft 
petit.  Les  Jardiniers  &  Bianchiffeurs  vivent  dans  une  honnête 
aifance. 

L'Eglife  de  Saint-Donatien  efl  très-ancienne.    Albert  de  Mor- 
laix  &  autres  ,  difent    qu'elle  fut  bâtie  par  ordre   de  Kerariun- 
dus ,  Evêque  de   Nantes,   en  488.  Kerariundus,  Juif  converti, 
fut  Evêque  en  475  ;  mais  on  ne   trouve  rien    qui  prouve  qu'il 
ait  bâti  cette  Eglife  :  il  ell:  même  probable  qu'elle  exiftoit  long- 
temps avant  ce  Prélat ,  mais  dans  un  autre  emplacement ,   & , 
félon  toutes  les  apparences ,  plus  près  de  la  ville.  L'hiiloire  nous 
apprend  qu'Ennius,  fécond  Evêque  de  Nantes,  depuis  310  jufqu'en 
330,   eut  l'honneur    d'élever  le    premier   temple  dédié  au  vrai 
Dieu  ,  dans  la  ville  de  Nantes ,  &  que  cet  édifice  fut  conilruit 
fur  la  fépulture  des   Saints  Donatien  &  Rogatien.  Il  eil  à  croire 
que ,  depuis    ce  temps ,  cette  Eglife  a  été  plufieurs  fois  rebâtie 
&  même  changée    de  place.  Landran  ,  Evêque    de  Nantes     en 
886,  mourut    le    5   Février  896,   &  fut  inhumé,   dans  l'Eglife 
de  Samt-Donaticn  ,   fous   une    tombe    de  marbre.    Ce    fut   fous 
TEpifcopat  de  ce   Prélat  que  l'Eglife  de  Saint-Donatien  fut  don- 
née ,  l'an   893  ,   à   l'Abbaye   de  Saint-Médard  de   SoifTons  :  elle 
en   jouit    julqu'en    1003   ,   qu'elle    la     donna    aux    Moines    de 
Bourgdéols ,  ou  Bourg -Dieu.  Le  Chapitre  de  la  Cathédrale  de 
Nantes  ,  fous  prétexte  que   cette   aliénation  n'avoit   pu  fe  faire 
fans  fon  confentemcnt ,  mais,  en  effet,  dans  la  crainte  que  les 
Moines  n'enlevalîent  les  Reliques  des  Saints  Patrons   de  la  ville, 
fe  faifit  de  cette  Eglife.   Le  procès  fut  férieux ,  &:  ne   finit  que 
l'an  1092.  L'Eglife   de  Samt-Donatien  reffa  à  l'Evêque  Benoît  & 
à  fon  Chapitre  ,  qui ,   dans  la  crainte  que  le  jugement  ne  leur 
fût  pas  favorable  ,  avoient   déjà  enlevé  de  TEchfe   en  htige  les 
plus  précieux  ornements ,    &  fur-tout ,  les  châfies  des  deux  Mar- 
tyrs, qui   furent   dépofées  dans  la    Cathédrale.  Les  Moines    de 
Bourgdéols   &:  ceux  de  Saint-Médard    de  Soiffons   n'ont   jamais 


iio  SA! 

habité ,  félon  toutes  les  apparences ,  h  Saint-Donatien.  Foulcher , 
aufli  Evêque  de  Nantes ,  après  Landran  ,  mourut  en  906 ,  Se 
fut  inhumé  dans  l'Eglife  de  Saint-Donatien,  Le  Prieuré  de  Lan- 
chaillou  fut  fondé,  l'an  1076;  celui  du  Grand-Loquidi  ^  droit 
de  quintaine,  &  dépend  de  l'Archidiaconé  de  Nantes.  On  voit, 
dans  ce  territoire  ,  au  bord  de  la  rivière  d'Erdre ,  les  ruines  d'un 
ancien  château  ,  nommé  Laverriere ,  011  l'on  remarque  encore  des 
fouterrains.  Les  habitants  du  pays  tiennent ,  par  tradition  ,  que 
le  Seigneur  de  ce  château,  dont  ils  ne  fçavent  pas  le  nom,  étoit 
fouvent  en  guerre  avec  le  Seigneur  du  château  de  Launay- Vio- 
let ,  qui  eft  à  peu  de  diftance  de  celui-ci ,  &  dans  le  même  ter- 
ritoire :  on  n'en  apperçoit  plus  que   les  ruines. 

Par  lettres  du  4  Septembre  1398,  le  Duc  Jean  IV  permit 
aux  Abbés  &  Moines  de  Blanche-Couronne,  d'avoir  une  ga- 
renne dans  le  territoire  de  Saint-Donatien  ,  &  leur  donna  un 
tenement  appelle  les  Grandes-Dimes  ,  pour  avoir  part  à  leurs 
prières.  La  Seigneurie  de  Porterie  appartenoit ,  en  1430,  à 
Geoffroi  du  Perrier  ,  Sieur  de  Quintin  j  elle  eft  aujour- 
d'hui à  M.  le  Marquis  de  Rofmadec.  Le  château  de  Belle-ifle, 
dont  il  ne  refte  plus  que  les  ruines  ,  appartient  à  M.  de  la 
Tullais,  Procureur  général  de  la  Chambre  des  Comptes  de  Bre- 
tagne ,  qui  polTede  aufli  le  Port-Duran ,  &  la  Terre  feigneuriale 
du  Piefîis-Tifon ,  où  il  a  une  maifon  de  plaifance ,  dont  le  fé- 
jour  eft  très-agréable  ;  ces  trois  Terres  ont  une  haute- Juftice.  Le 
Petit -Port  eft  à  iViM.  les  Prêtres  de  la  Congrégation  de  l'Ora- 
toire de  Nantes.  La  Dennerie  ,  qui  appartenoit  ,  en  1480  ,  à 
Pierre  Léel,  Chevalier,  eft  aujourd'hui  à  M.  de  Trevellec  :  la 
maifon  de  TEpronniere ,  ancienne  maifon  de  plaifance  des  Ducs 
de  Bretagne ,  appartient  aujourd'hui  à  M.  le  Méneult  ,  Che- 
valier de  Saint-Louis. 

SAINTE-AVÉ  ;  dans  un  fond  ;  à  i  heue  au  Nord-Nord-Efl 
de  Vannes  ,  fon  Evêché  ,  fa  Subdélégation  ,  &  fon  reflbrt }  &  à 
20  lieues  de  Rennes.  On  y  compte  1200  communiants  :  la  Cure 
eft  à  l'alternative.  Le  territoire  oftre  à  la  vue  des  terres  en  la- 
beur ,  quelques  prairies ,  &  des  landes  dont  le  fol  paroît  de  mauvaife 
quaUté.  L'Eglife  de  cette  Paroifle  eft  dédiée  à  Sainte  Avé ,  com- 
pagne de  Sainte  Urfule ,   qui  vivoit  dans  le  cinquième  fiecle. 

SAINTE-COLOMBE  -,  fur  une  petite  élévation  ;  à  6  lieues  & 
demie  au  Sud-Eft  de  Rennes ,  fon  Evêché  &  fon  reflbrt  5  &:  à 


s    A    I  IH; 

5  lieues  de  Chateaubriand  ,  fa  SubdélégatîOn.  On  y  compte 
250  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire  eft  un 
pays   plat ,  &  produit    du  grain  &  du  cidre. 

SAINTE -LUCE;  à  i  lieue  &  demie  à  l'Eft  -  Nord  -  Eft  de 
Nantes,  ion  Evêché ,  fa  Subdélégation  ,  6^:  fon  reffort  ;  &  à  22 
lieues  de  Rennes.  On  y  compte  800  cominuniants  :  la  Cure  eft 
préfentée  par  le  Chapitre  de  l'Eglife  Cathédrale.  Ce  territoire, 
borné  au  Sud  par  la  rivière  de  Loire  ,  offre  à  la  vue  un  pays 
riche ,  de  belles  prairies  ,  des  terres  abondantes  en  grains  , 
des  vignes  ,  &  des  landes  qui  méritent  d'autant  mieux  les  foins 
du  cultivateur  ,  qu'à  l'avantage  d'être  aux  portes  de  Nantes,  elles 
joignent  la  fertilité  du  fol.  Il  faut  convenir  que  les  hommes  fça- 
vent  bien  peu  apprécier  les  dons  de  la  nature  ,  nous  allons  cher- 
cher la  fortune  au  loin ,  tandis  qu'elle  eu  à  notre  porte.  Ce 
lieu  s'appelloit  autrefois  Chcjsait  ou  Chefs  cil  ^  parce  que  le  ruif- 
feau  le  Feil  y  prend  fa  fource.  Fortunat  y  place  la  belle  mai- 
fon  de  l'Evêque  de  Nantes  Saint  Félix ,  &  l'appelle  Cariacum  , 
nom  latin  qu'on  a  traduit  par  celui  de  Chaffais  ^  que  porte  ac- 
tuellement cette  maifon  ,  toujours  dépendante  de  l'Evêché  de 
Nantes.  C'eft  Saint  Félix  qui  l'a  fait  bâtir  en  550.  Un  de  fes 
fucceffeurs  y  unit  trente-fept  livres  de  rente ,  par  a8:e  du  mois 
de  Septembre  1291.  Amauri  d'Acigné  fit  creufer ,  en  1461,  les 
foffés  qui  font  autour  de  ce  château  ,  &  y  fit  conftruire  quel- 
ques fortifications.  En  1 5  00 ,  on  remarquoit  dans  le  même  terri- 
toire les  maifons  nobles  fuivantes  :  la  Belle-Riviere ,  à  Jean  de 
la  Rivière  ;  la  Minière ,  à  Pierre  Gilles  &  à  Jean  Pineau  ;  &  la 
Haye  ,  à  Guillaume  de  Montigné  ;  c'étoit  alors  une  métairie  , 
c'ell  aujourd'hui  une  belle  maifon  environnée  de  bois  de  haute- 
futaie  &  taiUis. 

SAINT-ENOGAT  ;  à  trois  quarts  de  lieue  à  l'Oueft-Sud- 
Ouefi:  de  Saint-Malo  ,  fon  Evêché  ;  à  1 4  lieues  de  Rennes  ;  & 
à  4  lieues  de  Dinan ,  l'a  Subdélégation  &  fon  reffort.  0\\  y 
compte  1400  communiants  :  la  Cure  efl  à  l'alternative.  Le  ter- 
ritoire ,  borné  au  Nord  &  à  l'Eit  par  la  mer ,  eft  d'une  fuperfi- 
cie  plane ,  &  bien  cultivé.  A  une  demi-lieue  au  Sud  de  fon  clo- 
cher, commence  une  lande  qui  s'étend  à  plus  de  deux  lieues 
vers  Dinan.  L'an  1324,  Olivier  &  Geoffroi  de  Montfort  fondè- 
rent ,  dans  ce  territoire ,  l'Eghfe  de  Saint- Jacques  &  de  Saint- 
Philippe  ,  nommée   jadis  Y  Hôpital  -  B  cchct ,    pour   des   Religieux 


ail  S  A  I 

Mathurîns,   en  mémoire  de  ce   qu'ils  avoient  été  rachetés  des 
mains  des  Infidèles  par  des  Religieux  de  cet  Ordre, 

SATNT-ERBLON  ;  à  3  lieues  au  Sud-Sud-Eft  de  Rennes,  fon 
Evêché  ,  fa  Subdélégation ,  &  fon  reflbrt.  On  y  compte  1250 
communiants  :  la  Cure  eft  préfentée  par  le  Théologal.  Le  ter- 
ritoire ,  arrofé  par  les  eaux  de  la  rivière  de  Seiche  ,  eÛ  plein 
de  marécages  5  il  produit  du  grain,  du  foin,  &  du  cidre. 
L'Eglife  de  cette  ParoiiTe  fut  bâtie  en  l'honneur  de  Saint-Erblon  , 
mort  dans  l'Abbaye  d'Indre ,  près  Nantes  ,  le  25  Mars  720.  L'an 
1304,  Robert  Raguenel,  Chevalier,  Seigneur  du  Châtel-Oger, 
fonda  la  Chapelleme  de  Notre  -  Dame  du  PiUer  ,  dans  l'Eglife 
Cathédrale  de  Rennes  ;  il  donna  au  Chapelain  qui  la  deflcrvoit, 
les  dîmes  qui  lui  appartenoient  dans  cette  ParoifTe.  Le  Châtel- 
Oger  appartenoit,  en  1420,  au  Vicomte  de  la  Belliere  ;  il  a 
une  hauteJuftice  ,  qui  appartient  à  Mademoifelle  du  Château- 
Létard.  Dans  cette  même  année ,  on  voyoit  dans  ce  territoire 
le  manoir  de  Bon-Efpoir,  à  Gérard  Raguenel  -,  le  Château- 
Leflart  ou  Létard ,  à  André  du  Fail  j  le  manoir  de  Cajan ,  à 
Jean  du  Bouais  j  &:  le  manoir  de  Lourmais ,  à  N„.. 

SAINT  -  ETIENNE  -  DE  -  CORCOUÉ  ;  dans  les  baffes-Mar- 
ches ,  fur  la  route  de  Nantes  aux  Sables  -  d'Olonne  ;  à  28 
lieues  de  Rennes.  Cette  Paroiffe  compte  300  communiants,  & 
fait  partie  du  Comté  de  Nantes  -,  mais  elle  eu  du  diocefe  de 
Luçon. 

SAINT -ETIENNE- DE -MERMORTE;  à  7  lieues  au  Sud- 
Ouell:  de  Nantes ,  fon  Evêché  &  fon  reffort  ;  à  29  Heues  de 
Rennes  j  &  à  2  lieues  de  Machecou  ,  fa  Subdélégation.  On  y 
compte  700  communiants  r  la  Cure  ell:  à  l'Ordinaire.  Le  territoire 
eft  borné,  à  deux  mille  toifes  au  Sud  ,  par  la  province  de  Poitou: 
on  y  voit  des  terres  bien  cultivées,  des  vignes,  des  prairies.  Se 
des  landes.  En  1400,  le  Seigneur  de  Retz  avoit  dans  cette  Pa- 
îoiffe  un  fort  château ,  oii  il  avoit  un  Capitaine. 

SAINT-ETIENNE-DE-MONT-LUC  ;  au  bas  d^un  coteau  ;  â 
4  lieues  à  l'Oueft-Nord-Oueft  de  Nantes,  fon  Evêché  &  fora 
reffort  j  à  20  lieues  de  Rennes  j  &  à  6  Heues  de  Pontchâteau , 
fa  Subdélégation.  On  y  compte  3000  communiants  :  la  Cure  eft 
jpréfeatée  par  le  Doyen  de  l'Eglife  Cathédrale  j  &  la  Chapelle 


s  A  I  iij 

de  Saint-Thomas ,  par  l'Evêque  diocéfain.  Le  territoire  offre  à  la 
vue  des  prairies  d'une  étendue  confidérable ,  des  marais ,  des 
terres  en  labeur  de  très-bonne  qualité ,  des  vignes ,  &  beaucoup 
de  landes  dont  le  fol  paroît  excellent  :  les  habitants  ont  com- 
mencé à  en  défricher  une  partie ,  mais  ils  n'ont  pas  encore  fait 
beaucoup  de  progrès  ;  il  eft  à  efpérer  que  peu-à-peu  ils  vien- 
dront à  bout  de  faire  difparoître  ces  landes. 

Les  archives  de  la  Seigneurie  de  Savenai  font  mention  qu'il 
y  avoit  jadis  une  Abbaye  ou  Couvent ,  de  l'Ordre  de  Cîteaux, 
à  l'endroit  appelle  Saint-Thebaud ,  fur  le  bord  de  la  Loire,  au 
territoire  de  Saint-Etienne-de-Mont-Luc  :  ce  Monaftere  ne  fubfille 
plus.  Les  Bénédi61ins  &  Bernardins  avoient  alors  cinq  Couvents, 
dont  on  ne  voit  plus  que  les  ruines  ,  dans  les  Paroifles  de 
Saint-Eticnne-de-Mont-Luc ,  de  Lavaux ,  &  de  Cordemais.  En 
1 188  ,  il  n'y  avoit  à  Saint-Etienne  qu'un  Chapelain,  qui  fe  nom- 
moit  Samfon,  Le  Seigneur  de  cette  ParoifTe  étoit  alors  Guerin 
de  Saint-Etienne ,  qui  eut  une  grande  conteftation  avec  Huon  , 
Prieur  de  Pont-Château,  au  fujet  des  dîmes  de  la  Paroiffe  de 
la  Chapelle  -  Launay  ,  que  ce  Prieur  prétendoit  lui  appartenir. 
Après  de  longues  procédures ,  Guerin  les  obtint  pour  fon  Cha- 
pelain. La  Paroifîe  ne  portoit  point  encore  le  furnom  de 
Mont -Luc. 

Dans  les  quatorzième  &  quinzième  fiecles  ,  la  maifon  d'Acigné 
avoit  de  riches  polleiîions  dans  cette  Paroiffe  ;  mais  nous  ignorons 
les  noms  des  Terres  &  châteaux  qu'elle  poffédoit.  Amauri  d'Aci- 
gné,  élu  Evêque  de  Nantes  en  1461  ,  étoit  né  à  Saint-Etienne- 
de-Mont-Luc.    En  1470  ,  Jean  de    Querci  étoit  Seigneur  de  la 
Juliennaye  j  &  Guillaume  de  Boifchaud  ,  Seigneur  de  la  Biliaye, 
On  remarque    dans  ce  territoire  les   ruines  dun  ancien   château 
que   les  habitants  du  pays  appellent  le  Tertre  des  bonnes  Dames  ;  Sc 
l'on  y  apperçoit  encore  d'anciens  foffés.  Cet  édifice  étoit  effeftive- 
ment  fitué  fur  le  coteau  du  Tertre ,  ôc  il  fe  peut  faire  qu'il  ait 
pris   fon   nom   du  coteau ,  ou  qu'il  lui   ait  donné   le  fien  5  mais 
on  ne  fçait  pourquoi  on  y   a  ajouté   le  furnom  de  Tertre   des 
bonnes  Dames.    La  JuHennaye    appartenoit ,  en    1 666 ,  à  Céfar 
d'Aiguillon,  dont  la  fille  unique,  nommée   Anne ,  époufa,-le  2 
Mars   1 677  ,  Jean-Gurtave  de  Rieux ,  Marquis  d'Afferac  ,  Comte 
de  Châteauneuf,  &  Vicomte   de  Donges.  La  Seigneurie  de  la 
Juliennaye  a  une  haute  -  Juilice  ,  qui   appartient    aujourd'hui   à 
M.  de  la  Bourdonnaye  de   Mont-Luc.  En  1590,  on  avoit  mis 
dans   le   château    de   la  Juliennaye  des  prifonniers  de  guerre. 


114  S  A  I 

qui  avoient  été  pris  par  le  Capitaine  de  Lefnaudieres.  La  HayCr 
Mahéas     haute-Juftice ,  appartient  à  Madame  de  Coutance. 

SAINT-ETIENNE-DU-BOIS  ;  dans  les  baffes-Marches  j  à  3  2 
lieues  de  Rennes.  Cette  Paroiffe  ,  qui  eft  dans  l'Evêché  de 
Luçon,  dépend,  comme  toutes  celles  qui  fe  trouvent  dans  les 
Marches  ,  des  Gouvernements  de  Poitou  &  de  Bretagne  ,  & 
fait  partie  du  Comté  de  Nantes  j  elle  compte  2400  communiants: 
la  Seigneurie  appartient  à  M.  Danieres  ,  Seigneur  de  Paluau. 
Le  terriioire ,  coupé  de  quelques  ruiffeaux ,  offre  à  la  vue  des 
coteaux,  des  vallons,  différents  points  de  vue  très -agréables, 
des  terres  en  labeur  très-fertiles  ,  de  bonnes  prairies  ,  des  vignes  , 
quelques  bois  de  peu  d'étendue ,  &  des  landes  en  quantité.  Je 
dois  une  juftice  aux  habitants  du  pays,  &  fur-tout  aux  agri- 
culteurs :  ils  ont  le  talent  précieux  de  fertilifer  leurs  terres  ;  elles 
produifent,  par  leurs  foins  ,  des  moiffons  abondantes  :  mais  un 
préjugé  malheureux  les  empêche  de  fe  hvrer  aux  défrichements. 
Ils  ne  peuvent  s'imaginer  que  ces  landes  immenfes,  qu'ils  ont  fous 
les  yeux ,  puiffent  les  récompenfer  de  leurs  travaux  -,  idée  per- 
nicieufe,  qui,  tranfmife  de  père  en  fils,,  détruit  L'émulation  la 
plus  utile.  Cette  opinion  leur  eu  commune  avec  la  plus  grande 
partie  de  nos  laboureurs  ;  mais  l'expérience  en  a  démontré  le  peu 
de  fondement.  Dix  mille  journaux  de  terrein  ,  refiés  fans  cul- 
ture &:  fans  valeur  depuis  fept  à  huit  fiecles ,  font  aujourd'hui 
une  fource  de  richeffes  pour  ceux  qui  ont  pris  la  peine  de  les 
cultiver.  Ils  ne  promettoient  pas  cependant  des  avantages  bien 
flatteurs  ,  mais  ils  ont  plus  donné  qu'on  n'ofoit  l'efpérer.  La 
nature  ne  fait,  rien  d'inutile  ;  elle  eft  toujours  a6live  ,  ik  elle 
répond  prefque  toujours  à  des  foins  opiniâtres  &  à  des  travaux 
intelligents.  Ne  foyons  pourtant  pas  injuftes  :  c'eft  moins  au 
iîmple  laboureur  qu'il  faut  s'en  prendre ,  qu'aux  Seigneurs  &  aux 
riches  particuHers  propriétaires  des  fonds  ;  &  ,.  fi  l'on  doit  s'éton- 
ner de  quelque  chofe  ,  c'eft  que  des  perfonnes  inftruites  ,  dont 
une  éducation  fage  a  rectifié  le  jugement ,  qui  ont  des  connoif- 
fances  étendues ,  loin  de  s'attacher  à  détruire  des  préjugés  nui- 
fibles  ,  contribuent  à  les  accréditer  parmi  les  ruftiques  villa- 
geois. Nous  terminerons  ces  réflexions  par  une  vérité  aujourd'hui 
généralement  reconnue  ,.  c'eft  que  les  landes  n'ont  prefque  au- 
cune valeur  ,  &  que  de  toutes  celles  qu'on  a  défrichées  on  n'en 
a  trouvé  aucune  dont  le  fol  n'ait  pas  répondu  aux  foins  du 
cultivateur  :  les  unes   ont  produjt  &:  produifent   annuelleraenî 

d'abondantes; 


s  A  I  zz^ 

d'abondantes  molflbns  ,  les  autres  ont  fait  de  belles  prairies , 
&  celles  qui  n'ont  pu  remplir  ces  deux  premiers  objets  d'utilité, 
ont  été  plantées  en  bois.  Les  habitants  de  Saint-Etienne  font 
affez  généralement  aifés.  Les  privilèges  dont  ils  jornlfent  ,  la 
fertilité  de  leurs  terres  ,  un  pays  charmant  ,  un  air  pur ,  ren- 
dent leur  condition  fortunée  j  &  ils  n'auroient  rien  à  envier  à 
leurs  voifins ,  s'ils  avoient  le  courage  de  défricher  leurs  terres 
incultes ,  &  de  forcer  la  nature  à  leur  prodiguer  fes  trélbrs. 
Le  maître-autel  de  l'Eghfe  paroifllale  eil  très-beau  :  c'efi:  l'ca- 
Vrage  d'un  excellent  fculpteur ,    nommé  le  Sueur. 

La  Seigneurie  de  Rochequairie  appartient  à  M,  de  Roche- 
quairie  ,  Seigneur  de  la  Motte  -  Glain  :  elle  a  droit  de  banc 
dans  l'Eglife  du  côté  de  l'Epître.  Le  fief  noble  de  Bellenouë 
appartient  à  M.  Savin  de  Bellenouë ,  Bourgeois  de  l'endroit. 
Il  fe  peut  faire  qu'il  y  ait  dans  la  Paroifle  d'autres  terres 
nobles   que  nous  ne  connoifTons  pas. 

SAINT-ETIENNE-DU-GUÉ-DE-L'IST.E;  dans  un  fond,  près 
la  rivière  de  Liés  j  à  lo  lieues  au  Sud  de  Saint  -  Brieuc ,  fon 
Evêché  j  à  1 6  lieues  de  Rennes  ;  &  à  4  lieues  de  JofTelin ,  fa 
Subdélégation.  Cette  ParoiiTe  refTortit  à  Ploermel  ,  Se  compte 
800  communiants  :  la  collation  de  la  Cure  appartient  à  M.  de 
Carcado.  Le  territoire  offre  à  la  vue  des  terres  en  labeur,  des 

Erairies  ,  un  bois  d'environ  une  lieue  de  circuit ,  des  landes  ,  & 
eaucoup  d'arbres  fruitiers.  Le  château  du  Gué-de-l'IUe ,  maifon 
feigneuriale  de  l'endroit ,  vint  en  la  poffeffion  de  la  maifon  de 
Rohan  ,  par  le  mariage  d'Eon  de  Rohan  ,  fils  d'Alain  VI  du  nom., 
avec  Aliette ,  Dame  du  Gué-de-l'Ifle.  Yolande  de  Rohan  la  porta 
dans  la  maifon-  de  Carcado ,  par  fon  mariage  avec  Guillaume  le 
Sénéchal.  Cette  Terre  a  plufieurs  hautes- jullices ,  &  appartient; 
à  M.  de  Carcado- 

SAINT-ETIENNE-EN-COGLAISj  fur  une  hauteur,  &  fur  la 
route  de  Dol  à  Fougères  ;  à  9  heues  au  Nord-Eil  de  Rennes ,  fon 
Evêché  &  fon  reffort  ;  &  à  2  lieues  un  quart  de  Fougères ,  fa 
Subdélégation.  Cette  Paroiffe  compte  1800  communiants  :  la  Cure 
eit  un  Prieuré  préfenté  par  l'Abbé  de  Touffaints  d'Angers , 
&  deffervi  par  un  Moine  de  cette  Maifon.  Le  territoire  , 
coupé  au  Nord  de  fon  bourg  par  la  rivière  de  l'Oifance ,  offre 
à  la  vue  des  coteaux  ,  des  vallons  ,  des  terres  très-exa6lement 
cultivées,  6c  des  arbres  fruitiers.  En  1420,  on  y  remarquoit  les 
Tome  IV^  F  i 


2,i5  S  A  1 

maifons  nobles  de  Saînt-Etienne  &  du  Boîs-Henrî,  à  la  Damé 
de  Saint  -  Etienne  ;  ce  dernier  eft  auprès  d'un  bois ,  le  feul  que 
nous  connoiffions  dans  la  Fàroifîe  :  le  Fail  appartenoit  au  Sieur 
de  Bonne-Fontaine  j  &  le  Vau-Garin ,  au  Sieur  du  Fratoy. 

SAINT-EVARZEC  ;  fur  une  hauteur  5  à  i  lieue  &  demie  au 
Sud-Sud- Eft  de  Quimper,  Ton  Evêché  ;  à  39  lieues  de  Rennes; 
&  à  3  lieues  de  Concarneau ,  fa  Subdélégation  &  fon  reflbrt. 
Cette  ParoifTe  compte  700  communiants  :  la  Cure  ell  à  Talter- 
native.  Le  territoire,  borné  à  l'Oueft  par  la  rivière  d'Odet,  6c 
coupé  de  ruiffeaux  qui  arrofent  des  prairies ,  offre  à  la  vue  des 
terres  en  labeur ,  des  arbres  à  fruits ,  &  plufîeurs  cantons  de 
terres  incultes  dont  le  fol  efl:  entièrement  ftérile.  Les  Murs-Hunes 
&  Gueriven  forment  une  haute  -  Juftice ,  qui  appartient  à  M.  le 
Comte  de  Coigni.  Les  manoirs  de  Montarlan  ôc  de  Montergoet 
font  très-anciens. 

SAINT-FIACRE  ;  fur  une  hauteur  j  à  3  lieues  au  Sud-Efl  de 
Nantes ,  fon  Evêché  ,  fa  Subdélégation  ,  &  fon  refTort  j  &  à  25 
lieues  de  Rennes.  On  y  compte  500  communiants  :  autrefois 
l'Abbé  de  Saint-Jouin  préfentoit  cette  Cure  j  mais,  en  1774»  il 
en  remit  la  collation  à  FEvêque  diocéfain.  La  Chapellenie  de 
M.  Benoît  Thomas  eft  préfentée  par  l'Ordinaire.  Le  30  Août,  il 
fe  tient  une  foire  en  cette  ParoifTe.  Le  territoire  efl  borné  au 
Nord  par  la  rivière  de  Sevré ,  &  au  Sud  par  celle  de  Maine  ; 
il  produit  du  grain  ,  du  vin  de  bonne  qualité ,  &  du  foin.  L'Eglife 
paroifTiale  de  Saint-Fiacre  fut  fondée  par  les  Seigneurs  de  Gou- 
laine,  qui  ont  en  cette  ParoifTe  leur  Jurifdiftion  des  Cleous , 
dépendant  du  Marquifat  de  Goulaine.  La  Jurifdiftion  de  la 
Ganterie  Se  la  moyenne-Juftice  de  l'Epinai ,  relèvent  des  Cleous. 

SAINT-GEORGES-DE-GREHAINE  ;  fur  une  hauteur  ;  à  5 
lieues  à  l'Eft  de  Dol ,  fon  Evêché  &  fa  Subdélégation  ;  &  à  1 1 
lieues  de  Rennes,  fon  refTort.  On  y  compte  500  communiants: 
la  Cure  eft  préfentée  par  l'AbbefTe  de  Saint-Georges  de  Rennes. 
Le  territoire  ,  borné  au  Nord  par  la  mer ,  &  à  l'Eft  par  la  ri- 
vière de  Couefnon  qui  fépare  la  Normandie  de  la  Bretagne  , 
préfente  une  fuperficie  plane ,  ft  vous  en  exceptez  une  petite 
montagne  de  forme  triangulaire,  fur  le  fommet  de  laquelle  eft 
fitué  le  bourg  de  la  Paroiffe  ,  &  un  très-beau  coteau  à  l'Oueft  : 
les  terres  font  très-exaftement  cultivées.  La  Chapelie-Vauclerc , 


s  A  I  117 

jmaîfon  noble ,  appattenoit ,  en  1 5  00 ,  à  Guillaume  de  Vauclerc  ; 
le  Montorton ,  à  Pierre  de  la  Marche  ;  les  Verdieres ,  à  Jean 
de  la  Binolaye  ;  le  Pont  de  la  Rufel  &  Haut  de  la  Grève ,  à 
N....  :  le  Prieuré  de  Saint  -  Georges  ,  haute -JulHce,  appartient  à 
l'Abbefle  de  Saint-Georges.  En  1274,  l'Abbeffe  de  Saint-Georges 
tranfigea  avec  les  Chanoines  de  Dol  pour  les  dîmes  de  cette 
ParoifFe.  Le  Prieuré  de  Mont-Rouault ,  haute-Juftice  ,  à  l'Abbaye 
du  Mont-Saint-Michel  ;  le  Comté  de  Poilley ,  haute ,  moyenne 
&  baffe Juftice ,  à  M.  d'Apreville. 

SAINT-GEORGES-DE-REINTEMBAULT  ;  gros  bourg ,  dans 
un  fond  ;  k  11  lieues  au  Nord-Eft  de  Rennes ,  fon  Evêché  ;  & 
à  3  lieues  deux  tiers  de  Fougères ,  fa  Subdélégation  &  fon 
reifort.  Cette  Paroiffe  compte  3000  communiants  :  la  Cure  eft 
à  l'alternative.  Le  territoire  efl  borné  à  l'Eft ,  au  Nord  ,  &  à 
rOuefl: ,  par  la  province  de  Normandie  ;  il  offre  à  la  vue  des 
coteaux,  des  vallons,  des  terres  exaftement  cultivées,  des  ar- 
bres fruitiers ,  &:  les  deux  petits  bois  de  la  Bourdonnaye  &  de 
la  Martinaye.  Il  fe  tient  quatre  foires  par  an ,  Se  un  marché  par 
femaine  ,  dans  cette  Paroiffe. 

La  Terre  Ôc  Seigneurie  d'Ardennes  fut  donnée  originaire- 
ment ,  par  les  Barons  de  Fougères ,  à  celui  qui  faifoit  la  recette 
de  leurs  rentes  &  revenus  dans  le  baiUiage  de  Saint-Georges-de- 
Reintembault ,  &  qui  mettoit  les  Mandements  &  Ordonnances 
des  Juges  à  exécution.  On  voit  que  c'étoit  une  Sergenterie 
féodée  ,  &  elle  étoit  d'abord  connue  fous  ce  nom.  Elle  fut  érigée  , 
en  1684,  en  Marquifat ,  fous  le  nom  de  Romilley  ,  en  faveur 
de  François  ,  Chevalier  ,  Seigneur  de  Romilley  ;  elle  a  haute  , 
moyenne  &  baffe-Juffice ,  qui  s'exerce  en  la  Paroiffe  de  Ferré, 
Julien  Maunoire  ,  célèbre  Miflionnaire ,  naquit  en  cette  Paroiffe, 
le  premier  Oéfobre  1606,  &:  mourut  dans  celle  de  Pleven  le 
28  Janvier  1683., 

SAINT-GERÉON  ;  fur  la  route  d'Ancenis  à  Redon  ;  à  7  lieues 
au  Nord-Eff  de  Nantes ,  fon  Evêché  6c  fon  reffort  ;  à  20  lieues 
de  Rennes  ;  &  à  un  tiers  de  Heue  d'Ancenis ,  fa  Subdélégation» 
On  y  compte  700  communiants  :  la  Cure  eff  un  Prieuré  pré- 
fente  par  l'Ordinaire  ,  quoique  l'Abbé  de  Bourg-Dieu  en  revendi- 
que la  préfentation.  Le  territoire  renferme  des  terres  en  labeur ,  des 
prairies ,  des  vignes  ,  &  peu  de  terres  incultes  :  on  y  voit  la  fon- 
taine de  la  Ragotiere ,  qui ,  à  ce  que  Ton  prétend  ,  a  flux  &  reflux. 


iig  SAÏ 

Le  Prieuré  de  Saînt-Geréon  tomba  en  f égale  l'atî  15;  57,  Se 
fut  donné, par  le  Roi ,  à  Gilles  de  Gaud  ,  Evêque  de  Ravennes,  & 
Coadjuteur  de  l'Evêque  de  Nantes.  La  Junfdiftion  des  Régaires 
de  Saint-Geréon  fut  acquife,le  9  Décembre  15  62,  par  Antoine 
de  Créqui  ,  Evêque  de  Nantes ,  qui  la  paya  une  fomme  de 
quatre  mille  fix  cents  livres ,  comme  on  le  voit  dans  les  titres 
de  l'Evêché.  Les  Religieufes  Urfulines  ,  qui  font  à  l'entrée  de  la 
petite  ville  d'Ancenis ,  font  dans  la  Paroiffe  de  Saint  -  Geréon* 
(  Voyez  Ancenis.  )  Les  Régaires  de  Saint-Geréon  forment  une 
haute-JulHce  ,  qui  appartient  à  M.  l'Evêque  de  Nantes  ;  &  le 
Prieuré  de  Saint-Geréon,  haute  -  Juftice ,  qui  appartient  à  M.  le 
Prieur. 

SAINT-GERMAIN-DE-LA-MER  -,  fur  une  hauteur  ;  à  8  Keues 
à  l'Efl-Nord-Eftde  Saint -Brieuc,  fon  Evêché  j  à  16  lieues  de 
Rennes  ;  &  à  4  heues  trois  quarts  de  Lamballe  ,  fa  Subdélégation. 
Cette  Paroiffe  reffortit  à  Jugon ,  &  compte  800  communiants  : 
la  Cure  eft  à  l'alternative.  M.  de  Valentinois  en  eft  le  Seigneur.  Le 
territoire  ,  borné  au  Nord  par  la  mer  &  par  l'entrée  de  la  rivière 
de  Frémur,  forme  une  pointe  environnée  de  fable,  qui  occupe, 
dans  cette  partie  ,  beaucoup  de  terrein  ;  mais  du  côté  de  Ma- 
tignon ,  qui  eft  une  dépendance  de  la  Paroiffe ,  on  voit  des 
terres  en  labeur ,  fertiles  en  grains  de  toutes  efpeces  :  on  n'y  re- 
marque point  de  landes,  mais  beaucoup  de  villages  ou  hameaux,^ 
&  un  grand  nombre  de  maifons  nobles.  En  1 400 ,  on  y  con- 
noiffoit  la  Rouxiere ,  au  Sieur  de  Châteauneuf  j  l'Iflarao,  à  Mar- 
guerite l'Abbé  ;  le  Vaull: ,  à  Jean  RouUet-Ruiffier  ;  la  Ville-Saloux , 
à  Bertrand  de  Cognets  ;  la  Vigne  ,  à  Alain  de  la  Vigne  ;  le 
Clos,  à  Gilles  de  Tremereuc  ;  le  Breil ,  à  Hervé  de  la  Lande  j 
Saint-Jean ,  à  Artur  Gruel  ;  Saint-Gallery ,  à  l'Abbé  de  Saint- Au- 
bin ;  la  Ville-au-Prenaire,  à  N...  ;  la  Chenaye-Tanniot ,  à  Henri 
Tremereuc  ;  la  Chabaffaye  ,  la  Cour  ,  la  Ville  -  Corbin ,  Roi- 
nel ,  la  Gargouillay  ,  la  Ville  -  Audren ,  &  Beauvoir.  GueiTouet , 
Commanderie  de  l'Ordre  de  Malte ,  forme  une  haute- Juftice. 

SAÏNT-GERMAÎN-DES-PRÉS  ;  à  18  lieues  au  Sud  de  Saint- 
Malo  ,  fon  Evêché  ;  à  6  lieues  &  demie  de  Rennes ,  fon  reffort; 
&  à  4  lieues  de  Plélan-le-Grand  ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte 
300  communiants:  la  Cure  eft  préfentée  par  l'Abbeffe  de  Saint-, 
Sulpice.  Le  territoire  ,  traverfé  par  le  grand  chemin  de  Rennes 
à  Redon ,  eft  couvert  d'arbres  $c  buiffons  -,  les  terres  y  font  fer- 


s  A  I  229 

tîles  en  grriîns  de  tomes  efpeces,  maïs  on  y  voit  beaucoup  de 
landes.  Ce  n  eft  que  depuis  1578  que  cette  Paroiffe  exifte ,  puif- 
qu'à  cette  époque ,  c'étoit  un  Prieuré  de  Filles  ,  dont  Sœur 
Jeanne  le  Voyer  étoit  Prieure.  Le  Bois-au-Voyer  eft  une  mailbii 
noble ,  fituée  dans  fon  territoire. 

SAINT-GERiMAIN-DU-PINEL  ;  à  9  lieues  à  l'Eft-Sud-Eft  de 
Rennes  ,  fon  Evêché  &  Ion  reffort  ;  à  3  lieues  de  Vitré ,  fa 
Subdélégation.  On  y  compte  1000  communiants  :  la  Cure  eft 
préfentée  par  l'Abbé  de  la  Roë ,  &  c'eft  un  Chanoine-Régulier 
qui  y  fait  les  fondions  de  Refteur.  Le  territoire ,  d'une  fuper- 
ncie  plane ,  eft  coupé  de  deux  petits  ruiffeaux ,  formés ,  l'un  par 
l'étang  du  Bois-Halbran  ,  &  l'autre  par  celui  du  moulin  de  la 
Paluere.  Au  Nord  du  bourg  eft  le  bois  Pinel ,  qui  contient  en- 
viron trois  cents  cinquante  arpents ,  &  la  lande  des  Touches- 
Vaux  qui  le  joint  :  le  refte  de  ce  territoire  eft  bien  cultivé  ,  &  pro- 
duit des  grains  &  du  cidre. 

SAINT- GERMAIN- EN -COGLAIS;  fur  une  hauteur;  à  10 
lieues  au  Nord-Eft  de  Rennes  ,  fon  Evêché  ;  &  à  2  lieues  de 
Fougères ,  fa  Subdélégation  &  fon  reffort.  On  y  compte  2400 
communiants  :  la  Cure  eft  préfentée  par  un  Chanoine  de  l'Eglife 
Cathédrale.  Le  territoire  offre  à  la  vue  des  monticules ,  des 
coteaux ,  des  vallons ,  un  petit  bois  qui  joint  le  bourg ,  beau- 
coup d'arbres  fruitiers ,  des  terres  bien  cultivées ,  &  beaucoup 
de  villages  ou  hameaux  :  il  y  a  quelques  terreins  incultes ,  dont 
on  croit  le  fol  de  mauvaife  qualité. 

SAINT  -  GERMAIN  -  SUR  -  ISLE  ;  à  3  lieues  au  Nord-Nord- 
Eft  de  Rennes ,  fon  Evêché ,  fa  Subdélégation  ,  &  fon  refîort. 
On  y  compte  300  communiants:  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le 
territoire  ,  arrolé  de  la  rivière  d'ifle  ,  produit  des  grains  ,  du  foin, 
&  du  cidre. 

SAINT-GILDAS-DE-RHUIS ,  Abbaye,  de  l'Ordre  de  Saint- 
Benoît ,  &  ParoifTe  du  nom  de  Saint  Gouftan  ;  au  bord  de  la 
mer,  dans  la  prefqu'ifle  de  Rhuis  ;  à  4  lieues  au  Sud-Sud-Oueft 
de  Vannes,  fon  Evêché;  à  25  heues  de  Rennes;  Sz  à  i  heue 
&  demie  de  Sarzeau,  fa  Subclélégation  &  fon  reffort.  Cette  Pa- 
roiffe  relevé  du  Roi  ;  on  y  compte  900  communiants  :  la  Cure 
eft  préfentée  par  l'Abbé  de  Saint-Gildas.  Le  territoire    eft  fertile 


ijo  S  A  I 

en  grains  ;  on  y  voit  auiTi  quelques   cantons   de  vignes  dont  lé 
vin  eu  de  médiocre  qualité. 

L'Abbaye  de  Saint-Gildas  eu  célèbre  dans  l'hiftoire ,  mais  les 
annaliftes  ne  s'accordent  point  fur  Tépoque  de  fa  fondation.  Les 
uns  prétendent  qu'elle  fut  fondée  par  Grallon ,  Roi  de  Bre- 
tagne ,  l'an  43  4  i  ce  qui  ne  peut  s'admettre  ,  puifque  Saint  Gildas 
n'arriva  d'Angleterre  dans  l'A rmorique ,  que  vers  l'an  530.  Les 
autres  placent  fa  fondation  en  389  ,  &  l'attribuent  à  Judicaël,  qu'ils 
fuppofent  premier  Evêque  de  Vannes.  Pour  détruire  ces  deux 
alfertions ,  nous  dirons ,  d'après  les  hilloriens  les  plus  véridiques 
&  les  plus  fuivis  ,  que  le  premier  Evêque  de  Vannes ,  élu  en 
441  ,  fe  nommoit  Maiifuet ,  &  que  Saint  Gildas ,  n'étant  né  qu'en 
499  ,  ne  pouvoit  être  Abbé  cinquante-huit  ans  avant  fa  nailTance.. 
Saint  Gildas  arriva  donc  en  Bretagne ,  l'an  5  3  o ,  &  obtint  de 
Varoch ,  Comte  de  Vannes  ,  un  château  que  ce  Prince  poffé- 
doit  fur  le  bord  de  la  mer  ;  château  que  le  Saint  Solitaire  chan* 
gea  en  Monallere.  C'eil  le  fentiment  de  l'hiftorien  Dom  Morice  , 
qui  dit,  «  que  Gildas  le  Sage  s'établit  ,  vers  l'an  530,  dans  la 
»  prefqu'ifle  de  Rhuis,  oii  il  écrivit  les  deux  Traités  que  nous 
»  avons  de  lui  j  Traités  que  l'on  regarde  com.me  la  meilleure 
»  fource  de  l'ancienne  hiftoire ,  &  que  ce  Saint  mourut  l'an 
»  570.  »  Comme  cette  Abbaye  eft  fur  le  bord  de  la  mer , 
elle  fut  plusieurs  fois  pillée  par  les  Normands  ;  &  les  ravages 
fréquents  de  ces  barbares  en  avoient  exilé  tous  les  Moines ,  en 
1008.  Les  murs  étoient  prefque  tous  renverfés,  &  il  s'étoit  élevé 
des  arbres  qui  bouchoient  les  portes  &  les  fenêtres  de  la  maifon,. 
qui  ne  fervoit  plus  que  de  refuge  aux  bêtes  fauvages  d'une  vaftc: 
forêt  qui  exilloit  dans  cette  prefqu'ifle ,  &  aux  plus  venimeux, 
reptiles  ^  dont  le  canton  abonde.  Geoffroi  I  ,  Duc  de  Bretagne, 
touché  de  la  mauvaife  fituation  de  ce  Monaftere  ,  demanda  à 
Gauzelin ,  Abbé  de  Saint-Benoît-fur-Loire ,  des  Moines  pour  le 
rétablir.  Gauzelin  le  fatisfit ,  &  ,  parmi  les  Religieux  qu'il  en- 
voya ,  il  en  choifit  un  nommé  Félix  ,  homme  infatigable  ,  que  le 
Duc  chargea  du  rétabliflement  de  l'Abbaye.,  Ce  Moine  remplit 
avec  tant  de  zèle  &  d'intelligence  les  intentions  du  Prince 
Breton  &  de  fon  Abbé ,  qu'en  peu  d'années  il  rendit  cette 
Maifon  floriffante  ;  & ,  quand  il  la  vit  bien  réparée  ,  il  alla  en 
rendre  compte  à  l'Abbé  Gauzelin ,  qui  lui  en  donna  le  gouver- 
nement. Félix ,  de  retour  ,  continua  fes  réparations ,  gouverna 
fagement  fa  Communauté  ,  &:  mourut ,  en  odeur  de  fainteté ,  en 
1038.  On  prétçad  qu'il  étgit  à  Rheims  lorfque  la  mort  vint  le 


s  A  I  'iji' 

furprendre.  La  Cônftru6Hon  de  l'Eglife  eft  fort  ancienne.  Parmi 
un  grand  nombre  de  Reliques  qu'elle  renferme  dans  fon  tréfor, 
on  remarque  un  morceau  qui  pafTe  pour  être  de  la  vraie  Croix , 
6c   im  morceau  du  Ibulier  de  Notre-Sauveur.  , 

Le  fameux  Pierre  Abailard ,  né  au  Pallet ,  près  Nantes ,  fut 
Abbé  de  cette  Maifon,  l'an  1125.  Ses  Moines  ayant  voulu  l'em- 
poifonner  &  enfuite  raflafliner ,  il  fut  obligé  de  la  quitter.  Mi- 
chel Ferrand ,  Abbé  Commendataire  de  cette  Abbaye ,  y  intro- 
duifit  la  Règle  de  la  Congrégation  de  Saint-Maur  ,  en  1649. 
Elle  fut  réunie  à  l'Evêché  de  Vannes  ,  le  7  Août  177Z.  En 
1430,  ce  territoire  renfermoit  la  maifon  noble  de  Ker-enoel,  qui  ap- 
partenoit  à  Antoine  Lehenj  Se  celle  de  Ker-illegan,à  Jean  deLohan. 

SAINT-GILDAS-DES-BOIS ,  Abbaye ,  de  l'Ordre  de  Saint- 
Benoît  ,  &  Paroifîe  ;  fur  une  hauteur  ;  à  1 1  lieues  au  Nord- 
Oueft  de  Nantes,  fon  Evêché  &  fon  refTort  ;  à  16  heues  de 
Rennes  ;  &  à  2  lieues  de  Pontchâteau ,  fa  Subdélégation.  On 
y  compte  1200  communiants  :  la  Cure  eft  en  la  prélentation 
des  Mornes.  Le  territoire  offre  à  la  vue  beaucoup  de  marais, 
des  prairies,  des  terres  bien  cultivées  ,  &  des  landes  très-éten- 
dues ,  dont  la  plupart  mériteroient  d'être  cultivées.  On  y  re- 
marque deux  moulins  à  vent,  qui  portent  le  nom  du  lieu,  ôc 
defquels  on  découvre  à  dix  lieues  à  la  ronde. 

Simon,  fils  de  Bernard,  Seigneur  de  la  Rochebernard ,  fonda, 
l'an  1020  ,  l'Abbaye  de  jSaint-Gildas-des-Bois  ,  (  de  nemore  ,  )  près 
la  fource  de  la  rivière  de  Pontchâteau  ,  dans  un  lieu  nommé 
Lampridic.  Les  anciens  titres  l'appellent  quelquefois  C Abbaye  de 
la  Lande  y  de  Laiidâ^  &  de  SamceL  Cette  fondation  fut  faite 
du  confentement  du  Duc  de  Bretagne  Alain  IIÏ ,  &  de  Budic, 
Comte  de  Nantes.  Simon  de  la  Rochebernard ,  la  renouvella  & 
confirma,  en  1026,  en  préfence  de  Gautier,  Evêque  de  Nantes; 
de  Guerin ,  Evêque  de  Rennes  j  du  Duc  Alain  111  ;  &  du  jeune 
Comte  Mathias ,  fils  du  Comte  Budic.  Les  fondateurs  fe  réfer- 
verent  un  fommier  ou  cheval  de  charge ,  de  cens  ,  lorfqu'il 
leur  faudroit  aller  à  l'armée  au  loin.  Cette  Abbaye  efi  la  feule 
du  diocefe  dont  l'Abbé  porte  les  ornements  pontificaux.  Ce 
privilège  lui  fiit  accordé  pendant  le  Concile  de  Bafle  ,  mais  avec 
les  reftriftions  portées  par  la  Bulle  de  Clément  IV.  Ce  fut  l'Ab- 
baye de  Redon  ,  alors  dirigée  par  Catwalon ,  qui  peupla  le  nou- 
veau Monaftere.  Helogonus  en  fut  le  premier  Abbé.  Les  trois 
foires  qui  s'y  tiennent  par  chaque  année  ,  furent  accordées  par 


i^t  ^  A  I 

lettres -patentes    de   1592.   L'Abbaye  a   une    haute-Juflice ,  & 
M.  de  Lefquen    en  poiïede  une  moyenne  dans  ce  territoire. 

SAINT-GILLES  ;  près  la  route  de  Rennes  à  Breft  ;  à  2  lieues 
Sz  demie  à  TOueft-Nord-Oueft  de  Rennes ,  fon  Evêché ,  fa  Sub- 
délégation ,  &  Ion  reflbrt»  On  y  compte  1200  communiants-: 
la  Cure  eft  préfentée  par  l'Abbé  de  Saint-Melaine.  Le  terri- 
toire ,  d'une  fuperficie  plane  ,  offre  à  la  vue  des  terres  bien- 
cultivées  &  des  pâturages  très-abondants.  Le  beurre  &:  le  cidre 
y  font  de  la  meilleure  qualité. 

SAINT-GILLES-LE-VlCOMTE  ;  à  3  lieues  &  demie  au  Sud- 
Sud-Eil:  de  Tréguier ,  fon  Evêché  ;  à  27  lieues  de  Rennes  -,  &: 
à  2  lieues  de  Guingamp  ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe 
Teffortit  à  Lannion  ,  Si  compte  950  communiants  :  la  Cure  eit 
un  patronage  laïque ,  Se  eft  préfentée  par  M.  le  Duc  de  Lorges.^ 
Seigneur  du  lieu.  C'étoit  jadis  une  trêve  de  la  Paroiffe  de  Pom- 
merit-le-Vicomte.  Le  territoire  renferme  des  terres  en  labeur, 
des  prairies,  des  landes,  &  des  bois, 

SAINT-GILLES-PLIGEAU ,  fur  une  montagne  ^  près  la  route 
de  Guingamp  à  Pontivi  ;  à  19  lieues  à  l'Eft-Nord-Eff  de  Quim.- 
per ,  fon  Evêché  -,  à  24  lieues  de  Rennes ,  &  à  2  lieues  de 
Corlai,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  reffortit  à  Saint-Brieuc, 
8c  compte  2600  communiants  ,  y  compris  ceux  de  Ker-per 
Se  de  Saint-Conan  ,  fes  trêves  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le 
territoire  offre  à  la  vue  des  terres  en  labeur  ,  des  prairies  , 
des  landes  ,  des  coteaux ,  des  vallons ,  des  monticules ,  des 
arbres  fruitiers  j  &  l'Abbaye  de  Coetmaloën  ,  Ordre  de  Cîr 
teaux.  (  Voyez  Coetmaloën.  ) 

SAINT-GLEN;  à  13  lieues  à  l'Oueff-Sud-Oueff  deDol,  fon. 

Evêché  j   à  14  lieues   un  quart  de    Rennes  j   &  à  3    lieues   de 

Lamballe  ,  fa    Subdélégation.  Cette   Paroiffe ,  qui   eft  enclavée 

dans  le  diocefe  de  Saint-Brieuc ,   reffortit   à  Jugon ,  &  compte 

600  communiants   :    la  Cure  ell  à  l'Ordinaire,   Le     territoire  ,, 

borné  au  Sud  par   les  montagnes  du  Mné  ,  renferme  des  terres 

en  labeur  &  beaucoup  de  landes.   C'eft  un  terrein  plan.   Saint- 

Glen,  haute-Juftice  ,  à   M.   Quimper  de  Lanafcol ,  Chaufliere  ,, 

moyenne-Juftice ,  à  M.  Deshayes  -,  &  la  Ville-Tanet ,  moyenne- 

Juffice,  à  M.  Bouexiere  de  la  Ville-Tanet. 

SAINT-GONDRAN  ^ 


SAINT-GONDRAN  ;  dans  un  fond;  à  lo  lieues  au  Sud-Sud^ 
Eu  de  Saint-Malo  ,  fon  E|pché  ;  à  4  lieues  Se  demie  de 
Rennes  ;  8^:  à  i  lieue  un  quart  de  Hédé ,  fa  Subdélégation  & 
fon  refTort.  Cette  ParoifTe  relevé  du  Roi,  &  compte  300  com- 
muniants :  la  Cure  efl:  à  l'alternative.  Le  territoire ,  traverfé  au 
Sud  par  la  route  de  Rennes  à  Dinan,  offre  à  la  vue  des  terres 
très-exactement  cultivées  ,  beaucoup  d'arbres  fruitiers ,  Se  autres. 
Les  habitants  récoltent  beaucoup  de  lin,. 

SAINT -GONLAI;  à  13  lieues  au  Sud  de  Saint-Malo  ,  fon 
Evêché  ;  à  6  lieues  &  demie  de  Rennes,  fon  refTort  ^  &  à  3. 
lieues  de  Plélan  ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  900  commu- 
niants :  la  Cure  efl  préfentée  par  l'Abbé  de  Montfort.  Le  terri- 
toire ,  borné  au  Nord  par  la  rivière  de  Muel ,  &  au  Sud  par 
la  forêt  de  Paimpont,  renferme  des  terres  en  labeur  &:  beau- 
coup de  landes  qui  paroifTent  mériter  les  foins  du  cultivateur. 
Le  Changée  appartenoit ,   en  1 400  ,  à  Philippe  Haloret. 

SAINT-GONNERI;  à  12  lieues  au  Nord-Eft  de  Vannes, 
fon  Evêché  ;  à  18  Heues  de  Rennes  ;  &  à  3  lieues  de  Pon- 
tivi,  fa  Subdélégation.  Cette  ParoifTe  refTortit  à  Ploermel,  & 
compte  700  communiants  :  la  Cure  efl  à  l'alternative.  Ce  ter- 
ritoire eft  en  partie  occupé  par  la  forêt  de  Branguilly  ,  qui 
appartient  à  M.  le  Duc  de  Rohan.  Lé  furplus  offre  à  la  vue 
des  terres  en  labeur  de  médiocre  qualité  ,  quelques  prairies , 
6c  des  landes.. 

C'efl  dans  ce  territoire  qu'efl  fitué  le  château  de  Carcado , 
rnaifon  feigneuriale  de  Saint-Gonneri ,  qui  a  pris  fon  nom  d'une 
famille  auffi  ancienne  que  diflinguée.  Une  lettre  écrite  par  Dom 
Morice ,  le  4  Avril  1740,  dit  qu'il  n'y  a  pas  de  preuve  que  la 
maifon  de  Kercado  foit  iffue  de  celle  de  Rohan ,  mais  qu'il  y  a 
des  conjectures  qui  rendent  cette  opinion  probable.  La  première 
ell  tirée  de  la  reffemblance  qui  le  trouve  entre  les  armoiries 
des  anciens  Seigneurs  du  Gué-de-Lifle ,  &  celles  des  premiers- 
Sénéchaux  de  Rohan.  Ce  dernier  fe  fervoit ,  en  1300  ,  d'un  fceau 
chargé  de  fept  macles  &  d'une  bande  tirée  du  premier  au  qua- 
trième quartier.  Eon  de  Rohan  ,  qui  vivoit  dans  le  même  temps, 
&  qui  a  fait  la  branche  des  Sires  du  Gué-de-Lifle  ,  s'efl  toujours 
fervi  d'un  pareil  fceau.  Cette  conformité  de  fceaux  infînue  une 
même  origine  ,  car  il  ne  paroît  pas  croyable  que  cet  Eon  ait  pris- 
les  armes  de  fon  Sénéchal  féodé,  fi  ce  Sénéchal  n'étoit  pas  iffu 
Tome  m  G  1 


2-Î4  S  AI 

de  la  maîron  comme  lui.  D  ailleurs ,  les  Officiers  cîes  maîfofis  por- 
tent  les  armes  de  leurs  maîtres  :  1^  Sénéchaux  les  portoient  avec 
une  bnfure  j  ils  étoient  donc  plus  que  fimples  Officiers ,  Se  par 
conféquent  puînés.  Les  droits  d'afyle  &  honorifiques  annexés  à  la 
SénéchauiTée  ,  font  encore  un  grand  préjugé  en  faveur  de  celui 
qui  l'a  reçue  à  titre  d'héritage.  Le  Vicom.te  ne  s'étoit  pas  contenté 
de  lui  céder  le  droit  qu'il  avoit  de  juger  fes  vaffaux ,  il  lui  avoit 
encore  affigné  des  biens  tels  que  n'en  avoient  pas  alors  les  cadets 
de  fa  maifon.  En  1 299  ,  Alain  VI ,  Vicomte  de  Rohan ,  partagea 
deux  de  fes  cadets,  JolTelin  &  Guiart,  à  qui  il  ne  donna  pas 
deux  cents  livres  de  rente.  Les  Terres  que  le  Vicomte  tenoit 
alors  en  Bretagne  ,  produifoient  quatre  mille  cinq  cents  livres 
de  rente.  Le  Sénéchal  avoit  le  vingtième  denier  de  ferme.  Selon 
une  enquête  faite  en  1258,  il  lui  revenoit  donc  deux  cents  cin- 
quante livres  par  an  fur  les  revenus  de  la  Vicomte ,  fans  compter 
les  fonds  annexés  à  fa  charge ,  que  l'on  nommoit  la  Sénéchaujfée 
féodée ,  &  la  part  qu'il  avoit  dans  les  amendes ,  les  tailles  ,  &  les 
aides  ;  fes  revenus  excédoient  donc  ceux  des  cadets  de  fa  mai- 
fon dans  ces  premiers  temps.  Il  ne  paroît  pas  vraifemblable  que 
des  Seigneurs ,  qui  fe  conduifoient  avec  beaucoup  de  fagelTe  ,  aient 
donné  tant  de  prérogatives  à  un  étranger,  tandis  qu'ils  ne  pou- 
voient  pas  faire  les  mêmes  avantages  à  leurs  propres  cadets.  Il 
eft  donc  naturel  de  croire  que  les  Sénéchaux  de  la  Vicomte  de 
Rohan  étoient   cadets  de  cette  illuftre  maifon. 

Plufieurs  raifons  porteroient  à  regarder  la  SénéchaufTée  ,  ou 
Sénéchalie  de  Rohan,  &  les  fiefs  &  droits  qui  y  furent  atta- 
chés, comme  une  Juveigneurie  de  la  maifon  de  Rohan,  &par 
conféquent  pourroient  faire  préfumer  que  les  premiers  qui  pof- 
fédèrent  cette  charge,  étoient  fortis  ,  comme  on  vient  de  le 
dire ,  de  la  maifon  de  Rohan  ,  ou  étoient  des  cadets  de  la  maifon 
de  Molac ,  dont  le  dernier  du  nom  fut  Gui  VII  de  Molac , 
Sire,  Baron  de  Molac,  mort  en  1411,  lefquels  pouvoient  aufli 
être  fortis  de  la  maifon  de  Rohan.  L'identité  des  écuffons  6c 
armes  de  ces  deux  maifons  qui ,  dès  les  dixième  &  onzième 
fiecles  ,  étoient  de  fept  macles  pofées  3.  3.  &  i  ,  comme  la 
maifon  de  Rohan  les  portoit  alors ,  mais  différenciées  feulement 
dans  les  maifons  de  Molac  &  de  le  Sénéchal ,  par  les  émaux 
ou  brifures ,  qui  étoient  le  caraftere  diilinftif  des  cadets  ou  des 
Juveigneurs  des  maifons  illuftres  ,  &c.  De  plus  ,  le  Seigneur 
de  Molac  pofTédoit  dès-lors  la  Terre  de  Molac  de  fon  nom, 
fituée  au  diocefe  de  Vannes ,  ôc  le  fief  de  Molac-au-Breton ,  fitué 


s  A  I  23. 

en  la  Paroîfle  de  Saint-Caradec ,  lequel  fieF  de  MoIac-au-Breton 
fait  partie  des  fiefs  de  la  Sénéchalie  féodée  de  Rohan  ;  &  lefdites 
armes  de  Molac  ,  Paroiffe  du  diocele  de  Vannes ,  &  de  Molac- 
au  -  Breton ,  étoient  ,  dès  le  onzième  fiecle  ,  les  mêmes  ,  fept 
macles  j.  j.  &  i. 

Les  Seigneurs  Vicomtes  de  Rohan,  qui  tirent  leur  origine,  en 
ligne  mafculine ,  des  premiers  Rois  de  Bretagne  ,  &  dont  la 
maifon  a  toujours  fort  approché  des  maifons  fouveraines,  avoient 
dans  leur  Vicomte ,  qui  a  pafTé  de  tout  temps  pour  une  des  plus 
illuftres  &  des  plus  confidérables  de  l'Europe ,  beaucoup  de  vaf- 
faux  nobles ,  des  premiers  noms  de  Bretagne  ,  entre  lefquels 
celui  qui  tenoit  le  premier  rang  étoit  le  Sénéchal  féodé  &  hé- 
réditaire ,  comme  les  Sires  de  Joinville  l'étoient  des  Comtes  de 
Champagne ,  &  les  Sires  de  Vergi  des  Ducs  de  Bourgogne ,  8c 
apparemment  par  un  ancien  partage  de  cadets ,  fuivant  la  vieille 
coutume  qu'avoient  les  grandes  maifons  ,  tant  en  France  que 
hors  de  ce  Royaume ,  d'avoir  leurs  cadets  pour  Sénéchaux  hé- 
réditaires ,  ainfi  qu'on  en  voit  plufieurs  exemples. 

Le  Sénéchal  a  toujours  été  le  premier  à  la  Cour  des  Empe- 
reurs, des  Rois,  &  des  autres  Souverains.  Son  emploi  étoit  en 
même  temps  civil  &  mihtaire.  Chargé  de  rendre  la  juflice  aux 
fujets  du  Prince  ,  il  vifitoit ,  en  certain  temps  ,  les  provinces , 
écoutoit  les  plaintes  des  particuhers ,  réformoit  les  mauvais  juge- 
ments ,  punifToit  les  Juges  &  autres  Miniftres  de  la  Juftice ,  8c 
les  changeoit  fi  le  bien  du  Public  le  demandoit.  Dans  les  ar- 
mées,  le  Sénéchal  conduifoit  l'avant -garde,  lorfque  le  Prince 
marchoit  à  l'ennemi,  &  l'arriere-garde  après  l'aftion.  Dans  les 
combats ,  il  portoit  la  bannière  du  Prince ,  & ,  en  fon  abfence , 
il  commandoit  les  troupes.  Cet  office  ,  qui  étoit ,  dans  la  pre- 
mière infiitution ,  une  dignité  perfonnelle  ,  devint  dans  la  fuite 
héréditaire,  &  le  Vicomte  de  Rohan  y  avoit  afFefté  une  très- 
belle  Terre  ,  nommée  la  SénéchaUe  de  Rohan  ,  pour  la  tenir  de  lui 
en  fief&  hommage  lige;  elle  s'étendoit  dans  plufieurs  Paroifles, 
&  avoit  toutes  les  marques  d'une  grande  Terre ,  telles  que  font 
la  haute,  moyenne  &  bafTe-Jufiice  ,  les  épaves  gallois,  &  le 
droit  de  fe  délivrer ,  au  premier  jour  des  plaids  généraux  de  la 
Vicomte,  à  congé  de  menées  &  de  perfonnes,  alternativement 
avec  les  Seigneurs  du  Gué-de-Lifle-Rohan  :  en  un  mot,  tout  ce 
qui  caraftérife  une  grande  Seigneurie  fe  trouvoit  dans  la  Terre 
de  la  Sénéchalie  ,  &: ,  de  plus  ,  des  droits  utiles  &  honorifiques , 
qui  rendoient  cet  office  très-confidérable  j  de  forte  que  les  Séné- 


2.}i5  s  A  I 

chaux  féodés  de  Rohati  n*étoient  point  inférieurs  aux  Sénéchmit 
héréditaires  des  autres  provinces. 

La  première  des  prérogatives  dont  jouifToit  le  Sénéchal  féodé 
Se  héréditaire  de  Rohan  ,  lui  donnoit  le  vingtième  denier  de 
termes  &  baillées  ,  des  tailles  &  des  aides  ,  des  taxes  &  amendes 
de  la  Vicomte  -,  la  féconde  lui  attribuoit  le  droit  d'inftituer  des 
Lieutenants  dans  toutes  les  Barres  &  les  Jurifdiftions  de  la  Vi-^ 
comté ,  pour  y  rendre  la  juftice  ,  &  de  mettre  un  Sergent  général  ^^ 
lequel ,  fuivant  l'ancienne  coutume ,  devoit  être  noble.  En  vertu 
d'une  troifieme  prérogative,  il  portoit  la  bannière,  lorfque  le 
Vicomte  alloit  à  la  guerre ,  & ,  en  fon  abfence ,  il  comman- 
doit  les  Nobles  du  pays. 

Les  premiers  Seigneurs  qui  exercèrent  la  charge  de  Sénéchal 
&  en  portèrent  le  titre  ,  ne  font  pas  connus.  Les  vieilles  chro- 
niques qui  ont  parlé  de  cette  famille  illuftre ,  &  depuis  fi  long- 
temps puifTante  en  Bretagne ,  ne  nous  ont  rien  appris  de  certain  , 
ou  plutôt  n'ont  point  prouvé  ce  qu'elles  en  ont  dit.  Quoique  tout 
ce  qu'on  y  trouve  foit  fort  glorieux  pour  cette  maifon ,  nous  le 
paflerons  fous  filence ,  parce  qu'elle  n'a  pas  befoin  de  ces  faits 
douteux  5  pour  fa  gloire.  Ceft  dans  les  hiftoriens  Bretons  ,  reconnus 
pour  véridiques,  qu'on  trouvera  &  qu'on  doit  chercher  les  faits 
honorables  qui  ont  toujours  diftingué  les  Seigneurs  de  Molac. 

La  branche  des  Seigneurs  de  Carcado  a  pour  auteur  Eon  ou 
Eudon  le  Sénéchal,  frère  cadet  d'Olivier  III  du  nom  ,  qui  eut 
en  partage  les  Terres  du  Bot-au-Sénéchal ,  Molac-au-Breton ,  en 
la  Paroiffe  de  Saint-Caradec ,  dépendantes  &  démembrées  des 
fiefs  de  la  Sénéchalie  féodée  de  Rohan  :  fa  poftérité  pofiede 
encore  aujourd'hui  ce  partage  &  le  furnom  de  Sénéchal ,  qu'il 
portoit  &  qu'il  tranfmit  à  fes  defcendants.  Eon  ou  Eudon  le 
Sénéchal  avoir  époufé  ,  en  1 3 1 4  ,  Olive  ,  Dame  &  héritière  de 
la  Terre  &  Seigneurie  de  Carcado. 

Corentin-Jofeph  le  Sénéchal ,  ci -devant  Abbé  de  Carcado, 
eft  préfentement  Marquis  de  Molac ,  Maréchal  des  Camps  & 
Armées  du  Roi ,  Commandeur  de  l'Ordre  de  Saint-Louis ,  Gou- 
verneur de  Quimper.  Il  a  époufé  Dame  Marguerite  -  Louife- 
Françoife  le  Sénéchal ,  héritière  principale  &  noble  de  Louis- 
Alexandre-Xavier  le  Sénéchal ,  Marquis  de  Carcado.  Ce  mariage 
a  fait  la  réunion  de  la  féconde  branche   à  la  première. 

SAINT-GOUENO  -,  dans  un  fond  -,  à  7  lieues  au  Sud-Sud-Eft 
de  Saint-Brieuc 5  fon  Evêché  ^  à   15  lieues  de  Rennes,  fon  ref- 


s  A  I  137 

fort;  &  à  i  lieues  un  quart  de  Moncôntôur,  fa  Subdélégation. 
On  y  compte  700  communiants  :  la  Cure  ell  à  l'alternative.  Le 
territoire  eft  occupé  au  Nord  &  à  l'Ell  par  les  montagnes  du 
Mné,  dont  le  fol  elt  abfolument  llérile  ;  mais,  au  Sud  &  à  l'Ouefl, 
font  des  terres  en  labeur  très-fertiles,  quelques  prairies,  &  quel- 
ques landes.  Carmené  ,•  haute-JulHce ,  appartient  à  M.  de  Car- 
mené  :1a  Ville-Delée ,  haute- Juftice,  à  M,  le  Veneur  de  la 
Ville-Chaperon.  Le  manoir  du  Coudrai  6c  le  manoir  de  Langle 
font  fort  anciens. 

SAINT-GRAVÈ;  fur  la  route  de  Redon  à  Maleftroit;  à  7 
lieues  &  demie  à  l'Ell  de  Vannes ,  fon  Evêché  &  fon  refTort  ;  à 
14  lieues  de  Rennes;  &  à  4  lieues  de  Redon,  fa  Subdéléga- 
tion. On  y  compte  900  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'alterna- 
tive. Le  territoire ,  coupé  par  les  rivières  d'Ouft  &  de  Clayes, 
préfente  une  fuperficie  plane  ,  &  renferme  des  terres  en  labeur, 
des  prairies,  des  bois,  &  des  landes.  En  1480,  les  maifons  no- 
bles de  l'endroit  étoient  :  le  Cancouet,  la  Chouallais,  la  Haye, 
Bréchéan,  la  Grenaudaye ,  le  Bas-Montrait,  &  le  Montrait, 

SAINT -GRÉGOIRE  j  à  i  lieue  au  Nord  de  Rennes,  fon 
Evêché,  fa  Subdélégation  ,  &  fon  reflbrt.  On  y  compte  1200 
communiants  :  la  Cure  eft  préfentée  par  un  Chanoine  de  la 
Cathédrale.  Le  territoire ,  coupé  par  la  rivière  d'Ifle ,  offre  à  la 
vue  des  terres  très-exaftement  cultivées ,  &  beaucoup  d'arbres  & 
buiflbns.  On  trouve  ,  dans  certains  cantons  ,  des  amas  de  fables  , 
que  vraifemblablement  la  mer  y  a  dépofés ,  &  qui  paroiftent  un 
detritum  de  coquilles  :  il  reffemble  affez  à  ce  fable  que  les  la- 
boureurs emploient  à  fertilifer  leurs  terres.  Les  habitants  le 
nomment  fable  de  Saint-Grégoire  :  il  contient  des  coquilles  en- 
tières &  des  loftéocles.  Les  maifons  nobles  de  cette  ParoiiTe , 
en  1420,  étoient  ;  le  Defert-Seul  &  la  Hautiere  ,  à  Pierre  de 
Pocé  ;  la  Grimaudayc  &  le  Val,  à  Jean  le  Prêtre  ;  la  Bréteche, 
à  Guillaume  Mandart  ;  la  Pleffe  ,  Launai ,  les  Chefnais  ,  &  Hau- 
debert ,  à  Jean  du  Breil  j  la  Vizeulle  ,  la  Saudraie  ,  &  les  Char- 
bonnières, à  N 

SAINT-GUINOU  ;  dans  un  fond ,  au  bord  des  marais  ;  à  2 
lieues  à  l'Oueft-Nord-Oueft  de  Dol ,  fon  Evêché  ;  à  1 2  lieues 
de  Rennes  ;  &  à  3  lieues  de  Saint-Malo  ,  fa  Subdélégation. 
Cette  Paroiiîe  reflbrtit  à  Dinan ,  &  compte  700  communiants  : 


x}8  S  AI 

la  Cure  eu  à  l'Ordinaîre.  Le  territoire  eft  coupé  à  TEft 
par  le  ruifTeau  de  Bied-Jean  j  au  Sud,  font  les  marais  de  DoL 
Les  terres  font  fertiles  en  grains  &  foin ,  &  très-exaftement  cuir 
tivées.  Les  maifons  nobles  du  lieu  étoient ,  en  1 5  oo ,  la  Ven- 
tiere  ,  à  Briand  de  Tréal  ;  Ker-yoUis ,  à  Jean  Quelleneuc  ^  la 
ViUe-Aubel  ,  à  Alain  Clohan  -,  le  Buat ,  à  Jean  Bouaye  -,  le 
Pré  ,  à  Jean  de  Quelleneuc  ;  la  Motte  &  la  Landelie  ,  h 
Pierre   de  la   Motte  5  &  Maupertuis ,   à  Jean  le  Bouteilier. 

SAINT-HELEN;  à  3  lieues  trois  quarts  au  Sud-Oueft  de  Dol^ 
fon  Evêché  &  fa  Subdélégation  ;  &  à  10  lieues  de  Rennes» 
Cette  ParoifTe  reffortit  à  Dinan,  &  compte  900  communiants: 
la  Cure  eil  à  l'Ordinaire.  Le  territoire  renferme  la  forêt  de 
Coetquen ,  des  terres  en  labeur  ,  des  prairies ,  &  des  landes  : 
il  produit  beaucoup  de  cidre.  Il  fe  tient  deux  foires  conlidé- 
rables  par  an   à  Saint-Helen. 

Le  château  de  Coetquen  eft  la  maifon  feigneuriale  de  Saint- 
Helen  :  c'eft  lui  qui  a  donné  fon  nom  à  l'illuftre  famille  de 
Coetquen ,  dont  l'origine  fe  perd  dans  l'obfcurité  des  fiecles» 
Dupas  5  dans  fon  hiftoire  ,  prétend  quelle  fort  des  anciens 
Comtes  de  Dinan  ,  &:  que  le  premier  qui  prit  le  nom  de 
Coetquen ,  fut  Olivier  y  fils  de  Rivallon ,  &  frère  de  Godefroi ,, 
Comte  de  Dinan.  Cet  Olivier  vivoit  à  la  fin  du  douzième 
fiecle ,  fi  l'on  en  croit  l'hiftoire  citée  ;  mais  il  fe  trompe ,  puif- 
que  les  titres  de  cette  maifon  prouvent  que  Raoul  de  Coetquen 
vivoit  l'an  11 50,  &  qu'Olivier,  fon  petit-fils,  fe  trouva  aux: 
Etats  afîemblés  à  Vannes  en  1203.  Ce  feroit  donc  Raoul  &: 
non  Olivier  qui  auroit  pris  le  premier  le  nom  de  Coetquen  j  mais 
ceci  eft  fort  indift'érent,  dès  qu'on  prouve  que  les  Seigneurs  de 
cette  maifon  tenoient  un  rang  diftingué  en  Bretagne  dès  le  dou- 
zième fiecle.  Jean  de  Coetquen  mourut  prifonnier  en  Angleterre 
pendant  les  guerres  entre  le  Comte  de  Montfort  &  Charles  de 
Blois ,  au  fervice  duquel  il  étoit  attaché.  Raoul ,  fon  fils  ,  fut 
Gouverneur  de  Redon  &  du  château  de  Léhon  ,  près  Dinan. 
Raoul  de  Coetquen  afllfta,  comme  Banneret ,  aux  Etats  de  Vannes, 
en  1 408  j  Marie  de  Coetquen  ,  fa  fœur ,  époufa  Jean  ,  Sire 
d'Acigné  ;  Raoul  de  Coetquen  ,  Gouverneur  de  Dinan  &  Maré- 
chal de  Bretagne,  époufa  Marguerite  de  Maleftroit  ;  Jean,  Grand- 
Maître  de  Bretagne ,  époufa  Catherine  de  Chateaubriand  j  un 
autre  aulîi  nommé  Jean,  fut  Lieutenant  de  Roi  en  Bretagne ->. 
&  c'eft  ea  fa  faveur  que  le  Roi  Henri  III  érigea  la  Terre   & 


s  A  1  i}9 

Seigneurie  de  Coetquen  en  Marquifat ,  Tan  i  Ç75  •,  il  époufa  Phi- 
lippe d'Acigné,  qui  lui  porta  le  Comté  de  Combourg.  Henri  IV 
le  fit  Gouverneur  de  Saint-Malo ,  &  le  nomma  Chevalier  de 
fes  Ordres  en  1 595  ,  mais  ce  Seigneur  mourut  avant  d'avoir  reçu 
le  collier  :  Jean  de  Coetquen  ,  fon  fils  ,  époufa  Renée  de  Rohan  -, 
&  Louis  de  Coetquen ,  Henriette  d'Orléans.  Malo ,  Marquis  de 
Coetquen,  prit  en  mariage  Marie  -  Charlotte  de  Nouailles  :  ces 
Seigneurs  furent  fucceffivement  Gouverneurs  de  Saint-Malo  j 
mais  leur  poflérité  mafculine  s'étant  éteinte ,  leurs  biens  font 
tombés  en  la  maifon  de  Duras ,  par  le  mariage  de  l'héritière  de 
cette  maifon  avec  M.  le  Maréchal  Duc  de  Duras,  Pair  de  France, 
qui  jouit  aujourd'hui  du  Marquifat  de  Coetquen. 

En  1500  ,  on  connoifToit  dans  ce  même  territoire  les  maifonS 
nobles  fuivantes  :  la  Ville-Bougaut,  à  Guillaume  le  Bigot  ;  Murs- 
Fille  ,  à  Henri  le  Prévofi  ;  la  Folletiere ,  à  Jean  Cadiou  -,  le 
Plefîis,  à  Guillaume  de  Lanteretj  le  Pont-Riou ,  à  Gilles  Pépin; 
la  ThyeuUaye  ,  à  Charles  Grinuel  -,  &  la  Falaife ,  à  Jean  de 
Rougé. 

SAINT-HELÎER ,  à  une  demi-lieue  à  l'Efi-Sud-Efl  de  Rennes , 
forme  un  des  fauxbourgs  de  cette  ville.  On  y  compte  2000  com- 
muniants :  la  Cure  efl:  préfentée  par  un  Chanoine  de  la  Cathé- 
drale. C'efi:  dans  ce  bourg  que  fe  fait  l'embranchement  des 
routes  de  Rennes  à  la  Guerche ,  &  de  Rennes  à  Chateaubriand , 
&  que  font  fituées  les  fourches  patibulaires  du  Parlement  ^  que 
l'on  nomme  la  Quarréc,  Le  territoire  produit  du  grain ,  du 
foin ,  &  du  cidre.  Aux  environs  de  la  maifon  de  Braye  ,  on 
trouve  dans  des  rochers  ,  du  fpalt  qui  efi:  très-feuilleté  5  il  y  en 
a  de    dur ,  &  d'autre  fi  tendre  qu'on  l'écrafe  avec  les  dqigts. 

La  Terre  &  Seigneurie  de  Cucé  ,  fituée  dans  ce  territoire , 
appartenoit  jadis  à  la  maifon  de  Bourgneuf ,  qui  a  produit  des 
hommes  d'un  mérite  rare.  JuHen  de  Bourgneuf  rendoit  la  JuHice 
dans  la  province  avec  le  titre  de  Préfidenr  de  Bretagne  ;  &: ,  lors 
de  l'inltitution  du  Parlement ,  le  Seigneur  de  Bourgneuf  fut 
nommé  Premier  Préfident,  charge  que  fes  defcendants  ont  pof- 
fédé  long-temps.  La  Seigneurie  de  Cucé  fut  érigée  en  Mar- 
quifat, l'an  1644,  en  faveur  de  Henri  de  Bourgneuf,  Seigneur 
de  Cucé  ,  Premier  Préfident  au  Parlement  de  Bretagne.  Ce  Ma- 
giftrat ,  ayant  été  député  par  fa  Compagnie  auprès  du  Roi , 
mourut  à  Paris ,  fans  poftérité ,  le  27  Août  1 660 ,  regretté  de 
la  nation  Bretonne ,  qui  le  pleura  comme  un  père  bicntaifant. 


X4^  S  A  I 

SAINT-HERBLAIN  ;  fur  une  hauteur  ;  à  i  Heue  deux  tkri 
à  rOueft  de  Nantes,  fon  Evêché  ,  fa  Subdélégation ,  &  fon  reffort  ; 
&  à  23  lieues  de  Rennes.  Cette  ParoifTe  relevé  du  Roi  :  on  y 
compte  2000  communiants  -,  la  Cure  eft  préfentée  par  le  Chapitre 
de  l'Eglife  Cathédrale.  Le  territoire  ,  borné  au  Sud  par  la  rivière 
de  Loire  ,  efl:  coupé  de  ruiffeaux  qui  arrofent  de  riches  prairies  -,  le 
pays  eu  très-agréable,  &  l'air  très-fain:  les  terres  font  fertiles  en 
grains  ,  &  vin  de  médiocre  qualité  ;  mais  ce  dont  on  ne  peut 
trop  s'étonner  ,  c'eft  de  voir  à  l'Eft-Nord-Ell:  de  ce  bourg ,  ôc 
pour  ainfî  dire  aux  portes  de  Nantes ,  des  landes  très-étendues  ^ 
dont  le  fol  paroît  mériter  les  foins  du  cultivateur.  L'EgUfe  de 
Saint  -  Herblain  fut  bâtie  en  l'honneur  de  Saint  Herblon  ,  qui 
mourut,  dans  le  Prieuré  d'Indre,  le  25  Mars  720. 

La  maifon  Seigneuriale  de  cette  Paroifïe  eft  le  château  du  Mar- 
quifat  du  Bois  de  la  MufTe ,  en  la  ParoifTe  de  Chantenai  5  le  Sei- 
gneur a  les  mêmes  droits  dans  l'Eglife  de  Saint-Herblain  que  dans 
celle  de  Chantenai,  &  en  outre  les  droits  de  foires  &  marchés. 
Cinq  fiefs  de  haute  -  Juftice  ,  fitués  dans  la  ParoifTe  de  Saint- 
Herblain  ,  dépendent  de  ce  Marquifat  ,  fçavoir  :  le  Bois ,  Ses- 
Maifons ,  le  PlefTis ,  la  Bouvardiere ,  &  la  Hunaudais.  Les  mai- 
fons  nobles  de  la  PetifTiere  ^  de  la  Bourgonniere ,  du  PlefTis- 
Bouchet,  de  la  Jolie-Reine,  de  la  Chauviniere,  du  Vigneau  ^ 
de  la  Bourderie ,  de  la  Moftiere  ,  de  Carcouet ,  de  la  Bernar- 
diere  ,  du  Fonteni ,  &  de  la  Rabotiere  ,  en  relèvent  à  foi ,  hom- 
mage ,  &  rachat.  En  1500,  la  Bouvardiere  &  l'Angeviniere  ap- 
partenoient  à  François  l'Epervier  de  la  Bouvardiere  j,  la  première 
appartient  aujourd'liui  à  Madame  de  Coutance  :  le  PlefTis-Bou- 
chet,  à  Guillaume  Lcayfelj  la  Patuiere  ou  la  Petifîiere  &  la 
Morefliere,  à  Guillaume  de  SafTré  ;  la  Bourgonniere ,  à  Guilr 
laume  Carreau  de  la  Bourgonniere  j  Teillai ,  à  Claude  Mareil  5;. 
la  Chauviniere ,  à  Jean-Baptifte  du  DifTaut  5  &  la  Boudardiere  ^  à 
Guillaume  le  Texier,. 

SAINT-HERBLON  5  fur  une  hauteur  5  à  9  lieues  à  l'Efl-Nord- 
Eû  de  Nantes ,  fon  Evêché  &  fon  reffort  ;  à  20  lieues  de  Rennes  j 
&  à  2  lieues  d'Ancenis ,  fa  Subdélégation.  Cette  ParoifTe  relevé 
du  Roi  :  on  y  compte  1 400  communiants  j  la  Cure  ell  à  l'Or- 
dinaire. Le  territoire  efl  coupé  de  ruifTeaux  qui  vont  tomber 
dans  la  rivière  de  Loire  ,  &  produit  du  grain ,  du  foin  ,  &  beau- 
coup de  vin  qui  eft  de  bomie  qualité:  on  ne  remarque  ni  bois^ 
ci  landes ,  dans  la  ParoifTe  ,  tout  efl  cultivé.  L'Eglife  paroifTiale 

fut 


s  Al  i4t 

fut  élevée  en  l'honneur  de  Saint  Herblon ,  qui  mourut ,  le  2  5 
Mars  720,  dans  l'Abbaye  d'Indre.  En  1196,  André,  Seigneur 
de  Varades ,  laifla  ,  par  tellament  ,  dix  fols  à  l'Eglife  de  Saint- 
Herblon  :  Je  marc  d'argent  valoit  alors  cinquante  lois.  En  1430, 
on  voyoït  dans  ce  territoire  les  maifons  nobles  fuivantes  :  la 
Seherie ,  que  Jean ,  Secrétaire  d'Ancenis  ,  acquit  de  Jean  Du- 
pont ,  Chevalier  ;  la  Métaine  ,  aux  Religieules  Hofpitalieres  j 
Beaubois  ,  à  François  de  Bretagne  ,  Seigneur  de  C  hàteaufremont. 
L'Abbé  &  les  Moines  de  Pontotrain  polTédoient  dans  le  même 
temps  quatre  métairies  dans  ce  territoire.  La  Templerie  ,  à  l'Or- 
dre de  Malte ,  aujourd'hui  au  Commandeur  de  la  Guerche  :  la 
Graflene  ,  la  Koche-Paliere,  6c  la  Bourelliere  font  plus  modernes; 
elles  exiftoient  en  1 500.  Le  Marquifat  de  Châteaufremont ,  haute- 
JulHce ,  à  M.  le  Préiident  de  Cornullier  :  la  Ragotiere  &  la 
Bilhere  ,  haute-Juftice  ,  à  M.  d'Achon. 

SAINT  -  HERNIN  ;  dans  un  fond  ;  à  9  lieues  &  demie  au 
Nord-Eft  de  Quimper ,  fon  Evêché  ;  à  3 1  lieues  de  Rennes  ;  & 
à  I  lieue  &  demie  de  Carhaix,  fa  bubdélégation.  Cette  Paroiffe 
relevé  du  Roi,  reffortit  à  Châteauneuf,  &  compte  1200  com- 
muniants :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire  ,  borné  au 
Nord  par  la  rivière  d'Aulne  ,  &  au  Sud  par  les  montagnes  noires  , 
offre  à  la  vue  des  terres  bien  cultivées  ,  des  prairies ,  &  beau- 
coup de  landes  ;  le  pays  eft  riant ,  très-agréable ,  coupé  de  val- 
lons ,  &  couvert  d'arbres  &  buifîbns. 

La  Terre  &  Seigneurie  de  Ker-goat  eft  très-ancienne  ;  elle 
étoit  poffédée  ,  en  1200,  par  Yves  le  Moine.  Yves,  fon  petit- 
fîls,  prêta  ferment  de  fidéhté  au  Comte  de  Montfort ,  en  13(39. 
Il  eut  un  fils ,  nommé  Yves  Hingoit  de  Kergoat ,  qui  fut  Médecin 
ordinaire  du  Duc  Jean  V,  qui  lui  procura  l'Evêché  de  Tréguier 
en  1402;  mais  il  ne  garda  ce  Siège  qu'environ  deux  ans: 
il  fît  bâtir  le  magnifique  château  de  Ker-goat ,  qui  palTa  pour 
une  place  très-forte,  &  mourut  en  1403.  Après  fa  mort,  ce  châ- 
teau appartint  à  Olivier  le  Moine,  Grand-Ecuyer  de  Bretagne, 
dont  le  fils,  auffi  nommé  Olivier,  fut  Chambellan  &  Grand- 
Ecuyer  de  Bretagne;  il  appartenoit,  en  1590  ,  au  Seigneur  de 
Kercolé ,  qui  y  avoir  de  grandes  nchcfîès.  Le  Capirame  la  Trem- 
blaye  réfolut  d'en  faire  fon  profit  ,  & ,  dans  ce  dellem ,  il  afîiégca 
la  place  ;  mais  elle  fut  fi  bien  déftndue  qu'il  fut  obligé  d'aller 
chercher  fortune  ailleurs.  En  1675  ,  il  y  eut  dans  les  environs 
de  Carhaix  ,  comme  dans  pluficurs  autres  cantons  de  la  province. 
Tome   IV^  H  2 


2.42^  ^        S  AI; 

des  révoltes  confîdérables  à  loccafion  des  nouveaux  droits,  da 
papier  timbré ,  du  contrôle ,  &c.  on  en  a  des  relations^  bien  cjr- 
conllanciées ,  qui  prouvent  quelle  fut  la  fureur  des  révoltésé, 
Le  château  de  Kergoat  fut  brûlé,  dans  le  même  temps,  par  les 
vafTaux  de  M.  Trevigni  ,  Seigneur  propriétaire  de  cette  belle} 
Terre.  Les  incendiaires  fe  plaignoient  d'une  augmentation  très- 
confidérable  fur  leurs  redevances ,  &  de  Tinjuilice  vraie  ou  im^vi 
ginaire  de  leur  Seigneur.  Cette  action  ne  demeura  pas  impunie. 
Les  coupables  furent  condamnés  folidairement  les  uns  pour  les 
autres ,  à  payer  de  groffes  fommes  au  Seigneur  de  Trevigni ,. 
pour  la  réparation  des  dommages  qu'ils  lui  avoient  caufés.  François, 
de  Coëtlogon  ,  Evêque  de  Quimper,.joua  un  très-beau,  rôle  d^ns 
cette  affaire.  Les  coupables  s'adrefferent  à  lui  ,  &  éprouvèrent) 
fes  bontés  :  touché  de  leur  repentir ,  il  leur  fervit  de  médiateur  9. 
&:  fe  chargea  de  leur  procuration.  Il  fit  une  répartition  modérée. 
&  réduite  ,  d'une  fomme  de  foixante  mille  livres ,  qui  reftoit  à 
payer  par  les  Paroifles  où  demeuroient  les  incendiaires.  Ce  traité 
fut  accepté  par  M.  Henri  Barin  de  Bois-Jaffrai,  Curateur  du. 
jeune  Seigneur  de  Trevigni.  La  Terre  &  Seigneurie  de  Ker-gpat , 
haute- Juftice  ,  appartient  aujourd'hui  à  M,  de  Roquefeuille  ,  Lieur 
tenant  général  des  armées  navales. 

SAINT  -  HÏDEULT  j.  à  4.  lieues  &  demie  au  Nord-Oueft  de 
Dol ,  fon  Evêché  j  à  14.  lieues  de  Rennes;  &  à  trois  quarts  de 
lieue  de  Saint-Malo,  fa  Subdélégation.  Cette  ParoifTe ,  enclavée 
dans  le  diocefe  de  Saint-Malo,  reffortit  à  Dinan ,  &  compte  4.00 
communiants  :  la  Cure  eft  à  l'Ordinaire.  Le  territoire ,  borné  au 
Nord  &  à  rOueft  par  la  mer ,  offre  à  la  vue  deux  vallons  qui 
font  à  rOueft  de  fon  bourg  ,  &:  des  terres  très-exa8:ement  cultivées. 

SAINT-HILAIRE-DE-CHALÉONS  ;  à  6  lieues  à  l'Oueff-Sud- 
Oueft  de  Nantes ,  fon  Evêché  &:  fon  reffbrt  j  à  27  Ueues  de 
Rennes;  &  à  2  lieues  un  tiers  de  Bourgneuf,  fa  Subdélégation, 
On  y  compte  1000  communiants:  la  Cure  eu.  à  l'Ordinaire- 
M.  le  Marquis  de  Juigné ,  Seigneur  de  la  Paroiffe  ,  a  les  prières 
nominales ,  &  préfente  un  Bénéfice ,  nommé  de  Saim-Laurent ,  def- 
fervi  dans  cette  Eglife.  Le  territoire  efl  ,  en  général ,  très-fertile 
en  froment ,  &  bien  cultivé  ;  il  produit  auffi  du  vin  de  médiocre 
qualité.  La  rareté  des  prairies  &  des  fourrages  occafionne  celle 
du  bétail  néceffaire  pour  la  culture  ,  &  du  fumier  qui  fert  à  cngraif-^ 
fer  les  terres.  Les  agriculteurs  font  obligés  d'ailçr  à  deux  lieues- 


s  A  I  24J 

Se  plus  chercher  des  engrais ,  qu'ils  ne  conduilent  qu'avec  beau- 
coup de  peine  par  des  chemins  de  traverfe;  chemins  imprati- 
cables pendant  la  moitié  de  l'année.  Ces  difficultés  font  un  obf- 
tacle  très-préjudiciable  aux  progrès  de  l'agriculture  &  du  com- 
merce j  &  il  fer  oit  à  defirer  que  ceux  qui  ont  l'autorité  en  main, 
ou  la  facuhé  de  faire  le  bien ,  employaffent  les  moyens  conve- 
nables pour  donner  aux  habitants  de  ces  cantons  la  facihté  de 
fe  livrer  au  commerce. 

Le  pays  de  Retz  eft  ,  fans  contredit  ,  le  meilleur  de  la  Bre- 
tagne ,  le  plus  fertile ,  &  le  plus  riant  dans  la  belle  faifon  ;  & 
un  des  plus  grands  biens  qui  pût  arriver  à  la  ville  de  Nantes 
de  même  à  tout  le  Comté  Nantais ,  feroit  de  lui  ouvrir  des 
communications  avec  ce  Duché.  C'ert  de  là  que  l'on  tireroit  une  partie 
des  grains  néceffaires  pour  la  confommation  de  cette  ville  ;  &  les  ha- 
bitants de  ce  canton  fertile  ,  trouvant  un  débouché  Hbre  ,  prompt, 
&  lucratif  de  leurs  denrées ,  augmenteroient  d'aftivité  ,  &  feroient 
de  leur  pays  un  nouveau  Pérou.  Ce  n'eft  point  exagérer  ,  & 
nous  en  appelions  hardiment  à  tous  ceux  qui  connoiffent  le 
local  :  ils  ne  nous  contrediront  certainement  pas.  Pour  tirer  de 
ce  pays  tous  les  avantages  qu'il  femble  promettre  ,  il  faudroit 
d'abord  commencer  par  rendre  les  chemins  de  traverfe  plus  com- 
modes ,  foit  en  creufant  des  banquettes  des  deux  côtés ,  foit  en 
les  exhauifant ,  ou  en  détournant  le  cours  des  eaux  qui  les  inon- 
dent. Il  feroit  auffi  très-facile  de  faire  des  prairies  artificielles, 
pour  fuppléer  aux  prairies  naturelles  qui  manquent  en  ce  pays  -, 
.  &  même  la  difpofition  du  terrein  fait  efpérer  que  l'on  en  pour- 
roit  former  de  très-bonnes  de  l'une  &  de  l'autre  efpece.  Enfin , 
on  pourroit  exécuter  un  canal,  déjà  tracé  par  la  nature  &  en 
partie  formé  par  elle ,  dans  les  marais  qui  viennent  aboutir  aflez 
près  du  bourg  de  Saint-Hilaire-de-Chaléons  &  de  celui  de  Che- 
meré ,  &  qui  continuent  jufqu'à  l'étier  de  Haute  -  Perche ,  c{ui 
conduit  à  Pornic.  Par-là ,  tout  ce  pays  auroit  une  communica- 
tion libre  avec  Nantes  par  la  rivière  du  Tenu ,  &  avec  la  mer 
par  Pornic.  Rouans,  Sainte-Pazanne  ,  Saint-Hilaire-de-Chaléons, 
Chemeré ,  Arton  ,  Chauve ,  Prigné  ,  le  Bourg  des  Moutiers ,  le 
Clion  ,  &:  même  Pornic  ,  prendroient  une  nouvelle  exillence. 
Cette  dernière  ville,  quoique  fituée  fur  les  bords  de  la  mer, 
«n  retireroit  un  grand  avantage  ,  tant  parce  que  ion  port  feroit 
plus  fréquenté,  que  parce  qu'elle  ne  feroit  plus  expolee  à  faire 
voiturer  fes  denrées  par  mer  ;  exportation  toujours  dangereiife 
&  en  même  temps  très-coûteufe.  On  épargneroit ,  par  ce  moyen , 


144  S  A  I 

les  frais  de  tranfport,  qui  abforbent  une  partie  des  profits  du 
laboureur ,  &  le  laiffent  dans  fon  indigence  &  fa  parefle.  Car , 
il  faut  le  dire ,  malgré  la  fertilité  du  fol ,  il  s'en  faut  bien  que 
le  Duché  de  Retz  foit  exaftement  cultivé  :  on  y  remarque  en- 
core beaucoup  de  terres  incultes.  En  temps  de  guerre ,  ce  canal 
offriroit  un  autre  avantage.  Les  navires,  battus  parla  tempête, 
ou  pourfuivis  par  l'ennemi ,  auxquels  les  vents  ou  la  pourfuite  ne 
permettroient  pas  d'entrer  dans  la  Loire,  pourroient  s'y  réfugier, 
&  de  là  envoyer  à  Nantes ,  par  le  nouveau  canal ,  leurs  mar- 
chandifes  fans  aucuns  rifques.  Il  y  a  dans  ce  bourg  un  ruifTeau 
très-petit,  qui  a  flux  &  reflux,  quoiqu'il  n'ait  aucune  communi- 
cation vifible  avec  la  mer  ,  qui  s'en  trouve  éloignée  de  trois 
lieues. 

En  1400  ,  Jean R efignant  permuta,  du  confentement  del'Evêque 
de  Nantes  ,  fa  Cure  de  Chaléons  avec  la  Chapellenie  de  Saint- 
Martin  ,  deflérvie  dans  l'Eglife  Collégiale  de  Nantes  par  Jean 
Robin.  Si  la  Cure  de  Saint-Hilaire  valoir  alors  ce  qu'elle  vaut 
aujourd'hui,  Jean  Robin  ne  perdoit  pas  au  change,  pmfque  cette 
Cure  vaut  dix  mille  Hvres.  Le  Bois-Rouaud ,  MaubufTon  ,  ViUe- 
Morice ,  Hunaudais,  Sicaudais ,  &  Vue,  forment  une  moyenne- 
Juftice  ,  qui  appartient  à  M.  le  Marquis  de  Juigné  :  le  Marais  de 
la  Salle,  moyeniie-Jufl:ice  ,  à  M.Charette  de  6ois-Foucaud  ;  la 
BaflTe-Ville  ,  moyenne-Jufl:ice ,  à  M.  Montaudouin.  L'Ordre  de 
Malte  &  l'Abbaye  de  Bufai  pofledent  des  domaines  &  des 
dîmes  dans  cette  Paroifl!e.  Le  Duché  de  Retz  y  a  aufli  des  fiefs. 

SAINT-HILAIRE- DES-LANDES  ;  à  7  lieues  un  quart  au 
Nord-Efl:  de  Rennes,  fon  Evêché  j  &  à  2  lieues  &  demie  de 
Fougères  ,  fa  Subdé légation  &  fon  reflx)rt.  Cette  Paroifle  relevé 
du  Roi ,  &  compte  1 200  communiants  :  la  Cure  efl:  à  l'alterna- 
tive. Le  territoire  offre  à  la  vue  des  terres  en  labeur,  quelques 
prairies  ,  des  landes ,  &  beaucoup  d'arbres   fruitiers  &  autres. 

Le  château  de  la  Haye-Saint-Hilaire ,  avec  haute- Jufl:ice  ,  efl 
la  maifon  feigneuriale  de  l'endroit  :  il  appartenoit,  en  1480,  à 
Jean  de  la  Haye,  Chevalier,  Seigneur  de  Saint-Hilaire  j  en 
1670  ,  à  Chriftophe  de  la  Haye,  Gouverneur  de  Fougères;  &, 
aujourd'hui ,  à  M.  de  la  Haye-Saint-Hilaire ,  de  la  même  famille. 

Le  Feu-Saint-Hilaire  efl: une  Terre  noble,  pofl^édée  ,  de  temps 
immémorial  ,  par  la  feule  famille  noble  de  ce  nom  en  Bretagne. 
L'incendie  de  cette  maifon  en  1635,  &  des  ennemis  puiflants  , 
pccafionnerent  aux  du  Feu  une  efpece  d'interlocution  en  1668  > 


s  A  I  245 

ils  retirèrent  aufïi-tôt  à  la  Chambre  des  Comptes  leur  attache  à 
Jehan ,  quaHfié  Seigneur  du  Feu  à  la  réformation  de  1513,  & 
prouvèrent  leur  delcendance  de  Jehan,  né  en  139(5.  Ce  Jehan 
eft  qualifié  de  Seigneur  du  Feu ,  Sz  du  titre  de  Baron ,  fans 
qu'on  voie  quel  droit  il  pouvoit  avoir  à  cette  dernière  qualité. 
Il  donna  à  fon  fils ,  en  le  mariant  avec  une  de  Porçon  ,  le 
Feu-Saint-Hilaire ,  &  eut ,  d'un  fécond  mariage  ,  une  fille  uni- 
que ,  qui  époufa  Jacques  de  Jouin ,  Ecuyer.  S'étant  rendu  cau- 
tion dudit  Jouin ,  il  fut  forcé  de  vendre  le  Bois-Cornillé ,  dans 
la  Paroiffe  d'Yzé ,  &  le  Feu ,  ParoifTe  de  Montreuil.  Jacques 
de  Jouin  ayant  été  fait  prifonnier  ,  le  Duc  de  Bretagne  lui 
donna  trois  cents  foixante- trois  livres  pour  payer  fa  rançon. 
Jean,  né  en  1431  ,  pafTe  à  la  réformation  de  15 13  fous  la 
qualité  de  Seigneur  du  Feu ,  &  meurt  en  151 4.  Charles ,  fon 
nls ,  paroît  à  l'alTemblée  des  Nobles,  en  1480  ,  &  a  pour  fils 
Gilles  du  Feu,  employé,  en  153^  &  15  53?  ^  ^^  garde  du  châ- 
teau de  Fougères.  Georges  &  François,  fes  enfants,  comp^roif- 
fent,  en  1562,  avec  le  Sénéchal,  leur  parent,  à  l'arriere-ban. 
La  Liniere  ,  haute  -  Juftice  ,  &  Leurmond  ,  haute -Juftice  ,  à 
Mademoifelle  de  Rochefort  ;  le  Feil ,  moyenne-Juflice  ,  à  M.  le 
Pelletier  de  Rofambo  j  ck  les  Flégés ,  moyenne-Jufhce ,  à  M.  des 
Flégés-BegafTe. 

SAINT-HILAIRE-DU-BOIS  ;  à  7  lieues  au  Sud-Eft  de  Nantes , 
fon  Evêché  &  fon  reiïbrt  j  à  29  lieues  de  Rennes  ;  6c  k  1  lieue 
de  Chflbn  ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  800  communiants. 
Cette  ParoifTe  fe  nommoit  d'abord  Saint-HiIaire-des-Foréts ,  p^vce 
que ,  lors  de  fa  fondation  ,  elle  étoit  toute  entourée  de  forêts  : 
elle  fut  donnée  à  l'Abbaye  de  Saint-Jouan-de-Marne  ,  dont  les 
Abbés  ont  préfenté  la  Cure  jufqu'en  1774,  qu'ils  la  remirent  à 
l'Evéque  diocéfain.  Le  territoire  eu  borné  au  Sud  &  à  l'Ouefl: 
par  la  province  du  Poitou  ;  il  eft  très-exa£lement  cultivé ,  &:  pro- 
duit du  grain  ,  du    foin  ,  &:  du  vin. 

SAINT-JACQUES-DE-LA-LANDE  ;  à  i  lieue  un  tiers  au 
Sud-Sud-Oueft  de  Rennes,  fon  Evêché,  fa  Subdélégation, 
&  fon  reflbrt.  On  y  compte  600  communiants  :  la  Cure  eft 
préfentée  par  l'AbbelTe  de  Saint-Georges.  Le  territoire  offre  à 
la  vue  des  terres  abondantes  en  grains,  des  prairies,  des  landes, 
&  beaucoup  d'arbres  à  fruits.  Les  Templiers  y  avoient  jadis 
des  poffeffions,  » 


%±6  S  A  r 

SAINT JACQUES-DE-PIRMIL.    (  Voyez  Saint-Sébaftien.  ) 

SAINT JACUT ,  près  la  rivière  d'Ars  j  à  9  lieues  à  l'Eft  dé 
-Vannes ,  Ton  Evêché  &  fon  reffort  ;  à  1 4  lieues  de  Rennes  j  & 
à  2  lieues  de  Redon,  fa  Subdéiégation.  On  y  compte  1200 
communiants  :  la  Cure  ell  à  l'alternative.  Le  territoire  ,  varié 
de  vallons ,  de  coteaux ,  &  de  monticules  ,  offre  à  la  vue  des 
terres  bien  cultivées ,  des  prairies  ,  des  marais ,  des  landes ,  & 
beaucoup  d'arbres  à  fruits.  En  1500,  il  renfermoit  les  maifons 
nobles  de  Caloën ,  du  Mortier ,  de  la  Guedemaye  ,  &:  d'Ar-^ 
dillac. 

SAINTJACUT  ;  à  7  lieues  au  Sud-Eft  de  Saint-^Brieuc ,  fon 
Evêché;  à  13  lieues  de  Rennes,  fon  relTort  ;  &  à  3  lieues  de 
Moncontour  ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  1000  commu- 
niants ,  y  compris  ceux  de  Saint-Gilles-du-Mné  ,  fa  trêve  :  la 
Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire  eft  plein  de  montagnes  j  il 
renferme  une  quantité  prodigieufe  de  landes  &  peu  de  terres  en 
labeur.  C'eft  là  où  commence  cette  longue  chaîne  de  mon- 
tagnes qui  s'étend  jufqu'à  la  baie  de  Douarnenez,  auprès  de 
Crozon,  dans  une  étendue  de  trente-cinq  lieues.  En  1450, 
le  manoir  de  la  Guerinaye  appartenoit  à  l'Abbaye  de 
Saint -Jacut  :  Bonnit  ,  haute  ,  moyenne  &  baffe -JulHce  ,  à 
Mademoifelle  Texier  ;  &  le  Parc-Lomaria ,  haute ,  moyenne- 
&  baffeJuffice ,  à  Madame  du  Gage. 

SAINTJACUT,  Abbaye  &  Paroiffe  ;  à  7  lieues  à  l'Ouefl: 
de  Dol,  fon  Evêché  ;  à  14  lieues  de  Rennes;  6ç  à  4  lieues 
de  Dinan ,  fa  Subdélégation ,  &  fon  reffort.  On  y  compte  400 
communiants  :  la  Cure  eft  préfentée  par  l'Abbé  de  SaintJacut* 
Le  territoire  ne  comprend  qu'une  prefqu'ifle  environnée  de  fa- 
bles que  les  marées  couvrent ,  de  forte  qu'on  ne  peut  y  entrer 
que  du  côté  du  Sud.  Cette  prefqu'iffe  ne  contient  que  la  Pa- 
roiffe  &  l'Abbaye ,  avec  un  moulin  à  vent ,  fans  aucun  village. 
Elle  renferme  environ  deux  cents  vingt  journaux  de  terres  en 
labeur,  grand  journal  de  Bretagne.  Le  fol  eft  de  bonne  qua- 
lité ,   &  paroît  très-bien  cultivé. 

La  Patoiffe  de  Saint- Jacut  eft  nommée,  dans  les  anciens  titres, 
Notre-Dame  de  Landouan,  L'Abbaye  efl:  de  l'Ordre  de  Saint-Benoît» 
Elle  eft ,  ainfi  que  la  Paroiffe  ,  enclavée  dans  l'Evêché  de 
Saint-Malo  :  elle  fut   fondée ,  vers  Tan  440  ^  par  Grallon ,  Roi 


s  A  I  *  247 

(de  Bretagne,,  &  elle  eut ,  pour  premier  Abbé  ,  Jacob  ou  Jacut, 
dont  elle  a  toujours  porté  le  nom.  Il  étoit  frère  de  Saint  Win-^ 
galois,  premier  Abbé  de  Landevenec  5  &  fils  de  Fracan,  parent 
de  Conan  Meriadec,  Le  17  Février  141 8,  Alain  IX  du  nom. 
Vicomte  de  Rohan ,  donna  cent  écus  d'or  à  Guillaume ,  Abbé 
de  Saint- Jacut ,  pour  la  célébration  d'un  anniverfaire  dans  l'Eglife 
de  fon  Abbaye.  Par  a6le  pafTé  le  17  Février  1414,  le  même 
Abbé  s'engagea  à  faire ,  tous  les  ans ,  un  Service  folemnel  pour 
le  Duc  de  Bretagne  Jean  V ,  en  confidération  de  ce  qu'il  avoit 
déchargé  fes  vaflaux  de  quelques  fubfides.  Ce  fut  cet  Abbé  qui 
obtint  du  Pape  Nicolas  V  la  permiffion  de  porter  les  ornements 
pontificaux.  Bertrand  de  Broons  fut  élu  Abbé  de  Saint-Jacut, , 
en  1461  ,  &  mourut  en  1471.  Sur  le  champ  ,  François  II  fit  dé- 
fendre aux  Moines  de  procéder  à  l'éleftion  de  fon  fuccefTeur , 
fans  fon  agrément.  Pierre  de  Francheville  ,  Re6leur  de  Combourg , 
élu  Abbé  en  161 6,  voulut  introduire  les  Bénédiftins  Anglais 
dans  fon  Abbaye  ;  mais  le  Parlement  refufa  d'enregiftrer  les 
lettres-patentes  que  ces  Moines  étrangers  avoient  obtenues,,  Se, 
par  Arrêt  du  7  Juillet  1643  ,  il  leur  fut  défendu  d'entrer  dans 
aucune  des  Abbayes  de  Bretagne.  Les  démarches  que  Pierre 
de  Francheville  faifoit  pour  obtenir  la  caffation  de  cet  Arrêt  , 
déterminèrent  le  Parlement  à  en  rendre  un  autre  ,  l'an  1646, 
qui  ordonne  que  les  Bénédiftins  de  la  Congrégation  de  Saint- 
Maur  feront  admis  dans  l'Abbaye  de  Saint  -  Jacut.  Ce  dernier 
Arrêt  fut  exécuté  félon  fa  forme  &  teneur,  le  29  Mars  1647, 
par  Dom  Germain  Morel ,  Prieur  de  l'Abbaye  de  Saint-Melaine 
de  Rennes.  La  fituation  de  cette  Abbaye  ,  furie  bord  de  la  mer, 
Ta  fouvent  expofée  aux  ravages  des  ennemis  de  l'Etat ,  qui  ont 
détruit  une  partie  des  anciens  monuments  qu'elle  confervoit.  Elle 
a  une  haute-Juflice  qui  appartient  à  M.  l'Abbé  :  la  moyenne-Juf-, 
tice  de  Carquete  appartient  aux  Moines.. 

SAINT-JEAN-DE-BOISEAU;  à  3  lieues  un  quart  à  l'Oucfl- 
Sud  -  Ouefl  de  Nantes ,  fon  Evêché ,  fa  Subdélcgation ,  de  fon 
refTort.  On  y  compte  1300  communiants:  l'Abbé  de  Geneflon 
préfente  la  Cure ,  qui  efl  un  Prieuré  dépendant  de  fon  Abbaye, 
Le  territoire  ,  baigné  au  Nord  par  la  rivière  de  Loire  ,  ofTre  à 
la  vue  de  riches  prairies,  beaucoup  d'ifles  formées  par  la  Loire, 
des  terres  en  labeur  très-fertiles ,  des  vignes  dont  le  vin  efl  de 
médiocre  qualité ,  Se  des  landes  très-étendues  qui  n'attendent  que 
les  foins  du.  cultivateuf.  pour  rapporter  d'abondanies  récolteSi  La 


148  .  ^  ^  ^     .     . 

maifon  noble  cîe  la  Hubaudiere  eft  la  Seigneurie  de  cette  Pa- 
roilTe  j  elle  appartient  à  M.  Daux. 

SAINT-JEAN-DE-BREVELAI  ;  à  4  lieues  &  demie  au  Nord 
de  Vannes ,  fon  Evêché  &  fa  Subdélégation  ;  &  â  1 8  lieues  de 
Rennes.  Cette  ParoifTe  refTortit  à  Ploermel ,  &  compte  1800 
communiants  :  la  Cure  eft  à  Talternative.  Le  territoire  coupé  de 
vallons  ,  dans  l'un  defquels  eft  la  fource  de  la  rivière  de  Clayes , 
qui,  après  un  cours  de  fept  lieues ,  va  fe  jetter  dans  celle  d'Ouft, 
offre  à  la  vue  des  terres  labourables ,  quelques  prairies ,  des  lan- 
des, des  arbres  fruitiers  &  autres.  Il  fe  tient  quatre  foires  par 
an  dans  le  bourg.  Les  habitants  font  commerce  de  grains  &  de 
beftiaux.  La  maifon  noble  du  Quenhoet  appartenoit ,  en  1400, 
à  Pierre  de  la  Haye  ,  Sieur  du  Quenhoet  :  celle  de  Ker-angat 
eft  à  N 

SAINT- JEAN-DE-CORCOUÉ  ;  fur  une  hauteur  ;  à  6  lieues 
un  quart  au  Sud  de  Nantes ,  fon  Evêché  &  fon  refTort  ;  à  28 
lieues  un  quart  de  Rennes  j  &  à  4  lieues  de  Machecou  ,  fa  Sub- 
délégation. On  y  compte  900  communiants  :  la  Cure  eil  à  l'Or- 
dinaire. Le  territoire  offre  à  la  vue  des  terres  très  -  exaftement 
cultivées ,  des  prairies ,  &  des  vignes.  C  eft  dans  ce  territoire 
qu'eft  la  fource  de  la  rivière  du  Tenu,  du  Ht  de  laquelle  ii 
feroit  à  defirer  qit'on  fît  un  canal  dans  la  longueur  de  trois 
lieues  ,  c'eft-à-dire ,  jufqu'à  Saint-Mêmes ,  où  cette  rivière  com- 
mence à  porter  bateaux  ;  &  alors  toutes  les  Paroiffes  des  envi- 
rons ,  au  nombre  de  quatorze  à  quinze  ,  pourroient  faire  conduire 
à  Nantes ,  par  eau ,  les  produftions  d'un  canton  très-étendu  & 
très-fertile  :  produftions  qu'on  eft  forcé  de  confommer  fur  les  lieux, 
par  la  difficuké  de  les  conduire ,  par  terre  ,  à  Nantes ,  où  elles 
ne  peuvent  être  tranfportées  qu'avec  beaucoup  de  peine  &  de 
dépenfe. 

Par  accord  f^t  à  Tours  ,  l'an  1 1 64  ,  entre  Bernard  ,  Evêque 
de  Nantes ,  &  les  Moines  de  Tournus ,  il  fut  convenu  que  la 
préfentation  de  la  Cure  de  cette  Eglife  appartiendroit  aux  Moines 
de  cette  Abbaye. 

SAÏNT-JEAN-EN-COGLAIS;  fur  une  hauteur;  à  10  lieues 
au  Nord  -  Nord  -  Eu  de  Rennes  ,  fon  Evêché  ;  &  à  4  lieues  de 
Fougères,  fa  Subdélégation  &  fon  reffort.  On  y  compte  1450 
communiants  :  la  collation  de  la  Cure    appartient   à  l'Abbé  de 

Saint-Melaine 


s  A  I  249 

Saînt-Melalne  de  Rennes.  Le  territoire ,  borné  au  Nord  par  la 
province  de  Normandie  ,  offre  à  la  vue  des  terres  en  labeur  , 
des  prairies ,  le  bois  de  Gashis ,  des  landes ,  des  vallons ,  beau- 
coup d'arbres  fruitiers  &  autres.  La  Bretonniere  ,  haute  -  Juftice  , 
appartient  à  M.  de  Noyan  j  les  Longrais  &  Malbré,  moyenne- 
JulHce ,  à  M.  des  Autieux. 

SAINT- JEAN-SUR-COUESNON  ;  dans  un  fond  -,  à  6  lieues 
un  quart  au  Nord-Eft  de  Rennes ,  fon  Evêché  j  &  à  trois  quarts 
de  lieue  de  Saint-Aubin-du-Cormier ,  fa  Subdélégation  &  fon 
relTort.  On  y  compte  1 100  communiants  :  la  Cure  eft  un  Prieuré 
qui  a  long-temps  dépendu  de  l'Abbaye  de  Saint-Florent  de  Sau- 
mur.  Ce  Monaftere  poffédoit  aufîi  la  Chapelle  de  Saint-Aubin , 
(îtuée  dans  ce  Prieuré,  qui  étoit  encore  deffervie par  des  Moines 
en  1636  :  il  a  été  depuis  fécularifé  ,  mais  les  Abbés  de  Saint- 
Florent  s'en  font  toujours  réfervé  la  préfentation.  Le  territoire  ren- 
ferme des  terres  en  labeur ,  des  prairies ,  des  landes ,  &  quelques 
petits  bois  ;  il  ell  couvert  d'arbres  &  buiffons ,  &  produit  beau- 
coup de  cidre. 

La  maifon  noble  de  la  Dobiais ,  Seigneurie  de  la  ParoifTe ,  ap- 
partenoit,  en  1370,  à  Jean  Gedouin ,  Sieur  de  la  Dobiais.  Guil- 
laume ,  fon  petit-fils ,  Sénéchal  de  Rennes  &  Procureur  général 
de  Bretagne,  époufa,  en  1498,  Jeanne  du  Bois-Baudri.  Michel 
Guibé ,  alors  Evêque  de  Rennes  &  Seigneur  d'une  partie  de  cette 
ParoifTe ,  fonda  dans  fa  Cathédrale  la  Chapellenie  des  Guibés , 
qui  fait  aujourd'hui  partie  de  la  Seigneurie  de  la  Dobiais  ;  elle 
fut  érigée  en  Marquifat ,  l'an  1645  >  ^^^  faveur  de  René  Gedouin, 
Sieur  de  la  Dobiais  ,  Préfident  au  Parlement  de  Bretagne ,  qui 
avoit  époufé  Marguerite  de  Montclair ,  de  laquelle  il  eut  un  hls 
nommé  René- i/rlpainyGouwevneur  de  Morlaix;&  un  autre,  nom- 
mé Julien^  qui  fut  Refteur  de  Saint- Jean  de  Rennes.  Ce  Mar- 
quifat paiîa  enfuite  à  la  maifon  de  Nétumieres ,  &  il  appartient 
aujourd'hui  à  M.  de  la  Belinais ,  Marquis  de  la  Dobiais ,  qui ,  en 
cette  qualité  ,  préfente  la  Chapellenie  des  Guibés  en  la  Cathédrale 
de  Rennes. 

SAINT.JEAN-SUR-VILAINE  ;  fur  la  route  de  Rennes  à  Vitré  ; 
à  5  lieues  à  l'Ell  de  Rennes ,  fon  Evêché  &:  fon  reffort  -,  6c 
à  3  lieues  de  Vitré,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  11 00  com- 
muniants, y  compris  ceux  de  Saint-Melaine  ,  fa  trêve  :  la  colla* 
tien  delà  Cure  appartient  à  M.  de  Châteaugiron.  Le  territoire. 
Tome  IF.  I  2 


ICQ  S  A  I 

coupé  par  la  rîvîere  de  Vilaine  ,  offre  â  la  vue  des  terres  bieiî 
cultivées ,  des  prairies ,  quelques  petites  landes ,  &  beaucoup  d'ar- 
bres fruitiers  &  autres.  Les  maifons  nobles  de  l'endroit,  dans  le 
quatorzième  (iecle  ,  étoient  :  la  Hammonaye  ,  la  Flouraye ,  la 
Fontenelle  ,  &  le  manoir  de  Dieu-Lefit.  Le  Prieuré  de  fayel , 
haute  -  Juftice  ,  appartient  aux  Religieux  de  Savigni  :  &  la 
Porte-Duval ,  aufli  haute-Juftice  ,  aux  enfants  de  M.  du  Bois-Péan. 

SAINT  -  IGNEUC  ;  fur  la  rivière  d'Arguenon  ;  à  7  lieues  uo 
quart  à  l'Eft-Sud-Eft  de  Saint- B  rieuc  ,  fon  Evêché  j  à  13  lieues 
de  Rennes  j  &  à  3  lieues  un  quart  de  Lamballe  ,  fa  Subdéléga- 
tion. Cette  Paroiffe  reffortit  à  JugGn ,  &  compte  500  commu- 
niants :  le  Roi  en  eft  le  Seigneur  ;  la  Cure  eft  à  l'alternative. 
Des  terres  bien  cultivées,  des  prairies,  quelques  landes,  des 
vallons ,  des  coteaux ,  &  beaucoup  d'arbres  à  fruits  &  autres  ; 
voilà  ce  qu'on  apperçoit  dans  ce  territoire.  Dans  le  quinzième 
fîecle  ,  il  renfermoit  les  maifons  nobles  fuivantes  :  la  Ville-Guil- 
laume ,  à  Pierre  Quettier  ;  la  Touche ,  à  Guillaume  le  Gallays  ; 
la  Gereziere  ,  à  Jean  Rouxel  -,  Follideuc  ,  à  Alain  Quettier  j  la 
Lande ,  à  Pierre  Texier  ;  les  Loges ,  au  Sieur  de  Kergus  -,  la 
Prévotais ,  à  François  Guillemet  ;  la  Broffe  ,  à  Georges  du  Breil  j 
&  Ranléon,  à  Jean  Poullain  :  la  Jartiere ,  Carna,  la  Touche, 
Pont-Gautier  ,  l'Orgeril ,  &  Péroufe  ,  font  plus  modernes  ;  cette 
dernière  a  moyenne-Juftice ,  &  appartient  à  M.  de  Kermenan, 
En  1346,  Geoffroi  le  Verger  &  fon  époufe  donnèrent  les  dîmes 
de  cette  Paroiffe  à  l'Hôpital,  qu'ils  fondèrent  à  Tremeur, 
pour  quatre  Frères  de  Sainte -Croix  ,  de  l'Ordre  de  Sain^ 
Auguftin. 

SAINT-JOUAN-DE-L'ISLE  ;  fur  uti  coteau ,  &  fur  la  route 
de  Rennes  à  Breft  ;  à  9  lieues  &  demie  au  Sud  de  Saint-Malo, 
fon  Evêché  ;  à  9  heues  de  Rennes  ;  &  a  3  lieues  de  Montau- 
ban ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  reffortit  à  Ploermel  ,  & 
compte  600  communiants  :  la  Cure  eff  à  l'alternative.  Le  terri- 
toire ,  arrofé  par  la  rivière  de  Rance ,  renferme  dcs  terres  en  la- 
beur ,  des  prairies ,  des  landes ,  &  des  bois  ;  on  y  fait  beaucoup 
de  cidre.  Quatre  grandes  routes  y  aboutiilent ,  &  on  y  remar- 
que une  Poffe  aux  chevaux.  Il  s'y  tient  deux  foires  par  an ,  Se 
un  marché  par  femame.  Ses  maifons  nobles,  en  14.10,  étoient: 
Saint  -  Jean  &  la  Menegmé ,  à  Alain  de  Landugcn  ;  le  manoir 
de    Saint  -  Jouhn  ,  ancienne  Chevalerie  ,   à  Chaiies  de   Landu- 


s  A  I  ijr 

gen  ;  l'Ifle ,  à  Jean  de  l'Ifle  ;  la  métairie  du  Temple ,  à  Amaury 
de  la  Mouffaye  ;  &  Ker-gouet ,  à  Edouard  de  la  Mouflaye  : 
Saint  -  Jouan  -  de  -  l'IUe  ,  haute  -  JufHce  ,  à    M.   de   Saint  -  Pern, 

SAINT-JOUAN-DES-GUERETS  -,  fur  la  route  de  Rennes  à 
Saint-Malo  j  à  i  lieue  un  tiers  au  Sud-Eft  de  Saint-Malo ,  fon 
Evêché  &  fa  Subdélégation  j  &  à  t  3  lieues  de  Rennes.  Cette 
Paroifîe  refîbrtit  à  Dinan ,  &  compte  750  communiants  :  la 
Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire ,  borné  à  l'Oueft  par  la  ri- 
vière de  Rance ,  au  Sud  par  une  anfe  où  la  mer  entre  à  toutes 
les  marées ,  offre  à  la  vue  une  monticule  fur  laquelle  font  trois 
maifons  de  remarque,  le  Château -Malo,  le  Château  -  Doré ,  & 
la  Tournerie  ;  elle  forme  un  très-beau  point  de  vue.  Les  terres 
de  cette  Paroiffe  font  très-bien  &  très-exa<!:l:ement  cultivées.  En 
1420,  les  maifons  nobles  de  l'endroit  étoient  :  Launai-Quinard, 
à  Jean  de  Broons  ;  Launai-Trochard  ,  à  Charles  le  Coq  :  la  Ville- 
ès-Oifeaux ,  à  Georges  Chauffée;  elle  a  haute-Juftice  ,  &  appar- 
tient à  M.  Magon  de  Clos-Doré  :  les  Clos ,  à  Jean  de  Pontual  ; 
le  manoir  de  la  Motte  ,  à  Eon  de  la  Motte ,  qui  poffédoit  aufli 
la  Landelle  ;  la  Chaire ,  à  Pierre  Guille  j  la  Brientaye ,  à  Jean 
Beaubois  ;  le   Bois  -  Bernier  ,    à  Etienne    Thomaffe  j   la   Motte- 

Rouxel ,  à  Aubert  de  Saint-Germain  ;  &  le  Tronchai ,  à  N : 

la  haute  -  Juilice  de  Saint  -  Jouan  appartient  à  M.  Piochan  de 
Saint-Jouan. 

SAINT  -  JUDOCE  ;  à  4  lieues  &  demie  au  Sud-Oueff  de 
Dol ,  fon  Evêché  j  à  8  lieues  un  quart  de  Rennes  ;  &  à  4  lieues 
un  quart  de  Montauban  ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  ref- 
fortit  à  Dinan ,  &  compte  600  communiants  :  la  Cure  eff  pré- 
fentée  par  l'Abbé  de  Marmoutier.  Le  territoire ,  couvert  d'arbres 
&:  buiffons,  renferme  des  terres  en  labeur  de  bonne  qualité,  des 
prairies  ,  des  landes ,  &  les  bois  des  Rués ,  de  la  Garde ,  &  de 
Pontual.  Saint  Judoc ,  honoré  fous  le  nom  de  Saint  Joffe  ,  fils 
d'Hoèl  III  du  nom  ,  Roi  de  Bretagne ,  eff  le  fondateur  &  le 
Patron  de  cette  Paroiffe  :  il  vivoit  dans  le  feptieme  fiecle.  La 
Seigneurie  du  Pont-Harouart  appartenoit ,  en  1500,  à  Antoine 
l'Evêque  ,  Seigneur  du  Pont-Harouart,  qui  poffédoit  au/ïi  la  mai- 
fon  de  la  Corbina)  e  ;  le  Pont-Harouart  paffa  dans  la  fuite  à  la 
famille  de  Grignard  de  Champfavoi ,  qui  ont  leurs  armes  gra- 
vées en  boffe  fur  des  pierres  de  taille ,  qui  forment  une  Uiiere 
€n  dedans  &  en  dehors  de  l'Eglife ,  ain{i  que  fur  les  bancs  fer- 


iji  s  A  î 

mes  du  Pônt-Harouart.  Cette  Seigneurie  appartient  aujourd'hui  â 
M.  Baude  de  la  Vieux-Ville:  la  Riollais,  en  1500,  à  Maurice 
Troufier  ;  le  Margat ,  à  Jean  le  Charpentier  j  le  Beffo  ,  la  Ville- 
Mere,  &  la  Fontaine  ,  à  Charles  de  Beaumanoir  -,  le  Fait ,  à  Louis 
du  Fournel  j  le  haut  &  le  bas  Fournel ,  à  Gilles  du  Fournel  ;  la 
Ville-Main ,  au  Sire  de  Chateaubriand  ;  le  manoir  de  la  Cha- 
pelle ,  à  la  Demoifelle  de  l'Hôpital  j  le  manoir  de  la  Motte- 
Evêque,  à  Louis  de  Guangan  ;  Champfavoi ,  à  Jean  Grignard  de 
Champfavoi  j  le  Portai ,  à  Ponce  de  l'Hôpital  ;  la  Garde  ,  à 
Bonabes  de  Lefquen  ,  qui  pofTédoit  aufîi  la  Sanfonnaye  j  & 
Quenard ,  à  Louis  de  Quanquan, 

SAINT- JULIEN-DE-CONCELLES  ;  à  3  lieues  à  l'Eft-Nord- 
Eft  de  Nantes ,  fon  Evêché ,  fa  Subdélégation ,  6c  fon  reffort  j 
&  à  22  lieues  de  Rennes.  Cette  Paroifîe  relevé  du  Roi  :  on  y 
compte  3000  communiants;  la  Cure  efl:  préfcntée  ,  à  l'alterna- 
tive ,  par  l'Evêque  de  Nantes  &:  l'Abbé  de  Saint-Florent  de 
Saumur.  Le  territoire ,  borné  au  Nord  &  à  l'Oueft  par  la  rivière 
de  Loire,  ell  très-exaftement  cultivé,  &  produit  du  grain,  du 
vin,  &  du  foin.  L'an  11 04,  Benoît,  Evêque  de  Nantes,  à  la 
follicitation  d'Alain  Fergent ,  Duc  de  Bretagne ,  confirma  Guil- 
laume ,  Abbé  de  Saint-Florent  de  Saumur,  dans  la  poffeffion  de 
l'EgUfe  de  Saint-JuUen  de  Concelles  &:  des  Chamelles  de  Saint- 
Symphorien  &  de  l'Oratoire. 

La  Châtellenie  de  l'Epine-Gaudin  &  la  Sénéchalliere ,  pofîe- 
dées  par  Marguerite  de  ClifTon,  furent  confifquées  par  le  Duc 
Jean  V,  en  1420,  en  punition  de  l'attentat  des  Penthievre  fur 
fa  perfonne  &  celle  de  fon  frère  Richard  de  Bretagne.  Le  Duc 
fit  aufîi  faifir ,  dans  le  même  temps ,  le  fief  de  la  Tour ,  parce 
que  le  propriétaire  de  ces  domaines  étoit  partifan  des  coupables. 
Ces  trois  Terres  furent  données  par  le  Duc  à  Jean  Angers, 
Seigneur  du  Pleffis-Angers  ,  dans  l'Evêché  de  Saint-Malo  ;  &  le 
Duc  ne  retint  ,  pour  droit  de  rachat  ,  qu'un  épervier  qui  lui 
étoit  dû  fur  la  Seigneurie  de  la  Sénéchalhere.  (  Voyez  l'hilloire 
du  Duc  Jean  V,  tome  premier  de  ce  Diftionnaire.  )  En  145^, 
le  Duc  Pierre  II  donna  permiiTion  à  Jean  Angers  &  à  fes  fuc- 
cefleurs ,  de  faire  élever  une  jufiice  patibulaire  à  quatre  po- 
teaux en  la  Châtellenie  du  Gué-au-Voyer.  Cette  Seigneurie  ap- 
partient aujourd'hui  aux  héritiers  d'Arquiftade. 

SAINT-JULIEN-DE-LA-COTE  j  fur  la  route  de  Saint-Brieuc  à 


s  A  I  155 

Quintia  ;  à  2  lieues  au  Sud-Sud-Oueft  de  Saint-Brieuc ,  fon  Evê- 
ché  &  fon  reflbrt  j  à  20  lieues  de  Rennes  j  &  à  2  lieues  un 
huitième  de  Quintin,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  650 
communiants  :  la  collation  de  la  Cure  appartient  à  M.  le  Mar- 
quis de  Langeron ,  Seigneur  de  la  Paroilîe.  Le  territoire  ,  arrofé 
par  la  petite  rivière  de  Goèt  ,  offre  à  la  vue  des  vallons ,  des 
terres  fertiles  en  grains ,  des  prairies ,  &  peu  de  landes.  C'efl 
un  pays  couvert  d'arbres  &  buiflbns  ,  qui  produit  beaucoup  de 
cidre.  La  Seigneurie  de  la  Côte  appartenoit ,  en  1380,  à  Robin 
du  Gourai,  Sieur  delà  Côte  :  Gui  du  Gourai  époufa  ,  en  1616  y 
Renée  Budes  ,  fœur  du  Maréchal  de  Guebriant.  Jean-François 
du  Gourai,  Marquis  de  la  Côte,  étoit  Lieutenant  de  Roi  en  baffe 
Bretagne,  en  1670;  il  époufa  Marie-Magdeleine  de  Rofmadec: 
cette  famille  efl  éteinte. 

SAINT-JULÏEN^DE-VOUVANTES  ;  fur  une  hauteur  Se  fur 
la  route  de  Chateaubriand  ci  Candé  pour  Angers  j  à  1 2  lieues 
au  Nord-Nord-Efl  de  Nantes,  fon  Evêché  &  fon  reffort;  à  15 
lieues  de  Pennes  ;  &  à  3  lieues  de  Chateaubriand  ,  fa  Subdé- 
légation. On  y  compte  1600  communiants  ;  la  Cure  ell:  pré- 
fentée  par  la  Communauté  de  ville  de  Nantes,  &  annexée  au 
Collège  des  Prêtres  de  l'Oratoire.  Le  Légat  de  Milîire  Simon 
Liard  eft  à  l'Ordinaire.  Le  territoire  ,  varié  de  coteaux  ,  de 
vallons,  de  monticules,  &  coupé  de  ruiffeaux,  offre  à  la  vue 
des  terres  très-fertiles,  des  prairies,  quelques  bois  taillis,  &  des 
landes.  Les  plus  étendues  font  au  Sud  &  à  l'Ouell  de  fon  bourg. 
On  y  trouve  des  carrières  de  pierres  de  taille  de  très-bonne 
qualité,  appellées  pierres  de  Beaumont.  Lorfque  Pierre  de  Rohan, 
Maréchal  de  Gié ,  fit  bâtir  le  château  de  la  Motte-Glain  ,  en 
1497,  il  fit  prendre  des  pierres  dans  ces  carrières.  (Voyez  la 
ChapcUc-Glain.  )  En  1748,  on  établit  un  marché  par  femaine 
à  Saint-Julien  ;  mais  il  fut  aboU  deux  ans  après ,  &  il  ne  s'y 
tient  feulement  qu'une  foire  par  an. 

L*an  II 04,  Guillaume,  Abbé  de  Saint-Florent  de  Saumur, 
fut  confirmé  par  Benoît ,  Evêque  de  Nantes ,  dans  la  pofTeffion 
de  l'Eglife  de  Saint-Julien-de-Vouvantes ,  par  la  protection  du 
Duc  Alain  Fergent.  En  1163  ,  Alain  de  Saint-Michel-du-Bois 
&  Ruellan  d'Erbrée  donnèrent  à  la  même  Abbaye  de  Saint- 
Florent  les  dîmes  de  Saint-Julien-de-Vouvantes  &  celles  de  la 
Cliapelle-Glain.  Bernard  ,  Evêque  de  Nantes ,  leur  confirma  ce 
don ,  &  celui  qu'Alain  de  Moifdon  &  fon  époufe  leur  firent ,  en 


donnant  l'habit  de  Religieux  à  leur  fils  dans  ce  Monaftere.  L'u-i 
nion  des  dîmes  de  la  Cure  de  Saint-Julien  au  Collège  de  l'Ora- 
toire ,  fut  confommée,  par  un  traité  du  21  Avril  1559,  entre 
le  Curé  de  cette  Paroifle  &  la  Communauté  de  ville.  En  1572, 
cette  Cure  fut  exemptée  des  décimes ,  en  confidération  de  fon 
union  au  Collège. 

On  remarque  dans  le  bourg  de  Saint-Julien  plufîeurs  ruines 
d'anciens  murs,  qui  annoncent  que  c'étoit  anciennement  une 
place  de  défenfe  ;  mais  nous  n'avons  rien  trouvé  qui  prouve^- 
qu'elle  ait  foutenu  des  fieges  ,  ni  qui  faffe  connoître  fes  fortifi- 
cations. On  voit  dans  l'Eglife  une  chaîne  de  fer ,  que  les  habi- 
tants du  lieu  difent  être  celle  d'un  homme  condamné  aux  ga- 
lères ,  Se  voici  comme  ils  racontent  le  fait  :  Plufieurs  de  ces 
malheureux ,  que  l'on  conduifoit  à  Brefl: ,  pafferent  par  Saint- 
JuHen.  Un  d'eux  demanda  &  obtint  la  permiffion  d'aller  faire 
fa  prière  à  l'Eghfe.  Aprçs  quelques  minutes,  on  le  preffa  de  re- 
joindre fes  compagnons  ;  & ,  comme  il  n'obéiffoit  point ,  on 
voulut  l'y  forcer,  en  le  maltraitant:  mais  ,  à  peine  l'eut- on 
frappé  que  fes  chaînes  tombèrent  ;  on  l'enchaîna  de  nouveau ,  mais 
la  même  main  invifible ,  qui  l'avoit  délivré  la  première  fois ,  le 
remit  encore  en  liberté  ,  &  ce  fut  inutilement  qu'on  efîaya  de 
l'enchaîner.  On  prétend  qu'on  rapporta  procès -verbal  de  ce 
prodige  ,  opéré  l'an  1650.  Auprès  de  l'Eglife,  font  trois  fon- 
taines voifines.  Dans  le  fond  de  celle  nommée  la  fontaine  de  Saint- 
Julien  ,  eft  une  pierre  de  taille ,  fur  laquelle  eft  empreint  un  fer 
à  cheval,  que  l'on  dit  être  celui  de  Saint  Julien.  Tous  les  ans,  environ 
huit  à  neuf  cents  Bretons  du  diocefe  de  Vannes  viennent  en 
voyage  à  Saint- Julien-de-Vouvantes  j  & ,  après  avoir  fait  leur  prière, 
il  fe  fait  une  lutte  ,  dont  le  prix  eft  un  louis  d'or ,  donné  au 
vainqueur  par  le  Seigneur  de  la  Motte-Glain.  La  Terre  de  la 
Briaye ,  aujourd'hui  divifée  entre  plufieurs  particuliers,  çonfiftoit 
autrefois  en  fiefs  ,  dîmes ,  &  domaines  ,  &  appattenoit ,  en  1350, 
à  MM.  CoHn  de  la  Biochaye.  JuHen  Cohn ,  Chevalier  ,  Capi- 
taine de  cent  hommes  d'armes ,  Seigneur  de  la  Briaye ,  de  la 
Herbetiere ,  &  d'Ardennes  ,  &  auteur  de  MM.  de  la  Biochaye , 
habitoit  cette  Terre ,  en  1 400  :  il  fonda ,  dans  cette  même 
année,  la  Chapellenie  de  Sainte-Catherine,  deflervie  dans  l'Eglife 
paroiffiale  de  Saint-Julien-de-Vouvantes ,  &  s'en  réferva  la  pré- 
Icntation  &  nomination  pour  lui  &  fes  fuccefleurs  portant  fon 
nom.  Il  mourut,  l'an  1401  ,  comme  il  fe  voit  par  la  préfenta- 
tion  de  ce  Bénéfice  ,  faite  la  même  année.  L'a6le  original  porte  9. 


s  A  I       '  155 

<que  «  noble  Cateline  de  Saint-Didier ,  veuve  de  feu  noble  homs 
t>  Julian  Colin ,  Chevalier ,  Capitaine  de  cent  hommes  d'armes, 
»  fondateur  de  cette  Chapailenie ,  en  l'honneur  de  Dieu  &  de 
»  Madame  Sainte  Catherine,  en  l'Eglife  de  Saint- Julien-de-Vou- 
y*  vantes,  comme  mère  &  tutrice  d'André  Colin,  leur  fils  ,  pré- 
»  fente  à  M.  l'Evêque  de  Nantes ,  noble  homs  de  Samt-Didier , 
w  leur  coufîn ,  pour  être  pourvu  de  ladite  Chapailenie.  »  Ce  titre 
eft  fîgné  fur  le  replis,  par  le  commandement  de  ladite  Dame 
Morel,  pafTé  &  fcellé  d'un  fceau  A  queue  de  cire,  portant  l'em- 
preinte d'un  écuffon  de  trois  merlettes  d'un  côté,  &  d'un  lion 
de  l'autre.  JuUen  Colin  fut  enterré ,  dans  l'Eglife  de  Saint-Julien- 
de-Vouvantes  ,  devant  l'autel  de  Saint-Jean.  Son  tombeau  ,  élevé 
de  terre,  portoit  cette  infcription,  en  lettres  gothiques  :  Cy gijl 
noble  homs  Julian  Colin  ;  Chevalier  ,  Capitaine  de  cent  hommes 
d'armes ,  Seigneur  de  la  Briaye  &  de  la  Herbetiere  ;  &  l'on  y 
voyoit  l'écuÀTon  de  fes  armes.  Ce  tombeau ,  ayant  été  démoli 
pour  la  commodité  des  procefîions ,  le  Général  de  la  ParoiiTe  , 
pour  en  rétablir  &  perpétuer  la  mémoire  &  celle  de  la  fonda- 
tion de  la  Chapellenie ,  a  fait  pofer ,  vis-à-vis  l'emplacement  de 
ce  tombeau  ,  une  plaque  d'airain ,  avec  l'éculTon  en  aUiance 
des  armes  dudit  Julian  Colin  &  de  Cateline  de  Saint-Didier, 
fa  femme ,  &  l'infcription  fuivante  :  Git  noble  Julian  Colin  , 
Chevalier ,  Capitaine  de  cent  hommes  d'armes  ,  Seigneur  de  la  Bnaye 
&  de  la  Herbetiere  ,  décédé  en  i^ot  ,  fondateur  ,  en  Van  1400^  de 
la  Chapelainie  de  Sainte-Catherine  ^  qui  fe  dejfert  dans  cette  Eglife^ 
&  dont  la  préfentation  appartient ,  par  droit  de  fang ,  à  MM.  Colin 
de  la  Biochaye  ,  i^us  dudit  fondateur  :  une  MeJJe  par  femaine, 
Requiefcat  in  pace. 

La  Baronnie  de  la  Roche  appartenoit  à  M.  de  Laval,  en 
1430J  &  la  Selle,  à  Jamet  Godart,  Seigneur  de  la  Selle  :  Vou- 
vantes ,  haute,  moyenne  &:  bafle-Juflice  ,  à  M.  de  Vouvantes  9 
Haut-Bois,  haute,  moyenne  &  balle  -  Juftice  ,  à  M.  de  Bruc  , 
&  autres. 

SAINT- JUST  ;  dans  un  fond  ;  à  1 2  lieues  &  demie  à  l'Elt- 
Nord-Ell  de  Vannes,  fon  Evêché  ;  à  10  heues  de  Rennes;  & 
à  3  lieues  de  Redon,  fa  Subdélcgation.  Cette  ParoiiTe  reflbrtit 
à  Ploermel  ,  &  compte  900  communiants  :  la  Cure  ell  à  l'al- 
ternative. Le  territoire ,  coupé  de  plufieurs  vallons ,  offre  à  la 
vue  des  terres  en  labeur,  quelques  prairies,  &  beaucoup  de 
landes.  En  1 5  00  ,   on  y   voyoit  les  maifons   nobles  d'Allerac , 


la  RohuUaye  ,  la   Rivière  -  CoUombert  ,  la  Barbarinais  ,   &   la 
Morlais. 

SAINT- JUV AT;  fur  la  Rance;  à  8  lieues  au  Sud  de  Saint- 
Malo  ,  ion  Evêché  ;  à  9  lieues  de  Rennes  ;  &  à  3  lieues  &  demie 
de  Montauban ,  fa  Subdélégation.  Cette  ParoifTe  relevé  du  Roi, 
reflbrtit  à  Dinan ,  &  compte  950  communiants  :  la  Cure  ell 
préfentée  par  les  Religieux  de  Léhon.  En  1 640  ,  des  Moines 
de  Marmoutier  faifoient  encore  les  fonctions  de  Curé  dans  cette 
ParoifTe.  Le  territoire ,  très-exadement  cultivé ,  produit  du  grain 
&  du  cidre.  On  trouve,  dans  quelques  cantons,  du  fable,  ap- 
pelle de  Saint-Grégoire ,  dans  lequel  font  beaucoup  de  coquillages 
entiers,  particulièrement  des  cœurs  ,  des  canes ,  des  tellines  ,  des 
gallets ,  &  des  vermifleaux  tubulaires. 

SAINT-LAUNEUC  ;  à  1 2  lieues  au  Sud-Oueft  de  Dol ,  fon 
Evêché  j  à  10  lieues  de  Rennes;  &  à  4  lieues  de  Montauban, 
fa  Subdélégation.  Cette  ParoifTe  refTortit  à  Ploermel ,  &  compte 
500  communiants  :  la  collation  de  la  Cure  appartient  à  M.  de 
Saint-Pern.  Le  territoire,  borné  au  Nord  par  la  rivière  de 
Rance ,  ofTre  à  la  vue  des  terres  en  labeur ,  peu  de  prairies , 
des  landes  ,  &  la  forêt  de  la  Hardouinaye.  Le  Château ,  haute- 
Juftice,  à  M.  de  Saint-Pern  :  cette  place  eft  célèbre  dans 
l'hilloire  ,  par  la  mort  de  l'infortuné  Gilles  de  Bretagne ,  frère 
du  Duc  François  I.  Ce  jeune  Prince,  chéri  de  la  nation,  avoit 
époufé  ,  pour  fon  malheur ,  Jeanne  de  Dinan ,  qui  étoit  la  plus 
belle  femme  de  fon  temps.  Artur  de  Montauban ,  favori  de 
François ,  c[ui  aimoit  la  PrincefTe  ,  réufîit  à  jetter  dans  l'efpriî 
de  fon  Maître  des  foupçons  violents  contre  la  fidélité  de  fon 
frère ,  &  fçut  mettre  dans  fon  parti  un  grand  nombre  de  Se>- 
gneurs ,  qui  perfuaderent  au  Duc  que  Gilles  étoit  fûrement  cou- 
pable. Les  apparences  étoient  contre  l'accufé  ;  &  François  ,  qui 
étoit  foible  ,  fit  arrêter  fon  frère,  en  1446,  dans  fon  château 
du  Guildo.  Le  prifor  nier  fut  conduit  de  prifon  en  prifon ,  & 
enfin  enfermé  dans  ie  château  de  la  Flardouinaye ,  où  il  fut 
mis  dans  une  chambre  fouterraine  ,  qui  n'étoit  éclairée  que 
par  une  fenêtre  grillée  ,  qui  donnoit  fur  les  fofTés.  Là  ,  on 
lui  fit  efTuyer  les  outrages  &  les  traitements  les  plus  durs  & 
les  plus  cruels  ;  mais  fon  tempérament ,  qui  étoit  robufle  ,  ré- 
fif^a  aux  chagrins,  à  la  douleur  ,  &  au  poifon  même.  On  prit 
donc   alors  ie    parti   de    le  laifTer  mourir  de   faim;   genre    de 

mort 


s  A  I  257 

mort  le  plus  affreux  de  tous  ,  mais  digne  de  trouver  place  dans 
l'efprit  des  ennemis  de  ce  Prince.  Cependant  les  cris  qu'il  poufToit, 
fes  gémifTements ,  attendrirent  une  pauvre  femme  ,  qui  fe  glilTa 
adroitement  dans  le  foffé,  &  lui  donna  un  morceau  de  pain. 
Les  fecours  de  cette  payfanne  retardèrent  de  quelques  jours 
la  mort  de  Gilles ,  qui  ,  fe  voyant  fans  aucun  efpoir  ,  lui  de- 
manda un  Confeffeur.  Elle  lui  amena  ,  pendant  la  nuit  ,  un  Fran- 
cifcain,  qui  le  confefla  au  travers  de  la  grille  de  la  fenêtre. 
Après  la  confeiTion ,  le  Prince  découvrit  fon  nom  au  Religieux , 
lui  apprit  tous  les  maux  qu'il  avoit  fouffert ,  &  le  pria  d'aller 
trouver  le  Duc  ,  fon  frère  ,  dont  il  n'avoit  pu  fléchir  l'injufle 
colère  ,  &  de  le  citer  au  Jugement  de  Dieu ,  pour  lui  faire  rai- 
fon  des  cruautés  qu'il  exerçoit  fur  lui.  Le  Moine  lui  promit ,  & 
le  quitta. 

La  fanté  du  Prince  étoit  altérée ,  & ,  malgré  les  fecours  de  la 
compatiffante  payfanne,  il  prévoyoit  bien  que  fa  fin  approchoit j 
lorfque  fes  Gardes,  ou  plutôt  fes  bourreaux ,  ennuyés  de  le  voir 
vivre  fi  long-temps  ,  entrèrent  un  matin  dans  fa  chambre  Se 
l'étoufferent  entre  deux  matelas.  Quand  ces  fcélérats  ,  qui  étoient 
au  nombre  de  trois  ,  eurent  confommé  leur  crime  ,  ils  lui  bou- 
chèrent le  nez  &  les  oreilles ,  afin  qu'il  ne  piit  fortir  de  fang 
de  fon  corps ,  &  le  couchèrent  dans  fon  lit  comme  s'il  fût  mort 
de  maladie.  Quand  on  fçut  en  Bretagne  que  Gilles  n'exiftoit 
plus ,  le  peuple  ne  doutant  point  qu'on  eût  avancé  fes  jours , 
montra  la  plus  vive  indignation.  Le  Comte  de  Richemont,  qui 
aimoit  le  jeune  Prince ,  fit  les  plus  fanglants  reproches  au  Duc , 
fon  neveu ,  qui ,  pour  fe  juftifier ,  dit  que  c'étoit  fans  fes  ordres 
qu'on  avoit  traité  fi  cruellement  fon  frère  -,  mais  perfonne  ne  le 
crut,  &  il  refta  chargé  de  l'horreur  du  forfait. 

Le  Duc  étoit  en  Normandie  ,  occupé  au  fiege  d'Avranches , 
lorfqu'on  lui  annonça  la  mort  de  fon  frerc.  Comme  il  s'en  re- 
tournoit  dans  fes  Etats ,  il  rencontra  ,  auprès  du  Mont-Saint-Mi- 
chel ,  le  Religieux  qui  avoit  confeffé  le  Prince  dans  fon  cachot. 
Ce  Religieux  s'approcha  du  Duc ,  &c  lui  demanda  une  audience  • 
particuHere.  Les  Courtifans  fe  retirèrent ,  &  le  Cordelier  prenant 
la  parole  ,  dit  au  Prince  avec  fermeté  :  Jt;  fuis  chargé  de  la  pan 
de  Aîonfeigneur  Gilles  ,  de  vous  citer  à  comparoitre  dans  quarante 
jours  au  Tribunal  de  Dieu  ,  après  quoi  il  fe  retira.  Le  Duc ,  déjà 
déchiré  de  remords ,  fut  effrayé  de  ce  difcours ,  qu'il  cacha  pour- 
tant à  ceux  de  fa  fuite  j  mais ,  quand  il  fut  rendu  à  fon  château 
de  plaifance ,  près  Vannes ,  il  fut  furpris  d'une  maladie  dange- 
Tomc  IK  K  1 


158  SAI 

reule ,  vraîremblablement  caufée  par  le  chagrin  Se  les  remords , 
&c  qui ,  augmentée  par  (es  terreurs ,  le  précipita  au  tombeau  l 
quarante  jours  après  la  mort  de  fon  frère.  Nous  ne  garantiflbns 
pas  ce  dernier  point  comme  très  -  certain  ;  mais  il  n'eft  pas  in- 
croyable pour  tous  ceux  qui  font  perfuadés  qu'il  eft  un  Dieu 
vengeur  des  crimes.  La  mort  de  Gilles  de  Bretagne  a  fourni  à 
M.  d'Arnaud  le  fujet  dune  de  ces  anecdotes  attendrifTantes ,  dont 
cet  écrivain  enrichit  notre  Httérature. 

SAINT-LAURENT  ou  LAN-LAURENT  -,  à  4  Heues  au  Sud 
de  Tréguier ,  fon  Evêché  ;  à  27  lieues  de  Rennes  j  &:  à  2  lieues 
de  Guingamp  ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroifle  relTortit  à  Lan- 
nion ,  &  compte  500  communiants  :  la  Cure  eft  préfentée  par 
M,  le  Duc  de  Lorges.  Le  territoire ,  borné  à  l'Efl  par  la  rivière 
de  Trieuc  ,  &  à  l'Oueft  par  celle  de  Tréguier ,  eft  très  -  mal 
cultivé  j  c'eft  un  terrein  plan  où  l'on  n'apperçoit  prefque  que 
des  landes. 

SAINT-LAURENT-DE-GRENEUC;  fur  une  hauteur;  à  8 
lieues  à  l'Eft-Nord-Eft  de  Vannes,  fon  Evêché;  à  13  lieues  de 
Rennes  ;  &  à  i  lieue  de  Maleftroit ,  fa  Subdélégation.  Cette  Pa- 
roilTe  reiTortit  à  Ploermel ,  &  compte  250  communiants.  Le  ter- 
ritoire ,  arrofé  des  eaux  de  la  rivière  d'Oull,  eu  fertile  en  grains 
Sl  abondant  en  foin  ;  on  y  voit  quelc[ues  landes  dont  le  fol  pa- 
roît  mériter  les  foins  du  cultivateur.  La  Terre  &  Seigneurie  de  Beau- 
mont  ,  avec  haute  ,  moyenne  &  baffe-Juftice ,  appartenoit ,  en 
1500,3  Louis  de  Maleflroit  ;  elle  elt  aujourd'hui  à  M.  de  la 
Bourdonnaye ,  qui ,  en  qualité  de  Seigneur  de  la  Paroiffe  ,  en 
préfente  la  Cure. 

SAINT-LEGER  ;  fur  la  route  de  Nantes  à  Machecou  &  Bourg- 
neuf;  à  4  lieues  à  l'Oueft-Sud-Oueft  de  Nantes,  fon  Evêché, 
fa  Subdélégation ,  &  fon  reffort  ;  &  à  26  lieues  de  Rennes.  On 
y  compte  750  communiants:  la  Cure  elt  à  l'Ordinaire.  Le  terri- 
toire ,  borné  au  Sud  par  le  lac  de  Grand-Lieu ,  ell:  afTez  exacte- 
ment cultivé  ;  il  produit  du  grain  ,  du  hn ,  &  du  foin.  L  an 
1 1 3  9  ,  l'Eghfe  &  les  dîmes  de  cette  Paroiffe  furent  données  à 
l'Abbaye  de  Saint  -  Florent  d'Angers  par  Robert  &  Guillaume 
le  Chat. 

SAINT -LEGER;  à  8  lieues  au  Sud-Eft  de  Saint  -  Malo ,  fon 


s  A  I  159 

Evêché  ;  à  8  lieues  de  Rennes  ;  &  à  4  lieues  de  Hédé  ,  fa  Svb- 
délégation.  Cette  Paroifle  reilortit  à  Bazouges,  &  compte  450 
communiants  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire  oft're  a  la 
vue  des  terres  en  labeur ,  quelques  prairies ,  des  arbres  fruitiers 
&  autres ,  avec  des  landes. 

SAINT  -  LÉONARD  -,  à  i  lieue  au  Sud-Sud-Eft  de  Dol ,  fon 
Evêché  &  fa  Subdélégation  j  &  à  10  lieues  de  Rennes.  Cette 
ParoifTe  relTortit  à  Dinan,&  compte  250  communiants:  la  Cure 
eu  à  l'Ordinaire.  Le  territoire ,  couvert  d'arbres  &  builTons ,  offre 
à  la  vue  des  terres  en  labeur  de  bonne  qualité ,  quelques  prai- 
ries ,  beaucoup  de  landes  ,  &  des  pommiers.  Le  château  des 
Ormes  efh  la  maifon  feigneuriale  de  l'endroit  ;  c'efl:  la  maifon  de 
plaifance  des  Evêques  de  Dol,  fortifiée,  l'an  1299  ,  par  Thebnud 
de  Pouencé ,  Evêque  de  Dol ,  qui  mit  des  troupes  pour  garder 
cette  place.  Ce  Prélat ^  comme  fes  confrères,  étoit  en  mauvaife 
intelligence  avec  le  Duc  de  Bretagne.  La  Corbonnaye  &  Vilouet 
forment  une  moyenne- Juftice ,  qui  appartient  à  M.  le  Saige  de  la 
.Ville-Brune. 

SAINT-L'HÉRI  j  dans  un  fond;  à  3  lieues  au  Sud  de  Saint-Malo, 
fon  Evêché  ;  à  9  lieues  de  Rennes  ;  &  à  4  lieues  Se  demie  de  Mon- 
tauban  ,  fa  Subdélégation.  Cette  ParoifTe  reflbrtit  à  Ploermel  ,  & 
compte  300  communiants  :  la  Cure  eft  préfentée  par  l'Abbé  de 
Saint-Méen.  Le  territoire ,  couvert  d'arbres  &  buiflbns ,  renferme 
des  terres  labourables,  des  prairies  ,  Se  des  landes.  Cette  ParoiiTe 
porte  le  nom  de  fon  fondateur  Saint  l'Héri ,  à  qui  Judicacl ,  Roi 
de  Bretagne,  donna,  l'an  632  ,  un  terrein  pour  y  bâtir  un  Mo- 
ïiaftere ,  où  il  demeura  avec  fes  compagnons.  Ce  Monaflere  ayant 
été  ruiné  par  les  guerres  ,  on  a  édifié  fur  fes  ruines  une  Eglife  pa- 
roiffiale  en  l'honneur  de  ce  Saint. 

En  1400,  le  manoir  de  Saint -l'Héri  appartenoit  à  Jean  de 
Saint-l'Héri  ;  le  manoir  du  Loup ,  à  Pierre  Thomas ,  aujourd'hui 
à  M.  du  Loup  des  Grées  ries  maifons  de  Lanloup  ,  de  la  Noë- 
Vcrtc  ,  de  Ker-divcl  ,  Ker-vernec  ,  Ker-guiftin  ,  &  du  Pleffis-au- 
Prévôt ,  font  plus  modernes. 

SAINT-LIPHAR  ;  à  13  heues  à  l'Oueft-Nord-Ouell  de  Nantes, 
fon  Evêché  ;  à  20  lieues  de  Rennes;  &  à  3  lieues  de  Guérande, 
fa  Subdélégation  &:  fon  reflbrt.  On  y  compte  i  oco  communiants  : 
la  Cure  eu  à  l'Ordinaire.  Le  territoire  efl  en  partie  occupé  à 


2.6o  s  A  I 

l'Eft  par  des  marais  qui  joignent  ceux  de  Montoir ,  appelles 
la  grande  bruere ,  d'où  l'on  tire  les  mottes  à  brûler  :  on  y  voit  en 
outre  quelques  terres  en  labeur  ,  un  bois  taillis ,  &  des  landes 
d'une  étendue  prodigieufe  -,  de  manière  que  les  habitants ,  faute 
d'induilrie  ,  de  courage,  &  d'aifance  ,  n'ont  de  reffource  que 
celle  que  leur  procurent  les  mottes  à  briller  :  ils  pourroient  vi- 
vre plus  à  l'aife  &  être  plus  utiles  à  l'Etat  en  défrichant  leurs 
terres  incultes.  En  1390  ,  il  y  avoit  dans  l'endroit  plufieurs  can- 
tons de  vignes  qui  dépendoient  du  manoir  de  Faugaret  :  on  ne 
voit  plus  à  Faugaret  qu'une  Chapelle  qui  dépend  de  la  Com- 
manderie  de  Saint- Jean  &  Sainte-Cathernie  de  Nantes,  de  l'Or- 
dre de  Malte.  Le  Roi  eft  Seigneur  d'une  grande  partie  de  cette 
Paroiffe ,  où  il  y  a  cinq  Frairies.  A  la  fortie  du  bourg  ,  du  côté 
du  Nord  ,  efl  un  rempart  en  terre,  qui  fe  continue  prefque  fans 
interruption  jufqu'à  Ponpas ,  dans  une  longueur  de  trois  quarts 
de  lieue  :  on  appelle  ce  rempart  le  grand  fojfé ,  il  peut  avoir 
quinze  pieds  de  hauteur  fur  dix  de  largeur  ;  on  ignore  pour- 
quoi &  le  temps  où  il  a  été  conllruit.  Son  Eminence  M.  de 
Rohan  de  Poldux ,  Grand-Maître  de  l'Ordre  de  Malte  ,  poffede 
dans  cette  Paroifle  la  Jurifdiftion  de  Cremeur  &  de  Ker-cabu  ; 
cette  dernière  a  été  transférée  à  Guérande  depuis  quatre  à  cinq 
ans  :  ce  Prmce  poflede  encore  dans  le  même  Heu  la  moyenne- 
Juftice  de  Ville-James ,  Renelona  ,  &  Crenigan.  On  voit  dans 
ce  territoire  les  ruines  de  la  Chapelle  de  Breca ,  où  il  fe  tenoit 
jadis  une  affemblée  confidérable  le  i^''.  Mai  &  le  25  Juin  de  cha- 
que année  :  les  défordres  ,  qui  regnoient  dans  ces  aflemblées,  ont 
occafionné  leur  fuppreiïïon  vers  1740. 

SAINT-LORMEL  j  dans  un  fond  5  à  8  lieues  &  demie  à  l'Efl 
de  Saint-Brieuc  ,  fon  Evêché  j  à  13  lieues  un  quart  de  Rennes; 
&  à  4  Heues  &  demie  de  Lamballe  ,  fa  Subdélégation.  Cette 
ParoilTe  reiïbrtit  à  Jugon ,  &  compte  300  communiants:  la  Cure 
eft  à  l'alternative.  Le  territoire  elt  coupé  de  quatre  à  cinq  ruif- 
feaux  qui  coulent  dans  les  vallons ,  &  qui  vont  fe  perdre  dans 
la  rivière  de  l'Arguenon  j  on  y  voit  des  terres  bien  cultivées,  àQS 
prairies ,  &  des  landes.  Auprès  du  bourg  eft  une  monticule 
qui  forme  un  très-beau  point  de  vue  ,  &  fur  le  fommet  de  la- 
quelle eft  le  moulin  à  vent  de  Lormel.  Il  fe  tient  une  foire  par 
an  dans  ce  bourg.  En  f  500  ,  on  connoilToit  dans  ce  territoire 
le  manoir  de  l'Argentay ,  au  Sieur  du  Pleffis- Bordais  ;  la  Salle, 
au  Sieur  de  Guébriand  -,  la  Motte ,  à  Jacques  Bofchier  >  les  Cour- 


s  A  1  iGi 

rils-Longs ,  h  Amaurî  Sauvaget  :  la  Ville-Biens ,  la  VîUe-Meneuft , 
&  la  Ville-Robert ,  font  plus  modernes. 

SAINT-LUMINE-DE-COUTAÏS  -,  fur  une  hauteur  ;  à  4  lieues 
au  Sud-Oueft  de  Nantes ,  fon  Evêché  &  fon  reilort  ;  à  16  lieues 
de  Rennes  ;  &  à  2  lieues  &  demie  de  Machecou ,  fa  Subdélé- 
gation. On  y  compte  1 1 00  communiants  ,  le  Roi  en  efl:  le 
Seigneur  ,  &  la  Cure  eft  à  l'Ordinaire.  Le  territoire  ,  borné  à 
l'Efl:  par  le  lac  de  Grand-Lieu,  renferme  un  grand  nombre  de 
marais ,  des  terres  fertiles  en  grains ,  des  vignes  dont  le  vin  eft 
de  médiocre  qualité  ,  &:  quelques  landes.  A  peu  de  diftance  du 
bourg  ,  efl:  une  monticule ,  fur  le  fommet  de  laquelle  font  quatre 
à  cinq  moulins  à  vent.  Elle  forme  un  très-beau  point  de  vue  , 
ainfi  que  le  moulin  de  la  Marfelle.  Le  jour  de  la  Pentecôte  de 
chaque  année ,  il  y  a  une  affemblée  en  cette  Paroifle  ;  &  fur 
la  place  eft  un  cheval  de  bois ,  qu'on  nomme  le  cheval  Merlene, 
autour  duquel  danfent  plufieurs  perfonnes  vêtues  d'une  chemife 
de  toile  peinte ,  fur  laquelle  font  deilinées  des  fleurs  de  lis ,  & 
un  de  la  compagnie  eft  obligé  de  chanter  une  chanfon  nouvelle , 
qu'on  envoie  en  Cour.  C'ell  le  Sacriltain  qui  compofe  ordinai- 
rement cette  chanfon  grotefque.  La  cérémonie  fe  fait  devant  les 
Officiers  de  la  Jurifdidion  ,  qui  ont  tous  l'épée  à  la  main.  Le 
Prieuré  de  Saint-Philbert ,  haute-Jufbice  ,  appartient  à  M.  le  Prieur 
de  Saint-Vincent  du  Mans  ;  le  Prieuré  de  Villeneuve  ,  haute- 
Juftice,  à  l'Abbaye  de  Villeneuve. 

SAINT-LUMINE ,  PRÈS  CLISSON  ;  à  5  lieues  au  Sud-Eft 
de  Nantes ,  fon  Evêché  &  fon  reflort  j  à  27  lieues  de  Rennes  ; 
&  à  I  lieue  de  Cliffon ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  1 200 
communiants  :  la  Cure  efl  à  l'Ordinaire.  Le  territoire  eft  un  pays 
plat,  couvert  d'arbres  &  buifîbns ,  &  très-exa6temcnt  cultivé:  il 
produit  des  grains  ,  du  vin,  &  du  foin.  En  1591  ,  le  Duc  de 
^^rcœur  chargea  le  Seigneur  de  Goulaine  de  bloquer  le  château 
de  la  Courbe-Jolliere  ,  qui  fut  enfuite  démoH.  Les  Seigneurs  en 
ont  fait  rebâtir  un  nouveau  fur  les  ruines  de  l'ancien  j  mais  lans 
fortifications.  C'ell  la  maifon  feigneuriale  de   l'endroit. 

SAINT-LUNAIRE  ;  au  bord  de  la  mer  ;  à  i  lieue  &  demie 
à  l'Ouell-Sud-Oucft  de  Saint-Malo  ,  fon  Evêché;  à  14  lieues 
de  Rennes;  &  à  4  lieues  de  Dinan,  fa  Subdélégation  &  foa 
refîort.  On  y  compte    600  communiants  :  la  Cure  efl  à  l'alter- 


26i  s  A  I 

native.  Le  territoire  ,  prefque  fans  inégalités ,  efl:  coupé  d'un  ruif- 
feau  qui  prend  fa  fource  auprès  de  la  maifon  de  Pontual ,  vient 
pafler  auprès  de  ce  bourg  ,  &  va  fe  jetter  dans  la  mer.  Les  terres 
en  font  exaftement  cultivées ,  fi  ce  n'eft  à  trois  quarts  de  lieue 
du  bourg  ,  où  commence  une  lande  qui  eft  fort  étendue.  Nous 
ignorons  cependant  fi  elle  dépend  de  la  ParoifTe  de  Saint-Lu- 
naire. Les  habitants  honorent  la  mémoire  de  Saint  Léonor.  On  voit 
dans  l'EgUfe  paroifTiale ,  fon  tombeau  élevé  de  deux  pieds  de 
terre ,  &  l'on  y  conferve  fes  Reliques.  Sa  tête  efl  dans  un  Re- 
liquaire d'argent ,  &  les  deux  autres  ofTements  dans  deux  Reli- 
quaires de  bois  d'ébene  vitrés,  Saint-Lunaire  ,  haute- Juflice  ,  à 
M,  de  Pontual. 

SAINT  -  MADEN  -,  fur  la  rivière  de  Rance  ;  à  7  lieues  un 
quart  au  Sud  de  Saint-Malo ,  fon  Evêché  -,  à  8  Heues  de  Rennes  ; 
&  à  2  lieues  trois  quarts  de  Dinan,  fa  Subdélégation  &  fon 
reffort.  Cette  ParoifTe  relevé  du  Roi,  &  compte  550  commu- 
niants :  la  Cure  efl  à  l'alternative.  Le  territoire ,  couvert  d'arbres 
&  buifTons ,  renferme  des  terres  en  labeur  cultivées  avec  foin , 
des  prairies ,  &  quelques  petites  landes  :  il  produit  beau- 
coup de  cidre.  La  HoufTaye  ,  haute  -  Juflice  ,  appartient  à 
M.  Lambert. 

SAINT-MALO;  ville  épifcopale  Se  port  de  mer,  dans  la 
Manche  ;  par  les  4  degrés  22  minutes  30  fécondes  de  longi- 
tude ,  &  par  les  48  degrés  38  minutes  de  latitude  ;  &  à  14  lieues 
de  Rennes.  Ce  diocefe  efl  borné ,  au  Nord ,  par  la  mer  ;  au 
Sud  ,  par  celui  de  Rennes  -,  à  l'Efl ,  par  celui  de  Dol  ;  &  à 
rOuefl,  par  ceux  de  Vannes  &  de  Saint-Brieuc.  C'efl  un  des 
diocefes  le  plus  étendu  de  la  haute  Bretagne  :  il  renferme  cinq 
Abbayes  d'Hommes  en  commende  ,  deux  Abbayes  de  Femmes  j 
trente-huit  Prieurés ,  cent  foixante  -  une  ParoifTes  ,  vingt-quatre 
Succurfales;  vingt  Communautés  d'Hommes ,  vingt-fept  de  Filles, 
deux  Séminaires;  &  compte  23 65 cohabitants.  L'air  y  efl  tem- 
péré,  affez  doux,  &  afTez  fain ,  quoique  le  voifmage  de  la  mer 
le  rende  un  peu  vif  &  humide.  Le  terroir  efl  bon  &  fertile  en 
grains  ,  légumes  ,  &  pâturages;  mais  il  n'efl  pas  exaftement  cultivé: 
on  y  trouve  à  chaque  pas  des  landes  &  des  marais  très-étendus , 
ui  ne  prouvent  pas  l'aftivité  &  le  courage  des  agriculteurs.  Un 
e  nos  plus  célèbres  agronomes  dit  ,  da"ns  fon  Traité  de  la 
Culture,  des  terres  ,   <<  qu'en   Bretagne ,    malgré   les   efforts    des 


l 


s  AI  2^j 

w  Etats  ,  la  culture  n'efl  point  portée  au  point  de  perfeéllon  qu'on 
«  pourroit  defirer  ;  cependant  la  Déclaration  du  Roi  du  6  Juin 
»  1768  ,  &  les  lettres  -  patentes  de  Sa  Majedé  du  8  Avril 
»  1769  ,  au  fujet  du  défrichement  ou  deflechement  des  terres 
»  incultes  ou  inondées  ,  accordent  de  grands  privilèges  à  ceux 
y>  qui  en  pofledent ,  6c  qui  veulent  les  défricher,  defTécher, 
»  &  cultiver.  »  Il  feroit  à  defirer  ,  pour  l'utilité  générale  & 
particulière  ,  qu'on  arrêtât  toutes  les  familles  pauvres  Se  vaga- 
bondes ,  qui  n'ont  pas  de  quoi  fubfifter ,  ou  qui  font  fans 
afyle  ,  &  qu'on  les  fit  tranfporter  dans  les  landes  &  fur  le  bord 
des  marais  du  diocefe ,  pour  les  défricher  &  defïécher.  Lorfque 
ces  terreins  feroient  en  rapport  ,  alors  on  les  céderoit ,  en  tout 
ou  en  partie  ,  à  ces  colons ,  par  afféagement ,  arrentement ,  ou 
à  telle  autre  condition  qu'on  voudroit  ;  on  rendroit  par-là  le  plus 
grand  fervice  aux  mœurs ,  à  l'humanité ,  &  à  la  province.  Ces 
défrichements  multiplieroient  l'abondance ,  &  bientôt  le  diocefe 
de  Saint-Malo  n'auroit  point  à  envier  le  fort  des  plus  fertiles 
provinces ,  puifqu'il  eft  prouvé  que  la  richeffe  la  plus  certaine 
d'un  pays  ell  le  revenu  du  fol.  Il  en  réfulteroit  d'ailleurs  un 
très-grand  avantage  pour  le  commerce ,  dont  l'aélivité  augmen- 
teroit  prodigieufement  ;  &  c'eft  ce  qui  doit ,  plus  que  toute  autre 
chofe,  infpirer  aux  Malouinsle  goût  de  l'agriculture.  Mais  ce  projet, 
également  beau  &  difficile ,  ne  peut  être  exécuté  que  par  une 
Compagnie  de  citoyens  avoués  par  le  Gouvernement ,  &  afTez 
riches  &  défintéreiîés  pour  faire  des  avances  confidérables ,  long- 
temps avant  de  retirer  l'intérêt  de   leur  argent. 

Le  Chapitre  de  la  Cathédrale  eft  compofé  d'un  Doyen,  des 
Archidiacres  de  Dinan  3c  de  Porhoèt ,  d'un  Grand-Chantre  ,  de 
feize  Chanoines ,  de  quatre  Semi-Prébendés-Chanoines  ,  de  quinze 
Chapelains ,  huit  Choriiles  ou  Muficiens ,  fix  Enfants  de  chœur , 
&  un  Sacrifie  ,  fans  y  comprendre  les  Prêtres  amovibles  &  les 
Muficiens  non-bénéficiers ,  dont  le  nombre,  toujours  très-grand, 
n'efl  point  fixé.  L'Eglife  Cathédrale  efl  dédiée  à  Saint  Vincent, 
Martyr.  L'Evêque  &  le  Chapitre  font  Seigneurs  temporels  de 
la  ville  épifcopale ,  &  nomment  aux  charges  de  la  Jurifdiftion 
ordinaire    &  commune   de  l'endroit,    qui  s'exerce  en  leur  nom. 

Trois  grandes  routes  aboutiflent  à  cette  ville,  oii  l'on  compte 
deux  ParoifTes.  La  première  ,  fous  le  vocable  de  Saint  Malo  , 
dont  la  Cure  efl  préfentéc  par  le  Chapitre ,  efl  dans  la  ville ,  &: 
a  une  fuccurfale  fous  le  nom  de  Notre-Dame  des  Anges  ;  la 
féconde,  dédiée  à   Saint  Servais,  ell    dans  le  fauxbourg    Saint- 


2^4  s  A  I 

Servan  :  fa  Cure  efl  à  l'alternative.  Le  nombre  des  habitants 
eft  de  18000.  H  fe  tient  deux  marchés  par  femaine  dans  cette 
ville ,  &  une  foire  confidérable ,  par  chaque  année ,  au  fauxbourg 
Saint- Servan  :  elle  commence  le  13  Mai  ,  &  dure  quinze 
jours.  , 

On  remarque  à  Saint-Malo  un  Gouvernem.ent  militaire  ,  corn- 
pofc  d'un  Gouverneur ,  d'un  Commandant ,  d'un  Lieutenant  de 
Roi ,  d'un  Major ,  d'un  Lieutenant  d'Artillerie  ,  &  de  deux  Ingé- 
nieurs pour  le  Roi  au  département  de  Saint-Malo  ;  une  Commu- 
nauté de  ville  avec  droit  de  députer  aux  Etats  de  la  province^ 
une  Commiffion  Intermédiaire  ,  un  Bureau  de  M.  le  Duc  de 
Penthievre,  Amiral  de  France  -,  un  Bureau  des  ClalTes ,  une  Sub- 
délégation ,  une  Brigade  de  MaréchaulTée ,  un  Bureau  de  la 
Société  d'Agriculture ,  un  Bureau  des  Oftrois  ,  une  Infpe61:ion  des 
Haras  de  Bretagne  pour  l'Evêché  de  Saint-Malo ,  une  Infpeftion 
pour  les  Manufactures  &  Toiles  ,  une  Direftion  des  Fermes  gé- 
nérales du  Roi,  une  Diredion  des  devoirs,  Impôts,  &  Billots j 
une  Recette  générale  des  droits  du  Roi  ;  les  Portes  aux  lettres 
&  aux  chevaux  ;  une  MiHce  Bourgeoife ,  commandée  par  un 
Connétable-Colonel;  &  les  Ecoles  d'Hydrographie ,  de  DefTein, 
&c.  Les  Communautés ,  au  nombre  de  quatorze  ,  font  :  le  Sé- 
minaire ,  les  Capucins,  les  Récollets ,  les  Frères  des  Ecoles  Chré- 
tiennes (  a  )  ,  les  Bénédiftins  ,  les  Urfulines  ,  les  Filles  de  Saint- 
Thomas-de-Villeneuve ,  les  Filles  de  la  Charité,  les  Calvairiennes, 
les  Filles  du  Bon-Pafteur ,  &  les  Filles  de  la  Croix.  Les  Jurif- 
diftions  de  Saint-Malo  ,  avec  haute-Juflice  ,  font  :  la  Jurifdiftion 
ordinaire  &  commune  ,  dont  les  appellations  vont  direftionnelle- 
ment  au  Parlement  ;  les  Régaires  ,  le  Chapitre  ,  l'Officialité , 
l'Amirauté ,  le  Confulat ,  &  les   Traites. 

Le  port  de  Saint-Malo,  quoique  d'un  accès  très -difficile, 
à  caufe  des  rochers  qui  le  bordent,  eft,  fans  contredit,  un  des 
plus  beaux  de  la  France.  La  fureté  de  fes  rades  &  de  fon 
mouillage ,  les  commodités  qu'il  offre  pour  la  conllruftion  des 
vaiffeaux  &  les  armements ,  font  des  avantages  que  peu  de  villes 
peuvent  lui  difputer.  Cette  ville  efl  une  des  clefs  du  Royaume, 
&:  un  des  boulevards  de  la  Bretagne.  Depuis  le  commencement 
de  ce  fiecle ,  qu'elle  a  été  embellie  &  accrue  d'une  nouvelle 
enceinte,  elle  peut  pafler  pour  une  des  plus  fortes   &  des  plus 

(a)  Ces  Communautés  d'Hommes  ,  1  doubles  :  it  y  en  a  à  Saint-Malo  &  à 
&  les  cjuatrc  fuivantes  de    Femmes  j  font     |     Saint-Servan. 

jolies 


s  A  I  1^5 

jolies  places  de  la  France.  Ses  remparts  font  d'une  ma- 
gnificence royale ,  &  forment  une  promenade  fuperbe.  Ses  for- 
tifications ,  qui  la  mettent  à  l'abri  de  toute  infulte ,  font  confidé- 
rables  &  méritent  qu'on  s'y  arrête.  Le  château ,  quoique  ancien , 
ell  encore  regardé  comme  un  bon  ouvrage  :  il  eft  bien  entretenu, 
bien  muni  de  canons  &  de  munitions  de  guerre,  &  gardé  par 
une  forte  garnifon  d'Invalides  ;  il  ell:  fait  en  forme  de  carroffe , 
Se  flanqué  de  quatre  grofles  tours  principales  ,  avec  de  vaftes 
&  protonds  foffés.  Il  doit  fon  exigence  a  la  Reine  Anne.  Cette 
PrincefTe,  ayant  eu  quelques  démêlés  avec  l'Evêque ,  touchant 
le  droit  de  régale  ,  fit  fortifier  le  château  ,  malgré  les  excom- 
munications lancées  par  le  Prélat  contre  les  entrepreneurs  & 
ouvriers,  &  y  fit  ajouter  de  nouveaux  ouvrages,  nonobilant  les 
oppofitions  de  l'Evêque.  Elle  fit.  en  cette  occafion,  ufage  de 
cette  fermeté  dont  elle  donna  n  feuvent  des  preuves.  Pour 
montrer  qu'elle  étoit  véritablement  &  qu'elle  vouloit  être  Sou- 
veraine de  Saint-Malo  ,  elle  fit  graver,  en  boffe  ,  fur  une  des  tours, 
ces  mots  bien  expreflifs  :  Qui  que?i  grogne ,  aijifi  fera  ,  ceft  mon 
plaifir ',  par  corruption  de  ces  mots  :  Quiconque  en  gronde.  Cet 
événement  a  fait  nommer  cette  tour ,  Qui  qu'en  grogne  -,  nom 
qu'elle  a  confervé  jufqu'aujourd'hui.  Le  terrein  qu'occupe  Saint- 
ÎVlalo  formoit  anciennement  une  ifle  5  mais  ce  n'efl:  plus  aujour- 
d'hui qu'une  péninfule ,  qui  communique  à  la  terre  ferme  par 
une  belle  chauffée  qu'on  appelle  le  Jiiloji.  Les  murs  de  ville  iont 
afîis  fur  le  roc  ,  &.  flanqués  de  tours  &  de  bafl:ions ,  garnis 
d'une  nombreufe  artillerie.  La  batterie  de  la  Hollande ,  qui  donne 
fur  la  rade  ,  efl:  compofée  de  plus  de  vingt  pièces  de  canons ,  dont 
plufieurs  font  du  plus  fort  calibre.  Les  Forts  avancés  ,  bâtis  iiir 
des  rochers  dans  la  mer,  font  au  nombre  de  quatre  :  le  Fort- 
Royal,  le  petit  Bé,  Me  Herbois ,  &  la  Couchée;  ce  dernier, 
ouvrage  de  l'immortel  Vauban  &  *digne  de  ce  grand  homme, 
efl  le  plus  confidérable  de  tous  ;  il  elt  à  une  lieue  en  mer ,  iiir 
un  rocher  qui  n'eil  acceflible  que  par  un  feul  côté.  L'abord  y 
efl:  dangereux ,  même  dans  le  beau  temps  ;  & ,  s'il  n'efl  peut- 
€tre  pas  imprenable,  il  efl  toujours  vrai  de  dire  qu'il  n'efl  pas 
facile  de  s'en  emparer.  Il  a  été  inutilement  attaqué,  fous  le  règne 
de  Louis  XIV,  par  les  Anglais,  qui  l'ont  refpe61:é  fous  celui  de 
Louis  XV.  Le  Fort  de  la  Varde  n'efl  pas  fitué  comme  les 
autres  :  il  efl  fur  une  langue  de  terre  qui  domine  fur  la  merj 
il  a  été  rebâti,  en  1758  ,  &  fortifié  à  la  moderne,  avec  fofl^es, 
chemin  couvert ,  &  glacis.  Enfin ,  on  vient  de  bâtir  ,  fur  la 
Tome  IV.  L  2 


%GG  SA! 

montagne  où  étoit  lâ  cité  d'Aleth ,  un  ouvrage  qui  met  Jà  ville 
à  couvert  de  toute  inlulte  de  la  part  de  l'ennemi.  L'arfenal  ell 
beau  &  mérite  la  curioiité  des  étrangers  ;  mais ,  ce  qui  doit 
lurprendre  &  exciter  l'admiration ,  c'elt  le  flux  &  reflux  de  la 
mer,  dans  les  mois  de  Septembre  &  de  Mars  :  elle  iBonte  à 
quatre-vingts  pieds  de  hauteur,  avec  des  ibulévemenrs  furieux, 
&  laifle  ,  en  fîx  heures  de  temps ,  le  rivage  à  fec  l'efpace  de 
plufleurs  lieues.  La  mer  a  infenflblement  gagné,  dans  cette  partie, 
un  terrein  très-vafl:e  ;  &  tandis  qu'  elle  le  retire  de  la  côte ,  au  Sud- 
Ouefl  de  la  Bretagne,  elle  envahit  les  terres  iituées  au  Nord  de  la 
province.  Un  procès  fameux  entre  les  Ducs  d'une  part,  l'Evêque 
&  le  Chapitre  de  Saint-Malo  de  l'autre  ,  nous  apprend  que  le 
terrein  fltué  entre  la  ville  &  l'ifle  de  Cefembre  ,  qui  en  eil 
éloignée  d'une  lieue  ,  &  celui  qui  ell:  fitué  entre  la  cité  d'Aleth 
&  Dinard ,  offroient  à  la  vue  des  prairies  &  à^i»  marais  qui  ap- 
partenoient  au  Chapitre.  Le  Duc  de  Bretagne  revendiquoit  ces 
domaines  ;  mais  la  fentence  des  Juges  de  la  Sénéchauflee  de 
Rennes  ne  lui  fut  pas  favorable ,  &  les  Receveurs  de  TEvêché 
&  du  Chapitre  en  font  encore  mention  dans  leurs  comptes, 
quoiqu'ils  n'en  retirent  point  de  revenus.  C'efl:  une  précaution 
très-fage  pour  la  confervation  de  leurs  droits ,  dans  le  cas  qu'ils 
puilfent  quelque  jour   les  faire  valoir. 

Cette  ville  efl  principalement  célèbre  par  {ts>  armements  &  fon 
commerce  ,  &:  c'efl:  par-là  que  fes  habitants  fe  font  fignalés  & 
ont  rendu  d'importants  fervices  à  l'Etat.  Nous  le  dirons,  à  la 
louange  des  Malouins  &  à  la  honte  de  quelques  autres  places, 
aucune  ville  n'a  montré  autant  de  zèle  pour  la  gloire  de  la 
patrie  que  Saint-Malo.  De  fon  port ,  font  fortis  des  eflfaims  de 
corfaires  ,  de  vaillants  Capitaines ,  d'intrépides  matelots  ,  des  ma- 
rins habiles ,  hardis ,  &  expérimentés ,  qui  ont  fait  trembler  les 
ennemis  de  la  France ,  &  ont  défolé  leur  marine.  Que  ce  foit 
plutôt  l'intérêt  que  l'amour  de  la  gloire  ou  le  patriotifme ,  qui 
ait  excité  &  conduit  ces  braves  marins ,  peu  importe  \  la  vertu 
diflingue  fims  doute  le  motif,  mais  la  patrie  ne  voit  que  le 
bienfait.  L'hifloire  de  Saint-Malo  va  prouver  ce  que  j'avance  ; 
mais  nous  ne  devons  pas  oublier  un  fait  qui  doit  être  confervé 
à  la  poflérité.  Les  Malouins  ont  donné ,  au  commencement  de 
ce  flecle  ,  un  exemple  de  généroiité  ,  digne  des  anciens  Romains  j 
ils  ont  agrandi  l'enceinte  de  leur  ville  ,  &  l'ont  re  •.  êtue  ,  à 
leurs  propres  dépens  ,  de  remparts  dont  la  magnificence  étonne. 
Un    citoyen  de  Saint-Malo  ,    bien    connu   dans   la   république 


s  Al  zSj 

des  Lettres  ,    a    célébré    cet    événement  par  ce  diftique  latin  ; 
Hk   œdes  ,   hinc  naves ,    pontus  amicus , 
JEdibus  his  prcebuit  fumptum  atque   locum. 

En  temps  de  paix ,  fon  commerce  a  plufieurs  branches  très- 
étendues  :  il  fe  fait  i°.  avec  nos  colonies  de  l'Amérique;  2°» 
avec  la  Hollande  ;  3*^.  avec  l'Angleterre  j  4*^.  avec  l'Elpagne, 
ce  dernier  eft  le  plus  aftif  Se  la  principale  fource  des  nchcfies 
de  Saint-Malo.  Il  efl:  d'autant  plus  avantageux  qu'il  tire  de  la 
Bretagne  les  toiles  fabriquées  dans  fon  fein ,  &  que  les  retours 
font  toujours  en  efpeces  d'argent  &  en  marchandifes  précieufes, 
&  d'un  débit  afluré.  Il  confifte  principalement  en  toiles  dites 
de  Bretagne ,  étoffes  d'or  &  d'argent  ,  fatins  de  Lyon  &  de 
Tours  ,  étoffes  de  laine  d'Amiens  ik  de  Rheims  ;  marchandifes 
<jui  font  portées  direftement  à  Cadix  ,  &  de  là  tranfportées 
dans  les  Indes  Efpagnoles.  On  emploie  tous  les  ans  environ 
quinze  frégates  à  ce  riche  commerce.  Le  temps  de  leur  dé- 
part de  France  fe  détermine  fur  les  avis  que  Ton  reçoit  du  dé- 
part des  galions  &  des  flottes  d'Efpagne.  Les  voyages  font 
longs ,  puifqu'ils  durent  ordinairement  quinze  à  feize  mois ,  & 
quelquefois  deux  ans  ;  mais  ils  font  fi  avantageux  qu'ils  rappor- 
tent fouvent  jufqu'à  douze  millions  en  efpeces,  &  jamais  moins 
de  fix  à  fept.  Cependant  ce  commerce  ne  fe  fait  jamais  fans 
beaucoup  de  rifqucs ,  en  temps  de  guerre ,  &  fans  de  grandes  /  i^ 
difficultés,  même  en  temps  de  paix,  par  la  défenfe  exprefîe, 
fans  ceffe  renouvellée  en  Efpagne  a  tous  les  étrangers ,  de  faire  le 
commerce  aux  Indes  j  mais  on  emploie  des  noms  fuppofés  ou 
étrangers  ,  tant  dans  les  lettres  que  fur  les  adreffes  ,  dans  la 
crainte  qu'elles  ne  foient  interceptées.  Malgré  toutes  ces  tra- 
verfes  ôc  les  inquiétudes  qu'il  caufe  ,  ce  commerce  eft  parfai- 
tement bien  établi  ;  &  il  n'y  en  a  point  de  plus  unie  au  pu- 
bhc  comme    aux   particuliers. 

Celui  qui  fe  fait  avec  la  Hollande  eft  bien  moins  aftif  & 
ne  peut  être  auffi  avantageux.  Les  Hollandais  font  eux-mêmes 
leurs  retours,  &  les  Malouins  n'envoient  guère  dire^lement 
dans  les  ports  des  Provinces -Unies.  Les  villes  commerçantes 
de  l'Angleterre,  &  fur-tout  les  ifles  de  Jerfey  &:  de  Garneley, 
envoient  tous  les  ans  plus  de  cent  navires  à  Saint-Malo  :  ils  ap- 
portent beaucoup  de  marchandifes ,  mais  dont  la  valeur  ne  peut 
cependant  fuffire  à  payer  tout  ce  qu'ils  emportent  en  denrées 
&  marchandifes  de  France  ;  &  cet  excédent  eft  payé  en  argent 


2é8  s  A  I 

comptant ,  ce  qui  rend  ce  commerce  très-lucratif.  Les  Maîouirrs 
font  encore  des  armements  confidérables  pour  la  traite  des 
Nègres  ,  &  fur-tout  pour  la  pêche  de  la  morue ,  au  banc  de 
Terre-Neuve ,  où  ils  envoient  tous  les  ans  près  de  foixante  na- 
vires. Cette  navigation  eft  une  pépinière  de  bons^  matelots  & 
d'excellents  marins.  Comme  les  armements  de  ce  geo^e  emploient 
tous  les  ans  fept  à  huit  mille  hommes ,  &  comme ,  par  un  règle- 
ment très-fage  &  très-fagement  exécuté ,  fur  cent  hommes  d'é- 
quipage il  y  a  toujours  trente  novices  ;  il  fe  trouve  tous  les 
ans  deux  mille  nouveaux  matelots  ,-fujets  précieux  à  l'Etat.  C'eft 
par  ce  moyen  que  le  département  de  Saint-Malo  a  fourni  dans 
tous  les  temps  aux  flottes  royales  plus  abondamment  qu'aucun 
autre  ,  &  que  fes  matelots  font  recherchés  &  employés  par  pré- 
férence pour  le  fervice  de  Sa  Majefté.  Cette  ville  fait  aulîi  le 
commerce  de  la  Chine  &  des  autres  parties  de  l'înde ,  depuis 
la  fuppreffion  de  la  Compagnie.  Depuis  la  dernière  guerre  juf- 
qu'en  1777  inclufivement ,  elle  a  armé  plus  de  deux  mille  na- 
vires Marchands. 

Les  marchandifes  que  les  Malouins  exportent  de  la  Bretagne , 
font  les  toiles  fabriquées  dans  le  pays  ,  les  cires  &  les  miels , 
les  bleds ,  &  les  fers  des  forges  de  Paimpont.  La  fayance ,  dont 
on  vient  d'établir  une  manufafture  à  Saint-Servan ,  fait  efpérer 
un  heureux  fuccès.  Le  dernier  goût  y  eil:  exaftement  obfervé , 
&  on  fe  flatte  qu'elle  égalera  bientôt  les  autres  manufactures 
du  Royaume.  On  y  fait  auffi  des  briques  de  toutes  efpeces  ,  pour 
les  fours ,  les  cheminées ,  &  le  pavé  des  falles ,  de  la  grandeur 
&  largeur  que  l'on  veut.  La  maifon  de  la  Providence ,  étabhf- 
fement  auffi  favorable  aux  mœurs  &  au  commerce ,  que  louable 
dans  fes  effets ,  efl  une  manufacture  précieufe  à  laquelle  on  em- 
ploie les  pauvres  ;  &  ces  malheureux ,  loin  d'être  à  charge  au 
public ,  lui  font  utiles  par  leurs  travaux. 

De' cette  aftivité  dans  le  commerce,  naît  l'abondance  &  la 
richefle  :  auffi  la  ville  de  Saint-Malo  offre-t-elle  à  la  vue  des 
édifices  fuperbes  qui  annoncent  l'opulence.  Ceux  qui  bordent  les 
remparts  font  des  Palais  qui  furprennent  les  étrangers.  L'EgHfe 
Cathédrale ,  quoique  dans  le  goût  gothique ,  a  des  beautés  qui 
la  font  encore  regarder  comme  une  des  plus  joHes  de  la  pro- 
vince :  le  choeur  fur-tout  eft  très-beau.  On  voit  encore  avec 
plaifir  l'Eglife  des  Bénédiftins ,  &  les  trois  ftatues  de  marbre 
qui  font  au  maître-autel  ;  l'Eglife  de  Saint-Sauveur  ;  l'Hôtel-Dieu , 
&  les  ftatues  de  Notre-Dame  &  de  Saint-Chriflophe ,  de  hau- 


s  A  I  2^9 

teur  naturelle  ,  qui  font  au  delTus  de  la  porte  principale  ;  les 
citernes ,  &  la  pompe  publique  ,  qui ,  par  des  canaux  fouterrains 
qui  pafTent  par  deflous  un  bras  de  mer  ,  conduit  l'eau  douce  dans 
la  ville ,  des  fontaines  éloignées  d'un  quart  de  lieue.  On  admire 
auffi  la  falle  de  fpeftacle ,  qui  ,  quoique  petite ,  eft  un  chef- 
d'œuvre  ,  elle  vient  d'être  incendiée  :  &  une  belle  &  grande  fon- 
taine ,  près  l'Eglife  paroifliale  de  Saint  -  Servan ,  qui  fournit 
de  l'eau  douce  aux  habitants ,  &  pour  les  armements  des  grands 
vaifTeaux, 

On  peut  voir  aufll  avec  plaifir  les  habits  de  la  Confrairie 
de  Meffieurs  de  Saint-Jean.  Cette  ancienne  Confrairie  ,  dont 
on  ignore  l'établiflement ,  eu  unie  à  celle  du  Saint-Sacrement  j 
elle  eu  compofée  de  deux  Abbés  &  de  douze  Jurats  laïques, 
choifis  entre  les  notables  de  la  ville  :  elle  fubfiftoit  avec  éclat 
dès  le  quatorzième  fîecle.  Jean  de  Morte  -  Fouace ,  Capitaine 
de  Saint-Malo  en  1376,  lui  donna  la  maifon  qu'on  appelle  au- 
jourd'hui C Abbaye  Saint-Jean.  Ceci  détruit  l'opinion  de  ceux  qui 
veulent  que  cette  Confrairie  blanche  foit  un  reile  de  l'Amende- 
honorable  (  a  )  faite  par  les  Malouinsau  Duc  de  Bretagne,  puifque 
cette  Confrairie  étoit  établie  avant  l'Amende ,  qui  ne  fe  fit  qu'en 
1 384.  Le  Duc  n'exigea  cette  humiliation  que  pour  le  jour  de  fon  en- 
trée, r  l'afte  pafTé  à  ce  fujet  en  fait  foi.  Comme  d'ailleurs  la 
ville  ne  refufoit  de  reconnoître  le  Duc  ,  que  pour  fuivre  le  parti 
de  fon  Evêque ,  le  Clergé  fit  fon  Amende-honorable  le  premier  : 
&  fi  la  Confrairie  étoit  une  fuite  de  cette  foumiffion ,  le  Cler- 
gé auroit  dû  fupporter  fa  part  de  l'affront  ;  ce  qui  ne  peut  fe 
dire  ,  puifqu'il  n'y  a  que  quelques  années  que  le  Chapitre  ac- 
compagne les  Mefîieurs  de  Saint-Jean  le  jour  &  la  veille  de  la 
fête.  Les  Afibciés  ont  pour  eux  quelque  chofe  de  plus  :  c'elt  une 
médaille  qui  repréfente  d'un  côté  un  Duc  de  Bretagne ,  &  de 
l'autre  un  des  Confrères.  Ce  Prince  s'étant  trouvé  à  Saint-Malo 
au  jour  Saint-Jean ,  affifia  lui-même  à  cette  proceiïion ,  ik  permit 
à  ces  Meffieurs  de  fe  fcrvir ,  dans  leurs  cérémonies ,  d'un  vête- 
ment pareil  à  l'habit  Ducal. 

On  a  auffi  prétendu  que  l'efpece  d'étole  que  portent  les  Con- 
frères ,  étoit  le  fymbole  de  la  corde  de  l'Amende  -  honorable  ; 
mais  ce  n'eft  autre  chofe  qu'une  cfpece  de  baudrier  ,  dont  les  Ducs 
fe  décoroient  dans  les  cérémonies  publiques.  Dans  un  mamifcrit 
que  j'ai  fous  les  yeux ,  on  lit ,  à  l'occafion  de  cette  Confrairie  : 

(4)  Nous  parlerons  de  cette  Amende-honorable  dans  Ton  lieu,  (voyez  année  138^.) 


^^o  S  A  I 

Les  Malouins  dlffimuUnt  le  motif  ;  la  vérité  ejl  que  cette  Amende- 
honorable  ejl  la  réparation  du  lâche  affajjinat ,  commis  en  la  perfonne 
du  nommé  Desfontaines  ,  dans  la  pnje  du  château  par  les  habitants 
de  Saint-Malo.  Je  fuis  impartial ,  &  je  dis,  vrai.  Je  n'entrepren- 
drai point  de  combattre  une  opinion  pour  faire  triompher  l'au- 
tre. La  Confrairie  fubfifte  avec  éclat  ,  c'eft  un  honneur  d'y 
être  admis  aujourd'hui  ;  qu'importe   le  motif   de  l'étabhffement  ^ 

La  ville  de  Saint-Malo  offre  plufieurs  coups  d'œil  très-amu- 
fants ,  les  afpefts  font  toujours  variés ,  &  les  tableaux  différents.. 
D'un  côté,  la  vue  fe  perd  fur  une  mer  tantôt  femblable  à  une 
glace  unie,  ou  aux  champs  de  bleds  qu'un  vent  léger  agite  & 
fillonne  ;  tantôt  écumante  ,  foulevée  par  les  vents  &:  ouvrant  de 
profonds  abyfmes.  Ce  fpeftacle  ell:  toujours  frappant  &  fublime  ^ 
il  élevé  &  agrandit  l'ame.  Le  flux  &:  le  reflux  diverfifie  en- 
core ce  tableau  ,  qui ,  cependant ,  n'efl  jamais  monotone  au  point 
d'ennuyer.  Dans  la  pleine  mer  on  n'apperçoit  que  les  eaux , 
mais,  lorfqu'elle  efl  retirée,  on  découvre  une  longue  chaîne  de 
rochers ,  dont  on  ne  foupçonnoit  pas  même  l'exiftence  :  d'un  au- 
tre côté  ,  un  fauxbourg  plus  grand  &:  plus  beau  que  plufieurs  villes 
confidérables ,  féparé  de  Saint-Malo  feulement  par  un  petit  bras 
de  mer  qui  découvre  deux  fois  le  jour ,  &  plufieurs  villages 
contigus ,  forment  une  perfpeftive  charmante ,  dont  la  vue  eft 
terminée  par  de  belles  maifons  de  campagne  &  des  bois  dans 
l'éloignement.  Plus  loin ,  dans  l'enfoncement  de  la  rade  ,  le  petit 
golfe  de  Dinard  ,  qui  préfente  un  payfage  admirable  en  forme 
d'amphithéâtre ,  achevé  de  rendre  ce  point  de  vue ,  finon  fupé- 
rieur ,  du  moins  égal  aux  perfpeftives  les  plus  vantées. 

Saint- Servan  ,  fauxbourg  de  Saint-Malo,  plus  grand  que  la 
ville  &  afTez  bien  peuplé  ,  efl:  dans  une  belle  fituaticn  au  Sud, 
entre  la  mer  &  la  campagne ,  &  fert  de  promenade  aux  Ma- 
louins. Ses  rues  font  larges ,  bien  pavées ,  &  garnies  de  belles 
maifons  ;  d'un  côté  il  regarde  Saint-Malo ,  &  de  l'autre  la  cam- 
pagne j  fes  dehors  offrent  une  très-;belle  perfpeftive.  11  deviendroit 
bientôt  une  ville  confidérable ,.  marchande  &  riche  ,  lî  l'on  exé- 
cutoit  le  plan  du  Maréchal  de  Vauban.  Suivant  ce  plan ,  dé- 
pofé  aux  archives  de  la  Maifon  &  Communauté  de  Saint-Malo, 
ce  feroit  une  des  plus  fortes  &  des  plus  belles  villes  du  Royau- 
me. Le  nom  feul  de  l'auteur  efl  garant  de  la  beauté ,  comme 
de  l'utilité  du  projet.  Ce  fauxbourg  n'a  rien  de  remarquable  que 
la  Chapelle  de  Saint- Pierre  ,  autrefois  Cathédrale  de  l'Evêché 
d'Akth,  6c  les  débris  du  château  de  Sohdor ,  autrefois  Stiridor, 


s  A  I  271 

dont  Tancienne  tour  fert  à  la  défenfe  du  port  de  fon  nom  &  du 
port  Saint-Pere  ,  &  à  loger  les  prifonniers  en  temps  de  guerre. 
Le  port  de  Solidor  eu  un  des  plus  commodes  que  l'on  connoifTe  : 
c'eit  là  que  l'on  conftruit  les  grands  navires  &  les  frégates  pour 
les  voyages  de  long  cours  ;  on  pourroit  même  en  faire  un  port 
pour  la  marine  royale.  Les  vaifieaux  de  Sa  Majefté ,  ainfi  que 
ceux  de  la  Compagnie  des  Indes ,  y  mouilleroient  en  toute  fu- 
reté. Après  la  fameufe  &c  malheureufe  bataille  de  la  Hougue  en 
1^92,  quinze  vaifTeaux  de  ligne  ,  à  hauts  bords  ,  s'y  réfugiè- 
rent ,  fans  aucuns  rifques  ni  accidents. 

Voilà  ce  que  j'ai  à  dire  fur  la  fîtuation  Se  l'état  aftuel  de 
Saint- Malo.  Je  vais  maintenant  rapporter  ce  que  l'hifloire  nous 
en  a  appris  :  je  parlerai  d'abord  de  la  ville  d'Àleth  ,  qu'on  peut 
appeller  /a  mère  de  Saint-Malo  ,  puifque  ,  fans  la  première ,  la 
féconde  n'eût  peut-être  jamais  exifté. 

Alet/i  ,  Alethum  ,  ou  Giadala  in  Reiomhus  ,  a  conferv.é' ibu 
ancien  nom  celtique  de  Gui -d'Aleth  ou  Guic-Aleth  ;  c'eft,  au- 
jourd'hui'le  fauxbourg  Saint-Servan  dont  on  vient  de  faire  mei}-  . 
tion.  LaifTant  aux  amateurs  de  l'antiquité  &  aux  fçavants  la  ''^M  -^at^ 
che  ,  peut-être  impofTible ,  d'aiïlgner  l'époque  de  fa  fondation  ,V/fc^^^ 
nous  ne  perdrons  pas  le  temps  à  bazarder  des  conjectures  fur  ^f"' 
fon  origine  :  nous  raifonncrons  d'après  les  hiitoriens ,  &  nous  ^f^ 
tirerons  àQ.%  conféquences  de  ce  qu'ils  nous  ont  appris.  Il  efl: 
probable  &  nous  penfons  que  la  ville  d'Aleth  eft  une  des  plus 
anciennes  de  la  Bretagne  armorique.  Tout  fe  réunit  pour  ap- 
puyer cette  opinion  ,  le  canton  où  elle  eft  fituée  étoit ,  fans 
doute ,  habité  par  un  peuple  quelconque  ,  &  ce  peuple  avoit 
une  ville  à  laquelle  les  anciens  hilloriens  donnent  le  nom  ^A- 
let/i  ;  leur  lîlence  ,  l'état  aftuel  du  pays ,  &  l'hiftoire ,  nous  font 
croire  qu'il  n'y  en  avoit  pas  d'autres  dans  les  environs.  Dol , 
félon  toutes  les  apparences ,  n'exifloit  point  avant  la  conquête 
des  Romains  ,  ou  ce  n'étoit  qu'un  village  de  peu  d'importance. 
Il  faut  donc  convenir  qu'elle  étoit  le  chef-Heu  &:  la  principale 
cité  de  cette  partie  de  la  Bretagne  ;  mais  la  difliculté  ell  de 
fçavoir  quel  étoit  le  peuple  qui  l'habitoit.  Ici  les  fentimcnts  font 
partagés ,  les  uns  la  donnent  aux  Diablintes ,  les  autres  aux  Cu- 
riofolites.  Le  premier  fentiment ,  qui  nous  femble  le  meilleur, 
eft  celui  d'Antonin ,  dans  fon  Itinéraire  du  Père  Dom  Denis  dans 
la  GalUa  Chrifliana ,  &  paroît  être  celui  de  Céfar  dans  fes  Com- 
mentaires. La  féconde  opinion  n'eft  pas  fort  fuivie  ,  &  n'elt  fon- 
dée que  fur  des  conjedurcs.  Le  bourg  de  Corfcul  qui  fe  trouve 


lyi  s  A  I 

à  quatre  lieues  de  Saint-Malo ,  a  donné  lieu  à  ces  conje6lures  ; 
voici  ce  qu'on  a  dit:  «  Corfeul  appartenoit  aux  Curiofolites , 
»  donc  Aleth  leur  appartenoit  auffi.  ^>  Il  eit  facile  de  fentir  le  foible 
ou  plutôt  le  ridicule  de  ce  raifonnement.  Les  Curiofolites  pou- 
voient  pofféder  Corfeul,  &  les  Diablintes  Aleth,  malgré  la  pro- 
ximité de  ces  deux  places ,  comme  le  Roi  de  France  poffede  les 
villes  en  deçà  du  Rhin ,  &  l'Empereur  celles  qui  font  au  delà. 
D'ailleurs,  quoique  les  Gaulois  formaffent  un  nombre  infini  de 
petites  républiques  ,  on  fçait  qu'ils  vivoient  dans  une  grande  in- 
telligence ,  confervée  &  entretenue  par  l'identité  de  rehgion ,  de 
mœurs  ,  &  d'ufage.  Mais  je  dirai  plus ,  c'efl:  que  rien  ne  prouve 
que  Corfeul  ait  été  l'ancienne  ville  des  Curiofolites.  Le  mot  Cor- 
jeul,  dit-on,  eft  un  abrégé  de  celui  de  Curiofolites ,  &  même 
le  premier  fe  trouve  renfermé  dans  le  fécond  ;  & ,  d'après  une 
analogie  fi  parfaite  (a),  il  efl:  hors  de  doute  que  cette  ville-là 
étoit  capitale  des  Curiofohtes.  Ce  principe ,  en  facilitant  la  déci- 
fîon  des  queftions  les  plus  épineufes  ,  multipUeroit  prodigieufe- 
ment  les  erreurs  hiftoriques  ;  &  il  y  a  long-temps  que  les  fça- 
vants  le  rejettent.  On  doit  d'autant  moins  en  faire  ufage  ici ,  que 
tous  les  monuments  anciens  combattent  l'opinion  qu'il  favorife. 
CuriofoUtum  ell:  un  mot  latin  ,  Corfeul  un  mot  français,  qui 
ont  pu  fervir  l'un  à  nommer  les  Curiofolites ,  &  l'autre  à  nom- 
mer le  bourg  de  ce  nom  ,  fans  aucun  rapport  des  premiers  au 
fécond  ;  &  fi  l'on  vouloir  juger  de  la  fituation  d'un  peuple  par 
le  nom  que  portent  aujourd'hui  les  différents  cantons,  où  trou- 
veroit-on  une  analogie  plus  parfaite  que  celle  du  mot  latin  Cu- 
riofolitwn  &  Curiofolites,  Or ,  le  premier  de  ces  mots  ell  le  nom 
latin  de  l'Evêché  &  de  la  ville  même  de  Quimper ,  qui  eft  re- 
gardée comme  la  capitale  des  Curiofolites.  D'ailleurs ,  que  prou- 
vent les  monuments  trouvés  dans  les  ruines  de  Corfeul  ?  Une 
feule  chofe ,  qui  efi:  que  le  pays  a  été  foumis  aux  Romains  , 
puifque  tous  ces  monuments  font  des  ouvrages  des  Romains ,  & 
non  des  Gaulois  ;  &  l'on  pourroit  même  conjefturer,  avec  raifon  , 
que  Corfeul  n'étoit  peut-être  qu'une  bourgade  ou  un  château  bâti 
par  les  conquérants  des  Gaules.  Ce  qui  me  feroit  pencher  pour 
ce  fentiment ,  c'efi:  que  les  Gaulois  plaçoient  toujours ,  autant 
qu'ils  le  pouvoient ,  leurs  villes  fur  le  bord  de  la   mer  :  Aleth , 


(û)  C'cft  avec  ce  raifonnement  qu'on 
a  voulu  faire  croire  que  Paris ,  fils  de  Priam , 
éioit  le  fondateur  de  Paris  :  que  Troyes ,  en 


Champagne  ,  devoit  fon    exiftence   à  un 
autre  Prince  Troyen. 


Quimper, 


f. 


s  A  I  27} 

Quimper ,  Vannes ,  &  Nantes ,  en  font  la  preuve.  Or ,  puifqu'ils 
avoient  une  fi  belle,  occafion  de  bâtir  fur  cette  côte  une  ville 
maritime  ,  pourquoi  placerent-ils  Corfeul  à  plus  de  trois  lieues  èc 
demie  de  la  mer  ?  (  Voyez  la  DifTertation  à  ce  fujet ,  page 
Ixiv ,  tome  premier.  )  Avouons  donc  que  l'on  ne  peut  conteikr 
la  cité  d'Aleth  aux  Diablintes ,  fans  choquer  ouvertement  le  bon 
fens  &  la   raifon. 

La  Notice  de  l'Empire  &  Fltinéraire  d'Antonin  nous  appren- 
nent que  ,  fous  la  domination  Romaine  ,  Aleth  avoit  une  garnifon 
comme  toutes  les  autres  places  importantes.  Nous  ne  fçavons  rien 
de  plus  fur  l'état  de  cette  ville  dans  ces  temps  reculés.  Les 
médailles  trouvées  en  1759,  ne  fervent,  tout  au  plus,  qu'à 
confirmer  ce  que  l'hiftoire  nous  a  tranfmis.  La  révolution  qui 
arracha  l'Armorique  à  l'Empire ,  fournit  la  ville  d'Aleth  aux 
Princes  qfti  avoient  conquis  cette  province  :  elle  refta  fous  leur 
puiffance  jufqu'au  commencement  du  fixieme  fîecle  ,  qu'une  armée 
de  Frifons ,  commandée  par  Crifolde ,  leur  Chef ,  que  Clovis 
avoit  envoyés  en  Bretagne ,  s'en  empara ,  &  la  garda  quelque 
temps.  Budic  ,  qui  regnoit  alors ,  ne  put  réfiiler  à  ces  étrangers; 
mais  Hoël  le  Grand ,  fon  fils  &  fon  fucceffeur  ,  la  reprit  Se 
chaiïa  les  Frifons  de  fon  pays.  On  prétend  que  cette  ville, 
ayant  reçu  l'Evangile  dès  les  premiers  fiecles  de  l'Ecylife ,  fut 
gouvernée  par  des  Evêques  régionnaires ,  dont  Saint  Budoc  fut 
le  dernier.  Il  faut  reléguer  cette  opinion  au  rang  des  chofes  dou- 
teufes  &  d'ailleurs  peu  intéreflantes.  Le  fixieme  fiecle  eft ,  peut- 
être  ,  l'époque  la  plus  brillante  de  la  religion  en  Bretagne.  Elle 
étoit  alors  peuplée  d'une  foule  de  faints  Solitaires  ,  Anglais  ,  Ecof^ 
fais,  Irlandais,  qui  venoient,  loin  de  leur  patrie,  s'y  confacrer 
à  la  pénitence.  De  ce  nombre  étoient  plufieurs  Evêques ,  qui 
rétablirent  ou  fondèrent  des  Eglifes  qui  fubliflent  encore.  Saint- 
Malo ,  qui,  félon  Moréri ,  étoit  fils  d'un  Gentilhomme  Irlandais, 
nommé  ff^ent  ou  Guent ,  &  coufin-germain  de  Saint  Samfon  & 
de  Saint  Magloire  (^  ),  ayant  été  élu  Evéque  de  Guic-Callel, 
&  ne  voulant  point  occuper  ce  Siège ,  fur  lequel  il  avoit  été 
placé  de  force  &c  contre  fon  gré ,  s'échappa  fecrétement  de  fa 
patrie ,  &  pafîa  en  Bretagne.  Il  fe  mit  fous  la  conduite  d'un 
faint  Solitaire ,  nommé  Aaron  ,  qui  avoit  bâti  un  Monailere  dans 
une  ifle  voifine  de  la  cité  d'Aleth.  Déjà  prefque  toute  la.  Bretagne 
avoit  renoncé  au  paganifme  ,  le  culte  des  taux  Dieux    avoit  été 


(j)  Selon  d'autres ,  Saint  Malo  ctoit  Ecoflais^  de  nation,  C^  Evcqiie  de    Winceâcr, 
Tome  IV.  M  2 


lyA.  S  A  I 

profcrit,  &  TEvangile  regnoit  fur  les  coeurs  Si  les  esprits»  Les 
habitants  d'Aleth  ,  voyant  leur  Eglife  parfaitement  établie ,  pen- 
ferent  à  fe  choifir  un  Pafteur  en  chef  &  d'un  ordre  fupérieur» 
Témoins  des  vertus  de  Saint  Malo ,  leur  voifin ,  ils  jetterent  les 
jeux  fur  lui,  &  le  proclamèrent  Evêque  de  leur  ville  ,  d'un  confen- 
tement  unanime.  Il  accepta ,  quoiqu'avec  peine  ,  cette  pénible 
&  importante  fonftion ,  &  gouverna  fon  peuple  avec  fagefîe. 
Après  la  mort  du  faint  Hermite  Aaron ,  il  fut  auffi  élu  Supé- 
rieur de  fa  Communauté ,  qu'il  dirigea  avec  beaucoup  de  pru- 
dence. Ses  diocéfains ,  enchantés  de  vivre  fous  fes  loix ,  &  pleins 
de  vénération  pour  fes  vertus ,  fe  foumirent  à  lui  pour  le  fpi- 
rituel  Se  le  temporel ,  &  lui  donnèrent  la  Seigneurie  de  leur 
pays.  Ses  libéralités  lui  attirèrent  la  haine  &  la  perfécution  de 
fon  Souverain.  Hoël  le  Grand  étoit  mort ,  &  avoit  lailTé  à  fes 
barbares  fils  le  Royaume  de  Bretagne.  Celui  qui  regnoit  dans 
cette  partie  de  la  province  o\x  ell  fitué  Saint-Malo,  perfécuta  le 
vénérable  Evêque;  il  ne  put  voir,  fans  jaloufie  ,  l'attachement 
des  Alethiens  pour  leur  Pafteur ,  Se  réfolut  de  l'en  punir.  Le 
Prélat  ne  voulut  point  réfiller  à  fon  Souverain.  Ne  fe  fentant 
pas  capable  de  braver  la  tempête  ,  il  prit  le  fage  parti  de 
l'éviter  :  il  quitta  fon  troupeau ,  Se  fe  retira  dans  une  folitude 
de  la  Saintonge.  Hoël  ne  tarda  pas  à  fe  repentir  de  fon  injuf- 
tice  :  il  reconnut  fa  faute ,  rappella  le  faint  Evêque  -,  & ,  pour 
montrer  qu'il  étoit  fincérement  fâché  de  ce  qui  s'étoit  paffé,  il 
confirma  à  Saint  Malo  toutes  les  donations  précédentes  ,  &  y 
ajouta  de  nouvelles  pofieflions ,  avec  beaucoup  d'or  &  d'argent. 
Voilà  ,  félon  toutes  les  apparences ,  l'origine  de  la  jurifdiftion 
temporelle  des  Evêques  de  Saint-Malo.  Le  faint  Prélat  ne  refta 
pas  long-temps ,  après  cet  accommodement ,  dans  fon  diocefe  : 
il  retourna  dans  fa  folitude  de  Saintes ,  &  y  mourut.  Quelques 
années  après ,  on  éleva  une  Eglife ,  en  fon  honneur,  dans  l'ifle 
de  Saint-Aaron  ,  &  cette  ifle  prit  le  nom  de  fon  Patron.  En  762 , 
un  jeune  homme  d'Aleth  apporta  de  la  Saintonge  les  Reliques  de 
Saint  Malo ,  qui  furent  dépofées  dans  l'Eghfe  de  fon  nom ,  par 
Bily ,  Evêque  de  ce  diocefe. 

L'hiftoire  de  ces  temps  reculés  ne  nous  ofFre  pas  un  grand 
nombre  de  faits  relatifs  à  la  ville  d'Aleth.  Il  paroît  qu'elle  fut 
fouvent  expofée  aux  ravages  &  aux  incurfions  des  Barbares, 
Elle  fut  attaquée  Se  prife  ,  en  8 1 1  ,  par  une  armée  de  Français , 
que  l'Empereur  Charlemagne  avoit  envoyés  conquérir  la  Bretagne 
Armorique.  Elle   relia  fous  la  puifiance   des  Empereurs  jufqu'au 


o  A  I  î-TÇ 

règne  de  Nominoé.  En  817,  Louis  le  Débonnaire  confirma  à 
Helocar  &  à  fes  fuccefTeurs  la  pleine  &  paiiible  pofreflion  du  do- 
maine èk  de  la  Seigneurie  d'Aleth  &  de  Saint-Malo ,  conformément 
aux  lettres  précédentes ,  accordées  par  Charlemagne  ,  fon  père. 
Les  lettres-patentes  données  à  ce  fujet ,  qui  font  le  plus  ancien 
titre  qu'il  y  ait  à  Samt-Malo  ,  nous  apprennent  que  ,  peu  aupa- 
ravant, la  ville  d'Aleth  avoit  été  pillée  par  les  Barbares,  &  que 
les  titres  de  cette  Eglife  avoient  été  brûlés.  Cell  vraifemblable- 
ment  à  la  fureur  de  ces  étrangers  que  l'on  doit  attribuer  la  def- 
truftion  de  l'Eglife  dédiée  à  Saint  Malo ,  qui ,  félon  le  témoi- 
gnage des  hiftoriens ,  fut  brûlée  dans  le  neuvième  fiecle.  L'Evê- 
que  Helocar  la  fit  rebâtir  ,  <Sc  la  dédia  à  Saint  Vincent ,  Martyr  j 
mais,  fi  l'Eglife  changea  de  nom,  l'ifle  ne  quitta  point  le  fien , 
&  conferva  toujours  le  nom   de  Saint-Malo. 

Quelques  écrivains  ont  prétendu ,  fans  beaucoup  de  fonde- 
ment, que  cette  ville  avoit  été  ravagée  parles  Sarrafins  j  mais 
l'hiftoire  ne  nous  apprend  rien  de  poiitif  là-defTus,  &,  ce  qui 
eft  plus  certain ,  c'ell  qu'en  969  les  Normands  défoloient  la  Bre- 
tagne par  leurs  pillages.  Ces  brigands ,  impies  &  facrileges ,  ne 
refpeftoient  pas  davantage  la  rehgion  que  les  hommes.  Salvator , 
Evêque  d'Aleth  ,  craignant  pour  TEghfe  de  Saint-Vincent  ,  fe 
faifit  des  ReUques  de  Saint  Malo  ,  ôc  les  porta  à  Paris  comme 
dans  un  afyle  afTuré.  La  tête  &  le  bras  de  ce  Saint  furent  dans 
la  fuite  apportés  en  Bretagne ,  &  dépofés  fous  le  grand  autel 
de  Saint  Vincent,  Martyr,  où  ils  font  toujours  reliés  depuis, 
enchàflés  dans  un   ReHquaire   très-riche. 

Cependant ,  les  habitants  ,  fatigués  de  ces  fréquentes  incur- 
fions,  6c  dégoûtés  d'une  ville  où  ils  avoient  fans  cefle  à  craindre 
pour  leurs  richefi'es  ,  leur  Hberté  ,  6c  leur  vie,  cherchèrent  à  s'éta- 
blir dans  un  heu  plus  fur  &  plus  à  couvert  des  entreprifes  des 
Barbares.  L'ifle  d'Aaron ,  ou  plutôt  de  Saint-Malo ,  leur  parut 
un  lieu  propre  à  s'y  fortifier  :  ils  étoient  d'ailleurs  attirés  dans 
cet  endroit ,  par  la  vénération  qu'ils  confervoient  pour  leur  pre- 
mier Evêque  Ils  y  firent  donc  confiruire  plufieurs  édifices,  &  dé- 
ferrèrent en  foule  leur  ancien  féjour  ;  en  forte  que  peu-à-peu 
l'iUe  fe  peuploit ,  tandis  que  la  ville  devenoit  dél'erte.  Benoît , 
Evêque  -  Adminifi:rateur  d'Aleth  ,  voyant  le  grand  nombre  de 
peuple  que  renfermoit  l'ifle  de  Saint-Malo ,  donna  à  l'Abbaye 
de  Marmoutier  l'Eglife  de  Saint-Vincent  &:  tout  ce  qui  en  dé- 
pendoit ,  avec  obligation  d'y  établir  une  quantité  funiiante  de 
kehgitux  pour  y  faire  les  fondions  de  Palleurs,  Cette  donation 


rj(,  *  S  A  I 

fut  approuvée  du  Pape  Pafchal  II,  l'an  1 109.  Les  chofes  ref-» 
terent  en  CQt  état  jufqu'à  FEpifcopat  de  Jean  de  Chatillon  ,  dit 
de  la  Grille,  Ce  Prélat  voyant  que  bientôt  Tancienne  ville 
d'Aleth  ne  feroit  qu'une  bourgade  prefque  déferte,  &  que  fon 
troupeau  ,  préférant  la  fituation  de  Saint-Malo  ,  ne  ceffoit  d'y 
former  de  nouveaux  établiflements ,  réfolut  de  le  fuivre ,  &  d'y 
transférer  le  Siège  épifcopal.  En  conféquence,  il  enleva  l'Eglife 
de  Saint- Vincent  aux  Religieux  Bénédiftins ,  &  en  fit  fa  cathé- 
drale, qu'il  donna  à  des  Chanoines-R.éguliers  qu'il  fit  venir  de 
Paris.  J'entrerai  dans  le  détail  de  cette  affaire  dans  le  Catalogue 
hiftorique  des  Evêques  de  Saint-Malo  :  je  me  contenterai  ici  d'ob- 
ferver  que  les  Papes  Innocent  II,  Anaftafe  IV,  &  Adrien  IV, 
approuvèrent  cet  arrangement ,  qui  fut  auffi  confirmé  par  le 
Duc  Conan  le  Gros.  Ce  Prince  fit  plus  :  il  accorda  à  la  ville 
de  Saint-Malo  tous  les  privilèges  dont  jouifîbit  l'ancienne  cité 
d'Aleth ,  &  y  ajouta ,  de  nouveau ,  celui  d'afyle  &  de  fauve- 
garde.  Tout  criminel  &  tout  débiteur  étoit  en  fureté,  dès  qu'il 
étoit  parvenu  fur  fon  territoire  ,  qui  s'étendoit  depuis  la*  cité 
d'Aleth  jufqu'au  village  de  Menhic  ou  Lomimhi  ^  par  corruption 
de  deux  mots  latins,  mane  hïc^  demeure-là.  Cet  afyle  étoit  in- 
violable :  on  en   peut  juger  par  ce  trait  d'hiftoire. 

L'an  1 479 ,  François  II ,  Duc  de  Bretagne ,  livre  aux  Am- 
baffadeurs  de  Richard  ,  Roi  d'Angleterre ,  le  jeune  Comte  de 
Richemont ,  Prince  Anglais ,  qui  s'étoit  réfugié  auprès  de  lui , 
fuyant  la  perfécution  des  York ,  bourreaux  de  fa  famille.  Le 
Prince  Breton  avoit  été  trompé  par  les  Ambafladeurs ,  qui  de- 
mandoient  le  Comte ,  fous  prétexte  que  Richard  vouloir  lui  faire 
époufer  fa  fille  ;  mais,  averti  que  le  deffein  du  Monarque  étoit 
d'immoler  à  fa  fureté  ce  dernier  rejetton  de  la  famille  des 
Lancallre  ,  il  envoya  en  difigence  le  chercher  à  Saint-Malo , 
où  il  devoit  s'embarquer.  Richemont  étoit  déjà  fur  les  vaifTeaux 
Anglais  qui  alloient  mettre  à  la  voile.  Dans  ce  péril  extrême, 
l'Envoyé  trouve  le  moyen  d'amufer  les  Ambaffadeurs  :  le  Prince 
s'échappe  ,  &  fe  réfiigie  à  Saint-Malo.  Les  Anglais ,  informés 
de  fon  évafion ,  ont  recours  au  Député ,  &  le  preiTent  de  leur 
remettre  le  Comte  entre  les  mains.  Leurs  inftances  font  inutiles: 
l'Envoyé  leur  répond  «  qu'il  n'ignore  pas  que  l'afyle  de  Saint- 
»  Malo  efi:  inviolable,  &  que  par  conféquent  le  Prince  Anglais 
»  n'eft  plus  fous  la  jurifdiction  du  Duc.  »  Les  Ambaffadeurs, 
convaincus  qu'ils  font  découverts  ,  partent  pour  l'Angleterre  ; 
Richemont   retourne  auprès  du  Duc ,    &  devient  dans  la  fuite 


s  A  I  *  177 

Roi  d'Angleterre  ',  fous  le  nom  de  Charles  VIL  Ses  fujets, 
heureux  fous  fon  règne  ,  lui  donnèrent  le  furnom  glorieux  de 
Salomon   de  U Angleterre, 

Ceft  en  accordant  de  pareils  privilèges  que  Louis  XI  repeupla 
la  ville  de  Paris ,  défolée  en  même  temps  par  la  guerre  6c  une 
épidémie.  Il  fit  publier  des  lettres  ,  portant  permillion  à  tous 
bannis  &  criminels  de  venir  s'y  établir ,  pour  y  jouir  des  mêmes 
franchifes  que  celles  accordées  à  ceux  qui  fe  réfugioient  dans 
les  villes  de  Saint-Malo  &  de  Valenciennes.  On  a  depuis  fup- 
primé  ces  afyles  ,  qui  n'étoient  propres  qu'à  multiplier  les  crimes 
&  les  criminels.  Les  franchifes  de  Saint-Malo  lui  furent  aufli 
accordées  par  Conan  le  Gros.  Toutes  fortes  de  marchandifes  y 
entroient  &  en  fortoient  fans  payer  aucuns  droits  ;  &  les  étran- 
gers, qui  venoient  s'y  établir  ,  jouilToient  des  mêmes  privilèges 
que  les  habitants  naturels  j  privilèges  que  cette  ville  polTéda 
long-temps,   malgré  les  révolutions  qu'elle  éprouva. 

1242.  EtabUfîément  de  l'Hôtel-Dieu  de  Saint-Malo  ,  à  l'endroit 
nommé  la  Licorne  ,  proche  la  Chapelle  de  Saint-Thomas  ,  qui 
eft  aujourd'hui  celle  de  l'Hôpital.  Cette  maifon  doit  fon  exif- 
tence  à  Geoffroi ,  Evêque  de  ce  diocefe ,  qui  lui  donna  les 
dîmes  de  la  Paroiffe  de  Broons.  Le  fuccelTeur  de  Geoffroi  eut 
un  différent  très-férieux  avec  les  habitants  de  Saint-Malo  ,  & 
l'affaire  fut  portée  fi  loin  ,  que  l'interdit  fut  jette  fur  cette  ville. 
En  1362,  le  Prélat  étant  mort  quelque  temps  après,  les  Ma- 
louins  eurent  recours  au  Chapitre,  qui  confentit  à  lever  l'inter- 
dit ,  à  condition  qu'on  fatisferoit  aux  volontés  du  défunt  5  ce 
qui  fut  exécuté. 

1373.  La  Bretagne  jouiffoit ,  depuis  dix  ans,  d'une  paix  qui 
lui  faifoit  oublier  les  malheurs ,  lorfque  la  guerre ,  qui  fe  ralluma 
entre  la  France  &  l'Anorleterre  ,  vint  troubler  i'heureufe  iituatioii 
de  ce  Duché.  Jean  IV ,  qui  avoit  en  quelque  forte  obligation 
de  fa  Couronne  aux  Anglais,  ne  vouloir  pas  être  ingrat  envers 
une  nation  qu'il  avoit  tant  de  raifon  de  chérir  ;  aufli  la  fa- 
vorifoit-il  de  tout  fon  pouvoir.  Mais  il  porta  trop  loin  la  recon- 
noiffance ,  &  s'attira  la  haine  de  fes  fujets.  La  Cour  du  Prince 
étoit  pleine  d'Anglais,  qui  y  jouiffoient  d'une  confidération  {in- 
guliere ,  &  qui  obtenoient  toutes  les  faveurs  &  toutes  les  grâces. 
Les  Seigneurs  Bretons  furent  choques  de  la  préférence  que  le 
Duc  donnoit  à  ces  étrangers  :  les  efprits  étoient  déjà  aigris,  lorf- 
que le  Comte  de  Salisbury ,  Commandant  d'une  flotte  Angiaife 
qui  amenoit  en  Bretagne  des  troupes  de  débarquement,  aborda 


iy2  S  A  I 

"à  Saint-Malo ,  &  y  brûla  fept  vaifleaux  Efpagnols  qui  étoient 
dans  Je  port.  Les  holHlités  commifes  fur  les  terres  des  Bretons 
envers  un  peuple  ami ,  &  la  complaifance  exceflive  &  conti- 
nuelle du  Duc  Jean  IV  pour  les  Anglais,  achevèrent  d'indifpofer 
les  efprits  contre  ce  Prince ,  acculé  d'avoir  appelle  cette  flotte. 
Cependant  tout  étoit  encore  tranquille  &  fournis  ,  lorfque  le  Duc, 
par  une  imprudence  inexcufabie  ,  ne  gardant  plus  de  ménage- 
ments ,  donna  le  gouvernement  oe  fes  places  tortes  aux  étran- 
gers ,  &  leur  confia  la  garde  de  fa  perfonne.  L'mdignation  fit 
fur  le  champ  naître  la  révolte  ;  les  Seigneurs  fe  liguèrent ,  levè- 
rent des  troupes  contre  leur  Souverain ,  &  l'obHgerent  à  fe  ré- 
fugier en  Angleterre.  Une  armée  de  Français ,  commandée  par 
le  Connétable  du  Guefchn ,  entra  en  Bretagne ,  &  fe  faifit  des 
meilleures  places.  Saint-Malo  fut  forcé  de  lui  ouvrir  fes  portes, 
malgré  tous  les  efforts  &  l'habileté  de  Robert  KernoUes,  Gou- 
verneur de  la  province ,  qui  ne  put  empêcher  la  révolution. 
Après  quelques  années  d'exil  ,  le  Duc  prit  enfin  la  réfolution 
de  rentrer  dans  fes  Etats  ;  mais  il  vouloit ,  avant  de  fe  mettre 
en  chemin  ,  avoir  Saint-Malo  en  fa  difpofition  :  il  fe  flattoit 
même  d'en  être  bientôt  le  maître  avec  le  fecours  des  Anglais. 
En  1376,  le  Duc  de  Lancafire  vint  affiéger  cette  ville  avec 
une  flotte  formidable.  Il  commença  par  brûler  plufieurs  vaiflTeaux 
chargés  de  vin ,  qui  étoient  dans  le  port  ,  &  ravager  le  pays 
circonvoifin.  Il  ouvrit  la  tranchée  du  côté  du  gros  fiUon  ,  & 
voulut  fapper  le  donjon  qui  faifoit  alors  tout  le  château.  Il  le 
battit  en  brèche  ,  &  livra  plufieurs  afîauts  très-opiniâtres.  Il  y 
en  eut  un  qui  dura  une  journée  entière  ;  mais  tous  les  efforts  des 
affiégeants  furent  inutiles  ,  ils  furent  toujours  repouffés  avec  perte. 
Le  Capitaine  Jean  Morte-Fouace,  qui  commandoit  dans  la  ville, 
la  défendit  avec  un  courage  &  une  valeur  véritablement  dignes 
d'éloges ,  &  fut  bien  fécondé  par  les  habitants.  Enfin ,  le  Con- 
nétable s'étant  avancé  avec  fon  armée  au  fecours  de  la  place  9 
le  Duc  de  Lancafl:re ,  défefpérant  du  fuccès  de  fon  entrepnfe, 
retourna  en  Angleterre.  Lorfqu'on  répara  la  brèche  faite  au 
gros  donjon,  on  y  mit  trois  boulets  des  Anglais,  qu'on  y  voit 
encore  aujourd'hui. 

Ce  fut  dans  ces  circonffances  que  le  Roi,  croyant  l'occafion 
favorable,  voulut  fe  faifir  du  Duché  de  Bretagne  &  l'unir  à 
fa  Couronne  ,  fit  déclarer  le  Duc  criminel  de  leze-majefl:é ,  & 
fes  Etats  confifqués  à  fon  profit.  Les  Seigneurs  Bretons,  infor- 
més   des   intentions  du   Monarque    Français  ,   abandonnent    fa 


s  A  I  Z79 

Cour,  reviennent  en  Bretagne  ,  Se  rappellent  leur  Duc.  Ce 
Prince  part  d'Angleterre  ,  &  vient  débarquer  auprès  de  Saint- 
Malo,    d'où  il  fe  rend    à  Dinan. 

Jean  IV  étoit  enfin  tranquille  &  commençoit  à  jouir  du  fruit 
de  fes  travaux ,  lorlque  ,  à  l'exemple  de  ces  Evêques  qui  avoient 
autrefois  bravé  la  puiiïance  de  leur  Souverain  ,  Joflelin  de 
Rohan  ,  Evêque  de  Saint-Malo ,  entreprit  de  fe  fouftraire  à  fon 
autorité.  Un  Prélat  d'une  naiflance  inférieure,  n'eût  peut-être 
pas  ofé  former  un  projet  fi  téméraire  j  mais  JofTelin  étoit  d'une 
maifon  pour  ainfi  dire  indépendante.  Il  prétendoit  que  Saint- 
Malo  étoit  bâti  fur  un  terrein  eccléfiaftique ,  &  que  cette  ville 
ne  devoit  reconnoître  d'autre  Supérieur  que  le  Pape.  Sur  ce  prin- 
cipe ,  il  refufa  nettement  de  reconnoître  Jean  IV  pour  fon  Sou- 
verain. Les  Malouins  ,  par  attachement  pour  leur  Evêqae  ,  adop- 
tèrent ce  fyftême ,  &  fe  préparèrent  à  réfifter  fortement  ,  en 
cas  qu'on  vînt  les  attaquer.  Le  Duc ,  irrité ,  fit  faifir  le  temporel 
du  Prélat  &  du  Chapitre,  Se  tous  les  biens  des  habitants  qui 
étoient  en  terre  ferme  ,  &  prend  des  mefures  pour  empêcher 
les  vaiiïeaux  d'entrer  à  Saint- iVlalo.  On  emprifonna  plufieurs 
Eccléfiafliques  ,  Se  on  traita ,  avec  la  dernière  rigueur ,  les 
partifans  du  Prélat,  qui  ne  manqua  pas  ,  de  fon  côté,  de  lancer 
des  excommunications  réitérées.  Cette  folle  entreprife  ne  fut  pas 
foutenue.  L'Evêque  fe  vit  forcé  de  plier  fous  la  puiflance  du 
Duc,  Se  de  fe  foumettre  à  fa  Jurifdiftion.  L'an  1384  ,  Jean 
IV  fit  fon  entrée  à  Saint-Malo  ,  en  quaHté  de  Seigneur  Sou- 
verain de  la  ville.  Les  habitants  n'obtinrent  leur  pardon  qu'à 
condition  que ,  dans  la  cérémonie  de  cette  entrée ,  ils  ie  met- 
troient  à  genoux  devant  le  Prince ,  Se  qu'après  avoir  quitté 
\eurs  ceintures ,  l'un  d'eux  ,  portant  la  parole  ,  demanderoit 
pardon  au  Duc  pour  toute  la  ville ,  Se  lui  jureroit  une  fidélité 
inviolable.  La  fierté  de-  l'Evêque  de  Saint-Malo  ne  lui  permit 
pas  de  fe  trouver  à  cette  cérémonie  humiliante  :  il  en  chargea 
l'Evêque  de  Dol  qui  ,  à  la  tête  du  Chapitre  Se  du  Clergé, 
marcha  proceflionnellement  au  devant  du  Prince  ,  avec  la  Croix 
Se  les  Reliques.  Le  Duc  defcendit  de  cheval ,  fe  mit  à  ge- 
noux ,  baifa  la  Croix  Se  les  KeHques  ,  Se  fit  fon  entrée  con- 
formément au  traité.  Le  lendemain  ,  la  Duchefi'e  fit  auïïi  la 
fienne  ;  & ,  le  jour  fuivant ,  le  Duc ,  le  Chapitre  ,  Se  les  ha- 
bitants ,  jurèrent  l'obfervation  du  traité. 

Saint-Malo  fut  tranquille  jufqu'en  1387.  Le  Duc  fiiifoit  alors 
la  guerre   au  Connétable   Olivier  de  CliiTon.   Robert  de  Quitté 


iSô  S  A  I 

8c  Geoffroi  Ferron,  partifans  de  ce  Connétable,  profitant  de 
rabfence  des  Seigneurs  de  Montauban ,  de  Châteaugiron ,  &  du 
Vicomte  de  la  Belliere ,  qui ,  avec  leurs  Compagnies ,  étoient 
çn  garnifon  à  Saint-Malo ,  &  traitoient  fort  durement  les  habi- 
tants, fe  préfenterent  la  nuit  du  lo  Oftobre  aux  pieds  des  mu- 
railles ,  au  lieu  que  leur  avoient  indiqué  les  Malouins ,  qui ,  de- 
puis long-temps  ,  cherchoient  à  fe  délivrer  de  la  tyrannie  de  leurs 
Gouverneurs ,  &  par  efcalade  entrèrent  dans  la  ville  ,  dont  ils 
s'emparèrent  au  nom  du  Roi  de  France ,  qui  la  fit  fortifier. 
Dans  la  fuite  ,  le  Duc  Jean  IV  s'étant  réconcilié  avec  la  France , 
&  étant  rentré  en  pofTeffion  de  fon  Duché ,  fomma  les  habitants 
de  Saint-Malo  de  reconnoître  fa  Souveraineté  ;  mais  les  Evêques 
de  cette  ville  ,  marchant  fur  les  traces  de  Joffehn  de  Rohan , 
avoient  gagné  le  peuple  &  lui  avoient  infpiré  la  réfolution  de 


392.  bien  reloiu  de  1  emporter 
bloqua  fi  étroitement  qu'on  ne  pouvoit  y  entrer  ni  en  fortir. 
Il  fit  faifir  les  revenus  de  l'Evêque  &  des  habitants ,  les  mit  au 
ban  de  fon  Duché ,  les  abandonna  au  feu  &  aux  armes  de  ceux 
qui  voudroient  s'en  emparer  ou  les  ravager  -,  & ,  pour  empêcher 
qu'il  n'entrât  des  fecours  par  mer  dans  la  ville  ,  il  chargea  le 
Seigneur  de  Matignon  de  croifer  devant  le  port  avec  un  nom- 
bre fuffifant  de  vaiffeaux.  Le  fiege  dura  plufieurs  mois ,  &  le  Duc , 
voyant  qu'il  ne  faifoit  aucuns  progrès ,  réfolut  de  le  lever.  Pour 
s'en  venger ,  il  fit  bâtir  le  Fort  de  Stiridor  ou  Solidor  ,  à  l'em- 
bouchure de  la  rivière  de  Rance ,  afin  d'empêcher  les  Malouins 
de  faire  commerce  avec  Dinan  &  les  pays  voifins. 

L'année  fuivante ,  l'Evêque  &  les  habitants  de  Saint-Malo  fe 
fentant  trop  foibles  pour  réfifi:er  aux  forces  d'un  Prince  a£lify 
éclairé ,  &  opiniâtre  ,  qui  ne  ceflbit  de  leur  faire  tout  le  mal 
poflible ,  &  prévoyant  bien  qu'ils  feroient  un  jour  forcés  de  re- 
cevoir la  loi  d'un  vainqueur  irrité  ,  cherchèrent  les  moyens  de 
prévenir  les  malheurs  qui  les  menaçoient  ;  ils  eurent  recours  au 
Pape  Clément  VII ,  (  c'étoit  au  temps  du  fchifme  ,  )  &  lui  repré- 
fenterent  que  l'Evêque  &  le  Chapitre  de  Saint-Malo  étoient  Sei- 
gneurs temporels  de  leur  ville ,  &  que  c'étoit  un  fief  qui  relevoit 
immédiatement  du  Saint-Siège  ;  qu'étant  fans  cefle  expofés  aux 
courfes  des  Anglais  ,  ils  avoient  imploré  les  fecours  de  la  France  , 
qui  avoit  fait  de  grandes  dépenfes,  6c  qui  leur  avoit  envoyé 
des  troupes  pour  les  défendre  j  &  que ,  puifqu'il  étoit  vifible  que 

cette 


s  AI  281 

cette  Couronne  feule  étoit  capable  de  les  mettre  à  couvert  des 
efforts  de  leurs  ennemis ,  ils  fupplioient  Sa  Sainteté  de  céder  à 
la  France  tous  les  droits  qu'elle  avoit  fur  leur  ville.  Le  Pape 
ne  fit  aucune  difficulté  de  céder  un  droit  fi  chimérique  ;  & , 
contre  toutes  les  règles  de  la  jufiice ,  tranfporta  pour  jamais  au 
Roi  de  France  la  Souveraineté  de  Saint-Malo.  Le  Monarque, 
oubliant  alors,  &  fes  devoirs  &  fon  rang  ,  reçut ,  des  mains  du 
Pontife  ,  le  don  d'un  domaine  qui  ne  lui  appartenoit  pas  j  en- 
voya fon  Chambellan  &  fon  Tréforier  prendre  pofieffion  de  cette 
ville ,  &  y  mit  une  forte  garnifon ,  avec  ordre  d'augmenter  les 
fortifications  de  la  place. 

Dans  la  fuite  ,  le  Roi  reconnut  fon  injuftice ,  Se  ne  voulant  pas 
paroître  admettre  une  maxime  qui  auroit  en  quelque  façon 
prouvé  que  les  Papes  avoient  le  droit  de  difpofer  des  Etats  en 
faveur  de  qui  bon  leur  fembloit  ,  il  reilitua  ,  l'an  141 5  ou 
1416,  fans  en  donner  avis  au  Pape,  la  ville  de  Saint-Malo  au 
Duc  Jean  V ,  fon  gendre  ,  &  en  fit  fortir  les  troupes  qui  la  gar- 
doicnt  pour  lui.  Peu  de  temps  après ,  le  Duc  y  fit  fon  entrée 
folemnelle.  Tous  les  habitants  fortirent  au  devant  de  lui  pour  le 
recevoir  ;  ils  étoient ,  dit  un  auteur ,  accoutrés  de  robes  mi  de 
livrées  de  Bretagne ,  qui  font  blanc  &  noir ,  &  les  petits  enfants 
portoient  des  petits  guidons  ou  étendards  d'hermines.  Ce  Prince 
fut  reçu  à  la  porte  de  la  ville  par  l'Evêque  &  fon  Clergé.  Il  par- 
donna aux  uns  &  aux  autres  leur  obftination  dans  la  révolte , 
leur  rendit  leurs  terres  qui  avoient  été  faifies  par  fes  Officiers, 
reçut  leurs  hommage  &  ferment  de  fidélité  ,  &  nomma  pour 
Gouverneur  de  la  ville  Pierre  de  Rieux.  Jean  V  craignant ,  mal- 
à-propos  ,  qu'un  autre  Prince ,  favorifé  de  la  Cour  de  Rome  , 
ne  lui  enlevât  derechef  Saint-Malo,  fe  fit  confirmer  la  refii- 
tution  de  cette  ville  par  le  Pape  Martin  V ,  en  1424.  Il  dé- 
truifit ,  à  la  vérité ,  par  ce  moyen  ,  toutes  les  prétentions  que  la 
Cour  de  Rome  auroit  pu  former  dans  la  fuite  fur  cette  ville  : 
mais  cette  aftion  n'eil  pas  moins  blâmable  ,  parce  qu'elle  femble 
reconnoitre  les  droits  des  Pontifes  ;  &  l'on  pourroit  conclure  de 
cette  confirmation ,  que  la  rellitution  de  Saint-Malo  étoit  plutôt 
un  don  du  Roi  qu'un  afte  de  juftice.  Heureufement  les  circonf- 
tances  font  telles  aujourd'hui ,  que  l'imprudence  de  Jean  V  ne 
peut  avoir  aucunes  fuites  fàcheufes  ! 

Les  Anglais  avoient  en  mer,  l'an  1405  ,  une  flotte  qui  défo- 
loit  les  côtes  de  Bretagne ,  &  caufoit  un  dommage  confidérable 
au  pays.  Les  Bretons  fongerent  à  fe  venger.  Ils  armèrent ,  6c 
Tome  IK  N  r 


lîz  s  AI 

deux  mille  Chevaliers  &  Ecuyers  s'embarquèrent  à  Saint-Malo, 
fous  le  commandement  des  Sires  de  Chateaubriand  ,  de  la  Jaille , 
&  du  Châtel.  Cette  flotte ,  après  quelques  fuccès ,  alla  descen- 
dre au  port  d'Yarmouth ,  où  elle  fut  reçue  par  fîx  mille  Anglais, 
L'avantage  fut  d'abord  du  côté  des  Bretons ,  qui  tuèrent  quinze 
cents  Anglais  ;  mais  le  nombre  de  ceux-ci  augmentant  à  chaque 
inllant,  les  premiers  fuccomberent  enfin,  &  furent  prefque  tous 
tués  ou  pris.  Guillaume  du  Châtel ,  ne  voulant  fe  rendre  aux 
ennemis ,  y  perdit  la  vie.  Le  refte  de  la  flotte  rentra  dans  le 
port,  après  cette  malheureufe  expédition.  L'intrépide  Tangui  du 
Châtel ,  qui  étoit  alors  en  Efpagne  ,  apprit ,  à  fon  retour ,  la  fâ- 
cheufe  nouvelle  de  la  mort  de  fon  frère.  Il  ne  s'amufa  point  à 
le  pleurer,  mais  il  penfa  à  le  venger.  Il  arma  une  flotte  nou- 
velle ,  &  fuivi  de  quatre  cents  Gentilshommes  de  fes  amis  &  de 
quelques  autres  troupes ,  il  alla  furprendrc  le  port  d' f  armouth , 
réduilît  cette  ville  en  cendres ,  courut  pendant  deux  mois  les 
côtes  d'Angleterre ,  pillant ,  brûlant ,  faccageant  tout  ce  qui  lui 
tomboit  fous  la  main ,  &  revint  dans  le  port  de  Saint-Malo ,  chargé 
d'un  riche  butin,  l'an  1406.  Ce  feroit ,  fans  doute,  faire  injure 
à  du  Châtel  que  de  le  juger  d'après  cette  expédition  cruelle. 
Si  la  douleur  &  le  regret  d'avoir  perdu  un  frère  le  rendit  bar- 
bare cette  fois ,  il  prouva  ,  dans  d'autres  occaflons ,  que  fon  ame 
étoit  auflî  belle  que  magnanime. 

1 421.  La  pefl:e  défoie  la  Bretagne;  la  ville  de  Saint-Malo  efl: 
celle  qui  fouflre  le  plus  de  cette  épidémie. 

1439.  Un  Normand,  qui  demeuroit  à  Saint-Malo ,  efl:  foupçonné 
de  trahifon.  Il  efl:  arrêté ,  &  fon  procès  efl  inflruit  fur  le  champ. 
Convaincu  d'avoir  voulu  livrer  la  ville  aux  Anglais ,  il  efl:  con- 
damné à  avoir  la  tête  tranchée  fur  un  échafaud,  devant  la 
porte  de  la  Blaterie.  * 

1488.  Depuis  141 5  ,  la  ville  de  Saint-Malo  étoit  fous  la  do- 
mination des  Ducs  de  Bretagne  ;  mais,  l'an  1488,  l'armée  Fran- 
çaife ,  vi8:orieufe  à  Saint-Aubin-du-Cormier ,  fous  le  commande- 
ment du  Duc  de  la  Trimouille ,  Lieutenant  du  Roi  Charles  VIII, 
vint  mettre  le  flege  devant  cette  place.  Ce  Général  poufla  le 
flege  avec  vigueur  :  il  avoir  drefl^é  fes  batteries  fur  la  grève  qui 
efl  au  deffous  de  l'ancienne  cité  d'Aleth  -,  & ,  quoique  la  mer  la 
couvrît  deux  fois  le  jour ,  les  Français  garantifloient  fl  bien  leurs 
canons  tous  chargés,  en  les  couvrant  de  peaux  &  de  cuirs  trem- 
pés dans  le  fuif  &  la  cire ,  qu'incontinent  après  le  reflux  ils  les 
faifoient  tirer  fans  que  la   poudre  fe  refl^entît  de   l'humidité  de 


s  AI  28? 

Teau  :  après  quelque  réfiflance  la  ville  capitula  Se  fe  rendit. 
Le  Roi  5  pour  retenir  les  habitants  fous  fon  obéiffance ,  leur  con- 
firma tous  les  privilèges  dont  ils  jouiflbient.  Le  Roi,  ayant  en- 
fuite  époufé  Anne ,  Ducheffe  Se  héritière  de  Bretagne ,  rendit 
cette  ville  à  la  Reine ,  fon  époufe.  Peu  de  temps  après  cet 
heureux  mariage  ,  les  Malouins  équipèrent  une  flotte ,  qui  battit 
&  difperfa  l'armée  Anglaife  qui  amégeoit  le  Mont-Saint-Michel. 
En  reconnoiflance  du  fervice  que  les  habitants  de  Saint  -  Malo 
lui  avoient  rendu  ,  le  Roi  Charles  VIII  leur  accorda,  par  fes  lettres- 
patentes  ,  l'exemption ,  pour  plufieurs  années ,  de  tous  droits  fur 
les  marchandifes  qu'ils  tireroient  de  l'intérieur  du  Royaume.  Ce 
fut  environ  le  même  temps  que  la  Reine  Anne  fit  fortifier  la 
ville  de  Saint-Malo  ,  pour  fe  venger  de  l'Evêque  &  de  fon 
Clergé.  Cette  PrincefTe  ne  voulut  point  leur  ôter  la  Seigneurie 
du  heu  ,  mais  elle  vouloir ,  &  à  jufie  titre  ,  en  être  la  Souve- 
raine. Elle  donna  un  Règlement  en  forme  d'Edit  ,  en  date  du 
1 3  0£lobre  1 5 1 3  ,  qui  confirme  au  Clergé  tous  les  droits  de 
Seigneurs  hauts-Jufi:iciers  :  il  porte  en  outre  que  les  Eccléfiafi:i- 
ques  feront  convoqués  aux  affemblées  de  ville ,  pour  s'y  trou- 
ver ,  s'ils  le  jugent  à  propos  ;  que  les  Officiers  perpétuels  de  la 
ville ,  comme  le  Capitaine  ,  Lieutenant ,  Sec.  feront  nommés  par 
le  Roi  ,  Sz  non  par  d'autres  ;  que  les  étrangers  qui  viendront 
à  Saint-Malo  avec  des  navires,  obtiendront  du  Gouverneur  de 
la  ville  ,  Se  non  de  l'Evêque ,  la  permilîion  d'entrer  dans  le 
port. 

Ce  Règlement  défend  au  Chapitre  de  Saint-Malo  de  concéder 
des  grâces  &  rémiflions ,  de  commuer  les  peines ,  parce  que 
c'ell  un  droit  qui  ne  peut  appartenir  qu'au  Souverain  ;  il  oblige 
néanmoins  les  Gouverneurs  de  faire  ferment  au  Chapitre  de 
garder  &  défendre  les  droits  Se  privilèges  de  l'Eglife  ;  il  décide 
que  les  portiers  de  la  ville ,  &:  les  chiens  dogues  qu'on  élevoit 
pour  faire  la  garde  pendant  la  nuit ,  feront  nommés  Se  inftitués 
par  le  Roi  :  il  défend  de  plus  au  Chapitre  de  faire  l'inventaire 
des  navires ,  Se  règle  les  droits  du  fceau ,  d'entrée  de  vin  Se  de 
poifibn  ,  d'étalage  ,  du  mefurage  ,  des  fours  bannaux  ,  &c.  (  a  ) 
ce  dernier  droit  a  occafionné ,  entre  les  Eccléfiafiiques  Se  les 
habitants  ,  un  procès  qui  vient  d'être  jugé  au  Parlement.  Il  fuit 
de  l'Arrêt  rendu  par  la  Cour  ,  que  fi  le  Parlement  a  cru  devoir 


{a)  Par  l'Edlt  d>  la  R?ine  Anne,  il  ctjit  permis  à  tout  habitant  d'avoir  un  four  doi» 
fa  uiailon  ,  pour  ion  ulago  particulier. 


i84  .,  ,  ^^^  ' 

refpefter  la  propriété  du  Chapitre  ,  il  a  dû  juger  que  leur  droit, 
odieux  en  lui-même ,  devoir  être  fubordonné  à  la  faveur  que  mé- 
ritera toujours  l'mtérêt  public. 

Ce  que  cet  Edit  nous  offre  de  plus  fingulier ,  eft  la  permiffion 
qu'il  donne  aux  habitants  de  faire  fonner  les  deux  cloches  de 
leur  ParoifTe,  fans  qu'il  foit  befoin,  comme  auparavant,  de  de- 
mander le  confentement  du  Chapitre  ;  confentement  que  l'on 
avoit  coutume  de  payer.  La  PoHce  fut  laiflee  aux  Juges  fécu- 
liers  du  Chapitre ,  &  la  Reine  ordonna  qu'on  indemniferoit  les 
Chanoines ,  des  terres  &  fiefs  dont  elle  s'étoit  emparée  pour  la 
conliruftion  de  Saint-Malo. 

François  I  étant  venu  en  Bretagne  avec  la  Reine  Claude ,  fon 
époufe  ,  honora  la  ville  de  Saint-Malo  de  fa  préfence  ,  &  y  pafia 
quelque  temps.  Pendant  le  féjour  qu'il  y  fit ,  il  fit  tenir  en  fon 
nom  fur  les  fonds  de  Baptême ,  par  Jean  Galeas ,  fon  Ecuyer, 
l'enfant  d'un  notable ,  nommé  Groult ,  dont  la  pofiérité  fubfiile  en- 
core dans  cette  ville.  Nous  ne  fçavons  rien  de  plus  fur  le  voyage 
de  ce  Monarque ,  qui ,  en  1 527,  donna  un  Edit  en  forme  de  Règle- 
ment pour  Saint-Malo  ,  qui  ne  paroît  avoir  eu  aucun  effet. 

En  1566,  il  fut  réglé  par  Arrêt  de  la  Cour,  que  l'Hôpital  de 
Saint-Malo  feroit  adminiftré  par  un  Chanoine  &:  deux  Bourgeois 
de  Saint-Malo. 

Le  mercredi  24  Mai  1570,  Charles  IX  fit  fon  entrée  à  Saint- 
Malo.  Jamais  réception  n'avoit  été  plus  magnifique.  Les  Malouins 
avoient  fait  équiper  une  vingtaine  de  bateaux  en  forme  de  ga- 
lions :  les  deux  principaux  qui  étoient  commandés  par  Hamon 
&  Guillaume  de  la  Jonchée ,  frères ,  offroient  le  plus  riant  fpec- 
tacle  ,  le  premier  avoit  la  forme  d'un  grand  navire ,  &  le  fé- 
cond d'une  gaUote  à  la  morefque  ;  ils  étoient  ornés  de  flammes , 
de  banderoles ,  &  de  drapeaux ,  aux  armes  du  Roi ,  &  étoient 
montés,  ainfi  que  les  autres,  par  la  jeuneffe  de  la  ville.  Ils  par- 
tirent de  Saint-Malo  le  mercredi  au  matin  ,  avec  les  Officiers  Mu- 
nicipaux ,  &  s'avancèrent  au  devant  du  Roi ,  qui  s'étoit  embar- 
qué à  Dinau  fur  la  rivière  de  Rance  :  à  la  rencontre  du  Roi , 
on  fit  une  décharge  d'artillerie ,  &  on  aborda  fon  bateau.  Le 
Monarque  entra  dans  le  principal  gaUon ,  au  fon  des  trompettes 
&  autres  inffruments.  La  Cour  étoit  nombreufe  &  brillante  :  le 
Roi  avoit  avec  lui  la  Reine  ,  fa  mère  ;  Monfieur ,  fon  frère  ;  & 
un  grand  nombre  d'autres  Seigneurs.  En  entrant  dans  le  port  de 
Solidor  ,  le  navire  le  Croijfant  fit  une  décharge  de  fon  artillerie, 
&  le  Monarque  fe  rendit  à  bord  vifiter  ce  navire ,  tandis  que  la 


s  A  I  185 

Reine  continua  fa  route.  Les  habitants  avoîent  formé  quatre  Com- 
pagnies de  gens  de  pied  ,  qui  fe  montoient  de  fix  de  fept  cents 
nommes  :  ils  portoient  pour  la  plupart  des  écharpes  de  taffetas 
bleu  &  violet.  Les  enfants  de  la  ville  ,  au  nombre  de  trois  à 
quatre  cents ,  avec  des  arcs  &  flèches  à  la  main  ,  formoient 
une  cinquième  Compagnie  à  la  porte  de  la  ville.  Les  clefs  fu- 
rent préfentées  au  Roi ,  qui  fut  harangué  par  Jean  le  Gobien 
des  Douetz  (a),  Sénéchal  de  Saint- iMalo.  Le  Monarque  fut  reçu 
fous  le  dais ,  &  fit  fon  entrée ,  précédé  des  enfants  qui  faifoient 
retentir  l'air  des  cris  de  Vive  le  Roi, 

Le  lendemain  ,  jour  de  la  Fête  -  Dieu ,  le  Roi  afTifla  à  la 
procefîion  avec  le  Prince  ,  fon  frère  j  M.  le  Chevalier  , 
ion  fils  naturel  j  les  Cardinaux  de  Bourbon  &  de  Lorraine  -,  la 
Reine  ,  mère  -,  Marguerite  ,  fœur  du  Roi  ;  le  Duc  de  Guife , 
les  Comtes  du  Lude  &  du  Perron.  L'Evêque  de  Nîmes  faifoit 
la  cérémonie ,  &  celui  de  Saint-Malo  marchoit  à  côté  du  Roi. 
Le  foir ,  après  Vêpres ,  le  Roi  monta  dans  fon  gaUon ,  &  alla 
vifiter  i'ifle  de  Cezembre.  Le  lendemain,  il  reçut  les  préfents 
que  lui  firent  les  Bourgeois  :  ils  confii1:oient  en  un  vafe  d'argent 
doré  ,  en  une  coupe  couverte  de  même  métal ,  &:  dans  une  col- 
leftion  de  couteaux  &  de  cuillers  aufîi  d'argent  doré  j  l'étui  qui 
les  renfermoit  avoit  la  forme  d'un  rocher  ,  c'étoit  un  ouvrage 
fini  :  le  préfent  offert  au  Duc  d'Anjou ,  fut  une  haquenée  blan- 
che. Les  Bourgeois  demandèrent  alors  au  Roi  diverfes  grâces  , 
entr'autres ,  un  Juge  &  deux  Confuls ,  pour  adminiflrer  la  juf- 
tice  aux  Marchands.  Dans  l'après-midi  du  même  jour ,  le  Roi 
eut  le  fpeftacle  d'un  combat  naval  entre  deux  gaHons  ,  dont  l'un 
fut  coulé  à  fond  ;  l'équipage  fe  fauva  à  la  nage.  Le  famedi ,  le 
Monarque  partit  ,  &  fe  rendit  coucher  à  Dol.  Le  Roi  Henri  III 
accorda  au  Chapitre  de  Saint-Malo,  par  les  lettres-patentes  du 
mois  de  Février  1582,  le  droit  d'étabHr ,  dans  la  ville,  des 
poids ,  balances ,  6c  mefures  publiques ,  jufles  &  égales ,  pour 
pefer  &  mel'urer  toutes  les  denrées  &  marchandifes  qui  pour- 
roient  s'y  vendre  &    débiter.   En  conféquence    de   ces    lettres. 


(  a  )  Jean  le  Gobien  fut  un  des  grands 
hommes  de  fon  temps  :  il  fut  deux  fois 
député  par  les  Etats  de  Bretagne  aux  Etats 
généraux  du  Royaume  ,  &  s'y  diftingua 
par  fon  zèle  &.  fon  éloquence.  La  ville  de 
Saint-Malo,  qui  lui  avoit  des  obligations 
particulières  ,  avoit  fait  placer  dans  un  lieu 
éminent,dans  la  Cathédrale  ,  fon  portrait, 


avec  ceux  de  les  enfants  :  Pierre  le  Gobien  , 
Archidiacre  de  Porhoët,  Chanoine  &  Of- 
ficiai de  Saint-Malo  ;  &.  Jean  le  Gobien  , 
Chanoine  de  la  même  Eglife.  Dans  le  der- 
nier bombardement,  en  1696,  une  bombe, 
qui  per^a  la  voûte  de  la  Cathédrale  ,  mit 
en  pièces  le  portrait  de  cet  illuftre  Magiftrat. 


lU  s  A  I 

la  Cour  de  Parlement,  avant  de  les  vérifier,  rendit  un  Arrêt 
qui  ordonne  que  les  Seigneurs  Evêque ,  Doyen ,  &  Chapitre , 
ne  prendront  pas  plus  de  deux  deniers  par  poids  de  cent  livres , 
&  qu'ils  ne  retireront  aucune  rétribution  des  marchandifes  qui  pe- 
feront  feulement  vingt-cinq  livres  &  au  deffous.  Il  fut  dit  que 
la  pancarte  des  devoirs  exigibles  feroit  affichée  dans  un  lieu 
éminent ,  avec  le  préfent  Arrêt ,  afin  que  perfonne  ne  pût  être 
trompé.  Dans  la  fuite  ^  foit  que  le  premier  Arrêt  n'eût  pas  pré- 
venu tous  les  abus ,  foit  mauvaife  volonté  de  la  part  des  habi- 
tants ,  ou  vexation  de  la  part  des  Fermiers  du  Chapitre  ,  il  s'é- 
leva un  procès  qui  fut  porté  au  Parlement ,  &  terminé  par  l'Ar- 
rêt qui  porte  que  ledit  Chapitre  fera  mettre  &  afficher  ,  en 
lieu  pubUc  &  éminent ,  la  pancarte  des  devoirs  qu'il  levé  ,  & 
fait  prohibition  &  défenfe  aux  Fermiers  de  prendre  &  exiger 
des  habitants  plus  de  huit  deniers  tournois ,  par  boifieau ,  pour 
cuifiTon  &  buaille ,  &  plus  de  fix  deniers  pour  devoir  d'aunage 
de  toiles  vendues  en  fardeau.  11  défend  encore  au  Chapitre 
d'exiger  quelque  rétribution  pour  la  fépulture  de  ceux  qui  feront 
enterrés  dans  l'Eghfe  de  Saint-Malo ,  &  pour  la  fonnerie  des 
cloches  de  la  Paroifîe.  Le  même  Arrêt  porte  que  le  Curé  de 
la  Paroiffe  fera  tenu  ,  en  temps  de  contagion  ,  de  fournir ,  pour 
affifier  les  malades ,  un  Prêtre  dont  les  gages  feront  pris  fur  les 
deniers  defiinés  à  l'Hôpital  de  la  Santé  5  &  que  le  Chapitre  fera 
forcé  de  rendre  le  chemin  commode  &  facile  pour  aller  aux 
fours  bannaux  nouvellement  confiruits. 

Saint-Malo  eut  auffi  part  aux  troubles  de  la  Ligue.  Le  Duc 
de  Mercceur ,  dès  le  commencement  de  la  guerre  ,  s'etoit  em- 
paré du  Fort  de  Solidor.  Les  M alouins,  craignant  le  voifinage 
de  ce  Prince  ,  qui  pouvoit  gêner  leur  navigation  ,  le  fupplierent 
de  retirer  fes  troupes  de  ce  polie ,  &  de  leur  en  confier  la  garde. 
Dans  la  vue  de  les  attacher  à  fon  parti ,  il  leur  accorda  leur  de- 
mande. On  verra  dans  la  fuite  fi  fa  pohtique  n'étoit  pas  en  dé- 
faut en  cette  occafion.  Les  habitants  de  Saint-Malo  mécontents 
du  Comte  de  Fontaines ,  leur  Gouverneur ,  élurent  alors  quatre 
Capitaines  généraux  &  un  Colonel ,  tirés  d'entre  les  principaux 
Bourgeois.  Ce  Colonel  fit  plufieurs  Règlements ,  fous  les  yeux 
&  comme  fous  l'autorité  du  Gouverneur ,  qui ,  ne  pouvant  s'y 
oppofer ,  prit  le  fage  parti  de  diffi.muler.  A  la  mort  de  Henri  III , 
le  Comte  ayant  voulu  faire  reconnoître  Henri  IV ,  on  en  vint 
à  une  rupture  ouverte.  Il  fut  alors  obligé  de  confentir  à  un 
accommodement,  qui  portoit   que  la  ville    de   Saint-Malo  ne 


s  A  I  _  187 

prendroit  aucun  parti ,  mais  qu'elle  fe  conferveroit  indépendante 
&  neutre  ,  fous  l'autorité  du  Gouverneur  ,  juiqu'à  ce  que  la 
France  eût  un  Roi  Catholique  ,  reconnu  par  les  Etats  généraux 
du  Royaume  légitimement  afTemblés  j  qu'enfin  ,  pour  lubvenir 
aux  dépenîes  néceilaires  ,  il  feroit  levé  un  nouveau  droit  fur  les 
marchandifes  qui  entreroient  ou  fortiroient ,  qu'ils  en  auroient  la 
diredion ,  &  donneroient  quatre  mille  écus  par  an  au  Comte 
de  Fontaines  ,  pour  lui  tenir  lieu  de  fes  appointements.  Cet 
accord  fubfirta  :  le  Roi,  le  Parlement,  &  le  Prince  de  Dombes 
effayerent  vainement  de  gagner  les  Malouins ,  &  d'en  tirer  de 
l'argent.  Sur  ces  entrefaites ,  le  Roi  étant  venu  en  Bretagne , 
le  Comte  de  Fontaines  déclara  que ,  (î  Sa  Majcllé  fe  préfentoit 
devant  Saint-Malo ,  il  ne  pourroit  fe  difpenfer  de  lui  ouvrir  fes 
portes.  Les  Malouins  ,  alarmés  ,  fongerent  à  éviter  le  péril.  Ce 
qui  les  effraya  encore  davantage  ,  fut  le  bruit  qui  fe  répandit , 
que  le  Comte  vouloit  introduire  des  troupes  dans  la  ville ,  im- 
pofer  une  taxe  fur  les  Marchands ,  Se  s'y.  acquérir  une  autorité 
ablblue.  Il  n'en  fallut  pas  davantage  pour  les  rendre  ennemis 
mortels  du  Gouverneur.  Ce  Gentilhomme  avoit  été  comblé  de 
biens  par  Charles  IX  ,  &  l'on  foupçonnoit  que  fes  richeffes 
étoient  dans  le  château.  La  cupidité ,  la  vengeance  ,  l'amour  de 
la  liberté  ,  &  le  fanatifme ,  fe  réunirent  pour  la  perte  du  Comte 
de  Fontaines.  Les  Malouins  formèrent  le  hardi  &  même  témé- 
raire projet  de  fe  rendre  maîtres  du  château ,  &  d'exterminer 
fa  garnifon.  L'entreprife  ne  pouvoir  paroître  poffible  qu'à  des 
gens  intrépides  &  accoutumés  à  grimper  aux  cordages.  Ils  ré- 
folurent  d'efcalader  la  tour  ,  appellée  la  Générale.  Après  une  dé- 
libération prife  par  un  affez  grand  nombre  de  Bourgeois  &  te- 
nue fort  fecrete  ,  on  choifit  cinquante-cinq  jeunes  hommes  har- 
dis &  vigoureux ,  auxquels  on  donna  pour  chefs  Jean  Pépin  de 
la  Bhnais  &:  Michel  Fortct  de  la  liardeUere.  Le  1 1  Mars ,  jour 
fixé  pour  l'exécution ,  ceux  qui  avoicnt  été  choifis  ,  &:  qu'on 
avoit  raffemblés  dans  une  maifon  de  la  ville ,  reçurent  leurs  inf- 
truftions  ,  &,  vers  les  dix  heures  du  foir,  defcendirent  avec  des 
cordages  de  defl'us  le  mur  de  ville  ,  &  s'approchèrent  du  pied 
de  la  Générale.  Aufîi-tôt  un  foldat  &.  un  canonnier  du  château, 
qui  étoient  gagnés ,  leur  jetterent  une  corde  ,  à  laquelle  ils 
attachèrent  une  échelle  de  corde  à  trois  montants.  Cette  échelle 
fut  tirée  en  haut ,  &  liée  à  l'extrémité  d'une  coulevrine  qui  ibr- 
toit  par  les  embrafures  du  parapet.  La  hauteur  de  la  tour ,  qui 
ell  de  plus  de  cent  pieds ,  n'cil  point  capable   de  les  étonner  : 


i88  S  AI 

chacun  difpute  l'honneur  de  monter  le  premier  ,  &  les  deur  - 
chefs  ont  bien  de  la  peine  à  régler  le  rang.  La  tour  fut  efca- 
ladée  dans  l'inllant.  On  laifTa  douze  hommes  fur  la  plate  forme 
pour  garder  ce  polie ,  tandis  que  les  autres  affaillants  ,  féparés 
en  deux  bandes ,  &  conduits  par  les  deux  foldats  qui  étoient 
de  la  confpiration ,  fe  rendirent  par  deux  endroits  différents  au 
corps-de-garde ,  qu'ils  furprirent.  On  tua  fept  à  huit  foldats ,  le 
refte  fe  rendit  ,  &  fut  défarmé.  La  garnifon  réveillée  par  le 
bruit,  accourt,  &  attaque  les  affaillants  j  mais  les  croyant  en  plus 
grand  nombre  ,  elle  fe  retire  dans  le  donjon  &  dans  les  chambres 
du  château. 

Cependant  tout  étoit  en  rumeur  dans  la  ville ,  oii  l'on  n*en- 
tendoit  qu'un  bruit  confus  de  coups  de  moufqueterie  ,  de  cris 
affreux ,  &  le  fon  des  cloches.  Les  deux  Compagnies  des  habi- 
tants qui  faifoient  la  garde ,  &  celles  qui  étoient  prêtes  de  les 
relever,  occupoient  la  place  qui  eft  devant  le  château.  Elles 
effayerent ,  mais  inutilement ,  d'enfoncer  la  porte.  Un  feul  Bour- 
geois ,  nommé  des  Landelles  ,  put  y  entrer ,  par  le  moyen  d'une 
échelle  appuyée  d'un  côté  fur  le  pont  -  dormant ,  &  de  l'autre 
fur  une  jettée  de  pierres  qui  fervoit  de  bafe  au  pont-levis.  Il 
fe  fit  ouvrir  le  guichet ,  &  alla  attaquer  la  Peraudiere  ,  Lieu- 
tenant du  Gouverneur,  qui  s'étoit  retiré  dans  fa  chambre  avec 
trente  hommes.  Il  le  fomma  de  fe  rendre  ,  en  lui  difant  qu'il 
avoir  plus  de  cinq  cents  hommes  dans  le  château ,  tant  des 
habitants  que  des  troupes  du  Duc  de  Mercœur.  La  Peraudiere 
crut  à  ce  difcours ,  tout  faux  qu'il  étoit ,  &  fit  ouvrir  fa  porte. 
Il  fut  défarmé  &  conduit  au  corps-de-garde  avec  les  autres, 
mais,  un  inftant  après,  on  le  fit  monter  au  donjon  dire  au  Gou- 
verneur qu'on  étoit  prêt  de  lui  accorder  telle  capitulation  qu'il 
voudroit.  Il  y  alla  &  revint,  au  bout  de  trois  quarts  -  d'heure  , 
dire  aux  habitants  que  le  Comte  avoit  été  tué  d'un  coup  d'ar- 
quebufe  ,  en  regardant  par  une  fenêtre  ,  &  que  la  Bruere ,  Ca- 
pitaine de  fes  Gardes ,  étoit  réfolu  de  fe  défendre.  On  alla 
auffi-tôt  attaquer  la  Bruere  ,  &  on  le  fomma  de  fe  rendre  ; 
mais  il  ne  répondit  que  par  des  injures  &  des  coups  d'arque- 
bufe.  Com.me  les  habitants  s'étoient  emparés  du  magafin  à 
poudre  ,  on  le  menaça  de  le  faire  fauter  :  il  eut  peur ,  & 
ouvrit  fa  porte. 

Pendant  que  tout  ceci  fè  paffoit ,  on  avoit  efcaladé  la  tour 
de  Qui  qu'en  grogne.  La  BardeHere ,  un  des  chefs ,  trouva 
dans.  le  donjon  la  veuve  du  fils  cadet  du  Comte  de  Fontaines , 

qui 


s  A  I  189 

qui  lui  remit  fept  à  huit  mille  écus  en  or  :  cette  ibmme  fut. 
diftribuée  à  ceux  qui  avoient  efcaladé  la  Générale.  Le  Syndic 
des  Bourgeois  &  les  deux  Capitaines  partagèrent  les  joyaux  de 
la  Comtelfe  ,  qui  étoit  alors  abfente.  Les  chevaux  furent  laiHés 
à  ceux  qui  s'en  failirent  ;  la  vaiflelle  d'argent  ,  les  meubles ,  & 
enfin  tout  ce  qui  étoit  dans  ce  château ,  furent  pillés  &  enlevés. 
On  fit  enfuite  la  vifite  des  papiers  du  Comte  de  Fontaines  :  on 
trouva  plusieurs  lettres  qui  faifoient  voir  que  ce  Gouverneur, 
fincérement  attaché  à  fon  maître  ,  avoit  deflein  de  livrer  la 
ville  aux  Royaliftes  :  on  prétend  même  que  le  Prince  02 
Dombes    s'étoit   déjà  mis    en  marche    pour  exécuter  le   projet. 

Le  Parlement ,  inllruit  de  ce  qui  s'étoit  pafTé ,  rendit  un 
Arrêt  foudroyant  contre  les  Malouins,  fans  en  excepter  les 
femmes.  Un  valet  de  chambre  du  Comte  de  Fontaines,  qui, 
voyant  fon  maître  mort ,  avoit  faifi  &  emporté  quelques  joyaux  , 
fut  arrêté ,  à  la  requifition  de  l'Abbé  de  Saint-Melaine ,  oncle 
du  Comte  5  &  ce  malheureux  fut  condamné  à  être  pendu, 
quoiqu'il  proteftât  que  fon  intention  étoit  de  remettre  ces  bijoux 
à  la  Comteffe  de  Fontaines. 

Le  Duc  de  Mercœur  apprit  avec  joie  la  révolution  arrivée 
à  Saint-Malo.  Il  fe  flattoit  que  cette  ville  alloit  embrafTer  ion 
parti,  mais  il  fe  trompoit  :  les  Malouins  refuferent  conflamment 
fes  offres ,  &  prirent  le  parti  de  fe  gouverner  en  Républicains. 
En  vain  le  Duc  employa-t-il  les  promefTes  &  les  menaces ,  ils 
furent  toujours  inflexibles.  Ils  gardèrent  eux-mêmes  leur  ville  Se 
leur  château,  &  firent  le  commerce  &  la  guerre  en  leur  nom: 
ils  donnèrent  néanmoins  du  fecours  à  la  Ligue ,  mais  dans  la 
fuite  ils  fe  brouillèrent  avec  le  Duc  de  Mercœur  ,  &  fe  faifirent 
de  quelques  châteaux  qui  lui  appartenoient.  Ils  avoient  demandé 
auparavant  à  ce  Prince  un  aveu  par  écrit  &  dans  les  formes,  de 
ce  qui  s'étoit  palTé  à  la  prife  du  château  -,  mais  ce  Prince  n'a- 
voit  jamais  voulu  y  confentir,  &  leur  opiniâtreté  à  refufer  de 
reconnoître  fon  autorité  l'avoit  fort  irrité  contre  eux.  Dans  une 
Audience  que  le  Prince  Lorrain  avoit  donné  à  leurs  Dépurés ,  à 
Dinan ,  ceux-ci  lui  avoient  dit  que  leur  intention  n'étoit  pas  de 
fe  fouttraire  à  l'obéifiance  des  Rois  de  France  ,  mais  qu'ils 
étoient  trop  bons  Catholiques  pour  fe  foumettre  au  Roi  de  Na- 
varre. Le  Duc  leur  avoit  aum-tot  répondu  avec  colère  :  P^ous 
me  parlai  d'un  Roi  :  fçac/ici  que  les  Rois  ne  m'ont  jamais  fait  la 
loi ,  &  que  je  n'ai  pas  hejoin  de  votre  fecours  pour  leur  réfijlen  H 
avoit  enfuite  délibère  de  faire  arrêter  les  Députés  ;  mais  ils  avoient 
Tome  IF.  O  1 


200  S  A  I 

été  inflruits  de  foh  intention  ,  &  ils  s'étoîent  retirés.  Ils  Te  con^ 
ferverent  long-temps  indépendants  &  redoutables.  Ils  fe  défioient 
également  de  l'un  &:  l'autre  parti ,  quoiqu'ils  parufTent  plus  fa- 
vorables à  la  Ligue.  Ils  firent  même  arrêter  Charles  de  Bourg- 
neuf,  leur  Evêque ,  &  le  retinrent  long-temps  prifonnier,  quoi- 
qu'il fût  zélé  Ligueur. 

Cependant ,  comme  ils  craignoient  que  quelque  jour  on  ne 
leur  fît  un  crime  de  la  manière  dont  ils  avoient  agi  envers  lé 
Comte  de  Fontaines ,  ils  prirent  la  réfolution  d'obtenir  un  aveu 
en  forme  de  quelques-uns  des  chefs.  Bien  perfuadés  que  le  Duc 
de  Mercœur  ne  leur  accorderoit  jamais  leur  demande  ,  qu'à 
condition  de  reconnoître  fon  autorité ,  ce  qu'ils  n'étoient  pas 
difpofés  à  faire  ,  ils  eurent  recours  au  Duc  de  Mayenne.  Celui- 
ci^  flatté  d'avoir  dans  fon  parti  une  ville  aulTi  puifTante  ,  s'em- 
prefTa  de  les  fatisfaire ,  &  leur  donna  même  des  lettres  de  re- 
commandation pour  la  fureté  de  leur  commerce. 

Cette  complaifance  du  Duc  de  Mayenne  ne  fit  pas  plaifîr 
au  Duc  de  Mercœur  -,  mais  il  fçut  difîimuler ,  &  ne  s'en  plai- 
gnit point.  Il  continua  toujours  de  fauver  les  apparences  avec 
les  Malouins ,  qui ,  de  leur  côté ,  lui  rendoient  de  fréquentsfer- 
vices  j  mais  la  politique  dirigeoit  les  démarches  des  uns  &  des 
autres.  On  en  vit  des  preuves  certaines  à  l'occafion  des  Etats 
que  le  Duc  convoqua,  à  Nantes,  en  1591.  Il  y  invita  les  Ma- 
louins, par  deux  lettres  difTérentes.  Ils  refuferent  toujours  de  s'y 
rendre ,  fous  prétexte  que  les  chemins  étoient  difliciles  &  dan- 
gereux ;  mais  ce  n'étoit  pas  là  le  vrai  motif  de  leur  refus.  Ré- 
folus  &  décidés  à  conferver  la  forme  de  leur  Gouvernement  & 
leur  liberté ,  ils  craignoient  qu'en  paroilTant  dans  une  affemblée 
convoquée  par  le  Prince  Lorrain ,  on  ne  les  regardât  comme 
fournis  à  fon  autorité.  Les  Etats  fe  tinrent  au  mois  de  Mars, 
&  accordèrent  une  impofition  fur  les  marchandifes.  Mercœur  eût 
bien  defîré  que  les  Malouins  eulTent  adopté  ces  règlements ,  & 
il  leur  en  fit  faire  la  propofition.  Ils  répondirent  que  la  guerre 
continuelle  qu'ils  étoient  obligés  de  faire  pour  leur  défenfe  pro- 
pre &  en  faveur  de  la  Ligue ,  les  avoir  épuifés ,  &  qu'ils  ne 
pouvoient  admettre  aucune  impofition ,  fans  fe  ruiner  entière- 
ment. Ils  continuèrent  leur  commerce  &  la  guerre  encore  quel- 
ques années  ,  &  prirent  l'iUe  de  Brehat ,  Châteauneuf ,  &  le 
Piefîis-Bertrand  ;  mais,  en  1594,  ils  prirent  des  fentiments  plus 
modérés  &  plus  louables.  Ils  avoient  toujours  proteflé  qu'ils  n'en 
vouloient  point  à    la    Majeflé  Royale ,  &  qu'ils    étoient  prêts 


s  A  I  ,  ^91 

d'obéir  à  un  Roi  Catholique.  Ils  avoient  d'ailleurs  à  craindre 
qu'on  ne  leur  fît  un  crime  de  la  prife  de  leur  château ,  &  ces 
craintes  n'étoient  pas  fans  fondement.  La  fille  unique  du  Comte 
de  Fontaines  avoit  époufé  le  jeune  Seigneur  de  Bellegarde, 
fils  du  Grand-Ecuyer  de  France,  dont  le  crédit  auprès  du  Roi 
étoit  fans  bornes  ;  &  il  étoit  probable  qu'il  auroit  demandé  une 
vengeance  éclatante  de  cette  aftion.  En  conféquence  ,  après 
plufieurs  délibérations ,  ils  avoient  fait  parler  d'accommodement 
au  Maréchal  d'Aumont  ,  qui  avoit  bien  reçu  leurs  Députés. 
Comme  d'ailleurs  le  Roi  fe  faifoit  inftruire  dans  la  religion  Ca- 
tholique &  paroifToit  difpofé  à  abjurer  fes  erreurs ,  ils  fe  pour- 
vurent devant  le  Monarque  ,  qui ,  ravi  qu'une  ville  fi  impor- 
tante rentrât  fous  fon  obéiflance  ,  leur  fit  les  conditions  les  plus 
avantageufes  qu'ils  pouvoient  jamais  efpérer.  Le  Roi  leur  promit 
même  de  ne  leur  donner  pour  Gouverneur  qu'une  perfonne  qui 
leur  feroit  agréable.  Le  Duc  de  Montpenfier  fut  le  premier  qui 
occupa  cette  place,  qui  fut  deux  ans  après  donnée  au  Marquis 
de  Coetquen.  Voilà  la  manière  dont  Saint  -  Malo  fe  conduifit 
pendant  les  troubles  j  &  il  eft  à  croire  que  cette  ville  fe  feroit 
confervée  en  République ,  fi  ,  pour  le  malheur  de  la  France ,  la  Li- 
gue eût  triomphé   de  la  valeur  de  Henri  IV. 

Quoi  qu'il  en  foit ,  les  Malouins,  déformais  foumis  à  leur  Prince 
légitime ,  reflerent  depuis  dans  l'obéifi^ance  ;  &  lors  de  la  con- 
juration qui  fit  rentrer  Dinan  dans  le  devoir,  ils  y  envoyèrent 
un  détachement  de  huit  cents  hommes ,  qui  contribua  beaucoup 
à  la  furprife  de  cette  ville ,  qui  étoit  la  place  d'armes  de  la 
Ligue.  Après  le  fuccès  de  cette  expédition  ,  ils  députèrent  au 
Roi  un  de  leurs  principaux  citoyens ,  pour  lui  apprendre  la  nou- 
velle. C'étoit  une  de  ces  âmes  franches  &  naïves ,  qui  ne  con- 
nurent jamais  l'impofture  ;  qui ,  dans  leur  fimplicité  ,  font  le  bien 
par  in{l:in6l ,  &  fçavent  intéreffer  &  plaire  ,  malgré  leur  rufi:icité. 
Il  fe  préfente  tout  hors  d'haleine ,  &  dit ,  fans  autre  détour ,  au 
Roi  ,  avec  fon  accent  Malouin  :  Sire  ,  j'avons  pris  Dinan,  Le 
Maréchal  de  Biron  s'écria  aufTi-tôt  que  cela  ne  fe  pouvoir  pas. 
Le  Député  regardant  le  Roi  d'un  air  familier ,  lui  dit ,  d'un  ton 
railleur  :  Kai  ^  il  le  fçaura.  mieux  que  mai  qui  y  étas  !  Il  rapporta 
enfuite  quelques  circonfi:ances  de  la  furprife  de  la  place ,  &  de- 
manda à  boire  &  à  manger.  Le  Roi  lui  fit  un  très-bon  accueil , 
&  ordonna  de  le  régaler.  Avant  fon  départ  ,  le  Monarque  lui 
demanda  s'il  vouloir  être  Gentilhomme;  il  le  refufa,  &ne  demanda, 
pour  toute  récompenfe ,  qu'un  cheval  de  l'écurie  de  Sa  Majefté, 


xpi  s  A  I 

parce  que  le  fieii  étok  péri  de  fatigues  en  arrivant  à  Pari:?,. 
Henri  IV  s'amufa  beaucoup ,  avec  {qs  Courtifans ,  de  la  franchife 
&  de  l'accent  du  Malouin. 

Le  20  Février  i6ii  ,  les  Pères  Bénédiftins  furent  établis  à 
Saint-Malo.  Le  Couvent  des  Cordeliers  qui  étoit  à  l'ifle  de  Ce- 
zembre  (a)  ,  fîtuée  à  une  lieue  au  Nord-Oueft  de  Saint-Malo  , 
fut  réformé  par  ordre  de  la  Cour,  Se  leur  hofpice  fondé  dans 
la  ville  ,  en   161 7. 

Le  Chapitre  de  Saint-Malo  avoit  obtenu ,  en  1616 ,  des  lettres- 
patentes  pour  l'augmentation  du  devoir  de  cuiflbn  >  mais  ces 
lettres  ne  furent  point  vérifiées  au  Parlement  ,  au  contraire  , 
la  Cour  rendit  un  Arrêt  qui  déboutoit  le  Chapitre  de  fa  de- 
mande de  l'entérinement  defdites  lettres  ,  &  le  condamnoit  aux 
dépens. 

En  ï6ii ,  pendant  le  fiege  de  la  Rochelle,  Saint-Malo  équipa 
une  flotte  de  vingt-cinq  à  trente  vaifleaux ,  armés  en  guerre , 
dont  elle  donna  le  commandement  à  N....  Porée ,  un  de  fes  ci- 
toyens ,  qui  a  eu  dans  fa  poftérité  de  dignes  héritiers  de  fa  va- 
leur :  les  équipages  étoient  prefque  tous  compofés  de  Malouins. 
Cette  flotte  fe  joignit  à  celle  du  Roi ,  &  contribua  beaucoup 
à  réduire  à  l'obéiflance  ce  dernier  rempart  de  la  rébellion  en 
France.  Sous  le  même  règne ,  les  Malouins  enlevèrent  au  Roi 
de  Danemarck  l'Ifle-de-Fer  ;  entreprife  hardie  qui  leur  fit  beau- 
coup d'honneur.  Dans  le  même  temps ,  ils  brûlèrent  fur  la  côte 
de  Groenland  trente-huit  vaiffeaux  ennemis.  C'elt  fur-tout  fous 
le  règne  à  jamais  mémorable  de  Louis  le  Grand  que  les  Ma- 
louins fe  rendirent  célèbres  par  leurs  expéditions  militaires.  Ils 
firent  cependant,  en  1654,  un  armement  qui  ne  fut  pas  heu- 
reux :  une  flotte  de  trente-fîx  vaifl!eaux  qu'ils  envoyoient  à  la 
pêche  de  la  morue ,  au  banc  de  Terre-Neuve  ,  fut  rencontrée  dans 
la  Manche  par  trois  frégates  Anglaifes  qui  l'attaquèrent.  Un 
petit  nombre  des  navires  Malouins  s'échappa  pendant  l'action  , 
&  parvint  heureufement  à  Terre-Neuve.  Les  plus  hardis  com- 
battirent ,  mais  ils  furent  vaincus  :  les  uns  furent  coulés  à  fond  , 
les  autres  conduits  en  Angleterre,  quelques-uns  rentrèrent  dans 
le  port ,  mais  fi  fracafTés  qu'ils  n'en  purent  fortir.  Le  1 2  Janvier 
1641  ,  le  Parlement  rendit  un  Arrêt  qui  confirmoit  les  privilèges 
de  la  Police  de  Saint-Malo.  En  1653  ,  l'Alloué  de  la  jurifdi6lioii 


(  <i  )  Cette  ille  peut  contenir   cinquante     |     tagne  :  on  y   trouve  du  talc  en   feuillsSjj. 
journaux  de  terrein  ,  grand  journal  de  Bre-     |     très-étendu,  uni  ÔL  tranlparent» 


s  A  I  29  j 

de  Saînt-Malo ,  ufant  des  droits  de  foti  Sîege ,  donna  une  Sen- 
tence de  Police  contre  un  des  habitants ,  qu'il  condamna  à 
trois  livres  d'amende  à  la  Seigneurie ,  trois  livres  à  l'Hôpital  , 
&  à  quinze  livres  envers  fa  partie  adverle  ,  avec  défenfe  au  cou- 

£able  de  retomber  en  pareille  faute  ,  fous  les  peines  qui  y  échéenr, 
e  condamné  appella  au  Parlement ,  qui  confirma  la  Sentence  de 
Police  ,  &  mit  l'appellation  au  néant.  Dans  le  courant  de  la 
même  année,  le  Chapitre  de  Saint -Malo  projetta  de  changer 
la  forme  du  Corps  politique  de  la  ville.  Il  fit  un  règlement  qui 
portoit ,  que  la  Communauté  de  Ville  feroit  délormais  compofée 
du  Gouverneur  ou  de  fon  Lieutenant ,  qui  feroient  reconnus 
Préfidents-nés  des  afîemblées ,  des  Députés  du  Chapitre  ,  des  Ju- 
ges &  Officiers ,  du  Procureur-Syndic ,  de  l'Adminiflrateur  de 
l'Hôpital  _,  des  Mifeurs ,  des  quatorze  Capitaines  de  la  Garde , 
des  Juges  -  Confuls ,  des  deux  BaiUis  des  Eaux,  du  Contrôleur 
de  l'Artillerie ,  des  trois  Commis  à  la  PoHce  ,  de  quinze  ou  vingt 
des  plus  notables  ,  &  d'un  Membre  ou  deux  de  chaque  Corps 
de  métier ,  qui  feroient  appelles  pour  traiter  &  délibérer  fur  les 
affaires  publiques.  Ce  règlement  ne  plut  pas  aux  habitants ,  & 
occafionna  un  procès  qui  fut  porté  au  Parlement.  La  Cour  ren- 
dit un  Arrêt  qui  déboutoit  le  Chapitre  de  fa  demande ,  &  remit 
les  chofes  fur  l'ancien  pied.  En  1(^55  ,  M.  l'Intendant  défendit, 
par  fon  Ordonnance ,  aux  Juifs ,  de  s'établir  dans  la  ville  de 
Saint-Malo ,  &  dans  tout  autre  lieu  de  la  province.  En  16(^9, 
le  Confeil  rendit  un  Arrêt  ,  portant  que  les  habitants  députe- 
roient  alternativement  des  Officiers  de  Jullice  &:  des  Bourgeois 
aux  Etats  de  la  province.  Les  Malouins ,  que  cet  Arrêt  blenoit , 
repréfenterent  que  les  Officiers  de  JulHce  dépendoient  de  l'Evê- 
que  j  que  les  habitants  ayant  le  privilège  de  garder  leur  ville , 
ils  dévoient  jouir  de  celui  de  députer  aux  Etats  ceux  qu'ils  ju- 
geroient  les  plus  capables  ;  qu'ils  avoient  toujours  coutume  d'en- 
voyer à  cette  affemblée  des  Négociants,  qui  ne  pouvoient  man- 
quer d'y  être  utiles  par  leurs  lumières  &  leurs  connoiffanccs  dans 
le  commerce  ;  &  que ,  s'ils  étoient  obligés  d'y  députer  des  ci- 
toyens d'un  autre  état ,  il  ne  pouvoit  manquer  d'en  rèfulter  un 
grand  mal ,  parce  qu'il  ne  fe  trouveroit  plus  perfonne  dans  l'af- 
femblée  qui  fût  inftruit  du  commerce.  Le  Roi  eut  égard  à  ces 
raifons,  &  leur  permit  de  nommer  ceux  qu'ils  jiigeroient  à  pro- 
pos ,  comme  par  le  paffé.  Sa  Majeilé  defirant  favorifer  les  Maires 
de  Saint-Malo ,  &  ceux  qui ,  en  leur  abfencc  ,  en  feroient  les 
fon£lions,  leur  accorda,  par  l'Arrêt  de  fon  Confeil,  du  10 Février 


2.94  S  A  I 

1680 ,  la  préfëance  fur  les  Confeillers-Secretaires  du  Roi,  réiîdant 
en  ladite  ville. 

Les  Armateurs  de  Saint-Malo  fe  rendirent  fur-tout  redoutables 
dans  la  guerre  allumée  par  la  fameufe  Ligue  d'Ausbourg  ,  où 
toutes  les  Puiflances  de  l'Europe  fe  réunirent  pour  rabaiffement 
de  la  France  :  les  Anglais  fur-tout  eurent  beaucoup  à  foufFrir 
de  leur  part  ;  aufîi  formerent-ils  le  projet  de  détruire  cette  ville 
téméraire ,  qui  ofoit  méconnoître  leur  prétendu  empire  fur  la 
mer.  Ils  imaginèrent  de  la  faire  fauter  ,  par  le  moyen  d'une 
machine  infernale  ,  compofée  d'un  bâtiment  de  quatre-vingt-dix 
pieds  de  longueur  ,  qui  avoir  la  forme  d'une  galiote  à  bombes, 
&  qu'ils  avoient  rempli  de  poudre ,  de  bombes ,  de  boulets , 
de  grenades  ,  de  morceaux  de  fer ,  &c. 

Les  Anglais  fe  croyoient  fi  fûrs  du  fuccès ,  que  le  fameux 
Adiflbn  chanta  d'avance ,  dans  fes  vers ,  l'entière  deftruftion  de 
cette  ville.  Le  16  Novembre  1693,  les  Malouins  apperçurent 
une  flotte  de  dix  vaifTeaux  de  ligne ,  depuis  cinquante  jufqu'à 
foixante-dix  canons ,  &  de  cinq  galiotes  à  bombes ,  qui  mouillè- 
rent à  la  FofTe-aux-Normands.  On  ne  prit  d'abord  aucune  pré- 
caution ,  parce  qu'on  s'imagina  que  c'étoit  une  flotte  Françaife 
qu'on  attendoit  du  Havre  ;  mais  on  découvrit  bientôt ,  à  leurs 
manœuvres ,  que  c'étoit  les  ennemis.  Sur  le  champ  on  fit  armer 
les  Forts ,  &  prendre  les  armes  aux  habitants ,  dont  les  princi- 
paux étoient  abfents  pour  leurs  aflFaires.  Le  Gouverneur ,  le  Syn- 
dic ,  &  le  Connétable  ,  étoient  aufli  abfents.  Le  Fort-Royal  leur 
tira  d'abord  un  coup  de  canon  ,  auquel  ils  ne  répondirent  point  -, 
Se ,  à  fept  heures  du  foir  ,  ils  commencèrent  à  bombarder  la  ville. 
On  dépêcha  promptement  de  Saint-Malo  deux  couriers ,  l'un  au 
Duc  de  Chaulnes ,  Gouverneur  de  la  province ,  à  Rennes  j  & 
l'autre  à  M.  de  Guemadeuc.  Les  Andais  bombardoient  fans  relâ- 
che  :  la  plus  grande  partie  de  leurs  bombes  tomba  fur  la  grève 
près  l'Eperon  ;  il  n'en  tomba  fur  la  ville  que  cinq ,  qui  endom- 
magèrent la  Cathédrale  &  trois  maifons.  On  permit  aux  femmes 
&  aux  enfants  de  fortir  de  la  ville. 

Le  27 ,  l'ennemi  s'empara  du  Fort  de  la  Couchée  qu'on 
commençoit  à  bâtir ,  y  arbora  fon  pavillon ,  mit  le  feu  aux  ba- 
raques des  ouvriers ,  &  les  emmena  ,  eux  -  mêmes ,  à  bord  de 
l'Amiral  :  il  recommença  à  jetter  des  bombes  ,  &  n'eut  pas 
plus  de  fuccès  que  la  veille.  Le  feu  des  remparts  &  du  Fort- 
Royal  l'ayant  forcé  de  s'éloigner ,  il  ne  tomba  que  douze  bom- 
bes  fur  la  ville   pendant  toute  la  nuit.  Le  Canonnier  du  grand 


s  A  I  295 

Bé  pointa  fi  bien  fon  canon  ,  qu'il  démonta  une  galiote  ;  mais 
malheureufement  cette  pièce  creva ,  &  blefla  dangereufement 
l'adroit  Canonnier ,  qui  mourut  huit  jours  après.  Pendant  un 
feu  très  -  vif  de  part  Ôc  d'autre ,  un  détachement  de  la  flotte 
Anglaife  alla  s'emparer  de  l'ifle  de  Cezembre ,  &  s'y  livra  à  tous 
les  excès. 

Le  28  ,  il  ne  fe  pafTa  rien  de  bien  remarquable.  MM.  le  Duc 
de  Chaulnes ,  l'Intendant  de  la  province ,  les  Comtes  de  Châ* 
teau-Renaud  ,  de  Bienafîis ,  &  de  Saint-Maure  ,  arrivèrent  à  Saint- 
Aï  alo.  Ce  dernier  fit  armer  un  canot  de  douze  hommes,  alla 
jufqu'à  la  portée  du  moufquet  des  Anglais ,  s'en  revint  rangeant 
leurs  galiotes  ,  &  coupa  leurs  amures  :  on  lui  tira  quelques 
coups  de  canons  qui  pafTerent  fous  fon  bateau.  La  nuit  fe  pafTa 
tranquillement.  Le  Dimanche  29,  furies  cinq  heures  du  matin, 
ils  jetterent  cinq  bomibes  qui  ne  firent  aucun  mal.  Le  Gouver- 
neur de  la  ville  arriva  fur  les  onze  heures  du  matin ,  &  on  ne 
fit  rien  le  refte  de  la  journée  ;  mais  à  huit  heures  du  foir , 
temps  de  la  pleine  mer ,  la  machine  fatale  vint  à  toutes  voiles 
vers  Saint-Malo ,  un  coup  de  vent  la  jetta  heureufement  fur  un 
rocher ,  où  elle  échoua.  Ce  contre-temps  &  les  boulets  qu'on 
lui  envoyoit  du  Fort-Royal ,  prefTerent  le  Capitaine  d'y  faire 
mettre  le  feu.  L'inventeur  de  la  machine  en  fut  la  viêlime  : 
l'artifice  ne  lui  donna  pas  le  temps  de  fe  fauver  avec  fon  ca- 
not ,  il  périt  avec  quarante  hommes  qui  l'accompagnoient.  C'en 
étoit  fait  de  Saint-Malo ,  fi  l'effet  eût  été  tel  que  l'ennemi  avoit 
lieu  de  l'attendre.  L'explofion  fut  terrible  ,  &  le  bruit  fi  ef- 
froyable que  la  terre  en  trembla.  Le  bâtiment  fauta  en  l'air 
à  cinquante  pas  des  remparts  -,  toute  la  ville  fut  ébranlée ,  les 
cheminées  tombèrent ,  les  vitres  &  les  ardoifes  furent  brilées  , 
Se  les  maifons ,  non-feulement  celles  de  Saint  -  Malo  ,  mais  de 
plus  de  deux  Heues  à  la  ronde  ,  furent  découvertes.  Les  mâts 
&  les  débris  de  ce  vaiffeau  remplirent  les  rues  ;  un  virevau 
de  dix-huit  à  vingt  pieds  de  long  tomba  debout  fur  une  maifon, 
&  la  perça  depuis  le  haut  jufqu'en  bas  :  il  fauta  plufieurs  bom- 
bes &  carcaffes  fur  la  ville  ;  on  trouva  deux  canons  cliargés 
dans  deux  greniers  ,  Se  ,  dans  un  jardin  ,  une  carcafie  remplie  de 
bitume ,  qui  s'enflamma  aufli-tôt  qu'il  eut  pris  l'air.  Quand  la 
mer  fut  retirée  ,  on  trouva  trois  cents  bombes  Se  trois  cents  ba- 
rils remplis  d'artifice.  Cet  amas  de  matières  defl:ru£Hves  ne  fit 
mal  à  perfonne  ;  il  n'y  eut  qu'un  chat  tué  dans  une  gout- 
tière. Le  lundi  30 ,  l'Amiral  tira  un  coup  de  canon ,  Se  appareilla, 


1^6  S  A  I 

avec  la  honte  de  n'avoir  pu  nuire  à  Saint-Malo  ;  Se  les  habitants 
de  cette  ville  s'emprefTerent  de  remercier  le  Ciel  de  les  avoir 
préfervés  d'un  danger  fî  éminent. 

Les  Malouins ,  loin  d'être  intimidés  par  la  fureur  de  leurs  en- 
nemis ,  ne  fongerent  qu'à  prendre  vengeance  des  maux  qu'ils 
leur  avoient  faits,  &  de  ceux  qu'ils  avoient  voulu  leur  faire. 
Les  Anglais,  fans  cefle  pourfuivis  par  ces  Armateurs  habiles  Se 
opiniâtres  ,  voyoient  leur  commerce  détruit  &  tombé.  Ils  ne 
pouvoient  fe  relever  tant  que  Saint-Malo  fubfifteroit  5  ils  prirent 
donc  encore  la  réfolution  de  la  bombarder.  En  conféquence , 
le  14  Juillet  1(^95  ,  une  flotte  de  trente  vaifleaux  de  guerre 
de  foixante-dix  à  quatre-vingts  canons ,  de  vingt-cinq  gaUotes , 
de  quinze  frégates  ou  flûtes ,  parut  à  la  hauteur  de  Saint  -  Malo. 
Les  Hollandais  s 'étoient  joints  aux  Anglais  pour  cette  expédition , 
qui  étoit  d'une  utihté  commune  aux  deux  peuples.  Le  Sieur  de 
Ponthaye  entra  ,  à  la  vue  de  cette  flotte ,  avec  une  prife  Hollan- 
daife  de  quatre  cents  tonneaux  ,  chargée  de  bled  feigle.  Les 
ennemis  mouillèrent  en  Hgne  au  Nord  de  la  Couchée  ,  qu'ils  ca- 
nonnerent  &  bombardèrent  toute  l'après  -  midi.  Ils  ne  tuèrent 
qu'un  feul  homme  ,  &  en  blefferent  un  autre.  Deux  galères  du 
Roi  y  commandées  par  MM.  de  la  Pailleterie  &  de  Langeron , 
fe  pollerent  au  Sud-Eft  de  la  Couchée  pour  obferver  de  près 
l'ennemi ,  &  tâcher  de  lui  enlever  quelques  galiotes  ;  mais  la  force 
du  vent  &  la  proximité  des  gros  vaifleaux  les  empêchèrent 
d'exécuter  ce  dernier  projet.  Toute  la  nuit  fe  paflâ  fans  aucune 
aftion  de  part  &  d'autre  -,  Se  le  vendredi  1 5  ,  le  vent  étant  favora- 
ble aux  Anglais ,  ils  vinrent  mouiller  dans  la  Fofle-aux-Normands. 

MM.  de  la  Pailleterie  Se  de  Langeron ,  avec  fix  doubles  cha- 
loupes du  port  de  Saint-Malo ,  armées  chacune  d'un  canon  de 
quatre  livres  de  balle ,  Se  commandées  par  M.  le  Chevaher  de 
Saint-Maure,  fe  préfenterent  pour  leur  difputer  le  pafl^age  5  mais 
ils  ne  purent  en  venir  à  bout ,  parce  que  le  vent  augmentoit 
toujours.  Les  galères  Se  les  chaloupes  canonnerent  l'armée  en- 
nemie ,  qui  continuoit  de  battre  la  Couchée ,  afin  que  ce  Fort 
ne  pût  lui  nuire  pendant  qu'elle  bombarderoit  la  ville  j  ce  qu'elle 
exécut-a  5  entre  fept  Se  huit  heures  du  matin,  avec  la  plus  grande 
vigueur.  Quinze  galiotes  bombardoient  fans  relâche ,  Se  lorf- 
qu'une  étoit  fatiguée ,  elle  étoit  aufli-tôt  remplacée  par  une  au- 
tre. Le  feu  des  ennemis  dura  onze  heures  fans  intervalle  :  ils 
jetterent  au  moins  feize  cents  bombes ,  dont  huit  à  neuf  cents 
t^^naberent  fur  la  ville.  Les  Forts  Se  les  remparts  répondoient  avec 

la 


s  A  I  '      i97 

îa  même  vivacité  j  il  y  eut  dix  perfonnes  tuées ,  fept  mail'ons 
brûlées ,  Sz  huit  cents  endommagées  :  le  bon  ordre  empêcha 
le  progrès  du  feu.  Le  14  ,  les  ennemis  bombardèrent  encore 
la  Conchée,  qui  leur  répondoit  avec  beaucoup  de  vigueur  j  ils 
détachèrent  deux  brûlots ,  dont  l'un  échoua ,  l'autre  s'attacha  au 
Fort,  &  brûla  quelques  baraques  avec  des  munitions  de  guerre. 
On  ne  fçait  pas  précifément  quel  dommage  reçurent  les  affaïUants  j 
mais  leur  retraite  précipitée  ,  dans  le  temps  qu'ils  pouvoient  défoler 
la  ville  ,  fait  croire  qu'ils  en  avoient  beaucoup  fouffert.  Suivant 
le  rapport  du  Sieur  Giraudin ,  commandant  le  Fidèle  ,  qui  avoit 
pris  &  conduit  leur  paquebot  à  Morlaix  ,  l'Amiral  n'étoit  pas 
content  de  fon  expédition  ,  vu  qu'il  y  avoit  perdu  quatre  à 
cinq  cents  hommes.  Le  18,  les  Anglais  mirent  à  la  voile ,  & 
difparurent.  Ces  deux  bombardements  ne  ralentirent  point  l'ar- 
deur des  Malouins  à  pourfuivre  par-tout  leur  fiers  ennemis  ,  des 
dépouilles  defquels  ils  s'enrichirent.  Dans  cette  feule  guerre ,  ils 
prirent  plus  de  quinze  cents  vaifTeaux  ,  dont  plufieurs  étoient 
chargés  d'or,  d'argent,  de  pierreries,  &  autres  effets  précieux, 
fans  compter  un  nombre  considérable  qu'ils  brûlèrent.  La  paix 
qui  fuivit  dura  peu  :  la  fucceflion  à  la  Couronne  d'Efpagne  ra- 
mena la  guerre.  Saint-Malo  recommença  fes  armements  avec  le 
même  fuccès ,  &  fit  en  même  temps  le  commerce  le  plus  im- 
menfe  ,  qui  la  rendit ,  pendant  quelques  années ,  la  plus  opu- 
lente ville  du  Royaume.  C'eft  du  Pérou  que  les  vaifTeaux  de 
Saint-Malo  tiroient  ces  richefTes ,  qui  mirent  les  habitants  de  cette 
ville  en  état  de  prêter  ,  en  171 1  ,  au  Roi ,  une  fomme  de  trente 
miUions  j  fomme  qui  ranima  l'efpérance  abattue  par  tant  de 
défaites  ,  &  fervit  à  ce  grand  Roi  à  maintenir  fon  petit-fils  fur 
le  Trône  d'Efpagne  ,  &  à  défendre  fes  propres  frontières.  La 
Compagnie  des  Indes  ,  fupprimée  depuis ,  étoit  alors  à  Saint-Malo. 
Les  richefTes  qu'elle  apportoit  dans  cette  ville  furent  employées 
au  fervice  de  l'Etat ,  dans  la  fameufe  expédition  de  Rio-Janeiro» 
Les  Malouins  eurent  la  gloire  de  Tentreprife  ,  en  firent  les  dé- 
penfes ,  &  en  partagèrent  les  périls ,  fous  la  conduite  du  fameux 
Dugué-Trouin ,  leur  concitoyen. 

En  1709  ,  on  bâtit  des  caferines  pour  loger  dans  la  ville  une 
troupe  de  cinq  cents  douze  hommes.  L'établifTement  du  Sémi- 
naire, fait  à  Saint-Servan  en  1707,  fut  confirmé  par  lettres-pa- 
tentes de  171 2.  D'autres  lettres  de  même  date,  portent  établif- 
fement  de  l'Hôtel-Dieu  de  Saint-Servan  ,  fondé  par  le  Sieur  de 
la  Roche-Prouvofl  &  Julienne  d'Anicaru 

Tome  IV.  P  2 


198  s  A  I 

En  17T3  ,  les  habitants  de  Saint-Malo  tranfigerent  avec  M.  le 
Duc  de  Penthievre,  au  fujet  des  droits  &  devoirs  d^entrée  qui 
fe  lèvent  entre  les  rivières  de  Couefnon  &  d'Arguenon,  qui 
appartiennent  à  ce  Prince,  Se  qui  font  partie  de  fon  Duché. 
M.  Trouflet  de  Valincour  ,  Secrétaire  général  de  la  Marine ,  au 
nom  du  Prince  ;  &  M.  Moreau  de  Maupertuis ,  au  nom  des 
habitants  de  Saint-Malo ,  s'aflemblerent  chez  M.  Defmarets ,  Eve* 
que  de  Saint-Malo,  qui  étoit  alors  à  Paris,  &  convinrent  de 
ce  qui  fuit  :  1°.  Il  fut  reconnu  que  les  devoirs  d'entrée  fur  toutes 
les  boifTons ,  marchandifes  ,  denrées  ,  fruits ,  foit  de  la  province , 
du  Royaume ,  ou  des  pays  étrangers ,  qui  entrerît  par  la  Man- 
che ,  &  font  tranfportées  dans  les  ports ,  havres ,  &  villes ,  fitués 
entre  les  rivières  d'Arguenon  &  Couefnon ,  foit  que  ces  marchan- 
difes &  denrées  foient  confommées  dans  les  mêmes  lieux  ou  tranf- 
portées ailleurs ,  font  dus  à  M.  le  Duc  de  Penthievre  ,  confor- 
mément à  la  pancarte  du  18  Août  1571  j  pancarte  autorifée 
par  Arrêt  du  Parlement  de  Bretagne,  du  18  Juin  161 9.  Il  fut 
pareillement  reconnu  que  les  droits  ne  font  point  dus  fur  ces 
marchandifes  lorfqu  elles  entrent  à  Saint  -  Malo ,  qu'elles  y  font 
confommées  ou  tranfportées  par  mer  ailleurs  que  dans  le  terri- 
toire fxtué  entre  les  rivières  de  Couefnon  &  d'Arguenon.  En  con- 
féquence  ,  il  fut  dit  que  les  Malouins  &  autres  pourroient  dé- 
charger de  leurs  vailleaux  dans  le  port  de  leur  ville ,  fans  être 
obligés  d'en  faire  déclaration  au  bureau  du  Prince  ;  mais  qu'ils 
ne  pourroient  rien  décharger  de  nuit ,  fi  ce  n'eft  en  cas  de 
tempête ,  dans  les  lieux  où  les  droits  font  dus  à  Son  Akefîe  ,  fans 
déclaration  préalable  &  paiement  des  devoirs ,  à  peine  de  trente 
livres  d'amende ,  &  de  confifcation.  Il  fut  convenu  que  ceux 
des  habitants  qui  voudroient  faire  tranfporter  des  marchandifes 
dans  les  Heux  ci  -  defTus  dénommés  ,  avertiroient  les  Receveurs 
ou  Commis  à  la  perception  des  droits  du  Prince ,  d'affiiler  à  la 
fermeture  des  ballots  pour  y  mettre  les  armes  de  Son  AltefTe 
Séréniffime  ;  que  les  mêmes  habitants  pourroient  fans  payer  aucuns 
droits, mais  non  fans  déclaration,  qui  doit  être  reçue  gratis  par  les 
Commis ,  faire  jjanfporter  &  charger ,  de  quelque  manière  que 
ce  foit ,  les  marchandifes  de  leur  ville  dans  les  navires  &  ba- 
teaux qui  fe  trouveroient  dans  leur  port ,  pourvu  qu'elles  fuffent 
deftinées  pour  d'autres  lieux  c|ue  ceux  qui  fe  trouvent  entre  les 
deux  rivières.  Il  fut  ftipulé  que  les  toiles  de  Laval ,  Pontivi  , 
Quintin ,  tranfportées  de  Saint  -  Malo  dans  le  territoire  ren- 
fermé   par  ces    mêmes .  rivières ,  ne  paieroient   aucuns   droits  5 


s  A  I  2^a 

mais  que  celles  de  Hollande ,  Morlaix ,  Lannion ,  &c.  feroient 
fujettes  aux  droits  fpécifîés  dans  la  pancarte.  On  fît  un  règle- 
ment femblable  pour  les  chanvres  ,  en  diilmguant  ceux  qui  ve- 
noient  de  Dol  &  des  environs ,  de  ceux  de  Morlaix  ,  &  autres 
lieux.  Il  fut  décidé  que  les  droits  ne  font  point  dus  pour  les 
poilTons  falés ,  apportés  du  territoire  d'entre  les  rivières  de  Couef- 
non  ,  d'Arguenon  ,  Se  tranfportés  enfuite  dans  le  même  territoire  ; 
mais  comme  tous  les  droits  font  dus  pour  les  poiflbns  faiés  qui , 
entrés  par  la  mer  à  Saint-Malo ,  font  enfuite  tranfportés  dans  les 
lieux  mentionnés ,  pour  éviter  la  fraude  ,  il  fut  dit  qu'on  en 
feroit  déclaration ,  dont  la  copie  feroit  délivrée  gratis.  Les  Par- 
ties convinrent  enfuite  que  toutes  les  Sentences ,  obtenues  ci- 
devant  par  les  uns  ou  les  autres  des  contraftants  ,  feroient  ré' 
putées  nulles  ,  &  que  tous  les  procès  commencés  à  ce  fujet  de- 
meureroient  éteints  :  elles  ajoutèrent  que  la  préfente  tranfaftion 
ne  pourroit  nuire  &  préjudicier  à  leurs  droits  refpe6lifs ,  ni  à 
ceux  du  Seigneur  Evêque.  Comme  on  avoir  oublié ,  dans  cette 
tranfaftion,  de  faire  mention  des  matières  propres  à  la  conflruc- 
tion ,  les  Malouins  firent ,  à  ce  fujet ,  des  repréfentations  à  M, 
l'Amiral ,  qui ,  par  {es  lettres  de  l'année  1 7 1 4 ,  déclara  qu'il 
exemptoit  des  droits  ordinaires  ,  le  bray ,  le  goudron ,  les  plan- 
ches ,  les  mâts  ,  les  prufTes  ,  les  chanvres  ,  les  cables  &  les 
cordages ,  les  toiles  à  voiles  ,  les  clous ,  le  fer  ,  &  généralement 
tout  ce  qui  eft  porpre  à  l'ufage  &  fervice  des  vaiffeaux.  Nonobf- 
tant  cette  tranfaftion  ,  il  s'élevoit  tous  les  jours  de  nouvelles 
difficultés  avec  les  Fermiers  des  devoirs ,  &  de  là  venoient 
fans  cefle  de  nouveaux  procès.  Pour  tarir  la  fource  de  tous  ces 
différents ,  la  Communauté  de  Saint-Malo  s'avifa  d'un  expédient 
qui  lui  réuffit.  Elle  fit  propofer  ,  en  1756,  à  M.  le  Duc  de 
Penthievre ,  de  lui  afféager ,  à  perpétuité ,  la  perception  de  ces 
droits.  Le  Prince  f  confentit ,  &  l'afte  en  fut  pafTé  à  Paris , 
en  1757.  La  Communauté  de  Saint-Malo  s'obligea  à  payer  tous 
les  ans ,  au  Tréforier  de  M.  le  Duc  de  Penthievre  ,  une  fomme 
de  cinq  mille  livres ,  &c  à  compter  au  Receveur  de  ces  droits 
une  fomme  de  dix-fept  mille  livres ,  pour  indemnité  de  la  réfi- 
liation de  fon  bail ,  dont  il  devoit  encore  jouir  pendant  huit 
ans.  Cet  arrangement  fut  approuvé  du  Confeil  d'Etat ,  qui  l'ho- 
mologua par  fon  Arrêt  du  22  Novembre  1757.  En  conséquence 
de  cet  Arrêt,  Sa  Majeflé  accorda  des  lettres-patentes  à  la  Com- 
munauté de  ville  de  Saint-Malo ,  Se  le  tout  fut  enrégiftré  au 
Parlement  de  Bretagne  &  à  la  Chambre  des  Comptes  en  1758. 


}oo  s  A  I 

Cet  afféagement  n'a  pas  rempli  l'objet  qu'on  s'étoît  pfopofé: 
les  difficultés  ne  font  pas  moins  fréquentes ,  &  les  procès  moins 
nombreux.  Voici  ce  que  m'écrit,  à  ce  fujet,  M.  Befné  de  la 
Hauteviîle ,  Avocat  au  Parlement  :  «  Tandis  que  j'étois  Con- 
»  feiller  à  la  Compagnie  des  Indes  à  Saint  -  Malo  ,  je  m'occupai 
»  à  corriger  les  abus  qui  s'étoient  gliffés  dans  les  perceptions 
»  des  droits  de  Couefnon  &  d'Arguenon ,  dont  la  ville  de  Saint- 
»  Malo  accable  le  Commerce.  Comme,  à  raifon  de  ce  droit ,  on 
»  plaidoit  devant  les  Juges  royaux  de  Dinan  ,  &  de  là  au  Par- 
»  lement ,  Se  qu'il  y  avoit  une  foule  de  procès  indécis  à  ces 
»  Tribunaux  ,  j'obtins  un  Arrêt  du  Confeil  général  des  Finances, 
»  en  Septembre  1771  ,  qui  évoqua  toute  conteftation  à  ce  fujet, 
»  au  Roi  &  à  fon  Confeil.  Je  fis  notifier  cet  Arrêt  avec  la 
»  Commiffion,  qui  fut  accordée  en  mon  nom,  par  le  Roi,  aux 
»  Maire  &  Echevins  de  Saint-Malo ,  avec  défenfe  de  continuer 
»  la  perception  du  droit.  Cet  Arrêt  fut  également  notifié  au 
»  Greffier  du  Parlement  &  à  celui  du  Siège  royal  de  Dinan. 
»  La  conteitation  fur  ce  droit  eft  indécife  au  Confeil ,  &  il  fe 
»  perçoit  comme  à  l'ordinaire.  » 

En  1720,  la  maladie  contagieufe  qui  défoloit  les  ifles  de 
Jerfey  &  Garnefey ,  &  les  provinces  du  Languedoc ,  de  la 
Provence  ,  &  du  Dauphiné ,  occafionna  la  défenfe  qui  fut  faite 
aux  Malouins  de  commercer  avec  ces  différents  pays  ;  défenfe 
qui  fut  levée  par  Arrêt  du  Confeil  de  l'année  fuivante.  Le  12 
Septembre  1733  ,  le  Confeil  d'Etat  rendit  un  Arrêt  qui  déboute 
les  Marchands  de  draps ,  foie  &  laine ,  mercerie  ,  clincaillerie  , 
&  épicerie  de  la  ville  de  Saint-Malo  de  leur  demande.  Arrêt 
du  Confeil,  du  18  Juin  1748,  qui  permet  à  la  Communauté 
de  ville  de  Saint-Malo  de  percevoir ,  pendant  douze  années ,  à 
commencer  du  i^/.  Novembre  1748,  un  droit  fur  les  boiffons 
qui  entreroient  dans  la  ville ,  le  fauxbourg*  de  Saint  -  Servan  , 
èc  havres  en  dépendants.  Arrêt  de  la  Cour  de  Parlement,  du 
13  Août  1750,  qui  défend  aux  Marchands  de  bois  de  conduire 
&  de  vendre  à  Saint-Malo  &  à  Saint -Servan  des  bûches  qui 
foient  moindres  de  trente  pouces  de  longueur ,  &  du  fagot  au 
defibus  de  vingt-deux  pouces  fous  hart  ;  leur  ordonne  de  faire 
la  braffe  de  bûches  de  mefure  compétente,  en  hauteur  &  longueur, 
fuivant  l'ufage  du  lieu. 

Par  Arrêt  du  I«^  Mai  1753,  le  fauxbourg  de  Saint -Servan 
fut  réuni  &  incorporé  à  la  ville  de  Saint-Malo  ,  pour  ne  former 
avec  elle  qu'une  même  Communauté ,  jouir  des  mêmes  avantages, 


s  A  I  301 

Se  payer  les  mêmes  charges.  A  l'occafion  de  deux  balles  de 
toiles  faifîes  au  bureau  de  Dinart ,  le  19  Août  1755,  ^^  Parle- 
ment rendit  un  Arrêt  qui  défend  d'exiger  les  droits  de  la  traite 
domaniale  lur  les  marchandifes  qui  ne  font  tranfportées  que  d'une 
ville  à  l'autre  dans  l'intérieur  de  la  province  de  Bretagne ,  & 
défend  d'inférer  dans  les  pafle-ports ,  que  les  marchandifes  font 
deftinées  à  fortir  de  la  province  ;  défend  pareillement  d'exiger 
les  droits  de  la  traite  domaniale  fur  les  marchandifes  qui  vont 
par  mer  ,  &  leur  enjoint  de  fe  conformer  à  la  pancarte  de  1 5 12  ; 
ordonne  au  furplus  que  ladite  pancarte  fera  affichée  dans  tous  les 
bureaux ,  &  condamne  le  Receveur  de  Dinart  à  vingt  livres 
d'amende.  En  1757,  l'Intendant  de  la  province  rendit  une  Or- 
donnance ,  qui  défendoit  aux  Juifs  de  s'étabHr  dans  la  ville  de 
Saint-Malo  &  dans  toutes  les  autres  places  de  la  province. 

Le  Dimanche  4  Juin  1758,  au  matin,  on  découvrit  au  Nord 
de  Saint-Malo  ,  à  la  hauteur  de  Cancalle  ,  une  flotte  Anglaife 
de  cent  voiles;  l'après-midi,  elle  parut  augmenter  de  cinq  & 
cingler  vers  Saint-Malo.  Le  5  ,  on  ne  douta  plus  qu'elle  n'en 
voulût  à  cette  ville ,  &  le  foir ,  vers  les  fix  heures ,  elle  mouilla 
à  Cancalle ,  &  y  débarqua  des  troupes.  M.  le  Comte  de  France 
de  Landal ,  commandant  la  Milice  Garde-côte  de  Saint-Malo , 
courut  fur  le  champ ,  avec  fîx  cents  hommes ,  s'établir  à  Can- 
calle fur  un  petit  Fort  armé  de  quatre  canons ,  pour  s'oppofer 
à  la  defcente  ;  mais  n'ayant  que  douze  coups  à  tirer ,  &  réunif- 
fant  tout  le  feu  des  ennemis ,  la  place  cefla  bientôt  d'être  te- 
nable  :  il  marcha  enfuite ,  avec  fes  foldats,  au  lieu  du  débarque- 
ment ,  &  fut  appuyé  par  un  détachement  du  Régiment  de 
Boulonnais  ,  qu'on  venoit  de  retirer  de  Saiiit-Servan  où  il  étoit 
en  garnifon  ;  mais  ne  pouvant  réfifter  au  feu  des  vaiffeaux  ,  il 
fut  obligé  de  reculer ,  &  Boulonnais  rentra  à  Saint-Malo.  M.  de 
Landal  eut  un  domelHque  &  un  cheval  tués.  Avant  de  fe  re- 
tirer ,  il  fit  fauter  fon  Fort ,  &  mit  le  feu  à  deux  barges  de  fa- 
gots ,  pour  dérober  à  l'ennemi  la  connoifiance  de  i'a  retraite. 
Les  Anglais  n'ayant  pas  trouvé  d'autre  réfiflance ,  parce  qu'il 
Y\y  avoit  pas  de  troupes  à  leur  oppofer  dans  cette  partie  de 
la  province  ,  mirent  à  terre  quinze  mille  hommes  ,  commandés 
par  Milord  Malboroug.  M.  de  la  Châtre  ,  Gouverneur  de 
Saint  -  Malo  ,  montra  beaucoup  de  fagefle  &  d'a6livité  en  cette 
occafion. 

Les  premiers  débarqués  des  ennemis  fe  répandirent  dans  la 
campagne  ,  emmenèrent  les  payfans  avec  les  outils  du  labourage  , 


joi  s  A  I 

&  firent  travailler  au  retranchement  d'un  camp,  dans  le  lieu 
de  la  defcente  &  dans  une  pofition  propre  à  favorifer  leur  re- 
traite. Ce  fut  l'opération  du  lundi  &  lendemain  mardi.  Ils 
firent  reconnoître  les  environs  par  quelques  détachements,  tandis 
que  M.  de  la  Châtre  faifoit  rompre  les  digues  de  la  mer  & 
ruiner  les  chemins  j  ce  qui  obligeoit  les  ennemis  à  un  grand 
détour ,  par  des  routes  pour  ainli  dire  impraticables  :  il  ordonna 
auffi-tôt  des  fortifications  au  dehors  des  murs  d'enceinte  ,  fit 
placer  des  batteries  fur  les  quais ,  difpofa  les  troupes ,  &  affigna 
des  poftes  aux  Bourgeois  qui  étoient  fous  les  armes.  M.  de 
Lauret ,  Capitaine  au  Régiment  de  Boulonnais ,  qui  formoit  toute 
la  garnifon  de  la  ville ,  fut  envoyé  avec  un  détachement  de 
Volontaires  harceler  les  ennemis  ,  ou  les  retarder,  s'il  étoit  poffi- 
ble  ,  dans  leur  marche  :  il  pouffa  jufqu'à  leur  grande  garde , 
leur  tua  quelques  foldats ,  &  en  perdit  quelques-uns.  Un  déta- 
chement des  ennemis  ,  commandés  par  un  Officier ,  entra  à 
Saint-Servan  vers  les  cinq  heures  du  foir  :  ce  parti ,  après  avoir 
fait  rafraîchir  fes  chevaux  ,  alla  mettre  le  Teu  à  une  corderie 
de  la  ville  ,  &  fe  retira  dans  le  nouveau  camp  que  l'ennemi 
occupoit  à  Paramé.  La  frayeur  fut  fi  grande^,  qu'elle-  fit  fuir 
la  majeure  partie  des  habitants  de  ce  fauxbourg ,  qui  emportèrent 
avec  eux  leurs  effets  les  plus  précieux  _,  de  forte  qu'il  en  refia 
à  peine  vingt  en  état  d'être  utiles.  Le  mercredi ,  le  bataillon  de 
Fontenai-le-Comte  arriva  :  le  Général  Anglais ,  avec  une  armée 
que  l'on  jugea  de  douze  mille  hommes,  entra  à  Saint  -  Servan , 
&  fit  diftribuer  &  afficher  plufieurs  manifeftes ,  par  lefquels  il 
engageoit  les  habitants  à  continuer  leurs  travaux  &  à  ne  point 
quitter  leurs  maifons ,  proteftant  qu'il  n'en  vouloit  ni  aux  hom- 
mes ,  ni  aux  habitations ,  m.ais  feulement  aux  effets  du  Roi ,  de. 
la  marine,  &  aux  perfonnes  portant  les  armes  contre  l'Angle- 
terre ;  menaçant  de  faire  piller  &  détruire  les  maifons  qu'il  trou- 
veroit  abandonnées.  Il  fit  venir  le  Syndic  pour  fe  faire  conduire 
dans  différents  endroits  :  dans  ce  moment ,  efcorté  de  quatre 
Dragons  ,  il  fe  porta  à  cheval  fur  une  pointe  qui  commande 
la  ville  de  Saint- :Vîalo ,  qu'il  examina  quelque  temps  avec  une- 
lunette  d'approche;  mais  un  coup  de  canon,  tiré  des  remparts,, 
ayant  tué  un  de  fes  Dragons ,  il  rentra  à  Saint-Servan ,  &  or- 
donna de  porter  le  feu  à  deux  corderies  &  à  un  magafin  qui 
étoient  proche  TEglife.  Le  Refteur ,  informé  de  fon  deffein  ,. 
courut  avec  fon  Clergé  fe  profferner  devant  lui ,  &  le  fupplier 
de  ne  pas  détruire  une  ville  qui  n'avoit  point  pris  les  armes ,  3c 


s  A  I  30} 

de  faire  refpefter  fon  Eglife  &  les  Communautés  (a).  Après 
s'être  affuré  qu'il  n'étoit  pas  poffible  de  brûler  les  magafms  lans 
rilquer  d'incendier  la  ville  ,  il  fit  tranfporter  fur  un  vaifleau  en 
rade ,  tous  les  effets  de  marine  &  de  conltruftion ,  &  y  fit 
mettre  le  feu.  Il  prit  chez  le  Refteur  logement  pour  lui  &  fon 
Etat-Major.  Il  commanda  la  difeipline  la  plus  févere,  raffura 
lui-même  les  habitants ,  donna  toutes  les  fauve  -  gardes  qu'on 
demanda,  &  engagea  les  femmes  à  s'éloigner  de  Saint-Servan, 
dans  la  crainte  qu'on  y  jettât  des  bombes  de  Saint  -  Malo.  Ce 
Général  fit  enfuite  diftribuer  des  vivres  à  fes  troupes ,  &  alla 
examiner  la  place  ,  dont  il  vifita  les  dehors ,  toujours  accom- 
pagné de  quatre  CavaHers  &  de  quelques  Officiers.  Les  Ca- 
nonniers  de  Saint-Malo ,  qui  fe  difputoient  l'honneur  de  le  tuer, 
faifoient  feu  dès  qu'ils  voyoient  parokré  un  habit  rouge.  Il  ne 
perdit  cependant  qu'un  homme  ce  jour^là.  On  ne  peut  conce- 
voir quel  étoit  fon  but ,  en  courant  tant  dé  rifques  pour  exa- 
miner cette  place  ;  il  né  paroît  pas  qu'il  ait  eu  deffein  de  l'af- 
fiéger ,  puifqu'il  n'avoit'fait  mettre  à'- terre  ^ùe  deux  pièces  de 
campagne  de  quatre  livres;  .     '"^ 

Le  8,  au  matin,  ce  Général  envoya  -un  Trompette  à  Saint- 
Malo  ,  avec  une  lettre  adreffée.'au  Maire ,  pour  le  Ibmmer  de 
rendre  la  ville ,  avec  proméffe  de  n'en  exiger  d'autres  fubfides 
que  ceux  qu'elle  payoit  au -Roi  de  France.  Le  Maire  répondit 
que  la  ville  étant  occupée  par  les  troupes  du  Roi  &  fes  com- 
mandants ,  il  n'avoit  aucune  qualité  pour  en  difpoier  ,  mais 
feulement  de  bons  canons  &  de  bons  bras  pour  la  défendre. 
Sur  cette  réponfe ,  Milord  Malboroug  fit  porter  le  feu  à  tous 
les  bâtiments  qui  étoient  mouillés  -  en  Tatare  ,  Trichet ,  Levai , 
Challe ,  &  Solidor ,  &  au  magafin  des  poudres  ,  qui ,  heureu- 
fement ,  avoit  été  vuidé  la  veille.  Il  y  eut  foixaiue-onze  vaif- 
feaux  brûlés,  dont  vingt  propres  pour  la  mariioëdu  Roi,  & 
trente  bateaux  ou  gabares  i  après  cette  expédition ,  il  fe  retira , 
avec  une  partie  de  fes  troupes ,  dans  un  camp  qu'il  avoit  établi 
à  Paramé ,  pour  fiivorifer  la  communication  de.  fes  vaifTcaux 
avec  Saint-Servan ,  laill'ant  dans  ce  fauxbourg  fes  équipages  &  le 
refte  de  fes  troupes,  qui  le  joignirent  fur  le-  foir.   L'après-midi, 


(  <z  )  Milord  étoit  irrite;  il  répondit  aux 
teprci'entations  avec  beaucoup  de  vivacité  : 
«  Il  n'y  a  qu'un  quart-d'hcurc ,  dit-il ,  que 
»  j'ai  penfé  l'aire  mettre  le  feu  aux  Quatre 
«  coins  de  la  ParoilTc.  Un  coquin   lur  la' 


)>  pince  A  iair  un  fignal  ,  &  auill-totun 
«coup  dî'c^rtlon  m'a  été  tiré.  SH. pa^'oi^ 
»  ti'ôiux  cA  hcrame  ,  je  l'aurois  fait  pendre 
))  fur  le  champ.  » 


304  s  A  I 

différents  partis  de  Cavalerie  vinrent  reconnoîtreles  moulins  à  vent 
qui  font  au  long  du  fîllon  de  Saint-Malo  ,  à  l'abri  defquels  l'ar- 
mée penfoit  à  faire  les  approches.  Le  canon  du  château  tua 
plufieurs  de  ces  Cavaliers ,  &♦,  comme  ces  moulins  étoient  minés, 
on  fit  fauter  les  plus  propres  à  couvrir  l'ennemi.  La  réunion  des 
troupes  Anglaifes,  à  Paramé  ,  fit  craindre  aux  Malouins  que 
l'ennemi  n'eût  deiîein  d'affiéger  la  ville  pendant  la  nuit  :  fa  ma- 
nœuvre fembloit  l'annoncer  ;  &  peut-être  l'aflaut  ne  fut-il  empê- 
^  ché  que  par  un  orage  terrible  ,  tel  qu'on  n'en  avoit  pas  vu  depuis 
long-temps ,  accompagné  d'une  pluie  violente ,  de  tonnerre ,  & 
de  grêle,  qui  dura  depuis  neuf  heures  du  foir  jufqu'à  une  heure 
du  matin.  On  avoit  fait  fortir  de  Saint-Malo  ,  à  l'entrée  de  la  nuit , 
un  détachement  de  troupes  &  de  Noblefle  volontaire  pour  aller 
reconnoître  l'ennemi.  Ce  détachement  chargea,  avec  avantage, 
un  parti  Anglais  ;  mais ,  ce  parti  ayant  été  foutenu ,  nous  eûmes 
huit  foldats  bleffés  &  deux  tués. 

Le  9,  à  cinq  heures  du  foir  ,  il  entra  à  Dol  quinze  cents 
ennemis,  dont  la  moitié  de  Cavalerie,  qui  y  refterent  jufqu'au 
lendemain ,  une  heure  après-midi.  Le  Commandant  &  quelques 
Officiers  prirent  leur  logement  chez  le  Maire  -,  le  refte  de  la 
troupe  s'établit  fous  les  halles  &  le  long  des  rues ,  fans  entrer 
dans  aucunes  maifons  :  ils  payèrent  exaftement  tout  ce  qu'on  leur 
fournit  ,  n'infulterent  perfonne ,  &  n'exigèrent  aucune  contribu- 
tion. Les  Anglais  occupèrent  paifiblement  Saint-Servan ,  Paramé  , 
Saint-Meloir  ,  &  Saint-Coulomb  ,  c'eft-à-dire  ,  tout  le  terrein  fitué 
entre  la  ville  &  Cancalle  -,  jufqu'au  Dimanche  1 1  au  matin, 
que  le  Général  retira  fes  équipages,  &  fit  défiler  toute  fon  ar- 
mée fur  Paramé ,  qui  fut  évacuée  l'après-midi.  Les  Anglais  fe 
replièrent  fur  leur  camp  de  Cancalle,  &  les  prifonniers  qu'on  fit 
il  rapportèrent   qu'ils    travailloient  férieufement  à   fe   rembarquer,. 

Quoique  nous  euffions  des  troupes  deftinées  à  les  charger ,  8c 
rendues  fur  les  lieux  à  cet  effet ,  il  fut  impoffible  de  contrarier, 
leur  embarquement,  vu  la  pofition  avantageufe  &  les  retran~ 
chements  de  leur  camp  ,  &  plus  encore  l'artillerie  de  leurs  vaif- 
féaux  emboffés  tout  près  de  terre.  Leurs  bateaux  de  tranfport 
levoient  cent  hommes ,  &  chacun  de  ces  bateaux  étoit  précédé 
de  deux  courfiers  armés  de  quatre  canons.  Les  foldats  avoient 
ordre  d'être  fous  les  armes  dans  les  bateaux  ,  &  prêts  à  remettre  à 
terre  au  premier  fignal.  L'embarquement  fut  fini  le  1 2  au  foir,  ils  n'a- 
voient  plus  de  troupes  à  terre  à  onze  heures  :  ils  appareillèrent  pen- 
dant la  nuit ,  &:  5  le  1 3  au  matin ,  on  ne  voyoit  plusieurs  vaiffeaux. 

La 


s  A  I  305 

La  Nobleffe  volontaire,  qui  s'étoit  rendue  à  Saint-Malo  au 
premier  bruit  de  la  defcente ,  fe  diftingua  dans  toutes  les  for- 
ties  de  jour  &  de  nuit.  MM.  le  Duc  d'Aiguillon  &c  de  la 
Châtre  fe  portèrent  par-tout  avec  un  zèle  infatigable.  M.  de 
Caud  ,  Garde-du-Corps  du  Roi ,  qui  s'étoit  rendu  !à  ,  de  Rennes, 
comme  Volontaire ,  remplit ,  en  cette  occafion  ,  les  fondions 
d'Aide  de  camp ,  &  fut  chargé  de  pluficurs  expéditions  qu'il 
rempht  avec  beaucoup  de  valeur  &  de  fageffe.  Il  fit  prifonnier 
un  des  Gardes  du  Roi  d'Angleterre.  M.  l'Ecoufle ,  Syndic  des 
habitants  de  Saint-Servan  ;  les  Prêtres  de  cette  ParoiiTe  ,  &  quel- 
ques-uns des  Membres  du  Général  fe  conduilirent  ,  dans  cette 
circonftance  ,  avec  beaucoup  de  courage ,  d'intelligence ,  &  de 
fageffe.  M.  de  la  Vigne-Hercouet ,  Capitaine  Garde-côte  de  la 
Capitainerie  de  Plancoët ,  relégué  avec  dix-huit  hommes  dans 
un  moulin  défendu  par  des  piquets  &  quelques  fafcines ,  em- 
pêcha les  Anglais  de  pénétrer  fur  la  grève  de  mer  baffe ,  & 
retarda  quelque  temps  leur  invalion  dans  le  fauxbourg  Saint- 
Servan  ;  il  tua  quelques  maraudeurs  Se  un  Officier- Major  des 
troupes  Anglaifes ,  fit  faifir  les  chevaux ,  fon  équipage ,  les  fit 
vendre,  &  en  diflribua  le  produit  aux  foldats  de  fa  Compagnie: 
il  obtint  une  récompenfe  des  habitants.  Ce  citoyen ,  honnête  de 
courageux  ,  demeure  à  Dinan ,  où  il  vit  dans  la  médiocrité, 
jouiffant  de  l'eflime  de  fes  concitoyens.  On  juge  que  les  An- 
glais eurent  quinze  à  vingt  hommes  tués  ,  on  leur  fit  vingt-cinq 
prifonniers.  Nous  n'eûmes ,  en  tout ,  que  deux  hommes  tués  & 
fîx  bleffés.  L'ennemi ,  en  fe  rembarquant ,  renvoya  les  différents 
payfans  qu'il  avoir  pris  pour  le  conduire  dans  fes  routes.  Au 
mois  de  Septembre  de  la  même  année ,  les  Anglais  firent  une 
autre  defcente  à  Saint-Cafl.  (  Voyez  Saint-Caff.  ) 

Avant  de  finir  cet  article  ,  je  dois  faire  mention  des  privilèges 
de  la  ville  de  Saint-Malo  ;  privilèges  dus  à  fon  zèle  pour  le  lér- 
vice  du  Roi.  Le  Roi  François  ,  par  fes  lettres  &  fa  déclaration 
de  fan  1534  ,  accorda  à  celui  des  habitants  qui  abattroit  le  pa- 
pegai,  le  droit  de  billot  fur  trente  pipes  de  vin  j  &,  l'année 
fuivante ,  ce  Monarque  confirma  ce  privilège  par  de  nouvelles 
lettres  données  à  Nîmes.  Le  Roi  Henri  en  donna  auffi  à  ce 
fujet  :  elles  accordent  la  permifîlon  de  vendre  vingt  tonneaux 
de  vin  à  celui  qui  abattra  le  papegai  avec  farquebufe  j  vingt 
autres  ,  à  celui  qui  l'abattra  du  ti  a  t  de  l'arbalète  j  &  vingt- 
quatre  ,  à  celui  qui  l'abattra  du  trait  de  l'arc.  François  II  con- 
firma cette  nou  elle  conccfîlon  au  mois  de  Mars  i^çi  Henri 
Tome  IK^  \  Q  i 


3o6  S  A  I 

III,  par  fes  lettres  da  7  Juillet  1575  ;  Henri  IV ,  par  fes  lettres 
du  mois  d'Avril  1601  ;  &  Louis  XIII,  aufli  par  lettres-patentes 
du  mois  de  Juin  161  o.  En  1661,  ce  privilège  occafionna  un 
procès  entre  les  habitants  de  Saint- iVîalo,  &  Louis  de  Rohan, 
Prince  de  Guemené  ,  Engagifte  des  Impôts  &  Billots  de  ce  diocefej 
procès  qui  fut  terminé  par  l'Arrêt  de  la  Cour,  qui  maintient 
les  habitants  dans  leur  droit  de  papegai  &  d'exemption  de 
devoirs  de  trente-cinq  tonneaux  de  vm,  qui  feront  débités  fous 
deux  brandons  feulement.  Par  Arrêt  du  Confeil  du  27  Juillet 
1671  ,  le  Roi  confirma  les  villes  de  la  province  ,  qui  av oient 
droit  d'abattre  le  papegai,  dans  la  polTefTion  de  leurs  droits. 
Les  Fermiers  des  Devoirs  de  la  ville  de  Saint-Malo ,  en  1 707 , 
ne  voulant  point  reconnoître  les  privilèges  de  rabatteur  du  pa- 
pegai ,  lui  intentèrent  procès  ;  mais  ils  furent  condamnés  par 
Arrêt  de  la  Cour  du  10  Janvier  1708.  Les  Fermiers  en  appel- 
lerent  au  Confeil  ;  mais  ils  ne  furent  pas  plus  heureux ,  ayant 
été  déboutés  de  leurs  demandes ,  par  Arrêt  du  14  Février 
1713  ,  qui  ordonne  l'exécution  de  celui  du  Parlement.  Nous 
ignorons  ce  qui  s'ell:  paiTé  depuis  à  ce  fujet  ;  mais  on  fçait  que, 
lors  de  la  fuppreffion  générale  des  papegais  en  Bretagne,  en 
1770,  la  feule  ville  de  Saint-Malo  fut  favorifée  &  confervée 
dans  fon  droit  de  tirer  le  papegai. 

De  temps  immémorial ,  le  foin  &  la  garde  du  port  de  Saint- 
Malo  font  confiés  à  deux  Officiers,  appelles  Baillis ^.^  choifis 
par  la  Communauté  pour  veiller  &  maintenir  ce  port  en  bon 
état ,  faire  remplir  les  fouilles  &  creux  formés  par  les  vaifîeaux  , 
entretenir  les  ponts  &  les  tranchées  qui  font  aux  avenues  de 
la  ville  ,  les  pots  auxquels  s'amarrent  &  s'attachent  les  vaifîeaux  , 
&  les  balifes  qui  font  pofées  en  plufieurs  endroits  fur  les  ro- 
chers pour  avertir  les  marins  de  s'en  écarter  5  &,  comme  tout 
cela  ne  fe  peut  faire  fans  frais,  les  Malouins  lèvent  un  droit 
d'ancrage  fur  chacun  des  vailTeaux  qui  mouillent  dans  la  rade. 
Les  Baillis  n'avoient  point  été  inquiétés  dans  la  percep- 
tion de  ce  droit  jufqu'en  1(359,  que  la  Chambre  des  Comptes 
ordonna  ,  par  fon  Arrêt ,  qu'ils  lui  rendroient  déformais  compte 
de  la  recette  &  de  l'emploi  de  ces  deniers.  La  Communauté 
de  ville  eut  recours  au  Confeil ,  qui  la  confirma  dans  fon  ancien 
privilège ,  avec  défenfe  à  la  Chambre  des  Comptes  de  poufîer 
plus  loin  cette  aflfaire.  Trois  ans  après,  les  Juges-Baillis  furent 
encore  inquiétés  dans  Texercice  de  leurs  charges  par  le  Gou- 
verneur  de  la  tour    de  Sohdor,    qui   prétendoit  que  le    droit 


s  A  I  307 

d'ancrage  lui  appartenoit.  Ils  fe  pourvurent  encore  au  Confeil, 
&  obtinrent  un  Arrêt  qui  déboutoit  le  Gouverneur  de  fes  pré- 
tentions. La  Communauté  de  ville  ^  voulant  abolir  un  uiàge 
abufif  &  dont  l'expérience  avoir  prouvé  le  danger ,  celui  d'al- 
lumer du  feu  dans  les  vaiffeaux  du  port  pendant  la  nuit,  pré- 
fenta  ,  à  ce  fujet ,  une  requête  au  Parlement ,  qui ,  le  18  No- 
vembre 1665  ,  rendit  un  Arrêt  conforme  à  fes  intentions,  avec 
ordre  aux  Juges-Baillis  de  le  faire  exécuter.  En  1670,  ces 
derniers  rendirent  une  Sentence  qui ,  entr'autres  chofes ,  défen- 
doit ,  fous  les  peines  méritées ,  de  porter  devant  d'autres  Juges 
les  caufes  dont  la  connoifTance  leur  appartenoit.  Cette  Sentence 
fut  fuivie  d'une  autre  ,  portant  défenfe  aux  voituriers  de  mettre 
leurs  chevaux  fur  les  quais  &  fur  la  poterne  de  la  croix  du 
Fiel.  La  même  année,  un  pilote,  qui  étoit  allé  au  devant  d'un 
navire  ,  pour  le  conduire  dans  le  port ,  n'avoit  pu  convenir  de 
prix  avec  le  Capitaine.  En  conféquence,  il  avoit  laiffé  là  le 
navire ,  dont  l'équipage  ,  qui  ne  connoilToit  point  ces  parages , 
n'avoit  pu  éviter  les  écueils  multipliés  qui  bordent  la  côte,  & 
le  navire  étoit  péri.  Les  Juges-Baillis  ,  informés  de  cet  accident 
&  de  fa  caufe  ,  rendirent  une  Sentence  qui  commandoit  aux 
bateliers-pilotes  d'aller,  à  l'ordinaire ,  au  devant  des  vaiffeaux, 
avec  défenfe  de  faire  le  prix  pour  leur  pilotage ,  à  peine  de  pri- 
vation de  leur  falaire  ,  de  reftitution  de  ce  qu'ils  auroient  touché , 
&  de  trente  livres  d'amende  appHcables  aux  réparations  & 
entretien  du  port.  Les  mêmes  Juges  &  la  Communauté  de  ville 
firent  différents  règlements,  en  1670,  concernant  la  recette  des 
deniers  du  BaiUiage  &:  la  pohce  du  port;  règlements  qui  furent 
approuvés  par  Arrêt  du  Confeil  du  14  Mars  1702.  En  1723  , 
la  charge  de  Leileur  &  Délerteur  fut  réunie  au  Bailliage  .  par 
contrat  pafTé  avec  le  pofTeffeur  de  cette  charge.  Lorl'que  les 
liabitants  de  Saint-Malo  fe  fournirent  au  Roi  Henri  IV  ,  ce  Mo- 
narque donna  un  Edit  en  leur  faveur  :  il  leur  accorda  d'abord 
une  amniftie  générale  pour  le  paffé  ,  renouvella  leurs  anciens  pri- 
vilèges ,  les  exempta  des  tailles  &  importions  pendant  fix  ans, 
&  leur  permit  de  lever  les  oftrois  comme  par  le  paffé.  La  li- 
berté du  commerce  leur  fut  accordée  généralement  dans  tous 
les  pays ,  avec  celle  de  fondre  le  canon  néceffaire  pour  la  fu- 
reté de  leur  navigation  :  ceux  de  leurs  biens  qui  avoient  été 
confifqués  furent  rcflitués  ;  &:  le  Monarque  ,  voulant  de  plus  en 
plus  les  attacher  à  fon  fcrvice  ,  érigea  un  Conf'ulat  dans  leur 
ville.  Mais  le  plus  précieux  ^  le  plus  honorable  de  ces  privi- 


jo8  S  A  I 

leges ,  eft  celui  de  garder  leur  propre  ville  ;  privilège ,  en  fa- 
veur duquel  ils  furent  exempts  du  ban  &  de  l'arriere-ban , 
mais  ce  privilège  a  eu  le  fort  de  toutes  les  inftitutions  humaines. 
Bon  en  lui-même ,  &  accordé  comme  une  faveur  méritée ,  il 
eft  devenu  une  fource  d'abus ,  qui ,  peut  -  être  ^  fe  multiplieront 
au  point  que  le  Gouvernement  fe  verra  dans  la  néceinté  de  lé 
révoquer.  Plufieurs  des  habitants  de  cette  ville  voient  le  mal ,  s'en 
plaignent, &  défirent  le  remède.  Cependant,  pour  me  garantir 
dufoupçon  de  malveillance,  je  dois  déclarer  ici  que  je  n'ai  point  été 
moi-même  témoin  des  défordres  que  je  rapporte  :  je  parle  d'après 
quelques  particuliers  dignes  de  foi ,  &  d'après  les  notes  qui  m'ont  été 
communiquées  par  des  témoins  oculaires.  M.  Befné  de  la  Hauteville, 
Avocat  à  Saint-Brieuc  &  ci-devant  à  Saint-Malo  ,  m'a  particulière- 
ment fait  connoître  ces  abus,  qui  fe  trouvent  aufîi  détaillés  fort  au 
long  dans  un  Mémoire  fait  pour  être  préfenté  au  Mmiftre  ;  mais  ce 
ne  fera  qu'avec  la  plus  grande  circonfpeftion  que  je  me  fervirai 
de  cette  dernière  pièce ,  dont  l'auteur  ne  paroît  pas  exempt  de 
prévention  :  je  m'en  tiendrai  à  des  faits  connus. 

Dans  le  temps  de  la  defcente  des  Anglais  à  Saint-Malo,  en 
1758,  un  nombre  confidérable  des  plus  riches  fit  tranfporter 
fes  effets  en  lieu  de  fureté ,  &  quelques-uns  même  prirent  la 
fuite  :  ils  fe  montrèrent  à  la  fois  peu  zélés ,  mauvais  citoyens , 
Se  peu  dignes  de  participer  au  privilège.  Cette  inculpation  ne  tombe 
pas ,  fans  doute ,  fur  le  général  des  habitants  j  mais  un  exemple , 
fi  dangereux  par  les  fuites  qu'il  peut  avoir,  devoir  être  puni. 
Quelqu'un  ,  qui  ne  veut  pas  défendre  fa  patrie,  n'efl:  pas  digne 
de  jouir  des  avantages  qu'il  trouve  dans  fon  fein  ;  &  celui 
qui  met  (es  biens  hors  d'une  ville  menacée  ,  ne  peut  prendre 
beaucoup  d'intérêt  à  fa  confervation  ,  dont  il  paroît  défefpérer. 
La  ville  de  Saint-Malo  efi:  compofée  de  citoyens ,  qu'on  peut 
ranger  en  trois  clalTes  :  les  riches ,  les  artifans ,  &  les  pauvres. 
Les  uns  &  les  autres  participent  au  privilège  ,  &  les 
derniers  feuls  en  portent  tout  le  poids  (  a  ).  Quoique ,  aux  termes 


(  <z  )  Rien  de  plus  cruel  que  ces  exemp- 
tion;  dans  toutes  nos  villes.  C'eft  toujours 
le  peuole  qui  efl  foulé.  Prefque  tous  les 
riches  trouvent  le  moyen  de  fe  mettre  au 
deffus  de  la  loi.  C'efl  un  abus  qui  fera  ré- 
formé tôt  ou  tard.  Qui  pourroit ,  par  exem- 
ple ,  approuver  l'ufage  que  l'on  fuit  pour 
le  logement  des  gens  de  guerre?  Un  Ré- 
giment arrive  dans  une  ville ,  où  feront 
logés  Cis  braves  foldats,  qui  nous  défen- 


dent ,  qui  fouvent ,  au  milieu  de  l'hiver  , 
font  des  routes  longues  &  pénibles  ,  par 
des  chemins  fouvent  impraticables  &  le 
mauvais  temps  :  harafles ,  excédés  de  fa- 
tigue ,  où  iront-ils  fe  repofer  ?  chez  le 
riche ,  auprès  d'un  bon  feu  ,  ou  dans  un 
bon  lit  ?  Non  :  ce  fera  chez  un  malheureiTX 
père  de  famille  ,  qui  fouvent  n'a  pas  de 
lit  pour  coucher  les  enfants,  ni  de  pain 
à  leur  donner. 


s  A  I  509 

des  Edits ,  Déclarations ,  &  Arrêts  de  la  Cour ,  tous  les  habitants 
de  la  ville ,  fans  exception  ,  font  fujets  à  la  garde ,  les  Méde- 
cins ,  les  Procureurs  ,  les  Chirurgiens ,  les  Valets  de  ville  même 
s'en  exemptent ,  fous  divers  prétextes  ,  malgré  la  conftitution 
politique  de  Saint  -  Malo ,  qui ,  bien  différente  de  celle  des  au- 
tres villes ,  ne  peut  permettre  ces  fortes  d'exemptions  ;  &  c'efl 
pofîtivement  l'exaftitude  de  M.  de  Coëtquen  ,  le  dernier  Gou- 
verneur de  ce  nom  ,  à  faire  obferver  les  Edits ,  qui  lui  atttira 
la  haine  des  Malouins.  Ce  Seigneur,  avec  tout  fon  zèle  &  fa 
bonne  volonté  ,  ne  put  réufîir  à  réformer  l'abus. 

C'eft  donc  le  pauvre  qui  fournit  à  toute  la  dépenfe  :  il  donne  tous 
les  quinze  jours  une  fomme  de  douze  fols  ,  ce  qui  fait  quinze  livres 
par  an  ;  &  l'on  a  vu  des  malheureux  pères  de  famille  ,  qui  ne  pou- 
voient  payer  la  taxe  impofée  ,  dépouillés  de  leurs  meubles , 
tandis  que  le  voluptueux  opulent  jouiffoit  tranquillement  de  fa 
fortune  fans  contribuer.  Voilà  un  abus  criant,  qui  faifoit  dire  à 
M.  Lorin ,  Sénéchal  a6tuel  de  Saint  -  Malo ,  dans  un  Mémoire 
imprimé  :  Le  privilège  de  nous  garder  nous-mêmes ,  ejl  un  privilège 
dans  un  fens ,  &  une   charge  dans  l'autre. 

Un  autre  abus  ,  c'ell  que  la  garde  de  la  ville  efl  confiée  à 
une  poignée  de  malheureux,  au  nombre  de  cinquante  à  foixante, 
que  les  Officiers  municipaux  ont  trouvé  le  fecret  de  s'attacher: 
ils  montent  exaftement  la  garde  aux  frais  des  habitants ,  qui 
paient  jufqu'à  leurs  habits  ,  depuis  le  premier  jour  de  l'an  juf- 
qu'au  dernier  inclufivement.  Leur  fit  eft  au  corps-de-garde  ,  & 
il  n'y  en  a  pas  un  qui  n'y  ait  fon  matelas.  Fatigués  de  cet  em- 
ploi ,  on  les  a  trouvés  fouvent  endormis  dans  leurs  guérites.  On 
doit  fentir  combien  cette  négligence  eil:  dangereufe  j  en  voici 
une  preuve.  En  1776,  le  feu  prit  à  la  maifon  de  M.  de  Cha- 
teaubriand ,  Seigneur  de  Combourg  :  cet  hôtel  eft  fitué  vis-à-vis 
le  corps-de-garde  de  Saint-Vincent ,  où  il  y  a  toujours  une  fen- 
tinelle  jour  &  nuit  ;  mais  elle  dormoit ,  &  la  maifon  alloit  de- 
venir la  proie  du  feu  ,  qui  commençoit  à  fe  communiquer  aux 
édifices  voifins ,  &  menaçoit  quelques  greniers  à  foin  ,  lorlque  l'in- 
cendie fut  découvert ,  non  par  le  foidat  qui  ne  put  être  éveillé 
par  l'aftion  du  feu ,  quoique  très- vive,  mais  par  les  cochers  du 
carrofie  pubUc  ,  qui  partoit  cette  nuit  -  là  de  Saint-Malo  pour 
Rennes.  Ils  coururent  au  corps -de-garde  ,  tout  y  dormoit;  il 
fallut  crier  au  feu  pour  réveiller  ces  gardiens  inutiles ,  &  l'on 
ne  put  y  parvenir  qu'à  force  de  cris.  11  fallut  enfuite  aller  cher- 


310  S  Al 

cher  le  Tambour,  &  le  fecours  ne  vint,  pour  ainfi  dire,  que 
lorfquil  n'en  étoit  plus  befoin. 

Si  les  abus  font  dangereux  en  temps  de  paix ,  comment  doit- 
on  les  envifager  en  temps  de  guerre  ,  fur-tout  dans  une  ville 
dont  la  confervation  eft  importante  ?  Il  eft  à  croire  que  les 
Officiers  municipaux  réfléchiront  fur  leurs  vrais  intérêts ,  &  qu'ils 
ne  s'expoferont  pas  à  perdre  un  privilège  qui  leur  fait  tant 
d'honneur.  En  copiant  ici  les  reproches  qu'on  leur  fait ,  je 
ne  me  rendrai  point  garant  des  motifs  fur  lefquels  ils  font 
fondés. 

Au  mois  d'Août  1643  ,  Louis  XIV  confirma  les  Malouins 
dans  la  jouiffance  de  tous  leurs  privilèges.  Arrêt  du  Confeil, 
du  20  Août  1751,  qui  règle  les  affembléts  de  Ville  de  Sainte 
Malo  ,  &  maintient  les  Officiers  municipaux  dans  la  jouiiTance 
de  tous  leurs  droits ,  privilèges  ,  &  prérogatives.  Autre  Arrêt , 
du  13  Juillet  1756,  confirmatif  de  la  conceffion  des  droits  pa- 
trimoniaux accordés  à  la  ville  de  Saint  -  Malo.  Cette  ville  de- 
manda la  franchife  de  fon  port ,  mais  toutes  les  autres  villes 
commerçantes  s'y  oppoferent ,  &  firent  échouer  le  projet  des 
Malouins.  En  1772  ,  M.  Magon  du  Bos  voulut  établir  un  bac  ^ 
pour  les  voitures  ,  au  paffage  de  Jouvante  :  il  eut  des  ennemis 
qui  traverferent  ce  projet,  qui  fut  enfin  approuvé.  M.  le  Duc 
de  Fitz-James  décida,  en  1773  •>  ^^'^^  auroit  lieu-,  mais  la  mort 
de  M.  Magon  du  Bos ,  &  l'état  aftuel  de  fes  affaires ,  l'ont  laiffé 
fans  exécution. 

La  ville  de  Saint-Malo  a  produit  des  hommes  célèbres  ,  dont 
le  nom  mérite  d'être  confervé  &  tranfmis  à  la  poftérité.  Le  plus 
ancien  que  nous  connoiffions ,  eft  Jacques  Cartier  ,  célèbre  Na- 
vigateur,  qui,  en  1554  ,  découvrit  le  Canada  ,  &  donna  une 
defcription  exafte  des  ifles ,  des  côtes ,  des  détroits ,  &  des  terres  5 
qu'il  avoit  vus. 

M.  de  Bauchêne-Bouin  a  découvert  le  paffage  du  Cap-Hom, 
pour  pénétrer  dans  la  mer  du  Sud. 

De  tous  les  hommes  célèbres  qui  ont  pris  naiffance  à  Saint- 
Malo  ,  aucun  ne  lui  a  fait  autant  d'honneur  que  l'illuftre  Dugué* 
Trouin  ,  ce  Héros  fi  bien  peint  par  M.  Thomas.  Le  difcours 
de  cet  Académicien  &  les  mémoires  de  ce  grand  homme  me 
difpenfent  d'entrer  dans  le  détail  de  fes  avions  ^  mais  fi  l'ad- 
miration, qui  excite  lefouvenir  d'un  homme  vertueux  ,  d'un  guer- 
îier  courageux ,  humain  ,  &  bon  patriote  ,  n'eft  pas  inutile  ,  ne. 


s  Al  j 1 1 

devfoît-on  pas  faire  en  forte  de  ne  pas  laifTer  éteindre  ce  fen- 
timent  dans  les  cœurs.  Deux  Officiers  de  cette  province ,  très- 
diftingués  dans  la  république  des  lettres  ,  ont  propofé ,  il  y  a 
quelques  années  ,  d'élever  un  monument  aux  Héros  de  la  ba- 
taille des  Trente.  Ce  projet  devroit  être  adopté  pour  tous  les 
hommes  qui  ont  fervi  l'humanité  &  leur  patrie  ;  &  je  m'étonne 
que  les  habitants  de  Saint-Malo  n'aient  pas  confacré  une  llatue 
au  plus  célèbre  de  leurs  concitoyens  :  cet  hommage  pubUc  ho- 
noreroit  également  la  ville  &  le  Héros.  «  En  palîant  à  Lam- 
»  balle ,  dit  M.  le  Vicomte  de  Touftain ,  nous  aurions  été  bien 
»  plus  édifiés  des  pèlerinages  qui  s'y  font  ,  fi  nous  avions  eu  la 
»  fatisfa6lion  d'y  appercevoir  la  fi:atue  du  brave  la  Nouë-Bras- 
»  de-fer ,  tué  au  pied  de  fes  murailles.  »  Ce  feroit ,  d'ailleurs , 
un  fujet  d'émulation  pour  les  habitants  de  Saint  -  Malo.  Quel 
homme  pourroit  ,  fans  enthoufiafme  ,  fans  concevoir  un  noble 
defir  de  l'imiter ,  contempler  l'image  de  ce  guerrier  intrépide  1 
L'hilloire  d'Alexandre  fit  Céfar  ;  la  ilatue  de  RicheHeu  remplit 
d'enthoufiafme  le  Légiilateur  de  la  Rufiie  :  &  pourquoi  celle 
d'un  Héros  Malouin  ne  feroit  -  elle  pas  impreffion  fur  fes  com- 
patriotes } 

Dans  la  guerre  de  1 744  ,  un  de  ceux  qui  fe  diflinguerent 
le  plus  fut  Matthieu  Loifon  de  la  Rondiniere  ,  Capitaine  de  na- 
vires ;  il  étoit  grand  manœuvrier  ,  intrépide  ,  hardi ,  &  entrepre- 
nant. Lors  de  la  defcente  des  Anglais  à  Cancalle  ,  il  projetta 
d'aller  brûler  leurs  navires ,  lors  échoués  ;  projet  qu'on  ne  lui 
permit  pas  d'exécuter.  L'unique  récompenfe  qu'il  obtint  fut  l'é- 
pée  du  Roi. 

Pierre  Guyomark ,  fils  d'un  Marchand  de  draps ,  mérita  aufli 
par  fes  fervices ,  &  obtint  la  même  faveur. 

Ecuyer ,  Yves-Marie  Roche,  né  à  Saint-Malo,  ancien  Capi- 
taine de  la  Compagnie  des  hides ,  a  aufli  droit  au  fouvenir  de 
fa  patrie  ,  dont  il  a  bien  mérité,  hifatigable  dans  le  travail  , 
intrépide  dans  le  combat ,  hardi  dans  les  entreprifes ,  courageux 
&  actif  dans  l'exécution,  il  fauva  ,  dans  la  dernière  guerre,  rifie- 
de-France  de  la  famine.  Avec  un  équipage  qu'il  avoir  choifi , 
il  fit  plufieurs  prifes  fur  les  ennemis  de  l'Ltat ,  dans  les  parages 
de  rinde.  Charge  de  convoyer  des  bâtiments  Français,  qui  fe 
rcndoient  avec  des  vivres  à  l'Ifle-de-France  ,  il  fçut  éviter  une 
efcadre  Anglaife  qui  étoit  à  croifcr  pour  les  attaquer,  &  arriva 
hcureufement  à  fa  dclbnation.  Le  temps  preflbit ,  il  n'y  avoir 
plus  que  pour  trois  jours   de  vivres   dans  Me.  Cet  OiHcier  eut 


}ii  S  A  I 

la  Croix  de  Saint-Louis ,  à  la  demande  du  Gouverneur  Se  des 
Commandants  de  Tille  :  il  en  étoit  digne ,  &  il  la  reçut  avec 
modeftie.  On  voulut  lui  faire  une  penlîon  ,  mais  un  ennemi  fe- 
cret  ,  jaloux  d'une  fortune  due  à  fes  travaux  ,  expofa  qu'il 
étoit  affez  riche.  M.  Roche  méprifa  ce  trait  :  il  étoit  moins 
jaloux  de  la  penfîon ,  que  fatisfait  d'avoir  mérité  un  bienfait  de 
fon  Roi. 

Ceux  qui  ont  lu  le  voyage  autour  du  Monde  ,  fait ,  il  y  a  quel- 
ques années ,  par  M.  Bougainville ,  ont  dû  voir  que  le  Sieur 
Chenard  de  la  Giraudais  étoit  un  Officier  digne  de  concourir 
à  fon  exécution:  il  a  donné  des  preuves  non  équivoques  de  fori 
expérience  &  de  fes  talents. 

Jacques-Pierre  Méfié  de  Grand-Clos,  Négociant  &  Armateur, 
a  aufli  obtenu  des  lettres  de  nobleffe  -,  digne  récompenfe  de 
fes  travaux  &  de  fon  zèle. 

Cette  Hfte  eft  peu  nombreufe  ,  fans  doute ,  mais  ce  n'eft  pas 
ma  faute  ;  j'ai  demandé  ,  inutilement ,  des  renfeignements  fur 
cette  ville  ,  que  l'on  m'a  conilamment  refufés.  Le  lefteur  fup- 
pléera  à  ce  qu'il  y  a  de  trop  peu  ,  en  réfléchiffant  qu'il  n'eft 
pas  poflible  que  dans  une  ville ,  qui ,  depuis  trois  fiecles ,  a  fait 
des  entreprifes  auffi  honorables  qu'utiles ,  il  ne  fe  trouve  pas  un 
plus  grand  nombre  de  marins  dignes  d'éloges.  S'il  étoit  permis 
de  louer  les  vivants  ,  je  pourrois  citer  MM.  de  la  Ville-au-Brun, 
Landais ,  &  du  Clos-Guyot  ;  &  je  n'oublierois  pas  MM.  Sébire 
&  Bouvet,  Officiers  fur  la  frégate  la  Belle-Poule.  La  pollérité, 
qui   apprécie  le  mérite  des  hommes ,  leur  rendra  juftice. 

Il  n'eft  pas  furprenant  que  la  ville  de  Saint -Malo  n'ait  pas 
produit  beaucoup  de  gens  de  lettres.  Le  defir  d'acquérir  des 
richeffes ,  &  de  parvenir  aux  honneurs  par  le  commerce  &  la 
navigation ,  eft  plus  fort  que  celui  de  courir  après  la  gloire  par 
des  travaux  pénibles  &  la  plus  longue  étude.  Cependant  on 
ne  peut  enlever  à  Saitit-Malo  l'avantage  d'avoir  donné  naiffance 
à  quelques  hommes ,  qui  fe  font  fait  une  réputation  dans  la  répu- 
blique des  lettres,  dans   des  genres  différents. 

Le  Père  Daniel ,  Carme  ,  neveu  de  Guillaume  le  Gouverneur  , 
Evêque  de  Saint-Malo  ,  Théologien  profond ,  fut  auteur  de  plu- 
fieurs  fermons  ,  panégyriques  ,  &  d'un  livre  intitulé  ,  le  Théologien 
Français  ,  fur  le   Myjîere  de  la  Trinité. 

N...  Offi-ai  de  la  Metne ,  Médecin  ;  homme  fîngulier ,  qui  a 
donné  plufieurs  ouvrages  que  le  Public  a  lus  avec  avidité  ,  mais 
que    les  perfonnes  fenfées  ont  jugé  dignes   de  l'oubli  :  les  plus 

connus. 


s  A  I  3TJ 

connus ,  font  ;  l'Homme  plante ,  l'Homme  machine ,  &  Machiavel. 
On  ne  peut  refufer  à  ce  Médecin  beaucoup  de  génie ,  un  llyle 
net  &  féduiiant  -,  mais  il  fe  laiffa  égarer  par  fon  imagination  déré- 
glée :  il  adopta  des  fyftêmes  que  la  raifon  &  la  religion  prof- 
crivent  mutuellement.  Ce  qu'il  y  a  d'étonnant  dans  ce  Malouin , 
c'eft  qu'il  haïffoit  les  Médecins ,  pour  le  moms  autant  que 
Molière  :  &  fi  ce  Poète ,  &  avant  lui  l'expérience  ,  nous  ap- 
prennent que  le  genre  humain  ell:  la  vi6lm"ie  des  Médecins ,  on 
peut  dire  que  la  Metrie  fe  rendit  viftime  de  fon  art.  Il  fe  fit 
îaigner  fans  art  ,  &  contre  les  règles  de  l'art ,  après  une  indi- 
gelhon ,  &:  mourut  des  fuites  de  cette  opération  :  c'étoit  un 
homme  aimable ,  avide  de  plailîrs ,  &  d'un  caraftere  extrême- 
ment gai. 

Louis  Moreau  de  Maupertuis ,  Préfîdent  de  l'Académie  de 
Berlin  ,  attaqué  ou  plutôt  perfécuté  par  Voltaire  :  cet  Académi- 
cien fut  envoyé  par  le  Roi  Louis  XV  ,  en  1736,  dans  le  Nord, 
pour  déterminer  la  figure  de  la  terre.  Au  retour  de  ce  voyage  , 
ion  portrait  fut  orné ,  par  Voltaire ,  des  quatre  vers  fuivants  ; 

Ce  globe  mal  connu  ,  qu'il  ofa  mefurer  , 
Devient  un  monument  où  fa  gloire  fe  fonde  l 
Son  fort  eft  de  fixer  la  figure  du  Monde  , 
De  l'inftruire ,  &  de  l'éclairer. 

On  peut  ajouter  à  l'éloge  de  ce  Phyfîcien  ces  autres  vers: 

Revole ,  Maupertuis  ,  de  ces  déferts  glacés  , 
Où  les  rayons  du  jour  font   fix  mois  éclipfés  : 
Apôtre  de  Newton,  digne  appui  d'un  tel  maître. 
Né  pour  la  vérité ,  viens  la  faire  connoitre. 

Si  Maupertuis  dut  s'indigner  contre  Voltaire ,  s'il  s'irrita  con- 
tre les  foupçons  de  plagiaire  ,  il  eut  le  mérite  &  la  générofité 
de  lui  pardonner  j  &  la  poflérité  jugera  ,  comme  Madame  la 
Marquife  du  Châtelet ,  que  cet  Aitronome  a  des  droits  à  l'ef- 
time  &  à  l'admiration  des  gens  de  goût.  Ses  ouvrages  forment 
quatre  volumes.  Au  refte  ,  li  ce  Phylicien  ne  put  fe  venger  des 
farcafmes  du  Poëte  ,  il  lui  témoigna  ,  par  un  billet  doux  ,  que 
le  courage  ne  lui  manquoit  pas.  Voici  ce  qu'il  lui  écrivit  : 

«  Je  vous  déclare  que  ma  faute  ell  afîéz  bonne  pour  vous 
y  aller  trouver  par-tout  où  vous  ferez,  pour  tirer  de  vous  la 
Tome   IF,  Ri 


314  SAI 

»  vencreance  la  plus  complette.  Rendez  grâce  au  refpeft  &  à 
»  robéiflance  qui  ont  jufqu'ici  retenu  mon  bras.  Signé ,  Mau- 
»  pertuis.  »  Voltaire  ne  répondit  rien.  Il  fe  renferma  dans  le  ref- 
peft  qu'il  portoit  à  l'Edit  des  duels  :  il  fe  tira  d'affaire  par  de 
mauvaifes  plaifanteries ,  en  publiant  l'art  de  bien  argumenter  en 
Philofophie  ,  réduit  en  pratique  par  un  vieux  Capitame  de  Ca- 
valerie ,  travefti  en  Philofophe  ,  réfidant  à  Fernei.  Le  Roi  de 
PrufTe  5  qui  avoit  attiré  M.  de  Maupertuis  auprès  de  lui ,  l'ho- 
nora toujours  de  fon  amitié.  Ce  fçavant ,  qui  étoit  pensionnaire 
de  l'Académie  des  Sciences  &  Membre  de  l'Académie  Françaife , 
mourut  à  Balle  ,  en  Suiffe ,  le  27  Juillet  1759,  ^^^^  ^^^  ^^^^j" 
ments  d'un  fage  ,  qui  avoit  perfeftionné  la  Philofophie  en  mé- 
ditant la  rehgion. 

La  France  a  perdu  un  autre  homme  illuftre  ,  à  qui  Saint- 
Malo  fe  glorifie  d'avoir  donné  naiffance  ,  &  que  cette  ville 
revendique  au  nombre  de  fes  citoyens  :  c'eil  Jacques-Claude- 
Marie-Vincent  de  Gournai ,  Confeiller  honoraire  au  Grand  Con- 
feil  &  Intendant  du  Commerce.  Il  s'ell  uniquement  occupé 
toute  fa  vie  à  étudier  &  perfeftionner  cette  partie  précieufe 
de  la  profpérité  publique  -,  il  s'y  appliqua  dès  fa  jeunefle ,  ôc 
ne  fe  borna  pas  à  connoître  fes  différentes  branches  ,  &  les 
moyens  ordinaires  de  l'étendre  ;  il  approfondit ,  en  Philofophe 
&  en  homme  d'Etat,  toutes  les  parties  de  l'économie  politique 
&L  tous  les  rapports  de  cette  fcience  compHquée  &  fi  peu  con- 
nue. Il  devint  Intendant  du  Commerce  en  175 1  :  alors  ,  il  tourna 
toutes  fes  vues  du  côté  de  la  perfeélion  des  Manufaâiures  ,  & 
s'appHqua  particuhérement  à  ôter,  autant  qu'il  dépendoit  de  lui, 
ce  qui  pouvoit  gêner  toutes  efpeces  de  commerce.  Son  zèle,  à 
cet  égard ,  fe  manifefl:e  dans  les  écrits  qui  font  refi:és  de  lui. 
Ce  vrai  patriote  ,  dans  la  ftrifte  fignification  de  ce  terme , 
mourut,  à  Paris,  le  27  Juin  1759,  âgé  de  47  ans.  On  peut 
voir  dans  le  Mercure  de  France,  du  mois  d'Août  1759,  fon 
éloge  ;  monument  qu'un  homme  de  lectres  a  élevé  à  la  mémoire 
d'un  bon  citoyen  ,  &  qui  nous  difpenfe  d'entrer  dans  le  détail 
de  fa  vie  :  nous  nous  contentons  de  jetter  quelques  fleurs  fur  le 
tombeau   d'un  homme  vertueux  que  la  patrie  regrette. 

M.  Duporc  du  Tertre,  auteur  de  la  France  Littéraire,  d'un 
Abrégé  de  l'Hifioire  d'Angleterre ,  &  de  quelques  autres  Ou- 
vrages, efl:  originaire  de  Saint-Servan  :  cette  maifon  portoit  au- 
trefois pour  armes ,  d'or  au  fanglier  de  fable  en  furie  ;  elle  tire 
fa  fource  de  la  maifon  des  Barons  de  Vefins    en   Anjou  ,  qui 


s  A  I  315 

à  fourni  un  Evêque  de  Saint-Brieuc.  Cette  famille  porte  préien- 
tementjde  gueules  au  croiflant  monté  d'hermines,  rebordé   d'or. 

M.  TAbbé  Trublet,  Membre  de  l'Académie  de  Berlin,  au- 
teur des  Effais  de  Morale  &  de  Littérature  ,  eft  auffi  originaire 
de  Saint-Malo.  Le  rang  diilingué  qu'il  tenoit  parmi  les  Littéra- 
teurs &  la  réputation  méritée  dont  il  jouit ,  font  fon  éloge. 

M.  Turpin  _,  né  à  Saint  -  Malo  ,  &c  gratifié  des  lettres  de 
citoyen  Malouin  par  fes  compatriotes ,  fait  honneur  à  fa  patrie 
par  fes  talents. 

Les  Malouins  font  robuftes  ,  vigoureux  ,  braves  ,  &  intrépides  : 
ils  ne  redoutent  ni  le  fer  de  l'ennemi,  ni  les  périls  de  la  mer; 
mais  ils  ont  des  défauts  qui  tiennent  à  leur  manière  d'être.  Ils 
font ,  en  général,  durs  ,  grolfiers  ,  opiniâtres.  Se  fuperftitieux.  L'ha- 
bitude de  la  navigation,  la  proximité  de  la  mer,  leur  infpirent 
cette  rudefle  qui  eft  affez  ordinaire  aux  gens  de  mer  ,  mais 
qui  ne  prouva  jamais  une  ame  méchante  &  vicieufe.  L'Etat  qui 
profite  de  leur  aftivité  &  de  leur  induftrie  ,  la  Patrie  qu'ils  fer- 
vent &  qu'ils  défendent ,  ne  font  pas  attention  à  ces  dehors  ,  mais 
à  l'utihté  que  l'on  retire  de  leur  courage.  On  ne  peut  cepen- 
dant s'empêcher  de  les  engager  à  étudier  les  Mathématiques. 
Tout  homme  qui  veut  aller  loin  dans  fon  état ,  doit  en  connoîrre 
les  principes  fondamentaux  j  &  fi  les  habitants  de  Saint  -  Malo 
négligent  l'Hydrographie  &  les  autres  fciences  néceffaires  aux 
navigateurs  ,  la  patrie  de  Dugué-Trouin  fournira  peut-être  en- 
core long-temps  de  vigoureux  matelots ,  mais  non  pas  d'excel- 
lents marins  ,  d'habiles  Officiers  :  le  courage  feul  ne  fuffit  pas  pour 
vaincre  ,  &  le  Héros  qui  fit  trembler  l'Angleterre  &  la  Hol- 
lande n'eût  été  qu'un  homme  ordinaire  ,  s'il  n'eût  eu  des  con- 
noiffances  égales  à  fon  courage.  L'habitude  du  commerce  a  in- 
flué fur  le  cara6lere  des  Malouins ,  comme  fur  celui  de  toutes 
les  villes  commerçantes.  Dans  le  négoce,  comme  dans  la  guerre, 
on  fe  fert  de  rufe  malgré  ioi  -,  on.  trompe ,  parce  que  Ibuvent 
on  a  été  trompé  ,  ou  parce  qu'on  craint  de  l'être.  Quant  au  fana- 
tifme  qu'on  reproche  aux  Malouins ,  voici  la  preuve  qu'on  en 
fournit.  En  1776,  un  Prêtre,  dont  la  conduite  étoit  exemplaire, 
mais  dont  les  fentimcnts  n'étoient  pas  conformes  à  la  Bulle 
l/nigenitus  y  mourut  :  il  avoit  été  adminiftré  en  vertu  d'un  Arrêt 
du  Parlement.  Le  peuple  alloit  fe  livrer  aux  excès  du  fanadfme, 
enlever  le  corps  &  le  jctter  à  la  voirie  ^  lorfque ,  pour  éviter 
le  fcandale ,  on  mit  des  gardes  à  la  porte  du  défunt  j  il  fut  en- 
terré la  bayonnettc  au  bout  du  fuiil. 


3i6  S  A  I 

Ces  excès  font  fans  doute  condamnables  ;  maïs  que  conclure 
de  là  ,  fînon  que  les  Malouins  ont  confervé ,  peut-être ,  la  plupart 
des  vices  de  nos  pères ,  &  qu'ils  n'ont  pas  pris  les  nôtres  ?  Nous 
les  trouvons  grofîiers  ,  parce  que  nous  fommes  voluptueux  & 
efféminés  j  durs ,  parce  que  nous  fommes  énervés  &  d'une  dé- 
licatelfe  excefïive  :  mais  trois  (iecles  de  gloire ,  mais  mille  vic- 
toires remportées ,  mais  des  fervices  éclatants  rendus  à  l'Etat 
qu'ils  ont  enrichi  &  protégé  ;  tout  cela  racheté  bien  des  défauts  , 
&  doit  peut-être  placer  les  Malouins  au  deffus  des  habitants 
de  toutes  les  autres  villes  Bretonnes.  Aujourd'hui ,  n'eil-ce  pas 
encore  d'eux  que  notre  commerce  attend  fon  rétabliffement  ? 
Déjà  ces  terribles  marins  commencent  à  paroître ,  &  les  cor- 
faires  Anglais  commencent  à  fuir.  Auffi-tôt  qu'ils  ont  pris  les 
armes ,  nos  fiers  ennemis  ont  paru  nous  craindre. 

Continuez,  braves  citoyens,  défendez,  vengez  votre  patrie, 
&:  comptez  fur  la  reconnoilfance  publique. 

Catalogue  des  Evêques  de  Saim-Malo, 

Cette  ville ,  difent  quelques  hifloriens ,  habitée  par  les  Dia- 
blintes ,  eut  des  Evêques  dès  les  premiers  fiecles  de  l'EgUfe  , 
&  ces  Evêques  s'appelloient  Diahlinûens.  Nous  n'affurerons  pomt 
la  vérité  d'un  fait  que  l'hiftoire  n'a  pomt  confirmé.  Le  premier , 
dont  elle  nous  ait  confervé  le  fouvenir ,  ell:  Saint  Malo  ,  né  dans 
la  Grande-Bretagne.  Ce  Saint ,  d'une  famille  noble ,  fe  confacra 
au  Seigneur  dès  fa  plus  tendre  jeuneffe  ,  &  vécut  dans  la  fo- 
litude.  La  réputation  qu'il  s'acquit  par  fes  vertus ,  engagea  les 
habitants  du  pays  où  il  vivoit  à  le  choifir  pour  leur  Evêque  : 
ils  l'enlevèrent ,  &  le  placèrent  malgré  lui  fur  le  Siège  épif- 
copal.  Malo ,  qui  n'avoit  accepté  cette  place  qu'avec  répugnance , 
réfolut  de  la  quitter  au  plus  vite.  En  conféquence  il  s'embarqua  , 
pafia  en  Bretagne ,  &  fe  mit  fous  la  conduite  du  faint  Moine 
Aaron ,  qui  avoir  bâti  un  Monaftere  dans  une  ifie  voifine  de  la 
ville  d'Aleth. 

La  Bretagne  étoit  alors  entièrement  foumife  au  Chriftianifme ,' 
&  peuplée  d'une  foule  innombrable  d'Hermites ,  qui  donnoient 
l'exemple  de  toutes  les  vertus.  Les  Fidèles  penferent  à  fe  choifir 
des  Evêques  pour  les  conduire  plus  fûrement  dans  la  voie  de 
la  rehgion.  Les  habitants  d'Aleth,  témoins  des  veitus  de  Saint 
Malo  ,  jetterent  les  yeux  fur  lui ,  &  le  conjurèrent  de  prendre 
le  foin  de  leur  falut.  Il  y  confentit ,  &  gouverna  fon  peuple 
avec  fageffe.  Il  fut  auffi  élu   Supérieur  du  Monaftere  de  Saint- 


s  A  I  J17 

Aaron,  après  la  mort  de  ce  dernier;  Se  les  Solitaires  fournis 
à  fes  ordres  lui  conferverent  toujours  un  attachement  inviola- 
ble. Les  habitants  d'Aleth ,  enchantés  de  vivre  fous  les  loix  du 
faint  Evêque ,  lui  accordèrent  la  Seigneurie  temporelle  &  fpi- 
rituelle  de  leur  ville.  Celui  des  fils  d'Hoël  le  Grand  qui  re- 
gnoit  dans  cette  partie  de  la  Bretagne ,  fut  jaloux  de  ces  con- 
cèiîions,  qui  tendoient  à  diminuer  fon  autorité.  Il  perfécuta 
Saint  Malo  ,  qui  prit  la  fuite  &  fe  retira  dans  une  folitude  de 
la  Saintonge.  Le  Prince  fe  repentit ,  dans  la  fuite ,  des  mauvais 
traitements  qu'il  avoit  fait  effuyer  à  Malo  :  il  le  rappella ,  con- 
firma toutes  les  donations  qui  lui  avoient  été  faites  précédem- 
ment ,  ajouta  de  nouveaux  domaines  à  ceux  qu'il  poflédoit  déjà  , 
&  le  combla  de  biens ,  lui  &  fon  Eglife.  Telle  efl ,  je  crois , 
l'origine  de  la  jurifdiftion  de  l'Evêque  &  du  Chapitre  de  Saint- 
Malo.  Ce  dernier ,  qui  avoit  goûté  le  repos  dans  fa  folitude  , 
ne  l'avoit  abandonnée  qu'avec  peine  :  dès  qu'il  eut  afTuré  la 
tranquillité  de  fon  troupeau  ,  il  le  quitta  ,  &  retourna  dans  la 
Saintonge  ,  où  il  mourut.  On  n'eft  pas  d'accord  fur  l'année  de 
fa  mort  ,  non  plus  que  fur  celle  de  fon  arrivée  en  Bretagne. 
Selon  les  uns  ,  il  aborda  dans  ce  pays  vers  540,  &  mourut  en 
565  i  félon  d'autres ,  il  vint  en  580  ,  &  mourut  en  612  ou  627, 
Nous  ne  prononcerons  point  entre  ces  différents  écrivains  ;  d'ail- 
leurs le  fait  eft  allez  indifférent ,  Se  chacun  peut  adopter ,  à 
fon  gré,  l'opinion  la  plus  vraifemblable.  Dans  le  feptieme  iiecle, 
on  bâtit ,  dans  l'ille  d'Aaron ,  une  EgUfe  en  l'honneur  de  Saint 
Malo.  Après  fa  mort ,  le  Siège  fut  occupé  par  différents  Eve- 
ques  ,  dont    l'hiffoire  ne    nous  a  confervé  que  les  noms. 

Saint  Gudwal  ou  Gurval.  Saint  Colaphm.  Saint  Ermagile. 
Saint  Enogat  ;  il  fut  auffi  Abbé  de  Saint-Méen.  Saint  Malmon  ou 
Maëlmon.  Saint  Godefroi.  Ocdinal  ou  Adinal.  Hamon.  Noëdius, 
Riatuval  ou    Ritual.    Tutamene.   Ravilius. 

Bili.  Pendant  fon  Epifcopat ,  les  Reliques  de  Saint  Malo  fu- 
rent apportées  par  un  jeune  homme  de  Saintonge  à  Alcth ,  Se 
dépofécs  dans  î'Eglife  élevée  à  l'honneur  de  Saint  Malo ,  dans 
l'ille  d'Aaron.  La  iete  de  cette  tranfl.ttion  eft  célébrée  le  fécond 
Dimanche   de  Juillet ,  dans   ce  diocefe. 

Mœnus.   Ebonus  ou    Ebodus.  Guibert  ou  Guibon. 

Cadocavanus  ou  Cadocanannis.  Bollandus  croit  que  c'eff  lui 
qui  foufcrivit  au  Concile  de  Rheims ,  en  682,  fous  le  nom  de 
Cadoenus  ;  mais  ce  fait  n'tff  pas  croyable  ,  fur-tout  fi  l'on  ad- 
met que  Saint  Malo  mourut  en  61 2  ou  627  ,  depuis  lequel  temps , 


Îi8  SAI 

jiifqu'à  6Si  ^  on  trouve  dix-fept  Evêques.  Il  faudroit  alors  fup- 
■pofer  ,  ce  qui  n'eft  guère  poiîible ,  qu'ils  n'euflent  occupé ,  les 
uns  pour  les  autres,  le  Siège  que  cinq  ans. 

Rivallon.  Judicaël.  Reginalde.  Menfenicus.  Benedi6lus  oti 
Benoît, 

Tels  font  les  Evêques  que  nous  ont  confervés  les  anciens 
Catalogues.  Taillandier  en  ajoute  encore  quelques  autres,  mais 
dont  l'exiitence  nous  a  paru  trop  incertaine  pour  les  pla- 
cer ici. 

Helocar  ou  Helogar ,  élu  en  814,  obtint  un  diplôme  de 
Louis  le  Débonnaire  ,  qui  le  conferve  dans  les  archives  de  la 
Cathédrale  de  Saint-Malo.  Ce  Prélat  étoit  Abbé  de  Saint-Méen.^ 
.comme  on   le  voit  par  les  titres  de  cette  Abbaye. 

Ermorus ,  élu  en  833  ,  la  première  année  de  l'empire  de  Lo- 
thaire  qui  venoit  d'arracher  la  couronne  à  fon  père ,  étoit  d'une 
naiffance  diftinguée  ,  comme  le  prouve  foft  nom  ,  qui ,  en  langue 
celtique,  fîgniiie   Prince  d'une  jamille   illujlre, 

Jarnwalt  ,  élu  en  836,    gouverna    fon    Eglife  jufqu'en    840. 

Mahen,  Maine  ou  Maën,  fon  fuccefTeur ,  fut  élu  en  841, 
la  même  année  que  'Tambitieux  Lothaire  combattit  contre  fes 
frères. 

Salacon ,  qui  occupa  enfuite  le  Siège ,  fut  dépbfé ,  comme 
{imoniaque  ,  par  les  Evêques  afTemblés  à  Redon.  Ce  Prélat  efî: 
appelle  &  reconnu  Evêque  de  Dol  5  & ,  fi  nous  le  mettons  au 
rang  des  Evêques  d^Aleth ,  ce  n'eft  que  d'après  quelques  hifto- 
riens,  qui  affurent  qu'il  gouvernoit  les  deux  Eglifes  avant  les 
changements   faits  par  le  Roi  Nominoé. 

Rethwalatre,  Rivolatre  ou  Rivoladre ,  fuccéda  à  Salacon» 
Sous  l'épifcopat  de  Rivoladre  ,  un  particulier  ,  dont  l'hiftoire 
n'afligne  point  la  condition ,  &  dont  le  nom  étoit  Vinhomare , 
tua  ,  dans  un  moment  de  fureur ,  trois  de  fes  enfants.  L'Evêque 
lui  impofa  une  pénitence  rigoureufe.  Le  criminel ,  touché  de 
repentir  ,  partit  pour  Rome  ,  &  le  Pape  adoucit  la  rigueur  de 
la  pénitence  :  il  l'obligea  feulement  de  fe  tenir  trois  ans  à  la 
porte  de  l'Eglife  pendant  la  MelTe  ,  de  refter  fept  ans  fans  com- 
munier ,  de  ne  point  manger  de  viande  le  refte  de  fa  vie ,  & 
de  fe  priver  de  vin  pendant  fept  ans,  fî  ce  n'ell:  aux*  jours  de 
Fêtes  &  Dimanches.  Il  lui  permit  de  demeurer  avec  fa  femme, 
à  moins  qu'il  ne  tombât  en  adultère  \  lui  ordonna  de  marcher 
nuds  pieds  pendant  trois  ans  :  on  lui  accorda  la  permi/Tion  de 
manger  du  fromage  ,    en    lui  ôtant  la    liberté  de  porter    les 


SA!  3 19 

armes  J    le    refte   de  fa    vie ,    û  ce   n  efl   contre  les   Payens, 

Ratuili  ou  Ratwilius ,   Evêque   d'Aleth,  vivoit  en  872. 

Bilius  ,  fon  fuccefleur ,  fut  élu  fur  la  fin  du  neuvième  fiecle. 

Salvator  vivoit  du  temps  d'Alain  Barbe -torte,  vers  950.  Il 
tranfporta  à  Paris  les  Reliques  de  Saint  Malo ,  pour  les  dérober 
aux  profanations  facrileges  des  Normands  ,  qui  ravageoient 
alors  la  Bretagne  :  ces  Reliques  furent  apportées ,  l'an  969 , 
à   Saint-Malo. 

Rethvalatre  II  du  nom  ,  vivoit  en  990. 

Raoul  occupoit  le  Siège  épifcopal  d'Aleth  en  ioc8,  comme 
il  eft  prouvé  par  une  ancienne  charte  de  la  fondation  de 
Saint-Méen. 

Hamon ,  fuccefTeur  de  Raoul ,  fe  trouve  dans  la  charte  de 
la  fondation  de  Saint-Georges   de  Rennes,  vers  l'an  1031. 

Martin  étoit  Evêque  d'Aleth  en  1054,  &  affilia  au  Concile 
de  Châlons  en  1056.  Après  fa  mort,  l'Eglife  d'Aleth  fut  divi- 
fée  en  deux  parties,  comme  l'a  obfervéle  Père  le  Large  dans 
fon  hiftoire  du  diocefe  de  Saint-Malo  ,  &  il  paroît  qu'on  éta- 
blit un  nouveau  Siège  à  Saint -Malo- de  -  Baignon  ,  qui  exifta 
pendant    foixante  ans  (a). 

Rainauld  ou  Renold,  Evêque  de  Saint-Malo  ,  mourut  vers 
1063. 

Daniel  ,  fon  fuccelTeur  ,  dont  perfonne ,  avant  Taillandier, 
n'avoit  parlé,  mourut  en   1085. 

Benoît,  quahfié  Evêque  d'Aleth,  dans  des  A6les  de  1092  Sc 
1099,  mourut  en  II  II.  Ce  Prélat  excommunia  Guégon ,  le 
Vicaire  du  Seigneur  de  Plouer ,  qui   avoir  forcé  &  pillé  l'Eglile 


^  j  )  On  ne  fçait ,  à  bien  dire  ,  ce  qu'on  doit 
penfer  de  cette  divifion  de  l'Evéché.  Dans 
un  Catalogue  manufcrit ,  compofé  par  un 
fçavant  célèbre ,  &  qui  avoit  fait  l'étude 
la  plus   longue  de    l'Hiftoire  Eccléfiaftique 


de  Bretaçn 


on  ne  trouve  aucune  men- 


tion de  ce  partage.  Il  donne  à  tous  les 
Prélats  le  nom  a  Evêque  d'Aleth ,  &  fait 
un  même  Evcque  de  Benoît  &  de  Judicaël. 
Voici  l.s  propres  termes  de  l'auteur  :  Ju- 
dicjël ,  fur/iommé  Bcnoit  ^  ou  Binoit  ,fur- 
noTZTz;  Judicaël ,  fut  élu  vers  l'an  108 j, 
La  différence  des  noms  de  ce  Prcl.it  ,  qui  , 
tantôt  c(l  appelle  Judicaël,  tantôt  Benoît,  a 
donné  lieu  à  l'erreur  d' Albert ,  qui  /ait  trois 
Evéqucs  d'un  feul.  On  voit  que  l'auteur 
n'a  pas  même  foupçonné  cetfe  divifion , 
dont  il  eft  parlé  dans  les  hillorigns  i  &  je 


ferois  tenté  de  fuivre  fon  fentlment.  En 
effet  ,  ne  pourroit-il  pas  fe  faire  que  ces 
Evêques  eufTent  pris  le  nom  d'Evéques  de 
Saint-Malo  ,  foit  par  dévotion  pour  le  pre- 
mier Evêque  du  diocefe,  ou  bien  plutôt, 
parce  qu'ils  faifoient  leur  demeure  dans  l'ifle 
de  Saint-Malo  ,  ou  à  Saint-Mcdo-de-Bai- 
gnon  ?  On  a  des  exemples  de  ces  qualifi- 
cations étrangères.  Dans  le  Concile  d'Agde, 
l'Evêque  de  Poitiers  prit  le  nom  d'Evéïjue 
du  Pallet,  parce  que  ce  Prélat  avoit  une 
maifon  de  plaifance  au  Pallet,  où  il  faifoit 
fa  réfidence.  Ses  p'-édécelfeurs  prenaient 
fouvent   le  titre  d'Evéques  de  /?«{ ,  parce 

au'ils  faifoient  aflez  fouvent  leur  léjour 
ans  ce  p-iys ,  qui  d^pondoit  de  leur  dio- 
cefe ;  &  les  hiltori;ns  ont  remarqué  que 
cet  ufagc  étoit  général. 


310  S  A  I 

d*Aleth.  Guégon ,  étant  tombé  malade  l'été  fulvant ,  demanda 
pardon  à  l'Evêque ,  fit  amende-honorable ,  &  rendit  à  l'Eglife 
un  morceau  de  terre,  appelle  le -pré  Brexel,  &,  par  corruption, 
le  pré  Mefel  ,  que  Robert ,  fils  de  Brexei  de  Ploiier ,  avoit  au- 
trefois donné  à  l'Eglife  d'Aleth.  Depuis  ce  temps ,  l'Evêque  & 
le  Chapitre  ont  abandonné  cette  partie  de  terre  au  Refteur  de 
Saint-Servan  ,  pour  lui  tenir  lieu  d'une  portion  congrue  de  trois 
cents  livres.  Celui-ci  a  arrenté  ce  terrein  à  pluiieurs  parti- 
culiers ,  qui  Y  ont  fait  bâtir  de  belles  miaifons  ;  &  ces  empla- 
cements donnent  aujourd'hui  au  Refteur  environ  huit  cents 
livres  de  rente. 

Judicaël ,  qualifié  tantôt  Evêque  d'Aleth ,  tantôt  Evêque 
de  Saint-Malo ,  mourut  en    1 1 1 2. 

Daniel  II ,  élu  en  11 1 2  ,  affilia  au  Concile  que  Baldric  de 
Dol  affembla  dans  l'Eglife  de  Saint-Samfon ,  l'an  1113,  & 
mourut  dans   le   courant  de  Mars  11 14. 

Rigual  ou  Riwal  ,  occupa  enfuite  le  Siège  d'Aleth.  L'hillo- 
rîen  des  Saints  de  Bretagne  lui  donne  pour  fucceffeur  un  Al- 
bert ,    qui  paroît  fuppofé. 

Donoald  ou  Donald,  de  l'Ordre  de  Saint-Benoît,  réunit, 
dit-on,  les  deux  Sièges  divifés  depuis  foixante  ans.  Il  fut  élu 
l'an  1 1 20 ,  affilia  aux  Conciles  de  Redon  &  de  Rheims  en 
1127  &  1132,  &  mourut  en  1140.  Benoît,  qu'Albert  lui 
donne  pour  fucceffeur,  elt  fuppofé. 

Jean  de  Châtillon ,  dit  de  la  Gnlle ,  monta  fur  le  Siège ,  Tan 
II 40.  Les  vertus  de  ce  Prélat,  &:  la  révolution  qui  fe  fit  fous 
fon  épifcopat,  exigent  que  je  le  faffe  connoître»  Il  naquit  en 
Bretagne,  l'an  1098,  d'une  famille  honnête  &  m.édiocrement 
riche.  En  1121  ,  il  fe  fit  Religieux  de  l'Ordre  de  Cîteaux, 
dans  l'Abbaye  de  Bégars,  &  devint  dans  la  fuite  Abbé  de 
cette  Maifon.  Elu  Evêque  d'Aleth ,  il  vit  que  les  habitants 
du  lieu  faifoient  bâtir  une  quantité  prodigieufe  de  maifons  dans 
l'ifie  de  Saint-Malo ,  &  que  l'ancieiuie  ville  d'Aleth  devenoit  dé- 
ferte ,  il  prit  le  parti  de  luivre  fon  troupeau  ,  &:  d'étabHr  dans 
cette  ifle  fon  Siège  épifcopal.  Il  fentit  bien  les  difficultés  de 
l'entreprife  ;  mais  il  n'en  fut  point  effrayé.  L'EgHfe ,  qu'on 
avoit  bâtie  dans  ce  lieu  à  l'honneur  de  Saint  Malo ,  avoit  été 
brûlée  &:  rebâtie  en  l'honneur  de  Saint  Vincent,  Martyr.  Cette 
Eglife ,  oii  repofoient  les  ReUques  de  Saint  Malo ,  étoit  la  feule 
propre  à  faire  une  Cathédrale  r  mais  elle  avoit  été  donnée  aux 
Bénédiftins,  par  Benoît ,  Adminiflrateur  de  l'Evêché  d'Aleth^  & 

il 


s  A  I  3n 

Il  étoit  d'autant  plus  difficile  de  leur  arracher  cette  Eglife , 
qu'elle  étoit  très-riche  ,  puifque  les  Bénédiftins  avoient  été  fubiH- 
tués  aux  droits  des  Evêques  d'Aleth  dans  toute  l'ifle.  Il  s'atten- 
doit  bien  qu'ils  ne  verroient  pas  de  fang-froid  la  perte  d'un  do- 
maine Il  confîdérable  :  il  demanda  d'abord  l'agrément  du  Saint- 
Siège  &  du  Duc  Conan  le  Gros ,  &  l'obtint.  Il  chafîa  fur  le 
champ  les  Moines  Bénédiftins .,  s'empara  de  leur  Eglife ,  y 
créa  un  Chapitre  de  Chanoines-Réguliers  qu'il  fit  venir  de  Paris, 
■  &  y  établit  fon  Siège.  Les  Bénédi61ins ,  chafTés,  ne  s'endormi- 
rent pas  :  ils  traduifirent  le  Prélat  en  Cour  de  Rome.  L'affaire  leur 
fut  d'abord  favorable  :  on  nomma  des  Juges ,  que  le  Prélat 
avoir  raifon  de  foupçonner  fes  ennemis.  Les  Bénédiftins ,  dès-lors 
extrêmement  riches^  furent  accufés  d'avoir  corrompu  la  Cour 
de  Rome  à  force  d'argent.  Le  malheureux  Prélat  fe  vit  fur  le 
point  d'être  dépofé.  L'affiiire  dura  dix-huit  ans ,  pendant  lef- 
quels  Jean  de  Châtillon  fit  trois  fois  le  voyage  de  Rome , 
à  pied. 

Les  Evêques  de  France,  &  même  Henri.,  frère  du  Roi  Louis 
le  Jeune ,  qui  connoilToient  &  admiroient  les  vertus  de  i'Evêque 
d'Aleth  ,  voyant  l'injulHce  qu'on  lui  faifoit ,  prirent  fon  parti  avec 
chaleur  ;  mais  ce  qui  lui  ièrvit  davantage  fut  la  prote8:ion  de 
Saint  Bernard.  Cet  Abbé  fameux  prit  hautement  la  défenfe  de 
l'opprimé ,  & ,  par  fon  autorité  &  fon  éloquence ,  il  fit  celTer  la 
pourfuite  de  fes  ennemis.  La  Sentence  du  Pape  fut  favorable  au 
Prélat ,  & ,  depuis  ce  temps ,  les  Bénédi6lins  ont  perdu  toutes 
leurs  prétentions.  C'eft  à  cette  époque  qu'on  doit  rapporter  la 
lettre  d'Odon ,  Légat  du  Pape,  à  I'Evêque  de  Saint -Malo, 
auc[uel  il  défend  d'empêcher  les  Moines  de  Marmoutier  de  célé- 
brer l'Office  divin  dans  leur  Oratoire  de  Becherel. 

Quoi  qu'il  en  foit ,  le  Prélat ,  enfin  viftorieux  de  fes  ennemis , 
fît  accroître  l'Eglife  de  Saint- Vincent ,  &  la  fit  décorer.  On  lui 
doit  la  tour  ou  le  clocher  qui  fubfille  encore  aujourd'hui.  Après 
des  travaux  innombrables,  il  mourut  le  premier  Février  11(^3, 
emportant  avec  lui  les  regrets  de  fon  troupeau  &  l'eltime  de 
fes  contemporains  :  il  fut  inhume  dans  ion  tglife  Cathédrale  , 
dont  il  fut  le  fondateur.  On  voit  encore  fon  tombeau  dans  le 
chœur  de  cette  Eglife  :  on  l'encenfe  à  la  Grand'Mefle  &  à 
Vêpres.  La  grille  de  fer  dont  on  l'a  environné  pour  empêcher 
le  peuple  d'en  approcher  ,  lui  a  fait  donner  le  farnom  de  Jt^an 
de  la  Grille, 

Les  Malouins  ont  toujours  eu  &  confervent  encore  une 
Tome  /F.  S  2 


jii  s  A  I 

fïnguliere  vénération  pour  ce  Prélat.  Le  Pape  Léon  X,  informé 
de  plufieurs  miracles  qui  fe  faifoient  fur  fon  tombeau,  permit, 
en  1517?  à  Denis  Briçonnet ,  Evêque  de  Saint-Malo ,  Ambafla- 
deur  du  Roi  François  I,  à  Rome  ,  de  célébrer  la  fête,  quoiqu'il 
ne  fût  pas  canonifé. 

Ceft  depuis  la  révolution  faite  par  Jean  de  la  Grille,  que 
les  Evêques  de  ce  diocefe  ont  quitté  le  nom  à^Aléthiens  pour 
prendre  celui  de  Malouins ,  fous  lequel  ils  font  connus  au- 
jourd'hui. 

Aubert  ou  Albert,  fut  facré  Evêque  de  Saint-Malo  l'an  11(^3. 
Son  épitaphe,  rapportée  par  Sigebert,  met  fa  mort  en  11 82, 
tandis  que  d'autres  la  placent  en  1 1 84.  Voici  cette  épitaphe  : 
Anno  ii8z ,  obiit  venerabilis  vir  Albenus ,  Epifcopus  Alethcnfîs  , 
quem  moderni  de  Sanclo-Madovio  vocant  ,  cujus  Epifcopatus  ami'' 
quitus  civitas  Aletha  vocabatur.  Albert  accorda  à  Robert,  Abbé 
de  la  Trinité  de  Combourg ,  deux  portions  dans  les  revenus  de 
l'EgHfe  de  Notre-Dame  de  cette  ville. 

Pierre  Giraud,  qui  fut  élu  en   1184,  mourut  en  1218. 

Raoul,  fon  fucceffeur ,  occupa  le  Siège  depuis  12 18  jufqu'er> 
1230. 

Pierre  II  du  nom,  mourut  ou  abdiqua  en  1231. 

Geoffroi ,  qui  lui  fuccéda ,  fonda  l'Hôpital  de  Saint-Malo ,  & 
réiîgna  fon  Evêché  à  fon  fucceffeur,  l'an  1255. 

Nicolas  de  Flac  ,  fut  Evêque  de  Saint-Malo  depuis  1255  juf- 
qu'en  1 262  ,  année  de  fa  mort. 

Philippe ,  nommé  par  le  Pape ,  ne  voulut  point  accepter  la 
dignité  d'Evêque. 

Frère  Simon  de  ClifTon,  de  l'Ordre  des  Frères  Prêcheurs, 
facré  le  jour  de  la  fête  des  Apôtres  SS.  Pierre  &  Paul,  en  1264, 
mourut   en  1286. 

Robert  du  Pont  occupa  le  Siège  depuis  1286  jufqu'en  1309. 
Sous  fon  épifcopat,  en  1307,  trois  Eccléfiaftiques  de  Saint-Malo, 
accufés  d'avoir  tué  un  homme,  nommé  Rufier.,  furent  emêtés  ÔC 
mis  dans  les  prifons  du  château  de  Léhon ,  près  Dinan.  L'Archi- 
diacre évoqua  la  caufe  à  fon  Tribunal ,  & ,  après  informations 
&  dépofitions  des  témoins ,  il  déclara  les  accufés  innocents.  On 
trouve  dans  les  titres  de  Marmoutier,  fous  les  années  130(5, 
I3»6  ,  1323  ,  1326,  &  1327,  fix  quittances  données  au  Prieur 
de  Léhon  par  le  Collefteur  des  deniers  accordés  par  le  Pape 
au  Roi  de  France  fur  les  biens  eccléfiaftiques  du  diocefe  de 
Saint-Malo.  Cette  impofition ,  qui  devoit  être  employée  au  foula- 


s  A  I  31  j 

gement  des  Fidèles  dans  la  Terre-Sainte,  fe  montoit,  pour  ce 
diocefe  ,  à  la  fomme  de  trois  cents  vingt-fept  livres  :  les  autres 
Eglifes  de  Bretagne  furent  auffi  taxées  à  proportion  de  leurs  ri- 
cheffes ,  &:  payèrent. 

Raoul   Rouxelet,    élu  vers  13 10,  mourut  en   13  17. 

Alain  Gontier ,  fon  fucceiïcur ,  en  1318,  aflilta  au  Concile 
de  Saumur  en  1 3 1 9.  Ce  Prélat ,  voyant  que  de  toutes  les  Ca- 
thédrales de  la. province  celle  de  Samt-Malo  étoit  la  feule  qui 
eût  un  Chapitre  régulier ,  pria  les  Pcres  du  Concile  de  fe 
joindre  à  lui  pour  obtenir  fa  fécularifation.  Ils  y  confentircnt, 
Ôc  le  Concile  demanda  une  Bulle  à  ce  fujet  au  Pape  Jean  XXil, 
qui  ne  fit  aucune  difficulté  de  l'accorder.  La  Bulle  eil  darée 
d'Avignon,  le  27  06lobre  13 19.  Le  même  Pape  ordonna  à 
Alain  de  valider  le  mariage  d'Olivier  de  Monrauban  &  de 
Julienne  de  Tornemine ,  parents  au  troifîeme  degré  ,  qui  avoient 
contracté  de  mauvaife  foi  ,  puifqu'ils  n'avoient  pas  voulu  de- 
mander de  difpenfes ,  quoiqu'ils  fçuffent  être  parents.  Leurs 
enfants ,  nés  &  à  naître ,  furent  déclarés  légitimes.  Alain  fut 
transféré  à  Quimper    en    1333. 

Yves  du  Bois-Breffel  ou  BoefTel ,  transféré  de  Quimper  à 
Saint-Malo ,  mourut  en  1348,  félon  Taillandier  ;  Lobineau  place 
fa  mort  en  1335  j  les  titres  de  Marmoutier  le  font  vivre  jufqu'en 
1340;    &   nous  préférons  de  nous  en   rapporter    à   Taillandier. 

Guillaume  Matthieu  ou  Mahé ,  fon  fucceffeur ,  ne  garde  le 
Siège  qu'un  an. 

Pierre  Benoît,  élu  fur  la  fin  de  Tannée  1349,  ou  au  com- 
mencement de  la  iuivante,  publia  des  llatuts  en  1350,  &  mou- 
rut en  1360.  Guillaume  le  Gouverneur,  Evêque  de  Saint-Malo, 
fait  une  mention  honorable  de   ce  Prélat. 

Guillaume  Poulard  ,  afiifla  au  Concile  provincial  d'Angers  en 
1366  :  l'année  de  fa  mort  efl  ignorée. 

Geofïroi  Pargas,  fit  ferment  de   fidélité  au  Duc  le  4   Février 

1371- 

JofTelin  de  Rohan,  fut  élu  Evêque  de  Saint-Malo  en  1375.  Ce 

Prélat  efl  célèbre  par  le  différent  qu'il  eut  avec  k  Duc  Jean 
IV,  fon  Souverain.  Il  mourut  en  1388.  (Voyez  ce  que  nous  en 
avons  dit  ci-devant  dans  l'hiflorique  de  la  ville  de  Saint-Malo.) 
Robert  de  la  Motte,  élu  en  1390,  ne  fut  pas  plus  fournis  à 
fon  Souverain  que   ne    l'avoit    été  fon  prédécefTeur  ;  il  mourut 

en   1423. 

Guillaume   de  Montfort,  élu  en   1423,  mourut  Cardinal  du 


324  s  A  I 

titre  de  Sainte-Aiiaftafie ,  le  27  Septembre  1432  :  il  avoît  faît^ 
en  1426,  des  ftatuts  ,  que  Guillaume  le  Gouverneur  a  confacrés 
par  des  éloges. 

Guillaume  Boutier,  Abbé  de  Beaulieu,  élu  par  le  Chapitre, 
n'eut  point  Tes  Bulles. 

Amauri  de  la  Motte,  frère  de  Robert,  déjà  Evêque  d'un 
autre  diocefe  ,  fut  transféré  à  Saint-Malo  en  1432,  publia  des 
ftatuts  en  1434,  &  mourut  la  même  année.  Guillaume  Boutier 
fut  élu  une  féconde  fois,  mais  il  ne  fut  pas  plus  heureux  que 
la  première.  Ce  choix  fait  '  l'éloge  de  cet  Eccléfiaftique. 

François,  8r ,  félon  d'autres,  Pierre  Piedru ,  fut  transféré  de 
Tréguier  à  Saint-Malo,  en  1434,  malgré  le  Duc  &  le  Roi  de 
France  ,  qui  demandoient  que  Guillaume  fût  pourvu  de  cet 
Evêché.  Le  Pape  fut  inflexible.  L'an  1448  ,  François  Piedru 
publia  des  ftatuts  dont  Guillaume  le  Gouverneur  fait  mention 
avec  éloge.  Il  fonda,  dans  la  Cathédrale  de  Nantes,  l'Office 
folemnel   de  Saint  Malo  ,  &  mourut  en   1449. 

Jacques  d'Epinai ,  ne  fut  Evêque  de  Saint-Malo  que  trois 
mois  &  demi,  en  1450. 

Jean  l'Epervier,  fit  ferment  de  fidélité  le  17  Septembre  1450, 
publia  des  ilatuts  en  1452  &  1460  :  il  fit  deux  fois  le  voyage 
de  Rome ,  fut  nommé  Premier  Préfident  de  la  Chambre  des 
Comptes  en  1477,  &  mourut  en  i486,  comme  le  prouve  le 
Bref  du  Pape  Innocent  VIII  en  faveur  de  Pierre  de  Laval.  Jean 
l'Epervier  avoit  un  Coadjuteur  quahfié  Evêque  de  Dromore. 

Pierre  de  Laval  &  de  Montfort,  Archevêque  de  Rheims, 
nommé  Evêque  commendataire  de  Saint-Malo  en  i486,  par 
le  Pape  qui  en  avoit  demandé  la  permiffion  au  Duc  de  Bre- 
tagne,  mourut  le  14  Août  1493,  &  fut  inhumé  dans  l'Eglife 
de  Saint-Aubin  d'Angers. 

Guillaume  Briçonnet ,  fit  ferment  de  fidélité  en  1493  ,  fut 
créé  Cardinal  en  1495  ,  Archevêque  de  Rheims  en  1497,  Ar- 
chevêque de  Narbonne  en  1511  ,  &  mourut  dans  la  même  an- 
née. On  voit ,  dans  la  SacrilHe  de  la  Cathédrale ,  au  Heu  où 
les  Chanoines  s'habillent  ,  ces  mots  ,  Mémento  Cardinalis  Bri" 
çonnet. 

Denis  Briçonnet,  fils  légitime  de  Guillaume,  fuccéda  à  fon 
père  en  1  5 1 1  ,  publia  plufieurs  fiatuts ,  fe  fit  donner  pour  Coad- 
juteur   fon    neveu  François  Bohier,    en    1534,    &   mourut   en 

^535-, 
François    Bohier  ,   fuccefleur  de   fon    oncle ,  fit    ferment  de 


s  Al  315 

fidélité  au  Roî ,  le  5  Janvier  1555,  afîifta   au  célèbre  colloque 

-de  Poifly  en  1561  ,  à  l'afTemblée  du  Clergé  de  France  en  1 567, 

&  mourut  en  1569.  Le  Roi    fit  faifir   le   temporel  de  l'Evêché. 

Guillaume  Rufé ,  nommé  par  le  Roi  Charles  IX  en  1 570 , 
abdiqua  en  faveur  de  François  1  home  en  1573,  &  ne  retint 
qu'une  penfîon  de  cinq  mille  livres  ;  il  ne  fut  point  facré  Evê- 
que  de  Saint-Malo ,  mais  il  fut  dans  la  fuite  nommé  à  l'Evêché 
d'Angers. 

François  Thomé  ,  nommé  en  1573  le  25  Février,  prêta  fer- 
ment de  fidélité  au  Roi  en  1574,  allifia  aux  Etats  de  Blois  en 
1576,  à  l'afTemblée  du  Clergé  de  France  en  1577,  aux  Etats 
de  Bretagne  ,  tenant  à  Ploermel ,  en  1 580  j  &  abdiqua  en  faveur 
de  Charles  de  Bourgneuf. 

Charles  de  Bourgneuf,  prit  pofreflion  ,  par  Procureur,  le  2^ 
Février  1 587,  6^  fe  rendit  de  Home  à  Saint-Malo  en  1 590.  Il  fut 
mal  reçu  des  habitants ,  qui  le  foupçonnoient  de  favoriier  Henri 
IV  :  ils  le  retinrent  même  quelque  temps  dans  une  efpece  de 
captivité.  Ils  fe  trompoient  néanmoins.  Ce  Prélat  fut  toujours 
du  parti  de  la  Ligue  :  il  permuta  avec  Jean  du  Bec ,  Evêque 
de  Nantes. 

Jean  du  Bec,  fit  fon  entrée  le  4  Avril  1599,  &  mourut  le 
20  Janvier  1610. 

Guillaume  le  Gouverneur,  élu  le  29  Janvier  1610,  fut  facré 
au  mois  de  Février  1611,  fit  fon  entrée  le  20  Mars  de  la 
même  année,  afîifla  aux  Etats  généraux  du  Royaume  en  1614 
&  161 5 ,  pubha  des  Statuts  en  1612  de  1620,  &  mourut  en  1(530. 
Ce  Prélat  avoir  un  mérite  rare. 

Le  Père  Michel  de  Paris  ,  Capucin ,  connu  fous  le  nom  d'Oc- 
tavien  de  Marillac  ,  eut  la  modeflie  de  refufer  l'Evêché  de 
Saint-Malo ,  auquel  il  avoit  été  nommé. 

Achille  de  Harlai  de  Sanci ,  nommé  l'an  1630,  prit  pofTefTion 
en   1632,  &:  mourut  le  20  Novembre   1646. 

Ferdinand  de  Neuville  ,  facré  Coadjutcur  du  précédent ,  qui 
étoit  fon  oncle  ,  fut  fon  fucceileur ,  afiiibi  aux  afTemblccs  du 
Clergé  en  1653   &   1654,  &  fut  transféré  à  Chartres  en   1657. 

François  de  Ville  -  Montée  ,  fit  ferment  de  fidélité  en  16605 
fut  nommé  Commifiairc ,  par  le  Pape,,  pour  les  affaires  du  Jan- 
fénifme  ;  &  mourut  en   1670. 

Sébaflien  de  Guemadeuc,  fut  facré  &:  prit  pofTcffion  au  mois 
de  Juin  1671  ,  afîilhi  aux  afTemblées  du  Clergé  en  1680 ,  1682, 
&  1685  i  3c  mourut  en  1702. 


ji6  SAI 

Vincent  -  François  Defmarets ,  élu  &  facré  en  1701,  préfida 
aux  Etats  de  Dinan  en  171 8.  Dans  la  lifte  nombreufe  des  con- 
teftations  qui  fe  font  agitées  entre  un  Evêque  &  fon  Chapitre  , 
dit  M.  Belhé  de  la  Hauteville ,  dans  un  manufcrit  -,  il  n'en  eft 
point  de  plus  célèbres  que  celles  qui  ont  exifté  entre  M.  Defma- 
rets &  le  Chapitre ,  &  les  Chapelains  mêmes  de  la  Cathédrale. 
Ce  fut  aux  yeux  du  Royaume  que  le  Chapitre  donna  l'exemple 
du  fcandale  le  plus  marqué:  il  lit  imprimer  des  mémoires  aufli 
peu  mefurés  dans  les  termes ,  que  faux  dans  les  principes ,  & 
injuftes  dans  les  conféquences.  M.  Froftin,  Avocat  à  Saint-Malo , 
défendoit  le  Prélat  avec  cette  fermeté ,  cette  précilion ,  cette 
folidité  de  raifonnements ,,  &  cette  force  de  génie,  qui  firent  ad- 
mirer fes  mémoires.  L'Evêque  n'eut  que  cet  Avocat  pour  le  dé- 
fendre au  Confeil  de  Sa  Majefté. 

M.  Defmarets  ne  pouvoit  décemment  demander  une  concilia- 
tion au  Chapitre  ,  qui  l'avoir  injurié  dans  fes  mémoires ,  &  qui 
avoir  tort  dans  fes  inveftives  comme  dans  fes  prétentions  :  aulîi 
ne  propofa-t-il  aucun  arrangement.  Le  Chapitre  s'ennuya  de 
plaider.  On  feroit  deux  volumes  in-folio  des  mémoires  fournis 
refpe Vivement.  L'affaire  étoit  prête  de  recevoir  une  décifion  lorf- 
que  le  Chapitre ,  par  un  retour  heureux ,  propofa  un  arbitrage. 
L'Evêque  auroit  cru  manquer  à  fa  dignité  de  s'y  refufer  j  il  eut 
l'honnêteté  &  la  bonté  de  l'accepter. 

L'arbitrage  fut  remis  à  MM.  de  Brilhac ,  Premier  Préfîdent  au 
Parlement  de  Rennes  ;  de  Brou ,  Confeiller  d'Etat  &  Intendant 
de  la  province  ;  Se  de  la  Villeguerin ,  Avocat  général  au  Par- 
lement de  Bretagne  ;  fur  l'avis  defquels  fut  rendu  l'Arrêt  du  Con- 
feil d'Etat,  le  4  O6tobre  1727  ,  qui  régla  plufieurs  articles  con- 
teftés  entre  l'Evêque  &  fon  très -litigieux  Chapitre.  Les  lettres- 
patentes  données  à  ce  fujet ,  furent  fignifiées  à  ce  dernier  ,  le 
J27  Mars  1728,  en  la  perfonne  de  M.  Mellet ,  Archidiacre, 
Chanoine  ,  &  Syndic  du  Chapitre.  Il  feroit  trop  long  d'entrer 
dans  le  détail,  qu'on  peut  voir  dans  les  pièces  originales,  û  l'on 
en  a  la   curiofité. 

Sans  m'arrêter  à  commenter  cet  Arrêt ,  j'obferverai  feulement 
qu'on  n'y  a  rien  contrevenu  depuis  :  on  a  fait  payer  aux  Cha- 
pelains &  au  bas-Chœur  la  portion  de  frais  qu'on  a  voulu  dans 
les  procès  fomentés  par  la  chicane  du  Chapitre.  Quoique  cet 
Arrêt  devoit  être  le  principe  &  le  fondement  de  la  paix  entre 
l'Evêque  &  les  Chanoines  de  Saint-Malo ,  il  donna  naiffance  à 
un  procès  fcandaleux.  L'Evêque  y  donna   lieu ,  contre  fon  in- 


s  AT       _  317 

tentîon.  Ce  Prélat  étoît  accufé  de  Janfénifme  par  le  Chapitre, 
qui  ne  l'aimoit  pas.  Pour  détruire  tout  foupçon ,  il  déclara  ac- 
cepter la  fameuie  Bulle  Unigemtus  ,  par  un  Mandement  du  20 
Août  1728.  Comme  il  aimoit  l'ordre,  il  crut  devoir  le  rétablir 
en  mettant  la  difcipline  dans  fon  Chapitre.  En  exécution  de 
TArrêt  du  Confeil ,  il  fit  un  Règlement ,  qu'il  maniferta  par  une 
Ordonnance  de  vifite ,  du  23  Jum  1729.  Cette  Ordonnance  fut 
le  fignal  de  la  révolte.  On  vit  fur  le  champ  l'Autel  s'élever  contre 
l'Autel  :  le  Chapitre  entier  fe  porta  Appellant ,  devant  le  Roi 
&  fes  CommifTaires ,  de  l'Ordonnance  de  vifite  j  plufieurs  de  ces 
Eccléfiafi:iques  furent  même  d'avis  d'appeller  au  futur  Concile. 
Tel  fut  l'excès  du  délire  des  i  hanoines  &  des  Chapelains.  Mais 
malgré  leurs  infoknts  mémoires  ,  dont  l'Evêque  pourfuivit  la 
radiation  ,  ils  ne  purent  réufîir  ;  l'Ordonnance  de  vifite  fut 
adoptée.  Forcés  d'obéir  ,  les  ennemis  de  l'Evêque  tinrent  enfin 
une  conduite  moins  oppofée  à  l'efprit  de  leur  état  ;  mais ,  s'ils 
ne  fe  révoltèrent  plus  contre  une  autorité  légitime ,  ils  ne  purent 
refter  tranquilles  entr'eux  ,  &  jufqu'ici  ils  n'ont  pu  abandonner 
la  fureur  qui  les  porte  à  procéder.  Ruiné  par  fes  querelles  Hti- 
gieufes,  le  Chapitre,  qui  avoir  renoncé  par  le  non-ufage  ,  à  fon 
droit ,  reconnu  légitime  ,  d'exiger  les  lods  &  ventes  au  denier 
fix ,  &  qui  ne  les  exig^oit  qu'au  denier  huit ,  arrêta ,  par  une 
délibération  capitulaire  ,  de  les  percevoir  au  denier  fix.  Les  Sei- 
gneurs n'ont  rien  changé  à  l'ancien  ufage  ,  mais  le  Chapitre  efl: 
bien  éloigné  de  les  imiter. 

L'unique  chofe  fur  laquelle  on  n'a  point  varié ,  c'a  été  fur  la 
pourvoyance  des  Offices  des  Jurifdiftions ,  qui  fe  donnent  gra- 
tuitement ,  non  au  plus  riche  ,  mais  au  plus  digne  ;  &  ce  n'efl 
pas  un  petit  fujct  d'éloge  pour  l'Evêque  &  le  Chapitre  de  Saint- 
Malo.  Plut  à  Dieu  qu'ils  enflent  des  imitateurs  de  ce  définté- 
reflement  ! 

M.  Defmarets  gouverna  fagement  fon  diocefe.  Entre  les  Rè- 
glements qu'il  fit,  il  en  efi:  un  qui  mérite  des  éloges  ;  c'ell:  celui 
qu'il  donna  pour  l'Hôpital  de  Saint  -  Malo  ,  &  qui  fut  imprimé 
chez  le  Comte. 

Jean-Jofeph  de  Fogafles  de  la  Bafi:ie  ,  nommé  Evêque  de  Saînt- 
Malo  en  1739,  ^'icré  en  1740,  mourut ,  le  29  Janvier  1767: 
Théologien  profond  ,  Canonifte  éclairé  ,  Logicien  unique  ,  ce 
Prélat  fe  fit  une  réputation  brillante  &  méritée  ,  il  mit  le  bon 
ordre  dans  fon  diocefe  ,  y  excita  la  piété  par  la  fienne  ,  s'occupa 
fans  celle  de  tout  le  bien  qu'on  peut  faire  &  dont  un  Evcque 


}i8  S  A  I 

doit  s'occuper.  En  deux  mots  j'aurai  fait  l'éloge  de  M.  de  la 
Baftie  ,  en  difant  que  c'étoit  un  Prélat  digne  des  temps  Apofto- 
liques ,  qui  faifoit  le  bonheur  de  fon  Eglife  &  l'ornement  de 
celle  de  France.  Lors  de  fa  mort  ,  la  voix  publique  avoit 
prévenu  celle  du  Roi.  Le  Roi  Louis  XV  confirma  le  vœu 
des  Malouins  &  de  la  province  ,  en  nommant  à  l'Evêché  de 
Saint- Malo 

M.  Antoine  -  Jofeph  des  Laurents ,  facré  le  2  Août  17(37.  Ce 
Prélat ,  digne  de  Ion  prédécefTeur ,  dont  il  avoit  été  le  Vicaire 
général ,  imite  le  modèle  qu'il  eut  autrefois  fous  les  yeux.  Les 
Ordonnances  Synodales  ,  imprimées  à  Saint-Malo  ,  prouvent  fon 
zèle.  PuilTe  la  Providence  le  conferver  pour  le  bonheur  de  fes 
diocéfains  ! 

SAINT- MALO- DE- BAIGNON;  dans  un  fond;  à  17  lieues 
au  Sud  de  Saint-Malo ,  fon  Evêché  ;  à  8  heues  de  Rennes  j  & 
à  I  lieue  un  tiers  de  Plélan,  fa  Subdélégation.  Cette  ParoilTe 
reffortit  à  Ploermel,  &  compte  150  communiants  :  la  Cure  efl: 
à  l'alternative.  Le  territoire  ,  coupé  de  vallons  très-profonds ,  eft 
mal  cultivé,  &  renferme  une  plus  grande  quantité  de  terres 
incultes  que  de  terres  en  labeur.  La  maifon  feigneuriale ,  nom- 
mée le  château  de  Baignon  ,  efl  la  maifon  de  plaifance  des  Evê- 
ques  fie  Saint-Malo  j  elle  leur  fut  donnée  ,  félon  d'Argeritré  ,  par 
le  Seigneur  de  Montfort  :  elle  a  une  haute-Jullice  qui  a  titre  de 
Régaires. 

SAINT -MALO- DE -PHîLIS;  fur  une  hauteur;  à  19  lieues 
au  Sud-Sud-Efl  de  Saint-Malo ,  fon  Evêché  ;  &  à  6  Heues  de 
Rennes ,  fa  Subdélégation.  Cette  ParoifTe  reffortit  à  Dinan ,  & 
compte  700  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  ter- 
ritoire ,  borné  à  l'Elî:  par  la  rivière  de  Vilaine ,  offre  à  la  vue 
des  vallons ,  des  monticules  ,  des  terres  en  labeur ,  des  prairies , 
des  landes,  &  beaucoup  d'arbres  fruitiers.  En  1380,  le  manoir 
de  la  Driennaye  appartenoit  au  Seigneur  de  Guignen  ;  cette 
Seigneurie  a  une  haute-Juflice  ,  &  appartient  à  M.  du  Bouexic  de 
la  Driennaye  :  le  manoir  de  la  Richardiere  appartenoit,  en 
142.0,  au  Seigneur  de  Treguent  ;  la  Fouchais ,  à  Payen  de  la 
Fauchais  ;  &  Ja  Gaudineray  ,  à  Pierre  du  Frefne. 

SAINT -MALON;  à  13  lieues  au  Sud  de  Saint-Malo,  fon 
Evêché  j  à  7  lieues   un    quart    de   Rennes  j   6c  à  3  lieues    de 

Plélan  , 


s  A  I  329 

Plélan ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiiïe  reflbrtit  à  Ploermel ,  & 
compte  900  communiants.  Le  territoire  ,  borné  au  Nord  par  la 
rivière  de  Muel ,  &c  au  Sud  par  la  forêt  de  Paimpont ,  offre  à 
la  vue  des  terres  en  labeur  ,  quelques  prairies ,  des  landes  ,  & 
beaucoup  d'arbres  fruitiers,  &  autres.  Saint-Jean  Sz.  les  Maifons- 
neuves  ,  fiefs  très-anciens ,  forment  une  haute-Juftice  qui  appar- 
tient à  M.  de  la  Chaffe-d'Andigné.  En  1420,  le  Bois-Durand, 
à  Guillaume  Poul  -  de  -  Bedéfe  j  Saint -Malon  ,  à  Guillaume  de 
Saint-Maion  ;  Tremel  &  la  Martiniere ,  à  Olivier  de  Tremel  y 
la  Touche -Guehennou  ,  à  Yves  le  Métayer;  la  Ville  -  Houx  , 
à  Jean  Lorence  ;  le  Bois -Raoul  ,  à  Olivier  Mel ,  Seigneur  du 
Bois-Denard. 

SAINT  -  MARCAN  ;  fur  une  hauteur ,  près  le  canal  de  la 
Banche  ;  à  2  lieues  à  l'Ell-Nord-Eft  de  Dol ,  fon  Evêché  &  fa 
Subdélégation  ;  &  à  1 2  lieues  de  Rennes ,  fon  reffort.  On  y 
compte  700  communiants  :  la  Cure  eu  à  l'Ordinaire.  Le  terri- 
toire ,  borné  au  Nord  par  la  mer  ,  n'efl  coupé  que  de  deux 
ruiffeaux  j  les  terres  y  font  exaftement  cultivées.  Les  maifons 
nobles  de  la  Ville-Duë  ,  Dupreft ,  &  du  Bois-Hermez  ,  font  très- 
anciennes.  La  moyenne-JulHce  de  Pont-Etal  appartient  à  M.  Ruel- 
lan  du  Pleflis  du  Tierxent. 

SAINT-MARCEL-BOHAL  ;  dans  un  fond  ;  à  6  lieues  à  l'Eft- 
Nord-Eft  de  Vannes ,  fon  Evêché  ;  à  1 4  lieues  de  Rennes  ;  & 
à  I  lieue  de  Maleftroit ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  reffortit 
à  Ploermel ,  &  compte  600  communiants  :  la  Cure  elt  à  l'alter- 
native. Ce  territoire ,  borné  au  Sud  par  la  rivière  de  Claye  , 
renferme  ,  de  ce  côté  ,  beaucoup  de  terres  en  labeur  &  des 
prairies  de  bonne  qualité  ;  au  Nord ,  font  des  landes. 

SAINT -MARC -LE- BLANC;  à  7  lieues  &  demie  au  Nord- 
Nord-Eft  de  Rennes ,  fon  Evêché  ;  &  à  2  lieues  d'Antrain ,  fa 
Subdélégation  Se  fon  reffort.  Cette  Paroiffe  compte  900  commu- 
niants :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire  ,  borné  au  Sud 
par  la  petite  rivière  de  Minette ,  eff  couvert  d'arbres  &  buiffons, 
&  renferme  des  terres  en  labeur ,  des  prairies  ,  des  landes ,  6c 
des  bofquets.  En  1420,  on  y  voyoit  la  maifon  noble  de  la 
Ville  -  Guerin  ,  à  Jean  le  Prêtre  ;  le  Bois  -  Geffrai ,  au  Sieur  de 
Béton  i  le  Huutbrin  ,  à  Pierre  d'EffourbiUon  :  la  Bclinaye  forme 
une  haute  -  Juflice  qui  appartient  à  M.  de  la  Belinaye  ;  &  le 
Tome  IV,  T  2 


3^0  S  A  ï 

Tierxent ,  aufîi  haute- Juftice ,  qui  eft  à  M.  Rueilan  du  Tierxent  î 
la  moyenne-Juftice  de  la  Vairie ,  à  M.  du  Hochet. 

SAINT  -  MARC  -  SUR  -  COUESNON  ;  fur  une  colHne  ;  à  6 
lieues  &  demie  au  Nord-Efl  de  Rennes ,  fon  Evêché  j  &  à  i 
lieue  de  Saint- Aubin-du-Cormier  ,  fa  Subdélégation  &  fon  reffort* 
On  y  compte  650  communiants  :  la  Cure  eil  à  l'alternative. 
Le  territoire ,  arrofé  des  eaux  de  la  rivière  de  Couefnon ,  offre 
à  la  vue  des  terres  bien  cultivées ,  des  arbres  fruitiers  &  autres, 
&  des  landes. 

Dans  cette  ParoilTe  ell:  la  Terre  de  Saint -Marc,  avec  fiefs 
&  jurifdiftion  fimple ,  qui  donne  la  Seigneurie  de  l'endroit  ; 
elle  eft  venue  à  la  branche  des  du  Feuplacé  de  Saint -Marc, 
par  leur  mariage,  en  1640,  avec  une  le  Provots  ,  dont  la 
maifon  l'avoit  eue  par  aUiance  ,  en  1330,  avec  une  de  Saint- 
Marc.  Cette  maifon  eft  ancienne,  elle  a  donné  une  AbbefTe  de 
Saint-Georges  de  Rennes,  &  plufieurs  Capitaines  qui  fe  font 
diftingués  fous  les  Ducs  de  Bretagne  ,  comme  Tifon  du  Feu  ,  né 
en  1296,  qui  fut  un  grand  guerrier. 

SAINT-MARC-SUR-ISLE   ou   SAINT-MÉDARDSUR-ISLE5 

fur  une  hauteur  ,  près  la  rivière  d'Ifle  ;  à  4  lieues  au  Nord  de 
Rennes  ,  fon  Evêché  j  &  à  2  lieues  &  demie  de  Hédé ,  fa  Sub- 
délégation &  fon  reffort.  On  y  compte  600  communiants  :  la 
Cure  eil  à  l'alternative.  Le  territoire  ,  qui  eft  affez  bien  cultivé, 
produit  des  grains  de  toutes  efpeces  &  du  cidre.  La  Seigneurie 
du  Bois  -  G  effroi  devoit ,  en  1290,  un  ChevaUer  à  la  Com- 
pagnie du  Baron  de  Vitré ,  lorfqu'elle  étoit  au  fervice  du  Duc 
de  Bretagne.  Cette  Terre  a  haute- Juftice  qui  appartient  à  M.  de 
Bavalan. 

SAINTE-MARIE-DE-PORNIC  ;  fur  la  côte;  à  10  Heues  un 
quart  à  l'Ouell-Sud-Oueft  de  Nantes ,  fon  Evêché  ;  à  16  lieues 
de  Rennes  j  &  à  4  lieues  un  tiers  de  Paimbœuf ,  fa  Subdélégation. 
On  y  compte  1 200  communiants  :  la  Cure  eft  un  Prieuré  à  la 
nommation  de  l'Abbé  de  Pornic.  Le  territoire ,  borné  au  Sud 
par  la  mer,  eft  fertile  en  grains  &  très-bien  cultivé.  L'an  105 1, 
Glevian ,  Prince  de  Becon  au  pays  d'Herbauges ,  donna  à  l'Ab- 
baye de  Redon  l'Eglife  de  Sainte-Marie-de-Pornic  ,  la  moitié  de 
fes  dîmes ,  &  quelques  autres  domaines  :  Airard ,  Evêque  de 
Nantes ,  confentit  à  ce  don.  La  Guerche  &  le  Bois-Macé ,  avec 


s  A  I  35t 

hautes- Juftices,  appartiennent  à  M.  de  Chevîgné  du  Bois  de  ChoUet: 
Breff  &  Sableau ,  moyenne-Juftice  ,  à  M.  ie  Prince  de  Condé. 

SAINT-MARS-DE-COUTAIS  ;  fur  la  rivière  du  Tenu  ;  à  4 
lieues  au  Sud-Oueft  de  Nantes,  fon  Evêché  &  fon  reflbrt  ;  à  26 
iieues  de  Rennes;  &  à.3  lieues  un  quart  de  Machecou ,  fa  Subdé- 
légation. On  y  compte  1350  communiants:  la  Cure  efl  à  l'Or- 
dinaire. Le  territoire ,  en  partie  compoi'é  de  marais  qui  le  trou- 
vent le  long  de  la  rivière  du  Tenu ,  fur  laquelle  le  bourg  efl 
fîtué  ,  &  le  long  du  lac  de  Grand  -  Lieu ,  ell  très- exactement 
cultivé  ,  &  produit  abondamment  du  grain,  du  foin  ,  &  une  petite 
quantité  de  vin.  Cette  ParoifTe  a  une  hauteJuftice  ,  qui  appar- 
tient à  M.  Boux  de  Saint-Mars. 

Saint-Mars-de-Coutais  eft  très-ancienne ,  puifqu'il  eft  reconnu 
que  le  fameux  Saint-Amand  y  prit  naiflance  l'an  588  ,  au  villacre 
d'Herbauges  ,  fitué  fur  le  bord  du  lac  de  Grand-Lieu  :  il  fut 
Evêque  de  Macotrich  ,  &  gouverna  plufieurs  autres  Eglifes. 
Après  avoir  rempli  toute  la  Gaule  de  l'éclat  de  fes  vertus  6c  du 
fruit  de  fes  travaux  Apoftoliques ,  il  fe  retira  dans  un  Monaftere 
qu'il  fonda  auprès  de  Tournai ,  &  dans  lequel  il  mourut ,  le  6 
Février  679.  Sur  la  fin  du  feizieme  fiecle ,  on  en  faifoit  l'Ofîice 
à  trois  leçons  à  Nantes ,  avant  que  le  Clergé  de  ce  diocefe  eût 
adopté  le  Bréviaire  Romain.  On  remarque  dans  ce  territoire  les 
veftiges  d'un  ancien  château  ,  que  les  habitants  appellent  la 
Motte  -  Margolle  j  château  qui  ,  félon  la  tradition  ,  appartenoit 
jadis  aux  anciens  Seigneurs  de  Retz.  Au  bord  de  la  rivière  du 
Tenu  ,  à  l'endroit  nommé  le  Pon-Beffon ,  efl  une  pierre  adoffée 
&  foutenue  ,  d'un  côté  ,  par  un  ravin  fort  efcarpé ,  &  de  l'autre 
par  deux  pierres  de  camp  ,  de  forte  que  cette  énorme  pierre 
couvre  une  chambre  ou  galerie  ,  que  les  habitants  de  l'endroit 
appellent  la  Salle  des  Fées  ,  &  croient  très  -  fermement  que  ces 
êtres  chimériques  font  les  conftrufteurs  de  cette  chambre  ,  qui  a 
huit  pieds  de  hauteur  ,  y  compris  l'épailTeur  de  la  couverture , 
fur  dix  pieds  de  largeur  en  quarré. 

En  1308  ,  Nicolas  de  Guemené ,  Curé  de  la  ParoifTe  de  Saint- 
Mars-de-Coutais  ,  fut  député  vers  Clément  V.  (Voyez  Nantes  , 
année  1308.)  La  maifon  d'Ardennes  appartenoit,  en  1420,  à 
Alain  du  Croifil ,  Juveigneur  d'Ardennes;  &  le  Bois-Jouan,  à 
Jean  Gallery.  En  1591,  le  Duc  de  Mercceur  fit  afliéger  le  châ- 
teau de  Saint-Mars-de-Coutais ,  qui  fut  auffi-tôt  emporté.  Ce  polie 
ouvroit  le  pays  de  Retz. 


2  21  S    A    I 

SAINT -MARS -DE- LA -JAILLEj  fur  la  rivière  d^Erdre,  & 
fur  la  route  d'Ancenis  à  Chateaubriand  ;  à  lo  lieues  au  Nord- 
Nord-Eil  de  Nantes ,  fon  Evêché  &  fon  reffort  ;  à  1 5  lieues  & 
demie  de  Rennes  i  &  à  5  lieues  d'Ancenis ,  fa  Subdélégation.  On 
y  compte  800  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'Ordmaire  ,  quoique 
l'Abbé  de  Saint  -  Nicolas  d'Angers ,  qui  préfente  le  Prieuré  ,  fe 
prétend  auiïï  le  préfentateur  de  la  Cure.  Le  territoire ,  plein  de 
vallons  ,  de  coteaux  ,  &  de  monticules ,  offre  à  la  vue  quelques 
petits  étangs ,  des  bois ,  la  forêt  de  Saint-Mars  qui  contient  en- 
viron fix  cents  quatre-vingts  arpents  de  terrein  en  bois  taillis , 
des  terres  en  labeur ,  des  prairies ,  &  des  landes ,  parnculiére-. 
ment  au  Nord  &  à  TEft  de  fon  clocher.  Ce  territoire  fe  termine, 
à  un  quart  de  lieue  àl'Eft,  à  la  province  d'Anjou. 

Le  château  ou  la  maifon  feigneuriale  de  Saint-Mars-de-la-Jaille 
fut  bân,  vers  l'an  1334,  par  Jean  de  la  Porte  j  il  pafîoit  jadis 
pour  une  place  très -forte.  Le  15  Décembre  1595,  le  jeune 
Malaguet ,  un  des  plus  rufés  Capitaines  de  fon  temps ,  entre- 
prit de  furprendre  le  château  de  Samt-Mars,  qui  étoit  du  parti 
du  Duc  de  Mercœur  ,  pour  le  foumettre  au  Roi  Henri  IV.  Le 
jeune  mihtaire  fe  déguifa  en  fille  ,  s'avança  jufqu'auprès  du 
pont  du  château  ;  fuivi  de  deux  foldats  déguifés  en  payfans ,  & 
les  larmes  aux  yeux ,  il  demanda  à  parler  au  Capitaine  Saulaye 
qui  commandoit  dans  la  place.  La  fentmelle  donna  dans  le  piège  , 
&  baiffa  le  pont-levis  pour  les  faire  entrer.  Il  paya  cher  fon 
imprudence ,  Malaguet  lui  caffa  la  tête  d'un  coup  de  pillolet , 
&  jetta  fon  corps  dans  le  foffé.  Malaguet ,  l'aîné ,  qui  étoit  en 
embufcade  ,  parut  fur  le  champ ,  pénétra  dans  le  château  avec 
fa  troupe  ,  fe  rendit  maître  de  la  place ,  &  la  foumit  au  Roi 
qui  fit  démolir  les  fortifications  en  1598.  En  1774?  le  château 
tomboit  en  ruines,  M.  de  la  Feronnaye  ,  Seigneur  propriétaire 
de  cette  place ,  le  fit  rebârir  à  neuf  dans  le  goût  moderne. 
Cette  Seigneurie  a  une  haute -Juftice ,  &  jouifloit  ci-devant  du 
droit  de  quintaine  ,  du  droit  de  ban  &  de  guet  fur  les  vaffaux 
de  ce  château  :  c'eft  à  M.  de  la  Feronnaye  à  qui  appartient 
aujourd'hui  cette  place. 

SAINT- MARS -DU -DESERT;  fur  une  hauteur;  à  4  lieues 
un  quart  au  Nord-Nord-Efl  de  Nantes  ,  fon  Evêché  &  fon  reffort  ; 
à  1 8  Heues  &  demie  de  Rennes  ;  &  à  4  lieues  d'Ancenis ,  fa 
Subdélégation.  On  y  compte  1000  communiants  :  la  Cure  eft 
préfentée    par   le    Chapitre,  Le   territoire ,  coupé   de   vallons  ^ 


s  A  I  333 

renferme  des  marais ,  des  terres  en  labeur ,  quelques  prairies , 
&  des  landes.  On  y  voit  les  maifons  nobles  de  la  Roche-For- 
diere  &  de  Caderan. 

SAINT-MARTIN-DES-PRÉS  i  à  19  lieues  à  l'Eft-Nord-Ell  de 
Quimper ,  Ion  Evêché  &  fon  refTort  j  à  22  lieues  de  Rennes  j 
&  â  I  lieue  de  Corlai ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  1300 
communiants  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Des  terres  en  labeur, 
des  prairies  ,  quelques  petits  bois ,  des  landes ,  &  des  arbres 
fruitiers,  voilà  ce  qu'on  apperçoit  dans  ce  territoire.  Clehuorant, 
haute,  moyenne,  &  bafle  -  Jufliice ,  à  M.  de  l'Iile  j  &  Ker-vert , 
haute-Juftice ,  à  M.  de  Kervert. 

SAINT-MARTIN-SUR-OUST  ;  à  8  lieues  à  l'Eft-Nord-Efl  de 
Vannes  ,  fon  Evêché  ;  à  1 3  lieues  de  Rennes  ;  &  à  3  heues  de 
Maleftroit ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroifle  reflbrtit  à  Ploermel , 
&  compte  1200  communiants:  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le 
territoire ,  coupé  par  la  rivière  d'Ouft ,  offre  à  la  vue  des  terres 
bien  cultivées ,  des  prairies  fertiles  ,  quelques  bois ,  des  arbres 
fruitiers ,  &  des  landes.  On  y  voit  les  maifons  nobles  de  la 
HoufTaye ,  avec  moyenne  &  baffe  -  Juftice  ;  elle  ell  fituée  dans 
la  prairie  de  fon  nom.  Cette  Terre  eft  poffédée ,  de  temps  im- 
mémorial ,  par  les  Seigneurs  de  ce  nom ,  lefquels ,  dès  le  dou- 
zième fiecle  ,  paroiffoient  avec  diffinftion  dans  la  province ,  & 
y  ont  joui  depuis  de  plufîeurs  titres  d'illuffration.  En  1 200 , 
Alain  de  la  Houffaye  avoit  la  quaHté  de  Chevalier ,  &  on  voit 
cette  qualité  continuée    dans  fes  defcendants. 

Euffache  de  la  Houffaye  fut  nommé  ,  en  1379,  Maréchal  de 
Bretagne ,  par  les  Seigneurs  &  Nobles  de  la  province ,  ailociés 
pour  s'oppofer  à  l'mvafion  du  pays  :  il  fut  depui»  nommé  Am- 
baffadeur ,  tant  pour  le  Duc ,  auprès  du  Roi  d'Angleterre ,  que 
pour  les  Seigneurs  Bretons  auprès  du  Duc ,  alors  retiré  en  An- 
gleterre ,  &  fut  depuis  employé  dans  les  emplois  les  plus  dif- 
tingués  ,  également  que  fon  frère ,  OUvier  de  la  Houffaye ,  qui 
fe  voit  employé,  en  141 8,  avec  dix  Ecuyers  de  fa  Compagnie. 

En  1373,  Alain  de  la  Houffaye  avoit  une  Compagnie  d'un 
ChevaHer  &  de  vingt-huit  Ecuyers. 

Alain  de  la  Houffaye  ,  Chevalier  ,  Seigneur  dudit  lieu ,  chef 
de  la  branche  aftuelle  de  la  Houffaye  qui  cxifte  maintenant 
en  Bretagne  ,  fut  un  des  Seigneurs  qui  ratifia  le  traité  de  Gué- 
rande.  Guillaume  de   la   Houffaye,  ion   fils,  ell  employé,  en 


354  ~  SAI 

1379,  pour  cent  trente-cinq  livres  tournois  d'or,  tant  pour  ùs 
gages  que  pour  ceux  de  deux  Chevaliers  Bacheliers ,  &  fept 
Ecuyers  de  fa  Compagnie.  Jehan  de  la  Houflaye ,  fils  du  pré- 
cédent, eft*  compris  dans  les  comptes  de  Hamon  Raguier ,  Tré- 
forier  des  guerres -,  en  qualité  d'Ecuyer.  Jehan  ,  fon  fils,  en  1442, 
accompagna  le  Connétable  au  fîege  de  Sainte  -  Severe  en  Lan- 
guedoc :  le  Sire  de  la  HoufTaye  cil  appelle  ,  parmi  les  Bannerets , 
aux  Etats  tenus  à  Vannes,  en  1455.  Depuis  ce  temps,  les  Sei- 
gneurs de  ce  nom  n'ont  point  celle  de  fe  diftinguer  au  fervice , 
tant  des  Ducs  de  Bretagne  que  des  Rois  de  France ,  depuis 
l'union  de  cette  province  à  la  Couronne  ;  &  tous  ont  pris  des 
aUiances  dans  les  meilleures  maifons  nobles  de  la  Bretagne. 
Cette  Terre  appartient  maintenant  à  M.  Louis  -  Jofeph  de  la 
Houflaye  ,  Chevalier  ,  Seigneur  dudit  lieu  ,  ancien  Capitaine  d'In- 
fanterie ,  lequel ,  de  fon  mariage  avec  Dame  Charlotte  Drouet 
de  la  Regontais ,  a  quatre  fils ,  qui  font  :  François-Marie-Jofeph , 
Chevalier  de  Saint-Louis  ,  Lieutenant  des  vaifleaux  du  Roi  ;  Euf- 
tache  ,  Capitaine  d'Infanterie  -,  Hyacinthe  ,  Garde  de  la  Marine  5 
&  Vincent-Auguflin  ,  Chevalier  de  Malte. 

La  Terre  de  la  Galiafier  &  la  Touche-ronde  ,  avec  chacune 
moyenne  &  baflTe-Juftice ,  appartiennent  à  M.  de  la  Houflaye  : 
Catelan  ,  haute ,  moyenne  &  balIe-Juftice  ;  cette  Terre ,  poflédée 
anciennement  par  les  Seigneurs  de  ce  nom,  d'une  des  plus  an- 
ciennes maifons  de  Bretagne  ,  étoit  pafl^ee  dans  celle  de  Carné , 
dont  elle  a  repafl^e  dans  celle  de  Catelan ,  qui  la  poflTede  à  pré- 
fent    également    que  celle   de  Trelan. 

La  Luardaye,  moyenne  &  bafle-Jufl:ice  ,  pofl^édée  ancienne- 
ment par  les  Seigneurs  de  Saint  -  Martin  de  Kerpontdarmes , 
maifon  éteinte  en  cette  Paroifle  j  enfuite  par  les  Seigneurs  de 
Cicé  ,  &  aujourd'hui  par  M.  Guerin  ,  Procureur  fifcal  de 
Ps.ochefort. 

L'Aulne ,  à  Madame  le  Douarin  de  Trevele61:. 

SAINT-MATTHIEU-DE-FINE-TERRE  j  au  bord  de  la  mer  ; 
à  1 5  lieues  au  Sud-Ouefl:  de  Saint-Pol-de-Léon ,  fon  Evêché  -,  à 

5  2  lieues  de  Rennes  j  &  à  4  lieues  de  Brefl: ,  fa  Subdélégation 

6  fon  reflx)rt.  On  y  compte  250  communiants  :  la  Cure  eft 
préfentée  par  l'Abbé  de  Saint-Matthieu.  Le  territoire ,  borné  au 
Sud  &  à  l'Ouefl:  par  la  mer ,  efl  très-exaftement  cultivé  &  très- 
fertile.  L'ancien  port  de  Liogan ,  bâti  en  briques ,  &  fltué  entre 
Saint-Matthieu  6c  le  Conquet  ,  n'efl:  préfentement  qu'une  petite 


SAI  35Î 

rade  foraine ,  Se  (e  nomme  la  rade  de  Lwcam,  La  couleur  de  la 
terre ,  pleine  de  fable  blanc  &  de  talc  ,  efl:  brillante  &  fort  belle. 

L'Abbaye  de  Saint  -  Matthieu  ,  Ordre  de  Saint  -  Benoît ,  fait 
partie  de  cette  Paroifle.  Elle  efl  très -ancienne  ,  &  bien  des 
hiftoriens  prétendent  qu'elle  fut  fondée  par  Saint  Tangui ,  Soli- 
taire ,  qui  vivoit  en  572.  Hervé,  Vicomte  de  Léon,  donna 
toute  la  Terre  de  Saint-Matthieu  aux  Moines  de  cette  Abbaye  ; 
&,en  reconnoiiïance  de  ce  bienfait ,  l'Abbé  &  les  Moines  arrêtè- 
rent, le  10  Juillet  II 57,  que  leur  bienfaiteur  participeroit  à 
tous  les  Offices  qui  feroient  célébrés  dans  leur  EgHfe.  Au  mois 
de  Janvier  1296,  une  flotte  Anglaife  de  plus  de  trois  cents 
cinquante  voiles,  arriva  à  Saint  -  Matthieu  pour  y  prendre  des 
rafraîchiflements.  Ces  étrangers  ayant  été  mal  reçus  des  Bretons , 
s'en  vengèrent  d'une  manière  éclatante.  Ils  pillèrent  l'endroit, 
forcèrent  l'Abbaye  ,  enlevèrent  tous  les  ornements  de  l'Eglife , 
&  fe  faifirent  même  de  la  tête  de  Saint  Matthieu  qu'on  y 
confervoit  très-refpe6lueufement  j  mais  l'Amiral  Anglais  n'efpé- 
rant  pas ,  félon  toutes  les  apparences ,  retirer  un  grand  profit 
de  cette  Relique,  il  la  fit  rendre  aux  ReHgieux.  En  1332,  le 
Duc  Jean  111  permit  à  ces  Moines  de  bâtir  une  fortereiîe  pour 
fe  mettre  à  l'abri  des  infultes  des  ennemis.  Dans  un  Chapitre 
tenu  par  Guillaume ,  Abbé  de  Saint-Matthieu ,  on  régla  que  les 
Prieurs  de  Goèio  &  Forell:  diroient ,  à  perpétuité,  trois  MefTes, 
par  femaine ,  pour  les  Seigneurs  de  Léon  ,  bienfaiteurs  de  ce 
Prieuré  &  de  l'Abbaye  de  Saint-Matthieu.  En  1374,  le  Comte 
de  Montfort  arriva  d'Angleterre  avec  une  flotte  conlidérable ,  & 
débarqua  à  Saint-Matthieu,  dont  il  traita  cruellement  les  habitants, 
qui  tenoient  pour   Charles   de  Blois ,  fon  compétiteur. 

Le  29  Juillet  1558,  une  flotte  Anglaife  &  Flamande  dé- 
barqua au  havre  du  Conquet ,  &  une  partie  des  ennemis  fe 
rendit  à  Saint-Matthieu ,  dont  elle  pilla  les  habitants ,  &  brûla 
enfuite  l'Eglife  avec  cinquante  maifons.  L'Abbaye  ne  fut  pas 
épargnée  ;  ils  prirent  les  facraires  qui  étoient  d'argent  doré  , 
deux  paires  d'orgues ,  beaucoup  de  livres ,  deux  clociies ,  avec 
tous  les  ornements  de  l'Eglife ,  &  enfuite  mirent  le  feu  au 
Couvent.  L'incendie  confuma  le  dortoir ,  la  lacrilHe  ,  une  partie 
de  l'Eglife  ,  les  dehors  de  l'Abbaye  ,  les  greniers ,  l'auditoire , 
&  les  halles.  La  perte  des  Moines  fut  évaluée  à  fix  mille  livres 
monnoie  du  temps. 

SAINT  -  MAUDÊ  -,  fur  une  hauteur  ;  à  4  lieues  &:  demie  au 


33^  S  AI     ■ 

Sud  -  Sud  -  Ouefl  de  Saint  -  Malo  ,  fon  Evêché  j  à  1 2  lieues  de 
Rennes  ;  &c  k  i  lieue  &  demie  de  Dinan ,  fa  Subdélégation. 
On  y  compte  250  communiants.  Le  territoire  renferme  des 
terres  bien  cultivées ,  quelques  prairies ,  un  petit  bois ,  &  des 
landes.  L'Eglife  eu  dédiée  à  Saint  Maudé ,  qui ,  félon  quelques 
écrivains ,  étoit  fils  d'Ereleurs  ,  Roi  d'Hibernie  ,  qui  confacra  ce 
fils  à  Dieu  avant  fa  naifîance  ,  comme  la  dîme  de  fa  famille. 
Maudé  arriva,  difent-ils ,  en  Bretagne  vers  l'an  528  ,  &  fe  re- 
tira où  eft  aujourd'hui  la  ParoifTe  de  Lanmodez ,  dans  le  diocefe 
de  Tréguier ,  &  après  fa  mort  on  conilruifit  l'Eglife  paroif- 
fiale  qui  lui  fut  dédiée ,  &  qui  porte  encore  aujourd'hui  fon 
nom.  On  prétend  que  dans  la  fuite  elle  fut  donnée  aux  Tem- 
pliers. On  remarquoit  encore  ,  il  y  a  quelques  années ,  les  vef- 
tiges  d'un  cloître  &:  des  figures  en  bas  relief  autour  de  la 
Croix  du  cimetière  ,  qui  annoncent  être  de  la  plus  grande  anti- 
quité. L'ancienne  Eglife  ,  qui  étoit  très-belle  ,  ne  pouvant  fubfifter 
par  fa  vétullë  ,  vient  d'être  reconlliuite  fur  un  nouveau  plan. 
La  Cure  ell  un  Prieuré  ,  avec  *  haute  -  Juftice  ,  préfenté  par 
FAbbé  de  Montfort ,  &  c'efl  le  Refteur  ou  Prieur  qui  eft  Sei- 
gneur de  la  ParoifTe.  Le  château  Thomas  eft  une  maifon  noble 
qui  appartient  à  M.  Thomas  Goyon. 

SAINT-MAUGAN  j  à  12  lieues  au  Sud  de  Saint-Malo ,  fon 
Evêché  ;  à  7  Heues  de  Rennes ,  fon  refîbrt  ;  &  à  2  heues  de 
Montfort ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  750  communiants: 
la  Cure  eft  préfentée  par  l'Abbé  de  Saint-Jacques  de  Montfort. 
Le  territoire  ,  coupé  au  Sud  par  la  rivière  de  Muel ,  offre  à 
la  vue  un  terrein  plan  &  couvert  d'arbres ,  des  terres  bien 
cultivées  ,  quelques  prairies ,  &  des  landes.  La  maifon  noble 
du  Vau-Ferrier,  avec  haute  -  Juftice ,  appartenoit ,  en  1370,  à 
Jean  de  Vau-Ferrier ,  &  aujourd'hui  à  M.  du  Vau-Ferrier,  de  la 
même  famille  :  en  1400  ,  la  Haye-des-Hêtres  &  la  Baffe- Ardaine, 
à  Jean  du  Vau-Ferrier;  aujourd'hui,  avec  moyenne  -  Juftice  ,  à 
M.  Thomas  de  la  Baffe -Ardaine  :  la  Sanneliere ,  à  Louis  de  la 
Chaffe  j  Montorai,  à  Jean  Damont  de  la  Regneraie  j  la  Mouf- 
fardiere ,  à  Guillaume  de  Saint-Malon  j  la  Houffaye ,  à  Pierre 
Godet  j  &  la  Cognardiere ,  à  Briant  de  Miniac.   - 

SAINT-MAURICE-DE-CARNOET  -,  Abbaye  de  l'Ordre  de 
Cîteaux;  à  10  lieues  à  l'Eft-Sud-Eft  de  Quimper  ,  fon  Evêché  j 
à  3 1  heues  de  Rennes  ;   Se  k   i  lieue  6l  demie  de  Quimperlé. 

Cette. 


.    ^^  ^  ,  337 

Cette  Maifon  ,  fituée  près  la  rivière  de  Laîta ,  à  l'entrée  de  la 
forêt  de  Carnoët ,  fut  bâtie ,  l'an  1 1 70  ,  par  Saint  Maurice , 
avec  l'agrément  du  Duc  Conan  IV,  qui,  outre  l'emplacement, 
donna  encore  plusieurs  autres  domaines  à  ce  faint  Relif^ieux. 
Saint  Maurice,  premier  Abbé  &  fondateur  de  ce  Monaftere, 
étoit  né  en  la  ParoiiTe  de  Loudéac  ,  au  diocefe  de  Saint-Brieuc  ; 
il  tira  tous  fes  Religieux  de  l'Abbaye  de  Langonnet ,  dont  il 
avoir  été  ci-devant  Abbé  ,  &  gouverna  fagement  fon  Monaftere 
jufqu'au  5  O6}obre  1191  ,  jour  de  fa  mort.  Cette  Abbaye  a 
confervé  le  nom  de  fon  fondateur.  Guillaume  de  Kerifper , 
Abbé  de  Saint  -  Maurice  ,  fit  faire  ,  en  1 407 ,  le  chœur  de 
l'Eglife  &  plusieurs  ornements.  Henri  de  Coeflrieux  fit  faire  les 
chaires  en  1472  j  la  belle  Croix  de  vermeil,  qui  fe  confervé 
dans  l'Abbaye ,  eu  due  à  l'Abbé  Bizien  de  Kerampuil ,  qui  la 
donna  en  1505.  Pierre  du  Vieux  -  Châtel ,  pourvu  de  cette 
Abbaye  en  1583,  fit  travailler  aux  réparations  des  bâtiments 
de  fon  Abbaye  ,  qui  ayoient  été  très-négUgés  par  fes  prédécef- 
feurs.  Il  étoit  occupé  de  ces  travaux,  lorfque,  pendant  les  hor- 
reurs de  la  Ligue  en  1590,  il  fut  tué  par  des  payfans.  La 
forêt  de  Carnoët  appartient  au  Roi  j  ^elle  contient  mille  quatre 
cents  arpents  de  terrein  en  futaie  &  taillis  ,  &  plus  de  fix 
cents  arpents  en  landes ,  où  Ton  pourroit  faire  avec  fuccès  des 
plantations.,  fi  le  fol  n'étoit  pas  propre  au  grain. 

On  voit  encore  les  vefiiges  de  l'ancien  château  de  Carnoët, 
qui  avoit  fon  parc  avec  fa  forêt ,  anciennement  appellée  de 
Mendaon.  Les  Ducs  y  réfidoient  quelquefois.  La  forêt  avoit  alors 
plus  de  fept  lieues  de  périphérie  ,  &  étoit  entourée  de  douves  & 
de  murs  dont  on  connoît  encore  la  continuité.  Ces  douves  & 
ces  murs  pafToient  la  rivière  de  Laita ,  &  renfermoient ,  du  côté 
de  Vannes ,  des  bois  taillis  d'une  étendue  confidérable ,  bien 
diminués  depuis  ce  temps  j  mais  ce  qui  en  refie  dépend  tou- 
jours de  la  forêt  :  ils  font  appelles  les  bols  du  Duc ,  comme  ces 
immenfes  clôtures  font  appeilées  les  murs  du  Roi.  Dans  les  en- 
virons ,  on  trouve  plufieurs  veftiges  de  retranchements. 

SAINT-MAYEUX  ;  à  18  lieues  à  l'Eil-Nord-Ell  de  Quimper, 
fon  Evêché  ;  à  22  lieues  de  Rennes;  &  à  4  lieues  de  Quintin, 
fa  Subdélégation.  Cette  Paroifle  reffortit  à  Plocrmel ,  &  compte 
2700  communiants  ,  y  compris  ceux  de  Caurcl  &  du  Vieux- 
Marché  ,  fes  trêves  :  la  Cure  eft  à  l'altc rnati\e.  Le  territoire 
offre  à  la  viic  des  terres  en  labeur ,  quelques  prairies ,  beaucoup 
Tome  IF.  V  2 


358  SAI 

de  landes,  Se  des  mines  de  fer.   Le  manoir   de  Saint -Dridaiî 
appartenoit ,  en  1450,  à  Henri  Rouffeau. 

SAINT-MEAUDAN  ;  à  9  lieues  au  Sud  de  Saint-Brieuc ,  fon 
Evêché  j  à  17  lieues  de  Rennes  ;  &  à  6  lieues  de  Joffelin ,  fa 
Subdélégation.  Cette  ParoifTe  refTortit  à  Ploermel,  &  compte 
400  communiants  :  la  Cure  efl:  à  l'alternative.  Le  territoire  ,  arrofé 
des  eaux  de  la  rivière  d'Ouft  &  coupé  de  ruifleaux ,  renferme 
des  terres  bien  cultivées ,  des  prairies ,  &  des  landes  -,  il  produit 
du  cidre. 

SAINT  -  MÉEN  ;  gros  bourg ,  fur  la  route  de  Dinan  à  Ploer- 
mel j  à  1 1  lieues  au  Sud-Sud-OuefI:  de  Saint-Malo  ,  fon  Evêché  j 
à  8  lieues  trois  quarts  de  Rennes  ^  &  à  3  lieues  de  Montauban , 
fa  Subdélégation.  Cette  ParoifTe  reifortit  à  Ploermel ,  &  compte 
1500  communiants  :  la  Cure  efl:  préfentée  par  les  Direfteurs  du 
Séminaire.  Trois  grandes  routes  aboutilTent  à  ce  bourg ,  où  l'on 
voit  un  Hôpital ,  &  où  il  fe  tient  deux  foires  confîdérables  de 
befliaux  par  an ,  &  un  marché  par  femaine.  Le  territoire ,  cou- 
vert d'arbres  &  buifTons ,  renferme  la  forêt  de  Saint-Méen ,  qui 
appartient  au  Séminaire  ,  &  qui  contient  environ  deux  cents 
quatre-vingts  arpents  ,  des  terres  bien  cultivées ,  des  prairies ,  Se 
des  landes  -,  il  produit  beaucoup  de  cidre.  Les  Jurifdi61ions  de 
l'endroit ,  font  :  Saint-Méen  ,  haute- Juftice  ,  à  M.  TAbbé  de  Saint- 
Aubin  ;  Crouaix ,  haute-Juftice ,  à  M.  le  Prieur  Lazarifte  ;  l'Au- 
mônerie  ,  moyenne  -  Juftice ,  aux  Millionnaires  de  Saint-Méen  j 
Couaridouc  ,  baffe-Juftice  ,  à  M.   de  Couaridouc. 

Le  Monaftere  de  Saint-Méen  fut  bâti  l'an  565  ,  fi  l'on  s'en 
rapporte  aux  annales  Eccléfiaftiques  de  France  ;  & ,  en  600  ,  fi 
l'on  en  croit  Dom  Morice,  Hillorien  de  Bretagne,  par  Saint 
Méen,  qui  obtint,  pour  cet  effet,  l'agrément  du  Roi  Hoël.  Le 
territoire  étoit  alors  plein  de  bois  &  très-favorable  à  des  Reli- 
gieux qui  doivent  chercher  la  folitude.  Saint  Méen  y  appella 
des  Moines  de  l'Ordre  de  Saint  -  Benoît ,  Se  les  gouverna  en 
qualité  d'Abbé.  C'efl  cette  Abbaye  qui  a  donné  naiffance  au 
bourg ,  ou  à  la  petite  ville  de  Saint-Méen ,  que  l'on  appelle  aufîi 
Saint-Jean  de  Saint-Méen. 

Hoël  III ,  Roi  de  Bretagne ,  eut  de  Pratelle  ,  fon  époufe , 
vingt-un  enfants.  Judicaël ,  l'aîné  de  tous ,  prit  l'habit  de  Saint- 
Benoît  ,  Se  reçut  la  tonfure  par  le  minillere  de  Saint  -  Méen. 
Après  quinze  ans  de  folitude   dans   cç  Monaflere  ,  il  le  quitta , 


s  A  I  339 

Se  força  Salomon ,  Ton  frère ,  à  lui  céder  la  Couronne ,  qui  lui 
appartenoit  en  qualité  d'aîné.  Quelques-uns  ont  prétendu  qu'il 
ne  quitta  le  cloître  qu'après  la  mort  de  Salomon.  Quoi  qu'il  en 
foit ,  Judicaèl  monta  fur  le  Trône ,  &  ne  vécut  pas  en  bonne 
intelligence  avec  les  Français.  Le  Roi  Dagobert  lui  envoya 
Eloy ,  depuis  Evêque  de  Noyon ,  qui  fe  plaignit  ,  au  nom  de 
fon  maître  ,  des  courfes  &  des  ravages  que  les  Bretons  faifoient 
fur  les  terres  de  fon  obéifTance.  Judicaèl,  qui  aimoit  la  paix,  fe 
rendit  à  la  Cour  de  France  pour  terminer  les  différents  à  l'a- 
miable. De  retour  ert  Bretagne ,  Hoel,  ennuyé  du  rang  fuprême  , 
ne  tarda  pas  à  abdiquer  une  Couronne  pour  laquelle  il  n'avoit 
eu  qu'un  goût  paiTager.  Il  reprit  l'habit  Monailique  ,  qu'il  porta 
encore  vingt  ans,  &:  mourut  dans  fa  folitude ,  le  17  Décembre 
659.  L'Eglife  l'a  mis  au  rang  des  Saints,  &  il  elt  honoré  en 
Bretagne  fous  le  nom  de  Saint  Gicquel  ,  Roi  des  Bretons. 
Ce  Prince  fit  beaucoup  de  donations  à  fon  Abbaye ,  &:  en 
augmenta  considérablement  l'édifice  ;  mais  il  fut  ruiné  fur  la 
fin  du  huitième  fîecle ,  vraiferablablement  par  les  Barbares  du 
Nord.  Enogat,  qui  en  étoit  Abbé,  étant  devenu  Evêque  d'Aleth, 
obtint  du  Roi  Charlemagne  la  permifîion  de  le  rebâtir  ,  &  ce 
Monarque  confirma  à  ce  Monaflere  tous  les  biens  qui  en  dé- 
pendoient.  Louis  le  Débonnaire  lui  accorda  la  même  faveur 
en  816. 

L'an  1 000  ,  Alain  III ,  fils  du  Duc  GeofFroi  I ,  donna  à  Hu- 
gueton  ,  Abbé  de  Saint-Méen  ,  les  Terres  &  Seigneuries  de  Gaèl , 
de  Trémorel  ,  &  de  Quédillac  ,  avec  les  forêts  de  Saint-Méen  , 
de  Recan  ,  de  Hâte ,  &  de  Treucar ,  fituées  dans  le  voifinage 
de  fon  Abbaye.  De  ces  quatre  forêts  ,  nous  ne  connoifTons  plus 
que  celle  de  Saint-Méen,  alors  très- étendue ,  &  aujourd'hui 
prefque  réduite  à  rien.  Quand  Alain  fut  fur  le  Trône ,  il  établit 
à  Saint-Méen  un  change  d'or  &  d'argent  ,  avec  permifTion 
à  l'Abbé  &  aux  Moines  d'en  haufTer  ou  baiffer  le  prix.  Comme 
ce  Monaflere  avoir  été  ruiné  par  les  Normands,  le  Duc  &  la 
DuchefTe  Havoife ,  fa  mère  ,  chargèrent  l'Abbé  de  Saint  -  Jacut 
de  le  rétablir.  Il  exécuta  ces  ordres  d'autant  plus  facilement 
qu'on   lui  fournit  tout  l'argent  dont  il  avoit  beibin. 

En  II 50,  les  Religieux  de  Saint-Méen,  voyant  le  défordre 
qui  regnoit  dans  leur  maifon  ,  tant  par  la  négligence  de  leur 
Abbé    que  par    leur    propre  inexaditude ,  réfolurent  de  le  dé- 

ofer  &  d'en  élire  un  autre  plus  digne  d'occuper  cette   place. 

Is  firent  part   de  leur    dcffein  a    l'Archevêque  de  Tours ,  qui 


r. 


340  S  A  I 

les  approuva ,  Se  qui  confirma  même  Téleftion  qu'ils  en  avoient 
faite  ;  mais  dans  la  fuite  il  changea  de  fentiment.  Le  nouvel 
Abbé  fut  perfécuté  par  fes  Ordres ,  &  même  traité  indignement. 
Les  Moines  de  Saint-Méen ,  voulant  mettre  fin  à  tant  de  fcan- 
dales,  écrivirent  au  Pape  Eugène  III.  Nous  ignorons  la  fuite 
de  l'affaire. 

L'an  1182,  Raoul,  Evêque  d'Angers;  Herbert,  Archidiacre 
de  la  même  ville  ;  &  Simon ,  Abbé  de  Savigni ,  rendirent  un 
Jugement  qui  porte,  que  les  Moines  de  Paimpont  doivent  re- 
connoître  &  honorer  ,  comme  leur  légitime  Abbé  ,  celui  de  Saint- 
Méen  ,  &  qu'on  ne  doit  point  nommer  de  Prieur  à  Paimpont , 
fans  le  confentement  de  l'Abbé  &  des  Moines  de  cette  Abbaye. 

Pierre  CornuHer ,  Evêque  de  Rennes  &  Abbé  de  Saint-Méen , 
efi:  le  fondateur  du  bel  Hôpital  qui  fert  à  loger  'les  pauvres  & 
les  pèlerins  qui  viennent  en  voyage  à  Saint-Méen  pour  la  galle 
ou  lèpre  blanche.  Ce  Prélat  mourut  le  22  Juin  1639.  Achille 
de  Harlai  de  Sanci ,  Evêque  de  Saint-Malo ,  fut  nommé  à  l'Ab- 
baye de  Saint-Méen  au  mois  d'Août  1639,  ^'  ^^  ^^  Oftobre 
1643  ,  il. obtint  la  permifiion  d'ériger  un  Séminaire  dans  cette 
Abbaye.  Cette  permifîion  fut  confirmée  par  lettres-patentes  du 
mois  de  Mars  1 646  ,  portant  union  de  la  Menfe  conventuelle  des 
offices  clauftraux  &  des  bâtiments  de  l'Abbaye  au  Séminaire  qui 
avoir  été  donné  aux  Lazariftes.  En  1400  ,  ce  territoire  renfermoit 
les  maifons  nobles  du  Bois-Riou,  à  Jean  des  Salles,  &  de  la  Gra- 
velle  ,  à  Georges  Befchart. 

SAINT-MELOIR-DES-ONDES  ;  â  i  lieue  trois  quarts  à  l'Efl 
de  Saint-Malo,  fon  Evêché  &  fa  Subdélégation;  &  à  13  lieues 
de  Rennes.  Cette  ParoilTe  refTortit  à  Dinan  ,  &  compte  1700 
communiants  :  la  Cure  eft  préfentée  par  l'Abbé  du  Mont-Saint- 
Michel ,  dont  les  Moines  ont  deffervi  cette  Cure  jufqu'en  1515: 
qu'on  y  nomma  un  Prêtre  fécuHer.  La  haute-JulHce  de  l'endroit 
appartient  encore  au  Mont-Saint-Michel.  Ce  territoire,  borné 
à  l'Ell:  par  la  mer ,  eil:  traverfé  du  Nord  au  Sud  par  un  côteau- 
Les  terres  font  très-fertiles  &  très-exaftement  cultivées.  On  re- 
marque plufieurs  maifons  nobles  dans  cette  Paroiffe.  Celle  nom- 
mée le  château  Richeux ,  appartenoit ,  en  1 090 ,  à  Bertrand  & 
Ohvier  du  Guefclin ,  frères  ,  qui  avoient  chez  eux  un  neveu , 
nommé  Pierre  ,  avec  lequel  ils  s'enrôlèrent  pour  le  premier  voyage 
de  la  Terre-Sainte,  en  1096.  Bertrand  du  Guefclin  II  du  nom, 
dit  k  Jeune  ,  fut    obligé ,  en  1 1 60  ,  d'abandonner   fon   château 


s  A  I  341 

Richeux ,  parce  que  ,  dans  ces  temps  de  guerre ,  cette  place , 
fîtuée  au  bord  de  la  mer ,  étoit  expofée  à  tous  les  ravages  des 
ennemis.  Il  fe  retira  dans  la  Paroifle  de  Saint-Coulomb  ,  dont 
la  Seigneurie  avoir  été  acquife  par  fes  ancêtres. 

En  1 500,  les  maifons  nobles  de  Saint-Meloir-des-Ondes  étoient: 
le  Prieuré ,  aux  Moines  du  Mont-Saint-Michel  j  Treleix  ,  à  Jac- 
ques de  la  Motte  ;  Limonaye ,  à  Jean  l'Evêque  j  Vauleraut ,  à 
Catherine  Remelin  -,  Tronc-Noble,  à  Raoul  Houel  ;  la  Chapelle- 
Maltere  ,  à  Jean  Martin  :  la  Coudre  ,  à  Rolland  Rouxel  ;  aujour- 
d'hui,  avec  moyenne-Juftice,  aux  héritiers  de  M.  Bâillon  :  les 
Clos-Nobles  ,  à  Guillaume  de  Chateaubriand  ,  Sieur  de  Beaufort  j 
la  Tréhaunai ,  à  Jean  Cohu:  le  Fléchai,  à  Henri  de  Québriacj 
aujourd'hui  à  M.  le  Fer  de  la  Bargoulai  :  la  Jaunaye  ,  à  Oli- 
vier Chaton  ;  le  Pont-Perrin  ,  à  Berthelot  Chevaher  -,  la  Ville- 
Volans ,  à  Jean  le  Filleux  ;  la  Bardoulaye ,  à  Etienne  Bardoul  ; 
Limonaye ,  à  Jean  le  Clerc  5  la  Prohorie  ,  à  Henri  Main  -,  les 
Fouefnays  ,  à  Hamon  Martin  j  la  Ville-Aufrai ,  à  Jean  Bonnierj 
Langanan,  à  Gilles  Barlet  ;  la  Villes-Gilles,  à  Guillaume  Tirgot; 
la  Barbotaye  ,  à  Etienne  Picot  ;  Tregeuri ,  à  Rolland  Poile\'é  ; 
le  Tertre,  à  Raoul  Regnaud.  En  1572,  Jean  le  Gobien,  Séné- 
chal de  Saint-Malo ,  pofTédoit  la  maifon  noble  des  Douets. 
Charles  le  Gobien  fut  Chevalier  de  Saint-Michel,  &  Guillaume, 
Dofteur  de  Sorbonne.  La  Terre  des  Douets,  avec  baffe- JulHce, 
appartient  préfentement  à  M.  de  la  PaHer-Chrifti  :  les  Landes , 
haute-Juftice ,  à  M.  de  Nouail ,  qui  poffede  auffi  la  Virgile  ;  le 
Val-Ernoul ,  moyenne-Juffice ,  à  M.  Robert  de  la  Mcnnais  ;  la 
Chenais-au-Boutciller ,  à  M.  de  Treffes  ;  la  Reinbaudais  &  le 
Haut-Affis ,  baffe-Juftice ,  à  M.  Hébert  de  la  Porte-Barré  ;  Blef- 
fain  ,  baffe-JulHce  ,  à  M.  de  la  Pluffinais  le  Breton  ;  le  Pavillon, 
à  M.  du  Chênaie-Poulain  j  la  Jaunaye,  à  M.  du  Clos-Joliff  ;  la 
Blanche,  à  M.  Grou  de  Belefmc  j  le  Parc  &  le  Bois-Garin,  à 
M.  du  Bois-Garin-Magon;  le  Parc  des  Ormes,  à  M.  de  Samt- 
Gilles  i  Beauregard  ,  à  M.  de  la  Boifîiere,  ancien  Conieiller  au 
Parlement;  &C  Vautouraude,  à  M.  du  Fougerai-Garnier.  Il  y  a 
quelques  années  que  l'on  trouva  ,  dans  un  champ  de  terre  dé- 
pendant de  cette  maifon  ,  plufieurs  morceaux  de  fonte  :  ces 
morceaux  reffemblent  à  des  bayonnettes  ou  à  des  couteaux 
de  cuifine. 

SAINT-MELOIR-PRÉS-EOURSEUL;  à  7  lieues  &:  demie  à 
POueft-Sud-Cueil  de  Dol ,    Ion  Evéchéjà  12  lieues  de  Rennes  j 


î4^  S  A  I  ^  ^     ^ 

&  à  <  lieues  de  Lamballe ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  ref- 
fortit  à  Dinan  ,  &  compte  250  communiants:  la  Cure  eft  à 
l'Ordinaire.  Le  territoire  ,  couvert  d'arbres  &  buiflbns ,  renferme 
des  terres  en  labeur ,  des  prairies ,  &  des  landes  ;  on  y  fait  du 
cidre.  Tremigon  eft  une  famille  ancienne  en  Bretagne.  Evrard 
de  Tremigon  fut  Evêque  de  Dol  en  1385.  Triftan  de  Tremigon 
fut  Chevalier  de  l'Ordre  du  Roi.  Les  maifons  nobles  fuivantes 
exiftoient ,  en  1500,  dans  cette  ParoifTe  :  la  Porte  ,  à  François 
le  Febvre  ;  Saint-Samfon  ,  à  Olivier  Hus  ;  le  Bois-Roland ,  à 
Raoul  le  Begafîbux  ;  la  Villeras ,  à  Louis  du  Fournet  j  la  Ville- 
Rue  appartient  à  M.  de  Tremigon  j  &  le  Mirois ,   à  N..... 

SAINT-MELOIR-SOUS-HÉDÉ  ;  dans  un  fond  ;  à  5  lieues 
un  tiers  au  Sud  de  Dol ,  fon  Evêché  ;  à  5  lieues  deux  tiers  de 
Rennes  ;  &  à  deux  tiers  de  lieue  de  Hédé ,  fa  Subdélégation  & 
fon  reflbrt.  On  y  compte  600  communiants  :  la  Cure  eft  à 
l'Ordinaire.  Cette  Paroiffe  eft  enclavée  dans  le  diocefe  de  Saint- 
Malo  5  &  le  territoire  eft  plein  de  monticules  &  de  vallons.  On 
y  remarque  des  terres  en  labeur  ,  quelques  prairies ,  des  landes , 
&  des  arbres  à  fruits  j  on  y  connoît  la  maifon  noble  de  la  Bar- 
botay  :  on  y  voit  un  monument  des  Romains ,  qui  s'eft  très-bien 
confervé.  Ce  font  quatre  pierres  anciennes,  en  forme  d'étoiles, 
dont  l'une  eft  creufe  &  percée  pour  laifter  couler  la  liqueur  des 
libations  que  les  Payens  faifoient  en  l'honneur  des  morts.  On 
y  lit  cette  infcription: 

IMP,  CAES. 
AVONIO'FICTORINO 

F:  E:  F:  I:S:  C O 

qu'on   veut  interpréter  ainfî  : 

Imperatori  Ccefarl  y  Avonio  P^i&onno  ^  patrl  exercituum  ,  Pnn- 
cipi  invicio  ,  S enatus-confulto  ,  libenus  ejus  vivens  curavit  j  ou  ,  ft 
on  aime  mieux  :  Imperatori  Cœfarl  ,  Avonio  Viclorino  ,  pio , 
feiici  5  Principi  invicio  ,  S  enatus-confulto  ,  legatus  ejus  vovet ,  con- 
fecrat.  Car  il  paroît  qu'au  lieu  de  F,  E,  comme  dit  Lobineau, 
il  faut  lire  F.  F.  on  trouve  Avonius  F,  F,  mais  jamais  Avo- 
nius  F,  E,  Viftorinus  fut  tué  par  fes  foldats  en  267  ,  ou  au 
commencement  de  268 ,  &  fut   fur  le  champ  mis   au   nombre 


s  A  I  34J 

des  Dieux.  Sur  quelques  monnoies ,  on  trouve  Plvanlus ,  Plavo- 
nius ,  &  Piovonius ,  au  lieu  de  XAvonius  de  notre  infcription.  En 
1728,  on  imprima  à  Paris,  chez  Simart ,  que  les  lettres  P.  I, 
foit  qu'elles  fuflent  mifes  avant  ou  après  le  mot  Avonio ,  don- 
noient  le  même  fens ,  &  iignifioient  Prince  invuicibU, 

SAINT-MERVON  ;  à  10  lieues  au  Sud-Sud-Ouefl  de  Dol, 
fon  Evêché  j  à  7  lieues  de  Rennes ,  fon  reflbrt  ;  &  à  i  lieue 
de  Montauban ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  300  commu- 
niants :  la  Cure  efl:  à  l'alternative.  Cette  Paroifî'e  fe  trouve  en- 
clavée dans  le  diocele  de  Saint-Malo.  Le  territoire  ,  couvert 
d'arbres  &  buiiïons ,  renferme  des  terres  en  labeur  ,  des  prai- 
ries, &  des   landes. 

SAINT-MESMES  -,  fur  la  rivière  du  Tenu  ;  à  6  lieues  au  Sud- 
Oueft  de  Nantes,  fon  Evêché  &  fon  reflbrt  ;  à  28  lieues  de 
Hennés  ;  &  à  i  lieue  de  Machecou ,  fa  Subdélégation.  On  y 
compte  500  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'Ordinaire.  Le  terri- 
toire ell  excellent ,  &  produit  du  froment  &  des  pâturages  en 
abondance.  La  rivière  du  Tenu  forme  ,  dans  cette  Paroilie ,  un 
petit  port  très- fréquenté  par  de  petites  barques  qui  vont  à 
voiles  &  à  rames  lur  cette  rivière  ,  qui  communique  d'un  côté 
au  lac  de  Grand-Lieu ,  &  de  l'autre  à  la  Loire.  Ce  port 
feroit  bien  plus  avantageux  fi  l'on  creufoit  un  canal  dans  la 
longueur  feulement  de  trois  quarts  de  lieue ,  c'eil-à-dire ,  jufqu'à 
Machecou ,  où  il  fe  joindroit  avec  le  canal  qui  de  Machecou 
communique  à  la  mer  :  alors  le  canal  que  nous  avons  pro- 
pofé  pour  Saint-Jean-de-Corcoué  ,  pour  Saint-Mefmes  ,  y  auroit 
aufTi  communication  3  &  alors  le  fertile  pays  de  Retz  devien- 
droit  fans  doute  le  plus  riche  de  la  France.  La  province  a 
déjà  commencé  à  fcivorifer  le  commerce  de  Saint-Mefmes, 
puifqu'elle  a  fait  tracer  un  grand  chemin  qui  conduit  de  ce 
bourg  à  Machecou.  Que  l'on  examine  le  local ,  &  on  verra 
combien  ce  projet  efl:  digne  de  fixer  l'attention ,  par  les  avan- 
tages réels  qu'il  promet.  En  1420,  les  maifons  nobles  de 
l'endroit  étoient  :  la  Ganiere  &  le  domaine  du  Bois-Foucaud , 
à  Maurice  Poilevin  ;  le  temple  &  l'Ebergement  du  Pin,  à  Pierre 
de  la  Landelle  j  l'Ebergement  de  Geneft-Jalian  ,  à  Jean  le 
Blanc  ;  la  maifon  de  la  Pichoterie  ,  à  Sylveftre  Goui.  Les 
Moines  de  la  Chaume  avoient ,  dans  le  même  temps ,  une 
maifon  franche   dans  la  ParoiiTe, 


344  S  Aï 

SAINT-MHERVÉ  ;  à  9  lieues  un  tiers  à  PEft  de  Rennes,  Ton 
Evêché  &  fon  reflbrt  j  &  à  i  lieue  trois  quats  de  Vitré,  fa 
Subdélégation.  On  y  compte  2000  communiants  :  la  Cure  efl 
préfentée  par  M.  de  Châteaugiron.  Le  territoire ,  borné  à  une 
demi-lieue  à  l'Eft  par  la  province  du  Maine  ,  renferme  des 
terres  très-exaftement  cultivées  ,  &  produit  beaucoup  de  cidre  j 
on  n'y  voit  ni  bois ,  ni  landes.  Au  Nord  du  bourg ,  eu.  un  coteau 
ik  une  monticule  ,  nommée  /a  Piverdiere ,  qui  forme  un  très-beau 
point  de  vue.  Cette  montagne  eil:  traverfée  par  le  chemin  de 
Vitré  à  Erné  dans  le  Maine.  La  moyenne-Juftice  de  la  Bourga- 
tiere  &  la  baffe-JuHice  de  la  Malerie  ,  appartiennent  à  M.  de 
la  Bourgatiere. 

SAINT -MICHEL-DE -CHEF -CHEF;  à  10  lieues  à  l'Oueft 
de  Nantes,  fon  Evêché  &  fon  reflbrt  ;  à  24  lieues  de  Rennes; 
&  à  3  lieues  de  Paimbœuf ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte 
600  communiants  :  la  Cure  efl  à  l'Ordmaire.  Le  territoire , 
borné  à  TOuefl  par  la  mer,  renferme  des  terres  bien  cultivées, 
quelques  prairies  ,  &  beaucoup  de  landes  dont  le  fol  paroît 
mériter  les  foins  du  cultivateur.  Les  habitants  font  prefque  tous 
marins  &  pêcheurs ,  &  voilà  pourquoi  l'agriculture  eil  ii  négli- 
gée dans  cette  ParoifTe.  Charon  ,  haute-Juilice  ,  aux  héritiers  de 
M.  Michel;  Souchais  ,  moyenne-Juftice  ,  à  M.  de  Peillac. 

Vers  l'an  11 04,  Garfire  de  Retz  donna  l'Eglife  de  Saint- 
Michel -de-Chef-Chef  à  l'Abbaye  de  Saint- Serge  d'Angers  ,  qui 
y  établit  une  Communauté  de  Moines,  qu'on  y  voyoit  encore 
en  1 206.  Jean  III  du  nom ,  dit  de  Maleftroit ,  nommé  Evêque 
de  Nantes  en  1 4 1 9 ,  acquit  de  Gilles  de  Retz  la  ParoilTe  de 
Saint-Michel-de-Chef-Chef ,  avec  les  Terres  de  Prigné  ,  de  Vue  , 
du  Bois-Tréan  ,  &  plufieurs  autres  fituées  dans  le  pays  de  Retz , 
pour  une  fomme  de  quatorze  mille  écus  d'or ,  ce  qui  feroit  au- 
jourd'hui deux  cents  mille  livres. 

SAINT -MICHEL -EN -GREVE;  fur  la  route  de  Morlaix  à 
Lannion;  à  5  lieues  &  demie  à  l'Oueft-Sud-Oueft  de  Tréguier, 
fon  Evêché;  à  33  lieues  de  Rennes;  &  à  2  lieues  de  Lannion, 
fa  Subdélégation  &  fon  reifort.  On  y  compte  400  communiants  ; 
la  Cure  eft  à  l'alternative.  Il  fe  tient  dans  l'endroit  deux  foires 
confidérables  par  an.  Le  territoire  ,  borné  au  Nord  par  la  mer, 
renferme  des  terres  bien  cultivées ,  &  une  grève  de  fable  qui 
commence  à   la  fortie   du  bourg  &  qui  peut  contenir  environ 

douze 


s  A  I  345 

douze  cents  journaux  de  Bretagne.  Vers  le  milieu  de  cette  grève, 
eft  une  croix  de  pierre  plantée  fur  un  rocher  :  elle  eft  couverte 
pendant  les  grandes  marées.  Les  habitants  du  heu  prétendent 
qu  elle  eft  placée  dans  l'endroit  où  débarqua  Samt  Eflam ,  en 
arrivant  d'Irlande ,  fa  patrie ,  &  que  cette  grève  étoit  alors  oc- 
cupée par  une  forêt  très-fpacieufe. 

SAINT-MOLF;  à  15  lieues  à  l'Oueft-Nord-Oueft  de  Nantes, 
fon  Evêché  ;  à  24  lieues  de  Rennes  ;  &  à  2  heues  de  Guérande  ,  fa 
Subdélégation  &:  fon  reffort.  On  y  compte  800  communiants: 
l'Eghfe  &  la  Cure  relèvent  du  Roi  ;  cette  dernière  eil  à  l'Or- 
dinaire. Le  territoire  ell  coupé  au  Nord  par  un  bras  de  mer  qui 
procure  aux  habitants  la  faciHté  de  faire  du  fel.  Au  Sud  ,  on 
«pperçoit  une  immenfe  étendue  de  landes ,  dont  le  fol  paroit 
mériter  les  foins  du  cultivateur  ;  mais  comme  la  plupart  des 
habitants  font  marins ,  pêcheurs  ,  ou  paludiers  ,  ils  négligent 
l'agriculture  ,  ou  l'abandonnent  aux  femmes ,  qui ,  quoique  très- 
aftives  ,  n'ont  point  aflez  de  forces  pour  tirer  de  leurs  terreins 
tout  le  parti  qu'on  pourroit  en  attendre.  Les  maifons  nobles  de 
cette  Paroifîe  ,  font  :  le  grand  &  petit  Quifillre,  compofant ,  avec 
la  Terre  de  Tréhembert,  en  la  ParoifTe  de  Mefquer  ,  le  Mar- 
quifat  de  BecdeUevre  ;  Clin  ,  moyenne  Se  baflb-Julbce,  à  M.  de 
Befné  ;  la  Salle-Branguen  ,  b  a  (Te- Ju  iHc  e  ,  aux  Jacobins  de  Gué- 
rande ;  Funfegat ,  à  M.  le  Flo  de  Kerleau  ;  Ker-guenec ,  à 
M.  le  Chauffi  le  Bois  de  la  Cour,  à  l'Abbaye  de  Prières  ^  & 
Ker-eilrauvuil ,  à  M.  le  Mée. 

SAINT-NAZAIRE  j  au  bord  de  la  merj  à  10  lieues  &  demie 
à  rOueft  de  Nantes,  fon  Evêché;  à  23  lieues  de  Rennes;  & 
à  4  lieues  de  Guérande,  fa  Subdélégation  &  fon  relfort.  Cette 
ParoifTe  relevé  du  Roi  ;  on  y  compte  3000  communiants  :  la  Cure 
eft  à  l'Ordinaire.  Le  territoire  eft  très-bien  cultivé  &:  fertile;  il 
produit  toutes  fortes  de  grains ,  le  meilleur  froment  du  Comté 
Nantais ,  du  vin  de  médiocre  qualité ,  &  beaucoup  de  loin. 
On  remarque  néanmoins,  dans  cette  ParoifTe ,  quelques  landes, 
&  un  banc  de  fable  trcs-étcndu  Sz  traverfé  par  le  grand  che- 
min de  Savenai  à  Guérande.  C'efl  dans  le  bourg  de  Saint- 
Nazaire  que  réfident  prefque  tous  les  pilotes  qui  entrent  dans 
la  Loire  les  vaifTeaux  marchands ,  &  les  conduifcnt  à  Paimbœuf. 
Le  port  de  Saint-Nazaire  ne  contient  que  des  barques  à  caufe 
du  grand  nombre  de  rochers  qui  fe  trouvent  dans  ce  port;  ro- 
Tome  IF.  X  2 


?4^  S  A  I 

chers  contre  lelqueîs  fe  briferoient  infailliblement  îes  navires  dans 
les  grands  vents.  11  faudroit ,  pour  la  fureté  de  ce  port ,  un  mole 
qui  avançât  au  moins  de  cent  cinquante  toifes  dans  la  mer.  Alors 
il  en  réfulteroit  deux  avantages  :  le  premier  ,  c'eft  que  ces  barques 
pourroient  refter  dans  ce  port  à  l'abri  de  ce  mole  j  &  le  fécond  , 
que  les  pilotes  pourroient  fortir  ,  même  pendant  la  tempête  ,  pour 
aller  fecourir  les  vaiiTeaux  qui  font  fouvent  jettes  par  les  vents  à  l'en- 
trée de  la  rivière  de  Loire,  où  ils  périfiént  allez  fouvent,  parce 
qu'il  eu  impofîible  aux  pilotes  de  fortir ,  dans  le  mauvais  temps^ 
fans  s'expofer  à  être  brifés  avant  d'avoir  évité  tous  les  écueils 
qui  bordent  la  côte.  Il  fe  tient  un  marché  par  femaine  à  Saint- 
Nazaire.  Il  s'y  exerce  pluHeurs  Jurifdiftions,  fçavoir  :  la  Motte- 
Allemand  ,  haute-Juftice  ,  à  M.  le  Chauff  ;  cette  Terré  étoit  pof- 
fédée ,  en  1400,  par  un  de  Volvire ,  enfuite  par  un  Guema- 
deuc  ;  en  1590,  par  N.  le  Valori  de  Seréac  -,  elle  paffa  depuis 
à  MM.  de  la  Rouziere  ,  qui  la  vendirent  à  MM.  de  la  Haye 
du  Sable  j  le  29  06lobre  1770,  M.  de  la  Haye  du  Sable  la 
vendit  à  M.  le  Chauff,  qui  la  poffede  aujourd'hui  :  le  Prieuré 
d'Aine,  haute-Juftice  ,  à  M.  le  Prieur  j  Bois-Jolan ,  haute-Juilice, 
&  Cleux,  haute-Juflice ,  à  M.  de  Ses-Maifons  :  Marzin ,  Vi- • 
comté  &  Baronnie  ,  &  Cleux-Coyaun  ,  haute-Juftice  ,  à  M.  de 
Viarme  &  aux  héritiers  de  Madame  de  Langan  ;  le  grand  Hen- 
ieix-Rofan,  haute-Juftice,  à  M.  Buart  j  Trébalé  ,  moyenne- Juf- 
tice  ,  à  M.  de  Crangal  -  Rote  ,  les  Boiilieres  ;,  moyenne  -  Juf- 
tice ,  à  Demoifelle  Martine  des  Boiffieres  ;  Henleix-Pommerais , 
moyenne-Juftice  ^  à  M.  de  Kermaflbn  ;  le  Pleffis ,  moyenne-Juf- 
tice ,  &  la  Ville-au-Févre  ,  moyenne-Juftice ,  à  M.  de  Siltz  j 
Paquelais  en  Méan ,  bafle-Juftice,  à  M.  de  la  Freloniere  j  Ben, 
baiie-Juftice ,    à     M.  Jégo. 

La  Paroifle  de  Saint-Nazaire  eft  très-ancienne.  L'hiftoire  nous 
apprend  qu'en  5  77  la  Bretagne  étoit  foumife  à  trois  Comtes , 
&  que  Varoch  ,  Comte  de  Vannes,  le  plus  puifTant  de  tous, 
avoit  un  château  à  Saint-Nazaire.  Ce  Prince ,  ayant  refufé  de 
payer  à  Chilperic  ,  Roi  de  France ,  le  tribut  ordinaire  ,  fut 
attaqué  par  une  armée  de  Français  ,  qu'il  eut  le  bonheur  de 
vaincre.  Varoch,  victorieux,  vient  à  Saint-Nazaire.  Un  de  fes 
Officiers  apprend  qu'on  a  fait  préfent  d'une  riche  ceinture  au 
Patron  de  cette  Paroifte ,  &  va  pour  s'en  emparer  j  cet  Officier 
eft  puni  de  mort.  Varoch  fe  foumet  au  Monarque  Français ,  & 
lui  donne  fon  fils  pour  gage  de  fa  fidélité.  Varoch  enrichit 
l'Eglife  de  Saint-Nazaire  de  plufieurs  bienfaits.  On  lit  dans  i'rlif- 


toire  Eccléfiaftique  du  Père  Thomaflin ,  qui  parle  d'après  Gré- 
goire de  Tours ,  qu'à  la  fin  du  fixieme  fiecle ,  un  Abbé  ,  ou 
Curé  de  Saint-Nazaire  ,  s'oppofa  à  l'enlèvement  d'une  offrande 
faite  à  fon  Eglife.  L'auteur  ne  nomme  pas  le  ravifleur ,  mais  le 
fait  prouve  que  Saint-Nazaire  avoit ,  dès  ce  temps-là  ,  le  titre 
de  Paroilfe. 

f  riold  ,  Seigneur  de  Donges ,  fonda ,  en  1079,  ^^  Prieuré 
de  Saint-Nazaire ,  auquel  il  donna  une  Chapelle  dédiée  a  Saint 
Jean-Baptifte  ;  il  donna  aufli  quelques  cantons  de  vignes  &  des 
terres  en  labeur  ,  avec  une  partie  des  dîmes ,  Se  un  four  qu'il 
avoit  dans  le  bourg.  En  même  temps ,  il  inftitua  une  foire  pour 
la  fête  de  Saint  Jean-Baptifte.  En  1178,  il  y  eut  une  conteita- 
tion  entre  le  Chapelain  qui  deflervoit  TEgHle  de  Saint-Nazaire 
&  les  Moines  du  Prieuré  du  heu.  Ces  derniers  vouloient  par- 
ticiper aux  oblations  de  l'Eglife ,  &  le  Chapelain  n'étoit  pas  dif- 
pofé  à  les  fatisfaire.  Robert  II  ,  Evêque  de  Nantes  ,  informé 
de  ces  conteftations,  les  termina  par  un  Jugement  qui  portoit, 
que  les  Moines  ne  pouvoient  avoir  aucunes  prétentions  fur  les 
revenus  de  l'Eglife ,  comme  le  Chapelain  n'en  avoit  aucunes 
fur  ceux  du   Prieuré. 

L'an  1380,  le  château  de  Saint-Nazaire  étoit  gardé  par  une 
forte  garnifon,  commandée  par  Jean  d'UftÇ  Capitaine  expéri- 
menté. Ce  Gouverneur ,  ayant  appris  que  les  Efpagnols  vou- 
loient  afîiéger  fa  place  ,  fit  des  provifions  en  tous  genres ,  &:  fe 
prépara  à  une  vigoureufe  réfiftance  :  il  fit  arborer,  fur  la  plus 
haute  de  fes  tours,  une  enfeigne  aux  armes  du  Duc  de  Bre- 
tagne, &  fit  dire  aux  Efpagnols  que,  s'il  y  avoit  quelqu'un 
parmi  eux  qui  voulût  faire  le  coup  de  lance  avec  lui ,  ou 
combattre  avec  toutes  autres  armes  ,  il  fortiroit  volontiers, 
moyennant  un  fauf-conduit  ;  mais  on  ne  lui  fit  point  de  réponfe. 
Quelques  jours  après ,  l'Amiral  Efpagnol ,  s'étant  préfenté  devant 
Saint-Nazaire  avec  fa  flotte,  Jean  d'Ult  lui  envoya  dire  par 
un  de  fes  Officiers,  nommé  Jean  de  Henleix  ^  Seigneur  de  la 
maifon  de  ce  nom,  dans  la  Paroiffe  de  Saint-Nazaue  ,  que,  s'il 
vouloit  mettre  quelqu'un  des  fiens  à  terre ,  il  lui  feroit  voir  la 
place  ,  &  qu'il  donneroit  un  otage  pour  la  fureté  de  celui  qui 
viendroit  l'examiner.  La  propofition  fut  acceptée  :  un  Efpagnol 
fut  député  ,  & ,  d'après  fon  rapport ,  l'Amiral ,  jugeant  que  la 
place  étoit  trop  forte ,  abandonna  fon  projet ,  ^c  lailfa  d'Ull  en 
repos.  Jean  d'Ull  étoit  Seigneur  du  château  d'Ull,  maifon  feigneu- 
riale  de  Saint-Andié-des-Eaux  ,  dans  le  voifinage  de  Saint-Nazaire. 


348  S  AI 

Les  ports  &  havres  de  Saint-Nazaire  furent  fournis  au  Siège 
ro^al  de  Guérande ,  par  Edit  du  29  Mars  1564  ,  donné  à 
Troyes  en  Champagne. 

Au  mois  d'Oftobre  1586,  le  Capitaine  la  Tremblaye  marcha 
à  Saint-Nazaire  avec  fa  Compagnie  &  quelques  autres  troupes 
du  Roi.  Les  foldats  Français  coupèrent  la  tête  au  Gouverneur, 
&  la  portèrent  au  Prince  de  Dombes ,  qui  étoit  alors  à  Rennes, 
Le  Duc  de  Mercoeur  fut  très-irrité  de  cette  cruelle  exécution. 
En  1624  ,  le  Duc  de  Vendôme  envoya  un  renfort  de  cent 
hommes  de  troupes  à  Saint-Nazaire ,  qui  étoit  menacé  par  les 
Calviniftes.  Au  mois  d'Oftobre  1637,  Monfieur  ,  frère  du, Roi, 
partit  de  Nantes  pour  Saint-Nazaire  ,  où  il  refta  trois  jours  :  nous 
ignorons  le  fujet  du  voyage  de  ce  Prince.  En  1756,  M.  le  Duc 
d'Aiguillon  fit  conftruire  ,  aux  frais  de  la  province ,  au  bord  de 
la  mer  &  dans  le  territoire  de  cette  ParoiiTe ,  deux  tours ,  fur 
le  fommet  defquelles  on  allume  des  feux ,  pendant  la  nuit ,  pour 
guider  les  vaiffeaux  qui  entrent  dans  la  Loire.  Ces  deux  bâtiments 
utiles  font  nommés  les  tours  d'Aiguillon, 

A  un  tiers  de  Heue  au  Nord-Ouell  de  Saint-Nazaire,  au  mi- 
lieu d'un  champ ,  fe  voient  trois  pierres ,  dont  deux  font  prefque 
enterrées;  la  troifieme ,  foutenue  par  les  deux  autres,  peut  pefer 
fix  milhers.  Un  p&ticulier  de  l'endroit,  faifant  creufer  dans  ce 
champ ,  trouva  une  vingtaine  de  médailles  avec  les  noms  des 
Empereurs  Auguile,  Claude,  Néron,  &  Vefpafien.  Il  en  donna 
quelques-unes  à  M.  de  Pontcarré  de  Viarme  ,  alors  Intendant  de 
la  province ,  &  quelques  autres  aux  Etats.  Il  en  conferva  en- 
viron une  douzaine.  Cette  découverte  feroit  croire  que  ces  trois 
pierres  font  un  monument  des  Romains,  vraifemblablement  un 
autel  ou  un  tombeau.  Une  vieille  tradition  ,  confervée  de  père  en 
fils  parmi  les  habitants ,  veut  que  le  château  où  commandoit 
Jean  d'Ufl:  en  1380,  &:  dont  on  voit  encore  les  vertiges  au- 
près de  i'Eglife  paroiiïiale ,  qui  occupe  une  partie  de  fon  em- 
placement ,  ait  été  bâti  par  Brutus.  Cette  opinion  n'ell:  peut- 
être  pas  mal  fondée  j  &  ,  fi  elle  efl  vraie  ,  Saint  -  Nazaire  eil 
aufTi  ancien  que  la  ville  de  Tours ,  puifque  l'hifloire  nous  apprend 
que  Brutus  bâtit  une  tour  pour  fe  défendre  contre  les  attaques 
des  Rois  d'Aquitaine ,  &  que  cette  tour  donna  le  nom  à  la 
ville    de  Tours,   capitale   de  la   Touraine. 

Il  y  a  à  Saint-Nazaire  une  ReHque  que  l'on  dit  être  de  la  vraie 
Croix ,  &  qui  efl  en  grande  vénération  parmi  le  peuple.  On 
afTure  qu'il  s'y  efl  opéré  plufieurs  miracles  j  mais  les  informations 


s  A  I  549 

qu'on  a  prifes  fur  les  lieux ,  &  la  déclaration  des  perfonnes  les 
plus  dignes  de  foi,  ne  contribuent  pas  à  accréditer  l'opinion  du 
peuple,  qui  ne  paroît  pas  «tayée-de  motifs  bien  puiflants.  A 
une  demi-lieue  au  Sud-Oueft  de  Saiftt-Nazaire  ,  efl:  une  Croix 
révérée  de  tous  les  marins.  Depuis  un  temps  immémorial,  tous 
les  navires  qui  pallent  devant  cette  Croix  W^iluent  d'une  dé- 
charge de  toute  leur  artillerie,  pendant  qufn^uipage  chante 
le  Salve ,  Regiîia  ,  &  le  Vcni ,  Creator ,  obleryant  de  laifTer  un 
intervalle  fuffifant  entre  les  coups  de  canons  ;  en  revenant  de 
leur  voyage ,  ils  font  encore  une  décharge  de  leurs  canons , 
en  paiïant  devant  cette  Croix  ,  &  chantent  le  Te  Dcum.  La 
Chapelle  qui  étoit  dans  cet  endroit  ,  a  été  convertie  en  corps- 
de-garde.  Tous  les  ans ,  le  mardi  de  la  Pentecôte ,  il  s'y  tient 
une  affemblée  coniidérable.  On  croit  qu'aux  environs  de  cette 
Croix  ell  un  rocher  qui  renferme  de  l'aimant ,  &  que  cet  ai- 
mant fait  varier  la  bouilole  des  marins.  Ce  qui  le  fait  croire , 
c'eft  que  ,  dans  ce  canton  ,  dans  un  champ  nommé  de  Loime^ 
près  la  maifon  de  la  ViUe-Martin,  on  trouve  une  grande  quan- 
tité de  pierres  d'aimant  ,  pour  peu  que  l'on  creufe  dans  la  terre. 
Cette  pierre  ell  de  différente  groffeur  \  & ,  quoiqu'elle  ne  foit 
point  armée  ,  elle  attire  néanmoins  la  limaille  de  fer. 

Il  y  a  foixante-dix  à  quatre-vingts  ans  qu'en  fouillant  dans  le 
grand  cimetière  de  Saint-Nazaire  ,  on  trouva  plufieurs  cadavres  qui 
avoient  plus  de  fept  pieds  de  hauteur  ,  &:  dont  quelques-uns 
avoient  encore  des  cafques.  L'Eglife  de  Saint-Nazaire  cil:  avan- 
tageufement  fituée  :  elle  efl  comme  une  fortereffe ,  au  bord  de 
la  mer ,  &  forme  un  très-beau  point  de  vue.  Dans  le  grand 
cimetière  ,  eil  une  ancienne  Chapelle  qui  fert  de  corps-de- 
garde. 

SAINT-NIC  5  à  6  lieues  au  Nord-Ouefl  de  Quimper  ,  fon 
Evêchéj  à  42  lieues  de  Rennes;  &  à  trois  lieues  du  Faou, 
fa  Subdélégation.  Cette  Paroilfe  reiïbrtit  à  Châteaulin ,  & 
compte  800  communiants  :  la  Cure  e(l:  à  l'akernative.  Le  ter- 
ritoire ,  borné  au  Nord  par  les  montagnes  de  Meneham  qui 
font  pleines  de  rochers  ,  au  Sud  par  une  lieue  de  grève ,  &: 
à  rOuefl  par  la  baie  de  Douarnencz ,  eft  encore  traverfé  par 
la  route  de  Quimper  à  Brell:,  de  manière  qu'il  \\y  a  qu'une 
partie  de  ce  terrein  qui  foit  cultivée.  Ajoutez  à  cela  qu'on  y  re- 
marque encore  des  landes  qui  font  aflcz  étendues.  C'eit  dans 
ce  territoire  ,  vis-à-vis  la  baie  de  Douarnencz ,  que   fe   trouve 


3^0  S  A  I 

une  montagne  qui  domine  cette  baie  de  plus  de  cinq  cents  pieds. 
Cette  montagne  préfente  trois  fommets  à-peu-près  de  forme  trian- 
gulaire. Sur  celui  à  l'Ouefl: ,  eu  une  grande  pierre  plate ,  pofée 
fur  quatre  piliers  de  pierre  brute ,  de  chacun  quatre  pieds  de 
hauteur  :  elle  a  trois  pieds  d'épaiffeur  ,  feize  de  longueur ,  &  fept 
de  largeur ,  fur  une  forme  quarrée.  Le  milieu  eft  plus  creux  & 
plus  noir  que  les  bords.  Plus  on  examine  cette  pierre ,  plus  on 
fe  perfuade  qu'elle  n'efl:  pas  de  la  même  nature  que  celles  qui 
fe  trouvent  fur  cette  montagne.  Ce  qui  rend  ceci  inconcevable ,  c'ell 
la  manière  avec  laquelle  on  l'y  aura  charroyée  ou  tirée.  Sur  le 
fécond  fommet ,  qui  eft  au  Sud  du  précédent  &  à  fix  cents  pas 
plus  loin ,  eft  une  petite  plame  d'environ  trois  cents  toifes  de 
longueur  fur  trente  de  largeur,  jadis  enceinte  de  murailles,  dont 
les  veftiges  fubfiftent  encore  ;  en  y  montant  ,  on  voit  çà  &  là 
des  fouches  très-larges ,  dont  les  renaifîances  prouvent  qu'elles 
font  de  chêne  ;  arbre  très-refpefté  des  Druides ,  &  fur  lequel 
on  trouvoit  jadis  un  arbrilTeau ,  appelle  GuL  Au  Nord  de  cet 
endroit ,  il  y  a  un  troifieme  fommet ,  fur  lequel  il  n'y  a  rien 
de  remarquable  ;  mais ,  en  regardant  une  féconde  fois  les  mo- 
numents qui  fe  trouvent  fur  les  deux  autres  fommets  ,  on  eft 
convaincu  que  ,  fur  l'un  d'eux  ,  fe  faifoient  les  facrifices  humains 
qu'on  reproche  aux  Druides ,  &  que  fur  l'autre  ils  s'aflembloient 
pour  délibérer  fur  qui ,  fous  prétexte  de  rehgion ,  tomberoit 
leur  vengeance.  Leurs  bois  facrés  venoient,  fans  doute  ,  de  ce 
qu'alors  il   y  en  avoir  prefque  par-tout  dans  cet  endroit. 

Tout  le  monde  fçait  qu'à  caufe  des  aftemblées  des  Druides 
&  de  leurs  facriflces  humains  ,  Tibère  ordonna  de  les  égorger 
&  de  rafer  leurs  bois  dans  toutes  les  Gaules  ;  mais  il  paroît  que 
cet  ordre  ne  fut  pas  exécuté  dans  l'Armorique  ,  &  que  ce  n'a  été 
que  dans  le  feptieme  fiecle  qu'on  eft  parvenu  à  les  détruire , 
©u  plutôt  à  leur  ôter  la  Prêtrife.  (  Voyez  l'Abrégé  de  l'Hiftoire 
de  Bretagne  ,  dans  le   premier  tome  de  ce  Dictionnaire.  ) 

SAINT-NOLFFj  fur  une  hauteur  j  à  2  lieues  &  demie  au 
Nord-Eft  de  Vannes  ,  fon  Evêché  ,  fa  Subdélégation  ,  &  fon  refîbrt  j 
&  à  18  lieues  de  Rennes.  On  y  compte  1200  communiants: 
la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire ,  coupé  par  plufieurs  val- 
lons &  monticules ,  offre  à  la  vue  des  terres  bien  cultivées  ,  des 
prairies,  &  des  landes.  C'eft  un  pays  couvert  d'arbres  &  buiftons, 
tort  abondant  en  cidre.  Le  Halgouet  ,  Ker-boulart,  &  Burzigol, 
font  les  maifons  nobles  qu'on  y  connoît. 


SAI  351 

SAINT.  ONEN  ;  à  1 1  lieues  &  demie  au  Sud-Sud-Ouefl  de 
Saint-Malo  ,  fon  Evêché  ;  à  8  lieues  de  Rennesj  &  à  3  lieues 
de  Montauban ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiflé  reflbrtit  à  Ploer- 
mel,  &  compte  900  communiants  :  la  Cure  efl  préientée  par 
l'Abbé  de  Saint-Méen.  Le  territoire ,  coupé  par  le  grand  chemin 
de  Rennes  à  Saint-iViéen  ,  efl  d'une  fuperficie  plane  ;  on  y  ap- 
perçoit  des  terres  en  labeur,  des  prairies,  des  arbres  fruitiers, 
&  des  landes.  En  1400,  cette  Paroifle  fe  nommoit  la  Chapelle 
Saim-Onen  ;  elle  renfermoit  alors  les  maifons  nobles  ci-après  :  le 
Bois-Baflet ,  à  Jean  Morice  ;  le  Plefîis-Coetdo  &  la  Chapelle , 
à  Yvonde  Coetdo  ;  le  Pirouil ,  à  Guillaume  Moezon  ;  le  PlefTis- 
Hefte ,  à  Pierre  de  la  Houffaye  j  le  Tertre ,  à  Guillaume 
l'Evêque  -,  la  Monneraye  ,  à  Jean  de  la  Bouexiere  j  &  le  Pleflis- 
Chardel ,  à  Olivier  de  la  Reneraie. 

SAINTE-OPPORTUNE  ;  fur  la  route  de  Paimbœuf  à  Pornic;  * 
^  à  8  lieues  &  demie  à  l'Ouefl  de  Nantes,  fon  Evêché  &  fou 
refTort  ;  à  24  lieues  de  Rennes  ;  &  à  2  lieues  de  Paimbœuf, 
fa  Subdélégation.  Cette  Paroifle  relevé  du  Marquifat  de  la 
Guerche  ,  &  compte  450  communiante  :  la  Cure  efl:  à  l'Ordi- 
naire. Le  territoire  ,  borné  à  l'Ouefl  par  la  mer  ,  eft  coupé  par  un 
ruiffeau ,  le  long  duquel  font  des  prairies  &  'des  marais.  On  y 
remarque  la  forêt  de  la  Guerche,  qui  appartient  à  M.  le  Mar- 
quis de  Bruc  ;  des  terres  bien  cultivées ,  quelques  cantons  de 
vignes ,  &  des  landes   au  Sud-Ouefl  de  fon  bourg. 

Le  Prieuré  de  Sainte -Catherine,  fïtué  dans  la  forêt  de  la 
Guerche,  a  long-temps  dépendu  de  l'Abbaye  de  Saint-Aubin 
d'Angers,  qui  a  confervé  la  préfentation  de  ce  Bénéfice,  qui 
fut  réuni  à  celui  de  Saint-Brevin ,  &  qui  efl:  maintenant  pofTédé 
par  un  des  Grands-Vicaires  de  Rennes.  La  Chapelle  du  Prieuré 
efl  en  ruines ,  &  l'on  ne  voit  plus  préfentement  que  les  veftiges 
du  Monallere  ,  jadis  habité  par  des  Moines  de  Saint-Aubin, 
qui,  fi  l'on  en  croit  la  tradition,  y  vivoient  d'une  manière  (i 
fcandaleufe  qu'ils  furent  obligés  de  l'abandonner.  Nous  igno- 
rons le  temps  de  fa  fondation.  L'an  1 040  ,  Simon ,  fils  de  Ca- 
vallon  ,  fonda  le  Prieuré  de  Sainte-Opportune  dans  la  ParoifTe 
de  ce  nom.  On  voit  dans  ce  territoire  les  maifons  de  l'Amandoir  , 
de   la  Raudiere,  de  la  Giraudiere,  6c  delà  Morandiere. 

SAINT-OUEN-DES-ALLEUX  ;  fur  une  hauteur  ;  à  6  lieues 
&:  demie    au   Nord-Nord-Efl  de   Rennes  ,   fon   Evêché  ;   &c  à 


551  S  A  I 

I  lieue  trois  quarts  de  Saint-Aubin-du-Coriuier ,  fa  Subdéléga- 
tion 8c  {on  reflbrt.  Cette  Paroiffe  relevé  du  Roi  ;  on  y  compte 
600  communiants  :  la  Cure  eft  préfentée  par  l'Abbé  de  Rillé. 
Le  territoire  ,  arrofé  des  rivières  de  Couelnon  &  de  Minette , 
produit  du  grain ,  du  foin ,  &  du  cidre  ;  les  landes  y  font  affez 
étendues.  La  Belinaye  ,  haute-Jufiice ,  appartient  à  M.  de  la 
Belinaye. 

SAINT-OUIN-DE-LA- HOIRIE  ;  à  9  lieues  un  quart  au  Nord- 
Nord-Eft  de  Rennes  ,  fon  Evêché  &  fon  reflbrt  ;  à  trois  quarts 
de  lieue  d'Antrain,  fa  Subdélégation,  On  y  compte  1200  com- 
muniants •:  la  Cure  efl:  a  l'Ordmaire.  Le  territoire ,  borné  au 
Nord  par  la  province  de  Normandie  ,  produit  des  grains  de  toutes 
efpeces  &  des  landes.  La  haute-Juftice  du  Prieuré  appartient  à 
M.    le  Prieur, 

Le  château  de  la  Roirie ,  maifon  feigneuriale  de  la  Paroifîe, 
efl:  très-ancien.  Un  afte,  qui  fe  trouve  dans  les  cartulaires  de 
l'Abbaye  de  Saint  -  Sauveur  de  Redon ,  nous  apprend  que  Rivalon 
de  la  Roirie  accompagna  Conan  le  Tort  ,  Comte  de  Rennes, 
lorfque  ce  Prince  fit  fon  entrée  dans  fa  ville ,  l'an  5)90.  Roger 
de  la  Roirie  époufa  Raenteline  ,  fille  de  Rivalon  de  Combourg 
&  d'Aremberge ,  fon  époufe.  Le  Seigneur  de  Combourg  avoit  un 
fief,  avec  Junfdiftion  ,  en  la  Paroifl^e  de  Saint-Ouin-de-ia-Koirie, 
qu'il  donna  pour  dot  à  fa  fille  ;  &  ces  deux  époux  eurent  de 
leur  mariage  un  fils ,  nommé  Henri ,  qui  mourut  jeune  ,  &  une 
fille ,  nommée  Berthe  ,  qui  demeura  feule  héritière  :  elle  époufa 
Robert  Tuflîn  ,  l'an  11 46.  Le  Duc  de  Bretagne  Conan  III,  dit 
h  Gros  ,  aflifla  à  leurs  noces.  De  ce  mariage  vint  Raoul  Tuffin , 
Chevalier ,  Seigneur  de  la  Roirie ,  qui  fut  un  des  grands  guer- 
riers de  fon  temps.  Depuis  lui,  fes  fuccefleurs  ont  eu  leur  fé- 
pulture  dans  le  chanceau  de  l'Eglife  de  cette  Paroifl!e ,  avec 
leurs  armes  en  lifiere  autour  de  l'Eglife ,  excepté  dans  la  Cha- 
pelle de  Saint-Nicolas,  qui,  quoique  renfermée  dans  cette  Eglife, 
appartient  au  Prieur  de  Combourg,  comme  il  eft  porté  dans 
l'accord  pafl^é  entre  le  Prieur  &  le  Seigneur  de  la  Roirie. 
Guillaume  Tuflin  fut  Chevalier  des  Ordres  du  Roi  &  Gentil- 
homme ordinaire  de  fa  maifon.  Cette  Seigneurie ,  avec  haute  , 
moyenne  &  bafl^e-Juflice  ,  appartient  aujourd'hui  à  M.  le 
Vicomte  Tuflin  de  la  Roirie,  de  la  même  famille.  Le  ma- 
noir de  la  Bretonniere  appartenoit  ,  en  1420  ,  à  Jeanne  du 
Châtelien 

SAINTE-P  AZANNE  ; 


SAI  3^5 

SAINTE-PAZANNE  ;  fur  la  route  de  Nantes  à  Paimbœut'i 
à  5  lieues  un  quart  au  Sud-Oueft  de  Nantes  ,  Ion  Evêciie  & 
fon  relTort  ;  à  25  lieues  de  Rennes  j  &à  3  lieues  de  Machecou , 
fa  Subdélégation.  On  y  compte  1500  communiants  :  la  Cure 
ell:  à  l'Ordinaire.  Le  territoire,  arrofé  par  la  rivière  du  Tenu 
&c  coupé  de  plufieurs  ruifleaux ,  eft  très-bien  cultivé  &  produit 
du  grain,  du  vin  ,  &  du  foin.  Le  3  du  mois  de  Juillet  1400, 
fur  les  quatre  heures  du  matin  ,  un  ouragan  furieux  ,  qui  dura 
environ  un  quart-d'heure  ,  renverfa  une  partie  de  l'Eglife  de 
cette  ParoifTe.  Le  mouUn  Henriette  ,  haute  ,  moyenne  &  baile- 
Julhce ,  à  M.  Charette  de  Bois-Foucaud  :  Ardennes ,  haute , 
moyenne  ôc  bafTe-Juftice ,  à  M.  Chancerel. 

SAINT-PERE-MARC-EN-POULET  ;  à  2  lieues  au  Sud-Ell 
de  Saint-Malo ,  fon  Evêché  &:  fa  Subdélégation  ;  &  à  1 2  lieues 
de  Rennes.  Cette  Paroiffe  reflbrtit  à  Dinan ,  &  compte  1000 
communiants  :  la  Cure  eil:  à  l'alternative.  Le  territoire  renferme 
des  terres  fertiles  &•  très-exa61ement  cultivées  ;  on  n'y  remarque 
qu'un  vallon  qui  eft  au  bas  du  bourg.  En  1500,  il  renfermoit 
plufieurs  maifons  nobles ,  fçavoir  :  la  Ville-NefTant  ou  Hermef- 
iant ,  à  Guillaume  de  Guitté  ;  Laplan  &  la  Motte-Guerin  ,  à 
Chriftophe  Defprés  ;  la  Ville-Maingui ,  à  Jean  le  Bouteiller  j 
le  Bois-Bonnier,  à  N...  ;  le  Bofq  de  la  Piaudaye  ,  à  Hervé  le 
Jar  ;  la  Yille-Malherbe ,  à  Rolland  Rouxel  ;  la  QuenouiUiere ,  à 
Alain  le  Jeune  -,  le  Prieuré  de  la  Maire ,  à  N....  ;  la  métairie 
de  Langan  à  la  Dame  de  la  Morandaye  j  la  Ronce,  à  Pierre 
de  Quebriac  -,  le  Chêne  ,  à  Guillaume  de  Guitté  ;  Launaye  ,  à 
Gilles  de  Launaye;  &  la  Boulierve,   à  N... 

SAINT-PERE-EN-RETZ  ;  fur  la  route  de  Paimbccuf  à  Pornic  ; 
à  8  lieues  un  tiers  à  l'Ouefl:  de  Nantes ,  fon  Evéché  &:  fon 
reflort  ;  à  24  lieues  de  Rennes  y  &:  à  2  lieues  de  Paimbœuf,  fa 
Subdélégation.  Cette  Paroiffe  relevé  du  Roi,  &  compte  1400 
communiants  :  la  Cure  eft  à  fOrdinaire.  Il  s'y  tient  un  marché 
le  Dimanche.  On  y  remarque  une  Pofte  aux  lettres  &  une 
Commanderie  de  l'Ordre  de  Malte.  Le  territoire  renferme  des 
terres  en  labeur  très-fertiles,  des  prairies,  quelques  vignes,  Si, 
quelques  cantons  de  landes.  Le  7  Janvier  1065  ,  Quiriac, 
Evêque  de  Nantes  ,  étant  à  Marmoutier  ,  ratifia  de  nouveau , 
mais  pour  fa  vie  feulement ,  le  don  que  Rodoald  ou  Rouaud 
avoitrait  aux  Moines  de  Marmoutier,  de  plufieurs  Eglifes ,  du 
Tome  IF.  Y  2 


55^  ,.       S  AI 

nombre  defquelles  étoît  celle  de  Saînt-Pere-efi-Retz.  Au  mois 
d'Août  1345  ,  Philippe  VI,  Roi  de  France,  donna  à  Jean  de 
Laval ,  Chevalier ,  Seigneur  de  Pacy ,  la  Xerre  que  polTédoit 
ci-devant  Jean  de  Bretagne ,  Comte  de  Montfort ,  dans  la  Pa- 
roiffe  de  Saint-Pere-en-Retz ,  avec  tout  ce  qui  en  dépendoit.  Il 
tenoit  cette  Terre  du  Duc ,  &  elle  valoir  cent  quatre-vingt-dix 
livres  de  rente  :  le  marc  d'argent  étoit  alors  à  cmquante-quatre 
fols  fept  deniers.  Le  château  de  l'endroit  étoit  alors  très-fortifié  j  la 
Seigneurie  a  le  titre  de  Châtellenie.  Le  Duc  François  II,  par 
fon  mandement,  donné  à  Nantes  le  12  Janvier  1488,  ordonna 
de  mettre  en  poflefTion  de  la  Seigneurie  de  Saint-Pere-en-Retz, 
Gilles  de  la  Rivière,  Vice-ChanceHcr  de  Bretagne,  &  les  en- 
fants de  Jacques  de  la  Villéon. 

Il  s'exerce  à  Saint-Pere-en-Retz  plufîeurs  Jurifdi61:ions  ,  fça- 
voir  :  les  Biais ,  Commanderie  de  l'Ordre  de  Malte ,  à  M.  le 
Commandeur  :  Bougon  ,  haute- Juftice  j  la  G  ruais  ,  haute-Juftice  ; 
Limur  ,  haute- Juftice  ;  &  Charon ,  haute- Juftice  ,  à  M.  Bidé  : 
le  Plefîîs  ,  haute- Juftice  ;  Bois-Jolli ,  haute- Juftice  ;  &  la  Rouau- 
diere ,  haute-Juftice ,  aux  héritiers  de  M.  Simon  de  la  Carterie  : 
la  Bellotiere  &  la  Gruaie  appartenoient ,  en  1430  ,  à  Gilles 
Heaume.  On  y  voyoit,  dans  le  même  temps,  la  maifon  des 
Hofpitaheres  de  Couldrie  -,  cette  ParoifTe  eft  encore  décorée 
du  château  de  Laverie  à  M.  le  Marquis  de  Bruc. 

SAINT-PERN  ;  à  8  lieues  au  Sud  de  Saint-Malo ,  fon  Evê- 
ché  ;  à  7  heues  de  Rennes  ;  &  à  2  Ueues  de  Montauban  ,  fa 
Subdélégation.  Cette  Paroilîe  reffortit  à  Dinan  ,  &  compte 
9ÇO  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire  offre 
à  la  vue  des  terres  labourables ,  des  prairies  ,  &  peu  de  landes  j 
il  produit  du  Hn  &  du  cidre. 

Le  château  de  Ligouyer  eft  très-ancien ,  &  poffédé,  de  temps 
immémorial ,  par  l'iiluftre  maifon  de  Saint-Pern.  Dans  un  extrait 
de  la  Chambre  des  Comptes  de  Bretagne ,  on  lit  que  Bertrand 
de  Saint-Pern  II  du  nom,  étoit,  en  131 1,  Gouverneur  du 
château  de  la  Rochederien ,  place  alors  très-forte ,  &  qu'il  y 
commandoit  prefque  avec  une  autorité  abfolue.  C'eft  ce  Seigneur , 
dont  la  famille  étoit  dès-lors  fi  diftinguée  en  Bretagne ,  qui  fur 
le  parrain  de  l'immortel  Connétable  Bertrand  du  Guefchn.  Ber- 
trand de  Samt-Pern  fut  auffi  un  de  ceux  qui  accompagnèrent 
Jean ,  Sire  de  Beaumanoir  ,  dans  la  célèbre  ambaffade  qui  con- 
duiiit  en  Angleterre  les  enfants  de  Charles  de  Blois ,  pour  otages 


s  AI  5JJ 

de  la  rançon  de  leur  père.  Par  un  extrait  du  catalogue  des 
Abbefles  de  Saint -Georges  de  Rennes,  tiré  des  archives  de 
cette  Abbaye ,  Se  fcellé  du  fceau  de  la  Maifon ,  il  efl:  conflaté 
que  Phelipote  de  Saint-Pern ,  élue  en  1352,  fut  la  vingtième 
AbbefTe  de  cette  Communauté  ,  &  qu'elle  portoit  les  armes  de 
fa  famille.  Un  extrait  des  baptêmes  de  la  Paroiiïe  de  Saint- 
Pern ,  du  dernier  Septembre  1562,  apprend  que  Jean  de  Saint- 
Pern  étoit  fils  de  Judes  de  Saint-Pern  &  de  Catherine  de 
Chateaubriand. 

Judes  de  Saint-Pern ,  Seigneur  de  Ligouyer ,  fe  fit  diftinguer 
par  fon  mérite  &  fa  valeur  :  il  époufa ,  en  1543  ,  Renée  de 
la  Marzehere ,  fille  de  Renaud  de  la  MarzeHere  &  de  Gillette 
de  Pont-Rouaud.  René  de  Saint-Pern  ,  fon  fils  ,  fut  aufR  Che- 
valier des  Ordres  du  Roi ,  en  1598.  La  Terre  &:  Seigneurie  de 
Ligouyer^  avec  moyenne -Juiîice,  appartient  à  M.  de  Saint- 
Pern  delà  même  famille.  En  1500,  les  autres  maifons  nobles 
de  ce  territoire ,  étoient  :  la  Ville  -  Ernoul  &  la  Pignelais-Pa- 
geaux  ,  à  Jacques  de  Beaumont  ;  la  Pugnelaye-Guébriac  ,  à 
N...  i  la  Pignelaye-Sauzon,  &  la  Ville-au-Vé  ,  à  Gilles  de 
Garnedain;  la  Motte  ,  ancienne  métairie  noble  ,  à  N...  ;  laBrehau- 
diere  ,  à  Bertrand  Pontelin  ;  le  Breil-Harel  &  MaubufTon  ,  à 
Guillaume  Tirecoq  ;  l'Eftaque  &  la  Voye-Gillaud ,  à  Robert 
Coueflel  j  la  Ville-Geloart  ,  à  François  de  l'Efpinai  j  la  Tour, 
à  N....  j  Launay-Bertrand  ,  Liffon  ,  Leauraix  ,  les  Hourmettes ,. 
le  Breil-Matcille ,  &  la  Guilhaudiere ,  â  N...  -,  &  les  Saults-aux- 
Chevaliers  j,    à  Raoul  du  Bouais. 

SAINT-PHILBERT-DE- GRAND-LIEU;  fur  la  rivière  de 
Boulogne  ;  à  5  Ueues  au  Sud-Sud-Ouefl  de  Nantes ,  fon  Evêché 
&  ion  reffort  j  à  27  heues  de  Rennes  ;  &  à  3  Ueues  de  Ma« 
checou  ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  2400  communiants  ; 
l'Eglife  eil  fur  le  fief  du  Roi ,  &  la  Cure  efl  à  l'Ordinaire. 
Le  territoire  offre  à  la  vue  des  terres  labourables  très-abon- 
dantes en.  froment  &  en  feigle ,  de  vafles  &  belles  prairies , 
des  marais ,  des  vignes  ,  &  des  landes  aflez  étendues  au  Nord- 
Ell  de  fon  bourg ,  dont  le  fol  paroît  mériter  les  Ibins  du  culti- 
vateur. On  a  commencé  à  en  défricher  une  partie  ,  &  l'on 
efpere  que  les  fuccès  que  l'on  a  lieu  d'attendre  engageront , 
par  l'appas  du  gain  ,  les  habitants  à  cultiver  tous  ces  terreins 
aujourd'hui  inutiles.  M.  Juchaut  de  Monceaux  y  pofTede  trois 
hautes -Juilices,  qui   font  :  l'EchafTaud,  qui  s'exerce  k  Saint- 


55^  S  AI 

Philbert   &  à  la  Lîmoufîniere  ,  la  Monclere    Se   le    Pie  -  Piîu 
La   haute- Juftice   du  Prieuré,  au  Prieur  de    Saint-Vincent  du 
Mans  f  le  Port-Bofîînot ,  bafTe-Juftice  ,  à  M.  Flaminque ,  qui  pof- 
fede  aufîi  la  bafle-Juftice   de  Vicque. 

Je  dois  commencer  cet  article  par  dire  quelque  chofe  de 
la  cité  d'Herbauges ,  û  fameuie  dans  le  Comté  Nantais.  Quel- 
ques hilloriens  ont  prétendu  que  c'étoit  jadis  une  ville  célèbre, 
qui  fubfilloit  dans  les  premiers  fiecles  de  l'Ere  Chrétienne ,  & 
voici  ce  qu'ils  nous  en  ont  appris.  Jules  Céfar  ayant  vaincu 
&  fubjugué  les  Venetes ,  vint  à  Nantes ,  traita  les  habitants  de 
cette  ville  avec  beaucoup  de  dureté ,  &  fit  rafer  tous  les  édi- 
fices qui  étoient  au  Sud  de  la  Loire.  Une  partie  du  peuple 
prit  la  fuite ,  &  alla  fe  réfugier ,  avec  ce  qu'il  avoit  pu  em- 
porter, fur  les  bords  de  la  rivière  de  Boulogne.  Cet  afyle  ayant 
paru  agréable  &  commode  à  ces  fugitifs  ,  ils  réfoîurent  d'y 
bâtir  une  ville ,  &  de  la  fortifier.  Tout  contribuoit  à  les  con- 
firmer dans  ce  deflein  ;  l'agrément  du  Heu ,  les  avantages  qu'il 
ofiroit  pour  le  commerce  ,  la  fureté  ,  &  même  la  facilité  de 
fuir  &  de  gagner  les  bords  de  la  Loire  ,  par  le  fecours  de  la 
marée  ,  au  cas  qu'on  pût  être  forcé  dans  un  lieu  également 
fortifié  par  la  nature  &c  par  l'art.  En  conféquence ,  ils  y  conf- 
truifirent  des  habitations ,  &  formèrent  une  ville ,  qu'ils  appelle- 
rent  Herhauges  ,  &  qui  devint  bientôt  une  des  plus  peuplées 
&  des  plus  florifTantes  cités  des  Gaules.  Leurs  fuccès  &  leurs 
richeffes  énorgueilUrent  ces  téméraires  habitants  ;  &  les  vices , 
qui  vont  prefque  toujours  à  la  fuite  de  l'opulence ,  corrompi- 
rent tellement  leurs  efprits  &  leurs  cœurs  ,  qu'ils  perdirent  de 
vue  tous  leurs  devoirs  &  fe  livrèrent  à  tous  les  défordres.  On 
ne  dit  point  s'ils  reçurent  d'abord  le  ChrilHanifme ,  &  s'ils  le 
rejetterent  enfuite  ;  mais  on  le  fuppofe ,  puifqu'on  dit  qu'ils 
avoient  entièrement  oublié  leur  religion ,  &  qu'ils  adoroient  les 
ll:atues ,  de  Jupiter  qui  étoit  d'or ,  de  Mars  ,  de  Mercure ,  de 
Diane  ,  de  Vénus ,  &  d'Hercule.  Il  n'étoit  pgs  pofTible  de  ra- 
mener ce  peuple  incrédule  dans  la  voie  du  falut  :  il  avoit  conçu 
tant  d'averfion  6l  de  mépris  pour  la  religion  Chrétienne ,  qu'il 
ne  vouloit  recevoir  aucun  Prédicateur  ;  &  il  portoit  fi  lojn 
cette  antipathie  ,  que ,  pour  n'avoir  aucune  fociété  avec  les 
Chrétiens  ,  il  ne  venoit  jamais  à  Nantes.  Saint  Fehx ,  Evê- 
que  de  ce  diocefe  en  550  ,  voulant  faire  un  dernier  effort 
pour  retirer  du  précipice  cette  partie  de  fon  troupeau ,  engagea 
Saint  Martin  ,  Abbé  de  Vertou  ,    à  aller  lui    annoncer  l'Evangile. 


/ 


^  Aï  55, 

Le  Saint  étant  arrivé ,  fut  rejette  de  tout  le  monde ,  excepté 
d'un  homme  nommé  Romain  ,  chez  lequel  il  logea  pendant  le 
féjour  qu'il  fît  en  cette  ville.  Il  fe  mit  à  prêcher  publiquement 
&  avec  beaucoup  de  zèle ,  mais  inutilement.  On  l'écouta  d'abord 
avec  indifférence  ;  mais  à  la  fin ,  ennuyés  des  avis  &  des  fer- 
mons du  Prédicateur,  les  Herbaugicns  lui  défendirent  la  chaire, 
&  pouffèrent  l'infolence  jufqu'à  le  maltraiter.  Saint  Martin,  dik.{(^i- 
pérant  de  convertir  cette  nation  endurcie ,  fe  difpofoit  à  s'en 
retourner,  lorfqu'il  lui  fut  révélé  que  le  Ciel ,  lafTé  des  défordres 
de  ce  peuple ,  alloit  le  punir ,  &:  détruire  cette  ville ,  qui , 
depuis  fîx  fîecles  qu'elle  exifloit  ,  avoit  accumulé  les  crimes 
dans  fon  fein.  Saint  Martin  inftruifit  fon  hôte  &  fon  époufe  de 
fa  révélation ,  &  les  exhorta  à  fuir  avec  lui  une  cité  que  la 
vengeance  du  ciel  menaçoit.  A  peine  étoient-ils  fortis,  que  la 
ville  difparut  &  fut  engloutie  fous  les  eaux ,  &  c'efl  ce  qui  a 
formé  le  lac   de  Grand-Lieu. 

Telle  efl  l'hiftoire  ,  ou  plutôt  la  fable  tiffue  par  Albert  de 
Morlaix  ,  &  autres  hifloriens  aufTi  amateurs  du  merveilleux.  Une 
tradition  qui ,  peut-être ,  n'ell  qu'une  fuite  de  l'hiftoire  ci-defTus 
rapportée ,  mais  qui  fe  conferve  de  père  en  fils  dans  le  Comté 
Nantais ,  veut  que  cette  ville  ait  réellement  exifté  ,  &  qu'elle 
ait  été  engloutie  pour  les  crimes  de  fes  habitants  :  ce  qui  perfuade 
les  plus  incrédules ,  c'efl  que  le  Bréviaire  de  Nantes  fait  mention 
de  cette  cité  prétendue.  Ce  qui  a  paru  confirmer  cette  opinion  , 
c'eft  quelques  uflenfiles  de  cuifine  &  autres  inflruments  qu'on  a 
tirés  du  lac  ;  mais  ce  ne  peut  être  une  preuve  ,  parce  qu'il  efl 
très-pofTible  que  des  barques  chargées  de  ces  inflruments  aient 
fait  naufrage  fur  le  lac  ,  &  dès  lors  il  n'y  aura  plus  rien 
d'étonnant.  La  meilleure  raifon  que  l'on  puilTe  donner  contre 
l'exiflence  de  la  cité  d'Herbaugcs ,  raiibn  qui  doit  perfuader 
tout  homme  fenfé  ,  c'cfl  qu'aucun  manuscrit ,  aucun  titre  du 
temps  de  Saint  Félix  ,  aucun  monument,  n'en  fait  mention  :  c'éfb 
enfin  que  Grégoire  de  Tours  n'en  a  point  parlé  j  &  certainement 
ce  père  de  notre  hifloire  n'auroit  pas  manqué  de  rapporter  un 
fait  de  cette  conféquence ,  s'il  en  avoit  eu  la  connoifî'ance  :  & 
pouvoit-il  l'ignorer  ? 

Le  lac  de  Grand-Lieu  contient  environ  quinze  mille  arpents 
de  terrein  couvert  par  les  eaux  :  quatre  rivières  viennent  s'y 
jetter ,  6c  celle  du  Tenu  qui  s'v  réunit  a  fon  embouchure  dar^s 
la  Loire  &:  y  porte  les  eaux  du  lac.  Ce  lac  efl  en  partie  fitué 
dans   le  territoire  de  Saint-Philbert  j  il  efl    environné  de  marais 


558  SAI  - 

dans  lefquels  on  trouve  une  quantité  prodigieufe  de  bois  ,  qu^ 
fon  long  féjour  dans  l'eau  a  noirci  &  durci  j  on  y  trouve  même 
des  arbres  entiers    d'une  grofleur  conlidérable ,  &  c'eft  ce   qui 
prouve  que   la  prétendue  cité  d'Herbauges  n'étoit  qu'une   forêt 
qui  aura  été  renverfée  par  ces  tremblements  de  terre  ou  oura- 
gans affez  fréquents    dans  le   fixieme  fiecle.    C'eft  l'opinion  que 
je  trouve  la  plus  fenfée ,  &  nous  croyons  devoir  la  fuivre  juf- 
qu'i  ce  qu'on  en  donne   une  plus  conforme  à  la  raifon.  Saint- 
Philibert  a  pris  le  furnom  de  Grand- Lieu ,  du  lac  qui  l'avoifine. 
Cette   ParoilTe   tire  fon  origine   d'un   village   nommé  Adias  ou 
Déas ,    dans  le    Comté    d'Herbauges ,  fiir   le  bord   du    lac  de 
Grand-Lieu.  Les  Moines ,  laiffés   par  Saint  Philbert   en  l'ifle  de 
Moirmoutier  ,  craignant  de  tomber  entre  les  mains  des  Normands 
qui  couroient  les  mers ,  fongerent  à  fe  choifir  une  habitation , 
qui,  fans  être  éloignée  de  leur  ancien  domicile,  fût  plus  avancée 
dans  les   terres ,  &   pût   leur  offrir  un   afyle  afTuré   contre  les 
irruptions  des  Barbares.  Ils  s'àdrefferent ,  pour  cet  effet  ^  à  Louis 
le  Débonnaire  ,  qui  leur  permit ,  en  8 1 9  ,  de  bâtir  un  Monaffere 
à  Adias  ou    à  Déas,  fur  le  bord    du  lac  de  Grand-Lieu,  pour 
s'y  réfugier  au  befoin.   Pépin ,  Roi    d'Aquitaine  ,.  fécondant  les 
bonnes  intentions  de  fon  père,  donna,  l'an  826,  à  ces  Moines, 
(ix  bateaux  francs ,  qui  pouv oient  aller  6r  venir  fur  toutes   les 
rivières  de  fon   Royaume ,  &  par-là  ,  il  les  expofa  à  la  tenta- 
tion  de    faire  un   négoce    continuel  :  ils  n'étoient  point   encore 
à  Déas   alors,  mais  ils  y  vinrent  l'an  830,  après   avoir  enfoui 
le  corps  de  Saint  Philbert ,  qui  étoit  leur   tréfor ,  dans  fon  iffe ,, 
afin  que  perfonne  ne  pût  l'enlever  ;  mais ,  fix  ans  après  ,  le  croyant 
plus  en  fureté  à  Adias,  ils  l'y  portèrent,  &  obtinrent,  l'aa  839, 
de  Louis  le  Débonnaire ,  le  village  &  le   territoire  de  Scobrit ,. 
avec  l'Eglife  de  Saint-Viau,  au  pays  de  Retz.  Ainfi  fe  forma 
l'Abbaye  de  Déas  ,  qui  n^'eut  pas  une  longue  exiflence.  En  847 
ou  848 ,  les   Moines  ne  trouvant  pas    encore  ce   lieu  bien   fur 
contre   les  invafions    des  Barbares ,  prirent   le  parti  de   Taban- 
donner.  Ils  allèrent ,  pendant  plufieurs  années ,  avec  les  reliques 
de  leur  Patron  qu'ils  avoient  emportées  j  enfin  ,  ils  s'arrêtèrent ,  du 
confentement  de  Charles  le  Chauve ,  au  château  de  Tournus , 
en  875,  &  formèrent    dans  ce   lieu   une  nouvelle  Abbaye ,  à 
laquelle  ils  unirent  tous  les  biens  qu'ils  avoient  poffédés  ea  Bre- 
tagne &  dans  l'Aquitaine.   Il  efl  à  croire   que  le  riche  Prieuré 
de  Déas,  aujourd'hui  Saint -Philbert -de -Grand- Lieu ,  tire  fon 
nom  de  celui  du  canton»  On  voit  dans  un  des  marais,  une  pierre 


s  A  I  Î59 

très-ancienne ,  qui ,  félon  toutes  les  apparences ,  étoît  andennc- 
ment  confacrée  à  Cybelle ,  mère  des  Dieux ,  que  Ton  appelloit 
la  Déejfe  par  excellence  ;  &  ,  en  conféquence  ,  le  lieu  aura  été 
nommé  Déas ,  le  pays  de  la  DéeJJe  ,  &  le  Monaftere  aura  con- 
fervé  ce  nom.  Cette  maifon  ne  tient  plus  de  Moines  depuis 
environ  cent  foixante  ans  :  les  Titulaires  y  placent  cinq  Prêtres 
féculiers  pour  y  faire  l'Office  divin.  11  ell  prouvé ,  par  le  procès- 
verbal  de  vifue  de  Jean  Coupé ,  par  commiflion  de  Philippe , 
Evêque  de  Nantes  en  1 5  64  ,  que  le  Prieuré  de  Saint-Phiibert 
doit  nourrir  quatre  Religieux  Prêtres  &  deux  Novices  ;  faire 
une  aumône  générale  les  dimanche  ,  mercredi  &  vendredi ,  & 
une  aumône  particulière  les  autres  jours ,  à  ceux  qui  la  de- 
mandent. Un  autre  procès- verbal  de  vifite  ,  rédigé  fous  l'auto- 
rité du  même  Evêque  en  1572,  nous  apprend  que  la  fondation 
d^  cette  Abbaye  erf  de  fix  Moines;  que  le  Prieur  doit  tous  les 
jours  de  l'année  Grand'MefTe  &  Vêpres ,  l'Office  entier  aux 
Meffes  folemnelles  &  aux  Fêtes  de  la  Vierge ,  l'aumône  trois 
fois  la  femaine  aux  pauvres  du  lieu,  &  à  toute  heure  aux  paf- 
fants.  Il  pourroît  bien  fe  faire  que  cette  dernière  obligation  ne 
fût  pas  remplie  bien  exaftement.  Le  Prieur  titulaire  n'aura 
vraifemblablement  pas  recommandé  à  fes  SublHtuts  de  confa- 
crer ,  au  foulagement  des  pauvres ,  une  partie  de  ces  rentes , 
ou  ne  les  aura  pas  chargés  de  ces  aumônes ,  en  leur  affignant 
des  revenus  plus  nombreux.  Ce  n'eft  pas  un  très  -  grand  mal  , 
fi  toutefois  ce  n'en  eit  pas  un  de  ne  pas  remplir  les  intentions 
du  fondateur;  ce  neû  pas,  dis -je,  un  très -grand  mal  que  ces 
aumônes  ne  fubfiftent  plus  :  l'expérience  a  prouvé  qu'elles  étoicnt 
plus  pernicieufes  qu'utiles ,  parce  qu'elles  font  l'aliment  de  la 
parefïe.  Mais  ces  biens  que  la  chanté  de  nos  aïeux  a  deitinés 
aux  pauvres  n'en  font  pas  moins  leur  patrimoine  ,  &  ils  de- 
vroient  être  dépofés  entre  les  mains  des  Payeurs ,  pour  le  fou- 
lagement des  vrais  infortunés. 

Pierre  II ,  dit  du  Chaffault  ,  Evêque  de  Nantes ,  étant  arrivé 
de  fon  voyage  de  Rome,  le  22  Septembre  i486,  accorda, 
pendant  un  an  ,  quarante  jours  d'Indulgences  à  ceux  qui  travail- 
leroient  à  la  chaulTée  de  Saint-Philbert-de-Grand-Lieu  ;  ouvrage 
d'une  utilité  générale.  En  1459,  on  propofa  ,  dans  le  Confcil 
du  Duc  François  II ,  de  faire  écouler  les  eaux  du  lac  &:  de  le 
dcffécher,  pour  tirer  du  terrcin  immcnfe  qu'il  occupe  un  parti 
beaucoi'p  plus  avantageux.  Le  Duc  nomma  des  CommWbires 
pour   l'exécution   de  l'entreprife ,  que    le  malheur   des   gacrres 


5éo  S  A  I 

leur  fit  manquer.  Vers  l'an  1506,  on  forma  le  projet  de  faire 
du  lac  de  Grand-Lieu  un  baffin  pour  les  vaifTeaux  de  la  marine 
royale ,  qu'on  y  auroit  conduit  par .  un  canal  ouvert  depuis 
Bourgneuf  jufqu'à  ce  lac  -,  mais  ce  projet  parut  impraticable  aux 
Ingénieurs  chargés  d'en  examiner  la  pofîibilité. 

£n  1559,  le  Roi  Henri  II  donna  des  ordres  pour  le  defleche- 
ment  du  lac  de  Grand-Lieu  -,  ordres  qui  ne  furent  point  exécutés. 
En  1572  &  1573  ,  le  Roi  Charles  IX  voulut  aufîi  tenter  le 
même  projet  ,  mais  fans  fuccès.  En  1705  ,  on  en  parla  encore, 
mais  l'entreprife  ne  fut  pas  poufîee.  Voilà  donc  un  Duc  de  Bre- 
tagne Se  trois  Rois  de  France  qui  ont  demandé  en  vain  ce  defîe- 
chement  :  on  ne  dira  pas  qu'il  foit  très-facile  de  l'exécuter  ,  mais , 
s'il  étoit  permis  de  dire  fon  avis  ,  le  mien  feroit  que  l'entreprife 
n  efl  point  du  tout  impofTible  ,  &  qu'elle  coûteroit  même  peu 
en  comparaifon  de  l'avantage  qu'on  en  retireroit.  Aujourd'hui , 
il  efl  d'une  valeur  prefque  nulle ,  & ,  s'il  étoit  defféché ,  il  rap- 
porteroit  pour  plus  de  deux  cents  mille  francs  en  grains  Ôc 
fourrage  ;  fomme  qui  feroit  vivre  quatre  cents  payfans  dans  l'ai- 
fance  ,  d'autant,  mieux  qu'ils  auroient  un  débouché  facile  de 
leurs  denrées  par  la  Loire  ,  dans  laquelle  va  tomber  la  rivière 
du  Tenu. 

SAINT-PIERRE-DE-BOUGUENAIS  ;  fur  une  hauteur  &  fur 
la  rive  gauche  de  la  Loire  ;  à  i  Heue  &  demie  au  Sud  -  Oueft 
de  Nantes ,  fon  Evêché  ,  fa  Subdélégation ,  &  fon  relTort  ;  &  à. 
23  lieues  &  demie  de  Rennes.  On  y  compte  2000  communiants: 
la  Cure  eft  à  l'alternative  ,  ainfi  que  la  Chapellenie  des  Baillons. 
Le  Prieuré  de  la  Bouvre  dépend  de  l'Abbaye  de  Genefîon  :  le 
Roi  pofTede  plufieurs  fiefs  dans  cette  ParoifTe ,  &  les  bois  taillis 
de  la  Morandiere ,  du  Chêne  -  Pointu ,  &  du  Pafcheneau  ,  qui 
peuvent  contenir  enfemble  deux  cents  cinquante-fix  arpents  de 
terrein  ;  ces  bois  tenoient  jadis  à  la  forêt  de  Touffoux  ,  &  ne 
formoient  enfemble  qu'une  feule  forêt.  Dans  ce  temps ,  le  ter- 
ritoire de  cette  Paroifle  étoit  peu  cultivé  ,  n'y  ayant  que  les 
coteaux  le  long  des  prairies  de  la  Loire  qui  étoient  en  rapport  j 
mais  aujourd'hui  l'agriculture  y  eft  obfervée  avec  beaucoup  de 
foin  :  à  l'exception  de  quelques  cantons  de  landes ,  le  refte  du 
terroir  produit  beaucoup  de  grain  ,  foin  ,  &  vin  de  médiocre 
qualité  ;  de  manière  que  la  Cure  ,  qui  ne  valoit  que  fort  peu 
de  chofe  autrefois ,  vaut  aujourd'hui  environ  fix  mille  Hvres  à 
foa  Relieur  j  6c   les    défrichements  que   les   habitants  font  par 

continuation 


s  A  I  }5i 

continuation  de  leurs  terres  incultes ,  donnent  Heu  d'efpérer  que 
cette  Cure  deviendra,  fous  peu  d'années  ,  d'un  revenu  plus  confidé- 
rable.  Par  une  tranfaftion  faite  entre  l'Evêque  de  Nantes  &  M.  le 
Re61:eur  aftuel  de  Bouguenais,  pafTée  en  1 773  , confirmée  par  lettres- 
patentes  du  Roi ,  &  homologuée  au  Parlement  de  Bretagne ,  le 
Refteur  eft  devenu  feul  décimateur  de  la  ParoilTe ,  moyennant 
la  fomme  annuelle  de  quinze  cents  livres  qu'il  paie  au  beigneur 
Evêque  de  Nantes.  Outre  les  bois  que  le  Roi  polTede  dans  cette 
Paroiffe  ,  on  y  voit  encore  ceux  de  Bougon ,  du  Chaffaut ,  du 
Breuil ,  de  la  Caillere ,  &  du  Défert  ;  mais  de  tous  ces  bois , 
ceux  de  Bougon  font  les  plus  confidérables. 

On  ne  fçait  en  quel  temps  l'Eglife  paroifîiale  de  Bouguenais , 
dédiée  à  Saint  Pierre ,  a  été  bâtie  ou  rebâtie  dans  la  forme  oii 
elle  eft.  Sa  tour  ou  clocher  en  pierres  de  taille  pourroit  être 
plus  ancienne  que  le  corps  de  l'Eghfe  :  ceux  qui  montent  à 
cette  tour  ,  divertiffent  agréablement  la  vue  de  quelque  côté 
qu'ils  jettent  les  yeuxj  c'eft  un  des  beaux  points  de  vue  du 
Comté  Nantais. 

Le  château  de  Bougon ,  avec  titre  de  Châtellenie ,  efi:  la 
Seigneurie  de  Bouguenais  ,  qui  appartient  à  M.  Robineau  de 
Bougon.  Certains  cantons  de  la  Paroiffe  reffortiffent  à  cette 
Seigneurie  ;  d'autres  du  Chaffaut ,  à  M.  Choran ,  Négociant  à 
Nantes  i  d'autres  du  fief  des  Religieufes  Carmélites  des  Couètsj 
d'autres  de  la  Chaboiffiere  ,  à  M.  l'Abbé  de  Pontual  j  6z  enfin , 
d'autres  du  Breuil ,  à  M.  l'Anglois  de  la  Rouffiere  :  outre  ces 
maifons,  on  y  en  remarque  une  grande  quantité  d'autres  remarqua- 
bles ,  &:   on  y   compte  environ  vingt  Chapelles  domefliques. 

Le  Couvent  des  Couëts  ,  habité  par  des  Religieufes  Carmé- 
lites ,  fut  fondé  par  Hoël  VI ,  Comte  de  Nantes  :  ce  Prince 
avoir  une  fille ,  que  l'on  nomme  Odeline ,  Religieufe  dans  l'Ab- 
baye de  Saint-Sulpice  ,  au  diocefe  de  Rennes ,  en  confidération 
de  laquelle  il  donna ,  l'an  1 1 49 ,  à  cette  Abbaye ,  fon  manoir 
de  Secretus ,  ou,  félon  une" autre  leçon,  de  Secouetus ,  que  Dom 
Lobineau  interprète  la  maifon  des  Couëts.  L'année  fuivante , 
le  Comte  ajouta  à  fon  préfent  l'ifle  de  Groais ,  fîtuée  dans  la 
Loire,  avec  le  Prieuré  de  Sainte  -  Radegonde ,  en  la  Paroiffe 
du  Loroux  ,  &  celui  de  Sainte  -  Honorine ,  en  la  Paroifle  de 
Héric.  Voilà  à-peu-prcs  ce  que  l'on  fçait  de  l'étabhfîément  de 
la  Communauté  des  Couëts.  En  1 1 77  ,  Robert  II  du  nom , 
Evêque  de  Nantes ,  approuva  deux  donations  faites  au  Monaf- 
tere  des  Couëts ,  l'une  à  la  Communauté  des  Hommes ,  &  l'autre 
Tome  IF.  1  i 


36i  S  A^„  . 

à  la  Communauté  des  Femmes  j  c'étoit  des  Bénédi6Hns  &  des 
Bénédièlines.  Dans  le  même  temps  ,  il  y  avoit  aufîi  deux  Cou- 
vents à  Buzai ,  l'un  d'hommes ,  l'autre  de  femmes.  Dans  la  fuite 
les  Conciles  défendirent  ces  fortes  d'établiffements  abufifs.  Le 
Prieuré  des  Couëts  fut  ôté  aux  Bénédiftines  ,  l'an  1477,  &  donné 
à  des  Carmélites  étrangères ,  en  faveur  de  la  Bienheureufe 
Françoife  d'Amboife ,  veuve  du  Duc  de  Bretagne  Pierre  II. 
Cette  Princeffe  ,  qui  avoit  pris  l'habit  de  Notre-Dame  des 
Carmes,  l'an  1458,  mourut  AbbefTe  ou  Prieure  perpétuelle 
des  Couèts ,  au  mois  de  Novembre  1485.  On  voit  fon 
tombeau    dans  le  fond  de  l'Eglife  de  cette  Abbaye. 

SAINT-PIERRE-DE-PLESGUEN  ;  fur  la  route  de  Rennes  à 
Saint-Malo  ;  à  3  lieues  au  Sud-Oueft  de  Dol ,  fon  Evêché  ôc 
fa  Subdélégation  ;  &:  à  9  lieues  un  quart  de  Rennes.  Cette  Pa- 
roifle  refîbrtit  à  Dinan,  &  compte  1700  communiants  :  la  Cure 
eft  à  l'Ordinaire.  Ce  territoire ,  couvert  d'arbres  &c  buiflbns , 
renferme  des  terres  abondantes  en  grains ,  des  prairies ,  les  bois 
de  Louvre  &  de  la  Sauvagere ,  &  des  landes  peu  étendues.  En 
1500,  le  Rouvre,  à  Rolland  du  Rouvre  ;  aujourd'hui,  avec 
moyenne- Juftice ,  à  M.  du  Rouvre  :  Bafogel ,  à  Jean  de  Bintin: 
la  Sauvagere  ,  à  Rolland  Geffroi  ;  (  cette  Terre  ,  qui  a  moyenne- 
Juilice ,  s'appelle  aujourd'hui  la  Sauvagere-Ferron^  Se  appartient 
à  M.  Jonchée  de  Saint-Malo  :  )  Grignart ,  à  Jean  Grignart  ;  le 
Gage ,  à  Jean  de  Cleuë  -,  la  Frefnaye ,  à  Guillaume  Geflin  ; 
Pépin  ,  à  Gilles  Pépin  5  les  Chapelles ,  à  Jean  MafTuel  :  la  Jehar- 
diere ,  à  Artur  Barde  ;  (  elle  a  une  moyenne- Juftice  ,  &  appar- 
tient à  M.  de  Châteaugiron  :  )  &  Corbon ,  à  GeofFroi  Corbon  j 
la  Chefnaye-au-Porc  ,  avec  moyenne -Juftice  ,  appartient  à 
M.   de   Lys. 

SAÏNT-POL.DE.LÉON5  ville  épifcopale  Se  capitale  de  h 
Principauté  de  Léon  -,  par  les  6  degrés  20  minutes  20  fécondes 
de  longitude ,  &  par  les  48  degrés  40  minutes  5  2  fécondes  de 
latitude  5  &  à  42  lieues  de  Rennes.  L'Evêché  de  Saint-Pol-de 
Léon  contient  122  lieues  quarrées  :  il  eft  borné  au  Nord  &  à 
rOueft  par  l'Océan ,  au  Sud  par  l'Océan  Se  l'Evêché  de  Quim- 
per,  Se  à  l'Eft  par  celui  de  Tréguierj  il  renferme  quatre  villes, 
quatre-vingt-une  ParoifTes  de  campagne,  trente-quatre  trêves, 
deux  Abbayes  d'Hommes ,  douze  Couvents  d'Hommes ,  fix  Cou- 
vents de  Femmes ,  quatre  Hôpitaux ,  dont  un  eft  militaire ,  un 


s  AI  56J 

H6tel-Dîeu  ,  &  compte  186800  habitants.  Le  volfinage  de  la 
mer  rend  l'air  un  peu  humide  èc  épais.  Le  terroir  eil  exafte- 
ment  cultivé ,  &  produit  des  grains  de  toutes  efpeces ,  du  lin , 
du  chanvre  ,  &  du  cidre.  Trois  grandes  routes  aboutiffent  à  Saint- 
Pol-de-Léon ,  oii  l'on  compte  5400  habitants.  Une  Teule  Paroifle, 
nommée  le  Minihi ,  formée  de  fept  qui  exiftoient  auparavant , 
&  qui  a  pour  trêve  la  petite  ville  de  Rofcoff,  avec  port  de 
mer  ;  &  cinq  Communautés  ,  qui  font  :  les  Carmes,  les  Minimes, 
le  Séminaire,  les  Urfulines ,  &:  l'Hôtel-Dieu.  On  remarque,  dans 
la  même  ville ,  une  Communauté  avec  droit  de  députer  aux 
Etats ,  une  Subdélégation ,  une  Pofte  aux  lettres  ,  trois  foires 
par  an ,  &  un  marché  tous  les  mardis.  Le  commerce  de  la  ville 
n'eit  pas  confidérable  ,  &  ne  peut  l'être  ,  n'ayant  d'autre  a6livité 
que  celle  que  lui  donne  le  port  de  Rofcoff  ,  qui  eft  à  trois 
quarts  de  lieue  de  Saint-Pol-de-Léon.  Ce  port ,  creufé  par  la  Na- 
ture elle-même  >  efl:  très-beau  &  très  -fur  pour  les  vaiffeaux  mar- 
chands ,  qui  y  font  à  l'abri  des  vents  &  de  la  tempête  ;  ce  qui 
rend  ce  petit  endroit  floriffant. 

L'Eglife  Cathédrale  efl:  dédiée  à  Saint  Pol,  premier  Evêque 
de  Léon.  Le  Chapitre  eft  compofé  d'un  Chantre  ,  de  trois  Ar- 
chidiacres ,  de  feize  Chanoines  ,  &  de  fept  Prébendes  ,  dits 
Vicaires.  La  ville  porte  pour  armes  ,  d'or  au  lion  de  fable 
cantonné  de  trois  molettes  de  même.  La  Principauté  de  Léon 
s'étend  depuis  Quimper  jufqu'à  la  ville  de  Saint-Pol-de-Léon , 
dans  une  étendue  de  vingt-quatre  lieues  ,  fans  y  comprendre  la 
Seigneurie  de  Bourgneuf ,  près  Carhaix  ,  qui  renferme  quatre 
lieues,  &  qui  eft  un  membre  de  la  Seigneurie  de  Léonj  elle  a 
une  haute-Juftice  ,  qui  s'exerce  dans  la  ville  épifcopale ,  &  qui 
connoît  de  tous  les  délits ,  à  l'exception  de  celui  de  faulFe  mon- 
lîoie.  Les  Sièges  de  Landivifiau  ,  de  Roche-Morice  ,  de  Coèt- 
Merieur  ,  &:  de  Peuret ,  avec  Sénéchaux  ,  Baillis ,  Lieutenants , 
&c.  dépendent  de  la  même  Seigneurie.  Lçs'Régaires  de  l'Evêque  ^ 
Seigneur  fpirituel  &  temporel  de  la  ville  ,  forment  une  Jiante-Juf- 
tice*  Le  Roi  Charles  IX  étabHt ,  en  1 5  64  ,  a  Saint-Pol-de- 
Léon  ,  un  Juge  qni  connoît  des  cas  royaux  feulement. 

La  ville  de  Saint-Pol-de-Léon  eil  très-ancienne  ,  &:  fa  fon- 
dation efl:  inconnue.  Céfar  en  fait  mention  dans  fes  commen- 
taires ,  fans  lui  donner  d'autre  nom  que  celui  de  ville  des  Of- 
fifmiens  ;  nom  du  peuple  qui  l'habitoit.  D'après  le  récit  des  an- 
ciens géographes  &  des  fçavants,  il  efl:  à  croire  que  cette  ville 
étoit  la  Capitale   de  tout  le   canton  que  renferment  aujourd'hui 


3^4  ^  ^  ^ 

les  Evêchés  de  Léon ,  de  Tréguier ,  &  de  Saint-Br îeuc.  Les  Ro- 
mains y  avoient  établi  une  garnifon ,  qui  y  fubfîila  jufqu'à  la 
conquête  de  l'Armorique  par  Maxime  &  Conan.  Les  autres 
révolutions  que  peut  avoir  éprouvé  cette  ville  dans  les  pre- 
miers fîecles  ,  nous  font  abfolument  inconnues.  Elle  n'a  jamais  été 
bien  célèbre  dans  l'hiftoire ,  même  dans  les  fîecles  poftérieurs  j  &  cet 
article  n'occupera  pas  une  grande  place  dans  cet  Ouvrage. 

En  421  ,  des  marchands  apportèrent  d'Egypte  en  Bretagne 
le  corps  de  Saint  Matthieu,  qu'ils  préfenterent  à  Salomon.  Le 
Prince ,  pieux ,  reçut  ces  précieufes  Reliques  comme  un  don  du 
ciel ,  &  les  fit  dépofer ,  avec  honneur ,  dans  la  ville  des  Oflif- 
miens.  Pour  marquer  à  Dieu  fa  reconnoifTance  d'avoir  rendu 
fes  Etats  dépositaires  du  corps  de  ce  faint  Apôtre ,  il  aboHt  la 
loi  qui  condamnoit  à  l'efclavage  les  enfants  de  ceux  qui  ne  pou- 
voient  payer  les  taxes  auxquelles  ils  avoient  été  impofés.  Cette 
coutume  barbare  avoit  été  introduite  par  les  derniers  Magiflrats 
Romains ,  qui  commirent  beaucoup  de  vexations  dans  la  Bretagne  ; 
vexations  qui  occafionnerent  la  révolte  de  409.  La  Chapelle 
de  Notre-Dame  dans  Me  Callot ,  vis-à-vis  Saint-Pol-de-Léon , 
fut  bâtie  en  mémoire  de  la  défaite  du  corfaire  Corfol ,  &  de 
cinquante  mille  Danois  qui  furent  taillés  en  pièces  par  le  Roi 
Rivalon  Murmacon  ,  l'an  502. 

La  ville  des  Oiîifmiens  fut  érigée  en  Evêché  dans  le  cin- 
quième fiecle ,  &  la  conduite  de  cette  EgUfe  fut  confiée  à 
Saint  Pol  Aurelien.  (  Voyez  ci -après  le  catalogue  des  Evêques.  ) 
Après  la  mort  de  ce  vertueux  Pafi:eur,  les  habitants  donnèrent 
fon  nom  à  leur  ville  -,  nom  qu'elle  a  confervé  jufqu'à  nos  jours. 
Les  premiers  Rois  de  Bretagne  y  firent  quelquefois  leur  réfidence  , 
&  il  y  a  apparence  qu'elle  étoit  alors  une  des  principales  cités 
de  leur  petit  Royaume.  Le  10  Mai  643  ,  Alain,  furnommé  le  Long ^ 
Roi  de  Bretagne ,  alTembla  fes  Etats  dans  la  ville  de  Saint-Pol- 
de-Léon  ,  &  s'occupa ,  de  concert  avec  l'afTemblée  nationale , 
dé'Tâféfcrînation  de  plufieurs  abus. 

En  1163  ,  le^Du.c  de  Bretagne  Conan  le  Petit,  ayant  marié 
fa  fille  unique  Confiance  à  Geofi'roi ,  fils  de  Henri ,  Roi  d'Angle- 
terre ,  le  Comte  Eudon ,  pour  fe  mettre  en  état  de  réfifter 
à  fon  fils  Conan  ,  époufa  la  fille  de  Hervé,  Vicomte  de  Léon, 
prit  le  parti  de  ce  Seigneur  rebelle ,  leva  des  troupes ,  &  fit 
des  courfes  dans  le  Duché.  Le  Roi  d'Angleterre ,  inftruit  des  dé- 
marches du  Comte  Eudon,  vint  en  Bretagne  avec  une  armée 
confidérable ,  rafa  les  châteaux  de  Saint-Pol-de-Léon ,  de  Trebez, 


s  A  I  3^5 

Air  la  rîvîere  de  Morlaix  Se  de  Lefneven ,  &  força  ce  Vicomte 
à  fe  foumettre  &  à  lui  donner  des  otages. 

En  II 72,  la  mer,  fortant  de  fes  limites  ordinaires,  inonda 
une  partie  de  l'Evêché  de  Léon.  Les  eaux ,  en  fe  retirant ,  dif- 
férent fur  les  terres  une  grande  quantité  d'immondices  &  d'infeftes, 
qui ,  par  leur  corruption ,  cauferent  une  épidémie  qui  emporta 
beaucoup  de  monde. 

En  1177  ,  le  Duc  Geoffroi  entra  dans  le  pays  de  Léon  avec 
une  armée  confîdérable.  Il  pouffa  vivement  le  Vicomte ,  lui  prit 
toutes  {es  places ,  &  le  contraignit  à  venir  fe  jetter  à  fes  pieds. 
Cette  reffource ,  Ci  humiliante  pour  le  Vicomte  ,  lui  valut  fon 
pardon  &  la  reftitution  de  toutes  fes  places  ,  à  l'exception  du 
château  de  Morlaix ,   qui  étoit  la  clef  du  Comté  de  Léon. 

L'an  1 1 89  ,  Richard  ,  Roi  d'Angleterre ,  ne  pouvant  avoir  en 
fa  puiffance  le  jeune  Artur,  Duc  de  Bretagne,  que,  pour  plus 
grande  fureté ,  on  avoit  enfermé  dans  le  château  de  Breft ,  en- 
voya une  armée  de  brigands,  nommés  les  Cotereaux,  en  Bretagne, 
avec  ordre  de  ravager  la  Seigneurie  de  Léon ,  &  de  faifir 
André  de  Vitré ,  qui  étoit  la  principale  caufe  qu'Artur  avoit 
été  enfermé  dans  le  château  de  Breft.  Cette  troupe  ne  manqua 
pas  d'exécuter  les  ordres  de  fon  Souverain ,  quant  aux  ravages , 
mais  elle  ne  put  prendre  le  Baron  de  Vitré. 

L'an  1 1 96 ,  pluficurs  compagnies  de  voleurs  fe  réunirent  & 
commirent  les  plus  affreux  défordres  dans  le  pays  de  Léon.  Le 
Duc  de  Bretagne  fit  marcher  contre  eux  des  troupes  qui  les 
prirent.  Ces  fcélérats  furent  interrogés,  jugés,  &  condamnés  aux 
plus  rigoureux  fuppHces.  En  1205  ,  Philippe  -  Auguffe ,  Roi  de 
France,  fit  le  fiege  de  Chinon ,  prit  cette  ville  ,  &  délivra  Conan  de 
Léon,  furnommé/e  Coun,  qui  y  étoit  détenu prifonnier.  Conan  ctoit 
d'une  force  extraordinaire  :  d'un  feul  coup  de  poing ,  il  affom- 
moit  rhomme  le  plus  robufte ,  ou   le  cheval  le  plus  vigoureux. 

En  1250,  le  Duc  Jean  I,  dit  le  Roux ^  voulut,  à  l'exemple 
de  fon  père ,  jouir  du  droit  de  bris  fur  les  terres  du  Seigneur  de 
Léon ,  &  lui  ôter  le  privilège  de  donner  des  brevets  à  fes  vaf- 
fauxi  privilège  dont  les  Vicomtes  jouiffoient  de  temps  immé- 
morial. Le  Seigneur  de  Léon  rejetta  hautement  fes  prétentions; 
& ,  fur  fon  rems  d'abandonner  ces  précieufes  prérogatives ,  qui 
effeftivement  ne  dévoient  appartenir  qu'aux  Souverains,  le  Duc 
entra  fur  fes  terres ,  prit  quelques  places ,  les  pilla  ,  &  les 
brûla.  Après  cette  expédition ,  qu'on  pourroit  quaUfier  de  bri- 
gandage ,  il   fe  retira   fans  en  exiger  davantage  ;  cependant , 


^66  S  AI 

comme  il  étoit  extrêmement  jaloux  des  droits  de  la  fouveraîné 
PuifTance,  il  acheta,  en  1275,  la  Seigneurie  de  Léon,  &  s'en 
appliqua  tous  les  privilèges.  L'inconduite  du  Seigneur  de  Léon 
y  donna  lieu.  Le  Vicomte  avoit  mis  fes  affaires  en  fî  mauvais 
état,  qu'il  fe  vit  forcé  de  vendre  volontairement  une  partie  de 
fon  bien,  &  qu'il  fut  dépouillé  de  l'autre  par  des  faifies-réelles. 
Le  Duc  Jean  I  ne  laiffa  pas  échapper  l'occafîon  du  retrait ,  & 
de  réunir  à  fa  couronne  les  vaftes  &  magnifiques  pofTefîions  du 
Vicomte.  La  plupart  de  fes  contrats  font  mentionnés  dans  les 
titres  du  Duché  ,  des  années  1273,1 274  ,  1 27  5 ,  1 276  ,  &  1 278  : 
ils  portent  acquifition  des  ports  &  villes  de  Saint- Mahé ,  de 
Brefl,  de  Saint-Renan,  du  Conquet,  &  généralement  de  tout 
ce  que  les  anciens  Seigneurs  poflédoient  au  pays  de  Léon.  Le 
Vicomte  vendit  même  la  propriété  de  la  légitime  de  fon  frère, 
dont  il  n'avoit  que  l'ufufruit  fuivant  l'ajfife  au  Comte  Geoffrou 
Depuis  cette  révolution  ,  la  Vicomte  a  été  pofTédée  par  les 
Princes  de  la  maifon  de  Bretagne,  d'où  elle  eft  tombée  dans 
l'illuflre  famille  de  Rohan,  en  faveur  de  laquelle  elle  a  été 
érigée    en    Principauté. 

Pierre  de  Bretagne  ,  Vicomte  de  Léon  ,  Prince  prodigue , 
avoit  acheté,  en  1291  ,  à  Paris,  des  chevaux  qu'il  ne  paya  pas. 
Au  temps  marqué  pour  le  paiement,  fon  créancier  le  prefTa 
vivement  de  le  fatisfaire  ;  & ,  comme  le  Prince  n'avoit  pas 
d'argent,  il  n'eut  d'autre  parti  à  prendre,  pour  fe  délivrer  de 
ce  mauvais  pas,  que  d'avoir  recours  à  fon  père,  qui  paya  fa 
dette  ,  à  condition  qu'il  hypothéqueroit  tous  les  biens  qu'il  avoit 
en  Bretagne.  Pierre,  émancipé  en  1294,  cède  à  fon  père  tous 
les  droits  qu'il  avoit  fur  la  Vicomte  de  Léon ,  pour  une  fomme 
de  quatorze  mille  livres.  Cette  ceffion  fut  faite  en  préfence  de- 
Phihppe  le  Bel ,  &  confirmée  par  fes  lettres  du  mois  de  Fé^ 
vrier  1294. 

En  13 10,  Henri  Boich,  Jurifconfulte  célèbre,  né  à  Saint- 
Pol-de-Léon,  compofa,  fur  les Décrétales  ^  fur  les  Clémentines, 
un  livre  qui  fut  imprimé  à  Venife ,  en  1576,  &  qui  a  été 
confervé  manufcrit  dans  la  Cathédrale   de  Cambrai, 

En  1344,  le  Roi  d'Angleterre,  ayant  appris  que  l'on  avoit 
décapité,  à  Paris,  Olivier  de  CUfTon  &  plufieurs  autres  Gen- 
tilshommes, à  caufe  de  leurs  intrigues  &  deleurs  liaifons  avec 
la  Grande-Bretagne ,  réfolut  d'ufer  de  repréfailles  pour  venger 
la  mort  de  ces  Seigneurs ,  &  voulut  faire  couper  la  tête  à  Henri 
de  Léon,  qui   avoit  été  pris  cette  année  au  fiege   de  Vannes. 


s  AI  3(J7 

Le  Comte  de  Derbi ,  inftruit  des  intentions  de  Ton  maître ,  lui 
repréfenta  que  c'étoit  une  injuftice  criante,  de  faire  périr  un  Che- 
valier eftimable ,  prifonnier  de  guerre ,  qui  n'avoit  aucune  part 
à  la  mort  d'Olivier  de  CliiTon.  Edouard  fe  calma ,  fit  venir 
Henri  de  Léon ,  &  lui  fit  grâce. 

Le  Duc  Jean  IV  &  la  Duchefie ,  fon  époufe ,  fondèrent ,  en 
1348,  le  Couvent  des  Pères  Carmes,  dans  la  vilîe  de  Saint-Pol- 
•de-Léon ,  &  firent  rebâtir ,  dans  cette  ville ,  la  Chapelle  de 
Notre-Dame  de  Creilquer  ,  fondée  très  -  anciennement  par  un 
Chanoine  de  la  Cathédrale. 

Guillaume  de  Rochefort ,  Evêque  de  Léon,  en  1349,  fit  cou- 
vrir de  lames  d'argent ,  empreintes  de  fes  armes ,  un  livre  écrit 
de  la  main  de  Saint  Pol ,  premier  Evêque  de  Léon ,  &  le  dé- 
pofa  dans  le  tréfor  de  fa  Cathédrale.  Le  Duc  Jean  IV  afliégea, 
l'an  1374,  la  ville  de  Saint-Pol-de-Léon ,  &  pafTa  toute  la  gar- 
nifon  Françaife  au  fil  de  l'épée.  En  1385,  Gui  le  Barbu ,  de 
la  maifon  du  Quilliou ,  en  la  ParoilTe  de  Plougallel ,  Evêque 
de  Saint-Pol-de-Léon ,  fit  bâtir  fon  tombeau  dans  la  Chapelle 
de  Saint- André  ,  à  laquelle  il  donna  vingt  marcs  d'argent,  deux 
cents   écus  d'or ,  fa  crofle ,  &  fa  mitre. 

Le  1 5  Septembre  1 444 ,  fut  pafTé  un  a6le  entre  le  Vicomte 
de  Rohan ,  Seigneur  de  Léon ,  &:  le  Chapitre  de  fa  Cathédrale, 
pour  régler  leurs  obligations  refpeftives.  Le  Vicomte  fonda,  dans 
la  Cathédrale,  deux  anniverfaires ,  pour  la  célébration  defquels 
il  donna ,  à  perpétuité ,  au  Chapitre ,  toutes  les  dîmes  qui  lui 
appartenoient  dans  la  Paroifie  de  Ploeiieven ,  Se  cinq  quanUrs 
de  froment  pour  le  pain  du  Chapitre.  En  reconnoilfance ,  le 
Chapitre  promit  au  Vicomte  &  s'obligea  à  le  recevoir  ,  lui 
&  fes  fuccefleurs.  Chanoines  en  fon  Eglife,  de  la  même  manière 
que  l'on  recevoir  les  Seigneurs  temporels  Chanoines  en  l'Eglife 
Métropolitaine  de  Tours.  C'ell:  en  conféquence  de  cette  obhga- 
tion  que  ,  lorfque  le  Viconite  entroit  à  Saint-Pol-dc-Léon , 
TEvêque ,  en  habit  pontifical ,  accompagné  de  fon  Chapitre , 
alloit  proceffionnellement  au  devant  de  lui  avec  la  croix  6l  les 
bannières ,  & ,  au  fon  de  toutes  les  cloches ,  lui  préfentoit  un 
furplis  dont  il  étoit  fur  le  champ  revêtu,  le  conduifoit  à  l'Eglife, 
où  il  prenoit  place  à  côté  de  ce  Prélat ,  pendant  qu'on  chan- 
toit  le  Te  Dcum  pour  célébrer  f  :i  hcureufe  arrivée  \  &  lorf- 
qu'il  fortoit  de  l'Eglife,  un  certain  nonibre  de  Lhanoines,  en 
habits  de  chœur  ,  le  conduifoient  jufqu'à  fon  log^is  ,  où  il  étoit 
nourri  aux  dépens  du  Chapitre.  11   fur.  llaiu      ^   u  la    mort  du 


368  S  A  I 

Vicomte  &  de  fes  fucceffeurs,  toutes  les  cloches  fonneroîent 
pendant  huit  jours  ;  qu'on  placeroit  dans  l'endroit  le  plus  émi- 
nent  de  la  Cathédrale  ,  &  pour  plus  grand  honneur,  douze 
bannières  aux  armes  du  Vicomte  -,  qu'il  leroit  fait  un  Service 
folemnel  avec  des  tentures  aux  mêmes  armes  -,  que  dès  le  mo- 
ment le  Chapitre  les  feroit  graver  en  pierres  en  deux  endroits 
de  i^glife  indiqués  par  le  Vicomte  ;  &  que  les  deux  anniver- 
faires  feroient  célébrés  en  cérémonie ,  l'un  à  la  fête  de  la  Con- 
ception ,  &  l'autre  le  jour  de  Saint  -  Yves.  Le  Duc  François  I 
approuva  cette  fondation ,  par  fes  lettres  données  à  Vannes , 
le  14  Oftobre  1444. 

\Jn  des  plus  finguliers  droits  que  nous  offre  le  Gouvernement 
féodal ,  eft  celui  de  Motte ,  attribué  au  Seigneur  de  Léon.  Ses 
vaffaux ,  appelles  ferfs  de  Motte ,  ne  pouvoient  aller  demeurer 
ou  choifir  une  habitation  ailleurs  que  fur  les  terres  du  Vicomte, 
& ,  s'ils  le  faifoient ,  le  Seigneur  ou  fes  Officiers  pouvoient  les 
faifir ,  leur  mettre  la  corde  au  col ,  les  ramener  à  leur  Motte , 
&  leur  infliger  une  peine  corporelle  Qu  pécuniaire.  Si  ces  ferfs 
avoient  des  enfants  qu'ils  fifl^ent  étudier,  ces  jeunes  gens  ne  pou- 
voient obtenir  la  tonfure  ni  aucuns  Ordres  Eccléliaftiques ,  fans 
lettres  -  patentes  du  Vicomte.  Si  quelques  -  uns  déUnquoient  ou 
manquoient  à  leurs  obligations  envers  les  Seigneurs ,  leurs  en- 
fants perdoient  les  biens  préfents  &  futurs  auxquels  ils  pouvoient 
prétendre  en  ladite  Vicomte ,  &  de  plus ,  ils  étoicnt  bannis  du 
pays.  Le  château  de  Roche-Morice  avoir  droit  de  Capitainerie , 
Lieutenant ,  &  Garde  ;  cette  place ,  jadis  une  des  plus  fortes  de 
Bretagne ,  efl:  maintenant  en  ruines. 

Pierre  Carnenge  ,  Kernengui ,  ou  Kermengi ,  de  l'Ordre  des 
Grands  Carmes  ,  Do6leur  en  Sorbonne  ,  né  à  Saint-Pol-de-Léon  , 
s'acquit  une  grande  réputation  dans  les  fciences  :  il  nous  a  laiffé 
une  Hiftoire  Eccléfiaftique ,  l'Hiftoire  de  fon  Ordre ,  une  critique 
des  ConfHtutions  &  des  Commentaires  fur  Arillote  ;  il  mourut 
en  1471.  Le  Roi  Louis  XII  &  la  Reine  Anne  ,  fon  époufe , 
furent  reçus  à  Saint-Pol-de-Léon,  en  1503,  par  Jean  de  Ker- 
mavan,  Evêque  de  ce  diocefe.  En  1548,  la  Princeffe  Marie 
Stuard  ,  venant  d'Ecoffe  en  France  ,  débarqua  à  Rofcoff  ,  & 
fonda  une  Chapelle  dans  l'endroit  où  elle  defcendit  de  fon 
bateau  j  cette  Chapelle  fut  dédiée  fous  le  vocable  de  Saint 
Ninien, 

François  Eguinard  ,  Baron ,  natif  de  Saint-Pol-de-Léon  ,  en- 
feigna  le  Droit  à  Bourges.  Le   célèbre   Duaren ,  aufli  Breton , 

vivoit 


s  A  I  369 

Vîvoît  dans  la  même  ville.  L'émulation  leur  mit  la  plume  à  la 
main  l'un  contre  l'autre  ,  &  ce  dernier  écrivit ,  contre  Baron  , 
l'Apologie  de  la  Jurifdi^lion  &  de  l'Empire  :  dans  la  fuite ,  Lv 
conformité  d'emploi  fervit  à  les  réconcilier.  Baron  mourut  le  2  2 
Août  1550,  &  Duaren ,  pour  laifTer  à  la  poftérité  un  témoi- 
gnage de  l'ellime  &  de  l'amitié  qu'il  avoit  pour  ce  fçavant  Ju- 
hfconfulte,  fit  fon  épitaphe.  L'Hifloire  nous  apprend  qu'en  1^461 
la  mer  jetta  une  baleine  fur  le  rivage  ,  vis-a-vis  Saint-Pol-de- 
Léon  :  l'Evêque  s'en  faifît  fur  le  champ  ;  mais  le  Duc  revendi- 
qua ce  poiflbn ,  &  foutint  qu'il  ne  pouvoit  appartenir  qu'à  lui 
feul,  L'Evêque  réfifta  pendant  quelque  temps  ,  mais  enfin  l'af- 
faire s'arrangea  à  l'amiable. 

En  1569,  Rolland  de  Neuville,  Evêque  de  Saint-Pol-de- 
Léon ,  grand  Prédicateur  ,  inllitua ,  dans  prefque  toutes  les  Pa- 
roiffes  de  fon  diocefe  ,  la  Confrairie  du  Saint-Sacrement ,  malgré 
toute  la  réfiftance  des  Huguenots  qui  abondoient  en  ce  temps-là 
dans  la  Bretagne.  En  161 8  ,  le  Couvent  des  Pères  Carmes,  qui 
avoit  prefque  été  entièrement  ruiné  par  les  malheurs  des  guerres , 
fut  rebâti,  en  quelque  forte,  à  neuf,  par  les  bienfaits  du  Boi 
Louis  XIIL  Les  Capucins  furent  établis  à  Rofcoff,  en  1621  &c 
1622.  Les  Révérends  Pères  Minimes  furent  fondés,  dans  la  ville 
de  Saint-Pol-de-Léon ,  par  Prigent  de  Coatelez  ,  Tréforier  du 
Chapitre  de  la  Cathédrale  ,  qui  donna  fa  maifon  canoniale 
pour  faire  ce  Monaftere;  &,  le  24  Mars  1626  ,  la  première  pierre 
de  l'Eghfe  fut  pofée.  En  1625  ,  l'EgUfe  Cathédrale  de  Saint-Pol-de- 
Léon  &  les  Chapelles  qui  s'y  deffervent ,  ayant  été  interdites  ^ 
les  Chanoines  firent  le  fervice  dans  la  Chapelle  de  Creifquer 
pendant  l'interdit.  (  Voyez  la  caufe  &  les  fuites  de  cette  grande 
affaire  dans  le  catalogue  des  Evêques.  ) 

En  1630,  au  mois  de  Décembre,  les  Religieufes  Urfulines 
furent  reçues  &  fondées  à  Saint-Pol-de-Léon.  Le  tonnerre  tomba 
fur  le  clocher  de  Notre-Dame  de  Creifquer ,  abattit  la  pointe 
de  la  flèche ,  tua  une  femme  qui  étoit  dans  l'Egiife ,  fondit  la 
moitié  du  chanceau  qui  étoit  en  bronze  au  devant  du  maître- 
autel ,  brifa  l'efcalier  du  clocher,   &  deflecha  tous  les  bénitiers. 

Lettres-patentes  de  l'an  1751  ,  pour  la  reconllruélion  du  Pa- 
lais épifcopal. 

Catalogue   hipcr'iijue  des  Evêijucs  de  S aim-Pol' de-Léon, 

L'Eghfe  Cathédrale   de  Saint-Pol-de-Léon  doit   fes  premiers 
fondements  à  Saint  Pol ,,  né  au  pays  de  Galles ,  en  Angleterre. 
Tome  IV ^  A  \ 


Ce  Saint  le  consacra  J  dès  fa  plus  tendre  jeuneffe,  à  la  vîê 
Relieieiife  ,  &  vécut  long-temps  dans  la  compagnie  de  Saint 
Gildas  le  Sage ,  fous  la  difcipline  de  l'Abbé  Hildut.  Arrivé  en 
Bretagne ,  il  le  retira  avec  fes  Difciples  dans  l'ifle  de  Batz ,  & 
Witur ,  Seigneur  du  pays ,  lui  donna  du  terrein  pour  édifier  un 
Monaftere.  Il  fixa  fa  demeure  dans  ce  lieu ,  &  alla  prêcher  l'E- 
vangile aux  Oiîifmiens.  Les  Grands  Se  le  peuple ,  pleins  de  véné- 
ration pour  ce  faint  homme ,  fupplierent  le  Roi  Childebert  de 
le  faire  facrer-  Evêque  de  Léon.  Le  Monarque  y  confentit ,  Se 
fit  venir  Saint  Pol  à  fa  Cour.  Voilà  la  manière  dont  ce  fait 
efl  rapporté  dans  une  ancienne  légende  de  l'Eglife  de  Léon» 
«<  Le  Monarque ,  fçachant  combien  les  habitants  de  Léon  defî-« 
»  roient  d'avoir  Pol  pour  leur  Evêque  ,  &  connoiffant,  lui* 
»  même  ,  l'éminente  famteté  de  cet  humble  ferviteur  de  Dieu , 
»  lui  adreffa  ces  paroles  de  l'Evangile  :  Courage ,  bon  ferviteur  ^ 
w  puifque  vous  ave:^  été  fidèle  jufquici  dans  les  moindres  chofes  ^ 
»  je  vais  vous  donner  un  emploi  plus  important ,  cefi  de  veiller  fuf 
»  vos  frères ,  de  les  inflruire ,  de  les  gouverner  avec  fag^ffe ,  6*  de 
»  les  conduire  dans  la  voie  du  cieL 

^>  Pol ,  faifi  d'étonnement  &  effrayé  de  l'immenfe  étendue  des 
>>  devoirs  qu'on  lui  préparoit,  fe  jette  aux  pieds  du  Roi  qui 
r>  le  relevé  avec  bonté ,  &  prenant  le  bâton  Pafloral  d'un  autre 
»  Evêque  là  préfent,  il  le  met  dans  les  mains  du  modefte  Soli-» 
>*  taire  ,  qui  ne  peut  réfiller  aux  ordres  de  fon  Roi ,  &  qui  efl 
»  facré  fur  le  champ  par  les  Prélats  de  fa  Cour.  Après  cette 
»  cérémonie ,  le  Roi  le  renvoya  dans  fon  Evêché ,  &  lui  afligna 
»  des  revenus  fufîifants  pour  fa  fubfiflance.  »  Les  hifloriens  ne 
font  pas  d'accord  fur  l'année  de  l'éreêlion  du  Siège  de  Saint^ 
Pol-de-Léon;  les  uns  la  placent  en  529,  &  les  autres  en  580* 
Sa  naiffance ,  placée  par  plufieurs  fous  l'année  487 ,  &  fa  mort 
fous  l'année  579,  font  rejetter  la  dernière  opinion.  Quoi  qu'il 
en  foit ,  après  avoir  gouverné  fon  diocefe  quelque  temps,  il  ré-* 
figna  fa  place  à  Saint  Johevin  ,  Joava  ou  Jovin ,  qu'il  avoit  or* 
donné  lui-même. 

Saint  Johevin  ,  ne  fut  Evêque  qu'un  an. 

Thiarmaile  ou  Ermel ,  qui  avoit  auffi  été  fait  Prêtre  par  Saint 
Pol  ,  ne  fut  pas  plus  long-temps  fur  le  Siège  de  Léon. 

Saint  Pol  reprit  encore  le  Gouvernement  de  fon  diocefe ,  qu'il 
gouverna  pendant  quelques  années ,  &  fe  retira  dans  fon  Mo- 
naftere  de  l'ifle  de  Batz,  où  il  mourut  dans  l'endroit  nommé 
U  Fcniti  de  Saint  Pol  ^  le  12  Mars  573 ,  &  félon  les  autres  579* 


s  A  I  571 

Cetomerin ,  parent  de  Saint  Pol  ,  prit  enfuite  le  titre 
d'Evêque. 

Saint  Goulven ,  fut  le  cinquième  Evêque  de  Saint-Pol. 

Saint  Tenenan.  Saint  Houardon.  Saint  Gocrnove.  Gilbert. 
Omene.  Guyomark.  Léonore. 

Libéral ,  fut  dépofé  ,  vers  848  ,  comme  iîmoniaque ,  par  Nomi- 
noé ,  Roi  de  Bretagne, 

Paulin  ou  félon  d'autres  Paulinien ,  voyant  la  Bretagne  dé- 
chirée par  fes  propres  enfants  &  par  les  Barbares  du  Nord , 
après  la  mort  du  Roi  Salomon  ,  quitta  fon  Evêché ,  &  prit  la 
fuite  avec  les  Reliques  de  Saint  Matthieu ,  vers  la  fin  du  neu- 
vième fiecle. 

O61:réon,  qui  occupa  enfuite  le  Siège  de  Saint-Pol ,  avoit  l'Evê- 
ché  de  Nantes  en  commende. 

Hoflion ,  fut  fon  fuccelfeur  en  940. 

Marbon  ou  Mabbon ,  n'eil  trouvé  que  dans  un  catalogue  ma- 
îiufcnt  qui  eu  à  la  BibUotheque  publique  de  Nantes. 

Cunan  ou  Conan ,  élu  vers  960. 

Jacob ,  originaire  de  la  Grande-Bretagne  &  Abbé  de  Saint- 
Mefmin  ,  élu  Evêque  de  Léon  à  la  demande  d'Alain  Barbe* 
torte ,  confentit  à  fon  éleftion  ,  &  fut  facré  ;  mais  il  ne  put 
fe  réfoudre  à  quitter  fon  Abbaye  ,  &  y  pafTa  le  relie  de 
£es  jours» 

Bretcand ,  fut  élu  en  990. 

Eudes,  fut  fon  fuccefîeur  en  995  :  la  coUeftion  de  Nantes  en 
fait  mention. 

Salomon  I  ,  élu  en  1025  ,  eft  connu  par  les  cartulaires  de  l'Ab- 
baye de  Saint-Georges  de  Rennes. 

Omnefe  ,  vivoit  du  temps  d'Alain  Caignard  &  d«  Saint 
Gurlois. 

Jacob,  fut  élu  vers  Tan  1099. 

Galon  Walon ,  Morne  de  Landevenec ,  élu  Evêque  de  Léon , 
affifta  aux  Conciles  de  Vienne  l'an  1 1 1 2  ,  de  Touloufe  en  1 1 1 9  , 
&  mourut  en  1 134. 

Gui  y  élu  en  1145  ,  confirma,  dans  le  courant  de  la  même 
année ,  à  l'Abbé  de  Saint  -  Melaine ,  toutes  les  donations  faites 
par  les  Comtes  de  Penthievre. 

Salomon  II ,  fut  témoin  d'une  donation  faite  à  Saint -Sulpice  , 
Tan  1 1 49 ,  par  Hoèl ,  Comte  de  Nantes. 

Hamon,  fils  de  Hervé,  Vicomte  de  Léon,  confirma,  le  10 
Juillet  1157,  les  privilèges  accordés    par   Hervé,  Vicomte  de 


Î72.  s  A  I 

Léon ,  fon  père ,  à  l'Abbaye  de  Saint-Matthieu  :  il  prît  les  armes  3 
l'an  116}  ,  pour  venger  l'affront  fait  à  fon  père  &  à  fon  frère 
par  les  Seigneurs  du  Faou ,  & ,  à  l'aide  du  Duc ,  il  les  mit  en 
liberté ,  prit  les  Seigneurs  du  Faou ,  &  les  renferma  au  château 
de  Daoulas.  Après  la  mort  du  Vicomte  Hervé ,  fon  père  ,  il  fe 
brouilla  avec  Guyomark ,  fon  frère  ,  qui  le  chalTa  de  fon  Siège, 
Le  Prélat,  exilé  ,  fe  retira  auprès  du  Duc  Conan  ,  qui ,  à  fa foUicita- 
tion ,  fit  la  guerre  aux  Seigneurs  de  Léon  ,  les  vainquit ,  &  rétablit 
Hamon  fur  fon  Siège;  mais  cet  Evêque  fut  tué  en  1171,1e  25 
Février  ,  par  ordre  de  fon  neveu.  En  expiation  de  cette  faute  , 
Guyomark ,  félon  la  coutume  du  temps ,  fonda,  en  1 173  ,  l'Ab- 
baye de  Daoulas ,  d'après  les  confeils  de  l'Evêque  de  Quimper; 
Après  la  mort  de  Hamon ,  un  des  Archidiacres  de  Saint-PoI-de- 
Léon  fut  élu  j  mais  l'éieftion  fut  déclarée  fimoniaque ,  en  1 1 7  5  , 
dans  le  Concile  de  Rennes ,  &  par  le  Pape  Alexandre  III  :  l'élu 
îie  fut  point  facré. 

Gui,  affilia  au  Concile   de  Latran  Tan  1179. 

Yves  Touill ,  Eveque  de  Léon ,  vivoit  fous  le  règne  de  Geof- 
froi ,  fils  du  Roi  d'Angleterre. 

Jean ,  fon  fucceffeur  ,  affilia  aux  Etats  tenus  à  Vannes  en 
1202  ,  &  donna,  en  1216,  l'Eglife  de  Saint-Michel  de  Lefnevea 
à  l'Abbaye  de  Saint-Sulpice  de  Rennes. 

Dernier  ou  Derrien ,  élu  en   1227,  mourut  en  1238. 

Gui ,  élu  en  1238,  donna,  en  1246,  le  Patronage  de  Notre-* 
Dame  de  Morlaix ,  à  Marmoutier. 

Yves,  élu  en  1262,  fcelîa  ,  en  12(35,  ^^  traité  paffe  entre 
le  Duc  Jean  le  Roux ,  &  Hervé ,  Vicomte  de  Léon ,  pour  les 
coutumes  de  Saint-Mahé.  Guillaume  de  Léon ,  que  Dom  TaiU 
landier  lui  donne  pour  fucceffeur ,  n'efl  connu  que  par  le  cata- 
logue de  ce  fçavant  Bénédiélin. 

Guillaume  de  Kerfaufon ,  fut  commis  par  le  Pape  Jean  XXII 
pour  abfoudre  Ifabeau  de  Caffille ,  du  vœu  qu'elle  avoir  fait 
d'aller  à  Saint-Jacques  en  GaHce.  Par  une  lettre  adreffée  à  cette 
Princeffe  ,  ce  Pape  accorde  une  remife  de  dix  jours  de  péni- 
tence à  ceux  qui ,  après  s'être  confeffés  avec  de  bonnes  difpo- 
fitions ,  prieront  Dieu  pour  elle  ;  & ,  par  une  lettre  de  date  pof- 
térieure ,  il  lui  permet  de  choifir  un  Confeffeur  à  fon  goiàt ,  au- 
quel il  donne  la  permiffion  de  l'abfoudre  de  tous  fes  péchés,  à 
l'exception  de  ceux  fur  lefquels  il  eft  befoin  de  confulter  le  Saint- 
Siège.  Guillaume  de  Kerfaufon  fit  bâtir  la  Chapelle  de  Saint-Mar- 
tin ,  dans  fon  EgUfe  Cathédrale. 


.  .    .  ^  ^  ^         .  375 

Pierre  Bernard ,  originaire  de  la  ParoifTe  de  Guemené  ,  au 
diocefe  de  Nantes ,  fit  fa  foumilTion  à  la  Chambre  Apollolique , 
le  lo  Juin  1328.  On  ignore  l'année  de  fa  mort.  Quelques-uns 
lui  donnent  pour  fuccefîeur  un  Yves  de  Trefiguidi ,  qui  ne  pa- 
roît  pas  admiflible. 

Guillaume  Ouvroing ,  transféré  de  Rennes  à  Léon  en  1347, 
mourut  en    1349. 

Guillaume  de  Rochefort  ,  élu  en  1349  ,  affifta  au  Concile 
d'Angers  en  1365.  Albert  place  fa  mort  en  1366,  Ôc  Hardouin 
en  1367. 

Jean  du  Juch,  foufcrivit,  en  13^9,  à  la  fondation  de  l'Abbaye 
de  Bonne-Nouvelle ,  le  2  Février ,  &  mourut  dans  le  courant 
de  la  même  année  ,  dit  Albert  de  Morlaix.  Cet  écrivain  lui 
donne  pour  fucceffeur  un  Pierre  Ouvroing  ,  qui  paroît  fup- 
pofé. 

Thomas ,  fuccéda  à  Jean  du  Juch  :  le  cartulaire  de  Léon  en 
fait  mention. 

Gui  le  Barbu  ,  frère  de  Henri ,  Evêque  de  Vannes  ,  fît  fa  fou- 
miffion  à  la  Chambre  Apoftolique  ,  le  17  Avril  1383.  Le  Pape 
Clément  VII ,  qui  elHmoit  ce  Prélat ,  le  recommanda  au  Duc 
de  Bretagne. 

Jean  ,  fon  fucceffeur ,  fit  ferment  de  fidélité  au  Duc  pendant 
les    Etats   tenant  à  Rennes,   le  22   Août  1395. 

Gui,  élu  le  25  Février  1396  ,  chargea,  au  mois  d'Avril  de 
la  même  année  ,  Jean  le  Jeune ,  tant  en  fon  nom  qu'en  celui 
de  fon  Chapitre  ,  de  rendre  foi  &  hommage  au  Vicomte  de 
Léon,  Seigneur  temporel  de  fon  Eglife.  Dom  Taillandier  n'a 
point  fait  mention  de  Jean ,  &  a  confondu  Gui  le  Barbu  avec 
celui-ci,   qui  mourut    au  mois  de   Septembre    1410. 

Alain  de  Kcrafred  ou  de  la  Rue,  Chanoine  de  Nantes, 
Dofteur  en  l'un  &  l'autre  Droit ,  fut  élu  en  1 4 1  o ,  &  mourut 
en  1420. 

Philippe  de  Coëtquis ,  Chanoine  de  Tournai ,  Dofteur  en 
Droit  Civil  &  Canonique  ,  fit  fon  entrée  folemnelle  le  17 
Mars  1421.  Nous  allons  entrer  dans  le  détail  de  cette  céré- 
monie ,  dont  le   récit   pourra  intércffer  les  fçavants. 

«  Le  17  Mars  1421  ,  le  Révérend  Perc  en  Dieu,  Phihppe 
»  de  Coëtquis ,  arriva ,  en  belle  compagnie ,  au  fauxboure  qui 
w  conduit  de  Saint-Pol  à  la  Magdeleinc ,  &  s'arrêta  près  le 
»♦  cimetière.  Là,  fe  préfenta  Tangui,  Seigneur  de  Kermorvan  , 
»  lequel,    obcillant  à    la  fomraation    que  lui    fiç  le    Seigneur 


574  ^^^ 

»  Evêque  ,  mit  pied  à  terre,  puis  prenant  la  bridé  du  cKevaîç. 
»  &  mettant  le    chapeau   bas ,    il  conduifit   le    Prélat   jufqu'au 
»  portail  de  l'Eglife  de  Saint-Pierre.  Dans  cet  endroit,  i'Evêque 
»  defcendit,  pendant  que  le  Seigneur  de  Kermorvan  lui  tenoit 
»  i'étrier  droit ,  à  raifon   de  quoi  le  cheval  fut  reconnu  lui  ap- 
»  partenir    avec    tout    l'équipage.    Cela  fait,    ce    Prélat  s'affit 
»  dans  une  chaife  placée  dans   le   porche    à  côté  droit  de  la 
»  porte  ,011    le  même   Seigneur   lui   ôta   fes    éperons  ,    tira  fes 
»  bottes ,  fe  faiiit   de  Ton   chapeau ,  de  fon  manteau ,  &  garda 
»  le  tout.  Les  Chapelains  de    I'Evêque   l'habillèrent  enfuite    de 
»  fes  ornements  pontificaux ,    &  le   Prélat  entra  dans  l'Eglife , 
»  précédé  du  Clergé.  Quand  il   eut  fait   fa   prière  ,   il   appella 
»  les  Seigneurs  de    Kermorvan  ,    Alain  de    Coëtivi ,  &  Guyo- 
»  mark  de    Kervern ,  &  leur  dit ,   qu'à  eux ,   comme    vafTaux 
»  de  fon    Eglife    &  nobles    Chevaliers  ,   appartenoit   l'honneur 
»  de  porter  trois  des  pihers    ou  poteaux  de  fa  chaife  ,  en  foa 
»  entrée    foiemnelle    dans  fa   ville    épifcopale.  Enfuite ,    il    les 
»  fomma  de  le  défendre  ,  lui  &  fon  Eglife,,  de  toutes  injures,, 
»  violences ,  &  opprefîions ,  &  de   lui  aider  de   tout  leur  pou- 
»  voir  à  adminiftrer  la  jullice   &  à  défendre  fon  EgHfe ,  comme 
»  ils  y  étoient  obligés  par  les  droits  &  fan61ions   légitimes.   Ils 
»  répondirent  unanimement  qu'ils  étoient  prêts  d'obéir.  Cela  fait^, 
»  fe   préfenterent  Prigent  de    Coëtmenech ,    Chevalier ,  Procu-^ 
»  reur  de  fon  père  ,  &  Henri ,  Seigneur  de  Penmark ,  âgé  d'en- 
»  viron  huit  ans,  qui  repréfenterent ,  par  l'organe  d'Ecuy et  Yves. 
»  de  Kermelec,  qu'autrefois  il  y  avoir    eu  un  procès^  entre  le 
»  Seigneur    de     Coëtmenech    &    Demoifelle    Guillemette    Le- 
»  velli ,   chacun    contellant   le    droit  &   privilège  de  porter  le 
»  quatrième  poteau  de    la  chaife  de  I'Evêque ,  &  de   percevoir 
»  la   quatrième  partie    des  uftenfiles  de    la  cuifine    épifcopale  ^ 
»  au   jour   de  fon   entrée  j  lequel  droit    de  la  Demoifelle    Le- 
»  velli  étoit  dévolu  au  Seigneur  de  Penmark.  Le   Procureur  de 
>♦  ces  Seigneurs  ajouta  :  que  les  Parties  étoient  convenues,  par 
>♦  accommodement ,  de   porter    le  Seigneur  Evêque  à   tour   de 
»  rôle ,   c'efl-à-dire ,  qu'ils    partageroient ,  par   portions  égales  ^ 
»  le  chemin  &  les  uAenfiles   de  cuifine.  Il  finit  par  fupplier  le 
>»  Prélat  de  leur  accorder  cet  honneur.  Le  Prélat  répondit  que, 
»  ne  connoiflant  pas   leurs  droits ,    il  ne  pouvoit  leur   accorder 
^  leur  demande  ,  qu'il   ne  fçavoit  pas    fur  quoi    étoient  fondées 
»  leurs  prétentions  refpeftives ,  &  que  d'ailleurs  le  procès  com- 
»  mencé  par  eux  n'étoit  pas  terminé.  Il  ajouta  :  que  le  Seigneur 


s  A  î  3^j 

^  de  Coëtmenech  n'avoit  poinf  fuffifante  procuration,  Se  que  le 
»  Seigneur  de  Penmark  étoit  trop  jeune.  En  conféquence  ,  il  fe- 
»  quellra  ce  droit  entre  fes  mains  jufqu'à  plus  amples  informa- 
M  tions ,  &  le  donna ,  pour  cette  fois  feulement  &  fans  préjudice 
s>  des  droits  des  Suppliants,  à  ïjgnnj  Seigneur  du  Châtel ,  &c  au 
»  Seigneur  de  Kerafred.  ^i^ 

»  AufTi-tôt  la  proceiîion  fortit  &  marcha  vers  la  ville.  Les 
M  Chanoines ,  revêtus  de  leurs  plus  beaux  ornements ,  précé- 
>»  doient  le  Prélat  ,  qui  s'arrêta  au  portail  de  l'Eghfe  ,  &  là 
»>  prêta  ferment  aux  Seigneurs  de  Kermorvan ,  de  Coètivi ,  de 
»  Kervern ,  du  Châtel  &  de  Kerafred ,  repréfentant  les  Che- 
»  valiers  &  Nobles  du  diocefe  de  Léon ,  leur  promettant  de 
»  défendre  ,  maintenir  ,  &  conferver  les  libertés  &c  franchifes  de 
»  l'Eglife  Léonnaife ,  de  ne  point  en  aliéner  les  biens  hors  les 
»  cas  permis  par  le  droit ,  &  de  recouvrer  ceux  qui  pourroient 
»  avoir  été  aliénés.  Il  promit  encore,  par  ferment,  de  défendre, 
»  maintenir,  &  conferver  les  libertés,  franchifes,  privilèges,  an- 
»  ciennes  &  louables  coutumes  des  Nobles  de  fon  diocefe  : 
»  après  quoi,  il  monta  dans  la  chaire  ,  dont  le  Seigneur  de  Ker- 
»  morvan  prit  le  poteau  droit  ,  le  Seigneur  de  Coètivi  le  gau- 
>>  che  du  devant ,  le  Seigneur  de  Kervern  le  droit ,  &c  les 
^>  Seigneurs  du  Châtel  &  de  Kerafred  le  gauche  du  derrière  ; 
>»  &  le  Prélat  fut  porté  le  long  de  la  rue  de  Verderel  jufqu'à 
y>  la  porte  de  la  ville  ,  qui  joint  l'Eglife  de  Notre-Dame  de 
i>  Creisker.  Les  habitants  de  la  ville ,  qui  avoient  fermé  leurs 
»>  portes,  firent  fortir  par  le  guichet  Ecuyer  Guillaume  Henri, 
»  leur  Procureur-Syndic  &  Mifeurj  &,  par  fon  organe,  ils  re- 
»  quirent  le  Sieur  Evêque  de  prêter  le  ferment  accoutumé  avant 
»  d'entrer  dans  la  ville  :  ce  qu'il  fit ,  en  promettant  au  Député 
s>  de  conferver  les  droits  de  fon  Eglife  cîc  ceux  des  habitants 
»  de  la  ville.  Le  Procureur-Syndic  requit  a6te  du  ferment,  &: 
n  fur  le  champ  la  porte  s'étant  ouverte  ,  la  procefîion  entra 
^>  dans  la  ville ,  &:  le  Prélat  fut  honorablement  reçu  des  Bour- 
»  geois ,  qui  l'accompagnèrent  jufqu'au  portail  de  la  Cathédrale. 
->  Le  Sieur  de  Vigeris ,  Archidiacre  ,  fe  trouva  là ,  &  requit  le 
»  ferment  dû  par' les  Évoques  au  Chapitre  à  leur  entrée  folem- 
•/>  nelle  -,  ce  qui  fe  fit  en  cette  manière ,  par  interrogations  & 
)>  réponfes  :  Etes-vous  le  Seigneur  de  Coètquis ,  que  Notre  Saint 
»  Père  le  Pape  envoie  pour  Palpeur  &  Evêque  de  ce  diocefe 
^>  de  Saint-Pol-de-Léon  ?  Oui.  Ne  promettez -vous  donc  pas, 
H  comme  bon  Pilleur  c<c  Evêque  de  Léon,  de  ne  point  ahéner 


37^  5  A  1 

»  les  rentes ,  pofTeiTions ,  &  autres  biens  immeubles  de  votre 
♦»  Eglife ,  hors  les  cas  permis  par  le  droit ,  mais  les  garder  fidé- 
w  lement  ?  Nous  le  promettons.  Ne  promettez  -  vous  pas  de 
»  faire  revenir  au  droit  &  propriété  de  votre  Egliie  les  ren- 
»  tes ,  poffeffions  ,  &  autres  b^s  immeubles ,  û  vous  trouvez 
M  ou  appercevez  qu'il  y  en  ait  ^elques-uns  d'aliénés?  Nous  le 
»  promettons.  Promettez-vous  aufîi  de  défendre ,  maintenir ,  Se 
»  conferver  les  droits ,  franchifes  ,  libertés,  immunités  eccléfîaf- 
»  tiques  de  cette  Eglife ,  Chapitre ,  &  Bénéfàciers ,  &  de  main- 
»  tenir  les  Eccléfiaftiques  dans  leurs  droits,  privilèges  ,  franchifes, 
»  &  libertés,  comme  l'ont  fait  vos  prédécelïeurs  Evêques  de 
»  Léon  ?  Nous  le  promettons.  Promettez-vous  d'obferver  les  fta- 
»  tuts  de  ladite  Eglife  &  les  louables  coutumes  y  reçues  ?  Nous 
H  le  promettons.  Vous  promettez  donc  de  tenir  ,  garder  ,  &  fidé- 
V  lement  accompUr  toutes  &  chacunes  des  chofes  delTus  dites  ? 
»  Ainfi ,  Dieu  vous  aide  ,  &  fes  faints  Evangiles.  Amea, 

»  Alors  toutes  les  portes  de  l'Eghfe  furent  ouvertes ,  &  l'Eve- 
»  que  fut  porté  jufqu'à  l'entrée  du  chœur  où  l'Archidiacre  lui 
»  fit  réitérer  le  même  ferment.  Se  enfuite  devant  Le  grand 
»  autel  où  le  Prélat  fit  fa  prière ,  Se  entra  au  Chapitre ,  qui 
»  exigea  un  troifieme  ferment ,  toujours  par  le  minillere  de  l'Ar- 
»  chidiacre.  L'Evêque  embraffa  fes  Chanoines  j  Se  ,  après  la  MefTe 
»  qui  fut  célébrée  folemnellement ,  on  alla  prendre  un  bon 
»  dîner.  Le  repas  fini  ,  les  Seigneurs  qui  avoient  porté  le 
»>  Prélat  fe  faifirent  de  toute  la  vaiflellé  &  de  tout  le  linge 
>>  qu'on  y  avoit  employé.  >»  Philippe  de  Coëtquis,fut  transféré 
à  Tours  en   1427. 

Jean  Validire  de  Saint-Léon ,  de  l'Ordre  des  Frères  Prêcheurs  y, 
Confeffeur  du  Duc  Jean  V  ,  fut  élu  en  1428  ,  Se  transféré  à 
Vannes  en  1433  :  il  avoit  aflifté  au  Concile,  tenu  à  Nantes 
par  Philippe  de  Coëtquis  ,  Archevêque  de  Tours,  en   143 1» 

Olivier  du  Tillei ,  Chanoine  de  Saint-Malo  ,  élu  en  14333 
fut  transféré  à  Saint-Brieuc  en  1436., 

Jean  Prigent  ,  Archidiacre  de  Léon  ,  fut  nommé  à  cet 
Evêché  en  1436,  Se  transféré  à  Saint-Brieuc ,  en   1438. 

Guillaume  de  Mclla  ,  fut  confirmé  pendant  le  Concile  de 
Ferrare  par  le  Pape  Eugène  IV.  Alain  de  Kerouferé ,  qu'Al- 
bert place  ici,  doit  être  rayé  du  catalogue  des  Evêques  de 
Saint-PoUde-Léon. 

Guillaume    le  Ferron,    élu  Se  confirmé  dans    le   Concile  de 

Florence  ,   auquel  il   affiila  en    1439,  mourut  en  1471-   Le 

temporel 


s  AI  377 

temporel  de  l'Evêché  fut  aufli-tôt  faifi  par  les  Officiers 
du  Duc. 

Vincent  de  Kerleau ,  Abbé  de  Bégars  Se  de  Prières  ,  élu 
Evêque  de  Léon,  fit  ferment  de  fidélité  au  Duc  ,  le  premier 
Juillet  1472.,  &  ne  fut  que  trois  ans  Evêque,  étant  mort  en 
1476.  Il  étoit  de  la  maifon  de  l'Ile,  au  territoire  de  Goëlo  :  il 
fut  Préfident  de  la  Chambre  des  Comptes ,  &  le  Duc  le  char- 
gea   de  plufieurs  négociations  importantes. 

Michel  Guibé ,  Chanoine  de  Nantes ,  éiu  Evêque  de  Léon 
par  le  crédit  du  Tréforier  Landais,  fit  ferment  de  fidélité  au 
Duc  ,  le  16  Avril  1477,    ^  ^^^  transféré  à  Dol  en  1478. 

Thomas  James,  nommé  en  1478,  fut  transféré  à  Dol  en 
1482. 

Alain  le  Moult,  Chanoine  de  Quimper  &  Confeiller  du  Duc 
François  II,  fut  élu  le  18  Mars  1482,  fit  ferment  de  fidélité  le 
2    Août  fuivant ,  &  fut  transféré  à  Quimper  en  1484. 

Antoine  de  Longueil ,  fils  de  Jean  de  Longueil ,  Préfident  au 
Parlement  de  Paris,  fit  ferment  de  fidélité  le  15  Juillet  1484, 
&  mourut  le  25  Août  1500.  Le  Roi  Louis  XII  l'avoit  envoyé 
en  ambafi^ade  dans  lés  Cours  de  Vienne  ,  de  Savoie,  d'Efpagne, 
&  d'Angleterre. 

Jean  d'Epinai  ,  transféré  de  Nantes  à  Léon,  l'an  1500,  par 
le  Pape  Alexandre  III,  mourut  en  1503. 

Jean  James  de  Kermorvan  ,  fut  nommé  Evêque  commcnda- 
taire  de  Léon,  en  1503. 

Gui  le  Clerc  ,  de  l'Ordre  de  Saint-Augufiin  ,  Abbé  de  Saint- 
Jacques-de-Montfort  &  Aumônier  de  la  Reine  Claude ,  fut  nom- 
mé à  l'Evêché  de  Léon  en  1 5 1 4  ,  fit  fon  entrée  folemnelle  le 
13  Mai  1520,  réforma  le  Bréviaire  de  (on  diocefe  ,  mourut, 
félon  les  uns,   &    fe  démit,  félon  les  autres,   en  1521. 

Chriflophe  de  Chauvigné ,  Abbé  de  Boquen  ,  fut  nommé 
le  3  Juin,  fit  ferment  de  fidélité  au  Roi  le  12  Novembre 
1521,  &  abdiqua,  en  15 54,. en  faveur  de  Rolland  de  Chau- 
vigné ,  fon  neveu. 

Rolland,  fit  ferment  de  fidélité  le  premier  06lobre  1554» 
8^  fe  démit  en  1 562» 

Rolland  de  Neuville ,  puîné  de  la  maifon  du  Plcffis-Bardoul, 
Abbé  de  Saint- Jacques-dc-Montfort ,  obtint  l'Evêché  de  Léon, 
par  la  prote6Kon  du  Duc  d'Etampes ,  en  1 563  ,  8c  fit  ferment  de 
fidélité  le  25  O^obre  156c.  Ce  Prélat  affilia  au  Concile  de 
Tours  en  1583  ,  &  demeura  toujours  fidèle  à  fon  Roi  pendant 
Tome  ir.  B  5 


3y8  S  AI 

les  troubles  de  la  Ligue.  Il  mourut  le  5  Février  K313,  après 
cinquante   ans   d'Epilcopat. 

René,  fils  de  René  de  Rieux  de  Sourdéac,  Abbé  du  Relec, 
de  Daoulas,  &  d'Orbais ,  fit  ferment  de  fidélité  le  23  Oc- 
tobre K319,  &  alTifta  aux  Etats  de  Guérande  en  1625.  Ce  Pré- 
lat èft  célèbre  dans  l'Hiftoire  Eccléfiaftique  du  dix-feptieme  fiecle  , 
par  les  traverfes  qu'il  éprouva.  Le  Pape  avoir  donné  un  bref  ^ 
portant  que  tous  les  Monafteres  de  Femmes  de  l'Ordre  de  Notre- 
Dame  du  Mont-Carmel  &  de  la  Réforme  de  Sainte-Thérefe , 
érigés  &  à  ériger  ,  reconnoîtroient  pour  leur  Supérieur  &  Vifi- 
teur  le  Père  de  Berulie,  fondateur  de  la  Congrégation  de  l'O- 
ratoire de  France.  Les  Religieufes  de  Morlaix ,  ayant  refufé 
d'obéir  à  ce  bref,  les  Cardinaux  de  la  Rochefoucault  &  de  la 
Valette  ,  Commiffaires  du  Pape  ,  chargèrent  Etienne  Louytre  , 
Doyen  de  Nantes ,  de  les  pourfuivre  &  de  faire  exécuter  le 
bref  du  Pape.  Ce  Doyen  rendit  une  Sentence  contre  elles  ;  mais 
elles  n'en  tinrent  compte ,  &  réfillerent  fi  vivement  qu'elles  de- 
mandèrent à  être  déliées  de  leurs  vœux  de  clôture  :  elles  firent 
plus  ;  elles  quittèrent  leur  Monaftere ,  fe  rendirent  à  Saint-Pol- 
de-Léon ,  &  furent  reçues  par  le  Prélat ,  qui  les  confola ,  les 
logea  dans  fon  palais,  &  les  transféra  enfuite  au  château  de 
Breft  ,  dont  étoit  Gouverneur  M.  de  Sourdéac  ,  père  de  l'Evêque. 

Louytre,  voyant  cette  obftination , rendit,  le  12  Avril  1625  , 
une  Sentence  d'excommunication  contre  les  Religieufes  ,  nom- 
mées Sœurs  Marguerite  de  Saint-Fiançoïs  ^  Théreje- Angélique  de 
Jefiis ,  Claire  de  Jefus ,  Maiie-Thérefe  de  Saint-Jofeph  ,  Béatrlx 
de  la  Conception  ,  Genrude  de  Jefus-Maria,  Annc-Thérefe  de  Jefus  ^ 
Marguerite  de  Saint-François  ^  &  Marguerite  de  la  Mère  de  Dieuj 
avec  défenfe  à  toutes  perfoTines ,  fous  peine  d'excommunication, 
de  les  hanter  ou  fréquenter ,  &  aux  EccléfiaiHques  féculiers  & 
réguliers ,  même  aux  Evêques ,  de  leur  adminiftrer  aucuns  Sa- 
crements ,  foit  en  fanté,  foit  à  l'article  de  la  mort  même, 
qu'auparavant  elles  n'eufl'ent  demandé ,  en  toute  humilité  &  dou- 
leur ,  l'abfolution  die  l'excommunication  encourue  par  elles ,  avec 
promefTe  de  leur  part ,  d'obéir  au  Siège  Apofi:olique  ,  félon  la 
forme  prefcrite  par  le  bref  du  Pape.  Ces  Religieufes  avoient 
appelle  au  Saint-Siège  ,  mais  l'appel  avoir  été  déclaré  nul  par 
le  Juge  qui ,  abufant  du  minifiere  dont  il  étoit  chargé ,  ofa  in- 
terdire i'Eglife  Cathédrale  de  Saint-Pol-de-Léon  &  l'Evêque  lui- 
même.  La  Sentence  fut  fignifiée  à  l'Evêque,  qui  en  donna  avis 
à  l'ailemblée   du   Clergé   tenant  à  Paris.   Les    Prélats  ,  jugeant 


,  379 

l'affaire  de  conféquence  ,  réfolurent  de  convoquer  tous  ceux  de 
leurs  Confrères  qui  fe  trouvoient  à  Paris  ,  &  de  conférer  avec 
eux  fur  un  fait  de  cette  importance.  En  conféquence  ,  les  Agents 
du  Clergé  avertirent  tous  les  Evêques  du  réfultat  de  la  délibé- 
ration ,  &  tout  le  monde  fe  rendit  au  jour  indiqué  ,  qui  étoit 
le  i6  Juin  1625.  L'Evêque  d'Orléans  fit  la  le61ure  de  tout  ce 
qui  avoit  été  fait  à  l'occafion  de  ces  Religieufes ,  &  enfuite 
de  la  déclaration  de  l'afTemblée  -,  déclaration  que  l'on  vouloir 
rendre  publique  ,  Se  qui  fut  généralement  approuvée  ;  la  voici  : 

«  Les  Cardinaux,  Archevêques,  Evêques,  &  Eccléfiaftiques, 
»  Députés  de  toutes  les  provinces  de  ce  Royaume  en  cette  ville 
»  de  Paris,  &  encore  les  Archevêques  &  Evêques  qui  fe  font 
»  trouvés  en  ladite  ville  ,  à  très-Révérend  Père  ,  notre  vénérable 
»  Frère  &  Collègue  René ,  Evêque  de  Léon  ,  nos  Frères  les 
»  Doyen  Se  Chanoines  de  fon  Eglife  ,  à  tous  les  Fidèles  étant 
»  fous  fa  charge ,  &  autres  qu'il  appartiendra ,  charité  &:  paix 
»  en  Notre-Seigneur. 

»  Ce  qui  s'ell  pafTé  en  votre  diocefe  ,  nous  a  paru  fi  étrange , 
»  que ,  fi  les  aftes  n'en  enflent  fait  foi  ,  à  peine  eût-il  été  tenu 
»  pour  véritable  j  car  jamais  préfomption  n'alla  fi  loin  ,  Se  les 
»  îiecles  pafl^és   ne  fourniflTent  point    d'exemples   d'un  attentat  fi 

V  plein  d'impiété.  Vous  avez  donc  vu  dans  votre  diocefe  un 
»  Prêtre  interdire  une  Eglife  Cathédrale ,  interdire  la  maifon  de 

V  l'Evêque  ,  le  menacer  d'irrégularité  ,  lui  faire  des  commande- 
»  ments ,  le  prononcer  indigne  de  l'entrée  de  fon  Eglife ,  & 
»  finalement ,  par  tous  ces  degrés  d'impiété  &  d'audace  ,  monter 
»  jufqu'à  le  fufpendre  de  fes  fonctions  épifcopales  ?  Il  ne  s'efl 
»  pas  contenté  d'une  peine ,  la  qualité  d'un  Evêque  lui  a  fem- 
»  blé  en  mériter  un  amas  &  une  furcharge.  Qui  en  confidérera 
^>  le  particulier  ,  n'en  pourra  jamais  coter  toutes  les  ignoran- 
»  ces ,  ni  toutes  les  impiétés.  Qui  ne  s'étonnera  de  l'interdic- 
^>  tion  d'une  Eglife  Cathédrale ,  qui  eft  le  centre  de  la  com- 
»  munion  des  Fidèles  du  diocefe,  le  lieu  le  plus  chéri  de  Dieu, 
w  Se  d'où ,  plus  volontiers ,  il  exauce  les  voeux  Se  les  prières  de 
»  fon  peuple ,  la  ParoiflTe  des  ParoifTes ,  l'Eglife  merc  des  autres , 

V  le  féjour  Se  la  flation  des  Anges  tutélaires  du  diocefe  ;  qui , 
*♦  par  conféquent ,  ne  peut  être  interdite  qu'on  ne  mette  tout 
»  un  diocefe  en  deuil  Se  en  affli^Hon  ?  Qui  voudroit  examiner 
»  tous  les  autres  attentats  ,  ne  croiroit  jamais  qu'ils  eufl^ent  été 
»  prononcés  par  un  Dofteur  ;  comme  rinterdi8:ion  de  la  maifon 
(t  épifcopale,  par  laquelle  il  retranche  la  communication  des  Fidèles 


58o  S  AI 

»  avec  leur  père  ,  Se ,  d'ailleurs ,  qui  eu  comte  l'ufage  ordinaire  de 
»  l'Eo-life ,  qui  réferve  plutôt  ces  punitions  pour  ranger  les  Laïques 
»  à  le^ur  devoir  que  les  Eccléfîaftiques.  Combien  d'injures  a-t-il  fait 
»  à  la  dignité  épifcopale  ,  de  l'avoir  violée  par  tant  de  mé- 
»  pris ,  par  tant  d'injonftions  &  de  commandements  fi  arrogants 
»  6^  Cl  éloignés  de  fon  pouvoir  ?  Ces  interdirions  &  ces  fuf- 
»  penfions ,  qu'il  a  prononcées  contre  un  Evêque  avec  une  pré- 
»  f bmption  épouvantable  ,  qu  eft-ce  autre  chofe  finon  prononcer 
»  que  non-feulement  l'Evêque  foit  privé  d'offrir  le  divin  facri- 
»  hce  pour  fon  peuple  ,  de  préfenter  fes  prières  à  Dieu ,  de 
»  l'unir  avec  fon  fils ,  de  lui  procurer  toutes  les  grâces  parti- 
»  culieres  &  toutes  les  bénédiftions ,  qui ,  libéralement  &  abon- 
»  damment ,  defcendent  d'enhaut  par  les  mains  des  Evêques  ; 
»  mais  aufli  prononcer  que  tous  les  Fidèles  du  diocefe  en  foient 
»  privés  ?  Finalement ,  il  n'y  a  point  de  crime  fi  abominable 
»  devant  Dieu  que  le  fchifme  &  la  divifion.  C'efl:  à  quoi  il  a 
»  travaillé ,  en  fa  commiflion  ,  à  divifer  les  Eccléfiaftiques  d'avec 
»  leur  chef ,  le  peuple  d'avec  fon  Evêque ,  le  troupeau  du  Paf- 
>if  teur ,  &  les  rendre  des  enfants  fans  père ,  des  difciples  fans 
»  maître.  Mais  encore  que  tous  ces  attentats  fentent  l'irréligion 
»  &  le  facrilege  -,  il  n'y  a  rien  qui  en  faffe  mieux  paroître  la 
»  préfomption  &  l'audace ,  que  les  nullités  qui  fe  trouvent  en 
»  fa  procédure ,  comme  le  défaut  de  pouvoir  procéder  contre  un 
»  Evêque  ,  qui  feul  rend  tout  ce  qu'il  a  fait  contre  lui  nul  &de  nulle 
»  valeur ,  quand  même  il  ne  feroit  pas  accompagné  d'une 
»  infinité  d'autres  nullités  -,  &  toutefois ,  quoique  cette  aftion 
»  foit  pleine  d'ignorance  ,  d'impiétés ,  &  de  nullités  ,  &  par 
»  conféquent  qu'elle  ne  doive  donner  aucune  crainte ,  ni  aucune 
»  appréhenfion  ,  il  s'en  eft  trouvé  parmi  vous ,  au  grand  regret 
»  de  toute  cette  alTemblée ,  qui  ont  fermé  la  porte  au  père  de 
»  famille  pour  l'ouvrir  au  larron  ;  qui  ont  méprifé  la  voix  du 
»  Pafleur  pour  obéir  à  celle  du  loup  ;  &  qui ,  prévenus  & 
»  abufés  de  l'audace  de  ce  Prêtre  étranger ,  ont  abandonné  celui 
»  qui  eft  établi  de  Dieu  pour  les  conduire  &  éclairer.  C'eft 
»  pourquoi,  defirant  promptement  étouffer  ce  fcandaJe  &  em- 
»  pêcher  que  la  divifion  ne  croifle  ,  nous  avons  jugé  néceffaire 
»  de  vous  écrire  la  préfente  ,  par  laquelle  nous  déclarons  abufif , 
»  nul ,  &  de  nul  effet ,  tout  ce  que  M^.  Etienne  Louytre  a  fait 
»-  &  prononcé  contre  la  maifon ,  l'EgUfe  ,  &  la  perfonne  de 
n  votre  Evêque,  ayant  été  fait  par  attentat,  fans  pouvoir,  Sc 
»  contre  les  faims  Canons.   Nous  mandons,  autant    qu'il    aous 


s  AI  38t 

»  eu  pofrible,*&  vous  exhortons  par  cette  paix  que  Notre-Sei- 
»  gneur  a  laifTé  à  fon  Eglife ,  que  ,  fans  avoir  égard  à  ces  té- 
»  méraires  interdictions  &  furpcnfions ,  vous  ayez  à  luivre  la 
»  voix  de  votre  Evêque ,  vous  ranger  avec  lui  ,  ouvrir  les 
»  portes  de  votre  Eghle ,  y  rétablir  le  fcrvice  de  Dieu ,  afin 
»  que  le  peuple  &  vous  étant  unis  avec  lui  ,^  vous  puifTiez ,  par 
»  fon  moyen  &  fon  union ,  jouir  de  la  communion  &  fociété 
»  univerfelle  de  Jefus-Chrill.  Fait  en  l'alTemblée  du  Clergé  gé- 
»  néral  de  France  ,  à  Paris.  » 

Cette  lettre  fut  adreffée  à  l'Evêque  de  Rennes  ,  qui  fut 
prié  de  contribuer  de  toutes  fes  forces  à  faire  refpefter  la  dé- 
claration du  Clergé.  L'afTemblée  voulant  punir  rigoureufement 
un  pareil  attentat ,  ne  s'en  tint  point  la  ;  elle  écrivit  à  tous  les 
Prélats  du  Royaume  une  lettre  circulaire  accompagnée  de  toutes 
les  pièces  qui  prouvoient  la  témérité  du  coupable  &  la  julHce 
de  cette  condamnation.  Voici  ce  qu'il  y  avoit  de  plus  remar- 
quable dans  cette  lettre  :  Si  le  fait  du  (leur  Louytre  vous  fcmhle 
aujf.  extraordinaire  &  aiijji  digne  de  punition  qu'aux  Prélats  de 
cette  ajfcjnblée  ,  vous  fere'^  ce  qu'ils  ont  tous  réfolu  &  promis  de 
faire  ,  qui  efl  de  lui  dénier ,  dans  leur  diocefe  &  autres  lieux  ,  toutes 
fortes  de  commiffions  ,  6*  de  n'avoir  aucune  part  ni  aucune  fociété 
avec  lui ,  &  de  le  tenir  en  cet  état  jufquà  ce  qu'il  fe  fou  rendu 
devant  fon  Archevêque  &  les  Evêques  de  fa  province  ,  pour  recevoir 
le  châtiment  de  fon  attentat.  Par  une  lettre  particulière  ,  l'Evêque 
de  Nantes  fut  prié  de  punir  le  coupable  ,  ik  de  lui  faire  recon- 
fioître  la  grandeur  &  la  témérité  de  fa  faute.  La  Faculté  de 
Théologie  de  Paris  ayant  reçu  une  copie  de  la  déclaration  ci- 
defTus  ,  qui  lui  fut  préfentée  par  ordre  de  l'ailemblée  ,  en  fit 
remercier  la  Compagnie  ;  &  ,  comme  le  Doyen  étoit  un  de  fes 
membres  ,  elle  le  cira  à  comparoître  pour  rendre  compte  de 
fes  allions  ,  &  voir  procéder  contre  lui  ;  elle  demanda  même  la 
permifiion  à  l'Archevêque  de  Paris  de  lui  refufer  la  commu- 
nion des  Fidèles  ,  pour  lui  faire  fentir  plus  vivement  fes  torts. 

Cependant  la  Cour  de  Rome  avoit  été  informée. de  la  déclaration 
de  l'afemblée  générale  du  Clergé,&  le  Pape,  ne  voulant  point  laillcr 
opprimer  le  Doyen  ,  avoit  cafie  cette  déclaration  ,  par  un  bref 
qu'il  avoit  envoyé  au  Légat ,  avec  ordre  de  le  faire  publier. 
Le  Légat  prévoyant  l'orage  que  cette  publication  alloit  occa- 
fionner ,  ne  fe  preflli  pas  d'obéir  ,  voulant  du  moins  attendre 
que  l'alTemblée  fe  fût  féparée.  Les  Evêques  ,  de  leur  côté ,  ne 
s'endormirent  point  :  ils  eurent  recours  au  Roi,  &  le  fupplierent. 


381  s  AI 

en  trois  ou  quatre  audiences ,  de  leur  accorder  fa  prote£lion , 
Itii  afîurant  qu'ils  ne  vouloient  faire  aucune  démarche  dans  une 
affaire  de  cette  importance ,  fans  l'avis  de  fon  Confeil.  Le  Roi 
ayant  répondu  favorablement  ,  les  Députés  lui  demandèrent 
quatre  chofes  :  1°.  Qu'en  préfence  du  Légat,  du  Nonce,  des 
Dofteurs  Italiens ,  des  Pères  de  l'Oratoire  ,  &  du  Confeil ,  les 
Prélats  puffent  démontrer  les  impertinences  ,  ignorances ,  atten- 
tats ,  témérités  de  Louytre ,  parce  que  leur  déclaration  ne  pou- 
voit  être  calomniée  ,  &  que  le  Pape  n'avoit  pu  y  toucher  fans 
les  entendre.  2°.  De  faire  fupprimer  ce  bref,  foit  en  envoyant 
à  Rome  un  courier  exprès ,  Ibit  en  faifant  voir  au  L^at  les 
inconvénients  qui  en  pouvoient  réfulter  ;  & ,  pour  cet  effet ,  on 
donna  à  Sa  Majeflé  un  mémoire  d'inftruftion  pour  fon  Ambaf- 
fadeur  à  Rome.  3°.  Que  ii  l'affaire  ne  pouvoir  s'accommoder  , 
qu'il  permît  un  Concile  national  pour  y  voir  &  demander  un 
Concile  général.  4°.  Qu'il  permît  aux  particuUers  les  appels 
comme  d'abus  de  toutes  les  bulles  &  brefs  qui  regardoient  les 
Pères  de  l'Oratoire  &  les  Carmélites ,  afin  de  réduire  teut  cela 
fous  les  Evêques ,  &  altérer  cette  impudente  ambition  qui  vouloit 
ha:^ardcr  un  fchifme  pour  maintenir  fon  orgueil.  Ces  moyens  furent 
approuvés  du  Roi ,  &  il  fut  réfolu  d'en  faire  ufage  :  le  mémoire 
à  î'Ambaffadeur  contenoit  de  très-amples  inffruftions ,  des  raifons 
folides ,  &  des  menaces  indireftes.  On  faifoit  craindre  au  Pape 
de  compromettre  fon  autorité  par  une  entreprife  qu'il  feroit 
peut-être  forcé  d'abandonner ,  d'autant  mieux  que  les  Parlements 
regardoient  la  fentence  de  Louytre  comme  abufîve  contre  le 
•  Droit  &  le  Concile  de  Trente.  Il  eff  à  préfumer  que  le  Pape 
fupprima  fon  bref ,  puifque  ,  le  29  Décembre ,  Louytre  fut  admis 
dans  l'affemblée ,  pour  y  faire  une  fatisfaélion  publique ,  après 
en  avoir  fait  une  particulière  :  en  conféquence  ,  l'affemblée  avertit 
tous  les  Prélats  du  Royaume  de  la  foumiffion  du  coupable ,  par 
une  lettre  circulaire  du  13  Janvier  1626.  René  de  Rieux  fut 
tranquille  pendant  onze  ans;  mais,  en  1635,  ^ccufé  d'avoir 
favorifé  la  fortie  de  la  Reine  Marie  de  Médicis  hors  du  Royaume, 
&  d'avoir  féjourné  dans  les  Pays  -  Bas  fans  la  permiffion  de  Sa 
Majefté  ,  il  fut  traduit  devant  les  Evêques  Commiffaires  du  Pape , 
&  fut  privé  de  l'adminiffration  de  fon  diocefe  par  Sentence  dii 
3 1  Mai.  La  crainte  de  déplaire  au  Roi  arrêta  les  murmures  du 
Clergé,  &  on  attendit  fa  mort  avant  d'en  parler.  Le  Père 
Eauni ,  Jéfuite,  publia  les  Statuts  de  René  de  Rieux,  en  1629 
&  1630. 


s  AI  38J 

Charles  Talon,  nommé  par  le  Roi  le  28  Août  1(335  ,  ne  put  avoir 
fes  bulles  ,  &  fe  démit ,  entre  les  mains  du  Roi ,  de  tous  les  droits 
qu'il  pouvoit  avoir  fur  l'Evêché  de  Léon,  en  1639. 

Robert  Cupif,  originaire  d'Anjou,  Doyen  du  Folgoèt ,  Archi- 
diacre ,  Officier  ,  &  Grand-Vicaire  de  Quimper ,  fut  facré ,  le  z6 
Mars  1640,  dans  l'Eglife  de  Saint-Germain-des-Prés  ;  mais  René 
de  Rieux ,  ayant  été  relevé  des  cenfures  portées  contre  lui ,  & 
rétabli  dans  fes  droits  ,  Robert  Cupif  fut  transféré  à  Dol 
l'an  1648. 

René  de  Rieux ,  qu  on  a  vu  ci-devant  dépofer  ,  fut  rétabli ,  à  la 
demande  des  Evêques  ,  en  1 646  -,  mais ,  comme  Robert  ne  vouloit 
pas  lui  céder  fon  Siège  ,  il  n'y  remonta  qu'en  1648  :René  mourut 
le  8  Mars  165 1. 

Henri  de  Laval  de  Bois-Dauphin  ,  nommé  Evêque  en  165 1  , 
affifta  à  l'afîemblée  du  Clergé  en  1654  &  1656,  ôc  fut  transféré 
à  la  Rochelle  en  1661. 

François  Vifdeloup  ,  Coadjuteur  de  Quimper  ,  futle  fucceiïeur 
de  Henri.  On  voit  dans  l'Eglife  Cathédrale  fon  tombeau  en 
marbre  blanc  -,  cette  pièce  ell  digne  de  la  curiofité  des 
étrangers. 

Jean  de  Montigni  ,  mourut  pendant  la  tenue  des  Etats  à 
Vitré  ,  l'an  1 67 1 . 

Pierre  de  Neboux  de  la  Brofle  ,  nommé  en  1671  _,  aflifta  aux 
Etats  à  Vitré  en  11673  ,  à  Dinan  en  1675  ,  à  Vannes  en  1691  , 
aux  aflemblées  du  Clergé  à  Paris  en  1695  &  1696,  6c  mourut 
en    1701. 

Jean-Louis  de  la  Bourdonnaye  ,  Grand -Vicaire  de  Nantes, 
nommé  le  31  Oftobre  1701  ,  facré  le  23  Avril  1702,  affilia  à 
l'affi^mblée  du  Clergé  en  1710,  &  mourut  au  mois  de  Février 
Ï745  ,  h  Breft ,  où  il  fut  inhumé. 

N.  de  Goyon  de  Vaudurand ,  Vicaire  général  de  Coutance  , 
nommé  le  24  Avril  1745  ,  prêta  ferment  &c  fut  facré  au  mois 
de  Septembre  de  la  même  année. 

N.  Dandigné  de  la  Châfîc ,  nommé  en  1763  ,  fe  démit 
en  1772. 

M.  de  la  Marche,  nommé  en  1772  ,  gouverne  a^luellcment 
l'Eglife  de  Saint-Pol-de-Lcon, 

SAINT-POTAN  ;  fur  une  hauteur  ;  à  7  lieues  à  TEH  de  Saint- 
Brieuc ,  fon  Evêché  ;  à  1 4  lieues  de  Rennes  ;  &  à  4  lieues  de 
Lamballe  ,  fa  Subdélcgation,  Cette  Paroiffii  reffortit  à  jugon ,  &c 


384  s  A  I 

compte  1 200  communiants  :  la  Cure  eu  à  Talternative.  Ce  territoire , 
arrofé  par  les  eaux  de  la  rivière  de  Guébriand ,  eft  très-exafte- 
ment  cultivé  ,  très-fertile  ,  &  produit  des  grains  de  toutes  efpeces  , 
du  cidre  &  du  foin.  En  1500^  on  voyoit  dans  cette  ParoifTe 
les  maifons  nobles  fuivantes  :  Vaudine-Loifel ,  à  Pierre  de  Mos  j 
(  c'elt  aujourd'hui  un  château  avec  haute-Juilice ,  il  fe  nomme 
Veaume-Loyfel ,  Se  appartient  à  M.  Gouyon  de  Beaucorps  :  )  le 
Pré-Morvan  ,  à  Jean  l'Anglois  j  (  cette  Terre  a  une  haute-Juftice 
qui  s'exerce  à  Pluduno  ,  &  appartient  à  M.  l'Anglois  :  )  la  FoiTe , 
à  Julien  Gouyon  ;  le  Dieu-Dit ,  à  Julien  Bouan ,  Sieur  de  la 
Grignardiere  ;  la  Lande  de  Brefeillac  -  BafTe ,  à  Gilles  de  la 
Lande  ;  le  Val ,  à  François  du  Val  ;  le  manoir  de  Liftaval ,  à 
François  Gouyon;  Gallinée ,  à  Mathurin  de  Brehant  ;  Guilloir, 
à  Charles  Corbal  j  Launaye  -  Gouyon  ,  à  Gouyon  -  Gouyon  ;  le 
Haut-Bart,  à  Charles  du  Val,  Ker-oualbo,  au  Sieur  de  Mati- 
gnon j  la  Cremeraye  ,  à  Bertrand  Bouan  -,  Vau-Balieuzon  ^  à  Jeaa 
Defnos  ;  la  Grignardaye ,  à  Bertrand  de  la  Bouexiere  -,  les  Ro- 
ches ,  à  Jean  le  Fefte ,  Sieur  de  Guébriand  j  le  VauJoyeux ,  à 
François  de  Saint-Guedas  j  la  Ville-Gicquel  ,  à  Jean  Erogeard  , 
Seigneur  du  Veau  -  Couronné  ;  Habel  ,  à  François  Habel  ;  le 
Charrie  ,  à  François  Denos  -,  la  Touche-Habel ,  à  Julien  Habel  ; 
la  Pajollais  ,  à  François  Madeuc  ,  Sieur  du  Vaumadeuc  ;  les 
Landes-Blanches ,  à  Guyon  du  Val  -,  la  Ville-Even ,  à  Jean  de 
la  Lande  -,  la  Couyere  ,  à  la  veuve  de  Jean  Guitton  ;  Bonne- 
Vie  ,  à  Pierre  Gouyon  ;  &  le  Chefné  ,  à  Geoffroi  de  Saint- 
î^ellet  :  la  haute- Juflice  de  l'Ifle-Avart  appartient  à  M.  de  la 
Rivière. 

SAINT-QUAY;  dans  un  fond  ,  au  bord  de  la  mer;  à  18 
lieues  à  l'Ouefl:  de  Dol ,  fon  Evêché  ;  à  23  lieues  de  Rennesj 
&  à  3  lieues  de  Saint-Brieuc ,  fa  Subdélégation  &  fon  refîbrt. 
On  y  compte  1600  communiants.  Les  Bénédiftins  de  Léon  fe 
prétendent  les  préfentateurs  de  la  Cure ,  dont  l'Evêque  diocé- 
iain  s'attribue  auffi  la  collation.  Il  s'y  tient  tous  les  ans  une 
foire  remarquable  par  la  grande  quantité  de  fils  &  de  beftiaux 
qui  s'y  vendent.  Le  territoire ,  borné  au  Nord  &  à  l'Eu  par  la 
mer,  eft  bien  cultivé  &  produit  beaucoup  de  grain 5.  fur-tout 
clu  froment.  On  trouve  dans  l'anfe  de  Saint  -  Quay ,  du  fable 
magnétique ,  noir ,  brillant ,  &  auffi  pefant  que  la  limaille  de 
fer.  Les  naturalises  l'appellent  ferrugbicux  ,  &  il  eft  fortement 
attiré    par    la   pierre   d'aimant  :   il   n'entre  cependant   pas    en 

effufîoa 


s  AI  585- 

effuiîon  au  feu  des  fourneaux  ,  fa  nature  efl  à-peu-près  la  même 
que  celle  du  graint ,  efpece  de  pierre  très-commune  en  ce  pays, 
qui  refTemble  beaucoup  au  granit  qu'on  trouve  û  abondamment 
en  Egypte.  En  1500,  les  maifons  nobles  de  l'endroit  étoient: 
la  Ville-Morio ,  au  Sieur  de  la  Roche-Jagu  ;  les  Fontaines  &:  le 
Minihy,  à  Jacques  Bertho. 

SAINT-QUAY  ;  près  la  route  de  Lannlon  à  Peros  ;  à  3  lieues 
&  demie  à  l'Oueft-Nord-Ouefl:  de  Tréguier  ,  fon  Evêchc  ;  à  3  3 
lieues  de  Rennes  ;  &  à  i  lieue  &  demie  de  Lannion  ,  fa  Subdclcga- 
tion  &  fon  refTort.  On  y  compte  300  communiants  :  la  Cure  eit  à 
l'alternative.  Le  territoire  ell  fertile  &  bien  cultivé.  Le  ma- 
noir de  la  Ville  -  Moriou  appartenoit ,  en  1 5  00  ,  à  Guillaume 
d'Acigné* 

SAINT -REMI- DU -PLAIN;  à  5  lieues  au  Sud-Sud-Ell  de 
Dol ,  fon  Evêché  ;  à  7  lieues  de  Rennes  ;  &  à  2  lieues  un  tiers 
<l'Aiitrain ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroifl'e  relevé  du  Roi ,  ref- 
fortit  à  Bazouges ,  &  compte  550  communiants  :  autrefois  la  col- 
lation de  la  Cure  appartenoit  à  l'Abbé  de  Rillé  ,  elle  eil:  pré- 
fentement  en  commende.  La  Paroiffe  eft  enclavée  dans  le 
diocefe  de  Rennes  :  le  fol  en  eft  mal  cultivé ,  puifque  les  terres 
incultes  font  beaucoup  plus  étendues  que  les  terres  en  labeur. 
La  Hays-d'Is,  le  Pleffis  -  Guet ,  &  Treait ,  forment  une  haute- 
Jultice  ,  qui  appartient  à  M.  de  Montboucher. 

SAINT-RENAN  ;  gros  bourg ,  dans  un  fond  ;  à  1 2  lieues  un 
quart  à  rOueft-Sud-Oueft  de  Saint-Pol-de-Léon  ,  fon  Evêché  ;  à 
50  lieues  de  Rennes  j  &  à  3  lieues  de  Brell ,  fa  Subdélégation 
èc  fon  refTort.  Cette  ParoifTe  relevé  du  Roi ,  ôc  compte  1 000 
com.muniants  :  la  Cure  eil:  préfentée  par  l'Evêque.  Trois  grandes 
routes  aboutifTent  au  bourg.  Le  territoire  eu.  abondant  en  grains 
Se  .fourrages  :  les  chevaux  qu'on  y  élevé  font  forts  &  vigoureux. 
Il  efl:  prouvé ,  par  la  vie  des  Saints  de  Bretagne  ,  que  cette 
Paroifle  eft  fort  ancienne  ,  &  qu'elle  doit  fes  premiers  tonde- 
inents  à  Saint  Renan  ,  fon  Patron ,  qui  bâtit  un  Hermitage  dans 
la  vafte  forêt  de  Nemée  ,  depuis  nommée  c/c  Nevet ,  qui  occu- 
poit  le  terrein  qui  compofe  aujourd'hui  cette  Paroiil'e.  Saint 
Kenan  mourut,  l'an  395,  dans  fon  Hermitage,  fur  lequel  on 
édifia  une  Eglife  paroifîiale  en  fon  honneur.  Kcr-uzas  appartient 
à  M.  de  la  Bedoyere. 

Tome  IF,  C  3 


î86  S  A  I 

SAINT-RIEUL;  à  6  lieues  â  l'Eft-Sud-Efl  de  Saint -Brieuc, 
fon  Evêché  ;  à  14  lieues  un  quart  de  Rennes  j  &  à  i  lieue 
trois  quarts  de  Lamballe ,  fa  Subdélégation.  Cette  ParoilTe  ref- 
fortit  à  Jugon ,  &  compte  300  communiants  :  la  Cure  eft  à 
l'alternative.  Ce  territoire  ,  traverfé  par  le  grand  chemin  de 
Dman  à  Lamballe  ,  renferme  des  terres  en  labeur,  des  prai- 
ries &  des  landes  ;  on  y  fait  du  cidre.  La  haute-Juftice  de 
Saint-Rieul  appartieiit  à  M.  de  Fontelebon  ,  Seigneur  de  la  Paroiffe. 

SAINTS  ;  à  3  lieues  à  l'Efl  de  Dol ,  fon  Evêché  &  fa  Sub- 
délégation j  &  à  1 1  lieues  de  Rennes.  Cette  ParoiiTe  reflortit  à 
Bazouges ,  &  compte  900  communiants  :  la  collation  de  la  Cure 
appartient  au  Chapitre  de  Dol.  Le  territoire  eu  coupé  au  Nord 
par  plufieurs  étangs ,  fur  lefquels  font  des  moulins ,  &  dont  les 
eaux  vont  fe  perdre  dans  la  rivière  de  Couefnon  -,  au  Sud  il  efl 
borné  par  le  chemin  de  Dol  à  Pontorfon  :  dans  cette  partie  ell 
une  lande  très-étendue  ,  la  feule  que  nous  connoifTions  dans 
cette  ParoifTe  ;  le  refte  des  terres  eft  bien  cultivé ,  &  produit  du> 
grain  &  du  cidre.  La  hauteJuftice  de  Langeviniere  appartient 
à  M.  Hué  de  Montaigu ,  qui  pofTede  aufTi  la  moyenne-JulHce 
de  Sennedavy  -,  la  première  appartenoit ,  en  1 480 ,  à  Gilles  de 
Lexure,  &la  féconde  ,  à  Robert  Turpin  :  le  Val-aux-Bretons  ,  à  N... 

SAINT  -  SAMSON  5  à  10  lieues  un  tiers  au  Sud  de  Saint- 
Brieuc  ,  fon  Evêché;  à  16  lieues  &  demie  de  Rennes;  &  à 
4  lieues  &  demie  de  Joffelin  ,  fa  Subdélégation.  Cette  ParoifTe 
reflortit  à  Ploermel ,  &  compte  800  communiants  :  la  collation 
de  la  Cure  appartient  à  l'Abbaye  de  Rilié.  M.  le  Duc  de 
Rohan  &  M.  de  Carcado  en  font  les  Seigneurs.  Le  territoire, 
arrofé  des  eaux  des  rivières  d'Oufl:  &  de  Lié  ,  offre  à  la  vue 
des  terres  fertiles  en  grains ,  des  prairies ,  des  landes ,  des  arbres 
fruitiers  &  autres ,  des  buiflbns  ;  &  les  maifons  nobles  de  la  Ville- 
Thébaud ,  de  Vaunoife  ,  &  du  Guengo.      _ 

SAINT-SAMSON-JOUXTELIVET  ;  fur  une  hauteur ,  près  la 
rivière  de  Rance  ;  à  4  lieues  à  l'Oueft  de  Dol,  fon  Evêché;  à- 
10  lieues  &  demie  de  Rennes;  &  à  1  lieue  de  Dinan ,  fa  Sub- 
délégation &  {on  reffort.  On  y  compte  400  communiants  :  la 
Cure  ell  à  l'Ordinaire.  Le  territoire,  plein  de  vallons  &  de 
monticules ,  renferme  des  terres  en  labeur  de  bonne  qualité  ,  des 
prairies ,  &  des  landes. 


s  A  I     '  ,87 

SAINT-SAUVEUR-DES-LANDES  ;  à  8  lieues  un  quart  au 
Nord-Efi:  de  Rennes,  fon  Eiêchéj  &  à  i  lieue  un  tiers  de 
Fougères,  fa  Subdélégation  &  fon  reffort.  On  y  compte  900 
communiants  ;  la  Cure  eu  à  l'Ordinaire.  Le  territoire  ,  pays  plat  & 
couvert ,  renferme  une  quantité  prodigieufe  de  landes ,  ^  fi  peu 
de  terres  en  labeur  que  les  récoltes  ne  fuffifent  pas  pour  la 
fubfiftance  des   habitants. 

L'Eglife  de  Saint-Sauveur-des-Landes  eft  un  Prieuré  fondé  l'an 
1040,  par  un  Gentilhomme,  nommé  le  Maine  ,  qui  donna  à 
Marmoutier  une  Terre  nommée  Savignac ,  fur  laquelle  fut  bâti 
le  Prieuré.  En  1630,  un  Moine  delîervoit  encore  la  Cure,  qui 
depuis  a  été  mife  à  l'Ordiiiaire.  Il  a  une  moyenne-Julhce  _,  qui 
appartient  aux  Prêtres  du  Séminaire  de  Rennes. 

SAINT-SÉBASTIEN  j  fur  une  hauteur,  au  bord  de  la  riva 
gauche  de  la  Loire  5  à  i  lieue  à  l'Efî:  de  Nantes,  fon  Evêciic 
fa  Subdélégation  ,  &  fon  reffort  j  &  à  23  lieues  de  Rennes.  L'Eglife 
de  cette  Paroiffe  relevé  du  Roi,  &  compte  5000  communiants  :  la 
Cure  étoit  préfentée  autrefois  par  l'Abbé  .de  Saint-Jouin ,  mais,  depuis 
quelques  années ,  la  collation  en  a  été  remife  à  fEvêque  diocé- 
fain.  Le  territoire  s'étend  jufqu'aux  portes  de  Nantes ,  &:  renferme 
une  partie  du  fauxbourg  de  Pirmil  &  tout  le  fauxbourg  de  Saint- 
Jacques,  où  efl:  fitué  le  Prieuré  de  ce  nom,  habité  par  des  Eé- 
nédiftins.  Les  terres  font  très-bien  cultivées  &  produifcnt  du  fro- 
ment ,  du  feigle,  du  vin  de  médiocre  qualité  ,  &  beaucoup  de  foin. 

Dans  une  enquête  de  1 206 ,  on  lit  :  que  le  Prieuré  de  Pirmil 
formoit  une  Communauté  de  Religieux  de  la  dépendance  de  l'an- 
cienne Abbaye  de  Vertou,  mais  on  en  ignore  la  fondation.  Le 
nom  de  Saint-James  ,  qu'il  portoit  plus  anciennement ,  feroit 
croire  qu'il  doit  fa  fondation  à  quelques  Seigneurs  Anglais.  L'E- 
glife ,  tombant  de  vétullé ,  fut  rebâtie  ,  fur  la  fin  du  quinzième 
îiecle,  par  Thomas  James,  Evêque  de  Dol.  On  voit  les  armes 
de  ce  Prélat  au  deffus  de  la  porte ,  avec  cette  infcription  ,  en 
lettres  capitales: 

Révérend  Père  en   Chrifl  ^  Thomas,  Evêque  de  Dol  y 
Prieur  perpétuel  ,  Commendataire  de  S aim- Jacques,  Apôtre  y 
A  rétabli,   dès  les  fondements ,  avec  gratidc  diligence. 
Cette  Eglijc  qui ,   de  jour   à  autre  ,    menaçait  de  tomber. 

L'an  du   Jcilut  1484. 

Ce  Prélat* confacra  auffi ,  le  16  Mars  1499,  l'Eglife  de  Saint- 
Sébartien ,  comme   le  prouve    l'infcription  qu'on  voit  au    du^ffus 


388  _      S  AI 

de  la  porte  âe  la  Sacriftie  de  cette  Eglife.  Celle  de  Saînt-Jac- 
ques  ,  autrefois  paroifîiale ,  n'efl  plus  qu'une  fuccurfale ,  depuis 
qu'elle  a  été  réunie  à  Saint-Sébaftien ,  en  faveur  des  Moines  qui 
depuis  n'ont  plus  qu'un  Prêtre  à  payer  :  ce  qui  prouve  que  l'E- 
glife  de  Saint-Jacques  fut  autrefois  ParoifTe ,  font  les  fonts  bap- 
tifmaux  qui  paroiffënt  un  refte  de  l'ancienne  Eglife ,  tant  ils 
font  anciens. 

La  pefte  qui  défola  Nantes  en  T500,  porta  les  habitants  à 
faire  un  vœu  à  Saint-Sébaftien.  On  y  fit  une  proceflion,  à  la- 
quelle on  porta  une  bougie  qui  faifoit  tout  le  tour  de  la  ville 
par  fa  longueur.  La  Communauté  de  ville  s'obligea  ,  par  fon  vœu  , 
à  aller,  tous  les  ans ,  le  20  Janvier,  jour  de  la  fête  du  Saint,  à 
l'Eglife  de  Saint-Sébaftien  ,  où  elle  recevroit  la  fainte  Euchariftie. 
Cette  dévotion  fe  fît  pendant  cent  cinquante  ans.  Toutes  les 
ParoifTes  de  la  ville  &  de  la  campagne  avoient  la  plus  grande 
dévotion  à  Saint  Sébaftien  :  elles  y  alloient  procefïïonnellement , 
&  y  portoient  des  cierges.  La  ParoifTe  de  Saint-Nicolas  en  don- 
noit  un  du  poids  de  quatre-vingt  livres  :  il  fervoit  toute  l'année  ; 
&  ,  quand  il  étoit  fini ,  on  en  portoit  un  autre  &  on  prenoit  ce 
qui  reftoit  de  l'ancien.  Cette  cérémonie  étoit  brillante  :  le  cierge 
étoit  placé  fur  une  gabarre  à  laquelle  il  fervoit  de  mât,  &  étoit 
accompagné  de  tout  le  Clergé  &  d'un  nombre  infini  de  peuple. 

Le  21  Oftobre  1570,  un  parti  de  Calvinilles  parut  à  Saint- 
Sébaftien  ;  mais  le  canon  du  château  l'obligea  de  fe  retirer  au 
plus  vite.  C'étoit  alors  le  Curé  de  Saint-Sébaftien  qui  nommoit 
&  préfentoit  le  Diacre  de  l'Eglife  Cathédrale  :  nous  ne  fçavons 
comm.ent  il  avoit  acquis  ce  droit  &  comment  il  l'a  perdu.  L'arche 
ou  pont  de  la  Grezilliere ,  en  Saint-Sébaftien,  fut  bâti,  l'an 
1624  ,  aux  frais  de  la  Communauté  de  ville  de  Nantes.  Le  20 
Janvier  16^^,  cette  Communauté  fit  préfent  à  l'Eglife  de  Saint- 
Sébaftien  d'un  ornement  de  fatin  verd  doublé  de  taffetas  incarna- 
din ,  garni  de  galons  &  de  dentelles  d'or  &  d'argent  :  le  tout 
coûta  une  fomme  de  huit  cents  vingt-fix  Hvres.  Le  15  Avril 
1726,  la  Communauté  de  ville  arrêta  de  procéder  à  l'adjudi- 
cation de  l'ouvrage  pour  la  réparation  de  l'autel  de  Saint-Sébaf- 
tien dans  l'Eglife  paroifTiale  de  ce  nom  ;  autel  qu  elle  s'étoit  obli- 
gée de  réparer  par  le  vœu  folemnel  de  l'an  1500,  qui  avoit 
été  approuvé  par  le  règlement  du  Confeil  du  Roi,  l'an  i68î. 
En  conféquence,  la  première  pierre  pour  cette  réparation  fut 
pofée,  au  nom  de  la  Ville  de  Nantes,  le  mercredi  5' Juin  1726, 
6c  on  mit,  dans  les  fondations,   plufieurs   jetons  de  bronze  aux. 


s  A  I  jgc, 

armes  de  la  Communauté.  Le  territoire  de  Saint-Sébaftien  ren- 
ferme les  maifons  nobles  de  la  Patouillere  ,  des  Jaunais ,  de  la 
Sivelliere  ;  Ses-maifons  ,  haute-Juftice  ,  à  M.  de  Ses-Maifons;  &  le 
Prieuré  de  Pirmil ,  liaute-Jufticc  ,  aux  Bénédidins  de  Saint-Jacques. 

SAINT-SEGLIN  ;  dans  un  fond  ;  à  1 9  lieues  au  Sud  de  Saint- 
Malo,  fon  Evêché  j  à  8  lieues  de  Rennes  j  &:  à  4  lieues  de 
Plélan  ,  fa  Subdélégation.  Cette  ParoifTe  refTortit  à  Ploermel ,  & 
compte  600  communiants  :  la  collation  de  la  Cure  appartient  à 
l'AbbefTe  de  Saint-Georges.  Le  terriroire,  couvert  d'arbres  frui- 
tiers &  de  buifTons  ,  renferme  des  terres  en  labeur  de  bonne 
qualité  ,  des  prairies,  des  landes  ,  &  le  bois  de  la  Sauvagere.  En 
1430,  les  maifons  nobles  de  l'endroit  étoient  :  la  Ville,  la  Hau- 
liere  ,  la  Sauvagere ,  le  Jaroczai ,  Tréguhere ,  &  l'hôtel  de  l'Ab- 
baye ,  à  l'Abbeife  de  Saint-Georges  de  Rennes. 

SAINT-SENOUX  ;  fur  une  hauteur;  à  18  Heues  Se  demie  au 
Sud-Sud-Efl  de  Saint-Malo ,  fon  Evêché  ;  &  à  5  lieues  un  quart 
de  Rennes,  fa  Subdélégation  &  {on  reffort.  On  y  compte  750 
communiants  :  la  Cure  ell  à  l'alternative.  Cette  Paroiiïe  ell  en 
partie  entourée  de  montagnes  ,  &  fon  territoire  eil  borné  à  un 
quart  de  heue  à  VEû  par  la  rivière  de  Vilaine  :  il  eft  coupé 
de  ruiffeaux  &  ell  de  mauvaife  quahté ,  puifqu'on  y  remarque 
plus  de  terres  incultes  &  rtériles  que  de  terres  en  labeur.  La 
Molière  ,  haute-Juflice  ,    appartient  à   M.  de  la  Molière. 

SAINT-SERVAN  ;  dans  un  fond  ;  à  7  lieues  6c  demie  au  Nord- 
Eft  de  Vannes,  fon  Evêché;  à  14  lieues  de  Rennes;  &  à  i 
lieue  de  JofTelin ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroifîe  refTortit  à 
Ploermel  ,  &  compte  i  200  communiants  :  la  Cure  cil  à  l'alter- 
native. Le  territoire  eft  borné  ,  à  un  tiers  de  lieue  à  l'Eil: , 
par  la  rivière  d'Ouil:  :  il  offre  à  la  vue  des  terres  aficz  exaéle- 
ment  cultivées,  des  prairies,  des  landes  à  rOucll  de  fon  bourg, 
des  coteaux,  &  des  vallons.  Le  Pleffis-Monteville ,  haute-JulHce, 
appartient  à  M.  de  Brignac  :  Maugremieux  ,  Juveigneurie  de 
Porhoët,  hauteJuftice  ,  à  M.  Bonindc  la^'illebouquai,  qui  poiTede 
aufîi  la  moyenne- Juflice  de  Guemaheas  ;  la  Châtellcnie  de  Que- 
len  ,  haute-Juftice ,  à  M.  le  Duc  de  Lavauguyon  ;  Caflcl ,  moycnne- 
Juftice,  ù  M.  de  CafTel. 

SAINT-SOLEMN;  à  4   heucs    au  Sud-Oucfl    de    Dol ,  fon 


590  S  A  I 

Evêché  ;  à  9  lieues  de  Rennes  ;  &  à  i  lieue  de  Dinan ,  fa  Sub- 
délégation &  fon  reflbrt.  On  y  compte  400  communiants  :  la 
Cure  ell  préfentée  par  M.  du  Chefne-Ferron.  Le  territoire  eft  en 
partie  occupé  par  la  forêt  de  Coètquen  ,  qui  appartient  à  M.  le 
Maréchal  de  Duras  ;  on  y  voit ,  en  outre  ,  des  terres  bien  culti- 
vées ,  quelques  prairies  ,  &  des  landes.  Les  habitants  font  du 
cidre ,  qui  leur  fert  de  boiffon  ordinaire.  La  Verrerie  a  une 
moyenne-Juftice,  qui  appartient  à  M.  Ferron  du  Cheûie. 

SAÏNT-SULIAC  ;  à  2  lieues  au  Sud-Sud-Eft  de  Saint-Malo, 
fon  Evêché  &  fa  Subdélégation  j  &  à  i  2  Heues  de  Rennes.  Cette 
ParoifTe  relTortit  à  Dinan ,  &  compte  1 5  00  communiants  :  la 
Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire  eft  borné  ,  à  deux  cents  toifes 
à  rOuell,  par  la  rivière  de  Rance.  Au  Nord,  ell:  une' anfe  cou- 
verte des  fables  de  la  mer  ,  laquelle  peut  contenir  environ  quatre 
cents  vingt  journaux  de  terrein  :  elle  eft  coupée  par  de  petits 
bras  de  mer ,  de  forte  qu'à  fon  extrémité ,  on  a  creufé  des 
marais  falants,  qu'on  voit  à  TEft  du  bourg,  où  font  auiTi  des 
marais  qui  ne  font  féparés  de  ceux  de  Dol  que  par  le  bourg 
de  Châteauneuf ,  qui  ell  voifin  de  celui  de  Samt-SuHac.  A  trois 
cents  toifes  au  Sud  de  ce  dernier  ,  eft  une  monticule  qui  peut 
avoir  un  tiers  de  lieue  de  longueur  fur  trois  cents  toifes  de  lar- 
geur. Son  fommet  eft  couronné  par  un  moulin,  d'où  l'on  découvre 
une  étendue  immenfe  de  pays.  La  petite  quantité  des  terres  dont 
jouifîent  les  habitants  eft  très-bien  cultivée ,  &  rapporte  des  ré- 
coltes très-abondantes. 

L'an  1256,  F aoul ,  Vicomte  de  la  Poudouere ,  &  fon  époufe , 
permirent  aux  Moines  de  Saint-Malo  de  Dinan  de  continuer  à 
percevoir  le  droit  de  vinage  dans  la  ParoifTe  de  Saint-SuHac , 
dont  P».aoul  étoit  Seigneur.  En  1 597  ,  Saint-Laurent,  à  la  tête 
d'un  corps  de  troupes ,  s'empara  de  la  Paroifte  de  Saint-Suliac ,  & 
y  étabht  fon  quartier.  Toutes  les  Paroifles  des  environs  furent 
■pillées ,  &  leurs  dépouilles  conduites  à  Dinan  par  des  barques  qui 
venoient  les  prendre.  Les  Malouins  portèrent  leurs  plaintes  de  ce 
brigandage  au  Capitaine  la  Tremblaye,  guerrier  excellent  pour 
les  coups  de  main.  Il  fut  convenu  que  les  Malouins  le  feconde- 
roient  dans  cette  entreprife ,  &  que  ,  tandis  qu'il  attaqueroit  Saint- 
Laurent  d'un  côté  avec  huit  cents  hommes,  ils  l'attaqueroient 
auffi.  Deux  galères  &  deux  canons  de  gros  calibre  arrivèrent 
devant  Saint- Suhac ,  qui,  en  peu  de  temps,  fut  forcé.  Saint- 
Laurent  fe    réfugia    dans  l'Eglife   avec    deux   cents    cinquante 


s  A  I  391 

hommes  J  maïs  il  n'y  put  tenir.  La  place  fut  emportée  ,  &c 
tous  les  afîiégés ,  à  l'exception  de  douze  ,  turent  paffés  au  fil 
de  l'épée.  En  1500,  on  voyoit  dans  cette  ParoilTe  les  mailbns 
nobles  fuivantes  :  la  Motte  -  Cohinac ,  la  Bagaye  ,  Baifle  qui 
dès  ce  temps  étoit  démolie  ,  &  le  Vaudoré.  En  1 400 ,  l'Ab- 
baye de  Saint-Aubin-des-Bois  avoit  pluiîeurs  cantons  de  vignes^ 
dans  ce  territoire  ,  mais ,  en  1 5  00  ,  elles  n'exiiloient  plus. 

SAINT-SULPICE  ;  Abbaye  de  Bénédiftines  ;  à  3  lieues  au  Nord- 
Eft  de  Rennes ,  Ton  Evêché ,  à  Tentrée  de  la  forêt  de  Rennes. 
Cette  Abbaye  reconnoit  pour  fon  fondateur  Raoul  de  la  Futaye, 
qui  avoit  été  Moine  de  Saint-Benoît  dans  l'Abbaye  de  Saint- 
Jouin-de-Marne.  Attiré  par  la  grande  réputation  de  Robert  d'Ar- 
briffîHes  ,  Raoul  quitta  fon  Monaftere  pour  venir  partager  les- 
travaux  de  ce  faint  homme.  Voulant  fuivre  en  tout  l'exemple 
de  fon  maître  qiii  venoit  de  fonder  l'Abbaye  de  Fontevraulr , 
en  II 06,  Raoul  entreprit  un  pareil  étabiiiïement  dans  la  forêt 
de  Nid-de-Merle  ,  aujourd'hui  la  forêt  de  Rennes ,  où  il  jetta  les 
fondements  du  nouveau  Monaflere.  Il  y  plaça  deux  Couvents , 
l'un  d'Hommes  ,  l'autre  de  Femmes  ,  &  les  foumit  tous  deux 
à  la  Supérieure  du  Monaftere  des  Femmes  -,  ce  dernier  eft  le  feul 
qui  y  exifte  aujourd'hui. 

Marie  ,  fille  d'Etienne  ,  Roi  d'Angleterre  ,  fut  la  première  Ab- 
beffe  de  cette  maifon  ,  à  qui  elle  procura  de  grands  biens. 
Henri  II,  Roi  d'Angleterre,  lui  donna  le  manoir  de  l'Ille-Her- 
ché  avec  toutes  fes  dépendances.  Nme  fuccéda  à  Marie  d'An- 
gleterre ,  &  fut  Abbeiïé  l'an  1161.  Elle  fit  confirmer  ,  par  le 
Pape  Alexandre  III ,  toutes  les  donations  qui  avoient  été  faites 
à  fon  Abbaye  ,  en  confidération  de  ce  qu'elle  avoit  bien  voulu 
recevoir  dans  fa  Communauté  Enoguent ,  fille  d'Alain  ,  Comte 
de  Richemont ,  &  de  Berthe ,  Duchefie  de  Bretagne.  Le  Duc 
Conan  IV  lui  donna  le  lieu  de  Merle  ,  où  eft  préfentement 
cette  maifon;  Se ,  en  1181  ,  elle  obtint  de  l'Evéque  de  Rennes 
la  confirmation  de  toutes  les  concevons  que  fes  prédcceffeurs 
avoient  faites  à  cette  Abbaye.  L'an  1331,  l'Abbeue  de  Saint- 
Sulpice  fe  plaignit  au  Pape  des  Vicaires  perpétuels  qui  delTer- 
voient  les  Eglifes  dépendantes  de  fon  Abbaye ,  &  le  Pape  char- 
gea l'Abbé  de  Saint-Melaine  de  terminer  TalTairc  le  plus  équita- 
blement  que  faire  fe  pourroit. 

L'Abbaye  de  Saint-Sulpice  avoit  autrefois  le  droit  de  prendre 
tous  les  ans ,  dans  la   forêt  de  Rennes ,  quatre-vingt  cordes  de 


391  S  A  I 

bois  de  trois  pieds  &  demi  de  longueur.  Les  AbbefTes  ne  man- 
quoient  pas  de  faire  choifir  les  plus  beaux  arbres  ,  &  eulTent-ils 
été  au  milieu  de  la  forêt,  il  failoit  les  abattre  &  les  conduire 
à  la  maifon ,  de  forte  qu'il  failoit  faire  un  chemin  commode ,  à 
qaelque  prix  que  ce  fût.  Les  Abbayes  de  Saint- Melaine  &  de 
Saint-Georges  avoient  le  même  droit ,  &  n'en  ufoient  pas  avec 
plus  de  modération ,  de  forte  que  cette  forêt  fe  ruinoit  infenfî- 
blement.  Cet  abus ,  fi  préjudiciable  ,  après  avoir  duré  bien   des 

fiecles ,  fut  enfin  fupprimé   il  y    a  environ ans.  On  a  pris 

le  fage  parti  de  faire  couper  ce  bois ,  &  de  le  diftribuer  à  ces 
Monalleres;  &  comme  ce  bois  n'eft  ou  ne  doit  être  que  pour 
le  chauffage  ,  on  a  foin  de  ne  pas  prendre  le  meilleur.  11  faut 
convenir  que  les  Princes  Bretons  n'entendoient  guère  leurs  vrais 
intérêts ,  lorfqu'ils  faifoient  des  conceflions  fi  extraordinaires  :  ces 
générofités  déplacées  leur  ont  fouvent  été  nuifibles  ,  &  elles 
étoient  d'autant  moins  raifonnables ,  que  leurs  protégés  n'en 
avoient  pas  befoin.  L'Abbaye  de  Saint-Sulpice  a  une  hautc-Juf- 
tice  qui  appartient  à  l'AbbefTe. 

SAINT  -  SULPICE  -  DES  -  LANDES  ;  à  8  lieues  au  Sud  de 
Rennes ,  fon  Evêché  &  fon  refîbrt  j  &  à  3  lieues  de  Derval ,  fa , 
Subdélégation.  On  y  compte  600  communiants  :  la  Cure  ert  à 
l'alternative.  Ce  territoire  offre  à  la  vue  la  forêt  de  Teille ,  des 
terres  en  labeur ,  &  des  prairies.  Cette  Paroiffe  eft  appellée 
Salm-Sulpice-des-landes ,  parce  qu'elle  efi:  en  partie  entourée  de 
landes  j  mais  il  n'y  en  a  aucunes  dans  l'enclave  de  fon  territoire. 
Les  terres  y  font  affez  bonnes ,  &  produiroient  abondamment  du 
bled  noir  ,  du  feigle  ,  &  même  du  froment  ,  fi  elles  étoient 
mieux  cultivées.  Les  fils ,  les  toiles ,  les  ferges ,  &  les  cochons , 
qu'on  vend  aux  marchés  voifins ,  font  les  feuls  objets  qui  faffent 
circuler  quelque  argent  :  en  général  l'induftrie  y  manque. 

La  maifon  noble  de  la  Roche-Giffard  étoit  autrefois  poffédée 
par  les  Seigneurs  de  la  Chapelle  ,  Marquis  de  la  Roche-Giffard , 
defcendants  d'Olivier  de  la  Chapelle ,  Maréchal  de  Bretagne  au 
commencement  du  quatorzième  îiecle.  Ces  Seigneurs,  zélés  Pro- 
teflants ,  portèrent  toujours  les  armes  pour  Henri  111  &  Henri  IV, 
contre  les  Ligueurs  ;  &  l'un  d'eux  fervit  en  qualité  de  Lieute- 
nant général  dans  l'armée  royale  en  Bretagne.  Après  la  révo- 
cation de  l'Edit  de  Nantes ,  ils  fe  réfugièrent  en  Angleterre ,  & 
ia  Roche-Giffard  &  leurs  autres  Terres  furent  vendues  aux  re- 
quêtes du  Palais ,  à  Paris ,  &  adjugées  au  Maréchal  de  Créqui , 

qui 


SAI  393 

qui  féjourna  long-temps  à  la  Roche-Giffard  ;  cette  Terre  a  été 
revendue  depuis:  elle  appartient  aujourd'hui  à  M.  de  Lavau  , 
reconnu  Seigneur  fondateur  &  univerfel  de  Saint  -  Sulpice.  Il 
s'exerce  dans  cette  ParoifTe  une  haute  -  Juftice  qui  relTortit  ^ 
Chateaubriand. 

SAINT-SULPICE-DES-LANDES  ;  fur  une  hauteur ,  &  fur  la 
route  d'Ancenis  a  Chateaubriand  ;  à  ii  lieues  au  Nord-Eil  de 
Nantes ,  fon  Evêché  &  fon  relTort  j  à  1 5  lieues  de  Rennes  ;  (Se 
à  4  lieues  de  Chateaubriand  ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte 
800  communiants.   M.   de   Kochequairie  en  cil  le   Seigneur ,  iS: 

la  Cure  elt  a Le   territoire  ,  borné  à  mille    toifes   au  Sud-Ell 

par  l'Anjou  ,  elt  arrofé  par  le  ruifleau  de  Mandie  ,  &  renferme 
une  quantité  prodigieufe  de  landes  ,  très-peu  de  terres  en  labeur, 
&  une  partie  de  la  forêt  de  Saint-Mars  ;  (  voyez  Saint-Mars-de- 
la-Jaille.  )  On  voit  dans  les  titres  de  l'Eglife  Cathédrale  de  Nan- 
tes ,  qu'en  1 1 5 1  les  Moines  de  Marmoutier  tenoient  en  com- 
mun avec  les  Religieux  de  Saint-SuIpice-des-landes  l'Eglife  de 
Sainte-Marie-des-landes  :  nous  ignorons  de  quel  Ordre  étoient 
ces  derniers ,  qui  fe  prétendoient  exempts  de  la  Jurifdiftion  de 
Bernard  ,  Evêque  de  Nantes  ;  mais  ce  Prélat  leur  réfilla  avec 
fermeté.  La  Cour  de  la  Marzelle  appartenoit ,  en  1440  ,  au 
Sieur  de  la  Chapelle-Glain  -,  elle  ei\  aujourd'hui  à  M.  de  Ro- 
chequairie. 

SAINT  -  SULPICE  -  PRÈS  -  L'ABBAYE  ;  dans  un  fond  -,  à  3 
lieues  au  Nord-Efl:  de  Rennes ,  fon  Evêché  &  fon  reflbrt  ;  &  à 
3  lieues  de  Samt-Aubin-du-Cormier  ,  fa  Subdélégation.  On  y 
compte  350  communiants  :  la  Cure  eft  préfentée  par  l'AbbcfTe 
de  Saint-Sulpice.  Cette  Paroifîe  cft  fituée  au  bord  de  la  forêt 
de  Rennes ,  qui  appartient  au  Roi ,  &:  contient  environ  cinq 
mille  cinq  cents  vingt  arpents  ,  plantés  en  futaie  &:  taillis  ;  il 
n'y  en  a  qu'une  partie  dans  ce  territoire  ,  qui  eft  arroféc  de 
différents  ruiffeaux  ,  qui  prennent  leur  fource  dans  l'étang  Neuf 
&  l'étang  des  Comtes,  (itués  à  l'entrée  de  la  forêt  :  au  rcfte, 
les  produ61:ions  du  terroir  font  le  grain  ,  le  foin  ,  &  le  cidre. 
L'an  II 60,  Etienne,  Evêque  de  Rennes,  accorda  à  Marmoutier 
la  préfentation  de  cette  Cure  &:  les  deux  tiers  du  cafuel. 
La  Paroiffe  a  deux  hautes  -  Jultices  ,  dont  l'une  s'exerce  à 
Vitré  i  elles  appartiennent  toutes  les  deux  à  TAbbefTe  de  Saint- 
Sulpice. 

Tome  IF.  D  3 


594  S  A  I 

SAINT-SYMPHORIEN  j  à  |  lieues  au  Nord-Nord-Oue^  da 
Rennes ,  fon  Evêcbé  ;  &  à  un  tiers  de  lieue  de  Hédé ,  fa  Sub- 
délégation &  fon  relTort.  On  y  compte  500  communiants  :  la 
Cure  eu  préfentrée  par  l'Abbé  de  Saint -Melaine.  Le  territoir-e , 
couvert  d'arbres  &  buiffons ,  produit  beaucoup  de  grains  &  du 
cidre  -,  il  eft  bien  cultivé.  Les  maifons  nobles  de  la  Breteche  & 
de  la  Salle  ,  font  très-anciennes. 

SAÏNT-THELO  ;  fur  une  colline ,  près  la  rivière  d'Ouft  ;  à 
7  lieues  au  Sud  de  Saint-Brieuc  ,  fon  Evêché  j  à  1 9  lieues  de 
Rennes  ;  &  à  4  lieues  de  Quintin ,  fa  Subdélégation.  Cette  Pa- 
roifle  reflbrtit  à  Ploermel ,  &  compte  2000  communiants  :  la, 
Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire  eft  traverfé  au  Nord  par 
les  montagnes  du  Mné ,  &  renferme  des  terres  en  labeur  ,  des 
prairies  ,  &  beaucoup  de  landes  j  les  habitants  font  du  cidre. 
La  haute-Juftice  de  iionamour  appartient  à  M.    de    Bonamour, 

SAINT-THOMAS-DE-BAILLÉ  -,  à  7  lieues  &  demie  au  Nord- 
Eft  de  Rennes,  fon  Evêché  j  &  à  2  lieues  un  quart  de  Saint- 
Aubin  -  du  -  Cormier  ,  fa  Subdélégation  &  fon  reffort.  On  y 
compte  350  communiants:  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  ter- 
ritoire ,  arrofé  par  les  eaux  de  la  petite  rivière  de  Minette ,  eft: 
d  une  fuperficie  plane ,  oftre  à  la  vue  des  terres  en  labeur  de 
bonne  qualité ,  quelques  prairies  ,  beaucoup  d'arbres  frmtiers  & 
autres,  des  buiffons,  &  quelques  petites  landes.  En  1400,  les 
maifons  nobles  de  l'endroit  étoient  :  le  manoir  de  la  Roclierie, 
à  Nicolas  Boilet  j  Monteval ,  au  Sieur  du  Tiercent^  &  Flaige  ,  à 
Jeanne  du  Tiercent. 

SAINT-THONAN  ;  à  7  lieues  au  Sud-Oueft  de  Sain^Pol-de- 
Léon,  fon  Evêché  j  à  45  lieues  de  Rennes;  &  à  i  lieue  un 
quart  de  Landerneau ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  reffortit 
à  Lefneven  ,  &  compte  450  communiants.  Le  territoire  oftre  à 
la  vue  des  vallons ,  des  monticules ,  des  coteaux ,  des  terres  en 
labeur  très-fertiles  &  bien  cultivées ,  quelques  prairies ,  &  peu  de 
terres  incultes, 

SAINT-THOYS;  à  5  lieues  &  demie  au  Nord-Eft  de  Qulm- 
per,  fon  Evêché  ;  à  35  lieues  de  Rennes;  &  à  4  lieues  de 
Châteaulin,  ùl  Subdélégation  &  fon  refîbrt.  On  y  compte  900 
communiants  ;  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire,  borné 


39s 

au  Nord  par  la  rivière  d'Aulne ,  8c  au  Sud  par  les  montagnes 
Noires ,  renferme  des  terres  en  labeur  de  bonne  qualité  ,  des 
prairies ,  le  bois  de  la  Roche ,  &  beaucoup  de  landes ,  dont  le 
fol ,  plein  de  rochers  Ss.  de  cailloux ,  ne  paroît  pas  mériter 
les  foins  du  laboureur.  Le  manoir  de  Ker-guelen  appartcnoit 
en  1400,  à  Guillaume  de  Quelen  j  &  celui  de  la  Roche  au 
Sieur  de  Roftrenen. 

SAINT  -  TUAL  ;  fur  une  hauteur  ;  à  5  lieues  au  Sud-Sud- 
Oueft  de  Dol ,  fon  Evêché  v  à  7  heues  de  Rennes  ;  Ôc  k  t 
lieues  un  tiers  de  Montauban,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiiîe 
reflbrtit  à  Dinan ,  &  compte  700  communiants  :  la  Cure  ell 
à  l'Ordinaire.  Le  territoire  ofFre  à  la  vue  des  terres  bien  cul- 
tivées ,  des  prairies ,  des  landes ,  beaucoup  d'arbres  fruitiers  & 
autres ,  des  buifTons ,  &  le  bois  de  Saint  -  Tuai  qui  peut  avoir 
une  lieue  &  demie  de  circonterence.  Cette  Paroiflé  eu  enclavée 
dans  le  diocefe  de  Saint-Malo. 

SAINT-TUGDUAL  ;  à  14  lieues  au  Nord-Oueil  de  Vannes, 
fon  Evêché  -,  à  16  lieues  de  Rennes  ;  &  à  2  Heues  &  demie  de 
Guémené ,  fa  Subdélégation.  Cette  ParoifTe  reiîortit  à  Henne- 
bon,.  &  compte  2000  communiants,  y  compris  ceux  de  Croixti, 
fa  trêve  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire  offre  à  la  vue 
des  terres  en  labeur  ,  des  prairies ,  des  landes  ,  &  des  bois ,  dont 
le  plus  confidérable  elt  celui  de  Ker-mehzederas  _,  qui  peut  avoir 
une  lieue  &  demie  de  circuit. 

SAINT -VERAN}  à  8  Heues  un  quart  au  Sud-Efl  de  Saint- 
Brieuc  ,  fon  Evêché  ;  à  1 2  lieues  de  Rennes  j  &  à  5  Heues  de 
Lamballe ,  fa  Subdclégation.  Cette  Paroifle  refTortit  à  Jugon ,  & 
compte  1 000  communiants  :  la  Cure  ert  à  Talternative.  Le  ter- 
ritoire ,  d'une  fuperficie  plane ,  offre  à  la  vue  des  terres  en  la- 
heur  &  beaucoup  de  landes.  Les  maifons  nobles  de  l'endroit, 
dans  le  quinzième  fiecle ,  étoient  :  Langourla ,  le  Botdeu ,  &  la 
Houliere ,  à  Jean  de  Langourla  :  le  Gué-Yvon  ,  à  François  de 
Broons  j  i'Orfeil  &  la  Ville  -  Chevier ,  au  Sieur  de  l'Orteil  -, 
Brigneu  ,  à  François  de  Plumaugat  ;  le  manoir  de  Guenon , 
à  Catherine  de  l'Hôpital  j  &  la  Touche  ,  à  Catherine  de  la 
Touche. 

SAINT- VL4U  ;  à  9  Heues  un  quart  à  l'Ouefl  de  Nantes  ;,  fou 


39^  S  A  I 

Evêché  Se  fon  relTort  ;  à  22  lieues  de  Rennes;  Se  à  trois  quarts 
de  lieue  de  Paimbœuf,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  1200 
communiants  :  la  Cure  ei\  à  l'Ordinaire  ;  mais  l'Abbé  de  Tournus 
s'en  prétend  le  préfentateur.  Le  territoire  eft  bien  cultivé ,  Se 
offre  à  la  vue  des  terres  en  labeur,  des  prairies  ,  &  des  vignes, 
dont  le  vin  efl:  de  médiocre  qualité  :  le  pays  eft  riant  Se  l'air 
très-pur.  Les  habitant^ font  en  partie  marins.  La  haute  -  Jufticô 
de  Saint-Viau  appartient  à  M.  du  Bot  de  Talhouet.  On  connoît 
dans  cette  ParoifTe  les  maifons  de  la  Galegré ,  de  la  Guinar- 
diere  ,  du  Plus-haut-midi ,  de  l'Aumondiere  ,  de  la  Môriniere  ,  Se 
des  Tumieres. 

Saint  Viau  ,  autrement  Saint  Vital ,  Anglais  d'origine  ,  vivoit , 
en  740,  dans  le  Monaflere  d'Her ,  aujourd'hui  Noirmoutier.  Le 
defir  d'une  vie  plus  retirée  le  fit  paffer  au  pays  de  Retz  ,  où  il 
mourut  la  même  année  qu'il  s'y  étoit  retiré  ,  fur  le  mont  Scobrit. 
C'efl  dans  cet  endroit  que ,  peu  de  temps  après  fa  mort  ,  on 
commença  à  bâtir  le  bourg  que  l'on  a  continué  d'appeller 
Saint-Viau,  On  y  voit  un  rocher  dans  lequel  l'on  montre  une 
grotte  ,  que  l'on  prétend  avoir  été  la  demeure  de  Saint  Viau, 
On  y  a  planté  une  Croix,  à  laquelle  on  alloit  jadis  en  pèleri- 
nage pour  les  maux  de  reins.  Le  corps  de  Saint  Viau  efl  con- 
fervé  dans  TEglife  de  l'Abbaye  de  Tournus ,  où  il  fut  transféré 
Tan  878  ,  à  l'exception  de  l'os  d'un  bras  que  l'on  conferve  dans 
l'Eglife  de  Saint-Viau.  En  839,  les  Moines  laifTés  par  Saint 
Philbert  à  l'Ille-d'Her  ou  de  Noirmoutier ,  obtinrent  de  l'Empe- 
reur Louis  le  Débonnaire,  le  village  de  Saint-Viau,  au  Gou- 
vernement de  Retz ,  dans  l'Aquitaine.  (  Voyez  Saint-Philbert  de 
Grand-Lieu.  ) 

Dans  le  Concile  de  Loudun ,  affemblé  le  18  061obre  11 09  y 
où  préfidoit  Gérard  d'Angoulême  ,  Légat  du  Pape  ,  fut  réglée  une 
affaire  férieufe  entre  l'Evêque  Se  le  Chapitre  de  Nantes  d'une 
part ,  Se  les  Moines  de  Tournus  de  l'autre  ,  au  fujet  de  l'EgUle 
paroifîiale  de  Saint-Viau  :  ils  en  avoient  déféré  le  jugement  au 
Légat ,  qui  donna  l'Eghfe  de  Saint  -  Viau  aux  Moines.  Par  un 
accord  paffé  l'an  1164,  entre  Bertrand,  Evêque  de  Nantes, 
Se  les  Moines  de  Tournus ,  il  fut  convenu  que  ces  derniers  pré- 
fenteroient  la  Cure  de  Saint-Viau. 

SAINT-VINCENT-DES-LANDES  ;  fur  une  petite  hauteur  ;  à 
II  heues  au  Nord  de  Nantes,  fon  Evêché  Se  fon  reffort  ;  à  12 
lieues  de  Rennes  ;  &  à  3  lieues  un  quart  de  Derval ,  fa  Subdé- 


s  A  I  397 

légation.  Où  y  compte  800  communiants  :  la  Cure  eu  préfentée 
par  l'Abbé  de  Saint-Florent  de  Saumur.  Le  territoire ,  arrofé  des 
eaux  de  la  rivière  de  Corne  &  d'une  fuperficie  prefque  plane , 
offre  à  la  vue  plus  de  landes  que  de  terres  labourables,  &  la 
plus  grande  partie  de  ces  landes  paroît  mériter  les  foins  du 
cultivateur  ,  foit  pour  la  femence  des  grains ,  foit  pour  la  plan- 
tation des  arbres  qui ,  à  coup  lur ,  y  «oîtroient  à  merveille  : 
les  habitants  font  du  cidre  de  médiocre  qualité.  Les  carrières 
d'ardoife  qui  fe  trouvent  dans  cette  Paroiffe ,  ne  fervent  qu'à 
la  couverture  des  maifons  des  habitants ,  parce  que  le  tranfport 
en  feroit  trop  coûteux  pour  les  rendre  dans  les  villes  de  cette 
province ,  qui ,  d'ailleurs ,  en  peuvent  tirer  des  carrières  moins 
éloignées.  Le  Val  de  Coiratel  efl:  la  feule  maifon  noble  que  nous 
connoiffions  en  ce  territoire.  En  1594,  l'EgHfe  fut  polluée  par 
les  Calvinilles  ;  &: ,  comme  FEvêque  de  Nantes  n'étoit  pas  fur 
les  lieux  ,  elle  fut  réconciliée  à  la  faveur  d'un  induit  de  Rome. 

SAINT-VINCENT-SUR-AOUST  i  fur  une  hauteur,  &  fur  la 
route  de  Redon  à  Maleltroit  -,  à  9  lieues  deux  tiers  à  VEÛ  de 
Vannes ,  fon  Evêché  ;  à  1 3  lieues  de  Rennes  ;  &  à  2  lieues 
de  Redon ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  reffortit  à  Ploermel , 
&  compte  1400  communiants,  y  compris  ceux  de  Saint-Pereuc, 
fa  trêve  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire  eff  plein  de 
vallons  &  de  monticules  ,  &  couvert  d'arbres  &  buiffons  ;  il 
offre  à  la  vue  des  terres  en  labeur ,  des  prairies ,  &  des  landes- 
Dans  le  quinzième  fiecle  ,  il  rcnfermoit  les  maifons  nobles  de 
Billi ,  de   Launai ,  du   Bouais  ,  de  Bouro ,  &  de  la  Drullaye. 

SAINT-UNIAC  ;  à  9  lieues  &  demie  au  Sud-Sud-Oucff  de 
Dol  ,  fon  Evêché  ;  à  6  lieues  de  Rennes ,  ôc  k  i  lieue  de 
Montauban  ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  ,  qui  i'e  trouve  en- 
clavée dans  le  diocefe  de  Saint-Malo  ,  reffortit  à  Ploermel ,  & 
compte  6co  communiants  :  la  Cure  eff  préfentée  par  l'Abbé  de 
Saint-Méen.  Le  territoire  ,  couvert  d'arbres  &  buiffons ,  renferme 
des  terres  de  bonne  qualité ,  très-bien  cultivées ,  des  prairies , 
&  peu  de  terres  incultes;  il  produit  du  cidre.  En  1440,  on  y 
connoiffoit  plufieuis  maifons  nobles  ,  nommées  la  Touche  ,  le 
Breil  ,  le  Coudrai,  la  Ville-Durand ,  la  Villc-Soriez ,  la  Rcuve- 
ray  ,  le  Pleffis ,  &  Scburon. 

SAINT-VOUGAY  ;  à  3   lieues   au  Sud-Oucff   de  Saint-Pol- 


398  ^  S  A  I 

de-Léon  ,  fon  Evêçhé  ;  k  42  lieues  de  Rennes  ;  &  à  3  lieues 
de  Lefoeven,  fa  Subdélégation  &  fon  refTort.  On  y  compte 
1200  communiants  :  la  Cure  eft  préfentée  par  l'Evêque.  Le 
territoire ,  couvert  d'arbres  &  buiflbns ,  produit  des  grains ,  du 
cidre ,  &  du  foin  ;  on  y  apperçoit  des  landes  aflez  étendues. 
La  vie  de  Saint  Vougay  nous  apprend  qu'il  étoit  Irlandais ,  qu'il 
vint  en  Bretagne  avec  un  certain  nombre  de  difciples-,  &  qu'il 
vécut  dans  un  Hermitage  jufqu'en  585.  Ses  difciples  l'inhurae- 
rent,  &  élevèrent  fur  fon  tombeau  une  Chapelle  qui  lui  fut 
dédiée.  Saint  Tenenan  ,  feptieme  Evêque  de  Saint-  Pol  -  dcr 
Léon ,  rérigea  en  Eglife  paroifTiale  ,  qui  a  toujours  porté  le  nom 
de  fon  Patron. 

Le  château  de  Ker-jean,  un  des  plus  beaux  de  la  province,, 
eft  la  Seigneurie  de  la  Paroifle  &  a  titre  de  Châtellenie  :  il  a 
foutenu  des  fieges  fous  les  Ducs.  Son  fuperbe  donjon  fut  démoli 
dans  le  dernier  fiede.  Au  mois  de  Juillet  1618,  cette  Terre  fut 
unie  aux  Châtellenies  de  Languen  ,  Ker-biguet ,  Rodalvez ,  &c 
Trocurum,  &  érigée  en  Marquifat  en  faveur  de  René  Barbier, 
Seigneur  de  Kerjean,  Chevalier  de  l'Ordre  de  Saint-Michel  & 
Gentilhomme  ordinaire  de  la  Chambre  du  Roi ,  en  confidération 
de  fon  ancienne  nobieffe  &  pour  récompenfe  de  (qs  fervices.  Le 
Marquis  de  Kerjean  eut  de  fon  époufe  Marie  de  Percevaux, 
Dame  d'Honneur  de  la  Reine ,  un  fils  nommé  François ,  que  la 
Nobieffe  du  diocefe  de  Saint-Pol-de-Léon  choifit ,  d'une  voix  unar 
nime  ,  pour  fon  Commandant,  Sébaftien ,  fon  cadet ,  fut  de  même 
élu  pour  Major.  François  de  Kerjean  avoir  époufé,  en  1619L, 
Catherine  de  Goësbnand  j  &  Marie  Barbier  de  Kerjean,  époufa  ;, 
en  premières  noces,  Jean,  Seigneur  de  Penhoèdic,  &,  en  fé- 
condes noces,  Vincent  du  Louet,  Seigneur  de  Coët-Jonval  5 
dont  elle  fut  la  troifîeme  femme.  De  ces  mariages  font 
fortis  des  Chefs  d'Efcadre ,  des  Colonels  ,  &  autres  Officiers  dans 
les  troupes  du  Roi ,  &  des  Chevaliers  de  Malte.  Cette  maifon 
fe  trouve  enfin  réduite  à  une  feule  branche  dans  la  perfonne  de 
Claude- Alain  Barbier,  Comte  de  Lefcouet,  qui  quitta  le  fer- 
vice  à  la  paix  de  1748 ,  &  fe  retira  dans  fon  château  de  Ker- 
no  au  territoire  de  Tregarantec  ,  près  de  Lefneven.  De  fon  ma- 
riage avec  Françoife-Perrine  le  Borgne  de  Lefquifiou  ,  il  lui 
refloit  fix  fils  ,  dont  quatre  et  oient  au  fervice  du  Roi  j  le  troi^ 
fieme  étoit  Chevalier  de  Malte  ,  &  le  fixieme  avoit  embraffé. 
l'Etat  eccléfiaftique.  Cette  nombreufe  famille  étant  morte  fans 
poftérité  ,  le  Marquifat  de  Ker-jean  tomba  dan^  la  maifon  de  Coëtanf- 


SA  I  — SA  R  399 

cour ,  qm  s'éteignit  auffi  ,  vers  i  769  ,  par  la  mort  d*Akxandre- 
Vincent  de  Coètanfcour.  Dans  le  commencement  du  quinzième 
fiecle  ,  le  territoire  renfermoit  les  manoirs  nommés  Ker-ouferé- 
Bihan ,  Ker-faufon  ,  le  Cloeftre  ,  Mangouerée  ,  Trouhern  ,  Ker- 
navalo  ,  Penfemeniou  ,  Ker-ouar&n , -Kjer-lan^  &  Ker-maingui. 

SAINT-URIAL  ;  fur  le  petit  vivier  de  Frinbois  ;  à  1 5  lieues 
au  Sud  de  Saint-Malo  ,  l'on  Evêché  ;  à  4  lieues  un  quart  de 
Rennes ,  fon  relTort  ;  &  à  2  lieues  &  demie  de  Plélan ,  fa  Sub- 
délégation. On  y  compte  1000  communiants  :  la  Cure  eft  à 
l'alternative.  Le  bourg  eft  environné  de  rochers;  mais  la  cam- 
pagne offre  à  la  vue  des  terres  en  labeur  bien  cultivées  ,  des  prai- 
ries ,  &  des  landes  beaucoup  trop  étendues.  Les  habitants  font 
du  cidre.  En  1 420  ,  ce  territoire  renfermoit  plufieurs  maifons 
nobles ,  fçavoir  :  Francbois,  au  Sieur  de  Treguenéj  Bonnœuvre, 
à  Guillaume  Caffort  ;  Marezac ,  à  Guillaume  Mauni  ;  la  Chefnaie , 
à  Pierre  Pain-d'Avoine  ;  &  la  Motte  ,  à  Geoffroi  Chouan  ;  cette 
dernière  ,  avec  moyenne-Juftice ,  appartient  à  M.  Loyer  :  la 
Cheze  ,  moyenne-Juftice,  appartient  à  Mademoifelle  de  la 
Cheze-Turmel. 

SAINT-URIELLE  ;  k  9  lieues  un  quart  à  l'Oueft-Sud-Oueft  de 
Dol ,  fon  Evêché  ;  à  1 1  Heues  &  demie  de  Rennes  ;  &  à  4  lieues 
un  tiers  de  Lamballe ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffc  ,  qui  eft 
enclavée  dans  le  diocefe  de  Saint-Malo ,  reffortit  à  Dinan  ,  & 
compte  4C0  communiants  :  la  Cure  étoit  autrefois  à  la  nomi-i 
nation  de  l'Abbé  de  Rillé  ;  mais  elle  eit  aftuellement  en  com- 
mende.  Le  territoire ,  arrofé  par  les  eaux  de  la  rivierc  d'Argue- 
non  &  d'une  fuperficie  plane  ,  eft  très-bien  cultivé.  Les  terres 
produifent  beaucoup  de  grain.  Eti  i  500  ,  la  maiibii  noble  de  la 
Plcffe  étoit  à  François  Millon.  La  moyenne-Juftice  de  la  BaïUig 
appartient  à  M.  des  Cougnets  de  THôpitai. 

SARZEAU  ;  petite  ville  fans  clôture  ;  par  les  5  degrés  6  mi* 
nutes  36  fécondes  de  longitude,  &  par  les  47  degrés  31  minutes 
10  fécondes  de  latitude;  à  3  lieues  im  quart  de  Vannes,  fon 
Evêché  ;  &  à  23  lieues  un  quart  de  Rennes.  On  y  compte  5400 
communiants  :  la  Cure  eft  préfentée  par  l'Abbé  de  Saint-Gildas 
de  Rhuis  ;  cette  ville  relevé  du  Roi.  On  y  remarque  une  Cour 
royale  ,  une  Communauté  de  ville  avec  droit  de  députer 
aux  Etats  de  la  proviiKC  ,  une  Subdclégation ,  ik  deux  Commu- 


400  S  A  R 

nautés ,  qui  font  les  Récollets  &  lesTrinitaires.  Le  territoire  de  Sar- 
zeau  occupe  la  plus  grande  partie  de  la  prefqu'ifle  de  Rhuis. 
Le  climat  eu  beau  ,  mais  très-fujet  aux  vents.  L'agriculture  n'y  eft 
pas  fort  aftive  par  le  défaut  de  monde  -,  de  forte  que  les  terres, 
quoique  très-bonnes ,  n'y  font  pas  cultivées.  Les  vignes  commen- 
cent à  y  être  mieux  foignées  que  ci  -  devant.  Les  marais  a  fel 
font  bien  entretenus  ;  mais  le  commerce  de  cette  denrée  fe  perd 
totalement ,  &  les  habitants  feront  obligés  d'abandonner  leurs 
ceillets,  parce  qu'ils  ne  trouvent  point  d  acheteurs.  Le  feul  com- 
merce ei\  celui  des  grains  du  pays.  Les  vins  en  faifoient  autre- 
fois une  branche  confidérable  j  mais  les  vexations  des  Fermiers 
à  l'égard  des  marchands, enlevant  tous  les  profits,  ont  ôté  cette 
reiïburce  aux  habitants.  Anciennement ,  on  regardoit  la  prefqu'ifle 
de  Rhuis  comme  un  fécond  paradis  terreilre  :  un  fol  fertile  y 
produifoit  en  abondance  des  grains  de  toutes  efpeces ,  des  vins, 
du  hn ,  des  pâturages  excellents,  des  fruits ,  &  enfin  tout  ce  que 
les  plus  riches  contrées  peuvent  produire  pour  la  vie  de  l'homme. 
Le  fel  ,  le  bois ,  les  laines ,  le  miel ,  le  poifTon  ,  le  gibier ,  s'y 
trèuvoient  en  quantité.  Le  Duc  Jean  le  Roux  ,  charmé  de  l'agré- 
ment de  ce  lieu ,  y  fit  bâtir  le  fort  château  de  Sucinio ,  où  lui 
&  fes  fuccefleurs  faifoient  fouvent  leur  réfidcnce.  La  nature  du 
fol  n'ell  pas  changée  ,  &  on  en  retireroit  les  mêmes  avantages 
fi  on  employoit  les  mêmes  moyens  qu'autrefois.  Cette  prefqu'ifle 
contient  quatorze  Heues  de  circonférence  ,  dont  neuf  lieues  trois 
quarts  de  côtes  de  mer  ,  y  compris  le  Morbihan.  Le  fiilon  qui 
l'attache  à  la  terre  ferme  du  côté  de  l'Ouefl-,  a  un  tiers  de  lieue 
de  largeur  :  il  efl:  à  l'entrée  du  havre  du  Morbihan ,  à  l'embou- 
chure des  rivières  de  Vannes  &  d' Aurai,  qui  portent  des  vaif- 
féaux  de  moyenne  grandeur.  La  prefqu'ifle  de  Rhuis  renferme 
trois  Paroifl^es ,  une  Abbaye ,  &  plufieurs  maifons  de  remarque. 
(  Voyez  la  carte    de  Bretagne  par  l'auteur  de  ce  Di6lionnaire.  ) 

Le  peuple  de  Sarzeau  elt  bon  &  doux  contre  l'ordinaire  des 
peuples  fitués  fur  la  mer  ;  mais ,  s'il  n'a  pas  le  défaut  de  ces 
derniers ,  il  n'en  a  point  auffi  les  qualités  eflimables  &"  utiles  :  il 
manque  d'induftne  dans  la  fituation  la  plus  avantageufe  pour  le 
commerce,  foit  intérieur,  foit  extérieur  j  il  vit  dans  l'mdigenee 
&  le  repos. 

Le  château  de  Sucinio,  place  forte,  qui  appartient  à  M.  le 
Duc  de  la  Vahere,  a  un  parc  d'une  étendue  confidérable  & 
fermé  de  murs  :  il  efl:  fitué  à  une  petite  lieue  au  Sud-Sud-Efl: 
de  Sarzeau ,  à  peu  dediftance  de  U  nier.  Le  Duc  Jean  le  Roux 

détruifit 


SAR=  SAV  401 

détruifît ,  pour  le  bâtir,  l'an  1249  ,  un  ancien  Monaftere  de  ViÛq 
de  Rhuis.  Cet  attentat  ne  fit  qu'augmenter  la  haine  du  Clergé  ; 
mais  ce  Prince,  éclairé,   fe   mocquoit  de   Ton  refîentiment. 

Le  Couvent  des  Trinitaires  de  Sarzeau  fut  fondé,  en  1341  , 
par  Jean  IV,  Comte  de' Montfort ,  pour  quatre  Religieux  de 
la  Merci,  à  condition  qu'ils  feroient  le  fervice  divin  dans  une 
Chapelle  qu'il  leur  fit  conllruire.  Par  lettres  données  au  châ- 
teau du  Sucinio,  au  mois  d'Avril  1341  ,  il  afligna  ,  pour  la 
fubfiftance  des  Moines ,  &  des  pauvres  malades  qu'ils  dévoient 
recevoir  chez  eux  comme  dans  un  Hôpital  ,  deux  cents  livres 
de  rente ,  à  prendre  fur  les  domaines  de  la  prefqu'ifle  de  Rhuis. 

En  1380,  le  château  de  Sucinio  étoit  gardé  par  Jean  de 
Maleftroit.  Une  flotte  Efpagnole ,  après  avoir  fait  des  tentatives 
■inutiles  fur  Saint-Nazaire  &  le  Croific  ,  alla  débarquer  des  troupes 
dans  la  prefqu'ifle  de  Rhuis  ;  mais  elle  ne  réuflit  pas  mieux  dans 
cette  expédition  que  dans  les  deux  autres.  Ses  troupes  furent 
taillées  en  pièces  par  Jean  de  Maleftroit ,  qui  étoit  forti  de  fa 
place  avec  fa  garnifon  ;  Se  l'Amiral  Efpagnol  ne  s'avifa  plus 
de  faire  des  defcentes  en  Bretagne.  En  1458,  le  Duc  François 
H  fonda  le  Monaftere  des  Récollets  de  Bernon ,  au  bord  du 
Morbihan  ,  à  trois  quarts  de  Ueue  au  Nord-Oueil:  de  Sarzeau  &: 
dans  fon  territoire.  Il  y  avoir,  en  1488,  une  forêt  très-fpacieufe 
dans  ce  canton,  &  une  Maîtrife  des  Eaux  &  Forets.  En  1420, 
le  territoire  renFermoit  plufieurs  maifons  nobles  j  fçavoir  :  Callac, 
à  Olivier  du  Quirifec  ;  le  manoir  de  Caden,  à  Jean  Joczon  ;  le 
manoir  duTreff,  à  N.  Runezonj  le  manoir  de  Langoëdic,  à  Olivier 
du  Bois  de  la  Salle  ;  le  parc  de  Bernon,  à  Gilles  Saufon  ou  Semfon: 
Ker-léan,  le  Treft  ,  Ker-nabru  ,  Ker-befton  ,  Ker-inis,  Ker-aluel, 
Cadena  ,  Coètquenaud ,  l'Hermitage  ,  Ker-olivier,  &  Trufcat, 
font  plus  modernes. 

SAVENAI  ;  fur  une  hauteur  ;'  à  7  Keues  à  l'Oueft-Nord- 
Oueft  de  Nantes,  fon  Evêché  &  fon  reflort  ;  à  19  lieues  de 
Rennes  j  &  à  3  lieues  de  Pontchâteau  ,  fa  Subdélégation.  On  y 
compte  2700  communiants,  y  compris  ceux  de  Boue,  fa  trêve; 
la  Cure  ell  à  l'Ordinaire.  Savenai  ell  une  petite  ville ,  mal  conf- 
truite;  mais  elle  a  l'avantage  de  la  plus  belle  fituation  ik  d'uri 
magnifique  point  de  vue  :  elle  eil  fur-tout  célèbre  par  fes  foires 
de  bclliaux ,  les  plus  conlidérables  de  la  province.  On  y  remarque 
deux  Communautés  ReHgicufcs  ,  l'une  de  Cordeliers,  l'autre  de 
Cordelières  ;  un  Hôpital  ;  luic  Brigade  de  Maréchauffée  ;  ua 
Tome  IF.  E  3 


401  S  A  V     ■ 

Bureau  de  Pofte  aux  lettres  ;  &  une  Pofte  aux  chevaux ,  à  l'endroit 
nommé  le  Moire.  Le  territoire  renferme  des  terres  en  labeur, 
d'excellentes  prairies,  &  des  landes  beaucoup  trop  étendues,  qui 
paroiffent  mériter  les  foins  du  cultivateur.  Il  eft  difficile  d'excuier 
les  habitants  de  ce  canton,  fi  bien  fitué  pour  l'exportation  de 
leurs  denrées.  Outre  le  grand  chemin  de  Nantes  à  Vannes ,  & 
l'embranchement  de  cette  route  qui  pafTe  par  Savenai  pour  fe 
rendre  à  Guérande ,  ils  ont  encore  la  voie  de  la  mer ,  de  laquelle 
ils  peuvent  le  fervir  pour  commejcer  avec  toutes  les  villes  ma- 
ritimes ;  mais ,  à  chaque  pas  que  l'on  fait  dans  cette  province ,  on 
trouve  des  preuves  de  l'inconféquence ,  de  l'indolence  ,  du  dé-^ 
faut  d'induftrie  de  nos  concitoyens.  Si,  cependant,  les  Savenais, 
méprifant  le  commerce  de  la  mer ,  vouloient  s'en  tenir  à  celui 
des  beiliaux  ,  qu'ils  font  avec  tant  de  fuccès  j  le  meilleur  moyen  de 
l'augmenter ,  feroit  de  convertir  leurs  terres  incultes  ,  foit  en  terres 
labourables ,  qui  pendant  le  repos  deviennent  de  bons  pâtu- 
rages ,  foit  en  prairies  naturelles  ou  artificielles.  C'eft  un  confeil 
difté  par  le  patriotifme,  &  les  intérefles  doivent  en  fentir  tout 
l'avantage.  Il  fe  tient  un  marché  tous  les  mercredis   à   Savenai. 

Par  lettres  du  17  Mai  1419  ,  le  Duc  Jean  V  fonda  les  Cordeliers 
de  Savenai ,  du  confentement  du  Curé  du  lieu  &  du  Chapitre  de 
Nantes ,  le  Siège  épifcopal  vacant.  Dans  l'Eglife  de  ce  Couvent , 
au  côté  droit  de  l'autel,  eft  le  tombeau  de  Gui  de  Rieux ,  Vi- 
comte de  Donges ,  Baron  de  la  Roche  en  Savenai,  l'an  1637  : 
il  eft  repréfenté ,  fur  fon  tombeau ,  en  manteau  ducal.  Au  mois 
de  Novembre  1435  ,  Gilles  de  Retz  vendit  la  Seigneurie  de  Sa- 
venai à  Hardouin  de  Beuil ,  Evêque  d'Angers.  L'Hôpital  de  cette 
ville  fur  fondé,  le  12  Mai  1450,  fous  le  nom  à! Hôpital  de. 
Saint' Armel  ^  de  Saint-Fiacre^  &  de  S  aint- Antoine  ^  par  Jean  de 
Châteaugiron ,  Curé  de  l'endroit.  L'an  1550,  la  Communauté 
de  ville  de  Nantes  fit  intimer  aux  habitants  de  Savenai  de  faire 
régir  &  adminiftrer  cet  Hôpital  par  des  CommifTaires  laïques, 
nommés  par  le  Général  de  la  Paroiffe ,  conformément  à  l'Arrêt 
du  Parlement  du  15  Oftobre  1548.  Cette  maifon ,  autorifée 
par  Arrêt  du  Confeil,  eit  aujourd'hui  dirigée  par  le  Refteur, 
le  Sénéchal ,  &  le  Procureur-fifcal  de  Savenai.  Les  Cordelières 
ont  été  fondées  l'an.... 

La  Jurifdiftion  de  Savenai  eft  une  Vicomte ,  qu'on  dit  être  la 
plus  ancienne  de  la  province  :  elle  a  ,  fous  fa  mouvance,  plufieurs 
fiefs  &  arrieres-fiefs  ,  &  les  audiences  des  Jurifdi8:ions  intérieures 
fe  tiennent   après   la   levée  du  Siège  fupérieur.  La  prifon,   qui 


s  A  V  =S  A  U  405 

eft  très-forte ,  fert  à  tous  les  Seigneurs  du  dillrift.  La  Vicomte 
de  Donges  ,  haute-JufHce  ,  à  M.  le  Vicomte  de  Querhoent ,  qui 
polTede  aufli  la  haute-Juftice  de  la  Roche  en  Savenai  ;  la  Haie 
de  Lavau  ,  haute-JulHce  ,  à  M.  le  Préiident  de  Runefau  j  Coesbi, 
moyenne-Juftice  ,  à  M.  de  Chevigné.  En  1400,  le  château  du 
Maz  appartenoit  à  Jean  de  Montauban  j  la  Babinaye,  à  Pierre 
de  Moelhoël  -,   &  Meneul ,  à  Jean  du  Locaux. 

SAULNIERE  ;  à  5  lieues  au  Sud-Sud-Eil  de  Rennes ,  (on 
Evêché  ,  fa  Subdélégation,  &  fon  reffort.  On  y  compte  650 
communiants  ,  y  compris  ceux  de  la  BolTe ,  fa  fuccurfale  :  la 
Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire,  couvert  d'arbres  &  buif- 
fons ,  renferme  des  terres  labourables ,  des  prairies  ,  &  des 
landes  j  les  habitants  font  du  cidre.  En  1068,  le  Seigneur  de 
Châteaugiron ,  en  confidération  de  fa  fille  qui  s'étoit  fait  Re- 
ligieufe  à  l'Abbaye  de  Samt-Georges  de  Rennes,  donna  à  cette 
Maifon  la  cjuatrieme  partie  des  dîmes  &  du  terrage  de  la  Pa- 
roiffe  de  Saulniere,  avec  une  maifon  qu'il  avoit  dans  le  bourg  , 
pour  y  retirer  ces  dîmes ,  &  en  même  temps  fervir  de  loge- 
ment a  l'AbbefTe  &  aux  Religieufes  lorfqu'elles  voudroient  allei» 
fe  promener  à  Saulniere.  Les  Religieufes  de  ce  temps  jouif- 
foient  d'une  grande  hbertéj  liberté  peut-être  aufli  funelle  à  leurs 
mœurs  qu'à  leur  réputation.  La  médifance ,  ou ,  fi  l'on  veut ,  la 
calomnie  ,  fe  déchaîna  contre  elles.  Les  Conciles  &  les  Evêques , 
voulant  empêcher  un  fcandaie  nuifible  à  la  religion  ,  donnèrent 
à  ces  Religieufes  des  avis  fages;  mais  l'amour  de  la  liberté,  &, 
peut-être  ,  des  plaifirs ,  faifoient  bientôt  oublier  des  confeils , 
falutaires  à  la  vérité  ,  mais  qui  faifoient  un  devoir  de  la  péni- 
tence. Enfin,  le  mal  alla  fi  loin,  qu'en  1527,  Yves  de  Mayeux, 
Evêque  de  Rennes ,  ne  pouvant  plus  tolérer  ces  abus ,  eut  recours 
à  l'autorité  du  Roi  pour  allreindre  à  la  clôture  les  Religieufes 
de  Saint-Georges. 

SAUTRON  ;  fur  la  route  de  Nantes  à  Vannes ,  à  1  lieues  un 
quart  à  l'Oueft-Nord-Oueil:  de  Nantes,  fon  Evêché,  fa  Subdé- 
légation ,  &  fon  reflbrt  ^  &  à  2 1  lieues  de  Rennes.  On  y  compte 
500  communiants  :  la  Cure  ell  préfentée  par  le  Chapitre.  Le 
territoire ,  couvert  d'arbres  &  buiflôns  ,  renferme  des  terres  en 
labeur ,  des  vignes  ,  la  forêt  de  Sautron  qui  contient  environ 
deux  cents  arpents  en  futaie  &  taillis  ,  &  qui  appartient  à 
l'Evêché  de  Naïuesi  quelques  autres  petits  taillis,  &  beaucoup 


404  s  A  U  =  s  E  G 

de  landes  qui  paroîfTent  mériter  les  foins  du  cultivateur.  Quelques 
particuliers  ont  commencé  à  défricher ,  mais  avec  û  peu  d'aftivité 
que  les  progrès  font  prefque  nuls.  La  Chapelle  de  N.  D.  de 
Bon-garant  ,  qui  fe  voit  auprès  de  la  forêt  de  Sautron ,  fut 
bâtie  par  le  Duc  François  II,  bénie  &  dédiée,  le  6  Juin  1464, 
par  le  Coadjuteur  de  Rennes  ;  elle  fut  d'abord  fréquentée  par 
un  grand  nombre  de  Pèlerins  de  la  province  ,  &  le  Duc  y 
faifoit  fouvent  dire  la  MefTe ,  lorfqu'il  alloit  à  la  chaiTe  dans  la 
forêt  de  Sautron ,  alors  très-étendue. 

SCAER  ;  fur  un  coteau ,  fur  la  route  de  Rofporden  au  Faouet, 
&  fur  celle  de  Carhaix  à  Rofporden  ;  à  8  lieues  à  l'Eil:  de  Quim- 
per ,  fon  Evêché  j  à  3  2  lieues  de  Rennes  ;  &  à  5  lieues  un 
quart  de  Concarneau  ,  fa  Subdélégation  &  fon  refîbrt.  Cette  Pa- 
roiffe  compte  3800  communiants  :  la  Cure  eft  préfentée  par  un 
Chanoine  de  l'Eghfe  Cathédrale  de  Quimper.  Le  territoire  ren- 
ferme la  forêt  de  Coaloch  ,  qui  contient  environ  fix  cents  ar- 
pents de  terrein  ,  planté  en  taillis  &  futaie  ;  elle  appartient  au 
Roi  :  au  milieu  font  les  ruines  du  château  de  Coaloch  ,  avec 
les  débris  d'un  ancien  mur  de  clôture  qui  environnoit  cette  forêt 
au  Sud  &  à  l'Eft  -,  l'un  des  bras  de  la  rivière  d'Aven  la  cernoit 
de  l'autre  côté.  Il  y  a  apparence  qu'elle  fervoit  de  parc  au  châ- 
teau ,  puifqu'elle  étoit  entourée  de  murs  ,  &  que  les  Ducs  y 
faifoient  quelquefois  leur  féjour.  Cette  Paroiffe  ell  très-étendue. 
Le  fol  produit  des  grains ,  du  cidre  ,  &  du  foin ,  &  pourroit 
être  plus  exaftement  cultivé.  Dans  les  environs  du  village  du 
Coudri ,  dans  quelques  pièces  de  terre ,  on  trouve  des  pierres 
métalhques  qui  repréfentent  des  croix  en  fautoir ,  des  croix  de 
Saint- André,  qui  font  belles  &  curieufes.  Ker-vegat  &  Trevalot 
forment  une  haute-Juftice  -,  elles  appartiennent  à  M.  de  Coupi- 
gny  :  les  Salles,  Ker-fac  ,  le  Rofoche ,  Ker-goat,  &  la  Chapelle 
de  Saint-Guenolé ,  font  des  maifons  nobles. 

SEGLIEN  j  à  1 3  lieues  au  Nord-Oueft  de  Vannes ,  fon  Evê- 
ché j  à  23  lieues  un  quart  de  Rennes;  &  à  i  lieue  de  Gue- 
mené ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  reffortit  à  Ploermel ,  & 
compte  2000  communiants ,  y  compris  ceux  de  Lefcharlins ,  fa 
trêve  :  la  Cure  efl  à  l'alternative.  Le  territoire ,  couvert  d'arbres 
&  buiffons ,  offre  à  la  vue  des  monticules ,  des  vallons ,  des  terres 
bien  cultivées ,  des  arbres ,  la  fource  de  la  rivière  de  Sare  qui 
va  tomber  dans  celle  de   Blavet ,  &c  beaucoup  de   landes  au 


SEGr=SEN  '405 

Nord-Kord-Eft  de  fon  bourg.  Il  fe  tient  tous  les  ans ,  en  cette 
ParoiiTe  ,  deux  foires  remarquables  par  la  grande  quantité  des 
beiHaux  qui  s'y  vendent. 

Le  château  de  Coètanfao  ,  maifon  feigneuriale  du  lieu  ,  ap- 
partenoit ,  en  1420  ,  à  Pierre  de  Querhoent  ^  &  ,  en  1616  ,  à  Sé- 
baltien  de  Rofmadec  ,  Marquis  de  Molac  ,  à  caufe  de  la  Dame 
Renée  de  Querhoent ,  fbn  époufe  :  cette  Terre  forme  ,  avec  celles 
de  Crenihuel ,  de  Cocodu  ,  &  de  Langouelan  ,  une  haute-Juilice 
qui  appartient  à  M.  du  Rumain  :  le  manoir  de  Ker-madiou  ap- 
partenoit  ,  en  1420,  à  N.  de  Maleftroit.  L'AbbefTe  de  Saint- 
Georges  y  pofledoit  alors  la  métairie  de  l'AbbefTe.  Treguher ,  à 
Jean  Mouraud  j  &  le  Geroufei ,  à  Pierre  Mouraud. 

SÉNÉ;  à  I  lieue  au  Sud-Sud-Eft  de  Vannes,  fon  Evêché , 
fa  Subdélégation  ,  &  fon  reffort  ;  &  à  21  lieues  de  Rennes.  On 
y  compte  1500  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le 
territoire  forme  une  prefqu'ifle  entourée  par  le  Morbihan  j  il 
renferme  des  terres  en  labeur ,  des  marais  faiants ,  &  des  landes 
qui  font  au  Nord  de  fon  bourg.  Les  femmes  font  fort  laborieufes, 
&  les  hommes  prefque  tous  marins  ou  pêcheurs.  Il  fe  tient  plu- 
fîeurs  foires  par  an  dans  cette  ParoifTe.  La  Baronnie  de  Ker-aër, 
avec  haute  -  Juftice ,  relevé  du  Roi  ,  &  a  droit  de  Menée  au 
Préfidial  de  Vannes.  Cette  Seigneurie  ell  une  concefTion  des 
Ducs ,  qui  en  firent  un  fief  de  Chevalerie  ,  dont  la  mouvance 
demeura  au  Duché  ,  avec  l'obligation  de  fournir  au  Prmce  un 
ChevaHer  en  temps  de  guerre.  La  Menée ,  dans  fon  origine  , 
n'étoit  autre  chofe  que  l'obhgation  que  s'impofoit  celui  qui  rece- 
voit  une  Seigneurie  féodée ,  de  fe  trouver,  avec  tous  les  vaf- 
faux  ,  auprès  du  Seigneur ,  lorfqu'il  l'exigeroit  ,  fous  certaines 
peines  contre  les  délinquants.  Cette  obligation  de  mener  fes  val-' 
faux  à  fon  Seigneur,  d'oii  eft  venu  le  mot  de  Menée,  ne  fe 
pratiqua  d'abord  que  pour  le  fervice  militaire ,  &  ce  ne  fut 
que  long-temps  après  qu'elle  fut  traduite  à  la  JuiHce.  Les  grands 
vaflaux  ,  ayant  obtenu  le  droit  de  tenir  trois  à  quatre  fois  par  an 
leurs  plaids  généraux ,  ou  grands  jours  de  leurs  jurifdi^lions ,  ils 
obligèrent  leurs  vaflaux  de  s'y  trouver  &  d'y  mener  leurs  hom- 
mes ,  avec  défenfe  à  quiconque  de  s'en  abfcnter  fans  congé  du 
Seigneur  fupérieur.  En  1530,  les  maifons  nobles  de  Séné  étoient  : 
le  manoir  de  Quentifac  ,  au  Sieur  de  Coethigat  j  le  manoir  de 
Surzon  ,  à  Bertrand  Curfo  ou  Carlot  ;  le  Maydo,  au  Sicur  de 
Tredudai  ;  Ker-abraham  ,   à  Alain   de   Boyat  ;  la    métairie    de 


4oé  S  E  N  =  S  E  R 

Talleguerec ,  au  Sieur  de  Bodruel  ;  &  Boifdihel ,  à  N....  Pierre 
le  Nevé  ,  Re6leur  de  la  Paroifle  de  Séné ,  mourut  en  odeur  de 
fainteté ,  dans  cette  Paroiffe,  le  23   Novembre  1749. 

SENSj  à  5  lieues  &  demie  au  Nord  -  Nord  -  Eft  de  Rennes, 
fon  Evêché  ;  &  à  3:  lieues  d'Antrain ,  fa  Subdélégation.  Cette 
Paroiffe  reffortit  à  Bazonges ,  &  compte  900  communiants  :  la 
Cure  eft  préfentée  par  l'Abbé  de  Rilié.  Le  territoire  offre  à  la 
vue  des  terres  en  labeur  de  bonne  qualité ,  des  prairies  ,  &  des 
landes.  La  Terre  &  Seigneurie  de  Sens  a  titre  de  Baronnie  ;  elle 
appartenoit,  en  1364  ,  à  Bertrand  du  Guefclin  :  elle  a  une  haute- 
Juffice  ,  6d  appartient  aujourd'hui  à  M.  le  Marquis  de  Saint- Brice. 
En  1427,  la  Bouefai  étoit  à  Guillaume  de  Champeigné  j  aujour- 
d'hui ,  avec  haute-Juftice  ,  à  M.  de  Montboucher  :  la  Gomeriaye, 
à  Rolland  Sebille  ,  fils  de  la  fœur  naturelle  de  Bertrand  du 
Guefclin ,  Connétable  de  France  -,  la  Moulneraye ,  à  Jean  Ri- 
chard j  &  la  métairie  de  la  Cheverie  ,  aux  Seigneur  &c  Dame 
de  Sens. 

SERENT  ;  dans  un  fond  ;  à  6  lieues  au  Nord-Eft  de  Vannes, 
fon  Evêché  j  à  1 5  lieues  de  Rennes  ;  &  à  2  Heues  de  Maleftroit, 
fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  reffortit  à  Ploermel ,  &  compte 
^000  communiants ,  y  compris  ceux  de  Lizio  ,  de  Roo-Saint- 
André ,  &  de  Saint-Guiomart  ou  Saint- Maurice ,  (es  trêves  :  la 
Cure  eff  à  l'alternative.  Le  territoire  ,  pays  couvert  8c  d'une 
fuperficie  inégale ,  renferme  des  terres  en  labeur  de  bonne  qua- 
lité ,  des  prairies ,  &  des  landes. 

La  Terre  de  Serent  ou  de  la  Chapelle  en  Serent,  haute, 
lïioyenne ,  &  baffe-Juftice ,  a  été  érigée  en  Baronnie  Bannerette , 
en  13  18,  par  Jean  III ,  Duc  de  Bretagne  ,en  faveur  d'Ollivier  II , 
Sire  de  la  Chapelle  ,  Maréchal  de  Bretagne.  Gui  ou  Guion  ,  Sire  de 
la  Chapelle ,  Baron  de  Serent  &  de  Molac ,  tué  au  iiege  de 
Saint-James  de  Beuvron  ,  en  1428  ,  fut  Chambellan  de  Bretagne, 
&  Gouverneur  de  Pierre  de  Bretagne  ,  fils  du  Duc. 

Le  Baron  de  Serent  eff  Seigneur  fupérieur  &  prééminencier 
de  la  Paroiffe  de  Serent  &  de  fes  trêves»  Cette  Terre  eff  le 
berceau  de  l'ayeul  de  Jean  de  Serent,  qui  étoit  à  la  bataille 
des  Trente  en  1350:  elle  paffa  dans  la  maifon  de  la  Chapelle , 
par  le  mariage  d'Ifabeau  de  Serent  ,  héritière  principale  & 
noble  de  la  branche  aînée  de  Serent  ,  qui  époufa  Ollivier ,  Sire 
de  la  Chapelle ,  6c  refta  dans  la  maifon  de  la  Chapelle  jufqu'ea 


s  E  R  407 

1505,  quelle  pafla  dans  celle  de  Rofmadec  ,  par  l'alliance  de 
Jean  III,  Sire  de  Rofmadec,  qui  époufa  Jeanne  de  la  Chapelle, 
héritière  principale  &  noble  delà  Chapelle,  Serent,  &  Molac; 
ce  mariage  fut  célébré  dans  la  Chapelle  du  château  de  Biois, 
en  préfence  de  Louis  XII  ôc  de  la  Reine  Anne  ,  qui  avoir 
fait  ce  mariage.  La  branche  aînée  des  Sires  de  Rofmadec 
s'étant  éteinte  dans  la  perfonne  de  Sébaftien  III  de  Rofmadec, 
Commandant  en  Bretagne,  &  mort  fans  poilérité  l'an  1667, 
la  fucceflion  pafTa  à  Marianne  de  Rofmadec,  fa  fœur  aînée, 
qui  avoir  époufé,  en  1661  ,  René,  Sire  le  Sénéchal,  Vicomte 
de  Carcado ,  mort  des  blefïures  qu'il  reçut  à  la  bataille  de 
Senef  le  11  Août  1674.  Cette  Baronnie  eft  pofTédée  préfen- 
tement  par  M.  Corentin-Jofeph  le  Sénéchal-Carcado  ,  Marquis 
de  Molac  ,  Maréchal  des  Camps  &  Armées  du  Roi ,  Comman- 
deur de  l'Ordre  de  Saint-Louis  ,  Gouverneur  de  Quimper, 
petit-fils  de  René ,  Vicomte  de  Carcado  ,  &  de  Marianne  de 
Rofmadec  ,    &:c. 

Le  Seigneur  ,  Baron  ^e  Serent ,  a  le  droit  de  faire  courir 
une  drague  ,  le  jour  de  Saint  Pierre ,  patron  de  Serent  ;  &  ,  le 
Dimanche  fuivant,  cette  drague,  aux  armes  du  Seigneur,  eft 
portée  par  douze  perfonnes  ou  environ ,  qui  font  trois  fois  le 
tour  du  cimetière,  après  la  Grand'MelTe  &  les  Vêpres.  Le  jour 
de  Saint  Pierre,  ainli  que  le  Dimanche  fuivant  ,  le  vaflal  à 
qui  eft  le  rang  de  la  faire  courir ,  a  le  titre  de  Duc  :  il  fe  met 
dans  le  banc  du  Seigneur,  pendant  l'Office,  &  fuit  immédia- 
tement le  Refteur  à  la  procefTion  ,  &  précède  les  Juges  j  il  doit 
être  botté  &  éperonnée ,  avec  un  manteau.  Il  précède  aufïï  la 
drague,  fur  un  cheval  très-bien  caparaçonné,  accompagné  du- 
Sergent  ;  &  ,  à  chaque  tour ,  devant  la  principale  paflée  du  ci- 
metière, le  Sergent  dit  à  haute  &  intelHgible  voix,  trois  fois: 
gric  à  Molac ,  je  garde  qui  voudra  de  la  Guibre  qui  va  cou" 
rir  :  gric  à  Molac  ,  fe  garde  qui  voudra ,  &C.  Le  cri  ou  devife 
des  armes  de  Molac,  efl  En  bon  efpoir  gric  à  Molac.  Ce  droit 
efl  fi  ancien  que  l'on  n'en  connoît  point  l'origine  ni  l'étymolo- 
gie  exafte  ;  mais ,  par  tradition ,  on  dit  feulement  que ,  vers  le 
dixième  fiecle ,  il  fe  trouva  une  bête  énorme ,  qui  Arailembla- 
blement  étoit  une  hyenne  ,  qui  dévoroit  les  femmes ,  enfants , 
&  pâtres  :  elle  fe  retiroit  dans  le  bois  d'une  Terre  nommée 
la  Salle ,  fituée  près  le  bourg  de  Serent.  On  la  voyoit  fouvenc 
aller  boire  dans  l'étang  de  la  Salle.  Le  Seigneur  de  Serent  ai- 
fembla  fes  vaffaux,  nobles  &  autres,  pour  mire  la  chafTc  à  cet 


4o8  S  E  R 

animal ,  &  parvint  à  la  tuer  lui-même.  Ses  vaflaux  de  la  Frairie 
du  bourg  de  Serent ,  en  reconnoiffance ,  s'obligèrent,  à  tour  & 
rang,  de  faire  courir  une  drague,  tous  les  ans,  le  jour  de 
Saint  Pierre  &  le  Dimanche  fuivant  ;  &  le  Seigneur  de  la  Salle 
s'obligea  de  fournir  un  boiffeau  de  farine  de  feigle  ,  (  ce  qui  fait  la 
valeur  d'une  pochée  ,  )  le  baffin  &  le  bois  pour  faire  cuire  la 
bouillie  de  cette  farine,  laquelle  bouillie  fe  fait  fur  un  rocher, 
près  la  maifon  noble  de  la  Salle ,  qui  eft  l'endroit  où  la  tradition 
dit  que  la  bête  fut  tuée  ;  ce  qui  fe  pratique  depuis ,  tous  les  pre- 
miers jours  de  Mai,  &  fe  diflribue  aux  pauvres,  vers  les  dix 
heures  du  matin ,  en  préfence  des  Juges  en  robes.  Ceft  le  vaffal 
qui  a  fait  les  fondions  de  Duc ,  à  la  Saint  Pierre  précédente , 
qui  fait  cuire  cette  bouiUie;  enfuite  il  appelle  à  haute  voix, 
par  trois  fois,  celui  qui  doit  faire  le  droit  l'année  fuivante,  & 
chez  lequel  il  a  porté  la  tête  de  la  drague ,  le  lundi  de  Pâques 
précédent ,  &  lui  remet  le  bâton  qui  lui  a  fervi  à  démêler  la 
bouillie  en  la  cuifant.  Si  la  perfonne  appellée  ne  fe  trouve  pas 
fur  l'endroit ,  il  lui  envoie  ce  bâton  chez  lui  par  le  Sergent , 
auquel  il  n'ell  dû  pour  cela  aucune  rétribution. 

Les  terres  nobles  de  la  Paroiffe  de  Serent ,  &  les  Jurifdiftions 
qui  s'y  exercent  dans  l'Auditoire  de  la  Baronnie  de  Serent, 
font  :  la  Terre  &  Seigneurie  de  Tromeur ,  haute ,  moyenne  & 
baffe- Juftice  ;  cette  Terre  paroît  avoir  été ,  dans  fon  principe  ;, 
le  chef-heu  des  Seigneurs  de  Serent  :  elle  a  fon  banc  dans  le 
chanceau  de  l'Eghfe  de  la  Paroiffe  ,  &  a  fon  enfeu  avec  xxn 
tombeau  de  marbre  blanc ,  élevé  de  trois  pieds  ,  fur  lequel  on 
voit  un  perfonnage  ,  &  armé  des  écuffons  à  l'entour  ,  qui  font 
trois  qumte^-feuilles  j  fur  &  autour  de  la  table ,  eft  écrit ,  en  lettres 
gothiques  ,  depuis  plus  de  trois  cents  ans  :  il  y  a  quen  cette. 
Eglife ,  chœur ,  &  chanceau ,  font  enterrés  les  Seigneurs  de  Tro- 
meur ,  ainfî  l'a  bien  voulu  le  monde  :  Dieu  veuille  pardonner  aux 
âmes  dont  les  corps  font  ici  enterrés.  Ce  tombeau  exiftoit  dès  1300^ 
les  trois  quintes  -  feuilles  qui  font  dans  les  écuffons  fur  le  tom- 
beau ,  étant  les  armes  de  la  maifon  de  Serent ,  font  préfumer 
que  c'eft  un  Seigneur  de  cette  maifon  dont  la  repréfentation 
eft  fur  ce  tombeau.  Cette  Terre  fut  donnée  en  Juveigneurie  à 
N.  de  Serent,  aïeul  d'Orfroife  de  Serent ,  qui  époufa  ,  vers  l'an 
1436,  Henri  Hingant,  dont  l'héritière  époufa  Jean  d'Avaugour  : 
elle  refta  dans  cette  maifon  jufques  vers  l'an  1630,  que  Sébaf- 
tien  de  Francheville  époufa  N...  d'Avaugour  ;  &  ,  vers  Fan 
1664,    Marin   de    Colonel  »  Seigneur  du   Bot-Langon  ,  époufa 

Thérefe 


s  E  R  4^9 

Thérefe  de  Francheville  ;  depuis  cette  Terre  eft  dans  cette 
maifon. 

La  Terre  &  Seigneurie  de  Bovrel,  haute  ,  moyenne  &  bafle- 
JulHce  :  cette  Terre  a  été  polTédée ,  en  1400  &:  1500,  par  des 
cadets  de  la  maifon  de  Rofmadeci  elle  a  pafTé  depuis  dans 
celle  de  Saint-Maure,  &  elle  étoit  polTédée  ,  en  1640,  par 
Pierre  l'Ollivier ,  Seigneur  de  Saint-Maure  &  de  Lochrift  ,  Ôcc» 
&  préfentement  elle  appartient  à  M.  de  Ligouhier ,  Marquis  de 
Saint-Pern  ,  qui  a  époulé  Mademoifelle  de  Saint- Maure. 

La  Terre  &  Seigneurie  de  Brignac  ,  haute  ,  moyenne  &  bafTc- 
Juftice  ;  elle  étoit  pofTédée  ,  en  1 5 1 5  ,  par  Julien  de  Brignac  , 
Seigneur  dudit  lieu  j  en  1601  ,  par  Dame  Marie  de  Brignac, 
Dame  de  Kerfily ,  &  depuis  elle  pafla  dans  la  maifon  de  Rof- 
madcG ,  &  a  été  pofTédée  par  Sébaftien  de  Rofmadec  ,  Evéque 
de  Vannes,  &  elle  fut  acquife  par  N...  de  Talhouet  de  Ker- 
avion  ,  dans  la  maifon  duquel  elle  ei\  préfentement,  &  ell  pof- 
fédée  par  M.  l'Abbé  de  Brignac  ,  Confeiller  honoraire  au  Par- 
lement de  Bretagne. 

La  Terre  &  Seigneurie  de  la  Ville-Reix  6c  du  Rufcouart, 
haute,  moyenne  ik  bafle-Juftice  :  elle  étoit  pofTédée,  en  1460, 
par  Guillaume  des  Forges  -,  en  1 660 ,  par  Jean  des  Prés  de  la 
Bourdonnaye  :  elle  appartient  préfentement  à  M.  l'Abbé  de 
Brignac. 

La  Terre  &  fîef  de  la  Salle ,  haute ,  moyenne  &  bafTe-Juf- 
tice  :  cette  terre  efl  encore  un  démembrement  de  la  Baronnie 
de  Serent ,  donnée  en  Juveigneurie  ,  par  N.  de  Serent  ,  père 
d'Ifabeau  de  Serent ,  à  N.  de  Serent ,  fon  cadet ,  dont  les 
defcendants  l'ont  toujours  pofTédée  depuis ,  c'eft-à-dire ,  Mademoi- 
felle de  Serent  ,  à  qui  elle  appartient  ,  l'a  vendue  à  M.  de 
Guerri,  Confeiller  au  Parlement  de  Bretagne  j  mais  elle  s'en  eft 
réfervée  la  jouifTance  pendant  fa  vie. 

La  Terre  &  Seigneurie  de  Caftiller ,  haute  ,  moyenne  & 
bafïe-Juflice  ,  étoit  pofTédée  ,  en  1430,  par  Jean  de  Malcflroit; 
en  1554,  par  Sufanne  Pechart ,  Dame  de  Caflelan-la-Salle  j&,  en 

1602  ,  par  Pierre  Garault  :  elle  appartient  aujourd'hui  à  M.  de 
Tregarot ,  Confeiller. 

La  Terre  &  Seigneurie  de  la  Chenaye-Morix ,  moyenneJuf- 
tlce  :  elle  appartenoit  ,    en   1 400 ,  à  Jean  de  Tregaranteuc ,  en 

1603  ,  à  Claude  de  Quelin  :  elle  efl  aujourd'hui  à  M.  Boniii 
de   la  Villebouquai ,  Confeiller  au  Parlement  de  Bretagne. 

La  Terre  &  Seigneurie  de  Bohurel ,  moyenne-Jufhce  :  elle 
Tome  IF.  .  F  3 


4ib  S  E  R 

étoit  pofTédée,  en  13^0,  par  Jean  du  Bohurel  ;  en  1604,  paf 
Jean  de  Luxembourg  &  Dame  Raoullette  Cado ,  fon  époufe  j 
&  préientement,  par  M.  le  Goesbe,  Sieur  de  Reron,  Capitaine 
d'Infanterie,  &  Chevalier  de  l'Ordre  Royal  èc  Militaire  de 
Saint-Louis. 

La  Terre  &  Seigneurie  de  la  Ville-Guihart ,  moyenne-Juftice  ; 
en  1560,  à  N.  de  Begaffon,  aujourd'hui,  à  M.  Grigniard  , 
Chevalier  de  Champfavoy,  du  chef  de  Dame  Mathurine-Sébaf» 
tienne  de  BegafTon  ,  fa  mère. 

La  Terre  &  Seigneurie  de  la  Villedez ,  haute ,  moyenne  Se 
bafle-Juftice  -,  en  1580,  à  Jean  de  Lezenet ,  Chevalier  de  l'Ordre 
du  Roi  ;  en  1648  ,  à  SébalHen  de  Kermeno  ,  Seigneur  de  Goyonj 
elle  paiîa  enfuite  à  Yves -Jean  Moro  :  elle  eft  aujourd'hui  à 
M.  de  Lys. 

La  Terre  &  Seigneurie  de  la  Touche-Carné,  haute- JulHce; 
cette  Terre  paroît  être  la  Terre  du  nom  de  Camé  :  elle  appar- 
noit  encore  à  cette  maifon  en  1 60 1  ,  &  étoit  pofledée  alors  par 
François  de  Carné  ,  Chevalier  de  l'Ordre  du  Roi  -,  en  1655,  elle 
appartenoit  à  François  Rogier,  Seigneur  du  Crevi ,  Confeiller  au 
Parlement  de  Bretagne  :  elle  ei\  aujourd'hui  à  Madame  de  Hays. 
La  Terre  &  Seigneurie  du  Val-Néant ,  moyenne-Juftice  ;  elle 
appartenoit  encore,  en  1520,  à  la  maifon  de  Néant;  en  1600, 
à  Guillaume  Poullain ,  Sieur  du  Pontlo,  du  chef  de  Jeanne  de 
Néant  ,  fon  époufe  :  elle  ell  aujourd'hui  à  M.  le  Douarin  de 
Trevellec. 

La  Terre  &  fief  de  la  Ville-Chevrier ,  moyenne- Juflice  ;  en 
1500,  à  Pierre  Audrent  &  Raoul  Roger,  fon  époufe,  Seigneur 
de  Malleville  ,  aujourd'hui  à    Madame  Billy. 

La  Terre  &  fief  de  la  Ville-des-Prés  ,  baffe-Juflice  ;  en  1 540, 
à  Thibaud  des  Prés;  en  1609,  à  Guillonne  Becdelievre ,  Dame 
de  Bohal;  en  1678,  à  Hyacinthe-Baptifle  Henri,  Seigneur  de 
BahaU  aujourd'hui  à  M.  du  Bot,  Seigneur  de  la  ViUeneuve- 
Bohal  &  autres  lieux ,  du  chef  de  Dame  Hyacinthe  de  Bohal , 
fon    époufe.  'i' 

La  Terre  &  fief  de  l'Abbaye  Bourdin  :  cette  Terre  étoit  pof- 
fédée,  en  1504,  par  Jean  Bourdin;  en  1640,  par  Robert  le 
Moine  ;  en  1665  ,  par  Pierre  Henri,  Seigneur  de  la  Noue  :  elle 
eft  aujourd'hui  à  Madame  la  ComtefTe  douairière  du  Fou,  qui 
poffede  aufTi,  dans  cette  ParoifTe  ,  les  Terres  &  fiefs  de  la  Noue 
&  de  Villegros.  - 

La  Terre   noble  de  la  Ville  -  Pierre  ,    en    1601  ,    à   Jacques 


SERr^SEV  411 

Johano,   Sieur    de   la    Ville  -  Pierre  j    aujourd'hui  à  M.  Moi éan. 

La  Terre,  iief,  &  Seigneurie  de  Quilly  j  en  1540,  à  Dame 
Barbe  Morio  ;  en  1601  ,  à  Dame  Renée  de  la  Ville-Rang,  Daire 
de  Quilly  ;  aujourd'hui  à  M.  de  Cartel,  ChevaHer,  Seigneui  de 
QuiUy  &  autres  heux. 

La  Ville-Quello  ,  haute  ,  moyenne  ,  &  baffe  -  Juftice  :  cette 
Terre  efl:  un  démembrement  de  la  Baronnie  de  Malellroit ,  ciii 
s'étendoit  en  la  Paroiffe  de  Serent  ,  elle  appartient  à  M.  de 
Serent ,   Baron  de  Malellroit. 

La  Terre  &  fief  de  Rohean ,  moyenne-Jullice  ;  en  1680,  à 
Hierofme  de  Carne  ,  Seigneur  de  Caftclan-Rohean  ;  aujourd'hui 
à  M.  Boiffet ,  Capitame  au  Régiment  de  Penthievre  ,  Infanterie  , 
du  chef  de  Dame  N.  du  Bot ,  fon  époufe. 

SERVET  j  fur  une  hauteur  ;  à  4  lieues  à  l'Oueft  de  Tréguier, 
fon  Evêché  ;  à  3  3  lieues  de  Rennes  j  &  à  i  lieue  de  Lannion , 
ia  Subdéiégation  &  fon  reffort.  On  y  compte  900  communiants  : 
la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  bourg  de  Servet  efl:  fitué  fur  la 
rivière  de  Gucr ,  qui  forme  en  cet  endroit  un  petit  port  avec 
flux  &  reflux.  Le  territoire  ell  borné  à  TEfl:  par  la  mer ,  très- 
fertile  ,  &  bien  cultivé.  On  y  connoît  le  fief  du  Minihi ,  à 
^.  l'Evêque  de  Tréguier  -,  &:  la  maifon  noble  de  Ker-vigant. 

SERVON  ;  dans  un  fond  ,  au  bord  de  la  rivière  de  Vilaine  -, 
à  3  lieues  à  l'Elt  de  Rennes ,  fon  Evêché ,  fa  Subdélégation  , 
&  fon  reffort.  On  y  compte  1 100  communiants  :  la  Cure  efl 
préfentée  par  un  Chanoine  de  l'Eglife  Cathédrale  de  Rennes. 
Le  territoire,  couvert  d'arbres  &  buiffons ,  eff  très-bien  cultivé  j 
il  produit  des  grains  de  toutes  efpeces  ,  &  d'excellent  cidre. 
On  voit  par  les  aftes  de  la  réformation  ,  qu'il  n'y  avoit  aucune 
maifon  noble  dans  cette   Paroiffe  en  1427. 

SEVERAC  ;  fur  la  route  de  la  Rochebernard  à  Redon  ;  à 
12  lieues  au  Nord-Ouefl  de  Nantes,  fon  Evêché  &  fon  reffort  j 
à  16  lieues  de  Rennes;  ck  à  4  lieues  de  la  Rochebernard  ,  fa 
Subdélégation.  On  y  compte  700  communiants  :  la  Cure  ell  à 
l'Ordinaire.  Le  territoire  ,  d'une  fuperficie  plane  ,  n'offre  que 
peu  de  terres  en  labeur  ,  qui  ne  prouvent  pas  le  courage  &  l'in- 
dulHe  des  habitants.  Le  château  de  Severac  ,  maifon  feigne u- 
riale  du  lieu,  appartenoit,  en  1577,  à  François  de  Talhouct, 
Maréchal  des   Camps   &  Armées   du   Roi  ,   ChevaUer    de   fon 


411  SEV=SIB 

Ordre  ,  Se  Gouverneur  de  Redon.  Louis  de  Talhouet ,  fbn  ûU  ^ 
fut  Enfeigne  des  Gardes  de  Sa  Majefté  ,  Gouverneur  de  la 
Niatre  &  de  Redon.  Cette  Terre  a  une  haute-Juftice ,  Se  appar- 
tient à  M.  du  Talhouet  de  Bois-Orant  :  le  château  ell  décoré 
d'un  bois  de  haute-futaie,  remarquable  par  la  grande  quantité 
de  hérons  qui  y  font  leurs  nids, 

SEVIGNAC  ;  à  9  lieues  au  Sud-Oueft  de  Saint  -  Malo ,  fon 
Evêché  5  à  1 1  lieues  &  demie  de  Rennes  j  &  à  4  lieues  & 
demie  de  Lamballe ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroifle  reffortit 
à  Dinan ,  &  compte  2500  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'alter- 
native. Le  territoire  renferme  des  terres  bien  cultivées  ,  des 
prairies  ,  &  des  landes  ;  on  y  voit  beaucoup  d'arbres  fruitiers 
&  autres,  &  la  fource  d'un  des  bras  de  la  rivière  d'Arguenon. 
En  1420,  on  y  connoiffoit  les  maifons  nobles  ci-après  :  la  Ville- 
Blanc  ,  à  Robert  Ferré  j  &  en  1 468  ,  à  Pierre  Ferré ,  Sénéchal 
de  Rennes  :  la  Ville-Marie ,  à  Jacques  de  la  Ville-Coq  ;  la  Ri- 
vière ,  à  Amauri  de  la  MoufTaye ,  qui  polTédoit  aufTi  la  Quehe- 
nochay e  :  les  Salles ,  à  Guillaume  de  Tremereuc  ;  Saint- André , 
à  Jean  de  la  Motte  -,  la  Touche-à-Nifan ,  à  Jean  Geffron  :  Bron- 
dineuf,  à  Jean  de  Broons  j  aujourd'hui,  avec  moyenne- Juftice  , 
à  M.  de  Saint-Pern-Brondineuf  :  Margaro ,  à  Guillaume  de  Mar- 
garo  ;  Bourgueneac ,  à  Jean  le  Beruyer  ;  la  Vigne  ,  à  Jean  Du- 
rand ;  Pembro  ,  à  Jean  du  Fau  ou  du  Fou  ;  Milica  ,  à  Bertrand 
Bardoul  ;  les  Aulnais  ,  à  Guillaume  du  Brofz  -,  le  Bignon  ,  à 
Charles  Ouri  ;  la  Chapelle  ,  à  OHvier  de  Launaye  :  Limoèlan , 
à  Gilles  de  Kerfaliou  ;  aujourd'hui ,  avec  haute-Juftice  ,  à  M.  Pi- 
cot de  Limoèlan  :  la  Ville-Billi ,  à  Olivier  le  Bernier  ;  le  Chaux- 
cheix ,  à  Jean  Gautron  ;  la  Ville-Neuve ,  à  Pierre  Grignon  j  le 
Quenar ,  à  Raoul  Coupliere  ;  le  PlefTis-Bataille ,  le  Loroux ,  la 
Ville-au-Prévoft ,  &  la  Touche,  à  N....  En  1390,  Eon  Rouxel 
avoit  fait  bâtir  une  belle  maifon  au  village  de  la  Ville -Léart. 
Beaumanoir  ,  haute-Juftice  ,  appartient  à  M.  Picot  de  Limoèlan  ; 
Cohineuc  ,  moyenne  -  Juftice ,  à  M.  de  la  Goublaye  de  Saint- 
Quereuc  j  Guernaon,  moyenne  -  Juftice  ,  à  M.  le  Marquis  de 
Locmaria  ;  le  PlefTis  -  Gautron  ,  moyenne  -  Juftice  ,  à  M.  du  Ro- 
cher de  Saint  -  Riveul  ;  Pengave  ,  moyenne  -  Juftice  ,  à  M.  de 
Launai-Guérif. 

SIBERIE  ;  à  I   lieue  &  demie  à  l'Oueft-Sud-Oueft  de  Saint- 
Pol-de-Lcon  ,  fon  Evêché  &  fa  Subdélégation  ;  Se  k  41  lieues 


s  I  B  415 

ide  Rennes.  Cette  Parolfle  reflbrtit  à  Lefneven,  Se  compte  1000 
-communiants  :  la  Cure  efl  préfentée  par  l'Evêque.  Le  territoire, 
borné  au  Nord  par  la  mer ,  eil  fertile  en  toutes  fortes  de  grains 
&  très-bien  cultivé.  Le  château  de  Ker-ouferé  efl:  une  des  prin- 
cipales Seigneuries  de  l'endroit;  il  appartenoit  ,  en  1360,  à 
Alain  de  Kerouferé  ;  en  1421  ,  à  Jean  de  Kerouferé  ,  Echanfon 
du  Duc  Jean  V ,  gratifié  de  cent  livres  de  rente  par  ce  Prince, 
pour  récompenfe  des  fervices  qu'il  lui  avoir  rendus  ;  &  ,  en 
Î462,  à  Yves,  Chevalier,  Seigneur  de  Kerouferé,  que  le  Duc 
François  II  inftitua  fon  Confeiller  6c  Chambellan  ,  par  fes  lettres 
données  à  Vannes  ,  le  18  Juin  de  cette  année  ;  en  1 590 ,  il  étoit 
poffédé  par  N.  de  Boiféon ,  Seigneur  de  Coëtnifan,  Gentilhomme 
attaché  au  fervice  du  Roi ,  qui  s'étoit  retiré  dans  cette  place 
avec  de  Guébriand  ,  fon  beau-frere ,  fes  parents  ,  &  amis.  La 
garnifon  étoit  commandée  par  Kerdraon  de  Coëtnifan ,  guerrier 
brave  &  cruel ,  qui  ;  par  les  ravages  qu'il  avoit  exercés  dans 
les  environs ,  s'étoit  attiré  la  haine  de  tout  le  pays  j  les  payfans 
fupphoient  depuis  long  -  temps  les  Seigneurs  de  la  Ligue  de 
les  délivrer  de  cet  ennemi  terrible.  Ils  obtinrent  enfin  leur  de- 
mande. Le  Seigneur  de  Goulaine  ,  du  Faouet ,  fon  frère ,  &: 
plufieurs  autres  Gentilshommes  fe  préfenterent  devant  la  place , 
^  virent  accourir  à  leur  camp  une  multitude  de  payfans  qui 
ne  refpiroient  que  la  vengeance  des  maux  qu'ils  avoient  fouffcrts. 
Le  château  étoit  une  malfe  de  pierre ,  flanqué  de  quatre  grofles 
tours  à  créneaux  &  machecoulis  ;  &  comme  le  Seigneur  de 
Coëtnifan  s'attendoit  bien  qu'il  feroit  afliégé  ,  il  avoit  fait  faire 
de  nouvelles  fortifications  au  dehors.  Après  quelques  jours  d'at- 
taque ,  le  Seigneur  de  Goulaine  s'appercevant  qu'il  n'avoir  fait 
aucun  progrès,  jugea  qu'il  ne  pouvoir  réufTir  fans  canon  :  il  en 
envoya  quérir  à  Brignon  ,  maiibn  (a)  forte  qui  appartenoit  au 
Seigneur  de  Ploeuc  ,  fon  beau-frere.  Kerhir  ,  Gentilhomme  ex- 
périmenté &  intrépide ,  fut  chargé  de  la  commiflion  :  elle  lui 
fut  funefle.  La  garnifon  de  Breft  ,  informée  de  fa  route  ,  lui  drefTa 
une  embufcade  ;  mais  comme  elle  ne  fe  trouva  pas  afTez  forte 
pour  l'attaquer  &  l'empêcher  de  paiTer  ,  un  fbldat  fe  détacha 
de  la  troupe  embufquce ,  &  à  la  faveur  d'une  haie  qui  le  ca- 
choit  ,  il  choifit  Kerhir  entre  les  autres ,  &:  le  rcnveria  mort 
ii'un  coup  d'arquebufc.  Cet  accident  n'empêcha  pas  le  détache- 


{a)  Cette   maifon    cft   fituce  dans  le   territoire  de  U  trêve   du   BourgbUnc ,  Paroid? 
de  Plouyen ,  à  8  lieues  de  Kerouferc. 


414  s  I  B  =  s  I  L 

ment  de  conduire  le  canon  au  camp  de  Kerouferë.  La  batterie 
fut  dreffée  &  la  brèche  faite  en  peu  de  temps  :  les  afiiégés 
prévoyant  le  fort  que  leur  réfervoit  la  populace ,  s'ils  étoient 
emportés  d'affaut ,  fongerent  à  capituler.  Les  Seigneurs  de  Gou- 
laine  &  du  Faouet  étoient  bien  difpofés  à  leur  accorder  une 
honnête  compofition  j  mais  les  payfans  qui  ne  refpiroient  que  la 
plus  horrible  vengeance  ,  ne  vouloient  point  entendre  parler 
de  capitulation  ,  &  menaçoient  de  tout  exterminer  ,  mênîe  la 
noblefîe  de  leur  parti ,  fi  elle  traitoit  avec  les  affiégés.  Ce  ne 
fut  qu'avec  beaucoup  de  peine  qu'on  parvint  à  les  calmer,  Ôc 
la  capitulation  fut  fignée.  Elle  portoit  que  les  affiégés  rendroient 
la  place  avec  tout  ce  qu'elle  renfermoit ,  que  les  foldats  for- 
tiroient  vie  &  bagues  fauves  ,  &  que  Coëtnifan ,  Guébriand , 
&  Kerdraon  ,  feroient  prifonniers  jufqu'à  ce  que  le  Duc  de 
Mercœur  en  eût  autrement  ordonné.  Comme  la  nobleffe  feule 
avoit  figné  la  compofition ,  la  populace  fe  fouleva  contre  les 
chefs  ,  &  fit  tous  fes  eftorts  pour  s'emparer  des  prifonniers ,  afin 
de  les  maflacrer.  Les  chefs  des  troupes  de  la  Ligue  coururent, 
en  cette  occafion  ,  un  très-grand  danger  de  la  vie ,  &  ne  pu- 
rent même  fauver  Kerdraon.  Comme  ce  Gentilhomme  avoit  le 
plus  à  craindre ,  il  avoit  eu  la  précaution  de  fe  déguifer ,  mais 
ion  déguifement  ne  put  le  dérober  à  fon  malheur  :  il  fut  re- 
connu de  quelques  payfans ,  qui ,  fur  le  champ  ,  tirèrent  fur 
lui  ,  &  l'attaquèrent  avec  tant  d'impétuofîté  que  les  gens  de 
guerre  ne  purent  empêcher  qu'il  fût  mis  en  pièces.  Il  n'y  eut 
pas  un  payfan  qui  ne  voulût  avoir  le  plaifir  barbare  de  lui 
donner  un  coup  ^  ils  affouvirent  leur  rage  fur  le  cadavre  de  cet 
infortuné  Officier  ,  &  pouffèrent  l'indignité  jufqu'à  lui  couper 
les  parties  viriles ,  qu'ils  promenèrent  dans  le  camp  au  bout 
d'une  pique.  Cette  fureur  de  la  populace  fut  favorable  aux  au- 
tres prifonniers  ,  qu'on  eut  foin  de  mettre  en  lieu  de  fureté. 
Coètnifan  fut  conduit  prifonnier  à  Nantes  j  &,  en  1602,  le  25 
Mai ,  le  Roi ,  pour  l'indemnifer ,  tant  de  fa  rançon  que  de  la 
démolition  de  fon  château  de  Ker-ouferé  ,  lui  accorda  une  fomme 
de  trente-cinq  mille  écus. 

SILFIAC  ;  fur  une  hauteur  ,  près  la  route  de  Pontivi  à 
Carhaix  ;  à  14  lieues  au  Nord  -  Nord  -  Ouefl  de  Vannes ,  fon 
Evêché  ;  à  23  lieues  de  Rennes;  &  à  2  lieues  de  Guemené^ 
fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  reffortit  à  Hennebon ,  &  compte 
1500  communiants ,  y  compris  ceux  de  Peret  ^  fa  trêve  :  la  Cure 


s  IL=  SI  O  415 

«{l  à  l'Ordinaire.  Le  territoire  offre  à  la  vue  des  terres  en  la- 
beur, mais  en  petite  quantité,  beaucoup  de  landes,  &  des  bois, 
qui  font  les  forêts  de  Cavern  ,  Quenequen  ,  &  Poulancre  ,  qui 
bordent  la  rivière  de  Blavet.  Dans  le  quatorzième  fiecle ,  ces 
forêts  étoient  plantées  en  futaie  ,  6c  contenoient  environ  cinq 
lieues  de  longueur ,  fur  trois  quarts  de  lieue  de  largeur  ;  elles 
étoient  remplies  de  bêtes  fauves  :  aujourd'hui  ce  ne  font  plus 
que  des  bois  taillis  ,  connus  fous  le  nom  de  forêt  de  Quenequen  ; 
elle  a  deux  lieues  de  longueur ,  fur  une  demi-lieue  de  largeur  : 
on  y  trouve  beaucoup  de  mines  de  fer ,  qui  y  ont  fait  établir 
des  forges.  Dans  les  environs  du  château  de  Peret ,  on  remarque 
des  pierres  &  des  arbres  fur  lefquels  font  figurées  des  macles. 
Dom  Taillandier  prétend  que  ce  fut  à  Peret  que  vécut ,  dans 
la  folitude  ,  Saint  Mériadec ,  fils  aîné  de  Conan ,  Roi  de  Bre- 
tagne ,  d'où  font  fortis  les  Seigneurs  de  Rohan.  En  1420,  le 
manoir  de  Crenuhel  appartenoit  à  Jean  Frazqualle  j  &  celui  de 
Quoètuder  ,  à  Pierre  BulTon. 

SION  ;  à  1 2  lieues  un  quart  au  Nord  de  Nantes ,  fon  Evê- 
ché  &  fon  reffort  j  à  i  o  heues  de  Rennes  ;  &  à  2  lieues  un 
quart  de  Derval ,  fa  Subdéiégation.  On  y  compte  1800  commu- 
niants :  la  Cure  eil:  à  l'Ordinaire.  Le  territoire ,  arrofé  des  eaux 
des  rivières  de  Merdrec  &  de  Chère  ,  fur  leiquelles  on  voit 
une  forge  &  un  fourneau  à  fer ,  nommés  les  forges  de  la  Hunau- 
dlere  ,  fournit  beaucoup  de  mines  de  fer ,  &  renferme  des  terres 
en  labeur ,  des  prairies ,  &  des  landes.  Le  bourg  de  Sion  fut 
un  de  ces  lieux  que  les  Proteflants  obtinrent ,  par  TEdit  de 
Nantes  &  d'autres  précédents,  pour  l'exercice  public  de  leur 
religion.  On  peut  préfumer  qu'il  fut  accordé  en  faveur  des 
Marquis  de  la  Rochegiffard ,  anciens  Seigneurs  de  Sion  ,  ôc  zélés 
Proteflants ,  qui  fervirent  fidèlement  les  Rois  Henri  111  &:  Hen- 
ri IV  contre  la  Ligue.  Le  lieu  d  afl'emblée  ,  dit  le  Prêche  ,  lub- 
fifle  encore  aujourd'hui  ,  &:  fert  à  préfcnt  d'auditoire.  On  le  four 
vient  encore  à  Sion  des  querelles,  fouvent  fanglantes,  qui  s'éle^ 
voient  fréquemment  entre  les  Catholiques  &  les  ProtelLmts.  Des 
vieillards,  qui  prétendent  le  tenir  de  témoins  oculaires,  racon- 
tent entr'autres  le  trait  d'un  Prêtre  ,  nommé  du  Bois  ,  qui  tua  , 
avec  le  bâton  de  la  Croix ,  le  cocher  du  Marquis  de  la  Roche- 
giffard ,  lequel  conduifoit  fon  maitre  au  Prêche  ,  &:  retuloit  de 
s'arrêter  pendant  que  la  Proceffion  Catholique  paffoit.  Telles 
étoient  les  occafions  de  ces  guerres  entre  ces  deux  partis,  qui 


4i6  SIO=SIX 

coûtèrent  tant  de  fang  à  la  France  ,  dans  ces  temps  malheureux 
&  fanatiques.  On  n'a  point  encore  oublié  les  moyens  finguliers 
qu'employoient  les  Dragons  ,  pour  convertir  quelques  entêtés 
reliés  dans  ce  bourg  après  la  révocation  de  l'Edit  de  Nantes. 
On  y  raconte  toutes  les  perfécutions ,  les  infultes ,  &  les  cruautés, 
que  leur  faifoient  éprouver  ces  Apôtres  des  Jéfuites ,  envoyés, 
par  Louvois  (  a  ). 

On  voit  dans  la  Paroifle  de  Sion  fept  de  ces  énormes  pierres 
qui  ont  été  plantées  de  mains  d'hommes  en  différents  endroits  ^ 
on  ne  fçait  trop  à  quel  ufage  &  en  quelle  occafion  :  elles  font 
toutes  fur  la  même  ligne,  au  bord  d'une  petite  lande,  &  aux 
carrefours  de  quatre  chemins.  On  ne  peut  douter  qu'elles  n'aient 
été  tranfportées  là  exprès,  parce  qu'il  n'y  a  point  aux  environs 
de  carrières  de  pierres  de  la  même  efpece  ,  elles  ne  font  pas 
toutes  de  la  même  groffeur ,  les  plus  groffes  peuvent  bien  pefer 
huit  à  dix  milliers, 

La  Terre  de  Sion,  qui  relevé  du  Roi,  appartient  à  M.  le 
Marquis  de  Juigné ,  Ambaffadeur  extraordinaire  à  la  Cour  de 
Ruffiej  il  y  a  une  haute -JulHce  qui  reflbrtit  au  Préfidial  de 
Nantes.  Les  maifons  nobles  de  cette  Paroiffe  font,  la  Fouaye 
&  l'Orme ,  avec  haute- Juftice  ;  la  première  à  M.  Gafcher  des 
Burons ,  &  la  féconde  aux  héritiers  de  M.  de  la  Garlaye ,  Eve- 
que  de  Clermont  :  l'Orme  appartenoit ,  en  1420,  au  Sieur  de 
l'Orme.   La  Roberdais  eft  aujourd'hui  à  M.  du  C 

SIXTE  ;  fur  une  petite  élévation  ;  à  1 1  lieues  à  l'Ell-Nord- 
Eft  de  Vannes ,  fon  Evêché  ;  à  1 1  Heues  de  Rennes  j  &  à  3. 
lieues  un  quart  de  Redon ,  la  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  rei- 
fortit  à  Ploermei ,  &  compte  1700  communiants  :  la  Cure  ell 
à  l'alternative.  Le  territoire,  arrofé  des  eaux  de  la  rivière  d'Aph, 
offre  à  la  vue  des  terres  fertiles  en  grains ,  des  prairies  ,  & 
des  landes  d'une  étendue  immenfe ,  particulièrement  au  Sud-Efl 
de  fon  bourg  :  il  s'y  tient  tous  les  ans  une  foire  conlîdérable 
de  belliaux. 

En  878 ,  le  Prêtre  Vidnimet  donna  à  l'Abbaye  de  Redon  une 
partie  de  fa  Terre  ,  nommée  Conc-hinoc,  &,  en  ii3<S,  Mahe 


(  a  )  Cette  petite  Eelife  a  eu  des  Paf-      .    du  parti ,  à  la  Cour ,  &  d'y  négocier  ces 

,.,  j:a: L.    r\^   .„- j l'un.-- :..    ..•...'.   _..:   jC.„:,»-*    ^,^C^.,a.    '.^CTi.tnt 


teurs  diftingués.  On  trouve  dans  l'Hiftoire 
de  France  un  Miniftre  de  Sion,  qui  y  joue 
na  lôle  ;  il  étoit  fouvcnt  chargé  des  Maires 


petits  traités  qui  étoient^  prefque  aufli-tôi 
rompus  qu'accordés. 

dâr 


s  I  X  =  S  ou  4,7 

de  Sixte  donna  au  même  Monaftere  les  dîmes  qu'il  poiïédoit 
dans  cette  ParoifTe.  En  1500,  Tregary  ,  les  Noës  ,  la  Châtei- 
gnerais ,  le  Chêne ,  &  le  PlefTis  de  Sixte ,  appartenoient  à  Jean 
de  Porcaro  :  la  Touche  -  Queno ,  à  Jean  de  la  Ville- Juhel  ;  le 
Bois  -  Garin  ,  à  René  de  la  Bourdonnaye  ;  l'Abbaye  Mou- 
raud  &  Villeneuve ,  à  JuHen  Coué  :  Branc-Franc  ,  à  Jacques 
de  Maleftroit  ;  la  Ville- Juhel ,  à  Jean  de  la  Ville-Juhel  ;  &  la 
Crapaudiere  ,  à  N.  Pommeri ,  avec  haute-Juflice  ,  appartiennent 
aujourd'hui  à  M.  Gouro  de  Pommeri:  Brai ,  haute-Jullice  ,  &: 
Boffour ,  haute-Juftice ,  à  M.  du  Bot  du  Grego  ;  le  Bois-Orant , 
haute-Juilice  ,  à  M.  de  Talhouet  ;  Trégary  ,  haute  -  Juftice  ,  à 
M.  du  Bouexic  de  Pigneux  j  Bougervé ,  moyenne  -  Juilice  ,  à 
M.  Rolland  de  Rangervé  j  le  Bois-Guerin ,  moyenne-Juilice  ,  à 
M.  Huchet  de  la  Bennerais  j  &  le  Pleflis ,  moyenne-Juftice  ,  à 
M.  Guitton. 

SIZUN  ;  à  7  lieues  au  Sud  de  Saint-Pol-de-Léon ,  Ton  Evê- 
ché  ;  à  39  lieues  de  Rennes;  &:  à  3  lieues  de  Landerneau  ,  i\\ 
Subdélégation.  Cette  Paroifle  refîbrtit  à  Lefneven  ,  &  compte 
3600  communiants,  y  compris  ceux  de  Loemelar ,  fa  trêve: 
la  Cure  ell  préfentée  par  l'Evêque.  Le  territoire  offre  à  la  vue 
des  terres  en  labeur ,  des  montagnes ,  &  des  landes.  En  1 1 86  , 
Hervé ,  Vicomte  de  Léon ,  donna  les  dîmes  qu'il  poffédoit  en 
cette  ParoifTe  à  l'Abbaye    de  Daoulas. 

SOUDAN  j  à  1 3  lieues  au  Nord  -  Nord  -  Eft  de  Nantes ,  (on 
Evêché  &  fon  reffbrt  ;  à  1 1  lieues  de  Rennes  ;  &  à  i  lieue  de 
Chateaubriand,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  2300  commu- 
niants :  la  Cure  efl  à  l'alternative.  Le  territoire  offre  à  la  vue 
des  terres  bien  cultivées  ,  des  prairies,  des  landes,  &  des  bois, 
dont  les  plus  considérables  font  ceux  de  Brichet  &:  de  Gauli- 
conniere.  La  haute-Juftice  de  Soudan  appartient  à  M.  de  Bon- 
amour  ;  la  Chetaye  ,  moycnne-Jullice ,  à  M.  de  Ville-Blanc  ;  la 
Croix-Cocu  ,  baffe-Juftice  ,  aux  Trinitaircs  de  Chateaubriand  ;  & 
le  Bois-Durand ,  à  N.... 

SOUGÉAL;  fur  une  hauteur  ;  à  10  lieues  au  Nord-Nord-Eft 
de  Rennes  ,  fon  Evêché  ;  &  à  i  lieue  un  tiers  d'Antrain  ,  fa 
Subdélégation.  Cette  Paroilîe  reffortit  à  Bazougcs ,  &  compte 
000  communiants:  la  Cure  ell  à  l'alternative.  Le  territoire  eil 
borné  au  Nord  par  la  province  de  Normandie ,  dont  il  eil:  aufîi 
Tome  IF.  G  3 


4i8  SO  U  =SU  C 

féparé  à  l'Eft  par  la  rivière  de  Couefnon  ;  les  terres  en  font 
très-bien  cultivées ,  &  les  habitants  font  d'excellent  cidre.  Cette 
Paroifle  eu  un  riche  Prieuré ,  dépendant  de  celui  de  Saint-Malo 
de  Dinan  ,  qui,  en  1 54c  ,  tomba  en  régale.  Le  Roi  Henri  II 
le  donna  à  Jean  de  la  Touche.  Il  a  une  moyenne- Juftice ,  qui 
appartient  au  Prieur  de  Saint-Malo  de  Dinan. 

'ISPEZET  ;  à  8  Ueues  à  l'Eft-Nord-Eft  de  Quimper ,  fon  Evê- 
ché  ;  à  3  2  lieues  de  Rennes  ;  &  à  2  heues  de  Gourin ,  fa  Sub- 
délégation. Cette  Paroifle  reflbrtit  à  Carhaix ,  &  compte  2400 
communiants  :  la  Cure  efl  préfentée  par  un  Chanoine  de  l'EgHfe 
Cathédrale  de  Quimper.  Le  territoire ,  borné  au  Nord  par  la 
rivière  d'Aulne  ,  &  au  Sud  par  les  montagnes  Noires  ,  efl:  in- 
culte dans  bien  des  parties ,  particulièrement  dans  les  montagnes 
dont  le  fol  efl  de  mauvaife  quaHté  :  il  n'y  a ,  à  bien  dire ,  qu'au 
Nord  de  la  Paroifl^e  oii  le  terroir  foit  bon. 

SQUIFFIEC  j  fur  une  hauteur  ;  à  4  lieues  au  Sud-Sud-Efl:  de 
Tréguier ,  fon  Evêché  ;  à  28  lieues  de  Rennes  ;  &  à  i  lieue  &c 
demie  de  Guingamp,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroifl^e  reflbrtit 
à  Lannion  ,  &  compte  1000  communiants,  y  compris  ceux  de 
Ker-moroch  ,  fa  trêve  :  la  Cure  efl  à  l'alternative.  Le  territoire , 
arrofé  des  eaux  de  la  rivière  de  Trieuc ,  efl  fertile  en  grains  de 
toutes  efpeces  &  très-bien  cultivé.  On  y  remarque  les  vefliges 
du  château  du  Poirier ,  qui  fut  afllégé  &  pris  ,  le  premier  Juin 
1393  ,  par  Olivier  de  Cliflbn  ,  Connétable  de  France  ,  qui ,  après 
avoir  pris  cette  place ,  la  fit  démoUr  :  elle  appartenoit  au  Duc 
Jean  IV. 

SUCÉ  ;  fur  la  rivière  d'Erdre  ;  à  3  lieues  au  Nord  de  Nantes, 
fon  Evêché,  fa  Subdélégation,  &  fon  reflTort  ;  &  à  19  lieues 
de  Rennes.  On  y  compte  1700  communiants  :  la  Cure  efl  à 
l'Ordinaire.  Le  territoire  produit  des  grains  de  toutes  efpeces, 
fur-tout  du  feigle  ;  du  vin  de  qualité  médiocre  ;  &  beaucoup 
de  châtaignes  :  on  y  remarque  un  châtaigner  de  vingt-neuf  pieds 
de  circonférence  ,  que  les  étrangers  vont  voir  par  curioflté.  Sur 
les  bords  de  la  rivière  d'Erdre  ,  font  de  vaftes  marais ,  qui  pro- 
duifent  du  fourrage  de  mauvaife  quahté  ,  &  il  feroit  avantageux 
pour  les  habitants  qu'ils  fuflent  deflféchés ,  ce  qui  ne  feroit  pas 
très-diflicile  :  alors  on  verroit  de  belles  prairies  prendre  la  place 
de  ces  marécages ,  dont  la  corruption  infede  l'air.  Le  péage  du 


s  U  C  =  S  U  L  4,9 

bac   établi  à   Sucé  ,   pour  paffer  la  rivière ,  appartient  à  M.  l'E- 
vêque  de  Nantes ,  Seigneur  du  lieu. 

L'ancienneté  de  la  ParoifTe  de  Sucé  eft  prouvée  par  un  a6î:e 
de  l'an  952,  par  lequel  Alain  Barbe-torte  donne  à  l'Abbaye 
de  Landevenec  plufieurs  Egliies  ,  parmi  lefquelles  fe  trouva  la 
moitié  de  la  Vicairerie  ôc  de  l'Eglife  de  Sucé  ,  à  cinq  milles  de 
Nantes.  En  1252,  Jean,  Abbé  de  Saint-Gildas-des-Bois ,  échan- 
gea avec  Galerand ,  Evêque  de  Nantes  ,  tout  ce  qui  pou  voit  4{ii 
revenir  en  1253  de  la  Chapelle  de  Bref-Chalan  ,  de  fa  mé- 
tairie ,  &  de  l'ifle  de  Saint-Denis  en  Sucé  ,  pour  les  domaines  que 
tenoient  les  Cordeliers  , de  l'Evêque  de  Nantes,  dans  la  rue  per- 
due ,  où  les  Moines  de  Saint-Gildas  avoient  deflem  de  s'établir. 
Ce  projet  ne  fut  pas  effeftué  :  leur  acquêt  paffa ,  quelque  temps 
après ,  par  échange  ,  à  la  maifon  de  Rieux ,  qui  en  fit  préfent 
aux  Cordeliers.  Guillaume  de  Vern  ,  Evêque  de  Nantes  en  1267, 
trouva ,  en  montant  fur  le  Siège ,  tous  les  domaines  de  l'Evêché 
entre  les  mains  du  Duc  Jean  I ,  dit  le  Roux.  Le  Prélat  expédia  fur  le 
champ  un  ordre  à  fon  Officiai  d'aller  trouver  le  Duc ,  Se  de 
lui  faire ,  en  parlant  à  fa  perfonne ,  les  monitions  requifes  de 
vuider  les  maifons  de  l'Evêché  ,  les  manoirs  de  Sucé  ;  de  réparer 
tous  les  dommages  qu'il  avoit  caufés  ;  &  de  reftituer  tous  les  fruits 
qu'il  avoit  reçus.  En  1370,  le  château  de  Sucé  étoit  une  des 
maifons  de  plaifance  de  l'Evêque  de  Nantes  ;  Sz ,  par  afte  du 
3  Décembre  1395  ,  Geoffroi  de  Malfchat  &  Alain  de  Brûlon, 
s'obligèrent  à  garder  cette  place  pour  le  Duc.  Ce  dernier  fait 
paroît  détruire  le  premier,  parce  qu'en  1395  ,  l'Evêché  n'étant 
pas  vacant ,  le  Duc  ne  pouvoit  mettre  une  garnifon  dans  ce 
Château  ;  il  fe  peut  cependant  faire  que  les  troubles  de  la  pro- 
vince l'y  aient  obHgé,  &  qu'il  l'ait  fait  avec  la  permifTion  de 
l'Evêque.  L'an  1572,  les  Calvinilles  établirent  un  prêche  à  Sucé: 
on  voit  encore  les  ruines  de  ce  bâtiment  auprès  du  bourg.  Les 
ruines  du  château  paroilTent  aufii  fur  la  rive  gauche  de  la  ri- 
vière d'Erdre  :  ces  reftes  annoncent  que  c'étoit  une  forte  place, 
quoique  l'enceinte  en  fût  petite.  Sa  ntuation  étoit  fur  une  mon- 
ticule fort  élevée  au  deflus  de  la  rivière  ,  avec  un  double  fofl'é, 
taillé  dans  le  roc  :  il  fut  démoli  en  1677.  On  trouva,  il  y  a 
quelques  années ,  dans  l'ille  de  Saint-Denis  ,  qui  fervoit  de  ci- 
metière aux  Pi  otellants  ,  plufieuis  caveaux  de  maçonnerie  ,  avec 
des  offements^ 

SULNIAC  i  à  3  Heues  à   ÏEÙ:  de  Vannes ,  fon  Evêché  ^  fa 


4ZO  S  U  L  =  TAD 

Subdélégatiôn ,  &  Ton  reflbrt  ;  &  à  1 8  lieues  de  Rennes.  On  y 
compte  1 800  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Ce  ter- 
ritoire contient  des  terres  en  labeur  de  bonne  qualité ,  des  prai- 
ries, le  bois  de  Beauvelle  ,  &:  des  landes.  La  mauvaife  qualité 
du  fol  de  quelques-unes  de  ces  dernières  n'ôte  rien  à  la  fer- 
tilité des  autres,  qu'on  pourroit  défricher  avec  fuccès.  En  1400, 
ce  territoire  renfermoit  plufieurs  maifons  nobles  ,  fçavoir  j  la  Per- 
rière 5  à  Guillaume  de  Kerfalio  ;  aujourd'hui  à  M.  de  Rofmadec  : 
le  manoir  de  Trevelan ,  à  la  Dame  du  Bois-Moraud  :  Ker-truel 
&  Boblais,  font  plus  modernes. 

SURZUR  j  à  2  lieues  deux  tiers  au  Sud-Eft  de  Vannes ,  fon 
Evêché  &  fon  refTort  j  à  21  lieues  de  Rennes;  &  à  2  lieues 
un  quart  de  Sarzeau  ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  3000 
communiants ,  y  compris  ceux  de  la  Trinité  &  du  Hézo ,  fes 
trêves  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Des  terres  en  labeur  bien 
cultivées ,  des  prairies,  des  bois  taillis,  &  beaucoup  de  landes  j 
voilà  ce  que  ce  territoire  offre  à  la  vue.  On  y  remarque  quel- 
ques manufaftures  de  groffes  étoffes  de  laines  ,  &  beaucoup  de 
boulangeries ,  dont  le  pain  eft  porté  &  vendu  dans  les  Paroiffes 
voifines.  En  1775  ,  une  fièvre  putride  &  vermineufe  enleva  une 
bonne  partie  des  habitants  de  cette  Paroiffe.  En  13  50  ,  la  maifon 
noble  de  Ker-guifé  appartenoit  à  Jean  de  Kerguifé  ;  &,  en 
1470,  à  Marc-Antoine  de  Kerguifé,  Enfeigne  des  Gardes-du- 
Corps.  En  1440,  Penbulzo ,  à  Thomas  de  Penbulzo  ;  Brionel, 
à  N.  Dainero  ;  le  FuUe ,  à  Guillaume  le  Baillif  ;  Granion  ,  à 
Renaud  de  Beaumont  j  &  le  Bois-Joyaux ,  à  Jacquette  de  Muf- 
filiac  :  Cohano  &  Perennes  ,  font  plus  modernes. 

X  ADEN  ;  fur  une  hauteur  ;  à  4  lieues  au  Sud  de  Saint-Malo; 
fon  Evêché;  à  10  lieues  un  tiers  de  Rennes;  &  à  une  demi- 
lieue  de  Dinan ,  fa  Subdélégation  &  fon  reffort.  Cette  Paroiffe 
relevé  du  Roi,  &  compte  1000  communiants  :  la  Cure  eft  à 
l'alternative.  Le  territoire  ,  baigné  des  eaux  de  la  rivière  de 
Pi.ance  ,  renferme  des  terres  très-bien  cultivées  &  fertiles ,  &  un 
bois,  dans  lequel  le  Roi  poffede  dix-neuf  arpents  cinquante-une 
cordes  d'étendue.  En  1 1 63  ,  l'Evêque  de  Saint-Malo  termina  un 
différent  que  fon  prédéceffeur  avoit  eu  avec  les  Moines  de  Mar- 
moutier  ,  au  fujet  de  l'Eghfe  de  Taden. 

En    1378,  Èon  de  Beaumanoir,  irrité,  on  ne  fçait  par  quel 


TA  D  =TA  L  4ir 

motif,  contre  Aliette  de  Kergus ,  Dame  d'honneur  de  Jeanne 
de  Navarre ,  VicomtefTe  de  Rohan ,  voulut  la  tuer  ;  mais  il 
manqua  fon  coup  :  fon  épée,  prenant  une  toute  autre  direftion 
que  celle  qu'il  avoit  intention  de  lui  faire  prendre ,  ne  blefla 
que  le  cheval  de  la  Dame  de  Kergus.  Le  Vicomte  de  Rohan, 
inltruit  de  cette  a6lion  peu  digne  d'un  Gentilhomme  ,  condamna 
le  coupable  à  une  amende  de  quatre  cents  écus  d'or,  à  prendre 
fur  la  ParoifTe  de  Taden  ,  dont  Beaumanoir  étoit  Seigneur ,  & 
lur  fes  autres  biens. 

On  remarque  dans  cette  ParoifTe  la  maifon  noble  de  la  Ville- 
Maillard;  le  château  &  le  parc  de  la  Garaye,  devenu  célèbre 
par  le  dernier  Comte  de  ce  nom ,  dont  les  pleurs  des  pauvres 
ont  fait  l'éloge.  Tout  intérelTe  dans  M.  le  Comte  de  la  Garaye. 
Sans  études ,  il  fçavoit  beaucoup  :  il  établit  chez  lui  un  Hôpital 
pour  les  malheureux  payfans  ,  fes  vaflaux ,  &  y  fonda  une  apo- 
thicairerie.  Il  extirpoit  la  catarafte  fupérieurement  -,  guérifToit  de 
la  galle ,  de  la  teigne ,  &  autres  maladies  ;  &  l'on  doit  fçavoir 
que,  s'il  étoit  le  premier  miniftre  des  pauvres  qu'il  fervoit  lui- 
même  ,  que  s'il  a  vécu  avec  eux ,  il  a  voulu  mourir  avec  eux. 
Dédaignant  l'oftentation  d'une  pompe  funèbre,  il  a  voulu  être 
enterré  au  bas  du  cimetière  de  la  ParoifTe  de  Taden ,  plutôt 
que  d'être  inhumé  dans  un  tombeau  de  marbre  élevé  par  fes 
ancêtres  à  l^inan.  Les  priibnniers  de  Dinan  lui  font  redevables 
d'une  MefTe  les  Dimanches  &  Fêtes.-  Cette  ville  lui  a  des  obli- 
gations immortelles,  &  doit  conferver  le  fouvenir  de  fes  bien- 
faits ,  comme  elle  a  fçu  rendre  juftice  à  Tes  vertus.  Ce  Seigneur 
n'a  point  laifTé  de  pollérité, 

TAILLIS  ;  fur  la  route  de  Vitré  à  Fougères  ;  à  7  lieues  & 
demie  de  Rennes ,  fon  Evêché  &  fon  reflbrt  ;  &:  h  i  lieue  un 
tiers  de  Vitré  ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  550  commu- 
niants :  la  Cure  eft  préfentée  par  l'Abbé  de  Saint-Serge  d'An- 
gers. Le  territoire  efl  coupé  de  ruifîeaux  ,  qui  forment  la  rivière 
de  Cantache  ou  de  Perouze.  C'efl  un  terrein  couvert ,  qui  pro- 
duit du  grain  ,  du  foin  ,  &:  du  cidre  ;  il  n'ell:  pas  mal  cul- 
tivé. On  y  voit  les  maifons  nobles  de  la  Benerie ,  de  la  Tour- 
mclaye,  &:de  la  Cour  de  Taillis  :  cette  dernière,  qui  a  hautc- 
Julhce,  appartient  à  M.  de  Gouyon  des  Hurlieres. 

TALENSAC  ;  fur  une  hauteur;  à  13  lieues  au  Sud  de  Saint- 
Malo ,  fon  Evêché  -,  à   3    lieues    trois    quarts    de    Rennes  ,   fou 


4"  TAL 

reffort  5  &  à  i   lieue  un  quart  de   Montfort ,  fa   Subdélégatîon^ 
On  y  compte  1600  communiants ,  y  compris  ceux  du  Verger,  fa 
trêve  :  la  Cure  eft  préfentée  par  l'ETeque ,  &  le  Seigneur  nomme 
le  Vicaire  perpétuel  du  Verger.  Ce  territoire ,   arrofé  des  eaux 
de  la  rivière  de  Men ,  offre  à  la  vue  des  terres  en  labeur ,  des 
prairies  y  des  landes ,  &  les  bois  de   Bintin  &  de  la  Bedoyere. 
Dans    le   premier  fe    trouve    une  carrière  de  pierres    maclées,. 
de  couleur  rougeâtre  ,  &  dans  les  environs  ,des  améthylles.  Les 
dîmes  de  cette  Paroiffe  furent   données ,  l'an  1 1 5 1  ,    à  l'Abbaye 
de  Saint- Jacques  de  Montfort ,  par  Guillaume  de  Montfort ,  fon- 
dateur de  cette  Abbaye.  Dans  les  quatorzième  Se  quinzième  fiecles  ^ 
on  remarquoit  à  Talcnfac  plufieurs  maifons  nobles.  La  Bedoyere,. 
maifon  feigneuriale  du  lieu  ,   avec    haute-Juftice ,    appartenoit ,. 
en    1360,  à  Pierre  Huciiet  de  la  Bedoyere.  Bertrand  de  la  Be- 
doyere fut  Secrétaire   dTtat,  Garde  des  Sceaux,  &  Ambaffa-^ 
deur  du  Duc  Jean   V.   Raoul  de  la  Bedoyere  époufa,  au  mois 
de  Mai  1463  ,  Charlotte  de   Cahideuc.   Gilles  6c  André  de  la 
Bedoyere    furent    Procureurs    généraux   au    Parlement   de  Bre- 
tagne.  Jean  de  la  Bedoyere    fut    reçu  Chevalier  de   Malte  en 
1656.  Cette  Seigneurie  appartient    aujourd'hui  à  M.  Huchet  de 
la  Bedoyere,  delà  même   famille.  En    1380,  le  Guern  appar- 
tenoit   à  Louis  de  Saint-Brieuc  -,  en  1420,  la  Bouax ,  à  Pierre 
de  la  Bintinaye.  Jean  de  la  Bintinaye  fut  envoyé  en  ambaffade  , 
l'an    1450  ,  en  Angleterre,  où  il    mourut.  Vincent  de  la  Bin- 
tinaye fut  Gentilhomme  ordinaire  de  la  chambre  de  la  Reine  ,  en 
1579.  M.   de   la   Bintinaye  ^  Greffier  aftuel  des  Etats  de    Bre- 
tagne, eft  de  la  même  famille.  En   1420,  la  Vallée ,  à  Jean  de 
Morhan  ;  la  Prévotaye  ,  à  Jean  de  Partenaye  :  le  Bois ,  à  Raoul 
de  Bintin ,  qui  poffédoit  auffi  le  Châtelier  ^  cette  dernière ,   qui 
^  moyenne- Juftice  ,  s'appelle  aujourd'hui  le    Bois  de  Binais ,    & 
appartient   â  M.  de  Logeois  r  la  Touche ,  à  Jean  du  Guel ,  dit 
Cillart',  le  Mauduet ,  à   René  du  Bois  j  le   Pré  du  Hou,  à  Eon 
le  Loup  ou  Belou  -,   le  Clos-Chef-Doué ,  à  Guillaume  Pied-de- 
Vache;  la  Touche,  à  Guillaume  Rolland  j  Collet,  à  Pierre  de 
Quédillacj  la  Chefnaye,  à  Urbain  Rolland  j  Crabaffe,  à  Jouan 
Trehel  ;  la  Rivière  ,  à  Jean  de  Breiieuc  :  la  Bonnax  ,  à  Guillaume 
de   la  Bonnax;  (elle  fe  nomme    aujourd'hui  la  Bonnais ,  elle  a 
moyenne -Juftice,  &  appartient  à   M.   Gourodi   Pommeri  :  )  la 
Robitelaye,  à  Jean    de    Breneuc;  la   Dazoaie,    à    Olivier    du 
Guelé;  Tréjohn,  à  Guillaume    de  Tréjohn;   le  Mons ,  à    Alain 
ie.  Mons;  le  Coudrai,  à  Thebaud  de  Quédillac ;  Treveneuc  ,  à 


T  A  LzzzTAU  41  j 

Pierre  de  Treveneuc  ;  la  Rigadelaye,  à  Guillaume  Toubary  ; 
Caiïet ,  à  Olivier  du  Guern  :  &  le  Guern  ,  à  N...  j  cette  der- 
nière ,  qui  a  moyenne-Juftice  ,  appartient  aujourd'hui  à  M.  de 
la  Beneré  ;  le  Houx ,  moyenne-JulHce  ,  à  M.  du  Forfan  du  Houx. 

TAULÉ  ;  à  2  lieues  deux  tiers  au  Sud-Eft  de  Saint-Pol-de- 
Léon  ,  ion  Evêché  ;  à  40  lieues  de  Rennes  j  &  à  i  lieue  & 
demie  de  Morlaix ,  fa  Subdélégation.  Cette  ParoifTe  relevé  du 
Roi,  refîbrtit  à  Lelneven  ,  &  compte  5000  communiants, 
y  compris  ceux  de  Carentec  6c  de  Henvic  ,  fes  trêves  :  la  Cure 
eft  prélentée  par  l'Evêque.  Le  territoire  eft  très-bien  cultivé,  & 
fertile  en  toutes  fortes  de  grains.  La  haute  -  Juflice  de  Pcnhoat 
appartient  à  M.  de  Kerouarts.  Les  maifons  nobles  de  l'endroit  font; 
la  Valoc ,  le  Franfic ,  Ker-om.mes  ,  Châteaumen ,  Chaftelenec , 
Coèt-Blouchou  ,  Coëtidual  ,  le  Crech  ,  Cofquerven  ,  Cofquer* 
meur  ,  QuiftiUic  ,  le  Vieux-Châtel ,  Feuntenfpeur ,  Ker-vefec  ,  le 
Front ,  Goazquelen  ,  Goëzou  ,  Guernifac  ,  Ker-angoaguet ,  Ker- 
brigent ,  Ker-afTel  ,  Ker-danet  ,  Ker-gadoret ,  Ker-hallic  ,  Ker— 
unan  ,  Ker-illi ,  les  Crech  ,  le  Menée  ,  Mahé-Ker-morvan ,  Pen» 
fez',  Penfornou,  leTimen,  Poulconquet ,  Lefireur,  cette  dernière 
porte  pour  dévife  dans  fes  armes  :  Dieu  me  tue. 

TAU  PONT  ;  dans  un  vallon;  à  18  heues  au  Sud-Sud-Ouell 
de  Saint-Malo  ,  fon  Evêché  ;  à  1 2  Heues  un  quart  de  Rennes  ; 
&  à  un  tiers  de  lieue  de  Ploermel ,  fa  Subdélégation  &  fon 
reffort.  Cette  ParoifTe  relevé  du  Roi,  &  compte  1900  commu- 
niants :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire ,  couvert  d'arbres 
&  buiffons ,  &:  arrofé  des  eaux  des  rivières  au  Duc  &  d'Ouil , 
eft  plein  de  collines  &  de  vallons  ;  fes  produélions  font  les 
grains  &  le  cidre.  Parmi  les  arbres  fruitiers ,  on  y  remarque  une 
quantité  prodigieufe  de  cerifiers ,  dont  les  fruits  font  renommés 
dans  le  canton.  Le  château  de  Lambilly  ,  haute-Juilice  &  mai- 
fon  Seigneuriale  de  la  ParoifTe,  appartenoit,  en  1360,  à  Jean 
de  Lambilly.  Jean ,  fon  fils ,  fut  Grand  Chambellan  Sz  premier 
Gentilhomme  du  Duc  Jean  IV,  en  1487.  Robert  de  Lambilly 
fut  élu  Capitaine  des  Francs-Archers  de  ^E^■cché  de  Vannes. 
Cette  Seigneurie  appartient  aujourd'hui  à  M.  de  Lambilly ,  de 
la  même  famille:  le  manoir  de  Cremenan  appartenoit,  en  1400, 
à  Jean  de  Lambilly  ;  la  Ville-Eau-de-Vache ,  à  Jean  de  Calkl  ; 
$c  la  Rivière  ,  à  Guillaume  Brchault. 


424  TE  L  =  THE 

TEILLÉ  ',  fur  une  hauteur  ;  à  7  lieues  un  tiers  au  Nord-Eft  de 
Nantes  ,  Ion  Evêché  &  fon  refîbrt  ;  à  17  lieues  de  Rennes  j  &:  à  3 
lieues  d'Ancenis ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  1000  commu- 
niants :  la  Cure  efl  à  l'Ordmaire.  Le  territoire  ,  coupé  par  la 
rivière  du  Havre ,  offre  à  la  vue  des  terres  en  labeur ,  &  une 
quantité  prodigieufe  de  landes  :  à  deux  vallons  près ,  le  terrein 
eft  de  fuperficie  plane.  La  maifon  noble  de  la  Guibourgere 
appartenoit ,  en  1460,  à  Guillaume  de  la  Guibourgere.  Joachim 
de  la  Guibourgere  fut  Aumônier  du  Roi.  Jacques  fut  Confeilier 
au  Parlement ,  Grand  Sénéchal  de  Nantes  ,  &  fucceffivement 
Evêque  de  Saintes  &  de  la  Rochelle.  Guillaume  ,  Raoul ,  &  Joa- 
chim de  la  Guibourgere,  ëtoient  Confeillers  au  Parlement  de 
Rennes ,  en  1 670.  Cette  Terre  a  haute- Juflice  ,  avec  titre  de 
Châtellenie ,  &  appartient  préfentement  à  M.  Pont -Carré  de 
Viarme  :  le  Bois-Maquiau  appartenoit,  en  1691  ,  à  Claude  de 
Cornullier ,  Sieur  du  Bois-Maquiau ,  Préfident  à  la  Chambre  des. 
Comptes  de  Bretagne.  *" 

TELGRUC  j  fur  la  montagne  de  Meucon  ;  à  6  lieues  8c 
demie  au  Nord-Ouefl  de  Quimper*,  fon  Evêché  &  fon  reffort^ 
à  43  lieues  de  Rennes  ;  &  à  j  lieues  deux  tiers  du  Faou  ,  fa 
Subdélégation.  On  y  compte  1300  communiants:  la  Cure  elt 
à  l'alternative.  Le  territoire ,  borné  au  Sud-Oueft  par  la  mer , 
6c  au  Nord-Ell  par  les  montagnes  de  Meneham  ,  renferme  des. 
terres  en  labeur  de  bonne  qualité ,  &  des  landes  dont  le  fol 
ne  paroît  pas  mériter  d'être  cultivé.  Le  manoir  de  Ker-edaa 
appartenoit,  en   1400,  à  Jean  de  Keredan. 

THEILLAC  j  trêve  de  MiiTillac  ;  à  1 2  lieues  &  demie  au 
Nord-Oueft  de  Nantes  ;  &  à  1 5  Heues  de  Rennes.  L'Eghfe  dé- 
pend de  l'Abbaye  de  Saint-Gildas-des-Bois.  Le  château  &  mai- 
fon feigneuriale  de  Theillac  appartenoit,  en  1360,  à  Guillaume 
de  Theillac.  Un  Seigneur  de  cette  maifon  époufa  une  Demoifelle 
de  Chateaubriand  de  Beaufort.  Jeanne  de  Theillac  époufa 
Triftan  de  la  Lande ,  Sieur  de  Guignen  ,  à  condition  que  leurs 
enfants  prendroient  le  nom  &  les  armes  de  Theillac.  François 
de  Theillac  époufa  Aliénor  de  Volvire  ,  &  René  prit  en  ma- 
riage Louife  d'Epinai.  En  1668,  cette  Terre  appartenoit  à  Jean 
Fourché  ,  Sieur  de  Theillac  ;  &  aujourd'hui  ,  avec  hauteJuf- 
tice ,  à  M.  le  Marquis  de  Bçcdelievre ,  Premier  Préfident  à  la 

Chambre 


THE=THO  415 

Chambre  des  Comptes ,  qui  poflede  encore  la  haute-Juflice  de 
la  Roche-Hervé. 

THEIX  ;  fur  une  hauteur  ,  &  fur  la  route  de  Nantes  à  Vannes  j 
à  2  lieues  de  Vannes  ,  fon  Evêché  ,  fa  Subdélégation  ,  &  fon 
relTort  j  &  à  "21  lieues  de  Rennes.  On  y  compte  2400  commu- 
niants :  la  Cure  eil  à  l'alternative.  Le  territoire ,  coupé  par  un 
bras  de  mer  qui  fort  du  Morbihan  ,  renferme  des  terres  en 
labeur ,  des  marais ,  &  des  landes.  Ses  maifons  nobles  l'ont  ;  Tre- 
dudai ,  Clerigo  ,  le  Granil ,  le  Pleffis ,  Ker-nier ,  le  Pltiîis-Joiro  , 
Ker-audran ,  Ker-fape  ,  Salarun  ,  &  le  Pont-Cleze.  On  remarque , 
dans  ce  territoire  ,  la  Chapelle  de  Saint-Marc  ;  l'Eglife  de  la  Tri- 
nité-de -la -Lande ,  fuccurfale  de  laParoilIej  &  quelques  mou- 
lins à  vent. 

THORIGNÉ  ;  dans  un  fond  ;  à  2  lieues  à  l'Ell-Nord-Efl  de 
Rennes  ,  fon  Evêché  ,  fa  Subdélégation  ,  &  fon  refTort.  Cette 
ParoilTe  relevé  du  Roi  ,  &  compte  500  communiants  :  la  Cure 
cfl:  préfentée  par  l'Abbé  de  Saint  -  Melaine.  Le  territoire  ell 
arrofé  par  les  rivières  de  Vouvre  &  de  Vilaine ,  &  en  partie 
occupé  par  la  forêt  de  Rennes  ;  les  terres  font  exaftement  cul- 
tivées ,  &■  les  habitants  font  beaucoup  de  cidre.  En  1174, 
Maurice  ,  Abbé  de  Rillé,  foufcrivit  à  l'accord  fait  entre  Guil- 
laume ,  Abbé  de  Saint-Melaine  ,  &  JofTelin ,  Abbé  de  Savigni , 
pour  les  dîmes  de  la  Paroille  de  Thorigné.  En  1 400 ,  le  terri- 
toire renfermoit  trois  manoirs  nobles  ,  qui  font ,  le  manoir  du 
Pleffis  ,  le  manoir  du  Seigneur  de  Guénour  ,  &  celui  des 
Landelles. 

THOUARÉ  ;  à  peu  de  diflance  de  la  rive  droite  de  la  Loire  ; 
à  2  lieues  un  quart  au  Nord  -  Eil  de  Nantes ,  fon  Evêché ,  fa 
Subdélégation  ,  &  fon  reiïbrL  On  y  compte  600  communiants  : 
la  Cure  ell  préfentée  par  le  Chapitre  de  Nantes ,  &:  la  Cha- 
pellenie  de  Saint-Vincent  par  le  Seigneur  de  Thouaré.  Le  ter- 
ritoire ,  borné  par  la  Loire ,  offre  à  la  vue  les  plus  belles  prai- 
ries ,  des  terres  en  labeur ,  des  vignes  dont  le  vin  ell  d'alfez 
bonne  quaUté  j  8c  au  Nord  de  fon  bourg ,  des  landes  dont  le 
fol  paroît  mériter  les  foins  du  cultivateur  :  ceux  des  habitants 
qui  font  laborieux,  commencent  à  défricher.  L'an  11 23,  la 
poffeflion  de  l'Eglife  de  Thouaré  fut  confirmée  à  l'Evêque  de 
Nantes.  Dès  1450  ,  on  faifoit  de  bonne  chaux  à  Thouaré. 
Tome  IF.  H  3 


4t6  T  H  O  =  T  I  N 

Le  premier  Juillet  1 584  ,  fut  baptifé  dans  l'Eglife  de  Thouaré^ 
par  Guinebaud  ,  Refteur  de  cette  Paroiffe ,  Claude  de  Breta» 
gne ,  fils  de  Charles  de  Bretagne  &  de  Dame  Philippe  de 
Samt-Amadour ,  fon  époufe  ,  Comteffe  de  Vertus,  Baronne  de 
Coueffret ,  Vicomtefle  de  Guingamp  ,  &  Dame  de  Thouaré  ; 
le  jeune  Seigneur  eut  pour  parrains ,  Philippe  du  Bec ,  Evêquê 
de  Nantes ,  &  Paul-Emile  de  Frafque ,  Seigneur  de  la  Senar- 
diere  ,  Gentilhomme  de  la  Chambre  du  Roi  ;  &  pour  marreine  ^ 
Françoife  de  Rochecouart  ,  Baronne  de  Mofai ,  Dame  Douai- 
rière de  la  Touche-Limoufiniere.  La  haute-JulHce  de  Thouaré 
appartient  à  la  Dame  de  ce  nom. 

TINTENIAC  i  fur  la  route  de  Rennes  à  Saint  -  Malo  ;  à  S 
lieues  un  quart  de  Saint  -  Malo  ,  fon  Evêché  ;  à  5  lieues  Se 
demie  de  Rennes  ;  Se  k  ï  Heue  de  Hédé ,  fa  Subdélégation  de 
fon  reffort.  Cette  Paroiffe  relevé  du  Roi  ,  &  compte  2000 
communiants  ,  y  compris  ceux  de  Trimer  ,  fa  trêve  :  la  Cure 
eft  un  Prieuré  à  la  nomination  de  l'Abbeffe  de  Saint-Georges 
de  Rennes.  Le  territoire ,  d'une  fuperficie  plane  ,  eft  cultivé 
avec  beaucoup  de  foin. 

Dans  le  onzième  fiecle ,  Guillaume  de  Tinteniac ,  Chevalier, 
furnommé  Ifmaëlite ,  fit  bâtir  dans  fon  château  une  Chapelle  , 
avec  la  permifïïon  de  Rainauld ,  Evêque  de  Saint-Malo.  L'Ab- 
befîe  de  Saint  -  Georges  de  Rennes ,  à  qui  appartenoit  l'EgHfe 
paroifTiale  de  Tinteniac ,  fit  des  difficultés  j  mais  l'affaire  fe 
termina  par  un  accord  paffé  dans  l'Abbaye  de  Saint-Georges, 
en  préfence  du  Prélat  &  des  parties  intéreffées.  Il  fut  décidé 
que  l'Aumônier  ,  deffervant  la  C  hapelle  ,  auroit  la  moitié  des 
oblations  qui  s'y  feroient  ,  &  l'Abbeffe  l'autre  moitié ,  à  con- 
dition que  les  paroiffiens  feroient  tenus  d'afîifler  à  la  Meffe  de 
r£gUfe  paroiffiale  aux  principales  Fêtes  de  l'année  ,  d'y  faire 
leur  devoir  pafchal ,  &  que  l'Aumônier  ne  pourroit  baptifer ,  ni 
donner  la  bénédiéHon  nuptiale  dans  fa  Chapelle  ,  fans  la  per- 
miffion  du  Curé.  En  1168,  Henri  II ,  Roi  d'Angleterre,  affiégea 
&  prit  le  château  de  Tinteniac  ,  qui  appartenoit  à  Olivier  de 
Tinteniac.  En  1 1 96 ,  ce  dernier  donna  à  l'Abbeffe  de  Saint- 
Georges  ,  pour  la  fondation  d'une  Chapellenie  à  l'autel  de 
Saint-Jean-Baptiile  de  fon  EgHfe  abbatiale  ,  le  heu  ,  m.<noir , 
métairies  ,  fiefs  ,  Seigneurie ,  jurifdiftions ,  hommes  &  fujets  de 
la  Ville-Ales ,  &  les  dîmes  de  Carleboitiere ,  de  la  Poocleterie  „ 
de  la  Sante-Cochere  ,  de  la  Boerie ,  &   de  la  Méenerie.  Cette 


..TIN  4Z7 

première  donation  fut  fuivie  d'une  autre ,  faite  du  confentement 
•     de  fa  mère  Eremburge ,  &  de  fa  fœur  Trefaine  ,  pour  le  falut 
des    âmes   de   fon  père  Guillaume ,  de  fon   frère  aîné  Geoffroi 
de    Tinteniac ,  &   de    tous    fes    ancêtres  ;  c'étoit   les  dîmes    de 
Hédé   qu'il    donna  à  ce  Monaftere ,  à  la  charge    que  les  Reli- 
gieufes  feroient  dire  ,  à  perpétuité ,  une  MefTe  par  i'emaine  dans 
leur  Eglife.   L'Abbciye  de  Saint-Melaine  éprouva  aulfi  les  effets 
de  fa  générofîté.  Il  fonda,. de  concert  avec  fa  fœur  Trefdme, 
une  Meffe ,  qui  doit  fe  célébrer  tous  les  jours   &:  à  perpétuité , 
par  un  Moine  nommé  exprès ,  pour   le  falut   de    fon    ame ,  de 
celle  de  fa  fœur,  8c  de    leurs   fuccefleurs   refpe6lifs  ;  il  donna, 
pour  l'acquit  de   cette  fondation  ,  les   dîmes   qu'il  avoit  dans  la 
Paroifle   des  Ifs.  Le  Chapitre  de    Saint-Melaine  s'aflembla  pour 
la  confeftion  de   l'acte  paffé  à  ce   fujet ,  qui  fut  figné    en  pré- 
fence  de  Giraud ,  Evêque  de   Saint-Malo ,  de  Péan  de    Bechc- 
tel ,  de  Guillaume  d'Aubigné ,  &  de   plufieurs  autres.   Alam  de 
Tinteniac  ,  fils  d'Olivier  &  de  Théophile  ,  fon   époufe  ,  donna  , 
en  1 260 ,  une  mine  de  froment  de  rente  à  l'Abbaye  de  Saint- 
Jacques  de    Montfort.    On   trouve  dans    les-  archives  de  Saint- 
Georges  de  Rennes,  une  tranfa6^on ,  de  l'an   1271  ,  qui  porte 
qu'Obvier  II  du  nom  ,  Sire  de  Tinteniac  ,  fe  reconnoît ,  avec  fon 
nls  Guillaume  ,  Homme-lige  de  l'Abbeffe  &:    du   Monailere  de 
Saint-Georges ,  auxquels  ils  promettent  d'obéir ,  &  aux  Sénéchaux 
dudit  Monailere  ,  comme  Hommes-liges  &:   fujets   doivent  obéir 
à   leurs   Seigneurs  féodaux  ,  pour   tout   ce  qu'ils  pofféderont  au 
territoire  de   Tinteniac  ;  proteflant  qu'ils  comparoîtront ,  lorfqu'iis 
en  feront  requis,  à  la  Cour    defdites  Dames  AbbelTe    6l   Rcli- 
gieufes  ,  pour  y  recevoir  droit  &  juftice  ;   de  laquelle  Cour  ils 
pourront  fe  délivrer  à  congé  de   perfonne   &  de  menée,  félon 
ia  raifon  &  coutume  du  pays.  La  même  tranfiiftion  porte,  qu'aux 
fêtes  de  Saint-Bartheicmi  ik  de  Noèl  ,  les  Seigneurs  de  Tinteniac 
paieront  à  l'Abbaye    de    Saint-Georges   la   fomme   de   quarante 
livres  monnoie ,  moitié    par   moitié,  pour   dédommagement   (.\\:^ 
'    tailles   que  les  AbbcfTe   &    Religieufes  vouloient   percevoir   lur 
les  vaflaux  dudit  Obvier,  dans  fa  Terre  de  Tmteniac,  qu'il  tient 
d'elles ,  également  que  pour  récompenfe  des  profits ,  émoluments , 
&  droits   qu'elles  recevoient    du  marché    de  Tinteniac  ;  laquelle 
fomme  devoit  fe  payer  double  à  la  mort  des  Seigneurs  de  Tin- 
teniac ,  qui  ,  en  outre  ,  dévoient  annuellement ,  à  la  même  Com- 
munauté ,  une  rente  en  avoine.  Les  Religieufesfe  réferverent  toute 
ia  paille  des  dîmes  de   la  Paroifî'e ,  à  l'exception  de    celle  de 


4i8  TIN=TO 

feigle  qu'elles  abandonnèrent  à  Olivier  &  à  fes  fuccefleufs^ 
Jean ,  Chevalier ,  Seigneur  de  Tinteniac ,  de  Becherel  ,  &  de 
Rouillé,  s'acquit  une  grande  réputation.  Il  fuivit  le  parti  de 
Charles  de  Blois ,  combattit  pour  les  Bretons  à  la  bataille  des 
Trente,  &  fut  tué,  en  1352,  à  celle  de  Mauron.  (Voyez 
la  Croix-Helléan  &  Mauron.)  Il  avoir  époufé  Jeanne  de  Dol , 
Dame  de  Combourg  ,  de  laquelle  il  ne  laifTa  qu'une  fille, 
nommée  Ifabeau  de  Tinteniac^  qui  époufa  Jean  de  Laval,  à  qui 
elle  porta  fes  biens.  Le  5  Août  1399,  Julienne  du  Guefclin, 
Abbefle  de  Saint-Georges  de  Rennes,  permit  au  Duc  Jean  IV, 
de  lever  ■  vingt  fols  par  feu  fur  les  hommes  de  Tinteniac.  En 
141 9,  Anne,  Comtefle  de  Laval,  de  Vitré,  &  de  Tinteniac, 
obtint  du  Duc  Jean  V  des  lettres  qui  lui  permettoient ,  de  lever 
fur  fes  fujets  de  Tinteniac  ,  un  fouage,  dont  les  deniers  dévoient 
être  employés  à  la  réédification  des  fortifications  du  château  de 
cette  Paroifle ,  qui  avoir  été  ruiné  par  les  guerres ,  &  obtint  la 
continuation  de  ce  fouage ,  par  d'autres  lettres  de  Tan  1428, 
parce  que  la  première  fomme  levée  n'avoir  pu  fuffire  à  tous 
les  travaux.  En  1553,1e  Roi  augmenta  les  foires  de  Tinteniac, 
&  accorda  un  oftroi  de  trente  tonneaux  de  vin ,  pour  celui  qui 
auroit  abattu  le  Papegai  de  l'Arbatre  ;  &  vingt  tonneaux  pour 
celui  qui  l'abattroit  avec  l'arquebufe  j  toutes  ces  concefïions  faites 
en  faveur  de  Gafpard  de  Coligni ,  Amiral  de  France  ,  &  de 
Catherine  de  Laval ,  fon  époufe ,  Seigneur  &  Dame  de  Tinte- 
niac. L'illuftre  famille  de  ce  nom  fubfifle  encore  en  Bretagne , 
dans  la  perfonne  de  M.  le  Marquis  de  Tinteniac,  iffu  d'une 
branche   cadette  de  cette  maifon. 

TONQUEDEC  ;  à  3  lieues  &  demie  au  Sud-Oueft  de  Tré- 
guier  ,  fon  Evêché  ;  à  3 1  Heues  de  Rennes  ;  &  à  2  Heues  de 
Lannion ,  fa  Subdélégation  &  fon  reflbrt.  Cette  ParoifTe  relevé 
du  Hoi,  &  compte  1700  communiants.  L'Eglife  efi:  une  Collégiale 
en  patronage  laïque  :  les  Canonicats  font  préfentés  par  le 
, Seigneur  de  Tonquedec.  Le  territoire  ,  d'une  fuperficie  plane, 
eft  arrofé  des  eaux  des  rivières  de  Tréguier  &  du  Guer.  Les 
terres  font  exactement  cultivées  ,  &  rapportent  d'abondantes  ré- 
coltes en  toutes  fortes   de  grains. 

Dès  l'an  1400  ,  le  Chapitre  de  Tréguier  pofTédoit  le 
manoir  noblç  du  Porzou  :  les  autres  maifons  nobles  de 
Tonquedec,  font  j  la  Vieille-Motte  ,Ker-huon,  Ker  -  rel  ^ 
&  Troguendi. 


'      T  O  R  =  T  R  A  419 

TORCÉ  ;  à  7  lieues  à  l'Efl  de  Rennes ,  {on  Evêché  &  fon 
reflbrt  ;  &  à  i  lieue  trois  quarts  de  Vitré ,  fa  Subdélégation. 
On  y  compte  550  communiants  :  la  Cure  elt  à  l'alternative. 
Le  territoire ,  d'une  fuperficie  plane ,  offre  à  la  vue  deux  petits 
vallons  ,  dans  lefquels  deux  ruiffeaux  prennent  leur  fource.  Le 
terrein  eft  couvert  d'arbres  à  fruits,  Se  très-exa8:ement  cultivé j 
on  y  remarque  les  maifons  nobles  nommées ,  le  Pleffis ,  le  Frefne , 
la  Chevalerie  ,  le  Châtel ,  la  Beurerie  ,  la  Quemiere ,  la  Rim- 
bourgere ,  la  Haie  de  Torcé ,  la  Racinais ,  la  Coliniere ,  &  la 
Gatellerie. 

TOURCH5  à  4  lieues  &  demie  à  l'Eft  de  Quimper,  fon 
Evêché;  à  35  lieues  de  Rennes;  &  à  4  lieues  de  Concarneau, 
fa  Subdélégation  &:  fon  reflbrt.  On  y  compte  600  communiants  :  la 
Cure  eftà  l'alternative.  Le  territoire  renferme  des  terres  en  labeur, 
&  beaucoup  trop  de  landes.  En  1380  ,  on  connoiflbit  dans  ce  ter- 
ritoire, les  manoirs  de  Ker-ninedel  ,  de  la  Rivière  ,  &  de  Coatafor. 
La  haute-Juflice  de  Coafl:eloret  appartient  à   M.  de  Quimer. 

TOURIE  ;  fur  la  route  de  Rennes  à  Chateaubriand  ;  à  6 
lieues  deux  tiers  de  Rennes ,  fon  Evêché  &c  fon  reflbrt  ;  &  â 
3  Ueues  deux  tiers  de  Chateaubriand ,  fa  Subdclégation.  On  y 
compte  900  communiants  :  la  Cure  ell  à  l'alternative.  Le  ter- 
ritoire ,  coupé  de  ruifleaux  qui  vont  fe  jetter  dans  la  rivière  de 
Semnon,  offre  à  la  vue  des  terres  très-bien  cultivées  ,  beau- 
coup d'arbres  &  buiffons.  La  maifon  noble  de  la  Touche 
appartenoit ,    en    1 400 ,  à  Eon  de  la  Touche. 

TOUVOIS  ;  à  8  lieues  au  Sud-Sud-Ouefl  de  Nantes  ,  fon 
Evêché  &  fon  reffort  ;  à  30  lieues  de  Rennes  ;  &:  à  3  lieues 
un  quart  de  Machecou ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  1  ico 
communiants  :  la  Cure  elt  à  l'Ordinaire.  Ce  territoire  ,  borné 
au  Sud  par  la  province  de  Poitou ,  renferme  la  forêt  de  Tou- 
vois ,  des  terres  en  labeur ,  quelques  cantons  de  vignes ,  &  des 
landes.  On  y  remarque  la  Chapelle  de  Notre-Dame  de  Fré- 
ligné ,  Prieuré  de  la  dépendance  de  l'Abbaye  de  Geneflon. 
Touvois  &  Saint -Etienne -de-Mer- morte  ,  forment  une  hautc- 
Juflice  ,  qui  appartient  à   M.    le  Marquis  de  Juigné. 

TRAMAIN  ;  à  7  lieues  à  TEfl-Sud-Efl:  de  Saint-Brieuc  ,  fon 
Evêché;  à  13  lieues  un  tiers  de  Rennes;  &:  à  deux  lieues  deux 


430  TRAITRE 

tiers  de  Lamballe  ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroifle  reffortità  Jugon; 
on  y  compte  400  communiants  :  le  Roi  en  ei\  le  Seigneur ,  &  la  Cure 
eu  à  l'alternative.  Le  territoire  ,  d'une  fuperficie  plane  ,  renferme 
des  terres  bien  cultivées  ,  &  quelques  landes.  La  maifon  noble  de 
la  ViUe-Goures  appartenoit ,  en  1500,  à  Pierre  de  Lorgerilj 
&  celle  du  Temple  ,  à  Pierre  du   Bois-Adam. 

TRANS  ;  à  7  lieues  au  Nord-Nord-Eft  de  Nantes ,  fon  Evê- 
ché  &  fon  reifort  ;  à  1 7  lieues  de  Rennes  j  &  à  4  lieues  d'An- 
cenis  ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  1 000  communiants  :  la 
Cure  eft  à  l'Ordinaire.  La  Chapellenie  de  la  Grofliere  efl:  pré- 
fentée  par  le  Roi.  Le  territoire ,  arrofé  des  eaux  de  la  rivière 
d'Erdre ,  &  d'une  fuperficie  plane  ,  offre  à  la  vue  des  terres 
bien  cultivées  ,  des  prairies ,  6c  beaucoup  de  landes.  La  haute- 
Juftice  des  Chauvelieres  appartient  à  M.  de  Lohéac. 

.  TRANS  j  fur  la  route  de  Dol  à  Fougères  ;  à  9  lieues  au  Nord 
de  Rennes ,  fon  Evêché  &  fon  reffort ,  &  à  2  lieues  d'Antrain , 
fa  Subdélégation.  On  y  compte  800  communiants  :  la  Cure  ell 
préfentée  par  le  Scholaftique.  Le  territoire  eft  en  partie  occupé 
par  la  forêt  de  Villecartier  ,  qui  appartient  au  Roi  &  contient 
environ  mille  fix  cents  foixante-dix-huit  arpents  ,  non  compris  un 
bois  taillis  qui  la  joint ,  &  dans  lequel  font  deu.^  étangs.  On 
y  voit,  en  outre  ,  des  terres  labourables  &  des  landes.  En  1400 , 
le  château  de  Villeaudon  ou  Villeandran  appartenoit  à  Guillaume 
du  Bois-Baudri.  Pierre  du  Bois-Baudri,  Chevalier,  Seigneur  de 
Trans ,  fut  fait  Capitaine  de  deux  cents  hommes  de  pied ,  par 
lettres  du  Roi  Henri  III,  données  à  Tours  le  4  Juin  1 589  :  cette 
Terre  ,  avec  haute-Juftice ,  appartient  préfentement  à  M.  de  la 
Motte  de  Beaumanoir. 

La  Chefnelais  appartenoit,  en  1400,  à  Jean  de  Romillé  j  la 
Baffe  -  Villarmoye ,  à  Jean  de  la  Villarmoye  ;  la  Fontaine ,  à 
Tiphaine  de  Senedavi ,  Dame  de  la  Fontaine  :  la  Haute-Villar- 
moye ,  à  Renaud  de  Launai  -,  le  Vert-Bois ,  à  Jean  du  Hallai  j  Se 
l'Abbaye ,  à  Guillaume  Rouxel. 

TRÉAL  ;  dans  un  fond  j  à  ïo  lieues  à  FEft-Nord-Eff  de 
Vannes ,  fon  Evêché  ;  à  1 1  lieues  de  Rennes  ;  &  à  2  lieues  de 
Maleffroit ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  reffortit  à  Ploermel, 
&  compte  1200  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le 
territoire,  qui,  en  13 00,  étok  pour  la  majeure  partie  planté  en 


TRE  45  r 

vîgnes ,  n'offre  plus  aujourd'hui  à  la  vue  que  des  terres  en  la^ 
heur ,  des  prairies ,  &  beaucoup  de  landes  ;  toutes  les  vignes 
ont  été  détruites  ,  apparemment  parce  quelles  ne  produifoient 
rien.  Le  Roi  poiïede  plulieurs  fiefs  dans  cette  Paroifle.  En  1500, 
les  maifons  nobles  de  l'endroit  étoient  :  le  Pleflis-Tréal ,  haute- 
Juftice  ,  qui  appartient  aujourd'hui  à  Madame  Thébaud  de  U 
Ruée:  la  Ville  -  Reguen ,  la  Ville -Gleyo,  au  Sieur  de  Tréal  : 
les  manoirs  de  la  Rue  &  du  Coiiedic  ,  à  Louis  de  la  Bour- 
donnaye  ;  (  cette  dernière  ,  qui  a  moyenne-Juftice  ,  appartient  à 
M.  Cartel  de  Landual  :  )  la  Godon  ,  à  Raoul  Perdic  j  la  Gui- 
chardais ,  Lefliac  ,  la  Beraye  ,  6:  la  Touche  ,  à  N.  de  la  Gui- 
chardais  :  la  Provotaye  ,  à  Jean  Bellouan  ;  la  Logerais  ,  au 
Sieur  de  la  Morlaix  ;  le  Pré-Clos ,  à  Guillaume  Gouridon  ;  le 
Bot-Sabri  ,  à  Jean  de  Bois-Bic  ;  la  Chenot  ,  aux  héritiers  de 
Raoul  de  la  Marche  ;  Fanhonnac  ,  à  N.  du  Bois-Guehenneuc ,  à 
caufe  de  fa  femme  :  &  le  Bois-Brun  ,  au  Sieur  de  Treceflbn  ; 
cette  dernière  ,  qui  a  haute  -  JulHce  ,  appartient  à  M.  de 
Tourtat. 

TREBABU;  à  14  Heues  au  Sud-Oueft  de  Saint-Pol-de-Lcon , 
Ion  Eveché;  à  53  heues  de  Rennes;  &  à  3  lieues  trois  quarts 
de  Brelljla  Subdélcgation  &  fon  reflbrt.  On  y  compte  300 
communiants  :  la  Cure  ell  préfentée  par  l'Evêque.  Le  territoire, 
borné  k  l'Ouell  par  la  mer ,  renferme  des  terres  labourables  & 
des  landes.  En  1280,  on  y  remarquoit  le  château  de  Ker- 
morvan  ,  qui  appartenoit  à  Alain  de  Kermorvan  ;  cette  Terre 
devoir  onze  Chevaliers  pour  la  remonte  de  l'armée  du  Duc  : 
elle  fut  érigée  en  Bannière  ,  par  lettres  de  Pierre  II ,  données  à 
Vannes  le  17  Février  1454,  avec  le  privilège  de  fe  déUvrer  à 
congé  de  perfonne  &  de  menée ,  pour  deux  jours ,  à  la  Barre 
de  Lefneven,  &c. 

TREBEDAN  ;  à  7  lieues  au  Sud-Oueft  de  Dol ,  fon  Eveché; 
à  10  lieues  un  quart  de  Rennes;  &  à  2  lieues  un  quart  de 
Dinan  ,  fa  Subdélégation  &  fon  reflbrt.  On  y  compte  400  com- 
muniants :  la  Cure  eiî:  à  l'Ordinaire.  Le  territoire  renferme  beau- 
coup de  landes ,  les  terres  en  labeur  ne  font  pas  mal  cultivées. 
En  1 500  ,  on  connoiflbit  à  Trebedan  les  maifons  nobles  fuivantes; 
le  Nadai,  à  Guvon  iNouel  ;  le  Bois-Paflemalct ,  à  Guillaume  le 
Puroux  ;  Lefcoubliere  ,  à  Jean  le  Selle  ,  Seigneur  de  Lcfcou- 
bliere  j  la  Hauteville  ,  à  Jean  Lambert  ;  6c  le  Uulonge  ,  à  Vin- 


451  TRE 

cent  Bouan  ;  cette  dernière ,  qui  a  moyenne-Jufllce ,  appartient 
aujourd'hui  à  M.  de  l'Orgeril. 

TREBEURDENj  fur  une  hauteur  j  à  4  lieues  trois  quarts  à 
rOueft  de  Tréguier,  fon  Evêché  j  à  34  Heues  de  Rennes  ;  &  à 
I  heue  &  demie  de  Lannion ,  fa  Subdélégation  &  fon  reffort. 
On  y  compte  550  communiants:  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le 
territoire ,  borné  à  l'Oueil  par  la  mer  ,  eil  très-bien  cultivé  ,  & 
produit  des  récoltes  abondantes.  Anciennement  on  y  voyoit  les 
maifons  nobles  nommées  5  Ker-aziou  ,  Trauguern  ,  Lefleinou  ,  Ker- 
avel ,  Ker-glezrec  ,  Traouvern  ;  Melieau  ,  &  Peulan ,  donnée 
vers  l'an  1225,  par  Raoul  de  Calomnia  ,  Efpagnol ,  à  l'Ab- 
baye de  Begars. 

TREBCEUFS  -,  à  6  lieues  &  demie  au  Sud-Sud-Eft  de  Rennes , 
fon  Evêché,  fa  Subdélégation,  &  fon  reffort.  On  y  compte 
1500  communiants  :  la  Cure  ell  préfentée  par  l'Abbé  de  Saint- 
Melaine.  Ce  territoire ,  coupé  par  la  rivière  de  Semnon  &  quel- 
ques ruiffeaux  ,  eft  couvert  d'arbres  &  buiffons ,  il  offre  à  la 
vue  des  terres  en  labeur ,  de  bonnes  prairies ,  &  des  landes  :  les 
habitants  font  beaucoup  de   cidre. 

TREBRI;  dans  un  fond  ;  à  5  lieues  au  Sud -Eft  de  Saint- 
Brieuc  ,  fon  Evêché  ;  à  1 5  lieues  de  Rennes  ,  fon  reffort  ;  &  à 
I  lieue  un  quart  de  Moncontour  ,  fa  Subdélégation.  On  y 
compte  1 000  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  ter- 
ritoire ,  borné  au  Nord  par  les  montagnes  du  Mné ,  renferme 
des  terres  en  labeur ,  &  beaucoup  de  landes.  En  1530,  il  ren- 
fermoit  plufieurs  maifons  nobles ,  fçavoir  j  le  moulin  Bernard ,  à 
Jeanne  de  Moiffelles  5  les  Fermes ,  à  Jean  Urvoi  ;  la  Begaciere 
&  SuUian  ,  à  Pierre  de  Couefpel  ;  Duault  &  la  Motte  ,  à  Fran- 
çois de  la  Roche  -,  Lefpourez  ,  Saint- Maudé  ,  &  Premaigné  ,  à 
Charles  de  Beaumanoir ,  qui  avoir  été  Chambellan  du  Duc 
François  II ,  &  avoir  accompagné  Charles  VIII  à  la  conquête  du 
Royaume  de  Naples.  Il  fe  diftingua  tellement  à  la  bataille  de  For- 
noue,  que  le  Roi ,  pour  le  récompenfer  ,  le  fit  Chevalier,  fur  le 
champ  de  bataille  ,  &  lui  ceignit ,  lui-même ,  le  baudrier  :  il  le  fit 
enfuite  fon  Chambellan.  De  retour  en  Bretagne  ,  Beaumanoir 
cpoufa  Jacquemine  Duparc ,  Dame  de  la  Motte  Duparc  &  de 
Trebii.  Pré-Maigné,  avec  haute- Juftice ,  appartient  aujourd'hui 
à  M.   du  Mné  de  Lezurec  ,  qui  poffede  auffi  Lefpourez ,  haute- 

Juftice , 


*^  ^  ^  4U 

Juftîce,  &  Trebri,  haute-Juftice  :  la  Touche-Trebrî,  qui  a  haute-Juf- 
tice ,  appartenoit ,  en  1530,  à  Jacques  de  la  Roche,  qui  jouiflbit 
aufli  de  la  Viile-Robin.  Les  Poflelieurs  de  la  Touche-Trebri  ont 
été  pour  la  plupart  Gouverneurs  de  Moncontour  j  ils  ont  pris 
des  alliances  dans  les  maifons  d'Avaugour ,  de  Beaumanoir-La- 
vardin,  du  Beflo ,  de  Ker-goilai ,  de  Carné  ,  ôcc.  Chrillophe  de 
la.  Roche  ,  Seigneur  de  la  Touche-Trebri,  fut  Chevalier  de 
l'Ordre  du  Roi ,  &  député  de  la  nobleffe  de  Saint-Brieuc  à  la 
réformation  de  la  coutume,  en  1580.  Cette  maifon  fe  confondit, 
vers  l'an  1656,  avec  celle  de  la  Frefloniere.  La  Seigneurie 
appartient  aujourd'hui  à  M.  de  Bonamour  :  la  haute -Jullice  de 
Belorient  appartient  à  M.  de  Lanafcol  ,  qui  poflede  aulîi 
Duault,  avec  haute-Juftice. 

TREBRIVANT  ;  à  1 2  lieues  &  demie  à  l'Eft  -  Nord  -  Eft  de 
Quimper  ,  fon  Evêché  ;  à  29  lieues  de  Rennes  j  &  à  i  heue 
trois  quarts  de  Carhaix ,  fa  Subdélégation  &  fon  reïïbrt.  Cette 
Paroilîe  compte  1800  communiants,  y  compris  ceux  de  Mouf- 
toir ,  fa  trêve  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire ,  borné 
à  rOueft-Nord-Ouefl:  par  la  rivière  d'Aulne ,  renferme  des  terres 
en  labeur  de  bonne  qualité  ,  quelques  prairies ,  Ôc  des  landes 
aiïez  étendues.  L'Etang  ,  la  Brunaut  ,  &  Loflancoat ,  forment 
une  haute  -  JulHce  ,  qui  appartient  à  Madame  la  Comtefle  de 
Forcalquier  :  Lochrifte  ,  haute  -  JulHce  ,  à  M.  de  Saint -Pern- 
Ligouyer. 

TREDANIEL  -,  iur  une  hauteur  j  à  4  lieues  un  quart  au  Sud- 
Eft  de  Saint-Brieuc,  fon  Evêché;  à  16  lieues  de  Rennes,  ion 
reffort  ;  &  à  une  demi-lieue  de  Moncontour ,  fa  Subdélégation, 
On  y  compte  11 00  communiants:  la  Cure  eu  à  l'alternative. 
Le  territoire,  couvert  d'arbres  &  bu  liions ,  eil  très-bien  cultivé, 
&  produit  des  grains  de  toutes  ei'peces ,  du  hn  ,  &  du  cidre. 
En  1530,  la  maifon  noble  de  la  ViUe-du-Bois  appartenoit  à 
François  de  Quédillac  ;  le  Vaulorent ,  à  Guyon  le  Poreilicr, 
Sieur  du  Bois-Hardi  ;  Belorient ,  à  Catherine  de  Quédillac  ;  les 
Granges ,  à  Antoine  de  Brehand  ,  Sieur  de  Lille  :  le  Plciîls-au- 
Noir,  &  Vauruellan,  à  Claude  de  la  Ville-Blanche  :  Tredaniel , 
à  Charles  Legadec  ;  la  HoufTai ,  à  Jean  &:  Gilles  le  Long  ;  la 
Ville-d'Anne,  à  N.  Prigent  ;  le  Chaucheix  ^  à  Guillaume  Léon; 
la  Ville -Amauri,  à  Guillaume  de  Kcrmené  ;  la  Ville-Meur,à 
François  du  Boiq  ;  la  Ville  -  Moifan ,  à  Jean  Douarin  ;  les 
Tome  IV.  1  3 


454  TRË  _ 

Marziere ,  à  N.  cKi  Parc  de  Lomaria  ;  Se  TEpine ,  à  Julien  Peî- 
lan.  Les  quatres  hautes-Juflices  de  Catuelan ,  de  Saint-Eloi ,  de* 
Madieres ,  &  du  Pleffis  -  au  -  Noir  ,  appartiennent  à  M.  le  Pré- 
fldent  de  Catuelan  :  les  hautes-Juflices  de  la  Marre  &  de 
Saint-Mirel ,  à  Madame  de  Froulé  :  la  Ville-Meno ,  haute- Juf- 
ftice  j  la  Roche ,  haute-Juftice  ;  6c  la  Ville-Chaplé ,  haute-Juf- 
tice ,  à  N.... 

TREDARZEC  ;  fur  une  hauteur  ;  à  une  demi-lieue  à  l'Eft  de 
Tréguier ,  fon  Evêché  &  fa  Subdélégation  ;  &  à  3  z  Heues  de 
Rennes*  Cette  ParoilTe  reflbrtit  à  Lannion  ,  &  compte  1300 
communiants  :  la  Cure  qû  préfentée  par  le  Chapitre  de  Tréguier* 
Ce  territoire  ,  borné  par  la  rivière  de  Tréguier  &  arrofé  de- 
plufîeurs  petits  ruiffeaux,  offre  à  la  vue  des  campagnes  riches 
&  bien  cultivées.  Par  lettres ,  données  à  Paris  au  mois  d'Avril 
1579,  le  Roi  Henri  III  accorda  à  François  de  Kerouzi ,  Sieur 
de  Quérir  ,  une  foire ,  qui  doit  fe  tenir  tous  les  ans ,  à  la  Cha- 
pelle de  Saint-Nicolas  ,  dans  cette  ParoifTe ,  avec  tous  les  pri- 
vilèges dont  jouiffent  les  autres  Seigneurs  des  environs  qui  ont 
des  foires.  Les  maifons  nobles  du  lieu  font  le  Bot ,  Ker-ino ,  la 
Chapponiere ,  Ker^vezec ,  Ker-vaëc,  Ker-antrez,  Ker-derien  ,  Ker- 
groas ,  Ker-guezec ,  Ker-hir  ,  &  le  Verfer. 

TREDIAS  5  à  8  lieues  au  Sud-Sud-OuefT:  de  Saint-Maîo ,  font 
Evêché  ;  à  1 1  Heues  de  Rennes  ;  &  à  4  lieues  trois  quarts  de 
Montauban,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroifle  reffortit  à  Dinan, 
&  compte  450  communiants:  la  Cure  eft  préfentée  par  l'Abbé 
de  Beaulieu.  Le  territoire  ,  d  une  fuperficie  plane  &  couvert 
d*arbres  &  buiffons ,  renferme  des  terres  fertiles  en  grains  de 
toutes  efpeces.  Par  lettres,  données  à  Dinan  le  21  Juin  i}6^  ^ 
le  Duc  Jean  IV  approuva  la  fondation  du  Prieuré  de  Saint- 
Georges  ,  faite  par  Geoffroi  le  Veyer  ,  qui  en  voulut  faire  un 
Hôpital. 

TREDRÉS  ;  à  5  lieues  à  TOueft-Sud-Oueft  de  Tréguier ,  fon 
Evêché  j  à  34  lieues  de  Rennes;  &  à  2  lieues  de  Lannion,  fa 
Subdélégation  &  fon  refTort.  Cette  ParoilTe  compte  1000  com- 
muniants ,  y  compris  ceu^  de  Loquemeau ,  fa  trêve  :  la  Cure 
eft  à  l'alternative.  Le  territoire ,  borné  par  la  mer  ,  produit  des 
grains  de  toutes  efpeces.  La  maifon  de  Ker-buzic  efl  dans 
Loquemeau. 


TRE  435 

TREDUDER;  à  5  lieues  &  demie  à  l'Oueft-Sud-Oueft  de 
Tréguier ,  fon  Evêché  j  à  3  5  lieues  de  Rennes  j  &  à  2  lieues 
&  demie  de  Lannion,  fa  Subdélégation  &  fon  reiloit.  On  y 
compte  400  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'Ordinaire.  Le  terri- 
toire ,  d'une  fuperficie  plane ,  efl:  très-bien  cultivé ,  8c  ne  ren- 
ferme que  peu  de  landes.  Les  maifons  nobles  de  la  Paroifîb 
font  y  Ker-aliou ,  la  Rivière  ,  Ker-armet ,  le  Nivirit ,  de  Rofcoët. 

TREFGLONOU  ;  fur  une  hauteur  ;  à  9  lieues  &c  demie  à 
rOuefl-Sud-Ouefl:  de  Saint-Pol-de-Léon  ,  fon  Evêché  j  à  49  lieues 
de  Rennes  j  &  à  4  lieues  de  Brell ,  fa  Subdélégation  &  fon 
reflbrt.  On  y  compte  450  communiants  :  la  Cure  elt  préftntée 
par  l'Evêque.  Le  Bourg  eft  peu  éloigné  d'un  petit  port  formé 
par  le  bras  de  mer  nommé  d'Abbrevrak  ,  ce  qui  lui  donne  la 
faculté  de  faire  un  petit  commerce  ;  & ,  comme  d'ailleurs  le  ter- 
roir eft  très-fertile  en  grains ,  les  habitants  rendent  leur  fort  trcs- 
heureux  par  le  travail, 

TREFFIAGAT  ;  fur  une  hauteur  ;  à  4  lieues  au  Sud-Sud-Ouefl 
de  Quimper,  fon  Evêché  &  fon  refîortj  à  42  lieues  de  Rennes  j 
&  à  deux  tiers  de  Ucue  de  Pont-l'Abbé  ,  fa  Subdélégation.  On  y 
compte  550  communiants  :  la  Cuce  ell  à  l'alternative.  Le  ter- 
ritoire ,  borné  au  Sud  par  la  mer ,  &  rempli  de  vallons  & 
monticules,  produit  des  grains  de  toutes  efpeces.  En  1400,  il 
renfermoit  cinq  manoirs  nobles ,  qui  font  j  Lanadehan  ,  Gouet , 
Ker-gelHn  ,  Cuiridan ,  &  Ker-véa ,  qui  appartenoit  alors  au  Vi- 
comte du  Faou. 

TREFFIEUC  j  à  i  o  lieues  au  Nord  de  Nantes ,  fon  Evêché 
5c  fon  lefTort  j  à  1 2  lieues  un  tiers  de  Rennes  j  &  à  2  lieues 
trois  quarts  de  Derval  ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  500 
communiants  :  la  Cure  efl  à  l'Ordinaire.  Le  territoire  ,  coupé 
par  les  rivières  de  Don  &  de  Corne  ,  offre  à  la  vue  un  pays 
couvert  &  plat;  des  terres  bien  cuhivcc?,  des  prairies,  &:  des 
landes  dont  le  fol  paroît  bon  ;  il  ne  faut  qu'une  bonne  culture 
pour  en  tirer  un  parti  avantageux. 

TREFFLAOUESNAN  ;  à  5  lieues  Ôc  demie  au  Sud-Ouefl 
de  Saint-Pol-de-Léon  ,  fon  Evêché  j  à  44  lieues  de  Rennes  ;  & 
à  I  lieue  trois  quarts  de  Lefneven  ,  fa  Subdélégation  6:  fon 
reilort.  On  y  compte    160Q   communituits ,  y  compris  ceux  de 


4}é  TRE 

Saint-Jean ,  àe  Querran ,  &  de  Trezilidé ,  fes  trêves  :  la  Cufé 
eft  préfentée  par  l'Evêque.  Le  territoire  ,  couvert  d'arbres  & 
buifîbns ,  &  coupé  de  plusieurs  ruifleaux  qui  coulent  dans  les 
vallons  ,  produit  des  grains  de  toutes  efpeces ,  des  pâturages 
abondants  ,  &  du  cidre.  Les  maifons  nobles  du  lieu  font  5  Cre- 
chengar  ,  Ker-melin  ,  Ker-merien  ,  &  Lannorgar. 

TREFFLÉAN  ;  dans  un  fond  -,  à  2  lieues  à  PEft-Nord-Eft  de 
Vannes,  fon  Evêché  &  fon  reflbrt;  &  à  19  lieues  de  Rennes. 
On  y  conpte  500  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'alternative. 
Des  terres  en  labeur  de  bonne  qualité  &  des  landes ,  voilà  ce 
que  ce  territoire  offre  à  la  vue.  Cette  Paroiffe  fut  annexée  à  la 
Pfallette  de  l'Eglife  Cathédrale  de  Vannes,  l'an  1459.  En  1500, 
on  y  remarquoit  les  maifons  nobles  de  Ker-gourie ,  de  Rendre- 
car,  &  de  Rofcanvec. 

TREFFLES  -,  fur  une  hauteur  ;  à  4  lieues  &  demie  à  FOuefî 
de  Saint-Pol-de-Léon ,  fon  Evêché;  à  45  Heues  de  Rennes;  ôc 
à  I  Heue  trois  quarts  de  Lefneven ,  fa  Subdélégation.  On  y 
compte  1200  communiants  :  la  Cure  eft  préfentée  par  l'Evêque. 
Le  territoire  ,  borné  au  Nord  par  la  mer  ,  à  l'endroit  nommé 
l'ance  de  Goulven ,  ell  coupé  par  un  bras  de  mer  ,  &  paffe 
pour  être  un  des  plus  fertiles  de  la  province.  Rivalon  de 
Treffles  mourut  Abbé  de  Landevenec  ,  en  1256.  La  maifon  de 
Coëtelez  eft  la  feule  que  nous   connoiffions  dans  ce  territoire. 

TREFUMEL  ;  dans  un  fond  ;  à  7  Heues  &  demie  au  Sud 
de  Saint-Malo  ,  fon  Evêché;  à  8  lieues  de  Rennes;  &à  3  lieues 
de  iVlontauban  ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  reffortit  à  Dinan, 
&  compte  350  Communiants  :  la  Cure  eft  préfentée  par  l'Abbé 
de  Saint-Jacques  de  Montfort.  Ce  territoire ,  coupé  par  la  Rance , 
offre  à  la  vue  des  terres  en  labeur  ,  des  prairies,  des  marais, 
&  des  arbres  fruitiers  :  C'eft  encore  ici  le  lieu  de  parler  du  pro- 
jet utile  de  rendre  la  *Rance  navigable.  Cette  rivière  a  flux  & 
reflux,  &  porte  bateaux  jufqu'à  Dinan.  Depuis  Dinan  jufqu'à 
Sain-Jouan-de-1'Ifle  ,  elle  eft  bordée  de  vingt  Paroiffes ,  dont  le 
terroir  eft  d'une  fertilité  reconnue;  mais  la  difficulté  du  tranfport 
empêche  les  habitants  de  faire  circuler  leurs  denrées  dans  la 
province.  Il  feroit  facile  de  leur  procurer  cette  commodité ,  en 
creufant  un  canal  de  cinq  Heues  de  longueur  ;  &  l'on  feroit 
naître  parmi   les  habitants   du  pays  une   aifance    dont  ils  font 


.     TRE  437 

encore  éloignés.  Le  territoire  de  Trefiimel  efl  remarquable  par 
la  grande  quantité  de  Table ,  nommé  de  Saint-Grégoire  ,  qu'on 
y  trouve.  Ce  fable  renferme  des  coquillages  entiers  &  bien 
confervés ,  particulièrement  des  cœurs,  des  cames,  des  tellines, 
des  peignes ,  des  dents  de  poifTons  ,  du  corail  blanc  ,  des  ma- 
drépores ,  &  des  vermifTeaux  tubulaires  ;  ce  qui  prcuveroit  que  ce 
canton  étoit    autrefois  couvert  des  eaux  de   la  mer. 

Le  château  de  Claire-Fontaine  appartenoit ,  en  1 400 ,  à  Charles, 
Chevalier ,  Seigneur  de  Lanvallai  &  de  TrefTain ,  fils  de  Raoul 
de  Lanvallai  &  de  Marguerite  de  Tornemine.  La  Terre  &  Sei- 
gneurie de  Rougé  fut  érigée  en  Baronnie  ,  en  1 576  ,  en  faveur 
du  Seigneur  de  Coètquen  :  cette  Baronnie ,  qui  a  haute-Juftice , 
appartient  préfentement  à  M.  de  la  Bintinaye ,  Greffier  des 
Etats  de  Bretagne ,  qui  pofTede  aulTi  la  moyenne-Juilice  de 
la  Rivière. 

TREGARANTEC;  à  6  lieues  à  l'Oueil-Sud-Ouefl  de  Saint- 
Pol-de-Léon ,  fon  Evêché;  à  45  lieues  de  Rennes;  &  à  une 
demi-lieue  de  Lefneven ,  fa  Subdélégation  &  fon  reflbrt.  On  y 
compte  800  communiants  :  la  Cure  cil  préfentée  par  l'Evêque. 
Le  territoire  ell  très-exaftement  cultivé ,  &  produit  toutes  fortes 
de  grains. 

Après  la  prife  de  Carhaix  ,  par  le  Comte  de  Montfort ,  en 
1341,  Hervé  de  Léon  fe  retira  au  château  de  Tregarantec. 
Gautier  de  Mauni  &  Tangui  du  Châtel  ,  qui  foupçonnoient  ce 
Seigneur  de  méditer  quelques  entreprifes  en  faveur  de  Charles 
de  Blois ,  formèrent  le  projet  de  l'enlever  avec  fa  compagnie. 
Ils  le  furprirent  en  effet ,  &  entrèrent  dans  le  château  par  une 
des  portes  qu'ils  avoient  brûlée  :  ils  firent  prifonniers  tous  ceux 
qui  s'y  trouvèrent ,  brûlèrent  la  place ,  de  firent  paffer  Hervé 
de  Léon  en  Angleterre,  où  il  courut  rifque  de  fa  vie,  comme 
on  l'a   rapporté  a  l'article   de  Saint- Pot- de- Léon. 

TREGASTEL;  à  4  heues  à  l'Oucll-Nord-Oucft  de  Trcguicr, 
fon  Evêché  ;  à  34  lieues  de  Rennes  ;  &  à  2  Heues  de  Lannion, 
fa  Subdélégation  &  fon  reffort.  0\\  y  compte  5C0  communiants: 
la  Cure  ell:  à  l'alternative.  Le  territoire,  borné  au  Nord  &:  à 
rOueft  par  la  mer ,  elt  très-bien  cultivé  «Se  très-fertile  en  grains. 
Le  château  de  Poulmanakh  ,  qui  a  paffé  pour  une  place  forte 
dans  fon  temps,  fut  afliégé  &  pris  par  le  Maréchal  d'Aumont , 
en  1594,  fur  les  troupes  du  Duc  de  Mcrcœur, 


4}8  TRE 

TREGENESTRE;  fur  une  hauteur  ;  à  1 4  lieues  à  rOueft-Sud- 
Cuell  de  Dol  5  fon  Evêché  j  à  17  lieues  de  Rennes  ,  fon  reffortj 
&  à  2  lieues  de  Moncontour ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte 
250  communiants  :  la  Cure  eft  préfentée  par....  Le  territoire 
ell:  exaftement  cultivé ,  &  rapporte  d'abondantes  récoltes  en 
toutes  fortes  de  grains. 

TREGOMAR  ;  à  5  lieues  &  demie  à  l'Efl-Sud-Efl  de  Saint- 
Brieuc  ,  fon  Evêché  ;  à  1 5  lieues  de  Rennes  i  &  à  i  lieue  èc 
demie  de  Lambaile ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroiffe  reflbrtit  à 
Jugon  ,  &  compte  200  communiants  :  la  Cure  ell  à  Talternative. 
Le  territoire  renferme  des  terres  en  labeur ,  des  landes ,  &  une 
partie  de  la  forêt  de  la  Hunaudaie.  Vers  1346  ,  Geoffroi  le 
Voyer ,  Baron  de  Tregomar  ,  époufa  Renée  Madeuc  ,  &  fut 
nom.mé  Chevalier  par  le  Comre  &  la  ComtefTe  de  Dinan ,  qui 
lui  accordèrent  une  penfion  fur  les  fermes  de  Dinan.  Olivier 
le  Voyer  ,  Baron  de  Tregomar ,  fut  nommé  Chambellan  du  Duc 
.Pierre  II,  en  145 1.  Jacques  le  Voyer ,  Chevalier  des  Ordres 
du  Roi  &  Gentilhomme  de  fa  chambre  ,  fut  député  de  la  No- 
bleffe  à  la  réformation  de  la  Coutume  de  Bretagne,  en  1580. 
Pierre  le  Voyer,  Baron  de  Tregomar,  vivoit  en  1680.  Cette 
Seigneurie  ,  avec  haute- Juftice  ,  appartient  aujourd'hui  à  M.  Cal- 
louet  de  Tregomar.  En  1500,  Bertrand  le  Voyer  poiTédoit  dans 
cette  Paroiffe,  les  manoirs  de  Tregomar,  de  Pont-Buffo ,  des 
Trotrés ,  de  la  Buffonnaye ,  &  de  la  Villéon.  La  baffe- Juftice  de 
la  Ville-Bily  appartient  à  Madame  Nugent. 

TREGOMEUR  -,  dans  un  fond  ,  fur  la  route  de  Saint-Briçuc 
à  Lanvollon  ;  à  2  lieues  un  quart  de  Saint-Brieuc  fon  Evêché  6c 
fa  Subdélégation;  &  à  22  lieues  un  quart  de  Rennes,  fon  ref- 
fort.  On  y  compte  700  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'alterna- 
tive. Ce  territoire  ,  coupé  de  ruiffeaux  qui  coulent  dans  les  val- 
lons ,  &  couvert  de  bois ,  eft  très-exadement  cultivé ,  à  quel- 
ques petites  landes  près.  Ses  produftions  font  :  le  grain ,  le  foin , 
&  le  cidre.  En  1500,  on  y  connoiffoit  les  maifons  nobles  nom- 
mées la  Ville-Gourio  ,  la  Foffe  ,  Raffrai ,  le  Clas-Rouault ,  le  Pont, 
la  Ville-Gillard ,  &  Buhouart. 

TREGON  j  fur  une  hauteur  ;  à  3  lieues  au  Sud-Oueft  de 
Saint-Malo ,  fon  Evêché  ;  à  1 3  lieues  &  demie  de  Rennes  ;  & 
à  3  lieues  &  demie  de  Dinan  ,  fa  Subdélégation  &  fon  reffort. 


TRE  439 

On  y  compte  300  habitants  :  laCureeflun  Prieuré  préfenté  par 
l'Abbé  de  Saint- Jacut.  Le  territoire  ,  d'une  fuperficie  inégale , 
renferme  des  terres  exa6lement  cultivées,  à  l'Hft  ,  au  Sud,  & 
à  rOueft;  mais,  au  Nord,  eft  une  anfe  confidérable  couverte 
par  les  fables  de  la  mer.  On  y  remarque  les  maifons  nobles 
de  Bouillons  &c  de  la  Ville-Guerif ,  avec  deux  moulins  à  vent, 
dont  nn ,   nommé  de  la  Vieuville ,  forme  un  beau  point  de  vue. 

TREGONNEAU  -,  à  4  lieues  &  demie  au  Sud-Sud-Ell  de  Tré^ 
guier  ,  fon  Evêché  ;  à  28  lieues  de  Rennes;  &  à  1  lieue  de 
Guingamp  ,  fa  Subdélégation.  Cette  ParoifTe  refTortit  àLannion, 
&  compte  400  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le 
territoire ,  coupé  par  la  nviere  de  Trieuc ,  &  couvert  d'arbres 
&  buiflbns ,  eft  allez  exaèlement  cultivé.  Ses  produ6Hons  font, 
les  grains  &  le   foin. 

TREGOUREZ  ;  à  4  lieues  &  demie  à  l'Eil-Nord-Efl  de 
Quimper ,  fon  Evêché  &  fon  reflbrt  ;  à  3  5  lieues  de  Rennes  j 
&  à  4  Heues  de  Châteaulin ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte 
1000  communiants:  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire, 
en  partie  occupé  par  les  montagnes  noires ,  &  par  des  landes 
dont  le  fol  eil  aufli  peu  propre  à  la  culture  que  celui  des  mon- 
tagnes, n'offre  à  la  vue  que  quelques  cantons  de  terres  labou- 
rables. On  y  remarquoit  jadis  la  forêt  de  Coateol,  qui  avoit 
trois  lieues  de  circuit.  Le  manoir  noble  de  Ker-gus  appartenoit , 
en  1420,  à  Yves  de  Kergus ,  aujourd'hui  à  M.  de  Kergus  de 
Kerftang  ,  de  la  même  famille. 

TREGROM;  à  5  lieues  au  Sud-Sud-Oueil  de  Tréguier  ,  fon 
Evêché  ;  à  26  lieues  de  Rennes  ;  &  à  trois  heues  trois  quarts 
de  Lannion ,  fa  Subdélégation  &  fon  reffort.  Cette  ParoifTe  relevé 
du  Roi,  &  compte  1500  communiants  :  la  Cure  ell  à  l'alter- 
native. Le  territoire  ,  d'une  fuperficie  plane  ,  &  couvert  d'ar- 
bres &  buifTons ,  eft  coupé  par  la  rivière  de  Guer.  Ses  produc- 
tions font  ;  les  grains ,  le  fom  ,  le  lin  ,  &  le  cidre.  On  y  con- 
noît  les  maifons  nobles  de  Ker-nafquiricc  &  de  Ker-golhai  ;  & 
la  moyenne-Juihce  de  Ker-noteriou  &  de  la  Lande-PloumiUiau, 
qui  appartient  à  M.  de  Marbœuf. 

TREGUENNEC  ;  à  4  lieues  &:  demie  au  Sud-Oueft  de 
Quimper  ,  fon  Evêché  &  fon  reffort  j  à  44  lieues  de  Rennes  ; 


440.  TRE 

&  à  2  lieues  de  Pont-l'Abbé ,  fa  Subdélégatîon.  On  y  compte  506 
communiants  :  la  Cure  eil:  à  Talternative.  Le  territoire,  borné 
par  la  mer ,  eft  fertile  en  toutes  fortes  de  grains.  Cette  Paroifle 
fut  fondée  par  Saint  AUore  ou  Albm,  troiiieme  Evêque  de  ce 
diocefe.  Sur  le  bord  de  la  mer ,  eil  une  Chapelle  dédiée  à  Saint 
Vougai ,  &  fort  fréquentée  des  pèlerins  :  elle  fut  bâtie  dans  le 
fixieme  fiecle. 

TREGUEUX  j  fur  une  hauteur  &  fur  la  route  de  Saint-Brieuc 
à  Moncontour;  à  deux  tiers  de  lieue  de  Saint-Brieuc,  fon  Eve- 
ché ,  fa  Subdélégation ,  &  fon  refîbrt  -,  &  à  1 9  lieues  un  tiers 
de  Rennes.  On  y  compte  600  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'al- 
ternative. Le  territoire ,  coupé  de  ruifîeaux  ,  eft  très-bien  cultivé  ^ 
&   rapporte  d'abondantes  moilTons  en    grains  de  toutes  efpeces.. 

TRÉGUIER  ;  ville  épifcopale  ,  avec  port  de  mer ,  par  les 
5  degrés  35  minutes  10  fécondes  de  longitude,  &  par  les  48 
degrés  46  minutes  45  fécondes  de  latitude;  à  32  lieues  de 
Rennes.  Le  diocefe  de  Tréguier  eft  borné  ,  au  Nord  ,  par  la  mer  ;, 
au  Sud  ,  par  l'Evêché  de  Quimper  j  à  l'Eft ,  par  celui  de  Saint- 
Brieuc  ;  &  à  l'Oueft  ,  par  celui  de  Saint-Pol-de-Léon.  Il  compte 
168950  habitants,  &  renferme  cent  neuf  Paroifles ,  trente-une 
trêves  ou  fuccurfales,  une  Abbaye,  douze  Couvents  d'Hommes^ 
treize  de  Filles ,  deux  Hôpitaux ,  &  un  Hôtel-Dieu.  Le  terroir 
eft  fertile  &  aflez  bien  cultivé.  Ses  produftions  font  ;  les  grains , 
le  cidre  ,  le  Hn ,  &  le  chanvre.  Le  principal  commerce  des  ha- 
bitants confifte  en  beftiaux  ,  lins  ,  fils ,  toiles ,  bleds  ,  papiers ,  &cc^ 

Trois  grandes  routes  aboutiftent  à  la  ville  épifcopale ,  où  Too: 
remarque  une  Communauté  de  ville  avec  droit  de  députer  aux: 
États  ',  une  Subdélégation ,  une  Brigade  de  MaréchaufTée ,  un 
Bureau  de  la  Pofte  aux  lettres,  &c.  On  y  compte  3000  ha- 
bitants ,  trois  Paroiftes ,  qui  font  :  le  Minihi ,  Saint-Sébaftien-de- 
ia-Rive ,  &  Saint-Vincent,  dit  V Hôpital,  dont  les  Cures  font 
préfentées  par  le  Chapitre  -,  cinq  Couvents  ,  qui  font  :  les  La- 
zariftes ,  les  Filles  de  Saint-Paul ,  les  UrfuUnes ,  les  Hofpitalieres, 
les  Sœurs  de  la  Croix  ,  &  l'Hôpital.  L'Eglife  Cathédrale  eft 
fous  le  vocable  de  Saint  TugduaL  Le  Chapitre  eft  compofé  d'un 
Tréforier ,  d'un  Chantre  ,  d'un  Scholaftique  ,  des  Archidiacres  de 
Tréguier  &  de  Plufquellec  ,  de  quatorze  Chanoines ,  &  de  ftx: 
Vicaires.  Les  armes  de  la  ville  font  :  d'azur  ,  à  trois  fleurs  de 
lis  d'or   formées  d'épis  de  bled  de  même,  2  &:  i» 


T  R  E  ^4t 

11  s*exerce  à  Tréguier  plufîeurs  Jurifdiftions ,  fçavoir  ;  les  Rc- 
gaires  ,  haute- Jullice ,  &  la  Prévôté,  moyenne -Juftice,  à  M. 
l'Evêque  de  Tréguier  j  Plouguiel ,  haute-Juftice  ,  &  Plougrefcant, 
haute- Juftice  ,  au  Chapitre  de  la  Cathédrale  j  Trouguendi ,  haute- 
Juftice  ,  à  M.  le  Maréchal  Duc  de  Richeheu  ;  Bois-Riou  ,  haute- 
Juftice ,  à  M.  de  Coëtivi  le  Borgne  j  Villebafle  ,  haute-Jullice  , 
à  M.  de  Tizé  :  Ker-ouarn  ,  le  Carpont ,  Coaltallec ,  &  Tro- 
queri ,  quatre  moyennes- JulHces ,  qui  appartiennent  à  M.  de 
Kerloret  :  le  Donnant .  moyenne-Jultice ,  à  M.  de  Carné  ;  Ker- 
alio-Lezernant ,  moyenne-Jullice ,  à  M.  de  Kerfalio-Artur  :  Ker- 
morvan  ,  moyenne-JulHce  ;  Ker-moufter,  idem  ;  &  la  Prévôté, 
iedm  ,  à  M.  de  Kermorvan-Barazec  ;  Ker-fiel ,  moyenne- Juflice  j 
&  Ker-deval ,  idem  ;  à  Madame  de  Carné  :  Ker-martin ,  moyenne- 
Juftice  ,  à  M,  de  la  Rivière  j  Ker-ouezec  ,  moyenne-Juftice  ,  à 
M*  de  Kerfaufon  ;  Ker-hir  ,  moyenne -Juftice,  à  M.  de  la-Ville- 
neuve-Allart  ;  Ker-prigent ,  bafTe-Juftice ,  à  M.  de  Kermel  j  Ker- 
maingui ,  hafTe  -  Juftice ,  à  M.  de  Kerannio  ;  Launai-Bat-loi , 
moyenne-Juitice ,  à  M.  de  Caradeuc  ;  le  Hildri ,  moyenne-Juf- 
tice  ,  à  Madame  de  Carné  -,  Verger-Lezerec ,  moyenne  &  bafTe- 
JulHce,  à  Madame  de  Rays  ;  Languenau  ,  baffe-JulKce  ,  à 
M.  de  Châteaugironj  Lohon ,  baiîe-Juilice,  à  Madame  du  Ru- 
men; Poulduran ,  bafTe-Juftice  ,  à  M.  de  Sarsfield  ;  Trolong , 
baiïe-Juflice  ,  à  M,  du  Halai.  L'Evêque  eli  le  Seigneur  de  la 
ville  épifcopale ,  qui  reflbrtit  à  Lannion  ;  'mais  les  Régaires  ref- 
fortifTent  direftement  au  Parlement.  Il  y  a,  à  Tréguier,  un  marché 
le  mercredi  de  chaque  femaine ,  &  une  foire  pendant  l'octave 
de  la    Fête-Dieu. 

Tréguier  n'a  pas  toujours  été  la  capitale  du  canton  qu'elle 
occupe.  La  ville  principale  du  peuple  qui  l'habitoit  du  temps 
de  Céfar,  &  que  l'on  croit  être  les  OlHfmiens  ,  le  nommoit 
J^exobie.  Céfar  ,  en  conféquence ,  les  appelle  Lexobii.  Cette 
Lexobie  étoit  dans  la  ParoilTe  de  Ploulech  ,  à  la  pointe  de  la 
rivière  de  Loquez  ou  le  Guer.  Les  habitants  du  pays ,  qui  par- 
lent la  langue  celtique ,  appellent  l'endroit  où  font  les  ruines 
de  Lexobie  ,  cofque  audet  ,  C'efl-à-dire  ,  VieilU  cité.  Elle  fut 
ruinée  par  les  Normands  au  commencement  du  neuvième  liccle. 
Ce  qui  a  donné  nailTance  à  la  ville  actuelle  de  Tréguier,  cd 
le  Monaftere  bâti  par  Saint  Tugdual  ,  fils  d'Hoël  le  Grand  , 
Roi  de  Bretagne,  dans  la  prclqu'ille  de  Trecor.  Ce  Prince,  de 
la  fiimille  régnante  de  Bretagne ,  pafla  en  Angleterre  pour  fc 
faire  iiiftruire  dans  les  fcienccs.  Quand  il  fut  en  ctat  de  réfléchir 
Tome  IK  K  3 


442^  T  R  E 

&  d'exercer  Ton  jugement ,  il  repaffa  en  Bretagne.  Les  brillantes 
efpérances  que  lui  auroit  pu  faire  concevoir  fa  naifTance  royale , 
ne  le  tentèrent  point.  Dégoûté  du  monde  ,  il  embrafla  l'Etat 
eccléiiaftique  ,  &  obtint  la  péninfule  nommée  Trecor  ^  pour  y 
bâtir  un  Monaftere.  Il  fit,  dit  l'hiftoire ,  le  voyage  de  Rome, 
&  fut  facré  Evêque  ;  mais  il  n'eut  point  de  Siège  épifco- 
pal.  Il  fut  ,  fans  doute  ,  un  de  ces  Evêques  régionnaires , 
fi  communs  dans  le  fixieme  fiecle.  On  croit  que  c'eft  lui 
qui  bâtit  la  Chapelle  de  Saint-Michel  ,  à  un  quart  de  Heue 
de  Tréguier. 

En  786  ,  le  Lieutenant  de  Charlemagne  prit  Lexobie.  En 
836,  les  Danois  5  fous  la  conduite  de  Hafting ,  ravagèrent  Lexo- 
bie ,  &  la  détruifirent.  Hafiiing ,  après  cette  expédition ,  fe 
rendit  au  Monaftere  de  Trecor ,  qu'il  pilla.  Avant  de  fe  rem- 
barquer ,  il  remarqua  la  commodité  du  lieu ,  &  réfolut  dy  bâ- 
tir un  Fort.  Il  laifla  donc  un  certain  nombre  de  troupes  ,  qui 
s'y  retranchèrent  &  y  conllruifirent  un  Fort  &  des  cabanes.  On 
croit  même  que  la  Tour  qui  joint  l'Eglife  Cathédrale  &  le 
Palais  épifcopal  de  Tréguier ,  &  que  l'on  nomme  tour  de 
Hafting ,  efi:  un  ouvrage  de  ces  barbares.  On  remarque  defTus 
quelques  mots  latins ,  dont  j'ignore  le  fens  :  c'eft  le  plus  ancien 
monument  de  la  ville.  Nominoé  ,  après  avoir  chafTé  les  Danois 
&  affermi  fon  autorité,  confidérant  que  le  nombre  des  Evêchés 
n  étoit  pas  fuffifant  en  Bretagne ,  en  plaça  un  au  Monaftere  de 
Saint  -  Tugdual  ,  Heu  déjà  célèbre  par  la  quantité  d'Evêques 
qui  s'y  étoient  réfugiés  d'Angleterre  pendant  les  ravages  des 
Scots  &  des  Piftes. 

C'eft-Ià  le  principe  de  la  ville  de  Tréguier.  En  conféquence 
des  intentions  du  Souverain ,  on  y  bâtit  une  Eglife  ,  qui  fut 
nommée  Lamreguer ,  nom  que  les  habitants  du  pays  donnent  à 
la  ville.  Environ  le  même  temps,  le  Monaftere  de  Saint^Tug- 
dual  fut  rebâti,  &  l'on  y  dépofa  les  Reliques  de  ce  Saint  & 
de  plufieurs  autres.  La  première  EgHfe  de  ce  Couvent  fut  d'abord 
fous  le  vocable  de  Saint-André,  Apôtre  j  mais,  après  avoir  été 
reconftruite  &:  érigée  en  Cathédrale,  elle  prit  Saint  Tugdual 
pour  fon  Patron.  ^.^ 

La  ville  de  Tréguier  eft  fituée  dans  l'enclave  dii  Comté  de 
Guingamp,  qui  fait  aujourd'hui  partie  du  Duché  de  Penthievre; 
mais  il  ne  paroît  pas  que  cette  ville  ait  jamais  dépendu  des 
Comtes  de  Guingamp.  Saint  Tugdual  &  fes  fuccefîeurs ,  Abbés 
&  Evêques ,   pofféderent,  en  toute  propriété ,  la  péninfule    de 


T  R  E  445 

Trecor  ,  &  ne  reconnurent  d'autres  Seigneurs  que  les  Princes 
Souverains  de  Bretagne. 

Le  17  Octobre  1253,  naquit,  au  château  de  Ker-martin, 
dans  la  Paroiiie  du  Minihi ,  à  un  quart  de  lieue  de  Tréguier  , 
Yves ,  fils  d'Helouri ,  Seigneur  de  Kermartin ,  &  de  Dame  Azo 
de  Kerenguis ,  de  la  maifon  du  Pleffis ,  dans  la  ParoilTe  de  Pau- 
merit-Jaudi  :  il  embrafTa  l'Etat  eccléfialHque ,  &  mourut  au  châ- 
teau de  Ker-martin,  le  19  Mai  1303.  11  fut  inhumé  dans  la 
Cathédrale  de  Tréguier,  &  fut  canonifé ,  en  1347,  par  le 
Pape  Benoît  XIII.  On  rapporte  qu'il  exerça  gratis  la  profcilion 
d'Avocat ,  en  faveur  des  veuves  ,  des  orphelins  ,  6c  des  pauvres;, 
ce  qui  l'a  fait  furnommer  ï Avocat  des  pauvres.  Les  Avocats 
&  les  Procureurs  ont  pris  pour  leur  Patron  ce  faint  Eccléfiafli- 
que ,  modèle  inimitable  de  défintérefTement  &  de  bienfaifance. 
Le  Roi  lui  faifoit  une  penfion  de  fîx  deniers  par  jour,  fomme 
alors  confidérable  ;  mais  cette  récompense  due  à  fes  travaux ,  il 
l'employoit  au  foulagement  des  malheureux ,  &:  vivoit  de  la 
manière  la  plus  frugale.  En  i  296 ,  il  fit  réparer  l'Eglife  de  Tré- 
guier. Pierre  de  Roltrenen  ,  Seigneur  du  Minihi ,  lui  permit  de 
prendre  ,  dans  la  forêt  de  cette  Paroifle ,  tout  le  bois  nécellaire 
pour  ces  réparations  ,  qui  ne  furent  pas  d'une  grande  utilité.  L'édifiée 
étoit  en  fi  mauvais  état  qu'on  réfolut  de  le  reconftruire  à  neuf.  La 
première  pierre  de  l'édince  en  fut  pofée  l'an  1339.  ^'"^  ^34^  ^^ 
ville  de  Tréguier  fut  pillée,  &  les  Eglifes  très -endommagées. 
En  1386,  Olivier  de  Cliflbn  fit  faire  à  Tréguier  un  château  de 
bois ,  de  trois  mille  pas  de  diamètre  ,  qui  fe  démontoit.  Cette 
machine  devoit  fervir  à  camper  dans  le  pays  ennemi.  Quand 
elle  fut  achevée,  le  Connétable  la  fit  charger  fur  des  barques, 
&  partit  lui-même  par  mer  ,  accompagné  des  Sires  de  Rohan  ,  de 
Laval  ,  de  Beaumanoir,  de  Dinan  ,  de  Maleilroit,  &  d'Ancenis, 
avec  cinq  cents  lances  &  une  flotte  de  foixantc-douze  voiles^ 
non  compris  les  vaifleaux  qui  portoient  la  ville  de  bois,  pour 
aller  faire  une  defcente  en  Angleterre.  Cette  flotte  efluya  une  tem- 
pête dans  la  traverfée ,  qui  m  perdre  la  majeure  partie  des  pré- 
paratifs fur  les  côtes  de  la  Zelande  ;  &  ces  travaux  immcnlés , 
qui  avoient  coûté  plus  de  trois  millions  ,  tombèrent  en  pure 
perte  aux  Français ,  par  la  lenteur  affe^iée  du  Duc  de   Berri. 

En  1420,  le  Duc  de  Bretagne  Jean  V  ,  qui  venoit  d'accom- 
plir à  Nantes  le  vœu  qu'il  avoit  fait  à  l'Eglife  des  Carmes , 
pendant  fa  détention  à  Chantoceaux  ,  fit  auffi  délivrer  trois 
cents  quatre -vmgts   marcs  ,    fept  onces  d'argent,    qu'il    avoit 


444  T  R  E 

promis  de  donner  à  Saint- Yves.  Cette  fomme  fut  employée  ail' 
beau  monument  que  l'on  voit  dans  l'Eglife  Cathédrale  de  Tré- 
guier.  Le  Prince  ,  qui  avoit  une  dévotion  particulière  à  Saint 
Yves ,  fit  confbuire  ,  en  fon  honneur ,  dans  l'Eglife  Cathédrale , 
du  côté  de  l'Evangile ,  une  Chapelle  que  l'on  nomme  commu- 
nément la  Chapelle  du  Duc  ou  des  Ducs,  Entre  cette  Chapelle 
&  un  piher  de  la  nef  ,  le  Duc  fit  faire  un  vafe  de  pierre  ,  ar- 
tiftement  travaillé ,  dans  lequel  fut  mis  le  corps  de  Saint  Yves. 
Ce  tombeau  efl:  couronné  d'un  petit  dôme  de  pierre,  fculpté  avec 
beaucoup  d'art  :  le  tout  eft  entouré  d'une  grille  de  fer  ,  & ,  en 
dedans,  le  fépulcre  eft  garni  d'une  toile  blanche.  Il  fonda  une 
MelTe  jounnaliere  dans  cette  Chapelle ,  en  l'honneur  de  Saint 
Yves.  L'Eglife  de  Notre-Dame  de  Ker-martin  ,  bâtie  au  bout 
de  l'avenue  du  château  de  Ker-martin  ,  eft  un  lieu  célèbre  par 
les  pèlerinages  qui  s'y  font.  En  général ,  les  habitants  du  dio- 
cefe  de  Tréguier  ont  beaucoup  de  dévotion  à  Saint  Yves, 
Ce  diocefe  le  reconnoît  même  pour  fon  Patron  ,  de  même 
que  rUniverfité  de  Nantes  ,  qui  en  célèbre  la  fête.  On 
bâtit ,  peu  de  temps  après  fa  canonifation  ,  une  Eglife ,  en  fon 
honneur ,  à  Rome  ;  &  l'illuftre  Pape  Léon  X  y  érigea  une 
Confrairie  en  faveur  des  Bretons ,  à  laquelle  il  accorda  plu- 
fleurs  privilèges. 

Le  Duc  Jean  V  étant  mort  au  château  de  la  Touche ,  près 
Nantes  ,  fon  corps  fut  renfermé  dans  un  cercueil  de  plomb , 
couvert  d'une  caiffe  de  fapin  goudronné,  &  dépofé  dans  le 
chœur  de  la  Cathédrale ,  à  côté  du  tombeau  du  Duc ,  fon 
père.  Mais,  comme  Jean  V  avoit  demandé,  en  1420, 
d'être  inhumé  dans  l'EgHfe  de  Tréguier ,  le  Chapitre  de  cette 
Eglife  intenta  au  Chapitre  de  Nantes  un  procès,  qui  fut  jugé, 
au  bout  de  neuf  ans  ,  en  faveur  du  premier;  ^,^n  i45i> 
le  corps  du  Prince  fut  porté  de  Nantes  à  l'Eglife  de  Notre- 
Dame  de  Plouec  ,  à  deux  lieues  de  Tréguier  ,  où  Jean  de 
Plouec  ,  Evêque  de  cette  ville  ,  aîTiflé  des  Chanoines  &  Cha-* 
pelains  de  fon  Eglife  Cathédrale  &  des  Prêtres  des  villes  & 
paroifTes  voifines ,  allèrent  le  chercher  pour  le  porter  à  Tré- 
guier ,  où  il  fut  inhumé ,  dans  la  Chapelle  qu'il  avoit  fait  bâ- 
tir ,  à  côté  du  tombeau  de  Saint  Yves. 

En  1 5 1 6  ,  des  particuHers  ,  polTefTeurs  de  quelques  vignes  dans 
le  diocefe  de  Tréguier ,  ne  fçachant  comment  détruire  les  che- 
nilles &  les  hurebets  qui  les  ravageoient ,  s'adrefTerent  à  l'Of- 
iicial  de   Tréguier ,   auquel  ils    préfenterent    une    requête.  Cet 


T  R  E  4^j 

Eccléfiaflique ,  après  avoir  mûrement  confidéré  la  requête  des 
iuppliants  ,  rendit  une  fentence ,  qui  ordonnoit  aux  chenilles  8c 
aux  hurebets  ,  fous  peine  d'excommunication  &  d'anathême , 
encourue  par  le  feul  fait,  de  fortir,  dans  fix  jours,  du  diocefe 
de  Tréguier ,  &  leur  défendoit  d'y  caufer  à  l'avenir  aucun  dom- 
mage. Je  ne  fçais  fi  ces  infectes  obéirent  à  une  pareille  fom- 
mation  :  ce  feroit  un  miracle  digne  d'être  tranfmis  à  la  polléritéj 
mais  malheureufement  la  fuite  de  cette  affaire  nous  ell  inconnue. 
Il  eil  à  croire  que  le  Juge  ne  croyoit  pas  fon  excommunication 
toute-puiflante  ,  puifqu'il  eut  foin  d'engager  les  perfonnes  inté- 
reffées  à  demander  au  ciel  la  faveur  d'être  délivrées  de  ces 
animaux  malfaifants. 

Les  Cordeliers,  qui  manquoient  de  tout  à  Tlfle- Verte,  l'une 
des  fept  ifles  où  ils  étoient  établis,  furent  appelles  par  le  Bue 
François  II  à  Morlaix.  Une  partie  d'entr'eux  refta  à.  Tréguier. 
Jean  de  Keroufi  &  Jeanne  de  Barkh,  fon  époufe,  leur  don- 
nèrent une  maifon  fituée  au  bord  de  la  rivière  de  Guindi,  dans 
la  Paroiffe  de  Plouguiel  ,  près  Tréguier.  Le  Siège  royal  de  Lan- 
nion  fut  transféré  en  cette  ville  ,  par  Edit  du  Roi  Charles  IX, 
donné  à  Troyes ,  en  Champagne,  le  29  Mars  1564;  mais,  de- 
puis ,  il  a  été  rétabli  dans  fon  ancien  féjour.  En  1574,  le  Sei- 
gneur de  Kergroaifés  ,  Gentilhomme  de  l'Evêché  de  Saint-Pol- 
de-Léon ,  annexa  au  Collège  de  Tréguier,  l'endroit  nommé 
de  Ker-acrembert,  En  1592,  le  17  Septembre,  une  flotte  Ef- 
pagnole  de  deux  galères  &:  de  dix-huit  vaifleaux  entra  dans  ce 
port.  Les  foldats  pillèrent  &  brûlèrent  une  partie  de  la  ville, 
d'où  ils  emportèrent  un  bras  de  Saint  Tugdual  &:  une  dent  de 
Saint  Yves.  Au  mois  de  Novembre  1607,  les  Etats  s'affemble- 
rent  à  Tréguier.  Arrêt  du  Confeil ,  du  13  Mars  i6î}  ,  portant 
règlement  entre  l'Evêque  de  Tréguier  &  fon  Archidiacre  ,  con- 
formément aux  Décrets  du  Concile  de  Tours,  de  fan  1 583  ,  tous 
les  Evêques  de  Bretagne  intervenant  &  demandant  l'obfcrxa- 
tion  du  Concile  à  cet  égard.  Au  mois  de  Septembre  1632,  le 
tréfor  de  l'Eglife  Cathédrale  de  Tréguier  fut  brûle,  par  un  acci- 
dent dont  on  n'a  jamais  pu  fçavoir  la  caufe.  En  1634,  les 
Religieufes  Urfulines  furent  fondées  dans    cette  ville. 

Catalogue  Histori<ive  z>es  EvÈÇiUES  de  Tréguier. 

Il  feroit  inutile  de  répéter  ici  les  fables  inventées  par  Albert 
de  Morlaix  &  autres,  qui  prétendent  que  Drennalus,  Difciple 
de  Jofeph  d'Arimathie  ,    qui    étoit  venu  prêcher   l'Evangile  en 


44^  T  R  E 

Angleterre,  fut  le  premier  Evêque  de  Tréguier,  &  qu'il  eut 
foixante-trois  fuccefleurs  jufquà  Saint  Tugdual.  On  fçait  aujourd'hui 
apprécier  les  rêveries  de  ce  Religieux  Dominicain  ,  qui  a  plutôt 
voulu  bâtir  un  roman  que  compofer  une  hiftoire  :  nous  reconnoî- 
trons  feulement  Saint  Tugdual  pour  fondateur  du  Couvent  de 
Trecor ,  &  nous  accorderons  ,  fi  l'on  veut ,  qu'il  fut  facré  Eve- 
que  ;  mais  on  pourroit  nier  qu'il  ait  jamais  été  reconnu  pour  tel 
en  Bretagne.  Il  mourut,  félon  les  uns,  fur  la  fin  du  fixieme,  &, 
félon  les  autres ,  au  commencement  du  feptieme  fiecle.  Ses.  fuc- 
ceffeurs  au  gouvernement  de  TAbbaye  de  Trecor ,  Evêques  ou 
Abbés,  furent.  Saint  Ruelin  ,  Plebecantus ,  Robertus ,  Stereleus, 
Martinus  ,  GouaranusouGoweranus  ,  &  Germanus.  Le  Cointe  rap- 
porte qu'après  la  mort  de  Saint  Tugdual ,  qui  avoit  nommé  Rwelin 
pour  fon  fucceffeur  ;  Pergat,  qui  ne  pouvoit  fouffrir  qu'on  lui  en 
préférât  un  autre ,  prit  le  titre  d'Evêque  ou  d'Abbé ,  &  en  vou- 
lut faire  les  fondions.  Les  Evêques,  appelles  pour  terminer  ce 
différent ,  fe  rendirent  à  Lexobie.  Pendant  qu'ils  étoient  aflem- 
blés.  Saint  Tugdual  parut  tout-à-coup  au  milieu  d'eux,  revêtu 
des  ornements  pontificaux  ,  &  fit  les  plus  terribles  menaces  à 
Pergat ,  s'il  n'abandonnoit  fon  entreprife.  Celui-ci ,  faifi  de  frayeur , 
fe  jette  le  vifage  contre  terre  ,  demande  humblement  pardon  à 
Rwelin  &  à  l'affemblée ,  qui  n'étoit  pas  moins  étonnée  que 
lui.   Si  le  fait  eft  vrai  ,    c'eft  un  miracle. 

Léotherius  ou  Léothericus ,  ou  Haëlvit ,  eft  le  premier  Evêque , 
connu  pour  tel  ,  du  diocefe  de  Tréguier  ;  il  fut  nommé  par  le 
Concile  de  Redon  ,  &  approuvé  par  Nominoé ,  en  849. 

Feftgen ,  lui  fuccéda  vers  855.  Les  annales  de  ce  temps  Le 
placent  fous  le  règne  d'Erifpoë,. 

Gratien.  Martin.  Denis. 

Confennanus ,  ou  plutôt  Conllantin ,  Evêque  vers  990. 

Gratien  IL  Paul.   Soffrus. 

Guillaume,  foufcrivit  à  la  fondation  de  Saint -Georges  de 
Rennes,  en  1030» 

Gui  -  Martin  IL 

Hugues:  en  1086,  il  donna  aux  Moines  du  Mont-Saint-Mi'* 
chel ,  le  Mont-Hinglas  &  fes  dépendances. 

Raoul,  foufcrivit  au  Concile  de  Dol,ran  1128^  &  mourut 
vers  l'an  ï  i  34. 

Guillaume  ,  vers  Fan  113 5  ;  fiit  accufé,  vers  l'an  ii53r 
de  Simonie  ,  de  parjure  ,  &  autres  crimes  atroces.  Le  Pape 
Anaûafe  IV    commit,  en   1154;^  Angebaut  j   Archevêque    de- 


T  R  E  447 

Tours ,  pour  examiner  la  conduite  de  ce  Prélat.  Il  eft  à  croire 
que  l'accufation  fut  trouvée  faufle ,  puifqu'il  refta  fur  fon  Siège',: 
il  mourut  l'an   1175  ,  félon  Robert,  Abbé  du  Mont. 

Yves  ,  Archiprêtre  de  Tours  &  Breton  d'origine ,  fuccéda 
à  Guillaume,  vers  11775  il  mourut  en  chemin  en  fe  rendant 
à  Rome. 

GeofFroi  Loiz  ,  fils  d'un  Bourgeois  de  Guingamp  ,  fut  élu 
&  ordonné  à  fa  place  ;  il  affilia  à  la  dédicace  de  l'Eglife  de 
Villeneuve ,  Ordre  de  Cîteaux  ,  au  diocefe  de  Nantes. 

Etienne,  lui  fuccéda  vers  1220,  &  ratifia  la  fondation  des 
Frères  Prêcheurs  de  Morlaix  ,  en  1237.  Cet  Etienne,  qui  étoit 
Chanoine  de  Tours,  ayant  affilié  à  l'éleftion  de  l'Archevêque, 
déclara  que  c'étoit  en  qualité  de  Chanoine  ,  &  non  en  qua- 
lité d'Evêque  de  Tréguier  ,  qu'il  avoir  affilié  à  cette  nomination , 
afin  que  les  fuccefleurs  Evêques  ne  vouluffent  prendre  occafion 
de  là  ,  d'étendre  leurs  prétentions  jufqu'à  fe  croire  en  droit 
de  participer  à  l'éleftion  des  Archevêques.  Avant  d'être  Evêque, 
il  avoit  affilié  ,  en  1 2 1 5  ,  au  Concile  de  Tours  ,  qui  fit  quatorze 
Canons.  Le  fécond  défend  aux  Eccléfialliques  de  fe  livrer  au 
commerce  &  aux  affaires  féculieres ,  d'affilier  aux  fpe6lacles  pu- 
blics ,  &  de  fréquenter  les  cabarets.  Le  troifieme  défend  aux 
Prêtres  d'avoir  chez  eux  leurs  enfants  bâtards ,  afin  d'éviter  le 
fcandale  ;  &  de  porter  des  couteaux  de  chaffe  &  autres  armes, 
fi  ce  n'efl   dans  le   cas  d'une  crainte  bien  fondée. 

Pierre,  confirma,  Tan  1238  ,  une  tranfaftion  paffée  entre 
TAbbeffe  de  Saint-Georges  de  Rennes  &  un  Chevalier  nommé 
Derien, 

Hamon ,  fut  facré  Evêque  de  Tréguier ,  vers    1255. 

Alain  de  Lezardrieuc  ,  élu  en  Ji6i,  mourut  en  1267. 

Alain  de  Bruc ,  qui  lui  fuccéda  ,  fut  inquiété  par  le  Duc 
Jean  I  ;  ce  Prince  ,  qui  ne  cherchoit  qu'à  donner  de  fembarras 
au  Clergé  ,  avoit  imaginé  avoir  une  autorité  immédiate  fur  les 
fujets  de  l'Evêque  Sz  du  Chapitre.  Cette  prétention  étoit  injullc, 
&  le  Prélat  fçavoit  bien  que  le  Duc  auroit  perdu  fon  procès 
s'il  avoit  voulu  le  pourfuivre  en  Cour  de  Rome  ou  à  la  Cour 
des  Pairs  -,  mais,  comme  il  connoiffoit  le  cara6lerc  du  Prince,  il 
ne  voulut  pas  fe  brouiller  avec  lui ,  parce  qu'il  fentoit  bien  que 
le  Duc  auroit  toujours  trouvé  l'occafion  de  le  mortifier.  Il  prit 
donc  une  voie  plus  douce ,  &  au  lieu  d'irriter  le  Prince  ,  il  s'en 
fit  un  protefteur  ;  il  confentit  que  les  Ducs  exerçafient  le  droit 
de  régale  à  la  mort  des  Evcqucs  de  Tréguier.  Le  Duc ,  content 


448  TRE 

de  cet  avantage ,  renonça  à  toutes  fes  prétentions ,  &  reconnut ,, 
de  bonne  foi ,  qu'il  n  avoit  aucune  Jurifdiftion  fur  l'Evêque  6c 
fur  fes  vafTaux. 

Yves  de  Boisboëfîel  ou  le  Prévôt,  élu  le  13  Novembre  1324,. 
fut  transféré  à  Quimper  l'an  1330. 

Alain  Huëlori ,  élu  en  1330,  tint  un  Synode  &  publia  des 
Statuts  en  1334.  Le  huitième  défend  d'admettre  plus  de  trois 
perfonnes  à  tenir  un  enfant  fur  les  fonds  de  Baptême  y  fi  c'eft 
un  garçon ,  il  aura  pour  parrains  &  marraine  deux  hommes  Se 
une  femme  ;  fi  c'efl  une  fille  ^  elle  fera  préfentée  à  l'Eglile  par 
deux  femmes  &  un  homme.  Il  recommande  de  ne  point  y  ad- 
mettre les  enfants  fans  une  extrême  nécefTué ,  de  peur  que,  ve- 
nant à  oublier  la  confanguinité  ,  ils  n'époufent  quelque  jour  leurs 
filleuls  ou  filleules.,  Le  neuvième  indique  les  cas  réfervés  au 
Pape  &  ceux  réfervés  à  l'Evêque.  Le  quarante-cinquième  dé- 
fend la  chafTe  aux  Eccléfiafliques  bénéficiers ,  fous  peine  d'ex- 
communication. Ils  font  au  nombre  de  quatre-vingt,  &  ne  règlent , 
pour  ainfi  dire  ,  que  la  conduite  extérieure  des  Prêtres.  En  1337, 
il  en  publia  de  nouveau.  Le  neuvième  ordonne  de  vifiter  l'Eglife 
Cathédrale  de  Tréguier,  au  moins  une  fois  par  an.  Le  quin- 
zième prononce  excommunication  contre  ceux  qui  font  rompre 
des  mariages  par  malignité  &  fans  empêchements  légitimes.  Les 
derniers  prononcent  excommunication  contre  ceux  qui  ne  regar- 
doient  pas  les  biens  de  l'Eglife  comme  des  chofes  facrées , 
auxquelles  il  n'étoit  pas  permis  de  toucher.  Ce  Prélat  mourut 
en  133.8. 

Raoul  ou  Richard  du  Poirier,  fut  ordonné  Fan  1339. 

Alain  Thomé ,  élu  en  1351  ,  mourut  en  1352. 

Robert   Peynel ,  fon   fucceffeur  ,  fut   transféré   à  Nantes    ert 

1353. 
Hugues  de  Montrelais ,  Doyen  de  Nantes,  élu  en  1353  ,  fut 

transféré  à  Saint-Brieuc  en   1356. 

Alain  ,  paya  les  droits  de  la  Chambre  Apoflolique ,  le  5: 
Novembre  1358,  &  mourut  en  1362  ,  fuivant  les  regiftres 
confifloriaux. 

Even  de  Begaignon  ,  d'une  famille  noble  de  l'Evêché  ,  entra 
d'abord  dans  l'Ordre  de  Saint-Dominique  ,  fut  élu  Evêque  de 
Tréguier  le  19  Novembre  1362.,  publia  des  Statuts  en  13(^57 
^371  >  1372  ,  &  1374;  afTifta  au  Concile  d'Angers  en  1366,  &, 
comme  témoin,  à  la  fondation  de  Notre-Dame  de  Bonne-Nouvelle  ^ 
i  Rennes j  en  1368    ou    1369^  &   abdiqua    en    1371  ,   ayant 

été; 


cté   créé  Cardinal   &  Grand   Pénitencier    de    rEgllfe   Romaine. 

^  Jean  le  Brun ,  Avocat  en  Cour  de  Rome ,  fut  pourvu  par 
réfîgnation  de  fon  prédéceffeur  ;  il  fit  des  Statuts  en  1374,  & 
mourut  en  1378. 

Thibaud  de  Maleflroit  ,  élu  en  1378,  préfcnta ,  en  1379, 
au  Duc ,  les  lettres  Apolloliques  qui  confirmoient  fon  élection  • 
il  publia,  en  1380,  des  Statuts ,  qui  défendent  de  donner  les 
biens  de  l'Eglife  à  ferme  aux  laïques  ,  &  fut  transféré  à  Quim- 
per  en   1384.  Le  Duc  fe  faifit  de  la  régale. 

Hugues  Poder  de  Keroulai  ou  de  Keriouvalech  ,  natif  d\i 
diocefe  de  Léon ,  Dofteur  en  l'un  &  l'autre  Droit ,  fut  élu  en 
1384,  envoyé  en  ambailade  auprès  du  Roi  de  France,  &  ne 
fut   Evêque  qu'un  an. 

Pierre  Morel ,  natif  de  Guingamp ,  élu  en  1385  ,  afliila  aux 
Etats  de  Nantes  en   1389,  &  mourut  en   1401. 

Bernard  du Peyron,  nommé  par  le  Pape  Benoît XIII,  en  1401, 
fut  transféré  ,  dans  le  courant  de  la  même  année  ,  à  Tarbes , 
parce  qu'il  ne  fçavoit  pas  la  langue  Bretonne. 

Yves  Hingoèt  de  Kercoat,  Médecin  du  Duc,  élu  en  1402, 
fit  ferment   de  fidélité  ,.  &■  mourut  en  1403. 

Hugues  Scocquer  ,  Jacobin  ,  de  Morlaix,  6c  Do61eur  en  Théo- 
logie ,  fut  pourvu  par  le  Pape  Benoît  XIII,  en  1403.  On  lui 
permit  de  fe  faire  ordonner  par  deux  ou  trois  Evêqucs  qu'il 
pouvoir  choifir  à  fon  gré.  De  l-i  efl  venu  l'origine  de  ne  point 
aller  trouver  l'Evêque  Métropolitain  pour  le  faire  facrer.  Be- 
noît XIII  accorda  la  difpenfe  de  cette  coutume  dans  toute 
l'étendue  de  fon  obédience.  Hugues  ne  fut  point  facré  Evêque 
de  Tréguier  j  il   fut  transféré,  à   Vannes,  en  1404. 

Hervé  de  Keroulai,  Archidiacre  du  Défert ,  nommé  en  140c, 
permuta  ,  en  1 407  ,  avec  Bernard  de  Tarbes. 

Bernard  de  Peyron  ,  fut  de  rechef  Evêque  de  Tréguier ,  en 
1408  j  mais  il  ne  paroît  pas  qu'il  ait  été  reconnu  en  qualité 
d'Evêquc. 

Chriftophe  ou  Triftan  de  Hauterive  ,  autrement  de  Kermarer, 
de  l'Ordre  Erémitique  de  Saint-AugulHn  ,  &  Do6leur  en  Théo- 
logie,  affilia  au  Concile  de  Pife  en  1409  &:  1416;  \\  fonda 
une  Méfie  annuelle  dans   le  Collège  de   Tréguier  à  Paris. 

Matthieu  Macé  ou  Mahé  du  Coskcr  ,  de  l'Ordre  Erémitique  de 
Saim-Augufiùn  ,  fut  élu  en   1417,  &  mourut  en  14 19. 

Thébaud  ,  fon  fucccfi^eur  ,  fut  transféré,  en   1424,  à  un  autre 
vecne. 

Tome  IK.  L  j 


450  TRE 

Jean  de  Bruc,  publia  des  Statuts  en  14^7?  &  fut  transféré  à 
Dol  en  1430» 

Pierre  Piedru  ,  Nantais  d'origine  ,  élu  en  1430,  affifta  au 
Concile  de  Nantes ,  &  publia  des  Statuts  en  1431;  fut  député 
par  le  Duc  au  Concile  de  Balle ,  &  fut  transféré  à  Saint-Malo 
en  1434. 

Raoul  Rolland  ,  natif  du  diocefe  de  Saint-Brieuc ,  &  Doékur 
en  Droit,  fut  élu  le  6  Septembre  1434;  il  publia  des  Statuts  en 
1436.  Le  quatrième  défend  de  peindre  ou  fculpter  des  croix  fur 
la  terre  ,  fur  des  tombeaux  ,  &  fur  des  murs  -,  il  ne  donne  d'au< 
très  raifons  de  cette  défenfe ,  fînon  que  les  loix  humaines  s'y 
oppofent.  Le  fixieme  défend  au  Caqueux  ou  Cordiers ,  efpece 
d'hommes  qu'une  prévention  mal  fondée  faifoit  regarder  comme 
avilis ,  8c  comme  infeftés  de  quelques  maladies  honteufes ,  de 
fe  mêler  avec  les  autres  ,  &  leur  ordonne  de  fe  placer  toujours 
au  bas  des  Eglifes,  Il  publia  encore,  en  1437,  d'autres  Statuts, 
qui  nous  apprennent  qu'il  y  avoit  alors  foixante  douze  fêtes 
gardées  dans  le  diocefe.  Ceux  qu'il  y  ajouta  en  1440,  défen- 
dent le  jeu  nommé  Mellat ,  fous  prétexte  qu'il  étoit  l'origine  de 
plufîeurs  abus  fcandaleux  :  on  ne  fçait  ce  que  c'étoit.  Ce  Prélat 
mourut  en  145 1. 

Jean  de  Ploeuc  ou  de  Plouec ,  élu  le  4  Mai  145 1  ,  publia 
des  Statuts,  par  lefquels  il  fupprima  quelques-unes  des  fêtes 
gardées  dans  fon  diocefe  :  s'étant  apperçu  que  quelques  Gentils- 
hommes ,  qui  avoient  fait  graver  leurs  armes  en  lifiere  autour 
des  Eglifes ,  prenoient  occaiion  de  là  de  fe  dire  Seigneurs  pro- 
priétaires des  Heux  ;  il  donna  une  déclaration ,  qui  portoit  que 
cela  ne  pouvoit  donner  aucun  droit.  Il  mourut  le  7  Avril  1453* 
Dans  l'enquête  qu'on  fit  le  16  Août  de  cette  année  ,  fur  les 
droits  de  l'Eglife  de  Tréguier ,  un  homme  âgé  de  foixante-quinze 
ans ,  attefta  avoir  connu  les  Evêques  Hugues  Poder ,  Morel , 
Hingoët ,  Scocquer ,  Chriftophe  ou  Triftan ,  Matthieu  Macé ,  de 
Bruc  ,  Piedru  ,  Rolland  ,  &  Jean  de  Plouec  ,  dernier  mort  ;  il 
auroit  pu  ajouter  à  ces  dix ,  les  Evêques  du  Peyron  ,  de  Ker- 
oulai ,  &  Thébaud  ,  &  compter  ainfi  treize  à  quatorze  Evêques 
dans  l'efpace  de  foixante-huit  ans  ;  mais  ce  vieillard  n'avoir  pu 
connoîrre  les  trois  derniers ,  qui  n'étoient  jamais  venus  à  Tré- 
guier. C'ell:  TEvêque  Jean  de  Ploeuc  ou  Plouec  qui  érigea 
l'Eglife  de  Tonguedec  en  Collégiale  ,  &  qui  fit  les  funérailles 
du  Duc  François  I. 

Jean  de  Coétquis  ou  de  Croefquer  ,  fut  transféré  de  Rennçs 


TRE  45, 

â  Tréguîer,  en  145 3  »  plublia  des  Statuts ,  &  afTifta  à  l'élévatioii 
du  corps  de  Saint  Vincent  Ferrier.  Il  avoit  pris  pour  Coadjuteur 
Chriilophe  du  Châtel  ;  mais  il  eut  lieu  de  fe  repentir  de  Ion 
choix.  La  conduite  de  ce  dernier  l'obligea  d'avoir  recours  au 
Duc,  qui  défendit  ,  en  1463  ,  au  Coadjuteur,  de  troubler  l'Evê- 
que  dans  fes  fondions  &  dans  la  perception  de  fes  droits.  Il 
mourut  en  1464.  Quelques-uns  lui  donnent  pour  fuccefîeur ,  un 
Jean  du  Croefquer ,  qui  s'excufa  de  n'avoir  pu  afTiiler  aux  Etats 
en  1462.  C'eil:  une  erreur.  Jean  de  Coétquis  &  du  Croefquer 
font  un  feul  &  même  perfonnage.  Il  eu  d'ailleurs  certain  que 
Jean  de  Coétquis  mourut  en  1464.  Albert  place  encore  ici  ua 
Hugues  de  Coatrez  ,  qu'il  allure  avoir  été  élu  en  1467,  créé 
Cardinal  en  1468 ,  &  avoir  abdiqué  la  même  année.  Il  cft 
fuppofé ,  car  le  Pape  Paul  II,  élu  en  1464,  &  mort  en  1471^ 
ne  créa  aucun  Cardinal  du  nom  de  Hugues  j  &.  Chriftophe  du 
Châtel ,  qui  fuit,    étoit  Evêque  dès  l'an   1465. 

Chriltophe  du  Châtel ,  ci-devant  CoaSjuteur  de  Tréguier ,  fit 
fon  entrée  en  cette  ville  le  21  Juillet  1465  ,  prêta  ferment  en 
1466  ,  fit  pubher  des  Statuts  par  fes  Grands  Vicaires  en  1467, 
(il  ne  faifoit  pas  rélidence ,  )  &  mourut  le  9  Décembre  1479. 
Le  Duc  fit  faifir  les  revenus  de  l'Evêché.  Pierre  Chauvin  ,  dé- 
figné  par  le  Duc  François  II ,  ne  fut  point  admis  par  le  Pape, 

Raphaël,  Cardinal  du  titre  de  Saint -Georges  &:  neveu  du 
Pape  Sixte  IV  ,  fut  nommé  Evêque  Commendataire  de  Tré- 
guier ,  par  ce  Pontife ,  qui  déclara  excommuniés  ceux  qui  rcfu- 
feroient  de  le  reconnoître.  Raphaël  fit  ferment  de  fidélité  au 
Duc  le  21  Septembre  1481.  Ce  Prince  le  reçut,  à  condition 
qu'il  réfîgneroit  à  Robert  Guibé,  promefTe  qu'il  exécuta  quatre 
ans  après ,  pendant  lefquels  il  avoit  fait  exercer  les  fondions 
épifcopales  par  un  Evêque   nommé  ad  hoc. 

Robert  Guibé,  fut  pourvu  en  1483:  ce  Prélat  n'avoit  pas 
encore  l'âge  requis  par  les  Saints  Canons  \  mais  il  obtint  des 
difpenfes  le  20  Mai  de  cette  année  ,  &  prêta  ferment  le  même 
jouti  il  fut  transféré  à  Rennes  en  1502. 

Yves  de  Kermahouan  ,  nommé  par  les  principaux  Seigneurs 
Bretons ,  ne  fut  point  admis ,  vraifemblablemcnt  parce  que  Lan- 
dais ne  l'aimoit  pas ,  ou  que  ce  Favori  crut  qu'on  ne  i'avoit 
nommé  que  par  haine  pour  lui. 

Jean  de  Talhouet  ou  de  Callouet ,  Do6leur  en  l'un  &:  l'autre 
Droit ,  &  Chanoine  de  Quiniper ,  fit  fon  entrée  le  4  Septembre 
1502,  Lpuis  Xll  le  choifit  pour  fon  Coufefleur ,  &:  le  fit  Préfideun 


451  T  R  E 

de  la  Chambre  des  Comptes.  Ce  Prélat ,  véritablement  digne 
de  l'être,  mourut,  le  7  Mars  1505,  à  Saint-Michel-en-Greve , 
&  fut  inhumé  dans  fa  Cathédrale ,  ou  Ton  voit  encore  fon  tom- 
beau. Lorfqu'en  161 1  on  ouvrit  ce  tombeau  pour  y  dépofer 
celui  d'Adrien  d'Amboife ,  on  trouva  fon  corps  entier ,  ainii  que 
fes  ornements  de  taffetas  jaune  ,  félon  le  procès-verbal  qui  a 
été  confervé  dans  les  archives  de  l'Eglife.  Après  la  mort  de 
Jean  de  Callouet ,  la  Reine  Anne  fit  défendre  au  Chapitre  de 
procéder  à  aucune  éleftion  avant  d'avoir  reçu  fes  ordres.  Dès 
que  le  Chapitre  fçut  les  intentions  de  Sa  Majefté ,  il  nomma 
Jean  de  Grigneaux  ,  qui  fe  démit  en  faveur  de  fon  frère. 

Antoine  de  Grigneaux ,  élu  en  place  de  fon  frère,  l'an  1505, 
tint  un  Synode  en  1515 ,  &  mourut  le  16  Novembre  1537.  1-e 
Roi  fit  faifir  les  revenus  de  l'Evêché. 

Louis  de  Bourbon  ,  fils  de  François  ,  Comte  de  Vendôme ,  Se 
de  Marie  de  Luxembourg,  Cardinal,  &  Evêque  de  Luçon,  du 
Mans,  Sec.  prit  pofieffion  ,  par  Procureur  ,  en  1538. 

Hypolite  d'Eft,  fils  du  Duc  de  Ferrare  ,  prit  TEvêché  de 
Tréguier  en  commende,  en  1543  ou  1544.  Quelques-uns  lui 
donnent  pour  fucceffeur  Bartholomé  Venturin  ,  Tréforier- Cha- 
noine de  Tréguier  ,  dont  l'éleftion  n'eft  pas  prouvée.  Dom  Tail- 
landier en  place  ici  deux  autres ,  l'un  nommé  Jean  de  Rieux , 
qui ,  félon  lui ,  fut  transféré  à  Saint-Brieuc  ;  &  François  de  Ma- 
nus ,  mort  ou  transféré  ailleurs  en  1547.  Je  n'ai  rien  trouvé  qui 
put  m'engager  à  les  admettre. 

Jean  Juvenal  des  Urfins,  défigné  en  1546,  fit  fon  entrée  le 
Dimanche  des  Rameaux  1549,  affifta ,  par  Procureur,  au  Con- 
cile de  Trente,  Se  mourut  en  1566. 

Claude  de  Kernavenoi ,  Abbé  de  Begars,  nommé  en  1^66^ 
abdiqua,  en  1572,  fans  avoir  été  facré,  parce  qu'il  ne  put  ob- 
tenir fes  Bulles. 

Jean-Baptifte  le  Gras  ,  de  l'Ordre  des  Frères  Prêcheurs  ;  fit  fon 
entrée  en  1572^  affilia,  par  Procureur,  aux  Etats  de  Dinan  en 
1 573  j  fit  ferment  de  fidélité  en  1 578  ,  mourut  en  1 583  ,  &  fut 
inhumé  dans  fa  Cathédrale. 

François  de  la  Tour,  transféré  de  Quimper  à  Tréguier,  en  1 583  , 
mourut  en  1593. 

Guillaume  du  Halgoët  ,   élu   en  1594,  mourut   le  29  061:o-\ 
bre  1602. 

Adrien  d'Amboife ,  fit  ferment  de  fidélité  en  1 604 ,  préfida 
aux  Etats  tenus  en  fon  diocefe  en  1607,  ^  mourut  le  29  Juillet 


T  R  E  45J 

ï6i6i  fort  corps  fut  Inhumé  dans  le  choeur  de  la  Cathédrale, 
fous  une  lame  d'airain. 

Pierre  Cornullier ,  Abbé  de  Saint-Méen  &  de  Blanche-Cou- 
ronne ,  Confeiller  au  Parlement  de  Rennes,  fut  nommé  en  1617, 
&  tranféré  à  Rennes  en  161 9. 

Gui  Champion,  nommé  en  1620,  fit  ferment  de  fidélité  la 
même  année,  affilia,  en  1621  ,  aux  Etats  de  Rennes,  Se  fut 
chargé  de  la  grande  dépuration  en  Cour.  Cell  fous  fon  Ponti- 
ficat que  les  Récollets  ,  les  Capucins ,  les  Carmélites ,  &  les  Calvai- 
riennes,  furent  établis  dans  ce  diocefe.  Il  mourut  d'une  attaque  d'apo- 
plexie ,  le  14  Septembre  163  5  ,  &  fut  inhumé  dans  fa  Cathédrale. 

Noël  des  Landes ,  né  dans  le  diocefe  de  Tréguier ,  &c  de 
l'Ordre  des  Frères  Prêcheurs,  nommé  par  le  Roi  ,1e  29  06lobre 
1635,  mourut  au  mois  de  Février  1646. 

Balthafar  Grangier  de  Liverdi  ,  défigné  au  mois  de  Février 
1646,  affifta  à  l'afTembié  du  Clergé,  le  28  Avril  1^54,  & 
mourut  le  2  Février  1679. 

François-Ignace  de  Baglion  ,  fuivit  d'abordie  parti  des  armes ,  qu'il 
quitta  pour  entrer  à  l'Oratoire.  On  étoit  fur  le  point  de  l'en 
faire  Supérieur  général ,  lorfque  le  Roi  le  nomma  à  l'Evêché. 
Il  fut  facré  le  23  Juillet  1679,  &  fut  transféré  à  Poitiers,  au 
d'Avril  1686. 

Euflache  le  Sénéchal  de  Carcado ,  Abbé  de  Generton  ,  élvi 
en  1686  ,  mourut  à  Paris  le  5  Mai  1694  :  il  avoir  été  d'abord 
Aumônier  de  la  Reine. 

Olivier  Jegou  de  Kerlivio  ,  fils  de  Gilles  ,  Seigneur  de  Ker- 
livio,  &  de  Marie  Budec ,  nommé  au  mois  de  Juin,  ^  facré 
le   3   Octobre   1694,  mourut  en  173 1. 

François-Hyacinthe  de  la  Fruglaie  de  Kervert ,  Grand-Vicaire 
de  Quimper  ,  nommé  en  1731,  au  mois  de  Décembre,  facré 
le  4  Mai  1732;  affilia  à  l'affismblée  du  Clergé,  en  1745,  en 
qualité  de  Député  de  la  Métropole  de  Tours ,  Se  mourut  au  mois 
de  Décembre. 

Charles-Gui  le  Borgne  de  Kermorvan  ,  nommé  le  3  Mar$ 
1746,  facré  le  11  Juillet,  fut  député  veJS  le  Roi,  en  1750, 
&:  mourut  en  176 1. 

N.  de  Cheylus,  Doyen  de  TEgHfe  Cathédrale  de  Lizicux,  ftrt 
fon  fuccelTeur  ,  en    1 761  ,  &  fut  transféré  h  Bayeux  en    176(5. 

M.   de  la  Royere  ,  facré  en    1766  ,  mourut  en.... 

M.  Auguftin  de  Frétât  de  Sarra ,  fut  transféré,  en  177J  ,  de 
l'Evêché  de  Tréguier  à  celui  de  Nantes. 


454  TRE 

M.  de  Luberfac,  nommé  en  1775,  gouverne  a6luellement 
cette  Eglife. 

TREGUIDEL  ;  à  3  lieues  au  Nord-Oueft  de  Saint-Brieuc, 
fon  Evêché,  fa  Subdélégation,  ck  fon  reflbrt  ;  &  à  23  lieues  de 
Rennes.  On  y  compte  800  communiants  :  la  Cure  efi  à  l'alter- 
native. M.  de  Tremargat  efl:  Seigneur  de  cette  Paroifle  ,  dont 
le  fol  efl:  de  très-bonne  qualité  &  affez  bien  cultivé.  En  1500, 
on  y  connoifToit  la  maifon  de  Villeneuve. 

TREGUNC  ;  fur  une  hauteur ,  &  fur  la  route  de  Quimperlé 
à  Concarneau  j  à  5  lieues  de  Quimper,  fon  Evêché  5  à  36 
lieues  de  Rennes;  &  à  1  lieue  de  Concarneau,  fa  Subdéléga- 
tion &  fon  relTort.  Cette  Paroifle  relevé  du  Roi ,  &  compte 
3000  communiants  :  la  Cure  elî:  à  l'Ordmaire.  Le  territoire  ,  borné 
au  Sud  par  la  mer  &  coupé  de  ruifleaux  qui  coulent  dans  les 
vallons  ,  efl  très-bien  cultivé  &  fertile  en  toutes  fortes  de  grains. 
On  remarque  ,  près  le  grand  chemin  ,  une  pierre  d'une  groflleur 
prodigieufe ,  élevée  d'environ  quinze  pieds  de  hauteur,  &  fou- 
tenue  en  équilibre  par  les  rochers  fur  lefquels  elle  efl:  placée. 
On  la  fait  mouvoir  fenflblement  en  la  poufl^ant  avec  force  des 
deux  mains.  On  la  nomme  la  pierre  aux  cocus  ,  parce  que  les 
habitants  du  pays  prétendent  qu'elle  réflile  aux  efforts  de  ceux 
dont  la  femme  n'efl  pas  fage  ;  de  forte  que  celui  qui , 
malgré  fes  efforts ,  ne  peut  lui  donner  du  mouvement ,  efl:  ré- 
puté cocu.  En  1420,  le  territoire  renfermoit  les  neuf  manoirs 
nobles  nommés,  Ker-aergugruz  ,  le  Poullay  ,  Ker-guen,  Ker- 
guern,  la  Motte,  Pouleaul ,  Stanguen ,  Ker-madezoac,  &  la 
Kiviere  ;  ce  dernier  appartenoit ,,  en  1 3  60 ,  à  Pierre  de  Roffrenen. 

TREHORANTEUC  j  dans  un  fond  -,  h.  16  lieues  au  Sud-Sud- 
Ouefl:  de  Saint-Malo,  fon  Evêché  ;  à  9  lieues  &  demie  de 
Rennes  ;  &  à  3  Heues  de  Plélan  ,  fa  Subdélégation.  Cette 
Paroiffe  reffortit  à  Ploermel,  &  compte  600  communiants  :  la  Cure 
eft  préfentée  par  l'Abbé  dePaimpont.  Le  territoire  ,  couvert  d'arbres 
&  buiffons,  eft  occupé  par  la  forêt  de  Paimpont ,  des  terres  en 
labeur ,  &  des  landes.  Les  habitants  font  du  cidre* 

TREILLIERES  ;  à  3  lieues  au  Nord-Nord-Ouefl  de  Nantes , 
fon  Evêché,  fa  Subdélégation,  &  fon  reffort  ;  &  à  19  lieues, 
de  Rennes.  On  y  compte  1200  communiants  :  la  Cure  efl  pré^ 


T  R  E  4JÇ 

fentée  par  le  Chapitre  de  la  Cathédrale.  Ce  territoire ,  d'une 
Superficie  plane,  eft  coupé  d'un  gros  ruifTeau,  fur  les  bords  du- 
quel font  des  prairies.  On  y  remarque  des  terres  en  labeur  de 
bonne  quaHté ,  quelques  bois  taillis  ,  &  un  bois  de  haute-futaie, 
fitué  au  milieu  d'une  lande  ,  dont  les  arbres  Ibnt  de  toute  beauté. 
On  n'en  connoît  point  le  propriétaire.  Les  habitants  de  Treilleres 
vivent  dans  la  milere ,  faute  d'aftivité  ou  de  moyens  pour  dé- 
fricher les  landes  immenfes  qu'ils  ont  fous  les  yeux.  Se  dont  le 
fol  paroît  de  bonne  qualité.  Jufqu'à  ce  jour,  perfonne  n'a  voulu 
entreprendre  de  les  cultiver,  La  Chapelle  des  Dons,  bâtie  par 
les  Ducs  de  Bretagne ,  elt  remarquable  par  une  alTemblée  qui 
s'y  tient  tous    les  ans ,  la  féconde  fête  de  Pâques. 

En  1283,  Durand,  Evêque  de  Nantes,  unit  à  la  Menfe  épif- 
copale  les  dîmes  de  la  ParoifTe  de  Treilleres,  Il  s'eil:  fait  depuis 
des  changements  :  l'Evêque  «Se  le  Chapitre  ne  jouifTent  aftuelle- 
ment  que  de  la  moitié  de  ces   dîmes. 

En  1 400 ,  le  manoir  de  la  Houflaye  appartenoit  au  Seigneur 
de  Treilleres ,  &  le  pont  de  Gêvres ,  à  Trillan  de  la  Lande. 
Le  château  de  Gêvres ,  maifon  feigneuriale  de  l'endroit ,  fut 
bâti,  en  1653  ,  par  Céfar  de  Renouard  ,  Seigneur  de  Drouges, 
Tréforier  général  des  Etats  de  Bretagne ,  qui  l'embellit  de  Ipa- 
cieux  jardins ,  de  bois  de  décorations,  de  canaux,  de  jets  d'eau, 
&c.  11  eut  le  crédit  de  faire  détourner  le  grand  chemin  de 
Nantes  à  Rennes  ,  qui  pafToit  trop  près  de  fa  maifon  ,  pour 
le  porter  où  il  eft  aujourd'hui  ;  cette  Terre ,  avec  haute-Juuice, 
appartient  préfentement  à  M.  le  Marquis  de  Rofmadec.  Il  y  a, 
auprès  du  château ,  une  Pofte  aux  chevaux. 

TRELEVERN  ;  à  2  lieues  un  quart  au  Nord-Oucft  de  Tré- 
guier ,  fon  Evêché  &  fa  Subdélégation.  Cette  Paroilî'e  relevé  du 
Roi,  &  compte  500  communiants  :  la  Cure  eft  à  l'alternative. 
Cette  Paroifte  reftbrtit  à  Lannion.  Son  territoire  ,  borné  au  Nord 
par  la  mer  ,  produit  des  grains  de  toutes  efpeces.  La  maifon 
noble  de  Ker-jean  appartenoit  ,  en  1450  ,  à  Jean  Paftour,  Sieur 
de  Kerjean  :  Launai-Mezaneguen ,  Leilech ,  6c  Los-Ker-goanton  , 
à    N.... 

TRELIVAN;  à  5  lieues  au  Sud-Sud-Oueft  de  Saint-Malo,  fon 
Evêché  ;  à  I  o  lieues  de  Rennes  j  &  à  i  lieue  de  Dinan  ,  fa 
Subdélégation  &:  fon  rcft'orr.  On  y  compte  600  communiants  :  la 
Cure  elt  préfentée  par  les  Moines  de  Léhon,  Ce  territoire  ofl're 


45é  T  R  E 

à  la  vue  plus  de  landes  que  de  terres  en  labeur.  En  1440,  où 
y  remarquoit  plufieurs  maifons  nobles  ,  fçavoir  ;  la  Salle-Bardoul , 
à  Jean  Robert  -,  Bouecoiles ,  à  Robin  Garance  j  le  Val ,  à  Pierre 
de  la  Vallée  j  Coëfmur  ,  au  Prieur  de  Léhon  ;  &  Vaucoulé ,  à  Guil* 
laume  Guitté  :  cette  dernière  s^appelle  aftuellement  Vaucouleurs  y 
elle  a  une  haute- Juftice  ,  &  appartenoit ,  en  1 660 ,  à  François»- 
René  de  Derval ,  aujourd'hui  à  M.  de  Bruc ,  qui  poflede  aufH 
Ker-hars,  avec  haute-Juftice^ 

TREMBLAY  ;  fur  la  route  de  Rennes  à  Saint- James ,  en  Nor- 
mandie j-  à  8  lieues  de  Rennes ,  fon  Evêché  ;  &  à  trois  quarts 
de  Heue  d'Antrain,  fa  Subdélégation  &  fon  refTort.  On  y  compte 
1600  communiants  :  la  Cure  elt  un  Prieuré ,  préfenté  par  l'Abbé 
de  Saint-Florent  de  Saumur  :  ce  Prieuré  a  une  haute-Juftice.  En 
1630,1!  étoit  encore  deffervi  par  trois  Moines  de  Saint-Florent. 
Le  territoire ,  arrofé  des  eaux  de  la  rivière  de  Couefnon  ,  & 
couvert  d'arbres  fruitiers  &  autres  ,  renferme  des  terres  en  la- 
beur de  bonne  qualité,  des  prairies,  &  des  landes* 

L'an  1190,  GeofFroi  de  CefTon  donna  la  moitié  de  fa  Terre 
de  Tremblay  à  l'Abbaye  de  Savigné  ,  fituée  dans  la  Normandie  , 
cette  Terre  lui  avoir  été  donnée  par  Hervé  de  CefTon  ,  fon 
grand-pere.  La  haute-Juftice  de  Pont-à-vis,  appartient  à  M.  du 
Haflai^ 

TREMEHEUC  ;  à  3  lieues  un  tiers  au  Sud-Sud-Eft  de  Dol  ^ 
fon  Evêché  &  fa  Subdélégation  ;  &:  à  7  lieues  &  demie  de 
Rennes.  Cette  ParoifTe  relTortit.  à  Bazouges  ,  &  compte  4.00  conir 
muniants  :  la  Cure  eft  à  la  nomination  privative  de  l'Evêqueo. 
Ce  territoire  ,  d'une  fuperficie-  plane ,  contient  plus  de  landes 
que  de  terres  en  labeur.  La  Seigneurie  de  Tremeheuc  fut  érir 
gée  en  Bannière,  par  le  Duc  Jean  V  ,  le  21  Juillet  1433,  en. 
faveur   de  N.  du  Bois  de  la  Motte.. 

TREMELOIR  ;  fur  une  hauteur  ;  à  2  lieues  au  Nord-Oueil' 
de  Saint- Brieuc>  fon  Evêché  &  fa  Subdélégation  j&  à  22  lieues 
de  Rennes  ,  fon  refTort..  On  y  compte  400  communiants  :  la 
Cure  efl  à  l'alternative.  Le  territoire  ,  coupé  de  quelques  ruifTeaux. 
qui  coulent  dans  les  vallons  ^  efl  très-exafteinent  cultivé  5  ii: 
produit  beaucoup  de  grains.. 

TR£MENECHj,  à  9.  lieues   à  l'Oueft  de  Saint-Pol-de-Léon^, 

(bn. 


ïbn  Evêché  j  à  49  lieues  de  Rennes  ;  &  à  3  lieues  trois  quarts  de  Lel- 
neven  ,fa  Subdélégation  &  Ion  reflbrt.  On  y  compte  500  commu- 
niants :  la  Cure  ei\  préfentée  par  l'Evêque.  Le  territoire  ,  borné  par 
la  mer  ,  eft  très-exaftement  cultivé  ,  Se  rapporte  d'abondantes  ré- 
coltes en  grains  de  toutes  efpeces. 

TREMEOC  ;  à  2  lieues  au  Sud-Ouefl  de  Quimper ,  fon  Evê- 
ché &  fon  reflbrt  ;  à  41  lieues  de  Rennes  ;  &  à  i  lieue  & 
demie  de  Pont  -  l'Abbé ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  000 
communiants  :  la  Cure  efl:  à  l'alternative.  Cette  Paroifl'e  fut 
fondée  par  Saint  Allore  ou  Albin  ,  troifieme  Evêque  de  Quimper  , 
qu'elle  reconnoît  pour  fon  Patron.  Le  territoire ,  rempli  de  vallons , 
de  coteaux  ,  &:  monticules  ,  elt  exaftement  cultivé  ;  il  produit  des 
fourrages  abondants,  qui  procurent  aux  habitants  la  facilité  d'élever 
beaucoup  de  beftiaux» 

TREMEREUC  ;  à  2  lieues  un  quart  au  Sud-Sud-Ouefl  de  Saint- 
^alo ,  fon  Evêché  ;  à  1 2  lieues  de  Rennes  j  &:  à  2  lieues  un  tiers 
de  Dinan ,  fa  Subdélégation  &  fon  reflbrt.  On  y  compte  400 
communiants  :  la  Cure  efl:  préfentée  alternativement  par  l'Abbé 
de  Saint-Jacut  6c  le  Seigneur  de  la  ParoiflTe.  Le  territoire  ell 
d'une  fuperflcie  plane  ,  fl  vous  en  exceptez  deux  vallons ,  qui  font 
au  Nord  &  au  Sud  de  fon  bourg.  A  peu  de  diilance  à 
l'Efl  de  fon  clocher  ,  eÛ  une  lande ,  qui  a  deux  lieues  de  longueur 
fur  un  tiers  de  lieue  de  largeur  -,  elle  pourroit  faire  un  très-beau 
taiUis,  û  le  fol  n'étoit  pas  bork  pour  la  culture  des  grains.  Le  refle 
des  terres  efl:  en  labeur  ou  en  prairies.  On  y  remarque  les  mai- 
fons  nobles  de  la  Gazé  &  de  la  Ville-Robert,  avec  deux  grands 
étangs ,  qui  font  tourner  deux  moulins.  La  hautc-Juflice  de  Tre- 
mereuc  appartient  à  M.  de  Plouer. 

TRÉMÉVEN  ;  fur  une  hauteur  ;  à  9  lieues  Se  demie  à  TEfl-Sud- 
EÛ  de  Quimper,  fon  Evêché  j  à  30  lieues  de  Rennes;  &:  à  x 
lieue  de  Quimperlé  ,  fa  Subdclégation  &  fon  reflbrt.  Cette 
FaroiflÂs  relevé  du  Roi,  &  compte  1000  communiants  :  la  Cure 
efl:  à  l'alternative.  Le  territoire ,  arrofé  par  les  rivières  d'ifolle 
&  d'Ellé ,  eft  très-bien  cultivé  ,  Se  produit  beaucoup  de  grains 
&  de  foin.  En  1420,  on  y  connoiflbit  trois  manoirs,  fçavoir  j 
Rcflaudou ,  à  Gauvin  du  Hilguiti  Coetauhay,  à  Jean  Chef-du- 
Bois  ',  &  Lancaru  ,  au  Sire  de  Kereimcr. 

Tome  IF.  M  J 


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45g  TRE 

TRÉMÉVEN;  fuf  une  hauteur  5  à  5  lieues  au  Nord-Oueftdé 
Saint-Brieuc  ,  fon  Evêché  &  fonrefîbrti  à  25  lieues  de  Rennes  j 
&  à  2  lieues  trois  quarts  de  Paimpol ,  fa  Subdélégation.  On  y 
compte  500  communiants.  M.  le  Marquis  de  Rougé  en  ell  le 
Seigneur  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire ,  couvert  d'ar- 
bres fruitiers  &  autres ,  &  rempli  de  vallons  de  monticules ,  ell 
très-bien  cultivé. 

La  Maifon  de  Coetmen  efl  une  branche  cadette  de  la  Maifon 
d'Avaugour  &  Penthievre,  qui  fortoit  de  la  Maifon  de  Bretagne. 
Geilinus  de  Coetmen  ,  efl  le  premier  qui  en  ait  porté  le  nom. 
Il  étoit  fils  de  Henri  I  du  nom  ,  Comte  de  Penthievre ,  &  de 
Mathilde  de  Vendôme  :  il  eut  la  terre  &  feigneurie  de  Coetmen 
en  partage,  l'an  11 51.  Lui  &  fes  defcendants  prirent  le  titre 
de  Vicomtes  de  Coetmen,  &  quelquefois  celui  de  Vicomtes  de 
Tonquedec  &  de  Châteaugui,  terres  qu'ils  poffédoient.  MM.  de 
Coetmen  prirent  leurs  alUances  dans  les  plus  grandes  Maifons  de 
Bretagne.  Ils  ont  toujours  joué  un  grand  rôle  à  la  Cour  des 
Souverains  de  la  Province  ;  &  les  ont  fervis ,  foit  à  la  tête  des 
armées ,  foit  dans  les  négociations.  Alain ,  fils  de  Henri  de  Coet- 
men ,  époufa ,  l'an  1 202  ,  Perronelle ,  nièce  du  Vicomte  de 
Thouars ,  &l  fonda  l'Abbaye  de  Beauport ,  ordre  de  Prémontré* 
Alain  II  du  nom ,  époufa  Confiance ,  fille  d'André  II ,  Baron 
de  Vitré.  Rolland  de  Coetmen  III  du  nom,  fuivit  le  parti  de 
Charles  de  Blois ,  &  fut  un  des  chefs  de  fes  troupes  :  il  fut 
fait  prifonnier,  à  la  bataille  d' Aurai ,  le  29  Septembre  i3<^4, 
où  Charles  perdit  la  viftoire  &  la  vie.  Rolland  de  Coetmen, 
fut  un  des  principaux  appuis  du  Connétable  Olivier  de  ClifTon, 
afîiégé,  en  1394,  dans  la  Rochederien,  par  le  Duc  Jean  IV  î 
il  fut  obhgé  de  demander  fa  grâce.  Ses  biens ,  qui  avoient  été 
faifis  ,  lui  furent  rendus ,  à  la  foUicitation  du  Roi  -,  mais  le  châ- 
teau de  Tonquedec  fut  entièrement  rafé ,  par  ordre  du  Duc  Jean 
IV.  En  1447,  Rolland  de  Coetmen  fit  ériger  l'Eglife  paroifTiale 
de  Tonquedec  en  Collégiale.  A  la  fin  du  quatorzième  fiecle ,  la 
maifon  de  Coetmen  fe  fépara  en  deux  branches  :  la  cadette 
eut  en  partage  la  Terre  du  Bois-Guezennec  ,  en  1487.  En  1 497, 
la  Terre  de  Coetmen  fut  érigée  en  Baronnie  ,  par  le  Duc  Fran- 
çois II ,  en  faveur  de  Jean  ,  Vicomte  de  Coetmen ,  époux  de 
Jeanne  du  Pont  ,  fille.de  Pierre,  Baron  du  Pont,  &  d'Helene 
de  Rohan.  Sa  fille  unique  &  héritière ,  Gillette  de  Coetmen , 
époufa  Jean  VI   d'Acigné.   Son  petit  fils ,  Judith  d'Acigné ,  eut 


,  ^,    ,    T  R  E  459 

jpour  fille  Judith  d*Acigné ,  héritière  &  Baronne  de  Coetmen  , 
qui  époufa,  en  1573  ,  Charles  de  CofTé ,  Comte  de  Briflac  , 
Maréchal  de  France ,  auquel  elle  porta  la  Baronnie  de  Coetmen. 
Après  avoir  paffé  dans  différentes  maifons,  Coetmen  revint  à 
fes  premiers  pofTefleurs  ,  par  l'acquifition  qu'en  fit  le  Marquis  de 
Coetmen ,  Maréchal  de  Camp  &  Commandant  à  Breft. 

En  1505  ,  Olivier  de  Coetmen,  chef  de  la  branche  cadette, 
étoit  Confeiller  &  Grand  Maître  de  la  Reine  Anne.  Après 
l'union  du  Duché  de  Bretagne  à  la  Couronne  de  France ,  M  M. 
de  Coetmen  fervirent  leurs  Rois  comme  ils  avoient  fervi  leurs 
Ducs.  Sous  le  règne  de  Louis  XIV ,  Olivier-Jof eph  de  Coetmen , 
Meftre  de  Camp  de  Dragons  ,  fut  tué  à  l'attaque  de  Douai. 
Cette  maifon ,  ancienne  &  lUuftre  ,  s'ell  éteinte  en  la  peribnne 
d'Alexis-René  ,  Marquis  de  Coetmen  ,  Meftre  de  Camp  de  Dra- 
gons ,  Gouverneur  de  Tréguier ,  puis  Maréchal  de  Camp ,  & 
Commandant  des  ville  &  château  de  Brelt  &  des  quatre  Evê- 
chés  de  bafTe  Bretagne  ;  il  époufa  Jeanne-JuUe  de  Goyon ,  & 
n'en  eut  que  deux  hlles  :  l'amée  époula  le  Marquis  de  Rougé, 
Lieutenant  général  des  armées  du  Roi ,  Gouverneur  de  Givet 
&  Charlemont ,  tué  a  la  bataille  de  PhiHnghaulén  en  1761,  & 
lui  porta  la  Baronnie  de  Coetmen.  Son  fils  aine ,  M.  le  Marquis 
de  Rougé ,  Colonel  d'Infanterie ,  en  efl  aujourd'hui  poflefTeur.  La 
fille  cadette  de  M.  le  Marquis  de  Coetmen  a  époufé  M.  le  Mar- 
quis de  Caradeuc ,  fils  aîné  de  M.  de  la  Chalotais  ,  &  n'en  a 
eu  qu'une  fille.  Il  exifle  un  titre  qui  prouve  combien  la  maifon 
de  Coetmen  étoit  confidérée  dans  fa  province.  Elle  étoit  prête 
à  s'éteindre  ,  &  ne  pouvoir  être  relevée  que  par  un  Abbé  de  Coet- 
men ,  Sous-Diacre.  Sa  Souveraine  écrivit  au  Pape  pour  le  faire 
relever  de  fes  vœux ,  alléguant  pour  raifon  qu'elle  ne  pouvoit 
fe  réfoudre  à  voir  s'éteindre  une  maifon  aufli  liluflre ,  ik  qui  lui 
avoit  rendu  tant  de  fervices. 

TREMEUR  ',  fur  un  coteau  ;  à  8  lieues  au  Sud  -  Ouefl  de 
Saint  -  Malo  ,  fon  Evêché  j  à  11  Heues  de  Rennes;  &  à  5 
lieues  de  Lamballe  ,  fa  Subdélégation.  Cette  ParoifTe  relevé  du 
Roi,  reffortit  à  Dinan  ,  &  compte  550  communiants  :  la  Cure 
eft  à  l'alternative.  C^e  territoire,  couvert  d'arbres  &  buifrons,efl 
affez  exaftemcnt  cultivé ,  6s:  produit  du  grain  &:  du  cidre.  Le 
Prieuré  de  Saint- Georges ,  qui  étoit  autrefois  un  Hôpital,  tut 
fondé,  en  1346,  par  Geoffroi  le  Voyer,  Sieur  de  Tregomar , 
&  Jeanne  Rouxel ,  fon  cpoufe ,  au  bout  de  la  chauffée  de  Trc- 


460       ■  T  R  E 

dien ,  en  cette  Paroifle.  L'afte  de  fondation  porte  qu'il  y  aura 
quatre  Prêtres  &  quatre  Frères  de  TOrdre  de  Saint  -  Auguftin  , 
de  l'Abbaye  de  Sainte-Croix  de  Guingamp  ;  pour  la  nourriture 
defquels  les  fondateurs  affignent  trente  mines  de  froment  de 
rentes  ,  mefure  de  Plumodan ,  à  prendre  fur  le  fromentage  de 
cette  Paroi  fle  ;  dix  mines  de  feigle  ,  mefure  de  Jugon ,  à  pren- 
dre fur  les  dîmes  de  Saint  -  Igneuc  &  autres.  M.  Callouet  de 
Tregomar  eft  aujourd'hui  dans  les  droits  des  fondateurs ,  defquels 
il  defcend,  La  haute-Juftice  de  Quenart  appartient  à  M.  de  la 
Bretonniere  ;  la  moyenne-Juftice  de  la  Gueurine ,  à  M.  de  la 
Goublaie  de  Saint-Quereuc  j  &  la  moyenne-Juftice  du  Nodai,' 
à  M.  Nodai  du  Rocher, 

TREMOREL  ;  à  1 1  lieues  trois  quarts  au  Sud-Sud-Efî:  de  Saint- 
Malo  ,  fon  Evêché  ;  à  9  lieues  trois  quarts  de  Rennes  ;  &  à  4  lieues 
èc  demie  de  Montauban  ,  fa  Subdélégation»  Cette  ParoilTe  refTortit 
à  Dinan  ,  &  compte  2300  communiants,  y  compris  ceux  de 
Lelocouet ,  fa  trêve  :  la  Cure  eft  préfentée  par  l'Abbé  de  Saint- 
Méen.  Il  fe  tient  une  foire  de  bétail  à  Tremorel  à  la  mi-ca- 
rême. Le  territoire  ,  d'une  fuperficie  plane  ,  renferme  des  terres 
en  labeur  de  bonne  qualité ,  quelques  bois  ,  Se  des  landes.  La 
Seigneurie  de  l'endroit  fut  donnée,  en  l'an  1000,  à  l'Abbaye 
de  Saint  -  Méen ,  par  le  Duc  Alain  IIL  Le  Pape  Céleftin  III ,' 
par  fa  Bulle  de  l'an  1192  ,  confirma  à  cette  Abbaye  la 
donation  de  l'EgHfe  de  Tremorel.  En  1390,  les  manoirs  de 
Giffart  &  du  petit  Val  appartenoient  à  Geoffroi  de  Beaumanoirj 
&  le  Bois-Cleret ,  à  Olivier  de  Coëtlogon. 

TREMUZON  ;  fur  une  hauteur,  &  fur  la  route  de  Saint- 
Brieuc  à  Guingamp;  à  i  lieue  &  demie  de  Saint  -  Brieuc ,  foti 
Evêché  Se  fa  Subdélégation  ;  &  à  2 1  Heues  &  demie  de  Rennes  , 
fon  refTort.  On  y  compte  600  communiants  :  M.  le  Duc  de 
Penthievre  en  eft  le  Seigneur  ;  Se  la  Cure  eft  à  l'alternative. 
Le  territoire  ,  coupé  de  rUiiTeaux  qui  coulent  dans  les  vallons , 
eft  très-exaftement  cultivé ,  &  produit  des  grains  de  toutes  ef- 
peces  &  des  pâturages.  Le  manoir  de  la  Roche-Suart  apparte- 
noit,  en  1440,  à  N.  de  Chateaubriand  -,  &  le  manoir  de  la  Mo-r 
randais ,  à  Geoffroi  de  Couveran ,  Chevalier. 

TRÉOGAN  j  à  4  lieues  à  l'Oueft-Sud-Oueft  de  Quimper, 
fon  Evêché  &  fon  refîbrt  j  à  43  lieues  de  Rennes  j  &  à  2  lieues 


de  Pont-l'Abbé,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  450  commu- 
niants :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire ,  qui  elt  borné 
par  la  mer  ,  efl  très  -  bien  cultivé ,  &  fertile  en  grains  de 
toutes  les  efpeces. 

TREOGATj  dans  un  fond;  à  10  lieues  un  tiers  à  l'Eft-Nord- 
Eft  de  Quimper ,  fon  Evêché  i  à  3 1  lieues  de  Rennes  j  Se  à  i  lieue 
deux  tiers  de  Gourin,  fa  Subdélégation.  Cette  ParoifTe  relevé 
du  Roi,  reflbrtit  à  Carhaix  ,  &  compte  550  communiants:  la 
Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire  n'ell:  compofé  que  de  mon- 
ticules ,  nommées  Us  montagnes  Noires  ,  qui  forment  une  chaîne 
depuis  Evran  jufquà  Crozon  ,  de  manière  que  la  plus  grande 
partie  du  terroir  ell  abfolument  inculte  :  on  y  voit  en  outre  la 
forêt  de  Connevau ,  qui  a  deux  lieues  de  circuit.  En  1356,  Jean  , 
Seigneur  de  Treogat ,  avoit  une  Compagnie  au  fervice  du  Roi 
Charles  V.  Les  manoirs  nobles  de  Pencoz ,  Ker-leaugui ,  Ker- 
fredin  ,  Ker-aflan ,  &  le  Mengui ,  exiiloient  à  la  même  époque , 
dans  cette  Paroifle. 

TREOUESCAT  ;  à  i  o  lieues  trois  quarts  à  l'Ouefl-Sud-Oueft 
de  Saint-Pol-de-Léon ,  fon  Evêché;  à  50  lieues  de  Rennes;  & 
à  3  lieues  deux  tiers  de  Breft ,  fa  Subdélégation  &:  fon  refîbrt. 
On  y  compte  300  communiants  :  la  Cure  eft  préfentée  par  l'Evê- 
que.  Le  territoire  elt  très-bien  cultivé. 

TREOULTRÉ-PENMARCH  3  (  voyez  Penmarch.  )  Treoultré 
relevé  du  Roi. 

TRESSAINTS  ;  à  5  lieues  au  Sud-Ouell  de  Dol ,  fon  Evêché  ; 
à  9  lieues  un  tiers  de  Rennes  ;  &  à  deux  tiers  de  lieue  de 
Dinan  ,  fa  Subdélégation  &  fon  refTort.  On  y  compte  400 
communiants  :  la  Cure  eft  préfentée  par  l'Abbé  de  Beaulieu, 
Le  territoire  ,  traverfé  par  la  rivière  de  Rance  &  quelques  ruif- 
feaux  qui  vont  s'y  jetter  ,  ell  couvert  d'arbres  fruitiers  &  autres: 
il  eft  très-bien  cultivé  ;  fes  produéHons  font  les  grains ,  les  pâ- 
turages ,  &  le  cidre. 

Du  Pas  dit  que  Raoul  de  Lanvallai ,  Chevalier ,  étoit  Seigneur 
de  TrefTaints  en  1300.  Charles  de  Lanvallai  fit  fon  tellament 
le  28  Avril  1449,  &  déclara  qu'il  vouloir  être  inhumé  dans 
l'EgUfe  paroiffiale  de  Treflaints ,  où  il  fonda  deux  MefTes  par 
femaine ,  aux  jours  de  vendredi  ôc  de   famedi.  Raoul ,  fon  fiL> 


^67.  T  R  E 

&  fon  fuccefTeur ,  s'acquit  une  grande  réputation  dans  les  armes  ^ 
&  fervit  fous  les  Ducs  Jean  V ,  François  I ,  Pierre  II ,  Artur  III , 
&  François  II,  auxquels  il  rendit  d'importants  fervices  :  il  fut  Ca- 
pitaine de  la  ville  de  Dinan  fous  le  Duc  Jean  V.  En  1467,  le 
Duc  François  II  lui  permit  d'élever  une  JulHce  patibulaire  à  trois 
poteaux  ;  lui  donna  la  commiflion  de  tenir  les  montres  des 
nobles  de  l'Archidiaconé  de  Porhoët  à  Ploermel  ;  &,  par  lettres^ 
données  à  Nantes  le  21  Mai  1468  ,  le  nomma  Capitaine  du  château 
'de  Landal.  Ce  brave  Chevalier  mourut  en  1472  ;  il  jouifioit  de 
mille  livres  de  rente ,  &  avoir  pour  dix  mille  livres  de  meubles , 
aufîi  paffoit-il  pour  un  des  plus  riches  Seigneurs  de  Bretagne  :  il 
ne  laifTa  point  d'enfants  de  fon  époufe  Jeanne ,  fille  d'Eulla- 
che  de  la  Houffaye ,  Chevalier  renommé  ,  &  de  Jeanne  de 
Roftrenen. 

TRESSE  ;  à  2  lieues  &  demie  au  Sud  -  Oueft  de  Dol ,  foa 
Evêché  6l  fa  Subdélégation  ;  &  à  9  lieues  &  demie  de  Rennes, 
Cette  ParoifTe  refTortit  à  Dman ,  &  compte  300  communiants  r 
la  Cure  eft  à  l'Ordinaire.  Le  territoire  ,  couvert  d'arbres  & 
buifTons ,  eft  coupé  par  les  grands  chemins  de  Rennes  à  Saint- 
Malo ,  &  de  Dol  à  Dinan  :  on  y  voit  le  bois  du  Mefnil ,  qui 

Eeut  avoir  deux  lieues  de  circuit ,  des  terres  en  labeur  de 
onne  qualité  ,  6c  peu  de  landes.  La  moyenne  -  Juftice  de 
Launai  -  Baudouin ,  appartient  à  Mademoifelle  du  Monnier  le 
Bonhomme. 

Cette  ParoifTe  fut  fondée  par  les  Seigneurs  du  Trèfle  ,  mais 
on  en  ignore  le  temps  i  tout  ce  que  l'on  fçait ,  c'efl:  qu'on  lit 
dans  une  ancienne  charte  que  Aduleaume  du  Trèfle  ,  fous  les 
ordres  de  Pépin,  dit  Herî/iel ,  Maire  du  Palais,  marcha,  avec 
fa  troupe,  contre  les  Saxons, l'an  690.  L'an  1200,  le  Seigneur 
de  Courtenay  ,  témoin  de  la  bravoure  de  Guillaume  du  Trèfle, 
ChevaUer  Baneret  Se  rejeton  d'une  famille  fi  généreufe,  lui 
donna  fa  fille  en  mariage ,  nommée  Ifabeau  ,  avec  cent  écus 
d'or.  La  maifon  du  Treiié ,  aufîi  illufl:re  par  fon  antiquité  que 
par  fes  aUiances ,  compte  pour  fes  ayeuls  maternels ,  les  Torne- 
mine  ,  les  Rohan ,  les  Soral ,  les  Duhellan ,  les  Goulaines  ,  les 
la  Touche-Lmiouzinieres  ,  les  Chevigné  ,  les  Safîré  ,  &c.  On  peut 
dire  que  cette  Maifon,  dont  l'origine  fe  perd  dans  les  temps 
les  plus  reculés ,  ell  au  rang  des  plus  anciennes  de  Bretagne  : 
elle  fubfifl:e  encore  aujourd'hui  dans  la  perfonne  de  M.  du 
Trèfle,  Commiflaire  des  Etats  de  Bretagne,  à  Nantes* 


T  R  E  4(î> 

TRESSÎGNEAU;  fur  un  coteau  j  â  3  lîeues  trois  quarts  au 
Nord  -  Ouefl  de  Saint  -  Brieuc ,  fa  Subdélégation  &  fon  refTort  i 
à  23  lieues  trois  quarts  de  Rennes.  On  y  compte  450  commu- 
niants :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Ce  territoire  ,  couvert  d'ar- 
bres &  buifTons  ,  eu  abondant  en  grains  &  pâturages.  En  i  cco 
on  y  connoifToit  les  manoirs  nobles  de  Ker-guilHn ,  Ker-raoul 
Ker-biguet,  Ker-errez,  Vieuxchâtel,  Ker-vivricq,  Ker-allan, 
Ker-gouet ,  &  Pellan. 

TREVE  j  dans  un  fond  ;  à  7  lieues  un  tiers  au  Sud  de  Saint- 
Brieuc,  fon  Evêché  j  à  17  lieues  trois  quarts  de  Rennes;  Se  à 
4  lieues  trois  quarts  de  Quintin ,  fa  Subdélégation.  Cette  Pa- 
roifïe  refTortit  à  Ploermel ,  &  compte  2400  communiants  :  la 
Cure  efl  à  l'alternative.  Le  territoire  eft  varié  de  coteaux  ,  de 
collines  ,  &  de  vallons ,  &  couvert  d'arbres  fruitiers  &  autres  : 
on  y  voit  des  terres  en  labeur ,  des  prairies  ,  des  bois ,  ôc 
des  landes. 

TREVENEUC  ;  dans  un  fond  ;  à  3  lieues  au  Nord-Nord- 
Oueft  de  Saint-Brieuc  ,  fon  Evêché  ,  fa  Subdélégation ,  &c  fon 
reffort  j  &  à  23  lieues  de  Rennes.  On  y  compte  400  commu- 
niants :  la  Cure  eft  à  ralternative.  Le  territoire ,  borné  par  la 
mer  ,  eft  fertile  en  grains  de  toutes  les  efpeces.  En  1 490 ,  on 
y  connoiftbit  les  maifons  nobles  de  Ker-cadoret  &  de  Pommorio* 

TREVEREC  ;  à  3  lieues  &  demie  au  Sud-Eft  de  Tréguier , 
fon  Evêché  ;  à  i6  lieues  Sz  demie  de  Rennes  ;  &  à  i  lieue  & 
demie  de  Pontrieux,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroifle  refTortit  à 
Lannion  ,  &  compte  400  communiants  :  la  Cure  ei\  à  l'alterna- 
tive. Le  terroir  eft  très-exa6lement  cultivé.  En  1380,  on  y  con- 
noiftbit trois  maifons  nobles ,  nommées  Pedernech ,  Ker-oovie  , 
&  Ker-allain. 

TREVERIEN  j  à  6  lieues  trois  quarts  au  Sud  -  Sud  -  Eft  de 
Saint-Malo ,  fon  Evêché  ;  à  7  heucs  un  quart  de  Rennes  ;  &:  à 
2  lieues  un  tiers  de  Hédé,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroifte 
reffortit  à  Ploermel  ,  &  compte  700  communiants  :  la  Cure  eft 
préfentée  par  les  Rehgieux  de  Léhon.  Le  territoire  ,  couvert 
d'arbres  &  buiflbns ,  offre  à  la  vue  des  terres  labourables  de 
bonne  qualité  ,  des  landes ,  &:  le  bois  de  la  Fofle-aux-Loups ,  qui 
peut  avoir  une  lieue  &  demie  de  circuit.  La  rivière  de  Lmnon, 


4^4  T  R  E 

qui  pafTe  à  peu  de  dillance  au  Nord  de  ce  bourg ,  pourfok  être 
rendue  navigable  ;  fa  fource ,  qui  n'eft  pas  fort  éloignée  de  celle 
d'Iile ,  qui  va  fe  jetter  dans  la  Vilaine  ,  à  Rennes ,  faciliteroit 
Texécution  du  projet  de  joindre  cette  dernière  à  la  Rance ,  dans 
laquelle  le  Linnon  fe  perd ,  une  lieue  un  quart  au  defTus  de 
la  ville  de  Dinan.  On  remarquera  feulement  que  ce  grand  projet 
mérite  un  férieux  examen  avant  d'en  venir  à  Tentreprife. 

TREVERON  j  à  6  lieues  un  tiers  au  Sud  de  Saint-Malo  ,  font 
Evêché  ;  à  8  lieues  deux  tiers  de  Rennes  j  &  à  2  lieues  de 
Dinan,  fa  Subdélégation  &  fon  relTort.  On  y  compte  550  com- 
muniants :  la  Cure  efl  préfentée  par  les  Religieux  de  Léhon. 
Le  territoire  ,  arrofé  des  eaux  de  la  rivière  de  Rance  &  de 
quelques  ruiiTeaux ,  eft  très-bien  &  très -exactement  cultivé  5  il 
offre  à  la  vue  beaucoup  d'arbres  fruitiers  &  autres.  Le  Château 
du  Chalonge  appartenoit,  en  1260,  à  Olivier,  Chevalier ,  Sei- 
gneur du  Chalonge  i  il  a  une  haute-Juftice ,  &  appartient  aujour- 
d'hui à  M.  le  Comte  de  Muée. 

TREVOU  ;  à  7  lieues  deux  tiers  à  FEfl-Sud-Efl  de  Quimper, 
fon  Evêché  ;  à  3  2  lieues  de  Rennes  ;  &  à  2  lieues  de  Quimperlé , 
fa  Subdélégation  &  fon  reffort.  Cette  Paroilfe  relevé  du  Roi  y 
&  compte  1500  communiants  :  la  Cure  eft  à  rakernative.  Le 
territoire  eft  couvert  d'arbres  ,  &  coupé  d'un  grand  nombre  de 
ruilTeaux.  qui  coulent  dans  les  vallons  j  il  offre  à  la  vue  des 
terres  bien  cultivées ,  des  prairies ,  des  bois  ,  &  des  landes. 

TREVOUX-TREGUINEC  ;  à  28  lieues  à  TOueft-Nord-Oueft 
de  Dol,  fon  Evêché;  à  32  lieues  de  Rennes  ;  &  à  2  lieues 
de  Tréguier ,  fa  Subdélégation.  Cette  Paroifle ,  qui  eft  enclavée 
dans  le  diocefe  de  Tréguier,  relevé  du  Roi,  &  compte  450 
communiants  :  la  Cure  ell  à  l'alternative.  Le  territoire ,  borné  aïi 
Nord  par  la  mer ,  eft  fertile  en  grains  de  toutes  efpeces* 

TREZELAN  ;  fur  une  hauteur ,  près  la  'rivière  de  Tréguier  j 
à  2  lieues  trois  quarts  au  Sud  de  Tréguier ,  fon  Evêché  ;  à  29 
lieues  de  Rennes  j  &  à  3  lieues  trois  quarts  de  Guingamp ,  fa 
Subdélégation  &  fon  reffort,.  Cette  Paroiffe  reffortit  à  Lannion , 
&  compte  1 200  communiants  ,  y  compris  ceux  de  Saint-Norvez  , 
fa  trêve  :  la  Cure  eft  à  l'alternative.  Le  territoire ,  pays  couvert 
d'arbres  &  buiflbns ,  renferme  des  terres  de  bonne   qualité ,  & 

quelques 


T  R  E  =  V  A  L  4^5 

quelques  petites  landes.  L'Abbaye  de  Begars ,  qui  eft  fituée  dans 
cette  Paroifle,  y  pofledoit  quatre  métairies ,  dès  avant  1380.  La 
Roche-Huon  exitloit  à  cette  dernière  époque» 

TREZENI;  à  2  lieues  à  l'Oueft  -  Nord  -  Oueft  de  Tréguier, 
fon  Evêché  ;  à  3  2  lieues  de  Rennes  ;  &  à  i  lieue  trois  quarts 
de  Lannion  ,  fa  Subdélégation  &  fon  reflbrt.  On  y  compte  450 
communiants  :  la  Cure  elt  à  l'alternative.  Le  territoire  eit  exac- 
tement cultivé ,  &  renferme  des  landes  peu  étendues.  On  y 
connaît  les  maifous  nobles  de  Ker-morvan  ,  Ker-naleguen ,  &: 
Ker-meno* 

TRIGAVOUj  à  3  lieues  un  quart  au  Sud-Sud-Oueft  de  Sain'- 
Malo ,  fon  Evêché  j  à  1 1  lieues  deux  tiers  de  Rennes  j  &:  à  i 
lieue  &  demie  de  Dinan  ,  fa  Subdélégation  ,  &  fon  reflbrt. 
Cette  Paroifl^e  relevé  du  Roi ,  &  compte  600  communiants  ': 
la  Cure  ei\  à  l'alternative.  Le  territoire  renferme  quelques  terres 
en  labeur  &  des  landes.  Le  château  du  Bois  de  la  Motte , 
maifon  feigneuriale  de  la  Paroifle ,  érigée  en  Bannière  par 
lettres   du  Duc   Jean  V,  en  date  du  21  Juillet  1433  ,  fut  érigé 

en   Marquifat  l'an Ce  Marquifat  pafla  à  l'illullre   maifon  de 

Cahideuc ,  en  1633,  par  le  mariage  de  Guyonne  de  Mont- 
bourcher  ,  Marquife  du  Bois  de  la  Motte ,  avec  Sébaitien-René 
de  Cahideuc.  Le  château  ell:  décoré  d'un  bois ,  qui  a  une  lieue 
&  demie  de  circuit  :  il  a  haute  -  Juftice  ,  &  appartient  à  M.  le 
Marquis  du  Bois  de  la  Motte. 

TROGUERI  j  à  trois  quarts  de  lieue  au  Sud  de  Tréguier  y 
fon  Evêché  &:  fa  Subdélégation  5330  Heues  de  Rennes.  Cette 
Paroifljs  reflibrtit  à  Lannion,  &  compte  350  communiants  :  la 
Cure  eft  à  l'alternative.  Le  terroir  efl:  très-bien  6c  uès-exa6le- 
meot  cultivée 


V. 


ALLET  ;  fur  une  hauteur  ;  à  5  lieues  un  quart  à  l'Efl-Sud- 
Eli  de  Nantes ,  fon  Evêché  ik  fon  reffon  ;  à  27  lieues  un  quart  de 
Rennes  ;  &  à  2  lieues  de  Clifl!bn ,  fa  Subdélégation.  On  y 
compte  3500  communiants:  la  Cure  eft  préfentée  par  le  Chapitre 
de  Nantes.  Le  territoire  cfl ,  pour  ainfl  dire  ,  tout  occupé  par 
des  vignes ,  qui  produifent  Le  meilleur  vin  du  Comté  Nantais  >, 
lomc  IK.  N   ï 


4é6     _  V  A  L  =  V  A  N 

on  y  voit  auffi  des  terres  en  labeur,  des  prairies,  &  des  bois 
peu  étendus. 

L'Abbaye  de  la  Regrippiere  ,  Ordre  de  Fontevrault ,  eft  dans 
cette  ParoifTe.  Je  n'ai  pu  rien  trouver  pour  la  fondation  de  cette 
Maifon.  Le  plus  ancien  Seigneur  dont  on  ait  connoifTance ,  efl 
Lucas  de  Valiet,  qui  vivoit  en  1188.  En  1264,  cette  Seigneurie 
appartenoit  à  Olivier  de  ClifTon.  Le  Prieuré  Differon  fut  uni  au 
Couvent  des  Chartreux  de  Nantes,  en  1577.  L'Ecole  publique 
de  Vallet  fut  fondée  en  1626;  &  la  préfentation  du  Principal 
fut  donnée  au  Chapitre  de  la  Cathédrale  de  Nantes ,  qui  perçoit 
une  bonne  partie  des  dîmes  de  la  ParoifTe.  Union  de  Juflice  à 
Vallet ,  au  mois  d'Août  1739  ,  ^^  faveur  d'Achille  Rolland 
Barrin ,  Confeiller  au  Parlement  de  Bretagne.  Au  mois  de  Juillet 
1756,  M.  Marc-Achille  Barrin,  Seigneur  de  Fromenteau,  ob- 
tint l'établifTement  de  quelques  foires ,  &  d'un  marché  qui  doit 
fe  tenir  le  lundi  de  chaque  femaine.  La  Terre  &  Seigneurie 
de  Fromenteau ,  avec  haute- Juftice  ,  fut  érigée  en  Marquifat ,  en 
1760,  en  faveur  de  M.  Marc-Achille  Barrin,  Meflre  de  Camp 
du  Régiment  de  Languedoc  ,  Dragons  ,  aujourd'hui  Maréchal 
des  Camps  &  armées  du  Roi.  La  maifon  noble  de  Bois-Benoît 
appartenoit,  en  1480,  à  Jean  de  Chevaegné  du  Bois-Benoît  j  èc 
celle  du  Clairay ,  à  Jean  de  la  Fontaine ,  Chevalier. 

VANDEL  j  fur  une  hauteur  ;  à  7  lieues  &  demie  au  Nord- 
Eli  de  Rennes ,  fon  Evêché  j  &  à  2  Heues  de  Fougères ,  fa 
Subdélégation.  Cete  ParoifTe  refTortit  à  Vitré,  &  compte  500 
communiants  :  la  Cure  efl  à  l'alternative.  Le  territoire ,  baigné 
des  eaux  de  la  Couefnon ,  &  couvert  d'arbres  &  buifTons  ,  efl 
très-exa6lement  cultivé.  Ses  maifons  nobles  font,  le  MouHn-Blot, 
le  Chantier  ,  la  Barberie ,  le  Manoir ,  la  Villaye  ,  Saint -Ni- 
colas ,  &   le  Pont-Notre-Dame  fur  la  Couefnon. 

VANNES  ;  ville  épifcopale ,  avec  titre  de  Comté ,  par  les  ç 
degrés  6  minutes  16  fécondes  de  longitude  ,  &  par  les  47  de- 
grés 39  minutes  14  fécondes  de  latitude  ;  k  ii  lieues  de  Rennes. 
Cet  Evêché  efl  borné ,  au  Nord ,  par  ceux  de  Quimper ,  Saint- 
Brieuc  ,  &  Saint-Malo  ;  à  l'Efl ,  par  celui  de  Rennes;  au  Sud, 
par  celui  de  Nantes  &  la  mer  ;  &  à  l'Ouefl ,  par  celui  de 
Quimper.  Il  compte  353950  habitants;  cent-foixante-onze  Pa- 
roilTes ,  quarante-fept  trêves ,  trois  Abbayes  d'Hommes ,  une  de 
Femmes ,  dix-neuf  Couvents  d'Hommes ,   dix-fept  de  Femmes  j 


neuf  Hôpitaux,  dont  deux  militaires ,  &  un  Hôtel-Dieu.  L'air 
y  eft  pur  &  falutaire ,  le  Toi.  el]J-fertile  &  affez  bien  cultivé 
dans  quelques  endroits  ;  mais  ,  'rij^is  j^iiiieurs  autres,  on  n'apper- 
çoit  que  des  landes  très-étendues," oôp^.on  pourroit  tirer  un  parti 
avantageux  en  les  défrichant.  La  ville  ce  Vannes  compte  i  oogq 
habitants  ;  quatre  ParoifTes  ,  qui  font ,  Notre -Dame-du-Mné  ,  (  la 
Cure  efl  préfentée  par  l'Evêque  ,  &  c'eft  toujours  un  Lazarifte, 
le  Supérieur  du  Séminaire  ,  qui  en  eftRefteur;')  Saint-Paterne,  Saint- 
Pierre  ,  &  Saint-Salomon ,  dont  les  Cures  font  préfentées  par  le 
Chapitre  de  La  Cathédrale  ;  onze  communautés  ,  qui  font ,  les 
Capucins ,  les  Carmes-Déchaufles  ,  les  Carmes  du  Bon-Don ,  les 
Dominicains ,  les  Carmélites  de  Nazareth ,  les  Dames  du  Père- 
Eternel ,  les  Cordelières  ,  les  Vifitandines  ,  &  les  Urfulines.  On  y 
remarque  un  Gouvernement  de  place  }  une  Communauté  de 
ville,  avec  droit  de  députer  aux  Etats;  un  Préfidial ,  une  Ami- 
rauté ,  un  Confulat  ;  une  Maîtrife  des  Eaux ,  Bois  &  Forêts  ;  une 
Brigade  de  Maréchauflee ,  une  Sudélégation  ;  une  Recette  ;  les 
Portes  aux  lettres  &z  aux  chevaux  ,  &:c.  L'Eglife  Cathédrale  efl 
dédiée  à  Saint-Pierre.  Le  Chapitre  ell  compofé ,  d'un  Grand-Ar- 
chidiacre, d'un  Tréforier,  d'un  Chantre,  d'un  Scholaftique  ,  d'un 
Grand-Pénitencier,  de  quinze  Chanoines,  &  du  Bas-Chœur. 
L'Evêque  efl  Seigneur  d'une  partie  de  la  ville  :  fa  Jurifdi6lion 
des  Régaires  eft  très-étendue.  Le  commerce  des  Vannerais  eil 
confidérable  :  il  confille  en  grains,  en  fers,8:  en  miel,  que  Ton 
tire  du  pays ,  &:  en  fardines  &  autres  poifTons ,  qu'on  trouve  en 
grande  quantité  dans  cette  ville.  Elle  a  un  port  très-fur  ,  formé 
par  un  bras  de  mer  ou  canal  qui  vient  du  Morbihan.  Cette  fî- 
tuation ,  avantageufe ,  devroit  y  faire  fleurir  davantage  le  com- 
merce j  mais  la  commodité  des  ports  qui  l'avoifinent  lui  en 
enlevé  une  partie.  Celui  de  Vannes  n'eit  gueres  fréquenté  que 
par  les  petites  barques ,  qui  fervent  au  cabotage  iX'  au  commerce 
intérieur  :  les  feuls  agréments  de  cette  ville ,  mal  bâtie ,  fe  ré- 
duifent  au  mail,  à  la  lice,  &  au  portj  encore  ce  dernier  n'efl-ii 
pas  fort  agréable  en  été  ,  à  caufe  de  la  mauvaife  odciu-  qui  s'ex- 
hale des  vafes  dont  il  eil  rempli.  Un  très-bel  étang  ,  nommé 
l'Etang  au  Duc ,  après  avoir  fait  tourner  quelques  moulins  ,  fe 
décharge  dans  ce  ba/ïïn,  &:  diminue  un  peu  cette  puanteur, 
en  emportant  une  partie  des  vafes,  qui,  peu-à-peu,  ne  man- 
queroient  pas  de  boucher  le  port ,  fi  elles  if  ctoient  entraînées 
par  la  rapidité  du  courant.  Il  fe  tient  à  Vannes  deux  marchés 
par  femaine,  le  mercredi  &:  le  famedi;  &  neuf  foires,  par   an* 


4(58  VAN 

Les  habitants  des  campagnes  fe  fervent  de  la  langue  Bretonne; 
mais  corrompue  :  ceux  de  Vannes  parlent  le  Français  pur.  Les 
armes  de  la  ville  font,  de  gueules,  à  une  hermine  paffante  au 
naturel  ,  d'argent  mouchetée  de  fable  &  accolée  de  la  jar- 
retière flottante  de  Bretagne. 

Il  feroit  ridicule  de  vouloir  s'attacher  à  découvrir  la  fondation 
de  la  ville  de  Vannes,  nommée  par  les  anciens,  Danoriqum,  Son 
origine  fe  perd  dans  l'obfcurité  des  fiecles.  Bâtie  par  les  anciens 
Celtes ,  elle  n  eft  connue  que  depuis  la  conquête  des  Gaules  &: 
de  l'Armorique  par  les  Romains  j  cependant ,  Strabon ,  qui  parle 
fort  au  long  des  Venetes ,  les  croit,  conjointement  avec  les  Cé- 
nomans,  fondateurs  de  Vénife  ,  où  ils  furent  conduits,  l'an  164 
de  Rome  ,  590  ans  avant  Jefus-Chrifl: ,  parBellovefe  ou  Sinogvefe, 
deux  Chefs  Gaulois.  Une  partie  s'établit,  dit-on,  en  Italie,  & 
appella  fon  pays  Samnium^  èc  l'autre  fe  fixa  dans  les  ifles  de 
la  mer  Adriatique,  &  nomma  la  Ville  qu'elle  fonda  Venife,  en 
mémoire  de  leur  origine,  &  en  conféquence  de  la  conformité 
des  deux  territoires  qui  font  remplis  de  petites  ifles  :  mais  cette 
tradition,  qui  s'eft  confervée  jufqu'à  nous,  n'efl:  pas  appuyée 
de  titres  fufiifants  pour  mériter  une  entière  créance,  &:  je  pré- 
fère le  fentiment  de  Fhiftorien  de  Vénife,  qui  croit  que  cette 
brillante  république  doit  fon  exiftence  à  la  terreur  qu'infpiroient 
les  Barbares  qui  inondèrent  l'Empire  Romain ,  &  en  partagèrent 
les  débris  dans  les  quatrième  &  cinquième  fiecles.  Les  peuples 
du  Continent  ,  eff'rayés  à  la  vue  de  ces  étrangers  ,  qui  ne  leur 
oflroient  que  la  mort,  ou  un  efclavage  pire  que  la  mort  même,  fe 
réfugièrent  dans  les  ifles  voifines ,  s'y  fixèrent ,  &  formèrent  cet 
Etat ,  qui  joua  depuis  un  fi  grand  rôle ,  &  qui  fe  maintient  au- 
jourd'hui par  la  fagefle  de  fon  gouvernement. 

Quoi  qu'il  en  Sit ,  les  Venetes  étoient  un  peuple  puiflânt 
parmi  les  Gaulois ,  &  le  plus  confidérable  de  l'Armorique.  Leur 
ville  étoit  regardée  comme  la  capitale  du  pays  ,  &  Darïonqum 
étoit,  félon  toutes  les  apparences,  le  chef- lieu  des  aflemblées 
particuUeres ,  comme  Chartres  celui  des  aflemblées  générales  de 
la  nation.  Néanmoins ,  ce  peuple ,  fi  riche ,  fi  puifî'ant ,  étonné 
de  la  grande  réputation  de  Céfar  &  de  fes  Romains ,  fe  fournit 
à  la  domination  de  la  république ,  dès  que  parut  Craflus ,  que 
Céfar  avoir  envoyé  ,  aVec  la  feptieme  légion ,  à  la  conquête  de 
l'Armorique ,  &  donna  des  otages  ,  pour  garants  de  fa  fidélité. 
Quelques  temps  après ,  Craflus ,  qui  avoir  pris  fes  quartiers  dans 
l'Anjou,  venant  à  manquer  de  bled,  envoya  en  demander  aux 


VAN  4^5 

Venetes  &  aux  habitants  de  l'Armorique.  Ces  braves  Gaulois, 
voyant  dans  les  AmbalTadeurs  plutôt  des  maîtres  qui  exigeoient 
que  des  amis  qui  demandoient,  réfléchirent  à  la  perte  de  leur 
liberté  ,  &  réfolurent  de  brifer  le  joug  odieux  qu'on  leur  avoit 
impofé  :  ils  fe  faifirent  des  Ambaffideurs ,  &  firent  dire  à 
CraiTus  ,  que,  s'ilvouloit  les  avoir,  il  falloir  qu'il  rendît  les  otages 
qu'on  lui  avoit  donnés.  Céfar  ,  qui  étoit  éloigné ,  informé  de  cette 
réfolution,  par  CrafTus,  accourt  en  Bretagne,  fe  prépare  à  la 
guerre   contre  les  Venetes. 

Un  point  intéreflant  à  découvrir ,  pour  juger  des  manœuvres 
du  Général  Romain ,  feroit  la  fituation  &  la  véritable  pofition 
des  villes  des  Venetes  ,  &  ,  fur-tout ,  de  leur  capitale. 

M.  de  la  Sauvagere  efl  le  premier  fçavant  qui,  en  1755, 
publia  les  connoifFances  qu'il  avoit  prifes  fur  le  territoire  de 
Vannes ,  d'après  les  Commentaires  de  Céfar ,  où  ce  grand  Ca- 
pitaine a  fait  la  guerre  qu'il  raconte  dans  fon  onzième  livre , 
qui  n'a  point  été  entièrement  entendu  dans  les  traduftions  qui  en  ont 
été  faites,  faute  d'avoir  fçu  comparer  les  récits  au  local  des 
côtes  de  l'Armorique  ,  &  aux  étymologies  celtiques ,  qui  indiquent 
encore  aujourd'hui  les  lieux  défignés  dans  le  texte  latin,  où 
s'efi:  paffèe  cette  aftion  fi  mémorable  dans  les  fafi:es  de  Jules- 
Céfar ,  par  la  defi:ru6lion  totale  des  Venetes,  fi  formidables  par 
leur  bravoure  &  leur  marine  ;  &  mes  lefteurs  me  fçauront  gré  de 
rapporter  ici  ce  que  M.  de  la  Sauvagere  en  dit.  «  Les  interprètes 
»  n'ont  eu  que  des  faufles  idées  fur  la  partie  précifément  de  ces 
n  côtes  maritimes ,  que  les  f^enen  de  la.  Gaule  occupoient  alors, 
>»  ainfi  que  les  géographes  modernes  ,  entr'autres  Sanfon  ,  qui 
»  s'eft  bien  trompé  dans  ce  qu'il  en  a  tracé  dans  ihn  GalUa 
»  vêtus,  »  On  peut  voir  fur  ce  que  nous  avons  dit  au  mot 
Camac ,  que  Jules-Cèfar  dut  fe  camper  dans  ce  camp.  «  Il  eft 
»  certain  que  Céfar  étoit  pofté  de  façon  qu'il  appcrçut  fa  flotte 
»  dès  qu'elle  déboucha  de  la  Loire.  Le  vent  qui  foufîloit  luii 
»  donna  beaucoup  d'inquiétude ,  parce  que  fes  liburncs  ,  el'peces 
»  de  galères  ,  étoient  trop  légères  pour  navigcr  dans  une  aufii 
»  grofie  mer.  Brutus  ,  Amiral  de  cette  flotte,  n'eut,  de  fou 
M  côté  ,  pas  moins  d'inquiétude.  Les  vaiffeaux  desVenetcs  étoient 
»  fort  gros,  faits  de  bois  de  chêne,  fort  commun  dans  leur  pays, 
»  à  fonds  plats  pour  pouvoir  échouer,  leurs  poupes  &  leurs 
»  proues  fort  élevées ,  afin  de  mieux  réliikr  à  la  lame  ;  ce  qui 
»  mettoit  les  foldats  à  couvert  contre  les  traits ,  &  leur  donnoit 
n  une  grande  fupériorité  fur  les  fiburnes  Romaines,  qui  ne  pou- 


470  V  A  N  _ 

»  voient  être  mifes  en  comparaifbn ,  ni  par  la  force,  quant  a\2 
V  choc ,  ni  par  la  voilure  des  bâtiments  des  Venetes ,  dont  les 
»  bordages  étoient  aufli  de  planches  de  chênes ,  fort  épaiffes , 
»  bien  clouées  les  unes  contre  les  autres  ;  &  les  bancs  des  rameurs 
w  étoient  faits  de  poutres  d  un  pied  d'épaifleur  -,  au  lieu  de 
»  cables  à  leurs  ancres ,  ils  avoient  des  chaînes  de  fer ,  &  leurs 
»  voiles  étoient  ,de  peaux  tannées ,  pour  mieux  réfiiler  aux  vents 
»  violents  de  ces  mers.  Ces  vaiffeaux  étoient  armés  d'un  excel- 
>>  lent  équipage ,  en  matelots  &  en  Officiers  braves  &  expéri-- 
^  mentes  dans  la  marine  :  les  vieillards  mêmes  s'étoient  em- 
»  barques.  Cétoit  un  jour  où  il  falloir  vaincre  ou  périr.  Tout 
»  étoit  ainfi  difpofé  ,  lorfque  la  flotte  Romaine  parut  -,  celle  des 
»  Venetes  fe  rangea  en  ordre  de  bataille ,  vis-à-vis ,  &  pour  couvrir 
»  l'entrée  de  leur  port.  Le  Morbihan  paroît  évidemment  être  le  même 
»  que  Céfar  appelle  mare  conclufum ,  dont  le  nom  breton  Morbihan  ^ 
»  compofé  des  mots  celtes  û/TTzor  mer,  &  bihan  petit,  a  la  même 
»  {ignification  que  le  latin  des  commentaires,  mer  renfermée  ovi petite 
»  mer.  Les  villes  des  Venetes  étoient  bâties  dans  l'intérieur  de  cette 
»  petite  mer  ou  golfe ,  remplies  de  langues  de  terre  &  ifles ,  au 
»  nombre  detrois  cents  foixante-cinq,  dont  Tentrée  étoit  fort  étroite  j 
♦>  c'étoit  fur  ces  pointes  ou  caps  intérieurs  quétoient  bâties 
»>  toutes  les  places  fortes  des  Veneti ,  dont  l'accès  étoit  très-dif- 
w  ficile  par  terre  ,  à  caufe  de  la  marée ,  qui ,  deux  fois  le  jour, 
»  rempliflant  d'eau  tous  les  bas-fonds ,  fréquents  dans  ce  pays,  fer- 
»  moit  les  iffues  par  des  marais  impraticables  j  d'ailleurs ,  il 
H  étoit  impoffible  aux  bâtiments  Romains  d'en  approcher,  par 
»  rapport  au  reflux  qui  les  faifoit  échouer  fur  la  vafe  ou  fur 
»  des  rochers  ;  ce  qui  les  rendoit  inutiles.  Une  grande  partie  de 
»  l'été  s'étoit  paflee ,  &  Céfar  avoir  fait  tous  fes  efforts  dans  le 
y>  Morbihan ,  oii  la  navigation  étoit  bien  différente  que  dans  le 
w  vafte  Océan.  Il  prit  donc  le  parti  de  renoncer  à  vaincre  les 
>>  Venetes  par  terre ,  fentant  qu'il  n  avoit  de  reflxDurces  qu'en  les 
>>  attaquant  par  mer.  C'efl:  à  ce  moment,  où  nous  avons  vu  com- 
»  ment  ils  mouillèrent  vis-à-vis  leur  port  j  tandis  que  l'Amiral 
»  Romain ,  voyant  la  mer  agitée  par  le  vent ,  trop  fort  pour  qu'il 
•»  ofât  attaquer  les  vaifleaux  des  Venetes ,  dont  plufleurs  à  la 
»  voile  cingloient  d'un  bord  fur  l'autre  ,  pour  montrer  leur 
»  force  &  l'intimider  ,  entra  fagement  dans  un  port  de  Me 
»  de  Belle-Ifle  ,  pour  y  attendre  un  temps  plus  favorable.  »  M.  de 
la  Sauvagere  a  fixé  cet  endroit  dans  le  port  du  Vieux-Château  ,  à 
caufe  d'un  retranchement  d'un  camp  Romain  qu'on  y  apperçoit,. 


VAN  471 

i3ans  fon  affaiiTement  des  terres ,  par  le  laps  des  temps ,  où  il 
fait  voir  ,  dans  la  carte  que  ce  fçavant  y  a  joint ,  la  marche 
des  fiburnes  depuis  la  Loire  à  ce  portifolé  ;  d'où  ,  du  mot  cajîray 
camp  ou  château  ,  &  de  ces  antiques  retranchements ,  où  l'on 
reconnoît  la  manière  romaine ,  il  infère  que  c'elt  de  là  «  que 
»  l'Amiral  Romain ,  profitant  d'un  grand  calme  ,  qui  avoir  pris 
^  lui-même  le  commandement  d'une  de  Tes  galères ,  &  avoir 
»  diftribué  les  autres,  ayant  mis  fur  chacune  un  Tribun  Mili- 
»  taire  avec  un  Centurion ,  &  fait  provilîon  de  beaucoup  de 
»  faulx  bien  tranchantes,  emmanchées  à  de  longues  perches, 
»  profitant  de  .la  tranquillité  où  étoit  la  mer,  &  de  l'avantage 
»  de  la  légèreté  de  leurs  fiburnes  ,  Brutus  s'approcha  avec  fon 
»  armée  navale,  à  force  de  rames  ,  fur  celle  des  Venctes.  Les  ayant 
»  joints ,  ils  accrochèrent  avec  leurs  faulx  les  cordages  &:  les 
»  coupèrent.  Cette  précaution  étoit  néceflaire ,  afin  que  ,  fi  le 
»  vent,  qui  fouffloit  un  peu,  s'étoit  élevé  tout -à -coup, 
»  ils  ne  pufient  en  être  les  viélimes.  Dès  ce  moment  ,  leurs 
w  manoeuvres  devinrent  inutiles ,  les  Soldats  Romains  fautèrent 
»  à  l'abordage ,  la  terreur  s'empara  de  ceux  Armoricains  6c  des 
»  équipages  ,  ainfi  que  des  matelots ,  où  la  confufion  fe  mit. 
M  Les  Romains  profitèrent  de  ce  défordre,  attaquèrent  de  toutes 
»  parts  les  vaifîcaux  devenus  immobiles ,  &  ce  qu'une  feule 
»  fiburne  ne  pouvoir  faire ,  elle  en  venoit  à  bout  avec  le  fe- 
»  cours  de  quelques  autres  ,  où  les  foldats  Romains  maflacroient 
»  tout  ce  qui  faifoit  réfiftance.  Peu  de  vaiffeaux  des  Venetes 
>♦  échappèrent  à  la  faveur  de  la  nuit  ;  tous  vieillards  &  enfants , 
»  indiftinftement ,  furent  pafi^es  au  fil  de  l'épée  ,  &  le  carnage 
»  dura  depuis  la  quatrième  heure  du  jour  jufqu'au  coucher  du 
»  foleil ,  d'où  cette  nation  fut  entièrement  exterminée  dans  cette 
w  journée. » 

Bien  des  Sçavants  ont  répandu  divers  fentiments  fur  le  lieu 
où  étoit  fituée  leur  capitale  j  car,  en  général,  on  vient  de  mettre 
bien  au  clair  quel  étoit  le  territoire  des  Vencti  des  bords  Armo- 
ricains, dont  on  a  dit  que  les  Géographes  modernes  n'avoicnt 
eu  que  des  idées  faufles  fur  fa  fituation. 

«  M.  Danville ,  (  pourfuit  M.  de  la  Sauvagere ,  )  cite  Dom 
w  Lobineau  ,  qui  veut  que  la  capitale  des  anciens  Vaiifu  ne  ré- 
»  pondoit  pas  précifément  à  l'endroit  qu'occupe  aujourd'hui  Vannes, 
n  Ce  Sçavant  Géographe  offre  un  heu,  nommé  Durouec y  à  une 
H  Heue  au  deffous ,  à  caufe  de  la  reficmblance  de  ce  nom  avec 
M  celui  de  Dariorisr  des  anciens   Romains  :  il  cite  le    VinJana- 


471  '  ,        VAN 

»  Portas  de  Ptolomée  ,  comme  étant  le  Morhihan  ,  que  Fou 
»  pourroit  entendre  par  le  port  de  Locmariaker ,  tout  à  l'entrée 
»  de  ce  golfe.  »  Et  M.  de  la  Sauvagere  croit  que  le  Pon-Navaloy 
qui  y  joint ,  étoit  un  havre ,  où  l'on  conllruifoit  les  vailTeaux 
Romains  ;  que  c'étoit-là  où  on  les  carenoit ,  &  où  étoit  l'arfenal 
de   marine,  dont  les  Romains  faifoient  grand  cas. 

La  grande  difficulté  de  fixer  le  point  où  étoit  {îtuée  cette 
capitale  des  Venetes ,  vient,  fans  doute,  «  de  ce  que  Jules-Céfar, 
»  voulant  éteindre  à  jamais  un  peuple  aulîi  formidable  ,  il  en 
^^  fit  détruire ,  fans  doute ,  toute  cette  ville  de  fond  en  comble  , 
M  dont  il  traita  ,  dans  cette  viftoire  par  ftratagême  ,  le  refte  des 
»  habitants  qu'il  y  trouva ,  avec  une  rigueur  inhumaine  inimagi- 
>>  nable  j  il  fit  trancher  la  tête  à  tous  les  Sénateurs  ,  &  vendit 
»  le  peuple ,  à  qui  il  conferva  la  vie  de  quelques-uns,  à  l'ancan.  >♦ 
Et  M.  de  la  Sauvagere  croit  que  cette  capitale  pouvoit  être 
iîtuée  où  elle  eft  aujourd'hui. 

C'efi:  d'après  la  lefture  de  fes  recherches  imprimées ,,  fur  les^ 
antiquités  des  environs  de  Vannes,  que  feu  M.  le  Comte  de 
Caylus ,  cet  illuflre  &  fi  fçavant  antiquaire  ,  s'explique  ainfi  dans 
fon  fixieme  volume  de  fes  Antiquités  Gauloifes  ,  page  37$^. 
«  M.  de  la  Sauvagere  m'avoit  fait  faire  quelques  réflexions  avant 
»  que  d'avoir  vu  le  manufcrit  de  M.  le  Préfident  de  Robien. 
»  Ces  deux  Auteurs  font  les  feuls  qui  aient  parlé ,  &c.  Et  pages 
>^  369  &  599,  feu  M.  le  Préfident  de  Robien,  dans  fon  Hifr- 
y>  toire  ancienne  ,  manufcrite  ,  de  la  Bretagne  ,  démontre ,.  (  dit  M. 
»  le  Comte  de  Caylus ,  )  que  le  peu  de  conformité  qu'il  y  a 
M  entre  la  fituation  de  la  ville  de  Vannes  &  la  defcription  que 
w  Céfar  nous  a  laifTée  des  anciennes  villes  dépendantes  des  peu-- 
w  pies  Vened ^  fituées  fur  des  caps  ou  des  langues  de  terre, 
»  dont  les  avenues  étoient  couvertes  deux  fois  par.  jour  par 
w  le  flux  de  la  mer ,  démontre  que  la  ville  de  Vannes ,  qui  ne 
w  préfente  aucune  de  ces  circonftances ,  ne  peut  erre  une  de 
»  ces  anciennes  villes  dont  Céfar  fait  mention  :  on  n'y  remarque 
»  d'ailleurs  aucun  monument  de  la  magnificence  &  de  l'antiquité 
»  qui  doivent  dilHnguer  l'ancienne  capitale  de  ces  peuples*  Ce^ 
»  deux  caractères  fe  trouvent  au  bourg  de  Locmariaker ,  où  l'on 
»  découvre  tous  les  indices  d'une  grande  &  ancienne  ville ,  & 
>»  dont  la  fituation  répond  parfaitement  à  l'idée  &  à  la  defcripr 
>»  tion  que  Jules-Céfar  nous  en  a  donnée  ,  &  dont  Ptolomée 
»  parle, comme  capitale  des  Veneti  ^  fous  le  nom  de  Dariongurrio 
^'  Ce  bourg  eft  fitué  fur  le  bord  de  la.  mer ,  dans  une  efpece 

de 


VAN  475 

w  de  prefqu'ifle  ou  de  langue  de  terre  ,  voyez  le  mot  Locmanaker.t* 
Le  Public  nous  fçaura  gré  d'ajouter  ce  que  notre  recon- 
noiiïance  nous  d'iEïe  relativement  à  M.  de  la  Sauvagere  ; 
voici  comme  en  parle  feu  M.  le  Comte  de  Caylus  :  «  L'Auteur 
»  eft  fçavant  dans  fon  Art ,  &  l'Ouvrage  (  fur  les  ajuijuitds  de 
»  Vannes ,  )  fait  en  homme  du  Métier ,  préfente  le  carattere  de 
»  l'intelligence  &  celui  de  la  vérité.  >►  M.  de  la  Sauvagere  ne 
s'eft  pas  contenté  de  nous  éclairer,  c'efi:  à  fes  foins  que  le  Roi 
a  confié  toutes  les  forterefles ,  retranchements ,  Se  batteries  qui 
ont  été  élevés  fur  les  mêmes  côtes ,  depuis  la  Vilaine  julqu'à 
Quimper ,  &  même  au  delà  de  Brelt ,  à  Saim-Matt/ucu ,  dan^ 
la  guerre  contre  les  Anglais,  en  1746^  jufqu'en  1758.  Dailleurs, 
il  devoir  cet  amour  pour  la  Bretagne  ,  puifque  nous  lifons  par- 
tout ,  qu'il  en  ell  ifTu  d'une  ancienne  maifon  noble.  Nous  femons 
que  la  modeftie  de  M.  de  la  Sauvagere  fera  en  fouffrance  en 
nous  lifant ,  mais  nous  n'avons  pu  nous  retenir  de  lui  rendre  cet 
hommage. 

Sous  les  Empereurs,  il  n'efl:  point  fciit  mention  des  Venetcs 
ailleurs  que  dans  la  vie  de  Saint  Clair ,  qui  leur  annonça  l'Evan- 
gile. Conan  Meriadec  ,  qui  vint  dans  le  fiecle  fuivant  en  Bre- 
tagne ,  foumit  les  Venetes  à  fes  loix ,  comme  les  autres  peuples 
de  l'Armorique.  Mais ,  depuis  Céfar ,  cette  ville  n'a  jamais  re- 
couvré fon  ancienne  fplendeur  ,  &  n'a  jamais  joué  qu'un  rôle 
fubalterne  dans  la  province.  Albert  de  Morlaix ,  ^'  M.  Deric  , 
Auteur  de  l'Hiftoire  Eccléfiailique  de  Bretagne ,  veulent  que  le 
Siège  épifcopal  de  Vannes  ait  été  érigé  par  Conan  Meriadec  , 
vers  l'an  388.  Albert  nomme  fon  premier  Evêque,  Judicaèl ,  t^  M. 
Deric  lui  donne  le  nom  de  Paterne  :  Lobineau  veut  qu'il  n'ait  été 
érigé  qu'en  46^  ,  &  lui  donne  aufîi  Paterne  pour  premier  Evo- 
que. Plufieurs  placent  cette  éreâ^ion  fous  l'année  445  ,  ^'  don- 
nent Manfuet  pour  premier  Evêque.  Le  Concile  ,  airemblé  ^ 
Vannes  en  462  ou  465,  confirma  l'établifTcmcnt  de  ce  Siège  j 
&  quelques-uns  penfent  qu'il  érigea  celui  de  Quimper  :  on  y  fit 
feize  Canons,  qui  ne  nous  font  pas  connus.  En  501,  les  Evê- 
chés  de  Vannes,  de  Quimper,  de  Saint-Pol-de-Lcon ,  de  Tré- 
guier ,  &  une  partie  de  celui  de  Saint-Brieuc ,  furent  réunis  fous 
la  domination  du  même  Prince  Hocl  II  ,  &:  formèrent  le  Royau- 
me de  Domnonée.  En  513  ,  Riothime ,  Lieutenant  général  d'Hoël 
le  Grand,  Roi  de  Bretagne  ,  fit  conllruire  dans  le  Morbihan  trois 
cent  bateaux ,  qu'il  chargea  de  foldats ,  avec  lefqucls  il  remonta 
la  Loire,  &  alla,  dans  le  Berri ,  faire  la  guerre  à  Euric  ,  Roi  des 
Tome  IV.  0  3 


474  VAN 

Vifigots.  En  547,  les  enfants  d'Hoël  le  Grand,  qui  s'ét oient 
partagés  la  Bretagne ,  commencèrent  ces  fcenes  d'horreurs  qui 
ne  fe  voient  gueres  qu'entre  des  frères  ennemis.  Conobre ,  Comte 
de  Vannes ,  donna  l'exemple  :  il  fit  tuer  d'abord  fon  frère  aîné , 
dont  il  époufa  la  veuve  ;  &  enfuite  Budic  &  Varoch.  Macliau, 
un  autre  de  fes  frères ,  échappa  à  fa  cruauté ,  &  devint  Evê- 
que  de  Vannes.  C'efl  ce  Conobre  ou  Comore ,  qu'un  Concile 
maudit ,  en  punition  de  fes  crimes  -,  &  ce  Prince  ,  horrible  par 
fes  cruautés ,  ne  fut  plus  connu  que  fous  le  nom  de  maudit 
Comore:  il  périt,  en  560  ,  dans  un  combat  qu'il  livra  au  Roi 
Clothaire ,  dans  le  territoire  de  Guérande.  Guerech  ou  Varoch , 
fils  de  l'Evêque  Macliau ,  lui  fuccéda  au  Comté  de  Vannes , 
dont  le  Roi  de  SoifTons ,  Chilperic  ,  avoir  joui  quelques  années 
auparavant. 

En  ^58  ,  les  Bretons  firent  d'inutiles  efïbrts  pour  chafTer  du 
Comté  de  Vannes  les  Français,  qui  s'en  étoient  emparés.  En  678  , 
les  Vannetais  fe  fervirent  du  feu  grégeois ,  pour  brûler  les  vaif- 
feaux  que  les  Sarrafins  avoient  fur  la  côte.  En  786 ,  Charlema- 
gne  chargea  fon  Grand  Sénéchal ,  de  la  conquête  de  la  Bre- 
tagne. Ce  petit  Etat  fut  foumis  au  Monarque  ,  qui  donna  le 
Gouvernement  du  Comté  de  Vannes  au  Comte  Frodoalde.  Il  en 
fut  chaffé ,  en  811,  par  les  Bretons  ;  mais  ce  fuccès  n'eut  pas 
d'heureufes  fuites.  Les  troupes  de  Charlemagne  ,  pour  punir  cette 
rébellion  ,  mirent  à  feu  &  à  fang  ]e  Royaume  de  Domnonée, 
En  818,  Louis  le  Débonnaire,  Roi  de  France  &  Empereur 
d'Occident  ,  vint  à  Vannes  avec  fon  armée ,  &  fit  la  revue 
générale  de  fes  troupes.  Il  livra  enfuite  bataille  à  Morvan ,  que 
les  Bretons  avoient  élu  pour  leur  Roi ,  &  qui  fut  tué  dans  le 
combat;  &  convoqua,  en  819,  les  Etats  à  Vannes.  En  824, 
Nominoé  fut  nommé  Gouverneur  de  Bretagne.  En  845  ,  le  Roi 
Charles  le  Chauve  fit  frapper  à  Vannes  des  deniers  d'aigent, 
avec  l'infcription  :  Carlus  gratiâ  dl  Francorum  Rex  j  Veneus  civitas» 
Le  cours  de  cette  monnoie  ne  fut  pas  de  longue  durée.  Nomi- 
noé ,  après  la  mort  de  l'Empereur ,  ne  fe  croyant  plus  obligé 
par  fon  ferment ,  forma  le  projet  de  fe  faire  couronner  Roi  de 
la  Bretagne ,  qui  lui  appartenoit  par  les  droits  du  fang.  Il  affem- 
bla  au  château  de  Coëtiou ,  dans  la  forêt  de  Vannes ,  les  Evê- 
ques  &  les  Barons ,  qui  applaudirent  à  fes  defTeins  ,  &  qui  l'ai- 
dèrent à  les  exécuter.  En  conféquence  ,  l'Edit  donné  à  Pifle ,  en 
854,  décria  la  monnoie  de  Bretagne,  comme  frappée  dans  des 
lieux  que  le   Roi  Charles  ne  pofTédoit  plus. 


En  S 56,  Erifpoé  fut  tué,  par  {on  coufin  Salomon  ,  dans  une 
Eglife  de  l'Evêché  de  Vannes ,  aux  pieds  des  autels  :  &  le 
meurtrier  monta  fur  le  trône  de  la  Bretagne ,  que  lui  avoit 
acquis  fon  crime.  En  865,  les  Normands  alllégerent  Vannes, 
la  prirent ,  la  pillèrent ,  &  la  livrèrent  aux  flammes.  Le  Comte 
Pafquiten  ik  l'Evêque ,  qui  a  voient  été  faits  prifonniers  ,  furent 
rendus  fans  rançon.  Courantgenus  ,  Evêque  de  Vannes ,  fit  ré- 
parer fon  Eglife  ,  qui  avoit  été  brûlée.  En  871  ,  Salomon,  Roi 
de  Bretagne  ,  aflembla  fes  Etats  à  Vannes ,  &c  leur  déclara  qu'il 
avoit  formé  le  defl:ein  d'aller  à  Rome.  Ce  Prince  ,  tourmenté 
de  remords  d'avoir  affafliné  fon  coulin  Erifpoé  ,  vouloir  aller 
demander  au  Pape  l'abfolution  de  fon  crime.  Les  Etats  lui  re- 
préfenterent  fî  fortement  le  préjudice  que  fon  abfence  alloit 
caufer ,  qu'il  fe  décida  à  refter.  Cependant  il  prit  le  parti  d'en- 
voyer au  Pape  fa  flatue  ,  de  grandeur  naturelle  ,  d'or  mafîifj 
avec  une  mulle  richement  enharnachée  ;  trente  pièces  de  tapif- 
feries ,  brodées  en  laine  de  différentes  couleurs  j  trente  peaux  de 
cerfs  ;  trente  pièces  de  draps ,  pour  habiller  les  gens  du  Pontife  j 
&  s'obligea  à  lui  payer  une  rente  de  trente  fols  par  chacun 
an.  Ce  préfent  valoit  bien  une  abfolution  ,  &  le  Pape  l'accorda 
de  la  meilleure  grâce  du  monde.  En  873  ,  le  Roi  Salomon 
joignit  fes  troupes  à  celles  de  Charles  le  Chauve  ,  Roi  de  France  , 
qui  alloit  faire  le  ficge  d'Angers,  alors  occupé  par  les  Nor- 
mands ,  qui  en  furent  chaflés  à  l'aide  de  la  valeur  des  Rretons. 
Charles  le  Chauve ,  content  de  ce  fervice  ,  renouvella  le  traité 
ci-devant  fait  avec  Salomon  ,  &  lui  confirma  le  titre  de  Roi , 
avec  la  permifïïon  de  faire  battre  monnoie  &  de  porter  toutes 
les  marques  de  la  Royauté.  Salomon ,  à  qui  fa  conlcience  repro- 
choit ,  par  continuation  ,  un  crime  affreux  ,  &  qui  venoit  d'cf- 
fuyer  une  maladie  dangereufe  ,  prit  la  réfolution  de  fe  défaire 
de  fon  Royaume ,  en  faveur  de  fon  fils ,  nommé  JVigon,  En 
conféquence ,  il  convoqua  une  afîemblée  de  tous  les  Evêqucs 
&  Seigneurs  de  la  Bretagne,  à  Vannes;  mais  la  plupart,  déjà 
gagnés  par  Pafquiten ,  fon  gendre  ,  &  Gurvand  ,  gendre  d'Erif- 
poé,  refuferent  de  s'y  trouver;  6c  s'affemblerent  ailleurs,  où  ils 
prirent  la  réfolution  de  fe  foulever  contre  leur  Souveram.  Paf- 
quiten ,  qui  étoit  à  la  tête  de  la  révolte  ,  principalement  excitée 
par  les  mtrigues  des  Evêques ,  &:  fur-tout  de  celui  de  Vannes , 
marcha  contre  le  Prince  ,  qui  ne  sy  attendoit  pas ,  ôc  qui  fut 
obligé  de  prendre  la  fuite  devant  fes  fujets.  Il  fe  retira  dans  le 
Monaflere   de  Plélan  ;   afyle   qu'il   croyoit  inviolable ,  mais  qui 


47é  _  VAN 

ne  put  le  garantir  de  la  fureur  de  fes  ennemis.  Affiégé  dans  fa 
retraite  ,  il  eft  forcé  de  livrer  fon  fils  ,  &  le  jeune  Prince  eft 
maffacré  fur  le  champ  par  les  rebelles.  Il  eft  lui-même  obligé 
de  fe  rendre  à  la  difcrétion  de  ces  furieux  :  le  refpeft  qu'inf- 
pire  fa  préfence ,  arrête  le  poignard  deftiné  à  l'égorger  ;  mais  ^ 
livré  à  une  foldatefque  infolente ,  il  eft  conduit  en  bafle  Breta- 
gne ,  où  on  lui  crevé  les  yeux  ;  traitement  cruel ,  qui  le  conduit 
au  tombeau  deux  jours  après. 

La  mort  de  Salomon  laifTa  la  Bretagne  à  Pafquiten  ,  Comte 
de  Vannes ,  fon  gendre  ;  &  à  Gurvand ,  Comte  de  Rennes , 
gendre  d'Erifpoé  ,  qui  polTédoit  le  Cotentin  ,  en  Normandie. 
L'ambition ,  qui  les  avoit  unis  d'abord  ,  ne  tarda  pas  à  les  divifer. 
En  877 ,  trois  ans  après  leur  partage ,  Gurvand  tomba  dange- 
reufement  malade.  Pafquiten  ,  informé  de  la  fituation  de  fon 
rival  5  crut  devoir  profiter  du  moment  pour  l'attaquer  -,  mais 
Gurvand  ,  s'étant  fait  porter  dans  une  litière  à  fon  camp ,  livra 
bataille  à  fon  ennemi ,  Se  remporta  la  viftoire  la  plus  complette- 
Cependant  il  ne  jouit  pas  de  fon  triomphe  -,  les  efforts  qu'il  avoit 
faits  lui  furent  funeftes  ,  il  mourut  pendant  le  combat.  Pafquiten 
ne  tarda  pas  à  le  fuivre  au  tombeau  ,  &  laifTa  le  Comté  de 
Vannes ,  avec  fes  autres  domaines  ,  à  Alain  ,  fon  frère.  Judi- 
caël ,  Comte  de  Rennes ,  ayant  été  tué  ,  en  878 ,  dans  un  combat 
où  il  vainquit  les  Normands  j  toute  la  Bretagne  fe  trouva  réunie 
fous  la  domination  d'Alain  ,  furnommé  le  Grand,  qui,  tantôt 
prenoit  le  titre  de  Duc ,  tantôt  celui  de  Roi  ;  il  mourut  l'an  907, 
après  un  règne  de  vingt-neuf  ans  &  quelques  mois. 

En  1070,  Méen  de  Porhoet,  Evêque  de  Vannes,  donna  au 
Chapitre  de  fon  EgUfe  Cathédrale,  la  moitié  de  la  Paroiffe  de 
Saint-Paterne;  &  l'autre  moitié  lui  fut  donnée,  l'an  11 80,  par 
Guihenoc  ,  autre  Evêque  de  la  même  ville.  En  1 1 63  ,  Eudon 
de  Bretagne  &  Alain  de  Rohan  ,  donnèrent  au  Prieuré  de  Saint- 
Martin  de  Joffelin,  le  droit  de  bouteillage  dans  le  port  de 
Vannes.  En  1203  ,  les  Etats  s'afTemblerent  à  Vannes ,  pour  avifer 
aux  moyens  de  venger  la  mort  du  Duc  Artur,  affaffmé  par 
Jean  Sans-terre,  fon  oncle.  Jamais  cette  affemblée  n'avoit  été 
plus  nombreufe  ;  on  y  remarquoit ,  Gui  de  Thouars  ;  Alain , 
Comte  de  Penthievre  j  Etienne  &  Conan ,  fes  frères  ;  Guiomar, 
Hervé  ,  Conan  ,  &  Soliman  de  Léon  -,  André  de  Vitré  ;  Guil- 
laume de  Fougères  ;  Jean  de  Dol  -,  Gedouin ,  fon  fils  -,  Olivier , 
Vicomte  de  Rohan  ,  avec  fes  frères  &  fon  fils  j  Juhel  de 
Mayenne  ;  Geoffroi  de   Chateaubriand  y  Guillaume  de  Derval  5 


VAN  477 

Geoffroi  d'Ancems  ;  Alain  ,  Jacques ,  Se  Galuron  de  Château- 
giron  j  Alain  de  Rochefort  ;  Olivier  de  Dinan  ;  Richard  le  Ma- 
réchal ',  Alcot  &  Garfuire  de  Retz  ;  Bonabcs  &  Raoul  de 
Montfort  ;  le  Sire  de  Lohéac  -,  Rolland  de  Rieux  ;  Geoffroi  de 
Poencé  ;  Jean  de  Montauban  ;  Alain  de  la  Roche  ;  Etienne  de 
Pontchâteau  ;  Bonabes  de  Rouge  ;  Foulques  Paincl ,  Sire  d'Au- 
bigné  ;  Olivier  de  Coetquen  j  Briand  le  Bœufj  Hervé,  Vicomte 
de  Donges  ;  Hervé  &  Geoffroi  de  Beaumanoir  ;  Péan  de  Ma- 
ieflroit  i  Soudan  ,  Vicomte  du  Faou  ;  Hervé  &  Eon  Dupont  ; 
Goranton  de  Vitré  ;  Alain  d'Acigné  j  Hervé  ;  les  Sénéchaux  de 
Rennes  &  de  Cornouaiiles  ;  avec  une  infinité  de  Gentilshommes 
&  d'Eccléfiaftiques.  Les  Etats  montrèrent  le  plus  grand  zele , 
&  jurèrent  tous  de  fe  iacriiier  pour  la  caufe  commune.  Ils  dé- 
putèrent au  Roi  Philippe  Augulle  ,  &  le  fupplierent  de  fe 
joindre  à  eux  pour  venger  un  crime  qui  avoit  été  commis  lur 
les  Terres  de  fa  domination ,  par  un  Roi ,  ion  va  liai. 

L'an  1238,  la  Duchefle  Blanche  de  Navarre  accoucha,  au 
château  de  Vannes ,  d'un  fils ,  que  baptifa  Cadioc  ,  Eveque  de 
Vannes ,  qui  le  nomma  Jean  ,  nom  de  fbn  père.  En  1 249 ,  le  Duc  fit 
frapper  une  nouvelle  monnoie  à  Vannes  ;  clic  commença  à  y 
courir  le  14  Aoiit  :  elle  étoit  à  l'écu  d'hermines  plein ,  à  la  dif- 
férence du  grand  blanc,  qu'il  avoit  fait  frapper  à  Nantes ,  quel- 
ques années  auparavant ,  aux  armes  de  Dreux ,  au  quartier  d'her- 
mines. Ce  fut  en  ce  temps  que  Dreux  difparut  des  monnoies: 
on  n'y  vit  plus  que  des  hermines ,  mais  fans  nombre  fixe.  Nous 
en  avons  à6,à7,à8,&à9.  En  1260,  la  famine  &  Ja 
pefte  défolerent  enfemble  la  Bretagne.  Le  Duc  Jean  I ,  de  concert 
avec  les  Seigneurs  de  Maleflroit ,  établit,  dans  le  courant  de  la 
même  année,  les  CordeHers,  dans  la  ville  de  Varnes.  Leur  Eglife 
ne  fut  dédiée  qu'en  1265  ,  quoiqu'ils  occupafîcnt  dès  1260  la 
maifon  que  le  Duc  leur  avoit  fait  bâtir.  Artur  II,  Duc  de  Bre- 
tagne ,  étant  mort  ,  dans  fon  château  de  l'ille ,  au  bord  de  la 
Vilaine,  dans  la  ParoifTe  de  Marzan,  1027  Août  131  2;  lés  en- 
trailles furent  enterrées  dans  l'Eglife  des  Révérends  Pères  Cor- 
deliers  de  Vannes  ;  &  fon  corps,  dans  celle  des  Carmes  de 
Ploermel. 

Pendant  la  guerre ,  pour  la  fucccfTion  au  Duché  ,  entre  les 
Comtes  de  Montfort  &  de  Blois ,  la  ville  de  Vannes  fut  alliégée 
trois  fois;  la  première,  en  1342,  par  Charles  de  Blois,  qui 
s'en  rendit  maitre  fans  rcfiilance ,  ik  y  mit  une  bonne  garnilbn. 
La  Comtefîé  de  Montfort ,  qui,  après  le  iiege  de  Henncbon,  en 


478  VAN 

1342,  étoit  paflee  en  Angleterre,  revint,  avec  une  flotte  cond- 
dérable ,  débarquer   auprès  de  Vannes ,    en  1343.  La  Comteffe 
de  Montfort  avoit  été  attaquée  en  mer  par  Charles  de  Blois,  & 
s'étoit  fignalée ,  dans  ce  combat  naval ,  comme  le  plus  intrépide 
marin  :  elle  voulut  montrer  qu'elle  fçavoit  aufîi  bien   combattre 
fur  mer  que  fur  terre  ,  &  attaquer  les  places  comme  les  défendre. 
Elle  forma  le  fiege  de  Vannes ,  dont  les  habitants  fe  défendirent 
avec  la  plus  grande    valeur  ;  mais,  pendant  une   nuit  très-obf- 
cure ,   Olivier    de  Mauni ,    s'étant    approché    des    remparts ,   fit 
planter  des  échelles  dans  un  endroit  qui  étoit  fans  défenfes.  Ses  fol- 
dats  ,  mettant  leurs  bouchers  fur  la  tête,  montent  fans  bruit ,  entrent 
dans  la  ville ,  &   vont  prendre  à  dos  les  afliégés ,  qui  étoient  à 
défendre  les  deux  brèches.   Il  y  eut  un  combat  tort    opiniâtre; 
mais ,  enfin ,  la  viftoire  demeura  à  Mauni ,  qui  fe  rendit  maître 
de  la  place.   La   Comteffe   de    Montfort    y  fit  fon  entrée  ;  & , 
après  y  avoir  féjourné  quelques   jours  ,  elle  y  mit  Robert  d'Ar- 
tois  pour   Gouverneur,   &  partit    pour   Hennebon.   Olivier    de 
CUffon  &  Hervé  de    Léon,    qui  étoient    dans  Vannes  ,   furent 
accufés  de  négfigence ,  en  cette  occafion.  Ils  furent  fi  fâchés  de 
cette  imputation  &  de  leur  défaite,   qu'ils  réfolurent  de  rétablir 
leur  honneur  en  reprenant  cette  place  :  ils  affemblerent  leurs  amis  ; 
tous  les  Gentilshommes,  leurs  vaffaux ,   qu'ils  joignirent  à  quel- 
ques troupes  que  leur  avoit  données  Charles  de   Blois  ;  en  com- 
poferent  un  corps  d'environ  douze  mille  fix  cents  hommes  ,  qui 
fut  encore  augmenté  de  la  troupe  de  Robert  de  Beaumanoir,  Maré- 
chal de  Bretagne ,  &  s'avancèrent  vers  Vannes ,  dont  ils  formè- 
rent le  fiege.  Il  fut  pouffé  avec   tant  de  vigueur ,   qu'ils  entrè- 
rent  par  les  mêmes  brèches  qui  avoient  fervi   au  dernier  fiege , 
&  qu'on  n'avoir  pas  encore    eu   le  temps  de  réparer.    La  gar- 
nifon  fut  taillée  en  pièces ,   &  Robert  d'Artois ,  Gouverneur  de 
la  ville ,  reçut  une  bleffure  ,  dont  il  mourut  en  s'en    retournant 
en   Angleterre.   En  1344,  le  Monarque  Anglais  vint   avec   une 
flotte  en  Bretagne,  &  débarqua  au  Morbihan.    Pour  jetter    tout 
d'un  coup  la  terreur  dans  la  province,  il  affiégea    trois  places 
à  la  fois  ;  Vannes  ,  Nantes  ,  &  Rennes.  Pendant  ce  temps ,  Louis 
d'Efpagne  ,  qui  tenoit  la  mer ,  enlevoit  tous  les  convois  qui  ve- 
noient  de  l'Angleterre ,   &  incommodoit  aufli  beaucoup   les  An- 
glais :  il  fit  plus  j  il  attaqua  leur   flotte  dans  le  Morbihan ,  leur 
prit  quatre  vaiffeaux,  &  en  coula    trois  à  fond.   Le  Roi   d'An- 
gleterre ,  pour  conferver   le  refte   de  fa  flotte ,   en  envoya  une 
partie  à  Breft ,  &  l'autre  à  Hennebon,  Cependant ,  tous  les  efforts 


VAN  479 

des  Anglais  s*étoîent  réunis  contre  Vannes  ;  le  fiege  étoit  pouiTé 
avec  vigueur  :  tous  les  jours  ,  il  fe  livroit  quelque  combat 
dans  une  des  forties  journalières  que  faifoient  les  aliiégés.  Hervé  de 
Léon  &  Olivier  de  ClifTon  ,  furent  faits  prifonniers.  La  captivité 
de  ces  deux  guerriers  n'abattit  point  le  courage  de  la  garnifon  : 
elle  continua  de  fe  défendre  avec  beaucoup  de  valeur ,  julqu'à 
la  levée  du.  fiege ,  qui  fe  fit  en  conféquence  d'une  trêve  de 
trois  ans ,  entre  Montfort  &  Charles  de  Blois.  Olivier  de  Cliflbn 
fut  gagné  par  les  Anglais,  avec  lefquels  il  convint  de  paroître 
toujours  attaché  aux  intérêts  de  Charles  de  Blois  j  mais,  néanmoins, 
de  tenir  en  fecret  le  parti  du  Comte  de  Montfort.  Le  complot 
fut  découvert  au  Roi  de  France ,  par  Salisburi  ,  Seigneur  An- 
glais. Olivier  fut  arrêté  à  Paris ,  &  perdit  la  tête  fur  un  écha- 
taudjavec  pluiieurs  de  fes  complices.  (Voyez  Nantes.)  Olivier 
Tornemine  II  du  nom ,  zélé  ferviteur  de  Charles  de  Blois , 
s'acquit  une  grande  réputation  dans  ces  différents  ficges.  Il  eut 
une  très-grande  part  à  toutes  les  belles  actions  qui  s'y  hrent  : 
il  mourut,  en  1344,  laiffant  plufieurs  enfants;  entr'autres ,  Oli^ 
vier  ,  (i  célèbre  dans  l'hiftoire  ,  par  les  preuves  éclatantes  de 
valeur  qu'il  donna  en  faveur  de  Charles  de  Blois ,  aux  côtés 
duquel  il   fut  tué  à  la  bataille  d' Aurai,  en  1364. 

Le  10  Juin  1345  ,  Charles,  Comte  de  Blois,  ayant  été  fait 
prifonnier  à  la  bataille  de  la  Rochederien,  où  il  reçut  dix-huit 
bleffures ,  fut  conduit  à  Vannes  ,  qui  etoit  enfin  tombée  au  pou- 
voir de  fes  ennemis  ,  &  y  refta  un  an  entier ,  en  attendant  qu'il 
pût  être  conduit  en  Angleterre.  La  ComtefTe  ,  fon  époufe,  eut 
permiflion  de  le  venir  voir  dans  fa  prifon. 

Le  château  de  l'Hermine  fut  bâti,  en  1387,  par  le  Duc  de 
Bretagne  Jean  IV  ,  dit  /e  Conquérant.  Cette  même  année,  ce 
Prince,  voulant  fe  venger  du  Connétable  Olivier  de  Cliflon, 
dont  il  étoit  fort  mécontent ,  l'engagea  à  le  venir  voir  à  Vannes, 
fous  prétexte  de  le  confulter  fur  l'édifice  qu'il  faifoit  élever. 
Ils  vifiterent  enfemble  tous  les  appartements  ,  à  l'exccptior.  de 
la  groffe  tour.  Le  Duc ,  qui  avoir  en  tête  l'exécution  de  fon 
projet,  s'arrêta  à  l'entrée  de  la  porte  ,  fous  prétexte  qu'il  étoit 
fatigué.  Il  pria  le  Connétable  d'entrcrr ,  &  de  bien  examiner 
cette  fortification  ,  tandis  qu'il  s'entretiendroit  avec  le  Sire  de 
Laval,  auquel  il  avoir  quelque  chofe  à  communiquer.  ClilFon, 
qui  étoit  fans  défiance ,  entra  ;  mais ,  à  j)cine  avoit-il  fait 
quelques  pas  dans  les  premiers  logements,  que  des  gens  armés, 
qui  le  tcnoient  cachés  dans  une  chambre,  fe   jettcrent  fur  lui, 


48o  VAN 

l'arrêtèrent ,  &  le  chargèrent  de  fers.  Le  Sire  de  Laval ,  en- 
tendant du  bruit,  &  jugeant  de  ce  qui  fe  paffoit,  par  l'alté- 
ration qui  paroifToit  fur  le  vifage  du  Duc  ,  lui  dit  :  Ha! 
Monfeigneur ,  par  Dieu  merci  ,  que  voule\  -  vous  faire  ?  N'aye^ 
nulle  mal-volonté  fur  heau-frere  Connétable,  Le  Duc  lui  ordonna 
de  fe  retirer  fur  le  champ  ,  en  lui  obfervant  qu'il  n'avoit  pas 
befoin  de  fes  avis.  Ce  Seigneur  protefla  qu'il  .ne  partiroit 
pas  fans  fon  beau-frere  ,  &  fortit  cependant ,  pour  ne  pas  ir- 
riter le  Prince.  Beaumanoir ,  qui  n'étoit  pas  mieux  dans  l'efprit 
du  Duc,  &:  qui  avoir  auffi  été  invité  par  les  mêmes  motifs, 
furvint  dans  ce  moment ,  &  demanda  le  Connétable.  Le  Duc  , 
que  la  colère  rendoit  furieux ,  s'avança  contre  lui ,  la  dague  à 
la  main,  &  le  menaça  de  le  frapper.  Beaumanoir,  effrayé,  mit 
un  genou  en  terre,  &  fuppha  le  Duc  de  ne  pas  fe  déshonorer 
par  un  afîliffinat.  Va  ,  répliqua  le  Prince  ,  tu  n'auras  ne 
pis  ne  mieux  que  lui.  Sur  le  champ  ,  Beaumanoir  fut  conduit 
dans  la  tour ,  où  il  fut  enchaîné  comme  le  Connétable.  La  nou- 
velle de  cette  aftion  fe  répandit  fur  le  champ  dans  les  environs: 
elle  parut  indigne ,  non-feuiement  d'un  Prnice ,  mais  du  moindre 
Gentilhomme;  &  Ton  difoit  ,  afTez  puWiquement,  qu'il  falloit 
tirer  vengeance  de  cet  attentat ,  &  forcer  le  Duc  à  le  réparer. 
Le  Duc,  toujours  emporté  par  fa  pafTion ,  fit  venir,  fur  le  foir, 
un  Gentilhomme  de  confiance  ,  nommé  Jean  de  Baivalen ,  & 
lui  commanda  ,  en  vertu  du  refpe6]:&  de  l'obéiflcnce  qu'il  lui  de- 
voir, de  faire  mourir  Olivier  de  ClifTon ,  pendant  la  nuit,  le 
plus  fecrétement  qu'il  feroit  pofîible.  Bazvalen  ,  effrayé  de  ce 
dt-ffein,  prit  la  liberté  de  lui  repréfenter  les  conféquences  de 
cette  aftion  ,  &  les  fuites  funelles  qu  elle  pourroit  avoir.  Le  Duc 
lephqua  que  fon  parti  étoit  pris,  &  qu'il  vouloir  fe  venger  d'un 
ennemi  dont  il  avoit  tant  de  fujets  de  fe  plaindre.  Bazvalen 
voulut  encore  excufer  le  coupable  j  mais  le  Prince  ,  fe  laif- 
fant  aller  à  la  colère  ,  le  menaça  de  lui  faire  fubir  le  même 
fort  ;  de  forte  que  le  Gentilhomme  promit  d'obéir ,  &  fe  retira. 
Le  Sire  de  Laval ,  inflruit  des  ordres  du  Duc ,  par  Bazvalen  , 
vint  fe  jetter  aux  pieds  du  Prince,  pour  tâcher  de  le  fléchir.  Il 
fe  fervit  des  raifons  les  plus  fortes  pour  le  déterminer  à  laifTer 
la  vie  au  Connétable;  il  lui  montra  la  Bretagne  entière  foule- 
vée  ;  le  Roi  de  France  ;  l'Europe  entière ,  acharnée  à  fa  perte , 
comme  à  celle  d'un  perfide ,  qui  cachoit  les  plus  infâmes  projets 
de  vengeance  fous  les  dehors  de  l'amitié  ;  il  lui  rappella  les  fer- 
vices  du  Connétable,  leurs  anciennes  liaifons,  &  lui  dit  que, 

puifqu'il 


VAN  481 

pulfqinl  étoit  vrai  que  ce  Seigneur  l'avoir  offenfé,  il  y  avoit 
des  moyens  plus  doux  de  le  punir  ;  qu'il  pouvoir  lui  ôrer  les 
biens ,  &  que  ,  s'ils  ne  fuffifoienr  pas  pour  réparer  l'injure  qu'il 
prérendoir  avoir  reçue  du  Connétable,  lui.  Seigneur  de  Laval, 
y  contribueroir  d'une  parrie  des  liens.  Le  Duc  tut  inflexible ,  & 
répondir  feulement ,  que  Clillon  s'étoit ,  depuis  long-temps  ,  montré 
fon  plus  ardent  ennemi  ,  &  qu'il  n'avoir  formé  le  projcr  de 
marier  fa  fille  au  Comte  de  Penthievre,  que  dans  le  dellein  de 
le  faire  Duc  de  Bretagne.  Il  ne  voulut  plus  rien  entendre,  & 
congédia  le  Seigneur  de  Laval,  qui  fur  obligé  de  le  retirer.  Le 
Prince  fe  coucha,  en  jurant  qu'il  feroit,  pour  cette  fois,  vengé 
de  fon  ennemi.  Cependant,  il  lit,  pendant  la  nuit ,  des  réflexions 
férieufes.  Tantôt ,  la  vengeance  l'emportoit  ;  tantôt  ,  la  crainte 
d'être  la  vi^^ime  d'un  procédé  fi  indigne  ,  lui  faifoit  regretter 
l'ordre  qu'il  avoit  donné.  Il  croyoit  déjà  voir  les  Français  ik  les 
Bretons  ,  ligués  enfemble  ,  venir  fondre  fur  lui ,  &  le  chaflcr 
honteufement  de  fon  Duché,  comme  un  Prince  en  horreur  à 
l'humanité.  Dès  le  point  du  jour  ,  il  fair  venir  Bazvalen  ,  qui 
lui  dit ,  en  entrant  :  vous  êtes  obéi.  Qiwi  /  interrompt  vivement 
le  Duc,  Clijfon  ejl  mon  !  Oui,  Monjeigneur ,  réplique  Bazvalen: 
Cène  nuit  il  a  été  noyé ,  &  j'ai  j ait  mettre  le  corps  en  terre,  dans 
un  jardin.  Ha  !  dit  le  Duc ,  ver:^ci  un  piteux  réveil-matin  !  plut  à 
Dieu  ,  Mejfire  Jehan  ,  que  je  vous  eujfe  cru  !  je  vois  bien  que 
jamais  je  ne  ferai  fans  détrejfes  i  Ketirt:^-vous  MeJfire  Jehan,  que 
je  ne  vous  voye  plus. 

A  peine  Bazvalen  fut-il  forti  ,  que  le  Duc ,  déchiré  par  les 
remords,  &  épouvanté  du  précipice  qu'il  s'étoit  creufé,  s'aban- 
donna à  la  douleur,  pouflant  des  cris  affreux,  comme  s'il  eût 
extrêmement  fouffert.  Les  domelliques ,  ignorant  la  caufe  de  Ion 
mal,  s'empreflenr  de  le  fecourir;  mais  le  Duc  ne  vouloir  ni 
boire,  ni  manger,  ni  parler  à  perfonne.  Laval,  qu'il  aimoit 
beaucoup,  étant  entré  dans  fa  chambre,  fut  très-mal  reçu,  8c 
fut  obligé  de  fe  retirer,  fans  ofer  lui  parler.  Bazvalen,  qui  ne 
vouloit  que  laifTer  au  Duc  le  temps  du  repentir,  n'attendit  pas 
long-temps  à  lui  calmer  l'efprit  :  il  le  prcfenta  devant  lui,  malgré 
l'ordre  qu'il  avoit  reçu,  &  lui  dit  que,  prévoyant  bien  toutes 
les  conféquences  de  la  mort  du  Connétdble  ,  il  avoir  olé  lufpendre 
l'exécution  de  les  ordres ,  î^  que  Cliflbn  vivoit  encore.  A  ces 
mots,  le  Duc  embraffe  avec  tranfporr  le  prudenr  Gentilhomme, 
&  lui  promir  une  récompenfe  proportionnée  au  fervice  qu'il 
venoit  de  lui  rendre.  En  ce  moment,  Laval  entra,  &  le  Duc, 
Tome   IV.  P  5 


481  VAN 

affeélant  un  aîr  fatisfait,  voulut  fe  faire  un  mérite,  auprès  dé 
lui,  de  n'avoir  point  ôté  la  vie  au  Connétable.  «  ClifTon  vous 
»  doit  la  vie ,  lui  dit-il  ;  mais  j'exige  de  lui  une  fomme  de  cent 
»  mille  francs ,  &  les  villes  de  Joflelin ,  Lamballe  ,  Broons , 
»  Jugon ,  Blain  ,  Guingamp ,  la  Rochederien  ,  Châtel-Audren  , 
»  ClifTon ,  &  Châteaugui.  Sçachez  de  lui  s'il  eft  difpofé  à  me 
»  rendre  ces  places  fortes.  »  Laval  fe  rendit  auprès  du  Conné- 
table ,  qu'il  trouva  plongé  dans  le  défefpoir  ,  attendant  la  mort 
à  chaque  inllant  ;  mais  la  vue  de  fon  beau-frere  le  raffura.  Il 
promit  tout  ce  qu'on  lui  demanda.  Le  traité  fut  réglé  fur  le 
champ  j  &  le  Connétable ,  proteftant  qu'il  foufcrivoit  fans  con- 
trainte ,  &  de  fa  pure  &  libre  volonté ,  à  toutes  les  conditions, 
jura ,  fur  les  Evangiles ,  &  par  la  foi  de  fon  corps  ,  de  les 
remplir  exaftement.  L'afte  fut  fcellé  des  fceaux  ,  du  Connétable, 
du  Vicomte  de  Rohan  ,  &  des  Sires  de  Laval ,  de  Chateau- 
briand,  &  de  Rieux.  Le  Duc  voulut  que  l'argent  fût  compté, 
&  les  principales  places  rendues ,  avant  d'élargir  fon  prifonnier. 
Pour  cet  effet ,  il  mit  en  Hberté  Beaumanoir ,  qui  alla  chercher 
les  cent  mille  francs ,  &  remettre  une  partie  des  places  fortes 
entre  les  mains  des  Officiers  du  Duc.  Ce  Prince  exigea  une  rati- 
fication du  traité ,  qui  fut  datée  de  Moncontour ,  quoique  fignée 
au  Château  de  l'Hermine.  Le  Connétable  ne  fut  pas  plutôt  libre, 
qu'il  alla  fe  jetter  aux  pieds  du  Roi ,  pour  lui  demander  ven- 
geance :  mais  la  Cour  de  France  ne  prit  pas  fon  parti  avec  beau- 
coup de  chaleur  ;  ce  qui  fit  que  ChfTon  prit  le  parti  de  fe  faire 
juftice  par  lui-même.  Le  Roi  voulut  néanmoins  terminer  cette 
affaire  ;  mais  les  parties  avoient  de  trop  violents  motifs  de 
défunion  pour  pouvoir  refier  amies  :  les  traités  furent  prefque 
aufîi-tôt  rompus  que  fîgnésj  &  la  guerre  fut  prefque  continuelle 
entre  le  Duc  &  le  Connétable.  En  1391,  le  Prince  fît  une 
levée  de  cinq  mille  hommes ,  dans  le  diocefe  de  Vannes  ,  pour 
faire  la  guerre  au  Seigneur  de  CHffon. 

En  1393,  le  Prince  Pierre,  Comte  de  Montfort  ,  reçut  la 
confirmation  des  mains  de  Henri  le  Barbu  ,  Evêque  de  Vannes, 
qui  changea  fon  nom  de  Pierre  en  celui  de  Jean.  Cette  même  ftnnée, 
le  Duc  arma  une  flotte  confidérable  dans  le  Morbihan ,  pour  le 
Duc  de  Lancaftre  ,  fon  neveu,  qui  avoir  deffem  de  conquérir 
l'Angleterre.  En  1396,  fut  conclu  le  mariage  du  Prince  Pierre, 
nommé  Jean  de  Bretagne ,  avec  Jeanne  de  France  ,  fille  du  Roi 
Charles  VL  Ce  joyeux  événement  fut  célébré  par  de  grandes  ré- 
jouiffances  à  Paris. 


VAN  48J 

Le  15  Mars  1401  ,  Henri  de  Lancaftre  ,  Roi  d'Angleterre  &:  d'Ir- 
lande ,  époufa  ,  par  Procureur ,  à  Vannes  ,  Jeanne  ,  Duchefle  de 
Bretagne  ,  fille  de  Charles  ,  jadis  Roi  de  Navarre.  Le  1 1  Mai 
141 5,  Jeanne  de  France,  époufe  du  Duc  de  Bretagne  Jean 
V ,  accoucha  d'un  fils  aîné ,  qui  fut  baptile ,  dans  TEglife  Ca- 
thédrale de  Vannes  ,  par  Jean  de  Malertroit  ,  Evêque  de 
Saint-Brieuc.  Il  fut  nommé  François  ,  &  tenu  fur  les  fonts  de 
baptême  par  David  de  Boviere ,  Seigneur  de  Himbercourt , 
repréfentant  Charles,  Duc  de  Guyenne.  En  1437,  Jean  Vali- 
dire  de  Saint-Léon ,  Evêque  de  Vannes ,  déclara  que  la  Cure 
de  la  ParoifTe  de  Saint-Salomon  appartenoit  au  Chapitre  de  la 
Cathédrale.  Ce  Prélat  fit  rebâtir  le  revcrtaire  de  (o\\  Eglife  , 
la  falle  où  fe  tient  le  Chapitre  ,  &  la  voûte  de  la  Chapelle 
de   Notre-Dame ,  derrière   le  chœur. 

Saint  Vinccnt-Ferrier  naquit  à  Valence,  en  Efpagne,  le  23 
Janvier  1357.  A  lage  de  dix-fept  ans,  il  embrafîa  la  vie  reli- 
gieufe  ,  dans  l'Ordre  de  Saint-Dominique  ,  au  diocefe  de  Valence. 
11  quitta  ce  Monaftere  ,  &  parcourut  plufieurs  villes  ,  oii  il  en- 
feigna  la  Théologie;  alla  à  Rome,  à  Avignon;  &,  en  1397, 
commença  Tes  miflions ,  qu'il  fit  en  différents  Royaumes.  lE^n 
141 7,  le  Duc  de  Bretagne  Jean  V,  l'ayant  appelle  dans  fcs 
Etats  ;  le  faint  Religieux  vint  fe  fixer  à  Vannes  ,  diocefe  dont  il 
a  été  nommé  l'Apôtre.  Il  y  mourut,  le  5  Avril  1419,  âgé  de 
foixante-deux  ans  deux  mois  treize  jours.  Il  étoit  fi  coniidéré 
dans  l'Europe  ,  que  le  Concile  de  Confi:ance  l'envoya  confulter 
pour  fçavoir  de  lui  les  moyens  de  faire  cefler  le  terrible  fchiime 
qui  défoloit  alors  l'Eglife.  La  Duchefie  de  Bretagne ,  époufe 
Gu  Duc  Jean  V ,  voulut  elle-même  enfevelir  le  corps  de  ce  faint 
homme,  &:  garda  long-temps  l'eau  dans  laquelle  elle  l'avoit  lavé, 
&■  elle  s'en  fervoit  pour  guérir  les  malades.  Le  Duc  de  Bretagne 
Jean  V ,  lui  fit  faire  des  obfeques  de  la  plus  grande  magnifi- 
cence ,  dans  l'Eglife  Cathédrale  ,  où  il  fut  inhumé ,  à  côté  du 
grand  autel.  En  1425  ,  le  Duc  Jean  V  donna  aux  Carmes  une 
de  fes  maifons  de  campagne  ,  fituée  à  un  quart  de  lieue  au 
Nord  de  Vannes,  pour  y  taire  un  Monailere  ;  6c,  à  fon  retour, 
fur  le  foir ,  à  fon  château  de  l'Hermine ,  il  annonça  cette 
nouvelle  à  la  Duché ffe ,  qui  lui  répondit  qu'il  avoit  fait  un  bon 
don.  Cette  réponfe  ne  fut  pas  oubliée,  &  le  Monaflcre  fut  en 
conféquence  nommé  Bon-Don.  Le  Duc  en  pofa  la  première 
pierre,  avec  l'Evêque  de  Vannes,  en  1434.  La  Duchcfi^e 
Jeanne   de  France  mourut  à  Vannes,  le  20  Septembre   i433« 


484  VAN 

Son  corps  fut  inhumé ,  dans  la  Cathédrale  ^  auprès  du  tombeau 
de  Saint  Vmcent-Ferrier.  Marie  de  Rieux  ,  époufe  de  Louis 
d'Amboife  ,  Vicomte  de  Thouars ,  Prince  de  Tahnont ,  mère  de 
la  DuchefTe  Françoife  d'Amboife,  mourut  à  Vannes  ,  en  1433: 
fon  corps  fut  inhumé ,  dans  le  chœur  de  l'EgHfe  Cathédrale  de  cette 
ville,  devant  le  grand  autel.  La  Comteiïé  de  Montfort  mourut, 
le  17  Juillet  1440,  au  château  de  Plaifance ,  près  Vannes,  &C 
fut  inhumée  aux  Cordeliers  de  cette  ville;  ce  château  eft  dans 
la  Paroifîe  de  Saint-Paterne  ,  à  un  tiers  de  Heue ,  fur  la  route 
de  Vannes  à  Rennes  -,  il  eft  préfentement  en  ruines.  Le  Duc  de  Bre- 
tagne François  I ,  mourut  aufTi  dans  ce  même  château  ,  le  17  Juillet 
1450  :  fon  corps  fut  trahfporté  à  Saint -Sauveur  de  Redon,  & 
inhumé  dans  l'EgUfe  de  cette  Abbaye.  Le  25  Mai  1451,  le 
Duc  de  Bretagne  Pierre  II ,  fit  l'ouverture  des  Etats  ,  afîemblés 
à  Vannes,  &  y  fit  couronner  la  DuchefTe  Françoife  d'Amboife, 
fon  époufe.  Olivier  du  Méel ,  un  des  bourreaux  de  l'infortuné 
Prince  Gilles  de  Bretagne ,  fut  conduit  à  Vannes ,  où  il  eut  la 
tête  tranchée,  avec  quelques-uns  de  fes  complices,  en  145 1  j 
leurs  corps  furent  mis  en  quartiers,  &  expofés  publiquement 
fur  les  grands  chemins.  Les  guerres  qui  avoient  défolé  la  Bre- 
tagne ,  avoient  chaffé  de  leur  pays  plufieurs  des  habitants,  qui 
avoient  porté  ailleurs  leurs  arts  &  leur  induftrie.  On  repréfenta 
au  Duc  qu'il  étoit  à  propos  de  les  rappeller  dans  leur  patrie, 
par  la  concefTion  de  quelques  privilèges.  Le  Prince  fuivit  ce 
confeil  ;  &  ,  par  fes  lettres-patentes  des  5  Juillet  &  1 1  No- 
vembre 145 1  ,  accordées  à  la  requête  des  habitants,  il  exempta 
de  toutes  importions  &  corvées,  les  Tiflerands  &  les  autres 
Ouvriers  en  broderies  &  en  draps  ;  il  renouvella  enfuite  plu- 
fieurs Loix  ,  &  en  fit  de  nouvelles,  comme  on  le  peut  voir, 
page  clxx  du  tome  premier.  Il  défendit  de  jamais  tranfporter 
hors  de  l'Eglife  Cathédrale ,  le  corps  de  Saint  Vincent -Ferrier, 
en  confidération  de  ce  que  la  DuchefTe ,  fa  mère ,  avoir  voulu 
y  être  inhumée,  par  la  dévotion  finguliere  qu'elle  avoir  pour 
ce   Saint. 

Au  commencement  du  mois  de  Février  14559  le  Vicomte 
de  Rohan  époufa ,  à  Vannes ,  Perronelle  de  Maillé  ;  mariage 
qui  fut  célébré  avec  beaucoup  de  magnificence.  Le  Duc  de 
Bretagne  Pierre  II ,  y  afTifla ,  donna  quatre  mille  écus  d'or  pour 
les  frais  de  la  noce ,  &  acheta  la  maifon  &  Seigneurie  du 
PlefTis-Pv.afTré ,  pour  en  faire  préfent  à  la  jeune  Perronelle  de 
Maillé.    11  fut  fait ,  fur  la  place  du  marché ,  un  caroufel  ,   pour 


VAN  48  j 

honorer  ce  mariage ,  &  celui  du  Comte  de  TancarvlIIe  ,  qui 
venoit  d'époufer  ,  à  Redon,  Yolande  de  Laval,  le  13  de  No- 
vembre 1455.  Les  Etats  de  Bretagne,  alTemblés  dans  la  grande 
falle  des  halles ,  à  Vannes ,  approuvèrent  le  mariage  de  Marie 
de  Bretagne  avec  Jean  de  Rohan  ;  nous  devons  aufli  obferver 
que  les  Seigneurs  de  Rohan  avoient  jadis  des  devoirs  de  cou- 
tumes dans  le  port  de  Vannes  ;  droits  qu'ils  donnèrent  au  Prieuré 
de  Saint  -  Martin  de  Joflelin.  Ils  avoient  aufli  un  étang  &  un 
mouHn  ,  que  l'on  appclloit  l'étang  &  le  moulin  de  Rohan  ^  près 
l'un  des  fauxbourgs  de  Vannes ,  vers  le  Monallere  du  Bon-Don , 
qu'ils  ont  donné  au  Chapitre  de  l'Eglife  Cathédrale  de  Vannes , 
qui  en  jouit  encore.  On  remarque  que  les  Seigneurs  de  Rohan 
avoient  le  privilège  d'accorder  la  grâce  à  un  de  leurs  fujets  qui 
avoit  commis  un  crime  capital. 

Le  \6  du  mois  de  Novembre  1455  ,  Marguerite  de  Bretagne 
époufa  le  Comte  d'Etampes ,  dans  la  Chapelle  de  Lilîé.  Ce 
mariage  fut  célébré  par  l'Evêque  de  Nantes  ,  en  préfence  du 
Duc  ,  des  DuchefTes ,  de  Marie  de  Bretagne  ;  des  Dames ,  de 
Thouars  ,  de  Keraër ,  de  Malellroit ,  de  Penhoët ,  de  Ploufra- 
gan  ,  &:  de  plufieurs  autres  Seigneurs  &  Dames.  Marguerite  de 
Bretagne  parut  avec  le  plus  grand  éclat  à  cette  cérémonitî  :  elle 
étoit  couronnée  d'un  cercle  d'or ,  enrichi  de  pierreries ,  fur  une 
coëffure  de  fil  d'or ,  fcmée  de  groifes  perles  \  fon  coUier  étoit 
garni  de  magnifiques  diamants  ;  ion  habillement  étoit  un  coriet 
de  velours  cramoifi ,  fourré  d'hermines ,  avec  une  grande  robe 
trainante ,  foutenue  par  Madame  de  Penhoët ,  qui  ctoit  en  coriet 
d'écarlate  ,  &  qui  étoit  iuivie  de  Madame  de  Keraër.  L'Amiral 
du  Beuil  tint  le  cierge  du  Comte  d'Etampes  ,  &  le  Sire  du 
Gavre  celui  de  la  Prmceiîe.  La  livrée  du  Duc  étoit  de  damrc; 
&  fatin  violet  ,  fourré  de  peaux  d'Agneaux  noirs  j  celle  du 
Comte  de  même  couleur ,  étoit  fourrée  de  gris  :  il  n'y  eut  qu'un 
certain  nombre  de  Gentilshommes  qui  portèrent  cette  couleur 
ce  jour-là  ;  mais ,  le  lendemain ,  toute  la  Cour  fut  en  gris.  La 
DuchefTe  ,  avec  huit  autres  Dames  ,  étoient  parées  de  rîoquarts: 
&:  portoient  de  groifes  chaînes  d'or  au  col  :  la  première  avoit 
une  robe  à  fleurons  d'or ,  iur  une  étoffe  fond  cramoili ,  knirrée 
de  peaux  de  marte  ;  les  autres  avoient  des  robes  de  velours  «S: 
de  fatin  cramoili.  Après  la  cérémonie  ,  le  Duc  mena  la  Princeife: 
dîner  à  fon  château  de  l'Hermine  ,  ik  la  plaça  fous  le  milieu 
du  dais ,  auprès  de  la  Ducheffe  ;  il  y  avoit  cinq  tables  dans  la 
même  falle  :  le  bal  fuivit ,  &  le    lendemain   fut  commencé  le 


486  VAN 

tournois ,  qui  dura  quatre  jours  ;  après  quoi ,  tout  le  monde  fe 
retira ,  à  l'exception  de  quelques  jeunes  Seigneurs  qui  voulurent 
aller  à  la  chafîe  dans  l'ifle  de  Batz  ;  mais  ils  furent  pris  par  les 
Anglais,  en  traverfant  la  mer.  Le  Duc  obtint  leur  libertés  quel- 
ques temps  après. 

La  cérémonie  de  l'exaltation  de  Saint  Vincent-Ferrier,  fe   fit  la 
nuit  du  4  au   5  Avril  1456,  par  le  Cardinal  Alain  de  Coëtivi , 
en  préfence  du  Duc  de  Bretagne  Pierre  II ,  de  quatorze  Arche- 
vêques &  Evêques ,  d'un  grand  nombre   d'Abbés  ,  &  d'un  con- 
cours prodigieux  de  peuple.  On  diftribua  quelques-unes  des  Reli- 
ques :  la  Duchefîe  Françoife  d'Amboife  eut  fon  bonnet  doftoral ,  fa 
ceinture ,  &  un  de  fes  doigts.  Cette  canonifation ,  qui  coûta  con- 
fîdérablement ,  obligea  le  Duc  à  mettre  fur  fes  fujets  un  fouage 
extraordinaire  de  cmq  deniers  par  écuelle  :  le  peuple  s'y  porta 
avec  beaucoup  de   zèle ,  Se    jamais  ,  peut-être  ,  impôt  ne   fut 
payé  avec  tant   d'exaftitude  éz  d'empreflement.   Le  Duc   Fran- 
çois II,  étant  à  Vannes,  voulant  fe  concilier  les   bonnes  grâces 
du  Pape  ,  lui  envoya  ,  en  1 460 ,  des  Ambafiadeurs  ,  qui  lui  pré- 
fenterent  des  lettres  flatteufes ,  &  qui  prou  voient  la  parfaite  fou- 
miflion  de  ce    Prince   au  Saint-Siège.  Le  Pape  en  fut  fi  flatté  , 
qu'il  fit  publier  ces  lettres.  Ces  Ambailadeurs  étoient  ;  l'Evêque 
de  Saint-Malo  j  les  Seigneurs  de  Laval ,  de  la  Ville-Blanche,  de 
la  Roche ,  de  la  Motte  ,  de  Coètanezre ,  &c.   Le  14  Juin  1462 , 
ce  Duc    fit   l'ouverture   de  fon    Parlement   général  ,  à  Vannes  , 
&  publia  plufieurs  Loix  &  Ordonnances.  Il  renouvella  celles  qu'a- 
voir  porté  le    Duc    Pierre  II ,  en   1451,  contre   les  jureurs   & 
blafphêmateurs  ;  Loix  qui ,  jufques-là  ,  avoient  été  mal  obfervées. 
Il  taxa  le  prix  des  lignes  d'écriture  dans  les  procès  ,  &  ordonna 
que  ceux  qui  feroient  convaincus  de  faux ,  fuflent  condamnés  à 
recevoir  un  certain  nombre  de  coups  de  bâton,  par  la  main  du 
Bourreau  ,  pour  la  première  fois  ,    au  pilori  ,   à   avoir  la  main 
droite  coupée ,  &  à  perdre  tous  leurs  meubles  &  biens  ;  qu'à  la 
féconde  ils  fuflent  pendus.  Que  les  faux  témoins  fufl^ent  fouettés 
par  la  main  du   Bourreau  ,  pendant  trois  jours  de  marché  ,  & 
enfuite  battus  au  pilori  ou  fur  l'échelle  patibulaire  ;  &  qu'après 
cette  première  punition ,  on   leur  coupât   une   oreille  ;  que  tous 
leurs  biens  fufl^ent  confifqués ,  pour  la  première  fois ,  &  qu'à  la 
féconde  ils  fuflîent  pendus. 

Le  Monaflere  des  Trois-Maries  ,  près  le  Bon-Don ,  fut  fondé 
&  bâti  par  la  Duchefle  Françoife  d'Amboife,  qui  fit  venir  de 
Flandres  neuf  Religieufes  Carmélites  pour  l'habiter.  Elle  y  entra 


VAN  487 

elle-même,  $^1466  -,  8c,  en  14(^9,  elle  prît  Phablt  de  Reli- 
gieufe ,  dans  lïglife  des  Révérends  Pères  Carmes  du  Bon-Don  , 
qui  lervoit  aux  deux  Monafteres.  Cette  Ducheffe  fonda  ,  par 
afte  du  24  Mars  14^7,  le  Couvent  de  Nazaretii ,  Se  lui  afîigna 
lix  cents  livres  de  rente.  Elle  acheta  fur  le  champ ,  de  Jean 
Eder  ,  Sieur  de  la  Haye-Eder  &  de  Plouagat ,  les  dîmes  & 
revenus  de  Saint-Guenen ,  en  la  Paroifle  de  Plouagat-Chûtel- 
Audren  ,  qui  lui  coûtèrent  une  fomme  de  cinq  cents  écus  d'or, 
Françoife  d'Amboife  fit  profeflion  au  Monaftere  des  Trois-iMa- 
ries ,  le  25  Mars  1470;  &  l'an  1475  ,  elle  fut  élue  Prieure  de 
ce  Couvent,  où  elle  refta  jufqu'en  1476,  qu'elle  en  fortit , 
avec  neuf  de  fes  Religieufes ,  pour  aller  prendre  poneflibn  du 
Couvent  des  Couèts ,  près  Nantes.  Celui  des  Trois -Maries  fiit 
dans  la  fuite  uni  &  incorporé  à  celui  de  Nazareth  ,  par  la  Du- 
cheffe Anne  j  Se,  au  mois  d'Avril  1539,  vingt-deux  Religieufes 
des  Couèts  partirent  pour  aller  en  prendre  poffeffion. 

Lorfque  la  Ducheffe  Marguerite  de  Bretagne  fit  fon  entrée  à 
Vannes,  la  Communauté  de  Ville  lui  fit  préfent  d'une  coupe, 
d'une  aiguière,  &  de  quatre  taffes  d'argent,  qu'elle  donna  ,  par 
teftament  du  22  Septembre  1469,  à  Jeanne  de  Vannes,  fa 
nourrice.  En  1480,  le  Duc  de  Bretagne  François  II  affembla 
fes  Etats  â  Vannes ,  &  ,  en  leur  préfence ,  affigna  la  Baronnie 
d'Avaugour  à  François  de  Bretagne  ,  fon  fils  naturel  ,  qu'il 
créa  premier  Barort  du  Duché.  En  1483  ,  il  créa  un  Parlement 
fédentaire  à  Vannes  ,  pour  y  tenir  régulièrement  fes  féances , 
depuis  le  1 5  Juillet  jufqu'au  1 5  Septembre.  Ce  Parlement  étoit 
compofé  de  douze  Confeillers ,  fçavoir  cinq  Eccléfialliques  & 
fept  Laïques  ,  non  compris  les  Sénéchaux  de  Rennes  &  de 
Vannes.  Cette  même  année  1483  ,  mourut  le  Chancelier  Chau- 
vin ,  que  Landais  avoir  fait  mettre  dans  le  château  de  l'Her- 
mine ,  fous  la  garde  de  Jean  de  Vitré  &  de  Briand  de  Fonte- 
naille  :  fon  corps  tut  porté,  par  quatre  pauvres,  aux  Cordeliers, 
où  il  fut  enterré  ;  parce  qu'il  étoit  mort  dans  une  fi  grande  in- 
digence ,  qu'il  n'avoir  pas  laiffé  de  quoi  payer  les  frais  de  fes 
funérailles.  Au  mois  de  Mars  1488,  le  Duc  François  II  donna 
ordre  à  Guillaume  de  la  Noë ,  Sieur  de  Lifincùc,  de  fortifier 
la  Ville  de  Vannes.  Dans  le  courant  de  la  môme  année ,  elle 
fut  affiégée  par  le  Duc  d'Orléans  &  le  Seigneur  de  Chateau- 
briand ,  à  la  tête  d'une  armée  confidérable.  Après  huit  jours 
de  iiege ,  la  ville  fe  rendit  par  capitulation  :  les  articles  furent, 


-4?8  VAN 

que   vingt  des  principaux  Officiers   de  la  garnifQ^^  feroient  prl- 
fonniers  de  guerre. 

En  1490,  le  Pape  ayant  nommé  à  l'Evêché  de  Vannes,  Jean- 
Baptifte   Cibo  ,  Génois,   Cardinal  de  Benevent,  fon   neveu,  îa 
Duchefle  Anne  ou  fon  Confeil  s'oppoferent  fortement  à  la  prife 
de  poireffion  de  ce   Prélat  ,  &  il  fut  défendu  à  tous  les  Chapi- 
tres &  Communautés  de  procéder  à  l'avenir  à   aucune  éleftion, 
de  recevoir  aucune  Bulle  ,  fans  l'avis  du  Chancelier  &   du  Con- 
feil, fous  peine    de  banniffement  ,    &  de  faifie  du  temporel  des 
Bénéfices.   Cependant ,   on  fe  relâcha  en  faveur  du  Pape  ,  &  le 
Cardinal  Cibo  jouit  des    revenus    de  l'Evêché  de   Vannes.    En 
1491  ,  le  Roi    de  France  Charles   VIII,  étant  prefque  entière- 
ment  maître   de  la  Bretagne  ,  qu'il  venoit  de  conquérir ,  convo- 
qua  les   Etats  de  la  province ,  pour  s'affembler   à  Dinan  ,   le   8 
Novembre  même  année  ;  il  nomma  pour  CommiiTaire^  ,^  l'Arche- 
vêque  de    Rheims,   le    Vicomte  de    Rohan  ,    le   Maréchal    de 
Rieux  ',  Jean  du  Verger ,  Préfident  en  la  Cour  des  Aides  ,   en  la 
province  de   Normandie  ;  Jean-François  de  Gardonne ,  Général 
des  Finances;  Thomas  Bochior,  Tréforier  &  Receveur-général j 
Boudet,   Contrôleur;  &  Guillaume   de    Beaune;  avec    ordre  à 
ces  Commifîaires  de  demander ,  pour  cette  année ,  un  fouage  de 
fix  livres  dix  fols ,   par  chaque  feu  ,  dans  toute  la  province.  La 
Chambre  des   Comptes,  qui    étoit    à  Vannes,  reçut    un  ordre 
de  la   DuchefTe  Anne,  Reine  de  France,  en  date  du  ^23  Avril 
1493  ,   de  quitter  cette  ville,  de  fe  rendre  à  Redon,  d'y  porter 
tous  les   titres  ,  &  à'y  exercer  fes  fondions  jufqu'à  nouvel  ordre. 
Des  difficultés  imprévues  empêchèrent  cette    tranflation. 

Le  13  Octobre  1494,  la  DuchefTe  ïfabeau ,  fille  du  Roi 
d'Ecoffe ,  veuve  de  François  I ,  Duc  de  Bretagne  ,  fit  fon  tep 
tament ,  par  lequel  elle  choifit  fa  fépulture  dans  l'Eghfe  Cathé- 
drale de  Vannes  ,  &  y  fonda  une  MefTe  folemnelle  à  l'autel  de 
Saint  Vincent-Ferrier.  Elle  donna  ,  pour  l'entretien  de  cette  fon-^ 
dation  perpétuelle ,  une  fomme  de  deux  mille  écus  d'or  au  coin 
de  France,  dont  le  montant  fut  compté  au  Chapitre ,  en  pots, 
aiguières,  baffins,  colliers,  anneaux,  ferrures,  bagues,  joyaux, 
pierreries ,  &  autres  bijoux  &:  vaifTelles  d'or  &  d'argent.  Dès 
que  la  Reme  Anne  fut  morte  ,  le  Comte  d'Angoulênie ,  époux 
de  Madame  Claude  ,  fut  mis  en  pofTeffion  de  fon  Duché  de 
Bretagne,  par  afte  du  27  Oftobre  1514.  Ce  Prmce  régna  en 
Bretagne ,  fous  le    nom  de  François   III',  &   fon   premier  afte 

d^autorité 


VAN  489 

d'autorité,  fut    d'ordonner  le    Parlement    fédentalre    à   Vannes , 
comme  au  centre    du  Duché.   Les  Prélidents   étoient  logés  dans 
un  hôtel   de  cette   ville  ,  que  l'on  appelloit  la  maifon   du  Parle- 
ment,   Après  la  mort  de  la  Reine  Claude ,  le   Roi ,  déclaré  ulii- 
frmtier  du   Duché ,    laifTa  le   titre  de  Duc  au  Dauphin ,  Ton  fils 
aîné;  m.ais,  avant    que   le  jeune   Prince   en  prît    poilc filon,   le 
Monarque   voulut  que    la   province   fut   irrévocablement    unie  à 
la  Couronne  de  France.  Il   vint    donc   en  Bretagne  ,   en    1535 
ou  1534,  8c  s'arrêta  à  C  hâteaubriand  ,  en  attendant  l'ouverture 
des  Etats  convoqués  à  Vannes.  Il  ne  fut  pas  qucltion   de    déli- 
bérer fi  le  Duché   feroit   uni    à  la   Couronne.   On  fçavoit    bien 
que  ,    depuis    Charles  Vlll ,  c'étoit    l'intention   de  la    Cour  de 
France  ,  &  les  Bretons  étoient  bien  déterminés  à  ne  pas  rejetter 
cette  union  ;   on  agita  feulement  la    queftion  de   fçavoir ,  il  les 
Etats  la  demanderoient  eux-mêmes.  Après  bien  des  contcflations, 
on  conclut  pour    l'affirmative  ,    &:   la  requête  fut   dreflee    à   ce 
fujet  ;    elle   étoit    intitulée  :   Au   Roi  ,  notre  fouverain   Seigneur  , 
ujujruitïer  de   ce    Pays    &  Duché  de  Bretagne  ,   Pcre    &    légitime. 
Admmijlrateur  de  Monfeigneur  le  Dauphin  ,   Duc  &  propriétaire  de 
ce  Duché.    Par   cette   requête  ,   l'afTemblée   nationale    demandoit 
au  Roi,  cju'il  plût  à  Sa  Majefté   permettre  que    Monfeigneur  le 
Dauphin ,  Duc  &  Prince  naturel  de  Bretagne  ,    qui    étoit  alors 
dans  le  pays ,   fit  fon  entrée   à  Rennes  ;  que  l'ufufruit   8c    l'ad- 
miniftration  du  Duché  fufient  néanmoins  réfervés  à  Sa  Majellé, 
qui  étoit  fuppliée  d'unir ,  à   perpétuité  ,  le  Duché  au  Royaume 
de  France ,   afin    de   détruire    toutes    les    femences    de   guerres 
entre    les    Français    oc  les   Bretons   ;     à    condition  ,     pourtant , 
que  les  droits ,   libertés  ,  &  privilèges    de  la   province    feroient 
confervés  ,    comme     ils    l'avoient  été    jufqu'alors    par    les   Rois 
de  France  ,    ce   que    le  Dauphin   jureroit   îi    fon   entrée  ;   qu'il 
plût    encore  à  Sa   Majellé,   défendre   à  tous   ceux    qui   av oient 
pris  le  nom  de  Bretagne^  du  chef  de  leurs  mères,   de  le  porter 
déformais  ,  ôc  leur  ordonner  de  mettre  des  brifures  à  leurs  armes  j 
ainfi  qu'aux  bâtards  de  Bretagne  &  à  leurs  defcendants  ,  de  porter 
une    cotice  en   barre  à    leurs  armes.   Le   Roi  accorda  tous    ces 
articles,  &  unit,  irrévocablement  8c  à    perpétuité,  le  Duché  de 
Bretagne  à  la  Couronne  de  France.  Les  lettres-patentes  ,  dreflces, 
à  ce  fujet,  à  Nantes,  8c  datées  du  mois  d'Août,  au  Parlement 
de  Pans,   le   21   Septembre,  ^  au  C  onfeil  de  Brengne,   le  8 
Décembre   de    la  même  année.  A  cette  tenue  ,  le  Bail  des   im- 
pôts fur  les  vins  8c  autres  liqueurs ,  fut  adjugé  pour    la  fomme 
Tome  IV,  Q  î 


490  VAN 

de  foixante-quatre  tnilîe  fix  cents  trente -cinq  livres,  par  an; 
le  Bail  des  billots  ,  qui  fe  prennent  fur  les  liqueurs ,  outre  les 
devoirs  d'impôt ,  fe  montoit  à  trente-un  mille  huit  cents  foixante* 
douze  livres  ;  la  fomme  totale  accordée  au  Roi ,  fe  mon! 
toit  à  quatre  cents  foixante-trois  mille  fquarante-deux  livres  qua- 
torze fols  dix  deniers ,  fur  quoi  il  falloit  diminuer ,  pour  les 
charges  ordinaires,  quatorze  mille  quatre  cents  foixante  -  cinq 
livres  ;  de  forte  qu'il  ne  reftoit  plus  au  Roi  que  quatre  cents  qua- 
rante-huit mille  cinq  cents  quatre -vingt  livres  quatorze  fols 
dix    deniers. 

Le  Préfidial  de  Vannes  fut  créé  par  le  Roi  Henri  II,  au 
mois  de  Novembre  1552,.  Ce  Monarque  créa  ,  à  la  même  épo- 
que ,  un  autre  Siège  Préfidial  à  Ploermel ,  qui  fut  incorporé  , 
quelque  temps  après ,  à  celui  de  Vannes.  En  1553,  la  NoblefTe 
de  ce  diocefe  ,  commandée  par  le  Seigneur  d'Aradon  ,  s'affembla 
à  Hennebon ,  pour  aller  défendre  l'ifle  de  Belle-ïfle  ,  qui  étoit 
menacée  par  les  ennemis  de  l'Etat.  Par  Edit  du  Roi ,  donné  à 
Troyes,  en  Champagne,  au  mois  de  Mars  1564,  les  Jurifdic- 
tions  de  Rhuis  &  de  Muffillac  furent  unies  au  Siège  Préfidial  de 
Vannes  ,  &  il  fut  dit  ,  qu'il  feroit  établi ,  à  Aurai ,  un  Siège  & 
Lieutenance  particuHere  du  Sénéchal  de  Vannes  ,  dont  les  ap- 
pellations reffortiroient  direftement  au  Siège  Préfidial  de  Vannes , 
tors  es  cas  de  l'Edit  des  Juges  Préfidiaux.  Les  Etats  fe  font 
afîemblés  plufîeurs  fois  à  Vannes  ,  ordinairement  &  extraordinai- 
rement  ,  depuis  la  tenue  de  1567,  fç  avoir  j  en  1572,  1577, 
1581,1582  , 1599, 1610,  1619,  1629, 1632, 1643 , 1649 , 1664, 
1691  ,  1693  ,  1695  ,  i<?99,  1703  ,  ôcc.  En  1577,  le  Collège 
de  Vannes  fut  fondé  par  René ,  Chevalier ,  Seigneur  d'Aradon  ; 
il  fut  dirigé  par  les  Jéfuites  depuis  1 63 1  ,  époque  de  l'établifTe- 
ment  de  ces  Pères  à  Vannes  ,  jufqu'à  la  fuppreflion  de  cet 
Ordre.  En  1584,  Guennel  le  Floch  ,  Tréforier  de  l'Eglife 
Cathédrale  de  Vannes ,  fonda  le  double  de  Saint  Vincent-Fer- 
rier ,  dans  cette  Eglife ,  &  afTigna,  pour  cette  fondation ,  huit  livres 
feize  fols    huit  deniers. 

Pendant  les  troubles  ,  dont  la  religion  fervit  de  prétexte , 
Vannes  fe  déclara  pour  la  Ligue  ,  &  le  Duc  de  Mercœur  y 
mit  pour  Gouverneur ,  Jean  de  Kermeno  ,  Seigneur  de  Keraho, 
qui,  fur  les  foupçons  qu'on  eut  de  fon  infidélité  au  Duc  de 
Mercœur ,  fut  dépolîedé ,  par  un  rtratagême  fmgulier.  Sur  quel- 
ques brouilleries ,  qui  étoient  arrivées  entre  lui  ik  fes  Officiers, 
on   lui    fit  envifager   que  ,    pour  réunir   les  efprits  ,   il    falloit 


VAN  49r 

donner  à  manger  à  tous  les  Gentilshommes  de  la  garnifon.  11 
le  crut  j  le  jour  fut  pris  &  le  repas  préparé.  Comme  on  étoit 
convenu ,  il  n'y  eut  qu'une  partie  des  conviés  qui  ie  rendirent 
chez  le  Gouverneur.  Keralio  ,  après  avoir  attendu  quelque 
temps ,  voyant  qu'ils  ne  venoient  point ,  le  détermina  à  aller 
les  chercher ,  fuivant  le  conl'eil  de  ceux  qui  étoient  préfcnts 
qui  l'alTurerent  qu'ils  ne  pourroient  réiifter  à  une  pareille  hon- 
nêteté. Ce  conl'eil  étoit  un  piège.  Il  ne  fut  pas  plutôt  forti  du 
château ,  que  le  Seigneur  d'Aradon  fît  lever  le  pont ,  s'en  em- 
para ,  &:  y  fit  entrer  des  gens  affidés.  Il  refta  Gouverneur  de 
la  place  ,  pendant  les  troubles  ,  &c  le  Roi  l'y  laifla  jufqu'a  la  paix  j 
le  Gouvernement  en  a  toujours  été  depuis  polTédé  par  les  defcen- 
dants.  En  1597,  les  Efpagnols  augmentèrent  les  fortifications 
de  Vannes. 

Les  Révérends  Pères  Capucins  furent  fondés ,  dans  le  faux- 
bourg  de  Calmont ,  en  161 3,  par  Laurent  Pefchard ,  Sieur  de 
Lourme.  Le  château  de  l'Hermine  fut  démoli,  par  ordre  du  Roi 
Louis XIII,  en  161 5.  La  procefiion  de  Saint Vincent-Ferrier  ,  qui  fe 
fait,  tous  les  ans,  à  minuit ,  le  jour  de  fa  fête  ,  fut  fondée,  dans 
l'Eglife  Cathédrale  de  Vannes,  en  161 7,  par  Jean  Morin,  Sieur 
du  Bois-Tréan  ,  Confeiller  du  Roi  ,  Préfident  -  Préfidial  &: 
Sénéchal  de  cette  ville ,  &  Demoifelle  Jeanne  Hutteau  ,  {on 
cpoufe.  Les  Révérends  Pères  Carmes  du  Bon -Don,  furent  ré- 
formés en  1624.  Les  Carmes-Déchaufles  furent  fondés  ,  fur  le 
port,  à  Vannes,  vis-à-vis  la  Chapelle  Saint-JuHen,  le  8  Dé- 
cembre 1628  ,  par  Jean  Morin  ,  Sieur  du  Bois-Tréan,  qui 
donna,  pour  cet  effet,  une  de  fes  maifons  ,  avec  jardin  & 
prairies  ,  l'iHe  de  Lerne  ,  fituée  dans  la  baie  du  Morbihan  ,  & 
cinq  cents  livres  de  rentes.  Le  fondateur  voulut  que  ce  Monaf- 
tere  fiit  dédié  à  Saint  Vincent-Ferrier;  & ,  le  11  Mai  1629^ 
pendant  la  tenue  des  Etats,  à  Vannes,  le  Prince  de  Condé  pofa 
la  première  pierre  de  l'EgHfe  ;  celle  du  Monallere  ne  fut  pofée 
que  le  11  Juin  1632,  par  Jean  Morin,  fondateur  de  ce  Cou- 
vent. Les  Urfuhnes  furent  reçues ,  dans  cette  ville  ,  au  mois  de 
Septembre  1632.  La  même  année,  pendant  la  tenue  des  Etats ^ 
à  Vannes,  l'oraifon  funèbre  du  Cardinal  de  Richelieu,  Gouver- 
neur de  la  province ,  fut  prononcée  par  Denis  de  la  Barde , 
Evêque  de  Saint-Brieuc.  Les  Jacobins  furent  fondés ,  dans  le 
£auxbourg  de  Saint-Paterne,  en  1633  ,  par  le  Seigneur  de  Rof- 
madec,  qui,  le  28  Octobre  1634,  pola  la  première  pierre  de 
TEglife  de  ce  Couvent^  en  grande  cérémonie,  en  préfence  de 


491  VAN 

rtvêque ,  Ton  oncle ,  Se  le  Monaftere  fut  nommé  de  Saint- 
Vincent.  Les  Reiigieufes  de  la  Charité,  &  celles  de  la  Vifita- 
tion,  ont  été  fondées,  à  Vannes,  en  1635.  En  1658,  mourut, 
à  Vannes ,  en  odeur  de  fainteté ,  Jean  le  Rigoleuc  ,  célèbre  Mif- 
iionnaire ,  Jéfuite ,  né  à  Quintin.  La  mailbn  de  la  Retraite 
pour  les  hommes ,  à  Vannes ,  a  été  bâtie  par  M.  KerHvio , 
Grand-Vicaire  &  Relieur  de  la  Paroiffe  de  Plumergat,  en  1664: 
c'ell:  le  premier  établifî'ement  de  ce  genre ,  qui  ait  paru  en 
France  j  celle  de  la  retraite  pour  les  femmes  a  été  fondée , 
en  1 674  ,  par  Catherine  de  Francheville ,  née  au  château  de 
Trufcat ,  près  Sarzeau  ,  dans  la  prefqu'ifle  de  Rhuis ,  le  2 1 
Septembre  1620. 

Arrêt  du  Confeil ,  de  1752,  qui  réunit  les  deux  Offices  de 
Mifeurs  de  Vannes,  à  la  Communauté  de  ville.  Arrêt  du  Con- 
feil, de  1763  ,  qui  permet  à  la  même  Communauté  d'emprunter 
une  fomme  de  cent  cinquante  mille  livres ,  pour  la  confeftion 
des  travaux  pubUcs.  On  rapporte  qu'en  1764,  un  Antiquaire, 
ItaUen  ,  paflant  à  Vannes ,  fut  fort  étonné  d'entendre  les  ha- 
bitants fe  glorifier  de  ce  que  Céfar  avoir  honoré  leur  pays  de 
fa  préfence.  On  lui  montra  de  vieilles  tours ,  où  logeoient  des 
pigeons,  en  lui  difant  que  c'étoit  des  monuments  bâtis  par  Cé- 
îar.  L'Antiquaire  ,  ennuyé  de  ces  propos ,  répondit  nette- 
ment ,  que  ce  ne  pouvoit  être  que  les  endroits  où  ce  conquérant 
Romain  avoir  fait  pendre  leurs  ancêtres.  Cette  faillie  ,  naïve , 
déplut ,  &  l'étranger  fut    très-mal  accueiUi. 

Catalogue  Historique  des  EvÈquES  de  Vannes, 

Manfuet  ,  premier  Evêque  de  Vannes  ,  en  43  5  ,  foufcrivit  au 
Concile  de  Tours  en  461  \  on  afTure   qu'il  étoit  Anglais  d'origine. 

Paterne  I  du  nom ,  affifta  au  Concile  qui  fe  tint  dans  fa 
ville  épifcopale  ,  félon  les  uns  en  462  ,  &  félon  les  autres 
en  465.  On  croit  que  ce  Concile  confirma  l'éreftion  de  l'Evê- 
ché  de  Vannes  &  même  de  celui  de    Quimper. 

Modeftus  ,  affifta  &  foufcrivit  au  Concile  d'Orléans,  en   511. 

Macliau  ,  eft  connu  par  l'hiftoire  de  Grégoire  de  Tours  :  il 
fut  Evêque  de  Vannes,  plutôt  par  néceffité  &  par  intérêt  que  par 
vocation.  Fils  d'Hoël  le  Grand ,  Roi  de  Bretagne ,  il  embrafTa 
l'état  de  mariage ,  &  eut  deux  enfants.  Menacé  d'une  mort  cer- 
taine ,  par  Canao  ou  Conobre  ,  fon  frère ,  il  quitta  fon  époufe  , 
&  fe  fit  Moine.  Le  Siège  de  Vannes  ayant  vaqué ,  il  eut  allez 


'^ 


_     VAN  495 

Se  crédit  pour  fe  faire  élire  &  ordonner  Evécfiie  ;  mais ,  Conobre 
étant  mort  en  569,  il  s'empara  de  fes  Etats,  &  reprit  Ion 
époufe.  Cette  démarche  icandalifa  tous  fes  fujets ,  &  fur-tout 
les  Evêques,  qui  l'excommunièrent.  Macliau  méprifa  leurs  cen- 
fures,  &  joignit  le  parjure  à  l'impiété.  Il  avoir  juré  une  fidélité 
inviolable  à  Budic  ,  fon  frère  ,  &  à  fes  defcendants  ;  cependant, 
il  chaffa  de  fes  Etats  Theodoric,  fils  de  Budic,  &  s'empara 
de  fon  apanage.  Theodoric  ,  après  plufieurs  années  paiîées  dans 
la  mifere  ,  trouva  des  fecours  ,  attaqua  Macliau  ,  &  le  fit 
mourir  ,  avec  fon  fils  Jacob  ,  l'an  577.  Telle  fut  la  fin  de 
ce  Prince,  qui  n'avoir  embraffé  l'Etat  eccléfiaflique  que  pour 
fauver  fes  jours. 

Ennius  ou  Eonius,  fut  fon  fucceffeur.  Grégoire  de  Tours 
rapporte,  fous  les  années  578  &  580,  que  ce  Prélat  étoit  fî 
adonné  au  vin ,  qu'il  s'enivroit  au  point  de  ne  pouvoir  faire  un 
pas.  Cette  accufation  ne  s'accorde  gueres  avec  ce  que  dit  Dom 
Taillandier  ,  de  Tintérêt  que  les  Vannetais  prenoient  à  ce  Prélat. 
Ennius,  dit  cet  hiftorien,  fut  député  par  Varoch ,  fils  de  Ma- 
cliau ,  vers  le  Roi  Chilperic  ,  qui  ,  loin  de  l'écouter  ,  l'envoya 
en  exil.  Les  Bretons  ,  piqués  de  la  conduite  du  Roi  de  France, 
s'emparèrent  du  Comté  de  Rennes.  Chilperic  ,  pour  arrêter  les 
conquêtes  des  Bretons,  rappella  Ennius,  &  l'envoya  à  Angers, 
à  condition  qu'il  ne  retourncroit  point  à  fon  Eglife.  Cette  con- 
dition ne  fatisfit  point  les  Bretons ,  qui  continuèrent  la  guerre 
oc  ravagèrent  le  Comté  de  Nantes.  Après  cette  expédition , 
Ennius  retourna  à  la  Cour  de  France  ,  pour  y  folHciter  la  per- 
miiTion  de  retourner  à  fon  Eglife.  La  chronique  de  Tours ,  qui 
nous  fournit  cet  article ,  ne  nous  en  apprend  point  la  fuite  ; 
mais  on  doit  dire  que ,  s'il  étoit  vrai  qu'Ennius  eut  été  ivrogne 
jufquà  la  crapule,  Varoch  ne  l'eut  pas  chargé  de  fes  intérêts, 
&  fes  diocéfains  ne  feroient  pas  expofés  à  la  colère  d'un  Prince 
puifTant ,  pour  lui  faire  obtenir  fa   liberté. 

Regalis  ,  efl  qualifié  Evêque  de  Vannes ,  par  Grégoire  de 
Tours,  en  parlant  du  Traité  de  paix  fait  ,  vers  l'an  590,  entre 
Varoch  ,  Comte  de  Vannes ,  &;  Ebrachaire ,  Comte  des  Marches 

de  Bretagne. 

Dominius  :  au  fujct  de  ce  Prélat  &  des  fuivants  ,  jufqu'A 
Agon  &  Ifaac  ,  pendant  près  de  deux  ficelés  ,  nous  n'ayons  rien 
de  certain ,  &  c'efl  avec  raifon  qu'on  pcnfc  que  pluficurs  font 
fuppofés  ;  les  voici  :  Clément ,  Amant ,  Saturnin  ,  Saint  Gucnnin  , 
Saint  Ignoroc  ,  Ramald  ou  Rainai  de  ,  Sufannus ,  Junkchci  ou  Ju- 


494  VAN 

dicaël  ;  Judoc  ou  Budoc ,  honoré  comme  Saint  dans  la  Cathé-- 
drale  de  Vannes ,  le  9  Décembre  ;  Saint  Hincwetene  ou  Hin» 
guetene  ;  Saint  Mereadoc  ,  ordonné  vers  l'an  659  ,  félon  le  pro- 
pre de  Vannes  ,  mais  cette  ordination  eft  rejettée  par  Lobineau 
&■  par  le  Calendrier  de  Tréguier ,  jufquesfous  la  fin  du  treizième 
fîecle  ;  Saint  Meldoc  ou  Meldroc  ,  Hamon ,  Mabon ,  Maurice 
ou  Morvan  ;  Saint  Gobrien  ou  Covian ,  mort ,  félon  le  Bréviaire 
de  Vannes,  en  725  ,  &  félon  Lobineau,  après  m  5,  (voyez 
les  raifons  déduites  plus  bas ,  raifons  que  Lobineau  ,  peu  d'ac- 
cord avec  lui-même,  allègue  pour  prouver  fon  fentiment :  ) Dilis , 
Kerenomonoc  ou  Kerenmonoc ,  Saint  Juflok ,  Jacut ,  Calgon  o\i 
Galgon ,  Luchenard  ou  Luetard  ,  Bili  I ,  Cunadan  ou  Enadan  y 
Blenlivet  ou  Bleviligat,  Orfcand  ou  Aurifcand  ,  &  Agon.  Voilà  ^ 
depuis  l'Evêque  Regalis ,  dont  Grégoire  de  Tours  fait  mention 
en  590,  vingt-huit  Evêques ,  dans  l'efpace  de  deux  cents  ans;.  ''■" 
qui  ne  fent  pas  que  ce  nombre  eu  invraifemblable  ,  puifque  les 
■vingt-huit  Evêques  qui  ont  fuccédé ,  dans  un  temps  où  les  tranf- 
lations  &  les  comimendes  étoient  fi  fréquentes  ^  ont  rempli 
un  intervalle  de  quatre  cents  foixante-dix  «ans. 

Ifaac  y  fe  trouve  ,  en  797  ou  81 4 ,  dans  les  cartulaires  de 
Redon» 

*  Kermaric  ,  en  8î8  :  l'Empereur  Louis  le  débonnaire,  tint,  fous 
fon  Pontificat ,  deux  Conciles ,  à  Vannes ,  l'un  avant  &:  l'autre 
après  fon  expédition  contre  Morvan ,  que  les  Bretons  avoient 
élu  pour  Roi.  Pendant  le  dernier  de  ces  Conciles,  également 
afTembiés  pour  les  affaires  de  l'Etat  comme  pour  celles  de 
l'Eglife  ,.  Marmonoc  ,  Abbé  de  Landevenech  ,  alla  trouver  l'Em- 
pereur ,  qui ,  l'ayant  interrogé  fur  la  manière  dont  il  conduifoit 
fon  Couvent  &  dont  fes  Moines  étoient  tonfurés  ,  lui  ordonnât 
de  fuivre  ,  à  cet  égard ,  la  coutume  générale  de  l'Eglife^ 

Vinhoëloc,  en  820. 

Rahenher ,  en  824. 

Raginaire  ,  Rainald ,  ou  Rainaire  ,  en  827.  Le  Père  Mabillon; 
croit  qu'il  y  eut  un  Concile  ,  à  Vannes,  en  828  ;  ce  qui  ne  pa- 
loît  pas  probable  à  M.  Travers;  c'eft  en  833  que  l'Empereur 
y  affembla   les  Evêques  &  les  Grands. 

Sufannus  ,  en  839.  Il  fut  dépofé,  par  ordre  de  Nominoë  5, 
en  849. 

Courant-gene  ou  Kerobrantgene ,  en  849,. 

Dilis ,  en  864  ou  870. 

Agon, 5  fécond  du  nom,  lui  fuccéda». 


VAN  ... 

Kerenmônoc  ou  Chemmunoc ,  en  878.  Le  Pape  Jean  VIII    lui 
écrivit  des  lettres  très-dures ,  qu'il  ne  méritoit  pas.  ' 

Saint  Bili,   en  8925  fous  le  règne  de  Gurmhailon. 
Ifraël ,  vers  947. 
Aurifcand ,  en  971. 

Judicaël,  frère  de  Geoffroi ,  Comte  de  Rennes,  en  1008  i  il 
mourut  en  1037. 

Budic,  Benoit,  ou  Budoc  ,  lui  fuccéda ,  en  1037. 

Maën  ou  Maine,  en   1047. 

Morvan  ou  Morice ,  en  1088  ;  aflifta  au  Concile  d'Angoulême 
en  II 18,  &  mourut  en   1128. 

Jacques ,  fon  fucceffeur ,  vivoit  fous  le  règne  de  Louis ,  Roi 
de  France  ,  Se  de  Conan ,  Duc  de  Bretagne. 

Even,  Evan  ,  ou  Yves,  en  1143  5  mourut  la  même  année. 

Rodoald  ,  Rouaud ,  ou  Ruaud ,  Moine  de  Cîteaux ,  fut  élu  en 
II 43.  Geoffroi  de  Chartres,  Légat  du  Saint-Siège,  tint  un  Con- 
cile, à   Vannes,  fous   fon  Épifcopat  :  il  mourut  l'an  11 77. 

Geoffroi,  élu  en  ii77,eft  cru  mort  l'année  de  fon  cleftion. 
Si  cela  eff ,  le  Siège  vaqua  près  de  cinq  ans ,  ou  Geoffroi  eut 
un  fucceffeur  qu'on  ne  connoît  pas. 

Guezenoc  ,  Guehonoc  ,  ou  Guethenoc  ,  Archidiacre  de  Rennes , 
élu  en  II 82,  mourut  en  1202.  Albert  de  Morlaix  dit  que  ce 
Prélat  obtint  de  l'Evêque  de  Nantes  &  de  fon  Chapitre ,  un  bras 
de  Saint  Félix  ,  Evêque  de  cette  Ville  ;  une  partie  de  la  tête 
de  Saint  Donatien  ;  &  des  cheveux  de  Sainte  Sehcine  ,  Rcli- 
gieufe  de  Nantes ,  à  laquelle  Dieu  avoit  daigné  fe  montrer  plu- 
iieurs  fois ,  fous  une  forme  vifible.  On  ne  connoît  point ,  à 
Nantes  ,  de  Sainte  Sehcine ,  c'eff  une  Sainte  de  l'invention  d'Al- 
bert. Guezenoc  eft  nommé  entre  les  Prélats  qui  affilièrent  à  la 
dédicace  de  l'Eglife  de  Meilleraie ,  &:  aux  obièques  de  la  Du- 
cheffe  Conffance. 

Guillaume,  élu  en  1203  ,  accorda,  l'an  1218  ,  à  fes  Chanoines, 
une  loi  qu'ils  demandoient.  Elle  portoit ,  qu'a  la  mort  d'un  Cha- 
noine ,  fes  revenus  de  l'année  fuivante  feroient  employés  à  payer 
fes  dettes ,  &  à  l'exécution  de  fon  teffament  :  il  mourut  fur 
Ja  fin  de  cette  année. 

Robert,  lui  fuccéda,  en  1227. 

Cadioc  ou  Gadioc ,  élu  en  1228,  mourut  en  1254;  il  affida 
au  Concile  qui  fe  tint  ,  en  je  ne  fçais  quel  endroit  de  la  pro- 
vince de  Tours.  Il  défend  aux  Prêtres  &:  aux  Moines  de  tenir 
des  femmes  ou  fervantes  dans  leurs  maifons  y  ik  aux  Cures ,  d'ex- 


49é  VAN 

communier  quelqu'un  dans  leur  propre  caufe  ,  ou  lorfqu'il  s  agît 
de  leurs  intérêts.  Il  défend,  auffi  aux  Evêques  de  prononcer  trop 
légèrement  des  excommunications.  On  trouve  dans  la  vie  de 
Saint  Louis  ,  par  Joinville  ,  édluon  de  Poitiers ,  in-4°,  Chap,  8z  ^ 
un  trait  bien  fage  de  ce  grand  Monarque.  Les  Evêques  de 
France,  s'étant  rendus  en  grand  nombre  auprès  de  lui,  lui  re» 
préfenterent  que  la  religion  tomboit  dans  fon  Royaume  ,  &  que , 
pour  en  empêcher  la  ruine  totale ,  il  étoit  nécelTaire  d'ordonner 
à  ceux  qui  avoient  été  excommuniés  de  fe  faire  abfoudre  au 
moins  un  an  après  l'excommunication  lancée  ,  &  même  de  les  y 
faire  contraindre  par  fes  Officiers  de  Juftice.  Cétoit  adroitement 
s  y  prendre  pour  obtenir  ce  qu'on  defiroit  ;  mais  le  Roi  s'ap- 
perçut  du  motif  qui  faifoit  agir  les  Prélats,  &  ne  voulut  pas 
le  féconder.  Il  leur  répondit ,  qu'il  vouloit  bien  les  fatisfaire , 
pourvu  qu'ils  confentiffent  auffi  que  fes  Juges  examinalTent  fi 
lexcommunication  étoit  bien  ou  mai  fondée.  Les  Evêques  refu- 
ferent  -,  &  le  Roi  qui  s'y  attendoit ,  leur  dit  :  Eh  bien  1  je  ne 
veux  pas  que  vous  vous  mêliez  auffi  de  ce  qui  regarde  ma 
Juftice.  11  ajouta  :  les  Evêques  de  Bretagne  ont  tenu,  pendant 
fept  ans ,  leur  Duc  fous  le  joug  de  l'excommunication  ;  il  a 
pourtant  été  abfous  en  Cour  de  Rome ,  comme  innocent  des 
griefs  qu'on  lui  imputoit.  Si  je  l'avois  forcé  à  fe  faire  abfoudre 
un  an  après  l'excommunication ,  il  auroit  été  obligé  d'acquiefcer 
à  toutes  les  demandes  des  Evêques  ,  &  j'aurois  fait  une  injuftice 
puifque  je  l'aurois   contraint  de   renoncer  à  des  droits  légitimes. 

Guillaume  de  Quelen  ou  de  Quelené ,  élu  en  1254,  facré 
cm  1255,  mourut  ou  fut  transféré  ailleurs  dans  le  courant  de 
cette  année. 

Alain,  élu  en  1256 ,  mourut  en  ïi6i. 

Gui  de  CoUed  ,  dédia  l'Eglife  des  Cordeliers  de  Vannes  eo. 
1265,  &  mourut  en  1270,  au  mois  d'Oftobre. 

Guidomarc   de   Conleu ,  en  1270,  mourut  en  1271. 

Gui  de  Conleu  ,  fut  élu  en  1 276.  Le  Siège  étoit  vacant  en  1 278, 

Hervé,  nommé  en    1278,  mourut  en  1287. 

Henri  Blokh  ,  en  1  287. 

Guillaume ,  fon  fucceffeur  ,  affifta  à  la  dédicace  de  l'Eglife 
de  Buzai  en  1288.  Il  ne  faut  pas  s'étonner  de  ce  grand  nombre 
d'Evêques ,  en  (i  peu  de  temps  -,  ils  ne  faifoient  que  paroître  fuK 
îe  Siège,  qu'ils  étoient  transférés  ailleurs. 

Henri  le  Tors,  en  128^,  mourut  en   1310* 

Yves<>  lui  fuccéda  en  13  lo- 

leaiîi 


VAN  497 

*   Jean  le  Parifi ,  élu  en  1 3  i  2  ,  fut  un  des  exécuteurs  teflamcn- 
taires  du  Duc  Artur  II;   il  mourut  le  20  Janvier  1334. 

GeofFroi  de  Rochefort ,  &  félon  les  autres  de  Sanit  -  Guen , 
fit  fa  foumiflion  à  la  Chambre  Apoftolique,  en  1339. 

Gauthier  de  Saint-Pern  ,  fut  élu  le  27  Février  1347.  On  ne 
fçait  pas   l'année  de  fa  mort. 

Guillaume,  fut  élu  en  1357. 

Jean  de  Lominé  ,  élu  en  1359  y  ^^^it  ci-devant  Archidiacre 
de  Vannes. 

Geoffroi  de  Rohan ,  fils  d'Olivier,  Vicomte  de  Rohan  ,  & 
de  Jeanne  ,  Vicomteffe  de  Léon  ,  paya  les  droits  de  la  Cham- 
bre Apollolique,  le  3  Novembre  1361.  11  donna  quittance  au 
Duc  &  à  fes  Officiers ,  pour  tous  les  dommages  &:  dégâts 
qu'ils  avoient  fait  fur  les  biens  de  fon  Eglife.  C'ell:  le  premier 
Evêque    de    Vannes   qui   fe    foit   intitulé  par    la   ^race  de  Dieu, 

Jean  de  Montrelais ,  nommé,  en  1378,  par  Urbain  IV,  fut 
transféré  à  Nantes  en  1381. 

Simon  de  Langre  ,  de  l'Ordre  de  Saint-Dominique ,  fut  tranf- 
féré  de  Nantes  à  Vannes,  &  réfigna  en    1384. 

Yves ,  fut  nommé  ,  en  conféquence  de  la  réfignation  de  fou 
prédéceiTeur. 

Henri  le  Barbu  ,  Abbé  de  Prières  ,  fuccéda  à  ce  dernier , 
&  fut  mis  en  pofTefîion  du  Siège  de  Vannes,  l'an  1384,  par 
Thomas ,  Archevêque  de  Naples  &  Légat  du  Saint  -  Siège  en 
Bretagne. 

Il  ratifia,  en  1387  ,  le  douaire  accordé  à  la  Duchefle  Jeanne 
de  Navarre ,  &  affilia  aux  Etats  de  Nantes  en  1389.  Pourvu  de 
la  charge  de  Chancelier  ,  il  accompagna  le  Duc ,  à  Tours ,  l'an 
1391  ;  &  fut  témoin  de  l'accord  fait  entre  ce  Prince  &:  le  Con- 
nétable Olivier  de  Clifibn  :  il  fut  transféré  à  Nantes,  en  1403. 
(  Voyez  Prières  &  Nantes.  ) 

Hugues  Scocquer  ou  Lelloquer  ,  de  l'Ordre  des  Frères  Prê- 
cheurs ,  Chanceher  &  Confeffi-'ur  du  Duc  ,  fut  transféré  de 
Tréguier  à  Vannes,  en  1404;  il  s'excufa  auprès  du  P<ipe  ,  qui 
l'avoit  prié  de  fe  rendre  à  fa  Cour  :  il  mourut  le  9  06i:o- 
bre  1408. 

Amauri  de  la  Motte  d'Acigné  ,  élu  en  1409»  ^ut  facré  par 
l'Archevêque  de  Tours ,  &  recommandé  au  Duc  par  le  Pape 
Alexandre  V,  en  1410:  il  fut  cité,  par  le  Pape  Martin  V,  à 
comparoître  en  Cour  de  Rome  ,  pour  répondre  à  ce  qu'on  liH 
reprochoit ,  de  ne  pas  vouloir  donner  les  Ordres  aux  Moines  de 
Tome  IV.  H   3 


498  _  V  A  N 

Prières ,  fans  les  examiner  :  il  afllfta  aux  funérailles  de  Saint  Vin- 
cent-Ferrier ,  &  fut  transféré  à  Saint-Malo  en  1432. 

Jean  Validire  ,  fut  transféré  de  Saint-Pol-de-Léon  à  Vannes , 
le  28  Novembre  1433,  par  le  Pape  Eugène  IV  j  &  publia  des 
Statuts ,  cette  même  année.  Son  Eglife  tombant  en  ruines ,  il  en 
fît  réparer  la  meilleure  partie  :  il  mourut  en  1 444 ,  &  fut  in- 
humé dans  la  Chapelle  de  Notre-Dame ,  où  l'on  voit  encore  fon 
tombeau.  • 

Yves  de  Ponfale  ,  de  l'Ordre  des  Frères  Prêcheurs ,  iffu  d'une 
noble  famille  du  diocefe ,  embrafla  d'abord  la  règle  de  Saint- 
Dominique.  Jean  Validire  l'admit  dans  fon  Chapitre ,  dont  il 
fut  fait  Tréforier.  Il  fuccéda  à  ce  Prélat ,  &  fit  les  funérailles 
du  Duc  François  I  ,  dans  l'Eglife  de  Redon ,  l'an  1 449.  Le 
grand  nombre  de  miracles  que  Dieu  opéroit  fur  le  tombeau  du 
B.  Vincent-Ferrier ,  l'obligea  à  demander  au  Pape  la  canonifa- 
tion  de  ce  Saint.  Le  Pape  lui  accorda  fa  demande  j  &: ,  en 
1456,  commit  le  Cardinal  de  Coëtivi  pour  lever  fon  corps  de 
terre.  Il  mourut  en  1475  ,  vieux  flyle. 

Louis  de  Salarun ,  qu'Albert  lui  donne  pour  fucceffeur  ,  eft 
fuppofé. 

Pierre  de  Foix  ,  de  l'Ordre  des  Frères  Mineurs ,  &  frère  de  lâ 
DuchefTe  Marguerite  de  Foix  5  après  une  jeunelTe  remplie  de 
bonnes  œuvres ,  fut  nommé  à  l'Evêché  de  Vannes ,  dont  il  prit 
pofTefîion  en  1475.  Le  Pape  écrivit  au  Duc  à  cette  occafîon, 
&  lui  promit  qu'à  la  première  promotion  il  feroit  fon  beau- 
frere  Cardinal.  Il  fit  ferment  de  fidélité  à  ce  Prince ,  le  13  de 
Mai ,  &  fut ,  peu  de  temps  après ,  nommé  Cardinal  du  titre  des 
Saints  Cofme  &  Damien.  Son  nom  fe  trouve  dans  les  lettres 
d'abolition ,  données  aux  Seigneurs  qui  avoient  voulu  fe  faifir 
du  Tréforier  Landais,  en  1485  5  mais,  craignant  d'être  inquiété 
dans  la  fuite  à  ce  fujet ,  il  fe  retira  à  Rome  ,  où  il  mourut, 
l'an  1 490 ,  Légat  d'Avignon  &  du  Comtat  Venailîin  j  il  fut 
enterré  dans  l'Eglife  de  Notre-Dame  del  Popolo. 

Après  la  mort  du  Cardinal  de  Foix,  Guillaume  le  Borgne, 
Chantre  Chanoine  de  l'Eglife  de  Nantes  &  Premier  Préfident 
de  la  Chambre  des  Comptes ,  fut  élu  par  le  Chapitre  ,  mais  il 
ne  fut  point  admis  par  le  Pape  Innocent  VIII ,  qui  vouloit  donner 
cet  Evêché  à  fon  neveu  Laurent  Cibo. 

Laurent  Cibo ,  de  Gênes ,  Archevêque  de  Benevent ,  &  Car- 
dinal du  titre  de  Sainte-Cécile ,  fut  fait  Evêque  Commendataire 
de  Vannes ,  en    1 490  -,  il   prit   pofTeiTion  ,  par  Procureur  ,  en 


VAN  49, 

1491  .  iQUS  le  bon  plaifir  de  la  Reine,  'qui  eut  beaucoup  de 
peine  à  y  confentir.  Il  mourut  ,  le  premier  Décembre  1 503  ,  d'une 
maladie  occafionnée  ,  dit-on ,  par  la  crainte  de  perdre  Ion  cha- 
peau de  Cardinal ,  fous  le  Pape  Jules  II ,  parce  qu'il  étoit  bâ- 
tard,  Se  que  c'étoit  contre  les  loix  qu'il  avoit  été  revêtu  de 
la  Pourpre. 

Jacques  de  Beaulne  ,  frère  de  Martin ,  Archevêque  de  Tours 
fils  de  Jacques,  Seigneur  de  Samblançai ,  Tréforic-r  de  l'épargne; 
&  de  Jeanne  de  Rufé ,  fut  nommé  par  le  Chapitre ,  en  confé- 
quence  des  ordres  de  la  Reine  Anne  ,  quoiqu'il  n'eut  que  dix- 
neuf  ans,  le  premier  Février  1503  ou  1504.  Il  étoit  Archidiacre  de 
Porhoèt ,  au  diocefe  de  Saint-Malo ,  &  Tréforier  de  l'iiglife  de 
Vannes.  Après  la  mort  du  Cardinal  de  Benevent ,  le  Pape  avoit 
nommé  le  Cardinal  d'Albret  à  l'Evêché  de  Vannes;  mais,  ayant 
fçu  que  la  Reine  en  avoit  difpofé  en  faveur  de  Jacques  de 
Beaulne  ,  il  lui  accorda  des  proviiîons ,  pour  ne  pas  défobliger  cette 
Princeffe.  Il  en  avoit  déjà  accordé  au  Cardinal  d'Albret ,  qui , 
n'ayant  pu  avoir  l'agrément  de  la  Reine ,  renonça  à  fcs  préten- 
tions. Jacques  de  Beaulne  fit  ferment  de  fidélité  au  Roi,  le  30 
Novembre,  &  mourut  au  mois  de  Janvier    1510. 

Robert  Guibé,  Refteur  de  Saint- Julien  de  Vouvantes ,  Prieur 
de  Batz,  de  la  Trinité  de  Fougères,  de  Sainte-Croix  de  Vitré, 
Abbé  de  Saint-Gildas  de  Rhuis,  de  Saint -Mclaine  ,  &  de 
Saint-Méen  ,  ci-devant  Evêque  de  Tréguier,  puis  de  Rennes, 
enfuite  Evêque  de  Nantes  ,  &  Cardinal  du  titre  de  Sainte-Anaf- 
tafie,  fijt  fait  Evêque-Adminiltrateur  de  Vannes,  en  1 5 1  i  ,  & 
mourut  en   15 13.  Le  Roi  fit  faifir  les  revenus  de  l'Evêché. 

Laurent  Pucci ,  Florentin  d'origine  ,  fut  fuccelîlvement ,  Pro- 
tonotaire du  Saint-Siège,  Clerc  de  la  Chambre  Apoilohque, 
Légat  du  Pape  Léon  X  ,  à  Florence  ,  puis  Cardinal ,  ik  enfin 
Evêque -Adminiftrateur  de  Vannes,  dont  il  prit  poflellion  en 
141 4;  il  céda  fon  Evêché. 

André  Hamon,  protégé  par  le  Roi  Se  la  Reine,  fut  reconnu 
Evêque  de  Vannes,  par  la  cefiion  du  Cardinal  Pucci;  mais 
celui-ci  fe  réferva  le  titre  d'Evêque  ,  le  pri\'ilege  de  nommer  les 
Grands-Vicaires  &  les  Bcnéficiers  ,  Se  plulicurs  autres  droits,  dont 
la  privation  ne  laifToit  à  André  que  l'ombre  d'une  grande  di- 
gnité   ;  celui-ci  s'en  démit ,  en  fe   réfervant  une  penlion. 

Geoffroi  le  Borgne,  Prieur  du  Bon-Don  &  Evêque  de  Tiberiade, 
fyt  nommé,  fur  la  démifhon  de   fon  prédcceiTeur. 

Laurent  Pucci,   reprit  fon  Evêché,  le    18  Janvier  15245  ^ 


500  VAN     _ 

le  céda  à  foti  neveu,  Antoine  Pucci ,  en  1530;  mais  il  en 
retint  les  revenus ,  avec  la  permiflion  du  Roi  :  il  mourut ,  à 
Rome  ,  en  1532. 

Antoine  Pucci ,  Grand-Pénitencier  de  l'Eglife  Romaine ,  Evê- 
que  de  Sabine,  nommé  en  1530,  fut  fait  Cardinal  l'année 
fuivante.  Geoffroi  le  Borgne,  Evêque  de  Tiberiade ,  continua 
de  faire  les  fon6lions  épifcopales  à  Vannes  ,  fous  ce  Prélat ,  en 
qualité  de  Vice-gérent  du  diocefe.  Antoine   mourut  en  1544. 

Laurent  Pucci  ,  neveu  du  précédent ,  qui  l'avoit  fait  nommer 
fon  Coadjuteur  ,  fuccéda  à  fon  oncle,  en  1544?  &  mourut  en 
1548.  Le  Siège  vaqua  quatre  ans. 

Charles  de  Marillac  ,  Abbé  de  Melun  ,  fut  nommé  par 
le  Roi  Henri  II,  à  l'Evêché  de  Vannes,  en  1551.  Ce  Prélat 
ne  réfida  pas  ,  mais  il  confia  le  foin  de  fon  diocefe  à  Bertrand 
de  Marillac  ,  fon  frère  &  fon  Grand-Vicaire  ,  qui  fut  dans  la 
fuite  Evêque  de  Rennes.  Charles  étoit  ferme  &  bien  intentionné 
pour  l'Eglife   :  il  fut  transféré  à  Vienne,  en  1557. 

N.  de  Bafle-Fontaine  ,  Lieutenant  du  Roi  en  Flandre ,  fut 
défigné   Evêque    de  Vannes,  en  1557' 

Sébaftien  de  l'Aubefpine  ,  auffi  nommé  la  même  année ,  ne 
fut  point  facré  j  il  céda  fon  Evêché  ,  &  fut  pourvu  de  celui 
de  Limoges,  en   1558. 

Philippe  du  Bec  j  fut  nommé  à  l'Evêché  de  Vannes,  le  17 
Avril  15585  prit  polTefTion  &  fit  ferment  de  fidélité  au  Roi,  la 
même  année.  Il  aflifta  au  Concile  de  Trente  ,  où  il  fe  fit  re- 
marquer par  fa  fcience  &  fes  mœurs.  Il  publia  des  Statuts , 
le  24  Juin   1565  ,  &  fut  transféré  à  Nantes  en  1566. 

Jean  le  Fevre ,  Chanoine  &  Chantre  de  l'Eglife  de  Vannes , 
fut  pourvu  le  1 4  Mars  1 5  66 ,  prit  poffefTion  le  1 4  Août  fui- 
vant,  fit  ferment  de  fidélité  en  15675  &  mourut  en   1570. 

Pierre  de  Saint-Martin,  nommé  le  8  Juin  1572,  fit  ferment 
de  fidélité  au  Roi,  en  qualité  d'Evêque  de  Vannes  j  mais, 
n'ayant  pas  été  agréé  de  la  Cour  de  Rome ,  il  réfigna  dans  le 
courant  de  cette  année. 

Jean  de  la  Haye  ,  de  l'Ordre  de  Saint-Benoît,  Dofteur  en 
Théologie  ,  &  Grand-Vicaire  de  Pierre  de  Saint-Martin  ,  obtint 
des  Bulles  pour  l'Evêché  de  Vannes,  en  15735  fit  ferment  de 
fidélité  au  Roi,  en  15745  &  fut  empoifonné ,  dans  le  courant 
de  la  même  année  ,  par  un  garçon  Apothicaire  ,  qui  fut  exé- 
cuté ,  peu  de  temps  après,  par  Arrêt  du  Parlement  de  Bretagne. 

Louis  de  la  Haye  ,  frère  du  précédent ,  lui  fuccéda ,  en  1575. 


VAN  joi 

Ce  fut  fous  fon  Pontificat  que  fut  bâti   le   Collège  de  Vannes. 
Il   affifta  au   Concile   d'Angers  en  1583  ,  &  mourut   en  1588,' 
fî  pauvre  ,    que  le  Chapitre  fut  obligé  de  faire  les  dépenfes  de 
fes   funérailles.   Il  fut    mis  ,   dans  la  Chapelle   de  Notre-Dame 
auprès  de  fon  frère.    Le  Roi  fît  faifir    les  revenus  de  TEvêché. 

Georges  d'iVradon  ;  après  avoir  fait  fes  études  avec  fuccès 
fiit  reçu  Confeiller  au  Parlement  de  Bretagne,  en  1587.  Il  s'at- 
tacha à  la  Ligue,  qui  lui  procura  l'Evêché  de  Vannes,  en  1590, 
Il  fut  facré ,  dans  la  Chapelle  du  Colltge  de  Navarre,  par 
l'Evêque  de  Plaifance  ,  Cardinal  du  titre  de  Saint-Onuphre.  Il 
aflifta  aux  Etats  Généraux ,  tenus  à  Paris ,  au  mois  de  Février 
1593  ,  en  qualité  de  Député  de  la  province  de  Bretagne;  il 
prit  poflefTion  de  fon  Evêché  ,  le  6  Août  fuivant  ,  &  fît  fer- 
ment de  fidélité  au  Duc  de  Mercœur,  le  iode  Septembre  1594. 
Les  regiftres  de  Nantes  lui  donnent  le  nom  de  François  ;  il 
mourut  le  dernier  jour  de  Mai  ^')<)6 ,  &  fut  enterré  dans  une 
Chapelle    de   fon  Eglife.    Le  Siège    vaqua    trois  à   quatre   ans, 

Jacques-Martin  de  Belle-AfTife,  natif  de  Bordeaux  ;  fut  nommé, 
par  le  Roi  Henri  IV ,  à  l'Evêché  de  Nantes  ,  quoiqu'il  n'eiit 
que  vingt  ans  -,  il  fît  ferment  de  fidélité  ,  &  prit  pofléffion  ,  en 
1600;  afîîfta  aux  Etats  de  Quimper  en  1601  ,  à  l'aflemblée 
générale  du  Clergé  en  1610;  il  gouverna  fagcment  fon  dioceie, 
y  introduifit  le  Rit  Romain ,  &  fit  préfent  à  fa  Cathédrale  d'une 
riche  tapifferie.  Etant  informé  que  la  pauvreté  empêchoit  plu- 
fieurs  Clercs  d'étudier  la  Théologie ,  il  aflîgna  un  fonds  de  quinze 
cents  livres  de  rente ,  pour  les  aider  ;  il  fît  aufïî  un  établiflement 
pour  l'éducation  de  quinze  pauvres  fîllcs.  Dégoûté,  enfin  des 
affaires  d'un  diocefe  fi  vafle,  il  permuta  avec  SébafHen  de 
Rofmadec  ,  Abbé  de  Paimpont ,  &  fe  retira  à  Paris ,  en  1611, 
pour  ne  plus  penfer  qu'à  fon  falut.  Il  vouloit  aller  en  pèlerinage 
à  Rome  ;  mais  il  mourut,  attaqué  d'une  violente  maladie  ,  le  1  2 
Janvier  1624  :  il  fut  inhumé  dans  l'Eglifc  des  Célellins,  près 
la   Chapelle  d'Orléans. 

Sébaftien  de  Rofmadec ,  Abbé  de  Paimpont  ;  fut  pourvu  de 
l'Evêché  de  Vannes ,  fur  la  réfignaiion  de  fon  fucceiieur  ,  ad- 
mife  en  Cour  de  Rome ,  &  fut  facré ,  en  l'Eghfe  de  Saint- 
Germain-des-Prés ,  le  11  de  Février  1624,  par  Bertrand  Def- 
chaux ,  Archevêque  de  Tours  ;  prêta  ferment  au  Roi  ,  6c  pré- 
fida  aux  Etats  de  la  province.  Ce  Prélat ,  véritablement  digne 
de  l'être  ,  gouverna  fagement  fon  diocefe  ,  &  publia  des  Sta- 
tuts,  qui  prouvent  fon  zèle  pour  la  vertu.  Entr'autres  chofes,  il 


jDi  VAN 

recommanda  aux  Curés  de  réfîder  exaélement  dans  leurs  Pa- 
roiffes  ,  d'aiîifter  aux  Synodes ,  de  faire  les  réparations  des  Eglifes 
dont  ils  perçoivent  les  revenus  ;  défendit  les  feflins  fcandaleux , 
qui  fe  faifoient  aux  premières  Meffes  des  Prêtres ,  taxa  le  prix 
des  Meffes;  fit  des  règlements  très-fages  pour  Tadminiflration. 
des  Sacrements ,  les  cérémonies  de  l'Eglife  ,  la  régie  des  biens 
des  Eglifes  paroiffiales  ,  pour  les  mariages,  l'éducation  des  enfants, 
la  vénération  des  Reliques ,  les  regiltres  des  baptêmes  ,  morts  & 
mariages,  les  enterremems ,  les  fages-femmes ,  &c.  A  la  fuite 
de  ces  règlements ,  font  défignés  les  crimes  dont  l'abfolution  eil 
réfervée  au  Pape  &  à  l'Evêque.  Les  coupables  qui  doivent 
s'adrefTer  au  Saint-Pere ,  font ,  les  meurtriers  d'un  Prêtre  ,  ceux 
qui  les  maltraitent  au  point  de  leur  faire  des  bleffures  dange- 
reufes  j  les  incendiaires  des  Eglifes ,  les  voleurs  facrileges ,  ceux 
qui  auroient  frappé  un  Evêque ,  ou  celui  qui  les  auroit  excom- 
muniés j  les  fimoniaques  ,  les  dueliilles  ,  les  provocations  ou  défits  , 
&  les  ufurpations  des  biens  de  l'Eglife.  Ceux  qui  doivent  s'adrefler 
à  l'Evêque  ,  font ,  les  blafphémateurs ,  les  magiciens ,  les  noueurs 
d'aiguillettes  ,  les  fuperftitieux  par  magie ,  les  fédu6leurs  des  per- 
fonnes  confacrées  à  Dieu ,  les  homicides ,  les  inceflueux ,  & 
ceux  qui  commettent  le  péché  contre  nature,  les  ufuraires,  les 
fauflaires ,  les  perturbateurs  du  repos  de  l'Eglife ,  &c.  Sébaftien 
de  Rofmadec  mourut  le  29  Juillet  1645  ,  &  fut  enterré  dans 
la  Chapelle  de  Saint  Vincent-Ferrier. 

Charles  de  Rofmadec  ,  Abbé  du  Tronchet  ,  au  diocefe  de 
Dolj  nommé  Evêque  en  1647,  f^cré,  en  1648  ,  par  René  de 
Rieux,  Evêque  de  Léonj  publia  des  Statuts  la  même  années 
aiTifta  àlalTemblée  du  Clergé  en  1655  j  &  fut  transféré  à  Tours,, 
en    1671. 

Louis  Caffet  ou  Cozet  de  Vautorte ,  fils  de  Louis ,  Préfident 
au  Parlement  de  Bretagne ,  fut  transféré  de  Leitoure  à  Vannes  , 
en  1 67 1  j  &  aflifta ,  la  même  année  ,  aux  Etats  de  Vitré. 

François  d'Argouges  ;  défigné  en  1689  j  facré  en  1692  ;  ap- 
prouva le  catéchifme  de  Gilles  de  Beauveau  ,  Evêque  de  Nantes  j 
afîifta  à  i'alTemblée  du  Clergé  de  Tours,  en  1699;  &  fut  un 
des  quarante  Evêques  qui  reçurent  la  Bulle  Unigenitus  ^  avec 
les  expUcations  y  jointes.  Il  pubUa  des  Statuts,,  aux  années  1693» 
1705,  &   1708  i  &  mourut  en   17 16. 

Louis  de  la  Vergne  de  Treffan,  premier  Aumônier  de  M» 
le  Duc  d'Orléans,  défigné  en  1716  ^  fut  transféré  à  Nantes 
en  1717, 


VAN=VAR  50J 

•"Jean-François-Paul  le  Fevre  de  Caumartin;  Doyen  de  Saint- 
Gatien  de  Tours ,  &  Abbé  de  Buzai  ;  nommé  en  1717;  facré  à 
Dinan  en  1 7 1 8 ,  en  préfence  des  Etats ,  par  l'Evêque  de  Saint- 
Malo  ;  fut  transféré  à   Blois ,  en  17 19. 

Antoine  Fagon ,  Abbé  de  Saint-Méen ,  Evêque  de  Lombez  ; 
fut  transféré  à  Vannes  en  171 9  ;  prêta  ferment  en  1730,  le  12 
Mai;  &   mourut  au  mois  de  Février   1742. 

Jean-Jofeph  de  Jumiliac ,  Abbé  de  Bonneval ,  Grand-Vicairé 
de  Chartres,  défigné  au  commencement  d'Avril  1742,  facré 
le    1 2  Août  fuivant  ;  fut  transféré  à  Arles  en  i  y 46. 

Charles-Jean  de  Bertin  j  facré  en  1746;  fut  député  au  Roi, 
par  les  Etats ,  en   1752. 

M.  Amelot ,  gouverne  aujourd'hui  le  diocefe  de  Vannes. 

VARADES  ;  fur  la  route  de  Nantes  à  Angers  ;  à  i  o  lieues 
trois  quarts  de,  Nantes ,  fon  Evêché  &  fon  rerfort  ;  à  2 1  lieues 
de  Rennes  j  &  à  2  Heues  deux  tiers  d'Ancenis ,  fa  Subdélcga- 
tion.  On  y  compte  3000  communiants  :  la  Cure  eu  à  l'Ordinaire  j 
&  le  Prieuré  de  Saint- Martin  eft  préfenté  par  l'Abbé  de  Mar- 
moutier.  Le  territoire ,  borné  au  Sud  par  la  rivière  de  Loire , 
coupé  par  un  bras  de  cette  rivière  ,  &  par  deux  autres  ruif- 
feaux  qui  coulent  dans  deux  vallons ,  offre  à  la  vue  un  pays  ri- 
che ,  très-bien  cultivé ,  des  champs  de  grains  ,  des  vignes  dont 
le  vin  eft  de  bonne  qualité,  &  de  très-belles  prairies.  La  falu- 
brité  de  l'air  &  la  beauté  du  pays  ajoutent  encore  à  l'agrément 
de  ce  féjour  ,  dont  les  habitants  n'ont  point  à  envier  le  lort 
de  leurs  voifins. 

Ce  pays  ed  fort  peuplé  de  villages  ou  hameaux  ;  S:  l'on  y 
voit  pluneurs  maifons  de  remarque  ,  qui  font;  le  Château,  le 
Coteau  ,  l'Auvriere ,  la  Blancherie ,  la  Baffe-Boutiere  ,  le  Jar- 
tier ,  la  Haute-Boutiere ,  l'Epinay  ,  la  Fichctrie ,  l'Hopitcau ,  le 
Doucet ,  &  la  Boultiere-Lon. 

Le  Prieuré  de  Rieux  exiftoit  dès  1400.  Il  n'y  avoit  alors  aucune 
maifon  noble  dans  le  territoire  de  Varades.  Quiriac  ,  Evêquè 
de  Nantes,  étant  à  Tours,  ratifia  de  nouveau,  mais  pour  fa  vie 
feulement ,  la  donation  que  Rodoald  ou  Rouaud  leur  avoit  faite  de 
l'Eglife  de  Saint-Pierre  de  Varades ,  fans  le  Picsbytérat ,  c'eft- 
à-dire ,  fans  le  patronage  ou  la  nomination  du  Prêtre.  Voilà  le 
plus  ancien  titre  qu'on  ait  trouvé ,  pour  conftatcr  lexiftencc  de 
cette  Paroiffe.  L'an  1 1  20  ,  Briand  ,  Seigneur  de  Varades ,  exempta 
les  effets  des  Moines  de  Marmouticr,  des  droits  qui  lui  ctoicnt 


504  VAR=VER 

dus  par  toutes  les  marchandifes  qui  pafToient  fur  la  Loire. 
Olivier ,  fils  de   Briand ,  Seigneur   de  Varades ,  confirma ,  l'an 

1150,  à  l'Abbaye  de  Marmoutier,  la  pofTeffion  de  l'Eglife  de 
Varades.  Les  Moines ,  alors  très-puiffants  ,  prétendirent  que  cette 
Eglife  étoit  indépendante  de  la  Jurifdiftion  de  Bernard  ,  Evêque 
de  Nantes,  ci-devant  Moine  de  Cîteaux.  Le  Prélat,  qui  fça- 
voit  bien  que  l'Inftitut  de  Clairvaux  n'approuvoit  pas  ces  fortes  d'in- 
dépendances ,  leur  réfilla  fortement ,  &    l'emporta   fur   eux    en 

11 51.  L'an  II 96,  André  de  Varades  légua  ,  par  fon  teftament , 
vingt  fols  ,  pour  la  réparation  ou  reconllruftion  de  l'Eglife  de 
Varade  ;  neuf  fols,  aux  Moines  qui  la  deffervoient  j  &  dix  fols^ 
pour  bâtir  la  Chapelle  de   Saint-Audouin. 

Le  10  Décembre  1591  ,  les  Capitaines  Quinipili  &  Camors^ 
arrivèrent  à  Varades ,  avec  leurs  troupes  &  du  canon ,  d'où  ils 
partirent  le  lendemain ,  pour  aller  affiéger  l'Abbaye  de  Saint-Florent» 
le-Vieil  ,  de  l'autre  côté  de  la  Loire  ,  où  le  Roi  Henri  IV 
avoir  placé  une  garnifon  de  trente-fix  hommes.  Cette  place  fut 
prife ,  le  13  du  même  mois  ;  &  les  vainqueurs ,  ufant  avec 
barbarie  de  leur  viftoire ,  firent  pendre  le  Capitaine  & 
fa  Garnifon.  J'ignore  quel  motif  les  porta  à  cet  excès  d'inhu» 
inanité. 

VAY  ;  à  7  lieues  deux  tiers  au  Nord-Nord-Oueft  de  Nantes , 
fon  Evêché  &  fon  reffort  j  à  14  lieues  un  tiers  de  Rennes  -,  & 
à  2  lieues  de  Blain  ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  1700 
communiants  :  la  Cure  eft  à  l'Ordinaire  j  mais  l'Abbé  de  Saint- 
Gildas-des-Bois  s'en  prétend ,  mal-à-propos ,  le  préfentateur.  Le  ter- 
ritoire ,  d'une  fuperficie  plane  ,  &  couvert  d'arbres  &  buifTons ,, 
renferme  des  terres  en  labeur  &  des  landes  très-étendues.  On  y 
remarque  la  maifon  noble  de  la  Sinerai. 

VENEFLE  ;  à  3  lieues  &  demie  au  Sud-Eft  de  Rennes ,  fon 
Evêché,  fa  Subdélégation,  &  fon  reffort.  On  y  compte  30a 
communiants  :  la  Cure  efl  à  Talternative.  Le  territoire ,  baigné 
des  eaux  de  la  rivière  de  Seiche  &  de  plufieurs  ruiffeaux,  eft 
couvert  d'arbres  &  builTons  ,  &  en  même  temps  rempli  de 
marais. 

VERGEAL;  à  7  lieues  &  demie  à  l'Efl  de  Rennes  ,^  (01^ 
Evêché  &  fon  reffort  j  &  à  2  lieues  un  quart  de  Vitré,  fa 
Subdélégation.  On    y  compte   600   communiants  :  la    Cure    efl: 

préfentée 


VER  ,05 

prefentée  par  M.  de  Châteaugiron.  Ce  territoire  ,  d'une  Tuperficie 
plane  ,  û  vous  en  exceptez  deux  vallons  ,  ei\  très-fertile  &  très- 
bien  cultivé.  On  y  remarque  plufieurs  mailbns  ,  içavoir  ;  le 
grand  Mesbiers  ,  avec  un  bois  ;  le  petit  Mesbiers ,  la  Prix  ,  l'Hô- 
tel-Pavi ,  Crozet,  le  haut  Préamenu,  Loilbnniere  ,  &  la  Guenaifle. 

VERN  ;  fur  la  route  de  Rennes  à  Chateaubriand  ;  à  2  lieues 
de  Rennes  ,  fon  Evêché ,  fa  Subdélégation  ,  Ôc  fon  relîbrt.  On 
y  compte  1500  communiants  :  la  Cure  eft  prefentée  par  l'Abbé 
de  Saint-Melaine.  Le  territoire  ,  couvert  d'arbres  &  builTons, 
offre  à  la  vue  un  bois  taillis,  nommé  de  Seuves,  qui  peut  avoir 
deux  Heues  de  circuit.  On  trouve  ,  en  plufieurs  endroits ,  de  l'ar- 
gile de  différentes  couleurs  :  elle  ei\  douce  &  très-favonncufe.  En 
1420  ,  il  renfermoit  plufieurs  mailbns  nobles  ;  le  Pleffis  de  Vern  ,  à 
Honorée  de  Montboucher ,  Dame  du  Pleffis  de  Vcrn  ;  la  Touche 
&  le  Boille  ,  à  Guillaume  de  la  Touche  ;  la  V'illc-Gaff ,  à  Jean 
de  la  Motte  ;  le  Pleffi$-Hamelin  ,  à  Raoul  du  Pleffis-Hamelin  ; 
Mouille-Muffe ,  à  Agaiffe  d'Acigné  ;  Lcffard  ^  à  Jean  Leffard  ; 
le  Gandon  ,  à  Jean  Pellerin  y  Sieur  de  la  Rivière  ;  la  Houffiere, 
à  Hervé  de  la  Touche  ;  la  Rivière ,  à  Honoré  Uguet,  Archidiacre 
du  Defert  ;  la  Gaillardicre  ,  à  N.,..  j  le  Clos  d'Orriere,  à  Pierre 
de  la  Touche  ,  Pré-Auvé  ;  à  Jean  du  Pré-Auvé  :  Peillac  ,  le 
Tertre,  Mefmuffet  du  Fucel,  les  Bœufs  &  Launai ,  à  N...  Dans 
le  treizième  (iecle  ,  il  y  avoir  fur  la  rivière  de  Seiche  ,  qui  coupe 
ce  territoire  ,  un  pont ,  nommé  de  Maugon  ,  fur  lequel  étoit 
établi  un  devoir  de  coutume.  Le  28  Avril  1304,  Robert  Ra- 
guenel ,  Chevalier,  fonda  un  obit  ,dans  la  Cathédrale  de  Rennes, 
&  affigna  ,  pour  l'acquit  de  cette  fondation,  trente  lois  de  rente, 
à  prendre  iiir  les  revenus  de  ce  pont.  Son  époufe  ,à  fon  exemple, 
fit  une  fondation  femblable  ,  avec  les  mêmes  conditions.  Le 
Prieuré  de  Vern  étoit  alors  affermé  trente-quatre  livres  dix  fols. 
En  1 3 18  ,  l'Evêque  de  Rennes  fit  un  règlement  pour  l'établiffement 
d'un  Vicaire  perpétuel  dans  l'Eghfe  de  Vern,  alors  deffcrvie  par 
des  Moines    de   Saint-Melaine. 

Le  24  Juillet  1589  ,  les  troupes  du  Duc  de  Mcrcccur  rava^ 
gèrent  la  Paroiffe  de  Vern  ;  les  foldats  fe  portèrent  à  tous  les 
excès  de  la  brutalité.  Le  viol ,  le  carnage  ,  &  le  pillage  ,  réduî- 
iîrent  cette  Paroiffe  dans  le  plus  déplorable  état.  Le  6  Mai ,  elle 
effuya  le  même  traitement  des  troupes  Efpagnoles  ,  qui ,  après 
avoir  affouvi  Lur  rage  ,  mirent  le  feu  à  ciuclqucs  maifons  du 
bourg,  &  brûlèrent  entièrement  le  village  ac  la  Vallée. 
Tome   IK^  S  3, 


jo^  VER 

VERTOU  ;  fur  une  hauteur  ;  à  i  lieue  trois  quarts  au  Sud- 
Eft  de  Nantes ,  fon  Evêché ,  fa  Subdélégation ,  &  fon  refTort  ; 
&  à  23  lieues  trois  quarts  de  Rennes.  Cette  ParoifTe  relevé  du 
Roi,  &  compte  4400  communiants  :  la  Cure  efi:  préfentée  par 
l'Abbé  de  SaintJouin  de  Marne.  La  Chapellenie  de  Mifîire 
Gabriel  Bretonneau ,  préfentée  par  la  famille ,  doit  une  MelTe 
par  femaine.  Ce  territoire  ,  baigné  des  eaux  de  la  rivière  de 
Sevré  ,  eft  d'une  grande  étendue  :  il  renferme  des  terres  en 
labeur  de  bonne  qualité  ;  beaucoup  de  vignes ,  dont  le  vin  n'eft 
pas  mauvais  -,  quelques  bois  de  peu  d'étendue  -,  &  des  landes 
qui  mériteroient  d'autant  mieux  d'être  cultivées  que  le  fol  en  paroît 
bon  ,  &  qu'elles  font  aux  portes  de  Nantes  &  fur  les  bords  de 
la  Sevré ,  qui  porte  bateaux  j  mais  l'indolence  eft  générale  en 
Bretagne. 

L'Eglife  paroifliale  de  Vertou  fert  au  Refteur  &  aux  Moines. 
Elle  ell  furmontée  de  deux  clochers  ,  dont  un  pour  la  Pa- 
roifTe ,  &  l'autre  pour  l'Abbaye ,  qui  eft  de  l'Ordre  de  Saint- 
Benoît.  Ce  Monaftere  doit  fon  exiftence  à  Saint  Martin  de 
Vertou  ,  difciple  de  Saint  Félix ,  Evêque  de  Nantes ,  vers 
l'an  550.  Ce  Saint,  après  plufieurs  voyages  en  différents  pays, 
où  il  fe  fit  remarquer  par  le  fuccès  de  fes  prédications ,  de  retour 
à  Nantes  ,  Heu  de  fa  naiffance ,  éleva,  dans  la  forêt  duMenne, 
un  petit  Oratoire  ,  où  il  fe  retira.  Quelques  folitaires  s'étant  joints 
à  lui ,  ils  bâtirent  une  Communauté  dans  le  lieu  le  plus  reculé  de 
cette  forêt  ,  appelle  Kenaw  ,  depuis  nommé  Vertou ,  où  il 
établit  une  règle  particuhere ,  qu'il  avoir  apportée  d'ItaUe.  Sa 
réputation  lui  attira  un  fi  grand  nombre  de  Difciples,  que  ce 
Monafiere  ne  pouvant  fuffire  à  loger  plus  de  trois  cents  Reli- 
gieux ,  il  fut  obligé  d'en  édifier  un  autre  dans  l'endroit  nommé 
Durin  ,  que  l'on  appelle  préfentement  Saint-Georges  de  Montaigu, 
à  fept  heues  de  Nantes ,   fur  la  route  de  la  Rochelle. 

L'an  1105  ,  Bricius  étoit  Abbé  de  Vertou  &  de  Saint- Jouin. 
Raoul,  qui  lui  fuccéda ,  ayant  fixé  fa  demeure  à  Saint- Jouin, 
l'Abbaye  de  Vertou  ne  fut  plus  gouvernée  que  par  des  Prépofés, 
qui  lui  ont  fiiit  donner  le  nom  de  Prévôté,  Dans  le  commence- 
ment de  leur  inftitution ,  ces  Prévôts  furent  amovibles ,  comme 
le  font  aujourd'hui  quelques  Prieurs;  mais ,  dans  la  fuite,  cette 
Prévôté  prit  une  confifi:ance  fixe  ,  &  le  Prévôt  ,  devenu  inamo- 
vible, jouit  de  toute  l'autorité  des  anciens  Abbés. 

A  la  mort  du  Cardinal  d'Avignon  ,  Prévôt  de  Vertou ,  en 
1 474 ,  le    Pape  Sixte  IV ,  écrit  au  Duc  François  II ,  &  le  prie 


VER  . 

d'agréer  que  le  Cardinal ,  neveu  de  Paul  II ,  folt  pourvu  de 
cette  Prévôté.  Le  Pontife  ,  qui  defiroit  ardemment  réuflir  dans 
ce  deffein  ,  &  qui  fçavoit  cependant  bien  qu'il  n'y  réuffiroit 
que  difficilement  ,  parce  que  François  II  refuibit  conihmmcnt 
de  donner  les  Bénéfices  de  fes  Etats  à  des  étrangers ,  ufe  de 
beaucoup  d'adrelTe,  &  tient  au  Duc  les  diicours  les  plus  flat- 
teurs ,  pour  arracher  fon  confentement.  Il  ell  à  préiumcr  que  les 
lettres  du  Pape  ,  &  les  belles  paroles  de  fon  Envoyé ,  gagnè- 
rent le  Prince  ,  qui ,  dans  le  courant  de  la  même  année  ,  en- 
voya au  Pontife  une  ambaflade  folemnelle ,  pour  l'aflurcr  de 
fa  parfaite  foumifllon  à  l'Eglife.  Sixte  IV  lui  fçut  gré  de  cette 
démarche,  &  publia  les  lettres  que  le  Prince  lui  avoir  écrites, 
en  rendant  un  témoignage  éclatant  à  fa  piété.  C'ell  ainfi  que 
les  Papes  retenoient  les  Princes  dans  l'efclavage  ,  par  des  louanges 
données  à  propos  &  avec  prudence  &  réferve  ,  6c  par  des  pour- 
fuites  vives  contre  ceux  qui  manquoient  à  l'Eglife.  Ce  fut  par 
cette  foumiffion  refpeftueufe  que  le  Duc  gagna  les  bonnes  grâces 
du  Pontife  ,  qui  ,  pour  le  récompenfer  de  fa  docilité,  lui  ac- 
corda ,  en  1475,  ""^  faveur  fînguHere  j  c'éroit  de  ne  pouvoir 
être  excommunié  par  d'autres  que  par  le  Pape  :  il  joignit  à 
cette  grâce  la  permiffion  de  faire  conflruire  une  fortereffe  fur 
les  terres  de  l'Evêque  de  Saint-Malo ,  moyennant  un  dédom- 
magement envers  le  Prélat;  il  lui  fit  témoigner,  dans  le  même 
temps ,  combien  il  defiroit  que  le  Cardinal  jouît  de  la  Prévôté 
de  Vertou  ,  qu'il  lui  avoit  donnée  en  commende.  Le  Pape 
avoir  été  fî  content  de  Bertrand  Millou ,  l'un  des  Ambafllideurs 
du  Duc ,  à  Rome  ,  que ,  pour  lui  témoigner  fa  fatisfaftion ,  il 
lui  donna  un  morceau  de  la  vraie  Croix.  Ce  trait  fait  l'éloge 
de  Bertrand.  Sixte  IV  étoit  un  des  hommes  les  plus  éclairés  de 
fon  (lecle ,  un  grand  Prince  ,  un  grand  Pape ,  &  il  fçavoit  ap- 
précier le  mérite.  François  II  ,  qui  lui  avoit  demandé  un  cha- 
peau de  Cardinal  pour  Pierre  de  Foix ,  Evêque  élu  de  Vannes, 
fon  beau-frere ,  re^jUt  ,  a  ce  fujet ,  la  réponfe  la  plus  Jatisfai- 
fante ,  qui  ne  tarda  pas  à  avoir  fon  eilet.  Malgré  toutes  ces 
grâces ,  le  Duc  ne  laiiïbit  pas  perdre  fes  droits  &  fcs  privi- 
lèges, &,  dans  le  cours  de  cette  année,  il  rendit  une  Ordon- 
nance ,  qui  portoit  défenle  à  toute  perfonne  ,  de  quelque 
qualité  qu'elle  fût  ,  de  publier  des  Bulles  &  Mandements 
apoftoliques ,  avant  de  les  avoir  montrés  au  Confeil ,  &:  fans 
fa  permifîion  ,  fous'  peine  de  banmircmciu  &  de  conlU'cauon 
de  tous  fes  biens. 


5o8  VER=VEU 

On  affure  que  la  table  de  marbre ,  de  dix  pîeds  de  longueuf 
fur  quatre  de  largeur ,  qui  eft  dans  l'Eglife  de  Vertou ,  eft  la 
même  qui  fervoit  à  Saint  Martin  pour  célébrer  l'Office  divin. 
En  1700,  on  voyoit  encore,  dans  le  cloître  du  Couvent,  un  arbre 
que  les  gens  de  la  campagne  revéroient  au  point  qu'ils  s'elli- 
moient  heureux  d'en  polTéder  une  branche.  Ce  refpeo:  extraor- 
dinaire venoit  de  l'opinion  reçue  dans  le  pays ,  &  qui  fe  con- 
fervoit  par  tradition.  On  penfoit  que  Saint  Martin ,  quittant  Ver- 
tou pour  fe  rendre  à  Saint-Georges  de  Montaigu ,  avoit  planté 
en  terre  fon  bâton  ,  qui  avoit  pris  racine  &  avoit  formé  cet 
arbre ,  qui  exiftoit  depuis  près  de  mille  ans.  Je  ne  fçais  s'il  a 
été  abattu ,  ou  s'il  eft  tombé  de  vétufté  :  dans  le  premier  cas  , 
je  fuis  perfuadé  que  les  payfans  auront  murmuré  contre  les 
Moines. 

Arrêt  du  Confeil ,  du  2  Juin  1750,  qui  permet  aux  Religieux 
de  Vertou  de  conftruire  une  éclufe  fur  la  chauffée  de  Vertou  , 
avec  établiffement  de  droits  pour  la  conftruftion  &  entretien  de 
cette  éclufe. 

La  Ramée  ,  moyenne-Juftice ,  appartenoit,  en  1390,  à  N.  des 
Ramées  &  de  Biofîac  :  la  Prévôté  de  Vertou,  avec  haute-Juftice , 
à  M.  le  Prévôt  ;  la  Maillardiere  ,  haute-Juftice,  à  M.  de  Coëffal  j 
Goyon ,  à  M.  de  Kergus  de  Kerftang. 

VEUE  j  fur  la  route  de  Nantes  à  Paimbœuf,  &  fur  la  rivière 
du  Tenu  ;  à  6  lieues  de  Nantes ,  fon  Evêché  &  fon  reffort  ;  à 
23  Heues  de  Rennes  ^  &  à  4  lieues  &  demie  de  Bourgneuf,  fa 
Subdélégation.  On  y  compte  1 200  communiants  :  la  Cure  eft  à 
l'Ordinaire.  Ce  territoire  offre  à  la  vue,  des  marais,  des  prairies, 
des  terres  en  labeur ,  quelques  vignes  ,  &  peu  de  bois  ;  c'en:  un  des 
meilleurs  du  Comté  Nantais.  La  rivière  du  Tenu  ,  qui  vient  du  lac 
de  Grand-Lieu  &  qui  va  fe  jetter  dans  la  Loire,  procure  aux  habi- 
tants la  facilité  de  faire  pafTer ,  par  eau ,  leurs  denrées  à  Nantes 
&  à  Paimbœuf.  Il  y  a  dans  l'endroit  une  manufacture  de  briques. 

Veuë  avoit  autrefois  le  titre  de  ville.  Le  Roi  Raoul  ,  qui 
mourut  l'an  936  ,  prit  fon  château  ,  que  quelques  Seigneurs  d'A- 
quitaine occupoient  injuftement ,  &  le  rendit  à  Geffroi ,  à  qui 
il  appartenoit.  Un  petit  livre ,  fait  fur  les  monnoies  de  Breta- 
gne ,  par  un  Prêtre  de  l'Evêché  de  Nantes ,  nous  a  confervé 
la  defcription  d'une  monnoie  frappée  à  Veuë.  C'eft  un  tiers  de 
fol  d'or,  avec  une  tête  ceinte  du  diadème  perlé,  les  houpes 
pendantes  ,  une  groffes   perle  ou  pierre  précieufe  fur  le  front. 


I 


VEU  =  VIE  J09 

jpour  légende,  Viriliacof j^omï  fit  ;  de  l'autre  coté  une  +,  & 
pour  légende  Fridericomon,  Cette  monnoie  eft  vraifemblablement 
du  Comte  Théodoric ,  fils  de  Budic  ,  Comte  de  Vannes ,  vers 
570.  Viriliac  ,  dans  rÀquitaine ,  eft  le  Fort  où  il  fe  retira,  lorl- 
ue  Macliau ,  Comte  de  Vannes ,  qui  cherchoit  à  fe  défaire 
e  lui  pour  envahir  fon  petit  Etat ,  l'eût  obligé  de  s'éloigner. 
Ces  mots,  ViRiLiACO  fitu ,  que  Bouterouë  rend  par  Vinliaco 
fitur ,  fe  rendent  ,  ce  me  femble  ,  beaucoup  mieux ,  par  Virillaco 
fit  urbe ,  ou  Virillaco  fit  in  turre  :  monnoie  du  Comte  Théodoric  , 
fabriquée  dans  la  ville  ou  château  de  Viriliac.  Le  Comte  Geof- 
froi ,  fils  de  Henri  II ,  Roi  d'Angleterre  ,  afligna ,  à  perpétuité , 
aux  Religieux  de  Buzai ,  vingt  livres  Angevmes  d'aumône  an- 
nuelle ,  à  prendre  fur  les  moulins  de  Veuë.  Ces  moulins  &:  ceux 
de  Pilon,  furent  détruits  l'an  1534,  lorfqu'on  voulut  dcflecher 
le  lac  de  Grand-Lieu.  Pendant  les  troubles  de  la  Ligue ,  cette 
ville ,  qui  tenoit  pour  le  Roi ,  fut  afîiégée  par  le  Seigneur  de 
Goulaine ,  qui  n'eut  pas  beaucoup  de  peine  à  la  foumettre  à 
l'obéifTance  du  Duc  de  Mercœur.  Celui-ci  fit  rafer  les  fortifica- 
tions de  cette  petite  place. 

En  1400,  le  manoir  de  la  Blanchardaie  appartenoit  au  Sieur 
de  la  Blanchardaie  ;  cette  Terre  ,  qui  a  haute-Jufl:ice ,  appartient 
préfentement  à  M.  Danguy.  En  1400,  Jean  Proais  étoit  Châte- 
lam  &:  Receveur  de  Veuë. 

VEZIN  ;  fur  la  route  de  Rennes  à  Montfort  5  à  i  licue  de 
Rennes  ,  fon  Evêché  ,  fa  Subdélégation ,  &  fon  refTort.  Cette 
Paroifle  relevé  du  Roi,  &  compte  500  communiants  :  la  Cure 
eft  préfentée  par  un  Chanoine  de  l'Eglife  Cathédrale.  Le  terri- 
toire ,  d'une  fuperficie  plane  &:  couvert  d'arbres  &  buiffons  ,  cfl 
très-bien  cultivé,  &  produit  des  grains  &  du  cidre.  En  1400, 
ce  territoire  renfermoit  les  maifons  nobles  fuivantcs  :  Louzcret , 
à  Jean  de  Beaulieu  ;  Montigné  ,  à  Jean  Ragucncl  ;  le  Bas-Vezin  , 
à  Pierre  de  Marbré  ;  le  Memennicr ,  à  Guillaume  le  Vaycr  : 
le  Domaine  de  Lozoret  &  la  Motte  de  Chevilli ,  à  Pierre  de 
Beaucé. 

VIEILLEVIGNE  ;  à  6  lieues  au  Sud-Sud-Ell  de  Nantes ,  foit 
Evêché  &  fon  reflbrt  j  à  28  lieues  de  Rennes;  &:  à  3  lieues 
un  tiers  de  CHflbn  ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  6000  com- 
muniants :   la  Cure  efl:  en   la  prcfcntation  de  l'Abbé  de Le 

territoire ,  d'une    fuperficie  prefquc    plane    6c    baigné    des  eaux 


5,0  VIE 

de  la  rivière  de  l'Oignon  &  de  celle  de  Lifoire ,  offre  à  la  vue 
des  terres  en  labeur  de  bonne  qualité ,  des  prairies ,  des  vignes 
dont  le  vin  n  eft  pas  très-excellent ,  quelques  bois  de  futaie  Se 
taillis  de  peu  d'étendue ,  &  des  landes  très-vaftes ,  dont  le  fol 
paieroit ,  fans  doute ,  les  peines  que  l'on  prendroit  de  les  cul- 
tiver. Les  habitants ,  très-peu  aftifs ,  vivent  dans  l'indolence  & 
la  mifere.  Jamais  l'émulation  ne  leur  fit  rien  entreprendre  pour 
leur  bonheur.  Des  fix  mille  habitants  qui  peuplent  cette  Pa- 
roiffe ,  environ  douze  à  quinze  cents  vivent  dans  une  aifance 
médiocre  :  deux  mille ,  peut-être ,  s'occupent  de  l'agriculture  j 
&  le  relie  fe  borne  à  faire  des  coutils  ,  efpece  de  toiles  à 
rayes  blanches  &c  bleues ,  qui  fert  à  faire  des  lits ,  &  dont  il  fe 
fait  une  confommation  prodigieufe  j  mais  ils  ne  tirent  de  ces 
toiles  qu'un  profit  très  -  médiocre  ,  incapable  de  leur  procurer 
un  bien-être.  Il  fe  tient  un  marché,  tous  les  lundis  ,  dans  le  bourg, 
&  quatre  foires  par  an.  le  Roi  y  polTede  des  fiefs.  Le  châ- 
teau de  Vieille  vigne  ,  avec  haute-Jufticé  &  titre  de  Châtellenie,, 
appartient  à  M.  le  Marquis  de  Juigné  ,  Maréchal  des  Camps  6c 
Armées  du  Roi.  En  1564  ,  il  y  avoir  à  Vieillevigne  un  Pafleur 
Calvinifle.  Le  Roi  Louis  XIII  partit  de  Nantes  ,  le  12  Avril 
1622,  &  fut  coucher  à  Vieillevigne,  où  Sa  Majefté  étoit  at- 
tendue par  fîx  mille  hommes  de  pied  &  cinq  cents  chevaux, 
La  maifon  &  terre  noble  de  Laudonniere  appartient  à  M.  le 
^Marquis  de  Goulaine ,  chef  de  la  branche  cadette  de  cette  il- 
luflre  famille  -,  branche  aujourd'hui  devenue  rainée,par  l'extmftion 
de  la  première  ,  qui  s'eft  confondue  avec  celle  de  Rofmadec. 
Une  autre  branche  des  Goulaine  s'efl  étabhe  dans  le  Poitou. 
La  Seigneurie  de  Lécorce  appartient,  à  Madame  veuve  le 
Maignan  :  le  Marchaix  ,  à  M.  le  Maignan  de  Lécorce  j  &  la 
Pilotiere ,  à  M.  de   Charbonneau. 

VIEUVIEL  5  à  9  lieues  trois  quarts  au  Nord  de  Rennes ,  fort 
Evéché  j  &  à  I  Heue  trois  quarts  d'Antrain ,  fa  Subdélégation» 
Cette  Paroiffe  refTortit  à  Bazouges,  &  compte  600  commu- 
niants :  la  Cure  efl  à  l'alternative.  Le  territoire  produit  des 
grains  &  des  fruits.  La  haute -JulHce  de  Brehand  appartient  à 
M.  Menard  de   Touchepret. 

VIEUXVI  SUR  COUESNON  ;  à  6  lieues  au  Nord-Nord-Efî 
de  Rennes  ,  fon  Evêché  ;  &  à  2  Heues  deux  tiers  d'Antrain,  fa 
Subdéiégation.  Cette  Paroiffe  relevé  du  Roi  j^relTortit  à  Bazouges^, 


VIE  =  VIL  jii 

Se  compte  950  communiants  :  la  Cure  eH:  à  lalternatlve.  Ce 
territoire,  arrofé  des  eaux  de  la  rivière  de  Couefnon,  ik  cou- 
vert d'arbres  &  buiflbns ,  offre  à  la  vue  des  terres  en  labeur 
de  bonne  qualité,  les  bois  de  Sève  8c  de  la  Mirardais.  La  haiitc- 
Juftice  d'Orange  appartient  à  M.  de   la  Blinaye. 

yiGNEUX  ;  à  4  lieues  au  Nord-Oueft  de  Nantes ,  fon  Evé- 
ché  &  fon  relîbrt  ;  à  1 9  lieues  de  Rennes  ;  &:  3  lieues  &  de- 
raie  de  Blain  ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  2000  commu- 
niants ,  y  compris  ceux  de  la  Pâclais ,  fa  trêve  :  la  Cure  eli:  à 
l'Ordinaire.  Le  territoire  ,  arrofé  de  plufieurs  ruiffeaux ,  &:  d'une 
fuperficie  plane ,  offre  à  la  vue  des  terres  en  labeur  ,  des 
landes  très-étendues,  &  très-peu  de  prairies.  La  pierre  de  grains 
s'y  trouve  en  abondance.  La  carrière  de  la  Roche  eft  la  plus 
confidérable.  Les  Architeftes  de  Nantes  en  tirent  beaucoup  de 
pierres,  fur-tout,  pour  les  marches  d'efcaliers ,  les  foyers,  & 
les  fourneaux  des  cuifines.  En  1^57,  la  Dame  de  Vigneux 
obtint  un  marché ,  qui  devoit  fe  tenir  en  cette  Paroiffe  ;  mais 
la  Communauté  de  ville  de  Nantes  s'y  oppofa ,  &:  le  fit  fup- 
primer.  Le  Buron  Se  les  Bretonnieres  font  les  deux  maifons 
feigneuriales  de  cette  Paroiffe ,  dont  M.  le  Duc  de  Rohan  ell 
Seigneur  fupéricur.  La  première  de  ces  maifons  ,  avec  celle 
de  la  Joue  ,  forme  une  haute-Juftice ,  qui  appartient  à  M.  du 
Breil  du  Buron.  Le  village  de  la  Boiffiere  relevé  du  Chapitre 
de   l'Eglife  Cathédrale  de  Nantes. 

VIGNOC;  à  4  lieues  au  Nord-Nord-Oucff  de  Rennes,  fon 
Evêché  j  &  à  I  lieue  de  Hédé,  fa  Subdélégation  &c  fon 
reffort.  Cette  Paroiffe  relevé  du  Roi ,  &  compte  900  commu- 
niants :  la  Cure  eft  préfentée  par  l'Evêque  de  Rennes,  en  fa 
qualité  d'Abbé  de  Saint-Melaine.  Ce  territoire  ,  coupé  de  ruif- 
feaux  &  d'une  fuperficie  prefque  plane  ,  produit  des  grains  6c 
du  cidre.  La  haute-Juffice  de  Montbourcher  appartient  a  M.  de 
Coigni.  En  1420,  fes  maifons  nobles  étoient  :  Claire-Fontaine, 
Gralfe-Vache  ,  le  Fail ,   &  les  Roncerais. 

VILLA MÉE  ;  fur  une  hauteur  ;  à  1 1  lieues  au  Nord-Eff  de 
Rennes ,  fon  Evêché  ;  &:  à  2  lieues  &  demie  de  Fougères ,  fa 
Subdélégation  &  fon  reffort.  Cette  Paroiffe  relevé  du  Roi  ,  Se 
compte  ioco  communiants  :  la  Cure  eft  préfentée  par  l'Abbé 
du  Mont-Saint-Michel,  à  qui  cette  Eglife  fut  donnée  par  i'Evè- 


511  "^ÏI-  .  . 

que  de  Rennes  en  1050.  Ce  territoire  eft  varié  de  coteaux ^ 
vallons ,  &  monticules.  La  rivière  de  Beuvron  y  prend  fa  fource. 
Le  terroir  eft  bien  cultivé.  Outre  des  grains  de  toutes  efpeces , 
il  produit  d'excellents  pâturages  &  du  cidre. 

VILDÉ-BIDON  ;  fur  la  route  de  Dol  à  Dinan  ;  à  i  Heue  de 
Dol ,  fon  Evêché  &  fa  Subdélégation  j  &  à  i  o  lieues  &  demie 
de  Rennes.  Cette  Paroilîe  refTortit  à  Dinan ,  &  compte  3  50 
communiants  :  la  Cure  ell  préfentée  par  le  Commandeur  de  la 
Guerche.  Le  territoire  eft  marécageux  ,  mais  fertile  en  grains  5. 
&  abondant  en  foin  ^  pâturages,. 

VILDÊ-GUINGALAN  ;  fur  la  route  de  Dinan  à  Lamballe  j  à- 
5  lieues  de  Saint-Malo  ^  fon  Evêché;  à  10  lieues  &  demie  de 
Rennes  ;  &  à  i  lieue  un  quart  de  Dinan ,  fa  Subdélégation  & 
fon  refTort.  On  y  compte  450  communiants  :  la  Cure  eft  pré- 
fentée par  l'Abbé  de  Beaulieu.  Le  territoire  eft  d'une  fuperhcie 
plane ,  &  renferme  beaucoup  de  landes ,  dont  le  fol  ne  paroît 
pas  de  bonne  qualité. 

VILDÉ-LA-MARINE  ;  fur  la  route  de  Dol  à  Saint-Malo  ;  à  2 
lieues  de  Dol ,  fon  Evêché  &  fa  Subdélégation  j  &  à  1 2  lieues  & 
demie  de  Rennes,  fon  refTort.  On  y  compte  300  communiants  :  la 
Cure  eft  préfentée  par  le  Commandeur  de  la  Guerche.  Le  territoire 
eft  occupé,  au  Nord,  parla  grève  de  Cancalle  ,  remarquable  par 
la  belle  pêcherie  qu'on  y  a  établie  ;  le  refte  du  terroir  forme 
une  plaine  exaftement  cultivée  ,.  6c  coupée  par  la  rivière  de. 
Bied-Jea». 

VILLENEUVE  ;  Abbaye  de  FOrdre  de  Cîteaux  ;  à  2  lieues 
un  tiers  au  Sud  de  Nantes,  fon  Evêché  j  &  à  24  lieues  un  tiers 
de  Rennes.  En  11  53,  Hoël ,  Comte  de  Nantes ,  donna  le  terri- 
-îoire  de  Villeneuve  à  l'Abbaye  de  Buzai ,  &  la  DuchefTe  Conf- 
iance,  ayant  fondé,  dans  cet  endroit,  nommé  ia  Grange  Je 
Conmaria  ^  une  Abbaye  dont  elle  fit  conftruire  les  édifices, 
une  colonie  de  Mornes  fortit  de  Buzai,  le  25  Mars  1200,  pour 
aller  prendre  pofleflion  du  nouveau  Couvent  qui,  fe  trouvoit 
renfermé  dans  la  forêt  de  Touffou ,  qui  étoit  alors  d'une  grande 
étendue.  Dans  la  fuite ,  la  fituation  de  cette  Abbaye  ne  fe 
lïouyant  pas    convenable  ^   elle    fut    tranfportée    où    elle    eft 

aujourd'hui 


aujourdhui,  par  Gui  de  Thouars,  qui  donna  un  autre  fonds,  en 
1205.  La  DuchefTe  Confiance  étoit  morte  dès  1201  ,  &  avoir 
demandé  d'être  inhumée  dans  l'Abbaye  qu'elle  avoir  fondée.  Ses 
dernières  volontés  furent  exécutées,  &  la  cérémonie  de  tes  fu- 
nérailles fut  faite  par  l'Archevêque  de  Tours  ,  afîiilé  de  tous 
les  Evêqucs  de  la  province.  Les  Prélats  fe  rendirent  enfuite  à 
Nantes,  oii  ils  s'aflemblerent  en  Concile.  L'an  1203,  Huo-ues, 
Seigneur  de  Montaigu  ,  accorda  aux  iVloincs  de  Villeneuve  ,  le 
droit  de  tenir  une  ïoire  par  chaque  année.  En  1224,  les  Evê- 
ques,  Etienne  de  Nantes,  Guillaume  d'Angers,  Joflelin  de  Rennes, 
Robert  de  Vannes ,  Hainauld  de  Quimper  ,  Raoul  de  Saint- 
Malo ,  Geoffroi  de  Tréguier,  Jean  de  Léon,  &  Guillaume  de 
Saint-Brieuc  ,  s'afîémblent  à  Villeneuve  ,  Si.  dédient  l'Eghfe  de 
ce  Couvent  en  l'honneur  de  Dieu  ,  de  la  Sainte  Vierge ,  &  de 
tous  les  Saints  dont  les  Reliques  étoient  dans  ce  Heu.  Le  même 
jour ,  furent  enterrés  la  Duchefle  Conllance ,  Gui  de  Thouars  , 
fon  époux ,  &  Alix  ,  leur  fille ,  en  préicnce  de  douze  Abbés  de 
Cîteaux  ;  d'Aimeri  ,  Vicomte  de  Thouars  ;  d'Amauri ,  Vicomte 
de  Beaumont ,  Sénéchal  d'Angers  ;  d'André ,  Seigneur  de  Vitré  ; 
&  de  pluiieurs  Barons  &  Seigneurs.  Les  trois  corps  avoient  été 
dépofés  dans  une  Chapelle  de  ia  mailbn ,  en  attendant  que 
l'Eghfe  fut  finie» 

VILLEPOT  ;  dans  un  fond  ;  ^  i  o  heues  un  tiers  au  Sud-Ell 
de  Rennes ,  fon  Evêché  &  fon  refTort  ;  &  à  2  Ueues  trois  quarts 
de  Chateaubriand ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte  1 200  com- 
muniants :  la  Cure  efl  préfentée  par  l'Abbé  de  la  Roë.  Ce  terri- 
toire, borné  à  l'tfl  par  la  province  d'Anjou,  &  d'une  luper- 
ficie  plane,  offre  à  la  vue  la  fource  de  la  rivière  de  Verzée, 
la  forêt  d'Araife  au  Nord  de  fon  bourg  ,  des  terres  en  labeur; 
&  au  Sud ,  une  lande  très-étendue  ,  qui  ,  peut-être  ,  ne  dépend 
pas  toute  entière  de  cette  Paroifl'e. 

Thomafîé  Babin  ,  époufe  de  Jean  de  Coëfmes ,  morte  en 
1333  ,  avoit  demandé,  par  teltamcnt,  d'être  inhumée  dans  TEglife 
de  Villepot ,  devant  l'Autel  de  Notre-Dame  ,  6c  en  conlccjucnce 
elle  légua  à  cette  Eglife  fbixante  fols  de  rente,  pour  l'acquit 
d'une  Meffe  qui  doit  le  dire ,  tous  les  premiers  lundis  de  chaque 
année  ,  par  le  Redeur  de  la  Paroille  :  elle  alfigaa  ,  en  outre , 
une  jaille  de  vin ,  de  rente ,  pour  la  communion  des  fid^'lcs  à  la 
fête  de  Pâques.  La  Vicomte  de  Fercé  ,  hautc-Jullice ,  appartient 
à  M.  du  Bois-Péan, 

TomcIK  T  3 


514  VIS=VIT 

VISSEICHE  ;  fur  la  route  de  Rennes  à  la  Guerche  ;  k  7  lieues 
un  tiers  de  Rennes,  fon  Evêché  &  fon  reflbrtj  &  à  i  lieue 
un  huitième  de  la  Guerche ,  fa  Subdélégation.  On  y  compte 
1300  communiants  ;  la  Cure  eft  préfentée  par  un  Chanoine  de 
l'Eghfe  Cathédrale  de  Rennes.  Le  territoire ,  coupé  par  la  rivière 
de  Seiche ,  &  d'une  fuperficie  affez  plane  ,  eft  couvert  d'arbres 
&  buifîbns  ;  il  offre  à  la  vue  des  terres  bien  cultivées.  L'an 
II 76,  Simon  de  Viffeiche  étoit  Seigneur  de  cette  ParoifTe.  En 
141 5  ,  Anne  d'Epinai,  Dame  de  Fontenaille  ,  demanda,  par 
teftament  ,  d'être  enterrée  dans  l'Eglife  de  cette  ParoifTe  ,  & 
ordonna  qu'il  feroit  dit  cinq  cents  Méfies  dans  cette  Eglife ,  pour 
le  repos  de  fon  ame. 

VITRÉ  j  aux  bords  de  la  Vilaine  &  fur  le  penchant  de  deux 
collines ,  par  les  3  degrés  3  3  minutes  de  longitude ,  &  par  les 
48  degrés  8  minutes  de  latitude  j  à  7  lieues  trois  quarts  à  l'Eft 
de  Rennes  fon  Evêché. 

Quatre  grandes  routes  aboutiffent  à  cette  ville,  qui  efl  confidé- 
rable  par  Ton  étendue ,  elle  efl  plus  longue  que  large ,  &  fe 
termine  d'un  bout  par  le  château ,  qui  eft  de  figure  triangulaire 
&  flanqué  de  trois  groffes  tours  fort  hautes  ,  dans  les  trois  an- 
gles ,  &  de  plufieurs  autres  moins  grofles ,  fur  les  côtés.  La  ville 
n'a  qu'un  fimple  mur  &  trois  portes.  On  y  remarque  une  Eghfe 
Collégiale  ;  trois  ParoifTes  ,  qui  font  :  Sainte-Croix ,  dont  la  Cure 
efl  à  l'Ordinaire  ;  Saint-Martin ,  dont  la  Cure  efl  à  l'alternative  ; 
Se  Notre  -  Dame ,  aufîi  à  l'alternative.  Les  Couvents  des  Béné- 
diftins ,  des  Auguflins ,  des  Jacobins ,  des  Récollets ,  des  Béné- 
diftines  ,  des  HofpitaHeres  ,  des  Urfuhnes  ,  &  l'Hôpital  5  une 
Maifon  de  retraite  ,  un  Collège  ,  une  Jurifdiftion  des  Traites  j 
une  Communauté  de  ville ,  avec  droit  de  députer  aux  Etats  de  la 
province  j  une  Subdélégation  ;  &  les  Pofles  aux  lettres  &  aux 
chevaux.  On  y  compte  8000  habitants.  Il  s'y  tient  un  marché 
le  lundi  de  chaque  femaine ,  Se  plufieurs  foires  par  an.  Ses  ar- 
mes font  de  gueules  au  lion  d'argent.  Il  s'y  exerce  plufieurs 
Jurifdiftions  -,  fçavoir  :  la  Baronnie  de  Vitré  ,  haute  -  Juflice  ,  à 
M.  le  Duc  de  la  Trimouille  -,  cette  Jurifdiftion  refîbrtit  direfte- 
ment  au  Parlement,  comme  haute  -  Baronnie  de  la  province, 
donnant  le  droit  de  préfider  aux  Etats:  les  Traites  Se  Gabelles, 
haute- Juflice  ,  au  Roi  :  Bourg ,  haute- Juflice  -,  Launaye ,  idem  ,•  le 
PlefTis ,  idem  ;  Rouvraie  ,  idem  -,  &  Trozé  ,  idem ,  à  M.  du  Plefîis 
d'Argentré  :  Baudiere ,  haute- Juflice  ,  à  M.  de  Cucé  :  la  Bouefïïere , 


VIT  ., 

haute- Ju{tice  ;  le  Châtelet ,  idem  ^  le  Vau- Fleuri,  Idem,  à  M. 
Hay  de  Netumieres  :  le  Prieuré  de  Sainte-Croix ,  haute-Jullice  \ 
à  M.  le  Prieur  titulaire  :  la  Charonniere  ,  haute  -  Juftice  ;  & 
Rouffiere ,  idem ,  à  M.  le  Moine  de  Grand-Pré  :  Saint-Sulp'ice , 
haute-JulHce ,  à  Madame  l'Abbefle  de  Saint-Sulpice  ;  le  Temple 
de  la  Guerche,  haute -Jullice  ,  à  M.  le  Commandeur  de  la 
Guerche  j  la  Motte  ,  moyenneJullice  ,  à  M.  Frain  de  la  Motte  y 
PlefTis  ,  moyenne  -  JulHce  ,  à  M.  de  Langle  j  la  Bichetiere, 
moyenne  -  Juilice  ,  à  M.  Fournier  ;  la  Berue,  moyenne  -  Juflice  , 
à  M.  de  Kerians  j  la  Corbinaye  ,  moyenne-Jultice  ,  à  M.  Vauhou- 
dain  -  Leziart  ;  Baillé  ,  baffe  -  Juftice  ,  au  Chapitre  de  Vitré  j  le 
Prieuré  de  Saint-Serges ,  baffe-Jullice ,  aux  Bénédictins  de  Saint- 
Serges  d'Angers  ;  Gazon ,  moyenne  -  Julhce  ,  à  M.  Grimaudet  j 
Saint-Yves  ,  baffe-JulHce  ,  aux  Hoipitalieres  de  Vitré  ;  la  Gui- 
chardiere  ,  moyenne- JulHce  ,  à  M.  de  Kerambert  ^  la  Grande- 
Verge  ,  baffe-Juftice ,  à  M.  Bouverie  de  Gérard. 

Malgré  Ton  éloignement  de  la  mer ,  la  ville  de  Vitré  efl  très- 
commerçante.  La  principale  branche  du  commerce  confîffe  dans 
de  groffes  toiles  de  chanvre ,  dont  les  Anglais  enlèvent  une 
grande  quantité  pour  leurs  Colonies  d'Amérique ,  &:  qu'on  em- 
ploie aulii  à  faire  de  petites  voiles  pour  la  navigation ,  6c  l'em- 
ballage des  marchandiles.  L'occupation  des  femmes  &:  des  filles 
efl:  de  faire  des  bonnets  ,  des  bas  ,  des  gants  de  fil ,  ôcc.  qu'on 
envoie  dans  les  Indes  ou  en  Efpagne.  Le  féjour  de  cette  ville 
eft  très-agréable  ^  une  pofition  avantageufe  ,  un  air  pur ,  le  beau 
fpeftacle  de  la  nature ,  y  charment  les  étrangers.  A  la  fortie  de 
la  ville  elt  un  très-beau  Parc  ,  qui  fcrt  de  promenade  aux 
kabitants. 

On  ht  dans  Moréri  ce  qui  fuit  :  «  Vitré  ,  en  latin  Vitriacum 
»  ou  Viti-uv'iacum  ,  ville  fort  ancienne ,  bâtie  long-tem])s  avant 
»  Jefus-Chrill ,  par  VUruvius ,  Troyen  de  nation.  Llle  reçut  la 
»  foi  l'an  70  de  Jefus  -  Chriil  ,  par  Saint  Clair,  Evéque  de 
»  Nantes.  »  Ces  deux  affertions  nous  paroiffent  également  fauffes. 
La  première  n  ell  qu'une  coniç6lare  dénuée  de  vraifemblance  , 
fans  fondement ,  fans  preuve.  La  féconde  ell  détruite  par  mille 
raifons  alléguées  dans  cet  Ouvrage  ,  en  différents  articles  , 
(  voyez  Nantes ,  où  l'on  prouve  que  Saint  Clair  n'exilloit  que 
dans  le  troifieme  ik.  non  dans  le  pieinier  fieclc  de  f  L^life.  ) 
Quelle  que  foit  (on  origine  ,  il  efl  probable  que  Vitré  exifloit  dans 
l'antiquité  la  plus  reculée ,  &  qu'elle  étoit  un  des  pjo^i  ou  bour- 
gades des  Rennois^  LL  eii  auffi   probable  c(u'ellc  reçut  de  Saint 


5i6  VÎT 

Clair  les  premiers  documents  de  l'Evangile.  L'hilloîre  nous  ap« 
prend  que  ce  Prélat  y  purifia  deux  Temples ,  dont  l'un  con- 
iacré  au  Dieu  Pan  ,  étoit  fitué  au  bord  de  la  Vilaine  ,  dans 
l'endroit  où  eft  aftuellement  le  Couvent  des  Auguftins  ;  & 
l'autre  confacré  à  Cérès  ,  étoit  dans  l'endroit  qu'occupe  au- 
jourd'hui l'Eglife  paroiffiale  de  Notre-Dame.  Toutes  ces  circonf- 
tances ,  rapportées  par  d'anciens  Hiiloriens ,  ne  méritent  pas  une 
entière  confiance.  On  ne  les  rapporte  que  pour  la  fidélité  de 
i'hiftoire.  • 

Les  premiers  Seigneurs  de  Vitré  ne  font  pas  bien  connus  : 
quelques-uns  les  font  defcendre  d'un  Martin,  Comte  de  Rennes, 
dont  l'exiftence  n'efl  pas  prouvée.  Néanmoins ,  tous  les  Hifloriens 
de  Bretagne  s'accordent  à  dire  que  la  maifon  de  Vitré  étoit 
une  branche  de  celle  de  Bretagne ,  &  il  n'eft  pas  poffible  de 
nier  un  fait  fi  généralement  reconnu.  Le  premier  dont  on  ait 
connoifTance  ,  eil  Rivalon  le  Vicaire  ,  fils  ou  petit  -  fils  d'un 
Comte  de  Rennes.  On  lui  donne  quatre  enfants  ,  dont  l'un 
mourut  fans  poftérité ,  les  autres  firent  les  branches  de  Vitré  & 
d'Acigné.  Leur  mère  ,  époufe  de  Rivalon  le  Vicaire  ,  qui  pre- 
noit  le  titre  de  Vicomteffe  de  Rennes ,  fonda ,  dans  le  onzième 
fiecle ,  le  Couvent  des  Pères  Auguflins.  Robert ,  Baron  de 
Vitré,  &  Berthe  de  Craon,  fon  époufe,  donnèrent,  en  1097, 
du  confentement  de  leurs  enfants  ,  un  vieux  château  &  le  terrein 
fur  lequel  il  étoit  bâti  ,  aux  Moines  de  Marmoutiers.  Ces  Reli- 
gieux y  bâtirent  un  Monallere  pour  quatorze  Moines,  &  ce 
Monaftere   forme  à  préfent  le  Prieuré  de  Sainte-Croix. 

Robert  eut  de  fon  mariage  deux  enfants,  André  &  Robert. 
André,  l'aîné,  époufa  Agnès  de  Montrelais.  En  1 1 16  ,  il  ôta  l'Eglife 
de  Notre-Dame  aux  Chanoines  qui  la  pofTédoient ,  &  qui,  par 
leur  conduite  déréglée  ,  fcandalifoient  tout  le  peuple.  Cette 
Eglife  fut  donnée  aux  Moines  de  Saint-Melaine ,  qui  en  prirent 
fur  le  champ  pofTefîion  ,  &  qui  y  vécurent  tranquilles  jufqu'à 
la  mort  du  Baron  André,  arrivée  en  113  5.  Les  Moines  exilés 
revinrent  alors  pour  rentrer  dans  leur  héritage  ,  mais  leurs  efforts 
furent  inutiles ,  &  ils  furent  contraints  de  fe  retirer.  Robert , 
fils  &  fucceffeur  d'André  ,  fut  un  maître  dur  &  barbare.  Il 
traita  fes  fujets  avec  tant  de  cruauté  ,  que  le  Duc  ,  après  lui 
en  avoir  fait  de  fanglants  reproches  ,  lui  ordonna  de  tenir  à 
l'avenir  une  conduite  plus  modérée ,  &  de  réparer  le  mal  qu'il 
avoir  fait.  Celui-ci  s'étant  mocqué  du  Duc  j  le  Prince ,  indigné , 
marcha  contre  lui,  fe  faifit  de  fes  places,  &  l'obligea  à  aller 


VIT  517 

chercher  un  afyle  chez  le  Baron  de  Fougères.  Le  Duc ,  maître 
de  Vitré  ,  &  le  Pape ,  qui  avoir  été  fortement  follicitc  à  cet 
effet  ,  prefferent  Hamelin  ,  Evêque  de  Rennes ,  de  remettre  les 
Chanoines  expulfés  en  pofTefîion  de  leurs  biens  ;  ce  qui  fut  exé- 
cuté :  mais  ces  Moines,  ne  fe  conduifant  pas  mieux  après  leur 
châtiment  qu'auparavant ,  ils  furent  encore  chalîés ,  &:  les  Moines 
de  Saint-Melaine  leur   fuccéderent. 

Cependant ,  Conan ,   qui  vouloit  pouffer  à  bout  le  Baron  de 
Vitré  ,  réfolut  de  gagner  le  Baron  de  Fougères,  fon  protecteur, 
Sc'ûy  réuffit ,  en  lui  donnant  la  Terre  de  Gahard  &  une  partie  de 
la  forêt  de  Rennes.  Robert ,  abandonné ,  fe    retira  chez  Juhel , 
Seigneur  de  Mayenne,   que  le  Duc  gagna   encore,   en   lui   fai- 
fant  époufer  Conffance  ,    la  plus  jeune   de  Tes  filles ,  à  laquelle 
il  donna  la  Baronnie  de  Vitré   pour    dot.   Le  Baron   de  Vitré  , 
encore  chaffé  ,  eut  recours  au  Seigneur    de  Laval ,   fon  couhn- 
germain  ,  qui  lui  aida  à  faire  la  guerre  à  ceux  qui  tenoient  la 
Baronnie  de  Vitré  ;  mais  il   fe  lafla ,    Se  fut  auffi  féduit  par  les 
préfents  du  Duc.  Pour  dernière   reffource,  il  ne  relloit  plus  au 
Baron  que  Guillaume   de  la  Guerche ,  aufîi  fon  parent ,   qui   lui 
fut  enfin  fidèle ,   &    le    fervit   avec  beaucoup   de   chaleur.  Les 
ravages  que  ces  deux   Seigneurs    faifoient  ,   forcèrent   le  Duc  à 
faire  des  levées ,    &  à  entrer  en   campagne.   Le  Seigneur  de  la 
Guerche  &   Robert ,  qui  n'avoient  pas  des  forces  fuftifantes  pour 
fe  mefurer  avec  le  Duc,  fe  mirent  en  embufcade  dans  des  bois: 
ils  avoient  avec  eux  ,  André  ,  fils  de  Robert  ;  Thebaud  de  Ma- 
thefelon ,  fon    gendre  ;    &   le   Seigneur    de  Candé.    Les  troupes 
du  Duc   filoient   en    défordre  fur  le  pont   de  Viffeiche  ,  dans  le 
territoire  de  la  Guerche  ,  lorfque  Robert  de  Vitré ,  fortant  tout- 
à-coup  de  fon  embufcade  ,  les  chargea  avec  vigueur ,  &  les  mit 
en  déroute.   Le  vainqueur  profita  du  bagage  du  Duc  ,  qui  fut 
pris    en  entier.   L'équipage    de   Judicaël  de    Retz,  &    celui  de 
Geoffroi  de   Maleffroit,  furent  auffi  pris  j  &  le  tout  fut  conduit 
à  la    Guerche.  Quelques    Bourgeois  de  la    ville  de   Vitré  ,  qui 
avoient    aidé    le  Duc  à  s'en   rendre   le  maître  ,    fe   trouvant  la 
confcience  chargée  ,  fe  rendirent  à  Rome  ,  pour  avoir   Tabfolu- 
tion  du  Pape.  Lucius,  qui  fiégeoit  alors,  leur  ordonna  de  la  faire 
reffituerà  fon  Seigneur  j  ce  qu'ils  firent,  par  la  même  rufe  dont 
ils  s'étoient  fervi   pour  la  hvrcr  au  Duc.   Robert  y  rentra,  &:  fit 
fon  accommodement  avec  le  Duc  ,  par  le  moyen  de   fcs  amis. 
Il  continua  la   guerre  avec   Judicaël ,   &  la  finit ,  par^  le  moyen 
du  mariage  de    ion  fils,  qui  époufu  la  foeur  ou  la  fille  de  ce 


5i8  VIT 

Seigneur.  Ce  Baron  confirma  ,  en  1157,  la  fondation  du 
Prieuré  de  Notre-Dame  ,  faite ,  par  le  Baron  André  ,  en  faveur 
de  Saint-Melaine.  Robert  avoir  époufé  Emme  de  Dinan  ,  de 
laquelle  il  eut  cinq  enfants.  En  1 1 64  ,  Garanton  de  Vitré  donna 
à  l'Abbaye  de  Saint -Sulpice  plufieurs  biens,  entr 'autres  ,  un 
morceau  de  terre,  pour  y  conftruire  une  Chapelle  &  un  cime- 
tière. André  ,  fils  aîné  &  fucceffeur  de  Robert ,,  époufa  ,  i^. 
Mathilde  de  Mayenne  ;  2^,  Enoquen  de  Léon  ;  3^.  Euilache  de 
Dais;  4^.  Laër  Painel.  Robert,  fucceffeur  d'André,  avoir  fait 
quelques  dommages  au  Prieuré  de  Sainte-Cro^x, fondé  par  fes  ancê- 
tres pour  quatorze  Moines.  Les  Religieux  s'étoient  plaint  â  FEvêque 
de  Bennes,  qui  avoit  fur  le  champ  excommunié  ce  Seigneur, 
Pour  faire  lever  l'excommunication  ,  il  fut  obUgé  d'abandonner , 
pendant  dix  ans ,  une  rente  de  vingt  livres  monnoie  ,  que  lui 
dévoient  les  vaffaux  des  Moines  -,  d'accorder  à  ceux-ci  quel- 
ques  droits  fur  les  foires  de  Vitré  y  &  de  s'engager  à  défendre 
leurs  biens  envers  &  contre  tous.  En  1172,  Robert  donna  la 
moitié  des  droits  de  la  foire  Saint-Blaife  au  Prieuré  de  Sainte- 
Croix.  L'année  fuivante ,  fut  fondée  l'Aumônerie  de  Vitré  ^  qui 
fut  donnée  à  l'Abbaye  de  Marmoutier.  Robert  laiffa  de  fon 
époufe ,  N.  de  Dinan ,  deux  enfants  ;  André  &  Alain.  André 
lui  fuccéda.  Rolland  ,  Seigneur  de  Dinan  ,  fe  voyant  fans  pof- 
térité ,  inftitua  Alain  pour  fon  héritier  -,  à  condition  qu'il  pren- 
droit  le  nom  de  Dinan.  André  III  du  nom,  fonda,  en  1209^^ 
la  Collégiale  de  Vitré  ,  dans  la  baffe-cour  de  fon  château  ,  & 
y  établit  neuf  Chapelains  ou  Chanoines»  Pierre  de  Dinan,. 
Evêque  de  Rennes  ,  y  en  établit  trois  autres.  Celte  fondation 
fut  ratifiée  par  l'Evêque  &  le  Chapitre  de  Rennes,  En  12,30, 
André  rendit  hommage -lige  au  Roi  Saint  Louis  ,  dans  fon 
camp  devant  Ancenis ,  pour  la  Baronnie  de  Vitré  ,  qui  eff  un 
arrière -fief  de  la  Couronne.  Le  Duc  Pierre  da  Dreux  ,  qui 
avoir  engagé  les  Barons  à  faire  hommage  au  Roi  d'Angleterre, 
qui  fe  trouvoit  alors  en  Bretagne  avec  une  puiffante  armée  ^ 
fut  très  irrité  de  cette  démarche  du  Baron  de  Vitré  ^  Mais 
celui-ci,  perfiftant  dans  fa  réfolution ,  fortifia  fes  places,  &  fe 
prépara  à  faire  une  vigoureufe  réfiftance ,  s'il  étoit  attaqué,  foit 
de  la  part  des  Bretons  ,  foit  de  la  part  des  Anglais  ,  qui  avoient 
déjà  mis  des  gardions  dans  plufieurs  places  fortes.  Il  ne  pa- 
roît  pas  qu'il  ait  été  attaqué»  En  1237  ,  le  Duc  de  Bretagne 
remit  ,  à  perpétuité  ,  le  bail  en  rachat.  André  époufa ,  en  pre- 
anieres  noces  ^.  Catherine  de  Thouars,  dont  il   eut  une  fille ^ 


VIT  5x9 

nommée  Philippe  ;  enfulte  ThomafTe  de  Mathefelon  ,  dont  il  eut 
André  IV  ,  tué  à  la  malheureufe  bataille  de  la  MalToure ,  qui  fît 
périr  tant  de  Chrétiens,  &  mit  le  Roi  lui-même  dans  les  fers 
des  Infidèles.  André  n  avoit  point  été  marié.  Philippe ,  devenue  , 
par  la  mort  de  fon  frère  ,  Baronne  de  Vitré ,  époufa  Gui  de 
Montmorenci ,  dit  Laval,  dont  elle  eut  Gui  Vil,  père  de  Gui 
VIII.  Celui-ci  aflifta  à  la  bataille  de  Monfenpuelle ,  en  1304. 
Gui  IX,  fon  fils.  Seigneur  de  Laval  &  de  Vitré,  eut  de  Héa- 
trix  de  Bretagne  ,  Gui  X ,  qui  mourut  fans  hgnée  ;  &  Gui  XII, 
qui  ne  laifla  qu'une  fille  ,  nommée  Anne ,  Dame  de  Laval ,  de 
Vitré,  de  Gaure  ,  Daquigni  ,  de  Châtillon  en  Vendelais,  d'Au- 
bigné ,  ôcc.  Cette  riche  héritière  prit  en  mariage  Jean  de  Mont- 
fort  de  Kergorlai ,  qui ,  par  fon  contrat ,  s'obhgea  à  porter  le 
nom  &  les  armes  pleines  de  Laval.  Il  prit  le  nom  de  Gui  XII y 
ôc  fuccéda  à  tous  les  biens  de  la  maifon  de  Laval.  Son  époufe, 
avant  fon  mariage ,  obtint  du  Duc  Jean  V  ,  la  permifîion  de 
lever  un  oftroi  fur  fes  fujets  de  Vitré,  pour  la  réparation  de 
fa  ville;  permifîion  qui  fut  encore  depuis  renouvellée  en  fa  fa- 
veur. Elle  fit  conftruire  un  très-bon  rempart  pour  la  défenfe 
de  cette  ville,  en    1448. 

Après  la  mort  de  fon  mari ,  la  Baronne  de  Vitré  eut  un  dif- 
férent avec  Jacques  d'Epinai,  cet  Evêque  de  Rennes,  fi  célèbre 
par  la  fierté  &  la  fougue  de  fon  caractère.  Voici  quelle  en  fut 
Toccafion.  A  l'entrée  des  Evêques  de  Rennes ,  les  Seigneurs  de 
Vitré  avoient  le  droit  de  porter  un  des  bras  de  la  chaife  du  Prélat  j 
&  ,  en  récompenfe  de  ce  fervice  ,  le  cheval  que  l'Evêque  mon- 
toit  ce  jour-là ,  leur  appartenoit.  Les  Seigneurs  d'Aubigné  pou- 
voient  aufii  s'emparerdes  vafes,  vaifTelles,  &  ullenfiles,  quilervoient 
à  la  cuifine  épifcopale ,  le  jour  de  cette  cérémonie.  A  l'entrce 
de  Jacques  d'Epinai ,  la  ComtefTe  &  fon  fils  ,  ne  pouvant  rcm- 
pHr,  par  leurs  mains,  leurs  obligations  ,  avoient  chargé  quelques 
Gentilshommes  de  leur  procuration.  Le  Prélat  ,•  qui  n'aimoit  pas 
la  maifon  de  Laval  ,  faifit  cette  occafion  de  moleftcr  la  Com- 
tefTe ;  il  retint  la  batterie  de  cuifine  &  le  cheval  ,  fit  chafTcr 
les  Procureurs  de  la  ComtefTe  &  de  fon  fils ,  &  les  excommu- 
nia. Non  content  de  cela ,  il  fit  faifir  un  des  Officiers  de  Juf- 
tice  du  Comte,  &  un  de  fes  vafTaux,  les  fit  mettre  en  nrifon, 
&  fit  maltraiter  le  vaflal ,  parce  qu'il  avoit  tenté  de  s'écnapper 
de  fon  cachot.  Le  traitement  qu'on  avoit  fait  clTuycr  à  ce  malheu- 
reux étoit  fi  cruel ,  qu'on  lui  avoit  fait  des  bleflurcsdangcreufcs,  qui 
exigcoient  les  foins  d'un  Chirurgien  ;  mais  l'Evéque,  inhumain,  ne 


510  VIT 

voulut  point  permettre  de  laiffer  entrer  celui  qui  fe  préientoît 
pour  panfer  les  blefîures  du  payfan.  Son  refTentiment  contre  la 
Comte fîe  fut  poufTé  û  loin ,  qu'il  fit  refufer  la  fépulture  à  un 
autre   de  fes  vafTaux   qui  avoit  été  tué. 

La  Dame  de  Laval ,  défefpérant  de  l'appaifer ,  jugea  devoir 
prendre  des  mefures  pour  fe  garantir  des  effets  de  fa  haine» 
Elle  porta  fes  plaintes  au  Pape ,  &  le  fupplia  de  la  délivrer 
de  la  Jurifdiftion  de  fon  ennemi.  Le  Saint-Pere  ,  qui  connoif- 
foit  le  caraftere  de  l'Evêque  de  Rennes ,  craignant  qu'il  ne  s'é»- 
levât ,  entre  les  vafTaux  de  l'Evêque  &  ceux  de  la  ComtefTe , 
une  guerre  ouverte  ,  fcandaleufe  y  &  cruelle ,  ou  que  le  Prélat 
ne  commît  lui-même  des  injuflices  criantes  envers  cette  Dame, 
fit  attention  à  fa  requête  ,  &  donna  une  Bulle  qui  portoit 
que,  durant  l'épifcopat  de  Jacques  d'Epinai,  la  ComtefTe  ,  fon 
nls  ,  leurs  Officiers ,  ck  leurs  vafTaux  ,  ne  reconnoîtroient  d'autre 
Jurifdiftion  fpirituelle  que  celle  de  l'Archevêque  de  Tours,  Si 
déclara  nul  &  de  nulle  valeur ,  fans  fondement  &  fans  confé- 
quence  ,  tout  ce  que  l'Evêque  de  Rennes  aftuel  pourroit  faire 
contre  eux. 

Gui  XIII  fuccéda  à  Raoul  de  Montfort ,  fon  aïeul  paternel , 
aux  Terres  de  Montfort ,  de  la  Rochebernard ,  &c.  Il  eut  de 
fa  première  femme  Ifabeau  de  Bretagne ,  Gui  XIV ,  mort  fans 
poflérité  ;  &  Jean  ,  père  de  Gui  XV  ,  Gouverneur  &  Amiral 
de  Bretagne ,  qui ,  de  fa  première  femme  Charlotte  d'Arragon , 
PrincelTe  de  Tarente  ,  fille  aînée  de  Frédéric,  Roi  de  Naples 
&  de  Sicile ,  eut  Anne  de  Laval ,  mariée ,  en  1 5  2 1  ,  à  François 
de  la  Trimouille  ;  dont  fortit  Louis  III  du  nom ,  premier  Duc 
de  Thouars  ,  Prince  de  Talmond  ,  qui  époufa  Jeanne  de  Mont- 
lïiorenci;  de  laquelle  naquit  Claude,  Duc  de  Thouars,  époux 
de  C  harlotte-Brabantine  de  NafTau ,  &  père  de  Henri ,  Duc  de 
Thouars.  C  elui-ci  prit  en  mariage  ,  en  1619  ,  Marie,  féconde  fille 
de  Henri,  Duc  de  Bouillon ,  Prince  de  Sedan ,  Vicomte  de  Turenne, 
Maréchal  de  Franc i  ;  préiida  à  l'ouverture  des  Etats  de  Bre» 
tagne ,  le  17  Septembre  1636,  &  mourut  en  1674,  Henri- 
Charles  ,  fon  fils  &  fon  fucceffeur ,  époufa  Amélie  ,  fille  du 
Prince  fouverain  de  Hefîé-CafTel ,  de  laquelle  il  eut  Charles-Bel- 
gique-Holand  ,  qui  époufa  l'héritière  de  Crequi,  de  laquelle 
il  eut  Charles  Bretagne,  Duc  de  Thouars,  marié,  en  17 17,  à 
Maric-Magdeleine  de  la  Fayette  ,  qui  lui  donna  un  fils  ,  nommé 
Charles- Armafid-René  ,  Duc  de  Thouars^  Prince  de  Tarente  & 

de  Talmond  ^  Baron  de  Vitré  ^  &c. 

En 


VIT  5ir 

'  En  1400,  le  territoire  de  Vitré  renfermoit  plufieurs  mailons 
nobles;  fçavoir  :  la  Galionaye  ,  à  Jean  du  Maz  ;  le  Gaft ,  à 
Pierre  de  Mebernard  j  le  Pieflis  ,  à  Jean  Javignier  ;  Chantelon, 
à  Jeanne  de  la  Patriere  ;  l'Aunai  &  Pontbillon ,  au  Seigneur  de 
Vitré;  les  métairies  des  Rochieres ,  du  BouUai ,  de  la  Fernere, 
de  la  Baillerie,  de  la  Marre,  de  Clerheult ,  &  de  la  fcilloniere, 
à  Guillaume  de  Sevigné  ;  la  Morandiere  &  la  Ripuiere ,  à  Ro- 
bert de  Préauvay  ;  la  Haute  -  Morandiere  ,  à  Gilles  Sanczon  ; 
la  Ruelle  ,  à  Jean  le  Voyer  ;  la  Chefneliere  ,  à  Jean  Tehel  j 
le  Pont  -  JofTelin ,  à  André  Rabault  ;  &  la  Bafnerie  ,  à  Jean 
Hardi. 

En  1462,  le  Duc  de  Bretagne  établit  à  Vitré  des  ouvriers 
en  foie  ,  qu'il  avoir  fait  venir  d'Italie.  Par  délibération  des  Etats, 
affemblés  à  Vitré  en  1477,  i^  l^^r  ^^^  accordé  un  moulin.  Le 
Duc  leur  accorda  des  privilèges  de  naturalité ,  c<:  leur  afTura 
fa  proteftion ,  tant  pour  eux  que  pour  leur  famille.  En  1488, 
Gui,  Comte  de  Laval,  remit  la  ville  de  Vitré  entre  les  mams 
du  Roi  Charles  VllL  II  ufa  de  rufe  pour  exécuter  ce  piojet  :  il 
introduifit,  par  une  poterne,  dans  fon  château,  les  troupes  fran- 
çaifes ,  qui  n'eurent  pas  de  peine  à  fe  rendre  maîtrciles  de  la 
ville ,  malgré  les  habitants. 

En  j  5 88,  le  Duc  de  Mercœur,  qui  avoir  déjà  formé  des 
projets ,  tâchoit  de  s'emparer  des  villes  de  Bretagne.  Il  venoit 
de  fe  failir  du  château  de  Blain ,  mais  il  y  avoit  en  Bretagne 
une  ville  bien  autrement  importante  pour  lui.  Vitré  étoit  la  feule 
place  qu'on  pût  dire  être  du  parti  Huguenot  dans  la  province.  Ne 
fe  fentant  pas  en  état  de  la  réduire  par  la  force  ,  il  eut  recours 
à  la  rufe ,  qui  ne  lui  réuflit  pas.  Les  chofes  en  reftcrent-là , 
parce  que  la  rupture  n'avoir  pas  éclaté  ;  mais,  dès  que  Mercœur 
eut  pris  le  parti  de  faire  la  guerre  au  Roi ,  il  réfolut  d'afliéger 
Vitré  dans  les  formes.  Cette  ville  étoit  alors  d'autant  plus  atta- 
chée au  parti  de  la  Réforme ,  qu'elle  étoit  gouvernée  par  un 
Seigneur  de  la  maifon  de  Coligni  :  aufïï  la  Religion  Calvinifte 
y  avoit-elle  fait  de  iî  grands  progrès ,  qu'elle  avoit,  au  milieu  de  la 
ville,  un  Prêche  fpacieux ,  qui  fert  encore  aujourd'hui  à  l'afTem- 
blée  des  Etats ,  lorfqu'ils  fe  tiennent  en  cette  ville  ;  de  forte 
que  la  ComtefTe  de  Laval,  mère  du  jeune  Seigneur,  n'eut  pas 
beaucoup  de  peine  h  conferver  les  habitants  dans  leur  oppoli- 
tion  à  la  Ligue.  Nous  avons  dit  que  Vitré  n'avoit  que  trois 
portes.  Les  deux  qui  font  aux  deux  bouts  de  la  ville ,  à  l'Oricnc 
&  au  Couchant ,  font  défendues  par  deux  tours  ik  par  un  rave- 
Tomc  IV.  V  3 


5" .  VIT 

lin  qui  les  couvre.  La  troifîeme ,  qui  eft  vers  le  milieu ,  à  Taf- 
pe6l  du  Midi ,  ell:  nommée  la  porte  Gajlecel  ;  elle  n'a  point  d'au- 
tre défenfe  que  la  tour  de  Sevigné  ,  qui  eft  auprès.  La  place 
eft  entièrement  commandée ,  du  côté  du  Midi ,  par  le  terrein  , 
qui  s'élève  infenfiblement.  Le  côté  du  Levant ,  où  eft  la  porte 
d'en  haut ,  eft  fortifié  par  une  faufle  braye.  Enfin ,  le  côté  du 
Nord  eft  un  vallon  efcarpé  &  peu  large ,  qui  fert  de  folTés  à 
la  ville  :  ces  fofTés  font  le  lit  de  la  Vilaine  ,  qui  n'eft  pas  fort 
confidérable  en  cet  endroit,  &  qui  fe  divife  en  plufieurs  bras 
que  forment  les  petites  prairies  qui  font  fur  {qs  bords.  Aux  pieds 
du  château  ,  font  des  moulins  à  eau.  Le  Duc  de  Mercœur  fe 
trouva  fort  embarrafTé  pour  former  ce  (iege  ,  parce  qu'il  n'avoit 
que  peu  de  canons  &  de  munitions  ,  qu'il  avoit  fait  venir  de 
Fougères  ;  mais  il  y  avoit  peu  de  gens  dans  la  ville  en  état  de 
la  défendre.  La  rigueur  des  Edits  en  avoit  éloigné  la  plus 
grande  partie  des  Proteftants,  qui  n'avoient  pu  revenir  depuis 
que  le  Roi  s'étoit  réuni  à  eux.  Cependant ,  comme  on  étoit 
inftruit  des  intentions  du  Duc  de  Mercœur ,  la  Comtefîe  de 
Laval  avoit  eu  la  précaution  de  faire  entrer  dans  la  ville  la  No- 
blefle  des  environs ,  à  la  tête  de  laquelle  fe  trouvoit  René  de 
Montbourcher ,  Seigneur  du  Bordage  ;  elle  l'avoit  aufîi  pourvue 
de  vivres  &  de  munitions  pour  long-temps.  Les  afîiégeants  fe 
logèrent ,  fans  peine ,  dans  les  fauxbourgs ,  dont  ils  bouchèrent 
les  avenues  en  dehors  &  en  dedans  :  leur  premier  foin  fut  de 
mettre  leurs  canons  en  batterie  ,  fur  la  hauteur  du  champ  de 
Sainte-Croix ,  qui  eft  au  Midi  de  la  ville.  C'étoit  l'endroit  le 
plus  foible  j  le  foffé  n'étoit  pas  profond  ,  &  le  pied  de  la  mu- 
raille étoit  vu  de  la  hauteur  j  mais  aufti  cet  endroit  étoit  vu 
de  la  groffe  tour  du  château ,  dont  il  eut  été  difficile  de  ruiner 
le  flanc.  La  première  fortie  des  afïiégés  fîit  heureufe  j  ils  tuèrent 
un  Gentilhomme  du  voifinage ,  nommé  du  Taillis ,  &  en  pri- 
rent un  autre  ,  qui  leur  apprit  que  les  afîiégeants  avoient  chan- 
gé de  defTein ,  &  que  leur  intention  étoit  d'attaquer  la  place 
par  le  coin  de  la  tour  des  prifonniers ,  qui  eft  plus  haut ,  du 
même  côté.  Ils  y  pointèrent  efïeftivement  leur  batterie  ;  &  leur 
canon ,  donnant  un  jour  dans  l'efcaHer  de  la  tour ,  emporta  les 
deux  cuifTes  du  Sieur  du  Lac  ,  Commandant  de  la  place ,  qui 
mourut,  fur  le  champ  ,  de  fa  blefTure.  Le  Seigneur  du  Eordage 
lui  fuccéda.  Quoique  les  afTiégeants  ne  fiffent  pas  beaucoup  de 
progrès,  vu  leur  petit  nombre,  les  affiégés,  après  fept  fcmames, 
craignant  enfin  de  fuccomber ,  voulurent  eflayer  s'ils  ne  pour- 


roient  pas  tirer  du  fecours  de  Rennes.  Deux  de  leurs  Capitaines 
defcendent ,  pendant  la  nuit ,  avec  des  échelles  de  cordes ,  par 
defTus  la  muraille  du  Nord ,  paflent  la  rivière  à  la  nage ,  &  fe 
rendent  à  Rennes  par  des  chemins  détournés.  Ils  s'adreflerent 
aux  Seigneurs  de  la  Hunaudaie  &  de  Montbarot ,  qui  tmrent 
un  Confeil  fecret  dès  le  foir ,  &  qui  rétblurent  d'envoyer  un 
renfort  commandé  par  Lavardin  ,  La  Tremblaye  ,  6c  Montbarot. 
Ils  partirent  avec  environ  fept  cents  chevaux  ,  &  arrivèrent ,  par 
des  chemins  détournés  ,  au  point  du  jour ,  lur  les  hauteurs  ai)- 
pellées  Us  terres  noires  ,  près  le  fauxbourg  de  Rachapt ,  au  Nord 
de  la  ville ,  fans  que  les  ennemis  s'en  fulient  apperçus.  ils  mar- 
chèrent fur  le  champ  a  l'attaque ,  &  fe  rendirent  maîtres  du 
fauxbourg,  mais  ils  ne  purent  ié  faifir  des  autres.  Les  ennemis, 
ayant  reconnu  leur  petit  nombre  ,  tinrent  ferme ,  firent  fonner 
Je  tocfin  dans  les  ParoiiTes  voilines  ,  &  virent  arriver  une  foule 
de  payfans  fous  leurs  drapeaux.  Le  fecours ,  ne  pouvant  faire 
lever  le  fiege ,  entra  dans  la  ville.  Ce  renfort  devoit  défefpérer 
les  afîiégeants  j  cependant  ils  n'en  pourfuivirent  pas  moins  vive- 
ment leurs  attaques.  Les  auxiliaires  ne  réitèrent  pas  aufli  très- 
long-temps  à  Vitré  :  les  Chefs ,  craignant  pour  Rennes  où  ils 
n'avoient  laifTé  que  peu  de  troupes ,  prirent  le  parti  de  décam- 
per. Ils  firent  conftruire  ,  pendant  la  nuit ,  au  Ion  du  tambour , 
afin  de  n'être  pas  entendus  ,  un  pont  fur  la  rivière  ,  &  fortircnt 
par  la  porte  Gaftecel.  Heureufement  pour  Vitré ,  il  ne  pafî'a 
qu'une  partie  des  troupes  j  le  pont  s'ctant  rompu  ,  le  reile 
fut  contraint  de  demeurer  dans  la  ville.  Montbarot  6z  la 
Tremblaye  furent  de  ce  nombre,  &  comme,  dans  la  fuite, 
ils  manquèrent  de  fourrage  ,  ils  firent  fortir  leurs  chevaux  un 
à  un ,  par  une  faulîe  porte  qui  donne  fur  la  rivière  ;  6c  dès 
qu'ils  paroifToient ,  ils  les  tuoient  à  coups  d'arqucbuie  ,  afin 
d'empêcher  les  ennemis  d'en  profiter.  Depuis  ce  temps ,  cette 
porte  s'appelle  la  porte  aux  Chevaux.  Lavardin  ne  fe  rendit  à 
Hennés  que  fur  le  foir ,  encore  ne  fut-ce  qu  avec  bien  de  la 
peine  ,  ayant  trouvé  fur  fa  route  les  payfans  accourus  au  fon 
du  tocfin.  Le  Duc  de  Mercœur ,  qui  avoit  donné  le  comman- 
dement du  fiege  à  Taihouet  ,  s'y  rendit  enfin  lui-même  ,  dans 
l'efpérance  que  la  place  ne  tiendroit  pas  long-temps  devant  fes 
troupes.  En  conféquence  ,  dès  quil  fut  arrivé ,  il  ordonna  de 
faire  une  nouvelle  attaque  ,  au  Nord  6c  à  l'Orient  de  la  ville , 
à  l'une  des  extrémités  ,  entre  la  tour  qui  fait  le  coin  6c  les 
deux  tours  voifin^s.  Voyant  que  foa  artillerie  ne   taifoit  point 


514  VIT 

d'effet ,  îl  donna  ordre  de  miner  fur ,  le  champ ,  la  tôiir  dU 
com ,  mais  la  mine  ayant  été  éventée ,  la  tour  n'éprouva  d'autre 
dommage  qu'une  légère  commotion  qui  la  fendit.  Défefpéré  de 
voir  fes  projets  û  mal  réufîir  ,  il  fit  continuer  l'attaque  du  Nord, 
&  parvint  à  faire  une  brèche  à  la  courtine  ^  entre  les  deux 
tours ,  dont  il  ruina  les  flancs ,  ainfi  que  celui  des  autres  tours 
qui  pouvoient  l'incommoder.  On  voit  encore  l'endroit  de  la 
brèche  qui  a  été  réparé  ,  avec  une  infcription  -,  mais  les  flancs 
des  tours  ne  l'ont  pas  été ,  on  a  jugé  plus  à  propos  de  faire 
des  ouvrages  en  dehors.  Pendant  que  duroit  cette  attaque,  que 
les  afliégeants  ne  pouflToient  pas  vivement  faute  de  canons, 
le  Duc  de  Mercœur  rouloit  d'autres  projets  dans  fa  tête.  Il  fit 
piller  Châteaugiron  &  le  bourg  de  Saint  -  Helier  de  Rennes , 
efpérant  que  par  le  moyen  de  ce  tumulte  ,  fes  amis  pourroient 
occafionner  une  révolution  en'  fa  faveur  ,  &  introduire  des 
troupes  dans  la  ville  ;  mais  il  ne  put  réuflir.  Il  ne  fit  pas 
donner  d'aflàut ,  à  fa  nouvelle  attaque  ,  &  d'ailleurs  il  n'étoit  pas 
facile  d'y  monter.  Cet  aflaut  ne  pouvoit  même  que  lui  être 
funefl:e  ,  parce  que  les  afliégés  ,  défefpérant  de  pouvoir  défendre 
leur  ancienne  muraille ,  criblée  de  coups  de  canons  ,  en  avoient 
bâti  une  autre  très-forte  derrière  celle-ci.  Ces  diflîcultés  8c 
l'arrivée  du  Prince  de  Dombes  à  Rennes  ,  déterminèrent  le  Duc 
à  lever  le  fiege ,  après  avoir  pillé  &  brûlé  les  fauxbourgs ,  & 
cafîe,  à  coups  de  canons ,  la  cloche  de  l'horloge.  Le  fiege  ne 
ceflTa  pas  par  la  retraite  du  Duc  de  Mercœur  :  les  payfans  tenoient 
toutes  les  avenues  fermées ,  &  ne  laiflx)ient  entrer  aucuns  vivres. 
^lontforeau  partit  de  Rennes  avec  des  troupes,  &  réduifit  ces 
payfans  à  l'obéifl^ance. 

Le  3  Août  de  l'année  fuivante  ,  peu  s'en  fallut  que  Vitré 
ne  tombât  au  pouvoir  de  la  Ligue.  Guillaume  de  Rofmadec- 
Meneuf ,  Gouverneur  du  château  de  Vitré  ,  Gentilhomme  très- 
aff^eftionné  au  parti  du  Roi ,  y  avoit  laifl^é ,  en  fon  abfence , 
fon  beau-frere,  pour  fon  Lieutenant.  Celui-ci  ne  fut  pas  à  l'é- 
preuve des  propofitions  du  Duc  de  Mercœur,  &  voulut  faire 
entrer  dans  le  complot  quelques-uns  des  Ofliciers ,  qui ,  ayant 
rejette  avec  mépris  cette  trahifon ,  furent  fur  le  champ  chaflTés 
de  la  place.  La  difficulté  étoit  d'introduire  les  ennemis  dans  le 
château  ,  qui  n'a  de  communication  au  dehors  que  par  un 
petit  fouterrain  ,  du  côté  de  la  rivière  ,  oii  un  feul  homme  peut 
palier.  Ce  fut  cependant  le  feul  endroit  qu'il  put  trouver  pour 
l'exécution  de  fon  deflein.  Heureufement ,  au  jour  convenu  avec 


îes  Ligueurs ,  ceux  que  le  traître  avoir  chafTés ,  trouvèrent  le 
moyen  d'avertir  un  Capitaine  de  la  ville ,  nommé  Rallon.  Le 
temps preffoit  j  car,  dans  le  moment ,  celui-ci,  ayant  jette  les  yeux 
dehors  ,  apperçut  Saint-Laurent ,  qui  pouflbit  devant  lui  environ 
foixante  hommes  vers  le  fouterram.  Il  courut  fur  le  champ  fur 
la  contrefcarpe ,  &  vit  le  grand  pont  &  la  planche  levés.  Il 
ne  perdit  point  la  tête  dans  ce  péril  prelîant  ;  il  conçut  le  plus 
hardi  projet  dont  on  ait  jamais  eu  d'exemple,  &:  l'exécuta  avec  beau- 
coup de  courage.  Il  fe  fit  apporter  un  pétard ,  &  une  échelle  avec 
laquelle  il  defcendit  dans  le  folTé ,  qui  cfl:  profond  &:  à  fond  de 
cuve ,  fuivi  de  fept  à  huit  hommes.  Il  planta  fon  échelle  contre 
le  pilier  de  la  muraille ,  entre  les  deux  ponts ,  expofé  aux  ar- 
quebufades  qu'on  lui  tiroir  des  mâchicoulis  ,  &:  dont  il  ne  fut 
que  légèrement  atteint ,  puis ,  à  la  faveur  de  la  petitefTe  de  fon 
corps ,  il  fe  ghiTa  entre  la  planche  &  la  petite  porte ,  y  attacha 
fon  pétard  ,  auquel  il  mit  le  feu  avec  une  fufée  aflez  courte  , 
&  fe  rerira  promptement ,  pour  fe  placer  ,  le  mieux  qu'il  put , 
à  côté  du  grand  pont,  afin  d'éviter  les  éclats.  Le  pétard  réuifit , 
emporta  la  planchette  dans  le  ïoi^é. ,  &  la  petite  porte  en  de- 
dans du  Château.  A  l'inflant,  il  fe  jetta  dans  la  place,  fuivi 
de  trois  hommes  feulement.  Le  traître ,  qui  l'attendoit  ,  lui  tira 
deux  coups  de  piftolets ,  defquels  il  fut  blelTé  ;  mais  ce  perfide 
ayant  été  tué  ,  ceux  qui  l'accompagnoient ,  étonnés  de  la  valeur 
de  Rallon ,  fe  rendirent  à  lui.  Les  autres ,  qui  croient  à  rece- 
voir les  foldats  de  Saint-Laurent,  croyant  Rallon  mieux  foutenu, 
prirent  la  fuite  ,  &  fe  retirèrent  en  heu  de  fureté.  Le  lendemain 
fut  employé  à  la  punition  des  plus  coupables.  Depuis  ce  temps , 
Vitré   ne  fut    plus   inquiété ,    &:   relia  pailible    fous  l'obéilfance 

du   Roi. 

Les  Révérends  Pères  Récollets  furent  reçus  à  Vitré  ,  en  i^io,' 
par  les  habitants  de  cette  ville  ;  établifiement  qui  fut  confirmé 
par  Arrêr  du  Parlement,  l'an  1611.  En  1621,  le  Couvent  des 
Pères  Jacobins  fut  fondé,  dans  le  fauxbourg  de  Saint-Martin 
de  Vitré  ,  par  le  Seigneur  de  Nétumieres.  Les  Etats  s'alTemble- 
rent  à  Vitré,  en  1655,  1665,  1671,  1673,  ^^79  5  '^^3> 
1697  ,  &  1705. 

L'exaftitude  avec  laquelle  on  doit  rendre  juflice  à  tous  les 
hommes  célèbres ,  ne  permet  pas  d'oublier  M.  Rcné-Jacc|ues  de 
Garengeot ,  de  la  Société  Royale  de  Londres  ,  Démonflrateur 
Royal  ,  Chirurgien-Major  du  Régiment  du  Roi ,  Confciller  ^' 
Chirurgien   ordinaire    du  Roi   au  Châtclct,  né  à  Vitré,    le  16 


5ié  VIT  =  UZE 

Juin  1688,  Se  mort  à  Cologne,  le  10  Décembre  1759.  Les 
Ouvrages  de  ce  célèbre  Breton  fe  trouvent  dans  les  Opufcules 
de  Chirurgie ,  par  M,  Morand. 

VRITZ  j  fur  une  hauteur  ;  à  1 2  lieues  un  tiers  au  Nord-Eft 
de  Nantes ,  fon  Evêché  &  fon  reffort  ;  k  16  Ueues  &  demie  de 
Rennes  j  &  à  5  lieues  un  tiers  d'Ancenis ,  fa  Suodélégation.  On  y 
compte  1700  communiants  :  la  Cure  eft  un  Prieuré  préfenté  par 
l'Abbé  de  Touffaints  d'Angers  ,  &  deffervi  par  un  Mome  de  cette 
Maifon.  Le  territoire  ,  borné  ,  au  Sud  ,  à  l'Eft ,  &  au  Nord ,  par 
la  province  d'Anjou  ,  eft  coupé  de  deux  ruiffeaux  qui  coulent  dans 
les  vallons.  On  remarque ,  dans  cette  Paroiffe ,  une  lande  qui 
forme  une  monticule ,  &  qui  peut  avoir  neuf  cents  toifes  de 
longueur  fur  fept  cents  de  largeur.  Cette  lande  en  joint  une 
autre  qui  n'eft  pas  aufli  étendue.  Le  refte  du  territoire  eft  bien 
cultivé;  il  eft  couvert  d'arbres  &  buifîbns.  En  1430,  la  maifon 
noble  de  la  Ramée  appartenoit  à  Charles  de  la  Ramée,  la  Lande > 
en  1320,  à  Heftor  de  la  Jaille  ;  &,  en  1420,  à  Pierre  Boivin  : 
la  Bouveraye ,  à  Jean  Rouault  j  la  métairie  du  Prieuré  de  Vritz,. 
au   Prieur. 

UZEL  ;  fur  une  hauteur  ,  Se  fur  la  route  de  Pontivi  à  Quintini 
à  5  heues  deux  tiers  de  Saint-Brieuc  fon  Evêché  ;  à  1  8  heues  & 
demie  de  Rennes  ;  &  à  3  lieues  de  Quintin ,  fa  Subdélégation, 
Cette  Paroifîe  reflbrtit  à  Ploermel ,  &  compte  1 800  commu- 
niants :  la  Cure  eft  préfentée  par  M.  Bofchat.  Le  territoire  eft 
d'une  fuperficie  très  -  irréguliere.  On  y  remarque  des  coteaux , 
des  vallons  ,  des  monticules  ,  beaucoup  d'arbres  &  buiflbns, 
quelques  ruifteaux  qui  vont  fe  jetter  dans  la  rivière  d'Ouft, 
une  partie  de  la  forêt  de  Lorge ,  beaucoup  d'arbres  fruitiers , 
&  autres ,  des  prairies  Se  des  terres  en  labeur ,  de  bonne  qua- 
lité. Les  habitants  font  un  grand  commerce  de  fils  &  de  toiles , 
qui  fe  fabriquent  &  fe  blanchiflent  à  Uzel  ,  où  il  fe  tient  un 
marché  par  femaine ,  Se  huit  foires  par  an.  La  Seigneurie  de 
cette  Paroifîe  ,  avec  titre  de  Bachelerie  ou  de  Bannière  , 
appartenoit ,  en  1 280  ,  à  Guillaume  Budes.  Sylveftre  Budes , 
fon  fils  ,  fut  Lieutenant  général  &  Gonfanonier  de  l'Eglife  Ro- 
maine. Jean  &  François  Budes ,  furent  Ecuyers  du  Duc  de 
Bretagne.  Bertrand  Budes  fut  Procureur  général  du  Parlement. 
François  ,  fon  frère ,  fut  Maître-d'Hôtel  de  la  Reine.  Jean-Bap- 
tifte  iiudes ,  Comte  de  Guébriand ,  fut  Maréchal  de  France ,  &:c. 


UZE=YRV  ^^j 

La  Seigneurie  d'Uzel  paffa  ,  par  alliance  ,  dans  celle  delà 
Châtaignerais.  Une  Demoilelle  de-gette  mailbn  la  porta  dans 
celle  de  Maleftroit ,  d'où  elle  tomb^  d^ns  celle  de  Coètquen. 
En  1488,  le  Roi  Henri  III  l'érigea  en'Viçoiïité  ,  en  fliveur  du 
Marquis  de  Coëtquen.  L'héritière  de  cette  -opaSfcMi  la  pona  dans 
celle  de  Duras,  par  Ion  mariage  avec  M'  le  Duc  de  Duras, 
qui  l'a  vendue,  depuis  environ  vingt  ans,  a -Ajwjiorchat,  qui 
la  poffede  aujourd'hui.  ■ir'^ 

X  FFINIAC  ;  fur  la  route  de  Rennes  à  Breft  ;  à  i  lieue  un 
tiers  de  Saint-Brieuc,  fon  Evêché  &:  la  Subdélégation;  &  à  18 
lieues  un  tiers  de  Rennes,  fon  reilbrt.  On  y  compte  1000  com- 
muniants \  M.  le  Duc  de  Penthievre  en  eft  le  Seigneur  :  la  Cure 
eft  à  l'alternative.  Le  territoire  eft  coupé  par  un  bras  de  mer, 
&  très-fertile   en  grains  de  toutes  les  el'peces. 

En  980  ,  cette  FaroiiTe  étoit  compnlé  dans  la  dépendance  du 
Comté  de  Rennes.  La  Seigneurie  de  la  Ville-Volette  eil  auflî 
très-ancienne  :  elle  appartenoit ,  en  i  200 ,  à  Juhaël  le  Vicomte. 
Guillaume  le  Vicomte  fut  Grand  Pannetier  de  France  ,  fous  Phi- 
lippe de  Valois  ;  cette  terre  a  moyenne-Jullice  ,  6c  appartient 
à  M.  le  Vicomte  de  la  ViUe-Volette. 

En  1400,  le  manoir  du  bois  de  Pledran ,  &  celui  deCaroy, 
appartenoient  à  Jean  de  la  Chapelle ,  Seigneur  de  Bœuvre  :  les 
manoirs  de  la  Ville-Hclio ,  de  la  Ville-Tannet ,  &  du  Vaurault, 
à  François  de  Brehand.  On  y  connoifToit ,  dans  le  même  temps, 
ceux  nommés ,  la  Ville-Hervé,  Bois-BiUy ,  la  Roche-Duval,  le 
Bois-Gilbert,  Ker-jagu  ,  la  Frefnay,  le  Pleflls ,  le  Pré-Glcn,la 
Fontaine-Menard ,  la  Ville-Guermel,  les  Cartes,  la  Motte-Glo- 
rel,  Languenac,  la  Ville-Loueze  ,  &:  la  Croix-Berthelot.  YfTiniac, 
haute-Julhce  ,  &  Cabren  ,  moyenne-Juitice ,  à  M.  du  Bouilli  de 
Refnon  :  le  Quellenec ,  haute-Juftice  ,  &  les  Clos  &  annexes, 
moyenneJulHce ,  au  même  :  Rochc-Brehand  &  annexes,  moycnnc- 
Juftice,  à   Madame  de  Toucheprêt, 

YRVILLAC  ;  fur  la  route  de  Quimpcr  à  Landerncau  ;  à  9 
lieues  &  demie  de  Quimper  ,  fon  Evêché  &•  fon  reilort  ;  à  41 
lieues  &  demie  de  Rennes  ;  6:  à  i  lieue  trois  quarts  de  Lander- 
neau  ,  fa  Subdélégation.  Cette  ParoilTc ,  qui  a  titre  de  Chûtel- 
lenie  ,  compte  2200  communiants ,  y  compris  ceux  de  Saint- 
Eloy ,  fa  trêve  :  la  Cure  ell  préfentée  par  un  Moine  de  DaouJas, 


5i8  Y  R  V  =  Y  V I 

Beaucoup  de  vallons,  des  ruifleaux  qui  vont  fe  jetter  dans  la 
rade  de  Brefl  ;  des  terres  en  labeur ,  de  bonne  qualité  ;  des  prai- 
ries ,  quelques  petits  bois  &  des  landes  ;  voilà  ce  que  ce  terri- 
toire offre  à  la  vue.  L'an  1186,  Hervé  ,  Vicomte  de  Léon, 
donna  à  l'Abbaye  de  Daoulas  les  dîmes  de  Lozonar ,  en  cette 
Paroiffe. 

YVIAS  ;  fur  une  hauteur  ;  à  6  lieues  Se  demie  au  Nord-Oueil 
de  Saint-Brieuc  ,  fon  Evêché  &  fon  reffort  ;  à  26  lieues  & 
demie  de  Rennes  j  &  à  i  lieue  trois  quarts  de  Paimpol,  fa 
Subdélégation.  On  y  compte  1800  communiants  :  la  Cure  eft 
préfentée  par  l'Abbé  de  Beauport.  Le  Roi  poffede  quelques  fiefs 
dans  cette  Paroilfe  ,  dont  MM.  le  Prince  de  Ghiftelle  ,  Lan- 
geac  ,  &  Querault-Vittu ,  font  Seigneurs.  Le  territoire  ,  coupé  par 
la  rivière  du  Liés,  eft  fertile  &  bien  cultivé.  En  1500,  Dam- 
noët  appartenoit  au  Sieur  du  Pont-Quellenec  :  le  Château-Car- 
rec ,  au  Sieur  de  Guemené  j  le  Porzou-Herbrezellec  ,  à  Yves 
le  Roux  5  &  Tranellang ,  à  François  de  Kerlan, 


FIN. 


t» 


M.  Ogée  fe  fait  un  plaifir  de  déclarer  ici ,  que  te  Diclionnaire 
de  Bretagne  a  été  rédigé  par  M.  Grelier  ,  jeune  homme  de  vingt- 
cinq  ans  ^  Maître  es  Arts  en  VUniverfité  de  Nantes  ,  &  aBuellement 
chargé  de  L'arrangement  des  Archives  de  l'Hôtel  &  Communauté  de 
la  même  ville» 

TABLE 


TABLE 

^  JL  jp  UŒ  ^  :jb  jt  :c  X  çi  xr  je 

DES      VILLES, 

PAROISSES  ,     TREVES,     ET    ABBAYES, 
Contenues  dans  ce  Volume. 


R 


R 


.ADENAC. 
Rannée. 

Redené  ;   Saint-David  ,  fa  trêve. 
Redon. 
Regiini. 

Relec ,    Abbaye. 
Réminiac. 

Rcmungol  ;  le  Moufloir  ,  fa  trêve. 
Renac. 
Rennes. 
Retiers. 
Rezé. 
Riaillé. 
Riantec. 
Riec. 

Rieux  ;  Saint  Jean-des-Marais,yâ  trêve. 
R'inon. 
Rochefort. 
Roche-Mentru. 

Rohan  ;  Saint- Gouvri ,  yâ  trêve. 
Romagné. 
Romazi. 
Romilley. 
Rofcanvel. 
Roflandrieux. 
Rofnohen. 
Rofpez. 
Rolporden. 
Ros-rur-Coucfnon, 
R')ftrenen; 
Rouans. 

Rougë  ;  Soulvache  ,  fa  trêve» 
Ruca. 

Tom,  IF. 


Ruffiac  ;    Saint-Nicolas ,  fa  trêve, 
Ruffigné, 

S 

OA.FFRÉ. 

Saint-Aaron. 

-  Abraham. 
— —  Aignan. 

Alban. 

Alloueftre. 

André  des-Eaux. 

André-des-Eaux. 

André-de-Treize-Voix. 

Armel. 

Aubin-d'Aubigné. 

Aubin-des-Bois  ,  Abbayei 

Aubln-des-ChAteaux. 

-  Aiibin-des-Landes. 

Aubin-du-Cormier. 

Aubin-du-Pivail. 

Benolt-des- Ondes. 

— —  Brevin. 

Briac. 

Brice. 

Brieuc. 

-  Brieuc-de-Mauron. 

Brieuc-des-Itfb. 

Broladre. 

.^_  Caradec. 

Caradec-Henncbon, 

. Caradec-Tregomcl. 

, Carné. 

Caft. 

C  liartophe-dtfs-Bois. 

Chriûophede-ValainJ, 

X3 


TABLE      ALPHABETIQUE. 


Sa'int-Colombln. 

Congar. 

— ~  Coulit. 

Coulomb, 

-  Cyr. 

Dénouai. 

Didier. 

Dolay, 

Domineuc. 

^—  Donan. 

Donatien. 

Sainte- A  vé. 

Colombe, 

Luce. 

Marie  de  Pornic. 

Opportune. 

— —    Pazanne. 
Saint-Enogat. 

Erblon. 

Etienne-de-Corcoué. 

Etienne-de-Mermorte. 

Etienne-de-Mont-Luc. 

Etienne- du-Bois. 

Etienne-du-Gué-de-l'Ifle. 

Etienne-en-Coglais. 

— —  Evarzec. 

Fiacre. 

Georges-de-Grehalne. 

Georges-de-Reintembault. 

Géréon. 

Germain-de-la-Mer. 

Germain-des-Prés. 

Germain-du-Pinel. 

Germain-en-Coglais. 

•—  Germain-fur-Ifle. 

Gildas-dc-Rhuis,  Abbaye. 

Gildas-des-Bois ,  Abbaye. 

Gilles. 

Gilles-le-Vicomte. 

Gilles  -  Pligeau  ;    Ker-per 

Saint-Conan  ,  fes  trêves,  " 

Glen. 

Gondran. 

Gonlai.  " 

.- —  Gonneri. 

Gouëno. 

Gravé, 

Grégoire. 


& 


Sainî-Gulnou. 
— —  Helen. 

Helier.  ,^, 

— —  Herblain. 

——  Herblon 

Hernin. 

Hideult. 

Hilaire-de-Châléons. 

■• Hilaire-des-Landes. 

Hilaire-du-Bois. 

Jacques-de-la  Lande, 

-  Jacques- de-Pii  mil. 
Jacut. 

Jacut. 

Jacut ,  Abbaye. 

— —  Jean-de-Boifeau. 

Jean-de-Brevelai, 

——  Jean-de-Corcoué, 
— —  Jean-en-Coglais. 

— —  Jean-fur-Couefnon. 
— —  Jean  fur-Vilaine  ;   Saint-Melaîne  ^ 
fa  trêve, 

Igneuc. 

-  Jouan-de-l'Ifle. 

-  Jouan-des-Guerets. 

Judoce. 

Julien  de-Concelles. 

Julien-de-la-Côte. 

Julien-de-Vouvantes, 

Juft. 

Juvat, 

— —  Launeuc, 

Laurent  ou  Lanlaurent, 

— —  Laurent-de-Greneuc. 

Léger. 

Léger. 

Léonard.  - 

L'Héry. 

Liphar. 

•— —  Lormel. 

Lumine»de-Coutais. 

Lumine ,  près  Cliflbn, 

. Lunaire. 

Maden. 

Maio. 

Malo-de-Baignon. 

Malo-de-Philis. 

"—  Malon. 


Saînt-Marcan. 

——  Marcel-Bohal, 

— —  Marc-le-Blanc. 

•""•  Marc-fur-Couefnon. 

'■"—  Marc- fur -Ifle  ou  Saint-Médard- 
fur-Ifle. 

•— -  Mars-de-Coutais. 

»—  Mars-de-la-Jaille. 

— —  Mars  du-Défert. 

-^  Martin-des-Prés. 

——  Martin-fur-Ouft. 

•—  Matthieu-de-Fine-Terre. 

— —  Saint-Maudé. 

"—  Maugan. 

— —  Maurice-de-Carnoet. 

^—  Mayeux  ;  Caurel  &:  le  Vieux- 
Marché,  y£:i  trêves,  . 

^— .  Meaudan. 

^1—.  Méen. 

-  Meloir-des-Ondes. 
— —  Meloir-près-Bourfeul. 
.—  Melolr  lous-Hédé. 

Mervon. 

—~-  Mefmes. 
— —  Mhervé. 

Michel-de-Chef.Chef. 

Michel-eii-Greve. 

.^—  Molf. 

— ^  Nazaire. 

Nie. 

Nolff. 

• —  Onen. 

Oiien-des-Alleux. 

""*  Oiiin-de-la-Roirie. 
^~  Ptre-Mr»rc-en-Po..ilet. 
""""  J'ere-en-Retz. 

"~~"    Pern. 

Philbert-de  Grand -Lieu. 

*~~"   Plerre-c!e-l-ouguenais. 
"■""   Pierre  de  PL iguen, 
"~~"  Pol-tleLéon. 

"~~"  Potan. 
Qiiay. 

Qiiay. 

-  Rcini-du-Plain. 

Renan. 

— -  Rieul. 
Saints. 


TABLE       ALPHABETIQUE. 

Saint  Samfon. 

Samlon-de-Iouxtclivet. 


Sauveurdes-Landes. 

Sébaftien, 

Seglin. 

— —  Senoux. 

Servan. 

Solemn. 

•  Suliac. 

Sulpice,  Abbaye. 

•—  Sulpicc-des-Landes. 

Sulpice  des-Landes. 

— —  Sulpice-près-l'Abbaye, 

Svmphorien. 

thclo. 

Thomas-dc-Bailié. 

Thonan. 

Thov$. 

Tuai. 

Tugdual  ;  Croixti  ,  fa  trêve, 

Veran. 

Viau. 

——  Vincent-des-Landes. 

Vincent-fur-Aouft  ;Saint-Perreuc  , 

fa  trêve, 

Uniac. 

Vouguay. 

Urlal. 

UricUe. 

Sarzeau. 

Savenai  ;  Boue  , /ii  trcve. 

Saulniere. 

Sautron. 

Scaër. 

Seglien  ;  Lefcharlins,  yû  trêve. 

Séné, 

Sens. 

Serent  ;  Lizio,  Roo-Salnt-André,  Saint- 

Guiomart    ou     Saint -Maurice , 

fes   trêves, 
Servet. 
Servon. 
Severac. 
Sevignac. 
Siberii. 

Silfiac  ;  Peret ,  fu  trêve, 
Sion. 
Sixte, 


TABLE      ALPHABÉTIQUE. 

SIzun  ;  Loemelar ,  fa  trcve.  Treffléan. 

Soudan. 

Soug-al. 

Spezet. 

Sqiaiffiec. 

Sucé. 

Sulniac. 

Surzur  ;   la  Trinité  &  Hezo  ^fes  trêves. 


ADEN. 

Taillis. 

Talenfac  ;  le  Verger ,  fa  trêve, 

Taulé  ;  Carantec  &  Henvic  ,fes  trêves. 

Tau  pont. 

Teiilé. 

Telgruc. 

Theillac. 

Theix. 

Thorigné. 

Thouaré. 

Tinteniac  ;  Trimer ,  fa  trêve, 

Tonquedec. 
Torcé. 

Tourch. 

Tourie. 
Touvois. 
Tramain, 
Trans. 
Trans, 
Tréal, 
,  Trebabu.' 
Trebedan. 
Trebeurden. 
Trebœufs. 
Trebri. 

Trebiivan  ;   Mouftoir ,  fa  trêve, 
Tredaniel. 
Tredarzec. 
Tredias. 

Tredrés  ;  Loquemeau ,  fa  trêve* 
Treduder. 
Trefglonou, 
Treffiagat. 
Trtffieuc. 

Trefflaouefnan  ;  Saint- Jean  ,  Queran  9 
ôc  Trezilidé  ,  fes  trêves» 


Treffles. 
Trefumel, 
Tregarantec, 
Tregaftel. 

Tregeneftre. 

Tregomar. 

Tregoméur. 

Tregon. 

Tregonneau. 

Tregourez. 

Tregrom. 

Treguennec. 

Tregueux. 

Tréguier. 

Treguidel, 

Tregunc. 

TrehoranteuCo 

Treillieres. 

Trelevern. 

Trelivan. 

Tremblay. 

Tremeheuc. 

Tremeloir. 

Tremenech, 

Tremeoc. 

Trémereuc. 

Tréméven. 

Tréméven. 

Tremeur» 

Tremorel;  Leiocouet,  fa  trevil 

Tremuzon. 

Tréogan. 

Treogat. 

Treouefcat. 

Tero  u  I  tré-Penmarch. 

Treffaints. 

TrefTé. 

Treffigneau. 
Trevé. 

Treveneuc, 

Treverec. 

Treverien. 

Treveron. 

Trevou. 

Trévoux  Treguinec. 

Trezélan  j  Saint-Norvez  ,  fa  trevc^» 


Trezeni. 

Trigavou. 

Trogueri, 


V. 


ALLET. 

Vandel. 

Vannes. 

Varades, 

Vay. 

Venefle. 

Vergeal. 

Vern. 

Vertou.' 

Veuë. 

Vezin. 

Vieillevigne, 

Vieuviel. 


/^ 


trcve. 


TABLE      ALPHABETIQUE. 

Vieuxvi-fur-Couefnonr 

Vigneux  ;  la   Pàclais , 

Vignoc. 

Villamée. 

Vildé-Bidon. 

Vildé-  Guingalan. 

Vildé-la-Marine. 

Villeneuve  ,    Abbaye. 

Villepot. 

ViflTeiche, 

Vitré. 

Vritz. 

Uzel. 


FFINIAC. 

Yrvillac;  Saint-Eloi ,/:  ircvc, 
Yvias. 


Fin  de  la   TahU  du  quatrième  &  dernier  Volume, 


L    E    T    T   R    E 

A     l'Auteur     de     ce     DiÛionnaire. 


D 


Hûtet  fater.iem  reum. 


ANS  un  Ouvrage  tel  que  le  vôtre  ,  Monfieur;  dans  un  Livre  confacré  à 
l'honneur  ôc  à  l'utilité  de  la  Province  ;  il  eft  edentiel ,  comme  je  l'ai  déjà 
remarqué  ,  que  les  inadvertances  ou  les  erreurs  gliffées  dans  un  article  ou 
dans  '^  "  ■  ''■ 


bien  puéril  amour-propre,  que  de  ne  pas  revenir  fur  Tes  pas  auflitôt  qu'on 
découvre  la  juftice  &  la  néceflîté  de  le  faire. 

D'après  ce  principe,  Monfieur,  permettez  -  moi  de  configner  dans  votre 
intéreffant  Dictionnaire  ,  mes  remerciements  à  l'efiimable  anonyme  qui  vous 
donne  fur  moi  gain  de  caufe,pour  le  récenfement  de  la  Population  de  Bre- 
tagne ,  malgré  les  épidémies  fréquentes  Se  multipliées  dont  les  Annales  de 
cette  Province  fourmillent  depuis  fes  premiers  temps  hifloriques  jufqu'à  nos 
jours.  C'eft  au  N°.  27  de  la  Gazette  d'Agriculture,  de  1779,  que  j'a>  lu  cette 
lettre  inftru6live ,  où  je  ne  fus  pas  médiocrement  furpris  d'apprendre  la  nullité 
du  prétendu  dénombrement  de  1755.  Je  i'avois  rapporté  fur  la  foi  de  VAmi 
deshommes,  qui  ,  écrivant  dans  la  Capitale  du  Royaume,  à  la  fource  ou  au 
centre  des  lumières  en  tout  genre ,  n'auroit  pas  dii ,  fur  ce  point ,  tomber 
dans  un  écart  fait  pour  égarer  fes  LeCleurs.  C'eft  ainfi  que  je  m'étois  encore 
laifTé  ,  moi  neuf  centième,  furprendre  ,  aux  réfultats  affirmatifs  d'un  autre  Cal- 
culateur ,  qui  ,  pareillement  en  faute  avec  d'aufîi  bonnes  intentions ,  avoir  , 
publiquement  ôc  fans  contradiction,  diminué  d'environ  cent  ibixante  mille  le 
nombre  des  capitables  de  la  Bretagne.  Ce  double  exemple  m'apprendra  , 
Monfieur,  à  ne  m'en  rapporter  délbrmais,  en  ce  genre,  comme  en  bien 
d'autres,  aux  afferiions  d'autrui ,  aux  autorités  les  plus  refpe(5lables ,  que  lorf- 
qu'elles  feront  appuyées  de  preuves  évidentes.  M.  l'Abbé  Expilly,  qui,  dans 
fon  Dictionnaire  des  Gaules,  ne  portoit  d'abord  la  Population  Bretonne  qu'à 
quinze  cents  mille  âmes ,  fe  trouve,  dans  fon  tableau  prélcnté  dernièrement 
au  Roi ,  parfaitement  d'accord  avec  vous  ,  finon  par  la  méthode  ,  au  moins 
par  les  réfultats. 

Mes  projets ,  dépofés  au-  Greffe  des  Etats  ,  fur  les  foulagcments  ,  les  amé- 
liorations ,  &  les  embellififements  dont  la  Province  m'a  paru  le  plus  fufccp- 
tible(^  )  ;  mes  Mémoires  à  la  Comminion  Intermédiaire  fur  les  Communes 
&  fur  la  Capitation  ;  enfm  ,  Monfieur ,  les  vues  &  les  idées  cparfes  dans  mes 
différents  Opufcules  ,  tant  imprimés  que  manufcrits ,  prouvent  ,  je  crois,  indé- 
pendamment de  ma  conduite  en   plufieurs  circonftanccs,   que  je  fuis  aufli  peu 

{a)  Voyez,  malgré  quelque»  légers  trraia  ,\i     t      >77'^i    N".   î   &  81  de    IT77  ;    fie  fur-toot  les 
Gazetie  poliiiquc   des   Dcux-i'on»,   N*.  101  de     |     dcrDier»  Suppknîcnii  de  177S, 


Tapologifte  de  rengourdiffement  &c  de  la  fainéantire ,  que  le  détrafl:eur  du 
travail  ôc  de  l'indurtrie.    Cependant,  Monfîeur,  il   me  paroît  que  vous  jugez 
trop  révérement  les  indigents  &  défœuvrés  citoyens,  miférablement  difperfés 
dans  les  fauxbourgs  de  nos  bourgades ,  fur  les  déferts  de  nos  landes ,  vers  les 
brouillards  de  nos  étangs ,  &  près  les  fondrières  de  nos  marais.  Tout  le  mal 
ne  vient  certainement  pas  de  leur  faute,  ni  même  de  celle  des  propriétaires, 
fouvent  moins  excufables.    Rappelions-nous   les  générofités  vraiment  royales, 
que  le  Chef,  le  Légiflateur,  le  Général ,  &  l'Hiftorien  de  Brandebourg  ,  vient 
de  faire ,  non-feulement  à  fes  peuples  ,  pour  prémices  de  la  paix ,  mais  à  des 
voifins ,  à  des  étrangers ,  qui  ceiToient  à  peine  d'être  fes  ennemis.  Rappelions- 
nous  ce  paflage  d'un  livre  français ,  imprimé  dans  le  Royaume  ,  répandu  par 
toute  l'Europe ,  &  cité  dans  les  deux  Continents.  "  La  culture  eft  fi  languif- 
„  fante  en  Portugal ,  (  1 771  ,  )  que  cette  nation  tire  annuellement  de  l'étranger 
,,  le  tiers  du  bled  qu'elle  confomme.  Ce  défordre  peut  ceffer....  La  Cour  de 
5,  Lisbonne  tomberoit  dans  une  erreur  bien  dangereufe ,  fi  elle  penfoir  que  le 
5,  temps  feul  amènera  cette  grande  révolution.  Il   lui  convient  de  la  préparer 
5,  par  la  diminution  des  impôts ,    fur-tout ,    par  l'adouciflement  dans  la  per- 
3,  ception  fouvent  plus  deftruélive  que  l'impôt  même.  Lorfqu'on  aura  levé  les 
5,  obftacles ,  il  faudra  prodiguer  les  encouragements.  Un  des  préjugés  les  plus 
5,  funeftes  au  bonheur  des  hommes  ,  à  la  prolpérité  des  Empires ,  tû.  celui  qui 
,V  veut  qu'il  ne  faille  que  des  bras   pour  la  culture.   L'expérience  de   tous  les 
5V  3-gQS  prouve  qu'il  ne  faut  beaucoup  demander  à  la  terre  qu'après  lui  avoir  beau- 
5,  coup  donné  ...  Le  Gouvernement  doit  venir  au  fecours  des  cultivateurs  hors 
5,  d'état  de  faire  les  avances....  \Jn  premier   changement  en  affurera  d'autres. 
„  Les  arts  néceflaires  à  la  culture  naîtront  infailliblement ,  &  s'élèveront  avec 
,,  elle  de  proche  en  proche;  l'induftrie  étendra  ,  pouffera  toutes  fes  branches, 
„  &  le  Portugal  ne  montrera  plus   un  peuple  fauvage  entre  des  peuples  civi- 
,,•  lifés....  La  fuperftition  finira  avec  la  parcffe  ,  l'ignorance  ,  le  découragement... 
5,  Là   nation  ,  débarraffée  de   fes  entraves ,    rendue    à  fon  aftivité  naturelle  , 
5,  prendra  un  effor  digne  de  (es  premiers  exploits.  „    Or ,  Monfieur  ,  nos  ma- 
ladies politiques  étant  moins  générales,  moins  graves,  &  moins  compliquées, 
nos  remèdes  étant  par  conféquent  bien  plus  efficaces  &  plus  faciles  ,  nous  avons, 
fur-tout  après  les  Edits  bienfaifants    prom.ulgués    au  milieu   des  hoftilités  &  des 
manifefies ,  nous  avons ,  dis-je ,  tout  lieu   d'elpérer  notre  guérifon  radicale   & 
prompte,  aufli-tôt  que  les  maux  plus  preffants  d'une  guerre,  noble  &  jufte 
de  notre  part  (^),  cefferont  d'abforber  l'attention  vigilante  de  nos  Médecins, 
mieux   ntentionnés  ou  plus  infl:ruits  que  ceux  d'un  pays  en  proie  au  monopole 
de  l'Angleterre ,  &  à  l'abrutiffement  de  l'Inquifition. 

Pour  troifieme  6>c  dernière  obfervation,  Monfieur,  permettez-moi  de  réprimer 
les  perfifBages  ou  les  badauderies  de  quelques  Parifiens  fur  les  noms  en  Ker  & 
en/7/0,  pUu  -pu  plou  ;  comme  fi  l'on  ignoroit  que  ces  fyllabes  répondent 
aux  mots domÈiU  ,  habitation ,  ville  ,  cité ^  peuplade.  KERBOT ^vicus  Jive  manjlo 
Boti.  KERM ART  IN  .oppidum  vd  domus  Martini.  PLOUFKAGJN ,  plebs  ^ 
populus^.jeu  regio  ,  p^gus  aut  civitas ^  urbs  Fracani\  ainfi  que  dans  la  même 
p^'ince  ,   CHATÈAUBRIANT  ^  cajlrum  ^  cajhllutn  Brientii;  &  ,  comme  en 


(a)  Voyez  dans  les  Afficiies  générales  de  Bre-     |     U   lettre  d'un  Major  de   Cavalerie  à   un  Jurlf- 
tagne,  No.  35  ,  ou   17  Août  1779  ;  l'extrait  de     I     conjulte. 

Beauce, 


Beauce,  ROUFJLIE  ,  TIGNONFILLE ,  Raoldî-vilU  (a),  Tignonîs-vUla - 
en  Normandie  ,  ROGLRVILLE  ,  TOUST AIN  PAILLE  ,  Rogmi-villa  ,  Trufiini- 
y'dla ,  &c.  (  ^  ).  Les  mots  de  manoir  &  de  mefnil  ^  allez  communs  dans 
cette  dernière,  ont  la  même  fignification.  Ceci  me  conduit  naturellement  à 
terminer  ma  lettre  par  une  réflex-on  fur  les  étymologies.  Le  Père  Labbe 
reprochoit  aux  Auteurs  des  Racines  Grecques  leurs  mots  dérivés  de  cette  Langue* 
parce  que  ,  difoit  le  Jéluite ,  ils  ne  jont  pas  parvenus  en  France  ,  fans  avoir 
pajje  par  le  pays  Latin  ;  mai:> ,  repondoient  les  Horts-Royaliftes ,  de  ce  que 
les  cabinets  de  la  Chine  palTent  par  la  Hollande  ,  avant  d'arriver  en  France, 
S*enruit-il  qu'ils  ceiïent  d'être  véritablement  Chinois,  6i  quM  t'aille,  les  ap- 
peller  cabinets  de  HilUnde  ?  Cette  réponfe  ,  ou  queftion  ,  m'a  paru  très -péremp- 
toire  ;  &  je  peni'e  qu'elle  peut  s'appliquer  à  la  plupa-^t  des  objedions  de  ceux 
qui  préfèrent  les  étymologies  latines,  espagnoles,  &:  italiennes,  aux  racines 
de  la  Langue  Celtique,  mère  de  la  plupart  de  nos  Langues  modernes,  &, 
peut-être  même  ,  plus  ancienne  encore  que  l'Hébraïque  ,  puilque  celle-ci ,  très-cor- 
fompue  ou  mélangée  depuis  les  premières  difperiions  6i  captivités  du  peuple 
qui  la  balbutie ,  ne  reflemble  probablement  gue'-es  à  celle  que  parloient 
Moyfe  &  Abraham.  Cependant,  !e  Celte,  lui-même,  ne  me  paroit  que  le 
dialefle  ,1e  débris,  ou  le  jargon  très-altéré  ,  d'un  plus  antique  idiome  fepten- 
trional  ;  car  c'eft  encore  plus  au  Nord  qu'à  TOrienr ,  qu'il  nous  faut  chercher 
la  fource  des  peuples  &  des  connoifTances ,  ainfi  que  l'ont  récemment  dé- 
montré deux  illuftres  Auteurs  ;  M.  Bailly  ,  dans  l'Hiftoire  de  l'Aftrouomie  , 
&  M.  de  BufFon  ,  dans  les  Epoques  de  la  Nature.  En  leur  joignant  les  conjec- 
tures ,  les  recherches,  &  les  découvertes  du  célèbre  Boulanger  ;  l'on  peut  dire 
que  jamais  les  Sciences  exaftes  &  les  Belles-Lettres,  jamais  la  Fhyfique  Sc 
l'érudition  n'ont  mieux  fait  fentir  leur  prix  &  leur  mérite  refpe6lifs ,  les  avan- 
tages de  leur  concours ,  &  la  force  de  leur  union. 

Je  fuis  très-parfaitement, 

Monsieur, 


Votre  très  humble  &  très-oKéifTant 
ferviteur ,  C.  G.  T.  *** 


(  a  )  N'étant  pas  à  portée  de  faire  des  reclicrclie» 
fur  cette  Terre  oc  l'aroilfe ,  dont  je  ne  connois  l'hif- 
torique  que  depuis  environ  1480 ,  fans  lui  trouver  de 
polfeffeur  du  nom  de  Rou  ,  Roi  ou  Raoul ,  je  ferois 
encore  afTez  tenté  de  conjeûurer  que  la  première  fyl- 
labe  de  fon  nom  provient ,  ou  de  fa  fituation  en  partie 
fur  le  roc,  ou  du  voifinage  de  la  nvitrt  enceiii'iue 
ro  ;  je  foupçonnc  même  que  ,  par  un  jeu  de  mots, 
trè$-comnmn  jadis  ,  la  première  de  ces  deux  raifons 
n*a  pas  médiocrement  contribué  a  la  faire  dédier  à 
Saint-Pierre.  Hoi  plus  habiles  fcrutateurs  d'ainquiiés 
&  d'étymoiogiesj  ôcparmilcs  plus  récents,  M.lePré- 
fident  de  Broffes ,  (  Nléchanifme  du  Lang.ige);  M. 
l'Abbé  Bercier,(  Origine  des  Dieux  );  M.  Court  de 
Gebelin,f  Monde  Piimit^f);  N.l'Abbé  Deric,(H  f- 
toireEcdcfiaf^ique  dcBrctng' .  )  ;  ont  fort  bien  prou- 
vé que,  dans  tous  les  pays  &  ''ans  toutci  les  Laozues, 

Tom.  IV. 


les  noms  de  lieux  font  dérivés  de  leur  pr  [i- 

que  ,  des  produftionsdu  terroir ,  de  quc.-,v,v  .(.,  .  té 
naturelle  ou  accidentelle.  Au  nombre  de  ces  qusl. et 
accidentelles , je  compfcainû  q.    '    ;'  t  Traité 

de  la  NoblelFe  ôc  oesNoms)  ,  !'  rem- 

pruntées ou  imitées  du  no  v. 

tcrc,    foit  du  Seigneur  ou  ,  ji» 

tans  ou  coons.  (  Note  et  M..  L.<i.  i  ^ 
(h  )Lt  bourg  ou  village-paroiffier ,  j'eil  fonné  dnt 
le  voifinage  des  Toufiaim  ,  Comtes  de  M»ntiofi^ 
furie  nom  dcimicls  on  trouve,  avec  celui  de  Uurpno- 
cipale  1  erre ,  les  mêmes  allufions  Ac  rapports  ét^mo- 
loj;iques  que  nous  avons  indiqués,  pjg.  6)  et  ce 
Volume, J  la  hn  de  la  Note  pour  les  Toy/lamê  , 
Comtes  d  Hvennes  ,  leurs  parents  .leurs  roci^j*. 
uiwc» ,  &  cofitcoiporaiiu.  (A«i«  J*  M.OOit.) 


»• 


9^  N  O  T  E    de    Monjieur    OgÉE. 

L'Auteur  de  la  Lettte  que  l'on  vient  de  lire  ,  occupé  des  foins  tant 
îpaternels  que  patriotiques ,  Membre  de  plufieurs  Corps  militaires  ,  politiques, 
&  littéraires ,  confacre  à  l'étude  &  à  la  méditation  les  courts  inftants  que  lui 
laiflent  des  travaux  plus  indifpenfables  ,  des  devoirs  auxquels  (es  goûts 
font  ou  conformes  ou  fubordonnés.  Nous  devons  à  fa  plume  fçavante  & 
fidelle  ,  l'analyfe  impartiale  &  raifonnée  que  le  Journal  Encyclopédique  de 
Mars,  Août,  &  Décembre  1779»  a  publiée,  des  trois  premiers  Volumes  de 
ce  Diâionnaire  ;  &  des  trois  premiers  de  l'Hiftoire  Eccléfiaftique  de  Bretagne, 
par  M.  ÏAbbc  DerU',  c'eft-à-dire  ,  de  tout  ce  qui  a  paru  jufqu'à  préfent  de 
ces  deux  Ouvrages,  entrepris  dans  le  même  temps,  fans  que  les  Auteurs  fe 
foient  connus  ni  confultés ,  &  qui  peuvent ,  à  bien  des  égards  ,  s'entretenir  de 
correélif  &  de  complémeiit  [l'un  à  l'autre.  Voyez  la  Lettre  de  M.  Grelier^ 
dans  les  Affiches  générales  de  Bretagne,  N°.  46,  au  12  Novembre  I779« 
Nous  indiquerons  encore  ,  pour  réponfe  à  des  reproches  que  nous  ne  mé- 
ritons pas  ,  les  N°%  10  ^  22,  &  47  de  177S. 


■1 


J 


APPROBATION  DU  CENSEUR  ROYAL. 


'ai  lu  ,  par  l'ordre  de  Monfeigneur  le  Garde  des  Sceaux  ,  le  tome  quatrième 
du  Dïclionnaire.  Hiflorique.  &  Géographique  delà  provïna  de  Bretagne -y  &C  je  n'y 
ai'Obfervé  rien  qui  puilTe  en  empêcher  Timpreflion.  Donné  à  Pans,  le  7  Juin 
1779. 

Signé,   PHILIPPE    DE    PRÉTOT, 


des  académies  d^ Angers  &  de  Rouen, 


PRIVILEGE    GÉNÉRAL. 

JLi  O  U  I  s  ,  par  la  Grâce  de   Dieu  >  Roi  de  France  &  de  Navarre ,  à  nos  amés 
&  féaux  Confeillers  ,  les  Gens  tenant  nos  Cours  de  Parlement ,  Maîtres  des  Re- 
quêtes ordmaires  de  notre  Hôtel ,  Grand-Confeil  ,  Prévôt  de  Paris ,  Baillits ,  Sé- 
néchaux ,   leurs   Lieutenants  Civils,  &  autres  nos  Jufliciers  qu'il  appartiendra  : 
Salut.  Notre  amé  le  Sieur  OgÉe  Nous  a  tait  expofer  qu'il  defireroit  taire  impri. 
mer  Redonner  au  Public  un  Ouvrage  de  fa  compofnion  ,  intitulé  :  Dïclionnaire 
Hijloriquc  &   Géographique  de    la  Province  de   Bretagne ,  s'il  Nous  plailbit  lui 
accorder  nos  Lettres  de  Privilège  à  ce  néceffaires.  A  ces  Causes,  voulant 
favorablement  traiter    l'Expofant  ,  Nous  lui    avons  permis  &    permettons  de 
faire  imprimer  ledit   Ouvrage  ,  autant  de  fois  que  bon   lui  fcmblera ,  &  de 
le  vendre,   faire  vendre  , par-tout  notre   Royaume.    Voulons  qu'il  jouiflc  de 
l'effet  du  préfent    Privilège,  pour  lui  &  fes  Hoirs,  à  perpétuité  ,  pourvu  qu'il 
ne  le  rétrocède  à  perfonne  ;  &  fi,  cependant,  il  jugeoit  à  propos  d'en  faire  une 
ceffion  ,  l'acSle  qui  la  contiendra  ,  fera  enrégiftré  en  la  Chambre  Syndicale  de 
Paris,  à  peine  de  nullité  ,  tant  du    Privilège  que  de  la   ccflion  ;  &  alors ,  par 
le  fait  feul  de  la  ceflion  enréglftrée  ,  la  durée  du  préfent  Pri\ilegc  fera  réduite 
à  celle   de  la  vie  de  l'Expofant ,  ou  à  celle  de  dix  années ,  à  compter  de  ce 
jour,  fi  l'Expofant    décède    avant    l'expiration    defdites  dix  années.    Le  tout 
conformément  aux  articles  IV  &i  V  de  l'Arrct  du  Conftil  du  trente  Août  1777, 
portant  Règlement  fur  la  durée  des  Privilèges  en  Librairie.  Faisons  déftnfesà 
tous  Imprimeurs,  Libraires,  &  autres  perfonnes ,  de  quelque  qualité  &  condition 
qu'elles  foient ,  d'en  introduire  d'imprelfion  étrangère  dans  aucun  lieu  de  notre 
obéiflance  ;  comme  aufii  d'imj.rimer  ou  faire  imprimer  ,  vendre,  faire  vendre, 
débiter  ni  contrefaire  lefdits  Ouvrages,  (bus  quelque  prétexte  que  cepuiiïe  être, 
fans  la  permiffion  expreffe  &  par  écrit  dudit  Expofant ,  ou  de  celui  qui  le  reprc- 
fentera  ;  à  peine  de  faifie  &  confiscation  des  exemplaires  contrefaits  ;  de  fix  mille 
livres  d'amende  ,  qui  ne  pourra  être  modérée  ,  pour  la  première  fois  ;  de  pareille 
amende,  &  de    déchéance  d'état,  en  cas  de  récidive  ;  Ôi  tous  dépens,  dom- 
mages,  &  intérêts;  conformément  à  l'Arrct  du  Con.'cil  du  trente  Août   1777» 
concernant  les  contrefacjons.  A  la  charge  que  ces  Prélentes  feront  cnrégilhccs 
tout  au  long  fur  le  Regifire  de  la  Comi!...nauté  des  Imprimeurs  &  Libraires  de 
Paris ,  dans  trois  mois  de  la  date  d'icclles  ;  que  l'impreflion  dudit  Ouvrage  fera 


faite  dans  notre  Royaume,  &  non  ailleurs,  en  beau  papier  6c  beau  caraôere , 
conformément  aux  Règlements  de  la  Librairie,  à  peine  de  déchéance  du  préfent" 
Privilège  ;  qu'avant  de  l'expofer  en  vente ,  le  manufcrit  qui  aura  fervi  de  copie  à 
l'impreflion  dudit  Ouvrage ,  fera  remis  dans  le  même  état  où  l'Approbation  y  aura 
été  donnée,  es  mains  de  notre  très-cher  &  féal  Chevalier ,  Garde  des  Sceaux  de 
France,  le  Sieur  Hue  deMiromenil  ;  qu'il  en  feraen  fuite  remis  deux  exemplaires 
dans  notre  Bibliothèque  publique ,  un  dans  celle  de  notre  Château  du  Louvre ,  un 
dans  celle  de  notre  très-cher  6;  féal ,  C  hevalier ,  Chancelier  de  France ,  le  Sieur  de 
Maupeou,  &  un  dans  celle  dudit  Sieur  HuE  DE  MiROMENiL.  Le  tout  à  peine 
de  nullité  des  Préfentes;  du  co  itenu  defquelles  vous  mandons  &  enjoignons  de 
faire  jouir  ledit  Expofant  &  fes  Hoirs,  pleinement  &  paifiblement,  fans  foufFrir  qu'il 
leur  ibit  fait  aucun  trouble  ou  empêchement.  Voulons  que  la  copie  des  Pré- 
fentes ,  qui  fera  imprimée  tout  au  long  au  commencement  ou  à  la  fin  dudît 
Ouvrage ,  foit  tenue  pour  duement  (ignifiée ,  &i  qu'aux  copies  collationnées  par 
l'un  de  nos  amés  &  féaux Confeillers- Secrétaires ,  foi  foit  ajoutéecomme  à  l'ori- 
ginal. Commandons  au  premier  notre  Huifîier  ou  Sergent  lur  ce  requis ,  de 
faire  pour  l'exécution  d'icelles ,  tous  aâ^es  requifs  &  néceflfaires  ,  fans  demander 
autre  permiflîon  ,  &  nonobftam  ciameur  de  Haro ,  Charte  Normande  ,  &  Lettres 
à  ce  contraires  :  Car  tel  eft  notre  plaifir.  Donné  à  Paris ,  le  quinzième  jour  de 
Juillet  ,  l'an  de  grâce  mil  fept  cent  foixantedix-huit ,  &  de  notre  règne  le 
cinquième.  Par   le  Roi  en    fon  Confeil.  Signé ,   LE  BEGUE. 

Rcgijiréfur  U  Regijire  XX  ^  d&  la  Chambre  Royale  &  Syndicale  des  Libraires 
&  Imprimeurs  de  Paris  ^  N^.  1^66',  fol.  3/2,  conformément  aux  difpofitions 
énoncées  dans  le  préfent  Privilège .,  &  à  la  charge  de  remettre  à  ladite  Chambre 
les  huit  exemplaires  prefcrits  par  l^ Article  CVIII  du  Règlement  de  lyz^ .  A  Paris ^ 
ce  ly  Juillet  lyyS»  Signé,  A.  M,  LOTTIN,  l'aîné;  Syndic. 

Rcgijiréfur  le  Regiflre  N°.  I  ,  de  ta  Chambre  Royale  &  Syndicale  des  Li' 
hraires  &  Imprimeurs  de  Nantes,  N°,  i  foL  1  ,  conformément  aux  Règlements , 
&pour  leur  maintien  à  l"* effet  d^ empêcher  les  contrej actions .  A  Nantes  5  k  i^  Mai 
/77j).  Signé,  BRl/N,  faîne;  Syndic» 


1/ 


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Rare 
Book 
Rooff)